Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi 25 mars 2002)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 25.)

4 (Les accusés sont dans le prétoire.)

5 (Questions relatives à la procédure.)

6 M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire, Madame la

7 Greffière.

8 Mme Thompson (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames

9 les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-98-34-T, le Procureur contre

10 Naletilic et Martinovic.

11 M. le Président (interprétation): Je voudrais que les présentations soient

12 faites, tout d'abord pour le Procureur.

13 M. Scott (interprétation): (Hors micro.) Je m'excuse. Pour ce qui est de

14 l'équipe de l'accusation, je m'appelle Kenneth Scott et je suis assisté de

15 M. Douglas Stringer.

16 M. le Président (interprétation): La défense?

17 M. Krsnik (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président et Mesdames les

18 Juges. Pour ce qui est de la défense de Mladen Naletilic, je crois que

19 nous sommes dans la même composition et je crois que vous nous connaissez

20 fort bien tous et toutes. Merci.

21 M. le Président (interprétation): Maître Seric?

22 M. Seric (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames les

23 Juges. Pour le compte rendu d'audience, je dirai que je suis l'avocat

24 Branko Seric et j'ai mon coconseil, M. Zelimir Par.

25 M. le Président (interprétation): Merci. Monsieur Martinovic, est-ce que

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1 vous entendez l'affaire dans une langue que vous êtes en mesure de

2 comprendre?

3 M. Martinovic (interprétation): Oui, je peux comprendre.

4 M. le Président (interprétation): Je vais poser la même question... Au

5 fait, je voudrais vous dire que si vous avez des difficultés à l'avenir,

6 veuillez nous le faire savoir.

7 (M. Martinovic fait un signe affirmatif de la tête.)

8 Veuillez vous rasseoir.

9 Monsieur Naletilic, est-ce que vous entendez l'affaire dans une langue que

10 vous êtes en mesure de comprendre?

11 M. Naletilic (interprétation): Oui, je vous remercie.

12 M. le Président (interprétation): Merci. Je ne vous poserai pas la même

13 question, mais je vous dirai seulement que, si vous avez des problèmes,

14 veuillez nous le faire savoir.

15 M. Naletilic (interprétation): Certainement.

16 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir. Enchaînons. Nous

17 sommes très désolés pour le retard que nous avons pris. Je crois que cela

18 arrive à chaque fois que nous avons une première journée de travail en

19 semaine. Avant de commencer, je voudrais savoir s'il y a des questions de

20 procédure que les deux parties voudraient soulever devant la Chambre.

21 Je vous en prie, Monsieur Scott?

22 M. Scott (interprétation): Il y a quelques questions en suspens dont la

23 Chambre est au courant; et je crois que je n'aurai rien d'autre à dire.

24 M. le Président (interprétation): Merci. Maître Krsnik?

25 M. Krsnik (interprétation): A part les requêtes que nous avons présentées,

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1 nous n'avons pas de question de procédure à soulever. Merci.

2 M. le Président (interprétation): Merci. Je crois avoir compris que vous

3 aviez fait une requête demandant une session à huis clos pour votre

4 premier témoin, et nous voudrions entendre la réponse de l'accusation à ce

5 sujet. Monsieur Scott?

6 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, comme nous l'avions

7 annoncé la semaine dernière lors de la conférence de mise en état, nous

8 sommes prêts à être assez souples lorsqu'il y a des demandes de protection

9 de la part de la défense pour ses témoins, vu la situation qui a été celle

10 des témoins de l'accusation.

11 Je dois dire que dans la plupart des cas, s'il s'agit de l'attribution

12 d'un pseudonyme, de la distorsion des traits de visage, etc., il a été

13 fait droit à nos requêtes de façon assez commune. Mais quand on parle de

14 huis clos, les choses sont différentes. Je crois qu'il apparaîtra à

15 l'étude du dossier qu'il y a très peu de témoins à charge qui ont témoigné

16 à huis clos et que ce sont surtout les autres mesures de protection qui

17 ont été utilisées.

18 S'agissant de ce premier témoin, Monsieur le Président, nous ne voyons pas

19 qu'il soit justifié d'entendre ce témoin à huis clos. Rien n'indique qu'il

20 court un risque quelconque. Bien entendu, je ne vais rien dire de plus qui

21 permette d'identifier la personne en question. Il s'agit de quelqu'un -et

22 là je vais être très prudent-, il s'agit de quelqu'un qui a pris des

23 positions publiquement par le passé et, de ce fait, cette personne ne

24 devrait pas être hésitante à l'idée de prendre position ici, publiquement,

25 dans ce prétoire.

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1 Notre position est donc la suivante: nous ne nous opposerions donc pas à

2 l'attribution d'un pseudonyme au témoin si cela peut être utile, mais nous

3 ne pensons pas qu'une audience à huis clos soit appropriée pour ce témoin.

4 M. le Président (interprétation): Merci. Maître Krsnik, si vous souhaitez

5 que nous passions à huis clos partiel, dites-le-nous si cela vous suffit

6 pour ce témoin.

7 M. Krsnik (interprétation): Non, Monsieur le Président. Je voudrais dire

8 que nous avons écrit, enfin, rédigé un supplément pour cette requête de

9 session à huis clos, et nous ne savons pas si l'accusation l'a reçu. Je

10 crois que nous l'avons envoyé vendredi. Et entre-temps, nous avons pris

11 connaissance de faits nouveaux intervenus ce jour-là qui nous ont fait

12 savoir que nous pourrions peut-être mettre en péril l'identité.

13 Mais je voudrais demander un huis clos partiel parce que je voudrais vous

14 expliquer en une ou deux phrases de quoi il retourne, si, toutefois, vous

15 n'avez pas reçu le supplément de notre requête.

16 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons passer à huis clos

17 partiel, je vous prie. Nous sommes à huis clos partiel maintenant.

18 (Audience à huis clos partiel à 9 heures 31.)

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20 (Audience publique à 9 heures 34.)

21 (Propos liminaires de la défense.)

22 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous êtes prêts pour la

23 session publique?

24 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

25 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous nous dire combien de temps

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1 il vous faut?

2 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais vous dire

3 très volontiers combien de temps il nous faudrait. Nous, notre équipe

4 s'est forcée de faire des calculs, nous avons fait des essais, et je

5 voudrais vous dire que nous n'avons pas réussi à calculer le temps

6 nécessaire. J'ai des enregistrements vidéo et des cartes à présenter et

7 quoique cela ne doive pas forcément demander beaucoup de temps, je crois

8 qu'il nous faudra quand même compter sur environ 2 à 3 heures.

9 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

10 M. Krsnik (interprétation): Je m'excuse, je voulais ajouter encore une

11 chose.

12 Les enregistrements vidéo avec les autres documents que je me propose… que

13 je vais montrer ici brièvement me serviront ici de référence générale pour

14 la toile de fond que je voudrais dresser ou brosser mais, avec chaque

15 témoin qui se présentera, je ferai état d'une cote pour les documents et

16 les enregistrements que je voudrais présenter.

17 M. le Président (interprétation): Je vous pose la question juste pour

18 essayer de répartir judicieusement le temps qui est mis à notre

19 disposition. Il convient de terminer notre session d'aujourd'hui à 13

20 heures 45, et étant donné que nous avons commencé avec un certain retard

21 dès le début, cela fait que nous allons faire une petite pause à chaque

22 heure, toutes les 60 minutes donc. Je vous prie de continuer Maître

23 Krsnik.

24 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

25 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'ai longuement réfléchi à la

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1 façon dont je devrais procéder pour entamer mes propos liminaires. C'est

2 la première fois que cela m'arrive dans ma carrière de procéder de cette

3 façon dans une affaire analogue.

4 Je voudrais dire d'avance que je me propose de citer des témoins et de

5 présenter des éléments de preuve que la défense a l'intention de présenter

6 devant ce Tribunal. Jamais auparavant dans ma carrière d'avocat, et

7 notamment dans mon pays, je n'ai eu l'occasion de le faire. Aussi ai-je

8 procédé à des préparatifs longs et complexes, notamment parce que tout ce

9 que je dirai aujourd'hui ici doit forcément être présenté à la Chambre

10 tant de manière viva voce qu'en citant des témoins, en présentant des

11 éléments de preuve autres tels que des cartes géographiques ou des

12 enregistrements vidéo.

13 S'agissant de ces éléments de preuve, je dirai que les témoins ne seront

14 que des personnes qui ont des connaissances immédiates. Je tiens à

15 préciser, Monsieur le Président, qu'aucun des témoins que je citerai à

16 comparaître ici ne sera un témoin qui viendra nous parler de choses qu'il

17 aura connues de deuxième main.

18 C'est conscient de la chose, ou plutôt conscient du fait que si je ne

19 procédais pas ainsi, les propos liminaires que je tiendrai demeureraient

20 suspendus, en quelque sorte dans l'air ou pourraient paraître comme une

21 tentative de ma part de laisser ou de faire impression sans prouver, je ne

22 me propose donc pas de faire étalage de conclusions ronflantes, je ne me

23 propose pas non plus de faire de débats politiques.

24 La défense a en effet déployé des efforts considérables pour rassembler un

25 nombre plus que suffisant d'éléments de preuve mais cette équipe de la

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1 défense elle-même -et vous voyez que nous sommes que trois- se doit de

2 s'opposer à l'appareil énorme, à la puissance du Bureau du Procureur que

3 rien n'entrave et qui se trouve en face.

4 Etant donné que l'Acte d'accusation constitue, hélas!, une seule façon de

5 voir, non vérifiée d'ailleurs, qui ne se fonde que sur une source

6 d'information, à savoir les sources bosniennes, je voudrais qu'il soit

7 tiré au clair ici la terminologie utilisée, à savoir: jusqu'à l'accord

8 réalisé à Washington, la défense, vers le début de l'année 1994, avait eu

9 affaire à un terme, une terminologie qui parlait de Musulmans, aux termes

10 de la Constitution en vigueur. Et ensuite, par la suite, donc après

11 l'accord de Washington, lorsqu'il y a eu reconnaissance internationale de

12 cette partie-là, la République croate de Herceg-Bosnie a été incorporée

13 aux Bosniens en qualité de nation et la langue bosnienne a été reconnue en

14 tant que telle; ce sont des choses que j'avais souhaité préciser pour me

15 comporter en conformité avec ce qui constitue les catégories juridiques en

16 vigueur.

17 Donc, de part leur façon subjective de voir, le Bureau du Procureur a

18 avancé ses éléments de preuve, et la défense propose quant à elle de les

19 contester et se propose également de prouver, moyennant témoins, que

20 certains événements ont été pris en considération partant d'un point de

21 vue des plus subjectifs.

22 En même temps, ces événements ont été placés sous le contrôle de certains

23 milieux très intéressés pour lesquels il n'est point sans importance, le

24 fait de savoir si ces événements allaient les présenter comme étant les

25 seules victimes dans ces événements qui sont survenus en Bosnie-

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1 Herzégovine. En même temps, en collaboration avec le Bureau du Procureur

2 qui s'est fait par le biais de l'A.I.D, on s'est efforcé de couvrir des

3 comportements véritablement criminels et ce, en criant, comme l'expression

4 populaire le dirait, "au voleur!".

5 C'est en raison de ce que je viens de dire jusqu'à présent que je me

6 proposerai de souligner la chose suivante: il est en effet pour moi un

7 honneur que d'être le conseil de la défense de M. Naletilic devant ce

8 Tribunal, et notamment en raison du fait d'avoir un système énorme tourné

9 contre un individu, contre un particulier, tourné contre un particulier de

10 toutes ses forces; ce qui signifie qu'il y a rapport inapproprié des

11 forces. Aussi est-ce un plaisir pour moi de faire en sorte qu'avec mon

12 client M. Mladen Naletilic, je vienne contester les allégations de l'Acte

13 d'accusation et les allégations faites par le truchement d'un système, de

14 tout un réseau d'affirmations présenté par le Bureau du Procureur devant

15 le Tribunal ici présent. Et c'est une première affaire dans laquelle il

16 est débattu des conflits entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine

17 dans le territoire de l'Herzégovine, et la défense se proposera de

18 présenter sa façon de voir les événements des années 1990, à savoir à

19 partir des élections pluripartites qui s'étaient tenues pour la première

20 fois jusqu'à février de l'année 1994. La défense de Mladen Naletilic a

21 pour devoir, mais tout aussi bien le droit, de procéder à une présentation

22 de ses éléments de preuve aux fins de contester ceux présentés par le

23 Bureau du Procureur dans l'Acte d'accusation, dans les compléments ou

24 avenants à l'Acte d'accusation et les allégations faites par le Bureau du

25 Procureur lors des propos liminaires. Il s'agit également de contester ce

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1 que le Bureau du Procureur a présenté comme éléments de preuve dans sa

2 présentation, et s'agissant directement de M. Mladen Naletilic.

3 Dès le début même, je souhaite souligner la conviction profonde qui est la

4 mienne au terme de laquelle la Chambre, ici présente, en dépit des

5 jugements déjà prononcés mais jugements qui ne sont pas encore entrés

6 pleinement en vigueur, ne sera pas réfractaire aux éléments de preuve que

7 la défense se propose quant à elle de présenter, s'agissant de l'existence

8 d'un conflit armé international et de persécutions qui en ont découlées.

9 La défense, en effet, se tient ou s'estime tenue de présenter ses éléments

10 de preuve aux fins de dresser ou de brosser une toile de fond qui a été

11 celle de la Bosnie-Herzégovine pour présenter, notamment après les

12 élections pluripartites, l'évolution des partis, la mise en place de

13 programmes et objectifs de ces partis, pour illustrer l'essor ou

14 l'évolution des relations entre les populations, les trois populations en

15 présence en Bosnie-Herzégovine, et pour dépeindre, ce faisant, les causes

16 et résultats du conflit.

17 Je pense, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, que nous ne devrions

18 pas oublier cet aperçu historique pour ne pas négliger les relations de

19 cause à effet et parler de ces événements. Je tiens à préciser également

20 que nous ne saurions comprendre la complexité de ces questions en écoutant

21 seulement l'exposé de 4 heures fait par le témoin expert, nous ne saurions

22 comprendre ce qui s'est passé au cours des 10 dernières années sans parler

23 des 100 ou 500 dernières années.

24 La défense se propose, en effet, de parler des années de 1990 seulement et

25 de présenter ses éléments de preuve à ce sujet-là uniquement, mais, les

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1 propos sages que j'ai eu l'occasion d'entendre et la sagesse de ceux qui

2 m'ont conseillé sur la façon de procéder.

3 Je voudrais avec plaisir me référer aux propos de l'honorable Président de

4 cette Chambre qui a déclaré une fois, je crois, que Rome ne s'était pas

5 constituée en 7 jours. C'est en nous référant à ce qui a été dit et en

6 nous conformant à vos instructions, que nous allons recourir à des

7 éléments de preuve les plus brefs possibles, mais les plus puissants

8 possibles également, que nous voudrions présenter les éléments de preuve

9 relatifs aux événements qui ont eu lieu il y a 10 ans.

10 La défense à également pour tâche de contester les chefs d'accusation

11 contre Mladen Naletilic, notamment les crimes contre l'humanité, les

12 crimes contre les persécutions comprises par l'Article 5 du Statut, et le

13 Bureau du Procureur, quant à lui, affirme que tous ces crimes-là ont été

14 perpétrés à un moment où il y avait une occupation partielle du territoire

15 de la Bosnie-Herzégovine par la Croatie et d'autres puissances étrangères.

16 Mais nous ferions mieux de procéder dans l'ordre. Tout d'abord, la défense

17 se propose d'expliquer, d'apporter des éclaircissements sur le rôle de

18 l'A.I.D dans cette affaire, mais non seulement dans cette affaire-ci, car

19 car nous avons déterminé de façon indubitable jusqu'à ce moment-ci, fait

20 que la défense se propose d'illustrer et, en se référant aux dires mêmes

21 des enquêteurs du Bureau du Procureur, donc en se référant à ce qu'ils

22 nous ont avoué eux-mêmes ici dans le prétoire, en disant que la

23 collaboration la plus étroite sur le terrain en Bosnie-Herzégovine s'est

24 faite notamment avec l'A.I.D, pour ce qui les concernait.

25 Par conséquent, il s'agit de répondre à une question, et nous le ferons:

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1 qu'est-ce que l'A.I.D? Qui constitue l'A.I.D? La défense démontrera que

2 l'A.I.D n'est qu'une police politique exclusivement musulmane, une police

3 secrète mise sur pied et incorporée au système par le parti du SDA. Son

4 vrai nom véritable dit "Agence de recherche et documentation", et cette

5 appellation fortement atténuée semble vouloir nous faire entendre un faux-

6 semblant, recherche de crimes de guerre pour dissimuler ses activités

7 véritables, pour nous tromper s'agissant de ses activités véritables,

8 notamment pendant la guerre mais aussi bien après les conflits armés et

9 jusqu'à nos jours.

10 Cette organisation, en fait, a vaqué à des activités de renseignement,

11 s'est chargée également de conduire une guerre spéciale, s'est chargée de

12 propager des désinformations, donc faire tout ce que les services secrets

13 de tout pays sont chargés de faire; c'est d'ailleurs leur travail.

14 Il est certain que ce Tribunal est matière du gros de ses activités et je

15 crois, Monsieur le Président, pouvoir dire que tous les témoins qui sont

16 venus témoigner ici… Je ne saurais vous dire un pourcentage exact, mais je

17 parlerai de quelque 80% de témoins qui ont eu des contacts, qui ont fait

18 des dépositions, les premières de leur déposition dans des entrevues ou

19 des interviews avec ce service particulier.

20 Les activités de ce service-là sont déployées dans l'intérêt d'un seul

21 peuple, à savoir du groupe ethnique bosnien, et contre les autres aux fins

22 de mettre en place une image ou de diffuser une image conformément à la

23 guerre spéciale disant que la HZ-HB, le HR-HB, le HVO étaient illégales,

24 clandestines, et qu'il s'agissait là de forces d'occupation. On s'est

25 efforcé de prouver également qu'il y avait ingérence de la République de

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1 Croatie dans le conflit qui a eu lieu sur le territoire de la Bosnie-

2 Herzégovine.

3 Et en préparant, en procédant aux préparatifs des témoins pour ce procès,

4 ils ont suggéré de diffuser notamment ce type d'images à l'occasion du

5 procès, comme je l'ai décrit, parce qu'en diffusant la fausse image, cette

6 image déformée, on parvenait à dissimuler l'image véritable afférente aux

7 objectifs du parti SDA qui consistaient en la réalisation de la

8 déclaration islamique faite par son leader dont je parlerai plus tard.

9 Cette déclaration islamique a été incorporée au programme du parti SDA. Il

10 s'agissait de préparatifs de mise en place d'un Etat islamique, chose que

11 nous allons illustrer de façon abondante dans la suite des propos que je

12 tiendrai ici.

13 Il s'agissait également d'islamiser l'armée de la Bosnie-Herzégovine en la

14 présentant ni plus ni moins comme étant des effectifs gouvernementaux,

15 alors que le HVO avait fait l'objet d'essais de présentation au terme

16 desquels il se serait agi de forces non gouvernementales.

17 Et pour ce qui est du président du SDA et du président de la présidence de

18 la Bosnie-Herzégovine, M. Alija Izetbegovic, eh bien, ceux-là ont été

19 présentés comme étant présidents légalement élus, et ce, avant même les

20 élections qui sont tenues après les Accords de Dayton.

21 La chose a été faite sciemment pour dissimuler un fait, le fait qu'il

22 avait dû quitter les fonctions de président de la présidence dans le

23 courant du mois de décembre 1992 parce que, en vertu de la constitution

24 qui était en vigueur à l'époque, son deuxième mandat avait pris déjà fin

25 au niveau de ses fonctions de président de la présidence. Par conséquent,

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1 il n'était plus à même d'exercer les fonctions en question. Cependant, il

2 ne l'a pas fait. Il continue à manipuler la présidence dans les cinq

3 années qui vont suivre. Il limoge les membres de la présidence et il

4 choisit les nouveaux membres de la présidence d'après sa volonté, mais il

5 ne choisit que les personnes qui allaient lui obéir.

6 Il faut savoir que ceci -et c'est quelque chose que la défense va sans

7 doute prouver de manière tout à fait convaincante-, eh bien, on ne peut le

8 croire que si on n'a aucune connaissance sur la Bosnie-Herzégovine. Les

9 gens qui le croient sont les gens qui n'ont exprimé aucun intérêt à

10 l'apprendre. Ils n'ont jamais demandé à quelqu'un de leur clarifier la

11 situation alors qu'ils auraient pu le faire, et ils peuvent encore se

12 renseigner.

13 Pour que la vérité historique qui ne peut pas être falsifiée, qu'aucun

14 jugement ne peut cacher, eh bien, nous pourrions l'apprendre à temps et

15 nous ne serions pas ici devant ce Tribunal en train de perdre autant de

16 temps pour prouver quelque chose qui est bien connu.

17 Il est de même bien connu que le HVO est une organisation militaire tout à

18 fait légale de l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Ceci est bien connu et je

19 vais le prouver à l'aide des documents aujourd'hui à vous, ainsi que je le

20 prouverai en appelant des témoins à la barre dans ce prétoire à partir de

21 demain.

22 Le gouvernement de Bosnie-Herzégovine est présenté ici comme étant le

23 gouvernement d'un pays européen, disons-le, ou peut-être le gouvernement

24 des Etats-Unis d'Amérique, comme s'il avait fonctionné de cette manière-là

25 pendant la guerre. Le gouvernement de Bosnie-Herzégovine a cessé d'exister

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1 au moment où l'état de guerre avait été proclamé en Bosnie-Herzégovine.

2 Car d'après la constitution en vigueur à l'époque, une présidence de

3 guerre était formée et, d'après leurs fonctions, les membres de cette

4 présidence de guerre devenaient -et ici je demanderai aux techniciens de

5 mettre sur le rétroprojecteur le document préparé-, vous voyez, ici sur

6 ces écrans, les élus tout à fait légaux, des gens qui ont donc été élus de

7 façon tout à fait légale, la première présidence, la seule présidence élue

8 légalement lors des élections de 1990.

9 Dans cette présidence, il y avait sept membres, et, d'après les voix

10 qu'ils avaient obtenues, deux représentants de chaque peuple constituant

11 en étaient membres -car ici, dans ce Tribunal, nous étions tout à fait

12 étonnés de devoir présenter des preuves que la Bosnie-Herzégovine

13 appartenait à trois peuples souverains- et de cette façon-là, des membres

14 de cette présidence étaient deux Croates, deux Serbes, deux Musulmans et

15 un représentant des autres, un Yougoslaves ou bien un représentant des

16 minorités ou d'un autre peuple.

17 Donc, pour les Bosniens Alija Izetbegovic, Fikret Abdic qui a été élu avec

18 le plus grand nombre de voix lors des élections, mais à cause de

19 manipulations du parti SDA, il n'est pas devenu le Président. A l'époque,

20 en 1990, on commençait à voir des indications du double visage, de

21 l'éternel double visage d'Alija Izetbegovic. Le représentant du peuple

22 serbe en Bosnie-Herzégovine, le Pr Nikola Koljevic, le Pr Biljana Plavsic.

23 Parmi les Croates ont été élus le journaliste sportif et le président de

24 la fédération de tennis de table de Bosnie-Herzégovine, M. Stjepan Kljujic

25 qui par la suite a été pendant un certain temps le président du HDZ de

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1 Bosnie-Herzégovine, et aussi Franjo Boras.

2 Après la première manipulation, arrive la deuxième. Même si élu avec le

3 plus grand nombre de voix, Fikret Abdic n'est donc pas devenu président,

4 et parmi les Yougoslaves, on pensait que les Yougoslaves seraient des gens

5 qui ne se déclareraient ni comme étant des Serbes, ni des Croates, ni

6 comme des Musulmans: ils se sentaient tout simplement comme Yougoslaves

7 puisqu'ils venaient de familles mixtes ou bien pour d'autres raisons qui

8 leur sont personnelles, ou bien des représentants des minorités, les

9 Tchèques, les Slovaques, les Bulgares ou bien des Juifs.

10 Eh bien, non, le parti SDA commence avec une nouvelle manipulation du fait

11 que telle personne s'était déclarée comme étant Yougoslave, c'est M. Ejup

12 Ganic qui est élu même s'il était Musulman, et même si, à l'époque, il

13 était membre du SDA -donc, il y avait déjà des Musulmans qui étaient déjà

14 élus à la présidence-, donc malgré tout cela c'est bien lui qui avait été

15 élu. Et comme vous allez l'apprendre par la suite, il a eu un très grand

16 rôle, en tant que connaissance et intime, quelqu'un qui servait M. Alija

17 Izetbegovic.

18 Peu de temps après, dans des termes historiques, donc un an au plus tard,

19 au moment où Alija Izetbegovic de retour de Lisbonne est arrêté pendant

20 une courte période par la JNA, au lieu de lui remettre en tant que son

21 substitut la deuxième personne élue, avec le plus grand nombre de voix, à

22 savoir Fikret Abdic, eh bien, lui, il choisit Ejup Ganic pour le remplacer

23 pendant sa détention.

24 De cette manière-là, Alija Izetbegovic qui était donc le président de tous

25 les trois peuples -le premier entre des égaux au sein de la présidence

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1 parce qu'il n'avait pas d'autre autorité-, il s'empare du pouvoir et il le

2 donne dans les mains de Ejup Ganic. Il est tout à fait clair où cela va

3 mener, et nous nous trouvons là à la fin de 1991. A l'époque, beaucoup

4 avaient appelé cela un coup d'Etat.

5 Je vais maintenant passer en revue toutes les manipulations, tout le

6 comportement qui était illégitime et non constitutionnel et qui a été

7 causé par M. Alija Izetbegovic au sein de la présidence. Et tout cela nous

8 allons le démontrer très clairement devant ce Tribunal.

9 Mais j'ai oublié de mentionner que le gouvernement cesse d'exister -je

10 m'excuse, je me suis emporté en voyant les photographies-, et maintenant

11 cette présidence de guerre, d'après son statut, nous avons les membres qui

12 sont le président du gouvernement, donc le Premier ministre qui, à

13 l'époque, si je ne m'abuse, était un Croate, M. Jure Pelivan, tout

14 simplement parce qu'à l'époque il y avait un système de rotation, et le

15 représentant de chaque peuple avait un mandat d'une durée d'un an,

16 renouvelable une fois.

17 Il y avait donc le président de l'assemblée et le président de la

18 présidence. Donc il y avait d'après sa fonction, en tant que membre aussi,

19 le président de l'assemblée, ainsi que le commandant de la Défense

20 territoriale.

21 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, en me posant des questions sur

22 comment mener ces déclarations liminaires, je savais qu'il fallait que ce

23 soit intéressant et que je ne vous fatigue pas. Et d'un autre côté, je me

24 suis dit: il ne faut peut-être pas négliger un certain nombre d'aspects.

25 Qu'est-ce que c'est que la Défense territoriale? Parce que je suis sûr que

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1 vous ne le savez pas, que vous ne savez pas quelle en est l'origine et

2 quel en était le rôle au sein de la SFRY puisque, ici, en parlant de la

3 Défense territoriale, on a prononcé beaucoup de contre-vérités et on a

4 manipulé avec ce terme, puisque la Défense territoriale, en réalité, avait

5 un rôle tout à fait clair, défini par la loi, pour tous les citoyens de la

6 République socialiste fédérative de Yougoslavie, et sa mission a été aussi

7 tout à fait clairement définie.

8 D'après le concept d'une défense généralisée, qui a eu son origine dans la

9 guerre menée par les résistants des partisans pendant la Deuxième Guerre

10 mondiale, conduite par Tito, eh bien, sur ces bases-là a été créé le

11 concept de la Défense territoriale.

12 Ce qui veut dire comme suit: tous les employés, tous les salariés de

13 chaque cuisine, de chaque entreprise, achètent des armes par leurs propres

14 moyens, par le moyen de cette entreprise. Ces armes sont déposées dans des

15 dépôts de ces entreprises. En même temps, ceux qui ont fait leur service

16 militaire doivent, en cas de guerre, suivre la mobilisation organisée par

17 la Défense territoriale et leurs armes sont gardées dans les dépôts de la

18 JNA. C'est de cette façon que chaque République, qui avait les formes d'un

19 Etat au sein de l'ancienne Yougoslavie, donc chaque République avait son

20 commandant de la Défense territoriale. Pour la plupart, c'étaient des

21 généraux à la retraite de la JNA. Donc ils avaient, ils faisaient semblant

22 d'un Etat (phon) qui, en réalité, était une République.

23 Vous allez bien sûr arriver à la conclusion logique: qu'est-ce que la JNA

24 a fait tout d'abord? Les armes de la Défense territoriale qu'ils

25 détenaient dans leurs dépôts, eh bien, ils les ont bien sûr gardées, mais

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1 en même temps ils ont pris toutes les armes qui se trouvaient dans les

2 dépôts de la Défense territoriale en se préparant pour l'agression de la

3 République de Croatie et pour l'occupation des territoires en Bosnie-

4 Herzégovine. C'est ainsi que la guerre civile a commencé, ce que je vais

5 élaborer de manière exhaustive par la suite.

6 Donc dans la première phase, les Croates et les Musulmans défendent le

7 territoire; ensemble, ils le défendent devant une agression serbe alors

8 que, par la suite, ils sont malheureusement attaqués par l'armée de

9 Bosnie-Herzégovine. Cette armée qui jamais, à aucun endroit depuis 1992

10 jusqu'en 1995, au moment où elle recommence à combattre avec le HVO, eh

11 bien, cette armée de Bosnie-Herzégovine n'a jamais réussi, pendant cette

12 période, à libérer un seul mètre carré face aux Serbes, mais ils se sont

13 toujours tournés vers ceux qui étaient plus faibles et ils attaquaient les

14 territoires sous le contrôle du HVO. Et tout cela –et là, je vais vous

15 démontrer l'absurdité de la chose-, ils le font pour s'emparer des

16 meilleures positions de départ, et tout cela, sous le parrainage et sous

17 l'égide de la communauté internationale.

18 Donc, d'après les fonctions, le commandant de la Défense territoriale

19 devient membre de la présidence de guerre. Alija Izetbegovic, bien sûr,

20 n'aime pas ce fait et il remplace donc cette personne de façon temporaire

21 par… je m'excuse, je n'arrive pas à me souvenir du nom. Mais toujours est-

22 il que c'est un Bosnien qui devient le commandant de la Défense

23 territoriale. Peu de temps après, cette personne est remplacée aussi par

24 M. Sefer Halilovic; ceci est fait contre toute la législation en vigueur

25 et il faut que je souligne: il s'agissait là d'un citoyen d'un autre pays,

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1 à l'époque. En réalité, c'était une personne inscrite dans le registre des

2 citoyens de la République de Serbie, à l'époque. Je sais pourquoi je le

3 souligne; vous allez vous en rendre compte parce que je vais faire un

4 parallèle avec la Croatie par la suite.

5 Cette personne donc représente les intérêts sur lesquels au départ on

6 s'était mis d'accord avec Alija Izetbegovic, mais il faut dire que c'était

7 quelqu'un qui était contre l'islamisation qui ne cessait de croître d'un

8 jour à l'autre. Il commence à s'affronter avec Alija Izetbegovic qui, lui,

9 était le commandant suprême de l'armée; il est donc contre l'islamisation

10 et il est limogé. A ce moment-là, c'est Rasim Delic qui est nommé à la

11 tête de l'armée. Il n'a qu'un seul supérieur, Rasim Delic, et il déclare

12 qu'il n'y a qu'Alija Izetbegovic qui peut le commander et personne

13 d'autre.

14 Le destin de M. Sefer Halilovic s'est avéré être tragique par la suite.

15 Dans un attentat, un missile a été tiré dans son appartement à Sarajevo,

16 son épouse et son frère y ont été tués. Ils ont pris son frère comme si

17 c'était lui. Il est resté seul avec ses deux enfants.

18 Je dis tout cela pour démontrer que les vengeances sont cruelles et que

19 l'on ne pardonne jamais en Bosnie-Herzégovine. On ne pardonne pas que

20 quelqu'un ose s'opposer à l'islamisation de l'armée, en l'occurrence. Dans

21 ce cas particulier, il s'agissait uniquement de l'islamisation de l'armée.

22 Toujours est-il que cette présidence de guerre ainsi formée commence à

23 agir, à fonctionner. Chacun des membres reçoit une tâche. Je ne vais pas

24 rentrer ici dans les détails puisque ce sont les témoins qui vont déposer

25 là-dessus. Mais ce qui est intéressant pour nous, c'est à quel moment tout

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1 cela commence à être illégitime. Cette présidence ne commence à être

2 illégitime qu'après le référendum, et vous allez voir que le référendum

3 était un moment clé de l'histoire de la Bosnie-Herzégovine. Les Serbes,

4 donc les représentants du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine quittent

5 l'assemblée, ils quittent tous les organes de pouvoir, tous ceux qui

6 avaient été élus lors des premières élections pluripartites, y inclus la

7 présidence de guerre. Biljana Plavsic et Nikola Koljevic se retirent donc

8 de la présidence de guerre.

9 D'après la constitution en vigueur à l'époque, de nouvelles élections

10 auraient dû être proclamées. Ceci n'a pas été fait. En lieu et place de

11 cela, ils ont été remplacés par d'autres personnes. Au moins pour garder

12 la forme, on choisit les personnes qui, lors des élections précédentes,

13 avaient été élues avec les nombres de voix juste après les deux personnes

14 précédentes: M. Kecmanovic et Mirko Pejanovic.

15 Alija Izetbegovic avait un rôle double. Nenad Kecmanovic quitte la

16 présidence puisqu'il n'arrive plus à supporter la situation, et la

17 présidence n'est plus légitime après cela. A sa place arrive un

18 représentant -permettez-moi de l'appeler "privé"-, donc un représentant

19 privé du peuple serbe, Tatjana Ljujic Mijatovic. Il faut dire

20 qu'auparavant elle n'a jamais été candidate aux élections précédentes.

21 C'est Alija Izetbegovic qui l'a prise, qui l'a emmenée comme cela. Les

22 Croates avaient toléré cela parce que, juste avant la guerre, toute

23 situation comportait tellement de stress et elle aurait toujours pu avoir

24 des conséquences catastrophiques. Ce qui était important, c'était de

25 contenir la situation en Bosnie-Herzégovine de façon tout à fait

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1 démocratique et sereine.

2 Mais M. Alija Izetbegovic décide d'évincer les représentants du peuple

3 croate élus de façon tout à fait légitime, à savoir M. Franjo Boras

4 puisque M. Kljujic avait entre-temps donné sa démission qui a été

5 acceptée.

6 Une fois de plus, des nouvelles élections s'imposent mais elles n'ont pas

7 lieu. Elles n'ont pas lieu parce que M. Izetbegovic fait venir des

8 représentants privés du peuple croate, à savoir M. Komsic, et par la

9 suite, par cooptation, M. Kljujic à nouveau.

10 En bref, il s'agit là d'une chose tout à fait risible. Mais en jetant de

11 la poudre aux yeux dans le monde entier, Alija Izetbegovic, en même temps,

12 manipule avec la présidence. C'est sa présidence privée, et ses

13 représentants privés du peuple croate ou du peuple serbe reçoivent des

14 récompenses. Ces récompenses sont des différents types de privilèges; ils

15 reçoivent, par exemple, des grands appartements ou bien des fonctions

16 importantes, et tout cela en période de guerre. Leurs enfants, leurs amis,

17 leurs familles sont nommés dans différentes ambassades. Et d'autres choses

18 similaires arrivent.

19 De par son comportement inapproprié, inconstitutionnel et illégitime, mais

20 grâce à la propagande menée par l'A.I.D. que nous avons déjà mentionnée

21 tellement de fois, donc l'A.I.D., le gouvernement… Pardon. Il agit et il

22 gouverne en tant que leader qui combat pour une Bosnie-Herzégovine

23 indépendante.

24 Mais, Monsieur le Président, même si c'est une Bosnie unique et même si

25 elle appartient aux trois peuples, mais à cause de l'incompréhension de la

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1 communauté internationale qui ne connaît pas la situation et

2 malheureusement, je vois que ceci est reflété dans cet Acte d'accusation,

3 eh bien, il réussit à présenter sa façon de voir les choses. Mais la

4 défense, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la défense va appeler

5 à la barre des témoins qui vont le contester.

6 J'ai l'impression qu'il est déjà 10 heures 30 et que vous avez parlé des

7 pauses toutes les heures mais si vous me le permettez, j'ai besoin

8 d'encore cinq minutes pour terminer cette première partie.

9 Cette incompréhension va très loin, et j'en veux pour preuve un certain

10 nombre de choses qui se sont passées au sein de ce prétoire. Mes collègues

11 du Bureau du Procureur parlent des Croates de Bosnie, des Musulmans de

12 Bosnie, mais ce sont des catégories qui n'existent pas. Il n'y a pas de

13 Croates de Bosnie, il n'y a pas de Musulmans de Bosnie; il y a des Croates

14 de Bosnie-Herzégovine, il y a des Musulmans de Bosnie-Herzégovine car

15 l'Etat s'appelle la Bosnie-Herzégovine.

16 Vous n'allez jamais entendre, du moins non pas par la bouche des témoins

17 que nous allons faire venir ici… Un Musulman de Mostar ne vous dira jamais

18 qu'il est bosniaque, il dira qu'il est Herzégovien. Il en va de même pour

19 un Croate ou bien un Serbe de Mostar. Ils sont nés en Herzégovine mais à

20 l'étranger, ils disent qu'ils viennent de Bosnie-Herzégovine.

21 Il n'est pas difficile de se rendre compte que l'A.I.D. manipule la

22 vérité, qu'ils présentent la vérité de la façon dont ça sert les intérêts;

23 jusqu'en 1994, les intérêts des Musulmans et après les accords de

24 Washington, des Bosniens, et qu'ils n'apportent comme preuves que les

25 preuves qui leur conviennent. Ils se mettent à la disposition du Bureau du

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1 Procureur et ils essaient de les convaincre de leur vérité.

2 Pour illustrer cela, je vais vous montrer un montage qui avait pour but la

3 propagande, et que nous allons invoquer dans ce prétoire. Voyez-vous, ceci

4 s'est passé en 1998, si je ne me trompe pas, moment où l'A.I.D. et les

5 services secrets de Bosnie-Herzégovine présentent tous les jours les

6 informations dans les journaux bosniaques sur: quels seront les criminels

7 qui seront présentés devant le Tribunal de La Haye. Ils ont créé beaucoup

8 de désinformation. C'était une action qui avait été appelée par la suite

9 "camp 22". C'est une action qui, par la suite, une opération qui a été

10 démantelée par la suite. Nous avons des preuves que nous allons vous

11 apporter de vive voix et d'autres manières.

12 Voyez-vous ce qui est intéressant, la façon dont on décrit mon client,

13 Mladen Naletilic. Son aspect physique: "un bohémien". Il porte des cheveux

14 longs et des lunettes, des lunettes à monture dorée. Il mesure 1,80 mètre,

15 quelque 70 kilogrammes. Il porte une barbe courte, grise, et il a 51 ans.

16 Essayez de vous rappeler ici la description de mon client faite au sein de

17 ce prétoire par les différents témoins.

18 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, vous allez être réellement

19 surpris, étonnés même quand vous allez apprendre qui a été à la tête de

20 cette campagne de désinformation dans les journaux. Je ne veux pas passer

21 ici à huis clos partiel, mais toujours est-il que je peux vous indiquer

22 que votre surprise sera grande. Si vous me permettez encore 5 minutes pour

23 terminer avec ce thème.

24 Les enquêteurs du Bureau du Procureur n'ont pas essayé, ils n'ont même pas

25 essayé de vérifier, en l'occurrence avec la partie croate, ils n'ont même

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1 pas essayé de les faire entendre, ils n'ont même pas essayé de les faire

2 venir pour un entretien et voir si les gens allaient répondre à l'appel ou

3 non. Et tout cela dans le but de devenir plus objectifs, et de cette

4 façon-là, on aurait pu éviter le type de procès que nous avons ici: un

5 procès long et épuisant.

6 Que nous n'allons pas… que nous ne perdions pas de temps pour prouver ce

7 qui est évident. Et j'en ai pour preuve, regardez: ceci sont des livres

8 qui sont tout à fait publics et je vais donner ces documents tout à fait

9 publics à mes collègues du Bureau du Procureur. Voyez-vous, ici, c'est un

10 livre écrit par un Croate cette fois-ci, mais les Bosniens écrivent aussi,

11 sauf que les Bosniens coopèrent beaucoup plus avec le Bureau du Procureur

12 que les Croates.

13 Ils auraient pu peut-être lire ce livre et essayer de trouver des témoins,

14 d'après ce qui est écrit ici. Je ne sais pas si vous le voyez à l'écran,

15 mais ici il y avait un livret qui avait été publié, qui parle aussi

16 d'autres aspects. Donc cet autre livre publié qui s'appelle "Le Crime avec

17 le tampon", il écrit une histoire croate.

18 Je permets, ceci est peut-être un récit subjectif, mais toujours est-il

19 qu'en voulant se renseigner sur l'autre côté, et ici nous avons aussi les

20 crimes effectués par le Dr Safet Cibo sur les Croates en 1993. Dans ce

21 livre, on apprend que le comité des Croates expulsés de la municipalité de

22 Konjic le 1er mars 1996 avait envoyé au Bureau du Procureur de ce Tribunal

23 et qu'ils ont demandé de poursuivre en justice devant le Tribunal de La

24 Haye pour le crime contre l'humanité et les violations des coutumes et

25 lois de la guerre, d'après les Conventions de Genève de 1949, contre Alija

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1 Izetbegovic qui avait été le commanditaire.

2 Et je vais expliquer aussi le rôle du Dr Safet Cibo qui était à la tête

3 des municipalités Jablanica, Konjic et Prozor depuis 1993, au moment où le

4 calvaire des Croates de cette région-là commençait. On ne pouvait pas le

5 savoir, mais dans cette demande de poursuite en justice, ils ont au moins

6 essayé de décrire de ce qui s'y est passé. Il faudrait peut-être commencer

7 à suivre les traces, comme ces livres-là, pour apprendre les choses et de

8 les présenter d'une manière beaucoup plus objective.

9 Il y a un autre livre ici qui parle de la vérité tragique en Bosnie-

10 Herzégovine, qui a été publié aux Etats-Unis, et au moment où ce livre

11 avait été traduit, vous allez voir que les Bosniens qui habitent en

12 Bosnie-Herzégovine prouvent exactement la même chose que je vais essayer

13 de prouver ici devant vous vous.

14 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'en ai terminé de la première

15 partie de mon intervention. Donc avec votre permission, nous allons

16 pouvoir faire une pause.

17 M. le Président (interprétation): Oui, nous reprendrons à 11 heures 05.

18 (L'audience, suspendue à 10 heures 39, est reprise à 11 heures 10.)

19 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, veuillez poursuivre.

20 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

21 Permettez-moi de conclure la première partie de mon intervention au sujet

22 de la légitimité du pouvoir en Bosnie-Herzégovine en vous montrant le

23 règlement relatif à la République socialiste de Bosnie-Herzégovine publié

24 à Sarajevo en 1992. Je vais bien entendu faire en sorte que ce document

25 soit traduit, et ce sera avec un grand plaisir que j'en remettrai un

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1 exemplaire à l'accusation.

2 Vous pouvez voir à l'écran à quoi ressemble ce document: on peut lire ici

3 "Présidence de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine - Règlement

4 pour la République socialiste de Bosnie-Herzégovine" et ensuite, en bas

5 "Sarajevo 1992". Et c'est avec ce statut, avec ce règlement que se

6 réglemente le travail de la présidence toujours, bien entendu, en

7 conformité avec la Constitution de Bosnie-Herzégovine.

8 Malheureusement, un grand nombre de documents dont je dispose ici n'ont

9 pas encore été traduits, ce qui n'est pas très positif pour moi, mais

10 j'espère que tout sera prêt à temps au moment où je présenterai ces

11 éléments de preuve.

12 Je vais maintenant passer à un autre sujet, et je vais essayer d'être

13 aussi concis que possible. L'accusation affirme que la fondation de la

14 communauté croate d'Herceg-Bosna a eu notamment pour objectif de

15 rapprocher ou de créer des liens plus étroits avec la République de

16 Croatie. Ceci a été démontré par l'utilisation de la monnaie croate, de la

17 langue croate. Et d'autre part, on a vu que des Croates de Bosnie-

18 Herzégovine se sont vus attribuer la nationalité de la République de

19 Croatie.

20 Bien entendu, la défense va contester ce fait en faisant venir des témoins

21 à la barre, en montrant des éléments de preuve qui vont montrer les

22 raisons pour lesquelles la HZ-HB a effectivement été constituée. Nous

23 montrerons qu'il ne s'agissait pas là du résultat d'un plan et d'un

24 dessein criminel, mais que le seul objectif, c'était de rétablir dans une

25 certaine mesure l'Etat de droit dans un Etat où il n'y avait pas d'Etat de

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1 droit.

2 La défense montrera qu'en 1991 -et justement en provenance du territoire

3 de la Bosnie-Herzégovine- montrera donc que les unités de l'armée

4 populaire yougoslave, toujours au sein de la République socialiste

5 fédérale de Yougoslavie puisqu'elle s'appelait ainsi encore à l'époque,

6 sous prétexte de -oui- de sécession -voilà le mot que je cherchais-, donc

7 sécession de la Croatie et de la Slovénie; c'est donc, comme je le disais,

8 à partir du territoire de la Bosnie-Herzégovine qu'ils ont attaqué des

9 villes, des villages, les ont détruits. Il s'agissait de villes et de

10 villages appartenant à la République de Croatie.

11 Et M. Alija Izetbegovic, en tant que président de la présidence de la

12 République de Bosnie-Herzégovine, et nul autre que lui, a tout simplement

13 proclamé la neutralité. Et à la télévision d'Etat, il a déclaré que la

14 guerre contre la Croatie n'était pas la guerre de la Bosnie-Herzégovine,

15 alors que les unités de la JNA se trouvaient sur le territoire de la

16 Bosnie-Herzégovine et alors que c'est à partir de cet endroit qu'elles ont

17 attaqué, qu'elles ont occupé certaines régions de la Croatie.

18 Si quelqu'un nous disait qu'à Vienne, Paris ou New York, si on faisait ce

19 genre de déclaration, tout le monde dirait: "Pourquoi pas, le président a

20 tout à fait raison. Pourquoi s'ingérer dans la guerre qui a lieu dans un

21 autre Etat?".

22 Mais il faut regarder les faits. En Bosnie-Herzégovine, la situation se

23 présentait de la manière suivante: les Serbes étaient armés et ils ont

24 repoussé les éléments non serbes de la JNA, ils les ont renvoyés. La JNA

25 est donc devenue une armée complètement serbe. Elle a rejoint la zone

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1 qu'elle souhaitait occuper en Bosnie-Herzégovine, elle l'a réunie aux

2 régions de Croatie pour atteindre les frontières d'une "grande Serbie", le

3 long du Virovitica et Karlobag, près de la mer Adriatique, au nord.

4 Les Musulmans et les Croates, quant à eux, n'étaient pas armés puisque, je

5 l'ai dit, la Défense territoriale n'avait plus d'armes: ses armes avaient

6 disparu. Et il dit en son propre nom, en manipulant ainsi la présidence

7 -vous aurez l'occasion de l'entendre en temps utile en ce lieu même dans

8 ce prétoire-, il nous dit: "Ce n'est pas notre guerre". Mais alors la

9 guerre de qui? Et en affirmant cela, il fait en sorte que les Musulmans

10 seront totalement dépourvus quand il leur arrivera ce qui devra leur

11 arriver.

12 Et que leur serait-il arrivé encore si le HVO n'était pas venu à leur

13 défense, s'il ne les avait pas armés et formés? Si cela n'avait pas eu

14 lieu, aujourd'hui, croyez-moi -et tout le monde le savait parfaitement en

15 Bosnie-Herzégovine, même les petits enfants, tout le monde savait ce qui

16 était en train de se préparer-, on peut se demander dans ces conditions

17 quel aurait été le destin de la Bosnie-Herzégovine puisqu'en tant qu'Etat,

18 cette entité n'existe pas. Je ne parle pas non seulement de cet Etat, mais

19 aussi de la Croatie et de la Slovénie. Rappelez-vous, nous sommes en 1991;

20 il s'agissait d'une unité fédérale de l'Etat yougoslave, à l'époque.

21 Pour illustrer la situation, pour vous montrer de quoi je parle, je

22 souhaiterais vous présenter deux cartes. Monsieur le Président, Mesdames

23 les Juges, ici vous voyez à partir d'où la Croatie a été attaquée. Ici

24 vous avez la Bosnie-Herzégovine et là, la Croatie. Les offensives ont été

25 lancées depuis ces endroits, Vukovar, Croatie centrale, Sibenik, Dalmatie

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1 centrale, Zadar et Dubrovnik.

2 Maintenant, regardez ce qu'il est advenu. Une partie de la Croatie

3 orientale a été occupée, ainsi que le centre de la Croatie. Tout ce qui

4 manque ici, c'est Dubrovnik; nous avons oublié d'indiquer Dubrovnik en

5 rouge. Mais cette partie ici a également été occupée par la JNA ou plutôt

6 par les Serbes, les citoyens de la République de Croatie qui étaient

7 encore une unité fédérale, avec la complicité de la JNA qui a lancé les

8 offensives contre l'Etat croate.

9 Je souhaiterais demander à la cabine technique de lancer la pièce à

10 conviction n°1 qui fait partie de la bande n°1.

11 (Diffusion vidéo.)

12 Est-ce qu'on pourrait accélérer un petit peu, s'il vous plaît? Oui. Avance

13 rapide, s'il vous plaît.

14 Ici, nous avons M. Karadzic qui présente son point de vue s'agissant de

15 l'organisation interne et politique du pays. Ici, nous avons M. Milosevic

16 ainsi que tous les présidents des unités fédérales de la RSFY qui tous

17 présentent leurs opinions. Nous avons ici la déclaration qui a été faite à

18 la télévision d'Etat, la télévision de Bosnie-Herzégovine, déclaration au

19 cours de laquelle M. Alija Izetbegovic déclare ce que je vous ai relaté

20 précédemment. Nous avons ici un enregistrement tout à fait authentique; il

21 s'agissait de la télévision d'Etat.

22 Je souhaiterais qu'on augmente le son, qu'on monte le son et puis qu'on

23 accélère jusqu'à la fin. Ensuite, nous pouvons nous arrêter ici et

24 l'entendre parler.

25 (Les interprètes indiquent qu'ils ne disposent pas du script.)

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1 (Diffusion vidéo.)

2 Je vais demander à la cabine technique de monter le son. Il n'y a pas de

3 son.

4 Mais quoi qu'il en soit, nous avons ici M. Alija Izetbegovic qui dit la

5 chose suivante: "Ici et maintenant, je proclame l'indépendance"; voilà ce

6 qu'il dit.

7 Veuillez, s'il vous plaît, interrompre le visionnage.

8 "Moi, aujourd'hui, je proclame la neutralité, sans consultation de la

9 présidence qui représente tous les peuples" et c'est le moment où il a

10 dit: "Ce n'est pas notre guerre".

11 Veuillez, s'il vous plaît, faire une pause.

12 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, apparemment la cabine technique

13 ne m'entend pas. Je ne vois pas comment on peut surmonter cette petite

14 difficulté puisqu'il est évident que les gens de la cabine technique ne

15 m'entendent pas.

16 M. le Président (interprétation): Oui, malheureusement je crains qu'il ne

17 convienne d'interrompre le visionnage de la cassette.

18 M. Krsnik (interprétation): Oui, apparemment personne ne m'entend.

19 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la Croatie est à feu et à sang,

20 elle a été attaquée sur la totalité de son territoire à partir ce qui

21 était alors la République socialiste de Bosnie-Herzégovine. L'armée serbe,

22 dans toute sa puissance et avec ses chars, s'avance sur la Croatie et

23 c'est alors que pour la première fois, le peuple non organisé, non armé,

24 se retrouve sur les routes avec ces femmes et ces enfants.

25 Et ils disent: "Nous, nous ne vous laisserons pas passer avec vos chars

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1 parce que nous savons très bien où vous allez.". Mais les chars se sont

2 préparés à prendre le contrôle de la Bosnie-Herzégovine parce que les

3 chars que vous allez voir sont allés à Kupres et ont pris le contrôle

4 d'une bonne partie du nord de la Bosnie-Herzégovine en faisant beaucoup de

5 victimes parmi les Musulmans et les Croates et le peuple a dit non.

6 Et une fois encore, M. Izetbegovic a fait son apparition entre Siroki

7 Brijeg et Mostar, un endroit qui s'appelle Polog et, lui, il permet à la

8 colonne de chars de passer.

9 Vous allez voir tout ceci sur l'enregistrement vidéo. Et au même moment,

10 la première victime est tombée, le premier crime a eu lieu dans le village

11 de Ravno, un village croate, village qui a été incendié, qui a été réduit

12 en cendres, ses habitants ont été tués.

13 Tout le monde en Bosnie-Herzégovine savait ce qui était en train de se

14 préparer à l'exception d'une seule personne, nous allons le voir ici. Il

15 parle en tant que président, en tant que président représentant les trois

16 communautés ethniques, les trois nations, et il dit: "Ce n'est pas notre

17 guerre." Cette déclaration devait ultérieurement avoir des conséquences

18 catastrophiques parce que les Musulmans l'ont cru et ne se sont pas armés,

19 alors que les Croates, eux, toujours non organisés, toujours sans arme,

20 les Croates à ce moment-là ont commencé à s'organiser.

21 Et si l'on suit la chronologie de cette organisation, vous pouvez voir sur

22 votre écran les trois principaux éléments de cette chronologie. Je demande

23 à ce que l'on fasse fonctionner le rétroprojecteur.

24 C'est en 1991 que la Republika Srpska, République autonome, a été

25 constituée, les Musulmans ont commencé à s'organiser au sein de la Ligue

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1 patriotique, quant aux Croates ils ont constitué la HZ-HB, le 18 novembre

2 1991. Nous y reviendrons plus tard.

3 Si la cabine technique peut m'entendre, j'aimerais qu'elle montre aux

4 Juges le discours d'Alija Izetbegovic et la manière dont il a laissé

5 passer les chars. Les chars sont arrivés jusqu'à Kupres, au nord de la

6 Bosnie, et ils contrôlaient une bonne partie du territoire de la Bosnie-

7 Herzégovine.

8 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, on me fait savoir qu'en

9 raison de difficultés techniques, nous ne pouvons pas entendre très bien

10 le son des enregistrements vidéo.

11 M. Krsnik (interprétation): Peu importe, je vais continuer et passer à

12 autre chose, nous aurons l'occasion de visionner cette cassette plus tard.

13 J'en suis désolé, mais je suis sûr que nous allons pouvoir voir la manière

14 dont les gens se sont organisés, la manière dont ils ont manifesté leur

15 soutien pour Alija Izetbegovic, et quand vous verrez tout ce qui s'est

16 passé depuis 1991, tout ce que nous avons entendu ici, vous aurez une

17 image assez précise de la situation.

18 A la demande de M. Alija Izetbegovic, les Croates ont laissé passer les

19 chars, et les événements que l'on connaît ont eu lieu. Je crois que c'est

20 le quatrième personnage de ce genre, personnage hypocrite que nous voyions

21 à l'époque, puisqu'au même moment lors de la conférence de La Haye, on

22 montrait des documents, on présentait des témoins: Izetbegovic a donné aux

23 Serbes pour la première fois des droits en Bosnie-Herzégovine, le droit à

24 l'auto-détermination dans un document écrit.

25 Il est allé à Belgrade, des tas d'ouvrages ont été écrits à ce sujet, tout

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1 le monde va à Belgrade pour offrir à Milosevic un accord historique entre

2 les Serbes et les Musulmans, et il en fait de même pour le président

3 Franjo Tudjman. Que fait-il? Il lui offre des régions où les Croates

4 constituaient la majorité de la population en Bosnie-Herzégovine. Les deux

5 hommes ne se mettent pas d'accord, mais les Serbes, le peuple serbe de

6 Bosnie-Herzégovine en tant que peuple constituant de cette entité, les

7 Serbes donc décident de saisir l'occasion et commencent à s'emparer de

8 certaines régions.

9 Que devez faire le peuple croate dans ces circonstances? Eh bien, l'unité

10 fédérale de Bosnie-Herzégovine était en train de se désintégrer parce que

11 l'armée et la police étaient contrôlées par les Serbes, ainsi que tous les

12 organes détenteurs de pouvoir et d'autorité. On se trouvait donc dans une

13 situation proche de l'anarchie la plus totale.

14 Que pouvaient-ils faire d'autre? Que pouvaient-ils faire d'autre que

15 s'inspirer de la Constitution de Bosnie-Herzégovine qui prévoit qu'en cas

16 de guerre ou en cas de danger de guerre imminente, en cas de menace de

17 guerre, les municipalités ont le droit et le devoir d'organiser les

18 municipalités, de s'organiser… Non excusez-moi, j'ai dit municipalité, en

19 fait, je voulais dire que les municipalités sont dans l'obligation

20 d'organiser leur propre défense.

21 Effectivement, c'est ce qui s'est produit puisqu'une trentaine de

22 municipalités encore libres l'ont fait, municipalités dont l'armée de la

23 Republika Srpska ne s'était pas encore emparée. C'est ainsi qu'ils ont

24 constitué la communauté croate d'Herceg-Bosna, et cela a englobé tous les

25 membres des groupes ethniques qui s'étaient trouvés sur tous les

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1 territoires en question.

2 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, partant de cette déclaration

3 afférente au programme, puis de la mise en place de la HZ-HB, il a

4 précisément été déclaré qu'il s'agissait d'une situation provisoire en

5 attendant l'aménagement interne de la Bosnie-Herzégovine. Parce qu'à

6 l'époque, la Bosnie n'était pas encore un Etat, cela n'a pas été reconnu,

7 on n'en était pas arrivé à la commission Badinter, on y viendra par la

8 suite, mais il n'y avait pas eu encore de référendum non plus; nous étions

9 dans l'attente d'un aménagement intérieur.

10 S'agissant du rôle de la HZ-HB, notamment après la création du HVO en sa

11 qualité d'organe exécutif, pour ce qui est de l'organisation du pouvoir

12 civil, des autorités civiles et militaires, cela se manifeste notamment

13 après l'attaque lancée contre Sarajevo et le blocus de Sarajevo; époque à

14 laquelle l'Etat, l'unité fédérale a cessé d'exister à l'égard de tout

15 segment constitutif de cet Etat.

16 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, il nous est difficile de

17 dépeindre les situations que nous avons traversées, nous, à Sarajevo, à

18 Zagreb ou ailleurs, et notamment les gens les plus malheureux qui ont

19 souffert en Bosnie-Herzégovine: il n'y avait ni téléphone ni électricité

20 ni eau ni école; les entreprises ne fonctionnaient pas, la guerre était en

21 train de s'amorcer.

22 Et la présidence de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine ne

23 règne que sur le bâtiment où elle se trouve à Sarajevo. Je dirais même que

24 la présidence ne pouvait pas sortir de cet immeuble si la Forpronu ne la

25 faisait pas sortir parce que Sarajevo avait été à moitié prise et bloquée

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1 par l'armée de la Republika Srpska. Et au lieu de sortir, la présidence de

2 la ville de Sarajevo occupait et se déplaçait vers le territoire libre,

3 c'est-à-dire s'opposait à l'agression, pour organiser la vie civile et la

4 vie militaire. Mais non, la présidence reste dans cet immeuble, immeuble

5 qu'elle n'était pas en mesure de quitter.

6 Vous allez entendre ici des témoins qui se trouvaient au côté d'Alija

7 Izetbegovic pour ce qui est de savoir ce qu'Alija Izetbegovic disait à

8 l'époque, et je crois bien que vous serez stupéfaits. Les Serbes, je

9 dirais le peuple serbe en Bosnie-Herzégovine avait occupé dès lors 70% du

10 territoire de la Bosnie-Herzégovine, de cette unité fédérale de l'époque.

11 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, il s'agit ici des territoires

12 libres: en rouge, vous voyez les territoires qui avaient été occupés; en

13 vert, on voit les positions qui étaient prises ou occupées par le groupe

14 ethnique; et en bleu c'était la population croate. Mais le HVO avec la TO,

15 la Défense territoriale, avait défendu tout ceci.

16 Voyez les directions des attaques lancées. Parce qu'il ne leur avait pas

17 suffit de ce qu'ils avaient déjà pris, ils avaient lancé des attaques.

18 Jajce était tombée. Et le HVO qui s'est aventuré à sauver Jajce a été

19 arrêté à Ahmici à un point de contrôle et n'a pas pu aider Jajce. Vous

20 allez entendre des témoins vous en parler.

21 Nous avancerons des éléments de preuve à ce sujet et il y aura toute une

22 série de situations étranges; elles étaient étranges à l'époque mais elles

23 ne le sont plus depuis parce qu'on avait appris depuis qu'ils étaient en

24 train de s'organiser pour leur propre territoire. Vous allez voir par la

25 suite comment la situation s'était développée suite à l'agression serbe.

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1 Vous allez voir que ces petites enclaves étaient encerclées de toute part

2 par les Musulmans et les Serbes. Vous allez voir ce qui est advenu de

3 Mostar après l'agression serbe et après la libération. Puis vous allez

4 voir se qu'il est advenu de Jablanica et Konjic.

5 Suite à l'occupation, ce type d'occupation des territoires, Monsieur le

6 Président, Mesdames les Juges, vous allez voir ce qui s'est passé par la

7 suite. Nous allons avoir des vagues de réfugiés se déplaçant dans

8 différents sens et ils vont essentiellement vers l'Herzégovine. Mais les

9 Musulmans aussi se dirigent vers leurs enclaves à eux et 80%, 90% de la

10 population ne tenaient pas par la parole ou les chiffres que j'ai

11 prononcés, mais je dirais qu'il y a en 400.000 et un million de personnes

12 qui se déplacent. Et la communauté croate d'Herceg-Bosna prend soin de ces

13 gens-là. La République de Croatie, s'agissant des îles croates, de la côte

14 croate, dans les hôtels, héberge 600.000 réfugiés appartenant au groupe

15 ethnique musulman et prend soin de ces réfugiés jusqu'aux Accords de

16 Washington, donc pendant encore la soi-disant guerre entre les Bosniens et

17 les Croates. Et nous allons prouver ici qu'il ne s'agissait pas d'une

18 guerre, mais d'une tentative d'agression de l'armée de la Bosnie-

19 Herzégovine qui s'efforçait de prendre le plus possible de territoires

20 pour avoir des positions de départ favorables relatives aux négociations.

21 Nous allons parler de Siroki Brijeg, Mostar, Citluk. Rien que Mostar

22 héberge 30.000 réfugiés! Siroki Brijeg a hébergé 5.000 à 6.000 réfugiés.

23 Siroki Brijeg, petite ville, a reçu tous ces réfugiés dans le lycée des

24 Franciscains.

25 Nous vous indiquerons qui a hébergé tel ou tel autre nombre de réfugiés

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1 parce qu'ils avaient obtenu une assistance financière essentiellement de

2 la part de Caritas, et par la suite seulement, d'organisations

3 humanitaires Esperanza, du HCR et de la Croix-Rouge. Vous verrez ce qui

4 s'est passé à Livno, Bugojno, et comment on a perturbé l'image

5 démographique de la région. Vous comprendrez dans quelle direction les

6 choses évoluaient.

7 Le HVO organise la défense armée, il organise les rangs de la défense. Il

8 arme les Musulmans, il les forme au sein de camps, tant en Croatie qu'au

9 sein de la HZ-HB. Il leur fournit une assistance à tout point de vue. Ce

10 qui fait que nous pouvons à juste titre affirmer -et je vais caricaturer

11 les choses en disant que la République de Croatie a fait de son mieux pour

12 ce qui est d'armer et de former les Musulmans, sans s'attendre à ce que

13 ces derniers ne s'attaquent à elle par la suite-, c'est un cas plutôt

14 unique dans l'histoire de la civilisation moderne, n'est-ce pas.

15 Dans une situation dans ce genre -et nous sommes actuellement à la veille

16 de l'intervention de la communauté internationale-, quoiqu’étant averti,

17 M. Alija Izetbegovic à son retour de la conférence de Lisbonne se voit

18 arrêté à l'aéroport de Butmir à Sarajevo, et c'est en tant qu'otage qu'il

19 est emmené par la JNA pour que la JNA puisse quitter les casernes

20 encerclées à Sarajevo pour se déplacer vers Pale.

21 Nous avons tout un enregistrement vidéo qui a été vu par la Yougoslavie,

22 l'ex-Yougoslavie entière parce que la télévision avait pris part

23 directement aux négociations en cours, et la Yougoslavie toute entière a

24 ouï-dire Alija Izetbegovic remettre le pouvoir à Ejup Ganic de toute façon

25 tout à fait illicite.

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1 A la lumière de ce qui vient d'être dit, je voudrais que vous imaginiez la

2 tragédie, les dimensions de la tragédie à l'époque parce que les Musulmans

3 n'avaient pas voulu un quartier général commun du HVO et des Musulmans.

4 Pourquoi pas? Parce qu'ils avaient déjà reçu des armes, ils s'organisaient

5 ensemble pour combattre les forces d'occupation. Et nous verrons par la

6 suite pourquoi ils ne le voulaient pas. Nous en sommes au début de 1991,

7 et c'est là que commence le récit afférent à la République de Croatie.

8 Je dirai clairement les choses ici. Nous allons le prouver moyennant les

9 témoins. Si la République de Croatie avait véritablement voulu partager la

10 République de Bosnie-Herzégovine, elle aurait pu le faire à tout moment si

11 elle l'avait véritablement souhaité. Savez-vous combien d'opportunités

12 elle avait eu si l'on part de l'offre faite par Alija Izetbegovic jusqu'au

13 fait de ne pas se présenter au référendum, jusqu'au fait de parler des

14 accords avec les Serbes à la lumière de la situation dont j'ai parlé où

15 deux groupes ethniques n'étaient pas armés et l'autre était armé jusqu'aux

16 dents?

17 Mais au contraire, cette petite Croatie qui compte 4 millions d'habitants

18 avait reçu 600.000 réfugiés! C'est une chose notoirement connue, le monde

19 entier le sait et nous n'allons pas le prouver dans ce prétoire! Mais nous

20 sommes censés le faire et nous allons présenter des éléments de preuve

21 parce que toutes les armes allaient via la République de Croatie vers les

22 Croates et les Musulmans parce que, sur ce territoire, on s'appuyait sur

23 la République de Croatie. C'est ce qui a permis l'arrivée des convois

24 humanitaires et l'arrivée de l'assistance à tout un chacun.

25 Nous en venons maintenant au sujet de la communauté internationale. Si la

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1 République de Croatie l'avait voulu, elle aurait pu le faire dès l'année

2 1991 parce que M. Robert Badinter, qui avait été chargé par la communauté

3 européenne, en sa qualité d'expert, pour faire des recommandations

4 s'agissant des unités fédérales de l'ex-Yougoslavie pouvaient être

5 considérées comme étant des Etats devant éventuellement être reconnus par

6 la suite.

7 Et la commission de Badinter accorde à la Slovénie et à la Croatie des

8 formes ou des aspects d'Etat où on leur fournit la possibilité d'être

9 reconnus en tant qu'Etats. Il me faudrait maintenant revenir à l'histoire,

10 à l'année 1943, pour expliquer les frontières du conseil antifasciste de

11 libération nationale de la Deuxième Guerre mondiale pour vous expliquer

12 les raisons qui ont motivé M. Badinter. Mais ce qui était certain c'est

13 que la Bosnie ne s'est pas vue accorder la possibilité de devenir un Etat,

14 mais vous allez apprendre également que la Bosnie de par son histoire n'a

15 jamais été un Etat indépendant, c'est la première fois que cette Bosnie-

16 Herzégovine devient un Etat du fait de la reconnaissance internationale de

17 cet Etat en avril 1992.

18 Mais étant donné que Badinter n'avait pas accordé à la Bosnie-Herzégovine

19 de devenir un Etat, la communauté internationale pose ses conditions à

20 elle. S'agissant des citoyens de la Bosnie-Herzégovine, s'agissant de ceux

21 qui étaient propriétaires de cette unité fédérale de l'époque, à savoir

22 les Serbes, les Croates, et les Musulmans qui étaient nation constitutive

23 et souveraine, en leur disant de se présenter au référendum s'ils

24 voulaient être reconnus par la communauté internationale, et ce n'est

25 qu'après ce référendum que la communauté internationale déciderait s'il y

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1 aurait reconnaissance ou pas.

2 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la République de Croatie prend

3 une part active à ce moment-là, tous les éléments croates faisant partie

4 de la Bosnie-Herzégovine se présentent au référendum en souhaitant

5 conserver la Bosnie-Herzégovine dans ses frontières de l'époque, dans les

6 frontières actuelles.

7 Est-ce que cela vous semble être quelque chose comme étant une volonté de

8 partage de la Bosnie-Herzégovine? Parce qu'ils avaient déjà pu se

9 prononcer en faveur, mais ils ne l'ont pas fait: les Serbes se sont déjà

10 présentés à un plébiscite, ils n'avaient pas souhaité conserver la Bosnie-

11 Herzégovine dans les frontières actuelles ou dans les frontières qui

12 avaient été celles de l'année 1945.

13 Donc, sans la participation des Croates, la Bosnie ne serait pas

14 indépendante, il n'y aurait pas eu d'Etat actuel de Bosnie-Herzégovine, il

15 n'y aurait peut-être pas eu de Tribunal où nous nous trouvons.

16 Depuis lors nous ne pouvons pas dire que les Croates avaient voulu un

17 partage quelconque; ceux qui le font, le font à mauvais escient, ils le

18 font pour masquer la vérité, pour induire dans l'erreur et c'est là un

19 moment historique de la Bosnie-Herzégovine. La Croatie d'abord arme,

20 libère, puis les Croates se présentent au référendum; si la Croatie avait

21 de telles intentions, je crois que son groupe ethnique ne l'aurait pas

22 fait, je crois que les choses sont claires.

23 Et suite à cette date-là, il ne saurait être question de quelque

24 aspiration que ce soit de la part de la Croatie pour ce qui est du partage

25 de la Bosnie-Herzégovine. C'est grâce aux Croates, au vote croate que le

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1 référendum a réussi, et qu'au mois d'avril 1992 la communauté

2 internationale a reconnu la Bosnie-Herzégovine.

3 Mais regardez seulement dans ses frontières extérieures, mais non pas dans

4 son aménagement intérieur au niveau politique et c'est aux trois nations

5 en présence que l'on a confié le soin d'aménager les relations. C'est là

6 que commencent les négociations, la conférence de Londres, la conférence

7 de Genève, Vance-Owen, Vance-Stoltenberg et ainsi de suite, et toutes les

8 négociations visaient à faire en sorte que ces trois nations aménagent

9 leur Etat.

10 Il s'agissait de savoir si on allait "cantoniser", comme en Suisse, si on

11 allait faire des provinces, si on allait faire une union de Républiques ou

12 d'unités fédérales et ainsi de suite. C'était une chose que l'on voulait

13 confier aux négociations et aux concertations devant être effectuées par

14 les trois peuples en présence. Les trois peuples constitutifs.

15 La défense se propose de citer des experts, des témoins experts, pour

16 prouver les faits suivants, la HZ-HB dans cette Bosnie-Herzégovine

17 reconnue au niveau des frontières extérieures s'attend maintenant à une

18 concertation pour ce qui est de l'aménagement politique à l'intérieur. Et

19 on nous a reproché, on a reproché à cette HZ-HB l'usage de la langue

20 croate.

21 Mais quelle langue voulez-vous qu'on parle et quelle est la langue des

22 Herzégoviens? Eh bien, les gens de l'Herzégovine parlent la plus pure des

23 langues croates, parce ce qu'on a utilisé c'est le dialecte Stokavian, je

24 ne sais pas comment les interprètes réussiront à vous traduire la chose,

25 parce que c'est dans cette partie-là du territoire que l'on parle la plus

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1 pure des langues croates.

2 Et nous nous proposons d'avancer nos éléments de preuve s'agissant de la

3 langue. La langue bosnienne n'existe pas, cette langue n'existe pas, ni

4 dans la Constitution ni dans les lois afférentes. On parle la langue

5 croato-serbe ou serbo-croate. Dans les écoles, en une semaine, on écrivait

6 en caractères latins, puis au cours de la semaine suivante on écrivait en

7 caractères cyrilliques. Et pour qu'une langue soit considérée comme étant

8 une langue, il faut qu'il y ait des préalables, il faut qu'il y ait une

9 orthographe, une grammaire pour que quelque chose puisse être considéré

10 comme étant une langue.

11 Donc vous voyez qu'il y a là des revendications montées de toutes pièces

12 pour semer la zizanie. Et lorsque, aux négociations, il a été convenu

13 d'appeler une langue comme étant bosnienne, on ne veut plus l'appeler

14 bosnienne, on dira que ce n'est pas une langue bosnienne mais bosniaque;

15 je ne sais pas comment les interprètes vont faire pour vous traduire la

16 chose, pour vous définir la différence entre bosnien et bosniaque, entre

17 langue bosnienne et langue bosniaque.

18 Et voyez-vous comment on en est venu à une orthographe de cette langue

19 bosniaque qui est la même langue, évidemment, mais avec beaucoup

20 d'arabismes, de termes arabes, beaucoup de termes turcs que l'on a insérés

21 à l'intérieur et c'est tout, ça ne va pas au-delà. Tout homme normalement

22 constitué en Bosnie-Herzégovine, de cette Bosnie-Herzégovine actuelle,

23 vous dira que c'est la même langue, et notamment que cela a été la langue,

24 la même langue jusqu'en 1994. Evidemment que cela a été la même langue!

25 On nous reproche également d'avoir utilisé l'argent croate au sein de

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1 cette HZ-HB, mais ceux qui connaissent les faits historiques sauraient,

2 devraient savoir que l'argent, à l'époque, l'argent de l'époque et

3 l'argent actuellement reconnu universellement dans toute la Bosnie-

4 Herzégovine était le mark allemand. Et dans ce chaos de guerre que j'ai

5 décrit tout à l'heure, on avait, on faisait usage de toute monnaie

6 possible.

7 Mais nous allons présenter des éléments de preuve, Monsieur le Président

8 et Mesdames les Juges. Je ne voudrais pas passer à huis clos partiel pour

9 prononcer des noms, mais nous allons voir ici un témoin qui vous parlera

10 des monnaies et qui vous dirait que la communauté croate d'Herceg-Bosna

11 n'avait jamais de banque nationale, de banque populaire. Et ceux qui n'ont

12 pas de banque nationale n'ont pas de politique monétaire, et ceux qui

13 n'ont pas de politique monétaire n'ont pas de monnaie à eux non plus. Or

14 le dinar croate, qui est devenu par la suite la kuna croate, avait été

15 utilisé comme tout autre monnaie, d'ailleurs.

16 Ce que je voudrais dire par la suite dans ces propos liminaires,

17 s'agissant de la communauté croate d'Herceg-Bosna et aux allégations

18 faites par le Bureau du Procureur disant que l'une des finalités avait

19 consisté à établir des liens plus étroits avec la République de Croatie.

20 Et alors? Qu'y a-t-il là d'illicite? Qu'y a-t-il là de criminel? Il

21 s'entend que l'on souhaitait avoir des liens étroits. Je dirais que le

22 pays mère, c'est-à-dire la patrie mère de ce peuple croate se trouvait de

23 l'autre côté, juste derrière. Et le fait est que la nation, le peuple

24 croate en Bosnie-Herzégovine a dans le dos une patrie, une mère patrie qui

25 est la mère patrie qui unifie ce groupe ethnique croate au-delà de ce

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1 territoire.

2 Monsieur et Mesdames les Juges, je choisis mes termes, mais je dirais

3 qu'il y a une disposition constitutionnelle de la République de Croatie

4 qui dit, qui prévoit de veiller aux Croates où qu'ils se trouvent. Mais

5 cela est prévu par tout pays démocratique normalement constitué qui prend

6 soin, qui veille aux intérêts de ses citoyens, qui veille à l'exercice de

7 leurs droits dans d'autres pays et ainsi de suite.

8 Mais c'est précisément cette coopération qui, heureusement, s'est déroulée

9 de façon magnifique jusqu'à il n'y a pas longtemps. On s'arroge du droit,

10 en se servant de subterfuges s'agissant de la Bosnie-Herzégovine -qui

11 n'est pas de nos jours encore un pays unifié parce qu'il y a deux unités

12 fédérales qui le constituent, et c'est un pays qui est géré par un

13 gouverneur de la communauté internationale qui interprète et applique la

14 réglementation comme bon lui semble-, et c'est dans le cadre de ces droits

15 que l'on a supprimé la télévision croate, et l'on a enlevé les relais de

16 télévision pour que les Croates de Bosnie-Herzégovine ne puissent pas

17 suivre les programmes de la télévision croate et ce, en fonction d'une

18 décision prise par le gouverneur de la Bosnie-Herzégovine, le gouverneur

19 de la communauté internationale.

20 Alors, on a tenu des élections démocratiques, et s'agissant des résultats

21 de ces élections, le gouverneur a dit: "Nous ne reconnaissons pas ces

22 résultats!". Et tous ceux qui ont été élus ont été limogés, révoqués.

23 C'est tout ce que je pourrai dire au sujet de la démocratie, la soi-disant

24 démocratie, et des relations qui existent au sein de cette république et

25 de ses liens avec la Croatie. Mais vous en entendrez davantage tout à

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1 l'heure ou ultérieurement.

2 Je pense, Monsieur et Mesdames les Juges, que je me suis un peu éloigné.

3 Lorsque j'ai commencé à parler de la Défense territoriale pour dire qu'ils

4 ne voulaient pas de quartier général commun ou conjoint, je dirais que

5 l'Herzégovine avait été une communauté exemplaire de par la coopération

6 entre les Musulmans et les Croates jusqu'à certains événements historiques

7 dont je parlerai plus tard.

8 Je voulais juste illustrer quelques faits. En 1992, s'agissant des mois de

9 mai à décembre -donc nous sommes en train de parler de mai/décembre 1992-

10 ici, il s'agit d'une présentation des incidents survenus et occasionnés

11 par l'armée de la Bosnie-Herzégovine à l'égard du HVO: Kresevo, Kiseljak

12 le 20 octobre à Varos et ainsi de suite. Vous voyez en 1992, entre mai et

13 décembre, le nombre d'incidents occasionnés.

14 Nous allons aller au-delà et maintenant nous allons voir de quelle façon

15 nous allons combattre les allégations qui figurent à l'Acte d'accusation.

16 Regardez cette carte. Vous ne l'avez certainement pas vue auparavant: la

17 situation en 1992 en Bosnie centrale, dont un certain nombre de témoins

18 avaient parlé. Regardez la situation: ce qui est indiqué ici en bleu ce

19 sont les enclaves croates, et ce que vous voyez ici ce sont les

20 territoires détenus par l'armée de Bosnie-Herzégovine et ici de Serbie.

21 Vous voyez, il n'y a aucun point de contact avec le territoire libre de la

22 HZ-HB. Regardez bien. Ils sont complètement coupés du monde, et ceci a

23 continué jusqu'aux accords de Washington. Et ce point indiqué en rouge,

24 qui se trouve au bord de ces enclaves, représente les attaques par l'armée

25 de Bosnie-Herzégovine sur les enclaves en question.

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1 Il est logique de voir pourquoi puisqu'il serait bien de les unifier, et

2 ils disent qu'ils parlent de la libération. Mais de qui vont-ils libérer

3 ces enclaves puisqu'à 90% ce sont des habitants croates? Comment ont-ils

4 le droit de dire qu'ils vont le libérer quand on parle d'une communauté

5 des trois pays? Regardez Vitez et Busovaca où il y a 90% des Croates: de

6 qui l'armée de Bosnie-Herzégovine va libérer ces enclaves? Ils vont

7 libérer les Croates de l'occupation des Croates?

8 Par la suite, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'ai ici un texte

9 en anglais avec des signatures, je vous en prie, il s'agit là de la pièce

10 à conviction du Procureur P218. J'ai marqué de façon tout à fait

11 volontaire le 20 mai 1993.

12 Il y est dit: "L'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO sont des forces

13 armées légales de la République de la Bosnie-Herzégovine et sont traités

14 de façon équitable."

15 Signé par -je vous en prie-: le commandant de l'armée de Bosnie-

16 Herzégovine, le commandant donc suprême de l'armée de Bosnie-Herzégovine,

17 Sefer Halilovic; le commandant du HVO, Milivoj Petkovic; le commandant de

18 l'ONU pour la Bosnie-Herzégovine, le général Philippe Morillon; et le

19 représentant des observateurs de la communauté européenne, dont le

20 quartier général se trouvait à Zenica, donc signé en cette qualité-là par

21 Jean-Pierre Thibauld.

22 Et savez-vous, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, quels ont été

23 les accords qui ont précédé l'accord en question? Eh bien, un autre accord

24 que nous avons ici en anglais, donc un autre accord qui a été signé

25 longtemps auparavant, à savoir le 28 juillet 1992 à Zagreb. Et il y a

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1 l'annexe à cet accord qui a été signée à New York le 22 décembre. Il

2 s'agit là de la pièce à conviction du Procureur P159.

3 Cette pièce à conviction représente les accords signés entre l'Etat de

4 Bosnie-Herzégovine qui a déjà été reconnu à l'époque dans ses frontières

5 extérieures, d'un côté, et la République de Croatie qui a aussi été

6 reconnue par la communauté internationale à l'époque. Il s'agit donc des

7 accords de coopération et d'amitié par lesquels le HVO est déclaré armé à

8 titre d'égalité avec l'armée de Bosnie-Herzégovine.

9 Et maintenant nous arrivons à un autre thème qui est tout aussi important,

10 on a passé les accords sur la coopération militaire entre la Bosnie-

11 Herzégovine et la République de Croatie. Cette coopération militaire a été

12 par la suite confirmée par les accords de Split, et par la suite

13 renouvelée en 1995, quand l'armée conjointe, les forces conjointes de

14 l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO libèrent une grande partie de la

15 Bosnie-Herzégovine.

16 Pourquoi est-ce que je souligne cela? Eh bien, parce que l'Etat de Croatie

17 avait le droit absolu d'après le droit international, étant donné qu'elle

18 avait été agressée par un autre pays, de rentrer dans un diamètre de 60

19 kilomètres dans cet autre territoire pour neutraliser le feu. Mais la

20 Croatie ne l'a pas fait. D'après ces accords militaires, le HVO pouvait

21 venir de façon tout à fait légale en Croatie, mais cette armée n'est pas

22 rentrée.

23 Je m'excuse, je n'ai pas voulu parler du HVO, j'ai voulu parler du HV.

24 L'armée croate n'est donc pas venue, même si l'armée croate aurait pu

25 venir, elle était même appelée à le faire de par ces accords. Mais saviez-

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1 vous à quel moment l'armée croate était entrée en Bosnie? Après

2 Srebrenica. Et Srebrenica, les événements de Srebrenica ont eu lieu en

3 1995. L'armée de Bosnie-Herzégovine, de façon tout à fait publique, devant

4 ce Tribunal, n'a jamais fait envoyer aucun de ces corps d'armée vers

5 l'est, vers la Drina, pour sauver les Musulmans à Srebrenica. Toutes ces

6 forces, quelque 220.000 personnes, vous savez où ils étaient concentrés?

7 Dans le bassin de Tuzla et Zenica, qui tendaient à attaquer la Bosnie

8 centrale. Et le 6e et le 4e Corps d'armée, sur Konjic et Mostar, donc le

9 but étant de s'emparer de tout le canal de la Neretva en direction de

10 Mostar. Ceci a donc été fait et nous allons le prouver par la suite.

11 Mais l'objectif final a été la prise de la ville de Mostar. Il y a un

12 ordre tout à fait clair que nous allons authentifier de façon tout à fait

13 claire, il s'agit d'une attaque du 16 avril 1994, ce qui a été réalisé le

14 9 mai 1993 et tout ceci n'était que le début d'un plan appelé "Neretva

15 93", le plan dont l'idée vient du commandant suprême et du quartier

16 général et dont le but principal était de sortir sur la mer, du côté de la

17 ville de Neum. La condition préalable était la prise de Mostar.

18 Monsieur Sefer Halilovic, à l'époque l'inspecteur général de l'armée de

19 Bosnie-Herzégovine, décrit cela dans son livre publié de façon tout à fait

20 ouverte. Et à ce moment-là, on a commis des crimes les plus atroces contre

21 les Croates et sans la remarque de tu quoque. C'est à ce moment-là qu'il y

22 a eu des massacres du côté de Jablanica, et je m'excuse de devoir citer

23 les atrocités qui on eu lieu; les personnes ont été crucifiées ou

24 empalées.

25 Quand la défense parle, évoque ces faits, nous ne pensons pas évoquer une

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1 défense tu quoque, je ne me le permettrais jamais, mais il est nécessaire

2 d'expliquer un certain nombre d'événements, car rien n'est arrivé par

3 hasard. Mais je vais évoquer ça à titre d'illustration.

4 Permettez-moi d'en terminer maintenant avec le HVO. Au moment où la

5 République de Croatie a été attaquée au mois de septembre 1991, à l'époque

6 on habitait, on vivait encore dans un pays commun: la Yougoslavie.

7 Les faits que nous allons démontrer devant ce Tribunal sont les suivants:

8 à l'époque, il y avait sur le territoire de la République de Croatie des

9 Croates d'origine de Bosnie-Herzégovine et qui ont été donc, qui étaient

10 donc la première génération née en Bosnie-Herzégovine; eh bien, ils

11 étaient au nombre de 400.000.

12 Que s'était-il passé? Tous les Croates de Bosnie-Herzégovine sont allés

13 défendre leurs parents, leurs frères, leurs cousins et leurs amis en

14 Croatie, en République de Croatie. Pour ce faire, ils devaient, mais ça ne

15 pouvait se faire qu'en 1992 puisque la Croatie n'avait pas encore d'armée,

16 elle ne se défend que par le ZNG, donc par les unités de garde nationale.

17 Donc en 1991, alors que ce n'est qu'en 1992 que l'armée croate a été

18 créée.

19 Ces jeunes hommes deviennent donc membres de l'armée croate. Pour abréger,

20 la conséquence logique en 1992 a été la suivante: quand leurs foyers ont

21 été attaqués et leurs familles et leurs cousins en Bosnie-Herzégovine, les

22 mêmes jeunes hommes retournent à leur foyer. Ils sont maintenant déjà

23 citoyens de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, mais ils sont accompagnés cette

24 fois-ci par leurs frères, par leurs pères, leurs amis et leurs cousins qui

25 sont des citoyens de l'Etat croate et d'après la naissance, aussi, les

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1 citoyens de Bosnie-Herzégovine. Leur nationalité double est bien reconnue,

2 pour les Croates et pour les Musulmans, et je vous ai montré cela par les

3 accords. Eh bien, ces gens-là se rendent en Bosnie-Herzégovine pour la

4 défendre, bien sûr.

5 Et que se passe-t-il à ce moment-là? Il y a des gens qui ne veulent pas

6 enlever les insignes de la HV parce qu'ils sont membres, ils viennent de

7 la HV, parce que le HVO est en train de s'organiser. On commence à peine:

8 il s'agit du mois d'avril 1992. La guerre en Croatie s'arrête grâce à la

9 Forpronu et la communauté internationale. Mais il y a des territoires qui

10 restent encore occupés, des territoires qui n'ont été libérés qu'en 1995.

11 Toujours est-il que ces jeunes hommes arrivent en Bosnie-Herzégovine et

12 qu'ils ne veulent pas enlever leurs insignes en disant: "Moi, ça fait déjà

13 un certain temps que je suis combattant alors que toi, tu commences à

14 peine". Et cela ne gêne personne jusqu'au jour où quelqu'un s'est dit:

15 "Mais ça pourrait peut-être être une agression". Et c'est à ce moment-là

16 que toute l'histoire avec la Croatie commence, mais en même temps ne

17 commence pas avec les histoires disant que des Américains ou Canadiens

18 sont en train de créer une agression puisqu'il y avait au moins un millier

19 de personnes d'origine croate qui étaient des citoyens américains ou

20 canadiens qui étaient venus. Les autres qui sont venus étaient réellement

21 des citoyens de Bosnie-Herzégovine qui sont allés faire la guerre

22 temporairement en Croatie. Il s'agissait tout simplement d'une agression.

23 Ils étaient aidés par des parents et des amis et ils avaient tous la

24 nationalité double.

25 Il en va de même, Monsieur le Président. Pourquoi on n'a pas dit: "Voilà,

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1 Sefer Halilovic est un citoyen d'un autre pays", alors que dans le cas de

2 Slobodan Praljak, on disait: "Mais lui, il est venu du HV"? Oui, bien sûr,

3 mais où est-il né? Où a-t-il passé toute sa vie? Il est né à Capljina, il

4 a passé toute sa vie à Siroki Brijeg. Au moment où il a vu ce qui s'est

5 passé, il quitte l'armée. Mais il a fait la même chose que d'autres

6 officiers ont faite. Il y avait, par exemple, des gens qui étaient à la

7 légion étrangère, qui avaient la nationalité française, et la légion

8 étrangère leur permet, les relâche pour qu'ils puissent aller se battre

9 dans leur pays. Parce que la défense de sa patrie représente un droit et

10 une obligation. Eh bien, nous allons démontrer tout cela dans ce prétoire.

11 Il est peut-être un bon moment maintenant pour procéder à une pause, mais

12 j'avais envie d'en terminer avec une partie.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Nous allons reprendre

14 à 12 heures 45, une heure moins le quart.

15 M. Krsnik (interprétation): Permettez-moi, Monsieur le Président, je

16 souhaite réellement montrer les cassettes audio. Je ne sais pas si c'est

17 peut-être la Greffière qui pourrait insister ou m'aider pour que je puisse

18 montrer un certain nombre d'images.

19 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Nous allons lever la

20 séance.

21 (L'audience, suspendue à 12 heures 17, est reprise à 12 heures 48.)

22 M. le Président (interprétation): Allez-y, Maître Krsnik.

23 M. Krsnik (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

24 Monsieur le Président, j'ai réellement des problèmes. Je souhaite abréger

25 ma déclaration liminaire mais voyez-vous, l'Acte d'accusation m'impose de

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1 parler de tellement d'éléments différents… Je respecte quand même votre

2 désir et je souhaite abréger, mais il faut que j'évoque quand même un bon

3 nombre de témoins. J'essaie de faire de mon mieux et j'espère pouvoir le

4 faire, effectivement.

5 Je demanderai maintenant à la cabine technique de lancer la vidéo, si tout

6 est rentré dans l'ordre.

7 (Diffusion de la vidéo.)

8 "Et au nom de la présidence…"

9 Vous pouvez avancer. La vidéo continue, vous pouvez le voir, en Bosnie-

10 Herzégovine, des deux côtés de la rivière Una. Arrêtez un instant, et vous

11 pouvez laisser maintenant la vidéo.

12 Monsieur le Président, vous avez vu très en vitesse la façon dont les

13 habitants ont arrêté les chars à Polog, une petite ville entre Mostar et

14 Siroki Brijeg. On a dit: "On souhaite, les généraux souhaitent qu'on se

15 tue les uns les autres". Malheureusement, ceci n'a pas été traduit. Mais

16 je ne vous montre que les images.

17 Ceci sont les chars de la JNA qui déclarent se rendre à des exercices,

18 mais tout le monde savait qu'ils se rendaient au mont Kupres qui a été

19 pris peu de temps après, et ceci est le commandant de la colonne des

20 chars.

21 Je demande aux interprètes de bien pouvoir nous aider, si cela est

22 possible.

23 Donc la vidéo dit: "Ils arrivent et ils partent en équipe. Il y a de plus

24 en plus de personnes d'autres villes. De cet endroit, l'armée ne peut

25 aller qu'en avant et non pas en arrière". Ici, c'est marqué: "Nous

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1 souhaitons la paix" et ils sont en train de chanter une chanson

2 catholique. "Nous souhaitons avoir la paix et l'amour". Pendant trois

3 jours et trois nuits, les habitants ont arrêté les chars.

4 Nous pouvons continuer. S'il vous plaît, arrêtez maintenant et on peut

5 continuer à visionner cette vidéo à la vitesse ordinaire.

6 (Diffusion de la vidéo.)

7 A ce moment-là, il y avait Alija Izetbegovic qui arrivait en personne, il

8 arrivait de Sarajevo. Et il tient un discours. La vidéo dit: "J'ai passé 9

9 ans dans le bagne". Il parle donc de son passé, qu'il a été dans un bagne,

10 et il demande au peuple de laisser passer les chars. Et vous voyez ici le

11 peuple croate qui acclame leur président légalement élu. La vidéo: "Je

12 pense que je peux commettre des erreurs", même s'il dit: "Je peux me

13 montrer, mais j'estime que la situation est telle maintenant qu'il

14 faudrait que vous laissiez passer les chars".

15 Et maintenant, nous voyons l'arrestation d'Alija Izetbegovic. Il a été

16 amené en tant qu'otage et vous voyez maintenant la conversation directe à

17 la télévision de Bosnie-Herzégovine. Vous voyez: la personne qui se trouve

18 au milieu aurait dû être son remplaçant, c'est Fikret Abdic. Mais il parle

19 directement de sa détention par téléphone à la télévision, c'est Alija

20 Izetbegovic qui parle.

21 La vidéo: "Il faut donc cesser le feu et cela nous convient, à nous et aux

22 habitants de Sarajevo".

23 Donc le studio lui parle par téléphone, en direct, et on peut voit ce

24 programme, cette émission en direct. C'est toute l'ancienne Yougoslavie

25 qui pouvait voir cela. Il est détenu par les généraux Djordjevac et

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1 Kukanjac de la JNA.

2 La vidéo; question du journaliste: "Peut-on parler au général?".

3 Vous voyez ici que c'est écrit en cyrillique et que l'alphabet cyrillique

4 avait le même statut que l'alphabet latin. Actuellement, vous voyez le

5 général Kukanjac, si je ne me trompe pas, donc dans cette émission, et il

6 donne ici quelles sont les conditions qu'il pose.

7 (Pas de traduction vidéo.)

8 Voyez maintenant, c'est le journaliste qui demande au général en quelle

9 qualité il le fait.

10 (Toujours pas de traduction de la vidéo. )

11 Actuellement il y a le membre de la présidence Stjepan Kljuic qui rentre

12 dans les négociations.

13 (Traduction de la vidéo.)

14 "Mais je crains que ce soit la même troisième partie qui essaye de

15 s'entremêler.

16 Le journaliste demande: 'C'est quel côté? A qui pensez-vous Monsieur le

17 Président?'

18 Il répond: 'Je crois que ce sont des unités paramilitaires qui sont en

19 train de tirer de Brace et ceci crée une confusion.

20 Question: Qui est en train de tirer sur qui?"

21 (Fin de la diffusion.)

22 Pourriez-vous accélérer un petit peu pour arriver vers la fin, en fait

23 jusqu'à la phrase qui m'intéresse. Revenez en arrière, s'il vous plaît, un

24 instant. Pourriez-vous retourner en arrière un tout petit peu? Merci. Et

25 on peut continuer le visionnage. Il semble que de toute évidence il y a

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1 des problèmes dans la cabine technique.

2 A ce moment-là M. Alija Izetbegovic revêt de toutes les autorités M. Ejup

3 Ganic, et ici, vous voyez que les journalistes de différents journaux de

4 Bosnie-Herzégovine représentant les trois peuples; il est donc en train

5 d'expliquer pourquoi il avait signé la coopération militaire et les

6 accords de Split. Ceci passe aussi à la télévision de l'Etat.

7 Et on peut maintenant passer à une autre séquence. Oui, Monsieur, je vous

8 demande de placer cette séquence à son début, s'il vous plaît. J'aimerais

9 bien que l'on voie cette séquence dès le début, et je demanderai aussi aux

10 interprètes de faire de leur mieux.

11 (Traduction de la vidéo.)

12 "Est-ce qu'un soldat croate qui refuse de se rendre sur le front en

13 Bosnie-Herzégovine, par exemple à Derventa ou ailleurs, est-ce qu'il peut

14 être puni en tant que déserteur?

15 -R: Non.

16 -Q: J'ai reçu des questions de nos auditeurs, est-ce qu'on pourrait

17 éclaircir ce que l'on dit pour Bosnie-Herzégovine?"

18 (Fin de la diffusion.)

19 C'est Gojko Susak, feu le ministre de la Défense de la République de

20 Croatie.

21 (Traduction de la vidéo.)

22 "Les officiers de la République de Croatie ont dit sous quelles conditions

23 ils se rendaient sur les champs de bataille en Bosnie-Herzégovine; il

24 s'agissait toujours de bénévoles qui, soit étaient nés en Bosnie-

25 Herzégovine, soit voulaient, en tant que volontaires, aller combattre en

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1 Bosnie-Herzégovine; donc nous n'avertissons personne, il n'y a aucun ordre

2 qui leur impose de se rendre en Bosnie-Herzégovine"

3 (Fin de la diffusion.)

4 Voilà ici, il s'agit d'une émission qui est très connue de la télévision

5 de Zagreb, qui s'appelle "Le gros plan". A l'époque, en 1992, ont

6 participé à l'émission le ministre Gojko Susak qui a répondu à la question

7 tout à fait ouvertement de l'un des téléspectateurs, et il y avait des

8 officiers de l'armée croate qui étaient sur le plateau avec lui.

9 Ceci était donc qu'une illustration de ce que j'ai dit précédemment et de

10 ce que nous allons prouver par la suite en présentant nos moyens de

11 preuve. Maintenant, nous arrivons au moment où les personnes arrivent des

12 différents pays étrangers, et on en arrive jusqu'à mon client, et nous

13 allons commencer maintenant à parler plus de mon client.

14 Mon client, M. Mladen Naletilic a déclaré lors de la comparution initiale

15 devant ce Tribunal avec fierté: "Si c'est un péché de défendre sa partie,

16 je suis coupable."

17 Il voulait dire par cela que c'était son obligation et son honneur. De la

18 même façon que c'était l'obligation et l'honneur des autres de défendre

19 leur foyer, leur famille en République de Croatie et en Bosnie-

20 Herzégovine. Ceci n'est pas un crime, c'est un devoir et un honneur. En

21 tout cas, il est venu aider et non pas commettre des crimes.

22 Mon client, Mladen Naletilic a quitté sa famille et tout le confort dans

23 lequel il avait vécu auparavant en République fédérale d'Allemagne, et il

24 s'est rendu tout d'abord en République de Croatie et par la suite à Siroki

25 Brijeg qui après s'est trouvé menacé par une agression de la JNA.

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1 Nous allons démontrer donc que l'on aurait pu le considérer comme un zéro,

2 comme un nul du point de vue de la morale, s'il n'avait pas pris la mesure

3 qui a conduit à la formation d'une unité qui a été baptisée "l'unité des

4 condamnés", "Le Bataillon des condamnés", et qui se composait de lui-même

5 ainsi que d'anciens prisonniers de leurs propres idéaux, de leur propre

6 conscience, et qui avaient fait l'objet de persécutions aux mains des

7 autorités du régime communiste de la Yougoslavie. Et cette unité, ainsi

8 ainsi que les autres unités constituées de la sorte, avaient pour objectif

9 et pour rôle essentiel de libérer Mostar ainsi que la totalité de

10 l'Herzégovine. Ces unités ont subi un grand nombre de pertes tout au long

11 de la période. Elle a également participé à la première victoire contre

12 l'armée de la Republika Srpska. Lui-même est né à Siroki Brijeg. Il était

13 donc citoyen de Bosnie-Herzégovine, mais il n'a jamais eu de passeport de

14 la Bosnie-Herzégovine. En fait, il était citoyen de Croatie.

15 Bien. Je vais sauter la partie suivante et je vais reprendre à cet

16 endroit. Dans l'Acte d'accusation, nous voyons que lorsqu'on mentionne le

17 HVO, on peut lire que "la propagande a été la démarche de certains cercles

18 afin de réaliser leurs objectifs politiques. Et on a essayé de montrer la

19 situation sous un jour différent de la réalité et de nombreux

20 représentants internationaux, malheureusement, en dépit de la faiblesse

21 des arguments prononcés -par exemple nous avons vu des véhicules qui

22 portaient des plaques d'immatriculation de la HV, donc on a pensé qu'il

23 s'agissait d'un général du HVO, alors qu'en fait la personne que l'on a

24 vue, c'était un général du HVO et pas la HV-, et personne ne sait très

25 bien qui occupait ces véhicules qui avaient des plaques d'immatriculation

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1 HV.

2 Une fois encore, personne ne parle de l'accord qui a été passé entre la

3 République de Croatie et la Bosnie-Herzégovine, un accord que j'ai

4 mentionné précédemment. La communauté internationale ainsi que les Nations

5 Unies, je le répète, ont reconnu les frontières externes. Mais quant au

6 système intérieur, à l'organisation interne de cette entité, on devait se

7 mettre d'accord à ce sujet plus tard. Et M. Izetbegovic s'en est servi

8 pour dire que les Musulmans et l'armée de Bosnie-Herzégovine étaient les

9 seuls représentants légitimes de cet Etat, alors que ces organisations qui

10 détenaient le pouvoir et l'autorité étaient exclusivement des Musulmans

11 sans que soient représentées les autres composantes ethniques; ce qui

12 faisait que ce gouvernement était illégitime puisque chacun aurait dû être

13 représenté.

14 Disons qu'on se trouve dans la même situation que celle d'une maison à

15 trois étages avec trois frères qui habitent à l'intérieur. Il faut bien

16 partager équitablement la maison entre les trois frères! C'était la

17 situation à laquelle on était confrontés dans la région, et c'est là que

18 la communauté internationale est intervenue.

19 Tous les plans, celui de Cutilliero, le plan Vance-Owen, le plan Owen-

20 Stoltenberg et ultérieurement les accords de Washington qui devaient

21 amener à cela, tout cela s'est inscrit dans le cadre d'une division de la

22 Bosnie, une division équitable sur la base des critères d'une majorité de

23 la population à majorité qui contrôlerait une zone donnée. Nous allons

24 vous présenter ces éléments de preuve par le truchement d'un expert en

25 matière de plan Vance-Owen; c'est lui qui viendra vous expliquer cela.

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1 Le plan Cutilliero, lui, se concentrait sur les municipalités, et c'est là

2 qu'on a entendu parler du "concept de la peau du léopard avec des oasis

3 ethniques constituées".

4 Le plan Vance-Owen voulait voir l'union des républiques et des provinces

5 qui devaient rester des provinces, et c'est ce qui s'est d'ailleurs

6 produit. La Bosnie a été divisée en provinces.

7 Entre temps, entre le plan Cutilliero et le plan Vance-Owen, une campagne

8 a été menée, et toutes les suggestions étaient illégales.

9 Donc on a entendu toute sorte de choses: "fédéralisation", "jonction avec

10 la Croatie", etc., "confédération au sein de la Bosnie-Herzégovine",

11 "union des républiques, "union des provinces". On a parlé du modèle

12 helvétique basé sur les cantons. Tout ceci était légal, tout ceci a fait

13 l'objet de discussions malheureusement pendant deux ans, pendant beaucoup

14 trop de temps parce que, dans l'intervalle, les gens ont souffert, et ces

15 gens-là, on ne peut ramener à la vie! Je crois qu'ils sont cependant

16 attentifs à ce que nous faisons aujourd'hui.

17 Aucune proposition n'avait pour objectif de créer une Bosnie-Herzégovine

18 civile et unitaire. Tout ceci était le fait de gens qui n'y connaissaient

19 rien. Toutes les propositions se reposaient sur un même concept, celui de

20 la division.

21 Nous allons citer à la barre un témoin qui déposera sur ce que Lord

22 Carrington lui a dit lorsque, à l'aéroport de Butmir, au moment des

23 négociations à l'aéroport de Butmir, Lord Carrington, le premier

24 négociateur de la communauté internationale, a dit: "Si vous n'arrivez à

25 un accord rapidement, on va vous laisser vous entre-tuer, vous détruire,

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1 et ensuite on viendra et on vous imposera notre propre solution".

2 Vous entendrez un témoin à qui ces paroles ont été adressées. Et fort

3 malheureusement, c'est exactement ce qui s'est produit. Alors, bien que

4 les Croates en tant que peuple le moins nombreux, qui ne pouvaient arriver

5 à un accord avec l'accord des deux autres -puisqu'ils représentaient au

6 début de la guerre 17% de la population contre 10% aujourd'hui, alors que

7 la population des deux autres groupes ethnique ne cessait d'augmenter. Et

8 d'ailleurs, c'est encore un phénomène que l'on peut constater aujourd'hui.

9 Les Croates ne pouvaient donc rien faire de par eux-mêmes; il leur fallait

10 attendre l'accord des deux autres composantes ethniques. Ils ont signé

11 tous les accords de paix inimaginables parce que c'était chaque fois la

12 manière de garantir la survie du peuple croate. C'est pourquoi ils les ont

13 signés, parce que tout plan était considéré comme un bon plan par les

14 Croates qui estimaient que c'était là la garantie de leur survie. Mais

15 Izetbegovic a signé aussi bien le plan Vance-Owen que le plan Cutilliero;

16 il les a signés pour ensuite les mettre de côté, les abandonner. Pourquoi?

17 Parce que leur appétit à eux, de leur côté, était beaucoup trop grand.

18 Et maintenant, revenons au rôle de la communauté internationale. Un de nos

19 témoins vous parlera de Izetbegovic, du moment où il est revenu de la

20 signature du plan Cutilliero à Lisbonne et Zimmerman qui était alors

21 ambassadeur en Yougoslavie a dit à Izetbegovic: "C'est de la faute à qui?

22 Qui est responsable de la signature de Split?" Parce que Izetbegovic se

23 plaignait d'avoir reçu beaucoup… trop peu de territoires. Et l'ambassadeur

24 Zimmerman lui a dit: "Mais vous l'avez signé, c'est la faute à qui?".

25 Comment Izetbegovic aurait-il pu interpréter la chose autrement qu'en

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1 disant: "Eh bien finalement, ce que j'ai signé, je n'ai pas à m'y

2 conformer". Et ces malentendus, ce manque de compréhension a eu des

3 conséquences fatales. Ce sont les intérêts locaux, les intérêts politiques

4 qui entraient en jeu dans ce contexte. Il y avait également les intérêts

5 de l'Europe, à l'est comme à l'ouest. Et cette frontière, elle suivait la

6 partie centrale de la Bosnie.

7 Je vais vous en donner l'illustration. La dernière séparation sous l'égide

8 de l'OTAN, à Bruxelles, a été mise au point en 1993, et la ligne de

9 division est la suivante. L'influence de la confession orthodoxe apparaît

10 ici; cette carte a été réalisée à Bruxelles, sous l'égide de l'OTAN, et on

11 voit où s'arrête cette ligne. Elle traverse la partie centrale de la

12 Bosnie-Herzégovine, et voici où elle s'arrête.

13 Je vous ai montré cette carte et je souhaite maintenant vous montrer autre

14 chose qui, souvent, a été mal compris, ou peut-être qui fait partie d'une

15 tentative délibérée de tromperie. Pour nous, c'est un élément de preuve,

16 c'est ce qu'on a appelé "la serviette de Paddy Ashdown".

17 Voici comment les choses se sont passées. Ça s'est passé lors d'un banquet

18 à Londres, on célébrait la victoire du fascisme; ce banquet a eu lieu le 6

19 mai 1995. Au cours de ce banquet, il y avait le président Tudjman,

20 puisqu'il avait participé à la résistance antifasciste; il était partisan…

21 c'était un des partisans de Tito, il avait obtenu le titre de général dans

22 l'armée de Tito. Il a été invité à ce banquet et sur… Il a reçu cette

23 carte de Bruxelles. Bien entendu, il est décédé aujourd'hui donc il ne

24 peut pas le confirmer, mais ce livre le confirmera.

25 Et il a simplement dessiné cette ligne-là alors que Lord Paddy Ashdown,

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1 lui, a interprété la chose et c'est son écriture que l'on voit sur ce

2 menu. Il a inscrit sur cette carte ce qu'il pensait, son interprétation au

3 moment, à ce moment-là, après les accords de Washington et vers la fin des

4 négociations de Dayton. Et il en a conclu que Tudjman voulait la division

5 de Bosnie et je ne sais pas pourquoi on a fait cela. On était le 6 mai

6 1995, je ne vois pas quels sont les objectifs de qui.

7 Ce livre va être traduit, ainsi d'ailleurs que tout ce que Paddy Ashdown a

8 dit à ce sujet; Paddy Ashdown qui va bientôt devenir le gouverneur de la

9 Bosnie-Herzégovine puisqu'il a déjà été élu à ce titre. Tous les

10 entretiens et les dénégations de l'ex-président Tudjman relatives à cette

11 déclaration, à ces interprétations de ce menu, nous vous les présenterons

12 dans le cadre de la présentation de nos moyens et nous prouverons que cet

13 élément de preuve là est faux.

14 Comme vous le voyez, toutes les négociations relatives à la division de la

15 Bosnie ont entraîné la division de la Bosnie parce qu'en fait, il y a deux

16 unités fédérales en Bosnie-Herzégovine actuellement, ce sont elles qui

17 constituent la Bosnie-Herzégovine. L'une d'elles s'appelle la fédération

18 des Bosniens et des Croates, elle a son propre gouvernement, sa propre

19 Constitution, sa propre armée, sa propre police; elle a un système

20 constitutionnel et judiciaire qui lui est propre. Et l'autre unité, c'est

21 la Republika Srpska qui dispose de sa propre armée, de sa propre police,

22 de son propre système judiciaire.

23 La seule chose qu'ils partagent, c'est la monnaie, bien que je ne sois pas

24 tout à fait sûr de cela. Je crois que c'est… Oui, c'est la monnaie qu'ils

25 ont en commun, il s'agit du mark, mark convertible -enfin maintenant,

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1 c'est l'euro- avec le soutien et la garantie de la République allemande.

2 Tout ceci a eu lieu à la fin 1992. En janvier, le plan Vance-Owen a été

3 signé; les Bosniens et les Croates l'ont signé. Il a été nécessaire de le

4 mettre en oeuvre. L'Herzégovine devait se retrouver aux mains de la

5 Croatie, mais Zijad Emirovic a été élu en tant que gouverneur en janvier

6 1993.

7 Le SDA, dirigé par Alija Izetbegovic, a bien compris qu'il y avait une

8 division qui était en train se faire et qu'il fallait qu'il mette la main

9 sur le plus de territoires possible. Qu'est-ce qu'il a fait, à ce moment-

10 là? Vers qui s'est-il il tourné? Il s'est tourné vers les Croates, les

11 plus faibles. Il n'y a pas eu d'attaque contre l'armée de la Republika

12 Srpska, ils n'ont pas osé.

13 On a vu se mettre en place une politique d'islamisation qui s'est montrée

14 au grand jour, puisque les dirigeants juridiques ont été remplacés de

15 Sarajevo à Mostar, à Jablanica, Prozor et Konjic. Les communautés

16 municipales, également élues, ont été remplacées et dans le cadre d'un

17 acte totalement illégal et unilatéral, le docteur Rusmir Dzarulderac a été

18 remplacé (Note de l'interprète: Rusmir Mahmut-Cehajic). J'ai sans doute

19 mal prononcé son nom, en tout cas c'était le président de la cellule de

20 crise de Konjic et on a fait venir le docteur Safet Cibo qui venait de

21 Sarajevo le 8 mars 1993.

22 Il a ensuite eu un comportement totalement dictatorial, il n'en a fait

23 qu'une seule unité, je parle des municipalités de Konjic, Prozor et

24 Jablanica qui sont devenues unifiées. Ceci a entraîné, d'ailleurs c'est

25 encore le cas à ce jour, ceci a entrainé la chose suivante: vous n'avez

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1 plus de Croates dans cette région.

2 A Mostar, les autorités légales ont été remplacées le Dr Hadzic Osmanovic

3 était à la tête de ces dirigeants, c'était un démocrate par conviction. Il

4 était en désaccord avec la situation mais Demirovic, lui, n'avait pas

5 autant de résistance à ce sujet, il l'a remplacé. Mais Seid Smajkic en

6 fait tirait les ficelles, c'est lui lui qui contrôlait tout; Demirovic

7 n'était qu'un pantin. C'est donc cet homme qui, avec les autres imams, les

8 autres notables musulmans, a activement participé à cette campagne

9 d'islamisation.

10 Le commandant Arif Pasalic, le commandant du corps d'armée, et Safet

11 Orucevic, proche d'Izetbegovic, ont participé également et jusqu'à une

12 date récente, cela avait été le maire de Mostar.

13 La défense va montrer et va produire des éléments de preuve à l'appui de

14 ce fait que ce sont eux qui sont à l'origine de la guerre à Mostar, ce

15 sont eux qui sont responsables. Ils se sont livrés à des manoeuvres de

16 propagande, ils ont donné des ordres à tous les médias, à tous les

17 Bosniens leur ordonnant de quitter leur lieu de travail, de quitter leurs

18 écoles, et leur interdisant de coopérer avec les Croates.

19 Jusqu'à ce jour, la cohabitation était pacifique, peu importait que le

20 programme dans les écoles soit organisé par la HZ-HB, peu importait.

21 L'important c'est que les enfants aillent à l'école, c'est qu'ils

22 terminent leurs études, c'est qu'ils bénéficient de toutes les études

23 possibles. Et quand l'Etat sera de nouveau libre de ses mouvements, on

24 pourra améliorer les programmes scolaires.

25 Alors, on était au milieu de la guerre, il y avait de tas de réfugiés, et

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1 ces gens-là demandaient des programmes spéciaux. Qui aurait pu le faire?

2 Nous montrerons que ces quatre hommes se sont vus confier cette mission

3 par Alija Izetbegovic, mission de mettre en oeuvre toutes ces manoeuvres

4 en Bosnie-Herzégovine, et ils y sont parvenus.

5 Autre personne remplacée: celui qui a été alors le commandant Sefer

6 Halilovic a été remplacé, il commandait l'armée de Bosnie-Herzégovine,

7 mais il n'était pas d'accord avec la politique d'islamisation. Il entrait

8 en conflit avec Alija Izetbegovic.

9 Nous montrerons grâce à une vidéo que l'islamisation a été très rapide. On

10 peut le voir, c'est manifeste. J'aimerais qu'on lance la vidéo: là où on

11 s'est arrêté, on peut continuer où on s'était arrêté précédemment.

12 (Diffusion de la vidéo.)

13 Pouvez-vous faire une avance rapide s'il vous plaît?

14 "Dans le cadre de l'armée légale de Bosnie-Herzégovine au sein du 3e Corps

15 de l'armée de Bosnie-Herzégovine, la Brigade "El Moudjahid" a été mise en

16 place, et d'après certaines estimations, elle comptait entre 3.000 et

17 5.000 hommes."

18 Merci d'arrêter le défilement rapide de la vidéo.

19 Ce Bataillon acceptait tout le monde, les former, les éduquer et les

20 envoyer pour former des unités musulmanes. Merci de retourner un petit peu

21 en arrière et j'aimerais qu'on puisse entendre le son. Voilà ici, c'est

22 bien. Veuillez, s'il vous plaît, monter le son.

23 (Diffusion de la vidéo.)

24 Alija Izetbegovic est venu en personne sur les lieux pour passer en revue

25 les troupes.

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1 Merci, s'il vous plaît, d'interrompre le visionnage. En fait, il criait:

2 "C'est la route vers la victoire: islam Djihad."

3 Merci de poursuivre.

4 (Diffusion de la vidéo.)

5 Vous avez ici des commandants militaires. Vous avez là le drapeau de

6 Bosnie-Herzégovine. Alija Izetbegovic leur est présenté, on l'informe de

7 la situation.

8 Merci s'il vous plaît d'interrompre le défilement de l'image.

9 On voit ici qu'on a procédé à la déformation des traits de l'homme assis à

10 côté d'Alija Izetbegovic, cet homme fait l'objet de recherche, c'est

11 pourquoi on a caché les traits de son visage, et les gens qui sont assis à

12 cet endroit ce sont des gens qui viennent de pays islamiques.

13 Veuillez s'il vous plaît poursuivre le visionnage, nous allons fournir des

14 preuves à l'appui de mes dires.

15 (Diffusion de la vidéo.)

16 Ici, vous avez le Chek Cherjatiars, vous le voyez, il est derrière la

17 personne dont les traits du visage sont camouflés. Le commandant du 3e

18 Corps de la Bosnie-Herzégovine est assis à côté d'Alija Izetbegovic.

19 Vous pouvez faire avance rapide maintenant. Avance rapide s'il vous plaît.

20 Ici vous avez une série de prises d'arme, on peut voir le nombre des

21 Mudjahidine, mais je ne veux pas lasser les Juges à ce stade de la

22 procédure, nous aurons l'occasion de présenter ces images par le

23 truchement de nos témoins.

24 Là, c'était un des camps d'entraînement les plus importants. Veuillez,

25 s'il vous plaît, interrompre et revenir un petit peu en arrière. Oui, là

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1 c'est bien. Voilà, ici on peut voir à vitesse normale cet extrait.

2 Vous avez le commandant qui conduit le commandant de la charria…. Nous

3 allons faire traduire cette cassette parce qu'elle est en arabe, donc on

4 ne voit pas son visage, il est déformé. Vous avez un rapport qui est

5 présenté sur Tuzla ainsi qu'un autre commandant ici, le commandant-

6 général, mais celui qui commande tout, bien entendu, c'est Alija

7 Izetbegovic.

8 Merci d'interrompre, s'il vous plaît, le défilement rapide et de revenir

9 un petit peu en arrière à partir d'ici. Allons-y, ici encore on voit que

10 certaines personnes n'apparaissent pas clairement sur l'image. D'après la

11 traduction que l'on nous a donnée, on nous dit qu'il s'agit là du prince

12 ainsi qu'un général Mahud du 3e Corps d'armée. On peut voir à quel point

13 tout ce monde-là s'entend bien. Je n'ai pas pu lire ce qui était écrit, je

14 vais demander à ce que l'on fasse défiler la bande plus rapidement, il

15 s'agit simplement de prisonniers, mais ce n'est pas très important pour

16 l'instant.

17 Veuillez s'il vous plaît, faire défiler l'enregistrement vers l'avant.

18 Ici, nous avons un certain nombre d'actions militaires, on peut voir les

19 armes dont disposaient ces troupes. Stop, s'il vous plaît. Vous avez ici

20 des gens qui viennent du détachement "El Moudjahid", des unités d'élite de

21 l'armée de Bosnie-Herzégovine en étaient extraites.

22 Ici, nous avons la 7e Brigade, et nous pouvons visionner la cassette et le

23 passage qui s'y rapporte. Veuillez, s'il vous plaît, faire "avance

24 rapide". Ici, nous avons différents membres de ces troupes qui nous

25 indiquent quelles sont leurs positions, qui montrent quel est l'objectif

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1 de l'islam, vous avez ici un étranger qui en appelle à tous les Musulmans

2 pour venir lutter en Bosnie-Herzégovine, pour défendre la Bosnie-

3 Herzégovine, et en croate ou en bosnien ces personnes décrivent pourquoi

4 les Moudjahidin sont présents, quels sont leurs objectifs, quelle est leur

5 mission, et quelle est la mission et objectif de tous les Musulmans en

6 Bosnie-Herzégovine. Voici un des camps où les troupes suivaient une

7 formation.

8 Ici l'on voit l'un des membres des troupes musulmanes qui parle en langue

9 bosnienne, qui convie tous les Musulmans à se battre contre les ennemis

10 d'Allah et de l'islam. Enfin, nous présenterons tout cela sous forme

11 d'éléments de preuve au moment opportun. Ce monsieur est ressortissant du

12 Yemen, je pense, nous allons voir son nom et prénom apparaître, et c'est

13 lui qui avait pris la parole à ce sujet. C'est de la propagande, et on

14 voit ici une inscription disant: "Où est-ce qu'on peut acheter la

15 cassette?" Je vous demande maintenant d'arrêter l'image, arrêtez l'image

16 je vous prie, et revenez un petit peu en arrière, encore un peu, encore un

17 peu. Voilà ici. Ici je vous prie de remettre le défilement normal.

18 (Défilement normal de la vidéo. )

19 Le responsable charré (phon) chargé de l'application de la charria a pris

20 la parole.

21 (Les interprètes ont du mal à suivre, à cause de l'écho en arabe.)

22 Bien, je crois que vous pouvez arrêter le visionnage de la cassette.

23 (Fin de la diffusion de la cassette.)

24 Après les explications que je vous fournirai, vous aurez une traduction et

25 vous comprendrez clairement quels étaient les objectifs de l'appel aux

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1 Moudjahidin qui avaient appelé à se battre contre les Nations Unies,

2 contre l'Amérique, contre la communauté internationale. Vous verrez quels

3 étaient les objectifs de leur combat, et vous verrez surtout quelle était

4 l'année en question, et il vous sera expliqué quelles sont les tâches de

5 tout Musulman. Et ici, l'image est arrêtée sur un soldat de la Forpronu.

6 Je vais poursuivre et je tiens à dire que la défense se doit de contester

7 les affirmations disant que l'unité de détenus avait pris part aux combats

8 avec les Musulmans car cela n'a jamais eu lieu. L'unité croate avec le

9 Bataillon des condamnés n'a jamais pris part à de tels combats, mais on

10 voit que cette unité de détenus avait combattu contre les Tutici. La

11 Chambre entendra aussi qu'aucun membre de ce Bataillon de détenus n'a

12 jamais affirmé pour lui-même qu'il était un membre des Tutici, l'un des

13 "Tuta", des gens à "Tuta", et ils n'avaient aucune raison de dire cela.

14 La défense vous dira comment ce Bataillon des détenus a été créé et qui

15 l'avait commandé, qui avait été son commandant. La Chambre...

16 (L'interprète indique que l'avocat a compris qu'il allait trop vite.)

17 La Chambre donc entendra comment l'un des fondateurs de ce Bataillon des

18 détenus avait été M. Mladen Naletilic et comment, au début, il n'y avait

19 qu'une dizaine de jeunes gens et comment cette dizaine a crû pour faire un

20 bataillon. Vous entendrez que ce Bataillon des détenus n'avait pas à avoir

21 honte ou à redouter ses propres actes, et vous entendrez les raisons pour

22 lesquelles bon nombre d'entre eux s'étaient présentés comme étant membres

23 des troupes de "Tuta".

24 Vous entendrez parler de Mladen Naletilic, des raisons de son arrivée en

25 Herzégovine après de longues années d'absence. Et vous entendrez parler de

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1 l'importance qu'avait revêtue son rôle lors de l'agression serbe.

2 La défense se propose de contester les éléments de preuve présentés par

3 l'accusation s'agissant des événements du mois d'octobre 1992 à Prozor,

4 Stolac, et des raisons et circonstances sous lesquelles ou dans lesquelles

5 il y a eu conflit entre l'armée de la Bosnie-Herzégovine et le HVO.

6 A titre d'illustration, je me propose de vous montrer maintenant certains

7 documents pour suivre le fil de mon exposé. Au 4e Corps d'armée de Mostar,

8 le 4 août 1993, le commandant Mihat (phon) envoie en date du 24 mars 1993

9 donc le texte suivant: "Nous informons que la situation dans notre zone de

10 responsabilité est la suivante: 150 membres du HVO ont été faits

11 prisonniers; la ville est bloquée; la vie dans la ville est paralysée.

12 Nous continuons avec les arrestations." "Nous continuons avec les

13 arrestations". (Fin de citation)

14 D'après les termes du plan dont j'ai parlé tout à l'heure, et je

15 demanderai à mes collègues de ne pas faire d'objection tu quoque

16 s'agissant des événements avant le 9 mai 1993, je vais vous parler des

17 emplacements et des dates auxquels des Croates ont été tués au terme ou en

18 vertu du plan criminel établi par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

19 A Gusti Grad le 29 janvier 1993: 5 morts.

20 A Orlista, le 23 mars 1993: 4 morts, tous des civils.

21 A Trusina, c'est dans la région de Konjic et de Jablanica, à Trusina, le

22 14 avril 1993: 16 morts, civils morts.

23 A Miletici, le 24 avril 1993: 5 morts.

24 A Bilivode, le 27 avril 1993: 3 morts.

25 A Susanj, le 27 avril 1993: 10 morts qui étaient des civils croates.

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1 Pour être plus correct, je n'irai pas au-delà parce que nous entrons dans

2 le mois de juin, juin, juillet, août, septembre, octobre. Pour être

3 correct parce que l'accusation a affirmé que, jusqu'au 9 mai, "nous avions

4 attaqué". Quand je dis "nous", c'est le HVO. Il avait voulu dire que le

5 HVO avait attaqué des villages civils non défendus.

6 Vous avez vu la puissance de l'armée et vous pouvez vous imaginer que

7 cette cinquantaine de civils croates qui ont été tués, vous croyez que

8 personne n'était au courant? Vous croyez que ce fait avait pu être

9 dissimulé aux yeux de quiconque? Mais le HVO n'avait pas à attaquer

10 l'armée de la Bosnie-Herzégovine, et nous allons le démontrer en

11 présentant les éléments de preuve à la Chambre de première instance ici

12 présente.

13 La défense se propose également de contester les allégations de

14 l'accusation disant que l'armée de la Bosnie-Herzégovine avait été des

15 forces armées du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, et que le HVO avait

16 été en conflit avec les effectifs de la République de Bosnie-Herzégovine.

17 Le HVO et l'armée de la Bosnie-Herzégovine avaient été des effectifs armés

18 qui se sont confrontés, mais non pas en s'attaquant à des villages civils

19 non défendus, comme l'accusation voudrait le laisser entendre dans son

20 Acte d'accusation.

21 Et ceci a été imputé à mon client, Mladen Naletilic, étant donné qu'on a

22 dit que le HVO avait commencé une série d'attaques en avril 1993 contre la

23 population civile bosno-musulmane comme, par exemple, l'attaque à Ahmici

24 en date du 16 avril.

25 Vous voyez combien, avant cela, il y avait déjà eu des crimes perpétrés

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1 par l'armée de la Bosnie-Herzégovine à l'égard de villages civils non

2 défendus, tant en Bosnie centrale que dans la région de Konjic et

3 Jablanica.

4 Et en même temps, le 17 avril 1993, le HVO avec les effectifs du HV, de

5 l'armée croate, y compris le Bataillon des détenus, s'est attaqué aux

6 villages de Sovici et Doljani et ce, sous le commandant de Mladen

7 Naletilic qui a fait déménager, qui a expulsé par la force les Musulmans

8 de Bosnie de cette région-là". (Fin de citation. )

9 S'agissant de Sovici, je crois qu'il faudra distinguer. Nous allons

10 montrer à la Chambre que Sovici et Doljani ne doivent pas être distingués,

11 mais que cela fait deux ensembles indissociables. Et j'élaborerai par la

12 suite de façon plus exhaustive pour ce qui est du rôle de ce Bataillon de

13 détenus à Sovici, ce qui s'est passé à Sovici et ainsi de suite.

14 Mais il est certain également que la défense se proposera de démontrer que

15 Mladen Naletilic n'avait été et n'avait pas pu être le commandant de

16 toutes les unités du côté du HVO qui avaient pris part au conflit, et nous

17 démontrerons qu'il n'avait pas été non plus à la tête de la partie de

18 l'unité de détenus qui avaient pris part à ces conflits. La défense

19 démontrera que Mladen Naletilic n'a ni donné l'ordre ni exécuté ni pris

20 part à cette expulsion forcée des civils. Nous démontrerons également

21 qu'en avril il n'y a eu ni arrestation de Musulmans, ni à Capljina ni à

22 Stolac ni à Mostar. La défense démontrera à cet effet devant la Chambre

23 qu'il n'y a pas eu persécution de Musulmans, il n'y pas eu licenciement de

24 Musulmans et que les Musulmans travaillant dans les établissements, les

25 institutions ou entreprises de production sont restés à leur poste, au

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1 poste qu'ils avaient occupé avant l'éclatement des conflits. Nous

2 démontrerons que les Musulmans avaient quitté ces postes sous la pression

3 du parti SDA.

4 A cet effet, nous nous proposons de démontrer que l'organisation Karitas

5 était chargée de 30.000 réfugiés à Mostar seul, bien entendu à huis

6 partiel, avec tous les renseignements afférents à ceux qui ont réceptionné

7 l'assistance qui avait été assurée par ces soins.

8 Contrairement aux assertions de l'accusation disant que les unités du HVO

9 avaient entamé les attaques, la défense se propose de montrer à la Chambre

10 des éléments de preuve qui illustreront le fait que l'armée de la Bosnie-

11 Herzégovine avait été celle qui s'était attaquée au HVO en date du 9 mai

12 1993 et que les conflits qui se sont ensuivis, à aucun moment n'étaient

13 dirigés contre des Musulmans, des civils musulmans.

14 La défense est également tenue de présenter des éléments de preuve pour ce

15 qui est d'affirmer ou d'appuyer ses dires, disant que ni l'armée musulmane

16 ni le HVO n'avaient occupé Mostar. Nous devons vous communiquer la genèse

17 des conflits entre le HVO et les effectifs musulmans, c'est-à-dire vous

18 présenter les éléments de preuve qui diront ou affirmeront que Mladen

19 Naletilic n'avait pas été la personne qui avait conduit une campagne à

20 l'encontre des Musulmans. Et il s'agit ici de faire la distinction entre

21 les notions que nous utilisons, entre ce que l'accusation avait affirmé

22 comme étant une attaque contre la population musulmane alors qu'il

23 s'agissait d'un conflit entre l'armée des Musulmans et non pas d'une

24 attaque lancée contre des civils.

25 La défense se doit donc de présenter des éléments de preuve pour contester

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1 les affirmations de l'accusation disant que les événements de Mostar et de

2 Sovici puis de Doljani, pour contester que ces événements n'avaient pas

3 pour objectif une épuration ethnique et l'exercice d'un contrôle,

4 s'agissant des municipalités de Mostar, Jablanica et autres en

5 contraignant, ce faisant, les Musulmans à quitter les territoires en

6 question.

7 La défense se propose également de démontrer que Mladen Naletilic,

8 d'aucune façon que ce soit, ne s'est comporté dans cette intention-là.

9 La défense se propose également de démontrer que les événements survenus à

10 Mostar, Mostar où hélas!, il y a eu des citoyens de tués, tant Musulmans

11 que Croates, où il y a eu, hélas!, des gens qui étaient torturés, passés à

12 tabac, malmenés. Mais tant Musulmans, Croates que Serbes, cela n'avait pas

13 été le résultat ou la résultante d'une épuration ethnique, mais la

14 conséquence, de tristes conséquences de conflits ethniques où toutes les

15 parties étaient victimes, où il est survenu des crimes individuels,

16 certes, mais ces crimes n'avaient pas été l'objectif visé; au contraire,

17 c'était la triste conséquence de ces conflits. Les criminels ont leurs

18 propres noms et prénoms, et on ne peut les traiter ni de Croates ni de

19 Musulmans ni de Serbes. Les criminels ont leurs noms et prénoms, ils sont…

20 Ce sont des criminels.

21 Il ne faut pas perdre de vue, Monsieur et Mesdames les Juges, qu'il

22 s'agissait d'armées qui ont été constituées en moins d'un an. De quelle

23 discipline, de quel sens du devoir pouvons-nous parler? Comment vous

24 illustrer dans ce prétoire? Mais nous allons nous efforcer de vous

25 présenter des éléments de preuve pour que vous vous fassiez une idée de ce

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1 qui avait été entrepris aux fins de faire de ces unités des unités les

2 plus organisées, les plus disciplinées, parce que c'étaient des gens qui

3 avaient vécu dans des rues des villes, se sont organisés dans cette rue et

4 se sont battus pour cette rue et pour la ville, et ont évolué pour devenir

5 des forces armées. Ils voulaient tous devenir des ATG, à savoir des

6 groupes armés faisant partie d'effectifs déterminés, mais cela ils ne le

7 sont devenus que par la suite.

8 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, je suis désolé de devoir

9 vous dire que nous devons hélas cesser notre session parce que nous avons

10 un autre procès qui doit reprendre dans le même prétoire. Et si vous

11 n'avez pas terminé avec vos propos liminaires, vous pouvez continuer

12 demain matin.

13 M. Krsnik (interprétation): Je vous remercie Monsieur le Président, je

14 crois avoir besoin d'une petite heure encore.

15 M. le Président (interprétation): Bien. Nous allons reprendre nos travaux

16 demain matin à 9 heures.

17 (L'audience est levée à 13 heures 48.)

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