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1 (Lundi 16 septembre 2002.)
2 (L'audience est ouverte à 14 heures 17.)
3 (Audience publique.)
4 (Questions relative à la procédure.)
5 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, veuillez citer
6 l'affaire.
7 Mme Thompson (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames
8 les Juges.
9 C'est l'affaire IT-98-34-T, le Procureur contre Mladen Naletilic et Vinko
10 Martinovic.
11 M. le Président (interprétation): Merci.
12 Maître Seric, êtes-vous prêt pour votre prochain témoin?
13 M. Seric (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.
14 Nous sommes prêts. Le témoin est ici et nous attendons qu'il soit
15 introduit dans le prétoire.
16 M. le Président (interprétation): Des mesures de protection sont-elles
17 prévues pour ce témoin?
18 M. Seric (interprétation): Oui. On a demandé qu'un pseudonyme lui soit
19 attribué et que les traits de son visage soient déformés.
20 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections?
21 Je me tourne vers le Procureur.
22 M. Poriouvaev (interprétation): Non.
23 M. le Président (interprétation): Nous allons faire droit à votre demande.
24 Avant de passer au témoin suivant, je souhaiterais rappeler aux parties
25 les choses suivantes: pour les mémoires en clôture, les deux parties
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1 devraient se conformer à la directive concernant la longueur des requêtes
2 et des mémoires qui ont été publiés par le Tribunal le 5 mars 2002.
3 Selon la directive, les mémoires en clôture n'excéderont pas 200 pages ou
4 bien 6.000 mots.
5 Ensuite, nous avons bien reçu les écritures du Procureur concernant les
6 témoins en réplique. Nous attendons que la défense dépose ses mémoires
7 également.
8 Oui, Monsieur Scott?
9 M. Scott (interprétation): Nous préparons, bien sûr, ce que vous venez de
10 nous dire, mais en tout état de cause, pour ce qui est de la longueur des
11 mémoires, étant donné qu'il s'agit de plusieurs accusés, de deux accusés,
12 la partie à laquelle incombe la charge de la preuve, normalement, devrait
13 se satisfaire de la moitié du nombre de pages qui sont donc attribuées
14 normalement à la défense. Donc la défense dispose de 200 pages pour chacun
15 des accusés, c'est-à-dire de 400 pages, et nous, notre mémoire ne devrait
16 pas excéder 200 pages. Je ne demande pas à la Chambre qu'elle prenne une
17 décision quelconque pour le moment, je voulais juste vous indiquer ceci.
18 M. le Président (interprétation): Je vous remercie beaucoup. La Chambre
19 agira conformément aux mémoires que vous allez déposer.
20 Oui, Maître Seric?
21 M. Seric (interprétation): Avant que le témoin prenne sa place, pour ce
22 qui est de la requête du Procureur concernant les preuves additionnelles,
23 nous allons répondre à cette requête avant le 18 septembre, donc le 18
24 septembre au plus tard.
25 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
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1 (Audience publique avec mesures de protection à 14 heures 19.)
2 (Le Témoin MV est introduit dans le prétoire.)
3 Bonjour, Monsieur le Témoin. Pouvez-vous m'entendre?
4 Témoin MV (interprétation): Oui.
5 M. le Président (interprétation): Veuillez, je vous prie, lire la
6 déclaration solennelle que va vous tendre l'huissier.
7 Témoin MV (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
9 M. le Président (interprétation): Oui. Je vous prie de vous asseoir.
10 Allez-y, Maître Seric.
11 (Interrogatoire principal du Témoin MV par Me Seric.)
12 M. Seric (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin. L'huissier va vous
13 tendre un morceau de papier où est écrit votre nom, prénom et votre
14 pseudonyme. Si ces données sont exactes, je vous prie juste de répondre
15 par l'affirmative, de dire oui, et ne le répétez pas, ne le lisez pas.
16 Témoin MV (interprétation): Oui.
17 Question: Moi-même et les autres parties au procès, nous nous adresserons
18 à vous pendant votre témoignage par le pseudonyme qui vous a été attribué:
19 c'est le MU.
20 Nous allons parler lentement. Il est surtout très important d'attendre
21 plusieurs secondes après que j'ai terminé de vous poser la question pour
22 que les interprètes puissent tout traduire, tout ce qu'on est en train de
23 dire. C'est très important, puisque ceci nous permettra d'avancer plus
24 rapidement.
25 M. le Président (interprétation): Monsieur Seric, il faut que l'on tire au
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1 clair une chose: quel est le pseudonyme attribué à ce témoin: c'est MU ou
2 MV?
3 M. Seric (interprétation): Je vous prie de m'excuser. C'est MV.
4 M. le Président (interprétation): Merci.
5 M. Seric (interprétation): Monsieur le Président, compte tenu du fait que
6 je vais demander au témoin de nous citer quelques données qui le
7 concernent personnellement, je vous prie de nous permettre de passer à
8 huis clos partiel.
9 M. le Président (interprétation): Oui. Passons à huis clos partiel.
10 (Huis clos partiel à 14 heures 25.)
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19 (Audience publique avec mesures de protection à 14 heures 28.)
20 Question: Votre poste vous permettait-il d'obtenir des informations de
21 types différents et des rapports différents?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Aviez-vous eu l'occasion d'obtenir des informations concernant
24 les persécutions des Musulmans?
25 Réponse: Oui.
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1 Question: Y a-t-il eu des transferts de Musulmans d'une partie de la ville
2 vers l'autre partie?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Est-ce le même processus a eu lieu en ce qui concerne les
5 Croates?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Avez-vous des informations quelconques sur Vinko Martinovic et
8 son unité qui aurait persécuté et chassé les Musulmans de leurs
9 appartements?
10 Réponse: Oui, à plusieurs reprises. Nous obtenions des informations, mais
11 ces informations n'étaient pas vérifiées, elles n'étaient pas véridiques.
12 C'était du pur ouï-dire.
13 Question: Saviez-vous si les membres d'autres unités se représentaient
14 comme faisant partie de l'Unité de "Stela"?
15 Réponse: Oui.
16 Question: En aviez-vous une connaissance personnelle? Etiez-vous au
17 courant d'un fait, vous personnellement, de ce type?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Qu'aviez-vous fait? Avez-vous procédé à une vérification?
20 Réponse: Oui. Je me souviens qu'on a obtenu une information selon
21 laquelle, pendant la nuit, il y aurait eu des persécutions, qu'on aurait
22 chassé des gens dans un immeuble? Et on mentionnait deux des
23 collaborateurs de "Stela". Suivant les ordres du commandant, je me suis
24 rendu sur place le lendemain matin pour me renseigner auprès des habitants
25 de cet immeuble.
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1 Nous avons même procédé à une confrontation des deux combattants de
2 "Stela". Cependant, les locataires de cet immeuble ont déclaré que ces
3 deux personnes ne correspondaient pas à la description des personnes qui
4 étaient là la veille, la nuit précédente.
5 Question: Savez-vous s'il y a eu d'autres cas de fausse présentation?
6 Réponse: Oui. A plusieurs reprises, pendant la nuit. Cela se produisait
7 surtout tard dans la nuit. Des personnes en uniforme nous disaient qu'ils
8 appartenaient à la police militaire, à la police, au 4e Bataillon, ensuite
9 du Bataillon des Condamnés et d'autres unités qui tenaient les positions
10 dans la ville. L'appartenance à ces unités cependant n'a pas été possible
11 à établir.
12 De surcroît, nous avions l'impression que ces personnes-là n'appartenaient
13 pas aux unités auxquelles elles prétendaient appartenir.
14 Question: Monsieur le Témoin, selon les informations dont vous disposiez,
15 pouvez-vous dire cette Chambre quelles étaient les fonctions de Vinko
16 Martinovic?
17 Réponse: D'après ce que j'en sais, Vinko Martinovic n'avait pas de
18 fonction quelconque, mais il avait une autorité sur un groupe de soldats,
19 des soldats de sa rue; et il avait la réputation de quelqu'un de
20 courageux.
21 Question: Pendant que vous exerciez vos fonctions que vous avez
22 mentionnées tout à l'heure, occupiez-vous ce même postes en 1996 et au
23 début de l'année 1997?
24 Réponse: Oui.
25 M. Seric (interprétation): Monsieur le Président, afin de pouvoir poser
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1 les quelques questions qui suivent, je vous prie de passer en audience à
2 huis clos partiel.
3 M. le Président (interprétation): Oui, passons à huis clos partiel.
4 (Huis clos partiel à 14 heures 39.)
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3 (Audience publique avec mesures de protection à 14 heures 43.)
4 M. Seric (interprétation): Savez-vous si pendant la guerre -et j'entends
5 par "la guerre" le conflit qui opposait le HVO à l'armée de Bosnie-
6 Herzégovine- s'il y a eu donc abus et falsification de documents avant
7 tout par l'A.I.D.? Et de ce fait même de falsification de faits?
8 Témoin MV (interprétation): Oui.
9 Question: Le SIS et le HIS recouraient-ils à des méthodes similaires?
10 Réponse: Je ne peux pas vous répondre à cette question puisque je dois
11 garder le secret professionnel.
12 Question: Savez-vous s'il y a eu des accords qui ont été passés entre les
13 services secrets musulmans et croates quant à la sélection de certains
14 documents pertinents pour les affaires en cours devant ce Tribunal?
15 Réponse: Je ne peux pas vous répondre à cette question.
16 Question: Pouvez-vous nous donner la raison?
17 Réponse: Puisque je dois garder le secret professionnel.
18 M. Seric (interprétation): J'ai terminé mon interrogatoire principal,
19 Monsieur le Président.
20 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des questions dans le cadre
21 d'un contre-interrogatoire, Monsieur le Procureur?
22 (Contre-interrogatoire du Témoin MV par M. Poriouvaev.)
23 M. Poriouvaev (interprétation): Oui, Monsieur le Président.
24 (Hors micro.)
25 Tout d'abord, Monsieur le Témoin, je propose que l'on passe à huis clos
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1 partiel pour traiter d'un certain nombre de sujets.
2 M. le Président (interprétation): Monsieur le Procureur, tout d'abord,
3 vous devez vous présenter au témoin. Ensuite, nous pouvons le faire.
4 M. Poriouvaev (interprétation): Je suis Vasili Poriouvaev. Je suis le
5 Procureur dans cette affaire. Je vais vous poser quelques questions liées
6 à l'interrogatoire principal mené par Me Seric.
7 M. le Président (interprétation): Oui. Nous allons passer à huis clos
8 partiel.
9 (Huis clos partiel à 14 heures 46.)
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10 (Audience publique avec mesures de protection à 15 heures 06.)
11 M. Poriouvaev (interprétation): Monsieur le Témoin, parfois vos
12 informations s'intitulaient "informations A" ou "informations B."
13 Est-ce que vous pourriez expliquer brièvement aux Juges quelle est
14 l'information entre les informations A et B? Est-ce que ceci a trait à la
15 crédibilité ou bien aux sources?
16 Témoin MV (interprétation): Je ne me souviens pas très exactement, mais je
17 pense que ceci a été proposé par les analystes, le département chargé
18 d'analyses.
19 Question: Donc vous ne pouvez pas nous expliquer la différence?
20 Réponse: Effectivement.
21 Question: Je suggère que, pendant la journée, vous avez coopéré avec la
22 police militaire, et notamment avec le département chargé d'enquêtes
23 criminelles, n'est-ce pas?
24 Réponse: Moi, personnellement, non.
25 Question: Ma question ne porte pas seulement sur vous personnellement,
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1 mais sur le SIS en tant qu'organisme.
2 Réponse: Je ne puis vous répondre à cette question.
3 Question: Parce que vous ne le savez pas? Ou parce que vous ne le
4 souhaitez pas? Ou parce qu'il s'agit, encore une fois, d'un secret
5 militaire?
6 Réponse: Je ne sais pas.
7 M. Poriouvaev (interprétation): Très bien.
8 Je souhaite que l'on montre au témoin la pièce à conviction 629.
9 M. le Président (interprétation): 629? Nous n'avons pas ce document.
10 M. Poriouvaev (interprétation): 629.
11 M. Krsnik (interprétation): La défense n'a pas ce document non plus.
12 M. Poriouvaev (interprétation): Excusez-moi. Peut-être qu'il y a eu une
13 confusion ici, malheureusement. Il s'agit là d'un document qui a été versé
14 au dossier.
15 Est-ce que je peux l'utiliser maintenant? Simplement pour montrer une
16 page.
17 Est-ce que vous l'avez?
18 M. le Président (interprétation): Oui, merci beaucoup. Oui, vous pouvez
19 l'utiliser et, s'il ne s'agit pas d'un document versé de manière
20 confidentielle, est-ce que l'on peut montrer cela, placer cela sur le
21 rétroprojecteur?
22 M. Poriouvaev (interprétation): Non, puisque ceci risquerait de dévoiler
23 l'identité de ce témoin, mais je peux vous fournir mon exemplaire à moi.
24 Monsieur le Témoin, veuillez examiner le fond de la deuxième page.
25 Est-ce que votre titre est inscrit de manière correcte sur ce document?
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1 Témoin MV (interprétation): Oui.
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15 M. le Président (interprétation): Oui.
16 M. Poriouvaev (interprétation): Excusez-moi et merci beaucoup. Je ne l'ai
17 pas fait exprès.
18 Monsieur le Témoin, en répondant à la question de la défense, vous avez
19 dit que vous aviez des informations concernant des persécutions de
20 Musulmans dans la partie ouest de Mostar. Est-ce exact?
21 Témoin MV (interprétation): Oui.
22 Question: Et quelles unités, les unités de quelle armée participaient à ce
23 genre de persécutions, expulsions, etc.? Est-ce qu'il s'agissait des
24 unités du HVO?
25 Réponse: Non.
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1 Question: Dans ce cas-là, qui l'a fait? Des individus n'appartenant pas à
2 l'armée?
3 Réponse: Je ne sais pas.
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11 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons tout d'abord passer à
12 huis clos partiel. (Huis clos partiel )
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4 (audience publique)
5 (L'audience, suspendue à 15 heures 32, est reprise à 16 heures 02.)
6 M. le Président (interprétation): Monsieur le Procureur, nous allons
7 commencer par une audience publique. C'est pour cela que je vous demande
8 d'être très attentif pendant votre contre-interrogatoire.
9 M. Poriouvaev (interprétation): (Hors micro.)
10 Je vous prie de montrer au témoin la pièce à conviction P60.4.
11 (Intervention de l'huissier.)
12 Monsieur, regardez, s'il vous plaît, le document original. Je considère
13 que vous aussi vous avez rédigé cette information?
14 Témoin MV (interprétation): Oui.
15 Question: Donc, Monsieur, comme vous le voyez dans cette information, il
16 s'agit de l'expulsion des Musulmans et du pillage de leurs biens. D'où
17 disposiez-vous des connaissances de ces faits que vous avez qualifiés
18 comme des phénomènes assez présents?
19 Est-ce que vous avez parlé avec les victimes musulmanes, avant tout avec
20 celles dont les biens ont été pillés, ou vos hommes, vos subordonnés
21 l'ont-ils fait en accomplissant leurs activités?
22 Réponse: Ces informations, je les ai obtenues de la part des citoyens.
23 Question: Est-ce qu'il s'agissait des citoyens de nationalité croate ou de
24 nationalité musulmane?
25 Réponse: Les deux.
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1 Question: Et comment avez-vous réussi à vérifier si cela était la vérité?
2 Parce qu'il y avait des gens qui se sont faussement présentés. Est-ce que
3 ces gens qui collectaient les informations possédaient certaines
4 qualifications pour le faire?
5 Réponse: J'ai déjà dit -et je m'en souviens bien- qu'à une reprise je suis
6 allé dans l'immeuble où, pendant la nuit, il y avait des… où les habitants
7 ont été gênés, importunés; et nous avons eu l'information dans laquelle
8 ont été mentionnés des noms comme Stelici, etc. Mais j'ai déjà dit cela.
9 Et j'ai même fait une sorte de confrontation entre les deux combattants de
10 "Stela"pour que les habitants de cet immeuble puissent les reconnaître.
11 Question: Oui, vous avez déjà mentionné cela, mais ma question était la
12 suivante: est-ce que vous avez parlé avec des Musulmans qui ont été
13 victimes de ce pillage?
14 Réponse: Non.
15 Question: Monsieur le Président, j'ai encore deux sujets dont je voudrais
16 m'occuper et cela ne prendra pas beaucoup de temps.
17 Monsieur, est-il exact que l'Unité "Vinko Skrobo" utilisait les
18 prisonniers de l'Héliodrome sur la ligne de confrontation de façon que
19 leur santé et leur vie étaient en danger?
20 Réponse: Je ne connais pas de tels cas.
21 Question: Je prie de montrer au témoin la pièce à conviction P718.
22 (Intervention de l'huissier.)
23 S'il vous plaît, regardez la deuxième page de ce document.
24 (Le témoin examine le document.)
25 Et je pense surtout au deuxième paragraphe en partant du début du
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1 document. Est-ce que vous avez réussi à lire ce paragraphe, Monsieur?
2 Réponse: Oui.
3 Question: Est-ce que ce document a été rédigé lorsque vous occupiez vos
4 fonctions?
5 Réponse: Oui.
6 M. Poriouvaev (interprétation): Donc je suppose que vous avez eu
7 connaissance du fait que l'Unité "Vinko Skrobo" utilisait les prisonniers
8 pour fortifier sa propre ligne de front, c'est-à-dire que ses hommes
9 creusaient les tranchées et fortifiaient la ligne, comme cela figure dans
10 cette information?
11 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Seric.
12 M. Seric (interprétation): Je demande seulement que le témoin lise
13 l'information et que le Procureur analyse un peu mieux l'information parce
14 que, dans l'information, il est clairement écrit où ces travaux ont été
15 effectués.
16 M. le Président (interprétation): Oui, on permet au témoin de lire tout le
17 document et surtout ce paragraphe déjà mentionné.
18 (Le témoin lit le document.)
19 M. Poriouvaev (interprétation): Monsieur, est-ce que vous avez réussi à le
20 lire?
21 Donc est-ce que vous étiez au courant de ces faits? Est-ce que vous les
22 avez connus?
23 Témoin MV (interprétation): Non.
24 Question: Monsieur, compte tenu que vous avez lu tout le document, je vais
25 vous poser encore une question concernant ce document.
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1 Dans ce document, il est mentionné qu'une unité du HV, qui se trouvait sur
2 la ligne de front, a quitté Mostar en causant des problèmes de sécurité
3 concernant la ligne de séparation. Est-ce exact?
4 Réponse: Je ne connais pas ce cas.
5 Question: Bien. Vous ne l'avez pas connu. Et vous n'étiez pas au courant
6 non plus que les prisonniers ont été utilisés pour accomplir les travaux
7 de force sur d'autres endroits, sur d'autres lignes de front?
8 Réponse: Non.
9 Question: Je vous prie de montrer au témoin la pièce à conviction P719.1.
10 (Intervention de l'huissier.)
11 D'abord, Monsieur, je vous prie de regarder la dernière page du document
12 et le nom de la personne qui a signé ce document. S'il vous plaît, ne
13 prononcez pas son nom ni sa position. Est-il exact que cet homme était
14 votre supérieur hiérarchique direct?
15 (Le témoin examine le document.)
16 Réponse: A l'époque, à cette époque-là, non.
17 Question: Donc il n'était pas... Est-ce que vous voulez dire qu'il s'agit
18 d'informations erronées, que ces informations ne sont pas exactes?
19 Réponse: Je ne suis pas au courant de ces informations.
20 Question: Mais était-il votre supérieur hiérarchique direct? Au début du
21 contre-interrogatoire, vous nous avez donné le nom de la personne qui
22 était votre supérieur direct, et le poste que vous occupiez correspond à
23 celui qui figure sur ce document; c'est pour cela que je vous pose cette
24 question.
25 Réponse: Pendant cette période, je faisais partie, j'étais affecté au
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1 commandement de la défense de la ville. Cette information émane du centre
2 du SIS de Mostar.
3 M. Poriouvaev (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez mentionné le
4 poste que vous occupiez en décembre 1993 devant cette Chambre. Peut-être
5 que nous ne vous avions pas bien compris. Je ne vous demande pas de nous
6 dire le poste que vous occupiez.
7 M. le Président (interprétation): Peut-être que nous devrions passer à
8 huis clos partiel?
9 M. Poriouvaev (interprétation): Oui.
10 M. le Président (interprétation): Passons à huis clos partiel.
11 (Huis clos partiel à 16 heures 17.)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
Page 15445
1 (expurgé)
2 (Audience publique avec mesures de protection à 16 heures 18.)
3 M. Poriouvaev (interprétation): Revenons au problème de la participation
4 de l'armée croate dans le conflit armé à Mostar. Persistez-vous à dire que
5 les unités de l'armée croate n'étaient pas impliquées dans le conflit à
6 Mostar?
7 Témoin MV (interprétation): Je ne suis pas au courant de tels cas.
8 Question: Je souhaiterais qu'on montre au témoin la pièce à conviction
9 628.1.
10 (Intervention de l'huissier.)
11 (Le témoin lit le document.)
12 Est-ce vous l'auteur de cette information?
13 Réponse: Je ne m'en souviens pas.
14 Question: Veuillez lire ce document, je vous prie. Il est question dans ce
15 document des unités de l'armée croate qui étaient positionnées à Mostar.
16 Et vous indiquez dans ce document que vous avez fait appel au commandant
17 des unités de l'armée croate. Vous ne parlez pas d'individus dans cette
18 note d'information, mais les commandants des unités sont mentionnés. Est-
19 ce exact?
20 Réponse: Je ne me souviens pas de cette note.
21 Question: Fort bien. Si votre mémoire n'est plus très bonne, je ne peux
22 pas vous porter secours, mais je vais essayer quand même de vous la
23 rafraîchir.
24 Je prie donc l'huissier de vous montrer la pièce à conviction qui porte la
25 cote 292.1.
Page 15446
1 (Intervention de l'huissier.)
2 (Le témoin examine le document.)
3 S'agit-il bien d'un document dont vous êtes l'auteur?
4 Monsieur le Témoin, je me suis adressé à vous.
5 Réponse: Je ne me souviens pas.
6 Question: Vous ne vous souvenez pas, mais vous mentionnez, dans ce
7 document, des patrouilles mixtes réunissant les membres de l'armée croate
8 du MUP et du HVO, qui couvraient le territoire de Mostar. Est-ce exact?
9 Réponse: Non.
10 Question: Vous ne mentionnez pas ce fait ou vous ne vous souvenez pas de
11 ce fait? Je vous prie d'être clair là-dessus.
12 Réponse: Je ne me souviens pas de cette note d'information et je ne me
13 souviens pas avoir recueilli de telles informations.
14 Question: Fort bien.
15 Ma dernière question sera la suivante: est-il exact, Monsieur le Témoin,
16 qu'il y a eu certains problèmes entre Vinko Skrobo et Mario Milicevic, qui
17 étaient les commandants respectifs des unités "Vinko Skrobo" et "Benko
18 Penavic"?
19 Réponse: Je ne me rappelle pas.
20 Question: Je prie l'huissier de montrer au témoin la pièce à conviction
21 628.2.
22 (Intervention de l'huissier.)
23 (Le témoin examine le document.)
24 Pouvez-vous poser ce document? Vous souvenez-vous de cet incident qui a eu
25 lieu le 7 octobre 1993?
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1 Réponse: Non.
2 M. Poriouvaev (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai plus de
3 question à adresser à ce témoin. Je vous remercie de votre patience.
4 M. le Président (interprétation): Auriez-vous, Maître Seric, des questions
5 supplémentaires?
6 M. Seric (interprétation): Non, Monsieur le Président.
7 M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur le Témoin, d'être venu
8 témoigner devant ce Tribunal.
9 L'huissier va descendre les stores et vous raccompagnera à l'extérieur de
10 ce prétoire. Nous vous souhaitons un bon retour chez vous.
11 A ce stade, y a-t-il des documents à verser au dossier?
12 Oui, Monsieur le Procureur?
13 (Le Témoin MV est reconduit hors du prétoire.)
14 (Audience publique.)
15 (Questions relatives à la procédure.)
16 M. Poriouvaev (interprétation): (Hors micro.)
17 M. le Président (interprétation): Votre micro.
18 M. Poriouvaev (interprétation): Je souhaiterais que les documents suivants
19 soient versés: les documents qui portent la cote P92.1; 578.1; 620.4;
20 624.1; 628.1; 628.2; 719.1.
21 Le dernier document a déjà été versé, mais, comme il n'y a pas eu de
22 décision portant sur la recevabilité de ce document, je souhaiterais le
23 verser encore une fois.
24 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections?
25 M. Seric (interprétation): Oui, mais puisqu'il y a plusieurs documents et
Page 15448
1 mes raisons diffèrent selon les documents, je vous prie donc de nous
2 accorder le délai qui est normalement prévu pour ces cas pour que l'on
3 puisse formuler une objection par écrit.
4 M. le Président (interprétation): Pour ce qui est du document P620.4 et le
5 document 624.1 pendant la déposition de ce témoin, le témoin indique
6 clairement que ce document a été écrit par lui-même. Donc il n'y a pas de
7 doute possible quant à l'authenticité de ce document. Nous avons donc
8 décidé que ces deux documents sont admis au dossier.
9 Quant aux cinq autres documents, nous attendons votre réponse.
10 Quant au document 719.1, nous constatons qu'il n'y a pas de traduction
11 anglaise de ce document; et nous allons le prendre en considération
12 lorsque nous recevrons la traduction.
13 M. Poriouvaev (interprétation): Peut-être que c'est notre erreur de pas
14 vous avoir fourni la traduction mais nous en disposons, nous disposons
15 d'une traduction.
16 M. le Président (interprétation): Nous vous remercions. Nous allons
17 prendre une décision lorsque nous recevrons les objections de la défense
18 pour les cinq autres documents.
19 A présent, nous allons entendre le témoin suivant et il s'agit d'un témoin
20 expert. Si j'ai bien compris, nous avons besoin de la déclaration de ce
21 témoin. Donc pouvons-nous faire une pause de cinq minutes?
22 Oui, Maître Par?
23 M. Par (interprétation): Monsieur le Président, cette déclaration a été
24 fournie à l'accusation et au Tribunal il y a longtemps. Elle doit être
25 quelque part. Ici, je dispose bien sûr de la déclaration et je peux faire
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1 des copies et vous les fournir.
2 M. le Président (interprétation): Nous avons la déclaration dans notre
3 bureau, mais nous ne pouvons pas commencer à entendre le témoignage de ce
4 témoin avant d'avoir cette déclaration. Laissez-nous cinq minutes, et nous
5 poursuivrons après.
6 (L'audience, suspendue à 16 heures 31, est reprise à 16 heures 45)
7 (Le témoin, M. Drazen Begic, est dans le prétoire.)
8 M. le Président (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin.
9 Bonjour, pouvez-vous m'entendre?
10 M. Begic (interprétation): Bonjour. Oui, je vous entends.
11 M. le Président (interprétation): Veuillez faire, je vous prie, la
12 déclaration solennelle.
13 M. Begic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
16 Oui, Maître Par, le témoin est à vous.
17 (Interrogatoire principal du témoin, M. Drazen Begic, par Me Par.)
18 M. Par (interprétation): Bonjour, Monsieur le Docteur. Vous m'entendez?
19 M. Begic (interprétation): Oui.
20 Question: Je vous prie de parler lentement afin que les interprètes
21 puissent suivre notre interrogatoire, et je vous prie de ménager des
22 pauses entre les questions et les réponses. Je vous prie donc de répondre
23 deux ou trois secondes après que j'ai terminé ma question et je vous prie
24 de parler à voix haute distinctement.
25 Aux fins du compte rendu d'audience, je vous prie de décliner votre
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1 identité?
2 M. Begic (interprétation): Je m'appelle Drazen Begic.
3 Question: Je vous prie de nous donner quelques informations fondamentales
4 vous concernant, concernant surtout votre vie professionnelle?
5 Réponse: Je suis psychiatre de Zagreb. Je suis né à Vukovar en 1958. Je
6 suis médecin et je suis psychiatre depuis douze ans. Et je suis expert
7 enregistré en médecine légale depuis cinq ans. Je travaille également à la
8 faculté de médecine à l'université de Zagreb en tant qu'assistant du
9 professeur en psychiatrie. Je suis donc diplômé de la faculté et j'ai un
10 doctorat depuis 1993. Je suis membre de plusieurs associations
11 professionnelles, entre autres de l'Académie croate des Arts et des
12 Sciences.
13 Question: En 2002, au courant de cette année, nous nous sommes adressés à
14 vous pour vous demander de faire une expertise pour nous. Est-ce que vous
15 pouvez nous dire, approximativement, de quoi il s'agit?
16 Réponse: En mars, le cabinet d'avocat Seric-Par s'est adressé à moi pour
17 que j'analyse le dossier médical de M. Halil Ajanic et de prêter une
18 attention particulière à plusieurs exigences.
19 Tout d'abord, M. Ajanic souffre-t-il de maladies mentales? Et, si oui,
20 quelles sont-elles et comment se manifestent-elles? Sont-elles de nature
21 progressive où un malade qui souffre de telles maladies puisse avoir une
22 perception et une reproduction des matériels qui lui sont montrés?
23 Ensuite, dans quelle mesure ils sont susceptibles d'être influencés et
24 dans quelle mesure leur témoignage sur des faits peut être authentique et
25 crédible?
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1 Question: Pouvez-vous nous dire quels étaient les documents dont vous
2 disposiez?
3 Réponse: C'était un document, un extrait du dossier médical du centre
4 régional médical de Mostar où figurait la description de l'hospitalisation
5 de M. Ajanic, en avril 1996, au département de psychiatrie. Donc y
6 figurent également l'état psychique et psychiatrique du malade et le
7 diagnostic tel qu'il a été formulé pendant le traitement.
8 Question: Donc, Docteur Begic, sur cette base, vous avez donné votre
9 opinion. Alors, s'agit-il bien du document du 6 mars 2002? C'est bien
10 votre rapport?
11 Réponse: Oui, c'est le rapport… il s'agit du 6 mars, alors qu'ici je vois
12 la date du 6 avril.
13 Question: On vient de corriger le compte rendu; il s'agit bien du 6 mars.
14 Passons maintenant à votre rapport et à vos conclusions.
15 La première question de la défense était la suivante: de quelle maladie,
16 au singulier ou au pluriel, s'agit-il lorsqu'on parle de Halil Ajanic?
17 Réponse: D'après le document, le dossier médical, M. Halil Ajanic souffre
18 de plusieurs maladies psychiatriques mentales: la psychose de type
19 alcoolique, le syndrome amnésique et la débilité. Donc il s'agit de trois
20 diagnostics bien distincts qui peuvent coexister dans le cadre d'un
21 tableau clinique.
22 Cette situation, une telle situation n'est pas inhabituelle. Il s'agit de
23 co-morbidité: un même malade souffre de plusieurs maladies mentales.
24 Question: Nous allons passer en revue les trois diagnostics. Pouvez-vous
25 nous dire ce qu'est la psychose alcoolique?
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1 Réponse: La psychose alcoolique est une des complications qui survient au
2 cours de l'alcoolisme. Donc une personne qui consomme trop d'alcool au
3 cours de plusieurs années en devient dépendante et elle devient
4 alcoolique.
5 Un alcoolique peut se retrouver par deux moyens dans une situation de
6 psychose. Tout d'abord, il peut arrêter soudainement de consommer de
7 l'alcool. Il s'agit donc d'une abstinence soudaine, et là, on parle de
8 psychose alcoolique aiguë de type délirique.
9 L'autre type survient lorsqu'on consomme de manière continue de l'alcool,
10 où l'abstinence n'intervient pas, et là, on parle de psychose chronique.
11 Les deux formes se manifestent par des éléments caractéristiques de la
12 psychose. La psychose est, comme on pourrait le dire, une condition dans
13 laquelle la personne ne distingue pas la réalité. Donc on parle de délire,
14 de paranoïa. Chez les hommes, on retrouve fréquemment la jalousie
15 pathologique, ensuite les troubles de perception, ensuite les troubles
16 cognitifs et intellectuels, et un comportement social inapproprié.
17 Donc c'est une description brève de la psychose, de quelque type qu'elle
18 soit, aiguë ou chronique.
19 Question: Et le syndrome amnésique, comment se manifeste-t-il?
20 Réponse: Le syndrome amnésique, on peut le retrouver dans de nombreuses
21 entités neurologiques et psychiatriques. Donc il s'agit de périodes
22 pendant lesquelles le patient ne se souvient pas ou perd la mémoire. Elles
23 peuvent être brèves ou longues. L'amnésie peut survenir de manière
24 soudaine ou progressivement.
25 Le syndrome amnésique -et il est très important de le dire- est une
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1 éthologie très variée, donc il y a plusieurs raisons qui peuvent amener à
2 ce syndrome. Il peut y avoir par exemple des maladies diverses -des
3 tumeurs, des hémorragies du cerveau- qui peuvent amener à l'amnésie.
4 Ensuite, les maladies dégénératives du système nerveux central du type
5 d'Alzheimer par exemple, ensuite l'artériosclérose des vaisseaux sanguins
6 du cerveau et, également, elle peut survenir comme une conséquence de
7 l'alcool et d'autres drogues.
8 Un grand nombre d'alcooliques, par exemple, au courant des années de
9 consommation d'alcool peuvent développer le syndrome amnésique. Il peut
10 être d'intensité et de caractère différents, mais la forme extrême porte
11 le nom de "psychose de Korsakov". Et les caractéristiques sont les
12 suivantes: le patient soufre de pertes de mémoire qu'il remplit d'autres
13 fait fabulés, donc il invente du tout au tout. C'est particulièrement
14 typique pour ce type de syndrome.
15 Question: Et lorsque l'on parle de débilité, de retardement mental?
16 Réponse: La débilité est une forme de retardement mental ou oligophrénie.
17 Dans la littérature, on rencontre deux types. Donc il s'agit d'une
18 personne qui a le quotient intellectuel de 50 à 69 ou de 50 à 70, c'est
19 une personne donc qui peut recevoir une éducation simple, élémentaire.
20 Elle peut travailler, elle peut effectuer des tâches simples manuelles,
21 elle peut conclure un mariage et avoir un enfant. Mais à tous les niveaux,
22 qu'il s'agisse du comportement, de la vie sociale, du niveau cognitif ou
23 affectif, cette personne montre des déficiences, donc elle ne peut pas
24 effectuer des tâches complexes. Elle exige l'attention des autres, elle a
25 une intelligence abstraite très peu développée; Et, en dernier, mais ce
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1 n'est pas le moins important, ce sont des personnes qui sont des personnes
2 très influençables. Ces malades donc, sont susceptibles d'être influencés
3 de la manière suivante: ils peuvent accepter les suggestions de leur
4 entourage, même si cela comporte des risques pour leur santé ou pour leur
5 vie en général, pour leur moral, etc. Ils sont capables donc d'agir au
6 détriment d'eux-mêmes en mettant en oeuvre les suggestions des autres.
7 Question: Monsieur Begic, après avoir évoqué toutes ces maladies, pouvez-
8 vous nous dire s'il s'agit de maladies qui évoluent de manière
9 progressive?
10 Réponse: Pour ce qui est de la psychose alcoolique, il s'agit d'une
11 maladie progressive; donc, avec le temps, le tableau clinique se détériore
12 à tous les niveaux.
13 On peut appliquer la même conclusion au syndrome amnésique en y apportant
14 un bémol tout de même: ce syndrome dépend de la raison de l'étiologie.
15 Quant au troisième diagnostic, la débilité, le caractère progressif est
16 possible mais il n'est pas inévitable. On ne peut pas se soigner de
17 débilité, donc quelqu'un qui a un quotient intellect tutelle entre 50 et
18 69 ou 50 et 70, avec le temps et l'aide provenant de l'entourage, même en
19 bénéficiant de tout cela, la débilité ne s'améliora pas; au contraire, il
20 peut y avoir détérioration.
21 M. Par (interprétation): Docteur, compte tenu du fait que ces documents
22 que vous avez examinés lors de votre analyse sont datés de 19...
23 M. le Président (interprétation): Les interprètes vous demandent de parler
24 directement dans le micro parce qu'ils n'arrivent pas à vous entendre.
25 M. Par (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je m'excuse auprès
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1 des interprètes.
2 La question était la suivante: compte tenu du fait que les documents qui
3 ont fait l'objet de votre expertise datent de l'année 1996 et compte tenu
4 du fait que ce qui nous intéresse en fait est la situation de santé de M.
5 Halil Ajanic en 2002, c'est-à-dire au moment où il a déposé devant ce
6 Tribunal, est-ce que vous pourriez nous dire si sa situation de santé, en
7 2002, peut être meilleure, pire ou identique à celle de 1996?
8 M. Begic (interprétation): Je vois qu'il y a une erreur dans le compte
9 rendu d'audience puisqu'il est écrit: 1992.
10 Question: Oui. Pour le compte rendu d'audience, veuillez rectifier cela.
11 Donc les documents médicaux sont datés de l'année 1996.
12 Réponse: Il est possible qu'au cours de ces six années, s'agissant des
13 deux premiers diagnostics, il y a eu une détérioration progressive.
14 S'agissant du troisième diagnostic, la débilité, il est possible qu'il y
15 ait eu une détérioration sur ce plan aussi, mais ceci n'est pas
16 nécessaire.
17 Je répète: s'agissant du troisième diagnostic, la situation stagne, elle
18 ne peut pas s'améliorer.
19 Question: Peut-on donc conclure que cette étape soit peut-être pire ou
20 identique à celle de l'année 1996?
21 Réponse: Pour dire les choses simplement, la réponse est oui.
22 Question: S'il vous plaît, si vous le pouvez, donnez un peu de détails
23 concernant ces maladies. Ce qui m'intéresse, c'est la possibilité d'avoir
24 des perceptions exactes chez les personnes atteintes de ces maladies-là,
25 leur crédulité et leur caractère qui fait qu'elles sont très
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1 influençables?
2 Réponse: Lorsqu'il s'agit de la psychose et du syndrome amnésique, il est
3 certain qu'il survient des problèmes au niveau de la perception.
4 S'agissant de la débilité, dans une moindre mesure, elle peut être
5 également troublée. Mais, s'agissant de la débilité, ce qui est surtout
6 troublé, c'est la possibilité de reproduire les événements.
7 En ce qui concerne le caractère influençable, il faut savoir que les
8 personnes atteintes des maladies mentales se distinguent des personnes
9 normales justement par ce caractère influençable. Donc de ce point de vue-
10 là, il n'y a pas de différence entre la psychose alcoolique et le syndrome
11 amnésique, et d'autres maladies mentales. Mais le caractère influençable
12 est justement le plus prononcé s'agissant du retardement mental. Il n'est
13 pas possible d'établir le diagnostic de la débilité si nous n'établissons
14 pas que la personne en question est extrêmement influençable.
15 Question: Du point de vue scientifique et médical, que peut-on dire
16 concernant la fiabilité, la crédibilité des déclarations faites par ce
17 genre de personnes, surtout si elles sont en train d'interpréter les
18 événements qui se sont produits huit ans avant leur récit. Quelles
19 seraient la fiabilité et la crédibilité d'un tel récit?
20 Réponse: Une période de huit ans est une période relativement longue et,
21 au cours de cette période, il est certain qu'il est possible que la
22 situation psychologique change. Ce qui peut avoir pour résultat la
23 reproduction altérée, de telle manière que la personne ayant un tel
24 diagnostic donne des réponses non fiables; donc ses réponses seront plus
25 souvent inexactes qu'exactes.
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1 La crédibilité de la déclaration d'une telle personne est douteuse
2 également parce que chacun de ces diagnostics pris séparément influence,
3 de manière importante, le souvenir. Ces diagnostics, lorsqu'ils sont
4 combinés, ont une influence encore plus prononcée. Donc la fiabilité est
5 petite et la crédibilité était très, très douteuse.
6 M. Par (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur le Docteur.
7 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'ai terminé. Merci beaucoup.
8 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des questions dans le cadre du
9 contre-interrogatoire?
10 Monsieur Stringer?
11 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Drazen Begic, par M. Stringer.)
12 M. Stringer (interprétation): Oui. Est-ce que je peux avoir un moment pour
13 m'organiser un peu?
14 Bonjour, Docteur Begic.
15 M. Begic (interprétation): Bonjour.
16 Question: Je m'appelle Douglas Stringer, et je vais vous poser un certain
17 nombre de questions au nom de l'accusation dans cette affaire.
18 Avant de commencer, l'huissier va vous montrer un certain nombre de
19 documents qui ont reçu la cote 877.22 et 877.23.
20 Je crois que vous allez reconnaître les deux, Monsieur le Docteur Begic,
21 parce que l'un de ces documents constitue la réponse que vous avez fournie
22 à la demande de Me Seric et Me Par, et l'autre document est constitué des
23 documents médicaux sur lesquels vous vous êtes appuyé lors de votre
24 déposition.
25 (Intervention de l'huissier.)
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1 Vous les avez devant vous?
2 Avant de parcourir tous ces documents, Docteur Begic, j'ai tout d'abord un
3 certain nombre de questions générales.
4 Nous sommes en train de parler d'un monsieur qui a déposé dans le cadre de
5 cette affaire, comme vous le savez. Est-ce que vous avez eu l'occasion de
6 l'examiner? Est-ce que vous l'avez jamais rencontré?
7 Réponse: Non.
8 Question: Avez-vous demandé à avoir l'occasion de l'examiner?
9 Réponse: Non.
10 Question: Donc les opinions que vous avez exprimées et les informations
11 contenues dans votre expertise se fondent surtout sur les documents que Me
12 Seric et Me Par vous ont présentés. Il s'agit là des limites et des
13 critères sur lesquels votre analyse a été établie.
14 Réponse: Oui, c'est exact. J'ai analysé le document qui se trouvait en
15 annexe de leur demande.
16 Question: La déposition de cette personne dans cette affaire, est-ce que
17 vous l'avez obtenue, ou sa transcription, pour vous permettre de mener à
18 bien votre analyse de manière plus appropriée et plus facile?
19 Réponse: Non.
20 Question: Je vais demander que l'on montre au témoin la pièce 848.1.
21 Je suppose que vous n'allez pas reconnaître ce document, Docteur, mais je
22 vais quand même vous poser la question. Il s'agit là de la déclaration de
23 témoin que cette personne, ce témoin a fourni à nos enquêteurs, les
24 enquêteurs de l'accusation. Est-ce que vous l'avez déjà vue?
25 Réponse: Non.
Page 15459
1 Question: Donc vous n'avez pas eu l'occasion de prendre en considération
2 ce document lors de l'analyse que vous avez menée au sujet de la capacité
3 mentale de cette personne de fournir une déposition exacte et fiable?
4 Réponse: Conformément à la législation croate, je me suis fondé uniquement
5 sur le document médical et il s'agit là d'une pratique tout à fait
6 habituelle.
7 Question: Avant de parler des détails de votre analyse, Docteur Begic, je
8 souhaite vous poser une autre question plutôt générale.
9 Dans votre déposition, vous avez exprimé un certain nombre d'avis et j'ai
10 eu l'impression que vous ne pouviez que donner des informations à la
11 Chambre concernant les caractéristiques associées à un certain nombre de
12 situations de santé qui ont été identifiées. Est-ce exact?
13 Réponse: D'après le document en annexe, oui.
14 Question: D'accord.
15 Le document qui se trouve en annexe porte la cote 877.22. Est-ce que vous
16 pourriez examiner ce document?
17 (Intervention de l'huissier.)
18 Vous l'avez?
19 Réponse: Oui.
20 (Le témoin examine le document.)
21 Question: Il s'agit là d'une lettre écrite à mes collègues de la défense,
22 Me Seric et Me Par, par le Dr Omanovic, le 26 février 2002.
23 Docteur Begic, est-ce que ceci constitue la base, ou plutôt est-ce que
24 ceci constitue les informations auxquelles vous vous êtes référé lors de
25 votre analyse?
Page 15460
1 Réponse: Absolument.
2 Question: Aucun autre document, en dehors de ce document, n'a été pris en
3 considération par vous lorsque vous tiriez vos conclusions?
4 Réponse: Non.
5 Question: Dans la dernière phrase de ce document, il est écrit que les
6 informations contenues dans cette lettre représentent les seules
7 informations dont il dispose concernant cette personne. Donc, en réalité,
8 il s'agissait là de l'unique document que vous pouviez utiliser lors de
9 l'analyse que vous avez menée, suite à la demande de Me Seric et Me Par.
10 Est-ce exact?
11 Réponse: Oui.
12 M. Stringer (interprétation): Est-ce que vous seriez d'accord avec moi,
13 Docteur Begic, pour dire que ces informations qui sont contenues dans
14 cette lettre, tout d'abord, ne représentent pas la source habituelle, à
15 savoir des documents médicaux que l'on souhaiterait normalement avoir afin
16 d'effectuer une analyse du type de celle que vous avez effectuée vous-
17 même? Est-ce exact?
18 M. Begic (interprétation): Oui, c'est exact, mais je souhaite ajouter
19 quelque chose.
20 A la fin de mon expertise, j'ai justement proposé un nombre de procédures
21 supplémentaires possibles, compte tenu du fait que, apparemment, le Dr
22 Omanovic n'avait vraiment pas d'autres documents. Il a écrit ce document
23 sur la base de son séjour au sein de leur service.
24 Mais, déjà sur la base de ce document, il est possible de voir comment, à
25 deux reprises, M. Ajanic a subi un traitement: une fois à Sokolac et une
Page 15461
1 fois à Mostar. Je n'ai pas de raison de douter de l'authenticité de ce
2 document et je suppose, donc, que, même après 1996, M. Ajanic subissait
3 des traitements psychiatriques cliniques ou même hospitalisé.
4 J'ai donc justement proposé dans ma conclusion que l'on obtienne ces
5 documents pour les présenter devant ce Tribunal ou peut-être devant un
6 autre expert. J'ai proposé cela entre autres choses.
7 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Par?
8 M. Par (interprétation): J'ai attendu la fin de la réponse, mais je
9 souhaite savoir si le Procureur conteste l'authenticité de ce document,
10 les sources, l'origine de ce document, ou bien est-ce qu'il souhaite
11 simplement constater que d'autres documents manquent? Je pense que ceci
12 devrait être clarifié pour la défense et peut-être pour les Juges aussi.
13 M. le Président (interprétation): A mon avis, le Procureur pose des
14 questions concernant le contenu de ce document et non pas concernant
15 l'authenticité de ce document. Vous n'avez peut-être pas d'autre document
16 concernant cela. Mais peut-être le Procureur pourrait nous clarifier sa
17 position.
18 M. Stringer (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai pas souhaité
19 suggérer que nous contestions l'authenticité de ce document 877.22. Je ne
20 conteste pas son authenticité, mais je pose un certain nombre de documents
21 sur la mesure dans laquelle ce document a trait à d'autres documents qui
22 ne sont pas disponibles apparemment, quelle qu'en soit la raison. Je
23 souhaite simplement poser un certain nombre de questions supplémentaires à
24 ce sujet-là.
25 Docteur Begic, si vous ne connaissez la réponse, dites-le-moi; mais est-ce
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1 que vous connaissez ce Dr Ramo Omanovic, auteur de cette lettre? Est-ce
2 que vous le connaissez, ou bien est-ce que vous avez entendu parler de
3 lui?
4 M. Begic (interprétation): Je ne le connais pas, mais j'ai eu l'occasion
5 de voir un nombre d'autres documents comportant son sceau. Mais
6 personnellement, je ne le connais pas.
7 Question: Il ne vous a pas remis les documents qui ont été rédigés, qui
8 ont été créés à l'époque, c'est-à-dire en 1996? Il n'a pas mis cela à
9 votre disposition, n'est-ce pas?
10 Réponse: Je n'ai pas obtenu cela parce que, je répète, conformément à la
11 législation croate, vous ne pouvez pas vous adresser à un autre collègue
12 pour obtenir tout simplement des documents médicaux.
13 Question: Docteur Begic, j'ai l'impression que vous n'avez pas eu
14 l'occasion d'examiner le témoin ou de parler avec le témoin et, à cela,
15 s'ajoute le fait que vous n'aviez aucun autre document plus détaillé, mis
16 à part ce qui est contenu dans cette lettre. Donc, en réalité, vous aviez
17 une base extrêmement limitée sur laquelle vous deviez vous fonder pour
18 arriver à votre conclusion et opinion. Est-ce que vous êtes d'accord avec
19 moi?
20 Réponse: Oui, je suis d'accord, mais je le répète qu'à la fin de mon
21 expertise, dans les conclusions, j'ai proposé plusieurs autres procédures
22 mis à part des documents supplémentaires. Donc, certainement, il faudrait
23 avoir des documents médicaux supplémentaires, la possibilité d'observer la
24 personne en direct et puis une hétéroanamnèse. Ceci n'a pas été mentionné
25 par moi dans mon rapport d'expert, donc cela veut dire l'établissement
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1 d'une hétéroanamnèse sur la base des entretiens avec son entourage qui
2 pourrait expliquer de quelle manière cette personne fonctionne au jour le
3 jour.
4 Donc, si vous me le permettez, je souhaite formuler cette proposition
5 maintenant, proposition qui n'est pas contenue dans mon rapport d'expert.
6 Question: Donc il existe tout un nombre de mesures qui auraient pu être
7 prises, des informations que vous auriez pu recueillir afin de pouvoir
8 avoir une opinion plus crédible concernant l'état de santé mentale de
9 cette personne?
10 Réponse: Il est certain qu'il existe des manières de recueillir des
11 documents qui m'auraient permis d'avoir une évaluation plus exacte et un
12 pronostic plus exact également, mais je n'ai pas de raison de douter du
13 contenu du document puisqu'il est écrit, professionnellement parlant,
14 d'une manière extrêmement logique. Et d'après mon expérience médicale et
15 d'après la littérature, je pense qu'avec ce genre de diagnostics, il n'est
16 pas possible de les interpréter d'une manière différente par rapport à
17 celle que j'ai exprimée dans mon rapport d'expert.
18 Bien sûr, toutes les mesures que j'ai proposées de prendre auraient accru
19 la qualité de cet avis d'expert, mais je doute fort qu'un tel avis se
20 solderait par des recommandations et conclusions différentes.
21 Question: N'est-il pas vrai, Docteur Begic, qu'en fait, vous vous fondiez
22 sur des données extrêmement limitées, ce qui devrait normalement miner la
23 confiance que l'on peut avoir en votre avis d'expert? Tout simplement,
24 vous n'aviez pas la possibilité, vous n'aviez pas suffisamment de
25 fondements pour arriver à vos conclusions et pour formuler votre opinion
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1 concernant cette personne.
2 Réponse: Mis à part les données contenues dans ce document, je n'ai pas eu
3 d'autres informations, d'autres données. Mais les diagnostics mentionnés
4 dans ce document portent sur des maladies d'extrême longue durée et je
5 n'ai pas de raison de douter que ceci est effectivement conforme au
6 tableau clinique de M. Ajanic, qui a pu être établi concernant M. Ajanic à
7 Mostar, à l'époque.
8 Question: En 1996?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Est-ce que vous seriez d'accord avec moi, Monsieur, qu'un autre
11 expert dans votre domaine ayant ces mêmes informations aurait pu conclure
12 que les informations étaient insuffisantes pour arriver à une opinion
13 concernant la crédibilité ou la capacité du témoin de déposer en 2002?
14 D'autres peut-être n'auraient pas pu exprimer une opinion sur la base de
15 ces informations contenues dans ce document….
16 M. Par (interprétation): Je fais objection à la manière dont les questions
17 sont posées puisqu'on suggère que le témoin examinait la situation de
18 santé de M. Halil Ajanic.
19 Mais ce qui ressort clairement, sur la base du document et de ce que le
20 témoin a dit, c'est que son rapport d'expert portait sur le document et
21 non pas sur l'homme en question. Donc je m'oppose à toutes les questions
22 qui suggèrent que le témoin aurait établi ces diagnostics. Il ne l'a pas
23 fait, et il a fondé son avis d'expert sur les documents dont il disposait.
24 Donc, à mon avis, si le Procureur suggère que le témoin avait établi le
25 diagnostic lui-même, il s'agit là d'un procédé tout à fait erroné. Merci.
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1 M. Stringer (interprétation): Est-ce que je peux poser ma question d'une
2 autre manière?
3 M. le Président (interprétation): Oui, s'il vous plaît, reformulez votre
4 question de façon à vous comprendre mieux.
5 M. Stringer (interprétation): Une autre personne de votre domaine n'aurait
6 peut-être pas voulu donner cette opinion parce que les données seraient
7 très limitées, peut-être parce que cette personne n'aurait pas eu la
8 possibilité d'examiner le témoin. Est-ce exact?
9 M. Begic (interprétation): Ce n'est pas exact parce que l'expert devrait
10 donner son opinion selon une expertise. Est-ce que cette expertise
11 différerait de la mienne? J'en doute. Mais, selon nos lois, nous faisons
12 l'expertise d'un document -d'un testament par exemple, ce n'est pas une
13 chose rare qui arrive, si vous m'avez bien compris-, c'est-à-dire un autre
14 expert pourrait, selon un document, donner son opinion d'expert.
15 Et une autre question: c'est dans quelle mesure cette opinion d'un autre
16 expert serait différente de la mienne.
17 Question: Docteur Begic, je voudrais attirer votre attention sur certaines
18 informations contenues dans cette lettre. D'abord, ici, il figure qu'il a
19 été soigné à Mostar durant huit jours et qu'il a été à l'hôpital pendant
20 la période au cours du mois d'avril 1996. Est-ce exact?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Ce fait ne nous donne pas beaucoup d'informations concernant
23 l'état de santé mentale du témoin en 1993, à l'époque où les événements se
24 sont produits et sur lesquels le témoin a déposé. Cela ne nous dit pas
25 beaucoup sur son état de santé mentale en 1993. Est-ce que j'ai raison?
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1 Réponse: Oui, partiellement, parce que, dans ce document, il est écrit que
2 M. Ajanic a été soigné à Sokolac durant trois ans, dans une époque
3 antérieure, et nous ne savons pas quand. Mais trois années de soins, c'est
4 extrêmement long et cela n'a pas été fait sans une indication importante.
5 Deuxièmement, il est mentionné que lui, il a été soigné à Mostar, mais on
6 ne sait pas quand. Est-ce que c'était avant, durant ou après 1993?
7 Mais il s'agit d'informations hétérogènes que M. Omanovic a peut-être eues
8 de la part des proches de M. Ajanic et qui parlent d'une période prolongée
9 de soins psychiatriques de M. Ajanic.
10 Question: Et cette information ne vous permet pas de commenter ou de
11 considérer son état de santé mentale pendant l'été 1993? Est-ce que j'ai
12 raison?
13 Réponse: Oui, mais cette information me permet absolument de parler de M.
14 Ajanic en tant que malade psychiatrique, même avant l'année 1993.
15 Question: Comment saviez-vous qu'il était malade psychiatrique avant 1993?
16 Maintenant, je vais poser une autre question. Je pense qu'on a eu un
17 problème de traduction, là.
18 Bien. Vous n'êtes pas en possibilité de commenter la capacité du témoin de
19 se souvenir en été 1993. Tout ce que vous savez, c'est qu'il s'agissait
20 d'une personne qui a été soignée à une certaine époque avant cette année
21 ou après?
22 Réponse: C'est exact, mais je ne peux pas négliger ces deux informations
23 sur les soins précédents, d'abord.
24 Et deuxièmement, si M. Ajanic, en 1996, a été soigné pour la première fois
25 en psychiatrie et le diagnostic a été établi, il est à attendre que de
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1 tels diagnostics, en parlant généralement, pourront modifier la
2 possibilité de se souvenir, même pour une période plus longue, même pour
3 l'année 1993 et même pour la période précédente.
4 Je pense qu'il faut souligner particulièrement ces deux choses.
5 Question: Docteur Begic, vous venez de dire qu'il s'agit d'une supposition
6 de votre part parce que vous n'avez pas de fondements pour affirmer que
7 cette personne ne pouvait pas se souvenir de l'année 1993 et des
8 événements qui sont survenus à l'époque. Donc vous ne savez pas si cette
9 personne, en 1993, a été malade dans ce sens?
10 Réponse: C'est exact, mais je ne sais pas non plus s'il était en bonne
11 santé. Selon cela, il paraît qu'il ne se trouvait pas en bonne santé.
12 M. Stringer (interprétation): Est-ce que vous savez si jamais, pendant
13 l'existence de l'ex-Yougoslavie, il était possible que quelqu'un, qui a
14 été accusé d'avoir commis des crimes, d'être mis dans un asile
15 psychiatrique et le fait qu'il s'y trouve, aurait été condamné à une peine
16 d'emprisonnement beaucoup plus brève que s'il avait dû aller en prison
17 pour purger cette peine?
18 M. Begic (interprétation): Est-ce que je peux répéter votre question: si
19 je sais si quelqu'un, pendant l'existence de l'ex-Yougoslavie, pour éviter
20 ou faire abréger sa peine d'emprisonnement, allait dans un asile
21 psychiatrique? Est-ce que j'ai bien compris votre question?
22 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Par?
23 M. Par (interprétation): Je soulève une objection à cette question parce
24 qu'on demande une spéculation de la part du témoin, donc de parler de
25 quelque chose qui ne peut pas être fondé sur des faits sérieux.
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1 M. le Président (interprétation): Maître Par, ne posez pas de questions
2 par vous-même parce qu'il s'agit d'un expert qui est, dans ce domaine, un
3 expert depuis longtemps, donc il connaît bien la situation en ex-
4 Yougoslavie.
5 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Stringer.
6 M. Stringer (interprétation): Docteur Begic, si je vous dis que cette
7 personne s'est trouvée pendant trois ans à Sokolac et qu'il s'agissait
8 d'une peine alternative par rapport à la peine régulière en prison, est-ce
9 que ce serait possible?
10 M. Begic (interprétation): D'abord, je ne peux pas parler de la période de
11 l'ex-Yougoslavie parce que je suis devenu psychiatre en 1999. Donc, dans
12 ce cas-là, ce serait une spéculation. Mais je permets que l'abus sur ce
13 plan, dans la psychiatrie yougoslave à l'époque, se déroulait de cette
14 manière, mais cela ne m'est pas connu en tant que donnée concrète.
15 Question: Mis à part ce que vous avez dit dans l'interrogatoire principal
16 concernant ces trois états de maladie -la psychose, la débilité et
17 l'amnésie-, mis à part ces caractéristiques générales attribuées à ces
18 maladies, vous ne pouvez pas clarifier l'état de santé mentale de cette
19 personne à l'époque de sa déposition, au mois de janvier dernier. Est-ce
20 exact?
21 Réponse: Oui, c'est exact.
22 Question: Donc vous n'êtes pas en mesure de dire qu'il était capable à
23 l'époque de se souvenir des faits, de se souvenir et de témoigner en
24 partant de ses souvenirs?
25 Réponse: Je n'étais pas en mesure de faire cela, mais je répète: mon
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1 opinion est établie sur la base du document dont on parle.
2 Question: Docteur Begic, est-ce que vous connaissez le document ou le
3 livre intitulé: "Manuel - Diagnostic pour les troubles mentaux dits SM4"?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Je voudrais parler maintenant du diagnostic établi par le Dr
6 Omanovic et sur la base duquel vous avez établi qu'il s'agit d'un
7 diagnostic correct, exact.
8 Réponse: Oui.
9 Question: Et cela m'aidera, quand on parle de ces trois troubles, pour
10 dire s'il est possible de les classifier dans les catégories conformément
11 à des SM4, quand il s'agit de la psychose? Il me semble que…, même s'il
12 s'agit de la psychose alcoolique provoquée par l'abus de l'alcool. Est-ce
13 que j'ai raison quand je dis cela?
14 Réponse: Il s'agit probablement de la psychose provoquée par l'alcool et
15 ce qui est écrit dans la première partie en latin.
16 Question: Est-ce qu'il s'agit d'un trouble dans lequel les épisodes de
17 psychose apparaissent lors de la consommation de l'alcool ou bien après la
18 consommation de l'alcool après l'arrêt?
19 Réponse: J'ai déjà répondu à des questions de la défense. Une forme, c'est
20 l'abstinence, c'est une forme, et la forme chronique, c'est avec la
21 consommation de l'alcool.
22 Question: Si on revient maintenant à 877.22; à cette pièce, c'est-à-dire à
23 la lettre de M. Omanovic. Dans une partie, il est mentionné que le malade
24 a été reçu en tant qu'un malade, un patient dans une… Donc selon cela, on
25 peut conclure qu'il s'agit d'un épisode causé par l'abstinence à l'alcool?
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1 Réponse: Oui, je suppose que cela était comme ça.
2 Question: Dans ce diagnostic initial, il a été mentionné également le
3 syndrome amnésique. Est-ce que vous voyez cela?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Ma question est la suivante: est-ce que dans une telle situation
6 ce trouble amnésique, peut-on l'y mettre en relation à l'abstinence à
7 l'alcool qui aurait causé cet épisode psychotique?
8 Réponse: Oui, nous pouvons le dire. Mais cela n'exclut pas la possibilité
9 d'existence d'autres causes que j'ai mentionnées, que j'ai énumérées
10 avant, pour lesquelles cette documentation n'est pas exhaustive pour avoir
11 d'autres détails concernant d'autres raisons, d'autre causes. C'est-à-
12 dire: nous ne pouvons pas exclure absolument d'autres causes à part
13 l'alcool.
14 Question: Sur la base de ces informations dont nous disposons, ce ne
15 serait qu'une spéculation si nous considérons le fondement de ce trouble
16 amnésique, de ce syndrome amnésique?
17 Réponse: La spéculation oui, mais sur la base d'un tableau clinique que
18 mon collègue Omanovic a établi et selon lequel il l'a soigné durant ces
19 huit jours.
20 Question: Eh bien, Docteur, nous pensons avoir un diagnostic initial qui
21 lie le syndrome amnésique avec l'alcool et que cela soit avec la
22 consommation de l'alcool ou -ce qui est plus probable- par l'abstinence à
23 l'alcool. Et ensuite, nous avons le diagnostic définitif dans lequel il
24 est introduit le troisième terme et ce diagnostic définitif c'est la
25 débilité mentale, "debilitas mentis".
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1 Ma première question est: ces épisodes psychotiques, est-ce qu'il
2 s'agissait de quelque chose qui était différent par rapport aux psychoses
3 mentionnées par le premier diagnostic? Il s'agit de termes différents,
4 c'est pour cela que je ne sais pas s'il s'agit de différents diagnostics.
5 Réponse: Il est possible que cet "épisode psychotique" -appelé comme cela
6 dans le diagnostic définitif- soit un tableau clinique différent au début
7 des soins. Mais il est également possible que ce M. Ajanic ait eu ce
8 diagnostic de débilité au début de son enfance, et que ce diagnostic a
9 été, d'une façon, masqué quand il est venu à l'hôpital à cause de
10 l'alcoolisme; et c'est alors que ce diagnostic a été établi par le
11 troisième diagnostic. Donc les deux variantes sont possibles.
12 Question: Ce diagnostic définitif -et maintenant je parle de ces épisodes
13 psychotiques- pour moi cela signifie donc que c'est une personne qui a des
14 intervalles de nature psychotique. Est-ce que j'ai raison?
15 Réponse: Oui, il s'agit de la situation dans laquelle la débilité mentale
16 est possible et qu'il existe une variante d'un fonctionnement d'un
17 comportement régulier et cet intervalle peut varier dans le temps, mais
18 cette période est interrompue par des troubles psychotiques. Et on peut
19 établir un parallèle avec la schizophrénie donc il y a des moments, des
20 intervalles où cela s'aggrave et des intervalles où la situation
21 s'améliore.
22 Question: Je pense que vous avez déjà répondu à ma question suivante, mais
23 je vais la poser quand même.
24 Quand nous parlons des épisodes psychotiques, pour moi, cela implique
25 l'existence d'épisodes lucides, c'est-à-dire de l'état dans lequel cette
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1 personne se comporte d'une manière plus normale et dans lequel il se
2 souvient normalement de certaines choses?
3 Réponse: Cette personne se comporte d'une manière plus normale parce que
4 les symptômes psychotiques sont absents, mais il ne peut pas fonctionner
5 de manière tout à fait normale parce qu'il y a cet état de débilité, parce
6 qu'il s'agit d'un état permanent, continuel, jusqu'à la fin de ses jours,
7 c'est-à-dire que, si un autre malade qui a ce même diagnostic a une sorte
8 d'épisode psychotique, après cela, après cet épisode, les symptômes
9 disparaissent, mais son fonctionnement cognitif, à cause de la débilité,
10 apparaît de nouveau au premier plan.
11 Question: Si nous regardons de nouveau la lettre du Dr Omanovic, il dit
12 que la thérapie a été prescrite. Vous voyez cette partie?
13 Docteur, je ne veux pas maintenant que vous spéculiez sur ce qu'aurait été
14 la thérapie pour quelqu'un qui souffre de ces troubles, mais je voudrais
15 tout simplement vous demander si vous savez quelle thérapie aurait été
16 donnée, prescrite dans le cas de M. Ajanic?
17 Réponse: Quelle thérapie concrète? Mais ce que j'aurais prescrit dans
18 cette situation, ce sont les trois médicaments psychopharmacologiques
19 différents.
20 Question: Est-ce que vous savez dans quelles proportions cette thérapie
21 prescrite est-elle réussie dans le traitement de ces troubles? Donc je ne
22 parle pas de manière abstraite, mais je parle concrètement de ce patient.
23 Réponse: Malheureusement, je ne sais pas.
24 Question: Donc ça veut dire, Monsieur, que vous ne savez pas dans quelle
25 mesure le témoin avait toujours souffert de ces troubles à l'époque de son
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1 témoignage à lui devant ce Tribunal. Est-ce exact?
2 Réponse: C'est partiellement exact, parce que, si ce diagnostic de
3 débilité mentale n'est pas en relation avec ces troubles, il est sûr qu'il
4 souffrait de toutes ces séquelles pendant son témoignage, c'est-à-dire les
5 séquelles dues à la débilité mentale. Donc il est possible que son
6 alcoolisme était contrôlé, sous contrôle, qu'il aurait évité peut-être des
7 épisodes de délire mais, dans cette opinion, dans ce constat d'expert, je
8 ne peux dire que lui, lors de sa déposition, il se trouvait dans ce même
9 type de fonctionnement qui a été causé par la débilité mentale.
10 Question: Pour résumer cela, on peut dire qu'il y avait la psychose, le
11 syndrome amnésique. C'est quelque chose que l'on peut soigner. Cela peut
12 apparaître, cela peut disparaître, cela peut s'améliorer ou s'aggraver,
13 mais la débilité mentale est constante?
14 Réponse: La débilité mentale est constante, mais un alcoolique qui a une
15 psychose alcoolique, tout simplement, une partie de son fonctionnement est
16 abîmé et lésé en permanence. Son comportement cognitif, social et de
17 travail, dans chaque facette de son fonctionnement, il peut avoir des
18 parties de fonctionnement normales, mais aussi d'autres parties qui sont
19 malades.
20 M. Stringer (interprétation): Docteur, je vous prie de prendre maintenant
21 une autre pièce, 877.23. C'est votre opinion d'expert.
22 Monsieur le Président, notre rythme de travail a un peu changé. Je ne sais
23 pas quand nous pouvons faire une pause.
24 M. le Président (interprétation): De combien de temps avez-vous besoin
25 pour votre contre-interrogatoire?
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1 M. Stringer (interprétation): J'ai à peu près déjà posé la moitié de mes
2 questions mais, si nous pouvons poursuivre, je pense que je pourrai finir
3 mon contre-interrogatoire aujourd'hui. Mais avec une pause d'une demi-
4 heure, non.
5 M. Par (interprétation): Je m'oppose à voir accordé ce temps, Monsieur le
6 Procureur. Ce serait le doublement du temps de l'interrogatoire principal.
7 Donc on peut toujours poser ces questions sans toucher l'essence de ce que
8 le témoin a dit. Donc je vous prie que le temps accordé soit conforme à
9 des règles.
10 M. le Président (interprétation): Maître Par, vous devez comprendre que ce
11 témoin est un expert. Ce qui figure dans sa déposition… nous pouvons lire
12 sa déposition nous-même et votre travail dans l'interrogatoire principal
13 est d'attirer notre attention sur des choses concrètes mentionnées dans ce
14 rapport. Mais, de l'autre côté, le Procureur doit poser un grand nombre de
15 questions concernant ce rapport; et là, la situation est tout à fait
16 différente.
17 Monsieur Stringer, nous pourrions continuer notre séance jusque la fin de
18 votre contre-interrogatoire, mais je pense que ce serait trop long pour
19 les interprètes. C'est pour cela que je propose de faire une pause de 20
20 minutes. Après quoi, nous allons voir si vous pourriez finir votre contre-
21 interrogatoire.
22 M. Stringer (interprétation): Je suis d'accord, Monsieur le Président.
23 M. le Président (interprétation): Bien. Nous allons poursuivre à 18 heures
24 20.
25 (L'audience, suspendue à 17 heures 57, est reprise à 18 heures 22.)
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1 M. le Président (interprétation): Oui. Monsieur Stringer, je vous prie de
2 continuer.
3 M. Stringer (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
4 Monsieur Begic, je souhaiterais revenir sur votre opinion d'expert. C'est
5 le document qui porte la cote 877.23.
6 Je vais être bref. Je voulais vous poser quelques questions sur la base de
7 la partie de votre lettre, c'est-à-dire de votre opinion. Donc, au n°1,
8 vous dites que "pour ce malade, il est question d'un tableau clinique
9 flou, qui pourrait avoir à la base le diagnostic de plusieurs entités
10 psychiatriques". Ensuite, vous énumérez les conditions dont nous avons
11 déjà parlé.
12 Ma question est donc la suivante: pour ce qui est du tableau clinique qui
13 n'est pas clair, comme vous le dites, avez-vous formulé cela de telle
14 manière parce que vous n'aviez pas suffisamment d'informations?
15 M. Begic (interprétation): Non. C'est parce qu'un tableau clinique peu
16 clair, cela veut dire que c'est peu clair. Il peut être clair lorsqu'il
17 s'agit d'une maladie en particulier, donc soit du délire, de la débilité
18 ou du syndrome amnésique. Et puisque, donc, il y a plusieurs entités, le
19 tableau clinique est peu clair, donc complexe.
20 Question: Passons maintenant à la dernière phrase de votre lettre; puisque
21 vous en avez parlé pendant votre témoignage, il faut donc que nous
22 abordions ce sujet.
23 Vous dites donc: "Une évaluation plus précise de la condition du malade
24 pourrait être produite sur examen d'autres documents médicaux ou sur
25 auscultation psychologique et psychiatrique du malade". (Fin de citation.)
Page 15476
1 Cela étant dit, ce tableau clinique aurait-il pu être plus clair si vous
2 aviez eu accès à d'autres documents de nature médicale ou au patient lui-
3 même?
4 Réponse: J'estime que le tableau aurait été tout aussi complexe, mais
5 peut-être que l'on aurait pu distinguer les trois entités l'une de l'autre
6 et établir la priorité qui est: lequel des trois est prioritaire par
7 rapport aux autres?
8 Question: Ensuite, vous parlez de psychose éthylique et, d'après votre
9 témoignage, on peut dire que c'est un trouble où les épisodes de psychose
10 surviennent en relation avec soit l'abstinence soit la consommation de
11 l'alcool. L'alcool est donc cet élément déclencheur?
12 Réponse: C'est exact.
13 Juste une correction, ce n'est pas moi qui ai établi le diagnostic; c'est
14 mon collègue, M. Omanovic, qui a établi le diagnostic. Moi, je l'ai juste
15 cité.
16 Question: Je le comprends. Donc vous acceptez son diagnostic en présumant
17 qu'il s'agit d'un diagnostic qui est conforme à la réalité, et c'est sur
18 cette base que vous commencez vos travaux, n'est-ce pas?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Pour ce qui est de la psychose éthylique, si M. Ajanic n'a pas
21 traversé cet épisode, donc à la période où les événements au sujet
22 desquels il a témoigné se sont produits, est-ce que ceci nous porterait à
23 croire qu'il avait une capacité plus grande à se remémorer ces événements?
24 Réponse: Si en 1993, donc pendant cette période, il n'avait pas subi des
25 altérations psychiques, à ce moment-là oui. Et sinon, eh bien, non.
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1 Question: Merci. Mais nous ne pouvons pas savoir quel était son état en
2 été 1993, n'est-ce pas?
3 Réponse: Nous ne le savons pas.
4 Question: Ce que vous avez dit pouvait également s'appliquer sur ce qu'il
5 a dit devant ce Tribunal en janvier de cette année, n'est-ce pas? Donc
6 s'il ne traversait pas pendant cette période un épisode de psychose, il
7 avait donc une plus grande capacité à se remémorer des événements de 1993,
8 n'est-ce pas?
9 Réponse: Même si ce monsieur en janvier 2002 ne traversait pas donc un
10 épisode de psychose, un épisode psychotique, il n'en demeure pas moins
11 qu'il souffre de débilité. Ce qui amène, ce qui peut amener à des
12 dysfonctionnements cognitifs, donc cet état de débilité est une condition
13 permanente.
14 Question: Nous allons aborder la débilité mentale dans quelques instants,
15 mais pour ce qui est de l'amnésie, du syndrome amnésique, au cours de
16 l'interrogatoire principal, vous avez évoqué "le syndrome de Korsakov".
17 C'est une forme plus grave d'amnésie liée à la consommation d'alcool,
18 n'est-ce pas?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Donc le diagnostic initial posé par M. Omanovic -et que vous
21 acceptez- ne mentionne pas "le syndrome de Korsakov"?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Dans votre opinion, opinion d'expert, au sujet du syndrome
24 amnésique, vous dites que les causes de cette condition peuvent être liées
25 à la dépendance à l'alcool, mais d'autres causes peuvent être présentes
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1 aussi.
2 Donc ma question est la suivante: il n'y a donc rien d'autre qui aurait pu
3 provoquer ce syndrome, rien d'autre que l'alcool, n'est-ce pas?
4 Réponse: On ne le sait pas.
5 Question: Nous ne le savons pas, puisque nous n'avons pas d'autres
6 informations que celles qui nous ont été fournies par le Dr Omanovic.
7 Réponse: C'est exact.
8 Question: Vous n'avez pas lu la déclaration de ce témoin. Il a évoqué les
9 événements de 1993. Le fait qu'il a été capable de se remémorer ces
10 événements et le fait qu'il n'a pas dit qu'il ne pouvait pas s'en
11 souvenir, n'est-ce pas incohérent par rapport... cela n'est pas tout à
12 fait conforme au syndrome amnésique, n'est-ce pas?
13 Réponse: Formulé de telle manière, oui. Mais si, moi, j'avais eu
14 l'occasion de lui poser des questions, je l'aurais fait autrement pour
15 établir ce qu'il en était.
16 Question: Fort bien. Vous ne le savez pas, donc, puisque vous n'êtes pas
17 au courant de sa déclaration.
18 Mais présumons la chose suivante: il a témoigné au sujet de certains
19 événements, cela nous aurait transférés dans le domaine de l'amnésie
20 plutôt que dans l'étendue et la valeur que l'on pourrait attribuer à ses
21 souvenirs?
22 Réponse: C'est exact.
23 Question: Et c'est un domaine où il appartient aux Juges de recourir à
24 leur propre jugement quant à la fiabilité, à la crédibilité des témoins
25 qui témoignent au sujet des événements qui se sont produits par le passé.
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1 Réponse: Si le Tribunal n'a pas besoin d'opinions d'experts, alors,
2 effectivement, il peut fonder son jugement sans y recourir.
3 Question: Ma dernière question concerne la débilité. Dans votre opinion
4 d'expert, vous dites que la débilité est un état de retardement mental. Ma
5 première question est donc la suivante: de quel degré de débilité s'agit-
6 il dans ce cas précis, dans le cas de ce monsieur?
7 Réponse: Le QI, chez des personnes qui souffrent de débilité, est de 50 à
8 69. Le QI normal varie de 90 à 110. Tout ce qui est en dessous de 70
9 représente une débilité mentale, un retardement mental. Ceci en est donc
10 une forme.
11 Question: Monsieur Begic, l'utilisation du mot "débilitate" correspond à
12 un certain éventail de QI, n'est-ce pas?
13 Réponse: Oui.
14 Question: Y a-t-il un autre terme que l'on utilise pour les cas où le QI
15 est en dessous de 50?
16 Réponse: Oui, "idiotie", par exemple. Donc pour le QI en dessous de 50, il
17 s'agit de retardement mental grave.
18 Question: Fort bien. Ensuite, y a-t-il d'autres termes que l'on utilise
19 pour le QI qui varie de 70 à 80?
20 Réponse: Il s'agit d'une catégorie psychologique et pas psychiatrique,
21 puisque c'est le psychologue qui se charge de ces évaluations. On appelle
22 donc cela "une intelligence en dessous de la normale".
23 Et, de 90 à 110, il s'agit de "QI normal".
24 Question: Ma question suivante concernait cela également. Donc avons-nous
25 une évaluation du QI de cette personne? Nous ne savons pas si M. Omanovic
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1 l'a fait. Vous, vous n'êtes pas en mesure de dire quel était son QI et si
2 cet état peut être qualifié de grave, de modéré, de léger. Est-ce exact?
3 Réponse: Nous ne savons pas quel est le niveau de son QI, mais la débilité
4 concerne le QI de 50 à 70, quel que soit l'auteur qui traite de ce sujet.
5 Question: Il s'agit donc d'individus qui peuvent fonctionner
6 indépendamment dans la société et qui ne sont pas exclus des personnes
7 aptes à témoigner dans des procédures de ce type, n'est-ce pas?
8 Réponse: C'est exact.
9 Question: Si je vous disais que le témoin avait une famille, qu'il
10 travaillait, tout ceci n'est pas en contradiction avec son QI?
11 Réponse: Ce n'est pas moi qui l'ai identifié mais le Dr Omanovic. J'ai
12 déjà dit qu'une personne de ce type peut effectivement être marié, avoir
13 une famille et travailler. Mais son entourage, même ceux qui ne sont pas
14 experts, remarque les changements dans le comportement d'une telle
15 personne à plusieurs niveaux.
16 Question: Nous allons en reparler, mais revenons au syndrome amnésique. Au
17 début du contre-interrogatoire, je vous ai montré la déclaration que ce
18 témoin a fournie aux enquêteurs du Bureau du Procureur de ce Tribunal.
19 J'ai également évoqué à plusieurs reprises sa déclaration devant ce
20 Tribunal au mois de janvier.
21 Ma question, Monsieur Begic, est la suivante: est-il acceptable à vos
22 yeux, en tant qu'expert, qu'une personne non-spécialiste que je suis
23 puisse lire cette déclaration, sa déposition du mois janvier et, d'après
24 les similarités ou les éléments de consistance, puisse donc formuler le
25 jugement qu'effectivement cette personne ne souffrait pas de syndrome
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1 amnésique, pour ce qui est tout au moins des événements au sujet desquels
2 il a témoigné.
3 Réponse: Il m'est très difficile d'établir cela sans discuter avec le
4 malade en personne.
5 Question: Revenons donc à la troisième partie, à la question de la
6 débilité. Des choses que vous avez dites au cours de votre témoignage,
7 c'est qu'une personne souffrant de débilité pouvait être influencée par
8 d'autres personnes.
9 Réponse: C'est exact.
10 Question: Ma question concerne justement sa déclaration et sa déposition :
11 est-ce qu'une personne, donc un non-spécialiste comme moi-même pourrait
12 formuler un jugement quant à l'étendue de l'influence qu'on a exercée sur
13 lui? Est-ce que ceci est une question que je n'ai pas posée de manière
14 peut-être très habile? Je peux vous la reformuler.
15 Réponse: Je ne peux pas vous répondre sans avoir connaissance de la
16 personne, du malade mais, pour ce qui est des personnes qui souffrent de
17 débilité mentale, je peux vous dire la chose suivante: ils sont
18 influençables.
19 Donc si M. Ajanic était plus ou moins influencé, je ne peux pas vous le
20 dire. Et quant à votre question de savoir si quelqu'un qui n'est pas
21 spécialiste pourrait en déduire quoi que ce soit, je ne peux pas vous
22 répondre.
23 M. Stringer (interprétation): Je n'ai plus de questions.
24 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des questions supplémentaires,
25 Maître Par?
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1 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Drazen Begic, par
2 Me Par.)
3 M. Par (interprétation): Oui, il y en a quelques-unes.
4 Monsieur le Docteur, commençons par la fin, le caractère influençable
5 potentiel de ce témoin.
6 Je vous pose la question suivante: moi, en tant que quelqu'un qui n'est
7 pas spécialiste en la matière, est-ce que je pourrais penser qu'il
8 pourrait donc être influencé si on lui disait: "Tu iras à La Haye pour y
9 témoigner. Il s'agit de témoignage de tel ou tel type. Lorsque tu viendras
10 à La Haye, nous allons te lire la déclaration que tu as faite. Après, nous
11 allons te poser des questions sur la base de cette déclaration et tu vas
12 témoigner."?
13 Est-ce que moi, en tant que quelqu'un dont ce n'est pas la spécialité...,
14 donc si je proposais une telle chose à une personne de ce type, est-ce que
15 cette personne ferait ce qu'on attend d'elle?
16 M. Begic (interprétation): Ma réponse serait similaire. Oui, une personne
17 laïque pourrait effectivement supposer cela, mais sans contact avec M.
18 Ajanic, avec le malade, il m'est difficile, dans quelle mesure et dans
19 quel domaine est patent son caractère influençable.
20 M. Par (interprétation): Monsieur le Docteur, une partie du contre-
21 interrogatoire était liée aux déclarations et aux dépositions de ce
22 témoin. Et on voulait, en fait, dire que vous, vous n'étiez pas au courant
23 de tout cela.
24 Le témoin a déclaré devant ce Tribunal qu'il…, il a dit pour lui-même
25 qu'il consommait de l'alcool, qu'il était fou, qu'il suivait un
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1 traitement, etc. et que de nombreux témoins, à la question de savoir s'ils
2 connaissaient cette personne, ont dit que c'était quelqu'un d'asocial qui
3 consommait de l'alcool et qu'il avait démoli sa vie privée. Il avait
4 conclu plusieurs mariages et il avait beaucoup d'enfants, etc.
5 Donc tout cela pourrait-il aller à l'appui du diagnostic que l'on peut
6 voir ici, ou bien ceci pourrait-il être de nature à contester le
7 diagnostic?
8 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Stringer?
9 M. Stringer (interprétation): Nous n'acceptons pas que Me Par caractérise
10 ce témoignage de la manière dont il l'a fait. Nous pourrons l'accepter
11 qu'en tant qu'hypothèse.
12 M. Par (interprétation): Si je l'ai dit, j'ai dit ce que je viens de dire,
13 je n'avais pas effectivement le choix puisque M. Stringer avait affirmé
14 que pour lui il avait une famille, que c'était un homme qui travaillait,
15 etc. Donc je ne pouvais pas faire autrement que de poser ma question de la
16 manière suivante.
17 Mme Clark (interprétation): Nous avons eu plusieurs versions de
18 déclarations concernant ce témoin, mais nous n'avons pas entendu quiconque
19 dire qu'il avait plusieurs épouses, etc. Peut-être qu'il a effectivement
20 beaucoup d'enfants, mais on n'a pas pu l'entendre formuler de cette façon-
21 là.
22 M. Par (interprétation): Fort bien. Je vais poursuivre.
23 Monsieur le Docteur, lorsque nous vous avons demandé votre opinion
24 d'expert sur la base de ce diagnostic, aviez-vous eu des raisons
25 quelconques pour mettre en cause ce diagnostic?
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1 M. Begic (interprétation): Non.
2 Question: Aujourd'hui, après avoir passé plusieurs heures à discuter de ce
3 diagnostic, avez-vous donc des raisons qui vous amèneraient à douter de ce
4 diagnostic et de changer votre opinion?
5 Réponse: Non.
6 M. Par (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus de questions à
7 poser à ce témoin.
8 M. le Président (interprétation): Pas d'interprétation.
9 (Questions de Mme la Juge Diarra au témoin, M. Drazen Begic.)
10 Mme Diarra: Monsieur l'expert, est-ce que le contact physique avec Halil
11 Ajanic ne vous aurait pas permis d'avoir une opinion plus précise sur son
12 état mental? A plusieurs questions, vous avez déploré de ne pas l'avoir eu
13 en face de vous. Qu'est-ce qui vous a empêché de l'avoir face à vous?
14 M. Begic (interprétation): Je n'ai dit qu'une fois, pas à plusieurs
15 reprises, que je ne disposais pas de telles informations, mais il est sûr
16 qu'un contact direct aurait contribué à ce que mon opinion professionnelle
17 soit basée sur plusieurs faits.
18 La troisième question concerne donc la communication avec le malade. Il
19 n'y avait rien qui m'empêchait de communiquer avec lui, mais j'avais le
20 dossier médical et c'est tout ce qu'on me demandait de faire: d'examiner
21 le dossier médical. S'il y avait eu d'autres demandes, peut-être que mon
22 comportement aurait été différent.
23 Mme Diarra: Je vous remercie.
24 M. le Président (interprétation): Oui, Madame la Juge Clark?
25 (Questions de Mme la Juge Clark au témoin, M. Drazen Begic.)
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1 Mme Clark (interprétation): J'ai quelques questions.
2 Tout d'abord, je souhaiterais vous remercier d'avoir témoigné en tant
3 qu'expert ici. Si j'ai bien compris, si on vous a demandé votre opinion,
4 c'est tout d'abord pour expliquer vos résultats à nous -qui ne sommes pas
5 des médecins- sur la base d'une note très brève fournie par le Dr
6 Omanovic. Ceci n'est pas contestable.
7 Ensuite, on vous a demandé votre opinion d'expert sur le fait de savoir si
8 cette personne pouvait donner un témoignage de qualité satisfaisante. Donc
9 cela concernait la qualité de la capacité de cette personne en tant que
10 témoin.
11 M. Begic (interprétation): Oui.
12 Question: Est-ce que, à quelque moment que ce soit, en tant que
13 professionnel, est-ce que vous avez appelé le Dr Omanovic pour l'informer
14 du fait que vous passiez en revue ses notes?
15 Réponse: Non.
16 Question: Est-ce que vous saviez si le Dr Omanovic était le docteur en
17 charge, parce que je vois qu'en effet, il était le chef du département,
18 mais en fait, la clinique s'appelle "la clinique du Dr Safet Mujic". Donc
19 nous ne savons même pas si la personne qui a signé la lettre avait
20 réellement traité ou même vu M. Ajanic.
21 Réponse: Oui, clairement, le Dr Omanovic est le chef du département. Le
22 nom de la clinique est "Safet" ou "Sefer Mujic". Mais cela veut dire que
23 cette personne n'y travaille plus depuis longtemps.
24 Question: Je pensais que, peut-être, c'était lui le docteur qui avait
25 traité ce patient, mais si vous dites qu'il s'agit là simplement du nom de
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1 la clinique, ceci est tout à fait autre chose.
2 Si j'ai bien compris vos propos, Docteur, l'état clinique de la psychose
3 est souvent aigu et parfois sensible aux traitements. Est-ce exact?
4 Réponse: Oui, en général.
5 Question: Et on ne peut pas suggérer qu'il s'agit là d'une psychose
6 chronique? On ne peut pas conclure cela sur la base de cet extrait
7 extrêmement bref de la note clinique du docteur, n'est-ce pas?
8 Réponse: Non.
9 Question: J'ai lu votre curriculum vitae, Docteur. Je sais que vous
10 enseignez à l'école médicale. Est-ce que, ces dernières années, vous avez
11 traité des patients ou bien est-ce que vous avez plutôt une fonction
12 scientifique et universitaire?
13 Réponse: Au début, j'ai dit que, pendant toute cette période, je
14 travaillais à l'hôpital et je travaille toujours à l'hôpital. Donc je
15 travaille avec des patients qui viennent pour une visite ou qui se font
16 hospitaliser. Parfois, je suis de garde. Donc je travaille constamment à
17 l'hôpital.
18 Question: Oui. J'ai remarqué aussi l'endroit de votre naissance, votre
19 lieu de naissance. C'est une ville qui a traversé une véritable tragédie
20 et tout le monde en a entendu parler dans le contexte de la dissolution de
21 la Yougoslavie. Est-ce que je peux conclure, Docteur, que, dans votre
22 travail, souvent, vous avez rencontré des gens de votre région qui avaient
23 subi des traumatismes psychologiques aigus pendant la guerre?
24 Réponse: Malheureusement, oui.
25 Question: Oui, je suis d'accord pour qualifier cela de "malheureux". Mais
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1 dites-nous, Docteur, est-ce qu'un grand nombre de ces personnes qui ont
2 subi des traumatismes psychologiques ont tendance à abuser d'alcool
3 périodiquement?
4 Réponse: Les personnes d'âge moyen, oui. Et les personnes plus jeunes se
5 tournent plus facilement vers d'autres drogues.
6 Question: Malheureusement, encore une fois, Docteur, si une personne d'âge
7 moyen avait subi un traumatisme psychologique…
8 Mais parlons plutôt de quelqu'un d'autre. Si quelqu'un avait subi un
9 traumatisme psychologique plutôt aigu, quelqu'un qui avait été prisonnier
10 ou qui a perdu un enfant dans des circonstances horribles, ou bien avait
11 perdu une épouse ou même toute la famille, et puis qui est passé par un
12 épisode d'abus d'alcool, suivi par un épisode psychotique -et là, j'avoue
13 que c'est une question très longue-, donc vous avez là une personne qui a
14 tout d'abord subi un traumatisme psychologique, ensuite s'est mise à
15 abuser d'alcool et ensuite a subi des épisodes psychotiques, est-ce que
16 vous seriez enclin à exclure la possibilité pour cette personne de ne
17 jamais déposer de manière fiable?
18 M. Begic (interprétation): Non, je n'exclurai pas cette possibilité.
19 Mme Clark (interprétation): Merci.
20 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'il y a des questions qui
21 résultent des questions des Juges?
22 (Second interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Drazen Begic,
23 par Me Par.)
24 M. Par (interprétation): Oui, je vais enchaîner sur la dernière question.
25 S'agissant de cette personne, si elle vous donnait le récit des
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1 événements, est-ce que vous croiriez tout ce qu'elle dirait?
2 M. Begic (interprétation): Tout d'abord, je devrais m'entretenir avec
3 cette personne ou bien examiner son dossier médical pour pouvoir parler de
4 la fiabilité et de la crédibilité de son récit.
5 M. Par (interprétation): Une seule question encore, s'il vous plaît.
6 Dites-moi, Docteur, dans la pratique, est-ce qu'il était possible... Je
7 vais vous donner un exemple. Nous, en tant que défense, nous vous avons
8 demandé d'interpréter ce document. Est-ce que, dans la pratique, il serait
9 possible d'organiser la venue de Halil Ajanic chez vous, pour que vous
10 l'examiniez? Comment cela peut-il se passer? Est-ce qu'il y a
11 communication entre collègues, entre les deux Etats? Est-ce que ces genres
12 d'arrangements sont organisés?
13 M. Begic (interprétation): Je vais répondre brièvement.
14 Mme Clark (interprétation): Vous ne devez pas poser cette question. Il
15 s'agissait là d'une question qui n'est pas appropriée. Maître Par, vous
16 auriez dû poser la question avant de le citer à la barre en tant qu'expert
17 et non pas après.
18 M. Par (interprétation): J'ai une question liée à la question posée par le
19 Juge Diarra qui a demandé au témoin s'il a eu la possibilité de voir le
20 témoin Ajanic. C'est pourquoi je posais la question maintenant. Je peux
21 reformuler la question.
22 Est-ce que vous pouvez aller dans un autre pays pour déposer en tant
23 qu'expert?
24 M. Begic (interprétation): Non, mais une seule phrase: si le Tribunal
25 demande un avis d'expert, dans ce cas-là, la personne doit apparaître et,
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1 si c'est la défense qui le demande, la personne, même si elle habite dans
2 un même Etat, peut assez facilement et de manière assez élégante éviter
3 cela.
4 M. Par (interprétation): Merci.
5 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président?
6 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik?
7 M. Krsnik (interprétation): Je ne pose pas de question, mais la Juge
8 Diarra a posé une question tout à fait intéressante que moi-même je posais
9 depuis un an: qui a le droit de parler avec les témoins?
10 Moi, j'ai étudié tous les documents. Est-ce que j'ai le droit de
11 m'entretenir avec les témoins du Procureur? La réponse est: non, je n'ai
12 pas le droit.
13 Et maintenant, dans la lettre relative à la réplique, le Procureur me
14 rappelle que je ne peux pas entrer en contact avec ses témoins, alors que,
15 dans la situation inverse, ce n'était pas le cas.
16 Rien ne m'étonne plus ici. J'ai eu toutes sortes d'expériences ici. Mais
17 je souhaite simplement répondre à la question posée par la Juge Diarra
18 pour dire que nous n'avons pas le droit de nous entretenir avec les
19 témoins de l'accusation.
20 Mme Clark (interprétation): Maître Krsnik, je pense que nous sommes en
21 train de parler de deux cas de figure tout à fait différents. Vous parlez
22 d'une procédure dans le cadre d'un système juridique, mais si j'ai bien
23 compris la question de la Juge Diarra, adressée au docteur, qui est le
24 témoin ici, c'est la question de savoir si avant qu'un docteur exprime son
25 avis concernant la situation de santé d'un patient, il était logique de
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1 penser qu'il souhaiterait obtenir l'autorisation du patient lui permettant
2 de l'examiner.
3 Il s'agit tout simplement d'une question éthique et morale, une question
4 liée au protocole. Je pense que cela n'a rien à voir avec le fait de
5 parler avec les témoins de l'accusation.
6 Et je pense que, peut-être, il aurait pu être possible de contacter le
7 docteur de M. Ajanic et M. Ajanic lui-même pour essayer de l'examiner. Et
8 la Juge Diarra et moi-même, nous avons souhaité savoir si quoi que ce soit
9 s'est posé comme obstacle à une telle consultation, un tel examen de ce
10 témoin. Donc il s'agit là d'une difficulté tout à fait différente par
11 rapport à celle dont vous êtes en train de parler.
12 M. Krsnik (interprétation): Avec tout le respect que je vous dois, je
13 pense que nous avons un avis différent. Peut-être que moi-même, j'ai mal
14 expliqué les choses. Je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne souhaite pas
15 me lancer dans une discussion très longue, mais, dans l'intérêt de la
16 justice, il aurait été plus simple si cette Chambre de première instance
17 donnait l'ordonnance pour qu'une expertise soit effectuée.
18 A partir du moment où il y a le moindre doute, il est possible de rendre
19 une ordonnance et, dans ce cas-là, il n'y aurait aucun problème. Alors
20 qu'ici, il s'agit d'un témoin de la défense.
21 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, la Juge Clark vous a
22 expliqué que nous parlions de deux choses différentes et je pense que vous
23 ne devriez pas traiter de cela devant le témoin.
24 Monsieur le Témoin, merci beaucoup d'être venu à La Haye déposer devant
25 nous. L'huissier va vous escorter en dehors de ce prétoire et nous vous
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1 souhaitons beaucoup de chance à l'avenir.
2 M. Begic (interprétation): Merci.
3 (Le témoin, le Dr Drazen Begic, est reconduit hors du prétoire.)
4 (Matières relatives aux éléments de preuve.)
5 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des documents à verser au
6 dossier à ce stade, Maître Par?
7 M. Par (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je propose deux
8 documents. Tout d'abord le résultat, l'avis d'expert, et puis le deuxième,
9 ce serait le document comportant le diagnostic, la lettre contenant le
10 diagnostic.
11 J'aimerais bénéficier de l'aide du Greffe. Je m'excuse de ne pas connaître
12 les cotes moi-même.
13 M. le Président (interprétation): Vous devriez m'informer des cotes selon
14 les classeurs du Procureur. Je pense que deux de ces documents se trouvent
15 dans ce classeur: il s'agit du document P877.22 et P877.23. Est-ce exact?
16 M. Par (interprétation): Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Merci de
17 cette clarification.
18 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections?
19 M. Stringer (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.
20 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup. Ces deux documents
21 seront versés au dossier et la Greffière d'audience va leur attribuer une
22 cote appropriée avec les lettres D, 2, etc.
23 Et vous, Monsieur Stringer, est-ce que vous avez des documents à verser au
24 dossier?
25 M. Stringer (interprétation): Non, Monsieur le Président. Mais je souhaite
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1 brièvement répondre au dernier commentaire fait par Me Krsnik concernant
2 les contacts avec les témoins de l'accusation.
3 M. le Président (interprétation): Nous avons déjà dépassé le temps de cinq
4 minutes. Si c'est extrêmement important, vous pourrez vous prononcer à un
5 autre moment. Maintenant, nous devons suspendre l'audience.
6 Demain, nous allons commencer nos travaux dans ce prétoire à 9 heures du
7 matin. Donc nous allons reprendre nos travaux à 9 heures du matin, demain
8 matin.
9 (L'audience est levée à 19 heures 05.)
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