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1 Le mardi 30 octobre 2012
2 [Audience d'appel]
3 [Audience publique]
4 [L'appelant est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
6 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez citer
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Mesdames, Messieurs les Juges.
9 Il s'agit de l'affaire IT-04-81-A, le Procureur contre Momcilo Perisic.
10 Merci, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Juges.
11 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pardonnez-moi. Est-ce que vous pouvez
12 vérifier que j'entends correctement ?
13 Monsieur Perisic, est-ce que vous pouvez suivre les débats dans une langue
14 que vous comprenez ?
15 L'APPELANT : [interprétation] Je peux suivre, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. Je vais maintenant
17 demander à avoir la présentation des parties, s'il vous plaît. Le conseil
18 de M. Perisic.
19 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Mesdames, Messieurs les Juges. Bonjour
20 à tous et à toutes dans ce prétoire et dans ce procès. Le général Perisic
21 sera représenté par moi-même, Novak Lukic; M. Gregor Guy-Smith. Nous avons
22 notre consultant juridique, M. Stéphane Bourgon; nos assistants, Boris
23 Zorko; Tina Drolec et Marlene Yahya Haage, qui est une interprète [phon].
24 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic. Du côté
25 de l'Accusation, s'il vous plaît.
26 Mme BRADY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames,
27 Messieurs les Juges. Helen Brady, représentant l'Accusation; avec Barbara
28 Goy, Elena Martin Saldago, Bronagh McKenna, et notre commis à l'affaire,
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1 Colin Mawrot.
2 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Brady.
3 M. Perisic a interjeté appel du jugement rendu par la Chambre de première
4 instance en l'espèce le 6 septembre 2011, Chambre de première numéro I.
5 D'après l'ordonnance portant au calendrier délivré le 24 septembre 2012, la
6 Chambre d'appel va entendre l'appel en l'espèce aujourd'hui. Avant que nous
7 ne commencions, je remarque que M. Perisic, le 29 octobre 2012, a déposé
8 une requête pour demander à ce qu'un conseiller juridique puisse être
9 présent pendant l'audience en appel le 30 octobre 2012, a demandé à ce que
10 M. Stéphane Bourgon puisse présenter des arguments en son nom pendant
11 l'audience en appel.
12 Après avoir examiné la requête et les annexes qui l'accompagnent, la
13 Chambre d'appel fait droit à cette requête.
14 Je vais tout d'abord résumer rapidement cet appel et la manière dont nous
15 allons procéder aujourd'hui.
16 Cette affaire porte sur la responsabilité de M. Perisic pour des crimes
17 commis par l'armée de la Republika Srpska ou VRS à Sarajevo et à Srebrenica
18 entre août 1993 et novembre 1995, et pour des crimes commis par des soldats
19 qui servaient dans l'armée serbe de Krajina, la SVK, à Zagreb en mai 1995.
20 Au cours de cette période, M. Perisic était le chef de l'état-major général
21 de la Yougoslavie ou VJ, ce qui en faisait l'officier le plus haut gradé de
22 la VJ.
23 Eu égard avec des crimes commis à Sarajevo et Srebrenica, la majorité, le
24 Juge Moloto étant en désaccord, a déclaré M. Perisic coupable d'avoir aidé
25 et encouragé les assassinats, les actes inhumains, en portant des attentes
26 graves à l'intégrité de la personne et [inaudible], ainsi que des
27 persécutions pour des raisons politiques, raciales ou religieuses, en tant
28 que crimes contre l'humanité et de meurtres et d'attaques contre des
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1 civils, en violation des lois ou coutumes de la guerre.
2 Eu égard aux crimes commis à Zagreb, la majorité, le Juge Moloto étant en
3 désaccord, a déclaré M. Perisic coupable en tant que supérieur hiérarchique
4 pour ne pas avoir empêché ses subordonnés de commettre les meurtres et
5 actes inhumains, y compris les atteintes à l'intégrité de la personne,
6 crimes contre l'humanité et pour des meurtres et attaques contre des
7 civils, violation des lois ou coutumes de la guerre.
8 La majorité, M. le Juge Moloto étant en désaccord, a condamné M. Perisic à
9 une peine unique d'emprisonnement de 27 ans.
10 M. Perisic a fait valoir 17 moyens d'appels qui contestent sa déclaration
11 de culpabilité ainsi que sa peine et demande à la Chambre d'appel d'annuler
12 ces déclarations dans leur intégralité ou subsidiairement d'ordonner une
13 réouverture du procès eu égard à des chefs d'accusation spécifiques ou de
14 réduire sa peine.
15 Au chef 1, M. Perisic conteste la conclusion de la majorité, à savoir que
16 son aide à la VRS était assimilable à une complicité par aide et
17 encouragement pour les crimes commis par les membres de la VRS. Au chef 4,
18 M. Perisic conteste la conclusion de la majorité, à savoir que les
19 objectifs stratégiques globaux de la VRS étaient de nature criminelle. Aux
20 chefs 2, 3, 5 et 6, M. Perisic conteste les conclusions de la majorité eu
21 égard à l'élément matériel de sa déclaration de culpabilité en vertu de la
22 complicité par aide et encouragement. Aux chefs 7 à 12, il conteste les
23 conclusions de la majorité eu égard à l'élément moral de la complicité ou
24 de la responsabilité par aide et encouragement. Au chef 13, M. Perisic
25 conteste les conclusions de la majorité qu'il était responsable en tant que
26 supérieur hiérarchique des auteurs des crimes commis à Zagreb. Pour finir,
27 aux chefs 14 à 17, M. Perisic conteste les conclusions de la majorité eu
28 égard à sa peine.
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1 L'Accusation répond à tous les moyens présentés par M. Perisic en appel et
2 a dit qu'ils doivent tous être rejetés. L'Accusation a répondu que j'attire
3 l'attention des parties sur les questions que les Juges de la Chambre
4 d'appel auront demandé d'examiner dans leur addendum.
5 Pendant toute la durée de l'audience, le conseil peut débattre des moyens
6 d'appel dans l'ordre qu'ils jugent convenir pendant leur présentation.
7 Cependant, j'exhorte les conseils de ne pas répéter littéralement ou de
8 résumer longuement les arguments présentés dans leurs mémoires en appel. La
9 Chambre d'appel connaît ces arguments. En outre, les parties ont
10 l'obligation de fournir des références précises aux documents à l'appui de
11 leurs arguments oraux.
12 Pour finir, je réitère que le processus en appel n'est pas un procès de
13 nouveau et les parties doivent s'abstenir de répéter leur thèse qui a été
14 soumise au procès. Les arguments doivent être circonscrits à des erreurs
15 alléguées de droit qui invalident le jugement de première instance ou
16 d'erreur de faits allégués qui ont donné lieu à une erreur judiciaire.
17 Telle qu'exposée dans l'ordonnance portant au calendrier, cette audience se
18 déroulera comme suit : nous allons tout d'abord entendre les arguments du
19 conseil représentant les intérêts de M. Perisic pendant une heure. Après
20 une pause de 20 minutes, l'Accusation répondra pendant une heure. Après une
21 pause de 20 minutes encore après cela, le conseil de M. Perisic aura 30
22 minutes pour répliquer. Pour finir, M. Perisic aura 10 minutes pour une
23 allocution personnelle facultative. Les parties présenteront leurs
24 arguments de façon précise, claire et concise. Les Juges, bien entendu,
25 peuvent intervenir à tout moment pour poser des questions ou peuvent poser
26 des questions suite aux arguments présentés par chaque partie ou à la fin
27 de l'audience.
28 Après avoir indiqué de quelle façon nous allons procéder, je souhaite
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1 inviter le conseil de M. Perisic de présenter son appel. Conseil de M.
2 Perisic, s'il vous plaît.
3 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Mesdames, Messieurs les Juges, le général Perisic a été condamné pour aide
5 et encouragement à des crimes commis par la VRS à Sarajevo et Srebrenica,
6 ainsi que pour avoir omis de punir les auteurs des crimes de pilonnages de
7 Zagreb.
8 Au tout début, je voudrais souligner l'importance particulière de l'opinion
9 dissidente du Président de cette Chambre de première instance, qui a
10 proposé que le général Perisic soit acquitté pour tous les chefs
11 d'accusation. Cette opinion ne saurait être mise de côté.
12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous patienter un peu ? Je
13 crois que ma collègue a un problème. Veuillez continuer, je vous prie.
14 Veuillez continuer, Monsieur Lukic.
15 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 La majorité de notre part a commis des erreurs de droit et de fait, la
17 raison pour laquelle nous demandons à la Chambre d'appel d'y apporter un
18 remède avec une issue qui serait la seule juste et bonne, pour ce qui est
19 de ce procès, à savoir l'acquittement du général Perisic pour tous les
20 chefs d'accusation. Nous nous tenons à la totalité des arguments que nous
21 avons présentés, aux 17 motifs d'appel. Nous allons aujourd'hui nous
22 centrer sur les questions qui nous ont été posées par les Juges de la
23 Chambre d'appel. Mais avant que de ce faire, nous voudrions souligner un
24 certain nombre de questions cruciales que nous estimons devoir être
25 examinées de façon attentive et sous multiple facettes pour ce qui est de
26 la décision relative à l'appel. Alors, Messieurs et Mesdames les Juges,
27 pour ce qui est d'un certain nombre de ces questions, ceci dépasse le cadre
28 de la procédure en appel, et se reflète sur certaines des notions cruciales
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1 de la jurisprudence de ce Tribunal, sa crédibilité, de sa place historique,
2 ainsi que de son patrimoine.
3 Alors la première de ces questions est plutôt une interprétation trop
4 grande et inacceptable de ce qui consiste en aide et encouragement quant à
5 l'établissement d'une responsabilité pénale par les soins des Juges de la
6 Chambre de première instance. Les éléments principaux de cette
7 responsabilité pour ce qui est d'aider et d'encourager ont été mis en place
8 au travers de la pratique de ce Tribunal pour constituer une digue à
9 l'imposition des normes de responsabilité stricte et d'apport d'un soutien
10 au principe fondamental de la nécessité de déterminer la responsabilité
11 individuelle. Donc la majorité de la Chambre a enfreint à ce principe et
12 commis une erreur évidente pour ce qui est de considérer qu'il n'était pas
13 indispensable de prouver l'existence d'une direction ou d'une orientation
14 concrète dans l'affaire Perisic.
15 Nous affirmons que pour déterminer la responsabilité, il doit être prouvé
16 qu'il y a eu une aide de la part de l'intéressé, et il faudrait qu'il y ait
17 une intention concrète de commettre un crime.
18 Pour ce qui est de la demande de supporter en aide, il doit y avoir une
19 contribution importante pour ce qui est de la perpétration d'un crime, cela
20 doit être prouvé comme étant une conclusion seule et unique, et ça ne peut
21 pas être remplacé par des conclusions de nature générale et les
22 suppositions comme cela a été le cas. La majorité des Juges de la Chambre
23 de première instance a commis une erreur lorsqu'elle a déterminé qu'on a
24 prouvé l'actus reus dans cette affaire en fonction de la dépendance de la
25 VRS de cette assistance par la VJ pour ce qui est de sa possibilité de
26 fonctionner en tant qu'armée. Ceci remet en question des actions
27 automatiques de l'apport d'aide pour ce qui est de la conduite d'une
28 guerre. Ceci a été l'opinion de la majorité, et ces constatations devraient
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1 être modifiées.
2 Ceci n'est pas une affaire où il s'agit d'une entreprise criminelle commune
3 avec une responsabilité pour ce qui est d'avoir apporté une aide et un
4 encouragement.
5 S'agissant de la mens rea, pour ce qui est d'aider et d'apporter un
6 encouragement, à la différence de l'entreprise criminelle commune, il est
7 indispensable de prouver que celui qui est censé avoir apporté cette aide
8 savait forcément que ses agissements allaient aider à la perpétration d'un
9 crime tel qu'énoncé à l'acte d'accusation. Et là aussi, la majorité des
10 Juges a erré parce qu'elle a omis de se pencher sur la question de savoir
11 si M. Perisic avait su que l'assistance apportée par la VJ avait constitué
12 une aide à la perpétration des crimes par la VRS à Sarajevo et à
13 Srebrenica.
14 Il est une question très importante pour ce qui est du réexamen du contrôle
15 effectif par la majorité des Juges de la Chambre, comme cela a été dit.
16 Et alors pour ce qui est de l'opinion dissidente du Juge Moloto pour
17 considérer que l'existence personnelle et mutuelle de cette relation de
18 subordination ou de supériorité hiérarchique se trouverait être nécessaire
19 à prouver, pour ce qui est de parler d'un contrôle effectif, la relation de
20 subordination ne saurait exister si le supérieur hiérarchique ou le
21 subordonné n'a aucune conviction pour ce qui est de se trouver dans une
22 telle nature de relation.
23 Pour finir, Messieurs et Mesdames les Juges, pour ce qui est de la
24 responsabilité du général Perisic, il conviendrait et il serait d'une
25 importance cruciale de se pencher sur les erreurs commises par la majorité
26 des Juges de la Chambre, lors de l'adoption des conclusions pour ce qui est
27 de la peine trop grande qui a été prononcée à son égard.
28 Je vais maintenant donner la parole à M. Guy-Smith, qui va apporter des
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1 réponses à vos questions 1 à 4, ce sera fait par M. Bourgon, et pour ce qui
2 est de la question numéro 5, je vous apporterai des arguments
3 complémentaires pour ce qui est des erreurs commises dans le prononcé de la
4 peine. Je vous remercie.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic.
6 M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
7 Mesdames, Messieurs les Juges. Je remarque que nous avons un nouvel
8 équipement qui nous permet de mieux entendre, et je crois qu'il est indiqué
9 selon l'appareil qu'il faut voter maintenant. Je crois qu'on peut voter
10 maintenant en faveur de la Défense.
11 Vous avez posé un certain nombre de questions et ce que je vais faire
12 maintenant c'est que je vais répondre directement aux questions que vous
13 nous avez posées dans l'ordre dans lequel ces questions ont été posées,
14 premièrement, comment la Chambre d'appel doit aborder la question de viser
15 précisément dans le contexte de la complicité par aide et encouragement.
16 La Chambre de première instance et la majorité a commis un certain nombre
17 d'erreurs manifestes lorsqu'elle a omis d'évoquer les conditions de la
18 notion de viser spécifiquement lorsqu'elle a pris la décision de condamner
19 le général Perisic, sa responsabilité de complicité pour aider et
20 encouragement. Et donc le préjudice est clair, si le critère correct avait
21 été appliqué, la Chambre aurait acquitté Perisic parce qu'il n'y a aucune
22 preuve de cette notion de viser précisément.
23 Viser précisément est une composante intégrale et importante de l'analyse
24 de la complicité par aide et encouragement. Retirer cette notion est
25 dangereux et s'écarte dangereusement du concept de base de la
26 responsabilité individuelle. Ce précédent, de par son absence, établit
27 quelque chose qui est peu clair et qui peut avoir des conséquences
28 importantes. Vous devriez peaufiner le libellé des décisions précédentes
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1 pour clarifier ce principe de droit qui existe depuis longtemps et qui est
2 souvent rappelé, selon lequel l'actus reus de la complicité par aide et
3 encouragement exige que deux conditions soient remplies : tout d'abord,
4 viser précisément à faciliter les crimes, et deuxièmement, avoir un effet
5 important sur la commission des crimes. Je fais une digression pour un
6 court moment parce que pour ce qui est des opinions qui ont été avancées
7 dans ce Tribunal, et au TPIR, il est très important de tenir compte de ces
8 termes utilisés de viser précisément et d'effet important. Ce n'est pas un
9 "ou", c'est un "et". Ces deux composantes doivent être réunies, et ceci est
10 prévenant dans le droit.
11 La jurisprudence qui formule cette notion de viser précisément est quelque
12 chose qui est décrit comme une aide spécifique visant précisément ou ayant
13 pour but de. Donc il s'agit de deux éléments qui doivent être pris en
14 compte lorsqu'il faut rendre une décision sur la complicité par aide ou
15 encouragement, là doit être prouvé au-delà de tout doute raisonnable pour
16 ce qui est de l'actus reus et ceci est quelque chose qui est définit de
17 façon cohérente depuis les arrêts Tadic; Delalic, paragraphe 344;
18 Kupreskic, paragraphe 248; Blaskic, 45; Simic, 85; Blagojevic, 222; Oric,
19 paragraphe 43.
20 Il s'agit d'une exception ici. C'est l'exception sur laquelle s'est
21 fondée la majorité en l'espèce, et c'est Mrksic. Dans Mrksic, la question a
22 été soulevée concernant la mens rea de la complicité par aide et
23 encouragement par omission, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Dans le
24 cas ici, ceci n'a rien à voir avec notre affaire en l'espèce. La Chambre
25 dans Mrksic a reconnu l'importance de la condition de viser précisément :
26 "Le fait qu'une omission doit," - et j'insiste sur cela - "viser
27 spécifiquement, encourager ou apporter un soutien moral à la perpétration
28 du crime fait partie intégrante de l'actus reus, de l'élément matériel, et
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1 non de l'élément moral de la complicité par aide et encouragement, mais on
2 retrouve une fois encore ici le terme 'viser'."
3 Au paragraphe 159,
4 je citerai le paragraphe 43.
5 Donc la Chambre Mrksic a compris cette condition à tous les [inaudible] de
6 cette condition de viser précisément. Par conséquent, si on se repose sur
7 le droit, le fait qu'aider était -- viser précisément a facilité un crime
8 commis doit être prouvé au-delà de tout doute raisonnable, à savoir si oui
9 ou non cela constitue un élément essentiel. Bien sûr, nous maintenons ce
10 point de vue.
11 Cependant si viser précisément n'était pas considéré comme un élément
12 essentiel en soi, cela est sous-entendu dans l'analyse. Et, par conséquent,
13 le fait de viser spécifiquement devra être prouvé au-delà de tout doute
14 raisonnable, avant de pouvoir conclure qu'un quelconque individu ait commis
15 un crime ou des crimes.
16 La majorité de la Chambre de première instance se fonde dessus à l'affaire
17 Mrksic, au paragraphe 126, et nous estimons qu'il s'agit là que la Chambre
18 s'écarte du droit applicable ou qu'il s'agit d'une erreur de droit.
19 La jurisprudence du TPI -- TPIR fourni d'autres exemples et des critères de
20 spécificité dans son analyse lorsqu'il s'agit de déterminer si l'actus reus
21 a été prouvé ou non. Et je m'excuse auprès de ceux qui parlent mieux la
22 langue que moi-même.
23 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise qu'elle ne dispose pas du document ou
24 du texte de M. Gregor Guy-Smith.
25 M. GUY-SMITH : Ntawakulilyayo, au paragraphe 214,
26 l'affaire décidée après
27 Mrksic; Rukundo, l'affaire décidée après Mrksic,
28 au paragraphe étaient au
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1 paragraphe 74, Kalimanzira, et 52 pour Rukundo. Ici, Seromba également au
2 paragraphe 34. Nahimana, paragraphe 214. Pardonnez-moi. Nahimana,
3 paragraphe 42. Ntageruga et je crois que c'est au paragraphe 74. Je vais
4 devoir vérifier. Ntakirutimana, aux paragraphes 503 [comme interprété] et
5 502 [comme interprété]. Vous avez utilisé le libellé le viser précisément
6 ou d'autres formes de cette notion que j'ai déjà évoquée, ainsi que la
7 notion du fait important. Donc, viser précisément revient sans cesse.
8 Le libellé de l'article 6.1 du Statut de TPIR et de l'article 7 [comme
9 interprété] d'une lettre au Tribunal sont identiques. Si vous examinez à
10 nouveau les affaires que j'ai citées, vous verrez que la composition de la
11 Chambre d'appel est sensiblement la même, il n'y a aucune raison pour que
12 la Chambre de première instance comprenne cette notion de viser précisément
13 ou sa définition de l'actus reus lorsque ceci n'est plus une condition
14 nécessaire. Apparemment, cela le serait.
15 Et si on regarde le statut, on regarde le but et cela signifie que dans
16 l'intérêt de la certitude et de la prévisibilité, la Chambre d'appel doit
17 rendre sa décision en se fondant sur la jurisprudence déjà élaborée depuis
18 Tadic et donc que l'idée de viser précisément doit être prouvée. Et je
19 m'appuie dans ce cas sur les leçons tirées de l'affaire Aleksovski.
20 Il y a un certain nombre de conséquences ici si on s'écarte de cette notion
21 que viser précisément est une composante intégrale de la notion de
22 complicité par aide et encouragement. Il n'y a aucun lien entre l'aide
23 fournie et les crimes commis. C'est une question qui se pose dans tous les
24 procès. Que signifie viser précisément en termes pratiques et qu'est-ce
25 qu'un Juge du fait raisonnable doit chercher pour savoir si ceci a été
26 prouvé ou non ?
27 A cet égard, je vous demande de vous reporter à l'opinion
28 dissidente de M. le Juge Moloto qui indique de viser
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1 précisément, c'est l'existence entre
2 une aide pratique fournie, une
3 pratique -- Au paragraphe 10, pardonnez-moi.
4 En l'absence d'un tel lien, on ne peut pas dire que l'aide visait
5 précisément la commission du crime. L'existence d'un lien direct entre
6 l'aide fournie et le crime commis n'est pas le même que lorsqu'on doit
7 prouver un lien de causalité entre le comportement du complice et la
8 commission du crime en tant que condition sine qua non. C'est une condition
9 plus stricte qui a été rejetée et qui figure dans la jurisprudence du
10 Tribunal. La notion de viser précisément est différente et il doit y avoir
11 un lien entre l'aide fournie et les crimes commis dans le sens où l'aide
12 pratique fournie en elle-même a facilité directement la commission des
13 crimes.
14 Deuxième point, d'après l'opinion de la majorité, on peut déclarer coupable
15 l'accusé si l'aide fournie a été fournie de façon provisoire et se trouve
16 éloignée géographiquement quel que soit le contexte. Et l'aide pratique a
17 été fournie par l'auteur principal d'un endroit éloigné à beaucoup plus
18 tôt. Il est encore plus important que l'aide pratique visait précisément la
19 commission du crime, nous sommes tout à fait d'accord, se reportait à
20 l'opinion dissidente, M. le Juge Moloto. De surcroît, l'affaire Kupreskic
21 est intéressante à cet égard. Vous avez constaté ici que Kupreskic, en
22 fait, a déchargé des armes de sa voiture et ne suffisait pas pour préciser
23 que ceci a facilité la commission des crimes.
24 Vous avez tenu compte du temps qui s'est écoulé des six mois entre le
25 moment où Mrksic a été vu en train de décharger les armes et le moment où
26 l'attaque contre Ahmici a eu lieu. Ceci diminue la probabilité que les
27 armes étaient destinées à être utilisées pour attaquer la population
28 musulmane, paragraphe 277.
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1 De la même manière, la déclaration de culpabilité de Kalimanzira pour avoir
2 aidé et encouragé le génocide a été infirmée en raison de l'absence de
3 preuve d'un lien direct entre son discours et les meurtres en question.
4 C'est au paragraphe 923.
5 Nous pensons que ces affaires établissent que la notion de "viser
6 précisément" doit être une composante explicite, sans quoi il y a absence
7 de lien entre les actes de l'accusé et le crime.
8 Troisièmement, si l'actus reus d'aide et d'encouragement se résume
9 uniquement à considérer l'effet important sur la commission du crime,
10 l'utilisation du critère de "simple connaissance d'un crime" est totalement
11 inadéquate pour déclarer quelqu'un individuellement responsable en tant que
12 complice. Que vous acceptiez ou non notre argument formulé au 7e moyen
13 d'appel selon lequel l'objectif a été et reste une condition au regard du
14 droit international coutumier pour établir la mens rea, sans inclure la
15 condition d'une aide "visant précisément" à faciliter les crimes dans le
16 cadre de l'analyse de l'actus reus aux fins d'une définition juridique de
17 l'aide et encouragement, ce qui se passe en réalité, c'est qu'une telle
18 définition risque fort d'abaisser les conditions nécessaires pour conclure
19 à la responsabilité. Sans la condition d'aide "visant précisément" à
20 faciliter les crimes, la seule connaissance d'un crime et toute forme de
21 soutien ayant eu un effet important sur celle-ci pourraient donner lieu à
22 une déclaration de culpabilité même si l'aide n'avait pas pour but d'aider
23 à la commission de ce crime. Un tel critère ne constitue pas un seuil
24 suffisant pour établir un comportement engageant la responsabilité. Celui
25 qui prête assistance ne saura pas quel comportement est juridiquement
26 approprié et quel comportement est juridiquement répréhensible.
27 D'un point de vue objectif, les effets peuvent être expliqués par les
28 événements des 12 derniers moins, c'est-à-dire l'armement et la formation
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1 des Soudanais dans la police militaire de la RDC ainsi qu'au sein du
2 personnel de sécurité alors qu'un embargo était en place, ou le fait que
3 cela engagerait la responsabilité des responsables britanniques pour
4 complicité par aide et encouragement. Et ceci est similaire également à la
5 situation au Darfour et à l'acte d'accusation contre Omar Bashir.
6 Les dirigeants britanniques savaient que des crimes étaient commis et ont
7 fourni une assistance au cours des cinq dernières années. En fournissant
8 une aide vitale et très importante aux rebelles libyens pour renverser le
9 régime en place en sachant que des crimes étaient commis par ces mêmes
10 rebelles, des dirigeants au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, en France, et à
11 l'OTAN, pour n'en citer que certains, auraient pu être considérés comme
12 étant tenus responsables pour avoir aidé et encouragé la commission de
13 crimes. Et le secrétaire, le ministre des Affaires étrangères britannique,
14 William Hague, peut considérer qu'il s'agit en fait d'une aide humanitaire
15 fournie aux forces syriennes, mais le soutien des forces d'opposition en
16 matière de formation et de communication avec une pleine connaissance des
17 crimes qui étaient commis par les forces rebelles engagent la
18 responsabilité pour complicité par aide et encouragement de ceux qui
19 fournissent ce soutien.
20 Si les conclusions de la majorité sont retenues, les résultats sont clairs.
21 Tous les officiels, tous les responsables officiels, tant politiques que
22 militaires, qui ont une connaissance des crimes qui sont commis et qui
23 facilitent une aide pour des armées étrangères, que ce soit des armées qui
24 sont associées à un état ou pas, durant un conflit, peut être tenu
25 responsable de complicité pour aide et encouragement des crimes qui sont
26 commis par ceux à qui ils prêtent leur aide.
27 Nous ne pensons pas que la jurisprudence de cette institution pourrait
28 soutenir ce type de scénario absurde, même par inadvertance. L'exigence
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1 d'une aide "visant précisément" à faciliter les crimes nous garde de cette
2 éventualité.
3 Cette notion énonce clairement que l'assistance doit être liée
4 directement à la commission des crimes. Ce qui est cohérent avec la norme
5 nécessaire pour la responsabilité individuelle, et le fait que la Chambre
6 de première instance ait conclu en l'espèce que cette condition n'était pas
7 nécessaire, constitue manifestement une erreur et est clairement
8 préjudiciable.
9 Je passe maintenant à la deuxième question, à savoir si une aide qui ne
10 vise pas précisément à faciliter la commission d'un crime particulier peut
11 avoir l'effet important requis pour une condamnation au titre de l'aide et
12 de l'encouragement.
13 Suite à la discussion concernant la condition de "viser précisément", la
14 réponse à cette question est tout simplement non. En l'absence de cette
15 condition, l'effet important de l'aide matérielle, quelle que soit au final
16 son importance, n'est pas suffisant pour condamner pour l'aide et
17 l'encouragement. Toute conclusion contraire reviendrait dans les faits à
18 vider totalement de leur sens les conditions requises pour établir la
19 responsabilité pénale individuelle de cette affaire montre bien pourquoi.
20 Pour paraphraser --
21 M. LE JUGE MERON : [interprétation] J'ai une question à vous poser.
22 Compte tenu de l'aide massive fournie par la VRS, j'aimerais savoir
23 quel type d'aide vous considérez comme suffisante pour être considéré
24 comme une aide importante afin de dépasser le seuil nécessaire pour une
25 condamnation au titre d'une complicité pour aide et encouragement ?
26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne sais pas si je peux vous répondre
27 dans l'abstrait, je vais vous expliquer pourquoi.
28 La difficulté c'est que
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1 dans une période de conflit, vous avez donc une aide logistique qui est
2 fournie dans toute situation de conflit. Et je ne pense pas que l'on puisse
3 quantifier cela. Et je n'ai pas trouvé qui que ce soit qui soit en mesure
4 de me dire comment quantifier ceci, notamment en ce qui concerne l'aide
5 militaire. Donc quand vous me demandez quel serait le montant de l'aide
6 nécessaire dans un contexte d'une guerre qui fait rage, il est quasiment
7 impossible de vous donner un chiffre exact. Je parlerais de la question de
8 l'effet important parce que c'est la quatrième question que vous avez
9 posée, et je crois que je serai en mesure peut-être d'y répondre un peu
10 plus, mais je comprends très bien la question que vous avez posée.
11 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si
12 vous pourriez vous pencher sur différents types d'aide, et en fonction de
13 l'aide fournie, est-ce que vous pourriez peut-être déterminer à quel stade
14 leur proportion est telle que dans ce cas-là, compte tenu de la nature de
15 l'aide fournie, ceci aurait une importance première sur la commission des
16 crimes ?
17 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je ne pense pas qu'on pourra faire ce type
18 d'analyse. En fait, vous me demandez ce que je considérais comme -- si vous
19 me demandez combien de temps dure un incendie. Et en fait, un incendie se
20 consume jusqu'à la dernière cendre. Donc tant qu'il y a du carburant pour
21 ou une matière qui permet à l'incendie de perdurer, l'incendie va continuer
22 à brûler. Mais dans les comportements humains, les choses sont différentes.
23 Et il semble que tout ceci se produise pour des raisons différentes.
24 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, merci, Maître Guy-Smith.
25 L'INTERPRÈTE : Maître Guy-Smith poursuivant en lisant un document qui n'a
26 pas été fourni aux interprètes.
27 M. GUY-SMITH : Je vous en prie.
28 On ne peut pas simplement ignorer la réalité, à savoir que les relations
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1 entre les États sont souvent renforcées par l'apport d'une aide militaire
2 importante. De nombreuses armées étrangères dépendent d'une assistance
3 externe pour fonctionner dans ce contexte. Dans de nombreuses zones de
4 conflit de par le monde, la fourniture d'aide humanitaire a pour objectif
5 de soutenir la guerre, de promouvoir la paix, la stabilité et la prospérité
6 ainsi que d'autres objectifs. C'est le paragraphe 32 de l'opinion
7 dissidente du Juge Moloto.
8 Si les conséquences de l'aide donnée deviennent en fait le critère
9 principal pour savoir s'il peut y avoir une condamnation pour aide et
10 encouragement, qui, je pense, est la question que vous avez posée, dans ce
11 cas tous les dirigeants politiques et militaires qui ont fourni une aide
12 logistique à une armée qui dépendait de cette aide, quelle que ce soit la
13 quantité fournie, pourraient être tenus responsables d'une aide et
14 d'encouragement si des crimes contre l'humanité avaient été commis.
15 Malheureusement, comme cela se passe dans la plupart des guerres, c'est la
16 situation, et c'est malheureux de le dire.
17 Je passe maintenant à la troisième question, à savoir si l'aide qui a été
18 fournie par M. Perisic remplissait, le cas échéant, les conditions requises
19 pour avoir "visé précisément" à faciliter les crimes, et ce, dans le cadre
20 de la responsabilité pour aide et encouragement.
21 L'aide fournie par M. Perisic ne remplit pas ces conditions – à supposer
22 qu'elles existent - et la majorité a commis une erreur en concluant le
23 contraire.
24 Aucune preuve ne montre que l'aide qui avait été donnée visait précisément
25 à fournir une aide matérielle à la perpétration des crimes à Sarajevo ou à
26 Srebrenica, et votre raisonnement dans l'affaire Kupreskic qui a été abordé
27 dans le cadre des discussions sur la première question montre bien que
28 toute forme d'aide ne peut pas nécessairement être qualifiée d'aide ou
Page 27
1 d'encouragement. Et seules les actions qui visent précisément à faciliter
2 la commission d'un crime doivent être prises en compte. Les éléments de
3 preuve montrent que cette aide avait été fournie dans le contexte d'un
4 soutien aux efforts de guerre. Le jugement mentionne de nombreux
5 paragraphes à ce sujet, comme par exemple les paragraphes 107, 109, 1234,
6 on a vu qu'il avait fourni donc une aide militaire importante, 1235, 1236,
7 1237, 1365, tentative d'accepter la paix ou de faire accepter la paix aux
8 populations, 1366 et 1369, tentative de persuader Mladic d'arriver à la
9 paix. C'était très important dans un contexte de guerre, parce que il
10 s'agit d'activités auxquelles il a participé, je parle de M. Perisic. Il y
11 a également le paragraphe 1406, 1407, 1408, 1411 et 1412, où on voit qu'il
12 y a des réunions des membres haut placés au sein de la RSK et de la VRS. Et
13 on peut dire que si ce n'est pas le seul objectif, au moins dans les
14 objectifs il avait un objectif de rétablir la paix. Il y a les paragraphes
15 1414, 1597, 1598, 1599, et je pense que c'est ce que vous avez mentionné,
16 Monsieur le Président, il n'aurait pu mener la guerre si l'assistance
17 n'avait pas été fournie. Et Monsieur le Président, j'analyse ceci dans le
18 cadre de la notion de "viser précisément". Il n'aurait pas pu survivre ou
19 défendre son territoire. C'est la raison pour laquelle l'assistance
20 existait. C'est ce qui était visé. Et c'est ce que la majorité a conclu à
21 plusieurs reprises dans ce jugement.
22 1602, la VJ, la VRS dépendait énormément de l'aide de la RFY et de la VJ,
23 afin de pouvoir mener la guerre et de fonctionner en tant qu'armée. Tout
24 ceci montre que ceci a permis de faciliter les efforts de guerre mais il
25 n'y a pas mentionné ici d'action visant précisément à commettre un crime.
26 En gardant cela à l'esprit, pour ce qui est donc de l'aide facilitée par M.
27 Perisic, elle ne répond pas au critère d'une action visant précisément à
28 faciliter un crime, qui est nécessaire pour une condamnation au titre de
Page 28
1 l'aide et d'encouragement. Passons maintenant pour commencer aux questions
2 de personnel. Mis à part trois membres principaux de la VJ, tous les autres
3 avaient été envoyés, incorporés au sein de la VRS avant que le général
4 Perisic devienne chef de l'état-major de la VJ. Il n'y a aucune preuve que
5 ces trois membres ont participé à la commission des crimes à Sarajevo et à
6 Srebrenica. Donc on ne peut pas dire que sur la base de cela l'aide fournie
7 par M. Perisic avait visant précisément de commettre des crimes dans les
8 dessus mentionnés. L'assistance financière et les avantages qui étaient
9 toujours fournis à ces membres de l'armée. Il y a, par exemple, le paiement
10 de salaires qui a été une aide importante pour la VRS, au paragraphe 167,
11 et ceci signifie que la VRS a pu continuer à fonctionner dans une période
12 de guerre, et puis vous avez la paragraphe 1618, qui ne répond pas au
13 critère nécessaire. Et d'ailleurs la majorité a conclu que même durant la
14 période où les membres de la VRS ne recevaient plus leurs salaires de la
15 part de la VJ, ils n'ont pas quitté la VRS parce que le commandant
16 militaire de la VRS ne les laissait pas partir.
17 Et on voit ici que dans la guerre les outils qui étaient utilisés pour
18 commettre les crimes, et là le dossier est très clair en la matière,
19 l'Accusation n'a pas pu prouver le lien direct avec les crimes qui avaient
20 été commis, la majorité d'ailleurs reconnaît cela puisqu'elle dit :
21 "La majorité reconnaît que les éléments de preuve ne permettent pas de
22 déterminer que les armes précises qui ont été utilisées pour commettre les
23 crimes visés à l'acte d'accusation proviennent de l'assistance logistique
24 qui avait été supervisée par le général Perisic."
25 Cela ne peut pas être plus clair que cela, et l'Accusation n'a pas remis
26 ceci en question. Et il est clair que l'aide fournie par M. Perisic ne peut
27 pas être considérée comme une action visant précisément à faciliter le
28 crime. Et pourquoi ? Eh bien, la réponse est très claire à cela. La
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1 majorité, après avoir reconnu immédiatement ce manquement dans le domaine
2 de la preuve, a rejeté la notion d'une action visant précisément à
3 faciliter un crime, notion à laquelle cette institution est attachée depuis
4 longtemps, et je cite les conclusions de la majorité :
5 "Cependant, [la majorité] rappelle que les actes du complice par aide et
6 encouragement ne doivent pas nécessairement avoir 'visé précisément' à
7 faciliter les crimes."
8 C'est le paragraphe 1624.
9 Sans ce lien, M. Perisic ne peut pas être tenu responsable d'avoir aidé et
10 encouragé. Et la condition d'action visant précisément à faciliter un crime
11 n'est pas remplie, donc la majorité s'est certainement trompée.
12 Il est possible également que des munitions provenant de la VJ
13 aient été utilisées durant la commission des crimes à Sarajevo, mais ceci
14 n'est certainement pas la seule déduction raisonnable que l'on peut tirer
15 des éléments de preuve.
16 Mais si vous consultez les discussions concernant Srebrenica
17 et les balles Selsky, les seules balles qui ont été retrouvées à
18 Srebrenica, en fait, ne pouvaient pas -- on ne pouvait pas faire remonter
19 ces balles à l'aide logistique fournie par Perisic, et ceci a été une
20 conclusion au-delà de tout doute raisonnable, impossible d'imputer ces
21 balles à un stock qui proviendrait de l'aide fournie par Perisic.
22 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pouvez-vous nous donner une référence
23 pour cette déclaration ?
24 M. GUY-SMITH : [interprétation] C'est aux paragraphes 1295 à 1302.
25 En conclusion, aucune aide pratique provenant de la VJ peut être considérée
26 comme ayant spécifiquement contribué à la commission de crimes et on ne
27 peut donc par conséquent pas conclure au-delà de tout doute raisonnable que
28 le général Perisic a été complice d'aide et d'encouragement à la commission
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1 de ces crimes. La majorité a évité cette analyse et a donc considéré que le
2 général Perisic était coupable. Si le droit avait été appliqué comme il
3 convient, il aurait été conclu que l'élément matériel n'avait pas été
4 prouvé au-delà de tout doute raisonnable et, par conséquent, les
5 déclarations de culpabilité prononcées au titre des chefs d'accusation 1 à
6 4, c'est-à-dire pour complicité d'aide et encouragement, doivent être
7 annulées. Et automatiquement si l'on conclut que la condition d'action
8 visant spécifiquement à faciliter la commission d'un crime n'est pas
9 remplie, il est inutile de se pencher sur la question de l'effet important,
10 et je soutiens qu'en vertu de la jurisprudence en la matière, des
11 conclusions dans ce sens devraient être rendues, mais vous m'avez également
12 posé cette question.
13 Mais la réponse donc est sans ambages, oui, à savoir que la Chambre de
14 première instance a commis une erreur en concluant que l'aide était en fait
15 un effet important dans la commission des crimes. Toute l'analyse
16 concernant cet effet important est basée sur le fait que la majorité se fie
17 de manière déraisonnable à cette relation de dépendance et au fait qu'elle
18 existe ou non, cela ne revient pas à déterminer s'il existe un effet
19 important sur la commission des crimes.
20 Mais la question n'est pas de savoir si la VRS dépendait de manière
21 importante de ce soutien de la VJ ou pas mais de savoir si le soutien
22 apporté par Perisic avait eu un effet important sur la commission de ces
23 crimes. Le fait qu'une armée dépende entièrement d'une armée étrangère ne
24 peut pas amener automatiquement à la seule conclusion raisonnable selon
25 laquelle cette aide fournissait cette armée en relation de dépendence et
26 distribuée par cette armée à ses unités subordonnées, on peut le trouver au
27 paragraphe 1237, on voit que le dépôt de Koran de la VRS a reçu la plupart
28 de ses munitions de la VJ. Donc vous aviez des livraisons légitimes
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1 militaires de munition, mais ceci ne peut pas être imputé directement à M.
2 Perisic compte tenu des événements qui s'en sont suivis parce qu'il n'y a
3 pas de lien direct entre les deux événements.
4 Dans l'affaire Kalimanzira, un an et demi après l'affaire Mrksic, cette
5 Chambre a conclu que les exhortations au génocide publiées dans un journal
6 avant le début du génocide au Rwanda ne remplissaient pas le critère
7 nécessaire à l'actus reus pour l'aide et l'encouragement même s'il y avait
8 probablement des liens entre les actions de l'accusé et les meurtres. Et
9 vous avez conclu que :
10 "Il n'y avait pas suffisamment de preuve pour qu'un juge raisonnable puisse
11 conclure au-delà de tout doute raisonnable que les publications qui avaient
12 été publiées durant les premiers mois de 1994 avaient contribué de manière
13 importante à la commission d'actes et de génocide qui avaient été commis
14 entre avril et juillet 1994."
15 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pourquoi est-ce que la distribution
16 d'armes du centre de Koran ne dépendait pas de M. Perisic ?
17 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je dis en fait que les munitions qui
18 avaient été envoyées au centre Koran ne signifie pas que cela répondait au
19 test. Il y a une dépendance, c'est clair, mais il n'y a pas de lien avec
20 les crimes parce que la dépendance dans ce cas précis, en fait, s'il y
21 avait une telle dépendance elle n'est pas liée à l'effet important vis-à-
22 vis des crimes parce que ces munitions étaient utilisées dans diverses
23 activités, donc vous ne pouvez pas avoir de lien direct. Vous ne pouvez
24 pas, par conséquent, en conclure qu'il y a une responsabilité. Je parle ici
25 du critère d'effet important ou pris au premier.
26 La VRS pouvait mener la guerre compte tenu du soutien matériel qui était
27 fourni, les aspects de logistique militaire correspondaient à cet
28 objectif. Les crimes commis étaient en fait une conséquence indirecte des
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1 mauvaises pratiques ainsi que du mauvais système de commandement et de
2 contrôle, ce qui, on peut le concéder est répréhensible, mais de décréter
3 que la VRS est pour ainsi dire une organisation criminelle afin d'imputer
4 une responsabilité pénale à M. Perisic constitue un abus de principes de
5 base du droit pénal, va à l'encontre du droit humanitaire international et
6 risque également de faire peser une responsabilité trop large et
7 inacceptable sur la pratique des États, ce qui ne peut que desservir la
8 légitimité du droit pénal international.
9 Il n'y a pas de preuve directe et, par conséquent, cette affaire est
10 basée sur des preuves indirectes. Et la loi est claire, le droit est clair
11 en la matière. Lorsqu'une déduction est basée sur des preuves indirectes
12 pour établir un fait donnant lieu à une déclaration de culpabilité, il faut
13 absolument que ce soit la seule déduction raisonnable qui puisse être tirée
14 des éléments de preuve présentés. Dire que Perisic a contribué à faciliter
15 la commission de crimes ne saurait être la seule conclusion raisonnable
16 possible. Une autre explication raisonnable pourrait consister à dire que
17 l'aide fournie par Perisic visait directement à soutenir l'effort de
18 guerre, et non la commission des crimes, et que par conséquent, cette aide
19 n'a pas contribué de manière importante à celle-ci. Mis à part le fait
20 qu'aucun élément de preuve présenté en l'espèce ne visait à la commission
21 de ces crimes, la conclusion concernant la relation générale de dépendance
22 est insuffisante pour conclure que nous sommes en présence d'une aide ayant
23 eu un effet important. Des soupçons ne peuvent être considérés comme des
24 preuves et des scénarios reposant sur des hypothèses de départ non
25 vérifiées n'en sont pas non plus, et cela ne permet certainement pas de
26 prouver quoi que ce soit au-delà de tout doute raisonnable. Le général
27 Perisic devrait être acquitté en ce qui concerne les chefs d'accusation 1 à
28 4. Je vais maintenant donner la parole à M.-- Me Bourgon, à moins que vous
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1 ayez de questions.
2 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith.
3 Maître Bourgon, c'est à vous.
4 M. BOURGON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président et bonjour,
5 Mesdames et Messieurs les Juges de la Chambre d'appel.
6 J'ai le grand plaisir pour moi ce matin de répondre à la question numéro 5.
7 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Attendez l'interprétation, je vous
8 prie.
9 M. BOURGON : [interprétation] Nous allons répondre de façon très, très
10 directe et simple à cette question. La Chambre de première instance a
11 commis une erreur en concluant que M. Perisic avait l'autorité et le
12 contrôle de facto et de jure lui permettant de discipliner, d'imposer des
13 mesures disciplinaires et de donner des ordres de commandement aux membres
14 du 40e Centre d'affectation du personnel.
15 Alors, cette question se cerne en trois volets. L'autorité de jure,
16 l'autorité de facto, et l'autorité de facto pour donner la possibilité de
17 donner des ordres contraignants.
18 Première, l'autorité de jure. L'analyse retenue par la majorité figure aux
19 paragraphes 1657 à 1667. En fait, cela est absolument pas la conclusion
20 dégagée, car l'analyse de la majorité est erronée parce qu'elle se base sur
21 deux postulats indirects.
22 Premièrement, la majorité avait été d'avis que la relation de jure entre M.
23 Perisic et les membres du 40e Centre d'Affectation du personnel était régie
24 par le droit de la VJ, ce qui n'est pas exact. Je vais fournir des
25 explications à ce sujet.
26 Deuxièmement, l'autorité de M. Perisic sur les membres de la VJ après leur
27 mutation au 40e Centre d'Affectation du personnel, à ce sujet, la majorité
28 a été d'avis qu'il n'y avait aucun changement, aucune modification de
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1 l'autorité du général Perisic, ce qui est également inexact.
2 Voici l'argument. Premièrement, la création de ce 40e Centre d'Affectation
3 du personnel correspondait à une situation absolument exceptionnelle. Cela
4 n'était donc pas régi par la loi relative à la VJ. Du point de vue désiré,
5 le commandement et le contrôle entre la VJ et les membres du 40e Centre
6 d'Affectation du personnel était régi par les consignes relatives au centre
7 de personnel. J'aurai pour preuve la pièce P734. Cela n'était pas régi ou
8 géré par la loi relative à la VJ.
9 Et ce qui est encore plus important, c'est que la majorité le confirme aux
10 paragraphes 1766 et 1767, puisqu'il est indiqué qu'à partir du moment où
11 les membres de la VJ sont transférés ou mutés au 40e Centre d'Affectation
12
13
14 du personnel, ils font partie d'une nouvelle filière, d'une nouvelle chaîne
15 de commandement, ce qui modifie la relation du commandement et de contrôle
16 de jure, parce que la majorité l'a déclaré, et je cite :
17 "A partir du moment un officier de la VJ a respecté un ordre de mutation au
18 40e Centre d'Affectation du personnel, il s'inscrit dans une chaîne de
19 commandement différente, la chaîne de commandement de la SVK."
20 Ce qui a été confirmé, puisque c'était Celeketic qui était le commandement
21 de la SVK et qui était donc le supérieur hiérarchique de jure.
22 Et plus important encore, les membres de la VJ ne pouvaient absolument pas
23 être sanctionnés ou disciplinés par le général Peresic à partir du moment
24 où ils étaient transférés au 40e Centre d'Affectation du personnel. Cela
25 est confirmé par les éléments de preuve à charge, pièce P1082.
26 Pour revenir maintenant à l'autorité de jure permettant de punir et de
27 discipliner.
28 L'argument est comme suit : premièrement, la majorité se base sur la
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1 constatation suivant laquelle ou la conclusion plutôt suivant laquelle
2 Perisic était le supérieur hiérarchique de jure et nous avons déjà vu que
3 cela n'était pas exact.
4 Deuxièmement, et cela a également été conclu par la majorité, M. Perisic a
5 seulement utilisé sa capacité ou sa capacité alléguée pour punir après la
6 chute de la RSK. Donc, la conclusion est très simple. Il n'y avait pas de
7 preuve au moment du bombardement de Zagreb que M. Perisic pouvait
8 diligenter des poursuites contre les membres du 40e Centre d'Affectation du
9 personnel.
10 Troisièmement, la majorité, afin de dégager cette conclusion sur la
11 possibilité de lancer des poursuites, est allée jusqu'à prendre en
12 considération des événements qui se sont produits après la chute de la RSK,
13 le 8 août 1995, ce qui a son importance parce que la chute de la RSK a
14 quand même abouti à un changement important de circonstances. A partir de
15 ce moment-là, la SVK et sa chaîne de commandement n'existaient plus, ce qui
16 fait que les membres du 40e Centre d'Affectation du personnel ne se
17 trouvaient plus sous le commandement du commandant de la SVK, et il faut
18 rappeler en fait que le commandant de la SVK était le supérieur de jure
19 lorsque -- le supérieur hiérarchique j'entends, lorsque Zagreb a été
20 bombardée.
21 Donc, du point de vue factuel et du point de vue légal, ce que Perisic
22 aurait pu faire était tout à fait différent avant et après la chute de la
23 RSK. Par conséquent, l'analyse retenue par la majorité, qui prend en
24 considération des éléments de preuve qui datent d'après -- après le 8 août
25 1995, est une analyse erronée du départ.
26 Quatrièmement, la majorité a avancé quelques raisons permettant de
27 comprendre pourquoi M. Perisic aurait pu attendre jusqu'après la chute de
28 la RSK pour utiliser les pouvoirs qui lui étaient conférés pour diligenter
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1 des procédures, mais les raisons qui sont présentées par la majorité sont à
2 nouveau erronées. Je vais vous en donner un exemple.
3 Car ils avancent que M. Perisic a utilisé son autorité, l'autorité qui lui
4 était conférée -- ou plutôt, ne l'a pas utilisée avant le mois de novembre
5 1995, parce qu'il n'avait pas besoin d'utiliser cette autorité à moins que
6 les objectifs militaires de la VJ étaient différents de ceux de la SVK.
7 Donc très clairement et manifestement, Monsieur le Président, M. Milosevic
8 et M. Perisic ont eu un désaccord assez important à propos du bombardement
9 de Zagreb. Le 1er mai 1995, M. Milosevic a dit lors d'une conversation à M.
10 Perisic :
11 "En fait, vraiment, j'espère que Celeketic … est-ce que tu ne peux pas lui
12 dire de ne pas écouter Martic, de ne plus l'écouter ? Martic va les
13 entraîner dans une spirale de guerre horrible."
14 Alors, voilà pour ce qui est de la preuve de leur désaccord. Par
15 conséquent, le bombardement de Zagreb aurait nécessairement en quelque
16 sorte déclenché cette autorité de Perisic ou le fait que Perisic aurait dû
17 punir les membres du 40e Centre.
18 Il s'ensuit, Monsieur le Président, que sur la base de tous ces arguments,
19 la conclusion de la majorité suivant laquelle M. Perisic aurait pu
20 diligenter des poursuites contre les membres du 40e Centre d'Affectation du
21 personnel au moment où Zagreb a été bombardée n'est pas la seule conclusion
22 raisonnable qui peut être dégagée sur la base de la globalité des éléments
23 de preuve. Il y a une autre conclusion possible vraisemblable et logique.
24 Il ne l'a pas fait parce qu'il n'avait pas le pouvoir, l'autorité pour le
25 faire.
26 Troisièmement, l'autorité et le pouvoir de donner des ordres contraignants.
27 Une fois de plus, Monsieur le Président, la majorité a commis une erreur
28 d'analyse en indiquant que M. Perisic était le supérieur hiérarchique de
Page 37
1 jure des membres du 40e Centre d'Affectation du personnel. Comme je l'ai
2 déjà indiqué, cela n'était pas le cas. Celeketic était le supérieur
3 hiérarchique de jure des membres du 40e Centre d'Affectation du personnel.
4 Deuxièmement, la majorité a également commis une erreur de raisonnement en
5 indiquant que M. Perisic avait la capacité et la possibilité de donner des
6 ordres contraignants et il s'avance et se repose sur deux ordres qui
7 auraient pu être donnés avant le mois de mai 1995, à savoir avant
8 l'événement ou pendant l'événement, et ces deux ordres ne déterminent
9 absolument pas l'autorité de commandant de M. Perisic.
10 Le premier de ces ordres a été donné le 24 mars 1995, pièce 1925, peu
11 importe de savoir si cet ordre a été obéi ou respecté ou non - c'est l'un
12 des arguments de l'Accusation - et en fait, cela n'est pas au cœur de ma
13 thèse. Cet ordre n'est manifestement pas l'ordre qui détermine l'autorité
14 de commandement sur la VSK. Le fait que vous constituez un comité pour
15 parler de l'assistance octroyée à la SVK ne prouve absolument pas que M.
16 Perisic avait l'autorité de commandement ou pouvait donner des ordres
17 contraignants.
18 Et le deuxième de ces ordres a été donné le 7 décembre 1994. Il fait
19 l'objet de la pièce P1800. Comme cela a été mis en exergue par M. le Juge
20 Moloto dans son opinion dissidente, cet ordre est clairement différent d'un
21 ordre donné dans le cadre d'une chaîne de commandement. Il a été envoyé
22 directement par Milosevic. C'est Celeketic qui a réagi directement lorsque
23 Milosevic donne cet ordre. Martic ne faisait pas partie du 40e Centre
24 d'Affectation du personnel, et Perisic n'a été en fait que le vecteur
25 permettant de relier cet ordre. Une fois de plus, Monsieur le Président,
26 cet ordre ne permet pas de prouver l'autorité de commandement de M. Perisic
27 sur la SVK avant le bombardement de Zagreb et pendant le bombardement de
28 Zagreb.
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1 Une fois de plus, la majorité a essayé de justifier le fait qu'il n'y a pas
2 d'ordre donné avant longtemps, et ils avancent une idée, à savoir M.
3 Perisic n'avait pas besoin de faire usage de son autorité à moins que les
4 objectifs étaient tout à fait différents de ceux de la SVK. J'ai déjà
5 analysé cet argument.
6 Mais M. Perisic et Milosevic manifestement n'étaient pas d'accord à propos
7 du bombardement de Zagreb. Si M. Perisic avait eu l'autorité lui permettant
8 de donner un ordre de commandement à Celeketic, il l'aurait fait. Il ne l'a
9 pas fait, parce qu'il ne disposait pas, il n'avait pas ce pouvoir.
10 Pour ce qui est maintenant des deux autres affaires dont la Chambre d'appel
11 a été saisie, l'affaire du général Hadzihasanovic et celle du général
12 Blaskic. Blaskic, le 29 juillet 2004; Hadzihasanovic, le 22 avril 2008.
13 Dans les deux cas, la Chambre d'appel a conclu que ces deux généraux
14 n'exerçaient pas de contrôle effectif même s'ils ont donné certains ordres
15 à des subordonnés allégués dans un cas, les Moudjahidines, il s'agit du
16 général Hadzihasanovic, et dans l'autre cas, pour le général Blaskic, à 4e
17 Section de la Police militaire.
18 Et le général Perisic n'a même pas donné ce type d'ordre, ce qui a son
19 importance.
20 Et je fais référence maintenant au Témoin MP-80, témoin qui a déclaré que
21 M. Perisic ne donnait pas de tâche, qu'il n'a pas pris de décisions au sens
22 militaire classique du terme. Paragraphe 1719 du jugement et compte rendu
23 d'audience, page 8 851.
24 Le Témoin MP-80 a confirmé que Martic était le supérieur hiérarchique de
25 Celeketic et de Perisic. Et la relation qui existait entre Celeketic et
26 Perisic est telle que l'on comprend que M. Perisic n'avait pas l'autorité
27 de jure ou de facto pour donner des ordres de commandement.
28 Les éléments de preuve apportés par le Témoin MP-80 sont tels à cet égard,
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1 et sont très clairs en fait, parce qu'ils déterminent de façon absolument
2 cristalline que ni Perisic ni Celeketic ne croyaient ou n'agissaient comme
3 si cette relation entre le supérieur et le subordonné a existé.
4 Et je conclurai rapidement à propos du système de commandement et de
5 contrôle, puisque la majorité a déclaré qu'il y avait eu division en deux
6 chaînes du commandement du point de vue militaire. Ce qui n'est absolument
7 pas logique. Celeketic a suivi l'ordre de Martic et a bombardé Zagreb, et a
8 refusé de suivre la tentative de M. Perisic qui a essayé de le convaincre
9 de mettre un terme à ce bombardement. Il est absolument clair que Perisic
10 ne disposait pas ou ne jouissait pas de l'autorité de facto pour donner des
11 ordres à Celeketic, et à Martic, dont les ordres ont été suivis puisqu'il
12 était le seul à avoir ce contrôle effectif. Si M. Perisic avait
13 véritablement eu cette autorité de facto, il aurait tout simplement fait fi
14 de M. Celeketic ou l'aurait contourné en quelque sorte et aurait donné des
15 ordres directement aux membres de l'équipe qui faisaient partie du 40e
16 Centre d'Affectation du personnel, il aurait essayé de les arrêter. Il ne
17 l'a pas fait parce qu'il n'avait pas cette autorité pour le faire.
18 Et en dernier lieu, Monsieur le Président, je dirais qu'au vu de toutes ces
19 observations, qu'il est absolument manifeste que M. Perisic n'avait pas
20 l'autorité et le pouvoir pour donner des ordres contraignants, ce qui est
21 une façon de répondre à votre question et aux trois volets de votre
22 question, et M. Perisic n'avait pas l'autorité ni de jure ni de facto pour
23 donner des ordres contraignants ou pour lancer des procédures
24 disciplinaires au moment où Zagreb a été bombardé. Par conséquent, nous
25 concluons que la majorité, que les conclusions de la majorité doivent être
26 infirmées.
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Bourgon. Je ne
28 pense pas que mes collègues pour le moment poseraient une question. Maître
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1 Lukic, Maître Lukic, il vous reste encore quatre minutes, exactement.
2 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Mesdames,
3 Messieurs les Juges. Je vois que j'ai peu de contrôle à l'égard des membres
4 de mon équipe. Je vais m'efforcer de dire quelques propos sur ce qui me
5 reste à dire.
6 Je suis dans une situation délicate. Je dois parler de peine et je crois
7 profondément en l'innocence du général Perisic. C'est la raison pour
8 laquelle j'estime que suite à vos conclusions après les motifs d'appel,
9 vous n'allez pas être amenés à examiner les motifs d'appel 14 à 17. Mais je
10 voudrais quand même dire quelques mots sur ce que la majorité a décidé pour
11 ce qui est de la peine. Alors considérant enfin en accordant une importance
12 peu pertinente aux faits et en dénigrant certains faits tout à fait
13 cruciaux, et sans énoncer des motifs pour les conclusions qui ont été
14 prises, et par recours par un double calcul dans le prononcé de la peine,
15 on en arrive à un raisonnement qui est non conforme à la pratique de ce
16 Tribunal, parce qu'on parle de la gravité des crimes et du rôle du général
17 Perisic. Je vais donc sauter cette partie, je vais juste me concentrer sur
18 l'argumentation qui se rapporte au 17e motif d'appel qui se rapporte aux
19 circonstances atténuante en maintenant tout ce que nous avons dit dans nos
20 motifs d'appel, 14, 15 et 16.
21 Pour les interprètes, je précise qu'il s'agit du paragraphe 20, de ce que
22 j'ai préparé comme texte. Je tiens à passer au dernier motif d'appel 17
23 pour dire quelles sont les erreurs commises par la majorité pour ce qui est
24 des circonstances atténuantes.
25 Compte tenu du mandat de ce Tribunal, au chapitre VII de la Charte des
26 Nations Unies --
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Nous ne recevons pas d'interprétation.
28 L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine française précisent que si M.
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1 le conseil a peu de temps, ce n'est pas une raison de lire à toute allure.
2 M. LUKIC : [interprétation] -- alors compte tenu du mandat de ce Tribunal
3 et du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, les agissements visant à
4 promouvoir la paix sur le territoire de l'ex-Yougoslavie sont de façon
5 générale considérés comme étant une circonstance atténuante. Ce sont les
6 propos de la Chambre d'appel dans son arrêt Babic, paragraphe 71.
7 La paix constitue toujours un impératif de la communauté internationale.
8 Les agissements ou les actes qui peuvent influer sur l'aboutissement à la
9 paix doivent être toujours valorisés de façon positive.
10 L'importance des actes, c'est ce que vous avez précisément vous-mêmes,
11
12
13 Mesdames et Messieurs les Juges, souligné dans le jugement en appel, ou
14 dans l'arrêt en appel Blagojevic, paragraphe 330. Ce qui importe ce sont
15 les actes visant à promouvoir la paix, indépendamment des dégâts qui
16 auraient été générés par un accusé. Alors c'est précisément ces activités,
17 les conséquences qui concernent le général Perisic qui ont été mis de côté
18 par la majorité de la Chambre de première instance. Pour ce qui est de ces
19 activités et de ces agissements pour ce qui est d'aboutir à la paix en
20 Bosnie, tel que déterminé par la Chambre de première instance aux
21 paragraphes 1365 à 1369, tout comme pour ce qui est de ce qui a constitué
22 des actes de libération des pilotes français comme déterminé au 1378 à
23 1384.
24 La majorité pour ce qui est de minimaliser et de rejeter ces circonstances
25 a utilisé cette même argumentation et a considéré que ce n'était pas des
26 circonstances atténuantes parce que Perisic dans ces activités aurait été
27 motivé par des intérêts militaires et politiques de la République de
28 Yougoslavie, et aurait agi de façon peu sincère. Et en raisonnant de la
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1 sorte, la majorité de la Chambre de première instance a commis une erreur.
2 Les activités concrètes et les conséquences de ces agissements n'ont pas
3 été considérées comme étant importantes, et les conséquences des
4 agissements de Perisic, je ne vais pas peut-être dédaigner, compte tenu des
5 valeurs qui ont été avancées ou mises en exergue par la pratique de ce
6 Tribunal. Je tiens à vous rappeler que la Chambre dans son jugement a cité
7 le fait que le président français, M. Chirac, avait posé des conditions
8 pour ce qui était de signer les accords de Dayton pour la libération des
9 pilotes, au paragraphe 1384. Et donc Perisic a joué un rôle décisif dans
10 leur libération, tel qu'énoncé au 1383.
11 Alors peut-on, Mesdames et Messieurs les Juges, l'emporter sur les
12 conclusions relatives aux agissements et penser les agissements de Perisic
13
14
15 qui étaient directement orientés pour aboutir à une fin de la guerre en
16 Bosnie. Alors pour les Juges de la Chambre, ce qui compte c'est les effets,
17 les résultats et les conséquences. Je tiens à vous rappeler que dans
18 l'arrêt de Dragomir Milosevic, vous, au paragraphe 17, Mesdames, Messieurs
19 les Juges, vous avez considéré qu'il était une circonstance atténuante que
20 de voir l'accusé participer à l'accord d'interruption des activités de
21 tireurs isolés. Alors c'est un accord qui est important, mais il est bien
22 moins important que les accords de Dayton. Vous avez donc considéré que les
23 faits et gestes de Milosevic avaient eu un effet positif, un rendement
24 positif. Vous avez indiqué que la communauté internationale ne dénigrait
25 pas les actes et les conséquences de ces actes. Et ici la majorité des
26 Juges de la Chambre de première instance a commis une erreur notable.
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Nous allons lever l'audience
28 maintenant. Je vous assure que nous allons vous accorder le temps qui vous
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1 est prévu à l'origine. Alors, nous allons faire une pause maintenant. Et
2 nous allons reprendre à 10 heures 30.
3 --- L'audience est suspendue à 10 heures 11.
4 --- L'audience est reprise à 10 heures 30.
5 M. LE JUGE MERON : [interprétation] L'Accusation va avoir une heure à sa
6 disposition. Mes collègues me disent que l'interprétation française a
7 parfois été un peu en retard parce que l'équipe de la Défense a eu tendance
8 à s'exprimer un peu trop rapidement. Donc j'exhorte les différents
9 intervenants à faire en sorte que les interprètes de la cabine française ne
10 soient pas victimes de trop de pression et de stress.
11 Mme GOY : [interprétation] Bonjour Mesdames, Messieurs les Juges. Nous
12 avons scindé notre réponse à l'appel de M. Perisic de la façon suivante. Je
13 vais dans un premier temps m'intéresser à l'article responsabilité de M.
14 Perisic pour avoir aidé et encouragé, et je répondrai aux questions 1 à 4
15 qui nous ont été posées. A la suite de quoi, Mme Martin Salgado
16 s'intéressera à la responsabilité du supérieur hiérarchique, et donc la
17 responsabilité de M. Perisic, et répondra à la question 5. Puis, à la fin,
18 Mme Brady vous parlera de la peine qui a été fixée.
19 Avant de répondre aux questions 1 à 4 que vous nous avez posées, j'aimerais
20 en fait replanter le décor, le contexte, vous donner le contexte et vous
21 fournir la réponse de l'Accusation à l'appel de M. Perisic eu égard aux
22 chefs 1 à 12, donc responsabilité pour avoir aidé et encouragé.
23 Et je m'intéresserai essentiellement au premier moyen d'appel qui est le
24 moyen d'appel principal eu égard à la responsabilité de M. Perisic pour
25 avoir aidé et encouragé.
26 M. Perisic n'a pas été condamné pour avoir aidé et encourager parce qu'il a
27 soutenu la VRS dans son effort de guerre. M. Perisic a été condamné parce
28 qu'il a, en connaissance de cause, fourni un soutien, un appui crucial à
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1 une armée dont les unités commettaient systématiquement des crimes. Il
2 savait qu'il fournissait un appui qui aurait un effet important sur les
3 crimes commis par la VRS à Sarajevo ainsi qu'à Srebrenica. En tant que chef
4 de l'état-major général de la VJ, M. Perisic contrôlait et supervisait un
5 système de fournitures importantes, d'assistances logistiques et en
6 effectifs à la VRS. Les unités qui ont commis les crimes à Sarajevo et
7 Srebrenica, le Corps de Sarajevo-Romanija, le RSK et le Corps de la Drina
8 faisaient partie des unités de la VRS qui ont reçu cette assistance. Ces
9 unités dépendaient du soutien de M. Perisic pour fonctionner en tant
10 qu'armée et pour exécuter ou mener à bien leurs opérations à Sarajevo et à
11 Srebrenica, opérations au cours desquelles des crimes ont été
12 systématiquement commis.
13 Etant donné que le soutien à l'appui de M. Perisic a été essentiel aux
14 unités dont les --
15
16
17 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Dites-moi, je vous prie, est-ce que M.
18 Perisic, en tant que chef d'état-major, aurait pu faire en sorte que l'aide
19 ne soit plus envoyée par son pays ?
20 Mme GOY : [interprétation] Nous reconnaissons, Monsieur le Président, que
21 cette aide était déjà en cours, était déjà envoyée lorsqu'il est devenu
22 chef d'état-major, mais il a en quelque sorte institutionnalisé cette aide,
23 c'est-à-dire insisté que ça n'a absolument rien fait pour y mettre un
24 terme, pour la canaliser vers des activités légitimes ou illicites.
25 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais est-ce qu'il y avait pu faire
26 quelque chose en - je pense à ses pouvoirs, à son autorité ? Est-ce qu'il
27 aurait pu dire à Belgrade, parce que, non, à partir de maintenant, plus
28 d'aide, je vous prie ?
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1 Mme GOY : [interprétation] Je vais consulter mes collègues.
2 [Les conseils de l'Accusation se concertent]
3 Mme GOY : [interprétation] Monsieur le Président, cela n'est pas analysé
4 dans le jugement. Tout ce que savons, c'est qu'au sein du Conseil de
5 Défense suprême, il a véritablement utilisé son autorité pour les persuader
6 de fournir cette aide, alors qu'il aurait pu très facilement l'utiliser,
7 cette autorité et sa capacité de persuasion, d'une autre façon. Mais comme
8 cela ne se trouve pas dans le jugement, nous ne pouvons pas nous livrer à
9 des conjectures. Alors, ce que nous savons, par contre, c'est qu'il n'a pas
10 tenté d'arrêter l'aide. Il a fourni son soutien au RSK et au Corps de la
11 Drina dont les unités commettaient des crimes.
12 Et dès le début de la guerre, M. Perisic était parfaitement informé de
13 l'intention discriminatoire et du comportement criminel lors des opérations
14 en Bosnie-Herzégovine.
15 Eu égard à Sarajevo, plus précisément, M. Perisic savait que le SRK était
16 en train de se lancer dans une campagne illicite de bombardements et de
17
18
19 tirs embusqués, et il savait que d'autres crimes suivraient probablement
20 pendant le siège de la ville.
21 Eu égard à Srebrenica, il était parfaitement informé de la menace sérieuse
22 pour la sécurité de l'enclave de Srebrenica. Il savait que les tensions
23 étaient déjà assez exacerbées. Il était au courant de la probabilité assez
24 importante que des crimes seraient commis contre la population à la suite
25 de l'attaque contre l'enclave, et par de nombreuses sources, M. Perisic a
26 été informé du fait que le Corps de la Drina commettait des crimes à
27 Srebrenica.
28 Il savait également que ses actes apporteraient une contribution à la
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1 commission de ces crimes du fait de la nature et de la portée de son
2 assistance et de la nature systématique de la commission de ces crimes.
3 C'est pour cela qu'il a été jugé responsable pour avoir aidé et encouragé,
4 parce qu'il a fourni un soutien crucial à une armée dont les unités
5 commettaient systématiquement des crimes.
6 Contrairement à ce que la Défense suggère, cela ne signifie pas, si l'on
7 considère M. Perisic responsable d'avoir aidé et encouragé, cela ne
8 signifie pas que l'on essaie de se lancer dans des tentatives
9 d'incrimination pour toute assistance aux efforts de guerre. Le critère
10 juridique n'impose pas de contraintes irréalistes lorsque l'on mène une
11 guerre ou lorsque l'on aide dans le cadre d'une guerre. Plutôt, le critère
12 pour avoir aidé et encouragé est doté de suffisamment de garanties contre
13 toute tentative d'incrimination de toute forme d'assistance à une armée.
14 Premièrement, l'élément matériel exige non pas n'importe quelle -- ou
15 prévoit non pas n'importe quelle forme d'assistance, mais une aide, une
16 assistance qui a un effet important sur la commission des crimes.
17 Deuxièmement, l'actus reus, l'élément matériel, doit aller de pair avec
18 l'élément moral, ce qui signifie que l'accusé devait être informé non pas
19 de l'existence d'un risque éloigné ou léger que des crimes allaient être
20 commis, mais qu'il devait être informé de la probabilité que les crimes
21 seraient commis.
22 Et il ne suffit pas de dire que l'Accusation savait que des crimes allaient
23 être commis -- plutôt, il devait être conscient du type de crimes qui
24 risquait d'être commis, ce qui signifie qu'il faut qu'il soit conscient des
25 éléments essentiels, notamment de l'état d'esprit des auteurs physiques.
26 L'accusé devait également savoir que ses actes allaient aider à la
27 commission du crime et une fois de plus, il ne suffit pas d'être au courant
28 ou d'avoir connaissance d'un risque éloigné ou léger. Il devait être
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1 informé de la probabilité que ses actes allaient aider.
2 Et cet élément moral doit être présent au moment où l'accusé fourni cette
3 assistance.
4 Au vu de ces exigences, ce critère est loin d'être un critère de
5 responsabilité stricte comme l'avance la Défense. En fournissant un soutien
6 crucial aux unités qui commettaient systématiquement des crimes en sachant
7 qu'ils allaient probablement connaître d'autres crimes et étant donné que
8 l'on lui informait de la nature du soutien qui pouvait avoir un effet
9 important sur ces crimes, Perisic -- je dois dire que toutes les conditions
10 sont respectées pour M. Perisic.
11 Donc, c'est à juste titre qu'il a été considéré coupable d'avoir aidé et
12 encouragé. Donc, tous les moyens d'appel eu égard à sa responsabilité pour
13 avoir aidé et encouragé devraient être rejetés.
14 M. LE JUGE MERON : [interprétation] J'aimerais poser une question pour
15 m'aider à comprendre ces problèmes difficiles.
16 Imaginez en fait que la Chambre d'appel serait d'avis que l'aide devra
17 tendre précisément à faciliter le crime afin de pouvoir prononcer une
18
19
20 condamnation pour avoir aidé et encourager. Est-ce que vous pourrez nous
21 indiquer dans les dossiers ce qui était cette condamnation pour avoir aidé
22 et encouragé si nous considérons que cela est un critère primordiale pour
23 un acte visant précisément, et pour que cela soit nécessaire.
24 Mme GOY : [interprétation] Mais cela en fait dépend beaucoup de la façon
25 dont l'on comprend cette notion d'acte ayant visé précisément ou tendant
26 précisément, et je pense qu'il faut que nous le compreniez bien.
27 Premièrement, la Chambre d'appel nous pose la question précise à propos de
28 ce concept, donc tendant précisément à faciliter l'aide et l'encouragement.
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1 Voilà quelle est notre réponse : la Chambre d'appel dans Mrksic, au
2 paragraphe 159, a réglé la question en concluant qu'un acte tendant
3 précisément à faciliter quelque chose n'est pas un élément primordial et
4 essentiel de l'actus reus pour avoir aidé et encouragé, il n'y a pas de
5 raisons connues pour s'écarter de cette conclusion.
6 Dans la jurisprudence du TPY, agir, avoir un acte ou commettre un acte qui
7 vise précisément à faciliter n'a été discuté que dans le cadre de l'actus
8 reus pour avoir aidé et encouragé. Cet actus reus est composé d'assistance,
9 d'encouragement ou de soutien moral, qui ont un effet important sur la
10 commission d'un crime précis de la part de l'auteur principal. Donc cela
11 n'est pas un élément essentiel de l'actus reus, parce qu'il est englobé par
12 d'autres, par les autres éléments.
13 Je vais tenter de vous expliquer notre point de vue : premièrement, je vais
14 m'intéresser aux origines de ces substantifiques, de cette notion donc
15 "tendant précisément" à dans la jurisprudence du Tribunal.
16 Deuxièmement, je vous présenterai l'interprétation de cette notion par la
17 Chambre d'appel dans l'affaire Blagojevic qui a été reprise par la Chambre
18 d'appel pour l'affaire Mrksic. Et, troisièmement, je vais envisager la
19 situation d'un accusé qui se trouve du point de vue géographique et
20 également de la scène de lieu du crime.
21 A commencer par l'origine des mots.
22 Vous vous souviendrez que cette notion a été introduite dans la
23 jurisprudence par la Chambre d'appel dans l'affaire Tadic, il s'agissait de
24 faire la différence entre une responsabilité pour avoir aidé et encouragé,
25 une responsabilité dans le cadre d'une entreprise criminelle commune. Je
26 pense que vous avez maintenant le paragraphe pertinent de l'arrêt Tadic.
27 Paragraphe 229.
28 Est-ce que vous le voyez ? Je le pense. Oui.
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1 Et voilà ce qu'a déclaré l'arrêt dans l'affaire Tadic, et je cite :
2 "La personne qui aide et encourage exécute des actes qui tendent
3 précisément à aider, encourager ou à fournir un soutien, un appui moral
4 pour la commission d'un crime précis … entre parenthèses meurtre,
5 extermination, viol, torture, destruction sans discrimination des biens
6 civils, fermer la parenthèses, et ce soutien a un effet important sur la
7 commission du crime."
8 Donc ce qui est requis ce sont des actes en fait qui tendent précisément ou
9 qui visent précisément un certain type de comportement : l'assistance,
10 l'appui moral, qui ensuite vise un crime spécifique.
11 Et la Chambre d'appel a indiqué ce qui était requis pour une entreprise
12 criminelle commune, et je cite le reste du paragraphe :
13 "Par contraste, lorsqu'il s'agit d'agir pour aboutir à un but commun ou un
14 dessein commun, il suffit que le participant se livre à des actes qui,
15 d'une façon ou d'une autre, tendent à faciliter le plan ou l'objectif
16 commun."
17 Donc ce qui est requis en fait pour l'entreprise criminelle commune est
18 n'importe lequel type de comportement qui vise non pas un crime spécifique,
19 mais qui vise l'entreprise et le but commun.
20 En tant qu'élément objectif, un comportement qui vise précisément à
21 faciliter un crime précis ne peut seulement signifier qu'il y a
22 comportement pour lequel on peut établir des liens avec le crime spécifique
23 qui consiste à fournir une assistance.
24 Alors il n'est pas logique d'indiquer que la seule signification objective
25 d'un acte doit être d'aider un crime, parce que quasiment n'importe lequel
26 acte peut être utilisé pour des actions criminelles et non criminelles
27 d'ailleurs.
28 Et cela correspond tout à fait à la jurisprudence de ce Tribunal qui
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1 indique que le comportement, et j'en veux pour preuve le paragraphe 243
2 dans l'affaire Furundzija, qui indique, disais-je, que le comportement de
3 la personne qui a aidé et encouragé peut être parfaitement licite. Cela
4 devient criminel que lorsqu'on trouve un lieu ou cela est combiné avec le
5 jugement dans l'affaire Furundzija où il est question de comportement
6 illégal et illicite de la part de l'auteur principal, et il faut qu'il y
7 ait des liens suffisants avec la personne qui a aidé et encouragé.
8 Donc il faut savoir, par exemple, que dans l'affaire Blagojevic, la Chambre
9 d'appel a indiqué que lorsqu'il est indiqué qu'un acte qui tend précisément
10 à faciliter un crime sera très souvent implicite lorsque l'on conclut que
11 l'accusé a fourni une assistance pratique à l'auteur principal et que cela
12 a un effet important. Paragraphe 189 de l'arrêt dans Blagojevic.
13 Il est important de ne pas oublier lorsque l'on prend en considération
14 l'arrêt dans l'affaire Blagojevic, qu'au paragraphe 193 la Chambre d'appel
15 a conclu à propos donc de cette notion d'acte tendant précisément à
16 faciliter que la question principale pour l'actus reus dans le cas d'aide
17 et d'encouragement est de savoir si l'accusé a eu un effet important sur la
18 commission du crime. Ce qui signifie que dans l'affaire Mrksic, la Chambre
19 d'appel a interprété
20
21
22 correctement l'arrêt Blagojevic comme signifiant que l'acte qui tend
23 précisément à faciliter un crime n'est pas un ingrédient, un élément
24 essentiel de l'actus reus pour avoir aidé et encouragé.
25 Si nous prenons maintenant la situation d'un accusé qui se trouve loin,
26 éloigné du lieu du crime, la réponse reste la même. Il n'y a aucune raison
27 que le critère juridique doit être différent lorsque l'accusé se trouve
28 éloigné géographiquement du lieu du crime. La Défense ne fournit, n'étaye
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1 absolument leur proposition, et elle se contente d'indiquer l'opinion
2 dissidente de M. le Juge Moloto dans le jugement.
3 Et donc l'éloignement à notre avis peut être un facteur à prendre en
4 considération par la Chambre de première instance pour se demander si les
5 actes de l'accusé ont eu un effet important sur la commission du crime.
6 Donc dans la pratique, l'éloignement de l'accusé peut signifier qu'il est
7 plus difficile de montrer que le comportement a eu un effet important si
8 l'accusé est véritablement éloigné du lieu du crime, mais cela ne modifie
9 aucunement le critère juridique. Et nous avons déjà dans notre mémoire en
10 réponse aux paragraphes 96 à 99 à propos de l'aide et de l'encouragement
11 indiqué que l'assistance ne doit pas forcément être directe. Donc le fait
12 que l'assistance a été fournie à un dépôt qui ensuite l'a fournie à des
13 unités ne signifie pas que le lien n'est pas suffisant.
14 Donc pour conclure, à propos de l'élément matériel il s'agit d'un acte ou
15 d'actes d'assistances, d'encouragement et de soutien moral, qui ont eu un
16 effet important sur le crime. Et pour être exhaustif, nous souhaiterions
17 ajouter qu'il n'est pas possible d'interpréter cette notion d'acte tendant
18 précisément à faciliter que les conditions suggestives. Et j'aimerais
19 rappeler à Mesdames, Messieurs les Juges, que la Défense en fait a fait
20 référence à un libellé que l'on trouve dans un arrêt du TPIR, mais je dois
21 dire qu'il se peut qu'il y ait une erreur de traduction qui se soit glissée
22 là, parce que la première fois que cela se soit trouvé -- que c'est la
23 première fois que cela soit apparu, c'était dans l'arrêt Ntagerura -
24 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je pense que vous allez un peu trop
25 vite.
26 Mme GOY : [interprétation] Excusez-moi.
27 La première fois donc c'était dans l'arrêt Ntagerura. Dans la version
28 anglaise donc le jugement a été rendu en français et en français, et dans
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1 la version française au paragraphe 370, la Chambre d'appel utilise les
2 termes français "actes qui visent spécifiquement A," qui est le libellé
3 français qui a été utilisé depuis le début lorsqu'ils ont traduit l'arrêt
4 dans l'affaire Tadic. Donc, dans la traduction française -- plutôt, dans
5 l'original français, il n'y a pas de nouvelles terminologies que l'on
6 trouve. Ce n'est que dans la version, dans la traduction anglaise que les
7 mots "visant à" ont été introduits, ils ont été ensuite reproduits dans
8 d'autres jugements. Donc en ce qui nous concerne, ces termes "visant" sont
9 des termes qui ont été utilisés pour traduire l'original en français.
10 Donc il n'est pas possible de comprendre cet acte visant précisément comme
11 une condition suggestive. La Chambre d'appel, dans l'affaire Mrksic au
12 paragraphe 159, c'est le même paragraphe auquel j'ai déjà fait référence,
13 indique de façon très, très claire que cette notion fait partie de l'actus
14 reus et ne fait pas partie du mens rea, donc de l'élément moral pour avoir
15 aidé et encouragé.
16 Ce qui est beaucoup plus important pour nous en fait ou à notre avis, c'est
17 que l'élément moral pour avoir aidé et encouragé correspond à la
18 connaissance, et je fais référence au moyen d'appel 7. Il s'agit en fait
19 d'une norme qui est incompatible à la façon de comprendre cet acte visant
20 précisément comme étant considéré comme un objectif.
21 Cette norme se base sur le droit coutumier international, elle a été
22 utilisée dans ce Tribunal, au TPIR pendant plus de dix ans, dans d'autres
23 tribunaux et cours internationales, tel que la Cour spéciale pour le Sierra
24 Leone, le Tribunal spécial pour le Liban et les Chambres extraordinaires au
25 sein des tribunaux ou des Cours de Cambodge. Aucune raison impérieuse ne
26 justifie la non-application de ce texte.
27 L'article 25.3 C des Statuts de la CPI ne constitue pas une raison
28 impérieuse puisque ça n'avait pas l'intention ni l'expression du droit
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1 international coutumier.
2 Le paragraphe 159 dans l'affaire Mrksic a rejeté cette norme plus
3 rigoureuse de mens rea.
4 Pour conclure, cet acte visant précisément à faciliter un crime est compris
5 dans les autres éléments de l'aide et de l'encouragement.
6 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc vous nous laissez penser que la
7 formulation du Statut de Rome stipulant qu'une personne a dû agir avec
8 comme objectif de faciliter la commission des crimes est un critère
9 nécessaire pour l'aide et l'encouragement mais ce n'est pas quelque chose
10 que l'on devrait prendre en compte. C'est ce que vous avancez ici.
11 Mme GOY : [interprétation] Non, Monsieur le Président. J'ai dit que ceci ne
12 reflète le droit coutumier international. Si on regarde l'histoire des
13 négociations, c'est un compromis qui a été négocié parce qu'aucun accord ne
14 pouvait être conclu sur la question de la connaissance ou de l'intention.
15 Et c'est donc la formulation qui a été utilisée, mais rien ne laisse penser
16 dans l'histoire donc de ce Statut que l'état des parties souhaitait asseoir
17 ce principe dans le droit coutumier international.
18 Donc je passe maintenant à votre deuxième question : est-ce qu'une aide qui
19 ne vise pas précisément à faciliter à un crime précis peut avoir un effet
20 important nécessaire pour pouvoir condamner au titre de l'aide et
21 l'encouragement ?
22 D'une certaine manière, j'ai déjà répondu à la question en répondant à la
23 question numéro 1.
24 Si l'on comprend cette notion visant précisément à faciliter un crime
25 précis comme étant un besoin suggestif, ce qui n'est pas, on peut vraiment
26 répondre à la question de savoir si cette aide peut avoir un effet
27 important sur la commission d'un crime, parce que dans ce cas-là il
28 s'agirait en fait d'une enquête indépendante par rapport à l'effet
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1 important des besoins suggestifs, et la réponse serait affirmative parce
2 qu'il s'agirait en fait d'un exercice suggestif.
3 Mais comme nous l'avons expliqué, cette notion d'acte visant précisément à
4 faciliter un crime ne peut pas faire partie de l'élément matériel mais est
5 compris dans les besoins nécessaires pour que l'assistance ait un effet
6 important.
7 Si vous suivez cette position, dans ce cas-là la question n'a pas lieu
8 d'être. Cependant, si on répond à cette question, la réponse serait la
9 suivante : un acte qui n'a pas pour objectif de prêter assistance à un
10 crime précis dans la mesure qui n'est pas suffisamment lié pour constituer
11 une assistance, un acte de ce type ne peut pas avoir donc un effet
12 important suffisant qui est nécessaire pour que l'on considère qu'il y a
13 une aide et un encouragement. Donc la réponse, par conséquent, est une
14 réponse négative.
15 Je passe maintenant à la troisième question. Est-ce que l'aide fournie par
16 Perisic a répondu aux critères de cette notion d'acte visant précisément à
17 faciliter un crime dans le contexte de l'aide et l'encouragement ? Et je
18 voudrais revenir à la question de M. le Juge Meron me demandant de citer
19 des éléments de preuve précis, parce que comme j'ai expliqué notre
20 position, je peux maintenant rentrer dans les détails.
21 Si l'on considérait cette notion d'acte visant précisément à faciliter un
22 crime comme besoin suggestif, on pourrait dire que l'aide qui a été
23 facilitée par Perisic n'aurait pas correspondu à un critère de cette
24 notion, parce que l'Accusation dans le procès n'a jamais dit que c'était
25 Perisic qui avait eu comme intention de commettre des crimes précis. Mais
26 je rappelle encore une fois, selon nous, cette notion signifie que l'acte
27 est suffisamment lié avec un crime précis pour fournir une assistance.
28 Etant donné que les actions, les actes étaient liés à des crimes
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1 spécifiques, étant donné que son comportement a eu un effet important sur
2 la commission de ces crimes, la réponse est dans ce cas-là, une réponse
3 affirmative. Et je vais développer sur cette notion d'effet important de
4 l'assistance de Perisic.
5 Et donc nous avons déjà mentionné dans notre mémoire en réponse en ce qui
6 concerne les moyens 5 et 6 qui parlaient donc de cet effet important.
7 Je passe maintenant à la quatrième question : est-ce que la Chambre de
8 première instance a commis une erreur en concluant que l'assistance
9 facilitée par Perisic avait un effet important sur la commission des crimes
10 commis par la VRS ?
11 La réponse très courte est non. La Chambre de première instance n'a pas
12 commis d'erreur.
13 Compte tenu de la nature cruciale de l'appui de M. Perisic fourni aux
14 Unités de la VRS, qui a commis des crimes systématiquement, la seule
15 conclusion raisonnable à laquelle on peut arriver est que le comportement
16 de M. Perisic a eu un effet important sur la commission des crimes par la
17 VRS à Sarajevo et à Srebrenica. La Chambre de première instance a conclu
18 que l'assistance logistique et l'assistance en matière de personnel fournie
19 par Perisic, tant du point de vue individuel que cumulatif, a eu un effet
20 important sur les crimes commis par la VRS à Sarajevo et Srebrenica.
21 Cette conclusion est la seule conclusion raisonnable à laquelle on peut
22 arriver, parce que les Unités de la VRS à Srebrenica et à Sarajevo, c'est-
23 à-dire le Corps de la Drina et la RSK, dépendaient de la VJ pour mener
24 cette guerre. L'appui de Perisic était crucial pour cette guerre. La guerre
25 comprenait une commission systématique de crimes par la VRS. Ce n'était pas
26 un produit accessoire de la guerre, comme la Défense l'a avancé
27 aujourd'hui, cela signifie que le soutien fourni par Perisic était
28 également crucial pour la commission de ces crimes, et par conséquent avait
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1 un effet important sur ces crimes.
2 Perisic était l'architecte du système qui a permis de soutenir la VRS par
3 le biais d'une assistance en matière de personnel et par le soutien d'un
4 soutien logistique, et les deux ont eu un effet important sur les crimes.
5 Je vais tout d'abord commencer par le soutien en matière de personnel.
6 Perisic a permis à la VRS de mener la guerre à Sarajevo, à Srebrenica, en
7 créant et en assurant le suivi des centres d'affectation au personnel.
8 Perisic a pu s'assurer que tous les membres qui étaient détachés reçoivent
9 leurs salaires et bénéficient des avantages de la VJ.
10 Parce qu'ils étaient membres des centres d'affection du personnel, les
11 officiers pouvaient mettre en œuvre la stratégie de guerre, qui comprenait
12 la commission systématique de crimes, et l'ont fait sans avoir à
13 s'inquiéter des besoins de base ni de ceux de leurs familles.
14 Ceci a eu un effet important sur la commission des crimes à Sarajevo et à
15 Srebrenica, parce que les officiers haut placés, clés, responsables de ces
16 crimes, c'est-à-dire Ratko Mladic, Dragomir Milosevic, Stanislav Galic,
17 Vujadin Popovic, Milan Gvero, Zdravko Tolimir et Radislav Krstic, étaient
18 des membres du 30e Centre d'Affectation du personnel. Ils pouvaient lutter
19 dans cette guerre comprenant la commission systématique de crimes sans
20 s'inquiéter de leurs besoins de base ou de ceux de leurs familles, parce
21 que le système des centres d'affectation du personnel permettaient de
22 s'assurer qu'ils perçoivent leurs salaires, leurs retraites, des avantages
23 en matière de logement, d'autres avantages, une assurance santé, une
24 assurance médicale, et cetera, pour eux et pour la famille.
25 Par conséquent, ceci a un effet important sur les crimes commis à Sarajevo
26 et à Srebrenica.
27 En plus de ce soutien en matière de personnel, Perisic a également fourni
28 un soutien logistique qui a eu un effet important sur la commission des
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1 crimes. Et je l'ai déjà mentionné dans ma réponse à la question posée par
2 M. le Juge Meron, il a persuadé le Conseil suprême de la Défense de lui
3 donner les pouvoirs juridiques qui permettaient d'assurer cette assistance.
4 Il a convenu avec Mladic d'une procédure qui permettait à Perisic
5 d'approuver les demandes de la VRS.
6 En tant que chef d'état-major de la VJ, Perisic a donc supervisé un système
7 qui a fourni un soutien technique et logistique de grande envergure et
8 complet à la VRS avec, par exemple, la fourniture de quantités importantes
9 de munitions et d'autres armes, une expertise technique, des services de
10 réparation, du carburant ainsi que de la formation en matière de personnel.
11 Ce système, sous le contrôle de Perisic, a permis à la VRS de fonctionner
12 en tant qu'armée et de mener la guerre, et parmi les unités qui ont reçu
13 cette assistance, il y avait la SRK ainsi que le Corps de la Drina.
14 Parce que la VJ, sous l'égide de Perisic, était le contributeur-clé de
15 cette assistance, et ceci pratiquement gratuitement, cette assistance a eu
16 un effet important sur la commission des crimes. Sans ce système qui était
17 contrôlé par Perisic, le Corps de la Drina et la SRK n'auraient pas pu
18 mener cette guerre à Sarajevo et à Srebrenica de la manière dont ils l'ont
19 menée et ils n'auraient pas pu non plus avoir commis les crimes tels qu'ils
20 les ont commis.
21 La Chambre de première instance s'est penchée sur les éléments de preuve et
22 a réalisé un examen factuel détaillé. Je me concentrerai dans les minutes
23 qui suivent à l'aide fournie en matière d'armes.
24 L'état-major général de la VJ sous la supervision de Perisic a fourni des
25 quantités importantes d'armes et d'assistances associées à la VRS, y
26 compris à la SRK et au Corps de la Drina, et ce soutien était fourni par
27 trois filières principales.
28 Tout d'abord, des armes ont été fournies directement aux Unités de la VRS,
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1 y compris au Corps de la Drina et à la SRK suite à une demande de l'état-
2 major principal de la VRS, et j'en veux pour preuve les paragraphes du
3 jugement de la Chambre de première instance 1062 et 1064.
4 Deuxièmement, pour ce qui est du dépôt de Koran qui était le dépôt de
5 stockage de la VRS pour les armes qui permettaient d'approvisionner le
6 Corps de la Drina et de la SRK, a obtenu environ 70 % de ces munitions de
7 la VJ.
8 Troisièmement, l'état-major général de la VJ sous l'égide de Perisic a
9 fourni une assistance logistique importante à Pretis. Pretis était une
10 entreprise ou une usine qui fournissait des armes à la VRS. Cette usine,
11 Pretis, a fourni, entre autres, le Corps de la Drina ainsi qu'à la SRK.
12 Pretis a produit des munitions de gros calibre, des obus, des mines ainsi
13 que des bombes aériennes modifiées.
14 L'état-major général de la VJ, sous l'égide de Perisic, était impliqué
15 activement dans les activités de la production des bombes aériennes. Ce
16 soutien est passé par, par exemple, la conception des concepts de bombes
17 modifiées, l'envoi d'experts pour résoudre des problèmes opérationnels et
18 également la fourniture de pièces détachées pour ces bombes aériennes dans
19 la VRS. Les armes étaient également testées à l'usine Pretis.
20 Et l'état-major général de la VJ réparait les armes de la VRS et compte
21 tenu de ces réparations, ceci signifie que ces armes pouvaient être
22 utilisées à tout moment. En plus de cette assistance, la VJ, sous
23 l'autorité de Perisic, a également fourni une formation, du carburant ainsi
24 que de l'expertise technique à la VRS. Ces différentes méthodes d'appui
25 logistiques étaient tellement importantes pour la VRS, y compris pour le
26 Corps de la Drina et pour la SRK, que ceci signifie que ces unités
27 dépendaient de cette assistance pour mener la guerre quelles que soient les
28 sources de l'approvisionnement.
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1 Mladic et Perisic ont reconnu eux-mêmes cette dépendance. Perisic, par
2 exemple, a dit au CSD en février 1994, que la RS et la RSK ne pouvaient pas
3 se défendrent sans notre assistance et sans nos armes et sans notre
4 assistance militaire. Il s'agit du paragraphe 1598, pièce P1292. Mladic a
5 dit également qu'il ne pourrait pas vivre sans l'aide de la RFY. Paragraphe
6 1598, pièce P1292.
7 La Chambre de première instance a analysé également soigneusement les
8 autres sources de l'approvisionnement dans plus de 20 pages du jugement et
9 a conclu que l'assistance logistique de la VRS reçue par la VJ était très
10 importante par rapport aux autres sources.
11 Donc, quels que soient les autres sources d'approvisionnement, la VRS, y
12 compris le Corps de la Drina et la SRK, dépendaient de la VJ pour mener la
13 guerre, une guerre qui passait par la commission systématique de crimes.
14 Par conséquent, il est inévitable que le Corps de la Drina et que la SRK
15 aient également dépendu de la VJ pour commettre les crimes à Sarajevo et à
16 Srebrenica.
17 La Chambre de première instance n'est arrivée qu'à la seule conclusion
18 raisonnable, à savoir que l'assistance logistique fournie par Perisic a eu
19 un effet important sur la commission de ces crimes.
20 Contrairement à ce que la Défense suggère, ceci n'est pas minimisé par le
21 fait que la Chambre de première instance n'a pas été en mesure de conclure
22 au-delà de tout doute raisonnable sur la base des éléments présentés en
23 l'espèce que Perisic avait participé à la fourniture d'obus et de balles
24 spécifiques qui avaient été retrouvés sur les lieux des crimes à Sarajevo
25 et à Srebrenica. Et, de toute façon, je voudrais rappeler que ces balles
26 n'étaient qu'un échantillon.
27 Tout d'abord, il y avait différentes autres formes d'assistance pratique
28 qui ont été fournies et j'en ai parlé.
Page 61
1 De plus, au vu du montant ou de la somme de munitions qui ont été fournies
2 et de la durée de cette assistance, il n'était pas possible de s'assurer
3 que les armes auraient des usages spécifiques ou seraient utilisées pour
4 des crimes commis, et par conséquent, il n'était pas raisonnable de
5 conclure que les munitions fournies par la VJ n'étaient utilisées que pour
6 des usages licites. Et compte tenu du fait que l'approvisionnement en armes
7 était crucial pour la VRS, leurs efforts de guerre, y compris les aspects
8 criminels de cette guerre à Sarajevo et Srebrenica, auraient été
9 impossibles à mettre en œuvre si la VJ n'avait pas fourni ces quantités
10 importantes d'armes.
11 Et ceci, même si la Chambre de première instance n'a pas été en mesure de
12 déterminer sur la base des éléments de preuve qui ont été présentés que ces
13 balles avaient été fournies par la VJ ou pas.
14 Pour conclure, la Chambre de première instance n'est arrivée qu'à la seule
15 conclusion raisonnable, à savoir que le soutien en matière de personnel
16 ainsi que le soutien logistique fourni par Perisic a eu un effet important
17 sur la commission des crimes par la VRS à Sarajevo et à Srebrenica.
18 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pourrais-je vous poser une question qui
19 semblera peut-être hypothétique, mais ceci nous permettra peut-être de
20
21
22 mieux comprendre les problèmes en l'espèce, mais avant de poser la
23 question, je vais répéter quelque chose qui semblait évident pour cette
24 Cour d'appel. Lorsque nous posons des questions, cela ne signifie pas que
25 cela représente notre propre opinion. Nous posons ces questions parce que
26 nous voulons mieux comprendre le problème, et c'est donc dans cet état
27 d'esprit que vous devez comprendre nos questions.
28 Alors, en partant du principe que cette aide militaire fournie par le pays
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1 donné est à 100 %, c'est-à-dire que vous n'avez pas besoin de vous
2 inquiéter de l'origine des balles ou des munitions et que donc tout
3 l'approvisionnement provient de ce pays A, donc le pays A fourni toute
4 l'aide militaire à l'attention d'un pays belligérant ou d'une armée
5 belligérante dans un pays B. Dans le pays B, vous avez une guerre qui fait
6 rage et le bénéficiaire de cette aide s'engage tant à des activités
7 militaires licites qu'à un bombardement de grande envergure de cibles -- ou
8 de villes peuples de civils. Et le chef d'état-major du pays A peut-il être
9 tenu responsable pénalement de cela ?
10 Mme GOY : [interprétation] La réponse est de s'assurer que tous les
11 critères en matière des encouragements sont remplis. Tout d'abord, est-ce
12 qu'il y a un effet important de cette aide sur la commission des crimes ?
13 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais ce sont les seules armes et les
14 seules balles qui sont utilisées.
15 Mme GOY : [interprétation] La question dans ce cas-là est de savoir dans
16 quelle mesure le chef d'état-major ait été au courant.
17 M. LE JUGE MERON : [interprétation] On peut partir du principe qu'il était
18 au courant, mais rien de plus que cela.
19 [Les conseils de l'Accusation se concertent]
20 Mme GOY : [interprétation] Mesdames, Messieurs les Juges, la question est
21 de savoir si, d'après notre point de vue, si le chef de l'état-major est au
22
23
24 courant des deux, à savoir qu'il y a non seulement un risque éloigné que
25 les crimes pourraient être commis, mais la connaissance que ces crimes
26 pourraient être commis et qu'il sait que l'aide fournie sera sans doute
27 utilisée pour commettre ces crimes. Donc, si tel est le cas, dans ce cas,
28 les conditions de la complexité par aide et encouragement sont réunies.
Page 63
1 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. Je ne souhaitais pas
2 vous interrompre.
3 Mme GOY : [interprétation] Je souhaite ajouter une condition que me ramène
4 à ce que vous avez dit tout au début de cette audience. La question qui se
5 pose est également de savoir si dans ce scénario hypothétique il y avait
6 moyen de canaliser cette aide, puisqu'il y aura un but légitime et un but
7 non légitime. Question factuelle supplémentaire dont vous devrez peut-être
8 tenir compte lorsque vous déterminerez l'actus reus et le mens rea,
9 l'élément matériel et l'élément moral.
10 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.
11 Mme GOY : [interprétation] Ceci conclut ma présentation sur vos quatre
12 questions. Et si vous n'avez pas d'autres questions, Mesdames, Messieurs
13 les Juges, dans ce cas, je vais passer la parole à ma consœur, Elena Martin
14 Salgado.
15 Mme MARTIN SALGADO : [interprétation] Bonjour, Mesdames, Messieurs les
16 Juges. Je vais répondre à l'appel de la Défense sur la question de la
17 responsabilité du supérieur hiérarchique ainsi qu'à la cinquième question à
18 laquelle vous nous avez demandé de répondre.
19 En réponse à la question, il n'y a pas d'erreur. La Chambre de première
20 instance a à juste titre conclu que Perisic disposait de l'autorité de jure
21 et de facto pour donner des ordres de commandement et pour prendre des
22 mesures disciplinaires à l'égard des membres du 40e Centre d'Affectation du
23 personnel qui servait au sein de la SVK.
24 En parvenant à cette conclusion, la Chambre de première instance a apprécié
25 les éléments de preuve avec soin et les a analysés dans le contexte
26 approprié. Un contexte qui était caractérisé par une politique qui
27 consistait à maintenir les liens entre la VJ et les SVK secrets et à
28 poursuivre les objectifs qui se chevauchaient entre la VJ et le SVK.
Page 64
1 Sous le couvert d'une mission officiel au sein du 40e Centre de
2 l'Affectation du personnel, les troupes de la VJ servaient au sein de la
3 SVK. Le 4e [comme interprété] Centre d'Affectation du personnel créé par
4 Perisic visait à dissimuler les liens avec la VJ et avec la SVK et non pas
5 de les rompre. Il avait été conçu pour permettre à la VJ et à SVK de
6 réaliser leurs objectifs communs à l'abri des regards et d'un examen
7 minutieux.
8 La Chambre de première instance a donc soulevé le voile de la tromperie et
9 montré que la position d'autorité d'exerçait Perisic était une position
10 dans laquelle il exerçait un contrôle effectif sur les membres du 40e
11 Centre.
12 La Chambre a constaté que le 40e Centre était responsable du bombardement
13 de Zagreb et que c'était dû aux subordonnés de Perisic. Conclusion adéquate
14 et la condamnation de Perisic doit être retenue.
15 Tout d'abord, je veux parler de l'autorité de jure de Perisic, et
16 deuxièmement, sa capacité de facto à donner des ordres et à discipliner les
17 membres du 40e Centre.
18 Des membres du 40e Centre d'Affectation du personnel étaient des membres de
19 la VJ, même pendant qu'ils servaient au sein de la SVK. Perisic était le
20 commandant militaire le plus haut placé de la VJ, ce qui signifie que
21 pendant toute la période qui porte sur l'acte d'accusation, Perisic avait
22 l'autorité de jure sur le 40e Centre d'affectation du personnel qui faisait
23 partie de l'état-major général. De jure, par conséquent, son pouvoir sur
24 les membres du 40e Centre était le même que les pouvoirs qu'il exerçait sur
25 le reste de la VJ. Il pouvait donner des ordres, il pouvait imposer des
26 mesures disciplinaires de la même façon.
27 Voici donc autant pour son autorité de jure. Pour de la capacité de facto
28 de Perisic à l'égard des membres du 40e Centre, la Chambre a analysé cette
Page 65
1 capacité qu'il avait dans son contexte ainsi que d'autres éléments portant
2 sur le contrôle effectif qu'il exerçait.
3 J'ai déjà abordé la question du cadre du secret et des objectifs communs.
4 Pour ce qui est des autres éléments de preuve, la Chambre de première
5 instance a utilisé comme il se doit l'autorité de jure de Perisic comme
6 élément de preuve pour indiquer qu'il exerçait un contrôle effectif.
7 La Chambre a également abordé les autres pouvoirs dont disposaient Perisic.
8 Perisic pouvait valider les promotions et mettre un terme au service des
9 membres du 40e Centre qui occupaient tous les postes-clé au sein de la SVK.
10 Perisic a supervisé leur solde ainsi que d'autres éléments d'aide sur
11 lesquels dépendaient la SVK. Perisic a également reçu des rapports
12 régulièrement de la SVK qui lui permettaient de donner des ordres aux
13 membres du 40e Centre lorsque cela s'avérait nécessaire.
14 Perisic disposait de ces pouvoirs pendant toute la durée couverte par
15 l'acte d'accusation. Et tous étayent le contrôle effectif. Ces pouvoirs
16 corroborent également la capacité qu'avait Perisic de donner des ordres et
17 d'imposer des mesures disciplinaires aux membres du 40e Centre
18 d'affectation du personnel.
19 Donc, par exemple, la Chambre de première instance a constaté que le fait
20 de mettre un terme à un service militaire était un moyen d'apposer une
21
22
23 mesure disciplinaire aux membres du 40e Centre.
24 Le fait de refuser une promotion lorsqu'il n'était pas d'accord avec un
25 comportement était une autre manière qu'il avait pour imposer une mesure
26 disciplinaire.
27 Avant que je n'aborde les éléments de preuve spécifiques sur le fait de
28 donner des ordres et d'imposer des mesures disciplinaires, je souhaite
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1 insister sur le fait qui nous intéresse, la capacité dont il disposait,
2 capacité qu'il avait d'empêcher ou de punir, capacité qu'il avait de donner
3 des ordres ou d'imposer les mesures disciplinaires. Alors que le fait de
4 donner des ordres de commandement est quelque chose qui est pertinent
5 lorsqu'il s'agit de déterminer la capacité qu'il avait, il ne faut pas
6 confondre les deux. Comme les Juges de la Chambre l'ont conclu dans
7 l'affaire Popovic, c'est cette capacité qui est la preuve d'une relation,
8 d'un lien de subordination, parce que si tel n'est pas le cas, cela réduit
9 énormément le sens que l'on peut donner à cette responsabilité du supérieur
10 hiérarchique.
11 Je vais maintenant parler de la capacité qu'avait Perisic pour donner les
12 ordres de commandement. Il a donné des ordres avant, pendant et après le
13 pilonnage de Zagreb. Encore une fois, Mesdames, Messieurs les Juges, le
14 nombre d'ordres et de commandements qui ont été présentés comme preuve
15 doivent être analysés à la lumière dudit contexte. Son intervention directe
16 exposait les liens de la VJ entre lui et la SVK, quelque chose que lui et
17 les dirigeants de la RFY s'efforçaient à garder secret. Les ordres de
18 commandement présentés comme éléments de preuve sont compatibles avec la
19 position de Perisic tout en haut de la hiérarchie de la VJ et doivent être
20 analysés dans le contexte des objectifs qui se chevauchaient entre la VJ et
21 la SVK. Pour autant que ces objectifs coïncidaient, Perisic n'avait pas
22 besoin d'intervenir.
23 Et c'est dans ce contexte que les ordres de commandement qui ont été
24 donnés, qui ont été présentés comme preuve soient une preuve suffisante de
25 la capacité qu'avait Perisic à donner des ordres.
26 Avant le pilonnage de Zagreb, nous disposons d'éléments de preuve en vertu
27 desquels Perisic a donné deux ordres de commandement.
28 La pièce P1800 est un ordre de commandement qui a été donné par Perisic sur
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1 l'autorité ou l'instruction de Milosevic qui, à l'époque, était le
2 président de la Serbie. Alors ceci est logique, parce que l'ordre n'a pas
3 seulement été envoyé à Celeketic, qui faisait partie du 40e Centre
4 d'Affectation du personnel et qui était le commandant de l'état-major
5 principal de la SVK, mais ceci également a été envoyé à Martic qui était le
6 président de la RSK. L'ordre montre que Perisic était perçu comme quelqu'un
7 qui exerçait son autorité sur la SVK, ce qui est corroboré par des écoutes
8 téléphoniques où on entend Milosevic et Mikelic, qui était le premier
9 ministre de la RSK, qui s'attendent à ce que la SVK suive Perisic. Vous
10 trouverez ceci au paragraphe 1727 et note en bas de page 4724 du jugement.
11 Alors, pour revenir au P1800, il y a eu obéissance à l'ordre et ce rapport
12 a été envoyé à Milosevic par l'intermédiaire de Perisic comme l'indiquent
13 les éléments express de l'ordre.
14 Avant le 2 mai 1995, nous avons la pièce P1925. Ceci a été envoyé à au
15 moins un membre du 40e Centre d'Affectation du personnel, et il est clair
16 d'après le libellé contraignant que cet ordre a été obéi, paragraphe 264 de
17 notre mémoire en réplique.
18 Pendant le pilonnage de Zagreb le 2 mai 1995, Perisic a donné l'ordre à
19 Celeketic de faire cesser le pilonnage. Ceci montre également que Perisic
20 disposait de la capacité à donner des ordres de commandement. Celeketic,
21 cependant, a suivi les ordres de Martic et a continué à pilonner Zagreb le
22 lendemain. Celeketic a finalement obéi à l'ordre de Perisic montrant ainsi
23 qu'il estimait que cet ordre était contraignant, et pour cela nous avons le
24 3 mai 1995, le rapport de Perisic envoyé à Milosevic : "Oui, j'ai mis un
25 terme à cet action. Tout d'abord j'ai dit le contraindre mais finalement il
26 a cessé."
27 A cet égard, l'argument de la Défense, à savoir qu'il y avait les chaînes
28 de commandement parallèles excluent la notion de contrôle effectif ce qui
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1 est contredit par la jurisprudence que nous avons citée dans notre mémoire
2 au paragraphe 269, mais cela n'a pas de sens au plan militaire d'avoir des
3 chaînes de commandement parallèles qui est contredit par les éléments de
4 preuve entendus par la Chambre de première instance par le truchement du
5 témoin, le général Melvin, pages du compte rendu d'audience de l'affaire en
6 espèce 9 416, 9 444, et 2 772.
7 Après le pilonnage de Zagreb, la Croatie a pris le contrôle du territoire
8 de la Slavonie occidentale. La Défense fait valoir que les objectifs
9 étaient différents suite ou pendant le pilonnage de Zagreb mais ceci est
10 contredit par les éléments de preuve, à savoir qu'après le pilonnage
11 Perisic a continué à faire droit à des demandes d'assistance. Vous
12 trouverez une partie de ces éléments de preuve au paragraphe 1246 du
13 jugement rendu par la Chambre de première instance.
14 Ce qui est arrivé après le pilonnage de Zagreb c'est que Perisic a décidé
15 de participer de plus en plus au contrôle de la SVK, ceci montre qu'il
16 disposait de cette capacité pendant toute cette période.
17 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je dois simplement vous rappeler qu'il
18 vous reste cinq minutes.
19 Mme MARTIN : [interprétation] Je vous remercie. Celeketic a été remplacé en
20 tant que commandant de l'état-major principal de la SVK et il a été
21 remplacé à la demande de Perisic par Mile Mrksic. Il ne prenait pas des
22 ordres de Martic mais de Perisic, ce qui confirme la capacité dont
23 disposait Perisic, à savoir de donner des ordres de commandement.
24 Pendant et après l'opération Tempête en août 1995, Perisic a donné
25 plusieurs ordres de commandement à l'intention des membres du 40e Centre
26 d'Affectation du personnel qui faisait partie de la SVK. Le libellé de
27 l'ordre indique clairement qu'il s'agit d'ordres de commandement. En
28 particulier, pendant l'opération Tempête, Perisic a donné l'ordre d'arrêter
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1 et voir peut-être également d'exécuter "toutes les personnes alarmistes."
2 Ceci montre qu'il est intervenu au niveau du corps peut-être maintenir la
3 discipline au sein de la SVK, l'ordre a indiqué également que Perisic avait
4 le pouvoir de prendre les mesures disciplinaires. Perisic a imposé des
5 mesures disciplinaires et pouvait tenter des actions au pénal contre les
6 membres du 40e Centre. C'est ce qu'il a fait lorsque la SVK est tombé entre
7 les mains des forces croates. Des enquêtes se sont concentrées sur le
8 comportement des membres du 40e Centre lorsqu'ils servaient au sein de la
9 SVK. Et en cherchant à imposer les mesures disciplinaires à ses officiers
10 parce qu'ils avaient manqué à leurs obligations militaires en servant dans
11 la SVK, Perisic a clairement indiqué quel lien il y avait entre lui et eux
12 puisqu'il courrait le risque d'exposer l'intervention de la VJ dans la
13 guerre en Croatie. Au lieu de punir, il a mis un terme à leur service.
14 La Défense fait valoir que Perisic n'a pris ces mesures disciplinaires
15 qu'après la chute de la RSK lorsqu'il y a eu un nouveau commandement et un
16 contrôle et des liens entre eux. Mais ceci n'est étayé par aucun élément de
17 preuve. En réalité, pendant toute cette période, il y a aucun changement
18 systémique au niveau du pouvoir de Perisic sur les membres du 40e Centre.
19 Il n'a pas eu plus de pouvoirs après le pilonnage de Zagreb ou après la
20 chute de la RSK. Il a été chef de l'état-major général pendant toute cette
21 période. Son autorité et son contrôle effectif se sont poursuivis de la
22 même manière et disposait du pouvoir de donner des ordres et d'imposer les
23 mesures disciplinaires. Perisic n'a pas démontré qu'il y a eu une erreur
24 parce qu'il avait décidé de ne pas exercer ces pouvoirs ou plutôt qu'il ne
25 l'a pas fait.
26 La Chambre de première instance a pu analyser ou voir au travers de la
27 façade que présentait ce 40e Centre du personnel et analyse la réalité des
28 liens entre Perisic et ses membres, et c'est pour cette raison que l'équipe
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1 de la Défense sur la question de la responsabilité supérieure hiérarchique
2 doit être rejetée.
3 M. LE JUGE MERON : [aucune interprétation]
4 Mme BRADY : [interprétation] J'ai autant de contrôle sur mon équipe que Me
5 Lukic, il me reste que deux minutes. J'allais faire quelques commentaires
6 sur la peine prononcée contre M. Perisic compte tenu du temps dont nous
7 disposons nous pouvons le reposer sur le mémoire en appel, la peine qui a
8 été imposée le 27 ans à M. Perisic n'est pas excessive clairement et
9 convient tout à fait, convient tout à fait du fait du rôle absolument
10 crucial de M. Perisic qui a aidé et facilité ces crimes qui sont des crimes
11 extrêmement graves. Donc, aujourd'hui, Me Lukic s'est intéressé aux
12 circonstances atténuantes, notamment il a parlé des efforts apparents
13 déployés par M. Perisic pour œuvre pour la paix. Nous avançons en fait que
14 la Chambre était particulièrement bien placée pour déterminer
15 l'authenticité de ces efforts et le poids à leur accorder, et en fait dans
16 l'exercice de son pouvoir d'appréciation, la Chambre a eu tout à fait
17 raison de n'accorder aucun poids à ses efforts pour la paix pendant la
18 guerre et pour ce qui est en fait de la libération des humanitaires
19 français et des otages de la FORPRONU parce que la conclusion de la Chambre
20 de première instance a été qu'il n'a pas véritablement œuvré de façon
21 véritable pour la paix, et a estimé en fait que ses actes étaient motivés
22 par un opportunisme politique plutôt que par l'altruisme.
23 Et il en va de même pour la libération des pilotes français.
24 Donc un mot, commençant, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous
25 avançons qu'une peine de 27 ans est tout à fait appropriée. Aujourd'hui, il
26 n'a pas prouvé ni dans ses mémoires non plus, il n'a montré aucune erreur
27 manifeste qui justifierait une diminution de cette peine. La peine en
28 question tient compte de la gravité des crimes sous-adjacents à Srebrenica,
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1 à Sarajevo, ainsi qu'à Zagreb, et sa responsabilité au titre de l'article
2 7(3) pour Zagreb et sa contribution pour ces crimes. Donc nous demandons
3 que tous ces moyens d'appel soient rejetés.
4 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons reprendre
5 dans 20 minutes, à savoir à 11 heures 50 précises.
6 --- L'audience est suspendue à 11 heures 30.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 50.
8 M. LE JUGE MERON : [interprétation] La réplique de la part de Me Lukic.
9 Vous avez 30 minutes.
10 M. LUKIC : [interprétation] Alors, j'ai repris le contrôle de mon équipe,
11 ce qui fait que je vais m'adresser à vous en premier.
12 M. LE JUGE MERON : [aucune interprétation]
13 M. LUKIC : [interprétation] Alors, voilà ce que j'aimerais vous dire à
14 propos de la peine, parce que c'est l'élément auquel on a accordé le moins
15 d'attention aujourd'hui, et je reprends les arguments avancés par
16 l'Accusation, qui aujourd'hui a avancé et déclaré que dans son mémoire en
17 appel, la Défense de M. Perisic n'a pas indiqué les erreurs importantes
18 commises par la majorité, ce qui fait que la peine peut être diminuée.
19 Alors je ne vais pas répéter, réitérer toutes les erreurs que nous avons
20 énoncées dans notre mémoire, mais je peux vous dire que rapidement et
21 succinctement aujourd'hui, que la Défense a très clairement prouvé et
22 démontré que la majorité a commis une erreur lorsqu'elle a évalué la
23 gravité du crime, parce que dans son jugement et eu égard à la
24 responsabilité précise - et là, je vous parle du crime de Srebrenica - les
25 arguments que l'on retrouve dans le jugement relèvent exclusivement ou
26 portent exclusivement sur le crime d'extermination. Il faut savoir que M.
27 Perisic a été acquitté de ce chef.
28 Pour ce qui est de Sarajevo, la majorité s'est appuyée sur le crime du
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1 génocide, d'ailleurs il faut savoir que cela n'a pas été reproché à M.
2 Perisic, et il a été question des quatre ans de siège autour de Sarajevo,
3 ce qui d'ailleurs dépasse la période couverte par l'acte d'accusation.
4 Il y a autre chose que j'aimerais indiquer, il y a deux moyens d'appel qui
5 sont assez semblables, eu égard aux actes individuels commis par l'accusé
6 et à son rôle pour les crimes. Donc cela devrait être déterminé par la
7 Chambre de première instance. Il faut savoir que la Chambre a commis ou
8 dépassé en fait son pouvoir d'appréciation parce qu'elle a considéré cet
9 acte comme une conséquence aggravée.
10 Je vous rappelle de votre norme dans le jugement, où il est dit, que la
11 Chambre de première instance doit fournir des conclusions et doit étayer
12 ces conclusions par écrit en avançant les raisons qui sont énoncées pour
13 qu'une personne soit considérée comme coupable, et ce, afin que la Chambre
14 d'appel soit à même de comprendre le raisonnement suivi par la Chambre
15 d'appel. Or, dans le jugement, nous ne trouvons aucune conclusion suivant
16 laquelle la Chambre de première instance a estimé que les actions de M.
17 Perisic étaient illégales et illicites. Dans le jugement non plus on ne
18 trouve pas de conclusions relatives à la gravité des crimes commis et eu
19 égard au rôle joué par M. Perisic, on ne trouve qu'une phrase où il est
20 indiqué qu'il avait le poste et qu'il exerçait la fonction de chef d'état-
21 major de la VJ pendant la période couverte par l'accusation. Par
22 conséquent, à la fois nous-mêmes et la Défense, nous sommes tous perplexes
23 lorsqu'il s'agit de savoir ce qui a été pris en considération par la
24 Chambre de première instance et ce qui n'a pas été pris en considération.
25 Pour ce qui est des circonstances atténuantes maintenant, notre mémoire en
26 clôture a été mentionné, et en fait, au vu de la pratique qui est retenue,
27 je dirais que j'ai mentionné l'affaire Milosevic, certes, mais il n'empêche
28 que c'est vous qui allez évaluer les actions et les conséquences. Et c'est
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1 ce qui doit être pris en considération eu égard aux circonstances
2 atténuantes. Par exemple, la contribution à la peine doit être prise en
3 considération comme une circonstance atténuante.
4 Dans l'affaire Milosevic, comme je vous l'ai déjà dit, vous avez établi que
5 sa contribution pour mettre un terme à la campagne des tirs embusqués a été
6 si importante qu'elle a été définie et décrite comme circonstance
7 atténuante. Et je dois également procéder à une autre analogie, il s'agit
8 des circonstances atténuantes pour le moyen d'appel, notre moyen d'appel
9 17. Il s'agit des conclusions relatives à ces 700 soldats de l'armée de
10 l'ABiH dont leur vie a été épargnée et qui avaient franchi à la nage la
11 Drina en 1995. La majorité a commis une erreur en avançant qu'il ne
12 s'agissait pas d'une circonstance atténuante, en disant que c'était Perisic
13 lui-même qui avait fourni l'assistance requise à la VRS, et qui de ce fait
14 avait contribué à la situation dans laquelle se trouvaient ces soldats.
15 J'aimerais vous rappeler qu'en tant que Chambre d'appel dans l'affaire
16 Krajisnik, vous avez pris en considération une circonstance atténuante qui
17 est la suivante : il avait aidé certains non-Serbes qui étaient en
18 détention, avait été le fait que c'était l'une des personnes qui avait créé
19 des conditions de détention de ces personnes.
20 Dans l'affaire Dragomir Milosevic, la Chambre d'appel après a suivi --
21 plutôt, repris la décision de la Chambre de première instance qui l'avait,
22 qui avait conclu à sa culpabilité pour les crimes qui allaient être commis,
23 mais par ailleurs sa participation lors des pourparlers de paix, a été
24 prise en considération comme une circonstance atténuante. En ce sens, je
25 pense qu'il s'agit d'une erreur importante, à savoir la majorité n'a pas
26 tenu compte du fait que Perisic par sa contribution a sauvé la vie de plus
27 de 700 membres de l'ABiH, grâce à son intervention auprès de M. Milosevic,
28 et je pense que cela devrait être évalué comme une circonstance atténuante
Page 74
1 importante.
2 Je vais maintenant donner la parole à Me Bourgon.
3 M. BOURGON : [interprétation] Bonjour à nouveau, Monsieur le Président. Je
4 vais m'intéresser à la question 5, les arguments soulevés par l'Accusation
5 à ce sujet.
6 Et je commencerais, dans un premier temps, de vous parler de l'argument qui
7 n'a pas été évoqué par l'Accusation lorsqu'ils ont parlé de Celeketic. Je
8 vous ai dit ce matin, que Perisic, lorsque Celeketic refuse de suivre son
9 conseil qui est d'arrêter le bombardement parce qu'il n'est pas d'accord
10 avec ce bombardement, s'il avait eu l'autorité sur les membres du 40e
11 Centre du personnel, aurait pu aller voir l'équipe en question, et il leur
12 aurait dit arrêter. C'est ce qu'un commandant fait et c'est ce que fait un
13 commandant lorsqu'il a le contrôle sur une entité qui était composée de
14 tous les officiers importants qui venaient du 40e Centre du personnel. La
15 plupart ne se sont pas penchés du tout sur cette question. Ils n'ont pas
16 remarqué que Perisic n'a pas fait cela. Or, ceci est très important,
17 Monsieur le Président. Pourquoi est-ce important ? Eh bien, tout simplement
18 parce que Perisic ne l'a pas fait, et ce, pour deux raisons : d'abord, il a
19 respecté la chaîne de commandement de l'armée serbe de la Krajina; et de
20
21
22 deux, il savait qu'il n'avait pas l'autorité de contourner Celeketic. Et
23 ça, c'est l'élément crucial pour ce qui est d'un contrôle effectif. Lorsque
24 Milosevic s'est entretenu avec Perisic, il n'a jamais suggéré à Celeketic
25 pour lui dire : Eh Momo, vas vers l'équipe d'Arkan, au 40e Centre du
26 personnel et des effectifs et d'interrompre tout ceci. Donc Milosevic a
27 compris qu'il n'y avait pas une autorité exercée par Perisic qui se
28 rapporterait au 40e Centre chargé des effectifs.
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1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 Alors maintenant pour ce qui est des question de jure. Le Procureur y a
12 fait référence ce matin, je voudrais y revenir quelque peu. On fait
13 référence à ce que j'appellerais argument circulaire. C'est la chose qu'a
14 faite la majorité de la Chambre aussi, la majorité a dit que les auteurs
15 c'étaient des membres de ce 40e Centre chargé des effectifs, et on coche la
16 case. Le 40e Centre des effectifs et les membres de la VJ, et c'est
17 reconnu. On fait une coche de la case aussi.
18 M. Perisic se trouve être l'officier le plus haut gradé de l'armée de la
19 VJ, et on coche là aussi cette case-là.
20 Mais la question est celle de savoir comment arrive-t-on à établir la
21 relation de jure ? Et ce que l'Accusation a omis de faire et ce que la
22 majorité des Juges de la Chambre n'a pas fait, c'est -- il a fait un erreur
23 à cet effet, c'est de ne pas prendre en considération le fait qu'une fois
24 que les membres de la VJ ont été transférés vers le 40e Centre chargé du
25 personnel ou des effectifs, ça tombait sur la chaîne de commandement de la
26 SVK. Si vous faites partie de la chaîne de commandement de la SVK, ou bien
27 donc c'est incorporer Perisic. Il n'y est pas. Dans la chaîne de
28 commandement de SVK, vous avez Martic, Celeketic, Arkan et les autres.
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1 Perisic ne fait pas du tout partie de cette chaîne de commandement-là. Or,
2 le Procureur n'a pas non plus abordé la question des instructions qui est
3 la pièce P734 ou la P1082.
4 L'Accusation, et je dirais la majorité des Juges de la Chambre, n'ont pas
5 pris en considération ces éléments de preuve lorsqu'il a été décidé du fait
6 de l'existence d'une relation de jure.
7 Je vais passer, Monsieur le Président, au fait qui dit qu'à la page 55,
8 lignes 6 à 9, l'Accusation a indiqué ce matin qu'il y avait quelque chose,
9 s'il y avait l'exercice d'une autorité, l'exercice de cette autorité
10 n'était -- porte -- n'était moins pertinente que la possibilité de le
11 faire. Ils ont raison. C'est le bon argument. Mais le problème, c'est que
12 l'exercice véritable est de la plus haute des pertinences. Or, il n'y a pas
13 d'élément de preuve disant qu'il y a eu des ordres émanant de Perisic
14 pendant ou -- avant ou pendant les bombardements de Zagreb et que Perisic
15 n'a pas non plus été à l'origine de procédures disciplinaires avant ou
16 pendant les bombardements de Zagreb. Or, si vous n'avez pas cela, vous
17 devez remplacer ceci par autre chose pour tirer une conclusion qui serait
18 la seule conclusion raisonnable et qui est celle de dire que Perisic aurait
19 pu le faire. Mais il n'y a pas d'élément de preuve à cet effet. Il y a
20 quelques suppositions de formulées. L'une de ces suppositions, c'est que
21 les objectifs étaient divergents et qu'ils n'avaient pas besoin de le
22 faire.
23 C'est une belle théorie, mais ce n'est pas un élément de preuve. Le
24 Procureur a dit dans son exposé ce matin que la difficulté ce n'était pas
25 parce que Perisic avait continué à apporter un soutien même après le
26 bombardement à Zagreb, mais je dis une fois de plus : et alors ?
27 On m'a dit de terminer, Monsieur le Président, et je vais en terminer tout
28 de suite. Je ne vais pas revenir vers les ordres qui ont été donnés par
Page 77
1 Perisic. C'est les ordres 1800 et 1925. Ils ne déterminent pas quel a été
2 le type de commandement en place. Ce que les Juges de la Chambre d'appel
3 doivent essayer de faire, c'est d'évaluer le contexte et le type de
4 relation qu'il y avait eu entre Perisic et l'armée serbe de la Krajina. Et
5 a-t-il exercé un commandement à l'égard de cette SVK qui englobait pour
6 l'essentiel ce 40e Centre chargé des effectifs. Et c'est la raison pour
7 laquelle j'ai fait référence à Blaskic et Hadzihasanovic comme affaires
8 [inaudible]. Et l'Accusation a omis d'adresser ce type de question ou de se
9 pencher sur cette question. Et si on compare les deux, la seule conclusion,
10 Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Juges, c'est de faire ce
11 qui -- enfin, d'établir quelle a été la relation de supérieurs, de
12 subordonnés et qui se trouveraient être celles de Perisic et Celeketic.
13 Et dernier élément que je voudrais citer dans nos critères, c'était celui
14 qui a été évoqué par le Juge Moloto et qui est évoqué dans notre mémoire.
15 Or, cela n'a pas été abordé du tout par la partie adverse. Lorsque deux
16 personnes ne se comportent pas comme ayant une relation quelconque, cela
17 veut dire qu'il n'y a pas de relation. Si je dois forcer quelqu'un à faire
18 quelque chose, il n'y a certainement pas une relation de contrôle effectif.
19 Merci, Monsieur le Président. Je veux donner la parole à M. Guy-Smith.
20 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.
21 Monsieur Guy-Smith.
22 M. GUY-SMITH : [interprétation] La réponse est très claire. La réponse est
23 non. Ceci n'est pas qualifié, et je vais vous dire pourquoi. Ce n'est pas
24 le président du pays. Il n'était pas le Conseil suprême de Défense, il ne
25 faisait pas partie du ministère de la Défense, et votre question porte sur
26 la manière dont un Etat doit se comporter. Il constitue une composante de
27 l'Etat, mais il n'est pas l'Etat. C'est la raison pour laquelle il est très
28 important de prendre en compte la responsabilité personnelle.
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1 Je souhaite poser une question : où est-ce que nous allons en réalité ? Où
2 est-ce que vous pensez que le droit nous mène ? Parce que pour ce qui est
3 de la question hypothétique que vous avez posée, Monsieur le Président, je
4 crois que ma réponse est très claire et, affaire après affaire dans le
5 monde entier, nous constatons ce qu'on appelle des mouvements de rébellion,
6 d'autodétermination qui tombent exactement dans votre escarcelle. Lorsque
7 des crimes sont commis, nous les voyons commis sous les yeux, donc chaque
8 Etat, nation qui fournit une aide à ces rebelles, à l'autre partie, est
9 coupable de complicité par aide et encouragement.
10 Est-ce que tout le monde sera poursuivi dans le monde entier ? Les Etats-
11 Unis, ainsi que ses effectifs; le Royaume-Uni; ou la France; ou l'OTAN ? Je
12 ne pense pas. Et le problème qui va se poser, qui serait un problème
13 récurrent et ce rapidement, sera le problème d'une augmentation de
14 l'impunité, reconnaissance qu'il n'y a pas un traitement égal au vu de
15 droits. Certaines personnes seront poursuivies et d'autres ne le seront
16 pas. Les personnes plus puissantes ne seront pas poursuivies. Donc, si vous
17 avez un quelconque doute sur l'opinion visée, je propose que vous écoutiez
18 ce qui suit, et ce qui suit est extrait d'une conférence qui s'est déroulée
19 le 20 août 2012.
20 [Diffusion de la cassette vidéo]
21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
22 "Quel était le précédent juridique le plus important établi par votre
23 Tribunal cette année et quel est le sens du précédent à la lumière du
24 développement du droit pénal international ? Je vais commencer par Serge."
25 "Je vais dire quelques mots à propos du jugement de Perisic rendu au mois
26 de septembre l'année dernière. Perisic, eh bien, lui, il était le chef de
27 l'état-major général de l'armée yougoslave, et en tant que tel a fourni un
28 soutien logistique à l'armée serbe en Bosnie. Donc, il a été poursuivi pour
Page 79
1 avoir aidé et encouragé des crimes qui ont été commis sur le territoire de
2 la Bosnie, crimes pour lesquels bon nombre de personnes ont déjà été
3 condamnés par le passé par le Tribunal.
4 La Chambre de première instance a considéré et l'a déclaré coupable d'avoir
5 aidé et encouragé ces crimes, un certain nombre de crimes spécifiques :
6 assassinats, meurtres, attaques contre des civils, aider et encourager. Ces
7 crimes, comme je l'ai dit, ont été commis par l'armée en Bosnie. Et il a
8 cependant été acquitté au titre d'avoir aidé et encouragé l'extermination à
9 Srebrenica, parce que la Chambre de première instance estimait que le mens
10 rea, l'élément moral, n'était pas suffisant. Il y avait une politique qui
11 disait connaître des crimes, mais pas dans le sens de l'extermination de
12 jure. Si il a également été condamné -- en tant que supérieur hiérarchique
13 parce qu'il n'a pas puni les personnes qui avaient commis des crimes lors
14 du pilonnage de Sarajevo.
15 C'était un jugement important. Il a été condamné à 27 ans d'emprisonnement.
16 Pourquoi est-ce important ?
17 Parce que c'est en partie un précédent, partiellement
18 un précédent qui montre que le fait de fournir une aide à une
19 des parties au conflit en sachant que la partie en question met en œuvre
20 une politique dans le cadre desquels des crimes [inaudible], que cette
21 personne peut être poursuivie pour avoir aidé et encouragé les crimes. Elle
22 nous parlait enfin ici de soutien logistique dans le sens où des soldes ont
23 été versées, où du carburant était fourni pour les chars, en fournissant
24 une formation. Nous ne parlons même pas d'armes en l'espèce, car la Chambre
25 de première instance estimait que les éléments de preuve étaient clairs à
26 cet égard, que des armes avaient été fournies par le chef de l'état-major
27 général ou, en tout cas, par les personnes placées sous sa responsabilité.
28 Mais c'est qu'il n'y avait pas de liens factuels pendant le procès entre
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1 les armes qui avaient été fournies et les crimes qui avaient été commis
2 dans un certain nombre de municipalités. Je crois qu'il s'agit d'un
3 développement important dans la mesure où l'aide et l'encouragement reçoit
4 une -- ou doit être interprété de façon plus large. Nous attendons bien
5 évidemment le jugement qui sera rendu par la Chambre d'appel."
6 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Alors, pour suivre ce qu'a dit M. Brammertz
8 et pour rependre l'hypothèse que vous avez soulevée, Monsieur le Président,
9 aucune des armes n'ont été fournies par le pays A. Ils ont fourni tout le
10 reste. Nous avons les mêmes faits, nous avons le pays A qui est coupable de
11 complicité par aide et encouragement. Sans aucun doute, les soldes, le
12 carburant.
13 Alors le fait est qu'en l'espèce, parce que je vais y revenir, il s'agit
14 d'une affaire portée contre M. Perisic. La seule déduction, qui puisse
15 raisonnablement être déduite, est celle de dire ce qui est nécessaire pour
16 déclarer la culpabilité. Je crois que je me suis mal exprimé, mais je crois
17 que vous m'avez compris. Il ne peut pas y avoir qu'une seule déduction
18 possible, est celle peut-être que la seule raisonnable parce qu'il y a
19 différentes déductions possibles. Je vais citer le compte rendu d'audience,
20 parce que le compte rendu d'audience est très clair pour ce qui est de la
21 question du carburant qui est évoquée par M. Brammertz aux paragraphes 168,
22 169, 170, il est clair que la VRS recevait du carburant d'autres sources.
23 Pour ce qui est des soldes qui ont été abordées ici, les membres de la VRS,
24 des membres du corps sont restés lorsqu'ils ne recevaient pas de soldes, et
25 ne sont pas partis, les membres ne sont pas partis. Ils sont restés actifs
26 sans pour autant avoir l'avantage de ces soldes.
27 Donc si on n'a pas de soldes et qu'on n'a pas de carburant, qui sont
28 attribués au général Perisic, tout ce qui reste c'est ce que j'ai dit à la
Page 81
1 fin de ma première présentation, à savoir il s'agit de conjecture. C'est
2 peut-être pas quelque chose qui vous plait, vous pensez peut-être que les
3 choses devraient être autrement, mais c'est ce que nous faisons. Ce n'est
4 pas ce que nous faisons devant un Tribunal, nous prouvons au-delà de tout
5 doute raisonnable en nous fondant sur des faits et non pas sur des
6 conjectures. Et l'Accusation lorsqu'elle a présenté ses arguments a admis
7 que l'affaire contre Perisic n'a pas été prouvée.
8 Et je méprise la guerre. Je ne pense pas qu'il y a un seul individu dans ce
9 prétoire qui aime la guerre. Mais le fait est que les guerres sont
10 commises, des choses épouvantables sont commises, et de plus en plus à la
11 lumière dont le monde évolue, nous avons davantage connaissance de ces
12 faits-là.
13 Et si les Juges de cette Chambre souhaitent statuer sur la question et dire
14 que la guerre doit cesser, je ne parle pas du crime d'agression, mais qu'il
15 faudrait incriminer la guerre ou la rendre ou la criminaliser, faites-le
16 donc. Faites-le, mais s'il vous plaît, souvenez-vous que lorsque lui était
17 général, lorsque lui soutenait son pays, lorsque lui était préoccupé par
18 son métier, ce n'était pas le droit.
19 Le général Perisic doit être acquitté de tous les chefs.
20 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Guy-Smith. Je
21 suppose que la Défense a terminé la présentation de ses arguments, et je
22 vais demander à M. Perisic s'il souhaite prendre la parole. Il a droit à
23 dix minutes pour faire une déclaration personnelle. Je vois la réponse a
24 déjà été fournie. Monsieur Perisic, vous avez dix minutes.
25 L'APPELANT : [interprétation] Oui, je souhaite prendre la parole, en effet.
26 Mesdames, Messieurs les Juges, c'est grâce à vous que ceci est la dernière
27 des opportunités qui s'offre à moi de m'adresser à vous. J'ai réfléchi à ce
28 que je devrais vous dire au-delà de l'argumentation présentée par mes
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1 avocats, afin que vous puissiez à titre complémentaire me juger en qualité
2 d'homme et en ma qualité de général, aux fonctions que j'ai occupées. Au
3 début de ce procès, le 3 octobre 2008, je me suis adressé aux Juges de la
4 Chambre et je vais vous citer une partie de ce que j'ai dit :
5 "Je regrette profondément les victimes des crimes commis sur le territoire
6 de l'ex-Yougoslavie, et je compatis sincèrement avec les membres de leurs
7 familles respectives. Toute vie perdue est une perte irréparable pour la
8 société, et une vie perdue du fait d'un crime est la pire des pertes. Je
9 crois que ceux qui ont commis les crimes vont finir par répondre devant les
10 tribunaux et obtenir des sanctions appropriées. Je souhaite que les crimes
11 de guerre ne se réitèrent plus jamais. En ma qualité d'officier de
12 carrière, je déteste la guerre parce que j'ai conscience du fait que les
13 guerres et en particulier les guerres ethniques, religieuses et civiles
14 telle que celle qui a eu lieu sur le territoire de la Yougoslavie, est
15 quelque chose -- enfin la pire des choses qui aurait pu se produire pour ce
16 qui est de la totalité des peuples sur ce territoire."
17 J'en suis profondément convaincu, et c'est la raison pour laquelle je la
18 réitère ici.
19 Je crois bien dans ce procès, vous avez eu à faire face avec bon nombre de
20 défis, non seulement du point de vue de ma responsabilité mais aussi du
21 point de vue de l'équité de la peine prononcée qui se chiffre à 27 ans de
22 prison, et aux répercussions de celle-ci sur la crédibilité de ce Tribunal.
23 Je ne suis pas un juriste, je n'ai pas eu la volonté ni la nécessité de
24 vaquer à des occupations liées au droit, mais je peux conclure une chose, à
25 savoir que le jugement rendu ne reflète pas ce que j'ai pu entendre pendant
26 le procès.
27 Parce que j'ai 40 ans d'expérience militaire, et c'est ce qui m'a fait
28 avoir beaucoup de respect pour le droit et la loi, d'une façon générale et
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1 respecter aussi l'importance de celle-ci. L'expérience que j'ai acquise
2 dans l'armée me rende encore plus difficile une compréhension du jugement
3 rendu. Je ne peux pas comprendre la décision rendue par la majorité des
4 Juges de la Chambre, et je vous pose la question de savoir comment peut-on
5 avoir quelque chose d'établi au-delà de tout doute raisonnable, si les
6 Juges qui président les travaux de la Chambre en doutent ? C'est rien qu'en
7 se référant à la logique que je considère que ça ne saurait être maintenu,
8 car impossible.
9 De par mon appartenance ethnique, je suis Serbe, je suis un soldat de
10 carrière, un militaire de carrière qui a fait son service sur tout le
11 territoire de la Yougoslavie. J'ai occupé les fonctions de chef d'état-
12 major de l'armée de Yougoslavie pendant une période assez longue, qui a
13 englobé des années difficiles qui sont celles des conflits. On m'a dit que
14 du fait de mon appartenance ethnique, et des fonctions que j'ai occupées,
15 il serait difficile, presque impossible de m'attendre à ce que le procès
16 devienne objectif, impartial, sans préjugé et parti pris. En dépit de ce
17 fait, dès que j'ai obtenu l'acte d'accusation, j'ai fait une déclaration
18 affirmative et publique pour ce qui est de la confiance que j'investissais
19 en ce Tribunal. Ce qui a été reproduit par la totalité des médias et qui a
20 été accepté comme élément de preuve de la Défense dans cette affaire. Je
21 suis venu de mon plein gré au Tribunal deux jours avant que l'acte
22 d'accusation ne soit rendu public. Ce qui est un exemple plutôt
23 exceptionnel du respect que je ressens pour ce Tribunal.
24 En dépit de toutes les choses négatives que j'ai eu à connaître et à vivre
25 depuis l'acte d'accusation en ce jour, je pense et je considère que vous
26 êtes au-dessus de tout cela, et que vous allez me juger de façon objective
27 et impartiale.
28 Mon cas est unique au monde. Jamais il n'est arrivé qu'un chef d'état-major
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1 d'une armée soit mis en accusation et condamné pour des crimes qui ont été
2 commis par des membres d'une autre armée sur le territoire d'un autre Etat.
3 Vous êtes des Juges et vous allez décider partant de votre conscience et du
4 sens de la justice qui est vôtre, mais il faut que vous vous disiez une
5 chose, à savoir que la décision, l'arrêt que vous allez rendre aura des
6 répercussions de grande portée pour ce qui est de tout chef d'état-major de
7 quelle qu'armée que ce soit autant ou autre alliance sur les politiques des
8 autres Etats qui aident, les guerres qui ont cours, qui font rage
9 aujourd'hui, en Afghanistan, Libye, Syrie, Soudan, Yémen et ailleurs, où
10 des crimes ont été commis et continuent à être commis.
11 Mon supérieur direct et immédiat, le président de la République fédérale de
12 Yougoslavie, et le président du Conseil suprême de la Défense, Zoran Lilic,
13 qui m'a donné des ordres pour ce qui était de porter assistance à la VRS et
14 à la SVK, n'a pas été mis en accusation, et il n'a pas été condamné. Et si
15 j'avais refusé d'exécuter ses ordres, j'aurais été soumis à des sanctions
16 plus dramatiques et drastiques que ce qui a été prononcé comme peine en
17 première instance.
18 Le général de la République de la Krajina serbe, le général Celeketic qui a
19 été désigné comme coupable pour le crime de bombardement de Zagreb n'a pas
20 été mis en accusation, quant à lui, n'a pas été condamné, c'est moi qui
21 suis condamné pour les crimes qu'il a commis.
22 Alors vous savez fort bien que la décision d'aider la VRS et la SVK a été
23 une décision politique, une décision prise au niveau de l'Etat avant même
24 que je n'occupe les fonctions de chef d'état-major de la VJ.
25 En ma qualité de chef d'état-major, j'ai participé à la mise en œuvre des
26 décisions prises par le Conseil suprême de la Défense et le gouvernement de
27 la RSFY, pour ce qui est d'aider à la conduite à la guerre mais non pas
28 d'aider à la perpétration des crimes, comme la majorité des Juges de la
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1 Chambre semble l'avoir conclu. Mesdames et Messieurs les Juges, j'ai
2 défendu mon Etat et ses citoyens de façon professionnelle et honorable pour
3 empêcher ce pays de -- ou de connaître toute implication dans la guerre.
4 J'ai proposé et mis en œuvre des mesures en temps utile et de façon
5 responsable afin qu'il n'y ait pas un débordement de la guerre dû au -- à -
6 - du territoire de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine sur le territoire
7 de la République fédérale de Yougoslavie. Avant que d'être chef d'état-
8 major de la RFY -- et la RFY étaient en guerre avec la Croatie et la
9 Bosnie-Herzégovine. Et une fois que j'ai été révoqué de mes fonctions, la
10 RFY a fait la guerre avec l'OTAN et à ce qu'il est convenu d'appeler
11 l'Armée de libération du Kosovo. Je suis fier du fait que la République
12 fédérale de Yougoslavie et son armée, pendant que j'étais à la tête de son
13 état-major n'ont pas participé à la guerre, et ce, pendant plus d'une demi
14 décennie, c'est-à-dire plus exactement du 25 août 1993 au 24 novembre 1998.
15 J'ai été révoqué de mes fonctions précisément parce que ceux qui avaient
16 décidé de la guerre et de la paix voulaient continuer à mettre en œuvre ce
17 type de politique, mais sans ma présence. Alors, chaque officier et en
18 particulier un général a pour mission de prévoir l'évolution de la
19 situation dans son environnement pour ce qui est de la sécurité de sa zone
20 de responsabilité de prendre -- de proposer et prendre des mesures
21 préventives pour protéger ce pays. Et dans le cas concret qui me concerne,
22 c'était l'Etat de la République fédérale de Yougoslavie.
23 En temps de guerre, rien n'est agréable pour un homme normal. Souvent, il
24 n'a pas le choix, et toute activité conduit à des séquelles lourdes. C'est
25 connu de toutes les armées et de toutes les politiques d'Etat et, en dépit
26 de toute chose, quelle que soit la difficulté générée ou le manque de bon
27 goût apparent à le dire, le monde n'a pas interdit la conduite des guerres,
28 n'a pas interdit d'aider ceux qui faisaient la guerre.
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1 En substance, tous ceux qui sont dans ce prétoire, tous ceux qui sont en
2 train de suivre ce débat sont tout à fait conscients du fait que l'aide à
3 la conduite de la guerre est apportée au quotidien selon les intérêts des
4 politiques des différents Etats, parce que la France et les Etats-Unis
5 d'Amérique ont été impliqués dans les conflits armés et ont apporté leur
6 soutien à des forces au conflit à des milliers de kilomètres au nom de
7 leurs territoires respectifs, et moi, on me reproche d'avoir défendu mon
8 pays de cette guerre qui était à ses portes, qui faisait rage à sa porte.
9 Que vouliez-vous que je fasse en ma qualité de chef d'état-major ? A quoi
10 s'attendait donc la majorité des Juges de la Chambre de première instance
11 pour ce qui est de ce que je devrais faire quand à notre porte la guerre
12 fait rage ?
13 En ma qualité de militaire professionnel à la tête d'une structure
14 militaire qui exécutait les ordres du Conseil suprême de la Défense, tout
15 ce que j'ai décidé a été décidé pour empêcher la guerre, et cela s'est
16 fondé sur le droit national et le droit international.
17 Je regrette beaucoup les victimes qui ont été générées pour les conflits
18 sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. Je compatis aux douleurs et aux
19 souffrances des citoyens des Etats où la guerre fait rage de nos jours
20 encore. Je serais la plus heureuse des personnes si, en ce moment même, on
21 pouvait interrompre toutes les guerres qui font rage dans le monde entier,
22 mais en dépit de mes souhaits, ça ne va pas se produire.
23 Et si la majorité des Juges de la Chambre avaient pensé qu'en me condamnant
24 on allait interrompre toute guerre, il fallait le dire. Mais il a été
25 constaté que si guerre il y avait, quand bien même il y aurait dégâts et
26 souffrances, ce n'étaient pas des crimes et moi, j'ai été sanctionné de
27 façon drastique pour la même raison.
28 Mesdames et Messiers les Juges, alors que le Juge Moloto, président des
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1 Juges de la Chambre de première instance en analysant la situation dans
2 laquelle je m'étais trouvé a estimé que je devais rentrer chez moi, il y a
3 eu deux Juges qui ont décidé que je devais être mis en prison pendant 27
4 ans. C'est une chose difficile, non seulement à comprendre, mais aussi à
5 vivre avec. Parce que dans ce qui vient d'être dit, ne voit-on pas la
6 confirmation de l'existence du doute raisonnable ? Je crois bien que vous,
7 Mesdames et Messieurs les Juges, allez remédiez à cette injustice.
8 Je vous remercie une fois de plus de m'avoir rendu possible de m'adresser à
9 vous et de votre attention quant à l'exposé que je viens de faire. Puis-je
10 me rasseoir ?
11 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur Perisic, pour cette
12 déclaration personnelle.
13 Avant de conclure, je souhaiterais remercier les parties pour les éléments
14 qu'ils ont présentés aujourd'hui ainsi que pour leurs activités en
15 préparation de cette audience. J'aimerais également remercier mes collègues
16 qui siègent avec moi dans cette Chambre d'appel. Je voudrais également
17 remercie les traducteurs les interprètes, les sténotypistes, tout le
18 personnel de soutien de ce Tribunal, ainsi que l'équipe informatique. Grâce
19 à leur travail de très grande qualité, ils nous permettent de pouvoir
20 entendre ces différents procès de manière équitable et rapide.
21 Le jugement de la Chambre d'appel sera rendu le moment voulu.
22 --- L'audience d'appel est levée à 12 heures 27.
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