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1 Le jeudi 5 décembre 2013
2 [Audience d'appel]
3 [Audience publique]
4 [Les appelants sont introduits dans le prétoire]
5 [L'Appelant Miletic est absent]
6 --- L'audience est ouverte à 10 heures 00.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, il y a
8 certains membres du barreau qui ont demandé quel était notre programme pour
9 aujourd'hui parce que nous avons fait des allers-retours, et dans l'intérêt
10 d'une audience qui se déroulera sans entrave, je crois qu'il est préférable
11 de préciser quel sera l'horaire pour aujourd'hui. Alors, entre 10 heures et
12 10 heures 20, nous aurons l'Accusation qui va présenter sa réponse, c'est
13 donc la poursuite de la réponse de l'Accusation; et ensuite la réplique de
14 Me Pandurevic, entre 10 heures 20 et 10 heures 50; et ensuite nous allons
15 entendre les arguments du conseil représentant les intérêts de M. Miletic,
16 de 10 heures 50 à 11 heures 15; ensuite une pause de 11 heures 15 à 11
17 heures 35; et de 11 heures 35 à 12 heures 20, nous poursuivrons pendant 45
18 minutes pour entendre les arguments de Me Fauveau; et ensuite nous
19 déjeunerons entre midi 20 et 13 heures 50; et dans l'après-midi nous
20 aurons, entre 13 heures 50 et 14 heures 40, la poursuite des arguments de
21 Me Fauveau pendant 50 minutes; et ensuite, de 14 heures 40 à 15 heures 10,
22 la réponse de l'Accusation; de 15 heures 10 à 15 heures 30, une pause; et
23 de 15 heures 30 à 16 heures 45, 75 minutes qui seront accordées à la
24 poursuite de la réponse de l'Accusation.
25 Nous avons une dérogation s'agissant des arguments présentés par M. Miletic
26 qui renonce à son droit d'être présent à l'audience aujourd'hui.
27 Donc, Monsieur le Procureur, s'il vous plaît, c'est à vous.
28 Avant que vous ne commenciez, puis-je vous demander, s'il vous plaît, de
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1 préciser quelque chose, comment comprenez-vous cette notion de lien
2 coupable. Si je ne me trompe pas, la Défense avance que le manquement de la
3 Chambre s'agissant d'aborder la question de la notion de visée précisément
4 -- est-ce que je ne demande pas la question à la bonne personne ?
5 M. WOOD : [interprétation] Bonjour, tout d'abord, Monsieur le Président.
6 Mon collègue, M. Milaninia, je crois, est celui qui a présenté les
7 arguments hier, donc je crois qu'il est plus à même de répondre à votre
8 question.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, certainement.
10 M. MILANINIA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, si j'ai bien
11 compris votre question, et veuillez me corriger si je me suis trompé --
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas terminé ma question.
13 M. MILANINIA : [interprétation] Pardonnez-moi.
14 [La Chambre d'appel se concerte]
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors, je vais terminer ma question,
16 et ensuite vous pourrez y répondre à tout moment. Comme je vous l'ai dit, à
17 la manière dont j'ai compris les choses, la Défense fait valoir que le fait
18 que la Chambre de première instance n'ait pas abordé la question, la notion
19 de visée précisément, porte un préjudice énorme, et vous répondez en disant
20 que l'essentiel de cette notion de visée précisément, à la manière dont
21 vous comprenez les choses au vu de l'arrêt Perisic, il s'agit là d'un lien
22 coupable, ou d'un lien de culpabilité. Donc, cela n'a pas d'importance, à
23 savoir si nous l'abordons nommément ou si nous l'adressons de façon
24 expresse, ou si nous abordons la question du fond si nous donnons des
25 exemples, par exemple, de nos exemples comme cette relation proche, par
26 exemple; est-ce que c'est exact ?
27 M. MILANINIA : [interprétation] Je vous remercie pour votre question. Je
28 crois que vous avez tout à fait bien résumé la question, cela est exact, et
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1 je crois que cela est une lecture fidèle de l'arrêt Perisic, qui précise
2 aux paragraphes 37 à 38, qui donne une définition de cette notion de visée
3 précisément, qui correspond à l'élément matériel du fait d'aider et
4 d'encourager, et que cela constitue un lien de culpabilité entre les actes
5 de l'accusé et les actes des auteurs. Ou lorsque les actes des accusés sont
6 proches des crimes, cette notion précise de visée précisément n'a pas
7 besoin d'être énoncée par la Chambre de première instance, mais cette
8 notion de visée précisément peut être sous-entendue par les autres critères
9 normatifs comme la contribution importante, le fait de savoir, et le fait
10 d'aider et d'encourager.
11 Madame, Messieurs les Juges, compte tenu de la proximité de Pandurevic au
12 lieu du crime, il convenait aux Juges de la Chambre de condamner Pandurevic
13 pour sa complicité par aide et encouragement sur le fondement de ces
14 critères normatifs et, dans ce cas-là, il n'y aurait pas eu de problème
15 avec la notion de visée précisément.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
17 M. MILANINIA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.
19 M. WOOD : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
20 Madame, Messieurs les Juges, nous avons entendu les propos de M. Pandurevic
21 hier et toute une série d'excuses qu'il a avancées pour excuser ses
22 manquements à l'exercice d'une commandement responsable, et aucune des
23 conclusions de la Chambre n'était déraisonnable. Il précise à la page 371
24 que la Brigade de Zvornik était une unité d'une taille -- une unité
25 importante. On se demande quelle serait la taille pour correspondre à une
26 petite taille réduite, comme le précise l'article 7(3). Quoi qu'il en soit,
27 ceci, pour un commandant, est une très bonne nouvelle qui commande deux
28 brigades et toute une armée. A la page du compte rendu d'audience 371, il y
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1 avait très peu de temps entre le retour de Pandurevic à Zvornik et la fin
2 des meurtres.
3 Donc, la Chambre a constaté, en regard de l'article 7(3), que tout ce que
4 Pandurevic aurait dû faire c'est de simplement donner un ordre. Combien de
5 temps faut-il pour donner un ordre ? Combien de temps faut-il pour mener
6 une enquête concernant ces informations suffisamment alarmantes qu'il avait
7 reçues ? Il dit également, compte tenu de la pauvreté des informations
8 qu'il avait à sa disposition, paragraphe 371 également. Et je vais vous
9 signaler, Madame, Messieurs les Juges, que le général Pandurevic n'a jamais
10 contesté la question de sa connaissance lors de l'appel, seulement la
11 question de savoir s'il exerçait le commandement et le contrôle. Quoi qu'il
12 en soit, ceci ne fait qu'illustrer un autre exemple de son manquement à
13 exercer un commandement responsable. Il avait son chef d'état-major
14 Pandurevic -- il avait Obrenovic qui lui a communiqué ces informations. Il
15 aurait pu contacter Nikolic pour avoir de plus en plus d'informations. Il
16 aurait pu contacter Jokic, l'homme qu'il savait être à la source de ces
17 informations, à l'origine de ces informations. Il a fait ni l'un ni
18 l'autre. Encore une fois, une illustration de son manquement à exercer son
19 commandement responsable.
20 Et il dit :
21 "Très peu de soldats de la Brigade de Zvornik ont véritablement apporté
22 leur concours à cette opération", page du compte rendu d'audience 371
23 également. Et hormis le fait que ce ne soit pas pertinent, cela n'est pas
24 exact non plus. L'opération meurtrière englobait ou devait utiliser les
25 moyens militaires de la Brigade de Zvornik, l'organe de transmission de
26 Pandurevic, le service du génie de Pandurevic, sa compagnie de génie, ses
27 moyens logistiques, ainsi que ses moyens de transport. Cela comprenait le
28 chef d'état-major, le chef de la sécurité et la police militaire. Et
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1 impliquait également ces soldats qui étaient sur le front puisque la
2 colonne se dirigeait précisément vers ce front. La Brigade de Zvornik était
3 essentielle et constituait un élément crucial de l'opération meurtrière qui
4 s'est déroulée entre le 13 et le 17 juillet 1995. Confer, Madame, Messieurs
5 les Juges, le paragraphe 119 de notre mémoire pour de plus amples
6 informations à cet égard.
7 A la page du compte rendu d'audience 372, Pandurevic dit qu'il était
8 complètement engagé dans une situation militaire. Il s'agit là d'une autre
9 manière de dire qu'il était trop occupé et ne pouvait même pas donner cet
10 ordre que les Juges de la Chambre de première instance ont estimé qu'il
11 aurait pu donner. Lorsqu'un commandant dit qu'il est trop occupé pour
12 commander, eh bien, on met un terme au droit humanitaire international. Et
13 son plus grand prétexte, c'est ce qu'il a présenté au procès, il a dit
14 qu'il n'a pas pu donner un seul ordre à ses subordonnés parce que c'est
15 l'administration chargée de la sécurité qui en avait la charge. La Chambre
16 a, à juste titre, rejeté cet argument et s'est fondée sur un examen
17 minutieux des éléments de preuve. Ces éléments de preuve ont montré que la
18 participation de l'administration de la sécurité n'a jamais privé
19 Pandurevic de son droit exclusif au commandement et qu'il pouvait commander
20 toutes ses unités. Les moyens de la Brigade de Zvornik dans les écoles et
21 dans les lieux d'exécution étaient employés sur ordres des supérieurs
22 hiérarchiques de la Brigade de Zvornik. La Chambre a constaté que Popovic
23 et Beara n'ont pas pu leur donner des ordres, Pandurevic caractérise de
24 façon erronée les éléments de preuve à cet égard.
25 Je souhaite vous rappeler, Madame, Messieurs les Juges, que dès le début la
26 Brigade de Zvornik a participé à l'opération meurtrière, il y avait
27 Nikolic, demande émanant de Popovic, mais pas directement, cela passait par
28 Obrenovic, qui était le commandant de la Brigade de Zvornik. Et il dit :
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1 J'ai cette demande et je demande à pouvoir ne pas participer en tant
2 qu'officier de permanence, mais de pouvoir participer à cela. Et je
3 souhaite recevoir un ordre pour pouvoir emmener la section de la police
4 militaire avec moi. C'est un élément de preuve clair qui indique que la
5 chaîne de commandement fonctionnait normalement, malgré la présence de
6 Beara et Popovic dans le secteur. Et c'est à partir de cet ordre, l'ordre
7 d'Obrenovic le 13, que la participation de la Brigade de Zvornik s'est mise
8 en branle, je veux dire sa participation à l'opération meurtrière.
9 D'autres éléments de preuve montrent qu'à tout moment les moyens militaires
10 de la Brigade de Zvornik se trouvaient dans un lieu qui était pertinent eu
11 égard aux crimes ou aux centres de détention ou au transport, c'est parce
12 qu'on avait donné l'ordre d'aller à cet endroit, et c'est le commandement
13 de la Brigade de Zvornik qui a donné cet ordre. Les soldats du 2e et 3e
14 Bataillons ont été envoyés dans les écoles de Rocevic et de Kula sur ordres
15 des commandements de la Brigade de Zvornik; 509 et 527, paragraphes du
16 jugement de première instance. La police militaire est arrivée à Orahovac
17 le 13 juillet sur ordres d'Obrenovic, et le commandant de la police
18 militaire, Jasikovac; paragraphes 471, 478, 481, et 1 879 du jugement en
19 première instance.
20 La compagnie du génie, son personnel et son matériel ont été envoyés à
21 Orahovac le 15 juillet et à la ferme de Branjevo le 16 juillet, sur ordres
22 de Jokic, qui était l'officier de permanence de la Brigade de Zvornik.
23 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française précise qu'ils n'ont pas
24 de document.
25 M. WOOD : [interprétation] De surcroît, la Chambre de première instance a
26 constaté, et comme l'a indiqué dans le détail l'Accusation au paragraphe
27 117 de son mémoire en réponse, Beara et Popovic n'ont pas donné d'ordres à
28 la Brigade de Zvornik mais ont simplement surveillé les troupes de la
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1 Brigade de Zvornik une fois que leur participation avait reçu
2 l'autorisation du commandement de la Brigade de Zvornik. Hier, le conseil
3 de M. Pandurevic a cité un certain nombre de paragraphes qui, d'après lui,
4 montrent que la Chambre a constaté que Popovic avait donné des ordres aux
5 soldats de la Brigade de Zvornik, et si vous regardez ces documents
6 attentivement, vous constaterez que la Chambre de première instance n'a
7 rien trouvé de la sorte. Et un de ces paragraphes en particulier est
8 particulièrement évocateur à cet égard. Il cite au paragraphe 1 132, page
9 suivante, c'est le paragraphe où la Chambre constate que lorsque Popovic
10 donne des ordres au 10e Détachement de Sabotage de tuer les prisonniers qui
11 sont à Pilica, ils ont refusé catégoriquement. Et ce n'est pas quelque
12 chose -- c'est même une contre-indication, je dirais, à savoir que
13 l'administration chargée de la sécurité était habilitée à donner des ordres
14 s'agissant de l'opération meurtrière.
15 Le conseil de Pandurevic a présenté un nouveau moyen d'appel hier lorsqu'il
16 a fait valoir que la Chambre n'avait pas tenu compte d'éléments de preuve
17 qui, d'après lui, lui sont favorables. Ceci comprend 7DP 007 [comme
18 interprété] ainsi que la déposition de certains témoins, comme Ostoja
19 Stanisic. Madame, Messieurs les Juges, vous ne trouverez pas ces arguments
20 dans des mémoires écrits. Il s'agit d'une tentative assez téméraire de
21 présenter des arguments qui ont échoué lors du procès. Je vous demande,
22 Madame, Messieurs les Juges, de regarder les éléments de preuve de façon
23 détaillée, et il extrait ces éléments de preuve de l'ensemble du dossier de
24 façon à ce que cela lui soit favorable. De toute façon, les éléments de
25 preuve qu'il a cités lors du procès, qu'il a cités dans ses mémoires, qu'il
26 a cités hier, eh bien, aucun de ces éléments de preuve ne permet de montrer
27 que Pandurevic avait perdu la capacité matérielle de prendre les mesures
28 nécessaires pour empêcher ses subordonnés de commettre et d'aider et
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1 d'encourager les meurtres.
2 Comme l'a constaté la Chambre de première instance, ces mesures
3 comprenaient le fait de donner un seul ordre, que Pandurevic n'a pas donné.
4 Même si les subordonnés de Pandurevic agissaient sur les instructions d'un
5 commandement externe, ils auraient eu l'obligation en tant que subordonnés
6 d'en faire un rapport à Pandurevic, et le Témoin Butler, confer la page du
7 compte rendu d'audience 20 829.
8 Pandurevic n'a pas montré que la constatation de la Chambre était une
9 constatation qu'aucun juge de fait raisonnable n'aurait pu faire.
10 En conclusion, Madame, Messieurs les Juges, au paragraphe 172 de son
11 mémoire en appel, le général Pandurevic fait valoir que cela serait assez
12 facile de retrouver des cas ou des exemples où un commandant cherche à
13 réfuter sa responsabilité pour sa responsabilité de commandement au motif
14 qu'il n'a pas exercé un commandement responsable. L'Accusation est d'accord
15 avec cette déclaration, nous faisant valoir que si vous avez un tel exemple
16 sous les yeux, et si les arguments de Pandurevic étaient retenus, dans ce
17 cas, tout commandant peut se couvrir les yeux et plaider et dire qu'il est
18 aveugle. Et dans ce cas, leur responsabilité de commandement ne
19 correspondrait en rien, car il pourrait simplement dire qu'il -- et cela
20 revient au même puisqu'il a dit qu'il était simplement trop occupé pour
21 exercer son commandement et qu'il suivait simplement les ordres qu'on lui
22 donnait. Et donc, dans ce cas-là, un commandant qui est à quelque 40
23 kilomètres entre le 4 et le 15 et qui a montré qu'il est capable de donner
24 des ordres à ses subordonnés et qu'il peut communiquer avec eux quand il le
25 veut, et qu'il avait néanmoins, malgré tout cela, perdu la capacité
26 matérielle qui était la sienne de prendre des mesures nécessaires et
27 raisonnables pour empêcher à ses subordonnés de commettre ces crimes.
28 Et le droit humanitaire international est justement là pour dire aux
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1 commandants qu'ils ne peuvent pas choisir entre un état d'urgence militaire
2 et leur responsabilité sur un plan juridique, qui consiste à contrôler
3 leurs troupes, de dire aux commandants précisément comme Pandurevic qui
4 était à ce poste-là doit exercer son commandement de responsabilité quel
5 que soit le niveau des combats ou l'existence d'ordres contraires. Et
6 l'Accusation fait valoir que nous demandons à Pandurevic de rejeter ce
7 modèle d'impunité et de rejeter son deuxième moyen d'appel dans son
8 intégralité.
9 L'Accusation a maintenant terminé la présentation de sa réponse à l'appel
10 de Pandurevic. Et pour les motifs susmentionnés aujourd'hui ainsi que dans
11 notre mémoire en réponse, nous vous demandons de rejeter l'intégralité de
12 l'appel et de retenir ces condamnations pénales et de monter sa peine, ce
13 qui correspond à l'appel de l'Accusation. Je souhaite parler pendant
14 quelques instants du conseil d'hier puisqu'il a parlé d'une demande de
15 remise en liberté provisoire parce qu'il a déjà purgé les deux tiers de sa
16 peine, il a demandé à l'Accusation se présenter des arguments sur ce point.
17 Je veux simplement vous dire que nous allons nous pencher sur cette demande
18 et revenir vers vous de façon adéquate en temps voulu.
19 Ceci met un terme, donc, à notre réponse à l'appel de Pandurevic.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
21 Monsieur Haynes.
22 M. HAYNES : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
23 Avant d'aborder la réponse dans son fond, je voudrais juste formuler une
24 remarque à propos de ce qu'a dit mon estimé collègue aujourd'hui à la page
25 7, deuxième ligne. En essayant d'illustrer que les subordonnés de M.
26 Pandurevic avaient refusé d'obéir aux ordres du colonel Popovic, il a cité
27 un cas impliquant les membres du 10e Détachement de Sabotage. Je suis sûr
28 que ses collègues lui diront que le 10e Détachement de Sabotage est une
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1 unité de l'état-major principal, et ne fait aucunement partie de la Brigade
2 de Zvornik, et donc, les propos qu'il a tenus devant vous ce matin sont
3 purement et simplement sans objet.
4 J'en viens maintenant au fond de la réponse. Aidé et encouragé, après-
5 Perisic, de condamner tout accusé d'avoir aidé et encouragé, une Chambre de
6 première instance doit se satisfaire de façon à être sûre qu'il a commis un
7 acte délibéré ou un acte qui vise précisément à aider au crime principal.
8 Vous ne pouvez pas simplement faire abstraction de cet élément du crime,
9 vous devez le trouver. Vous pouvez, bien entendu, constater que cela est
10 démontré de façon implicite par le caractère proche de cet acte au crime
11 principal, mais vous devez l'indiquer dans votre jugement.
12 La Chambre de première instance dans ce cas d'espèce a totalement renoncé à
13 la notion de visée précisément ou d'acte délibéré, ils n'ont jamais
14 recherché d'acte précisément. Ils ne l'ont pas trouvé de cette visée
15 précisément parce qu'ils ne pensaient pas que cela faisait partie
16 intégrante du crime d'aider et d'encourager, et c'est ce qui se trouve au
17 cœur des deux condamnations de Pandurevic, d'avoir aidé et encouragé les
18 crimes. C'est particulièrement le cas lorsque l'on se penche sur les
19 charges d'aider et d'encourager un meurtre, car ces crimes auraient été
20 commis par lui sous forme d'omission. Il a omis de protéger ou d'assurer la
21 garde de prisonniers dont il avait la responsabilité légale, et ainsi, par
22 cela, Popovic a pu les assassiner.
23 Ce que la Chambre de première instance post-Perisic doit déterminer, c'est
24 que Pandurevic a omis à dessein d'assurer la garde ou de protéger ces
25 prisonniers et que, ce faisant, il savait que cet acte contribuait à leur
26 meurtre et, en réalité, cela constituait une contribution substantielle à
27 leur meurtre. Ce que la Chambre de première instance a constaté dans ce cas
28 d'espèce, c'est que Pandurevic a simplement omis de protéger ou d'assurer
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1 la garde de ces prisonniers et que, ce faisant, il savait que cela
2 contribuait une aide à leur assassinat ou en constituait une contribution
3 substantielle.
4 Ce qu'ils n'ont pas abordé dans leur esprit était de savoir s'ils l'ont
5 fait à dessein ou s'ils l'ont fait avec une visée express. On va donc
6 préciser les choses en termes pratiques pour voir ce que cela veut dire.
7 Afin de condamner Pandurevic d'avoir aidé et d'encourager un meurtre par
8 omission, la Chambre de première instance aurait dû avoir tenu compte de
9 cela, n'est-ce pas, c'est-à-dire que Pandurevic avait connaissance de son
10 obligation d'assurer la protection et la garde de ces prisonniers, qu'il a
11 pris une décision délibérée de ne pas le faire, sachant qu'il contribuerait
12 à leur meurtre, et que c'était là une contribution substantielle à leur
13 meurtre. C'est là, donc, la discussion qui aurait dû avoir lieu et qui n'a
14 pas eu lieu. C'est donc la conclusion qui aurait dû être soulignée et qui
15 ne l'a pas été. C'est pourquoi il s'agit d'une condamnation insupportable,
16 car la Chambre de première instance ne s'est jamais livrée au processus de
17 discussion ou de déterminer quel objet d'omission avait été commis par
18 Pandurevic lorsqu'il n'a pas assuré la garde des prisonniers, et simplement
19 trouvé qu'il avait omis de le faire sachant que cela pourrait se traduire
20 par leur meurtre par Popovic n'est pas conforme à la décision du crime
21 telle que nous la connaissons.
22 J'en viens maintenant au transfert forcé. Dans l'affaire Gotovina au
23 paragraphe 110, la Chambre d'appel a estimé impossible de le condamner
24 d'avoir aidé et encouragé un transfert forcé en l'absence d'une
25 constatation que le fait de bombarder des zones civiles était contraire à
26 la loi. La situation n'est pas synonyme, mais elle est peut-être très
27 proche de celle à laquelle était confrontée la Chambre de première instance
28 dans l'affaire de Vinko Pandurevic. En appréciant son comportement en tant
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1 que commandant du Groupe tactique numéro 1, qui faisait partie de la force
2 Krivaja 95, qui se dirigeait vers Srebrenica du sud, celle-ci a estimé
3 qu'elle ne pouvait pas être sûre que les actes de Pandurevic n'étaient pas
4 conformes à la poursuite des objectifs militaires légitimes de ladite
5 opération. Il s'agit là du seul facteur ou de la seule action que la
6 Chambre a présenté comme étant l'acte qui a aidé au transfert forcé illégal
7 de la population civile de Srebrenica. Là encore, en l'absence d'une
8 discussion indiquant que Pandurevic avait délibérément dirigé son
9 comportement légal en tant que commandant du Groupe tactique numéro 1 vers
10 la réalisation illégale du transfert de la population civile, une telle
11 condamnation ne peut pas être justifiée, parce que l'acte légal en tant que
12 tel ne suffit pas. La Chambre aurait dû poursuivre, aborder et énoncer quel
13 était son objectif, et que celui-ci était contraire à la loi.
14 Là encore, je précise qu'il s'agit là du débat qui n'a pas eu lieu, de la
15 conclusion qui est absente, et c'est donc pourquoi cette condamnation de
16 Pandurevic en tant que personne qui a aidé et contribué doit échouer.
17 Je voudrais formuler deux observations mineures, peut-être en prenant
18 légèrement la tangente pour dire que le document qui vous a été montré hier
19 avec le passage surligné, le rapport de combat intérimaire du 16 juillet,
20 constitue une pièce très importante d'un autre point de vue, qui a été
21 étudié longuement par la Chambre de première instance dans son jugement qui
22 a été évoqué longuement par le Témoin PW-168 de Pandurevic, et d'autres, et
23 en résumé, a été présenté comme un document dans lequel Pandurevic avait
24 créé une œuvre de fiction afin de justifier le non-respect de ses ordres et
25 de permettre le passage d'une colonne de soldats musulmans à Baljkovica.
26 Vous ne trouverez pas dans le jugement que la Chambre de première instance
27 a estimé qu'il s'agissait là d'un guide utile quant à ce qu'est l'objectif
28 de Pandurevic cinq ou six jours avant, et de façon tout à fait
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1 compréhensible, compte tenu de leur appréciation de son document, sa
2 véracité et son objectif, il convient de faire abstraction de cette
3 référence, car elle est sans objet à cet exercice.
4 La deuxième observation que je formule est la suivante : il y avait deux
5 groupes tactiques qui se dirigeaient vers Srebrenica à partir du sud. Le
6 deuxième, comme vous l'avez sans doute deviné, s'appelait le Groupe
7 tactique numéro 2, le commandant du Groupe tactique numéro 2 était un homme
8 qui s'appelait le major Trivic. Il n'était donc pas condamné pour le
9 transfert forcé, et il s'est promené dans les rues de Srebrenica, il a bien
10 sûr attaqué le sud de la ville. C'était donc un témoin à charge, mais il
11 n'a même pas reçu un avertissement contre une auto-incrimination avant de
12 commencer à déposer. Bien sûr, il avait la grande fortune, il avait
13 beaucoup de chance, mais personne n'a déposé tout un groupe de prisonniers
14 dans son arrière-cour.
15 Je passe maintenant à la question de la responsabilité de commandement. La
16 série d'arguments suivants porte sur une des questions que vous avez
17 posées, à savoir l'évaluation par la Chambre de première instance de la
18 période qui va du 4 au 15 juillet et le fait qu'elle semble se fier aux
19 éléments de preuve du Témoin 168. Dans notre argument, il importe de se
20 pencher sur l'ensemble du jugement à cet égard afin de déterminer quel
21 était le jugement de la majorité qui a estimé que Pandurevic exerçait un
22 commandement et un contrôle effectif pendant toute la période ainsi que
23 l'avis dissident du Juge Kwon, qui a estimé le contraire.
24 Il y a une approche contradictoire aux éléments de preuve du Témoin 168. La
25 majorité se fie exclusivement aux réponses qu'il a données lors de son
26 interrogatoire par l'Accusation. Le Juge Kwon, pour sa part, adopte une
27 approche plus large, estimant qu'il convient de tenir compte des réponses
28 qu'il a données lors du contre-interrogatoire. Et je voudrais vous en citer
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1 une, c'est un moment qui est resté gravé dans ma mémoire. Ça s'est produit
2 dans cette salle vers 17 [comme interprété] heures en 2007, c'était le
3 moment où PW-168 a reconnu que Pandurevic n'exerçait pas le commandement
4 des unités de la Brigade de Zvornik dont Obrenovic exerçait le
5 commandement, le compte rendu d'audience est le 16 193, à huis clos
6 partiel, le 10 octobre 2007. Bien sûr, lorsqu'on se penche sur l'ensemble
7 de la déposition du Témoin PW-168, il dit beaucoup de choses et il est
8 possible de prendre l'un ou l'autre de ces éléments. Mais nous affirmons
9 que le Juge Kwon a eu raison de suivre l'approche qu'il a adoptée. Nous ne
10 laissons pas entendre que les réponses données lors du contre-
11 interrogatoire doivent être prises pour être plus fiables, lorsque vous
12 avez un témoin qui dit une chose et ensuite se ravise, et ensuite revient
13 et change à nouveau sa réponse, la question de la charge de la preuve
14 intervient. Et nous affirmons que lorsque vous prenez l'ensemble de la
15 déposition du Témoin 168, elle tente à dire que durant la période qui va du
16 4 au 15 juillet, Pandurevic ne commandait pas les unités qui étaient sous
17 le commandement d'Obrenovic.
18 Maintenant, hier, de façon assez curieuse me semble-t-il, le conseil a cité
19 comme soutien pour la suggestion selon laquelle Obrenovic n'exerçait pas
20 son plein commandement, le fait qu'en affectant, je crois, cinq ou six
21 membres de la police militaire à Drago Nikolic et le fait de n'en avoir pas
22 fait état à Pandurevic, Obrenovic avait commis une erreur. Il a cité un
23 passage du jugement où la Chambre de première instance a estimé que le fait
24 qu'il ait reconnu cette erreur était crédible. Je vous propose de faire une
25 pause un instant et d'y réfléchir. En réalité, Obrenovic a affecté cinq ou
26 six membres de la police militaire à Drago Nikolic sans en informer son
27 commandant; ça c'est clair et net. Vu sous cet angle, c'est la
28 manifestation la plus claire de ce qu'Obrenovic exerçait son plein contrôle
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1 sur la brigade. (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 Vous trouverez également, si vous vous référez au jugement du procès, que
6 pendant cette période Obrenovic transmettait régulièrement des ordres du
7 commandement du corps d'armée vers les subordonnés dans la brigade et
8 montrait toute indication qu'il avait un total commandement.
9 Deuxième objection ou contraste qui existe entre la majorité et le Juge
10 Kwon est la façon dont ils ont traité de la question de la position de
11 Pandurevic en tant que commandant du Groupe tactique numéro 1. En sa
12 qualité de commandant du Groupe tactique numéro 1, Pandurevic était placé
13 directement sous le commandement du général Krstic, c'est à lui qu'il
14 rendait compte, et le 15 juillet il lui a demandé un ordre pour pouvoir
15 être libéré pour qu'il puisse se rendre et revenir au commandement de la
16 Brigade de Zvornik. Le Juge Kwon a eu raison, nous estimons d'y voir en
17 fait un remplacement qui a eu lieu, donc il a été remplacé et écarté de la
18 filière hiérarchique qui est celle où il était placé entre Krstic et
19 Obrenovic. Il a été placé dans une chaîne de commandement distincte, et
20 c'est de la part de cela que cet ordre de relâchement a dû être donné. Et
21 nous estimons que la majorité a eu tort de penser que Pandurevic pouvait en
22 fait rester placé au commandement de deux unités simultanément et qu'il
23 pouvait être placé dans la chaîne de commandement entre Krstic et
24 Obrenovic. Et nous estimons qu'il s'agit là d'une erreur au niveau de
25 l'interprétation du principe de l'unicité du commandement, une erreur de
26 fond.
27 Je voudrais simplement ajouter une chose au sujet de cette phrase qui a été
28 répétée à plusieurs reprises par les conseils. Hier, on a fait valoir que
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1 pendant le contre-interrogatoire qui portait sur le temps qu'il avait passé
2 ailleurs avec le Groupe tactique numéro 1, Pandurevic aurait dit dans son
3 témoignage qu'il aurait pu donner des ordres à la brigade mais qu'il était
4 trop pris pour le faire. Et non seulement cela était inexact et induisait
5 en erreur, mais c'était irresponsable. Mais, en fait, il n'a jamais dit
6 cela, il n'a jamais dit rien de tel. En répondant à la question à la
7 référence qui a été mentionnée, il a dit de manière hypothétique qu'il
8 aurait pu émettre des ordres mais que cela aurait violé le principe de
9 l'unicité du commandement parce que les destinataires de cet ordre à ce
10 moment-là recevaient les ordres d'Obrenovic.
11 Telle a été notre réplique, Madame, Messieurs les Juges.
12 [La Chambre d'appel se concerte]
13 M. HAYNES : [interprétation] Excusez-moi, j'ai omis de vous demandé si vous
14 aviez des questions.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de
16 dire qu'il n'a jamais proféré ces mots-là, à savoir qu'il était trop pris ?
17 M. HAYNES : [interprétation] Non, il ne l'a pas fait. Il n'a pas dit qu'il
18 était trop pris dans cette citation.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors, Monsieur le Procureur, qu'en
20 est-il ? Bien entendu, nous allons vérifier le compte rendu d'audience,
21 mais est-ce que c'est une paraphrase que vous avez employée ?
22 M. WOOD : [interprétation] Oui, nous avons paraphrasé l'affirmation
23 générale de la Défense sur cette question, à savoir au fond disant que
24 compte tenu de sa charge de travail dans le cadre de l'attaque sur
25 Srebrenica entre le 4 et le 15, au fond il disait qu'il était trop pris et
26 que ça l'a empêché de donner des ordres à ses subordonnés, même s'il aurait
27 pu le faire. Et c'est l'affirmation de l'Accusation, nous résumons la
28 substance des arguments de la Défense dans son appel et ses mémoires en
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1 appel.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que c'est regrettable que
3 vous n'ayez pas précisé qu'il s'agit simplement d'une paraphrase des propos
4 de M. Pandurevic, autrement je serais d'accord sur le fait que c'est
5 irresponsable.
6 M. WOOD : [interprétation] Je n'avais jamais l'intention de laisser cette
7 impression, et je vous présente mes excuses pour cela. Là encore, c'était
8 un résumé, une paraphrase.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
10 M. HAYNES : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais donner
11 lecture exacte des propos de M. Pandurevic pour le compte rendu d'audience.
12 Il a dit :
13 "J'aurais pu donner des ordres, mais je ne l'ai pas fait parce que je
14 n'étais pas au commandement de la brigade. Cela reviendrait à un
15 commandement double, pas à une autorité unique, puisque Dragan Obrenovic
16 leur avait déjà confié des missions et ils étaient en train de les exécuter
17 et cela n'aurait que créé une confusion."
18 Je ne comprends pas comment on peut paraphraser cela dans le sens
19 d'être pris ou trop pris. Simplement, je ne le comprends pas.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
21 [La Chambre d'appel se concerte]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous pourrions entendre les
23 arguments des conseils de M. Miletic.
24 M. WOOD : [interprétation] Monsieur le Président --
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
26 M. WOOD : [interprétation] -- est-ce que nous pourrions avoir juste cinq
27 minutes, juste pour que les conseils puissent se réorganiser entre eux.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait. Mais nous n'allons
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1 pas quitter le prétoire.
2 --- La pause est prise à 10 heures 46.
3 --- La pause est terminée à 10 heures 49.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous
5 sommes revenus en audience.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le conseil de M. Miletic
7 s'exprimera.
8 Mme FAUVEAU : -- La Défense soutient que tous les moyens sont bien fondés,
9 en droit et en faits, et rappelle, comme vous l'avez noté vous-même, le
10 Procureur connaît le bien-fondé du sixième moyen d'appel relatif à la
11 condamnation de Radivoje Miletic pour le crime contre l'humanité, le
12 transfert forcé des hommes qui ont traversé la rivière de Drina.
13 Dans ses arguments, la Défense n'a pas l'intention de répéter les arguments
14 exposés dans son mémoire d'appel ou dans sa réplique, elle n'a aucun doute
15 que la Chambre d'appel connaît ces arguments. Nous avons choisi de ne pas
16 exposer aujourd'hui tous nos moyens d'appel, bien que nous les maintenions
17 tous, mais d'élaborer nos arguments qui concernent certaines erreurs
18 commises par la Chambre de première instance qui sont suffisamment graves
19 qu'elles invalident à elles seules la condamnation de Radivoje Miletic en
20 totalité.
21 Afin d'être claire, je tiens dès le début à souligner que rien dans le
22 jugement n'a été proprement établi. Pour commencer, la base factuelle n'a
23 pas été proprement établie, et je me réfère surtout aux faits cruciaux pour
24 la responsabilité de Radivoje Miletic, la rédaction et l'interprétation de
25 la directive numéro 7, la situation humanitaire dans les enclaves de la
26 restriction de l'aide humanitaire. Les éléments constitutifs des crimes
27 contre l'humanité ne sont pas proprement établis. La responsabilité de
28 Radivoje Miletic non plus. Le jugement est tout temps dans la partie qui
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1 concerne Radivoje Miletic entaché d'erreurs, aussi bien en droit qu'en
2 fait.
3 La Défense est consciente que la Chambre d'appel conférera la crédibilité à
4 l'évaluation des preuves faites par la Chambre de première instance lors du
5 procès. Maintenant à ce que la Chambre d'appel est consciente que
6 l'approche de la Chambre de première instance a mené à des conclusions
7 déraisonnables, elle appréciera si la Chambre de première instance a fait
8 une erreur dans son approche d'évaluation qui a pu mené à un déni de
9 justice. Or, c'est le cas dans l'espèce où toutes les conclusions
10 déterminantes ne peuvent être qualifiées autrement que suppositions,
11 présomptions, ou spéculations en forme d'arbitraire.
12 A titre liminaire, je souhaite attirer votre attention au fait que tous les
13 documents importants dans cette affaire et, notamment la directive numéro
14 7, qui est le document central dans l'affaire de Radivoje Miletic, ont été
15 analysés à la lumière des événements postérieurs. Or, les documents doivent
16 surtout être analysés dans le contexte dans lequel ils ont été rédigés. Les
17 événements postérieurs peuvent parfois apporter un éclairage à la
18 signification des documents, mais ils peuvent également déformer les
19 objectifs d'un document. Et c'est exactement ce qui s'est passé dans la
20 présente affaire, notamment dans l'interprétation de cette directive.
21 Vous avez certainement noté que pratiquement tous les moyens d'appel de la
22 Défense de Radivoje Miletic invoquent la violation du principe de la
23 présomption d'innocence de la règle dubio pro reo et du principe selon
24 lequel la charge de preuve repose sur le Procureur. Et je me réfère au
25 moyen 2, paragraphe 79; moyen 5, paragraphe 165, 166, 184, 185, 191; moyen
26 6, paragraphe 202; moyen 7, paragraphe 212; moyen 8, paragraphe 220; moyen
27 9, paragraphes 224 et 259; moyen 10, paragraphe 263; moyen 11, paragraphe
28 335; moyens 13 et 14, paragraphe 360; et moyen 19, paragraphe 407.
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1 En effet, lorsqu'on analyse le jugement, il devient rapidement évident que
2 les conclusions de la Chambre de première instance attaquaient les moyens
3 d'appel, que je viens de citer, ne correspondent pas aux conclusions
4 auxquelles la Chambre de première instance aurait dû parvenir si elle avait
5 appliqué le standard qui aurait dû être appliqué, et qui est celui au-delà
6 de tout doute raisonnable.
7 Si les conclusions de la Chambre de première instance n'étaient pas
8 si déraisonnables, je serais tentée de dire que les Juges ont rendu le
9 jugement selon leur intime conviction, le principe qui est bien connu dans
10 le droit continental mais qui n'a pas à être appliqué devant ce Tribunal.
11 Bien sûr, la Chambre de première instance a correctement annoncé le
12 standard au-delà de tout doute raisonnable, elle a affirmé qu'elle
13 appliquait le principe dubio pro reo, jugement paragraphes 8 et 9. Elle a
14 également correctement annoncé que la charge de preuve repose sur le
15 Procureur; jugement, paragraphe 8.
16 Le fait que la Chambre a correctement identifié les standards qu'elle
17 devait appliquer ne signifie certainement donc pas qu'elle a ensuite
18 proprement appliqué ces standards. Par ailleurs, même si le droit
19 applicable est correctement appliqué, s'il est appliqué aux faits
20 incorrectement établis, la conclusion sera tout de même erronée.
21 Dans la présente affaire, la Chambre a proprement identifié les
22 standards et principes applicables à l'appréciation de la preuve, mais elle
23 n'a appliqué aucun de ces standards et principes, ce qui a résulté dans de
24 nombreuses conclusions erronées qui, en tout, sont d'une telle ampleur et
25 d'une telle nature, qu'elles ont mené à un total déni de justice. Pour
26 illustrer le renversement de la charge de preuve, je citerai deux exemples
27 concernant les parties centrales de l'affaire de Radivoje Miletic. L'un
28 concerne les conclusions liées à l'aide humanitaire; et l'autre,
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1 l'établissement du rôle de Radivoje Miletic dans la rédaction de la
2 directive.
3 Concernant l'aide humanitaire, la Chambre a fait constat judiciaire
4 d'un certain nombre de faits. Elle a ainsi constaté que le blocage de
5 l'aide humanitaire faisait partie du plan. Je me réfère à la décision
6 relative au constat judiciaire du 26 septembre 2006, fait numéro 63. Ce
7 fait avait une influence déterminante pour les paragraphes 766 et 767 du
8 jugement. Or, ce fait a été constaté dans la présente affaire sans que le
9 Procureur ait eu besoin d'apporter la moindre preuve. Dans cette affaire,
10 l'aide humanitaire était l'une des questions cruciales; or, les faits
11 relatifs ont été constatés sur la base des conclusions adoptées dans les
12 affaires où le passage de l'aide humanitaire n'a été qu'une question
13 marginale. Je me réfère aux affaires Krstic et Blagojevic.
14 Dans certaines affaires devant ce Tribunal, les Chambres observaient
15 une grande prudence dans l'admission des constats judiciaires. Par exemple,
16 dans l'affaire Seselj, je me réfère aux décisions rendues dans l'affaire
17 Seselj le 8 février 2010, paragraphes 13 et 25, et le 10 décembre 2007,
18 paragraphe 13. La Chambre d'appel du Tribunal pour le Rwanda a préconisé
19 une prudence extrême lorsqu'il s'agit de constater judiciairement les faits
20 qui ont une importance cruciale pour la responsabilité de l'accusé. Je me
21 réfère à la décision rendue par la Chambre d'appel dans l'affaire Karamera
22 le 16 juin 2006, paragraphe 50. Cependant, dans la présente affaire, la
23 Chambre de première instance a accepté aveuglement tous les faits liés à
24 l'aide humanitaire que le Procureur lui a proposés.
25 En réalité, le constat judiciaire a pour effet de renverser la charge
26 de la preuve sur la partie qui conteste le fait constaté et qui doit en
27 emporter la preuve contraire. En l'occurrence, la Défense s'est trouvée
28 dans l'obligation de démontrer qu'il n'y avait pas de restrictions
Page 422
1 injustifiées et que les restrictions de l'aide humanitaire ne faisaient pas
2 partie du plan. Et une telle obligation qui a été imposée à la Défense par
3 la Chambre de première instance sur des faits importants pour la
4 détermination de la responsabilité de l'accusé est tout simplement
5 incompatible avec le droit de la défense.
6 Le constat judiciaire des faits concernant l'aide humanitaire a
7 clairement mené la Chambre de première instance d'adopter les conclusions
8 qu'elle n'aurait jamais pu et dû adopter si elle n'avait pas préalablement
9 fait le constat judiciaire. Je pense surtout aux conclusions dans les
10 paragraphes 228, 766 et 767 du jugement.
11 L'autre exemple est encore plus troublant. La Chambre de première
12 instance a constaté qu'une réunion a eu lieu le 16 mars 1995 chez le
13 président Karadzic, le signataire de la directive numéro 7, en admettant
14 que la directive transmise aux unités le 17 mars 1995 a pu y être discuté.
15 Jugement, paragraphe 1 650.
16 La Chambre de première instance a ensuite conclu, toujours dans le
17 même paragraphe, qu'il n'y a pas de preuve concluante sur le sujet de cette
18 réunion. Qu'il y ait ou pas de preuve concluante sur le sujet de cette
19 réunion ne devrait pas être le problème de la Défense. La Défense a apporté
20 des preuves de l'existence de la réunion et des preuves suffisantes pour
21 que la Chambre de première instance admette que la directive a pu y être
22 discutée. La Défense n'a pas à apporter des preuves concluantes ou des
23 preuves qui permettent l'établissement des faits au-delà de tout doute
24 raisonnable.
25 En admettant que la directive a pu être débattue lors de la réunion du 16
26 mars 1995, la réunion à laquelle Radivoje Miletic n'a pas assisté, et en
27 refusant ensuite de prendre cette réunion en compte comme le point crucial
28 de la rédaction de la directive en statuant explicitement qu'il n'y a pas
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1 de preuve concluante sur ce point, la Chambre de première instance a
2 renversé la charge de preuve et, bien évidemment, elle n'a pas appliqué le
3 principe in dubio pro reo auquel je viens maintenant.
4 Dans ses conclusions relatives à l'aide humanitaire et à la rédaction,
5 l'interprétation et les objectifs de la directive, la Chambre de première
6 instance n'a pas seulement renversé la charge de preuves, elle a
7 constamment et de manière flagrante violé le principe in dubio pro reo.
8 Ainsi, la Chambre a jugé qu'elle n'a pas de preuve conclusive concernant le
9 moment d'aggravation de la situation humanitaire dans les enclaves. Mais
10 elle a toutefois lié la détérioration de la situation humanitaire dans les
11 enclaves à la directive numéro 7. Jugement paragraphe 767.
12 Sachant qu'elle ne disposait pas de preuve concluante et/ou suffisante, la
13 Chambre a pu utiliser son pouvoir en application de l'article 98 du
14 Règlement et a ordonné de sa propre initiative la production de moyens de
15 preuve supplémentaires. Puisqu'elle ne l'a pas fait, elle a dû respecter le
16 principe in dubio pro reo; or, elle ne l'a pas fait non plus. Sans preuve
17 conclusive, et à vrai dire sans aucune preuve et en omettant de considérer
18 toute preuve en faveur de l'accusé, la Chambre de première instance s'est
19 permise de lier l'aggravation de la situation humanitaire dans les enclaves
20 Srebrenica et Zepa à la directive numéro 7. Paragraphe 767 du jugement.
21 La Chambre de première instance n'a pas seulement ignoré les preuves dans
22 le dossier, elle a également ignoré le droit international humanitaire
23 applicable au passage des convois. La Chambre de première instance a
24 constaté différents abus de convois humanitaires, le transport d'armes et
25 de munitions au profit des forces armées bosniaques et l'utilisation de
26 l'aide humanitaire pour les besoins de l'ABiH. Jugement, paragraphes 197,
27 205 et 240.
28 Toutefois, au lieu de considérer ces agissements illégaux et contraires aux
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1 conventions de Genève, et je me réfère notamment à l'article 70 du premier
2 protocole aux conventions de Genève, comme cause possible, et je dirais
3 même évidente, des contrôles et restrictions que les autorités serbes ont
4 imposés aux convois depuis le début de la guerre, donc bien avant la
5 rédaction de la directive numéro 7, la Chambre de première instance a
6 préféré lié, sans aucune preuve concrète et tangible, le contrôle imposé
7 par les autorités serbes à la directive numéro 7.
8 Conformément au droit international humanitaire, les parties n'ont pas
9 d'obligation d'autoriser automatiquement et aveuglément le passage des
10 convois humanitaires. Le pouvoir de refuser une action humanitaire n'est
11 pas discrétionnaire et doit être utilisé exceptionnellement, mais le refus
12 de passage à un convoi, s'il est justifié, n'est pas interdit. Or,
13 l'utilisation même des convois humanitaires pour des besoins militaires
14 justifie en soi le refus de passage d'un convoi. Avant de juger que les
15 restrictions imposées aux convois étaient planifiées par la directive
16 numéro 7, elles faisaient partie d'une attaque contre la population civile,
17 c'est dans le jugement aux paragraphes 766 et 767, la Chambre a dû établir
18 si les restrictions étaient illégales. Puisque les preuves dans ce procès
19 montrent de nombreux abus des convois, la Chambre a dû établir pour chaque
20 restriction si celle-ci était injustifiée et illicite.
21 N'ayant pas fait une analyse précise du passage des convois et des
22 restrictions imposées, la Chambre aurait dû conclure en application du
23 principe in dubio pro reo que d'une part les restrictions des convois
24 n'étaient pas liées à la directive numéro 7; et d'autre part, qu'elle
25 n'était pas injustifiée et donc pas illégale. Tout comme elle a lié sans
26 aucune preuve les restrictions imposées aux convois à la directive numéro
27 7, elle a de même façon lié toujours sans la moindre preuve concrète et
28 tangible les attaques aux enclaves, et plus largement, l'attaque contre la
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1 population civile à cette directive, la directive numéro 7. Dans les
2 paragraphes 760, 762 et 1 085 du jugement, la Chambre de première instance
3 a jugé qu'une attaque généralisée et systématique composée de plusieurs
4 éléments a commencé contre la population des enclaves avec la directive
5 numéro 7. Or, d'une part, le Procureur lui-même concède que la politique de
6 l'armée de la Republika Srpska n'a pas changé après la directive. Je me
7 réfère au compte rendu du 10 décembre 2008, pages 29 489 et 29 490.
8 Et d'autre part, la Chambre n'a pas été en mesure d'identifier un seul, un
9 moindre changement dans le comportement de l'armée de la Republika Srpska
10 qui serait survenu suite à la directive.
11 Le commencement de l'attaque n'a pas été identifié. La période exacte dans
12 laquelle cette attaque a eu lieu n'a pas été déterminée. Les actes qui
13 auraient constitué l'attaque n'ont pas été précisés, et encore moins
14 établis. Dans la jurisprudence internationale, tous les éléments
15 constitutifs d'un crime contre l'humanité doivent être établis conformément
16 aux standards applicables. Ainsi, la Cour pénale internationale a jugé que
17 la Chambre ne voit aucune raison, s'agissant de l'administration de la
18 preuve de crimes contre l'humanité, d'appliquer aux événements présentés
19 comme constitutifs de l'élément contextuel d'existence d'une attaque une
20 norme plus souple que celle qui s'applique aux autres faits et
21 circonstances allégués en l'espèce. Par tant, chaque événement évoqué à
22 l'appui des éléments contextuels doit être prouvé conformément à la norme
23 applicable à tous les autres faits. Il s'agit de la décision sur
24 l'ajournement de l'audience de la confirmation des charges rendue dans
25 l'affaire Gbagbo le 3 juin 2013, paragraphe 22.
26 Par ailleurs, tous les incidents qui, selon la Chambre, constitueraient
27 l'attaque contre la population civile ont fait voir une cause différente et
28 entièrement indépendante de la directive 7. Et je tiens à préciser que la
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1 Défense ne cherche pas à substituer sa propre interprétation à
2 l'interprétation de la Chambre de première instance. La Défense souligne le
3 fait que la Chambre de première instance a systématiquement négligé le
4 principe in dubio pro reo en réservant tout doute en faveur de l'Accusation
5 et en rejetant d'emblée les arguments de la Défense.
6 Par exemple, les tirs isolés. Au-delà du fait que ces incidents
7 existaient depuis le début de la guerre, que leur fréquence n'a pas changé
8 après la directive numéro 7, et qu'aucun lien n'a été établi entre ces tirs
9 et la directive numéro 7, une tout autre explication peut être donnée à ces
10 tirs, pour autant qu'ils aient eu lieu puisque l'existence même de ces tirs
11 n'a pas été proprement établie. Même Momir Nikolic reconnaît que la cause
12 des tirs isolés se trouve dans le comportement de soldats difficilement
13 contrôlables. Compte rendu du 23 avril 2009, pages 33 066, 33 067. Ce qui
14 signifie automatiquement que ces tirs ne s'inscrivaient pas dans la
15 directive ou dans un plan désigné.
16 Quant au bombardement, le seul bombardement qui est identifié avant
17 juillet 1995 est le bombardement du 25 mai 1995. Or, la Chambre de première
18 instance a elle-même constaté que ce bombardement a été effectué en réponse
19 au bombardement des positions serbes par l'OTAN. Jugement, paragraphes 207
20 et 778. Il ne s'agit pas ici de déterminer si le bombardement du 25 mai
21 1995 a été oui ou non militairement justifié ou effectué selon les règles
22 de l'art militaire. Il s'agit de déterminer si ce bombardement peut
23 s'inscrire dans la ligne de la directive numéro 7. En réalité, la Chambre
24 de première instance nous donne la réponse. Ce bombardement est une réponse
25 au bombardement de l'OTAN, et je souligne que le bombardement de l'OTAN
26 n'était ni prévu, ni prévisible au moment de la directive numéro 7.
27 Cependant, après avoir constaté proprement la cause dudit bombardement, le
28 bombardement de l'OTAN, la Chambre de première instance ne semble pas
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1 exclure le bombardement du 25 mai 1995 des actes qui, selon elle,
2 constituent une conséquence de la directive numéro 7.
3 Au-delà du fait que la Chambre de première instance n'a pas
4 proprement identifié le bombardement de Srebrenica et de Zepa avant juillet
5 1995, elle a également refusé de considérer que les maisons qui ont pu être
6 bombardées lors de l'attaque en juillet étaient des cibles militaires, bien
7 qu'elle ait constaté elle-même que l'ABiH utilisait des maisons, hôtels, et
8 autres bâtiments à usage civil pour des besoins militaires. Jugement,
9 paragraphes 246 et 774.
10 Monsieur le Président, est-ce que ce serait le bon moment pour la
11 pause ?
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous reprendrons à 11 heures
13 36.
14 --- L'audience est suspendue à 11 heures 15.
15 --- L'audience est reprise à 11 heures 44.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez continuer.
17 Mme FAUVEAU : La Chambre de première instance s'est également fourvoyée
18 dans la détermination d'une attaque systématique généralisée qui aurait été
19 dirigée contre la population civile. J'attire votre attention au langage de
20 la Chambre de première instance, ou, plutôt, aux expressions utilisées par
21 celle-ci lorsqu'elle a décrit les attaques que l'armée de la Republika
22 Srpska aurait menées et qui auraient constitué une attaque systématique ou
23 généralisée contre la population civile.
24 La Chambre de première instance a jugé que dans les enclaves avant juillet
25 1995, la population civile était parfois, au hasard, prise comme cible.
26 Jugement paragraphes 210 et 768. Ces deux termes, "parfois" et "au hasard",
27 ou pour citer la Chambre de première instance littéralement en anglais,
28 "sometimes" and "randomly", sont entièrement incompatibles avec une attaque
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1 généralisée ou systématique dirigée contre la population civile.
2 Si la population civile était prise pour cible au hasard, l'attaque n'est
3 pas dirigée contre la population civile. Or, pour qu'il y ait un crime
4 contre l'humanité, une attaque dont la cible principale est la population
5 civile doit être établie. Egalement, des attaques sporadiques, qui semblent
6 découler du terme "parfois" sont incompatibles avec une attaque
7 systématique ou généralisée. Le langage même de la Chambre de première
8 instance efface toute existence d'une attaque systématique ou généralisée
9 avant juillet 1995.
10 Cependant, la Chambre de première instance, en dépit de ces conclusions que
11 je viens de citer et qui sont incompatibles avec une attaque contre la
12 population civile avant juillet 1995, considère que les attaques aux
13 enclaves font partie d'une attaque plus large contre la population de
14 Srebrenica et Zepa commencée par la directive numéro 7. Jugement paragraphe
15 775. Pour parvenir à cette conclusion, la Chambre a dû sortir du contexte
16 et les parties incriminées de la directive numéro 7 et les ordres du Corps
17 de la Drina, je me réfère aux pièces 5D106 et P107, en omettant d'apprécier
18 les éléments de preuve conformément aux standards applicables, les
19 standards qu'elle a pourtant correctement énoncés. En effet, la directive
20 numéro 7 n'envisageait pas la prise des enclaves, elle n'envisageait pas
21 l'attaque aux enclaves. La directive numéro 7 conserve le concept des
22 enclaves, et je me réfère à la tâche assignée au Corps de la Drina qui se
23 trouve à la page 11 de la directive 7, pièce P5, et qui se lit comme suit :
24 [interprétation] "La tâche du démantèlement et de la destruction des forces
25 musulmanes dans ces enclaves…"
26 [en français
27 ] La directive numéro 7 ne fait que réitérer une tâche assignée depuis
28 longtemps au Corps de la Drina, celle de séparer les enclaves. La Chambre
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1 de première instance refusait purement et simplement de considérer cette
2 preuve, et je me réfère à tous les éléments de preuve qui sont référenciés
3 dans les moyens 31 et 33 de notre mémoire d'appel. Tout comme elle a mal
4 interprété la directive numéro 7, la Chambre de première instance a donné
5 une interprétation incorrecte aux ordres du Corps de la Drina, 5DP106 et
6 P107. Elle a souligné seulement que ces ordres se référaient aux
7 directives, elle a omis de considéré que ces ordres se référaient aussi à
8 la situation sur le terrain et qu'ils étaient délivrés sur l'ordre direct
9 du commandant suprême, Radovan Karadzic.
10 La Chambre a sommairement rejeté toute preuve indiquant que l'attaque à
11 Srebrenica a été ordonnée par Radovan Karadzic, et ceci par un ordre
12 délivré directement au Corps de la Drina. Elle a sommairement rejeté toute
13 preuve indiquant que l'attaque à Srebrenica en juillet 1995 a été provoquée
14 par des attaques continues et incessantes des forces musulmanes. Et elle
15 n'a pas pris en compte le témoignage de Richard Butler, l'expert militaire
16 du Procureur, qui n'a cessé de répéter que l'objectif de l'attaque a été
17 modifié par un autre ordre de Radovan Karadzic, celui du 9 juillet 1995.
18 Richard Butler, le compte rendu du 16 janvier 2008, page 19 794. Et l'ordre
19 du 9 juillet 1995, c'est la pièce P33.
20 Et que dire du refus de la Chambre de première instance d'accepter que la
21 directive 7/1, c'est la pièce 5D361, n'est pas un simple prolongement de la
22 directive 7. Entre autres, la Chambre de première instance s'est fondée sur
23 l'ordre de Corps de Drina délivré le 20 mars 1995. Jugement, paragraphe
24 764. Comment l'ordre du 20 mars peut éclaircir la signification d'un
25 document, en l'occurrence de la directive 7/1 qui a été délivrée le 31
26 mars. De toute évidence, la Chambre de première instance refusait de
27 considérer les preuves en faveur de l'accusé et construisait ses
28 conclusions à la lumière de la présomption de la culpabilité, ce qui est
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1 une violation flagrante des droits de l'accusé mais aussi des principes
2 fondamentaux de tout procès pénal. Si la Chambre de première instance avait
3 analysé correctement et proprement les preuves, elle aurait dû conclure que
4 l'armée de la Republika Srpska a abandonné la partie incriminée de la
5 directive 7, que l'attaque aux enclaves ne peut être liée à la directive 7,
6 et que l'attaque contre la population civile était, d'une part, le
7 débordement de l'action militaire commencée en juillet 1995, et, d'autre
8 part, la conséquence de l'ordre du 9 juillet 1995.
9 A la différence des conclusions auxquelles la Chambre est parvenue, les
10 conclusions auxquelles elle a dû parvenir sont toutes fondées sur les
11 éléments de preuve admis au dossier. Les conclusions de la Chambre de
12 première instance sont arbitraires. Mais quand bien même elles auraient eu
13 un fondement quelconque dans la preuve, d'autres interprétations possibles
14 existent. Celles que je viens de mentionner sont toutes plausibles et
15 raisonnables, et sont en plus favorables à l'accusé. Tout doute aurait dû
16 être résolu en faveur de l'accusé. Or, dans la présente affaire, la Chambre
17 a dû d'abord déformer les preuves et ensuite violer les principes
18 fondamentaux du droit pénal afin d'arriver aux conclusions auxquelles elle
19 est parvenue et à la condamnation de Radivoje Miletic.
20 On peut même constater dans la présente affaire une certaine inertie ou
21 nonchalance de la Chambre de première instance qui se reflète dans le refus
22 d'analyser des détails et, au final, dans le refus dans prendre une
23 décision bien fondée et motivée. Ainsi, la Chambre de première instance,
24 après avoir constaté que les attaques contre les enclaves avaient un double
25 objectif, dont l'un était militairement légitime, jugement paragraphe 774,
26 avait refusé de se prononcer sur ce qui était d'un point de vue militaire
27 nécessaire et justifié et donc légitime et ceux qui ne l'étaient pas.
28 Jugement paragraphe 775. Les Juges ne peuvent se décharger de leurs
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1 obligations en adoptant une conclusion facile. Ils doivent déterminer avec
2 précision les faits criminels et les séparer de ceux qui ne le sont pas.
3 Cette distinction est d'autant plus importante lorsqu'il s'agit de
4 déterminer la responsabilité pénale d'une personne qui n'est pas présente
5 sur les lieux du crime, qui n'a pas toutes les informations sur les
6 activités qui se déroulent. Or, c'est exactement le cas dans l'affaire de
7 Radivoje Miletic. Radivoje Miletic est officier de carrière, il était
8 membre de l'armée de la Republika Srpska, et dans ses fonctions et dans le
9 cadre de ses pouvoirs, il a accompli certains actes. Afin de déterminer si
10 ces actes qui, en soi, ne sont pas illégaux et encore moins criminels
11 peuvent être liés aux actions criminelles, il fallait que la Chambre de
12 première instance se donne la peine d'établir exactement quelles étaient
13 les actions criminelles et si les actions de Radivoje Miletic avaient un
14 lien quelconque avec les activités criminelles ou si elles étaient dirigées
15 exclusivement vers les activités militaires légitimes.
16 La Chambre a refusé de distinguer les activités légitimes de celles qui
17 étaient illégitimes en refusant d'opérer une distinction absolument
18 nécessaire dans un procès pénal. En revanche, elle a opéré une distinction
19 purement spéculative artificielle et juridiquement infondée lorsqu'elle a
20 distingué la partie civile et la partie militaire de la colonne partie de
21 Srebrenica. Cela dit, la Chambre a constaté l'existence de cette
22 distinction mais sans expliquer comment les officiers serbes, ceux qui ne
23 sont pas sur le terrain, comme Radivoje Miletic, pouvaient en avoir
24 connaissance. Spécifiquement, elle n'a donné aucune explication comment
25 Radivoje Miletic a pu avoir connaissance de la composante civile de cette
26 colonne.
27 Par ailleurs, en opérant cette distinction, la Chambre de première instance
28 a ignoré encore une fois les dispositions du droit international
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1 humanitaire et s'est éloignée considérablement de la jurisprudence du
2 Tribunal. Elle a également ignoré les preuves dans le dossier, et notamment
3 le témoignage de l'expert militaire du Procureur, Richard Butler, qui a
4 déclaré que la colonne a été formée avec l'objectif militaire de percer les
5 lignes serbes et d'atteindre le territoire sous le contrôle musulman.
6 Richard Butler, le compte rendu le 16 janvier 2008, pages 19 816 et 19 849.
7 Au terme même du jugement, les civils et militaires n'étaient pas séparés
8 dans la colonne. Or, je rappelle, la colonne avait un objectif militaire et
9 n'était pas formée spontanément. Une unité militaire, la 28e Division de
10 l'ABiH, faisait le gros de la colonne, et selon le droit international
11 humanitaire, une unité militaire est, par essence, un objectif militaire.
12 Mais en plus, cette unité militaire n'était pas un long fleuve tranquille
13 passant paisiblement devant les positions serbes. Cette colonne était
14 engagée dans les combats, les combats farouches qui ont laissé une
15 multitude de victimes, et des deux côtés. L'expert militaire du Procureur
16 était extrêmement clair et a qualifié la colonne de cible militaire
17 légitime en déclarant explicitement que ce qui s'est passé avec la colonne
18 était un acte militaire. Richard Butler, compte rendu du 23 janvier 2008,
19 pages 20 244, 20 245, et le compte rendu du 30 janvier 2008, page 20 374.
20 Si la présence de quelques militaires au sein de la population civile ne
21 peut altérer le caractère civil de la population, la présence de civils au
22 sein d'une unité militaire qui, de plus, est engagée dans les combats, ne
23 change en rien le caractère militaire de l'unité. Je rappelle, par
24 ailleurs, que le caractère civil des hommes qui se sont joints à la 28e
25 Division dans cette colonne reste plus que discutable. Et je rappelle que
26 dans l'affaire Kordic, la Chambre d'appel a jugé que les habitants qui se
27 sont joints aux soldats pour organiser les lignes de la défense sont
28 devenus combattants au sens juridique du terme. Arrêt Kordic, paragraphe
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2 La situation est la même ici et les habitants de Srebrenica qui se sont
3 joints à la colonne ont pris part aux hostilités et ont contribué à la
4 force militaire de cette colonne, c'est-à-dire de la 28e Division de
5 l'ABiH. Ils ont apporté un avantage militaire certain aux activités
6 militaires de la 28e Division et ne peuvent être considérés comme des
7 civils. Le même problème que ce que je viens de citer se retrouve dans la
8 partie du jugement qui traite la responsabilité de Radovan [sic] Miletic.
9 La Chambre a tout simplement refusé à se rendre à l'évidence que Radivoje
10 Miletic, officier de l'armée de la Republika Srpska, faisait son travail
11 avec le seul but de contribuer au bon fonctionnement de cette armée et aux
12 objectifs légitimes d'un combat armé qui existaient à l'époque en Bosnie-
13 Herzégovine.
14 Monsieur le Président, peut-on passer à huis clos partiel puisque je veux
15 me référer à une décision confidentielle de la Chambre.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
18 Madame, Messieurs les Juges.
19 [Audience à huis clos partiel]
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15 [Audience publique]
16 Mme FAUVEAU : Au lieu de se pencher véritablement sur le rôle de Radivoje
17 Miletic, d'analyser son comportement et ses actes, la Chambre de première
18 instance a accepté sans aucune analyse critique et sans discernement le
19 témoignage de Manojlo Milovanovic, chef de l'état-major de l'armée de la
20 Republika Srpska et le supérieur immédiat de Radivoje Miletic. Si l'on se
21 fie au témoignage de Manojlo Milovanovic, compte rendu des 29, 30 et 31 mai
22 2007, celui-ci n'était au courant de rien et ne faisait rien. Il ne lisait
23 même pas les documents qu'il transmettait aux unités subordonnées. Etant un
24 simple figurant à l'état-major de la Republika Srpska, Manojlo Milovanovic
25 n'a jamais vu la directive numéro 7 et il n'en a jamais entendu parler
26 avant de venir témoigner devant le Tribunal. Il est évident pour n'importe
27 qui que Manojlo Milovanovic fuit ses propres responsabilités. Il est
28 évident pour n'importe qui que Manojlo Milovanovic ment. C'est évident pour
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1 tout le monde, sauf pour la Chambre de première instance. Et pourtant, si
2 elle avait proprement apprécié le témoignage de Manojlo Milovanovic et les
3 autres preuves relatives, la Chambre de première instance a pu et dû
4 l'écarter facilement.
5 Le témoignage de Manojlo Milovanovic est contredit par de nombreux
6 documents. Manojlo Milovanovic a rédigé et signé lui-même certains
7 documents sur la base de la directive numéro 7. Dans certains de ces
8 documents, il se réfère explicitement à la directive numéro 7. Il a signé
9 les plans des opérations élaborées sur la base de la directive numéro 7,
10 et, pour couronner le tout, il a participé à une réunion avec le président
11 Karadzic, la réunion qui a duré des heures la veille de la transmission de
12 la directive numéro 7 au corps, la transmission qu'il a opérée lui-même.
13 Tous les documents que je viens de citer sont référenciés dans notre
14 mémoire d'appel moyen 20, paragraphe 412. Certes, lors de son témoignage,
15 Manojlo Milovanovic n'a pas été confronté avec ces documents pour la seule
16 et unique raison qu'à l'époque la Défense n'avait pas ces documents. Ces
17 documents se trouvaient chez le Procureur, ils n'existaient nulle part
18 ailleurs puisque le Procureur a pris les originaux dans les archives, et la
19 Défense ne pouvait les avoir avant que le Procureur ne les lui divulgue.
20 Or, il l'a fait à un stade ultérieur du procès.
21 Certes, la Défense aurait pu rappeler Manojlo Milovanovic, mais pourquoi
22 elle l'aurait fait ? Dans la phase du procès, il n'appartient pas à la
23 Défense de prouver quoi que ce soit. En tout cas, c'est la règle que j'ai
24 apprise et qui a été toujours appliquée dans les procès pénaux. C'est la
25 règle à laquelle j'ai cru jusqu'au prononcé de ce jugement. Le document a
26 été versé au dossier, il démontrait de manière catégorique et sans
27 ambiguïté que le témoin, Manojlo Milovanovic, ne disait pas la vérité. Le
28 Procureur a reconnu que Manojlo Milovanovic n'était pas crédible. Mémoire
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1 en clôture du Procureur, paragraphe 55; réquisitoire du Procureur, le
2 compte rendu du 2 septembre 2009, page 34 060.
3 Seule la Chambre de première instance accepte les dires de Manojlo
4 Milovanovic sans aucune réserve. En acceptant le témoignage de Manojlo
5 Milovanovic, la Chambre de première instance s'est condamnée à rendre un
6 jugement erroné. Milovanovic mentait sans vergogne. Il mentait sur tous les
7 points importants, et à vrai dire, il n'avait pas le choix. Il mentait pour
8 se protéger lui-même, car c'est lui le chef de l'état-major, c'est son rôle
9 à lui de conseiller Ratko Mladic, c'est son rôle à lui de coordonner les
10 actions entre les commandants et les assistants. C'est sur lui qu'il repose
11 le fonctionnement de l'état-major, et lui il y est, il est présent à
12 l'état-major au moment où la directive numéro 7 a été rédigée. Or, cette
13 directive et sa rédaction est la partie centrale de l'affaire de Radivoje
14 Miletic. Si Manojlo Milovanovic avait décrit correctement le rôle de
15 Radivoje Miletic, il aurait dû reconnaître le sien; or, cela revenait à
16 signer son propre acte d'accusation.
17 Bien que la Chambre de première instance ait correctement jugé que les
18 témoignages des témoins complices doivent être appréciés avec la plus
19 grande prudence, jugement paragraphe 26, elle n'a identifié nulle part qui
20 étaient les témoins qu'elle considérait comme des témoins complices. En
21 effet, elle a identifié seulement ceux qui en étaient poursuivis et qui ont
22 conclu un accord avec le Procureur. Manojlo Milovanovic n'est pas dans
23 cette catégorie et rien dans le jugement ne démontre que son témoignage a
24 été analysé avec précaution. Au contraire, il semble que la Chambre de
25 première instance a fait foi à tout et à n'importe quoi venant de ce témoin
26 en particulier. Mais sachez que les gens en Bosnie-Herzégovine savent, les
27 Serbes, les Croates et les Bosniaques, y compris les victimes des crimes
28 jugés dans cette affaire, ils connaissent tous le nom, la position,
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1 l'importance et le rôle de Manojlo Milovanovic dans la guerre qui a fait
2 rage en Bosnie entre 1991 et 1995. Ils connaissent bien Manojlo Milovanovic
3 et ne peuvent prendre au sérieux un jugement basé sur son témoignage.
4 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, la crédibilité du
5 Tribunal se joue dans l'appréciation du témoignage de Manojlo Milovanovic.
6 En accordant la crédibilité au témoignage de Manojlo Milovanovic, le
7 Tribunal met en jeu sa propre crédibilité. Ayant cru aveuglement au
8 témoignage de Manojlo Milovanovic, qui n'est qu'une supercherie, la Chambre
9 de première instance ne pouvait parvenir à des conclusions correctes et
10 justes concernant la responsabilité de Radivoje Miletic. Effectivement, le
11 plus grand nombre d'erreurs a été commis dans l'appréciation de sa
12 responsabilité. Ainsi, la Chambre de première instance n'a pas pu établir
13 si l'état-major a défini le texte définitif de la directive numéro 7.
14 Jugement, paragraphe 1 649.
15 Autrement dit, il est inconnu qui a défini le texte définitif de cette
16 directive, ce qui signifie automatiquement qu'il est inconnu qui a rédigé
17 les parties incriminées de la directive numéro 7. Je rappelle que la
18 Chambre de première instance a correctement jugé que la directive contient,
19 dans une grande partie, des objectifs militaires légitimes. Jugement,
20 paragraphe 762. Donc, nous avons un document qui contient des parties
21 légitimes et des parties illicites, et selon l'aveu de la Chambre de
22 première instance, personne ne sait qui a rédigé les parties illicites.
23 Dans cette situation, si la Chambre avait correctement appliqué la règle
24 au-delà de tout doute raisonnable, cette seule constatation de la Chambre
25 aurait dû suffire pour que la Chambre juge qu'elle ne peut établir le rôle
26 de Radivoje Miletic dans la rédaction de la directive numéro 7. Or, la
27 Chambre n'a cessé d'imputer, implicitement ou explicitement, la rédaction
28 de la directive numéro 7 et toutes ses conséquences à Radivoje Miletic.
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1 Jugement, paragraphe 1 716.
2 La directive numéro 7 et son texte ne sont pas automatiquement imputables à
3 Radivoje Miletic. Radivoje Miletic n'est pas le signataire de la directive.
4 La rédaction de la directive et les propos contenus dans la directive
5 numéro 7 peuvent être imputés à Radivoje Miletic seulement et uniquement
6 s'il est établi avec précision et au-delà de tout doute raisonnable que
7 Radivoje Miletic a rédigé certaines parties de la directive et que ces
8 parties qu'il aurait rédigées avaient été identifiées également avec
9 précision et au-delà de tout doute raisonnable.
10 La Chambre de première instance, sur le fondement des éléments de preuve
11 admis dans le dossier, n'a pu établir le rôle exact de Radivoje Miletic
12 dans la rédaction de la directive numéro 7. Nous n'avons jamais su quel
13 était le projet de la directive, le texte préparé par Radivoje Miletic qui
14 a été transmis à Radovan Karadzic pour la signature. La Chambre de première
15 instance n'a accordé aucun poids au fait qu'une réunion s'est tenue le 16
16 mars 1995 chez le président Karadzic et que la directive y a pu être
17 débattue. J'ai déjà parlé de cette réunion, mais j'y reviens, car si la
18 Chambre a constaté que la directive a pu être débattue, la Chambre a dû
19 tirer des conséquences de ce constat. En effet, aucun juge raisonnable ne
20 pouvait exclure que le texte de la directive numéro 7 a subi des
21 changements lors de cette réunion à laquelle Radivoje Miletic n'a pas
22 participé.
23 Ensuite, la Chambre de première instance a proprement conclu que Manojlo
24 Milovanovic a transmis la directive aux unités subordonnées; jugement,
25 paragraphes 200 et 1 650. Mais elle est ensuite parvenue sans aucune
26 preuve, sans aucune explication, à la conclusion incompréhensible que
27 Radivoje Miletic a informé le destinataire de la vision générale des
28 dirigeants politiques. Jugement, paragraphe 1 705. J'avoue que pour moi,
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1 cette conclusion de la Chambre de première instance reste un pur mystère.
2 La Chambre de première instance n'a même pas essayé d'identifier par quel
3 acte Radivoje Miletic aurait informé les destinataires de la directive, de
4 son contenu, et elle n'a non plus identifié à quelle occasion Radivoje
5 Miletic les aurait informés. Elle n'a fourni aucun motif qui aurait
6 expliqué comment elle est parvenue à cette conclusion totalement
7 arbitraire.
8 Ce qui ressort d'une manière évidente de la lecture du jugement, c'est que
9 la Chambre de première instance n'a pas été en mesure d'établir qui a
10 rédigé les parties incriminées de la directive numéro 7 et si Miletic y
11 avait un rôle quelconque. Dans cette situation, la Chambre n'avait aucun
12 autre choix raisonnable que de conclure qu'elle ne pouvait considérer le
13 rôle de Radivoje Miletic dans la rédaction de la directive numéro 7 comme
14 une contribution à l'entreprise criminelle commune. Et il faut se rendre à
15 l'évidence, si Radivoje Miletic n'avait pas de rôle dans la rédaction des
16 parties incriminées de la directive numéro 7, il n'a pas de rôle dans
17 l'ensemble des événements concernant Srebrenica, il n'a rien. Tout comme
18 elle n'a pas élucidé le rôle de Radivoje Miletic dans la rédaction de la
19 directive, la Chambre de première instance n'a pas élucidé le rôle de
20 Miletic dans l'approbation des convois. La Chambre a constaté que les
21 preuves ne lui permettaient pas de comprendre complètement la procédure
22 d'approbation des convois humanitaires. Jugement, paragraphe 221.
23 Ne pouvant établir exactement le rôle de l'armée de la Republika Srpska
24 dans cette procédure, la Chambre ne peut prétendre qu'elle a établi au-delà
25 de tout doute raisonnable le rôle de Radivoje Miletic. Or, c'est exactement
26 ce que la Chambre de première instance a tenté à faire croire. S'agissant
27 des autres actes qui auraient constitué la contribution de Radivoje Miletic
28 à l'entreprise criminelle commune, à aucun moment la Chambre de première
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1 instance n'a pas déterminé proprement si ces actes en étaient destinés à
2 commettre les crimes et à promouvoir l'objectif commun de l'entreprise
3 criminelle ou s'ils avaient un autre objectif tout à fait légitime. Or,
4 cette détermination est essentielle, tout comme la détermination de
5 l'intention de l'accusé. Dans le jugement rendu le 30 mai 2013, la Chambre
6 de première instance a acquitté les accusés Stanisic et Simatovic parce
7 qu'elle ne pouvait pas déterminer que leurs intentions dépassaient des
8 objectifs légitimes, notamment mais pas seulement le paragraphe 2 345 du
9 jugement rendu dans cette affaire le 30 mai 2013.
10 Dans la présente affaire, la Chambre n'a pas pu constater un seul acte de
11 Radivoje Miletic dirigé vers la commission des crimes qui lui sont imputés.
12 Elle n'a pas pu constater un seul acte de Radivoje Miletic dirigé vers la
13 concrétisation de l'objectif commun de l'entreprise criminelle commune. Et
14 elle n'a pu trouver aucun élément qui démontrerait une intention criminelle
15 de Radivoje Miletic.
16 La Chambre de première instance partait de la supposition erronée selon
17 laquelle Radivoje Miletic aurait eu connaissance du plan. Jugement,
18 paragraphe 715. Or, Miletic n'avait aucune connaissance d'un plan
19 quelconque car un tel plan n'a pas existé avant le 9 juillet 1995. Or, le 9
20 juillet 1995, Radivoje Miletic était à Belgrade, ce que la Chambre a
21 reconnu. Paragraphe 1 665.
22 L'ordre du 9 juillet 1995 est la pièce-clé des événements tragiques autour
23 des enclaves. L'ordre du 9 juillet, selon les propres conclusions de la
24 Chambre, change les objectifs de l'action militaire. Jugement, paragraphes
25 252, 769. L'ordre du 9 juillet autorise les forces serbes à entrer dans la
26 ville de Srebrenica et à prendre l'enclave. L'ordre du 9 juillet a été
27 donné par le président Karadzic. Il a été adressé au Corps de Drina, et les
28 deux seules personnes dans l'état-major qui auraient pu le voir étaient les
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1 généraux Zdravko Tolimir et Milan Gvero. Radivoje Miletic n'a aucun lien
2 avec cet ordre. Il n'est pas à l'état-major au moment où cet ordre est
3 délivré. Il ne connaît en rien les nouveaux objectifs de l'armée de la
4 Republika Srpska. Il ne sait pas que l'enclave allait disparaître et que la
5 population musulmane allait se trouver sur le territoire sous le contrôle
6 serbe. Il n'en sait rien. La Chambre de première instance reconnaît que
7 Radivoje Miletic n'était pas à l'état-major principal dans la période du 7
8 au 11 juillet 1995. Jugement, paragraphe 1 666.
9 Mais pour elle, ce fait est sans importance. Or, il est impensable que
10 Radivoje Miletic, qui n'était pas au courant des événements majeurs entre
11 les 7 et 11 juillet 1995, qui dans cette période est en congé à Belgrade,
12 ait pu jouer un rôle important dans la prise de Srebrenica.
13 Tous les actes de Radivoje Miletic étaient exécutés dans le cadre de ses
14 fonctions régulières. Tous les actes de Radivoje Miletic étaient légitimes
15 et justifiés et aucun de ces actes n'avait de lien avec les activités
16 criminelles auxquelles certaines personnes se sont livrées lors des
17 activités militaires autour de Srebrenica et Zepa. En réalité, la Chambre
18 de première instance a confondu l'appartenance à l'armée de la Republika
19 Srpska avec l'appartenance à une entreprise criminelle commune. L'armée de
20 la Republika Srpska n'est pas une entreprise criminelle commune, et le seul
21 fait d'appartenir à une armée, y compris à celle de la Republika Srpska, ne
22 peut constituer la participation à l'entreprise criminelle commune.
23 Egalement, le fait que Miletic ait eu les contacts avec certains membres de
24 l'entreprise criminelle commune ne constitue pas une base suffisante pour
25 conclure qu'il appartenait lui-même à une telle entreprise. Le concept de
26 l'entreprise criminelle commune ne permet pas de conclure à la culpabilité
27 de l'accusé sur le fondement d'une simple association. Or, c'est exactement
28 ce que la Chambre de première instance a fait et ce qui constitue, bien
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1 évidemment, une erreur de droit en violation de l'article 7(1) du Statut du
2 Tribunal.
3 En effet, l'approche adoptée par la Chambre de première instance tend vers
4 une responsabilité objective inadmissible en droit pénal. La Chambre de
5 première instance ne s'intéresse nullement à l'intention de Radivoje
6 Miletic. Elle part du principe qu'il est coupable parce qu'un crime a eu
7 lieu. Ainsi, pour la Chambre de première instance, la directive relève
8 l'intention discriminatoire des forces serbes de Bosnie. Jugement,
9 paragraphe 1 003. L'intention discriminatoire ne peut être collective comme
10 la conclusion de la Chambre semble le suggérer; elle doit être
11 individuelle. Or, la directive, si elle relève une intention
12 discriminatoire, ne peut que relever l'intention discriminatoire de celui
13 qui l'a conçue et rédigée. Or, nous ne savons pas si Radivoje Miletic a
14 participé dans la rédaction des parties qui peuvent être comprises comme
15 discriminatoires.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Désolé de vous interrompre, Maître.
17 Nous allons faire la pause à midi 30, à moins que vous ne proposiez de
18 conclure prochainement.
19 Mme FAUVEAU : Monsieur le Président, je pense que j'ai 20 minutes. Si on
20 peut terminer, c'est peut-être le plus simple, si ça vous convient.
21 [La Chambre d'appel se concerte]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon, bien, si vous pouvez vous
23 passer de déjeuner pendant 20 minutes, vous pouvez poursuivre.
24 Mme FAUVEAU : Merci, Monsieur le Président.
25 Par ailleurs, encore une fois, la Chambre a oublié que le doute doit
26 profiter à l'accusé. Si la Chambre avait appliqué proprement les principes
27 fondamentaux du droit pénal selon lesquels tout doute doit profiter à
28 l'accusé et si elle avait apprécié les preuves conformément au standard
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1 d'au-delà de tout doute raisonnable, elle aurait dû parvenir à des
2 conclusions différentes de celles auxquelles elle est parvenue dans les
3 paragraphes 1 704 à 1 722, 1 725 à 1 731, et 1 734 à 1 735 du jugement. La
4 seule conclusion raisonnable sur la base des preuves qui sont dans le
5 dossier est celle que Radivoje Miletic n'avait pas d'intention criminelle
6 et qu'il n'a nullement contribué aux actes criminels autour de Srebrenica
7 et Zepa.
8 La Chambre de première instance n'a pas déclaré Radivoje Miletic coupable
9 seulement pour la commission des crimes dans le cadre de l'entreprise
10 criminelle jointe. Elle l'a condamné aussi pour la planification. Jugement,
11 2 108. Il est évident que la Chambre a commis une erreur de droit en
12 condamnant Radivoje Miletic pour la planification car les mêmes actes qui,
13 selon la Chambre, auraient constitué la contribution de Radivoje Miletic à
14 l'entreprise criminelle commune ont été utilisés pour le déclarer coupable
15 de la planification et de la commission. Conformément à la jurisprudence de
16 la Chambre d'appel, dans un tel cas, la commission englobe entièrement la
17 conduite criminelle et la personne déclarée coupable d'avoir commis un
18 crime ne le sera pas pour avoir planifié ce même crime. Je me réfère à
19 l'arrêt de ce Tribunal rendu dans l'affaire de Dragomir Milosevic,
20 paragraphe 274, et à l'arrêt du Tribunal pour le Rwanda rendu dans
21 l'affaire Kamuhanda, paragraphe 77. Mais au-delà de cette erreur de droit,
22 la Chambre de première instance a encore une fois ignoré tous les principes
23 de droit pénal lorsqu'elle a jugé dans le paragraphe 1 716 que Radivoje
24 Miletic avait le rôle central dans le plan du déplacement forcé des
25 Musulmans de Srebrenica et Zepa. Bien entendu, pour étayer sa thèse, la
26 Chambre de première instance s'est référée au rôle de Radivoje Miletic dans
27 la rédaction de la directive, le rôle que lui-même n'a jamais été établi
28 correctement. Il reste inexpliqué et inexplicable comment la Chambre
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1 pouvait raisonnablement parvenir à une telle conclusion, en quoi la simple
2 participation de Miletic dans la rédaction de la directive, sans qu'il soit
3 établi quelle partie aurait été rédigée par lui-même, et quels étaient ses
4 propos à lui, puisse constituer la planification des actes criminels.
5 S'agissant des meurtres à Potocari pour lesquels Radivoje Miletic a été
6 condamné dans le cadre de l'entreprise criminelle commune 3, la Chambre a
7 commis de nombreuses erreurs aussi, aussi bien de fait que de droit. Tout
8 d'abord, la Chambre de première instance n'a pas proprement établi qui
9 était l'auteur principal de ces meurtres. Selon le paragraphe 31 de l'acte
10 d'accusation, ces meurtres auraient été commis par des membres de l'armée
11 de la Republika Srpska ou par des membres de la police serbe. La Chambre de
12 première instance a tout d'abord jugé que ces meurtres étaient commis par
13 les membres des forces serbes de Bosnie. Jugement, paragraphes 359 et 361.
14 Elle a également précisé que les forces serbes de Bosnie comprenaient des
15 forces de l'armée de la Republika Srpska et de la police. Jugement,
16 paragraphe 102. Cependant, lorsqu'elle a apprécié la responsabilité de
17 Radivoje Miletic, la Chambre de première instance a soudainement jugé que
18 ces meurtres ont été commis par les forces de l'armée de la Republika
19 Srpska. Jugement, paragraphes 1 727 et 1 735.
20 Il est évident que la Chambre erre dans les faits sans parvenir à une
21 conclusion ferme qui lui permettrait d'établir la responsabilité pour ces
22 meurtres. Personne ne sait dans quelles circonstances les neuf hommes ont
23 été tués à Potocari. Personne ne sait qui les a tués. A vrai dire, on ne
24 sait même pas si le meurtre de ces hommes peut être lié aux forces des
25 Serbes de Bosnie. Bien sûr, chaque affaire est unique et chaque Chambre
26 juge sur le fondement des preuves admises dans une affaire particulière des
27 preuves qui sont devant elle, mais le Tribunal se doit d'avoir une certaine
28 consistance dans les jugements qui concernent les mêmes événements et les
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1 mêmes faits. La responsabilité pénale est individuelle, mais la base
2 factuelle devrait être identique. Le contraire risque de mettre la
3 crédibilité du Tribunal dans le péril. Or, si dans la présente affaire la
4 Chambre a imputé ces meurtres aux forces serbes, ces mêmes meurtres deux
5 ans plus tard n'ont pas pu être imputés aux forces serbes dans l'affaire
6 Tolimir. Jugement Tolimir du 12 décembre 2012, paragraphe 308.
7 Par ailleurs, il est entièrement obscur comment et pourquoi les meurtres à
8 Potocari pourraient être la conséquence prévisible et naturelle de
9 l'entreprise criminelle commune visant le transfert forcé. Et sur ce point,
10 je me réfère à l'opinion dissidente du Juge Kwon, paragraphes 22 à 25.
11 J'attire aussi votre attention sur le fait que le Juge Kwon considérait
12 qu'il n'y avait pas de preuve que Miletic aurait délibérément pris le
13 risque des meurtres à Potocari, opinion dissidente paragraphe 28. Et
14 j'ajoute qu'il reste obscur comment Radivoje Miletic a pu prévoir ces
15 meurtres, puisqu'il ne savait même pas que les forces serbes allaient
16 entrer à Srebrenica et, encore moins, que la population de Srebrenica se
17 trouverait à Potocari.
18 Je voudrais maintenant attirer votre attention à quelques erreurs
19 particulières de droit commises par la Chambre de première instance. Tout
20 d'abord, la Chambre de première instance a dépassé le cadre de l'acte
21 d'accusation et s'est substituée au rôle du Procureur. Les obligations du
22 Procureur liées à la présentation des faits et des crimes reprochés à
23 l'accusé doivent être interprétées conformément aux articles 21(2) et
24 21(4)(b) du Statut. La jurisprudence du Tribunal impose dès lors au
25 Procureur de présenter les faits essentiels qui fondent les accusations
26 portées dans l'acte d'accusation. En conséquence, un acte d'accusation doit
27 exposer de manière suffisamment circonstanciée les faits incriminés
28 essentiels pour informer clairement l'accusé des accusations portées contre
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1 lui afin qu'il puisse préparer sa défense.
2 Le Procureur n'a pas inclus la colonne ou les personnes qui étaient dans la
3 colonne qui est partie de Srebrenica dans la soirée du 11 juillet dans le
4 transfert forcé.
5 Monsieur le Président, peut-on passer à huis clos partiel, puisque je vais
6 me référer à un compte rendu confidentiel.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
9 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 Mme FAUVEAU : -- le jugement et tout lien que la Chambre de première
28 instance a pu faire entre le sort de cette colonne et Radivoje Miletic est
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1 entaché d'une erreur de droit. Sur ce point-ci, j'attire votre attention à
2 l'opinion dissidente du Juge Kwon, qui considérait que le mouvement de la
3 colonne n'a pas été proprement allégué dans l'acte d'accusation et que
4 toute inclusion de ladite colonne dans le transfert forcé constitue un
5 élargissement inadmissible des charges alléguées, opinion dissidente
6 paragraphes 7 à 12. Nous considérons aussi que le crime contre l'humanité,
7 persécutions consistant en actes inhumains et la terrorisation de la
8 population n'a pas été proprement plaidé dans l'acte d'accusation. Ces
9 actes ne faisaient pas partie du but commun et ne peuvent donc être commis
10 dans le cadre de l'entreprise criminelle commune 1. D'ailleurs, dans le
11 paragraphe 83 de l'acte d'accusation, sous-titre entreprise criminelle
12 commune 3, forme élargie, le Procureur a clairement indiqué que les divers
13 actes criminels, tels que différents meurtres opportunistes et persécutions
14 rapportées aux paragraphes 31 et 48 de l'acte d'accusation, entraient dans
15 la forme élargie de l'entreprise criminelle commune. Le paragraphe 83 de
16 l'acte d'accusation ne laisse aucun doute que les actes de persécution
17 allégués dans le paragraphe 48 de l'acte d'accusation, à l'exception du
18 transfert forcé, faisaient partie de l'entreprise criminelle commune, la
19 forme 3. D'ailleurs, la Chambre de première instance semblait bien confuse,
20 elle aussi, dans la détermination du crime de persécution. Si la Chambre a
21 fait une distinction entre les persécutions qui auraient été constituées du
22 transfert forcé et celles qui auraient été constituées des meurtres dans le
23 paragraphe 1 735 du jugement, elle a complètement oublié ladite distinction
24 dans le paragraphe 2 108 du jugement. Pour couronner la confusion, dans le
25 paragraphe 2 108 du jugement, la Chambre de première instance a jugé que
26 Radivoje Miletic aurait planifié dans le cadre des persécutions les
27 meurtres qui auparavant n'étaient qu'une conséquence naturelle et
28 prévisible du plan commun. Difficile de faire plus confus.
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1 S'agissant de la forme 3 de l'entreprise criminelle commune, la Défense
2 est, bien entendu, consciente de la jurisprudence depuis longue date de ce
3 Tribunal. La Défense considère, toutefois, qu'à la lumière de la
4 jurisprudence des autres juridictions internationales qui ont rejeté la
5 forme 3 de l'entreprise criminelle commune, le Tribunal devrait réviser son
6 approche aussi. La position de la Défense est surtout fondée sur le fait
7 que le Tribunal s'est référé au Statut de la Cour pénale internationale
8 lorsqu'il a établi l'existence de sa théorie de l'entreprise criminelle
9 commune dans le droit international coutumier, et je me réfère à l'arrêt
10 Tadic, paragraphes 221 et 222.
11 Or, la Cour pénale internationale a rejeté la théorie de l'entreprise
12 criminelle commune. Je me réfère aux décisions rendues dans l'affaire
13 Lubanga et Katanga. Par ailleurs, comme la Défense considère que le crime
14 de persécution n'a été plaidé dans l'acte d'accusation que dans le cadre de
15 l'entreprise criminelle commune 3, et que malgré la confusion dans le
16 jugement, il semble que Radivoje Miletic ait été condamné pour les
17 persécutions commises par les meurtres sur le fondement de l'entreprise
18 criminelle commune forme 3, je souhaite attirer votre attention à une
19 décision relativement récente du Tribunal pour le Liban. Le Tribunal pour
20 le Liban est une des rares juridictions internationales qui accepte
21 l'entreprise criminelle commune, forme 3. En droit international,
22 lorsqu'une intention spécifique est nécessaire pour établir un crime dolus
23 specialis, les éléments constitutifs ne sont réunis et l'accusé ne peut
24 ainsi être déclaré coupable que s'il est démontré au-delà de tout doute
25 raisonnable qu'il entendait spécifiquement atteindre l'objectif en
26 question, c'est-à-dire qu'il était animé de cette intention spécifique. Une
27 difficulté a surgi du fait que pour condamner un individu au titre d'une
28 entreprise criminelle commune 3, l'accusé ne doit pas partager l'intention
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1 de l'auteur principal, ce qui entraîne une anomalie juridique. Si la
2 responsabilité pour l'entreprise criminelle commune forme 3 devait
3 s'appliquer, une personne pourrait être condamnée à titre de co-auteur pour
4 un crime répondant à une intention spécifique sans être mu par cette
5 intention spécifique requise. Et le Tribunal pour le Liban a conclu que la
6 meilleure approche consiste à éviter la condamnation sur la base de
7 l'entreprise criminelle commune 3 de crimes qui nécessitent une intention
8 spécifique. Décision préjudicielle sur le droit applicable rendue par la
9 Chambre d'appel le 16 février 2011, paragraphe 248.
10 La persécution demande une intention discriminatoire spécifique et, à mon
11 sens, il serait incorrect de condamner qui que ce soit pour ce crime sur la
12 base de l'entreprise criminelle commune 3 qui, par définition, exclut toute
13 intention spécifique.
14 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, nous considérons que
15 les erreurs commises par la Chambre de première instance sont d'une telle
16 ampleur qu'elles invalident le jugement en sa totalité. Toutes les
17 conclusions importantes concernant Radivoje Miletic ont été prises en
18 violation du principe in dubio pro reo. Et aucune d'elle ne répond au
19 standard au-delà de tout doute raisonnable. En conséquence, la seule
20 conclusion raisonnable qui s'impose dans cette affaire est l'acquittement
21 de Radivoje Miletic. Nous demandons donc la Chambre d'appel d'infirmer le
22 jugement en totalité, d'annuler la condamnation de Radivoje Miletic pour
23 tous les chefs de l'accusation et de l'acquitter de l'ensemble des charges.
24 Concernant nos arguments sur la peine exposés dans nos moyens 24 à 27, ces
25 moyens sont de toute évidence subsidiaires, car nous sommes convaincus que
26 Radivoje Miletic doit être acquitté. Je souhaite seulement attirer votre
27 attention que la Chambre de première instance a commis des erreurs même
28 dans cette partie-là. Ces erreurs sont notamment exposées dans nos moyens
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1 24 et 25, et je me réfère aussi à l'opinion dissidente du Juge Kwon,
2 paragraphes 60 à 74.
3 Finalement, et je termine avec ceci, dans notre moyen 28, nous avons
4 demandé que le jugement dans sa totalité soit public. L'objectif de la
5 publicité est d'assurer le contrôle du pouvoir judiciaire par le public. La
6 publicité a pour l'objectif principal la sauvegarde des droits de l'accusé,
7 mais elle n'est pas moins importante pour les victimes. La publicité du
8 jugement intégral avec tous ses motifs est d'autant plus importante dans le
9 cadre de ce Tribunal, dont la tâche principale est certes de rendre la
10 justice, mais dont le mandat est étroitement lié à la restauration et le
11 maintien de la paix et la sécurité internationale sur le territoire de
12 l'ex-Yougoslavie. Il est évident que les jugements confidentiels ne servent
13 ni les intérêts de la paix, ni les intérêts de la justice.
14 Je vous remercie.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'ai rendu une ordonnance portant
16 expurgation pour les pages du compte rendu d'audience 14.24 à 15.12.
17 Nous allons faire une pause et reprendre à 14 heures 15.
18 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 46.
19 --- L'audience est reprise à 14 heures 17.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je donne la parole au conseil qui
21 représente le bureau du Procureur.
22 Mme GOY : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je suis Barbara
23 Goy. J'interviens ici au nom du bureau du Procureur pour répondre à l'appel
24 Miletic, de concert avec mes collègues Laurel Baig et Giulia Pinzauti.
25 Depuis trois jours, vous avez entendu parler surtout de l'opération de
26 meurtre, de l'entreprise criminelle commune visant à tuer. Aujourd'hui,
27 l'appel porte surtout sur l'entreprise criminelle commune afin de déplacer
28 de force les populations de Srebrenica et de Zepa.
Page 453
1 Dans notre réponse écrite à l'appel Miletic, nous avons suivi l'ordre
2 de ces moyens d'appel. Dans notre réponse orale aujourd'hui, nous avons
3 l'intention de procéder différemment. Alors, je vais tout d'abord présenter
4 une introduction brève aux constatations de la Chambre de première instance
5 eu égard à l'entreprise criminelle commune visant à déplacer de force, ce
6 qui est pertinent en l'espèce dans le cadre de cet appel. Ensuite, je
7 répondrai à quelques contestations de Miletic par rapport à l'exécution de
8 l'entreprise criminelle commune cherchant à déplacer de force.
9 Ensuite, ma collègue Laurel Baig répondra aux contestations de Miletic par
10 rapport à sa responsabilité pénale individuelle au titre de l'entreprise
11 criminelle commune 1 et 3. Et à la fin, ma consœur Giulia Pinzauti répondra
12 au moyen d'appel sur la peine. Pour le reste, nous avons abordé ces
13 questions dans nos réponses écrites. Cela s'applique aux moyens d'appel eu
14 égard à l'acte d'accusation qui ont été abordés aujourd'hui. Pour le reste,
15 donc, nous nous reposons sur nos arguments présentés par écrit, et cela
16 s'applique également à tout ce qui a été dit aujourd'hui. Nous avons
17 répondu dans notre mémoire pourquoi les arguments de la Chambre ne sont pas
18 viciés.
19 Madame, Messieurs les Juges, la Chambre de première instance a
20 constaté que la direction politique et militaire des Serbes de Bosnie, y
21 compris Radivoje Miletic, ont partagé un objectif commun visant à déplacer
22 de force cette population musulmane de Bosnie de Srebrenica et de Zepa. Cet
23 objectif commun a vu le jour au plus tard au moment où a été donnée la
24 directive 7. Vous vous rappellerez que la directive 7, qui a été rédigée
25 par Miletic, qui a été donnée en mars 1995, fixe l'objectif pour le Corps
26 de la Drina de :
27 "Créer une situation insupportable d'insécurité totale sans espoir de
28 survie pour les populations de Srebrenica et de Zepa."
Page 454
1 Il s'agit de la pièce 5, paragraphe 5, page 10.
2 L'objectif commun de déplacer les populations des deux enclaves a été mis
3 en œuvre à travers les restrictions d'aide humanitaire et au
4 réapprovisionnement par la FORPRONU des enclaves, ainsi que par le biais de
5 bombardements sans discrimination des civils, et des attaques militaires
6 disproportionnées et sans discrimination sur les enclaves de juillet 1995.
7 Ces mesures ont provoqué une crise humanitaire pour les Musulmans de Bosnie
8 de Srebrenica et de Zepa. La population civile a fui Srebrenica compte tenu
9 des conditions qui y prévalaient.
10 A commencer par le 10 juillet 1995, les Musulmans de Bosnie, surtout les
11 femmes, les enfants et les personnes âgées, ont pris la fuite à pied, ils
12 se sont rendus à Potocari. En route, ils ont été victimes de tirs de
13 tireurs embusqués et ils ont été bombardés. A Potocari, de 20- à 30 000
14 personnes se sont retrouvées dans une situation de panique, de peur et de
15 désespoir. La situation humanitaire était déjà difficile mais elle est
16 devenue maintenant catastrophique et insupportable. Il y avait des
17 situations de sévices physiques et psychologiques, et la population a dû
18 être témoin d'une situation où le Bataillon néerlandais n'était pas en
19 mesure de les protéger, et ce, du fait des Serbes de Bosnie. Ensuite, la
20 population a dû supporter un processus de séparation extrêmement pénible.
21 Des femmes, des enfants et des personnes âgées ont été séparés des hommes
22 et ont été embarqués pour être sortis de l'enclave.
23 Les femmes, les enfants et les personnes âgées se sont retrouvés à
24 Potocari, jusqu'à 10 000 hommes de Srebrenica se sont, eux, rassemblés de
25 le village de Susnjari, et ce, en bordure de l'enclave dans la soirée du
26 11. Ils avaient peur d'être tués s'ils restaient dans l'enclave. Vers
27 minuit, les hommes ont commencé à se déplacer avec les membres de l'ABiH
28 dans une colonne vers le territoire entre les mains de l'ABiH qui se
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1 situait au nord. La colonne était surtout constituée de civils avec un
2 tiers de personnes, à peu près, étant armées. Les femmes, les enfants et
3 les personnes âgées ont été sortis de Potocari, et à partir de ce moment-
4 là, la VRS a continué vers Zepa. Dans une ambiance de contrainte, ce qu'on
5 a appelé des négociations se sont passées afin de discuter des transports
6 de la population musulmane vers l'extérieur de Zepa. Chaque fois que les
7 négociations n'aboutissaient pas selon les souhaits de la VRS, elle
8 répondait par une escalade d'attaques sur les enclaves, y compris en visant
9 les civils. Le sort de ces Musulmans de Srebrenica a commencé à être connu
10 et ça a ajouté à leur angoisse. Entre 4- et 5 000 civils musulmans et
11 blessés ont été transportés vers l'extérieur de Zepa.
12 En tout, des dizaines de milliers de Musulmans ont été déplacés.
13 En plus des crimes contre l'humanité de transfert forcé en tant
14 qu'actes inhumains et persécution fondée sur le transfert forcé, cet
15 objectif commun comprenait également le fait de terroriser ainsi que le
16 traitement cruel et inhumain sous forme de persécution.
17 Je répondrai aujourd'hui aux trois contestations de Miletic qui ont été
18 abordées oralement; deux concernent la mise en œuvre de l'ECC afin de
19 déplacer par la force. Premièrement, la première contestation, à savoir que
20 la Chambre s'est fourvoyée lorsqu'elle a constaté que cette crise
21 humanitaire était fondée sur la directive 7, qui a été rédigée par Miletic;
22 deuxièmement, l'existence d'une attaque systématique et généralisée contre
23 une population civile et le fait que le transfert forcé des civils de la
24 colonne faisait partie de cette attaque contre la population civile;
25 troisièmement, la question juridique de l'entreprise criminelle commune 3
26 par rapport à l'intention spécifique.
27 La principale contestation de Miletic est que les événements qui se sont
28 déroulée sur le terrain, qui ont causé la crise humanitaire, les
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1 restrictions aux convois et les attaques militaires, n'étaient pas fondés
2 sur la directive 7. Permettez-moi de commencer par les restrictions au
3 convoi.
4 La Chambre a été raisonnable lorsqu'elle a constaté que l'approvisionnement
5 en aide dans les enclaves a décru de manière significative au moins à
6 partir de juin 1995 sur la base des restrictions imposées au convoi par la
7 VRS en exécutant la directive 7. Jugement de première instance, 767.
8 Miletic affirme dans son moyen 5 que les restrictions imposées au convoi
9 étaient entièrement légales et justifiées et n'étaient liées d'aucune
10 manière à la directive 7. Ensuite, il conteste le fait qu'il y ait eu moins
11 d'aide en tant que telle et que c'était de la responsabilité de la VRS.
12 La Chambre a constaté qu'au moins à partir de juin 1995, il y a eu moins
13 d'aide de manière considérable dans les enclaves, et que cela a causé une
14 situation humanitaire extrêmement préoccupante.
15 Les conseils de Miletic ont fait valoir aujourd'hui que la Chambre de
16 première instance s'est fourvoyée puisqu'elle s'est reposée sur des faits
17 jugés.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi. Les interprètes ont du
19 mal à vous suivre.
20 Mme GOY : [interprétation] Je vous présente mes excuses.
21 Le conseil de Miletic a fait valoir aujourd'hui que les conclusions de la
22 Chambre de première instance consistant à dire qu'il y a eu
23 considérablement moins d'aide à partir au moins du mois de juin étaient
24 erronées parce que la Chambre de première instance s'est fondée sur les
25 faits jugés. Madame, Messieurs les Juges, la Chambre, en l'espèce, a pris
26 en considération de manière appropriée les faits jugés. La Chambre d'arrêt
27 dans Karemera, dans la décision sur l'appel interlocutoire de l'Accusation,
28 décision sur le fait de dresser le constat judiciaire du 16 juin 2000, a
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1 expliqué pourquoi le fait de dresser un constat judiciaire des faits jugés
2 n'inverse pas la charge de la preuve.
3 La Chambre ici a tenu compte des limites du constat judiciaire des
4 faits jugés, le fait qu'il ne porte pas sur les actes et la conduite de
5 l'accusé ou de son état mental. Et pour ce qui est des autres faits, la
6 Chambre doit utiliser son pouvoir discrétionnaire pour juger, soit d'agir
7 de manière rapide et de faire avancer rapidement le procès, soit de
8 défendre pleinement les droits de l'accusé, en fait, de trouver le juste
9 équilibre entre les deux. Ici, la Chambre a apprécié de manière détaillée
10 la situation dans sa décision sur les faits jugés du 26 septembre 2006.
11 Quoi qu'il en soit, Miletic n'a pas démontré quelle aurait été
12 l'incidence du fait d'accepter les faits jugés par rapport aux restrictions
13 imposées aux convois parce que la Chambre de première instance ici ne s'est
14 pas appuyée exclusivement sur les faits jugés. Dans ses conclusions, le
15 conseil de Miletic s'est référé au fait jugé 63. Pour autant qu'on le
16 sache, ce fait n'a pas été utilisé et ce n'est pas sur celui-là que s'est
17 appuyée dans son jugement la Chambre de première instance. Elle ne s'est
18 pas appuyée sur les faits 52 et 53 par rapport aux restrictions imposées
19 aux convois. Et je vous renvoie à la note de bas de page 671 ainsi qu'à la
20 note 673, mais vous verrez qu'ils ne se sont pas appuyés uniquement sur les
21 faits jugés.
22 En outre, la Chambre a tenu compte des éléments contradictoires entre les
23 membres du Bataillon néerlandais et le HCR par rapport au moment où les
24 enclaves ont connu une situation très difficile. Il a été constaté que
25 c'était au moins à partir du mois de juin.
26 En contestant cette diminution à partir du mois de juin dans sa réplique au
27 paragraphe 71, Miletic se réfère uniquement aux nombres à partir du mois de
28 février jusqu'au mois de mai 1995 et ne tient pas compte de la pièce à
Page 458
1 laquelle il se réfère, la pièce P4145, page 14, qui montre clairement qu'il
2 y a eu une diminution radicale en juin, ce qui correspond aux conclusions
3 de la Chambre.
4 La conclusion de la Chambre qu'il y a eu une diminution considérable de
5 l'aide au moins à partir du mois de juin est ainsi raisonnable, et la
6 conclusion sur la diminution s'est fondée sur les restrictions aux convois
7 en application à la directive 7.
8 La directive 7 a fixé l'objectif de restriction des convois de manière très
9 claire, et je vous cite cela de la pièce P5, page 14 :
10 "Les organes pertinents de l'Etat et militaires responsables de travailler
11 avec la FORPRONU et les organisations internationales agiront par le biais
12 de restrictions discrètes aux permis de circuler, réduiront ainsi et
13 limiteront le support logistique de la FORPRONU aux enclaves ainsi que
14 l'approvisionnement aux ressources matérielles de la population musulmane,
15 ce qui les rendra dépendants de notre bonne volonté pendant que cela, en
16 même temps, évitera de nous faire condamner par la communauté
17 internationale et par l'opinion publique internationale."
18 Le temps qui s'est écoulé entre le moment où a été donnée la directive 7 en
19 mars 1995 et la conclusion que l'aide a décru de manière considérable en
20 juin ne rend pas cette conclusion dénuée de raison. La Chambre a tenu
21 compte de ce laps de temps. Dans la note de bas de page 2796, elle a
22 signalé que d'après la directive 7, la restriction de l'aide devait être
23 faite de manière discrète pour éviter une condamnation internationale. La
24 Chambre a également conclu de manière raisonnable que l'approvisionnement
25 en aide humanitaire a été interrompu en tant que résultat des restrictions
26 imposées aux convois par la VRS.
27 De ce point de vue-là, la pénurie en aide humanitaire ne pouvait pas être
28 attribuée à la VRS, et Miletic souligne que cette situation était difficile
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1 partout en Bosnie-Herzégovine. Il souligne cela dans sa réplique,
2 paragraphe 60, que le HCR, en juin 1995, par exemple -- à en juger d'après
3 le HCR, donc, du mois de juin 1995, pour Banja Luka, eh bien, Banja Luka
4 n'a reçu aucune aide alimentaire, même si le HCR avait prévu 1 250 tonnes
5 d'aide. Pièce P4145, page 19.
6 Cet argument n'est pas convaincant parce que le même document montre que,
7 par exemple, Zenica a reçu davantage d'aide de vivres en juin 1995 que cela
8 n'a été fixé comme objectif par le HCR. Qui plus est, contrairement à
9 l'argument de Miletic, le droit international humanitaire n'autorise pas la
10 VRS à bloquer entièrement les convois, en particulier lorsque cela a pour
11 résultat une situation humanitaire préoccupante. Miletic signale qu'il y a
12 eu des armes qui ont été trouvées dans les convois du HCR ou que l'ABiH
13 recevait des vivres, du carburant, ou d'autres matériels par le biais des
14 convois d'aide humanitaire, eh bien, cela ne permet pas que l'on impose un
15 blocus total sur l'ensemble des convois. Plutôt, dans ces situations-là, le
16 droit international humanitaire prévoit que les convois soient fouillés
17 pour que les biens qui ne sont pas autorisés soient bloqués, ou d'imposer
18 des conditions par rapport à la supervision de la distribution, et je vous
19 réfère à l'article 70(3)(a) et (b) du premier protocole additionnelle.
20 Protocole 1, article 70, constitue le principe du droit international
21 coutumier, qui s'applique indépendamment de la nature du conflit, à savoir
22 :
23 "Les parties au conflit doivent permettre et faciliter un passage
24 rapide et sans encombre de l'aide humanitaire aux civils qui en ont besoin,
25 ce qui doit être impartial dans son caractère et doit être conduit sans
26 qu'il y ait de distinction hostile et doit faire l'objet du droit au
27 contrôle."
28 Article 55 du CICR.
Page 460
1 Qui plus est, d'après cette étude, page 197, une partie doit donner
2 son consentement aux passages de convois humanitaires s'il a été démontré
3 que la population civile est menacée de pénurie de vivres, de malnutrition,
4 et si une organisation humanitaire peut aider.
5 Miletic n'a pas démontré que la Chambre n'a pas été raisonnable en
6 constatant que l'approvisionnement en aide humanitaire dans les enclaves a
7 été diminué de manière considérable, au moins à partir du moins de juin,
8 sur la base des restrictions imposées aux convois en application de la
9 directive 7. Nous avons répondu aux contestations de Miletic par rapport à
10 la participation de la VRS aux restrictions aux convois. Nous l'avons fait
11 de manière détaillée dans notre mémoire écrit. Aujourd'hui, je voulais
12 simplement signaler que pour ce qui est de la responsabilité individuelle
13 pénale de Miletic, eh bien, ce qui est pertinent à cet égard, c'est sa
14 participation personnelle au processus de donner le consentement aux
15 convois. Ma collègue, Laurel Baig, parlera de cela lorsqu'il abordera la
16 question de l'entreprise criminelle commune.
17 Ensuite, Miletic conteste dans son moyen 3 le fait que l'attaque
18 militaire de grande envergure sur Srebrenica et sur Zepa, ainsi que les
19 bombardements préalables et tirs de tireurs embusqués, était fondée sur la
20 directive 7. Dans sa réplique, paragraphe 37, Miletic admet que l'attaque
21 militaire sur Srebrenica était menée sans discrimination et qu'elle était
22 disproportionnée et, par conséquent, illégale. Maintenant, il conteste
23 uniquement le fait que l'attaque sur Srebrenica, ainsi que celle sur Zepa,
24 était fondée sur la directive 7.
25 S'agissant maintenant de l'attaque sur Zepa, de manière analogue à
26 celle contre Srebrenica, elle était dirigée également contre la population
27 civile parce qu'elle était sans discrimination et disproportionnée.
28 Jugement, 772 et 775, paragraphes du jugement.
Page 461
1 La Chambre a été raisonnable lorsqu'elle a constaté que les attaques
2 sur les deux enclaves par la VRS étaient fondées sur la directive 7. Les
3 ordres qui ont été donnés par le Corps de la Drina montrent que l'attaque
4 militaire sur Srebrenica était fondée sur la directive 7. L'attaque
5 militaire a commencé avec les deux ordres du 2 juillet 1995, ordre Krivaja
6 95, et l'ordre préparatoire à cet effet. L'ordre préparatoire ordonne de
7 passer de la défense à l'attaque, et le deuxième ordre fixe cet objectif de
8 manière même plus claire, en ordonnant de réduire les enclaves à leurs
9 zones urbaines et de créer des conditions pour éliminer les enclaves.
10 L'ordre du Corps de la Drina de Krivaja 95 ordonne, et je cite,
11 "d'agir en application des directives 7 et 7/1." Pièce 5DP106, page 1, et
12 pièce P107, page 3.
13 Cela montre clairement que l'attaque militaire sur Srebrenica était
14 fondée sur la directive 7. Rien que cela, "en application de la directive 7
15 et 7/1" contredit l'argument de Miletic que la directive 7/1, qui a été
16 elle aussi rédigée, a changé la directive 7. En revanche, c'est plutôt la
17 Chambre qui a eu raison de constater, et ce, de manière raisonnable, que la
18 directive 7 -- que la directive 7/1, excusez-moi -- en fait, met en œuvre
19 la directive 7.
20 L'attaque de Milicic [comme interprété] sur Zepa a été fondée de
21 manière comparable sur la directive 7. La Chambre a eu raison de constater
22 ce fait sur la base de la directive 7, qui a été spécifiquement adressée à
23 Srebrenica et à Zepa. Elle a constaté que de manière comparable que cette
24 stratégie a été mise en œuvre contre les deux enclaves après le fait de
25 donner la directive 7. Paragraphe 773 du jugement de première instance.
26 L'argument de Miletic que nous avons entendu de nouveau, à savoir que
27 c'était l'ordre de Karadzic du 9 juillet de prendre la ville de Srebrenica
28 qui a changé l'objectif, n'est pas convaincant. Plutôt, après qu'on ait
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1 atteint l'objectif du deuxième ordre de Krivaja, on a pris Srebrenica et on
2 a pris Zepa. L'ordre Krivaja 95 initialement ne comprenait pas la prise de
3 Srebrenica en tant que telle, la ville de Srebrenica, parce qu'on avait
4 apprécié au sein de la VRS, au sein de son commandement, que les conditions
5 n'étaient pas réunies, mais cela a été déjà annoncé par l'ordre de créer
6 des conditions afin d'éliminer les enclaves, et il a été prévu qu'un ordre
7 allait suivre de prendre Srebrenica à partir du moment où les conditions
8 étaient réunies.
9 Non seulement les attaques militaires sur les enclaves de juillet, mais
10 aussi des incidents précédents de bombardement et de tirs de tireurs
11 embusqués étaient fondés sur la directive 7. La Chambre a constaté cela à
12 partir du mois de mai jusqu'à l'attaque militaire de juillet, que pendant
13 cette période, de plus en plus, on a bombardé et on a utilisé des tirs de
14 tireurs embusqués vers l'enclave de Srebrenica.
15 Miletic avance que les tirs des tireurs embusqués n'auraient pas pu être
16 fondés sur la directive 7 parce qu'il y a eu également des événements de
17 tirs de tireurs embusqués avant que cette directive ne soit donnée. Cet
18 argument ne nous montre pas que la conclusion de la Chambre n'était pas
19 raisonnable. Momir Nikolic a expliqué que le fait de prendre pour cible les
20 civils par les tireurs embusqués ne faisaient pas partie de ce processus de
21 rendre la vie difficile pour la population des enclaves en les empêchant
22 d'avoir une vie normale. Jugement, paragraphe 207 [comme interprété]. Par
23 conséquent, la continuation des activités de tirs embusqués correspond à ce
24 schéma qui est prévu par la directive 7.
25 Miletic conteste également le fait que le bombardement par la VRS le 25 mai
26 1995 était fondé sur la directive 7, parce que c'était un événement qui
27 n'était pas prévu, une réponse aux frappes aériennes de l'OTAN contre les
28 positions de la VRS. Cet argument ne tient pas compte du fait que le
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1 bombardement par la VRS était sans discrimination, était une attaque sur
2 les civils et, par conséquent, correspond à ce plan de créer une situation
3 insupportable. Par conséquent, Miletic n'a pas démontré que la Chambre
4 n'était pas raisonnable lorsqu'elle a compris cela en tant que partie de la
5 mise en œuvre de la directive 7.
6 Alors, maintenant la deuxième partie de mon exposé.
7 La Chambre a constaté que l'attaque sur la population civile pour ce
8 qui est donc des éléments généraux de crimes contre l'humanité commence par
9 le moment où la directive 7 a été donnée, à savoir en mars 1995. Miletic a
10 encore contesté cela aujourd'hui, et nous y avons répondu aux paragraphes
11 39 à 42. Paragraphe 41, nous avons également donné la liste des actes de
12 violence.
13 Aujourd'hui j'aimerais insister sur le fait que pour la condamnation de
14 Miletic, il importe peu de savoir si l'attaque contre la population civile
15 a commencé à ce moment-là. Ce qui compte, c'est que les crimes pour
16 lesquels il a été condamné font partie de l'attaque généralisée
17 systématique, et le transfert forcé ici était fondé sur les mêmes actes que
18 l'attaque, les restrictions sur les convois, le bombardement, et les tirs
19 isolés, et l'attaque militaire contre l'enclave. Tous ces actes étaient
20 systématiques dès le début en raison de l'existence d'un plan qui avait été
21 conçu préalablement et qui était énoncé dans la directive 7.
22 Eu égard à l'élément dit de chapeau, Miletic conteste également sa
23 condamnation pour le transfert forcé des civils, des hommes civils qui ont
24 fui avec la colonne. Dans son moyen 7, Miletic plaide que l'attaque contre
25 eux était une attaque contre une cible militaire légitime, étant donné la
26 présence de soldats de l'ABiH dans la colonne, faisant que tout acte contre
27 la colonne ne constituait pas ou ne faisait pas partie de l'attaque contre
28 la population civile, aux fins de l'élément générique de crimes contre
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1 l'humanité.
2 En ce qui concerne la colonne, j'aimerais faire remarquer que la
3 Chambre a constaté que deux tiers de la colonne étaient constitués de
4 civils. La Chambre de première instance, au paragraphe 270, a dit que la
5 colonne était composée d'éléments civils et d'éléments militaires et il y a
6 des indications selon lesquelles près d'un tiers des hommes de la colonne
7 étaient armés. En outre, ces civils, malgré ce qui est allégué par Miletic
8 aujourd'hui, des combattants, du fait de s'être rejoints à la colonne;
9 plutôt, c'étaient toujours des civils. Ils ne perdaient leur protection
10 qu'à la condition de participer directement aux hostilités. Et Miletic n'a
11 donné aucun élément de preuve pour étayer ce fait.
12 Quoi qu'il en soit, Madame et Messieurs les Juges, les arguments de
13 Miletic se rapportant à une attaque sur la colonne, en fait, se fondent sur
14 une mauvaise interprétation du jugement. Les hommes civils qui se sont
15 réunis à Susnjari dans la soirée du 11 et ensuite se sont déplacés avec la
16 colonne en même temps que des membres de l'ABiH ont quitté leurs maisons à
17 Srebrenica pour les mêmes raisons que les femmes, les enfants, et les
18 personnes âgées. Ces hommes ont fui en raison de la crise humanitaire
19 provoquée par l'attaque contre l'enclave. Cette crise a été provoquée par
20 les restrictions de l'aide humanitaire, les bombardements, les tirs isolés,
21 et l'attaque militaire sur Srebrenica. Je me réfère ici au jugement, 926 et
22 929.
23 Cela veut dire que le transfert forcé de tous les groupes de
24 victimes, y compris les hommes civils, a commencé au moment où ils ont été
25 contraints de quitter leurs maisons à Srebrenica. Donc, la force pertinente
26 pour ce qui est du transfert forcé n'était pas du tout du fait de l'attaque
27 contre la colonne. C'étaient les conditions dans leurs maisons à Srebrenica
28 qui ont contraint les hommes civils à se déplacer. Ceci rentre donc bien
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1 dans le cadre de l'attaque contre la population civile. C'est ainsi que
2 l'argument de Miletic concernant l'attaque contre la colonne en tant que
3 telle sont absolument malvenus.
4 La fin de mon plaidoyer, j'aimerais me tourner vers la question
5 d'ordre juridique soulevée dans le moyen 12 de l'appel de Miletic qui a été
6 soulevée aujourd'hui de nouveau, à savoir la question de l'entreprise
7 criminelle commune 3 comme faisant partie du droit coutumier international.
8 Le jugement en appel de Tadic a analysé de façon approfondie le droit
9 coutumier international et en a conclu que l'ECC 3 en forme partie. Par la
10 suite, le Tribunal ainsi que la Chambre d'appel ont confirmé que le droit
11 coutumier international comprend, englobe l'ECC 3. Et nous vous avons
12 renvoyé à la jurisprudence pertinente dans notre mémoire. Miletic n'évoque
13 pas des affaires supplémentaires citées en soutien de notre mémoire. Ses
14 références dans les mémoires, et ainsi que les références aux décisions de
15 la CPI, et de la Cour européenne, et du Tribunal spécial pour le Liban ne
16 tend pas à saper l'analyse du Tribunal, car ce Tribunal n'est pas tenu par
17 les décisions d'autres cours.
18 En particulier, en ce qui concerne ce qui a été dit aujourd'hui, à
19 savoir que la Chambre d'appel du Tribunal spécial pour le Liban a rejeté
20 l'ECC 3 en ce qui concerne les crimes avec l'intention spécifique,
21 j'aimerais signaler que la Chambre d'appel dans Brdjanin dans sa décision
22 en appel interlocutoire du 19 mars [comme interprété] a relevé, concernant
23 ce point précis, qu'il est erroné de faire l'amalgame le mens rea
24 nécessaire pour les crimes avec intention spécifique avec les critères
25 mentaux pour le mode de responsabilité. Et que dans bon nombre d'affaires,
26 comme le fait d'aider et d'encourager et la responsabilité des supérieurs
27 hiérarchiques, différents critères de mens rea peuvent être appliqués à
28 différents auteurs et à d'autres.
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1 J'aimerais maintenant, sauf question de votre part, donnez la parole
2 à ma collègue, Laurel Baig, qui va maintenant parler de la responsabilité
3 pénale individuelle de Miletic.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
5 Oui, vous pouvez poursuivre.
6 Mme BAIG : [interprétation] Bonjour, Madame et Monsieur le Juge.
7 La Chambre de première instance a constaté que Miletic était responsable
8 sur le plan pénal pour les crimes que Mme Goy a esquissé suite à sa
9 participation dans une entreprise criminelle commune, dont l'objectif
10 commun était de chasser par la force les Musulmans bosniaques de Srebrenica
11 et Zepa. Miletic s'oppose aux conclusions de la Chambre de première
12 instance et cherche à minimiser sa responsabilité et de faire passer le
13 blâme pour ces événements tragiques sur d'autres personnes. Mais aucun de
14 ces arguments ne permet de démontrer que les conclusions de la Chambre
15 étaient déraisonnables du point de vue des faits ou se fondaient sur une
16 mauvaise interprétation juridique.
17 Je parlerai en trois parties. D'abord, je parlerai du rôle de Miletic dans
18 l'entreprise criminelle commune pour le transfert forcé; deuxièmement, je
19 parlerai de sa condamnation pour meurtre au titre de l'ECC 3; et enfin, je
20 parlerai pourquoi ses arguments concernant le mode de planification de la
21 responsabilité n'ont aucun impact sur le jugement.
22 J'aimerais commencer par le rôle central qu'a joué Miletic dans
23 l'entreprise criminelle commune. Il était l'auteur responsable de la
24 rédaction du plan; il a participé aux restrictions imposées sur les
25 convois, il était le centre de l'information et de la coordination. En tant
26 que chef de l'administration en charge des opérations et de la formation au
27 sein de l'état-major de la VRS, Miletic traduisait les décisions de ses
28 supérieurs hiérarchiques et en faisant des ordres écrits. C'est lui qui
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1 avait la responsabilité pour l'élaboration de tous les documents de combat
2 qui étaient émis par l'état-major. C'est son administration qui planifiait
3 les opérations au niveau stratégique, c'est-à-dire les opérations qui
4 faisaient intervenir toute l'armée ou la force de deux corps ou plus, des
5 opérations complexes.
6 La directive 7, dont on a parlé ce matin, figure parmi ces documents, et je
7 vous rappelle que c'est la pièce 5 au dossier.
8 Je vous invite à consulter la dernière page de la directive 7 qui dit très
9 clairement "rédigée par le colonel Radivoje Miletic". Dans ce document,
10 Miletic énonce la plan illégal qui contraint les Musulmans bosniaques à
11 quitter les enclaves, donne des affectations aux forces serbes bosniaques
12 permettant d'arriver à cet objectif qui consistait à créer "une situation
13 insoutenable d'insécurité totale sans espoir de survie ou de vie pour les
14 habitants de Srebrenica et Zepa."
15 Miletic lui-même reconnaît au paragraphe 403 de son mémoire que ce passage
16 peut être compris comme étant discriminatoire envers la population
17 musulmane. C'est la seule façon dont on peut comprendre le plan de la
18 directive 7.
19 La Chambre a constaté que l'objet de cette instruction était les
20 opérations. Et ceci rentrait sous le coup de la responsabilité de Miletic
21 en sa qualité de chef de l'administration chargé des opérations et de la
22 formation. C'est ainsi que la Chambre a conclu de façon raisonnable dans
23 son paragraphe 1 651 du jugement que Miletic, non seulement, était celui
24 qui avait rédigé le texte mais c'est celui qui avait fourni les
25 informations sous-jacentes pour cette instruction illégale.
26 Miletic vous invite à accepter une interprétation déraisonnable de son rôle
27 dans la rédaction. Il veut faire croire qu'il a été seulement un secrétaire
28 qui aurait simplement réuni les mots des autres. Il faut ici signaler qu'il
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1 a avancé ces mêmes arguments lors du procès, qui ont été à juste titre
2 rejetés par la Chambre de première instance. Au moment où cette directive
3 était rédigée, Miletic était un colonel. Il fut ensuite promu au rang de
4 général le 28 juin 1995. Miletic a participé dans la réunion d'aptitude au
5 combat de janvier 1995, au cours de laquelle Karadzic a parlé des
6 stratégies de guerre pour la Republika Srpska avec l'élite politique et
7 militaire. Miletic avait pour tâche à cette réunion de retirer les
8 conclusions les plus importantes de la réunion qui devaient former le
9 fondement de la directive 7. Je vous renvoie ici au paragraphe 1 648 du
10 jugement.
11 La Chambre de première instance, dans ses conclusions, a pris en compte le
12 fait que la directive 7 a été rédigée en suivant ce qui était convenu
13 d'appeler la méthode intégrale. Dans cette procédure, chaque organe de
14 commandement contribue à la version finale de l'instruction. La Chambre a
15 également pris en compte et a considéré qu'il était possible que la
16 directive 7 aurait pu être discutée lors de la réunion du 16 mars faisant
17 intervenir Karadzic, Milovanovic, et Tolimir. Mais même en prenant cela en
18 compte, la Chambre de première instance a fini par conclure de façon
19 raisonnable, en son paragraphe 1 751 du jugement, que, je cite :
20 "Indépendamment du fait que ce soit lui qui ait matériellement rédigé la
21 directive ou inséré les mots dans les parties criminelles, en raison de son
22 rôle central dans le processus de rédaction, Miletic a donné aux
23 destinataires une vue d'ensemble de la vision globale des leaders
24 politiques sur l'autorité du commandant suprême."
25 Madame et Messieurs les Juges, ainsi que le dit la directive 7, Miletic a
26 participé aux restrictions sur l'assistance fournie aux enclaves, ce qui a
27 contribué au transfert forcé des populations civiles. Aux paragraphes 1 655
28 à 1 660 du jugement, la Chambre a adéquatement analysé les approbations,
Page 470
1 refus, et notifications concernant les convois qui ont été signés par
2 Miletic pendant la période en question. La Chambre a reconnu qu'elle ne
3 disposait pas de tous les documents se rapportant au convoi en sa
4 possession, mais ce qui est important dans le cas d'espèce, c'est que
5 Miletic a joué un rôle dans le processus d'approbation des convois et que
6 le résultat global du processus fut une réduction significative de l'aide
7 humanitaire, et ceci, dès juin 1995. Ainsi que prévu par la directive 7, et
8 bien connu de son auteur, Miletic, ceci a contribué à la catastrophe
9 humanitaire qui a été créée par les membres de l'entreprise criminelle
10 commune qui visait à chasser de force les habitants musulmans bosniaques
11 des enclaves.
12 Miletic a également contribué à l'entreprise criminelle commune en servant
13 de coordinateur de l'information. La Chambre de première instance a accepté
14 les éléments de preuve versés au dossier démontrant que Miletic était le
15 "cœur de l'état-major de la VRS" et la personne "la mieux informée sur la
16 situation dans les divers théâtres de guerre". Miletic conseillait et
17 informait dans les deux sens le long de la chaîne de commandement. En
18 remontant des commandants sur le terrain, Miletic recevait et étudiait
19 leurs rapports, qui lui permettaient de suivre l'avancée des opérations et
20 l'exécution des ordres des commandants. Il exploitait ces informations
21 détaillées pour rendre compte auprès de son supérieur hiérarchique direct,
22 Milovanovic, et le supérieur auquel rendait compte Milovanovic, à savoir
23 Mladic.
24 Et c'était également son travail de faire en sorte que le président
25 Karadzic soit tenu informé, ainsi que le commandement Suprême, quant aux
26 activités de la VRS grâce à des rapports quotidiens de l'état-major.
27 Donc, dans les deux directions, Miletic assurait la circulation de
28 l'information des ordres émanant de l'état-major général jusqu'aux unités
Page 471
1 subordonnées.
2 Au cœur de l'état-major principal, Miletic était à une place tout à fait
3 unique et pouvait coordonner les unités sur le terrain. Au paragraphe 1
4 712, la Chambre de première instance a expliqué : Compte tenu de l'ampleur
5 et de l'étendue de l'attaque militaire et des opérations de déplacement
6 forcé, la coordination de l'état-major était essentielle. La Chambre de
7 première instance a conclu que Miletic se trouvait au centre de cette
8 coordination.
9 Si nous considérons son rôle dans la planification des crimes, sa
10 participation à la restriction de l'aide apportée aux enclaves, ainsi que
11 du rôle central qu'il a joué en tant que centre de coordination et
12 d'information, la Chambre de première instance a, à juste titre, condamné
13 Miletic pour sa participation à une entreprise criminelle commune.
14 Madame, Messieurs les Juges, je souhaite répondre à trois des contestations
15 à la condamnation de Miletic dans les grandes lignes qui ont été présentées
16 dans les mémoires ainsi que dans quelques-uns des arguments ce matin : ce
17 n'était pas lui, il n'était pas là et cela n'était pas illégal.
18 Je vais maintenant aborder son premier argument, à savoir que cela n'était
19 pas lui. Miletic tente de prendre ses distances par rapport à la
20 responsabilité en rejetant la faute sur ses supérieurs hiérarchiques, mais,
21 bien évidemment, leur participation ne peut pas enlever à Miletic sa
22 responsabilité et le rôle personnel qu'il a joués dans ces événements.
23 Tout d'abord, il affirme qu'il n'était pas dans l'entourage ou le cercle du
24 commandant de la VRS, Mladic. Pour étayer sa proposition, Miletic cite à
25 maintes reprises au fait que Mladic a omis de le remercier lors de
26 l'allocution de 1996, le jour de l'An. Cet argument n'est pas convaincant
27 au vu des éléments de preuve concernant ses rapports étroits avec Mladic.
28 Pendant toute la durée des événements de 1995, Miletic travaillait au QG de
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1 l'état-major avec Mladic. Comme le reconnaît Miletic au paragraphe 89 de sa
2 réplique, il relevait de sa responsabilité générale de coucher par écrit
3 les décisions de Mladic.
4 La Chambre de première instance a constaté que Miletic et Mladic se
5 rencontraient régulièrement. Par exemple, Miletic a assisté aux réunions
6 quotidiennes le matin avec Mladic ainsi que les commandants adjoints. Il
7 s'agissait de les informer sur les problèmes qui surgissaient dans le
8 théâtre des opérations. D'autres éléments de preuve concernant la nature
9 même de leur relation se trouvent à la pièce 1376, qui est une écoute
10 téléphonique abordée au paragraphe 1 696 du jugement. Dans cette
11 conversation enregistrée, Mladic parle de Miletic et l'appelle par son
12 surnom, "Mico", et l'appelle "Burazer", ce qui signifie "pote".
13 Madame, Messieurs les Juges, le fait que la Chambre de première
14 instance n'ait pas permis (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 Madame, Messieurs les Juges, Miletic tente également de rejeter sa
22 responsabilité criminelle sur son supérieur hiérarchique Milovanovic, qui
23 était son chef d'état-major au sein de la VRS. Milovanovic n'était pas au
24 QG de l'état-major entre mai et octobre 1995. A ce moment-là, Miletic
25 travaillait dans le bureau de Milovanovic.
26 Pardonnez-moi, ma collègue vient de m'indiquer que lorsque j'ai
27 évoqué cette pièce à conviction, eh bien, qu'il faudrait expurger cette
28 ligne-là. Je peux vous préciser exactement à quel endroit du compte rendu
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1 d'audience cela se situe. Pardonnez-moi.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors, vous devez nous donner la
3 ligne en question, s'il vous plaît.
4 Mme BAIG : [interprétation] D'accord. Merci.
5 Alors, je disais qu'il essaie de rejeter sa responsabilité et la faire
6 porter à Milovanovic. Lorsque Milovanovic était absent, Miletic travaillait
7 depuis son bureau et signait de nombreux documents en qualité de remplaçant
8 du chef d'état-major. Aux paragraphes 1 633 et 1 634, la Chambre de
9 première instance a constaté que Miletic, techniquement parlant, ne
10 remplaçait pas Milovanovic, mais que néanmoins il a assumé certaines
11 fonctions de Milovanovic en son absence.
12 Madame, Messieurs les Juges, je dois insister maintenant sur le fait que le
13 rôle de Miletic dans la rédaction de la directive 7 se fondait sur ses
14 fonctions normales puisqu'il était le chef du service chargé des opérations
15 et de l'inspection, et non pas parce qu'il remplaçait Milovanovic. Ainsi
16 que son argument concernant l'endroit où se trouvait Milovanovic à l'époque
17 au moment où il a rédigé cette directive n'est pas pertinent.
18 Miletic a contesté la manière dont la Chambre de première instance a abordé
19 la question de la déposition de Milovanovic au moyen d'appel 20 ce matin.
20 Et, encore une fois, je dois vous donner le détail de notre mémoire en
21 réponse aux paragraphes 310 à 316, la Chambre d'appel a évalué comme il se
22 doit la déposition de Milovanovic avec une très grande prudence, et à la
23 lumière du rôle qu'il a joué dans ces événements.
24 Je vais maintenant parler du deuxième argument, à savoir qu'il n'était pas
25 là. Miletic fait valoir qu'il n'a pas participé au transfert forcé à cette
26 opération en se fondant sur le fait qu'il était absent du QG de l'état-
27 major entre le 7 et le 11 juillet. Mais cette courte absence ne minimise
28 pas pour autant le rôle central qu'il a joué dans la planification et
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1 l'exécution de l'objectif criminel commun. La Chambre de première instance
2 s'est penchée sur cette question et a expliqué pourquoi, compte tenu de sa
3 contribution générale, que son absence n'a pas diminué le rôle ou minimisé
4 le rôle qu'il a joué lors de la mise en œuvre du plan entre le mois de mars
5 et le mois d'août. Je souhaite attirer, Madame, Messieurs les Juges, votre
6 attention sur le paragraphe 1 667 et à la note en bas de page 5211. Le
7 droit n'exige pas que chaque membre de l'entreprise criminelle commune
8 participe à chaque réunion ou à chaque prise de décision. La Chambre de
9 première instance a fait preuve de prudence, prudence tout à fait adéquate,
10 lorsqu'elle a apprécié les rapports qui ont été distribués en son nom en
11 son absence, et a refusé de rendre des conclusions à cet égard contre lui.
12 Au lieu de cela, la Chambre de première instance a constaté que Miletic
13 était informé dans le détail sur les évolutions à Srebrenica dès son retour
14 à l'état-major dans la matinée du 12 juillet alors que l'attaque contre la
15 population civile était en cours.
16 Contrairement à ce que suggère Miletic - comme l'a déjà expliqué dans le
17 détail Mme Goy - le plan n'est pas brusquement devenu un plan criminel en
18 l'absence de Miletic le 9 juillet 1995, lorsque Karadzic a donné l'ordre de
19 prendre le contrôle de Srebrenica. Le plan qui visait à déplacer par la
20 force la population avait déjà été élaboré au plus tard dans la directive
21 7. L'ordre du 9 juillet n'était pas le commencement, le début du plan, ni
22 un changement brusque du plan, c'était le point culminant du plan commun
23 dont Miletic était l'auteur, et à propos duquel il était tout à fait au
24 courant.
25 Madame, Messieurs les Juges, concernant le troisième argument de la
26 Défense, à savoir que ses actes n'étaient pas des actes illégaux, Miletic
27 tente de se décharger de sa responsabilité en faisant valoir que ses actes
28 faisaient simplement partie de ses obligations normales, à savoir de
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1 recevoir, de rédiger et de transmettre les informations. Il faut prendre
2 ceci au pied de la lettre, à savoir un aveu de ses contributions à
3 l'entreprise criminelle commune, que c'était récurrent et continue.
4 J'ai trois arguments à faire valoir en guise de réponse. Tout d'abord, dans
5 la mesure où des actes individuels n'étaient pas illégaux, abstraitement
6 parlant, cela ne décharge pas Miletic de sa responsabilité pénale. La
7 Chambre d'appel a confirmé à maintes reprises que les contributions à
8 l'entreprise criminelle commune ne sont pas forcément pénales ou
9 criminelles en elles-mêmes.
10 Deuxièmement, Miletic fait valoir qu'il avait l'intention de poursuivre ou
11 de réaliser uniquement des objectifs militaires, et qu'il n'était pas au
12 courant de crimes, eh bien, ceci est contraire aux éléments de preuve
13 présentés. Il était la personne qui a rédigé le plan criminel, il a
14 contribué à l'objectif commun de cette entreprise criminelle commune parce
15 qu'il était le centre des informations. Miletic savait exactement ce qui se
16 passait.
17 Pour finir, même s'il avait rempli les fonctions qui étaient les siennes au
18 sein de l'état-major en l'absence des attaques, ce qui est important ici,
19 c'est qu'il l'a fait dans le but de contribuer à la réalisation du plan
20 criminel commun.
21 Miletic a été condamné comme il se doit pour avoir commis des actes de
22 persécution en se fondant sur sa participation à l'entreprise criminelle
23 commune qui visait à déplacer par la force la population musulmane de
24 Bosnie de Srebrenica et de Zepa. Miletic n'a pu démontrer aucune erreur
25 dans les conclusions rendues par la Chambre de première instance.
26 Je peux vous dire à quel endroit il faut rédiger le passage en question.
27 Page 72, lignes 17 à 20, me semble-t-il.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
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1 Mme BAIG : [interprétation] Je souhaite, Madame, Messieurs les Juges,
2 maintenant parler de la condamnation pour meurtre de Miletic conformément à
3 l'entreprise criminelle commune 3.
4 La Chambre a constaté à la majorité que deux incidents distincts de
5 meurtres opportunistes à Potocari le 13 juillet 1995 constituaient une
6 conséquence naturelle et prévisible de l'entreprise criminelle commune qui
7 visait à déplacer par la force : d'abord, le meurtre de neuf hommes
8 musulmans de Bosnie à 500 mètres environ de la base de Bataillon
9 néerlandais; et deuxièmement, le meurtre d'un homme musulman de Bosnie près
10 de la maison blanche.
11 Lors d'une opération de transfert forcé et une opération de cette ampleur
12 qui impliquait le déplacement de dizaines de milliers de civils et qui se
13 fondait sur l'intention de créer un "climat insoutenable et d'insécurité"
14 impliquait qu'il fallait restreindre de façon importante l'aide humanitaire
15 dont la population avait besoin, cela entraîne le traitement cruel et
16 inhumain, ainsi que la terrorisation [phon] des civils, ainsi que le
17 pilonnage et les tirs embusqués, et, dans des conditions comme cela, il est
18 tout à fait raisonnable que la Chambre de première instance conclut en
19 l'espèce qu'il était prévisible que des individus puissent être tués.
20 Au paragraphe 1 726, la Chambre de première instance a constaté, et je cite
21 :
22 "Suite au niveau de participation de Miletic, l'aperçu ou la compréhension
23 qu'il avait de l'opération à grande échelle ainsi que sa connaissance des
24 événements, lui, sans doute plus que tout autre, était en mesure de prévoir
25 que ce mouvement à grande échelle de la population conduirait ou donnerait
26 lieu à des meurtres opportunistes…"
27 Miletic reprend l'idée que les victimes étaient aux mains des forces bosno-
28 serbes au moment où ces personnes sont mortes, pour affirmer que cela
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1 faisait partie de l'opération meurtrière plutôt que du transfert forcé.
2 Mais il n'a pas démontré que la Chambre n'a pas été déraisonnable
3 lorsqu'elle a constaté que ces meurtres étaient la conséquence naturelle et
4 prévisible, correspondant à la fois au fait de déplacer par la force et de
5 commettre des meurtres, et les deux éléments doivent être compris dans le
6 plan de l'entreprise criminelle commune.
7 La Chambre a fait très attention de tenir compte de cette question, et a,
8 comme il se doit, fait une différence entre les meurtres opportunistes à
9 Potocari le 13 juillet, et les autres meurtres opportunistes qui font
10 l'objet d'accusation en l'espèce. Il n'y a que les meurtres du 13 juillet,
11 les meurtres opportunistes du 13 juillet à Potocari qui constituaient la
12 conséquence prévisible et naturelle des deux entreprises criminelles
13 communes. La raison en est simple : il n'y avait que ces meurtres-là qui se
14 sont déroulés à un endroit et à un moment où les deux entreprises
15 criminelles communes étaient mises en œuvre. Les victimes étaient à
16 Potocari parce qu'elles avaient déjà été déplacées par la force de chez
17 elles à Srebrenica. Le transfert forcé et ce processus, y compris la
18 séparation des hommes, des femmes et des enfants, et des personnes âgées,
19 était toujours en cours lorsque les victimes ont été tuées. Même si les
20 victimes se trouvaient aux mains de l'ennemi, et dans ce cas, les victimes
21 étaient détenues, confer le paragraphe 795 du jugement, ces personnes
22 n'avaient pas encore été transportées dans un centre de détention. Une
23 illustration de cela est cet homme qui a été tué près de la maison blanche
24 parce qu'il a été abattu au moment où il résistait et ne souhaitait être
25 emmené par les forces bosno-serbes.
26 Miletic affirme qu'il n'était pas au courant de certains faits, tels que
27 l'intention des forces serbes d'entrer dans Srebrenica, ni des conditions
28 qui prévalaient à Potocari, et ceci est catégoriquement contredit par les
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1 éléments de preuve. La Chambre de première instance a constaté de façon
2 raisonnable, au paragraphe 1 715, que Miletic avait pleine connaissance de
3 la situation à Srebrenica et Zepa, avant, pendant, et après l'attaque. Le
4 12 juillet, la veille des meurtres opportunistes, Miletic a informé Mladic
5 que la population était déplacée par la force en grand nombre, en précisant
6 qu'il s'agissait d'environ 10 000 Musulmans. Confer la pièce P44 et P2748.
7 Miletic évoque peut-être que la VRS et le MUP posaient des embuscades aux
8 personnes qui tentaient de fuir.
9 Je souhaite aborder la question des incohérences qui a été abordée ce matin
10 dans les conclusions portant sur les auteurs des crimes de neuf hommes qui
11 ont été tués dans l'enceinte du Bataillon néerlandais. Comme l'a précisé
12 mon collègue ce matin, les constatations portant sur les crimes abordés par
13 la Chambre de première instance, la Chambre a constaté que les meurtres ont
14 été commis par les forces bosno-serbes; paragraphe 359. Pour ce qui est de
15 la responsabilité de Miletic, la Chambre de première instance a estimé que
16 les auteurs appartenaient à la VRS; paragraphe 1 027.
17 Dans la situation qui les intéresse aujourd'hui, il s'agit d'une
18 distinction qui n'a aucune incidence sur le jugement. Etant donné que la
19 prise de contrôle de Potocari faisait partie d'une opération de combat, le
20 terme de "VRS" qui décrit les groupes d'auteurs peut être interprété comme
21 comprenant le MUP qui avait été resubordonné ou comprenant un MUP
22 resubordonné. Sans resubordination officielle, les actes du MUP peuvent
23 toujours être attribués à Miletic par le truchement d'autres membres de
24 l'entreprise criminelle commune, tels que Mladic et Karadzic, et parce que
25 les auteurs physiques faisaient partie d'eux ou agissaient de concert avec
26 des groupes hiérarchiques qui les contrôlaient. Confer l'arrêt Martic,
27 paragraphe 195.
28 La Chambre de première instance a conclu de façon raisonnable en se fondant
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1 sur les éléments de l'espèce que les meurtres de Potocari constituaient une
2 conséquence prévisible et naturelle de l'entreprise criminelle commune
3 visant à chasser par la force que Miletic pouvait prévoir cette possibilité
4 et qu'il a délibérément pris ce risque. Paragraphe 1 082 du jugement.
5 Le fait qu'une autre Chambre, en se fondant sur d'autres éléments de
6 preuve, en tenant compte d'autres circonstances, une Chambre qui aurait pu
7 parvenir à d'autres conclusions n'a qu'une incidence sur les condamnations
8 rendues raisonnablement par la Chambre de première instance s'agissant de
9 la condamnation de Miletic conformément à l'entreprise criminelle commune 3
10 pour ces meurtres.
11 Et pour finir, Madame, Messieurs les Juges, je souhaite aborder la question
12 des arguments de Miletic au moyen d'appel 8 portant sur la planification.
13 Miletic conteste les conclusions de la Chambre qui ont estimé qu'il était
14 responsable à la fois de la planification et de la commission des crimes
15 par l'entreprise criminelle commune, mais cette erreur n'a aucune incidence
16 sur sa condamnation ni sur sa peine. La Chambre dispose de pouvoir
17 discrétionnaire et peut, bien sûr, déclarer l'accusé coupable de multiples
18 façons en se fondant sur des modes concomitants de responsabilité, ce
19 qu'elle doit faire lorsqu'il s'agit de clairement représenter l'ampleur du
20 comportement criminel de l'accusé. Dans le résumé des conclusions des
21 accusations de contre Miletic, au paragraphe 2 108 du jugement, la Chambre
22 de première instance a constaté qu'il réunissait les deux éléments, à
23 savoir le fait de commettre les crimes et de planifier les crimes de
24 persécution. S'agissant néanmoins du dispositif à la page 835 du jugement,
25 vous constaterez que la Chambre de première instance ne site que l'article
26 7(1), le fait de commettre. Il ne condamne pas l'accusé en se fondant sur
27 le mode de planification. Ceci cadre avec les constations factuelles de la
28 Chambre aux paragraphes 1 722 et 1 731 du jugement, à savoir que son
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1 comportement peut être décrit comme étant quelqu'un qui a commis l'acte de
2 persécution par sa participation à l'entreprise criminelle commune aux fins
3 de déplacer par la force. Il est clair que Miletic n'a été condamné que
4 pour le mode de responsabilité qui correspond à une commission de crimes.
5 Il faut donc rejeter le moyen d'appel numéro 8.
6 Avant de conclure, je souhaite ajouter une référence à nos arguments
7 concernant le moyen 23 de l'appel Miletic, à savoir au manque de décision
8 sur une requête de la Défense. Dans notre mémoire, nous avons cité les
9 pages du compte rendu d'audience 17 402 à 17 406. Je souhaite ajouter que
10 ce débat se poursuit à la page 17 408 où, après avoir tenu compte des
11 arguments de l'Accusation et de la Défense sur la requête, le Président de
12 la Chambre précise à la ligne 20 que la question était tranchée. Après
13 avoir tranché sur la question de la requête, une autre décision ne s'avère
14 plus nécessaire.
15 Madame, Messieurs les Juges, c'est pour ces motifs et pour les motifs
16 exposés dans notre mémoire que les contestations de Miletic à l'égard de
17 ses condamnations doivent être rejetées.
18 Nous avons remarqué que nous avons également fait une concession pour ce
19 qui est du moyen d'appel numéro 6.
20 Sous réserve de questions que vous aurez peut-être à nous poser, ceci met
21 un terme à la réponse de l'Accusation concernant l'appel de Miletic.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
23 [La Chambre d'appel et le Juriste se concertent]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause pendant
25 une vingtaine de minutes, et nous reprendrons à 15 heures 45.
26 --- L'audience est suspendue à 15 heures 24.
27 --- L'audience est reprise à 15 heures 48.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes au courant de la situation
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1 météorologique qui évolue défavorablement. Les agents de sécurité ont
2 demandé aux salariés qui ne participent pas aux débats dans les prétoires
3 de rentrer chez eux. Je suppose que ceux qui participent aux débats ne
4 peuvent pas, eux, être victimes de mauvaises conditions météorologiques, et
5 cela s'applique à la Chambre d'arrêt. Mais nous allons entendre la réponse
6 de Miletic.
7 Mme FAUVEAU : Je voudrais d'abord dire quelques remarques sur la colonne.
8 Alors, on a entendu aujourd'hui le Procureur, qui ne répète que les
9 conclusions de la Chambre, qu'en effet les hommes qui sont partis de
10 Srebrenica sont partis pour les mêmes raisons que les femmes, les enfants
11 et les personnes âgées. Je ne devrais pas être une victime femme ou enfant
12 qui aurait pu entendre une telle évaluation de la situation. Elle me semble
13 injuste. Mais au-delà de ce fait, ce n'est pas vrai. Les hommes de
14 Srebrenica ne sont pas partis pour les mêmes raisons que les femmes,
15 enfants et les personnes âgées. S'ils étaient partis pour les mêmes
16 raisons, ils seraient partis comme ces personnes-là à Potocari. Les hommes
17 qui sont partis avec la colonne, ils sont partis avec un objectif
18 militaire.
19 Il ne faut pas oublier non plus que la Bosnie-Herzégovine, à l'époque,
20 suivait la politique yougoslave dans ce cadre-là et que tous les hommes en
21 âge militaire étaient plus ou moins militaires. De toute façon, pour ce qui
22 est la colonne et ses objectifs, je pense que l'expert militaire du
23 Procureur, Richard Butler, l'a décrit de la meilleure manière possible.
24 Maintenant, s'agissant de l'aide humanitaire. Oui, l'aide humanitaire a
25 diminué en juin. Mais pourquoi elle a diminué en juin ? Elle a diminué en
26 juin pour trois raisons qui n'ont rien à voir avec l'armée de la Republika
27 Srpska. La première, une grave crise a éclaté entre la FORPRONU et les
28 autorités serbes en mai 1995, dont la conséquence était la suspension des
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1 convois, décidée par l'UNHCR. Il s'agit de la preuve P4133, page 5,
2 paragraphe 14. Ensuite, l'offensive de l'ABiH a commencée le 15 juin 1995
3 impliquant les forces musulmanes de Srebrenica et Zepa a augmenté
4 l'insécurité de passage des convois. Et finalement, l'UNHCR a diminué les
5 quantités de l'aide humanitaire destinée à la Bosnie-Herzégovine, y compris
6 aux enclaves, en juin 1995.
7 Alors, le Procureur nous dit que l'argument que Banja Luka n'a reçu rien
8 n'est pas un bon argument puisque Zenica a reçu plus. Je vous invite de
9 voir la pièce P4145, page 19, qui montre clairement qu'effectivement Zenica
10 a reçu un peu plus que prévu, mais que Banja Luka, Orasje, Bihac, la Bosnie
11 orientale, les enclaves de la Bosnie orientale, Sarajevo, la Bosnie du sud
12 et Tuzla ont tous reçu beaucoup moins que prévu.
13 Maintenant, si la thèse du Procureur, qui encore répète le jugement, selon
14 laquelle le fait que jusqu'en juin l'aide humanitaire n'a pas diminué ne
15 change rien parce que l'armée de la Republika Srpska a décidé de le faire
16 intelligemment et graduellement, je vous invite de regarder la même pièce,
17 la page 21, qui montre les convois qui sont passés vers Srebrenica et Zepa
18 et la quantité de l'aide humanitaire distribuée après la délivrance de la
19 directive, mars, avril, mai 1995. Alors, qu'est-ce qu'on peut observer dans
20 cette pièce ? Qu'il y a une augmentation graduelle de l'aide humanitaire
21 qui est parvenue aux enclaves. Et j'attire votre attention que Zepa, en
22 mai, a reçu même plus que ce qui était prévu. Alors, il y a quelque chose
23 que je ne comprends pas. Ou l'armée de la Republika Srpska ne savait pas
24 calculer, ou ses convois et la distribution de l'aide humanitaire n'avaient
25 rien à voir avec la directive.
26 Pour clarifier un point, ce n'est pas la thèse de la Défense que lorsqu'il
27 y a des abus de convois, que les restrictions sont permises entièrement. Ce
28 n'est pas du tout la thèse de la Défense. La thèse de la Défense, c'est
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1 lorsqu'il y a des abus, que certaines restrictions sont permises, et
2 surtout le contrôle. La thèse de la Défense est puisqu'il y avait des abus
3 qui sont avérés et établis dans le jugement, la Chambre de première
4 instance a dû établir au-delà de tout doute raisonnable pour chaque convoi
5 que les restrictions étaient illégales et elle ne l'a pas fait.
6 Le Procureur, lorsqu'il parlait de la planification, disait que la -- non,
7 pardon. Je voudrais juste parler encore de la directive numéro 7 et du rôle
8 du général Miletic. Ce qui s'est passé, c'est que Radivoje Miletic n'ait
9 jamais contesté qu'il avait un rôle dans la rédaction de la directive
10 numéro 7. Il a participé à sa rédaction. La thèse de la Défense, c'était
11 qu'il ne participait pas aux réunions lors desquelles la politique de
12 l'armée de la Republika Srpska, et plus généralement la politique des
13 Serbes de Bosnie a été décidée; et c'est pour cette raison qu'il est très
14 important que Manojlo Milovanovic était à l'état-major principal lors de la
15 rédaction de la directive. Et la deuxième thèse, c'est que Radivoje Miletic
16 a préparé le projet de la directive, mais on ne sait pas, et la Chambre de
17 première instance ne l'a pas établi au-delà de tout doute raisonnable, est-
18 ce que les parties incriminées de la directive, est-ce que la phrase qui
19 effectivement pourrait être considérée comme illégale, est-ce que cette
20 phrase-là était conçue, rédigée, écrite, au moins vue par Radivoje Miletic
21 avant que la directive était signée par Radovan Karadzic. Notre thèse,
22 c'est qu'elle ne l'était pas. Et de toute façon, ce qui ressort du
23 jugement, la Chambre de première instance n'était pas en mesure d'établir
24 est-ce que Radivoje Miletic avait la connaissance de cette directive -- de
25 cette phrase dans la directive avant le 31 mars, lorsqu'il a écrit la
26 directive 7/1 sur la base de la directive 7.
27 Monsieur le Président, c'est tout ce que j'ai à répondre. Je ne sais pas si
28 vous avez des questions.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour ma part, je n'ai pas de
2 questions.
3 Je ne sais pas si mes collègues en ont. Non.
4 Je vous remercie.
5 Nous voici arrivés au stade où il nous faut examiner comment il faut
6 poursuivre, compte tenu de la situation météorologique.
7 Monsieur le Procureur.
8 M. KREMER : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes prêts à
9 entamer l'appel de l'Accusation, si les Juges le souhaitent, et d'autre
10 part si les conseils de l'autre partie l'acceptent. Sinon, je suis tout à
11 fait prêt à poursuivre pendant une heure et continuer demain pour terminer
12 avec l'exposé des arguments de l'Accusation.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Eh bien, Monsieur Kremer, tout le
14 monde n'est pas aussi résistant que vous. Compte tenu de la situation, je
15 propose de reprendre demain matin à 9 heures 30 et --
16 M. KREMER : [interprétation] Oui, tout à fait, cela nous agrée.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- et nous allons atteindre le même
18 objectif.
19 Donc, levons l'audience et rentrez bien chez vous.
20 --- L'audience est levée à 15 heures 59 et reprendra le vendredi, 6
21 décembre 2013, à 9 heures 30.
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