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1 Le mercredi 29 août 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 28.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière
6 d'audience, pourriez-vous citer l'affaire, s'il vous
7 plaît ?
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
9 Messieurs les Juges. Affaire IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin
10 Popovic et consorts.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vérifie si tous les accusés sont là.
12 Ils le sont. Je vois qu'il y a des absents du côté de la Défense, M.
13 Krgovic et M. Ostojic. Du côté de l'Accusation, je vois que MM. McCloskey
14 et Thayer sont là.
15 Monsieur McCloskey, vous vouliez soulever des points avant que l'on ne
16 commence.
17 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Merci. Bonjour, Monsieur le Président,
18 Madame et Monsieur les Juges.
19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.
20 M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut passer à huis clos
21 partiel un instant, s'il vous plaît ?
22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Passons à huis clos partiel.
23 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avant que je ne vous donne la parole,
28 Monsieur McCloskey, nous tenons audience aujourd'hui en application de
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1 l'article 15 bis. Le Juge Stole se sent mal; il m'a demandé de l'autoriser
2 à s'absenter, il espère pouvoir nous rejoindre demain. Ça c'était un
3 premier point.
4 Un deuxième point, vous savez que nous avons eu un problème hier, il y a eu
5 une coupure d'électricité. Nous nous sommes réunis brièvement ici à 17
6 heures. Nous avons la sensation qu'il n'y a pas eu d'enregistrement de
7 cette brève audience -- ou plutôt, nous avions cette impression-là mais il
8 semble maintenant qu'en fait, on a bel et bien enregistré, mais on ne l'a
9 pas diffusé. On n'a pas diffusé cet enregistrement qui a été tenu à huis
10 clos partiel, alors que ça ne devait pas être le cas. Nous avons simplement
11 précisé que -- nous avons estimé que cette audience s'était tenue en
12 audience publique et non pas à huis clos partiel et devrait être mise à la
13 disposition de tout un chacun qui en aurait besoin.
14 Je vais demander maintenant que l'on passe à huis clos partiel très
15 brièvement, s'il vous plaît.
16 Nous sommes à huis clos partiel.
17 [Audience à huis clos partiel]
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21 [Audience publique]
22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Zivanovic, allez-y. Vous avez la
23 parole.
24 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je voudrais m'adresser à la Chambre au
25 sujet de la communication du rapport d'information du mois de juin 2000 eu
26 égard au Témoin 109 de l'Accusation. Il est prévu qu'il vienne déposer par
27 voix de vidéoconférence ce vendredi, alors, le rapport d'information que
28 j'ai reçu est expurgé, c'est ce que l'Accusation m'a fourni. Je leur ai
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1 demandé de me fournir une version complète, intégrale du rapport, ce matin,
2 ils ont refusé de le faire. D'après ce qu'ils me disent, les expurgations
3 ont à voir avec l'adresse et des renseignements personnels sur le témoin,
4 mais je vois que le témoin a refusé de fournir son adresse ainsi que des
5 renseignements personnels, donc, il me faut ce rapport sous forme intégrale
6 pour que je puisse me préparer conformément en bonne et due forme au
7 contre-interrogatoire, et je demanderais à la Chambre de rendre une
8 ordonnance à l'adresse de l'Accusation pour qu'ils me communiquent ce
9 rapport sans expurgation.
10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, tout à fait. Nous parlons du
11 Témoin PW-109. Vous voulez répondre ? Dites-nous, tout d'abord, s'il vous
12 plaît, ce que contiennent les parties expurgées.
13 M. THAYER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
14 Monsieur les Juges.
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.
16 M. THAYER : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît, passer
17 à huis clos partiel ou huis clos ?
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Huis clos partiel.
19 Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur Lazarevic.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Soyez le bienvenu dans ce prétoire.
3 Vous allez déposer ici à partir d'aujourd'hui, vous auriez dû commencer
4 hier, mais vous savez ce qui s'est passé. Il y a eu une coupure
5 d'électricité. Je suis certain qu'on vous en a parlé et c'est la raison
6 pour laquelle nous avons dû reporter votre déposition aujourd'hui. J'en
7 suis désolé mais maintenant nous allons pouvoir travailler.
8 Avant de commencer à déposer, en vertu de notre Règlement, vous devez
9 prononcer une déclaration solennelle vous engageant à dire la vérité. Ce
10 texte va vous être remis. Je vais vous demander d'en donner lecture.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 LE TÉMOIN: DAMJAN LAZAREVIC [Assermenté]
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur Lazarevic. Veuillez
16 vous asseoir.
17 Monsieur Lazarevic, vous êtes venu déposer au sujet de certains événements
18 pour lesquels l'Accusation allègue qui se seraient déroulés en juillet
19 1995.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] M. Thayer du côté de l'Accusation va
22 vous poser des questions, et par la suite, ce sont les différentes équipes
23 de la Défense qui vont vous poser leurs questions, mais avant que M. Thayer
24 ne commence, ne vous pose ses questions, je dois vous expliquer quelque
25 chose, à savoir je dois vous mettre en garde. Je dois vous préciser que,
26 conformément à notre Règlement, vous jouissez d'un droit, à savoir on
27 semble soumettre que vous avez expérimenté, que vous avez vécu un certain
28 nombre d'événements qui sont allégués par l'Accusation. Et il n'est pas
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1 exclu que M. Thayer ou les défenseurs vous posent des questions qui
2 risquent de vous incriminer si vous y répondiez d'une manière véridique.
3 Donc, je ne vais pas vous dire que nécessairement il va y avoir de
4 telles questions, mais si ça devait se produire, vous avez de droit de nous
5 demander, de nous demander à nous les Juges de la Chambre de ne pas
6 répondre à ces questions ou à ce genre de question. Lorsque vous nous aurez
7 posé la question, nous pouvons soit vous exhortez de répondre soit nous
8 pouvons estimer qu'il est dans l'intérêt de la justice que vous y répondiez
9 quand même. Donc, nous pouvons vous obliger à y répondre. Ce droit que vous
10 avez est limité et ce n'est pas un droit absolu. Mais si cela devait
11 arriver, si on vous posait une telle question et si vous obligeait à y
12 répondre indépendamment du fait que vous nous auriez demandé de ne pas y
13 répondre, donc, quel que soit le témoignage que vous donneriez en répondant
14 à cette question, à moins que ce sera un faux témoignage, on ne pourra pas
15 s'en servir contre vous, dans le cadre de poursuite au pénal à l'avenir.
16 Est-ce que vous avez bien compris, ce que je viens de vous dire ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce qu'on vous en a déjà parlé avant
19 que vous ne veniez ici dans ce prétoire pour témoigner ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on m'a préparé.
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Lazarevic.
22 Ceci nous permet de poursuivre, de poser la première question.
23 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 Interrogatoire principal par M. Thayer :
25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
26 R. Bonjour.
27 Q. Pourrez-vous décliner votre identité pour le compte rendu d'audience,
28 s'il vous plaît ?
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1 R. Je suis Damjan Lazarevic.
2 Q. Vous avez quel âge, Monsieur ?
3 R. J'ai 53 ans.
4 Q. Vous étiez né où ? Où est-ce que vous avez grandi ?
5 R. A Celopek, près de Zvornik, et maintenant, je vis à Zvornik.
6 Q. Vous vous déclarez Serbe de Bosnie ?
7 R. Oui.
8 Q. Une ou deux questions au sujet de votre parcours militaire, votre
9 carrière militaire, ce sera bref. Si je me suis trompé, corrigez-moi, s'il
10 convient de préciser quelque chose.
11 Lorsque la Brigade de Zvornik a été créée, vous avez rejoint la Section des
12 ponts et chaussées, dans la Compagnie du Génie de la Brigade de Zvornik;
13 est-ce exact ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous avez été membre de la Compagnie du Génie jusqu'à ce que les
16 accords de Dayton soient signés. Vous l'avez quitté peu après; c'est exact
17 ?
18 R. Oui.
19 Q. Avant de devenir membre de la Brigade de Zvornik, vous pouvez décrire
20 aux Juges de la Chambre où vous avez servi depuis le début de la guerre ?
21 R. Mais avant la guerre, j'ai travaillé dans une entreprise et quand la
22 guerre a commencé, on a tous été mobilisé et j'étais au front pendant deux
23 mois à peu près. Puis, quand on a créé le génie, dans la Brigade de
24 Zvornik, ils m'ont pris car, quand j'ai fait mon service militaire, j'étais
25 dans les ponts et chaussées au génie, dans l'armée. C'était ça mon poste.
26 Donc, on m'a transféré là en arrière pour créer le génie, pour pouvoir
27 continuer fonctionner et faire des terrassements, des ponts, et cetera.
28 Q. Juste une dernière question sur votre parcours dans l'armée. Lorsque la
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1 guerre a éclaté, mais avant qu'on ait créé la Brigade de Zvornik, vous avez
2 été membre de la Défense territoriale ou d'une unité locale quelle qu'elle
3 soit au front, sur la ligne de front ?
4 R. Avant que le conflit n'éclate, vous voulez dire ? Non, je n'ai pas fait
5 ça.
6 Q. Très bien. Mais après que le conflit a éclaté, mais avant qu'on ait
7 créé la Brigade de Zvornik, est-ce que vous avez été membre de l'Unité de
8 Celopek - c'est ainsi qu'on l'a appelée car tout le monde, tous les membres
9 de l'unité étaient de Celopek ?
10 R. Oui, vous voulez dire le Peloton ou la Section de Celopek.
11 Q. Très bien. Alors, Monsieur, je vais vous inviter maintenant à parler de
12 l'année 1995 et plus précisément du mois de juillet 1995. La Brigade de
13 Zvornik avait son QG à un endroit qu'on a appelé Standard, et votre
14 Compagnie du Génie, elle avait son QG à quel endroit ?
15 R. Mais au début, quand on a créé le génie, on était à Standard, et après,
16 c'état à la caserne, le village de la jeunesse; c'est comme ça qu'on
17 appelait cet endroit-là, cité de la jeunesse. C'était là dans ces
18 baraquements qu'on a été transféré.
19 Q. Très près de cet endroit où il y avait le QG du génie, il y avait des
20 compagnies, il y avait des usines, des entreprises, qui n'étaient situées
21 pas loin ?
22 R. Dans les parages autour de nos baraquements, il y avait l'entreprise
23 Glinica, il y avait universel, et puis, il y avait d'autres entreprises un
24 peu plus loin. Mais les plus proches c'étaient ceux-là.
25 Q. L'usine de Glinica, vous la connaissiez par un autre nom ?
26 R. L'usine de Glinica, elle s'appelait aussi Bihac -- Glinica signifie
27 oxyde d'aluminium.
28 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, expliquer aux Juges de la Chambre
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1 comment était structurée votre Compagnie du Génie; qui était le chef de
2 votre compagnie ?
3 R. A la tête, il y avait le commandant Jokic, le chef du génie.
4 Q. Vous vous souvenez de son prénom, Monsieur ?
5 R. Dragan Jokic.
6 Q. Monsieur, qui était son subalterne direct ?
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, ne
8 répondez pas.
9 Oui, Maître Bourgon.
10 M. BOURGON : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président. Je
11 voudrais juste que mon confrère précise, parce qu'il a commencé sa question
12 - page 2, ligne 10 : comment la Compagnie de Génie était-elle structurée ?
13 Puis, il enchaîne en -- sans en posant sa question sur le chef du génie.
14 Alors, ce sont deux choses distinctes, et je voudrais qu'il précise cela
15 avant de poser sa question, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, vous avez raison.
17 Faites-le.
18 M. THAYER : [interprétation] Oui, je pense que les questions que je vais
19 poser vont préciser cela. De toute évidence, c'est quelque chose
20 d'important, nous en avons déjà parlé.
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous en remercie.
22 M. THAYER : [interprétation]
23 Q. Monsieur, s'agissant de votre Compagnie du Génie, d'après vos souvenirs
24 et d'après ce que vous en savez, pour ce qui est de la filière de
25 commandement dans votre compagnie, qui était le subordonné direct de M.
26 Jokic dans votre compagnie ?
27 R. Depuis le début du conflit ou plus tard ?
28 Q. Encore une fois, Monsieur, je parle du mois de juillet 1995.
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1 R. Mais c'était Dragan Jevtic. Il était le chef de compagnie.
2 Q. A l'attention des Juges de la Chambre, est-ce que vous pouvez, s'il
3 vous plaît, nous dire quelle est la différence entre les rôles joués par le
4 chef du génie, à savoir le commandant Jokic, et
5 M. Jevtic; le savez-vous ? Vous en souvenez-vous ?
6 R. Le chef du génie c'était le chef. Il était notre supérieur à nous tous
7 membres de l'unité. Toutes les missions confiées à la compagnie -- confiées
8 dans la compagnie étaient confiées par lui, selon les différentes sections,
9 mais c'est lui qui était à l'origine des ordres.
10 Q. Est-ce que vous vous souvenez où était situé le bureau de M. Dragan
11 Jokic ? Etait-ce au commandement de votre compagnie près de ce village de
12 la jeunesse, ou était-ce à Standard dans les baraquements ou les casernes -
13 - la caserne de la brigade ?
14 R. Je pense que c'était à Standard, mais il était aussi très présent --
15 régulièrement présent en bas chez nous. Je veux dire quand il avait du
16 temps. Quand il était auprès de nous dans l'unité. Quand il avait le temps,
17 il était toujours avec nous dans notre unité -- avec notre unité.
18 Q. D'accord. Alors, directement subalterne à M. Jevtic, qui était la
19 personne suivante dans la chaîne de commandement ?
20 R. Le commandant adjoint de notre compagnie s'appelait Slavko Bogicevic.
21 Il avait également la fonction de responsable du commandement moral, mais
22 il était donc aussi commandant adjoint de la compagnie, Slavko Bogicevic.
23 Q. Y avait-il également un secrétaire sous une forme ou une autre dans
24 cette Compagnie de Génie ?
25 R. Je ne sais pas. C'était lui qui était commandant adjoint, responsable
26 de la direction morale et c'était lui qui rédigeait nos instructions
27 quotidiennes, et cetera.
28 Q. D'accord. Est-ce que vous vous souvenez d'une personne du nom de
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1 Sekonjic ?
2 R. Vojkan Sekonjic ?
3 Q. Oui, c'est cela.
4 R. C'était lui qui était l'officier d'administration de la compagnie.
5 Q. Pouvez-vous nous expliquer au juste en quoi consistait son rôle, ses
6 responsabilités, s'il vous plaît ?
7 R. Donc, c'était lui qui écrivait les ordres, les instructions
8 quotidiennes. C'était lui qui faisait l'appel, c'est-à-dire qui notait qui
9 n'était pas là, qui était présent dans l'unité un jour donné.
10 Q. Bien. Alors, quelques questions sur la structure, et puis, nous allons
11 passer à autre chose, Monsieur. Diriez-vous que votre compagnie était
12 divisée en peloton ? Et si oui, combien de pelotons et comment s'appelaient
13 ces pelotons ?
14 R. Bien, il y avait la Section de Peloton des Pionniers; deuxième peloton,
15 les Ponts et Chaussées [phon]; troisième peloton, Génie.
16 Q. En juillet 1995, Monsieur, aviez-vous une position quelle quel soit au
17 sein de ces trois pelotons ?
18 R. Moi, j'étais commandant du Peloton de Ponts et Chaussées, c'est-à-dire,
19 que pendant toute la durée des hostilités, c'est moi qui étais responsable
20 de la construction de routes et de ponts, et c'est ce que j'ai fait.
21 Q. En juillet 1995, quel était votre grade, Monsieur ?
22 R. J'étais sergent de deuxième classe. C'est le grade qui m'avait été
23 attribué par l'ex-armée yougoslave, et puis, après les différentes
24 manœuvres auxquelles j'ai participé, je suis arrivé au rang de sergent, et
25 donc, c'est ce que j'étais à ce moment-là.
26 Q. Combien y avait-il d'hommes dans votre peloton ?
27 R. Une dizaine, peut-être une douzaine.
28 Q. Qui était votre supérieur immédiat ? Je sais vous nous avez déjà donné
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1 la structure. Mais au moment où vous étiez responsable de ce peloton, vous
2 étiez -- vous rendiez des comptes à qui exactement, directement ?
3 R. Le commandant de la compagnie.
4 Q. Pourriez-vous avoir l'obligeance de décrire à la Chambre de quelle
5 façon les instructions, les ordres étaient émis au sein de votre compagnie
6 -- à votre compagnie ? Sous quelle forme, par quel itinéraire les
7 instructions étaient-elles transmises à et à travers votre compagnie ?
8 R. Chaque matin, il y avait un briefing, le commandant venait -- se
9 joignait au commandement de la brigade et il participait à ces briefings,
10 et à la fin du briefing, soit qu'il venait nous voir, soit il appelait le
11 commandant de la compagnie ou son adjoint au téléphone pour leur dire ce
12 que nous étions censés faire, il recevait ces instructions du commandant et
13 il nous les transmettait directement, soit oralement, soit au téléphone. Il
14 nous disait ce que serait nos tâches et qui était censé les remplir.
15 Q. Donc, pour que le compte rendu soit clair, lorsque vous nous parlez du
16 commandant, vous parlez, je présume, du commandant Dragan Jokic ?
17 R. Oui.
18 Q. De quel type d'équipement de construction disposiez-vous dans votre
19 peloton en juillet 1995 ? Quel type de machines lourdes ? Je vous parle de
20 ce qui vous était propre par contraste avec ce que vous auriez pu vous
21 procurer de l'extérieur.
22 R. Nous n'avions pas grand-chose. Deux ou trois camions, peut-être. Un
23 bulldozer 75, un Skip, qui est une petite machine d'une équipe tracteur
24 avec un godet et une partie excavatrice à l'arrière. C'était une petite
25 machine qui n'aurait pas pu faire grand-chose en terme de construction.
26 Q. Bien. Je vais maintenant consacrer quelques minutes avec vous à des
27 machines spécifiques. Nous allons les prendre l'une après l'autre. Je vais
28 vous poser des questions concernant ces équipements l'un après l'autre.
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1 Vous nous avez parlé des bulldozers, plus spécifiquement, si je ne me
2 trompe, les bulldozers 75. Alors, cette machine, quand on en parlait, on
3 l'appelait comment ? Avait-elle un nom -- un surnom dont on se servait pour
4 lui faire référence ?
5 R. Le bulldozer 75, la machine à chenille parce qu'elle avait des
6 chenilles.
7 Q. Vous l'appeliez parfois peut-être le Dozer ou le Dozer 75 ?
8 R. Bulldozer ou Dozer, oui, c'est comme ça qu'on l'appelait.
9 Q. Pourriez-vous nous décrire au juste ce qui est un Skip, une description
10 sommaire, mais quelques caractéristiques.
11 R. Un Skip. Le Skip c'est une machine qui peut être utilisée pour des
12 travaux de construction et qui a à l'avant une benne qui charge et qui
13 décharge -- petite benne, et à l'arrière, une pelle rétrocaveuse [comme
14 interprété] qui sert à creuser un canal, une tranchée, donc, la pelle, qui
15 est à l'arrière, est plus petite. C'est une petite machine de construction.
16 Q. Elle a des roues ou des chenilles ?
17 R. Des roues.
18 Q. Je vais maintenant me servir d'une terminologie assez précise qui
19 revient régulièrement. Je ne veux pas vous écorcher les oreilles par mon
20 utilisation du B/C/S mais, avez-vous déjà entendu le mot, "Rovokopac" ou
21 "Kopac" ? Et si vous connaissez ce mot, que signifie-t-il ?
22 R. Bien sûr. On appelle souvent ça un Rovokopac. C'est une machine qui
23 fait des trous qui peut servir dans le privé comme dans l'industrie de la
24 construction pour faire des travaux à petite ou à grande échelle.
25 Q. D'accord. En ce qui concerne les travaux d'une plus grande ampleur et
26 les machines plus lourdes exigés pour ce genre de chantier. Votre compagnie
27 était-elle dotée de gros Rovokopac, ou deviez-vous vous les procurer à
28 l'extérieur ?
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1 R. Nous n'avions pas de grosses machines. Quand la brigade avait besoin de
2 quelque chose de ce genre, de quelque chose de gros, alors il fallait
3 passer par la voie de la réquisition. On pouvait réquisitionner des
4 machines auprès de grandes entreprises de construction qui en disposaient,
5 des grosses pelles rétrocaveuses, des engins de charge. Tout dépendait de
6 ce que les entreprises avaient à leur disposition et de ce dont nous avions
7 besoin à ce moment-là.
8 Q. Très bien, Monsieur. Je vais maintenant vous demander de penser plus
9 particulièrement à des journées, certaines journées dont nous savons, moi
10 et mes confrères, sur lesquelles nous savons que vous détenez des
11 informations. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre si vous
12 souvenez d'avoir reçu un ordre en une certaine journée de juillet 1995,
13 l'ordre de vous rendre dans un certain endroit ? Si vous vous en souvenez,
14 veuillez, s'il vous plaît, dire à la Chambre en quoi au juste consistait
15 cet ordre ?
16 R. Le 14 juin, j'ai accompagné mon fils qui rejoignait l'armée donc je me
17 suis retrouvé sous le standard avec mon fils qui se rendait à l'armée.
18 Ensuite, je suis rentré chez moi le lendemain. Quand je suis revenu auprès
19 de mon unité, on m'a donné l'ordre de me rendre à Orahovac. Quand j'ai
20 demandé pourquoi, on m'a répondu : "C'est à toi d'y aller et c'est à nous
21 de savoir pourquoi. On est en train d'y creuser des tranchées. Tu as du
22 travail là-bas; alors, vas-y." Et donc, j'y suis allé. Je n'ai pas eu le
23 choix.
24 Q. Bon. Je dois vous arrêter là un instant, Monsieur. Dans votre réponse -
25 là, je me réfère au compte rendu, nous sommes en ligne 10 - vous nous
26 parlez du 14 juin. Or, moi, je vous interrogeais sur le mois de juillet et
27 je désire que nous précisions de quelle journée, de quel mois parlons-nous
28 aujourd'hui ?
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1 R. Je suis désolé, je me suis trompé. Je sais bien ce que voulez dire. Je
2 me suis trompé de mois.
3 Q. Donc, c'est bien le 14 juillet que vous vous trouviez avec votre fils,
4 14 juillet 1995; c'est bien cela, Monsieur ?
5 R. Oui, oui, tout à fait. Tout à fait.
6 Q. Alors, vous nous avez dit avoir reçu cet ordre le lendemain, donc nous
7 sommes là au 15 juillet. Pourriez-vous maintenant parler à la Chambre des
8 événements dont vous souvenez de cette journée-là, en commençant par le
9 début ?
10 D'abord, où vous trouviez-vous quand vous avez reçu ces instructions et de
11 qui les avez-vous reçues ?
12 R. C'est un ordre que j'ai reçu quand j'étais à la compagnie. Le
13 commandant Jokic n'était pas là, mais Slavko Bogicevic y était ainsi que
14 plusieurs autres. Nous avons reçu un coup de fil du commandant Jokic et
15 j'ai immédiatement était envoyé là-bas pour faire ce qu'il y avait -- ce
16 qu'il y avait à y faire, donc, j'ai dû partir.
17 Quand je suis arrivé -- ou plus exactement déjà en route, j'ai rencontré un
18 groupe de soldats dont certains étaient autour -- un groupe de soldats à
19 proximité de l'école. Ils étaient plusieurs. Je ne peux pas vous dire
20 exactement combien. Il y avait deux ou trois soldats qui portaient des
21 ceintures blanches, et je me suis rendu à un puits près de la route de
22 Krizevici. Quand j'y suis arrivé, il y avait à ma droite des prés où j'ai
23 vu un groupe de gens plutôt des jeunes hommes donc qui se tenaient dans ce
24 pré ou, plus exactement, qui étaient dans ce pré et qui étaient morts. Ils
25 avaient été abattus et j'ai -- on m'a dit qu'il y avait là une machine près
26 du pont et il y avait une machine qui était partie déjà le 14 et dont on se
27 servait pour creuser les tombes. Donc, si j'y suis allé en dessous du pont,
28 j'ai entrevu la situation. Je n'ai pas pu me rapprocher, franchement, je
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1 n'ai pas supporté cette vue et je suis retourné sur la route, et de là, je
2 suis retourné à la base et je suis rentré chez moi.
3 Q. Bien, Monsieur. Nous allons maintenant revenir un peu en arrière. Je
4 vais vous poser quelques questions sur cette journée que vous venez de nous
5 décrire. Ce matin-là du 15 juillet, quand vous êtes arrive au quartier
6 général de votre compagnie, avez-vous rencontré des soldats de votre
7 compagnie, qui en conversation sur un sujet quel qu'il soit ?
8 R. A l'entrée de la caserne, il y avait un groupe de soldats d'une même
9 unité qui était en train de parler d'Orahovac. Ils se disaient qu'il y
10 avait des gens là-haut à enterrer, mais je n'ai pas vraiment fait attention
11 et je suis allé au bureau, c'est là que se trouvait Slavko avec Sekonjic et
12 les autres. On m'a dit de monter le plus rapidement possible pour faire le
13 travail. J'ai demandé : "Pourquoi moi ?" Ils m'ont répondu : "Parce que
14 c'est toi, tu y vas, tu n'as rien à dire, tu as à y aller." J'aurais pu
15 dire que la machine était cassée et que je ne pouvais pas travailler ce
16 jour-là, mais, en fait, ça n'était pas possible.
17 Q. Bien. Donc, les soldats qui étaient en conversation, c'étaient des
18 soldats de la Compagnie du Génie ?
19 R. Oui, c'étaient nos soldats.
20 Q. Quand vous nous dites qu'ils étaient en train de parler d'Orahovac et
21 des gens qui y étaient là et qui devaient être enterrés, les avez-vous
22 entendu parler de la façon dont ces gens ont été -- avaient été tués, s'ils
23 avaient été tués au cours d'une bataille ou d'une autre façon, dans des
24 circonstances quelles qu'elles soient ?
25 R. Non, ça je ne sais pas. Je n'ai rien entendu sur la façon dont ils sont
26 morts. Je les ai juste entendu dire qu'il y avait là-bas des gens.
27 Q. Vous nous avez dit avoir quitté la base. On vous a dit au juste où vous
28 étiez censé aller ?
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1 R. A Orahovac.
2 Q. On vous a dit de vous rendre spécifiquement dans tel ou tel endroit à
3 Orahovac ?
4 R. De me rendre depuis l'école vers la route de Krizevici.
5 Q. Vous y êtes allé seul, Monsieur ?
6 R. J'ai eu une voiture qui m'a amené jusqu'à l'école, et puis, le reste du
7 chemin, je l'ai fait à pied.
8 Q. Quand vous êtes arrivé au niveau de l'école, vous dites que vous avez
9 vu des soldats et des hommes portant des ceintures blanches. Ces ceintures
10 blanches signifient-elles quelque chose, ont-elles une signification
11 quelconque concernant la position, le rôle de la personne qui porte ces
12 ceintures ?
13 R. Les seules personnes à porter des ceintures blanches étaient la police
14 militaire dans notre brigade, c'est tout, personne d'autre.
15 Q. Quand vous êtes arrivé à l'école, comment vous y êtes-vous pris pour
16 arriver à cet autre lieu que vous étiez censé aller près d'une source ou
17 d'un puits et de la voie ferrée ?
18 R. Le premier point se trouvait près d'un puits et d'un pré. Le deuxième
19 point où je devais me rendre était un peu plus loin au-delà de la voie
20 ferrée, un peu plus haut. J'y suis allé à pied, donc, je suis parti de
21 l'école et je me suis rendu à ce premier point après avoir être sorti de la
22 voiture.
23 Q. Quelle était au juste votre mission, telle qu'elle vous a été décrite
24 ce matin-là par M. Bogicevic ?
25 R. J'étais censé y aller. On m'a dit : "La machine est déjà là, donc, tu y
26 vas, tu te présentes et tu fais en sorte de les enterrer." Donc, c'est
27 pourquoi que j'y suis allé. Et puis, comme je l'ai dit, j'ai vu quelque
28 chose sous le pont et je suis rentré, mais j'ai vu qu'il y avait des gens
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1 qui travaillaient.
2 Q. Quand vous êtes arrivé à l'école, vous a-t-on parlé d'une machine
3 quelconque qui aurait déjà été sur place et qui était déjà en utilisation ?
4 R. Au quartier général, on m'a dit que la machine était déjà partie avec
5 les ingénieurs, mais une fois que je suis arrivé là-bas, plus personne ne
6 m'a plus rien dit. Moi, je ne suis pas resté avec les soldats près de la
7 route, j'ai poursuivi après l'école pour aller sur les lieux.
8 Q. Bien. Mais quand vous êtes arrivé à l'école, comment avez-vous su où
9 aller ? Comment avez-vous su où vous étiez censé vous présenter ?
10 R. Quand j'étais au quartier général, on m'avait dit de suivre la route de
11 Krizevici qui passe devant l'école, c'est la route principale de Krizevici.
12 Après m'a-t-on dit, à côté de la route, tu verras où c'est. Il te suffit
13 d'avancer.
14 Q. Vous vous souvenez au juste de l'heure qu'il était quand vous êtes
15 arrivé à l'école ?
16 R. Il était peut-être 19 heures 30, ou 20 heures.
17 Q. Vous parlez de l'après-midi, donc, le soir ?
18 R. Non, le matin.
19 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise : Il était donc 7 heures 30 ou 8
20 heures.
21 M. THAYER : [interprétation]
22 Q. D'accord. Quand vous êtes arrivé à l'école ce matin-là, vous souvenez-
23 vous d'avoir vu des officiers de la VRS, d'une brigade, quel qu'elle soit
24 du corps, de l'état-major autour de l'école ?
25 R. Non. Quand nous sommes passés devant en voiture, j'ai vu quelques uns
26 de ces soldats devant l'école, mais je n'ai pas vu d'officiers ni à
27 l'école, ni à l'endroit où les choses se passaient.
28 Q. Après avoir donc fait le chemin à pied pour arriver à ce deuxième
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1 site, là, près du puits, pouvez-vous nous décrire de façon un peu plus
2 détaillée ce que vous avez vu au juste ?
3 R. En fait, le point près du puits, c'était le premier site, à côté de la
4 route. Le deuxième site se trouve un peu plus loin près du passage aérien.
5 J'ai vu là des soldats et des civils morts et j'ai poursuivi mon chemin
6 jusqu'au passage aérien. Là, à droite, j'ai vu une partie, et puis, j'ai
7 fait demi-tour, je suis revenu sur mes pas.
8 Q. Ce premier groupe de morts, vous nous les décrirez comme étant des
9 soldats et des civils. Pourquoi vous nous dites-vous qu'il y avait là des
10 soldats et des civils ?
11 R. Parce que j'ai remarqué qu'il y en avait qui étaient revêtus d'uniforme
12 de camouflage, donc, j'ai présumé que c'étaient des soldats qui faisaient
13 partie, mais il y avait là aussi des civils qui étaient vêtus comme des
14 civils.
15 Q. Pouvez-vous nous dire à peu près de combien de personnes il s'agissait
16 ?
17 R. Je ne sais pas au juste. C'était un tas, une pile de corps. Je ne
18 pourrais pas vous dire au juste. Il y en avait tout un groupe. Une
19 vingtaine peut-être, ou 25, 30. Je ne saurais vous le dire. Je ne peux pas
20 vous donner de chiffre. Ils étaient tous entassés.
21 Q. Vous avez continué votre chemin, vous nous dites que vous êtes passé
22 près d'un chemin de fer, cette voie de chemin de fer, elle est au sol ou
23 elle est ailleurs -- aérienne ?
24 R. C'est une voie de chemin aérienne. C'est le fameux passage aérien sur
25 lequel passe le train pour aller à Tuzla.
26 Q. Vous avez parcouru quelle distance sur cette route en direction de la
27 voie de chemin de fer ?
28 R. Ce n'est pas très loin, 150, 200 mètres entre le premier site et le
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1 deuxième. C'est une évaluation. Je ne peux pas vous dire. C'était peut-être
2 plus, peut-être moins.
3 Q. Vous vous êtes arrêté où, Monsieur ?
4 R. Bien, d'abord, je me suis arrêté juste avant le passage aérien. Je suis
5 resté là une minute, à me demander si je devrais poursuivre ou pas, et
6 puis, une fois que j'ai passé le passage aérien, j'ai vu à ma droite des
7 cadavres juste à côté de moi, à droite du passage aérien donc à 20 à 25
8 mètres peut-être.
9 Q. Vous nous dites que vous avez vu quelques cadavres lorsque vous étiez
10 près du passage aérien. Pouvez-vous nous dire à peu près, essayez de vous
11 remémorer cette journée et de vous rappeler ce que vous avez vu, combien de
12 cadavres, à peu près, avez-vous vu sur ce deuxième site ?
13 R. Un nombre plus important. Ils étaient dispersés. Il n'y avait pas
14 réellement d'amoncellement et ils étaient dispersés sur une certaine
15 largeur du pré. Je ne sais pas combien il y en avait. Je ne me suis pas
16 approché. Je pouvais voir de loin que ce premier groupe était plus
17 important que le premier groupe que j'avais vu au premier point.
18 Q. Et de votre position près de cette voie ferrée, est-ce que vous avez pu
19 voir des machines en fonctionnement ?
20 R. Il y avait une machine, la BGH, et il s'agit d'une rétrocaveuse. Elle
21 avait été envoyée le 14. Je ne sais pas qui l'a envoyé.
22 Q. Cette BGH, pouvez-vous vous remémorer si c'est celle que vous avez vue
23 portait un numéro de modèle qui aurait été mentionné sur la machine ?
24 R. BGH, je pense que c'était une BGH-500.
25 Q. Pouvez-vous nous décrire la taille et ce à quoi ressemblait cette BGH,
26 pour la Chambre, d'une façon générale, description générale, à quoi
27 ressemblait-elle ?
28 R. Il s'agit d'équipement de construction de machine utilisée pour creuser
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1 des canaux, les fondations de bâtiment, qui portent à l'avant un godet.
2 C'est un véhicule tracté, qui peut tourner dans toutes les directions.
3 C'est un engin de terrassement.
4 Q. Est-ce que le BGH fabrique également un modèle 700 ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous souvenez-vous spécifiquement si cette machine que vous avez vue ce
7 jour-là était une BGH-500. Je sais que vous avez dit que : "Vous pensiez
8 qu'il s'agissait d'une BGH-500," ou s'agissait-il d'une BGH-700 ?
9 R. Bien, qu'est-ce que je pourrais vous dire ? Je n'ai pas vraiment fait
10 attention au numéro mais je pense qu'il s'agissait d'une 500, donc la plus
11 petite.
12 Q. Ces deux modèles sont-ils plus gros que ce que la Compagnie du Génie
13 possédait dans son propre stock sur la base ?
14 R. Oui.
15 Q. Pendant que vous étiez dans cet endroit ce jour-là, avez-vous vu
16 arriver d'autre équipement ?
17 R. Il y avait une autre machine ULT 220 qui est arrivée, et qui
18 appartenait à la société d'oxyde de Birac.
19 Q. Cette ULT 220, de quel type de machine s'agit-il ? Qu'est-ce qu'elle
20 fait ? Est-ce que vous pourriez nous décrire à quoi elle ressemble, s'il
21 vous plaît ?
22 R. Il s'agit d'une machine de construction autopropulsée et avec des
23 roues. A l'avant elle possède une benne de chargement.
24 Q. Par rapport au type de machine Rovokopac, comme la BGH-500, la
25 rétrocaveuse BH-500, qu'est-ce que l'ULT 220 est supposée faire ? Vous avez
26 dit que la rétrocaveuse la BGH est conçue pour creuser des tranchées avec
27 son godet. L'ULT 220 est conçu pour faire quoi, Monsieur ?
28 R. Elle est essentiellement utilisée pour charger du matériel de
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1 construction. C'est son but principal. Mais elle peut également être
2 utilisée pour de plus petites excavations sur un terrain plat, mais elle ne
3 peut creuser en profondeur.
4 Q. Et --
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, avez-vous, par hasard,
6 une photo de ces machines que nous pourrions montrer au témoin et que nous
7 pourrions également voir ce qui faciliterait la vie de tout un chacun ?
8 M. THAYER : [interprétation] Oui, Président, je les ai. Je peux vous les
9 montrer maintenant ou les montrer plus tard mais si vous souhaitez, je peux
10 le faire maintenant.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que cela faciliterait les
12 choses et permettrait d'aller plus vite.
13 M. THAYER : [interprétation] Si nous pouvions avoir sur le prétoire
14 électronique le 65 ter 2069.
15 Q. Malheureusement, c'est ce que nous avons de mieux comme photo. Est-ce
16 que vous voyez l'engin que vous avez sous les yeux ?
17 R. Oui, je vois. Il s'agit d'une excavatrice, une BGH-500, une
18 rétrocaveuse.
19 Q. C'est la machine qui est au centre de cette photo, n'est-ce pas ?
20 R. C'est la machine qui est juste à côté de la personne qui se trouve sur
21 la photo.
22 Q. S'agit-il de la machine que vous vous souvenez avoir vue à Orahovac ?
23 R. Oui.
24 M. THAYER : [interprétation] Pourrions nous maintenant voir la 65 ter,
25 2070, s'il vous plaît ?
26 Bien. Cette photo ne ressort pas très bien. J'en ai une qui soit -- qui est
27 mieux en couleur et c'est comme si nous avions téléchargé ceci. Ça été
28 téléchargé en noir et blanc. Je demanderais l'aide de la Greffière, si je
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1 pouvais mettre cela sur le rétroprojecteur. Bien, je vois que nous avons
2 quelques problèmes techniques.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est M. Meek qui nous vole la vedette.
4 M. THAYER : [interprétation] Oui. Bon.
5 Q. Monsieur, reconnaissez-vous maintenant cet équipement ?
6 R. Oui. Il s'agit d'une ULT 220. C'est un engin de construction
7 autopropulsé.
8 Q. Bien. Où étiez-vous, Monsieur, lorsque vous avez vu le ULT 220 arrivée,
9 ce jour-là ? D'après vos souvenirs, où vous trouviez-vous lorsque vous avez
10 d'abord vu cette -- lorsque vous avez vu cette machine ?
11 R. J'étais près du point d'eau. Je m'y trouvais lorsque cette machine est
12 arrivée, cette ULT 220.
13 Q. Là, Monsieur, était-elle conduite ou est-elle arrivée tracter par un
14 autre engin ?
15 R. Elle est arrivée conduite par quelqu'un. Elle possède des pneus et peut
16 être conduite.
17 Q. Vous souvenez-vous si vous attendiez à voir cette deuxième machine,
18 arrivée ce jour-là ?
19 R. Je n'en savais rien. Personne ne m'en avait parlé. Cette machine est
20 arrivée au bout d'un certain temps. Je ne saurais pas vous dire au bout de
21 combien de temps.
22 Q. Où est-elle allée, Monsieur ?
23 R. Dans l'autre endroit, il y avait des personnes qui travaillaient pour
24 une société de services publics et ils ont chargé des corps dans la benne
25 et la machine, cette machine les a emmenés.
26 Q. Où est-ce que cette machine emmenait les corps, Monsieur ?
27 R. Vers le charnier qui avait été creusé par la rétrocaveuse, la BGH-500.
28 Q. Les corps ont été chargés sur cette ULT 220; de quels corps s'agissait-
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1 il, Monsieur ? S'agissait-il des corps que vous nous aviez décrits et que
2 vous avez vus en premier lorsque vous êtes arrivé dans cet endroit, ou
3 s'agit-il d'autres corps ?
4 R. Non, c'était un autre endroit. Pour ce qui est du groupe de personnes
5 tuées, des corps dispersés, ils étaient là; certains portaient des
6 uniformes, d'autres étaient en tenue civile.
7 Q. Bien. Si vous me le permettez, je voudrais clarifier cela dans les
8 quelques minutes qui nous restent avant la pause. Vous avez dit avoir vu
9 des membres des sociétés des services publics chargés des corps, de quelle
10 société de services publics s'agit-il,
11 Monsieur ?
12 R. La société des services publics de Zvornik.
13 Q. Où les avez-vous chargé ces corps sur l'ULT 220 ?
14 R. Une fois que l'ULT est arrivée, ils ont commencé à charger les corps et
15 je me suis éloigné. Je suis allé à l'école et ils ont continué à travailler
16 et moi, je n'y suis pas retourné. Une fois qu'ils ont eu terminé, ils sont
17 repartis vers leurs bases respectives.
18 Q. Bien. Donc, les corps que vous avez vus charger par les personnes
19 travaillant pour les sociétés des services publics et chargés ce ULT,
20 s'agissait-il des corps de ce groupe plus petit que vous avez décrit avoir
21 vu en premier ou s'agissait-il des corps -- dans l'autre endroit, ou
22 s'agissait-il d'un autre groupe encore ?
23 R. Il s'agissait de l'autre endroit là-haut car la machine a d'abord œuvré
24 dans cet autre lieu.
25 Q. Donc, au-delà de la voie ferrée, c'est ce que vous vouliez dire ?
26 R. Oui, oui.
27 M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce le moment de
28 faire une pause ?
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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense que nous pouvons faire une
2 pause maintenant. Ce sera une pause de 25 minutes.
3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.
4 --- L'audience est reprise à 16 heures 13.
5 M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous reprendre
6 ?
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur Thayer.
8 M. THAYER : [interprétation] Merci.
9 Q. Bien. Vous vous souvenez, Monsieur, il y a quelques minutes lorsque
10 l'on vous a montré la photo de la BGH, la rétrocaveuse BGH, est-ce que vous
11 vous souvenez de la couleur de cette engin de terrassement que vous avez vu
12 le 15 juillet ?
13 R. Jaune.
14 Q. Vous souvenez-vous de la couleur de l'ULT 220 que vous avez vue le 15
15 juillet ?
16 R. Jaune également.
17 Q. Bien. Maintenant, Monsieur, quelle a été votre réaction lorsque vous
18 avez vu tous ces corps vers l'autre site ?
19 R. Bien. Ce n'était pas très agréable. Je n'étais pas à l'aise.
20 Q. Bien, avant de vous rendre sur ce site, près du point d'eau et au-delà
21 de la voie ferrée, est-ce que vous aviez reçu des informations ? Aviez-vous
22 entendu quelqu'un parler ou entendu quoi que ce soit à propos d'exécutions
23 qui se seraient produites à Orahovac le 14 ?
24 R. J'avais entendu au sein de l'unité que ce qui avait été fait devait
25 être enterré qu'il y avait des gens à enterrer là-bas.
26 Q. Vous nous avez dit, un petit peu plus tôt dans votre témoignage, que la
27 réaction lorsque l'on vous a donné cet ordre a été pourquoi moi, pourquoi
28 est-ce que je dois y aller ? Est-ce que vous aviez cru comprendre que vous
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1 étiez --
2 R. Oui.
3 Q. -- est-ce que vous aviez compris que vous étiez envoyé pour surveiller
4 ou assurer l'enterrement de personnes qui avaient été exécutées ?
5 R. On m'a envoyé pour être prêt de la machine au cas où quelque chose --
6 au cas où il y aurait eu un problème, au cas où une des machines serait
7 tombée en panne. Donc, j'étais là pour intervenir, et on m'a dit : "Vous
8 n'avez rien à voir avec ce qui se passe là-bas." Mais j'y suis allé mais je
9 n'ai pas pu supporter cette vue très longtemps, donc, je suis retourné.
10 Q. D'après votre expérience au sein de la Compagnie du Génie, comment
11 compreniez-vous la relation entre les entreprises des services publics et
12 les sociétés de protection civile dans la municipalité de Zvornik ?
13 R. La société de service publique avait été créée et nous savions tous
14 pourquoi. Nous savions tous quelle était la fonction de l'entreprise de
15 service public au sein de la municipalité. Maintenant, pourquoi ont-ils
16 envoyé les personnes plus âgées pour ensevelir les autres personnes pour
17 les charger dans une benne et les transporter vers la fosse ? Je ne sais
18 pas.
19 Q. Bien. Je vais vous poser une question, Monsieur. Comment compreniez-
20 vous ce que les gens de la protection civile faisaient à Zvornik ? Dans la
21 municipalité de Zvornik quel était l'objectif de la protection civile ?
22 R. Bien. La protection civile, les termes parlent d'eux-mêmes. Elle était
23 là pour offrir son aide en cas d'incendie, de catastrophes naturelles ou
24 d'événements de ce genre. Les gens se rassemblaient pour aider les
25 personnes, d'autres sont partis de la ville dans les communautés locales,
26 alors que la société de service public s'occupait de toutes sortes
27 d'activités municipales, du ramassage des ordures, du nettoyage de la
28 ville, et de choses similaires.
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1 Q. Monsieur, vous rappelez-vous qui conduisait ou faisait fonctionner ces
2 machines lorsque vous étiez sur le site proche d'Orahovac ?
3 R. La BGH-500 était conduite par Cvijetin Ristanovic, qui était
4 l'opérateur de la machine, je pense. Sa profession c'était justement de
5 s'occuper de machine de construction. C'était là son poste au sein de la
6 société où il avait travaillé avant la guerre et par la suite. Pour ce qui
7 est des autres machines, et de l'ULT 220 qui venait de la société de
8 Glinica Birac, c'était quelqu'un du nom de Rade qui faisait fonctionner
9 cette machine mais je ne me souviens pas de son nom de famille.
10 Q. Bien. Combien de temps pensez-vous être resté dans cet endroit qui
11 était proche du point d'eau ou près de la voie ferrée ? Combien de temps
12 êtes-vous resté d'une façon générale dans cet endroit ?
13 R. Je suis parti plus tôt. Je suis allé à pied vers l'école, une voiture
14 est arrivée du front proche de Krizevici, les autres sont restés pour
15 terminer le travail, et ensuite, ils sont repartis vers leur base. Je ne
16 sais pas très bien quand. Je ne sais pas très bien à quelle heure ils sont
17 revenus. Je pense que c'était après le crépuscule, et le jour suivant,
18 lorsque je suis arrivé à l'unité, ils m'ont dit avoir fini aux alentours de
19 6 heures ou 7 heures.
20 Q. Combien de temps pensez-vous être resté à Orahovac, le 15 juillet,
21 entre le moment où vous êtes arrivé à l'école et le moment où vous êtes
22 parti dans ce véhicule pour rentrer à la base ?
23 R. Je n'ai pas pu supporter la vue. C'est la raison pour laquelle je suis
24 reparti à l'école. Il y avait une odeur désagréable dans l'air. J'ai dû
25 passer trois ou quatre heures dans cet endroit en déambulant entre l'école
26 et la fontaine d'eau.
27 Q. Lorsque vous êtes rentré dans votre compagnie, est-ce que vous avez
28 fait rapport à quelqu'un ?
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1 R. Non. Je n'ai pas fait de rapport. Je ne me souviens même pas s'il y
2 avait quelqu'un au bureau, si Slavko y était ou s'il y avait quelqu'un
3 d'autre. Je suis rentré, et ensuite, je suis reparti chez moi.
4 Q. Vous souvenez-vous avoir parlé à qui que ce soit à la
5 base ?
6 R. Non.
7 Q. Avant de continuer, nous allons maintenant nous pencher sur le 65 ter
8 1705.
9 Voyez-vous l'image qui est devant vous ?
10 R. Oui.
11 Q. Prenez votre temps, et lorsque vous pensez avoir reconnu ce que vous
12 voyez, dites-le-nous, et j'aurais des questions à vous poser.
13 R. Oui, je vois tout, parfaitement bien.
14 Q. Bien. Est-ce que vous pouvez nous décrire d'une façon générale ce que
15 cette photo nous montre ?
16 R. C'est là où se trouve les deux charniers, le charnier numéro 1 et le
17 charnier numéro 2. C'est la route qui mène à Krizevici.
18 M. THAYER : [interprétation] Pourrais-je demander à l'huissière de vous
19 donner un crayon pour que vous puissiez marquer certains points ?
20 Q. Pourriez-vous marquer d'une croix le point d'eau, qui vous nous avez
21 dit, était proche de la route ?
22 R. [Le témoin s'exécute]
23 Q. Pourriez-vous également tracer un cercle pour indiquer l'endroit où
24 vous avez vu les premiers corps dont vous avez parlé; est-ce que vous
25 pourriez à l'intérieur de ce cercle mettre le
26 chiffre 1 ?
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 Q. Pourriez-vous dessiner un autre cercle et indiquer l'endroit où vous
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1 avez vu des corps dispersés. Si vous pouviez, à l'intérieur de ce cercle,
2 mettre le chiffre 2, s'il vous plaît.
3 R. [Le témoin s'exécute]
4 Q. Si vous pouviez mettre vos initiales pour indiquer l'endroit où vous
5 vous teniez lorsque vous aviez vu les corps, lorsque vous êtes approché des
6 corps pour ce deuxième point.
7 R. Ici.
8 [Le témoin s'exécute]
9 Q. Pourriez-vous mettre vos initiales ?
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Si vous pouviez marquer la date d'aujourd'hui en bas à droite.
12 Aujourd'hui, nous sommes le 29 août.
13 R. [Le témoin s'exécute]
14 Q. Merci, Monsieur. Je pense que nous pouvons donc garder ce document.
15 Nous avons fini avec cette pièce.
16 Alors, avez-vous reçu, à un moment ou à un autre, une autre mission
17 similaire à celle qui vous avait été assignée le 15 juillet ?
18 R. Oui, le lendemain quand je suis arrivé à mon unité, donc, le 16, on m'a
19 à nouveau chargé d'aller cette fois à Kozluk pour les mêmes raisons. Ce qui
20 avait été fait avait été fait, et ils ont dit à Milos Mitrovic d'y emmener
21 le petit Skip là.
22 Q. Quand vous dites : "Ce qui avait été fait avait été fait," pourriez-
23 vous préciser pour la Chambre, même si cela est peut-être pénible, au juste
24 ce que vous voulez dire par là ?
25 R. Je veux dire que des gens avaient été exécutés, à cet endroit-là, et
26 que j'étais censé y aller après pour terminer le boulot, pour les enterrer.
27 Q. Vous souvenez-vous qui vous a donné cet ordre de vous rendre à Kozluk ?
28 R. Quand j'étais à mon unité, il y avait là Slavko, le commandant Jokic
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1 n'était pas là. Il n'était pas à l'unité, mais il y avait Sekonjic et on a
2 reçu un ordre venant de Milos d'y aller avec une petite machine et moi,
3 j'étais censé y aller aussi pour enterrer les corps. Les corps étaient dans
4 des creux dans le sol. Donc, il n'y avait pas besoin de creuser, il
5 suffisait de recouvrir les corps.
6 Q. Nous allons revenir sur ce point dans un instant. Une petite question,
7 d'où venait cet ordre, cet ordre qui vous concernait ainsi que M. Mitrovic,
8 d'où émanait-il, Monsieur ?
9 R. Je pense que c'est Slavko Bogicevic qui a envoyé Milos. En ce qui me
10 concerne, on m'a dit d'y aller aussi. Quand je suis arrivé devant la porte
11 du bureau, on m'a dit d'y aller aussi. C'est dans le bureau qu'on me l'a
12 dit, je ne sais plus si c'était Slavko Bogicevic ou Sekonjic, l'un des deux
13 m'a dit : "Le commandant veut que tu y ailles pour terminer le travail."
14 Q. Vous êtes allé à Kozluk tout seul, alors, Monsieur ?
15 R. Je n'étais pas seul, on m'y accompagnait en voiture, en camion plus
16 exactement, un camion TAM, TAM 75, un véhicule militaire, donc, j'avais un
17 chauffeur qui m'y a emmené, et puis, j'ai terminé à pied pour aller sur les
18 lieux vu que ce n'était pas accessible aisément. Ça sentait très mauvais.
19 Q. Vous vous souvenez de l'heure de votre arrivée sur ce
20 site ?
21 R. Il était 8 heures à peu près du matin, encore une fois.
22 Q. Pourriez-vous nous décrire le mieux possible de quoi avait l'air ce
23 site, où se trouvait-il et décrivez-nous un peu le terrain lorsque vous
24 êtes arrivé ?
25 R. Sur ce site, on avait creusé -- c'était une carrière où on se procurait
26 du gravier pour l'industrie. Donc, il y avait déjà des trous parce qu'on en
27 avait tiré des graviers. Il y avait aussi des excavations, donc, tout était
28 déjà là. Il y avait quelqu'un qui avait apporté -- qui avait mis du verre
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1 cassé dans l'un des trous. Je crois que cela venait probablement de l'usine
2 de verre de Kozluk. On avait dû y apporter le verre cassé de l'usine qui
3 avait été donc déchargée dans ce même champ.
4 Q. Monsieur, vous nous parlez d'une usine à Kozluk, mais lorsque vous êtes
5 rendu sur ce site, cette même carrière de gravier, vous êtes passé tout
6 près de cette fameuse usine, n'est-ce pas ?
7 R. Je suis passé à côté de l'usine d'eau minérale de Vitinka Kozluk.
8 Q. C'est là la société dont vous veniez de nous parler quand vous nous
9 parlez d'une usine de verre de Kozluk ?
10 R. Non, non, cette usine produisait de l'eau minérale, et sans doute, se
11 servait-elle de bouteille de verre pour contenir cette eau. Donc, quand une
12 bouteille était cassée, je présume qu'on jetait les déchets -- le verre
13 cassé dans ces trous à gravier, je présume.
14 Q. D'accord. Vous souvenez-vous de quelle couleur était le verre que vous
15 avez vu, Monsieur ?
16 R. Les bouteilles étaient principalement en verre blanc ou vert. Il y
17 avait surtout du blanc, il y avait quelques morceaux de verre vert, je n'ai
18 pas beaucoup fait attention à ce point. Je suis passé devant, c'est tout.
19 Q. Cet endroit se trouvait-il à proximité d'un puits ou d'un plan d'eau
20 quelconque ?
21 R. Il y avait à proximité à 20 ou 30 mètres peut-être le lit de la rivière
22 Drina.
23 Q. Pourriez-vous décrire au juste où vous avez vu ces cadavres et dans
24 quel état vous les avez trouvés ?
25 R. Dans ces trous où on avait creusé pour sortir du gravier, il y avait
26 des corps en pleine décomposition. A la surface du trou, on ne pouvait,
27 c'était intenable. On ne pouvait pas rester là. C'était presque impossible
28 d'en approcher de plus de -- moins de 20 mètres. Quand je suis passé à côté
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1 du trou qui contenait des morceaux de verre, je me suis éloigné, je ne
2 supportais pas l'odeur.
3 Q. Avez-vous pu voir comment étaient vêtus ces cadavres, Monsieur ?
4 R. Pendant la courte période où je suis resté près des trous à gravier,
5 j'ai pu apercevoir certaines personnes en uniforme, mais il y avait aussi
6 là des cadavres en costume civil.
7 Q. S'agissait-il là de cadavres qui étaient déjà dans les trous ou à la
8 surface de la terre ?
9 R. Tous les corps étaient déjà dans les trous, quasiment tous. Il y en
10 avait quelques-uns qui étaient restés en surface. Mais ils étaient très
11 près les uns des autres. Ils n'étaient pas vraiment dispersés. Ils étaient
12 tous près les uns des autres.
13 Q. Avez-vous vu quelqu'un d'autre sur place, d'autres que
14 M. Mitrovic et votre chauffeur ?
15 R. Le chauffeur qui m'y avait emmené était resté à distance. Il n'y a que
16 Mitrovic qui se soit approché avec le Skip -- le petit Skip pour enterrer
17 les corps et empêcher l'odeur de se répandre. Il y avait là peut-être trois
18 ou quatre jeunes hommes, jeunes hommes en uniforme avec des ceintures
19 normales. Mais ils étaient masqués. Ils avaient le visage couvert. C'était
20 un groupe de trois ou quatre personnes, mais je ne me suis pas approché
21 d'eux. Je ne leur ai pas demandé qui ils étaient. Je ne pouvais pas les
22 reconnaître. Ils étaient un peu plus loin et je ne pourrais franchement pas
23 vous dire ce qu'ils étaient en train de faire.
24 Mitrovic n'a rien pu faire avec sa machine. C'était une petite machine.
25 Donc, après un certain temps, l'ULT 220 est arrivée. C'est une machine plus
26 grosse. Le conducteur est sorti de l'habitacle. Il se voyait qu'il trouvait
27 la situation absolument pénible, mais il n'avait pas le choix. Je ne sais
28 pas s'il était forcé à le faire par ces jeunes hommes. Je ne sais pas de
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1 qui il s'agissait. Je ne sais pas qui était ces messieurs. Mais ce qui est
2 sûr c'est qu'il était obligé de faire ce qu'il a fait.
3 Q. Est-ce vous qui avez demandé qu'on emmène là cette ULT 220, Monsieur ?
4 R. Mais, non, ce n'est pas moi.
5 Q. C'est qui alors, si vous savez de qui il s'agissait ?
6 R. Je présume que l'ordre émanait de l'unité, j'imagine qu'ils se sont
7 rendus compte qu'on ne pourrait rien faire avec le petit skip, que c'était
8 une petite machine qui n'était pas adapté à ce genre de travail. En tout
9 cas, pas sur ce genre de site et que ça prendrait extrêmement longtemps de
10 faire le travail avec une aussi petite machine. Donc, je pense qu'ils ont
11 dû demander à ce que l'unité envoie une plus grosse machine.
12 Q. Savez-vous qui conduisait cette ULT 220 ?
13 R. La machine appartenait à Stanko [phon] de Josanica. C'est une
14 entreprise, c'est une carrière de pierres. Donc, c'était leur machine, et
15 le conducteur qui s'appelait Rade Boskovic était un employé de l'entreprise
16 en question. C'était lui qui conduisait la machine. C'était sa machine.
17 C'était la machine de l'entreprise mais c'était lui qui en était le
18 conducteur habituel.
19 Q. Vous souvenez-vous à peu près de combien de temps vous êtes resté sur
20 le site ?
21 R. Ah, pas très longtemps, je suis rapidement parti encore une fois. Mais
22 Milos est parti le premier avec la petite machine qui ne servait à rien.
23 Moi, je suis resté là et Rade -- à partir de -- Milos est parti avant moi
24 avec la petite machine qui ne servait à rien.
25 R. Rade est resté là après moi, et puisque c'était lui qui conduisait la
26 machine autopropulsée, il est revenu avec la machine et il a terminé le
27 travail.
28 Q. Donc, vous êtes parti avant que M. Boskovic ait fini le travail, ou
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1 vous êtes parti en même temps que lui, ou vous êtes parti après lui ?
2 R. Je suis parti avant lui.
3 Q. Vous l'avez vu faire le travail avec son ULT 220,
4 Monsieur ?
5 R. Je n'ai pas pu ne pas le voir, il est passé tout près de moi. C'est là
6 qu'il allait. Il allait finir le travail.
7 Q. Vous l'avez vu faire le travail qu'on l'avait envoyé
8 faire ?
9 R. Je n'étais plus tout près, j'étais déjà plus loin. Mais oui, je l'ai vu
10 travailler.
11 Q. Vous, où vous êtes-vous rendu après avoir quitté ce site, Monsieur ?
12 R. Je suis revenu à mon unité. J'ai sorti du véhicule et quand j'ai pu
13 constater qu'il n'y avait personne au bureau, je suis ressorti dans la rue
14 et j'ai fait du stop pour rentrer chez moi. Rade est revenu à la base tout
15 seul.
16 Q. Maintenant, dites-nous, Monsieur : y a-t-il eu une troisième fois où on
17 vous a donné l'ordre d'aller quelque part ?
18 R. Oui. Tous les matins quand j'arrivais à mon unité, on me donnait des
19 tâches. Il y a eu un troisième jour où on m'a ordonné d'aller cette fois à
20 Branjevo. J'ai demandé ce que j'étais censé y faire et on m'a dit : "Bien,
21 comme la même chose que tes dernières tâches." Voilà ce qu'on m'a dit à
22 l'unité. C'est Slavko et Sekonjic qui me l'ont dit d'y aller immédiatement.
23 Q. On vous a dit d'aller où en particulier à Branjevo ?
24 R. A Branjevo, il y avait eu une exécution à proximité de la ferme, une
25 ferme d'exploitation porcine près de Branjevo. Donc, on était censé creuser
26 un trou pour y jeter les corps. On m'a dit que les -- des services publics
27 allaient venir charger les corps.
28 Q. Vous connaissiez déjà cette exploitation porcine à
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1 Branjevo ?
2 R. Non. Je ne connaissais pas. J'étais passé par la région pendant la
3 guerre, par cette même route. J'avais déjà traversé Branjevo, mais je
4 n'avais jamais été sur le site de l'exploitation. Je n'avais jamais visité
5 les lieux, j'étais juste passé par là, j'avais traversé par la route.
6 Q. Vous vous y êtes rendu comment, Monsieur ?
7 R. J'y suis allé en véhicule, en petit véhicule.
8 Q. Vous conduisiez vous-même ou vous aviez un chauffeur ?
9 R. Non, j'avais un chauffeur, ils ont envoyé un chauffeur, quelqu'un de
10 l'unité.
11 Q. Vous souvenez-vous à peu près de l'heure à laquelle vous êtes arrivé ?
12 R. Ah, je pense qu'il était un peu plus 8 heures, peut-être
13 8 heures 30, même 9 heures. C'était assez loin de Zvornik.
14 Q. Pour plus de précision, nous sommes le matin ou l'après-midi ?
15 R. Le matin.
16 Q. Pourriez-vous décrire ce que vous avez vu quand vous êtes arrivé sur le
17 site de cette exploitation à Branjevo, ce matin-là ?
18 R. Quand je suis arrivé, le véhicule est resté sur la route juste avant
19 l'emplacement où on est censé tourner pour aller à la ferme. Moi, je suis
20 allé jusqu'à la ferme, j'ai rencontré là un groupe de travailleurs, des
21 gens qui travaillaient à la ferme et qui étaient debout sur la route et qui
22 m'ont dit -- en fait, qui m'ont demandé si quelqu'un allait venir faire
23 quelque chose. J'ai répondu : "Bien, oui, je suppose, pour qu'on m'a envoyé
24 ici." Après quoi, un BGH est arrivé chargé sur un camion à remorque, et
25 puis, un ULT est arrivé aussi, tout seul. Je ne sais pas si les
26 travailleurs leur ont dit où creuser, ça, je ne sais pas. Je présume que
27 l'idée était le travail se fasse le plus loin que possible des porcheries.
28 Je n'ai même pas eu le temps de partir quand ils commencé à creuser, une
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1 fois que le BGH est arrivé.
2 Q. Quand vous nous parlez de travailleurs, vous voulez dire des civils qui
3 travaillaient sur place ou des militaires ?
4 R. C'étaient des civils, des gens assez âgés qui étaient locateurs des
5 lieux et qui travaillaient dans cette ferme. C'étaient des gens assez âgés.
6 Q. Vous souvenez-vous avoir vu sur place quelqu'un du peloton arrière sur
7 le site ?
8 R. Au moment où je suis arrivé il n'y avait là personne. Mais un peu plus
9 tard, il y a eu des personnes venant des services publics, des gens assez
10 âgés qui nous ont aidés à faire le travail pour qu'on termine plus vite.
11 Q. Ils faisaient quoi, ces personnes âgées ?
12 R. Ils ne faisaient rien au moment où je suis arrivé. Ils étaient là près
13 des porcheries sur les sites de la ferme, mais ils ne faisaient rien.
14 Q. Plus tard, ils ont fait, Monsieur ?
15 R. Mais ils sont retournés sur leur lieu de travail. De temps en temps,
16 ils sortaient des bâtiments, pour surveiller ce qui se passait
17 l'enterrement.
18 Q. Avez-vous vu là quiconque autre que la personne qui conduisait le BGH,
19 ou celui qui conduisait l'ULT ? Donc, autre que ceux qui s'occupaient de
20 leur machine, avez-vous vu là quelqu'un chargé en train de déplacer les
21 corps ou de faire quoique ce soit qui a à voir avec ces corps ?
22 R. Pas au moment où je suis arrivé. Là, je n'ai vu que les gens de la
23 ferme et un peu plus tard, ceux qui conduisaient les machines.
24 Q. Mais quand vous nous dites que des gens des services publics avaient
25 été envoyés pour aider. Ils ont aidé à quoi au
26 juste ?
27 R. Ils étaient censés aider à charger les corps dans la benne. De temps en
28 temps, les conducteurs pouvaient ramasser les corps avec la benne, mais, en
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1 général, il y avait quelqu'un qui soulevait les corps et qui les déposait
2 dans la benne, manuellement.
3 Q. Savez-vous que la Brigade de Zvornik avait un bataillon arrière ?
4 R. Oui, je le sais.
5 Q. En quoi consistait ce bataillon arrière, qui était les hommes qui
6 composaient ce bataillon ?
7 R. Dans ma zone c'étaient des personnes assez âgées qui n'étaient pas
8 censées être mises sur le front, qui étaient censées rester à l'arrière
9 pour des tâches qui se passent à l'arrière garde. En général, c'étaient des
10 gens assez âgés.
11 Q. Vous souvenez-vous avoir vu des membres de ce bataillon arrière en
12 train de travailler avec les fameux salariés du service public, ce jour-là
13 ?
14 R. Quand ils sont arrivés, il y en avait peut-être deux ou trois avec eux,
15 dans le groupe, je ne m'en souviens pas exactement parce que je ne me
16 souviens d'aucun nom. Je ne les connaissais pas. Mais il y avait un groupe
17 qui venait des services publics avec peut-être deux ou trois hommes du
18 bataillon arrière.
19 Q. Etes-vous resté sur place pendant toute la durée de la mission, ou est-
20 ce que vous avez fait des allers-retours. Est-ce que vous êtes allé
21 ailleurs pendant le travail de chargement des corps et pendant
22 l'enterrement ?
23 R. Je suis resté là presque jusqu'à la fin, je n'étais pas tout près, je
24 suis resté près de la route, du côté de la clinique des soins ambulants qui
25 était censé s'occuper de la région locale. Moi, j'étais plutôt du côté de
26 la route qui se trouvait entre la porcherie et la clinique.
27 Q. A proximité de cette clinique, avez-vous parlé à quelqu'un, avez-vous
28 vu quelqu'un ? Vous en souvenez-vous ?
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1 R. Je me trouvais là avec un capitaine, je crois, de première classe, qui
2 était là sur place à l'organe. Je crois que de profession c'était un
3 enseignant. Je ne me souviens ni de son nom, ni de son prénom, c'était une
4 personne âgée dont la maison se trouvait tout près de la clinique. Je suis
5 allé le voir, nous sommes restés ensemble tout près de la route.
6 Q. Pouvez-vous nous le décrire physiquement ?
7 R. Un vieux monsieur assez corpulent, un gros ventre. Voilà, pour autant
8 que je puisse me souvienne, de quoi il avait l'air. Il était assez costaud.
9 Q. Vous souvenez-vous si ce capitaine était membre d'un bataillon en
10 particulier; si oui, à quelle brigade appartenait son bataillon ?
11 R. Il faisait partie du Bataillon Lokanj de la Brigade de Zvornik.
12 Q. Vous souvenez-vous à peu près de l'heure qu'il était lorsque vous avez
13 quitté les lieux ?
14 R. C'était le soir. Il était peut-être 19 heures ou 20 heures.
15 Q. Quand vous êtes parti, le travail d'excavation et l'enterrement était
16 terminé ou on travaillait encore ?
17 R. Il y avait encore quelques cadavres à enterrer quand je suis parti.
18 Quand ils ont eu fini, la machine autopropulsée est partie toute seule, la
19 deuxième machine a été chargée sur la semi-remorque, et elles sont
20 retournées à la base.
21 M. THAYER : [interprétation] J'aimerais maintenant, s'il vous plaît, faire
22 afficher la pièce P02103, plus particulièrement la page 210 de ce document
23 -- la page 210, s'il vous plaît.
24 Q. Monsieur, reconnaissez-vous cet endroit, l'endroit qui est représenté
25 sur la photographie ?
26 R. Oui.
27 Q. Que voit-on ?
28 R. Oui.
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1 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qu'on y voit ?
2 R. C'est la ferme de Branjevo, l'exploitation agricole.
3 Q. Vous avez mentionné des porcheries. Vous allez peut-être avoir besoin
4 d'aide. Je vais vous demander de vous prendre le stylet.
5 M. THAYER : [interprétation] Merci, Mme l'Huissière.
6 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, tracer un X là où se trouvait la
7 porcherie, pour autant que vous vous en souveniez ?
8 R. C'était là. C'est cette partie-ci.
9 [Le témoin s'exécute]
10 Q. Lorsque vous dites : "C'est cette partie-ci," est-ce que vous vous
11 référez en fait aux deux bâtiments en rangée qui ont des toits rouges ?
12 Vous dites que c'est ça les porcheries ?
13 R. Oui, oui.
14 Q. Sur cette photographie, voyez-vous l'endroit où on a enterré les corps
15 ?
16 R. Je vais l'annoter.
17 Q. Oui, s'il vous plaît, si possible, tracez un cercle pour indiquer
18 l'endroit où on a enterré les corps.
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 Q. Monsieur, est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, inscrire vos
21 initiales en bas à droite, et inscrire également la date d'aujourd'hui ?
22 Nous sommes le 29 août.
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Je voudrais que l'on mémorise ceci et on en aura terminé avec cette
25 pièce.
26 M. THAYER : [interprétation] Je vais demander, s'il vous plaît, la page
27 210. Je vous remercie, Mme l'Huissière.
28 Q. Ma première question pour vous, Monsieur : est-ce que vous comprenez
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1 l'anglais ?
2 R. Non.
3 Q. Très bien. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que l'on voit à
4 l'image ?
5 R. C'est le même site, le site de Branjevo. Celui qu'on a vu précédemment.
6 Q. Très bien. Est-ce que vous pourriez inscrire des X où se trouvaient les
7 porcheries ?
8 R. [Le témoin s'exécute]
9 Q. Tracez une ligne, s'il vous plaît, pour nous montrer quel est le
10 secteur où on a creusé et on a enterré. Vous pouvez tracer un cercle, mais
11 vous pouvez juste aussi tracer une ligne pour nous indiquer jusqu'où
12 s'étend ce secteur ?
13 R. C'est ce secteur-ci.
14 [Le témoin s'exécute]
15 Q. Merci, Monsieur. Encore une fois, je vais vous demander d'inscrire vos
16 initiales en bas à droite, ainsi que la date d'aujourd'hui, la date du 29
17 août.
18 R. [Le témoin s'exécute]
19 Q. Nous allons mémoriser cela, s'il vous plaît.
20 M. THAYER : [interprétation] Nous n'aurons plus besoin de cette pièce.
21 Merci, Mme l'Huissière.
22 Q. Monsieur, n'avez-vous jamais parlé à votre chef du génie, au commandant
23 Jokic ? Lui avez-vous parlé des missions que vous avez reçues ?
24 R. Oui. A chaque fois que nous nous sommes vus, mais on ne se voyait pas
25 tous les jours. Il est arrivé que l'on ne se voie pas, donc, moi, je lui ai
26 demandé et lui il me répondait il fallait bien que quelqu'un le fasse.
27 Puisque vous -- "Toi tu avais ces hommes, tu étais le chef de la Section
28 des Ponts et Chaussées, tu travaillais sur des terrassements et il a fallu
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1 que tu y ailles." Voilà.
2 Q. Monsieur, d'après ce que vous avez vu, ce que vous avez entendu ces
3 jours-là lorsqu'on vous a confié ces missions, les exécutions qui ont eu
4 lieu, est-ce que c'était un secret dans votre compagnie ? Ou est-ce que les
5 hommes en parlaient ? Est-ce qu'ils le savaient ?
6 R. Je ne sais pas. Avant tout cela, j'ai été pendant deux ou trois jours
7 chez moi. J'étais en train de me préparer pour faire une fête à mon fils
8 qui allait partir à l'armée. Je ne savais même pas que c'était comme ça. Et
9 quand je suis revenu dans mon unité, c'est uniquement, à ce moment-là,
10 qu'on m'a dit ce que je devais faire, où je devais aller. Je ne sais pas,
11 je n'ai pas.
12 Q. Ces missions qu'on vous a confiées d'aller enterrer les corps des
13 personnes exécutées, ces missions étaient-elles secrètes ? Etait-ce un
14 secret dans votre compagnie ?
15 R. Mais je ne pense pas. Ce n'était absolument pas un secret. Les gens le
16 savaient. Les gens savaient que ça devait être fait, les soldats entre
17 autres. Ils le savaient. Ils en ont parlé.
18 Q. Monsieur, on vous a envoyé à trois endroits. A chaque fois que vous y
19 êtes allé, étiez-vous la personne la plus gradée de votre compagnie à ces
20 endroits ?
21 R. Oui. Les autres c'étaient des soldats; moi, puisque j'étais sergent
22 d'avant la guerre, on m'a confié cette mission dans ma compagnie et on m'a
23 dit que je devais être à la tête de la Section des Ponts et aux dépenses
24 des Chaussées. On m'a confié ces hommes aussi et je devais aller faire ces
25 missions.
26 Q. Est-ce que vous dites dans le cadre de votre témoignage, Monsieur, que
27 vous n'avez émis aucun ordre à l'un quelconque de vos hommes au sujet de
28 ces trois missions ?
Page 14467
1 R. Non.
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Que signifie votre "non" ?
3 Vous n'avez émis aucun ordre ? Ou ce n'est pas ce que vous dites dans le
4 cadre de votre déposition ? Nous vous voudrions savoir très clairement,
5 Monsieur Lazarevic, la chose suivante : à un moment quelconque, avez-vous
6 émis un ordre à l'intention de l'un quelconque de vos hommes eu égard à ces
7 trois missions ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, à personne. Une mission concrète je n'en
9 n'ai confié à personne.
10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est clair. Allez-y, Monsieur Thayer ?
11 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Est-ce que vous avez jamais annoté des sites d'une manière quel qu'elle
13 soit avant que les corps n'y soient enterrés, à l'un quelconque des sites ?
14 R. Moi non, certainement pas.
15 Q. Est-ce que vous avez jamais montré à qui que ce soit à l'un quelconque
16 de ces sites où il fallait enterrer les corps ?
17 R. Non. Je ne l'ai pas fait.
18 Q. A un moment quelconque après ces événements, est-ce que vous avez
19 appris qu'une opération était en cours afin d'exhumer ces corps pour les ré
20 enterrer ailleurs ?
21 R. Après qu'ils aient été enterrés, c'est ça ?
22 Q. Oui, c'est ça, Monsieur.
23 R. J'en ai entendu parler.
24 Q. A quel moment, en avez-vous entendu parler, Monsieur ?
25 R. Au bout d'un certain temps. Je ne sais pas vous le situer dans le
26 temps.
27 Q. Vous avez des informations ? En savez-vous quelque chose que votre
28 Compagnie du Génie ait été impliqué d'une manière quel qu'elle soit à ce
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1 genre d'activités ?
2 R. Oui.
3 Q. Très bien. Pourriez-vous nous en parler ? Qu'en savez-vous au sujet de
4 votre Compagnie du Génie ayant pris part d'une manière quelconque au ré
5 enterrement de ces corps ?
6 R. J'ai entendu dire que des gens qui travaillaient sur des machines qui
7 étaient allés les enterrer initialement et qui sont allés les exhumer.
8 Q. Je vous en prie de continuer.
9 R. Mais, moi aussi, j'ai été désigné comme la première fois de la même
10 façon dans mon QG dans le génie que j'y aille, que je sois avec eux pendant
11 qu'ils allaient faire ça. Ils ont dressé une liste des hommes, le
12 commandant Jokic, et Slavko Bogicevic, des hommes qui étaient censés aller
13 faire ça.
14 Q. D'après vos souvenirs, à quel moment est-ce qu'on vous a confié cette
15 mission, Monsieur ?
16 R. J'étais chez moi. J'étais en permission ce jour-là. Ils m'ont appelé
17 par téléphone. Slavko Bogicevic m'a appelé par téléphone et il m'a dit :
18 "Viens, c'est urgent. Il faut que tu viennes ici," et j'y suis allé devant
19 la caserne et il était dehors et il m'a donné une feuille de papier. Je lui
20 ai dit : "Mais qu'est-ce que c'est que ça ? Et il m'a dit : "Voilà, c'est
21 comme ça. Il faut exhumer les corps pour les transférer. Tiens, tu as la
22 liste des gens qui vont venir avec toi." J'ai dit : "Mais, enfin, pourquoi
23 est-ce que moi, je dois y aller ?" Et lui, il a dit : "Que le commandant
24 l'avait désigné lui pour être avec ce groupe qui allait le faire, qu'il ne
25 voulait pas le faire et qu'ils ont décidé de me le confier à moi." Donc, il
26 m'a appelé chez moi pour me remettre la liste pour préparer ça.
27 Q. C'est le commandant Jokic, Monsieur ?
28 R. Le commandant Jokic et Slavko Bogicevic.
Page 14469
1 Q. Vous souvenez-vous du mois où cela s'est produit, où on vous a confié
2 cette mission d'aller exhumer les corps, à peu près ?
3 R. Non, je ne sais pas quel mois c'était, ni la date. Je n'arrive pas à me
4 rappeler.
5 Q. Etait-ce en 1995, Monsieur ? Etait-ce avant le mois de décembre 1995 ?
6 R. C'était en 1995, mais je ne sais pas quel mois.
7 Q. Monsieur, finalement, en fin de compte, avez-vous pris part,
8 personnellement, d'une manière quelconque, à cet exhumation et enterrement
9 et ensevelissement des corps ?
10 R. J'y ai pris part comme la première fois. J'étais là. J'étais là mais je
11 n'étais pas sur les lieux puisque les gens qui avaient enterré ils savaient
12 où et comment. Donc, c'est eux qui se sont chargés d'exhumer également,
13 puisqu'ils savaient.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez des noms de ces sites où vous vous êtes
15 rendu pendant le ré enterrement des corps ?
16 R. Je suis allé au même site où je suis allé la première fois quand on a
17 enterré les corps. J'ai reçu pour mission d'être là.
18 Q. En ces occasions, est-ce que vous avez suivi le transfert des corps
19 jusqu'au site où on allait les ré ensevelir ?
20 R. Non.
21 Q. Monsieur, je voudrais que l'on parcoure ensemble des documents.
22 Premièrement, document 65 ter 297.
23 Avec l'aide de Mme l'Huissière, Monsieur, je voudrais vous montrer un
24 original. C'est l'original d'un document.
25 M. THAYER : [interprétation] Placez-le sur le rétroprojecteur un instant,
26 s'il vous plaît.
27 Q. Monsieur, pourriez-vous, s'il vous plaît, prendre ce
28 livre ? Pourriez-vous juste le parcourir rapidement et nous dire de quoi il
Page 14470
1 s'agit ?
2 R. C'est le cahier qui contient les ordres du jour de la Compagnie du
3 Génie.
4 Q. Très bien. C'est la page 135 que je voudrais que l'on examine dans la
5 version en B/C/S et c'est la page 15 en anglais, 126 dans l'original,
6 Monsieur, si vous regardez l'angle supérieur droit c'est 126.
7 Monsieur, est-ce que vous pourriez lire la première ligne que l'on lit à la
8 page 126 ?
9 R. "L'officier de permanence au commandement de la compagnie pour la
10 journée du 15 juillet 1995 sera le sergent de première classe, Lazarevic,
11 Damjan."
12 Q. Très bien. En haut de la page, que lit-on ? Que dit la première ligne ?
13 R. "Ordre pour le jour en question du commandant de la compagnie, donc,
14 ordre pour la journée du 15 juillet 1995."
15 Q. Vous souvenez-vous quel était l'objectif, la finalité de ce registre ?
16 R. De savoir quels étaient les ordres donnés, qui était l'officier de
17 permanence dans la compagnie, qui devait faire quoi. Moi, on m'a désigné
18 pour être officier de permanence dans la compagnie le jour où j'allais à
19 Krizevici à Orahovac. Je n'étais même pas présent dans la compagnie. Or,
20 habituellement, il était de permanence celui qui se trouvait là où la
21 compagnie était stationnée. Ça pouvait même être un simple soldat, ce
22 n'était pas nécessairement un officier. Mais on ne pouvait pas désigner
23 comme de permanence quelqu'un qui n'était pas dans la compagnie. C'était ça
24 dans la pratique.
25 Q. D'après vous, qui étiez chargé de renseigner cette information, est-ce
26 que vous vous souvenez qui devait écrire cela tous les jours ?
27 R. C'était le supérieur de la compagnie. C'est lui qui le faisait surtout
28 s'il était libre; sinon, l'adjoint du commandant de la compagnie.
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1 Q. Vous dites : "Un officier de la compagnie," vous vous référez à qui
2 plus précisément, Monsieur ?
3 R. Celui qui écrit les ordres pour la journée, Slavko Bogicevic qui est
4 l'adjoint du chef de compagnie; sinon, le chef de la compagnie, il sait qui
5 doit faire quoi, donc, il pouvait l'écrire.
6 Q. Oui. Très bien. Excusez-moi. Je n'ai pas été clair. Quel était le nom
7 de cet officier de votre compagnie ?
8 R. Sekonjic, Vojislav -- Vojkan Sekonjic. Je pense qu'il s'appelait
9 Vojkan.
10 Q. Je vais vous inviter maintenant à examiner les points 4, 5, 6 et 7,
11 sous l'intitulé : "Mission." C'est la page 126, la journée du 15 juillet.
12 Donc, c'est la page que vous aviez, ou regardez à l'écran de votre
13 ordinateur. Vous voyez sous "Mission," Monsieur ?
14 R. Oui.
15 Q. Au point 4, que voit-on ?
16 R. "Emploi du BGH 700 à Orahovac."
17 Q. Au point numéro 5, la mission numéro 5, qu'est-ce,
18 Monsieur ?
19 R. "Emploi de l'ULT 220 à Orahovac."
20 Q. A la ligne suivante, la ligne 6.
21 R. "Emploi de l'ULT à Petkovci." Mais tout ça je n'en sais rien, ce qui
22 est écrit là, sous ces points.
23 Q. Au point 7, comment se lit le point 7 ?
24 R. Mais ça non plus, au point 7, je n'en sais rien.
25 Q. Autrement dit, "emploi de la ULT à Petkovci," vous n'en savez rien.
26 R. Je ne sais pas ça ni au point 6 ni au point 7. Ça je ne sais pas.
27 Q. Très bien. Examinons la page suivante de ce même document, donc, la
28 page 127, Monsieur, vous n'avez pas besoin de tourner la page. Alors,
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1 comment se lit la première ligne, tout en haut de la page ?
2 R. "Ordre du commandant de la compagnie pour la journée du
3 16 juillet 1995."
4 Q. La mission au point 2, s'il vous plaît, pourriez-vous nous en donner
5 lecture ? C'est là qui nous intéresse 2 et 3.
6 R. "Emploi du BGH 500 à Orahovac, et emploi de l'ULT 220 à Orahovac."
7 Q. La page suivante, si vous voulez bien; pour examiner la page donc 128,
8 Monsieur, juste tournez la page. Comment se lit la première ligne de cette
9 page, s'il vous plaît ?
10 R. "Ordre du commandant de la compagnie, chef de compagnie pour la journée
11 du 17 juillet 1995."
12 Q. S'il vous plaît, lisez-nous juste ce qui se lit au
13 point 2 ?
14 R. "Travailler avec la BGH 700 à Branjevo."
15 Q. Le point suivant, c'est-à-dire la mission numéro 3 ?
16 R. "Travailler avec l'ULT 220 à Branjevo."
17 Q. La mission numéro 5, s'il vous plaît ?
18 R. "La BGH 700 devrait être transporté à Branjevo."
19 Q. Est-ce qu'il est indiqué comment par quel moyen ?
20 R. Non, ce n'est pas indiqué.
21 Q. Bien, Monsieur, nous pouvons fermer cela et merci.
22 Je voudrais vous montrer un autre document, nous pouvions regarder le
23 65 ter 301. Avec l'aide de l'huissière, je vais vous passer l'original du
24 document qui est peut-être plus lisible. En fait, on a besoin de la page
25 suivante parce que je pense qu'il est à l'envers. Le document a été paginé
26 à l'envers.
27 Monsieur, si vous pouvez donc passer, remontez jusqu'au haut du
28 document, il y a quelque chose qui est écrit à la main en haut de la page à
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1 droite, et qui semble être souligné; que disent ces mots ?
2 R. La société Birac, c'est-à-dire la société d'aluminium à Birac.
3 Q. Si nous pouvions remonter, ça, c'est bon. Il semblerait qu'il y ait là
4 une ligne où figure une date qui va du 1er au 31 juillet 1995; que dit cette
5 ligne ?
6 R. Je ne vois pas sur l'écran.
7 Q. Bien, nous avons l'original là, et il y a une ligne.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que quelqu'un pourrait indiquer
9 le pointeur.
10 M. THAYER : [interprétation]
11 Q. Si vous regardez, vous pourriez voir la ligne qui vous est montrée. Je
12 sais que c'est un petit peu difficile.
13 R. "L'excavatrice, la -- pardon, de Torpedo."
14 Q. Bien. Juste au-dessus de cette ligne, qu'est-ce qu'indique cette ligne
15 ?
16 R. "Le 1er juillet.
17 Q. Bien. Qu'est-ce que cette ligne indique, Monsieur ?
18 R. 1er au 31 juillet.
19 Q. Bien. La deuxième ligne que vous venez de lire, juste en dessous de ce
20 que vous venez de lire. La ligne qui est juste en dessous, qu'est-ce
21 qu'elle indique ? Il y a quelque chose indiqué en lettre cyrillique et puis
22 quelque chose d'imprimé en lettre d'imprimé. Est-ce que vous pourriez lire
23 ce qui est écrit ?
24 R. Je ne vois rien là-dessus.
25 Q. Bien. Si vous pourriez regarder l'original ?
26 R. D-2.
27 Q. Bien. Juste au-dessous de cette ligne, vous venez de la lire il y a
28 quelques instants. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que dit cette ligne
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1 ? Est-ce que vous pouvez lire ce qui est écrit en cyrillique, et ensuite,
2 ce qui est en lettre d'imprimerie juste après, tapé à la machine juste
3 après ?
4 R. Ce que j'ai pu lire c'est : "Rétro Torpedo." Qu'est-ce que je devrais
5 lire d'autre ?
6 Q. Qu'est-ce que ce document -- est-ce que vous pourriez dire à la Chambre
7 de première instance ce qu'est ce document ?
8 R. Il s'agit donc du livret concernant de l'ordre de mission de chacun de
9 ces véhicules pour chaque équipement que nous avions en notre possession.
10 Q. Nous avons déjà expliqué ce qu'était la Rovokopac. Qu'est-ce que c'est
11 qu'une "Torpedo" ? S'agit-il simplement de la marque d'un engin de
12 terrassement ?
13 R. Bien. Je suppose que c'était une marque, c'est une toute petite
14 machine, comme un tracteur avec une petite benne à l'avant, et une benne
15 plus grande à l'arrière pour creuser des trous. Je suppose que le Torpedo,
16 c'est la marque de cette machine.
17 Q. Si vous regardez un petit peu plus loin sur ce document, il y a deux
18 noms qui apparaissent; pourriez-vous les lire, Monsieur ?
19 R. Cvijetin Ristanovic et Milos Mitrovic. Ces deux noms signifient qu'il y
20 avait une machine et -- creuse l'opérateur qui se remplaçait, par exemple,
21 il y en a qui travaillait pendant deux ou trois jours, puis, il prenait
22 deux ou trois jours de congé. Il était remplacé par l'autre. Les deux noms
23 figurent ici pour indiquer qui était celui qui avait rempli, qui avait mis
24 du carburant dans la machine, donc, ces deux personnes travaillaient sur la
25 machine, une machine et deux opérateurs, c'est tout.
26 Q. Si nous pouvions regarder un petit peu plus loin en bas, il y a un
27 diagramme un peu plus grand, et dans cette première colonne du côté gauche,
28 on voit des dates. Est-ce que vous voyez ce diagramme, Monsieur, il y a
Page 14475
1 donc quelques dates ?
2 M. THAYER : [interprétation] Merci, merci, Madame l'Huissière.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois le 11, le 14, le 16 et le 21, et
4 à la dernière ligne, le 23.
5 M. THAYER : [interprétation]
6 Q. Que disent les lignes du 14 et du 16, si vous lisez ces informations
7 partant de la gauche vers la droite ? Commençons par le 14 juillet. Qu'est-
8 il dit à ce point ?
9 R. La date et il y a ensuite le numéro de la mission, et ensuite, la
10 quantité de carburant utilisé pour le véhicule.
11 Q. En litres, Monsieur ?
12 R. Oui, exprimez en litres.
13 Q. Du côté droit, tout en haut à droite de ce diagramme, que dit cette
14 dernière colonne, Monsieur ? Qu'est-ce qu'elle indique ?
15 R. C'est là des signatures. Les signatures de quelqu'un à l'arrière qui
16 confirmait la quantité de carburant qui avait été utilisé pour le véhicule
17 et pour le travail effectué par cette machine.
18 Q. Merci, Monsieur.
19 Est-ce que nous pourrions maintenant passer à la page suivante de ce
20 document ? Si cela vous aide de regarder l'original, n'hésitez pas. Nous
21 faisons figurer ce document également à l'écran. Utilisez celui qui vous
22 parait le plus facile à lire. Là encore, à l'extrême gauche, il y a une
23 colonne qui porte quelques dates. D'une façon générale, sans s'intéresser à
24 un point en particulier, que dit cette page ? Quelles sont les informations
25 figurant sur cette page ? Qu'est-ce qu'elles sont supposées dire aux
26 lecteurs ?
27 R. Il s'agit de la description de chaque journée là où les machines
28 étaient envoyées, la route suivie, par exemple, le 11 juillet 1995, l'armée
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1 de la Republika Srpska, bien, le document donne le nom de la base, et je
2 n'arrive pas à déchiffrer le mot suivant.
3 Q. Ça va, Monsieur. Nous allons parler, de toute façon, de deux autres en
4 particulier, mais si vous regardez la colonne 16, si l'on donc regarde ce
5 document en allant de la gauche vers la droite, qu'indique-t-elle, Monsieur
6 ?
7 R. C'est là les heures des véhicules, l'horaire des véhicules.
8 Q. Bien. C'est le nombre d'heures pendant lequel le véhicule a été
9 utilisé; c'est exact ?
10 R. Le nombre d'heures pendant laquelle la machine a été utilisée, d'après
11 l'ordre de mission.
12 Q. Si nous pouvions revenir à l'extrême gauche de ce document, je vous
13 demanderais de lire tout ce qui figure pour la date du 14 juillet 1995; la
14 voyez-vous ?
15 R. "La base Orahovac, la base, creuser des tranchées à Orahovac."
16 Q. L'horaire-là, le temps de l'utilisation du véhicule ?
17 R. Cinq heures.
18 Q. Monsieur, si nous pouvions regarder le point suivant en dessous du 14
19 juillet, que dit ce point ?
20 R. La base Orahovac, creuser des tranchées à Kozluk."
21 Q. Bien, Monsieur, juste pour m'assurer que nous avons lu la bonne ligne.
22 Si nous regardons ce qui concerne le 16, je vous demanderais de passer
23 lentement -- d'aller lentement vers la droite dans la colonne 4; est-ce que
24 vous pouvez lire ce qui y figure pour le 16 ?
25 R. "La base Kozluk, la base. Creuser des tranchées à Kozluk."
26 Q. Le nombre d'heures, si vous pouvez voir sur l'original le temps passé ?
27 R. Huit -- huit heures.
28 Q. Si nous revenons à la colonne 2, qu'indique cette colonne pour ces
Page 14477
1 dates du 14 et du 16, donc, la colonne numéro 2 ?
2 R. "La base Orahovac -- la base," le 14 et le 16, "La base Kozluk -- la
3 base."
4 Q. Si vous regardez maintenant la colonne numéro 2, est-ce que vous voyez
5 cela ? Donc en allant de gauche vers la droite, les colonnes 1 à 20, je
6 vous pose des questions sur la colonne numéro 2 ?
7 R. "Indication," oui, je peux voir VRS -- la VRS, l'armée de la Republika
8 Srpska.
9 Q. Ça c'est ce qui concerne le 14 et le 16; est-ce exact ?
10 R. Je pense. Je pense que la même chose s'applique là parce qu'il n'y a
11 pas d'autres indications.
12 Q. Merci, Monsieur. Excusez-moi, je vous laisse terminer votre réponse.
13 R. Mais ces deux machines, au cours de ces deux jours, le 16, elles sont
14 allées à Kozluk, mais n'ont rien fait. Le 14, cette machine en particulier
15 n'y était pas. Elle n'était pas à Orahovac. L'autre la plus importante, la
16 BGH-500, y était. Quelqu'un a mis cette information au hasard. Lorsque je
17 suis arrivé à Orahovac, la BGH y était. La Torpédo n'y était pas. La
18 Torpédo était à Kozluk. Milos Mitrovic l'y avait emmenée, mais elle n'a
19 servi à rien. Il n'a rien pu faire avec.
20 Q. Bien.
21 M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le moment
22 est venu de faire une pause. Il y a encore deux autres documents que je
23 voudrais voir avec le témoin lorsqu'il reviendra.
24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Je remets à la Greffière un
25 exemplaire propre de ce que vous nous aviez remis un peu plus tôt indiquant
26 les parties que vous devez expurger, ce qui n'a pas été annulé sur la -- le
27 document que je vous remets ne doit pas être expurgé. Est-ce que vous
28 pourriez remettre cela à M. Thayer, puis, nous vérifierons cela, Monsieur
Page 14478
1 Zivanovic, par la suite, et vous aurez une nouvelle -- un nouvel exemplaire
2 expurgé. Merci bien.
3 Nous faisons maintenant une pause de 25 minutes.
4 --- L'audience est suspendue à 17 heures 48.
5 --- L'audience est reprise à 18 heures 18.
6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer.
7 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Pourrions-nous avoir le numéro 302 relevant du 65 ter, et pourrais-je
9 avoir l'aide de l'huissière ?
10 Q. Bien. Monsieur, voyez-vous le document qui apparaît sur l'écran de
11 votre ordinateur ? Je vous ai également remis l'original de ce document
12 s'il vous est plus facile de lire l'original. Il y figure une ligne tapée à
13 la machine tout en haut du document juste au-dessus de cette série de
14 chiffres. Pourriez-vous la lire tout en haut du document ?
15 R. "Machine de construction, équipement de construction, propriété de la
16 société Birac."
17 Q. Un petit peu plus loin dans le document quelle est donc la date qui est
18 donnée pour cet équipement ?
19 R. Du 1er juillet au 31 juillet 1995.
20 Q. Quel est l'équipement donc de Birac -- qui vient de "Birac Holding" --
21 de la société Birac ?
22 R. Une machine de construction, l'ULT 220, quatre roues autopropulsée de
23 couleur jaune.
24 Q. Il y a un nom qui figure sur le petit diagramme qui se trouve un petit
25 peu plus loin en bas. Pourriez-vous -- savez-vous -- pouvez-vous lire cela
26 et nous dire -- dire à la Chambre de qui il s'agit ?
27 R. C'est le nom de l'opérateur de cet équipement. Il travaillait pour la
28 société Birac et il s'appelait Veljko Kovacevic.
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1 Q. Un petit peu plus bas, dans le diagramme un peu plus grand qui se
2 trouve sur cette page, est-ce que vous voyez là donc ce qui est dit pour
3 les dates du 15 juillet et du 17 juillet concernant le carburant utilisé ?
4 R. Oui. Le 15 juillet, 60 litres ont été utilisés pour le véhicule et le
5 17 juillet, 100 litres.
6 Q. Vous voyez deux autres points concernant le 15 et le 17 dans cette même
7 colonne; quelles sont les quantités de carburant utilisées pour faire le
8 plein ?
9 R. Le 15, 40 litres, et le 17, 70 litres.
10 Q. Pourrions-nous maintenant regarder la deuxième page de ce document ?
11 M. THAYER : [interprétation] Pouvons-nous la montrer sur le prétoire
12 électronique ?
13 Q. Monsieur, je ne peux pas dire -- mais si vous voulez donc tourner la
14 page et regarder l'autre côté de la page -- de l'autre côté de ce document.
15 Oui, c'est cela. Dans la colonne 1, vous voyez deux dates, Monsieur, l'une
16 en dessous de l'autre.
17 R. Le 17 juillet 1995, VRS creusait les tranchées à Orahovac.
18 Q. Bien. Je vous demanderais d'y jeter un autre œil. Regardez la colonne
19 1, et si vous pouviez donc regarder la date au tout début de cette colonne
20 1, là où figure la date, si vous pourriez regarder et nous dire quelle est
21 la date qui y figure ?
22 R. Le 15 juillet 1995, VRS creusement de tranchées à Orahovac.
23 Q. Combien d'heures sont indiquées sur cet ordre de mission pour l'ULT 220
24 ce jour-là à Orahovac ?
25 R. Cinq heures, mais cela aurait dû être plus long. Mais quelqu'un a écrit
26 cinq heures, je ne sais pas pourquoi.
27 Q. Bien. En regardant donc le deuxième point, vers la gauche, quelle est
28 la deuxième date qui figure dans cette colonne, Monsieur ?
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1 R. Le 17 juillet 1995, VRS creusement de tranchées à Branjevo.
2 Q. D'après cet ordre de mission, cela demandait : combien d'heures à
3 Branjevo ?
4 R. Il est dit ici 8 heures 30.
5 M. THAYER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant passer le
6 65 ter numéro 299 sur le prétoire électronique ?
7 Q. Je vais, avec l'aide de Mme l'Huissière, vous passer l'original de ce
8 document.
9 R. Me permettez-vous de faire une correction concernant l'autre date ?
10 Q. Oui, certainement.
11 R. Cette machine n'était pas à Branjevo le 17. Il y avait là une autre
12 machine. Il y avait également une ULT 220, mais elle appartenait à la
13 carrière de Josanica. Ce n'était pas -- il ne s'agissait pas de celle-ci.
14 Ça j'en suis sûr.
15 Q. Bien. Le carburant qui a été utilisé pour ravitailler ces véhicules où
16 est-ce que le plein a été fait et à qui appartenait le carburant ?
17 R. La VRS, notre brigade, la pompe à essence et c'est là où nos véhicules
18 faisaient le plein de carburant.
19 Q. Bien. C'est le dernier document que je vais vous montrer, Monsieur. Là
20 encore, quelles sont les dates qui sont indiquées pour ce véhicule ? Si
21 vous pouviez regarder la première page - merci, Monsieur - voyez-vous
22 l'image qui apparaît sur votre écran,
23 Monsieur ?
24 R. Je ne vois pas. Je vois beaucoup mieux sur l'original.
25 Q. Bien. Merci, Monsieur. Si vous pouviez lire les dates qui figurent sur
26 ce document.
27 R. Il ne s'agit pas d'équipement de construction, il s'agit d'un camion.
28 C'est un véhicule le 2626 D-2. C'est un camion qui est utilisé pour
Page 14481
1 transporter du matériel.
2 Q. De quelle marque s'agit-il, si vous pouvez le lire, Monsieur ? Quel est
3 le mot qui apparaît juste avant le 2626 ?
4 R. [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quelle est la marque de ce camion ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici il est marqué D-2, c'est le type de
7 carburant.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, non, non, c'est la ligne juste
9 avant au-dessus, quelle est la marque. Vous nous avez dit qu'il s'agissait
10 d'un camion un 2626 ou enfin quelque ce soit le chiffre, mais quelle était
11 la marque de ce camion ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'une Mercedes, un camion Mercedes.
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
14 Monsieur Thayer, à vous.
15 M. THAYER : [interprétation]
16 Q. Un peu plus bas, nous avons un nom. Est-ce que vous pouvez nous lire ce
17 nom ? Qui est cette personne ?
18 R. Milovanovic, Milan, c'était un chauffeur chez nous, dans notre unité.
19 Q. Plus loin, vous allez essayer de voir ce grand tableau. On a renseigné
20 des choses pour la journée du 14 et pour la journée du 17 juillet; le
21 voyez-vous, Monsieur ?
22 R. Oui, le 14 juillet 1995.
23 Q. Quelle est la quantité de carburant ?
24 R. 30 litres.
25 Q. Le 17 juillet ?
26 R. 30 litres fournis.
27 Q. D'après vos souvenirs, Monsieur, si on réquisitionnait un véhicule à
28 une entreprise, l'entreprise de Glinica ou Birac, que vous avez mentionnée,
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1 dans ce cas-là, c'est l'entreprise qui devait être chargée de faire le
2 plein, ou c'est l'armée de la Republika Srpska, en l'occurrence la Brigade
3 de Zvornik ? C'est elle qui avait sous sa responsabilité de fournir
4 suffisamment de carburant aux véhicules en question ?
5 R. C'est surtout la brigade qui s'en occupait de prendre du carburant.
6 S'il n'y avait pas de carburant à la brigade, alors, il le faisait à
7 l'entreprise, qu'il s'agisse d'équipement ou de véhicule.
8 Q. Très bien. Prenons maintenant la page suivante, Monsieur, il ne me
9 reste plus que quelques questions à vous poser au sujet de ce document.
10 Vous pouvez faire dérouler le texte, s'il vous plaît, un petit peu.
11 Monsieur, la colonne à l'extrême gauche, est-ce que vous pouvez
12 l'examiner ? Est-ce que vous y voyez la journée du 14 juillet ?
13 R. Oui.
14 Q. Lisez-nous ce qui est écrit dans cette ligne pour la journée du 14.
15 R. Le 14 juillet 1995, "la base Krizevici, transport de l'excavateur à
16 bord d'une remorque."
17 Q. Est-ce qu'il est dit : "La base à Krizevici ou la base vers Krizevici"
18 ?
19 R. Il est question de la base du génie, donc : "La base, le QG du génie
20 pour Krizevici et retour".
21 Q. Très bien. La ligne suivante, s'il vous plaît, dans la suite, la
22 journée du 16 juillet, est-ce que vous pouvez nous en donner lecture ?
23 Lisez-nous ce qui est écrit dans toute la ligne.
24 R. Le 16 juillet 1995, la base Orahovac transport de l'excavateur
25 remorque.
26 Q. La journée qui suit, celle du 17 juillet, Monsieur ?
27 R. Le 17 juillet 1995, la base Standard c'est le QG de notre brigade,
28 Branjevo, la base, transport de BG-700.
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1 Q. Plus loin à droite, dans cette même ligne, est-ce que vous reconnaissez
2 la signature pour ce qui est de la journée du 17
3 juillet ?
4 R. Le 17, c'est ma signature. C'est moi qui ai signé. Il fallait bien que
5 quelqu'un signe puisque j'étais là, j'ai signé. Quand je n'étais pas là,
6 c'était quelqu'un d'autre.
7 Q. Merci, Monsieur. Nous n'avons plus besoin de ce document.
8 Monsieur, j'ai quelques questions supplémentaires à vous poser. Ça va
9 concerner le ré-ensevelissement de ces corps. Vous avez mentionné une liste
10 de noms de personnes, liste qui aurait été dressée qu'on vous a montrée. Je
11 crois qu'il s'agissait là de gens qui étaient censés aller travailler,
12 aller participer à cette opération, c'était des membres de votre compagnie.
13 Est-ce que vous savez qui a dressé la liste en question, Monsieur ?
14 R. De ma compagnie, il y avait deux opérateurs -- ou plutôt, trois
15 opérateurs. Les autres étaient membres d'autres unités. Ils n'étaient pas
16 membres du génie, il n'y avait que trois hommes de notre unité.
17 Q. Vous dites "unité," Monsieur; vous voulez dire les autres Unités du
18 Bataillon de la Brigade de Zvornik, ou vous vous référez à d'autres
19 brigades ?
20 R. Mais des membres d'autres unités, de mon Unité du Génie de la Compagnie
21 du Génie, il n'y avait que trois hommes. Ces autres, ils venaient de la
22 Brigade de Zvornik mais ils appartenaient à d'autres unités.
23 Q. Vous a-t-on jamais montré une carte, une carte montrant les sites où on
24 allait ré-ensevelir ces corps ? Est-ce que vous n'avez jamais entendu
25 parler d'une telle carte ?
26 R. Non, jamais. Jamais personne ne me l'a montré. Et je n'en n'ai jamais
27 entendu parler.
28 Q. Est-ce qu'on vous a dit qui a choisi ces sites pour le ré
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1 ensevelissement ? Vous en avez entendu parler ? Vous avez entendu quelque
2 chose là-dessus ?
3 R. Non.
4 Q. Vous êtes allé à ces trois sites où on a exhumé les corps. Est-ce que
5 vous étiez présent au moment où les véhicules sont arrivés, les véhicules
6 qui allaient transporter les corps ?
7 R. Oui, j'y étais. J'étais là quand ils sont arrivés et quand les hommes
8 se sont mis à charger mais je n'étais pas à côté parce que j'étais là.
9 Q. Vous pouvez nous décrire les véhicules qu'on a utilisés pour
10 transporter ces corps ?
11 R. On a utilisé les véhicules appartenant à l'entreprise, des camions de
12 transport puisque nos véhicules étaient anciens. On ne pouvait pas s'en
13 servir. On n'aurait pas pu faire ça avec nos véhicules.
14 Q. D'après vos souvenirs, il a fallu que ces camions reviennent combien de
15 fois pour transporter ces corps ?
16 R. Mais ils sont venus autant de fois que nécessaire lorsqu'il a fallu
17 transporter des corps d'un site déterminé. Ils se rendaient sur le site
18 quand il le fallait.
19 Q. Mais est-ce que vous pouvez nous donner une évaluation ? Combien de
20 fois ces camions sont-ils arrivés à différents sites pour emporter les
21 corps ?
22 R. Je ne saurais pas vous dire combien de fois les différents véhicules
23 sont venus, mais ils étaient là à tous les sites lorsqu'on a pris les corps
24 pour les emporter.
25 Q. Monsieur, était-ce de jour ou de nuit ?
26 R. Le soir.
27 Q. Est-ce que vous pourriez vous nous décrire maintenant l'odeur que vous
28 avez ressentie lorsqu'on a exhumé ces corps pour les charger à bord des
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1 camions ?
2 R. C'était une odeur insupportable. On ne pouvait pas supporter ça. Donc,
3 il est arrivé que les gens sautent, descendent de ces équipements en
4 sautant pour s'enfuir, pour respirer de l'air frais parce qu'ils ne
5 pouvaient pas supporter --
6 Q. Pour autant que vous le sachiez, est-ce que quelqu'un a fourni de
7 l'aide à la brigade ? Est-ce qu'une autre brigade, une autre unité a
8 apporté son secours au génie ? Est-ce que des unités supérieures ou
9 subordonnées sont venues aider pour mener à bien cette mission ?
10 R. Je ne sais pas. Je sais que nous étions chargés de ces exhumations.
11 Quant à savoir qui était chargé là-haut d'ensevelir les corps, ça on ne
12 pouvait pas le savoir. Puis, personne ne le disait. Je veux dire, je ne
13 savais pas du tout où on emmenait tout ça.
14 Q. Donc, Monsieur, êtes-vous en train de nous dire dans cette déposition
15 que pour autant que vous le sachiez les membres de la Compagnie du Génie de
16 la Brigade de Zvornik n'ont pas reçu pour mission d'aider à ensevelir ces
17 corps à un autre endroit où que ce soit, donc ré ensevelir ces corps ?
18 R. Non.
19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il nous faudra préciser ce nom.
20 Vous nous avez confirmé, Monsieur Lazarevic, que la Compagnie du
21 Génie de la Brigade de Zvornik n'a pas reçu pour mission de ré ensevelir
22 l'un quelconque de ces corps; c'est bien cela ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, non.
24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci.
25 M. THAYER : [interprétation]
26 Q. Monsieur, pour autant que vous le sachiez, d'après ce qu'on vous a dit
27 à l'époque et d'après ce que vous avez appris par la suite, est-ce qu'il y
28 a -- pour ce qui est des autres, est-ce qu'il y avait d'autres sites qui
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1 auraient été exhumées où on a procédé à la même opération, en plus des
2 trois endroits où vous êtes trouvé ? Est-ce que jamais vous avez appris que
3 ça s'est produit ailleurs où il y a eu des exécutions en masse et des
4 enterrements ?
5 R. Non. Je ne suis pas au courant de cela. Je suis au courant de nos trois
6 sites dans le secteur de Zvornik, ce qui a été enterré et ce qui a été
7 transféré par la suite. Je ne suis pas au courant du reste. Je ne sais pas
8 ce qui s'est passé ailleurs.
9 Q. Pouvez-vous nous donner une évaluation du nombre de jours qu'a duré
10 cette opération de ré ensevelissement dans la zone de responsabilité de la
11 Brigade de Zvornik ?
12 R. Cinq ou six jours peut-être au plus. Voilà pour la durée. En comptant
13 les trois sites de la zone de responsabilité de la Brigade de Zvornik.
14 Q. Sur ces sites, et quand vous étiez présent, y avait-il là quelqu'un
15 d'un grade plus élevé ayant une autorité supérieure à la vôtre ?
16 R. Pendant que j'étais présent moi avec les soldats, personne d'autre
17 n'est venu. Je n'ai vu personne d'autre; cependant, je n'étais pas là tout
18 le temps. Pendant que le travail se faisait, je venais, je passais, je
19 restais un petit moment, puis je m'en allais. Je m'en allais le plus loin
20 possible parce que la puanteur était insupportable.
21 Q. Bien. Etant donné que ce processus, cette opération a pris plusieurs
22 jours, pourriez-vous dire, s'il vous plaît, à la Chambre où, selon vos
23 souvenirs -- d'où selon vos souvenirs, provenait le carburant qui a été
24 nécessaire pour toute cette opération ?
25 R. De la brigade -- de la Brigade de Zvornik.
26 Q. De ce que vous avez vu et de ce que vous ont -- a dit
27 M. Bogicevic, ou peut-être le commandant Jokic, cette opération vous
28 semblait-elle coordonner simplement par la Brigade de Zvornik, ou vous
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1 semble-t-il y avoir un niveau plus élevé de commandement, Monsieur ?
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Meek.
3 M. MEEK : [interprétation] Monsieur le Président, cette question est
4 directive et suggestive. Elle invite le témoin à faire des conjectures.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez raison. Veuillez reformuler
6 la question, s'il vous plaît, dans la façon dont vous la posez elle est un
7 peu douteuse. M. Meek peut avoir raison. Je suggère que vous reformuliez.
8 M. THAYER : [interprétation]
9 Q. Monsieur, vous étiez là, alors, en vous basant sur ce que vous avez vu
10 et sur ce que l'on vous a dit, notamment les personnes qui dépendaient de
11 votre commandement, vous semblait-t-il que cette opération était
12 entièrement organisée par la Brigade de Zvornik ?
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Meek.
14 M. MEEK : [interprétation] Mon objection reste la même, Monsieur le
15 Président.
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vais délibérer avec mes collègues.
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La raison pour laquelle je vous
19 demandais de reposer la question c'est parce que votre question est
20 extrêmement directe.
21 M. THAYER : [interprétation]
22 Q. Pour autant que vous le sachiez, savez-vous qui a coordonné cette
23 opération dans son ensemble ?
24 R. Le commandant Trbic de la Brigade de Zvornik, qui était au
25 commandement.
26 Q. Mais, qui, Monsieur, est le commandant Trbic ?
27 R. Il était à un poste élevé de la brigade. Il était commandant chargé de
28 la sécurité, je crois. Je ne sais pas. Mais il me semble qu'il était
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1 responsable de la sécurité.
2 Q. Donc, sur quelle base me répondez-vous que c'était le commandant Trbic
3 de la Brigade de Zvornik qui était chargé de l'organisation de cette
4 opération ?
5 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
6 M. MEEK : [interprétation] Il me semble, Monsieur le Président, que cette
7 question est également contraire aux éléments de preuve disponibles. Le
8 témoin vient de nous dire que le commandant Trbic était aux commandes. Ce
9 témoin nous a également, Monsieur le Président, dit depuis dix minutes que
10 personne ne lui a jamais rien dit sur cette situation.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez, attendez, attendez. Il y a
12 une limite, à mon avis, au-delà de laquelle vous ne devriez pas aller.
13 Cette référence à la Brigade de Zvornik, à mon avis, donne raison à Me
14 Meek, peut-être pas entièrement parce que la réponse antérieure était : "Il
15 était à un poste élevé dans la brigade. Il était commandant chargé de la
16 sécurité." La seule chose est qu'en ligne 23 de la page précédente, le
17 témoin nous disait que : "Le commandant Trbic, de la Brigade de Zvornik,
18 était à un poste élevé du commandement." C'est la seule chose dont nous
19 puissions -- mais c'est la seule chose, mais je vous permets de clarifier
20 cela et vous ne lui avez d'ailleurs pas demandé le prénom de ce commandant
21 Trbic.
22 M. THAYER : [interprétation]
23 Q. Témoin, encore quelques questions pour éclaircir les choses. Vous avez
24 entendu la question du Président. D'abord, vous souvenez-vous du prénom de
25 ce commandant Trbic ?
26 R. Non, cela ne me dit rien, mais je connais cet homme. Il était de notre
27 brigade. Je ne me souviens pas de son nom comme ça à brûle pour point.
28 Q. Quand vous nous dites : "Qu'il était à un poste élevé de commandement,"
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1 vous entendez quoi au juste ?
2 R. Il commandait. C'était lui qui était responsable de ces ré-
3 ensevelissement et déplacement de corps.
4 Q. De quel commandement, Monsieur ?
5 R. Commandement de la Brigade de Zvornik. Il était tout en haut, les gens
6 s'adressaient à lui pour lui demander ce qu'ils avaient à faire et comment
7 le faire.
8 Q. Encore une fois, Monsieur, sur quoi vous basez vous pour nous dire que
9 c'était ce commandant Trbic au commandement de la Brigade de Zvornik qui
10 coordonnait cette opération de ré- ensevelissement ?
11 R. Mais après chaque travail, il nous appelait, il nous faisait venir pour
12 nous faire préciser ce que nous avions fait, combien nous avions avancé.
13 Voilà ce que je sais. Je n'ai jamais parlé à qui que ce soit d'autre.
14 Personne d'autre ne m'a jamais appelé pour me demander des comptes. Voilà.
15 M. THAYER : [interprétation] Je vous demande l'autorisation de la Chambre
16 pour prendre quelques instants, si vous me le permettez ?
17 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
18 M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je poserai
19 encore deux questions, si vous le permettez.
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous en prie.
21 M. THAYER : [interprétation]
22 Q. Monsieur, saviez-vous, à l'époque, si ce M. Trbic qui était le
23 supérieur hiérarchique de ce M. ou commandant Trbic dans la chaîne de
24 commandement ?
25 R. Drago Nikolic, qui était responsable de la sécurité, avec Trbic, enfin
26 tous les deux.
27 Q. Monsieur, vous souvenez-vous avoir dit aux enquêteurs à Banja Luka en
28 2002, lors de votre entretien, lorsque vous parliez de cette question dans
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1 d'ensevelissement et ré-ensevelissement ? Vous souvenez-vous avoir
2 mentionné ceci à l'enquêteur ?
3 R. Il m'a posé des questions, mais sur le moment je ne lui ai pas répondu
4 sur ce point.
5 Q. Pouvez-vous nous dire quand vous vous souvenez avoir dit pour la
6 première fois à une enquêteur ou à qui que ce soit ce dont vous vous
7 souveniez sur cette opération de ré-ensevelissement et les personnes
8 impliquées et votre rôle dans cette opération ?
9 R. Personne ne m'a jamais posé la question. Personne ne m'a jamais
10 interrogé sur ce sujet. S'il m'avait posé la question, je leur aurais dit.
11 M. THAYER : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres
12 questions.
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Encore une question avant de clore
14 l'audience. Je présume que personne n'a envie de commencer le contre-
15 interrogatoire à cette heure-ci. Monsieur Lazarevic, au cours de ces
16 journées où on vous a demandé de vous rendre à Orahovac et à Kozluk, vous
17 est-il arrivé de rencontrer et de voir ou de parler avec ce commandant
18 Trbic ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de l'ensevelissement, du premier
20 enterrement ?
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Effectivement.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ce n'est que pour la deuxième phase,
23 c'est-à-dire l'opération d'exhumation, à cette époque-là. Il était mon
24 supérieur hiérarchique pour cette opération-là.
25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Nous poursuivrons
26 demain après-midi, Monsieur Lazarevic, nous reprendrons avec le contre-
27 interrogatoire. Dans la période qui nous en sépare, je dois vous dire,
28 donc, d'ici votre contre-interrogatoire demain, vous ne devez discuter avec
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1 personne des questions relatives à votre déposition; vous m'avez compris ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Je vous remercie, Monsieur
4 Lazarevic. Je remercie tous les présents et nous nous retrouverons demain.
5 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le jeudi 30 août 2007,
6 à 14 heures 15.
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