Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi 17 juin 2002.)

2 (Audience publique.)

3 (L'audience est ouverte à 14 heures 17.)

4 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, veuillez citer

5 l'affaire, je vous prie.

6 Mme Thompson (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames

7 les Juges. Affaire n°IT-98-34-T, le Procureur contre Mladen Naletilic et

8 Vinko Martinovic.

9 M. le Président (interprétation): Monsieur l'huissier, est-ce que vous

10 pouvez faire entrer le témoin, je vous prie?

11 (Le témoin, M. Ivan Bagaric, est introduit dans le prétoire.)

12 M. le Président (interprétation): Bonjour Monsieur le Témoin. J'espère que

13 vous vous êtes bien reposé pendant le week-end.

14 M. Bagaric (interprétation): Oui, merci, Monsieur le Président, merci de

15 votre intérêt.

16 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott.

17 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Ivan Bagaric, par M. Scott.)

18 M. Scott (interprétation): Merci, Monsieur le Président, bonjour Monsieur.

19 M. Bagaric (interprétation): Bonjour Monsieur.

20 M. Scott (interprétation): Je demande l'aide de M. l'huissier, la pièce à

21 conviction 239.11 où nous étions restés vendredi. Veuillez venir à cette

22 pièce à conviction.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 Nous parlions de cela, Monsieur le Témoin, et je vois que nous en sommes

25 arrivés au point où vous disiez -si j'ai bien compris-, ces comptes rendus

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1 n'étaient pas vraiment tenus de manière régulière pour une raison ou pour

2 une autre, ou peut-être faute de ressources, ou à cause du travail que

3 cela représentait qui était trop grand. Mais je crois que vous avez dit

4 vendredi que le type de compte rendu régulier qui était envisagé de ce

5 document de M. Stojic, le 6 février 1993, que cela –d'après vous- n'avait

6 jamais vraiment été mis en place.

7 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que je peux

8 vous demander de m'aider lorsqu'on me pose une question de cette façon-là

9 parce que je ne sais pas comment répondre à cette question?

10 L'accusation me demande -comme on le disait dans le dicton "tu iras, tu

11 reviendras, tu ne périras pas au cours de la guerre"- cela dépend de ce

12 que veut dire la question. Une allégation contient plusieurs allégations

13 et allégations mensongères. Est-ce qu'il me demande si c'est exact? Est-ce

14 ainsi que le Tribunal fonctionne normalement? Enfin je voudrais savoir de

15 quelle pièce à conviction il s'agit parce que j'ai plusieurs pièces devant

16 moi.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott, essayez de poser des

18 questions simples, vous avez entendu le témoin.

19 M. Scott (interprétation): Monsieur, il y a peut-être eu une certaine

20 confusion dans les documents. J'ai parlé spécifiquement du document

21 P239.11 qui –je crois- est le premier ou le deuxième document dans le

22 dossier que vous avez devant vous.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 M. Bagaric (interprétation): Je ne sais pas de quel document vous parlez,

25 Monsieur. Je ne sais pas de quoi vous parliez avant qu'on me le mette sous

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1 les yeux. Ce document, je le vois, 515095.

2 M. Scott (interprétation): Je ne sais pas de quoi vous parlez. Il s'agit

3 d'un document, intitulé de la page de garde: P239.11.

4 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik.

5 M. Krsnik (interprétation): Bonjour Monsieur le Président et merci de me

6 donner la parole. Je voudrais aider le Tribunal. Nos copies en croate ne

7 comportent pas cette numérotation, sauf un numéro en haut à droite. C'est

8 01539320; c'est cela le numéro que vient de nous lire le témoin.

9 M. le Président (interprétation): Je crois que le témoin a trouvé le bon

10 document.

11 M. Scott (interprétation): Merci Monsieur le Président. La question est

12 peut-être trop compliquée, mais en fait, elle est assez simple. Vous nous

13 avez dit vendredi que malgré l'ordre de M. Stojic du 6 février 1993, un

14 système de comptes rendus sur ces questions n'était pas en fait mis en

15 œuvre.

16 M. Bagaric (interprétation): Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit.

17 Est-ce que je peux préciser? Cet ordre se rapporte à un service qui,

18 pendant un certain temps, s'occupait de la recherche de crimes commis à

19 l'égard de la population civile surtout, mais aussi à l'égard de soldats

20 qui étaient détenus, puis tués. Je crois que cela remonte aussi -je ne

21 sais plus quel mois, parce que je ne vois pas très bien-, mais ce n'est

22 pas le 6 février en tout cas, je crois que c'était le 6 juillet ou le 6

23 août.

24 Il s'agit d'un document qui a été rédigé après un événement dont j'ai déjà

25 parlé, où les forces musulmanes ont détenu environ 37 soldats. Il y avait

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1 une dizaine de civils parmi eux et, ils ont tous été tués. A ce moment-là,

2 nous avons demandé qu'il y ait des post mortem des personnes qui avaient

3 été tuées pour voir s'ils avaient été torturés. J'ai déjà dit que la

4 personne responsable était le Dr Markic et que quelque chose a été fait à

5 cet égard, mais son travail à ce sujet n'a jamais été publié. Ce qui ne

6 veut pas dire qu'aucun crime intéressant des civils et des soldats du

7 Conseil national croate de défense n'a eu lieu, ce que j'ai dit c'est

8 qu'elle n'a pas écrit un ouvrage ce sujet.

9 Question: Je sais que ça ne répond pas à mes questions, je sais que vous

10 tenez beaucoup à parler au Tribunal des crimes commis contre les Croates

11 et, j'ai beaucoup de sympathie pour cela, mais ce n'est pas la question

12 que je vous ai posée. En fait, est-ce que cette information demandée par

13 M. Stojic, est-ce que cette information a été recueillie systématiquement

14 par le HVO?

15 M. le Président (interprétation): Maître Krnsik?

16 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je crois qu'il n'est

17 pas approprié de laisser l'accusation évoquer des présomptions, des

18 raisons pour lesquelles le témoin est là. Ce qui est clair c'est que le

19 témoin est ici pour répondre aux questions qui lui sont posées.

20 L'accusation ne devrait pas être autorisée à commenter les choses comme

21 elle vient de faire, c'est cela mon objection.

22 M. le Président (interprétation): Je crois que la question posée par

23 l'accusation est très simple. La question est qu'un système de compte

24 rendu régulier n'a pas été mis sur ces questions n'a pas été en fait mis

25 en œuvre. Le témoin a le choix de répondre par oui ou par non à cette

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1 question.

2 M. Krsnik (interprétation): Je ne m'oppose pas à la question, Monsieur le

3 Président, je n'ai pas d'objection à la question, j'ai des objections à ce

4 que l'accusation fasse des commentaires. Je ne sais pas si vous l'avez

5 dans la transcription, je crois que si, l'accusation a proposé ses

6 commentaires, et ses commentaires, c'étaient "vous êtes venu nous parler

7 des victimes croates". Or ce n'était pas la question et j'ai des

8 objections à ces commentaires qui ne sont pas appropriés. J'ai entendu ces

9 observations de façon tout à fait claire, je n'ai pas élevé d'objection à

10 la question.

11 M. le Président (interprétation): L'accusation a dit qu'il y a beaucoup de

12 sympathie à cet égard, ce n'est pas la question que j'ai posée, a-t-il

13 dit, je crois que ce n'est pas déplacé à cet égard.

14 Monsieur le Témoin, pouvez-vous répondre à la question de l'accusation?

15 M. Bagaric (interprétation): Je vais essayer Monsieur le Président. Cet

16 ordre qui a été donné concerne les unités du Conseil de défense croate à

17 propos de leur domaine de responsabilité. Ce que voulait dire cet ordre

18 c'est que si on trouvait un corps et si l'on soupçonnait qu'un crime avait

19 été commis, qu'ils s'agisse de civils ou de soldats, on devrait faire un

20 examen post mortem.

21 Je le répète, cela ne le dit pas ici, mais je le sais, cet ordre a été

22 donné pour aider la personne en question à recueillir un certain nombre de

23 données. Je crois qu'elle est membre d'une association de victimes ou de

24 centres de protection des Droits de l'homme, et elle devait écrire un

25 livre. Ce que j'ai dit, c'est qu'elle n'a jamais publié ce livre. La

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1 dernière fois, j'ai dit que rien n'avait été fait; je ne vous ai pas dit

2 qu'on n'avait pas fait d'examen post mortem.

3 Si vous me demandez si ces examens ont été faits, je peux répondre, mais

4 la façon dont la question m'a été posée par l'accusation, je ne peux pas

5 répondre simplement par oui ou par non, parce que ma réponse ne serait pas

6 exacte, on ne peut pas répondre par oui ou non.

7 M. Scott (interprétation): Est-ce que pour autant que vous sachiez puisque

8 vous étiez directeur du secteur de la santé et du HVO, est-ce que c'était

9 simplement pour recueillir des informations de crime de guerre pour des

10 victimes croates, ou bien est-ce qu'il fallait aussi des informations sur

11 des civils musulmans?

12 M. Bagaric (interprétation): J'ai déjà dit que cet ordre a été donné après

13 un événement qui avait eu lieu dans le village de Doljani, et il est

14 apparu nécessaire de donner cet ordre. Je sais que cette dame médecin

15 voulait écrire un livre sur les victimes civiles croates, les victimes de

16 ces crimes.

17 Question: Non, je ne veux pas parler de ce livre -c'est la quatrième

18 réponse que nous avons au sujet de ce livre-, je repose la question

19 Monsieur: est-ce que le HVO a recueilli des informations de manière

20 systématique sur le massacre de civils musulmans? Est-ce que ces

21 informations ont été recueillies?

22 Réponse: Je ne sais pas, ce n'est pas de mon domaine de compétence et je

23 n'ai pas participé personnellement à cela. Je ne sais donc pas, je n'ai

24 pas d'information.

25 Question: Ce que vous dites au Tribunal, Monsieur, c'est qu'en tant que

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1 responsable médical le plus élevé du HVO, vous n'avez pas de connaissance

2 d'un effort systématique du HVO pour recueillir des informations sur les

3 victimes de crime de guerre musulmanes?

4 Réponse: En fait, quelquefois je me demande ce que vous dites! Vous parlez

5 à quelqu'un qui était responsable des soins de santé, dont le travail

6 était d'organiser ces soins de santé. Pour qui? Pour tout le monde et

7 partout. C'est de cela dont nous pouvons parler. Et moi je peux vous

8 donner des informations, et cela je peux le faire parce que je connais les

9 réponses. Maintenant, vous me posez des questions qui n'ont rien à voir

10 avec moi et vous me demandez de répondre par oui ou par non. Mais cela ne

11 relevait pas de mon autorité, je n'ai pas du tout eu affaire à cela.

12 Au siège des services médicaux, il y avait un service qui était

13 responsable des membres du HVO qui étaient tombés. Bien entendu, on ne

14 pouvait pas s'occuper de l'armée de Bosnie-Herzégovine parce que

15 l'opposition ne nous a pas envoyé d'informations sur leurs soldats qui

16 étaient tombés. A l'époque, nous recueillions donc ces données parce que

17 personne ne le faisait auparavant, avant nous, et nous voulions le faire

18 pour pouvoir suivre les choses, pour pouvoir donner les données, pour

19 pouvoir savoir qui était blessé et où ils étaient traités.

20 Pour répondre donc à votre question "est-ce que quelqu'un systématiquement

21 recueillait des informations ou des donnés sur les victimes croates en

22 dehors de nous?", vraiment, je ne sais pas. Et en particulier je ne sais

23 pas si quelqu'un était responsable de la collecte des données sur les

24 victimes musulmanes et les soldats ou les civils. Je ne sais pas, ce

25 n'était pas mon travail, ce n'était pas ce que j'étais autorisé à faire.

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1 M. Scott (interprétation): Est-ce que l'on pourrait montrer le document

2 P601.2?

3 (Intervention de l'huissier.)

4 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que je peux

5 revenir à la question précédente? Parce que quelque chose vient de me

6 venir à l'esprit à propos de ce que je viens de dire tout à l'heure.

7 M. le Président (interprétation): Vous avez répondu à la question, mais si

8 vous avez quelque chose à ajouter, je vous en prie.

9 M. Bagaric (interprétation): Dans cet ordre que je viens de voir et que je

10 n'avais jamais vu auparavant, je sais d'où vient cet ordre, et comme

11 j'étais le supérieur du Dr Brncic, j'ai demandé au ministre d'envoyer cet

12 ordre sur le terrain. Je vois ce que l'on dit ici: "Au cas où un crime a

13 été commis intéressant des civils, on devrait les envoyer à notre service

14 de pathologie.".

15 Tout ce que je voudrais dire c'est que nous n'avions pas de service de

16 pathologie; tout au long de la guerre nous n'avons pas eu un seul

17 pathologiste à Mostar. Malheureusement, l'hôpital de Mostar, à ce jour

18 encore, n'a toujours pas de pathologiste. Ces cas individuels, lorsqu'on

19 les a vus, je sais qu'on les a envoyés au service de pathologie de

20 l'hôpital de Split. Cela, je peux le dire de manière certaine. C'est la

21 fin de ma réponse à cette question.

22 M. Scott (interprétation): Alors, pour revenir sur ce point, c'est Split

23 dans la République de Croatie, n'est-ce pas?

24 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, je parle de la ville

25 que j'ai déjà mentionnée le premier jour, lorsque j'ai commencé à

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1 témoigner. Split était une institution qui s'occupait de tous les

2 Musulmans, Croates et Serbes que nous ne pouvions pas traiter. Elle a reçu

3 des milliers de gens de Bosnie-Herzégovine, et leurs services de

4 pathologie ont assuré les services que l'on pouvait assurer lorsque cela

5 était nécessaire, lorsqu'on leur envoyait des corps.

6 M. Scott (interprétation): Pour revenir à 601.2, pouvez-vous nous dire…

7 Vous connaissez ce type de rapport, non seulement ce type de rapport

8 indiquant les soldats blessés et morts?

9 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, si vous me permettez

10 de jeter un coup d'œil à ce document. Il y a plusieurs pages.

11 (Le témoin parcourt le document.)

12 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, avant je demande de

13 nous donner une indication. Les rapports… c'est daté du 16 septembre. Les

14 comptes rendus ont été envoyés le 20 septembre et le document a été publié

15 le 16 septembre. Comment cela est-il possible? Le rapport a été publié le

16 16 septembre et les données dont il s'agit portent sur le 17 et le 20

17 septembre. Il y a peut-être de la magie à cela, peut-être que quelqu'un

18 sait d'avance qui va être tué et où?

19 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott.

20 M. Scott (interprétation): Eh bien, tout d'abord la source du document est

21 indiquée sur l'original en BCS, et ce sont les archives de Zagreb. On voit

22 très clairement en haut à droite le tampon. Pour ce qui est de la date,

23 Monsieur le Président, je ne peux pas répondre. Ce document est censé

24 avoir été établi par le témoin; il est signé par lui avec le tampon. Peut-

25 être qu'il y a une erreur, ce peut être toute sorte de chose; ce n'est pas

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1 à moi de le dire. Je regrette que la défense intervienne avant que le

2 témoin n'ait eu à possibilité de répondre, et cela se passe semaine après

3 semaine. Nous nous opposons à cette procédure et nous continuerons à nous

4 opposer.

5 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, si vous avez des

6 objections à formuler, vous pouvez peut-être attendre que le témoin ait

7 répondu à la question. Je crois que ce document a été signé par le témoin.

8 Peut-être que lui pourrait éclairer ce point précis ou pas, mais vous

9 n'avez pas à lui donner des indications sur la façon dont il doit répondre

10 avant qu'il réponde à la question.

11 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je ne donne pas

12 d'instructions. Ce que je demande au tribunal c'est de ne pas accepter les

13 abus du contre-interrogatoire. Le témoin doit être informé des données du

14 document de façon approprié, le témoin ne doit pas être… il ne faut pas

15 tricher avec le témoin. Le témoin n'a pas signé.

16 Pourquoi créons-nous toujours la confusion? Ce document n'a pas été signé

17 par le témoin. Nous ne savons que trop bien ce qu'est la signature de

18 quelqu'un et ce qu'est son nom simplement dactylographié. Je veux

19 simplement m'opposer à cet abus du contre-interrogatoire.

20 (Les Juges se concertent sur le siège.)

21 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, j'estime que ce n'est pas

22 la manière appropriée pour exprimer vos objections. Je crois qu'il y a

23 d'ailleurs des règles qui permettent de savoir comment gérer ce genre de

24 situation. Si le témoin estime qu'il n'a pas signé ce document, il a le

25 droit tout à fait de le dire devant le Tribunal. Il n'est pas utile que

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1 vous disiez au témoin devant nous que le témoin n'a pas signé le document.

2 En effet, il y a des dates, il y a un petit peu de confusion dans les

3 dates de ce document. C'est au témoin de nous le dire. Vous pouvez

4 exprimer vos objections une fois que le témoin a répondu. Ne le faites pas

5 auparavant, s'il vous plaît.

6 Monsieur le Témoin, pouvez-vous maintenant répondre à la question si vous

7 avez eu assez de temps pour lire le document?

8 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, il est très difficile

9 de lire si rapidement un document aussi long, mais en effet je me suis

10 familiarisé avec son contenu; cela suffit. Je voudrais demander au

11 Tribunal, avec le plus grand respect, que ni l'accusation ni le conseil de

12 la défense ne me défende, je n'en ai point besoin! J'ai simplement besoin

13 de votre protection, à savoir que vous me permettiez de m'exprimer. Il n'y

14 a aucune question à laquelle je ne puisse répondre ici. Je ne veux

15 absolument pas refuser de répondre aux questions, au contraire, j'y

16 répondrai.

17 En effet, le document que j'ai sous les yeux, j'avoue, je ne me souviens

18 pas de ce document, car nous avions une centaine de documents chaque jour

19 que l'on voyait. Il se pourrait que celui-ci soit l'un de ces documents,

20 mais il est fort probable que ce document provienne du département de la

21 défense, puisqu'il porte mon nom, sinon ma signature. Je ne sais pas, je

22 ne saurais vous dire s'il s'agit d'un document véridique ou pas, sinon il

23 doit provenir de l'institut où j'ai travaillé.

24 En effet, c'est la confirmation de ce que je disais tout à l'heure, à

25 savoir, confirme en effet l'existence du département qui s'occupait des

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1 blessés et des décès. Il y avait un certain nombre de femmes qui

2 travaillaient à la saisie devant des ordinateurs et qui s'occupaient de

3 saisir ces informations, donc je n'étais pas assis à côté d'elles. Ces

4 femmes recevaient des informations directement du champ de bataille, des

5 lieux, des événements et elles ont saisi ces informations.

6 Mais ce qui me paraît bizarre ici: j'avoue que je ne sais pas quel était

7 le but de ce document, à quoi il était utilisé. Nous n'avons jamais, à ma

8 connaissance, imprimé des documents de ce type. Lorsque nous devions

9 imprimer ces informations, c'était pour les envoyer à quelqu'un, alors

10 qu'ici il n'y a pas de destinataire. Si j'avais eu à envoyer ces

11 informations à quelqu'un, je l'aurais signé. Comme ce document ne porte

12 pas ma signature… En effet le document porte mon nom puisque mon nom était

13 dans le programme informatique, donc en effet tout ce qui était imprimé de

14 l'ordinateur porterait mon nom, ça je ne peux pas le nier.

15 Mais ce qui est plutôt bizarre, c'est que le document ne porte pas de

16 destinataire, je reconnais certains lieux, certaines unités qui sont

17 mentionnés, en effet ce document porte sur les décès et les blessés du

18 Conseil de la défense croate, mais à la fin du document, à la dernière

19 page, on mentionne des civils blessés ou tués. Je ne les connais pas, je

20 ne sais pas s'il s'agit d'événements qui auraient eu lieu à Mostar ou

21 ailleurs, et puis amenés à l'hôpital chez nous, je ne sais pas. Il n'y a

22 pas d'indications détaillées, on ne sait pas à qui appartiennent ces

23 victimes.

24 Un instant, s'il vous plaît, à la page 5 du document, le document porte

25 "soldats tués le 16 septembre 1993, 3e Brigade". Donc sans doute que le

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1 rapport porte là-dessus, mais j'avoue que je ne sais pas à quelle question

2 répond ce document. Nous avions une base de données qui comportait des

3 informations sur les morts et les blessés, et je ne sais pas si on a pu

4 saisir davantage de noms sur cette base de données. Je ne le sais pas, ce

5 n'était pas mon rôle de contrôler la base de données. Nous avions des

6 femmes chargées de cette saisie informatique qui étaient expertes en la

7 matière, qui travaillaient devant l'écran.

8 Et je pense que ce document provient du ministère de la Santé, mais je

9 répète, il ne porte aucun nom de destinataire, et j'avoue que je ne sais

10 pas pourquoi il aurait été imprimé si ce n'était pour l'envoyer à

11 quelqu'un, or il ne porte pas de destinataire.

12 M. Scott (interprétation): Savez-vous Monsieur le Témoin, comment ces

13 informations ont été collectées, c'est-à-dire les soldats tués et morts

14 dans ce document 601.2? D'abord à la date du 16 septembre 1993, on y

15 trouve 10 noms. D'abord Slaven Martinovic, je prends ce document à titre

16 d'exemple, et je vous demande si vous pouvez nous dire peut-être que c'est

17 simplement un rapport parmi d'autres, pouvez-vous nous dire comment on a

18 pu collecter les informations qui figurent sur ce texte?

19 M. Bagaric (interprétation): Merci, merci d'avoir posé une question claire

20 et juste. Je vois en effet… C'est la première question que vous me posez

21 qui ne cherche à me faire dire quelque chose qui n'est pas correcte, et

22 donc tout mes félicitations car cela ne serait pas possible, en effet.

23 Alors toutes les informations provenaient du lieu des événements,

24 provenaient des médecins sur ce lieu. Et je voudrais essayer, si vous

25 permettez, que je puisse vous expliquer une chose afin d'éviter que l'on

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1 répète de me poser cette question concernant la fréquence des rapports et

2 la provenance des informations qui viennent de l'accusation. Je vais

3 essayer de clarifier la situation. Il y avait des médecins en Bosnie, à

4 Posavina, avec lesquels nous n'avions aucune communication, à Zepce

5 également, pas de communication et je ne vais pas répéter. Il y avait

6 d'autres lieux également.

7 Et parfois les liens de communication fonctionnaient, parfois ils ne

8 fonctionnaient pas. Et dans le domaine de la santé, parfois nous avions

9 une meilleure communication que dans d'autres domaines. En effet, à chaque

10 fois que nous avions des informations, elles étaient saisies dans la base

11 de données quelle que soit l'heure d'arrivée et sans pour autant vérifier

12 chaque individu.

13 Je n'étais pas moi-même chargé de la saisie, d'autres personnes le

14 faisaient. On gardait donc cette base de données afin de l'utiliser si

15 quelqu'un venait nous voir pour retrouver un membre de sa famille qui

16 aurait pu être blessé ou tué. Les gens se présentaient et donnaient le nom

17 et on pouvait faire une recherche dans l'ordinateur, la base de données

18 pour voir s'il y avait des informations sur cette personne. Voilà quel

19 était le but de cette base de données.

20 Question: En ce qui concerne donc le début du document, à la première

21 page, les noms mentionnés au 16 septembre, le n°6 par exemple, on peut

22 conclure que ce soldat était un membre du Bataillon des condamnés et qu'il

23 a été tué le 16 septembre 1993. C'est bien cela?

24 M. Bagaric (interprétation): Je ne sais pas si cela est juste ou pas,

25 Monsieur le Procureur, car personne ne vérifiait les informations, je l'ai

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1 déjà dit. Lorsqu'on recevait donc des informations du lieu des combats,

2 ces informations étaient saisies, mais on ne pouvait vérifier si elles

3 étaient correctes ou pas. Personne ne saurait vous le dire.

4 Je pourrai répéter que je ne comprends pas le but de ce document: à qui

5 était-il destiné? Me Krsnik a raison en disant que je ne comprends pas

6 comment le document porte la date du 16, et puis il relate les événements

7 qui auraient eu lieu le 16, le 17, etc. Je ne sais pas très bien pourquoi.

8 Et j'avoue que je ne sais pas non plus si les informations sont justes, si

9 les chiffres sont justes ou ces personnes étaient membres de tel ou tel

10 bataillon. Je ne peux le dire car ces informations n'étaient pas

11 vérifiées.

12 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous répondre de manière plus

13 concise, s'il vous plaît? Si l'accusation souhaite avoir davantage

14 d'informations, il vous posera une question supplémentaire. Je pense que

15 la réponse à la question qui vient de vous être posée aurait pu être "je

16 ne sais pas"; cela suffit.

17 M. Scott (interprétation): Monsieur le Témoin, est-il vrai que le HVO

18 ainsi que d'autres organisations militaires souhaitaient connaître des

19 informations sur les blessés, etc.? Ce sont des informations qui

20 intéressent l'armée, n'est-ce pas?

21 M. Bagaric (interprétation): Le HVO n'est pas une structure militaire,

22 c'était militaire et civil. Premier point.

23 Deuxième point. Ces informations que l'on collectait dans la base de

24 données étaient destinées uniquement à suivre le destin des blessés. Il ne

25 s'agissait pas de l'utiliser pour faire des évaluations en matière de

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1 préparation, à l'état de préparation de l'armée ou autre chose.

2 Question: Pouvez-vous répondre oui ou non? Est-ce que la branche militaire

3 du HVO -vous savez très bien de quoi il s'agit-, est-ce que cette

4 organisation souhaitait connaître des informations concernant les blessés

5 et les morts? Oui ou non?

6 Réponse: Oui. Moi, je voulais le savoir. Je ne peux pas répondre au nom du

7 HVO.

8 M. Scott (interprétation): Vous étiez le responsable médical du HVO et à

9 ce titre votre section, votre département que vous dirigiez avait la

10 responsabilité de la collecte de ces informations. Est-ce bien cela?

11 M. Bagaric (interprétation): Eh bien, franchement la saisie et la collecte

12 des données étaient ma dernière priorité. Ma première priorité était de

13 soigner les gens. Je vous demande de bien vouloir m'écouter. Je le répète,

14 je demande la protection du Tribunal. Mon premier souci était de soigner.

15 Bien sûr j'étais aussi obligé de collecter des informations, mais ce

16 n'était pas ma première priorité.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, je vous demanderai

18 de vous calmer. Il s'agit du contre-interrogatoire et les deux parties ont

19 exprimé une certaine hostilité. La Chambre des Juges va décider. Nous vous

20 demandons de répondre aux questions sans vous énerver.

21 Monsieur Scott?

22 M. Scott (interprétation): Au cours de la collecte d'informations, ce type

23 de document comme le P601.2 ne devait pas forcément être envoyé à

24 quelqu'un. Ce document pouvait être simplement la transcription des

25 informations que vous aviez?

Page 12479

1 M. Bagaric (interprétation): C'est presque juste de dire cela. Les

2 informations étaient collectées afin de faire le point si un médecin

3 venait poser des questions ou autre.

4 M. Scott (interprétation): Je comprends bien que vous ne vous occupiez pas

5 personnellement de ces documents, mais votre département souhaitait

6 recueillir ces informations, n'est-ce pas, et vous-même également?

7 M. Bagaric (interprétation): Dieu lui-même ne saurait répondre à une telle

8 question! Les commandants des différentes unités savaient bien sûr qui

9 étaient morts dans leur unité. Je n'avais donc pas besoin de leur dire.

10 Ces informations étaient conservées afin d'en avoir une base de données.

11 Je ne comprends donc pas quelle est votre question.

12 Mme Clark (interprétation): Docteur Bagaric, Monsieur Scott, j'aimerais

13 essayer de remettre les choses sur les rails. Pourriez-vous, Docteur

14 Bagaric, nous décrire quel est le protocole utilisé dans votre hôpital

15 afin de collecter les données sur les victimes de guerre? Pouvez-vous nous

16 dire quelle était l'organisation de votre personnel afin de collecter ces

17 informations?

18 M. Bagaric (interprétation): Merci Madame la Juge, voilà une bonne

19 question, et je crois qu'enfin je vois une porte de sortie, mais je

20 voudrais en effet clarifier la situation. Je vous prie de m'excuser, mais

21 il n'y a pas d'autres moyens.

22 Les informations contenues dans ce texte ne sont pas un document de

23 l'hôpital en tant que tel, ce sont des informations qui relèvent d'une

24 unité, de l'état-major. Il s'agit d'informations collectées par le

25 personnel de notre hôpital auprès de notre hôpital, et ensuite on

Page 12480

1 saisissait les informations sur la base des rapports qui venaient du champ

2 de bataille, qui venaient des autres hôpitaux et des brigades.

3 Sans doute que chaque unité avait aussi ses documents, mais je ne les

4 connais pas. Je n'étais pas le directeur de l'hôpital d'ailleurs. Je ne

5 sais donc pas quelles informations étaient gardées dans les différents

6 hôpitaux. Mais je pense, en effet, qu'il y avait un institut qui était

7 chargé de ce faire, et je pense qu'ils avaient un certain protocole pour

8 le faire, pour avoir des informations sur les blessés.

9 Mme Clark (interprétation): Pourriez-vous peut-être clarifier la chose

10 suivante? Je croyais que vous étiez vous-même directeur de l'hôpital. Vous

11 étiez directeur d'un département. D'accord. Alors les informations que

12 vous saisissiez provenant de plusieurs hôpitaux, c'est cela? Les

13 informations ne venaient pas toutes de chez vous?

14 M. le Président (interprétation): Souhaitiez-vous que les informations

15 soient aussi précises que possible?

16 M. Bagaric (interprétation): En effet, justement, j'ai été responsable de

17 l'ensemble du système de santé du Conseil de défense croate, j'ai été donc

18 au-dessus de l'hôpital si vous voulez. A un moment donné, j'étais proche

19 de l'hôpital de Mostar, et en fait, ce dont nous parlons ici ce sont les

20 informations qui proviennent du lieu des batailles. Je ne peux pas vous

21 dire si les informations sont complètes ou pas, mais je pense en effet que

22 les informations sont sans doute incomplètes, car je pense qu'on n'aurait

23 sans doute pas eu toutes les informations possibles. Mais tout ce que nous

24 recevions, nous le saisissions dans l'ordinateur.

25 M. Scott (interprétation): J'aimerais maintenant me référer au document de

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1 la défense, les pièces D1/381, 371 et 379. On va les prendre dans l'ordre

2 numérique: 371, 379 et 381.

3 (Intervention de l'huissier.)

4 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Juge, je vous prie de m'excuser

5 pour ma réaction tout à l'heure.

6 M. Scott (interprétation): Je vous demande de bien vouloir regarder le

7 document D1/371, notamment la dernière page qui est en langue croate.

8 M. Krsnik (interprétation): Mesdames et Monsieur les Juges, je peux en

9 effet lire et la version anglaise et la version croate. Je sais que 30% de

10 ce que dit le témoin n'a pas été traduit. Je sais que le témoin parle très

11 vite, et il est difficile pour les interprètes de suivre. Je vous demande

12 donc Monsieur le Juge de bien vouloir demander au témoin de parler un peu

13 plus lentement, ce qui peut peut-être prêter à confusion, car…

14 M. le Président (interprétation): C'est très grave ce que vous dites. Vous

15 dites que 30% de ce que dit le témoin n'est pas correctement traduit?

16 M. Krsnik (interprétation): Non, je disais que le sens n'est pas tout à

17 fait juste. J'entends ce qu'il dit, je comprends le croate, et je pense

18 que l'interprétation peut expliquer en partie votre réaction à ce qu'il a

19 dit. Je ne voulais pas dire pour autant qu'il n'avait pas compris ce qui

20 avait été dit.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, vous voyez comme

22 c'est difficile au sein de ce Tribunal. Chaque mot que vous prononcez doit

23 être traduit dans deux autres langues. Lorsque vous répondez, ayez la

24 gentillesse de faire des pauses et de ne pas parler trop rapidement, de

25 manière à ce que tous puissent vous suivre.

Page 12482

1 Monsieur Scott?

2 M. Scott (interprétation): La pièce D1/371 à la fin, je ne vois ni tampon

3 ni signature sur ce document. Est-ce bien le cas Monsieur le Témoin?

4 M. Bagaric (interprétation): C'est vrai qu'il n'y a ni tampon ni

5 signature, c'est néanmoins vrai que j'ai lu le document et je l'ai signé

6 ici, il s'agit d'une copie. Tout à l'heure, le document ne portait pas ma

7 signature et donc il est vraisemblable que nous ne l'ayons pas imprimé

8 nous-mêmes, mais celui je l'ai lu mot à mot, phrase par phrase, et je sais

9 en effet que c'est un document qui a été envoyé aux organisations

10 internationales qui sont indiquées ici.

11 Question: Oui, mais pourquoi il n'y a ni votre signature ni tampon?

12 Réponse: Il n'est pas nécessaire d'avoir ma signature et le tampon puisque

13 je l'ai laissé au bureau, je pourrais peut-être trouver un exemplaire qui

14 porte ma signature. Je crois que ce sont les faits qui étaient importants

15 ici et non pas la signature ou le tampon. Si vous allez remettre en cause

16 la véracité de ce document, je ferai tout mon possible de retrouver la

17 version d'origine qui porte ma signature, vous trouverez ce document

18 auprès de l'ONU, de l'UNHCR, et du CIRC. Je ne vais pas vous dire ici des

19 mensonges.

20 Question: Mais le document d'origine, disiez-vous, devait être signé et

21 porter un tampon, mais une copie imprimée de l'ordinateur pourrait ne pas

22 être signée avec un tampon, c'est bien cela?

23 Réponse: C'est cela. Le document que j'ai envoyé a été signé et portait le

24 tampon. Celui-ci… Non, je ne comprends pas très bien quelle est cette

25 technologie, je ne peux pas signer le document dans l'ordinateur, n'est-ce

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1 pas, il faut d'abord imprimer le texte, et ensuite je signe le texte.

2 Question: Cela aurait donc pu être le cas pour d'autres documents: il y a

3 des copies, des copies électroniques qui peuvent être justes sans pour

4 autant porter votre signature?

5 Réponse: Mesdames et Monsieur les Juges, il s'agit du document que j'ai

6 envoyé aux organisations internationales et que j'ai signé. Cela ne

7 signifie en rien que cet exemplaire n'est pas signé, vous trouverez le

8 même document dans les organisations internationales que j'ai mentionné.

9 Question: Alors passons au D1/379 si vous le voulez bien. Je ne vais pas

10 vous poser de question sur le contenu, simplement regardez la dernière

11 page si vous le voulez bien qui était élaborée par quelqu'un qui s'appelle

12 Brncic, si je ne me trompe. Vous êtes bien d'accord avec moi que ce

13 document ne porte ni signature, ni tampon. C'est bien cela?

14 M. Bagaric (interprétation): La même explication que j'ai donnée tout à

15 l'heure peut s'appliquer à celui-ci.

16 M. Scott (interprétation): Vous êtes bien d'accord avec moi qu'il ne porte

17 ni signature, ni tampon, c'est bien cela?

18 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik?

19 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je me souviens de vos

20 avertissements lorsque j'ai moi-même mené des contre-interrogatoires, et

21 vous m'aviez toujours dit que s'il y avait un conflit quelconque ou si

22 l'on se trouvait dans une situation mal aisée entre le conseil et le

23 témoin, vous disiez que c'est toujours le conseil qui a tort.

24 Ici, le témoin est quelqu'un de très énergique, vous vous souvenez que

25 j'ai eu moi-même quelques difficultés à mener l'interrogatoire. En effet

Page 12484

1 le témoin a répondu parfois à côté de la question sans pour autant

2 toujours respecter les règles. En effet, le Tribunal a pu lui permettre

3 cela, mais je vous demande de bien vouloir avertir l'accusation. Vous

4 m'avez averti, car vous connaissez mon tempérament et j'ai toujours

5 respecté vos avertissements, mais cela devrait être l'accusation qui est

6 responsable s'il y a un conflit et non pas le témoin.

7 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, dans ce cas, l'accusation

8 a posé une question très simple. Tout un chacun peut constater en

9 regardant le document qu'il n'y a ni signature ni tampon, n'est-ce pas? Il

10 suffit donc que le témoin réponde oui ou non.

11 Si nous avons besoin d'explication supplémentaire, si cela nous intéresse,

12 nous pouvons en effet permettre au témoin de donner davantage

13 d'explications. Mais ici, tout ce qui nous intéresse, c'est de savoir si

14 oui ou non le document porte une signature ou un tampon. La question est

15 simple.

16 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, vous avez tout à fait

17 raison, mais là n'est pas le problème. Le problème c'est que le témoin

18 voudrait expliquer le fait que le Procureur ne lui permette pas de

19 répondre de façon incorrecte, qui se trouve être offensante pour lui, et

20 ce sont les modalités de la conduite du contre-interrogatoire qui font

21 l'objet de cette objection.

22 Ce que je voulais dire c'est permettre au témoin de répondre et de ne pas

23 l'amener dans une situation de répondre comme il l'avait fait tout à

24 l'heure. C'est là la question. Ce n'est donc pas une objection qui porte

25 sur la façon dont sont posées les questions. Et si le témoin a une

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1 explication à apporter, on lui dit de façon brutale "non, répondez-moi à

2 ceci" ou de la façon dont on lui demande de le faire! C'est tout ce que je

3 voulais dire Monsieur le Président parce qu'il n'est point contestable

4 qu'il n'y ait pas de signature et de tampon sur ce document.

5 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, est-ce que vous voulez

6 bien que je réponde comme me le demande M. le Procureur et comme vous

7 venez de le faire vous-même? Et je pense que je puis le faire, mais ce ne

8 serait pas tout à fait consciencieux ni équitable de ma part.

9 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, écoutez, Monsieur le

10 Témoin, si le Procureur vous pose une question tout d'abord vous êtes tenu

11 de répondre à celle-ci, et deuxièmement si besoin est de fournir des

12 explications, vous serez en mesure de nous l'apporter.

13 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, toute personne dans ce

14 prétoire et partout au monde pourrait voir que ce document ne porte ni

15 signature ni cachet, donc je ne le vois pas non plus. Suis-je alors

16 autorisé à fournir une explication et dire pourquoi cela n'y figure pas?

17 M. le Président (interprétation): Oui, mais essayez d'être concis, je vous

18 en prie.

19 M. Bagaric (interprétation): Oui, ma femme me fait objection souvent me

20 disant que je suis trop ample dans mes explications, et je m'en excuse. Le

21 document en question, ce n'est donc pas un document que j'ai montré pour

22 démontrer l'absence ou la présence d'une signature. Toute personne est

23 capable de voir qu'il n'y a pas de signature ici.

24 Cependant, ce que je voudrais dire à la Chambre, c'est que ce document est

25 un document véridique, il existe en version signée, et je sais de quoi il

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1 s'agit. Ceci est une réplique, à savoir une copie sortie d'ordinateur. Et

2 si vous en faites 5: il y en a une qui est signée -celle qui est envoyée à

3 la personne, au destinataire, et les autres, vous ne les signez pas. Dans

4 ce cas-ci, c'est donc un exemplaire qui a été envoyé au bureau de la

5 presse étrangère; je ne sais pas pour quelle raison d'ailleurs.

6 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott.

7 M. Scott (interprétation): (Hors micro.)

8 M. le Président (interprétation): Micro?

9 M. Scott (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

10 Monsieur serait-il exact de dire que la partie musulmane, à savoir l'armée

11 de Bosnie-Herzégovine, à plusieurs reprises, avait fourni une assistance

12 médicale à l'attention des Croates de Bosnie tant soldats que civils,

13 n'est-ce pas vrai?

14 M. Bagaric (interprétation): Je suppose que oui, je crois même que oui.

15 Cependant je ne dispose pas d'informations concrètes provenant des

16 médecins de l'armée de Bosnie-Herzégovine, et notamment pas de proposition

17 en ce sens datant de la période de conflit, pour ce qui est de

18 l'établissement d'une coopération -il n'y en a pas eu-, mais je veux bien

19 croire qu'ils avaient effectivement soigné des Croates, et je dois même

20 dire, pour dire vrai, que je sais que cela avait été le cas dans certaines

21 régions.

22 Question: Donc, Monsieur, non seulement vous supposez la chose mais vous

23 êtes au courant de certains cas concrets?

24 Réponse: C'est exact.

25 Question: Monsieur, je pense donc que nous pourrions être d'accord pour

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1 dire que les deux parties au conflit, Croates et Musulmans, ont de temps à

2 autre fait preuve de bonne volonté à l'égard des victimes de l'autre

3 partie. Est-ce que c'est vrai?

4 Réponse: Oui, c'est vrai, Monsieur le Président, Mesdames les Juges. Et si

5 vous me permettez, je pourrai même vous l'expliquer cela.

6 M. le Président (interprétation): Croyez-vous qu'on devrait expliquer! Je

7 ne pense pas.

8 M. Bagaric (interprétation): Si vous ne pensez pas cela nécessaire, je ne

9 le ferai pas.

10 M. le Président (interprétation): Allez-y Monsieur Scott.

11 M. Scott (interprétation): Je demanderai maintenant à M. l'huissier de

12 vous montrer la pièce à conviction P171.1.

13 (Intervention de l'huissier.)

14 Je m'excuse. Je crois, Monsieur le Président, qu'ici il n'y a pas de

15 traduction jointe parce que nous avons reçu la traduction en retard, mais

16 nous allons procéder à la distribuer de celle-ci immédiatement.

17 (Intervention de l'huissier.)

18 Monsieur le Témoin, ma question concernant ce document serait la suivante:

19 étant donné que vous vous trouviez à la tête de ces services médicaux du

20 HVO à l'époque où le ministre de la Défense, à savoir Bruno Stojic, avait

21 donné l'ordre de la mise en place de cette prison, est-ce que vous vous

22 trouviez déjà à la tête des services de santé du HVO?

23 M. Bagaric (interprétation): Je m'excuse, j'ai besoin d'une traduction en

24 BCS. Je demande la version en BCS parce que, là, j'ai une traduction en

25 anglais que je ne voudrais pas commenter.

Page 12488

1 M. Krsnik (interprétation): Je crois que M. l'huissier devrait avoir ses

2 écouteurs sur les oreilles parce qu'il n'entend pas ce qui est dit, plutôt

3 la traduction de ce qui est dit. Et j'ai cru comprendre qu'on lui avait

4 dit que le document se trouvait dans le classeur en version originale.

5 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges,

6 sur le document en question on dit qu'il s'agit de la date du 3 septembre

7 1992, et si la question était de savoir si j'étais chef des services

8 médicaux du HVO à l'époque, je dirais oui. Je l'avais été à cette date du

9 3 septembre 1992, je l'avais été en effet. C'est ce que je puis répondre à

10 cette question.

11 M. Scott (interprétation): Concernant la mise en place d'une unité de

12 détention à l'Héliodrome, en votre qualité d'officier des services

13 médicaux du HVO, aviez-vous des instructions, des ordres concernant la

14 mise en place des services de santé concernant ce centre de détention?

15 Maître Krsnik, est-ce que nous pourrions entendre d'abord la réponse du

16 témoin, je vous prie, ou est-ce que vous êtes en train de soulever une

17 question procédure?

18 M. Krsnik (interprétation): Il s'agit d'un problème de procédure, Monsieur

19 le Président, parce que je pense que nous pourrions peut-être faire comme

20 dans le droit continental, c'est-à-dire rédiger toutes mes objections et

21 attendre la fin pour en donner lecture, mais je ne pense pas que dans le

22 droit anglo-saxon cela soit une coutume.

23 Je crois devoir faire objection à l'avance, si j'estime qu'il y a une

24 erreur de procédure. Je me dois de le faire d'avance parce que si je le

25 fais après, nous perdons la signification des objections, parce que si

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1 nous passons au droit continental, nous allons passer au procès-verbal et

2 faire procéder à une dictée des objections de par le passé.

3 Je tiens à dire que M. le Procureur parle d'unité de détention. Je tenais

4 à préciser que, dans le document, il est question d'une prison militaire

5 centrale. Je voudrais que la question soit formulée conformément à la

6 terminologie utilisée dans le document et non pas conformément à une

7 terminologie qui conviendrait à M. le Procureur. Il y a une différence

8 substantielle –du moins pour ce qui est de la langue croate- entre le fait

9 de dire "prison militaire centrale" et le fait de dire "unité de

10 détention".

11 Mme Clark (interprétation): Maître Krsnik, je crois que vous devriez avoir

12 davantage de confiance s'agissant des Juges pour ce qui est de traiter de

13 la procédure. Nous remarquons les choses, nous ne les perdons pas de vue.

14 Votre témoin, le Dr Bagaric, est une personne très intelligente; ce serait

15 la première des personnes à remarquer s'il y a eu déformation dans la

16 terminologie utilisée dans la formulation de la question.

17 Procédons donc à ces questions et réponses dans l'ordre pour que ce pauvre

18 témoin puisse finalement rentrer chez lui. Je crois qu'il n'a pas besoin

19 de votre aide.

20 M. Krsnik (interprétation): Merci Madame la Juge, vous avez absolument

21 raison. Peut-être ai-je moi-même perdu la confiance que j'avais placée

22 dans mon confrère.

23 M. Bagaric (interprétation): Je vous remercie, je vous remercie de cette

24 remarque concernant mon intelligence et je vous remercie davantage encore

25 pour ce qui est de la bonne volonté que vous avez de me voir partir chez

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1 moi enfin.

2 Monsieur le Procureur, excusez-moi, quelle avait été votre question?

3 M. Scott (interprétation): Il n'y avait pas de question en suspens,

4 c'était une question que je vous avais déjà posée, à savoir celle de

5 savoir si vous étiez à cette position à l'époque. Et Me Krsnik a fait

6 objection et j'avais moi commencé à vous poser une question tout à fait

7 autre.

8 Je voulais savoir, en effet, si concernant cette prison militaire

9 centrale, vous aviez des fonctions à assumer et mon intention n'avait

10 nullement été de conduire qui que ce soit dans ce prétoire sur un mauvais

11 chemin ou une impasse. Je voulais donc savoir si vous aviez pour tâche

12 d'organiser un système médical de fonctionnement de cette prison?

13 Bagaric (interprétation): Monsieur et Mesdames les Juges, la date qui

14 figure ici, c'est la date du 3 septembre 1992. Je ne sais rien du tout et

15 je ne pense que j'ai été concerné. Je vous ai dit que dès que cela avait

16 été possible, je suis allé à cette prison, lorsque je l'avais appris, et

17 cela avait eu lieu avant cette date-ci.

18 J'avais mis en place dans cette prison une unité médicale et nous avions

19 procédé à des services de santé, mais je n'avais pas reçu d'instruction ou

20 d'ordre dans ce sens-là. Personne n'avait d'ailleurs osé le faire, à

21 partir du moment où j'avais été en mesure de pouvoir le faire, à savoir à

22 partir du moment où mes collègues étaient en mesure de le faire, nous

23 l'avons fait, c'est ce que j'ai déjà dit auparavant, et tout cela s'est

24 fait avant la date qui figure ici.

25 Question: Donc la réponse à ma question en fait est non, parce que lorsque

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1 cette prison a été mise en place, en date du 3 septembre 1992, personne à

2 l'époque n'était venu vous voir et vous demander si vous aviez la

3 possibilité de mettre en place des soins médicaux.

4 Réponse: Excusez-moi. Je me suis trompé d'année Madame la Juge, je vous

5 remercie d'avoir remarqué la chose. Je vois ici 1992 et j'avais en tête

6 l'année 1993. S'agissant donc de cette date de l'année 1992, je ne sais

7 rien vous dire au sujet de ce document, je ne saurais rien vous dire au

8 sujet de son authenticité non plus.

9 M. Scott (interprétation): Mais je ne vous ai pas posé de question

10 concernant le document, Monsieur. Lorsque la prison avait été créée en

11 date du 3 septembre 1992 -et là je vous pose pour la dernière fois la

12 question que j'avais posée-, je veux savoir si quelqu'un dans la

13 hiérarchie du HVO, le ministre de la Défense, M. Bruno Stojic, vous a

14 demandé à vous, en votre qualité de personne qui s'était trouvée à la tête

15 des services de santé au HVO, d'assurer ou de fournir des soins médicaux à

16 toutes personnes qui se trouveraient détenues dans cette prison?

17 M. Bagaric (interprétation): Je ne saurais vous dire ni oui ni non, et

18 permettez-moi maintenant d'expliquer pourquoi.

19 M. le Président (interprétation): Oui, je vous prie de le faire.

20 M. Bagaric (interprétation): Nous sommes en train de parler du 3 septembre

21 1992, c'était l'époque où il ne saurait être question de conflits

22 musulmano-croates, il s'agissait d'une époque où des obus tombaient

23 quotidiennement sur la ville de Mostar qui était, elle, défendue par les

24 Croates et les Musulmans ensemble. Maintenant s'agissant de cette date et

25 s'agissant de la création d'une prison militaire centrale, je ne sais rien

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1 vous dire, je ne sais même pas à quoi cela devait servir. Je ne peux

2 comprendre qu'il arrivait quoi que ce soit ou qu'il y ait eu besoin de

3 l'avoir, je n'avais pas à intervenir alors que rien ne se passait là-bas,

4 et c'est la première fois maintenant que j'entends parler de la chose.

5 Autre question ou plutôt autre volet, il n'est pas indispensable de créer

6 un service médical au niveau d'une prison, cela n'a aucun sens, parce que

7 si les prisonniers avaient besoin d'être soignés, on les emmenait à

8 l'hôpital ou à un centre médical. Et en Bosnie, nous avions créé un centre

9 médical pour cause de circonstances extraordinaires, pour cause d'un grand

10 nombre de prisonniers. Je n'avais donc guère besoin de parler de ceci

11 parce qu'à l'époque ceci était tout à fait inutile, c'est ce que je pense,

12 moi.

13 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, je vois que l'heure est

14 venue de faire une pause et je voudrais juste poser une question avant que

15 de prendre la pause.

16 Monsieur le Témoin, vous avez dit, il y a quelques instants, que vous

17 aviez effectué une visite à l'Héliodrome, et que vous aviez entrepris des

18 mesures à l'époque. Sauriez-vous dire à la Chambre une date approximative,

19 car vous nous aviez dit que cela avait été la seule fois où vous aviez

20 personnellement été à l'Héliodrome? Savez-vous quand est-ce que cela a eu

21 lieu?

22 Réponse: C'est exact. Eh bien, cela a eu lieu à peu près à mon retour du

23 Canada, cela devait se situer vers le mois de juillet, vers la mi-juillet,

24 et c'est ce que je puis vous affirmer en toute certitude.

25 M. Krsnik (interprétation): Peut-être faudrait-il préciser l'année pour

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1 que les choses soient tout à fait claires?

2 M. Bagaric (interprétation): Oui, 1993 en effet, je pense à l'année 1993.

3 M. le Président (interprétation): Merci Monsieur le Témoin.

4 M. Scott (interprétation): Merci Monsieur le Témoin.

5 M. le Président (interprétation): Bien, nous allons faire une pause et

6 nous allons reprendre à 16 heures.

7 (Le témoin, M. Ivan Bagaric, est reconduit hors du prétoire.)

8 (L'audience, suspendue à 15 heures 35, est reprise à 16 heures 02.)

9 (Questions relatives à la procédure.)

10 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik. Vous vouliez dire

11 quelque chose, n'est-ce pas?

12 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je serai très

13 bref. Je me sens très mal à l'aise pour un malentendu dont je suis le

14 fautif et je crois que j'ai été mal compris. Je tiens à m'excuser

15 publiquement à l'attention de Messieurs et Mesdames les interprètes.

16 Lorsque j'ai dit tout à l'heure "30% de perdu", je n'avais pas pensé, je

17 n'avais pas voulu affirmer, je n'avais pas en tête le fait de vouloir dire

18 que les interprètes avaient traduit quoi que ce soit de façon erronée. A

19 savoir, ce que le témoin avait dit a absolument été traduit de façon

20 correcte.

21 Quand j'ai parlé de 30%, j'avais pensé que le témoin perdait 30% de ce

22 qu'il voulait dire parce que je le suivais dans la pensée, mais quand il

23 prononçait le fond de sa pensée, j'estimais qu'il perdait 30% de ce qu'il

24 voulait dire en parlant aussi vite. Et ce n'est pas à moi… Enfin, je

25 n'avais nullement l'intention de dire que les interprètes avaient fait

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1 quelque chose d'erroné.

2 Je m'excuse auprès des interprètes, j'assume la responsabilité de cette

3 mauvaise interprétation de ce que j'avais voulu dire, et je tiens à

4 m'excuser une fois de plus publiquement auprès des interprètes parce que

5 je me sens très mal dans ma peau.

6 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, je ne comprends toujours

7 pas ce que vous aviez l'intention de nous dire.

8 M. Krsnik (interprétation): Vous voyez, peut-être n'ai-je pas réussi à

9 m'exprimer comme il se devait. Moi, je puis suivre le témoin, je suis

10 parfaitement bien ce qu'il a l'intention de communiquer ici. Etant donné

11 qu'il parle très vite, il n'arrive pas à adapter ou à exprimer l'esprit de

12 sa réponse. Et les interprètes avec cette vitesse n'arrivent pas à saisir

13 l'esprit de ce qu'il avait voulu dire ou communiquer.

14 Ce n'est pas la faute des interprètes, mais la faute de celui qui parle si

15 vite. C'est la raison pour laquelle j'ai dit les 30% de ce qu'il voulait

16 exprimer étaient perdus ici en raison de sa rapidité d'élocution. C'est ce

17 que j'avais en tête quand j'ai dit ce que j'ai dit. Mais je n'ai, Dieu

18 m'en garde, aucunement voulu dire que les interprètes avaient traduit quoi

19 que ce soit de façon erronée.

20 C'est la raison pour laquelle je me sentais fort mal dans ma peau et que

21 je voulais m'excuser publiquement à l'attention des interprètes. Je sais

22 bien combien cela est difficile et notamment lorsque les témoins comme

23 celui-ci, et moi-même d'ailleurs très souvent, parlons si vite. C'est en

24 raison de cette sensation désagréable que je ressens que j'avais tenu à

25 m'excuser de façon publique à l'attention des interprètes, parce que je

Page 12495

1 n'avais rien pensé de mal.

2 M. le Président (interprétation): Merci. Pouvons-nous maintenant Monsieur

3 l'huissier faire entre le témoin?

4 Monsieur Scott, je me dois de vous dire que vous devriez conduire à terme

5 votre contre-interrogatoire dans un délai d'une heure.

6 M. Scott (interprétation): Merci, Monsieur le Président, je ferai de mon

7 mieux.

8 (Le témoin, M. Ivan Bagaric, est réintroduit dans le prétoire.)

9 Je puis assurer à la Chambre que j'ai reçu, que j'ai eu vent de certaines

10 suggestions aux termes desquelles j'essaierai de prolonger. Au contraire,

11 je fais tout le nécessaire et je mets à profit toutes les pauses pour

12 essayer de faire des découpes dans la documentation que j'ai préparée à

13 l'attention du contre-interrogatoire pour le rendre plus bref. Merci.

14 (Suite du contre-interrogatoire du témoin, M. Ivan Bagaric, par M.

15 Scott.)

16 Monsieur, vers la fin de l'été 1993 et durant l'automne et la fin de

17 l'année 1993, il était notoirement connu le fait que les conditions

18 prévalant aux camps de détention du HVO y compris celui de l'Héliodrome,

19 Dretelj, Gabela et Ljubuski, donc que ces conditions là-bas se trouvaient

20 très au-dessous du niveau qui fait partie des normes médicales

21 internationales, n'est-ce pas?

22 M. Bagaric (interprétation): S'agissant de ces normes médicales, les

23 prisonniers, dans ces centres de détention ou ces centres, se trouvaient

24 détenus à un niveau qui était le niveau le plus élevé possible que nous

25 étions, à ce moment-là, en mesure d'assurer. Bien entendu, tout ce que

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1 vous faites dans ces situations-là pourrait être mieux fait en effet. Mais

2 du point de vue des soins médicaux, nous avons fait tout ce qui avait été

3 en notre pouvoir. Ce "tout" est conforme aux conventions et aux droits

4 humanitaires. Malheureusement, si on compare cela avec d'autres centres,

5 je crois pouvoir dire que nous étions bien mieux organisés, et ça je puis

6 l'affirmer en connaissance de cause.

7 M. Scott (interprétation): Je demanderai maintenant à Monsieur l'huissier

8 de montrer au témoin la pièce à conviction P566.4.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président.

11 M. le Président (interprétation): Oui.

12 M. Krsnik (interprétation): Je n'ai pas l'intention de faire des

13 objections concernant le document, mais je voulais dire qu'il n'y a pas

14 d'original croate et que nous ne l'avons pas reçu. Maintenant, si M. le

15 Procureur en a un, nous aimerions qu'il nous le communique. Parce qu'avec

16 cette traduction, il ne nous a pas été communiqué un original en langue

17 croate..

18 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, nous n'avons pas non

19 plus cette version-là.

20 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, je ne pense pas que nous

21 l'ayons en ce moment-ci. Comme l'a dit Me Krsnik, nous avons pas mal de

22 difficultés au niveau de l'obtention des traductions. Mais ici, il n'y a

23 qu'une seule phrase que je me propose de lire et je demanderai aux

24 interprètes de nous aider.

25 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président.

Page 12497

1 M. le Président (interprétation): Oui.

2 M. Krsnik (interprétation): La situation est tout à fait autre, il

3 faudrait que nous ayons le document original pour qu'il puisse être

4 traduit, et il faudrait que ce document soit en original pour qu'on se

5 penche sur la traduction. On ne peut pas fournir une traduction sans que

6 l'on ait à notre disposition le document original.

7 M. Scott (interprétation): Mais ceci, Monsieur le Président, est un

8 original, c'est un document en langue anglaise, et je parle du document

9 566.4. Ce n'est pas une traduction. C'est un original en langue anglaise,

10 et la traduction ne peut être qu'en croate.

11 M. le Président (interprétation): Je vois, mais promettez-nous donc de

12 nous fournir une traduction aussitôt que possible.

13 M. Scott (interprétation): Bien entendu Monsieur le Président.

14 M. le Président (interprétation): Bien allez-y.

15 M. Scott (interprétation): Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous d'une

16 visite que vous auriez reçue de la part d'une organisation chargée des

17 Droits de l'homme, à savoir Mme Ivana Nizic et Zeljka Markic? Cela s'est

18 passé en août 1993. Je vais demander aux interprètes de nous aider -je

19 cite-: "Nous avons demandé l'autorisation de visiter Dretelj et Gabela,

20 les prisons de Dretelj et Gabela. Nous avons demandé au Dr Ivan Bagaric,

21 ministre de la Santé de la communauté croate d'Herceg-Bosna d'intervenir

22 auprès des autorités du HZ-HB de Capljina pour nous permettre de visiter

23 les camps. Et la chose a été refusée. Bagaric avait accepté l'assertion

24 aux termes de laquelle les conditions dans ces camps n'étaient pas

25 satisfaisantes."

Page 12498

1 Est-ce que vous vous souvenez Monsieur?

2 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges, ce

3 document nécessite une explication, et je m'en excuse. Je ne puis répondre

4 par un oui ou par un nom, mais je souhaite expliquer parce que ceci est en

5 anglais. Mais je n'ai rien contre le fait de commenter, au contraire je

6 souhaite faire un commentaire.

7 Ces dames Ivana Nizic et Zeljka Markic ne nous ont donc pas visités. C'est

8 nous qui les avions invitées. Ça, c'est d'un. De deux, elles s'étaient

9 entretenues avec Ivan Bagaric, ministre de la Santé. Ivan Bagaric (sic)

10 n'a jamais été ministre de la Santé. Troisièmement, elles ne s'étaient pas

11 entretenues avec moi seul, elles s'étaient entretenues avec un cercle

12 plutôt grand de médecins parmi lesquels il y avait peut-être le ministre

13 de la Santé, dont le prénom était également Ivan mais le nom de famille

14 était différent.

15 En ce moment-ci, au moment présent, je n'arrive pas à me souvenir d'une

16 phrase à part parce que leur visite chez nous avait duré plusieurs jours.

17 Par conséquent, je me souviens, entre autres, qu'elles étaient venues dans

18 mon bureau aussi, mais elles sont allées dans bon nombre de bureaux,

19 d'autres bureaux.

20 Et on dit ici que cette demande avait été rejetée. Je n'ai pas très bien

21 compris qui avait refusé parce que je ne connais pas, enfin je ne parle

22 pas si bien l'anglais. On dit qu'on avait demandé au ministre de la Santé

23 d'intervenir auprès des autorités de Capljina, chose qui avait été

24 refusée. Alors, on ne dit pas si c'est moi qui avais refusé ou si c'est

25 quelqu'un d'autre qui avait refusé.

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1 Question: Les conditions à Dretelj et Gabela n'étaient pas satisfaisantes?

2 Réponse: Eh bien, pour Ivan Bagaric, médecin et membre élu du Conseil de

3 la défense croate, le fait même qu'il y ait eu ces enquêtes sur les

4 prisons, ce fait même fait que ce n'est pas satisfaisant. Si quelqu'un

5 était incarcéré, pour moi c'était quelque chose qui appelait des efforts

6 supplémentaires.

7 Alors je ne sais pas ce que Mmes Nizic et Markic et cette autre dame ont

8 pu dire -je ne me souviens pas-, mais je sais à cent pour cent que nous

9 pouvons les appeler pour les faire témoigner ici: elles étaient tout à

10 fait satisfaites de cette visite chez nous après avoir pu voir les

11 conditions. Je ne sais pas si elles ont rendu visite à tout le monde, je

12 ne sais pas, mais je sais qu'elles sont allées à l'Héliodrome avec nos

13 médecins.

14 Ma réponse, Monsieur, c'est donc que je ne me souviens pas qu'elles

15 n'étaient pas satisfaites à l'époque. Il est possible qu'en parlant avec

16 elles, j'ai dit ou quelqu'un d'autre a dit quelque chose comme ça parce

17 qu'on dit ici "Ivan Bagaric, ministre de la Santé", c'est donc peut-être

18 quelqu'un d'autre qui l'a dit.

19 Question: "Ministre de la Santé" est entre guillemets ici. Ça peut être un

20 titre exact ou non, mais en tout cas elles parlaient de vous, Ivan

21 Bagaric, le principal responsable médical croate, c'est exact.

22 Réponse: Non, non, ce n'est pas exact parce que le ministre de la Santé

23 c'est quelqu'un d'autre. Donc Mme Nizic a effectivement parlé avec moi,

24 cela c'est vrai, mais pas seulement avec moi; elle a vu également le

25 ministre de la Santé, et elle a vu cinq autres médecins qui travaillaient

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1 dans le corps médical du HVO. Je suis Ivan Bagaric, oui, mais je ne suis

2 pas Ministre de la santé, je ne me souviens pas avoir fait cette

3 observation. Sans vouloir affirmer que je n'ai pas fait d'observation dans

4 ce sens, il est possible que je l'ai dit.

5 Question: Veuillez regarder le point 612.2.

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Pour gagner du temps, je ne laisse pas du tout entendre que votre nom

8 figure ici, que vous l'avez signé ou pas, ce n'est pas la question, donc

9 inutile de répondre à cela. Est-ce que vous pourriez voir la teneur de

10 cette information, des points 1 à 8? La question que je vais vous poser

11 est la suivante, n'est-il pas vrai, Monsieur, que fin septembre 1993, les

12 soins médicaux dans les camps étaient encore inadéquats?

13 Réponse: Est-ce que vous pourriez me montrer la deuxième partie du

14 document? Parce que j'en ai une partie, je n'ai que le début du document,

15 je n'ai pas la fin, il manque quelque chose.

16 Question: J'ai la totalité du document ici, c'est tout ce que j'ai.

17 Réponse: Quelque chose qui porte le sceau.

18 Question: Excusez-moi, en bas de la page, je vous ai donné tout ce que

19 j'ai.

20 Réponse: Non, non, non, ce n'est pas un document complet, parce que moi je

21 me souviens de ce document. C'est un document qui venait du siège du corps

22 médical, c'est un document important, et la deuxième partie qui manque et

23 qui est signée. Je peux vous dire par qui.

24 Question: Cela était signé par qui?

25 Réponse: Cela était signé par des médecins qui étaient sous mes ordres,

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1 dont j'étais le supérieur, et que j'avais envoyés pour aller voir la

2 situation. C'est de cette partie de l'équipe médicale dont je parlais. La

3 dernière fois, j'ai dit qu'on avait créé cela en dehors du centre pour

4 organiser les soins médicaux.

5 Il y a encore autre chose: moi je suis très fier de ce document.

6 Question: Quels sont les noms, s'il vous plaît?

7 M. Bagaric (interprétation): Je ne sais pas pourquoi vous me forcez à vous

8 dire, je ne veux pas vous donner les noms. Vous m'interrompez, moi je vous

9 dirai tout.

10 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, je fais de mon mieux

11 pour suivre les instructions, vos instructions sont de terminer en une

12 heure. Est-ce qu'on pourrait peut-être répondre à mes questions? Cela me

13 permettrait d'essayer de répondre aux directives de la Cour.

14 M. le Président (interprétation): L'accusation vous a demandé le nom de

15 ces médecins, si vous avez besoin de protéger ces personnes, nous pouvons

16 passer en séance en huis clos partiel. Mais vous êtes obligé de répondre

17 aux questions qui vous sont posées.

18 M. Bagaric (interprétation): Oui, j'ai bien compris, Monsieur le

19 Président, ce que vous dites. Et je crois que l'accusation ne devrait pas

20 me bousculer, je ne suis pas pressé aujourd'hui, je ne suis pas vraiment

21 pressé. Je m'excuse, je ne sais pas pour vous, Monsieur le Président, mais

22 qu'on me laisse parler!

23 Mme Clark (interprétation): Vendredi dernier, vous nous avez donné

24 l'impression que vous aimiez beaucoup le Tribunal mais que vous teniez

25 beaucoup à rentrer chez vous, que vous préfériez la Bosnie-Herzégovine et

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1 que vous n'aimiez pas beaucoup rester ici à ne rien faire. Nous voudrions

2 que vous puissiez rentrer dès que possible dans votre famille.

3 Mme Diarra: Etant donné que vous ne répondez pas aux questions de

4 l'accusation, mais aussi aux Juges de la Chambre, nous comptons sur vous,

5 il faut continuer à coopérer.

6 M. Bagaric (interprétation): Oui, mais le Tribunal ne m'a posé aucune

7 question. Mais enfin peu importe, je répondrai. Ce document a donc été

8 signé par les chefs de mon secteur, Dr Toni Kolak et Dr Ivo Sandrk, et je

9 crois que l'un des médecins locaux également qui était là-bas sur place -

10 je continue la première partie de ma réponse-, oui je suis très fier de ce

11 document, parce qu'ici dans l'en-tête, on dit: "Après l'examen sur place

12 en exécution de l'ordre, etc., du 18 août 1993, du 28 août 1993, au sujet

13 de la mise en œuvre des dispositions de droit humanitaire, etc. j'ordonne

14 que."

15 Ce qui veut dire très clairement, cela témoigne très clairement que nous

16 avons supervisé les conditions de santé de façon systématique, je conteste

17 à qui que ce soit, y compris l'accusation, le droit de semer le moindre

18 doute sur ces questions. Est-ce que vous n'avez pas fait cela un peu tard?

19 Eh bien, moi je vous dirai, Monsieur le Président, et vous aussi Mesdames

20 les belles (note de l'interprète: charmantes) Juges, que ce document est

21 daté du début août.

22 M. Krsnik (interprétation): Pourriez-vous demander au témoin de ralentir,

23 Monsieur le Président?

24 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, il faut bien

25 comprendre que l'accusation vous a posé une question fort simple, à savoir

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1 quel est le nom de ce médecin, et vous avez répondu à cette question. Si

2 l'accusation a besoin d'un complément d'explication, on vous posera des

3 questions de suivi.

4 M. Bagaric (interprétation): Oui, mais Monsieur le Président, auparavant

5 il m'a posé une question tout à fait provocatrice, et moi je voulais y

6 répondre aussi.

7 M. le Président (interprétation): Bien. Cela dépend de savoir si nous

8 sommes intéressés ou pas Monsieur le Témoin.

9 Monsieur Scott?

10 M. Scott (interprétation): L'huissier va vous montrer la pièce 614.

11 M. Krsnik (interprétation): Nous en avons terminé avec ce document? Tout

12 en respectant absolument votre décision sur les objections, j'exprimerai

13 mes objections à la fin. Je demanderai également que ces documents soient

14 étudiés parce qu'il semble que certaines choses aient été masquées et re-

15 photocopiées.

16 Nous voyons ici une partie du tampon de quelqu'un d'autre, une partie d'un

17 autre document. Et ici, en 1, on voit "poste médical", et cela a été

18 masqué. Est-ce qu'on l'a donc biffé ou bien on indique la source et les

19 archives de Zagreb? Mais je regarde et je ne vois absolument pas de tampon

20 de l'original croate. Alors qu'est-ce qu'on a fait de ce document? Ce

21 document n'est pas complet. On nous montre ici des documents qui, de toute

22 évidence, ne sont pas complets et pourtant on prétend qu'ils sont

23 complets. Combien de documents de ce genre avons-nous eu jusqu'à présent?

24 M. le Président (interprétation): Je vous remercie d'appeler notre

25 attention sur ce document.

Page 12504

1 M. Scott (interprétation): Nous souhaiterions que ces documents soient… En

2 haut à gauche dans l'en-tête, nous voyons l'indication d'un tampon

3 "archives HVO de Zagreb". Cela ressemble exactement à ce que nous avons vu

4 sur des centaines d'autres documents. On peut également le faire vérifier

5 de façon indépendante. Mais d'après nos documents, cela provient des

6 archives de Zagreb.

7 Avec beaucoup de respect, Monsieur le Président, permettez-moi de dire que

8 Me Krsnik a souhaité des conclusions trop rapidement. Cela a peut-être

9 été… cela n'est peut-être jamais arrivé à Me Krsnik, mais c'est arrivé à

10 tout le monde. D'ailleurs, quelquefois lorsqu'on ne met pas un document

11 tout à fait à plat, on photocopie également le début du document ou un

12 morceau de document qui est en dessous. Il ne faut donc pas accuser à la

13 légère de réalisation de faux et d'usage de faux.

14 M. le Président (interprétation): Nous tiendrons compte des points de vue

15 exprimés par les deux parties lorsque nous prendrons une décision à ce

16 sujet.

17 Monsieur Scott, vous pouvez continuer.

18 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, P614.1.

19 M. Bagaric (interprétation): Excusez-moi, c'est ce document-là?

20 M. Scott (interprétation): Est-ce que l'huissier pourrait nous aider? Le

21 témoin semble avoir des difficultés. C'est la pièce P614.1.

22 (Intervention de l'huissier.)

23 C'est une communication du 29 septembre 1993, M. Stanko Bozic, directeur

24 de la prison militaire centrale, écrit: "Monsieur, je vous écris afin de

25 vous informer des difficultés et des problèmes relatifs au traitement

Page 12505

1 médical d'un certain nombre de personnes gravement blessées, etc.".

2 Là encore, faute de temps, je ne lirai pas tout. Il s'agit de l'absence de

3 matériaux et de médicaments et d'un hébergement qui n'est pas très

4 satisfaisant dans votre document. C'est un brigadier.

5 Ivan Bagaric, n'est-il pas vrai que fin septembre les conditions de

6 l'Héliodrome n'étaient pas au niveau des normes médicales internationales?

7 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le Président, pour répondre à cette

8 question, j'ai besoin d'un autre document, le document précédent, celui

9 que j'avais tout à l'heure parce que c'est très important de l'avoir pour

10 répondre à cette question. Ce document incomplet que j'avais donc tout à

11 l'heure.

12 M. le Président (interprétation): Oui, oui, certainement.

13 M. Bagaric (interprétation): Je vais essayer de commenter ce document-ci

14 pendant qu'on cherche l'autre. Je vous avais dit que lorsque nous sommes

15 entrés dans le centre, c'était de façon organisée. Je vous ai dit

16 pourquoi. Et bien entendu, nous avons supervisé constamment la situation

17 et nous avons demandé qu'elle soit améliorée par conséquent.

18 M. Scott (interprétation): Non…

19 M. Bagaric (interprétation): Excusez-moi.

20 M. Scott (interprétation): Non, ce n'était pas la réponse. Je sais que le

21 Tribunal donne toujours au témoin la possibilité de donner une explication

22 complète. Vous lui en avez donné une hier. Je ne sais pas quelles mesures

23 ont été prises pour améliorer la situation. J'ai dit que les conditions

24 n'étaient pas adéquates en septembre 1993. Je crois que le témoin a

25 répondu à cette question, au moins partiellement.

Page 12506

1 M. le Président (interprétation): Oui, vous pouvez répondre à cette

2 question.

3 M. Bagaric (interprétation): Alors, nous avons supervisé de façon continue

4 l'état sanitaire et les soins donnés au centre. Dans le rapport, dont je

5 me souviens très bien, qui a été écrit avant cette date par nos médecins,

6 dans ce rapport-là, on dit que l'état de santé -je dis bien l'état de

7 santé-, qu'il y avait suffisamment de médicaments, que si un traitement

8 était nécessaire, il a été donné.

9 Je n'accepte pas l'avis de M. Stanko Bozic qui n'est pas médecin, et qui

10 prend sur lui de commenter l'état de santé des patients. De ce point de

11 vue-là, le document n'a donc aucune pertinence, est sans importance parce

12 que cela montre que M. Bozic s'est occupé des salles -c'est une bonne

13 chose, on peut l'en féliciter- mais il ne peut pas juger de la façon dont

14 nous avons organisé les soins de santé.

15 Monsieur le Président, si vous voulez, moi je ne savais pas qu'on allait

16 entrer dans cette partie-là du problème, mais je peux recueillir la

17 documentation nécessaire, je peux vous la soumettre. Des documents

18 complets et pas partiels! Parce qu'un tableau fragmentaire et souvent

19 inexact ne vous donne pas un tableau exact; cela peut induire en erreur.

20 M. le Président (interprétation): Votre réponse c'est qu'il y a

21 suffisamment de médicaments, et que l'état de santé était bon, c'est cela?

22 M. Bagaric (interprétation): Oui.

23 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott.

24 M. Scott (interprétation): Si les médicaments étaient bons, si l'état de

25 santé était bon, je suppose que vous n'avez pas d'explication des raisons

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1 pour lesquelles M. Bozic vous écrive le 29 septembre pour dire que le

2 comité international de la Croix-Rouge ne devrait pas s'apercevoir qu'ils

3 sont traités médicalement et qu'ils sont logés de façon inadéquate, et par

4 conséquent créerait une mauvaise impression de la prison militaire

5 centrale car cela pourrait porter préjudice au HVO, aussi bien qu'à tout

6 le peuple croate. Vous voulez dire que M. Bozic comme chef de la prison,

7 directeur de la prison, n'avait pas de base pour tirer cette conclusion?

8 M. Bagaric (interprétation): Ce document inclus une phrase, mais je vous

9 demande en même temps, je vous demande de transmettre, de transférer ces

10 (inaudible) et son hospitalisation, autrement dit, il a envoyé ce document

11 à différents destinataires, et je suis l'un de ces destinataires. De toute

12 évidence, il voulait transférer les malades, mais une lettre de lui

13 n'était pas nécessaire pour cela parce que nous le faisions. L'équipe

14 médicale qui était là le faisait.

15 Ce document signifie donc que M. Stanko Bozic s'occupait de ce centre,

16 mais son évaluation de l'état de santé et de l'approvisionnement en

17 médicaments, c'est quelque chose qui n'a absolument aucune pertinence,

18 parce que je n'ai aucune raison d'accepter l'évaluation de M. Bozic,

19 plutôt que le point de vue de mes médecins. Et je sais qu'à l'époque les

20 médecins avaient signalé que tout était en bon ordre en ce qui concernait

21 l'organisation des soins de santé, et j'en prends la pleine

22 responsabilité.

23 Mme Clark (interprétation): Excusez-moi Monsieur Scott, est-ce que nous

24 pourrions venir à la fin de cette lettre? En ce qui concerne le Dr

25 Bagaric, cette lettre n'est pas bien informée et n'est pas équitable.

Page 12508

1 M. Bagaric (interprétation): Oui. Je crois que lorsque qu'il s'agit

2 d'évaluer les soins de santé de ces aspects-là, ça ne donne tout

3 simplement pas un tableau véritable de la situation, j'en prends la

4 responsabilité.

5 Mme Clark (interprétation): Je voudrais poser une question à M. Scott,

6 pendant que nous sommes là. Monsieur Scott, je constate que la personne

7 qui est décrite comme le directeur de la prison centrale militaire du 29

8 septembre 1993, M. Stanko Bozic.

9 M. Scott (interprétation): Oui.

10 Mme Clark (interprétation): Et on parle d'un M. Mile Pusic, il y a environ

11 une demi-heure dans le document 171.1. Est-ce qu'il y a eu un changement?

12 Est-ce que M. Bozic est le supérieur de M. Pusic?

13 M. Scott (interprétation): Sans avoir eu l'occasion de vérifier, je dirais

14 qu'en septembre 1993 même auparavant, mais certainement en septembre 1992,

15 M. Pusic avait été remplacé par M. Bozic.

16 Mme Clark (interprétation): Vous pourrez revenir à cela tout à l'heure,

17 mais est-ce que vous voulez dire que M. Bozic était le chef de

18 l'administration de l'Héliodrome depuis un certain temps?

19 M. Scott (interprétation): Oui, Madame la Juge, nous y reviendrons. Vous

20 avez dit que vous faisiez tout à fait confiance aux médecins qui vous

21 présentaient leurs rapports, est-ce que vous pourriez nous rappeler le nom

22 de ces médecins?

23 M. Bagaric (interprétation): Absolument. Le Dr Ivan Curic, spécialiste en

24 infection, il est chef de cette équipe qui s'occupait de cette partie-là,

25 le Dr Ivan Sandrk. Plus exactement le Dr Ivan Curic était chef du service

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1 de médecine préventive, Ivan Sandrk était chef du contrôle et de

2 l'inspection, c'est-à-dire de la supervision et de la qualité des services

3 de santé, et le Dr Toni Kolak qui, à l'époque était chirurgien et qui

4 s'était occupé des blessés, il était chef de l'équipe des blessés. Je leur

5 fais donc beaucoup plus confiance lorsqu'ils ont dans leurs témoignages…

6 je leur fais beaucoup plus confiance qu'à M. Bozic.

7 Question: Vous avez parlé du Dr Ivan Curic, le Dr Toni Kolak, je m'excuse

8 si ma prononciation est défectueuse, il y avait un M. Ivan Sandrk, vous

9 accordez le plus grand crédit aux comptes rendus faits par ces médecins,

10 est-ce exact?

11 Réponse: Les médecins n'ont pas le droit de faire confiance à qui que ce

12 soit. Il semble que les critères soient différents entre médecin et

13 juriste. Moi, je n'avais aucune raison de mettre en doute leur jugement.

14 Je prends pleinement les responsabilités si l'un de ces médecins ou

15 d'autres d'ailleurs, qui étaient mes subordonnés, ont fait quelque chose

16 de mal; j'assume personnellement la responsabilité.

17 M. Scott (interprétation): Veuillez, s'il vous plaît… le document P618.1.

18 M. Krsnik (interprétation): Je voudrais simplement vous prévenir, Monsieur

19 le Président, que ce document n'est pas complet non plus. Dans la version

20 anglaise, on dit "pièce jointe: liste des disparus et des malades". Ceci

21 fait donc partie d'un autre document qui contient une liste qui était

22 absente. Une fois encore, nous avons donc affaire à un document tronqué.

23 Et qui sait, ce que contient le reste de ce document!

24 M. Scott (interprétation): Je sais que les mêmes objections ont été

25 formulées précédemment. Le document que nous avons ici comporte tous les

Page 12510

1 documents nécessaires (sic); tous ces documents ont le tampon des archives

2 de Zagreb, la plupart également du HVO de Mostar et la signature apparente

3 sur la version en BCS.

4 Cela dit, nous ferons le maximum d'efforts pour vous fournir le reste de

5 ce document. Mais une fois encore, les avocats de la défense exercent une

6 sorte de droit de préemption et répondent avant le témoin.

7 M. le Président (interprétation): Je crois que Me Krsnik parlait du

8 document P614.1, le document que nous avons déjà vu.

9 M. Scott (interprétation): Honnêtement, je ne sais pas de quel document il

10 s'agit.

11 M. le Président (interprétation): De toute manière, nous tiendrons compte

12 du point de vue exprimé des deux parties. Vous pouvez continuer Monsieur

13 Scott.

14 M. Scott (interprétation): Veuillez examiner le document P618.1. Selon ce

15 document, il s'agit d'un rapport de trois des médecins dont vous venez

16 précisément de parler.

17 M. Bagaric (interprétation): Exact.

18 Question: "Point 1. En faisant le tour du centre, nous n'avons pas été

19 arrêtés ou on ne nous a pas demandé de papiers d'identité de la part des

20 fonctionnaires autorisés. Deuxièmement, Il y a un nombre insuffisant de

21 personnes bien physiquement dans le cadre du centre. Troisièmement, le

22 cadre du centre, le centre lui-même se trouvait être négligé et mal tenu.

23 Quatrièmement, le centre est surchargé. Cinquièmement, le centre de

24 chirurgie du centre est bien approvisionné en médicaments et fournitures

25 médicales. Si les heures de travail de la chirurgie sont de 0 heure à 24

Page 12511

1 heures, il a 2 médecins, 4 infirmières, 1 pharmacien adjoint travaillant

2 dans la chirurgie. Septièmement, il n'y a pas de ségrégation dans le

3 centre entre les blessés, les malades et les prisonniers en bonne santé.

4 Huitièmement, les conditions d'hygiène sont absolument insatisfaisantes,

5 et il est probable qu'il y aura une épidémie, des maladies intestinales et

6 respiratoires".

7 N'est-ce pas exact?

8 Réponse: Le document précédent a été signé par les trois médecins. Est-ce

9 qu'on pourrait me remettre ce document, s'il vous plaît? Je connais ces

10 documents parce que je les porte dans ma tête. Ce sont des documents

11 importants, je les ai signés, mais donnez-moi le document qui manque.

12 La première fois, j'ai dit que ces trois médecins avaient signé, je

13 voulais dire qu'ils avaient signé un autre document. Donnez-moi le

14 document précédent, le document incomplet qui est mon document à moi. Mes

15 excuses. Voici comment cela est… Ceci est un élément de preuve clair qui

16 corrobore ce que j'ai dit. L'équipe dont je parlais, Kolak, Sandrk et

17 Curic, c'est cela l'équipe de médecins qui sont allés au centre.

18 Donc d'après… Du point 1 au point 8, il n'y a pas un seul point qui se

19 réfère à une critique quelconque des soins de santé, que ce soit de

20 l'alinéa 1 à l'alinéa 8. Il n'y a pas une seule critique. Un instant.

21 Cela veut dire… le point 5 confirme ce que je disais: que le centre est

22 bien approvisionné en médicaments et fournitures médicales, qu'il n'y a

23 pas de ségrégation dans le centre, que la clinique fonctionne 24 heures

24 sur 24. Rien de tout cela n'est une critique. Tout au contraire, cela

25 confirme que nous avons le service très bien.

Page 12512

1 Le point 8, Monsieur l'avocat, les conditions d'hygiène ne relèvent pas du

2 personnel médical. Les conditions sanitaires, c'est la propreté, la

3 possibilité de prendre régulièrement des bains, la prévention, etc. Cet

4 aspect-là, c'est la seule source de danger possible. Et après cette

5 inspection, immédiatement nous avons écrit un ordre nouveau que je vous

6 communique et qui portait sur la prévention de cet état de chose. C'est

7 donc un autre document dont je suis très fier, qui prouve bien que,

8 systématiquement et de façon ordonnée, nous avons essayé de résoudre ces

9 problèmes. Il y a aussi la mesure proposée, à savoir agir conformément à

10 l'ordre, le 28 septembre 1993. Et on dit probablement -je ne sais pas le

11 texte par cœur-, mais on dit en gros qu'il faut davantage de vaisselle,

12 que l'on doit mieux laver la vaisselle pour éviter les maladies

13 infectieuses. Nous avons fait un bon travail, ce qui a été confirmé par

14 l'absence d'infection, il n'y a pas eu d'infection, cela n'a pas eu lieu,

15 Monsieur le représentant de l'accusation.

16 Question: Nous pouvons considérer que ce texte est absolument exact, ce

17 qu'il y a dans cette pièce est absolument exact? C'est cela que vous nous

18 dites?

19 Réponse: La première partie de ce document, absolument, mais la deuxième

20 partie manque, et cette partie c'est moi qui l'ai signée. C'est un

21 document que j'ai signé. Vous ne pouvez donc pas soumettre des textes

22 tronqués. C'est cela que je suis en train de vous dire. C'est pourquoi à

23 chaque fois que je suis obligé de vous expliquer, car vous présentez des

24 documents incomplets. Pourquoi n'avez-vous pas demandé que je vous apporte

25 les documents? Je vous les aurai donnés!

Page 12513

1 M. Scott (interprétation): Il s'agit du document P618.1. Est-ce que

2 l'huissier peut bien montrer ce document au témoin, s'il vous plaît?

3 (Intervention de l'huissier.)

4 Mme Clark (interprétation): J'aimerais clarifier quelque chose si vous

5 permettez. Le document, lettre datée du 28 septembre, qui s'appelle "un

6 ordre", que nous appelons la pièce 612.2, c'est une pièce jointe au

7 précédent document dont nous avons parlé, à savoir le 618.1. Est-ce que

8 j'ai bien compris?

9 M. Bagaric (interprétation): Malheureusement, non. Est-ce que je pourrais

10 avoir l'ensemble des documents sous les yeux, je les replacerai dans

11 l'ordre, car je connais bien dans quel ordre il faut les regarder. Il y a

12 un document signé... Je comprends bien votre confusion, j'ai besoin

13 également d'un instant et je vais vous expliquer ensuite pourquoi les

14 choses sont ainsi.

15 Ce document-ci, qui fait une seule page, en haut on lit "ordre". Ce texte

16 a été signé par… en fait j'avais dit que cela était signé par Kolak et

17 d'autres, mais en fait c'est faux. Je me suis trompé, c'est moi qui avais

18 signé ce document, je me suis trompé parce qu'il manquait la deuxième

19 partie, c'est cela qui m'a induit en erreur.

20 Ensuite, on m'a montré un autre document signé par trois personnes. En

21 effet, la date indiquait le 28 septembre 1993, mais dans ce document, on

22 lit que: "Après inspection sur site, un ordre a été publié le 8 août 1993

23 -le 18 ou le 20-, concernant l'application des dispositifs du droit

24 humanitaire, etc.".

25 Autrement dit, il y avait des ordres que j'avais publiés par moi-même sur

Page 12514

1 proposition de mes confrères médecins en qui j'avais entièrement confiance

2 depuis toujours. J'ai donc publié ces ordres à leur demande. Et il

3 s'agissait donc d'une série d'ordres dont le but était d'améliorer les

4 conditions, mais en effet nous n'étions jamais satisfaits, nous avions un

5 problème de malnutrition notamment. Nous n'avions pas suffisamment

6 d'aliments pour les patients, mais il y avait des organisations

7 internationales qui étaient responsables de cela car elles n'avaient pas

8 fourni suffisamment d'aliments puisqu'il fallait aussi nourrir les

9 réfugiés.

10 Si vous souhaitez avoir ces documents, si cela peut vous être utile pour

11 clarifier la situation, je peux vous les transmettre, à vous les Juges, et

12 vous aurez ainsi une vue beaucoup plus complète de la situation, car les

13 documents que nous avons ici ne sont que des fragments d'une mosaïque, et

14 les fragments pris à part comme cela n'ont aucun sens.

15 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'on peut discuter maintenant de

16 la pièce 138.1? Monsieur Scott, posez votre question s'il vous plaît.

17 M. Scott (interprétation): Le 11 octobre 1993, sur le lieu de la prison de

18 l'Héliodrome, centre de détention. Pardon, Monsieur le Juge, la référence

19 est incorrecte dans le transcript. Il s'agit du P638.1.

20 Monsieur le Témoin, je ne vous demande pas de regarder la première page

21 qui porte sur l'utilisation des détenus pour le travail, pour travailler,

22 mais pouvez-vous regarder la deuxième page où on parle des blessures

23 graves et d'autres souffrances des détenus.

24 Au paragraphe 2.A: "Un grand nombre de détenus nécessitent des soins

25 médicaux qui ne peuvent être fournis dans un hôpital, que nous ne pouvons

Page 12515

1 fournir. Puis B: "Le problème de l'approvisionnement des médicaments, des

2 articles d'hygiène personnels". Et puis au point C: "Le comité

3 international de la Croix-Rouge a visité le centre, les 10, 11, et 12

4 août, et a souligné un certain nombre d'irrégularités qui sont des

5 violations aux Conventions de Genève, en citant les points A, B, et C.".

6 Je vous montre de nouveau ce document, est-il vrai qu'au fur et à mesure

7 que l'on avance vers l'automne 1993, les conditions médicales étaient en

8 dessous des normes internationales? Est-ce bien le cas?

9 Réponse: Mesdames et Monsieur les Juges, puis-je commenter l'ensemble des

10 commentaires qui figurent dans ce document de M. Bozic? Je crois que c'est

11 important.

12 M. le Président (interprétation): Oui, faites-le, mais le plus rapidement

13 possible, s'il vous plaît.

14 M. Bagaric (interprétation): Au point A, le texte dit que nous ne pouvons

15 fournir si M. Bozic ne pouvait le fournir, et si ce document est

16 authentique, c'était à nous, médecins, quel que soit le blessé, quelle que

17 soit l'origine, quel que soit le camp du blessé, tous les blessés étaient

18 envoyés à l'hôpital, si nous étions informés de cela.

19 Au point B, les problèmes liés à l'approvisionnement de médicaments et

20 d'articles d'hygiène personnels, eh bien, c'est un problème généralisé que

21 nous avons rencontré dans le système de santé du HVO. A l'hôpital de

22 Mostar, nous avions ce problème également, mais nous avons travaillé à

23 régler ce problème avec les différentes unités et en effet les

24 approvisionnements étaient rares pour les hôpitaux et pour les unités.

25 Dans les limites de nos possibilités, nous avons fourni des quantités

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1 suffisantes aux centres, nous connaissions le problème et nous l'avons

2 géré.

3 Au point C, le texte dit qu'il faut installer, etc., un dispensaire, il

4 dit qu'il fallait créer un dispensaire. Une commission, notre commission

5 avait proposé qu'un centre médical soit créé et cela a été fait. A ma

6 connaissance, ce centre médical possédait des lits pour des cas éventuels,

7 mais en fait cela n'avait pas une grande pertinence ici, car tous ceux qui

8 avaient besoin de traitement pouvaient être emmenés à l'hôpital.

9 Enfin le dernier commentaire sur le comité international de la Croix-

10 Rouge, et les trois sous points A, B, C: rien de cela n'est en rapport

11 avec ce que l'on peut appeler des soins de santé en tant que tels. Tout à

12 l'heure, j'ai parlé de la mauvaise qualité de l'alimentation et de

13 l'insuffisance de l'alimentation, nous n'avions pas d'approvisionnements

14 suffisants en ce qui concerne la qualité et la quantité d'aliments, je ne

15 peux rien dire d'autre.

16 En ce qui concerne le fait de faire travailler les détenus, je ne peux pas

17 non plus commenter puisque j'étais moi-même responsable des soins de

18 santé, donc je ne peux répondre que sur ces aspects-là. Je ne vois rien

19 dans ce texte qui contredirait ce que je vous ai déjà dit à propos de

20 l'organisation des soins de santé. Voilà ce que je voulais vous dire.

21 M. Krsnik (interprétation): Nous sommes un peu perplexes. De quel document

22 s'agit-il à ce stade? Je vous prie de m'excuser, mais je pensais que l'on

23 regardait le 638.1, c'est cela ou pas? Car moi j'ai un texte différent, je

24 suis un peu perplexe, je n'ai pas le document dont vient de parler le

25 docteur, aucun de ces points ne sont mentionnés dans le document qui porte

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1 la cote 638.A que j'ai devant moi.

2 M. le Président (interprétation): A la page 2 de ce document, vous

3 trouverez le paragraphe 2.

4 M. Scott (interprétation): C'est le document 638.1.

5 M. Krsnik (interprétation): Je suis désolé, je ne trouve pas le bon

6 document.

7 M. le Président (interprétation): Il s'agit du 01540561 en langue BCS.

8 Monsieur Scott, il n'y a pas d'objection de fond de la part de la défense,

9 vous pouvez donc continuer pendant que la défense recherche le texte.

10 M. Scott (interprétation): J'ai besoin de l'aide de l'huissier.

11 Mme Clark (interprétation): Je crois que dans la version BCS, il manque

12 une page, si vous comparez la version en BCS avec la version anglaise. Il

13 y a un paragraphe 1 avec des sous (inaudible) A jusqu'à E. Puis il manque,

14 me semble-t-il, un paragraphe parce que la deuxième page en BCS commence

15 tout de suite avec le paragraphe 16. Il me semble qu'il doit manquer

16 quelque chose.

17 M. Scott (interprétation): Vous avez pu passer plus de temps que moi à

18 comparer les deux versions du document.

19 Mme Clark (interprétation): Le Juge Liu vient de me faire remarquer que

20 les pages figurent, mais elles ne sont pas dans l'ordre. Voilà le

21 problème.

22 M. Scott (interprétation): Oui, je vous prie de m'excuser. En effet, le

23 mien n'est pas agrafé de cette façon. J'aimerais demander à l'huissier de

24 bien vouloir vous montrer le document 661.11.

25 (Intervention de l'huissier.)

Page 12518

1 En BCS, c'est-à-dire l'original, est-ce que ce document porte votre nom

2 écrit à la machine? Est-ce quelque chose qui ressemble à des initiales

3 écrites à la main, ainsi qu'un sceau, un tampon?

4 M. Bagaric (interprétation): Oui, je vous prie de m'excuser, pouvez-vous

5 répéter la question?

6 Question: Est-ce que vous y voyez votre nom et une marque qui ressemble à

7 vos initiales?

8 Réponse: En effet, il y a mon nom, ce ne sont pas mes initiales, mais je

9 pense que c'est un document authentique. Je ne me souviens pas précisément

10 de celui-ci mais je pense qu'il vient de chez nous.

11 Question: Au point 2, avez-vous dit que le 27 octobre 1993, les mesures

12 ordonnées, les mesures PMZ ordonnées, avaient été inspectées et vérifiées

13 à l'Héliodrome, et que ces ordres PMZ n'avaient pas été mis en oeuvre

14 complètement. Il était en effet urgent de supprimer les défauts en matière

15 de PMZ. A la date de ce document, les mesures correctrices n'avaient donc

16 pas encore été prises. Est-ce que c'est bien le cas?

17 M. Bagaric (interprétation): Monsieur le représentant du Bureau du

18 Procureur, tous les documents montrent clairement exactement ce que j'ai

19 déjà dit, c'est-à-dire que nous avons fait tout notre possible. Au point

20 1, le texte parle des inspections sanitaires du GRUD. Puis les mesures de

21 prévention et de protections médicales PMZ ont été vérifiées et inspectées

22 auprès de l'Héliodrome et du centre Gabela.

23 Le texte dit que les mesures n'ont pas été complètement mises en œuvre.

24 Mais vous n'avez pas lu la dernière phrase. Le texte dit que "l'ordre a

25 été donné de toute urgence de corriger ces défauts". Donc à tout moment

Page 12519

1 nous avons surveillé la situation et vous me demandez encore de clarifier

2 ce que cela signifie.

3 J'ai le sentiment que vous semblez dire que rien n'était fait. Au

4 contraire, nous demandions à ce que l'on fasse plus et davantage, car en

5 effet nous craignions des épidémies. C'est pourquoi il a été ordonné qu'il

6 fallait intervenir, et c'est pourquoi il n'y a pas eu d'épidémie. Si vous

7 deviez inspecter l'hôtel où je séjourne actuellement qui est un hôtel 4

8 étoiles -j'espère qu'ils ne vont pas entendre ce que j'apprête à vous

9 dire-, mais si vous deviez effectuer une inspection, je suis persuadé que

10 vous trouveriez des défauts qui doivent être corrigés afin d'améliorer

11 l'état sanitaire.

12 Donc Monsieur le Procureur, dans un centre de détention, dans une ville où

13 on ne sait même pas si on sera en vie le lendemain, dans une ville en

14 guerre, en effet une inspection a été faite et nous avons proposé des

15 mesures correctrices. Je crois qu'on devrait nous féliciter, et je

16 m'attends à ce que le Procureur me félicite d'avoir fait un bon travail.

17 Nous faisions partie d'une unité qui n'était absolument pas une unité de

18 criminels. J'étais un bon médecin et en effet, si l'ensemble de mon équipe

19 était bon, eh bien, pourquoi ne pas nous féliciter. A l'époque de Hitler,

20 même les médecins faisaient des choses maléfiques. Je ne vois pas ce que

21 vous cherchez à prouver ici. Je suis très fier de ce que nous avons fait.

22 M. Scott (interprétation): J'aimerais attirer votre attention, à la pièce

23 697.1… Votre honneur encore une fois je n'aurai pas pu compléter la

24 présentation de l'ensemble des pièces, mais j'ai encore deux pièces que

25 j'aimerais aborder et ensuite j'aurai terminé.

Page 12520

1 M. le Président (interprétation): Avons-nous des traductions anglaises de

2 ces documents?

3 M. Scott (interprétation): Oui, en effet nous les avons.

4 M. le Président (interprétation): En effet, nous les avons.

5 M. Bagaric (interprétation): Est-ce que je peux ajouter une phrase s'il

6 vous plaît? Je voudrais protester contre ce que vient de dire le

7 Procureur. Il nous dit qu'il a encore quelques pièces à nous montrer, mais

8 il sera bref par manque de temps. Je voudrais suggérer qu'il continue, je

9 ne voudrais absolument pas partir en pensant qu'il y avait autre chose à

10 voir et qu'il manquait de temps. Je crois que c'est très important, il

11 faut trouver du temps.

12 M. le Président (interprétation): Eh bien, c'est la Chambre qui organise

13 la procédure, c'est à nous de décider de la durée de chaque contre-

14 interrogatoire. Monsieur Scott, vous avez la parole.

15 M. Scott (interprétation): Je ne vais pas vous donner lecture de

16 l'ensemble du document par faute de temps, mais est-il vrai que c'est un

17 document que vous avez préparé le 26 novembre 1993, c'est-à-dire un mois

18 plus tard -nous sommes maintenant fin novembre? Est-il vrai, encore une

19 fois à cette époque comme le reflète ce document, que les conditions

20 médicales et sanitaires de détention étaient encore insuffisantes par

21 rapport aux normes internationales en vigueur?

22 M. Bagaric (interprétation): Ce n'est pas vrai. Je vous prie de m'excuser,

23 Mesdames et Monsieur les Juges, qu'est-ce qui vous fait dire ces choses?

24 Si je vous disais que nous avons continuellement surveillé. En effet, ce

25 document est daté du 26 novembre, adressé au Dr Drago Dzambas et qui

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1 traite de la zone entière . D'ailleurs je n'ai pas lu ce document, et je

2 ne me souviens pas de documents de cette époque précisément, mais je crois

3 que ce texte est la preuve que nous avons tout fait pour surveiller et

4 améliorer la qualité des soins de santé et l'état médical des détenus.

5 Même pas dans les hôpitaux de Bosnie-Herzégovine à l'époque, on ne pouvait

6 dire que les soins de santé étaient satisfaisants, même aujourd'hui, même

7 aujourd'hui c'est le cas.

8 Question: Par rapport au document que nous avons examiné, notamment

9 l'inspection sur site, au mois d'août 1993 -nous sommes trois mois plus

10 tard-, et vous dites dans ce texte, vous parlez de choses à faire. Au

11 dernier alinéa de ce rapport, le texte dit: "Le ci-dessus doit être

12 considéré comme une priorité et une tâche permanente".

13 Je dois conclure -et je me permets donc de vous poser la question-, vous

14 estimez que les conditions du camp n'ont jamais été vraiment améliorées.

15 C'était un scandale international et que ce n'est en raison des pressions

16 de la République de Croatie que ces camps ont été fermés fin 1993, est-ce

17 bien la vérité?

18 Réponse: Enfin je suis heureux que vous ayez reconnu que la République de

19 Croatie a fait quelque chose de positif en Bosnie-Herzégovine! Ce que vous

20 venez de dire n'est pas juste, n'est pas vrai. Disons que ce n'est pas

21 tout à fait correct. J'ai pu montrer à l'aide des documents, bien que je

22 n'aie pas l'ensemble des documents, mais à l'aide de ce que vous avez

23 présenté, que nous avons surveillé de manière continue l'état sanitaire

24 des détenus et que nous avons à chaque instant d'essayer de faire mieux.

25 Imaginez si je n'avais pas publié ce document, est-ce que cela signifie,

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1 Monsieur le Procureur, que notre état de santé était bon? Ce texte ne fait

2 que prouver qu'à chaque instant nous avons essayé de faire mieux. Et

3 lorsque vous dites qu'au fur et à mesure que le temps passe, la situation

4 s'est empirée, eh bien, c'est un mensonge. La situation s'est améliorée

5 avec le temps.

6 Je me demande, Mesdames et Monsieur les Juges, s'il y avait un moment où

7 on aurait pu faire plus. Là, je vous dirai oui, c'était tout de suite

8 après l'ouverture de ce centre de détention. En effet, c'est à cette

9 époque que j'ai pu aborder les problèmes et les choses qu'on n'a pas pu

10 faire, et ensuite la situation s'est améliorée. Et personne ne peut dire

11 le contraire. C'est un mensonge de dire que la situation était inchangée

12 ou empirait. Ce n'est pas du tout le cas, et cela n'a rien à voir avec la

13 fermeture de ces centres.

14 M. Scott (interprétation): J'aimerais maintenant examiner la pièce 716.1,

15 s'il vous plaît.

16 M. Krsnik (interprétation): Je dois faire mon devoir. J'ai la plus grande

17 confiance en la Chambre, et la Juge Clark me l'a rappelé à plusieurs

18 reprises, je me permets de dire que ce document est mal interprété au

19 cours de contre-interrogatoire. Ce n'est pas un rapport, c'est un ordre,

20 c'est un texte qui indique ce qu'il faut faire dans l'ensemble du

21 territoire de Bosnie-Herzégovine. Et j'estime que l'on a mal présenté ce

22 texte.

23 M. Bagaric (interprétation): J'aimerais ajouter quelque chose. Ce texte

24 porte sur l'ensemble de la zone et les documents que l'on a examinés tout

25 à l'heure portaient uniquement sur le centre de détention. Comment est-ce

Page 12523

1 que j'aurais donc pu savoir ce qui se passait en Bosnie centrale, si je ne

2 pouvais pas y aller? Et cette lettre est envoyée à un médecin en Bosnie

3 centrale et cela s'applique à lui aussi, dans la mesure où nous avions des

4 informations de sa part. J'ai l'impression que le Procureur essaie

5 d'abuser de ma bonne foi et j'en suis désolé.

6 M. le Président (interprétation): Monsieur l'huissier, avez-vous retrouvé

7 ce document? Oui, Maître Seric, vous vouliez dire quelque chose?

8 M. Seric (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai pas d'objection

9 à formuler, mais pour le traitement égal des deux parties au procès, je

10 voudrais dire que je me sens tenu de par ma conscience: le Procureur a

11 outrepassé le temps qui lui avait été imparti pour son contre-

12 interrogatoire, c'est tout ce que je voulais dire, merci.

13 M. le Président (interprétation): Je pense que l'accusation sait très bien

14 combien de temps il a utilisé et il essaie de conduire à un terme à son

15 contre-interrogatoire, il se réfère notamment à son dernier document, si

16 j'ai bien compris. Monsieur Scott, je vous prie d'y aller.

17 M. Scott (interprétation): Monsieur, j'attire votre attention sur la pièce

18 à conviction P716.1. Si vous vous penchez sur le document en question,

19 j'aimerais que vous nous disiez si vous vous souvenez d'une décision de

20 Mate Boban datée du 10 septembre 1993 qui disait qu'il conviendrait de

21 conduire les unités ou les centres de détention du HVO, à savoir Gabela,

22 l'Héliodrome, Ljubuski, Livno, Tomislavgrad, Prozor.

23 Ce serait ma première question: est-ce que vous vous souvenez donc de

24 l'ordre émis par Mate Boban concernant la fermeture de tous ces camps vers

25 la fin de l'année 1993?

Page 12524

1 M. Bagaric (interprétation): Bien sûr que je ne m'en souviens pas, je n'ai

2 pas travaillé au bureau de Mate Boban, je n'ai pas travaillé dans les

3 unités de détention. Si ce document est donc un document véridique, je ne

4 vois pas pourquoi je devrais m'en souvenir.

5 Question: Monsieur, je me propose d'en terminer avec ce qui suit, et

6 j'affirme pour les besoins du compte rendu d'audience que d'autres sujets

7 encore seront soumis à la Chambre. Mais ne serait-il pas vrai de dire,

8 Monsieur le Témoin, que les camps ont été fermés en raison des conditions

9 qui y avaient prévalu, en raison des conditions dans lesquelles avaient

10 vécu ces détenus, les conditions médicales, les conditions hygiéniques,

11 les conditions de détention? Ces conditions étaient devenues l'objet d'une

12 préoccupation internationale, et ce n'est qu'en raison de la pression de

13 la communauté internationale à l'égard du gouvernement de Croatie que ces

14 camps ont fini par être fermés en 1993, n'est-ce pas vrai?

15 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik?

16 M. Krsnik (interprétation): Oui, j'attends la fin de la traduction et je

17 tiens à dire qu'il est inadmissible que M. le Procureur in continuo

18 s'estime autorisé à plus de droits que nous. Et il a l'air de ce dire que

19 c'est lui le patron à ce procès! Il ne peut pas témoigner de cette façon-

20 là, ce n'est pas un contre-interrogatoire, et ce n'est pas une chose qui

21 me serait permise de faire! Ce ne sont pas des questions qui sont posées,

22 ce ne sont pas des questions qui sont posées et qui nécessitent une

23 réponse.

24 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, bien, pour être tout à

25 fait franc, je n'arrive pas à comprendre votre objection. Attendez,

Page 12525

1 attendez, Monsieur Scott.

2 M. Scott (interprétation): Je m'excuse.

3 M. le Président (interprétation): Attendez, laissons M. Scott nous dire ce

4 qu'il a à dire.

5 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, l'Article 90 au point

6 H)2) dit: "Lors du contre-interrogatoire, un témoin qui est susceptible de

7 fournir un témoignage pertinent pour l'affaire", donc s'agissant de la

8 partie qui contre-interroge, le conseil va présenter des éléments de

9 preuve en contradiction avec le témoignage fait par le témoin. C'est en

10 tout cas ce que j'ai essayé de faire, et j'ai essayé de m'en tenir au

11 temps imparti le plus possible, et je tiens à dire que j'ai terminé avec

12 le contre-interrogatoire en présentant ma thèse.

13 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik?

14 M. Krsnik (interprétation): Ce n'est pas ce qui vient d'être lu, parce que

15 nous connaissons la teneur des Articles et le Procureur a posé une

16 question et il y a répondu en même temps. Ce qu'il vient d'affirmer, il

17 convient qu'il le prouve auparavant et les documents, nos documents,

18 précisent qu'il faut qu'il prouve. Nous ne sommes pas ici pour prouver

19 notre innocence, mais c'est à lui de prouver la culpabilité et pour ces

20 termes qui sont utilisés, lorsqu'on pose une question et l'on apporte une

21 réponse immédiatement après, c'est une chose qui devrait être considéré

22 comme étant inadmissible lors d'un contre-interrogatoire. Peut-être me

23 trompé-je et peut-être n'aurais-je pas dû intervenir pour m'adresser à la

24 Chambre à ce sujet.

25 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, je ne vois rien de mal

Page 12526

1 concernant cette question et je vous parle de façon franche. Cette façon

2 de procéder a été utilisée devant ce Tribunal dans bien des affaires et

3 nous sommes en train de siéger ici depuis presque un an, je ne vois donc

4 rien de mal que de voir le Procureur poser une question de ce genre.

5 Et je dois même souligner le fait que votre témoin a pleinement le droit

6 de réfuter des allégations présentées par l'autre partie, la partie qui se

7 trouve de l'autre côté, face à nous qui sommes Juges. Il appartiendra aux

8 Juges de faire l'évaluation de tous les témoignages, y compris le

9 témoignage du témoin ici présent. Donc je pense que le problème ne se pose

10 pas. Je comprends que vous ne soyez pas d'accord avec ce que le Procureur

11 a dit, que vous ne soyez pas d'accord avec sa conclusion et cela est tout

12 à fait compréhensible. Mais le Procureur a pleinement le droit de

13 présenter ses allégations et ses thèses devant le témoin, et le témoin,

14 lui, a pleinement le droit de répondre à la question qui lui est posée ou

15 de réfuter toute allégation qui est faite. Je n'y vois rien de mal, Maître

16 Krsnik.

17 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, si je n'interviens pas,

18 je pourrais dire que je n'ai pas bien fait mon travail lors de

19 l'interrogatoire principal. Parce que, si tel est le droit des deux

20 parties, j'aurais pu à l'intention de tous les témoins de l'accusation… je

21 pouvais dire par exemple lorsque certains témoins n'ont pas pu reconnaître

22 le bâtiment de l'Héliodrome, j'aurais pu affirmer "mais Monsieur, vous

23 n'avez jamais été là-bas, vous n'en savez rien". Je ne l'ai pas fait parce

24 que j'ai toujours été décent à l'égard des victimes ou soi-disant victimes

25 ou à l'égard des témoins.

Page 12527

1 Est-ce que cela signifierait que j'ai porté préjudice à mon client en

2 conduisant de la sorte la défense faite par mes soins? Et si cela est le

3 cas, je m'excuse auprès de mon client. Mais si cela est le cas donc, Si je

4 me suis comporté de la sorte, j'estime que les témoins de l'accusation

5 auraient dû faire l'objet d'un comportement analogue.

6 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, si vous estimez que vos

7 contre-interrogatoires n'ont pas été conduits de façon adéquate, et si

8 vous estimez qu'il y a des choses qui relèvent d'une importance

9 essentielle pour ce qui concerne votre client, le Règlement vous autorise

10 dans une phase ultérieure, à savoir lors des questions complémentaires et

11 des réfutations, de le faire.

12 Oui, Maître Seric, vous vouliez dire quelque chose. Nous avons perdu pas

13 mal de temps sur les questions de procédure.

14 M. Seric (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais faire des

15 objections sur des fondements tout à fait autres. En effet, mon client M.

16 Vinko Martinovic… donc la question est tout à fait non pertinente, mais il

17 ne répond ni de la mise en place de cette unité de détention ni des

18 conditions de détention de quelque prisonnier que ce soit. Je ne vois pas

19 donc en quoi la question posée par le Procureur a quelque chose à voir

20 concernant les chefs d'accusation rédigés à l'encontre de mon client.

21 M. le Président (interprétation): Eh bien, moi j'ai compris que le témoin

22 ici présent est venu témoigner en faveur de M. Naletilic. Mais Monsieur le

23 Témoin, vous pouvez répondre à la question qui vous est posée.

24 M. Bagaric (interprétation): Je comprends M. le Procureur, et lui a donc

25 l'intention de persister dans ses intentions, et en quelque sorte, de

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1 discréditer ma personne en qualité de témoin. Je comprends cela depuis

2 tout le temps que je suis ici. Sa façon de se comporter avait été telle;

3 du moins c'est ainsi que je l'ai perçu. Ce que je ne comprends pas

4 cependant, c'est à quel point il a lui prouvé l'inexactitude de mes dires

5 à ce sujet.

6 Donc pour répondre à cette question, je dirai ce qui suit: tous les

7 centres de détention, prison ou tout ce que vous voulez, sur le territoire

8 de la Bosnie-Herzégovine, étaient malheureusement contraires aux intérêts

9 tant des Croates que des Bosniens musulmans. Ils ont donc été enfermés

10 dans l'intérêt et à l'avantage des uns et des autres. Et toute personne

11 qui aurait contribué à la fermeture de ces centres de détention a fait une

12 bonne tâche, un bon travail.

13 Je souligne donc la dernière phrase. Dans les prisons ou dans ces centres

14 de détention –appelez-les comme vous voulez-, il n'y avait pas des

15 conditions -s'agissant des soins médicaux- telles ou conformes à ce qui a

16 été décrit par le Procureur. Ce n'est pas dans ce contexte qu'il convient

17 de placer les choses. La décision de fermer ces centres était une décision

18 politique, et, bien entendu, pour les personnes détenues il n'avait pas

19 été plaisant d'être détenus à aucun moment ou pour qui que ce soit.

20 Donc on voudrait peut-être laisser entendre que j'avais mal dit quelque

21 chose ou mal interprété. Je souhaite rejeter toute insertion de ce genre,

22 et je me mets à votre disposition pour prouver, pour commenter toute

23 assertion de ce type aussi longtemps qu'il le faudra. C'est le commentaire

24 que je voudrais faire à ce sujet.

25 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, j'apprécie hautement la

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1 patience de la Chambre pour cet après-midi. Ceci conclut les questions que

2 j'avais à poser. Je tiens à préciser que je viens d'épuiser mon contre-

3 interrogatoire et que parmi les thèmes, les sujets dont je n'ai pas été en

4 mesure de continuer, cela a été usage des prisonniers musulmans pour ce

5 qui est de l'accomplissement de travaux forcés. Et j'estime qu'il y a eu

6 en novembre 1993 une commission mise en place pour ce qui est des crimes

7 de guerre en Herceg-Bosna, et le témoin présent a été nommé membre de

8 cette commission. Je pense que cela serait un sujet pour la Chambre, mais

9 nous n'avons pas le temps de nous aventurer dans ces sujets. Merci.

10 M. le Président (interprétation): Bien, nous allons faire une pause

11 maintenant et nous reprendrons à 6 heures.

12 (L'audience, suspendue à 17 heures 30, est reprise à 18 heures 01.)

13 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, vous avez peut-être des

14 questions complémentaires?

15 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je m'efforcerai

16 d'être bref.

17 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Ivan Bagaric, par

18 Me Krsnik.)

19 Etant donné que nous venons de recevoir une version croate du document

20 556.4, je voudrais m'adresser au témoin et lui demander ce qui suit.

21 Docteur, dites-nous si vos services de santé, les dispensaires que vous

22 aviez à l'Héliodrome et la liste des personnes qui figurent sur la liste

23 qui a servi de fondement d'interrogatoire du Procureur disant qu'il y

24 avait là 1.500 personnes. Dites-nous, je vous prie si vous aviez à votre

25 disposition des renseignements analogues concernant le nombre de personnes

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1 se trouvant dans ce centre d'instruction ou dans cette prison?

2 M. Bagaric (interprétation): Lorsque je suis allé là-bas pour la première

3 fois, j'ai reçu des informations disant qu'il s'agissait là d'un nombre

4 important de détenus, et je pensais qu'on me disait un grand nombre cela

5 signifiait à mon oreille quelques milliers et on m'avait dit qu'il y avait

6 là beaucoup de détenus. Par la suite lors des entretiens que j'ai eus avec

7 les personnes qui avaient été chargées des soins médicaux dans ce centre,

8 j'ai ouï-dire que le nombre n'a pas été si grand que cela, c'était un

9 nombre important, bien entendu, mais ils m'avaient dit à l'époque qu'il

10 devait y avoir moins de 2.000 personnes, mais je ne suis pas en mesure de

11 vous donner un chiffre exact à ce sujet, je n'ai pas en ce moment-ci non

12 plus d'informations exactes, ce serait juste des suppositions de ma part,

13 mais le chiffre n'avait pas été celui pas celui que je m'étais imaginé à

14 avoir à un moment donné, ou je que j'avais craint d'avoir.

15 Question: Dites-nous, s'il vous plaît, étant donné que vous étiez chargé

16 de fournir des médicaments et de veillez aux soins, est-ce que vous aviez

17 reçu des rapports disant que le nombre avait varié, à savoir dans le

18 courant du mois de juillet, du mois d'août et ainsi de suite, est-ce que

19 le nombre avait été le même où n'avait pas été le même?

20 Réponse: S'agissant des questions qui requièrent des chiffres exacts, je

21 ne suis pas malheureusement en état de vous donner de réponse précise,

22 mais ce que je sais, ce dont je me souviens, c'est que l'on avait proposé

23 tout de suite de relâcher les personnes qui avaient plus de 60 ou 65 ans,

24 et je crois qu'il s'agissait aussi relâcher les personnes qui avaient

25 moins de 18 ans, et à bon nombre de reprises lors des entretiens

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1 concernant les échanges, ou suite à des propositions que sais-je de la

2 part de nos médecins à nous, lorsque les gens étaient malades, je sais que

3 le nombre avait évolué, qu'il avait changé, et je pense, je ne sais pas

4 trop que d'une période à l'autre ce chiffre, ce nombre variait, mais je ne

5 sais pas vous donner de chiffre exact parce que je n'avais pas

6 d'information disant que nous allions nous entretenir sur ce sujet-là. Ce

7 qu'il conviendrait, c'est que je rafraîchisse les contacts, que je procède

8 à des vérifications et en ce moment-ci je ne suis pas en mesure de le

9 faire.

10 Question: Excusez-moi, question finale de ma part, j'apprécie beaucoup vos

11 réponse lorsque vous n'êtes pas sûre et lorsque vous n'avez pas de

12 connaissance personnelle à ce sujet, mais est-ce que vous pensez que le Dr

13 Curic serait à même de nous fournir le renseignement en question? Ou peut-

14 être serait-il nous en dire plus long, que vous étant donné qu'il avait

15 -j'imagine- été plus souvent là-bas que vous-même?

16 Réponse: Il est certain qu'il doit avoir plus d'informations que moi. Je

17 me dois de dire que ni le Dr Curic, ni les autres médecins n'avaient été

18 chargés de tâches afférentes au nombre. Ils étaient plutôt censés fournir

19 des soins médicaux, c'était là l'essentiel, le Dr Curic doit certainement

20 disposer de plus d'informations et il doit disposer de davantage

21 d'informations pour ce qui est des soins dispensés, mais on pourrait en

22 parler avec les commandants eux-mêmes.

23 Question: Merci. Merci de cette information mais nous avons ouï-dire dans

24 ce prétoire qu'il avait été question de chiffres allant à 5 à 10.000 et

25 c'est la raison pour laquelle je vous ai posé la question.

Page 12532

1 Réponse: Ah bon, très bien.

2 Question: On vous a demandé, je crois que c'est la Juge Clark qui vous l'a

3 demandé, vous n'avez pas répondu à la question parce que vous étiez

4 interrompu par le Procureur, ou peut-être n'avez-vous pas terminé la

5 réponse. Il s'agissait du document P612.2 signé par le Dr Sandrk et Dr

6 Curic qui dit que dans l'annexe cela faisait partie d'une partie d'un

7 ordre du département de la santé datée du 28 septembre 1993, et la Juge

8 Clark vous avez posé une question si cela faisait partie intégrante de cet

9 document et vous n'avez pas eu le temps de répondre.

10 Réponse: Oui, je me souviens de cette partie du texte. Après avoir élaboré

11 un aperçu pour ce qui était de la situation au niveau des soins de santé,

12 ils avaient proposé un document, et ce document faisait partie intégrante

13 d'un autre document et le complétaient pour en faire un tout, et en sus du

14 document qu'ils avaient élaboré eux-mêmes ils avaient joint un autre

15 document.

16 Question: Donc cet ordre émanant de votre part du 28 septembre 1993 devait

17 faire partie intégrante du document?

18 Réponse: C'est cela.

19 Question: Parce que nous n'avons pas ce document, c'est pour cela que je

20 vous pose la question. Je voudrais maintenant vous poser ma dernière

21 question. Docteur, ayez l'amabilité de me dire, s'agissant du document

22 P661.11: il s'agirait du document au sujet duquel le Procureur vous avait

23 demandé si c'était là votre fac simile ou pas, et vous avez dit que non.

24 Réponse: Je me souviens.

25 Question: Je vais demander l'aide de l'huissier et vous demander à vous de

Page 12533

1 vous pencher sur le coin en haut à droite. Est ce que vous pouvez nous

2 dire s'il était habituel de gribouiller dans une partie supérieure

3 quelconque, à droite ou à gauche, dans un original, pour y porter des

4 annotations quelconques ou de signer ou de parapher le document? Je me

5 réfère notamment à l'original croate.

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Réponse: Eh bien, il se peut que ce soit un document transmis par notre

8 état-major ailleurs et que ce quelqu'un d'autre éventuellement avait

9 paraphé en haut pour certifier qu'il avait bien reçu le document. Je ne

10 puis qu'imaginer que cela est le cas, il se peut que pour cette première

11 partie ce soit le cas effectivement. Et cette première partie pourrait

12 émaner du Dr Stojic, de M. Stojic.

13 Je reviens à la question posée par le Procureur concernant la signature.

14 Lorsque nous rédigions un document, nous l'envoyions là où il était cessé

15 être envoyé, mais nous pouvions imprimer une copie et la garder pour nos

16 besoins; cette copie n'était pas nécessairement signée et ne devait pas

17 forcément quitter nos bureaux avec des sceaux en haut à droite. Il se peut

18 donc que celui qui avait reçu le document quelque part avait apposé un

19 paraphe, et j'imagine que vous avez reçu ces exemplaires-là de la part du

20 ministère de la Défense qui avait peut-être été le destinataire. Je ne

21 peux pas vous l'affirmer avec certitude.

22 Question: Mais pour être tout à fait certain, dites-nous finalement avec

23 toutes ces tentatives de questions, qui vous ont été adressées, nous

24 préciser quel est le document que l'on devrait et pourrait considérer

25 comme étant un original?

Page 12534

1 Réponse: Avec un en-tête qui est l'en-tête de service officiel, qui n'a

2 pas cette apparence, avec en bas une signature et un cachet.

3 Question: Quand vous dites signature, à quel type de signature vous vous

4 référez? On estime ici ou on essaie de faire entendre ici qu'une signature

5 c'est ce qu'on avait tapé à la machine, en bas à droite.

6 Réponse: Ah non.

7 Question: Mais, n'allez pas trop vite, nous nous comprenons bien, mais ne

8 répondez pas si vite! Quand vous dites signature, est-ce que vous entendez

9 une signature faite par la main de l'intéressé?

10 Réponse: Excusez-moi, vous parlez de ceci?

11 Question: Non, je parle en général d'un document. Quand vous parlez d'un

12 document original, de quoi doit avoir l'air un document?

13 Réponse: Vous parlez de mes documents?

14 Question: Oui, en effet.

15 Réponse: Mes documents en original étaient des documents qui avaient par

16 exemple, en bas, tapés à la machine ou à l'ordinateur "l'adjoint du

17 commandant chargé de la Santé", etc., et il y avait une inscription qui

18 disait "signé personnellement ou par", et c'était signé par moi-même ou

19 alors c'était signé par l'un quelconque de mes collègues qui était

20 habilité à le faire.

21 Question: Et c'est donc ce que vous considéreriez comme étant un document

22 original?

23 Réponse: Oui, c'est à mon avis, ce que l'on pouvait considérer comme tel

24 parce que je ne pouvais pas être tout le temps présent pour signer chacun

25 des documents émis, pour signer chaque chose.

Page 12535

1 Question: Monsieur, Docteur, quand vous envoyez un document aux Nations

2 Unies, est-ce que vous allez le signer vous-même?

3 Réponse: Oui, mais ceci n'est pas un document qui avait été adressé aux

4 Nations Unies!

5 Question: Non, je ne vous pose pas la question strictement pour ce

6 document, stricto sensu pour ce document, je vous pose la question de

7 savoir si les documents qui émaneraient de vous étaient signés par vos

8 soins?

9 Réponse: Oui, bien sûr qu'ils étaient signés par mes soins.

10 Question: Dernière question de ma part, Docteur, si la défense vous

11 demanderait dans deux semaines de faire en sorte, dans un délai de deux

12 semaines, de nous faire parvenir des documents, est-ce que vous pourriez

13 me les faire parvenir pour que je puisse les remettre à l'éminente Chambre

14 de ce Tribunal, si vous estimez pouvoir le faire?

15 M. Bagaric (interprétation): A mes yeux, toute demande émanant de ce

16 Tribunal équivaut à une obligation. C'est ainsi que je vois les choses. Il

17 s'entend que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous faire

18 parvenir ce que je suis en mesure de me procurer avec les collègues, les

19 médecins. Dans quel délai je serai en mesure de le faire? Je ne sais pas

20 vous dire au juste.

21 M. Krsnik (interprétation): Merci beaucoup, je n'ai plus de questions à

22 votre intention.

23 M. Bagaric (interprétation): Je vous remercie également.

24 M. le Président (interprétation): Des questions de la part des Juges?

25 (Questions au témoin, M. Ivan Bagaric, par Mme la Juge Clark.)

Page 12536

1 Mme Clark (interprétation): J'espère que vous pourrez éclaircir quelques

2 points à mon intention. Avant le conflit en 1992, même avec les Serbes,

3 quel était l'éthique de l'hôpital de Mostar? Par éthique, peut-être que

4 cela pose des problèmes de traduction, je ne sais pas. Dans beaucoup de

5 pays, dans la plupart des pays! Vous comprenez ce que veut dire éthique?

6 M. Bagaric (interprétation): Bien. Je crois que oui. C'est la composition

7 nationale.

8 Question: Non, non. Dans la plupart des pays que je connais, il y a

9 beaucoup de religions, certains des hôpitaux ont une éthique catholique,

10 et il y a peut-être des religieuses; d'autres hôpitaux sont protestants,

11 c'est un conseil d'administration qui les administre. Certains en Grande-

12 Bretagne, par exemple, sont israélites et d'autres sont civils. Si c'était

13 un hôpital catholique, il n'y avait pas de fertilisation in vitro, il n'y

14 a pas d'avortement ou d'interruption de grossesse. C'est cela que je veux

15 dire par éthique.

16 Voici ma question: est-ce que l'hôpital principal de Mostar qui, par la

17 suite est devenu l'hôpital de guerre, est-ce que cet hôpital-là, avant le

18 conflit, avait-il une éthique particulière, catholique, orthodoxe,

19 musulmane, ou bien est-ce que cet hôpital était au service de l'ensemble

20 de la population de la municipalité de Mostar?

21 Vous faites un signe affirmatif, il n'y avait donc pas d'éthique

22 particulière, c'était au service de tout le monde.

23 Très bien. Lorsque le HVO a été créé, est-ce qu'il y avait des drapeaux

24 devant l'hôpital? Lorsque le HVO a repris l'administration au jour le jour

25 de Mostar, est-ce qu'il y avait un drapeau devant l'hôpital?

Page 12537

1 Réponse: Je comprends votre question, mais je ne peux pas vous parler de

2 ce qui se passait immédiatement avant le conflit de 1992, parce que je

3 n'étais pas à Mostar à ce moment-là. C'était une époque de conflit entre

4 Croates et Musulmans d'une part, et les Serbes de l'autre. Vraiment je ne

5 peux donc pas vous dire s'il y avait quelque chose ou pas à ce moment-là.

6 Ce que je peux vous dire en tout cas c'est que pendant le conflit avec les

7 Musulmans, donc entre Croates et Musulmans, à plusieurs reprises, j'ai

8 observé le fait, -pas pour l'hôpital, je n'ai pas vu de drapeau croate sur

9 l'hôpital-, mais au point de contrôle dans la cour de l'hôpital, dans le

10 périmètre de l'hôpital, à l'entrée où il y avait des contrôles de police

11 militaire pour les entrées, j'ai vu, je crois avoir vu un drapeau croate à

12 un moment.

13 Je suis intervenu personnellement, j'ai demandé qu'on enlève ce drapeau

14 parce que cela donnait une excuse pour un pilonnage éventuel. J'ai dit que

15 quelqu'un pourrait y voir un signe que nous ne recevrions pas des

16 personnes appartenant à d'autres religions. Il n'y avait donc pas de

17 drapeau, et je ne crois pas qu'il en a eu. Le seul drapeau était le

18 drapeau de la Croix-Rouge. Mais je me souviens d'être intervenu

19 personnellement dans le périmètre de l'hôpital, à l'entrée principale qui

20 était à 300 ou 500 mètres du bâtiment principal de l'hôpital; c'est là où

21 il y avait ce poste de contrôle de la police militaire à l'entrée.

22 Question: Merci, Docteur. Je voulais vous poser une autre question. Est-ce

23 que l'huissier pourrait remettre au Dr Bagaric le document D1.380? C'est

24 une liste de fournitures médicales dans un envoi à l'armée de Bosnie-

25 Herzégovine datée du 8 juin 1993.

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1 Réponse: Je vois.

2 Question: Docteur, pourriez-vous m'expliquer ce que veut dire "SC" après

3 "quantité"? Qu'est-ce que cela veut dire "SC" après les quantités, après

4 le chiffre?

5 Réponse: "SC", cela veut dire une Scatulla, c'est-à-dire une boîte, une

6 boîte qui contient ces médicaments. "Sc", c'est l'abréviation du mot latin

7 Scatulla. C'est une mesure…

8 Question: Point 25, ce sont des médicaments en vrac, deux boîtes. Point

9 25, médicaments en vrac.

10 Réponse: Je crois que ces médicaments c'est un petit peu comme de la

11 Penbritine (phon), en rubrique 1; c'est un antibiotique. On les compte en

12 Scatulla, mais pour ces médicaments en vrac… Non.

13 24, ce sont les solutions pour deux perfusions. Une palette, c'est-à-dire

14 une centaine de solutions de perfusion pour les médicaments en vrac, deux

15 boites… Je ne comprends pas, cela peut peut-être vouloir dire qu'il y

16 avait différents médicaments qui n'étaient pas assortis. C'est souvent

17 comme cela qu'on les reçoit dans l'aide humanitaire. Vous avez encore

18 beaucoup de médicaments de l'aide humanitaire qui sont en fait toxiques

19 lorsqu'ils sont périmés. Peut-être qu'il s'agit de médicaments qui ne sont

20 pas vraiment triés. C'est pour cela qu'on les appelle en vrac.

21 Question: Je vous remercie, je laisse cela de côté pour l'instant.

22 Docteur, d'après ce que je crois comprendre de votre témoignage, rectifiez

23 si je me trompe, avant juillet, la mi-juillet 1993, vous ne saviez pas que

24 l'Héliodrome était utilisé comme centre de détention pour des Musulmans.

25 Lorsque vous y êtes allé, il n'y avait pas de soins médicaux qui y étaient

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1 assurés du tout?

2 Réponse: Pour être tout à fait précis, la première fois que j'ai entendu

3 dire qu'il y avait les détenus, une réunion à Jablanica, je l'ai déjà dit,

4 M. Halilovic a dit qu'il y avait des soldats détenus, bien que la guerre

5 n'ait pas commencé en ce moment-là, et j'étais vraiment très étonné. En

6 fait, une commission s'est rendue dans cette prison qui était là, et je ne

7 savais même pas où se trouvait l'Héliodrome et que des gens y étaient. Ça,

8 c'est un premier point.

9 Deuxièmement, pendant le conflit en mai et juin, je vous ai dit qu'en

10 juin, à la mi-juin, je suis allé là où je suis allé, c'est-à-dire au

11 Canada. Lorsque je suis revenu -c'était je pense vers la mi-juin-, donc je

12 suis parti fin juin, je suis revenu vers le 20 juin, et à ce moment-là

13 j'ai entendu d'autres médecins dire qu'ils étaient allés dans ces locaux,

14 que ceux qui avaient besoin d'aide étaient traités. J'ai entendu dire

15 qu'il y avait un grand nombre de personnes, et que nous étions censés

16 intervenir.

17 Je vous ai dit également que, moi, j'ai contribué à cette intervention.

18 Cela a été ma première visite avec le Dr Lang dont je vous ai déjà parlé.

19 Mais à ce moment-là, je ne peux pas vous dire de façon certaine que telle

20 ou telle personne supervisait ceci ou cela. Je sais que le responsable des

21 services médicaux de telle ou telle brigade de la région recevait des gens

22 et leur assurait des soins et après ma visite nous avons organisé une

23 protection et une supervision en bonne forme.

24 Question: Donc ce que vous dites c'est que les soins que recevaient les

25 prisonniers avant votre visite fin juillet 1993, après votre visite avec

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1 le Dr Lang se soldaient par une amélioration de la situation?

2 Réponse: Absolument.

3 Question: Parce que M. Bruno Stojic nous a dit dans son témoignage…Est-ce

4 que j'ai dit quelque chose que je ne devrais pas dire?

5 M. Krsnik (interprétation): Non, mais M. Stojic n'a jamais déposé devant

6 ce Tribunal.

7 Mme Clark (interprétation): Quelqu'un de position très élevée qui était

8 peut-être un témoin protégé, peut-être il faudrait passer en séance à huis

9 clos partiel.

10 M. Krsnik (interprétation): Vous parlez de M. Bozo (phon).

11 Mme Clark (interprétation): Nous avons des problèmes terribles pour se

12 souvenir de ces noms, cette personne qui est très importante dans le HVO

13 est allée visiter l'Héliodrome et nous a dit qu'il avait été choqué par ce

14 qu'il avait vu. Mais je crois qu'il y est peut-être allé avant vous, c'est

15 peut-être cela la situation, mais de toute manière ce que vous dites en

16 témoignage, c'est qu'après votre visite, il y a eu une sensible

17 amélioration des soins médicaux donnés à ces prisonniers.

18 La question que je voulais poser Docteur Bagaric est la suivante: est-ce

19 que vous faites une distinction en fonction, entre le bien-être général

20 des détenus et les soins qu'ils leur sont donnés lorsque leur état médical

21 l'exige? Est-ce que vous faites une distinction entre le bien-être et les

22 soins médicaux?

23 M. Bagaric (interprétation): Une distinction très ténue entre les deux. On

24 ne peut pas vraiment bien soigner les gens s'ils sont mal nourris en même

25 temps. Alors je vois ce que vous voulez dire. Si vous me demandez "est-ce

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1 que la situation s'est améliorée après notre visite?" La réponse tout à

2 fait exacte serait la suivante: je ne pense pas qu'elle se soit améliorée

3 le lendemain matin ou même dans les deux ou trois jours qui ont suivi,

4 mais quelques jours plus tard, dix jours plus tard, la situation était

5 sensiblement meilleure.

6 Parce que nous avons insisté pour que des médecins s'y rendent et ensuite

7 au début du mois d'août, nous avons même organisé un centre médical, une

8 antenne médicale. Je suis d'accord avec vous pour dire que les conditions

9 qui y régnaient, la surpopulation, etc., aggravaient manifestement la

10 situation dans laquelle ces gens vivaient. Et bien entendu, cela

11 représentait beaucoup de problèmes pour les soins de santé.

12 Question: Vous avez fait une différence entre problème sanitaire, absence

13 de possibilité de toilette, je suppose que vous ne pouviez rien y faire?

14 Réponse: C'était là quelque chose qui relevait de la logistique nécessaire

15 pour que certaines conditions soient réunies l'inspection de santé qui

16 doit être faite pour instaurer des conditions permettant d'empêcher des

17 épidémies. Je peux vous dire qu'au début les résultats n'ont pas été

18 spectaculaires, mais après l'ouverture médicale de notre antenne médicale,

19 la situation simplement avec cela, la situation s'est améliorée et de ce

20 fait il n'y a pas eu d'épidémie. Il n'y a pas eu de situation médicale

21 grave pour un pour un grand nombre de gens.

22 Si vous lisez tous les documents que l'accusation vous a donnés, surtout

23 la deuxième page où l'on dit qu'il faut ajouter de l'eau de javel à l'eau,

24 que ceux qui manutentionnaient des denrées alimentaires doivent répondre à

25 des conditions sanitaires, etc., et que le régime alimentaire doit être

Page 12542

1 amélioré, que l'hygiène doit être améliorée, les conditions sanitaires de

2 toilette, par exemple etc., de toute évidence, la situation était très

3 sérieuse et ne pouvait pas être bonne, elle ne pouvait pas être optimale.

4 Mais de mon point de vue en tant que médecin, ce qui était nécessaire,

5 c'est que ceux qui avaient besoin de soins de santé en bénéficient et ce

6 qu'il fallait pouvoir envoyer à l'hôpital ceux qui avaient besoin d'être

7 hospitalisés, et c'est à cela que nous avons veillé.

8 Question: Merci. Vous pouvez peut-être considérer que cela ne relève pas

9 de votre domaine de compétence ou de connaissance mais je vous pose la

10 question parce que cela nous préoccupe. L'année où vous êtes allé à Mostar

11 -et vraiment c'est le moment où il y avait le point culminant des

12 hostilités en 1993-, en tant que médecin et dans la position que vous

13 occupiez dans le HVO, étiez-vous au courant de ce qu'il y avait, des

14 comptes rendus, je n'irai pas plus loin, des comptes rendus selon lesquels

15 on utilisait les prisonniers sur la ligne de front ou à proximité, et que

16 par conséquent un certain nombre d'entre eux ont eu des blessures par

17 balle, et ont été tués. Est-ce que personnellement vous en avez eu

18 connaissance?

19 Réponse: J'ai eu connaissance du fait que des gens sortaient pour faire

20 certains travaux. Des groupes de gens faisaient des travaux, et vu la

21 pénurie de travailleurs, on envoyait des gens à l'extérieur faire des

22 travaux. Quel genre de travaux? Je ne sais pas. Je l'ai entendu dire. Mais

23 où on les amenait, où ils ont été blessés, comment? Je ne peux pas vous le

24 dire, je n'en suis pas sûr. Je crois qu'il serait bon que vous puissiez

25 prendre contact avec les gens qui y étaient. Je suis sûr qu'ils pourraient

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1 vous donner beaucoup plus d'informations.

2 J'ai entendu dire que les gens de ces centres étaient amenés à faire des

3 travaux. Ils ont peut-être été blessés, et j'ai même entendu dire que

4 certains avaient été tués, mais est-ce que cela s'est passé de telle ou

5 telle façon? Il y avait beaucoup de pilonnages, donc je ne peux pas

6 vraiment vous répondre, je ne peux pas témoigner en ce sens.

7 Question: Alors Docteur, pouvez-vous nous dire ceci? Est-ce que cela

8 faisait partie de vos compétences, de votre rôle dans les fonctions que

9 vous occupiez, de faire une enquête à la suite du décès d'un prisonnier?

10 Est-ce que c'était fait par la police ou bien est-ce que vous aviez un

11 rôle à jouer là-dedans? Si un prisonnier mourait ou s'il était gravement

12 blessé, est-ce qu'il y avait un protocole d'enquête, une procédure

13 d'enquête?

14 Réponse: Si quelqu'un était blessé, il était traité à l'hôpital en tant

15 que patient. Ce que devenaient ces gens après, c'était qu'ils étaient

16 traités à l'hôpital. Nous avions à l'hôpital une structure de travail, je

17 n'avais pas besoin d'intervenir, je n'avais pas d'objection à faire en

18 dehors des soins de santé donnés à ces patients, qu'ils soient musulmans,

19 croates ou autres. Ce n'était pas ma responsabilité, je n'avais pas à

20 intervenir. Lorsque quelqu'un était tué, ces centres avaient leurs

21 commandants respectifs, et je vous ai dit que nos médecins étaient dans le

22 centre, et ma responsabilité était d'assurer le niveau maximal de soins.

23 Nous ne pouvions pas prendre la responsabilité de ce que les gens

24 souhaitaient envoyer faire des travaux, et éventuellement s'y trouvaient

25 blessés ou pas. Je vous l'ai dit, nous avons été très étonnés de voir ces

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1 centres parce que nous n'étions absolument pas prêts ou préparés à les

2 voir.

3 Ma principale tâche était d'organiser les soins de santé à l'intention des

4 unités et de la population. Lorsque ces centres ont été ouverts, nous

5 avons assuré les soins de santé parce que personne d'autre n'était là pour

6 le faire. Les organisations internationales malheureusement n'ont pas

7 assez fait pour accroître leur présence. Lorsque j'ai parlé de nos

8 propositions, lorsque nous avons dit que les représentants de la Croix-

9 Rouge devraient être là en permanence pour rendre compte de ces centres,

10 c'était à cela que visaient mes propositions. Ce que vous m'avez demandé

11 ne relevait pas de notre compétence.

12 Question: Docteur, le traitement des prisonniers de guerre ou des détenus

13 relevait de quelle compétence? Qui était responsable du bien-être des

14 détenus qui étaient blessés ou tués? Nous savons d'après les documents que

15 nous avons vus, Docteur, qu'il y a eu des détenus qui ont été blessés ou

16 tués, je ne dis pas comment ou qui a causé cela, mais lorsqu'ils ont été

17 sortis de l'hôpital, ils se trouvaient près des lignes de confrontation ou

18 sur les lignes de confrontation: qui était responsable du bien-être des

19 prisonniers de guerre?

20 Réponse: Moi, je parle des cas où quelqu'un était blessé soit un détenu

21 soit quelqu'un d'autre. Cette personne relevait de notre responsabilité.

22 C'étaient les services médicaux, c'était l'hôpital qui s'en occupait.

23 Pour ce qui était des gens qui étaient tués, ce n'était pas de notre

24 responsabilité, nous n'étions pas responsables du Conseil de défense

25 croate, des civils ou des membres de l'armée HVO. Par la suite, il y a eu

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1 des organes qui s'occupaient des victimes de la guerre, mais cela ne

2 relevait pas de nos compétences. Je vous prie de m'excuser, ceux qui

3 étaient blessés et qui étaient traités, eux, ils relevaient de notre

4 compétence, ils étaient traités dans nos hôpitaux. Je ne peux pas vous

5 dire ici que tous ceux qui ont été blessés, nous les avons traités. Mais

6 nous les avons traités si on nous les amenait ou si nous savions leur

7 existence. Mais si un membre du HVO était blessé quelque part où il n'y

8 avait pas de médecin, très loin, les médecins ne sont pas au courant de

9 leur existence, quelqu'un peut mourir d'hémorragie sans assistance, parce

10 que les routes sont bloquées ou parce que l'intéressé n'a pas été cherché

11 en temps voulu ou parce que les services de secours ne sont pas arrivés en

12 temps utile. Mais dans nos hôpitaux, nous avons reçu des gens qui avaient

13 été blessés et nous étions responsables de leur traitement.

14 Question: Si je peux résumer votre témoignage, si je l'ai bien compris à

15 propos de cet aspect: les installations de traitement de tous les blessés

16 étaient là, quelle que soit leur origine, mais il n'y avait rien que vous-

17 même ou les médecins vous pouviez faire pour amener les militaires à les

18 faire venir jusqu'à l'hôpital. Cela ne relevait pas de votre

19 responsabilité. Vous pouviez assurer des traitements, mais vous ne pouviez

20 forcer personne à amener les détenus ou d'autres blessés à votre hôpital

21 pour y être traités?

22 M. Bagaric (interprétation): Je ne connais aucun cas où quelqu'un aurait

23 été blessé, avait besoin d'aide et n'aurait pas été emmené et traité chez

24 nous. Lorsque vous alléguez qu'il est donc possible que cela se soit

25 produit, ça n'est pas fondé.

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1 Je voudrais que nous tirions quelque chose au clair. Ce que j'ai dit,

2 c'est qu'il peut y avoir eu un soldat HVO blessé dans une de ces poches ou

3 enclaves, et que les gens ne pouvaient pas amener les blessés au centre

4 médical en temps utile, et que quelqu'un est peut-être mort de ce fait.

5 Moi, ce sont des cas dont j'ai entendu parler.

6 Je me souviens d'une infirmière qui a été tuée dans une embuscade, et le

7 temps de la retrouver, elle était encore vivante, mais en fait, elle est

8 morte d'hémorragie. Mais je n'ai pas entendu parler en règle générale de

9 quelqu'un qui aurait été blessé, quelle que soit son origine, qui n'aurait

10 pas été transporté là où il aurait dû être transporté.

11 Ce que je veux dire, c'est que parfois ils sont arrivés trop tard. Si vous

12 parlez concrètement de gens qui faisaient des travaux, qui étaient des

13 détenus, je n'ai jamais entendu parler de l'un d'eux qui aurait été

14 blessé, qui n'aurait pas été amené pour des soins. Je n'ai pas entendu

15 parler de cela. Moi, je crois que ceux qui étaient blessés, quelle que

16 soit leur nationalité, auraient été traités.

17 Mme Clark (interprétation): Je vous remercie de votre assistance, Docteur.

18 (Questions au témoin, M. Ivan Bagaric, par Mme la Juge Diarra.)

19 Mme Diarra: Pour rester au centre de détention de l'Héliodrome, Docteur,

20 vous avez dit -je vous cite que-: "Ce centre était, hélas, l'une des

21 résultantes non souhaitées de la guerre". Je trouve ce sentiment vague.

22 Nous avons besoin de savoir si vous étiez indigné par les conditions de

23 détention de ces personnes, c'est-à-dire locaux étroits avec insuffisance

24 d'espace, manque de chauffage, manque d'hygiène. Ou bien s'ils étaient

25 dans un état de santé déplorable et si cet état… s'il s'agissait de

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1 maladies générales, maladies infectieuses ou autre inflammation, ou si

2 c'étaient des conséquences de passages à tabac, tortures, sévisses ou des

3 traces de balles ou la faim.

4 En tout cas, j'ai trouvé votre sentiment très vague. Je voudrais à

5 présent, malgré les explications fournies à ma collègue, savoir

6 précisément ce qui vous avait indigné.

7 M. Bagaric (interprétation): Eh bien, tout d'abord pour commencer, le

8 résultat de la guerre qui n'aurait pas de résultat souhaitable, je parlais

9 de moi-même et de mes confrères qui avions tous étudié la médecine. En

10 effet, nous n'avions pas d'expérience de guerre et nous ne nous attendions

11 pas à ce qu'en raison du conflit entre les Croates et les Musulmans…

12 Mme Diarra: (Hors micro.) …inutilement. Je veux savoir ce qui vous a

13 indigné, si les détenus avaient des traces de passage à tabac, des traces

14 de torture, de balle, ou étaient-ce des victimes de maladies générales ou

15 infectieuses, s'ils avaient froid, s'ils avaient faim, s'ils étaient trop

16 serrés dans les cellules. Expliquez-moi le fondement de votre sentiment

17 d'indignation, ne faites plus un rappel historique de la situation!

18 Réponse: Bien. D'accord. Lorsque je suis allé moi-même à ce centre, j'ai

19 vu beaucoup de monde dans un même endroit, je n'ai pas vu d'individus

20 blessés, je n'en ai vu aucun à ce moment, mais j'ai vu des hommes qui

21 disaient prendre des médicaments pour la tension artérielle et "je n'ai

22 plus de médicament", par exemple. Vous comprenez ce que je veux dire. Des

23 individus qui venaient vers nous, les médecins, et se plaignaient de

24 manquer de tel ou tel médicament en disant qu'ils avaient besoin de tel ou

25 tel médicament.

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1 Donc déjà, le simple fait d'avoir beaucoup d'individus dans un même lieu,

2 même s'ils sont en bon état, s'ils sont en bonne santé, cela nécessite une

3 intervention ne serait-ce que pour anticiper des événements éventuels; il

4 pourrait y avoir une épidémie ou tout autre problème en raison du simple

5 nombre de personnes. En effet, ils nous avaient formulé des demandes et

6 j'ai donc vu que la situation était grave, qu'il fallait corriger la

7 situation. Et en ce qui concerne les soins de santé, il fallait créer un

8 groupe de manière urgente pour surveiller et traiter les individus. Voilà.

9 Question: Merci. Est-ce que vous avez dit que, après les attaques du 9 mai

10 1993 et d'autres événements consécutifs, la Bosnie était restée intacte et

11 entière? Vous avez dit cela? En tout cas, c'est ce que j'ai compris, je

12 l'ai noté. Est-ce que vous l'avez dit? Est-ce que moi je ne me trompe pas?

13 Réponse: Qu'est-ce que vous voulez dire par le fait que la Bosnie était

14 intacte?

15 Question: Vous avez affirmé ici, dans cette salle, qu'après les attaques

16 du 9 mai et d'autres événements consécutifs, la Bosnie est restée intacte

17 et entière. Est-ce que je me suis trompée ou bien est-ce que vous l'avez

18 dit -puisque nous ne parlons pas la même langue, vous parlez vite, il y a

19 les interprètes entre nous-, si vous avez affirmé que la Bosnie était

20 restée intacte et entière?

21 Réponse: Je ne pense pas en avoir parlé, en tout cas je ne me souviens pas

22 en avoir parlé.

23 Question: Je n'insiste pas. Vous avez parlé de Mme Minder pour qu'elle

24 vienne en aide face à la situation tragique de Klis et Konjic -je m'excuse

25 si je prononce mal les noms-: qui est Mme Minder? Et vous avez dit

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1 qu'elle-même avait besoin d'autorisations pour vous aider: l'autorisation

2 de qui?

3 Réponse: Je ne me souviens pas s'il s'agissait de Mme Minder ou quelqu'un

4 d'autre, j'aurais besoin du document, car en effet nous lisions des

5 documents. Je crois que vous vous référez à un document qui a été envoyé

6 au comité international de la Croix-Rouge et c'était elle qui était

7 responsable -me semble-t-il- à l'époque, et c'est de cela qu'il s'agit me

8 semble-t-il. Si c'est cela -je crois que c'est cela-, c'est une

9 organisation internationale qui n'est pas armée, qui n'a pas d'armement.

10 Et le personnel n'est pas armé, donc il ne peut pas se rendre à Konjic ou

11 à d'autres villages croates où des crimes avaient été commis puisque les

12 forces musulmanes et les forces de l'armée de Bosnie-Herzégovine

13 bloquaient la zone. Donc elle avait besoin de permission pour s'y rendre,

14 autrement elle ne pouvait pas y aller; nous n'avons pas obtenu cette

15 autorisation et nous n'avons pu rien faire.

16 Mme Diarra: Je vous remercie, Docteur Bagaric, pour toutes ces réponses.

17 M. le Président (interprétation): Y a-t-il d'autres questions, Monsieur

18 Scott.

19 (Contre-interrogatoire supplémentaire du témoin, M. Ivan Bagaric, par M.

20 Scott.)

21 M. Scott (interprétation): Oui, Monsieur le Président, j'ai une question à

22 la suite de la question posée par Mme la Juge Clark, concernant

23 l'amélioration matérielle des conditions de détention après juillet 1993.

24 J'aimerais encore demander à l'huissier de bien vouloir présenter au

25 témoin le document P630.2.

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1 (Intervention de l'huissier.)

2 En raison de l'heure tardive, je n'ai pas le temps de vous montrer les

3 autres documents, mais ici c'est un document similaire le P638.1. Il

4 s'agit d'une lettre de M. Bozic adressée à Bruno Stojic. L'autre document

5 était daté du 11 octobre 1993, c'est-à-dire le 638.1, et les deux textes

6 sont pratiquement identiques.

7 Monsieur le Témoin, sur le document 632, voyez-vous des annotations de

8 Mate Boban où il écrit à M. Valentin Coric, chef de la police: "C'est un

9 problème grave, veuillez contacter Bozic et trouver une solution dans les

10 limites du possible en accord avec le droit humanitaire. Faites-moi un

11 rapport, et décrire la situation: qui, quand, etc.?" Daté du 13 octobre

12 1993, Boban, de la main de Boban, l'annotation "ceci est urgent".

13 M. Bagaric (interprétation): Je vous prie de m'excuser mais je ne sais pas

14 de quoi vous parlez. On me montre un document daté du 10 octobre 1993, je

15 ne vois absolument pas la cote que vous avez annoncée. Ici, je vois le

16 document 01538326, c'est bien celui-ci dont il s'agit?

17 Question: Oui, en langue croate dans ce même texte, vous pouvez voir en

18 haut à droite des annotations à la main signées Boban?

19 Réponse: Oui, en effet, je le vois. Quelle est votre question?

20 Question: Ce rapport dont le contenu est similaire au document 638.1 de M.

21 Bozic, comme ce rapport a été lu par Boban, sa réaction a été de dire

22 qu'il fallait corriger la situation immédiatement. Ne peut-on pas

23 considérer que depuis le 10 octobre 1993, la situation n'avait pas été

24 corrigée, améliorée?

25 M. Bagaric (interprétation): Bien. Je ne vois pas du tout, je ne connais

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1 pas ce document, je ne sais pas à qui il a été envoyé. Bien sûr je

2 pourrais le lire. Je vois en effet: "Le contenu comporte des détails sur

3 le nombre des blessés, les problèmes de traitement, d'approvisionnement

4 médical, la mise en place d'une clinique, etc.". Et ce document… enfin

5 j'avais déclaré en date du 10 octobre 1993 qu'à ce moment nous avions mis

6 en place une équipe médicale à l'extérieur du centre, et puis il y avait

7 une équipe à l'intérieur du centre qui permettait de régler la plupart des

8 problèmes.

9 Je ne peux pas parler d'un rapport, d'un document qui a été écrit par

10 quelqu'un d'autre, je suis désolé. Vous ne m'avez pas envoyé le rapport de

11 mes médecins qui disait autre chose. Je ne sais pas s'il s'agit ici d'un

12 problème très grave, je ne sais pas si le centre est devenu un problème en

13 tant que tel. Peut-être qu'ils ne savaient plus comment le gérer, qu'ils

14 ne pouvaient gérer tous les problèmes qui se posaient de toutes sortes,

15 dont on parle, ici. Je n'en ai pas connaissance.

16 Mais en ce qui concerne les soins médicaux dont je vous ai parlé, et

17 notamment dans le rapport des médecins dont je vous ai déjà parlé, la

18 situation s'était améliorée. Je ne peux donc pas commenter sur ce

19 document. Il faudrait que je puisse prendre le temps nécessaire pour le

20 lire et le regarder, mais je crois que ce document porte sur le centre.

21 M. Scott (interprétation): Merci. En tant que membre responsable du

22 ministère de la Défense de haut niveau, n'est-il pas vrai que, suite aux

23 pressions internationales, à la fin de 1993, on a retiré Mate Boban de sa

24 place?

25 M. Krsnik (interprétation): Objection! Ceci ne découle pas des questions

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1 posées par le Juge Clark.

2 M. le Président (interprétation): Ceci ne découle pas des questions posées

3 par le Juge Clark.

4 M. Scott (interprétation): Je ne suis pas d'accord car, en effet, Mate

5 Boban a été retiré de ses fonctions partiellement en raison de cela.

6 Justement, pour moi, le rapport est tout à fait direct, mais je respecte

7 votre décision.

8 M. le Président (interprétation): Je préférerais que vous retiriez votre

9 question. A ce stade, il est très tard.

10 M. Scott (interprétation): Je ne retirerai pas la question Monsieur le

11 Juge; pour moi c'est une question tout à fait pertinente.

12 M. Bagaric (interprétation): Dois-je répondre?

13 M. le Président (interprétation): Si vous souhaitez répondre, vous pouvez

14 le faire.

15 M. Bagaric (interprétation): Pourquoi pas? Le Procureur a raison lorsqu'il

16 dit que ce centre est devenu un problème. Il y avait des problèmes de

17 maintenance, des problèmes d'approvisionnement alimentaire et de

18 médicaments. En effet, il y avait toute une série de problèmes qui

19 nécessitaient un effort supplémentaire et du travail supplémentaire, tout

20 comme toute autre unité de ce type. En effet, je n'en ai pas de doute.

21 Mais ce serait complètement fou de dire, après les différents documents et

22 les témoignages que j'ai présentés des membres de mon équipe, que rien

23 n'avait changé. Lorsqu'il s'agit de soins médicaux, je réfute toute

24 accusation de ce type et je ne vois pas absolument pas pourquoi on

25 poserait de telles questions pour savoir pourquoi il était fermé. Bien sûr

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1 il aurait fallu ne jamais ouvrir de tels centres, peut-être en Bosnie! Là-

2 dessus, je suis d'accord.

3 Mais ce que j'ai dit c'est que nous avons fait de la prévention, nous

4 avons apporté des soins de santé, nous avons évité les épidémies dans la

5 mesure de nos moyens. C'était l'essentiel. Les gens avaient souffert en

6 masse, ils ont été tués, ils sont tombés malades; effectivement c'est la

7 vérité.

8 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik.

9 M. Krsnik (interprétation): Nous n'avons plus de temps en effet, il aurait

10 fallu interrompre l'accusation à 5 heures moins le quart et non pas à 7

11 heures. J'ai d'autres témoins, le professeur, un autre témoin doit venir,

12 et je vais changer de tactique dorénavant car je dois faire entendre

13 l'ensemble de mes témoins.

14 M. le Président (interprétation): Avez-vous encore des questions pour ce

15 témoin? Si vous voulez, vous pouvez les poser maintenant.

16 (Questions supplémentaires au témoin, M. Ivan Bagaric, par Me Krsnik.)

17 M. Krsnik (interprétation): Une question. Suite à la question Mme Diarra

18 qui n'a pas trouvé réponse, la Juge a posé une question concernant le

19 conflit. Votre première question portait sur les conditions. Qu'est-ce que

20 vous vouliez dire lorsque vous parliez du conflit à Mostar? Pouvez-vous

21 répondre très brièvement, car il est déjà 7 heures du soir? Pouvez-vous

22 répondre en une seule phrase? C'est une question liée à celle posée par la

23 Juge Diarra.

24 M. Bagaric (interprétation): Lorsque les Croates et les Musulmans dans le

25 Conseil de défense croate se battaient contre l'ennemi commun, il n'y

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1 avait pas de détention. Personne n'était détenu. Mais au moment où les

2 unités musulmanes ont quitté l'armée musulmane et le Conseil de la défense

3 croate, du jour au lendemain je ne sais pas exactement, à un moment donné,

4 dans certaines zones il y avait des conflits et plus personne ne faisait

5 confiance à quiconque, et tout le monde se méfiait de tout le monde. Et je

6 crois que c'est cela la cause pour éviter que les gens s'arment encore

7 davantage au nom de l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'est donc cela qui a

8 été le résultat.

9 Question: Peut-on jeter un coup d'œil sur les pièces 630.2 et 638.1? Je

10 n'ai pas vraiment de question, mais si vous regardez ces documents -je ne

11 sais pas à quoi ils ressemblent en version anglaise car je ne les ai pas

12 en anglais-, mais en langue croate, donc la version d'origine, les textes

13 sont identiques, les deux textes sont parfaitement identiques,

14 parfaitement identiques à part la toute dernière phrase, les 8 points dans

15 cette liste sont identiques.

16 Je vous demande de regarder l'original croate, il n'y a ni signature, ni

17 tampon. Comment est-ce possible? Il s'agit du document 638.1: pas de

18 signature, pas de tampon; exactement identique au document 630.2. Merci

19 beaucoup, je n'ai plus de question.

20 M. le Président (interprétation): Je voudrais vous remercier Monsieur le

21 Témoin, d'être venu ici à La Haye afin de nous aider, nous vous remercions

22 et nous vous souhaitons bonne chance dans votre avenir. L'huissier va vous

23 montrer le chemin. Bon voyage chez vous.

24 M. Bagaric (interprétation): Merci beaucoup Monsieur le Président.

25 M. le Président (interprétation): Vous pouvez partir.

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1 M. Bagaric (interprétation): Je n'ai même pas pu serrer la main de

2 l'accusé alors qu'il était dans la salle depuis le début.

3 M. le Président (interprétation): Vous n'avez pas le droit de serrer la

4 main aux accusés.

5 (Le témoin, M. Ivan Bagaric, est reconduit hors du prétoire.)

6 M. le Président (interprétation): Nous avons 5 minutes de retard, nous

7 n'avons pas le temps pour la présentation des documents, je vous demande

8 de bien vouloir présenter vos soumissions par écrit d'ici une semaine, y

9 compris vos objections concernant les documents de la partie adverse. Nous

10 allons reprendre cette session demain après-midi.

11 (L'audience est levée à 19 heures 07.)

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