Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 5 mai 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes

  6   présentes dans le prétoire et hors du prétoire.

  7   Madame la Greffière d'audience, veuillez citer la cause, je vous prie.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

  9   à toutes les personnes présentes dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire

 10   IT-04-81-T, le Procureur contre Momcilo Perisic.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Je souhaiterais que les parties se présentent, en commençant par

 13   l'Accusation.

 14   M. THOMAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 15   Monsieur les Juges. Barney Thomas, Mme Carter ainsi que Mme Carmela Javier

 16   pour l'Accusation.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Qu'en est-il de la

 18   Défense.

 19   M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Madame, Monsieur les Juges et bonjour

 20   à toutes les personnes présentes dans le prétoire. La Défense est assurée

 21   aujourd'hui par moi-même, Me Lukic, ainsi que Milos Androvic, Chad Mair,

 22   Tina Drolec, Daniela Tasic.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 24   Avant que nous ne commencions, il y a une décision orale que je

 25   souhaiterais rendre. Dans un premier temps j'aimerais savoir si

 26   l'Accusation a obtenu une réponse, car il y avait une requête de

 27   l'Accusation présentée à propos de M. Muhamed Sacirbey; qu'en

 28   est-il ?

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  1   M. THOMAS : [interprétation] Monsieur le Président, je me demande si je

  2   pourrais peut-être reprendre le contact avec vous à ce sujet après la

  3   première pause.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc vous ne souhaitez pas que nous

  5   vous donnions lecture de notre décision maintenant, n'est-ce pas, Monsieur

  6   Thomas.

  7   M. THOMAS : [interprétation] Oui, c'est cela. Je m'en excuse. Nous n'allons

  8   pas réagir. Mais je voudrais simplement m'assurer de tout cela avant que la

  9   décision ne soit rendue.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Nous attendrons, Monsieur

 11   Thomas.

 12   M. THOMAS : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors je vous redonne la parole,

 14   Monsieur Thomas.

 15   M. THOMAS : [interprétation] Je vous remercie. Une petite question

 16   administrative relative au témoin qui devait comparaître demain. Il nous a

 17   été indiqué hier que du fait de conditions ou de la situation

 18   météorologique négative, il ne sera pas en mesure d'obtenir la

 19   correspondance pour son vol. Donc il n'arrivera pas à La Haye avant

 20   vendredi. Maintenant, ce qui fait que nous ne pourrons pas commencer sa

 21   déposition avant le début de la semaine prochaine. Mais il est absolument

 22   essentiel que nous puissions, dès qu'il sera arrivé, commencer la séance de

 23   récolement. Mais le problème, c'est que cela ne pourra pas commencer avant

 24   demain ou avant vendredi.

 25   Il y a un témoin qui avait été prévu après lui et qui ne pourra pas

 26   d'ailleurs commencer sa comparution demain pour deux raisons. Premièrement,

 27   j'ai cru comprendre que Me Lukic avait quelques problèmes. Il a des

 28   engagements dans un autre tribunal ou dans une autre affaire cet après-midi

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  1   et il m'a demandé, ce que je comprends tout à fait, de pouvoir avoir un

  2   certain temps après ma séance de récolement avec le témoin, ce qui présente

  3   un problème à l'Accusation. Puisqu'il y a le problème présenté par le fait

  4   que les autorités n'ont pas présenté de dérogation ou de dispense pour ce

  5   témoin.

  6   Donc le fait est, Monsieur le Président, que la situation est telle

  7   que nous n'avons pas de témoin pour demain. Il y a un témoin qui avait été

  8   prévu pour jeudi et je pense que nous pourrons procéder et finir toute la

  9   procédure d'ici la fin de la semaine prochaine.

 10   Mais le fait est que demain, ce que nous pourrons faire, c'est faire les

 11   préparatifs pour le témoin qui devra comparaître jeudi. Mais je ne pense

 12   pas que des efforts diplomatiques pourront être déployés pour ce témoin,

 13   parce qu'il faut savoir que cette dérogation doit être octroyée par son

 14   gouvernement qui siège en session jeudi matin, ce qui fait que ce n'est

 15   qu'à ce moment-là que la dispense ou la dérogation pourrait être octroyée.

 16   Donc je ne sais pas ce que nous pourrons faire pour accélérer la

 17   procédure, mais je voulais juste attirer votre attention sur ce fait.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais de quelle dérogation, de quelle

 19   dispense parlez-vous ?

 20   M. THOMAS : [interprétation] La dispense --

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour qui ?

 22   M. THOMAS : [interprétation] La dispense qui est requise et exigée pour le

 23   témoin qui devra comparaître jeudi.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 25   M. THOMAS : [interprétation] Ce que je voulais dire, c'est que le témoin ne

 26   pourra pas comparaître plus tôt.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends bien ce que vous nous

 28   dites, mais j'aimerais quand même qu'on éclaire ma lanterne à ce sujet,

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  1   parce qu'il y a assez longtemps de cela, le 25 avril [comme interprété],

  2   vous nous aviez dit qu'il n'y aurait pas de témoin prévu d'ici au 8 ?

  3   M. THOMAS : [interprétation] Le 8, je ne comprends pas.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, le 8 mai. D'après le calendrier

  5   qui vise la date du 8 mai, la Chambre avait été informée que vendredi 8 mai

  6   il n'y aurait pas de témoin qui devrait comparaître.

  7   M. THOMAS : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président, parce

  8   que nous ne siégeons jamais le vendredi.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui -- non, je m'excuse.

 10   M. THOMAS : [interprétation] Oui, je pensais que quelque chose vraiment

 11   m'avait échappé pendant un moment.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse.

 13   M. THOMAS : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation]  Alors merci. Merci de votre

 15   explication, Monsieur Thomas. En un mot commençant, vous êtes en train de

 16   nous dire que nous n'allons pas siéger demain, c'est cela en d'autres

 17   termes?

 18   M. THOMAS : [interprétation] Oui, c'est tout à fait cela.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, je souhaiterais que vous fassiez

 20   entrer votre témoin dans le prétoire.

 21   M. THOMAS : [interprétation] Ce témoin --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais j'ai l'impression que Me Lukic va

 23   intervenir.

 24   M. LUKIC : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 26   M. THOMAS : [interprétation] Oui, c'est Mme Carter qui va prendre la parole

 27   à ce sujet.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

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  1   Mme CARTER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  2   Monsieur les Juges. Le bureau du Procureur convoque à la barre Mme Ewa

  3   Tabeau.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Madame.

  8   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] Bonjour.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demanderais de bien vouloir

 10   prononcer la déclaration solennelle.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 12   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 13   LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Assermentée]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez prendre

 16   place.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 19   Madame Carter.

 20   Interrogatoire principal par Mme Carter : 

 21   Q.  [interprétation] Docteur Tabeau, auriez-vous l'amabilité de décliner

 22   vos coordonnées aux fins du compte rendu d'audience.

 23   R.  Je m'appelle Ewa Tabeau.

 24   Q.  Quelle est votre spécialité ?

 25   R.  Je suis démographe, notamment je m'intéresse à la démographie en cas de

 26   conflit.

 27   Q.  Alors je souhaiterais que vous décriviez rapidement ce concept de la

 28   démographie ?

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  1   R.  La démographie est un domaine de recherche qui vise essentiellement la

  2   population, qui décrit la population, les tendances de la population, qui

  3   explique les tendances des phénomènes démographiques avec les décès, les

  4   mortalités, les naissances, les divorces. Donc il s'agit du processus

  5   démographique fondamental.

  6   Q.  Et vous avez indiqué à la Chambre de première instance que votre

  7   domaine était la démographie par rapport aux situations de conflit.

  8   R.  C'est exact.

  9   Q.  Comment est-ce que vous pourriez décrire cela ?

 10   R.  Il s'agit en fait d'un sous-domaine de la démographie. Vous avez donc

 11   la démographie et en cas de conflit, il s'agit de s'occuper de démographie

 12   ainsi que des causes de conflits et autres choses.

 13   Q.  Nous avons obtenu votre curriculum vitae, qui était valable à l'époque

 14   du rapport Galic. Mais pourriez-vous nous dire quels furent votre formation

 15   et votre parcours universitaire ?

 16   R.  J'ai étudié les statistiques ainsi que l'économie à l'Université de

 17   Varsovie pendant les années 70. J'ai obtenu mon diplôme ainsi que ma

 18   maîtrise avec félicitations du jury. Par la suite, j'ai fait un doctorat en

 19   démographie, cela a été couronné de succès dans le domaine de la

 20   démographie mathématique. J'ai obtenu également les félicitations du jury à

 21   ce sujet. Il s'agissait de la même université, de l'Université de Varsovie.

 22   J'ai travaillé pendant un certain nombre d'années au sein de la même

 23   université dans le département des statistiques et de démographie, et ce,

 24   pour les cours de licence. Par la suite, je suis venue aux Pays-Bas, je

 25   suis devenue maintenant chercheur auprès de l'Institut national statistique

 26   néerlandais. Finalement, en l'an 2000 je suis venue travailler ici au

 27   Tribunal, au bureau du Procureur, et là je suis devenue la responsable de

 28   l'unité démographique.

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  1   Q.  Pendant cette période passée au Tribunal, est-ce que vous avez eu la

  2   possibilité de témoigner ?

  3   R.  Oui, j'ai témoigné plusieurs fois, il me semble 13 ou 14 fois devant

  4   différentes Chambres de première instance.

  5   Q.  Dans quelles affaires avez-vous témoigné ?

  6   R.  J'ai témoigné dans plusieurs affaires qui portaient sur Sarajevo. Le

  7   général Galic, Dragomir Milosevic, dans l'affaire Slobodan Milosevic,

  8   également pour ce qui était de la partie de Sarajevo, il s'agissait des

  9   déplacements des personnes qui avaient été déplacées. J'ai également

 10   témoigné dans l'affaire Prlic, dans l'affaire Popovic à Srebrenica, dans

 11   l'affaire Seselj également et dans un certain nombre d'autres affaires.

 12   Dans l'affaire Lukic et Lukic récemment, puis dans d'autres, Simic et

 13   consorts également, il y a quelques années.

 14   Q.  Lorsque vous étiez experte ici, est-ce que vous avez toujours témoigné

 15   pour le bureau du Procureur ou avez-vous eu la possibilité de témoigner

 16   pour la Défense ?

 17   R.  J'ai témoigné une fois pour la Défense, dans l'affaire Lukic et Lukic,

 18   récemment cette année.

 19   Q.  Merci. Il vient de m'être indiqué de ne pas parler aussi vite.

 20   R.  Je m'excuse.

 21   Q.  Non, c'était pour moi.

 22   Mais comme vous le savez, vous avez compliqué des rapports à propos du

 23   siège de Sarajevo pour les affaires Galic et Slobodan Milosevic, il y a des

 24   addendums [phon] qui ont été versés au dossier. Je pense, par exemple, à la

 25   pièce P2325 à P2331.

 26   Aujourd'hui pour votre déposition, je souhaiterais en fait que nous nous

 27   intéressions essentiellement aux personnes tuées et blessées et pour la

 28   période couverte par l'acte d'accusation de Perisic, à commencer par le 23

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  1   août 1994.

  2   Je commencerais par parler des personnes tuées.

  3   Dans la pièce P2325, il s'agit de votre rapport dans l'affaire Galic, il y

  4   a un tableau, le tableau A 3.13, page 69 dans le système électronique,

  5   ainsi que dans la pièce P2331, il s'agit de votre rapport dans l'affaire

  6   Slobodan Milosevic, tableau A 3 et A 4, page 9 du prétoire électronique,

  7   vous nous donnez une ventilation mensuelle des soldats et des civils tués.

  8   Mais ces chiffres et leurs totaux d'ailleurs ne correspondent pas

  9   entièrement les uns avec les autres pour la période comprise entre le mois

 10   de septembre 1993 et le mois d'août 1994. Est-ce que vous pourriez nous

 11   fournir une explication à ce sujet ?

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cette explication ne me sert

 13   absolument à rien si je ne sais pas exactement où nous en sommes, Madame

 14   Carter. Parce que vous commencez à parler des affaires Galic, Slobodan

 15   Milosevic et de leurs addendums versés au dossier, je ne sais pas tellement

 16   de quoi il s'agit. Est-ce que vous pourriez nous dire à quoi vous faites

 17   référence. Est-ce que cela fait partie du rapport du témoin ?

 18   Mme CARTER : [interprétation] Oui, tout à fait. Pour le rapport Galic, il

 19   s'agit de la pièce P2325, je fais référence au tableau A 3.13, page 69 du

 20   rapport.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien --

 22   Mme CARTER : [interprétation] Et cela est affiché à l'écran pour le moment.

 23   Puis, je ne sais pas si les deux pages pourraient être placées en

 24   parallèle, document P2331 page 9, est-ce que vous pourriez afficher cette

 25   version à côté de l'autre version.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Madame Carter.

 27   Alors qu'est-ce qui ne correspond pas.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, je voulais dire qu'il fallait remplacer

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  1   le deuxième tableau, mais cela vient d'être fait. Parfait. C'est exactement

  2   ce dont nous avons besoin pour ce qui nous intéresse.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de deux pages qui émanent de deux

  5   rapports d'expert différents qui portent tous les deux sur Sarajevo. Sur le

  6   tableau de gauche, tableau A 3.13, il s'agit du rapport Galic, un tableau

  7   qui se trouve dans le rapport Galic. Il s'agit d'une répartition ventilée

  8   suivant les mois, il s'agit donc de personnes qui ont été tuées, de

  9   personnes qui se trouvaient sur les lignes de front et de civils. Cela va

 10   de la période de septembre 1992 à août 1994. Il s'agit donc d'une

 11   répartition ou d'une ventilation mensuelle, donc il s'agit de chiffres

 12   absolus relatifs à des personnes tuées suivant ces différents mois pendant

 13   la période mentionnée.

 14   Cette période, septembre 1992 à août 1994, correspond à la période couverte

 15   pour le rapport Galic. C'est une période différente à la période de cet

 16   acte d'accusation dans cette affaire, et qui est différente également de la

 17   période qui a fait l'objet de discussions dans le rapport de Sarajevo

 18   compilé pour l'affaire Slobodan Milosevic.

 19   Donc, l'autre page qui se trouve sur la droite de notre écran vient du

 20   rapport Slobodan Milosevic. La période d'analyse est beaucoup plus large

 21   par rapport au rapport Galic. Dans le rapport Slobodan Milosevic, ce qui

 22   nous intéressait c'était les victimes qui étaient tombées pendant toute la

 23   période du conflit, à commencer par le mois d'avril 1992 jusqu'au mois de

 24   novembre 1995. Vous avez le tableau A 3 pour les soldats et le tableau A 4

 25   qui correspond aux morts de civils. Là pour les civils, la période

 26   analytique est encore plus longue, parce que cela commence en janvier 1992

 27   et se termine en décembre 1995.

 28   Il y a une autre catégorie qui a été incluse et qui correspond à la

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  1   première rangée dans les deux tableaux.

  2   Les données des tableaux A 3 et A 4 correspondent aux mêmes données que

  3   dans le rapport Galic. Il s'agit d'une ventilation mensuelle pour les

  4   personnes tuées. Là nous faisons la différence entre les soldats et les

  5   civils. Bien entendu, les chiffres qui correspondent aux civils sont les

  6   chiffres qui nous intéressaient au premier plan, donc nous allons nous

  7   intéresser au tableau A 4 qui se trouve sur la partie droite en bas de

  8   l'écran, et vous avez donc la première colonne qui vous donne le chiffre

  9   des civils si vous mettez en parallèle cela au tableau A 3.13.

 10   Les chiffres ne sont pas entièrement identiques. De toute façon il y a un

 11   chevauchement entre les deux périodes, et vous pouvez comparer les chiffres

 12   pour cette période.

 13   Mais il faut savoir que j'ai également préparé un résumé, une

 14   synthèse des données de ces deux tableaux pour la période pertinente pour

 15   l'affaire Perisic, à savoir une période qui dure pendant 12 mois. Il s'agit

 16   d'une période qui est exactement la même période que nous avons reprise

 17   pour l'affaire Galic, pour l'affaire Slobodan Milosevic et donc pour

 18   l'affaire Perisic. C'est une période qui commence en septembre 1993, et qui

 19   se termine en août 1994. J'ai préparé un tableau différent qui reprend

 20   exactement les mêmes chiffres. Je ne sais pas si nous pouvons utiliser cet

 21   autre tableau mais si cela est possible je préférerais de loin utiliser ce

 22   tableau, parce que là vous pourrez voir beaucoup plus nettement les

 23   différences de ces petits échantillons de population.

 24   Mme CARTER : [interprétation] Ce tableau synthèse nous a été donné hier. Je

 25   l'ai transmis au conseil de la Défense. Il ne fait pas partie de notre

 26   liste 65 ter, donc je ne sais pas si nous pouvons l'utiliser. Il ne fait

 27   pas non plus partie du système électronique. Nous pourrions utiliser le

 28   rétroprojecteur si la Chambre souhaitait se pencher sur ce tableau avec

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  1   l'aval du conseil de la Défense.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic, qu'en

  3   est-il ?

  4   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  5   Juges, certes, nous avons reçu ce tableau de synthèse hier après-midi. Nous

  6   l'avons reçu après avoir eu une conversation avec Mme Tabeau, nous avons

  7   donc reçu ce tableau. Je n'ai aucune objection à ce qu'il soit utilisé

  8   maintenant. Mais je souhaiterais toutefois demander le droit de

  9   consultation avec mon client une fois que nous aurons étudié ces tableaux,

 10   parce que ces tableaux sont exprimés en anglais. Donc je souhaiterais

 11   qu'ils soient enregistrés aux fins d'identification dans un premier temps

 12   pour que je puisse revenir là-dessus et vous faire part de mon point de vue

 13   à ce sujet.

 14   Mais je dois dire qu'hier avec Mme Carter - et d'ailleurs elle l'a confirmé

 15   - elle m'a dit en fait que ce tableau avait été compilé à partir de ces

 16   deux tableaux affichés à l'écran, ce qu'elle a confirmé d'ailleurs. Si cela

 17   est clair, si ce document est beaucoup plus clair et précis que ceux que

 18   nous avons utilisés dans les affaires précédentes, je n'ai absolument

 19   aucune objection à ce qu'il soit utilisé maintenant. Toutefois, je

 20   souhaiterais pouvoir avoir la possibilité de les étudier par le menu, mais

 21   je n'ai absolument aucune objection à ce qu'ils soient utilisés maintenant

 22   et enregistrés, comme je l'ai déjà dit, aux fins d'identification.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez les utiliser et demander

 24   leur enregistrement aux fins d'identification, Madame Carter.

 25   Mme CARTER : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Carter, vous confirmez qu'ils

 27   ont été compilés à partir des tableaux précédents.

 28   Mme CARTER : [interprétation] Oui, tout à fait, mais je peux demander cette

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  1   confirmation au Dr Tabeau.

  2   Q.  Docteur Tabeau, quelle est la provenance de ce tableau ?

  3   R.  Il s'agit d'un tableau qui présente un échantillon des données et des

  4   résultats des deux rapports dont je viens de parler : l'un étant le rapport

  5   Galic sur Sarajevo; l'autre étant le rapport Slobodan Milosevic toujours

  6   sur Sarajevo.

  7   Q.  Bien.

  8   Mme CARTER : [interprétation] J'aimerais demander l'aide de M. l'Huissier,

  9   et je souhaiterais que le tableau ou le rapport soit placé sur le

 10   rétroprojecteur.

 11   Q.  Madame Tabeau, je remarque qu'il y a quelques annotations, je vois

 12   qu'il y a une ligne droite et un cercle à côté de la colonne civils qui ne

 13   figuraient pas dans le document que vous m'avez fourni et que vous avez

 14   fourni à la Défense. Alors à qui doit-on attribuer ces annotations ?

 15   R.  C'est moi qui viens de les faire il y a quelques secondes de cela.

 16   Q.  Bien. Vous alliez donc indiquer à la Chambre comment expliquer les

 17   différences entre le nombre de civils dans les deux rapports.

 18   R.  J'aimerais dans un premier temps vous dire qu'il y a, certes, une

 19   différence dans les chiffres des personnes tuées, qu'il s'agisse de civils

 20   et de soldats, il y a des différences entre ces deux rapports. Et je vous

 21   parle de la période de chevauchement, ce que j'appelle la période de

 22   chevauchement entre le rapport Galic et le rapport Slobodan Milosevic et la

 23   période qui correspond, bien entendu, à l'acte d'accusation Perisic. Alors

 24   il s'agit d'une période de 12 mois qui commence, comme cela est indiqué

 25   dans ce tableau, par le mois de septembre 1993 et qui va jusqu'au mois

 26   d'août 1994.

 27   Donc il s'agit de 12 mois qui peuvent être comparés, et pour chaque mois

 28   vous avez le nombre des civils, le nombre des soldats, vous pouvez donc

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  1   voir quels sont ces chiffres sur ces colonnes placées en parallèle.

  2   En règle générale, le nombre de civils et de soldats tués pendant cette

  3   période de 12 mois est plus élevé dans le rapport Slobodan Milosevic; 548,

  4   par opposition à un chiffre beaucoup plus faible dans le rapport Galic, qui

  5   est le chiffre de 370.

  6   Voilà les deux chiffres que j'ai mentionnés, 548 pour le rapport Slobodan

  7   Milosevic, et 370 pour le rapport Galic.

  8   Il y a également une différence pour ce qui est du nombre de soldats. La

  9   différence est moins importante. Il y a 499 soldats tués dans le rapport

 10   Galic, donc c'est un chiffre qui figure dans le rapport Galic, et dans le

 11   rapport Slobodan Milosevic cela correspond au chiffre de 472.

 12   Donc quelle est la provenance de ces différences ? Il faut savoir dans un

 13   premier temps que différentes sources ont été utilisées pour établir ces

 14   rapports. Le rapport Galic n'a utilisé qu'une source, l'enquête faite

 15   auprès des foyers à Sarajevo, donc il s'agissait d'une étude qui a été

 16   faite pendant le conflit à la mi-1994. C'est une étude qui a été faite par

 17   un institut de recherche à Sarajevo, et nous avons utilisé cette source

 18   pour compiler toutes les statistiques du rapport Galic.

 19   C'st une source qui est très large. Il s'agissait d'une étude sur les

 20   foyers dont le but était d'avoir les chiffres de tous les foyers à Sarajevo

 21   en 1994. En tout, 85 000 foyers ont répondu à des questions dans le cadre

 22   de cette étude. Les 85 000 foyers représentaient une population de quelque

 23   340 000 personnes environ. Et nous avons utilisé cette source dont une

 24   partie a été informatisée par le bureau du Procureur. Nous avons établi

 25   ainsi une base de données, une base de données dans laquelle on trouvait

 26   les chiffres des personnes tuées, des personnes blessées, des personnes

 27   décédées de mort naturelle pour le rapport Galic. Donc c'est une bonne

 28   source mais ce n'est qu'une source.

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  1   Et en matière de sources et de provenance, lorsque vous étudiez les

  2   conséquences démographiques des guerres, il faut ne jamais oublier qu'il

  3   n'y a aucune source exhaustive, il n'y a aucune source qui est exhaustive,

  4   qui est parfaite, qui ne présente aucune lacune. Et il en va de même pour

  5   cette étude menée auprès des foyers. Cette étude devait être, était censée

  6   être exhaustive, mais il y a certaines imperfections, certaines lacunes

  7   dans les données qui fait que nous avons dû exclure certains chiffres à nos

  8   fins analytiques.

  9   Pour améliorer cette situation, dans l'affaire Milosevic, dans le rapport

 10   Slobodan Milosevic qui a été établi plus tard, nous avons utilisé et retenu

 11   une approche différente. Nous avons travaillé à partir de plusieurs sources

 12   importantes, notamment l'étude auprès des foyers de Sarajevo, qui a été

 13   fusionnée. Toutes ces études ont été fusionnées. Les chevauchements ont été

 14   éliminés, les doublons ont été éliminés, et nous avons pu ainsi dresser une

 15   liste, une liste principale de victimes. Cela a été fait seulement pour les

 16   personnes tuées, parce que les données relatives aux blessés n'étaient pas

 17   très fréquentes. Vous avez donc l'étude relative aux foyers de Sarajevo,

 18   c'était une source dont nous disposions et que nous avons pu utiliser pour

 19   cette analyse.

 20   Donc pour le rapport Slobodan Milosevic, nous avons utilisé plusieurs

 21   sources : l'étude auprès des foyers de Sarajevo, une base de données

 22   analytiques relatives à la mortalité en cas de guerre, cela a été établi à

 23   la demande du bureau du Procureur par l'Institut de statistiques de la

 24   Bosnie-Herzégovine. Dans cette base de données, il y a environ 25 000 décès

 25   provoqués par la guerre pour tout le pays, donc pour la Bosnie-Herzégovine

 26   et pour toute la période, et cela a commencé pour le mois d'avril 1992

 27   jusqu'en décembre 1995.

 28   Vous avez également un échantillon qui porte sur Sarajevo. Je pense qu'il y

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 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   a 15 000 chiffres dans cette base de données qui portent sur Sarajevo. En

  2   sus de cette base de données, nous avons utilisé la liste des personnes

  3   portées disparues du comité international de la Croix-Rouge --

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ralentissez un peu, je vous prie.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolée.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est très difficile de pouvoir vous

  7   suivre à cette vitesse, difficile pour les sténotypistes. Elles notent en

  8   anglais, et j'imagine que les interprètes auront également du mal à

  9   traduire dans d'autres langues. Donc je crois que dans leur intérêt il

 10   convient de ralentir un peu le débit.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'en suis désolée. Je vais ralentir.

 12   Je disais simplement que dans le rapport de Slobodan Milosevic, il y a un

 13   certain nombre de sources qui ont été utilisées, qui ont été combinées. On

 14   a essayé d'en éliminer les lacunes. Il y avait, par exemple, l'enquête sur

 15   les ménages de Sarajevo. Il y avait également une autre enquête en ce qui

 16   concerne la mortalité en Bosnie. On a utilisé également une base de données

 17   qui a été compilée par une ONG en Bosnie. Ensuite, cette base de données a

 18   évolué, c'est la plus importante base de données en Bosnie, elle est connue

 19   comme telle.

 20   Mme CARTER : [interprétation]

 21   Q.  J'aimerais vous interrompre et vous dire que nous avons quelques

 22   difficultés avec la rapidité de votre déposition, je vous demande de

 23   ralentir encore.

 24   R.  Bien. J'en suis désolée.

 25   Donc les Musulmans bosniaques ont également fait l'objet d'une base de

 26   données. Une ONG en Bosnie a servi également de source. Nous avons collecté

 27   des informations sur les victimes de conflits, sur les civils et sur les

 28   militaires. Nous avons donc combiné et associé toutes ces informations. Il

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  1   y a une base de données qui a été établie, qui s'appelle les Musulmans

  2   contre le génocide. C'est une base de données que nous avons également

  3   utilisée comme source.

  4   Donc dans l'ensemble, nous avons toute une série de sources qui ont été

  5   mises à profit. Les sources font la différence essentielle en ce qui

  6   concerne les statistiques combinées pour le rapport Galic et pour le

  7   rapport Slobodan Milosevic.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais vous poser une question.

  9   Est-ce que je vous comprends bien lorsque vous dites, qu'en fait, que votre

 10   rapport est le résultat des informations que vous avez glanées dans les

 11   données qui ont été compilées par d'autres personnes dans d'autres

 12   organisations. Il ne s'agit pas uniquement du produit de votre travail.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Les rapports que je réalise sont faits sur la

 14   base de sources réalisées par d'autres. C'est le cas pour le rapport Galic,

 15   c'est le cas également pour le rapport Slobodan Milosevic. Nous parlons

 16   maintenant de nombre important de victimes de ce conflit, et un nombre

 17   important de personnes travaillaient en Bosnie-Herzégovine pour essayer de

 18   compiler des chiffres, des informations à propos de ces victimes.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vous demande pas d'explication.

 20   Je vous demande simplement s'il s'agit bien d'un fait.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est un fait.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suis sûr que Mme Carter va y

 25   arriver mais j'aimerais que vous nous parliez des informations liées aux

 26   décès des civils et des militaires, décès et blessures des civils et des

 27   militaires pour la période du 26 août 1993 jusqu'à la fin du conflit.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas sûre d'avoir compris la

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  1   question.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question est la suivante :

  3   j'aimerais savoir ce que vous tirez de ces rapports. Je comprends que ces

  4   rapports n'ont pas été compilés ou rédigés pour cette affaire mais pour les

  5   affaires Galic et Slobodan Milosevic.

  6   Alors, dans la mesure où ils peuvent couvrir la période qui est couverte

  7   par l'affaire Perisic, j'imagine que vous avez extrapolé à partir de ces

  8   rapports et vous allez nous dire quels sont les chiffres qui sont liés plus

  9   précisément à la période couverte par l'acte d'accusation dans l'affaire

 10   qui nous occupe. C'est ce qui nous intéresse.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends. Je suggère que nous

 12   regardions d'abord la première page de cet ensemble de documents qui vous

 13   ont été présentés ce matin. J'ai inclus un petit tableau à la première

 14   page, il s'agit d'un tableau qui fait la synthèse du nombre de victimes

 15   pour toute la période de l'acte d'accusation de l'affaire Perisic. Je n'ai

 16   pas pu inclure les données à partir du 26 août mais à partir du mois

 17   suivant, c'est-à-dire septembre 1993 jusqu'à la fin de novembre 1995.

 18   Donc le nombre total des victimes est de 1 782 victimes, il s'agit à la

 19   fois de civils et de militaires. Il s'agit de tués, de personnes tuées. Le

 20   nombre de civils tués est de 949 et de 833 militaires. Ces chiffres

 21   viennent du rapport Slobodan Milosevic. J'ai commencé à vous expliquer

 22   quelles étaient les sources de ce rapport. C'est un rapport qui peut être

 23   utilisé pour en extraire les chiffres liés à l'affaire Perisic.

 24   Donc voilà les chiffres, voilà les informations principales qui peuvent

 25   être extraites du rapport Slobodan Milosevic.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez des informations

 27   similaires en ce qui concerne les blessés ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, il n'y a pas d'information à

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  1   propos des blessés dans le rapport Slobodan Milosevic. Cependant, on peut

  2   faire une extrapolation en utilisant les informations du rapport Galic. Sur

  3   la base de cette période de chevauchement de 12 mois entre les deux

  4   rapports, il est possible d'estimer une relation, un lien entre les civils

  5   tués et blessés. C'est une sorte de ratio, c'est-à-dire qu'on a un ratio de

  6   3.2, ce qui veut dire que pour un civil mort, nous avons 3.2 civils

  7   blessés. Ce ratio peut être appliqué et le nombre général des blessés peut

  8   être obtenu de cette façon pour la période couverte par l'affaire Perisic.

  9   On peut appliquer ce ratio aux nombres que l'on voit apparaître à l'écran.

 10   Ce qui veut dire qu'il y aura environ trois fois plus de blessés que de

 11   tués chez les civils.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Mais je pensais qu'un peu plus

 13   tôt vous nous aviez montré un tableau et vous avez dit qu'il comportait des

 14   chiffres absolus mais pas d'estimations.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le tableau comporte des nombres absolus,

 16   ce sont des nombres qui peuvent être attestés par des documents, il s'agit

 17   de chiffres individuels. Ce ne sont pas des estimations. Ce sont les

 18   nombres les plus bas. Pour ce qui est des estimations, il y a quelques

 19   nombres estimés également dans le rapport Galic. Le ratio que j'ai

 20   mentionné n'est pas une estimation, c'est un ratio qui est obtenu à partir

 21   des données effectives. Donc le ratio n'est pas une estimation, c'est une

 22   quantification de la relation --

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] -- à partir des données absolues.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais comme nous le savons, les statistiques

 27   sont une mesure estimée à partir des données réelles, il peut y avoir une

 28   extrapolation, la même mesure peut être appliquée sur une population plus

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  1   importante. Bien entendu, s'il y a des bonnes raisons d'appliquer cette

  2   mesure, il faut le faire. Je pense qu'il y a une bonne raison d'appliquer

  3   cette mesure générale à partir du nombre total d'études, mais il s'agit

  4   effectivement d'un nombre estimé de civils pour la période de Perisic.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame Carter.

  6   Mme CARTER : [interprétation] Merci, Président.

  7   Pour que les choses soient bien claires, je fais référence au document

  8   P2325 à la page 69. Le tableau A 3.13 que vous avez déjà sur le prétoire

  9   électronique.

 10   Je crois que vous faisiez référence au tableau sur la gauche. Vous avez

 11   indiqué que nous avions certaines données de base en ce qui concerne les

 12   civils blessés -- je suis désolée. En fait, il s'agit des civils tués. Pour

 13   ce qui est des civils blessés, je fais référence au tableau A4.13

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document A4.13, n'est-ce pas ?

 15   Mme CARTER : [interprétation] C'est le tableau A4.13, il s'agit du document

 16   02194824.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi ? Puis-je avoir votre aide, s'il

 18   vous plaît ? Pouvez-vous m'aider ?

 19   Merci.

 20   Mme CARTER : [interprétation]

 21   Q.  Docteur Tabeau, ce que nous voyons maintenant sous les yeux c'est le

 22   tableau A4.13, il s'agit du nombre total des personnes blessées dans les

 23   lignes de front de Sarajevo et vous avez compilé la même ventilation

 24   mensuelle. Est-ce que vous avez utilisé la même méthode que celle que vous

 25   décriviez à la Chambre précédemment pour en tirer ces chiffres ?

 26   R.  Oui. Il s'agit également du nombre des personnes blessées. Le tableau

 27   vient du rapport Galic, donc à partir de ce tableau, malheureusement, nous

 28   ne pouvons pas avoir de chiffres qui pourraient couvrir l'acte d'accusation

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  1   de l'affaire Perisic. A partir de ce tableau, nous ne pouvons que tirer des

  2   données correspondant à une année, à partir du mois de septembre 1993

  3   jusqu'à août 1994.

  4   Q.  D'accord. Lorsque vous avez indiqué qu'il y avait un ratio de 3.2,

  5   comment êtes-vous arrivée à ce ratio ?

  6   R.  Ce ratio a été obtenu en utilisant des données sur les civils dans le

  7   rapport Galic, seulement à partir des 12 mois qui représentent le

  8   chevauchement avec l'acte d'accusation Perisic, la première année de la

  9   période de l'acte d'accusation et le total des civils tués a été comparé au

 10   total des personnes blessées. On a divisé les blessés par les tués.

 11   Q.  Cependant, vous avez indiqué que sur la base de cette année, vous

 12   pouviez extrapoler au-delà d'août 1994; est-ce bien

 13   exact ?

 14   R.  Oui. C'est là une chose possible. C'est possible, effectivement.

 15   Q.  D'accord. S'agit-il d'un outil démographique normal pour arriver à ces

 16   extrapolations ?

 17   R.  L'extrapolation démographique peut se faire de multiples façons

 18   différentes. L'extrapolation de ce type de ratio est une façon de faire. Il

 19   existe des outils plus sophistiqués qui peuvent également être utilisés

 20   pour ce type d'extrapolation. Dans le rapport Slobodan [comme interprété]

 21   Milosevic, qui n'est pas discuté aujourd'hui malheureusement, il y a un

 22   autre type d'opération qui a été utilisé, on prend les totaux mensuels des

 23   personnes tuées, on compare deux sources qui font des comparaisons sur les

 24   blessés.

 25   Donc il y a un modèle statistique plus complexe qu'un simple ratio qui a

 26   été utilisé pour ce type d'extrapolation.

 27   Q.  Lorsque vous utilisez ce type d'extrapolation secondaire, est-ce que

 28   vous avez obtenu des nombres similaires à ceux que vous évoquez

Page 5799

  1   aujourd'hui, c'est-à-dire un ratio de 3,2 blessés par personne tuée ?

  2   R.  Pour cette période en question, je ne sais pas parce que je n'ai rien

  3   sous la main et je n'ai pas procédé à cette extrapolation. Mais en règle

  4   générale, cette extrapolation basée sur le modèle est encore plus

  5   sophistiquée et encore plus détaillée. C'est-à-dire qu'on a le lien général

  6   qui existe, ce ratio de 3,2 blessés par tué est contenu dans cette

  7   extrapolation, mais il y a également la ventilation mensuelle et même la

  8   ventilation hebdomadaire qui peut être produite en utilisant ce modèle.

  9   Donc ma réponse serait oui, ces ratios sont préservés, il s'agit là de

 10   mesures plus générales, mais plus le modèle est sophistiqué, plus le

 11   résultat de l'utilisation de ce modèle sera sophistiqué.

 12   Q.  Vous êtes devant nous avec un certain nombre d'informations, en

 13   particulier le rapport Galic, le rapport Slobodan Milosevic. Est-ce que

 14   vous pouvez dire devant cette Chambre aujourd'hui que nous serons en mesure

 15   d'utiliser un ratio de 3,2 pour pouvoir déterminer les blessés après la

 16   période d'août 1994 ?

 17   R.  Oui, je pense que oui. En effet.

 18   Q.  Merci.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Lukic.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Je ne voulais pas vous interrompre, Monsieur le

 21   Président, Messieurs les Juges, mais maintenant je vois à l'écran qu'il y a

 22   un problème technique avec la traduction de ce document, il s'agit d'une

 23   traduction officielle qui a été faite par le CLSS qui a été utilisée déjà

 24   dans l'affaire Galic. On nous dit dans le document : A 413, le nombre de

 25   personnes tuées mensuellement dans les lignes de front de Sarajevo.

 26   Apparemment, c'est une traduction de la version anglaise. Malheureusement,

 27   pour se préparer à cet interrogatoire, j'ai utilisé la version anglaise.

 28   Alors je vais essayer d'utiliser les faits que j'ai établis, tous les

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  1   chiffres sont les mêmes, mais le titre de ce tableau est complètement

  2   différent.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame Carter.

  4   Mme CARTER : [interprétation] Malheureusement, j'ai des très mauvaises

  5   connaissances du B/C/S. Je ne serais pas en mesure de vérifier ou de

  6   m'inscrire en faux contre cette affirmation sur la précision des faits.

  7   J'aimerais demander au conseil de la Défense de nous dire s'il y a d'autres

  8   corrections qui sont nécessaires afin de procéder à une retraduction. Mais

  9   le rapport a été rédigé en anglais et c'est l'anglais qui fait foi. Mais,

 10   bien entendu, nous voulons avoir un compte rendu très précis en B/C/S.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Votre collègue a indiqué qu'il y avait

 12   un certain nombre de choses à changer en B/C/S, et ce sera porté à

 13   l'attention des traducteurs.

 14   Mme CARTER : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je le ferai

 15   à la première occasion.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 17   Madame Carter.

 18   Mme CARTER : [interprétation]

 19   Q.  Madame Tabeau, étant donné -- j'ai maintenant -- je n'ai maintenant

 20   plus de questions pour le témoin pour l'instant.

 21   Mme CARTER : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois qu'il faut corriger le compte

 23   rendu. Je ne pense pas qu'on pourra le corriger par la suite. J'ai dit que

 24   ce rapport indiquait les morts et non pas la date, les morts et au lieu des

 25   blessés, il ne s'agit pas de dates ici, mais il s'agit bien de morts et de

 26   blessés, d'accord ?

 27   Monsieur Lukic.

 28   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que vous pouvez mettre ceci sur le

Page 5801

  1   rétroprojecteur…

  2   Contre-interrogatoire par M. Lukic : 

  3   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Tabeau.

  4   R.  Bonjour.

  5   Mme CARTER : [interprétation] Je suis désolée de cette interruption,

  6   Monsieur Lukic. J'aimerais demander que le document au rétroprojecteur soit

  7   versé au dossier en tant que pièce à conviction et qu'il soit enregistré

  8   aux fins d'identification en attente de traduction.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Je suis d'accord, Monsieur le Président,

 10   Messieurs les Juges.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il s'agit donc d'une pièce versée au

 12   dossier, Madame Carter ?

 13   Mme CARTER : [interprétation] C'est donc une pièce à conviction. Je suis

 14   désolée d'utiliser le mauvais terme.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Il y a un document maintenant

 16   qui se trouve sur cet écran. D'après mon prétoire électronique, j'ai le

 17   document qui porte la cote 5090, qui a fait l'objet d'une mauvaise

 18   traduction, mais il y avait un document avant cela. Qu'est-ce que vous

 19   voulez que l'on verse au dossier ?

 20   Mme CARTER : [interprétation] Nous demandons que les tableaux qui se

 21   trouvent sur le rétroprojecteur soient versés au dossier et non pas ce

 22   qu'on trouve actuellement sur le prétoire électronique. Je crois qu'on est

 23   en train de vous remettre ce document.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il s'agit des tableaux. Bien. Merci.

 25   Le document est donc versé au dossier. Est-ce qu'on peut donner la cote de

 26   cette pièce aux fins de l'identification.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P2332,

 28   enregistrée aux fins d'identification, Monsieur le Président, Messieurs les

Page 5802

  1   Juges.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

  3   M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais vérifier quelque chose avec Mme

  4   Carter. Ces tableaux qui n'ont pas été enregistrés aux fins

  5   d'identification n'incluent pas le rapport d'information additionnel que

  6   nous avons reçu, c'est-à-dire l'interrogatoire avec Mme Tabeau. Nous

  7   demandons le versement au dossier que des tableaux et non pas de la

  8   conversation qui a eu lieu le 4 mai 2009, ça ne fait pas partie de cette

  9   pièce versée au dossier.

 10   Mme CARTER : [interprétation] C'est exact. Il ne s'agit que du versement au

 11   dossier des tableaux. Il s'agit donc d'un document de six pages qui

 12   commence par un tableau en couleur qui s'intitule "Rapport Slobodan

 13   Milosevic" avec les tendances, les morts, et cetera.

 14   M. LUKIC : [interprétation]

 15   Q.  Bonjour. Je m'appelle Novak Lukic et je représente la Défense de M.

 16   Perisic. Je vais procéder à un interrogatoire.

 17   Il y a un certain nombre d'années, nous nous sommes rencontrés dans cette

 18   salle de première audience, il s'agissait de l'affaire Bosanski Samac. Vous

 19   ne vous en souvenez peut-être pas mais je m'en souviens certainement.

 20   Je vais vous poser une question initiale qui est liée, j'imagine, à la

 21   méthodologie. Vous avez dit à cette Chambre que dans de nombreux cas vous

 22   aviez travaillé devant le Tribunal en tant qu'expert, vous travailliez pour

 23   le bureau du Procureur à l'époque. Est-ce que vous travaillez toujours pour

 24   le bureau du Procureur aujourd'hui ?

 25   R.  Oui, c'est exact.

 26   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de lire les décisions de ce Tribunal

 27   dans les affaires où vous avez été citée à comparaître en tant que témoin

 28   expert ?

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  1   R.  Je le fais de temps en temps. Je lis la décision, celle qui est liée

  2   notamment au versement au dossier de mes rapports dans l'affaire en

  3   question.

  4   Q.  Je vous pose cette question parce que vous, ainsi que toutes les autres

  5   personnes ici présentes, savent que la tâche de témoin expert est

  6   d'assister la Cour à arriver à certaines conclusions et vous l'avez bien

  7   compris comme votre rôle dans les affaires dans lesquelles vous avez

  8   déposé, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, absolument.

 10   Q.  Est-ce que vous étiez intéressée plus tard pour savoir si vos rapports

 11   avaient aidé la Cour à former ses décisions -- ou à prendre des décisions

 12   dans les affaires futures, les affaires similaires au cours desquelles vous

 13   seriez amenée à déposer ?

 14   R.  Oui, en règle générale, je pense que c'est le cas à chaque fois qu'un

 15   rapport a sa pertinence, très certainement.

 16   Q.   J'imagine que vous avez lu la décision du Tribunal dans l'affaire

 17   Galic, lorsque votre rapport a été partiellement pris en compte et

 18   partiellement non pris en compte.

 19   R.  Si vous parlez de la décision dans cette affaire, il faut que vous

 20   soyez plus clair.

 21   Q.  Le verdict du Tribunal dans l'affaire Galic, au cours de laquelle vous

 22   déposiez en tant que témoin expert, fait référence à un moment à votre

 23   rapport, mais il y a d'autres parties de votre rapport qui n'ont pas été

 24   prises en considération. Est-ce que vous avez en fait lu la décision de la

 25   Chambre de première instance dans l'affaire Galic ?

 26   R.  Si vous faites référence au jugement, je les ai lues en partie, mais il

 27   est inévitable qu'un rapport ne soit accepté dans son entier. Il y a des

 28   résultats qui seront acceptés et auxquels il sera fait référence dans un

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  1   jugement et d'autres parties de ces rapports auxquels il ne sera pas fait

  2   référence dans un jugement.

  3   Q.  Ma question était la suivante : Si certaines parties de votre rapport,

  4   sur certains commentaires du Tribunal en ce qui concerne votre rapport,

  5   montraient que certaines parties n'étaient pas acceptées, est-ce que vous

  6   seriez à ce moment-là encline à corriger certaines parties de votre rapport

  7   en recherchant d'autres sources ou en essayant d'appliquer d'autres

  8   méthodes de calcul ? Est-ce que la position de la Chambre de première

  9   instance vous donnait une sorte de feu vert pour essayer de trouver quelque

 10   chose de différent ?

 11   R.  Je pense, Monsieur, que les décisions prises lors d'un jugement sont

 12   justifiées par de nombreux facteurs, il n'y a pas que mon rapport qui soit

 13   pris en compte, il y a d'autres facteurs qui sont pris en considération, il

 14   va y avoir des rapports supplémentaires, des dépositions de témoin, et

 15   cetera.

 16   Ce que vous dites en fait c'est cela, s'il y avait des erreurs dans mon

 17   rapport, est-ce que je serais encline à les corriger, c'est bien ce que

 18   vous me posez comme question ?

 19   Q.  Vous pourriez peut-être essayer de trouver une autre méthode, une autre

 20   façon d'arriver à certaines conclusions qui pourraient aider la Chambre de

 21   première instance, parce que le Tribunal peut décider que le rapport de Mme

 22   Tabeau n'est pas utile sous certains aspects.

 23   Est-ce qu'à ce moment-là cela vous encouragerait à changer quelque chose

 24   dans votre méthode de travail, parce qu'il y a eu des affaires similaires

 25   qui ont été jugées par le Tribunal ?

 26   R.  Monsieur, à chaque rapport que je rédige, j'essaie d'améliorer les

 27   choses. C'est ma façon naturelle de procéder. J'apprends en continu, comme

 28   nous tous ici dans ce Tribunal et c'est ce que je fais dans le cadre de

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  1   chaque rapport. Je fais toujours de mon mieux pour présenter de bonnes

  2   statistiques qui soient fiables et de qualité. Mais si vous avez détecté

  3   des erreurs dans mon rapport Sarajevo, dites-le-moi, parce que jusque-là je

  4   ne me souviens pas que des erreurs aient été pointées par les Chambres de

  5   première instance qui me faudrait corriger lors de mon prochain rapport.

  6   Q.  Très bien. Alors n'en parlons plus, puisque c'est le Tribunal qui devra

  7   en décider.

  8   Une question d'ordre général. Maintenant vous pensez donc que votre rapport

  9   est correct, tant pour le rapport Galic que pour le rapport Milosevic. Donc

 10   vous soutenez les faits et les conclusions de votre rapport ?

 11   R.  Oui, absolument. Mais pour le rapport Milosevic, il y a une version un

 12   peu plus à jour, à savoir le rapport Dragomir Milosevic qui n'a pas été

 13   utilisé dans cette affaire.

 14   Q.  Moi, mon interrogatoire portera sur ces deux rapports dont il s'agit

 15   ici, le rapport Galic et le rapport Slobodan Milosevic.

 16   Est-ce que vous soutenez, est-ce que vous pensez que ces deux

 17   rapports sont corrects ? C'est ma question.

 18   R.  Oui, absolument.

 19   Q.  Merci. Je vais vous poser maintenant des questions sur vos sources.

 20   Je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'en matière

 21   d'expertise, quel que soit le domaine d'expertise, il est particulièrement

 22   important que les sources d'information soient de la meilleure qualité.

 23   R.  Absolument.

 24   Q.  La qualité de l'information suppose que dans vos conclusions en tant

 25   que chercheur, bien, ce que vous présentez peut être utilisé et soit

 26   considéré comme fiable, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, absolument.

 28   Q.  Dans votre rapport, à certains égards vous avez obtenu des informations

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  1   auprès de différentes sources et vous les avez évaluées en fonction de ces

  2   sources.

  3   R.  Oui, l'évaluation des sources est très importante. De chacune des

  4   sources, il s'agit d'évaluer ces sources de façon éminemment détaillée. Il

  5   y a beaucoup plus d'informations et de conclusions dans les évaluations

  6   dans le rapport complet que dans ce rapport d'expert. Parce que le

  7   processus d'évaluation est un processus long, il faut étudier les données

  8   dans la base de données pour essayer de voir quelles sont les lacunes, ce

  9   qui pourrait manquer. On essaie de voir s'il y a des incohérences de

 10   logique, on essaie de voir quels sont les biais de chacune des sources,

 11   est-ce que tous les groupes ethniques sont bien représentés, sont

 12   sous-représentés, surreprésentés, donc les procédures d'évaluation sont

 13   quelque chose qui dure très longtemps.

 14   Il est vrai qu'il y a une hiérarchie des sources que nous utilisons dans ce

 15   rapport Galic et ça a trait à la fiabilité et à l'efficacité et aux

 16   lacunes, pardon, concernant certaines sources. Mais parallèlement, pour

 17   autant que je me souvienne, dans le rapport on dit que les sources

 18   utilisées étaient d'une qualité acceptable et étaient relativement fiables.

 19   Il s'agit du rapport Milosevic, Slobodan Milosevic, pas du rapport Galic.

 20   Q.  Très bien. Vous nous l'avez dit dans vos propos liminaires pour

 21   l'affaire Milosevic. Vous nous avez dit que vous aviez des sources de

 22   qualité qui avaient une certaine hiérarchie pour les classer en fonction de

 23   certains événements. Je pense que cela a trait à l'armée BiH ?

 24   R.  Non, ça n'a pas trait à l'armée. La hiérarchie des sources est

 25   appliquée aux sources que nous avons utilisées pour les listes des

 26   victimes, parce que cette hiérarchie des sources est une question pratique

 27   qui est liée au fait que lorsqu'on essaie de comparer les sources, il a

 28   fallu faire des choix pour savoir quel rapport nous allions utiliser, à

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  1   quel moment, ce qu'on considérait comme des doublons, et cetera. C'était ça

  2   le sens de cette hiérarchie. Et la liste des sources militaires, ça, cela

  3   ne faisait pas partie de la liste principale. Ça a été utilisé à d'autres

  4   fins. Ça a été utilisé pour suivre le statut militaire.

  5   Q.  En fait, je m'étais trompé. Vous avez dit que ce rapport c'était le

  6   rapport du bureau fédéral des statistiques, et vous nous avez dit que dans

  7   votre rapport vous avez une priorité dans la hiérarchie pas dans le rapport

  8   de l'armée; c'est cela ?

  9   R.  Oui, la base de données est établie par les autorités statistiques

 10   fédérales, et ça, c'était la priorité numéro 1 lorsqu'on recherchait des

 11   doublons. C'est une base de données qui est établie par des statisticiens

 12   professionnels à la lumière de notifications ou d'avis de décès qui ont été

 13   établis pour chaque cas. Ça, c'est une source qui est de meilleure qualité

 14   que toutes les autres sources. Toutes les autres n'ont pas été compilées

 15   par des professionnels, y compris le CICR, des gens qui sont tout à fait

 16   capables. Mais ce n'est pas une autorité statistique, ce ne sont pas des

 17   professionnels de la statistique.

 18   Q.  Pour pouvoir tirer des conclusions et pour dire que telle ou telle

 19   information est de bonne qualité, je pense qu'il est important de pouvoir

 20   comparer ces informations et d'en trouver une confirmation dans d'autres

 21   sources. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez fait pour évaluer la

 22   qualité de vos informations, de vos sources ?

 23   R.  Bien, nous croisons nos sources constamment, c'est un processus

 24   continu, c'est ce que fait mon unité. Il s'agit de croiser les sources avec

 25   des correspondances individuelles. Nous avons des recensements de

 26   population. Ce recensement, c'est le cœur de notre base démographique. On

 27   relie ces sources avec le recensement. On compare les informations avec les

 28   différentes informations qui nous sont apportées concernant les individus.

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  1   Q.  Je n'ai peut-être pas été suffisamment précis, mais je n'ai pas obtenu

  2   de réponse à ma question.

  3   La qualité d'une information ou d'une source est meilleure si l'on peut la

  4   croiser, si on peut la comparer à d'autres informations venant d'autres

  5   sources, plutôt que si vous ne disposiez que d'une seule source

  6   d'information; est-ce exact ?

  7   R.  La qualité est ce qu'elle est. La qualité de chacune des sources dépend

  8   de la source, ça n'a rien à voir avec le croisement de données ou de

  9   sources. Par contre, en croisant les données on peut mieux comprendre telle

 10   ou telle source.

 11   Donc si vous êtes en train de me dire qu'utiliser plusieurs sources est

 12   mieux que d'utiliser une seule source, oui, à ce moment-là, vous avez

 13   absolument raison, oui. J'espère c'est ce que vous voulez dire ?

 14   Q.  Bien, voilà ce que je voudrais vous demander en tout cas, et ça a trait

 15   à ce que j'ai lu dans votre rapport d'ailleurs.

 16   Dans vos conclusions, dans votre évaluation concernant le nombre des

 17   personnes tuées sur la période étudiée, vous aviez différentes sources pour

 18   cette affaire. Notamment pour le rapport Milosevic, vous avez utilisé cinq

 19   sources différentes concernant le nombre de personnes tuées. L'une de ces

 20   sources, par exemple, c'était le bureau fédéral des statistiques.

 21   Maintenant, la qualité des informations contenues était considérée comme

 22   bonne si vous pouviez les confirmer ou les comparer à d'autres informations

 23   trouvées dans d'autres sources d'information concernant les mêmes faits.

 24   R.  Ecoutez, je pense que vous n'avez pas bien compris la procédure. La

 25   base de données des autorités fédérales est de bonne qualité, mais ça ne

 26   veut pas dire qu'il faut ne pas tenir compte des autres sources, ce serait

 27   une erreur. Davantage de sources est toujours un plus, parce qu'évidemment

 28   on a un échantillon plus large. N'utiliser une grande source, comme l'étude

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  1   sur les foyers de Sarajevo, ça c'est quelque chose d'énorme, c'est

  2   incroyablement détaillé comme source.

  3   Donc je pense que les chiffres du rapport Galic et du rapport

  4   Slobodan Milosevic sont de bonne facture. Et croyez-moi, je les ai comparés

  5   à plusieurs reprises au rapport Galic ou au rapport Slobodan Milosevic,

  6   Dragodan [comme interprété] Milosevic, et cetera, et vous seriez surpris de

  7   voir à quel point il y a une cohérence qui ressort de tout cela dans chacun

  8   de ces rapports.

  9   En tout cas utiliser une seule source d'information ne pose

 10   absolument pas de problème comme utiliser la source concernant les foyers.

 11   Il n'y a pas de problème si l'on fusionne différentes sources, cinq

 12   sources, sept sources, parce qu'évidemment on a un échantillon plus large.

 13   Par contre, les problèmes avec les sources sur les victimes de guerre,

 14   c'est qu'elles sont incomplètes. Que vous le vouliez ou non, c'est un fait.

 15   Donc, soit vous acceptez d'avoir des sources qui sont bonnes et sans

 16   biais, sans préjugés, ou alors vous devez travailler à partir de

 17   différentes sources.

 18   Q.  Je suis tout à fait d'accord avec vous, et vous avez donc comparé

 19   différentes sources et évalué leur qualité.

 20   Ma question maintenant est la suivante : vos conclusions, lorsque

 21   vous parlez des blessés, bien, pour ces blessés, vous avez utilisé une

 22   seule source, c'est l'étude des foyers de Sarajevo qui date de 1994.

 23   Maintenant, concernant cette source et les informations qui y sont,

 24   vous ne les avez pas comparées à d'autres sources ?

 25   R.  Si. Si. Pas dans ces deux rapports, mais dans le rapport Dragodan

 26   Milosevic, il y a une comparaison très intéressante avec les statistiques

 27   des hôpitaux, venant des grands hôpitaux de Sarajevo. Il y a un échantillon

 28   de plus de 3 000 noms venant des hôpitaux de Sarajevo concernant les civils

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  1   et les victimes de pilonnage et les morts violentes, et il y a une

  2   cohérence entre les personnes blessées dans cette étude sur Sarajevo et

  3   avec les chiffres venant des hôpitaux.

  4   Q.  Vous savez que ça n'est pas le cœur de votre déposition devant cette

  5   Chambre.

  6   Alors, j'ai dit que j'allais me concentrer sur vos conclusions dans

  7   le rapport Galic et Slobodan Milosevic qui nous intéressent. Et j'en

  8   reviens à la même question.

  9   Concernant les blessés dans le rapport Galic - parce qu'on ne parle

 10   pas de blessés dans l'affaire Milosevic - donc dans le rapport Galic, est-

 11   ce que vous avez utilisé d'autres rapports en dehors de l'étude sur les

 12   foyers de Sarajevo de 1994 ? Merci de répondre par oui ou par non, tout

 13   simplement.

 14   R.  Dans le rapport Galic, ce sont seulement les blessés qui apparaissent

 15   dans ce rapport sur les foyers de Sarajevo.

 16   Q.  Et cette source, pour ce rapport, bien, vous ne pouvez pas la comparer

 17   avec une autre source concernant ces mêmes faits; est-ce exact ?

 18   R.  Dans le rapport Galic, il n'y a pas de comparaison avec d'autres

 19   sources sur les blessés. Simplement pour cette étude concernant Sarajevo.

 20   Q.  Lorsque vous avez préparé votre rapport et lorsque vous avez travaillé

 21   sur ces données, vous et votre équipe, est-ce que vous avez cherché des

 22   sources personnellement, vous et votre équipe, ou est-ce que ce sont des

 23   sources qui vous ont été fournies par l'Accusation ?

 24   R.  Non, nous avons recherché les sources nous-mêmes.

 25   Q.  Avez-vous essayé de trouver certaines sources sans réussir à y avoir

 26   accès, ou est-ce qu'on vous en a empêché ? Est-ce qu'une autorité ou une

 27   autre vous en aurait empêché ?

 28   R.  Non, pas pour autant que je me souvienne. Les sources que l'on voulait

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  1   pour le rapport Galic, cette étude sur les foyers de Sarajevo, ça nous a

  2   été proposé par ceux qui détenaient cette source.

  3   Q.  J'aimerais maintenant en venir à toutes les sources des deux rapports.

  4   Etant donné que la plupart de ces sources viennent du CICR et qu'il y

  5   a des rapports de l'armée serbe et le rapport HVO, toutes les autres

  6   sources sont des sources qui proviennent des autorités fédérales, les

  7   autorités de Bosnie-Herzégovine, en clair, de l'autre partie au conflit.

  8   Donc est-ce que vous avez eu des réserves concernant l'authenticité

  9   et la véracité des informations qui étaient contenues dans ces sources ?

 10   R.  Non, pas fondamentalement. Parce que les autorités statistiques, bien,

 11   pourquoi seraient-elles biaisées ? Moi, j'ai aussi utilisé des informations

 12   venant d'autres bases de données, venant de l'autorité statistique et je

 13   les ai fusionnées. Donc concernant Sarajevo, les sources utilisées dans le

 14   rapport Slobodan Milosevic étaient celles qui couvraient ces épisodes du

 15   conflit, elles les couvraient le mieux possible. Donc c'était ça le critère

 16   de sélection de nos forces. Et si au moment du rapport Slobodan Milosevic,

 17   de son élaboration, si j'avais déjà disposé de cette autre base de données,

 18   bien, je l'aurais inclus dans mon analyse.

 19   Q.  Une question qui a trait davantage à vos impressions qu'à autre chose,

 20   mais je pense que vous pouvez répondre parce que vous êtes un expert, un

 21   témoin expert.

 22   Pendant votre communication et lorsque vous avez préparé ce rapport,

 23   lorsque vous avez communiqué avec différentes institutions, les instituts

 24   de Bosnie-Herzégovine, par exemple, qui vous ont fourni ces informations,

 25   est-ce que, à votre avis, est-ce que vous avez eu l'impression qu'ils

 26   souhaitaient que vous fournissiez ce rapport, et est-ce qu'ils vous ont

 27   demandé de leur fournir ce rapport une fois qu'il était terminé ? Est-ce

 28   que c'était de leur intérêt ?

Page 5813

  1   R.  Bien, je ne devrais pas parler de mes impressions, mais disons, que ça

  2   fait partie de la discussion des sources. Vous savez, les sources, je l'ai

  3   dit, sont biaisées un peu, tronquées parfois. Mais cela dépend de qui

  4   établit ces sources. Et chaque partie au conflit, évidemment, souhaite

  5   montrer ces victimes avec les chiffres les plus élevés possibles. C'est

  6   fréquent, ça arrive tout le temps. Et mon rôle en tant que statisticienne,

  7   c'est de reconnaître cet intérêt, ensuite de le gérer intelligemment. C'est

  8   précisément ce que j'ai cherché à faire, et c'est ce que j'ai fait dans le

  9   rapport Slobodan Milosevic.

 10   Tout d'abord, ce biais c'est quelque chose de très important. Et dans le

 11   cas de Sarajevo, il ne s'agit pas de nettoyage de purification ethnique, on

 12   parle de civils qui sont tués. Donc ce qui est important, c'est les

 13   chiffres qui sont au coeur de tout cela. Et ce qui est important, c'est que

 14   dans chacune des sources, on ait tous les groupes ethniques qui sont

 15   représentés.

 16   Sarajevo était une communauté multiethnique, comme vous le savez, et

 17   la partie de Sarajevo qui était assiégée relevait des autorités

 18   statistiques. Donc ils cherchaient à compter toutes les victimes, quelle

 19   que soit leur ethnicité, parce que c'était précisément leur rôle à ces

 20   autorités statistiques au moment du conflit. Donc il n'y a aucune raison de

 21   croire qu'ils sélectionnaient, qu'ils choisissaient ou qu'ils ne retenaient

 22   pas tel ou tel groupe parce qu'ils ne l'appréciaient pas. Il n'y a aucune

 23   raison de penser que tel aurait pu être le cas.

 24   Q.  Donc est-ce que vous avez le même point de vue à propos de l'étude

 25   portant sur les foyers de Sarajevo en 1994 ou pour ce qui est de cette

 26   étude, est-ce que vous avez exprimé certaines réserves avant de parvenir à

 27   vos conclusions ?

 28   R.  L'étude portant les foyers de Sarajevo était censée englober toute la

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  1   population qui vivait à l'intérieur du périmètre de la ligne de front, donc

  2   les différentes lignes de front de Sarajevo. Je pense en fait que les

  3   Bosniens ont organisé l'étude, il leur a été plus facile d'avoir accès à

  4   des familles bosniennes par rapport aux groupes minoritaires. Mais il faut

  5   savoir que ce n'est pas la composition ethnique des victimes qui fait

  6   l'objet de mes rapports. Ce n'est pas l'essentiel de mes rapports. Ce qui

  7   est au cœur des rapports, c'est le nombre des victimes.

  8   Alors il se peut que pour ce qui est des victimes bosniennes, là il y

  9   ait eu analyse systématique et beaucoup plus exhaustive que pour les autres

 10   groupes ethniques.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que le moment

 12   serait venu de faire la pause.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, nous allons faire la pause, nous

 14   revenons à 10 heures 45.

 15   --- L'audience est suspendue à 10 heures 18.

 16   --- L'audience est reprise à 10 heures 47.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Lukic.

 18   M. LUKIC : [interprétation]

 19   Q.  Madame Tabeau, j'aimerais poursuivre notre discussion en ce qui

 20   concerne les sources.

 21   Parlons du recensement de 1991. Nous sommes d'accord pour dire qu'il s'agit

 22   là d'une source de bonne qualité pour en tirer vos statistiques et vos

 23   comparaisons; est-ce bien exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Avez-vous été en mesure de voir la législation fédérale, le code

 26   fédéral sur le recensement qui a été promulgué en 1990, il y figure des

 27   instructions pour la conduire du recensement de 1991 ? Je crois que cette

 28   législation avait été préparée par le bureau statistique fédéral de

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  1   l'époque.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ce recensement

  4   démographique, en raison de la situation politique qui prévalait et en

  5   raison des sensibilités de l'époque, que ce recensement démographique, en

  6   dépit de tout cela, avait été bien préparé de manière très approfondie ?

  7   R.  Oui, il a été préparé de façon très approfondie.

  8   Q.  Les recenseurs, c'est-à-dire les individus ayant procédé au

  9   recensement, étaient des individus qui avaient fait l'objet d'une formation

 10   - ils avaient reçu une formation spéciale - pour la conduite de ce

 11   recensement ?

 12   R.  Oui. Il y a eu une formation pour les personnes ayant procédé à ce

 13   recensement, beaucoup de préparations qui ont duré environ dix ans, comme

 14   c'est le cas pour n'importe quel recensement de population.

 15   Q.  Les manuels ou le matériel pédagogique reçu par les personnes ayant

 16   procédé au recensement fournissait un certain nombre de définitions qui

 17   devaient être utilisées lors de ce recensement, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui. Mais j'aimerais savoir si nous parlons du recensement le plus

 19   complet de population qui existe dans chaque pays. Ce recensement de

 20   population, le recensement dont nous parlons, est la source essentielle

 21   d'information à propos de la population dans chaque pays. Il s'agit d'un

 22   exercice qui est complet, qui couvre énormément de terrain, il y a toutes

 23   sortes de personnes qui sont impliquées dans la préparation et dans

 24   l'organisation de recensements. Par la suite, c'est la tâche de l'autorité

 25   statistique de chaque pays que de préparer et de conduire ce recensement.

 26   Encore une fois, j'aimerais dire quelque chose très clairement pour éviter

 27   toute discussion superflue à propos de la démographie du conflit et de la

 28   démographie en général. Il faut distinguer cela des statistiques

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  1   officielles. Les statistiques officielles sont des statistiques qui sont

  2   produites dans le domaine de la démographie du conflit, mais ne peuvent pas

  3   faire l'objet de comparaisons directes. En effet, il y a deux situations

  4   différentes : le moment où le recensement a été préparé et organisé ne peut

  5   pas être comparé avec la période où il y a eu effectivement une situation

  6   de guerre. On ne peut pas comparer les deux.

  7   Q.  Alors vous pensez qu'il ne peut pas y avoir de comparaison possible.

  8   Mais en tant que démographe, lorsque vous évaluez la qualité de certaines

  9   sources, il vous faut considérer certaines normes qui peuvent vous guider

 10   dans votre évaluation de la qualité de la source. Donc nous ne parlons pas

 11   que du recensement de population, mais nous parlons de démographie du

 12   conflit. Lorsque vous procédez à l'évaluation de certaines sources, des

 13   sources qui ont leur pertinence pour vos conclusions dans ce cas

 14   particulier, c'est-à-dire ici, en l'occurrence, l'étude sur les ménages de

 15   Sarajevo, vous avez utilisé un certain nombre de normes ou de critères pour

 16   évaluer la qualité de l'information qui s'y trouvait. Vous avez comparé

 17   cela aux normes internationales qui président la compilation de telles

 18   études, n'est-ce pas ?

 19   R.  Vous avez parlé de normes d'évaluation des sources. Les normes dans les

 20   enquêtes démographiques bien établies, telles que le recensement, ne

 21   peuvent pas être utilisées dans les sources pour la démographie de la

 22   guerre ou du conflit. Ça n'est pas possible dans un premier temps, et en

 23   plus, ce serait tout à fait injustifié. Une tâche importante de la

 24   démographique de guerre vise d'abord à identifier les sources qui peuvent

 25   être utilisées dans une étude des victimes. On veut pouvoir identifier ces

 26   morts et le biais des sources possibles. Une fois qu'on a fait tout cela,

 27   il faut essayer de voir comment on peut traiter de ces sources de manière

 28   adéquate.

Page 5817

  1   Donc ça c'est ma position. Il ne s'agit pas d'une norme acceptée dans le

  2   monde entier pour les statistiques officielles. Il faut savoir que dans le

  3   domaine de la démographie du conflit, on a besoin d'une approche différente

  4   vis-à-vis des sources qui servent d'inspiration, des sources d'analyse, et

  5   c'est exactement ce que vous aviez dit. La démographie des pays occidentaux

  6   et la démographie des pays du Tiers-Monde diffèrent énormément. Ça n'est

  7   pas la même chose. Il y a la démographie de la guerre et les statistiques

  8   officielles. Vous ne pouvez pas mesurer avec les mêmes statistiques la

  9   situation en cas de conflit. Ce serait impossible tout d'abord, et en plus,

 10   ça ne serait pas justifié.

 11   Q.  Je ne veux pas polémiquer sur la question des statistiques, mais voyons

 12   quelles sont les normes qui sont utilisées dans les pays occidentaux,

 13   gardons-les présentes à l'esprit, comparons-les aux normes des pays en

 14   développement, la qualité des statistiques peut se comparer à l'aune des

 15   normes qui existent dans d'autres pays; est-ce bien exact ? Vous pouvez me

 16   répondre par oui ou par non. Nous n'avons pas besoin de nous lancer dans de

 17   longues explications.

 18   R.  Je ne peux pas répondre par oui ou par non, parce que vous parlez de

 19   normes dans les pays du Tiers-Monde par rapport aux normes occidentales.

 20   Dans les pays du Tiers-Monde, il n'y a pas tout simplement de telles

 21   sources. Il n'y a pas de recensement, par exemple, en Afrique occidentale,

 22   pourtant il y a un besoin d'information à propos de la démographie, on veut

 23   pouvoir analyser la population et essayer de trouver un certain nombre de

 24   données-clés. Donc nous parlons de la même situation. Nous avons une

 25   démographie du conflit qui doit être compilée pour une zone qui est

 26   affectée par un conflit. Ça ne peut pas être fait en utilisant les sources

 27   statistiques normales, on ne peut pas utiliser de normes statistiques

 28   universelles, pour ainsi dire.

Page 5818

  1   Q.  Essayons de resserrer un peu le champ de notre discussion.

  2   Vous avez dit que vous saviez qu'il y avait législation concernant le

  3   recensement, un code pour le recensement de population de 1991. C'était

  4   l'article 21 du code ou de cette législation auquel nous faisons référence,

  5   et cet article 21 prévoit des sanctions en cas de fourniture d'informations

  6   erronées. Donc quiconque fournit de fausses informations à la personne

  7   conduisant le recensement était passible de sanctions. Est-ce que vous vous

  8   souvenez du libellé de cet article ?

  9   R.  Je ne me souviens pas s'il s'agit de l'article 21 ou d'un autre article

 10   du code. Mais tout d'abord, les gens étaient en premier lieu obligés de

 11   participer au recensement. Tout le monde devait participer au recensement.

 12   C'était là une obligation légale, obligation légale également de fournir

 13   des informations réelles, véridiques.

 14   Q.  Et dans le cadre de la loi, tout individu était censé fournir les

 15   informations sur lui-même. Donc ce sont les citoyens qui devaient fournir

 16   des informations sur eux-mêmes. Par exemple, leur appartenance ethnique,

 17   leur appartenance religieuse devait être fournie par la personne interrogée

 18   elle-même ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Et maintenant, vous nous dites que ces deux critères, ces deux

 21   conditions importantes pour la fourniture d'informations lors du

 22   recensement de population ne peuvent pas être comparés aux critères qui

 23   sont utilisés pour les recensements en temps de guerre. Alors, le

 24   recensement de population de 1994 prévoyait qu'un membre de la famille

 25   donne des informations au nom de tous les autres membres de la famille;

 26   est-ce bien exact ?

 27   R.  Oui, c'est exact. Cependant, nous n'avons pas utilisé ces informations

 28   dans notre analyse à Galic. Vous vous en souviendrez peut-être, c'est 81,6

Page 5819

  1   % des chiffres de l'enquête sur les ménages de Sarajevo que nous avons

  2   informatisés pour le rapport Galic. Il y a 81,6 % de ces chiffres qui ont

  3   été comparés avec le recensement de 1991. Alors, vous pouvez transférer de

  4   l'information entre les sources. Donc s'il y a appariement des données

  5   chiffrées, vous pouvez tout simplement utiliser les informations qui sont

  6   données dans le recensement. Et c'est ce que nous avons fait. Nous l'avons

  7   utilisé. Donc il n'y a pas de biais en ce qui concerne l'appartenance

  8   ethnique dans notre rapport puisqu'on tire l'information du recensement. Il

  9   y a un petit groupe d'individus qui ne font pas l'objet d'appariement, pour

 10   lesquels nous n'avons pas l'appartenance ethnique, et on dit simplement

 11   dans les rapports "Appartenance ethnique inconnue" pour cet individu.

 12   Q.  Vous serez d'accord avec moi - et je pense que vous l'avez d'ailleurs

 13   dit pendant l'interrogatoire principal - vous serez d'accord avec moi pour

 14   dire que l'objectif principal de votre rapport dans l'affaire Galic c'était

 15   de pouvoir établir le nombre de civils qui ont été tués ou blessés. Telle

 16   était votre tâche. Le statut de victimes, c'était vraiment l'objectif de

 17   votre travail dans les deux rapports; est-ce bien exact ?

 18   R.  C'est correct.

 19   Q.  Dans l'enquête sur les ménages à Sarajevo en 1994, pour ce qui est des

 20   personnes blessées, les individus qui ont compilé ce rapport ont vu qu'il y

 21   avait une question en ce qui concerne le statut d'un membre du ménage.

 22   Quand je dis "statut," c'est cet individu qui avait été tué ou blessé. Et

 23   quand je parle de statut, ce statut pouvait s'appliquer à la fois aux

 24   civils et aux militaires; est-ce bien exact ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  La personne donnant ces informations à la personne conduisant le

 27   recensement n'était pas obligée de prouver la véracité de l'information en

 28   soumettant, par exemple, un document à l'appui de ces affirmations en ce

Page 5820

  1   qui concerne la blessure, la mort ou autre statut. Ce qui était dit par la

  2   personne rentrait dans le formulaire mais sans qu'aucune preuve ne soit

  3   apportée à l'appui de ces dires ?

  4   R.  Effectivement. Il n'y avait pas d'exigence d'apporter la preuve des

  5   faits présentés. Et c'était vrai, ce que vous avez dit à propos du statut

  6   s'appliquait effectivement à la fois aux militaires et aux civils.

  7   Q.  Vous voyez maintenant ce questionnaire qui fait partie du document

  8   P3225. C'est à la page 56 du document en anglais et c'est à la page 55 du

  9   document en B/C/S.

 10   Nous allons maintenant brièvement analyser le type d'information qui était

 11   donné ou qui était disponible.

 12   M. LUKIC : [interprétation] On pourrait peut-être remonter d'une page.

 13   Regardez sur la gauche. Ou plutôt, laissons les choses en l'état. La

 14   légende se trouve actuellement à la fois en anglais et en B/C/S.

 15   Q.  On va commencer par l'élément suivant : voilà le questionnaire qui a

 16   été utilisé par les recenseurs, utilisé lors du recensement à Sarajevo en

 17   1994. Il s'agit donc de l'enquête sur les ménages de 1994; est-ce que c'est

 18   bien cela ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Et ce questionnaire existe en deux langues, en B/C/S et en anglais.

 21   D'après ce que vous avez dit dans votre rapport, d'après mon souvenir, vous

 22   n'avez traité qu'une partie de l'information émanant de ce questionnaire;

 23   est-ce bien exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous avez traité les informations émanant des questions 1 et 2; est-ce

 26   bien exact ?

 27   R.  Oui, parmi d'autres.

 28   Q.  Nous y viendrons. Je trouve que les informations en réponse à la

Page 5821

  1   question 2 sont intéressantes. On nous donne des informations sur l'adresse

  2   du ménage en question, on voit si cette famille vit au même endroit

  3   qu'avant la guerre ou si, au contraire, l'adresse a changé pour être dans

  4   l'une des six municipalités de Sarajevo couvertes par l'enquête; est-ce

  5   bien exact ?

  6   R.  Oui, c'est vrai.

  7   Q.  Je pense - et vous pouvez me corriger si j'ai tort - je pense que vous

  8   n'avez pas analysé les réponses à la question 4 de votre rapport. 

  9   R.  Non, c'est bien vrai.

 10   Q.  Il s'agit d'une question qui concerne les membres du foyer qui

 11   s'étaient enfuis ou avaient été déplacés, ayant quitté Sarajevo ou qui

 12   restaient sur le territoire, comme on dit, qui était contrôlé par

 13   l'agresseur, ce qui fait qu'au cours du recensement de population en 1991,

 14   il y avait des membres de la famille qui vivaient à une adresse précise. Et

 15   il faut savoir que depuis lors la famille avait déménagé. Elle ne se

 16   trouvait plus à cette adresse; est-ce bien

 17   exact ?

 18   R.  Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris la question. Est-ce que c'est

 19   une question sur la liste des personnes vivant dans une famille en

 20   particulier, est-ce que c'est une question pour savoir si la famille ou non

 21   a déménagé d'une adresse à l'autre ?

 22   Si c'est bien le cas, effectivement, il y a eu ces déménagements dans

 23   certains cas.

 24   Q.  Alors, vous avez traité séparément des informations qui, je présume,

 25   étaient importantes pour vous. Il y avait les réponses aux questions 5, 6

 26   et 12, notamment. Est-ce que j'ai oublié quelque

 27   chose ? Il s'agit des questions qui portent sur les victimes, sur les

 28   personnes étant décédées de mort naturelle, y compris sur le statut de ces

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 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   personnes; est-ce bien exact ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  A l'époque où vous rédigiez le rapport Galic, c'était une base de

  4   données, une source d'informations importante pour vous en ce qui concerne

  5   le statut de la victime, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est vrai.

  7   Q.  D'après mon souvenir, la seule autre source qui évoque également le

  8   statut des personnes civiles ou militaires était le rapport des autorités

  9   funéraires. Je crois que ce sont les deux seules sources qui faisaient état

 10   de ce type d'information sur le statut des personnes.

 11   R.  Non, vous vous trompez. Il y avait également la liste des soldats

 12   tombés de l'ABiH et cela figure également comme source dans le rapport

 13   Galic.

 14   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire où dans le rapport Galic vous évoquez

 15   cette source, le rapport de la liste des soldats tombés de l'ABiH ?

 16   R.  C'est dans le résumé exécutif, c'est dans le tableau le plus important

 17   qui se trouve à la page 3 qui est le tableau le plus important du rapport

 18   Galic.

 19   Q.  Très bien. Nous y viendrons plus tard.

 20   R.  Nous avons deux définitions de statut dans ce tableau. Tout d'abord,

 21   nous avons le statut tel qu'il est figuré, mentionné dans l'enquête sur les

 22   ménages. Nous avons une deuxième définition et il s'agit de la définition

 23   externe du statut et c'est à la page 3 de la version anglaise du rapport

 24   Galic que l'on trouve cette définition.

 25   Q.  Pour être précis, vous avez le tableau du rapport Galic à la page 3

 26   auquel vous faites référence, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Très bien. Merci. Nous y reviendrons par la suite.

Page 5824

  1   Est-ce que vous pouvez me dire où il est fait référence à cette

  2   source de l'ABiH ? Est-ce que c'est lorsque l'on dit ABiH/VRS ?

  3   R.  Il s'agit de la liste des soldats tombés et d'autres personnels

  4   militaires. C'est une liste qui nous a été fournie, à l'unité démographique

  5   et au bureau du Procureur. C'est le ministère fédéral de la Défense et le

  6   VRS qui nous ont fourni cette liste. Donc nous avons utilisé cette liste en

  7   plus de l'enquête sur les ménages qui faisait également état du statut des

  8   personnes. Nous l'avons utilisée comme une définition plus objective du

  9   statut militaire. Nous pensons en effet que le statut qui faisait l'objet

 10   d'aucune pièce apportant la preuve de cette affirmation pouvait mener à des

 11   chiffres trop conséquents en ce qui concerne le nombre des soldats, et on a

 12   tendance en général à considérer qu'on déclare trop de statuts militaires

 13   que ça n'est le cas, en fait.

 14   Donc la distinction entre les victimes civiles et les victimes militaires

 15   doit faire l'objet de rapports très précis. Il est important d'avoir les

 16   vrais chiffres correspondant aux militaires.

 17   Q.  Je suis d'accord, il s'agit là d'un sujet très important. Mais il y a

 18   quelque chose que je ne comprends pas. Peut-être est-ce mon erreur. Mais

 19   j'ai lu votre rapport dans l'affaire Galic et, ce faisant, lorsque je vois

 20   le tableau des matières de ce rapport, je ne vois pas dans la table des

 21   matières ou dans le contenu du rapport que vous fassiez référence, comme

 22   c'est le cas pour l'affaire Milosevic, que vous fassiez référence, disais-

 23   je, à cette source ABiH. Je vois que vous faite référence à l'enquête sur

 24   les ménages, à la base de données également de la société funéraire Bakije

 25   et que vous les avez analysées.

 26   Ma question est la suivante : dans le rapport Galic, est-ce que vous avez

 27   utilisé le rapport du ministère de la Défense, parce que je n'y vois pas

 28   fait mention. Vous avez parlé du tableau et vous dites que dans le tableau

Page 5825

  1   figure des informations émanant de ces sources, mais avez-vous procédé à

  2   une analyse de ces données quelque part ?

  3   R.  J'ai commencé à expliquer où vous pouviez trouver dans ce rapport une

  4   référence à cette liste ABiH, et le tableau 1 est un des endroits où il y a

  5   une référence.

  6   Si vous allez à la page 27 de la version anglaise de ce rapport, vous

  7   trouverez un paragraphe, il s'agit du deuxième paragraphe en partant du

  8   haut de la page, et dans ce deuxième paragraphe j'explique comment nous

  9   avons utilisé cette liste militaire, c'est à la page 27 du rapport en

 10   version anglaise. C'est la page où figure le tableau 5. Regardez ce qui se

 11   passe au deuxième paragraphe et le premier paragraphe d'ailleurs en début

 12   de page y est également lié.

 13   Dans ce paragraphe 2, nous expliquons comment la définition externe

 14   du statut a été compilée, et vous voyez à partir de ce paragraphe que nous

 15   avons utilisé les données statistiques des soldats tombés. Nous avons

 16   apparié ces données avec celles du recensement démographique. Nous avons

 17   utilisé les chiffres ayant fait l'objet de comparaison pour pouvoir le

 18   marquer comme soldats, et ça faisait à peu près 80 % des chiffres qui ont

 19   fait l'objet de comparaison. Pour les 20 % restants, qui n'ont pas fait

 20   l'objet de ces appariements, nous avons utilisé le statut tel qu'il nous

 21   avait été rapporté par les personnes interrogées. Donc il s'agit d'une

 22   intégration, nous avons des définitions externes du statut pour les listes

 23   militaires, et pour les 20 % restants nous avons utilisé le statut tel

 24   qu'il était rapporté par les personnes. Il y a 20 % donc des chiffres pour

 25   lesquels nous avons utilisé la définition de l'enquête sur les ménages à

 26   Sarajevo, et pour les 80 % restants nous avons utilisé la source externe.

 27   Donc cette définition externe on l'a obtenue en appliquant les listes

 28   militaires.

Page 5826

  1   Q.  Une question de profane, parce que j'arrive pas à bien

  2   comprendre.

  3   Dans cette affaire, ainsi que dans l'affaire Galic et dans cette

  4   étude sur les ménages, vous avez dit qu'il y avait plus de combattants que

  5   de civils qui avaient été blessés. Alors, regardons peut-être les tableaux,

  6   ça va faciliter la tâche.

  7   Une question : lorsque vous parlez des données que le ministère de la

  8   Défense vous a données sur les combattants qui ont été tués, c'est la même

  9   source que vous avez utilisée dans l'affaire Milosevic pour les membres de

 10   l'armée BiH, jusqu'en 1995, ou est-ce qu'il s'agit de deux sources

 11   différentes ?

 12   R.  C'est la même source.

 13   Q.  Je poursuis. Concernant le statut des civils ou des combattants, là je

 14   pense que c'est clair pour chacun d'entre nous.

 15   Mais j'aimerais revenir aux données concernant cette étude sur les

 16   ménages. Dans cette enquête de 1994, est-ce que vous y apprenez que tous

 17   les ménages étaient enregistrés, déclarés, sur le territoire de la sixième

 18   municipalité de Sarajevo ?

 19   R.  Oui, toutes les données auxquelles ils ont eu accès l'étaient.

 20   Q.  Environ 85 000 ménages y étaient déclarés; c'est exact ?

 21   R.  Oui, c'est exact.

 22   Q.  Mais ni eux ni vous n'avez réussi à dire si tous ces ménages à l'époque

 23   étaient présents dans ces six municipalités qui étaient déclarées, ou est-

 24   ce que vous pensez qu'effectivement tous les ménages étaient déclarés

 25   enregistrés ?

 26   R.  Bien, effectivement, il y des chiffres qui ont peut-être disparu. Mais

 27   ça n'a pas vraiment d'importance, parce que 85 000 c'est déjà un chiffre

 28   très élevé si vous le comparez avec les données dont on disposait

Page 5827

  1   auparavant et ce que l'on avait avec le recensement, et la publication sur

  2   les ménages, on constate que c'est la quasi-totalité. Donc ça n'a guère

  3   d'importance de savoir s'il y en a quelques uns qui sont passés à l'as ou

  4   pas.

  5   Ensuite les chiffres que nous avons présentés dans le rapport Galic,

  6   nous avons présenté les chiffres minimums. Donc nous ne sommes pas en train

  7   de dire que c'est quelque chose d'exhaustif qui couvre toutes les victimes.

  8   Il s'agit d'un chiffre minimum. On sait pertinemment que certaines victimes

  9   ont été laissées pour compte et on donne donc des estimations pour ceux qui

 10   n'apparaissent pas dans nos sources et pour répondre à cette critique.

 11   Donc au final, puisque nous avons présenté nos rapports Galic, c'est

 12   tout d'abord le fait que ça vient d'une source large, importante, une

 13   source qui a été bien préparée dans des circonstances difficiles à

 14   l'époque, une source qui recueillait des données auprès de personnes qui

 15   conduisaient des enquêtes et qui étaient formées. Les structures qui

 16   recueillaient ces données étaient les communautés locales qui avaient

 17   facilement accès à la population. Au total, c'est une excellente source et,

 18   en outre, c'est une source assez grande, large, importante. Et même si

 19   c'est bien fait, nous pensons toujours que c'est assez incomplet, voilà

 20   pourquoi nous considérons que ce sont des chiffres conservateurs

 21   uniquement.

 22   Q.  Je préférerais des réponses plus courtes pour que l'on arrive à

 23   conclure dès aujourd'hui. Alors je comprends bien que vous devez être aussi

 24   précise que possible, mais vous utilisez ces sources pour établir, de façon

 25   statistique, les populations qui vivaient sur ce territoire à l'époque;

 26   est-ce exact ?

 27   R.  Oui, nous avons essayé d'évaluer la taille de cette population.

 28   Q.  Vous l'avez établi en multipliant 85 000 par quatre, comme étant une

Page 5828

  1   estimation du nombre de personnes vivant dans chaque ménage à l'époque sur

  2   ce territoire; est-ce exact ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   Q.  Et vous nous avez dit que dans votre rapport, d'un point de vue

  5   statistique, pour les territoires de chacune des municipalités qui

  6   pouvaient être analysées avant la guerre, que les totaux avaient été

  7   augmentés étant donné l'immigration pendant la période en question; est-ce

  8   exact ?

  9   R.  Oui, c'est exact. Je pense effectivement que les chiffres de l'enquête

 10   sur les ménages étaient inférieurs aux données avant la guerre. C'était

 11   trois virgule quelque chose, pour autant que je me souvienne.

 12   Q.  Vous nous avez dit il y a un instant que vous n'aviez pas inclus la

 13   question 4 qui posait des questions sur les personnes qui avaient quitté le

 14   territoire pour obtenir des données plus précises sur les personnes qui

 15   avaient quitté Sarajevo pendant la période en question. Vous n'en avez pas

 16   tenu compte ou est-ce que vous en avez tenu compte au contraire ?

 17   R.  Oui et non, je n'ai pas inclus ces données issues de ce questionnaire,

 18   mais en dehors des données principales utilisées par le rapport Galic, nous

 19   avons parfois recueilli des échantillons pilotes de données, à savoir

 20   plusieurs milliers de questionnaires venant de deux municipalités, je pense

 21   que c'était Stari Grad et l'autre c'était Centar. Ces questionnaires

 22   pilotes que nous avons recueillis étaient tous les questionnaires

 23   disponibles pour ces zones. Ces questionnaires contenaient des données sur

 24   toutes les tendances démographiques, y compris sur les populations

 25   déplacées.

 26   Donc pas seulement les blessés, les morts et les morts naturelles,

 27   mais aussi les naissances et les enfants mort-nés, les populations

 28   déplacées à Sarajevo, et cetera.

Page 5829

  1   En utilisant ces pilotes, on a estimé cette population qui avait été

  2   déplacée sur ces deux zones de Sarajevo et les chiffres, vous les avez dans

  3   le rapport Galic, c'était environ 86 % de la population qui vivait sur ces

  4   deux zones par rapport à 14 % de la population déplacée dans ces

  5   municipalités.

  6   Donc on avait une idée assez précise des déplacés qui étaient

  7   présents à Sarajevo.

  8   Q.  Ce projet pilote que vous avez analysé comprend deux municipalités, ça

  9   fait environ 4 000 ménages, ça faisait environ

 10   0,5 % du nombre de ménages que vous avez établi, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, absolument.

 12   Q.  En tant que démographe, est-ce que c'était un périmètre suffisant pour

 13   tirer des conclusions concernant le nombre de personnes qui avaient quitté

 14   le territoire de ces municipalités ?

 15   R.  Je n'ai pas tiré de conclusions à partir de ces chiffres, je mentionne

 16   ces chiffres parce que vous me posez des questions les concernant. Ce qui

 17   est important, c'est le sens de ces personnes déplacées. Le rapport parle

 18   du nombre de victimes au front et si vous voulez calculer des taux à partir

 19   de ces chiffres, là encore, ça n'est pas pertinent, parce que les taux sont

 20   calculés uniquement pour la population qui provient de ces municipalités et

 21   pas pour les populations déplacées.

 22   Q.  Madame Tabeau, à la lecture de vos conclusions, j'en arrive à la

 23   conclusion que le nombre de personnes qui vivaient sur place, environ 300

 24   000 - ça c'est la base que vous avez utilisée pour vos analyses - vos

 25   estimations du nombre d'habitants pour cette zone sont assez élevées,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, absolument.

 28   Q.  Pourquoi n'avez-vous pas tout simplement ajouté les membres des ménages

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  1   de ces 85 000 ménages issus du questionnaire, parce que ça ne me semble pas

  2   être quelque chose de particulièrement compliqué. Pourquoi est-ce que vous

  3   n'avez pas suivi cette méthodologie ?

  4   R.  Mais je pense que vous avez tort en disant que c'est quelque chose de

  5   facile parce que c'est un travail immense. Il s'agit de saisir des

  6   informations pour au moins 300 000 personnes, 300 000 personnes. Est-ce que

  7   vous vous rendez compte de ce que ça

  8   représente ? Pour obtenir les informations dont vous parlez maintenant, il

  9   faudrait avoir accès à toutes ces informations --

 10   Q.  Non --

 11   R.  -- population déplacée, non déplacée et de cette étude. Dans ce

 12   questionnaire, il y a 85 000 questionnaires qui contiennent plusieurs noms.

 13   Q.  Pardonnez-moi, je dois vous interrompre. Mais à la lumière de ces

 14   informations, j'ai l'impression que les noms et les personnes que l'on

 15   mentionne ne sont pas importants, mais que seuls les chiffres sont

 16   importants. Et vous êtes en train de nous dire qu'ajouter des chiffres

 17   issus de 85 000 questionnaires c'est plus compliqué que de faire des

 18   hypothèses comme vous l'avez fait.

 19   R.  Non, ce n'est absolument pas ce que j'ai dit. Ce que je suis en train

 20   de vous dire, c'est que vous n'avez aucune idée de la façon dont on élabore

 21   des statistiques et ce que cela requiert.

 22   Q.  Pardonnez-moi, je dois vous interrompre. Je vous demande de bien

 23   vouloir me fournir une réponse simple, parce que ce que je suis en train de

 24   vous dire, c'est que concernant la population totale, si l'on s'en tient à

 25   cette enquête sur les ménages de 1994 comme étant une source de qualité et

 26   si l'on procède de façon simple, alors évidemment ça prendrait du temps,

 27   mais est-ce qu'on aurait pu établir à partir de cela la population qui

 28   était présente sur place plutôt que de faire des hypothèses.

Page 5831

  1   Parce que vous n'avez pas simplement compté les personnes qui se

  2   trouvaient dans les sources.

  3   R.  Je n'ai pas compté les personnes déplacées dans le cadre de cette

  4   étude, parce que je n'en avais pas besoin pour arriver à un chiffre de

  5   victimes ou de personnes blessées ou tuées. Il me fallait calculer ou

  6   ajouter les nombres de personnes tuées, le nombre de personnes blessées.

  7   Maintenant, peu importe qu'une personne habitait à Sarajevo d'emblée ou est

  8   venue à Sarajevo d'ailleurs ou de Bosnie, du moment que cette personne

  9   apparaît sur une liste comme personne tuée ou blessée.

 10   Q.  Toutefois, ce chiffre de 344 000 auquel vous arrivez avec vos

 11   hypothèses a été utilisé comme base pour vos estimations statistiques,

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  Pour estimer les taux et les 340 000 que j'ai avec en moyenne quatre

 14   individus par ménage, c'est plus que si vous aviez utilisé 3 comme moyenne.

 15   Si vous réfléchissez un peu à la façon dont les taux sont calculés et à la

 16   population, effectivement c'est le dénominateur, c'est probablement

 17   légèrement inférieur.

 18   Donc j'ai eu une approche conservatrice, je n'ai pas voulu surestimer

 19   ce taux, ce qui est plutôt une bonne chose pour la Défense, d'ailleurs.

 20   Q.  Je suis parfaitement conscient de ce que vous êtes en train de nous

 21   dire, mais je ne veux pas revenir sur ce qui est bon pour moi ou pas.

 22   Je veux simplement savoir si c'était correct d'un point de vue statistique

 23   et si vous disposiez des données statistiques nécessaires, pertinentes pour

 24   compter les personnes. Vous ne l'avez pas fait, vous pensez que cette

 25   méthode de comptage de la population n'était pas nécessaire, que pour vous

 26   il était plus efficace d'avoir recours à une estimation; est-ce exact ?

 27   R.  Deux choses. Ça n'était pas tout à fait nécessaire. Deuxièmement, ça

 28   aurait nécessité énormément de ressources et je ne suis pas la personne qui

Page 5832

  1   décide de ses ressources.

  2   Q.  Très bien. C'est une réponse que j'accepte.

  3   J'aimerais maintenant vous poser quelques questions sur une autre source

  4   concernant l'affaire Milosevic. Vous avez parlé du CICR comme étant un

  5   rapport de qualité et d'après ce que j'ai compris, c'est un rapport sur les

  6   personnes manquantes, ce qui, selon les conclusions du CICR, peut être

  7   utilisé pour comptabiliser les personnes manquantes que l'on retrouve dans

  8   leur base de données ?

  9   R.  Oui, les personnes manquantes, pas les gens qui ont été déclarés comme

 10   étant tués ou blessés, ce sont les personnes manquantes dont on pense

 11   qu'elles sont mortes a priori dans des circonstances violentes.

 12   Q.  A partir de cette source, à partir de cette liste de personnes

 13   manquantes du CICR, vous avez établi des correspondances, et il y a 570

 14   personnes qui étaient des habitants de Sarajevo, selon le recensement de

 15   1991. Est-ce que j'ai bien compris ? Ce qui voudrait dire --

 16   R.  Pour obtenir la bonne réponse, il faut que vous vous tourniez vers la

 17   page 8 du rapport Slobodan Milosevic et il faudrait regarder le tableau A2.

 18   Q.  Hm-hm.

 19   R.  Dans ce tableau - je ne sais pas si vous l'avez - mais en tout cas, il

 20   y a une catégorie qui est propre au CICR. Dans ce tableau vous avez CICR et

 21   vous avez le fait qu'il y a 70 informations qui proviennent du CICR

 22   uniquement.

 23   Comme vous l'avez dit, les 570 qui ont été appariés avec le recensement

 24   proviennent du CICR, mais tous ne sont pas propres au CICR. Il y en a plus

 25   de 500 sur 570 qui ont été juxtaposés, notamment avec des sources

 26   concernant l'enquête sur les ménages de Sarajevo ou les Musulmans.

 27   Donc ces 570 personnes manquantes ont été appariées avec le recensement et

 28   il a été confirmé que plus de 500 étaient mortes dans nos sources.

Page 5833

  1   Q.  C'est précisément l'hypothèse de laquelle je partais également, et ma

  2   question est de savoir si l'Accusation a informé le CICR de ces 500

  3   personnes qu'ils ont sur leur liste comme personnes manquantes et qui

  4   avaient été tuées selon d'autres sources. Alors peut-être que ça n'a

  5   absolument rien à voir avec ce qui nous intéresse ici, mais ce qui

  6   m'intéresse c'est la façon dont vous avez apparié les choses. Est-ce que

  7   c'est quelque chose que vous auriez fait ?

  8   R.  Ecoutez, je ne peux pas revenir sur ces points parce que ça ne relève

  9   pas de ce procès, mais je pense qu'il y a une coopération qui existe avec

 10   le CICR, donc vous pouvez leur poser la question.

 11   Q.  Je suis d'accord. Effectivement, nul n'est besoin de poursuivre sur ce

 12   point, mais c'est simplement une idée qui m'a traversé la tête alors que je

 13   préparais cela.

 14   Venons-en à autre chose. J'aimerais revenir sur la procédure utilisée pour

 15   identifier les tués et venons-en au rapport dans l'affaire Milosevic,

 16   Slobodan Milosevic.

 17   Si j'ai bien compris, vous avez apparié des informations provenant de

 18   différentes sources et une fois que vous avez apparié ces informations,

 19   vous avez fourni de nouvelles informations ou des conclusions que vous avez

 20   ensuite incluses dans votre rapport; est-ce que c'est exact ?

 21   R.  Non, je n'ai pas fourni d'informations nouvelles. J'ai fourni une

 22   nouvelle liste de victimes et l'information dans cette liste, que j'appelle

 23   une liste master ou une liste intégrée, c'est exactement la même chose que

 24   ce que l'on a dans les sources

 25   sous-jacentes.

 26   Q.  Venons-en maintenant aux chiffres absolus, pas aux évaluations.

 27   Alors après avoir apparié ces informations, vous avez mentionné les noms,

 28   les prénoms des personnes qui ont été tuées. Ça c'est un type d'information

Page 5834

  1   que vous avez apparié, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Ça fait partie des informations qui ont été appariées.

  3   Q.  Pour certaines sources, vous disposiez aussi d'informations très

  4   utiles, à savoir le numéro d'identification des citoyens, ce qui est très

  5   utile pour l'appariement, n'est-ce pas ?

  6   R.  Est-ce que vous parlez des JMBJ [comme interprété] ?

  7   Q.  Oui.

  8   R.  -- pour certaines sources, oui. Pour la majorité des sources dans

  9   Slobodan Milosevic, on ne disposait pas de ces chiffres JMBJ [comme

 10   interprété].

 11   Q.  Vous avez ensuite reçu des informations concernant le lieu de décès de

 12   ces individus et vous avez établi que ces personnes qui appartenaient au

 13   périmètre de votre étude avaient été tuées sur le territoire de ces six

 14   municipalités sous le contrôle de l'armée BiH, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui. Le lieu de décès faisait partie des sources et était utilisé pour

 16   l'étude principale, master.

 17   Q.  Le type d'information suivante c'était le moment du décès, n'est-ce pas

 18   ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Ensuite vous aviez aussi des informations sur la cause du décès ou de

 21   la blessure, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Enfin, peut-être que j'ai oublié quelque chose, mais je mentionne

 24   simplement ce qui est important à mes yeux, le point suivant c'était le

 25   statut de cette personne, à savoir si c'était un combattant ou un civil.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ce statut comme catégorie est corroboré par d'autres sources. Les trois

 28   sources des trois armées : BiH, VRS et HVO, ça correspond aux informations

Page 5835

  1   fournies par ces trois autres sources, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Alors, comme on l'a vu tout à l'heure, vous avez aussi utilisé, pour

  4   ces catégories, l'enquête sur les ménages de Sarajevo de 1994 qui

  5   comprenait aussi ces informations, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Il y a aussi la liste du funérarium de Bakije qui a été utilisée comme

  8   source d'information dans ces sources; est-ce exact ?

  9   R.  Oui. Mais je pense que les autorités fédérales les ont aussi utilisées

 10   dans le cadre de leurs travaux concernant le statut militaire.

 11   Q.  Vous voulez dire le bureau fédéral des statistiques ou le ministère

 12   fédéral de la Défense ?

 13   R.  Le bureau fédéral des statistiques. Mais il faudrait vérifier, je n'en

 14   suis pas tout à fait certaine. Ça n'était pas une déclaration systématique

 15   du statut militaire dans cette source. Ça n'était pas le cas.

 16   Q.  Vous avez aussi précisé dans votre rapport que - et je dois dire que

 17   cette information est acceptable à mes yeux, mais je voudrais simplement la

 18   vérifier auprès de vous - que les listes que vous avez reçues de l'armée

 19   BiH sur les soldats tués, aucune de ces listes ne contenait des

 20   informations sur le lieu de leur mort;

 21   exact ?

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   Q.  J'imagine que la source la plus fiable pour vous sur cette question du

 24   statut, quant à savoir si la personne était combattante ou civil, c'étaient

 25   les sources militaires; et j'aimerais pour l'instant parler des sources de

 26   l'armée BiH.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que je peux dire que si dans une autre source vous avez

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  1   découvert qu'une personne était combattante mais que cela ne correspondait

  2   pas au statut fourni par la liste de l'armée BiH, à ce moment-là vous

  3   changiez le statut de cette personne pour faire apparaître civil, et je

  4   parle des personnes qui ont été tuées en l'occurrence.

  5   R.  Oui, une précision toutefois. Ces listes militaires n'étaient pas

  6   utilisées pour établir la liste master en tant que telle parce que le lieu

  7   de décès n'était pas déclaré. Les listes militaires ont été utilisées pour

  8   suivre le statut des personnes qui ont été saisies dans la liste master en

  9   fonction d'autres listes utilisées pour ce projet.

 10   Ce qui était apparié à partir de la liste master avec les listes militaires

 11   c'était 80 % des correspondances, à la question statut apparaissait statut

 12   militaire, parce qu'on ne disposait pas de ces informations par

 13   correspondance.

 14   Donc on a fusionné ces listes. Le statut militaire tel qu'il a été

 15   déclaré sur la liste ABiH et pour une petite partie de personnes c'est le

 16   statut tel qu'il est déclaré dans les sources d'origine.

 17   Donc ce sont des faits importants qu'il faut préciser et qu'il faut

 18   bien comprendre.

 19   Q. Je dois vous poser des questions très simples.

 20   Si vous avez constaté compte tenu de l'enquête des ménages qui a été

 21   faite en 1994 que quelqu'un était sur la liste et que son statut était

 22   celui d'un combattant et que vous n'avez pas retrouvé le nom de cette

 23   personne sur la liste de l'ABiH, à ce moment-là vous placiez cette personne

 24   dans quel groupe dans le rapport qui a été présenté dans l'affaire

 25   Milosevic, à savoir si vous estimiez que cette personne devait être placée

 26   dans la catégorie civil ou combattant.

 27   R.  C'est un combattant. Parce que dans la source d'origine on précise que

 28   c'est un combattant.

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  1   Q.  Merci. Vous devez savoir, Madame Tabeau, qu'un combattant dans un

  2   conflit armé n'est pas seulement quelqu'un qui fait partie d'une armée, un

  3   soldat. Vous savez qu'il y a cette catégorie de combattants.

  4   R.  Oui, je suis au courant de cela. Mais comme je l'ai indiqué dans le

  5   rapport Galic, je précise que si on rapporte que quelqu'un est un soldat ou

  6   un combattant, dans ce cas on estime que cette personne aurait pu mourir en

  7   tant que combattant, autrement dit quelqu'un qui serait mort au combat.

  8   Mais en réalité, nous ne connaissons pas les circonstances particulières du

  9   décès de toutes les personnes qui figurent sous la rubrique soldats au

 10   niveau de toutes nos sources. S'il faut décider et savoir si cette personne

 11   est effectivement décédée au combat, à ce moment-là, il faut étudier les

 12   circonstances et analyser ceci au cas par cas. Ceci est impossible en

 13   raison de l'importance des chiffres.

 14   Alors ce que nous pouvons faire c'est nous pouvons prendre le statut

 15   tel qu'il figure dans le rapport et on considère à ce moment-là quelque

 16   chose que nous reprenons parce que c'est dans le rapport, mais ceci ne

 17   confirme pas pour autant que cette personne est morte au combat.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il faudrait vérifier cela, parce qu'il

 19   faut vérifier auprès de la personne qui a préparé le document d'origine.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Si cette personne est sans doute --

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui effectivement, si c'est le cas. 

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, si c'est le cas. C'est ma

 23   réponse.

 24   M. LUKIC : [interprétation]

 25   Q.  Savez-vous que des membres d'unités paramilitaires et de milice dans un

 26   conflit armé ne sont pas considérés comme étant des civils ? Est-ce que

 27   vous savez qu'il s'agit là d'une catégorie qui a été établie par les

 28   conventions de Genève ?

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  1   R.  Je ne suis pas avocat mais je peux effectivement imaginer que l'on ne

  2   tient pas compte de ces catégories-là. Ceci ne fait pas partie de mon

  3   domaine de compétence, comme je l'ai indiqué dans le rapport Galic.

  4   Q.  Oui, bien sûr. Avez-vous par hasard demandé à ce que la police de

  5   l'ABiH vous fournisse des listes de leurs membres qui ont été tués pendant

  6   le conflit ?

  7   R.  Je crois que les membres de la police sont indiqués dans les bases de

  8   données qui ont été fournies par le ministère de la Défense, il s'agit

  9   d'une des catégories. Je n'ai fait des commentaires sur ces trois bases de

 10   données, une de la VRS, une de l'ABiH et une du HVO, ces bases de données

 11   contiennent non seulement les noms des soldats mais contiennent également

 12   d'autres catégories. Des membres de la police qui sont décédés au cours du

 13   conflit. Il s'agit des membres du personnel du ministère de la Défense,

 14   ainsi que d'organes associés, et même des personnes qui faisaient partie

 15   des services de production et qui fournissaient des biens et services à

 16   l'armée.

 17   Donc il s'agit de listes très importantes et, bien sûr, ceci comporte

 18   un nombre très important de personnes qui sont mortes dans une situation

 19   qui correspond à une situation de combat. Mais il ne s'agit pas de tous les

 20   cas et on ne doit pas considérer que toutes ces personnes sont décédées

 21   dans ces conditions-là. Donc nous n'avons pas demandé à obtenir une archive

 22   séparée mais nous avons utilisé les bases de données de la police lorsque

 23   nous avons préparé notre rapport.

 24   Q.  Regardons maintenant votre premier rapport, s'il vous plaît. Nous avons

 25   déjà évoqué ce thème un peu plus tôt mais nous allons l'évoquer plus en

 26   détail maintenant.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la pièce P2325,

 28   le premier tableau, s'il vous plaît.

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  1   Q.  Qui provient du rapport Galic que vous avez préparé.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour éviter toute confusion, ce

  3   document P2325, c'est en fait le numéro qui a été attribué au rapport dans

  4   l'affaire Galic. Il ne s'agit pas de la cote qui a été donnée au cours de

  5   ce procès.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci.

  8   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  9   M. LUKIC : [interprétation] Il va falloir que j'intervienne.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- dans cette affaire, me dit-

 11   on.

 12   M. LUKIC : [interprétation]

 13   Q.  Donc il s'agit d'un tableau statistique qui fournit un aperçu des

 14   données statistiques de tous les foyers à Sarajevo en 1994. Pour ce qui est

 15   des personnes tuées vous avez établi que 1 399 civils ont été tués, et 2

 16   381 soldats ont été tués; est-ce exact ?

 17   R.  Oui. Il s'agit des chiffres minimums.

 18   Q.  Compte tenu de cette source-là ?

 19   R.  Compte tenu de cette source et ceci a trait uniquement à la période

 20   couverte par l'acte d'accusation dans l'affaire Galic.

 21   Q.  C'est exact. Lorsque vous faites concorder cela avec d'autres sources,

 22   cette période, j'entends, vous avez établi que le nombre de civils était

 23   quelque peu plus élevé que le nombre de soldats, de combattants, qui était

 24   légèrement inférieur, mais que le nombre de soldats était toujours plus

 25   important que le nombre de civils tués; c'est exact ?

 26   R.  Nous pouvons regarder les pages supplémentaires qui ont été utilisées

 27   au début de mon témoignage aujourd'hui. J'ai regardé ces chiffres --

 28   Q.  Je dois vous demander des questions parce que j'ai préparé mes

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  1   questions. Je vous demande simplement de répondre à mes questions.

  2   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que le nombre de

  3   combattants des chiffres provenant des deux sources, le nombre de

  4   combattants était supérieur au nombre de civils tués d'après ces deux

  5   sources ?

  6   Répondez par oui ou par non, s'il vous plaît.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous êtes tout à fait en droit de

  8   poser une question par rapport à la façon dont vous avez préparé vos

  9   questions. Le témoin est tout à fait en droit de répondre à la façon dont

 10   il souhaite répondre.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc elle peut tout à fait se reporter

 13   aux documents pour lui permettre de répondre à la question que vous lui

 14   avez posée.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais suivre vos

 16   consignes.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous vous souvenez de la question

 18   encore, vous pouvez y répondre.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, le nombre de civils dans le

 20   rapport fourni dans l'affaire Milosevic qui correspond à l'acte

 21   d'accusation de Perisic, je parle du nombre de civils qui est plus

 22   important que le nombre de soldats tués. Je parle de personnes tuées.

 23   Mais nous pouvons revenir au rapport Galic maintenant et nous pouvons

 24   regarder cette période de 12 mois que nous pouvons comparer avec le rapport

 25   Galic et la comparer avec le rapport Milosevic, et on peut regarder le

 26   tableau, si vous me le permettez. Dans ces cas, dans le rapport Galic le

 27   nombre de civils sera inférieur au nombre de soldats, et dans le rapport

 28   Milosevic le nombre de civils est plus important que le nombre de soldats

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  1   tués.

  2   Donc les données sont inverses, les données ne sont pas les mêmes,

  3   elles sont contraires dans l'un et l'autre rapport.

  4   M. LUKIC : [interprétation]

  5   Q.  Je suis tout à fait au courant de cela. C'est une question que je

  6   souhaitais évoquer avec vous aujourd'hui.

  7   Donc évoquons la même période de temps, la période à propos de

  8   laquelle vous avez fait vos recherches dans l'affaire Galic, et les

  9   conclusions que vous avez tirées dans le cadre de l'affaire Milosevic. Nous

 10   pourrions peut-être procéder comme suit.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Regardons quelques instants, s'il vous

 12   plaît.

 13   Est-ce que nous pouvons regarder le tableau du rapport Galic, A3.13.

 14   Ceci se trouve à la page -- un instant, s'il vous plaît.

 15   Le tableau A3.13, je me demande si vous disposez d'un exemplaire sous

 16   les yeux. Ceci se trouve dans l'annexe 3, le tableau numéro 13.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mme Carter est debout.

 18   Mme CARTER : [interprétation] Cela se trouve à la page 39 dans le système

 19   électronique du prétoire, pour information pour la Chambre et le conseil de

 20   la Défense.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 22   Q.  Je ne vais pas vous demander de faire des calculs maintenant. Mais

 23   veuillez regarder l'année 1993 et le nombre de soldats, de combattants, qui

 24   figure sur ce tableau, de combattants tués. Ceci se trouve dans la deuxième

 25   colonne.

 26   D'après vos sources, les sources que vous avez utilisées dans

 27   l'affaire Galic, en chiffres absolus, il s'agit du nombre total de

 28   combattants qui ont été tués entre le mois de janvier et le mois de

Page 5843

  1   décembre 1993, et j'ai calculé que ce chiffre correspond à 1 389 environ,

  2   ce qui devrait correspondre au chiffre total. Si vous avez une calculette

  3   et si vous souhaitez faire l'addition vous-même, je souhaite comparer ces

  4   chiffres et une catégorie identique que vous avez établie dans le rapport

  5   Milosevic, et je souhaite comparer ces données pour la même année.

  6   Ai-je raison de dire que le nombre total de combattants est ce que

  7   nous voyons dans la troisième colonne, pour la période allant du mois de

  8   janvier au mois de décembre 1993, et si nous faisons le total de tous ces

  9   chiffres, nous obtenons le nombre total de combattants tués dans l'affaire

 10   Galic; est-ce exact ?

 11   R.  En 1993, c'est exact, oui.

 12   Q.  C'est cela.

 13   R.  Je préférerais dire soldats. Cela vous convient ?

 14   Q.  Moi j'utilise le terme B/C/S.

 15   En réalité, vous avez raison. Le terme utilisé ici est le terme de

 16   soldats.

 17   Je souhaite comparer les chiffres totaux dont nous disposons ici avec le

 18   tableau du rapport Milosevic, tableau A3, où vous évoquez la même catégorie

 19   de personnes, à savoir, soldats, sauf si ce n'est que vous utilisez le

 20   terme de "combattant" ici. Donc en chiffres absolus il s'agit du même

 21   territoire et de la même période, vous indiquez que 1 150 personnes ont été

 22   tuées.

 23   R.  Je ne dispose pas de ces chiffres que vous venez de calculer, hormis le

 24   fait que j'ai fait ces calculs pour vous pour vous simplifier la tâche. Au

 25   total, le tableau que vous évoquez correspond au même mois, parce que nous

 26   avons une période qui est la même pour les deux rapports.

 27   Donc quel est votre chiffre total, 1 150 ? Ceci correspond à quelle année,

 28   1993 ? Toute l'année 1993 ?

Page 5844

  1   R.  Oui, c'est cela en fait, ça correspond à cette période-là. Mais lorsque

  2   j'ai fait le total de tous les chiffres qui se trouvent dans le tableau

  3   A3.13 sont les éléments inconnus, le nombre de combattants tués entre les

  4   mois de janvier et décembre 1993, le chiffre que j'ai obtenu est le chiffre

  5   1 389. Je pense ne pas m'être trompée, mais ce chiffre est plus élevé que

  6   le chiffre que vous avez présenté vous-même, même si vous regardez la

  7   répartition par mois. Vous constatez que ce chiffre est plus élevé par mois

  8   dans le tableau que vous avez préparé dans l'affaire Milosevic.

  9   R.  C'est la raison pour laquelle je souhaite vous montrer ce tableau dans

 10   Perisic où on peut voir ces données par mois, parce qu'il y a des éléments

 11   qui sont en commun. Le nombre de soldats est plus important de façon

 12   générale que le nombre de soldats cité dans le rapport Milosevic. C'est ce

 13   que vous me dites, et je suis d'accord avec vous.

 14   Je souhaite simplement ajouter que les chiffres qui correspondent au

 15   rapport Galic sont les chiffres qui proviennent du statut des personnes, il

 16   s'agit d'une définition externe, il ne s'agit pas du rapport à proprement

 17   parler préparé dans l'affaire Galic. Il s'agit de deux définitions

 18   différentes.

 19   Q.  Vous m'avez dit il y a un instant que lorsque le statut de la personne

 20   est cité, lorsque le statut est différent, vous acceptez le statut qui est

 21   donné dans le premier rapport, dans la source. Pourquoi alors le statut qui

 22   a été utilisé dans l'enquête sur les ménages -- autrement dit, je vais vous

 23   poser cette question-ci : dans l'affaire Milosevic, vous avez utilisé

 24   l'enquête des ménages qui a été faite en 1994; c'est exact ?

 25   R.  Oui. Mais je peux déjà répondre à votre question, enquête des ménages

 26   de Sarajevo.

 27   Q.  Avez-vous fait figurer toutes les personnes qui avaient été citées dans

 28   cette enquête, tous les combattants qui figuraient dans cette enquête ?

Page 5845

  1   Est-ce que vous avez utilisé tous ces chiffres dans le rapport Milosevic ?

  2   R.  Pour ce qui est des données restantes pour lesquelles il n'y avait pas

  3   de concordance.

  4   Pour ce qui est du statut des différentes personnes dans le rapport

  5   Galic, toutes les statistiques des différents tableaux dans le rapport

  6   Galic présentent le statut qui a été indiqué dans l'enquête des ménages de

  7   Sarajevo. L'autre définition qui est montrée est montrée dans le tableau

  8   qui est un résumé, le tableau numéro 1. Il s'agit d'un autre tableau,

  9   tableau numéro 3, et il n'y a pas d'autre tableau. Il s'agit de fournir les

 10   statistiques qui sont des résumés et qui évoquent le statut militaire des

 11   personnes qui ont répondu à l'enquête des ménages de Sarajevo. Bien sûr,

 12   ceci a une incidence sur le nombre de civils. En fait, vous faites une

 13   conclusion. Il s'agit d'une définition de statut qui est différente dans

 14   ces deux rapports, donc on ne peut pas les comparer directement.

 15   Q.  Nous nous éloignons, je crois, l'un de l'autre.

 16   Ma question était celle-ci, c'était une question très simple, Madame

 17   Tabeau, essayez de répondre à ma question, s'il vous plaît, et ce, de façon

 18   simple. Lorsque je suis un avocat, je ne comprends pas parfaitement votre

 19   rapport d'expert.

 20   Le statut de combattant ou le statut de soldat était quelque chose

 21   qui a été préparé pour le rapport Galic et correspond à une période donnée

 22   à un endroit donné. Vous avez établi qu'un nombre plus important de

 23   combattants a été tué au cours de cette période-là que le nombre de civils

 24   tués au cours de cette période-là; c'est exact ?

 25   R.  Le statut précisé dans le rapport Galic est un statut qui a été donné

 26   par les personnes qui ont répondu à l'enquête des ménages de Sarajevo. Donc

 27   si vous comparez ceci avec une définition externe du mot statut, vous

 28   constaterez que d'après cette définition interne il y a davantage de

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  1   soldats.

  2   Q.  Voilà, c'était ça ma question. D'après la source que vous avez utilisée

  3   dans l'affaire Galic, il y avait un nombre plus important de soldats qui a

  4   été tué, un nombre plus important que de civils pour la période en

  5   question.

  6   R.  Par rapport au rapport de Slobodan Milosevic, oui.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois que nous allons faire une

  8   pause maintenant et revenir à midi trente sur ces paroles.

  9   --- L'audience est suspendue à 12 heures 02.

 10   --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic.

 12   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Est-ce que nous pourrons mettre à l'écran le deuxième rapport de Mme

 14   Tabeau. Il s'agit de la pièce P2325 et plus précisément du tableau A3.13.

 15   Le deuxième rapport. Il s'agit du rapport de l'affaire Galic. Peut-être ai-

 16   je donné un mauvais énoncé. Je suis désolé.

 17   Il s'agit du premier rapport de l'affaire Galic qui porte la cote

 18   P2325.

 19   Q.  Nous allons revenir à ce tableau pendant quelques instants, Madame

 20   Tabeau. Nous examinons actuellement la période qui va de septembre 1992 à

 21   août 1994. Il s'agit donc du rapport de l'affaire Galic.

 22   Etes-vous d'accord avec moi pour dire que pendant la période en question,

 23   pour tous les mois exception faite d'octobre 1992, plus de soldats ont été

 24   tués que de civils, d'après ce rapport ?

 25   R.  Oui, généralement, c'est le cas. Mais le mois d'octobre 1992 ne fait

 26   pas exception. Il y a d'autres cas.

 27   Q.  Oui, c'est vrai. Octobre 1992 et février 1994 également, d'après ce que

 28   je vois. Mais pour ce qui concerne les autres mois - et dans certains cas

Page 5847

  1   les chiffres sont très marquants - il y a beaucoup moins de civils que de

  2   soldats qui ont été tués dans ces municipalités ou dans ces parties de

  3   municipalités ?

  4   R.  En règle générale, c'est ce qu'on peut attendre, c'est-à-dire que moins

  5   de civils soient tués que de soldats.

  6   Q.  Voyons maintenant votre rapport. La pièce P2331, le rapport Milosevic,

  7   plus particulièrement les tableaux A3 et A4.

  8   Convenons tout d'abord que nous parlons bien du même territoire; est-ce

  9   bien exact ?

 10   R.  Pas nécessairement. Parce que les territoires qui se trouvent dans le

 11   rapport Galic se trouvent dans les lignes de front avec des parties

 12   importantes couvertes des six municipalités. Et dans le rapport Slobodan

 13   Milosevic, il y avait six municipalités au total.

 14   Donc il y a une légère différence dans les territoires couverts.

 15   Q. Bien, c'est nouveau pour moi. Donc vous nous dites que dans l'affaire

 16   Slobodan Milosevic, vous avez analysé les territoires dans les frontières

 17   des municipalités ou dans les limites des municipalités qui étaient

 18   couvertes par le recensement de population de 1991. Il s'agit donc d'un

 19   territoire plus large que le territoire couvert dans l'autre affaire ?

 20   R.  Oui, légèrement plus large. Nous avons étudié la population à partir du

 21   recensement de population de 1991 pour les deux territoires. En utilisant

 22   le système de liaison entre le rapport Galic et les municipalités couvertes

 23   par le recensement. Nous sommes en mesure d'établir que la population, dans

 24   les lignes de front, était environ 80 % de la population ayant fait l'objet

 25   du recensement. Je ne parle pas des territoires géographiques. Ce qui est

 26   important, c'est la taille de la population sur ces territoires.

 27   Q.  Je suis d'accord. Mais il y a une chose qui doit être dite clairement :

 28   la population que vous avez examinée et qui vivait sur les territoires dans

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  1   l'affaire Milosevic et la population de l'affaire Galic est de 340 000

  2   personnes. C'est bien le chiffre exact. Il s'agit là du chiffre qui se

  3   fonde sur l'enquête des ménages de 1994; est-ce bien exact ?

  4   R.  Il s'agit d'une estimation de la population.

  5   Q.  Très bien. Ce qui veut dire que nous parlons du même nombre de

  6   personnes que celui qui est estimé dans les deux rapports.

  7   R.  Je ne comprends plus. Est-ce que vous pouvez reformuler votre question.

  8   Q.  Dans l'affaire Galic, vous avez exprimé l'avis que la population était

  9   de 340 000, sur la base de 85 000 ménages ayant fait l'objet de cette

 10   enquête, c'était là la source de votre travail, sur la base du recensement

 11   de population mené en 1994. Vous avez utilisé la même taille de population

 12   dans le rapport de l'affaire Milosevic, que la population que vous avez

 13   examinée.

 14   R.  Je ne me souviens pas d'avoir parlé de la taille de la population. J'ai

 15   parlé de six municipalités dans le rapport Slobodan Milosevic. Pour ce qui

 16   est de la taille de la population, ça n'est pas 340 000, en l'occurrence,

 17   pour ces municipalités.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors quelle est la taille de la

 19   population dans ces municipalités ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation]  D'après le recensement de population de 1991

 21   ?

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, d'après le rapport Milosevic.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça n'est pas clair, parce que la population a

 24   évolué après le recensement de population de 1991. Nous avons une

 25   estimation qui est de 340 000 individus qui sont restés dans les lignes de

 26   front et on ne sait pas combien sont restés en deçà des lignes de front. En

 27   raison de la liberté de mouvement en dehors des lignes de front, on peut

 28   s'attendre à ce qu'il y ait des parties importantes de la population qui se

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  1   trouvent en dehors des lignes de front. La séparation n'est pas nette

  2   qu'elle pourrait l'être, certains sont partis très loin des conflits, ce

  3   n'est pas le cas de la population --

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup --

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] -- dans les lignes.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- de cette réponse.

  7   M. LUKIC : [interprétation]

  8   Q.  Voyons maintenant votre rapport dans l'affaire Milosevic, voyons le

  9   tableau suivant. Il s'agit des tableaux 2 et 3.

 10   Ces tableaux indiquent le nombre de combattants et de civils qui ont

 11   été victimes. Si on regarde le tableau, pour l'affaire Galic, qui couvre la

 12   période de septembre 1992 à août 1994, on s'aperçoit que tous les mois il y

 13   a plus de combattants tués que de civils, à l'exception faite de deux mois;

 14   est-ce bien exact ?

 15   Si nous examinons les mêmes mois pendant la même période dans ces

 16   deux tableaux, pour chaque mois, si on fait une comparaison entre septembre

 17   1992 et la même période, on s'aperçoit qu'il y a plus de civils qui sont

 18   notés ici que de combattants dans vos listes; est-ce bien exact ?

 19   R.  J'ai déjà donné mon accord sur ce point. Le nombre de soldats est plus

 20   important dans le rapport Slobodan Milosevic. Désolée. Il règne une

 21   certaine confusion dans mon esprit. Je vais y réfléchir. Non, le nombre de

 22   soldats doit être inférieur dans le rapport Milosevic que dans le rapport

 23   Galic, en général.

 24   Q.  Est-ce bien exact.

 25   R.  C'est vrai pour toutes les périodes. Est-ce que vous avez une période

 26   particulière à l'esprit.

 27   Q.  Je comparais simplement deux périodes qui sont comparables d'un rapport

 28   à l'autre.

Page 5850

  1   Donc prenons la même période dans les deux rapports, elles reflètent

  2   des catégories de statuts différentes des personnes qui sont tuées sur un

  3   même territoire; est-ce bien exact ? C'est ce que vous avez dit. Dans

  4   l'affaire Milosevic, il y a plus de civils tués pendant la même période que

  5   dans l'affaire Galic.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Même si vous avez dit il y a quelques instants que vos sources

  8   d'information établissaient qu'une personne pouvait être un combattant ou

  9   un soldat respectivement, vous avez dit que vous allez vous en tenir à

 10   cette catégorisation; est-ce bien exact ?

 11   R.  Dans l'affaire Slobodan Milosevic, il s'agit des listes militaires qui

 12   constituent les sources principales pour le statut militaire. Ça c'est pour

 13   le rapport de Slobodan Milosevic.

 14   Est-ce que cela répond à votre question ?

 15   Q.  Ce qui veut dire que dans l'affaire Slobodan Milosevic, votre enquête

 16   sur les ménages de 1994 où les gens sont caractérisés comme des soldats,

 17   vous n'avez pas compté les soldats sauf s'ils étaient mentionnés dans le

 18   rapport de l'ABiH. Je parle là du rapport de 1995. Au lieu de cela, vous

 19   avez réduit le nombre de soldats par rapport au nombre de civils.

 20   R.  Non, nous avons déjà eu une longue discussion sur la façon dont ça a

 21   été fait dans le rapport Slobodan Milosevic. Pour les rapports qui sont

 22   comparés, nous avons pris les statuts militaires tels qu'ils existaient

 23   dans les listes militaires.

 24   Pour le reste, ça a été rapporté comme dans la source originale. En

 25   fait, il y a une hiérarchie de sources utilisées. La plupart des archives

 26   ont été utilisées à partir de la base de données de l'autorité statistique

 27   fédérale.

 28   Q.  [hors micro]

Page 5851

  1   R.  On ne peut pas comparer ces sources comme si elles étaient comparables

  2   en tous points, elles ne le sont pas. D'un côté, nous avons un rapport où

  3   il y a une seule source qui est utilisée, l'enquête sur les ménages, et

  4   dans un autre cas, on a plusieurs sources qui sont utilisées. Bien entendu,

  5   cela donne des différences à l'arrivée, qu'on le veuille ou non.

  6   Alors il y a des différences dans le statut militaire des sources. Pour

  7   pouvoir venir à bout de ces différences, on a utilisé une définition

  8   cohérente du statut militaire, c'est celui que l'on trouve dans les listes

  9   militaires. Donc c'est ce que nous avons fait. C'est une définition

 10   différente du statut que la définition qui est utilisée dans l'enquête sur

 11   les ménages. En plus de cela, le nombre des sources était plus important.

 12   C'est également une autre source de divergence dans les statistiques qui

 13   sont produites in fine, et il y a une légère différence en ce qui concerne

 14   le territoire couvert. Donc il est impossible de procéder à une comparaison

 15   directe de ces résultats.

 16   Q.  Madame, une question simple : dans l'affaire Slobodan Milosevic,

 17   n'avez-vous pas tenu compte des sources qui donnaient d'une personne une

 18   définition de soldat lorsque --

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- Madame Carter.

 20   Mme CARTER : [interprétation] On a déjà posé cette question et on y a déjà

 21   répondu plusieurs fois.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Lukic.

 23   M. LUKIC : [interprétation] J'ai peut-être posé la question plusieurs fois,

 24   mais je ne pense pas avoir eu de réponse à cette question.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez une réponse, Monsieur.

 26   M. LUKIC : [interprétation] J'ai déjà eu cette réponse.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le témoin a dit que si la source

 28   catégorisait la personne comme un soldat, elle l'a gardée comme un soldat.

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  1   M. LUKIC : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La personne vous a dit que la

  3   raison pour laquelle il y avait une différence entre la liste de l'affaire

  4   Galic et la liste de l'affaire Milosevic, c'est qu'il y a plusieurs sources

  5   de différences, je ne m'en souviens pas toutes. Mais, par exemple, il y a

  6   des personnes qui se sont déclarées comme étant soldats qui ne l'étaient

  7   pas, donc il y a surdéclaration; deuxièmement, dans la liste Milosevic, ils

  8   ont utilisé les listes militaires et non pas les déclarations faites par

  9   les personnes approchées. Elle a dit ensuite que dans le rapport Galic ils

 10   ont procédé municipalité par municipalité, il y en avait six au total. Dans

 11   le rapport Milosevic, ils ont couvert toutes les municipalités comme s'il

 12   s'agissait d'un seul ensemble, donc ça faisait un territoire légèrement

 13   plus important que les municipalités couvertes les unes après les autres

 14   dans le rapport Galic.

 15   Voilà pourquoi le témoin a dit - je vois que vous faites des signes

 16   de dénégation. Nous pourrons examiner ensuite ce qui est dit dans la

 17   transcription.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Non, je suis tout à fait avec votre

 19   interprétation des mots prononcés par le témoin, mais je n'ai pas eu de

 20   réponse qui soit suffisamment satisfaisante aux fins de mon analyse. Mais

 21   de toute évidence, je ne peux pas obtenir de réponse qui serait utile pour

 22   la Chambre de première instance, mais visiblement c'est mon problème.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

 24   Oui, Madame Carter.

 25   Mme CARTER : [interprétation] J'aimerais faire référence à un document du

 26   conseil de la Défense à la page 70, qui commence à la ligne 11, qui indique

 27   qu'il y quelque chose qui a été dit très clairement là-dessus à partir du

 28   moment où une personne dans la liste de l'enquête sur le ménage avait fait

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  1   une déclaration, ce statut serait maintenu.

  2   M. LUKIC : [interprétation] Très bien.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je ajouter quelque chose ?

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Madame. Est-ce qu'il a bien

  5   interprété ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

  7   Je voudrais dire que le but ce n'est pas simplement de comparer

  8   directement les statistiques de ces deux rapports, simplement il faut voir

  9   si les rapports sont complémentaires. Je crois que le rapport Galic est un

 10   rapport important, en effet, il montre un nombre minimum indiscutable de

 11   victimes et on voit une répartition, on voit de quoi ils ont été victimes,

 12   de pilonnage, de tireurs embusqués, on voit la répartition parfaite, la

 13   répartition par âge, combien y avait-il de femmes, on voit combien de

 14   personnes âgées ont été tuées. On voit quelles sont les municipalités qui

 15   ont été touchées, où les activités étaient les plus intenses.

 16   C'est un point de départ très important. Ensuite il y a le rapport

 17   Slobodan Milosevic qui a une portée vraiment générale, qui nous donne que

 18   des chiffres ou des statistiques généraux, mais si vous lisez ces chiffres

 19   avec les détails très spécifiques qui émanent du rapport Galic, à ce

 20   moment-là, je crois que ça complète vraiment la description de la

 21   situation. Il y a une possibilité d'extrapolation qui est permise d'un

 22   rapport à l'autre, mais on ne doit pas pouvoir procéder à une comparaison

 23   point par point de tous les détails de ces rapports, ce n'est pas

 24   l'objectif.

 25   M. LUKIC : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, m'expliquer où il y a une

 27   différence de catégorisation, dans un rapport, le nombre de civils tués est

 28   bien supérieur à celui des soldats, parfois c'est le contraire. Donc

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  1   qu'est-ce qui a pu causer de telles différences dans les résultats de votre

  2   recherche ? Parce que nous avons, pour la même période, dans les deux

  3   rapports, des données statistiques très différentes. Quelles en sont les

  4   raisons ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Carter.

  6   Mme CARTER : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas que le

  7   témoin réponde à cette question. Elle a déjà été posée. On y a déjà

  8   répondu.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'essayais d'expliquer certaines des

 10   raisons, mais je crois que vous avez parlé au témoin.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Il y a quelques problèmes, Monsieur le

 12   Président, parce que je ne comprends pas. Le témoin a expliqué que les

 13   territoires couverts étaient différents. Cela c'est mon problème, je

 14   pensais que les territoires, et le cadre temporel y compris, étaient les

 15   mêmes d'un rapport à l'autre, mais je comprends maintenant que la

 16   catégorisation est différente. Mme Tabeau dit que les deux rapports peuvent

 17   être compris comme étant complémentaires, hors ils donnent une peinture

 18   tout à fait différente des événements.

 19   Mais si c'est clair dans votre esprit, nous pouvons poursuivre.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas clair dans mon esprit,

 21   mais en tout cas nous avons des explications. Mme Tabeau nous a exposé ce

 22   qui motivait les différences entre les deux rapports, elle l'a fait depuis

 23   ce matin, elle a dit, en particulier, en plus de ce que je vous ai déjà

 24   dit, que dans la liste Slobodan Milosevic, il y avait une multiplicité de

 25   sources d'information, alors que pour ce qui est de liste Galic, c'est la

 26   source de l'enquête sur les ménages, c'est cette source qui est utilisée.

 27   Dans la liste de l'affaire Galic, elle a mentionné les périodes qui

 28   commençaient, je crois, en 1992, mais ça c'était pendant l'interrogatoire

Page 5856

  1   principal. Mais dans la liste Milosevic, c'était pour l'ensemble de la

  2   période de la guerre, c'était toute cette période qui était couverte.

  3   Voilà les facteurs qui expliquent qu'il y ait de légères différences.

  4   Je ne sais pas dans quelles mesures cela a une incidence importante, mais

  5   en tout cas, ce qu'elle vient de vous expliquer, il y a quelques instants,

  6   c'est que la liste Galic catégorise en fonction de l'âge, du sexe, du

  7   statut, des individus --

  8   M. LUKIC : [interprétation] Statut.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- alors que l'on ne donne que des

 10   données générales dans l'autre liste. On ne vous indique pas le nombre

 11   d'enfants, de femmes, d'hommes, de personnes âgées, et cetera. C'est --

 12   M. LUKIC : [interprétation] Très bien.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- ce que j'ai compris jusque là

 14   aujourd'hui.

 15   M. LUKIC : [interprétation] D'accord.

 16   Q.  Alors autre question. Madame Tabeau, dans votre deuxième rapport,

 17   voyons maintenant le tableau 1A et 1B. C'est au tout début de votre

 18   rapport.

 19   M. LUKIC : [interprétation] C'est la page 2 de la version en B/C/S et en

 20   anglais, c'est également la page 2.

 21   Q.  Nous avons là l'essentiel de vos conclusions, je vais vérifier si j'ai

 22   bien compris. Dans le tableau A1, vous vous exprimez en nombre absolu, vous

 23   donnez le nombre des tués. De 1992 à 1995, vous dites que 3 686 soldats ont

 24   été tués et vous dites que plus de

 25   3 000 civils ont été tués et qu'il s'agit là des conséquences directes de

 26   la guerre.

 27   Alors il s'agit là de nombres absolus qui concordent ?

 28   R.  Je crois que le nombre de civils tués est de 4 015, non pas de 3 000.

Page 5857

  1   Q.  Oui, effectivement. C'est 4 015 civils et 3 686 soldats tués, c'est ce

  2   que dit le tableau. Voilà donc les chiffres que vous avez fait concorder à

  3   partir de différentes sources ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Ensuite au tableau 1B, vous avez travaillé avec des catégories

  6   estimées. Vous avez augmenté les chiffres de 24 %. C'est le nombre estimé

  7   de victimes, à la fois chez les militaires et chez les civils.

  8   R.  C'est exact.

  9   Q.  Ce pourcentage de 23 %, vous l'avez appliqué à la population des six

 10   municipalités, n'est-ce pas ?

 11   R.  Aux victimes de ces territoires. Oui, donc aux victimes, aux victimes

 12   de ces territoires.

 13   Q.  Très bien.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Voilà, j'en ai terminé avec ce tableau.

 15   Q.  On est donc d'accord. Le premier tableau comprend les chiffres absolus

 16   et le second, des estimations. Et ça représente, comme vous le dites dans

 17   vos conclusions, ça veut dire donc que c'est une déduction et vous

 18   expliquez comment vous en arrivez à cette déduction.

 19   R.  D'abord, il y a les chiffres observés, absolus, ensuite il y a des

 20   estimations. 1B, ce sont des estimations ?

 21   R.  Absolument, c'est exact.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si 1B est une estimation et 1A est des

 23   chiffres absolus, pourquoi est-ce que vous dites 1B corrigé ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que c'est à cause de la méthode

 25   d'estimation, c'est une question de correction de données. Ça n'a aucun

 26   sens spécifique. C'est un terme assez malheureux, on devrait dire estimé

 27   d'ailleurs, je m'en excuse.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est très bien.

Page 5858

  1   M. LUKIC : [interprétation]

  2   Q.  Une question d'ordre général qui découle de ce que vous nous avez

  3   montré aujourd'hui lorsqu'on analyse la période suivant l'acte d'accusation

  4   de M. Perisic.

  5   Si l'on se penche d'un point de vue chronologique sur le nombre de

  6   victimes, ce chiffre, d'une manière générale, a baissé depuis 1992 de façon

  7   forte, une baisse forte en 1992. Pendant les trois mois du printemps, il a

  8   réaugmenté en 1995, ensuite il a baissé encore.

  9   Mais d'une manière générale, il augmente encore. Mais d'une manière

 10   générale, ça montre que le nombre de victimes, quel que soit leur statut, a

 11   baissé depuis 1992 lorsque le conflit a commencé, et ce, jusqu'à la fin de

 12   la guerre ?

 13   R.  Non, je ne suis pas d'accord. J'ai des informations sur ce point. J'ai

 14   notamment les pièces qui ont été fournies ce matin dans le cadre de cette

 15   déposition. Vous avez le nombre de tués à la première page couvrant toute

 16   la période. On peut d'ailleurs regarder ce tableau sur le rétroprojecteur

 17   si vous le souhaitez.

 18   Q.  Oui, si l'on pouvait effectivement le faire apparaître au

 19   rétroprojecteur. J'aimerais que l'on fasse donc apparaître le tableau 1 au

 20   rétroprojecteur.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Pardonnez-moi.

 22   Q.  Il s'agit du tableau 1 qui apparaît en rouge, qui montre le calcul de

 23   mortalité chez les civils et chez les combattants.

 24   Ce que l'on voit, c'est qu'il y a une augmentation au début 1992

 25   jusqu'en juin, ensuite il y a des variations mais de manière générale, ça

 26   décroît. Et en vert, on voit la période couverte par l'acte d'accusation de

 27   M. Perisic et si l'on regarde cette période jusqu'en 1995, est-ce que vous

 28   êtes d'accord avec moi pour dire que sur cette période, d'une manière

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  1   générale ou pour dire en tout cas que le nombre de victimes, d'une manière

  2   générale sur cette période est largement en dessous de ce qu'il était, en

  3   deçà de ce qu'il était en août 1995 ?

  4   R.  Oui, absolument. Toutefois, il y a des hausses de temps à autres. On le

  5   voit notamment en octobre 1993.

  6   Q.  Oui, on peut probablement regarder ce tableau pour vérifier tout cela.

  7   C'est peut-être la solution la plus simple, parce que c'est comme ça

  8   que j'ai préparé cet interrogatoire. Si l'on regarde chacune de ces

  9   augmentations sur cette période, bien, on se rend compte que l'augmentation

 10   la plus importante est en deçà ou au même niveau que les hausses ou que les

 11   points hauts que l'on avait sur la période précédente; c'est exact, oui ?

 12   R.  Oui, c'est exact.

 13   Q.  Sur ce tableau, on voit la période au printemps 1995, entre mai et août

 14   1995 donc, on voit qu'il y a une augmentation du nombre de victimes chez

 15   les civils et chez les militaires. Et je pense que vous l'avez souligné

 16   dans votre rapport. Vous avez dit que c'était une période au cours de

 17   laquelle il y avait eu une augmentation très importante par rapport aux

 18   périodes précédentes en termes de nombre de victimes, et cela,

 19   effectivement, apparaît sur les tableaux A3 et A4.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Je vais vous poser une question maintenant. Alors, ça ne relève pas de

 22   votre expertise directement, mais savez-vous qu'à l'époque il y a eu une

 23   offensive très importante de l'ABiH qui a été lancée en mai et qui a

 24   continué pendant tout le mois de mai et jusqu'en août 1995 au moment des

 25   frappes aériennes de l'OTAN ?

 26   R.  Oui, c'est possible.

 27   Q.  Et on peut donc en tirer la conclusion suivante : les victimes, quel

 28   que soit leur statut, bien, il y a un lien entre ces victimes et le conflit

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  1   en cours sur le terrain, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je n'ai pas étudié les causes de ces tendances. Il doit sûrement y

  3   avoir une corrélation, un lien entre les combats et le nombre de victimes.

  4   Cela ne souffre pas le moindre doute, mais je n'ai pas étudié ces causes,

  5   notamment les actions militaires des Etats. Donc je ne suis pas en mesure

  6   de répondre à cette question.

  7   Q.  Fort bien. C'est logique. J'aimerais donc que l'on regarde une autre

  8   analyse où apparaissent les blessés. C'est mentionné dans le premier

  9   rapport parce que ça ne relève pas du second rapport.

 10   M. LUKIC : [interprétation] Dans ce tableau, annexe 4, table 9. Je pense

 11   que c'est page 91, mais je ne sais pas si c'est la même page sur le

 12   prétoire électronique. Il s'agit peut-être de la page 88, je crois que

 13   c'est ça.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la page 88 [comme interprété], je crois.

 15   M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais simplement vérifier la page. C'est

 16   le premier rapport, tableau A4.9.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A4, page 9. A4.9, page 91.

 18   M. LUKIC : [interprétation]

 19   Q.  On parlait tout à l'heure, Madame Tabeau, du fait que la seule source

 20   dont vous disposiez pour les blessés et que vous avez analysé uniquement

 21   dans le cadre du rapport Galic, c'était les informations que vous aviez

 22   reçues ou que vous tiriez d'une étude ou d'un recensement d'une enquête sur

 23   les ménages, à savoir que c'était la seule source qui permettait d'obtenir

 24   des informations sur les blessés; c'est bien cela ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Une précision, pour vérifier que j'ai bien compris cette catégorie. Ce

 27   que vous nous dites ici - et c'est intéressant - c'est que sur cette

 28   période étudiée, il y a 178 femmes militaires qui ont été blessées, dont

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  1   deux ont été blessées de façon [inaudible], sans prendre part au conflit.

  2   Mais en tout cas il y a eu 178 femmes ou 176 blessés, dans le cadre des

  3   combats; est-ce exact ? Cent soixante-seize femmes blessées au combat pour

  4   cette période qui va de 1992 à 1994; est-ce exact ?

  5   R.  Oui, le nombre de femmes est 178, 178, et il s'agit de femmes

  6   militaires, militaires blessées, absolument. C'est une autodéclaration.

  7   Q.  Oui, oui. Oui, oui, absolument, ça ne fait pas le moindre doute. C'est

  8   effectivement les chiffres dont on dispose dans cette enquête sur les

  9   ménages.

 10   Dans ce même rapport, il y a un total de 7 594 hommes blessés, et je vois

 11   aussi dans l'avant-dernière colonne qu'il y a des accidents qui ne sont pas

 12   liés au conflit, mais les autres blessures déclarées étaient liées au

 13   conflit, au combat directement; est-ce exact ?

 14   R.  Je crois qu'il y a 26 [comme interprété] cas d'hommes blessés de

 15   manière accidentelle ou autre, y compris des blessures auto-infligées. Mais

 16   je pense qu'il est très difficile de décider si un accident est lié au

 17   combat, à la guerre ou pas. Dans l'enquête sur les ménages, il y a un

 18   certain nombre d'accidents qui sont déclarés ou qui apparaissent comme des

 19   explosions. Les accidents peuvent arriver dans la rue. Ça peut être un

 20   accident de la circulation, tout simplement parce que quelqu'un grille un

 21   feu, et cetera. Donc à la lumière des libellés, si ces accidents étaient

 22   motivés, bien -- bon, maintenant on voit bien que personne n'a tué ces

 23   gens, mais j'en ai tenu compte parmi les cas liés à la guerre, toutefois.

 24   Q.  Oui. Et ce que vous venez de nous dire, je pense que vous l'avez

 25   expliqué pendant votre déposition sur Galic, mais ce n'est qu'une

 26   hypothèse, et ce dont on parle ici ce sont de chiffres, et votre travail

 27   c'était de fournir des informations à partir de ces chiffres et non pas de

 28   déterminer si les blessures étaient liées, étaient des dommages collatéraux

Page 5862

  1   ou des conséquences collatérales ou alors étaient liées directement au

  2   conflit, parce que ce serait pure spéculation et ce n'est pas votre

  3   travail.

  4   R.  Oui, absolument, c'est vrai que je n'ai absolument pas essayé de

  5   distinguer cela. Toutefois, il faut bien voir que dans cette enquête sur

  6   les ménages, les personnes blessées sont déclarées séparément. Toutes ces

  7   personnes, ce sont des accidents qui apparaissent dans ce tableau des

  8   personnes blessées qui sont déclarées séparément, en cas de mort naturelle.

  9   Donc j'imagine, j'imagine que j'ai bien fait les choses et que je n'ai pas

 10   mélangé les choses, puisque j'ai écarté les morts naturelles des personnes

 11   qui ont été tuées. Et pour les personnes blessées, bien, là encore, les

 12   déclarations étaient séparées. Donc j'ai présenté les données de l'étude

 13   comme elles avaient été présentées. C'est ce que j'ai repris ici.

 14   Q.  Fort bien. J'aimerais vous présenter quelques conclusions à la lumière

 15   de ce que j'ai entendu aujourd'hui ou de ce que j'ai lu dans votre rapport.

 16   Tout d'abord, vous considérez que dans ces deux rapports, il n'y a

 17   rien qui doit être changé. A votre avis, ces rapports sont précisément

 18   précis, ils ont été bien rédigés, vous êtes satisfaite de la méthodologie

 19   que vous avez appliquée pour ces deux rapports ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et votre objectif c'était, à la lumière de différentes sources, de

 22   déterminer le nombre de victimes civiles sur le territoire contrôlé par

 23   l'armée BiH. Par "victimes," j'entends victimes mortes et décédées, et des

 24   personnes blessées.

 25   R.  Bien, oui, l'objectif c'était de quantifier le nombre de personnes

 26   blessées ou tuées, oui c'est ça, absolument, c'était ça l'objectif

 27   principal. Puis, il s'agissait aussi de revenir sur un certain nombre de

 28   détails concernant ces chiffres.

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  1   Q.  Lorsque vous avez fixé le statut de ces personnes, vous avez utilisé

  2   différentes sources, et chacune de ces sources était utilisée pour chacun

  3   de ces rapports pour déterminer le statut de ces personnes, pour savoir si

  4   c'étaient des civils ou des combattants ou des militaires ?

  5   R.  Pour Galic, il y avait les autodéclarations, ça je l'ai utilisé, comme

  6   je l'ai dit. Puis dans l'autre rapport, Slobodan Milosevic a utilisé les

  7   listes militaires avec le statut militaire qui y apparaissait d'emblée.

  8   Q.  Dans votre rapport Milosevic, vous avez également utilisé les

  9   autodéclarations dans l'enquête sur les ménages comme source de votre

 10   travail ?

 11   R.  Oui, pour une petite partie des informations qui n'avaient pas été

 12   corrélées. C'est ça, pour les informations qui n'avaient pas été corrélées

 13   lorsqu'il n'y a pas de correspondance. Toutefois, pour une majorité des

 14   informations, ça provient des listes militaires.

 15   Q.  J'en reviens à ce que je n'ai pas encore toujours pas bien compris.

 16   Dans l'affaire Milosevic, est-ce que vous avez utilisé cette enquête sur

 17   les ménages et les autodéclarations pour le statut ? Oui ou non ? Et je

 18   suis désolé, encore peut-être ne suis-je pas tout à fait clair, mais est-ce

 19   que vous avez utilisé ce rapport dans l'affaire Milosevic pour les cas sans

 20   correspondance ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Donc vous avez utilisé ce statut que les gens avaient rempli eux-mêmes

 23   et le statut comme statut dans votre rapport ?

 24   R.  Je ne sais que vous répondre, parce que votre problème c'est que vous

 25   ne comprenez pas bien comment l'on procède à la macroanalyse des données.

 26   Donc il est possible d'attribuer une telle ou telle valeur à 80 % de vos

 27   données, et cette valeur proviendra des listes militaires. Puis il y aura

 28   20 % d'informations complémentaires auxquelles vous n'attribuez pas de

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  1   "value," mais vous pouvez utiliser la valeur qui existe dans les sources.

  2   C'est ça ma réponse, c'est précisément ce que j'ai fait.

  3   Q.  Vous avez donc utilisé l'enquête sur les ménages lorsque vous avez

  4   décrit le statut ou, soyons précis, vous avez utilisé l'enquête sur des

  5   ménages de 1994 pour l'affaire Milosevic pour déterminer le statut des

  6   victimes. Oui ou non ?

  7   R.  Oui, pour une petite partie des personnes.

  8   Q.  Merci, Madame Tabeau. Merci.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je n'ai pas

 10   d'autres questions.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

 12   Madame Carter.

 13   Mme CARTER : [interprétation] Oui, j'ai quelques questions.

 14   Nouvel interrogatoire par Mme Carter : 

 15   Q.  [interprétation] Dans les tableaux que vous nous avez fournis

 16   aujourd'hui, à la page 2, vous nous avez parlé des doublons ou des

 17   juxtapositions entre le rapport Galic et le rapport Slobodan Milosevic.

 18   Pour préciser les choses et pour être certain de ce dont on parle --

 19   R.  Oui, absolument.

 20   Q.  La différence entre les militaires, c'est 27. Il y a 27 militaires de

 21   moins dans le rapport Milosevic que dans le rapport Galic; est-ce que c'est

 22   exact ?

 23   R.  Oui, c'est exact. C'est pour les 12 mois qui sont comparables entre ces

 24   deux rapports.

 25   Q.  Vous avez comparé, vous avez dit qu'il y avait 151 civils de plus dans

 26   le rapport Milosevic; est-ce exact ?

 27   R.  Oui, je crois que le chiffre c'est 158 [comme interprété], 158 civils

 28   de plus.

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  1   Q.  Oui, absolument, absolument je me suis trompé. Donc on maintient ces 27

  2   militaires du rapport Galic, donc il y a toujours un gain net de 151

  3   civils; est-ce que c'est exact?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Au début des questions de la Défense, à la page 25, ligne 14, il est

  6   dit que : "Si dans certaines parties, certains commentaires de votre

  7   rapport n'étaient pas acceptés par le Tribunal, est-ce que vous seriez

  8   disposée à les corriger, à les présenter de façon différente ou à utiliser

  9   une méthode de calcul différente ?"

 10   A ce moment-là, vous avez répondu que vous aviez eu l'occasion de

 11   lire une partie des jugements qui avaient été utilisés dans votre

 12   déposition. Et si je vous disais que dans le cadre de l'affaire Galic, au

 13   paragraphe 581, qui a été reconnu comme étant une preuve dans le cadre de

 14   cette affaire :

 15   "Les conclusions principales du rapport Tabeau étaient étayées par

 16   d'autres preuves apparaissant dans les travaux, y compris des pièces

 17   versées par la Défense et qui montrent qu'il y a eu un conflit à Sarajevo

 18   qui a entraîné la mort ou la blessure d'un nombre important de civils. La

 19   Chambre de première instance reconnaît que le rapport présente des chiffres

 20   minimums venant de six municipalités. En tenant compte de ses limites, la

 21   Chambre considère qu'il ne fait aucun doute qu'il y a plusieurs centaines

 22   de civils qui ont été tués et des milliers qui ont été blessés dans les

 23   zones contrôlées par l'ABiH concernant la période couverte par l'acte

 24   d'accusation."

 25   Est-ce que vous avez quelque chose à dire sur ce point ?

 26   R.  Oui. Ce sont des chiffres minimums.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic.

 28   M. LUKIC : [interprétation] Ma question visait un autre point. Ma question

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  1   était de savoir s'il y avait une situation dans laquelle une Chambre

  2   n'acceptait pas la position de Mme Tabeau, alors que Mme Carter nous parle

  3   maintenant de points qui ont été acceptés par la Chambre. Donc je pense que

  4   Mme Carter est en train de poser des questions qui ne correspondent pas à

  5   mon contre-interrogatoire. Je n'ai pas d'objection à ce qu'il y ait de

  6   réponse à cette question, mais je pense que ce n'est pas pertinent.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Il y a une légère différence

  8   entre ce que vous nous dites maintenant et ce que vous nous avez dit

  9   lorsque vous avez contre-interrogé le témoin. La différence, c'est que

 10   maintenant vous dites : s'il y avait une situation dans laquelle la Chambre

 11   considérait ceci ou cela. Alors que lorsque vous avez contre-interrogé le

 12   témoin, c'était un fait. Ce n'était pas une supposition, à savoir qu'il y

 13   avait certaines parties du rapport qui n'étaient pas acceptées. C'est ça la

 14   différence entre ce que vous dites maintenant et ce que vous nous avez dit

 15   alors.

 16   M. LUKIC : [interprétation] Oui. C'est exactement dans ce sens que je l'ai

 17   dit.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mme Carter demande au témoin, étant

 19   donné les commentaires de la Chambre dans l'affaire Galic, s'il y avait

 20   quelque chose qui pourrait faire qu'elle ne serait pas d'accord avec ce

 21   commentaire ou s'il y avait une raison pour laquelle elle souhaiterait

 22   changer ce rapport.

 23   M. LUKIC : [interprétation] J'entends bien. J'ai bien compris ce qu'elle

 24   voulait dire, mais ma question portait sur des cas où la Chambre de

 25   première instance n'a pas accepté le rapport, et je crois que c'était là

 26   tout le sens de mon contre-interrogatoire. C'est ce que je voulais dire.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez indiqué que vous ne vous

 28   opposiez pas à la réponse de Mme Tabeau, réponse à la question posée par

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  1   Mme Carter.

  2   Je crois que vous n'êtes pas tout à fait sur la même longueur d'onde

  3   que Mme Carter. En tout cas, c'est ce que vous dites.

  4   Mme CARTER : [interprétation]

  5   Q.  Madame Tabeau, est-ce que vous souhaitez que je répète ma question ?

  6   R.  Non. Je ne changerais rien dans le rapport Galic, si ce n'est que dans

  7   le rapport suivant que j'ai présenté sur Sarajevo. J'ai essayé de donner

  8   des chiffres plus complets plutôt que ces chiffres minimum, qui étaient

  9   vraiment des chiffres minimum qui proviennent du rapport Galic. Il

 10   s'agissait justement de compléter cela, de faire quelque chose et de

 11   l'améliorer et le rapport Slobodan Milosevic est une des illustrations de

 12   cela.

 13   Q.  Merci. Dans la note en bas de page 2 081 du jugement rendu dans

 14   l'affaire Galic, la Chambre a indiqué en guise de mise en

 15   garde :

 16   "Les auteurs du rapport Tabeau ont tenté de déterminer si oui ou non il y

 17   avait corrélation entre le fait que les personnes aient été tuées et

 18   blessées, qu'ils étaient des soldats. La différence entre le fait que des

 19   soldats et des civils aient été tués ou blessés."

 20   Ceci a conclu en des termes qui n'étaient pas définitifs que les

 21   soldats étaient des victimes dû au pilonnage, et qu'il ne s'agissait pas

 22   forcément de soldats qui ont été tués ou blessés, qu'il est exact de

 23   laisser entendre que les pertes au niveau de la population avaient peut-

 24   être d'autres causes, hormis ces chiffres présentés pour les soldats qui

 25   ont été tués ou blessés.

 26   Je souhaite attirer votre attention sur le rapport Slobodan Milosevic, dans

 27   lequel vous avez indiqué que les chiffres n'étaient pas complets.

 28   Si les chiffres sont exacts, en 1994, vous avez indiqué que 279

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  1   soldats ont été tués, 349 civils ont été tués; en 1995, 307 soldats ont été

  2   tués alors que 350 civils ont été tués. Compte tenu du fait que les civils

  3   représentent un chiffre beaucoup plus important que les soldats, est-ce que

  4   vous estimez que ceci est significatif au plan statistique sur le fait que

  5   les civils aient été pris pour cibles ?

  6   R.  Ecoutez, ceci laisse entendre que le fait qu'ils aient été pris pour

  7   cibles est une éventualité. Mais il faudrait étudier ceci plus avant et

  8   examiner d'autres données plus détaillées, mois par mois. Ce que je peux

  9   faire en revanche, c'est analyser le calcul du rapport entre les civils et

 10   les soldats, ce que j'ai fait. C'est ce qui a été distribué aujourd'hui.

 11   C'est le deuxième tableau qui a été présenté aujourd'hui. On constate,

 12   après cela, qu'un certain nombre de valeurs ont été présentées, qui est

 13   précisé que le nombre de civils était très proche du nombre de soldats ou

 14   était, voire même plus élevé que le nombre de soldats tués. Ceci ne fait

 15   que confirmer ces observations générales, à savoir que les civils étaient

 16   pris pour cibles.

 17   Egalement la corrélation qui a été calculée dans l'affaire Galic, qui est

 18   comparée avec le rapport Milosevic, où on a analysé la corrélation entre

 19   les deux pour la même période, le nombre de soldats et de civils tués pour

 20   la même période montre qu'il y avait corrélation entre ces chiffres, mais

 21   la période d'observation est plus important que la période à laquelle

 22   correspond la corrélation.

 23   Donc c'est possible, mais pour le dire avec certitude, il faudrait

 24   faire des analyses complémentaires de ces données. 

 25   Mme CARTER : [interprétation] J'en ai terminé avec le témoin.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Madame Carter.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   Ceci met un terme à votre témoignage, Madame Tabeau. Je vous remercie

  2   d'être venue ici pour faire votre déposition. Je suppose que vous ne devez

  3   pas aller très loin, vous pouvez simplement retourner à votre bureau --

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] -- vous pouvez disposer.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Je vous souhaite une bonne

  7   journée.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

  9   [Le témoin se retire]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Carter.

 11   Mme CARTER : [interprétation] Je vais passer la parole à M. Thomas.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 13   M. THOMAS : [interprétation] Je vous remercie, Madame, Messieurs les Juges.

 14   Je souhaite préciser que pour la question administrative qui a été

 15   évoquée ce matin, à savoir la décision orale, que l'Accusation ne va pas

 16   déposer sa réponse. Le témoin suivant, comme je l'ai indiqué, sera entendu

 17   jeudi. Nous sommes entre vos mains maintenant. Je ne sais pas si vous

 18   souhaitez que l'on en reste là pour l'instant.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, Monsieur Thomas.

 20   La Chambre de première instance souhaite passer à huis clos partiel.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous

 22   sommes à huis clos partiel.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'audience est levée et nous reprenons

 25   le jeudi 7 mai 2009 dans le prétoire numéro I.

 26   --- L'audience est levée à 13 heures 29 et reprendra le jeudi 7 mai 2009, à

 27   9 heures 00.

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