Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-21-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE Vendredi 17 janvier 1997

3 Devant la Chambre de première instance composée comme suit :

4 M. le Juge Adolphus Karibi-Whyte (Président) Mme le juge Elizabeth

5 Odio Benito M. le juge Saad Jan

6 LE PROCUREUR c/ Zejnil DELALIC Zdravko MUCIC, alias "PAVO" Hazim DELIC

7 Esad LANDZO alias "ZENGA" Le Bureau du Procureur : M. Eric Ostberg, Ms

8 Theresa McHenry, M. Giuliano Turone Conseil de la défense Mme Edina

9 Residovic, Professeur Eugène 0'Sulivan et M. Galijatovic pour la

10 défense de l'accusé Zejnil Delalic M. Branislav Tapuskovic et Mme Mira

11 Tapuskovic pour la défense de l'accusé Mucic M. Salih Karabdic pour la

12 défense de l'accusé Delic M. Mustafa Brackovic et Mme Cynthia

13 Mc Murrey pour la défense de l'accusé Landzo.

14 L'audience est ouverte à 10 heures 15.

15 M. le Président (interprétation de l'anglais). - L'audience de ce

16 matin vise à l'examen des exceptions préjudicielles soulevées par les

17 conseils de la défense. Nous allons donc commencer par l'examen de ces

18 dites exceptions. Les conseils veulent-ils bien se présenter ? Nous

19 commençons par l'accusation.

20 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Merci monsieur le

21 président. Je m'appelle Eric Ostberg. Je compare aujourd'hui avec

22 mes co-conseils, M. Turone et Mme Thérésa McHenry, notre assistante

23 juridique étant Mme Van Dusschoter.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous remercie,

25 monsieur Ostberg. Les conseils de la défense, s'il vous plaît.

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1 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Je suis le conseil

2 de la défense pour monsieur Hazim Delic. Le Tribunal a commis

3 d'office un co-conseil qui n'est pas encore arrivé.

4 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous remercie,

5 monsieur Karabdic. Monsieur, veuillez vous présenter ?

6 M. Tapuskovic (interprétation du serbo-croate). - Je suis Branislav

7 Tapuskovic, conseil de la défense de M. Mucic. Voici mon assistante,

8 Mira Tapuskovic qui est aussi conseil.

9 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Madame, veuillez

10 vous présenter.

11 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Je m'appelle Idina

12 Residovic, conseil de la défense pour M. Delalic. Je suis avocat de

13 Sarajevo. J'ai pour co- conseil M. Eugène O'Sullivan qui est aussi

14 co-conseil pour M. Delalic.

15 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Bonjour madame et

16 messieurs les juges. Je m'appelle Busko Brackovic, je suis conseil

17 de la défense de M. Esad Landzo. Je représente l'accusé avec mon éminente

18 collègue, Mme Cynthia Mc Murrey 18 qui vient des Etats- Unis.

19 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup,

20 monsieur Brackovic. Je crois que vous connaissez la structure

21 utilisée pour la présentation des différentes requêtes. Je tiens à

22 souhaiter la bienvenue à tous les nouveaux conseils qui comparaissent

23 pour la défense. Je pense que vous comprenez que vous avez donc le

24 droit de parler à moins que le droit de parler n'ait été affecté à

25 un co-conseil. Et s'il est probable qu'il y ait absence du

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1 co-conseil, il faudrait informer la Chambre de première instance pour

2 motiver l'absence du co- conseil et pour informer aussi de la

3 probabilité de sa comparution ultérieure. Il a été indiqué que

4 nous allons examiner toutes les exceptions en cours d'examen.

5 Je crois que neuf exceptions ont été soulevées au nom de M. Landzo,

6 une au nom de M. Delic et deux au nom de M. Delalic. Nous allons

7 donc les prendre selon l'ordre repris dans cette liste. Il y a eu

8 réaction de la part de l'accusation, du moins à l'égard des neuf

9 exceptions soulevées pour M. Landzo. Je suppose qu'il y en a aussi

10 deux pour l'ajournement. Monsieur Brackovic va prendre position sur

11 ces exceptions et va les examiner une à une.

12 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Madame et messieurs

13 les juges, je voudrais présenter la requête de la défense aux fins de

14 l'ajournement du procès. S'agissant des autres requêtes ou

15 exceptions, déposées par ma collègue, Mme Cynthia Mc Murrey, je

16 demanderai à la Chambre de première instance de lui permettre de

17 présenter ses arguments. En effet, même si ces exceptions ont été

18 soulevées avec mon accord, après consultation avec moi, je ne serais

19 pas en mesure de les présenter aussi bien que ma consoeur ne pourrait

20 le faire puisqu'elle a elle-même élaboré beaucoup de ces exceptions.

21 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Effectivement, madame

22 pourra présenter ses différentes exceptions. Poursuivez, monsieur.

23 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Merci, monsieur le

24 président. Le 31 décembre 1996, la défense a déposé une requête aux

25 fins d'ajournement de la date d'ouverture du procès. Dans cette

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1 requête sont présentés les arguments détaillés avec un certain degré

2 de détail. Telles sont les raisons pour lesquelles cette exception

3 a été soulevée. La raison principale étant, à notre avis, le fait

4 que la défense de M. Landzo n'est pas prête, si la date prévue

5 demeure, à savoir le 28 janvier 1997. Mais je vais commencer par

6 l'exposé des arguments et plus précisément par le point 3. Les

7 déclarations fournies par l'accusation, s'agissant des témoins à

8 charge, ont été distribuées trop tard à la défense. Etant donné

9 la date qui avait été précédemment prévue pour le début du procès,

10 le 5 décembre, le bureau du procureur a remis à la défense

11 43 déclarations qui étaient toutes en langue anglaise. Cependant,

12 l'anglais n'étant pas la langue maternelle de l'accusé, il ne

13 comprend pas ni ne parle cette langue, cela voulait dire que

14 l'accusation se devait de traduire ou de faire traduire toutes

15 ces déclarations dans la langue maternelle de l'accusé. La défense

16 ne comprend pas pourquoi toutes ces déclarations étaient fournies

17 en anglais alors qu'elles ont été faites en bosniaque, en serbe ou

18 dans des langues de la région d'où provient l'accusé. Or les

19 déclarations initiales n'ont jamais été remises dans une de ces

20 langues que comprendrait l'accusé. En revanche, elles ont été

21 présentées en langue anglaise et c'est la raison principale que

22 nous invoquons, parce qu'il a fallu traduire tous ces documents

23 dans la langue de l'accusé. Avant le 5 décembre, à savoir le

24 23 novembre, l'accusation a remis à la défense 19 déclarations

25 de témoins potentiels pour le procès. C'est un problème qui se

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1 présente également pour ce qui est de tous les autres coaccusés.

2 Tous les conseils de la défense se sont entendues pour dire que

3 toutes ces déclarations devaient être traduites et remises au

4 conseil de la défense. En effet, parmi ces nombreuses déclarations,

5 certaines d'entre elles sont très longues et quelques-unes

6 comptent sept à dix pages. Ces déclarations étant nombreuses et

7 longues, le travail n'a pas pu se faire rapidement. J'étais présent

8 au Tribunal de La Haye, dans la période qui a précédé le 19

9 décembre. Au cours de ce séjour à La Haye, l'accusé n'a pu obtenir

10 que moins de la moitié des déclarations traduites. Au moment où

11 cette exception a été soulevée, l'autre moitié, un peu plus de la

12 moitié des déclarations, n'a été remise à l'accusation que plus

13 tard. Mais l'accusé n'était pas en mesure, alors, d'en discuter

14 avec son ou ses conseils. Ce n'est qu'après mon arrivée à La Haye,

15 le 6 janvier 1997, et seulement dans la période allant du 6 au

16 9 janvier 1997 que j'ai pu discuter avec l'accusé de la teneur de

17 ces déclarations, déclarations qui ont été reçues par la défense

18 dans la période allant du 19 décembre au 6 janvier. Mais cette

19 période était très courte. En fait, nous n'avons eu que trois

20 jours. Nous n'avons donc pu avoir qu'une discussion superficielle à

21 propos de ces déclarations. C'est seulement aujourd'hui que je suis

22 en mesure d'avoir des conversations plus poussées avec l'accusé,

23 s'agissant de toutes les déclarations remises par l'accusation à la

24 défense, déclarations que l'accusation entend utiliser en cours de

25 procès. Voilà donc une des raisons principales qui a poussé le

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1 conseil de la défense à soulever cette exception aux fins

2 d'ajournement du procès. Je me contenterai d'ajouter qu'après dépôt

3 de cette exception, après le 6 janvier 1997, la défense a pris

4 connaissance de la liste définitive des témoins que l'accusation

5 entend citer au procès ou qu'elle a peut-être et l'intention de citer

6 au procès. L'argument suivant, contenu dans notre exception visant

7 à l'ajournement du procès, se trouve au point 4. L'accusation a

8 manifesté son intention d'utiliser un nombre important

9 d'enregistrements vidéo au procès. Le 10 décembre 1996, la défense

10 a déposé une requête écrite au greffe du Tribunal demandant qu'un

11 magnétoscope soit mis à la disposition de l'accusé. Le 12 décembre

12 1996, j'ai reçu par écrit une information selon laquelle un

13 magnétoscope avait été préparé et serait mis à disposition de

14 l'accusé pour une période de deux semaines. Toutefois, l'accusé n'a

15 pu avoir l'occasion de voir ces enregistrements qu'après le 12

16 décembre 1996, après que nous ayons formulé plusieurs requêtes

17 verbales au quartier pénitentiaire. La défense a alors demandé à

18 M. Marro et à M. Berisford, à une reprise et plusieurs jours se sont

19 écoulés avant que l'accusé n'ait l'autorisation finalement d'utiliser

20 ce magnétoscope. Dans la mesure où l'accusation a l'intention

21 d'utiliser neuf enregistrements vidéo qui ont été remis à la défense

22 en tant qu'éléments de preuve pour le procès et étant donné

23 également que les autres accusés se sont vus prendre aussi d'autres

24 enregistrements, je pense qu'en tout il s'agira de 90

25 enregistrements vidéo. La défense a manifestement besoin de revoir

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1 ou de voir ces enregistrements, s'ils sont utilisés au cours du

2 procès. Mais la défense devrait pouvoir aussi voir tous les autres

3 enregistrements vidéo qui auraient été pris des autres co-accusés.

4 C'est une des raisons pour lesquelles la défense a le droit et la

5 volonté de pouvoir réellement examiner ces enregistrements vidéo,

6 même s'il s'agit d'enregistrements vidéo que l'accusation n'a pas

7 l'intention d'utiliser. Ce faisant, en examinant ces

8 enregistrements, la défense pourra constater s'il y a des

9 circonstances qui sont atténuantes ou qui pourraient diminuer

10 l'importance des faits incriminés. J'aimerais indiquer un autre

11 élément, quelque chose que j'ai découvert hier soir lorsque j'ai

12 rendu visite à mon client au quartier pénitentiaire. Hier, les

13 gardes du quartier pénitentiaire avaient emporté le magnétoscope

14 pendant plusieurs heures à titre provisoire. La raison invoquée par

15 eux était que les coaccusés devaient aussi revoir certains

16 enregistrements vidéo. J'aimerais insister sur le fait que l'accusé,

17 même à l'heure actuelle, n'est donc pas en mesure d'avoir une

18 utilisation illimitée dudit magnétoscope. Ceci sans nul doute aura

19 un effet négatif sur la capacité qu'aurait mon client, l'accusé, à

20 bien utiliser le magnétoscope et à voir tous les enregistrements

21 qu'il veut voir. J'aimerais également faire remarquer un point, et

22 il s'agit là du point 6 de l'exception soulevée aux fins

23 d'ajournement du procès. Dans une notification déposée le 17

24 décembre par l'accusation, il est dit que l'accusation a plusieurs

25 dépositions de détenus de Celebici obtenues des autorités de la

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1 Republika Srpska et d'organisations non gouvernementales, et qu'elle

2 avait peut-être l'intention d'appeler certains de ces témoins pour

3 témoigner au procès. Dès que j'ai reçu cette notification en date du

4 17 décembre 1996, en tant que conseil de la défense, j'ai demandé

5 que ces déclarations me soient remises ou soient mises à ma

6 disposition. Pourtant, alors que j'étais à La Haye jusqu'au

7 19 décembre, l'accusation n'a pas été en mesure de préparer ces

8 différentes pièces à mon intention. Je n'ai pu prendre connaissance

9 de ces pièces que de la période allant du 6 au 9 janvier ou, pour

10 être plus exact, le 8 janvier 1997. Ceci vaut également pour le

11 point 7 de cette exception aux fins d'ajournement du procès, pour ce

12 qui est des photographies, des enregistrements vidéo et des

13 maquettes du camp. La défense n'a pu prendre connaissance de ces

14 pièces que le 8 janvier 1997. En outre, au point 8 de notre requête,

15 il est dit que la défense a été informée du fait que l'accusation

16 avait l'intention de citer des témoins experts en vue de témoigner

17 sur des questions militaires, ainsi que sur les structures

18 politiques, et l'histoire et le contexte pertinent pour ce qui est

19 du conflit, mais ceci à une date très tardive. Voici les noms des

20 experts : Mme le Dr Francine Firedman des Etats-Unis, Mme le Dr

21 Marie-Janine Calic qui vient de la République fédérale d'Allemagne,

22 Général de Vogel qui est un général à la retraite des forces

23 militaires néerlandaises. Cependant, à ce jour, la défense n'a reçu

24 aucune conclusion ou rapport écrit de ces témoins experts alors que

25 c'est nécessaire pour assurer une bonne défense. En effet, il s'agit

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1 de questions très importantes qui ont une incidence sur le contexte

2 historique et qui sont importantes pour le chef n° 2 de l'acte

3 d'accusation, ainsi que pour le chef n° 48 de l'acte d'accusation.

4 En qualité de conseil de la défense, ce n'est qu'hier que j'ai reçu

5 un document assez court, document portant sur les éventuelles

6 conclusions et avis des experts témoins proposés. J'estime toutefois

7 que ces pièces ne m'ont pas été remises en temps opportun. De plus,

8 de l'avis de la défense, ces pièces ne suffisent pas. La défense

9 voudrait faire intervenir ses propres experts témoins, et voudrait

10 aussi que ceux-ci puissent prendre connaissance des conclusions

11 proposées par les experts que l'accusation entend citer. La défense

12 veut fournir une réponse correcte, adéquate, sans devoir être

13 acculée à une position d'observateur silencieux lorsque les experts

14 témoins que propose l'accusation interviendront. Cette crainte nous

15 est particulièrement inspirée par le fait que les témoins experts

16 que l'accusation a l'intention de citer -et je fais ici référence à

17 Mme Marie-Janine Calic, s'explique par le fait qu'au vu du nom de

18 famille de Mme Calic, il s'agit là d'une dame qui vient de l'ex-

19 Yougoslavie. Pour ce qui est du général de Vogel, nous craignons

20 également que son témoignage ne soit influencé par les événements

21 malheureux de Srebrenica. En effet, les forces militaires

22 néerlandaises à Srebrenica, par leur comportement passif, ont permis

23 le massacre de milliers de civils. Au paragraphe 9, la défense

24 ajoute encore que seront communiquées les conclusions d'ONG, il

25 s'agit notamment de veille d'Helsinki et d'autres conclusions qui

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1 nous viennent de la CSCE. Ces conclusions seront présentées en

2 anglais. Or l'accusé ne parlant ni ne comprenant l'anglais, étant

3 entendu que le Tribunal est dans l'obligation de produire toutes les

4 pièces à l'accusé dans la langue de l'accusé, ce fait est une raison

5 supplémentaire justifiant l'ajournement du procès. Au paragraphe 11

6 de notre exception préjudicielle aux fins de l'ajournement du procès,

7 il est indiqué que l'accusation dans sa notification du 5 décembre

8 1996 a informé la défense de son intention de présenter au cours du

9 procès comme élément de preuve, divers articles publiés dans la

10 presse entre le 24 et le 26 juillet 1992. Cela étant, ces articles,

11 qui ont été produits par l'accusation le 10 décembre, n'étaient

12 rédigés ni en anglais ni en bosniaque. Il s'agit d'article de la

13 presse arabe, donc rédigés en arabe. Une langue que ni la défense,

14 ni le conseil de la défense ni l'accusé ne parlent. Ce n'est que

15 plus tard, le 8 janvier 1997 je pense, que la défense a reçu les

16 traductions de ces articles de presse. Ils ont été traduits en

17 anglais. Au paragraphe 12 de l'exception préjudicielle aux fins de

18 l'ajournement du procès, la défense évoque le problème de l'état de

19 santé mentale de l'accusé. Aucun des autres accusés n'a ce problème.

20 Par conséquent, aucun des conseils de la défense des autres conseils

21 de la défense n'a eu besoin de s'intéresser à cette question. La

22 Chambre de première instance sait que trois examens psychiatriques

23 ont déjà été menés, trois examens différents. Le premier examen

24 portait sur la compatibilité de la détention avec l'état de santé

25 mentale de l'accusé. Le deuxième examen portait sur la capacité de

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1 l'accusé de passer en procès. Le troisième examen portait sur la

2 responsabilité mentale de l'accusé au moment où les crimes allégués

3 qui lui sont reprochés auraient été commis. Outre ces trois examens,

4 le conseil de la défense a déposé des documents s'ajoutant à

5 l'exception préjudicielle aux fins de la mise en liberté provisoire

6 de l'accusé ainsi qu'à la requête visant à la modification des

7 conditions de détention de l'accusé. Plusieurs conférences de mise

8 en état ont déjà été tenues pour examiner ces différentes requêtes,

9 notamment les 12 et 17 décembre. Lors de ces conférences de mise en

10 état, les conseils des autres accusés n'étaient pas tenus de prendre

11 part car cela ne concernait pas leur propre client. Le 9 janvier

12 1997, le conseil de la défense a préparé une audience avec le

13 président du Tribunal concernant la requête qui visait à la

14 modification des conditions de détention de l'accusé. La raison pour

15 laquelle je rappelle tous ces faits est que je tiens à expliquer que

16 la défense n'a pas été à même de participer entièrement à l'enquête

17 pour laquelle la date du 15 janvier 1997 avait été fixée comme délai

18 dans le cas de Esad Landzo. Je voudrais aussi faire remarquer,

19 concernant ces problèmes que j'ai déjà évoqués, que la défense s'est

20 attelée à la rédaction d'une série de requêtes et exceptions

21 préjudicielles, elle a correspondu avec l'accusation. Et pour toutes

22 ces raisons qui sont des faits objectifs, la défense n'a pas pu

23 enquêter pendant un temps. Même l'enquêteur recruté pour obtenir des

24 garanties supplémentaires du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine

25 n'a pas obtenu ces garanties et donc la défense n'a pas été à même

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1 de mener son enquête dans le délai imparti, c'est-à-dire le 15

2 janvier 1997. Au paragraphe 13 de la requête de la défense aux fins

3 de l'ajournement du procès, la défense rappelle encore que les

4 conditions atmosphériques étaient très mauvaises en Bosnie-

5 Herzégovine lorsque l'enquête a été menée, les 24 et 25 décembre et

6 jusqu'à ce jour. Pendant toute cette période en Bosnie-Herzégovine,

7 et en particulier aux alentours de Sarajevo de Conijc, le temps

8 s'est très nettement détérioré et des précipitations de neige ont

9 été enregistrées. Il a aussi fait très froid, jusqu'à moins 15°. Je

10 pense que c'est un phénomène qui est bien connu. Cette vague de

11 froid a traverser toute l'Europe pendant cette période. Je peux vous

12 lire quelques titres parus dans la presse pour vous montrer que

13 cette vague de froid est un fait bien établi : "Verglas sur la

14 route", "ville bloquée par la neige", "mauvaises conditions

15 atmosphériques sur toutes les routes", "même le sel ne suffit plus",

16 "les services météorologiques annoncent que leur machine tombe en

17 panne", "routes glissantes", "la Krajina bloquée par la neige", "le

18 gel de retour", "toute l'Europe frappée par une vague de froid et

19 des tempêtes de neige". Puis d'autres articles de presse des 13 et

20 14 janvier indiquent que dans la plus grande partie de la Bosnie-

21 Herzégovine les routes sont mouillées, glissantes, on y trouve ce que

22 l'on appelle de la "glace noire". Toutes ces conditions

23 atmosphériques provoquent de nouveaux problèmes. Le 14 janvier, de

24 nouveau verglas en maints endroits sur la route. Pour ce qui est

25 toujours des conditions atmosphériques, je voudrais rappeler que moi-

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1 même j'ai vu mon vol annulé au départ de Sarajevo le 10 janvier et

2 donc j'ai dû me rendre en autobus plus loin. A cause du verglas et

3 des précipitations de neige sur la route, nous nous sommes

4 retrouvés coincés pendant trois heures à l'un des arrêts, toujours

5 à cause des mauvaises conditions atmosphériques. Il m'était très

6 difficile de revenir à La Haye car je n'ai pas pu prendre d'avion à

7 Sarajevo pour aller à Zagreb étant donné que le temps était très

8 mauvais et que le vol avait donc été annulé. Je n'ai su que le vol

9 avait été annulé que très tard, et comme cela m'était déjà été

10 arrivé auparavant, j'avais déjà dû aller en autocar de Zagreb à

11 Sarajevo et l'inverse, j'ai donc pris la précaution de partir

12 24 heures plus tôt que ce qui était vraiment nécessaire. Je

13 craignais en effet que si je m'engageais dans ce voyage par

14 d'autres moyens, j'allais rater le vol à destination de Amsterdam

15 et auquel cas, je serais arrivé en retard à cette conférence de

16 mise en état. Je peux vous dire que dans ces conditions qui sont

17 franchement impossibles, la défense a essayé et a réussi en partie

18 à mener son enquête. Il est évident que dans des conditions

19 climatiques normales, l'enquête aurait été menée de bien meilleure

20 façon et de façon beaucoup plus approfondie. Je voudrais aussi

21 indiquer ou rappeler les raisons qui apparaissent dans le document

22 complétant la requête de la défense aux fins de l'ajournement de la

23 date du procès, je tiens à rappeler une de ces raisons. Mon collègue,

24 Mme Cynthia Mc Murrey va revenir sur ces questions évoquées dans le

25 document supplémentaire. Pour ma part, je me contenterai de dire

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1 qu'aujourd'hui, une possibilité qui n'est arrivée que tard dès lors

2 que la liberté de mouvement s'est améliorée sur le territoire de la

3 Bosnie-Herzégovine, maintenant donc, la défense est plus à même de

4 mener son enquête et d'interroger certains des témoins à charge

5 conformément à l'article 21 du statut, paragraphe 4 e. Je pense

6 qu'il importe pour la défense de mon client Esad Landzo, que la

7 défense puisse mener une enquête et interroger certains des témoins

8 à charge. Cela ne fait pas de doute. Or la défense n'a pas été à

9 même de le faire jusqu'ici dès lors qu'elle n'a reçu qu'en janvier

10 la liste définitive des témoins à charge, et aussi parce que cette

11 amélioration dans la liberté de mouvement est un élément nouveau.

12 Cela ne fait qu'un mois à peu près que cette liberté s'est

13 renforcée. C'est la raison pour laquelle la défense demande

14 également l'ajournement du procès pour une période plus longue que

15 celle qui est mentionnée dans la première requête d'ajournement et

16 dans le document complémentaire. De fait, dans le document

17 complémentaire, il y a une erreur : il ne faut pas comprendre le

18 20 mars, mais le 20 mai. Cela dit, ma confrère, Mme Mc Murrey, vous

19 donnera davantage de détails sur ce point. Voilà donc les raisons

20 principales pour lesquelles la défense demande à la Chambre

21 d'ajourner le procès. Certaines de ces raisons, de l'avis de la

22 défense, font que la défense n'est pas prête pour le procès si celui-

23 ci devait s'ouvrir le 28 janvier 1997. Par ailleurs, je voudrais

24 répondre à la question de l'accusation qui se dit ne pas être

25 opposée à un ajournement jusqu'au 18 février, je pense. Nous pensons

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1 que cette période serait trop courte et que tous les obstacles

2 rencontrés par la défense ne seront pas réglés d'ici cette date, à

3 savoir le 18 février 1997. Je pense qu'il y a de bonnes raisons pour

4 que la Chambre de première instance décide de reporter le procès au

5 20 mai 1997, ce qui signifie moins de quatre mois de retard.

6 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Puis-je poursuive,

7 monsieur le président pour ce qui concerne la requête

8 d'ajournement ?

9 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui.

10 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Mon collègue vient de

11 vous expliquer en détail les raisons spécifiques pour lesquelles

12 cette requête est déposée à ce moment, y compris l'argument de force

13 majeure. Mais pour ce qui me concerne, je retiendrai les aspects

14 généraux en m'écartant un peu de la requête en tant que telle. Je

15 crois que les insuffisances qui ont empêché la défense, comme le

16 stipule l'article 21 "toutes les personnes sont égales", il doit y

17 avoir égalité et respect des garanties minima qui figure au petit g

18 de l'article 21.4, n'est-ce pas ? Quand nous sommes arrivés ici, et

19 je ne tiens pas du tout à abuser le Tribunal, c'est que bien qu'en

20 présence d'arguments de force majeure, et en présence d'arguments

21 liés aux difficultés qui viennent d'être évoquées, la seule raison

22 pour laquelle la défense n'est pas prête à ce stade, à accepter le

23 procès, c'est la divulgation d'un certain nombre de courriers à des

24 moments non opportuns par l'accusation. Encore hier, nous avons reçu

25 de nouveaux éléments de preuve. Après avoir lu les documents émanant

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1 de la conférence de mise en état du 1er novembre, nous voyons que

2 même le juge Mc Donald déclare qu'il est très clair que la situation

3 est différente. Le juge Mc Donald a dit que les dates de remise des

4 éléments de preuve étaient évidentes. Lorsque vous recevrez les

5 documents que l'accusation a l'intention d'utiliser, personne ne

6 sera en mesure de savoir ce que vous utiliserez vraiment. J'attire

7 donc l'attention de la Cour sur le fait que nous ne recevons pas

8 seulement des éléments de preuve, mais nous n'avons aucune

9 possibilité d'enquêter sur la validité de ces éléments de preuve.

10 Nous n'avons même pas le moindre moyen d'évaluer ces éléments de

11 preuve, jusqu'au moment où la décision est prise de les utiliser ou

12 pas. Donc nous sommes empêchés de fonctionner. Pour ma part, je suis

13 arrivée ici le 7 janvier. Je sais que ceci n'est que le deuxième

14 procès devant ce tribunal, mais l'accusation travaille depuis deux

15 ans déjà, elle dispose d'enquêteurs, de chercheurs juridiques, d'un

16 personnel entier. Pour ce qui me concerne on m'a présenté la pièce

17 de la défense. J'y suis rentrée je n'y ai rien trouvé : pas de

18 photocopies, pas d'accès à des documents de recherche juridique, rien

19 de ce qui pourrait garantir l'égalité évoquée à l'article 21 du

20 statut. Je tiens donc à dire au greffe que dès que nous aurons

21 demandé les équipements et autres matériels qui pourraient nous

22 mettre sur un pied d'égalité avec l'accusation. Je dois remercier le

23 greffe pour toute l'aide qu'il a apportée à la défense de façon à ce

24 qu'elle soit sur le même pied que l'accusation. Mais je voudrais

25 revenir sur un certain nombre de points qui figurent dans la requête

Page 17

1 de report, et préciser notre demande. Nous demandons un report

2 jusqu'au 20 mai, plutôt que jusqu'au 20 mars. Nous pensons que ce

3 serait la seule manière pour nous d'être prêts et peut-être d'avoir

4 une possibilité d'examiner les documents qui nous ont été présentés

5 par l'accusation. Nous avons eu, le 8 janvier, une réunion avec

6 l'accusation, réunion informelle dans le hall du Tribunal. Au cours

7 de cette réunion, il nous a été dit que l'accusation possédait des

8 éléments de preuve qu'elle n'avait pas encore examinés. En vertu de

9 la règle concernant l'échange des éléments de preuve, je crois qu'il

10 est de leur devoir de nous communiquer ces preuves. Il serait donc

11 bon qu'il y ait une personne neutre qui puisse procéder à cette

12 communication de preuve. Je ne crois pas qu'il serait juste que

13 l'accusation décide de ce qui peut être important pour la défense,

14 ou de ce qui peut servir à abandonner telle ou telle poursuite. Je

15 crois donc qu'il serait peut-être bon qu'une personne neutre puisse

16 accéder à l'index des éléments de preuve et puisse donner son avis

17 sur ce qui pourrait être utile à divulguer. Il y a également les

18 bandes vidéo. Là, je vous donnerai un exemple des difficultés que

19 nous avons à nous préparer. J'ai en ma possession un document que

20 j'ai signé hier. Il y a plusieurs heures de déclaration sur vidéo de

21 l'accusé, M. Delic. Hier, on nous a donné cette bande. Nous avons

22 maintenant un projecteur de vidéo dans notre salle. Je viens de

23 signer le document stipulant que je ne sortirai pas cette bande

24 vidéo du Tribunal et que je m'engage à la restituer au bureau du

25 procureur d'ici à une certaine date. Or il y a une seule bande

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1 vidéo, quatre accusés et un seul écran, une seule télévision dans la

2 salle de la défense qui nous a été fournie cette semaine. Donc il

3 nous est impossible d'examiner et de voir toutes les bandes vidéo

4 qui nous ont été données. L'accusation a dit qu'elle allait en

5 utiliser neuf que nous n'avons pas vues, mais il y en a bien

6 d'autres dont nous pensons qu'il est de notre devoir de les voir

7 dans cette salle de la défense au préalable. Je crois savoir que

8 l'accusation a déclaré qu'à son avis nous n'avions pas le droit

9 d'interroger les témoins de l'accusation. L'article 21 stipule que

10 l'accusé a le droit d'entendre ou de faire entendre les témoins qui

11 parlent contre lui. Il serait irresponsable de notre part que nous

12 n'attendions que le début du procès pour savoir si nous avons le

13 droit ou pas d'interroger telle ou telle témoin. Nous pensons que

14 nous devons avoir le droit de poser la question aux témoins, si ces

15 témoins acceptent de nous parler. Il n'appartient pas à l'accusation

16 de décider si le témoin veut nous parler ou non, mais bien au témoin.

17 Or jusqu'à présent, nous n'avons eu aucun accès de quelque nature

18 que ce soit aux témoins de l'accusation car leur nom ont été rayés.

19 Nous n'avons donc aucune possibilité d'entrer en contact avec eux.

20 Ce qui nous met encore un peu plus en marge.

21 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Pourriez-vous nous

22 donner lecture du contenu de cet article du statut à haute voix, je

23 vous prie ?

24 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - "L'article 21.E

25 estime qu'une garantie minimum pour l'accusé consiste à interroger

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1 ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la comparution

2 et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions

3 que les témoins à charge." Je suis sûre que ceci peut faire l'objet

4 d'une interprétation, mais ma lecture est la suivante : si eux ont

5 le droit de parler à nos témoins, alors nous avons le droit de

6 parler à leurs témoins, dans un climat informel, hors de la salle

7 d'audience, c'est-à-dire dans un endroit où les témoins auront plus

8 de chances de discuter de la réalité des faits que dans un prétoire.

9 Je prierai, madame et messieurs les juges, de nous donner leur

10 interprétation, mais je crois qu'en droit coutumier nous avons le

11 droit de discuter.

12 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Il y a une requête

13 sur ce point.

14 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - La requête concernant

15 l'égalité d'accès ?

16 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, qui est tout à

17 fait distincte de la requête pour report du procès.

18 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - De façon générale,

19 étant donné tous les éléments que M. Brackovic a énuméré devant

20 cette Chambre, étant donné la présence de très nombreux éléments de

21 preuve que nous n'avons pas pu examiner, étant donné la divulgation

22 trop lente de ces documents par l'accusation à ce stade, il n'y a

23 aucun moyen d'être sûr que la justice sera bien servie si le procès

24 devait commencer le 28 janvier. De façon générale, sur la base des

25 points que je viens d'évoquer devant cette Chambre aujourd'hui,

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1 l'accusation ayant eu neuf mois pour préparer ce procès, ayant

2 bénéficié de deux reports, qu'elle a demandés précédemment, nous

3 sommes ici en présence du premier report demandé par la défense.

4 Donc si l'accusation a eu neuf mois pour se préparer, je crois que

5 quatre mois pour la défense n'est pas un délai extraordinaire à

6 demander.

7 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Merci, monsieur le

8 président. Nous venons d'entendre beaucoup de choses à la fois. Je

9 commencerai par souligner qu'un grand nombre des arguments présentés

10 en faveur du report se trouvent également dans les huit autres

11 requêtes déposées par la défense au nom de Landzo, ainsi que dans la

12 requête unique présentée par la défense au nom de M. Delic. Nous

13 traiterons de ces requêtes et nous nous répartirons le travail entre

14 nous. Monsieur Turone s'occupera des éléments de preuve à décharge

15 et établira clairement, devant cette Chambre, que nous avons appuyé

16 la défense à tout moment en ce qui concerne ces éléments de preuve à

17 décharge. Vous entendrez ensuite parler de la procédure de

18 divulgation et du langage à utiliser en matière de divulgation. En

19 fait, ce que nous affirmons, c'est que jusqu'à ce jour, nous avons

20 bien respecté le statut et le règlement de ce Tribunal. Maintenant,

21 j'entrerai dans certain des détails qui viennent d'être évoqués par

22 Me Brackovic et Me Mc Murrey, à commencer par le matériel fourni

23 pour l'examen des bandes vidéo. Je dois dire à la Chambre que le

24 3 juillet 1996, les avocats ont obtenu une liste de l'ensemble des

25 bandes vidéo, on leur a dit qu'ils pouvaient les inspecter, les

Page 21

1 examiner si tel était leur désir. Puisqu'ils n'ont déposé aucune

2 demande d'examen des bandes vidéo, puisqu'ils n'ont demandé aucun

3 matériel supplémentaire jusqu'au mois de décembre 1996, le greffe ne

4 leur a fourni qu'à ce moment-là le matériel demandé. Ce matériel est

5 disponible aujourd'hui. Il est donc impossible de se servir de cet

6 argument comme base à l'appui d'une requête concernant un report de

7 quatre mois. Je ne parlerai plus de ce sujet. Le matériel est

8 maintenant disponible. Faites, je vous en prie, ce que vous jugez bon avec

9 ce matériel. Je me tournerais sur la question des témoins

10 experts. Apparemment, les avocats de la défense ont peut-être mal

11 compris ce qu'était un témoin expert. Il s'agit de personnes qui

12 sont appelées par la Chambre d'instance pour l'aider, mais qui

13 parlent de l'objectivité des faits impliqués dans les crimes commis.

14 Il ne s'agit pas, monsieur le président, d'un nouvel aspect des

15 crimes invoqués. Nous parlons de meurtres, de passages à tabac, en

16 particulier pour M. Landzo, nous parlons donc de violences

17 perpétrées contre des gens détenus dans des conditions horribles.

18 Et on nous dit aujourd'hui que c'est un besoin, pour M. Landzo,

19 d'entendre ce que quelqu'un va dire au sujet de la toile de fond

20 historique et militaire. Nous affirmons que les témoins experts

21 -j'insiste, il s'agit de témoins experts, et non de témoins

22 oculaires, de tel ou tel chef d'inculpation- viennent ici, dans

23 cette Chambre d'instance, pour aider l'accusation à mettre en

24 évidence le contexte dans lequel ces événements horribles se sont

25 déroulés. Nous avons aidé les témoins de la défense en leur

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1 fournissant une liste des points qui seront traités par nos témoins

2 experts, témoins experts qui sont des experts renommés dans les

3 domaines sur lesquels ils seront interrogés. Nous souhaitons

4 simplement leur poser un certain nombre de questions objectives,

5 j'insiste objectives, sur ce qui est arrivé en leur demandant de

6 s'aider d'études universitaires, ou d'autres documents objectifs

7 auxquels il est possible de faire confiance. Des déclarations ne

8 leur ont pas été demandées. Ils seront interrogés par nous, dans le

9 prétoire, et bien sûr il y aura possibilité de contre-interrogatoire

10 par les conseils de la défense. Les conseils de l'accusation

11 aideront d'ailleurs et appuieront toute demande des conseils de la

12 défense qui souhaiteraient présenter leurs propres témoins experts.

13 Je ne crois pas qu'il faille faire de cette question un grand

14 problème. Je ne pense pas du tout que cela puisse être la base d'une

15 demande de report du procès car il s'agira d'entendre des

16 informations sur la toile de fond objective, les événements de

17 l'époque, et tout cela sera présenté devant cette Chambre d'instance.

18 Bien entendu si les avocats de la défense souhaitent bénéficier

19 d'experts, nous les appuierons également. J'insiste donc pour dire

20 cas ont mon avis, il est tout à fait approprié et tout à fait

21 inacceptable d'entendre un conseil de la défense, dans ce prétoire,

22 disqualifier une personne en utilsant son nom sans savoir quelle est

23 l'importance de ce nom, sans savoir d'où vient cette personne, sans

24 savoir quel est le champ d'expertise de cette personne. Nous

25 entendons le conseil de la défense écarter la totalité des experts

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1 néerlandais en raison des événements de Srebrenica. Il se trouve que

2 je sais ce qui c'est passé à Srebrenica et nous avons entendu un

3 expert néerlandais dans une autre affaire : l'affaire de Srebrenica.

4 Je pense donc qu'il est tout à fait inaproprié de laisser entendre

5 que des experts néerlandais ne pourraient être entendus en raison du

6 destin infortuné vécu par le bataillon néerlandais à Srebrenica.

7 Ayant dit cela, je poursuivrai en ajoutant que les documents de la

8 veille d'Helsinki, il n'y en a pas beaucoup, ces documents sont

9 maintenant en cours de traduction et seront remis à la défense. Ils

10 ne sont pas très nombreux, il ne faudra pas beaucoup de temps pour

11 en prendre connaissance. S'agissant de la traduction anglaise à

12 partir de l'arabe, je répéterai que cette demande a été présentée le

13 8 janvier. Elle concerne un document qui n'est pas très volumineux.

14 La détermination de l'état de santé de Esad Landzo, maintenant, cela

15 a impliqué un travail très important pour Me Brackovic qui a dû

16 comparaître devant cette Chambre d'instance et se préparer, mais il

17 s'agit là en fait d'un problème à soumettre à un spécialiste

18 médical, et c'est ce qui a été fait. De l'avis de l'accusation, cet

19 argument n'est donc pas non plus utilisable en tant qu'argument à

20 l'appui d'une demande de report de quatre mois. Je ne puis

21 m'empêcher de souligner que Me Brackovic nous a parler du temps

22 pendant environ 10 minutes, ce que je ne ferai pas pour ma part. Je

23 viens d'un pays ou moins 20° de température n'est pas quelque chose

24 de très rare, et je n'ai jamais entendu devant quelque Chambre

25 d'instance que ce soit qu'il convenait de reporter une audience en

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1 raison d'une température de cette nature, à moins bien entendu

2 qu'une partie concernée soit incapable de comparaître. Mais utiliser

3 l'argument du temps, qui a prévalu pendant quelques semaines dans

4 une partie déterminée de l'Europe, pour demander le report de quatre

5 mois d'un procès me paraît comme un argument impossible à prendre au

6 sérieux dans nos délibérations. J'aurais quelques autres points à

7 évoquer, par exemple le désir non spécifié de se rendre en Serbie

8 pour interviewer des témoins à la décharge de Landzo. Cela aussi

9 peut se faire après le début du procès. Toute relation

10 internationale dans tel ou tel pays, tout voyage est possible, même

11 après le début du procès. Donc de l'avis de l'accusation, cet

12 argument n'est pas non plus utilisable pour justifier le report du

13 procès. Ce voyage est possible à tous moments. Je ne crois donc pas

14 que cet argument puisse servir, lui non plus, comme argument à

15 l'appui d'un report. L'article 21 du statut, le président en a

16 demandé lecture de la bouche de Me Mc Murrey et je crois, pour ma

17 part, que les conseils de la défense l'ont mal compris. Il sort de

18 la convention européenne des droits de l'homme, mot pour mot. Il

19 est repris mot pour mot, et signifie en fait que l'accusé a le

20 droit d'interroger ou de faire interroger les témoins qui

21 s'expriment contre lui lors du procès. Maître Mc Murrey a évoqué

22 également la possibilité éventuelle de la défense d'entrer en

23 contact avec les témoins de l'accusation. Bien entendu il

24 appartient au témoin d'accepter ou de refuser, l'accusation n'a rien

25 à voir là-dedans. S'il l'accepte très bien ; s'il le refuse très

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1 bien aussi, mais ce n'est pas le problème de l'accusation. Comme je

2 l'ai dit, mes collègues à cette table s'occuperont d'autres points

3 de l'argumentation eu égard aux requêtes présentées aujourd'hui.

4 Mais en ce qui me concerne, j'ajouterai que dans notre réponse à ces

5 requêtes, nous utilisons constamment la phrase "la requête doit être

6 rejetée", car nous n'avons pas vu une seule requête qui, à notre

7 avis, soit susceptible de rapprocher la date du procès. Notre

8 conclusion définitive, c'est que nous n'aurons pas d'opposition à un

9 bref report demandé par la défense. Donc nous acceptons un report

10 jusqu'au 18 février 1997 au plus tard, mais pas plus.

11 M. le Président (interprétation de l'anglais). - La personne qui

12 s'exprime ensuite pour l'accusation a la parole.

13 M. Turone (interprétation de l'anglais). - Merci, monsieur le

14 président. J'ai l'intention de discuter de la requête concernant les

15 éléments de preuve à décharge qui a été déposée par le conseil de

16 M. Landzo. La défense, dans cette requête...

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi de vous

18 interrompre. Nous ne traitons pas des requêtes à ce stade, nous

19 traitons des arguments généraux à l'appui du report.

20 M. Turone (interprétation de l'anglais). - A l'appui du report, oui.

21 S'agissant du report de la date du procès, tout ce que l'accusation

22 avait à dire à ce sujet a déjà été dit par Me Eric Ostberg, monsieur

23 le président. M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci

24 beaucoup.

25 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi, monsieur

Page 26

1 le président. La défense peut-elle répondre aux arguments de

2 Me Ostberg ?

3 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Il y a une autre

4 demande de report.

5 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi.

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Une deuxième

7 requête présentée par Me Karabdic pour M. Delic, qui demande un

8 report jusqu'au 28 avril. Ai-je raison ? Si j'ai raison, dites-le

9 moi car nous examinerons toutes les requêtes de demandes de report

10 ensemble.

11 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

12 président, mon client a déjà passé beaucoup de temps en prison, soit

13 un mois et demi en prison en Bosnie, et sept mois pleins ici, ce qui

14 fait au total huit mois et demi de prison pour M. Delic. Ce qui

15 l'intéresse, c'est que le procès commence le plus tôt possible, tout

16 comme moi d'ailleurs. J'ai très déçu quand j'ai constaté que j'étais

17 dans l'obligation de présenter une requête de report, et il m'a été

18 très difficile également de faire connaître cette décision à M.

19 Delic. Or M. Delic l'a bien compris. Il a fait preuve d'une très

20 grande compréhension à cet égard. Je ne souhaite pas répéter ici les

21 raisons et arguments qui ont déjà été avancés par Me Brackovic et

22 Me Cynthia Mc Murrey car j'appuie tout à fait ces arguments. Je suis

23 d'accord avec eux. Mais il faut simplement revenir brièvement sur

24 les propos tenus par l'accusation au sujet de ces arguments de façon

25 à ne pas avoir à y revenir ultérieurement. Maître Ostberg nous a

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1 parlé des conditions climatiques en Suède. La Suède n'a pas été en

2 guerre depuis plus de 400 ans, alors qu'en Bosnie la guerre s'est

3 arrêtée hier, et tous les vingt ou trente ans, cette région a subi

4 une guerre. En Bosnie, il n'existe pas de conditions permettant de

5 marcher à pied ou de voyager facilement par moins 20° de température,

6 comme c'est le cas en Suède. Je vous donnerai un autre exemple. En

7 Inde, lorsque la température tombe à zéro, cela provoque des

8 centaines de morts, et moins 20° ne représentent pas une difficulté

9 en Suède. Je vous dis cela simplement pour vous montrer qu'il est

10 toujours difficile de prendre des exemples dans des pays étrangers

11 pour les adapter à la Bosnie. En Bosnie, les routes qui existent ne

12 correspondent pas à celles qui peuvent exister ailleurs, et s'il en

13 existe, elles ont été largement détruites pendant la guerre. Bien

14 entendu, des progrès sont en cours actuellement entre Sarajevo et

15 Konjic. Il y a une montagne, d'ailleurs toute la région est

16 montagneuse, les gens qui sont à Sarajevo sont très loin de Konjic

17 et d'autres petits villages. Lorsque la neige tombe, ce qui est le

18 cas en ce moment, la couche de neige est très épaisse et interdit la

19 circulation sur les voies de circulation que nous avons dans notre

20 pays. Ces voies de circulation sont en mauvais état et ne nous

21 permettent pas de jouir des conditions qui ont été évoquées il y a

22 quelques instants. Aussi, je pense que les propos de l'accusation

23 n'étaient pas sérieux à cet égard. Je reviendrai encore sur d'autres

24 propos de l'accusation, d'autres positions de l'accusation. Mon

25 client est ici depuis plusieurs mois, comme je l'ai déjà dit et

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1 pendant toute cette période, moi-même et les autres conseils de la

2 défense avons déposer un certain nombre de requêtes au Tribunal.

3 Nous avons constaté que l'acte d'accusation, ce qui est inhabituel,

4 se présente de façon non régulière car non-conforme à l'aspect que

5 devrait revêtir un acte d'accusation aussi bien chez nous que dans

6 d'autres pays. Nous avons tenté de remédier à cela. Nous avons

7 déposé des requêtes dans le but d'améliorer l'acte d'accusation,

8 dans le but de faciliter les travaux à réaliser dans le cadre de ce

9 procès, de façon que ce dernier puisse se dérouler le plus

10 rapidement possible. Mais rien n'a été accepté. Lorsque nous avons

11 attaqué la forme de l'acte d'accusation, il nous a été répondu que

12 nous n'avions pas le droit de revenir sur des points de l'acte

13 d'accusation dans la période immédiatement préalable au procès. Ce

14 qui à mon avis n'est pas exact. Le procureur-général a émis un

15 document qui est en contradiction avec le conseil de sécurité, avec

16 l'assemblée générale et avec les documents des Nations Unies en

17 général.

18 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Maître Karabdic,

19 nous parlons du report.

20 M. Karabdic (interprétation du serbo- croate). - Excusez-moi, mais

21 je dois dire...

22 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je

23 souhaite simplement vous entendre sur la question relative à votre

24 requête de report. M. Karabdic (interprétation du serbo-croate).

25 - Et bien ce que je suis en train de dire est étroitement lié à

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1 cette requête. Nous n'avons pas pu corriger la forme de l'acte

2 d'accusation dans les audiences préalables au procès. Maintenant, il

3 nous faut travailler beaucoup plus dur pour nous préparer au procès

4 dans ces conditions. Lorsque nous avons présenté des exceptions

5 préjudicielles reposant sur des points de droit, il nous a été

6 répondu que ces points de droit seraient résolus au moment du

7 verdict. Mais cela crée des difficultés pour nous car nous ne savons

8 pas exactement dans quelles conditions notre client sera jugé

9 responsable. Nous sommes amenés dans une situation où c'est à nous

10 de chercher à déterminer le verdict qui pourrait être prononcé

11 contre mon client. Dans ces conditions, je vous dirai qu'il est tout

12 à fait difficile de se préparer et en tout cas qu'il faut beaucoup

13 de temps pour le faire. Ce que je viens de dire figure dans les

14 requêtes écrites que nous avons déposées auprès du Tribunal et la

15 Chambre d'instance a bien constaté l'existence de toutes ces

16 insuffisances, mais a jugé que ces insuffisances n'étaient pas

17 suffisamment graves pour justifier d'y accéder. Cela étant, les

18 insuffisances existent, et nous sommes contraints d'organiser notre

19 défense dans le cadre de ces insuffisances, ce qui nous prendra

20 beaucoup de temps, aussi bien pour la solution apportée au point de

21 forme, qu'au point de droit. Je ne répéterai pas ce qui est déjà

22 dans les exceptions préjudicielles écrites, il y a des chefs

23 d'inculpation doubles ou qui se contredisent, il existe des chefs

24 d'inculpations pour lesquels la base juridique éventuellement à

25 invoquer pour établir les responsabilités n'est pas précisée et il

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1 est difficile de se préparer à un procès face à de telles carences.

2 Aussi je crois que nous aurons besoin de bien plus de temps pour

3 préparer la défense. Le temps ne suffit pas d'ici la date prévue

4 pour l'ouverture du procès. La Chambre de première instance a

5 reconnu après tout l'existence de telles carences. Il nous a fallu

6 beaucoup de temps pour déposer toutes ces exceptions préjudicielles.

7 Plutôt que de répéter les arguments, je me contenterai d'ajouter

8 ceci : la conduite adoptée par l'accusation a provoqué des retards,

9 l'accusation n'a pas remis les déclarations des témoins, elle n'a

10 pas remis les pièces qu'elle invoque pour appuyer ses arguments.

11 Nous en avons parlé ; M. Brackovic et sa consoeur en ont parlé. Je

12 souscris à ce qu'ils ont dit, et j'aimerais insister sur la question

13 des experts témoins. Hier, l'accusation nous a remis sa

14 notification. Elle y parlerait du contenu probable des déclarations

15 des experts témoins. Ce n'est pas un document qu'elle est obligée

16 de nous remettre. L'accusation est obligée de remettre les

17 déclarations des témoins, au titre de l'obligation des échanges de

18 moyens de preuve. Il n'est pas possible d'accepter la déclaration

19 de M. Ostberg, selon laquelle elle n'a pas les dépositions des

20 experts témoins. Parce que sur quoi se serait basé l'accusation

21 pour rédiger ses arguments, si elle n'a pas le contenu de ces

22 déclarations ? Comment l'accusation pourrait-elle savoir ces choses,

23 s'il n'y a pas eu des contacts préalables avec ces experts témoins ?

24 Nous avons besoin de ces éléments. Il fallait bien rédiger,

25 l'accusation a rédigé sur la base de quelque chose. Nous ne pourrons

Page 31

1 nous préparer à la défense que si nous avons l'intégralité des

2 documents entre nos mains. Alors que nous n'avons reçu ceci qu'hier.

3 Il nous faudrait bien sûr procéder à l'examen de tout ceci et nous

4 pourrons alors présenter un argumentaire plus complet. Je pense

5 toutefois que la mesure adoptée par l'accusation n'était pas

6 régulière. Je crois que l'accusation doit avoir la teneur des

7 déclarations des experts témoins, elle doit nous la remettre.

8 S'agissant de l'enquête à mener, je ferai remarquer que nous tenons

9 à examiner les témoins, les témoins à charge. Or, nous n'avons pu

10 le faire que tout récemment. Nous parlons ici des témoins qui vivent

11 sur le territoire de Yougoslavie, ainsi que ceux qui vivent sur le

12 territoire de la Republika Srpska. Nous avons un droit, établi par

13 le statut du Tribunal, qui nous permet de contacter les témoins,

14 d'obtenir des informations, de ces témoins, ceci dans les mêmes

15 conditions que celles que connaissait l'accusation quand elle a

16 entendu nos témoins à nous, les témoins de la défense. Mais tout

17 ceci va nécessiter énormément de temps. En effet, d'entrée de jeu,

18 l'accusation a essayé de nous poser des difficultés dans l'exercice

19 de ce droit puisque ne figuraient pas les coordonnées et les

20 adresses des témoins. Il nous a donc fallu beaucoup de temps pour

21 essayer de savoir où se trouvaient ces témoins. En revanche, pour ce

22 qui est de chacune des déclarations que nous avons nous- mêmes remis

23 à l'accusation, nous avons toujours fait figurer les coordonnées du

24 témoin. Aussi, il a été facile à l'accusation de savoir où se

25 trouvaient ces témoins. De surcroît, les conditions s'étant

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1 améliorées, nous aimerions poursuivre, élargir notre enquête. Pour

2 ce faire, nous aimerions interroger, à titre de témoins à décharge

3 beaucoup de personnes qui se trouvent pour le moment en Yougoslavie

4 ou sur le territoire de Republika Srpska. Ceci nécessite à nouveau

5 du temps. Or, vu le délai que je prévois dans mon exception

6 préjudicielle, je crois que ce temps, nous le méritons, il doit nous

7 être accordé. J'ajouterai que si nous demandons le report du procès,

8 ce serait aussi en raison de l'état de santé de M. Delic, comme le

9 précise notre requête. Il a été blessé à la jambe droite, au début

10 de la guerre. Il souffre encore des séquelles de cette blessure. Au

11 cours de la guerre, il a été emprisonné. Il a eu une hernie discale,

12 ce qui a provoqué des douleurs considérables dans les jambes. Il

13 n'aura donc qu'une capacité limitée à suivre les débats du procès.

14 Cette maladie a fait l'objet d'un diagnostic, ici, à La Haye, de la

15 part d'experts en médecine au quartier pénitentiaire. Il y a des

16 docteurs qui ont témoigné de son état de santé. Il existe des

17 documents à ce propos. Il est soumis à une thérapie pour le moment,

18 thérapie qui va durer plusieurs mois et aux termes de laquelle nous

19 saurons s'il doit subir une intervention chirurgicale. Il y a un

20 problème parce qu'il y a un nerf qui a été touché lors de la

21 blessure, situation qui nécessite un traitement thérapeutique. Si ce

22 dernier échoue, il faudra passer à une intervention chirurgicale.

23 Après thérapie et après éventuelle intervention chirurgicale, M.

24 Delic sera alors tout à fait à même de comparaître et de suivre de

25 façon adéquate les débats du procès. En l'état actuel, étant donné

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1 les douleurs dont il souffre, ses capacités sont entamées. Il est

2 incapable de se concentrer. Il doit prendre des médicaments. Il ne

3 peut pas garder une seule position pendant très longtemps. Dès lors,

4 il semble difficile pour lui d'être assis pendant très longtemps, ce

5 qui va poser des problèmes sérieux si le procès a lieu tout de

6 suite. Je ne répéterai pas les autres motifs qui figurent d'ailleurs

7 dans la requête écrite. Je ne les répéterai pas ici, sauf si madame

8 et messieurs les juges le souhaitent, auquel cas je m'exécuterai.

9 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

10 président, M. l'accusé Mucic aimerait une courte suspension.

11 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Fort bien. Nous

12 suspendons l'audience pendant 35 minutes et reprendrons nos travaux

13 à 12 heures 30. L'audience, suspendue à 11 heures 55, est reprise à

14 12 heures 30

15 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mesdames et

16 Messieurs, nous allons poursuivre pour voir s'il y a un quelconque

17 commentaire de la part des conseils de la défense pour MM. Mucic et

18 Delic, s'agissant de la question du report du procès, pour autant

19 que vous ayez, bien sûr, un commentaire à fournir.

20 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Je vous remercie,

21 monsieur le président. Nous avons reçu notification du Tribunal nous

22 demandant de préciser notre position sur cette question aujourd'hui.

23 Avant de vous présenter certains de nos arguments reflétant l'avis

24 des conseils de la défense de M. Delalic, je précise que nous

25 trouvons irrecevable que les conseils de la défense de mon client

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1 n'aient reçu, jusqu'à hier, 12 h 30, aucune requête provenant

2 d'autres conseils et requêtes qui devaient être l'objet de

3 discussions aujourd'hui. Il y a eu la réponse de l'accusation que

4 nous avons reçue hier à 17 h 00, et il apparaît clairement, à la

5 lecture de la rédaction, que l'accusation a reçu des requêtes

6 provenant de conseils de la défense qui avaient disposé d'un certain

7 temps pour préparer leur réponse à ces dites requêtes. Ceci montre

8 bien qu'il n'y a pas égalité pour ce qui est de la défense et de

9 l'accusation devant cette Chambre de première instance et j'aimerais

10 que soit apporté un correctif à ceci. S'agissant des questions qui

11 ont été soulevées, qui portaient sur le report du procès, au départ

12 la date du 28 janvier avait été arrêtée. A ce propos, je dirais que

13 la défense de M. Delalic jusqu'à présent a essayé d'écourter, dans

14 la mesure du possible, la période de préparation pour parvenir à une

15 situation qui permettrait d'avoir un procès rapide. Nous sommes

16 prêts pour l'ouverture du procès. Nous sommes partis du principe que

17 l'accusation nous a remis tous les moyens de preuve nécessaires, que

18 l'accusation a mis à notre disposition, conformément aux articles 66

19 et 67, tous les documents que nous avons demandés, conformément à

20 l'article B du Règlement de preuve et de procédure. Malheureusement,

21 lors de la dernière conférence de mise en état, nous ne disposions

22 pas des arguments précis, et j'avais pensé que l'accusation m'avait

23 remis tous les éléments de preuve dont elle disposait, et respectait

24 ainsi l'article invoqué, ainsi que l'ordonnance du 1er novembre.

25 J'étais partie de l'idée que j'avais reçu toutes les pièces

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1 nécessaires qui étaient en anglais. J'aimerais toutefois souligner

2 un fait, parce qu'il est certain que la Chambre de première instance

3 fondera sa décision sur les arguments avancés lors de la conférence

4 de mise en état. Je rappelle que le 29 mai, nous avons demandé

5 l'échange de moyens preuve. A l'époque, la défense avait remis à

6 l'accusation tous les moyens de preuve qu'elle avait à sa

7 disposition. Conformément à l'article 66 A et à l'article 67, il

8 incombait aussi à l'accusation de communiquer ces moyens de preuve.

9 J'ai découvert qu'à la date où nous avions remis tous les documents

10 à l'accusation, celle-ci nous avait remis 22 documents comme

11 documents ou pièces à l'appui de l'acte d'accusation. En fonction de

12 la date à laquelle furent entendues et prises ces dépositions, nous

13 avons découvert que sur 67 dépositions ou déclarations que nous

14 avions reçues fin novembre- début décembre, en anglais, sur ces

15 67 déclarations, seules 22 avaient été entendues avant après la date

16 butoir du 29 mai, et celles-ci provenaient de témoins qui avaient

17 déjà été entendus. D'après l'article 66 B, l'obligation incombe à

18 l'accusation de nous remettre toutes les pièces pour que nous

19 puissions préparer notre propre défense. J'ai été quelque peu

20 surprise de tout ceci, étant donné l'attitude de l'accusation,

21 l'argument étant toutefois que -comme l'avançait mon collègue-,

22 M. Brackovic, entre autres, même si nous avons reçu la plupart des

23 éléments de preuve, cela n'a pas été présenté dans une forme qui

24 nous permette de préparer la défense dans les délais prévus. Le

25 6 décembre, j'ai demandé à l'accusation de nous dire si elle

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1 disposait d'autres éléments de preuve, et ceci relevait aussi d'une

2 enquête que j'avais moi-même menée, et ces documents n'avaient pas

3 été communiqués à la date du 6 décembre. Lors de cette conférence de

4 mise en état, l'accusation a ajouté qu'elle disposait de

5 déclarations supplémentaires provenant d'autres témoins, mais

6 qu'elle n'avait pas l'intention de les utiliser. Dans le cadre d'une

7 autre communication ultérieure, j'ai reçu deux déclarations

8 supplémentaires, mais la liste qui nous avait été remise le

9 17 décembre indiquait la présence de ces deux déclarations, ce qui

10 veut dire que la liste qui nous avait été remise précédemment n'était pas

11 correcte. Je parle de la liste que nous avions six mois plutôt.

12 Il n'y avait donc pas eu pleine et entière communication par

13 l'accusation de tous les éléments dans les délais prescrits. Il y a

14 aussi la question de la traduction. Je pense que la Chambre de

15 première instance ne retiendra pas les arguments avancés par

16 M. Ostberg lors de la dernière conférence de mise en état, à savoir

17 qu'il s'agit de problèmes purement techniques. Il s'agit ici de

18 questions d'ordre juridique très sérieuses. Il s'agit de témoins

19 qui sont forcés à déposer dans une langue qui n'est pas leur langue

20 maternelle. Ils sont obligés de signer cette déclaration. Ceci

21 constitue aussi une entrave pour les travaux de la défense qui doit

22 préparer des entretiens avec lesdits témoins. Je souscris aux

23 autres arguments présentés par mes collègues qui évoquaient

24 notamment la question de l'obtention de tous les moyens de preuve

25 dans la langue de l'accusé. Vous avez pu le constater vous-mêmes, un

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1 effort considérable a été fait pour que 550 pages soient traduites

2 par la défense pendant une période de congé. Il faut aussi que je

3 parle des conditions climatiques qui prévalaient dans la région où

4 nous vivons. Etant donné toutes les destructions que nous avons

5 subies aussi pendant la guerre, nous n'avons pas été en mesure de

6 préparer au mieux notre ligne de défense. Madame Mc Murrey a soulevé

7 une question qui n'avait pas été soulevée auparavant, elle a parlé

8 de l'article 21 du statut qui nous donne le droit d'entendre les

9 témoins à charge. Notre collègue, M. Ostberg, visait, je pense,

10 l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ou des

11 droits politiques. Mais ce que Mme Mc Murrey a dit, c'est qu'à

12 l'examen du statut du tribunal et plus précisément de l'article 21,

13 s'ensuit immédiatement la question de la procédure. Cet article

14 montre bien que les droits de l'accusé sont des droits vraiment très

15 importants, ce qui veut dire qu'au cours de la période

16 préjudicielle, il est absolument impératif que nous nous entendions,

17 que nous examinions tous les témoins et que nous soyons en mesure de

18 les localiser. Lorsque nous avons essayé précisément de localiser

19 ces témoins dans le cadre de la défense de notre client, nous avons

20 pensé aussi qu'il y avait des informations à décharge qui figuraient

21 dans les déclarations de nos propres témoins. Nous avons fourni les

22 coordonnées de nos témoins, et l'accusation a donc pu les entendre.

23 Mais nous ne sommes pas en mesure de savoir avec exactitude, ni même

24 avec inexactitude, le pays dans lequel se trouvent ces témoins. Et

25 il est important que vous requériez de la part de l'accusation

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1 qu'elle nous fournisse des adresses, si ce n'est l'adresse du témoin,

2 au moins l'adresse de quelqu'un qui les représente, d'une

3 organisation, ce qui nous permettrait de localiser ces témoins. La

4 question suivante qui a été présentée par mes collègues, c'est la

5 question de la disponibilité d'autres éléments de preuve. La défense

6 de M. Delalic a insisté pour dire que tous les moyens de preuves

7 obtenues ou trouvées en sa possession soient remis à la défense.

8 L'accusation a disposé de plus de 90 enregistrements vidéo pendant

9 plus de deux mois. Il y a aussi 4 000 pages de diverses notes,

10 d'écrits, d'enregistrements, et lorsque la Chambre de première

11 instance a ordonné que les éléments qui ne seraient pas utilisés au

12 procès nous soient remis, l'accusation nous a rendu 25

13 enregistrements vidéo alors que, dans la liste, l'accusation parlait

14 de 12 enregistrements. Ce qui veut dire que les autres

15 enregistrements n'ont pas été remis, et ce qui signifie aussi que

16 ceci semble intéresser l'accusation. Si l'accusation est intéressée

17 par ces enregistrements, éventuellement dans le cadre d'un contre-

18 interrogatoire ou pour d'autres motifs au cours du procès, cela veut

19 dire que ces enregistrements sont aussi intéressants pour la

20 défense, parce que si la défense veut être à même de se préparer,

21 elle a besoin de ces enregistrements. Ici je ne représente pas les

22 autres accusés, je ne suis pas ici pour représenter non plus mes

23 collègues, mais il se fait que j'ai été en mesure d'être en

24 possession de ces 90 enregistrements et, de ce fait, je sais qu'il

25 n'est pas possible de simplement visionner ces enregistrements comme

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1 si on était au cinéma ou devant la télévision. Il faut voir ceci

2 dans le cadre d'une procédure pénale, il faut voir tout ceci dans le

3 contexte de notre préparation. Nous voulons pouvoir trouver des

4 arguments pour contrer les arguments de l'accusation au cours du

5 procès et ceci sera vrai pour tout moyen de preuve. Je pense que

6 nous pouvons accepter les autres arguments déjà évoqués précédemment

7 par mes collègues. Je me contenterai d'ajouter quelques mots

8 s'agissant des experts témoins. Il vous a déjà été dit qu'hier, à

9 12 h 30, que nous avons reçu une esquisse de ce dont discuteraient

10 les témoins experts. Avec tout le respect que je dois à

11 l'accusation, laquelle a peut-être une meilleure connaissance

12 historique et militaire de certains événements, je me dois de dire

13 que la défense n'est sans doute pas encore prête, étant donné

14 l'absence de préparatifs, à un contre- interrogatoire de ces experts

15 témoins, et là je reviens à la question de la langue ; vous savez

16 que tout ceci se fait en anglais ; nous avons deux conseils sur

17 quatre qui parlent l'autre langue officielle du Tribunal, à savoir

18 le français ; et ceci a été présenté comme si on parlait de n'importe

19 quel pays, comme si on parlait ici de données géographiques ou de

20 politique générale. Ceci ne contient rien de ce dont parlera un

21 expert témoin, rien de ce qui ressemblait à ce qu'a dit M. Garel

22 lors du procès de M. Tadic. On ne fait pas référence aux documents

23 qui seront utilisés par les experts. Là n'oubliez pas que nous sommes

24 vraiment très éloignés de ces documents, ou de ces éléments que vont

25 invoquer les experts témoins. La situation est donc telle qu'il nous

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1 sera difficile de procéder à un contre-interrogatoire de ces experts

2 lors du procès. Je ne soulèverai pas la question du statut politique

3 de ces témoins appelés par l'accusation, je rappellerai simplement

4 que ce Tribunal a été constitué pour éviter, par exemple, que des

5 conflits similaires se produisent dans d'autres pays à l'avenir.

6 Mais dans notre pays, vous avez des experts qui sont peut-être tout

7 à fait qualifiés pour parler des faits dont il va parler. Si un

8 témoin comparait venant d'un pays où quelque chose s'est passé qui

9 n'aurait pas dû se passer -là je parle des forces des Nations Unies

10 dans la région de Srebrenica-, je pense que ceci pourrait provoquer

11 des difficultés politiques, pourrait provoquer des réactions

12 malencontreuses à l'égard du Tribunal. Je répète que je ne veux pas

13 dénigrer l'expert qui est proposé, mais je pense que la réaction

14 publique à l'égard de ce témoin pourrait être négative pour ce

15 Tribunal. Mes collègues ont soumis des requêtes écrites aux fins de

16 report du procès. Et je pense que les arguments qu'ils ont avancés

17 étaient tout à fait valables. S'agissant de la position adoptée par

18 l'accusation, à savoir qu'il faudrait commencer le procès plus tôt

19 parce qu'il se pourrait que certaines personnes parmi les effectifs

20 de l'accusation pourraient abandonner leur poste au mois de juin,

21 ceci n'est pas une bonne raison. Vous savez que nous sommes une

22 institution dont je respecte tout à fait tous les membres, vous le

23 savez. Il n'en demeure pas moins qu'une telle institution ne peut

24 pas se servir d'un individu pour s'opposer au jugement équitable

25 d'un accusé.

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1 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous remercie.

2 Il n'apparaît pas que vous pensiez à une date précise. Vous avez

3 avancé certains arguments, Madame, vous avez présenté vos arguments

4 selon lesquels il faudrait un report, mais vous n'avez pas proposé de

5 date. Deux dates avaient été avancées : on avait parlé du mois

6 d'avril et du 20 mai également. Ces deux dates ont été proposés

7 notamment par les conseils de M. Landzo et de M. Delic. Mais

8 vous-même n'avez pas précisé de date, Madame. Est-ce bien exact ?

9 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

10 président, mon client est détenu depuis dix mois. Je sais qu'il nous

11 est impossible de nous préparer dans les délais proposés par

12 l'accusation, mais je suis sûre qu'après avoir entendu nos

13 arguments, monsieur le président, vous arrêterez une décision sage

14 et raisonnable quant à la date à prévoir. Ceci devrait nous

15 permettre de bien nous préparer et il est dans l'intérêt de la

16 justice que nos clients puissent pleinement participer à ce procès.

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je me tourne vers

18 M. Tapuskovic. M. Tapuskovic (interprétation du serbo-croate). -

19 Merci, monsieur le président. Je suis le seul conseil de la défense

20 qui n'ait pas soulevé d'exception préjudicielle supplémentaire. Je

21 n'ai rien demandé. Avant de dire quoique ce soit, je dois vous

22 rappeler que pour ce qui est de l'ouverture du procès, M. Drasco

23 Mucic n'a eu de cesse de protester et, grâce aux efforts de M.

24 Marro, et grâce aux nombreuses discussions qu'il a eues avec

25 M. Mucic, M. Mucic a cessé ses protestations. Il a rédigé une lettre

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1 à l'intention de la Chambre de première instance. Il s'est exprimé,

2 il a manifesté l'espoir que le procès pourrait commencer le 28. Nous

3 tenons à remercier M. Marro des efforts qu'il a entrepris pour

4 convaincre mon client qu'il n'était pas utile qu'il poursuive dans

5 cette voie. Je n'ai rien à dire. Mon opinion est la même que celle

6 que j'avais au début du procès et je ne veux pas en changer. Depuis

7 le mois de mars, au moment de son arrestation en Autriche, mon

8 client espère que ce procès, qui devrait régler la question de sa

9 culpabilité ou de son innocence, soit rapide et équitable.

10 L'article 20 du statut corroborait cet espoir. Il en était conscient.

11 Les autorités autrichiennes lui ont dit que le procès commencerait

12 très vite à La Haye. L'avis de M. Mucic, mon avis personnel, j'ai

13 commencé la défense de mon client en mai, et depuis la conférence de

14 mise en état du 1er août, nous n'avons pas changé d'avis. Depuis le

15 mois d'août, nous n'avons eu de cesse de demander qu'il y ait un

16 procès rapide et équitable. Je crois que c'est la moindre des choses,

17 dans le bon respect des principes régissant le statut. Nous restons

18 de cet avis aujourd'hui. Avec les moyens de preuve que nous a remis

19 l'accusation, il y a quelques jours de cela, nous aurions pu

20 commencer le procès au mois de mars. Auquel cas, nous n'aurions même

21 pas eu vingt jours pour nous préparer. Sans doute est-ce pour des

22 raisons tactiques que l'accusation n'a pas insisté pour qu'il y ait

23 procès parce que l'accusé suivant n'est arrivé au Tribunal que

24 quelques mois plus tard. Il était donc manifeste que l'espoir

25 d'avoir un procès rapide et équitable était un espoir vain. Au vu

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1 des moyens de preuve, je peux vous dire que si j'avais été conseil

2 de sa défense dès avril 1996, je n'aurais pas pu bien mener ma

3 défense. J'aimerais attirer votre attention sur plusieurs choses.

4 Dans plusieurs pays, certains délais sont prescrits pour l'enquête,

5 pour les procédures, il y a une obligation à commencer un procès,

6 surtout lorsqu'il y a des tensions de l'accusé. Le statut lui-même,

7 dans le respect de ses principes, accepté et retenu par pratiquement

8 tous les pays du monde, ce statut rappelait aussi en tant que

9 principes la nécessité d'un procès rapide, sans préciser de délai

10 pourtant. Un procès rapide, c'est donc la Chambre de première

11 instance qui doit interpréter cette notion. Mais ce faisant, il faut

12 respecter les principes de droit international, droit qui vaut pour

13 pratiquement tous les pays du monde. Il est patent que dans le cas

14 de mon client, on ne peut pas parler d'un procès rapide, puisque

15 cela fait pratiquement un an qu'il est détenu. Si Zdravko Mucic

16 était en liberté, qu'il était en mesure de s'occuper de ses enfants,

17 alors je demanderais peut-être un an, deux ans, voire sept ans pour

18 préparer ce procès. C'est l'exemple que cité l'accusation. Il y a eu

19 un cas où en fait la préparation du procès a duré sept ans. Si mon

20 client était en liberté, il est certain que je demanderais report

21 après report. Je sais qu'il a des problèmes et je sais qu'il y a des

22 questions d'ordre juridique, des points de droit. Ceci rend notre

23 vie à tous très difficile, mais en tant que conseil, il y a des

24 choses que j'ai comprises il y a vingt ans et je dois respecter ces

25 principes à toute occasion. La détention la plus difficile c'est la

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1 détention avant le procès. Je sais que vous avez connu quelques cas

2 dans votre vie professionnelle. Vous savez bien ce que veut dire la

3 détention. La culpabilité n'a pas encore été établie. Inutile de

4 vous expliquer tout ceci, ce sont des faits établis et bien connus.

5 La détention préventive provisoire est la punition la plus dure, la

6 plus sévère. En l'occurrence? le conseil de la défense doit faire

7 tout ce qu'il lui est possible et tout ce dont il est capable pour

8 se préparer le plus rapidement possible, même s'il faut pour cela

9 consentir des efforts particuliers pour s'acquitter en âme et

10 conscience de sa tâche. Cela fait sept mois que je suis occupé à

11 cette affaire, et je crois que je suis bien préparé. A certains

12 égards, bien sûr il faudra se préparer tout du long, il y a des

13 éléments qui vont surgir au cours du procès. Alors s'il fallait nous

14 préparer à la défense de façon à éviter toute surprise ultérieure,

15 c'est quelque chose d'impossible. Cela ne va pas se produire. Pour

16 ma gouverne, nous pouvons commencer non pas le 28 janvier, mais

17 demain. Je suis maintenant assisté d'une consoeur et il sera donc

18 beaucoup plus facile pour moi de travailler à l'avenir sur ce

19 procès. Si je devais demander un report du procès pour que ma

20 consoeur puisse se préparer, cela demanderait encore quelques mois.

21 Pour ce qui me concerne le procès peut commencer demain. Je suis

22 prêt. Bien entendu, monsieur le président, je ne vais pas revenir

23 sur ce qu'ont dit mes collègues conseils des autres accusés. Je

24 respecte entièrement ce qu'ils ont dit, et je m'en remets à vous

25 pour ce qui est de juger le bien-fondé de nos arguments. Mais mon

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1 attitude, et celle de M. Mucic, est que le procès devra commencer

2 immédiatement. A ce stade, parce que cela à avoir avec la date du

3 procès, il faut que je rappelle quelques faits relatifs à l'acte

4 d'accusation. Le procès a été reporté parce que l'accusation n'était

5 pas prête, reporté plusieurs fois pour des périodes de trois ou

6 quatre mois. Or maintenant, on nous présente les mêmes éléments de

7 preuve : rien de plus et rien de moins que ce que l'accusation avait

8 lorsque l'acte d'accusation était délivré. L'acte d'accusation a été

9 examiné à l'époque, et il a été jugé qu'il y avait des présomptions

10 suffisantes pour que l'acte d'accusation soit délivré. Si le

11 procureur veut respecter l'article 20 du statut, il peut le faire

12 dès lors qu'il n'y a rien de nouveau ici. Certes il y a six témoins

13 qui sont énumérés au début de la liste, c'est nouveau. Je peux

14 maintenant comprendre la défense des autres accusés qui sont

15 concernés. Mais je conclu, monsieur le président, si le procureur

16 voulait que le procès commence le 28, il n'aurait pas inclus ces

17 témoins dans la liste. Il aurait pu laisser la liste des témoins

18 susceptibles d'être cités en l'état. Car ce dont nous parlons ici,

19 c'est le fait que toutes les personnes qui étaient détenus au temps

20 de Celebici étaient protégées au sens de la Convention de Genève.

21 Nous ne devons pas déterminer s'il y a responsabilité pénale. Et

22 ensuite, bien sûr, il est très important de déterminer ce qui s'est

23 passé de façon générale dans la région afin de pouvoir établir les

24 mobiles des personnes qui s'y trouvaient. A cet égard, la défense des

25 autres accusés a raison. Auquel cas, il aurait été important de

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1 prendre en compte ces autres éléments. Mais le procureur a introduit

2 une certaine confusion en mettant en premier lieu ce qui aurait dû

3 venir ensuite. Voilà quelque chose qui n'a rien à voir avec

4 l'incrimination et les faits reprochés à l'accusé. En conclusion

5 donc, M. Mucic et moi-même en tant que conseils souhaitons que le

6 procès commence effectivement le 28 janvier. Il apparaît que

7 l'inclusion des témoins sur la liste est peut-être une tactique de

8 la part du procureur que le procès commence ou non le 28 janvier.

9 En bref, je suis le seul ici à être favorable à l'ouverture du

10 procès le 28 janvier. Puis-je m'asseoir ?

11 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Pas de problèmes.

12 Monsieur Ostberg ?

13 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Quelques observations

14 eulement. La plupart des éléments que j'ai avancés en réplique au

15 premier intervenant valent pour les autres conseils. Je dirai à

16 M. Tapuskovic qu'il n'est pas le seul à être prêt à commencer le

17 procès le 28 janvier, l'accusation est prête aussi. Ce que nous

18 disons, c'est que nous satisferons à la requête de vos collègues,

19 en reportant quelque peu le procès. Nous leur donnerions donc ainsi

20 satisfaction, mais notre position est que la date du 28 janvier et

21 une bonne date et pour notre part, nous serions prêts à ouvrir le

22 procès à cette date. Avant que nous levions l'audience, M. Karabdic

23 a parlé et ses propos recoupent un grand nombre de choses que

24 j'avais déjà dites en réponse à l'intervenant précédent. Cela dit,

25 je voudrais ajouter que la première comparution de M. Delic remonte

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1 au 18 juin 1996. Depuis cette date, M. KARABDIC a eu connaissance de

2 l'acte d'accusation, de sa forme, de la façon dont les accusations

3 ont été rédigées, et il a tenté de réfuter les chefs d'accusation.

4 Il a introduit un recours contre la décision de la Chambre de

5 première instance, mais l'acte d'accusation est toujours le même que

6 celui qu'il a vu le 18 juin 1996. Aujourd'hui, il nous dit avoir

7 besoin de beaucoup de temps pour préparer la défense de son client

8 contre les allégations contenues dans l'acte d'accusation. Alors que

9 c'est exactement l'acte d'accusation qu'il a vu à l'époque. Aussi,

10 je ne comprends pas cette façon qu'il a d'invoquer l'acte

11 d'accusation. Il est demandé à la Cour et au procureur de le

12 modifier. Cela ne peut être en aucun cas un argument pour le report

13 du procès. Voilà ce que j'avais à dire à titre général en réponse à

14 M. Karabdic. ensuite, on a posé la question de ce que nous avons

15 divulgué, de la façon dont nous avons divulgué, qu'en est-il des

16 éléments de preuve à décharge ? Sur ce point, je voudrais inviter

17 mes collègues, M. Turone et Mme Mc Henry à répondre. Avant cela, une

18 chose encore. Je trouve injuste de dire à la Cour que le procureur a

19 mis des entraves à la possibilité pour la défense de préparer la

20 défense des accusés. Ce n'est pas vrai. Nous avons fait plus que

21 ce qui nous était imposé par le statut et le règlement pour donner

22 satisfaction aux Conseils de la défense. Et nous avons toujours

23 essayé, dès lors que des demandes nous étaient présentées, d'y

24 donner suite dans toute la mesure du possible. Je ne peux donc

25 laisser passer cette affirmation de la défense qui considère que

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1 nous sommes en quelque sorte hostiles aux accusés.

2 M. le Président (interprétation de l'anglais). - La question des

3 éléments de preuve a décharge fait l'objet d'une autre requête et

4 c'est une question très différente car déposée dans le contexte déjà

5 du report.

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Monsieur Brackovic,

7 voulez- vous prendre la parole ?

8 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Oui, j'aimerais

9 répondre aux observations de M. Ostberg, ainsi qu'à certains propos

10 de mes collègues. Tout d'abord, je voudrais rappeler une nouvelle

11 fois à la Chambre que la requête d'ajournement du procès a été

12 étayée par différents arguments, dont certains touchent à la

13 capacité de la défense de se préparer au procès. Je voudrais

14 souligner à cet égard ce qui a été dit au sujet des conditions

15 climatiques. La défense a soulevé cette question et a expliqué que

16 c'était là l'une des raisons qui l'avait empêché de mener son

17 enquête au cours des vingt derniers jours. Les conditions qui ont

18 prévalu n'amèneraient pas la défense à demander le report du procès,

19 il s'agit plutôt des conditions climatiques à l'époque. L'intention

20 de la défense n'était pas non plus de jeter le discrédit sur les

21 avis des experts témoins. La défense n'a fait qu'exprimer une

22 crainte compte tenu de l'importance de ces témoignages et des

23 questions que les témoins experts aborderaient. Ces questions sont

24 d'une telle nature qu'il serait très dangereux pour la défense de ne

25 s'y trouver confrontée qu'au moment du procès. Sur ce point encore,

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1 nous continuons à craindre que ces témoins experts ne soient pas

2 entièrement objectifs concernant les événements qui se sont déroulés

3 en Bosnie- Herzégovine. Je pense que Mme Residovic a très bien

4 exprimé cette crainte pour ce qui concerne le général néerlandais et

5 la réaction que son témoignage pourrait provoquer dans l'opinion

6 publique. Surtout si la défense n'a pas le temps de se préparer à ce

7 témoignage. Je voudrais avancer un argument en faveur de la requête

8 de la défense, à savoir le retard avec lequel le procureur a

9 divulgué les éléments de preuve. Madame Residovic a précisé le

10 nombre de dépositions, de sorte que la défense s'est trouvée dans

11 une situation très difficile où elle ne peut mener son enquête en

12 temps opportun, et éprouvera des difficultés à trouver des éléments

13 de preuve à décharge. Le procureur n'a pas été à même de réfuter les

14 arguments que nous avons avancés aujourd'hui comme quoi le nombre de

15 dépositions qui m'ont été données en tant que conseil de M. Landzo

16 s'élevait à 43 et que ces dépositions ne m'ont été données que très

17 tard. Un certain nombre de ces dépositions ont été consignées par

18 des enquêteurs dans la période précédant la première comparution de

19 l'accusé devant la Chambre de premières instances. Il s'agit des

20 dépositions qui ont été prises en mars et avril 1996. Il en ressort

21 clairement que l'accusation auraient pu produire ces dépositions à

22 la défense beaucoup plutôt. Nous ne voyons pas pourquoi ces

23 dépositions ne nous ont pas été données.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi, quel

25 argument avancez-vous maintenant ? Je ne m'attendais pas à un

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1 deuxième exposé de vos arguments ? Je voudrais que nous nous en

2 tenions là pour l'instant.

3 M. M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Il ne s'agit pas

4 de nouveaux arguments, monsieur le président. J'ai parlé de ces

5 questions précédemment, mais je voudrais simplement souligner la

6 principale raison pour laquelle la défense demande le report du

7 procès, à savoir la divulgation adéquate des éléments de preuve en

8 temps opportun. En effet, la défense a évoqué aussi les conditions

9 climatiques, l'accusation estime cet argument insuffisant pour

10 justifier un report de quatre mois. Je voulais simplement expliquer

11 à la Chambre de première instance que les conditions climatiques

12 n'étaient pas la principale raison pour laquelle nous demandons le

13 report du procès de quatre mois. La raison principale est la

14 divulgation tardive des éléments de preuve. La défense se trouve

15 confrontée depuis plus d'un mois et demi à un certain nombre de

16 dépositions nouvelles venant de l'accusation qui nous ont été

17 transmises à la veille du procès. Je pense que cela ne correspond

18 pas à l'idée d'un procès juste, on ne peut forcer la défense à

19 examiner ces dépositions dans un laps de temps aussi court. C'est la

20 raison pour laquelle je crois que les arguments de la défense en

21 faveur du report du procès sont valables. Je comprends bien la

22 position du conseil de M. Mucic et les arguments qui sont avancés

23 par ce conseil. En effet, dans les circonstances, M. Tapuskovic a

24 jusqu'ici a dit très clairement que sa défense portait

25 essentiellement sur un document, à savoir un décret désignant M.

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1 Mucic commandant du camp. Toute cette défense est basée sur ce

2 point. Il est clair que la défense de Zdravko Mucic est prête, et

3 que pour l'accusé en question, le procès pourrait s'ouvrir dès

4 demain. Cela dit, les besoins de mon client sont très différents de

5 ceux de M. Mucic et c'est la raison pour laquelle la défense demande

6 le report du procès de quatre mois. Je voudrais ici souligner que la

7 Chambre est confrontée à un dilemme moral, et je suis quelque peu en

8 conflit avec moi-même pour ce qui est de la décision de la Chambre

9 de première instance. Quelle attitude dois-je adopter concernant

10 cette décision ? Puis-je accepter de participer à un procès dans

11 lequel mon client serait handicapé parce qu'il n'aurait pas pu

12 préparer sa défense ? Faut-il rejeter cette idée ? C'est pourquoi

13 je demande à la Chambre de prendre les arguments que j'ai avancés en

14 considération et d'accepter la requête aux fins d'ajournement du

15 procès. En effet par ailleurs, toutes les requêtes de l'accusation

16 ont été acceptées lorsqu'il s'agissait de reporter le procès. Dans

17 le cas présent il n'y a pas de raison, à mes yeux, pour que la

18 Chambre n'accepte pas l'argumentation avancée par la défense et ne

19 reporte pas le procès de quatre mois.

20 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup,

21 Brackovic. Nous verrons cet après-midi.

22 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi, monsieur

23 le président, pouvez-vous me donner cinq minutes pour répondre à

24 M. Ostberg ?

25 M. le Président (interprétation de l'anglais). - S'agissant du

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1 report du procès ? Vous n'êtes pas conseil principal ? Votre conseil

2 principal est présent et j'imagine que c'est lui qui doit répondre.

3 Il n'y a pas deux conseils qui parlent en même temps sur la même

4 question.

5 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Très bien, merci.

6 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Excusez-moi,

7 monsieur le président, ce que Mme Mc Murrey voulait dire n'est pas

8 une répétition de ce que j'ai déjà dit. Nous sommes ici en tant

9 qu'équipe de juristes et je voudrais vous demander d'autoriser

10 Mme Mc Murrey à répondre à certaines des observations de M. Ostberg

11 sur certains aspects que je n'ai pas couverts pour ma part, car je

12 comptais sur son aide effectivement.

13 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, très bien.

14 Mais je voudrais que vous contrôliez la défense de votre accusé. Si

15 vous assumez la défense de votre client, c'est vous qui êtes le

16 conseil principal. Si vous préférez abandonner cette position de

17 conseil principal, il faudrait que vous en avisiez la Chambre

18 qu'elle le sache. Car j'ai dit d'emblée, très clairement, que je ne

19 souhaitais pas que les conseils parlent en parallèle pour la défense

20 de l'accusé. Si vous pensez ne pas pouvoir résumer, alors que c'est

21 votre prérogative que de résumer votre argumentation, nous

22 inviterions alors le conseil à le faire dans l'intérêt de cette

23 affaire. Je vais vous donner la parole effectivement, car peut-être

24 n'était-ce pas aussi clair que cela dans votre esprit.

25 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Je vous ai très

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1 bien compris, monsieur le président, et je vous remercie de votre

2 autorisation. Mais si l'accusation a eu la possibilité de présenter

3 des arguments tels que ceux soutenus par M. Ostberg, je pense que la

4 défense devrait, elle aussi, avoir la même possibilité. Nous

5 travaillons en équipe et c'est pourquoi je vous demande d'autoriser

6 également Mme Mc Murrey à couvrir certains aspects que je n'ai pas

7 couverts moi-même.

8 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui,

9 Mme Mc Murrey ?

10 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Excusez-moi, puis-je

11 parler ?

12 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, vous pouvez

13 maintenant parler.

14 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Rapidement, je

15 voudrais simplement dire que nous sommes d'accord avec le conseil de

16 M. Mucic lorsqu'il dit que M. Landzo ne renonce pas ici au droit à

17 un procès rapide. Il se fait que s'est posé un problème, celui de la

18 divulgation des éléments de preuve. Nous acceptons l'idée du report

19 du procès pour garantir la bonne administration de la justice. Cela

20 dit, M. Ostberg est un avocat très éloquent dans cette procédure

21 accusatoire. Certaines des choses qu'il a dites nous ont intéressés,

22 notamment concernant le matériel vidéo, mais qui serait disponible à

23 la défense depuis l'été. Mais à l'époque, la défense ne savait pas

24 que des bandes vidéo seraient présentées comme éléments de preuve.

25 Ce n'est que récemment que nous avons appris que 9 bandes vidéo

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1 seraient utilisées comme éléments de preuve et que beaucoup d'autres

2 bandes vidéo existaient aussi, qu'elles devraient être visionnées

3 par la défense. Ce n'est donc que maintenant que nous avons la

4 possibilité de visionner ces bandes vidéo. Même si le matériel était

5 disponible depuis plus longtemps, le besoin de ce matériel est

6 beaucoup plus récent. Ce n'est que cette semaine d'ailleurs que ce

7 matériel vidéo a été installé dans la salle réservée à la défense.

8 Monsieur Ostberg a aussi dit que la défense avait peut-être mal

9 compris la raison d'être des témoins experts qui sont là pour

10 avancer des faits objectifs. J'imagine que c'est vrai. Mais le fait

11 est que dans une procédure accusatoire, les avis des experts sont là

12 pour étayer la thèse de l'une et de l'autre parties, et les avis des

13 experts varient. Par conséquent, nous avons appris hier à

14 12 heures 30, quelle était la liste des experts et ce qu'ils

15 pourraient avoir à dire. Nous n'avons pas eu la possibilité de

16 contredire ce que l'accusation souhaiterait présenter. Par ailleurs,

17 l'accusation n'a nié en aucune façon qu'il y a eu des retards dans

18 la production des éléments de preuve. Pour être bref et rapide, je

19 voudrais simplement dire que sur la base de toutes les documents

20 écrits que nous avons (requête d'ajournement, compléments à la

21 requête d'ajournement), sur la base aussi de tous les arguments

22 extrêmement valables avancés par Mme Residovic et M. Karabdic, ainsi

23 que par le conseil de M. Delic, il apparaît qu'il n'est passible

24 pour la défense des accusés de se préparer dans un délai inférieur à

25 quatre mois. Nous demandons que ce procès soit reporté jusqu'aux

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1 20 mai. Je vous remercie.

2 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup,

3 madame Mc Murrey. Je pense que nous allons aborder les autres

4 requêtes.

5 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Puis-je réponde à

6 M. Ostberg, monsieur le président ?

7 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous en prie.

8 Oui, très bien, M. Karabdic, parlez.

9 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - J'appuie entièrement

10 les arguments avancés par Mme Mc Murrey, ainsi que par M. Brackovic.

11 Je ne les répéterai pas. Permettez-moi simplement de faire une

12 rapide observation en réponse à ce qu'a dit l'accusation.

13 L'accusation a dit que j'avais reçu l'acte d'accusation le

14 18 juin 1996, ou à peu près à cette date. C'est vrai que j'ai reçu

15 l'acte d'accusation ce jour-là, mais j'ai immédiatement dit aussi

16 que j'allais prendre les mesures appropriées. L'acte d'accusation

17 avait été rédigé de façon irrégulière, et j'ai fait tout ce que

18 j'ai pu pour régulariser cette situation. Les trois juges de la

19 Chambre d'appel ont dit que j'avais raison sur bien des points. Ils

20 ont dit que les défauts qui entachaient l'acte d'accusation étaient

21 bel et bien présents dans l'exposé des faits et sur le plan plus

22 juridique. Dans la décision des trois juges, ceux-ci disent que le

23 procureur devrait le plus rapidement possible apporter des

24 éclaircissements sur certains points et améliorer ou résoudre les

25 problèmes posés par l'acte d'accusation. Or cela n'a pas été fait.

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1 J'ai pris toutes les mesures possibles pour résoudre ce problème, et

2 je m'attendais à ce que l'acte d'accusation soit corrigé et qu'alors

3 je serais à même de préparer la défense de mon client. Or en l'état

4 actuel des choses, étant donné que l'acte d'accusation est resté en

5 l'état, il faut que je prépare la défense en fonction de plusieurs

6 scénarios possibles. Ainsi que les trois juges l'ont dit eux-mêmes,

7 ces scénarios sont contradictoires. Cela prend donc beaucoup de

8 temps. Il faut que je détermine moi-même quelles sont les

9 dispositions que le client pourrait utiliser pour sa défense. Cela

10 prend beaucoup de temps et c'est pourquoi j'ai demandé le report du

11 procès. Je me trouve dans une situation où aucun conseil ne s'est

12 jamais trouvé. Je ne sais pas quelles sont les dispositions en

13 vertu desquelles mon accusé est inculpé ou les dispositions qui vont

14 être invoquées pour sa défense. Je n'ai pas dit que l'attitude de

15 l'accusation était hostile. J'ai dit que l'accusation avait coopéré

16 avec nous. Le fait est que nous n'avons pas reçu les adresses des

17 témoins accompagnant les dépositions qui nous ont été transmises.

18 Nous ne savons pas où trouver ces témoins. L'accusation nous a donc

19 rendu la tâche impossible. Si nous voulons trouver l'adresse de ces

20 témoins pour pouvoir exercer notre droit d'interrogatoire, il nous

21 faudra aussi beaucoup de temps, c'est la raison pour laquelle nous

22 demandons l'ajournement du procès. J'en reste donc à mon opinion

23 selon laquelle ce que nous avons reçu de l'accusation, c'est-à-dire

24 ses déclarations des témoins, ne suffit pas à affirmer que

25 l'accusation a bien rempli ses obligations de communication de

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1 pièces. Tout cela est tout à fait vague, rien n'est clair, et donc

2 cela ne peut être d'aucune utilité. Je vous dis cela en quelques

3 mots, rapidement, c'est une réaction rapide puisque nous avons reçu

4 des documents hier. L'accusation dispose très certainement d'autres

5 éléments concernant ces témoins experts et nous prions donc que ces

6 éléments nous soient communiqués, plutôt que de nous donner ces

7 éléments très vagues qui vraiment ne constituent pas la moindre base

8 de travail pour la défense. Rien n'est dit de très précis quant à ce

9 que ces témoins vont discuter, hormis une position très générale de

10 l'accusation : à savoir que les témoins experts ne parleront que de

11 circonstances générales, etc. etc. Cela n'est pas acceptable pour

12 nous. Ce qui s'est passé en Bosnie, le fait qu'un Etat ait été créé

13 dans ces conditions, le fait que cet Etat ait subi une attaque, et

14 qu'il se soit défendu -d'ailleurs ce n'est pas seulement l'Etat qui

15 a subi une attaque, mais également le peuple-, tous ces faits

16 doivent être pris en compte et doivent constituer la base première

17 de ce procès. Nous avons tous été condamnés à une mort lente. Nous

18 avons été attaqués par les quatre plus grands d'Europe.

19 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Cela n'a rien à

20 voir, maître.

21 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Non, je vous prie

22 de m'excuser, monsieur le président. Je dis cela simplement pour

23 prouver que ce sont des faits que les témoins experts ne pourront

24 pas éviter de traiter. Or cela ne figure pas dans le document que

25 nous avons reçu. On ne peut pas éviter de regarder ce fait, on ne

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1 peut pas traiter cette affaire comme s'il s'agissait d'un pays

2 abstrait. Nous sommes bien ici dans des circonstances concrètes : un

3 Etat a été créé, une attaque a eu lieu, vous savez vous-même tout

4 ce qui s'est passé. Il faut donc que l'ensemble de ces éléments

5 soient examinés dans un contexte global. A mon sens, il est

6 impossible de séparer tel ou tel point pour le traiter

7 individuellement, indépendamment de tout ce qui l'entoure, de tout

8 ce qui constitue son contexte. Je vous prie de m'excuser, je vous

9 demanderai de bien pouvoir finir. Pour toutes ces raisons, je suis

10 toujours favorable à un report du procès de quatre mois, comme je

11 l'ai dit précédemment.

12 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup.

13 Nous avons d'autres requêtes présentées au nom de l'accusé, Landzo.

14 Pourrions-nous les entendre présentées ?

15 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Monsieur le

16 président, puis-je m'exprimer devant cette Chambre ?

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Eh bien, je ne

18 vois pas très bien quel est votre rôle. C'est l'article 73 du

19 règlement qui s'applique ?

20 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - J'avais proposé qu'on

21 s'occupe d'abord de la requête concernant le délai de dépôt des

22 requêtes supplémentaires, car cela nous permettrait d'aller plus

23 vite. Nous avons parlé d'un délai de 60 jours qui nous a été

24 accordé. La raison pour laquelle nous avons besoin d'un délai

25 complémentaire pour déposer notre requête à ce stade, compte tenu

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1 des documents qui nous ont été communiqués très récemment par

2 l'accusation, c'est seulement après avoir reçu ces documents qu'il

3 nous a été possible de déterminer quel pourrait être le contenu de

4 ces requêtes ou de ces exceptions préliminaires au procès. C'est

5 donc seulement aujourd'hui, alors que nous continuons toujours à

6 recevoir des documents de l'accusation, que nous avons la

7 possibilité de déterminer un certain nombre de points

8 supplémentaires à traiter qui nous apparaissent au fil du temps.

9 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Eh bien je suis

10 prêt à vous donner un délai supplémentaire.

11 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Merci, beaucoup.

12 Puis-je choisir l'ordre des requêtes ou vous appartient-il de le

13 faire ?

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je suppose que vous

15 pouvez le faire. En revanche, j'aimerais que vous lisiez l'article

16 73 du Règlement pour vérifier si la totalité des exceptions que

17 vous présentez tombent bien sous le coup de cet article 73.

18 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - En fait, j'ai demandé

19 que nous puissions continuer à déposer des exceptions préalables au

20 procès, au fur et à mesure de la nécessité de telles requêtes, dans

21 le cadre de l'article 63. Car après la publication de l'acte

22 d'accusation, l'accusation était sensée communiquer un certain

23 nombre de pièces à la défense.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais nous parlons

25 de l'article 73. Cet article traite de la divulgation de la

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1 communication ?

2 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Non, monsieur le

3 président. Mais s'agissant de la demande d'exclure un certain nombre

4 d'éléments de preuve, nous ne pouvons pas décider si un élément de

5 preuve doit être exclu ou non avant que cet élément ait été reçu.

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Donc il est trop

7 tôt aujourd'hui ? Il est trop tôt ?

8 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Il est trop tôt tant

9 que nous n'avons pas reçu effectivement.

10 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Donc nous ne

11 pouvons pas en traiter ? Quelle est la requête suivante ?

12 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - La demande de procès

13 séparés.

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Une décision est

15 déjà intervenue ?

16 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Oui, une décision est

17 déjà intervenue et elle a été déposée en temps utile, avant. Mais

18 c'est une question à considérer par la Chambre d'appel. Nous

19 demandons que ce point soit réexaminé aujourd'hui.

20 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Dans le cadre de

21 quel article du règlement ?

22 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Dans le cadre la

23 demande de prolongement du délai.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Non, ce n'est pas

25 possible, je ne peux pas vous y autoriser.

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1 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Nous n'avons pas une

2 idée claire, c'est pourquoi je demande votre opinion.

3 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, nous pouvons

4 constater que vous n'êtes pas très familiarisés avec la portée de

5 l'article 73. Je ne peux vous y autoriser.

6 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Je demande à la

7 Chambre.

8 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Ce à quoi vous avez

9 renoncé, c'est à votre délai. Mais le sujet dont nous parlons ne

10 tombe pas dans le même cadre, car il est dit très spécifiquement

11 dans l'article 73 qu'un certain nombre de sujets sont à considérer.

12 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Monsieur le

13 président, j'ai dit que l'exclusion des pièces, des éléments de

14 preuve ne peut pas être demandée dans les 60 jours si l'accusation

15 n'a pas communiqué les pièces. Aussi, je crois que nous sommes bien

16 là dans le point qui nous intéresse.

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, d'accord.

18 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Et la demande de

19 séparation des chefs d'inculpation ou de procès séparés, cette

20 demande doit être déposée dans les 60 jours.

21 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Une décision est

22 déjà intervenue, une décision du tribunal !

23 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Eh bien s'il y a un

24 argument supplémentaire sur ce point, à savoir qu'un client

25 demande "que la question sera considérée sur la base de ces nouveaux

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1 arguments..."

2 M. le Président (interprétation de l'anglais). - C'est la raison

3 pour laquelle je vous ai demandé de citer un article du Règlement.

4 Vous nous lisez cet article du Règlement et auquel cas, nous pouvons

5 reconsidérer.

6 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Je parle de

7 l'Article 73 C du Règlement qui parle ...

8 M. le Président (interprétation de l'anglais). - ...des exceptions

9 préjudicielles s'agissant de votre renonciation.

10 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Dans le cadre de la

11 renonciation, nous avons dit que si nous n'avions pas déposé un

12 document dans les 60 jours, nous pourrions comparaître devant le

13 Tribunal pour argumenter.

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais il faut que

15 vous apportiez des justifications.

16 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Oui, vous nous

17 demandez de citer des justifications.

18 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais sur quels

19 sujets ? Nous avons un, deux, trois, quatre, cinq... Où en

20 sommes-nous dans l'Article 73 ?

21 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Le seul élément

22 relevant de l'Article 73 à mon avis, auquel nous avons renoncé,

23 c'est le procès séparé.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais vous ne

25 pouvez pas renoncer à un procès séparé puisqu'il a fait l'objet

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1 d'une décision de la Chambre de première instance, à moins que vous

2 ayez fait appel. Mais vous n'avez pas fait appel, n'est-ce pas ?

3 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Donc c'est peut-être

4 un véhicule inapproprié pour demander une reconsidération des

5 arguments. Est-ce que c'est ce que vous me dites ?

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Il vous appartient

7 la nature des erreurs que vous commettez.

8 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Très bien. Si vous le

9 voulez bien, laissons de côté le problème du procès séparé. Mais les

10 autres exceptions sont toujours là ?

11 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, mais je vous

12 dis qu'il faut établir le lien avec l'Article 73. Or elles ne sont

13 pas couvertes par l'Article 73 du Règlement. Vous n'êtes pas en

14 train d'invoquer le bon article du Règlement.

15 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Eh bien je demanderai

16 des éclaircissements à la Chambre de première instance, sur la base

17 des éléments de preuves communiqués, sur la base des exceptions

18 préjudicielles préalables au procès -et je parle de toutes les

19 exceptions-, je dirai que ce sont là les bases de notre demande

20 d'éclaircissements. Nous ne sommes pas dans le cadre de l'Article

21 73 ?

22 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Non, pas du tout.

23 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Non, effectivement,

24 et donc nous pouvons poursuivre sans craindre la moindre dérogation.

25 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Donc vous pensez

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1 pouvoir poursuivre sans respecter le règlement ?

2 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Non, monsieur le

3 président, ce n'est pas ce que je suis en train de dire. L'exception

4 concernant l'égalité d'accès aux témoins, l'exception concernant les

5 preuves à décharge, la nomination des témoins, les règles à

6 respecter, ne tombent pas dans l'article 73. Donc il n'est pas

7 nécessaire d'y déroger. Je dis simplement qu'avant le procès, il est

8 possible de les examiner au fur et à mesure.

9 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais lisez donc

10 l'Article 66 et l'Article 67 du règlement. Vous y trouverez la liste

11 de vos droits qui sont je pense tout à fait suffisants.

12 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - S'il n'est pas

13 nécessaire de les intituler "exceptions préjudicielles préalables au

14 procès", on peut peut-être en traiter lors d'une conférence de mise

15 en état et invoquer l'Article 5 du Règlement qui signifie que les

16 articles du Règlement n'ont pas été appliqués de façon appropriée par

17 le passé.

18 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous demande

19 simplement d'invoquer un article.

20 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Ce sont des points

21 qui vont être présentés de façon informelle, qui ne seront pas

22 présentés sous la forme d'une exception préjudicielle, mais sous la

23 forme d'une conférence de mise en état.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Si vous le

25 souhaitez, d'accord. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de donner

Page 65

1 la parole à l'accusation pour des commentaires car en fait rien de

2 nouveau ne vient d'être dit devant cette Chambre d'instance.

3 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Madame Mc Henry,

4 avez-vous quelque chose à dire ?

5 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Avec votre indulgence,

6 je voudrais simplement dire une chose. Alors que nous sommes encore

7 en audience publique, je crois comprendre que nous allons discuter

8 d'un certain nombre de points supplémentaires plus tard dans cette

9 conférence de mise en état. Mais puisque nous sommes encore en

10 audience publique, je voudrais m'assurer qu'il est bien compris que

11 l'accusation, dans son ensemble, nie ne pas avoir communiqué les

12 pièces à temps. Je tiens à ce que ce soit dit en audience publique,

13 nous pouvons revenir sur les détails ultérieurement.

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup,

15 Maître Mc Henry.

16 Nous pouvons suspendre la séance et nous reprendrons à 15 heures 30.

17 Nous rediscuterons alors du problème du report du procès.

18 L'audience est levée à 13 heures 45.

19 L'audience est reprise à 15 heures 35.

20 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mesdames et

21 messieurs, bonne après-midi. J'espère que nous sommes tous

22 requinqués et que nous sommes prêts à poursuivre nos travaux. Nous

23 allons commencer la conférence de mise en état. J'espère qu'elle

24 sera bonne. J'espère que c'est aussi la dernière avant le procès.

25 Madame Residovic, il y a quelques questions à soulever dans le cadre

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1 de cette conférence. Nous aimerions vous entendre. Quelles sont les

2 matières dont vous voulez débattre à cette occasion ?

3 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Tout d'abord,

4 j'aimerais obtenir une réponse quant à ceci. Allons-nous discuter

5 aujourd'hui des points que nous avons formulés dans notre mémoire ?

6 Il y avait plusieurs questions de procédure. Il y a aussi la requête

7 portant sur l'irrecevabilité de la déposition faite par M. Delalic à

8 Munich.

9 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je pense que ceci

10 relève de l'irrecevabilité des moyens de preuve. Vous essayez de

11 poser l'éventualité de l'irrecevabilité pour cette raison, n'est-ce

12 pas ?

13 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Nous avons demandé

14 que cet élément de preuve soit déclaré irrecevable du fait

15 d'irrégularités assez nombreuses. Quant à la procédure adoptée pour

16 la prise de dépositions et aussi en vertu des Articles 42 et 43, de

17 même pour ce qui est de la façon dont a été fait l'entretien d'après

18 cet Article 43. Nous avons déposé ces requêtes dans le cadre des

19 exceptions préjudicielles. Et au vu de la décision de novembre, il a

20 été dit que cette requête était prématurée. En effet, il n'était pas

21 clair, a-t-il été dit, si oui ou non l'accusation allait se servir

22 de ce moyen de preuve lors du procès. Dans le mémoire du 5 décembre,

23 l'accusation a dit qu'elle allait utiliser cet entretien comme moyen

24 de preuve. Nous invoquons donc notre droit, au titre de cette

25 décision, et nous représentons cette requête qui s'appuie sur la

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1 décision prise lors.

2 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Quel est l'avis de

3 l'accusation sur ce point ?

4 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Merci, monsieur le

5 président. S'agissant de la requête aux fins d'irrecevabilité de cet

6 entretien de M. Delalic, nous n'avons pas présenté de réponse

7 formelle. En effet, nous avons reçu cet avis hier seulement. Mais je

8 suis prête à vous fournir notre position en synthèse. La défense

9 voudrait exclure ce transcript à deux titres : d'abord parce que

10 l'accusé n'aurait pas formellement et spécifiquement été informé de

11 la nature de l'entretien. Or cette décision a déjà été prise par la

12 Chambre, le 9 octobre, selon laquelle il n'y avait pas de raison de

13 déclarer ceci irrecevable. Ma collègue a raison de dire que la

14 Chambre n'a pas pris de décision sur le deuxième point, à savoir

15 qu'étant donné des erreurs techniques commises dans

16 l'enregistrement, ceci pourrait servir de raison pour refuser cet

17 entretien. Et la Chambre n'a pas pris de décision l'estimant

18 prématurée et préférant prendre une décision à une date ultérieure.

19 Nous sommes donc opposés à tout nouvel argument selon lequel

20 l'Article 42 n'aurait pas été respecté, à savoir qu'il faut qu'il

21 soit informé et qu'il avait le droit d'avoir un conseil. Nous ne

22 nous opposons pas à ce qu'il y ait une requête basée sur l'Article

23 43, pour dire que l'entretien doit être enregistré.

24 M. le Président (interprétation de l'anglais). - L'argument

25 principal n'est-il pas de savoir s'il est préférable pour le procès

Page 68

1 d'utiliser un tel entretien ?

2 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Effectivement, et le

3 conseil de la défense a raison de dire que l'accusation a

4 l'intention de les présenter comme moyens de preuve au cours de

5 témoignages.

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Il apparaît qu'il

7 n'y a qu'un argument partiel, et non pas d'argument complet,

8 présenté pour savoir si cette déclaration doit être utilisée.

9 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Monsieur le président,

10 d'après le règlement du Tribunal, il faut respecter un délai de

11 60 jours pour présenter toute requête aux fins d'irrecevabilité de

12 dépositions obtenues de l'accusé. Je pense que l'interview tombe

13 sous le coup de cette décision. Donc le conseil de la défense

14 demande de ne pas utiliser cet élément. Dans la décision du 9

15 octobre, une décision a été prise par la Chambre selon laquelle elle

16 ne statuait pas sur la question de savoir si l'enregistrement vidéo

17 ou l'enregistrement tout court de ce témoignage était correct ou

18 pas. Il y a eu enregistrement de l'entretien et nous pensons que

19 toutes les règles au titre de l'Article 43 ont été respectées, alors

20 que la défense dit qu'il y a peut-être eu des lacunes ou des

21 problèmes. La Chambre semblait penser qu'il fallait déterminer

22 certains éléments factuels en étudiant l'enregistrement et à

23 l'époque, elle n'a donc pas statué sur ce point. Mais la Chambre

24 avait rejeté les arguments avancés par la défense qui affirmait que

25 ceci était irrecevable et se fondaient sur les droits de l'accusé

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1 visés à l'Article 42.

2 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je ne vois pas

3 encore très clairement ce qu'il en est de cette décision quant au

4 fait de savoir si tous les arguments ont été entendus ou si ce ne

5 fut pas le cas.

6 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Monsieur le président,

7 je pourrais vous fournir photocopie de la décision. L'accusation

8 estimait que l'enregistrement pouvait être utilisé à l'exception de

9 la détermination factuelle pour savoir si l'Article 43 avait fait

10 l'objet d'irrégularités ou s'il y avait eu quelques irrégularités

11 ou lacunes dans la façon dont l'entretien avait été enregistré. Mais

12 s'agissant des autres requêtes présentées par l'accusé quant à

13 savoir si effectivement on a dit à l'accusé qu'il était suspect,

14 s'il pouvait avoir un avocat s'il avait demandé un avocat et qu'on

15 le lui ait refusé, la Chambre avait déjà pris une décision, correcte

16 à notre avis, qui était de débouter la requête.

17 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Me permettez-vous

18 d'intervenir, monsieur le président ?

19 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, madame.

20 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - A l'inverse, de ce

21 que dit ma collègue, Mme Mc Henry, je pense que la Chambre de

22 première instance n'a pas pris une telle décision. La Chambre a

23 refusé, a rejeté une exception préjudicielle au moment de son dépôt.

24 Mais la Chambre a discuté des questions qu'évoquait l'exception

25 préjudicielle que nous avions déposée. Lorsque nous avons dit qu'au

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1 cours de l'entretien, les droits de l'accusé avaient été violés -et

2 nous invoquions là l'Article 42 et l'Article 43-, il y a eu analyse

3 de la part de la Chambre quant à ce paragraphe et la Chambre a

4 décidé que l'accusé avait été informé de ses droits. Mais c'était

5 uniquement, à notre avis, à titre formel ou de façon formelle.

6 Maintenant, nous parlons de la quintessence de ses droits quant à

7 savoir ce qu'il en était de son statut, de son état, quant à la

8 question de savoir s'il pouvait disposer d'un avocat. Si la Chambre

9 a décidé qu'il y avait des irrégularités, cela aurait représenté une

10 violation des droits de l'accusé Delalic et ceci aurait justifié

11 l'irrecevabilité de ce moyen de preuve-là. Je fais lecture ici de la

12 décision : "et si l'on devait utiliser la transcription de cet

13 entretien en cours de procès, il était loisible à la défense de se

14 fonder sur les Articles 89 et 95 pour présenter, à la phase

15 suivante, une requête". Voilà cette phase arrivée. Nous n'avons

16 toujours pas reçu le transcript de cet entretien et il reste à la

17 défense de prouver que cet élément de preuve doit être déclaré

18 irrecevable se fondant sur la décision prise par la Chambre. Nous

19 affirmons que puisque l'accusation voudrait utiliser ceci comme

20 moyen de preuve au cours du procès, nous pensons que toutes les

21 conditions sont réunies pour que nous puissions déposer cette

22 exception au titre de l'irrecevabilité.

23 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Vous aviez fait une

24 première requête qui a été rejetée. Elle a été bien rejeté, cette

25 requête ?

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1 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Effectivement,

2 mais il avait été indiqué qu'il était prématuré de statuer sur la

3 question de savoir si cet entretien était utilisé. A l'époque,

4 l'accusation n'avait pas encore pris de décision ni dans un sens ni

5 dans l'autre. C'est pourquoi il avait été dit que c'était prématuré.

6 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous remercie.

7 Vous affirmez donc que puisque l'accusation a désormais décidé

8 d'utiliser ceci, vous êtes en mesure de soulever une exception

9 préjudicielle ? C'est donc l'argument que vous avancez ?

10 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Effectivement.

11 Oui, monsieur le président. Nous avons fait une demande écrite hier,

12 assortie de l'argumentaire et si nécessaire, nous pourrons présenter

13 les arguments oralement aujourd'hui ou à la prochaine conférence de

14 mise en état. Aujourd'hui, nous pourrions parler des questions de

15 procédure qui figurent dans notre mémoire.

16 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Madame, voulez-vous

17 présenter d'autres arguments, hormis la suggestion que vous venez de

18 faire ?

19 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - J'attends votre

20 décision, monsieur le président, j'aimerais savoir si je peux

21 présenter mes arguments. J'aimerais que mon collègue, M. O'Sullivan,

22 partage ces arguments avec moi s'agissant de cette requête ainsi que

23 d'autres questions que nous avons présentées dans notre mémoire. Je

24 crois qu'il faut vraiment trouver une solution pour que nous

25 puissions avoir un procès équitable.

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1 M. le Président (interprétation de l'anglais). - De ce que je peux

2 voir, il est clair que cet entretien fera partie du procès. Vous

3 cherchez une solution et vous voudriez l'irrecevabilité pour cette

4 pièce ?

5 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - L'accusation, dans

6 sa lettre du 5 décembre, a exprimé cette volonté d'utiliser cette

7 pièce comme élément de preuve et l'a confirmé.

8 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Fort bien, madame,

9 donnez-nous vos arguments.

10 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Dans la requête

11 précédente, que nous avons déposée le 28 mai, plusieurs arguments

12 ont été formulés à partir desquels nous pensons que l'entretien de

13 M. Delalic donné le 18 mars à Munich ne peut pas être utilisé comme

14 moyen de preuve pour les raisons suivantes. En vertu de l'Article 42

15 du paragraphe A, les droits fondamentaux de l'accusé consistent à ce

16 qu'il soit informé au préalable de son état, de son statut, afin

17 qu'il puisse être conscient de la position qui est la sienne et

18 qu'il puisse exercer ses droits. Par exemple son droit à rester

19 silencieux. Dans le commentaire qu'elle a fourni sur la question, la

20 Chambre a fait remarquer qu'il suffisait de lui lire ses droits,

21 droits qui sont repris dans le Règlement de procédure et de preuve.

22 Mon collègue, M. O'Sullivan, va aborder un autre point plus tard.

23 Mais nous estimons que dans l'intérêt de la justice, la culture, la

24 connaissance moyenne d'une personne ordinaire en Europe, est telle

25 qu'il faut offrir tout de suite la possibilité d'avoir recours à un

Page 73

1 avocat et cela à qui que ce soit dans ces conditions. Le troisième

2 argument sur lequel j'aimerais m'attarder, c'est le fait que

3 l'interview ou l'entretien de Munich ne respectait pas les

4 conditions visées à l'Article 43. Le transcript de cet entretien

5 comprend des erreurs matérielles et pas simplement techniques, et

6 des erreurs telles que cet entretien ne peut pas être admis, comme

7 élément de preuve. Je me contenterai d'ajouter aux arguments déjà

8 présentés dans la requête que le système judiciaire pénal de Bosnie

9 et le système prévu sur le territoire de tous les nouveaux Etats

10 venant de l'ex-Yougoslavie veulent qu'un accusé soit informé sur-le-

11 champ de la qualité dans laquelle il est interviewé, et qu'il soit

12 informé de tous les chefs d'inculpation portés contre lui. Or ce

13 n'est qu'après une journée complète d'interrogatoire que l'accusé a

14 été informé de ces conditions. Ce n'est pas juste, que ce soit pour

15 la Bosnie-Herzégovine ou pour quelque autre pays que ce soit dès

16 lors que c'est un droit universel qui relève des systèmes de droit

17 civil. Mon client a longtemps vécu en Allemagne, il était interprète

18 par devant les tribunaux, et on aurait dû lui fournir des

19 explications susceptibles d'être comprises par une personne

20 ordinaire, en Europe. On aurait dû lui dire en quoi consistait ses

21 droits. J'aimerais aussi faire remarquer qu'à la lecture du document

22 remis par l'accusation, il apparaît clairement que les autorités

23 allemandes ont adopté la même position. Mon client était une

24 personne recherchée, ce n'était pas un "suspect", ce sont les termes

25 utilisés en Allemagne. Tels sont là les arguments supplémentaires

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1 qui nous poussent à croire qu'il y a eu vraiment une violation de

2 ces droits élémentaires et qu'on aurait dû expliquer en quoi

3 consistait les droits d'une personne interrogée par la police. A

4 titre d'exemple, les gens de chez nous sont tout à fait libres quand

5 ils parlent à la police parce qu'ils savent que toute déclaration

6 qui aurait été faite dans ce cadre ne pourraient être utilisée dans

7 un procès. Le juge d'instruction a pour obligation d'informer sur-le-

8 champ, ou au plus tard à la fin du processus d'instruction, de

9 l'obligation de mettre sous scellées la déclaration qui aurait été

10 faite. Dans notre culture juridique européenne, il aurait été dans

11 l'intérêt de la justice d'adopter une attitude tout à fait

12 différente plutôt que de se contenter d'une lecture superficielle

13 des règles de procédure. Nous parlons ici d'un Tribunal qui a un

14 statut très élevé et, auquel cas, l'obligation est encore plus

15 rigoureuse étant donné les normes standard très élevées que nous

16 utilisons, de même que les normes et les règles européennes déjà

17 invoquées. L'Article 43 est très clair. Vous-même, monsieur le

18 président, avez répondu à des questions que j'avais posées lors de

19 la dernière conférence de mise en état, à savoir que l'Article

20 devait être lu à nouveau car ce sont des règles très précises et

21 très strictes. Je dois dire que cet article-ci en l'occurrence est

22 aussi très précis et très stricte. Ce n'est pas simplement une

23 question insignifiante ou technique, il y est dit que toute

24 interruption dans l'enregistrement doit être signalée sur la bande

25 et que le début de l'interrogatoire doit être à nouveau marqué.

Page 75

1 Malheureusement, la première bande vidéo que nous avons reçue montre

2 qu'il y a eu une interruption de presque une heure dans

3 l'interrogatoire de notre client et à ce moment-là, en tant que

4 conseil de mon client, en juillet, personnellement, et plus tard

5 lorsque j'ai revu cette bande avec un interprète, nous avons déposé

6 plusieurs avertissements auprès du procureur disant que la

7 transcription ne correspondait pas à la bande vidéo que nous avions

8 reçue. Nous avons donc reçu une nouvelle transcription qui avait été

9 faite à partir de la bande vidéo qui contenait en plus d'erreurs,

10 puisqu'il manquait dix pages en anglais ou en bosniaque. Nous ne

11 savons donc pas quelle est la transcription à prendre en

12 considération. Nous ne savons ni quand l'interview a commencé ni

13 quand elle fut interrompue. Aussi, je pense que cet interrogatoire

14 qui a été fait à Munich de cette façon ne peut être utilisé à titre

15 de moyen de preuve par la Chambre d'instance. Puisque nous avons

16 déposé cette requête sous forme écrite, je ne m'étendrai pas, je

17 pense que vous pouvez vous référer à ce document écrit lorsque vous

18 prendrez une décision sur la question. Le professeur O'Sullivan va

19 maintenant vous présenter quelques arguments supplémentaires sur ce

20 point.

21 M. O'Sullivan (interprétation de l'anglais). - Madame et messieurs

22 les juges, je voudrais brièvement compléter ce que ma collègue vient

23 de vous exposer et résumer son exposé sur le droit du conseil et les

24 droits de M. Delalic au titre de l'Article 42. Monsieur Delalic

25 aurait renoncé à son droit d'avoir un avocat lors de

Page 76

1 l'interrogatoire. Nous disons que ce renoncement était non valable

2 car il n'a pas été informé de façon adéquate de son droit d'être

3 assisté. Il faut peut-être préciser le sens du mot "informé". Un

4 suspect doit être "informé" au titre de l'Article 42 A de son droit

5 d'être assisté par un conseil dans la langue qu'il parle et

6 comprend. Alors que signifie ce mot "informé" ? A notre sens, ce mot

7 "informé" va au- delà, comme le dit l'Article 42 A, de pouvoir

8 simplement parler dans la langue que l'accusé comprend ou parle,

9 cela suppose aussi que la personne interrogée comprend le sens et

10 les conséquences qu'il y a à renoncer à un tel droit. Nous pensons,

11 pour notre part, que M. Delalic pas été suffisamment informé de

12 l'importance de ce droit a être assisté et que donc il n'a pas

13 entièrement compris les conséquences de sa renonciation dans le

14 contexte de la procédure ouverte contre lui par le Tribunal. Nous ne

15 voulons pas dire par là que M. Delalic n'est pas suffisamment

16 intelligent ou qu'il n'est pas à même de comprendre cela, tout au

17 contraire, mais les procédures visées par le statut et nos propres

18 règles et décisions prises ici dans d'autres chambres tendent à un

19 système accusatoire tel qu'on le connaît dans les systèmes de droit

20 coutumier. C'est un système qui est entièrement étranger à M.

21 Delalic qui n'en a ni la connaissance ni l'expérience et par

22 conséquent, notre position est qu'une simple lecture de l'Article 42

23 ne suffit pas à suffisamment informer une personne de son droit à

24 être assistée. En conséquence, le renoncement de M. Delalic n'est

25 pas valable. Il est tentant de dire que seul quelqu'un venu d'un

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1 système de droit coutumier ou peut être le conseil de la défense est

2 la seule personne à même d'informer le suspect ou l'accusé des

3 sauvegardes qui sont prévues, telles que la présomption d'innocence

4 ou le droit de rester silencieux qui sont incarnés par l'Article 21

5 de notre statut. C'est important, et comme l'a dit Mme Residovic,

6 nous devons voir quelle est la culture juridique et sociale de la

7 personne à qui est lu cet article. Une personne qui vient d'un

8 système de droit coutumier, qui a grandi dans cette culture,

9 comprend mieux cette notion d'assistance. On en parle à l'école, à

10 l'université, dans les journaux, à la télévision, dans les films,

11 les romans, notamment dans les pays où l'on voit beaucoup de procès

12 à la télévision, où il y a même des chaînes de télévision

13 spécialisées. La réaction de cette personne peut être différente

14 lorsqu'on lui lit l'Article 42 puisque l'accusation dit, à la page 7

15 de sa réplique que le 28 juin, effectivement, d'après la Cour

16 suprême des Etats-Unis, utiliser un mémoire contenant cet

17 avertissement peut ne pas signifier grand-chose à quelqu'un qui

18 viendrait de l'extérieur des Etats-Unis. Cela concorde avec notre

19 opinion que l'Article 42 doit être lu, mais que cette lecture ne

20 suffisait peut-être pas à informer la personne interrogée qu'elle

21 peut rester silencieuse ou qu'elle peut exiger un avocat. Ce même

22 raisonnement semble être sous-jacent à la décision du 9 octobre

23 aussi. Mais dans la décision des Etats-Unis, la Cour suprême parle

24 des droits constitutionnels du citoyen. Nous pensons, pour notre

25 part, que lire un avertissement n'a pas la même portée selon la

Page 78

1 culture de la personne interrogée. En l'occurrence, les personnes

2 qui viennent d'ex- Yougoslavie ont une culture juridique très

3 différente et une expérience des pratiques policières et judiciaires

4 très différentes de celles des citoyens qui viennent de juridiction

5 de droit coutumier. Nous vous demandons donc de statuer qu'une

6 simple le lecture de l'Article 42 ne suffit pas lorsqu'il s'agit de

7 citoyen de l'ex-Yougoslavie. Pour cette raison, nous vous demandons

8 de statuer que M. Delalic, de fait, n'a pas été prévenu de ses

9 droits, n'a pas été informé de ses droits et qu'il ne pouvait donc

10 pas renoncer à ce droit.

11 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Madame Mc Henry,

12 voulez-vous répondre ?

13 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Oui, je vais essayer

14 d'être brève. Tout d'abord je voudrais m'opposer à l'argument qui

15 nous est avancé aujourd'hui, à savoir que cet argument a déjà été

16 avancé devant la Chambre et rejeté. De fait, l'accusé doit être

17 informé du fait qu'il est suspect, il doit être informé de son droit

18 à un avocat, et à la page 7 de sa décision, la Chambre d'instance a

19 constaté qu'il n'y avait pas eu de violation durant l'interrogatoire

20 des droits de l'accusé conformément à l'Article 42 A. Pour ce qui

21 est de l'Article 42 B qui traite de l'avertissement à la personne

22 interrogée quant à son droit d'avoir un conseil, la Chambre a

23 statué que ce qui est nécessaire au titre de l'Article 42, c'est que

24 le suspect soit informé des éléments contenus à l'Article 42. Donc

25 la Chambre d'instance a déjà pris une décision sur ce point. Encore

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1 une fois, pour ce qui concerne du renoncement à un conseil, il

2 apparaît clairement à la suite de l'interrogatoire de M. Delalic,

3 que celui-ci a effectivement, spontanément et de son plein gré,

4 renoncé à être assisté d'un conseil pendant l'interrogatoire.

5 Ensuite, la transcription se poursuit, il est dit comment les

6 enquêteurs, plusieurs fois, ont rappelé à l'accusé et ont relu à

7 l'accusé ses droits. Nous pensons donc qu'il y a déjà eu décision

8 sur ce point et qu'il n'y a pas de raison, maintenant, pour que la

9 Chambre reprenne une décision ou qu'elle aille à l'encontre de la

10 décision précédemment prise. Je soulignerais aussi que ce qu'il est

11 demandé ici par l'accusé, c'est une modification importante au

12 règlement. Le règlement a été respecté et l'accusé dit maintenant,

13 en quelque sorte, que cela ne suffit pas. Or je ne pense pas que

14 ceci soit l'instance appropriée pour introduire pareilles

15 modifications au règlement. Si l'accusé souhaite proposer une

16 modification au juge, il peut le faire. Mais à ce stade,

17 j'indiquerai simplement que ce n'est pas une question ici de droit

18 coutumier ou de droit civil, les droits nationaux ne sont pas tous

19 pareils, et dans notre première réplique à la requête de l'accusé,

20 l'exception préjudicielle de l'accusé à laquelle je fais référence,

21 nous avons cité le système américain certes, mais aussi le système

22 de droit français. Enfin, pour revenir aux faits précis de la

23 présente affaire, concernant la question de savoir si l'accusé a

24 été informé ou non du fait qu'il était suspect, la Chambre a déjà

25 conclu qu'il n'y a pas de droit particulier à être informé du fait

Page 80

1 qu'on est suspect. En l'occurrence, l'accusé a bel et bien été

2 informé. La police allemande l'a dit au moment de son arrestation.

3 Ensuite, il s'est trouvé en garde à vue. C'est à ce moment-là qu'il

4 a été interrogé. Lorsque les enquêteurs ont lu le règlement -et je

5 joins à cet égard l'extrait de la transcription pertinente-, y

6 compris les droits du suspect durant les interrogatoires, de même

7 lorsqu'ils ont lu l'Article 43, ils ont dit à l'accusé : nous allons

8 vous lire l'Article 43 portant sur les suspects. Je pense donc,

9 monsieur le président, qu'en l'occurrence il ne faisait aucun doute

10 quand au statut de l'accusé : celui-ci était informé qu'il était

11 suspect. L'idée que l'accusé doive avoir un conseil et ne puisse y

12 renoncer est contraire aux réglementations appliquées par le

13 Tribunal. Pour ce qui concerne l'enregistrement, je pense qu'au

14 départ la transcription était incomplète et c'est encore une fois

15 parce que dans un excès de prudence en quelque sorte, il y a eu

16 enregistrement audio et enregistrement visuel. Il se peut que l'un

17 des deux enregistrements se soit arrêté et donc interrompu pendant

18 que l'autre se poursuivait. La première transcription donc avait

19 quelques lacunes. Cela nous a été signalé. Je crois que nous avons

20 pu vérifier et éclaircir ce point. Dès le début d'ailleurs, le

21 conseil de la défense avait cette bande vidéo et la seule question

22 qui s'est posée était de savoir si la transcription avait été

23 corrigée ou non. Avant le procès, nous vérifierons encore une fois

24 et nous veillerons à ce que cette transcription soit absolument

25 exacte sur la base à la fois de l'enregistrement audio et de

Page 81

1 l'enregistrement visuel. Peut-être que la transcription initiale

2 transmise à la défense présentait quelques lacunes. Mais nous ne

3 pensons pas que cela soit un problème, d'autant que nous avons fait

4 tous les efforts possibles pour transmettre le plus rapidement

5 possible à la défense une version corrigée de la transcription.

6 Voilà. A moins que vous n'ayez d'autres questions, monsieur le

7 président, je dirais simplement que cette question a déjà fait

8 l'objet d'une décision, que le règlement a été appliqué et, encore

9 une fois, que l'accusation en l'occurrence a fait tout ce qu'elle

10 pouvait pour être équitable vis-à-vis de l'accusé. Il n'y a donc pas

11 de raison d'exclure cet interrogatoire du dossier.

12 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous remercie.

13 Madame Residovic, avez-vous quelque chose à ajouter ? Je pense que

14 vous connaissez bien le Règlement de preuve et de procédure, alors

15 y a-t-il encore des points à régler ?

16 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

17 président, nous n'entend rien dans les écouteurs pour l'instant.

18 Pouvez-vous répéter la question, monsieur le président ?

19 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je faisais

20 référence à votre participation aux procédures précédentes, où vous

21 avez déjà avancé ces arguments. Ce sont donc des sentiers déjà

22 battus. La question qui se pose maintenant est de savoir si cet

23 interrogatoire doit être gardé à titre d'élément de preuve pour le

24 procès. C'est la seule chose qui reste en suspens. Toutes les

25 questions portant sur l'Article 42 et l'Article 43 ont déjà fait

Page 82

1 l'objet d'une décision et la Chambre d'instance n'a pas le pouvoir

2 de revenir sur ses décisions. Nous attendrons donc le versement de

3 la transcription au dossier et vous pourrez formuler vos remarques

4 une fois que cette pièce sera au dossier. Ce n'est pas le moment

5 maintenant de trancher.

6 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

7 président, nous avons dit que nous nous réservions le droit de faire

8 connaître notre avis pour toute question qui surgirait durant le

9 procès. Nous avons déposé une requête officiel, une requête

10 formelle. Donc nous attendons de la Chambre d'instance qu'elle

11 prenne une décision en motivant cette décision. J'aimerais que vous

12 le fassiez.

13 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Nous ne prenons pas

14 une décision sur des choses pour lesquelles nous ne sommes pas

15 saisis. Ce n'est pas une question dont nous ayons à connaître, c'est

16 une question dont nous espérons qu'elle sera abordée lors du procès.

17 C'est donc au procès que la question se posera et que nous

18 statuerons, pas avant.

19 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - J'accepte votre

20 argument, si nous décidons de la question lorsqu'elle sera présentée

21 à la Chambre de première instance. Mais outre cela, je voudrais que

22 l'on note que l'interrogatoire de mon client a été fait lorsque

23 l'acte d'accusation n'avait pas été encore délivré et vous

24 constaterez, à la lecture du mémoire des autorités allemandes, que

25 le procureur allemand a autorisé l'interrogatoire alors que

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1 l'Article 42 ne prévoit pas cette possibilité. Nous réservons donc

2 notre avis pour le moment où la Chambre se prononcera sur

3 l'exclusion ou non de cet élément du dossier.

4 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Donc pour

5 l'instant, nous n'étudions pas cette question. Madame Residovic,

6 avez-vous encore quelque chose à dire ?

7 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

8 président, nous avons aussi posé certaines questions qui ont trait

9 à la procédure et qu'il faudra sans doute examiner à la présente

10 conférence de mise en état car elles ont trait à la préparation du

11 procès. Nous devons tous nous préparer au procès. Pensez-vous donc

12 que nous devons présenter maintenant nos arguments concernant ces

13 questions ?

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Oui, nous allons

15 vous entendre.

16 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Notre première

17 proposition est que le procureur reçoive instruction de fournir à

18 la défense la traduction bosniaque de tous les documents encore

19 restants qui sont sur la liste des éléments de preuve dans les notes

20 des 5 et 17 décembre. Il s'agit des éléments de preuve qui nous ont

21 été remis jusqu'ici. Mes collègues ont déjà dit qu'il s'agissait là

22 d'un rapport résumant les exposés que s'apprêtent à faire les

23 témoins experts, les dépositions du témoin Ivan Asinovic né en 1956,

24 le rapport des organisations internationales, le rapport de

25 l'organisation pour le droit international dont le procureur a dit

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1 qu'il n'allait pas l'utiliser comme pièce de preuve, mais cela est

2 important pour nous car il est question dans ce document de

3 l'affaire Celebici et traite de questions intéressant l'accusé.

4 Donc en application de l'Article 66 B, cet élément de preuve est

5 important pour la préparation du procès par la défense et il faudra

6 donc que la Chambre prenne une ordonnance ordonnant au procureur de

7 remettre ces pièces en bosniaque. Même chose pour la déposition de

8 Zdravko Mucic faite devant la cour, déposition que le procureur nous

9 a remise avant la conférence de mise en état aujourd'hui. Deuxième

10 question, sur laquelle nous voudrons appeler votre attention, celle

11 portant sur la liste des témoins qui nous a été remise le 20

12 décembre 1996 par le procureur. Nous soutenons que cette liste n'a

13 pas été établie dans le respect de l'Article 67 A i car elle

14 contient deux listes en quelque sorte de témoins que le procureur a

15 l'intention de citer, à savoir les témoins que l'accusation citera

16 et les témoins que l'accusation pourrait cité. La défense devra par

17 conséquent consacrer beaucoup d'efforts à contacter des témoins que

18 le procureur pourrait appeler. Nous pensons que le procureur doit

19 nous présenter une liste de témoins qu'ils savent avoir l'intention

20 de citer. Or pour cela, le délai est passé depuis longtemps. Je

21 pense qu'il serait juste aussi que la liste des témoins contienne

22 des informations précises quant aux chefs d'inculpation pour

23 lesquels ils seront appelés à témoigner. Cette liste comprend plus

24 de 60 personnes, il est très difficile pour nous de retrouver quels

25 sont les témoins qui concernent notre client en particulier. Cela

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1 nous permettrait aussi de ne pas avoir à contacter des gens qui ne

2 nous intéressent pas. Cela nous donnerait la possibilité de traiter

3 avec les témoins qui nous intéressent de façon beaucoup plus

4 approfondie et nous proposons au procureur qu'en application de

5 l'Article 67, il établisse une liste modifiée et corrigée des

6 témoins, ceux qu'il appellera effectivement, ainsi qu'une liste des

7 témoins pour chaque accusé de façon spécifique. Nous pensons en

8 particulier que cette liste doit contenir les adresses des témoins,

9 car ces personnes vivent en Bosnie-Herzégovine, en Republika Srpska

10 et en Yougoslavie, c'est-à-dire en Serbie et au Monténégro, et dans

11 beaucoup d'autres pays. Sans savoir où résident ces personnes, la

12 défense ne peut même pas envisager d'exercer son droit à rencontrer

13 ces personnes. Nous proposons par conséquent que le procureur

14 reçoive injonction de nous fournir la liste des témoins avec le lieu

15 de résidence ou du moins le lieu où nous pourrions trouver ces

16 adresses. Je constate que pour beaucoup de témoin, il est indiqué

17 que l'adresse du témoin est un centre qui prend en charge des

18 personnes ayant été détenues dans des camps. Si cette information

19 nous est communiquée, nous prendrons contact avec ces organisations

20 qui, a leur tour, pourrons nous fournir les contacts nécessaires

21 avec les témoins. Les témoins voudront-ils nous rencontrer ? La

22 décision leur appartient. Cela n'a rien à voir avec le procureur. Le

23 procureur n'a pas à garder cette information par devers lui.

24 Question suivante, qui doit être abordée pensons-nous, celle du

25 transport des accusés du quartier pénitentiaire au Tribunal. Ce

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1 matin, mon client, qui était le premier a être amené au tribunal,

2 est arrivé à 6 heures du matin et il a dû attendre 3 heures et demie

3 dans une pièce froide avant que l'audience ne commence. La raison

4 étant que les accusés sont sensés être amenés séparément, d'où une

5 rotation. Ce n'est pas toujours le même qui est amené le premier et

6 cet acheminement prend plusieurs heures. Le premier qui arrive est

7 celui qui retourne au quartier pénitentiaire le dernier et il risque

8 ainsi de passer 6 heures d'attente dans les locaux du Tribunal. Si

9 cela arrivait une fois pour une conférence de mise en état, ce ne

10 serait pas grave, nous n'appellerions pas votre attention sur ce

11 problème. Mais si cela se poursuit tout au long du procès, nos

12 clients vont se trouver dans une situation où ils auront à attendre

13 pendant trois longues heures que le procès ne commence et ils seront

14 donc dans un état de nervosité tel qui les empêchera d'assister en

15 toute sérénité au procès. A la dernière conférence de mise en état,

16 nous avons discuté d'autres aspects de l'acheminement des accusés,

17 notamment de certaines mesures de protection. Nous pensons que pour

18 protéger la dignité de toute personne, y compris des accusés, il

19 faut que certaines de ces mesures soient abrogées de sorte que nos

20 clients soient entièrement à même de participer au procès de la

21 façon la plus adéquate. Autre proposition que nous faisons, celle

22 que la Chambre enjoigne au greffe de prévoir au quartier

23 pénitentiaire que nous puissions communiquer avec les accusés pour

24 la préparation du procès de façon directe, sans que nous soyons

25 séparés par une vitre. Comme je l'ai déjà dit, pour la défense de

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1 M. Delalic, nous allons utiliser certaines pièces telles que des

2 cartes, des bandes vidéo, des plans, et il est impossible pour mon

3 collègue et moi-même et M. Delalic de travailler efficacement alors

4 qu'une vitre nous sépare. Il est aussi impossible pour nous,

5 d'examiner les bandes vidéo séparément alors qu'une partie de cette

6 bande vidéo pourrait signifier la liberté ou au contraire une

7 condamnation pour mon client. Il serait beaucoup mieux pour nous que

8 nous puissions discuter de ces bandes vidéo rapidement. Donc je

9 pense que le greffe doit recevoir l'ordre de prendre des mesures

10 appropriées pour ce qui concerne l'acheminement des accusés et les

11 communications avec leur conseil de façon à pouvoir préparer la

12 défense.

13 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Avez-vous discuté

14 de ce point avec le greffe à quelque moment que ce soit ? En

15 avez-vous parlé avec le greffe ? Avez-vous évoqué certaines de ces

16 difficultés administratives ? Parfois, cela peut être tout à fait

17 utile, vous savez, pour les conseils de discuter de certaines de ces

18 difficultés directement avec le greffe. On obtient ainsi parfois pas

19 mal de résultats. Je vous inviterais, pour ma part, à le faire

20 savoir au greffe, à parler de ces difficultés et à voir comment

21 elles pourraient être résolues.

22 Mme Residovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

23 président, j'ai pour ma part discuté d'un certain nombre de ces

24 points avec le commandant de la prison. Si vous estimez que ces

25 problèmes méritent qu'on leur prête attention, et en l'absence d'une

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1 ordonnance, je pense que vous pourriez vous réunir avec moi-même et

2 d'autres personnes concernées pour prendre une décision. Je crois

3 qu'il apparaît tout à fait manifestement que la préparation de la

4 défense ne peut se faire de façon satisfaisante, et que l'accusé

5 n'est pas placé dans de bonnes conditions pendant le transport. On

6 peut trouver différentes solutions, on peut utiliser quatre

7 véhicules différents pour transporter chacun des accusés séparément.

8 Mais je pense que votre opinion peut compter. Nous sommes

9 aujourd'hui à une date proche du procès, je ne sais pas jusqu'à

10 quand vous allez le reporter, mais discuter davantage que nous ne

11 l'avons fait, je ne vois pas très bien en quoi cela pourrait aider à

12 trouver une solution. Une ordonnance du Tribunal serait bien entendu

13 une bonne manière de mettre le greffier en position de discuter avec

14 nous. Il y a encore un point que je vais vous présenter moi-même,

15 alors que comme je vous l'ai dit au début de mon intervention,

16 M. O'Sullivan, mon collègue vous en présentera un autre. Ce point

17 que je voudrais évoquer devant vous, c'est la façon dont les

18 éléments de preuve ont été recueillis. C'est la première fois que

19 quatre accusés comparaissent ensemble devant ce Tribunal et nous

20 savons bien que c'est le procureur qui parlera le premier en

21 présentant ses éléments de preuve. La question qui se pose est celle

22 de savoir dans quel ordre se fera le contre- interrogatoire. Si l'un

23 des témoins de l'accusation ne parle de faits concernant qu'un seul

24 des accusés, cela ne posera pas de problème. Nous pensons à ce

25 moment-là que le premier contre interrogatoire concernera la

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1 personne visée dans les propos du témoin, selon le contenu de l'acte

2 d'accusation. Mais dès lors qu'un même témoin parlera de plusieurs

3 accusés, le problème existera. Nous proposons qu'aujourd'hui soit

4 décidé que ce droit au contre-interrogatoire suive l'ordre des

5 accusés tels qu'ils sont mentionnés dans l'acte d'accusation. Je

6 pense que cette question est assez simple, qu'il est facile de la

7 régler, pour autant que vous estimiez qu'il y ait quelques

8 justifications à notre requête. Quant au deuxième point que je vais

9 maintenant soulever, nous n'en avons pas parlé du tout, à savoir

10 l'ordre de présentation des éléments de preuve de la défense. Dans

11 l'une des décisions déjà prises par cette Chambre au moment où il

12 était discuté de savoir si les instances pouvaient être disjointes

13 ou non et si mon client pouvait bénéficier d'un procès distinct, il

14 a été souligné que l'existence d'un crime préalable était l'élément

15 primordial pour déterminer de la responsabilité. Nous sommes ici

16 dans un Tribunal qui a été créé en fonction d'un certain nombre de

17 principes, et donc notre position consiste à penser qu'il convient

18 de déterminer à l'avance l'ordre de présentation des éléments de

19 preuve de la défense. Si l'existence d'un acte criminel est une

20 condition sine qua non pour qu'existe la responsabilité d'une

21 personne déterminée, nous estimons qu'il doit être déterminé que les

22 éléments de preuve de la défense seront présentés de telle sorte que

23 les accusés incriminés comme auteurs d'actes criminels devraient

24 être pris en compte en premier, après quoi devrait être examiné le

25 cas des personnes accusées en fonction de leur responsabilité, de

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1 leur fonction. Donc nous pensons que l'ordre devrait être Landzo,

2 Delic, Mucic et finalement Delalic pour la présentation des éléments

3 de preuve de la défense, c'est-à-dire que les éléments de preuve de

4 la défense devraient être présentés dans cet ordre. Monsieur

5 0'Sullivan maintenant va vous présenter les arguments relatifs à la

6 dernière question qui est évoquée dans notre lettre, si vous le

7 voulez bien.

8 M. O'Sullivan (interprétation de l'anglais). - En quelques mots,

9 monsieur le président, je dirai que nous cherchons à connaître votre

10 avis, votre opinion, quant à l'article qui a permis d'incriminer

11 M. Delalic, c'est-à-dire l'article qui traite de l'établissement de

12 la responsabilité par rapport à des fonctions officielles. Nous

13 aimerions savoir sur ce point de la responsabilité, quels sont les

14 éléments matériels qui ont été pris en compte, les éléments de

15 preuve. Vous savez que ni le statut ni le Règlement de procédure et

16 de preuve n'a apporté de conclusions à ce sujet.

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous prie de

18 m'excuser, de vous interrompre, mais je trouve qu'il est ridicule de

19 poser ces questions. Vous êtes ici dans une Chambre d'instance

20 pénale, donc toutes les dispositions du droit pénal s'appliquent. Je

21 ne vois pas pourquoi il y aurait une différence ici. C'est tout ce

22 que vous vouliez savoir ? Je crois que notre position est donc la

23 suivante : il s'agit d'une affaire pénale et ce sont les

24 dispositions pénales qui s'appliquent. Il n'y a pas de différence

25 entre cette affaire et toute autre affaire criminelle comparaissant

Page 91

1 devant un tribunal. Maître Karabdic avez-vous quelque chose à

2 ajouter ou ce qui a été dit par vos collègues vous suffit ?

3 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Je suis d'accord

4 avec les propos tenus par le conseil de Delalic. Je pense tout de

5 même qu'il conviendrait de consacrer encore un certain temps à la

6 discussion de cette responsabilité incombant à quelqu'un pour ses

7 fonctions officielles, notamment en ce qui concerne mon client.

8 Car, mais je crains de répéter ici ce que j'ai déjà dit à de très

9 nombreuses reprises, à savoir que dans l'acte d'accusation, la base

10 de cette responsabilité et la façon dont cette responsabilité peut

11 être démontrée ne sont pas mentionnées dans cet acte d'accusation,

12 notamment en ce qui concerne mon client. C'est seulement la Chambre

13 d'appel qui a demandé à la Chambre d'instance de préciser le plus

14 rapidement possible cette ligne de raisonnement "par l'exposé" comme

15 ils le disent, des éléments de pensée, des éléments psychiques qui

16 permettent d'arriver à la détermination de cette responsabilité. Je

17 pense que c'est là quelque chose de tout à fait indispensable.

18 Aussi, je vous rappelle donc l'injonction qui a été faite par la

19 Chambre d'appel quant à la nécessité de le faire le plus rapidement

20 possible. Je crois que cela devrait être établi avant le procès.

21 J'ai cité un passage de la décision de la Chambre d'appel, et je

22 considère que l'accusation devrait se conformer à cette décision le

23 plus rapidement possible et, en toute état de cause, avant le début

24 du procès. Merci beaucoup.

25 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Monsieur

Page 92

1 Tapuskovic ?

2 M. Tapuskovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

3 président, je vais simplement dire quelques mots au sujet de ce dont

4 nous discutons ici, sans m'appesantir sur quelques points que ce

5 soit. J'ai entre les mains une lettre du 5 décembre 1996 que j'ai

6 reçue du procureur. Je crois comprendre que l'accusation nous

7 demande notre avis sur toute une série de choses qui seront traitées

8 au procès. J'ai bien sûr un avis sur pas mal des points évoqués dans

9 cette lettre. Il y a pas mal de points dans cette lettre avec

10 lesquels je ne suis pas d'accord, mais j'ai cru comprendre que nous-

11 mêmes, ainsi que vous, madame et messieurs les juges, ne pourrez

12 traiter de ces points qu'après le début du procès. C'est pourquoi

13 j'attends avec impatience le début du procès. Au point 5, par

14 exemple, où il est question du procès de Konijc qui a une incidence

15 sur l'accusé Mucic, il faudra bien en parler. Donc pour que nous

16 nous intéressions à toutes ces questions et pour que nous demandions

17 une décision de la Chambre sur un certain nombre d'incriminations

18 évoquées dans cette lettre du 5 décembre, il faut que le procès

19 commence.

20 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup.

21 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Monsieur le

22 président, j'aimerais dire quelques mots en rapport avec la requête

23 de la défense déposée en vertu de l'Article 72 du Règlement de

24 procédure et de preuve quant à l'information ultérieure de la

25 défense, par rapport au témoin d'alibi de mon client. Je fais

Page 93

1 référence également à l'Article 67 A du Règlement de procédure et de

2 preuve. J'ai soumis il y a deux jours, le 15 décembre, cette requête

3 que je suppose le Tribunal a reçue. En bref, j'aimerais exposer les

4 motifs principaux qui ont justifié le dépôt de cette requête. Comme

5 vous le savez, puisque vous avez participé, monsieur le président, à

6 cette conférence de mise en état le 1er novembre 1996, la défense a

7 indiqué qu'elle allait utiliser des alibis dans son système de

8 défense. Le délai du 9 décembre a été à ce moment-là défini pour

9 l'accomplissement d'une procédure officielle relative aux éléments

10 de preuve.

11 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Si je puis interrompre

12 une seconde, monsieur le président, avec l'indulgence de M.

13 Brackovic. En ce qui concerne l'accusation, nous n'avons pas

14 d'objection à ce que l'accusé fasse connaître ses alibis à une date

15 tardive, et cela pourrait peut-être raccourcir le débat.

16 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Pour autant que

17 vous donniez les détails de l'alibi, je crois qu'il n'y a pas de

18 problème. C'est bien cela n'est-ce pas, maître Mac Henry ? Les

19 coordonnées du témoin d'alibi doivent être fournies, n'est-ce pas,

20 au terme du Règlement ?

21 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Oui, monsieur le

22 président, et nous n'avons pas d'objection à ce que le dépôt de

23 cette note d'information se fasse après les délais. C'est tardif,

24 mais nous n'avons pas d'objection.

25 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - J'ai déjà remis à

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1 l'accusation l'information selon laquelle notre client allait

2 s'appuyer sur l'Article 67 A du règlement de procédure et de preuve

3 pour organiser sa défense d'alibi. J'ai cité, dans cette note

4 d'information, une période qui est intéressante pour la défense, ou

5 plutôt qui a un lien direct avec l'alibi. Les noms des témoins qui

6 confirmeront l'alibi de mon client sont également exposés, toujours

7 dans le cadre de l'Article 67 du règlement de procédure et de

8 preuve, ainsi que le lieu ou les lieux où mon client se trouvait au

9 moment où a prétendument eu lieu l'acte criminel qui lui est imputé.

10 La défense a simplement souhaité que le tribunal prenne une décision

11 officielle de façon à ce que le délai soit bien défini et que la

12 défense soit autorisée à agir comme elle a demandé à le faire dans

13 le document qu'elle a remis le 6 janvier. La défense voulait donc se

14 protéger, dirais-je, d'une certaine manière, quant au contenu de

15 cette note d'information relative aux témoins d'alibi et ce, dans le

16 respect de l'Article 67 du règlement de procédure et de preuve où il

17 est stipulé que la défense doit agir de la sorte le plus tôt

18 possible ou, en tout cas, avant le début du procès. Je crois que

19 nous avons agi dans le respect de l'esprit de cet Article, et je

20 demande simplement aujourd'hui, monsieur le président, l'acceptation

21 formelle de cette disposition. Je crois qu'il n'y a pas de raison

22 pour que cette requête soit rejetée.

23 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Les notes

24 d'information sont destinées à l'accusation et pas au président.

25 Vous informez l'accusation, et c'est une base -c'est d'ailleurs la

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1 seule- qui permet d'entendre les témoins d'alibi.

2 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup, Monsieur

3 Brackovic.

4 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Avez-vous encore

5 quelque chose à ajouter ?

6 M. Brackovic (interprétation du serbo-croate). - Non, je n'ai rien à

7 ajouter mais je voudrais répondre à votre dernière constatation. La

8 défense a déjà remis cette note d'information mais elle l'a fait en

9 dehors du délai prescrit. Le délai expirait le 9 décembre, alors que

10 c'est le 6 janvier que la défense a déposé sa note. Etant donné

11 l'expiration du délai prescrit, j'ai déposé une requête aux fins

12 d'obtenir l'autorisation d'informer l'accusation plus tardivement -

13 car je pensais que c'était nécessaire- sur la base de l'Article 72

14 du règlement de procédure et de preuve. Nous lisons, en effet, que

15 les deux parties peuvent soulever devant la Chambre de première

16 instance une ou plusieurs exceptions préjudicielles pour peu que

17 l'accusation soit bien informée de façon officielle de la

18 présentation d'un alibi dans le procès qui surviendra ultérieurement

19 et qui concernera l'accusé. C'est donc la raison de mon intervention

20 ici. Je vous prie de bien vouloir légaliser l'extension de ce délai

21 pour l'information de l'accusation.

22 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup.

23 L'accusation elle-même a déclaré qu'elle n'avait rien contre le

24 retard du dépôt de cette note. Les choses sont donc bien claires :

25 la défense a déposé sa note, l'accusation a été informée, la défense

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1 a bien fait connaître son intention de présenter des témoins d'alibi

2 et le délai est donc suffisant puisque l'accusation l'a accepté.

3 Merci.

4 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Merci. Je reprends sur

5 ce que vient de dire M. Karabdic. Il a parlé de la Chambre d'appel

6 qui aurait statué, qui aurait ordonné à la Chambre d'instance de

7 faire quelque chose. Moi je ne suis pas au courant d'une décision de

8 la Chambre d'appel, je sais simplement que toutes les requêtes ont

9 été rejetées. Et je ne suis pas au courant d'une ordonnance émanant

10 des juges de la Chambre d'instance qui ait ordonné à l'accusation de

11 faire quoique ce soit de précis.

12 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Monsieur le président,

13 je voudrais répondre brièvement à quelques-uns des points qui

14 viennent d'être soulevés et notamment par Me Residovic, à commencer

15 par la requête demandant aux juges de prendre une ordonnance quant

16 au devoir de l'accusation de fournir certaines informations.

17 S'agissant de la langue utilisée par les accusés, la Chambre

18 d'instance a déjà statué. Il a été convenu et déclaré que

19 l'information que nous leur fournissons, à titre d'information

20 plutôt qu'à titre d'éléments de preuve dans le procès, peut demeurer

21 dans sa langue originale. Il n'y a donc pas, dans les documents qui

22 ont été fournis, de documents que l'accusation entend utiliser

23 pendant le procès. Ils sont donc dans leur langue originale.

24 S'agissant des éléments de preuve en revanche, la plupart sont en

25 serbo-croate et la plupart ont été fournis à l'accusé pendant

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1 l'instruction dans cette langue. Il n'existe pas de délai

2 prescrivant la date à laquelle l'accusation doit fournir ces

3 documents en serbo-croate. Je sais que la section de traduction

4 travaille très dur sur les quelques documents qui restent encore à

5 traduire de façon à ce que la traduction serbo-croate soit bien

6 disponible avant le procès. Je pense donc qu'il n'est pas

7 nécessaire de prendre la moindre ordonnance sur ce point. S'agissant

8 maintenant de la liste des témoins de l'accusation, le premier point

9 que Mme Residovic et d'autres conseils ont mis en cause, c'est la

10 forme de la liste des témoins. Nous avons notifié une quarantaine de

11 témoins à la défense dont nous sommes sûrs que nous allons les

12 appeler, avec je crois vingt autres que nous pourrions appeler mais

13 sans en être certains. Nous l'avons fait pour aider les conseils de

14 la défense. Il est bien évident que dans quelque procès que ce soit,

15 il est impossible de déterminer, à la virgule près, avant le début

16 du procès, le nombre de témoins que l'on entendra. En effet, tout

17 dépend de l'évolution des questions soulevées pendant les dépositions

18 ainsi que du résultat des contre-interrogatoires. Il est fort

19 possible qu'il arrive qu'un témoin que nous considérions comme

20 important ne le soit plus et, au contraire, que nous ayons besoin

21 d'un témoin dont nous pensions que nous n'en aurions pas besoin. Je

22 dis simplement que nous avons pensé que la défense aurait émis des

23 objections si nous avions inscrit un nombre de témoins sur une liste

24 ultérieure à convoquer éventuellement sans que la défense en ait été

25 informée au préalable. Mais si la défense en est d'accord, nous

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1 sommes tout à fait heureux de lui faire savoir que nous avons

2 l'intention d'appeler la totalité des témoins qui figurent sur la

3 première liste qui leur a été communiquée, même au cas où certains

4 de ces témoins ne seraient pas indispensables.

5 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je crois -si je me

6 souviens bien- que ce que la défense demande, c'est un peu plus de

7 précision et un peu plus de détails par rapport à chacun des

8 témoins pour déterminer de quel accusé le témoin en question va

9 parler.

10 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Monsieur le président,

11 nous avons déjà discuté longuement de ce point par le passé, et je

12 puis vous dire que la défense aura des informations sur les témoins

13 intervenant par rapport aux chefs d'inculpation de chacun des

14 accusés. Mme Residovic a rappelé que l'existence d'un crime

15 effectivement commis pouvait avoir une incidence sur le jugement

16 porté sur la responsabilité -d'un commandant par exemple. Il est

17 donc difficile, nous semble-t-il, de rédiger une liste absolument

18 précise à cet égard. Mais si la défense souhaite avoir une idée

19 générale, c'est-à-dire la même idée générale que celle que nous

20 avons sur la base des déclarations écrites des témoins, et puisque

21 je présume que la défense possède ces déclarations écrites, la

22 défense pourra sans aucun doute se dire que telle déclaration est

23 d'une importance tout à fait capitale pour elle. Elle peut le faire,

24 aussi bien que nous l'avons fait nous-mêmes, sur la base de la liste

25 en notre possession. Monsieur le président, je dirais donc que rien

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1 n'existe dans le règlement de procédure et de preuve, pas plus que

2 dans les principes d'équité et de justice, qui puisse nécessiter la

3 fourniture de détails complémentaires. Il suffit à la défense de

4 regarder la liste.

5 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais ils ont parlé

6 des adresses qu'ils ne possèdent pas.

7 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Oui, monsieur le

8 président, comme nous l'avons déjà dit depuis le début et comme cela

9 a également été dit dans une conférence de mise en état ici même -

10 car la défense n'est pas la seule à regretter de ne pas disposer

11 d'adresses-, l'accusation n'est pas en mesure de fournir l'adresse

12 de quelque témoin que ce soit. Ce serait -j'en suis convaincue- une

13 violation grossière de l'accord que nous avons conclu avec les

14 témoins et de l'obligation dans laquelle nous nous trouvons de les

15 protéger dans une certaine mesure. Bien entendu, si le témoin en est

16 d'accord, nous n'avons pas d'objection pour le faire. Mais le bureau

17 du procureur en tant que tel n'acceptera certainement pas de fournir

18 l'adresse de ces témoins. Et il me semble qu'il existe un Article

19 dans le règlement qui envisage cette impossibilité de donner les

20 adresses. S'agissant du travail du procureur, il est stipulé

21 spécifiquement que le procureur fournira le nom des témoins alors

22 que lorsqu'on parle des témoins de la défense -des témoins d'alibi-,

23 dans l'Article du règlement relatif à cette question, il est parlé

24 de nom et d'adresse, mais le règlement est très clair pour les

25 témoins de l'accusation quant à la nécessité et à l'obligation de ne

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1 fournir que les noms. Et je vous rappellerais également le précédent

2 instauré dans l'affaire Tadic : les adresses des témoins dans

3 l'affaire Tadic n'ont pas été fournies non plus.

4 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Mais je remarque

5 que vous n'avez pas non plus demandé de mesure de protection des

6 témoins.

7 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Monsieur le président,

8 nous ne demandons l'anonymat pour aucun des témoins. Nous n'avons

9 aucun témoin dont nous souhaitons garder l'identité secrète par

10 rapport à la défense. Il y a effectivement un petit nombre de

11 témoins -inférieur à six, je crois- qui souhaiteraient bénéficier

12 d'un certain nombre de mesures de protection par rapport aux médias.

13 Nous avons déjà travaillé pour essayer de préparer ces mesures et de

14 les présenter à la Chambre de première instance. Nous vous les

15 soumettrons dès qu'elles seront prêtes. Encore une dernière chose,

16 en guise de réaction à une question soulevée par Mme Residovic dans

17 le mémoire dont elle veut discuter -et même si elle ne l'a pas dit

18 de façon explicite aujourd'hui, ceci préoccupe également

19 l'accusation- : la question porte sur les copies des enregistrements

20 vidéo des déclarations faites par les quatre accusés. En

21 l'occurrence, tous les accusés ont fourni des déclarations pour

22 lesquelles il y a eu un enregistrement audio ou vidéo, ainsi qu'un

23 transcript. Et pratiquement dès le début, les accusés se sont vu

24 recevoir ce transcript ainsi que la bande vidéo, la bande audio et

25 le transcript des dépositions des autres accusés, sans recevoir une

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1 copie vidéo, et ceci pour respecter en fait le caractère privé de

2 ces déclarations. Deux des accusés, sinon plus, ont récemment

3 demandé à l'accusation d'obtenir les enregistrements vidéo des

4 déclarations des autres accusés. Qu'avons-nous fait ? Nous en avons

5 fourni une copie qu'on peut examiner dans la salle de la défense.

6 Et, en l'absence d'objection de la part d'un conseil de la défense à

7 ce qu'une vidéo de leur client soit remise à un autre conseil de la

8 défense, nous sommes tout à fait disposés à ce que vous fassiez

9 faire des copies. Nous allons donc fournir un exemplaire par

10 déclaration, et vous allez peut-être souhaiter avoir l'assistance du

11 greffe pour procéder à davantage de copies. Je l'ai préalablement

12 indiqué au greffe car nous pensions que cette question pouvait

13 surgir et je crois que le greffe va s'entretenir avec les conseils

14 de défense par la suite sur ce point. S'il y avait objection de la

15 part de la défense que l'on remette des copies des autres

16 enregistrements des accusés, veuillez nous le notifier.

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Avez-vous un

18 complément à apporter ?

19 M. Ostberg (interprétation de l'anglais). - Oui, monsieur le

20 président, j'aimerais revenir sur les deux derniers points évoqués

21 par Mme Residovic parmi les points dont elle voulait discuter

22 aujourd'hui (les points 6 et 7). Il y a d'abord une demande en vue

23 d'une ordonnance par cette cour pour dire que les co-accusés peuvent

24 demander des éléments suite à présentation des éléments de preuve

25 par l'accusation. Je crois qu'il est prématuré de faire une telle

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1 demande. Je pense que toutes les présentations doivent être d'abord

2 faites, et c'est seulement après, par la suite, que les conseils de

3 la défense peuvent s'entendre et prendre une décision, et s'ils ne

4 peuvent pas statuer sur la question, ils pourront demander les bons

5 conseils de la Chambre. Il est aussi demandé d'avoir le droit de

6 procéder à un contre-interrogatoire. Je crois que ceci ne pourra pas

7 être fait avant d'avoir entendu l'interrogatoire principal des

8 témoins. Il est prévisible que les conseils de la défense sauront

9 dans quel ordre ils voudront procéder aux contre-interrogatoires.

10 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Monsieur le

11 président, puis-je prendre la parole pour un bref instant ? Je

12 voudrais réagir aux arguments présentés par Me Mc Murrey quant au

13 nom des témoins à charge. J'aimerais appeler l'attention de la

14 Chambre sur le fait que la question avait été soulevée à la première

15 conférence de mise en état de novembre. A l'époque, Mme le juge

16 McDonald avait dit que si l'accusation voulait continuer

17 l'expurgation des noms et ne voulait pas divulguer cette information

18 à la défense, à ce moment-là l'accusation devait présenter une

19 requête aux fins de protection. Elle ne l'a pas fait. Et dans la

20 dernière déclaration de Mme le juge McDonald, à la page 44 du

21 transcript de la première conférence de mise en état, il a été dit

22 par Mme McDonald : "vous savez que ceci va être une déclaration,

23 vous avez pris une décision, vous n'avez pas donné la déclaration ni

24 le nom du témoin, vous savez ce qu'ils reste à faire". S'il n'y a

25 pas eu de requête aux fins de protection pour ces dix témoins après

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1 l'argument exposé le 1er novembre, et s'il n'y a pas eu de tentative

2 pour répondre à ce qui avait été fait dans le procès Tadic, à ce

3 moment-là nous trouvons qu'il est nécessaire d'avoir ces noms et

4 adresses, et nous ne pouvons pas nous préparer adéquatement si nous

5 n'avons pas ces noms et adresses. Si vous le permettez, j'aimerais

6 évoquer une autre question très rapidement. Je sais que nos

7 entretiens sont de nature informelle par rapport à ce qui s'était

8 dit ce matin. Puisqu'il y aura communication d'éléments de preuve au

9 fur et à mesure du procès, je pense qu'il faudrait quand même avoir

10 une certaine date butoir ; nous pourrons ainsi être sûrs que nous

11 avons reçu tous les éléments que nous sommes susceptibles de

12 recevoir et préparer notre défense en conséquence. Pour le moment,

13 nous recevons ces informations au goutte-à-goutte. Alors nous ne

14 savons pas quelle sera la date butoir définitive. Et je pense, ceci

15 étant, qu'il est impossible de bien se préparer. Deuxième élément :

16 nous souscrivons à ce que disait Mme Residovic qui demandait que

17 soient précisés les éléments de preuve. Même s'il est affirmé que

18 tous les éléments de preuve et que tous les témoins peuvent

19 s'appliquer à chacun des accusés, il se fait que M. Landzo n'est

20 inculpé que pour 25 des 49 chefs d'accusation. Si nous voulons bien

21 préparer notre défense, il faut savoir que tel témoin est important

22 pour le chef d'accusation numéro 2. Sans désigner les témoins, il

23 est impossible de connaître exactement les circonstances. Mais si

24 l'on sait que tel témoin sera spécifique pour tel chef, ceci nous

25 permettra de diminuer ou de rétrécir le champ d'investigation. Je

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1 sais que c'est peut-être naïf mais il n'y a en général qu'une copie

2 pour chaque requête, et il n'y a que deux copies de travail parce

3 que nous n'avons pas accès à une photocopieuse pour le moment, et

4 nous avons chacun besoin d'avoir un exemplaire des documents. Je

5 crois que Me McHenry a déjà résolu le problème des bandes vidéo dont

6 nous parlions plus avant. Quant à l'ordre dans lequel nous

7 entendrons les différents témoins, même si M. Ostberg dit qu'il faut

8 attendre que tout soit terminé du côté de l'accusation, je crois

9 qu'il est élémentaire que nous préparions une certaine stratégie et

10 il nous faut savoir qui va commencer. M. Landzo -je crois que ceci a

11 été accepté- est considéré comme le premier accusé -l'élément de

12 base-, et nous acceptons de commencer par lui, mais il faut le

13 savoir avec suffisamment de temps. On ne peut pas attendre les

14 décisions de l'accusation pour savoir qui va commencer. Une autre

15 question a été soulevée, celle de la définition des ordonnances

16 supérieures. Là aussi il nous faut certaines directives, parce que

17 s'il y a défaut de responsabilité mentale en l'état, nous ne savons

18 pas ce que nous avons comme charge de preuve quand on parle de

19 défaut de responsabilité. Je suppose que c'est une ligne de défense

20 par "absence d'émotion", c'est ce qu'on dirait aux Etats-Unis. Nous

21 ne savons pas ici exactement quelle est la charge de la preuve si

22 nous n'avons pas une définition plus précise de ce défaut de

23 responsabilité. Et je reste confuse dans une certaine mesure quant

24 à la procédure pour ce qui est des dépôts de requête. C'est une

25 forme écrite qui demande au tribunal de résoudre une question qui

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1 reste en suspens. L'Article 73 s'intitule exception préjudicielle.

2 Je ne pense pas que la liste qui figure par la suite soit

3 exhaustive, on dit "inclura" ou "comprendra". La seule façon de

4 résoudre un problème, c'est de formuler la question par écrit.

5 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je vous interromps

6 parce qu'il y a déjà eu une décision, Madame, dans l'affaire Tadic.

7 Dans des affaires précédemment entendues, on a déjà fourni une

8 interprétation de l'Article 73. Il était clair que la liste était

9 exhaustive. C'est une décision qui a été prise et il est impossible

10 de revenir sur cette décision. Je ne faisais donc pas du tout ceci

11 par ignorance, Madame.

12 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Je ne le conteste pas

13 du tout, monsieur le président.

14 M. le Président (interprétation de l'anglais). - La question est de

15 savoir si nous agissons de façon informelle par le biais d'une

16 conférence de mise en état, mais je crois que toutes ces questions

17 sont vraiment à régler avec l'accusation lorsqu'il s'agit de la

18 communication de moyens de preuve, des questions d'irrecevabilité,

19 d'exception ... ; vous pouvez traiter de ces questions directement

20 avec l'accusation. Tout ceci se fait de façon informelle et ne nous

21 concerne pas.

22 Mme Mc Murrey (interprétation de l'anglais). - Mais qu'en est-il,

23 s'il faut une décision de votre part, s'il existe une disparité

24 entre ce que dit l'accusation et ce que dit la défense ?

25 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Il faut attendre

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1 que surgisse cette question, et il y aura discussion, mais à ce

2 moment-là, une décision sera prise s'il y a lieu, mais une requête

3 est alors présentée. Je pense que c'est une pratique judiciaire

4 courante. Il faut essayer d'épuiser tous les recours avant de passer

5 à l'étape de l'exception préjudicielle. Vous n'ignorez pas la partie

6 adverse, vous tenez compte de ce qu'elle fait à chaque pas. Nous

7 allons suspendre la séance pendant quelques instants, nous la

8 reprendrons à 17 h 30.

9 L'audience, suspendue à 17 heures 10, est reprise à 17 heures 40.

10 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Bienvenue. J'espère

11 que les conseils feront preuve de précision et de concision à cette

12 heure de la journée. Nous avons, en fait, passé toute la journée sur

13 des questions qu'on aurait pu régler en une demi-journée. Je pense

14 que c'était Mme Mc Murrey qui avait la parole au moment de la

15 suspension.

16 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Non, c'était moi.

17 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Ah oui, c'était à

18 vous.

19 M. Karabdic (interprétation du serbo-croate). - Oui monsieur le

20 président. Je voulais fournir une réponse rapide aux commentaires de

21 M. Ostberg. Dans la décision en date du 6 décembre 1996 de la

22 Chambre d'appel, il est dit que la Chambre de la première instance

23 n'a pas étudié la question du caractère vague de l'acte d'accusation

24 avec suffisamment de temps et de précision, surtout pour ce qui est

25 de l'objection concernant plusieurs chefs d'accusation où il y a des

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1 formulations diverses précisant plus ou moins l'acte d'accusation.

2 Et là (je cite en anglais), quand on parle de ce qui a été décidé

3 sur la structure de la ligne de la défense, on demande à

4 l'accusation de préciser systématiquement sa conduite, de dire de

5 quelle façon elle établit la responsabilité s'agissant des

6 supérieurs hiérarchiques et quelle est la base de l'argumentaire

7 qu'elle présente. J'aimerais aussi que l'accusation précise

8 davantage l'état de santé mentale : en était-elle consciente ou

9 devait-elle en être consciente ? C'est un état précisé ici et je

10 pense que l'accusation devrait parler davantage de l'intention. Je

11 pense qu'on a donné ici une indication claire à l'accusation

12 s'agissant de la charge de la preuve.

13 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je crois que nous

14 avons parcouru quasiment toutes les questions prévues pour cette

15 conférence de mise en état. La question de la traduction a fait

16 l'objet de plusieurs décisions par cette Chambre, et j'ai été

17 surpris qu'elle soit à nouveau posée aujourd'hui. Il a déjà été dit

18 qu'on pouvait faire des déclarations dans une des langues de

19 travail, à moins que le document soit rédigé au départ dans la

20 langue parlée par l'accusé. S'il s'agit de traduire chaque document

21 dans la langue de l'accusé, vous savez que cette décision n'a jamais

22 été prise par cette Chambre ; cette Chambre a toujours dit qu'il y

23 aurait, le cas échéant, traduction dans l'une ou l'autre langue de

24 travail du tribunal si c'était nécessaire. Pour ce qui est de la

25 liste des témoins, je sais que ceci peut porter à litige.

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1 L'accusation a fait état de ses propres difficultés à tenter

2 d'expliquer pourquoi elle ne pouvait pas fournir les adresses des

3 témoins figurant dans cette liste. C'est peut-être là quelque chose

4 de difficile à accepter. Il est, en effet, difficile d'accepter

5 d'exposer les témoins aux actions diverses de la défense. Je pense

6 que l'accusation, qui fera preuve de beaucoup de compréhension, vous

7 permettra d'essayer de contacter les témoins. On pourra vous donner

8 quelques indications sur le lieu où s'est déroulé l'interrogatoire.

9 Ceci sera peut-être d'un certain intérêt pour vous. Mais si le

10 témoin n'est pas protégé, je suppose que vous pourriez obtenir son

11 nom et son adresse. Mais il est difficile de statuer sur ce point

12 parce que l'accusation a le droit de protéger ses témoins. Une autre

13 question a été évoquée ou suggérée, celle des standards juridiques.

14 Je persiste à croire que nous sommes en train de mener un procès

15 pénal et, dans un tel procès, la charge de la preuve est

16 effectivement à déterminer. C'est un standard très élevé, au-delà

17 du raisonnable, et je suis surpris que cette question ait été

18 posée. Mais il pourrait s'avérer utile que les conseils abordent

19 cette question dans leurs mémoires pour le procès. Nous aurons des

20 mémoires de la part des conseils avant le procès -c'est ce à quoi

21 nous nous attendons- et il faudrait donc poser cette question à ce

22 moment-là. Sur la question du transport des personnes accusées du

23 quartier pénitentiaire jusqu'au tribunal, un membre du greffe

24 pourrait peut-être nous dire si on peut faire quelque chose, et si

25 le greffe peut apporter une quelconque assistance dans ce domaine.

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1 UN ASSISTANT DU GREFFE.- Monsieur le président, la question

2 concernant le transport des détenus -que nous aurions d'ailleurs

3 préféré voir évoquer dans le bureau du greffier- va effectivement

4 être étudiée par le greffe. Concernant la façon de transférer des

5 détenus séparément, il semble, en effet, que certains détenus

6 pourraient circuler ensemble. La problématique du transport sera

7 donc envisagée par le greffier.

8 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Merci beaucoup. Il

9 faudrait peut-être aussi essayer de réduire le nombre de conférences

10 de mise en état pour que ces détenus ne soient pas obligés de venir

11 aussi fréquemment. Je crois ne pas me tromper en disant que ce sont

12 en général les autorités néerlandaises qui se chargent du transport.

13 Il y a peut-être possibilité d'intervention du greffe, mais le

14 greffe n'est pas la seule instance qui s'occupe de ces questions.

15 Toutefois, des difficultés ont été évoquées par Mme Residovic et

16 elles portaient sur le quartier pénitentiaire. Le greffe pourrait

17 peut-être vous aider, si vous le contactiez, à trouver une solution

18 de rechange. Peut-être que le conseil pourrait voir les vidéos au

19 quartier pénitentiaire. S'agissant de la présentation d'autres

20 éléments de preuve, je laisse le soin à l'accusation de s'en

21 occuper. L'accusation sait toujours comment présenter son dossier.

22 Il est tout à fait inhabituel de commencer à discuter de la façon

23 dont l'accusation va mener son procès. Lors d'un contre-

24 interrogatoire, si les conseils décident ensemble de commencer par

25 un premier accusé, même si aucune accusation n'est portée sur cet

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1 accusé précis (même si l'accusé n'a pas vu d'accusation portée

2 contre lui), son conseil ne doit pas nécessairement intervenir, à

3 moins bien sûr qu'il ne veuille obtenir des renseignements du témoin

4 entendu à ce moment-là. L'accusation n'est pas du tout concernée par

5 la façon dont les conseils de la défense veulent mener leur défense.

6 Pour ce qui est de la question des témoins experts, cette question a

7 déjà été débattue, et je pense que toute cour ou tribunal a sa

8 propre théorie quant aux témoins experts. Il s'agit de témoins

9 neutres. Mais je suis d'accord avec la défense qui souhaite savoir

10 ce que les experts témoins viendront dire de façon à ce que la

11 défense puisse, le cas échéant, conduire sa propre enquête ou

12 proposer ses propres experts. Mais les témoins experts sont

13 ordinairement des témoins neutres qui sont appelés par l'institution,

14 mais qui ne sont pas véritablement parties au procès. En

15 l'occurrence, certaines connotations sont peut-être un peu

16 malheureuses. Des objections ont été soulevées au vu du nom des témoins et

17 je pense que l'accusation pourrait prendre en

18 considération cette objection qui porte sur la crédibilité des

19 témoins experts. Mais, en tout état de cause, je ne pense pas que

20 cela importe vraiment. Ce qui importe pour le tribunal, c'est ce qui

21 est dit devant le tribunal et non pas qui le dit. Lorsqu'il s'agit

22 d'exposés relatifs aux faits historiques ou à des faits d'ordre

23 technique, le nom de la personne qui fait cette exposé n'a pas

24 d'importance au regard de ce qui est dit. Beaucoup d'arguments ont

25 été avancés. Les noms sont peut-être un peu sujet à caution, mais je

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1 ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aller aussi loin. Nous pensons

2 qu'il sera nécessaire, même dans ces circonstances, que l'accusation

3 essaie de faire connaître à l'avance ses experts témoins et, en tout

4 cas, pas plus tard qu'à la fin du mois de janvier. On devra savoir à

5 cette date qui seront les témoins experts, et avoir sur papier une

6 ébauche de ce que ces témoins experts vont vraisemblablement dire ou

7 le domaine qu'ils vont traiter, car s'il est impossible de savoir à

8 l'avance ce qu'un témoin expert dira dans le détail, on peut en

9 revanche préciser son domaine de compétence, ses qualifications et

10 son expérience, autant d'éléments qui sont pris en considération

11 pour déterminer le statut d'expert témoin. Si la défense souhaite

12 aussi citer des experts témoins, elle devrait présenter les noms

13 avant le 15 février pour que l'accusation soit à son tour à même de

14 décider de son attitude. Comme je l'ai dit, tous les conseils

15 présenteront sans doute des mémoires préalables au procès, c'est-à-

16 dire au moins quatorze jours avant le début du procès. Ils devraient

17 pouvoir déposer ces mémoires deux semaines avant que le procès ne

18 soit entamé. Pour ce qui est des arrangements pratiques relatifs au

19 procès, la Chambre et les trois juges qui siégeront ici comptent

20 siéger du lundi au mercredi de 10 h 00 à 13 h 00 et de 14 h 30 à 17

21 h 30. Nous aurons de courtes pauses lors de chacune des séances. Je

22 ne pense pas encore avoir dit que les conseils principaux devront

23 être présents chaque jour, à moins qu'ils aient de bonnes raisons de

24 ne pas être là. Nous avons besoin d'appliquer une certaine

25 discipline dans la présentation des affaires et nous attendons du

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1 conseil principal, s'il n'est pas présent à l'instance, qu'il

2 désigne son suppléant. J'espère ne rien avoir oublié de ce qui a été

3 dit lors du débat.

4 Mme Mc Henry (interprétation de l'anglais). - Une question de la

5 part de l'accusation : préférez-vous que les mémoires préalables au

6 procès ne couvrent que les questions juridiques ou voudriez-vous que

7 ces mémoires couvrent aussi rapidement les faits ? Nous pouvons les

8 rédiger dans un sens ou dans l'autre, il vous appartient d'en

9 décider.

10 M. le Président (interprétation de l'anglais). - Je souhaite qu'ils

11 couvrent principalement les questions juridiques. Mais puisque nous

12 ne savons pas comment les contre- interrogatoires vont affecter les

13 éléments de preuve, il pourra être difficile pour vous de savoir

14 exactement d'avance ce qu'il en est de ces questions. C'est donc un

15 tableau assez général que vous aurez à présenter au tribunal. Je

16 pense que c'est tout ce que nous avions à traiter dans cette

17 présente conférence de mise en état. Comme je le disais au début de

18 la réunion, nous allons rendre notre décision concernant les

19 requêtes présentées à l'occasion de cette conférence de mise en

20 état. Après avoir considéré tous les arguments avancés pour et

21 contre le report du procès et après avoir entendu les raisons

22 avancées pour ce report, nous avons jugé assez difficile d'accorder

23 le report qui a été demandé. Mais nous allons vous donner les

24 raisons qui sont les nôtres d'accepter un report du procès jusqu'au

25 10 mars. Voici donc ce qui motive cette décision :.nous n'avons pas

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1 été saisis des requêtes de façon adéquate. Mais nous n'avons pas

2 jugé nécessaire d'en dire plus que ce que nous avons dit ce matin.

3 Nous n'avons pas tranché sur les questions qui ont été abordées dans

4 le cadre des requêtes présentées au titre d'un article erroné. C'est

5 un procès en cours. Le règlement est là pour ceux qui auraient des

6 difficultés. Ces personnes peuvent s'y référer. Mais ce que nous

7 conseillons, c'est de tirer partie du règlement lui-même, de le lire

8 attentivement, et de ne pas tirer de conclusions de choses qui

9 pourraient se passer ailleurs. Il y a un avantage à rester en

10 rapport bilatéral avec l'accusation, et à savoir ce que le règlement

11 prévoit. Nous n'avons donc pas à entrer dans le détail des requêtes

12 à chaque stade ou pour chaque point particulier qui n'exige pas de

13 requête pour leur règlement. La séance touche à son terme. Nous

14 allons donc lever cette séance. Et le procès s'ouvrira le 10 mars.

15 La séance est levée à 18 h 00

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