Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 18 septembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

6 l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : Bonjour, Monsieur le Président. Affaire

8 IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

10 Je salue en ce lundi 18 septembre 2006 toutes les personnes présentes. Je

11 salue M. Scott, tous les avocats et ainsi que les accusés présents, en me

12 réjouissant particulièrement du fait que les trois absents de la semaine

13 dernière peuvent assister à l'audience de ce jour. Je ne peux donc que m'en

14 réjouir.

15 Par ailleurs, la Chambre va rendre deux décisions orales que je vais lire

16 lentement afin que les interprètes puissent suivre. Alors, c'est une

17 décision concernant à l'admission des documents relatifs au Témoin BK. Le

18 29 août dernier, afin de décider de l'admission du document P 08436 sous

19 pli scellé, marqué aux fins d'identification, la Chambre avait demandé à

20 l'Accusation de lui fournir la décision accompagnant le certificat de

21 décès. L'Accusation a déposé ce document le 5 septembre sous la cote P

22 09696. Il s'agit d'une liste comprenant 162 noms de personnes décédées de

23 la municipalité de Prozor. L'Accusation a demandé donc à la Chambre

24 d'admettre définitivement en tant qu'élément de preuve la pièce P 08436

25 sous pli scellé ainsi que cette liste de noms de personnes décédées.

26 La Défense qui a eu la parole pour ses observations s'y est opposée. Après

27 avoir entendu les parties, la Chambre estime que les deux documents P 08436

28 et P 09696 - je répète P 09696, c'est exact; pour ce qui est uniquement du

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1 numéro 51 de cette liste corrobore les dires du témoin relatif au décès de

2 son père. Par conséquent, la Chambre a admet sous pli scellé les documents

3 P 08436 et P 09696 pour ce qui est uniquement du numéro 51.

4 Je me résume. Nous admettons la pièce P 08436 et concernant la pièce P

5 09696 seul la mention figurant au 51 est admise. Voici la première

6 décision.

7 Deuxième décision portant sur la demande de Me Alaburic du 14 septembre

8 2006. Le 14 septembre 2006, Me Alaburic a demandé une prolongation du délai

9 prévu à l'article 73(C) du Règlement afin de se réserver la possibilité

10 d'interjeter appel de la décision du 7 décembre -- du 7 septembre 2006

11 portant constat judiciaire des faits admis.

12 A l'appui de sa demande, elle a souligné qu'il lui fallait attendre la

13 traduction en anglais de ladite décision avant éventuellement de demander

14 une certification d'appel. La Chambre rappelle que l'article 73(C) du

15 Règlement prévoie que les demandes de certification doivent être

16 enregistrées dans les sept jours suivant le dépôt de la décision contestée.

17 Les Juges ne voient pas de raison -- pour déroger à cette Règle.

18 Le français est une des deux langues de travail officiel du Tribunal et la

19 présente Chambre est une Chambre francophone. Partant, il incombe aux

20 parties d'organiser leurs équipes en conséquent, donc, vous avez toujours

21 la possibilité d'avoir des assistants qui vous aident en français.

22 Les Juges, en conséquence, décident de rejeter en partie la demande

23 formulée par Me Alaburic. Cependant, exceptionnellement, les Juges décident

24 d'accorder une prolongation du délai jusqu'à demain, mardi, 19 septembre

25 2006. On vous accorde un délai jusqu'à demain.

26 A titre de commentaire, cette décision, que la Chambre a rendue, est une

27 décision qui fait 35 pages, mais ce qui importait même si vous ne

28 connaissez pas le français, c'était de savoir quels étaient les faits qui

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1 ont été admis et les faits qui ont été admis figurent encore sur la

2 décision, à savoir le 7, 8, 9, 10, 14, 15, et cetera, même si vous ne

3 connaissez absolument pas le français, il suffit de voir que le 7, le 8, le

4 19, le 14, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 23 ont été admis pour pouvoir avoir

5 une vue générale de la décision que nous avons rendue.

6 Voilà, vous avez jusqu'à demain. Nous avons donc augmenté le délai qui

7 était de sept jours, mais nous l'avons porté jusqu'à demain. Comme cela,

8 vous avez largement le temps de réfléchir à ce que vous allez faire.

9 Je tiens également à type personne ajouter ceci : le constat judiciaire

10 amène toujours la possibilité par la Défense de réfuter - vous avez

11 toujours la possibilité de réfuter, ce n'est pas parce que nous faisons le

12 constat que c'est gravé dans [imperceptible]. Vous avez toujours la

13 possibilité par vos témoins au cours du contre-interrogatoire de réfuter,

14 donc, imprégniez-vous de cela.

15 Enfin, dernier élément avant de poursuivre l'audition, je tiens à indiquer

16 aux parties parce que c'est tombé aujourd'hui sur le système électronique.

17 Comme vous le savez, les Juges se sont réunis la semaine dernière et ont

18 modifié le Règlement de procédure et de preuve, notamment, en ce qui

19 concerne un article, l'article 92 bis, et la Chambre enfin les Juges ont

20 également adopté un article 92 ter et un article 92 quater. L'article 92

21 ter concerne les autres cas d'admissions de déclarations écrites et de

22 comptes rendus de dépositions et l'article 92 quater concerne les personnes

23 non disponibles.

24 Alors, à la lumière de ces nouvelles dispositions qui ont été adoptées et

25 qui vous comprenez bien ont pour but d'essayer pour tout le monde de donner

26 du temps - vous pouvez tant l'Accusation que la Défense le moment venu

27 présenter par requête des listes donc de témoins qui pourront répondre soit

28 sur l'empire du 92 bis nouveau soit sur l'empire de l'article 92 ter.

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1 Etant précisé que l'article 92 ter nouveau porte également sur des

2 témoignages qui peuvent tendre à prouver les actes ou comportement d'un

3 accusé. C'est quelque chose de tout à fait nouveau.

4 Je vous invite à lire cela, le méditer, et puis, à adapter votre travail en

5 conséquence.

6 Aujourd'hui, nous avons le témoin de la dernière fois qu'il doit venir pour

7 être contre-interrogé. Normalement, si tout va bien - c'est ce que j'espère

8 - nous devrions terminer aujourd'hui, mais, pour le cas où il y aurait

9 nécessité pour Me Karnavas de prolonger son contre-interrogatoire, il

10 pourra le faire en début de l'audience de demain après-midi. Mais

11 connaissant les capacités de synthèse de Me Karnavas, je n'ai aucun souci

12 et je pense qu'il pourra peut-être terminer aujourd'hui.

13 Je vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir aller chercher le témoin

14 qui doit attendre d'ailleurs depuis plusieurs jours sa venue.

15 Je profite pour remercier les avocats qui nous ont donné les documents

16 qu'ils comptent introduire tout à l'heure avec donc les notes "post-it"

17 avec les numéros, ce qui va nous permettre de suivre facilement le contre-

18 interrogatoire.

19 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

20 LE TÉMOIN : WILLIAM TOMLJANOVICH [Reprise]

21 [Le témoin répond par l'interprète]

22 M. LE JUGE ANTONETTI : D'après ce que j'avais compris pour les

23 avocats de M. Pusic ils avaient besoin encore de 25 minutes, et

24 Me Nozica de 20 minutes, puis après, Me Karnavas aura tout le temps.

25 Bien. Bonjour, Monsieur. Oui.

26 Maître Ibrisimovic.

27 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

28 n'avons pas de questions à poser à ce témoin et j'en ai averti le conseil

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1 de la Défense de M. Prlic, s'ils veulent bien, ils peuvent toujours

2 profiter de ce temps.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Bien, donc, Maître Ibrisimovic, j'ai compris

4 que vous ne vouliez pas poser de questions à ce témoin. Vous avez terminé

5 votre contre-interrogatoire.

6 Alors, Maître Nozica.

7 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

8 Messieurs les Juges. Si vous me le permettez, je voudrais demander que mon

9 confrère Karnavas soit le premier à entamer le contre-interrogatoire. Je

10 crois qu'il serait correct d'entendre quelqu'un entamer le contre-

11 interrogatoire de le faire en premier. Je me réserverai ces 25 minutes à la

12 fin.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'est 25 minutes totalement égales. Alors,

14 Maître Karnavas, vous avez donc la parole puisque vous intervenez.

15 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

16 Messieurs les Juges.

17 Contre-interrogatoire par M. Karnavas :

18 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Bonjour à tout le monde.

19 Je suppose que la semaine dernière, pendant que

20 M. Galbraith était là pour déposer, vous n'avez pas suivi le procès ?

21 R. Non.

22 Q. Je suppose que vous n'avez pas vérifié le compte rendu d'audience pour

23 voir ce qui y est entré ?

24 R. Non.

25 Q. Très bien. Avant d'entamer, avant de commencer, je voudrais voir avec

26 vous pourquoi exactement vous avez préparé le rapport et de quoi vous êtes

27 compétent. Vous nous avez dit de quoi vous n'êtes pas expert. Vous avez

28 mentionné de nombreuses disciplines qui n'ont pas fait l'objet de vos

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1 études. Maintenant, je vous prie de nous dire concrètement, en matière du

2 procès qui est le procès pendant, en quoi êtes-vous et de quoi êtes-vous

3 expert ?

4 R. D'abord, nous devons faire une distinction entre expert dans un sens

5 juridique et un expert qui est tout simplement versé dans un sujet dans

6 certaines disciplines.

7 Q. Mes questions ont été tout à fait concrètes. Ne parlez pas maintenant

8 de ce qui serait expert du point de vue juridique, et cetera. Dites-nous en

9 quoi, de quoi vous êtes expert ici.

10 R. La plupart du temps, ces derniers temps, sept ans et demi, je me suis

11 occupé d'éléments de preuve qui, entre autres, concernent les questions.

12 Q. Vous voulez dire questions touchant au HVO, HB HZ ?

13 R. Oui, pour parler de structures, de pouvoir des autorités et de

14 processus en la matière.

15 Q. Vous êtes donc expert en la matière ?

16 R. Oui.

17 Q. Cela veut-il dire également que vous vous êtes penché aussi sur les

18 documents constitutifs, c'est-à-dire les documents de base telle la

19 constitution ?

20 R. A quelle constitution faites-vous référence ? La Herceg-Bosna n'avait

21 pas de constitution à elle.

22 Q. Je le sais. Je sais qu'il n'y avait pas de constitution en Herceg-

23 Bosna, mais il y avait en Bosnie-Herzégovine une constitution.

24 R. Oui.

25 Q. Vous êtes-vous penché sur la constitution de la Bosnie-Herzégovine à ce

26 sujet ?

27 R. Oui, je me suis occupé de la constitution de Bosnie-Herzégovine de 1974

28 et d'une manière générale, non pas pour préparer le présent rapport.

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1 Q. Vous a-t-on dit de ne pas le faire ?

2 R. Non. Personne ne m'a donné aucune instruction à ce sujet.

3 Q. Fort bien. Vous nous dites que vous avez reçu des instructions en cette

4 matière-là, à savoir ce qui vous convenait de faire. C'est le bureau du

5 Procureur qui vous a dit qu'il s'attendant à tel ou tel rapport, ce que

6 vous avez dû préparer, ou bien vous a-t-on laissé libre choix, carte

7 blanche, oui ou non ?

8 R. Je ne peux pas répondre par oui ou non parce que votre question est

9 fort complexe.

10 Q. Bon on va la découper un petit peu cette question. Vous a-t-on dit au

11 bureau du Procureur ce que vous avez dû faire et ce sur quoi vous deviez

12 surtout plancher ?

13 R. Non.

14 Q. Alors --

15 M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, ralentissez. Les interprètes ont du

16 mal à vous suivre.

17 M. KARNAVAS : [interprétation]

18 Q. Donc, le bureau du Procureur vous a dit que vous avez dû réduire votre

19 rapport à une centaine de pages ?

20 R. Excusez-moi, je voulais répondre à l'autre question, mais vous m'avez

21 interrompu. On m'a dit d'essayer de tenter de faire un rapport aussi bref

22 que possible pour ne pas aller au-delà d'une centaine de page, ce que je

23 n'ai pas pu faire. Le rapport s'est étalé à plus de 100 pages. Voilà à peu

24 près les idées que j'avais reçues.

25 Q. Il vous a fallu donc produire 200 pages ? Le bureau du Procureur vous

26 avait dit que vous ne deviez pas faire un rapport d'expert de 200 pages ?

27 R. Non.

28 Q. Vous a-t-on demandé, lors de vos préparatifs, pour nous donner qu'une

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1 vue d'ensemble à l'intention de la Chambre de première instance pour qu'on

2 sache de quoi il s'agit, le HZ, le HVO, et cetera. Ou vous a-t-on dit que

3 vous avez dû faire entrer toutes les prémisses, et cetera ?

4 R. On m'a dit d'éviter toute suggestion ou toute prémisse qui ne devrait

5 pas, évidemment, être retrouvée dans le document auquel je me réfère. Pour

6 ce qui est de la première partie de votre question, on m'a dit de présenter

7 à l'intention des Juges une description de base, un tableau de front de

8 toutes les structures des organes et des processus en cours.

9 Q. Est-ce que vous avez évitez de porter des jugements de valeur ?

10 R. Des jugements qui ne sont pas fondés sur des documents, oui, je les ai

11 évités.

12 Q. Bon, il s'agit donc de jugements d'opinion personnelle qui sont les

13 vôtres ?

14 R. Oui, ces opinions-là qui ne pouvaient pas être fondées sur des éléments

15 de preuve dont je m'occupais lors de la préparation.

16 Q. Bon. Vous dites, par exemple, un petit Etat ou para-Etat HZ HB, et vous

17 avez dit que c'était un para-Etat. Est-ce -- vous pouvez répondre par oui

18 ou par non ou je ne sais pas.

19 R. Il s'agit d'une expression.

20 Q. S'il vous plaît, vous avez soutenu un doctorat à Yale, vous avez passé

21 des examens, vous savez très bien quand il faut répondre aux questions,

22 essayons d'abréger l'histoire. Oui ou non, s'agit-il vraiment d'une opinion

23 ou pas ?

24 R. Il s'agit de faire une présentation, caractérisation, pour ainsi dire,

25 l'expression qui était la mienne.

26 Q. Est-ce bien une opinion ?

27 R. Tout dépend de ce que vous entendez par opinion. Il s'agit d'une

28 question d'ordre sémantique.

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1 Q. Fort bien. S'il s'agit évidemment d'un canard qui fasse des coins coins

2 ou qui est en train de nager ou quoi, est-ce qu'il s'agit de dire que ce

3 n'est plus un canard ?

4 R. Bon, d'accord, oui, ce serait une opinion.

5 Q. Dites-nous, quelle est votre définition d'un Etat avant de passer à un

6 petit Etat ?

7 R. Un Etat est censé avoir plusieurs attributions.

8 Q. Cela se fonde-t-il uniquement sur votre opinion ou sur des sources que

9 vous vous préparez à citer ?

10 R. Non. Il ne s'agit pas de faire des références et de citer, on ne me l'a

11 pas demandé. Lorsque des experts en constitutionalité vous le demande, on

12 demande de voir sur quoi tout cela se fonde.

13 Q. Est-ce que vous avez cherché une définition d'Etat ? Peut-être que vous

14 avez surfé sur l'Internet, Google, ou quelque chose que tout comme un

15 laïque, comme nous autres, vous pensez être un Etat, en ce moment-ci ?

16 R. Je pourrais peut-être l'expliquer si on fait un petit peu marche

17 arrière.

18 Q. En une phrase ou deux, avez-vous eu une définition de l'Etat sous vos

19 yeux ? Si oui, quelle en est la base, quels en sont les principes, ou est-

20 ce que vous les avez cherchés, ces principes. Est-ce que vous avez

21 rencontré des experts en matière de constitution ? Avez-vous lu des livres

22 là-dessus ?

23 R. Non. La seule chose, des ouvrages consultés par moi lorsque nous

24 parlons d'Etat ou de petit Etat ou para-Etat, il s'agit de connaissances

25 que j'ai pu acquérir ici, dans l'ordre de la pratique. Ce qu'on attribue à

26 ce qui est convenu à être comme un Etat, on ne m'a pas demandé, évidemment,

27 d'en déduire des conclusions d'ordre constitutionnelles.

28 Q. Question de ralentir un peu, essayons de condenser -- enfin, on ne peut

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1 pas condenser quatre journées de contre-interrogatoire, ce que nous voulons

2 faire maintenant. Est-ce que vous allé vous mettre d'accord avec moi pour

3 dire qu'il s'agit d'un terme un petit peu artistique ?

4 R. Etat ou para-Etat ?

5 Q. Les deux. Ici, vous vous en servez comme étant ce terme-là.

6 R. Je peux vous dire pourquoi.

7 Q. Lorsque je voudrai savoir le pourquoi de cela, je vous poserai la

8 question là-dessus. Vous utilisez ce terme comme étant un terme technique,

9 n'est-ce pas, le terme d'Etat, non ? Si vous ne voulez pas répondre, peut-

10 être pas dire ni "oui" ni "non", dites "peut-être."

11 R. Tout dépend de ce que vous appelez terme technique. Tout peut-être être

12 intitulé comme étant un terme technique si on use de ce terme.

13 Q. Est-ce qu'en ce moment-là, vous n'usez pas ce terme-là comme étant un

14 terme technique, petit Etat ou para-Etat ? Est-ce que ce n'est pas dans cet

15 ordre idée que vous l'employez ? Il doit y avoir une raison, si oui.

16 R. Je ne sais pas si un terme technique est censé avoir une signification

17 juridique.

18 Q. Bon, on s'en occupera, je m'en occuperai. On vous a posé une question

19 concernant les structures, M. le Juge Trechsel vous a posé des questions

20 là-dessus, et ce que vous avez fait entrer dans le cadre de ce terme.

21 R. Oui, je m'en souviens.

22 Q. La question vous a été posée par le Juge lorsqu'il a dit que vous avez

23 eu pratiquement les mains libres ce qu'il vous convenait de faire.

24 R. Je ne dirais pas dans ces termes-là. En effet, on a essayé de définir

25 ce que je devais décrire.

26 Q. Mais, M. Scott ne vous a pas évidemment demandé de faire entrer ceci ou

27 cela dans votre rapport.

28 R. Certainement pas.

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1 Q. Bien. J'ai été pratiquement surpris et sidéré de voir que ceci n'a pas

2 été fait, et nous devons en parler dans cette lumière-là de ce rapport.

3 Pourquoi ? On vous a demandé de préparer ce rapport au mois de novembre

4 2005, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Bon. Pendant six années entières vous y travaillez sur ce rapport, le

7 rapport auquel on s'attendait de votre part ?

8 R. Oui. Oui. Même plus de cinq, six ans.

9 Q. Vous avez eu la possibilité évidemment de connaître de quoi il s'agit

10 pour ce qui est des faits dans le cadre de ce procès ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous avez peut-être pu avoir des conversations ?

13 R. Oui, à trois reprises.

14 Q. Même à des réunions où une stratégie devait être fixée.

15 R. Oui.

16 Q. Vous saviez également en quoi consistait la théorie du bureau du

17 Procureur dans le cas de ce procès parce que vous avez vous-même en partie

18 pris part au modelage de l'acte d'accusation ?

19 R. Pour parler de la première partie de votre question, je savais en

20 général comment se présentait la théorie du bureau du Procureur, mais pour

21 descendre dans les détails, pour ce qui est des crimes, et cetera --

22 Q. On n'en parle pas encore. On parle de petit Etat. C'est le moins qu'il

23 y a lieu maintenant ici de parler de théorie et de stratégie, on en a parlé

24 de petit Etat sans entrer dans le détail des thèses du Procureur.

25 R. Non, je ne connaissais pas les arguments de l'Accusation, même si ce

26 n'est pas tout à fait le terme que j'utiliserais.

27 Q. Mais vous saviez que cela faisait partie de la théorie de l'Accusation.

28 D'ailleurs, vous n'avez pas besoin, je vous le rappelle, de lire le compte

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1 rendu d'audience. Vous comprenez l'anglais, n'est-ce pas ? Donc, je suppose

2 que vous pouvez me suivre sans regarder l'écran.

3 R. Je ne suis pas sûr de bien comprendre la dernière partie de votre

4 question au sujet de la façon dont je suis les débats.

5 Q. Vous ne comprenez pas mon anglais ? Vous avez besoin de le lire ? Je

6 suis du "mid-west", il n'y a pas trop de problème d'accent.

7 R. J'ai déjà dit que je suivais.

8 Q. Bien. Avançons. Au milieu de votre rapport écrit -- alors que vous

9 étiez arrivé au milieu de votre rapport écrit, l'Accusation s'apprêtait à

10 modifier l'acte d'accusation, n'est-ce pas ? Elle l'a effectivement fait.

11 R. Cela, je ne le sais pas.

12 Q. Vous ne savez pas que l'acte d'accusation a été modifié ?

13 R. Je vais réfléchir.

14 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, le compte rendu

15 indiquera que l'acte d'accusation a été modifié bien avant que le rapport

16 ne soit préparé. C'est un fait qui peut être vérifié au compte rendu

17 d'audience.

18 M. KARNAVAS : [interprétation] Bon, j'accepte. J'admets.

19 Q. Mais quand vous vous êtes mis à table pour écrire votre rapport, est-ce

20 que vous avez lu par hasard l'acte d'accusation ?

21 R. Non.

22 Q. D'accord. Mais vous saviez ce qu'il contenait ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous saviez que l'Accusation qui se tient ici face à nous affirmait que

25 l'Herceg-Bosna, à moins qu'on ne l'appelle la HZ HB, ou HR HB, donc, qu'il

26 s'agisse de la Communauté croate ou de la République croate d'Herceg-Bosna,

27 il était un para-Etat ou un pseudo-Etat ?

28 R. Oui, c'est un fait.

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1 Q. Bien, d'accord. J'aimerais que nous revenions un peu en arrière. Dites-

2 nous, Monsieur, à votre avis, qu'est-ce qui fonctionnait dans l'Etat de

3 Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat ?

4 M. SCOTT : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Cela sort du

5 champ du rapport. Le témoin n'a pas été invité à travailler sur l'Etat

6 existant de Bosnie-Herzégovine, il a été prié très précisément de fournir

7 un rapport sur les structures et le fonctionnement du HVO et de l'Herceg-

8 Bosna. Rien dans ce qui lui a été demandé ne visait l'aspect plus général

9 de l'Etat de Bosnie-Herzégovine.

10 M. KARNAVAS : [interprétation] Je traiterais de cela dans le même sens que

11 ce qu'a fait la Défense du IIIe Reich. Il ne faisait que respecter les

12 ordres. Mais comment est-ce qu'on peut qualifier quelque chose de para-Etat

13 ou de pseudo-Etat au sein même d'un autre Etat ? Comment peut-on prétendre

14 qu'on est objectif ? Dans le cadre d'un interrogatoire principal, il a dit

15 que, lorsqu'il était interrogé sur le contexte, il était objectif et que

16 son but n'était que de démontrer des faits, alors qu'il semble totalement

17 ignorant sur l'existence de cet Etat ?

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur le Témoin, vous avez entendu. M.

19 Scott vous a demandé si vous pouviez lui répondre sur l'Etat de la Bosnie-

20 Herzégovine, comment cela marchait. M. Scott s'est levé pour faire une

21 objection en disant que cela ne rentrait pas dans le cadre de votre

22 expertise. Alors, est-ce que vous êtes en mesure de répondre ? Parce que

23 vous êtes quand même quelqu'un qui a fait des études très importantes. Vous

24 êtes un expert, vous êtes qualifié d'expert. Donc, est-ce que votre niveau

25 de connaissance vous permet de répondre à la question de Me Karnavas ?

26 Votre réponse pourrait être utile pour les Juges : tout ce qui se lit ici

27 est toujours utile à la condition, bien entendu, que cela soit bien ciblé.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Si je me souviens bien, Me Karnavas a

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1 posé plusieurs questions dont j'ai quelques-unes en mémoire et auxquelles

2 je peux répondre sur la base des connaissances que j'aie acquises dans le

3 cadre de mon travail sur d'autres affaires, mais pas sur les documents que

4 j'aie examinés pour la préparation de ce rapport.

5 M. KARNAVAS : [interprétation]

6 Q. Donc, cela n'est pas contenu dans votre rapport. Rien dans votre

7 rapport ne traite des instruments d'Etat, n'indique que l'Etat fonctionnait

8 ou ne fonctionnait pas, pas plus que la façon dont cet Etat aurait pu

9 évoluer vers un para-Etat ou un pseudo-Etat ?

10 R. Non. On ne m'a pas demandé d'examiner le gouvernement de Bosnie-

11 Herzégovine.

12 Q. Je vous pose une question concrète, Monsieur. Cela ne figure pas dans

13 votre rapport, n'est-ce pas ? C'est la réponse que vous faites ?

14 R. Non. Ma réponse est non et je l'ai déjà faite d'ailleurs.

15 Q. Bien, cela ne figure pas dans votre rapport. Pouvez-vous nous dire ce

16 qui fonctionnait en Bosnie-Herzégovine à l'époque en question ?

17 R. Eu égard aux organes de la République de Bosnie-Herzégovine, il importe

18 d'abord de distinguer entre ce qui fonctionnait, ce qui fonctionnait bien

19 et ce qui fonctionnait en d'autre lieux.

20 Q. Ecoutez, revenons à la question. Qu'est-ce qui fonctionnait dans cet

21 Etat ? Je sais, je ne sais pas ou j'ignore totalement.

22 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois,

23 j'interromps car je vais redire ce que j'aie déjà dit. Je continue à dire

24 que Me Karnavas est en train de demander au témoin de spéculer hors du

25 champ fixé pour le rapport qu'il a rédigé en lui demandant de répondre à

26 des questions auxquelles il n'est pas prêt à répondre et sur lesquelles il

27 n'a effectué aucun travail de recherche.

28 M. KARNAVAS : [interprétation] Le point que j'évoque ne fait l'objet

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1 d'aucune contestation.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Témoin, vous venez de dire que vous

3 pouvez répondre sur ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas.

4 Donc, c'est important pour nous de savoir ce qui fonctionnait et ce qui ne

5 fonctionnait pas. Alors, dites-nous : qu'est-ce qui fonctionnait dans

6 l'Etat de la Bosnie-Herzégovine ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un aspect très vaste de la question, mes

8 connaissances à ce sujet ne peuvent être que très vagues et très générales.

9 D'abord, je sais que s'agissant des organes de l'Etat, il y avait la police

10 et la police militaire qui fonctionnaient avec un grand succès sur tout le

11 territoire, à savoir qu'elles étaient en mesure d'exercer leur contrôle sur

12 l'ensemble du territoire.

13 S'agissant maintenant de la banque centrale et de son fonctionnement, je ne

14 sais pas grand-chose sur ce sujet.

15 M. KARNAVAS : [interprétation]

16 Q. Est-ce que vous savez quelque chose ?

17 R. Si vous me permettrez de répondre. S'agissant de la banque centrale, la

18 raison pour laquelle je n'ai pas répondu c'est que je sais bien que

19 l'Accusation aille citer des -- au moins financier, un expert en finances.

20 M. SCOTT : Je ne vous demande pas.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Financier.

22 M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

23 Objection. Donnez-moi encore trois ou quatre jours si le témoin veut

24 poursuivre dans ce sens. Car je vois que le témoin se comporte comme

25 quelqu'un qui dit, je ne fais que respecter les ordres. Je lui demande s'il

26 existait une banque centrale qui fonctionnait et la réponse est "oui" ou

27 "non". C'est important de savoir si, dans d'autres régions du pays, les

28 municipalités devaient se battre comme elles pouvaient sans aucune aide

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1 extérieure pour mettre au point un système fonctionnant. Alors, quand je

2 lui pose une question sur une de ses déclarations, il faut que cette

3 déclaration ait un sens tout de même. Il devrait savoir pourquoi il a

4 utilisé ce terme.

5 M. SCOTT : [interprétation] D'abord, la structure que

6 Me Karnavas est en train de vous présenter est totalement fausse.

7 Me Karnavas souhaite marquer un point, point qu'il a déjà avancé

8 précédemment dans les débats. Il essaie de plaider sa cause dans le cadre

9 de son argumentation pour indiquer pourquoi l'Herceg-Bosna a fait ce

10 qu'elle a fait. Mais ceci n'a rien à voir avec le sujet et j'indique au nom

11 de l'Accusation que M. Tomljanovich n'a pas été invité à exprimer des

12 conjectures en sortant du champ de son rapport. C'est impossible. Comme si

13 on interrogeait n'importe lequel à l'extérieur de cette salle qui vous

14 dirait n'importe quoi au gré de ces fantaisies. C'est donc tout à fait

15 injuste de la part de

16 Me Karnavas de dire que, d'une façon ou d'une autre, ces sujets devaient

17 faire partie de son rapport. Le témoin a été invité à présenter un rapport

18 sur les structures, les processus gouvernementaux existant en Herceg-Bosna,

19 et lui demander quelles étaient les instances fonctionnant en Bosnie-

20 Herzégovine à cette époque, n'a aucun rapport.

21 Donc, je fais objection le plus fermement qui soit. Me Karnavas devrait

22 mieux savoir quelle est sa tâche ? En tout cas, face à moi. Donc,

23 objection, Monsieur le Président.

24 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien.

25 M. SCOTT : [interprétation] Je m'objecte à cela.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis du côté de la Défense. Je m'attaque

27 à cette défense consistant à dire : je n'ai fait qu'obéir aux ordres. Vous

28 l'avez entendu au moins trois fois. Alors, si vous me le permettez,

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1 j'aimerais répondre très certainement à l'Accusation.

2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Karnavas, est-ce que vous ne

3 confondez pas un peu plusieurs choses ? L'homme qui est présent ici est un

4 témoin. Ce n'est pas un accusé.

5 M. KARNAVAS : [interprétation] Il est un employé.

6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] A mon avis, votre comparaison

7 lorsque vous parlez de défense du IIIe Reich, vraiment, cela est inadapté.

8 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge, je crois que nous avons

9 entendu cette défense à plusieurs reprises et, chaque fois que ce monsieur

10 ne veut pas répondre, il dit que sa réponse que sur le champ de son

11 rapport. Mais penchons-nous sur ce rapport, s'il n'y avait l'expression du

12 moindre d'avis dans son rapport, s'il n'y avait que des citations de ce qui

13 existe dans la législation, cela ne me poserait pas de problème, mais, à

14 partir du moment où il parle de déclaration et où il dit qu'il s'agissait

15 d'un pseudo-Etat, c'est une conclusion, un avis qu'il exprime et cela ouvre

16 la porte pour moi et je dois pouvoir lui poser des questions à ce sujet. Il

17 aimerait que vous croyez comme l'Accusation d'ailleurs que ceci est un

18 rapport objectif et je prends -- j'ose affirmer que ce n'est pas le cas,

19 donc, je demande simplement à pouvoir lui poser cette question, car di

20 cette conclusion est tirée de sa part il faut qu'il explique pourquoi ?

21 Quant à ma conclusion je dirais qu'elle consiste à dire que ce témoin n'est

22 pas objectif qu'il est partial et qu'il a donc pris partie. Comment est-ce

23 qu'on peut tirer des conclusions sans les inclure dans un contexte

24 historique ? Un contexte, il faut bien qu'il y en ait un. Or c'est

25 exactement ce qu'il fait. Il veut que nous pensions que le système

26 financier mis en place par l'Herceg-Bosna avait pour but de fimbociter

27 [phon] l'ensemble de la région.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous n'allons pas passer tout notre temps que

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1 l'intervention de M. Scott et Me Karnavas, alors qu'on a un témoin. Je vais

2 recadrer juridiquement la question.

3 L'article 90 du Règlement est très précis. C'est l'article 90(H)(ii) et il

4 dit ceci et écoutez bien : "Lorsqu'une partie contre-interroge un témoin" -

5 c'est le cas, c'est ce que fait Me Karnavas - "qui est en mesure de déposer

6 sur un point ayant clair sa cause," donc, Me Karnavas a dans l'idée de

7 démontrer que la République d'Herceg-Bosna était la seule en état de

8 répondre au fonctionnement d'un Etat -- la partie doit le confronter --

9 confronter au témoin aux éléments dont elle dispose qui contredisent ces

10 déclarations.

11 Donc, on est dans la situation où Me Karnavas veut contre-interroger

12 le témoin sur le fonctionnement tel qu'il a décrit de la Herceg-Bosna et

13 par rapport au fonctionnement de l'Etat de la Bosnie-Herzégovine et il doit

14 aborder la question de la banque centrale. Je rappelle que cette question

15 de la banque centrale nous l'avons évoquée ici même. C'est une question qui

16 a déjà été débattue.

17 Le témoin où il peut répondre ou il ne répond pas : "Yes", "no",

18 "maybe", et cetera. C'est au témoin de répondre, et c'est beaucoup plus

19 utile que de perdre son temps à des objections qui ralentissent le cours.

20 Les Juges verront très bien si le témoin est apte ou inapte, alors, il a

21 des connaissances au fonctionnement d'une banque centrale ou il n'en a pas.

22 S'il a travaillé sur les structures du HVO, de la République Herceg-Bosna,

23 il a dû également se poser des questions sur le fonctionnement et ces

24 rapports avec le fonds monétaire international avec le dinar, la

25 convertibilité, et cetera. Alors, oui, il l'est -- ou il est capable d'y

26 répondre ou pas. Bien. Alors, Maître Karnavas, poursuivrez, mais je

27 rappelle, Maître Karnavas, que vous devez confronter les déclarations du

28 témoin par rapport aux éléments que vous disposez qui contredisent ce qu'a

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1 pu, le cas échéant, dire le témoin dans son rapport d'expert.

2 On est bien d'accord. Alors, poursuivez. J'invite les uns des autres

3 de garder leur calme.

4 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Bien. Nous allons reprendre pas à pas. Dans votre rapport, vous

6 n'expliquez pas le rapport de cause à effet entre les événements survenus

7 durant la guerre et les diverses activités des parties belligérantes.

8 R. Bien, au risque d'être comparé au Nazis, je dirais que je ne croyais

9 pas que c'était quelque chose que je devais faire, donc, je ne l'ai pas

10 fait.

11 Q. D'accord. S'agissant de la méthode que vous avez utilisée, et en

12 admettant que puisque vous l'avez déjà défini, à plusieurs reprises. Nous

13 savons quelle était la mission qui vous avait été confiée par le Procureur.

14 Vous continuez donc à dire, dans ce contexte, que votre rapport est dans

15 l'ensemble objectif : "oui", "non", ou "peut-être".

16 R. Oui, il l'est. J'ajouterais que je n'avais pas l'intention de présenter

17 l'ensemble de la cause.

18 Q. Vous nous l'avez déjà dit et vous nous l'avez déjà dit et je n'ai pas

19 besoin de sous titre. Nous avons entendu vos justifications. Puisque le

20 fait que vous vous soyez concentré uniquement sur le HVO dans votre rapport

21 n'est pas une absente de contexte en laissant de côté complètement les

22 actes des autres et notamment les actes des Serbes, de Musulmans, des

23 représentants médiateurs ou autres observateurs des Nations Unies et de la

24 Communauté européenne, et cela ne fait pas une absence de contexte ?

25 R. Bien, il y avait beaucoup, beaucoup de choses que j'ai dû laisser de

26 côté --

27 Q. Monsieur, je vous prie.

28 R. Pour pouvoir -- déjà un rapport présentable dans une seule semaine.

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1 Q. Oui ou non, c'est exactement ce que je vous demande, est-ce que vous

2 avait demandé le Président de cette Chambre ? Sinon, nous allons encore

3 attendre toutes vos justifications en long et en large et à travers au

4 sujet de l'absence des contextes. Est-ce que vous vous n'êtes pas

5 uniquement concentré sur le HVO comme si rien d'autre n'existait aux

6 alentours ?

7 M. SCOTT : [interprétation] Objection à la forme de la question ce qui se

8 passait ailleurs n'avait rien à avoir la structure du HVO ou le fait de

9 savoir si la structure du HVO se composait d'une branche exécutive et d'une

10 branche HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna ou s'il y avait des

11 échanges de service entre le président à Sarajevo et les autres

12 représentants ?

13 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais poursuivre, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un instant, Monsieur Karnavas. Je comprends

15 que, lorsqu'un expert avait une mission sur un sujet la moindre des choses

16 étaient quand même pour l'expert d'étudier le sujet en question, mais de

17 voir également ce qui se passe à l'extérieur parce qu'une expertise doit

18 être complète et non pas sur une seule facette, bon, enfin, c'est comme

19 cela qu'un expert travaille.

20 Prenons un exemple. Si un expert en médecine tropicale, s'il a étudié les

21 effets de la piqûre d'un moustique en Afrique, il va quand même peut-être

22 se poser la question des piqûres d'un moustique en Amérique du sud.

23 Poursuivez, Maître Karnavas.

24 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, merci, Monsieur le Président.

25 Q. Monsieur, est-ce que vous ne citez pas de façon très sélective dans

26 votre rapport un certain nombre de passages, des transcripts présidentiels

27 en particulier ? "Oui" ou "non" ?

28 R. Ecoutez, vous m'ôter les mots de la bouche parce que, si vous m'imposez

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1 de répondre par "oui" ou par "non", j'ai besoin d'au moins une phrase.

2 Q. Est-ce que vous n'avez pas cité sélectivement des parties très précises

3 des transcripts présidentiels ? Vous pouvez y répondre ?

4 R. Oui, j'ai utilisé sélectivement certains passages de ce texte.

5 Q. Ne pensez-vous pas qu'en agissant ainsi, vous déformez quelque peu les

6 passages citez ?

7 R. Non, parce que --

8 Q. Puisque vous ne les replacez pas dans leur contexte.

9 R. Est-ce que je peux finir ma réponse ?

10 Q. Non. Ne voyez-vous pas que peut-être vous citez quelque chose hors de

11 son contexte en vous contentant de choisir sur plusieurs centaines de pages

12 de transcripts présidentiels à un passage déterminé ?

13 R. Non, parce que je sais ce que je ne cite pas. Je connais très bien le

14 contexte dans son intégralité.

15 Q. Très bien, très bien. Ecoutez, je ne voudrais pas me laisser emporter.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Une autre question. Me Karnavas vous a posé une

17 question sur les transcripts présidentiels. Quand, dans votre rapport, vous

18 citez une partie du transcript, j'ose espérer que vous avez lu

19 l'intégralité du transcript ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, et à plusieurs reprises, pour ce que j'ai

21 cité, j'en ai vu d'autres également pour me préparer à d'autres procès et

22 j'ai examiné l'index général de ces transcripts, donc je les ai tous eu

23 sous les yeux, à plusieurs reprises.

24 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Q. Je ne voudrais pas passer trop de temps sur cette question, mais vous

26 citez, n'est-ce pas, un passage du transcript présidentiel du 17 septembre

27 1992 ?

28 R. Oui.

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1 Q. J'ai remarqué que toutes les pages de ce transcript présidentiel

2 n'avaient pas été soumises à la traduction. Y a-t-il une raison

3 particulière à cela ? En d'autres termes, les passages traduits se limitent

4 à ceux que vous-même ou quelqu'un au bureau du Procureur estimait

5 nécessaire de faire traduire, ce n'est pas l'intégralité du texte.

6 R. Oui, je peux répondre à cette question. Ceci est dû principalement à

7 des raisons matérielles car nous sommes en possession à l'heure actuelle de

8 plus de 65 ou 66 --

9 Q. Vous nous avez déjà parlé de ces problèmes matériels.

10 R. Oui.

11 Q. Mais, en tout cas, vous citez un transcript présidentiel du 17

12 septembre 1992 et les pages omises sont au moins une cinquantaine.

13 Notamment, je rappelle, il s'agit de la pièce à conviction P 00498. Je suis

14 curieux de savoir quelles sont les personnes ou la personne qui a choisi

15 les parties de ce transcript qu'elles convenaient de ne pas faire traduire,

16 autrement dit, qui risquent de contenir des renseignements exculpatoires,

17 donc, favorables à la Défense.

18 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, objection, car le témoin

19 a déjà indiqué et démontré dans ce prétoire, à plusieurs reprises, qu'il

20 lisait par le B/C/S. Donc, il a lu tous ces textes.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas la question, Monsieur le

22 Président.

23 M. SCOTT : [interprétation] Donc, que ces documents aient été traduits ou

24 pas n'a pas d'importance.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : [chevauchement] -- de Me Karnavas que, par rapport

26 au transcript, il y aurait entre 50 et 60 % qui auraient été traduites et

27 vous expliquez pourquoi, c'est un problème de ressources. Mais alors, la

28 question qui vient, les pages qui n'ont pas été traduites en anglais, comme

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1 vous connaissez, vous, le B/C/S, est-ce que vous les avez lues en B/C/S ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le transcript dont nous parlons, je l'ai

3 lu à plusieurs reprises en B/C/S. Pour répondre aux questions déjà posées

4 par Me Karnavas, je dirais que ce sont des gens comme moi, divers analystes

5 qui peuvent lire les textes dans leur version originale qui ont décidé

6 quels étaient les passages à faire traduire et quels étaient les passages à

7 ne pas faire traduire car nous n'avions pas les moyens matériels de faire

8 traduire tous les passages.

9 M. KARNAVAS : [interprétation]

10 Q. Donc, c'est quelqu'un qui a les mêmes compétences que vous, qui parle

11 le B/C/S comme vous, qui choisissait les passages éventuellement à décharge

12 qui l'importait de ne pas faire traduire ?

13 R. Ce n'est pas vrai. Car l'article 68 du règlement s'applique en présence

14 d'éléments en décharge. Donc, il aurait fallu les faire traduire.

15 Q. Vous êtes censé savoir quel est le sens exact des documents relevant de

16 l'article 68 même si vous n'êtes pas juriste ?

17 R. Toute personne travaillant au bureau du Procureur est informée

18 fréquemment quant à la nature des documents relevants de l'article 68. Il

19 lui est même rappelé à plusieurs reprises qu'il convient de faire preuve

20 d'un grand soin dans l'examen des documents et dès lors qu'un document peut

21 relever de l'article 68, il faut qu'il soit porté à la connaissance de la

22 Défense.

23 Q. Sur ce sujet, le 17 septembre, si nous avons eu sous les yeux

24 l'intégralité du transcript relatif à cette journée plutôt que d'en avoir

25 uniquement des segments, le contexte de la conversation aurait été

26 déterminé, n'est-ce pas ? Je crois que vous conviendrez avec moi qu'il y

27 avait pas mal de personnes participant à la réunion ce jour-là ?

28 R. Pas mal, en effet. Je ne suis pas sûr de leur nombre, toutefois.

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1 Q. Il semblerait que tout le monde a eu la possibilité de faire valoir son

2 avis ?

3 R. Je ne suis pas sûr du fait que les personnes présentes à une réunion

4 s'expriment nécessairement toutes.

5 Q. Mais il y en a eu pas mal qui ont pris la parole.

6 R. Cela je n'en suis pas tout à fait sûr.

7 Q. Pas mal de personnes ont donné leur avis, en tout cas, cela revient, on

8 le voit reproduit dans le transcript ?

9 R. Oui.

10 Q. Très bien. Je pense que vous conviendrez avec moi que cette

11 conversation, cet entretien, portait sur le fond sur le problème des

12 Croates en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

13 R. La question de l'Herceg-Bosna et les éléments relatifs à cette

14 question, je ne dirais pas que cela a un rapport direct avec le problème

15 des Croates en Bosnie-Herzégovine.

16 Q. Bon, c'est certain ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous ne voulez pas présenter une fausse image à la Chambre de première

19 instance en disant que l'entretien en question a porté uniquement sur

20 l'Herceg-Bosna ? Je vous rappelle que vous êtes sous serment. Donc, dans le

21 cadre de cet entretien, de cette réunion, il a été question de la manière

22 de protéger les Croates de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

23 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une fausse piste

24 ici car l'intégralité des transcripts présidentiels sont bien connus, ils

25 ont été communiqués à la Défense il y a plusieurs années par rapport à

26 certain nombre d'accusés et d'autres avocats ont reçu également ces

27 documents intégraux. Donc, cela fait des mois et des années qu'ils ont peu

28 lire en B/C/S, en version originale, ces textes.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, il ne s'est appuyé que sur certains

2 passages qui avaient été traduits en anglais alors qu'il y a des passages

3 en B/C/S qui alimenteraient votre cause, alors, faites la démonstration.

4 Dites au témoin : voilà, telle page, voilà ce qui est écrit en B/C/S,

5 pourquoi vous ne l'avez pas évoqué, et cetera.

6 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons demander

7 le versement au dossier de l'intégralité du document, de tout le document.

8 Mais comme je suis limité par le temps et avec le respect que je vous dois,

9 je dirais que le temps qui m'a été imparti n'est pas réaliste par rapport à

10 la nécessité contre-interroger correctement un témoin comme celui-ci. Vous

11 pouvez hausser les épaules autant que vous voulez, mais je vous assure que

12 ce que je dis exact. S'il y avait moyen de procéder plus rapidement, je

13 voudrais le savoir, mais --

14 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Vous n'avez pas un exemple à partir

15 --

16 M. KARNAVAS : [interprétation] Je peux donner un exemple, je peux le faire,

17 Monsieur le Président.

18 M. KARNAVAS : [interprétation]

19 Q. Très bien. Penchons-nous sur ce qu'a dit Jozo Maric. Son intervention

20 commence -- un instant, je vous prie. A la page comportant le numéro ERN

21 01508795.

22 L'Accusation a arrêté la traduction à la page précédente en laissant de

23 côté donc les propos de Jozo Maric. Alors, cette introduction étant faite,

24 j'aimerais vous poser quelques questions préliminaires, Monsieur.

25 Savez-vous qui est Jozo Maric ?

26 R. Oui. C'est un responsable politique de la Communauté croate d'Herceg-

27 Bosna de Grude, si je me souviens bien. Il faisait également partie de la

28 commission chargée des échanges.

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1 Q. Très bien. Le document auquel nous faisons référence est la pièce 1D

2 00918, je l'indique pour le compte rendu d'audience.

3 Donc, Monsieur, vous avez dit avoir lu ce transcript à plusieurs reprises.

4 Vous rappelez-vous ce que préconisait Jozo Maric à cette époque-là ?

5 R. Non, de mémoire, non.

6 Q. D'accord. Regardons d'un peu plus près ce qui a été laissé de côté.

7 Numéro ERN de la page qui m'intéresse c'est 01508795.

8 Jozo Maric dit, au milieu de la page, et je vais le lire lentement, je cite

9 : "Je dis ce que je dis avant tout en raison de la nécessité d'assurer une

10 continuité historique. Ce qui m'intéresse en Bosnie-Herzégovine, c'est le

11 sort vécu par la population depuis 200 à 500 ans."

12 La page en question, c'est la page 1D 33-0032. Je poursuis la citation, je

13 cite : "Si nous sommes d'accord pour que subsiste une Bosnie-Herzégovine

14 intégrée, nous vivrons dans notre chair ce que les municipalités de Bosnie

15 centrale ont vécu depuis 30 ou 40 ans. Donc, en ayant une attitude

16 conciliante et en nous déplaçant constamment plus vers l'ouest, nous

17 avançons simplement, mais si ces zones font partie de nos municipalités à

18 venir, nous nous y fixerons et nous y investirons plus facilement. Nous

19 créerons des écoles, et cetera, et cetera."

20 Donc, dans le passage suivant, il est question de Livno. Si vous passez à

21 la page suivante, au milieu de la page suivante, il y a un paragraphe qui

22 commence par les mots suivants, je cite : "Par conséquent, pour l'avenir de

23 nos petits enfants et pour ceux qui voudraient revenir, je tiens à un

24 morceau du territoire. Je veux que ma part me soit rendue sans abandonner,"

25 - et j'insiste sur ce point - "sans abandonner la Bosnie-Herzégovine en

26 tant que telle, ce pourquoi on m'a souvent critiqué à tort."

27 Alors, s'il y a quelque chose qui devrait être présenté comme à décharge,

28 je ne sais pas ce qui peut être plus à décharge que ce passage que je viens

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1 de citer et qui n'a pas été traduit par ce témoin.

2 M. SCOTT : [interprétation] Non, nous n'allons pas autoriser la poursuite

3 de cette présentation déformée de la réalité car la cause de l'Accusation

4 s'appuie sur l'intégralité du document dont il a été demandé le versement

5 au dossier en tant que pièce à conviction

6 P 00498. Me Karnavas essaie maintenant de laisser entendre que l'Accusation

7 a utilisé sélectivement ce document. Nous avons demandé le versement au

8 dossier de l'intégralité du document.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Pas en anglais, Monsieur le Président, pas

10 en anglais.

11 M. SCOTT : [interprétation] Pour les raisons indiquées et le conseil peut

12 remédier à cela s'il le souhaite.

13 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien pour la vérité et la bonne foi de

14 l'Accusation.

15 M. SCOTT : [interprétation] Ceci est faux, Monsieur le Président, parce que

16 le témoin a déjà témoigné à plusieurs reprises en disant qu'il a lu

17 l'intégralité du transcript en B/C/S. Donc, tout ce que dit Me Karnavas,

18 s'agissant de -- c'est simplement sa parole contre celle du témoin et cela

19 n'a absolument pas la moindre pertinence. Le témoin a lu l'intégralité du

20 document en B/C/S, en version originale, le document a été versé au dossier

21 par l'Accusation dans son intégralité, donc les allégations de la Défense

22 ne tiennent pas.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un instant, Monsieur Karnavas, voilà comme

24 j'ai compris la situation. Il apparaît que, dans le transcript présidentiel

25 en B/C/S, apparaît l'intervention de M. Maric qui évoque un point relatif à

26 la Bosnie-Herzégovine et semble, je résume, en quelque sorte indiquer que

27 du côté croate, on appliquera les décisions et qu'on ne mettra pas des

28 bâtons dans les roues. Bon. Je résume, la Défense nous indique que si cela

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1 avait été traduit en anglais, les Juges en auraient eu connaissance et

2 auraient mieux apprécié le rapport de l'expert. Voilà toute la

3 problématique.

4 Alors, Monsieur, est-ce que cette intervention de M. Maric -- est-ce

5 qu'elle contredit la vision que vous aviez ? Qu'est-ce que vous en pensez ?

6 Non ? Vous dites non de la tête; alors, expliquez-nous ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ecoutez, en tant que -- de ce que je peux

8 voir du discours de M. Maric et de ce qu'on vient de m'en lire, c'est

9 exactement le raisonnement général, c'est-à-dire qu'ils ne voulaient pas

10 que les personnes, qui s'impliquent en Herceg-Bosna à l'époque, ne

11 voulaient pas justement d'un Etat bosniaque centralisé ou, comme ils le

12 disaient, en Etat unitaire de Bosnie-Herzégovine. Ils voulaient avoir la

13 haute main sur les affaires de leurs municipalités.

14 M. KARNAVAS : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le

15 Président, je voudrais continuer.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez, s'il vous plaît.

17 M. KARNAVAS : [interprétation]

18 Q. Encore une fois, "sans abandonner la Bosnie-Herzégovine," sans la

19 découper, sans l'annexer à la Croatie. A l'époque, Tudjman est déjà

20 président, n'est-ce pas ?

21 R. Vous nous dites "ils", au pluriel, n'en parlent pas. Je crois que c'est

22 un singulier, "il ne parle pas d'abandonner la Bosnie-Herzégovine." Je ne

23 sais pas ce qu'est le reste de cette citation, mais comme je l'ai déjà dit

24 à plusieurs reprises, et j'y reviens.

25 Q. Je sais que vous voulez faire durer l'affaire, mais je vous pose une

26 question très simple. Il dit ici : "Sans abandonner la Bosnie-Herzégovine."

27 Il le dit, "oui" ou "non" ? Est-ce que vous le reconnaissez ?

28 R. Cela ne m'étonnerait pas qu'il l'ait dit effectivement à ce point, à ce

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1 moment.

2 Q. Si l'on passe à la page suivante, 01508797 [comme interprété], c'est

3 donc la page suivante, au milieu de la page, au milieu du paragraphe plus

4 exactement. Je vais lire, je cite : "Je soutiens ce que quelqu'un a dit,

5 c'est-à-dire que tous les hommes en pleine forme de Bosnie-Herzégovine

6 devraient retourner, ceux qui se baignent au bord de la mer et qui se

7 promènent, puisqu'ils ont une obligation de défendre leur patrie, tout

8 comme ceux qui sont venus ici. Ils sont venus pour être garçons de café,

9 travailler ici ou là et s'échapper de chez eux."

10 Est-ce que, dans ce cas-là, on n'est pas en train de dire que les Croates

11 de Bosnie-Herzégovine devraient rentrer en Bosnie-Herzégovine pour défendre

12 leur patrie ? Est-ce que ce n'est pas ce qu'il est en train de dire ?

13 R. Oui, mais permettez-moi d'ajouter que quand il parle de la patrie, il

14 parle d'Herceg-Bosna, pas de Bosnie-Herzégovine.

15 Q. Oui, exactement. C'est ce qu'il est en train de dire et d'ailleurs on

16 l'entend dire parfois que les uns et les autres ont parti de Bosnie-

17 Herzégovine étaient des missionnaires, mais en fait ce que dit M. Maric

18 c'est qu'ils se baignaient et qu'ils faisaient toutes sortes de choses

19 inutiles, et qu'il vaudrait mieux qu'ils rentrent chez eux défendre la

20 Bosnie-Herzégovine ou l'Herceg-Bosna.

21 R. Ce que vous dites est tout à fait cohérent avec ce que je dis dans mon

22 rapport. Il y a, effectivement, un certain nombre de personnes qui étaient

23 cachées en République de Croatie et qui refusaient de prendre les armes. On

24 l'a vu dès octobre 1993, j'en fais mention dans mon rapport.

25 Q. Bien.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne voudrais pas m'étendre et prendre trop

27 de votre temps sur ce sujet, Monsieur le Président.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, juste un point. Vous venez de

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1 développer l'intervention de M. Maric et vous vous êtes appuyé sur cette

2 intervention pour contredire le témoin. Mais, dans les lignes directrices

3 que la Chambre avait fixées sur l'admission d'éléments de preuve, vous avez

4 indiqué que quand une partie veut contester un élément, il lui incombe de

5 fournir la traduction du texte. Donc, la traduction des propos de M. Maric,

6 vous l'avez faite en anglais, cette traduction ? Oui ?

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. C'est sous la cote 1D -- je reprends,

8 1D 00918. Nous avons fait traduire toutes les pages manquantes en anglais;

9 et ainsi, on a le transcript entier.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

11 M. KARNAVAS : [interprétation]

12 Q. On voit ultérieurement que M. Zoran Buntic tient un discours similaire.

13 Je ne veux pas m'étendre sur ce sujet, mais je voudrais vous poser une

14 question, Monsieur : si l'on lisait le transcript entier, qu'on le

15 replaçait dans son contexte, est-ce qu'on a bien un dialogue, un débat

16 entre toutes sortes d'interlocuteurs qui cherchent avoir réglé la question

17 croate de Bosnie-Herzégovine; est-ce que c'est bien l'état de ce débat ?

18 R. Je ne parlerais pas de la question croate de Bosnie-Herzégovine. Si

19 l'on me disait il y a tout un sous-entendu, mais, effectivement, je

20 reconnais qu'on parle, effectivement, de la situation des Croates de

21 Bosnie-Herzégovine.

22 Q. Donc, personne en fait ne parle d'annexer ces territoires à la Croatie

23 ou de procéder à un morcellement de la Bosnie-Herzégovine ? Les Juges

24 auront d'ailleurs accès ultérieurement à ce document.

25 R. Voulez-vous que je réponde ? Oui ? Je crois que personne ne propose

26 l'indépendance à ce moment-là.

27 Q. Encore une fois, on parle de cette conversation particulière. Suivez-

28 moi, essayez de me comprendre, répondez à mes questions. Au 17 septembre

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1 1992, ce n'est pourtant pas compliqué, dans ce débat-là, il est clair qu'il

2 ne cherche pas à morceler la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

3 R. Je vais essayer de travailler au mieux à vos côtés, Maître, mais ce qui

4 est certain, et encore une fois je voudrais résumer très rapidement ce qui

5 a été décidé --

6 Q. Je ne vous demande pas de résumés. Dites-moi, "oui" ou "non", si

7 quelqu'un propose de morceler la Bosnie-Herzégovine pour mettre en place un

8 pseudo-Etat, un para-Etat. Les Juges auront accès au transcript, ils

9 pourront décider d'eux-mêmes ultérieurement.

10 L'INTERPRÈTE : M. Scott parle sans micro.

11 M. SCOTT : [interprétation] Oui, je veux bien laisser répondre le témoin,

12 mais Me Karnavas devrait également laisser répondre son témoin.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur, la Défense vous demande, en se

14 fondant sur ce transcript du 17 septembre 1992 et, notamment,

15 l'intervention de M. Maric que, dans la traduction en anglais, cela

16 commence à la page 12; est-ce qu'il est évoqué par M. Maric un éventuel

17 démantèlement de la Bosnie-Herzégovine au profit de la Croatie ou au profit

18 de l'Herceg-Bosna ? Voilà, la question est simple. Qu'est-ce que vous en

19 pensez puisque vous l'avez lu ? Ou, comme semble suggérer Me Karnavas,

20 c'est tout le contraire qui est en train d'être dit ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, et peut-être que c'est un

22 problème de traduction, je crois que, Monsieur le Président, la question

23 que vous venez de me poser est légèrement différente de celle de Me

24 Karnavas. Si la question est de savoir ce que pensais

25 M. Maric, je répondrai tout d'abord que je ne me souviens pas de mémoire de

26 l'entièreté de son discours, mais, si vous me posez la question de savoir

27 quel était l'état général du débat et quelle était la conclusion générale,

28 là, c'est autre chose.

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1 M. KARNAVAS : [interprétation]

2 Q. Etes-vous en train d'essayer de suggérer que quelqu'un dans le débat

3 suggérait aux Croates de Bosnie-Herzégovine de faire sécession ou

4 démanteler la Bosnie-Herzégovine ? "Oui", "non", "peut-être", "je ne m'en

5 souviens pas." Vous avez quatre réponses possibles.

6 R. Parmi ces quatre réponses, je crois que je n'ai pas de réponse, mais,

7 si vous me donnez deux phrases, je peux y aller.

8 Q. Si on relit ces documents, est-ce que nous ou la Cour aura l'impression

9 que les Croates de Bosnie-Herzégovine débattent de la possibilité de

10 démanteler l'Etat de Bosnie-Herzégovine et de mettre en place leur pseudo-

11 Etat ou de se faire annexer par la Croatie ?

12 R. Ils sont en train de parler de leurs nouvelles institutions et de

13 mettre en place ce que j'appellerais un pseudo-Etat.

14 Q. Est-ce que c'est une question à terme technique lorsque vous parlez de

15 pseudo-Etat ? Est-ce que c'est un terme technique ? On a besoin dans, ce

16 cas-là, si cela en est un, d'une définition. Ou est-ce que c'est juste un

17 avis ? Est-ce un terme technique; "oui" ou "non" ?

18 R. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est une question

19 d'épistémologie plus que d'autre chose.

20 Q. Bien. Alors, continuons. Dans quelle mesure est-ce que l'Etat et les

21 autorités nationales étaient en mesure de payer les salaires au niveau

22 local ? Le savez-vous ou ne le savez-vous pas ? Si vous ne le savez pas,

23 dites-le-nous que vous savez pas, ne devinez pas.

24 R. J'imagine que les situations étaient variées.

25 Q. La question est simple : "oui" ou "non", étaient-ils en mesure de payer

26 les salaires des professeurs, des enseignants, des retraites, d'offrir les

27 services de base et nécessaires d'un Etat à ses citoyens ?

28 M. LE JUGE ANTONETTI : [chevauchement] -- des objections.

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1 D'après-vous, Monsieur l'expert, qui avez travaillé sur les documents

2 pendant des années, la question qui vous est posée, est-ce que la

3 République de Bosnie-Herzégovine était en état de payer aux enseignants,

4 puisque c'est l'exemple, leur salaire; le saviez-vous ? Vous ne le savez

5 pas ? Vous êtes incapable de répondre ? Voilà, c'est clair.

6 M. SCOTT : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire très

7 exactement : est-ce qu'on parle de payer les salaires à Sarajevo en 1992,

8 "oui" ou "non", et où ?

9 M. KARNAVAS : [interprétation] En dehors de Sarajevo.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- payer les salaires à Sarajevo ou, en dehors, dans

11 tout le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine ? Ou vous ne vous

12 êtes pas penché sur le problème, ce qui peut être aussi notre possibilité.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas examiné cette question

14 particulièrement, mais je peux vous donner mon opinion générale, Monsieur

15 le Président.

16 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, c'est une réponse que j'admets.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous ne vous êtes pas penché sur le

18 problème, mais vous pouvez donner votre opinion générale, alors c'est quoi

19 votre opinion générale ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] En termes génériques, je dirais qu'au début de

21 la guerre, des individus et pas seulement ceux des fonctionnaires, mais

22 toute sorte de personnes dans toute l'ancienne République de Yougoslavie,

23 et pas seulement Bosnie-Herzégovine, n'avaient leurs salaires payés que de

24 façon très épisodique et j'en serais donc très surpris de voir que tout le

25 monde recevait son salaire et que tout le monde le recevait en temps et en

26 heure puisque cela se faisait mal, en particulier au tout début de la

27 guerre.

28 M. KARNAVAS : [interprétation]

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1 Q. Bien. Dans la préparation de votre rapport, je vois que vous n'avez pas

2 examiné les propositions de paix et voir comment elles s'inséraient dans le

3 reste du contexte.

4 R. Effectivement, je pensais que ce n'était pas pertinent, je pensais que

5 les experts répondraient de vivo.

6 Q. Si je vous avais demandé si c'était pertinent ou pas, si j'avais voulu

7 le savoir, je vous aurais posé la question. Est-ce que vous avez examiné

8 cela ?

9 R. Oui, je devrais le prendre en compte dans le cadre général, dans le

10 contexte, mais la question n'était pas de donner aux Juges des informations

11 particulières sur les plans de paix.

12 Q. Vous parlez du cadre général, du contexte général. Est-ce que vous

13 pouvez me dire très exactement où, dans votre rapport, vous évoquez

14 l'éventualité des plans de paix ou de leur impact sur les événements sur le

15 terrain. Est-ce que vous en faites mention quelque part ?

16 R. Je crois que je l'évoque à au moins deux reprises, que j'évoque le plan

17 Vance-Owen avec la description des faits au premier semestre 1993 puisque

18 tout le monde en parlait en Herceg-Bosna et en Bosnie plus généralement à

19 l'époque. Il me semble que j'évoque le plan Owen-Stoltenberg à la fin de

20 1993 également.

21 Q. N'avez-vous pas oublié d'examiner de façon critique l'attitude des

22 Musulmans dans le fonctionnement des institutions de Bosnie-Herzégovine ?

23 M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est pas la question. Je le dis et je le

24 répète. Me Karnavas peut poser des questions au témoin qui n'aura pas

25 traité de questions qu'on lui pose. On n'a pas demandé à ce témoin

26 d'évoquer la question de l'administration par les Musulmans mais plutôt

27 d'Herceg-Bosna de 1991 à 1994. Je le redis. Je le répète. Il ne devait pas

28 examiner le comportement des Musulmans de l'époque. Je ne comprends pas,

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1 Monsieur le Président, pourquoi on ne peut pas reconnaître et comprendre

2 une bonne fois pour toute ce que le témoin avait pour -- l'expert avait

3 comme mission et ce qui est dans le cadre de ce rapport et de ce qui ne

4 l'est pas. C'est inclus dans la lettre de mission reprise dans le rapport

5 si seulement Me Karnavas pouvait avoir la bonté de le comprendre.

6 M. KARNAVAS : [interprétation] je vais poursuivre, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Scott a raison, Maître Karnavas. Si vous posez la

8 question, c'est : Qu'elle est sous-tendue pour quelque chose, qu'est-ce que

9 vous voulez démontrer ?

10 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que d'autres

11 Cours n'auraient pas -- ou d'autres formations du Tribunal n'auraient pas

12 reconnu monsieur comme expert, nous l'avons fait très bien. Il nous a parlé

13 de l'établissement d'Herceg-Bosna et des institutions. Mais reconnaissons

14 qu'elles n'ont pas été construites dans le vide, qu'il y avait un cadre, un

15 contexte qui avaient des accords d'amitié. Un processus qui a été mis en

16 œuvre pour aboutir à cette mise en place des institutions. Monsieur le

17 Président, et Messieurs les Assesseurs, si le rapport avait été très clair,

18 je ne serais pas en train de poser des questions. Je crois qu'à partir du

19 moment où, effectivement, on a des arguments, des raisonnements, des

20 opinions, des conclusions, qui sont exposés dans le rapport, alors même que

21 le témoin nous dit qu'il n'est pas expert dans les disciplines qui auraient

22 dû l'aider à former son jugement et ses conclusions, bien, je crois qu'en

23 tant qu'avocat de la Défense, il est nécessaire que je puisse montrer que

24 le rapport qui nous est soumis est partial. On ne peut pas avoir le beurre

25 à l'argent du beurre. Ce rapport a des problèmes. Si, dans ce rapport,

26 toutes les opinions et tous les avis et toutes les conclusions avaient été

27 biffées et que le rapport aurait été transmis à nouveau à la Chambre, j'en

28 serais ravi. Peut-être que le rapport n'aurait, à ce moment-là, plus que

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1 dix pages, mais je pourrais l'admettre.

2 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que rien de ce

3 que Me Karnavas n'a posé comme question a remis en cause le rapport. Je

4 crois que la plupart des questions qu'il a posées n'étaient pas dans le

5 cadre de ce rapport. Rien de ce qu'il a nous a dit ne contredit ce qu'a

6 fait l'expert. Je crois que c'est une fausse déclaration par Me Karnavas.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien. Je vais poursuivre. Je vais essayer de

8 voir un autre moyen peut-être.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez, Maître Karnavas.

10 M. KARNAVAS : [interprétation]

11 Q. Bien, regardons des parties de votre rapport --

12 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Ibrisimovic s'était levé tout à l'heure.

13 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si vous me

14 le permettez je souhaiterais vous apporter mon concours. Je crois que le

15 témoin ait effectivement évoqué les réactions de ce qui se passait à

16 Sarajevo et évoqué également quelques décisions de la Cour

17 constitutionnelle de Sarajevo. Je crois que c'est pertinent les questions

18 de Me Karnavas.

19 M. KARNAVAS : [interprétation] Justement j'allais y venir aux décisions

20 prises a Sarajevo.

21 Q. Dans votre premier paragraphe --

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il y a un élément que j'ai peur de

23 mal comprendre, je ne voudrais pas rester avec cet avis.

24 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est d'accord, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vois à la fin du rapport qu'il y

26 a une manière de résumer, et au dernier paragraphe 333, donc, je lis ici

27 que le HZ HB a été remplacé par un nouveau cadre constitutionnel avec le HR

28 HB en août 1993. Le nouveau HR HB était plus permanent et ressemblait plus

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1 encore à un Etat que le HZ HB. Pour moi, j'en arrive à la conclusion que ce

2 n'était pas un Etat, mais que c'était moins dissemblable d'un Etat que le

3 précédent ne l'était. Alors, certes, les termes de pseudo-Etat, par

4 exemple, apparaissent de temps à autre, je crois, Maître, que c'est dans ce

5 dernier paragraphe que l'on trouve l'essence même du rapport, et qu'il est

6 donc un peu sur réaliste que de s'attaquer au moment dans le courant du

7 rapport où l'on parle de pseudo-Etat.

8 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge, je suis dans une certaine

9 mesure d'accord avec vous. En temps normal il m'aurait fallu trois ou

10 quatre jours pour procéder à mon contre-interrogatoire. Nous n'en avons pas

11 les moyens. Vous m'avez parlé de m'attaquer au témoin. Certes. Peut-être.

12 Mais je peux vous dire que j'ai passé plus de 100 heures à préparer une

13 séance de trois heures. C'est injuste peut-être, mais c'est -- je peux

14 peut-être essayer de faire de mon mieux. Donc, si vous me le permettez je

15 souhaiterais aller de l'avant et clarifier certains points.

16 Q. Monsieur, dans votre rapport au premier point vous parlez de mettre

17 l'accent sur : "Les niveaux les plus élevés de l'administration." Vous ne

18 nous dites pas si c'est au niveau élevé de l'administration était en mesure

19 de contrôler les organisations et les unités de base, n'est-ce pas ?

20 R. Bien, je crois que vous avez posé en fait deux questions. En ce qui

21 concerne les autorités locales, je crois que je traite ce point avec les

22 documents qui étaient à ma disposition.

23 Q. [aucune interprétation]

24 R. [aucune interprétation]

25 Q. [aucune interprétation]

26 L'INTERPRÈTE : Avec un micro de Me Karnavas, si c'était possible.

27 M. KARNAVAS : [interprétation]

28 Q. [aucune interprétation]

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Microphone.

2 M. KARNAVAS : [interprétation]

3 Q. Je repose ma question. Est-ce que "oui" ou "non", il y avait contrôle

4 sur les groupes extra gouvernementaux ?

5 R. En ce qui concerne les autorités -- les collectivités locales, j'en

6 parle. Les collectivités militaires, écoutez, je ne le traite pas.

7 Q. Vous avez passé sept ans et demi ici. Est-ce que vous comprenez ce

8 terme technique : "Contrôle réel et effectif" ? C'est cela la question. Y

9 avait-il un vrai contrôle effectif au niveau local, "oui", "non", "je ne le

10 sais pas", "je ne me suis pas penché" ?

11 R. Vous avez évoqué différents points. Si l'on parle des municipalités, je

12 ne peux que vous dire ce que j'ai dit dans le rapport et citer ce que j'ai

13 déjà cité.

14 Q. Très bien, Monsieur.

15 R. Je crois que c'est un bon niveau de contrôle.

16 Q. Je crois que vous ne répondez pas à la question; passons à une question

17 suivante. Dans le courant de vos études, vous avez examiné les organes -

18 c'est indiqué au paragraphe 2 - qui, à votre avis - c'est moi qui le dis -

19 ont un contrôle effectif et exercent un certain pouvoir. C'est un avis,

20 n'est-ce pas ? C'est bien vous qui pensez et je cite qu'ils ont un pouvoir

21 effectif.

22 R. J'explique ce que j'en pense à la phrase suivante c'est-à-dire que

23 j'examine les organes qui fonctionnent plutôt que des gouvernements

24 temporaires mis en place dans le cadre d'un projet de paix qui n'ont jamais

25 fonctionné.

26 Q. D'accord.

27 R. C'était pour éviter d'avoir à parler du reste.

28 Q. Vous avez parlé de ce que vous n'évoquez pas le fonctionnement au jour

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1 le jour des unités combattantes militaires. N'auriez-vous pas dû au moins

2 parler du rapport avec les institutions civiles ?

3 R. Non. Je ne crois pas ce que cela faisait partie de ma mission ou de mon

4 mandat.

5 Q. Vous ne cherchiez pas à savoir donc s'il y avait effectivement une

6 chaîne de commandement qui fonctionnait ?

7 R. Je ne dirais pas que je ne m'y intéressais pas.

8 Q. D'accord, mais --

9 R. Je dirais juste que je n'étais pas supposé faire un rapport sur cette

10 question.

11 Q. D'accord. Ce n'est pas dans votre rapport ?

12 R. Que je n'étais pas supposé traiter des points proprement militaires.

13 Q. Bien. Je comprends. La possibilité des autorités civiles d'influencer

14 les militaires et les milices locales, cela non plus n'est pas évoqué.

15 R. La relation -- le rapport de jure entre les civils -- structures

16 civiles et militaires sont traitées par mon rapport. En ce qui concerne le

17 rapport avec les milices locales, comme vous le dites, ce n'était pas dans

18 mon rapport.

19 Q. Donc, ce n'est pas dans votre rapport.

20 R. Non, cela ne l'est pas.

21 Q. Au paragraphe 4, vous nous dites que vous avez utilisé des sources

22 primaires dans -- et que l'utilisation principale d'une série de sources a

23 des avantages et des désavantages qu'il faut garder à l'esprit, des sources

24 secondaires telles que les mémoires, qui ont été rédigées par des

25 participants dans les institutions de l'Herceg-Bosna, sont des sources

26 indirectes.

27 Est-ce que vous êtes toujours fidèle à cet avis ?

28 R. Oui.

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1 Q. Donc, vous ne fondiez votre travail que sur les documents d'une seule

2 partie ? Je vais vous reposer la question.

3 R. Est-ce que je peux répondre à --

4 Q. Je vous ai demandé si vous n'aviez regardé qu'une partie; la réponse

5 est oui.

6 M. SCOTT : [interprétation] Oui, mais il y a un problème, c'est qu'à la

7 ligne 17 et 18, on voit bien que Me Karnavas obtient des réponses et

8 détourne les renseignements.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais écouter à

10 M. Tomljanovich plutôt qu'entendre M. Scott --

11 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, il a dit --

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le

13 Président, pourriez-vous demander à M. Scott de s'asseoir et de me laisser

14 le temps d'interroger M. Tomljanovich.

15 M. SCOTT : [interprétation] Je vais continuer de faire interjection puisque

16 Me Karnavas reprend certains éléments des réponses du témoin et détourne le

17 sens de sa réponse.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

19 M. SCOTT : [interprétation] ce n'est pas juste au témoin de dire que vous

20 n'étiez pas intéressé. Ce n'est pas ce que dit

21 M. Tomaljanovich.

22 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien. Il peut répondre à la question.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Il ne faut pas détourner le sens des questions.

24 Maître Karnavas, reposer votre question pour qu'on puisse suivre la réponse

25 du témoin.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien, Monsieur le Président.

27 Q. Monsieur, pourriez-vous nous dire pourquoi vous n'avez traité la

28 question que d'un seul point de vue, et répondez en moins de deux minutes,

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1 si possible ? Encore une fois, je serais reconnaissant à M. Scott de ne pas

2 m'interrompre. Je sais qu'il peut être désagréable, cela suffit jusqu'à un

3 certain point.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'avais effectivement l'intention

6 d'examiner les structures d'Herceg-Bosna, ses organes et leurs missions.

7 Comme je le disais dans le paragraphe que vous avez cité, je voulais

8 utiliser les sources primaires produites par ces institutions. Je ne

9 voulais pas utiliser que ces documents, mais principalement ces documents

10 pour décrire leur fonctionnement; avant de le faire, j'avais donné une

11 information préliminaire aux Juges et autres parties qu'effectivement

12 j'allais citer leurs points de vue et que c'était un élément qui devait

13 être gardé à l'esprit.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un exemple. Il y a quelque chose qui m'a

15 fortement intéressé dans votre rapport, qui concerne la mise en place des

16 tribunaux, des juges nommés par l'Herceg-Bosna. Vous en parlé.

17 Dans le sens de la question de Me Karnavas, est-ce qu'en tant qu'expert,

18 vous vous êtes posé la question de savoir : pourquoi on va nommé des

19 nouveaux juges ou un nouveau procureur et créer un nouveau tribunal ? Est-

20 ce que c'est parce que les juges ou les procureurs, ou le tribunal de la

21 Bosnie-Herzégovine ne fonctionnaient pas qu'on en a nommé d'autres ? Ou

22 cela fonctionnait, mais pour des raisons autres, on a rajouté des juges,

23 des procureurs et un tribunal ? Voilà. Voilà même le type de sujet qui est

24 intéressant. Qu'est-ce que vous dites ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

26 Effectivement, c'est une question très intéressante. Je crois, Monsieur le

27 Président, que la réponse à votre question apparaît dans une réunion du HVO

28 HZ HB d'octobre 1992, lorsqu'on débat justement le système judiciaire. Il y

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1 avait deux projets de loi; l'un était acceptable par les institutions de la

2 République de Bosnie-Herzégovine telles qu'elles existaient déjà; l'autre

3 projet de loi avait l'avantage de leur donner la main haute et de mettre en

4 œuvre une cohérence plus grande entre les structures judiciaires et les

5 structures qu'elles avaient déjà mises en place. Le choix a été fait à ce

6 moment-là de choisir le projet de loi qui leur laissait une marge de

7 manœuvre plus grande, c'est-à-dire le système le plus différent du système

8 préexistant.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que vous me permettez de poser une

10 question ?

11 Q. Est-ce que vous connaissez bien les systèmes de justice pénale ?

12 R. Bien, c'est --

13 Q. "Oui" ou "non" ?

14 R. Bien, c'est-à-dire que la question est différente.

15 Q. De quoi parlez-vous alors ?

16 R. Je peux vous parler du cadre général, je ne peux pas vous donner les

17 détails comme cela. Mais ce que je sais, c'est qu'en octobre 1992, si j'ai

18 bonne mémoire, on a débattu du décret sur les tribunaux et on avait, à ce

19 moment-là, parlé de la mise en place d'une nouvelle structure judiciaire et

20 qu'il y avait effectivement deux projets, que celui qui a été retenu est

21 celui des deux qui était le plus novateur et le plus différent. Mais en ce

22 qui concerne la procédure pénale, évidemment, c'est très différent et le

23 code de procédure pénale également.

24 Q. Est-ce qu'il y a eu l'adoption d'un nouveau code de procédure pénale et

25 d'une nouvelle procédure pénale ?

26 R. Le code de procédure pénale a été adopté dans son modèle Bosnie-

27 Herzégovine tant qu'il n'était pas en contradiction avec les organes tels

28 qu'ils existaient, dans la mesure où justement ce code n'est pas en

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1 contradiction avec toute la législation de Bosnie-Herzégovine.

2 Q. Mais dites, est-ce qu'ils ont nommé également de nouveaux juges en

3 octobre ?

4 R. Non. Ils ont tout simplement établi de nouvelles structures. Pour ce

5 qui est des nominations de juges --

6 Q. Fort bien. C'est vous qui êtes expert ici, dites-nous ce en quoi

7 consiste ces nouvelles structures. Dites-nous, parce qu'il s'agit d'un

8 sujet dont vous vous êtes occupé. Vous avez dit, vous avez allégué que vous

9 en saviez long. Dites-nous de quelles structures il s'agit ? De quoi vous

10 parlez maintenant ?

11 R. Bien --

12 Q. Si vous ne vous en souvenez pas, si vous l'ignorez, dites : "je ne m'en

13 souviens pas" ou "je ne le sais pas", et cetera. On passera à un autre

14 sujet.

15 R. Ecoutez, malheureusement, je ne peux pas me rappeler maintenant. Sans

16 me référer à mon rapport, je ne saurais vous dire très exactement ce qui

17 était libellé dans et par le décret qui a été adopté portant sur les

18 structures judiciaires. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il a été adopté

19 ce qui d'ailleurs a été la plus innovatrice comme législation.

20 Q. Fort bien.

21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Karnavas, je dois reprendre

22 votre question. Vous avez posé la question alors que vous n'avez pas

23 entendu la réponse. Vous posez une question sur le code de procédure

24 pénale, sur le code pénal, vous n'avez reçu que la réponse concernant l'un

25 de ces volets. Je voudrais entendre l'autre partie de la réponse.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Il serait bon d'entendre le témoin répondre

27 à toutes les questions.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas ce que vous entendez par code

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1 de procédure pénale, mais ce que j'ai pu constater moi-même, c'est que tout

2 simplement pour tout délit, toute infraction, des lois ont été adoptées

3 telles qu'elles existaient.

4 M. KARNAVAS : [interprétation]

5 Q. Savez-vous la différence qu'il y a entre le code de procédure pénale et

6 le code pénal ? Dites que vous ne le savez pas en tant que juriste ?

7 R. Je pourrais peut-être lancer des conjectures, mais cela n'a pas de

8 sens.

9 Q. Fort bien.

10 M. KARNAVAS : [interprétation] Je crois, Monsieur le Juge Trechsel, qu'on a

11 répondu à votre question.

12 Q. Dans votre rapport, vous semblez ignorer la base constitutionnelle, la

13 base légale qui a été imposée aux citoyens, aux municipalités, aux

14 communautés en matière de défense du pays, n'est-ce pas ?

15 R. Non, je ne l'intitulerais pas comme cela parce que dans le cas concret,

16 tout cela dépend de ce que vous venez de dire par là. Si vous voulez dire

17 que j'ai cité ou pas cité la loi sur la défense de la Bosnie-Herzégovine,

18 je ne l'ai pas citée, mais je suis penché sur.

19 Q. Fort bien. La loi sur la défense de Bosnie-Herzégovine, de quelle loi

20 parlons-nous ? Parlons-nous de la loi sur la défense généralisée ou des

21 forces armées, ou sur les forces armées de Bosnie-Herzégovine ? De quoi

22 parlez-vous ? Chemin faisant, disons plutôt que ceci devrait s'agir plutôt

23 des forces armées de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, bien

24 entendu.

25 R. Oui.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-être que le bon moment est venu de

27 marquer une pause et nous reprendrons.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 4 heures. Nous reprendrons à 4 heures 10.

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1 --- L'audience est suspendue à 15 heures 50.

2 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

4 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Monsieur Tomljanovich, nous nous étions arrêtés au moment où je vous ai

6 posé la question de savoir si vous occupiez des bases légales et

7 constitutionnelles moyennant lesquelles on a imposé aux citoyens, aux

8 villes, cités, municipalités, aux communautés, l'obligation de défendre le

9 pays. Je ne suis pas sûr que vous ayez pu répondre à cette question.

10 Q. [hors micro]

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que mon micro est branché maintenant ?

12 M. KARNAVAS : [interprétation]

13 Q. Oui.

14 R. Merci.

15 Je me suis penché sur les bases constitutionnelles légales pour ce qui est

16 de ce qui incombe aux villes et aux municipalités en matière défense dans

17 le système de HVO Herceg-Bosna. Pour ce qui est de la République de Bosnie-

18 Herzégovine, je me suis penché très brièvement sur la loi portant sur la

19 défense, mais je considérais que cela sortait du cadre de ce que je devais

20 faire.

21 Q. Permettez-moi, une seconde. Vous dites vous être penché sur la

22 constitution du HVO Herceg-Bosna. Faisons un pas en arrière. Avant de voir

23 le HVO Herceg-Bosna, il y avait la République socialiste de Bosnie-

24 Herzégovine, n'est-ce pas ?

25 R. Oui, et même lorsque l'Herceg-Bosna existait.

26 Q. Bien. Allons-y pas à pas. Avant de voir la Bosnie-Herzégovine devenir

27 un pays indépendant et souverain, elle faisait partie intégrale de la

28 Yougoslavie, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. Très bien. En vertu de la constitution fédérale, en vertu de la

3 constitution de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, je suppose

4 que les deux constitutions par leurs dispositions imposaient de voir une

5 obligation aux citoyens, aux cités, aux communautés et aux municipalités,

6 la défense du pays le cas échant ?

7 R. Oui. Il y avait une conception de défense dite généralisée. C'est-à-

8 dire, en cas d'une guerre, tous devaient être mobilisés.

9 Q. On y reviendra. Je suppose que lorsque vous avez dit vous-même lorsque

10 vous vous y êtes penché -- vous dites en réponse vous être penché sur le

11 système du HVO Herceg-Bosna également en matière défense. Dites-moi, étant

12 donné qu'il y avait une constitution de la République socialiste de Bosnie-

13 Herzégovine, est-ce que vous avez pu voir ce qui était libellé très

14 exactement et stipulé par cet acte juridique en ce qui concerne les

15 possibilités pour les municipalités de s'organiser en matière de défense le

16 cas échéant et de façon imminente ?

17 R. Oui. Notamment, j'ai pu me pencher sur la constitution pour voir

18 comment se présentaient les obligations qui incombaient aux municipalités

19 et aux communautés.

20 Q. Fort bien. Alors, vous allez convenir avec moi de ce qui suit : lorsque

21 l'on se penche sur la façon dont la Communauté croate d'Herceg-Bosna a été

22 formée et organisée et comme s'organisaient les municipalités, le tout à la

23 lumière des événements, le tout devrait être vu et revu, et considéré à la

24 lumière de la constitution de la République socialiste de Bosnie-

25 Herzégovine, n'est-ce pas ?

26 R. Oui et non. Non, parce que je n'ai pas considéré que mon rôle

27 consistait à me décider à voir si ceci a été fait en vertu conformément à

28 la constitution ou pas. Si les communautés avaient quoi que ce soit comme

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1 devoirs ou obligations, il s'agit d'un jugement de valeur que je devais

2 porter et qui allait en-dehors de ce qu'il me fallait faire.

3 Q. Voyez maintenant, si je vous ai bien suivi et bien compris. Pendant que

4 je suis en train de vous poser de telles questions, vous, quant à vous,

5 vous avancez l'attitude pour dire en tant qu'expert, vous n'êtes pas en

6 mesure de nous fournir une opinion pour savoir si la HZ - la Communauté

7 croate d'Herceg-Bosna - était constitutionnelle ou pas. Si le tout se

8 passait aux termes de la constitution existante à cette époque-là de la

9 Bosnie-Herzégovine.

10 R. Non. Je ne pensais pas que mon rôle consistait à donner une réponse

11 définitive. Je voulais tout simplement dire qui est venu à quelles

12 conclusions et à quelle époque.

13 Q. Monsieur, supposez que vous avez maintenant une présentation orale de

14 votre thèse de doctorat à soutenir et que votre mentor, votre professeur

15 doit vous poser une question directe et il veut une réponse directe. Je ne

16 vous ai pas posé une question sur le rôle qui était le vôtre parce qu'à la

17 lumière de ce vous avez dit tout à l'heure, il semble que vous avouez

18 ignorer que la Communauté croate d'Herceg-Bosna était légale ou pas ?

19 R. Je sais que la Cour constitutionnelle a répondu et a décidé que non.

20 Q. Je sais ce qui a été le prononcé de la Cour constitutionnelle, mais

21 lorsqu'on vous demande aujourd'hui de revoir l'ensemble de la structure,

22 comment le tout a été formé, organisé, or je suppose que pour ma part,

23 lorsqu'on veut voir de quelle façon quelque chose a été établi et mis en

24 place, comment tout ceci a été confiné, dans quel cadre, dans quelles

25 circonstances, mais dire comment la communauté précitée a été formée, je

26 voulais savoir si vous vous êtes penché sur la constitution en vigueur et

27 si vous avez essayé de déterminer s'il était permis ou pas permis de voir

28 de telles municipalités, étant donné les circonstances, s'organiser,

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1 s'auto-organiser elles-mêmes. "Oui" ou "non" ?

2 R. Non, parce que ceci ne serait autre chose qu'un jugement de valeur.

3 Q. Bien. Supposons qu'on vous avait demandé de le faire. Peut-on dire que,

4 le tout pris en considération, vous êtes dépourvu de tout fondement

5 juridique, parce que vous l'avez dit vous-même, vous l'avez reconnu, même

6 Mme Alaburic vous a soumis quelques documents pour étude pour vous prouvez

7 qu'en fait, vous n'êtes pas en mesure de comprendre comment il faut faire

8 lecture d'une loi. Par conséquent, on pourrait dire que ceci était votre

9 assertion, parce que vous n'avez pas pu, évidemment, avancer une telle

10 attitude étant donné votre formation.

11 M. SCOTT : [interprétation] Mais si cette question n'a pas été pertinente.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Je voudrais, Monsieur le Président,

13 Messieurs les Juges, entendre la réponse à ma question, après quoi nous

14 allons voir ce qui nous semble être clair par lui-même.

15 M. SCOTT : [interprétation] Il ne s'agit que de spéculations, il ne s'agit

16 que d'hypothèses, c'est quelque chose qui n'existe pas dans le monde réel.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : En tout cas, j'ai compris la question de la Défense.

18 La question que vous pose la Défense est la suivante : d'après les études,

19 les documents, le contexte, tout ce que vous avez pu voir, est-ce que les

20 habitants d'une municipalité avaient le pouvoir de se défendre eux-mêmes,

21 de se constituer en unités militaires ou paramilitaires pour faire face à

22 un agresseur potentiel ? Est-ce que les documents, la constitution de la

23 Bosnie-Herzégovine ou les textes de l'ex-Yougoslavie leur permettaient de

24 se constituer en unité; une milice, unité paramilitaire, unité para-légale

25 ou légale, comme on veut ? Est-ce que d'après-vous vous avez examiné cette

26 question ? Parce que là cette question est au cœur de la théorie de la

27 Défense.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour répondre à votre question, Monsieur le

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1 Président, il s'agit de deux parties d'une question. Primo, pour ce qui est

2 de l'obligation que les gens ont, en vertu de la constitution, tous les

3 hommes avaient le droit de défendre l'ordre établi par -- et sur la base de

4 la constitution. Pour ce qui est des obligations qui ont incombé aux

5 municipalités c'est une autre chose. Par l'association de municipalités

6 chose pouvant être faite pour des raisons économiques mais pas aux fins

7 d'une défense, cela c'est une autre question.

8 M. KARNAVAS : [interprétation] Si je peux poursuivre, Monsieur le

9 Président.

10 Q. Primo. Revenons un peu en arrière. Vous avez dit, Monsieur, tout à

11 l'heure, que vous n'étiez pas compétent d'étudier pour comprendre les

12 instruments juridiques telle que la constitution du fait que vous n'êtes

13 pas doté d'une formation de juriste non plus d'une expérience en la

14 matière.

15 R. Non, parce que nous avons justement énormément de juristes dans ce

16 prétoire.

17 Q. Je ne vous ai pas posé cette question-là.

18 Ma question était la suivante : avez-vous été compétent de nous fournir une

19 opinion là-dessus si, en effet, il s'agissait d'une affaire légale ou

20 illégale, vous avez dit que personne ne vous a demandé de vous en

21 préoccuper ?

22 R. Non, on ne m'a pas demandé de m'en occuper mais c'est une autre chose

23 que de poser des questions concernant mes compétences.

24 Q. Fort bien. Mais même si on vous pose la question, par exemple, de voir

25 que pour le contexte dans lequel les événements se sont déroulés vous

26 deviez en faire une détermination, est-ce que sur la base des réponses qui

27 ont été les vôtres préalablement vous n'auriez pas été capable de vous

28 acquitter de cette tâche qui était la vôtre du fait de manque d'un manque

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1 de qualifications de juriste, n'est-ce pas ?

2 R. J'ai toujours dit pour ma part que je n'étais pas un juriste.

3 Q. Oui. Vous venez de dire et vous avez d'ailleurs fourni une opinion

4 juridique à la Chambre de première instance que sur la base de lecture de

5 la constitution faite par vous les municipalités ne pouvaient former des

6 communautés qu'afin des affaires aux fins des affaires économiques. Est-ce

7 que -- lecture de la constitution qui était la vôtre et de la loi sur la

8 Défense l'œuvre généralisée vous aurez pu permettre de le dire ainsi, êtes-

9 vous compétent ou pas ? S'agit-il de voir votre attitude comme quoi ces

10 instruments juridiques ne permettent pas aux municipalités de s'associer,

11 par exemple, en cours d'une guerre&

12 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin.

13 M. KARNAVAS : [interprétation] Objection que je vais interjeter lorsque

14 j'entends M. Scott donner des idées à ce témoin expert.

15 M. SCOTT : [interprétation] Je vais m'objecter.

16 M. KARNAVAS : [interprétation] Je peux répondre à la question.

17 M. SCOTT : [interprétation] J'ai une objection à faire au sujet de la

18 question qui n'est pas adéquate et inappropriée. Voilà pourquoi ? Ce témoin

19 ici présent n'a jamais dit et je regrette de voir obliger de faire

20 redondance et j'espère que je ne le ferais plus parce que je ne veux pas

21 permettre que M. Karnavas détourne la déposition de ce témoin.

22 M. Tomljanovich n'a jamais dit qu'il était compétent de telles ou telles

23 questions. Il a dit qu'il a dit qu'il n'était pas juriste. Il a fait

24 d'autres écoles. Ce qui lui permet de lire tels ou tels documents et

25 d'émettre des opinions. Quand il dit qu'il n'est pas juriste ce n'est pas

26 la même chose que d'entendre dire M. Karnavas alors vous avouez que vous

27 n'êtes pas compétent. Non. Cela ne va bien. Ce n'est inapproprié. Je ne

28 permets pas à Me Karnavas de détourner la déposition du témoin.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Tomljanovich, vous avez dit que vous

2 n'êtes pas un juriste. Nous le savons depuis la première minute où vous

3 êtes venu dans cette salle d'audience. Mais ce que nous avons, nous, les

4 Juges, c'est que vous êtes historien et lorsqu'un historien se penche sur

5 l'histoire d'un pays ou sur un événement, il est obligé de par sa démarche

6 de recherches historiques de se pencher sur des problèmes qui ne relèvent

7 pas particulièrement parfois de sa compétence, mais qui sont nécessaires

8 sur les institutions, les structures, les relations de pouvoir, l'armée,

9 puis ce qu'on appelle l'institutionnelle, c'est-à-dire les textes de base,

10 les constitutions, les lois, les règlements, et cetera.

11 Dans votre travail d'historien, puisque ce n'est pas un travail du juriste

12 qu'on vous a demandé, mais comme un historien, est-ce que vous avez été

13 amené à vous poser la problématique de la Défense territoriale, de la

14 défense par des individus face à une agression extérieure ? Voilà, le type

15 de démarches. C'est comme si un historien se penchait sur la guerre de

16 sécession aux Etats-Unis. Sans être juriste, est-ce qu'il ne se pencherait

17 pas sur les problèmes juridiques de l'époque ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je devrais pouvoir répondre peut-être un peu

19 plus en détail. Primo, j'ai considéré, j'ai étudié tous ces documents, j'en

20 ai parlé, dans d'autres procès et par d'autres documents, peut-être de

21 façon assez superficielle. Je ne m'en suis pas occupé notamment en vue de

22 la préparation de ce rapport-ci j'ai considéré que dans le cadre du procès

23 auquel nous sommes maintenant. Je ne pensais pas de voir si le HVO avait

24 des bases légales ou pas. Je n'ai pas offert d'opinion là-dessus, et je ne

25 considérais pas que ceci était une fin en soit.

26 Si la question était posée pour répondre, je crois pouvoir dire que je me

27 suis servi des documents qui pourraient servir à la Chambre de première

28 instance là où on peut prendre une décision, mais je ne me suis pas

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1 descendu dans les détails, et encore, que j'ai une opinion à moi pour dire

2 quels étaient les motifs qu'offraient ces documents et ce qui aurait pu

3 être permis en vertu et sur la base de la constitution de la loi, il se

4 s'agit pas d'une opinion d'expert.

5 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je peux reprendre,

6 s'il vous plaît ?

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, reprenez, Maître Karnavas. Mais ce que nous

8 savons c'est que le témoin n'est pas un juriste, mais un historien.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, très bien. Il est un spécialiste de

10 l'histoire croate du XIXe siècle, d'ailleurs, il a été aussi conférencier,

11 professeur pour s'occuper d'autres époques.

12 Q. Monsieur, si nous devons nous occuper de la constitution de 1974, et

13 nous devons nous occuper de la loi sur la Défense généralisée, ceci serait

14 peine perdue parce que vous n'êtes pas juriste quant à vous.

15 R. Tout dépend évidemment de vous et tout dépend de ce que vous voulez

16 faire en vous servant.

17 Q. Fort bien. Est-ce que vous avez étudié la loi sur la Défense

18 popularisée, publiée par le journal officiel de la République socialiste de

19 Bosnie-Herzégovine ? Je suis certain que votre bureau de Procureur est en

20 possession de ce document, l'avez-vous étudié pour voir dans quelle mesure

21 ce document a une échelle très locale, disons à l'échelle de municipalités

22 jusqu'à la structure d'Etat permettait la mobilisation -- auto mobilisation

23 en cas de guerre ? L'avez-vous étudié cette question ?

24 R. Oui, il y a bien longtemps, mais c'est généralement connu que le

25 système de l'ex-Yougoslavie prévoyait que tout un chacun avait l'obligation

26 de défendre le pays.

27 Q. Lorsque nous parlons de tout un chacun, évidemment tout un chacun est

28 valable aussi pour parler de municipalité ?

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1 R. Oui, je crois qu'il devait y avoir quand vous dites un plan de défense.

2 Q. Vous serez d'accord avec moi pour dire que ne serait-ce que pour cette

3 période-là il a fallu voir les municipalités s'organiser à titre sporadique

4 -- individuel pour pouvoir fournir une résistance, n'est-ce pas, et

5 organiser la défense, "oui" ou "non" ?

6 R. Oui, mais encore je me réserve le droit de parler du rôle de la

7 municipalité et le rôle des organes centraux.

8 Q. Mais ils ont quelque rôle ?

9 R. Ils ont quelque rôle, oui.

10 Q. Je ne voulais pas vous poser de telles questions, je ne veux pas

11 écouter -- vous suivre dans cette argumentation, mais à vous, écoutez

12 parler. Il me semble que, si la banque centrale ne fonctionnait pas et s'il

13 n'y avait pas de monnaie nationale, si l'Etat tel qu'il était en 1992 ne

14 pouvait fournir aucune ressource à une échelle locale quelconque à des fins

15 militaires, vous en savez quelque chose ?

16 R. Je ne voudrais pas en parler -- pour parler en parler avec certitude.

17 Q. Je voudrais savoir si vous avez étudié cela, si vous avez fait des

18 recherches pour voir si à l'échelle locale les gens pouvaient s'appuyer sur

19 les autorités centrales, par exemple, en matière de défense, en matière

20 d'armement, de salaires, et cetera; est-ce que vous avez étudié cela ?

21 R. Non.

22 Q. Est-ce que vous vous êtes occupé évidemment cette fois-ci à l'échelle

23 de la municipalité ? On vous a évidemment dit de vous occuper de la Croatie

24 et des Croates et du HVO, mais est-ce qu'à titre de comparaison, vous avez

25 fait l'étude de d'autres municipalités, celle de Tuzla, cette municipalité

26 s'est-elle organisée quant à elle-même pour essayer d'assurer les besoins

27 quotidiens et de première nécessité aux citoyens pour dispenser ces

28 différents services qui incombaient aux municipalités pour organiser la vie

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1 quotidienne puisque déjà les pouvoirs centraux ne pouvaient pas le faire ?

2 R. Non. Je ne m'en suis pas occupé, de cette question-là.

3 Q. Bien. Je vous ai entendu dire tout à l'heure que votre mission ne

4 consistait pas à traiter de l'égalité ou d'illégalité du HZ, Communauté

5 croate d'Herceg-Bosna. C'est à quelqu'un d'autre que ceci devait incomber,

6 mais, à regarder votre rapport, vous parlez tout le temps de de jure ou de

7 facto. Quant à moi, j'ai regret de dire que, et ceci en-dehors de termes

8 juridiques, les gens ne parlent pas de cette arme de jure ou de facto.

9 Comment les définissez-vous, de jure ou de facto, comme quelqu'un qui n'est

10 pas juriste pour que nous puissions savoir comment vous appréhendez ces

11 termes ?

12 R. De jure veut dire : voir les choses fonctionner d'après la loi. De

13 facto veut dire comment les choses fonctionnent dans la réalité.

14 Q. Je crois que nous pouvons nous mettre d'accord avec vous pour adopter

15 votre définition. En effet, si -- et vous avez eu pour tâche non pas pour

16 déterminer si quelque chose était légal ou illégal, constitutionnel ou

17 anticonstitutionnel, alors que vous dites par vous-même que vous n'êtes pas

18 juriste et vous dites vous-même qu'il n'était de votre tâche d'en traiter,

19 comment avez-vous pu faire entrer dans votre rapport cette section, cette

20 vision de sure de tous ces événements ?

21 R. Oui, c'est parce que j'avais accès au journal officiel.

22 Q. Bien, je suppose que vous avez pu vous pencher sur le journal officiel,

23 sur des procès-verbaux de différentes réunions.

24 R. Oui, j'ai eu accès à d'autres documents qui nous étaient disponibles et

25 accessibles, mais, pour la plupart des documents de l'ordre de la

26 législation nationale sont émis et publiés par le journal officiel.

27 Q. Peut-être que vous vous êtes penché sur les lois à l'échelle d'Etat.

28 Nous allons parler également de décisions émises par la Cour

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1 constitutionnelle. Indépendamment de cela, vous vous préoccupez d'autres

2 lois ou uniquement celles portant sur le HVO ?

3 R. Lorsque vous parlez d'échelle d'Etat, est-ce que vous vous référez à la

4 Bosnie-Herzégovine ? Alors, là, j'ai décidé de ne pas m'en occuper.

5 Q. Mais en dépit de tout, votre opinion d'expert, lorsque vous parlez de

6 jure, le tout semble se fonder sur la lecture qui était là vôtre de ces

7 documents, n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Lorsque vous dites, vous, de jure, pour que je puisse mieux comprendre

10 la définition de ce terme qui est la vôtre et le cadre de votre rapport au

11 sein et sur la base de cette définition qui est la votre, or, votre analyse

12 que vous avancez est la suivante. Lecture faite, analyse faite et après

13 avoir synthétisé l'existence des lois, votre analyse de jure est là, ce qui

14 ne veut pas dire nécessairement que ceci devait être constitutionnel ou

15 anticonstitutionnel, n'est-ce pas ?

16 R. Pour autant que je puisse comprendre votre question, je dirais -- je

17 vais répondre affirmativement.

18 Q. Fort bien. Vous avez dit entre autres que vous avez traité de la

19 situation de facto, de fait. Ceci nécessite une élucidation. Tout à l'heure

20 je vous ai posé la question de savoir si vous avez considéré dans quelle

21 mesure les hauts responsables, les chefs, avaient eu un contrôle effectué

22 et effectif sur ce qui se passait à l'échelle locale. D'après ce que vous

23 avez dit, il me semble à moi, que vous ne vous en êtes pas occupé du tout ?

24 Oui ou non ? Vous vous en êtes occupé ou pas ?

25 R. Je m'en suis occupé uniquement si les documents me le permettaient. Il

26 y a des documents auxquels je fais référence et que j'ai cités dans mon

27 rapport, documents qui concernent les municipalités et les relations que

28 celles-ci entretenaient avec le gouvernement central de Bosnie-Herzégovine.

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1 Mais je ne l'ai fait que dans l'exacte mesure où les documents me l'avaient

2 permis.

3 Q. Bien, d'accord. Maintenant nous n'allons pas maintenant nous pencher

4 sur la constitution de la République de Bosnie-Herzégovine de 1974, non

5 plus que sur la loi sur la Défense populaire généralisée, mais, étant donné

6 votre rapport, à la lumière de votre rapport, nous ne voyons pas que vous

7 avez fait mention de la loi sur la Défense populaire généralisée. Puis-je

8 conclure ipso facto que lorsqu'il s'agit de ce rapport qui est le vôtre,

9 pour lequel vous considérez que c'est un rapport équilibré, complet, et

10 cetera, vous n'y avez pas, pour le rédiger, pris en considération la loi

11 sur la Défense populaire généralisée comme étant quelque chose de peu

12 d'importance ?

13 R. J'ai décidé, pour ma part, que le décret du HVO, portant formation des

14 forces armées, a mis en quelque sorte, l'a remporté sur cette loi.

15 Q. Voulez-vous peut-être expliciter un petit peu ? Etait-ce de dire que

16 cette loi l'a remporté sur le décret du HVO, l'a remporté sur la loi ?

17 R. Je crois qu'à en juger d'après les jugements des gens qui sont à la

18 base de ce décret, je peux conclure que leurs lois devaient être

19 prioritaires si la loi existante n'avait pas été adoptée. Il n'y aurait pas

20 eu évidemment de pertinence de voir admettre les lois de Bosnie-

21 Herzégovine, à moins que ce ne soit, par exemple, adoption du code pénal.

22 Q. Vous dites, par exemple, que les lois d'Etat sont dans la constitution

23 au-delà et au-dessus de toute autre loi ?

24 R. Je n'ai pas dit cela.

25 Q. Je voulais vous aider, essayer un petit peu de désarticuler tout cela,

26 le voir pas à pas. Est-ce que vous considérez qu'au niveau de l'Etat, la

27 constitution serait la loi la plus importante ?

28 R. Est-ce que vous vous référez maintenant à la constitution de la

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1 République ?

2 Q. Nous parlons de la République socialiste de la Bosnie-Herzégovine.

3 R. Je n'ai pas d'opinion personnelle à vous offrir là-dessus, mais je sais

4 qu'il ne s'agit pas de quelque chose que les gens du HVO considéraient

5 comme étant la loi supérieure, la loi suprême du pays.

6 Q. Je ne vous pose la question de savoir ce que le HVO faisait ou pensait,

7 mais en des termes théoriques, que pouvez-vous dire ? Est-ce que vous le

8 savez ?

9 R. Bien, écoutez, pour parler en théorie, cela semble convaincant pour

10 qu'une loi de la République doive être évidemment au-dessus de la

11 République du HVO ou de la Republika Srpska, par exemple.

12 Q. Fort bien. Sur débat théorique, il serait convaincant, d'après-vous,

13 que la loi sur la Défense populaire généralisée devrait être mise en

14 pratique également ?

15 R. Pas pour ce qui est du HVO HZ en tant que système.

16 Q. Bon, écoutez, nous allons pas à pas. Sur des bases théoriques, vous

17 avez dit que vous ne saviez pas si le HVO HZ était une création

18 constitutionnelle ou pas. Ma question est tout à fait concrète. La

19 législation au niveau de l'Etat telle la loi sur la Défense populaire

20 généralisée était supérieure aux lois qui ont été adoptées à l'échelle

21 municipale. Lassons de côté maintenant le HVO ou le HZ en Herceg-Bosna.

22 Répondez par oui ou par non ou je ne sais pas.

23 R. Je crois que vous venez de détourner ce que j'ai dit tout à l'heure en

24 réponse à votre question. Je n'ai pas dit notamment que je ne savais pas si

25 c'était anticonstitutionnel pas. Je disais tout simplement que je ne savais

26 pas si c'était une décision qui devait être prise par moi.

27 Q. Je puis vous dire quelles sont les institutions qui l'ont considéré

28 comme anticonstitutionnelle. Vous êtes en train de nier ce que vous avez

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1 dit tout à l'heure. Vous dites, par exemple, que vous n'êtes pas un expert

2 en matière constitutionnelle, vous dites que vous n'avez pas consulté la

3 constitution, que vous n'avez pas non plus consulté des juristes qui vous

4 auraient dit qu'il s'agissait d'affaires constitutionnelles ou pas.

5 M. SCOTT : [interprétation] Objection. Monsieur le Président, M. Karnavas

6 est en train de présenter sous une fausse lumière ce que le témoin vient de

7 dire. Le témoin n'était pas obligé, n'était pas tenu de dire ce qu'il en

8 pensait. Il a tout simplement cité deux décisions émises par la Cour

9 constitutionnelle et en vertu de quoi le HVO était une création

10 anticonstitutionnelle.

11 M. KARNAVAS : [interprétation]

12 Q. Bien. Est-ce que vous avez été cité à la barre ici en tant qu'expert

13 historien, spécialiste de l'histoire du XIX siècle, ou est-ce que vous êtes

14 ici pour donner votre avis personnel sur les structures juridiques de jure

15 et de facto de la Communauté croate d'Herceg-Bosna qui existait à

16 l'intérieur de la République de Bosnie-Herzégovine ?

17 R. D'après ce que j'ai cru comprendre, je n'étais censé ne faire ni l'un,

18 ni l'autre. Si j'ai bien compris, j'étais censé mettre l'accent pour les

19 Juges sur les éléments de preuve pertinents permettant de mieux comprendre

20 les structures du gouvernement et processus du gouvernement.

21 Q. D'accord. Mais à un certain moment, vous vous êtes penché sur la

22 Communauté croate d'Herceg-Bosna et la Republika Srpska, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. D'accord. Alors, est-ce que vous pourriez mettre l'accent sur l'endroit

25 dans votre rapport où vous présentez une analyse détaillée destinée aux

26 Juges de la Chambre de première instance permettant de les aider à

27 trancher. Mais, dans votre rapport, je ne vois aucune analyse. Ne me dites

28 pas que vous avez tiré des enseignements d'autres procès parce que je vous

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1 parle de ce rapport-ci. Est-ce qu'on trouve une analyse dans ce rapport ?

2 "Oui", "non" ou "peut-être" ? Vous avez peut-être oublié ou vous devez

3 consulter votre rapport pour vous le remettre en mémoire, ou on vous a dit

4 quelque chose ou je ne sais pas, mais quelle est votre réponse ?

5 R. Je vais vous répondre par une métaphore au sujet du canard, celle que

6 vous avez utilisée tout à l'heure, cela marche comme un canard et cela

7 parle comme un canard.

8 Q. Une analyse concrète. Partons du principe que les Juges n'avaient pas

9 la moindre idée de ce qu'était la Republika Srpska et partons de

10 l'hypothèse que notre honorable Chambre de première instance c'est

11 l'endroit dans votre rapport où vous présentez une analyse sur ce point,

12 alors dans ce cas-là, on pourrait au moins se pencher sur un point ou

13 deux ?

14 R. Compte tenu que la Republika Srpska --

15 Q. Monsieur, Monsieur. Je vous demande : où se trouve ce passage dans

16 votre rapport ? J'ai le droit de remarquer et j'ai remarqué quelque chose

17 dans votre rapport; alors, je vous demande : où, dans votre rapport, vous

18 faites une comparaison analytique plutôt que de simplement vous livrer à

19 une déclaration personnelle ?

20 M. SCOTT : [interprétation] Le témoin pourrait peut-être recevoir un

21 exemplaire de son rapport et être autorisé à se pencher sur les pages 8, 9

22 et 10. Il n'a même pas son rapport sous les yeux. Donc peut-être ce rapport

23 pourrait lui être soumis et pourrait-on peut-être appeler son attention sur

24 les pages 8, 9, 10 et 11 de son rapport.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je crois que je pourrais répondre à cette

26 question sans examiner mon rapport.

27 M. KARNAVAS : [interprétation]

28 Q. Faites-le.

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1 R. Si on me permet deux phrases.

2 Q. D'accord.

3 R. Je pense qu'il est nécessaire à mon avis de parler de l'association des

4 municipalités qui a été créée dans l'intérêt d'un groupe ethnique

5 particulier par un parti politique particulier représentant de ce même

6 groupe ethnique, et que je ne pensais pas nécessaire de passer en revue

7 tous les ordres et tous les documents qui ont été rédigés à cette fin, à ce

8 moment-là. Je pensais que c'était évident pour tout le monde.

9 Q. A moins que cela ne soit pas le cas.

10 R. Mais, il y a peut-être des documents qui indiquent quelque chose de

11 différent.

12 Q. D'accord. Puisque nous parlons de décision de la Cour

13 constitutionnelle, peut-être pourrions-nous passer en revue un certain

14 nombre de ces documents. Mais, avant de nous pencher sur ces décisions,

15 j'aimerais vous demander si vous avez peu ou prou examiné les documents qui

16 pouvaient servir de référence, qui ont été évoqués notamment par M. Kljuic

17 lorsqu'il a témoigné ici en disant que les Croates de Bosnie-Herzégovine ne

18 cessaient de demander à l'Etat et au gouvernement de Sarajevo de prendre

19 des mesures en raison d'une menace imminente les visant eux ? Je parle d'au

20 moins sept documents qui lui ont été soumis pendant sa déposition. Vous

21 avez indiqué que vous avez suivi la déposition de M. Kljuic. Avez-vous

22 suivi cette partie précise de sa déposition ? Est-ce que je pourrais vous

23 demander si vous avez examiné ces documents ? Je peux, maintenant, vous les

24 citer. Est-ce que vous aimeriez que je vous les cite ?

25 R. Si vous les citez ou si vous ne les citez pas, ce sont des documents

26 que j'ai eus sous les yeux. Je peux d'emblée vous dire que je n'aie pas

27 d'ailleurs suivi plus d'une heure de la déposition et du contre-

28 interrogatoire de M. Kljuic.

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1 Q. Est-ce que vous vous êtes penché sur la pièce P 0032, qui parle de la

2 rencontre présidentielle du 4 avril 1991 et qui a été versée au dossier par

3 votre intermédiaire ?

4 R. Je ne suis pas sûr que ce document ait été évoqué durant la déposition

5 de M. Kljuic dans l'affaire Kordic.

6 Q. Tous ces documents l'ont été.

7 R. J'ai dit dans l'affaire Kordic.

8 Q. Dans l'affaire Kordic, vous étiez au Tribunal, si je me souviens bien ?

9 R. Oui.

10 Q. Il y a un fait que vous avez omis l'autre jour alors qu'une question

11 vous était posée à ce sujet. Vous étiez au Tribunal --

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Je souligne pour le compte rendu d'audience

13 que c'était le cas de façon à ce que la démonstration relative à ce que

14 nous avons dit du bureau du Procureur soit complétée.

15 Q. Qu'en est-il de la pièce P 0034, deuxième réunion de la présidence du

16 HDZ de Bosnie-Herzégovine, 16 avril 1991 ? Est-ce que vous l'avez examinée

17 au cours de la préparation de votre rapport ? Je n'en vois mention nulle

18 part.

19 R. Pas précisément pour la préparation de ce rapport, mais je l'ai sans

20 doute eu sous les yeux comme ceux de toutes les réunions de la présidence.

21 Q. Alors ?

22 R. Il y a sept ans.

23 Q. Qu'en est-il de la pièce P 0041, rencontre régulière de la présidence

24 du HDZ de Bosnie-Herzégovine, 10 juillet 1991 ? Ce sont toutes des réunions

25 sur les mêmes sujets, à savoir menace imminente ou danger pour l'Etat, et

26 nécessité de faire quelque chose, de s'organiser dans ce contexte ?

27 R. Non, je n'ai pas examiné ce document parce que je partais du principe

28 que M. Kljuic était un témoin viva voce qui traiterait de cette question.

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1 Q. D'accord. Alors, vous dites que vous partiez de ce principe; mais

2 comment saviez-vous que ce document allait être versé au dossier puisqu'ils

3 ont tous un numéro en P et ils ont été soumis à M. Kljuic ? Ou qu'est-ce

4 qui vous a servi à vous faire cette opinion ?

5 R. C'était un avis personnel sur la base de ce qui se passait dans le

6 procès Kordic.

7 Q. D'accord, d'accord. Donc, vous êtes clairvoyant également. Très bien.

8 Qu'en est-il de la pièce P 00042, réunion de la présidence du HDZ de

9 Bosnie-Herzégovine à Busovaca, 21 juillet 1991 ? Pas un mot n'en est dit

10 dans votre rapport.

11 R. Non.

12 Q. D'accord. La pièce P 00047, deuxième réunion ordinaire du Conseil

13 exécutif du HDZ à Prozor Rama; rien n'est dit dans votre rapport non plus à

14 ce sujet ?

15 R. Non.

16 Q. Puis, il y a deux autres documents, 9e Réunion régulière,

17 P 00052 et P 00051, communiqué de presse suite à la 9e Réunion régulière,

18 et puis, ces deux réunions datent du 26 août 1991. Rien dans votre rapport

19 à ce sujet, n'est-ce pas ?

20 R. Je ne dirais pas que ces documents je ne les aie pas examinés, parce

21 que tous les procès-verbaux de ces réunions sont des documents que j'aie

22 vus un certain nombre de fois avant de délibérément décider qu'ils

23 n'avaient pas nécessité d'être mentionnés dans mon rapport.

24 Q. Très bien. Mais si les Croates s'inquiétaient quant à l'éventualité

25 d'une guerre en Croatie, parce que la JNA utilisait le territoire bosniaque

26 pour attaquer la Croatie et le gouvernement de l'Etat, le gouvernement de

27 Sarajevo, n'était pas capable ou n'avait pas la volonté de faire quoi que

28 ce soit à cet égard. Est-ce que vous pensez que les Croates de Bosnie-

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1 Herzégovine étaient inquiets au point de penser que la Défense populaire

2 généralisée leur permettait de s'organiser au moins dans le but de contrer

3 une menace imminente ou un danger imminent ? Est-ce que vous avez pris cela

4 en considération ?

5 M. SCOTT : [interprétation] Au-delà des limites du rapport, Monsieur le

6 Président. Encore une fois, il ne lui a pas été demandé de spéculer quant à

7 ce qui était bon ou mauvais pour les Croates et dans ce qu'ils ont fait. Il

8 lui a simplement été demandé de témoigner sur les structures et les

9 processus mis en place qu'ils soient bons ou mauvais. M. Tomljanovich a dit

10 qu'il n'était pas là pour exprimer des jugements de valeur, mais simplement

11 pour rendre compte des structures telles qu'elles existaient, et c'est tout

12 ce qu'il a fait.

13 Encore une fois, Me Karnavas s'efforce de faire parler le témoin sur la

14 défense généralisée qui n'a rien à voir avec le mandant assigné à ce

15 témoin.

16 Me Karnavas peut appeler son propre expert, s'il souhaite que des témoins

17 parlent de ce sujet là ou non devant la Chambre, et le temps nécessaire

18 leur sera donné pour sortir du champ du rapport de ce témoin.

19 M. KARNAVAS : [interprétation] Comme je l'indiquais, Monsieur le Président,

20 parce qu'il y a des jugements de valeur dans le rapport de ce témoin, des

21 conclusions qu'il tire sur ce genre de sujet. Alors, je propose que, bien

22 sûr, j'appellerais mon témoin expert s'il le faut, je n'ai pas sept ans à

23 leur disposition ni l'argent du bureau du Procureur pour payer quelqu'un

24 aussi longtemps. Cela, c'est le premier argument. Mais, deuxième argument,

25 la charge de la preuve repose sur l'Accusation, et j'ai tout à fait le

26 droit de faire ce que je suis en train de faire. Donc, si l'Accusation

27 souhaite présenter un rapport avec des conclusions, j'ai le droit de le

28 contester.

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1 Voyons maintenant cette décision constitutionnelle. Vous avez cité cette

2 décision, n'est-ce pas ? Cela vous l'avez citée. Vous vous rappelez la date

3 de cette décision par hasard ?

4 R. A la mi-septembre 1992.

5 Q. 18 septembre 1992, en fait. Alors, cela va nous donner un peu de

6 travail. J'aimerais que nous nous penchions sur ce document, pièce P 00339,

7 si je ne m'abuse. Vous vous rappellerez qu'il s'agit d'un accord d'amitié

8 et de coopération, n'est-ce pas ?

9 R. Hm-hm.

10 Q. Alors, ceux d'entre -- dans l'intérêt de ceux qui n'ont peut-être pas

11 une connaissance détaillée de ce sujet, il s'agit d'un accord conclu entre

12 la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce

13 pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Très bien. En fait, c'est un accord entre Tudjman -- Franjo Tudjman,

16 qui présidait la République de Croatie et Izetbegovic qui était président

17 de la présidence et pas du pays, il était président, n'est-ce pas, de la

18 présidence de la République de Bosnie-Herzégovine; c'est exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Bon. Alors, d'après ce que j'ai compris et cela ne veut pas dire que

21 c'est déjà au compte rendu d'audience ni au dossier, mais j'inviterais

22 instamment la Chambre de première instance à se pencher avec le plus grand

23 soin sur le contenu de cet accord en ne perdant pas de vue dans le même

24 temps la pièce à conviction de l'Accusation

25 P 00336, qui est un transcrit présidentiel datant du 21 juillet 1992. Je ne

26 vais pas aborder dans le détail ici, mais c'est un transcript rédigé suite

27 à la rencontre qui a réuni le président Tudjman et le président

28 Izetbegovic, et à la fin de ce transcript, qui - comme vous pourrez le

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1 voir, est très volumineux - cet accord est conclu, mais, dans le

2 transcript, il est question de toute la dynamique et des mots qui ont été

3 prononcés au cours de la réunion et qui ont emmené à la conclusion de cet

4 accord et c'est sur ces mots que j'aimerais mettre l'accent aujourd'hui.

5 Nous allons maintenant y venir, mais c'était une introduction que je

6 faisais pour le compte rendu d'audience.

7 Monsieur, j'aimerais que nous nous penchions sur le paragraphe 1, qui se

8 trouve en page 2 de cet accord, numéro ERN 00810568. Il est dit à ce niveau

9 du texte qu'ils se sont mis d'accord sur la chose suivante. Je cite : "Le

10 président de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine et le

11 président de la République de Croatie sont convenus que le système étatique

12 futur de la Bosnie-Herzégovine découlera du respect du principe de

13 l'égalité pleine et entière des trois nations constitutives, à savoir les

14 Musulmans, les Croates, et les Serbes. Le système politique constitutionnel

15 du pays sera fondé sur l'existence d'unités constitutives dont la création

16 se fera dans la prise en compte des intérêts nationaux, historiques,

17 culturels, économiques, et autres de chacun."

18 Vous voyez ce passage ?

19 R. Oui.

20 Q. D'ailleurs, il y a un point que je devrais rappeler -- dans votre

21 rapport entre autres points très vagues. Vous parlez du concept de groupes

22 ethniques, et j'ai trouvé -- cela m'a frappé en tout cas comme étant assez

23 étonnant que vous utilisiez cette expression. Je crois que c'est en page 4

24 de votre rapport. Un instant. Je vérifie, paragraphe 9 de votre rapport.

25 Vous utilisez l'adjectif ethnique, et vous un historien, je crois que je

26 peux me permettre le ton que j'emploie en ce moment vous auriez sans doute

27 dû être plus prudent en vous penchant sur les nations historiques tels que

28 les Musulmans et les Serbes, et en les appelant nations plutôt que groupes

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1 ethniques, n'est-ce pas ?

2 R. Bien, c'est -- il y a une distinction me semble-t-il entre groupes

3 ethniques et nations. Je ne me suis pas donné pour tâche de définir

4 exactement ces expressions.

5 Q. Monsieur, vous êtes bien doté d'un diplôme de doctorat de Yale, n'est-

6 ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Si j'ai bien compris -- vous vous êtes sans doute penché sur les

9 raisons qui caractérisent l'importance de ces notions. Je crois comprendre

10 que vous étiez consultant dans cette -- que l'un de vos maîtres à

11 l'université était Ivo Banic; n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. D'accord. Il a écrit un ouvrage qui est tout à fait fondamental sur la

14 notion de droits nationaux, n'est-ce pas ?

15 R. Les nationalités de l'ex-Yougoslavie, oui.

16 Q. Bon. D'accord. Je suppose que puisque vous avez étudié l'histoire de la

17 Croatie au XIXe siècle puisque vous aviez un mentor, vous auriez dû ou lire

18 le livre dont il était l'auteur parce que cela aurait pu -- car, en

19 général, on lit les livres de son professeur, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, j'ai lu ses ouvrages.

21 Q. D'accord. En fait, il parle des nations historiques qui ne sont pas des

22 groupes ethniques. Ce sont de nations rien à voir avec des groupes

23 ethniques au sens du terme utilisé aux Etats-Unis ou dans d'autres pays.

24 R. Bien, c'est une distinction que fait le Pr Banac et je peux vous dire

25 quelles sont ses idées sur ce sujet et pourquoi il établit cette

26 distinction ?

27 Q. Vous, vous parlez de groupes ethniques et pas de nations historiques,

28 n'est-ce pas ?

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1 R. Non. Je pense que les groupes en question étaient les deux.

2 Q. D'accord. Avançons. En tout état de cause, pour revenir au document qui

3 présente cet accord, il est question de trois nations constitutives dans ce

4 document. D'ailleurs, est-ce que cela ne figurerait pas dans la

5 constitution l'existence de ces trois nations constitutives en Bosnie-

6 Herzégovine, est-ce que les termes utilisés n'étaient pas nations

7 constitutives ?

8 R. Oui, citées très fréquemment d'ailleurs.

9 Q. Fréquemment citées et d'ailleurs cités au cours de toutes les

10 négociations qui ont eu lieu dans lesquelles la notion de constitution

11 reconnaissant ces trois peuples constitutifs était toujours avancée.

12 R. Oui, d'ailleurs le sens exact à donner à ces termes a fait l'objet de

13 pas mal de divergences également entre ces différentes entités.

14 Q. D'accord. Quand vous dites entre ces groupes, vous parlez de quels

15 groupes exactement ?

16 R. Je parle des dirigeants des Serbes, des dirigeants des Musulmans, et

17 des dirigeants des Croates de Bosnie-Herzégovine.

18 Q. D'accord. Bien, approfondissons un peu. Parce que c'est vraiment trop

19 important pour passer rapidement. Est-ce que vous laissez entendre par

20 hasard que pendant ces négociations les Croates négociaient dans l'intérêt

21 du peuple croate en Bosnie-Herzégovine et qu'ils avaient des hésitations

22 quant à la possibilité pour les Musulmans de Bosnie d'être désormais

23 appelés des Bosniens ?

24 R. Cela dépend de ce que vous appelez une hésitation.

25 Q. Bon, est-ce qu'à quelque moment que ce soit, ils ont dit que les

26 Musulmans n'étaient pas une nation constitutive ? Est-ce qu'ils ne l'ont

27 jamais dit ? C'est une question très vaste, alors voyons qui était défini

28 comme Musulman.

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1 R. Ils ne l'ont pas dit pour autant que je le sache lorsque la

2 constitution était discutée, même si la question de l'appartenance

3 nationale et de l'existence d'une nation bosnienne musulmane a été évoquée

4 fréquemment.

5 Q. N'est-ce pas vrai que dans tous les accords de paix qui ont été

6 proposés et signés par les Croates ils étaient reconnus de façon claire et

7 nette que le peuple musulman de Bosnie-Herzégovine était une nation

8 constitutive ?

9 R. Je ne saurais pas absolument affirmatif, mais dans les documents

10 officiels, c'était en effet la pratique.

11 Q. Bien, c'est en tout cas ce qui a été signé. Est-ce que vous n'avez lu

12 aucun de ces documents ?

13 R. J'en ai lu un certain nombre.

14 Q. D'accord. Très bien.

15 M. KARNAVAS : [interprétation] Voyons donc, maintenant, le paragraphe 6 de

16 cette même page. Numéro ERN 00810569.

17 Il est question de la composante armée à savoir du Conseil croate de

18 Défense qui fait partie intégrante des forces armées unies de la République

19 de Bosnie-Herzégovine. Le Conseil croate de la Défense a ses représentants

20 au sein du commandement conjoint, commandement conjoint, j'insiste, des

21 forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine.

22 Q. Vous voyez ce passage ?

23 R. Oui.

24 Q. D'accord. Donc, dans cet accord, le HVO est bel et bien reconnu

25 officiellement, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, mais sous condition.

27 Q. Bon. Il est reconnu, n'est-ce pas, et ce texte date du 21 juillet 1992.

28 Poursuivons. Alors, il est dit ensuite : "Les autorités civiles provisoires

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1 - et je mets l'accent là-dessus provisoire" - les autorités civiles

2 provisoires - "créées en tant de guerre dans le cadre du Conseil croate de

3 Défense seront dès que possible mis en conformité avec le système

4 judiciaire constitutionnel de la République de Bosnie-Herzégovine, au cours

5 de pourparlers portant sur cette question, j'insiste, pourparlers portant

6 sur cette question qui commenceront immédiatement dans le respect des

7 principes établis au point 1 du présent accord."

8 Est-ce que vous voyez ce passage ?

9 R. Oui.

10 Q. Alors, à ce moment-là, Monsieur, est-ce qu'il existait une commission

11 ou en tout cas était-il prévu de créer une commission chargée de rédiger

12 une nouvelle constitution pour la République de Bosnie-Herzégovine ?

13 R. A ce moment-là, je n'en suis pas sûr.

14 Q. Vous ne vous rappelez pas ?

15 R. Non, je ne me rappelle pas.

16 Q. Mais à un certain moment il y a eu une telle commission. Si vous ne le

17 savez pas, dites-le.

18 R. Bien, il y en a eu à plusieurs moments, je ne sais plus exactement ce

19 qu'il en était à ce moment-là je ne m'en souviens pas.

20 Q. Quand vous dites "à différent temps," je ne vous interroge pas au sujet

21 de 1994 ou de 1995. Je vous interroge au sujet de 1992.

22 R. Je ne me souviens pas si à l'été 1992 une telle commission existait.

23 Q. Puis, au point 7, il est dit, et cela pourrait être important compte

24 tenu de ce qui précède, je cite : "La République de Bosnie-Herzégovine et

25 la République de Croatie autorisent mutuellement leurs citoyens à acquérir

26 une nationalité mixte." Je souligne ceci à l'intention de la Chambre

27 puisque c'est une question qui a été contestée.

28 Alors, Monsieur, ce texte date du 21 juillet 1992, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Je crois que c'est exact.

3 Q. J'ai cité le transcript présidentiel. Je suppose que vous avez lu ce

4 transcript, celui portant sur cette journée précise et que vous êtes au

5 courant des négociations en question, à quel point elles ont été

6 laborieuses et j'utilise ce thème, notamment, en rapport avec les

7 paragraphes dont j'ai donné lecture.

8 R. Oui, j'ai examiné ce transcript.

9 Q. Alors, penchons-nous, maintenant, sur la pièce P 00346, datant du 26

10 juillet 1992, qui est une lettre qui, comme nous le voyons, provient du

11 secrétaire général du HDZ de Bosnie-Herzégovine.

12 Alors, prêtons une attention toute particulière à la première ligne où nous

13 lisons, je cite : "Le 23 juillet 1992, l'Union démocratique croate de

14 Bosnie-Herzégovine a reçu une lettre de la Cour constitutionnelle datant du

15 22 juillet 1992." Vous voyez ce passage ?

16 R. Oui, bien sûr.

17 Q. Là, se trouve l'élément sur lequel je souhaitais mettre l'accent, à

18 savoir que, le lendemain - je dis bien le lendemain du jour où Izetbegovic

19 signe un accord - il semble que quelqu'un au sein de son gouvernement

20 encourage la Cour constitutionnelle à entamer une procédure contre le HDZ

21 et le HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, à savoir ces organismes

22 mêmes qui, dans le cadre de l'accord d'amitié, viennent d'être reconnus

23 officiellement.

24 M. SCOTT : [interprétation] Peut-être Me Karnavas pourrait-il nous dire

25 quel est le rapport entre les deux éléments car il semble impliquer qu'il y

26 en a un ?

27 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez le

28 président de la présidence qui, selon les propos du témoin Galbraith

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1 entendu récemment ici, était président de l'ensemble du pays et qui signe

2 un accord et dans cet accord il reconnaît le HVO et, si nous regardons le

3 paragraphe 6 de cet accord provisoire, vous voyons qu'il y est question des

4 autorités civiles provisoires. Alors qu'est-ce que c'est que des autorités

5 civiles provisoires ? Si vous vous penchez sur l'intitulé, vous voyez qu'il

6 est question de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et du HVO comme étant

7 une composante civile. Alors, d'abord, il est question du HVO et de

8 l'aspect provisoire de ces structures civiles.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pourrais répondre si vous y tenez.

10 M. KARNAVAS : [interprétation]

11 Q. D'accord, d'accord. Première question, est-ce que vous êtes d'accord

12 que ceci se passe, le lendemain, de la signature de l'accord ?

13 R. Je ne suis pas sûr, oui, oui, le 22, c'est bien lendemain.

14 Q. D'accord. Je suppose que vous ne voyez aucune contradiction là-dedans.

15 R. Non et je peux vous dire pourquoi.

16 Q. Mais vous n'allez pas nous présenter des spéculations ?

17 R. Non, non, pas du tout.

18 Q. Vous n'allez pas citer quelque chose que je peux lire moi-même ?

19 R. Si, je le ferai.

20 Q. D'accord. Allez-y.

21 R. Je crois --

22 Q. Je ne vous demande pas de me dire ce que vous croyez, je vous demande

23 de dire ce que vous savez. Citez-moi un document qui explique comment il

24 est possible qu'un jour on voit Izetbegovic signer un accord à la suite

25 d'une réunion qui a duré toute la journée et le lendemain, on voit que la

26 Cour constitutionnelle s'efforce de dire que les institutions reconnues la

27 veille sont devenues illégales.

28 R. C'est très simple. D'abord, et je vous renverra à un document qui

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1 prévoit la séparation des pouvoirs en Bosnie-Herzégovine, la Cour

2 constitutionnelle pourrait --

3 Q. D'accord, d'accord, mais dites-moi --

4 R. D'abord --

5 Q. Un instant. Avant de poursuivre, vous avez parlé de séparation des

6 pouvoirs. C'est quelque chose que nous connaissons bien aux Etats-Unis, que

7 j'ai pas mal étudié, personnellement, puisque j'ai étudié le droit

8 constitutionnel, mais vous nous avez dit que vous n'étiez pas juriste, vous

9 nous avez dit que vous n'étiez pas spécialiste des instruments juridiques.

10 Alors, sur quoi vous fondez-vous, sur quel fondement juridique, en

11 particulier, éventuellement, pour déclarer qu'il y avait séparation des

12 pouvoirs, notamment, à la période où, je crois vous l'avoir entendu dire,

13 une déclaration de menace imminente de guerre existait ?

14 R. Oui, c'était le cas.

15 Q. D'accord. Donc, vous savez avec certitude, assis sur la chaise des

16 témoins ici, qu'il existait une séparation des pouvoirs, à ce moment-là, en

17 Bosnie-Herzégovine parce que nous allons, dans ce cas-là, cesser de

18 discuter et passer à autre chose.

19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, j'ai un problème

20 technique. Les documents que nous voyons sur la gauche de l'écran sont en

21 anglais, sur la droit en B/C/S, et normalement, les deux documents doivent

22 être un seul et même document, deux langues différentes, mais je n'ai pas

23 l'impression que ce soit le cas. Parce que vous avez parlé du lendemain de

24 la signature de l'accord et, si je me souviens bien, vous avez cité la date

25 du 21 juillet pour la signature de l'accord, or je vois écrit 23.

26 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, mais, si on n'oublie pas --

27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc, ce n'est possible de parler

28 d'une lettre qui date du lendemain si on parle d'une lettre de deux jours

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1 plus tard.

2 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge, je vais lire l'intégralité

3 du texte en anglais. Je cite : "Le 23 juillet 1992, l'Union démocratique

4 croate de Bosnie-Herzégovine a reçu une lettre de la Cour constitutionnelle

5 de Bosnie-Herzégovine le 23." Puis, ensuite, on voit mention du 22 juillet

6 1992. Donc, nous ne sommes pas en possession de cette lettre, mais il est

7 fait référence à cette lettre. Je suppose que puisque l'accord a été signé

8 le 21, ceci peut servir d'élément de preuve indirect. Donc, il est dit :

9 "Nous avons reçu la lettre du 23, mais elle datait du 22." Donc, on peut en

10 déduire que la lettre a été envoyée le lendemain.

11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] D'accord, merci.

12 M. KARNAVAS : [interprétation]

13 Q. Très bien. Monsieur, je suppose qu'à un certain moment, vous avez lu la

14 décision datant du 18 septembre 1992, n'est-ce pas ? R. Oui.

15 Q. D'accord. D'ailleurs, revenons sur cette question de la séparation des

16 pouvoirs, si vous voulez bien, et je ne voudrais pas en parler trop

17 longtemps -- m'étendre abusivement sur ce sujet, mais vous n'avez pas pu

18 nous dire avec quelque certitude que ce soit qu'il y avait séparation des

19 pouvoirs à ce moment-là, n'est-ce pas ?

20 R. Je peux vous dire avec un assez bon degré de certitude --

21 Q. Je parle de certitude juridique.

22 R. Oui, je peux vous le dire avec pas mal de certitude juridique --

23 Q. D'accord, d'accord.

24 R. -- que cette procédure a été entamée par la Cour constitutionnelle.

25 Q. Monsieur, je vous demande s'il y avait séparation des pouvoirs. Je sais

26 que la Cour pouvait entamer une procédure et qu'Izetbegovic devait

27 reconnaître la procédure lancée par la Cour constitutionnelle. Mais ce que

28 je vous demande, c'est si vous savez avec certitude que légalement, il

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1 existait à ce moment précis une séparation des pouvoirs. N'oubliez pas

2 l'état de guerre. Donc, est-ce qu'il existait séparation des pouvoirs,

3 "oui" ou "non" ? Parce que vous en avez parlé.

4 R. J'en ai parlé dans le contexte d'une contradiction entre le fait que la

5 Cour constitutionnelle entame une procédure et le fait qu'Izetbegovic avait

6 dit quelque chose de particulier.

7 Q. Mais c'est une supputation de votre part, une conjecture.

8 R. Non, ce n'est pas une conjecture. Je ne sais pas si Izetbegovic avait

9 la moindre influence sur la Cour constitutionnelle, la seule chose que je

10 sais avec certitude, c'est que la Cour a lancé sa procédure.

11 Q. Alors, vous dites que vous rapportez des propos venant de tiers ?

12 R. De la Cour constitutionnelle.

13 Q. Mais, d'après-vous, qui a dit cela avec une quelconque certitude ?

14 R. Mais, dans ce cas-là, je ne peux pas me fonder uniquement sur le

15 document que vous me soumettez, mais sur un certain nombre d'autres

16 documents.

17 Q. Monsieur, s'agissant de la séparation des pouvoirs, vous avez fait une

18 affirmation. A un certain moment, la Chambre de première instance va vous

19 parler de cette décision officielle et j'aimerais vérifier pour ma part si

20 vous savez qu'il existait effectivement une séparation des pouvoirs à ce

21 moment précis.

22 R. De facto, je ne peux pas le dire avec certitude.

23 Q. De jure, est-ce que vous pouvez me mettre le doigt sur un document

24 précis qui l'indique ?

25 R. Je crois qu'il s'agit de la constitution.

26 Q. Vous croyez ou vous savez avec certitude ? Oui, non, peut-être ? Parce

27 que je suppose que de votre part, c'est en fait une conjecture.

28 R. De mémoire, je ne sais pas.

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1 Q. D'accord. Alors, penchons-nous sur un autre document, la pièce P 00817.

2 M. KARNAVAS : [interprétation] Je pense qu'elle est pertinente -- les

3 périodes sont pertinentes, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

4 parce que cela permet de mettre les choses en perspective.

5 Q. Vous connaissez ce document, n'est-ce pas? C'est un document signé par

6 le premier ministre, M. Akmadzic, n'est-ce pas ? C'est un Croate.

7 R. Oui, je connais ce document. Il y a longtemps que je ne l'ai pas eu

8 sous les yeux, mais je l'ai inclus dans mon rapport.

9 Q. Vous le voyez n'est-ce pas ?

10 R. D'accord, je connais ce document.

11 Q. Bien. Alors, le 27 novembre 1992, décision signée par le premier

12 ministre dans laquelle il est dit que le Dr Jadranko Prlic est habilité à

13 présider le Conseil croate de Défense. Il n'est pas dit l'ex-Conseil croate

14 de Défense ou le Conseil croate de Défense annulé par la Cour

15 constitutionnelle; il est dit Conseil croate de Défense. Donc, il est

16 habilité à présider le HVO au sein du gouvernement de la République de

17 Bosnie-Herzégovine et, ensuite, on voit une énumération et il est nommé

18 numéro un du gouvernement du personnel chargé par le gouvernement de la

19 République de Bosnie-Herzégovine de veiller à un certain nombre d'éléments

20 destinés à aider la population de la République de Bosnie-Herzégovine à

21 survivre; vous voyez ce passage ?

22 R. Oui.

23 Q. D'accord. Alors, assurons-nous que ce point est bien compris et

24 penchons-nous sur la pièce 1D 00898. C'est un exemplaire du journal

25 officiel, donc, ce n'est pas seulement le gouvernement qui signe un

26 document ou rend une décision officielle que nous pouvons nous mettre sous

27 les yeux, mais nous voyons également que ceci est repris dans le journal

28 officiel de la République de Bosnie-Herzégovine. Dans ce document officiel,

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1 n'est-ce pas, nous voyons que cette décision est reprise ? Vous admettez

2 qu'il s'agit bien du journal officiel ?

3 R. Oui, bien qu'il y ait une implication que vous avez déjà évoquée sur

4 laquelle il faut mettre l'accent. Mile Akmadzic est Croate et ceci est

5 essentiel pour comprendre ces documents.

6 Q. Un instant. Est-ce que vous voulez dire que Mile Akmadzic était à

7 Sarajevo, à ce moment-là, n'est-ce pas ?

8 R. Je crois qu'il l'était toujours.

9 Q. Il était à Sarajevo à ce moment-là, c'est exact ?

10 R. Je pense qu'il était toujours à Sarajevo en novembre 1992. Il part à un

11 autre endroit un peu plus tard, mais je ne peux pas le dire avec certitude.

12 Q. D'accord. Est-ce que vous voulez dire -- parce que c'est la raison pour

13 laquelle je présente ce deuxième document, est-ce que vous voulez dire que

14 ce Croate très malin a pu prendre une décision, donc, faire publier une

15 décision officiel avec un sceau officiel, parce que les sceaux, cela

16 compte, n'est-ce pas, et que cette décision est reprise par le journal

17 officiel pour être présentée universellement à Dieu et aux hommes et que

18 personne ne l'a remarquée ? Parce que si vous avez un document qui montre

19 que cette décision a été abrogée ou qu'elle n'a pas été admise et que donc

20 ce document démontrerait qu'Akmadzic a agi en-dehors de ses attributions

21 juridiques et sans l'aval de la présidence de la République de Bosnie-

22 Herzégovine, j'aimerais que vous me soumettiez ce document.

23 R. Je peux répondre, mais cela me prendrait très longtemps. Il faudrait

24 que je le fasse à huis clos.

25 Q. Monsieur, il est dit -- dans cette décision officielle que j'ai en

26 mains, il est fait mention d'Akmadzic. Ce n'est pas lui qui signe ce

27 document officiel, qui se lit comme suit à la dernière ligne, je cite : "Le

28 gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine émet par la présente ce

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1 qui suit." Donc, ce n'est pas Akmadzic qui émet la décision, c'est le

2 gouvernement. Lui, simplement, signe à la demande du gouvernement au nom du

3 premier ministre et il appose le sceau officiel au bas de ce document,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Il y a pas mal de prémisses à votre question. Je ne suis pas sûr

6 qu'Akmadzic agissait avec pleine et entière habilitation et qu'il n'est pas

7 sorti de ses attributions. Comme je l'ai dit --

8 Q. Est-ce que vous voulez dire, Monsieur, que ces documents - et nous

9 parlons en audience publique - est-ce que vous voulez dire que ces

10 documents que je vous ai soumis sont peut-être des faux ?

11 R. Non, ce n'est pas ce que je veux dire.

12 Q. Vous voulez dire que ce n'est pas un numéro officiel du journal

13 officiel que n'importe qui peut consulter ?

14 R. Si, si. C'était un exemplaire public du journal officiel.

15 Q. Donc, quelqu'un comme Izetbegovic ou un de ses proches collaborateurs

16 participant au gouvernement reçoit le journal officiel et peut voir le

17 texte en question, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous ne voulez pas dire qu'Akmadzic a simplement glissé ce texte dans

20 le journal officiel en catimini ?

21 R. Qu'il est agi en dépassant ses pouvoirs officiels ou pas, il y a dû y

22 avoir une réaction et ce n'est pas l'objet de votre question, donc je ne

23 pense pas que Akmadzic ait pu rester en poste très longtemps après cela.

24 Q. Est-ce que vous voulez dire qu'il a été limogé, licencié, est-ce que

25 c'est cela l'implication de votre réponse ?

26 R. Non, je crois que M. Akmadzic a quitté son poste de son plein gré.

27 Q. D'accord. Mais rien ne prouve -- aucun document n'existe qui peut

28 prouver l'authenticité de l'intention qui a présidé à la prise de cette

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1 décision, n'est-ce pas ?

2 R. Non.

3 Q. D'accord. Je suppose que vous n'avez pas lu la loi sur l'administration

4 de l'Etat, n'est-ce pas ?

5 R. Quelle loi sur l'administration ? Sur l'administration de Bosnie-

6 Herzégovine ?

7 Q. Mais de quoi parlons-nous ici, de la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

8 Alors, veuillez m'accompagner mentalement, en tout cas, sur le plan

9 géographique.

10 R. C'est précisément le problème parce qu'il y avait pas mal de lois qui

11 n'avaient pas de rapport direct avec la géographie.

12 Q. C'est la loi de l'Etat sur l'administration de l'Etat, ce n'est pas

13 très compliqué, n'est-ce pas ?

14 R. J'ai eu ce texte sous les yeux, mais je ne l'ai pas inclus dans mon

15 rapport.

16 Q. D'accord. Je vois l'heure, Monsieur le Président, peut-être est-ce

17 l'heure de la deuxième pause ?

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut faire la pause maintenant et, ensuite, on

19 ira jusqu'à 19 heures.

20 M. KARNAVAS : [interprétation] Cela me permettra de m'organiser. Je ne peux

21 pas promettre que j'en aurai fini ce soir, mais je vais faire absolument le

22 maximum dans ce sens, Monsieur le Président, comme je l'ai déjà fait

23 jusqu'à présent.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous comptons sur vous. Alors, il est

25 5 heures 20. Nous faisons la pause de 20 minutes et nous reprendrons aux

26 alentours de 5 heures 40.

27 --- L'audience est suspendue à 17 heures 20.

28 --- L'audience est reprise à 17 heures 40.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Oui, Maître Karnavas, vous avez la

2 parole.

3 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

4 Juges.

5 Q. A la lumière des événements en Bosnie-Herzégovine, à l'époque, où les

6 Croates de Bosnie-Herzégovine se sont organisés, pensez-vous qu'il ait été

7 déraisonnable de se préparer -- pour eux, de se préparer à l'éventualité de

8 circonstances similaires à ce qui se passait en Croatie.

9 R. Dans l'ensemble non, avoir adopté les mesures précises, peut-être.

10 Q. Vous avez un avis donc ?

11 R. J'ai un avis personnel que j'estime de ne pas inclure dans le rapport

12 autant que possible.

13 Q. Bien. Je comprends et j'imagine que vous savez ce qui s'est passé à

14 Ravno.

15 R. Oui, j'en ai souvent entendu parler.

16 Q. Vous en avez souvent entendu parler par certaines personnes ou vous

17 savez ce qui s'y est passé ?

18 R. A chaque fois que j'ai travaillé sur une affaire HVO, la Défense en

19 parle.

20 Q. Vous dites la Défense soulève cet argument comme si c'était quelque

21 chose d'atroce ou d'affreux.

22 M. SCOTT : [interprétation] Je pense que cela ne -- c'est en dehors du

23 domaine et puis, je ne pense pas que Me Karnavas a raison en disant que le

24 témoin a dit que c'était une insulte ou quelque chose de problématique que

25 d'évoquer Ravno.

26 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur Ravno, quel est l'intérêt, la pertinence, en

28 quoi cela peut être utile pour votre défense ?

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1 M. KARNAVAS : [interprétation] On a demandé, si vous me le permettez à

2 monsieur d'écrire un rapport sur le HVO HB, on peut se poser,

3 effectivement, la question de savoir quand cela a été mis en place et

4 comment. Monsieur nous a dit qu'il avait un avis personnel sur ce que les

5 Croates avaient fait. Si vous nous le permettez, si vous voulez bien me

6 laisser aller de l'avant, vous verrez que nous ne sommes pris dans un repli

7 de l'espace-temps, mais que nous agissons dans le vrai monde, que le HVO HB

8 a été mis en place étant donné le contexte dans lequel cela a été fait.

9 Monsieur est un expert et je lui pose des questions en tant qu'expert.

10 Monsieur a pris la peine de dire que la Défense utilise tout le temps et,

11 dans le ton, dans sa façon de dire, j'avais l'impression, effectivement,

12 qu'il méprisait ou qu'il négligeait les éléments de Ravno.

13 L'INTERPRÈTE : M. Scott s'exprime sans micro.

14 M. SCOTT : [interprétation] Pour reprendre ce que Me Karnavas a dit ou, à

15 l'occasion, reprenons les lignes 15 et 16 : "Monsieur," - et je le redis :

16 "Monsieur n'a pas eu pour obligation d'écrire un rapport sur la mise en

17 place de la HZ HB, mais plutôt un rapport sur l'existence des structures ou

18 l'état des structures et des organes telles qu'elles existaient, et non pas

19 de mettre un avis, de décrire simplement qu'il y avait la présidence, les

20 forces militaires, un ministère de la Défense, ce genre de chose. On ne lui

21 a jamais demandé de rédiger un rapport sur l'histoire de la mise en place

22 de ces structures en Bosnie et de la pertinence de cette mise en place."

23 C'est justement là le problème de Me Karnavas, c'est qu'il ne prend pas en

24 compte ce des contraintes du rapport.

25 M. KARNAVAS : [interprétation] Chapitre 1 : "L'établissement de l'Herceg-

26 Bosna et des structures politiques, et leurs fondations en droit." Pendant

27 la première phase d'interrogation, l'Accusation a effectivement fait

28 répondre le témoin sur certains points des développements. Si vous me le

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1 permettez, je pourrais vous montrer que et faire comprendre à Monsieur que

2 c'est une question pertinente et on a déjà perdu cinq minutes.

3 Q. Monsieur, savez-vous ce qui s'est passé à Ravno ?

4 R. Oui.

5 Q. Est-ce que c'était un lieu musulman, croate ou serbe ?

6 R. C'était une petite ville ou un village croate.

7 Q. Bien. Alors, quelles étaient les victimes ?

8 R. C'était les Croates.

9 Q. Quand est-ce que les événements se sont passés ?

10 R. A l'automne 1991, peut-être en octobre.

11 Q. Nous avons entendu certains témoignages selon lesquels le gouvernement

12 de Sarajevo n'avait pas pris une part particulièrement active à la

13 protection ou le sentiment de protection des Croates de cette région pour

14 les protéger contre des agressions de la part des Serbes ou de l'armée

15 nationale yougoslave. Est-ce que c'est exact ?

16 R. Etant donné la question telle que vous l'avez posée, vous avez entendu

17 des témoignages.

18 Q. Etes-vous d'accord ou pas avec ma vision des choses ?

19 R. A propos de votre analyse sur Ravno ?

20 Q. Etes-vous en accord ou non avec le fait que le gouvernement de Sarajevo

21 n'a pas particulièrement répondu aux besoins des Croates après les

22 événements de Ravno ?

23 R. Je sais que c'est une question qui fait débat depuis très longtemps, la

24 question de savoir si, "oui" ou "non", les autorités de Sarajevo ont agi

25 suffisamment avant ou après.

26 Q. Le président Izetbegovic avait dit : "Ce n'est pas notre guerre."

27 M. LE JUGE ANTONETTI : La question est quand même très simple : est-ce que

28 le gouvernement de Sarajevo a fait ce qu'il fallait après les événements de

Page 6813

1 Ravno ? Vous dites cette question a fait l'objet de débat. Vous, en tant

2 qu'historien, quel est votre point de vue ? Si vous en avez un. Si vous en

3 avez pas, vous dites : je peux pas et on passe à autre chose.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne les événements de Ravno, je

5 n'ai pas d'avis à dire sur la question de savoir si, "oui" ou "non",

6 suffisamment d'actions ont été prises.

7 M. KARNAVAS : [interprétation]

8 Q. Bien. Savez-vous dans quelles mesures les événements de Ravno ont pu ou

9 auraient pu affecter la Communauté croate de Bosnie-Herzégovine ?

10 R. Ecoutez, je ne sais pas. Je ne peux pas vous décrire leur état

11 d'esprit, mais je sais qu'ils se sont exprimés.

12 Q. Je sais qu'un certain nombre de documents ont été soumis à M. Kljuic à

13 propos de la Communauté croate et des débats au sein de la direction

14 croate. Sur la base de ces documents, on peut partir du principe que si

15 vous aviez pris la peine de lire ces documents, vous auriez pu vous former

16 un avis selon lequel les Croates et la direction croate de Bosnie était

17 bien inquiète, à ce moment-là, étant donné les événements qui se passaient

18 en Croatie et les événements qui semblaient se profiler en Bosnie; êtes-

19 vous d'accord ?

20 R. Evidemment, les gens étaient préoccupés, inquiétés.

21 Q. Mais pas seulement les gens, je vous parle des Croates, des directions

22 croates ?

23 R. Effectivement, ils disent qu'ils l'étaient.

24 Q. Vous nous dites : "Ils disent que," comme si vous vous détachiez

25 complètement de cela.

26 R. Non, j'essaie simplement de vous dire que je parle aux noms des

27 documents ou de reprendre les documents.

28 Q. Monsieur, en tant qu'historien, voyant ce qui s'est passé sur le

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1 terrain et étant donné ce que vous savez de ce qui s'est passé sur le

2 terrain, mettez-vous en doute le fait selon lequel ces préoccupations et

3 ces inquiétudes étaient légitimes ?

4 M. SCOTT : [interprétation] Encore une fois, c'est en dehors du mandant du

5 rapport. Cela ne l'est pas, cela ne l'était pas. Encore une fois, si Me

6 Karnavas veut traîner et sortir le --

7 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense veut exposer une théorie par

8 l'intermédiaire de ce témoin. La théorie, elle est bonne ou fausse. Les

9 Juges apprécierons au final, mais là cela ne vaut rien. Donc, il y a une

10 théorie, la théorie c'est de dire : il y a eu un événement à Ravno qui a eu

11 des conséquences. Est-ce que -- la Communauté croate, qu'elle était son

12 inquiétude ? Qu'est-ce qu'ils ont fait, et cetera ? C'est la théorie de la

13 Défense. Pourquoi vous voulez lui mettre des bâtons dans les roues ?

14 Laissez la Défense poser des questions et nous verrons après parce que là,

15 on perd du temps. Parce que le témoin ne répond pas, la Défense reposera

16 les mêmes questions à un autre témoin; et vous vous lèverez à chaque fois

17 pour dire : ce n'est pas dans le cadre du contre-interrogatoire. Mais nous,

18 c'est notre cadre. On doit répondre à ce type de question. On ne se

19 contente pas que de l'acte d'accusation.

20 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, c'est

21 au-delà de ce qu'était la mission de ce témoin. C'est comme de dire à un

22 témoin, Ecoutez, vous nous avez écrit sur Mars, je vais vous poser des

23 questions sur Pluton. On répète, on répète, c'est toujours le même jour, on

24 va au-delà du cadre.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin a répondu. Il a dit : je ne peux rien

26 dire. Question de Me Karnavas, il dira : je ne peux y répondre. Ce que je

27 vous dis je le dirais exactement à Me Karnavas s'il faisait la même chose à

28 votre égard. Poursuivez, Maître Karnavas.

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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Dans votre rapport, Monsieur, vous nous dites que le HZ HB a été mis en

3 place avec pour but ultime de se développer et de s'installer en tant

4 qu'Etat. Je crois que c'est au paragraphe 12 de votre rapport. Il semble de

5 ce que vous nous dites dans l'interrogatoire principal dont le contre-

6 interrogatoire a également dans les objections de l'Accusation que vous

7 n'avez pas examiné les institutions au regard du contexte de leur

8 établissement.

9 R. Je ne crois pas avoir jamais dit que cela devait s'établir ou être

10 établi pour développer en tant que structure d'Etat.

11 Q. Etes-vous donc en train de dire, Monsieur, que cela n'a pas été mis en

12 place, que c'est bien votre avis d'expert aujourd'hui, que cela n'a pas été

13 mis en place pour devenir un Etat ou un para-Etat ou un pseudo-Etat ou

14 autres éléments similaires de la famille des Etats ?

15 R. C'est mon avis sur la base de tout ce que je sais et --

16 Q. Hm-hm.

17 R. -- ce que j'ai lu que la solution idéale.

18 Q. Je ne vous parle pas de solution je vous parle de l'objectif de la mise

19 en place de ces circonstances.

20 R. Cela a été établi.

21 Q. Après sept ans et demi de travail sur cette question et sous

22 l'observation de l'Accusation êtes-vous en train de dire que ces structures

23 n'ont pas été mises en place pour se transformer en Etat para-Etat ou

24 pseudo-Etat interne ?

25 R. Je crois que cela a été mis en place pour faciliter l'inter collection

26 avec un autre Etat ou d'autres structures d'Etat.

27 Q. Pour pouvoir être annexé, pour faire sécession.

28 R. Je crois qu'effectivement c'était le scénario idéal de la part des

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1 fondateurs a priori.

2 Q. Vous pensez donc que c'était l'objectif principal de ces personnes. Je

3 vous parle dans votre langue maternelle et vous êtes un Dr de

4 l'universitaire et répondez-moi clairement.

5 R. Je crois qu'en parlant de tous ceux qui ont participé --

6 Q. D'accord.

7 R. -- bien, effectivement la solution idéale c'était de voir ces

8 territoires être agglomérés à la Croatie même si cela ne pouvait pas se

9 faire immédiatement.

10 Q. Bien. A la lumière de cet objectif que vous venez de reconnaître, est-

11 ce que la mise en place la HZ HB devait être prise en compte à la lumière

12 du contexte et des événements sur le terrain ?

13 R. cela est --

14 Q. Ce qui arrive au fond.

15 R. Bien, je n'ai pas vraiment examiné cette question-là dans ce rapport --

16 Q. D'accord ?

17 R. -- parce que je ne pensais pas --

18 Q. Dans quelle mesure dans ce rapport pensez-vous qu'au niveau de l'Etat

19 les structures d'Etat étaient en train de protéger les Croates ou même les

20 Musulmans par rapport aux événements qui se déroulaient ? Est-ce que vous

21 l'avez mis dans le rapport ?

22 R. Non, cela ne l'était pas.

23 Q. Y a-t-il des éléments dans votre rapport sur les moyens que l'Etat

24 m'était à la disposition de la population pour mettre en place les mesures

25 de Défense civile, protéger les hôpitaux, les écoles, rien de cela n'est

26 inclus ?

27 R. Effectivement, rien de cela n'est inclus, vous avez raison.

28 Q. Dans votre rapport en fait vous ne faites rien -- absolument rien pour

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1 essayer de comprendre ce qui se passe au niveau de l'Etat et du

2 gouvernement à Sarajevo de leurs réactions et de leurs actions pour

3 garantir la protection des Croates soumis à l'attaque de la part des

4 Serbes. Vous ne le traitez pas de cette question ?

5 R. Effectivement, je ne le fait pas ce n'était pas mon objectif, je ne

6 cherchais pas à voir si la fondation d'Herceg-Bosna était fondée,

7 justifiée.

8 Q. [aucune interprétation]

9 R. Quelles étaient les motivations.

10 Q. Le HVO, l'aspect militaire des choses, est-ce que cela a été mis en

11 place de façon légitime étant donné les circonstances ? "Oui" ou "non" ou

12 "je ne le sais pas."

13 R. Ecoutez, c'est plus d'une question que vous me posez là.

14 Q. Non, non.

15 R. Tout d'abord, est-ce que vous parlez de HVO, HZ HB ?

16 Q. Je vous parle des services militaires, des Départements de Défense.

17 Ecoutez ma question.

18 R. Le HVO a été fondé le 8 avril 1992.

19 Q. Que se passait-il à ce moment-là en Bosnie-Herzégovine ?

20 R. C'était juste après la reconnaissance de l'indépendance et au tout

21 début des combats, le combat avait commencé en mars, fin mars.

22 Q. Vous parlez de combat qui se bat, qui a été attaqué ?

23 R. Les deux.

24 Q. Qui se fait attaqué ?

25 R. Les forces telles qu'elles sont en présence les forces croates.

26 Q. Mais les gens bon sens. Qui se fait attaquer ? Où ? Vous êtes un

27 historien nom de Dieu. Dites-nous, exactement. Cela fait sept ans et demi

28 que vous travaillez là-dessus. Qui s'est fait attaqué à ce moment-là tant

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1 est si bien que le HVO a été mis en place ?

2 R. Ecoutez, je ne crois pas que les circonstances aient nécessaire conduit

3 à la nécessité de la mise en place de la HVO.

4 Puis, je peux répondre à la question de savoir qui se faisait attaquer.

5 Q. Bien. Mais dites-le-nous.

6 R. Les autorités civiles se font auto défendre -- défendre attaquer dans

7 le nord-est de la Bosnie.

8 Q. Est-ce que ce sont des Croates de Bosnie-Herzégovine qui se font

9 attaquer, "oui" ou "non" ?

10 R. Oui, et dans de nombreux endroits.

11 Q. [aucune interprétation]

12 R. En particulier à Kupres.

13 Q. Est-ce que l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine les a

14 soutenu ?

15 R. Il n'y avait pas d'armée nationale.

16 Q. Justement, voilà. Il n'y avait pas d'armée. La Ligue patriotique quand

17 est-ce qu'elle a été fondée ? Je vais essayer de voir. Dites-le-nous,

18 Monsieur, dites-le-nous, le savez-vous ?

19 M. SCOTT : [interprétation] Encore une fois, Monsieur le Président, je ne

20 cherche pas à vous fatiguer mais je crois qu'on en est en train de faire

21 des choses inacceptables, on n'est pas dans le cadre du débat.

22 M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis obligé d'agir ainsi parce que le

23 témoin ne répond pas comme il le faut.

24 M. SCOTT : [interprétation] M. Tomljanovich a répond correctement à toutes

25 les questions. Rien à voir avec la Ligue patriotique.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez parfaitement répondu aux questions,

27 Monsieur l'Expert. Vous avez dit quelque chose, à la ligne 15, il n'y avait

28 pas de l'ABiH. Cette phrase d'ordre général. Vous pouvez la recadrer dans

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1 le temps ? Parce qu'évidemment, la question de la Ligue patriotique est

2 venue tout de suite, vous dites cela sur un plan général ou non, ou vous

3 avez des points de repère, et si l'ABiH existait, elle existait à partir de

4 quand ? A quel moment ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, je cherchais à faire une

6 distinction entre l'ABiH sous ce titre-là et d'autres institutions

7 militaires ou paramilitaires ou relevant du ministère de l'Intérieur qui se

8 battait peut-être au nom des autorités de Bosnie-Herzégovine.

9 La Ligue patriotique, autant que je m'en souvienne - et encore une fois, je

10 n'ai pas réexaminé ces questions récemment - était en train d'être mise en

11 place dès avant les combats. L'un des dirigeants principaux était le

12 général Halilovic. Je ne suis pas absolument certain de savoir à quelle

13 date cela a été mise en place je sais que l'armée de Bosnie-Herzégovine n'a

14 été mise en place que, plus tard, peut-être à l'été 1992, de façon

15 formelle. Entre-temps, un certain nombre d'Unités de Défense territoriale

16 ont commencé à être actives en Bosnie-Herzégovine au nom du gouvernement de

17 Bosnie-Herzégovine.

18 M. KARNAVAS : [interprétation]

19 Q. Quand le président Izetbegovic a-t-il proclamé l'état de guerre ?

20 R. C'est évoqué dans le rapport, de mémoire, je crois que c'est en juin

21 1992.

22 Q. Oui. Bien. Vous nous dites que les combats ont commencé le 8 avril

23 1992, et je crois que nous pouvons être d'accord pour dire qu'il n'avait

24 pas de force armée de l'Etat, à ce moment-là, n'est-ce pas ?

25 R. Ecoutez, cela dépend de ce dont on parle.

26 Q. [aucune interprétation]

27 R. L'ABiH en tant que tel n'existe pas.

28 Q. Un instant. L'ABiH n'a-t-elle pas émergée de la Ligue patriotique…

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1 R. D'une certaine façon, c'était une Défense territoriale, donc peut-être.

2 Q. Donc, c'était des Musulmans ?

3 R. Ecoutez, n'oublions pas. Si vous regardez les éléments de Défense

4 territoriale, ce n'était pas nécessairement exclusivement constitué de

5 Musulmans. Je crois que les structures fondamentales étaient peut-être

6 musulmanes.

7 Q. Que se passait-il en Bosnie-Herzégovine entre avril et la déclaration

8 de l'état de guerre par Izetbegovic ? Il y a des combats, n'est-ce pas ?

9 R. Effectivement, il y a des combats dans toute la Bosnie-Herzégovine.

10 Q. Qui se fait attaquer ? Question générale.

11 R. Bien, tout le monde. Tout le monde se fait attaquer par ce qui reste de

12 l'armée nationale yougoslave et des forces armées serbes.

13 Q. Donc, des Croates.

14 R. Des Croates, des Musulmans, tout le monde.

15 Q. Dans la zone qui est ensuite devenue la Communauté croate d'Herceg-

16 Bosna, pourriez-vous nous dire, Monsieur, de quelles troupes Izetbegovic

17 disposaient après les avoir envoyer surplace pour protéger ces régions ?

18 Est-ce que vous vous en souvenez ?

19 R. Non, je ne m'en souviens pas.

20 Q. En fait, cela n'a jamais eu lieu ?

21 R. Je ne pourrais pas m'engager sur cette réponse.

22 Q. Pensez-vous qu'il aurait pu être pertinent pour vous d'examiner cette

23 question ? D'avoir essayé de voir ce qui s'était passé au moment de

24 l'établissement du HVO HZ HB avant et puis ensuite le développement des

25 structures définitives ? Qu'est-ce qui s'est passé entre les deux ?

26 N'auriez-vous pas dû regarder ces éléments, en particulier en tant

27 qu'historien ? Si, si je le répète, si vous aviez voulu avoir un élément de

28 contexte de façon à permettre à la Chambre de comprendre exactement ce qui

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1 se passait pour mieux comprendre la motivation de certaines actions.

2 R. Je crois qu'il y a plusieurs questions dans ce que vous venez de dire.

3 Tout d'abord, je n'avais pas l'intention de proposer une histoire générale

4 du conflit, j'aurais regardé beaucoup plus d'éléments et de façon beaucoup

5 plus large, ce n'était absolument pas mon objectif. En ce qui concerne les

6 autres éléments de votre question, je ne peux que dire, au risque d'être

7 encore accusé de me comporter comme un nazi, je n'ai fait que regarder les

8 structures et les processus et pas les motivations.

9 Q. Oui, oui, nous avons entendu cet argument de défense, merci, cela

10 suffira.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire à la ligne 25 et ligne 1 de la

12 page 103 que vous vous êtes contenté d'analyser les structures sans vous

13 préoccuper des motivations. Enfin, vous l'avez déjà dit deux fois. Je vous

14 demande pour une troisième fois de bien préciser que dans votre démarche

15 intellectuelle, vous n'avez pas été regarder en réalité les motivations,

16 sur ce quoi vous interroge, Maître Karnavas.

17 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit qu'il y a hochement de la tête pas le

18 témoin.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous me posez la

20 question plus directement, permettez-moi de dire que je ne fais rapport des

21 intentions que lorsqu'elles ont été, en fait, couchées sur le papier et que

22 j'ai pu les voir sur les documents auxquels j'ai pu accéder. Je ne déduis

23 pas des motivations extérieures. Si, dans un document, je trouve : voilà la

24 raison ou la motivation pour laquelle nous agissons, je le dirai. Je m'en

25 tiens autant que possible aux documents que j'ai pu consulter.

26 M. KARNAVAS : [interprétation]

27 Q. Merci. Le HDZ BiH, après la mise en place du HZ HB n'a-t-il pas appelé

28 les Croates de BiH de soutenir l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine au

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1 référendum ?

2 R. Oui, mais c'est assez complexe, mais effectivement, oui, cela a été

3 l'appel lancé aux Croates.

4 Q. Bien. N'est-ce pas un fait établi que le référendum n'aurait pas été

5 remporté sans participation massive des Croates ?

6 R. Oui, ce l'est.

7 Q. Bien. N'est-il pas établi que le HZ HB a accepté de façon

8 inconditionnelle tous les plans de paix pour la République de Bosnie-

9 Herzégovine, ou plus exactement la République socialiste de Bosnie-

10 Herzégovine, proposés par la communauté internationale ?

11 M. SCOTT : [interprétation] On va au-delà du cadre.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, de

13 finir ma question. On n'est pas devant un jury populaire, nous n'allons pas

14 convaincre ou détourner le jury de ses opinions.

15 M. SCOTT : [interprétation] Je m'opposerai à la question s'il le faut à la

16 fin; allez-y.

17 M. KARNAVAS : [interprétation]

18 Q. N'est-il pas établi, donc, que le HZ HB a accepté de façon

19 inconditionnelle tous les plans pour la République socialiste de Bosnie-

20 Herzégovine, proposés par la communauté internationale, qui incluaient des

21 mesures de mise en place de structures internes dans le cadre des

22 frontières internationalement reconnues ?

23 M. SCOTT : [interprétation] Objection. C'est une spéculation et c'est en-

24 dehors du cadre des mesures proposées par le témoin.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est une question qui peut être posée à un

26 historien.

27 Bon, Monsieur le Témoin expert historien, cette question, est-ce

28 qu'elle est dans votre champ de compétence ou hors de votre champ de

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1 compétence, comme l'indique M. Scott ? Est-ce qu'un historien est capable

2 de répondre à ce type de question ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, un historien serait en position de le

4 faire s'il avait les documents nécessaires et pertinents à sa disposition.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne les aviez pas eus, donc, vous ne pouvez pas

6 répondre.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je dis juste que je n'ai pas examiné de

8 très près tous les documents diplomatiques puisque ce n'était pas mon

9 objectif initial. Il y a certains éléments dont j'ai connaissance de façon

10 générale, mais ce ne sont pas des éléments que j'ai examinés de très près.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, Maître Karnavas, il ne peut pas répondre à

12 votre question puisqu'il n'a pas eu tous les documents diplomatiques.

13 M. KARNAVAS : [interprétation] Effectivement, j'en ai bien peur, il ne peut

14 pas. Il ne peut pas, malheureusement.

15 Q. Bien. Alors, on vous a proposé des documents, vous avez fait des

16 commentaires sur ces documents. Quant à la mise en place du HZ HB, de ce

17 que je comprends, vous avez également examiné le préambule. C'est le P

18 00077 [comme interprété]. D'après ce que je comprends de votre témoignage,

19 c'était lié au P 00081, la décision d'établissement de la Communauté croate

20 d'Herceg-Bosna. Vous en souvenez-vous, Monsieur ?

21 R. Je me souviens des documents, mais je ne me souviens pas des numéros.

22 Q. Bien. Dans le préambule, cela date donc de novembre 1991, n'est-ce pas

23 ?

24 R. Oui.

25 Q. Donc, nous en avons déjà parlé plus ou moins au -- je résume. Le 8

26 avril, autour du 8 avril, les attaques commencent et Izetbegovic attend le

27 mois de juin ou de juillet -- juin, si je ne m'abuse, pour déclarer l'état

28 de guerre. Je crois que nous sommes d'accord pour dire que l'Etat n'avait

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1 pas les moyens d'apporter une aide militaire au niveau local, aux

2 communautés. La banque nationale ne fonctionnait pas, d'autres institutions

3 non plus. Sommes-nous d'accord ou êtes-vous en désaccord sur cela ?

4 R. Ecoutez, sur tous ces points je pourrais vous dire si oui ou non.

5 M. SCOTT : [interprétation] Encore une fois, je m'oppose à ce que M.

6 Tomljanovich fasse de la spéculation sur les points qu'il ne connaît pas.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien, je vois que l'Accusation ne veut pas

8 que le témoin témoigne.

9 M. SCOTT : [interprétation] Je ne veux pas qu'il témoigne sur des sujets

10 qui ne sont pas de son ressort.

11 M. KARNAVAS : [interprétation]

12 Q. Au deuxième paragraphe de P 00077, il est indiqué -- au milieu du

13 premier paragraphe, pardon -- que : "Nous, Croates de Bosnie-Herzégovine,

14 au travers de notre Union démocratique des Croates et par nos représentants

15 élus doivent être républiques soutenant l'option d'une Bosnie-Herzégovine

16 souveraine. Nous avons toujours dit que cela ne se fera que jusqu'à ce que

17 d'autres lancent le mécanisme de démembrement de la Bosnie-Herzégovine."

18 Vous en souvenez-vous ?

19 R. Oui.

20 Q. Bien. Nous avons donc dit que, si les Croates n'avaient pas soutenu le

21 référendum, le référendum n'aurait pas été dans la direction dans laquelle

22 il a été. Excusez-moi, je crois que j'ai fait une erreur, vous me fatiguez.

23 En gros, si je me résume, Monsieur, l'attitude croate c'est qu'ils veulent

24 bien en faire partie de la Bosnie-Herzégovine, mais pas de la Yougoslavie.

25 R. Je crois que c'est une interprétation, mais, selon la situation, c'est-

26 à-dire de soutenir la sécession, qu'une fois que les autres ont commencé la

27 sécession, je crois que c'est une référence à l'Association serbe des

28 municipalités, en fait.

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1 Q. Bien. Donc, ils sont en train de dire que si les Serbes commencent à

2 diviser le pays, il faut commencer à réfléchir à l'avenir de la Bosnie-

3 Herzégovine.

4 R. Oui, c'est effectivement ce que dit cette citation, si l'on veut.

5 Effectivement, la Bosnie-Herzégovine est une bonne idée, mais, si on

6 commence à s'y attaquer et si d'autres commencent à s'y attaquer, peut-être

7 qu'il faudra y réfléchir.

8 Q. Bien. Bien. Au deuxième paragraphe, on nous dit que : "Confronté aux

9 menaces qui pèsent sur notre peuple, et à notre intégrité historique et

10 territoriale, et étant donné nos responsabilités en matière de défense du

11 territoire ethnique et historique croate, et des Croates en Bosnie-

12 Herzégovine, nous, les représentants élus des Croates de Bosnie-

13 Herzégovine, fondons la Communauté croate d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?

14 Vous êtes donc, j'imagine, d'accord avec nous que c'est une description des

15 objectifs, de leurs objectifs, à ce moment-là ?

16 R. Oui. Mais il y a un certain nombre de termes qui ne sont pas définis

17 tels que, par exemple, les territoires ethniques et historiques.

18 Q. Bien. J'imagine qu'un Croate d'Herzégovine qui a toujours vécu, dont le

19 père, le grand-père, l'arrière-grand-père et cetera y ont toujours vécus,

20 et étant donné donc que les Croates sont une nation, on pourrait imaginer

21 que dans l'esprit de cet individu, il y aurait effectivement emprise

22 territoriale et historique de Croates ?

23 R. Est-ce que vous avez évité l'Herzégovine ?

24 Q. Oui, l'Herzégovine.

25 R. Effectivement, vous mettez donc une vraie différence entre la

26 Herzégovine occidentale qui était effectivement croate.

27 Q. Oui, mais la Posavina, alors ? Les Croates en Posavina se voyaient

28 comme étant part de la Croatie ?

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1 R. Oui, cela faisait peut-être partie de leur patrimoine mais ils

2 n'étaient pas en majorité sur le territoire.

3 Q. Je sais bien ce que vous êtes en train de dire, mais répondez à nos

4 questions.

5 R. J'essaie juste d'être précis dans mes réponses.

6 Q. Bien. Après ce préambule, il y a le texte de la décision.

7 R. Oui.

8 Q. Fort bien. Occupons-nous de l'article 7 de cette décision que nous

9 pouvons lire, en date du 18 novembre 1991 : "L'autorité suprême de la

10 communauté sera la présidence comprenant les hauts représentants du peuple

11 croate dans les autorités municipales ou bien les président du comité

12 municipal du HDZ. La présidence aura un président, deux adjoints et

13 secrétaires."

14 Ma question est la suivante : à cette époque-là, le 18 novembre 1991, au

15 moment où le document a été publié, la présidence n'a pas été à une

16 structure législative, n'est-ce pas ?

17 R. Et bien --

18 Q. La question vous a été posée sur la base de ce document, c'est une

19 question qui vous a été posée en anglais, vous avez dit que vous pouvez

20 lire les documents en B/C/S, s'il vous plaît.

21 R. Oui.

22 Q. Dites-nous si, dans l'article 7, nous lisons les fonctions qui sont à

23 être exercées par la présidence.

24 R. Je n'ai pas sous mes yeux le document, je ne peux pas vous répondre à

25 cette question.

26 Q. Fort bien.

27 M. KARNAVAS : [interprétation] Alors, je voudrais que Mme l'Huissière vous

28 aide -- vous assiste en posant sur le rétroprojecteur ce document-là.

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1 Q. Il s'agit de ce document que vous avez mentionné par vous. Vous avez

2 été longuement examiné par le Procureur et vous voulez peut-être nous

3 donner lecture sur ce que nous lisons ici.

4 Article 7. Il s'agit d'ailleurs ce premier document, document primitif,

5 n'est-ce pas ?

6 R. Oui.

7 Q. Dites-nous, s'il vous plaît : est-ce qu'en ce moment-là, il y a eu de

8 dilemme quelconque, une tergiversation à faire pour savoir quelle serait

9 concrètement la fonction de la présidence comme étant une autorité

10 suprême ?

11 R. Ecoutez, ceci est un tracé, on parle d'autorité suprême, mais c'est

12 assez vague.

13 Q. C'est ce que je voulais justement savoir. En ce moment-là, la

14 présidence n'est pas une structure législative; sinon, qu'est-ce qu'elle

15 est ?

16 R. Tout dépend de la façon dont on voit la chose. Si vous la considérez

17 comme un établissement du HVO en avril, suivant un acte législatif, alors,

18 il s'agirait d'une structure législative.

19 Q. S'il vous plaît, qu'est-ce que le HVO ? Il s'agit de -- parler du mois

20 d'avril, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, oui.

22 Q. Très bien.

23 R. Si je ne m'abuse pas, il s'agit de parler du HVO comme étant un corps

24 de structure suprême, je ne sais pas comment en fut la formulation, mais,

25 en tout cas, on parle de la date du 8 avril.

26 Q. S'agissait-il du HVO ou pas du HVO en avril ? De quoi parlez-vous ?

27 R. Si vous vous penchez sur cette décision, vous verrez qu'il s'agira

28 d'une structure de défense et exécutive à la fois.

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1 Q. Fort bien.

2 R. Pour ce qui est des détails, le tout a été daté en date du 15 mai.

3 Q. Fort bien. Revenons à l'article 7, s'il vous plaît, dites-nous : pour

4 être certain de ce que vous dites d'un point de vue légal ou d'un autre

5 point de vue, la présidence à cette époque-là, peut-on dire pour elle que

6 c'était une structure législative ou pas ?

7 R. Etant donné qu'il s'agit de la présidence qui a été établi moyennant

8 cet acte le 8 avril et qu'un autre corps a été créé, alors, on peut dire

9 qu'il s'agissait de structures législatives. On peut dire que cela est

10 ainsi.

11 Q. Avez-vous consulté qui que ce soit pour nous faire valoir cette

12 attitude ou tout simplement vous le dites en des termes virtuelles ?

13 R. Justement, c'était une question toute particulière que vous m'avez

14 posée une première fois.

15 Q. N'y a-t-il pas au bureau du Procureur des avocats qui parlaient le

16 B/C/S, des juristes qui parlaient le B/C/S et qui auraient pu vous assister

17 pour mieux interpréter ces documents tels la constitution, la loi sur la

18 défense généralisée, le code de procédure; vous avez une foule de

19 ressources à votre disponibilité, des services techniques, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 M. SCOTT : [interprétation] Je suis pour ma part certain que ceci a été

22 fait tout simplement pour que M. Karnavas puisse interjeter un appel pour

23 contester le témoin et pour dire qu'on a voulu exercer une influence sur le

24 témoin.

25 M. KARNAVAS : [interprétation] Je crois qu'en ce moment-ci, toute

26 interférence pour influer sur ce témoin serait le bienvenu. Mais passons au

27 document.

28 Est-ce que peut-être vous vous êtes penché sur le document portant sur les

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1 décisions et des principes en date du 18 mars 1992 ? Ceci a été d'ailleurs

2 utilisé et exploité lors de la déposition de

3 M. Kljuic, à savoir il s'agit de la pièce à conviction ID 00389, n'est-ce

4 pas ? Est-ce que vous avez voulu peut-être voir, est-ce que vous avez vu le

5 document qui portait sur la négociation, lequel document a été avancé par

6 la communauté internationale ? Il est dit que : "Les directions des trois

7 parties en conflit en Bosnie-Herzégovine, en mars 1992, sont encore venues

8 quant à la proposition faite. On a vu cette proposition rejetée par la

9 présidence de la Bosnie-Herzégovine." Est-ce que vous y êtes penché vous-

10 même ?

11 R. Je ne sais pas de quel document exactement vous parlez, je ne me suis

12 pas penché là-dessus pour préparer ce rapport. Je ne voulais pas m'occuper

13 d'événements diplomatiques très en détail.

14 Q. Fort bien. Voyons, il faut en plus ce dilemme quant aux nationalités

15 face aux groupes ethniques ou appartenance à des groupes ethniques. Si vous

16 avez lu par exemple ce document et même si vous n'avez pas adopté les

17 thèses de votre mentor, à savoir M. Ivo Banac, et il semble que vous ayez

18 eu des divergences avec lui, il est dit là que la souveraineté était

19 notamment au niveau des citoyens, de Musulmans, de Serbes, Croates et

20 d'autres nationaux qui assurent le tout en action civique et civile avec

21 l'activité des organes de la république en question.

22 Par conséquent, si nous adoptons ce document-là, il paraît qu'il n'y a pas

23 de contestation, qu'il n'y a pas de dilemme lorsqu'il s'agit de parties en

24 conflit; ce sont des peuples, des nations constitutives, pas des groupes

25 ethniques.

26 R. Il s'agit de termes ethniques lorsqu'on parle, en B/C/S, lorsqu'on

27 parle de peuples, de nations. On devrait dans ce sens-là --

28 Q. Oui.

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1 R. -- parler de Croates, de Musulmans --

2 Q. Les Serbes ?

3 R. -- de Serbes --

4 Q. Bien.

5 R. -- qui, en vérité, existaient en tant que nations dans l'ex-

6 Yougoslavie, alors que les groupes ethniques devraient être des Italiens,

7 des Hongrois, Rom, Romanichels [phon], et cetera.

8 Q. Rom, que ce soit.

9 R. Des gens qui ne font pas.

10 Q. En Croatie, il y a eu un bon nombre de Serbes, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, de l'ordre de 12 à 13 % du total de la population.

12 Q. Aidez-moi un petit peu. S'agissait-il d'une nation ou d'un groupe

13 ethnique --

14 R. Ils étaient une nation.

15 Q. -- en vertu de la constitution en vigueur ?

16 R. Pour parler évidemment du concept constitutionnel, on parlera de

17 nation.

18 Q. Cela --

19 R. Si vous vous référez à la constitution de l'ex-Yougoslavie.

20 Q. Fort bien. Une seconde, s'il vous plaît, pour voir si je vous ai bien

21 suivi. Est-ce que vous voulez suggérer ou dire que, dans l'ex-Yougoslavie,

22 lorsque tous ces Etats étaient ensemble, en vertu de la constitution en

23 vigueur, les Serbes qui habitaient la Croatie étaient reconnus comme étant

24 une nation de la république en question, Croatie, à la différence de tout

25 groupe ethnique en minorité ou pas ? "Oui" ou "non" ?

26 R. Oui, je crois que oui, ils l'étaient. Justement le fait que leur statut

27 a été nié était d'ailleurs la source de tout émoi pour les Serbes, parce

28 que référence faite en 1990 à d'autres événements.

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1 Q. N'ont-ils pas été considérés comme une minorité nationale ?

2 R. Non, non. Ceux qui évidemment s'occupent de ces termes-là, évidemment

3 ont un avatar de la Yougoslavie communiste.

4 Q. Permettez-moi de différencier un petit peu. En Bosnie-Herzégovine, il y

5 avait des Croates de l'ordre de 17,5 % du total de la population. Là où je

6 suis moi, aux Etats-Unis d'Amérique, ceci constituerait une minorité, peut-

7 être minorité nationale, n'est-ce pas ? Maintenant, est-ce que vous nous

8 dites qu'il n'y a pas de distinction entre la façon dont nous voyons la

9 situation des Croates en Bosnie-Herzégovine en tant que nation et les

10 Serbes en Croatie ? En d'autres termes, est-ce que vous n'y faites pas une

11 distinction ?

12 R. Bien, ils étaient les deux --

13 Q. Entre --

14 R. Poursuivez, s'il vous plaît.

15 Q. Entre nation et groupe ethnique, est-ce que vous n'y voyez pas de

16 distinction ?

17 R. Si j'y vois -- évidemment, distinction ou pas, on peut le définir comme

18 vous voulez.

19 Q. Y a-t-il une distinction à faire dans les documents juridiques pour

20 lesquels vous dites les avoir lus ?

21 R. Oui, oui, dans le cadre du régime yougoslave ancien autant que de la

22 constitution, les nations constitutives de la Yougoslavie de cette époque-

23 là étaient justement les Etats, les pays qui constituaient cet Etat, et

24 c'étaient des nations.

25 Q. D'accord ?

26 R. Voilà comme j'ai pu répondre.

27 Q. Monsieur, s'il vous plaît, je crois que je vous ai posé une question

28 concrète. Permettez-moi d'aller de l'avant. Après ce document-là, il s'agit

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1 d'un document datant du mois de mars 1992 -- allons de l'avant. Le 26 avril

2 1992, nous avons un document qui porte la cote 1D 00525 du 26 avril 1992. A

3 l'en-tête, nous lisons Herceg-Bosna, Herceg-Bosnie. Vous dites que vous

4 vous y êtes penché, vous, sur ce document pertinent. Avez-vous consulté ce

5 document, oui, non ou je ne m'en souviens pas, s'il vous plaît ?

6 R. Je ne me souviens pas avoir consulté ce document précis.

7 Q. Est-ce qu'à voir ce document, compte tenu du fait qu'il s'agit d'un

8 document émis par l'Herceg-Bosna et signé par Mate Boban, ayant en vue la

9 date pertinente, est-ce que, d'après vous, ce document devait appartenir à

10 ce cadre pour lequel vous avez été mandaté ?

11 R. Pas nécessairement. Je devrais me pencher plus précisément là-dessus.

12 Je vous ai dit que je ne me suis pas occupé de tous les documents portant

13 sur des négociations de paix; ceci aurait été une tâche beaucoup trop vaste

14 et large.

15 Q. Fort bien. Mais ne trouvez-vous pas qu'il aurait été important, ne

16 serait-ce qu'à regarder la date pertinente -- en quoi consistait

17 l'intention de Mate Boban, étant donné que celui était à la tête, le

18 président, n'est-ce pas, de la Communauté d'Herceg-Bosna ? Ne croyez-vous

19 pas que ceci aurait dû avoir de la pertinence ?

20 R. Oui, d'abord, primo, vous voulez dire quelle était son intention

21 exprimée ou évoquée ? Peut-être était-elle comme intention pertinente --

22 mais étant donné qu'il y a eu une série de négociations, ceci aurait risqué

23 de m'entraîner beaucoup trop loin.

24 Q. Fort bien. Mais regardons le paragraphe 3 de ce document pour nous dire

25 si c'est pertinent ou pas. Il est dit : "Dans la certitude que les

26 principes de négociations sous l'égide de l'Union européenne représentaient

27 la seule voie possible d'établir un gouvernement d'Etat de Bosnie-

28 Herzégovine et qu'encore toujours, on pourra mettre un terme aux

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1 hostilités, à la guerre, il est nécessaire de mettre en pratique certains

2 principes retenus portant sur le futur ordre constitutionnel de la Bosnie-

3 Herzégovine.

4 A lire ce document, ne peut-on pas dire et y voir une position prise par

5 Mate Boban telle qu'il l'a évoquée, à savoir qu'il fallait coopérer au sein

6 du processus de négociations sous l'égide de l'Union européenne, n'est-ce

7 pas ?

8 R. Oui, c'est ce que nous disons.

9 Q. Dans la foulée, il lui dit, il écrit à M. Cutileiro, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. C'était un homme sérieux, n'est-ce pas ?

12 R. Pour autant que je sache, oui, sérieux.

13 Q. C'était quelqu'un qui a pris part au processus de négociations ?

14 R. Oui.

15 Q. Il a dit qu'une solution devait être trouvée pour trouver

16 -- remédier à la guerre ?

17 R. Oui.

18 Q. C'est à Izetbegovic que ceci a été envoyé ?

19 R. Oui.

20 Q. En tant que président de son parti politique à lui, est-ce que vous

21 considérez qu'il s'agissait d'un parti politique qui représentait la

22 majeure partie des opinions des Musulmans de Bosnie-Herzégovine ?

23 R. Je ne sais pas.

24 Q. Le document a été envoyé également à Karadzic qui était le président du

25 SDS, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Allez-y. "Par conséquent, nous suggérons qu'au lieu d'avoir des organes

28 de pouvoir démantelés ou illégaux, l'on puisse mandater le Conseil des

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1 ministres de la Bosnie-Herzégovine composé de huit membres et de façon

2 paritaire, représentant respectivement les trois nations, ainsi que l'a

3 prévu et proposé la Communauté européenne pour être l'unique autorité

4 temporaire de gouvernement en Bosnie-Herzégovine."

5 Par conséquent, ici, aidez-moi. Ne voit-on pas dans ce document que le

6 président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna propose lui-même la

7 création d'un comité de neuf membres sous l'égide de la Communauté

8 européenne qui devrait être la seule autorité légale, même une autorité qui

9 serait au-dessus de la Communauté croate ? N'est-ce pas sa proposition à

10 lui en date du 26 avril 1992 ?

11 R. Oui, mais il apparaît -- il semble qu'il s'agit d'une proposition

12 faite, mais suivant un principe de parité de trois nations.

13 Q. Oui, merci de m'avoir corrigé, mais faisons un pas en arrière. Nous

14 parlons de la date du 26 avril. Peut-être me suis-je perdu un petit peu

15 dans la chronologie, dans le contexte. Mais, le

16 8 avril, nous parlons du début des hostilités, d'une attaque, après quoi,

17 il y a lieu de signaler de mars, le 18 mars. On parle d'organisation de la

18 façon dont les trois nations s'organisent. Or, le 26 avril, vous voyez

19 Boban qui lui apparaît pour dire, maintenant qu'il faut mettre en place une

20 autorité qui aurait une compétence sur l'ensemble du territoire, n'est-ce

21 pas ?

22 R. Oui. C'est ce qu'on dit ici.

23 Q. Bon. Dans votre rapport, excusez-moi, de m'y référer tout le temps,

24 dans votre rapport vous ne faites rien apparaître aucun événement

25 historique sur lequel nous pourrions peut-être compter ici pour y faire une

26 référence qui ne permet certains indices qui ne permettraient de voir ce

27 qui s'est passé lors de cet événement-clé en Bosnie-Herzégovine, cette

28 période critique. Ce qui fait qu'un certain Mate Boban suggère que ce soit

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1 la Communauté européenne qui assure le gouvernement de ce pays. Pouvez-vous

2 vous poser la question, pourquoi ?

3 R. Parce que tout ceci évidemment était partie des manœuvres diplomatiques

4 qui quotidiennement se faisait entendre et ce qui était en dehors dont j'ai

5 été mandaté.

6 Q. Fort bien. Mais, alors, j'ai pu remarqué que vous n'avez pas terminer

7 cette promotion de seconde de faire des commentaires sur les décisions qui

8 datent du 3 juillet 1992, et portant l'établissement de la Communauté

9 croate, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. En d'autres termes, dans le rapport et lors de la déposition dans le

12 cadre de l'interrogatoire principal lorsque vous avez dû répondre aux

13 questions qui vous ont été par l'Accusation, on vous a vu désireux de

14 parler de cette transition pour dire ce qui devait être établi en premier

15 lieu, puis après vous sautez vers le

16 3 juillet, et c'est là que nous voyons que la HZ HB prend une autre forme,

17 forme différente, n'est-ce pas ? Vous n'y avez pas de raison pour laquelle

18 on devrait étudier ce rapport cause à effet, le "ying and yang" entre l'un

19 à l'autre. Vous n'y évoquez aucune raison pour laquelle ceci aurait dû

20 avoir lieu.

21 R. Je crois que c'est une bonne raison -- excellent cas pour dire ce que

22 j'ai fait et ce que je n'ai pas fait et pourquoi ? Tout ce qui s'était

23 passé en date du 3 juillet 1992 était directement lié au cadre de ce dont

24 j'ai été mandaté. En ce moment-là, les gens à Herceg-Bosna se sont faits

25 doter de leurs propres institutions. Si on voit le "background" ce toile de

26 fond diplomatique et tous les autres événements qui ont suivi j'ai cru que

27 d'autres viendraient ici pour en déposer.

28 Q. Vous, Monsieur, en tant historien, vous avez passé ici pendant sept ans

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1 et demi, peut-être autant de temps qu'il vous a fallu faire d'études pour

2 soutenir un test de doctorat, pouvez-vous dire qu'au fait maintenant vous

3 êtes en mesure de nous dire ce qui s'était passé très exactement au cours

4 de cette période-là pertinente à Bosnie-Herzégovine ?

5 R. Uniquement dans une sens très vague, large, pas pour dire exactement ce

6 qui s'était passé tout le long de cette période.

7 Q. Pourrait-on dire de façon générale, qu'en Bosnie-Herzégovine, la

8 situation s'est trouvée détériorée depuis la date du 8 avril, plus tard ?

9 La situation a-t-elle été détériorée ?

10 R. Ecoutez, tout ce printemps et été en 1992 les choses avaient mal

11 tourné.

12 Q. Lorsque je parle de la détérioration de la situation je ne parle pas

13 qu'en de terme militaire mais je parle de siège de Sarajevo, pourrait-on

14 dire aussi qu'on a guère besoin d'être économiste non plus qu'un expert en

15 armes militaires non plus que en affaire constitutionnelle pour dire que

16 les organes d'Etat, les autorités disposaient de moins en moins de services

17 à l'ensemble du pays ?

18 R. Je ne dirais pour ma part de moins en moins -- disposait de moins en

19 moins de service ou plutôt d'aucun le sollicitait.

20 Q. Sarajevo était sous le siège ?

21 R. A cette époque, oui.

22 Q. Bon. Est-ce que vous croyez que Sarajevo, le gouvernement pouvait enfin

23 dispenser ces services à savoir évidemment en eau, courant, et cetera, à

24 toutes ces différentes municipalités ?

25 R. Vous voulez parler de Sarajevo, de gouvernement, des autorités.

26 Q. Oui.

27 R. Il y avait des endroits où il y avait de courant et de l'eau mais

28 d'autres il n'y en avait pas.

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1 Q. Pendant combien de temps fonctionnait le gouvernement, les autorités de

2 Sarajevo ?

3 R. Ceci est difficile de quantifier.

4 Q. [aucune interprétation]

5 R. Nous pouvons dire ce qu'ils ont fait, le gouvernement de Sarajevo, ce

6 qu'ils n'ont pas fait.

7 Q. [aucune interprétation]

8 R. Encore aussi, il était beaucoup trop loin de ce que je me proposais de

9 faire dans mon rapport.

10 Q. Bon. On ne peut pas le dire mais on peut dire que tout le long de cette

11 période à savoir qui courait du 8 avril, comme les documents l'accusent la

12 situation particulièrement pour parler de la gouvernance par les citoyens

13 et pour les citoyens où différents services devaient être dispensées la

14 situation s'est empirée de plus en plus.

15 R. Cela dépend de quelle période et de quel service on parle.

16 Q. [aucune interprétation]

17 R. [aucune interprétation]

18 R. [aucune interprétation]

19 Q. Dites-nous : où c'est que le gouvernement de Sarajevo a pu offrir et

20 assurer tous ces services y compris évidemment le territoire de Sarajevo ?

21 R. Ecoutez, pour tous, par parler des services pour tous c'est différent,

22 et toutes les municipalités, c'est-à-dire on prenait Tuzla, par exemple.

23 Q. Tuzla très bien. Prenez l'exemple de Tuzla. Une communauté

24 multiethnique. Vous avez dû certainement dû avoir pas mal de documents à

25 consulter. Dites-nous : qu'est-ce que le gouvernement d'Etat a pu faire

26 pour Tuzla si vous voulez dire dites-nous quoi si vous ne le savez pas ne

27 dites pas ?

28 M. SCOTT : [interprétation] Objection, une fois de plus. On demande au

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1 témoin de faire des spéculations. Il s'agit d'une question de cadre.

2 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

3 le témoin disait que tout dépend. J'aurais pu lui donner d'autres exemples.

4 J'aurais pu lui demander de --

5 M. LE JUGE ANTONETTI : [chevauchement] -- spéculation, la Défense cite

6 Tuzla et Bihac. Vous êtes à même d'appréhender la question ou pas sans

7 spéculer ? Vous ne répondez que si vous êtes sûr.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Tout ce que je peux dire au sujet de

9 Tuzla ou de Bihac c'est que la Bihac était suffisamment organisée pour

10 maintenir la défense de leur secteur.

11 M. KARNAVAS : [interprétation]

12 Q. Objection. Ce n'était pas ma question. Vous gaspillez mon temps. Vous

13 faites perdre mon temps. Je voulais savoir quels étaient les services qui

14 pouvaient recevoir de la part de l'Etat. Ma question est très précise.

15 R. Oui.

16 Q. Ce n'est qu'une partie de la réponse.

17 R. La défense, par exemple, elle a été un service rendu pour ce qui est

18 évidemment de faciliter d'ordres de service municipaux, et cetera, par le

19 courant, et eau, le tout dépendait évidemment du fonctionnement des

20 autorités municipales de comment elles fonctionnaient je ne sais pas.

21 Q. Fort bien. Nous allons voir avec d'autres témoins. Comment se pose

22 cette question ? Je n'ai pas suffisamment de temps, par conséquent, je

23 serais obligé de sauter quelques questions. Occupons-nous maintenant de

24 l'ultimatum du 15 janvier 1993.

25 Si je comprends bien la déposition qui était la vôtre, dans le cadre de

26 l'interrogatoire direct, dites-moi, si je vous ai bien suivi. En fait, vous

27 n'avez pas été informé des événements qui se sont produits dans Gornji

28 Vakuf avant qu'il y ait eu le 15 janvier cet ultimatum, 15 janvier 1993;

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1 est-ce que je suis dans mon droit de le dire ainsi ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que vous dites, vous, Monsieur, que vous ne saviez pas si

4 quelque chose était intervenu ou tout simplement votre opinion de

5 technicien historien qui avez tant travaillé là-dessus vous dites après

6 avoir consulté toutes ces archives vous dites que rien ne s'est produit à

7 Gornji Vakuf en date du 15 ? Je vous dis que l'Accusation a allégué cela

8 comme étant -- cet ultimatum étant quelque chose qui a précipité et

9 provoqué les combats.

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous le savez ou vous ne le savez pas ?

12 R. Oui, oui, en des termes généraux, oui, je suppose qu'il doit y avoir eu

13 des combats menés dans la municipalité de Gornji Vakuf après les événements

14 de Prozor en octobre.

15 Q. Oui. Nous sommes en train de parle de janvier, janvier, Monsieur.

16 R. Oui, mais pour cette période-là, première moitié de janvier, pour

17 Gornji Vakuf je ne peux rien vous dire.

18 Q. Seriez-vous surpris si je vous dis qu'il y a eu des incidents et que

19 les incidents qui se sont déroulés en janvier comment pouvez-vous dire

20 qu'en ce moment-ci, pour parler de cela en ce moment-ci, que ceci aurait pu

21 provoquer certains événements et lesquels événements sont survenus avant

22 l'ultimatum.

23 R. Oui, mais on vous voit, maintenant, réduire le tout comme étant les

24 retombées de l'ultimatum du 15 janvier uniquement au niveau de la

25 municipalité de Gornji Vakuf alors que ceci ne pouvait pas se produire

26 ailleurs.

27 Q. Bon, cette décision n'a-t-elle pas été prise le 15 janvier ?

28 R. Oui.

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1 Q. Cette décision, c'est-à-dire cet ultimatum, nous en parlons, n'est-ce

2 pas ?

3 R. Oui, vous parlez par la même occasion de la décision qui a été signée

4 par M. Prlic, je suppose.

5 Q. Oui, mais chemin faisant, dites-nous si, à titre d'historien ou

6 d'expert de bureau du Procureur ou par pure curiosité, n'avez-vous pas

7 peut-être fait un effort pour savoir combien de troupes, combien de

8 soldats, de brigades, se sont trouvées subordonnées. Il s'agit d'avoir

9 subordonné des troupes et des brigades subordonnées à l'armée de BiH. Je

10 crois que M. le Juge Trechsel vous a posé une question là-dessus. Est-ce

11 qu'à un quelconque moment, vous avez voulu savoir quelle pouvait être la

12 réponse à cette question ou s'agissait-il plutôt d'un cheval de Troie ?

13 R. Voyez-vous, je n'ai pas pu le constater, quant à moi, pour parler

14 évidemment de certains secteurs précis.

15 Q. Oui, d'accord, mais est-ce que ceci n'aurait pas été pertinent pour

16 déterminer combien de secteurs il y a eu et parce que ceci est à l'origine

17 de tous ces événements. Vous dites, par exemple, qu'il y a eu cet ultimatum

18 du 15 janvier, alors que, maintenant, nous voyons qu'immédiatement

19 préalablement à la date du 15, il y a eu des combats menés dans ces

20 secteurs. Y a-t-il une raison toute particulière pour laquelle vous l'avez

21 fait, vous êtes intervenu comme cela ? Vous n'avez pas voulu essayer de

22 vérifier le tout pour vous lancer à des comparaisons, certaines

23 comparaisons ? On a demandé aux troupes, aux soldats croates de se faire

24 subordonner par l'ABiH. Il s'agit de quelque chose de critique, de crucial.

25 R. Non. Enfin, quelque fois que je me suis posé la question, je puis y

26 répondre, aussi.

27 Q. Vous y avez répondu ?

28 R. Oui.

Page 6846

1 Q. Bon, mais --

2 R. Il s'agissait de parler de secteurs où il y a eu, évidemment, des

3 contingents du HVO, de Tuzla, ensuite d'un contingent de HVO de Zepce.

4 Q. Il y en avait à Zenica ?

5 R. Oui, Zenica.

6 Q. A Kakanj et à Vares, n'y a-t-il eu pas suffisamment de troupes du HVO ?

7 R. Oui, il y avait une unité dans Sarajevo ouest.

8 Q. Est-ce que vous serez surpris si je vous disais, par exemple, que

9 certains de mes calculs permettent, nous allons l'établir avec sûreté,

10 qu'il s'agissait de l'ordre de 18 000 troupes. Est-ce que vous seriez

11 surpris ?

12 R. Un chiffre aussi important m'étonnerait. Je suis d'accord qu'il y en

13 aurait plusieurs milliers, mais probablement pas 18 000. Mais enfin, cela

14 je vous le dis de mémoire.

15 Q. D'accord, d'accord. Je suppose, et le document dont je vais parler est

16 un document que nous avons produit, donc, je ne suis pas sûr que vous

17 l'ayez eu sous les yeux, 1D 00820. C'est un document manuscrit, une lettre,

18 une note, envoyée par M. Boban et dans ce document il ordonne, je dis bien

19 il ordonne au HVO, donc aux autorités civiles, de convoquer une réunion

20 extraordinaire pour modifier le point 5 de cette décision. Est-ce que, par

21 hasard, vous auriez ce document dont je parle sous les yeux ?

22 R. Je ne suis pas sûr du document dont vous êtes en train de parler

23 puisque je ne l'ai pas sous les yeux et je n'en connais même pas la date.

24 Q. D'accord, d'accord. La date, c'est le 20 janvier. Peut-il être affiché

25 sur le rétroprojecteur, à moins qu'on utilise le système e-court ? 1D

26 00820. Je peux vous en remettre un exemplaire papier pour gagner du temps,

27 si vous le souhaitez. En tout cas, voici ce qu'on lit dans ce document, je

28 cite : "En rapport avec votre décision numéro 01-1-31/93 et après

Page 6847

1 discussion avec les coprésidents de la conférence de Genève sur la Bosnie-

2 Herzégovine, M. Vance et Lord Owen, je vous ordonne de convoquer une

3 réunion extraordinaire du HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna ce

4 jour-là pour modifier le point 5 de façon à fixer un délai pour la mise en

5 œuvre de cette décision."

6 En d'autres termes, est-ce que, d'après ce que vous savez, Boban avait

7 aptitude d'émettre un tel ordre de jure, de facto ? Enfin, quoi qu'il en

8 soit.

9 R. Il était certainement présent aux pourparlers de paix et il était celui

10 qui, oui, oui, il pouvait le faire constitutionnellement, oui.

11 Q. Constitutionnellement, de quelle constitution vous parlez pour le dire,

12 la première ou la deuxième, après réflexion ?

13 R. Je ne suis pas entièrement sûr que les lois régissant l'Herceg-Bosna le

14 lui aurait autorité à cette époque-là.

15 Q. Janvier 1993, qui est le commandant suprême, à ce moment-là ?

16 R. Des forces armées, c'est probablement Boban.

17 Q. Cette décision, ne parle-t-elle pas de la subordination des unités ?

18 R. Non, même si de mémoire je ne suis pas sûr du sujet abordé dans le

19 point 5.

20 Q. Le point 5, c'est un document produit par vous, P 01346, qui traite de

21 la subordination et des délais dans le temps.

22 R. Hm-hm.

23 Q. Avant que vous ne répondiez à cette question, je vais vous en poser une

24 autre qui peut-être vous aidera à répondre à cette question. Est-ce que

25 vous seriez surpris si vous entendiez dire qu'il existe une décision prise

26 par le HVO et qui fait référence à une modification du point 5. On trouve

27 cette référence dans le document 1D 00821. Alors, un plus un faisant deux,

28 n'est-ce pas, il semble bien que Boban ordonne aux responsables du HVO

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1 d'obtempérer, de prendre une décision de modification du point 5. Alors, je

2 vais vous demander, Monsieur, la chose suivante. Est-ce que vous avez déjà

3 eu ce document sous les yeux ?

4 R. Ce document particulier, non, jamais.

5 Q. Bon, d'accord, c'est le document 1D 00821. La décision, la décision

6 signée par Jadranko Prlic, président du HVO, est-ce que vous l'avez eue

7 sous les yeux ?

8 R. Je n'en suis pas sûr. Je crois que oui, mais n'ayant pas le texte sous

9 les yeux, je ne sais pas.

10 Q. D'accord.

11 R. Mais, finalement, je pense que non.

12 Q. Vous pensez que non ?

13 R. Je pense que non, mais je ne suis pas absolument affirmatif.

14 Q. Je vous demande maintenant de répondre à la question suivante. Est-ce

15 que vous savez, effectivement, sans aucune conjecture de votre part, si

16 Boban, à ce moment particulier, compte tenu de la législation existante,

17 avait juridiquement l'aptitude d'émettre un tel ordre ? En d'autres termes,

18 est-ce que cet ordre était légal à ce moment-là, cet ordre adressé au HVO,

19 c'est-à-dire aux autorités civiles ?

20 R. Dans ce cas particulier --

21 Q. Monsieur --

22 R. Dans ce cas particulier, je ne suis pas sûr.

23 Q. D'accord. Merci beaucoup pour cette réponse très franche, vous ne savez

24 pas. D'accord. Je suppose qu'à ce moment-là, il faut vous poser une autre

25 question. Comment se fait-il que vous ne le sachiez pas ? Parce que la

26 toute première question que je vous ai posée, si je me souviens bien,

27 c'était quels sont les sujets de votre expertise. Nous avons que vous êtes

28 un expert de l'histoire de la Croatie au XIXe siècle, nous savons aussi que

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1 vous n'êtes pas un expert constitutionnel, que vous n'êtes pas un expert

2 financier, que vous n'êtes pas un expert économiste, que vous n'êtes pas un

3 expert militaire, et cetera, et cetera, mais vous dites avoir passé pas mal

4 de temps dans la région et être, finalement, un expert quant aux

5 fonctionnements et aux structures de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et

6 de la République croate d'Herceg-Bosna. Alors maintenant, je vous demande

7 comment il se fait que vous pouvez à l'instant, vous exprimant devant les

8 honorables membres de la Chambre, déclarer que vous êtes incapable de dire

9 avec quelque certitude, que ce soit juridique ou autre, si Boban, à ce

10 moment-là, avait aptitude juridique à émettre un ordre de cette nature ?

11 R. Quand je dis "juridique", je pense au système législatif créé pour

12 l'Herceg-Bosna.

13 Q. C'est exactement ce à quoi je pense. Cela veut dire que vous auriez

14 l'aptitude à vous pencher sur des instruments juridiques. Alors, je vous

15 demande si à ce moment-là, dans cette période-là, Boban agissait de facto

16 en tant que dirigeant, s'il ne le faisait pas de jure ?

17 R. Si ce document est authentique, il agit de facto et de facto il donne

18 un ordre.

19 Q. On n'a pas besoin d'être génial pour faire cette réponse, parce qu'on a

20 sa signature au bas du document. Alors, la question est, est-ce que vous

21 pouvez répondre à cette même question quant à sa capacité de jure. "Oui",

22 "non", "je ne sais pas" ?

23 R. Cela dépend de la lecture que l'on fait des documents fondateurs. Je ne

24 peux que vous répondre après examen des documents fondateurs qu'il était

25 peut-être autorisé à émettre un tel ordre.

26 Q. D'accord. Mais, par ailleurs, je manque de temps. Est-ce que vous avez

27 vu d'autres documents qui ont été échangés de part et d'autre, des procès-

28 verbaux de réunions tenues entre le 15 et le 20, documents émanant de M.

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1 Prlic qui les a établis en sa qualité, ou en tout cas, suite aux réunions

2 qui rassemblaient les autorités civiles du HVO. Est-ce que vous avez eu ces

3 documents sous les yeux ?

4 R. J'ai regardé et je me suis penché sur tout ce sur quoi j'ai pu mettre

5 la main, mais il y a pas mal de procès-verbaux qui manquent et il y en a

6 pas mal qui sont incomplets. Donc je répondrais que j'ai probablement vu

7 des documents de cette période, mais il est fort probable qu'il y en a

8 beaucoup que je n'ai pas eus sous les yeux.

9 Q. Bon, d'accord. Je vous demandais de supposer quelque chose, mais c'est

10 sans doute trop vous demander.

11 Alors, eu égard à la création de la République croate d'Herceg-Bosna,

12 d'accord. Je crois pouvoir dire que nous avons pratiquement établi que vous

13 n'avez eu sous les yeux aucun document relatif au contexte qui a présidé à

14 la création à la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Est-ce que nous pouvons

15 faire la même constatation quant à la création de la République d'Herceg-

16 Bosna. En d'autres termes, est-ce que vous avez eu sous les yeux des

17 éléments de contexte par rapport à cette question. Vous n'avez pas eu sous

18 les yeux des documents traitant des événements historiques, des

19 propositions de paix tel que le plan Owen-Stoltenberg ou le plan

20 Stoltenberg Owen, n'est-ce pas ? Vous ne vous êtes pas penché sur les

21 événements qui se déroulaient sur le terrain à ce moment-là ? Cela n'a pas

22 été couvert dans votre rapport ?

23 R. Ce sont deux choses différentes.

24 Q. Bon ?

25 R. J'ai eu sous les yeux un certain nombre de documents qui traitaient de

26 ces questions et qui figurent dans la façon dont j'ai décrit le contexte

27 dans mon rapport.

28 Q. Donc, si nous nous penchons sur votre rapport, nous n'y trouvons pas de

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1 rapports de cause à effet entre quelque chose qui a causé la création de la

2 Communauté croate d'Herceg-Bosna et qui ensuite a provoqué sa

3 transformation en République croate d'Herceg-Bosna. Peut-être cela a-t-il

4 un rapport avec les négociations ?

5 R. Bien, je crois que j'ai fait état du fait que la République croate

6 d'Herceg-Bosna a été créée dans le cadre de quelque chose qui avait un

7 rapport certain avec l'orientation des négociations à cette époque-là.

8 Q. Des pourparlers de paix ?

9 R. Oui.

10 Q. Ce qui était proposé à l'époque du plan Owen-Stoltenberg, d'après-vous,

11 c'était la création de trois républiques au sein de la Bosnie-Herzégovine;

12 c'est bien cela ?

13 R. Oui. Le projet prévoyait une union de trois républiques

14 Q. Une unions de trois république, bon, d'accord. Cela me va, restons-en

15 là.

16 Vous avez quelque peu abordé dans votre déposition Vares, l'évacuation de

17 cette ville, n'est-ce pas ? Alors, j'aimerais que nous passions rapidement

18 en revue cette question de Vares. J'ai une incertitude à ce sujet. Est-ce

19 que quelque chose est arrivé aux Croates de Vares qui les a poussé à

20 souhaiter ou à être contraints de partir ? A votre avis, est-ce que la

21 Communauté croate ou, en tout cas, les dirigeants croates étaient en train

22 d'essayer de pratiquer le nettoyage ethnique sur leur propre peuple ?

23 R. Si vous m'accordez une seconde, je pourrais vous répondre complètement.

24 D'abord, à l'été 1993, il est certain que des raisons réelles et très

25 pressantes existaient qui justifiaient la crainte de la population de

26 Kakanj et qui les a poussé à fuir vers Vares et ensuite à partir de Vares

27 vers d'autres lieux. Puis, deuxièmement, oui, il existait des raisons, et

28 même de très bonnes raisons, justifiant que les Croates souhaitent fuir

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1 cette région à cette époque-là. Par ailleurs, je n'ai jamais dit que les

2 Croates pratiquaient le nettoyage ethnique sur leur propre peuple dans ces

3 régions. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait une certaine ambiguïté quand

4 on voit que des dirigeants du HVO disent, d'une part, il est dommage que

5 tout cela se passe et que, d'autre part, ces mêmes dirigeants demandent la

6 possibilité de regrouper ces territoires.

7 Q. D'accord, cela c'est votre interprétation.

8 R. Et bien.

9 Q. D'accord, d'accord. Pouvons-nous maintenant examiner quatre documents ?

10 Je crois que nous en aurons terminé pour aujourd'hui. D'abord, la pièce 4D

11 00022 qui porte la date du 2 juillet 1993. Je vais commencer la lecture

12 d'un passage qui se trouve au bas de la page pour le compte rendu

13 d'audience, je cite : "Compte tenu du fait que la population de la

14 municipalité de Vares se trouve dans une situation désespérée, compte tenu

15 de l'afflux massif de personnes déplacées qui continuent à arriver de la

16 région de Kakanj jour après jour, nous sommes contraints de faire appel à

17 vous," et cetera, et cetera. C'est de cela que vous étiez en train de

18 parler, n'est-ce

19 pas ?

20 R. Oui.

21 Q. D'accord. Si nous regardons la date et l'identité de l'auteur de ce

22 texte ainsi que les événements décrits dans cet texte, il semble pour le

23 moins qu'une crise humanitaire menace à l'horizon, n'est-ce pas ?

24 R. Oui, grand nombre de réfugiés qui ne pouvaient aller nulle part à

25 partir de Kakanj affluent à Vares qui se trouvait déjà dans une situation

26 très difficile.

27 Q. Pour resituer tout cela dans le contexte historique, examinons la pièce

28 4D 00023. Ce document porte la date du 9 juillet 1993. Il émane du

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1 commandant de la Brigade, Emil Harah, et il est dit ici, je cite : "Comme

2 vous le savez déjà, quand la zone de la municipalité de Kakanj du côté de

3 la Bosnie-Herzégovine a été occupée et qu'environ 15 000 Croates ont été

4 expulsés de notre zone de responsabilité, la municipalité de Vares s'est

5 trouvée dans une situation extrêmement difficile du point de vue de

6 l'existence en raison des conditions de guerre." Vous ne contestez pas

7 cela ?

8 R. Non, non. Je suis sûr que la situation était difficile.

9 Q. Bien. Penchons-nous maintenant sur un autre document.

10 P 02283. Il s'agit d'un document de l'Accusation qui porte la date du 11,

11 du 11 mai et c'est le colonel Blaskic qui signe ce document. C'était un

12 commandant dans la région, vous le savez, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. D'accord. Dans cette lettre, il évoque la réalisation de l'évacuation

15 et donne ses raisons quant à la nécessité de procéder à cette évacuation et

16 au lieu d'évacuation.

17 R. Et bien --

18 Q. Laissez-moi finir.

19 R. D'accord.

20 Q. Je vais aller au terme de ma question d'abord et à la fin du texte

21 parce que je manque de temps, à moins que vous ne souhaitiez passer encore

22 plusieurs heures ici demain. Alors, à la fin du texte, nous lisons, je cite

23 : "Envoyer un représentant dans les territoires à partir desquels se fait

24 l'évacuation." Un peu plus loin, on trouve les mots suivants, je cite :

25 "Dans dix jours, il sera peut-être trop tard et la situation risque de se

26 transformer en extrême tragédie après le départ de plus de 10 000 Croates

27 de Bosnie centrale, qui a déjà tragédie qui a déjà commencé compte tenu des

28 souffrances vécues par les Croates de Zenica et de Konjic."

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1 Vous voyez ce passage ?

2 R. Oui.

3 Q. Alors, il y a un dernier document dont j'aimerais parler, le document P

4 034113, qui émane de Jadranko Prlic, qui porte la date du 13 juillet 1993.

5 Je pense que nous l'avons déjà examiné. Je n'insisterai pas, mais est-il

6 permis de dire, Monsieur, si ce qui nous intéresse c'est de déterminer

7 quelles étaient les motivations du HVO en Communauté croate d'Herceg-Bosna,

8 le 13 juillet 1993, lorsque cette lettre a été rédigée, n'est-il pas au

9 moins permis de dire de façon tout à fait équilibrée et calme qu'au vu de

10 ces autres documents également, dès le mois de mai, il existait un probable

11 à Vares et que ce problème ne venait pas du fait que les Croates

12 s'efforçaient de procéder à un nettoyage ethnique contre leur propre

13 peuple, mais bien du fait qu'une véritable catastrophe se formulait à

14 l'horizon ?

15 Monsieur, aucun de ces documents que je vous aie montrés n'a été évoqué

16 dans votre rapport, n'est-ce pas ?

17 R. Non. Ce n'est pas exact.

18 Q. Le contexte dans lequel j'ai situé ce document, se retrouve-t-il dans

19 votre rapport ?

20 R. Les arguments que vous avez formulés, non.

21 Q. Les arguments reposent sur la chronologie des événements et elle ne

22 figure pas dans votre rapport, n'est-ce pas ?

23 R. Ces documents que nous avons sous les yeux figurent dans mon rapport,

24 sont évoqués, si je ne m'abuse, le dernier, du colonel Blaskic, en

25 particulier.

26 Q. Très bien.

27 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu du

28 calendrier et de l'horaire qui est très serrée, j'aimerais quelques heures

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1 supplémentaires de contre-interrogatoire demain, et j'arriverai à la

2 conclusion de mon contre-interrogatoire. Je sais que --

3 M. LE JUGE ANTONETTI : [chevauchement] -- on a décidé, au maximum, deux

4 heures demain, pas plus. Donc, demain, vous aurez deux heures au maximum et

5 on arrête. Me Nozica aura -- oui, bon, et mon collègue me dit comme il faut

6 prendre en compte les 20 minutes de

7 Me Nozica, donc, deux heures tout compris.

8 M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord, d'accord. Je prends cela comme

9 base et je m'en tiendrai là.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Parce qu'apparemment, il y avait une mauvaise

11 traduction. Vous voulez du temps simplement demain, oui ou non ?

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne demande pas de temps supplémentaire,

13 Monsieur le Président; si on me le propose, je le prends. Mais, à mon avis,

14 il n'est pas nécessaire que je poursuive beaucoup plus longtemps le contre-

15 interrogatoire d'un expert aussi particulier que celui-ci. Je crois que mon

16 contre-interrogatoire peut s'arrêter, même si j'apprécie le fait que la

17 Chambre aurait été prête à me donner du temps supplémentaire.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, demain, Me Nozica interviewera pour les 20

19 minutes. Merci. Bien.

20 Très bien. Il est 19 heures 05. Nous nous retrouvons donc demain pour

21 l'audience qui débutera à 14 heures 15. Je vous remercie.

22 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mardi 19 septembre

23 2006, à 14 heures 15.

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