Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-21-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Vendredi 05 juin 1998

4 (L'audience est ouverte à 10 h 05.

5 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

6 M. le Président (interprétation). - Bonjour Mesdames et

7 Messieurs. Les parties peuvent-elles se présenter ?

8 M. Niemann (interprétation). - Bonjour, Madame et

9 Messieurs les Juges. Je m'appelle Grant Niemann, je suis présent à

10 l'audience à M. Turone, Mme McHenry et M. Huber au nom de l'accusation.

11 M. le Président (interprétation). - Et pour la défense ?

12 Mme Residovic (interprétation). - Bonjour Madame et

13 Messieurs les Juges. Je suis Edina Residovic, je défends M. Zejnil Delalic

14 en compagnie de M. le professeur O'Sullivan, professeur du Canada.

15 M. Olujic (interprétation). - Bonjour, je m'appelle

16 Zeljko Olujic, je défends M. Zdravko Mucic avec mon confrère, Niko Djuric,

17 avocat de Croatie.

18 M. Karabdic (interprétation). - Bonjour. Je m'appelle

19 Salih Karabdic, avocat de Sarajevo. Je défends M. Hasim Delic.

20 Mme McMurrey (interprétation). - Bonjour Madame et

21 Messieurs les Juges, je m'appelle Cynthia McMurrey et c'est avec

22 Mme Nancy Boler que nous défendons M. Esad Landzo.

23 M. le Président (interprétation). - Merci. Peut-on faire entrer

24 le témoin ?

25 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

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1 Mme le Greffier (interprétation) - Je vous rappelle, Monsieur,

2 que vous êtes toujours sous serment.

3 M. Alic (interprétation). - J'en suis conscient.

4 M. le Président (interprétation). - Maître Residovic, veuillez

5 poursuivre votre interrogatoire principal.

6 Mme Residovic (interprétation). - J'en ai terminé de

7 l'interrogatoire de ce témoin.

8 M. le Président (interprétation). - Quels sont les contre-

9 interrogatoires ?

10 M. Olujic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

11 nous n'avons pas de question à poser à ce témoin.

12 M. Karabdic (interprétation). - La défense de M. Hasim Delic n'a

13 pas de question à poser à ce témoin.

14 Mme McMurrey (interprétation). - Nous n'avons pas non plus de

15 question à poser à ce témoin. Je vous remercie.

16 M. le Président (interprétation). - L'accusation veut-elle

17 procéder au contre-interrogatoire ?

18 M. Niemann (interprétation). - Oui, Monsieur le Président,

19 merci.

20 Vous a-t-on jamais surnommé "Soko" ou "Sokol" ?

21 M. Alic (interprétation). - C'est exact.

22 M. Niemann (interprétation). - Au cours de la guerre et après la

23 guerre aussi éventuellement, saviez-vous que l'on surnommait M. Delalic

24 "Oganj" ?

25 M. Alic (interprétation). - A ma connaissance, il utilisait un

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1 nom de code, "Ikar", pour l'une des opérations.

2 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous jamais entendu dire ou

3 connaissiez-vous M. Delalic sous le surnom de Oganj ?

4 M. Alic (interprétation). - Je pense qu'il y a une opération qui

5 a reçu ce nom.

6 M. Niemann (interprétation). - Vous ne lui avez jamais écrit à

7 titre personnel après la guerre, en lui adressant une lettre, en vous

8 adressant à lui comme étant Oganj, et vous-même en signant du nom de

9 Sokol ?

10 M. Alic (interprétation). - Je ne m'en souviens pas.

11 M. Niemann (interprétation). - Le Juge Jan a soulevé une

12 question hier mais je ne sais pas si nous en avons reçu réponse. Je vais

13 peut-être vous reposer la même question aux fins du compte rendu.

14 Etiez-vous au courant de tous les ordres, qu'ils soient oraux ou

15 écrits, qui auraient été transmis à M. Delalic ou par M. Delalic au cours

16 de l'année 1992 ?

17 M. Alic (interprétation). - Il est évident que je ne pouvais pas

18 être au courant de tous ces ordres, mais seulement d'une partie d'entre

19 eux.

20 M. Niemann (interprétation). - Vous avez dit que, en mai 1992,

21 les forces de la JNA et du SDS avaient attaqué Hadzici. Qu'entendez-vous

22 par là, lorsque vous parlez des forces du SDS ?

23 M. Alic (interprétation). - Des unités armées organisées se

24 composant surtout d'habitants serbes qui ont ensuite constitué le parti du

25 SDS. Auparavant, ils avaient été formés dans les casernes de la JNA. Ils

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1 avaient déjà appris à établir des barrages routiers sur tous les axes

2 importants et sur tous les lieux stratégiques qui surplombaient la ville

3 de Hadzici.

4 M. Niemann (interprétation). - Sauriez-vous si ces forces

5 opéraient sous un nom particulier ?

6 M. Alic (interprétation). - Non. C'étaient des forces du SDS. Je

7 sais comment nous, nous les appellerions, mais je ne sais pas comment,

8 eux, ils s'appelaient.

9 M. Niemann (interprétation). - Ces forces de la JNA et du SDS

10 ont-elles travaillé de concert au cours de l'attaque menée contre

11 Hadzici ?

12 M. Alic (interprétation). - C’est exact.

13 M. Niemann (interprétation). - Au cours de la guerre, pendant

14 l'année 1992, vous ou des personnes se trouvant sous vos ordres ont-elles

15 capturé des personnes et les ont-elles faites prisonnières ?

16 M. Alic (interprétation). - Oui.

17 M. Niemann (interprétation). - Et ces prisonniers, où les avez-

18 vous emmenés ?

19 M. Alic (interprétation). - Nous les avons capturés au cours de

20 l'opération de libération de Trnovo et de l'opération Strajiste.

21 M. Niemann (interprétation). - Qui, parmi les personnes se

22 trouvant sous votre commandement, a fait ces prisonniers ?

23 M. Alic (interprétation). - C'étaient des combattants. Il y a eu

24 une avance de nos troupes, l'ennemi s'est rendu, je ne pourrais pas vous

25 citer le nom des combattants. C'étaient des unités qui, au cours de

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1 l'attaque, avaient capturé des ennemis.

2 M. Niemann (interprétation). - Lorsque ces personnes ont été

3 faites prisonnières, où ont-elles été gardées ?

4 Mme Residovic (interprétation). - Je ne vois pas l'intérêt de

5 cette question. Pourquoi poser une telle question à ce témoin ?

6 M. le Président (interprétation). - Je suppose que cela découle

7 des réponses que le témoin lui-même a données. Poursuivez, Maître Niemann.

8 M. Niemann (interprétation). - Merci. Et ces prisonniers, où

9 furent-ils emmenés ?

10 M. Alic (interprétation). - Eh bien, ils étaient remis aux

11 unités de la police qui s'en occupaient.

12 M. Niemann (interprétation). - Connaissez-vous toutes les unités

13 qui se trouvaient sous les ordres de M. Delalic au moment où il était

14 commandant du groupe tactique 1 ?

15 M. Alic (interprétation). - Je pense me souvenir du nom de

16 toutes les unités, mais je ne peux pas affirmer que je sois complet dans

17 ces souvenirs. Il se peut que j'omette l'une ou

18 l'autre, mais je pourrais vous les énumérer.

19 M. Niemann (interprétation). - Il est normal qu'après tout ce

20 temps vous ne vous souveniez pas de toutes les unités. Mais il nous serait

21 fort utile de connaître celles dont vous vous souvenez.

22 M. Alic (interprétation). - Le groupe tactique 1 et son

23 commandant, M. Zejnil Delalic, pouvaient utiliser les unités de l'état-

24 major de Jablanica, de celui de Konjic et celui de la Défense territoriale

25 de Hadzici. Mais il y avait des unités qui venaient d'autres états-majors

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1 municipaux, qui étaient placées sous mes ordres et peut-être aussi sous

2 les ordres de M. Delalic, en tant que commandant du TGA. Je ne sais plus

3 exactement car nous avions des unités de Vakuf, de Zenica, de Rijeka, de

4 Krajina.

5 M. Niemann (interprétation). - Savez-vous si tous les membres de

6 ces unités relevaient du commandement du groupe tactique n°°1 ou si

7 seulement certains de ces membres relevaient de ce commandement ?

8 Si ma question n'est pas claire, dites-le moi, j'essaierai de la

9 reformuler plus clairement. Avez-vous entendu ma question ?

10 M. Alic (interprétation). - Je n'ai pas tout à fait compris la

11 question, je m'attendais à ce que vous la reformuliez.

12 M. le Président (interprétation). - Maître Niemann, ne pensez-

13 vous pas qu'il serait préférable de poser cette question à un témoin qui

14 est considéré comme étant son chef d'état-major ?

15 M. Niemann (interprétation). - Je n'ai pas besoin d'insister sur

16 cette question, je voulais simplement un sonder petit peu cette question,

17 mais je n'insisterai pas.

18 Nous parlons maintenant des membres du commandement du groupe

19 tactique n° 1 au moment où M. Delalic était le commandant. Connaissez-vous

20 l'un quelconque de ses membres ? Et, si tel est le cas, pourriez-vous nous

21 donner les noms de ces membres ?

22 M. Alic (interprétation). - Il y avait M. Pilica Sucro, qui

23 était le chef d'état-major, c'est lui que je connais le mieux, et il y

24 avait le responsable de l'artillerie mais, en ce moment même, je ne me

25 souviens plus de son nom. Et puis, il y avait le responsable des

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1 communications : là non plus, je ne me rappelle plus son nom, je n'ai pas

2 une tellement bonne mémoire des noms.

3 M. Niemann (interprétation). - Merci. Je vous avais posé

4 quelques questions à propos de votre surnom, Sokol. J'aimerais vous

5 montrer un document par le truchement de l'huissier.

6 (L'huissier s'exécute.)

7 Je vous demanderai d'examiner la version bosniaque du document.

8 Mme Residovic (interprétation). - Pourrions-nous avoir un

9 exemplaire de ce document ?

10 M. Niemann (interprétation). - En fait, vous avez vu ce

11 document. C'est une partie des pièces qui vous ont été communiquées. Je ne

12 veux pas revenir sur cette lettre, mais je veux simplement que vous

13 examiniez le nom du signataire de cette lettre et je ne vous demanderai

14 pas d'entrer dans les détails.

15 Je voudrais aussi le nom de la personne qui aurait été arrêtée.

16 A l'examen de ce document, qu'en pensez-vous ? Est-ce que ceci

17 semble être votre écriture ?

18 M. Alic (interprétation). - Effectivement, c'est mon écriture.

19 M. Niemann (interprétation). - Et ce document est-il signé par

20 vous-même, par le surnom de Sokol ?

21 M. Alic (interprétation). - Oui.

22 M. Niemann (interprétation). - Est-il exact que cette lettre

23 soit adressée à M. Oganj ?

24 M. Alic (interprétation). - Cela aussi est exact.

25 M. Niemann (interprétation). - Et quand on dit Oganj, on dit

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1 M. Delalic, n'est-ce pas ?

2 M. Alic (interprétation). - Mais vous savez que ceci date

3 de 1994. Qui sait... Il se peut que j'aie envoyé cette lettre, mais je ne

4 sais plus pour quelle raison. C'était peut-être dans le cadre des actions

5 mentionnées, et la lettre est de type social.

6 M. Niemann (interprétation). - Je n'insiste pas là-dessus, mais

7 veuillez parcourir cette lettre pour voir si vous vous en souvenez.

8 La seule chose que je veux savoir, c'est si vous avez écrit à

9 M. Delalic en le surnommant Oganj.

10 M. le Président (interprétation). - Est-ce que c'est important ?

11 Est-il important qu'il lui attribue ce nom particulier ?

12 M. Niemann (interprétation). - Tout à fait, vous le verrez à

13 l'examen d'autres documents.

14 M. le Président (interprétation). - Vous savez qu'il était

15 courant d'avoir des surnoms pour lesquels il n'y a pas de rapport

16 particulier.

17 M. Niemann (interprétation). - C'est un des documents qui a été

18 saisi en Autriche et c'est un aspect important du problème.

19 Il est bien exact de dire que vous étiez en train d'écrire à

20 M. Delalic dans cette lettre ? Veuillez répondre par oui ou par non pour

21 que ceci soit consigné sur le compte rendu.

22 M. Alic (interprétation). - Oui.

23 M. Niemann (interprétation). - Et vous vous adressez à lui comme

24 étant M. Oganj ?

25 M. Alic (interprétation). - Je vous ai déjà fourni cette

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1 explication.

2 M. Niemann (interprétation). - Merci. Je demande le versement de

3 cette lettre non pas pour son contenu, je ne veux pas que des détails

4 personnels soient dévoilés, mais uniquement pour le nom et pour la

5 signature qui apparaissent à la fin de cette lettre.

6 M. le Président (interprétation). - Est-ce vraiment important ?

7 M. Niemann (interprétation). - Je n'insiste pas.

8 M. le Président (interprétation). - Vous faites référence à lui

9 en tant que tel, même si...

10 M. Jan (interprétation). - Quelquefois, on fait référence à une

11 personne qui aurait participé à une opération précise et on lui accorde le

12 nom qui avait été attribué à cette opération.

13 M. Niemann (interprétation). - Nous ne savons pas tout à fait

14 pourquoi ce nom d'Oganj a été utilisé. Mais je n'insiste pas.

15 M. Jan (interprétation). - (Hors micro).

16 Mme Residovic (interprétation). - En tout état de cause, vous

17 avez peut-être déjà pris votre décision, mais je voulais manifester que

18 nous avions une objection à cet égard.

19 M. Niemann (interprétation). - Je n'insiste pas et je n'ai plus

20 de question à poser à ce témoin.

21 M. le Président (interprétation). - Y a-t-il un droit de

22 réplique que vous voulez exercer, Maître Residovic ?

23 Mme Residovic (interprétation). - Non.

24 M. le Président (interprétation). - Merci beaucoup , Monsieur,

25 d'être venu nous aider. Vous pouvez disposer. Nous vous remercions et nous

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1 demandons le témoin suivant.

2 M. Alic (interprétation). - Je vous remercie.

3 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

4 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on faire entrer le témoin

5 Pilica Sucro ?

6 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

7 M. le Président (interprétation). - Veuillez faire prêter

8 serment au témoin.

9 M. Pilica (interprétation). - Je déclare solennellement que je

10 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

11 M. le Président (interprétation). - Veuillez vous asseoir.

12 M. Pilica (interprétation). - Merci.

13 Mme Residovic (interprétation). - Bonjour, Monsieur.

14 M. Pilica (interprétation). - Bonjour.

15 Mme Residovic (interprétation). - Veuillez-vous présenter à

16 l'intention des Juges, en déclinant votre identité.

17 M. Pilica (interprétation). - Je m'appelle Pilica Sucro.

18 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, pouvez-vous

19 nous donner vos lieu et date de naissance ?

20 M. Pilica (interprétation). - Je suis né le 5 avril 1953, dans

21 le village de Mirojevici dans le secteur de Bistrica, à Bjelo Polje au

22 Monténégro, République fédérale de Yougoslavie.

23 Mme Residovic (interprétation). - Et où habitez-vous,

24 Monsieur Pilica Sucro ?

25 M. Pilica (interprétation). - J'habite désormais à Sarajevo.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Quelle formation avez-vous

2 reçue ?

3 M. Pilica (interprétation). - J'ai terminé le primaire, le

4 secondaire, puis j'ai fait l'académie militaire au sein de l'ex-JNA.

5 Mme Residovic (interprétation). - Quel grade occupez-vous

6 aujourd'hui ?

7 M. Pilica (interprétation). - Je suis colonel dans l'armée de

8 Bosnie-Herzégovine.

9 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, où vous trouviez-vous

10 le 6 avril 1992, au moment où commença l'agression contre la Bosnie-

11 Herzégovine ?

12 M. Pilica (interprétation). - Le 6 avril 1992, je me trouvais à

13 Kiseljak. J'y étais

14 avec l'ex-JNA .

15 Mme Residovic (interprétation). - Et quel grade avez-vous occupé

16 au sein de l'ex-JNA ?

17 M. Pilica (interprétation). - J'étais major.

18 Mme Residovic (interprétation). - A un moment quelconque

19 de 1992, avez-vous rejoint les rangs des forces de la défense de Bosnie-

20 Herzégovine ?

21 M. Pilica (interprétation). - Oui.

22 Mme Residovic (interprétation). - Les Juges détiennent déjà

23 suffisamment d'informations en ce qui concerne la législation de l'Etat

24 alors récemment formé et en ce qui concerne les forces armées et leur

25 Constitution pour ce nouvel Etat. Toutefois, pourriez-vous nous préciser

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1 quelles furent les premières opérations militaires que vous avez réalisées

2 en tant que membre de la Défense territoriale en 1992 ?

3 M. Pilica (interprétation). - Ma première mission a été courte,

4 elle n'a duré que quelques jours. C'était une espèce de fonction de

5 conseil militaire auprès de l'état-major municipal de Kata*.

6 Mme Residovic (interprétation). - Donc cette mission n'a duré

7 que quelques jours. A un moment quelconque de 1992, un groupe tactique a-

8 t-il été constitué et avez-vous joué, dans ce groupe tactique 1, un rôle

9 particulier ?

10 M. Pilica (interprétation). - Je sais qu’il y a eu constitution,

11 établissement de ce groupe tactique 1. J'étais commandant-adjoint de ce

12 groupe tactique. J'avais les responsabilités de chef d'état-major

13 également. C'était un petit poste de commandement et il est arrivé que je

14 me retrouve à la tête d'opérations.

15 Mme Residovic (interprétation). - Qui vous a désigné à ce

16 poste ? Qui vous a nommé à ce poste ?

17 M. Pilica (interprétation). - L'état-major de la Défense

18 territoriale de Bosnie-Herzégovine, en d'autres termes, par le

19 commandement suprême. C'était la structure la plus élevée de la hiérarchie

20 militaire en Bosnie-Herzégovine.

21 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, quand avez-

22 vous pris vos fonctions en tant que commandant-adjoint ou en tant que chef

23 de l'état-major du groupe tactique 1 ? Vous en souvenez-vous ?

24 M. Pilica (interprétation). - Bien sûr, je m'en souviens,

25 c'était le 12 mai 1992.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on faire passer au témoin

2 la pièce de l'accusation 183, s'il vous plaît ?

3 (L'huissier s'exécute.)

4 Je souhaite que la version anglaise de ce document soit placée

5 sur le rétroprojecteur.

6 M. Jan (interprétation). - Monsieur l’Huissier, allumez le

7 rétroprojecteur, s’il vous plaît.

8 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, ce document est-il

9 celui par lequel vous avez été nommé à votre poste et avez-vous vous-même

10 communiqué ce document aux personnes compétentes ?

11 M. Pilica (interprétation). - Absolument, c'est le document

12 auquel vous faites référence et c'est moi-même qui l’ai transmis aux

13 forces de la défense, sur leur demande.

14 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, le

15 témoin vient d'authentifier ce document. Celui-ci est pertinent dans le

16 cadre de cette affaire et, par conséquent, j'en demande le versement au

17 dossier.

18 M. le Président (interprétation). - Il est admis.

19 Mme Residovic (interprétation). - Ce document ne porte pas de

20 date d’émission, Monsieur Pilica. Vous m'avez cependant déclaré que vous

21 aviez pris vos fonctions le 12 mai 1992. Peut-on donc dire que vous avez

22 effectivement commencé à travailler à cette date ?

23 M. Pilica (interprétation). - Tout à fait.

24 Mme Residovic (interprétation). - Qui était votre commandant

25 immédiat ?

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1 M. Pilica (interprétation). - C’était Mustafa Polutak qui est

2 aujourd'hui général dans l'armée de Bosnie-Herzégovine.

3 Mme Residovic (interprétation). - Quelle était la mission qui

4 avait été confiée au groupe tactique auquel vous appartenez ?

5 M. Pilica (interprétation). - Notre groupe tactique a été chargé

6 de lever le siège de Sarajevo.

7 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, dans le cadre

8 de l'accomplissement de cette tâche, quelle a été la première opération

9 qui a été menée par votre groupe tactique et dans quel secteur cette

10 opération a-t-elle été menée ?

11 M. Pilica (interprétation). - Une des premières tentatives qui

12 a visé à lever le siège de Sarajevo a été lancée dans la région de Koscan.

13 C'est un petit village qui se trouve du côté de Hadzici. Il y avait

14 également Batalo Brdo, Rakovica et, si on suit toujours cette même

15 direction, on arrive directement à Sarajevo.

16 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, à quelle période

17 faites-vous référence ? De quelle période de temps parlons-nous ?

18 M. Pilica (interprétation). - Cela s'est passé dans la deuxième

19 quinzaine du mois de mai 1992.

20 Mme Residovic (interprétation). - Des unités de Konjic ont-elles

21 pris part à cette mission ?

22 M. Pilica (interprétation). - Non, elles n'ont pas participé à

23 cette opération.

24 Mme Residovic (interprétation). - Vous étiez chargé de mener

25 certaines activités

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1 dans une zone géographique bien déterminée. Pouvez-vous nous dire si, à un

2 moment donné, dans le cadre de tentatives ultérieures qui visaient à mener

3 le siège de Sarajevo, des unités de Konjic ont pris part aux opérations ?

4 M. Pilica (interprétation). - Oui, effectivement, vers le

5 milieu du mois de juin 1992, dans la région de Pazaric, Hadzici et

6 Sarajevo. Une unité de Konjic a participé à cette opération.

7 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, il y a un

8 instant nous avons vu le document qui vous nommait à votre poste. Ce

9 document précisait-il également la nomination de M. Mustafa Gagula ?

10 Pouvez-vous nous dire qui était responsable de la nomination des

11 commandants des groupes tactiques ?

12 M. Pilica (interprétation). - Seul le commandement supérieur

13 pouvait procéder à ces nominations. Je parle donc là de l'état-major

14 principal des forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine.

15 Mme Residovic (interprétation). - Le commandant d'un groupe

16 tactique pouvait-il nommer des membres de l'état-major de ce même groupe

17 tactique ?

18 M. Pilica (interprétation). - Non, cela ne relevait pas de ses

19 compétences. Cela dit, il pouvait proposer le nom de certaines personnes

20 avec lesquelles il souhaitait travailler et ces propositions étaient

21 transmises au commandement supérieur, via un certain nombre de liens de

22 transmission.

23 Dans la plupart des cas, les ordres qui étaient ensuite délivrés

24 tenaient compte de ces propositions. L'état-major du commandement du

25 groupe tactique 1 a été formé de cette façon.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire combien

2 de temps vous avez occupé ce poste de commandant-adjoint du groupe

3 tactique 1 ?

4 M. Pilica (interprétation). - J’ai occupé ce poste jusqu'au

5 10 octobre 1992.

6 Mme Residovic (interprétation). - Il y a quelques instants, vous

7 avez déclaré que le groupe tactique auquel vous apparteniez avait été

8 chargé de lever le siège de Sarajevo. Pendant toute la période de temps

9 que vous avez passée au poste de commandant-adjoint du groupe tactique 1,

10 cette mission a-t-elle été la seule qui a été confiée à ce groupe

11 tactique ?

12 M. Pilica (interprétation). - Oui, c'était notre tâche

13 prioritaire. Bien entendu, pendant la période de temps au cours de

14 laquelle j'ai occupé ce poste, c'était bien cette mission que nous devions

15 accomplir et par la suite, après la dissolution du groupe tactique,

16 c'était toujours la mission qui avait la priorité absolue.

17 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, le commandement de

18 votre groupe tactique était-il de taille importante ou bien était-ce en

19 fait un commandement qui était constitué d'un certain nombre d'organes

20 distincts ?

21 M. Pilica (interprétation). - Les principes d'organisation d'un

22 commandement de groupe tactique sont tels qu'il apparaît clairement qu'un

23 groupe tactique n'est jamais qu'une formation provisoire. Les groupes

24 tactiques étaient constitués pour mener à bien des tâches bien précises et

25 bien entendu, le groupe tactique avait besoin de bénéficier d'un certain

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1 nombre d'officiers pour mener à bien la tâche qui lui était confiée.

2 Pour ce qui est de notre groupe tactique, son commandement était

3 de taille assez réduite et son état-major également. Le nombre des membres

4 de cet état-major a fluctué de cinq à huit membres, selon les

5 circonstances. Je parle bien sûr de la période de temps pendant laquelle

6 le groupe tactique était toujours opérationnel.

7 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, nous ne sommes pas

8 experts en matière militaire, mais nous avons déjà appris qu'un certain

9 nombre d’unités étaient placées sous vos ordres. C'est ce qui vous

10 permettait de mener à bien les missions qui vous étaient confiées. En tant

11 que chef de l'état-major du groupe tactique 1 au cours de cette période,

12 pourriez-vous nous

13 expliquer comment vous vous prépariez à accomplir ces missions dans la

14 pratique ? Comment les unités étaient-elles placées sous les ordres du

15 commandement du groupe tactique, en pratique ?

16 M. Pilica (interprétation). - Eh bien, nous devions d'abord

17 nous rendre au sein des unités qui étaient placées sous les ordres des

18 différents états-majors municipaux. Il fallait que nous réunissions autant

19 d'informations que possible, informations relatives à la taille des

20 troupes, à leur formation, à d'autres éléments encore.

21 Mme Residovic (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît.

22 M. le Président (interprétation). - Poursuivez, Maître.

23 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, poursuivez,

24 je vous en prie. Vous nous expliquiez de quelle façon vous tentiez de

25 rassembler certains éléments d'information qui vous permettaient de

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1 rassembler les troupes dont vous aviez besoin pour mener à bien votre

2 mission ?

3 M. Pilica (interprétation). - Oui. Lorsque nous avions rassemblé

4 suffisamment d'informations sur le nombre d'hommes disponibles et sur les

5 ressources dont nous pouvions disposer, nous planifiions nos opérations de

6 combat -toujours avec l'objectif d'accomplir une mission bien

7 particulière.

8 Nous faisions part de nos propositions au commandement suprême.

9 Nous lui suggérions de quelle façon ces troupes devaient être utilisées,

10 de quelle façon elles devaient être déployées.

11 Mme Residovic (interprétation). - Si je vous comprends bien,

12 lorsque vous parlez du commandement suprême, vous parlez du commandement

13 suprême des forces armées de Bosnie-Herzégovine. Bien. Ledit commandement

14 suprême a-t-il délivré des ordres vous étant adressés et précisant quelles

15 étaient les unités qui devaient être placées sous vos ordres et sous ceux

16 du commandement du groupe tactique ?

17 M. Pilica (interprétation). - Bien évidemment. Après avoir reçu

18 nos propositions, les membres du commandement suprême ont délivré soit un

19 ordre, soit une décision qui précisait quelles unités des différents

20 états-majors municipaux devaient participer aux opérations de combat

21 prévues.

22 Ces ordres ou ces décisions nous étaient transmis et ces

23 différentes instructions précisaient quelle devait être l'utilisation que

24 nous devions faire des troupes dont nous disposions.

25 Mme Residovic (interprétation). - Après émission de ces ordres

Page 12439

1 qui émanaient du commandement suprême, les états-majors municipaux qui

2 étaient supposés détacher certaines unités délivraient-ils leurs propres

3 ordres qui détaillaient quelles étaient effectivement les unités qui

4 allaient être placées sous vos ordres ?

5 M. Pilica (interprétation). - Absolument. Les états-majors

6 municipaux donnaient l'ordre à certaines unités de se placer sous notre

7 commandement pendant une période de temps donnée et dans le cadre de

8 certaines opérations de combat.

9 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, les unités qui

10 n'étaient pas concernées par ces ordres émanant de l'état-major municipal,

11 sous les ordres de qui restaient-elles placées ?

12 M. Pilica (interprétation). - Eh bien, elles continuaient de

13 dépendre des zones de compétence des états-majors municipaux. Ces unités

14 étaient déployées conformément au plan établi par l'état-major municipal

15 et par leur propre commandement.

16 Mme Residovic (interprétation). - Où se trouvait le quartier

17 général du groupe tactique 1 auquel vous apparteniez ?

18 M. Pilica (interprétation). - En jargon militaire, on parle de

19 poste de commandement. Le poste de commandement du groupe tactique 1 donc,

20 pendant toute la période d'existence du groupe tactique 1, était à

21 Pazaric, dans la caserne de Pazaric plus précisément.

22 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, à un moment donné

23 en 1992, Zejnil Delalic est-il devenu commandant du groupe tactique 1 ?

24 M. Pilica (interprétation). - Absolument.

25 Mme Residovic (interprétation). - Si vous vous en souvenez,

Page 12440

1 pouvez-vous me dire à quelle date M. Delalic a pris ses fonctions à

2 Pazaric ? A quelle date lui avez-vous fait part des informations dont il

3 avait besoin pour prendre ses fonctions à Pazaric ?

4 M. Pilica (interprétation). - Je me souviens très bien de cette

5 période. C'était aux alentours du 27 juillet 1992. Nous avons entendu dire

6 que Zejnil Delalic s'était vu confier le commandement du groupe tactique 1

7 et, en fait, il a pris ses fonctions le 30 juillet 1992.

8 C'est arrivé de la façon suivante : il est arrivé au poste de

9 commandement ; nous avons pris alors toutes les dispositions nécessaires

10 pour qu'il puisse prendre le commandement du groupe tactique. Ensuite,

11 jusqu'au 10 octobre 1992, jusqu'à mon départ, c'est lui qui était

12 commandant du groupe tactique.

13 Mme Residovic (interprétation). - Vous souvenez-vous où

14 M. Polutak est allé sur la base de cet ordre qui a été délivré vers le

15 27 juillet 1992 ?

16 M. Pilica (interprétation). - Bien sûr que je m'en souviens.

17 M. Polutak est un de mes très bons amis. Il s'est vu confier un nouveau

18 poste, un poste de plus grande importance. Il est devenu membre du

19 commandement suprême qui, à l'époque, se trouvait à Visoko. Nous

20 l'appelions "Poste de commandement avancé de l'état-major principal des

21 forces de défense armée de la République de Bosnie-Herzégovine."

22 Mme Residovic (interprétation). - Vous savez sans doute

23 également qui commandait ce poste de commandement avancé. Pouvez-vous nous

24 donner son nom, s'il vous plaît ?

25 M. Pilica (interprétation). - C'était le général Rasim Delic.

Page 12441

1 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, pouvez-vous affirmer

2 en toute certitude que M. Delalic a été effectivement nommé à ce poste le

3 27 juillet et a pris ses fonctions le 30 de ce même mois ?

4 M. Pilica (interprétation). - Je n'en ai été certain que lorsque

5 j'ai vu l'ordre qui le nommait commandant du groupe tactique 1. Et j'ai vu

6 cet ordre le 8 août 1992, à savoir plusieurs jours après son arrivée. Cela

7 dit, nous savions déjà et nous étions convaincus du fait qu'il était

8 officiellement commandant du groupe tactique 1, qu'il avait été

9 officiellement nommé à ce poste. Nous en avons été convaincus dès que nous

10 avons entendu dire qu'il s'était vu confier ces fonctions. Je répète que

11 cela s'est passé officiellement le 27 juillet.

12 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie.

13 Jusqu'au 27 juillet, êtes-vous absolument certain du fait que

14 les responsabilités du commandant du groupe tactique 1 étaient assumées

15 par M. Mustafa Polutak ?

16 M. Pilica (interprétation). - Pas seulement jusqu'au 27 juillet,

17 mais jusqu'au 30 juillet. Polutak est resté jusqu'à cette date commandant

18 officiel du groupe tactique 1. Il est resté commandant jusqu'à ce que ses

19 responsabilités soient transférées à M. Delalic. Et tout cela s’est passé,

20 je le répète, au poste de commandement de Pazaric.

21 Mme Residovic (interprétation). - Maintenant, une question sous

22 forme d'hypothèse. Si quelqu'un devait vous montrer un document d'après

23 lequel M. Delalic était commandant du groupe tactique 1 dès le 18 juillet,

24 comment réagiriez-vous ?

25 M. Pilica (interprétation). - Je n'en sais rien, jamais je n'ai

Page 12442

1 vu un tel document. Le premier ordre que j'ai vu par écrit, je l'ai vu à

2 une date que je vous ai déjà précisée. Et cet ordre écrit est arrivé au

3 poste de commandement du groupe tactique.

4 Mme Residovic (interprétation). - Etes-vous absolument certain

5 que le commandant Polutak a rempli ses fonctions jusqu'à la date dont vous

6 nous avez parlé, à savoir le 30 juillet ?

7 M. Pilica (interprétation). - Je l'affirme en toute certitude.

8 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie.

9 M. Delalic a donc pris son poste en tant que commandant du

10 groupe tactique 1 le 30 juillet, comme vous nous l'avez dit. A cette

11 époque-là, l’avez-vous informé du fait qu'un ordre était arrivé, ordre

12 selon lequel un canon de Konjic devait être transféré sur votre zone

13 d'opération ?

14 M. Pilica (interprétation). - Bien sûr que je l'ai informé de

15 cela. Et cet événement, cet incident du canon me permet de très bien me

16 souvenir des événements qui se sont déroulés au cours de cette période. Je

17 suis spécialisé en artillerie et, à l'époque, disposer -ne serait-ce que

18 d'un seul canon- était quelque chose qui avait pour moi une grande

19 importance.

20 Mme Residovic (interprétation). - Pour ce qui est du transfert

21 de cette pièce d’artillerie, vous souvenez-vous si un certain nombre de

22 problèmes se sont posés vis-à-vis de l'état-major municipal de Konjic ?

23 M. Pilica (interprétation). - Effectivement. Des problèmes

24 franchement sérieux se sont même posés.

25 Mme Residovic (interprétation). - L'état-major municipal a-t-il

Page 12443

1 essayé de s'assurer du fait que cet ordre émanait bien du commandement

2 suprême ?

3 M. Pilica (interprétation). - Bien sûr qu'ils ont cherché à s'en

4 assurer. L'état-major municipal était placé sous le commandement du

5 commandant suprême et non pas sous notre commandement. C'était donc là un

6 premier problème.

7 Et puis l'autre problème qui se posait était que l'état-major

8 municipal lui-même avait terriblement besoin de cette pièce d'artillerie

9 pour mener à bien ses propres opérations de combat sur sa zone de

10 responsabilité.

11 Mais lorsqu'ils se sont aperçu que c'était là un ordre qui

12 émanait du commandant Sefer Halilovic, ils n'ont plus opposé aucune

13 résistance à l'exécution de cet ordre et la pièce d'artillerie a

14 effectivement été transférée. J'ai personnellement participé à

15 l'organisation de ce transfert.

16 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, lorsque M. Delalic a

17 remplacé M. Polutak dans ses fonctions, a-t-il également, par ce fait, été

18 chargé de l’accomplissement des mêmes opérations de combat qui avaient

19 précédemment été confiées à M. Polutak ?

20 M. Pilica (interprétation). - Absolument. Il s'est vu chargé

21 exactement des mêmes missions.

22 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez déclaré que vous

23 aviez mené une première opération en mai, visant à lever le siège de

24 Sarajevo. Il y a eu une deuxième opération en juin et des unités de Konjic

25 ont pris part à cette deuxième opération. Lorsque ces unités de Konjic ont

Page 12444

1 pris part aux opérations, et lorsque M. Polutak était toujours en poste,

2 M. Zejnil Delalic avait-il une responsabilité de commandement quelconque

3 vis-à-vis de ces unités de Konjic, qui étaient placées sous vos ordres à

4 cette période de l’année 1992 ?

5 M. Pilica (interprétation). - Non, je sais qu'il n'avait aucune

6 responsabilité de commandement. A cette époque, il a pris part à certaines

7 tâches dont je n'ai pas connaissance, mais je sais qu'il avait équipé

8 l'unité qui nous avait été envoyée pour mener à bien cette opération de

9 combat. Il leur avait donné des vêtements, des chaussures, et je me

10 souviens que c'était l'unité la mieux équipée dont nous disposions à

11 l'époque.

12 Cela a beaucoup fait pour remonter le moral des troupes. Cela a

13 eu des conséquences psychologiques très importantes.

14 Pour nous, les soldats, cela signifiait clairement que cette

15 unité était prête à agir et qu’elle était prête aussi bien sur le plan

16 physique et matériel que psychologique et militaire. Elle était tout à

17 fait prête à agir.

18 Mme Residovic (interprétation). - Je vous en remercie, Colonel.

19 S’il vous plaît, au moment où M. Delalic est devenu commandant

20 ou bien à un autre moment, au moment où vous étiez son chef d'état-major,

21 savez-vous si M. Delalic était à la tête de toutes les formations armées

22 sur votre axe d'intervention ?

23 M. Pilica (interprétation). - J'en ai entendu parler, mais je

24 n'ai vu aucun document le signifiant. Pour nous, soldats, il n'y a pas

25 d’ordre de ce type qui préciserait que quelqu'un est commandant de toutes

Page 12445

1 les formations armées et, dans le jargon militaire, cela n'existe pas. En

2 tout état de cause, je n'ai jamais vu ce genre de document.

3 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, vous en avez entendu

4 parler, mais M. Delalic a-t-il été de fait, en réalité, à un moment

5 quelconque, commandant de toutes les formations armées ou bien avait-il

6 les mêmes fonctions que M. Polutak ?

7 M. Pilica (interprétation). - A aucun moment, il n'a été

8 commandant de toutes les formations armées. En revanche, ses fonctions

9 étaient tout à fait identiques à celles de l'ancien commandant,

10 M. Mustafa Polutak.

11 Mme Residovic (interprétation). - Puisque dans votre réponse

12 vous m'avez dit que vous n'avez jamais vu ce genre de document, je ne vais

13 pas vous le montrer, mais je vous montrerai un autre document, et je vous

14 demanderai s'il vous est arrivé de voir ce type de document. Il s'agit

15 d'un document D 145-6-4 page 896.

16 (L'huissier s'exécute.)

17 Colonel, auriez-vous vu à un moment quelconque ce document-ci ?

18 M. Pilica (interprétation). - Je n’ai jamais vu ce document.

19 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on remettre au témoin le

20 document D 146 1 ?

21 (L'huissier s'exécute.)

22 Colonel, vous est-il arrivé de voir, au cours de l'année 1992,

23 ce document ?

24 M. Pilica (interprétation). - Oui, c’est le document qui est

25 arrivé dans notre

Page 12446

1 commandement et c'était une preuve écrite pour nous que Zejnil Delalic

2 était commandant du groupe tactique 1. Ce document est signé par le

3 Président de la République de Bosnie-Herzégovine, M. Alija Izetbegovic, en

4 tant que commandant suprême des forces armées.

5 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Pilica, vous voyez en

6 haut du document la date de délivrance de cet ordre, ainsi que la date qui

7 est vraisemblablement celle du moment où cet ordre a été envoyé. La

8 Chambre a entendu beaucoup parler des conditions de transmission des

9 ordres.

10 Je voudrais savoir si, au cours de l'année 1992, il pouvait se

11 produire qu’un document parvienne à destination en retard ou bien qu'un

12 document émis ultérieurement parvienne à destination avant un document qui

13 aurait été émis avant celui-ci ?

14 M. Pilica (interprétation). - Oui, c’était possible parce que

15 nous avions vraiment de très mauvaises communications. Il pouvait arriver

16 effectivement que certains documents soient transmis rapidement, que ce

17 soit par coursier ou éventuellement par fax, ce que nous cherchions à

18 éviter mais, concernant la plus grande partie des documents, la

19 transmission se faisait par voie radio.

20 Au début de la guerre, nous avions encore des communications par

21 téléphone, mais à ce moment où notre commandant était Zejnil Delalic, ce

22 lien était interrompu, parce que, dans la zone de la ville de Hadzici, la

23 ligne ferroviaire a été sabotée par les forces ennemies et ceci a

24 endommagé cette ligne-là. Nous n'étions plus en mesure de l'utiliser.

25 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, vous nous avez dit de

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1 manière très claire que, par l'ordre de l'état-major municipal, vous avez

2 pu prendre sous vos ordres certains effectifs. Vous nous avez dit

3 également que les états-majors municipaux, selon les ordres de l'état-

4 major principal, mettaient à votre disposition certains moyens techniques.

5 A l'époque où vous étiez à la tête de l'état-major du groupe

6 tactique 1, existait-il une obligation qu'il y ait les états-majors

7 municipaux et, conformément aux décisions de l'état-major principal, que

8 ces états-majors municipaux mettent à votre disposition des

9 renseignements ?

10 M. Pilica (interprétation). - Oui, nous étions un commandement

11 provisoire. Par conséquent, nous n'avions ni équipements, ni hommes qui

12 auraient pu être chargés de recueillir ce type d'information, des

13 renseignements sur l’ennemi. Généralement, nous n'avions qu'un seul

14 officier chargé de cela et celui-ci devait coordonner ces actions et

15 veiller à ce que cela soit mené à bien.

16 Tous les renseignements qui nous étaient indispensables pour

17 mener à bien nos opérations devaient être recueillis par les états-majors

18 municipaux, autrement dit par leur unité et leur organe.

19 Permettez-moi de rappeler brièvement qu'il s'agissait

20 essentiellement des informations et des renseignements sur l'ennemi,

21 allant de la ligne de front vers l'arrière. C'est cela qui est

22 intéressant. Rarement, il s'agissait d'information de contre-espionnage.

23 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, puisque nous avons

24 déjà entendu parler des préparatifs de l'organisation de l'opération JUG,

25 et ainsi de suite, pourriez-vous nous dire s'il y a eu de mauvaises

Page 12448

1 surprises, pour employer ce terme, à l’arrière de vos lignes, pendant que

2 vous prépariez vos opérations et cela a-t-il provoqué une réaction de

3 votre part et vous êtes-vous adressé au commandement suprême ?

4 M. Pilica (interprétation). - Oui, des unités ont été

5 introduites à l'arrière de nos positions par l’ennemi, au niveau de la

6 ligne de front, mais aussi plus à l'arrière. Le cas le plus difficile, le

7 plus sérieux, qui a été un grand choc pour nous, a été l'incident où a été

8 blessé Mirsad Catic appelé Cuperak et la mort de Yozo Fadil où ont été

9 blessés également d'autres membres de cette mission.

10 En fait, il s'agissait d'une mission de reconnaissance dans le

11 cadre de la préparation de l'opération JUG. La présidence de notre Etat et

12 notamment la ville même de Sarajevo

13 attendaient de grands résultats de cette opération. Il s’agissait d’une

14 opération qui avait été préparée pendant très longtemps, qui était très

15 importante pour nous, et on s’attendait à ce qu’elle réussisse.

16 Mme Residovic (interprétation). - Merci Colonel. Nous n'allons

17 pas entrer dans les détails de cette opération, mais vous avez dit que cet

18 événement a causé un grand choc parmi vous. Est-ce que, suite à cet

19 incident, une instruction aurait été donnée par le commandement suprême,

20 instruction qui aurait renforcé cette obligation des états-majors

21 municipaux à l'égard des groupes tactiques et concernant la mise à votre

22 disposition des informations de renseignements ?

23 M. Pilica (interprétation). - Naturellement, il nous est arrivé

24 même avant de prendre certaines mesures sur le plan des renseignements, à

25 tous les niveaux. Et il y avait un certain nombre d'instructions et de

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1 règles en ce sens.

2 Mais, suite à cet événement, il y a eu une réaction très sévère,

3 venue même du plus haut niveau, du niveau de notre commandement suprême.

4 Le résultat de cette réaction a été des instructions supplémentaires et

5 des mises en garde liées à cette activité de renseignements.

6 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on remettre au témoin la

7 pièce à conviction de l'accusation P 244 ? .... Excusez-moi.... 224.

8 Colonel, pouvez-vous lire ce document ? Je ne vous demanderai

9 pas de l'authentifier, puisque vous avez déjà dit à la Chambre que vous

10 avez quitté le groupe tactique 1 le 10 octobre mais, conformément à ce que

11 vous venez de nous dire, je vous demanderai de prendre connaissance de ce

12 document.

13 Colonel, s'il vous plaît, pouvez-vous me dire si ce document a

14 un lien quelconque ou bien s'il découle de cette instruction émise par

15 l'état-major principal concernant les obligations qui relèvent des états-

16 majors municipaux dont vous avez parlé, que vous avez vue

17 personnellement ?

18 M. Pilica (interprétation). - Bien entendu, ceci est une

19 réaction militaire, une réaction dont le résultat devrait être le suivant,

20 prendre très au sérieux le problème. Il s'agit également d'un ordre qui

21 découle des instructions données par l'état-major principal de l'armée de

22 Bosnie-Herzégovine.

23 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous regarder la date ?

24 C'est la date du 14 novembre 1992.

25 Colonel, bien que vous ayez été muté à une autre fonction,

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1 savez-vous, peut-être, si c'est le moment où l’on recommence à préparer de

2 manière sérieuse pour une nouvelle tentative de levée du siège de Sarajevo

3 le long du même axe, Igman-Sarajevo ?

4 M. Pilica (interprétation). - Oui je le sais, puisque le poste

5 où j'ai été nommé après avoir quitté le groupe tactique était celui de

6 commandant-adjoint d'une brigade et également chef de l'état-major, le

7 long de la ligne de front de Visoko. Les missions principales à cet

8 endroit étaient également la levée du siège de Sarajevo.

9 Concernant toutes les informations et les renseignements, nous

10 tous qui étions déployés le long de cette ceinture autour de Sarajevo,

11 nous étions tenus de collaborer, d'échanger nos informations.

12 Mme Residovic (interprétation). - Merci.

13 Pourriez-vous me dire si vous saviez que cette seconde

14 tentative, qui n'a pas été menée par les groupes tactiques, puisqu'ils

15 n'existaient plus, a été entreprise au mois de décembre 1992 ? Vous en

16 souvenez-vous ?

17 M. Pilica (interprétation). - Pour ce qui est du territoire de

18 la municipalité de Visoko, effectivement il y a eu une opération.

19 M. Jan (interprétation). - Mais en quoi cela nous intéresse-t-

20 il ? S'il vous plaît, limitez-vous à poser des questions sur les pouvoirs

21 de M. Delalic en tant que commandant du groupe tactique 1. Posez-lui des

22 questions sur ses relations avec l'administration de Konjic.

23 Mme Residovic (interprétation). - Ici, nous avons un document

24 qui aurait été signé par mon client. Nous devons savoir s'il avait des

25 pouvoirs et quel genre de pouvoirs relatifs à cette mission. Il a eu une

Page 12451

1 troisième mission, nous devons savoir à quel point ces préparatifs étaient

2 sérieux.

3 M. Jan (interprétation). - Nous avons entendu beaucoup

4 d'informations là-dessus. Ils avaient besoin de renseignements, ils ont

5 donné des instructions en ce sens, des instructions qui découlaient de

6 l’ordre du commandement principal.

7 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, en tant que chef

8 d'état-major, savez-vous si M. Delalic avait autorité de s'adresser à un

9 état-major municipal pour demander l'exécution de ce type de mission ?

10 M. Pilica (interprétation). - Oui.

11 Mme Residovic (interprétation). - Par rapport au point 6 que

12 vous pouvez consulter maintenant, pouvez-vous me dire si le commandant

13 avait l'autorité de sanctionner les commandants des états-majors

14 municipaux ? En d'autres termes, quels pouvoirs avait-il en cas

15 d'inexécution de sa demande ou de son ordre ?

16 M. Pilica (interprétation). - Il n'avait pas l'autorité de

17 sanctionner les commandants des états-majors municipaux, mais il pouvait

18 s'adresser au commandement supérieur, il pouvait dresser un rapport à leur

19 adresse lié à la non-exécution de ses ordres...

20 Mme Residovic (interprétation). - Merci.

21 Dans la traduction, nous voyons qu'il ne pouvait pas sanctionner

22 le chef de l'état-major municipal, alors que le témoin a dit le

23 commandant. La différence est uniquement entre le chef et le commandant.

24 C'est ce que vous avez dit ?

25 M. Pilica (interprétation). - Oui, les commandants des unités de

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1 la défense municipale, parce que cela les concerne, eux.

2 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, lorsque M. Delalic

3 était commandant du groupe tactique 1, était-il autorisé à nommer les

4 commandants des états-majors municipaux ou les membres de ces états-

5 majors ?

6 M. Pilica (interprétation). - Il n'avait pas cette autorité-là.

7 Il pouvait proposer ce genre de mesure, mais il ne pouvait pas l'exécuter

8 lui-même.

9 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, votre groupe

10 tactique, au moment où son commandant était M. Polutak et également, ce

11 qui nous intéresse davantage, où son commandant était M. Delalic, avait-il

12 des pouvoirs quelconques sur les institutions civiles sur le territoire,

13 des écoles, des hôpitaux ou d'autres institutions ?

14 M. Pilica (interprétation). - Non, jamais.

15 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, à un moment

16 quelconque, pendant que vous y étiez, donc jusqu'au 10 octobre ou bien

17 même plus tard si vous le savez, M. Delalic aurait-il reçu un pouvoir

18 particulier d'être en charge d'une prison ?

19 M. Pilica (interprétation). - Non.

20 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, à l'époque où le

21 commandant était M. Polutak et notamment où M. Delalic était commandant du

22 groupe tactique 1, les commandants étaient-ils appelés à transmettre

23 certains ordres émanant de l'état-major principal à l'adresse des états-

24 majors municipaux ou à d'autres instances qui se trouvaient sur votre

25 terrain d’opération ou ailleurs, à des endroits qui étaient loin de cette

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1 première ceinture autour de Sarajevo ?

2 M. Pilica (interprétation). - Ces cas se sont présentés en

3 effet, aussi bien à l'époque où notre commandant était M. Polutak qu'à

4 l'époque où le commandant était M. Delalic.

5 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on remettre au témoin le

6 document D 145 annexe V-D41 et annexe V -D42, pages 813 et 818 ?

7 (L'huissier s'exécute.)

8 Pouvez-vous tout d'abord consulter le document daté du

9 24 août 1992 ?

10 Peut-on placer sur le rétroprojecteur le document daté du 24,

11 puisque le document que nous voyons maintenant est celui du 28 août ?

12 Colonel, nous voyons que la date qui figure sur ce document est

13 la date du 24 août 1992. Avant tout, je voudrais vous demander si la

14 période allant du 20 jusqu'à la fin du mois d'août était une période de

15 combats quotidiens de grande intensité menés par votre groupe tactique, ou

16 s'agissait-il d'une période plutôt calme pour le groupe tactique 1 ?

17 M. Pilica (interprétation). - C'était une période de combats de

18 grande intensité et cela concerne l'opération JUG. J'ai souligné il y a un

19 instant qu'il s'agissait d'une opération dont nous attendions beaucoup.

20 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, est-ce précisément la

21 période où à la fois le commandant et tous les membres du commandement du

22 groupe tactique 1 sont déployés le long de la première ligne de front ?

23 M. Pilica (interprétation). - Oui. Tous les membres du

24 commandement du groupe tactique 1 sont présents à Ormanj, un poste

25 d'observation qui se trouve dans les hauteurs de Hadzici, ou bien en

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1 partie au poste de commandement de Pazaric qui est situé immédiatement à

2 l'arrière de cette montagne.

3 Nous étions tous engagés dans une très grande activité. La

4 situation était très complexe. Chaque moment comptait. Nous avons même été

5 attaqués par l'aviation. Nous avons subi des attaques d'artillerie très

6 importantes, et ainsi de suite.

7 Mme Residovic (interprétation). - Serait-ce le moment opportun

8 de faire une pause avant que je ne passe aux questions concernant les

9 documents ?

10 M. le Président (interprétation). - Oui. Tout à fait. Nous

11 allons suspendre la séance jusqu'à midi.

12 (Suspendue à 11 h 30, l'audience est reprise à 12 h 05.)

13 M. le Président (interprétation). - Avant de reprendre, j'ai

14 essayé de contacter le service de la section des victimes et témoins.

15 Maître Olujic, apparemment vous n'avez pas fait preuve d'un bon

16 esprit de coopération ; vous n'avez pas soumis à cette section la liste de

17 vos témoins. Ce service n'a pas la moindre idée des témoins que vous

18 voulez appeler à la barre et ils ne savent pas non plus de quels témoins

19 ce service devrait s'occuper. Pourriez-vous prendre contact avec eux

20 aujourd’hui ? Ils essaieront de voir ce qu'ils peuvent faire.

21 Il se peut que certains de vos témoins n’aient pas besoin de

22 visa et puissent être cités à comparaître plutôt. Il faudrait que vous

23 preniez contact avec ce service des victimes et témoins.

24 M. Olujic (interprétation). - Hier soir, Monsieur le Président,

25 après que vous nous ayez fait part de vos suggestions, j'ai contacté mes

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1 collaborateurs, mais en vain.

2 En effet, ce n'est que maintenant que j'ai pu m'assurer de la

3 présence de certains témoins. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas

4 pris contact avec la section des témoins et des victimes, tout simplement

5 parce que je n'étais pas en mesure de leur fournir des données exactes. En

6 effet, certain de ces témoins se trouvent dans un pays tiers.

7 Je me suis donné comme limite pour les contacter quatorze heures

8 cet après-midi. Si je ne parviens pas à obtenir les renseignements

9 pertinents, je pense qu'il ne sera pas possible de fournir le nom des

10 témoins qui pourraient être cités à la barre.

11 Il reste encore une petite ouverture : j'attends un appel

12 téléphonique au début de l'après-midi, mais je puis vous assurer que nous

13 avons fait l'impossible pour répondre à votre demande. Je peux vous dire

14 aussi que le 22 juin, date prévue pour la présentation de nos témoins, et

15 si les témoins concernant le premier accusé ne sont pas disponibles, nous

16 pourrons vous fournir certains témoins. Mon confrère, Me Djuric, a déjà

17 pris des dispositions concernant certains témoins pour la date prévue du

18 22 juin.

19 Il faut aussi qu'il y ait concordance entre la présentation des

20 témoins et la présentation des documents qu’il faudra aussi fournir au

21 moment des dépositions.

22 Nous faisons de notre mieux pour essayer de nous conformer à vos

23 décisions. Nous saurons à 14 heures, cet après-midi, ce qu'il en est.

24 Lorsque nous aurons repris l'audience à 14 heures 30, nous serons en

25 mesure de vous dire ce qu'il en est de nos tentatives visant à nous

Page 12456

1 conformer à votre décision.

2 M. le Président (interprétation). - Je ne sais pas d'où vous

3 tenez cette date du 22 juin. Pourquoi croyez-vous que ce soit là la date

4 où vous êtes censé présenter vos témoins, puisque nous attendons pour le

5 premier accusé d'autres témoins ?

6 Cela ne fait pas partie des prévisions que nous avons établies,

7 nous les Juges. Si un conseil décide de son propre chef de décider en son

8 nom propre, c’est peut-être là une erreur qui ne correspond pas du tout à

9 la réalité de la situation.

10 Que fait la Chambre de première instance ? Elle essaie d'épuiser

11 toutes les voies, tous les recours qui sont en son pouvoir pour diligenter

12 la procédure, comme le demande la situation. Je crois que nous avons fait

13 suffisamment de choses pour que vous soyez convaincus de notre bonne

14 volonté et de notre volonté tout court de bien nous conformer aux règles

15 de ce Tribunal.

16 Si vous n’obtenez pas de résultat, nous ne pourrons conclure

17 qu'une chose : nous n'avons pas l'intention de passer deux semaines

18 entières sans entendre de dépositions de témoins à décharge. S'il le faut,

19 nous déclencherons la procédure qui devrait s'appliquer dans un tel cas de

20 figure.

21 Je vous remercie et je vous demande, Monsieur l'Huissier,

22 d'introduire le témoin.

23 (L’huissier s'exécute.)

24 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

25 Veuillez vous asseoir.

Page 12457

1 Mme le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle, Monsieur,

2 que vous êtes toujours sous serment.

3 M. Pilica (interprétation). - Oui.

4 M. le Président (interprétation). - Poursuivez,

5 Maître Residovic.

6 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

7 Colonel, avant la pause, je vous avais demandé d'examiner un

8 document en date du 24 août. En réponse à ma question précédente, vous

9 m'avez dit qu’il était coutumier qu'un commandant transmette un ordre à

10 d’autres commandants. Nous parlons de cette période de 1992. Etes-vous au

11 courant de cet ordre que M. Delalic aurait envoyé à l'état-major municipal

12 de Konjic ?

13 M. Pilica (interprétation). - Oui.

14 Mme Residovic (interprétation). - Etiez-vous présent lorsque

15 M. Delalic a reçu cet ordre du commandement suprême, ordre qu'il devait

16 transmettre à l'état-major municipal ?

17 M. Pilica (interprétation). - Oui, j'étais présent.

18 Mme Residovic (interprétation). - Connaissez-vous les

19 circonstances de l'arrivée de cet ordre ? En d'autres termes, quelle était

20 la mission qui vous était confiée, à vous et à M. Delalic, au moment de

21 l'arrivée de cet ordre ?

22 M. Pilica (interprétation). - Nous nous acquittions de cette

23 tâche principale confiée au groupe tactique n° 1 ainsi qu’à d'autres

24 groupes. Nous essayions d'arriver à la levée du siège de Sarajevo. Nous

25 nous occupions de l'opération JUG. Ceci intervenait au moment le plus

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1 dynamique, le plus actif de cette opération.

2 Mme Residovic (interprétation). - La version anglaise de cet

3 ordre se trouve-t-elle sur le rétroprojecteur ? Peut-être qu'on l’a

4 déplacée pendant l'interruption. Cette version anglaise est-elle toujours

5 là ?

6 M. Pilica (interprétation). - Je pense que oui.

7 Mme Residovic (interprétation). - Fort bien, merci. Je le vois

8 qui apparaît à l'écran. Vous disiez que ceci se passait au moment le plus

9 actif de l'opération JUG. C'est alors que M. Delalic a reçu un ordre qu'il

10 devait transmettre à l'état-major municipal. Dites-moi, qu'est-ce que

11 M. Delalic a fait précisément à ce moment-là ?

12 M. Pilica (interprétation). - Eh bien je le sais. Il devait

13 réaliser une tâche qui relevait du groupe chargé de l'opération JUG et il

14 a demandé à une dactylo de prendre en note certains points. Il a donné

15 l'ordre que ce document soit envoyé par véhicule à l'état-major municipal

16 de Konjic, et ceci dans les meilleurs délais. C'était le coursier Irfan

17 qui devait se charger d'acheminer ce document au commandement de l’état-

18 major municipal de Konjic.

19 J'ajouterai encore ceci : M. Delalic a aussi consigné rapidement

20 quelques notes pour se souvenir de certaines choses qu'il avait à l'esprit

21 et il pensait que l'état-major municipal devait être informé de ces

22 éléments.

23 Plusieurs questions surgissent ici, chacune de ces choses

24 entraînant un choix différent dans les actions à mener.

25 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous examiner le

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1 cinquième paragraphe ? Est-ce que c'est là un des points dont vous parliez

2 et quel est le lien qui existe entre ceci et le groupe tactique 1 dont

3 vous faisiez partie et dont M. Delalic était le commandant ?

4 M. Pilica (interprétation). - Eh bien, ceci fait partie de

5 l'exécution des tâches nécessitées par l'opération JUG pour le secteur

6 allant de Bjezinici vers Kalinovik. L'objectif était d'établir la liaison

7 avec des forces en présence dans ce secteur et de permettre la meilleure

8 mise en oeuvre de l'opération JUG. C'était un des points secondaires dans

9 le cadre de l’opération JUG.

10 Mme Residovic (interprétation). - Nous avons déjà appris qu'il y

11 avait effectivement des domaines secondaires dans le cadre de

12 l'opération JUG.

13 Ce secteur de la municipalité de Konjic constituait-il un des

14 secteurs ou un des aspects secondaires de cette opération JUG ?

15 M. Pilica (interprétation). - Oui.

16 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie.

17 Veuillez examiner le document qui porte la date du 28 août 1992.

18 Je demanderai que la version anglaise soit placée sur le rétroprojecteur.

19 (L'huissier s'exécute.)

20 Colonel, ce document fait-il partie des documents transmis à

21 l'un des postes se trouvant sur le terrain ?

22 M. Pilica (interprétation). - Vous le voyez tout de suite, il

23 suffit pour cela de lire le préambule qui fait état de l'ordre émis par le

24 commandement suprême de Sarajevo avec la cote de référence. Ce document

25 renvoie à un autre document qui le précède et que nous avons vu il y a un

Page 12460

1 instant.

2 Mme Residovic (interprétation). - Etiez-vous présent au moment

3 de la rédaction de ce document ?

4 M. Pilica (interprétation). - Non au moment de la rédaction de

5 ce document-ci. Je ne le connaissais pas, d'ailleurs.

6 Mme Residovic (interprétation). - Parlons de cette date, celle

7 du 28 août 1992. Cette période-là était-elle elle aussi caractérisée par

8 des opérations de combat intensives qui étaient incessantes ?

9 M. Pilica (interprétation). - Effectivement.

10 Mme Residovic (interprétation). - Je crois que nous n'avons plus

11 besoin de ce document.

12 (Le greffier s'exécute.)

13 Le groupe tactique n 1, dont vous étiez le chef d’état-major,

14 avait-il pouvoir de commandement pour approuver ou interdire la visite

15 d'organisations internationales dans des installations militaires ?

16 M. Pilica (interprétation). - Non.

17 Mme Residovic (interprétation). - Et qui disposait de ce pouvoir

18 habilitant à interdire ou accepter de telles visites ?

19 M. Pilica (interprétation). - Je sais que c'était l'état-major

20 principal ou le commandement suprême des forces armées qui avait ce

21 pouvoir.

22 Mme Residovic (interprétation). - Question sous forme

23 d'hypothèse à votre intention, imaginons que vous, chef d'état-major d'un

24 groupe tactique, vous receviez la demande d'une organisation

25 internationale qui voudrait qu'une visite de ce genre soit organisée,

Page 12461

1 seriez-vous en mesure d'émettre une telle autorisation ou pourriez-vous

2 réagir différemment ?

3 M. Pilica (interprétation). - Nous n'aurions en aucun cas eu

4 l'autorisation ou l'autorité nécessaire pour émettre une telle

5 autorisation. C'est seulement le commandant du groupe tactique qui est

6 habilité à le faire.

7 Mme Residovic (interprétation). - Mais vous personnellement,

8 pourriez-vous essayer de négocier avec le commandement suprême pour

9 l'obtention d'une telle autorisation ?

10 M. Pilica (interprétation). - Oui, nous aurions pu le faire,

11 mais en tenant compte du temps disponible et de la situation dans laquelle

12 nous nous trouvions.

13 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous des renseignements

14 quelconques en ce qui concerne la prison de Konjic ?

15 M. Pilica (interprétation). - Non, pas du tout. Manifestement

16 pas pour la période concernée.

17 Mme Residovic (interprétation). - Auriez-vous jamais entendu

18 dire que M. Delalic avait un lien quelconque avec cette prison ? Auriez-

19 vous entendu dire, auriez-vous vu qu'il aurait reçu un ordre lui donnant

20 tout pouvoir en ce qui concerne une prison quelconque et en particulier en

21 ce qui concerne Celebici ?

22 M. Pilica (interprétation). - Non, jamais ce ne fut le cas.

23 Cette question ne relevait pas des compétences du groupe tactique 1, si ce

24 n'est pour la question de la négociation dont nous avons parlé il y a un

25 instant et question qui s'est posée à l'une ou l'autre reprise, mais cela

Page 12462

1 ne se faisait pas.

2 Mme Residovic (interprétation). - Vous parlez de médiation, de

3 négociation, vous avez parlé de cela à l'encontre du document du 24 août,

4 n'est-ce pas ?

5 M. Pilica (interprétation). - Oui.

6 Mme Residovic (interprétation). - Y avait-il d'autres documents

7 relatifs à la prison dans les dossiers du commandement ?

8 M. Pilica (interprétation). - Non.

9 Mme Residovic (interprétation). - Je voudrais vous reposer la

10 question : le commandant du groupe tactique 1, pendant le temps où vous

11 étiez chef d'état-major, aurait-il nommé au poste de garde de la prison de

12 Celebici une quelconque personne ?

13 M. Pilica (interprétation). - Non, il n'avait pas compétence

14 pour ce faire et il ne l’a pas fait.

15 Mme Residovic (interprétation). - En vous fondant sur vos

16 connaissances personnelles, Colonel, pouvez-vous nous dire si le

17 commandant du groupe tactique 1, qu'il s'agisse de M. Polutak ou de

18 M. Delalic, a jamais nommé M. Zdravko Mucic au poste de commandant de la

19 prison de Celebici ?

20 M. Pilica (interprétation). - Ni M. Polutak ni M. Delalic n'ont

21 jamais nommé M. Mucic au poste de commandant de la prison de Celebici.

22 Mme Residovic (interprétation). - Lorsque vous étiez chef de

23 l'état-major, le commandant de cette prison ou de toute autre prison se

24 trouvant dans la région dans laquelle

25 vous étiez opérationnel était-il dans l’obligation de faire rapport de ce

Page 12463

1 qui se passait dans la prison à M. Zejnil Delalic en tant que commandant

2 du groupe tactique 1. Avez-vous jamais vu un tel rapport écrit, un

3 document quelconque qui aurait été déposé dans les archives de votre

4 commandement ?

5 M. Pilica (interprétation). - Non. Le commandant de la prison

6 n'était pas dans l'obligation de faire cela et jamais, je n'ai vu un

7 rapport de la nature de celui que vous décrivez.

8 Mme Residovic (interprétation). - Les organisations

9 internationales étaient-elles dans l’obligation de faire un rapport

10 relatif à leur visite dans telle ou telle prison et, le cas échéant, est-

11 ce que le groupe tactique 1 a jamais reçu un rapport de ce type émanant

12 d’une organisation internationale quelconque ?

13 M. Pilica (interprétation). - Non, jamais nous n'avons reçu un

14 rapport de ce type.

15 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez été chef de l'état-

16 major du 12 mai au 10 octobre ; pendant cette période, le commandant du

17 groupe tactique 1, qu’il s'agisse de M. Polutak ou de M. Delalic, était-il

18 autorisé à nommer des membres de la commission d'enquête militaire qui a

19 mené un certain nombre d’interrogatoires de prisonniers ?

20 M. Pilica (interprétation). - Non, ils n’étaient pas compétents

21 en la matière et ils n'ont jamais fait une telle chose.

22 Mme Residovic (interprétation). - Le commandant du groupe

23 tactique 1 était-il autorisé à prendre des sanctions disciplinaires contre

24 toute personne ayant commis des actes illégaux ou ayant refusé de se

25 conformer à certains ordres dans le secteur de la municipalité de Konjic ?

Page 12464

1 M. Pilica (interprétation). - Les sanctions disciplinaires,

2 comme nous les appelons, n'étaient pas du ressort du commandant du groupe

3 tactique 1, et jamais, nous n'avons pris de telles mesures.

4 Mme Residovic (interprétation). - Savez-vous si M. Delalic ou

5 M. Polutak, en tant

6 que commandants du groupe tactique 1, avaient des pouvoirs quelconques

7 vis-à-vis de la prison de Celibici, pouvoirs dont je n'aurais pas parlé

8 dans une des questions que je vous ai déjà posées ? Avaient-ils des

9 compétences quelconques vis-à-vis de la prison, compétences qui faisaient

10 partie des tâches qui leur auraient été confiées de façon générale ?

11 M. Pilica (interprétation). - Non, ils n'avaient aucun lien avec

12 la prison de Celibici et aucune compétence vis-à-vis de cette prison.

13 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez directement pris

14 part aux opérations de combat dans le cadre de l'opération JUG ; vous

15 souvenez-vous si le groupe tactique 1, au cours de cette opération, avait

16 sous ses ordres des unités qui venaient de Konjic ?

17 M. Pilica (interprétation). - Vous voulez dire qui venaient des

18 états-majors municipaux de la Défense territoriale de Konjic ou parlez-

19 vous d'autres unités ?

20 Mme Residovic (interprétation). - Vous souvenez-vous si, dans le

21 cadre de l'opération JUG qui a été menée dans le secteur d'Ormanj et

22 d'autres villages, et au sein de laquelle vous avez participé, vous aviez

23 sous vos ordres des unités de combat détachées de l'état-major municipal

24 de Konjic ?

25 M. Pilica (interprétation). - Non, pas une.

Page 12465

1 Mme Residovic (interprétation). - Savez-vous, Colonel, si ces

2 unités ont pris une part quelconque à l'opération JUG, et le cas échéant,

3 savez-vous dans quels secteurs elles ont été déployées ?

4 M. Pilica (interprétation). - Oui, ces unités ont participé à

5 l'opération JUG, mais elles étaient déployées dans le secteur de Trnovo et

6 sur la ligne de front de Trnovo, vers Krupac et, au-delà, vers Sarajevo.

7 Mme Residovic (interprétation). - A un moment quelconque, un

8 garde ou un membre du personnel de la prison de Celibici a-t-il été placé

9 sous les ordres du groupe tactique 1 pendant la période au cours de

10 laquelle vous étiez chef de l'état-major dudit groupe

11 tactique ?

12 M. Pilica (interprétation). - Non, jamais.

13 Mme Residovic (interprétation). - Savez-vous si l'un quelconque

14 des soldats qui étaient placés sous vos ordres dans le cadre de certaines

15 opérations s'est rendu dans la prison de Celibici et y a commis un crime ?

16 M. Pilica (interprétation). - Non, il n'y avait aucune raison

17 pour que des soldats placés sous mes ordres se rendent sur place, cela ne

18 s'est jamais produit.

19 Mme Residovic (interprétation). - Lorsque Zejnil Delalic

20 commandait le groupe tactique 1, est-ce que l'un quelconque de vos soldats

21 a commis un crime dans un autre secteur ? Savez-vous quoi que ce soit à ce

22 sujet ?

23 M. Pilica (interprétation). - Pendant toute la période de temps

24 pendant laquelle nous avons commandé ces unités et ces groupes, il n'y a

25 eu aucun incident de ce genre.

Page 12466

1 Mme Residovic (interprétation). - Merci beaucoup, Colonel. Je

2 n'ai plus de questions à poser au témoin, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation). - Des conseils de la défense

4 des autres accusés souhaitent-ils procéder au contre-interrogatoire du

5 témoin ?

6 M. Olujic (interprétation). - Non, Monsieur le Président, nous

7 n'avons pas de question à poser.

8 M. Karabdic (interprétation). - Monsieur le Président, nous

9 n’avons pas non plus de question à poser à ce témoin.

10 Mme McMurrey (interprétation). - Les conseils de la défense de

11 M. Esad Landzo n'ont pas de question à poser non plus.

12 M. le Président (interprétation). - Je me tourne donc vers

13 l’accusation qui souhaitera sans doute procéder à un contre-

14 interrogatoire.

15 Mme McHenry (interprétation). - Bonjour, Madame et Messieurs

16 les Juges.

17 Effectivement, nous avons plusieurs questions à poser.

18 M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.

19 Mme McHenry (interprétation). - Bonjour, Monsieur. Je m'appelle

20 Teresa McHenry, je représente ici l’accusation et, en son nom, je vais

21 vous poser un certain nombre de questions. Ayez l'obligeance d'écouter

22 avec attention les questions que je vais vous poser, si vous ne les

23 comprenez pas, je les répéterai ou je les reformulerai.

24 Je vous avertis également que nombre de questions que je vais

25 vous poser ne demandent pour réponse qu'un "oui" un qu'un "non" et ne vous

Page 12467

1 sentez pas obligé de répéter des choses que vous avez déjà dites dans le

2 cadre de l’interrogatoire principal.

3 Si vous pouvez répondre par un oui ou par un non, n’hésitez pas

4 à le faire parce que, ainsi, nous en aurons terminé beaucoup plus vite.

5 M. Jan (interprétation). - Colonel, s'il vous plaît, ne hochez

6 pas la tête, cela ne peut pas être consigné dans le compte rendu, répondez

7 clairement par un oui ou par un non.

8 M. Pilica (interprétation). - Je vous prie de m'excuser, j’ai

9 bien compris ce qu’a dit Mme McHenry.

10 Mme McHenry (interprétation). - Colonel, lorsque vous étiez chef

11 de l'état-major et lorsque c'est M. Delalic qui commandait le groupe

12 tactique 1, quels étaient les autres membres qui composaient l'état-major

13 de ce groupe ?

14 M. Pilica (interprétation). - Les autres membres de l'état-major

15 étaient les suivants : il y avait Mustafa Gagula et Hiba Turkovic.

16 Mme McHenry (interprétation). - Quel était le poste occupé par

17 M. Turkovic ?

18 M. Pilica (interprétation). - Mademoiselle Turkovic était

19 dactylo. Ensuite, il y avait Amir Kazazic qui était responsable du service

20 administratif. Quant à Mustafa Gagula, il était commandant-adjoint chargé

21 de la logistique. Et puis M. Turcinovic, que nous appelions Zeka, a, lui

22 aussi, pendant une brève période de temps, travaillé au sein de l'état-

23 major. Il y avait également Sead Rekic. Un peu plus tard, M. Selimovic a

24 pris la place de M. Turcinovic. Je ne me rappelle plus le prénom de

25 M. Selimovic. Cela me reviendra peut-être.

Page 12468

1 Tels étaient les membres de l'état-major. Et puis il y avait

2 également M. Salko Karic qui appartenait à l'état-major municipal de

3 Hadzici et M. Amid Selimovic... En fait, voilà, Amid est le prénom de

4 M. Selimovic dont j’ai parlé tout à l’heure. Toutes ces personnes

5 constituaient le commandement du groupe tactique 1, au moment du transfert

6 de compétences entre M. Polutak et M. Delalic.

7 Mme McHenry (interprétation). - A l'époque pendant laquelle

8 M. Delalic commandait le groupe tactique 1, toutes ces personnes sont-

9 elles restées membres de l'état-major du commandement ?

10 M. Pilica (interprétation). - Non, pas toutes. Elles ne sont pas

11 toutes restées jusqu'à la fin.

12 Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous nous préciser

13 quelles sont les personnes qui sont parties et quelles sont celles qui

14 sont restées ? Pouvez-vous me dire lesquelles étaient membres de l'état-

15 major outre celles dont vous avez déjà parlé ?

16 Je voudrais parler de la période pendant laquelle c'était

17 M. Delalic qui était commandant.

18 M. le Président (interprétation). - Si vous avez une question

19 précise à l'esprit, posez-lui la question et si vous faites référence à

20 une personne en particulier, citez-la.

21 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, vous rappelez-vous les

22 personnes qui constituaient l'état-major de commandement pendant toute la

23 période de temps où M. Delalic était commandant du groupe tactique ?

24 M. Pilica (interprétation). - J’ai déjà cité un nombre de

25 personnes. Je l’ai déjà fait. Pendant l'opération JUG, M. Selimovic a été

Page 12469

1 transféré. Il est parti pour occuper un groupe dans le groupe tactique 2.

2 Si je m'en souviens bien, pendant une brève période de temps, notre

3 dactylo a, elle aussi, été remplacée par une jeune femme appelée

4 Habiba Veladzic. Je ne crois pas que d'autres changements soient

5 intervenus au sein de l'état-major.

6 J'ai déjà précisé que M. Zeka était parti et qu'il avait été

7 remplacé par M. Selimovic.

8 Mme McHenry (interprétation). - Dans le cadre de

9 l’interrogatoire principal, vous avez parlé de M. Irfan. Quel était son

10 poste exactement ?

11 M. Pilica (interprétation). - Irfan était chauffeur du

12 commandant de M. Delalic et il était également coursier lorsque c'était

13 nécessaire.

14 Mme Mc Henry (interprétation). - Quel est son nom de famille ?

15 Peut-être ne le savez-vous pas. Ce n’est pas grave.

16 M. Pilica (interprétation). - Oui, je ne suis pas certain de

17 savoir comment il s’appelait.

18 Mme Mc Henry (interprétation). - Et M. Sultanic ou M. Rizvanovic

19 étaient-ils aussi membres de l'état-major et auraient-ils pris part à des

20 missions de communication ? Auraient-ils participé au transfert de

21 certains éléments d’information ?

22 M. Pilica (interprétation). - Rizvanovic est venu travailler

23 avec nous pendant une certaine période de temps. Mais à mes yeux, il ne

24 faisait pas partie de notre commandement.

25 Mme McHenry (interprétation). - Je vois. Donc il y avait parmi

Page 12470

1 vous des personnes qui travaillaient pour le commandement, sans pour

2 autant en faire officiellement partie ? C’est bien cela ?

3 M. Pilica (interprétation). - Oui, exactement, il y a eu

4 certains cas isolés.

5 Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie. Si je vous ai

6 bien compris, M. Delalic a été nommé à son poste le 27 juillet ; il a pris

7 ses fonctions le 30 juillet et ce n'est que le 8 août que vous avez vu

8 l'ordre écrit qui le nommait à ce poste ? Vous ai-je bien compris ?

9 M. Pilica (interprétation). - C’est parfaitement exact. J’ai

10 également précisé que le 27 juillet, j'avais entendu dire qu'il avait été

11 nommé à son poste. Mais à cette date, je n'ai pas vu le document écrit. Ce

12 document, comme vous l'avez dit, je ne l'ai vu que le 8 août.

13 Mme McHenry (interprétation). - Bien sûr, lorsque M. Delalic est

14 arrivé le 30 juillet, vous avez immédiatement reconnu son autorité, sans

15 exiger de preuves écrites de sa nomination à son poste, parce que c'était

16 la guerre et parce que c'était une situation d'urgence. Ai-je bien décrit

17 la situation ?

18 M. Pilica (interprétation). - Je me suis conformé aux ordres de

19 mon commandant de l'époque, M. Mustafa Polutak. Dès lors que M. Polutak

20 dit que M. Delalic a été nommé à tel ou tel poste, eh bien oui, je

21 considère M. Delalic comme mon commandant.

22 Mme McHenry (interprétation). - Je vais demander que la

23 pièce D 146 soit passée au témoin.

24 Monsieur, s’agit-il bien là du document que vous avez vu

25 le 8 août ?

Page 12471

1 M. Pilica (interprétation). - C’est effectivement le document

2 que j'ai vu le 8 août.

3 Mme McHenry (interprétation). - Etes-vous certain du fait que

4 c'est le 8 que vous avez vu ce document ? Ce ne serait pas plutôt quelques

5 jours plus tard ?

6 M. Pilica (interprétation). - Non, j’ai vu ce document

7 le 8 août.

8 Mme McHenry (interprétation). - Bien. Dans la version serbo-

9 croate que vous avez sous les yeux, on ne voit pas la signature du

10 Président Alija Izetbegovic, n’est-ce pas, mais le document que vous avez

11 vu le 8 août portait-il la signature du Président ?

12 M. Pilica (interprétation). - Oui, absolument.

13 Mme McHenry (interprétation). - Au vu des problèmes de

14 communication qui se posaient, notamment entre Sarajevo et les postes qui

15 se trouvaient sur le terrain, n'est-ce pas étrange de penser que, le jour

16 même où le Président appose sa signature sur un document, vous recevez ce

17 même document sur le terrain ?

18 M. Pilica (interprétation). - Si vous avez prêté une oreille

19 attentive à ce que j'ai dit précédemment, sur les problèmes de

20 communication qui se posaient, vous vous rappellerez que j'ai précisé que

21 dans certaines situations les documents nous parvenaient immédiatement.

22 Dans d'autres situations, il leur fallait un peu plus de temps pour nous

23 parvenir. Si c'est ce document-ci qui vous intéresse particulièrement, je

24 peux vous dire que nous l'avons reçu par fax sur le mon Igman dans l'hôtel

25 Borik.

Page 12472

1 C'est la raison pour laquelle j'ai pu immédiatement consulter ce

2 document, le jour même de son émission. J'ai également appris par voie de

3 radio que M. Delalic avait été nommé commandant. Il y avait à l'époque

4 également cette rumeur qui circulait selon laquelle un certain document

5 nommait un commandant à tel ou tel poste de commandement de formation.

6 Bien sûr, il s'agissait d'une rumeur que l'on était en droit de

7 remettre en question. Donc, j'ai absolument insisté sur le fait que nous

8 devions recevoir un ordre très précis. C'était la seule façon de procéder

9 si l'on souhaitait agir de façon responsable.

10 Mme McHenry (interprétation). - Je vais vous demander un peu

11 plus de précisions, Monsieur. Vous avez déclaré précédemment que

12 M. Polutak vous avait dit que M. Delalic allait le remplacer en tant que

13 commandant et que vous l'aviez cru sur parole, sans rien demander de plus.

14 Pourriez-vous nous expliquer maintenant pourquoi, lorsque vous

15 avez entendu parler de cet ordre relatif à toutes les formations, vous

16 avez demandé à ce que des éclaircissements et des précisions soient

17 apportés sur ce point ? Avez-vous personnellement insisté sur le fait que

18 vous vouliez obtenir des précisions sur cet ordre ?

19 M. Pilica (interprétation). - No, ce n'est pas moi qui suis

20 intervenu. Toutes mes informations me parvenaient par le biais du

21 commandant, de M. Polutak. La situation que j'ai décrite tout à l'heure ne

22 s'est pas présentée lorsque, moi, j'étais présent.

23 Mme McHenry (interprétation). - Alors, qui vous a dit, ou qui

24 vous a parlé de cet

25 ordre relatif à toutes les formations, à toutes les unités ? Cet ordre

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1 dont vous venez de parler ?

2 M. Pilica (interprétation). - C'est le commandant Polutak qui me

3 l'a dit.

4 Mme McHenry (interprétation). - Entendu. C'est le 30 juillet que

5 M. Polutak vous a fait part de ces informations ?

6 M. Pilica (interprétation). - Excusez-moi, je ne comprends pas

7 la question.

8 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez déclaré que c'était

9 M. Polutak qui vous avait dit que M. Delalic avait été nommé chef de

10 toutes les formations. Ma question est la suivante : quand M. Polutak vous

11 a-t-il fait part de cette nouvelle ?

12 M. Pilica (interprétation). - Il ne s'agissait pas de toutes les

13 formations mais de toutes les forces armées, de toutes les forces. On ne

14 parle pas ici du groupe tactique 1, en l'occurrence. La première fois que

15 j'ai entendu parler de cela, ce devait être aux alentours du 27 juillet,

16 comme je l'ai déjà dit. C'est à cette époque-là qu'on entendait ces

17 informations circuler.

18 Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous si M. Polutak a vu un

19 exemplaire de l'ordre de nomination de M. Delalic, ou savez vous comment

20 M. Polutak a reçu ces informations ?

21 M. Pilica (interprétation). - Il a été nommé, il a vu cet ordre

22 personnellement le 8 août.

23 Mme McHenry (interprétation). - Veuillez m'excuser, Monsieur, je

24 crois que vous n'avez pas saisi ma question. Elle était comme suit :

25 lorsque, aux alentours du 27 juillet, M. Polutak vous a dit que M. Delalic

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1 a été nommé à la tête de toutes les forces armées, savez-vous comment

2 M. Polutak avait reçu cette information ? Sauriez-vous par hasard si

3 M. Polutak a vu cet ordre de nomination daté du 27 juillet ?

4 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas.

5 M. le Président (interprétation). - Je crois que le compte rendu

6 indique que M. Polutak a vu cet ordre de ses propres yeux. C'est la

7 réponse que le témoin a apportée à votre question précédente.

8 Mme McHenry (interprétation). - Tout de même, je vais demander

9 un éclaircissement. Monsieur, lorsque vous dites que M. Polutak a vu cet

10 ordre de ses propres yeux, faites-vous référence au document qui a été

11 délivré le 27 juillet ou faites-vous référence à celui qui date

12 du 8 août ?

13 M. Pilica (interprétation). - Je parle du document daté

14 du 8 août.

15 Mme McHenry (interprétation). - Parlons précisément de ce

16 document du 8 août. Comment êtes-vous en mesure de nous affirmer que

17 M. Polutak a vu ce document ? Etait-il toujours présent au quartier

18 général du groupe tactique 1 au moment où l'ordre est arrivé ?

19 M. Pilica (interprétation). - Oui, absolument.

20 Mme McHenry (interprétation). - Donc, à une période de temps

21 donnée, MM. Polutak et Delalic travaillaient parallèlement au quartier

22 général du groupe tactique 1. C'est exact ?

23 M. Jan (interprétation). - En tant que commandant ?

24 Mme McHenry (interprétation). - Non, pas précisément, mais ils

25 étaient présents, sur place, au même moment.

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1 Entre le 30 juillet et le 8 août, Colonel, M. Polutak est-il

2 resté sur place, dans le quartier général du groupe tactique 1 ?

3 Remplissait-il pendant cette période une fonction quelconque ?

4 M. le Président (interprétation). - Voulez-vous dire qu'ils

5 étaient toujours membres du groupe tactique 1 ? Ce n'est pas clair.

6 Mme McHenry (interprétation). - Je vais reformuler ma question.

7 Etaient-ils présents au quartier général du groupe tactique 1 entre le

8 30 juillet, date à laquelle M. Delalic a

9 pris ses fonctions, et le 8 août ?

10 M. Pilica (interprétation). - J'ai déjà répondu à la question.

11 Mme McHenry (interprétation). - Alors, élaborez un peu, s'il

12 vous plaît Est-il resté sur place tout le temps sans interruption ? Est-

13 ce qu’il était là de façon sporadique ? Donnez-nous plus de détails parce

14 que cela me permettra de mieux comprendre la situation et surtout, je

15 saurai la fréquence de la présence de M. Polutak au quartier général.

16 M. Pilica (interprétation). - Je vais répéter une fois de plus

17 ce que j'ai dit : M. Polutak a confié ses responsabilités à M. Delalic le

18 30 juillet 1992.

19 M. Jan (interprétation). - Mais par la suite, que faisait-il ?

20 M. Polutak a confié ses fonctions à M. Delalic le 30 juillet, mais

21 ensuite, qu'a-t-il fait ? Est-il resté sur place ? Est-il resté au

22 quartier général et que faisait-il, au cours de cette période ? C'est cela

23 que veut savoir le représentant de l'accusation.

24 M. Pilica (interprétation). - Oui, c'est bien ce que j'ai

25 compris. Après cette passation de pouvoirs, les deux commandants se sont

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1 séparés ; M. Polutak est parti de son côté et M. Delalic est resté.

2 Mme McHenry (interprétation). - Quelles étaient les fonctions de

3 M. Polutak après le 30 juillet ? Puisqu’apparemment, il occupait des

4 fonctions qui exigeaient qu'il soit présent au quartier général du groupe

5 tactique 1 ?

6 Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

7 il me semble que l'on pousse le témoin à donner certaines réponses ; ce

8 n'est pas la bonne façon de procéder.

9 M. le Président (interprétation). - Je crois comprendre la

10 situation : il y a eu passation de pouvoirs le 30 juillet, il était

11 toujours présent le 8 août lorsque la discussion a surgi, relative à la

12 nomination de M. Delalic ; comment en est-on arrivé à cette situation ?

13 Voilà ce que veut savoir Mme McHenry, Colonel. Pouvez-vous répondre ?

14 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez bien compris la

15 question que je vous

16 ai posée, Colonel ?

17 M. Pilica (interprétation). - Oui, je comprends bien la

18 question, c'est vous qui ne comprenez pas, je crois, et je m'en excuse.

19 Comprenez bien : c'était la guerre, le commandant Delalic s'est

20 vu confier le commandement du groupe tactique 1 ; Polutak, lui, a dû aller

21 prendre un poste dans un autre secteur, mais quand on se trouve sur le

22 front, on ne peut pas attendre l'arrivée d'un bout de papier pour agir, le

23 document arrive lorsque la situation le permet.

24 Nous, nous essayons de nous adapter à la situation et nous

25 essayons de résoudre les problèmes au fur et à mesure qu'ils surgissent.

Page 12477

1 Je ne sais pas, j'ai l'impression que ma réponse vous pose

2 problème.

3 M. le Président (interprétation). - Nous allons surprendre

4 l’audience, nous nous retrouverons à 14 heures 30.

5 (Suspendue à 13 h, la séance est reprise à 14 h 35.)

6 M. Olujic (interprétation). - Puis-je m'adresser à vous,

7 Monsieur le Président ? Des difficultés ont surgi en ce qui concerne les

8 témoins qui seront cités à la barre. Mon confrère va vous soumettre un

9 document qui pourrait être une amorce de solution au problème que nous

10 rencontrons.

11 Nous ne sommes pas encore sûrs d'être en mesure d'accomplir la

12 tâche que vous nous avez confiée. Pourrons-nous appeler tous ces témoins ?

13 Je ne le sais pas encore, mais nous sommes de bonne foi et vous pouvez

14 vous attendre sous peu à ce que ce document vous soit remis par le

15 truchement du greffe.

16 M. le Président (interprétation). - Ce sont les premières

17 tentatives que vous entreprenez pour contacter la section des victimes et

18 des témoins en vue de l'obtention de vos témoins ? Est-ce bien cela ?

19 Avez-vous compris ma remarque, Maître Olujic ? Cette tentative

20 d'aujourd’hui constitue-t-elle votre première tentative en vue d'obtenir

21 l'aide de la section des

22 victimes et des témoins en ce qui concerne vos témoins ?

23 M. Olujic (interprétation). - Oui, pour ce qui est des contacts

24 avec cette section, mais nous avons été très actifs sur le terrain afin

25 d'organiser un programme pour tous ces témoins. Nous sommes en effet

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1 convaincus qu'il serait inutile d'essayer de constituer une liste de

2 témoins qui, en toute probabilité, ne seraient pas cités dans le temps qui

3 est prévu pour cette comparution des témoins.

4 M. le Président (interprétation). - Vous savez que nous en

5 sommes à la dernière phase pour ce qui est des témoins à décharge du

6 premier accusé. Et puis c’est votre tour, vous êtes le représentant du

7 deuxième accusé et vous saviez que vous deviez assurer la relève une fois

8 que Mme Residovic aurait terminé la présentation de ses témoins.

9 En dépit de tout cela, vous n'avez fait aucun effort jusqu'à ce

10 jour pour trouver une solution. Il n'incombe pas à la Chambre de faire

11 votre travail, de vous dire comment organiser votre défense.

12 Cela est un problème qui concerne surtout le conseil de la

13 défense. On aurait pu s'attendre à ce qu'aujourd'hui vous ayez déjà

14 organisé votre défense, puisque la présentation des témoins du premier

15 accusé progresse assez vite. Maintenant, vous nous dites que vous essayez

16 de donner les coordonnées de vos témoins. Cela paraît un peu maladroit.

17 M. Olujic (interprétation). - Si vous me le permettez, je

18 relèverai que nous avons ici une jonction d'instances, plusieurs

19 coaccusés.

20 Notre défense se fonde également sur les témoins qui

21 comparaissent pour la défense du premier accusé qui auraient peut-être une

22 incidence sur notre défense. Nous ne savons pas combien de témoins nous

23 devrons appeler à la barre. Le premier accusé n'a pas terminé de présenter

24 ses témoins à décharge et notre stratégie sera adaptée en conséquence de

25 ces premières présentations. C'est toujours ce qui se présente comme

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1 problème lorsqu'il y a plusieurs coaccusés.

2 M. le Président (interprétation). - Je ne vais pas répéter la

3 teneur de notre première conférence de mise en état, nous l'avons tenue

4 avant le début de la présentation des moyens à décharge pour que vous

5 n'ayez pas ce genre de problème.

6 Il est dans l'intérêt des accusés eux-mêmes que vous sachiez

7 comment organiser cette défense. Et en lieu et place de cela, il y a eu

8 plusieurs tentatives ou plusieurs critiques dissimulées ou pas qui ont été

9 manifestées devant nos efforts consentis pour essayer de vous aider.

10 En tout état de cause, je pense que nous devons poursuivre nos

11 débats et, une fois que le premier accusé aura terminé la présentation de

12 ces témoins, vous devrez prendre la relève.

13 J'appelle maintenant le témoin dans le prétoire. Vous pouvez

14 vous asseoir, Monsieur.

15 M. Pilica (interprétation). - Merci.

16 Mme le Greffier (interprétation) - Je vous rappelle, Monsieur,

17 que vous êtes toujours sous serment.

18 M. le Président (interprétation). - Poursuivez, Maître McHenry.

19 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Témoin, bonjour.

20 Juste avant la pause du déjeuner, nous parlions des renseignements que

21 vous auriez à propos de divers ordres portant désignation donnée à

22 M. Delalic. J'aimerais poser quelques questions qui, espérons-le, tireront

23 les choses au clair. Vous ai-je bien compris ? Entre le 30 juillet et le

24 8 août, M. Polutak était toujours présent au quartier général du groupe

25 tactique n° 1. Est-ce bien exact ?

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1 M. Pilica (interprétation). - Au poste de commandement ?

2 Mme McHenry (interprétation). - Non, dans quelque fonction que

3 ce soit.

4 M. Pilica (interprétation). - Non, il n'était pas présent.

5 Mme McHenry (interprétation). - Après le 30 juillet, M. Polutak

6 n'était

7 physiquement plus présent au quartier général du groupe tactique n° 1.

8 Est-ce bien exact ?

9 M. Pilica (interprétation). - Non.

10 Mme McHenry (interprétation). - Qu'est-ce que vous voulez dire

11 par non ?

12 M. Jan (interprétation). - Peut-être terminait-il ses activités.

13 Ne faites-vous pas une confusion entre les fonctions et le commandement ?

14 Il se peut qu'il n'exerçât plus de fonctions, mais qu'il fût présent en

15 chair et en os pour expédier les affaires courantes.

16 Mme McHenry (interprétation). - Je repose ma question : après le

17 30 juillet, est-ce que M. Polutak était présent, quelle que soit sa

18 qualité à l'époque ? Etait-il au quartier général ?

19 M. le Président (interprétation). - Il expédiait peut-être les

20 affaires courantes pour lui-même.

21 Mme McHenry (interprétation). - Est-ce qu'il était présent à

22 titre personnel, privé ?

23 M. Pilica (interprétation). - Non. Il n'était pas présent au

24 poste de commandement du groupe tactique.

25 M. Jan (interprétation). - Nous ne parlons pas de poste de

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1 commandement. On demande s'il était présent en chair et en os à un autre

2 titre, là où se trouvait le quartier général, pas le poste de

3 commandement. Peut-être était-il là pour des raisons privées. Me McHenry

4 veut tirer cette question au clair. Elle veut savoir si, après le

5 30 juillet, il était présent quelque part.

6 M. Pilica (interprétation). - Moi, je ne l'ai pas vu.

7 Mme McHenry (interprétation). - Je vais peut-être devoir revenir

8 sur quelques questions parce que, manifestement, à mon avis, il y a un

9 certain malentendu entre nous, ou bien vos souvenirs ne sont pas les

10 miens. En tout cas, voici ma question.

11 Vous avez dit qu'après le 30 juillet vous aviez recueilli

12 certaines informations de M. Polutak à propos du pouvoir que détenait

13 M. Delalic. Est-ce exact ?

14 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas à quelle

15 information vous pensez après le

16 30 juillet. Votre question ne peut-elle pas être plus précise ?

17 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez déclaré qu'il y avait

18 une certaine controverse, ou un litige quant à la portée de l'autorité de

19 ce commandement qu'aurait eu M. Delalic après le 30 juillet. Est-ce bien

20 exact ?

21 Mme Residovic (interprétation). - Objection. Le témoin a parlé

22 du 27.

23 M. le Président (interprétation). - Si je devine bien ce que

24 vous voulez obtenir, vous voulez voir ce qu'il en est de cette disparité

25 entre le fait que M. Delalic serait le commandant de toutes les forces et

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1 la correction apportée à cet ordre ? C'est bien cela que vous voulez ?

2 Mme McHenry (interprétation). - Oui, je veux savoir ce que ce

3 témoin peut nous expliquer. Comment avez-vous appris que M. Delalic avait

4 reçu une autorité de commandement à l'encontre de toutes les unités ? Qui

5 vous en a parlé ? Et quand cet entretien aurait-il eu lieu ?

6 M. Pilica (interprétation). - Vers le 27 juillet, et c'est le

7 commandant Polutak qui en a parlé.

8 Mme McHenry (interprétation). - Si je vous ai bien compris, vous

9 avez déclaré que, ultérieurement, après cette date, il y a eu certaines

10 discussions et il fut décidé qu'il fallait prendre contact avec le

11 commandement suprême à propos de cette question. Vous ai-je toujours bien

12 compris ?

13 M. Pilica (interprétation). - Ce n'est pas ce que je voulais, je

14 n'avais moi-même pas le pouvoir, l'autorité nécessaire pour prendre

15 contact avec le commandement suprême.

16 Mme McHenry (interprétation). - A votre connaissance, est-ce

17 qu'une quelconque personne a pris contact avec le commandement suprême à

18 propos de cette question ?

19 M. Pilica (interprétation). - Je n'en sais rien. Mais le

20 commandant Polutak a reçu un ordre émanant du commandement suprême par

21 lequel M. Delalic, le nouveau commandant,

22 devait recevoir ses compétences.

23 Indépendamment des malentendus qui pouvaient exister à l'époque

24 et qui avaient trait à cette tournure de phrase ou à cette locution

25 "commandant de toutes les forces", au commandement dont je faisais partie,

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1 les choses n'étaient pas très claires à ce propos. Nous avons donc demandé

2 que les termes soient précisés sans aucune ambiguïté par écrit et que l'on

3 n'y parle pas de toutes les forces mais qu'il y soit déclaré de façon

4 directe que ce serait une autorité par rapport au groupe tactique n° 1,

5 car c'était là le libellé exact. J'espère que maintenant tout est tiré au

6 clair.

7 Mme McHenry (interprétation). - Malheureusement, j'ai encore

8 quelques questions à vous poser.

9 M. Pilica (interprétation). - Allez-y.

10 Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous si cet ordre du

11 27 juillet avait trait à toutes les formations ou à toutes les unités

12 armées ?

13 Mme Residovic (interprétation). - Objection. Le témoin a déjà

14 répondu à cette question avant la pause du déjeuner.

15 M. le Président (interprétation). - Et qu’a-t-il répondu à ce

16 moment-là, Maître Residovic ?

17 Mme Residovic (interprétation). - Eh bien, le transcript montre

18 bien qu'il a dit qu'il ne savait pas si M. Polutak avaient vu cet ordre ou

19 pas.

20 Mme McHenry (interprétation). - Si M. Polutak vous avait dit que

21 M. Delalic avait reçu l'autorité de commandement sur toutes les unités

22 armées, comment savez-vous que M. Polutak savait qu'une telle autorité

23 avait été déléguée à M. Delalic ?

24 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas.

25 Mme McHenry (interprétation). - Mais vous êtes certain que

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1 M. Polutak était au courant puisqu'il vous en a parlé ?

2 M. le Président (interprétation). - Voulez-vous qu'il répète

3 encore une fois ce qu'il a déjà dit ? Vous voulez qu'il le répète une fois

4 de plus ?

5 Mme McHenry (interprétation). - Etant donné qu'il y avait des

6 problèmes, j'allais peut-être répéter la question, mais j'avance.

7 Vous avez déclaré : "Nous voulions avoir certains

8 éclaircissements sur les autorités de commandement déléguées à

9 M. Delalic". J’aimerais vous demander maintenant qui était ce "nous" dont

10 vous parlez.

11 M. Pilica (interprétation). - Le commandement du groupe

12 tactique.

13 Mme McHenry (interprétation). - Vous voulez dire M. Polutak et

14 vous-même, ou entendez-vous par là tous les membres de l'état-major ?

15 Pourriez-vous être plus précis ?

16 M. Pilica (interprétation). - Il ne s'agissait pas de tous les

17 membres de l'état-major, cela concernait un peu le cercle restreint.

18 Mme McHenry (interprétation). - Et qui faisait partie de ce

19 cercle restreint ?

20 M. Pilica (interprétation). - L'adjoint, le chef d'état-major,

21 moi-même en l'occurrence, ainsi que les assistants de logistique et du

22 renseignement.

23 Mme McHenry (interprétation). - Et qui était l’assistant chargé

24 du renseignement ?

25 M. Pilica (interprétation). - Zeka, j'ai déjà parlé de lui

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1 précédemment.

2 M. Jan (interprétation). - Puis-je poser une question,

3 Maître McHenry ?

4 Mme McHenry (interprétation). - Bien sûr, Monsieur.

5 M. Jan (interprétation). - Vous étiez le chef d'état-major du

6 groupe tactique 1 au moment concerné par l'acte d'accusation ; après avoir

7 reçu cet ordre le 27 juillet, quelle mesure avez-vous prise pour assumer

8 la responsabilité de toutes les formations... le 27 juillet, page 20.

9 M. Pilica (interprétation). - Je n'ai pas reçu un tel ordre.

10 M. Jan (interprétation). - Puisqu'il était chef d'état-major,

11 c'est lui qui aurait pris tout de suite les mesures nécessaires pour

12 assurer la responsabilité de la formation puisque c'était l’homme chargé

13 de la situation.

14 Mme McHenry (interprétation). - Après avoir été informé par

15 M. Polutak que M. Delalic avait reçu l’autorité de commandement sur toutes

16 les forces armées, quelles furent les mesures prises ?

17 M. Pilica (interprétation). - MM. Polutak et Delalic ont assuré

18 la passation de pouvoirs au poste de commandement du groupe tactique n 1

19 en fonction des ordres reçus du commandement suprême ou supérieur.

20 M. Jan (interprétation). - Avez-vous pris la responsabilité de

21 toutes les formations du secteur qui sont mentionnées dans l'ordre ?

22 M. Pilica (interprétation). - Non.

23 Mme McHenry (interprétation). - Nous revenons à ce cercle

24 restreint au sein de l'état-major. Vous dites que c'est ce cercle

25 restreint de personnes qui avait demandé des éclaircissements. Vous

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1 conviendrez sans doute avec moi que, parmi les trois membres composant ce

2 cercle restreint, vous étiez la personne ayant le rang le plus élevé ;

3 d'où ma question : avez-vous par conséquent pris des mesures afin

4 d'obtenir des éclaircissements par écrit quant à l'autorité de

5 commandement dont jouissait M. Delalic ?

6 M. Jan (interprétation). - Il l'a déjà dit. Une telle mesure

7 n'était pas de son ressort.

8 Mme McHenry (interprétation). - J'ai demandé ce qu'il avait

9 fait. Qu'est-ce qui a été fait pour obtenir des éclaircissements sur cette

10 question ?

11 M. Pilica (interprétation). - Les autres membres du

12 commandement, en excluant le commandant, n'ont pas de pouvoir de décision,

13 ne peuvent pas prendre de leur propre chef des décisions ; tout ce qu'ils

14 peuvent faire, c'est analyser, encoder, enregistrer et faire des

15 propositions.

16 C'est le commandement qui alors prend des décisions, seul le

17 commandant Polutak, donc le commandant précédent, était à même de prendre

18 cette décision, ou encore le nouveau commandant, en l'occurrence

19 M. Delalic.

20 Mme McHenry (interprétation). - Une requête, une mesure

21 quelconque, a-t-elle été formulée en vue d'obtenir des éclaircissements

22 quant à l'ordre portant désignation pour M. Delalic en date du

23 27 juillet ?

24 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas.

25 Mme McHenry (interprétation). - Vous serez d'accord avec moi

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1 pour dire que vous ne savez pas que cet ordre du 8 août était une réponse

2 à cette demande d'éclaircissement quant à l'autorité de commandement de

3 M. Delalic. Est-ce exact ?

4 M. Pilica (interprétation). - Lorsque nous avons vu cet ordre,

5 tout était clair pour nous.

6 M. Jan (interprétation). - La question est un peu différente.

7 Savez-vous si M. Delalic a pris contact avec le commandement supérieur

8 pour avoir des éclaircissements sur cet ordre du 27 juillet ?

9 M. Pilica (interprétation). - Cela, je le sais.

10 Mme McHenry (interprétation). - Comment le savez-vous ?

11 M. Pilica (interprétation). - A partir de conversations. Il a

12 formulé cette demande par nos lignes de communication.

13 Mme McHenry (interprétation). - Vous étiez présent, vous avez pu

14 l'entendre faire cette demande ?

15 M. Pilica (interprétation). - Non, je n'étais pas présent à ce

16 moment-là, au moment où il avait établi la communication.

17 Mme McHenry (interprétation). - Mais M. Delalic lui-même vous a

18 dit qu'il avait demandé des éclaircissements quant à son propre pouvoir de

19 commandement. Est-ce bien

20 exact ?

21 M. Pilica (interprétation). - Ce n'étaient pas des

22 éclaircissements. Il n'y avait rien qui était en doute, les pouvoirs

23 étaient clairement établis. On n'était pas trop sûrs de ce qu'il

24 commandait. Parlait-on du groupe tactique nø 1 ou et de toutes les forces

25 armées ? Parce que s'il devait être commandant de toutes les forces, pour

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1 nous cela ne voulait rien dire. Pour un groupe tactique, cela ne

2 signifiait pas grand-chose.

3 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur Delalic en personne

4 vous a-t-il dit avoir demandé une désignation plus précise en matière de

5 commandement ?

6 M. Pilica (interprétation). - Il n'a pas demandé que l'on

7 précise la désignation de son commandement, de son poste.

8 Mme McHenry (interprétation). - Eh bien Monsieur, vous avez

9 déclaré que vous avez appris que l'ordre du 8 août a été émis en réponse à

10 des questions portant sur le pouvoir de commandement de M. Delalic. Est-ce

11 exact ?

12 M. Pilica (interprétation). - Si j'ai bien compris, la seule

13 chose qui était controversée, c'était le nom que l'on allait donner, à

14 savoir s’il allait être appelé commandant du groupe tactique 1 ou bien

15 commandant de toutes les forces.

16 M. le Président (interprétation). - Pensez-vous que vous devez

17 continuer, reposer d'autres questions là-dessus ?

18 Mme McHenry (interprétation). - Seriez-vous d'accord avec moi

19 pour dire que vous n'aviez aucune information que...

20 M. le Président (interprétation). - Essayez de lui poser une

21 autre question.

22 Mme McHenry (interprétation). - D'accord, j'avance, Monsieur le

23 Président.

24 L'ordre du 8 août, en ce qu'il ne concerne pas uniquement

25 M. Delalic mais également M. Maric... Peut-on remettre ce document au

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1 témoin ?

2 Monsieur, savez-vous ou non s'il y avait des controverses ou des

3 questions qui

4 concernaient la nomination de M. Maric ?

5 Je voudrais que l'on remette au témoin l'ordre du 8 août. Il

6 s'agit de la pièce D 146.

7 (L'huissier s'exécute.)

8 M. Jan (interprétation). - Vous devez demander au témoin s'il

9 connaissait M. Maric.

10 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, savez-vous pourquoi

11 dans le texte de ce même ordre il y avait aussi la désignation de

12 M. Maric ?

13 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas.

14 Mme McHenry (interprétation). - D'accord. Pour autant que vous

15 le sachiez, M. Delalic a-t-il vu l'ordre daté du 8 août ?

16 M. Pilica (interprétation). - Oui.

17 Mme McHenry (interprétation). - Seriez-vous d'accord avec moi

18 pour dire que, après les nominations militaires, M. Izetbegovic confirmait

19 souvent ces nominations et que par la suite elles étaient publiées dans le

20 Journal officiel ? Le saviez-vous ?

21 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas comment cela se

22 faisait pendant la guerre.

23 Mme McHenry (interprétation). - En ce qui concerne ce document,

24 vous pouvez l'examiner si vous voulez. On dit dans celui-ci que l'ordre

25 est donné suite à une proposition du ministère de la Défense du

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1 19 juillet. Savez-vous à quoi se réfère ce document du ministère de la

2 Défense du 19 juillet ?

3 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas.

4 Mme McHenry (interprétation). - On continue à consulter le même

5 document, Monsieur.

6 Nous voyons ici que ceci concerne le groupe tactique dans les

7 régions de Hadzici , Pazaric, Konjic et Jablanica. Vous nous avez dit que

8 le groupe tactique n'était pas supérieur à

9 ces états-majors municipaux, mais qu'est-ce que cela veut dire quand on

10 mentionne ces noms ? Cela veut-il dire zone de responsabilité ? Est-ce des

11 municipalités d’où viennent les unités ? Qu'est-ce que cela veut dire

12 précisément quand on parle de ces quatre municipalités ?

13 M. Pilica (interprétation). - Selon moi, c'est une manière de

14 déterminer de manière géographique un axe d'opération.

15 Mme McHenry (interprétation). - Etait-ce la zone d'opération du

16 groupe tactique 1 ?

17 M. Pilica (interprétation). - C'était un axe général sur

18 l'ensemble de la période où a agi, où a été actif le groupe tactique 1.

19 Mme McHenry (interprétation). - Mais vous seriez d’accord avec

20 moi pour constater que ceci ne décrit pas de manière exacte la zone où a

21 agi le groupe tactique n° 1 en août 1992 ?

22 M. Pilica (interprétation). - Pourriez-vous me dire, s'il vous

23 plaît, de manière plus précise, pourquoi cela ne paraît pas logique que ce

24 soit l'axe d'opération ?

25 Mme McHenry (interprétation). - Je ne vous ai pas demandé si

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1 c'était logique ou non, je vous ai demandé si au mois d'août 1992, à

2 l'époque où cet ordre a été délivré, c'est une présentation exacte de la

3 zone d'opération du groupe tactique n° 1.

4 M. Pilica (interprétation). - Ici, nous n'avons qu'une

5 indication de l'axe d'opération, Hadzici, Pazaric, Konjic et Jablanica,

6 ainsi que les zones qui sont couvertes par cet axe. Cela entend donc un

7 secteur plus large qui dépend de cet axe.

8 Mme McHenry (interprétation). - Konjic était un des axes

9 principaux de communication pour le groupe tactique n° 1 ?

10 M. Pilica (interprétation). - La communication principale, l'axe

11 de communication principale passe par Konjic, en ce qui concerne le groupe

12 tactique n° 1.

13 Mme McHenry (interprétation). - Quand vous dites "axe de

14 communication" ou

15 "ligne de communication", pouvez-vous nous préciser ce que vous entendez

16 par là ?

17 M. Pilica (interprétation). - Quand je dis "axe de

18 communication", je pense à des lignes routières ou ferroviaires.

19 Mme McHenry (interprétation). - Merci.

20 Peut-on remettre au témoin la pièce à conviction de

21 l'accusation 230 ? J'en ai terminé avec la pièce D 146.

22 (L'huissier s’exécute.)

23 Monsieur, avez-vous vu ce document au mois d'août 1992 ?

24 M. Pilica (interprétation). - Oui, j'ai vu ce document.

25 Mme McHenry (interprétation). - La version originale bosniaque

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1 porte-t-elle la signature de M. Delalic ? Pouvez-vous nous affirmer qu'il

2 s'agit ici de la signature de M. Delalic ou non ?

3 M. Pilica (interprétation). - Oui, c'est bien sa signature.

4 Mme McHenry (interprétation). - Avait-il le pouvoir d'effectuer

5 la nomination dont fait état ce document ?

6 M. Pilica (interprétation). - Il avait des pouvoirs uniquement

7 pour résoudre de manière provisoire certains problèmes, avant que la

8 nomination définitive ne parvienne et, si c'était nécessaire, pour engager

9 le plus vite possible un individu donné pour qu'il effectue des missions

10 spécifiques.

11 Dans le cas précis, il s'agit d'un dactylo qui devait à un

12 moment donné être chargé du travail de dactylo pour remplacer la personne

13 qui y était avant. Comme je l'ai dit, la personne qui a travaillé avant à

14 ce poste était Mlle Hiba.

15 Si vous me permettez, je dois dire que par la suite ce document

16 est entré en vigueur réellement après avoir été confirmé par l'instance

17 supérieure. Il n'avait donc ce pouvoir que lorsqu’il fallait résoudre de

18 manière provisoire un problème, s'il était vraiment indispensable

19 d'engager quelqu'un sur des missions de combat et qu'à ce moment précis,

20 le commandement supérieur n'était pas en mesure de délivrer un tel ordre.

21 Si vous me le permettez, même aujourd'hui vous pouvez rencontrer

22 ce genre de cas où un commandant signe une nomination provisoire. Il nomme

23 donc quelqu'un à un poste uniquement pour, si je puis dire, expédier les

24 affaires courantes, tant qu'il n'y aura pas eu nomination définitive. Même

25 en temps de paix vous avez cela, et surtout en temps de guerre.

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1 M. Jan (interprétation). - Mais un commandant doit avoir le

2 pouvoir de nommer un dactylo sans demander l'autorisation à son

3 commandement supérieur.

4 M. Pilica (interprétation). - Oui, ce serait logique, mais notre

5 commandement supérieur nommait tout le monde et c'était cela le principe ;

6 parce que vous devez tenir compte du fait que le groupe tactique est

7 constitué de manière provisoire pour effectuer des missions sur une

8 période donnée et des missions très spécifiques, qui sont définies de

9 manière très précise.

10 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, savez-vous pourquoi

11 une copie de ce document a été envoyée et au quartier général de la

12 Défense territoriale de Konjic et à la présidence de guerre ?

13 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas.

14 Mme McHenry (interprétation). - D’accord.

15 Pouvez-vous, s'il vous plaît, regarder l'en-tête de ce document,

16 voir : "République de Bosnie-Herzégovine, l'état-major principal des

17 forces armées, Sarajevo". Etait-ce l'en-tête qui figurait sur tous les

18 documents qui provenaient du groupe tactique 1 ?

19 M. Pilica (interprétation). - En principe, on y voit figurer

20 d'abord le commandement supérieur et par la suite le commandement

21 subordonné. Cet en-tête est correct si on tient compte du fait que c’est

22 la règle qui régit toute correspondance officielle. Cette règle, nous

23 l'avons héritée de l'ancienne JNA, mais je ne peux pas exclure non plus la

24 possibilité qu'il y ait des document émis en temps de guerre où l'en-tête

25 n'était pas formulé de manière aussi précise. Cela dépendait des gens qui

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1 le faisaient et nous n'avions pas suffisamment de gens vraiment formés et

2 qui pouvaient effectuer ce travail de manière vraiment très précise.

3 Mme McHenry (interprétation). - Nous allons aborder un autre

4 sujet. Lorsque vous êtes parti en octobre, qui est devenu commandant-

5 adjoint ?

6 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas.

7 Mme McHenry (interprétation). - Vous n’avez pas remis vos

8 fonctions à une personne précise ?

9 M. Pilica (interprétation). - Si, j’ai remis mes fonctions au

10 commandant Zejnil Delalic.

11 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez évoqué certains

12 problèmes qui concernaient les autorités municipales de Konjic et un

13 canon. Ceci a commencé, si j'ai bien compris, au moment où M. Delalic est

14 entré en fonction en tant que commandant du groupe tactique 1. Est-ce

15 exact ?

16 M. Pilica (interprétation). - Oui.

17 Mme McHenry (interprétation). - Le commandement suprême était au

18 courant de ces questions, n'est-ce pas ?

19 M. Pilica (interprétation). - Oui, il l'était.

20 Mme McHenry (interprétation). - Pendant que M. Delalic était

21 commandant du groupe tactique 1, et à l'époque où vous y étiez, donc entre

22 le moment où il est entré en fonction jusqu'au moment où vous êtes parti,

23 quels étaient les effectifs qui étaient subordonnés au groupe tactique 1 ?

24 M. Pilica (interprétation). - A plusieurs moments des

25 détachements ont été effectués, parce qu'il y a eu plusieurs tentatives

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1 pour lever le siège de Sarajevo. C'était

2 conforme à la mission du groupe tactique 1. Mais ce chiffre n'a jamais

3 dépassé 1 200 hommes.

4 Mme McHenry (interprétation). - Pendant que M. Delalic était

5 commandant du groupe tactique 1, quelles étaient les municipalités d'où

6 ont été détachées des unités, pour autant que vous puissiez vous en

7 souvenir ?

8 M. Pilica (interprétation). - Je vais essayer de vous le dire.

9 Les municipalités de Jablanica, Konjic, Hadzici, Kiseljak,

10 Ilidza et il y a eu un cas où une unité est venue de Prozor. C'est ce dont

11 je peux me souvenir en ce moment.

12 Mme McHenry (interprétation). - Les unités qui sont venues de

13 Konjic étaient quel type d’unité ? Je veux dire de quelle entité ? De la

14 Défense territoriale ? Du MUP ?

15 M. Pilica (interprétation). - Toutes ces unités appartenaient à

16 la Défense territoriale. Une fois, une unité de moindre importance,

17 également du HOS, a été engagée. C'était pendant l'opération JUG, et ceci

18 sur l'axe d'intervention secondaire, depuis le mont Ormanj en direction du

19 mont Ostrig et c'était à gauche par rapport à la ville de Hadzici.

20 Mme McHenry (interprétation). - Qu’est-ce que veut dire "unité

21 du HOS" quand elle n'était pas subordonnée au groupe tactique 1 ? Si elle

22 ne faisait pas partie de la Défense territoriale, à qui était-elle

23 subordonnée ?

24 M. Pilica (interprétation). - A l’époque, nous parlions des

25 forces armées de Bosnie-Herzégovine. Tel était notre désir, à nous,

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1 Musulmans de Bosnie, que ces forces-là soient effectivement constituées.

2 L'évolution est allée dans une autre direction, mais pendant une période

3 donnée au sein des forces armées, nous avions à la fois les unités du HVO,

4 les unités de la Défense territoriale et du HOS, ainsi que d'autres

5 unités.

6 Mme McHenry (interprétation). - Ma question était la suivante :

7 si les unités du HOS ne faisaient pas partie de la Défense territoriale, à

8 qui étaient-elles subordonnées avant d'être détachées au groupe

9 tactique 1 ?

10 M. Pilica (interprétation). - A vrai dire, je ne connais pas

11 très bien ces unités du

12 HOS. Mais normalement, elles devaient être subordonnées au commandement

13 suprême des forces armées de Bosnie-Herzégovine. Cependant, pour autant

14 que je sache, cela ne s'est jamais vraiment réalisé. On a tenté de le

15 faire, c'est tout.

16 Mme McHenry (interprétation). - A l'époque où M. Delalic était

17 commandant du groupe tactique 1, y a-t-il eu des unités du MUP qui lui

18 auraient été subordonnées ?

19 M. Pilica (interprétation). - Non.

20 Mme McHenry (interprétation). - Quand je dis "subordonnées à

21 lui", je pense à subordination au groupe tactique 1. Pendant que

22 M. Delalic y était, il n'y a pas eu du tout d'unités du MUP ?

23 M. Pilica (interprétation). - Il n’y en a pas eu.

24 Mme McHenry (interprétation). - Pendant que M. Delalic était

25 commandant du groupe tactique 1, y a-t-il eu une police militaire au sein

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1 du groupe tactique 1, ses propres unités ou bien des unités qui lui

2 auraient été détachées ?

3 M. Pilica (interprétation). - Non, il n’y en a pas eu.

4 Mme McHenry (interprétation). - A un moment quelconque de

5 l’existence du groupe tactique 1, y a-t-il eu des prisonniers capturés ?

6 M. le Président (interprétation). - Il ne fait aucun doute que

7 nous avons déjà entendu des réponses à toutes ces questions.

8 M. Jan (interprétation). - Vous avez posé cette question au

9 témoin précédent et il a répondu par la négative.

10 Mme McHenry (interprétation). - Je vais éclaircir ce point. A

11 l'époque où M. Delalic était commandant du groupe tactique 1, est-ce qu’un

12 seul prisonnier a été capturé pendant toute la durée de ses fonctions ?

13 M. Pilica (interprétation). - Non, jamais.

14 Mme McHenry (interprétation). - Pendant l'interrogatoire

15 principal, vous avez dit

16 que le groupe tactique 1 n'avait pas l'autorité de sanctionner les soldats

17 qui étaient sous ses ordres. Il n'y avait pas de texte disant qu'il n'y

18 avait pas ce genre de pouvoir qui est de prononcer des sanctions à

19 l'encontre de soldats subordonnés.

20 M. Pilica (interprétation). - Dans les principes généraux de

21 constitution d'organisation des groupe tactiques, il est précisé de

22 manière explicite que les pouvoirs du groupe tactique ne permettent pas de

23 sanctionner qui que ce soit, mais uniquement qu'il est possible d'agir

24 envers des individus ou des groupes qui ne respectent pas la discipline et

25 qui n’exécutent pas les ordres, qu’ils doivent être renvoyés dans leur

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1 unité de base et qu'il est possible de proposer à leur commandement de

2 prononcer des mesures disciplinaires. C'est cela que le commandement d'un

3 groupe tactique pouvait faire sur ce plan.

4 Mme McHenry (interprétation). - Etes-vous d'accord avec moi pour

5 dire que, dans les textes qui régissent l'armée de Bosnie-Herzégovine et

6 que dans les ordres du commandement suprême des forces armées bosniaque,

7 ceci n'a jamais été formulé par écrit ?

8 M. Pilica (interprétation). - On peut trouver ceci dans les

9 règles que nous respections. Il s'agit de règles et de manuel dont nous

10 avons hérités de l'ex-JNA, parce qu'à cette époque nous n'en avions pas

11 d'autres. Et c'est là qu'il est formulé en détail et de manière explicite

12 et précise quels sont ces pouvoirs.

13 Mme McHenry (interprétation). - Y a-t-il eu des circonstances

14 exceptionnelles, par exemple quand il fallait agir d'urgence ou quand

15 aucune unité n'était disponible pour sanctionner un soldat ?

16 M. Pilica (interprétation). - Non, ces cas ne se sont pas

17 présentés et vraiment, je dois dire que nous n'avions pas ce pouvoir. Nous

18 n'avions pas le droit de le faire, quelles que soient les circonstances.

19 Mais leurs commandants, notamment quand il s'agissait

20 d'opérations de combat importantes, suivaient de près la manière dont se

21 comportaient leurs unités et, le cas échéant, ils

22 nous prêtaient assistance.

23 Mme McHenry (interprétation). - Peut-on remettre au témoin la

24 pièce 145 A-5d/41 pages 815 et 816 ?

25 (L’huissier s’exécute.)

Page 12499

1 C’est un document daté du 24 août. Vous avez dit que vous étiez

2 présent au moment où M. Delalic a été en contact avec le commandement

3 suprême ; vous en souvenez-vous ?

4 M. Pilica (interprétation). - J’étais présent quand il a rédigé

5 ce document et je savais de quoi il s'agissait.

6 Mme McHenry (interprétation). - Cela veut-il dire que, pendant

7 la communication réelle entre M. Delalic et le commandement suprême, vous

8 n'étiez pas présent et que vous n'avez pas de connaissance personnelle du

9 contenu de cet entretien ?

10 M. Pilica (interprétation). - J’étais présent lorsque cette

11 communication a été établie. C'était une communication par radio, qui

12 était notre seul moyen de communication à l'époque. Je me souviens qu’il a

13 réagi de manière assez forte puisqu’il avait des choses plus urgentes à ce

14 moment à traiter et je lui ai dit : "Monsieur le Commandant, nous devons

15 aider, quelles que soient les circonstances, même si les circonstances

16 sont difficiles".

17 Mme McHenry (interprétation). - Avec qui du commandement suprême

18 est entré en contact M. Delalic ?

19 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas, je ne lui ai

20 pas posé cette question.

21 Mme McHenry (interprétation). - Donc si je comprends bien, vous

22 n'étiez pas présent pendant le début de cette conversation où les

23 personnes se sont présentées l'une à l’autre ?

24 M. Pilica (interprétation). - Si, j’étais présent à l'endroit où

25 cela se passait mais, à ce moment-là, je ne cherchais pas à savoir de qui

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1 il s'agissait. Peut-être que M. Delalic a dit de

2 qui il s'agissait, mais je n'y ai pas prêté attention.

3 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez dit que M. Delalic a

4 été chargé de transmettre certains ordres et qu'il a également, au moment

5 où il a dicté cet ordre, fait figurer d'autres choses qui lui passaient

6 par la tête.

7 M. Pilica (interprétation). - Oui, c'est cela.

8 Mme McHenry (interprétation). - Vous-même, vous l'avez entendu

9 et alors, le commandement suprême lui a demandé de transmettre quel type

10 d'ordre ?

11 Ce que je veux savoir, concrètement, c'est quelles sont les

12 choses que le commandement suprême voulait que M. Delalic transmette et

13 quelles sont les choses auxquelles pensait M. Delalic sans que le

14 commandement suprême ne le lui demande explicitement.

15 M. Pilica (interprétation). - Je ne sais pas avec qui il était

16 en contact à l'époque, mais il a simplement dit que le commandement

17 principal, le commandement suprême, qui, à l'époque, était appelé le

18 commandement principal, le chargeait de certaines choses, et il m'a

19 également dit en passant : "Je vais également écrire ceci et je vais

20 l'envoyer rapidement ; et toi, tu peux te rendre là-bas et leur apporter

21 ton aide". Il faut savoir qu'à l'époque, nous menions des opérations de

22 combat et nous nous trouvions sur un plateau, un endroit relativement

23 protégé.

24 Le poste d'observation se trouvait plus en avant de cette

25 position et un certain nombre d'officiers s’y trouvaient. Ils

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1 surveillaient l'évolution des opérations.

2 Mme McHenry (interprétation). - Vous-même, avez-vous entendu un

3 membre du commandement suprême dire quoi que ce soit à M. Delalic ? Si

4 c’est le cas, dites-moi ce qui a été dit et si vous ne le savez pas, dites

5 simplement que vous ne le savez pas.

6 Vous-même, avez-vous entendu quoi que ce soit qui aurait été dit

7 par un représentant du commandement suprême à M. Delalic en cette

8 occasion ?

9 M. Pilica (interprétation). - Dans ce paragraphe 1, ici, il

10 parle très succinctement de cela ; il dit que certaines personnes lui

11 demandent de transmettre à l'état-major municipal de Konjic des

12 déclarations des prisonniers de Celebici, déclarations écrites, mais il

13 m'a également dit à l'époque : "Je vais inclure certaines informations

14 relatives à nos opérations de combat, comme cela, je n'aurai pas à rédiger

15 un document séparé".

16 Voilà quelle était la nature de nos communications, à ce moment-

17 là. Ensuite, je suis allé voir ce que faisaient les officiers qui se

18 trouvaient au poste d’observation, notamment quelles mesures ils prenaient

19 pour l'attaque du point de vue de l'artillerie.

20 Mme McHenry (interprétation). - Vous ai-je bien compris ? Vous-

21 même, vous n’avez rien entendu de ce que le commandement suprême aurait pu

22 dire à M. Delalic ? Ce que vous nous dites, en fait, est tiré de ce que

23 M. Delalic a pu vous dire à ce propos, n'est-ce pas ?

24 M. Pilica (interprétation). - Effectivement, je n'ai rien

25 entendu, moi, personnellement, parce que c'est M. Delalic qui avait le

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1 casque du transmetteur radio et nous n'avions pas de micro ou de haut-

2 parleur qui m'aurait permis d'écouter ce qui était en train de se dire.

3 Ils lui ont parlé d'un certain nombre d'autres sujets, notamment

4 de ce qu'il fallait faire dans le cadre des opérations de combat. Ils ont

5 parlé de pertes importantes que nous avions essuyées dans la région de

6 Krupac... Pardon, pardon, je m'emballe un peu...

7 Mme McHenry (interprétation). - Oui, cela suffit, merci.

8 Dans cet ordre, on parle du fait que la commission d’enquête

9 militaire doit fournir un exemplaire de son rapport à -je cite- : "ce

10 commandement" ; ce rapport a-t-il jamais atteint le commandement ou

11 n’êtes-vous pas au courant de cela ?

12 M. Pilica (interprétation). - De quel commandement parlez-vous ?

13 Mme McHenry (interprétation). - Eh bien, je vais vous poser une

14 autre question.

15 Savez-vous quelles mesures ont été prises par la Défense

16 territoriale municipale ou par M. Delalic après réception de cet ordre du

17 24 août ? D’ailleurs, des mesures ont-elles été prises ?

18 M. Pilica (interprétation). - Delalic n’a pris aucune mesure

19 particulière, pour autant que je le sache, et notre commandement n'a reçu

20 aucun rapport portant sur ces activités.

21 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, précédemment, vous

22 avez déclaré qu’à l’époque, vous n'étiez pas au courant et que vous ne

23 connaissiez pas le document daté du 28 août émanant de M. Delalic et

24 destiné au commandant de la prison de Celebici, par conséquent, je ne vais

25 pas vous poser de questions sur ce sujet. Mais on fait référence à un

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1 ordre écrit qui émane de l'état-major du commandement suprême. Alors, ma

2 question est la suivante : pour ce qui est de la prison de Celebici, avez-

3 vous jamais vu un ordre écrit émanant du commandement suprême ?

4 M. Pilica (interprétation). - Je vous le dis en toute sincérité,

5 je n'ai jamais vu un ordre de ce type.

6 Mme McHenry (interprétation). - Seriez-vous d'accord avec moi,

7 Monsieur, pour dire que, en 1992, la levée du siège de Sarajevo était la

8 priorité absolue de l'armée de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

9 M. Pilica (interprétation). - Entièrement d'accord.

10 Mme McHenry (interprétation). - De ce fait, le commandement

11 suprême voulait s'assurer que les groupes tactiques étaient en mesure

12 d'agir de façon efficace.

13 M. Pilica (interprétation). - Le commandement suprême a fait

14 tout ce qu'il a pu.

15 Mme McHenry (interprétation). - Cela supposait également, n'est-

16 ce pas, que le commandement suprême, s'il en voyait la nécessité, autorise

17 les commandants du groupe tactique à délivrer des ordres destinés aux

18 états-majors municipaux, ordres relatifs à des problèmes de renseignement

19 et de collecte d'informations ? Je crois que vous vous êtes déjà

20 prononcé sur la question, j'essaie simplement de voir si ce que je dis est

21 exact.

22 M. Pilica (interprétation). - Oui, j'ai vu ce document et j'ai

23 déclaré que ce document reflétait tous les événements qui étaient en train

24 de se produire. Ce document traitait des besoins en renseignements

25 notamment. En fait, on demandait à chacun de faire preuve de la plus

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1 grande efficacité possible.

2 Mme McHenry (interprétation). - Je crois que vous ne m'avez pas

3 comprise. Vous avez dit quelque chose dans le cadre de l'interrogatoire

4 principal et c'est cela qui m'intéresse. N'est-il pas exact de dire que,

5 aux vues des besoins qui existaient, le commandement suprême a autorisé

6 les commandants des groupes tactiques à délivrer des ordres aux états-

7 majors municipaux, dès lors que ces ordres portaient sur des questions de

8 renseignement ?

9 M. Pilica (interprétation). - Mais moi je considère cela comme

10 une transmission d'ordre, transmission d'ordre émanant du commandement

11 suprême, même si le travail dans le cadre des services de renseignements

12 était très particulier, un travail crucial dès lors que l'on parle de la

13 préparation de certaines opérations et dès lors que l'on parle plus

14 précisément des tentatives faites par la suite pour lever le siège de

15 Sarajevo.

16 Mme McHenry (interprétation). - Je crois que je ne suis pas

17 claire. Vous dites la chose suivante : du fait des directives qui avaient

18 été précédemment émises par le commandement suprême pour ce qui était des

19 questions de renseignement, tous les ordres ultérieurs délivrés par des

20 commandants de groupe tactique et relatifs à des services de renseignement

21 étaient en fait non pas des ordres à proprement parler, mais des ordres de

22 transmission. C'est bien cela que vous dites ?

23 M. Pilica (interprétation). - Permettez-moi de vous demander de

24 me poser une question plus précise.

25 Mme McHenry (interprétation). - Je vais tâcher de le faire. Vous

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1 avez déclaré dans le cadre de l'interrogatoire principal que, après un

2 certain incident impliquant M. Catic et

3 au cours duquel celui-ci avait été blessé, une directive avait été

4 délivrée par l'état-major municipal, directive qui indiquait qu'il

5 souhaitait s'entretenir avec les commandants des groupes tactiques à

6 propos des services de renseignement. N'est-ce pas exact ?

7 M. Pilica (interprétation). - C'était là une des tâches

8 traditionnelles qui revenaient aux états-majors des municipalités, parce

9 que le groupe tactique 1, de même que tous les autres groupes tactiques,

10 était une unité de combat et exclusivement de combat.

11 Mme McHenry (interprétation). - Je ne suis pas sûre de vous

12 comprendre. Dites-vous que les états-majors municipaux étaient dans

13 l'obligation à tout moment de coopérer avec les groupes tactiques en

14 matière de renseignement ?

15 Etes-vous en train de nous dire également que cette obligation

16 permettait aux commandants des groupes tactiques de délivrer des ordres

17 destinés aux états-majors municipaux, dès lors que ces ordres portaient

18 sur des questions de renseignement ?

19 M. Pilica (interprétation). - Oui, des ordres directs si l'on

20 veut, mais pour ce qui est d'une capacité de commandement et de contrôle,

21 cela, les groupes tactiques n'avaient pas cette compétence. En revanche,

22 ils avaient le droit de formuler certaines demandes.

23 Mais comprenez-moi bien, avant l'ordre dont nous parlons, celui

24 qui a été transmis, une directive a été émise, une directive portant sur

25 les services de renseignements et sur les activités menées dans ce domaine

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1 sur les lignes de front.

2 Donc cet ordre, de même que tous les autres ordres dont nous

3 avons parlé jusqu'ici, sont en fait des ordres de transmission qui émanent

4 du commandement supérieur et qui sont destinés aux états-majors de la

5 défense municipale.

6 Mme McHenry (interprétation). - Je vais passer à une autre

7 question, Monsieur.

8 Il y avait donc un effort continu qui visait à lever le siège de

9 Sarajevo. Lorsque l'opération JUG a commencé, n'est-il pas exact que le

10 commandant de cette opération a reçu l'autorisation du commandement

11 suprême de choisir les unités qu'il souhaitait voir détacher des

12 différents états-majors municipaux ? Vous êtes au courant de ce fait ?

13 M. Pilica (interprétation). - Non, je ne suis pas au courant de

14 cela.

15 Mme McHenry (interprétation). - Mais vous êtes d'accord avec moi

16 pour dire que le commandement suprême pouvait confier des pouvoirs

17 supplémentaires et une mission supplémentaire aux commandants des groupes

18 tactiques, n'est-ce pas ?

19 M. Pilica (interprétation). - Vous parlez d'un soutien en

20 matière de renseignement ?

21 Mme McHenry (interprétation). - Non. Vous êtes d'accord avec moi

22 pour dire que le commandement suprême était susceptible de confier au

23 groupe tactique une tâche supplémentaire, tâche que le groupe tactique

24 était censé mener à bien. N'est-ce pas exact ?

25 M. Pilica (interprétation). - C'est exact.

Page 12507

1 Mme McHenry (interprétation). - Dans le courant de

2 l'automne 1992, n'y a-t-il pas eu précisément un exemple de cette

3 situation ? Le commandement suprême n'a-t-il pas chargé M. Delalic

4 d'arrêter M. Prazina, un commandant militaire de Bosnie ? Etes-vous au

5 courant de cela ?

6 M. Pilica (interprétation). - Absolument pas.

7 Mme McHenry (interprétation). - Vous n''avez jamais entendu

8 parler de Juka Prazina et vous n'avez jamais entendu dire qu'il avait été

9 arrêté dans le courant de l'automne 1992 ?

10 M. Pilica (interprétation). - J'ai entendu dire qu'il avait été

11 arrêté, mais par qui ou pourquoi, je suis incapable de vous le dire.

12 Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous où M. Prazina a été

13 détenu après avoir été arrêté ?

14 M. Pilica (interprétation). - Je ne le sais pas et ayez

15 l'obligeance de ne pas me poser de questions relatives à

16 l'affaire Prazina, parce que je ne sais rien à ce sujet.

17 Mme McHenry (interprétation). - Entendu. Je suppose que, en tant

18 que commandant-adjoint prenant part à toutes les opérations de combat qui

19 avaient cours à l'époque, vous étiez toujours au courant du fait que

20 M. Delalic établissait des contacts avec le commandement suprême. Vous

21 étiez dans la plupart des cas au fait de la teneur de ces contacts, n'est-

22 ce pas ?

23 Pouvez-vous nous dire quelle était la teneur de tous les

24 contacts que M. Delalic a eus avec le commandement suprême ?

25 M. Pilica (interprétation). - Je crois que j'étais au courant de

Page 12508

1 tout qui concernait les activités du groupe tactique 1, mais un commandant

2 se réserve toujours le droit de ne pas tout communiquer à ses subordonnés.

3 Mme McHenry (interprétation). - Merci Monsieur.

4 Monsieur le Président, je n'ai plus de question à poser à ce

5 témoin.

6 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

7 Maître Residovic, souhaitez-vous exercer un droit de réplique ?

8 Mme Residovic (interprétation). - Colonel, deux questions

9 simplement. Vous avez déclaré que, à un moment donné, une unité du HOS

10 avait été placée sous les ordres du groupe tactique 1, et vous avez

11 également précisé où cette unité avait été déployée.

12 Un point d'éclaircissement : à quelle période cette unité a-t-

13 elle été placée sous les ordres du groupe tactique 1 ?

14 M. Pilica (interprétation). - Je ne pourrais pas être très

15 précis, mais cette unité n'est pas restée très longtemps sous les ordres

16 du groupe tactique 1, elle a simplement participé pour une brève période

17 de temps à l'opération JUG.

18 Mme Residovic (interprétation). - Certaines unités provenant de

19 secteurs assez éloignés de votre zone d’activité ont également été placées

20 sous le contrôle du groupe tactique, et je voulais vous demander si, dans

21 le cadre de l’opération JUG, les unités de Konjic et

22 Jablanica on été placées sous le contrôle de votre groupe tactique

23 M.Pilica (interprétation). - Non.

24 Mme Residovic (interprétation). - Merci. Je n'ai plus de

25 question, Monsieur le Président.

Page 12509

1 M. le Président (interprétation). - Merci, Colonel, d'avoir

2 apporté votre aide à ce Tribunal. Vous pouvez vous retirer de manière

3 définitive.

4 M.Pilica (interprétation). - Je vous remercie.

5 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

6 M. le Président (interprétation). - Le témoin suivant peut-il

7 être amené dans le prétoire, s'il vous plaît ?

8 Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais que le greffe

9 m’apporte un éclaircissement. La pièce de l'accusation 230 a-t-elle été

10 versée au dossier ? Il s'agit de l'ordre portant nomination de la dactylo,

11 ordre authentifié par le témoin. Je crois que la pièce a déjà été versée

12 au dossier. Je voudrais simplement m'en assurer parce que, si ce n'est pas

13 le cas, je vais en demander le versement au dossier.

14 Mme le Greffier (interprétation). - La pièce n'a pas été versée.

15 Mme McHenry (interprétation). - Je demande,

16 Monsieur le Président, le versement de la pièce au dossier, et je m'excuse

17 d'avoir omis de le faire tout à l'heure.

18 M. le Président (interprétation). - Vous demandez son versement

19 par le biais de ce témoin qui vient de sortir ?

20 M. Jan (interprétation). - Vous êtes vraiment intéressée par un

21 ordre qui porte nomination d'une dactylographe pour une période de temps

22 très réduite ? Je ne vois pas en quoi cela concerne la responsabilité de

23 supérieur hiérarchique de M. Delalic, très franchement.

24 M. le Président (interprétation). - Je ne vois pas non plus ce

25 que cela a à voir avec sa capacité à nommer un état-major efficace ou pas.

Page 12510

1 Mme McHenry (interprétation). - Mais cela me semble pertinent,

2 Monsieur le Président, dans la mesure où cela fait référence aux

3 compétences de base de M. Delalic.

4 M. Jan (interprétation). - Oui, effectivement, il était

5 compétent pour nommer sa propre dactylographe. Tout le monde reconnaît

6 qu'il était commandant.

7 M. le Président (interprétation). - Faites entrer le témoin

8 suivant.

9 Mme Residovic (interprétation). - J'appelle à la barre

10 M. Ekrem Milic.

11 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

12 M. Milic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

13 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez vous asseoir,

15 Monsieur.

16 Mme Residovic (interprétation). - Bonjour, Monsieur.

17 M. Milic (interprétation). - Bonjour.

18 Mme Residovic (interprétation). - Rapprochez-vous du micro parce

19 que nous vous entendons à peine. Merci. Veuillez décliner votre identité,

20 s’il vous plaît.

21 M. Milic (interprétation). - Je m'appelle Ekrem Milic. Je suis

22 le fils d’Emin Milic. Ma mère s'appelle Hajirja Isanovic.

23 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Quels sont

24 vos lieu et date de naissance ?

25 M. Milic (interprétation). - Je suis né le 8 janvier 1959 dans

Page 12511

1 la municipalité de Rogatica, en Bosnie orientale.

2 Mme Residovic (interprétation). - Quelle est votre appartenance

3 ethnique et quelle est votre citoyenneté ?

4 M. Milic (interprétation). - Je suis Musulman de Bosnie et

5 citoyen de Bosnie-Herzégovine.

6 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, je tiens à

7 vous remercier personnellement car vous avez réussi à vous arranger et à

8 faire en sorte de pouvoir comparaître ici aujourd'hui, alors que cela

9 n'était pas prévu. Monsieur Milic, quelle est votre profession ?

10 M. Milic (interprétation). - Je suis journaliste depuis dix-sept

11 ans maintenant.

12 Mme Residovic (interprétation). - Quelle a été votre formation ?

13 M. Milic (interprétation). - J'ai fait tout mon cursus

14 académique à Sarajevo. J'ai été à l'école élémentaire, secondaire, au

15 collège, au lycée ; je suis entré à la faculté des sciences

16 politiques de l'université de Sarajevo et j'ai obtenu un diplôme en

17 sociologie.

18 J’ai également suivi des cours de philosophie à l'école de

19 philosophie, de littérature et d'étude de la langue serbo-croate. C'est

20 ainsi que s'appelait cette institution à l'époque.

21 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie.

22 Monsieur Milic, où travailliez-vous jusqu'au 6 avril 1992 et que faisiez-

23 vous exactement ?

24 M. Milic (interprétation). - Eh bien, je vais d'abord répondre à

25 la deuxième partie de votre question. J'étais journaliste. Officiellement,

Page 12512

1 j'étais correspondant pour une agence de presse de Belgrade qui s'appelait

2 Borba, une agence de presse qui publiait sept journaux différents. Il y

3 avait à la fois des quotidiens et des hebdomadaires. J’ai travaillé pour

4 un certain nombre de médias en Bosnie-Herzégovine en tant qu'indépendant.

5 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie,

6 Monsieur Milic. Je crois que vous n'avez plus rien à ajouter pour ce qui

7 est de la carrière que vous avez suivie.

8 Où vous trouviez-vous entre les mois d'avril 1992 et

9 d’avril 1993 ? Pouvez-vous brièvement nous dire quelles ont été vos

10 activités à cette époque ? Cela nous permettra de comprendre des

11 événements qui seront à la base des questions que je vous poserai par la

12 suite.

13 M. Milic (interprétation). - Je me trouvais à Innsbruck en

14 Autriche lorsque mon pays a été victime de cette agression. Je pensais que

15 tout serait fini très rapidement et c'est la raison pour laquelle je suis

16 retourné à Belgrade. J'espérais pouvoir ensuite me rendre à Sarajevo.

17 Mais je me suis aperçu que les choses n'allaient pas se résoudre

18 aussi rapidement que je l'avais prévu et je suis retourné en Autriche.

19 Puis, je suis parti pour la Croatie. Je suis allé dans une ville appelée

20 Funtana. C'est une petite ville qui se trouve à proximité de Porec, dans

21 la région de l’Istrie.

22 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, je vous ai

23 précisé quelle était la période de temps qui m'intéressait. Lorsque vous

24 vous êtes rendu en Croatie, combien de temps

25 y avez-vous passé ?

Page 12513

1 M. Milic (interprétation). - Eh bien, je m'y suis trouvé vers la

2 fin du mois d'avril 1992 et j'y suis resté en tant que réfugié jusqu’au

3 mois de juin 1993.

4 Mme Residovic (interprétation). - Vous venez d'anticiper la

5 question que je souhaitais vous poser. Vous étiez donc un réfugié. Pendant

6 votre séjour en Croatie, avez-vous pu exercer votre profession, que ce

7 soit de façon continue ou de façon ponctuelle ?

8 M. Milic (interprétation). - Vous le savez, les journalistes ne

9 peuvent jamais cesser d'exercer leur profession. Oui, j'ai continué à

10 exercer ma profession. En fait, j'ai travaillé pour moi, j'ai fait

11 beaucoup de recherches. Je suivais les événements de près, mais je n'ai

12 pas eu de contrats professionnels en Croatie. Je ne pouvais même pas

13 essayer d'obtenir un contrat quelconque. Vous comprenez bien quelle était

14 la situation, je le suppose.

15 Mme Residovic (interprétation). - Oui, bien sûr, Monsieur Milic,

16 je comprends tout à fait ce que vous voulez dire.

17 Si j'ai attendu quelques instants, c'est parce que j'attendais

18 que l'interprétation soit terminée. Maintenant, pouvez-vous nous dire si,

19 au cours de la période que vous avez passée en Croatie, vous avez décidé à

20 un moment quelconque de vous rendre à Konjic ou à Sarajevo, en passant par

21 Konjic ?

22 M. Milic (interprétation). - C'était mon désir, mais je n'ai pas

23 pu le réaliser, ce n’était pas faisable.

24 M. le Président (interprétation). - La Chambre va suspendre ses

25 travaux. Nous reprendrons à 16 heures 30.

Page 12514

1 (Suspendue à 16 h 00, l'audience est reprise à 16 h 35.)

2 M. le Président (interprétation). - Madame Residovic, vous

3 pouvez continuer à poser vos questions à votre témoin.

4 Mme le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle, Monsieur,

5 que vous êtes

6 toujours sous serment.

7 (L'interprétation n'entend pas le témoin).

8 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, à ma dernière

9 question, avant l'interruption de séance, vous avez dit qu'au cours

10 de 1992 vous ne vous êtes pas rendu à Konjic, ou à Sarajevo ou en Bosnie-

11 Herzégovine dans quelque endroit que ce soit.

12 Cependant, Monsieur Milic, en tant que citoyen de Bosnie-

13 Herzégovine, avez-vous suivi les événements qui se sont produits là-bas ?

14 M. Milic (interprétation). - Oui, j'ai beaucoup suivi ce qui s'y

15 passait.

16 Mme Residovic (interprétation). - De quelle manière le faisiez-

17 vous ?

18 M. Milic (interprétation). - Je me suis vraiment engagé,

19 j’essayais d'écouter toutes les stations de radio. Cela veut dire que, le

20 soir, j'arrivais à entendre la radio de Bosnie-Herzégovine, le programme

21 régulier de la télévision et des radios croates. Le soir j'essayais aussi,

22 et même j’y parvenais, d’entendre Radio-Belgrade.

23 Mme Residovic (interprétation). - Bien, d'accord, cela suffira.

24 M. Milic (interprétation). - En plus de la presse que je lisais,

25 bien sûr.

Page 12515

1 Mme Residovic (interprétation). - Vous venez de dire où vous

2 avez séjourné en tant que réfugié. Pouvez-vous nous dire si, pendant cette

3 période-là, vous vous êtes rendu à Zagreb et si vous y avez rencontré des

4 gens venus de Bosnie-Herzégovine ?

5 M. Milic (interprétation). - Oui, dès le mois de mai 1992, parce

6 que c’est à Zagreb que se trouvait le plus grand et le plus organisé des

7 clubs pour les Bosniaques, pour les citoyens de Bosnie-Herzégovine qui ont

8 quitté le théâtre des opérations, les zones touchées par la guerre.

9 Mme Residovic (interprétation). - En tant que journaliste, vous

10 pouvez bien entendu nous dire pour cette période-là, au cours du

11 printemps 1992, de quelle manière les médias croates faisaient état de la

12 guerre en Bosnie-Herzégovine. Vous étiez bien placé pour

13 pouvoir évaluer les informations qui étaient diffusées par les médias en

14 Croatie ?

15 M. Milic (interprétation). - Sur le plan professionnel, je dois

16 dire que c'était une période où en Croatie on voyait des textes vraiment

17 objectifs. C’était en avril et en mai 1992.

18 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, à un moment,

19 avez-vous néanmoins remarqué qu'il y avait un changement dans la manière

20 d'informer sur les événements de guerre en Bosnie-Herzégovine ?

21 M. Milic (interprétation). - Oui, c’était le mois de mai.

22 M. le Président (interprétation). - Si vous savez quelle réponse

23 vous souhaitez obtenir, essayez d'aller directement au coeur des choses.

24 M. Jan (interprétation). - Vous souhaitez savoir quelle

25 propagande était diffusée à l'encontre de votre client et quelles mesures

Page 12516

1 il a pris.

2 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, la Chambre, à

3 juste titre, nous fait remarquer qu’il y a des éléments qu’elle connaît

4 déjà. Par conséquent, il y a eu une modification au niveau de la

5 propagande diffusée en Croatie. A un moment donné, avez-vous appris qu'une

6 propagande était menée, cherchant à nuire à M. Zejnil Delalic ?

7 Auparavant, je dois vous demander si en 1992 vous connaissiez

8 M. Zejnil Delalic.

9 M. Milic (interprétation). - Non.

10 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous pu remarquer, à

11 travers les médias croates, qu’à un moment donné le nom de Zejnil Delalic

12 a commencé à apparaître ? Si vous l'avez remarqué, pouvez-vous nous dire

13 dans quel contexte ?

14 M. Milic (interprétation). - La première fois que j'ai remarqué

15 l'apparition de ce nom, c'était dans une opération qui a été menée pour

16 lever le siège de Sarajevo. Je pense que cette opération s’appelait

17 JUG 92. Jusqu'à ce moment, je dois dire que je n'ai pas particulièrement

18 prêté attention à cela. J'ai vu des reportages sur les succès remportés

19 sur le front de Konjic, de Mostar, sur le théâtre d'opérations de

20 Duvno Livno.

21 Mme Residovic (interprétation). - Merci.

22 A l'époque où vous suiviez ces informations, celles parlant de

23 Zejnil Delalic étaient-elles positivement ou négativement connotées ?

24 M. Milic (interprétation). - Je peux dire que c'était ni dans un

25 sens ni dans l'autre. C'était neutre, c'était une information normale.

Page 12517

1 Mme Residovic (interprétation). - Excusez-moi, Monsieur Milic,

2 je m’excuse également auprès de la Chambre, je vois que l'interprétation

3 vous surprend et fait que vous vous interrompez.

4 J'ai oublié de vous indiquer que vous pouvez suivre avec ce

5 casque, qui est sur votre pupitre, l'interprétation de ce que nous disons.

6 Je vous demanderai de vous exprimer librement, en parlant lentement et de

7 ne pas prêter attention au son qui sort de ce casque. Mais attendez

8 néanmoins avec votre réponse jusqu’à ce que vous ayez entendu que ma

9 question a été traduite. L’avez-vous bien compris ?

10 M. Milic (interprétation). - Oui, j’ai bien compris.

11 Mme Residovic (interprétation). - Excusez-moi, j'aurais dû vous

12 le faire remarquer dès le début.

13 Monsieur Milic, au moi de mai 1992, avez-vous suivi les

14 émissions de la télévision de Zagreb intitulées " Slikom na sliku" ("Image

15 contre image") ?

16 M. Milic (interprétation). - C’était une émission que tout le

17 monde regardait en Croatie, qui était diffusée régulièrement. Bien

18 entendu, je n'ai pas vu toutes les émissions de "Image contre image". J’en

19 ai vu certaines ultérieurement sur des bandes vidéo.

20 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, à l’époque, au

21 mois de mai 1992, avez-vous vu l’émission de "Image contre image" où

22 Zejnil Delalic a été invité ?

23 M. Milic (interprétation). - Malheureusement, le soir en

24 question, au moment où il y a eu cette émission en direct, je ne l'ai pas

25 vu.

Page 12518

1 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, vous est-il

2 arrivé, en Croatie, de rencontrer l'un des frères de M. Zejnil Delalic ?

3 M. Milic (interprétation). - Oui. C'était au début de

4 l'année 1993. Et pendant une période qui s'étalait sur trois ou

5 quatre mois, j'ai rencontré trois de ses frères.

6 Mme Residovic (interprétation). - A quelle occasion avez-vous

7 rencontré son frère qui se trouvait à Zagreb ? Et dites-nous le nom de son

8 frère.

9 M. Milic (interprétation). - Mon premier contact avec l'un de

10 ses frères était avec M. Vejsil Lamoura* (l'interprète n'a pas très bien

11 saisi le nom). C'était au début de l'année 1993 et la rencontre s'est

12 faite lorsque j'ai exprimé mon souhait de m'engager davantage dans les

13 activités du centre de crise bosniaque de Zagreb parce que je souhaitais

14 contribuer à ma façon à ce que l'on empêche que se développe davantage une

15 campagne qui avait déjà beaucoup d'ampleur dans la région de Konjic, où

16 les membres de la défense territoriale et de l'armée de Bosnie-Herzégovine

17 avaient déjà remporté des succès considérables sur le front.

18 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Témoin, mais dans

19 cette campagne qui était menée en Croatie, on cherchait à discréditer ces

20 hommes et ces résultats.

21 Mes collègues me signalent que le nom "Vejsil" n'est pas bien

22 transcrit ici. Puisque nous aurons l'occasion de revenir sur ce frère de

23 M. Zejnil Delalic, il ne faut pas le corriger maintenant.

24 Si j'ai bien compris, dans cette cellule de crise des

25 Bosniaques, vous souhaitiez vous engager en tant que journaliste pour

Page 12519

1 combattre cette propagande ; à ce moment, avez-vous appris que ses frères,

2 ou plus précisément ce frère-là, Vejsil, cherchait quelqu'un qui

3 l'aiderait à combattre cette campagne qui portait atteinte à M. Delalic ?

4 M. Milic (interprétation). - Oui, suite à une conversation que

5 j'ai eue avec le secrétaire Muhamed Mujkanovic, et suite à nos

6 discussions, nos débats et notre dépression à cause de ce qui se passait,

7 et également à cause de mon désir de présenter la vérité sur Konjic et

8 sur Jablanica, il y a eu un concours de circonstances : ce secrétaire

9 connaissait Vejsil.

10 Mme Residovic (interprétation). - Nous n'allons pas rentrer dans

11 les détails, Monsieur.

12 M. Muhamed Mujkanovic, donc, vous a-t-il permis d'entrer en

13 contact avec le frère de Zejnil ?

14 M. Milic (interprétation). - Oui, oui. C'est ce qu'il a fait, et

15 très rapidement.

16 Mme Residovic (interprétation). - S'il vous plaît, lors de votre

17 première rencontre, que vous a dit Vejsil ? Quelles sont les informations

18 qu'il vous a fournies et qu'a-t-il demandé de votre part ?

19 M. Milic (interprétation). - Puisqu'il disposait d'informations

20 qui provenaient du terrain, et qu’il disposait d'informations exactes, il

21 souhaitait que toutes les rumeurs et cette campagne soient démenties.

22 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, Vejsil vous a-

23 t-il dit que lui aurait déjà essayé de faire quelque chose relativement à

24 cette campagne ?

25 M. Milic (interprétation). - Il n'y a pas eu de discussions

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1 spécifiques portant sur ce sujet. Néanmoins, il cherchait vraiment à tout

2 prix que l'on fasse connaître la vérité.

3 Bien entendu, à l'époque, j'ai proposé, j'ai suggéré que l'on

4 contacte ceux qui disposent d'informations fiables. Je souhaitais que l'on

5 organise une conférence de presse et, éventuellement, que l'on rassemble

6 des bandes vidéo, que l'on réunisse tout cela et qu'on le présente à la

7 fois à l'opinion bosniaque de Croatie, aux journalistes croates et aux

8 journalistes étrangers accrédités en Croatie.

9 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, je sais que

10 vous n'êtes pas psychologue, que vous êtes journaliste mais, dans vos

11 conversations avec M. Vejsil, le frère de M. Zejnil, auriez-vous remarqué

12 qu'il semblait inquiet, troublé, ou bien c'était une conversation normale

13 où on demandait simplement que vous vous engagiez dans cette affaire ?

14 M. Milic (interprétation). - Ecoutez, cet homme était vraiment

15 très troublé, il était très agité ; il avait peur pour les membres de sa

16 famille là-bas, il avait peur pour lui-même, pour sa vie à Zagreb, parce

17 que c’était une période où on pouvait craindre le pire pour la

18 famille Delalic.

19 Mme Residovic (interprétation). - Au cours de cette

20 conversation, M. Vejsil Delalic vous aurait-il dit quoi que ce soit au

21 sujet de son frère Zejnil Delalic, à savoir comment son frère réagissait à

22 ces calomnies qu'on pouvait entendre à son égard ?

23 M. Milic (interprétation). - Lui aussi traversait une période

24 très difficile, d'après ce que Vejsil m’a dit.

25 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez dit que vous

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1 considériez qu'il vous fallait réunir des informations, des documents sur

2 ces événements, parce que je suppose que, vous-même, vous n’y avez pas

3 pris part. Pouvez-vous me dire à ce propos si Vejsil vous a dit à un

4 moment qu'il fallait que vous rencontriez quelqu'un de Vienne ou quelqu’un

5 d'autre qui aurait pu vous procurer ce genre d'information ?

6 M. Milic (interprétation). - Suite à ma suggestion de réunir ces

7 documents, et autant de documents que possible, des cassettes vidéo,

8 Vejsil m’a promis qu'il allait les trouver et qu’il allait me trouver des

9 collaborateurs, des interlocuteurs qui allaient pouvoir dire la vérité sur

10 ces événements.

11 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, cette promesse

12 s’est-elle réalisée, cette promesse donnée par M. Vejsil Delalic ? Avez-

13 vous rencontré quelqu’un ?

14 M. Milic (interprétation). - Oui, très vite, il ne s’est pas

15 passé beaucoup de temps. Cela s’est réalisé.

16 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre

17 qui vous avez rencontré et où ?

18 M. Milic (interprétation). - Un homme est arrivé de Vienne, un

19 homme qui

20 s'appelait Ciso, c’était son nom de famille ou bien son surnom. Nous

21 sommes restés ensemble pendant plusieurs heures. Nous nous sommes

22 entretenus, je lui ai fait part de mes réflexions, de mes idées sur la

23 manière de procéder. J’ai insisté sur le fait qu'il fallait agir vite.

24 Mais je prévoyais une condition à cela, et la condition était de

25 réunir tous ces documents à Zagreb.

Page 12522

1 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, avez-vous reçu

2 les documents que vous avez demandés ou certains de ces documents ? Et qui

3 vous a apporté ces documents ?

4 M. Milic (interprétation). - Ceci m'a été apporté par Ciso et

5 par Dzemal Delalic, l'autre frère de Zejnil, qui aurait dû arriver plus

6 tôt, à la mi-janvier. Mais il n'a pas pu le faire parce qu'il n'avait pas

7 de passeport croate.

8 Finalement, fin janvier j'ai reçu entre vingt et trente

9 cassettes vidéo.

10 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, puisqu'il

11 s'agit de propagande et de presse, avez-vous également collectionné les

12 articles qui avaient été publiés sur M. Zejnil Delalic à cette période ?

13 M. Milic (interprétation). - C’est de Vejsil que j'ai reçu la

14 plupart de ces articles.

15 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous raconter

16 brièvement ce qu’on disait de Zejnil dans ces articles ?

17 M. Milic (interprétation). - Avant d'interpréter ces textes...

18 Mme Residovic (interprétation). - J’espère que vous n’allez pas

19 interpréter tous ces textes. Je vous demande de nous dire brièvement ce

20 que vous y avez trouvé. Mais avant de répondre à ma question, dites ce que

21 vous jugez nécessaire de dire. Allez-y.

22 M. Milic (interprétation). - Je considère qu'il s'agissait d'une

23 propagande organisée, orchestrée, commanditée et qu'elle avait un objectif

24 précis qui était de porter atteinte à Zejnil Delalic et à Konjic de

25 manière générale.

Page 12523

1 Mme Residovic (interprétation). - Dites-moi, s'il vous plaît,

2 maintenant que vous

3

4 avez dit ces quelques mots d'introduction, qu’y avait-il dans cette

5 presse ? Dites-nous en quelques phrases quel était le contenu de cette

6 propagande. Comment Zejnil était-il présenté dans ces articles ? Dites-le

7 nous si vous vous en souvenez, bien sûr, et dans la mesure où vous vous en

8 souvenez.

9 M. Milic (interprétation). - Je pourrais répartir ces articles

10 en trois catégories. D’abord, la collaboration avec les Serbes. Dans le

11 même temps, il était qualifié comme espion serbe, collaborateur des

12 services secrets serbes, du KOS, activité qui visait à créer un climat

13 négatif et qui allait créer des tensions entre les Musulmans de Bosnie et

14 les Croates. Enfin, ce qui était le pire, c'étaient des mensonges, qu'il

15 s'était enfui -et là je cite les mots que j'ai vus dans ces articles-, "en

16 utilisant un hélicoptère serbe chetnik sur un territoire serbe", ce qui

17 manifestement n'était pas vrai.

18 Mme Residovic (interprétation). - A-t-on parlé aussi, dans les

19 médias et dans la presse de la façon dont il avait traité les prisonniers

20 serbes ?

21 M. Milic (interprétation). - Oui. C'était une situation absurde,

22 bizarre, mais présentée de façon fort habile en matière de propagande. A

23 l'époque, M. Zejnil Delalic aidait à la libération de Serbes, de prisons

24 et de camps, même si personnellement je sais qu'il n'était pas en mesure

25 de le faire.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, après que Cico

2 et Dzemal Delalic vous aient apporté cette vingtaine de cassettes, les

3 avez-vous regardées ? Qu’avez-vous fait par la suite ?

4 M. Milic (interprétation). - Ce jour-là encore, je les ai

5 regardées un peu en vitesse, simplement pour savoir ce qu'il y avait sur

6 ces cassettes.

7 Mme Residovic (interprétation). - Après cet examen rapide des

8 cassettes, avez-vous pu déterminer si ce matériel avait rapport avec

9 M. Zejnil Delalic ou avec quelque chose d'autre ?

10 M. Milic (interprétation). - Non, de façon générale ces

11 cassettes retraçaient les événements qui s'étaient produits dans la région

12 allant de Konjic à Sarajevo, villes dont on essayait de lever le siège. Il

13 y avait des images portant sur différentes opérations, on trouvait des

14 images de la télévision croate, de la télévision serbe, de la télévision

15 bosniaque, ainsi que de la télévision locale de Konjic.

16 Il y avait aussi des séquences qui étaient manifestement

17 tournées par quelqu'un de non professionnel, des cassettes d'amateur.

18 Mme Residovic (interprétation). - Savez-vous qui était le

19 propriétaire de ces cassettes que l’on vous a apportées ?

20 M. Milic (interprétation). - Je sais qu'il n'est pas coutumier

21 qu'un témoin pose des questions à la personne qui l'interroge.

22 Mme Residovic (interprétation). - A quoi pensez-vous ?

23 M. Milic (interprétation). - Simplement, pour préciser cette

24 question de la propriété des cassettes,. Pensez-vous aux droits d’auteur,

25 au fait d’être propriétaire de droits d'auteur ou simplement au fait

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1 d'être en possession de cassettes ?

2 Mme Residovic (interprétation). - Je vous demande ce que vous

3 saviez en 1992. A votre avis, à qui appartenait ces cassettes ?

4 M. Milic (interprétation). - D'après moi, elles appartenaient à

5 Dzemal Delalic, à Ciso, dont je ne me souviens pas du prénom et le droit

6 d'auteur bien sûr revenait à toutes ces chaînes de télévision que j'ai

7 mentionnées.

8 Mme Residovic (interprétation). - Et après avoir examiné

9 rapidement, comme vous l'avez dit, de façon un peu diagonale, ces

10 séquences, qu'avez-vous fait ? Avez-vous fait quoi que ce soit de ces

11 cassettes ?

12 M. Milic (interprétation). - Ma première réaction était que tout

13 ceci devait être un peu raccourci, abrégé, monté et être en fait repris

14 sur une ou deux cassettes qui opéreraient la synthèse de toutes ces

15 images, ce sur quoi je pourrais monter une cassette définitive, l'idée

16 étant que tout ceci devienne une espèce de documentaire.

17 Mme Residovic (interprétation). - Vous aviez donc ce projet que

18 vous venez de nous relater. Etes-vous arrivé à vos fins ? En d'autres

19 termes, avez-vous réussi à obtenir une cassette ou deux de synthèse et de

20 qui l'avez-vous obtenue ?

21 M. Milic (interprétation). - J'ai obtenu tout cela à peu près

22 quinze jours après cette première conversation de Ciso, Dzemal et Sefik,

23 qui est mort depuis... Je pense effectivement que c'est Ciso et Sefik qui

24 m'ont apporté ces deux cassettes.

25 Mme Residovic (interprétation). - Fort bien. Est-ce que c'était

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1 là la dernière phase du travail qui vous revenait ou avez-vous commencé à

2 utiliser tout ce matériau pour votre activité de journaliste ?

3 M. Milic (interprétation). - C'est à ce moment-là que mon

4 travail à moi commençait. J'ai étudié cette synthèse avec le plus grand

5 soin, pour voir ce qu'il fallait mettre en exergue. J'ai rédigé un script,

6 c’est-à-dire un relevé des séquences qu'on allait retenir et de l'ordre

7 dans lequel ces séquences seraient présentées. Il m'a fallu cinq à sept

8 jours de travail intensif et approfondi et, en fin de parcours, j'ai

9 apporté mon propre commentaire, le texte qui devait accompagner cette

10 cassette qui allait être présentée lors d’une conférence de presse.

11 Mme Residovic (interprétation). - Si je vous ai bien compris,

12 vous disposiez à ce moment-là de séquences vidéo à partir de ce que vous

13 aviez vous-même et de ce que Vejsil vous avait apporté, puisque vous aviez

14 aussi quelques articles de la presse croate.

15 Mais ma question n'était pas tout à fait celle-là. Lorsque vous

16 avez rencontré Vejso Sefik et Dzemal Delalic, avez-vous appris d'autres

17 éléments d'information et savez-vous si certains d'entre eux avaient

18 participé aux événements qui s'étaient produits à Konjic en 1992 ?

19 M. Milic (interprétation). - Ciso s’est rendu à Konjic plusieurs

20 fois, Dzemal y est

21 resté un peu plus longtemps. Quant à Sefik, il était volontaire et à ce

22 titre il a passé plusieurs mois dans différents secteurs de la Bosnie.

23 Mais il se déplaçait. En effet, je pense qu'il s'occupait de logistique...

24 C’est cela, je me rappelle maintenant.

25 Mme Residovic (interprétation). - Donc vous avez eu diverses

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1 sources d'information pour relater ces événements ; vous aviez les médias,

2 les cassettes video et le témoignage de certains protagonistes des

3 événements de Konjic.

4 Avez-vous fait part de vos intentions à Ciso et à Sefik ? Ici,

5 vous nous avez dit que vous deviez assurer le montage, préparer la partie

6 son... Etiez-vous censé parler de tout cela avec les frères de Zejnil ?

7 M. Milic (interprétation). - Je leur ai posé la question et j'ai

8 été un peu déçu de leur réponse. Zejnil ne savait pas du tout ce que nous

9 étions en train de faire.

10 Mme Residovic (interprétation). - Même si vous avez compris que

11 Zejnil n'était pas au courant de ce projet auquel vous participiez, est-ce

12 que vous avez composé un texte qui était censé dénoncer cette propagande ?

13 Ou est-ce que vous avez préparé d'autres éléments que vous aviez

14 l’intention de présenter lors de la conférence de presse ?

15 M. Milic (interprétation). - Tout à fait, j'ai préparé un

16 script, un texte, mais j'ai aussi formulé des suggestions quant à la façon

17 dont ces deux cassettes, qui n'étaient encore qu'à l'état brut, devaient

18 peut-être être écourtées ; il fallait peut-être abréger certains extraits

19 et les disposer de telle sorte qu'elles puissent correspondre et coïncider

20 avec mon texte. J'ai suggéré aussi que la durée maximale ne devait pas

21 dépasser soixante ou quatre-vingt minutes.

22 Mme Residovic (interprétation). - Ce travail de montage s'est-il

23 fait à Zagreb ? Etiez-vous présent lors de cette activité de montage qui

24 devait se faire à partir de vos suggestions ? Cela devait être le fait du

25 frère de Zejnil et d’autres personnes qui participaient au projet.

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1 M. Milic (interprétation). - Non, ce n'est pas à Zagreb que le

2 montage s'est réalisé. Ces cassettes furent montées et produites à Vienne.

3 Mme Residovic (interprétation). - Vous venez de dire,

4 Monsieur Milic, que vous aviez préparé ce texte d'accompagnement et que

5 vous aviez formulé des suggestions, par exemple quant à la durée maximale,

6 qui ne devait pas être de plus de soixante ou quatre-vingt minutes ; avez-

7 vous fini par recevoir un exemplaire de cette cassette qui aurait été

8 réalisée à partir de vos suggestions ?

9 M. Milic (interprétation). - Oui.

10 Mme Residovic (interprétation). - Et cette cassette, l'avez-vous

11 regardée ? Avez-vous été satisfait du travail réalisé ?

12 M. Milic (interprétation). - Oui, je l’ai regardée, cette

13 cassette. J'avais espéré une meilleure qualité, une qualité plus

14 professionnelle. En effet, il y avait beaucoup de carences, dans le

15 montage, par exemple.

16 Et il y avait aussi une qualité de son quelquefois franchement

17 exécrable ; la voix du commentateur n'était pas bonne.

18 Mme Residovic (interprétation). - Indépendamment de la piètre

19 qualité et de la mauvaise lecture du texte, les extraits que vous aviez

20 proposé d'inclure dans la cassette s’y trouvaient-ils ?

21 M. Milic (interprétation). - Oui. Tout a été repris du premier

22 mot au dernier mot.

23 Mme Residovic (interprétation). - Et quel est le titre que vous

24 avez donné à cette cassette, qui avait été montée à partir de vos idées et

25 aussi avec le texte que vous aviez préparé ?

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1 M. Milic (interprétation). - On a eu plusieurs moutures, ce qui

2 est tout à fait compréhensible dans un tel projet. Et finalement, nous

3 avons retenu le titre suivant: "La guerre en Bosnie-Herzégovine".

4 Mme Residovic (interprétation). - En dépit du fait que cette

5 cassette n'était pas le travail d'un professionnel, quelles furent vos

6 suggestions en ce qui concerne la fin pour cette cassette ? En effet, vous

7 aviez fait des propositions pour toutes les parties ; qu’avez-vous proposé

8 pour la dernière partie de la cassette ?

9 M. Milic (interprétation). - Je tenais à avoir un enregistrement

10 et je voulais qu'apparaisse devant la caméra M. Zejnil Delalic puisqu'il

11 était l’homme qui, grâce à l'appareil de propagande croate, se serait

12 prétendument enfui à bord d'un hélicoptère chetnik.

13 Mme Residovic (interprétation). - Votre cassette vidéo devait

14 être une dénonciation de cette campagne de diffamation ; avez-vous aussi

15 inclus le fait qu'il était arrivé à Vienne le lendemain du jour où il

16 avait quitté Konjic ?

17 M. Milic (interprétation). - Oui. Mais après cet extrait-là, il

18 y en avait un autre, extrait dont je n'ai jamais discuté, ni avec Djemal,

19 ni avec Ciso, ni avec qui que ce soit d'autre.

20 Mme Residovic (interprétation). - Et à quel extrait pensez-

21 vous ?

22 M. Milic (interprétation). - C'était le message que voulait

23 adresser Zejnil à l'opinion publique de Bosnie-Herzégovine, à ses amis,

24 aux personnes qui avaient travaillé avec lui pour dire qu'il était

25 présent, qu'il était bien là, à Vienne, qu'il n'avait rien à voir avec les

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1 Serbes et, pour autant que je puisse en juger -c'est d'ailleurs Djemal qui

2 m'avait donné ces informations-, cette cassette vidéo devait, par une

3 filière quelconque, être acheminée vers Sarajevo et être présentée aux

4 habitants.

5 Mme Residovic (interprétation). - Excusez-moi, je ne vous ai pas

6 très bien compris ; que voulez-vous dire ? Ce message qu'envoyait Zejnil à

7 la population, était-ce seulement cela qui devait être acheminé à Sarajevo

8 ou était-ce toute la cassette vidéo qui devait l’être ?

9 M. Milic (interprétation). - Uniquement le message de Zejnil.

10 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous fait des

11 propositions, formulé des suggestions avant de reprendre le travail que

12 vous faisiez sur cette cassette pour que M. Zejnil Delalic soit informé de

13 ces idées que vous aviez ? Saviez-vous où il se trouvait à l'époque ?

14 M. Milic (interprétation). - Nous avons travaillé d'arrache-

15 pied, très rapidement, à cette cassette, tant pour la phase des

16 préparatifs que pour la phase du montage et aussi de la bande-son, mais je

17 n'ai même pas pensé à demander où se trouvait M. Delalic, même si je

18 savais qu'il était à Vienne.

19 Mme Residovic (interprétation). - Une fois cette cassette

20 terminée, avez-vous suggéré qu'elle soit montrée à M. Delalic et,

21 finalement, l'a-t-il vue ?

22 M. Milic (interprétation). - C'est plus tard que j'ai demandé à

23 Dzemal si Zejnil avait vu la cassette et il m'a dit qu’il ne l'avait pas

24 encore vue et qu'il voulait lui faire une surprise, une fois que la

25 cassette serait terminée.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Témoin, lorsque

2 vous avez reçu la version définitive de montage, savez-vous si Dzemal ou

3 quelqu'un d'autre l’aurait montrée à M. Zejnil Delalic et sauriez-vous

4 quelle fut sa réaction s'il l'a vue ?

5 M. Milic (interprétation). - A mon avis, pour nous c'était un

6 peu une défaite. Il a rejeté de façon catégorique les attentions que

7 j'avais, les idées que j'avais formulées mais, en guise de consolation, il

8 m’a remercié pour les efforts que j'avais consentis et il a essayé

9 d'obtenir une autre solution par la voie juridique. Il a demandé les

10 services d'un avocat.

11 Mme Residovic (interprétation). - Passons, si vous le voulez

12 bien, aux commentaires dont vous êtes l'auteur. Est-ce que vous avez

13 présenté les activités qui avaient été celles de M. Delalic en 1992,

14 conformément à la vérité ?

15 M. Milic (interprétation). - Cette question est tout

16 particulièrement difficile. Il y a eu beaucoup d'exagération. Dans ces

17 cassettes, on essayait de contrecarrer cette campagne de calomnies et on

18 avait essayé de répondre à ces arguments par des arguments du même genre.

19 Certains faits venant du terrain ne correspondent pas tout à fait aux

20 commentaires que j'avais fournis pour la cassette.

21 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Milic, vous êtes

22 journaliste, vous savez qu'il y a une déontologie dans toutes les

23 professions. Si dans le cadre d'une propagande il y a un élément qui est à

24 ce point empreint de parti pris et de fausses vérités, de faits erronés,

25 répondez-vous par des arguments du même acabit pour essayer de

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1 contrecarrer cette propagande en temps de guerre ?

2 M. Milic (interprétation). - En temps de guerre, tous les moyens

3 sont bons et de ce fait même, cela s'applique également au monde du

4 journalisme.

5 Mme Residovic (interprétation). - Dites-moi, lorsque vous avez

6 composé ce texte de commentaires, êtes-vous parti d'événements véridiques

7 authentiques que vous avez simplement gonflés, comme vous avez dit, que

8 vous avez exagérés, ou ne disposiez-vous pas d'une base d’événements et de

9 faits réels ?

10 M. Milic (interprétation). - Cette base réelle, ainsi que mon

11 inspiration, dans le cadre de la démarche que nous avions choisie pour

12 cette cassette, c'était d'un côté cette campagne créée par les médias

13 croates, campagne tout à fait percutante et efficace et, de l'autre côté,

14 j'attendais des renseignements venant de personnes qui s'étaient trouvées

15 sur le terrain, qui s'y trouvaient encore, avec qui j’étais constamment en

16 contact.

17 Une source importante d'informations, c'était les programmes de

18 la radio "Voice of America" qui donnaient un aperçu tout à fait équilibré

19 des événements qui se produisaient dans la région.

20 Mme Residovic (interprétation). - Fort bien, merci. Je crois que

21 ceci suffira pour savoir quelles sont vos sources.

22 Monsieur le Président, le moment est-il bien choisi pour

23 terminer la journée ?

24 M. le Président (interprétation). - Il est 17 heures 30. Nous

25 allons lever l'audience

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1 et nous reprendrons nos travaux lundi.

2 Mme Residovic (interprétation). - Merci.

3 (L’audience est levée à 17 heures 30.)

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