Affaire n° : IT-98-34-A

LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Fausto Pocar, Président
M. le Juge Mohamed Shahabuddeen
M. le Juge Mehmet Güney
M. le Juge Wolfgang Schomburg
Mme le Juge Inés Mónica Weinberg de Roca

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
4 mai 2005

LE PROCUREUR

C/

MLADEN NALETILIC ALIAS « TUTA »
VINKO MARTINOVIC ALIAS « STELA »

_________________________________________

DÉCISION RELATIVE AU DOCUMENT DE VINKO MARTINOVIC LEVANT LA CONFIDENTIALITÉ DE SON MÉMOIRE D’APPEL

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Le Bureau du Procureur :

M. Norman Farrell

Les Conseils des Accusés :

MM. Matthew Hennessy et Christopher Young Meek pour Mladen Naletilic
MM. Zelimir Par et Kurt Kerns pour Vinko Martinovic

LA CHAMBRE D’APPEL du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

VU le document levant la confidentialité du mémoire d’appel (Withdrawal of Confidential Status of Appeal Brief), déposé par Vinko Martinovic (l’« Appelant ») le 29 mars 2005 (le « document de l’Appelant »), par lequel celui-ci informe le Tribunal international qu’il lève la confidentialité de son mémoire d’appel (Appeal Brief of Mr. Vinko Martinovic), déposé le 29 août 2003 (le « Mémoire d’appel »), et demande que celui-ci soit traité comme un document public, affirmant que le choix de la confidentialité avait initialement été dicté par des craintes liées à la sécurité des témoins qui, depuis, se sont dissipées et qu’à présent, il n’est plus nécessaire que son Mémoire d’appel reste confidentiel (la « demande »),

VU la réponse de l’Accusation au document de l’Appelant et la notification des informations confidentielles contenues dans le mémoire d’appel de Vinko Martinovic (Prosecution’s Response to Vinko Martinovic’s ‘Withdrawal of Confidential Status of Appeal Brief’ and Notification of Confidential Information Contained in Vinko Martinovic’s Appeal Brief), déposées le 30 mars 2005 (la « Réponse de l’Accusation »), par laquelle l’Accusation demande que le document de l’Appelant soit rejeté au motif que 1) lever la confidentialité du Mémoire d’appel violerait des exigences de confidentialité car ledit mémoire révèle l’identité de témoins qui, sur ordonnance de la Chambre de première instance, ont déposé en application des articles 75 et 79 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement ») sous des pseudonymes, avec altération de leur image et à huis clos, 2) l’Appelant ne peut unilatéralement annuler des mesures de protection accordées par une Chambre de première instance en application de l’article 75 du Règlement, et 3) l’Appelant ne fait valoir aucune raison à l’appui de l’annulation des mesures de protection précédemment ordonnées par la Chambre de première instance,

ATTENDU que l’Appelant n’a pas déposé de réplique,

ATTENDU que, le 23 septembre 2003, le juge de la mise en état en appel a estimé que compte tenu de certains éléments figurant dans le Mémoire d’appel, celui-ci aurait dû être déposé à titre confidentiel, et a ordonné qu’il soit désormais traité comme tel1,

ATTENDU en particulier que le Mémoire d’appel révèle des informations relatives à des témoins pour lesquels des mesures de protection ont été ordonnées par la Chambre de première instance en application des articles 75 et 79 du Règlement,

ATTENDU que les mesures de protection ordonnées par la Chambre de première instance pour des témoins dans le cadre de la présente affaire s’appliquent mutatis mutandis en appel2,

ATTENDU que la levée de la confidentialité du Mémoire de l’Appelant entraînerait l’annulation des mesures de protection ordonnées par la Chambre de première instance,

ATTENDU qu’un appelant ne peut unilatéralement lever la confidentialité d’un document lorsque celle-ci a été ordonnée par la Chambre d’appel,

ATTENDU en outre que l’Appelant n’a présenté aucun élément factuel à l’appui de la demande faite à la Chambre d’appel de considérer son Mémoire d’appel comme un document public, au motif que la décision de la Chambre d’appel de rendre ledit Mémoire d’appel confidentiel et celle de la Chambre de première instance d’accorder les mesures de protection initiales sont fondées sur des craintes liées à la sécurité des témoins qui se sont à présent dissipées,

ATTENDU que, le 17 mars 2005, le juge de la mise en état en appel a oralement ordonné aux parties en l’espèce de déposer auprès du Tribunal international, dans les délais requis, des versions publiques expurgées de leurs mémoires d’appel confidentiels3,

ATTENDU que, en application des articles 78 et 107 du Règlement, la procédure devant une Chambre d’appel, qui comprend les écritures déposées par les parties, est publique sauf si des raisons exceptionnelles justifient son déroulement à huis clos4, et qu’il est d’usage au Tribunal international que les parties déposent des versions publiques expurgées des mémoires confidentiels déposés en appel du jugement rendu par la Chambre de première instance, puisque la Chambre d’appel, après avoir dûment examiné les mémoires des parties et le dossier d’appel, rend son arrêt en audience publique, en application de l’article 117 du Règlement,

REJETTE le document de l’Appelant et, de ce fait, la demande qui y est exprimée,

ORDONNE à l’Appelant de déposer au plus tôt une version publique de son Mémoire d’appel, dûment expurgée de toutes les informations confidentielles, dont celles relatives à l’identité des témoins protégés.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre d’appel
______________
Fausto Pocar

Le 4 mai 2005
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1. Ordonnance, 23 septembre 2003, p. 2.
2. Voir article 75 du Règlement, in fine.
3. Conférence de mise en état en appel, compte rendu du 17 mars 2005, p. 67.
4. Voir, par exemple, articles 75 et 79 du Règlement.