Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 5 décembre 2007

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame la Greffière, bonjour, bon

  6   après-midi. Pourriez-vous citer l'affaire, s'il vous plaît ?

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

  8   Il s'agit de l'affaire IT-05-88-T, le Procureur contre Popovic et consorts.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

 10   Pour les besoins du compte rendu, je remarque l'absence de

 11   Me Ostojic du côté de la Défense et Me Haynes. 

 12   En revanche, du côté de l'Accusation, nous avons M. McCloskey et M.

 13   Nicholls.

 14   Il y a une ou deux questions que nous devons aborder sur laquelle

 15   nous devons attirer votre attention. Je m'adresse en particulier à

 16   l'Accusation pour la première question. Hier, je crois que l'équipe de la

 17   Défense de Pandurevic a déposé une requête demandant à ce que leur expert

 18   dont le nom est cité dans la requête - je ne souhaite pas le citer - puisse

 19   assister à la déposition de votre témoin expert Butler. Avez-vous une

 20   objection à cela ?

 21   M. NICHOLLS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Nous n'avons

 22   aucune objection.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. A ce moment-là, nous allons donc

 24   rendre une décision eu égard à cette requête oralement. Nous faisons droit

 25   à cette requête, et ce, pour deux raisons parce que cette demande nous

 26   paraît justifiée premièrement, et ensuite, parce que l'Accusation ne

 27   s'oppose pas à cette demande.

 28   Hier, également, l'Accusation a déposé une requête pour demander que soit

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  1   modifiée la liste des pièces 65 ter relatives au Témoin numéro 042 Manning.

  2   Comme vous le savez, Manning est prévu pour lundi, jour où il doit venir

  3   déposer, et je ne sais pas si vous êtes en mesure de nous donner vos

  4   estimations aujourd'hui. Si vous ne l'êtes pas, nous allons fixer un délai

  5   et ce délai sera vendredi, délai fixé et intervalle de temps pour que vous

  6   puissiez répondre. S'il y a une objection, faites-le-nous savoir, s'il vous

  7   plaît, de façon à ce que nous puissions faire droit à la requête.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Nous allons répondre à la requête, Madame

  9   et Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc, vendredi, dernier délai, et lundi

 11   nous prendrons une position sur cette requête.

 12   De même la Défense a déposé une requête demandant à ce que la

 13   déposition de ce même Témoin Dean Manning face l'objet d'une décision, bien

 14   évidemment, donc, nous sommes tenus par les délais de procédure puisqu'il

 15   doit être entendu lundi, et donc, nous vous accordons jusqu'à vendredi pour

 16   nous donner votre réponse.

 17   Donc, nous allons prendre une décision sur ces requêtes dès la

 18   première heure lundi matin. Voici donc les deux questions que je souhaitais

 19   aborder. Je crois que la juriste hors classe va contacter les personnes

 20   concernées. L'une traite de la requête Pandurevic et l'autre avec la

 21   requête Miletic.

 22   Très bien. S'il n'y a pas d'autres questions que vous souhaitez aborder,

 23   nous pouvons faire rentrer le témoin dans le prétoire. Oui. S'il vous

 24   plaît. Merci.

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   LE TÉMOIN: ZORAN PETROVIC [Reprise]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Petrovic. Nous

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  1   vous souhaitons la bienvenue à nouveau.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons reprendre l'interrogatoire

  4   principal, et ensuite, nous allons nous consacrer au contre-interrogatoire.

  5   Monsieur Nicholls.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges.

  7   Interrogatoire principal par M. Nicholls : [Suite]

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

  9   M. NICHOLLS : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu, je

 10   remarque que M. Petrovic a apporté des documents avec lui. Je ne sais pas.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, c'est de ma faute.

 12   M. NICHOLLS : [interprétation] Je remarque que le témoin,

 13   M. Petrovic, dispose des documents. Je n'ai pas d'objection à soulever,

 14   mais je veux soulever simplement m'assurer que mes confrères et consoeurs

 15   de la Défense soient au courant.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vais expliquer ceci au témoin. Je

 17   crois qu'il faut être équitable envers tout le monde ici.

 18   Monsieur Petrovic, la procédure de ce Tribunal veut que vous soyez autorisé

 19   à vous référer à des notes que vous avez prises. Vous êtes autorisé à

 20   apporter des documents dans le cadre de votre déposition, surtout si vous

 21   avez besoin de vous rafraîchir la mémoire ou si vous avez besoin de

 22   consulter vos notes. Néanmoins -- néanmoins, vous devez savoir que si vous

 23   le faites, à ce moment-là, l'une ou l'autre des parties que ce soit,

 24   l'Accusation ou la Défense, peut demander à voir ces documents.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je souhaite simplement vous expliquer

 27   la procédure qui est appliquée ici. Autrement dit, si vous les utilisez

 28   vous devez les mettre à la disposition de l'une ou l'autre partie si la

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  1   demande en est faite.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Par exemple, l'information concernant ma

  3   citation, mon assignation à comparaître, effectivement, je peux proposer

  4   ces documents si quelqu'un souhaite les voir.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Bien, merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Je souhaite reprendre là où nous avons laissé notre échange hier. Je

  8   vais vous poser sur l'ordre chronologique dans lequel se déroulaient vos

  9   échanges avec M. Borovcanin et vous avez été embarqué dans son unité en

 10   1994. Nous savons cela, vous étiez -- cela a été juillet 1995. Quand avez-

 11   vous rencontré M. Borovcanin après cette période du 15 juillet 1995 ?

 12   R.  Dans mon village près de Belgrade, c'était au début de l'année 2002, je

 13   crois. En tout cas, c'était quelque temps après qu'il ait été en contact

 14   avec vous, d'après ce que j'ai compris, et il a décidé de venir à La Haye.

 15   Donc, il voulait que je vienne témoigner pour lui. En tout, j'ai compté, ça

 16   fait une quarantaine d'heures. Donc, pour ces 40 heures, je n'avais pas

 17   raison de dire non. Je crois que c'était utile pour lui, c'est utile pour

 18   ce Tribunal aussi pour établir la vérité.

 19   Q.  Que lui avez-vous dit ?

 20   R.  La réunion était très courte et j'ai donné mon accord tout de suite. Je

 21   ne me souviens pas des détails, mais pour l'essentiel, cela a été fait dans

 22   les premières minutes de notre échange.

 23   Q.  Après cela, vous avez rencontré le conseil de la Défense, les

 24   enquêteurs, l'équipe de la Défense de M. Borovcanin ?

 25   R.  Oui, j'ai rencontré votre collègue, M. McCloskey, et j'ai rencontré -

 26   il va être en colère avec moi maintenant - l'avocat de l'équipe de Me

 27   Lazarevic. Il vient de Bijeljina, si je ne me trompe pas.

 28   Q.  Merci. Donc, je souhaite maintenant vous poser cette question-ci avant

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  1   que nous n'abordions la question de ces 40 heures avec M. Borovcanin.

  2   Pourriez-vous nous dire --

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Lazarevic.

  4   M. LAZAREVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, je m'excuse auprès de mon

  5   collègue. Je crois qu'il y a un très grand malentendu à propos de ces 40

  6   heures. Peut-être cela a un lien avec deux événements, en particulier, je

  7   ne sais pas comment faire. Le témoin parle très bien l'anglais mais, en

  8   même temps, je peux présenter mes arguments, il le comprendrait de toute

  9   façon.

 10   M. NICHOLLS : [interprétation] Je peux reposer ma question --

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Même si vous demandez

 12   M. Bourgon ou Me Fauveau --

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Je crois que je peux poser la question

 14   différemment.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc, si ça ne marche pas, à ce moment-

 16   là, nous allons entendre les arguments en l'absence du témoin et nous

 17   reprendrons les choses à partir de là. Je vous remercie, Maître Lazarevic.

 18   M. NICHOLLS : [interprétation]

 19   Q.  Donc, en fait, plus tard, je vais vous poser des questions sur le temps

 20   que vous avez passé avec M. Borovcanin, les 13 et 14 juillet 1995. Mais

 21   pour l'heure, je souhaite vous poser des questions sur ce que vous avez

 22   fait avec votre premier jet, votre premier film, et ensuite, est devenu un

 23   documentaire qui a été diffusé par studio B. Qu'est-ce que vous avez fait

 24   avec votre film de 8 millimètres lorsque vous êtes revenu à Belgrade ?

 25   R.  Écoutez, j'ai fait mon travail et je me suis mis d'accord avec le

 26   rédacteur en chef pour préparer ces documentaires. Je suis revenu, j'ai

 27   commencé à monter cela avec les machines dont il disposait, mais je ne suis

 28   pas professionnel en la matière, je ne suis pas un caméraman professionnel.

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  1   Je suis un bon journaliste mais un mauvais caméraman. Donc, ceci a été

  2   remis à studio B.

  3   Q.  Pourriez-vous nous donner le titre de votre documentaire ?

  4   R.  En serbe, c'est : "Operacija Srebrenica," "Opération de Srebrenica."

  5   C'est un documentaire de 28 minutes en format standard. Q.  Quand cette

  6   émission a-t-elle été diffusée par studio B ?

  7   R.  Quelques jours plus tard, c'était peut-être même le soir même, ou le 17

  8   - je mélange les deux tout le temps - mais c'était tout de suite après

  9   avoir fini et ceci a été diffusé le plus rapidement possible, deux ou trois

 10   jours après la diffusion, tout le monde était intéressé par l'événement.

 11   Q.  Souhaiteriez-vous connaître la date que vous nous avez donnée lors de

 12   l'entretien ?

 13   R.  Le 15 ou le 17.

 14   Q.  Vous nous avez dit le 17. Essayez de réfléchir avant que nous

 15   poursuivions.

 16   R.  Écoutez, cela fait un certain temps, donc, un jour près, cela n'est pas

 17   très important pour ce récit.

 18   Q.  Je souhaite maintenant vous montrer le tout début. Nous n'allons pas

 19   tout regarder. Donc, au numéro -- c'est la pièce 2011, le documentaire de

 20   studio B, simplement pour que le témoin sache de quoi nous parlons.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Je crois que cela suffit et vous en souvenez

 23   certainement.

 24   Q.  Qu'est-ce que nous venons de regarder ?

 25   R.  Vous souhaitez que je vous le dise ?

 26   Q.  Je suis obligé de poser la question d'une certaine façon,  donc, c'est

 27   la raison pour laquelle je vous la pose comme ça.

 28   R.  Écoutez, j'ai surtout respecté ce qui s'est passé en temps réel,

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  1   lorsque je suis arrivé sur les lieux. Donc, ceci constitue des données

  2   brutes, si vous voulez, c'est le vrai début du défilement des images

  3   lorsque je suis arrivé - pardonnez-moi - je suis arrivé sur la base

  4   britannique - pardonnez-moi, non - néerlandaise de Bratunac. Q.  Merci.

  5   Pouvez-vous nous confirmer qu'est-ce que nous venons de voir constitue le

  6   début de votre documentaire ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Et de surcroît, il y a ce documentaire de 28 minutes du studio B.

  9   R.  C'est 28 minutes, en réalité.

 10   Q.  Avez-vous écrit des articles sur --

 11   R.  Oui.

 12   Q.  -- ces événements ?

 13   R.  Oui. Vous l'avez dans vos documents. Il y avait une interview avec un

 14   magazine de Belgrade qui n'existe plus depuis des années. Il s'appelle

 15   Politika, et c'était le récit, mais qui comportait davantage de détails,

 16   parce que l'article que j'ai publié était meilleur que le documentaire à

 17   cause des difficultés que j'ai rencontrées parce que je ne suis pas très

 18   bon caméraman.

 19   Q.  Oui, je comprends bien. Etant donné que c'est vous qui avez soulevé la

 20   question; nous n'avons pas abordé cela hier. Est-ce que c'était une caméra

 21   professionnelle ou personnelle ?

 22   R.  C'était une caméra que j'avais achetée ailleurs qu'en 1993. Cela

 23   m'avait coûté 750 $, et cette caméra c'est sa destinée, en fait. J'ai pu

 24   l'utiliser jusque-là, et cela a été volé du studio B, et ils souhaitaient

 25   la réparer. En fait, ils me doivent de l'argent pour cela.

 26   Q.  Vous souvenez-vous à quelle date votre article a été publié dans ce

 27   magazine ?

 28   R.  Récemment, je l'ai vu. Je crois que c'était à la fin du mois de juillet

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  1   -- 21 juillet.

  2   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir le numéro 469, s'il

  3   vous plaît.

  4   Q.  Et --

  5   R.  Oui, c'est le 21.

  6   Q.  C'est bien votre article que nous voyons ici ? Merci. Donc, vous venez

  7   de nous dire que vous êtes, en fait, assez satisfait de cet article ?

  8   R.  Oui, au point de vue professionnel, je veux dire.

  9   Q.  Vous avez déjà parlé de l'autre article lorsque vous étiez embarqué

 10   avec l'Unité de Borovcanin, et vous avez dit que c'était objectif et qu'en

 11   fait, on vous a crédité pour avoir écrit un bon article. Comment vous

 12   sentez-vous par rapport à cet article qui a été publié le 21, en termes

 13   d'objectivité, d'équilibre, de précision ? Pourriez-vous en parler ?

 14   R.  Ecoutez, je suis sûr encore aujourd'hui que c'est un des meilleurs

 15   articles qui expliquaient la situation après l'entrée des Serbes à

 16   Srebrenica parce que la plupart des éléments écrits dans cet article en

 17   fait reposent sur mes notes; c'était très documentaire.

 18   Je ne les ai pas embellies par la suite. J'ai une technique

 19   particulière qui consiste à prendre des notes. Depuis le début, je me

 20   rapporte toujours à mon texte initial. C'est donc ce qui est -- je reste

 21   fidèle à mes notes. Donc, j'ai repris tout ce que contenaient ces notes, et

 22   c'est ce que j'ai entendu. Lorsqu'il s'agissait de paroles rapportées, je

 23   mettais des guillemets.

 24   Q.  Très bien. Donc, les notes dont vous parlez ici, que vous avez

 25   utilisées pour votre article, est-ce que ce sont des notes que vous avez

 26   écrites le jour même ou par la suite ? Le 13 et 14 ou par la suite, sur la

 27   base des souvenirs ?

 28   R.  Ecoutez. Bon, la plupart, je ne peux pas être très précis, mais

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  1   c'est sans doute lorsque je n'étais pas en train de filmer parce que, si

  2   vous comparez ce texte avec le filme, vous verrez qu'il y a des scènes

  3   différentes et je n'ai pas d'images, et il y a des choses qui ne sont pas

  4   sur les images.

  5   Q.  Je comprends.

  6   R.  J'étais seul, voyez-vous.

  7   Q.  Bien. Alors, maintenant, je souhaite que vous sachiez que les Juges de

  8   la Chambre ont vu une copie de ce que [imperceptible] et je souhaite vous

  9   montrer certains extraits de ces séquences et je vais vous demander de

 10   commenter ces extraits. Alors, il s'agit d'originaux d'enregistrements qui

 11   ont été faits sur quelque chose qui existait -- un support qui existait

 12   déjà. Est-ce qu'il s'agit, en fait, de séquences vidéo qui ont été intégrés

 13   ou donnés brutes ? Est-ce que vous comprenez ?

 14   R.  Oui, oui.

 15   Q.  Je vais d'abord vous montrer la première. On va la visionner. C'est

 16   2054, c'est le numéro de ce document sur la liste 65 ter.

 17   R.  Je peux faire ça tout seul. Je peux appuyer sur le deuxième bouton.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. NICHOLLS : [interprétation]

 20   Q.  Donc, ça c'est bien, cette séquence vidéo -- pardonnez-moi. En fait, on

 21   voit ici une douille. C'était le numéro 08 : 584. La maison avec -- on voit

 22   ici des affaires devant.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pourriez-vous nous en parler ?

 25   R.  Bien, cet obus -- cette douille d'obus se trouve devant de ma maison.

 26   En fait, elle vient du champ de bataille de Vukovar. Il s'agit, en fait, du

 27   balcon de ma maison, et cela prouve également que ces données brutes,

 28   malheureusement, étaient comme un chant en folklore qui est passé entre

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  1   différentes mains. Je ne me souviens pas de cela, mais cette cassette est

  2   une cassette de 8 millimètres qui a été utilisée souvent. Donc, ça n'était

  3   pas professionnel. Ceci n'avait pas été filmé à cet effet, et on a

  4   l'habitude, en fait, de n'enregistrer qu'une seule fois habituellement, et

  5   ceci a été utilisé plusieurs fois pour des raisons différentes. Donc, ce

  6   dont vous parlez, en fait, ne sont pas des images qui sont si fiables que

  7   cela.

  8   Q.  D'accord.

  9   R.  Si on va procéder à des expertises.

 10   Q.  Mais --

 11   R.  Pardonnez-moi, mais c'est la raison pour laquelle, depuis le début, je

 12   pensais que ce film de 28 minutes est le plus fidèle et le plus exact sur

 13   le sujet.

 14   Q.  Merci. Simplement deux questions encore. Peut-être que votre

 15   explication sera la même.

 16   R.  Si c'est la scène avec Karadzic.

 17   Q.  Oui, c'est une des images.

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   Q.  Est-ce qu'on peut voir la suivante.

 20   R.  Pardonnez-moi, mais peut-être qu'à ce moment-là, si je dois choisir

 21   entre quelle langue je dois parler, l'anglais d'Europe ou les vieilles

 22   langues européennes, je préfère m'exprimer en serbe, et donc, j'ai promis

 23   de dire dans quelle langue j'allais m'exprimer aux interprètes, si vous me

 24   le permettez.

 25   Q.  Fort bien.

 26   R.  Merci.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Ecoutez, vous avez le droit

 28   de choisir votre langue.

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  1   M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien.

  2   Q.  Alors, vous pouvez choisir la langue que vous préférez. Donc, nous

  3   allons commencer à 10 minutes, 15 secondes ?

  4   [Diffusion de la cassette vidéo]

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne vois rien pour l'instant.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui. Pardonnez-moi. C'est exact, en fait.

  7   Cette séquence fait partie de la cassette où il y a un blanc, de rien.

  8   Voilà, ça y est.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Est-ce que vous avez des commentaires à faire ?

 12   R.  Il s'agit là sans doute, comme je le vois -- en fait, le son est très

 13   fort ici. C'est sans doute une conversation que j'ai eue chez moi dans ma

 14   maison à cette occasion-là. C'est un sujet qui intéressait beaucoup de

 15   gens, et je ne peux pas vous fournir d'autres commentaires. Simplement,

 16   bon, c'est quelque chose qui a été enregistré, en fait, c'est une

 17   interférence, je ne sais pas dans quel contexte que ceci a été filmé.

 18   Q.  Merci. La troisième image vous la connaissez certainement. Je vais vous

 19   la montrer. En fait, c'est une boite de ration militaire. Vous allez la

 20   voir dans quelque instant. Ici nous commençons à 24:10.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Encore une fois, il s'agit là de

 23   l'appareil que j'ai utilisé avant qu'on ne dispose d'ordinateur chez moi

 24   dans mon pays. Cela prouve que l'OTAN a aidé les Moudjahidines, comme je

 25   l'ai dit hier. L'OTAN a partagé les vivres avec les Moudjahidines, et cet

 26   élément d'information je l'ai rapporté de mon voyage, et j'ai montré ces

 27   séquences vidéo partout en Serbie.

 28   Cela prouve une nouvelle fois que ceci a été utilisé et réutilisé à maintes

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  1   reprises, et je ne sais absolument pas comment ce film que vous souhaitez

  2   montrer a été interrompu via une coupure. Je sais dans quelle direction

  3   cela va, mais je ne peux pas vous dire plus que cela. J'admets qu'ici ce

  4   sont les rations standard de l'OTAN qui ont été utilisées pour nourrir les

  5   volontaires du monde musulman qui sont venus en Europe pour se rapprocher

  6   de l'Union européenne. C'est un peu cynique, c'est vous qui me l'avez

  7   demandé.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation]

  9   Q.  Savez-vous quand cette séquence vidéo que nous avons vue des rations --

 10   de cette boite de ration, a été filmée; vous en souvenez-vous, ce carton ?

 11   R.  Je ne m'en souviens pas parce qu'il y a un lien avec l'époque

 12   précédente. C'est quelque chose que j'ai ramené du front bien avant

 13   Srebrenica.

 14   Donc, c'est peut-être à Pale, c'est peut-être ailleurs. C'est difficile

 15   pour moi de vous le dire. Dites-moi davantage, dites-moi plus, et je

 16   pourrais vous en dire plus.

 17   Q.  Non. J'essaie simplement de vous demander de vous rappeler cela.

 18   R.  Ah, pardonnez-moi, je me suis exprimé en anglais à nouveau.

 19   Q.  Je vais vérifier, voir si je vous ai bien compris. Est-ce que vous

 20   pensez que ceci a été filmé avant ou après juillet 1995, cette caisse ?  

 21   R.  C'est sans doute avant parce que la première fois qu'on parle de cette

 22   boite avec la famille, mais cela devait être avant parce que c'est bien

 23   avant Srebrenica que j'avais cela.

 24   Q.  La dernière image est celle que vous avez évoquées vous-même, où on

 25   voit Karadzic. Je souhaite la visionner pendant quelques instants. Nous

 26   commençons à 23:21.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] [imperceptible] ici, cette petite séquence

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  1   vidéo vient de cette même cassette dont nous parlons. En fait, les données

  2   vont être ici, et ceci a, bien évidemment, été fait dans le studio de la

  3   télévision Pale avant l'entretien avec Karadzic, et l'équipe de TF1 était

  4   présente, la télévision française, et ceci a été souvent utilisé pendant la

  5   guerre. Ils ont enregistré cela, ils ont dit que cela devait être diffusé

  6   parce qu'il fallait quelque chose qui avait été filmé sur le terrain. Moi,

  7   j'étais avec eux, et donc, ceci a été fait lorsque je suis entré dans le

  8   studio avec les français, et ils l'ont enregistré, ils ont enregistré cet

  9   entretien avec Karadzic.

 10   M. NICHOLLS : [interprétation]

 11   Q.  Très bien. Est-ce que vous êtes allé à Srebrenica à la mi-juillet ?

 12   Est-ce que c'est sur cette cassette avant ou après ? A quel moment est-ce

 13   que s'est enregistré sur la cassette; vous en souvenez-vous ?

 14   R.  Si je pouvais vérifier avec l'équipe française à quel moment elle se

 15   trouvait là, je pourrais vous le dire. Après Srebrenica, je ne pouvais pas

 16   me rendre en Bosnie parce que j'ai reçu des menaces à cause de cela, à

 17   cause de cette vidéo. Donc, ceci aurait pu être en 1994, avant Srebrenica,

 18   parce que j'ai également été l'auteur de nombreuses interviews avec le Dr

 19   Karadzic, diffusés par la télévision de Belgrade, et la télévision au

 20   studio B.

 21   Après réflexion, je crois que ceci était avant juillet 1995. Mais il faut

 22   vous rappeler que cette cassette a été utilisée par des gens qui étaient

 23   pauvres. Il n'y avait pas de caméra. Il n'y avait pas d'argent pour les

 24   cassettes vidéo, et c'est la raison pour laquelle cette cassette a été

 25   utilisée maintes et maintes fois, ce qui signifie que tout cela a été un

 26   peu chaotique. Cela est dû au fait que j'ai donné cette cassette à tout le

 27   monde, ceci est un cas unique dans notre profession chez les journalistes à

 28   la fin du

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  1   XXe siècle. Je crois qu'il n'a pas de cas semblable au mien.

  2   Voici donc l'explication que je peux vous fournir. Il y a plusieurs, en

  3   fait, couches ici, et il y a des séquences vidéo qui se superposent sur une

  4   cassette qui a été réutilisée de nombreuses fois.

  5   Q.  Simplement pour m'assurer que de bien comprendre, vous dites que cette

  6   cassette a été utilisée par bon nombre de personnes, mais les séquences

  7   vidéo que nous avons vues, ce sont des choses que vous avez filmées vous-

  8   même lorsque vous étiez Pale; c'est cela ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Bien. Alors, maintenant, je souhaite que nous parlions du 13 juillet.

 11   Vous nous avez raconté comment vous avez rencontré

 12   M. Borovcanin sur le pont à Bratunac et comment vous avez passé le pont.

 13   Ensuite, vous nous avez également dit que vous vous êtes directement à

 14   Potocari.

 15   Qui était dans la voiture avec vous lorsque vous êtes allé à Potocari ?

 16   R.  Lorsque M. Borovcanin m'a rencontré, j'avais ma propre voiture du côté

 17   serbe du pont, à savoir de la Drina, du fleuve. De l'autre côté de la rive,

 18   il y avait M. Borovcanin dans une voiture, et dans cette voiture, à bord de

 19   cette voiture, nous sommes allés, en réalité, pendant longtemps - je ne me

 20   souviens pas si nous étions seuls. Je crois que nous nous sommes rendus à

 21   la base tous les deux, et ensuite, il y a un chauffeur qui nous a rejoint,

 22   quelque de la police sans doute.

 23   Votre collègue ne cessait de dire que j'étais toujours quelque part dans un

 24   véhicule militaire, ou de la police, ce qui n'a pas de sens. Je souhaite

 25   qu'il me montre une photo de ce véhicule parce que j'étais avec Borovcanin

 26   qui faisait partie de la police, et non pas de l'armée. Nous avons passé

 27   Bratunac. Il y avait dans cette enceinte où il y avait des étrangers, et

 28   les premiers clichés en fait ont décrit précisément cela. Nous sommes

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  1   arrêtés à cet endroit-là et nous avons continué à pied. Plus tard, vous

  2   verrez qu'il y a des gens qui arrivent et que c'est très clair que ces

  3   clichés ont été pris non pas d'une voiture, mais par moi qui étais debout,

  4   il y a autre chose que vous souhaitez que je vous raconte un peu plus.

  5   Je parle aux traducteurs. Est-ce que je vais trop vite ?

  6   Q.  Je pense que ça va. On vous le dira s'il y a un problème.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec vous,

  8   Monsieur Nicholls. S'il va continuer en serbe, et je pense que ça serait

  9   mieux pour les interprètes parce que quand vous parlez anglais vous avez

 10   tendance à vous chevaucher.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je demanderais aux traductrices si elles sont

 12   en mesure de me suivre et si je vais suffisamment lentement.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Si on continue à ce rythme, je pense que ça

 14   ira très bien.

 15   Q.  Pouvez-vous nous décrire la voiture que vous avez empruntée avec M.

 16   Borovcanin en vous rendant à Potocari ?

 17   R.  Absolument pas. C'était une voiture tout à fait ordinaire, un véhicule

 18   normal pour passagers, pas de fabrication yougoslave sans doute japonaise

 19   car c'était à l'époque déjà assez courant d'importer des voitures

 20   japonaises. Je ne sais pas il va falloir demander à quelqu'un d'autre, je

 21   n'ai pas fait très attention. En tout cas ce n'était pas une voiture

 22   militaire. Si M. Ruez nous écoute, je voudrais qu'il nous explique comment

 23   il a pu dire autant de bêtise, ce qui est tout à fait inadmissible étant

 24   donné son --

 25   Q.  Oui, vous avez été parfaitement clair à cet égard. Qui est-ce qui

 26   conduisait la voiture ?

 27   R.  Je pense que c'était M. Borovcanin en allant vers Potocari, mais je

 28   peux me tromper. Encore une fois, je m'excuse. Peut-être qu'il s'agit du

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  1   chauffeur qui avait été envoyé mais je ne me souviens pas lorsque nous

  2   parlons de la partie allant du pont jusqu'à l'entrée de l'enceinte.

  3   J'espère que vous ne n'attendez pas de moi que je m'en souvienne car après

  4   tout je me concentrais surtout sur les événements pas sur la voiture dans

  5   laquelle j'étais assis.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce qu'il se souvienne de la couleur

  7   de la voiture.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Je crois que je lui ai posé la question.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il nous a donné une indication comme

 10   quoi ce serait une voiture japonaise, peut-être que dans ces conditions --

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après la longueur de la voiture, il me

 12   semble qu'elle était de taille moyenne, ce n'était pas une voiture de luxe,

 13   je ne me souviens pas de sa couleur en dépit des efforts que j'ai faits.

 14   J'aimerais bien pouvoir vous parler de cette voiture mais je ne peux le

 15   faire. Je ne me souviens même pas si je l'ai mis dans mon texte cette

 16   couleur. En tout cas, je sais qu'en aucun cas, je n'ai été en contact avec

 17   les militaires ni avec leur véhicule si c'est ça le sens de votre question.

 18   J'ai passé tout mon temps avec M. Borovcanin qui faisait partie de la

 19   brigade spéciale.

 20   M. NICHOLLS : [interprétation]

 21   Q.  Je vais vous dire quelque chose ce n'est pas une question. Je n'essaie

 22   pas de vous faire dire des choses, comme par exemple, que c'était une

 23   voiture militaire, je vous demande simplement de vous souvenir de la

 24   voiture, essayez de la décrire autant que vous le pouvez.

 25   R.  Je vous dis la vérité : véritablement, je ne me souviens pas des

 26   détails de cette voiture.

 27   Q.  Vous avez dit parfaitement clairement que vous ne vous souvenez pas

 28   s'il y avait un chauffeur avec vous au début, en même temps que vous et M.

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  1   Borovcanin à Potocari, et vous venez également de dire que j'ai passé tout

  2   mon temps avec M. Borovcanin qui faisait partie de la police spéciale de la

  3   brigade. Pendant le temps que vous avez passé dans cette voiture et que --

  4   est-ce qu'il y a eu, pendant le temps que vous étiez dans cette voiture,

  5   des moments où

  6   M. Borovcanin n'était pas présent dans la vidéo que nous voyons ?

  7   R.  D'après mes souvenirs, il me semble que M. Borovcanin était avec moi ou

  8   vice-versa. Il était avec -- j'étais avec lui.

  9   Q.  Vous avez parlé un petit peu de ce que cela veut dire d'être incrusté

 10   et les difficultés que vous avez éprouvées pour atteindre Srebrenica à

 11   cause du conflit du danger d'être arrêté; est-ce qu'il y a eu un accord

 12   avec M. Borovcanin ou avec qui que ce soit quant à ce que vous alliez

 13   filmer -- non pas ce que alliez filmer mais ce que vous alliez là où vous

 14   alliez être pendant votre temps là-bas avec M. Borovcanin ?

 15   R.  Je suis journaliste. M. Borovcanin a participé à la guerre. C'est un

 16   combattant, chaque journaliste recherche un scoop. Je vais vous expliquer,

 17   mon collègue serbe, un journaliste a essayé de rentrer à Mossoul en Irak,

 18   mais il n'était pas incrusté auprès des Américains et il n'a pas pu y

 19   parvenir. Je parle de M. Lazanski en 1993. Si vous connaissez les guerres

 20   surtout les guerres modernes, si vous n'avez pas un laissez-passer, si vous

 21   n'êtes pas sur place, vous n'avez aucune nouvelle parce que les armées

 22   modernes ne reconnaissent pas le rôle du journaliste en tant que tel. C'est

 23   pour cela que j'ai essayé de trouver un moyen. L'une des façons de le faire

 24   c'était d'appeler les gens que je connaissais. Si j'avais connu quelqu'un

 25   d'autre dans l'armée ou un militaire. Bien entendu, je lui aurais posé la

 26   question, bien que les militaires ne m'auraient sans doute pas autorisé

 27   parce que leur vue générale était qu'il y avait une opération en cours.

 28   J'ai pu le constater de mes propres yeux. Je pouvais voir que les combats

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  1   continuaient, qu'ils allaient continuer pendant des jours. C'était le type

  2   de situation où on essaie de trouver une façon de rentrer, comment le faire

  3   s'il y a une opération en cours. J'ai pu trouver un moyen, ce monsieur m'a

  4   cru, il m'a fait confiance. Il a pensé, il n'avait rien à cacher, et je

  5   suppose qu'il aurait eu beaucoup moins de problème si ce film n'avait

  6   jamais été fait, mais la vie est difficile et voilà qu'il se trouve en

  7   prison. Ce n'est pas une explication classique de ce qu'on -- du terme

  8   incrusté. En fait, il me faisait confiance. Je suis arrivé à son habitation

  9   et je pouvais faire des choses parce que j'étais accompagné par lui.

 10   Q.  Bien. Je veux maintenant vous montrer une autre séquence, c'est

 11   l'émission studio B 2011, et vous allez immédiatement reconnaître cette

 12   séquence. Il s'agit d'un homme qui se trouve sur un balcon.

 13   R.  J'ai jeté un œil sur la page précédente et j'oserais élucider quelque

 14   chose dans l'interprétation. Peut-être c'est quelque chose qui se passe

 15   souvent, quand j'ai parlé de mon collègue, le journaliste serbe qui a

 16   essayé de rentrer à Mossoul, j'ai dit Mossoul en Irak, c'est quelque chose

 17   très important. Il ne pouvait pas y rentrer. Si vous voyez le compte rendu,

 18   on ne voit pas où il a essayé de rentrer. J'ai essayé de vous expliquer ce

 19   que ça veut dire d'être incrusté dans une armée moderne actuellement. Si on

 20   ne le voit pas dans le compte rendu, il doit bien y avoir bien d'autres

 21   imprécisions. Si on continue à être imprécis de cette manière-là, je vais

 22   parler anglais, c'est inadmissible. Je suis sûr que je vais dire des choses

 23   encore plus importantes et si cela va être imprécis, je ne vais pas

 24   continuer à parler serbe. Encore une chose, si je continue à parler, je

 25   voudrais voir ma version également sur mon écran en serbe.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez ralentir tous les deux, s'il

 27   vous plaît, et continuons de la manière de la plus tranquille et calme

 28   possible.

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  1   M. NICHOLLS : [interprétation]

  2   Q.  Je voudrais vous expliquer quelque chose, Monsieur Petrovic. Ici, nous

  3   avons un compte rendu à l'état brut qui est fait par des gens très

  4   compétents ici, au fur et à mesure que nous continuons. Parfois il y a un

  5   circonflexe -- accent circonflexe inversé et cela veut dire qu'il faut

  6   vérifier particulièrement cette partie. Donc, chacun de ces comptes rendus

  7   est réécouté à plusieurs reprises avant que le compte rendu final ne soit

  8   obtenu. Mais on ne peut pas avoir un compte rendu parfait simultanément.

  9   Dans ce monde, rien n'est pas parfait. Il y a des erreurs, mais ne vous

 10   préoccupez pas de cela.

 11   R.  Je vais essayer de ralentir, de façon à ce qu'on puisse entendre car il

 12   s'agit d'éléments très importants. Il ne s'agit pas, en tout cas, de noms

 13   inconnus, mais je comprends bien ce que vous venez de m'expliquer.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Nous allons maintenant regarder la séquence.

 15   Commençons à 2 : 30, qui convient, en fait, de notre compilation, mais qui

 16   est identique à la séquence qui vient du

 17   studio B.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] On va arrêter là.

 20   Q.  Première question : qu'avez-vous appris, le cas échéant, là sur place

 21   devant cette maison, concernant ces hommes qui se trouvaient sur le balcon

 22   ?

 23   R.  C'est une phrase qui provient de la version finale de l'émission. C'est

 24   une narration qui fait partie des informations que j'ai pu recueillir

 25   pendant que je filmais sur place, et par la suite j'ai posé des questions à

 26   différentes personnes. Il y a eu des personnes qui avaient étudié les

 27   crimes commis vis-à-vis des Serbes également. Donc, en tant que journaliste

 28   consciencieux, je me suis efforcé de faire mon travail le mieux possible,

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  1   et donc, de donner au public le plus d'information possible. Là, il s'agit

  2   de l'une des phrases que j'ai mises dans le texte parce que, lorsqu'on a

  3   monté les séquences brutes pour faire une bande de son, à ce moment-là,

  4   moi, j'ai lu le texte. Dans des maisons de télévision avec plus de moyens,

  5   cela aurait été différent, mais dans ce cas, j'avais simplement un micro à

  6   la main. J'ai regardé le -- mais je faisais le commentaire dans le studio.

  7   Certaines parties de la vidéo, cependant, contenaient ma voix telle qu'elle

  8   était pendant la prise de vue, par exemple, lorsque le docteur irlandais

  9   était présent, à qui j'ai posé une question.

 10   Q.  Ma question est : quand avez-vous appris que ces hommes sur le balcon -

 11   - ou on vous a dit que ces hommes sur le balcon étaient des criminels ou

 12   des suspects qui avaient essayé de rejoindre les convois ? Quand est-ce que

 13   vous l'avez appris ?

 14   R.  Peut-être deux choses rentrent en ligne de compte. En tout cas, il y a

 15   deux possibilités. Peut-être j'en ai entendu parler, auquel cas je l'aurais

 16   entendu de personnes alors qu'on assistait les gens de Srebrenica pour

 17   partir vers Tuzla. J'ai également fait des enquêtes en revenant, lorsqu'il

 18   s'agissait de faire le montage de l'émission. Donc, ce serait tout à fait

 19   logique que je l'ai entendu sur place pendant que je filmais, mais je ne me

 20   souviens pas des détails. Il faut savoir que je devais me souvenir des mots

 21   et enregistrer, et ce sont deux choses très différentes. On ne peut pas les

 22   faire aussi bien l'un que l'autre, donc, je ne peux pas vous répondre avec

 23   précision. Je ne peux vous dire qui me l'a dit ni quand. Je ne connaissais

 24   personne à part M. Borovcanin, mais peut-être que j'ai posé une question et

 25   que quelqu'un y a répondu. Je n'ai pas fait d'enregistrement à ce propos.

 26   Il me semble que c'est sur place que j'ai appris la chose.

 27   Q.  Donc, pendant que vous filmiez ?

 28   R.  Sans doute, oui.

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  1   Q.  Vous dites sans doute. Maintenant, je vais vous demander si vous vous

  2   souvenez de ce que vous avez dit pendant votre entretien lorsque nous nous

  3   sommes rencontrés en 2006. Vous souvenez-vous de ce que vous m'avez dit à

  4   l'époque ?

  5   R.  Pouvez-vous me rafraîchir la mémoire, s'il vous plaît, me citer le

  6   texte ? Cela doit se trouver dans les documents que vous m'avez donnés pour

  7   que je puisse les relire hier ou avant-hier. Je ne me souviens pas de tous

  8   les détails des 200 pages que comprend ce texte que vous m'avez montré

  9   hier, et d'autant plus que l'entretien a eu lieu il y a un an et demi.

 10   Q.  C'est compréhensible. La question se trouve page 172. Je cite :

 11   "Comment êtes-vous parvenu à la conclusion que ces personnes sur le balcon

 12   étaient suspectés de crimes de guerre ?" Votre réponse a été : "Ce n'était

 13   pas la conclusion que j'ai tirée. C'est quelque chose que j'ai entendu sur

 14   place. Je ne me souviens pas qui me l'a dit. J'ai sans doute demandé à

 15   quelqu'un."

 16   R.  Oui, c'est tout à fait similaire à ce que je viens de vous donner comme

 17   réponse. Il n'y a pas de contradiction entre ce que j'ai dit il y a un an

 18   et demi et ce que je viens de vous dire. En quelque sorte, je ne peux pas

 19   être tout à fait certain quant à qui m'a donné cette information. Ça

 20   pourrait être n'importe qui. En tout cas, j'ai vu des gens sur le balcon.

 21   Je savais qui ils étaient. Je ne suis pas un combattant. Je suis un

 22   journaliste, et donc, mon devoir est de donner des informations. Cela

 23   aurait pu être des informations objectives, subjectives ou des rumeurs,

 24   mais, en tout cas, c'est la conclusion que j'en ai tiré. Le but était très

 25   clair quant à l'émission. Ce serait une explication logique, à savoir que

 26   c'étaient des hommes recherchés, qu'on les avait mis à part, et sans doute

 27   quelqu'un dans l'enceinte a répondu à cette question. Personne ne m'a

 28   donné, de son propre gré, des informations. Je posais toujours des

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  1   questions, mais je ne sais pas qui j'ai vu, car je jouais deux rôles à la

  2   fois. Je devais, en même temps, poser des questions et faire

  3   l'enregistrement.

  4   Q.  Est-ce que vous vous souvenez d'avoir entendu parler pendant cette

  5   période de listes de criminels ?

  6   R.  Je ne me souviens pas de cela. Il y a un chercheur à Belgrade, M.

  7   Ivanisevic, qui est un chercheur très respecté, quelqu'un de pédant. Sa

  8   femme vient de Srebrenica et connaît des gens là-bas. L'agence pour

  9   laquelle je travaillais, qui était basée à Belgrade, puis, s'appelait Bina,

 10   dès 1994. Nous avons publié une publication concernant les crimes de

 11   guerre, et ma première liste de crimes de Podrinje, en langue anglaise.

 12   Le régime à Belgrade, à partir de mai 1993 - il faut se souvenir -

 13   jusqu'à 1995, a effectué une sanction très stricte sur qu'est-ce qui venait

 14   de la Republika Srpska. Je vais terminer. Ivanisevic avait cette liste, et

 15   c'était sans doute ce à quoi je faisais allusion.

 16   Q.  Puis, c'est à ce moment-là que vous avez écrit sur la police, sachant

 17   quels étaient les noms des criminels que vous avez publiés dans l'article,

 18   et ceci sur la base, bien sûr, des notes que vous avez prises le 21 juillet

 19   ?

 20   R.  Non, ce n'était pas seulement des notes. Je reviens maintenant à

 21   l'information que j'ai obtenue comme journaliste. Vous n'êtes pas là pour

 22   tâter le terrain dans un brouillard. Vous savez très bien ce que vous

 23   faites. Vous devez vous préparer, et c'est la guerre en plus. Donc, dans

 24   mon bagage d'information, j'avais déjà les informations que j'avais

 25   publiées dans mon livre en 1994, et l'une de ces personnes qui avait été

 26   poursuivie pour crime de guerre se trouve sur la liste que j'ai donnée à M.

 27   McCloskey quand il était à Belgrade, et cet homme maintenant se trouve à la

 28   tête du 

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  1   Parti social démocratique. Ce dernier se trouvait sur cette liste.Par

  2   souci, je vais vous dire que, lorsque je vous parle de ces hommes et

  3   lorsque je vous dis qu'ils étaient ce qu'ils étaient, je veux simplement

  4   vous dire que les Serbes avaient des renseignements sur des hommes qui,

  5   pendant deux ans, pillaient et tuaient les personnes dans cette zone. Vous

  6   devez savoir qu'avant les événements de Srebrenica, des maisons serbes

  7   avaient été détruites -- plus de

  8   6 000 maisons serbes, et on a tué plus de 2 500 personnes, mais on n'en

  9   parle pas. Alors, dans tout ce que j'ai dit, c'est que j'ai simplement

 10   répété cette histoire dans le journal Magazine.

 11   Q.  Pour être parfaitement sûr de vous avoir bien compris quand vous avez

 12   écrit dans l'article, que la police serbe se déplaçait à Potocari, ils

 13   avaient les noms de chacun des criminels; vous le saviez avant de vous y

 14   rendre ?

 15   R.  Pouvez-vous répéter votre question ? Je suis désolé.

 16   Q.  Je ne sais pas si mon éminent collègue veut prendre la parole mais je

 17   vais essayer de poser ma question.

 18   Je voulais savoir si la police à Potocari avait les noms des criminels

 19   musulmans avant de vous y rendre ?

 20   R.  Je n'aurais pas pu avoir ce type d'information. N'essayez pas de

 21   m'amener dans ces eaux troubles. Je suis journaliste. Qui aurait pu donner

 22   de telles informations à un journaliste ? Est-ce que vous avez déjà vu des

 23   Américains donner des informations concernant le nombre de soldats qu'ils

 24   ont perdus en Irak ?

 25   Jamais M. Borovcanin, ni mon frère, ni un parent, et je ne faisais

 26   pas partie de leur armée. J'étais un citoyen étranger. Je venais d'un autre

 27   pays. Ils me respectaient et ils m'appréciaient, mais donner de telles

 28   informations à quelqu'un pendant -- en pleine guerre, ce serait absurde.

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  1   Q.  Je vais essayer de vous poser la question différemment et essayez de

  2   m'écouter. Je ne vous posais pas la question de savoir si vous aviez obtenu

  3   ces informations de M. Borovcanin.

  4   Voici ce que je vous pose comme question et on pourrait peut-être se

  5   référer au paragraphe dont il s'agit dans votre article qui a été publié le

  6   21 juillet. Est-ce que vous voulez y référer ?

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Voyons, pièce 469, page 2, dans la version

  8   anglaise, et je suis désolé, je ne suis pas tout à fait synchro [phon],

  9   mais je pense que le témoin pourrait le lire dans la version anglaise,

 10   peut-être page 1 de la version originale. En fait, non. Probablement, la

 11   page 2 de l'original également.

 12   Q.  En version anglaise, page 2, quatrième paragraphe à partir du haut --

 13   le troisième paragraphe traite des crimes qui ont été commis par des

 14   Musulmans à l'encontre de civils serbes. Puis, le paragraphe que je

 15   voudrais que vous lisiez commence : "Jevic et les autres policiers ne le

 16   savent que trop bien. Ils connaissent les noms de chacun des criminels, et

 17   dans cette jungle de personnes, d'enfants qui pleurent de -- et fait sales

 18   de poussière et de puanteur, il faut qu'ils trouvent ces hommes-là parmi

 19   les civils musulmans. En effet, il semble qu'il y en ait eu au mois

 20   quelques-uns parmi les gens qui étaient sur le balcon proche de la base des

 21   Nations Unies."

 22   R.  Oui, maintenant, nous parlons du texte que j'ai rédigé tout de suite

 23   après avoir fini mon émission. Là aussi, je l'ai écrit en un espace de

 24   temps très court. Il y avait une certaine dynamique. J'avais tout cet

 25   ensemble d'informations, y compris le nom de certains individus. Si je

 26   voyais que quelqu'un devait à voir avec l'opération, je combinais cette

 27   information avec l'information qui ne pouvait pas être niée à ce stade.

 28   C'était évidemment M. Ivanisevic parce que lui il avait la liste la plus

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  1   importante des crimes dans la zone de Podrinje, la vallée de la Drina, dans

  2   cette anse de la Drina. Donc, c'est une narration d'un texte qui parle d'un

  3   événement de guerre.

  4   Q.  La partie que j'ai lue, ce paragraphe concernant les connaissances

  5   d'Ivanisevic et les autres policiers et les criminels qui regardaient à

  6   travers les barreaux du balcon, est-ce que ça c'est quelque chose que vous

  7   êtes sûr d'avoir entendu ? Ou c'est une conclusion logique à laquelle vous

  8   êtes parvenu une fois que vous avez lu des choses concernant ces autres

  9   listes et que vous avez rassemblé différentes informations ? Est-ce que

 10   c'est quelque chose qui était avéré lorsque vous avez écrit votre article ?

 11   R.  C'est sans doute un peu les deux, à savoir ma présence sur place et le

 12   fait que j'ai filmé les gens sur le balcon, et puis, mes connaissances

 13   préalables qui concernaient l'information et la liste de M. Ivanisevic. Les

 14   deux choses correspondaient dans mon esprit et pour le lecteur il était

 15   parfaitement clair qu'il pouvait en tirer la conclusion que ces listes

 16   étaient en leur possession sur place. Je ne sais pas de qui j'ai entendu

 17   cela, peut-être j'ai entendu certaines de ces informations sur place. Mais

 18   en tout cas j'ai combiné toutes ces informations avec la liste existante,

 19   deux livres de

 20   M. Ivanisevic qui avaient été publiés un an avant et qui existaient déjà et

 21   qui expliquaient sans doute beaucoup de choses qui ont été connues plus

 22   tard. Je ne sais pas si c'était Pero, qui me l'a dit ou quelqu'un d'autre.

 23   Je peux vous donner -- je vous donne les noms que j'ai entendu sur place.

 24   Mais je ne peux pas citer ou déterminer l'identité de quelqu'un de précis à

 25   cet égard.

 26   Je vais vous donner un exemple : sur cette page on voit une partie du texte

 27   que je n'ai pas pu vérifier, on voit la photographie, ensuite on voit un

 28   des chefs musulmans qui devait qu'on traite -- enfin éviter la guerre mais

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  1   n'a pas pu prendre le pouvoir par rapport à Izetbegovic.

  2   Mais c'est sans doute quelque chose que je ne publierais plus

  3   aujourd'hui. Mais je n'avais pas le temps. On l'a vu là-bas avec les Serbes

  4   et c'est d'ailleurs quelque chose de très intéressant vis-à-vis de ce qui

  5   s'est passé à Srebrenica. J'ai fait un lien entre ceci et la scène que j'ai

  6   vue quand je suis revenu à Belgrade sur ce même pont, où j'ai vu les

  7   colonels, les commandants français, russes, et yougoslaves, qui allaient se

  8   réunir avec Mladic, et en tant que journaliste, j'ai fait le lien.

  9   Tout le monde évitait de dire quoi que ce soit. Et la fonction de ce

 10   texte était de donner une idée de ce qui se passait avec le minimum que

 11   j'avais à ma disposition.

 12   Q.  Est-ce que vous connaissiez un certain Dusko Jevic ?

 13   R.  J'en ai entendu parler mais ce n'est pas quelqu'un que je connais

 14   personnellement. Je n'ai jamais rencontré. Peut-être que je l'ai vu plus

 15   tôt en ce qui concerne la brigade, mais je ne peux pas

 16   -- enfin, sans dire comme je l'ai dit pour M. Borovcanin, que je l'ai

 17   rencontré. Je me souviens d'avoir en fait son nom c'est quelqu'un dont j'ai

 18   entendu parler mais je ne connaissais pas.

 19   Q.  Très bien. Question simple : vous souvenez-vous avoir vu Dusko Jevic à

 20   Potocari le 13 juillet ?

 21   R.  Probablement que, oui, mais je ne peux pas vous l'affirmer. J'ai dû le

 22   voir. Mais vous savez de quel type de rencontre il s'agit. Ce sont des

 23   rencontres lorsque j'étais en train de filmer, j'avance, je recule, il m'a

 24   fallu filmer le plus de cadres que possible, je ne suis pas caméraman, vous

 25   le savez.

 26   Même si je l'avais vu, ça aurait été une question de quelques

 27   secondes. Mais je ne me souviens pas d'avoir partagé plusieurs heures avec

 28   lui comme vous avez sur la photo où j'étais en compagnie de Borovcanin avec

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  1   les soldats de la FORPRONU. Je ne me souviens pas du tout d'avoir vraiment

  2   passé beaucoup de temps avec cet homme, alors que pour les autres je m'en

  3   souviens. J'aurais peut-être pu également le filmer. Je suis en train d'y

  4   penser maintenant, mais c'est absolument impossible de vous reproduire

  5   fidèlement la scène. C'était quelque chose qui ne m'était pas très

  6   important.

  7   Q.  Très bien. Merci. Vous avez répondu à ma question. Maintenant

  8   j'aimerais vous montrer un document. C'est un autre clip vidéo. Le document

  9   porte la cote 2991. Nous avons créé ce document -- nous l'avons créé à

 10   l'examen du document du film qui a été filmé par studio B. Il a également

 11   des scènes qui proviennent de vos séquences brutes.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 14   "Il y avait des gens qui essayaient de passer de façon clandestine à

 15   bord de convois. Dans des dossiers, ces derniers sont inscrits comme étant

 16   des criminels."

 17   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. NICHOLLS : [interprétation]

 19   Q.  La séquence du studio B, c'est le clip 2291 qui se trouvait à la

 20   gauche. Vous nous avez donné le matériel brut qui était présenté à la

 21   droite de l'écran. J'aimerais vous demander maintenant la chose suivante.

 22   Que pensez-vous -- qu'est-ce que l'on pouvait voir sur cette séquence

 23   maintenant que vous l'avez vue ?

 24   R.  Vous voulez dire à droite. Voilà ma première impression. Si vous suivez

 25   et comparez les deux, je vois où vous voulez en venir, mais si vous suivez

 26   la partie de gauche, nous pouvons voir que c'est l'original, car la partie

 27   de gauche porte le sigle du studio B. Si vous suivez ma voix lorsque vous

 28   regardez la séquence de gauche, vous voyez la douille de droite, vous

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  1   pouvez voir qu'il s'agit d'un fragment, il s'agit de quelques secondes. Car

  2   pendant quelques secondes, à cet endroit-là, devant 28 000 personnes que

  3   pensez-vous

  4   -- qu'est-ce qui aurait pu se passer sans que ceci ne figure sur mes

  5   images.

  6   A gauche, le son démontre que c'est la même image car la phrase se

  7   termine très rapidement. Ce matériel brut pour moi ne peut pas être fiable

  8   à 100 % dans le sens où vous l'entendez, et pour plusieurs raisons, le

  9   document n'était pas tout le temps avec moi, et cetera. La séquence de

 10   gauche nous démontre qu'il s'agit d'une séquence assez courte. Je ne sais

 11   pas si vous avez calculé le nombre de secondes. Ce serait impensable de

 12   penser que quelqu'un aurait pu tuer quelqu'un en cinq secondes. On l'aurait

 13   su, bien sûr,

 14   Q.  Mais ce n'est pas la question que j'allais vous poser, je

 15   n'allais pas non plus insinuer qu'une personne aurait été tuée pendant ces

 16   cinq secondes. Ma question est la suivante : lorsque vous comparez ces deux

 17   séquences, d'abord on voit M. Borovcanin en train de s'entretenir avec des

 18   personnes. Ensuite, la caméra bouge vers la gauche, et nous pouvons voir

 19   des effets personnels devant une porte, et dans votre matériel brut, nous

 20   pouvons voir les douilles.

 21   Sur la séquence du studio B on peut voir un homme zoomé qui se trouve

 22   sur un balcon. Je ne vais pas repasser la séquence, mais j'espère que c'est

 23   clair. Ma question est la suivante, ayant vu les deux séquences, est-ce que

 24   vous pensez que l'homme sur le balcon était quelqu'un qui se trouvait là et

 25   qu'on a enregistré par-dessus la séquence avec la douille, car après on

 26   voit de nouveau les deux séquences et l'homme marche ?

 27   R.  C'est justement l'un des éléments qui manquait sur le document

 28   brut et heureusement ils ont été trouvés de nouveau, car j'ai pu me

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  1   procurer une cassette VHS du Canada. Ce sont des moments contestables, j'ai

  2   eu d'énormes problèmes en Serbie car plusieurs personnes m'accusaient

  3   d'avoir effacé des crimes odieux. Nous ne pouvons pas -- je ne suis pas un

  4   devin pour savoir ce qui a pu se passer indépendamment du fait de ce qui

  5   ait pu se passer avec le matériel brut, tout le monde pense que j'ai caché

  6   des choses, mais elles se trouvent là.

  7   Si vous trouvez ce type de caméra, le zoom est tellement pitoyable

  8   que l'on n'arrive même pas à zoomer. Même si j'ai eu ce cadre de cinq

  9   secondes de plus, c'était la même chose. Ce sont toutes des personnes qui

 10   sont vos experts qui ont pu identifier avec des documents sophistiqués.

 11   Lorsque j'ai filmé cela, c'était comme cela, je n'ai pas eu du tout en tête

 12   ceci.

 13   Q.  Bien. Je vais maintenant passer à autre chose et je vais laisser

 14   de côté l'homme sur le balcon.

 15   Nous avons regardé des séquences de Potocari du 13. Vous nous avez

 16   dit que vous aviez filmé une partie de la base du DutchBat -- où êtes-vous

 17   allé après, vous et M. Borovcanin, après avoir quitté Potocari ?    

 18   R.  Puisque nous suivions de façon générale la chronologie de nos

 19   déplacements, nous sommes allés sur le terrain puisque je vous ai dit que

 20   les opérations étaient en cours. Nous nous sommes dirigés depuis Bratunac

 21   et nous avons emprunté la route qui mène vers Tuzla, c'est-à-dire vers le

 22   carrefour entre Tuzla et Zvornik. Et nous sommes arrivés jusqu'à mi-chemin,

 23   si vous voulez. Par la suite vous m'avez dit comment s'appelait cet

 24   endroit, mais pendant plusieurs années j'ignorais quel était le nom de

 25   l'endroit.

 26   En 2006, lorsque je suis retourné sur les lieux avec l'équipe de la

 27   télévision française, il m'était impossible de reconnaître l'endroit où se

 28   trouvaient les prisonniers. Tout avait changé. Certaines maisons avaient

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  1   été détruites, on les avait reconstruites.

  2   Donc nous nous sommes dirigés en partant de la ville en prenant l'axe

  3   de communication. Il y avait déjà des camions, des colonnes d'autobus qui

  4   menaient des réfugiés vers Tuzla. C'est d'abord cela que nous avons filmé.

  5   Ensuite, nous sommes arrivés jusqu'au Praga -- certaines personnes parlent

  6   de Praga, en fait, c'était des canons antiaériens, mais ce n'est pas des

  7   Praga comme on le dit. On a filmé cela.

  8   Je voudrais que vous sachiez que les coups de feu sont enregistrés et

  9   M. Agius, le Président, devrait savoir que cette partie-là, j'ai filmé en

 10   risquant ma vie, car on nous tirait dessus pendant que je filmais ceci, le

 11   chauffeur conduisait extrêmement rapidement -- toutes les personnes pensent

 12   que si l'on conduit une voiture à plus de 120 kilomètres à l'heure qu'une

 13   balle ne peut pas vous toucher, mais ce n'est pas vrai. Une balle peut vous

 14   toucher quand même.

 15   Mais voilà je suis très heureux que l'on ne nous ait pas touchés. Je

 16   parlais du côté musulman bien sûr.

 17   Q.  Merci. Permettez-moi maintenant de vous montrer une carte avec

 18   votre permission. 

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] Voilà, c'est notre numéro 2111 [comme

 20   interprété], carte numéro 6 sur e-court.

 21   Q.  Voici une carte de la région pour voir si vous arrivez à vous orienter.

 22   Si vous avez du mal à vous orienter sur l'écran, je vais vous donner ma

 23   copie papier.

 24   Est-ce que vous arrivez à lire les noms d'endroits ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Si vous prenez la partie de droite, nous pouvons voir Potocari, au nord

 27   de Bratunac, ensuite une route mène vers Kravica, Sandici et Konjevic

 28   Polje. Veuillez, je vous prie, nous dire si cette carte rafraîchit votre

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  1   mémoire, à savoir où vous vous rendiez avec M. Borovcanin cette journée-là

  2   lorsque vous avez quitté Potocari.

  3   R.  Si je ne m'abuse, c'est la seule route.

  4   Q.  Est-ce que c'est bien la route que vous avez empruntée pour arriver à

  5   Konjevic Polje ?

  6   R.  Je ne me suis jamais rendu à Konjevic Polje.

  7   Si je me souviens bien. Pourquoi ? Car cet endroit était déjà connu pour

  8   avoir eu le premier massacre des Serbes qu'Oric avait fait en 1993 pendant

  9   l'hiver. Si j'avais été là, j'aurais pris des images de Konjevic Polje. Ce

 10   n'est pas un endroit qui est peut-être connu chez vous, mais chez nous en

 11   Serbie, c'est un endroit qui est très connu. Je vois ici sur la carte

 12   l'endroit que vous appelez Sandici, mais je ne me souviens absolument pas

 13   d'un carrefour.

 14   En dessous de Konjevic Polje, il y a normalement un carrefour qui

 15   mène vers Nova Kasaba et Milici. C'est la route qui mène vers Sarajevo.

 16   Alors qu'à droite, vous avez la route qui mène vers Zvornik en Serbie.

 17   C'est à peu près cela.

 18   Q.  Très bien. Merci. Si vous vous souvenez, dites-nous à quel endroit ces

 19   tirs ont-ils commencé, les tirs de l'armée musulmane ? A quelle proximité

 20   de Bratunac ?

 21   R.  J'avais entendu déjà - et je ne peux pas être tout à fait précis. Mais

 22   déjà quelques kilomètres après Bratunac, de ce que l'on voit ici, peut-être

 23   déjà à Glogova. Nous nous rendions vers Zvornik, les tirs provenaient de la

 24   gauche. Nous pouvons voir le ruisseau de Kravica, c'est un ruisselet même,

 25   si je me souviens bien. Ensuite à gauche de cet endroit, en nous dirigeant

 26   vers Zvornik en voiture, il y a ce ruisselet, et là après, il y a des

 27   montagnes, et sur tout ce territoire il y avait eu des tirs. Je me souviens

 28   qu'à certains endroits nous nous arrêtions, car les routes n'étaient pas

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  1   sûres et pour ne pas atteindre les autobus, on arrêtait, on repartait, on

  2   arrêtait, on repartait, ce qui me permettait de croire que les Serbes

  3   n'avaient pas dû tout vaincu quoi que ce soit, les Musulmans étaient en

  4   train de tirer.

  5   Q.  Je vais vous poser une question maintenant concernant un autre aspect

  6   de la journée. Vous souvenez-vous si les convois et les autocars, ainsi que

  7   les camions bondés de réfugiés, comme vous les appelez, avaient été arrêtés

  8   pendant la journée, pendant qu'il y avait des tirs ?

  9   R.  Je me souviens qu'à deux ou trois endroits, ils se sont immobilisés

 10   peut-être pendant une demi-heure. Vous savez, dans la guerre, des fois il y

 11   a une zone qui est dangereuse, ensuite la zone, une demi-heure plus tard

 12   n'est plus dangereuse, et pendant que cette zone devienne plus sûre, il

 13   faut attendre que les civils ne soient pas attaqués. Ce que j'ai fait, ce

 14   n'était pas du tout sûr. Nous, nous allions même si les tirs étaient en

 15   cours.

 16   Q.  D'accord, merci. Je comprends ce que vous nous dites. Lorsque vous est

 17   retourné, et vous nous avez dit que vous ne pouviez pas trouver d'autres

 18   endroits le long de cette route, les séquences que vous avez prises de

 19   l'entrepôt de Kravica et des cadavres, est-ce que vous étiez en mesure de

 20   retrouver ces endroits avec l'équipe de la télé française ?

 21   R.  Non. Je ne me souviens pas d'avoir identifié cet endroit. Vous savez,

 22   la faune avait changé. Plusieurs maisons avaient été érigées. Il y avait

 23   eu, à ce moment-là, plusieurs maisons détruites lorsque j'y étais pour la

 24   première fois. Les hommes d'Oric avaient incendié et détruit ces maisons en

 25   1993. Donc il était absolument impossible après de se fier à quoi que ce

 26   soit, aucun point de repère. De toute façon, ce point avait été filmé en

 27   quelques secondes, seulement quelques secondes.

 28   Q.  D'accord. Dernière question avant la pause, car il nous faut prendre

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  1   une pause pour les interprètes et pour changer les cassettes. Pendant cette

  2   partie-là du trajet, vous souvenez-vous si Borovcanin était avec vous dans

  3   la voiture ou y avait-il un

  4   chauffeur ?

  5   R.  Je crois qu'il y avait un chauffeur à ce moment-là.

  6   Q.  Très bien.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je crois qu'il

  8   serait plus propice de prendre la pause maintenant.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Une pause de 25 minutes. 

 10   Avant la pause, Monsieur McCloskey, il y a une autre requête

 11   provenant de l'équipe Miletic pour que leur conseiller militaire soit

 12   présent pendant le témoignage de Richard Butler. Est-ce que vous avez des

 13   objections quant à cette requête -- de Pandurevic ?

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Aucune objection, Monsieur le

 15   Président.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc, je fais droit à cette requête.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ne pas qu'il y ait de problème, je mets à

 20   la disposition mes notes personnelles, comme vous m'avez dit au début.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous pouvez prendre vos notes

 22   personnelles avec vous. Personne ne vous a demandé de les produire. Si

 23   c'est le cas, nous vous les demanderons plus tard. Pause de 25 minutes.

 24   --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

 25    --- L'audience est reprise à 16 heures 14.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que je vais

 28   terminer avant la prochaine pause. Je crois que j'ai pris un peu plus de

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  1   temps car je ne croyais pas que le témoin allait répondre -- donner des

  2   réponses si étoffées.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, veuillez, je vous prie, vous en tenir aux réponses

  4   plus courtes. Essayez de répondre plus succinctement.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pour le compte rendu, je remarque la

  6   présence de M. Haynes dans le prétoire.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur le Témoin, je vais vous montrer, en fait, une séquence vidéo.

  9   Il s'agit d'un document qui provient de votre matériel brut et je ne vous

 10   ai pas montré ce document un peu plus tôt car il semblerait qu'une séquence

 11   est manquante. Il y a un cadre qui est vide. Nous allons commencer par la

 12   séquence 12:17:1.

 13   [Diffusion de la cassette vidéo]

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Voilà. Pendant quelques secondes, nous avons eu une séquence vide, un

 16   cadre qui était complètement sans rien. Je voudrais savoir ce que

 17   représente cet écart dans votre matériel.

 18   R.  Je n'ai absolument pas vu de cadre vide.

 19   Q.  Vous savez, entre les deux séquences. il n'y avait rien entre deux

 20   séquences ?

 21   R.  C'est une réponse universelle que je vous donne, s'agissant de ce

 22   matériel brut c'est assez intéressant que vous me parliez de ce matériel

 23   brut, vous me parlez plus du matériel brut que de l'émission que j'avais

 24   faite. Je ne peux pas vous donner de raison pour cela. Vous voyez qu'il

 25   s'agit de tirs provenant d'un Pat de la colline. Les Musulmans tirent

 26   depuis la colline. La situation est claire comme de l'eau de roche. Je ne

 27   vois vraiment pas ce qui vous préoccupe.

 28   Je n'ai même pas porté attention sur le texte qui était indiqué ici,

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  1   s'agissant du dialogue je n'ai pas du tout écouté, le dialogue que l'on

  2   entend, ce que l'on entend sur la séquence. Je ne sais pas. Je ne faisais

  3   pas que filmer j'étais concentré sur l'image. Maintenant, outre l'image, je

  4   ne peux rien vous dire de plus. Pourquoi il n'y a rien pendant quelques

  5   secondes je ne sais pas.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

  7   M. LAZAREVIC : [interprétation] Petite correction pour le compte rendu

  8   d'audience. Il semblerait qu'à la ligne 20, le témoin a dit : "Le feu a été

  9   ouvert d'un Pat depuis la colline." Ce n'est pas Pat en anglais P-A-T-H,

 10   mais bien Pat, donc, fusil antiaérien ou canon antiaérien.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je présume que vous le confirmer,

 12   Monsieur le Témoin.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, oui. C'est une abréviation

 14   militaire.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Alors, je demande que le

 16   compte rendu d'audience soit corrigé. Cela sera fait.

 17   M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais que l'on montre maintenant une

 18   séquence provenant de studio B, séquence vidéo qui porte l'indication 2011.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 21   "Sur la route Bratunac-Kravica-Konjevic Polje, des tirs de feu

 22   sporadiques se sont fait entendre provenant des forces musulmanes qui ne

 23   souhaitaient encore pas se rendre," dit le texte.

 24   "Voici l'une des armes les plus efficaces dans la guerre en Bosnie appelé

 25   Praga. Deux de ces Praga sont en train d'agir maintenant depuis une route

 26   se trouvant dans la colline."

 27   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 28   M. NICHOLLS : [interprétation]

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  1   Q.  8:36:2. Alors, pourrait tout à fait précis nous pouvons voir que le

  2   compteur sur la séquence se lit 16:48:00. C'est ce qui est à l'écran de

  3   cette cassette provenant de studio B.

  4   Maintenant, cette partie-là de la séquence de la cassette de studio B ne se

  5   trouve pas sur votre matériel brut. Est-ce que vous pourriez nous dire, si

  6   vous le savez, pourquoi ceci n'existe pas ?

  7   R.  Je réponds à la même chose. Dans le texte, je viens de faire une

  8   erreur, j'ai parlé de Praga, je crois que j'ai fait un lapsus lorsque j'ai

  9   parlé. Il s'agissait d'un fusil PAT d'un fusil antiaérien, un canon

 10   antiaérien PAT, et non pas Praga.

 11   Q.  Très bien. Poursuivons le visionnage.

 12   [Diffusion de la cassette vidéo]

 13   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 14   "Les forces spéciales du MUP en train d'effectuer ces tirs. On estime que

 15   de 5 à 6 000 Musulmans se trouvent encore dispersés dans les forêts et les

 16   collines et ceux qui se rendent montrent aux Serbes…"

 17   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. NICHOLLS : [interprétation] Arrêtons-nous ici, s'il vous plaît.

 19   Q.  Lorsque vous avez parlé de ces PAT et vous nous avez dit que les PAT

 20   tiraient dans les collines; est-ce que vous étiez à l'intérieur ou à

 21   l'extérieur du véhicule ?

 22   R.  Je me trouve à ce moment-là alors que je filmais à côté du véhicule, ce

 23   qui démontre -- ce qui est démontré par la musique que l'on peut entendre.

 24   On ne peut pas vraiment lier l'un avec l'autre. Mais la radio du véhicule

 25   était allumée, donc, la situation était dangereuse, il l'aurait été

 26   complètement normal que je porte un gilet par balle. Comme tout journaliste

 27   américain, les journalistes américains ne sortent jamais sans gilet par

 28   balle. Moi, j'aurais vraiment pu périr. J'aurais pu y passer.

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  1   Lorsque j'ai commencé à filmer j'étais juste à côté du véhicule et

  2   parce que j'ai voulu avoir une bonne image. C'est pour cela que l'on entend

  3   la musique provenant du véhicule.

  4   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est la pièce 2286 qui m'intéresse, page --

  5   Q.  Il s'agit d'un cliché provenant de votre matériel brut.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Encore une fois ce qui nous intéresse c'est

  7   la page 52, photo B elle apparaît maintenant à l'écran.

  8   Q.  On voit également une voiture argent gris qui se trouve un peu plus

  9   loin dans la séquence. Est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire ?

 10   R.  Il me semblerait que c'était une Golf et il y en avait pas mal en

 11   Yougoslavie à l'époque. Mais ce véhicule ne me rappelle absolument rien. Si

 12   vous me demandez si j'ai été transporté à bord de ce véhicule, je ne me

 13   souviens pas. Je crois que ce n'était pas ce véhicule-là, mais j'ignore

 14   quel était le véhicule.

 15   Q.  Très bien. Merci. Vous avez répondu très clairement à ma question. Je

 16   souhaiterais vous montrer une autre séquence vidéo et vous posez des

 17   questions relatives à cette dernière. Voilà. Passons la vidéo encore une

 18   fois c'est le matériel brut, 2011.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien. Nous sommes arrêtés à

 21   22:57:05.

 22   Q.  Tout d'abord, vous souvenez-vous de cette séquence ? Vous en souvenez-

 23   vous les gens qui se rendaient quand ils sont sortis du bois ?

 24   R.  Ils sortaient du bois, et ensuite, ils descendaient en direction du

 25   cours d'eau, du petit fleuve que l'on voit sur la carte, et ensuite ils se

 26   sont rendus et ils sont montés jusqu'à la maison, jusqu'à la route. Pour

 27   autant que je m'en souvienne, ils sont passés devant la maison. C'est là

 28   que l'on arrive sur la route, et depuis cet endroit-là on rejoint le pré où

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 1   j'ai filmé cette séquence. Je ne sais pas ce que vous souhaitez savoir

 2   d'autre. Maintenant, que je regarde cette vidéo, tout me revient.

 3   Q.  Ce jeune homme que l'on voit ici sur l'arrêt sur image au point

 4   22:57:5, pour les besoins du compte rendu ressemble pour beaucoup à la page

 5   56, la photographie E, 2986, vous souvenez-vous ce qui est arrivé à ce

 6   garçon peu de temps après avoir filmé cette chaîne ?

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28   Q.  Merci. On le voit ici, ainsi que l'autre avec ce groupe de garçons,

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  1   monter à bord de l'autocar le jour où ils sont partis à Tuzla ?

  2   R.  Je m'en souviens bien parce que ceci a été publié dans le "Times" en

  3   1998. J'étais choqué parce que je me souvenais encore de tout cela. Je

  4   répète : j'ai vu un groupe de jeunes garçons, d'enfants mineurs de moins de

  5   18 ans qui sont montés à bord des autocars ou des camions. Je ne sais pas

  6   qui est monté à quel endroit. De toute façon, ils sont montés à bord de

  7   véhicules et ont atterri à Tuzla. 

  8   Il ne s'agit pas d'une fuite couronnée de succès grâce à un point

  9   d'eau ou un puit derrière lesquels il s'est caché pour ensuite partir à

 10   Tuzla. Ceci n'a aucun sens.

 11   Je vais vous aider un petit peu --

 12   Q.  Attendez la question, s'il vous plaît. Si vous avez besoin d'ajouter

 13   quelque chose -- je vais ajouter quelque chose, si les Juges de la Chambre

 14   me le permettent. 

 15   A l'époque, ce garçon et les autres garçons ont été séparés des

 16   hommes plus âgés. Vous les avez décrits. Vous avez dit qu'ils sont montés à

 17   bord des autocars et ensuite qu'on les emmenés à Tuzla. Alors, qui, si

 18   quelqu'un, a donné l'ordre que cela devait se passer ainsi ?

 19   R.  Qui a donné l'ordre pour qu'ils montent à bord des autocars ?

 20   Q.  Oui. 

 21   R.  D'après ce dont je me souviens, M. Borovcanin, lorsque nous sommes

 22   arrivés sur les lieux, a tout d'abord vu qu'il y avait de jeunes hommes qui

 23   ne pouvaient pas être des soldats, et pour autant que je m'en souvienne, il

 24   a tout de suite dit qu'il fallait faire cesser le transport de réfugiés,

 25   que ces derniers devaient être envoyés à Tuzla. Il m'est très difficile de

 26   citer ses propres termes, mais c'est plus ou moins ce qui s'est passé. La

 27   situation était plus ou moins comme cela.

 28   Nous sommes arrivés ensemble. Il a vu les mêmes choses que j'ai vues

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  1   moi-même. 

  2   Q.  Maintenant, si vous vous en souvenez, M. Borovcanin, après avoir décidé

  3   que ces garçons devaient monter à bord d'autocars pour aller à Tuzla, est-

  4   ce qu'il a arrêté l'autocar lui-même ou est-ce quelqu'un d'autre qui l'a

  5   fait, si vous vous en souvenez ?

  6   R.  Je ne m'en souviens pas. Je sais que je l'ai dit lors de l'entretien à

  7   Belgrade, mais à mon sens cela n'est pas très important, car je sais qu'ils

  8   ont été transportés depuis ce pré à bord d'autocars. Je ne sais pas si ce

  9   sont les gardes. Peut-être l'un d'entre eux, parce que Borovcanin

 10   surveillait l'ensemble de la situation. Il y avait des gens près de la

 11   route et je ne me souviens pas qu'il se soit arrêté un certain temps à cet

 12   endroit. Mais si vous ne le permettez --

 13   Q.  Allez-y.

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 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel pendant

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  1   quelques instants, s'il vous plaît.

  2   Nous sommes à huis clos partiel.

  3   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges.

 25   Q.  Bien. Alors, sans citer de noms, s'il vous plaît, Monsieur Petrovic,

 26   vous nous avez parlé de différents travaux de recherche, vous avez vérifié

 27   les faits, vous aviez des listes. Savez-vous ce qui est arrivé à ces autres

 28   hommes qui ont été faits prisonniers ce jour-là dans ce champ ?

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  1   R.  Ce ne sont pas des éléments d'information dont pouvaient se procurer

  2   les journalistes, lorsqu'il y avait un théâtre d'opération de ce genre.

  3   Q.  Vous voulez dire que vous ne savez pas ?

  4   R.  Non même pas aujourd'hui.

  5   Q.  Bien.

  6   R.  Il y avait des rumeurs -- pardonnez-moi. Je m'excuse auprès des

  7   interprètes. Ceci s'est passé en 1995, et ensuite il y a eu des rumeurs sur

  8   les événements de Srebrenica qui se sont répandus. Donc, j'ai peut-être

  9   entendu parler de la mort de certains entre eux, mais ce ne sont pas des

 10   éléments qui me sont parvenus par des voies officielles. Ce sont des

 11   informations qui ont été procurées par les médias internationaux ou locaux.

 12   Mais je sais qu'il y avait un homme qui s'appelait Ramo, que l'on voit

 13   également dans l'émission de la BBC. Je l'ai filmé aussi et cette scène

 14   était très difficile à supporter. C'est peut-être quelqu'un de la BBC ou

 15   une équipe de la BBC, je ne sais pas, qui m'a dit que cet homme avait été

 16   tué. Je me souviens bien de l'avoir entendu parler de cela.

 17   Q.  C'est ma dernière question sur le sujet. Parce que vous avez suivi

 18   quelques-uns, vous avez suivi certains procès devant ce Tribunal, et

 19   maintenant que vous disposez des éléments d'information dont vous disposez

 20   au jour d'aujourd'hui, est-ce que ces hommes ont été emmenés de ce pré, ce

 21   que vous avez filmé ? Est-ce qu'ils ont été tués ? Pensez-vous que sur la

 22   base des informations dont vous disposez, est-ce que c'est le cas ou est-ce

 23   qu'il s'agit simplement de rumeur ?

 24   R.  Lorsque j'étais là, personne n'a quitté cet endroit hormis les enfants.

 25   Ils sont montés à bord des autocars.

 26   Mais puis-je, moi, vous poser une question, s'il vous plaît ?

 27   Q.  Non, ça, ça ne fait pas partie des règles.

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à huis clos

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  1   partiel pendant quelques instants ?

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Huis clos partiel.

  3   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, ce n'est pas à moi d'en décider --

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, vous avez tout à fait raison.

  5   M. NICHOLLS : [interprétation] Après, lorsque nous en aurons terminé, après

  6   l'audience, vous pourrez me poser des questions.

  7   [Audience à huis clos partiel]

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 20   [Audience publique]

 21   M. NICHOLLS : [interprétation]

 22   Q.  Je souhaite maintenant passer à un autre thème, un autre sujet. C'est

 23   quelque chose que vous avez évoqué dans votre article ainsi que l'entretien

 24   que nous avons eu. Je souhaite vous parler de ce film que vous avez tourné

 25   lorsque vous avez filmé ces corps, ces cadavres devant l'entrepôt. Si vous

 26   vous en souvenez, qu'avez-vous entendu ce jour-là, le 13 juillet, à propos

 27   de quelqu'un, d'un officier qui avait un surnom. Parlez-nous en brièvement,

 28   s'il vous plaît. Dites-nous ce que vous avez entendu.

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  1   R.  De toute façon, c'était à l'époque où nous avons quitté Bratunac et que

  2   nous avons filmé toutes les personnes qui se trouvaient sur la route, un

  3   groupe de détenus et les autres personnes. C'est à cette époque-là. Je ne

  4   peux pas vous dire exactement quand. J'étais un observateur externe. Je ne

  5   sais pas exactement ce qui s'est passé, mais j'en ai conclu, compte tenu

  6   des éléments dont nous disposions à ce moment-là lorsque nous sommes

  7   arrivés à l'hôpital, qu'un combattant, placé sous le commandement de

  8   Borovcanin, qui était surnommé Officier, avait été blessé, qu'il avait

  9   sauté sur quelque chose qui disposait d'armes et que ses bras avaient été

 10   blessés dans l'escarmouche et qu'il avait été transporté d'urgence à

 11   l'hôpital de Bratunac. 

 12   Q.  Vous souvenez-vous qui vous a rapporté cela ?

 13   R.  Je ne sais pas. Je suppose qu'il a dû y avoir une conversation entre

 14   Borovcanin et quelqu'un qui lui en a parlé, ou peut-être que c'est quelque

 15   chose qu'il a entendu sur son Motorola. Il est vrai que mes souvenirs ne

 16   sont pas très précis à cet égard. Le détail importait peu. C'était

 17   important parce que l'homme a été blessé, ce qui signifie que les Serbes

 18   ont également souffert, non seulement les Musulmans. Ils avaient des

 19   difficultés parce qu'ils étaient Musulmans, mais je ne sais pas quel était

 20   le nom de cet homme. Je ne sais pas quelle était la situation, mais je sais

 21   que dès qu'il en a été informé, nous nous sommes dirigés directement vers

 22   Bratunac. Encore une fois, on a tiré depuis la droite, depuis l'endroit où

 23   je filmais.

 24   Q.  Je vais clarifier cela. Dès qu'il a reçu cette information, vous avez

 25   dit. Vous voulez parler de qui ? Qui a reçu cette

 26   nouvelle ?

 27   R.  Je suppose que c'est Borovcanin, parce que c'est lui qui a décidé où

 28   comment il fallait partir. J'avais suivi, ce n'était pas l'inverse. Ce

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  1   n'est pas lui qui me suivait.

  2   Q.  Encore une fois, je vous demandais de qui vous parliez. Je vous ai

  3   demandé de qui vous parliez.

  4   A aucun moment de la journée, est-ce que vous avez vu cet homme

  5   blessé, ce surnommé, Officier.

  6   R.  Non, mais j'ai vu un Musulman qui avait été tué. On le voit dans

  7   le film. Il sortait de ce petit cours d'eau, et c'est là qu'il y a eu cette

  8   escarmouche, cette échauffourée. Je ne sais pas où cette échauffourée avait

  9   eu lieu, mais il y avait des Musulmans morts sur le bord de la route. Je ne

 10   me souviens pas d'avoir jamais vu cet homme. Je suis sûr que je ne l'ai pas

 11   vu à l'époque.

 12   Q.  Bien. Si vous en souvenez, par rapport au film que vous avez

 13   tourné, et ce que nous appelons l'entrepôt de Kravica, là où vous avez

 14   filmé les corps morts qui se trouvaient devant, est-ce que l'information à

 15   propos d'Officier est une information qui vous est parvenue avant d'avoir

 16   tourné cette partie-là du film ou après ?

 17   R.  Je ne peux pas vous le dire avec certitude. Par rapport à tout ce

 18   que j'ai fourni, ce n'est pas quelque chose qui est resté gravé dans ma

 19   mémoire. J'ai travaillé activement pendant toute la durée de la guerre.

 20   Q.  Mais c'est quelque chose qui figure dans votre article, n'est-ce

 21   pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  A l'hôpital -- tout d'abord, je vais vous poser cette question-ci

 24   : Nous avons dans le transcript, on indique que ses bras étaient blessés.

 25   Vous souvenez-vous si c'était sa main ou ses bras ? Quelle partie du corps

 26   d'Officier avait été blessée ?

 27   R.  Je crois qu'on racontait que c'était ses bras ou ses mains qui

 28   avaient été blessés. A savoir si c'est quelqu'un qui lui a enlevé, retiré

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  1   ses armes, je ne sais pas, mais il était en mauvais état, car il devait

  2   être transporté d'urgence à l'hôpital.

  3   Q.  Bien. Maintenant, à l'hôpital, est-ce que M. Borovcanin est entré

  4   dans l'hôpital pour aller rendre visite à Officier ?

  5   R.  Oui, je crois que ça s'est passé comme ça. Je crois que je m'en

  6   souviens correctement. Je suis resté à l'extérieur de ce centre médical.

  7   C'était inutile pour moi de rentrer à l'intérieur. Qu'est-ce que j'aurais

  8   fait, puisque cet homme était entré aux urgences ? Il voulait sans doute

  9   voir dans quel état se trouvait cet homme. Mais j'étais dehors, j'attendais

 10   dehors. Je ne m'en souviens pas bien, mais je m'en souviens au niveau de

 11   l'article. Je suppose que les choses se sont passées à la manière dont je

 12   les ai décrites dans l'article.

 13   Q.  Si je vous remontre cette partie-là de votre article, est-ce que

 14   cela vous permettrait de vous rafraîchir la mémoire ?

 15   R.  Allez-y, je vous en prie.

 16   Q.  A la page 5, du 469. A la page 5, le dernier paragraphe entier en

 17   anglais : "Au moment de sa reddition, à l'angle du bâtiment, un soldat

 18   musulman s'est tout à coup précipité sur un combattant serbe, lui a arraché

 19   son fusil et a tiré une rafale. Officier, un des membres des forces

 20   spéciales de Ljubisa a sauté sur lui, l'a renversé, il a été légèrement

 21   blessé dans la bagarre. Officier est un des espoirs des formations de

 22   Borovcanin, donc, le commandant se rend immédiatement au centre médical de

 23   Bratunac où on a pansé les blessures d'officier."

 24   Maintenant, que je vous ai lu ceci, est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 25   Est-ce que c'est exact ou est-ce qu'il y a des erreurs ?

 26   R.  C'est quelque chose dont j'ai entendu parler des gens qui étaient là.

 27   Je ne pense pas qu'ils disaient n'importe quoi. Ce n'était pas le genre de

 28   situation où on racontait n'importe quoi. La manière dont j'ai décrit

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  1   l'officier comme étant un espoir, c'est ce genre de chose que l'on

  2   entendait sur NBC, des garçons qui sont partis en Irak, des boys, et c'est

  3   comme ça que je ressentais les choses. C'étaient des garçons qui faisaient

  4   partie de mon peuple. Vous savez quand on parle des garçons, des boys qui

  5   sont partis en Irak pour aller défendre la démocratie.

  6   Q.  Maintenant, je souhaite vous parler d'un clip ou d'une séquence vidéo

  7   du studio B, qui a été retrouvé -- en tout cas, qui filme ce qu'il y a

  8   devant l'entrepôt de Kravica, nous allons d'abord le visionner à une

  9   cadence normale et ensuite au ralenti.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   M. NICHOLLS : [interprétation]

 12   Q.  Nous sommes arrêtés à 2:56:07:1. A l'écran, on peut lire les mots

 13   suivants : "Bonjour. Comment vas-tu ? Que se passe-t-il ?" Savez-vous où

 14   nous sommes ? Où ceci a-t-il été filmé ?

 15   R.  Oui. Il s'agit là de la route qui allait de Bratunac à Srebrenica. On

 16   voit les personnes qui descendent de là-haut avec des chevaux. On dirait

 17   une scène extraite du Moyen Age. Cette route était sûre, et c'était le

 18   deuxième jour de mon séjour là-bas, les heures du matin, si je me souviens

 19   bien.

 20   M. NICHOLLS : [interprétation] Veuillez continuer le visionnement, s'il

 21   vous plaît.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. NICHOLLS : [interprétation]

 24   Q.  Bien. Je souhaite, maintenant -- pour que vous puissiez mieux voir

 25   parce que c'est assez court, je souhaite maintenant vous le montrer au

 26   ralenti.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

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  1   Q.  Deux questions. Lorsque vous passez en voiture devant l'entrepôt, vous

  2   avez filmé cette séquence, qui est dans la voiture ? Est-ce qu'il y a un

  3   chauffeur ou est-ce simplement vous et

  4   M. Borovcanin ?

  5   R.  Etant donné que c'était sur le chemin du retour en direction de

  6   Bratunac, nous étions trois, si je me souviens bien. Je dirais qu'il y

  7   avait encore le même groupe de personnes qu'avant.

  8   Q.  Il y a cette photographie prise alors que vous passiez devant en

  9   voiture. Est-ce que la voiture s'est arrêtée ou est-ce que vous avez

 10   poursuivi votre chemin ?

 11   R.  Je ne me souviens pas de quelque chose de la sorte. La vidéo dont vous

 12   disposez a été tournée pendant que la voiture était en mouvement. Rien ne

 13   semble indiquer que c'est une séquence qui est courte, qui a été filmée par

 14   hasard, parce que j'étais simplement à la place du passager sur la droite

 15   et ma caméra était prête comme un soldat aurait son fusil.

 16   Sur le chemin du retour, je n'ai pas filmé grand-chose, j'ai moins

 17   filmé qu'avant. Encore une fois, il y avait des tirs et sur le chemin du

 18   retour on tirait du côté droit, et à cause de ces fusillades je ne pouvais

 19   pas filmer grand-chose.

 20   Q.  A droite, c'est le même côté que l'entrepôt, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Lorsque vous dites que les tirs venaient, vous voulez dire que

 23   c'étaient des tirs en provenance des unités serbes, ou est-ce que vous

 24   voulez parler de tirs de Musulmans, ou vous ne savez pas ?

 25   R.  Il y a différents types de tir. Il y avait les Musulmans qui tiraient

 26   sur les Serbes qui se trouvaient à Recica et les Serbes tiraient sur les

 27   Musulmans, et les Musulmans tiraient sur les Musulmans qui se rendaient et

 28   ils tiraient sur nous, je suppose. De temps en temps, il y avait des coups

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  1   de feu échangés et c'était assez violent. D'après le son, je crois que cela

  2   venait des collines qui se trouvaient de l'autre côté par rapport au cours

  3   d'eau. Mais il y avait également des tirs de l'autre côté, du côté serbe.

  4   C'est là où il y avait un PAT, c'était la zone de combat et il y avait des

  5   échanges de coups de feu.

  6   Q.  Bien. Ces coups de feu que l'on entend sur cette séquence vidéo, vous

  7   pensez que cela venait d'où ? C'est très fort, on l'entend bien ici au

  8   niveau de l'entrepôt lorsque vous êtes passé devant.

  9   R.  Je ne peux pas vous le dire. Je crois que la caméra a enregistré ces

 10   tirs peu de temps après, 20 minutes après. Je crois que c'est difficile de

 11   savoir. Je crois qu'un expert militaire ne serait même pas capable de le

 12   dire.

 13   Q.  Bien. Lorsque vous dites sur cette séquence, on peut la remontrer si

 14   vous le souhaitez, le soldat qui passe devant l'entrepôt, juste devant

 15   plusieurs corps morts qui sont empilés les uns sur les autres, il lève la

 16   main en quelque sorte en direction de la voiture alors que vous passiez

 17   devant. Est-ce que vous pensez qu'il agissait comme ça parce qu'on le

 18   menaçait d'un coup de feu, ou non, qu'est-ce que vous en pensez ?

 19   R.  C'est la technologie à la pointe du progrès et les miracles que cela

 20   permet de réaliser. Alors que je filmais, je n'ai même pas remarqué cette

 21   personne. C'est seulement lorsque j'ai regardé votre vidéo au ralenti que

 22   j'ai constaté cela et que j'ai vu qu'il y avait un soldat qui avait le

 23   pouce en l'air, je crois. Je crois que dans d'autres arrêts sur image il y

 24   avait un autre individu, mais j'ai remarqué qu'il n'arborait aucun insigne

 25   sur son bras. C'est simplement un petit détail.

 26   J'ai remarqué cela dans votre vidéo. Il faut savoir que ce que j'ai

 27   filmé n'a aucune valeur professionnelle, seulement historique. Même dans

 28   les premières séquences brutes, vous avez vu plusieurs arrêts sur image qui

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  1   n'ont rien à voir les uns avec les autres, je ne pense pas que vous pouvez

  2   établir un lien, vous allez les présenter comme s'il s'agit de plusieurs

  3   années, il a fallu monter tout cela.

  4   Q.  Bien. Donc, en fait --

  5   R.  C'est ce que j'ai pu voir alors que nous sommes passés en voiture à

  6   bord de ce véhicule. Nous ne nous sommes pas arrêtés.

  7   Q.  Donc, M. Borovcanin a essayé de censurer ce que vous étiez en train de

  8   filmer et vous a demandé de filmer cela ou de ne pas filmer ceci ou cela,

  9   ou est-ce que vous étiez complètement libre et indépendant de filmer ce que

 10   vous vouliez ?

 11   R.  Ecoutez, on en vient à la question que je souhaitais évoquer. Est-ce

 12   que vous pensez vraiment que quelqu'un de censé autoriserait un journaliste

 13   à filmer des crimes de guerre et de lui laisser la vie sauve ? Est-ce que

 14   vous pensez vraiment que ce serait normal que je sois assis ici aujourd'hui

 15   si ceci s'était passé ainsi ? Par exemple, cette guerre récente en Irak.

 16   Est-ce que vous avez jamais vu quelqu'un filmer quelque chose à partir de

 17   2003, et quelque chose de ce genre ? Avez-vous jamais vu un journaliste, et

 18   surtout un qui fait partie d'une unité de l'armée, filmé ce genre de chose

 19   ? Donc, pourquoi cette armée aurait-elle réagi différemment ? Toutes les

 20   règles au sein de toutes les armées sont les mêmes. Donc, il m'a autorisé à

 21   travailler -- à faire mon travail, et je n'avais aucune raison de ne pas

 22   dire la vérité. Ceci, bon, faisait que cette personne m'a autorisé à

 23   filmer. Peut-être que d'autres ne m'auraient pas autorisé à filmer. C'était

 24   simplement une question de respect mutuel entre nous.

 25   Q.  Je comprends, je crois, votre réponse. Maintenant, pour élucider

 26   certaines choses, vous avez parlé de filmer des crimes de guerre. Dans

 27   votre esprit, puisque vous utilisez ce terme, est-ce que c'est ce que vous

 28   étiez en train de filmer devant l'entrepôt ce jour-là, des crimes de

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  1   guerre, l'entrepôt de Kravica ?

  2   R.  Sur la base des deux ou trois secondes de séquences que j'ai pu filmées

  3   pendant que la voiture passait à côté de ce bâtiment, ce n'est, bien

  4   entendu, pas une situation normale de voir une vingtaine de - je ne sais

  5   pas si vous avez pu compter le nombre par le zoom, mais je pense qu'il

  6   s'agissait d'environ une vingtaine. Je n'ai pas pu réfléchir à la chose à

  7   l'époque. J'ai réfléchi beaucoup plus après. C'était l'une des images de

  8   mon reportage et je ne pouvais pas me permettre d'avoir des émotions. Il

  9   fallait que je reste en vie, que je revienne à Belgrade, au studio B, que

 10   je fasse le montage, que je fasse mon reportage, grâce auquel vous avez

 11   désormais ce document. Je ne suis pas superman.

 12   Q.  Bien entendu, je n'entendais pas par là vous critiquer.

 13   R.  D'ailleurs, je ne l'ai pas pris comme une critique.

 14   Q.  Ce que je vous ai posé comme question, c'est que vous avez utilisé le

 15   terme "crimes de guerre". Sans parler du moment où vous avez filmé les

 16   cadavres, mais, actuellement, quand vous utilisez le terme "crimes de

 17   guerre," est-ce que vous parlez de ce que vous avez filmé là-bas ? Est-ce

 18   que vous êtes en train de dire que vous avez filmé des crimes de guerre ou

 19   pas ?

 20   R.  D'après la théorie, ça ressemblerait à un crime de guerre peut-être,

 21   mais en tout cas ça a eu lieu pendant les opérations. Je ne sais pas, si

 22   j'avais été le commandant à l'époque les choses auraient été différentes.

 23   Q.  Pour autant que vous vous souvenez, puisque vous vous n'êtes pas

 24   arrêtés - vous nous l'avez dit - vous vous êtes rendu où ? Je vais

 25   reformuler ma question. Est-ce que vous avez demandé à

 26   M. Borovcanin si vous pouviez vous arrêter pour filmer ce qui se passait,

 27   puisqu'il n'avait pas l'intention de vous censurer ?

 28   R.  Je ne me souviens pas d'avoir posé une telle question. La raison pour

Page 18808

  1   laquelle nous avons emprunté ce chemin à ce moment précis, c'est que nous

  2   nous rendions au centre médical à Bratunac. Je ne sais pas [imperceptible]

  3   jamais parlé. Je ne me souviens pas d'avoir parlé de cet événement. Je sais

  4   que la raison principale pour laquelle nous nous rendions à Bratunac, c'est

  5   cette question concernant l'officier dont nous venons de parler. Je ne me

  6   souviens pas d'autre chose à ce propos.

  7   Q.  Lorsque vous avez vu cet amoncellement de cadavres alors que vous

  8   filmiez, qu'est-ce que vous avez dit à M. Borovcanin concernant ce que vous

  9   veniez de capter heureusement avec votre caméra ?

 10   R.  Vous entendez par là quelque chose que j'aurais dit à

 11   M. Borovcanin et qui a été enregistré. Donc, je ne me souviens pas

 12   actuellement ? Je ne sais pas de quoi vous parlez.

 13   Q.  C'est toujours si vous vous en souvenez. Si vous vous souvenez, est-ce

 14   qu'il y a eu une conversation quant à ce que vous voyiez alors que vous

 15   vous rendiez en direction du centre médical de Bratunac ?

 16   R.  Je ne me souviens pas.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Lazarevic.

 18   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je ne [imperceptible] peut-être pas, mais

 19   cela a déjà été demandé et déjà répondu. Nous n'en avons jamais parlé avec

 20   ce témoin. On le voit à la page 56, ligne 17.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez raison.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Mon collègue à tout à fait raison. Cela m'a

 23   échappé. Je suis désolé.

 24   Q.  Pourquoi vous n'en avez jamais parlé avec M. Borovcanin ? Est-ce qu'il

 25   y a une raison précise pour laquelle vous avez évité le sujet ?

 26   R.  Non. Nous parlons ici après les faits. Est-ce que vous savez ce que

 27   cela veut dire une opération en cours ? Cela veut dire qu'une guerre est en

 28   train de se dérouler, qu'il y a des combats, et c'est une conversation

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  1   qu'on pourrait avoir éventuellement, une fois que tout est terminé, que

  2   vous analyser les événements au QG, où vous racontez des anecdotes

  3   concernant la guerre. Il y en avait plein de ces événements à l'époque. Ce

  4   qu'il y avait de plus important pour moi à l'époque, c'est qu'en tant que

  5   journaliste j'étais une cible facile, et donc, il était tout à fait naturel

  6   que je me soucie davantage de m'échapper -- de survivre que de faire de la

  7   conversation. Cela peut vous paraître un petit peu dur peut-être, mais la

  8   guerre est une chose terrible. Tout le monde vous dira que quand on voit un

  9   cadavre, c'est quelque chose d'horrifiant et d'inacceptable, et je pense

 10   que nous sommes d'accord là-dessus.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, désolé de vous

 12   interrompre, mais pour être parfaitement clair, quelque chose m'a peut-être

 13   échappé, mais est-ce que vous pouvez demander au témoin s'il a remarqué

 14   qu'il y avait un amoncellement de cadavres indépendamment de tirs ?

 15   M. NICHOLLS : [interprétation]

 16   Q.  Vous pouvez répondre à la question, Témoin ?

 17   R.  Cette séquence ne dure que deux ou trois minutes -- ou plutôt,

 18   secondes. Maintenant, en y réfléchissant, je regardais tout cela à travers

 19   la caméra. Je voyais, mais c'est tout à fait différent quand vous voyez les

 20   choses au ralenti. Il faut être au courant de la vitesse d'enregistrement à

 21   l'époque. Il faut se souvenir que ça a eu lieu en un instant, en une espace

 22   de temps très, très petit. Puis ensuite, il y a eu d'autres scènes. Toute

 23   la route qui mène à Bratunac n'était pas du tout sûre. Il y avait des tirs

 24   des Musulmans, des tirs des Serbes, des Musulmans qui tiraient sur des

 25   Musulmans qui se rendaient. C'était le chaos. C'était de la folie.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que ma question est assez

 27   simple, en fait. Est-ce que vous vous souvenez d'avoir vu ces cadavres à

 28   l'époque ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'y ai pas réfléchi de cette manière-là.

  2   Oui, je l'ai vu en l'espace de deux secondes. J'ai dû l'enregistrer. Je le

  3   voyais à travers l'optique de la caméra, mais pendant deux secondes à

  4   peine.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation]

  7   Q.  Je vais vous poser une autre question -- non, je me reprends. Où vous

  8   êtes-vous rendu ? Où avez-vous passé la nuit du 13, c'est-à-dire la nuit

  9   après la journée dont nous venons de parler concernant la vidéo ?

 10   R.  Dans l'appartement dans lequel séjournait M. Borovcanin à Bratunac,

 11   quelque part au centre. Je ne sais pas exactement la rue ni le bâtiment

 12   maintenant. Il s'agirait d'un de ces bâtiments sociaux réalistes, comme on

 13   les appelait. Ils comportaient plusieurs étages. Mais, en tout cas, c'était

 14   chez lui. C'était l'appartement où, officiellement, il résidait à l'époque.

 15   Je ne sais pas si celui-ci lui appartenait.

 16   Q.  Est-ce que vous vous souvenez pendant votre entretien, je vous ai

 17   montré -- ce que vous a montré M. Borovcanin, du moins dans l'entretien que

 18   je vous ai montré la partie concernant le fait que la voiture a été arrêtée

 19   ?

 20   R.  Je pense qu'il se trompe. Il n'y a pas eu de censure. J'ai tout filmé;

 21   sinon, si a situation avait été différente, nous serions arrêtés et, en

 22   tout cas, il serait agi des images les plus puissantes que j'aurais pu

 23   tourner parce que j'avais seulement trois morts au centre-ville de

 24   Srebrenica. Et puis ce seul Musulman qui était parmi les Musulmans qui

 25   était dans le pré, donc, j'avais quatre cadavres. Cela aurait été très

 26   intéressant. Si on s'était arrêté la chose aurait été très différente.

 27   Q.  Maintenant, quand vous vous trouviez avec M. Borovcanin à Bratunac,

 28   est-ce que vous avez parlé de ce que vous aviez vu pendant la journée, ce

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  1   que vous aviez filmé à Potocari, les bus, les personnes qui se rendaient,

  2   le Pat, et cetera ?

  3   R.  Je peux conter, plutôt, sur le texte de l'entretien pas à ma mémoire

  4   car j'étais fatigué et stressé par ce que j'avais vécu pendant la journée.

  5   Si vous regardez le texte, c'est également important parce qu'à travers mes

  6   différentes sources d'information, j'avais réussi à avoir une vue générale

  7   des événements telles qu'elles se sont produites le 11 quand les Serbes

  8   sont rentrés à Srebrenica. Donc, certaines de ces choses je ne peux pas

  9   vous dire exactement lesquelles dans le texte final, mais je lui ai demandé

 10   de m'expliquer certaines de ces choses en termes militaires, et c'est très

 11   intéressant, c'est un peu comme on regardait un film, voir comment se

 12   déroule une opération. Je sais que les lecteurs en général sont intéressés

 13   par ce genre de chose et c'était la seule description à l'époque qu'on ait

 14   pu trouver dans les médias, que ce soit chez nous ou au niveau

 15   international, du moins si détaillée. Ce qui m'a un peu semé la confusion

 16   dans mon esprit c'est que 1 800 Serbes auraient pu prendre le dessus par

 17   rapport à 10 000 Musulmans armés qui avaient des armes de pas très bonne

 18   qualité. Mais, en tout cas, chaque fusil peut tuer. Comment se fait-il

 19   qu'il n'y a pas eu de résistance ? Maintenant, on voit dans la presse à

 20   Sarajevo que nous avons un certain nombre de réponses d'un des colonels de

 21   Srebrenica.

 22   Q.  Pour revenir à ma question, vous avez parlé de la façon dont s'est

 23   déroulée l'opération; c'est ça que vous avez débattu à Bratunac ?

 24   R.  Ce soir-là, j'ai appris certaines choses qui sont dans le texte de lui,

 25   je ne peux pas vous dire ce qui provenait de lui et ce que j'ai pu

 26   recueillir plus tard à Belgrade. Ce que je peux dire c'est que la structure

 27   de base du texte est quelque chose que j'ai pu glaner grâce à lui. La façon

 28   dont les Serbes ont attaqué, de quel côté, comment les Musulmans se sont

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  1   défendus ?

  2   Q.  Vous avez déjà dit que vous n'avez pas parlé ni des cadavres ni des

  3   personnes qui se trouvaient devant l'entrepôt de Kravica, à savoir le clip

  4   que nous avons vu, vous nous avez dit que c'était les images les plus

  5   puissantes que vous n'ayez jamais pu filmer; est-ce que vous pouvez nous

  6   dire pourquoi vous n'en avez pas parlé avec lui ?

  7   R.  Je n'ai pas bien compris ce que vous venez de dire. Je ne l'ai pas

  8   mentionné.

  9   Q.  Avec M. Borovcanin à Bratunac, le 13 au soir ?

 10   R.  Le fait qu'il s'agissait des images très puissantes c'est quelque chose

 11   que nous ne savons que maintenant. Décembre 2007, derrière moi j'ai 20

 12   années de reportages de guerre. Je ne peux pas vous dire pourquoi je n'ai

 13   pas parlé de ces choses-là avec lui. On m'a permis de faire ce film et

 14   c'était une preuve de respect mutuel. Bien entendu, vous serez d'accord

 15   nous pour dire que j'aurais pu monter une scène en présence de nous deux,

 16   pourquoi je n'ai pas incluse ? Il m'a peut-être dit : "Pourquoi vous avez

 17   filmé ci ou

 18   ça ?" Mais c'est moi qui ai fait le montage et il y a tout là-dedans et

 19   vous avez tout là-dedans grâce également à M. Borovcanin, et je crois que

 20   cela mérite d'être dit clairement.

 21   Pour autant que je sache, il était en bonne santé à la fois physique

 22   et mental parce qu'autrement seul un fou travaillerait contre ses propres

 23   intérêts et permettrait qu'on filme des choses alors que vous savez très

 24   bien que les gens de chez vous vont faire quelque chose d'inconvenable ou

 25   qu'ils vont tuer quelqu'un. C'est tout à fait normal que je vous le dise.

 26   Je pense que c'est quelque chose de très rare de permettre à quelqu'un de

 27   faire -- de procéder de la sorte même dans l'armée américaine.

 28   Q.  Avez-vous vu la vidéo d'exécution des Skorpions ?

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  1   R.  Oui. Il s'agit là de la séquence qui m'avait été, en fait, attribuée à

  2   Belgrade, et je voulais d'ailleurs vous le dire, le témoignage de M. Ruez a

  3   été allé jusqu'il a même indiqué que j'étais l'un des auteurs et qu'on

  4   m'avait donné des grandes sommes d'argent pour que je vende cette séquence

  5   à Mme Kandic. C'est la première fois que j'entendais parler de ce groupe.

  6   Cela n'a rien à voir ni avec l'armée ni avec la police. Puisqu'on connaît

  7   la Brigade de la Police, ces personnes auraient été arrêtées si on les

  8   avait vu.

  9   Q.  Les hommes dans cette séquence; est-ce qu'ils avaient un problème pour

 10   filmer avant qu'ils ne furent tués ?

 11   R.  Avant d'être tués ?

 12   Q.  Oui.

 13   Ce n'était pas juste quelqu'un qui passait. Est-ce qu'ils avaient des

 14   problèmes à filmer ?

 15   R.  Je ne vous comprends pas.

 16   M. LAZAREVIC : [interprétation] Ce n'est pas vraiment une objection.

 17   J'aimerais savoir si mon collègue se réfère au film des Skorpions ou s'il

 18   s'agit d'une situation où on fait appel à la spéculation ?

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois que je sais où il veut en

 20   venir, Monsieur Nicholls, mais peut-être vaudrait mieux que vous

 21   reformuliez votre question.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Bien.

 23   Q.  Les Skorpions -- la vidéo des Unités de Skorpions, qui a été montrée

 24   lors d'une affaire à Belgrade et qui montraient des Musulmans qui se

 25   faisaient massacrer, c'est de cette vidéo-là que je parle. Est-ce que vous

 26   me comprenez ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Avez-vous vu cette vidéo ?

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  1   R.  Oui, de nombreuses fois. Les médias nous ont bassinés en quelque sorte

  2   avec cette séquence pendant des jours et des jours.

  3   Q.  Vous avez dit que personne ne serait aussi fou que de permettre à ce

  4   qu'un crime de guerre soit filmé et qu'en est-il des hommes qui étaient

  5   dans cette vidéo ?

  6   R.  Je vais vous le dire clairement.

  7   M. LAZAREVIC : [interprétation] Il me semble que mon éminent collègue fait

  8   des comparaisons un peu malheureuses entre ces deux choses. Je ne veux pas

  9   mener mes arguments devant le témoin.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Peut-être qu'il fait une comparaison.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, je vais continuer, peu importe.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation]

 14   Q.  Je vais lui poser une question concernant autre chose. Est-ce que vous

 15   vous souvenez si vous avez fait une promenade dans Bratunac quand vous y

 16   trouviez ?

 17   R.  Oui, tout à fait dans le centre de la rue principale.

 18   Q.  Tout seul ou avec M. Borovcanin qui était avec vous ?

 19   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, j'étais obligé d'être toujours avec lui;

 20   sinon, j'aurais pu être arrêté par les militaires car les journalistes

 21   n'avaient pas le droit de rentrer. L'opération était toujours en cours.

 22   J'ai eu l'occasion de passer quelques instants au centre tout seul, peut-

 23   être quelqu'un m'a suivi de loin, je ne sais pas. Je veux dire c'était une

 24   situation de guerre. C'était un tout petit endroit. Beaucoup de gens

 25   devaient savoir que j'étais journaliste, et beaucoup de gens ne me

 26   connaissaient pas simplement Bratunac, mais également dans toute la

 27   Yougoslavie. J'étais un journaliste connu. Je ne sais pas combien de temps

 28   j'ai passé tout seul au centre de Bratunac mais néanmoins j'ai passé

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  1   quelques temps tout seul sans lui.

  2   Q.  Est-ce que vous avez entendu du stade pendant cette conversation ?

  3   R.  J'ai commencé à entendre parler du stade quand je suis revenu à

  4   Belgrade, pas avant. A propos de l'école avec un millier de personnes, je

  5   ne sais pas combien qui aurait été tué, et ce jour-là, j'ai remarqué

  6   l'humeur des gens. Il y avait très peu de troupes serbes pour autant que je

  7   me souvienne. La plupart d'entre eux étaient partis en direction de Zepa,

  8   le jour précédent. Beaucoup de prisonniers sont arrivés pour autant que je

  9   me souvienne, la population était préoccupée, avait peur que ces personnes

 10   puissent s'enfuir du stade, ce qui peut redonner lieu à des problèmes très

 11   graves. C'est la situation qu'ils craignaient et je crois que je l'ai noté

 12   à l'époque. En tout cas, je l'ai dit plus tard, mais je ne m'en souviens

 13   pas exactement. Ce n'est que quand je suis revenu à Belgrade le 21 juillet,

 14   j'ai le papier ici devant mes yeux, c'est pour cela que je l'ai emmené. Ce

 15   sont mes notes où il est marqué -- a écrit un texte sous le titre,

 16   d'ailleurs, ça a été publié le 21 juillet.

 17   A l'époque, il avait beaucoup plus de liberté que moi à Bratunac. Ce

 18   qui est un peu bizarre car il était un Anglais. J'aimerais beaucoup savoir

 19   qui lui a donné l'autorisation de se promener librement alors que moi

 20   j'étais menacé d'arrestation. C'est lui qui a lancé les premières

 21   allégations selon lesquelles il y avait des crimes à échelle, à très grande

 22   échelle. C'est lui qui avait parlé également des camps en Bosnie deux ans

 23   avant.

 24   Q.  Je vais vous poser une autre question. Que craignait la

 25   population de Bratunac, qui pouvait sortir du stade ?

 26   R.  Il s'agissait des Musulmans emprisonnés, détenus, car ils étaient

 27   beaucoup plus nombreux que les Serbes armés dans la ville. Ce n'est pas une

 28   ville, c'est un bourg, et je me souviens bien de cette crainte chez les

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  1   gens.

  2   Q.  Je veux être tout à fait sûr, et ensuite, on pourrait regarder

  3   votre déclaration, si vous en avez besoin. Cette crainte que vous avez

  4   constatée chez les gens, c'est quelque chose que vous avez constaté pendant

  5   votre promenade ce soir ?

  6   R.  Ce soir-là, j'étais dans l'appartement et je ne me suis pas

  7   promené dans la ville près des opérations de guerre. Mais je m'y suis

  8   promené le jour et j'ai vu beaucoup des affiches, des annonces de décès,

  9   quelque chose qu'on ne voit pas en occident. Des annonces affichées,

 10   c'était le 14. Je pouvais voir que beaucoup de ces gens étaient des Serbes.

 11   Ce sont des Serbes qui avaient été tués et ça, c'est mis dans mon texte. On

 12   pouvait voir donc ces affichages de décès sur les troncs d'arbre, sur les

 13   portes des magasins. C'est quelque chose dont on ne parle pas souvent.

 14   Q.  Est-ce que vous êtes sûr de la date 13 ou 14, que c'est à ce

 15   moment-là que vous avez fait cette promenade ?

 16   R.  C'était en plein jour. Donc, pendant la journée.

 17   Q.  En plein jour, c'était le 13 ou le 14 que vous avez fait votre

 18   promenade dans Bratunac et que vous avez constaté cette crainte qu'avaient

 19   les personnes concernant l'éventuelle fuite des prisonniers du stade ?

 20   R.  Je vais revenir un petit peu en arrière. Le 13, nous étions en train de

 21   filmer environ 16 ou 17 heures, et je pense que c'était le 14, soit avant

 22   ou après nous être rendus à Srebrenica. Donc, je ne me souviens pas de

 23   m'être promené à Bratunac, le premier jour mais plutôt le deuxième jour.

 24   J'essaie de reconstituer l'heure. Le premier jour je suis arrivé à 15

 25   heures 30, nous avons continué à filmer pendant le reste du jour, donc il

 26   ne peut s'agir que du 14, soit avant soit après nous être rendus à

 27   Srebrenica parce que, ce jour-là, je ne filmais que Srebrenica.

 28   Q.  Vous êtes rendu directement depuis là où vous avez vu les cadavres

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  1   devant l'entrepôt de Kravica et avoir filmé cette séquence jusqu'à

  2   l'hôpital à Bratunac, et ensuite, est-ce que vous êtes revenu sur le

  3   terrain ou êtes-vous resté à Bratunac ?

  4   R.  Pour autant que je m'en souvienne, nous ne sommes plus sortis de

  5   Bratunac, ce jour-là. On n'aurait pas eu d'intérêt parce qu'il faisait déjà

  6   noir, les opérations étaient en cours, qu'est-ce que j'aurais pu filmer

  7   avec ma petite caméra. La seule chose que j'aurais pu gagner c'est d'être

  8   tué.

  9   Q.  Je vous pose maintenant cette question parce que dans votre déclaration

 10   il y avait une confusion quant à la date, et maintenant je veux savoir

 11   pourquoi vous êtes sûr que c'est le 13. Je peux vous montrer la partie de

 12   la déclaration concernée.

 13   R.  Parce que vous m'avez obligé pendant tous ces mois à essayer de me

 14   souvenir de toutes ces choses que j'avais essayées de réprimer jusque-là.

 15   Alors, quand j'essaie de me remémorer le calendrier, la chronologie de ce

 16   jour, cela semble plus logique, mais je ne suis pas à 100 % sûr, de toute

 17   façon, cela n'aurait eu aucune influence sur les événements que j'ai pu --

 18   dont j'ai pu être le témoin.

 19   Q.  Non, je ne suis pas préoccupé par la date, mais alors que vous étiez à

 20   Bratunac le 13 ou le 14, quelle que soit la date; est-ce que vous vous

 21   souvenez d'avoir vu un camion qui traversait la ville et qui vous a frappé

 22   ?

 23   R.  Oui, c'est quelque chose qui m'a frappé particulièrement. Je crois

 24   qu'il s'agissait d'un FAP, un camion fabriqué localement, et je crois qu'il

 25   y avait des cadavres dans ce camion. Je l'ai vu depuis la rue. J'étais sur

 26   le trottoir à côté d'un magasin. Je ne me souviens pas exactement où et il

 27   se rendait quelque part, je ne sais pas exactement. Il provenait d'une

 28   direction que je ne connaissais pas et à continuer dans une direction qui

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  1   ne m'était pas connue. C'était au milieu de la journée. Je le sais parce

  2   qu'il y avait également cette impression qui s'est combinée avec ces

  3   affichages annonçant des décès sur les arbres et sur les magasins. Je

  4   pouvais les voir, ils étaient surtout des Serbes, des jeunes hommes.

  5   Quelque part les deux choses se sont amalgamées dans mon esprit.

  6   Q.  Donc, dans votre esprit, quelle était l'ethnicité, l'appartenance

  7   ethnique des cadavres se trouvant dans le camion si vous aviez à l'époque

  8   émis un jugement à cet égard ?

  9   R.  On ne peut conclure simplement que c'étaient des Musulmans. Il n'y

 10   avait rien de précis indiquant leur appartenance ethnique sur leurs

 11   cadavres. Ce fut un court instant pendant lequel j'ai vu ce camion. J'ai vu

 12   des cadavres, je ne sais pas combien mais on les voyait, peut-être qu'ils

 13   étaient recouverts, mais on pouvait voir certaines parties de leurs corps

 14   et des bottes de militaires.

 15   Q.  Merci. Maintenant, passons à autre chose. Toujours à propos de ces deux

 16   journées, je parle de Milan Lukic; n'avez-vous jamais vu Milan Lukic

 17   pendant ces deux journées ? Est-ce que vous, personnellement, vous l'avez

 18   vu pendant ces deux journées, 13 ou 14 juillet, comme vous vous trouviez

 19   dans la région ?

 20   R.  Quand je suis revenu à Belgrade, je prenais mon petit-déjeuner dans un

 21   restaurant et j'ai vu plusieurs officiers de la police avec Borovcanin, et

 22   même des membres de l'armée peut-être. En tout cas, je me souviens de ce

 23   personnage, Lukic, et c'est comme ça qu'il a fini par apparaître dans le

 24   texte. Mais Lukic, c'est un nom de famille très courant, mais je ne sais

 25   pas qui est ce personnage -- cette personne qui se nomme Lukic.

 26   Q.  Est-ce que nous parlons véritablement du même Milan Lukic ? Moi, je

 27   vous parle du Milan Lukic qui a fait l'objet d'un acte d'accusation.

 28   R.  Je ne pense pas qu'il s'agisse de la même personne. En tout cas,

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  1   quelque soit le Lukic en question, je ne les connais pas. Si vous pensez à

  2   un Lukic particulier, sans doute vous parlez de celui qui a essayé de fuir

  3   et de se rendre en Argentine, pour autant que je sache.

  4   Q.  Est-ce que vous avez vu cet homme, celui-là dont il s'agit, est-ce que

  5   vous l'avez vu le 13 ou le 14 juillet ?

  6   R.  Peut-être dans ce restaurant dont je vous ai parlé. Je ne sais pas si

  7   c'est le même Lukic, mais, en tout cas, c'était un Lukic. En tout cas,

  8   Milan Lukic ne faisait pas partie des Unités de Borovcanin. Il est

  9   originaire de notre région, Visegrad, je crois, et ici, on parle de

 10   Srebrenica, et il n'avait rien à voir avec Srebrenica. Je réfléchis.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 12   Juges, j'en ai presque terminé.

 13   Q.  A quelle heure êtes-vous allé dormir dans l'appartement de

 14   M. Borovcanin ?

 15   R.  Vous voulez dire avant que je ne parte à la maison ?

 16   Q.  Non, je parle de la première nuit, la nuit du 13.

 17   R.  Cette partie-là du récit est quelque peu vague. Je ne peux pas vous

 18   dire à quel moment je me suis couché et quel moment je me suis réveillé.

 19   C'était après le tournage. Pour un journaliste, ce ne sont pas des choses

 20   importantes, ce n'est pas du tout pertinent.

 21   Q.  Très bien. Si vous ne vous en souvenez pas, je comprends; cela va. Mais

 22   cette nuit-là, lorsque vous êtes allé de Potocari à Konjevic Polje, est-ce

 23   que vous avez revisionné l'enregistrement pour voir ce que vous aviez pris,

 24   si tout va bien ?

 25   R.  Moi personnellement, oui, c'est tout à fait logique. Quoique je n'ai

 26   pas souvenu. Vous savez, on ne regarde jamais ce que l'on fait avant de

 27   tout terminer. Je n'ai pas ce réflexe. Lorsque vous êtes dans une équipe,

 28   ce sont les [imperceptible] du montage, les monteurs qui regardent cela. Ce

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  1   n'est pas nous. Normalement, j'étais avec les journalistes, et normalement,

  2   ce sont les monteurs qui montent le tout dans la soirée. J'ai peut-être

  3   jeté un coup d'œil, peut-être pas. Je ne sais pas. Mais pour moi, ce

  4   n'était pas du tout important.

  5   Q.  Merci. Fort bien. Vous ne vous souvenez pas si

  6   M. Borovcanin a regardé la cassette non plus ?

  7   R.  Non. Mais il n'était pas intéressé par le fait de contrôler quoi que ce

  8   soit. Je vais le répéter de nouveau, ce n'était pas du tout sa

  9   préoccupation principale. Les opérations étaient en cours. Ses hommes

 10   mourraient sur le champ de bataille et d'autres personnes perdaient la vie,

 11   des enfants, et cetera. Il connaissait tout le monde. Il était de cette

 12   région. Il était originaire de ces villes-là. Il sait que j'étais un

 13   professionnel et il m'avait laissé libre cours, à mon imagination. Il m'a

 14   permis de faire mon travail sans vérifier ce que je faisais.

 15   Q.  Très bien. Merci. Répondez, je vous prie, par un oui ou par un non pour

 16   ce qui est de la prochaine question, si vous le savez. Vous avez dit que

 17   les hommes de M. Borovcanin étaient en train de se faire tuer ce jour-là.

 18   Est-ce que vous aviez un chiffre ? Est-ce que M. Borovcanin vous avait

 19   parlé du nombre de personnes qui avaient péri ce jour-là ?

 20   R.  Je ne me souviens pas du tout, mais ce qui est important c'est la scène

 21   que j'ai vue au centre, lorsque les -- d'après les vitrines et les arbres,

 22   on pouvait voir le tout. Quand il y a une mort, il n'est pas tellement

 23   important de savoir s'il était un militaire ou un civil, mais il est

 24   certain que de jeunes personnes avaient trouvé la mort, et c'est toujours

 25   désagréable dans chaque armée, surtout si vous connaissez ces personnes.

 26   Cela ajoute du stress.

 27   Q.  Bien. Alors, passons maintenant rapidement à la journée du 14 juillet.

 28   Où êtes-vous allé ce jour-là avec M. Borovcanin ? Essayez de nous dire tout

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  1   ceci de façon assez succinct. Il n'est pas nécessaire d'entrer en détail,

  2   mais dites-moi simplement si vous pouvez nous dire où vous étiez. Est-ce

  3   que le chauffeur est venu ?

  4   R.  Vous voulez que je vous parle de Srebrenica ? C'était un sujet très

  5   intéressant. On en parlait pendant des années. Donc, j'ai trouvé avec

  6   Ljubisa une manière d'y aller, et le ministre de la police nous a suivis.

  7   C'est toujours une situation importante. Lorsque vous êtes un journaliste,

  8   c'est bien de pouvoir aller tourner avec les personnes importantes. Donc,

  9   j'étais plutôt concentré sur Srebrenica et la partie qui s'appelle Zeleni

 10   Jadar.

 11   Q.  Merci. Vous souvenez-vous du nom du ministre de l'Intérieur, le

 12   ministre de la police, si vous voulez ?

 13   R.  Oui, Tomo Lukac, Tomislav Tomo Lukac. C'est quelqu'un de très connu. En

 14   fait, voilà, c'est Tomo Lukac, et peut-être pas Tomislav. Je dois me

 15   corriger.

 16   Q.  Qu'en est-il de Tomo Kovac ?

 17   R.  Je sais qui est cette personne. Je l'ai déjà rencontrée dans la vie

 18   auparavant. Je l'ai déjà vu au début de la guerre avec l'équipe, là où il y

 19   avait le chef de la police, en périphérie de Sarajevo. Tout comme les

 20   autres me connaissaient, j'étais quelqu'un de connu parce qu'on me voyait à

 21   la télé, on voyait mes articles dans les journaux, donc, j'étais une

 22   personnalité connue.

 23   Q.  Très brièvement, et de nouveau, j'aimerais vous rappeler que les Juges

 24   ont examiné l'ensemble de votre matériel cru que vous nous avez donné au

 25   cours de ces derniers jours, et ils ont également visionné le filme que

 26   vous avez tourné le 14 juillet à Srebrenica et la partie où vous avez

 27   interviewé des Serbes revenant. Vous montrez un chien à côté des corps.

 28   Alors, est-ce que vous étiez seul ?

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  1   R.  J'étais complètement seul et libre. C'est la rue principale de

  2   Srebrenica. C'est la rue principale. Donc, vous tournez à gauche et à

  3   droite, et au sommet de cette rue - si je me souviens bien de la scène,

  4   c'était très émouvante -- il y avait deux ou trois cadavres, un petit chien

  5   à côté d'eux dans ce silence de mort. Il y avait également à côté un

  6   magasin à rayon qui avait brûlé, non pas à ce moment-là, mais dans une

  7   autre opération, et c'était une ceinture qui avait brûlé de 200 mètres de

  8   périmètre et il était absolument -- il n'était pas nécessaire que l'on me

  9   suive. Les Serbes provenaient, je les interviewais. Ni Martin Bell et

 10   Christiane Amanpour, on ne les dérange pas lorsqu'ils sont sur le terrain

 11   pour filmer. La situation était pareille pour moi.

 12   Q.  Je comprends, mais après avoir tourné ces séquences, vous avez rejoint

 13   M. Borovcanin de nouveau et vous êtes allé en direction de Zeleni Jadar ?

 14   R.  Nous avons suivi un ministre qui faisait le tour du terrain. Il y avait

 15   plusieurs bâtiments qui étaient détruits. Il y avait également l'usine qui

 16   produisait le bois. Il devait réorganiser la vie et faire en sorte que tout

 17   revienne à la normale, et personne ne m'a dit de ne pas tourner. Tout ce

 18   que j'ai tourné on m'a laissé faire. On m'a laissé tourner mon film et on

 19   ne m'a pas confisqué mes séquences non plus.

 20   Q.  Je souhaiterais que l'on examine la page 66 de 1986 [comme interprété],

 21   pour ce qui est du numéro du document, ou 64 et 65. Voilà. Ceci est une

 22   scène de votre vidéo, n'est-ce pas, vous avez parlé d'un magasin à rayon

 23   qui était tout près de là ?

 24   R.  Oui, le magasin à rayon était juste devant nous. C'est le bâtiment, si

 25   je me souviens bien, un bâtiment énorme.

 26   Q.  D'accord. Merci.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 28   Juges, il n'y a rien de particulièrement important sur la séquence mais je

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  1   ne sais pas si vous voulez prendre la pause.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons prendre une pause, mais

  3   avant la pause, nous aimerions voir de nouveau la séquence où on voit les

  4   corps empilés, et nous aimerions que l'on commence le visionnage un peu

  5   avant et un peu après la séquence des cadavres.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Aimeriez-vous que l'on fasse ceci maintenant

  7   ?

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, maintenant, et ensuite, on prendre

  9   la pause.

 10   M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien. Merci. C'est donc le documentaire

 11   de studio B qui porte le numéro 2011.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas au ralenti.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, oui, bien sûr.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avec le son, s'il vous plaît. C'est

 15   très important.

 16   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons commencer

 17   le visionnage à 17:16:5.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 20   "Ces personnes retournaient dans leurs demeures pour voir ce qui restait,

 21   ce qu'ils avaient laissé derrière. Il y a deux ou trois ans. De nouveau, la

 22   FORPRONU que vous voyez là c'est un énorme complexe de bâtiment et d'espace

 23   qu'ils occupaient et cela n'existe plus non plus. Maintenant, voici des

 24   images qui ressemblent à celles de la Deuxième Guerre mondiale des

 25   personnes sur des chevaux, des soldats sur des chevaux, la situation est

 26   surréaliste. Vous allez l'avouer, n'est-ce pas ?

 27   "Il y a des cadavres des Musulmans, des soldats musulmans et le mouvement

 28   des troupes qui revient pour reprendre ses positions."

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  1   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maintenant, merci. Nous avons vu ce que

  3   nous voulions voir.

  4   Nous allons prendre une pause de 25 minutes.

  5   --- L'audience est suspendue à 17 heures 42.

  6   --- L'audience est reprise à 18 heures 12.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Q.  On arrive presque à la fin de ma série de questions. Ce que je

 10   vais maintenant faire, c'est de vous demander de nous dire très brièvement,

 11   vous avez parlé du fait que vous vous êtes rendu à Srebrenica et vous étiez

 12   seul pendant quelque temps et d'après la vidéo vous étiez à Zeleni Jadar,

 13   et avec Borovcanin vous avez filmé la promenade dans l'usine détruite,

 14   ensuite dans la vidéo, on vous voit revenir en arrière à travers

 15   Srebrenica, Potocari en direction de Bratunac. Pouvez-vous nous dire

 16   comment cette journée-là s'est terminée, la deuxième journée ? Qu'est-ce

 17   que vous avez fait quand vous vous êtes rendu à Bratunac avec M. Borovcanin

 18   ?

 19   R.  Je suis resté au centre de la ville, pas très loin de l'appartement. Je

 20   ne sais pas exactement où j'étais. Ça avait quelque chose de psychologique

 21   quand vous savez que vous avez fait votre reportage, qu'il est complet.

 22   Puis il y a des moments où vous n'avez plus d'énergie, et à ce moment-là je

 23   n'en avais plus aucun souhait de m'éloigner du centre de la ville dont j'ai

 24   parlé tout à l'heure.

 25   Q.  Quand vous êtes revenu à Bratunac avec M. Borovcanin, est-ce que vous

 26   vous souvenez, jusqu'à ce soir-là, au moment où vous vous endormez dans

 27   l'appartement, est-ce que vous étiez avec M. Borovcanin ou est-ce que vous

 28   étiez parfois tout seul ?

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  1   R.  Je pense que pendant la nuit il était avec moi dans l'appartement.

  2   C'est ainsi en tout cas que je me souviens de cette chose-là.

  3   Q.  A partir du moment où vous êtes revenu à Bratunac dans la voiture

  4   jusqu'au moment dans la nuit où vous étiez ensemble dans l'appartement,

  5   est-ce que vous étiez ensemble pendant toute cette période ? Si vous vous

  6   souvenez. Evidemment si vous ne vous souvenez pas, ce n'est pas la peine.

  7   R.  Il n'y a pas eu d'événement particulier qui m'aurait peut-être permis

  8   de prendre mes repères. Nous avons passé la plupart de la journée là, et

  9   sans doute le jour se finissait. Je ne pouvais pas me déplacer, vous vous

 10   en souvenez. Il y avait des opérations en cours et il y avait des

 11   avertissements qui avaient été émis vis-à-vis des journalistes de Serbie et

 12   de partout ailleurs, à part Peter Block et que cette zone était hors

 13   limite. Evidemment, le collègue anglais devait avoir reçu un soutien plus

 14   important que celui de

 15   M. Borovcanin, ce qui lui a permis de rentrer.

 16   Q.  Peut-être il y aura une objection, mais d'après ce que j'ai compris, le

 17   matin du 15, le lendemain, vous êtes revenu en Serbie ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Environ à quelle heure êtes-vous parti de Bratunac ?

 20   R.  Le matin même pendant le petit déjeuner. Il fallait que je parte

 21   aussitôt que possible pour faire le montage. Il fallait que je m'y rende

 22   rapidement parce que l'une des premières nouvelles allait annoncer que le

 23   reportage devait être diffusé. Et il y a environ 200 kilomètres de là

 24   jusqu'à Belgrade via Valjevo. Donc il me semble que je suis parti

 25   immédiatement après le petit-déjeuner. Je ne sais pas si c'était très tôt,

 26   mais, en tout cas, c'était assez tôt. Je ne peux pas vous dire l'heure

 27   exacte.

 28   Q.  Ai-je raison de dire alors qu'il n'y a eu que les 15, 16 et 17, pour

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  1   mettre en place, faire le montage, faire les voix, et cetera pour votre

  2   documentaire ?

  3   R.  Oui, c'est ainsi que nous travaillions. Chez nous, on parle de notre

  4   travail en tant que partisans, car il fallait travailler dans des

  5   conditions telles qu'elles étaient. On a fait un travail chez nous qui

  6   aurait pris dix jours en occident, alors que nous, il nous a fallu 48

  7   heures. Cela, ça a bien marché. Il y avait deux monteurs dans le studio B

  8   qui se répartissaient le travail, avec un budget très, très limité. Par

  9   exemple, vous étiez obligé de sortir de la salle de montage parce qu'il n'y

 10   avait qu'une seule table de montage. Les conditions étaient assez

 11   difficiles, les conditions de travail pour moi. Evidemment, la qualité de

 12   la séquence était de piètre qualité, mais ce qui était important c'était

 13   l'authenticité de ces événements, et chez le public, cela a été à l'origine

 14   de vues très divergentes. Ni ceux de Bosnie, ni ceux de Serbie n'étaient

 15   satisfaits de ce que j'avais fait. D'ailleurs, j'ai reçu des menaces de

 16   mort dans la période qui a suivi.

 17   M. LAZAREVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, une partie de

 18   la réponse du témoin n'a pas été enregistrée au compte rendu. Cela concerne

 19   le fait qu'il avait travaillé sur les documents bruts, qui ont ensuite

 20   changé de mains à plusieurs reprises, et il a utilisé une expression,

 21   disons, très locale pour exprimer la chose. Peut-être il pourrait répéter.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que vous avez suivi, Monsieur

 23   Petrovic ? Auquel cas, répétez, s'il vous plaît.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il fallait que je travaille dans la hâte

 25   et dans des conditions extrêmement difficiles au montage, et j'ai utilisé

 26   le document que vous avez appelé les données brutes, la cassette brute. Je

 27   prenais les images sur ce document. Il fallait que je le fasse très

 28   rapidement. D'habitude, on devrait prendre une dizaine de jours pour le

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  1   faire, et il a fallu que je le fasse beaucoup plus vite, bien que la

  2   qualité des images n'était pas très bonne et généralement les stations de

  3   télévision ne les auraient pas diffusées. Si c'étaient eux qui en étaient

  4   chargés, ils auraient fait autrement.

  5   Q.  Bien. A quel point avez-vous participé au montage ? Vous avez parlé

  6   d'un monteur. Est-ce que vous lui avez laissé le document brut et ensuite

  7   vous êtes revenu pour voir ce qu'il avait fait ou avez-vous participé au

  8   choix des séquences, et cetera ?

  9   R.  Les deux choses sont vraies. Je ne sais pas comment ça s'est produit.

 10   Peut-être que l'un d'entre eux devait s'occuper d'autre chose et c'est

 11   l'autre qui est resté, mais, en tout cas, la maison avait deux monteurs -

 12   je ne me souviens pas de leurs noms, mais vous pouvez sans doute les

 13   trouver dans le générique. En tout cas, il faut donner quand même

 14   d'autonomie à ces techniciens. Par exemple, vous ne pouvez pas monter un

 15   cadre qui vous montre en train d'aller dans une direction puis en avoir un

 16   à la suite qui vous montre allant dans la direction opposée. Il y a

 17   certaines règles à respecter. Ils examinent la façon dont les séquences

 18   sont faites et ils peuvent changer pas mal de choses pendant le montage.

 19   C'est bien évidemment l'intention. Parfois, je n'avais plus le contrôle des

 20   documents parce qu'il fallait que je sorte de la salle de montage, car ils

 21   en avaient besoin pour faire leur diffusion de nouvelles normales. Alors,

 22   parce que la maison de télévision n'avait pas suffisamment d'appareils de

 23   montage et étant donné les circonstances, et bien, la cassette a échappé à

 24   mon contrôle, et ensuite elle a été donnée à beaucoup de journalistes

 25   internationaux pour qu'ils puissent la visionner.

 26   Q.  Je vous parle actuellement des 15 et 16 juillet jusqu'au moment où

 27   cette émission a été diffusée -- ce documentaire a été diffusé. Est-ce que

 28   vous vous souvenez d'en avoir parlé pendant l'entretien concernant qui

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  1   était avec le monteur, si oui ou non vous avez travaillé avec le monteur ?

  2   R.  Vous parlez de Schiller, le journaliste canadien ?

  3   Q.  Désolé, je vais reformuler la question. Vous avez parlé du montage et

  4   vous avez dit qu'il fallait le faire très rapidement alors qu'il aurait

  5   fallu dix jours, et vous n'avez pris que deux jours. Est-ce que vous vous

  6   souvenez que vous avez parlé de votre participation au montage juste avant

  7   de faire en sorte qu'il ait pu être diffusé le 17 ?

  8   R.  Aidez-moi, s'il vous plaît. Je ne sais pas très bien où vous voulez en

  9   venir.

 10   Q.  Page 105 de votre entretien. Cela peut-être pourra vous aider. Vous

 11   avez dit - mais ce n'était pas en réponse à une question - vous avez dit :

 12   "On ne peut pas compter sur ses propres documents de cette manière-là parce

 13   que ce que je vérifiais, je n'étais pas seul. J'étais avec le monteur qui

 14   était présent, et tout le reste. On a tout pris. On a pris les images. On

 15   ne savait pas combien de temps ça allait durer." Donc, il semblerait,

 16   d'après ce que vous avez dit, que vous travailliez avec un monteur et que

 17   vous étiez tous les deux ensemble.

 18   R.  Quand vous dites "edit" en anglais, vous voulez dire la personne qui

 19   fait le montage des images, qui les coupe et qui les rassemble; cette

 20   personne-là ? Oui, il y en avait deux en fin de compte, et il y avait une

 21   ambiance très sereine, et beaucoup de journalistes étrangers, qui sont

 22   venus voir, ne pouvaient pas croire que cette télévision fonctionnait de la

 23   sorte, avec les câbles qui étaient par terre, avec des gens qui allaient

 24   dans tous les sens et qui se démenaient. J'avais deux monteurs qui

 25   travaillaient avec moi, mais parfois ils étaient pris pour d'autres

 26   nouvelles, et cetera, sur lesquelles ils devaient travailler, et ils me

 27   faisaient sortir pour prendre un café. C'est ces circonstances-là qui

 28   prévalaient.

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  1   Q.  Encore une question que j'ai oublié de vous poser. Le matin du 15, à

  2   environ l'heure du petit-déjeuner et avant que vous partiez pour revenir en

  3   Serbie, avez-vous vu M. Borovcanin ce matin-là ? Etait-il présent dans

  4   l'appartement quand vous vous êtes levé et que vous vous êtes apprêté à

  5   partir ?

  6   R.  Oui, je me souviens. Je me suis rendu d'ailleurs au restaurant avec lui

  7   parce que c'est lui qui m'amenait à la frontière avec un chauffeur ou -- il

  8   me semble qu'il y avait un chauffeur, mais ce détail était peu important

  9   pour moi. En tout cas, nous nous sommes rendus au restaurant - je ne sais

 10   pas quel était ce restaurant à l'entrée de Bratunac - et puis, j'ai

 11   continué parce que la frontière est toute proche, à dix minutes à peu près.

 12   Q.  Donc, vous vous êtes séparé de M. Borovcanin près du même pont que vous

 13   avez emprunté pour venir là-bas, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Bien. Alors, ce que j'aimerais faire maintenant c'est de montrer une

 16   autre séquence provenant du studio B, et il s'agit de la visionner à une

 17   vitesse normale. C'est la séquence qui dure quelques secondes et qui montre

 18   l'entrepôt de Kravica.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 21   "Deux soldats musulmans meurent."

 22   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo] 

 23   M. NICHOLLS : [interprétation] 

 24   Q.  Un peu plus tôt vous nous avez dit que ce que nous avions vu juste

 25   avant cette séquence de l'entrepôt de Kravica à Srebrenica c'était le

 26   lendemain le 14, on voit une séquence très brève de l'entrepôt de

 27   Srebrenica, nous voyons les corps, et cetera. Mais j'aimerais savoir

 28   lorsqu'on fait un montage ce qui existe avant, ce qui est pris avant et

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  1   après que se passe-t-il de ces séquences-là ?

  2   R.  Il faudrait trouver les monteurs et leur poser cette question, comme je

  3   vous ai dit, la scène était plutôt surréaliste. En fait, après on montre le

  4   cadre avec justement l'entrepôt de Kravica. C'est le même axe de

  5   déplacement. La seule raison pour laquelle c'est là, selon moi, lorsqu'on

  6   regarde - et je ne me souviens pas du détail particulier - c'est qu'on ne

  7   peut pas avoir le cadre précédent, c'est-à-dire que le monteur ne peut pas

  8   montrer le cadre précédent tout d'un coup. Donc, il faut arrêter l'image

  9   lentement donc c'est pour ceci que l'image suivante s'enchaîne, c'est

 10   l'image de la voiture. Je n'ai pas fait d'objection lorsqu'il a fait ce

 11   type de montage-là, parce que c'est la façon de procéder. C'est comme ceci

 12   que les monteurs travaillaient eux, avaient ces ingrédients pour faire ce

 13   pain et c'est ainsi que je les ai laissés faire leur travail. Tout le monde

 14   est en mouvement. Je crois que les experts vous l'auraient expliqué de la

 15   même façon.

 16   Q.  La raison pour laquelle on passe d'une ville à l'autre c'est pour

 17   l'effet ?

 18   R.  Oui, pour des raisons techniques ce sont les règles de l'emploi. Ce

 19   sont les lois de la télévision qui dictent qu'une image doit s'enchaîner,

 20   se fondre dans une autre image.

 21   Q.  Bien. Alors, parlons maintenant du matériel brut, que se passe-t-il du

 22   matériel brut qui est coupé quelques secondes avant et quelques secondes

 23   après ce que nous avons vu ?

 24   R.  Je ne sais pas. Je ne m'en souviens plus.

 25   Q.  Bien. Veuillez, je vous prie, expliquer aux Juges de la Chambre très

 26   brièvement tout ce que vous pouvez nous dire de quelle façon le

 27   documentaire est disparu de la station studio B ?

 28   R.  Justement c'est une situation forte intéressante et cela doit sans

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  1   doute intéressés les Juges de la Chambre. Vers le milieu du mois de juillet

  2   1995 et lorsque soudainement on a commencé à parler de Srebrenica -- enfin,

  3   lorsqu'on a commencé à parler de Srebrenica sans arrêt dès que l'émission a

  4   été diffusée j'ai fait l'objet d'attaques dans les journaux de Belgrade,

  5   comme si j'avais fait une propagande contre les Serbes. J'ai fait l'objet

  6   d'attaques horribles. On a complètement oublié que j'étais journaliste et

  7   que je ne faisais que respecter ma profession. Je me souviens que quelqu'un

  8   du studio B avait appelé cette femme qui m'avait attaqué de façon si

  9   véhémente, elle m'a demandé de venir au studio et de faire des commentaires

 10   lorsqu'on visionne les scènes et elle a refusé. Mais il est arrivé qu'il y

 11   a eu une reprise, la cassette originale avait disparu du bureau de

 12   l'éditeur principal qui est la seule fois où quelque chose a pu

 13   disparaître. Donc, une cassette qui est réservée pour être diffusée qui

 14   disparaît, donc, on appelle ceci une deuxième génération d'image. Donc, la

 15   première règle, génération d'image, c'est le matériel brut et là, c'est un

 16   document qui est plus grand qu'une cassette Beta deux fois plus grande que

 17   la cassette Beta, et techniquement parlant, on a simplement expliqué que

 18   cette cassette a disparue. Je n'ai jamais demandé étant donné les

 19   circonstances à quel moment elle a disparu, mais je pouvais conclure

 20   seulement que soit que le service du Renseignement de l'Etat qui avait mis

 21   la main sur cette cassette ou que quelqu'un l'aurait vendue. Je ne pouvais

 22   rien conclure d'autre. Voilà le sort de cette cassette. Mais il y avait la

 23   cassette VHS que j'avais remise aux gens de la diaspora serbe au Canada car

 24   ils voulaient absolument l'avoir et lorsque je suis allé au Canada, je leur

 25   ai apportée. Je leur ai apporté un exemplaire et c'est ceci qui m'a sauvé,

 26   qui a sauvé mon nom, en tant que journaliste.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je n'ai plus

 28   d'autres questions pour le témoin.

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  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Maître Nicholls.

  2   Voyons maintenant, pour ce qui est du contre-interrogatoire, s'il y en a;

  3   Maître Zivanovic, allez-vous contre-interroger ce

  4   témoin ?

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

  7   Maître Meek.

  8   M. MEEK : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic, allez-vous contre-

 10   interroger le témoin ?

 11   Mme NIKOLIC : [interprétation] Non, je ne crois pas que je vais contre-

 12   interroger ce témoin.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne crois pas devoir vous demander,

 14   Maître Lazarevic.

 15   Maître Fauveau.

 16   Mme FAUVEAU : -- pas de questions, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame.

 18   Monsieur Krgovic.

 19   M. KRGOVIC : [interprétation] Oui, j'aurais quelques questions, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Combien de temps avez-vous besoin ?

 22   M. KRGOVIC : [interprétation] Je crois pas plus que 45 minutes.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, c'est 45 minutes -- non, ce n'est

 24   pas de quatre à cinq minutes mais, bien, vous parlez bien de 45 minutes.

 25   L'INTERPRÈTE : L'interprète signale que Me Krgovic opine du chef.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

 27   Maître Haynes.

 28   M. HAYNES : [interprétation] Non, merci.

Page 18836

  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Lazarevic, allez-vous contre-

  2   interroger ce témoin pendant combien de temps ?

  3   M. LAZAREVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

  4   les Juges, cette question est très difficile après avoir entendu la

  5   déposition du témoin mon éminent confrère m'avait dit que son

  6   interrogatoire principal serait bref, mais il a duré quatre heures, presque

  7   quatre heures. S'agissant des questions que j'avais préparées pour ce

  8   témoin, il semblerait que la plupart de ces questions ont déjà obtenu

  9   réponse. Mais je propose de commencer maintenant et vers la fin de la

 10   journée, je vais pouvoir vous donner une meilleure évaluation du temps dont

 11   j'aurais besoin.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous voudriez peut-être consulter

 13   l'équipe Gvero ? Aimeriez-vous peut-être leur céder votre place et avant de

 14   commencer --

 15   M. LAZAREVIC : [interprétation] Non. Absolument pas. Je crois qu'ils n'ont

 16   pas le désir de commencer aujourd'hui.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Commencez alors, Maître Lazarevic, et

 18   vous nous en direz un peu plus vers la fin de la journée quant au temps

 19   dont vous avez encore besoin.

 20   M. LAZAREVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Contre-interrogatoire par M. Lazarevic : 

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Petrovic.

 23   R.  Bonsoir.

 24   Q.  Pour le compte rendu d'audience, j'aimerais me présenter. Je m'appelle

 25   Aleksandar Lazarevic et je représente les intérêts du général Borovcanin,

 26   et je suis accompagné de mes deux collaborateurs, Mme Cmeric et M.

 27   Stojanovic. Etant donné que j'ai remarqué la vitesse à laquelle vous

 28   répondez aux questions qui vous sont posées en anglais, j'ai bien peur que

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  1   l'on ne ménage pas de pause entre les questions et les réponses puisque

  2   nous parlons tous les deux la même langue.

  3   R.  Je vais tenter de faire attention.

  4   Q.  Lorsque le curseur s'arrête au compte rendu d'audience, c'est à ce

  5   moment-là que vous pourriez peut-être commencer à répondre. C'est peut-être

  6   une idée comme ça que je vous donne pour suivre le texte.

  7   R.  Merci beaucoup.

  8   Q.  Très bien. Commençons alors. Hier, j'ai écouté attentivement le début

  9   de votre déposition et j'ai conclu que vous étiez un journaliste présent

 10   sur le champ de bataille de Majevica et vous avez parlé de ce que vous avez

 11   vécu alors que vous étiez présent sur le champ in situ, le champ de

 12   bataille de Majevica. Vous nous avez également parlé d'une police spéciale

 13   qui a participé dans cette bataille.

 14   R.  Je n'ai pas tout dit lorsque j'ai parlé de ce que j'ai vécu car cela ne

 15   fait pas l'objet de ce procès. Mais aujourd'hui je suis particulièrement

 16   perturbé lorsque je me souviens de ce qui -- enfin, je -- c'est à ce

 17   moment-là que j'ai vu de vrais Moudjahidines arabes sur notre territoire.

 18   Q.  Merci beaucoup. En fait, je voulais simplement vous ramener dans le

 19   temps, vous rappelez certains événements en invoquant ceci. A la suite de

 20   vos reportages faits sur le champ de bataille de Majevica, selon

 21   l'information que j'ai vous avez également été reporteur de guerre à

 22   Sarajevo, alors que vous étiez sur le théâtre des opérations, et une

 23   Brigade de Police spéciale avait également participé à cette opération.

 24   Alors, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si ceci est exact ?

 25   R.  Oui, tout à fait. On parle de Majevica au mois de mars, de Semizovac en

 26   juin, de Srebrenica en juillet 1995.

 27   Q.  Merci beaucoup. En séjournant sur ces territoires et en ayant la

 28   possibilité de voir vous-même tout ce qui s'est passé, quelle est votre

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  1   conclusion -- quelle était votre conclusion ? Vous avez été reporteur dans

  2   plusieurs pays, le Nicaragua et d'autres le Liban, pourriez-vous nous dire

  3   quelle était votre expérience ? Qu'est-ce que vous pouviez conclure de

  4   cette unité ?

  5   R.  Nous parlons des qualités professionnelles de l'unité. Je crois que le

  6   président Karadzic lui a attribué -- lui a accordé beaucoup d'attention. Je

  7   crois que la VRS était très fière du haut niveau de cette unité en parlant

  8   de l'expérience militaire jusqu'au comportement très noble qu'ils avaient

  9   car les hommes qui avaient fait des écoles militaires faisaient partie de

 10   cette unité. Il y avait également des membres de la police militaire et ces

 11   derniers sur le terrain étaient mieux équipés. Ils avaient -- ils étaient

 12   mieux habillés. Ils ont fait une bonne impression. Lorsque je vais

 13   interviewer le président Karadzic, à un moment donné, j'ai vu le dernier

 14   type de Galilée d'Israël. Donc, cette unité connaissait très bien

 15   l'équipement, c'est pour ceci que j'étais intéressé par eux. Je vous ai

 16   mentionné hier les signes noirs, une unité de Izetbegovic et CNN couvrait

 17   ces derniers. Je voulais simplement dire que les Serbes avaient également

 18   ce type d'arme et d'unité, c'est intéressant. Ceci avait trait à Semizovac.

 19   Q.  Merci beaucoup. Alors que vous étiez sur le théâtre des opérations de

 20   Sarajevo, dites-nous si jamais à quel que moment que ce soit l'on ait

 21   évoqué la possibilité qu'une Brigade de Police spéciale devait se diriger

 22   vers Srebrenica ?

 23   R.  Non, absolument pas. Comme j'ai mentionné à M. Nicholls, je suis quand

 24   même un journaliste et il y a code déontologique qui régit notre

 25   comportement surtout lorsque l'on parle de ces hommes. En fait, jamais,

 26   jamais il n'est rien arrivé d'étrange. Vous avez vu lorsque

 27   -- sur une émission on a montré que l'on est en train d'attraper un renard.

 28   Je voulais insister sur l'atmosphère pour expliquer ce qu'est la guerre.

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  1   Aujourd'hui, j'aurais écourté ou j'aurais raccourci l'émission. Mais à

  2   l'époque je l'ai laissé comme ceci. Mais ce type d'information, en fait, ce

  3   que faisaient les hommes, comment se comportaient-ils, ceci n'était pas

  4   nécessairement communiqué aux journalistes.

  5   Q.  Oui, justement c'était le but de ma question.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît. Vous avez

  7   donné un conseil parfait, mais aucun de vous deux ne suivait le transcript

  8   ni la course du curseur. Donc, je vous prierais de ralentir. Les

  9   interprètes s'efforcent de vous suivre mais c'est assez difficile. 

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je serai cynique si vous le permettez.

 11   Sur nos territoires, on n'a pas atteint un niveau de coordination tel qui

 12   permettait aux médias car aux Etats-Unis, les médias savent très bien à

 13   l'avance ce qu'ils allaient tourner. Et justement on les voit comme unité

 14   qu'il y ait complètement qui fait part -- qui fait partie de l'équipe. Les

 15   journalistes dorment avec eux, mangent avec eux et je ne faisais partie de

 16   l'équipe simplement parce que je connaissais M. Borovcanin. Mais je ne

 17   crois pas que le commandement Supérieur aurait décidé de me laisser aller

 18   sur le terrain, de le suivre. C'est complètement contraire aux principes de

 19   chaque armée.

 20   Q.  Merci beaucoup. Monsieur, je crois que votre réponse était très

 21   détaillée et très claire. Je souhaite maintenant passer à autre chose, à

 22   savoir le moment où vous êtes arrivé à Potocari. J'ai lu votre déclaration

 23   attentivement celle que vous avez donnée au bureau du Procureur qui est la

 24   pièce 5D 538. C'est le numéro de référence pour le document que je suis sur

 25   le point de vous montrer, à la page 15 en anglais et page 16 en B/C/S' et

 26   dans cette déclaration, vous avez dit que à partir du moment où vous êtes

 27   arrivé à Potocari, vous n'avez pas parlé à M. Borovcanin jusqu'au moment où

 28   vous êtes reparti ensemble. Pouvez-vous simplement nous confirmer cela ?

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  1   R.  Oui. Je dis oui.

  2   Q.  Merci beaucoup. Maintenant, vous avez déjà confirmé ceci mais je vais

  3   vous reposer la question, après avoir quitté Potocari et après avoir

  4   conduit sur la route, vous ne vous êtes pas entretenu avec M. Borovcanin

  5   sur ce qui s'était passé à Potocari, sur ce que vous avez vu et filmé ?

  6   R.  Écoutez, je ne me souviens pas de cela. Comment était la situation, je

  7   dois vous répéter qu'il y avait des tirs qui venaient de la gauche pendant

  8   toute la durée de notre voyage, et nous n'avions pas le temps, nous

  9   n'avions pas le temps de parler. Il m'avait déjà fait une faveur, il ne

 10   pouvait pas me servir de guide dans tous les cas. Il m'avait autorisé à

 11   filmer, et si quelqu'un m'avait tiré dessus, c'est un risque que je

 12   prenais.

 13   Q.  J'entends bien. Tout ceci se passait dans des conditions assez

 14   difficiles et tendues. Je souhaite savoir quelque chose à propos du moment

 15   que vous avez passé à Potocari pendant que vous tourniez votre film. Y

 16   avait-il quelqu'un d'autre à part Borovcanin, je veux dire des membres de

 17   l'armée, de la police, des réfugiés que vous connaissiez peut-être, y

 18   avait-il quelqu'un ?

 19   R.  Écoutez, personne que je connaissais.

 20   Q.  Merci beaucoup. C'était pour l'essentiel ma question.

 21   R.  Pardonnez-moi, mais en anglais, l'interprétation n'est pas bonne. J'ai

 22   dit que je ne me souviens de personne que je connaissais. C'est personnes

 23   ce n'est pas [imperceptible].

 24   Ce que je craignais tant il y a tant de choses comme cela. Il est

 25   préférable de ralentir et je m'excuse auprès des interprètes.

 26   Q.  Donc, nous allons essayer de corriger le compte rendu. Vous avez

 27   répondu en disant à part Borovcanin je ne connaissais personne d'autre;

 28   c'est cela ?

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  1   R.  C'est exact. Je ne connaissais personne d'autre.

  2   Correction, correction, pardonnez-moi. Si vous ne voulez pas parler de M.

  3   Tomo Kovac que je connaissais avant, je le connaissais de vue, et je le

  4   connaissais parce que c'était un journaliste célèbre, Tomo Kovac.

  5   Q.  Oui, j'entends bien, et je vous remercie de votre réponse. Mais ma

  6   question portait sur Potocari et non pas sur ces deux journées que vous

  7   avez passées là. On peut voir ceci dans votre film. Lorsque vous êtes

  8   arrivé à Potocari, vous avez vu un certain nombre de représentants du

  9   Bataillon néerlandais, et je crois qu'il était facile de les reconnaître.

 10   Ils portaient des pantalons courts, des

 11   t-shirts à manches courtes, des casques bleus, et ils n'étaient pas armés,

 12   n'est-ce pas, ceux que vous avez vus ?

 13   R.  Ecoutez, ce que je pouvais voir -- d'après ce que je pouvais voir dans

 14   l'enceinte de la base, non. Mais dans le cercle au-delà, je voyais d'autres

 15   membres du Bataillon néerlandais dans le bâtiment, voir un certain nombre.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez une difficulté ?

 17   M. LAZAREVIC : [interprétation] Ce témoin n'a jamais dit : "Ceux que j'ai

 18   vus dans cette enceinte." Non, en réalité, les termes qu'il a utilisés

 19   c'est comme quelque chose : "Ce premier cercle." C'est cela qu'il a dit. Il

 20   n'a pas parlé d'enceinte parce que lorsqu'on parle de l'enceinte dans ce

 21   Tribunal, cela signifie, dans la plupart des cas, la base du Bataillon

 22   néerlandais, et je crois que ce film a été tourné à l'extérieur. Donc, il

 23   parlait, en fait, de cette première rangée de soldats néerlandais. Je

 24   souhaite préciser ceci avec le témoin.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.

 26   M. LAZAREVIC : [interprétation]

 27   Q.  Bien. Ma question à propos du Bataillon néerlandais était comme suit :

 28   donc, vous avez vu ces personnes qui portaient des pantalons courts et des

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  1   t-shirts, et ce sont ces personnes-là que vous avez filmées lorsque vous

  2   avez tourné votre film ?

  3   R.  C'est exact.

  4   Q.  C'étaient les mêmes membres du Bataillon néerlandais qui se trouvaient

  5   sur la base et parmi les réfugiés ?

  6   R.  Oui, si ce n'est que -- je souhaite clarifier un point pour M. le Juge

  7   Agius ainsi que les autres Juges. Tout ceci se trouve à l'intérieur de

  8   l'enceinte. Les réfugiés se trouvaient à l'intérieur. Mais les soldats

  9   néerlandais se sont retirés. Il faisait chaud, et la plupart se trouvaient

 10   dans l'usine. C'était à l'arrière-plan. Il y avait ceux qui venaient en

 11   aide aux Serbes qui coopéraient directement avec ceux qui sont arrivés tout

 12   d'un coup comme moi. On essayait de trouver une solution ensemble. C'est ce

 13   que j'ai dit, mais personne n'a lu cela. J'ai déclaré ceci dans une

 14   conversation que j'ai eue avec l'Institut royal néerlandais d'histoire. Je

 15   crois que ce sont les mêmes personnes qui ont préparé un rapport de 5 000

 16   pages sur cette question. J'ai dit quelle était l'atmosphère à l'époque.

 17   J'aurais admis cela s'ils avaient eu peur, s'ils avaient été menacés de

 18   torture. A ce moment-là, ils auraient eu cette apparence-là, mais j'ai vu

 19   un gars qui buvait du lait qui avait l'air très détendu, et il y avait un

 20   autre gars noir, un soldat néerlandais aussi, qui conduisait une voiture,

 21   et dans un fauteuil roulant ou une brouette - c'est comme ça qu'on

 22   l'appelle - et ils étaient en train de l'aider. Il faut savoir également

 23   qu'il faisait 30 degrés, peut-être plus, et qu'on était censé évacuer ces

 24   gens dès que possible. L'impression que j'avais, c'est qu'ils travaillaient

 25   très dur pour essayer de réaliser cet objectif, et il y avait surtout des

 26   femmes, des enfants et des personnes âgées. En d'autres termes, ils

 27   faisaient bien leur travail. Les soldats néerlandais essayaient de faire

 28   leur travail aussi rapidement que possible et essayaient de le faire bien.

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  1   Q.  Merci beaucoup. Je pense que nous allons revenir là-dessus pendant le

  2   reste de mon contre-interrogatoire.

  3   M. NICHOLLS : [interprétation] Page 92 -- je crois qu'il y a une erreur au

  4   niveau du compte rendu, parce qu'on peut lire ici : "En allant en voiture à

  5   bord d'une brouette ou d'un fauteuil roulant." Je crois, en fait, que c'est

  6   quelqu'un qui aidait quelqu'un qui --

  7   M. LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être qu'il ne sait pas ce que c'est

  8   qu'une brouette.

  9   M. LAZAREVIC : [interprétation] Peut-être qu'il faut faire une pause plus

 10   tôt aujourd'hui. Je suis sur le point d'en terminer avec ce sujet.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, vous pouvez choisir le moment.

 12   Cela n'est pas un problème.

 13   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je crois que les interprètes ont quelque

 14   difficulté à suivre.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] -- fatigué. Tout un chacun est fatigué.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi pas.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc, nous allons reprendre demain

 18   après-midi à 14 heures 15. Merci, Monsieur Petrovic, et nous allons

 19   poursuivre demain. Donc, je vous demande peut-être de revoir vos

 20   estimations et savoir de combien de temps vous aurez besoin pour votre

 21   contre-interrogatoire. Bonsoir. 

 22   --- L'audience est levée à 18 heures 53 et reprendra le jeudi

 23   6 décembre 2007, à 14 heures 15.

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