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1 Le jeudi 4 mai 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 09.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, veuillez appeler le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous.
8 Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic, et al.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je demanderais à
10 l'Accusation de bien vouloir se présenter.
11 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
12 Juges. Ken Scott, Daryl Mundis, Roeland Bos et Mme Skye Winner, qui est
13 notre commise à l'affaire.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Je demanderais aux avocats de bien vouloir se
15 présenter.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
17 les Juges. Michael Karnavas défendant les intérêts de
18 M. Prlic avec Me Suzana Tomanovic, co-conseil, et Mme Ana Vlahovic est
19 notre assistante juridique.
20 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
21 Juges. Senka Nozica défendant les intérêts de M. Bruno Stojic, assistée de
22 Valent Slonje, notre commis.
23 M. KOVACIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bozidar
24 Kovacic. Je défends M. Praljak, accompagné de Me Nika Pinter.
25 Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Vesna
26 Alaburic. Je représente M. Petkovic, et Davor Lazic est mon commis à
27 l'audience.
28 M. JONJIC : [interprétation] Bonjour. Tomislav Jonjic, Messieurs les Juges.
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1 Je défends M. Valentin Coric avec l'aide de
2 Mme Krystyna Grinberg, assistante juridique, notamment, et Ida Jurkovic,
3 commise d'audience.
4 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour
5 défendre les intérêts de M. Pusic, Fahrudin Ibrisimovic, Roger Sahota, et
6 notre assistant juridique, Nermin Mulalic.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Au nom des Juges, je salue toutes les personnes
8 présentes, je salue les accusés, les représentants de l'Accusation, les
9 avocats, ainsi que toutes les personnes qui nous assistent.
10 Comme vous le savez, aujourd'hui nous allons commencer l'audition
11 d'un témoin, dont l'audition se poursuivra demain. Toutefois, je dois vous
12 préciser qu'impérativement, nous devons terminer notre journée à 16 heures
13 parce qu'il y une audience de mise en état tenue par le Juge Meron.
14 Malheureusement, nous devrons quitter les lieux à 16 heures. Par ailleurs,
15 nous serons emmenés à réduire légèrement aujourd'hui les "breaks". Au lieu
16 de faire un "break" de 20 minutes, on fera un "break" de 15 minutes. La
17 pause du déjeuner sera exceptionnellement raccourci de 60 minutes à 50
18 minutes.
19 Ceci étant dit, je vais aborder très rapidement deux autres problèmes
20 logistiques. Hier, j'ai pu constaté que lorsqu'un document était appelé par
21 une partie, cela prenait quelques temps avant de voir le document sur
22 l'écran. J'en ai parlé avec M. le Greffier. Il me dit qu'en règle générale,
23 il faut compter une dizaine ou une quinzaine de secondes; en cas de
24 difficultés, cela peut aller jusqu'à une demi-minute. Mais cette nuit, j'ai
25 fait un bref calcul. Je me suis dit que, si nous avons enregistré plus de
26 10 000 documents, multipliés par le nombre de secondes, tout cela va se
27 transformer en heures et en jours. On va continuer dans ce système, mais,
28 si jamais on se rend compte que cela prend trop de temps, il vaudrait mieux
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1 repasser à l'ancien système. On a tout de suite le document sur le
2 rétroprojecteur et là, en quelques secondes, on a le document. On verra.
3 Parce que tant qu'il y a quelques centaines de documents, il n'y a pas de
4 problème, mais, là, nous sommes maintenant face à des échelles importantes
5 du document, ne serait-ce que l'audience d'hier où que j'ai constaté que la
6 Défense avait demandé des documents dans le cas du contre-interrogatoire.
7 Donc, je m'attends également à une avalanche de documents provenant de la
8 Défense. De ce fait, il faudra compte de cela.
9 Deuxième problème : lorsque, dans le cadre du contre-interrogatoire, vous
10 présentez un document, dans la position de Juges, nous ne savons pas
11 actuellement si le document que vous présentez est un document qui vous a
12 été communiqué par le Procureur, que vous utilisez, ou que c'est un
13 document que vous avez, vous-même, recherché, trouvé et informé 24 heures
14 avant le Procureur et a donné au service du Greffe. Je vous demande,
15 lorsque vous avez un document, de nous dire d'où vient ce document. Est-ce
16 que c'est un document qui vous a été fourni par l'Accusation ? Si c'est un
17 document que vous avez de nous, en indiquer la source, l'archive, et
18 cetera. Tout cela pour gagner du temps. Vous avez compris que mon objectif
19 était d'aller très vite sur les documents ou en ce qui concerne
20 l'admissibilité. Vous laissant le soin ultérieurement si on conteste un
21 document "filings" par des écritures plus tard de venir en demander le
22 retrait. Mais pour gagner du temps, de ma part, il n'y aura aucun obstacle
23 à l'admission quasi immédiate d'un document que vous présentez, mais, pour
24 faciliter notre tâche, indiquez d'où vient ce document. La plupart du temps
25 je vérifie s'il y a bien des cachets, des signatures, mais, là aussi,
26 lorsque vous présentez un document que je n'ai pas eu avant, donc, en
27 quelques secondes, je suis obligé de faire ces tests, puisque tout de suite
28 le document est présenté au témoin. Dans la mesure du possible, indiquez
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1 d'où vient le document, comme cela nous gagnerons du temps.
2 Dernier petit sujet avant de faire venir le témoin : je sais qu'il y a
3 quelques temps, avait émis le vœux que les accusés aient en leur possession
4 un ordinateur sur lequel ils entreraient pendant l'audience toutes
5 informations qu'ils leur paraîtraient pertinentes. Je sais que ceci
6 préoccupe Me Karnavas qui ne va pas manquer de m'en parler tout de suite.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président. Je vous
8 salue, Messieurs les Juges. Oui, j'ai bien un portable pour mon client.
9 L'idée c'était que nous pourrions l'amener tous les jours afin que M. Prlic
10 l'utilise et puisqu'à la fin de l'audience, il pourrait graver sur CD ce
11 qu'il avait tapé ce jour-là, qu'il pourrait utiliser le portable qu'il a au
12 quartier pénitentiaire. Nous reprendrions ce portable aussi que nous
13 utilisons ici, donc, il n'y aurait pas le moindre risque de sécurité. Si
14 M. Prlic a des notes qu'il a prises la veille, bien, il apporterait ce CD,
15 et nous pourrions décharger ses éléments afin que nous ayons son apport
16 parce que nous n'avons pas de courrier électronique entre nous.
17 Si ceci n'est pas faisable, ou à titre subsidiaire, dirais-je, en fait, ce
18 que je préférerais c'est que j'ai mon client qui soit assis à côté de moi.
19 Vous en avez parlé hier, Monsieur le Président. Je crois que cette
20 institution a gagné suffisamment en maturité. Nous avons maintenant ce
21 système, nous avons un nouveau prétoire. Je ne vois pas pourquoi M. Prlic
22 ne pourrait pas être à côté de moi, ainsi je pourrais directement le
23 consulter. Cela se fait partout aux Etats-Unis, quelle que l'infraction
24 reprochée à la personne, je ne vois pas qu'il y a un risque en matière de
25 sécurité.
26 Je n'en ai pas parlé aux gardes. De toute façon, les gardes sont près des
27 portes, et je ne vois pas s'il y a un problème. Pour moi, il n'y a pas de
28 problème. Ce n'est peut-être pas vrai pour tout le monde. De toute façon,
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1 je voudrais qu'on examine la question et, dans la mesure du possible, il
2 faudrait que nous ayons à nos côtés nos clients respectifs afin que ceux-ci
3 puissent participer à la procédure.
4 Je pense que M. Prlic, hier, voulait me passer une note. Il a dû la donner
5 à un garde. Heureusement, l'assistant juridique d'une des équipes me l'a
6 amenée. Vous savez, cela ne peut pas se faire si on a des témoins assez
7 importants où vous aurez nos clients qui ont beaucoup de connaissance,
8 vraiment, que nous n'avons pas, nous, puisqu'ils y ont participé aux
9 événements, il est important à ce moment-là de parler avec eux.
10 J'aimerais beaucoup - et je vous serais gré, Monsieur le Président -
11 d'examiner la question. Je vous remercie d'avance.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Je vais vous donner la parole. Maître
13 Kovacic, sur ce problème.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
15 je voulais simplement réagir pour dire de ce que vous avez dit s'agissant
16 de la présentation des documents. Vous avez demandé que soient données des
17 informations quant aux sources, quant à l'origine, pas de problème du tout.
18 Toujours, nous serons à même de dire d'où vient ce document puisque c'est
19 un document qui provient de nos propres bases de données, ce qui fait que
20 nous en connaissons l'origine. Mais je suis assez préoccupé par le fait que
21 vous avez mentionné qu'il faudrait donner les documents à l'Accusation 24
22 heures à l'avance, procédure qui n'est pas toujours réalisable et
23 impossible de respecter. Vous devez savoir comment nous travaillons,
24 Monsieur le Président.
25 Par exemple, aujourd'hui, nous allons avoir un témoin, et disons qu'on
26 termine l'audition du témoin fin de la journée, c'est seulement ce soir que
27 nous pourrons examiner sa déposition, même si nous avons un dossier avec
28 les documents qui risquent d'être intéressants s'agissant de ce document.
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1 Mais c'est seulement ce soir que nous connaîtrons la nature de sa
2 déposition après l'interrogatoire principal, c'est seulement alors que nous
3 pourrons déterminer comment nous allons mener notre contre-interrogatoire,
4 seulement dix, 11 heures qu'on pourra le faire.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire quelque chose qui vient de me
6 frapper. Vous dites "le témoin." Est-ce à dire que le témoin de
7 l'Accusation vous le voyez avant qui vienne ?
8 M. KOVACIC : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président. Mais nous
9 devons nous préparer à partir des déclarations préalables de ce témoin, en
10 général. Ce témoin a fait ses déclarations aux organes de poursuite du
11 Tribunal ou d'autres services, et puis nous avons des documents généraux.
12 Mais c'est seulement après avoir entendu le témoin une fois qu'il a
13 commencé sa déposition ou c'est seulement, à ce moment-là, après avoir
14 entendu l'interrogatoire principal, qu'on peut savoir quel document il faut
15 retenir. Cela se fait le soir -- dans la soirée. C'est pratiquement
16 impossible parce qu'il faut suivre certaines procédures avec le e-court. Si
17 on a déjà saisi ce document sur le système électronique pas de problème,
18 mais quand même c'est difficile. Donc c'est seulement avant le début de
19 l'audience qu'on peut déterminer qu'elles seront les documents utilisés. Je
20 ne veux pas ici que mon droit à l'utilisation de certains documents soit
21 lésé parce que je devrais donner copie de ce document 24 heures à l'avance.
22 Permettez-moi d'étoffer ce propos. L'Accusation a la charge de la
23 preuve. Nous avons des documents que nous avons réunis, que nous avons
24 trouvés grâce à nos propres recherches. Nous ne savons pas ce que va faire
25 l'Accusation, ce que va dire le témoin. A notre avis - et je pense que ce
26 serait là le droit de garder le silence quelque part - si nous devions
27 communiquer nos documents à l'Accusation avant qu'elle ne fasse son
28 interrogatoire principal, à ce moment-là, elle peut évacuer tout problème
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1 que nous aurions. C'est un petit peu comme si on jouait au poker. Si je me
2 montre mes cartes et si je suis le seul à le faire et si l'Accusation, de
3 toute façon, doit nous dire quels sont ses documents, quelles sont ses
4 preuves, parce qu'elle a la charge de la preuve, et si, maintenant, on a,
5 disons, M. Scott, qui dit qu'il ne va pas aborder tel ou tel domaine, il a
6 le droit de le faire. Alors, j'aurais donné des documents à M. Scott que je
7 vais peut-être utiliser plus tard avec un autre témoin et puis il commence
8 à deviner qu'elle sera ma stratégie de défense et il commence déjà à faire
9 sa réfutation alors qu'il présente au principal ses éléments de preuve.
10 Cela ne devrait pas poser de problème.
11 Je pense que la meilleure chose à faire - et je sais ici que nous ne sommes
12 pas d'accord - l'Accusation voudrait déjà avoir, maintenant, tous les
13 documents de la Défense, alors qu'elle n'a pas encore terminé elle la
14 communication de tous ses documents. Je crois que ce sera là une violation
15 du droit de garder le silence et que ce serait de notre part une aide que
16 nous apporterions à l'Accusation pour s'acquitter de la charge de la
17 preuve. Or, elle n'a pas besoin d'aide. Si l'Accusation n'est pas à même de
18 présenter sa cause, elle n'a sûrement pas besoin de moi pour le faire.
19 Je demanderais à ce que nous ne soyons pas placés dans une situation
20 où nous devons communiquer à l'Accusation tant qu'une décision ne sera
21 prise. Par exemple, hier, j'avais un bon nombre de documents que j'étais
22 prêt à utiliser, mais vu le contre-interrogatoire, il a été décidé de ne
23 pas utiliser ces documents, de les réserver pour plus tard. Cela a été une
24 décision prise comme cela de façon impromptue.
25 Merci d'en tenir compte, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Scott, je voudrais que vous
27 répondiez sur trois points.
28 Premier point : la question de l'ordinateur qui serait donné à l'accusé.
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1 L'accusé, d'après ce qu'il veut dedans et, ensuite, il prendrait la
2 disquette et, avec cette disquette, il la garderait avec lui quitte à la
3 travailler ultérieurement sur l'ordinateur fixe qu'il a dans la prison de
4 Scheveningen. Cela c'est la première question.
5 Deuxième problème - et j'ai besoin de votre avis avant d'en saisir le
6 Président et le Greffier - la Défense pense comme moi, mais c'était un avis
7 personnel. Il serait plus utile que l'accusé soit à côté de son avocat.
8 Donc, cela, je voudrais connaître votre point de vue.
9 Troisième problème, mais qui et toujours récurant dans tous les procès
10 c'est la question où des pièces lors du contre-interrogatoire. La Défense
11 nous dit que le fardeau de la preuve vous incombant et il n'a pas à vous
12 dire à l'avance ce qu'il compte utiliser comme documents. Que de ce fait,
13 vous n'aurez connaissance du document qu'au dernier moment dans la mesure
14 où l'Accusation doit être chargée de la preuve, et la Défense n'a pas à
15 faciliter le travail de l'Accusation.
16 Alors, sur ces trois points, Monsieur Scott, très vite.
17 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
18 Pour ce qui est des portables, pas d'avis particulier sur ce qui peut être
19 posé comme question en matière de sécurité, ce qui pourrait être le cas
20 pour ce qui est du transfert de données. Mis à part cela, pas d'avis
21 particulier. Nous laissons le soin au personnel chargé de la sécurité
22 d'assurer les meilleures protections.
23 Pour ce qui est du deuxième point, pour ce qui est de la disposition des
24 accusés, uniquement, pour nous c'était uniquement une question de sécurité
25 et il faut s'en tenir au savoir faire des gardes. Depuis dix ans dans ce
26 Tribunal, il est courant et c'est toujours ce qui se fait, les accusés sont
27 ensemble aux bancs de accusés comme ils sont disposés aujourd'hui. Avec les
28 gardes, cela se fait ici depuis dix ou 12 ans, pourquoi changer cette
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1 pratique aujourd'hui. Je pense qu'il faut s'en remettre au savoir faire des
2 gardes.
3 Pour ce qui est des documents utilisés au contre-interrogatoire. Je suis
4 content qu'on en parle parce que ce qui se dit aujourd'hui est très
5 révélateur et ceci va être redit quotidiennement dans les prochaines
6 années. Apparemment, la philosophie qui prévaut c'est qu'alors que
7 l'Accusation a le devoir de communiquer à l'avance le moindre bout de
8 papier pour respecter le principe du procès, qui s'applique ici, ne
9 s'appliquerait pas à la Défense. Alors que pour nous, on peut tomber dans
10 des embuscades. C'est le principe de l'embuscade.
11 On peut nous montrer des documents qu'on affiche à l'écran, un
12 document qu'on n'a jamais vu, on ne sait pas d'où ils viennent et on ne
13 sait pas si le témoin a jamais vu ce document, donc, on ne connaît pas
14 l'origine. Tout d'un coup, surgit un document à l'écran, et ceci pour la
15 première fois. C'est fondamentalement injuste.
16 Pour ce qui est de la préparation du contre-interrogatoire, Messieurs les
17 Juges, n'oublions pas une chose. Lorsque arrive un témoin à charge ici,
18 avant cela, il y a eu communication considérable. Toutes ces déclarations
19 préalables ont été communiquées à la Défense. De nombreux documents ont été
20 fournis à celle-ci. Nous avons déjà fourni une liste des documents qui vont
21 être utilisés par le truchement de ce témoin, alors, en fait, maintenant,
22 ils l'ont pour les témoins jusqu'au mois de juillet. En quelques rares
23 exceptions - mais, bien sûr - il y aura peut-être un oubli, une omission,
24 un ajout, mais, pour l'essentiel, les équipes de la Défense connaissent
25 déjà les pièces que nous allons utiliser même pour les témoins qui vont
26 venir déposés en juillet. Cela se trouve dans votre tableau, le tableau que
27 vous avez demandé. Donc, ils ont des déclarations préalables, nos résumés
28 65 ter qui leur donnent au fond la synthèse de la déposition du témoin et,
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1 en plus, tous les documents nécessaires.
2 Sauf le respect que je leur dois, je respecte la fonction de l'avocat
3 de la Défense, le travail que cela représente, mais en même temps ils
4 savent très bien lorsque le témoin arrive ici ce qui va se dire. Certes, il
5 y a quelquefois des modifications, des modulations, quelquefois on va
6 ajouter ceci, on va retirer cela, mais, au fond, la déposition du témoin,
7 elle est déjà connue. On peut aussi attendre le contre-interrogatoire, j'en
8 suis certain. J'en suis convaincu qu'il est déjà préparé et ces préparatifs
9 commencent bien avant la venue du témoin dans ce prétoire.
10 Ceci étant, je pense qu'il est fondamentalement injuste que
11 l'Accusation reçoive au compte goutte ces documents, en fait,
12 effectivement, lorsqu'ils apparaissent à l'écran. Nous demandons à recevoir
13 les pièces utilisées en contre-interrogatoire un jour avant le début
14 prévisible du contre-interrogatoire. Cela s'est fait dans le procès Vukovar
15 qui est en cours à l'heure même. Les équipes de la Défense ont l'obligation
16 de fournir leurs pièces un jour à l'avance.
17 Je ne pense pas que ce soit là quelque chose de déraisonnable. Je l'ai dit
18 il y a plusieurs jours de cela. L'Accusation, Messieurs les Juges, a aussi
19 le droit à bénéficier d'un procès équitable. Bien sûr que nous avons la
20 charge de la preuve mais cela n'a rien à voir avec cela. Maintenant, nous
21 allons, effectivement, faire l'administration de la preuve, mais nous avons
22 le droit à un procès équitable et on ne peut pas comme cela nous surprendre
23 avec des documents. Il n'y a pas eu de communication. On n'a jamais vu ces
24 documents et tout d'un coup apparaît un document à l'écran, et c'est la
25 première fois que cela se fait et on est censé y répondre. Je pense que
26 fondamentalement c'est injuste. Merci.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste une question de ma part à
28 Me Karnavas. Maître Karnavas, les Etats-Unis - je dis bien les Etats-Unis -
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1 lors du contre-interrogatoire, est-ce que la Défense présente les documents
2 au dernier moment ou a l'obligation d'après les règles fédérales de
3 présenter le document à l'Accusation 24 heures ou deux jours avant ?
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Excellente question. Excellente question.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme toutes les questions posées par les Juges.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Absolument. Absolument. C'est au moment où
7 j'allais informer. Je n'ai pas la moindre obligation, ni l'obligation de
8 fournir à l'avance des documents à l'Accusation. C'est au moment où je me
9 lève et je présente.
10 Parce qu'il y a toujours un jury, il faut toujours poser les bases --
11 les fondements et s'il y a des problèmes, peut-être qu'on en a parlé en
12 l'absence du jury, mais je n'ai pas la moindre obligation de présenter ce
13 document.
14 Permettez-moi d'ajouter une réponse à cette odyssée, Monsieur Scott,
15 dans ce procès. Par exemple, dans le procès Halilovic, là aussi, s'est
16 apparue au dernier moment. Ce n'est pas l'exemple que
17 M. Scott a donné. Il serait fondamentalement inéquitable que je dévoile mes
18 cartes à l'avance parce qu'il va s'en servir de ce document.
19 Bien sûr que je partage ces préoccupations et j'ai beaucoup de
20 sympathies, de compassion pour lui. Mais il n'a pas mal d'ordres. Il n'a
21 pas mal d'ordres. Un petit exemple.
22 Hier, nous avons quitté le prétoire. Nous sommes rentrés
23 essentiellement à minuit que j'ai su quel document j'allais utiliser. Voici
24 la nature de cette liste que nous avons reçue, cette liste de l'Accusation,
25 mais tardivement. Bon, je ne vais pas revenir là-dessus, mais inutile de
26 rappeler. Nous l'avons reçu assez tardivement. Alors, je n'ai les
27 ressources nécessaires pour préparer à l'avance. On survit à peine. On
28 surnage à peine, alors qu'on doit préparer des témoins importants. Citez-
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1 moi une autre semaine. C'est vraiment difficile. Bon, je sais maintenant
2 qu'il se plaigne. Alors, ils peuvent pleurer autant qu'ils veulent par
3 rapport à leurs difficultés. Ils n'ont qu'à venir de l'autre côté pour
4 comprendre nos difficultés.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Parce qu'on peut y passer des heures.
6 Maître Kovacic.
7 M. KOVACIC : [interprétation] Si cela vous intéresse, dites-le-moi.
8 Dans le cas contraire, je ne dirai plus un mot. Mais puisque vous avez
9 demandé quelle était la situation aux Etats-Unis, il serait peut-être
10 intéressant pour les Juges d'entendre quelle est la procédure criminelle en
11 la matière en Croatie. Nous pouvons vous dire que c'est à peu près la même
12 chose en Bosnie-Herzégovine puisque les droits des deux pays ont la même
13 origine. Donc, si vous souhaitez que je vous le dise; sinon, je me tais.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez, s'il vous plaît, très rapidement.
15 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans notre procès duo-
16 pénal, la Défense n'a pas la moindre obligation de communiquer le moindre
17 document à l'Accusation avant le moment où la Défense le juge utile. Donc,
18 si j'agis en qualité de conseil de la Défense et que je souhaite soumettre
19 un document à un témoin, qu'il soit témoin à charge ou à décharge. On
20 n'utilise pas le terme, témoin de la Défense et de l'Accusation ici. Car
21 les témoins ici sont toujours les témoins de la Chambre. Mais enfin, il y
22 en a tout de même un qui est favorable à votre cause et l'autre qui ne
23 l'est pas. Donc, dès lors que j'ai choisi de soumettre un document à un
24 témoin, je le mets sur la table et il n'y a aucune restriction, aucune
25 obligation de communication à l'avance.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica, vous avez levé la main.
27 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais
28 brièvement joindre ma voix à celle de mes consoeurs et confrères.
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1 L'Accusation nous a beaucoup parlé aujourd'hui des obligations qui pèsent
2 sur elle et qui sont prévues par le Règlement. En effet, selon le Règlement
3 en vigueur dans ce Tribunal, l'Accusation est tenue de nous communiquer les
4 documents. Mais j'aimerais parler aujourd'hui de ce qui s'est passé hier,
5 qui peut constituer un problème objectif assez important à l'avenir.
6 Si nous devions communiquer tous nos documents 24 heures à l'avance,
7 nous détruirions notre propre défense. Hier, nous avions tous préparé un
8 certain nombre de documents à soumettre au témoin et si nous les avions
9 communiqué à l'avance à l'Accusation, nous aurions fait connaître à
10 l'Accusation notre stratégie de défense. Donc, hier, nous n'avons pas
11 communiqué les documents ou plutôt finalement, le contre-interrogatoire est
12 allé dans un sens, tout à fait, imprévu par rapport à ce que nous pensons à
13 l'avance. Il n'a pas suivi le sens auquel nous nous attendions.
14 Aujourd'hui, nous allons procéder à l'interrogatoire du témoin. Nous
15 continuerons à poser des questions, donc, communiquer à l'avance nos
16 documents à l'Accusation pourrait mettre en danger assez sérieusement la
17 Défense de nos clients. Pour cette raison, je m'associe aux demandes
18 présentées par mes consoeurs et confrères avant moi, à savoir, nous
19 demandons de pouvoir communiquer nos éléments de preuve plus tard.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Entre les Juges, nous vous dirons ce qu'il convient
21 de faire. En attendant, nous allons tout de suite introduire le témoin
22 puisque nous avons pris déjà une demi-heure.
23 Monsieur Scott.
24 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous attendons
25 le témoin, j'aimerais utiliser utilement le temps qui nous sépare de son
26 entrée dans le prétoire. Je ne sais pas combien de fois au cours des 10
27 dernières années, il a été dit que ce n'était pas le droit américain qui
28 régissait la pratique de ce Tribunal. Donc, je pensais que ce Tribunal
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1 allait faire mieux que les tribunaux américains. Je ne crois pas qu'il soit
2 pertinent de parler du droit américain par rapport à ce Tribunal. C'était
3 mon premier point.
4 Deuxième point : J'aimerais compléter des mentions qui ont été faites
5 précédemment. Ce témoin va déposer en rapport avec le chef numéro 2, le
6 chef numéro 3, le chef numéro 26 qui n'étaient pas mentionnés dans nos
7 documents préalables. Egalement, par rapport au paragraphe 113, de l'acte
8 d'accusation modifié.
9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Scott. Voulez-vous ajouter quelque
11 chose ?
12 M. SCOTT : [interprétation] Non merci, Monsieur le Président. C'est tout.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
14 Bonjour, Monsieur. Avant de vous faire prêter serment, pouvez-vous
15 nous donner votre nom, prénom, date de naissance et la fonction que vous
16 exerciez en 1992, 1993, et la fonction éventuelle que vous exercez
17 aujourd'hui.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je vous
19 remercie de vos mots d'accueil. Je m'appelle Ratko Pejanovic. Je viens de
20 Mostar. Entre 1991 et 1995, j'étais commandant de l'Unité des Sapeurs-
21 pompiers de Mostar. Aujourd'hui, je suis à la retraite et je me trouve
22 devant vous.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre date de naissance ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Oui. Je suis né le 14 janvier
25 1944 à Mostar.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question avant de vous faire lire la
27 déclaration de serment. Est-ce que vous aviez témoigné devant un tribunal
28 international ou national sur les événements qui se sont déroulés dans
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1 votre ligne dans ces années, 1992, 1993, 1994 ? Est-ce la première fois que
2 vous témoignez en justice ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la première fois
4 que je suis témoin devant un tribunal.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
7 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]
9 LE TÉMOIN : RATKO PEJANOVIC [Assermenté]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, vous pouvez vous asseoir. Bien. Avant
12 de donner la parole au Procureur qui va vous poser des questions, j'ai
13 quelques éléments d'information de ma part. Comme vous le savez, votre
14 audition est prévue pour se tenir aujourd'hui et demain. Vous aurez à
15 répondre dans un premier temps des questions qui vont vous être posées par
16 le Procureur.
17 Une fois que le Procureur aura rempli son office, les six avocats des
18 accusés vous poseront également des questions de ce qu'on appelle dans
19 notre jargon juridique, le contre-interrogatoire. Après quoi, le Procureur
20 pourra poser des questions supplémentaires et les Juges, les quatre Juges
21 qui sont devant vous, pourront s'ils estiment utiles à tout moment,
22 également, vous poser des questions.
23 Comme vous venez de prêter serment, vous avez compris qu'il faut dire
24 la vérité et ne pas mentir car le mensonge est une infraction qui peut être
25 punie par ce Tribunal.
26 Par ailleurs, si vous vous sentez fatiguer ou si vous éprouvez quelques
27 défaillances, dites-le-nous immédiatement pour que je puisse suspendre
28 l'audience parce que, témoigner pendant deux heures, c'est assez fatiguant
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1 et si vous éprouvez un quelconque problème, n'hésitez pas à m'en faire
2 part. Vous aurez toutes les personnes de cette salle, font des repos
3 temporaires, toutes les heures et demie, donc, il y aura un premier repos
4 d'un quart d'heure. Ensuite, de l'interruption pour vous permettre de vous
5 restaurer, vous aurez 50 minutes de repos, exceptionnellement, et nous
6 reprendrons dans l'après-midi, comme je viens de l'indiquer. Si, à un
7 moment donné, vous allez me poser une question, n'hésitez pas. Nous sommes
8 là pour vous faciliter votre mission et n'hésitez pas à nous demander la
9 parole si vous éprouvez la nécessité.
10 Sans perdre de temps maintenant, je vais donner la parole à
11 M. Scott qui vous vous poser les questions.
12 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Interrogatoire principal par M. Scott :
14 Q. [interprétation] Bonjour, M. Pejanovic.
15 R. Bonjour.
16 Q. J'aimerais rapidement revenir sur quelques éléments déjà abordés par le
17 Président de cette Chambre. Vous êtes né à Mostar en janvier 1944 et vous y
18 avez passé toute votre vie; c'est bien cela, Monsieur ?
19 R. Oui.
20 Q. Votre appartenance ethnique est serbe, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Vous avez passé le plus gros de votre vie professionnelle en tant que
23 sapeur-pompier, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Quand avez-vous commencé à travailler en tant que sapeur-pompier
26 professionnel à Mostar ?
27 R. Si vous me le permettez, j'aimerais faire une petite digression. En
28 juillet 1991 -- excusez-moi, 1981, j'ai pris mes fonctions de commandant de
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1 l'Unité des Pompiers bénévoles et je suis devenu instructeur pour les
2 sapeurs-pompiers qui, à l'époque, comptaient 38 unités.
3 Q. Pour gagner du temps, Monsieur, j'aimerais rapidement revenir sur la
4 période 1991, 1992. Pourriez-vous dire aux Juges de cette Chambre comment
5 étaient organisés les sapeurs-pompiers dans la ville de Mostar pendant
6 l'année 1991 et jusqu'à la mi-1992 ? Comment y avait-il d'unités ? Où est-
7 elle stationnée, et cetera ? Comment les sapeurs-pompiers étaient-ils
8 organisés ?
9 R. Avant la guerre, bien avant la guerre, il existait à Mostar 12 à 13
10 Unités des Sapeurs-pompiers. Avec l'arrivée des réservistes à Mostar en
11 1991, en septembre, il était nécessaire de changer certaines choses
12 radicalement, compte tenu du nombre d'unités bénévoles qui ont cessé de
13 travailler, donc, seules les unités composées de professionnels ont
14 continué à travailler et il s'agissait de la compagnie et des autres
15 éléments composés de certains pompiers professionnels.
16 Nous avons continué à travailler jusqu'au mois d'avril 1992, date à
17 laquelle où les tensions en ville se sont intensifiées et des attentats à
18 la bombe ont commencé à se produire dans les cafés, il y a eu un attentat à
19 l'église, une mitrailleuse a tiré dans un coin de la ville tout près de là
20 où j'habitais et cela m'a beaucoup gêné. Ma maison est séparée de par 300
21 mètres à peine du parvis de l'église et j'en ai été très affecté, je dois
22 vous dire.
23 Donc, des choses pas très jolies ont commencé à se passer, mais la Brigade
24 des Sapeurs-pompiers avait pour mission à l'époque de travailler 24 heures
25 sur 24 en trois équipes, avec participation de bénévoles. Il y avait des
26 pompiers qui étaient de permanence et les pompiers de permanence devaient
27 être contactables [phon] par téléphone à tout moment. C'était évidemment
28 une charge psychologique assez importante. Nous avons essayé de maintenir
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1 également notre équipement en état de bon fonctionnement car il y avait
2 déjà des magasins qui étaient pillés, et cetera. Un certain nombre
3 d'incidents de ce genre, donc, c'est la raison pour laquelle le 18 -- plus
4 exactement, le 19 avril 1992, nous avons décidé de nous réorganiser. C'est
5 une réunion qui s'est tenue à ce moment-là avec tous les commandants
6 d'unité et tous les membres de la défense civile, et j'ai été invité à y
7 assister car, en dehors de mes fonctions professionnels en tant que
8 commandant de la Brigade des Sapeurs-pompiers, j'étais également commandant
9 de l'Unité professionnelle de Défense civile. A l'époque déjà, nous avions
10 besoin de nous réorganiser étant donné les événements et pour une raison
11 très simple d'ailleurs qui était que la défense civile se composait de deux
12 détachements, et il y avait deux Brigades des Sapeurs-pompiers dans le
13 cadre de cette Défense civile. La mobilisation générale avait déjà été
14 décrétée, un certain nombre de personnes avaient répondu, donc des hommes
15 manquaient. Il fallait que je réorganise la brigade, que je fasse en sorte
16 que les pompiers puissent continuer à travailler un peu partout dans la
17 ville. Donc, j'ai fait une proposition qui était que l'on tienne compte des
18 recrues militaires, que l'on prenne leur permis militaire pour voir quel
19 était leur calendrier d'activités militaires et que l'on arrive à combler
20 les vides pour que les sapeurs-pompiers de Mostar puissent travailler sans
21 interruption. Il y avait certains hommes qui appartenaient à d'autres
22 structures, mais ils étaient peu nombreux. Nous avons donc décidé de
23 discuter les uns avec les autres, de regrouper nos moyens en hommes et à ma
24 demande personnelle, j'ai reçu un ordre écrit de la défense civile signé à
25 l'époque par commandant de l'état-major de la défense civile, M. Roko
26 Markovina [phon]. Finalement, selon cet ordre, d'autres documents ont été
27 publiés et d'ailleurs j'en parle dans le livre que j'ai publié en 1997.
28 Q. Très bien. J'aimerais essayer de tirer au clair un certain nombre de
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1 questions abordées par vous dans votre réponse. Vous avez parlé de la mi-
2 1992 en disant que les tensions s'étaient intensifiées dans la ville de
3 Mostar, à ce moment-là; est-ce que les affrontements concernaient à
4 l'époque les Serbes et les non Serbes, avant tout ?
5 R. Oui. C'est ce qu'il est permis de dire. Malheureusement, c'est bien ce
6 qui était la réalité de l'époque.
7 Q. Est-ce que vous avez ressenti vous aussi ces tensions en dépit du fait
8 que vous étiez Serbe et résidiez à Mostar à l'époque ?
9 R. Personnellement, je n'ai pas eu de problèmes bien graves, même si des
10 provocations aient été dirigées à mon encontre. On me provoquait un peu au
11 sujet des armes que j'étais censé détenir en me demandant où elles se
12 trouvaient. Une nuit, alors que j'étais de permanence, parce que, bien sûr,
13 dans chaque rue avait un poste assigné aux sapeurs-pompiers en cas
14 d'urgence, je n'avais pas, pour ma part, d'armes, et des voisins m'ont
15 demandé si j'en avais sur un ton un peu provocateur.
16 Comme je l'ai déjà dit, il y avait donc des équipes qui travaillaient
17 24 heures sur 24 au sein des sapeurs-pompiers, et j'ai saisi mon talkie-
18 walkie. Je pensais que le téléphone ne fonctionnait pas à ce moment-là et
19 je devais communiquer avec mes hommes; il fallait aussi qu'ils puissent
20 m'appeler moi. Donc, nous utilisions un code pour communiquer par talkie-
21 walkie, c'était, par exemple, le 101 que nous utilisions pour éviter
22 d'utiliser des noms propres. Une nuit, des voisins se sont regroupés autour
23 de moi, c'était des Serbes surtout qui m'ont dit : "Pourquoi est-ce que tu
24 as ce talkie-walkie ? Qu'est-ce que tu fais dans ce poste ici ?" Mais c'est
25 la dernière fois que j'aie travaillé aux côtés de mes voisins.
26 Q. Monsieur, il vous est demandé par les interprètes de ralentir un peu
27 votre débit car il y a des interprètes dans ce prétoire et ils ont quelque
28 mal à vous suivre à cette vitesse.
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1 R. Je n'ai pas entendu la demande des interprètes, mais je vous remercie
2 de me la communiquer. Je vais y obéir.
3 Q. Merci. Monsieur, encore quelques petits points à tirer au clair. Vous
4 avez dit : "Où est-ce que tu tiens tes armes ?" Mais qui sont ces "ils"
5 dont vous avez parlé ?
6 R. J'ai dit qu'il s'agissait de mes voisins et que c'était des Serbes
7 avant tout. Notre rue était habitée par des gens de toute appartenance
8 ethnique, il s'y trouvait aussi bien des Bosniens musulmans que des Serbes
9 et des Croates. Peut-être un peu moins de Croates, mais, tout de même, nous
10 travaillions tous les uns avec les autres et nous assurions tous des
11 permanences. La provocation dont je viens de parler - car, aujourd'hui, je
12 n'hésite pas à qualifier cela de provocation - bien, cette provocation a
13 été le fait de ceux qui avaient la même appartenance que moi, à savoir, des
14 Serbes.
15 Q. Très bien. Vous avez parlé à plusieurs reprises d'une structure que
16 vous appeliez la protection civile. Pourriez-vous rapidement, je vous prie,
17 nous dire quelle était cette structure et de quelle façon elle s'intégrait
18 au gouvernement municipal ?
19 R. La Défense civile ou protection civile faisait en tout état de cause
20 partie du pouvoir municipal. C'est une structure qui existe depuis très
21 longtemps et dans le but était de regrouper toutes les unités, toutes les
22 formations susceptibles à un moment déterminé, à un moment de crise
23 d'intervenir avec ces moyens matériels et humains. Quand je dis "crise", il
24 s'agit de catastrophes naturelles, incendies, inondations, tremblements de
25 terre, et cetera, ou autres incidents graves.
26 Cette structure comportait des Unités chargées de l'Assainissement du
27 terrain chargé de la contamination. En son sein, les sapeurs-pompiers
28 occupaient une place assez particulière puisque il existait à l'époque un
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1 détachement conjoint et deux Unités des Sapeurs-pompiers dans cette Défense
2 civile. Il arrivait qu'on nous appelle s'il y avait des incendies ici ou là
3 en ville ou d'autres incidents graves.
4 Q. J'aimerais appeler votre attention sur la date du 31 juillet 1992. Est-
5 ce que vous avez changé de fonction à ce moment-là ? Est-ce qu'après avoir
6 commandé la Brigade des Sapeurs-pompiers votre travail, vos responsabilités
7 ont changé en juillet 1992 ?
8 R. Malheureusement, c'est quelque chose qui me fait mal lorsque j'en
9 parle, c'est bien le cas et uniquement parce que j'étais Serbe. Le 15
10 juillet 1992, un homme est venu me voir. Je sais que son prénom et Jugo, je
11 ne connais pas son nom de famille. Il m'a dit tout simplement qu'à compter
12 de ce jour je ne commandais plus la brigade et que Meho Kekic prendrait ma
13 place. C'était un jeune homme qui faisait partie des sapeurs-pompiers et
14 d'ailleurs j'avais été son chef hiérarchique au sein des pionniers quand il
15 était tout petit et c'est moi qui l'avais formé. Mais voilà c'est ce qui
16 s'est passé.
17 Je dois insister également que Miroslav Mrdjo, un Croate, était censé
18 prendre ma place au début. Mais au sein de la direction, deux Bosniens ont
19 protesté, ils ont dit que le commandant de la brigade devait être un
20 Bosnien car il est permis de penser que d'autres structures avaient
21 également changé la composition de leur direction et, pour des raisons de
22 proportion, ils ont dit qu'il fallait que ce soit un Bosnien.
23 Donc, c'est dans ces conditions que j'ai été remplacé à mon poste.
24 Q. Avez-vous compris à l'époque pour quelle raison vous étiez démis de vos
25 fonctions ou remplacer à votre poste ?
26 R. Très franchement, oui. Je savais tout à fait clairement pour quelle
27 raison cela s'était passé. J'ai été remplacé à mon poste sur la base de
28 paroles prononcées oralement, sans le moindre document écrit, donc, j'ai
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1 assisté à l'époque pour être reçu par le chef de la Défense civile, à
2 l'époque, M. Josip Skutor, parce que je voulais quelque chose d'écrit. Je
3 dois dire qu'il a fallu que j'attende pas mal de temps pour avoir
4 l'occasion d'un entretien avec cet homme.
5 Quand cette possibilité m'a été accordée, je lui ai demandé de me remettre
6 un décret, un décret stipulant mon licenciement, décret similaire à celui
7 qui m'avait été fourni au moment de ma nomination à ce poste, et que dans
8 ces documents figurent les raisons de mon remplacement à mon poste. Bien,
9 malgré cela, personne ne me l'a jamais dit, mais je savais très bien quelle
10 était cette raison. Toutefois un peu plus tard j'ai reçu un document écrit
11 que je publie également dans le livre dont je suis l'auteur.
12 Q. Vous avez dit que ces motifs étaient très clairs à vos yeux. Quels
13 étaient-ils ?
14 R. La seule raison était mon appartenance ethnique, car à ce moment-là
15 dans la ville de Mostar tous ceux qui occupaient un poste de responsabilité
16 et qui n'étaient pas Croates ou Bosniens ont été remplacés à leur poste.
17 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de cette Chambre si vous avez continué à
18 faire partie de la Brigade des Sapeurs-pompiers même si vous ne la
19 commandiez plus ?
20 R. C'est exact. Mais je dois dire que, si j'ai continué à remplir le
21 travail de sapeur-pompier, je l'ai fait en me sentant très démuni, très en
22 danger. J'attendais simplement que quelqu'un mette la main sur la détente
23 d'un fusil parce que, voyez-vous, c'est terrible, lorsque vous avez créé
24 une brigade, créé une structure, de vous retrouver dans une situation où
25 vous n'avez plus le droit d'utiliser la radio pour annoncer un incendie ou
26 pour réagir à un incendie, vous n'avez plus le droit de prendre un véhicule
27 motorisé sans en demander l'autorisation, vous n'avez plus le droit de vous
28 saisir d'un walkie-talkie ou vous n'avez plus le droit, finalement, que de
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1 conduire la voiture sur ordre, c'est vraiment très pénible.
2 Q. En juillet 1992, Monsieur, en tant que composante du gouvernement local
3 de Mostar, pouvez-vous nous dire quel était le parti ou l'organisation qui
4 dominait au sein du gouvernement de Mostar au cours de l'été 1992 ?
5 R. Je dois dire que le 30 juin 1992, il y a eu un coup d'état militaire
6 dans la ville de Mostar dû au HVO, le HVO a remplacé tous les hommes qui
7 constituaient le pouvoir local de Mostar. Donc, à partir du maire et en
8 passant par tous ceux qui avaient des responsabilités, toutes ces personnes
9 ont été remplacées et des militaires ont pris leur place partout. Le
10 président du HVO, Jadranko Topic était à l'origine de cela.
11 Q. Vous dites que tout cela a concerné le maire et toutes les personnes
12 élues à l'issu des élections. Qui a remplacé ces responsables ? Quel group
13 ou quelle structure ou quel parti politique est venu au pouvoir ?
14 R. Bien, nous sommes contraints de reconnaître que les trois partis
15 nationaux ont pris le pouvoir en ville à l'issu des élections, il s'agit du
16 SDS, du SDA, et du HDZ. Lorsque les Serbes pour ne pas dire le SDS ont
17 quitté la ville, il ne restait plus de SDS, il ne restait plus que le SDA
18 et le HDZ. A ce moment-là, très manifestement, c'était le HDZ qui menait la
19 danse. Comme je viens de le dire, ce sont bien ces membres qui auraient été
20 responsables du coup d'état militaire lorsqu'ils ont remplacé à leur poste
21 toutes les personnes qui avaient des responsabilités dans la ville à partir
22 du maire et à tous les niveaux. Evidemment, ce sont ces gens-là qui ont
23 continué à gérer la ville, alors que la troisième composante n'était plus
24 là parce que les habitants serbes sont massivement partis de la ville et,
25 en tant que composante du pouvoir, ils n'existaient plus. Ceux qui sont
26 restés en ville servaient, finalement, de pions dans les négociations entre
27 les deux autres parties.
28 Je suis resté, mais je vous ai dit que j'ai payé très lourd pour
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1 cela.
2 Q. Ce M. Skutor, qui est venu vous voir et vous a annoncé que vous étiez
3 démis de vos fonctions, quelle était son appartenance ethnique ?
4 R. C'était un Croate. Il représentait la Défense civile dans la ville de
5 Mostar à l'époque au sein du pouvoir local.
6 Q. Nous avançons dans le temps. Vous êtes resté à la Brigade des Sapeurs-
7 pompiers; pourriez-vous dire aux Juges où se trouve le bâtiment dans la
8 caserne des pompiers là où vous travaillez à l'époque ?
9 R. Jusqu'au 11 mai 1992, cette caserne se trouvait dans la rue Braca
10 Brkica au numéro 4, en face du grand magasin qui s'appelle Razvitak. Le 11
11 mai 1992, j'ai estimé que les Serbes exerçaient ou faisaient beaucoup une
12 grande pression sur la rive gauche et qu'il y avait de plus en plus de gens
13 qui la quittait et les pompiers sont intervenus plusieurs fois pour aider
14 les gens à partir. Nous avons aidé ceux qui voulaient quitter la rive
15 gauche.
16 Le 11 mai je suis allé chez moi, retourné à mon appartement. J'ai
17 rencontré dans ma rue une unité serbe, par la suite, je crois que dans de
18 telles conditions, je n'aurais jamais voulu rester. Une partie de l'unité
19 avait déjà été transféré sur la rive droite. Je leur ai dit quelle était la
20 situation et il y avait un certain Miodrag Kandic, un Serbe. Il y avait
21 deux frères musulmans, Dostovic, Edo et Nerko. Nous quatre, nous sommes
22 restés sur place, alors que les autres se sont retrouvés sur la rive droite
23 de la rivière. J'ai dit que je ne savais pas s'il était possible de
24 continuer à vivre là, qu'on n'aurait pu donner tout notre matériel aux
25 Serbes, se rendre aux Serbes, mais je me suis contenté de franchir la
26 rivière. Je n'ai même pas pensé à cette idée-là parce que c'est une zone
27 qui avait été attaquée depuis plusieurs jours par des tireurs embusqués.
28 Nous sommes passés sur la rive gauche et nous avons été logés par des
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1 collègues de -- dans la caserne des pompiers, puis, on nous a dit d'aller
2 ailleurs. Nous sommes allés dans un bâtiment de la faculté de l'institut
3 chargé, de l'institut de la construction. Nous y sommes allés là, nous
4 avons travaillé à partir de là pendant un certain temps. Il y avait des
5 incendies qu'il fallait éteindre dans cette zone, dans ce secteur. Après,
6 nous sommes restés là jusqu'en septembre, après quoi nous avons réintégré
7 les locaux que nous avions au départ. Le 18 juin 1992, dans ce home ainsi
8 que dans ces locaux qui se trouvent sur la rive gauche. Nous avions, en
9 fait, deux installations et, dans la seconde installation, nous avons cinq
10 hommes. Nous allions les voir tous les jours. Nous leur donnions des
11 vivres. Nous leur fournissions le soutien logistique et il y avait relève
12 des équipes tous les deux jours, tous les deux ou trois jours. S'il y avait
13 beaucoup de travail à faire du côté de la rive gauche, beaucoup de
14 pression, bien à ce moment-là nous étions de service pendant sept jours.
15 Donc, à partir du 18 juin, nous étions sur ces deux installations dans ces
16 locaux que nous avions sur la rive gauche et, sur la rive droite, nous
17 avions ce "home" jusqu'en septembre. Après, nous sommes repartis dans nos
18 locaux initiaux.
19 Q. Quelques points. Vous parliez ici de cette rive gauche, de cette rive
20 droite. Quand vous dites "rive droite", c'est ce qu'on appelle Mostar
21 ouest; est-ce bien exact ?
22 R. Je ne sais pas comment dire, notre base, disons, bien c'était la rue
23 Braca Brkica, au numéro 4 en face de ce grand magasin Razvitak. Cela
24 c'était notre base. Mais il fallait trouver d'autres locaux, une autre
25 base. Je ne peux pas dire qu'on s'est installé dans la parie est, ou la
26 partie nord de la ville. Si nous sommes allés sur la rive droite c'est
27 parce que nous avions un certain objectif. Nous voulions garder nos
28 effectifs, conservés le matériel, donc, nous avons, finalement, en partie,
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1 réussi dans cette tâche.
2 Q. C'était plus simple que cela ma question. Je voulais savoir, dans
3 l'intérêt des Juges : quand vous dites "rive droite", est-ce ce qu'on
4 appelle communément Mostar ouest ?
5 R. Oui, oui, tout à fait. Tout à fait.
6 Q. Quand vous dites "rive gauche", c'est ce qu'on appelle quelquefois
7 Mostar est ?
8 R. Oui, la partie est de Mostar.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, vous avez une carte, le 9 517. Vous
10 pourriez peut-être lui présenter. Comme cela, ce serait peut-être plus
11 clair.
12 M. SCOTT : [interprétation] Oui, nous allons examiner longuement d'ailleurs
13 cette carte. Mais je ne voudrais pas l'examiner dès maintenant. Avec votre
14 permission, j'aimerais retarder ce moment de quelques minutes. J'espère
15 que, maintenant, les dires du témoin sont clairs sur ce point.
16 Q. Monsieur, ce matin, vous nous avez dit qu'au moment où arrive l'été en
17 1992, ce qu'on appelait le HDZ, ce parti politique croate, avait pris le
18 contrôle de la ville et que les personnes qui avaient été élus, les
19 fonctionnaires élus auparavant avaient été soit démis de leurs fonctions ou
20 remplacés. Revenons à une partie de votre déclaration, page 24, ligne 17.
21 Vous avez dit que ceux qui n'étaient pas Croates ou Serbes avaient été
22 remplacés. Est-ce que ce sont tous les Croates et les Serbes qui ont été
23 remplacés ? Ou est-ce que ce sont les non-Croates ?
24 R. Je vais essayer de répéter ce que je vous ai dit, il y a un instant.
25 J'ai dit que les pouvoirs publics ont tous été remplacés à commencer par le
26 maire qui était Croate. Lui aussi, il y a été remplacé. Le fait qu'il était
27 Croate, cela n'a pas beaucoup aidé. S'il a été remplacé, c'est sans doute
28 parce qu'il n'était pas fidèle aux principes ou préceptes du HDZ. Tous ceux
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1 qui partageaient les idées du maire, M. Gagro Milivoj, par exemple, ont été
2 remplacés, mais il est vrai aussi des Bosniens qui n'avaient pas voulu
3 accepter la politique du HDZ.
4 Indépendamment de l'appartenance ethnique, si on ne faisait pas partie de
5 cette équipe, si on ne suivait pas les idées du HDZ, on était remplacé.
6 Ce que j'ai dit, c'était que puisque les Serbes avaient quitté la ville,
7 ils ne s'y trouvaient plus. Les pouvoirs militaires étaient restés en ville
8 et tous ceux qui sont restés, ils ont dû se débrouiller comme ils ont pu.
9 Q. Avant de passer à l'année 1993, parmi, si vous le voulez bien d'un
10 événement survenu en 1992, est-ce que quelqu'un a tenté de confisquer votre
11 véhicule ?
12 R. Oui. Voici ce qui s'est passé. Ma fille m'a relaté certaines choses et
13 puis, j'ai fini par comprendre parce que vous voyez, elle a éclaté en
14 sanglot. Elle m'a dit : "Papa, prend soin de toi. N'oublie que je suis la
15 seule personne que tu as," et cela m'a vraiment touché. Cela m'a ébranlé.
16 Je ne savais pas ce que ma fille savait à l'époque. Je lui ai répondu :
17 "Maintenant, ce que je fais c'est pour la ville. Bien sûr." Elle a répondu
18 : "Mais à quoi cela va t'avancer ? Cela va servir à quoi ?" Donc, j'étais
19 dans une situation pénible. Elle m'a dit : "Est-ce que tu sais que tu es
20 suivi en ville ?" Je ne sais pas. Pas du tout. Alors, elle m'a donné des
21 détails. Quand j'ai mis en place cette pièce du puzzle, effectivement, j'ai
22 compris qu'elle avait raison. Elle était chez sa tante à l'époque. Sans
23 doute qu'elle avait pris cela par les jeunes qu'elle rencontrait, qu'elle
24 fréquentait.
25 Auparavant, j'avais escorté un de nos collègues parce qu'il avait demandé
26 que je lui donne dix pompiers à l'Institut l'aluminium et je l'ai emmené à
27 Rudnik qui se trouve environ à trois kilomètres de nos locaux. Cela se
28 trouve dans la partie ouest de la ville et lorsque nous sommes approchés de
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1 Rudnik, là où il devait se présenter. Il y avait -- à un endroit, il y
2 avait des obstacles et il y avait deux hommes en uniforme avec pour
3 insigne, celui de la Défense territoriale. L'un deux m'a dit d'arrêter, de
4 sortir de la voiture. J'ai dit que ce n'était pas ma voiture. Je lui ai
5 demandé comment j'étais censé quitter, sortir de la voiture. Il m'a dit
6 simplement : "Sors, montre-nous ton permis de conduire, puis, tu peux
7 partir."
8 Un homme de taille moyenne s'est approché de la personne qui m'avait
9 donné cet ordre et il m'a dit : "Tu sais qu'on s'était mis d'accord pour
10 dire qu'il ne fallait pas embêter les ambulances et les camions de pompier.
11 Rends ces documents à cet homme." Je lui avais déjà donné mon permis de
12 conduire. Donc, il me l'a remis. Il me l'a rendu et l'autre homme m'a dit :
13 "Vas-y, monte et va-t-en."
14 J'ai poursuivi ma route. J'ai accompagné ce jeune homme encore sur
15 une distance de 800 mètres. Il ne lui restait que 200 mètres à couvrir.
16 Puis, j'ai fait demi-tour. Je ne suis plus reparti dans ce quartier de la
17 ville, pas avant que nous nous installions ailleurs, que nous nous soyons
18 installés dans ces locaux de ces élèves, où là, il a fallu éteindre les
19 incendies.
20 Q. Est-ce que vous connaissez le nom de la personne qui vous a demandé vos
21 papiers ?
22 R. Non. Mais je peux vous dire qu'avant cet incident car les incidents
23 donnaient souvent de l'eau en temps de paix aux habitants. Si par exemple,
24 il y avait pénurie dans certains quartiers, on avait ordonné qu'un
25 réservoir d'eau soit amené. En général, on avait l'adresse de la personne
26 qui demandait de l'eau. La personne qui avait cette eau a dit, qu'il se
27 trouvait du côté de Krusevo, un quartier où il n'y avait pas
28 d'approvisionnement en eau. Donc, il attendait à Banlovac. Cela, c'est dans
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1 la direction qui va vers la partie ouest de la ville. Donc normalement, le
2 chauffeur du camion recevait l'ordre et il est allé avec ce camion à
3 Banlovac. Là se trouvaient deux hommes qui l'attendaient armés de fusils.
4 Ils ont confisqué le véhicule qui a fini à Siroki Brijeg. Même il y a
5 quelques années de cela, ce problème n'avait pas été résolu. Je ne sais pas
6 si on a déjà rendu ce véhicule.
7 C'était l'anarchie qui régnait. On a fait fi de tout bois pour
8 s'approprier des choses. Qu'importe à qui ce matériel appartenait, ce qui
9 comptait c'est qu'il fallait le voler.
10 Q. Aux fins du compte rendu d'audience, j'aimerais une précision de votre
11 part. Vous dites : "Tout ce qu'ils voulaient faire - au pluriel - c'était
12 de voler ce matériel." Vous parlez de qui en utilisant ce pronom
13 personnel ?
14 R. Il y a un instant, je vous ai dit qu'il y avait l'emblème du damier à
15 la manche gauche de ces hommes et en dessous se trouvait l'inscription des
16 forces territoriales. J'ai supposé plus tard que c'étaient des forces du
17 HVO puisqu'il y avait l'insigne des forces territoriales.
18 Q. A l'époque, d'après votre expérience, quelles étaient les forces qui
19 arboraient cette insigne se composant, notamment, du damier et de cette
20 inscription ?
21 R. C'était en général, le HVO. Les hommes du HVO, quelque soit leur
22 appartenance ethnique, ils avaient tous cette insigne. J'ai mon carnet de
23 la protection civile, on les a emporté. Ils ont été emportés mais nous,
24 nous avons de nouveaux carnets. La traduction est en langue croate et puis,
25 vous avez l'emblème du damier -- d'un livret. Cela veut dire que des
26 membres de la protection civile qui faisait partie de ces formations
27 disposaient de ces documents. Nous avions ces emblèmes dans nos livrets.
28 Q. Pourriez-vous aider les Juges de la Chambre ? Quand vous dites, de
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1 nouveaux documents avec le drapeau croate, avec l'insigne croate, quand ces
2 documents vous ont-ils été délivrés ?
3 R. Vers la fin de juin. Peut-être, en juillet. Je ne peux pas vous donner
4 la date exacte parce que je ne m'en souviens pas. Mais je pense que c'était
5 fin de juillet.
6 Q. En quelle année ?
7 R. En 1992.
8 Q. Essayons de parler du début de l'année 1993. Pourriez-vous dire aux
9 Juges de la Chambre si quelque chose s'est produite au niveau de la
10 restructuration des Unités des Sapeurs-pompiers à Mostar ? Nous parlons ici
11 de janvier 1993.
12 R. Oui. On pourrait qualifier ceci de réorganisation car le 22 janvier
13 1993, une décision a été prise disant qu'il fallait restructurer,
14 réorganiser le service des Sapeurs-pompiers. C'était important pour le bon
15 fonctionnement de ces Unités des Sapeurs-pompiers. Cette information, nous
16 l'avons reçu. Cette décision, nous en avons été informés le 28, mais cette
17 décision, elle a été prise, je pense, le 23 janvier.
18 Elle disait que l'Organisation des Sapeurs-pompiers de Mostar mettra
19 tout son matériel à la disposition de la Compagnie des Sapeurs-pompiers
20 professionnels, qu'un véhicule Njiva devrait être fourni au personnel de la
21 protection civile, plus exactement, à son chef, M. Josip Skutor, que
22 l'Unité des Sapeurs-pompiers serait démantelée et serait mobilisée. En tant
23 que de -- quant au mobilité -- de mobilisation aux fins -- comment voulez-
24 vous que l'unité travaille, fonctionne si elle n'a pas de matériel.
25 Q. Est-ce que vous vous souvenez du nom du fonctionnaire qui a pris cette
26 décision ?
27 R. Comment ? Il s'appelait Jadran Topic. C'est sa signature qu'on voit
28 ici. C'est un document qui figure dans le livre que j'ai publié.
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1 M. SCOTT : [interprétation] Pourrais-je avoir l'aide de
2 M. le Greffier pour afficher la pièce P09511. 9511 ? Je vous remercie.
3 Q. Quelle est la nature de ce document ? L'avez-vous déjà vu ?
4 R. Evidemment. C'est un document que j'ai tenu entre les mains et qui fait
5 partie aussi de mon livre. Ceci confirme tout ce que je vous ai dit. La
6 Brigade des Sapeurs-pompiers de Mostar a reçu l'ordre de fournir son
7 matériel, de remettre son matériel à la Compagnie des Sapeurs-pompiers.
8 Vous avez l'obligation de fournir à M. Josip Skutor ce matériel, et l'unité
9 et par cette décision démantelée.
10 Je dois indiquer que nous n'avons jamais exécuté cet ordre. Nous ne
11 voulions pas le faire.
12 Q. Pourquoi pas ?
13 R. Bien, pour une raison simple tout d'un coup cela voulait dire que 30
14 hommes se seraient retrouvés sans travail. N'importe qui aurait pu les
15 capturer, les organiser comme bon leur semblait. En plus, c'était du
16 matériel qui appartenait à la Brigade des Pompiers bénévoles. Je ne veux
17 pas ici par modestie, mais je veux dire que, pour ce qui est de 80 % du
18 matériel réquisitionné, personnellement, avec mes collègues, nous avons
19 payé avec une partie de nos salaires ce matériel, nous-mêmes. J'étais
20 contre cette décision et c'est unanimement que nous avons rejeté cette
21 décision.
22 Q. Vers la même période, en janvier 1993, est-ce qu'il y a des
23 modifications qui sont intervenues au niveau de la façon dont les rations
24 quotidiennes vous étaient fournies ?
25 R. Oui. Ils nous ont donné cet ordre, que nous n'avons pas voulu
26 appliquer. Le lendemain, lorsque nos hommes sont allés au camp du Nord, là,
27 où nous obtenions les vivres et le soutien logistique, on nous a dit
28 simplement qu'on aurait plus de vivre. Nous sommes allés voir les membres
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1 de l'ABiH, de l'armija, pour leur dire cela et ils nous ont fourni vivre et
2 soutien logistique comme ils le faisaient à leurs propres hommes.
3 Q. Une fois de plus, j'ai besoin de votre aide. Vous dites : "Ils ont
4 donné cet ordre." Qui était "ils" ?
5 R. Ce n'est tout à fait clair, mais, quand je dis "ils", cela fait
6 référence à la République ou à la communauté croate d'Herceg-Bosna. On dit
7 ici "Jadranko Topic" en bas du document. C'est très clair qu'il était
8 président du HVO. Il est également fait référence à une décision prise en
9 1992, et ensuite, dans une certaine mesure en 1991, avant tous ces
10 événements survenus dans cette région-là, avant ces événements, il y a eu
11 des préparatifs en vue de la création de l'Herceg-Bosna. Ceci se voit très
12 clairement dans ce document.
13 Q. Excusez-moi. Peut-être n'ai-je pas posé ma question de façon
14 suffisamment claire ? Parce que je parlais de la situation en matière de
15 vivre, de nourriture, et lorsque celle-ci a changé, vous dites que
16 quelqu'un -- "ils" ont changé la situation pour ce qui est des rations
17 quotidiennes; alors, quand vous dites "ils", vous pensez à quelle personne
18 ou à quelle organisation ?
19 R. Je vais répéter ce que j'ai dit déjà. C'est très clair qu'il s'agit des
20 membres du HVO. Il est très clair que cette formation s'était déjà
21 constituée pour former dans Herceg-Bosna. Qui est derrière la signature de
22 ce document, qui est derrière Jadranko Topic, je ne le sais pas. Vous voyez
23 que ceci concerne à Jadranko Topic, sans doute. Au vu de ce document,
24 s'agissait-il de quelqu'un qui était habilité à agir en Herceg-Bosna.
25 Q. Est-ce qu'on vous a jamais expliqué pourquoi le HVO avait cessé de
26 fournir les vivres à des pompiers en 1992 ?
27 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président --
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je demanderais pour reformuler la question
2 parce que, maintenant, on parle de cette Bosna. Ce témoin ne dit pas qui
3 c'était. Puis, il fait référence à M. Topic et, maintenant, M. Scott pose
4 la question de savoir si c'est le HVO. Je me permets de demander que soit
5 reformulée la question. Ceci présente des faits qui n'ont pas du tout été
6 prouvés ni versés au dossier.
7 M. SCOTT : [interprétation] Oui, je vais la reformuler, Monsieur le
8 Président.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Scott, allez-y.
10 M. SCOTT : [interprétation]
11 Q. Est-ce que l'organisation d'Herceg-Bosna vous a donné une explication
12 ou a donné des raisons au fait que vous ne receviez plus de vivre ?
13 R. Non. Nous n'avons pas reçu d'explication. On ne pouvait pas vérifier,
14 c'était tout à fait clair. Nous avions refusé d'exécuter leur ordre,
15 d'appliquer leur décision, bien entendu, on a été puni en ne recevant pas
16 ce soutien logistique. C'est tout à fait logique. Mais il nous était
17 impossible de vérifier tout cela pourquoi cela s'était passé.
18 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais encore quelques
19 questions à poser sur ce sujet, peut-être pourrions-nous terminer ce sujet
20 avant la pause ?
21 M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. Allez-y.
22 M. SCOTT : [interprétation] Je vais demander l'aide de
23 M. le Greffier pour que vous soit montrée la pièce P09512.
24 Q. Pourriez-vous nous dire quelle est la teneur de ce document ?
25 R. Je pense que le document se passe de commentaire. On voit bien
26 clairement qu'il s'agit ici du conseil croate de la Défense parti
27 constitutif de la République d'Herceg-Bosna, ou plutôt de la communauté
28 croate d'Herceg-Bosna, et qui donne l'ordre que l'Association des Pompiers
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1 bénévoles soit abolie. Lorsque nous avons reçu cette décision, qui nous
2 disaient que nous faisions plus partie de la protection civile de Mostar,
3 je dois relever que le 23 janvier lorsque nous avions refusé d'appliquer
4 cette décision à ce propos nous ne faisions plus partie organiquement de
5 cette formation. Cela a été dit officiellement le 3 mai.
6 Retenez cette date, s'il vous plaît, celle du 3 mai. Notez là quelque part,
7 car les événements qui vont suivre vont prendre une signification toute
8 particulière au regard de cette date du 3 mai.
9 Q. M. Skutor, dont on a trouvé le nom ou dont on trouve le nom ici au
10 document 9512, était-ce le même homme ? Etait-ce lui qui vous avait démis
11 de vos fonctions de commandant ?
12 R. Oui. Il s'agit bien de la même personne.
13 M. SCOTT : [interprétation] J'ai terminé l'examen de ce sujet. Peut-être
14 que pourrions-nous faire la pause, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire, comme je l'ai dit, une pause d'un
16 quart d'heure. Donc, nous reprendrons nos travaux aux environs de 11 heures
17 moins le quart.
18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.
19 --- L'audience est reprise à 10 heures 50.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience étant reprise, vous avez la parole.
21 M. SCOTT : [interprétation]
22 Q. Monsieur Pejanovic, avant la pause, vous nous avez exhorté à bien
23 garder à l'esprit la date du 3 mai 1993, et je souhaite, effectivement,
24 parler avec vous à présent de ce mois de mai 1993, en particulier, de la
25 journée du 9 mai. Pourriez-vous nous dire ou pouvez-vous dire aux Juges de
26 la Chambre ce qui s'est passé ce jour-là, le 9 mai ou dans la période
27 allant du 3 mai au 9 mai ?
28 R. Un peu plus tôt, j'ai dit que je souhaitais me concentrer sur cette
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1 date car c'est une date très importante. C'est le 3 mai. Le 9 mai, le
2 conflit a éclaté entre le HVO et l'ABiH, ou entre les Croates et les
3 Musulmans. C'est à ce moment-là que le conflit a éclaté.
4 Une décision a été rendue le 23 janvier, aux termes desquels les pompiers
5 de Mostar devaient remettre tout leur équipement et l'ensemble de leur
6 équipement, ainsi que le véhicule à la protection civile. Je crois que leur
7 objectif était très clair par là.
8 Maintenant, je vous demande que ce serait-il passé si nous avions appliqué
9 cet ordre, celui qui était daté du 23 janvier ? Si nous avions tenu compte
10 de cette décision du 3 mai ou du 9 mai, tous les citoyens de Mostar
11 auraient dû descendre la rivière pour aller chercher de l'eau.
12 Heureusement, nous ne sommes pas conformés à cet ordre.
13 Je vais, maintenant, vous paraphraser ceci. Nous avons réussi à mettre en
14 place une protection un peu élémentaire avec l'équipement dont nous
15 disposions. Nous avions une petite quantité d'eau. Le 3 mai était une date
16 très importante.
17 Q. Je souhaite maintenant vous reporter plus particulièrement à la date du
18 9 mai; est-ce que vous vous souvenez de ce qui s'est passé ce jour-là ? Que
19 vous est-il arrivé et qu'est-il arrivé à la Brigade des Sapeurs-pompiers
20 dans la partie est de Mostar ? Ce jour-là ou la partie ouest, quel que soit
21 l'endroit où vous vous trouviez ?
22 R. A ce moment-là, nous étions entrés dans la rue Brkica en face du grand
23 magasin Razvitak. Je faisais partie de l'équipe de nuit du samedi au
24 dimanche. Quelqu'un était censé me relever vers 5 heures moins quart du
25 matin. C'est à ce moment-là qu'il y a eu des coups de feu. Nous étions
26 allongés et on ne savait pas vraiment d'où venaient les tirs et qui
27 tiraient. On a dû -- on a pris un certain temps pour reprendre nos esprits
28 et comprendre ce qui se passait. Nous nous sommes rendus compte à ce
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1 moment-là que les tirs venaient du boulevard, là précisément où se trouvait
2 -- là où, plus tard, la ligne de démarcation a été établie.
3 J'étais d'accord d'agir en collaboration avec mes collègues. Nous pensions
4 que les conséquences ne seraient pas trop graves. Donc, nous sommes allés
5 chercher de l'eau dans le camion citerne des sapeurs-pompiers pour faire du
6 café. Ensuite, j'ai remarqué que devant nos locaux, à une vingtaine de
7 mètres le long de la route, il y avait une maison particulière. Je voyais
8 de la fumée s'échappée de cette maison et avec les hommes nous avons dit
9 oublions le café et éteignons le feu. Au moment où nous avons voulu
10 éteindre le feu, un tireur embusqué a touché deux tuyaux. Lorsque nous
11 avons vu que ces tirs étaient répétés, nous avons essayé de déplacer le
12 camion car, en face de la route, il y avait une ancienne installation et
13 dans le sous-sol de ce bâtiment, il y avait un poste radioamateur. Nous
14 avons essayé de déplacer le véhicule pour qu'il soit derrière le bâtiment
15 afin de protéger le camion. Nous utilisions toujours le tuyau pour éteindre
16 le feu. Egalement, certains éléments que nous avions trouvé pour protéger
17 les tuyaux.
18 C'était le premier feu que nous avons tenté d'éteindre ce jour-là. Ensuite,
19 il y a eu toute une série d'incendies. Un de ces incendies sur lesquelles
20 je souhaite -- à propos duquel je souhaite insister était l'incendie au
21 poste de police, près du marché, dans les locaux d'une association, une
22 sorte d'association de la marine. Ils avaient un soutien logistique et des
23 armes et des munitions dans le sous-sol et ils dormaient dans une autre
24 partie du bâtiment.
25 Nous avons réussi à éteindre le feu. Le feu ne s'est pas propagé dans les
26 alentours des bâtiments voisins. C'était un feu assez coriace mais il y a
27 eu sept ou huit interventions. Nous avons eu sept à huit incendies à
28 éteindre au cours de la journée. Pour ce qui est de cet incendie-là, nous
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1 avons pu l'éteindre sans que nous ayons à subir des pertes au niveau des
2 hommes et au niveau de notre équipement.
3 Q. Pourriez-vous nous dire si le poste des sapeurs-pompiers a été touché
4 par des tirs d'artillerie, ce jour-là, le 9 mai ?
5 R. Nos installations et l'endroit où ces derniers se trouvaient faisaient
6 souvent l'objet de tirs. Je souhaite simplement vous dire ceci : la partie
7 supérieure du réservoir a été touchée à deux reprises et il y a un obus qui
8 a traversé le réservoir et est tombé sur nos installations. L'autre obus a
9 enlevé la partie supérieure -- a fait tomber la partie supérieure du
10 réservoir, ce qui recouvrait le réservoir, la couronne en haut du
11 réservoir.
12 Il y avait également une poutre qui traversait, c'était la poutre centrale
13 qui traversait tout le bâtiment. Les autres poutres étaient entrecroisées
14 avec cette poutre principale. Par conséquent, cette poutre a dû être
15 remplacée.
16 Nous avons regardé et vu quels étaient les dégâts provoqués par ce
17 pilonnage.
18 Q. Vous nous avez dit il y a quelques instants que, pendant toute la
19 journée du 9 mai, vous et votre unité, vous avez éteint sept à huit
20 incendies. Hormis le poste des sapeurs-pompiers, vous souvenez-vous
21 d'autres endroits qui ont été touchés par les tirs d'artillerie ce jour-
22 là ?
23 R. Je vous ai dit, il y a un instant, que le poste de police était en
24 flammes et cet à partir de la colline de Hum qu'on avait tiré. C'est là que
25 la visibilité était excellente et, ce même jour, l'Institut d'hygiène a été
26 pris pour cible également. C'était autrefois l'Institut d'hygiène qui a été
27 transformé en hôpital de campagne -- hôpital de guerre et c'était protégé
28 par des sacs de sables et des poutres, et les poutres, encore une fois, ont
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1 été endommagées par des missiles.
2 Q. Bien. Nous allons, Monsieur Pejanovic, revenir sur ces incidents, en
3 particulier, et ces incendies. Mais, avant d'y revenir, j'aimerais vous
4 parler de ceci. Après le 9 mai et ce qui s'était passé le 9 mai, pourriez-
5 vous parler aux Juges de la façon dont ont été mobilisés les sapeurs-
6 pompiers à l'est de Mostar, une fois que le conflit avait véritablement
7 éclaté ?
8 R. Un peu plus tôt dans ma déposition, j'ai dit que le 9 mai, j'étais
9 censé être relevé et une autre équipe devait me remplacer, et notre équipe
10 devait partir. Nous habitions tous dans la partie ouest de Mostar, c'était
11 les maisons où résidaient leurs familles, mais certains d'entre eux avaient
12 un domicile provisoire dans la partie ouest de Mostar.
13 Après l'éclatement du conflit, on ne pouvait pas raisonnablement s'attendre
14 à ce que d'autres prennent la relève ce jour-là. Par conséquent, moi et
15 d'autres collègues, nous avons été obligés de recruter les personnes qui
16 n'avaient aucune expérience. Nous n'avions pas d'autre possibilité. A ce
17 moment-là, nous avons embauché beaucoup de gens nouveaux pour qu'ils
18 travaillent et tant que sapeurs-pompiers. Il y a même des gens qui étaient
19 d'anciens sapeurs-pompiers, qui avaient fait partie de la Brigade des
20 Sapeurs-pompiers et qui étaient partis, par exemple, Sator Ahmet, Mirzo
21 Bratic, qui a été tué par la suite par un éclat d'obus. Je pourrais vous
22 citer d'autres noms, mais je ne sais pas si cela vous intéresse. C'était
23 pour la plupart, des gens qui travaillaient à la Brigade des Sapeurs-
24 pompiers avant la guerre et qui pour différentes raisons avaient quitté la
25 brigade, après que le conflit ait éclaté, ils sont revenus et ont rejoint
26 la brigade.
27 Mirza Bratic, que j'aie évoqué, ses parents habitaient avant dans un
28 bâtiment de qualité qui se trouvait près de la gare et de la station de
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1 bus. Il est venu nous voir, car après le début du conflit, on ne pouvait
2 pas passer de l'autre côté, je l'ai tout de suite intégré dans la brigade.
3 Je dois vous dire que, ce jour-là, un incendie a éclaté près de la ligne de
4 démarcation, près de la rue Santica et près du cinéma, du bâtiment où se
5 trouvait le cinéma. Etant donné qu'un ordre avait été donné et que nous ne
6 faisions pas partie du personnel de ce secteur, nous avons quitté le
7 secteur 1, nous avons appelé nos collègues pour dire que certains
8 appartements étaient en flammes. Ils se sont rendus à cet endroit-là et je
9 ne sais pas ce qui s'est passé, mais ils ont été pris entre les feux
10 croisés du HVO et de l'ABiH. Il y avait également à cet endroit-là des
11 membres du MUP de Bosnie-Herzégovine.
12 Ils ont laissé le camion dans la rue, ils se sont enfuis et se sont mis à
13 l'abri. Nous ne savions pas ce qui se passait, eux non plus. Ils ne nous
14 ont rien dit. Leur équipement radio est resté dans le camion. Deux ou trois
15 jours plus tard, ils nous ont appelé et ils nous ont dit que nous étions
16 responsables de la disparition de deux ou trois hommes qui se trouvaient à
17 l'intérieur du véhicule.
18 Par conséquent, un collègue et moi-même, nous sommes partis à bord d'une
19 voiture, nous avons traversé le pont et nous nous sommes rendus à un
20 endroit près de la rue Santica, et nous sommes allés d'un appartement à
21 l'autre en appelant les noms. Une femme est sortie d'un de ces appartements
22 et a dit : "Ils sont ici." Donc, nous avons trouvé ces hommes et nous leur
23 avons expliqué ce qui s'était passé, et qu'on nous tenait pour responsable
24 pour leur disparition. Nous leur avons dit que nous allions appeler leurs
25 familles pour leur dire qu'ils allaient bien.
26 C'est ce qui s'est passé. Bien sûr, tout le monde était content qu'on ait
27 pu les retrouver. Nous leur avons proposé de venir nous rejoindre. Ils nous
28 ont répondu qu'ils allaient y réfléchir.
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1 Etant donné qu'ils n'avaient ni cigarettes, ni nourriture, ils étaient
2 coupés de tout, et le lendemain, ils sont venus nous voir et ils ont resté
3 15 à 20 jours, je ne sais pas exactement pendant combien de temps, c'était
4 des jeunes hommes formidables. Ils nous ont beaucoup aidés et ils nous ont
5 aidés à réparer nos véhicules, les moteurs, et cetera, car nous les
6 utilisions dans des circonstances un petit peu particulières.
7 Entre-temps, Pompiers sans frontières, nos collègues de France, sont
8 arrivés. Ils sont arrivés avec de l'aide humanitaire, un petit véhicule
9 transportant de l'eau, et une ambulance et un camion-citerne transportant
10 de l'eau, également, des liquides de perfusion, il y en avait 1 000 litres
11 environ.
12 L'ambulance qui était entièrement médicalisée, ainsi que les liquides de
13 perfusion ont immédiatement été transportés à l'hôpital de guerre parce
14 qu'ils en avaient besoin.
15 Ils se préparaient à travers et à aller de l'autre côté, du côté ouest de
16 Mostar. Ceci avait été organisé par la FORPRONU. Nous avons réussi à
17 intégrer quatre hommes dans le convoi et ils sont passés de l'autre côté.
18 Malheureusement - et ceci est tout à fait malheureux - l'un des collègues,
19 un pompier, a commencé à faire des recherches et il a fait cela assez tôt.
20 Il a voulu savoir en passant de l'autre côté, et après cela, lorsqu'ils
21 sont passés de l'autre côté, j'ai appris que l'un d'entre eux avait été tué
22 par un tireur embusqué, quelque part près du boulevard. Mais ils y ont
23 poursuivi leur intervention et il a été tué par un tireur embusqué.
24 Q. J'aimerais vous demander quelle assistance a été fournie par
25 l'organisation française, l'ambulance et une autre forme d'aide; pourriez-
26 vous dire aux Juges, s'il vous plaît, à quelle date ceci s'est produit ?Au
27 mois de mai de cette année ?
28 R. Je peux vous dire que c'était vers la fin du mois de mai lorsqu'ils
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1 sont repartis. Au moment de l'événement lui-même, autrement dit, lorsqu'ils
2 sont venus éteindre les incendies, c'était le 9 mai dans l'après-midi, vers
3 14 heures. Je vous ai dit qu'ils sont restés chez nous pendant quelques
4 temps, et entre-temps, les Pompiers sans frontières sont arrivés, et vers
5 la fin du mois de mai, le convoi est passé de l'autre côté de la ville et
6 nous avons dû négocier avec les autorités civiles car tout le monde avait
7 besoin d'autorisation pour passer de l'autre côté; donc, nous avons réussi
8 à négocier avec les autorités militaires et nous assurer que ces personnes
9 puissent revenir.
10 Q. Pour entrer dans la partie ouest de Mostar vous deviez demander une
11 autorisation à quelle autorité ?
12 R. Nous n'avions aucune chance de passer de l'autre côté de la ville. Non,
13 c'était le convoi qui pouvait passer, et ceci avait été organisé par les
14 deux autorités. Le convoi était mené par la FORPRONU. Nous avons essayé de
15 faire embarquer nos collègues de la Brigade des Sapeurs-pompiers dans ce
16 convoi de façon à ce qu'ils puissent quitter Mostar, c'est la raison pour
17 laquelle quatre sapeurs-pompiers, nos quatre collègues sont partis. Ils ont
18 fait partie du convoi. Mais il nous fallait une autorisation à la fois des
19 autorités militaires et des autorités civiles de cette partie-là de la
20 ville, car ils vérifiaient les identités des personnes qui se trouvaient
21 dans le convoi.
22 Q. Vers cette date, et après le mois de mai 1993, est-ce que vous avez
23 assuré le commandement de cette Brigade des Sapeurs-pompiers une nouvelle
24 fois, à l'est de Mostar ?
25 R. Oui. Il se trouve que le collègue qui a été nommé en juillet 1993,
26 lorsque j'ai été démis de mes fonctions, a commencé à rendre les choses
27 difficiles, tout d'abord, cela n'était pas bien grave, mais plus tard les
28 choses se sont aggravées vis-à-vis des autorités civiles. Il y avait
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1 souvent des réclamations à propos de son comportement, de son travail à
2 cause de la distribution d'eau dans l'ensemble de la ville. Les autorités
3 civiles en ont eu assez avec toutes ces réclamations qui arrivaient, et à
4 un moment donné, ils se sont posés la question, ils se demandaient si
5 c'était la seule personne capable d'occuper cette fonction et s'il n'y
6 avait pas quelqu'un d'autre qui pouvait le faire également. Ensuite,
7 certaines personnes ont dit qu'ils me connaissaient d'avant la guerre et
8 ils ont dit que oui, ils me connaissaient, Ratko Pejanovic, mais c'était un
9 Serbe. Ensuite, le président de la présidence de Guerre, M. Smajo Kljajic,
10 a dit : "Ecoutez, ce n'est pas de ma faute si c'est un Serbe. Si il sait
11 faire ce travail, nous devons le nommer à ce poste." C'est ainsi que le 15
12 juillet, j'ai été nommé une nouvelle fois commandant de la Brigade des
13 Sapeurs-pompiers. C'est à ce moment-là que les autorités civiles étaient en
14 train d'être créées sur la rive gauche.
15 Q. Merci.
16 L'INTERPRÈTE : Veuillez ralentir, s'il vous plaît.
17 M. SCOTT : [interprétation]
18 Q. Monsieur Pejanovic, on vous demande de bien vouloir parler un peu plus
19 lentement, s'il vous plaît. Les interprètes essaient de vous suivre.
20 R. Pardonnez-moi. Ne m'en voulez pas encore aujourd'hui. Lorsque je parle
21 de ces événements, je revis tous ces événements, et je vais faire de mon
22 mieux pour essayer de contrôler mon débit.
23 Q. Avant cette intervention, Monsieur, vous avez parlé il y a quelques
24 instants, à la page 46, à la ligne 8, vous avez parlé de votre collègue qui
25 a été nommé. Vous dites : en juillet 1993. Est-ce que vous parliez de votre
26 remplacement en 1992 ?
27 R. Oui, c'est fort possible. C'était un lapsus linguae. Mais mon collègue
28 Meho Kekic a été nommé en juillet 1990 et j'ai été démis de ma fonction.
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1 Plus tard, au mois de juillet, c'est lui qui a été démis de cette fonction,
2 et je l'ai remplacé. J'ai été nommé une nouvelle fois.
3 Q. A partir de cette époque-là, au mois de mai, c'était au mois de mai
4 1993, est-il exact de dire qu'à l'exception de vous, Monsieur, puisque vous
5 êtes Serbe, tous les autres membres de la Brigade de la partie est de
6 Mostar étaient soit Musulmans, soit Bosniens ?
7 R. Oui, c'est exact. Cela n'aurait pas pu être autrement, car il n'y avait
8 pas de jeunes gens d'appartenance ethnique serbe et ils ne s'intéressaient
9 pas à ce métier. Il y avait environ 600 Serbes sur la rive gauche.
10 C'étaient surtout des personnes âgées, et les personnes qui étaient plus
11 jeunes avaient rejoint l'ABiH ou le MUP de la BiH. Par conséquent, ils
12 avaient déjà rejoint une formation et ne pouvaient pas rejoindre la Brigade
13 des Sapeurs-pompiers.
14 Pour ce qui est des habitants croates, et il s'agissait surtout de
15 personnes âgées, 246, au total, je crois. Il se trouve que j'ai ces
16 chiffres en tête, car à un moment donné, au mois de mai ou au mois de juin
17 1994, nous avons distribué des vivres, vivres qui ont été remis au conseil
18 civique serbe dont j'étais le président, et ces vivres ont été distribués.
19 C'est comme cela que je sais combien d'habitants il y avait.
20 Q. Très bien. Nous allons tourner votre attention un petit peu sur
21 l'équipement dont disposait votre Brigade des Sapeurs-pompiers pendant
22 l'été et la deuxième partie de l'année 1993. Pourriez-vous vous dire aux
23 Juges, s'il vous plaît, de combien de véhicules vous disposiez et de
24 réservoirs, et cetera ? Je parle du matériel lourd.
25 R. Un peu plus tôt, j'ai précisé que nous avions une Lada Niva, qui était
26 le véhicule le plus important. Jusqu'au mois de juin 1992, nous avions
27 également un véhicule permettant de transporter des hommes et de
28 l'équipement. Ceci a été endommagé par simple négligence par nos propres
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1 hommes. C'était un véhicule endommagé qui a fait partie de notre
2 équipement.
3 Ensuite, nous avions les deux camions-citernes qui avaient une capacité de
4 cinq tonnes ou cinq litres. Ensuite, il y avait une Zastava 650 AM, qui est
5 un véhicule qui était utilisé pour la décontamination d'arbres et de
6 plantes très hautes. Ceci avait été acheté en 1985.
7 C'est ce que nous avions, et ce matériel pouvait être utilisé, il
8 fonctionnait. Mais au mois de janvier ou vers la mi-février 1993, il se
9 trouve qu'un de nos camions a été volé, un des camions-citernes et nous
10 n'avons jamais réussi à le retrouver, ce qui signifie que nous avions deux
11 camions-citernes TAM et deux Zastava 650. Leur capacité était de 4 500
12 litres, et nous avions également le véhicule principal dans lequel nous
13 transportions de l'équipement, mais nous ne l'utilisons qu'à cette fin.
14 Nous ne l'avons pas utilisé beaucoup. Pour ce qui est des camions-citernes,
15 ceux-ci étaient la propriété de l'association des sapeurs-pompiers de
16 Mostar.
17 L'un de ces camions-citernes qui avaient une contenance de 7 000
18 litres, le camion qui nous a été remis par la Défense civile. Il me semble
19 que les forces de réserves et les membres des Unités serbes se trouvaient
20 là, ces camions étaient en aluminium. Ensuite, après un certain temps, la
21 Défense civile nous a permis de les utiliser. Ceci avait été fabriqué par
22 l'usine appelée FAP. Sa capacité était de sept litres. C'était un camion de
23 couleur jaune, et c'est ce que j'essaie de vous dire. C'était ce qu'on
24 utilise, en fait. C'était le camion des sapeurs-pompiers.
25 Les lances à incendie étaient assez longues. Plus tard, alors que
26 nous allions éteindre le feu, les lances ont été endommagées et étaient à
27 peine utilisables.
28 Q. Je vais essayer de vérifier tout ceci et voir si je vous
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1 comprends bien. Il y a trois -- ensemble, il y avait trois camions de
2 sapeurs-pompiers, si on peut utiliser ces termes, qui ont pu être utilisés
3 pour combattre les incendies, à cette époque-là.
4 R. Oui, oui.
5 M. SCOTT : [interprétation] Avec l'aide du Greffe, je demande à ce que
6 cette pièce P09220 [comme interprété] soit déplacée, 9220. Il faudrait
7 passer à la page 6233. L'autre numérotation de la page est 14, si cela aide
8 la régie.
9 Q. Monsieur, pouvez-vous nous dire ce qu'on voit, ce que représente cette
10 pièce à conviction, P09220 ?
11 R. On voit un des véhicules dont je viens de parler. C'est le véhicule
12 FAP, camion-citerne de capacité sept mètres cubes. Vous le voyez ici dans
13 une très jolie couleur, et remarquez la plaque d'immatriculation également,
14 parce que quand nous l'avons reçu, c'était tout sauf un camion-citerne. Si
15 je suis bien informé, 4 à 5 000 marks allemands ont dû être investis pour
16 remettre ce camion-citerne en état. On a dû refaire le pare-brise, réparer
17 le moteur, réparer la pompe, changer les essuie-glaces, réparer les
18 portières, et cetera.
19 Q. Ce véhicule est-il celui dont vous parliez en disant tout à l'heure
20 qu'il était de couleur jaune ?
21 R. Oui, absolument, oui.
22 Q. Pouvez-vous nous dire, je vous prie - si vous le pouvez - quel était
23 l'équipement de ces camions du point de vue des phares, des sirènes, de
24 tout équipement de signalisation. Pouvez-vous dire aux Juges s'ils
25 comportaient quelque inscription que ce soit, par exemple, quelque signe
26 distinctif qui permettait de les reconnaître et de les distinguer d'un
27 véhicule de combat ?
28 R. Je dois dire avant tout que partout dans le monde et chez nous
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1 également, les véhicules des pompiers sont de couleur rouge assez éclatant.
2 Je comparerais ce rouge au rouge d'une flamme. C'est une règle implicite
3 qui est appliquée partout dans le monde et chez nous également. Ces
4 véhicules sont donc de couleur rouge, ce qui ne signifie pas qu'ils
5 puissent être utilisés à autre chose qu'à éteindre des feux. Mais je peux
6 vous dire que dans les circonstances dont je parle, ils ont souvent servi à
7 bien d'autres choses, même à tout sauf à cela.
8 Puis, nous avions un sémaphore sur le camion, qu'il n'était pas utile
9 d'utiliser tout le temps. Il y avait une sirène également que nous
10 n'utilisions pas tout le temps. Mais, si quelqu'un voulait se servir de ce
11 véhicule pour un autre objectif qu'éteindre le feu, il choisissait de se
12 servir ou pas du sémaphore et de la sirène.
13 J'aimerais maintenant vous raconter quelque chose qui concerne le
14 réservoir d'eau et le camion, Zastava, dont la capacité était de
15 4 500 litres. Ce véhicule est parti un jour vers Gornji Zanik, une ville
16 dans les environs, et sa citerne était pleine d'eau. Il est arrivé sur
17 place, il a commencé à distribuer de l'eau à la population. C'était près du
18 quartier de Rudnik. Un fusil a commencé à tirer, une balle a transpercé la
19 citerne d'eau, ce qui a fait de cette citerne quelque chose qui ressemblait
20 à du gruyère suisse. Vous voyez un peu à quoi cela ressemblait. Le
21 chauffeur a réussi à se sauver et à sauver sa peau. Le lendemain, nous
22 avons dû tracter le camion jusqu'à chez nous puisque ses pneus étaient
23 plats.
24 Le lendemain encore, à la radio, nous avons entendu les informations,
25 et il était dit : "Hier, les soldats du HVO ont été très efficaces. Entre
26 autres choses, ils ont touché un camion-citerne plein d'essence. Je peux
27 vous assurer que ce camion, c'était notre camion, notre camion-citerne qui
28 servait à distribuer de l'eau à la population, et bien entendu, il n'aurait
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1 pas pu être plein d'essence puisque de toute de façon, nous aussi nous
2 avions des problèmes d'approvisionnement en essence. Parfois, il nous
3 fallait sortir de l'essence de voitures individuelles pour pouvoir mettre
4 en marche nos véhicules de pompiers.
5 Q. J'aimerais vous poser une question au sujet des pompiers membres de
6 votre structure. Quels étaient les vêtements qu'ils portaient lorsqu'ils
7 étaient de service ? Avaient-ils un uniforme ? Si oui, quel était cet
8 uniforme ? Pouvez-vous le décrire ?
9 R. Oui, bien sûr. Je dirais au préalable que lorsque certains d'entre nous
10 avaient encore les anciens uniformes que j'appellerais uniformes
11 stéréotypes de l'ex-Yougoslavie, c'est-à-dire des pantalons avec de longues
12 poches au milieu de la jambe, une chemise que l'on mettait en premier et
13 une deuxième chemise que l'on mettait par-dessus la première, puis une
14 veste doublée, mais avec une doublure assez fine -- tous ces éléments
15 d'uniforme étaient de couleur bleu foncé. Par la suite, lorsque ces
16 uniformes ont été usés, puisque bien sûr, nous pénétrions dans des
17 bâtiments en feu, de sorte que les uniformes s'élimaient très rapidement,
18 nos collègues de l'étranger nous ont fait provenir des vêtements
19 professionnels. Donc parmi nous, il y en avait qui portaient l'ancien
20 uniforme de la couleur que j'ai indiquée, bleu foncé sans aucun insigne
21 particulier, puis il y avait certains qui portaient d'autres uniformes.
22 Nous avions bien sûr un casque sur la tête.
23 Q. Monsieur, pouvez-vous dire aux Juges si ces uniformes des sapeurs-
24 pompiers ressemblaient peu ou beaucoup aux uniformes des membres de l'ABiH,
25 éventuellement ?
26 R. Mais non, pas du tout. Pas le moins du monde. L'uniforme de l'ABiH et
27 l'uniforme des membres du MUP de Bosnie-Herzégovine ainsi qu'y compris les
28 uniformes du HVO étaient des uniformes de camouflage. Pour le MUP et
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1 l'armée, ces uniformes étaient souvent des uniformes véritablement très,
2 très usés, très vieux. Les membres de ces structures armées portaient les
3 éléments d'uniforme qui étaient encore utilisables, quelques fois très
4 usés, très élimées, et d'autres éléments disparates pour compléter si
5 certains éléments manquaient. Il n'y avait vraiment aucune ressemblance
6 entre leurs uniformes et les nôtres.
7 Q. Monsieur Pejanovic, avant de passer à un autre sujet, vous avez parlé
8 des équipements lourds que vous possédiez. Je parle des trois camions que
9 vous avez évoqués. Pouvez-vous maintenant expliquer en quelques mots aux
10 Juges ce que vous avez fait entre mai 1993 et la fin de cette année-là pour
11 maintenir votre matériel en état de fonctionnement ?
12 R. J l'ai déjà dit et je le répète, c'était très difficile. Nous avions
13 donc le matériel dont nous disposions et nous nous sommes toujours efforcés
14 de leur raccommoder, si je puis utiliser ce terme. Je vais vous donner un
15 exemple. Lorsqu'une tôle métallique est transpercée par un éclat d'obus ou
16 par la balle d'un tireur embusqué, il faut évidemment boucher le trou. Nous
17 avions des lances à incendie qui mesuraient 8 mètres de long, par exemple.
18 Il fallait parfois réunir un morceau d'une lance à un autre morceau d'une
19 autre lance. Il fallait aussi réparer les pneus plats des véhicules, les
20 réparer par tous les moyens possibles, et il fallait donc faire tout cela
21 par les moyens du bord. On circulait dans la région. Il y avait des coins
22 où des obus étaient tirés et des balles, aussi. Donc, nous faisions ce que
23 nous pouvions pour coller quelque chose ici, raccommoder là, obturer là,
24 mais c'était très difficile de conserver ces véhicules en état de marche.
25 Q. Très bien. Passons à autre chose, maintenant.
26 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, il serait utile à
27 présent de soumettre au témoin un plan de Mostar qui existe. Je propose de
28 soumettre au témoin cette carte, car je vais lui demander de l'annoter à
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1 plusieurs reprises au cours de la prochaine heure de sa déposition. Ce sera
2 utile s'il a devant lui un exemplaire papier.
3 La carte constitue la pièce à conviction P09517.
4 Q. Monsieur, pour que tout le monde puisse bien suivre le reste de votre
5 déposition ainsi que ce que vous avez déjà dit jusqu'à présent, je vous
6 demanderais de nous montrer sur ce plan où se trouvait le siège de votre
7 Brigade des Sapeurs-pompiers entre le mois de mai et la fin de l'année
8 1993.
9 R. Monsieur le Président, je dois dire avant tout que ce plan est
10 véritablement trop petit pour qu'on puisse annoter tout ce qui est
11 intéressant. Mais, malgré cela, je vais essayer au moins en partie
12 d'indiquer l'emplacement d'un certain nombre de lieux où des événements
13 particuliers se sont déroulés. J'espère que vous pourrez me suivre.
14 La rue du maréchal Tito, qui n'est pas loin de la rue Mazoljice, et
15 en dessous, la rue Mladen Balorda. Donc, on a la rue du maréchal Tito, et
16 au coin il y avait la maison de Coko Rila [phon], et nous, nous étions
17 juste en dessous de cette maison, un peu plus bas. En face, il y avait un
18 grand magasin.
19 Q. J'aimerais que vous inscriviez une annotation sur le plan à l'endroit
20 où était le siège de votre Brigade des Sapeurs-pompiers et que vous
21 inscriviez le numéro 1 à côté de cette annotation.
22 R. Voilà, je l'ai fait.
23 Q. Merci beaucoup. Pourriez-vous inscrire le chiffre 2 au niveau de
24 l'emplacement du bâtiment Razvitak dont vous avez déjà parlé ?
25 R. C'était juste en face de chez nous, donc voilà, ici; et j'inscris le
26 numéro 2. C'est fait. Merci beaucoup.
27 Q. Je vous demanderais d'inscrire encore une troisième annotation, après
28 quoi nous laisserons ce plan de côté et nous y reviendrons plus tard. Je
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1 vous demanderais de situer sur le plan l'hôpital de guerre et d'inscrire le
2 chiffre 3 à ce niveau-là.
3 R. Mais c'est très facile. Vous voyez, là, il y a le numéro 1, puis la rue
4 du maréchal Tito, et ici, à peu près, entre la lettre M et la lettre T,
5 j'inscris le chiffre 3 qui situe l'emplacement de l'hôpital de guerre.
6 Q. Pour que tout soit clair, le numéro correspond au siège de la Brigade
7 des Sapeurs-pompiers, le numéro 2 correspond au bâtiment Razvitak et le
8 numéro 3 correspond à l'hôpital de guerre; c'est bien cela ?
9 R. Oui.
10 Q. Très bien. Nous allons garder ce plan sous la main. Mais maintenant,
11 j'ai des questions portant sur autre chose à vous poser. Durant l'année
12 1993, à partir du 9 mai à peu près, pouvez-vous dire aux Juges, sur la base
13 des informations ou documents dont vous disposiez, quel est le nombre
14 d'incendies dont vous vous êtes occupé à Mostar pendant cette époque ?
15 R. Si nous partons du mois de janvier, donc avant le début du conflit qui
16 a démarré le 9 mai, je dirais qu'entre janvier et le 9 mai - et ne me
17 prenez pas au mot à une unité près - mais je crois pouvoir dire que nous
18 avons éteint entre 86 et 87 incendies. Entre janvier et décembre, nous nous
19 sommes occupés de 386 incendies, donc entre le mois de mai et fin décembre,
20 il y a eu à peu près 280 incendies. Ne me prenez pas au mot à une unité
21 près, mais je crois que c'est à peu près cela.
22 Q. Sur la base de votre expérience de l'époque, quelle était d'après vous
23 la cause de ces incendies ou de la majorité d'entre eux ?
24 R. Je dois dire franchement qu'un grand nombre d'incendies, je dirais même
25 99 % d'entre eux, étaient le résultat des opérations de guerre; soit qu'ils
26 aient été touchés par des munitions incendiaires, soit qu'ils aient été
27 pilonnés par des obus. Il y a également eu, bien sûr, un certain nombre
28 d'incendies causés par un accident, mais ils étaient en minorité.
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1 Q. Pouvez-vous dire aux Juges, sur la base des observations personnelles
2 que vous avez pu faire à l'époque, quels étaient les lieux qui étaient
3 pilonnés à cette époque-là. Est-ce que vous avez pu éventuellement vérifier
4 une coïncidence entre les endroits pilonnés et les endroits où se
5 déclaraient des incendies ?
6 R. Bien, écoutez, est-ce qu'il y avait un schéma particulier ou pas, je ne
7 saurais le dire. Mais en tout cas, 99 % des incendies en question étaient
8 provoqués par des opérations militaires, donc 99 % de ces incendies étaient
9 provoqués délibérément, puisque lorsqu'on utilise des munitions
10 incendiaires, on ne peut pas s'attendre à autre chose. Si l'on pilonne une
11 ville, il est tout à fait clair que le pilonnage va allumer des incendies
12 un peu partout dans la ville. C'est tout à fait normal.
13 Je ne peux pas m'empêcher de dire ici aujourd'hui que, s'agissant des
14 incendies auxquels nous répondions, nous nous mettions en danger en tentant
15 d'éteindre ces incendies, parce que finalement, on éteignait un incendie au
16 risque de notre vie, et la minute d'après, un autre incendie se déclarait
17 ailleurs parce que des tirs avaient eu lieu ailleurs. Donc nous avons subi
18 des pertes humaines dans nos rangs, 14 blessés et une quinzaine d'hommes
19 tués.
20 Q. Je reviendrai à cela plus précisément plus tard, Monsieur Pejanovic.
21 Mais s'agissant des pilonnages, pouvez-vous dire aux Juges, toujours sur la
22 base de votre expérience personnelle, si certains lieux de Mostar étaient
23 pris pour cibles plus souvent que d'autres ?
24 R. Bien, évidemment. Le bâtiment où était stationnée notre Brigade des
25 Sapeurs-pompiers et autour de ce grand magasin qui se trouvait en face, le
26 grand magasin Razvitak, ainsi qu'au niveau de la police militaire, je peux
27 vous dire qu'il y avait aussi un bâtiment qui abritait le commandement et
28 qui a abrité pendant un bref laps de temps la prison, également. Dans ce
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1 même bâtiment, il y a eu aussi les services de comptabilité publique par le
2 passé, et aujourd'hui, ce bâtiment est une banque. Ces bâtiments étaient
3 très souvent visés.
4 Q. Au compte rendu d'audience, on lit les mots : "Hôpital de la police
5 militaire." Est-ce ce que vous avez décrit précédemment comme étant
6 l'hôpital de guerre dont vous parliez ?
7 R. Je ne sais pas qu'il existait un hôpital de la police militaire. Ce que
8 je connaissais, c'était l'hôpital de guerre où tous les blessés et tous les
9 accidentés se rendaient.
10 Q. Pourriez-vous nous dire, sur la base de votre expérience personnelle,
11 ce que vous avez pu voir dans les environs de Mostar ? Quels étaient les
12 lieux dans les environs de Mostar où se déclaraient des incendies, le plus
13 souvent ? Pourriez-vous nous dire où se trouvaient ces endroits, sur la
14 base de ce que vous saviez à l'époque ?
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis me
16 permettre.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Maître Karnavas.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Une objection technique à cette question qui
19 en comporte plusieurs, en fait. Je préfèrerais qu'elle se divise en
20 plusieurs questions, car il y a une différence entre observer quelque chose
21 et obtenir des renseignements à ce sujet. Je n'ai pas élevé d'objection
22 précédemment lorsque la question consistait à demander au témoin si tel ou
23 tel lieu ou bâtiment avait été pris pour cible ou bien avait été touché,
24 mais là je fais objection.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Essayez d'arriver au même résultat par des questions
26 neutres. Je sais bien que vous voulez gagner du temps, mais la Défense
27 objecte. Bon, cela paraît un débat futile, mais respectons la procédure.
28 M. SCOTT : [aucune interprétation]
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Je disais, Monsieur Scott, essayez d'arriver au
2 même objectif par une série de questions neutres, bien qu'à titre
3 personnel, j'estime que l'objection est futile.
4 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]
5 M. SCOTT : [aucune interprétation]
6 Q. [aucune interprétation]
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Les interprètes, on ne les entend plus. Les
10 interprètes.
11 M. SCOTT : [interprétation] Qu'est-ce qui se passe ? C'est encore un bogue.
12 Cela, c'est de l'anglais à partir d'ici, aussi.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : -- l'interprète dit que c'est un bogue, donc, cela
14 doit marcher.
15 M. SCOTT : [interprétation] Vous m'entendez, maintenant, Monsieur le
16 Président ? Je pensais que le micro était éteint, excusez-moi.
17 Est-ce qu'on peut reprendre ?
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.
19 M. SCOTT : [interprétation]
20 Q. Monsieur, pourriez-vous revoir le plan de la ville que vous avez annoté
21 il y a quelques instants. Je me rends bien compte que ce dont je vais vous
22 parler est peut-être en dehors du plan, mais pourriez-vous peut-être au
23 moins inscrire une flèche pour montrer dans quelle direction cela se trouve
24 à l'extérieur de la ville, donc, où se trouve Hum, ces collines ?
25 R. Je répèterai que, si vous posiez la question à quelque habitant qui
26 était en ville à l'époque, il n'aurait pas la moindre peine à vous
27 l'indiquer. Cette position, cet emplacement se trouve au sud de la ville.
28 Il s'agit des collines de Hum. Les autres, l'autre emplacement où des feux
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1 se déclaraient était à l'ouest de la ville, et le troisième, au Nord.
2 Dans la zone de Hum, c'était sur les collines de Brkanovo que les
3 emplacements en question étaient les plus nombreux.
4 Q. Excusez-moi de vous interrompre encore un peu, Monsieur, mais
5 j'aimerais que l'on m'agrandisse le plan sur le rétroprojecteur. Zoom
6 arrière. Bon, commençons avec cela.
7 Monsieur, vous avez parlé d'un emplacement qui se trouvait à l'ouest de la
8 ville. Pourriez-vous donner un nom à ce secteur et inscrire un A sur le
9 plan à ce niveau-là ?
10 M. SCOTT : [interprétation] Il serait bon de remonter un peu, ou plutôt, de
11 descendre le plan sur l'écran. Je demande l'aide de la régie.
12 Q. Monsieur Pejanovic, pouvez-vous, je vous prie, faire de votre mieux
13 pour inscrire une annotation illustrant cet emplacement à l'ouest et d'y
14 inscrire une flèche ou un A majuscule ?
15 R. J'ai dit il y a un instant que le plan était très petit, mais je vais
16 essayer comme je peux. La colline de Brkanovo se trouve à l'endroit où je
17 suis en train d'inscrire un A majuscule, d'ailleurs, les bois de "Siroki
18 Brijeg."
19 [Le témoin s'exécute]
20 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que
21 cela donnera une bonne idée de la réalité. Nous disposons d'une douzaine de
22 cartes et je crois vraiment qu'il faudrait une autre carte, ici. Ce plan
23 est beaucoup trop schématisé. Nous allons aborder un débat qui portera sur
24 les positions militaires, et je crois vraiment que nous devons disposer
25 d'un plan approprié pour ce faire. Le plan qui se trouve ici permet
26 éventuellement de situer un certain nombre de lieux en ville, mais
27 maintenant, nous passons à une question tout à fait différente, à des
28 emplacements de nature tout à fait différente.
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1 M. SCOTT : [interprétation] Je pense que tout de même que le témoin peut
2 nous donner une idée générale de la situation sur la base de ce plan. Nous
3 ne lui demandons pas la plus grande précision qui soit, mais simplement de
4 situer un certain nombre d'emplacements dans la ville. Je lui demande de
5 nous situer sur ce plan un certain nombre de positions de combat qu'il
6 connaissait à l'époque.
7 M. KOVACIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le
8 Président, vous voyez, l'Accusation vient d'utiliser les mots : à peu près,
9 à peu près ceci, à peu près cela. On parlera des positions du HVO,
10 quelqu'un vous dira que les positions étaient exactement ici, et finalement
11 cette position sera approximative.
12 M. SCOTT : [interprétation] Ce sera approximatif.
13 M. KOVACIC : [interprétation] Avec une carte militaire, une carte d'état-
14 major, ce serait précis, alors ce n'est pas la peine de soumettre la carte
15 au témoin.
16 M. SCOTT : [interprétation] Me Kovacic, Monsieur le président, a toute
17 liberté de poser des questions qu'il veut poser au moment du contre-
18 interrogatoire, je suppose.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors bon, que le témoin nous indique où se
20 trouve la direction de cette colline qui est à l'ouest.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit que cela se trouvait dans la
22 banlieue située non loin de "Siroki Brijeg." Je ne peux pas m'exprimer en
23 termes plus précis que cela.
24 Un peu plus loin, il y avait une autre position où se trouvent aujourd'hui
25 les répéteurs de la télévision. C'est au niveau de la colline de Mikuljaca.
26 M. SCOTT : [interprétation]
27 Q. Bien. Alors veuillez apposer une annotation à ce niveau-là également et
28 inscrire la lettre B.
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1 R. [Le témoin s'exécute]
2 Q. Alors, il y a un instant, Monsieur, vous avez également parlé
3 d'emplacement situé au nord de la ville de Mostar, au nord, d'ailleurs,
4 ainsi qu'au sud. Alors, pourriez-vous là encore inscrire une annotation
5 illustrant ces positions ?
6 R. Bien, au nord du centre de la ville entre les quartiers Rudnik et
7 Rastani, sur le territoire de Raska Gora, c'est à peu près ici. Mais,
8 évidemment, ces emplacements sont un peu complexes à définir et j'ai
9 beaucoup de mal à les situer sur le plan que j'ai ici. J'essaie de le faire
10 le plus justement possible dans cette approximation générale.
11 Q. Je vous demanderais d'inscrire encore une fois une flèche indiquant
12 l'emplacement général de cet endroit et d'inscrire la lettre C majuscule.
13 R. [Le témoin s'exécute]
14 Q. Monsieur, vous avez déjà indiqué quel était l'endroit sur le mont Hum;
15 est-ce que vous avez déjà fait référence à cet emplacement ? Pourriez-vous
16 l'indiquer par la lettre D majuscule, s'il vous plaît ?
17 R. C'est une position qui se trouve au sud par rapport au centre. C'est un
18 point dominant. C'est quelque chose qui est très visible quelle que soit la
19 position où vous vous trouvez.
20 Q. Bien, Monsieur, nous allons nous écarter pendant quelques instants de
21 la carte, et j'aimerais vous poser quelques questions à propos des
22 pilonnages et des dégâts provoqués à certains endroits de Mostar pendant
23 les années 1992, 1993; pourriez-vous nous dire en premier lieu, s'il y a eu
24 des dégâts ou des destructions d'église orthodoxes serbes en 1992 ?
25 R. Oui. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute il y avait une église qui a
26 été touchée au mois de juillet. Il y avait la cathédrale. Elle a été
27 incendiée vers la mi-juillet, ensuite elle a explosée. Il y avait une
28 église et il y avait l'église ancienne a été incendiée. Heureusement, elle
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1 n'a pas explosé. Elle a simplement été incendiée. Elle a été rénovée, et je
2 crois que cette église fonctionne normalement.
3 Q. Lorsque vous dites vers la mi-juillet, vous faites référence à la
4 destruction de l'église ?
5 R. En 1992.
6 Q. Si vous le savez, pourriez-vous nous dire quelle organisation est à
7 l'origine et l'explosion de cette église ?
8 R. Bien, c'est ce que j'ai appris de la bouche d'autrui. Je ne sais pas
9 qui était responsable de cela. Si je le savais, je vous fournirais des
10 noms. Je n'hésiterais pas. Mais à l'époque, on nous dit que c'était le HOS
11 qui avait mis le feu à cette église, les forces croates armées. Il y a
12 quelques instants un citoyen m'a dit qu'il avait une vidéo de la pause de
13 mine dans l'église. Il m'a dit qu'il me remettrait ces films. Nous nous
14 sommes rencontrés, et il a évoqué -- nous avons parlé de cela et du fait
15 que j'étais en possession de bobines et de photographies qui montraient que
16 l'église avait explosé.
17 On sous-entendait dans la conversation que ceci avait été fait avec l'aide
18 des soldats du HVO, aidés par les éléments de l'armée croate. Je ne peux
19 pas l'affirmer avec certitude.
20 Q. Bien. Je souhaite vous poser une question à propos de mosquées, encore
21 une fois nous parlons de 1992, nous reviendrons à l'année 1993 dans
22 quelques instants. D'après les éléments dont vous disposiez est-ce que vous
23 savez si des mosquées ont été détruites à Mostar en 1992 ? Détruites ou
24 fortement endommagées.
25 R. Pour autant que je sache, car comme je vous l'ai dit, le 11 mai je suis
26 rentré chez moi, je devais passer devant la mosquée Krzbegova, j'ai vu que
27 le minaret de la mosquée avait été touché. J'ai vu que cette mosquée avait
28 été détruite. Une partie du minaret et une partie de la mosquée avaient été
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1 détruit. Je ne sais pas si les autres mosquées ont été détruites.
2 Q. Maintenant je vais vous demandez de porter votre attention à l'année
3 1993. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre, combien de mosquées dans
4 Mostar est - je parlerais de Mostar ouest un peu plus tard - combien de
5 mosquées dans Mostar est ont été détruites ou endommagées en 1993 ?
6 R. A l'est de Mostar, si on dit que la mosquée Karazbegova a été fortement
7 endommagée ensuite la mosquée de Lipova et Nemed Pasina Dzamija [phon],
8 cette mosquée également en partie endommagée, la mosquée de Mahala et
9 Sarica, cette mosquée-là. Toutes ces mosquées avaient été en partie
10 endommagées. Je dis "en partie" car c'était quelquefois le minaret qui
11 avait été détruit et quelquefois il y avait en plus du minaret des trous au
12 niveau du dôme.
13 Q. La question que je vous ai posée. Je vous ai demandés si ces mosquées
14 avaient été détruites ou endommagées. Sur ce que vous savez et vos
15 observations, de quelle façon ces mosquées avaient-elles été détruites ou
16 endommagées ? Par quel type d'action ou de conduite ?
17 R. Je crois que je puis dire sur la base de mes observations personnelles
18 que ces dégâts ont été provoqués par des obus, des obus de gros calibre car
19 un fusil n'aurait pas pu provoquer ce genre de dégât. Donc cela devait
20 certainement provenir de pièces d'artillerie. Quelquefois, les obus
21 faisaient un trou dans le dôme et sortait de l'autre côté, quelque fois le
22 dôme était complètement détruit, et il est vrai que bon nombre de minarets
23 ont été détruits.
24 Q. Je souhaite revenir à la carte que nous avons vue précédemment. Je vous
25 demande de prendre un marqueur et de nous indiquer sur la carte -- et de
26 marquer sur la carte les endroits à l'est de Mostar où ces mosquées,
27 d'après vous, ont été détruites ou endommagée en 1993. Je ne vais pas vous
28 demander de nous donner des noms. Je vous demande simplement d'indiquer sur
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1 la carte. Je ne vous demande pas pour l'instant d'indiquer sur la carte,
2 les noms, mais simplement les emplacements de ces mosquées dont vous venez
3 de nous parler, ces mosquées à l'est de Mostar.
4 R. La mosquée de Karazbegova ici, à l'intersection entre deux rues.
5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu le nom des rues.
6 M. SCOTT : [interprétation]
7 Q. Pour les interprètes, pourriez-vous redonner les noms des rues, s'il
8 vous plaît, juste à l'endroit que vous venez d'indiquer ?
9 R. A l'angle de Brace Fejzica et Karazbegova, ces rues-là.
10 Q. Je vais vous demander de marquer ceci avec la lettre X, pour l'instant,
11 de façon à ce que nous puissions distinguer ces annotations-là des autres
12 annotations. Représentez les mosquées par un X pour l'instant, s'il vous
13 plaît, et la mosquée suivante, s'il vous plaît.
14 R. Oui. Cela y est fait déjà. La mosquée suivante n'est pas loin lorsqu'on
15 traverse la rue du maréchal Tito et qu'on descend en direction du marché.
16 Cela se trouve quelque part par ici, là où on peut voir la lettre B. Là, on
17 voit que c'est écrit "Brankovac" et cette mosquée s'appelle "Under Linden
18 Tree" ou Podlipa".
19 Q. Est-ce que vous pourriez indiquer sur la carte par la lettre X, s'il
20 vous plaît ?
21 R. La mosquée suivante se trouve un peu en contrebas, un peu plus bas,
22 sous la lettre X et pas très loin de la place du 1er mai. La mosquée Koski
23 Mehmed-pasa. Celle-ci se trouve entre la Neretva et la route en direction
24 du vieux pont. Je l'ai indiqué ici.
25 Q. Ceci peut, peut-être, aider les Juges. Vous avez parlé de c point de
26 référence de Stari Most, le vieux pont. Pourriez-vous nous indiquer sur la
27 carte et nous dire à quel endroit cela trouve ?
28 R. Oui. Pas très loin de la lettre X. Pas très loin de cette lettre --
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1 Q. Peut-être vous pouvez --
2 R. -- un peu plus vers l'avant.
3 Q. Pourriez-vous marquer le chiffre 4, le pont, s'il vous plaît ?
4 R. Ici précisément.
5 Q. Est-ce que vous pouvez maintenant nous indiquer où se trouve la
6 prochaine mosquée ?
7 R. Exactement à l'endroit où on descend du vieux point sous ce terme,
8 "Grad", il y avait la mosquée Esnafa [phon]. Un peu plus tôt, il y avait
9 une zone de fabrication de cuir et un atelier de cuir. C'est là que les
10 membres de cette corporation avaient leur propre mosquée.
11 Q. Est-ce que vous avez d'autres mosquées à marquer sur la carte ? Soit.
12 Mais si vous en avez encore, je vous prie de les marquer.
13 R. Non, non. Pas très loin des marches qui mènent vers le vieux pont, il y
14 avait, il y a encore aujourd'hui ce qu'on appelait la mosquée Inat [phon].
15 Q. Pourriez-vous nous dire dans quelle rue cela se situe, environ, s'il
16 vous plaît, pour les besoins du compte rendu d'audience ? Un point de
17 repère, s'il vous plaît.
18 R. Cela se trouve dans la rue du maréchal Tito, mais un peu plus à
19 l'intérieur de la rue, à une trentaine de mètres à l'intérieur de la rue.
20 Sur la gauche et au sud du vieux pont, c'est un bâtiment qui se voit.
21 Lorsqu'on descend la rue du maréchal Tito, il est impossible de ne pas voir
22 cette mosquée.
23 Ensuite, un peu plus loin, à Mahala, dans la Vukavica Gojka, il y a
24 une mosquée à mi-chemin entre cet espace qui est appelé, Gojka Vukavica. A
25 l'endroit où se trouve ce mot "Luka". Je vous donne des indications
26 approximatives ici. Je vous indique de façon approximative l'emplacement de
27 ces mosquées.
28 Ensuite, de l'autre côté par rapport à cet endroit, il y a la mosquée
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1 de Sarica qui est ici. Dans cette partie de la rue du maréchal Tito et à
2 partir de Luka, il y a une rue qui s'appelle Podhum et quelque part dans ce
3 quartier-là, dans ce triangle, se trouve la mosquée de Sarica.
4 Q. Est-ce que vous avez maintenant marqué toutes les mosquées que
5 vous souhaitiez marquer sur la carte, celles qui ont été détruites ou
6 endommagées en 1993 ?
7 R. Pardonnez-moi. Je vous dois encore une autre mosquée. C'est la
8 mosquée de Musala. C'était plus bas par rapport à l'endroit où nous étions,
9 par rapport à l'endroit où se trouvait la Brigade des Sapeurs-pompiers,
10 c'était Cietiste [phon], Srejca et Mladen Balorda. Cette rue-là, je l'ai
11 marqué avec la lettre X. C'est la dernière mosquée qui se trouvait sur la
12 rive gauche. Ce groupe de mosquées qui existaient autrefois.
13 Q. Très bien. Donc, je souhaite maintenant que vous vous concentriez
14 sur Mostar ouest. Pourriez-vous dire, aux Juges de la Chambre, quelque
15 chose à propos des mosquées qui ont été détruites ou fortement endommagées
16 pendant l'année 1993 ? Pourriez-vous, encore une fois, marquer ces mosquées
17 de la lettre X ?
18 R. Avant de faire cela, je vous prie de me permettre de dire ceci.
19 J'ai entendu dire que ces mosquées avaient été détruites, trois mosquées et
20 un mesjid à Ilici. D'après ce que je sais, mais je n'en suis pas tout à
21 fait certain, je crois que le mesjid à Ilici a été rénovée. Je sais que la
22 mosquée de Banovci a également été rénovée et la mosquée de Podhum,
23 également. La troisième mosquée a été détruite et les trois mosquées ont
24 été rasées jusqu'au sol et il y avait du gazon qui poussait à cet endroit-
25 là. La troisième mosquée se trouvait près de l'école primaire de Podhum.
26 Cette mosquée est toujours en ruine aujourd'hui. Il n'en reste rien. Je
27 vais essayer de la retrouver sur la carte.
28 Q. Pourriez-vous nous donner un point de repère au niveau des rues, s'il
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1 vous plaît, par rapport à la dernière annotation que vous avez faite,
2 Monsieur.
3 R. Juste ici, à cet endroit-là, dans ce quartier-là, la mosquée de Podhum
4 a été détruite. Je crois que cela s'appelle toujours Podhum, à moins que le
5 nom n'ait été modifié. Ensuite, l'autre mosquée se trouvait à l'angle de la
6 Franjevacka et de la Reine Katarina. A l'angle ici de ces deux rues. Cette
7 mosquée n'a pas été rénovée. Elle n'a pas été reconstruite.
8 Ensuite, la mosquée suivante se trouvait dans la région, dans le quartier
9 de Balinovac. Ici, très précisément, si vous arrivez à me suivre, là se
10 trouve -- on voit "Balinovac", près de la lettre B. Je l'ai indiqué ici. La
11 mosquée de Balinovac et la mosquée de Podhum¸ ces deux mosquées ont été
12 rénovées depuis. Celle qui se trouve à l'angle de Franjevacka et de la rue
13 Reine Kararina, cette mosquée-là n'a pas été rénovée. Pour ce qui est de
14 mesjid à Ilinovici [phon], cette mosquée-là a également été rénovée. Je ne
15 peux pas vous montrer mesjid sur la carte parce que c'est un peu plus haut.
16 Q. Pourriez-vous, pour les besoins du compte rendu d'audience, nous
17 expliquer ce que signifie "mesjid" ?
18 R. C'est en réalité une mosquée également, mais une mosquée dépourvue de
19 minaret.
20 Q. La mosquée que vous venez de nous indiquer à l'est de Mostar, ces
21 mosquées qui ont été détruites et endommagées en 1993, savez-vous quels
22 partis ou organisations sont responsables pour la destruction ou
23 l'endommagement de ces mosquées ?
24 R. C'est difficile à dire aujourd'hui, car n'importe qui aurait pu tirer
25 ces pièces d'artillerie. Ce qui est certain, c'est que les coups de feu qui
26 venaient de la partie ouest de la ville, c'est ce qui a provoqué les
27 dégâts. Cela est certain.
28 Q. Un dernier emplacement, s'il vous plaît, Monsieur. Pourriez-vous dire
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1 aux Juges, si vous le savez, si d'autres lieux de culte musulman ont été
2 pris pour cibles en 1993 ou bâtiments religieux ?
3 R. Hormis ces mosquées que j'ai indiquées sur la carte, je ne sais pas. Je
4 ne sais pas s'il y en a eu d'autres hormis le vieux pont. Je ne sais pas
5 c'est ce que vous entendez, mais je n'établirais pas de lien avec les
6 Bosniens. C'est un pont qui a été construit à l'époque turque, et c'est un
7 symbole de la ville, que l'on apprécie cela ou non. Cela restera un symbole
8 pour toujours. C'est peut-être précisément la raison pour laquelle ce pont
9 a été détruit.
10 Q. Je souhaite vous poser une question non pas à propos du vieux pont,
11 mais y avait-il un endroit près de Blagaj qui a été pris pour cible,
12 d'après vous ?
13 R. Blagaj, oui, mais cela, c'est autre chose. C'est vrai. Au mois de
14 juillet, j'ai mis en place une brigade, un poste de commandement avancé de
15 la Brigade des Sapeurs-pompiers à Blagaj, lorsque j'ai été nommé commandant
16 de la brigade. J'ai appris sur la base des éléments d'information dont je
17 disposais, qu'il était important de mettre en place cette Brigade des
18 Sapeurs-pompiers à Blagaj. C'est ce que nous avons fait.
19 Blagaj même, comme notre ville, ne disposait pas suffisamment de
20 ressources. Donc, nous avons prévu cela.
21 Q. Oui, si vous me le permettez --
22 R. Ce qui veut dire --
23 Q. Simplement, il faut faire attention à l'heure. Pardonnez-moi si je vous
24 interromps. Je vous demande de porter votre attention précisément sur un
25 endroit à Blagaj. Pourriez-vous nous dire et nous en parler plus
26 précisément, s'il vous plaît.
27 R. Merci. Je voulais simplement faire la clarté là-dessus, et vous
28 expliquer comment ces choses se sont passées.
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1 A deux reprises, les Pompiers sans frontières sont venus nous rendre
2 visite. Ils venaient de France. Ils sont venus une fois. Une autre fois, il
3 y avait les sapeurs-pompiers de Swansea, qui sont venus nous voir
4 d'Angleterre. Nous voulions leur montrer des endroits intéressants dans la
5 région. Nous les avons emmenés aux sources du fleuve Buna, et nous leur
6 avons montré un endroit qui s'appelle Tekija. Sur le chemin du retour, à
7 deux reprises, les lance-roquettes à plusieurs canons, c'est quelque chose
8 que l'on m'a appris par la suite, car je ne suis pas un expert en matière
9 d'artillerie, mais quoi qu'il en soit, il s'agissait de lance-roquettes
10 fabriqués en Chine, qui lançaient des missiles, qui venaient littéralement
11 au-dessus de nos têtes, et ont touché l'endroit à la gauche de la source du
12 fleuve Buna et Tekija. Tekija est un lieu de culte oriental et islamique
13 depuis 25 ans, un endroit où les derviches se retrouvent régulièrement.
14 C'est un lieu de pèlerinage pour eux.
15 Fort heureusement, les missiles n'ont pas touché cet endroit directement.
16 Ou plutôt ces missiles ont touché un rocher qui se trouvait au-dessus de
17 Tekija, et ont heurté quelques pierres qui sont tombées sur le toit de
18 Tekija.
19 M. SCOTT : [interprétation] Avant que Me Karnavas intervienne, Monsieur le
20 Président --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Oui, Maître Karnavas, soyez bref,
22 s'il vous plaît.
23 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, je regardais les documents qui nous ont
24 été remis par l'Accusation. Il se peut qu'il y ait une erreur, mais je ne
25 vois pas dans ce qui nous a été remis par l'Accusation, quelque chose à
26 propos des événements qui sont invoqués maintenant. Ceci ne fait pas partie
27 des notes de récolement. C'est peut-être mon erreur. Je souhaite avoir une
28 explication de la part de l'Accusation.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Cet événement de Blagaj, il est mentionné dans
2 l'acte d'accusation dans le mémoire préalable ?
3 M. SCOTT : [interprétation] Cet incident en particulier à propos de Tekija.
4 Pardonnez-moi, je vais vérifier. Non, pas précisément. Il n'est pas
5 mentionné dans l'acte d'accusation. Le témoin nous en a parlé après sa
6 venue à La Haye. Il nous a dit que c'était quelque chose dont il a été au
7 courant. Lorsqu'on a parlé de la destruction de lieux de culte, il nous a
8 parlé des mosquées, et il nous a parlé de l'histoire et le récit de cet
9 endroit à ce moment-là.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, hier après-midi, on
11 m'a remis un document intitulé "Communication supplémentaire et déclaration
12 du témoin, Ratko Pejanovic," l'homme qui se trouve ici. Peut-être qu'on a
13 omis de m'en parler. Ceci n'est pas évoqué sur cette page. C'est ce que
14 nous appelons habituellement des notes de récolement. Nous aurions pu être
15 au courant de la situation. Nous espérons que ceci ne se reproduira pas.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Sauf à considérer que c'est une question
17 d'ambiance ?
18 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai encore une
19 seule question, Monsieur le Président, et ensuite, ce sera l'heure de faire
20 la pause.
21 Q. Pendant que vous commencerez, vous dites avoir fait référence à ces
22 lance-roquettes à canons multiples fabriqués en Chine, qui volaient au-
23 dessus de vos têtes. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre par qui ces
24 missiles ont été tirés en direction du complexe de Tekija ?
25 R. A vrai dire, comme je vous l'ai dit, j'ai entendu dire des gens qui
26 étaient de Blagaj, que c'était un missile chinois. Je ne sais pas, je n'ai
27 pas confirmé cela, mais il est certain que ces missiles ont été lancés
28 depuis les positions du HVO, qui se trouvaient quelque part dans la région
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1 de Hodbine. C'était la région où ils se trouvaient.
2 Q. Vous avez été le témoin des impacts provoqués par ces missiles dans la
3 région de Tekija, vous-même ?
4 R. Oui. Bien évidemment, car les missiles volaient au-dessus de nos têtes,
5 littéralement, et sifflaient au-dessus de nos têtes. Nous avons eu peur.
6 Nous nous sommes mis à courir, car nous pensions que d'autres missiles
7 seraient lancés, qu'il y en aurait peut-être un qui allait se perdre en
8 route ou quelque chose comme cela.
9 Q. Merci, Monsieur Pejanovic.
10 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je propose que nous
11 fassions la pause.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, nous allons faire une pause pour
13 vous permettre de vous reposer et de vous restaurer. Nous reprendrons nous
14 travaux aux environs de 13 heures.
15 --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.
16 --- L'audience est reprise à 13 heures 18.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Scott, vous avez à nouveau la parole.
18 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Q. Monsieur Pejanovic, à plusieurs reprises au cours de votre déposition
20 aujourd'hui, vous avez parlé de la livraison d'eau à Mostar est, pendant
21 quelques minutes je voudrais m'attarder sur ce sujet et je vous présenterai
22 deux volets de questions. Tout d'abord, quel était le système de conduite
23 d'eau, de livraison d'eau à Mostar est entre 1992 et mai 1993, pas après.
24 Est-ce que vous pourriez nous dire ce qu'il en était ?
25 R. Je vais vous le dire en quelques phrases, mais d'abord une petite
26 introduction. La situation était catastrophique en matière
27 d'approvisionnement en eau. Pendant que le conflit faisait rage entre les
28 Serbes d'une part et les Croates et les Musulmans de l'autre, tous les
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1 ponts de la ville avaient été détruits. Pourquoi est-ce que je vous dis
2 cela ? Non pas simplement parce qu'il y a eu destruction des ponts, mais
3 parce que les artères principales et les conduites principales de
4 canalisation ont été interrompues aussi et après la destruction des ponts,
5 la rive gauche a été tout à fait coupée de tout approvisionnement. Il n'y
6 avait plus de routes, ni de canalisation d'eau. Le seul pont qui a subsisté
7 c'était le vieux pont. Une partie de ce pont avait été endommagé au cours
8 du conflit avec les Serbes.
9 Les Serbes se sont ensuite retirés de la ville et on a créé des voies de
10 contournement, de délestage où -- pour qu'on des voies, qui ont permis
11 notamment de poser des conduites d'eau pour aller sur la rive opposée, la
12 rive droite. Il y avait trois ponts : le pont Sarinski, le pont Lucki et le
13 pont de Tito, ce qui a permis d'amener l'eau aux habitants. C'est ainsi que
14 la situation s'est présentée et s'est poursuivie jusqu'au 9 mai 1993. Là il
15 y a eu de nouveau conflits et ces canalisations de rechange n'ont plus pu
16 être utilisées.
17 Je ne sais pas qui il faut remercier pour cet état de chose, le fait qu'il
18 n'y ait plus d'approvisionnement en eau sur la rive gauche. Mais à deux
19 endroits, je suppose que cela c'était à cause du fait que les soupapes
20 principales -- les valves principales ne pouvaient plus bien fonctionnées,
21 donc elles ne pouvaient pas être fermées complètement. De ce fait, nous
22 n'avions d'eau permanente qu'à deux endroits, disons, que
23 l'approvisionnement n'était pas extraordinaire, mais il suffisait à remplir
24 quelques récipients ou conteneurs.
25 Je vous ai parlé de deux endroits. Il y en avait un qui se trouvait
26 près du Palais de Justice à Sevnica [phon]. Là, il y avait une pompe du
27 genre de ces pompes qu'on utilise comme pompe à incendie souterraine. Puis,
28 on a commencé à nous prendre pour cibles. Cela se trouvait à un carrefour.
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1 Nous sommes alors allés dans la cour d'ElectroHerzégovine. C'était la
2 société d'électricité. Là aussi, il y avait cette espèce de bouche
3 souterraine, qui nous a permis d'utiliser cette installation pendant assez
4 longtemps. Quand je dis "longtemps," je pense à deux mois. Cela a duré
5 jusqu'au moment où il y a eu au lieu et place du pont de Tito; un pont
6 métallique construit par la FORPRONU. Ce qui a permis de relier la rive
7 droite et la rive gauche. Nous avons ainsi pu remplir des récipients, des
8 conteneurs, fournir de l'eau potable aux habitants. Il fallait aussi de
9 l'eau pour éteindre les incendies.
10 Après la destruction des ponts, après la destruction des
11 canalisations, les bâtiments du boulevard ont pu recevoir de l'eau. Parce
12 que là aussi, il y avait une bouche d'eau qui a permis de remplir, par
13 exemple, une tasse ou un petit récipient, voire un seau.
14 Q. Je vous interromps, car vous avez fourni énormément d'informations. Je
15 vais revenir sur certains points. Je crois qu'il serait utile de se servir
16 de la carte. Est-ce que vous voulez bien reprendre la carte que nous
17 examinions avant la pause du déjeuner, pièce P09517.
18 Intéressons-nous à la période qui a suivi le 9 mai 1993. Il me semble que
19 ces quelques dernières minutes, vous nous avez dit qu'il y avait deux
20 bouches qui sont restées -- qui ont continué, du moins en partie, a
21 fonctionné ici sur la rive ouest de la rivière. Pourriez-vous nous indiquer
22 cette première bouche et l'annoter par l'inscription W1. W pour "water", en
23 anglais, et 1 pour la première bouche ou prise d'eau.
24 R. Agissons dans l'ordre. Le premier lieu où nous avons rempli des
25 récipients. C'est une fois qu'on a franchi le pont Tito, qu'on tourne à
26 gauche, première rue, il y a la rue Adema Ilidza. Là, il y a une rue qui
27 mène au boulevard, le Palais de Justice, il est juste de l'autre côté.
28 Juste ici à l'intersection où il y a la lettre A, c'est là que se trouve
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1 cette prise d'eau qui est aussi une bouche d'incendie, en tout cas, qui se
2 trouve en dessous du sol de la chaussée.
3 La deuxième prise d'eau se trouve un peu plus loin dans la cour de la
4 société qui fournissait l'électricité. Vous voyez ici "Adema". Vous voyez ?
5 Là, il y a d'abord un bâtiment privé. Il y a le Palais de Justice, un petit
6 passage, un bâtiment appartenant à un particulier, et à côté, vous avez
7 cette société de distribution de l'électricité. Dans la cour se trouvait
8 une deuxième prise d'eau que nous avons utilisée jusqu'au moment de la
9 destruction du pont. Ici, je vais indiquer W2. C'est fait.
10 Q. Si j'ai bien compris ce que vous avez dit, il y a un instant, pour
11 pouvoir utiliser W1 et W2 avec un camion, il fallait franchir la rivière en
12 passant un pont.
13 R. Oui, manifestement. Il fallait franchir le pont qui avait été construit
14 par la FORPRONU entre les deux conflits.
15 Q. Est-ce que vous pourriez indiquer cet endroit que vous allez entourer
16 d'un cercle avec la mention B1, B étant "bridge", pont.
17 R. C'était ici, là où vous voyez Titov Most, autrement dit, le pont Tito.
18 Je vais plutôt indiquer ceci à l'aide d'un rectangle. Quelle lettre voulez-
19 vous que j'utilise ?
20 Q. B1.
21 R. B1. Vous voulez bien répéter ? B1; c'est cela ?
22 Q. Oui, B1.
23 R. Merci beaucoup.
24 Q. Après le 9 mai 1993, est-ce que vous pouviez utiliser ce pont ? Quand
25 ce pont a-t-il été détruit ?
26 R. Honnêtement, je ne me souviens pas de la date précise. Je pense que
27 c'était après la deuxième quinzaine de juillet. Après, il n'était plus
28 possible d'utiliser ce pont pour franchir la rivière. Enfin, les piétons
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1 pouvaient encore passer parce qu'on avait placé des planches. Des piétions
2 pouvaient encore passer pour aller dans la rue Adema Buca où se trouvaient
3 les forces de l'ABiH.
4 Q. Dites-nous, Monsieur le Témoin, après la destruction du pont, les gens
5 de Mostar est, où trouvaient-ils de l'eau ?
6 R. Je vous ai parlé de ces deux prises d'eau. Pour nous, sur la rive
7 gauche, on ne pouvait plus les utiliser. Celle d'Adema Buca, seuls les
8 habitants de ce quartier pouvaient l'utiliser. En plus de cela, on
9 établissait les pouvoirs civils. Ils ont été les premiers à établir une
10 unité de sapeurs-pompiers professionnels dont nous faisions partie, et ils
11 ont aussi créé une société de distribution d'eau, qui est devenue une
12 entreprise publique par la suite. C'est à ce moment-là que cette société
13 s'est occupée de la distribution de l'eau, et nous, on se contentait
14 physiquement d'en distribuer.
15 En plus de cela, il y a une autre source, disons. C'est un peu
16 inexplicable. Comme il y avait quelque chose qui était défectueux, une
17 mauvaise valve ici dans la partie où il y avait le vieux pont, là, il y
18 avait aussi une prise d'eau. Dès qu'on passait le pont sous le bâtiment
19 Cardak, il y avait une prise d'eau. Cela avait même été touché par un obus.
20 J'y suis allé un soir pour remplacer, en tout cas, pour réparer cette prise
21 d'eau après qu'elle ait eu été pilonnée.
22 Nous avons construit un moyen de contourner, en tout cas, une autre
23 façon d'acheminer l'eau avec des conduites en plastique, et nous sommes
24 allés directement sur la rive gauche. Dès qu'on franchit le pont - cela va
25 jusqu'à Bijuka [phon] - c'est à peu près, à peine à 30 ou 40 mètres du
26 pont. Nous avons créé là une espèce de pont pour des prises d'eau avec cinq
27 ou six robinets. La pression de l'eau était assurée grâce à nos tuyaux de
28 pompier.
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1 Q. Excusez-moi. C'était du côté est du pont ?
2 R. Oui.
3 Q. Très bien. Continuez.
4 R. Nous avons donc eu six robinets que pouvaient utiliser les habitants
5 pendant 24 heures. Mais aussi, on courait plus de risques en y allant
6 pendant la journée. Les gens y sont allés avec toutes sortes de conteneurs,
7 de récipients, tout ce qui leur tombait sous la main. Moi aussi. La nuit,
8 je transportais de 300 à 400 litres d'eau quand ma femme voulait faire la
9 lessive. Nous avons aussi utilisé l'eau que nous avons bue, avec laquelle
10 nous avons fait la cuisine, on s'est lavé. L'eau que pouvait utiliser les
11 pompiers, elle venait uniquement de la Neretva. Il y avait une pompe ou une
12 bouche d'incendie, ou plutôt une pompe qui pompait l'eau de la Neretva par
13 les conduites jusqu'à la rue Naca [phon]. C'est là que l'eau était
14 transvasée dans d'autres récipients ou conteneurs. A plusieurs reprises, on
15 a pris ce lieu pour cible. A partir du nord, on a pilonné la ville de
16 Mostar.
17 Q. Une fois de plus, vous nous avez fourni une multitude d'informations.
18 Je vais vous poser quelques questions de détail. Vous avez parlé de ce
19 socle ou de ce lieu où il y avait cinq ou six robinets ou cette borne,
20 peut-être. Vous avez dit que c'était dangereux d'y aller. Pourriez-vous
21 dire aux Juges de la Chambre pourquoi c'était dangereux d'y aller.
22 R. Bien sûr. Il y a eu plusieurs fois des tirs de mortiers, des pilonnages
23 de cet endroit. Il y a eu plusieurs fois des blessés. Heureusement,
24 personne n'est mort, personne n'a été tué.
25 A ce moment-là, à Mostar, il y avait interdiction de circuler, enfin
26 plus exactement un couvre-feu. Cela changeait au cours de
27 24 heures. Désolé de ne pas avoir apporté de documents car j'en ai. Ces
28 documents montrent que nous, sapeurs-pompiers, nous avions la permission de
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1 circuler en ville 24 heures sur 24, que ce soit lorsque nous travaillions
2 ou si nous étions en repos.
3 Q. Avant d'oublier, je voudrais vous demander d'indiquer par W3 ce
4 troisième lieu à proximité du vieux pont.
5 R. Je vous l'ai dit, c'était juste tout près du vieux pont. Je connais
6 très bien ce quartier. Il y a une espèce de terrain plat, puis il y a une
7 volée de cinq ou six ateliers, qui va jusqu'à cette espèce de socle ou de
8 borne. C'est là que je vais apposer la mention W3. C'est fait.
9 Q. Merci. Avant de vous interrompre - ce dont je m'excuse - vous parliez
10 du fait que vous aviez rempli vos camions d'eau au cas où il faudrait
11 éteindre un incendie. Parlons d'abord de l'approvisionnement en eau
12 potable. Au cours des six derniers mois de l'année 1993, mis à part ces
13 trois endroits que vous avez indiqués, est-ce qu'il y avait d'autres
14 sources d'eau potable à Mostar est, mis à part ces endroits que vous avez
15 déjà indiqués ?
16 R. Non. Non. Je vous l'ai dit, nous n'avions que l'eau - enfin, je suppose
17 qu'elle est venue - parce qu'il y avait cette défectuosité d'une valve.
18 Puis, il y avait l'eau de la Neretva, celle qu'on avait transvasée dans des
19 camions-citernes. Elle était chlorée. En fonction de la quantité d'eau
20 qu'il y avait dans le système, on a ajouté du chlore. L'eau, elle avait la
21 couleur du sang. C'était une eau rouge. Il fallait de 45 à 50 minutes pour
22 que le chlore s'évapore. C'est seulement après cela qu'il était possible de
23 boire cette eau.
24 Q. Je voulais aussi vous demander si le long de la rivière, il y avait de
25 l'eau qu'on prélevait de la Neretva, effectivement, pour placer cette eau
26 dans des camions-citernes et pour la traiter au chlore afin que cela
27 devienne de l'eau potable. Est-ce qu'il y avait un lieu particulier que
28 vous pourriez nous indiquer sur la carte où ceci se faisait ?
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1 R. Oui. Enfin, je peux vous indiquer cet endroit de façon approximative.
2 Ce n'est pas facile. C'était ici. Vous voyez le pont Tito. Il y en a un
3 autre. Enfin, ce n'est pas véritablement un pont; c'est un pont de fortune
4 qu'ils ont improvisé à des fins logistiques. Au sud de ce pont, sur la rive
5 de la Neretva, il y avait une pompe qui pompait l'eau de la rivière jusqu'à
6 la rue Fejzica.
7 Q. Pourriez-vous nous indiquer le lieu où cette pompe se trouvait, même si
8 c'est approximatif, et apposer la mention W4.
9 R. D'accord. Attendez que je m'y retrouve. Près du pont Tito, vous avez ce
10 pont, ce passage improvisé. Tout près de ce pont de fortune, il y a un
11 passage - vous voyez cette zone rose là, assez étroite, de sorte que cela
12 indique une structure quelconque - tout près de là, il y avait une pompe
13 qui pompait l'eau de la rivière et l'amenait à la rue Pajica. C'est là que
14 nous allions faire le plein d'eau.
15 Je dois vous dire que ce système ne fonctionnait pas toujours parce
16 qu'on n'avait pas assez de carburant non plus. Or, la pompe, c'était une
17 pompe qui avait besoin de carburant. On a pu, peut-être, faire le plein
18 d'eau que quatre ou cinq fois par jour. S'il y avait des incendies qui se
19 prolongeaient, en vertu d'une autorisation donnée par le gouvernement de la
20 ville, cette pompe fonctionnait plus longtemps. Nous étions les seuls à
21 avoir le doit d'utiliser l'eau qu'on pompait.
22 Lorsque nous avons commencé à distribuer l'eau aux habitants, c'est
23 ce que nous avons fait une fois, puis, on a appris qu'il y avait un feu qui
24 avait éclaté, un incendie quelque part. Nous avons arrêté la distribution
25 d'eau aux habitants, et nous sommes allés éteindre l'incendie car c'était
26 notre responsabilité première.
27 Q. Pourriez-vous indiquer par W5 - si je vous ai bien compris, W4, c'est
28 où se trouvait la pompe. Vous sembliez dire que l'eau, elle était acheminée
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1 ailleurs, n'est-ce pas, je vous ai bien compris ? C'est là que le camion
2 allait la chercher; est-ce exact ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous pourriez nous indiquer la dernière partie de ce
5 système, le dernier maillon de cette chaîne d'approvisionnement et indiquer
6 le W5.
7 R. Excusez-moi. Permettez-moi de faire une digression. W4, c'est l'endroit
8 précis d'un camion-citerne, là où il allait chercher l'eau. Si vous voulez,
9 je peux indiquer d'un W5 l'endroit où se trouvait la pompe, là où on
10 pompait l'eau. C'était juste sur la rive, et je l'indique par la mention
11 W5. C'est là qu'était pompée l'eau, et par les conduites, c'était
12 transformé à la rue Pajica. C'est là que nous, nous allions avec le camion
13 chercher l'eau.
14 Q. Pour que tout soit clair au compte rendu d'audience, est-ce que vous
15 avez maintenant montré du mieux que vous pouviez toutes les sources d'eau
16 potable qu'avaient les habitants de Mostar; est-ce dans les six derniers
17 mois de l'année 1993 ?
18 R. Je ne suis pas le seul à savoir. Tout le monde pourrait vous confirmer.
19 Tout habitant pourrait vous dire où se trouvaient les sources d'eau. Il n'y
20 en avait pas d'autres. C'est aussi simple que cela.
21 Q. En 1993, le HVO s'est-il efforcé, a-t-il tenté d'interrompre la
22 distribution d'eau venant d'une de ces sources que vous avez mentionnées ?
23 R. Quant à savoir s'il y a eu des tentatives d'interrompre la distribution
24 d'eau par cette valve-là ou pas les canalisations qui passaient sous le
25 vieux pont, je ne sais pas, mais c'est un fait. Il y a eu, de façon
26 constante, approvisionnement d'eau. Sans doute, parce que certaines valves
27 ne fonctionnaient pas bien, ce qui veut dire qu'elles ne faisaient pas bien
28 leur travail, elles n'interrompaient pas, elles ne fermaient vraiment pas
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1 les conduites. C'est pour cela qu'il y a toujours eu un peu d'eau dans les
2 canalisations.
3 Pour ce qui est du fait de pomper de l'eau de la Neretva. Si vous voyez
4 comment se présentent les rives de la Neretva à cet endroit, la chose la
5 plus simple, cela aurait été de pomper l'eau avec nos camions-citernes.
6 Cela pouvait être illimité. Mais étant donné la façon dont se présentent
7 ces rives, il était impossible d'arriver à l'eau même sur la berge avec les
8 camions. La seule option qui demeurait, c'était effectivement d'utiliser la
9 pompe qui se trouve dans le quartier de Djuro Salaj. C'était le seul
10 endroit où il était possible d'aller faire le plein d'eau.
11 C'était notoire, c'était bien connu. Ce n'était pas un secret. Cet
12 endroit a été pris pour cible des dizaines de fois. Notre véhicule y a été
13 endommagé des dizaines de fois aussi. Le pare-brise a été endommagé, la
14 carrosserie, même aussi les pneus. Il y a eu même des gens qui ont été
15 blessés. Heureusement, personne n'a été tué.
16 Q. En 1993, est-ce qu'il y a eu une inondation ? Est-ce que la Neretva est
17 sortie de son lit, ce qui fait qu'il y a eu interruption de
18 l'approvisionnement en eau potable ?
19 R. Oui. Ce fut aussi, là, une des choses malencontreuses qui se sont
20 passées. La rive gauche s'est affaissée, et l'eau qui venait du lac s'est
21 précipitée dans la rivière. Cela faisait beaucoup de bruits. Avant que
22 l'eau n'arrive jusqu'à nous, on a entendu un vacarme provoqué par ces
23 énormes quantités d'eau qui se précipitaient.
24 Nous avions une pompe qui pompait de l'eau de la rivière. Une fois
25 qu'on a eu cette masse d'eau qui est arrivée jusqu'à la pompe,
26 heureusement, cette masse n'a fait que renverser la pompe qui a heurté un
27 rocher à proximité. Le personnel de la société de distribution d'eau -
28 c'était au mois de décembre - les gens se sont mis en maillot ou torse nu.
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1 J'essaie de me souvenir du nom d'un de ces hommes. Il a sauté dans la
2 rivière, il a plongé, a retrouvé l'endroit où se trouvait la pompe. Nous
3 nous sommes dits que la pompe n'avait pas flotté parce que c'était un
4 appareil très lourd. Il avait un peu de corde sur lui et il a pu attacher
5 cette pompe à la corde. Tout ceci s'est passé dans la matinée entre 11
6 heures et midi. L'après-midi, on a commencé à nettoyer le moteur de la
7 pompe, toutes les pièces, et la pompe a recommencé à fonctionner vers 19
8 heures. De l'eau a pu ainsi être acheminée aux habitants.
9 Q. Est-ce que vous savez ce qui a provoqué cette inondation qui a renversé
10 du moins, temporairement la pompe ?
11 R. La seule explication, c'est que la valve d'occlusion est restée
12 ouverte. Pendant un certain temps, après les accords de Washington, cette
13 valve d'occlusion avait été détruite; elle ne fonctionnait pas. Peut-être
14 qu'une espèce de missile se déplaçant dans l'eau, une torpille ou ce genre
15 de chose l'a détruit. Enfin cela, c'est ce que je suppose, mais je n'ai pas
16 de preuve à l'appui. Le fait est qu'après la signature de l'accord de
17 Washington, il y a eu un cessez-le-feu et cette valve d'occlusion ne
18 fonctionnait pas jusqu'au moment de la reconstruction du barrage.
19 Q. Nous n'allons pas remonter aux accords de Washington, nous allons
20 plutôt nous intéresser au mois de décembre 1993. A aucun moment, y a-t-il
21 eu un moment où le barrage sur la Neretva, au nord de Mostar, a été
22 détruit ?
23 R. Oui, c'est exact. J'ai dit, il y a quelques instants, que ceci s'est
24 passé au mois de décembre lorsque la pompe est tombée dans le fleuve. Torlo
25 Miron était le nom de l'homme qui a plongé dans le fleuve. Il travaille
26 actuellement à l'Université de Mostar. Avant, il travaillait pour la
27 société de distribution d'eau. C'est l'homme qui a plongé dans le fleuve.
28 C'est lui qui a retrouvé la pompe dans le lit du fleuve. Il a plongé une
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1 deuxième fois, il a attaché une corde autour de la pompe, a réussi à
2 extraire de l'eau la pompe. Je ne me souviens pas du jour exact.
3 Q. Savez-vous qui a détruit le barrage ?
4 R. Je préfère dire que je sais qui n'a pas détruit le barrage, car il y
5 avait à l'endroit où ceci s'est passé des membres du HVO.
6 Q. Monsieur Pejanovic, je souhaite maintenant me reporter à la question
7 des tireurs embusqués. Vous dites avoir écrit un ouvrage, un livre sur
8 l'expérience vécue à Mostar; est-ce exact ?
9 R. Oui.
10 Q. Quel est le titre de cet ouvrage ?
11 R. Le livre est intitulé, "Flamme au-dessus de Mostar."
12 Q. Avez-vous évoqué des incidents de tirs embusqués qui ont eu lieu
13 pendant l'année 1993 ?
14 R. Je souhaite vous poser cette question, et je souhaite ajouter que j'ai
15 parlé des incidents de tireurs embusqués en 1992. Ce n'est pas que dans cet
16 ouvrage que j'en ai parlé. J'ai insisté pour dire que la première victime
17 de tout ceci était un pompier et un de mes collaborateurs. C'était un jeune
18 homme exceptionnel qui travaillait très bien, et il a été la première
19 victime. Un tireur embusqué serbe lui a tiré dessus.
20 Q. Que dites-vous à propos de ces tirs embusqués ? Ceci a commencé à
21 Mostar en 1992, et ensuite, ceci a duré combien de temps ? Vous avez
22 couvert quelle période ?
23 R. Ecoutez, j'ai parlé des quelques mois de l'année 1992 ou plutôt,
24 j'ai parlé de la période qui allait jusqu'au 11 mai 1992. C'était la durée
25 de notre présence à cet endroit-là, près du supermarché, près du grand
26 magasin. Donc à partir de là, en direction de l'hôtel Bristol en l'espace
27 de quelques jours, je ne peux pas vous citer des chiffres exacts, mais je
28 crois que sept personnes ont été tuées précisément parce que ces personnes
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1 allaient en direction de Bristol et traversaient le pont Tito. Un des nos
2 hommes a été tué sur le pont Tito. Il revenait de l'autre côté où un
3 incendie avait éclaté.
4 Q. Monsieur, un des incidents dont vous parlez, vous parlez du fait qu'un
5 homme a été tué, il s'appelait Uzeir Jugo.
6 R. Oui. Vous avez parfaitement prononcé son nom. Malheureusement, j'ai dit
7 : A Dieu me plaise, j'espère que ce sera la dernière victime. Il a été tué
8 très peu de temps après la trêve qui a été signée en 1994, l'accord de
9 cessez-le-feu entre les Bosniens et les Croates. J'ai assisté à cela en
10 même temps qu'un de mes collègues, Dzemal Barakovic et le feu Jugo Uzeir,
11 qui était le chauffeur de permanence ce jour-là. Avant ce malheureux
12 moment, lui et son collègue Dzemal Barakovic s'occupaient des pneus,
13 regonflaient les pneus et réparaient les pneus. Donc, j'ai dis que la trêve
14 avait été signée peu de temps après cet accord de cessez-le-feu, et
15 l'incident démesuré qui a eu lieu à cet endroit-là.
16 Q. Très bien. Donc nous allons partir un petit peu en arrière et parler
17 d'un élément d'information. La carte que vous avez, vous avez indiqué
18 l'emplacement où se trouvait la Brigade de Sapeurs-pompiers. Je pense qu'il
19 n'est pas nécessaire de nous y reporter à nouveau. Vous souvenez-vous de
20 cela ?
21 R. Oui.
22 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, avec l'aide de la régie
23 technique, nous allons vous montrer une photographie à 360 degré qui était
24 prise à l'endroit où M. Jugo a été tué. Ensuite, je vais demander au témoin
25 de nous identifier certains endroits sur cette photographie. Il s'agit de
26 la pièce, pardonnez-moi, P09139.
27 Nous allons regarder cette photographie à 360 degré, nous allons voir
28 l'ensemble de la photographie, et ensuite demander au témoin de reconnaître
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1 certains endroits.
2 Veuillez vous arrêtez là un instant, s'il vous plaît.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Monsieur Kovacic.
4 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, pardonnez-moi si je
5 vous interromps, mais si je ne me trompe pas, le témoin a dit lorsqu'il a
6 commencé son récit, il a dit que : "Cet homme a été tué après les accords
7 de Washington." Si je ne me trompe pas, l'acte d'accusation ou la période
8 mentionnée dans l'acte d'accusation va de septembre 1991 jusqu'aux accords
9 de Washington. Donc il se peut que nous parlions ici d'un incident qui est
10 en dehors de la période mentionnée par l'acte d'accusation. Il s'agit d'un
11 élément dont on a fait mention.
12 Il y avait différents incidents qui ont eu lieu en Bosnie-Herzégovine
13 après les accords de Washington. Donc si nous acceptons de parler de cet
14 incident, à ce moment-là, nous parlerons de bien d'autres incidents.
15 J'essaie simplement de vous signaler que nous n'avons peut-être pas
16 besoin de cela.
17 M. SCOTT : [interprétation] Je suis tout à fait disposé à préciser cela à
18 M. Kovacic. Ceci est effectivement mentionné dans l'acte d'accusation au
19 numéro 14 de l'annexe, paragraphe 114 de l'acte d'accusation modifié. Si
20 vous avez ce paragraphe et si vous regardez l'annexe en référence et que
21 vous regardez l'incident numéro 14, c'est ce dont il s'agit. Pour ce qui
22 est de la période couverte par l'acte d'accusation, cette période va
23 jusqu'au mois de mars 1994.
24 M. KOVACIC : [interprétation] Je vois bien la citation que vous faites,
25 mais c'est en dehors du contexte, en dehors du cadre ici de la période.
26 M. SCOTT : [interprétation] C'est dans l'acte d'accusation.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Il faut à ce moment-là modifier l'acte
28 d'accusation.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le paragraphe 114, à l'annexe, il y a la liste
2 des personnes qui ont été victimes, et le dernier de la liste, il y a Uzeir
3 Jugo, conducteur d'un camion de pompier rouge, a été tué d'une balle à la
4 poitrine, la date : 2 mars 1994.
5 Alors, le témoin, Monsieur, quand vous évoquez le décès de
6 M. Jugo dans votre mémoire, quand a-t-il été tué ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que c'était immédiatement après la
8 signature. Je vois que vous avez cité la date du 2. Je crois que c'était à
9 la fin du mois de janvier ou début du mois de février, lorsque la signature
10 a eu lieu, alors que cet incident, bien évidemment, a eu lieu après la
11 signature des accords, car je me souviens, on avait commencé à pouvoir
12 circuler normalement dans la rue, on pouvait distribuer de l'eau. Nous
13 avions moins peur d'être la cible d'obus, de tirs.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne pouvez pas nous donner une date précise où
15 ce pompier a été tué ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Quoi qu'il en soit, ce n'est pas moi, mais il
17 y a effectivement un compte rendu que vous retrouverez dans les locaux de
18 la protection civile, car ils étaient censés faire un rapport de toute
19 personne blessée ou tuée, et ceci devrait être rapporté à l'organisation de
20 la protection civile. Il a été touché un jour, et a expiré le lendemain.
21 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, le certificat de décès
22 de cet individu se trouve à la pièce P07998, et précise que M. Jugo a été
23 tué le 1er mars 1994. C'est dans la pièce dont vous disposez.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, pour être précis. Si vous avez
25 l'acte de décès, 1er mars 1994, pourquoi dans vos écritures vous indiquez 2
26 mars 1994 ?
27 M. SCOTT : [interprétation] Nous parlons du mois de mars, du mois de mars.
28 M. KOVACIC : [interprétation] Nous sommes sur le point d'utiliser les
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1 moyens de preuve pour nous permettre de savoir si cet incident relève de la
2 période mentionnée dans l'acte d'accusation ou non. Je dois dire ce qui
3 suit : Mon cher confrère, la pièce qu'il évoque n'a pas encore été versée
4 au dossier, donc nous ne savons pas.
5 Deuxième point, le seul élément de preuve dont nous disposons pour
6 l'instant, c'est la déposition de ce monsieur -- ce témoin, au cours de nos
7 débats, a très clairement dit qu'il est certain que cette personne est
8 décédée après les accords de Washington. Oui, il est vrai, il n'est pas
9 tout à fait sûr de la date. Il a un petit peu mélangé les dates, mais il
10 est tout à fait certain que -- il est tout à fait sûr et certain que c'est
11 après les accords de Washington. C'est tout.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges vont délibérer.
13 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, avant que vous --
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.
15 M. SCOTT : [interprétation] Avant de délibérer, avec tout le respect que je
16 vous dois, Me Kovacic --
17 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai dit que les Juges vont délibérer, c'est-à-dire,
18 dans le futur.
19 M. SCOTT : [interprétation] D'accord.
20 Lorsque nous regardons le paragraphe 115 de l'acte d'accusation, on
21 constate que ceci va jusqu'au mois d'avril 1994 et n'a rien à voir avec la
22 date de la signature des accords de Washington. Donc, je tiens à préciser à
23 Me Kovacic qu'avec tout le respect que je vous dois, il a commis une erreur
24 sur la signification de cette date, l'acte d'accusation parle du mois
25 d'avril de 1994 plus particulièrement le paragraphe 110 du mois de juin
26 1993 au mois d'avril 1994, Mostar est était assiégé pendant toute cette
27 période. Au mois de juin, paragraphe 111, au cours de cette période, encore
28 au mois de juin 1993 à avril 1994, des combats continus, pilonnages, tirs
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1 embusqués. Au paragraphe 114, annexe à l'acte d'accusation, paragraphe 115,
2 paragraphe 117, le siège de Mostar est s'est terminé le 12 avril 1994.
3 L'incident figure très clairement dans l'acte d'accusation et est
4 couvert par la période mentionnée à l'acte d'accusation.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez.
6 M. SCOTT : [interprétation] Nous allons revenir à la photographie. A 360
7 degrés.
8 Q. Monsieur Pejanovic, je vous demande de bien vouloir regarder cette
9 photographie. Alors qu'on la regarde ici et que l'image bouge, je vous
10 demande de bien vouloir me signaler le moment où vous verrez le bâtiment
11 Razvitak; est-ce que vous pourriez nous arrêter et nous dire quel est ce
12 bâtiment ?
13 R. Repartez un petit moment en arrière, s'il vous plaît.
14 Q. D'accord.
15 R. Veuillez vous arrêter. L'endroit ici c'est l'endroit où se trouvait la
16 citerne. On voit ici l'angle du mur et cela c'était à un mètre et demi si
17 on tient compte de la largeur du véhicule. Ceci se trouvait vraiment sur le
18 bord du trottoir.
19 Q. Vous avez utilisé le terme de "citerne"; est-ce que vous voulez parler
20 du camion citerne ?
21 R. Le camion citerne.
22 Q. Ceci est le camion citerne --
23 R. Oui, du camion citerne. Oui, oui.
24 Q. C'est bien l'endroit où vous avez vu -- c'est de là que se trouvait le
25 camion citerne au moment où M. Jugo a été tué ?
26 R. Oui.
27 Q. Bien. Pourriez-vous continuer à faire tourner la photo et nous dire si
28 vous reconnaissez quelque chose, que ce soit le bâtiment des sapeurs-
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1 pompiers ou le bâtiment Razvitak ?
2 R. Ici on voit la Brigade des Sapeurs-pompiers et c'est là qu'il y avait
3 le camion citerne à un mètre et demi du mur et la largeur du camion, ce qui
4 signifie que c'était contre le trottoir. Mon collègue, M. Uzeir, réparait
5 les pneus ici, ils regonflaient les pneus, ils réparaient les pneus et avec
6 Djamakovic [phon], il réparait les moteurs aussi.
7 J'ai dit à une de mes collègues femme, qui se trouvait dans le bureau à ce
8 moment-là, je lui ai demandé de me préparer du café et, en disant cela, je
9 suis sorti, j'ai mis un pied dehors et ces deux personnes, qui étaient
10 debout à côté des véhicules, ont commencé à ranger le matériel, à enlever
11 la pompe, et cetera, et Uzeir s'est retourné. Maintenant, que vous avez la
12 photographie sous les yeux, vous voyez qu'il y a une affiche qui indique
13 qu'il fait de la publicité pour les pièces détachées et il passait sur la
14 partie gauche du trottoir, il voulait ranger ses outils. J'étais en face du
15 véhicule, et Dzemo Barakovic était devant le camion.
16 A un moment donné, j'ai entendu la porte se fermer, et il a
17 dit : "Oh, mon Dieu." Dzemo Barakovic, qui voyait mieux et tout ceci s'est
18 passé en une fraction de seconde, et il m'a dit : "Uzeir, Uzeir a été
19 touché." Je me suis baissé et sous le véhicule, j'ai pu le voir. J'ai vu
20 son genou et son coude gauche, il s'appuyait dessus et il essayait de se
21 relever. Je dois dire qu'à ce moment-là, il portait l'uniforme de la
22 protection civile qui était bleu ciel. Il avait un coupe-vent aussi.
23 On a réussi à le transporter de l'autre côté du bâtiment sur un brancard
24 dans une ambulance. L'ambulance est arrivée tout de suite. Il a été
25 transféré à l'hôpital. Ceci est arrivé entre une heure et demie et deux
26 heures moins quart.
27 Le lendemain, il est décédé. Il avait reçu six transfusions sanguines car
28 son groupe sanguin zéro, plus zéro positif. Il nous a fallu trouver
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1 quelqu'un pour donner son sang. C'était un petit peu compliqué et c'est à
2 ce moment-là qu'il est décédé.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]
4 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Puis-je poser une question, s'il vous
5 plaît ? A cause de l'analyse balistique qui a été faite par la suite, il
6 serait très important pour nous que le témoin nous indique précisément à
7 quel endroit cette personne, qui a été touchée, est tombée. Merci.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Normalement les questions, il faut les poser quand
9 c'est le moment du contre-interrogatoire. Bon. On garde cette question en
10 mémoire et on y reviendra. Mais l'observation était pertinente.
11 Est-ce que le témoin pourrait avec son bâton nous dire où il était lui et
12 où son camarade est tombé parce que j'ai vu une photo qui a tourné, mais
13 j'aimerais bien savoir exactement où était la victime et, vous-même, où
14 étiez-vous ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.
16 M. SCOTT : [aucune interprétation]
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Me demandez simplement.
18 M. SCOTT : [interprétation] Oui. Nous allons faire cela, peut-être que le
19 témoin pourra nous aider. Nous allons non pas au niveau de cette
20 photographie, mais au niveau d'une vidéo. Le témoin a donné l'emplacement
21 exact et la rue, donc, nous allons vous fournir cela.
22 Q. Monsieur Pejanovic, est-ce que vous pouvez répondre à la question qui
23 vous a été posée par le Président de la Chambre ? En regardant cette
24 photographie, peut-être que vous n'avez pas le meilleur point de vue, mais
25 pourriez-vous nous dire où vous vous trouviez et où se trouvait M. Jugo
26 lorsque vous étiez par terre ? Vous dites qu'il s'était appuyé sur son
27 coude; où se trouvait-il exactement à ce moment-là ? Pourriez-vous déplacer
28 l'image ? Si vous souhaitez déplacer l'image dans un sens ou dans un autre,
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1 faites-le-nous savoir, s'il vous plaît ?
2 R. En arrière, un petit peu, s'il vous plaît. Oui, arrêtez-vous là.
3 Il y a quelques instants, vous avez vu l'extrémité du mur. Donc, à un
4 ou deux mètres de ce mur se trouvait le camion-citerne. Si on estime que ce
5 camion-citerne avait une largeur de 1, 80 mètres. C'est peut-être un grand
6 camion-citerne, à ce moment-là. Le camion arrive à la hauteur de ce panneau
7 où on peut lire Prodavnica.
8 Donc, sur le bord du trottoir ici, il a ouvert la porte, la porte
9 arrière du camion, car la cabine, le conducteur était devant et
10 l'équipement placé sous le siège avant, l'équipement qu'il utilisait.
11 A ce moment-là, lorsqu'il a posé son équipement et qu'il l'a placé
12 sous le siège avant et qu'il est allé refermer la porte, c'est à ce moment-
13 là que j'ai entendu un cri. Il a dit : "Oh, mon Dieu, il est mort," et
14 j'étais de l'autre côté. Si vous voulez bien repartir un petit peu en
15 arrière, je vais vous montrer l'endroit où je me trouvais, moi-même. Voilà,
16 ici, quelque part par là, près du mur car je sortais du bureau qui se
17 trouve derrière ce mur.
18 Car j'avais dit à notre collègue femme de nous préparer un café,
19 j'avais mis un pied dehors. J'étais à 15 centimètres ou à 1 mètre du mur.
20 J'étais en face du camion-citerne. Donc, j'étais en face de la porte du
21 véhicule où il a été touché et où il est tombé. C'est sur son genou gauche
22 et son coude sur lequel il s'appuyait. Il a réussi à se traîner jusqu'à
23 l'avant du véhicule pour que nous ne soyons pas, nous, en danger, pour
24 qu'on puisse le porter et l'enlever de là. C'est ce que nous avons fait.
25 Je sais que, lorsque nous l'avons amené à l'hôpital. Lorsqu'il a été
26 hospitalisé, je sais que les gens ont dit que c'était sous la poitrine
27 gauche. C'était dans le dos qu'il avait été touché quelque part au niveau
28 de la poitrine droite et que le point de sortie de la balle se trouve là.
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1 Je souhaite insister, encore une fois, je ne suis pas stratège. Je ne
2 suis pas soldat, mais on a dit que la balle qui l'avait touché était
3 quelque chose qui cassait les os et qui a traversé son diaphragme, son
4 foie. Il est mort suite à l'hémorragie qu'il a eue. Nous lui avons
5 transfusé six bouteilles de sang pendant une période de 24 heures. Je suis
6 venu lui rendre visite vers le soir et il était dans le coma. Il était
7 inconscient. Je suis retourné le voir, le lendemain matin, et il
8 transpirait. Il était très pâle et les médecins m'ont dit qu'il y avait
9 très peu de chance pour qu'on le sauve. Mais voilà, nous espérions toujours
10 le voir survivre comme je vous l'ai dit, il a survécu pendant 24 heures
11 après l'incident. Ensuite, il est mort.
12 Q. S'agissant de la photo qu'on voit à l'écran, vous ai-je bien compris ?
13 Dites-vous que M. Jugo se serait trouvé du côté de la rue. Vous avez trouvé
14 ces structures à droite, ce bâtiment, et puis, que lui était par rapport au
15 véhicule du côté de la rue; est-ce exact ?
16 R. Oui, oui. C'est tout à fait vrai. C'était comme cela parce que quand il
17 a ouvert la portière, la portière qu'on utilise pour entrer dans
18 l'habitacle, il a dû d'abord ouvrir la portière toute grande. Puis, il a dû
19 mettre un pied sur le trottoir ou sur la chaussée.
20 Q. Je ne sais pas si vous étiez parvenu à nous indiquer où se trouvait ce
21 grand magasin Razvitak, est-ce que nous pourrions voir le reste de ce
22 panorama ?
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Arrêtez la photo. Une précision technique à laquelle
24 l'Accusation ne pense pas. Vous dites qu'il a été touché par une balle.
25 C'était un tir unique ou des projectiles dont l'un l'avait frappé dans le
26 dos ? Vous avez entendu le bruit du tir ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Une seule, une seule, fatale.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : A l'époque, il était là.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur ce bâtiment, ce bâtiment Razvitak, cela a
2 été construit à la fin des années 1970.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Expliquez que la victime a pu être touchée par une
4 balle alors qu'avec l'angle de ce bâtiment, on a dû mal à penser qu'il a pu
5 être touché par une balle puisqu'il y a le bâtiment qui est juste de
6 l'autre côté de la rue. Où se trouvait d'après vous le tireur ?
7 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Je pense qu'il y a peut-
8 être une méprise de la signification à accorder à ce lieu.
9 Q. Monsieur Pejanovic, est-ce que vous pourriez du mieux que vous pouvez
10 répondre à la question posée par M. le Président ? D'où venait ce tir qui a
11 tué M. Jugo ?
12 R. Arrêtez, arrêtez l'image. Il fallait que la balle vienne du côté opposé
13 de la partie ouest de la ville. J'ai supposé que cela venait d'un endroit
14 près de ce qu'on appelle aujourd'hui, la Place espagnole -- ou la Place
15 d'Espagne.
16 Est-ce qu'on pourrait revenir en arrière ? Est-ce que je peux voir l'angle
17 de cette rue ? Est-ce qu'on peut rembobiner un peu ? Je voudrais vous
18 montrer le lieu où 8 personnes ont été blessées aux bras, à la jambe ou à
19 la clavicule ? Voilà, ici.
20 Regardez, Monsieur, le coin supérieur gauche. Vous voyez qu'il y a une
21 façade bleue à côté des feux de circulation et à un mètre de ce tournant,
22 il y a un endroit où 8 personnes ont été blessées dont mon collègue, Cedo.
23 Une balle l'a frappé juste en dessous de la clavicule et est sortie par
24 l'omoplate. Il y a aussi Riki Saric. Il revenait de l'hôpital de guerre qui
25 se trouvait non loin de là, peut-être à une trentaine ou 40 mètres. Il
26 revenait de l'hôpital où il avait été voir son fils blessé. Son fils avait
27 été blessé au front. Il a été touché par un tireur embusqué au bras ou à la
28 main. Il portait des gants. La balle a traversé son gant et c'est dans cet
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1 état qu'il est arrivé dans nos locaux.
2 D'autres personnes ont été blessées légèrement par un tireur
3 embusqué, au nombre de cinq. Je le suppose. Je n'en suis pas tout à fait
4 sûr. Quelque part, tout près de la Place d'Espagne, il devait y avoir, je
5 ne sais pas une espèce de plateforme ou une élévation. En tout cas, un
6 endroit d'où il était facilement possible de grimper aux arbres, d'où il
7 était facile de tirer, d'en descendre rapidement. Le tireur embusqué, on ne
8 l'a jamais découvert, mais les deux parties se sont servies de tireurs
9 embusqués parce qu'ils se prenaient respectivement pour cible mais --
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- 60 % vous ne pouviez pas localiser le tireur
11 embusqué ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile parce que c'était de l'autre
13 côté. Pas à proximité. Ce n'est pas très loin mais c'est de l'autre côté du
14 pont. Derrière l'hôtel Bristol, pas loin à mon avis de la Place d'Espagne.
15 Regardez. Si vous regardez la carte je peux vous le montrer où se
16 trouve la Place d'Espagne. Vous verrez alors quelle est la distance qui
17 nous séparait de cet endroit, et vous verrez qu'il était très facile de
18 tirer de là.
19 Pendant longtemps, il y a eu un nid de tireurs embusqués sur le
20 bâtiment de la banque Privredna. Pendant longtemps, il y a eu à cet endroit
21 un tireur embusqué qui avait une vue excellente parce qu'il était assez
22 élevé que pour voir la totalité du pont Tito jusqu'à nos locaux. En fait, à
23 Hrasnica, cinq personnes ont été blessées et trois ont fini par trouver la
24 mort, par mourir.
25 C'était dangereux pour nous de s'approcher de la personne qui avait
26 été blessée. On lui lançait une corde et s'il avait suffisamment de force,
27 bien, il s'y accrochait et nous le sortions ainsi.
28 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a mentionné la
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1 carte que j'allais l'inviter à examiner de nouveau. C'est la carte qui se
2 trouve être la pièce P9517.
3 Est-ce qu'on pourrait la placer également sur le
4 rétroprojecteur ?
5 Q. Essayons de nous réorienter. Montrez nous, s'il vous plaît, une fois de
6 plus l'emplacement de la caserne des pompiers ? Je pense que vous l'avez
7 indiqué ce matin par un numéro 1, par le chiffre 1. Pourriez-vous nous
8 indiquer ce chiffre 1 ? La position ainsi indiquée ?
9 R. Volontiers. C'est ici, précisément. Vous voyez ce cercle et un numéro
10 1. Puis de l'autre côté vous avez un rectangle avec le chiffre 2. Cela
11 c'est ce grand magasin Razvitak.
12 Q. Est-ce que c'est la rue qu'on trouve -- ce qu'on a vu à l'image, est-ce
13 que c'était cette rue qui se trouve entre le numéro 1 et le numéro 2 ?
14 R. Exactement. C'est la rue Brkica.
15 Q. Revenons à la carte pour en faire quelques allées et venues pendant un
16 certain temps. Veuillez vous servir de votre bic ou feutre, pour indiquer
17 de façon précise la rue où cette rue franchit la Neretva et où elle entre
18 dans Mostar ouest, pourriez-vous vous arrêter au moment où vous allez
19 arriver à cette Place d'Espagne ?
20 R. Je pars d'ici de l'endroit où on était à l'instant même, voici dans
21 quel sens il faut aller. Ceci nous emmène à la Place d'Espagne.
22 Là, il y a deux possibilités. La première est celle-ci : Il y a ici la rue
23 qu'on appelle la rue Drinski, puis vous avez la rue Hrasnica et la rue
24 Safeta Mujica, et la rue Hrasnica et l'autre s'appelait la rue Ante Zuanica
25 [phon]. Là, ici à l'angle ainsi formé par cette bifurcation vous aviez
26 auparavant le bâtiment de la banque Privredna, ce qu'on appelait à Mostar
27 la banque de Verre. Il est possible qu'en fait que le tir soit venu de là,
28 l'autre possibilité c'est que dans la rue Zrinjski, il y avait une espèce
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1 de plate-forme à partir de laquelle il était facile de grimper puis de
2 descendre et partir. C'est ce que je suppose. J'opte pour la plate-forme.
3 Pour ce qui est du bâtiment -- de cet immeuble de la banque, c'est bien
4 connu il y a là une petite maison à partir de laquelle il y avait un
5 tireur embusqué qui tirait.
6 Q. Revenons à la photographie. Nous prenons la rue qui défile. Vous voyez
7 ce panneau. On dit cette rue ici on la descend, elle va vers où ? Est-ce
8 qu'elle va vers la Neretva vers la Place d'Espagne, dites-nous, s'il vous
9 plaît ?
10 R. Derrière ce panneau, où on voit le mot "Audi", pièces d'automobile. Si
11 on continue, on arrive à la Place d'Espagne.
12 Q. Au fond, M. Jugo était debout du côté de la rue au moment où il a été
13 touché par rapport à ce véhicule, de ce côté là ?
14 R. Oui. Oui, c'est cela.
15 Q. Je crois que c'est --
16 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
17 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que le début de l'interprétation n'a
18 pas été entendu parce que le micro n'était pas branché.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être que cette photo peut nous
20 aider. On voit à l'arrière plan des collines. Auparavant aujourd'hui on
21 vous a posé des questions à propos des emplacements d'armes. Est-ce qu'il
22 est possible que ce soit là les collines dont vous parliez ? Hulet [phon],
23 si je me souviens bien, et il y avait aussi Brkanovo, ou est-ce que cela
24 n'a aucun rapport ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous demande de comprendre ce que je vais
26 dire. Il est vraiment difficile de reconnaître la totalité du secteur à
27 partir d'ici, mais ce n'est pas la colline de Brkanovo, je peux vous le
28 dire. On ne voit que la partie de la colline de Brkanovo au-dessus des
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1 toits à gauche. Puis, après, il y a une route, et sur la droite de la
2 route, il y a une autre hauteur où on a aujourd'hui les émetteurs de la
3 télévision. C'est là qu'on a le mont Mikuljaca, qui est assez important.
4 Donc, sur la droite de cette route, c'est là que commence les premiers --
5 c'est le pied du mont Mikuljaca.
6 Sur la gauche, vous voyez, ce qu'on voit juste au-dessus des toits. C'est
7 là que se trouve la colline Hum. C'est vraiment un élément saillant du
8 paysage qui ressort très clairement.
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Espagne de l'endroit où on voit le véhicule est à
11 quelle distance ? Si on retient votre hypothèse comme quoi, il y avait un
12 tireur embusqué au niveau de la Place d'Espagne. Entre la Place d'Espagne
13 et cet endroit, il y a quelle distance ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai jamais pensé parce que
15 cela n'était pas nécessaire. Mais, approximativement, si cela ne ferait pas
16 plus de 600 ou 700 mètres voire moins, et à vol d'oiseau ce serait encore
17 moins.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : La colline que l'on voit elle serait à quelle
19 distance, elle ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle est assez loin de cet endroit-là, à ma
21 connaissance, la route qui va jusqu'à la colline de Brkanovo allait jusqu'à
22 Balinovac, près de la route de Citluk et puis tourner à droite. Donc, si on
23 allait par la route, cela ferait peut-être de sept à dix kilomètres à peu
24 près, et à vol d'oiseau, bien entendu, beaucoup moins.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, continuez. Nous avions besoin de ces
26 précisions techniques.
27 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
28 Q. Monsieur Pejanovic, nous avons aussi abordé rapidement cet autre
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1 incident où vous avez ces cinq personnes qui ont été touchées par des tirs
2 à l'angle de la rue. On pourra peut-être reprendre ce panorama. Vous nous
3 direz d'arrêter à l'endroit où d'après vous ces cinq personnes, endroit
4 approximatif, où ces personnes ont été touchées par des tirs.
5 R. Stop, stop. A l'avant-plan, vous voyez -- ou plutôt, à l'arrière-plan,
6 ce bâtiment rouge, c'est la bibliothèque, en tout cas, au rez-de-chaussée.
7 Il y a des appartements au-dessus, mais à droite, vous avez une boulangerie
8 qui appartient à un particulier et vous voyez l'entrée dans la cour de la
9 bibliothèque. Si vous prenez l'angle à la boulangerie jusqu'au bout là où
10 vous voyiez les feux de circulation, c'est à cet endroit-là que beaucoup de
11 gens ont été touchés, cinq ont été soit blessés soit tués, me semble-t-il.
12 Q. Est-ce que des collègues à vous de la brigade des sapeurs-pompiers
13 auraient été blessés à cet endroit ?
14 R. Pas ici, non, non, pas ici. Mais à l'entrée de la rue, je ne sais pas
15 si vous pouvez revenir en arrière et arrêter l'image ici. Regardez, juste-
16 là, un mètre, un mètre et demi par rapport au bout de ce bâtiment. Si on
17 allait vers nos locaux, Edo Dostovic, un de mes collègues, a été blessé, il
18 est encore aujourd'hui pompier. Aussi Edo Saric a été blessé, il a été
19 touché par une balle à la main ou à l'avant-bras alors qu'il revenait de
20 l'hôpital où il avait rendu visite à son fils blessé.
21 Q. Vous dites : "L'extrémité de ce bâtiment." On voit à l'extrémité gauche
22 de la photo, on a une structure, un bâtiment, disons de couleur vert clair.
23 Est-ce que c'est de cela que vous parlez ?
24 R. Oui, oui. Oui, oui, c'est à celui-là que je pense. Je vous l'ai dit, si
25 vous prenez l'angle et si vous revenez vers l'avant-plan en parcourant un
26 mètre, un mètre et demi, deux mètres, là je ne sais pas exactement, c'est
27 un peu difficile de faire ces -- pas facile de faire ces estimations, mais
28 c'est ce que j'aie en mémoire. Dès que les gens apparaissaient après avoir
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1 tourné là, à l'angle du bâtiment, c'est ce qui se passait. Je viens de me
2 souvenir de quelque chose : pendant très longtemps, il y avait quelque
3 chose d'inscrit sur ce mur. Il était inscrit : "Faites attention aux
4 tireurs embusqués." C'était un avertissement destiné à tout le monde qui
5 est resté là jusqu'au moment où on a ravalé la façade de ce bâtiment.
6 C'était un avertissement destiné à tout le monde.
7 Q. Vous avez parlé de M. Dostovic, mais savez-vous s'il y a d'autre
8 collègue à vous qui aurait été tué ou blessé à cet endroit ou à proximité ?
9 R. Non, pas dans ce secteur, mis à part Dostovic. Riki Saric, une
10 connaissance à moi, un ami, il a été touché au bras.
11 Q. A proximité, dans les alentours de ce bâtiment Razvitak qu'on va
12 refaire un panorama pour le voir. Pourriez-vous dire aux Juges de la
13 Chambre --
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé de vous interrompre. Ligne
15 15, on parle d'un certain Edo Saric, alors que, maintenant, à la page 103,
16 ligne 9, on parle d'un certain Riki Saric. Ailleurs, on retrouve Edo
17 Dostovic. Il y a peut-être une méprise, une erreur là ?
18 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
19 Q. Pourriez-vous tirer ceci au clair, Monsieur le Témoin ? Vous parlez
20 d'un M. Dostovic et puis - désolé de ne pas avoir relevé cela
21 personnellement - vous donnez un autre nom; est-ce qu'il s'agit de deux
22 individus séparés et différents ou est-ce qu'en fait, il s'agit d'un même
23 individu, ou est-ce que vous avez là une confusion entre les noms et les
24 endroits ?
25 R. Non, non. Il s'agit de deux personnes différentes. Je m'excuse auprès
26 de vous tous si je me suis mal exprimé. J'essaie de maîtriser ce que je
27 dis, mais il se peut que j'aie fait un lapsus. Edo Dostovic a été blessé
28 sous la clavicule, puis Riki Saric a été blessé au bras droit.
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1 Q. Où se trouvait-il, M. Saric, par rapport à cet endroit que nous venons
2 d'examiner ?
3 R. Est-ce qu'on peut revenir un peu en arrière ? Merci. Arrêtez. Là,
4 précisément, je vous l'ai dit. Vous voyez cette façade peinte en vert
5 clair, à peut-être à deux, deux mètres et demi de là
6 -- enfin, deux mètres, deux mètres et demi de l'angle du bâtiment lorsqu'on
7 revient vers les locaux de la Brigade des Sapeurs-pompiers. Cela c'est vrai
8 pour Edo et Riki, qui tous deux ont été touchés, ainsi qu'Emina Dedic et
9 beaucoup d'autres qui ont été blessés à cet endroit. Heureusement, aucun
10 d'entre eux n'a été tué.
11 Q. Revenons un peu plus à gauche. Nous voulons simplement nous resituer.
12 Là on a fait le tour, n'est-ce pas ? On revient aux locaux des sapeurs-
13 pompiers, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Revenons vers le bâtiment Razvitak. Est-ce que vous avez d'autres
16 incidents impliquant des tireurs embusqués que vous pourriez relater aux
17 Juges de la Chambre, par rapport avec ce bâtiment Razvitak ? Je peux peut-
18 être vous aider en vous donnant la date du 9 mai.
19 R. Oui, je vois à peu près de quoi il s'agit. Là, le camion de Dervis
20 Travnjak a été touché. C'était un camion de couleur bleu clair, il était
21 garé juste en dessous de ce panneau publicitaire, sauf qu'à l'époque il n'y
22 en avait pas. Donc c'est là que le camion était garé à peu près. J'étais
23 dans le bureau avec une collègue à mois. Vous avez vu où se trouvaient nos
24 locaux, le bureau, notamment, tout près de ce poteau électrique. Tout d'un
25 coup, j'ai entendu plusieurs coups individuels de feu. Je me suis dit que
26 quelqu'un essayait de toucher les feux de circulation, peut-être un tireur
27 embusqué qui n'avait rien de mieux à faire, parce que ces feux rouges, ils
28 ont toujours été là et, si on vient de la route principale, on a la
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1 priorité -- enfin, il faut respecter les règles de circulation. Je suis
2 sorti pour voir ce qui se passait, et j'ai entendu des coups de feu. J'ai
3 vu qu'on n'avait pas touché le panneau. J'ai regardé de plus près, et j'ai
4 vu qu'on avait touché le camion. Je ne veux pas exagérer, mais je crois
5 qu'au moins sept ou huit coups de feu avaient touché le moteur du camion.
6 Quatre ou cinq avaient touché le pare-brise. Soudainement, j'ai compris
7 qu'ils essayaient de mettre le feu au camion. Ils ne s'intéressaient pas
8 nécessairement au moteur; ils essayaient simplement d'incendier ce camion.
9 Alors que j'y réfléchissais, j'ai vu que de la fumée a commencé à se
10 dégager du siège. Je me suis précipité à l'intérieur de nos locaux, et un
11 de mes collègues est sorti en courant pour aller vers le camion qui n'était
12 pas verrouillé. Je ne lui ai pas permis de le faire, alors qu'il voulait
13 déplacer ce camion de l'endroit où il se trouvait.
14 Il y avait quelque chose de particulier. Le tireur embusqué n'a pas
15 essayé de prendre pour cible mon collègue, qui a pourtant ouvert la porte
16 du camion - je vous l'ai déjà dit. Nous avions reçu un camion-citerne de
17 nos collègues français, qui avait une capacité de
18 1 000 litres. Nous avons sorti un peu le camion-citerne pour pouvoir en
19 sortir les tuyaux, qui faisaient quelque chose comme 50 mètres de long, et
20 nous avons éteint le feu qui avait commencé au siège. Les tirs se sont
21 interrompus. Quelqu'un est allé dire au propriétaire du camion ce qui
22 s'était passé, et dès la nuit tombée, le propriétaire du camion l'a
23 déplacé. Je ne sais pas ce qui est arrivé après.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que c'est trois heures moins quart ? On
25 reprendra à 3 heures, et il nous restera une heure.
26 --- L'audience est suspendue à 14 heures 45.
27 --- L'audience est reprise à 15 heures 02.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Juste avant de donner la
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1 parole à M. Scott, le Juge Trechsel a une question à poser au témoin
2 également sur un aspect technique.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je souhaite que vous m'aidiez sur un
4 plan technique. Je souhaite voir l'image, et je souhaite que vous passiez
5 de l'autre côté. Voilà. Très bien. Merci.
6 On nous a dit que le tireur embusqué avait très probablement, je suppose,
7 tirer à partir de l'endroit en centimètres à partir du panneau de
8 signalisation indiquant qu'il y a un parking. Je souhaite savoir si ce
9 panneau existait déjà à ce moment-là, et je me demande si le témoin peut
10 nous montrer, sur cette image, quelles sont les fenêtres derrière
11 lesquelles se trouvait le tireur embusqué ou sur quel toit il se trouvait.
12 Vous nous avez indiqué l'emplacement, vous nous avez donné le nom. Mais il
13 serait utile que vous nous le montriez sur cette photographie, car en
14 raison des distances, votre récit à propos du tireur embusqué rend les
15 choses un peu compliquées. Si vous voulez bien nous montrer cela, s'il vous
16 plaît. Merci.
17 On vient de nous dire qu'on ne peut pas utiliser un écran tactile ici. Ce
18 n'est pas possible. On ne peut pas utiliser de flèches non plus pour
19 indiquer l'endroit sur cette photographie. Ce n'est pas possible sur un
20 plan technique. Peut-être que vous pouvez nous le décrire, s'il vous plaît.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer de m'y employer. Je vais
22 utiliser à nouveau la carte.
23 Sur la carte, j'ai clairement indiqué quel était l'endroit où se
24 trouvait notre quartier général, l'emplacement de la brigade des sapeurs-
25 pompiers ainsi que l'endroit où se trouvait la Place d'Espagne. Je n'ai pas
26 d'autres emplacements à vous signaler. Je vous ai indiqué quelle était
27 notre position. Il doit s'agir d'un malentendu.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi. Il doit s'agir d'un
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1 malentendu. J'ai fait très attention lorsque vous avez parlé de la carte
2 que vous nous avez montrée. Maintenant, nous savons où cela se trouve, à
3 moins que je ne me trompe. Vous avez dit où le témoin était debout ou
4 accroupi lorsqu'on lui a tiré dessus. C'est une question de bon sens. A
5 partir de là, on ne devrait pouvoir voir de quel endroit tirait ce tireur
6 embusqué. Je vous demande non pas de nous le montrer sur la carte mais sur
7 cette photographie.
8 Vous pourriez nous le décrire, par exemple, en parlant de la partie
9 en haut à gauche ou parler de l'angle gauche du parking. Vous pouvez dire
10 que c'était à une centaine de mètres ici au niveau du toit ou procéder
11 ainsi.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais être très clair. Je me trouvais du
13 côté opposé à la victime, par rapport à la victime. Je me trouvais du côté
14 opposé par rapport au véhicule. A partir de cet endroit-là, je ne peux rien
15 vous montrer avec le doigt. On ne peut pas voir l'endroit d'où venait le
16 tir car cela ne figure pas sur cette photographie. C'est la raison pour
17 laquelle je vous ai reporté à la carte. Là, je peux vous montrer l'endroit
18 où se trouve le bâtiment Privredna. Ici, l'endroit où il y avait la cage
19 d'ascenseur, ils ont tiré à partir de là.
20 Les tireurs embusqués qui étaient de l'autre côté ont essayé tirer
21 sur ce tireur embusqué pour l'empêcher d'agir. Cet endroit qui vous
22 intéresse n'est pas sur la photographie. On ne peut vous le montrer que sur
23 la carte. C'est l'endroit que je vous ai indiqué sur la rive-là, à partir
24 de l'endroit où le tireur qui a tiré se trouvait.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi si j'insiste. Il
26 y a quelque chose que je ne comprends pas. Je souhaite que vous me
27 corrigiez si c'est le cas. La position de la caméra qui prend cette
28 photographie-ci, celle que nous avons sous les yeux, celle-ci est quasiment
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1 -- est identique, le même emplacement, non pas où vous trouviez vous, mais
2 l'emplacement où on a tiré sur la victime. En général, une balle part tout
3 droit, ce qui signifie qu'à partir de l'endroit où se trouve la victime -
4 et il s'agissait non pas d'un tir de mortier mais d'une balle, vous êtes
5 censé voir l'endroit d'où la balle est partie.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas pu voir cet endroit, et de façon
7 abstraite, je n'ai jamais prétendu que ce soit le cas non plus. Au
8 contraire, j'ai dit que j'étais à droite en face ou devant le camion, et
9 j'étais à la droite du camion, à savoir, l'angle droit du trottoir. Alors
10 que le chauffeur ouvrait la porte pour mettre son équipement à l'intérieur,
11 qu'il le veuille ou non, il était là debout. Il n'était pas protégé, il
12 était dans la rue. Je ne sais pas où se trouvait le tireur embusqué, mais
13 il était dans son angle de vision. Je vous ai donné deux possibilités.
14 Je vous ai dit que le tireur embusqué a pu se trouver dans le
15 voisinage de la Place d'Espagne. La Place d'Espagne, on peut la voir non
16 pas sur cette image, mais on ne peut la voir que sur la carte.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
18 Monsieur Scott.
19 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis être d'une
20 certaine utilité, eu égard aux questions posées par M. le Juge Trechsel, il
21 y aura d'autres témoins qui vont parler de cet incident en particulier, et
22 qui étaient plus près de l'endroit en question que M. Pejanovic. Donc, ce
23 ne seront pas les seuls éléments de preuve que vous allez entendre sur la
24 question.
25 Q. Monsieur, nous avons parlé d'un quartier avant la pause. Avant de
26 quitter cet endroit-là, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre, s'il
27 vous plaît, ce que vous pensez être à l'origine de cet incident. Il y avait
28 un nombre important de Musulmans, de civils musulmans rassemblés devant le
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1 bâtiment Razvitak. Pourriez-vous décrire cet incident aux Juges, s'il vous
2 plaît.
3 R. Maintenant ou à ce moment-là plutôt, lorsque le camion a été touché
4 devant le bâtiment Razvitak; c'est à cela que vous pensez ? C'est à cet
5 incident, lorsque le camion a été pris pour cible par un tireur ?
6 Q. Vous nous avez parlé avant la pause d'un moment où le camion a été
7 touché par avant, et d'après vous, on avait tenté de mettre le feu à ce
8 camion. Y a-t-il eu un autre incident, et vous en souvenez-vous ? Y avait-
9 il d'autres incidents ? Lorsqu'il y avait un groupe de civils musulmans qui
10 étaient rassemblés devant le bâtiment Razvitak, vous avez dit que vous
11 pensiez qu'un tir avait été -- qu'un tireur embusqué avait tiré.
12 R. Oui, je me souviens de cela.
13 Q. Veuillez-nous en parler, s'il vous plaît ?
14 R. Je me souviens de cet événement. Pardonnez-moi, je n'avais pas compris
15 tout de suite votre question. Je croyais que vous souhaitiez des
16 éclaircissements sur la réponse précédente.
17 Alors, ce qui s'est passé, c'est ceci : après le 9 mai, lorsque le
18 conflit a éclaté et une à deux semaines après, nous sommes parvenus à un
19 compromis, et la fusillade et les pilonnages ont cessé. A un moment donné,
20 ils ont dit que tous ceux qui souhaitaient repartir dans leurs appartements
21 qui se trouvaient à Mostar ouest, devaient se présenter au MUP et se rendre
22 dans leurs communes. Beaucoup de gens ont suivi ce conseil. Ensuite, ils
23 ont commencé à rassembler les gens pour qu'ils puissent traverser de
24 l'autre côté sur la rive droite. Ceci a été fait de façon organisée. Toute
25 personne qui n'avait pas été enregistrée n'était pas autorisée à traverser
26 de l'autre côté. Leurs noms ont dû être placés sur une liste.
27 Si vous prenez - si vous repartez un petit peu l'angle de vue ici de la
28 caméra, je souhaite que vous repartiez un peu de l'autre côté, s'il vous
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1 plaît. Arrêtez-vous là.
2 Toujours ici derrière le bâtiment Razvitak, je crois qu'à cet endroit-là,
3 il y avait 1 000 à 1 500 personnes qui étaient disposées à repartir, car on
4 leur avait dit qu'on était parvenu à un accord et qu'ils pouvaient rentrer
5 chez eux. Ceci a été fait de façon organisée. Les hommes sont arrivés à
6 bord d'autocars, de voitures particulières, toute personne qui en
7 disposait, et ils montaient à bord de ces derniers pour pouvoir passer de
8 l'autre côté.
9 Si vous repartez un petit peu en arrière - je crois qu'il faut voir le
10 passage piéton. Merci. Alors que les gens montaient à bord de ces autocars
11 pour en passer de l'autre côté, j'étais sur le trottoir ou plus loin.
12 Derrière ce panneau, j'ai pu très bien voir comment les gens sont montés à
13 bord de ces autocars et de ces véhicules, et cetera. A ce moment-là, un
14 pigeon a atterri sur le bâtiment Razvitak. A une fraction de seconde, on a
15 tiré sur ce pigeon. Je crois que le message était très clair. Je crois que
16 c'était un message que l'on souhaitait envoyer à ceux qui souhaitaient
17 monter à bord de ces bus et de ces voitures.
18 Q. Je souhaite maintenant mettre de côté cette photographie, et vous
19 demander de nous dire si vous savez quelque chose à propos du fait qu'on
20 ait tiré sur Mirzo Hamzic.
21 R. Je souhaite apporter une correction. Il n'y avait pas de fusillade sur
22 à venir sur Mirzo Hamzic. On a mis le feu à cette installation.
23 Q. Pardonnez-moi.
24 R. Aux premières heures du matin, à 5 heures du matin, nous avons -- à
25 cinq heures et demie, nous avons reçu un rapport nous indiquant que la
26 maison de Mirzo Hamzic était en feu. Ce qui n'était pas très loin de nos
27 locaux. Donc, ce n'était pas très difficile pour nous de nous rapprocher de
28 la maison. Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, nous avons vu que le
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1 toit était en feu.
2 De façon générale, il ne faut jamais s'approcher de trop près d'un
3 bâtiment en feu. Il faut toujours garer le camion un peu plus loin. C'est
4 une règle tactique de façon à ce que le bâtiment, si le bâtiment
5 s'effondre, qu'il est endommagé et qu'il s'effondre, que le véhicule ne
6 soit pas endommagé.
7 Donc, nous nous sommes arrêtés à 50 ou 60 mètres de la maison, nous
8 avons essayé de diriger notre lance incendie en direction du bâtiment. Nous
9 avons commencé à éteindre le feu. A ce moment-là, un tireur embusqué à
10 commencer à nous tirer dessus. Je me trouvais à l'intérieur où j'étais
11 assis à côté du chauffeur. Une balle d'un tireur embusqué est passée entre
12 nous deux et s'est logée dans le siège. Ensuite, il y a toute une série de
13 tirs qui ont touché la partie avant du véhicule, le moteur, pour essayer de
14 le détruire.
15 Nous nous sommes rendus compte de la situation et j'ai dit : Il faut
16 sortir du camion. Il y avait deux autres collègues qui étaient assis
17 derrière nous. Nous sommes sortis du camion et la fusillade n'a pas cessé.
18 Nous étions derrière le camion. C'était un TAP-125 ou un T-10. C'était un
19 camion de ce type-là. Nous ne pouvions pas nous abriter dans la maison de
20 quelqu'un ni dans la cour de quelqu'un, car il fallait traverser la rue et
21 il y avait ce tireur embusqué.
22 Alors que nous étions debout derrière le camion, nous pouvions voir les
23 deux pneus avant qui ont été troués par ces tirs. Ces pneus se sont
24 dégonflés. Il y a eu deux, trois ou quatre grenades. On a entendu trois ou
25 quatre grenades siffler à côté de nous, et ensuite, un homme - c'est Zezemi
26 - il nous a dit de rentrer dans sa maison. Nous sommes entrés dans sa
27 maison. On entendait toujours ces tirs. Nous étions dans sa maison. Sa
28 femme était là également. Nous avons pris un café. Nous sommes sortis et
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1 nous nous sommes faufilés le long du mur pour essayer d'arriver à Noloko
2 [phon]. Ensuite, le soir, nous avons dû remorquer notre camion, car nous ne
3 pouvions pas le sortir autrement. Nous devions réparer les pneus. Fort
4 heureusement, le moteur n'était pas trop endommagé.
5 Q. Encore une fois, si nous regardons la carte et la
6 pièce 9517. Pourriez-vous nous indiquer par la lettre E l'endroit où se
7 trouvait le camion lors de cet incident.
8 R. En face de la rue, on peut lire "Balaga". C'est la rue Cveci, celle qui
9 se trouve sur la gauche, là où on voit la lette X, la deuxième rue à
10 gauche. La première rue est plus courte, et la seconde est plus longue.
11 C'est dans cette rue-là en bas de la rue.Nous étions à 50 à 60 mètres du
12 bâtiment en question. Comme je vous l'ai dit, c'était la fin de la rue. Le
13 bâtiment se trouve sur la rive de la Neretva. Voilà l'endroit. Vous voulez
14 que je l'annote comment ?
15 Q. Pourriez-vous apposer la lette E, s'il vous plaît ?
16 R. Cela y est. C'est fait.
17 Q. D'après ce que vous saviez de Mostar et de ces environs, est-ce que
18 vous aviez une idée de l'endroit d'où venaient les tirs ?
19 R. Non, pas l'ombre d'un dilemme. Je peux vous dire d'emblée, que ceci
20 n'aurait pu venir que du bâtiment de l'école secondaire, qui s'appelait
21 Aleksa Santic. C'était l'école Aleksa Santic.
22 Q. Pourriez-vous nous indiquer ceci sur la carte, s'il vous plaît, et
23 indiquer l'emplacement par la lettre F.
24 R. Là, on peut lire Place d'Espagne. C'était tout près de la Place
25 d'Espagne, à 10 à 15 mètres de la Place d'Espagne. Voilà l'endroit. C'est
26 là que se trouvait le bâtiment de l'école secondaire, à l'angle ici, entre
27 la rue Drinski et le boulevard, ou plutôt la Place d'Espagne. Dix à 15
28 minutes en deçà de la route un petit peu. C'est là où cela se trouve. C'est
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1 en forme de fer à cheval. C'est là que cela se trouve. Vous voulez que
2 j'inscrive la lettre F ici ? Ça y est.
3 Q. Est-ce que cet endroit est aussi connu sous le nom de gymnase ou école
4 secondaire ou lycée ?
5 R. C'est encore le cas aujourd'hui.
6 Q. Je souhaite que vous portiez votre attention -- que vous vous reportiez
7 à un autre incident, un endroit qui s'appelle Saric Harem. Est-ce que vous
8 pouvez nous en parler, s'il vous plaît ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous pourriez commencer par nous donner la data
11 approximative de cet incident ?
12 R. C'était au mois de juillet. Je le sais fort bien parce qu'il faisait
13 très chaud. Il devait être environ 13 heures lorsque nous avons reçu les
14 premières informations à propos de ce feu. Je vois qu'on peut lire qu'il y
15 a le mot "port" et ensuite un X, on voit qu'il y a la mosquée de Saric. Un
16 peu plus bas, on voit cette lettre X. En fait, la mosquée est à l'entrée de
17 Harem, c'est là où on peut voir Luka. J'ai indiqué ici que c'était X1 car
18 la mosquée c'est X et ici, c'est X1.
19 Q. Très bien. Est-ce que nous pouvons le remplacer sur le rétroprojecteur
20 de façon à pouvoir voir ceci ? Relevez un petit peu la carte vers la
21 droite, dans le sens opposé peut-être.
22 R. Oui. Ici, on le voit. On voit ici la lettre X qui représente la mosquée
23 et la mosquée se trouve à l'entrée de Harem et repart en arrière, sur 4 à
24 500 mètres, cela c'est le quartier de Harem. Nous avons reçu ces
25 informations vers 13 heures. Nous ne nous sommes pas rendus à l'endroit en
26 question tout de suite, car à ce moment-là, nous n'avons pas de camion-
27 citerne, car le camion-citerne était utilisé ailleurs et était parti avec
28 toute l'eau.
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1 Deuxièmement, pour être tout à fait honnête, comme je dirigeais cette
2 brigade, je n'autorisais jamais deux frères ou à deux parents proches de
3 partir en mission en même temps, ni d'envoyer des gens lorsque la situation
4 était peu sûre. En général, j'attendais, je comptais jusqu'à dix avant de
5 prendre une décision, et c'est ce que j'ai fait à cette occasion-là aussi.
6 Bon, il n'y avait rien à brûler à Harem, en réalité. Il n'y avait que du
7 bois, des pierres et des tombes, mais rien de particulier. Donc nous avons
8 attendu l'arrivée du camion-citerne. Pour des raisons tactiques, nous
9 sommes partis vers 14 heures 30. Il y avait plusieurs appels qui nous
10 parvenaient; on disait que les flammes étaient en train de se propager.
11 Nous nous sommes rendus sur les lieux où avait lieu l'incendie. Nous nous
12 sommes rendus dans la rue du maréchal Tito ou plutôt, à mi-chemin.
13 En direction du Harem, nous avons mis en place une chaîne de
14 lance-incendie. Certains de mes collègues sont entrés dans le Harem en se
15 faufilant le long du mur, je suis resté à côté du chauffeur, près du
16 chauffeur et du camion-citerne, et nous avons communiqué par radio et nous
17 avons dit que n'appellerions que si cela s'avérait strictement nécessaire.
18 A un moment donné, ils ont réussi à éteindre la moitié de l'incendie et
19 moi-même, j'étais derrière le camion-citerne, et j'ai reçu des
20 égratignures. En fait, c'était la douille d'une balle, j'ai saigné un tout
21 petit peu. Alors que je regardais ce qui m'était arrivé, le chauffeur est
22 venu vers moi pour me dire : "Ils nous tirent encore une fois dessus. Ce
23 sont des tireurs embusqués." Je lui ai dit à ce moment-là : "Oui, ils
24 viennent de me toucher." Je lui ai montré l'endroit où j'avais ces
25 égratignures. Ensuite, les tirs sont devenus incessants et j'ai dit : "Mais
26 qu'est-ce que nous devons faire ?" A ce moment-là, mes collègues qui
27 étaient à Harem m'ont appelé et m'ont dit : "Qu'est-ce qu'on doit faire ?"
28 J'ai dit : "Restez où vous êtes, mais essayez de vous retirer et de vous
Page 1328
1 échapper en direction de la mosquée."
2 J'ai détaché le lance-incendie, je l'ai jeté à terre, et j'ai dit au
3 chauffeur de repartir un petit peu en arrière et de faire marche arrière un
4 petit peu. C'est ce qu'il a fait, et j'ai essayé de courir en même temps
5 que le camion. J'étais moi-même épuisé à vrai dire. Je lui ai fait un signe
6 de la main, je lui ai dit qu'il devait continuer et je me suis jeté contre
7 le mur. Au bout de la rue du maréchal Tito, il y avait un autre Harem qui
8 avait été construit 1993, car il n'y avait pas suffisamment d'endroit dans
9 le premier cimetière. Donc je me suis couché à terre sur la route
10 goudronnée, protégé par ce mur et quelques buissons. Lorsque j'avais repris
11 mon souffle, j'ai continué à courir tête baissée, j'ai couru sur une
12 centaine de mètres encore, je me suis reposé, et j'ai essayé une troisième
13 fois. J'ai réussi à me soustraire aux tirs des tireurs embusqués.
14 Entre-temps, mes collègues étaient revenus du Harem, mais ce faisant,
15 ils nous fallaient détacher le lance-incendie. Il y avait un homme que je
16 connaissais de vue. C'est un homme âgé, trapu. Il a sauté du mur du Harem
17 et je lui ai dit : "Cours. Tu vas être touché." Car j'ai vu qu'il avait été
18 blessé au-dessus de la cheville et sa cheville saignait, et il l'avait
19 pansée avec un mouchoir. Nous nous dirigions vers le nord -- non, lui se
20 dirigeait vers le nord et nous nous sommes dirigés vers le sud. C'est ainsi
21 que nous avons réussi à nous échapper en longeant ce mur.
22 Ensuite, à Tekija, un peu plus loin, à 400 mètres, il y avait cette
23 localité appelée Tekija. Donc, il y avait cette clinique ambulatoire qui se
24 trouvait à cet endroit-là et il est allé se faire soigner. Il est en vie
25 aujourd'hui, donc sa blessure n'était pas trop grave. Nous avons réussi à
26 nous en sortir, le camion est resté là jusqu'au soir, et nous sommes venus
27 le remorquer à l'aide d'un autre véhicule. Après cela, il y avait 15 lance-
28 incendies environ et l'ensemble de l'équipement que nous sommes allés
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1 rechercher.
2 Q. Bien, Monsieur. C'est l'incident, donc que vous avez parlé il y a
3 quelques instants, à la page 69 de votre livre lorsque vous parlé de cet
4 incident du 27 juillet 1993. Est-ce bien de cet incident-là dont il
5 s'agit ?
6 R. C'est possible, c'est possible. C'est sans doute le cas. Mais je n'ai
7 pas vraiment les dates exactes en tête, en ce moment, je sais que c'était
8 le mois de juillet, je sais qu'on avait beaucoup hésité à se rendre sur le
9 lieu de cet incendie.
10 Q. Pendant que tout cela se passait et même pendant que vous vous rendiez
11 à cet endroit, saviez-vous que vous risquiez d'être exposé à des tireurs
12 embusqués à cet endroit particulier ?
13 R. Très franchement, je savais qu'il y avait des tireurs embusqués à cet
14 endroit-là car, à plusieurs reprises, ils nous avaient accompagnés. Je
15 n'étais pas le seul à avoir fait cette expérience. Tous ceux, qui
16 circulaient dans ce secteur, le savaient. C'est la raison pour laquelle
17 j'ai déclaré que j'avais eu quelques hésitations. Je me demandais s'il
18 fallait y aller tout de suite et si même il fallait s'y rendre, parce que
19 maintenant que j'ai réfléchi a posteriori, je pense que c'était de la
20 véritable folie que d'aller là-bas. Mais nous les pompiers, nous sommes
21 peut-être un peu cinglés, et nous avons donc décidé de nous y rendre. Je ne
22 sais pas comment vous dire cela mieux que je le fais, maintenant, parce
23 qu'à cet endroit-là, la vue était totalement dégagée, aussi dégagée
24 qu'entre vous et moi, maintenant; c'était très dangereux.
25 Mais voilà, nous y sommes allés. Nous nous en sommes tirés, et cela
26 valait sans doute la peine, ne serait-ce que pour les gens qui ont
27 bénéficié du fait que nous avons éteint cet incendie.
28 Q. Si vous en vous souvenez, Monsieur, pouvez-vous donner aux Juges un ou
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1 plusieurs noms s'agissant des tireurs embusqués qui se trouvaient là,
2 d'après vous, ou une indication au moins ?
3 R. En un mot, cela se situe en dessous de Mahala -- au-dessus de Donja
4 Mahala. C'est un point un petit peu en relief. Je connaissais cet endroit
5 sous le nom de Cekak, même si on l'appelait Visnjica ou Stotina, par
6 ailleurs. Parce que quand j'étais enfant, j'allais souvent là-bas où il n'y
7 avait pas d'habitations. Par la suite, un lotissement y a été construit.
8 Mais nous allions là-bas pour nous exercer au tir à l'époque.
9 Q. Merci, Monsieur Pejanovic.
10 M. SCOTT : [interprétation] Avec l'aide de la régie, j'aimerais que l'on
11 diffuse la vidéo qui constitue la pièce à conviction P09140 -- ou plutôt,
12 9140.
13 Je demanderais aux interprètes d'interpréter la personne qui parle au
14 micro.
15 [Diffusion de cassette vidéo]
16 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
17 "Q. Monsieur Pejanovic, pouvez-vous, je vous prie, montrer l'endroit
18 où se trouvait le camion des pompiers, si vous vous en souvenez ?
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 Q. Merci. Pouvez-vous maintenant, si vous vous en souvenez, nous
21 montrer l'endroit où les sapeurs-pompiers sont intervenus pour éteindre
22 l'incendie.
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Merci. Pourriez-vous indiquer, si vous vous en souvenez, montrer
25 à quel endroit vous vous teniez lorsque vous avez été touché ?
26 R. C'est là ?
27 Q. Merci. Pouvez-vous maintenant montrer d'où provenaient les tirs ?
28 R. [Le témoin s'exécute]
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1 Q. Merci. Si vous vous en souvenez, pouvez-vous, je vous prie, à
2 présent, montrer d'où venait l'homme qui a été blessé, qui a été touché ?
3 R. [Le témoin s'exécute]
4 Q. Merci. Je vais maintenant inscrire, à l'endroit où cet homme a
5 été touché, la lettre X, sur le sol, en jaune.
6 R. Maintenant, pour nous assurer qu'il n'y a pas le moindre malentendu, la
7 personne qui a été blessée, la personne qui a été touchée, c'est quelqu'un
8 qui a assisté à la scène qui a été touché. Ce n'était pas quelqu'un qui
9 faisait partie de notre équipe. Q. Merci."
10 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
11 M. SCOTT : [interprétation]
12 Q. Maintenant, j'aimerais que l'on examine la pièce à conviction
13 P09139, qui est une photographie. Nous reparlerons de ces deux endroits un
14 peu plus tard. Revoyons l'ensemble du site avant tout, en faisant un tour à
15 360 degrés.
16 Monsieur Pejanovic, vous étiez à cet endroit au moment où cette
17 photographie a été prise, n'est-ce pas, comme nous l'avons vu sur les
18 autres vidéos; c'est bien cela ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Au moment où la lettre X a été inscrite sur le sol, vous étiez d'accord
21 avec le fait que c'était bien l'endroit en question ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. Nous allons continuer à effectuer cette rotation, et à un certain
24 moment, vous verrez le lieu qui s'appelle Stotina. A ce moment-là, je vous
25 demande de nous demander d'arrêter la diffusion.
26 R. Stop. A l'arrière sur la gauche, on voit l'endroit en question.
27 Maintenant, on voit encore mieux l'endroit indiqué par la flèche.
28 Q. On voit une vieille maison -- ou en tout cas, une partie de vieille
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1 maison, au milieu. En tout cas, quelque chose qui ressemble à une cheminée.
2 Si l'on se sert de ce point comme d'un point de référence, pouvez-vous
3 indiquer aux Juges dans quelle direction se trouve l'endroit que vous
4 appelez Stotina, ou les maisons Stotina ?
5 R. Ce bâtiment qui se trouve ici est la maison d'un Serbe qui a été
6 incendiée en 1992. A droite de ce bâtiment, vous voyez une maison
7 appartenant à un particulier. J'aimerais que l'on fasse tourner un peu la
8 photographie sur la gauche. Je vous dirai un peu plus tard pourquoi je vous
9 demande cela. Sur la gauche. Encore un peu. Encore, encore. Stop.
10 Entre cette maison et la colline qu'on voit là-bas, il y a un vieux
11 bunker qui date de l'époque austro-hongroise. Je l'ai découvert par hasard
12 en 1985 ou 1986, je ne m'en souviens pas exactement. Mais en tout cas, il y
13 avait un incendie qui s'est déclaré sur les flancs de cette colline et qui
14 s'étendait jusqu'à l'école primaire.
15 Il y avait par là un champ de tir que nous utilisions pour nous
16 entraîner quand nous étions enfants. Dans ce secteur, je viens de le dire,
17 il y avait un bunker avec des tranchées en béton qui étaient en très bon
18 état.
19 Quand nous sommes allés nous occuper d'un incendie, j'ai découvert ce
20 bunker par hasard. Je pouvais m'en servir pour stationner des membres de
21 mon unité. C'était un endroit très sûr. Un bunker est un endroit presque
22 totalement enterré, il est construit en béton, et il y a aussi des
23 tranchées.
24 Q. Pouvez-vous également montrer sur cette photographie, en utilisant
25 toujours la cheminée comme point de référence, la cheminée qui fait face à
26 des toits et des maisons à peu près au centre; est-ce que vous pouvez vous
27 servir du pointeur pour nous montrer cette cheminée sur l'écran ?
28 R. Oui, je vois.
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1 Q. Très bien. Par rapport à cette cheminée, pouvez-vous maintenant
2 indiquer aux Juges où se trouve Stotina ?
3 R. C'est tout le secteur qui porte ce nom, si je ne me trompe pas. Avant
4 la guerre, on appelait ce secteur Cekek. Je l'ai dit tout à l'heure et
5 c'est seulement après la guerre que j'ai entendu les deux autres noms
6 utilisés pour désigner cet endroit. Stotina et Visnjica.
7 Q. Mais l'endroit où se trouve le curseur maintenant, est-ce que c'est
8 cela l'endroit qu'on appelait Stotina ?
9 R. A peu près. A peu près parce que, comme je viens de le dire, le bunker
10 se trouve là sur les flancs de cette colline. Cela je le dis en toute
11 certitude.
12 Q. Très bien. D'après votre livre, le 1er août 1993, un incident s'est
13 produit à Musala auquel un tireur embusqué a tiré à cet endroit. Pouvez-
14 vous nous en parler plus en détail ?
15 R. Bien, voilà de quoi il s'agit. Un gynécologue de chez-nous est parti
16 chercher de l'eau et il portait un seau et tout près de la place Musala
17 plus exactement tout près de la mosquée qui se trouve à cet endroit, un
18 tireur embusqué l'a touché alors qu'il avait fait à peine quelques pas dans
19 la rue. Il y avait à cet endroit l'agence Putnik par le passé, et
20 maintenant, je pense que c'est l'entreprise Benetton, qui se trouve là. Ce
21 n'est pas que je le pense d'ailleurs c'est sûr.
22 Q. Le 1er août 1993, est-ce que vous combattiez des incendies à cet
23 endroit ?
24 R. On est passé par là. Je ne sais pas si je pourrais vous décrire cette
25 situation, de la façon la plus appropriée, ici aujourd'hui, mais le plus
26 gros problème que nous avions à l'époque c'était d'aller du siège de notre
27 brigade jusqu'à la place Musala. Il y avait entre les deux endroits un
28 secteur très exposé aux tirs des tireurs embusqués parce que c'est
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1 seulement quand on arrivait à la Banque commerciale qu'on était un peu à
2 l'abri, seulement après avoir passé le pont qui mène à la place Musala.
3 L'hôtel Bristol servait d'écran protecteur à ce niveau-là, donc, le tireur
4 embusqué n'avait pas une très bonne visibilité et il ne pouvait voir de
5 l'endroit où il se trouvait que la rue Adema Buca avoir traversé le pont de
6 Tito, c'était la première rue sur la gauche. De l'endroit où il se
7 trouvait, il n'avait pas une vue totalement dégagée, mais il pouvait tout
8 de même tirer et essayer de nous atteindre. Mais pour aller de notre
9 caserne au pont de Tito, c'était très dangereux.
10 Q. Est-ce que vous pourriez maintenant regarder, encore une fois, le plan
11 qui se trouve à l'écran et inscrire la lettre H à l'endroit où se trouve le
12 pont dont vous venez de parler en relatant l'incident qui faisait l'objet
13 de votre propos ?
14 R. Avec votre autorisation, la lettre B1 a déjà été utilisée pour désigner
15 le pont de Tito et, derrière le pont au premier carrefour, quand on prend
16 la rue parallèle à la rue Santic, on a inscrit la lettre B1, et le nom de
17 la rue ne question c'est Adema Buca.
18 Q. Mais est-ce que vous pourriez y inscrire la lettre H ?
19 R. C'est fait.
20 Q. Dans votre livre, vous parlez également du 2 août 1993 en disant que le
21 quartier résidentiel de Beyrouth a été pilonné ce jour-là; pourriez-vous
22 nous en dire un peu plus à ce sujet ?
23 R. Avant de partir pour cette intervention dont je parlais tout à l'heure,
24 un pilonnage a eu lieu qui a duré assez longtemps, pilonnage aux mortiers.
25 C'est à ce moment-là que nous avons appris qu'un appartement du quartier
26 résidentiel Beyrouth était en feu. Nous étions déjà intervenus à plusieurs
27 reprises à cet endroit car il arrivait qu'un obus tombe à l'extérieur, mais
28 qu'une fenêtre soit ouverte et que des éclats entrent dans un appartement
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1 ou dans un autre, et comme il y avait par exemple des journaux, il prenait
2 feu et l'appartement était en feu. Ce jour-là, nous sommes intervenus à
3 l'aide de deux véhicules. L'un d'entre eux était le TAM 12550 dont la
4 capacité était de 1 800 litres et l'autre véhicule était le véhicule
5 Zastava, qui contenait quatre mètres cubes d'eau. Comme nous ne disposions
6 pas d'une pompe à eau assez sûre, nous utilisions le véhicule TAM qui
7 pouvait éteindre un feu car sa capacité en eau était suffisante. Donc nous
8 nous approvisionnions en eau, nous remplissions la citerne et nous nous
9 servions de cette eau pour éteindre le feu de l'eau contenue dans le
10 véhicule Zastava.
11 Ensuite, le deuxième véhicule intervenait pour éteindre complètement
12 le feu dans cette -- c'est ce que nous avons fait pour cet appartement qui
13 se trouvait au quatrième étage. L'appartement avait été incendié à partir
14 du nord et, à ce moment-là, le chauffeur du véhicule Zastava a cherché un
15 briquet pour allumer une cigarette et il ne trouvait son briquet, donc, il
16 s'est approché de son collègue qui était à l'entrée du bâtiment Beyrouth.
17 Juste au moment où il s'apprêtait à allumer sa cigarette, un obus est
18 tombé. C'était vraiment incroyable. C'est tout à fait par hasard que cet
19 homme s'est trouvé là et c'est simplement parce qu'il n'arrivait pas à
20 trouver son briquet et qu'il s'est mis -- qu'il s'est rapproché de son
21 collègue pour allumer sa cigarette, qu'il a survécu. Autrement, il se
22 serait trouvé à l'endroit où l'obus est tombé et il aurait été déchiqueté.
23 Mais ce qui est encore plus bizarre, c'est que quand le véhicule qui
24 a été touché -- a été tracté jusqu'à chez-nous pendant la nuit, nous avons
25 essayé de voir s'il était possible de le réparer pour qu'il fonctionne à
26 nouveau. Croyez-moi ou pas, sur la gauche du changement de vitesse, nous
27 avons trouvé le briquet en question. Donc, c'est très heureux que le
28 chauffeur n'ait pas trouvé son briquet au moment où il le cherchait; sinon,
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1 il aurait été déchiqueté.
2 Q. A ce moment-là, Monsieur, est-ce que vous parlez d'un tir de tireur
3 embusqué ou d'un obus ? Est-ce que ce n'était pas un obus qui était
4 responsable -- qui est tombé à ce moment-là ?
5 R. Oui, oui, c'est exact. C'est un obus de mortier qui est tombé à cet
6 endroit-là et vraiment c'est le plus grand des hasards qui a fait que cet
7 homme a pu sauver sa tête car il se trouvait exactement à l'endroit touché
8 par l'obus, donc, l'obus serait tombé directement sur sa tête. C'est juste
9 à ce moment-là que le tir de mortier a commencé quand il cherchait son
10 briquet.
11 Q. Je vous demanderais de regarder, encore une fois, le plan et d'inscrire
12 la lettre I au niveau où s'est produit cet incident ?
13 R. C'est fait.
14 Q. Merci. J'aimerais maintenant appeler votre attention sur un autre
15 incident dont vous faites état dans votre livre. Un incident survenu le 8
16 août 1993, au niveau du 37 de la rue Lace.
17 Pouvez-vous nous en parler, je vous prie ?
18 R. Il n'existe pas de rue à Lace.
19 Q. Excusez-moi. Je crois que le nom complet de la rue est Zahirovic Lace.
20 R. La rue Zahirovic Lace. Oui, oui, elle existe. Il y avait là un bâtiment
21 qui se trouvait à côté de la banque de la Neretva, enfin à 150 mètres de la
22 banque, et le feu a commencé aux environs 17 heures, en fin d'après-midi.
23 Nous avons essayé de passer par le toit pour pénétrer dans le bâtiment et
24 éteindre le feu de l'intérieur mais dès que certains d'entre nous sont
25 arrivés sur le toit un tireur embusqué a commencé à tirer. Ce bâtiment se
26 trouve en face de la prison et il y a aussi le tribunal cantonal et la
27 poste qui sont tous près. Tous ces bâtiments sont pratiquement adjacents
28 les uns aux autres, donc il était possible à partir d'un de ces bâtiments
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1 de tirer sans la moindre difficulté car la vue était totalement dégagée.
2 D'après moi, il n'était même pas nécessaire d'avoir une carabine avec
3 viseur optique. Un fusil de fantassin pouvait très bien servir à tirer à
4 partie de ces bâtiments. Nous avons tenté à plusieurs reprises de monter
5 sur le toit pour éteindre le feu. Le bâtiment était en feu. Si le
6 propriétaire de la maison nous avait autorisé à y pénétrer nous aurions pu
7 le faire beaucoup plus facilement, mais malheureusement cela n'a pas été le
8 cas. Nous avons rendu compte à la police. Je ne sais pas ce qui s'est passé
9 par la suite. Je n'étais plus responsable de cela et je n'ai pas été
10 informé. Ma seule responsabilité consistait à intervenir sur le site.
11 Q. Ce jour-là, Monsieur, j'ai peut-être raté quelque chose de ce que vous
12 avez dit. Je vous prie, de m'en excuser. Est-ce que vous avez été touché
13 par la balle d'un fusil ? Ou est-ce qu'il y a eu des grenades qui ont été
14 tirées par un lance-roquette multiple sur vous ?
15 R. Non, non. C'était une arme légère qui a tiré.
16 Q. Encore une fois, Monsieur, j'aimerais que vous vous penchiez sur le
17 plan et que vous inscriviez la lettre J au niveau de cette maison qui était
18 en feu ce jour-là.
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 M. SCOTT : [interprétation] J'en terminerais avec trois ou quatre questions
21 encore, Monsieur le Président.
22 Q. Monsieur Pejanovic, vous venez de parler de la prison. Est-ce que vous
23 pourriez inscrire la lettre K au niveau de la prison ?
24 R. Il y avait aussi au même endroit le tribunal cantonal un peu derrière
25 la poste et la poste. Ces trois bâtiments constituent une seule et deux
26 bâtiments reliés les uns aux autres pratiquement. Ils se trouvaient tous en
27 face du bâtiment en feu. Il y a encore une chose que je devrais dire. Tout
28 près du bâtiment en feu ce jour-là deux civils avaient été touchés et tués
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1 un peu avant ce jour-là. Si je ne me trompe pas.
2 Q. Cela avait un rapport avec l'incident dont nous sommes en train de
3 parler, ou était-ce un autre jour ?
4 R. Non, non, c'était avant, avant l'incident dont nous sommes en train de
5 parler. Deux civils avaient été abattus.
6 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous
7 pourrions nous en arrêter là. J'aurais besoin encore de 25 minutes à peu
8 près ou peut-être un peu moins, j'espère. Car j'ai encore un ou deux
9 incidents à évoquer avec le témoin, et il faudra annoter un certain nombre
10 de pièces à conviction, puis j'aurais deux ou trois questions pour la fin.
11 Mais j'espère que cela ne prendra pas plus de 25 minutes.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- que, donc, demain, nous avons l'audience qui
13 demeure à 9 heures et qui va jusqu'à 13 heures 45. Dans ce laps de temps,
14 il faudra que vous posiez vos quelques questions résiduelles et que la
15 Défense mène le contre-interrogatoire. Si jamais nous n'arrivons pas à
16 terminer à 13 heures 45, il faudra que le témoin reste jusqu'à lundi
17 prochain.
18 J'invite la Défense à vraiment se concentrer sur l'essentiel, parce qu'à
19 titre d'exemple on a passé une heure sur la question de l'eau, donc je n'ai
20 pas très bien vu toute la problématique et l'intérêt.
21 Je vais, Maître Karnavas, il a envie de lever le doigt depuis tout à
22 l'heure.
23 Maître Karnavas.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, une petite remarque rapide, Monsieur le
25 Président.
26 D'abord, l'Accusation a commencé par utiliser le programme que l'on connaît
27 sous le nom de Sanction. Je sais que nous sommes au début d'un nouveau
28 procès et que nous sommes peut-être un peu rouillés. Mais quand on consulte
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1 le compte rendu d'audience on a un petit bout-là un petit là-bas, le
2 curseur se déplace d'un endroit à l'autre et dans ces conditions il sera
3 sans doute impossible, difficile, si non impossible de déterminer ce dont
4 parle ou ce que montre le témoin. Donc je proposerais que par la suite
5 lorsque le système Sanction est utilisé les photographies dont il sera
6 question soient marquées à l'avance, si non il nous sera très difficile
7 quand on dit ici, là, de retrouver l'endroit en question, et très
8 franchement, cela me parait une solution simple.
9 Deuxièmement, on a vu le témoin dans une séquence vidéo et on nous a montré
10 d'autres bâtiments à cette occasion. J'apprécierais beaucoup qu'à partir de
11 maintenant on demande au témoin de décrire en mots la scène où l'incendie
12 s'est produit, parce que si les bâtiments ne présentent plus le même aspect
13 aujourd'hui, si les terrains ne présentent plus le même aspect aujourd'hui,
14 cela risque de créer des difficultés pour nous. Le général Praljak a dit à
15 très juste titre qu'à un certain moment nous devrons peut-être discuter des
16 lieux où ces tireurs embusqués sont censés avoir tiré.
17 Puis, troisièmement, l'Accusation a demandé au témoin d'utiliser un
18 pointeur. Donc, elle guidait un peu le témoin dans ces réponses. Encore une
19 fois, je pense qu'il aurait été préférable de soumettre une photographie au
20 témoin et de lui dire de parler de ce que montre cette photographie plutôt
21 que de voir l'Accusation ou le Procureur décrire quelque chose qu'il
22 demande au témoin de retrouver sur l'image.
23 Enfin, je m'en excuse encore une fois, ce qui m'inquiète un petit
24 peu, c'est ce nouvel incident qui a été évoqué aujourd'hui et qui n'était
25 pas mentionné dans les notes de récolement. Cela ne figure pas dans les
26 documents communiqués à la Défense. Monsieur le Président, vous avez dit
27 que c'était peut-être à des fins de définition de contexte ou d'ambiance,
28 mais cela me préoccupe un petit peu, parce que si nous lisons l'arrêt
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1 Stakic, et je crois qu'il y a également des éléments du jugement Tuta ou
2 l'arrêt Naletilic qui vont dans le même sens et qui ont été évoqué hier. En
3 tout cas, dans l'arrêt Stakic, il est tout à fait clair que si l'on veut se
4 servir de certains éléments pour décrire ou le climat général, je dois être
5 au courant de toute évidence. En la circonstance, cela n'a pas été le cas.
6 J'aimerais que cela ne se reproduise pas à l'avenir. Nous craignons un peu
7 que des situations de ce genre ne se reproduisent et que l'on fasse porter
8 la responsable aux uns et aux autres. Il ne faut que ces incidents aillent
9 plus loin nécessaires.
10 Puis en dernier lieu, j'aimerais revenir sur ce qu'a dit
11 Me Kovacic, il y a quelques instants, au sujet de l'acte d'accusation.
12 L'acte d'accusation n'est pas toujours absolument clair. Si nous voyons ce
13 dont a parlé M. Scott, qui concerne le mois d'avril, les choses ne sont pas
14 très claires à cet égard. L'acte d'accusation est un peu indéterminé pour
15 le mois d'avril. On ne sait pas très bien à quelle date l'acte d'accusation
16 s'arrête. J'aimerais quelques précisions.
17 Je vous prie de m'excuser, et je m'excuse auprès du témoin également, pour
18 avoir été un peu long, mais je n'irai pas plus loin.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic.
20 M. KOVACIC : [interprétation] Cinq mots, Monsieur le Président, si vous me
21 le permettez littéralement.
22 Un peu plus tôt, certains des conseils de la Défense, y compris moi, ont
23 essayé de voir qui interrogerait le témoin en contre-interrogatoire. Je ne
24 sais pas si tous les conseils s'entendent sur la question, mais nous en
25 discuterons encore en raison précisément de ce qui vient d'être dit. En
26 tout cas, la répartition des interventions des conseils de la Défense faite
27 à l'avance ne sera peut-être pas absolument respectée à la lettre. Mais
28 quoi qu'il en soit, le témoin a parlé au cours des réponses qu'il a
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1 apportées au contre-interrogatoire d'une période qui s'étend au-delà de
2 deux ans et demie, et un certain nombre d'incidents très précis - 22 au
3 moins, je pense avoir bien compté - ont été évoqués. Par ailleurs, on a
4 beaucoup interrogé ce témoin au cours de l'interrogatoire principal sur le
5 contexte, à savoir, des événements survenus avant le déclenchement du
6 conflit ayant opposé l'ABiH et le HVO. Donc, cela fait pas mal de choses à
7 aborder pour la Défense, Monsieur le Président. Je ne suis pas sûr que nous
8 pourrons respecter, le projet est prévu à l'avance. Merci.
9 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas
10 interrompre mon estimé confrère, mon ami, Maître Kovacic, mais je vous
11 l'assure, nous allons faire l'impossible pour veiller à terminer demain à
12 13 heures 45 au plus tard. Je suis sûr que c'est faisable pour autant que
13 M. Scott n'utilise que les 25 minutes qu'il a promises. Merci.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous en remercie à l'avance. Donc, nous
15 nous retrouvons demain à 9 heures.
16 --- L'audience est levée à 16 heures 08 et reprendra le vendredi 5 mai
17 2006, à 9 heures 00.
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