Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 4 décembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, appelez le numéro de l'affaire,

6 s'il vous plaît.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il

8 s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic et

9 consorts.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : En ce lundi, 4 décembre 2006, je salue les

11 représentants de l'Accusation, les avocats, ainsi que les accusés.

12 J'ai deux décisions orales à rendre avant de faire une communication.

13 Décision orale numéro 1, décision orale portant sur l'admission des pièces

14 relatives au Témoin CD.

15 La Chambre va se prononcer ce jour sur l'admissibilité des pièces relatives

16 au Témoin CD qui a comparu le 22 novembre 2006. La Chambre décide

17 d'admettre les éléments de preuve suivants présentés à l'Accusation au

18 motif qu'ils présentent une certaine valeur probante et une certaine

19 pertinence. P 03019, P 08742, P 09038 -- donc c'est bien P 09038. Par

20 ailleurs, la Défense n'a demandé l'admission d'aucun élément de preuve.

21 Décision orale numéro 2, décision portant sur l'admission des pièces

22 présentées dans le cadre de l'audition du témoin Nihad Kovac. La Chambre se

23 prononce sur l'admission des pièces présentées dans le cadre de l'audition

24 du témoin Nihad Kovac qui a comparu le 16 novembre 2006.

25 En ce qui concerne la pièce P 02009, dont l'Accusation demande l'admission,

26 la Chambre observe que celle-ci a déjà été admise.

27 La Chambre rejette les objections formulées par la Défense Koric concernant

28 l'admission des pièces P 0915 et P 02546.

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1 Ainsi, nonobstant le fait que le témoin n'est pas un militaire, ce témoin a

2 pu corroborer certaines des informations contenues dans ces deux pièces. En

3 conséquence, la Chambre décide d'admettre les pièces suivantes au motif

4 qu'elles présentent une certaine valeur probante et une certaine pertinence

5 : P 09708, P01915, P 02546, P 07985, P 08401, P 08952, IC 00091, IC 00092,

6 IC 00093, IC 00095, IC 00096, et IC 00097.

7 Concernant la première pièce, il y a une petite erreur. Ce n'est pas P

8 09708, mais P 09728.

9 Par ailleurs, la Chambre admet la pièce 3D 00575 présentée par la Défense

10 de l'accusé Praljak au motif qu'elle présente une certaine valeur probante

11 et une certaine pertinence. Voilà.

12 Alors, j'ai à vous faire part de la communication suivante : vendredi

13 dernier l'administration a été prévenue qu'un contrôle de routine avait

14 permis de déceler des bactéries de légionellose aux étages 4 et 5 et dans

15 la salle d'audience numéro III. Ce de fait, le Président du Tribunal a

16 annulé dans l'après-midi l'audience qui devait se dérouler dans cette salle

17 d'audience. Entre-temps, pendant le week-end, des mesures ont été prises

18 afin de vérifier le système et de contrôler, le cas échéant, l'existence de

19 bactéries. Il se trouve qu'il a deux types de bactérie : la bactérie de

20 type A et la bactérie de type B. La bactérie de type B peut présenter un

21 danger potentiel pour ceux qui en seraient infectés. Des analyses sont en

22 cours et nous connaîtrons demain le résultat de ces analyses concernant le

23 type même de ces bactéries. De ce fait, il a été décidé provisoirement de

24 bloquer le système de ventilation de la salle d'audience. Nous risquons au

25 cours de la journée d'avoir un peu chaud puisque nous ne serons pas

26 réfrigérés comme nous le sommes d'habitude.

27 J'indique également que la durée d'incubation de la légionellose peut

28 prendre plusieurs jours et que les symptômes sont ceux de la fièvre, des

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1 courbatures, des maux de tête, de la toux, voire également de la diarrhée.

2 Si certains d'entre vous présentent ce type de symptômes vous devez prendre

3 attache vite, fait avec un médecin, afin que des analyses soient effectuées

4 pour voir si vous n'êtes pas atteints de ce type de bactérie.

5 C'est ce que le médecin du Tribunal préconise. Selon lui, les risques sont

6 minimes, donc il n'y a pas lieu de s'inquiéter, mais il faut toujours dans

7 ce type de problèmes faire utilisation du principe de précaution.

8 Je vous tiendrai informer dès que possible des résultats en cours

9 concernant l'existence ou non de bactéries de type A ou B.

10 Ceci étant dit, nous allons maintenant poursuivre nos travaux, et je vais

11 demander à Mme l'Huissière de fermer le rideau afin d'introduire le premier

12 témoin. J'ai appris que l'Accusation en faisait maintenant un 92 ter, il

13 m'a été indiqué que l'Accusation prendra 20 minutes, et conformément à la

14 liste de l'article 65 ter, la Défense aura une heure 30 minutes

15 globalement.

16 Les mesures de protection qui ont été ordonnées sont le pseudonyme et

17 distorsion du visage.

18 Après ce témoin, nous aurons un autre témoin qui viendra également déposer,

19 mais elle sera un témoin du viva voce.

20 Je vais demander maintenant à Mme la Greffière de passer en audience à huis

21 clos.

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à

23 huis clos partiel.

24 [Audience à huis clos partiel]

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15 [Audience publique]

16 M. FLYNN : [interprétation] En l'occurrence, la déclaration indique que le

17 témoin vivait à Capljina. Jusqu'en 1991 il n'y avait pas de tension

18 ethnique dans la région. Dans la deuxième moitié de 1992, le mari du témoin

19 a assisté à l'arrestation de nombreux intellectuels musulmans de Capljina

20 et les a vus arriver à la caserne de Grabovina où il travaillait jusqu'à la

21 fin 1992. En juillet 1993, un policier a arrêté le mari du témoin. Il était

22 civil. Il a été envoyé à Gabela.

23 Elle a reçu une lettre de garantie pour se rendre en Allemagne, notamment

24 des garanties pour son mari, mais en dépit de cinq tentatives son mari est

25 resté à Gabela.

26 A Capljina, la plupart des Musulmans ont été arrêtés et le HVO a intimidé

27 les femmes et les enfants musulmans et a pillé. En août 1993, le HVO a

28 commencé à expulser les femmes. Le témoin a été arrêtée avec les 33 autres

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1 le 29 septembre 1993. Elle a dû remettre les clés de son appartement au

2 membre de la police militaire qui l'a arrêtée et certains ont été emmenés à

3 Silos. Elle est arrivée à peu près à 20 heures, a été enregistrée et n'a

4 pas reçu d'alimentation. Le lendemain, à 14 heures, le HVO l'a emmenée,

5 accompagnée d'autres, en camion vers Blagaj où elle a été forcée de marcher

6 vers "l'armija" de Bosnie-Herzégovine. Le témoin a vu des corps sur le

7 chemin. Le témoin s'est rendu à Mostar et a fini par demeurer à Jablanica

8 pendant quelques mois. Le témoin s'est rendu au camp de réfugiés danois à

9 Ostrozac. Son mari a été libéré de Gabela le 29 novembre 1993.

10 Ceci met un terme à mon résumé. Merci.

11 Q. Madame le Témoin, vous m'avez entendu faire un résumé de votre

12 déclaration. Avez-vous rencontré des enquêteurs du TPIY le 6 février 2001

13 pour faire une déclaration ?

14 R. Oui.

15 Q. Avez-vous fait cette déclaration en toute liberté sans aucune pression

16 que ce soit ?

17 R. Non, il n'y a pas eu de pression.

18 Q. A la fin, est-ce que cette déclaration a été relue dans votre langue ?

19 Est-ce que vous l'avez comprise ?

20 R. Oui.

21 Q. Avez-vous signé une version française de votre déclaration ?

22 R. Oui.

23 Q. A votre arrivée ici à La Haye, vous souvenez-vous m'avoir rencontré

24 ainsi qu'un autre enquêteur du TPIY ?

25 R. Oui.

26 Q. Avez-vous eu la possibilité -- la réponse était "oui," je pense.

27 R. Oui, oui.

28 Q. Avez-vous eu la possibilité de relire votre déclaration à ce moment-

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1 là ?

2 R. Oui.

3 Q. En dépit de certaines petites corrections mineures, vous maintenez

4 cette déclaration, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. En ce qui concerne ces modifications mineures, est-il exact de dire que

7 vous vouliez changer, modifier la date de l'arrestation de votre mari, qui

8 était indiquée comme étant juillet 1993, et vous avez voulu donc dire que

9 c'était en mai 1993 ?

10 R. C'était en mai. C'était au mois de mai.

11 Q. Je pense que c'était le 13 mai, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Je pense que vous vouliez également, pour apporter des

14 éclaircissements, que lorsque vous évoquiez d'autres personnes arrêtées,

15 vous avez indiqué des noms de villes et villages, tels que Stolac, Visici,

16 Pocitelj, et cetera; est-ce que c'est exact ?

17 R. Oui.

18 Q. Si vous deviez déposer de manière exhaustive devant le Tribunal

19 aujourd'hui, est-ce que vous diriez la même chose que ce qui est dans votre

20 déclaration ?

21 R. Oui.

22 Q. Merci. J'ai une question très brève pour préciser quelques aspects. A

23 la page 3 de votre déclaration, vous indiquez qu'à la suite de

24 l'arrestation de votre mari, la situation à Capljina est devenue tendue. Il

25 y a eu des tirs dans la ville. Vous parlez de musulmans.

26 R. Oui.

27 Q. Une question, est-ce que vous avez demandé l'aide de la police, de la

28 police, on s'entend, est-ce que vous avez téléphoné à la police civile ?

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1 R. Non. Parce que notre téléphone ne fonctionnait pas.

2 Q. Auriez-vous pu appeler la police, si vous le vouliez ? Savez-vous si la

3 police apportait son aide lorsque la police revenait en ville ?

4 R. Non.

5 Q. Je voudrais attirer votre attention sur la pièce 03160 qui figure

6 dans le dossier qui est devant vous. C'est un ordre du commandant du

7 secteur du sud, du TOG93, le commandant du HVO, au paragraphe 1, il adresse

8 un ordre à la police civile, la chargeant de prendre la responsabilité de

9 protéger les civils de Capljina et Stolac, ainsi que de leurs biens.

10 Pouvez-vous nous dire si la police -- s'est exécutée ou non ?

11 R. Non. Non.

12 Q. Est-ce que vous pourriez vous reporter à la première pièce dans ce

13 dossier qui porte la cote 0799 -- 09799. Il s'agit d'une déclaration. La

14 déclaration que vous dites avoir fait à la première page dans la version

15 française.

16 Est-ce que vous pouvez me dire si la signature qui figure en bas de page à

17 droite est la vôtre ?

18 R. Oui.

19 Q. A la page suivante, à la fin de la déclaration, est-ce que c'est

20 également votre signature en bas de page ?

21 R. Oui.

22 M. FLYNN : [interprétation] Cette déclaration est sous pli scellé et je

23 devais le dire à Messieurs les Juges.

24 Q. Je vous présente -- je vous prie à présent de prendre la pièce 09086.

25 Avant d'examiner cette pièce, je voulais vous poser la question suivante :

26 vous dites avoir été emmené à un Silo dans votre déclaration; est-ce que

27 c'est vrai ?

28 R. Oui, c'est exact.

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1 Q. Vous avez été détenue pendant un bref laps de temps en compagnie de 34

2 autres personnes ?

3 R. Oui. On était 34 en tout.

4 Q. De quel genre de bâtiment s'agit-il, les bâtiments où vous étiez

5 détenus ?

6 R. Bien, c'était une installation où on dépose du blé, du mais, du grain,

7 c'est à Silo, un dépôt.

8 M. FLYNN : [interprétation] Est-ce que vous pourriez examiner les quatre

9 photographies qui figurent au dossier sous la pièce 9086 et portent les

10 cotes allant de 01449943 à 01449947.

11 Q. Est-ce que vous pourriez examiner chaque photographie individuellement

12 et me dire si vous reconnaissez ceux qui figurent sur ces photos, très

13 brièvement ?

14 Excusez-moi cinq photographies ? La première photo 01449943, que

15 représente-t-elle ?

16 R. J'y vois Silos; d'un côté, il y avait la rue et puis, sur le côté, il y

17 avait l'entrée de Silos.

18 Q. C'est à cet endroit que vous avez emmené. Je vous prierais de regarder

19 la deuxième photo. Est-ce que vous reconnaissez cette deuxième

20 photographie ?

21 R. -- ici on voit un Silo.

22 Q. Il s'agit de la photographie 01449944. La troisième photo 01449945, qui

23 voyez-vous ?

24 R. Bien, ceci est un côté de ce bâtiment de Silos, si l'on regarde la

25 route depuis la route principale --

26 Q. -- sur la photographie suivante, 01449946.

27 R. Là, c'est le Silo, mais vu de l'autre côté, ce n'est pas la vue que

28 l'on a depuis la route principale.

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1 Q. Enfin 01449947.

2 R. Là, à nouveau, c'est le s, mais de l'autre côté -- vu de l'autre côté,

3 mais je ne suis pas entré par cette entrée-là. J'ai emprunté l'autre entrée

4 qui se trouvait de l'autre côté.

5 Q. Je vois. Merci beaucoup.

6 M. FLYNN : [interprétation] A ce stade, Messieurs les Juges, je n'ai plus

7 d'autres questions. Je voulais simplement dire qu'il y a toute une série

8 d'autres pièces à conviction, mais je ne pense pas demander l'admission à

9 ce stade.

10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous nous avez dit avoir vécu à

11 Capljina et par ailleurs que vous vouliez rentrer dans votre appartement à

12 Capljina. Est-ce que les choses ont évolué depuis ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis revenu. Je suis revenu. C'était

14 en l'an 2000.

15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous êtes de nouveau dans votre

16 ancien appartement ? Y avait-il -- y a-t-il des choses qui manquaient ou

17 est-il encore tout à fait équipé ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] L'appartement était à moitié vide mes affaires

19 n'y étaient pas. Bon, enfin je dirais moitié, moitié. Ils ont apporté la

20 moitié, puis, ils ont resté la moitié, puis, où l'appartement a été un peu

21 détruit.

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Moi aussi, j'ai une question, mais je vais demander

24 à Mme la Greffière de passer en audience à huis clos ?

25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

26 Monsieur le Président.

27 [Audience à huis clos partiel]

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24 [Audience publique]

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez expliqué que, le 29 septembre 1993, après

26 avoir été rendu une visite à votre mère, vous êtes retournée chez vous et

27 aux environs de 19 heures 30, deux personnes sont venues chez vous. Vous

28 dites qu'il s'agissait de policiers militaires. L'un était en tenue de

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1 camouflage de la police militaire l'autre en uniforme bleu de la police

2 régulière. Alors --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : -- c'est qu'il y a la police civile et la police

5 militaire, les deux qui sont venues chez vous. Qu'est-ce qui vous a permise

6 de penser qu'ils appartenaient à la police ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Il avait un uniforme de camouflage puis il

8 avait aussi un uniforme bleu porté habituellement par la police.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais celui qui avait l'uniforme bleu c'était

10 la police civile ou la police militaire ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, sans doute la police civile.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce qu'à part l'uniforme, il y avait un signe

13 distinctif comme quoi ils appartenaient à la police ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, c'est vous qui en avez tiré la conclusion

16 qu'ils appartenaient à la police militaire ou la police civile ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, après vous avez quitté l'immeuble, vous

19 avez remis vos clés et vous êtes montés avec vos enfants dans un minibus de

20 la police. Alors, comment saviez-vous que c'était un minibus de la police ?

21 Il y avait marqué police, qu'est-ce qui vous permet de penser que c'était

22 un minibus de la police ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, c'était un bus noir, puis, il y avait

24 quelque chose d'écrit.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce qu'il y avait décrit ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, c'était l'emblème de -- c'était écrit --

27 ce qui était écrit c'est la police.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait écrit police sur ce minibus.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est de là qu'ils vous ont emmenés au Silo ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Bon.

5 M. LE JUGE MINDUA : Témoin Celopek, juste pour compléter à votre

6 confirmation sur ces opérations d'arrestation, vous voulez bien confirmer,

7 si je vous ai compris, qu'après avoir arrêté les hommes en âge de

8 combattre, il a été question de l'arrestation même des adolescents de moins

9 de 16 ans, et des hommes de plus de 60 ans. Cela une fois fait il y a eu

10 plusieurs vagues d'autres arrestations de femmes selon votre déclaration.

11 Suite à ces arrestations de femmes, que la population musulmane a été vidée

12 dans votre village, c'est bien cela ? C'est suite à ces différentes

13 arrestations ? Parce qu'il est resté des femmes musulmanes dans le village,

14 et la population s'est vidée, c'est à cause des arrestations de la fin du

15 mois de septembre, ou elles ont quitté d'elles-mêmes, les femmes

16 musulmanes ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas un village, c'est une ville.

18 M. LE JUGE MINDUA : Tout à fait.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Il en est resté un petit peu que je sache,

20 ensuite, on a arrêté trois groupes, qu'on a également amené à Silo, et

21 c'est là qu'on les a enfermés.

22 M. LE JUGE MINDUA : Hm-hm. Merci beaucoup.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

24 Alors, la Défense pour une heure et 30.

25 Maître Tomic.

26 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

27 n'avons pas de questions pour ce témoin.

28 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions non plus,

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1 Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

3 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bien, nous

4 voudrions remercier le témoin d'être venue. Nous n'avons pas de questions à

5 lui poser.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica.

7 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bien, j'ai

8 quelques questions à poser à ce témoin, mais je voudrais demander que l'on

9 passe à huis clos partiel puisque je vais poser quelques questions qui

10 pourraient découvrir l'identité du témoin.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Passons en audience à huis clos partiel.

12 M. LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en huis clos partiel.

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11 [Audience publique]

12 M. KRUGER : [interprétation] Merci.

13 Q. Témoin, vous parliez de conscrits militaires. Qu'est-ce que vous

14 vouliez dire ?

15 R. Les Musulmans de Bosnie à cette époque-là -- comment dire ? A l'époque,

16 le HVO était au pouvoir du point de vue militaire, du service militaire,

17 alors que les Musulmans de Bosnie pendant qu'ils étaient sur la ligne entre

18 les Serbes et les Croates, ils se trouvaient sur la ligne. Ils tenaient

19 cette ligne-là.

20 Q. Oui, vous avez dit que les hommes à Stolac ont été emmenés. Lorsque

21 vous dites "ont été emmenés," par qui ?

22 R. Les Musulmans de Bosnie. Par le HVO, par les hommes portant des

23 insignes du HVO. Je ne sais pas qui c'était, ils portaient des uniformes de

24 camouflage avec des couvre-chefs du même tissu. Ils étaient armés. Puis il

25 y avait des gens qui venaient d'ailleurs l'Herzégovine de l'ouest, de Neum,

26 de Capljina, Metkovic.

27 Il y avait des membres de structures paramilitaires qui se rejoignaient au

28 HVO. Je pense qu'il s'agissait des gens des unités de Split, qui portaient

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1 des uniformes, des espèces d'uniforme noir. Les gens du HVO avaient des

2 insignes sur leurs uniformes et leurs couvre-chefs.

3 Q. Merci. Votre mari, au cours de cette période comprise entre avril 1993

4 et juillet 1993, a-t-il travaillé d'une manière quelconque pour le HVO ?

5 R. Oui. Il y avait des -- comment dirais-je ? Dans le secteur civil -- il

6 avait un âne qu'il utilisait pour transporter la nourriture, et parfois un

7 plus tard des grenades à main à Vesilje [phon], pendant une vingtaine de

8 jours. Par la suite, on lui a demandé de travailler à Inkos dans le cadre

9 de la protection civile, sans salaire.

10 Q. Lorsqu'il a travaillé pour Inkos, est-ce que c'était avant son

11 arrestation, dont vous avez parlé ?

12 R. Non, il ne travaillait nulle part. Il était simplement au sein de la

13 protection civile pendant la guerre, depuis la première moitié de l'année

14 1993, jusqu'à son arrestation.

15 Q. Merci. Je voudrais à présent parler du 3 juillet 1993, qu'est-il arrivé

16 à votre mari ce jour-là ?

17 R. Le 3 juillet, à ce moment-là aussi, il était au sein de la protection

18 civile, et à ce moment-là il était censé être de garde à Inkos, cependant

19 des soldats inconnus sont venus. Ils frappaient à la porte. C'était ce

20 matin-là. On avait sommeil ce matin-là, car la nuit on entendait toujours

21 des tirs, des cris, des sons liés aux incendies.

22 Ils frappaient fort. J'ai ouvert la porte. J'ai dit : Vraiment, je ne sais

23 pas où il est. Peut-être il est à Inkos ou ailleurs. Comme c'est une grande

24 maison, je suis partie le chercher à l'étage. Effectivement, il était à

25 l'étage, il avait entendu le bruit. C'est ainsi qu'ils l'ont emmené. Il y

26 avait des soldats.

27 Q. A quelle heure dans la matinée ces soldats sont-ils arrivés ?

28 R. Vers 8 heures.

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1 Q. Est-ce que ces soldats portaient des uniformes ?

2 R. Oui, un uniforme noir avec des chemises noires, et ils portaient des

3 insignes du HVO. Ils portaient des couvre-chefs de camouflage. Ils étaient

4 armés et ils étaient minces. Ils frappaient violemment sur la porte, et non

5 pas poliment. Ils demandaient mon mari, ils le cherchaient. Je n'avais pas

6 le choix. Je suis allée à l'étage, je lui ai dit que des membres du HVO le

7 cherchaient. Je leur ai dit qu'il était membre du HVO, qu'il travaillait à

8 la protection civile à Inkos, mais cela n'a pas aidé.

9 Ils l'ont emmené en chaussons. Il était pratiquement pied nu. Je ne

10 sais pas où il était, pendant longtemps je ne le savais pas.

11 Q. Votre fils ?

12 R. A ce moment-là ils ont emmené mon fils aussi avec mon mari, mon mari

13 est parti lui aussi. Il était à 20 à 30 mètres derrière mon fils, mais l'un

14 des soldats a constaté que mon fils était jeune et qu'il était trop jeune

15 pour être emmené là où les hommes étaient emmenés par le HVO. Je ne savais

16 rien d'autre à l'époque.

17 Q. Votre fis est revenu, il vous a été rendu.

18 R. Oui, un soldat l'a remmené, oui.

19 Q. Avant de passer à autre chose, quand avez-vous après cela revu votre

20 mari pour la première fois ?

21 R. Après tout cela, la première fois que j'ai revu mon mari c'était le 15

22 décembre 1993, et aucune connaissance entre-temps.

23 Q. Après l'arrestation de votre mari, qu'est-ce que les femmes musulmanes

24 de Stolac ont fait ?

25 R. Je ne comprends pas.

26 Q. Est-ce que le lendemain vous avez essayé de chercher à savoir où votre

27 mari avait été emmené ?

28 R. Non.

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1 Q. Est-ce que vous vous êtes rendue au quartier général du HVO à Stolac ?

2 R. Oui. Le lendemain on y est allé au commandement. Je suis allée toute

3 seule, cependant je suis tombée sur un nombre, un grand nombre de femmes,

4 des enfants qui cherchaient leurs maris et leurs enfants.

5 Q. Qu'est-ce qui s'est passé ?

6 R. Les hommes en âge de combattre, et cetera. Nous sommes partis et on

7 nous a dit qu'ils avaient leur bureau dans le jardin d'enfants. Mais

8 lorsque nous y sommes arrivés, le bureau était plein de documents, mais

9 personne n'était à l'intérieur.

10 Q. Avant de continuer, vous dites qu'ils recherchaient des maris et les

11 enfants, avant que je ne vous interrompre, et les hommes en âge de porter

12 les armes. Est-ce qu'ils recherchaient des conscrits militaires ou est-ce

13 qu'il y avait avec vous des conscrits ? Pour bien comprendre ce qu'il y a

14 au compte rendu.

15 R. C'était leur fils. Les femmes cherchaient leurs fils, leurs fils qui

16 étaient sur les lignes de front, contrôlées par le HVO, les lignes de front

17 entre le HVO et l'armée de la Republika Srpska. Donc, ils sont allés

18 jusqu'à une certaine ligne.

19 Q. Merci. Dans ce jardin d'enfants, où se situe-t-il, ce jardin d'enfants

20 où vous êtes allée ? Où se situe-t-il et dans quelle partie de la ville ?

21 R. Il existe une partie de la ville qui s'appelle qui Stari Grad, puis une

22 autre qui s'appelle Podgrad. Donc, il faut aller d'abord à Podgrad,

23 derrière ce Stari Grad, et c'est une partie derrière Stari Grad. C'est là

24 que se trouve le jardin d'enfants.

25 Q. Puis, lorsque vous parlez de jardin d'enfants, c'est un jardin

26 d'enfants au sens de kindergarten, école maternelle ?

27 R. Oui, un jardin d'enfants. C'est là que se trouvait le bureau du HVO, de

28 même que dans des bâtiments autour. Il y avait une partie avec leurs

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1 bureaux, là-bas aussi; cependant, certains nous interdisaient d'entrer dans

2 l'immeuble. Nous sommes entrés dans la cour, nous étions devant une porte

3 devant laquelle se trouvait un soldat qui portait une arme et il ne

4 bougeait pas du tout. On demandait -- on posait des questions, on

5 suppliait, mais nous n'avons eu aucune réponse. Il y avait d'autres soldats

6 sur place aussi.

7 Certains d'entre eux nous provoquaient, d'une certaine manière. Ils

8 nous disaient : "Qu'est-ce que vous cherchez ? Qu'est-ce que vous voulez ?"

9 Nous, on souhaitait savoir pourquoi l'on séparait les membres de nos

10 familles.

11 Un soldat, alors qu'ils étaient trois, l'un d'eux, il s'est approché de

12 moi. Il a dit : "Madame, que font les vôtres à Bijelo Polje ?" Je lui ai

13 répondu : "Ce qui m'intéresse, c'est ma famille et ma ville de Stolac. Je

14 ne pouvais rien voir au-delà car toutes les routes étaient bloquées." Il a

15 commencé à essayer de m'étrangler. Je me suis échappée et les deux autres,

16 ils m'ont aidée.

17 Je me suis approchée d'une vieille femme. Je me suis calmée un peu et un

18 peu plus loin, plus tard, et plus loin, j'ai vu un véhicule de transport de

19 troupes, avec des soldats qui portaient des uniformes du HVO, qui portaient

20 des insignes du HVO.

21 Celui qui avait essayé de m'étrangler, il est parti de moi. Il tirait

22 de son fusil, je ne sais pas dans quelle direction, peut-être dans l'air.

23 Ainsi, nous avons vu que rien ne se passait par là. Nous nous sommes

24 éloignées de l'immeuble et Ivo Raguz, un journaliste connu, est sorti de

25 l'immeuble. Il travaillait pour Slobodna Dalmacija. C'était le cas avant la

26 guerre et encore aujourd'hui. Comme il était informé et qu'il disposait de

27 beaucoup d'informations, mais ils donnaient surtout des informations

28 erronées à ces journaux, concernant ce qui était fait par les Bosniens, par

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1 les Musulmans de Bosnie en Herzégovine; cependant, nous les femmes, on

2 était nombreuses là-bas.

3 Il a pris un pistolet de sa poche intérieure et il y a toujours une

4 menace qui planait, si on posait une question ou si quelqu'un allait dire

5 quelque chose, il allait tirer. C'est ce qu'il a dit. Nous nous sommes

6 regardées entre nous, nous sommes restées encore un peu de temps là-bas, à

7 se regarder, et ceux qui commandaient le HVO et qui étaient sur place et,

8 bien sûr, ces soldats n'auraient pas été là-bas s'ils n'avaient pas reçu de

9 tels ordres. Par conséquent, nous avons compris cela. Nous sommes rentrées

10 chez nous.

11 Il y avait, à l'endroit où c'était avant la direction forestière, et à ce

12 moment-là, il y avait une espèce de dispensaire là-bas, et je suis allée

13 voir Nino Palac, pour demander un calmant et j'étais vraiment ébranlée. Je

14 suis rentrée chez moi. J'ai trouvé ma mère, chez moi, et mes enfants et je

15 leur ai dit que j'avais échappé à un véritable mal. Mais nous n'avons rien

16 pu savoir d'autre ce jour-là.

17 Q. Le Témoin --

18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre. Il

19 y a un passage un petit peu bizarre au compte rendu d'audience, page 55,

20 lignes 16 et 17. Apparemment, le témoin, elle dit : "En chemin vers le

21 commandement, j'ai rencontré une série de femmes qui recherchaient leur

22 mari et enfants." Je pense que ce qu'elle voulait dire, c'est qu'elle

23 voulait dire qu'elle a rencontré des femmes et des enfants qui

24 recherchaient leur mari et père, parce que nous n'avons pas l'information

25 selon laquelle des enfants ont été arrêtés.

26 Donc, Madame le Témoin, est-ce que les femmes recherchaient leurs enfants

27 ou est-ce que les femmes et les enfants recherchaient leur mari et père ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Les enfants, il s'agit de la chose suivante.

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1 Je suis partie toute seule, mais le long du chemin, j'ai vu qu'on était

2 toutes lésées et on essayait de chercher de l'aide. On voulait s'adresser à

3 quelqu'un et sans cesse, il y avait un véhicule de transport des troupes

4 qui tournait autour de nous. Donc, on cherchait le commandant. On s'est

5 demandé qui avait permis à ces soldats d'agir ainsi, de nous séparer.

6 Il y avait des femmes. Environ 200, 250 femmes. Femmes, jeunes femmes

7 aussi.

8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Elles étaient des femmes musulmanes de Bosnie.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, une précision.

11 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Juste une explication linguistique. La

12 langue employée par la dame qui dépose ici, lorsqu'elle dit un enfant, cela

13 se réfère aussi aux adultes. Je suis un enfant de mes parents. Chez nous,

14 même à l'âge de 20 ans ou de 30 ans, on parle de la personne en tant

15 qu'enfant. Je suis toujours enfant de mes parents. C'est l'explication, je

16 pense.

17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

18 Il y a une deuxième question de fond. Lorsque vous avez parlé de la

19 rencontre avec le journaliste qui a sorti un pistolet et a menacé de tirer.

20 Ensuite, vous avez dit : "Ils ont menacé d'ouvrir le feu." Est-ce qu'il y

21 avait quelqu'un d'autre, en plus du journaliste, qui a menacé de vous tirer

22 dessus ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Juste le journaliste, à ce moment-là. C'était

24 après tout le reste, après tout ce que je vous ai raconté et après cela,

25 nous sommes repartis chez nous.

26 L'INTERPRÈTE : Microphone pour le Juge, les interprètes ne l'entendent pas

27 malheureusement.

28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Le témoin a dit : "Ils ont menacé de

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1 me tirer, mais si je comprends bien l'anglais, cela aurait dû être "he",

2 donc, il a menacé - avait en anglais - mais "he", "il", parce qu'il n'y

3 avait qu'une seule personne.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient plusieurs sur le véhicule de

5 transports de troupes. Je pensais qu'eux aussi, ils allaient tirer. Puis,

6 lui aussi, le journaliste. Donc, ils étaient nombreux. Puis, il y avait le

7 garçon, le jeune homme qui avait tiré quelque part après m'avoir vue. Je ne

8 sais pas.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : -- pour les personnes qui nous écoutent ou celles

10 qui nous lirons dans le futur.

11 Quand vous dites : "le journaliste," comme on sait maintenant qu'il y a des

12 journalistes qui sont embarqués avec des militaires, il y a des confusions.

13 Alors quand vous dites ce journaliste, en fait, c'était un soldat, ce

14 n'était pas un "journaliste ?"

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Il portait des vêtements civils. C'était un

16 journaliste. Je ne l'ai pas vu dans un uniforme.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : -- un journaliste. Madame --

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'était une personne connue, Ivo Raguz.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : L'arme d'un journaliste c'est son stylo. Ce n'est

20 pas un revolver. Alors qu'est-ce qu'il faisait là ce journaliste avec une

21 arme ? Il faisait un reportage ? Que pouvez-vous nous donner comme

22 précision ? Ou il participait avec d'autres à une opération de police ou

23 l'opération militaire ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai aucune idée. Je ne le sais pas. Je

25 raconte seulement ce que j'ai vu, mais je ne sais pas ce qu'il faisait là-

26 bas. Pourquoi il était là-bas ? D'où il était venu ? S'il recueillait des

27 informations ou pas ? Cela je ne le sais pas. Mais j'ai vu ce que j'ai

28 raconté. Il a sorti son pistolet de sa poche intérieure à gauche et il a

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1 dit : "Si quelqu'un me pose des questions, je vais tirer."

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

3 M. KRUGER : [interprétation] Merci.

4 Q. Madame le Témoin, en ce qui concerne ce journaliste, à ce moment-là,

5 est-ce que vous avez lu des articles ou entendu des informations diffuser

6 par ce journaliste, que ce soit dans la presse ou à la radio ?

7 R. Oui, à la radio.

8 Q. Pourriez-vous nous dire brièvement ce que cela représentait pour vous

9 comme femme que de vivre à Stolac à partir du 4 juillet 1993 ? Est-ce que

10 vous aviez de l'eau, de l'électricité ?

11 R. Ma vie à partir du 3 juillet, date à laquelle mon mari a été emmené, et

12 même avant, cela avait commencé avant, les Musulmans de Bosnie qui étaient

13 à Stolac, qui étaient en ville, qui se tenaient en ville, leurs maisons ont

14 été incendiées. Plus tard, cela avait commencé. Il n'y avait que du dioxyde

15 de carbone dans le centre-ville. La mosquée du tsar a été incendiée. Elle

16 datait du XVIe siècle, d'après mes connaissances. Peut-être elle était même

17 plus ancienne que cela. Autour de la mosquée, il y avait un marché, le

18 vieux marché dans lequel il y avait des commerces d'artisans, des bouchers,

19 des magasins de tout genre, puis autour, il y avait des endroits où des

20 gens vivaient. Il y avait aussi des pâtisseries, et cetera. Tout ceci a

21 totalement brûlé. Je ne respirais que du dioxyde de carbone.

22 Les 13 et 14 juillet, à ce moment-là, le HVO a commencé à incendier des

23 immeubles sans cesse. Par conséquent, dans le

24 centre-ville, dans lequel j'étais vous savez ma maison était vieille et

25 elle était plutôt construite de bois. Nous, on était quatre à la maison

26 puisque mon mari avait été emmené et j'attendais sans cesse que l'on soit

27 incendié nous aussi. Je me disais toujours qu'il fallait peut-être me

28 diriger vers la maison des voisins à 200, 300 mètres, car tout était en

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1 flammes. J'ai vu qu'il y avait des jeunes hommes qui le faisaient pendant

2 la nuit en utilisant des balles incendiaires. Ces marchés, par exemple,

3 étaient à une distance de 20, 30 mètres de moi à vol d'oiseau et ils

4 allumaient le feu au vieux marché, tout près de cette école. Vous voyez où

5 est l'école. Ils chantaient : "C'est le 1er mai, appelez les pompiers." Mais

6 je ne pouvais pas appeler les pompiers, j'étais seule. Ils chantaient et

7 ils disaient : "Qu'il fallait brûler, incendier -- "

8 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, j'ai l'impression que

9 la dame est en train de lire, peut-être j'ai mal lu. Je n'ai pas pu voir

10 depuis ici.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, vous savez, on m'a montré cette photo,

12 mais je connais tout cela par cœur. J'y habite depuis 55 ans.

13 M. LE JUGE MINDUA : Madame le Témoin, juste un mot au sujet de la mosquée

14 incendiée, vous avez dit qu'il y a eu une mosquée du XVIe siècle, à peu

15 près qui a été incendiée, mais, dans votre déclaration écrite, vous parlez

16 de plusieurs mosquées, de plusieurs mosquées, un, c'est bien cela. Est-ce

17 qu'il y avait plusieurs mosquées ou une seule ? Puis --

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Il n'y a pas d'interprétation ? Désolé.

19 Madame --

20 Madame, voilà cela y est, cela marche.

21 M. LE JUGE MINDUA : Voilà, non, mais je reprends ma question. Parce

22 que vous venez de dire qu'il y a une mosquée du XVIe siècle qui a été

23 incendiée et, dans votre déclaration écrite, vous parlez, en fait, de

24 quatre mosquées. Alors, mais en même temps, vous dites que ces incendies

25 ont eu lieu lorsque le conflit -- les incendies ont eu lieu lorsque le

26 conflit devient intense entre le HVO et l'ABiH.

27 Parce que vous étiez là ou selon ce que vous avez vu les quatre mosquées --

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'étais pas là.

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1 M. LE JUGE MINDUA : Mais, selon votre -- c'est parce que c'est votre

2 déclaration. Les mosquées ont été incendiées délibérément, ou c'est à la

3 suite du conflit intense qui a eu lieu entre les deux armées ? Voilà la

4 question. Je me réfère à votre propre déclaration ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] A Stolac, il n'y avait pas d'armée. Où voulez-

6 vous qu'il y ait des côtés. Vous avez le peuple bosnien et puis, le HVO qui

7 était soumis au HVO sous le HVO et nos quatre mosquées ont été incendiées,

8 la mosquée du Tsar, je l'ai vue en train de brûler. Tout d'abord, le toit a

9 brûlé. Ensuite, c'étaient les tapis qui ont brûlé et tout ce qui était

10 qu'on a rassemblé au cours des siècles. Vous savez, les fumées

11 ressemblaient à des arcs-en-ciel. On n'avait même plus la force de regarder

12 tout cela tellement, on avait peur. Il y avait du bruit, la peur, pas

13 d'électricité, les tirs. Partout, sur les marchés, on entendait les tirs de

14 loin.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous avez vu donc la mosquée brûler.

16 Alors, ma question : qui l'a fait brûler ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Devant de mes yeux, on a entendu les soldats.

18 Il n'y avait que des soldats du HVO qui étaient dans la ville. Je ne

19 pouvais voir personne puisqu'il faisait nuit, mais j'ai entendu les mots,

20 je les ai entendus dire : "Incendie. Brûle, brûle."

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Répétez les mots que vous avez entendus.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Quand on a incendié la mosquée ?

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Qu'avez-vous entendu ? Vous venez de dire que

24 vous aviez entendu des gens dire quelque chose, alors, qu'est-ce qu'ils

25 disaient ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils disaient -- il y en avait un, parce qu'ils

27 étaient plusieurs, j'étais dans ma chambre à coucher, je regardais le

28 marché brûler ainsi que la mosquée. C'était la suite, si vous voulez, dans

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1 ma soirée. L'incendie commençait à partir, enfin, le feu était plus grand

2 que l'école élémentaire. Vous pouvez voir devant vous l'image et vous

3 pouvez voir quelle est la taille de l'école élémentaire. Quelqu'un a appelé

4 un certain "Misa", mais il a répondu : "Ne m'appelle pas comme cela, par ce

5 nom." J'étais à peu près à une vingtaine de mètres à vol d'oiseau, à la

6 fenêtre de ma chambre à coucher. Ils ne pouvaient plus me voir. Cependant,

7 après, jamais j'ai appris que c'était un certain Mise Moro de Crnici. C'est

8 vrai que cela ne m'intéressait pas tellement parce que j'avais tellement

9 peur pour ma propre maison, pour ma famille, d'un incendie qui pourrait

10 nous englober aussi. Vous savez, le feu était énorme, les cendres tombaient

11 partout. C'était le vieux marché, les vieux immeubles autour du marché.

12 J'avais peur à cause de ce feu et de ces incendies qui étaient un peu

13 partout. J'étais encerclée.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Madame, arrêtez de parler parce qu'on perd

15 du temps et il faut aller à l'essentiel. Je vous demande : à Stolac, est-ce

16 qu'il y a des pompiers ? Est-ce qu'il y a des pompiers qui interviennent

17 quand il y a des incendies ? Ce jour-là, est-ce que les pompiers sont

18 venus, ou pas ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas le savoir. C'est celui qui

20 était à la tête du HVO, ce sont les dirigeants qui devaient savoir cela,

21 leurs commandants, parce que c'étaient eux qui tenaient la ville, qui

22 contrôlaient la ville à l'époque.

23 M. KRUGER : [interprétation] Merci.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux continuer ?

25 M. KRUGER : [interprétation] Je voudrais demander à nouveau que l'on nous

26 présente la pièce 9583 sur l'écran. C'est la photo que nous avons déjà

27 examinée.

28 Q. Madame le Témoin, plus tôt, quand vous nous avez raconté ce qui s'était

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1 passé à Stolac ce jour-là, c'est la photo qui se trouve à la fin de votre

2 dossier; est-ce que vous pouvez l'examiner ?

3 R. [aucune interprétation]

4 Q. Au milieu de cette image, de cette photo, on voit la mosquée, ou tout

5 au moins son minaret. Quelle est cette mosquée ?

6 R. C'est la veille mosquée, la mosquée du Tsar. Elle est au centre-ville.

7 Elle a été incendiée entre le 13 et le 14, ainsi que le vieux marché et le

8 nouveau marché aussi, d'ailleurs.

9 Q. Merci. Madame le Témoin, vous avez dit qu'on a aussi incendié trois

10 autres mosquées. Est-ce que vous le voyiez ? Est-ce que vous le voyiez

11 depuis votre maison ? Est-ce que vous avez pu voir ce qui leur était arrivé

12 depuis votre maison ?

13 R. Oui, puisque ma maison fait trois étages, donc je pouvais voir la

14 direction de la fumée, d'où venait la fumée. C'est comme cela que je

15 pouvais déterminer ce qu'on était en train d'incendier. Ces mosquées ont

16 été incendiées plus tard, le 26, le 27, de sorte que toute la ville était

17 dans la fumée. On ne savait même plus d'où venait la fumée.

18 Après, j'ai cherché la clé de l'appartement de mon frère et je suis passé

19 par un pont, et j'ai vu que même la mosquée qui se trouve près du pont a

20 été brûlée. C'est celle qui est derrière la mosquée du Tsar.

21 Q. [aucune interprétation]

22 R. De toute façon, quand elle brûlait, on pouvait bien voir la fumée même

23 depuis chez moi, puisque vous savez, ma maison est assez haute. Je pouvais

24 tout voir. Je ne pouvais sortir nulle part puisque les soldats du HVO

25 étaient là. Vous ne pouviez sortir qu'en cachette, par hasard. C'était très

26 difficile, c'était dangereux. Mais à chaque fois que l'on sortait pour

27 passer la tête à travers la porte, on se trouvait braqué par un fusil.

28 Q. Quels étaient les noms de ces trois mosquées, mis à part la mosquée du

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1 Tsar ? Comment les appeliez-vous ?

2 R. J'avais tellement à faire avant la guerre. Tout ce que je sais, c'est

3 là où elles se trouvaient. Il y en a une qui est à Uzdolici, il y en a une

4 qui est près du pont, il y en a une qui est sous la ville. Elles portent de

5 vieux noms que ces mosquées avaient avant, mais vous savez, cela ne

6 m'intéressait jamais particulièrement de savoir quel était leur vrai nom.

7 Je savais où elles étaient, c'était tout.

8 M. KRUGER : [interprétation] Je voudrais tout d'abord demander à la

9 Greffière de placer sur l'écran la pièce 8985. C'est la quatrième page de

10 cette pièce qui m'intéresse, avec la photographie d'une mosquée.

11 Pourriez-vous nous montrer cette pièce, mais une ou deux pages plus loin ?

12 Voilà, encore une page. C'est la première photo, c'est la photo précédente.

13 Pourriez-vous nous montrer la photo précédente ? Voilà. Merci.

14 Q. Madame le Témoin, voyez-vous cette image sur l'écran ?

15 R. Oui, oui, je la vois très bien.

16 Q. Reconnaissez-vous cet immeuble ?

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 Q. Très bien.

22 M. KRUGER : [interprétation] Maintenant, je voudrais que l'on présente les

23 photos qui figurent sur la page précédente. Ce sont les photos qui sont

24 présentées juste avant la photo que nous venons de voir.

25 Q. Madame, est-ce que vous voyez cette photo ?

26 R. Oui, je vois très bien. Je vois très bien cette photo.

27 Q. Quelle était cette photo, qu'est-ce qu'elle représente ?

28 R. C'est la rivière Bregava, donc tout à l'heure on pouvait voir la

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1 mosquée, qui est sous le pont. Cette mosquée a d'abord été incendiée,

2 ensuite plastiquée. Je ne sais pas à quel moment exactement. C'était après,

3 plus tard.

4 M. KRUGER : [interprétation] Pourriez-vous nous montrer la photo qui est

5 juste en bas de la page ?

6 Q. C'est la même vue, enfin le même endroit mais vue de l'autre côté,

7 depuis l'autre rive de la rivière ?

8 (expurgé)

9 (expurgé)

10 (expurgé)

11 (expurgé)

12 M. KRUGER : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit nécessaire

13 d'annoter ces photos à moins que vous ne le souhaitiez.

14 Q. Madame le Témoin, je veux vous montrer quelques autres photos.

15 M. KRUGER : [interprétation] Je voudrais vous demander d'examiner la pièce

16 1021, et c'est surtout la deuxième page de cette pièce qui nous intéresse.

17 Q. Madame, la photo que vous voyez sur votre écran, est-ce que vous la

18 reconnaissez, est-ce que vous savez ce qu'elle représente ?

19 R. Oui. C'est la mosquée de Podgrad, qui a été incendiée au mois de

20 juillet 1993.

21 Q. Est-ce que vous l'avez vu brûler depuis votre maison ?

22 R. Non. Ce sont les soldats du HVO qui m'ont dit que cette mosquée-là

23 aussi a été incendiée.

24 Q. A quel moment vous leur avez demandé cela ?

25 R. Je leur ai demandé : "Qui fait cela ? Pourquoi est-ce qu'ils font

26 cela ?" Ils m'ont répondu -- je demande : "Est-ce que vous avez des

27 ordres ?" Ils ont dit : "Oui, oui. On reçoit tous les jours des ordres nous

28 indiquant ce que nous devons faire."

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1 Ils ont tiré à plusieurs fois à côté de ma maison, de temps en temps il

2 fallait que je sorte prendre l'air. Parfois il y en avait qui était plus

3 gentils, qu'ils ne menaçaient pas toujours avec des fusils.

4 Q. A quel moment vous leur avez posé cette question ?

5 R. Ils étaient là tous les jours, tous les soirs. Ils passaient tout le

6 temps à côté de ma maison et à côté de la maison de ma mère, de sorte que

7 je pouvais sortir dans la cour sans qu'ils ne me voient. Puis il y a deux

8 ruelles qui passent par là à partir de ma cour. Puisque je suis à côté de

9 la rue de Trebinje, j'étais toujours là à monter la garde, puisque j'avais

10 rien d'autre à faire.

11 M. MURPHY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, de vous

12 interrompre. Je voudrais que l'on passe en audience à huis clos pour un

13 instant, s'il vous plaît.

14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à

15 audience à huis clos partiel.

16 [Audience à huis clos partiel]

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10 [Audience publique]

11 M. KRUGER : [interprétation]

12 Q. Je voudrais que l'on examine la pièce 08983, c'est la toute dernière

13 page de cette pièce, c'est une photo, il y a une ou deux.

14 Madame, la photo que vous voyez sous vos yeux, la reconnaissez-vous,

15 l'endroit où cela a été pris ?

16 R. Oui, assez bien. C'est la mosquée d'Uzdolici.

17 Q. La deuxième photo, reconnaissez-vous ce qui figure sur la deuxième

18 photo ?

19 R. Cela aussi c'est la mosquée d'Uzunovici. Vous savez, tout cela est bien

20 détruit, c'est difficile de savoir.

21 Q. Merci. Nous pouvons passer à un autre sujet. Avant de vous poser

22 quelques questions au sujet des événements qui se sont produits le 4 août,

23 je voudrais savoir quelle était la situation quant à l'eau et à

24 l'électricité à Stolac, et ceci pendant le mois de juillet.

25 R. Il n'y avait pas d'eau, il n'y avait pas d'électricité. Puisque mon

26 appartement est dans la ville, à partir du moment où le HVO est entré dans

27 la ville, j'ai reçu de l'électricité. Mes voisins se sont branchés sur le

28 réseau qui venait jusqu'à ma maison, donc pour avoir de l'électricité eux

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1 aussi. En ce qui concerne l'eau, les Serbes avaient coupé l'eau mais de

2 temps en temps je recevais un petit peu d'eau. Mais si vous regardez

3 Uzunovici, ils n'avaient pas d'eau. Ils allaient chercher de l'eau au

4 niveau de la fontaine de la ville, la pompe à eau de la ville, qui se

5 trouvait dans la rue. Quand j'ai traversé la cour, je voyais que là il y

6 avait des soldats du HVO qui étaient en train de percer les conteneurs que

7 les femmes utilisaient pour transporter de l'eau. Donc, dans la région,

8 dans la région d'Uzunovici, dans ces quartiers, ce n'était pas possible

9 d'avoir de l'eau. En ce qui concerne l'électricité, je ne sais pas quelle

10 était la situation.

11 Q. Maintenant, nous allons parler de la journée du 4 août.

12 M. KRUGER : [interprétation] Je voudrais demander que l'on passe à huis

13 clos partiel.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : -- dire quelque chose qui peut avoir une certain

15 importance. Vous venez de dire que l'eau avait été coupée. Deuxièmement,

16 qu'il y avait un point d'eau --

17 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Madame. Madame. Avant de -- vous

19 intervenez à tout bout de champ quand quelqu'un vous pose une question.

20 Ecoutez, d'abord ce qu'on vous demande et répondez après. Je reprends.

21 Vous avez dit qu'on avait coupé l'eau. Deuxièmement, vous dites qu'il

22 y avait un point d'eau et qu'avec des dames-jeannes, les femmes allaient

23 chercher de l'eau. Vous avez précisé qu'il y avait des soldats du HVO qui

24 perçaient les dames-jeannes. Alors, vous en avez été témoin ou on vous l'a

25 dit ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, oui, je l'ai vu de mes propres

27 yeux. Jusqu'à la fontaine, l'eau arrivait naturellement, parce qu'elle

28 était restée dans les tuyaux, donc, elle ne coulait goutte à goutte et ils

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1 n'avaient pas d'eau dans ces quartiers. Je les ai vus. J'ai vu ces gens

2 vêtus d'uniformes, je les ai vus en train de percer les bidons des deux

3 femmes, des bidons qu'elles voulaient utiliser. C'était au mois de juillet.

4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Comment faisaient-ils ? Est-ce

5 qu'ils ont tiré là-dedans ? Est-ce qu'ils ont -- qu'est-ce qu'ils ont

6 fait ? Est-ce qu'ils ont utilisé des marteaux ? Qu'est-ce que-ce qu'ils ont

7 fait ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient des couteaux. J'étais dans la

9 porte d'entrée de chez ma mère et, à 150 mètres de là, et c'est à partir de

10 cet endroit-là que je l'ai vu de mes propres yeux. Je l'ai vu de mes

11 propres yeux.

12 M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

13 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pourrions-nous

14 passer à huis clos partiel, pour un instant ?

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

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16 [Audience publique]

17 M. KRUGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

18 Q. Donc, vous avez dit que ces deux jeunes soldats sont arrivés. Que

19 s'est-il passé à partir du moment où ils arrivent ?

20 R. Je ne connais pas leur nom. Vraiment, je ne connais pas leur nom. Ils

21 sont tout jeunes. Ils venaient de terminer leurs études au niveau

22 secondaire. Ils portaient des fusils.

23 Ils nous ont dit de nous préparer en l'espace de cinq minutes et de

24 quitter la maison. Je leur ai demandé où est-ce qu'il fallait aller. Ils

25 nous ont dit de nous diriger en direction de l'école secondaire, que c'est

26 là qu'il fallait se rassembler.

27 Vous voulez que je continue ?

28 Q. Vous ont-ils donné une raison de votre départ ? Pourquoi fallait-il

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1 partir ou vous rendre là-bas ?

2 R. Non. Ils ne disaient rien. Tout ce qu'ils ont dit, c'est qu'il fallait

3 quitter la maison en l'espace de cinq minutes et se diriger -- qu'on se

4 dirige en direction de l'école secondaire, ce que nous avons fait.

5 Q. Avant de continuer, est-ce que vous pourriez prendre avec vous les clés

6 de votre maison ? Comment deviez-vous quitter la maison ?

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20 Donc, cette femme est retournée chez elle pour ouvrir sa maison, et

21 ensuite, on est parti. Ensuite, on est parti avec ses enfants, ma grand-

22 mère, et cetera.

23 M. KRUGER : [interprétation] Excusez-moi, il y avait deux informations au

24 niveau de la ligne 18, page 74, et ensuite à nouveau, au niveau de la page

25 -- des lignes 23 à 24. Il conviendrait donc de les expurger.

26 Q. Madame le Témoin, je vous prie de ne pas --

27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- posez la question. Je savais bien qu'on allait y

28 arriver.

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1 Bien. Alors, Madame la Greffière, préparez-moi l'ordonnance.

2 Vous comprenez, Monsieur Kruger, que quand vous abordez les questions,

3 comme le témoin est quelqu'un de prolixe, il est inévitable qu'elle va dire

4 des noms.

5 M. KRUGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Effectivement, je

6 pensais, mais, effectivement, j'assume la responsabilité. C'est une erreur.

7 D'accord.

8 Q. Ensuite, vous avez quitté votre appartement. Alors, à partir de ce

9 moment-là, où est-ce que vous avez été ?

10 R. Je n'ai pas quitté ma maison. J'en ai été expulsé. On est allé vers

11 l'école secondaire.

12 Lorsque je me suis approchée de cette école, c'était derrière l'école

13 primaire. Les deux écoles sont reliées, j'ai vu beaucoup de gens de

14 Uzunovici, avec des sacs, des petits sacs. A côté d'eux se trouvaient les

15 soldats du HVO. Puis, un camion est venu avec une femme immobile, et les

16 soldats grondaient la fille qui avait laissé sa mère à la maison, alors

17 qu'en partant, ma mère elle-même avait dit : "Mais pourquoi vous nous

18 chassez alors que nous allons revenir de nouveau ?" Donc, ils sont -- nous

19 sommes venus à l'école secondaire.

20 C'est là que j'ai vu beaucoup de gens de Stolac et Uzunovici et du

21 centre de Cuprija, et une partie de Luka aussi. Là, je parle des parties de

22 la ville.

23 Q. A l'école, est-il exact que vous avez été emmenée à l'intérieur du

24 bâtiment et pour que les choses -- pour la sécurité --

25 M. KRUGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande peut-être de

26 passer au huis clos partiel avant la réponse du Témoin.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Passons à huis clos.

28 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en huis clos ou à huis clos

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22 --- L'audience est levée à 18 heures 28 et reprendra le mardi

23 5 décembre 2006, à 9 heures 00.

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