Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 19 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire, s'il vous plaît ?

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit

8 de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

10 En ce lundi, 19 mars 2007, je salue toutes les personnes présentes, je

11 salue tous les membres de l'Accusation, MM. et Mmes les avocats, je salue

12 MM. les accusés. Je constate que M. Coric n'est pas là aujourd'hui. J'ose

13 espérer qu'il se rétablira très vite et que nous aurons donc le plaisir de

14 le voir le plus tôt possible. Je salue également les représentants du

15 Greffe et M. l'Huissier.

16 Je vais donner la parole à M. le Greffier pour nous lire deux numéros IC.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le bureau

18 du Procureur a présenté une liste de documents qui vont être versés au

19 dossier par le truchement du Témoin L. Cette liste se verra attribuer le

20 numéro IC 492. 3D a présenté une liste d'objections au document présenté

21 par le bureau du Procureur pour le truchement du Témoin L, cette liste se

22 verra attribuer le numéro IC 493. Merci.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, j'ai compris ce que vous avez

24 dit, mais apparemment l'interprétation ne fonctionne pas.

25 Est-ce que l'interprétation fonctionne ?

26 L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont travaillé -- l'interprète a travaillé

27 vers le français.

28 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

2 L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont travaillé vers le français. Les

3 interprètes ont interprété. Est-ce que vous entendez l'interprétation

4 française maintenant ?

5 Le bureau du Procureur a présenté une liste de documents --

6 Nous allons essayer. Est-ce que vous entendez maintenant l'interprétation

7 française ?

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'entends M. -- il y a rien. Voilà. Cela va être

9 bon.

10 L'INTERPRÈTE : Vous entendez maintenant l'interprétation française ?

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Cela fonctionne. La Chambre va rendre une décision

12 orale concernant la demande de la Défense Petkovic du

13 12 mars 2007. Le 12 mars 2007, la Défense Petkovic a sollicité

14 l'autorisation de la Chambre de répliquer à la réponse du Procureur du 17

15 mars 2007, concernant sa requête du 12 février 2007, d'omettre de l'acte

16 d'accusation les allégations de co-perpétration, perpétration indirecte,

17 co-perpétration indirecte et complicité.

18 La Chambre estime qu'il convient de faire droit à la demande de la Défense

19 Petkovic pour autant que sa réplique se limite à soulever des points

20 nouveaux non évoqués dans sa requête initiale. En conséquent, la Chambre

21 décide que la Défense Petkovic dispose d'un délai de sept jours à compter

22 d'aujourd'hui pour déposer sa réplique. Bien. Alors, concernant les suites

23 de l'intervention de

24 Me Karnavas jeudi, il y a donc des interventions qui vont porter

25 clarification sur certains points. Je vais d'abord donner la parole à mes

26 collègues qui veulent donner leur sentiment personnel, et ensuite, je

27 ferais mon intervention orale.

28 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci beaucoup. Monsieur le

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1 Président,

2 [interprétation] Je souhaiterais, au nom de M. le Juge Trechsel et en mon

3 nom, faire la déclaration suivante : jeudi dernier, le 15 mars 2007, le

4 Président de la Chambre -- Président de l'affaire, l'Accusation contre

5 Prlic et consorts, M. le Juge, Jean-Claude Antonetti, a fait, entre autres,

6 les déclarations suivantes : premièrement, et je cite : "Mon sentiment est

7 et je l'ai déjà exprimé que, dans 90 % des cas -- 95 % des cas, la plupart

8 de ces questions sont en faveur ou vont en faveur de vos clients." Il

9 s'agit de la page 95 du compte rendu d'audience, lignes 2 à 4. Conformément

10 à l'ordonnance du Président émise le même jour il entendait par cela et il

11 a expliqué que ce qu'il souhaitait dire c'était que 95 % des questions

12 engendraient des réponses qui étaient favorables à la Défense.

13 Deuxièmement, et je cite à nouveau : "Donc, vous voyez beaucoup de

14 questions sont en faveur de la Défense." Cela a été extrait du compte rendu

15 d'audience, toujours page 95, ligne 13. Puis, dans son ordonnance, il a

16 indiqué que les réponses à de nombreuses questions étaient favorables à la

17 Défense.

18 Troisièmement, je cite à nouveau, je sais que le compte rendu

19 d'audience page 95, lignes 13 à 16, et je cite : "Lorsque vous dites qu'il

20 ne s'agit pas d'un procès entièrement équitable, je souhaiterais que vous

21 m'indiquiez quelle est l'autre Chambre qui ait si en faveur de la Défense

22 ou qui est en faveur de la Défense dans cette mesure ?" En français, dans

23 l'original il a été indiqué ce qui suit, en faveur des droits de la

24 Défense. Donc, en faveur des droits de la Défense."

25 Nous souhaitons tous les deux indiquer que ces déclarations ne reflètent

26 pas notre attitude, ne sont pas le reflet de notre attitude pour les

27 raisons suivantes. Pour ce qui est des points un et deux, nous ne

28 conservons pas un dossier afin de préciser si des réponses à nos questions

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1 peuvent finalement être considérées comme allant à l'avantage d'une partie

2 ou d'une autre. Nous ne sommes pas conscients d'une égalité en ce sens.

3 Pour ce qui du point numéro trois, qui a été cité ci-dessus, nous

4 aimerions déclarer que tout en étant absolument conscients des droits de la

5 Défense, nous croyons fermement que la mission principale de la Chambre est

6 d'assurer l'équité du procès et ce conformément à l'article 20, paragraphe

7 premier du Statut. A notre avis, la quête de l'équité, de la justice est

8 équivalente à la recherche visant cet équilibre.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci. Je vais faire mon intervention orale

10 portant clarification puisque certains propos tenus ou certaines

11 traductions peuvent laisser, supposer que certaines choses ont été dites

12 alors que ce n'était pas absolument pas le sens de mes propos.

13 Pour ce faire, je vais reprendre l'historique. Je vais lire lentement pour

14 qu'il n'y ait pas d'erreur d'interprétation. Jeudi dernier 15 mars 2007, Me

15 Karnavas a pris la parole après la fin de l'audition d'un témoin. J'ai

16 répondu brièvement sur certains points. Je n'ai plus donné la parole à M.

17 Scott. Le Greffier d'audience m'avait avisé que la bande audio ne

18 permettait plus de prolonger l'audience. Aujourd'hui tout à l'heure, je

19 vais donner la parole à l'Accusation si elle veut répondre aux observations

20 des uns et des autres. Toutefois, je suis amené à intervenir à nouveau pour

21 la raison liée à un problème de traduction français anglais pouvant

22 entraîner une confusion et qui nécessite une clarification de ma part.

23 Jeudi dernier en début d'après-midi, j'ai effectivement constaté à la

24 lecture du seul transcript anglais, ne disposant pas du transcript en

25 français à ce moment-là, que certaines phrases ne correspondaient pas au

26 sens de mes propos. Dans ces conditions, j'ai dès l'après-midi de jeudi

27 aviser les parties que j'allais apporter des clarifications. J'ai ainsi

28 pris une ordonnance de clarification par ajout de membres de phrases afin

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1 de mettre en concordance plusieurs phrases au regard de ma conclusion

2 orale.

3 La lecture ultérieure du transcript en français m'amène cependant à

4 apporter deux précisions importantes pour éviter toute erreur

5 d'interprétation quant au sens de mes propos.

6 Il y a, en fait, deux sujets différents qui ont été rapidement

7 abordés jeudi dernier, les droits de l'accusé qui est le premier sujet et

8 le second sujet qui est le couple question-réponse. Alors, premier sujet,

9 les droits de l'accusé au sein des termes génériques des droits de la

10 Défense. Les droits de la Défense de mon point de vue, englobent les droits

11 de l'accusé et les droits de l'avocat de l'accusé. Il convient d'être

12 précis sur ce thème. Les droits de l'accusé c'est quand un accusé pose

13 comme l'autorise le Statut une question au témoin, et les droits de

14 l'avocat de la Défense, c'est par exemple le fait pour Me Karnavas de

15 pouvoir développer son contre-interrogatoire de telle façon qu'il puisse le

16 faire sans être entravé par des questions qui viendraient perturber le fil

17 conducteur de sa démonstration.

18 Concernant les droits de la Défense, j'ai constaté que le transcript

19 en anglais indique sous ce thème le mot, "Defense." En réalité, il faut

20 lire : "Les droits de l'accusé." Ainsi quand je dis que cette Chambre par

21 ses Juges a fait beaucoup en faveur de la Défense, dans la version

22 anglaise, ce n'est pas exact. J'ai simplement voulu dire que cette Chambre

23 a fait beaucoup en faveur des droits de l'accusé. J'ai ainsi illustré cela

24 en citant le cas Blagojevic, pour montrer que cette Chambre en conformité

25 avec le Statut avait permis aux accusés de poser eux-mêmes directement les

26 questions. Œuvrer en faveur des droits de l'accusé, c'est une chose, œuvrer

27 en faveur de la Défense, c'est autre chose. Il n'a jamais été question pour

28 moi d'œuvrer en faveur de la Défense du fait de la neutralité du Juge à

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1 l'égard des parties.

2 Le deuxième sujet, le couple question-réponse. Il convient de

3 rappeler que Me Karnavas a demandé la tenue d'une audience pour évoquer

4 certains problèmes qu'il rencontrait de son point de vue dans l'exercice de

5 son contre-interrogatoire du fait des questions posées par les Juges. Ce

6 n'est pas la première fois que ceci avait été demandé. La Chambre avait

7 estimé jusqu'ici qu'il n'y avait pas eu lieu cette réunion.

8 En raison de l'insistance de Me Karnavas, appuyé par plusieurs

9 avocats et le Procureur, nous allons rendre prochainement une décision sur

10 la question soulevée.

11 La lecture de certaines phrases en anglais du transcript, pour un non

12 initié n'ayant pas une connaissance entière des propos tenus sur ce sujet,

13 pourraient donner lieu à confusion. C'est la raison pour laquelle je me

14 dois de fournir quelques explications complémentaires.

15 Lorsqu'un témoin comparait, bien souvent je lui explique le mécanisme des

16 questions - page 11 451 - je vais citer entièrement ce que j'avais dit à

17 l'époque : "Les quatre Juges qui sont devant vous pourront au moment où ils

18 souhaiteront vous poser des questions." Donc, je relis : "Les quatre Juges

19 qui sont devant vous pourront au moment où ils le souhaiteront vous poser

20 des questions."

21 Conformément à la pratique de la jurisprudence de ce Tribunal, les Juges ne

22 sont pas limités dans le champ de leurs questions, via ni dans la forme des

23 questions, par ailleurs, vous verrez que les questions sont très

24 différentes. L'Accusation vous pose des questions non directrices; les

25 avocats de la Défense dans le cas du contre-interrogatoire peuvent vous

26 poser des questions directrices; les Juges s'efforcent de poser des

27 questions les plus objectives possibles dans la mesure où au travers de vos

28 réponses nous essayons de comprendre la situation ou le contexte et ce que

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1 vous dites.

2 J'ai donc à plusieurs reprises dans le passé indiqué au témoin que

3 lorsqu'un Juge posait une question, il était dans une logique différente

4 des parties. Chaque partie pose des champs -- des questions en fonction de

5 sa thèse, thèse de l'Accusation, thèse de la Défense. Les Juges, eux,

6 recherchent la vérité qui peut correspondre parfois au niveau de la réponse

7 aux thèses des parties. Cette recherche passe par l'approfondissement de

8 certaines réponses données par le témoin ou par l'évocation de questions

9 émises par les parties car les Juges ont la mission au terme de l'article

10 90(f)(i) du Règlement de rendre la présentation des moyens de preuve

11 efficace pour la vérité.

12 J'ai eu l'occasion de préciser cela en intervenant suite à une objection en

13 indiquant - cela figure aux pages 15 722 et 15 723. Je vais lire ce que

14 j'avais dit à l'époque : "En règle générale, quand les Juges posent une

15 question, vous regarderez les questions que nous posons sont très

16 élaborées. On reprend ce qu'a dit le témoin, on y introduit des éléments

17 qui résultent des dires d'autres témoins et la question elle est générale

18 et ouverte qui permet normalement au témoin plusieurs solutions dans sa

19 réponse."

20 Je vais vous donner un exemple que j'ai évoqué rapidement mais qui

21 restitue bien l'objectif recherché.

22 Il y a quelque temps un témoin répondant à une question de

23 l'interrogatoire principal avait évoqué l'existence d'un char sur le

24 complexe de l'Heliodrom. Puis le témoin était passé à autre chose et le

25 Procureur n'avait pas posé de questions à ce témoin sur la présence de ce

26 char allégué. J'ai moi-même posé la question au témoin qui a confirmé avoir

27 vu un char sur le complexe de l'Heliodrom et de mémoire je cite : "Il avait

28 même indiqué que ce char a tiré."

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1 Plusieurs jours après, un autre témoin était venu. J'ai attendu d'attendre

2 que le Procureur pose les questions sur ce char parce que ce témoin pouvait

3 utilement confirmer ou infirmer la présence du char, le Procureur n'a pas

4 posé des questions. J'ai attendu que la Défense également aborde la

5 question, elle ne l'a pas fait. Au final, j'ai posé la question au témoin

6 en lui demandant son point de vue sur l'existence de ce char. Le témoin

7 avait alors répondu en disant que pour lui il n'y avait pas de char. Donc,

8 cherchant la vérité, j'ai été amené d'une part à poser la question au

9 témoin, au premier témoin, puis au second témoin.

10 Ceci étant dit, je voudrais préciser qu'à la page 15 831 du transcript, je

11 dois signaler une erreur où un lapsus dans mes propos. Je cite la phrase :

12 "Je vous l'ai déjà dit c'est que dans 95 à 90 % des cas, la plupart de nos

13 questions tombent en faveur de vos clients." En écoutant à nouveau la bande

14 audio en français ce matin, je me suis rendu compte que j'avais marqué

15 entre les mots question et tombent une hésitation et que pris dans la

16 rapidité j'avais donc conclus ma phrase.

17 Je voulais dire ceci et je relie donc la phrase : "Je vous l'ai déjà

18 dit c'est que dans 90 à 90 % des cas la plupart des réponses à nos

19 questions peuvent tomber en faveur de vos clients." Cette phrase doit être

20 mise en rapport avec mes propos antérieurs, compte tenu les pages 15 451 et

21 15 722, sur le débat portant sur les questions des Juges.

22 Une question appelant une réponse. J'ai été amené à dire au niveau du

23 résultat, il m'était apparu que parfois plusieurs réponses avaient été

24 faites au bénéfice de la Défense, et que d'autres l'avaient été au bénéfice

25 de l'Accusation. Ayant le sentiment sous réserve d'un examen plus exhaustif

26 et précis, que dans un certain nombre de cas, la Défense avait été

27 largement bénéficiaire par les réponses apportées à des questions.

28 Mes collègues pouvant avoir un autre point de vue, n'avons pas débattu avec

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1 eux sur les chiffres de 90 à 95 %. Peut-être que ce chiffre est inférieur,

2 voire largement inférieur. Je n'ai pas à ce stade fait un décompte exact

3 exprimant un sentiment qui m'apparaissait, mais sans en être sûr au niveau

4 du pourcentage.

5 Sur ce fait, il convient de préciser qu'une réponse à une question doit

6 être évaluée au niveau de la pertinence et de la valeur probante, et que

7 lorsque cette réponse est donnée au temps T [imperceptible] zéro,

8 l'évaluation qui en est faite est nécessairement provisoire, et ne serait

9 préjugée de la solution finale qui interviendra seulement à la clôture des

10 débats.

11 Pour résumer mes propos, je conclus comme suit : la question posée

12 par un Juge, en tout impartialité à l'égard des parties, s'inscrit dans le

13 cadre du Règlement. La question a pour objet d'établissement de la vérité.

14 Pour y parvenir, la question peut notamment porter sur la crédibilité du

15 témoin, sur des précisions quant aux réponses déjà données, sur des sujets

16 non évoqués dans l'intérêt de la justice.

17 Le deuxième point que je veux mettre en évidence est le suivant : la

18 réponse donnée à une question peut, au niveau de l'évaluation provisoire

19 quant à la valeur probante, être soit en faveur de la thèse de l'Accusation

20 soit en faveur de la thèse de la Défense.

21 Le troisième point que je veux mettre en évidence est le suivant : la

22 mot mentionné en anglais dans le transcript, "Defence," doit se litre, pour

23 moi, comme les droits de l'accusé.

24 Voilà ce que je voulais indiquer pour éviter tout malentendu, tout

25 incompréhension.

26 Etant précisé, que la question soulevée par Me Karnavas sur la tenue d'une

27 réunion sera donc tranchée par la Chambre, qui rendra, je l'espère dans la

28 semaine sa décision. Etant observé à cet égard que l'intervention de jeudi

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1 dernier de Me Karnavas a permis de mieux comprendre la problématique et

2 mieux comprendre de mon point de vue le probable que rencontrait Me

3 Karnavas. Donc, à mon niveau, j'essaierais dans la décision de lui donner

4 satisfaction sur ce point-là.

5 Monsieur Scott, comme la dernière fois les avocats étaient intervenus et

6 j'étais intervenu, et comme nous avons terminé l'audience, je ne vous ai

7 pas donné la parole. Donc je vous donne la parole si vous voulez

8 intervenir; sinon, si vous n'avez rien à dire, nous passerons à l'audition

9 des témoins.

10 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je n'avais pas

11 l'intention de m'exprimer aujourd'hui, et ce pour un certain nombre de

12 raisons, car comme d'habitude nous avons un programme tr es chargé cette

13 semaine et même le temps qui a été perdu maintenant va avoir une incidence

14 sur la présentation ou la comparution de tous les témoins cette semaine.

15 Donc je n'avais pas l'intention de m'exprimer cet après-midi. Me Karnavas

16 avait demandé la semaine dernière à ce que cette audience soit convoquée à

17 l'avenir, et en fait, je pense que si la Chambre prévoie un temps

18 d'audience pour cette audience ce sera à ce moment-là que je ferais mes

19 observations, je pense que c'est la procédure la plus appropriée, puis

20 jeudi M. le Juge Trechsel avait indiqué que c'était pas le meilleur moment

21 pour intervenir sur la question car il n'y avait que deux Juges. M. le Juge

22 Prandler était absent, M. le Juge Mindua n'était pas là, donc cela n'était

23 pas le moment de se pencher sur cette question. Donc, je replace cela

24 maintenant dans le contexte d'aujourd'hui.

25 Toutefois, je pense que les observations qui ont été faites et la Chambre a

26 indiqué qu'elle avait l'intention de rendre une décision un peu plus tard

27 cette semaine -- avant que l'Accusation n'ait eu la possibilité de

28 s'exprimer, alors, je pense maintenant que si je ne m'exprime pas je

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1 n'aurais pas une autre possibilité pour m'exprimer avant que la Chambre ne

2 rende une décision. Par conséquent, je pense que je n'ai pas véritablement

3 le choix, si ce n'est de vous livrer mes observations maintenant.

4 Ce faisant, je commencerais --

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, pour ne pas perdre de temps - parce

6 que vous avez indiqué qu'il ne faut pas perdre de temps - la décision que

7 la Chambre rendra est simplement de savoir si on va tenir une audience sur

8 la question du contre-interrogatoire ou de l'interrogatoire principal et du

9 moment où doivent intervenir les questions des Juges. C'est cela le champ

10 de la question qui est soulevée.

11 M. SCOTT : [interprétation] Je comprends tout à fait cela, Monsieur le

12 Président, mais, malheureusement, au vu de ce qui s'est passé je ne peux

13 pas véritablement être rasséréné par ce qui vient d'être dit. Car,

14 malheureusement, l'un des problèmes qui s'est développé jusqu'à présent et

15 que, parfois, Monsieur le Président, vous avez tendance à rendre une

16 décision sans avoir véritablement entendu les parties, notamment

17 l'Accusation, et la semaine dernière la Défense a passé une vingtaine de

18 minutes jeudi sans que l'Accusation ne réponde. Je ne critique pas la

19 Défense du -- je me contente tout simplement de constater les faits la

20 Défense a eu 20 minutes pour parler de cela en sus du temps supplémentaire

21 qui lui sera octroyé lors d'une audience. Alors que l'Accusation n'a

22 absolument eu aucune minute pour ce faire. Donc, qu'au vu de ces

23 circonstances, Monsieur le Président, je vais m'exprimer pendant 20

24 minutes, pour parler de cette question dont est saisie la Chambre.

25 Voilà pour ce qui est de mon introduction. J'aimerais maintenant dire que

26 je vais m'exprimer avec tout le respect que j'éprouve par la Chambre, mais

27 la Chambre doit également comprendre que je vais être très, très franc.

28 A la suite de l'audience de jeudi, un certain nombre de personnes m'ont

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1 demandé si j'allais bien, si je n'avais pas de problèmes - n'oubliez pas

2 que j'étais assis ici, avec la tête baissée. Un certain nombre de personnes

3 qui suivent les audiences m'ont posé cette question. Jeudi dernier, j'ai

4 baissé la tête parce que je faisais tout ce qui était en mon pouvoir pour

5 essayer de disparaître de cette salle d'audience. Car j'avais un tel

6 sentiment de honte pour cette institution, j'avais un sentiment de honte

7 pour moi-même, pour les personnes qui suivaient le débat et j'avais ce

8 sentiment de honte également à l'égard des Juges. Tout simplement, je

9 voulais dans la mesure du possible disparaître, disparaître de cette salle

10 d'audience.

11 Je dois dire que l'Accusation est particulièrement préoccupée car nous ne

12 savons pas si les victimes, l'Accusation, la communauté internationale

13 pourront bénéficier d'un procès équitable. Nous avons de nombreuses

14 préoccupations pour de nombreuses raisons, notamment le temps qui nous a

15 été imparti, les pressions de temps, mais également du fait de certaines

16 déclarations faites par la Chambre, par le Président de la Chambre et par

17 la façon dont certaines choses sont gérées. Je reviendrai là-dessus dans un

18 petit moment à la conclusion de cette déclaration. J'aimerais, avant de ce

19 faire, parler de certaines questions qui ont été soulevées la semaine

20 dernière. Je souhaite m'exprimer car le risque preuve nous avons été

21 entendu avant que la Chambre ne rende sa décision.

22 Alors, pour ce qui est de la présentation des moyens de preuve, Monsieur le

23 Président, Messieurs les Juges, cela fait plus de neuf ans que je travaille

24 ici au sein de ce Tribunal. Je connais le système du Tribunal. Je sais que

25 ce système est un système hybride qui ne se fonde pas sur l'une ou l'autre

26 des approches. Je dois dire que ce fut l'un des grands privilèges que m'ont

27 offert ces neuf années d'expérience ici, car j'ai pu ainsi comprendre ce

28 système, sa force, ses faiblesses, les lacunes. Je dois dire que pour mon

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1 expérience de juriste, je considère que c'est une grande expérience

2 professionnelle qui m'a été donnée que de travailler ici.

3 Je ne suis pas un partisan du système du "common law" du système

4 contradictoire, bien que je viens de ce système comme tous les systèmes, il

5 y a ses lacunes et ses imperfections ainsi que ses points forts. Je pense,

6 en fait, que les juristes du "common law" ont beaucoup à apprendre du

7 système du droit romano-germanique.

8 Toutefois, je ne suis pas non plus partisan de ce système car, comme

9 tout système, il a ses points forts il a ses faiblesses. Je pense que les

10 personnes connaissant le système du "common law" ont beaucoup à apprendre

11 des autres et vice-versa. Je ne suggère pas que tout ce qui peut poser des

12 problèmes ici au sein de ce Tribunal pourrait être : "Réglé si seulement

13 nous adoptions un système du droit civil." Il s'agit d'une position

14 particulièrement simpliste qui ne réglerait pas les nombreux problèmes

15 auxquels doit faire face cette institution. Je ne pense pas que le système

16 de droit civil est supérieur de façon inhérente ou que le système

17 contradictoire. Il s'agit de deux systèmes différents, qui je le répète qui

18 ont tous les deux des points forts et des lacunes.

19 Ceci étant dit, lorsque les premiers Juges de cette institution ont

20 conçu le système qui allait devenir le système du TPIY, ils ont mis en

21 place qui est certes hybride, mais qui est quand même plus contradictoire

22 que non -- qui tend plus vers le système du "common law" que vers l'autre

23 système. Pour le meilleur ou pour le pire, les Juges sont convenus que

24 c'était le poids qu'il fallait accorder à chacun des systèmes et c'est la

25 voie qu'ils ont choisie, qui a été retenue au cours des 13 à 14 dernières

26 années.

27 C'est essentiellement un système contradictoire avec différents

28 ajustements puisque nous avons, par exemple, des Juges professionnels, nous

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1 n'avons pas de jury. Il faut également ne pas oublier les circonstances et

2 la nature des procès, les moyens de preuve et cela représente autant de

3 défis et des limites pour cette institution.

4 Ceci étant dit que cela nous plaise ou non, le système contradictoire

5 est essentiellement un système qui émut en quelque sorte par les parties

6 qui s'expriment. Chacune des parties, l'Accusation ainsi que la Défense ont

7 une responsabilité. Il s'agit d'une responsabilité qui est de poids. Elles

8 doivent pouvoir présenter leur moyens de preuve non pas les moyens de

9 preuve des Juges, non pas les moyens de preuve du Tribunal, il s'agit de

10 leurs moyens de preuve. La Chambre de première instance ne doit pas essayer

11 de faire tout à la fois, être Juge, membre d'un jury, Accusation, Défense.

12 Si la Chambre de première instance commence à se coller dans le rôle de

13 l'Accusation pour modeler la façon dont l'Accusation présente ses moyens de

14 preuve, je suis sûr que mes confrères et consoeurs de la Défense auront des

15 objections à ce sujet. J'aurai des objections également de même si la

16 Chambre de première instance se colle dans le rôle de la Défense, présente

17 des moyens à décharge, là, moi, en tant que Procureur, présenterait des

18 objections, et je suppose que, dans certaines circonstances, les conseils

19 de la Défense présenteront également des objections.

20 Comme l'a dit Me Karnavas la semaine dernière, le rôle principal de

21 la Chambre de première instance est d'agir en tant qu'arbitre, arbitre

22 neutre, arbitre des procédures. Pour utiliser un exemple que je tire d'un

23 sport américain, pour utiliser l'exemple du base-ball, vous avez les deux

24 systèmes, la personne qui lance la balle et la personne qui reçoit la balle

25 avec son bât et vous ne pouvez pas faire les deux à la fois. Vous ne pouvez

26 pas diriger la façon dont le Procureur présente ses moyens à charge et vous

27 ne pouvez pas non plus les présenter à la place du Procureur.

28 Pour ce qui est des questions qui sont posées au témoin. Je dirais

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1 qu'au vu de tout ce que je viens de dire, le Procureur doit avoir la

2 possibilité de présenter ses moyens à charge qui sont présentés suivant un

3 plan. S'il y a des interruptions et si l'on prend toujours la tangente, si

4 l'on pose certaines questions avant que la personne qui mène à bien

5 l'interrogatoire principal ne soit disposé et prête à le faire, cela ne

6 peut pas avoir -- si l'Accusation n'a pas posé de question, Monsieur le

7 Président, on n'a pas posé une question précise. Je vous dirais que neuf

8 fois sur dix, il y a d'excellentes raisons qui expliquent pourquoi le

9 Procureur a agi de la sorte.

10 Premièrement, le Procureur peut vouloir poser la question mais ne

11 elle n'a encore posé cette question. Un interrogatoire principal ne

12 consiste pas à des questions qui sont posées de façon aléatoire. Il s'agit

13 d'un ensemble, de jeu de questions qui sont avancées, qui sont structurées

14 et qui ont pour intention de présenter ses moyens de preuve à la Chambre de

15 première instance. Je dirais que cela représente un grand nombre d'effort,

16 un énorme investissement intellectuel, non seulement pour l'Accusation,

17 mais également pour la Défense.

18 Il y a des documents qui sont présentés suivant un ordre précis pour

19 des raisons précises. Il faut que vous donniez la possibilité aux personnes

20 qui mènent à bien l'interrogatoire principal de suivre, de poser les

21 questions avant que la Chambre ne pose des questions parce que, Monsieur le

22 Président, je peux -- ce que j'avance, neuf fois sur dix vous vous rendrez

23 compte que la personne qui pose les questions allait -- était sur le point

24 de poser la même question.

25 Deuxièmement, il y a une autre raison qui peut expliquer pourquoi le

26 Procureur pose ou ne pose pas certaines questions. Le Procureur a déjà

27 étudié les différents thèmes. Il a rencontré le témoin, et

28 fondamentalement, il sait ce que le témoin va dire et parfois il sait que

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1 le témoin n'a rien à dire à propos de certaines questions, alors pourquoi

2 est-ce que vous n'avez pas fait le tour du bâtiment vers la gauche pour

3 voir ce qui se passait. Nous, nous ne posons pas la question pourquoi parce

4 que nous lui avions déjà posé la question à ce témoin. Le témoin nous avait

5 dit : "Je ne sais rien à ce sujet." Par conséquent, étant donné que nous

6 avons un temps très limité pendant les audiences, nous ne posons pas cette

7 question parce que nous savons que cette question ne nous permettra, ne

8 nous fera aboutir vers rien.

9 Troisièmement, je dirais que la personne qui pose des questions --

10 les questions qui sont posées par un Juge ou par les conseils de la Défense

11 peuvent être intéressantes, mais elles sont parfois particulièrement non

12 pertinentes ou alors visent d'autres éléments que nous ne pouvons pas

13 poursuivre du fait des limites de temps. Il n'y a pas un seul témoin que

14 j'ai présenté à cette Chambre de première instance à qui je n'aurais pas

15 une d'autres questions à poser pour préciser certaines choses, mais

16 constamment, jour après jour, nous nous trouvons dans une situation où nous

17 n'avons pas suffisamment de temps. Donc, je ne peux pas dire constamment

18 que je ne peux pas poser ces questions, je souhaiterais préciser certaines

19 choses. C'est la réalité dans laquelle nous opérons. Cela correspond à une

20 vérité quotidienne que nous devons accepter.

21 Je ne veux pas perdre de temps, je veux vous faire grâce de certains

22 éléments, mais je souhaiterais juste dire un tout dernier élément, à ce

23 sujet. Les mêmes problèmes se posent lorsque l'Accusation a indiqué en

24 toute bonne foi quelle sera la durée de l'interrogatoire principal. Lorsque

25 nous disons quatre heures, nous n'avons pas joué cela au dé, nous n'avons

26 pas fait cela de façon empirique, nous avons essayé d'évaluer de façon

27 sérieuse la durée du temps qui sera utile pour l'interrogatoire principal

28 et dans l'intérêt de la Chambre. Lorsque nous disons quatre heures et

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1 lorsque j'arrive ou que M. Mundis arrive et qu'on nous dit : "Bien, nous

2 avons décidé que vous aurez trois heures." Cela a un impact immédiat parce

3 que je suis debout et je dois donc faire des coupes sombres dans mes

4 questions au fur et à mesure de la présentation des questions et il se peut

5 que j'omette et que je rate une question importante. Il se peut que

6 j'omette de présenter une pièce à conviction. Bien, puisque je suis ici, je

7 dois réduire d'une heure mon interrogatoire et cela c'est une réalité avec

8 laquelle nous devons vivre, que nous devons accepter.

9 Puis, j'aimerais mentionné le revers de la médaille parce que,

10 parfois, les Juges peuvent se demander : pourquoi est-ce que le Procureur a

11 passé tant de temps à poser telle et telle question ? Alors, parfois, il se

12 peut que nous fassions des erreurs, mais, en général, nous avons donc une

13 vision d'ensemble de notre affaire. Il y a parfois des éléments qui -- sur

14 lesquels la lumière est jetée dans deux semaines après -- six semaines

15 après. On ne peut pas considérer à priori que certaines questions

16 représentent une perte de temps. Nous, nous pensons qu'il y a parfois des

17 éléments de preuve qui sont importants pour la Chambre de première

18 instance. Alors, il se peut que la Chambre décide ultérieurement que cela

19 n'était important et cela, en fait, me ramène à la case départ, à savoir je

20 disais l'Accusation présente les éléments à charge et elle ne présente pas

21 les éléments à décharge, elle ne présente pas les éléments que vous voulez

22 présenter.

23 J'aimerais vous inviter, Messieurs les Juges, si vous voulez aider

24 l'Accusation, venez travailler pour l'Accusation; si vous voulez le faire

25 pour la Défense, travailler pour la Défense, mais tant que cela ne sera pas

26 fait, chacune des parties doit pouvoir présenter ses éléments de preuve.

27 Comme je vous l'ai déjà dit un certain nombre de fois, Messieurs les Juges,

28 l'Accusation travaille d'arrache-pied. Je parle de moi-même et je parle de

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1 toute mon équipe. Je sais que ce que nous faisons n'est pas parfait. Nous

2 avons déjà commis des erreurs et nous ferons d'autres erreurs avant que

3 cela ne se termine, mais en tout cas, nous travaillons d'arrache-pied pour

4 pouvoir présenter nos éléments à décharge dans des conditions très

5 difficiles. Laissez-nous présenter ces éléments à charge.

6 Alors, j'aimerais parler très rapidement du nombre de pièces à conviction,

7 mentionnées dans cette affaire parce que cela a fait l'objet d'observation

8 la semaine dernière. Le président ayant fait de remarques à propos du

9 nombre de pièces à conviction.

10 Premièrement, et vous m'aurez déjà entendu dire cela. Dans ce genre

11 d'affaire, nous avons six dirigeants politiques et militaires, les six

12 accusés en l'occurrence. Vous ne devriez pas être surpris de voir que cela

13 représente un grand nombre de pièces à conviction, des milliers de

14 documents tout comme le procès de Nuremberg, où dans le procès Nuremberg,

15 ils ont dû étudier des milliers de documents. Je vais être très franc, je

16 sais que très souvent les juristes ou les membres de notre équipe nous

17 disent, mais cela c'est épouvantable, c'est un nombre épouvantable de

18 documents.

19 Tout ce que je peux dire c'est ce qui suit, mais à quel genre d'axe,

20 dans quel genre d'affaire pensez-vous que vous alliez travailler ? Il ne

21 s'agit pas de petits larcins. Il ne s'agit pas de quelqu'un qui a volé une

22 bicyclette et quelques couverts en argent. Il s'agit d'affaires extrêmement

23 complexes qui demandent et qui exigent la présentation d'un grand nombre de

24 documents, et d'un grand nombre de moyens de preuve, donc personne -- je

25 répète, personne ne devrait être surpris lorsque nous devons présenter un

26 grand nombre de documents dans cette affaire.

27 Je dirais qu'il s'agit d'une affaire où de nombreux documents seront

28 présentés. Je ne sais pas si la Chambre le comprend véritablement car la

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1 Chambre ne va entendre qu'une petite partie des éléments de preuve

2 présentés par le truchement des témoins. Un témoin qui a été victime dans

3 un village ne peut vous présenter que certains événements. Mais il faut

4 savoir qu'un grand nombre d'éléments de preuve dans cette affaire sont

5 présentés à la lecture de documents internes du HVO et des organisations

6 dont faisaient partie ces hommes. D'ailleurs, si la Chambre n'a pas reçu

7 ces documents par les moyens appropriés, ils pourront et nous pouvons

8 d'ailleurs aborder cette question dans un petit moment, l'Accusation ne

9 pourra pas présenter ces différents éléments en preuve. Il va falloir que

10 vous preniez en considération tous ces documents, et puis, nous ne pensons

11 pas que l'Accusation aille présenter 10 000 pièces à conviction. Bien sûr

12 que cela ne va pas se faire. C'est un procès -- c'est un procès qui est en

13 pleine évolution, qui est en pleine mutation et, en fait, la semaine

14 dernière, par exemple, il y a eu certains éléments de preuve qui ont été

15 présentés par les témoins.

16 Bon, je ne vais pas entrer dans les détails, mais M. Flynn et moi-

17 même avons pensé -- nous pensons que telle ou telle chose allait être

18 contestée, mais cela n'a pas été contesté. Donc, nous avons supprimé la

19 présentation de certains documents et il n'y a pas eu contestation. Cela a

20 été accepté, cela a été versé au dossier, donc, nous avons pu présenter ces

21 moyens de preuve.

22 Nous ne pensons pas que nous allons vous présenter 10 000 documents, mais

23 dorénavant c'est que 2 000 documents, et qui plus est, Monsieur le

24 Président, ce n'est pas tellement le nombre de documents, mais la façon

25 dont les documents sont gérés et présentés.

26 Je dirais que, dans l'affaire Tuta Stela, dans laquelle j'ai travaillé. Il

27 s'agissait d'une affaire à portée beaucoup plus réduite, beaucoup plus

28 réduite que celle-ci, il y avait deux accusés qui avaient un rang beaucoup

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1 moins élevé que ces six hommes, et l'Accusation a présenté et a versé au

2 dossier environ 4 500 documents. Cela n'a rien à voir avec Capljina. Cela

3 n'avait rien à voir avec Gornji Vakuf. Il s'agissait d'une affaire à portée

4 beaucoup plus réduite. Il y a eu 2 500 pièces à conviction. Le Président de

5 la Chambre, Messieurs les Juges, lui n'a pas considéré que cela soit un

6 problème. Ils ont pris en considération les documents et il n'y a aucune

7 raison qui explique que cette Chambre devrait avoir un problème à ce sujet.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les besoins, oui, mais pour les besoins du

9 transcript, pouvez-vous redonne les chiffres parce qu'on a mis des points

10 d'exclamation. Si mon collègue l'avait vu, il aurait fait lui-même

11 l'intervention.

12 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, dans l'affaire

13 Tuta et Stela, je disais que le Procureur a présenté

14 2 450 pièces à conviction et j'ai vérifié ces chiffres pendant le week-end.

15 En fait, au cours des neuf derniers -- neuf années que j'ai passées au

16 Tribunal, Messieurs les Juges, et j'ai dit à un certain nombre de fois - en

17 fait, non je ne vais pas dire cela parce que je ne pense pas que je devrais

18 faire cette observation - mais je dirais que, dans un certain nombre de

19 situations, il a été dit : "Pourquoi est-ce que ces pièces à conviction ne

20 peuvent pas être admis avant le début du procès ? Cela nous aurait permis

21 de gagner du temps." Je sais que ce sont des réflexions qui ont été faites

22 par des Juges du TPIY, alors, certains documents auraient pu être présentés

23 de façon plus efficace. L'Accusation a essayé de le faire lors de la phase

24 préalable au procès lorsque les premiers témoins sont arrivés, et

25 d'ailleurs, je dirais que lors de la phase préalable au procès.

26 Monsieur le Président, vous aviez indiqué qu'un certain nombre de

27 jeux de documents et je vais vous donner un exemple; des documents de la

28 MOCE pourraient être versés au dossier par le truchement d'un seul

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1 représentant de cette organisation. Donc, l'Accusation a pris cela en

2 considération et puis pour une raison que j'ignore nous nous sommes

3 éloignés de cette idée et nous avons maintenant un régime qui est beaucoup

4 plus lourd pour l'admission des preuves documentaires. Alors, je pense, en

5 fait, que nous avons essayé ce faisant de présenter les documents de façon

6 plus efficace et je pense que c'est une bonne direction qui a été prise et

7 j'espère que cela continuera. Mais j'indiquerais aux Juges et à la Défense

8 qu'au cours des semaines prochaines, nous avons prévu de présenter un grand

9 nombre de documents. Il s'agit de documents du HVO qui ont été reçus du

10 gouvernement croate notamment les -- il s'agit des archives du HVO pour

11 cette affaire et cela sera une indication de la façon dont nous souhaitons

12 préparer et présenter de façon efficace nos éléments de preuve.

13 Je suis sur le point de terminer et je reviendrai sur mes préoccupations

14 générales que j'ai exprimées au début de mon intervention. Je le répète je

15 suis extrêmement préoccupé, Messieurs les Juges, en tant que juriste

16 professionnel, en tant que quelqu'un qui est véritablement engagé dans ce

17 procès, je suis très préoccupé car je crains que les victimes, l'Accusation

18 et la communauté internationale ne bénéficient pas -- ou ne puissent pas

19 bénéficier d'équité dans cette affaire.

20 Je suis extrêmement préoccupé, et alors, parfois, il semblerait que

21 l'Accusation devrait avoir des propos beaucoup plus mordants et beaucoup

22 plus vitrioliques [phon], mais je résiste à cela, Monsieur le Président,

23 car je pense qu'en fin de compte, la Chambre de première instance réagira

24 ou répondra ou réagira beaucoup mieux si la raison et le bon sens prévalent

25 plutôt que des déclarations lapidaires.

26 Alors, je sais que la Chambre a fait certains observations aujourd'hui que

27 nous consignons ou prenons en considération, mais je dois répéter une fois

28 de plus que ce que j'ai entendu jeudi dernier, et ce que la plupart du

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1 monde anglophone a entendu, et je l'ai entendu à l'extérieur de l'enceinte

2 du TPIY.

3 Ce que j'ai entendu ce sont des mots de vives préoccupations et pour

4 qu'il n'y a absolument pas de malentendu, je dirais que la déclaration, qui

5 a été entendue jeudi dans le monde entier, a été ce qui suit : mon

6 sentiment est - et je l'ai déjà dit - que dans 90 à 95 % des cas, la

7 plupart de nos questions tombent en faveur de vos clients, donc, vous

8 voyez, il y a beaucoup de questions qui sont en faveur de vos clients.

9 Lorsque vous dites qu'il -- et lorsque vous dites --

10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- alors, vous parlez de jeudi, j'ai corrigé le sens

11 de la phrase. Donc, si vous avez préparé votre papier avant, je comprends

12 que vous dites cela, mais vous n'avez peut-être pas compris ce que j'ai dit

13 tout à l'heure.

14 M. SCOTT : [interprétation] J'ai compris. J'ai bien compris le corrigendum,

15 Monsieur le Président. Je voulais juste vous dire quelle a été la réaction

16 jeudi dernier lorsque cela a été entendu.

17 Je sais qu'il y a de nombreuses personnes qui ont entendu cela. J'ai

18 exprimé ma préoccupation à propos de l'équité de ce procès, il appartient à

19 la Défense d'exprimer son point de vue, comme le fait toujours d'ailleurs

20 de façon véhémente. J'espère que ce que je viens de dire -- j'espère que la

21 Chambre de première instance va pouvoir prouver que ce que je viens de dire

22 est tout à fait faux, à savoir qu'il y aura équité pour ce procès pour les

23 victimes, pour l'Accusation, pour la communauté internationale, mais je

24 vais m'exprimer, de façon très, très franche, et n'oubliez pas que d'autres

25 dans cette salle se sont exprimés de façon très, très franche également.

26 Donc, accordez-moi cela les propos, les mots ne me persuade pas facilement

27 -- les mots sont très faciles à dire. Il peut y avoir des erreurs de

28 traduction, des malentendus, on peut expliquer cela ainsi. Je dirais que

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1 les actes sont beaucoup plus de preuve que les mots. C'est par les actions

2 de la Chambre et non pas les mots et les propos de la Chambre que nous

3 verrons ce qui se passera.

4 Je m'engage, car j'ai une responsabilité, j'ai une

5 responsabilité vis-à-vis des victimes, vis-à-vis de la communauté

6 internationale. Je pense -- je prends cela très, très au sérieux car il

7 s'agit d'une fonction très importante de l'Accusation, je l'ai déjà dit.

8 Mais les victimes et la communauté internationale ainsi que l'Accusation

9 ont le droit d'avoir un procès juste et équitable aussi équitable que les

10 accusés. Il ne s'agit pas d'avoir un genre de procès équitable, il s'agit

11 tout simplement d'avoir un véritable procès juste et équitable, tout comme

12 Me Karnavas -- alors, peut-être que Me Karnavas peut être -- faire beaucoup

13 d'effets -- être très agité parfois ainsi que d'autres. Si c'est cela qui

14 est nécessaire, Monsieur le Président, bien, je vais aussi faire des effets

15 -- être agité, et ce, pour faire en sorte que l'Accusation soit traitée de

16 façon juste et équitable.

17 J'ai bien entendu le plus grand des respects pour vous trois ainsi

18 que M. le Juge Mindua qui est absent, mais si vous pensez que je vais

19 accepter ce système de double poids double mesure, et si vous pensez que je

20 vais accepter que l'Accusation soit traitée de façon différente, il ne

21 s'agit pas tout simplement d'exprimer des points de vue et de dire : "Ce

22 n'est que l'Accusation," on pourra dire au bureau du Procureur ce qu'il

23 doit faire après tout. Il ne s'agit que du bureau du Procureur.

24 Bien, Messieurs les Juges, si cela est l'attitude, le point de vue de

25 la Chambre de première instance vous avez véritablement le mauvais

26 Procureur en face de vous. Il se peut que d'autres procureurs le fassent,

27 mais je ne vais pas accepter sans réagir que ce genre de chose se passe.

28 En guise de conclusion, je vous dirais ce que j'ai déjà dit, je ne

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1 pensais pas vous livrer ces réflexions cet après-midi, mais le fait

2 maintenant. Je me suis souvent demandé : Quelle serait la situation ?

3 Sinon, nous avions six victimes assises derrière l'Accusation, six victimes

4 à qui la Chambre devrait dire bonjour. Six victimes envers qui, à qui la

5 Chambre pourrait poser des questions. Six victimes qui pourraient se lever

6 et faire des observations, des questions qu'ils pourraient exprimer leurs

7 points de vue, leur avis, leur opinion, et qui pourraient également dire si

8 à leur point de vue -- au point de vue -- ou suivant des milliers de

9 personnes, des milliers d'autres victimes, ils considèrent qu'ils sont

10 traités juste et équitable.

11 Voilà je ne fais que représenter ces victimes et notre intérêt.

12 Je vous remercie.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

14 Monsieur Scott, on vous a écouté. Comme je vous l'ai dit, nous allons

15 rendre une décision en essayant de donner satisfaction ou revendication

16 légitime des uns et des autres. Donc, attendez la décision avant de vous

17 prononcer définitivement comme on peut avoir l'impression parfois d'en

18 avoir le sentiment. Donc, nous on n'a pas encore pris notre décision. Nous

19 savons que Me Karnavas nous a expliqué pourquoi il voulait pouvoir --

20 pendant son contre-interrogatoire ne pas être interrompu et il nous a bien

21 expliqué pourquoi, donc, on a compris. Vous venez également d'expliquer

22 beaucoup de choses également qu'on a compris et je pense que la décision

23 sera conforme aux intérêts des uns et des autres. Voilà c'est tout ce que

24 je peux dire.

25 Maître Karnavas, vous vous étiez levé. Je vous en conjure, ne rajoutez pas

26 de l'huile sur le feu parce que tout le monde est calme aujourd'hui et je

27 sais que vous êtes parfaitement calme.

28 M. KARNAVAS : [interprétation] Je n'ai pas reçu l'interprétation encore,

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1 mais toujours est-il que je m'efforcerais d'être très bref.

2 D'abord, je voudrais remercier l'Accusation pour ses commentaires et je

3 voudrais du moins avoir l'occasion d'exprimer les mêmes sentiments au sujet

4 du droit de l'Accusation pour ce qui est de la présentation de ces éléments

5 de preuve et du droit que celle-ci a de représenter les droits des

6 victimes.

7 De deux, pour ce qui est de ce procès, j'estime qu'avant une -- la prise de

8 quelques décisions que ce soit, il faudrait que nous ayons une audience sur

9 tous ces points. Partant de l'expérience qui est la mienne et qui date de

10 25 ans, les deux parties réclament à chaque fois un procès juste et

11 équitable ou plus juste et plus équitable. Alors, je crois qu'elles ont une

12 requête conjointe à cet effet. Alors, c'est déjà la deuxième fois que

13 l'Accusation vient se plaindre du fait de voir son temps raccourci. Nous

14 rejoignions l'Accusation sur ce point, nous estimons du point de vue de la

15 Défense que nous n'avons pas suffisamment de temps à notre disposition.

16 Cela n'est pas suffisamment argumenté non plus du point de vue de décision

17 rendue par la Chambre d'appel. Nous pensons qu'il faudrait, bien entendu,

18 être le plus rapide possible dans un procès mais peut-être ne suis-je pas

19 aussi éloquent que M. Scott ou comme certains autres confrères, mais nous

20 devons avoir une audience pour débattre de ces questions techniques, les

21 choses qui risquent d'aider à la procédure dans ce procès. Si vous vous

22 penchez sur l'acte d'accusation et la taille de la situation, vous vous

23 rendrez compte du fait que c'est probablement le procès le plus complexe

24 qui est conduit devant ce Tribunal, et cela probablement restera le plus

25 complexe des procès jusqu'à la fin de l'existence de ces institutions. Il

26 faudrait que cela dure, donc, il faut bien entendu s'efforcer de faire en

27 sorte que les choses soient faites de la façon la plus efficace possible,

28 mais il n'est toujours pas trop tard pour ce qui est de remédier à

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1 certaines carences. Alors, nous aimerions, Messieurs les Juges, que nous

2 ayons véritablement ce type de deux sortes d'audience et je remercie M.

3 Scott pour l'éloquence dont il a fait preuve aujourd'hui. Je partage les

4 problèmes de l'Accusation parce que j'estime qu'il n'y a rien de plus

5 frustrant que de voir un travail extrêmement en -- de fait et qu'on n'a pas

6 le temps de poser certaines questions en raison du fait d'interruption ou

7 du fait d'avoir des questions de posées qu'on avait l'intention de poser

8 ultérieurement dans le cadre d'une stratégie qui a déjà été mise en place.

9 Alors, je pense avoir été suffisamment clair et si j'ai levé la voix ce

10 n'est certainement pas par manque de respect vis-à-vis des Juges de la

11 Chambre.

12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Karnavas, merci beaucoup.

13 J'ai demandé la parole. Le Président m'a donné la parole. Je sais ce que

14 j'ai dit. Vous savez qu'il y a eu un échange entre vous-même et moi-même

15 jeudi passé, au sujet de cette audience que vous venez de réclamer de la

16 part de la Chambre, je dirais que vous l'avez entamé dès jeudi passé. Peut-

17 être faudrait-il le faire dans une composition plus restreinte et peut-être

18 en l'absence des accusés parce qu'il s'agit, d'après ce que je comprends de

19 questions de droit uniquement, je crois avoir compris, M. Scott également,

20 qui lui aussi a souhaité exprimer son argumentation de façon claire, tout

21 comme la Défense.

22 Alors, je suis conscient du fait que les autres conseils de la Défense eux

23 aussi souhaiteraient intervenir, de façon plus en large

24 -- de façon plus élargie, sur ce point, mais je crois qu'il faudrait que

25 nous passions à l'audience du témoin parce qu'il y a un témoin qui attend.

26 C'est une question de politesse, et non pas laisser les gens attendre

27 pendant des heures. Peut-être, Monsieur le Président, pourrait-il décréter

28 une pause à présent et peut-être pourrions-nous entamer ensuite.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

2 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné que

3 M. Scott, le représentant de l'Accusation, a soulevé quelques points qui

4 nous concerne nous aussi, nous les accusés, le fait qu'il y avait des

5 victimes et que les accusés sont présents d'ores et déjà ici cette équation

6 que M. Scott vient de faire laisser entendre que nous sommes d'ores et déjà

7 coupables et que c'est un fait acquis, je ne pense pas que cela soit

8 conforme aux éléments de droit. Nous ne sommes pas coupables jusqu'à

9 jugement rendu de plein droit.

10 Alors, pour ce qui est des victimes et de la communauté internationale, je

11 dirais que les victimes de ce qui s'est passé en ex-Yougoslavie, nous

12 savons qui c'est nous aussi. Pour ce qui est de la notion de communauté

13 internationale, je dirais que cette notion internationale -- je dirais que

14 cette notion est plutôt flux, et il y a 500 ou 600 guerres où la communauté

15 internationale entre autres l'Etat d'où vient M. Scott a conduit après la

16 Deuxième Guerre mondiale. Nous ne nous souvenons pas des procès diligentés,

17 mais des victimes il y en a eu au moins autant qu'en ex-Yougoslavie, sinon

18 plus.

19 Deuxièmement, après la Révolution française, en Europe il y a eu un

20 principe de poser, à savoir que dans un tribunal nous sommes tous égaux

21 devant la loi et je voudrais dire --

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak. Monsieur Praljak,

23 vous avez eu le droit de poser des questions parce que, parfois, les

24 accusés savent mieux que leur propre avocat quels ont été les faits dans la

25 réalité, mais vous n'intervenez pas ici comme un avocat, et vous n'avez pas

26 à intervenir sur ce point. Votre conseil peut le faire. Merci.

27 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je pense que le Statut m'accorde le

28 droit de présenter des opinions qui s'opposent à l'Accusation, Monsieur le

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1 Juge Trechsel.

2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, pas cette fois-ci.

3 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je veux juste évoquer un point. Cela

4 concerne un élément, on parle d'équité et de droits. Les lois en vertu

5 desquelles M. Scott veut accuser et réclamer une condamnation pour nous

6 autres, ces lois-là ne sont pas en vigueur pour M. Scott, alors pour ce qui

7 est de l'équité d'une telle thèse, c'est une chose dont elle peut être

8 débattue. Si nous en débattons, je pense que moi-même en ma qualité

9 d'intellectuel, indépendamment de mes connaissances en matière de droit,

10 j'ai le droit de dire une opinion, M. Scott m'accuse en vertu de lois qui

11 ne sont pas appliqués pour lui. Entre autres, il parle de droit en mot

12 redondant mais cela ne l'implique pas. Merci beaucoup de votre attention.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors, nous allons --

14 Il est 15 heures 30. On va faire venir le témoin. Monsieur Scott, le témoin

15 qui vient, il y a des mesures de protection ou pas ? Parce que dans les

16 fiches, je ne crois pas. Non, pas de mesures. Vous avez donc prévu une

17 heure et demie et la Défense aura une heure et demie. Voilà. Le mieux c'est

18 qu'on fasse les 20 minutes de pause, et nous reprendrons donc dans 20

19 minutes.

20 --- L'audience est suspendue à 15 heures 28.

21 --- L'audience est reprise à 15 heures 51.

22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

23 LE TÉMOIN : SALEM CEREMIC [Assermenté]

24 [Le témoin répond par l'interprète]

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, je crois que vous devez

26 me donner un numéro IC.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

28 L'accusé 4D a présenté une liste d'objections de document versé par

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1 l'Accusation au travers du témoignage du Témoin DE. Ce document se verra

2 attribuer la cote 494. Merci, Messieurs les Juges.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, j'espère que vous m'entendez dans votre

4 langue la traduction de mes propos. Pouvez-vous me donner votre nom,

5 prénom, et date de naissance ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Salem Cerenic, je suis né le 16

7 octobre 19562, à Vares.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Est-ce que vous avez une profession, une

9 activité actuelle ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais à quoi vous faites référence ?

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne travaillez pas, ou vous avez un emploi

12 quelconque ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je travaille pour la municipalité de

14 Vares.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné devant un

16 Tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans votre pays, ou c'est la

17 première fois que vous témoignez ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai témoigné au tribunal cantonal de Zenica,

19 au sujet des procès de Vares pour ce qui est des événements de 1993,

20 j'entends.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire le serment,

22 Monsieur.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Merci. Vous pouvez vous asseoir.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur, quelques éléments

28 d'explication de ma part comme je le fais pour tous les témoins. Vous êtes

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1 donc un témoin de l'Accusation. Vous allez répondre à des questions qui

2 vont vous être posées, je crois, par M. Flynn que vous avez déjà dû

3 rencontrer ce matin ou hier. Le Procureur aura une heure et demie pour vous

4 poser des questions. A l'issue de cette phase, les avocats voire les

5 accusés eux-mêmes vous poseront des questions dans le cadre du contre-

6 interrogatoire.

7 Les Juges qui sont en face de vous pourront également vous poser des

8 questions s'ils l'estiment nécessaire. Je ne peux pas préciser que les

9 questions posées par les Juges ne sont pas en faveur ni de l'Accusation, ni

10 de la Défense, mais ne visent qu'à connaître la vérité. Par ailleurs, en ce

11 qui nous concerne je vais faire en sorte de ne poser des questions qu'à la

12 fin de la prise de parole des uns et des autres pour éviter donc tout

13 problème, et ce qui me permettra de mieux vérifier la traduction. Je donne

14 donc la parole à Monsieur Flynn.

15 M. FLYNN : [interprétation] Merci beaucoup. Bonjour à MM. les Juges.

16 Bonjour aux membres de la Défense et à toutes personnes présentes dans le

17 prétoire.

18 Interrogatoire principal par M. Flynn :

19 Q. [interprétation] Monsieur Cerenic, bonjour à vous aussi. Je crois que

20 vous êtes de la ville de Vares ?

21 R. Oui, je suis né là-bas.

22 Q. Pouvez-vous nous dire où est-ce que vous avez résidé dans la première

23 moitié de l'an 1993 ?

24 R. Je vous ai déjà dit que depuis ma naissance je vis à Vares et donc en

25 1993 je résidais avec ma famille à savoir ma femme et mes deux enfants à

26 Vares.

27 Q. A l'époque, avez-vous eu un métier et quelle a été votre profession ?

28 R. A l'époque même en 1993, j'étais membre de l'ABiH.

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1 Q. Quand avez-vous rejoint les rangs de l'ABiH ?

2 R. J'ai rejoint les rangs de l'ABiH en début 1993, dès le mois de janvier.

3 Q. Pouvez-vous nous dire de quelle unité vous avez fait partie et quel a

4 été votre grade, quelles ont été vos fonctions, s'il vous plaît ?

5 R. Je n'ai pas eu de grade du tout; j'ai été membre du Peloton de Pristav

6 [phon] dans la municipalité de Vares et j'ai été chargé de la sécurisation

7 des bâtiments, des installations.

8 Q. Avez-vous été stationné à Vares pendant toute la durée de 1993 ?

9 R. Non.

10 Q. Pouvez-vous nous dire où encore vous a-t-on affecté et pourquoi vous a-

11 t-on déplacé là-bas ?

12 R. Si j'ai bien compris votre question, à un moment donné j'ai été sur des

13 champs de bataille pour la plupart du temps contre des Chetniks. Dans

14 l'Unité auprès du QG, j'ai été chargé de la sécurisation de certaines

15 installations.

16 Q. Est-ce qu'à un moment donné vous auriez entendu parler d'un village

17 appelé Dabravine ?

18 R. Oui.

19 Q. Avez-vous été rattaché à une unité quelconque là-bas ?

20 R. Vous parlez de Dabravine ?

21 Q. Oui.

22 R. A Dabravine, j'étais un membre de l'ABiH.

23 Q. Mais pourquoi êtes-vous allé de Vares à Dabravine ?

24 R. Il n'y avait pas que moi de muter. Le 1er juillet 1992, les Unités du

25 HVO ont pris par la force le pouvoir des instances légalement élues, ce qui

26 fait qu'à Vares les pouvoirs légalement élus à savoir les dirigeants, la

27 police, les élus de la municipalité, la présidence de Guerre de la

28 municipalité, tout a été déplacé vers Dabravine.

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1 Q. Alors si l'on passe maintenant à l'été 1993, vous étiez à Dabravine sur

2 la ligne de front, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que quelque chose vous serait arrivée pendant que vous étiez sur

5 cette ligne de front ?

6 R. J'ai été blessé.

7 Q. Quelle blessure, quel type de blessure avez-vous eu ?

8 R. J'ai eu des blessures suite à l'explosion d'un obus. J'ai été blessé à

9 la cuisse droite et à l'épaule.

10 Q. Vous avez passé un certain temps à l'hôpital ?

11 R. Oui, je n'arrive pas à me souvenir du nombre exact de jours, mais j'ai

12 été installé en ma qualité de blessé à Breza, au dispensaire de Breza parce

13 que nous ne pouvions pas entrer dans Vares aux fins de nous faire soigner.

14 Q. Vous étiez à Dabravine pendant cette période, est-ce que l'unité vous

15 laissait partir de temps à autre pour que vous puissiez voir votre

16 famille ?

17 R. Il me semble au mois de septembre que j'avais demandé un congé de la

18 part de mes supérieurs pour deux raisons : ma feu maman était très malade à

19 l'époque et j'ai demandé à ce qu'on me laisse partir pour lui rendre

20 visite, et la deuxième raison de ma demande d'aller à la maison. Etant

21 donné que nous n'avions pas d'argent pour nous acheter de quoi nous

22 chauffer, à savoir du bois de chauffage pour l'hiver, aussi suis-je allé

23 moi-même dans le bois pour couper du bois afin que les miens puissent se

24 chauffer. C'est la raison pour laquelle j'avais demandé un congé un peu

25 plus long.

26 Q. Dans le courant du mois d'octobre, début du mois d'octobre et allant

27 jusqu'à la mi octobre où étiez-vous ?

28 R. J'étais à Vares.

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1 Q. Vous souvenez-vous qu'à un moment donné au mois d'octobre pendant que

2 vous étiez à Vares, il vous serait arrivé des nouvelles au sujet de

3 visiteurs arrivant dans cette ville ?

4 R. Les 21 et 22, me semble-t-il, je ne me souviens pas au juste de la

5 date, j'avais un voisin qui était là et qui m'a dit qu'à Vares il y avait

6 environ 200 soldats oustachi qui était commandé par Ivica Rajic.

7 Q. Quand vous dites : "Soldats oustachi," est-ce qu'on vous a donné un nom

8 d'unité pour l'identifier ?

9 R. Il me semble qu'il a été fait mention des Apostoli et Maturice.

10 C'étaient des Unités en provenance de Kiseljak.

11 Q. A l'époque en octobre 1993, saviez-vous quoi que ce soit au sujet des

12 Unités Apostoli et Maturice ?

13 R. J'ai entendu parler d'eux par la télévision locale, et du fait de la

14 prise des pouvoirs à Vares, la télévision locale appelée Bobovac avait été

15 -- avait rapporté des événements de Croates de Vares -- nous avons les

16 Croates de Vares.

17 Q. Dans la ville de Vares même, y avait-il une unité militaire propre à la

18 ville ?

19 R. Dans la ville, il n'y avait que des Unités du HVO, bien entendu.

20 Q. Mais est-ce que cette unité était connue comme étant la Brigade de

21 Bobovac ?

22 R. Oui, c'est ainsi qu'elle s'appelait.

23 Q. Alors, s'agissant de ces troupes en provenance de Kiseljak, savez-vous

24 nous dire vers quel moment ces unités sont arrivées à Vares ?

25 R. On n'a pas été informé de leur arrivée, et encore moins, avons-nous su

26 pourquoi ils étaient venus. Mais à l'époque, en Bosnie, c'était chose

27 notamment connue que de dire que, si des unités venaient dans une autre

28 ville, on disait que cela allait faire du "belaj;" chez nous, c'est une

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1 expression pour dire du remue ménage. Cela ne voulait rien signifier de

2 bon.

3 Q. L'arrivée de ces unités vous a-t-elle préoccupé, ou étiez-vous plutôt

4 détendu à cet égard ?

5 R. Je crois avoir répondu tout à l'heure en partie quand on parle de remue

6 ménage cela sème le trouble parmi la population que de voir que des unités

7 arrivaient d'ailleurs.

8 Q. Est-il arrivé quelque chose d'inhabituel à vous-même et à votre famille

9 tout de suite après leur arrivée ?

10 R. Le 23 au matin, trois hommes masqués, enfin quand je dis "masqués," je

11 veux dire qu'ils portaient des uniformes de camouflage avec une espèce de

12 cirage sur la figure, et ils sont venus dans notre maison. Il y avait ma

13 femme, moi et nos deux enfants.

14 Q. Avez-vous reconnu l'un quelconque de ces soldats ?

15 R. Non, personne.

16 Q. Avez-vous pu déterminer partant de leurs uniformes quels étaient les

17 effectifs qu'ils étaient censés représenter ?

18 R. Oui. Ils avaient sur une manche, de plus c'était celle de gauche ou de

19 droite, les insignes du HVO.

20 Q. Mais vous n'avez reconnu personne. Alors, à ce moment-là en votre

21 qualité de résident de Vares vous auriez pu connaître des soldats qui

22 faisaient partie de cette Brigade Bobovac du HVO ?

23 R. Je ne connaissais la plupart de ces gens. Vares c'est une petite ville

24 où les gens se connaissent. Alors, si c'était le cas j'aurais reconnu l'un

25 des trois mais non c'étaient des gens venus d'ailleurs.

26 Q. Pourriez-vous d'écrire à l'intention des Juges de la Chambre ce qui

27 s'est passé une fois qu'ils sont venus dans votre maison ?

28 R. Ils ont fait éruption à trois. C'étaient des gens donc que je ne

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1 connaissais pas. Ces soldats vêtus d'uniformes de camouflage et ils ont

2 commencé à nous engueuler, à crier : "Donnez-nous votre argent, l'or, les

3 armes." Je n'avais ni or, ni argent, ni arme, et je n'avais rien à leur

4 donner. Il y a eu des provocations, des injures, on m'a qualifié de Balija,

5 de Turc. Ce sont des propos assez offensant. Ils ont injurié ma mère, mon

6 père et que sais-je encore, tout cela se passait au fur et à mesure du

7 temps. A un moment donné, ils m'ont mis le canon d'un fusil dans la bouche

8 en demandant de l'argent, de l'or ou des armes.

9 Q. Alors, je crois comprendre de ce que vous dites que vous ne leur n'avez

10 pas donné d'argent du tout.

11 R. Je n'arrive plus à m'en souvenir exactement du fait de leur avoir donné

12 quoi que ce soit. Si j'avais quelque chose sur moi, il est probable que je

13 leur ai donné.

14 Q. Bon. Après avoir présenté leur exigence que s'est-il produit ? Pouvez-

15 vous nous le dire ?

16 R. En terme assez euphémistique, je dirais que j'ai été jeté hors de ma

17 maison, il faisait plutôt froid, on était en octobre. Ils ne m'ont pas

18 laissé le temps de me chausser ni de m'habiller et je crois que j'étais en

19 espèce de t-shirt de couleur rouge.

20 Q. Donc, vous n'étiez pas vêtu de votre uniforme de l'ABiH, vous étiez en

21 civil lorsqu'ils sont arrivés dans votre maison ?

22 R. Non, non.

23 Q. Une fois dehors, que s'est-il passé ?

24 R. Ils m'ont bousculé avec leurs armes à la main. Je disais tout à l'heure

25 qu'ils m'avaient jeté dehors et ils m'ont même fait sortir de ma cour puis

26 il y avait là des petits groupes. J'ai vu disons à 50 ou 70 mètres de la

27 maison un autre petit groupe de soldats. Ils m'ont donné l'ordre de courir

28 vers eux en baissant la tête vers le sol pour ne pas regarder à gauche et à

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1 droite ni devant, je devais mettre mes mains sur la nuque, comme cela, et

2 d'un groupe à l'autre, on m'a bousculé en criant et dois-je répéter encore

3 que sur chemin faisant j'ai entendu que des gens autres étaient bousculés

4 et emmenés, et c'est donc sous les injures -- sous toutes ces offenses,

5 qu'on nous a fait arriver jusqu'au bâtiment du centre scolaire secondaire

6 qui s'appelait Ivan Goran Kovacic à l'époque, Ivan Goran Kovacic à Vares,

7 et ils nous ont pris dans la salle de gym de cette école secondaire.

8 Q. Mais avant que d'avoir été emmené à l'école secondaire, vous souvenez-

9 vous du fait d'avoir porté une alliance ?

10 R. L'alliance c'est quand on se marie. C'est qu'on met sur l'annulaire.

11 J'avais mon alliance sur mon doigt. A la sortie de ma cour l'un des

12 Oustachis m'a dit : "Enlève cela de ton doigt." Alors, j'ai expliqué que

13 c'était mon alliance de mariage. Alors, l'autre m'a dit : "Mais enlève te

14 dis-je." Donc, je l'ai enlevé.

15 Q. Alors, vous avez été forcé d'aller jusqu'à cette école Ivan Goran

16 Kovacic et vous avez été forcé d'y aller pied nu sans chaussure dirais-je ?

17 R. Ce chemin fait à peu près un kilomètre, cela zigzague. Cela ne va pas

18 droit. Peut-être un peu plus ou, non pas un peu moins, un peu plus, disons,

19 environ un kilomètre.

20 Q. Que s'est-il passé une fois que vous êtes arrivé à l'école ?

21 R. Quand on est arrivé à l'école on nous a fait entrer dans cette salle de

22 gym de l'école secondaire, et je suis allé à l'école secondaire, j'y ai

23 trouvé entre 70 et 100 personnes qui se trouvaient déjà dans cette salle.

24 La seule chose que j'ai remarquée c'est qu'en plein milieu de la salle il y

25 avait un homme qui gisait. Je répète la ville était une petite ville on se

26 connaissait. Je devais probablement les connaître plus ou moins tous.

27 Alors, j'ai trouvé un siège et je me suis assis parmi ces gens.

28 Q. Mais la personne qui gisait en plein milieu de cette salle de gym

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1 était-ce quelqu'un que vous connaissiez ?

2 R. Oui.

3 Q. Pouvez-vous nous le décrire et nous donner son nom ?

4 R. Ibro Likic, il était vêtu d'un uniforme bleu clair qui à l'époque était

5 portée par la protection civile.

6 Q. Y avait-il quelconque - qui que ce soit à ses côtés, ou était-il seul ?

7 R. Lui, il était allongé, et au-dessus de lui, il y avait deux hommes, je

8 ne sais pas trop, je crois deux hommes en uniforme.

9 Q. Mais savez-vous ce qu'ils faisaient à même le sol ? Avez-vous entendu

10 des propos échangés entre lui et les autres ?

11 R. Ceux qui étaient au-dessus de lui, ces soldats l'engueulaient, enfin,

12 dois-je dire que l'injure était toujours présente, on injuriait à la mère

13 de Balija, à la mère de Turque, un fusil de chasse parce que cet homme

14 était un chasseur avec un permis de port d'armes. On lui a demandé -- on

15 lui a réclamé de restituer son fusil de chasse.

16 Q. Vous souvenez-vous dans quel était se trouvait ?

17 R. Il était en piteux état du point de vue physique. Il avait reçu des

18 coups sur le visage. Il avait du sang, il y avait plein d'ecchymoses, plein

19 de bleus. Enfin, c'était apparemment et on voyait qu'on l'avait vraiment

20 tabassé.

21 Q. Quel âge pouvait bien avoir cet homme à l'époque ?

22 R. Enfin, si vous voulez que je sois dans l'approximation, je dirais qu'il

23 avait une quarantaine d'années, peut-être un peu plus de 40.

24 Q. Avez-vous eu la possibilité de regarder autour dans cette salle ? Avez-

25 vous reconnu qui que ce soit de ces 70 ou 100 personnes pour lesquelles

26 vous avez dit qui se trouvaient dans la salle de gym lorsque vous êtes

27 arrivé dans la salle ?

28 R. Les gens qui étaient présents dans la salle, bien sûr, j'ai vu tous ces

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1 gens-là, c'étaient les habitants de Vares. Encore une fois, je répète que

2 c'est une petite ville, nous nous connaissons tous entre nous, je

3 connaissais tous les gens.

4 Q. Pourriez-vous nous dire s'il y avait des femmes parmi ces gens-là ?

5 R. Je ne me souviens pas de cela.

6 Q. Quelles étaient les origines ethniques de ces gens ?

7 R. Ils étaient tous bosniens, musulmans, qui on les a fait rentrer par la

8 force dans la salle de gym.

9 Q. Étiez-vous en mesure de voir s'ils étaient jeunes ou âgés ou entre deux

10 âges ?

11 R. Plutôt les âges, entre 17 -- peut-être 17 ans jusqu'à 70 ans, jusqu'aux

12 personnes âgées.

13 Q. Est-ce qu'on vous a dit pourquoi vous avez été emmené à l'école, ce qui

14 allait vous arriver ?

15 R. Non, personne ne dit rien.

16 Q. Vous nous avez dit qu'il y avait là-bas entre 70 et 100 personnes au

17 moment où vous êtes arrivé, dans la salle. Est-ce que ce chiffre est resté

18 -- est-ce que est resté le même ou a changé ou est-ce que le nombre a

19 augmenté ?

20 R. Non, non le nombre a augmenté d'une minute à l'autre. Il s'agissait de

21 gens qui affluaient, ils étaient tous bosniens, musulmans qui ont été

22 amenés par la forces dans la salle de gym.

23 Q. Donc, quel était le nombre de personnes qui se trouvaient à la fin de

24 la journée du 23 octobre 1993 à l'école dans cette salle de gym ?

25 R. Il y en avait à peu près 300.

26 Q. Est-ce qu'on vous a donné des instructions par quelqu'un par rapport à

27 ce que vous allez faire dans la salle de gym, dans ce bâtiment ?

28 R. Les soldats du HVO nous donnaient des instructions, à savoir nous

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1 devions vider nos poches. Il y en avait qui avait des bagues ou de d'autres

2 objets en or ou des clés. Donc il fallait vider nos poches et poser tout

3 cela devant nous. Après les soldats venaient pour prendre ces objets.

4 Q. Vous souvenez-vous si les premiers jours donc si les premiers jours les

5 membres du HVO vous approchaient pour vous demander d'autre chose,

6 exception faite de ce que vous venez de décrire ?

7 R. Me demander à moi ?

8 Q. Oui, est-ce que quelqu'un parmi ces soldats vous -- s'est adressé à

9 vous ce premier jour ?

10 R. Oui, les premiers jours, l'un de ces personnes en uniforme s'est

11 adressé à moi. Il est venu à la porte en disant : "Qui est Salem Cerenic ?"

12 Ce qui m'a vraiment surpris, parce que je vous dis je ne connaissais

13 personne d'entre ces soldats. Je me posais des questions comment il pouvait

14 me reconnaître. Il m'a demandé de m'approcher.

15 Q. Dites-nous ce qui s'est passé par la suite.

16 R. Lorsqu'il a prononcé mon nom et prénom, il m'a dit de m'approcher du

17 fait que j'étais au fond de la salle. Lorsque j'étais à quelques mètres de

18 distance par rapport à lui, il a sauté -- ou plutôt, sursauté en me donnant

19 des coups de pied, sur la poitrine. Je suis tombé au sol. A ce moment-là,

20 les autres se sont approchés, les autres qui étaient avec lui parce qu'il

21 n'était pas seul au moment où il est entré dans la salle. Avec lui sont

22 entrés me semble-t-il cinq ou six autres. Ils ont commencé tous à me

23 frapper. Il y avait des bâtons, ils ont utilisé des bâtons pour me frapper,

24 des cross de fusil. Ils me donnaient des coups de pied. Ils portaient des

25 bottes d'ailleurs, ils me donnaient des coups de pied.

26 Q. Pendant qu'ils vous frappaient, est-ce qu'ils vous ont dit, est-ce

27 qu'ils vous ont expliqué pourquoi ils vous ont réservé ce traitement ?

28 R. D'abord, ils ont demandé qui est Salem Cerenic. En fait, ils m'ont

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1 demandé, ensuite, ils m'ont appelé l'habitant de Kiseljak parce qu'ils ont

2 reçu une information selon laquelle j'ai été au front autour de Kiseljak en

3 tant que membre de l'ABiH. Tout cela était accompagné de différentes

4 insultes, en injuriant ma mère de balija, comment se faisait-il que vous ne

5 soyez toujours par mort, tué par eux, et cetera.

6 Q. Pendant combien de temps avez-vous été battu ?

7 R. D'abord, la première -- les premiers--.

8 Q. Oui, pendant combien de temps cela a duré ?

9 R. Presque une heure. Il y en avait sept, ils -- lorsque l'un d'entre eux

10 était fatigué, le deuxième reprenait, cela a duré une heure. J'ai perdu

11 deux dents. Ensuite, j'ai eu des cotes cassées à cette occasion-là.

12 Q. Avez-vous eu d'autres blessures, exception faite de ces deux dents

13 arrachées et des cotes brisées, cassées ?

14 R. J'avais des blessures sur le visage, blessures visibles et j'ai eu des

15 ecchymoses sur le visage, des bleus. Vous pouvez imaginer l'aspect de

16 quelqu'un qui a été battu pendant ce temps-là par six ou sept hommes qui

17 ont utilisé des bâtons, des crosses de fusil, et qui m'ont donné de coups

18 de pied, coups-de-poing, et cetera.

19 Q. Je vous prie de vous rappeler le fait que les Juges ne savaient pas ce

20 qui vous est arrivé. Moi et vous, nous avons parlé de cela, mais le Juge

21 devrait entendre de votre bouche ce qui s'est passé.

22 Pendant qu'ils vous frappaient, dites-nous si vous avez eu des blessures

23 sur la tête.

24 R. Oui. Après les radios ont montré cela, c'est-à-dire que j'ai eu -- je

25 ne me souviens pas de terme médical. Le crâne a été fissuré à quelques

26 endroits, et même aujourd'hui, j'ai des séquelles de cela. J'ai des

27 migraines, la colonne cervicale a été endommagée également, parfois j'ai

28 mail dans cette partie de la colonne vertébrale même aujourd'hui.

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1 Q. Quand ils ont cessé de vous frapper, vous souvenez-vous si vous étiez

2 conscient ou pas ?

3 R. Je ne peux pas vous dire avec certitude dans quelle mesure j'ai été

4 conscient, mais je me souviens, qu'à quatre pattes je me suis approché de

5 l'endroit où j'étais censé être assis. Ce passage à tabac a lieu dans la

6 salle, et après, à quatre pattes, je me suis approché ou peut-être l'un de

7 mes collègues m'a aidé à rentrer à l'endroit qui était près du mur où nous

8 étions assis.

9 Q. Dites-nous si vous étiez la seule personne qui a été frappé ce premier

10 jour.

11 R. J'ai déjà mentionné Ibro Likic qui était allongé au milieu de la salle

12 couverte de bleus, et ils ont appelé les gens par leurs noms. Il avait

13 trois ou quatre hommes qui étaient Albanais et ils ont dit : "Siptari,

14 sortez." J'ai vu que ces Albanais ont été battus Nalic également, il vit

15 aujourd'hui à Vares. Moi-même et Ibro Likic, nous avons été battus, et nous

16 avons pu entendre qu'ils étaient en train de battre d'autres personnes, non

17 seulement ceux-ci que j'ai mentionnés.

18 Q. Connaissiez-vous l'une de ces personnes qui vous ont frappé ?

19 R. Non.

20 Q. Est-ce qu'on vous a apporté l'assistance médicale après ce passage à

21 tabac et pour soigner vos blessures, ou est-ce que vous avez demandé à ce

22 qu'on vous aide ?

23 R. Non, je n'ai rien reçu. Je n'ai pas reçu d'aide médicale.

24 Q. Pendant combien de temps vous avez été gardé dans cette salle de gym

25 dans cette école secondaire ? Combien de jours ?

26 R. J'ai été là pendant cinq ou six jours, je pense, moi et un autre groupe

27 de personne, après quoi ils ont fait un tri. Ils ont séparé les hommes

28 aptes à porter les armes dans la salle de l'école élémentaire Vladimir

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1 Nazor à Vares. Dans la salle de gym de l'école secondaire étaient restées

2 les personnes âgées et les malades, et nous, à savoir les hommes aptes à

3 porter les armes, avons été emmenés à l'école élémentaire qui à l'époque

4 s'appelait Vladimir Nazor.

5 Q. Pouvez-vous nous dire quel était le nombre approximatif d'hommes qui

6 ont été emmenés à l'école secondaire, à l'école de Nazor, et quel était le

7 nombre, qui ont été restés à l'école secondaire ?

8 R. Plus de la moitié ont été donc emmenés à l'école primaire. Peut-être

9 entre 160 et 170 d'entre nous ont été emmenés à l'école élémentaire et les

10 autres étaient restés dans la salle de gym de l'école secondaire.

11 Q. Avant d'aborder l'école secondaire dont vous avez parlé où -- dites-

12 nous, d'abord pendant ces cinq ou six jours, pendant lesquels vous avez été

13 gardé à l'école secondaire, quelles étaient les conditions de vie ? Aviez-

14 vous de l'eau potable, de l'eau pour vous laver ? Avez-vous reçu de la

15 nourriture ? Est-ce qu'il y avait des toilettes là-bas ?

16 R. Non. Rien de tout cela. Nous avions parfois lorsqu'ils étaient de bonne

17 humeur ils nous permettaient pendant une dizaine de secondes d'aller aux

18 toilettes, par exemple. Quant à la nourriture, il me semble que pendant

19 quelques -- pendant les deux premiers jours, de la Croix-Rouge municipale,

20 les gens étaient arrivés pour nous apporter de la nourriture, mais après

21 ces deux premiers jours, il n'y avait pas de nourriture. Pour ce qui est de

22 la salle même, nous étions couchés sur les paillassons. Ce sont les

23 paillassons qui étaient dans la salle de toute façon, mais il n'avait pas

24 assez de paillassons pour tout le monde, donc, il y en avait qui devait

25 être couché sur le parquet de la salle de gym.

26 Q. C'était à la mi-octobre. Quelle était la météo, quel était le temps à

27 l'époque ?

28 R. Vares c'est une ville où il fait froid en général et au mois d'août

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1 même il faisait froid, et en octobre, il faisait vraiment froid.

2 Q. Passons maintenant à l'école -- à l'autre école, à la deuxième école où

3 vous avez été emmené. Pouvez-vous nous dire ce qu'il vous est arrivé

4 lorsque vous avez été emmené ? D'abord, avez-vous été battu dans cette

5 autre école ?

6 R. Oui. Un peu moins, c'est-à-dire moins fréquemment que dans la première

7 école. Dans la première école je recevais entre cinq et six fois de

8 tortures et dans l'autre école peut-être que c'était une ou deux fois par

9 jour que j'ai été battu. Donc, ce n'était pas la même fréquence.

10 Q. Pendant combien de temps avez-vous été gardé dans la deuxième école ?

11 R. Je ne sais pas pendant combien de temps nous avons été gardé dans cette

12 deuxième école parce que nous avons été à deux ou trois endroits à

13 l'intérieur du bâtiment de l'école. Nous avons été

14 -- nous nous essayons de nous cacher, en fait, à de différents locaux --

15 deux ou trois différents locaux à l'intérieur du bâtiment même de l'école.

16 Q. Pouvez-vous nous dire pourquoi ils nous ont cachés ? Quel était

17 l'objectif de tout cela de vous cacher à deux ou trois différents endroits

18 à l'école ?

19 R. Je pense que la raison principale était pour que les représentants de

20 la Croix-Rouge internationale ne nous voient pas, parce que ces

21 représentants étaient venus pour enregistrer les détenus et comme nous

22 étions un groupe qui comptait entre 25 et 27 hommes qui ont été vraiment

23 beaucoup battus et avaient des blessures visibles, ils nous ont cachés pour

24 que les représentants de la Croix-Rouge internationale ne nous voient pas,

25 et parfois, ils disaient que les représentants de la FORPRONU y venaient

26 pour voir les détenus.

27 Q. Ce groupe de personnes pour lequel vous dites qu'ils ont été passés à

28 tabac, et qui avaient des blessures visibles, quels étaient là, à peu près,

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1 des hommes faisant partie de ce groupe ? Est-ce qu'il y avait des jeunes ou

2 des personnes âgées ?

3 R. C'étaient les personnes entre 20 et 45 -- et 35 ou plus 40 ans, mais

4 nous étions tous aptes à porter les armes.

5 Q. Vous nous avez dit que vous avez été passé à tabac dans cet autre

6 endroit, mais que ce n'était pas aussi fréquent donc dans la première

7 école. Est-ce que vous avez subi des blessures dans cette deuxième -- dans

8 ce deuxième endroit ?

9 R. J'ai -- encore une fois, je répète que j'ai beaucoup de cotes brisées

10 peut-être des os fêlés et des dents m'ont été arrachées en Bosnie. On

11 compare cet état parfois en un panneau en -- osier. Je ressemblais à cela,

12 en fait.

13 Q. Je vous ai posé des questions par rapport à vos conditions de vie dans

14 la première école. Pouvez-vous nous dire si les conditions de vie dans la

15 deuxième école -- dans ce deuxième endroit, étaient meilleures ? Pouvez-

16 vous nous décrire les conditions qui prévalaient dans cette deuxième école

17 par rapport à la nourriture, à l'eau, aux toilettes, au lit peut-être ou au

18 linge de lit dans cette école de Nazor -- Vladimir Nazor ?

19 R. Non, les conditions étaient les mêmes enfin pas -- étaient les mêmes.

20 Q. Est-ce que pendant que vous étiez là-bas vous avez reçu de la

21 nourriture à un moment donné -- pendant que vous étiez là-bas ?

22 R. Je ne suis pas en mesure de m'en souvenir.

23 Q. Pour ce qui est des toilettes, est-ce qu'on vous permettait d'aller aux

24 toilettes ?

25 R. Je ne me souviens pas d'être sorti de cette école élémentaire Vladimir

26 Nazor parce que pour ce qui est de ce groupe dont je faisais partie et ce

27 groupe de 27 personnes, tout à l'heure, j'ai dit qu'ils nous ont -- ils

28 nous forçaient donc d'aller d'un endroit à l'autre dans le même bâtiment de

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1 cette école, mais je ne me souviens pas d'être sorti à un moment donné pour

2 aller aux toilettes.

3 Q. Mais avez-vous -- est-ce qu'on vous a donné des matelas ou des draps ?

4 R. Non, non, pas du tout. Nous n'avions même pas de couvertures.

5 Q. Pendant combien de temps êtes-vous resté dans cette deuxième école ?

6 R. A l'école élémentaire, dans la salle de gym, je suis resté, me semble-

7 t-il deux jours après quoi on a été transféré de cette salle à la hâte. En

8 nous insultant au troisième étage de l'école élémentaire dans une salle de

9 classe -- dans cette salle de classe, je ne peux pas vous dire avec

10 exactitude combien de temps j'y suis resté mais je sais avec certitude que

11 je suis resté une nuit ou plutôt deux nuits.

12 Dans cette salle de classe où nous étions, vous savez certainement quel est

13 l'aspect d'une salle de classe ? Il y a des pupitres et des chaises et donc

14 nous sommes restés dans cette salle de classe une nuit et après quoi on

15 nous a emmené -- au sous-sol, aux locaux de chauffage où se trouvaient les

16 chaudrons, où le système de chauffage de l'école et en passant par une

17 porte, nous avons été emmenés à l'extérieur de l'école.

18 L'église catholique se trouve près de l'école -- à côté de l'école et nous

19 nous trouvions dans la cour de l'église. Ils nous ont forcés d'aller devant

20 l'église, devant l'église j'ai vu deux véhicules à bord desquels --

21 Q. Je vais vous arrêter là. Vous souvenez-vous de la date à laquelle cela

22 s'est passé, à savoir lorsqu'on vous a emmené par la force de l'école

23 élémentaire à la cour de l'église ?

24 R. Je ne me souviens pas de la date. Je peux peut-être maintenant me

25 souvenir approximativement. Si j'y suis resté cinq ou six jours à l'école,

26 et encore deux jours dans l'école élémentaire, bon, cela fait neuf ou dix

27 jours au total.

28 Q. Donc, cela veut dire dix jours, neuf ou dix jours en détention avant

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1 que vous n'ayez été transféré dans la cour de l'église ?

2 R. Nous n'étions pas amener à l'église. Nous étions -- on nous a donc

3 emmenés devant l'église, devant l'entrée de l'église. Il y avait deux

4 véhicules, il y avait un camion du type TAM et un mini car, après quoi on

5 nous a fait monter à bord de ces deux véhicules pour être transférés en une

6 troisième, une quatrième, ou une cinquième localité.

7 Q. Est-ce que cela est arrivé pendant la journée ou la nuit ?

8 R. Pendant la nuit.

9 Q. Cette troisième localité à laquelle vous avez été amenée, pouvez-vous

10 nous dire où se trouvait cette localité et ce que c'était ?

11 R. A bord de ces camions, nous avons été transférés à Majdan, et nous ne

12 savions pas où nous allions. Vares-Majdan est une banlieue de la ville de

13 Vares qui se trouve à trois kilomètres de la ville de Vares. Ils nous -- on

14 nous a emmené devant un bâtiment. Il s'agissait d'un bâtiment -- d'un vieux

15 bâtiment où se trouvait -- pas -- enfin, autrefois une école pour qui --

16 industrielle et c'est le rez-de-chaussée de cette école qui avait été déjà

17 transformé en prison -- une sorte de prison. Il y avait des cellules.

18 J'allais dire par là cellules, donc, ces pièces.

19 Q. Quel était le nombre de personnes qui ont été mis dans ces pièces ou

20 dans ces cellules ?

21 R. Au troisième étage, nous étions entre 25 à 27, plutôt 27. Ce groupe qui

22 a été mis au troisième étage --

23 Q. Y avait-il d'autres prisonniers à ce troisième endroit lorsque vous

24 êtes arrivés ?

25 R. Non.

26 Q. Y avait-il des gardes dans le bâtiment au moment où vous êtes arrivés ?

27 R. Oui. Ils étaient déjà là.

28 Q. Connaissiez-vous l'un d'entre eux ?

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1 R. Je connaissais quelques-uns de ces gardes. Il s'agissait des membres du

2 HVO de la Brigade de Vares Bobovac, et il me semble que donc j'ai vu

3 quelques membres de leur police militaire.

4 Q. Qu'est-il arrivé pendant que vous étiez détenus là-bas, gardés là-bas ?

5 R. Nous étions disposés en deux cellules. Dans une cellule, il y avait la

6 moitié du groupe et dans l'autre, l'autre moitié. Dans ces deux cellules,

7 on allait pour creuser des tranchées. Certains d'entre ces détenus. Par

8 exemple, je ne n'étais jamais amené pour aller creuser les tranchées.

9 Q. Avez-vous été frappé, battu -- pendant que vous étiez à ce troisième

10 endroit ?

11 R. Non, parce qu'il s'agissait des membres du HVO locaux.

12 Q. Pendant que vous étiez là-bas, avez-vous reçu des visites ?

13 R. Si vous pensez à mes amis, à mes connaissances, à mes -- à des membres

14 de ma famille, vous pensez à ces gens-là ?

15 Q. Non. Permettez-moi de reformuler ma question. Pendant que vous étiez

16 dans ce bâtiment, quelqu'un est venu pour vous parler; est-ce quelqu'un

17 vous a rendu visite ? Je ne pense pas uniquement à vos connaissances à vos

18 amis ?

19 R. Pour ce qui est de mes amis, mes connaissances, et ma famille, personne

20 ne pouvait me rendre visite. Ils ne savaient même pas où nous étions. A

21 l'occasion, je me souviens que les soldats étaient venus, les soldats qui

22 avaient des couvre-chefs avec des cocardes chetniks là-dessus, il y avait

23 des Chetniks qui venaient officiellement à une occasion.

24 Q. Est-ce qu'ils vous ont parlé lorsqu'ils sont arrivés ?

25 R. Oui, l'un d'entre eux m'a parlé en m'insultant d'une façon comment

26 dirais-je inhumaine. En nous disant que Stupni Do a été rasé. Je ne me

27 souviens pas exactement de l'expression qu'il a utilisée à cette occasion-

28 là, mais en tout cas, il a mentionné Stupni Do, en disant que Stupni Do a

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1 été détruit et la population tuée.

2 Q. A ce moment-là, à savoir en octobre 1993, est-ce que vous savez s'il y

3 avait une coopération entre les Serbes et les Croates de Bosnie dans le

4 cadre du conflit qui opposait donc l'ABiH et -- qui les opposait à l'ABiH

5 et aux Musulmans ?

6 R. Dans la région de Vares, la coopération entre le Conseil de Défense

7 croate et les territoires serbes -- ou plutôt, les Croates -- ou plutôt,

8 Vares était entouré de tous les côtés, d'un côté par les forces serbes et

9 de l'autre côté par l'ABiH. Donc, comment est-ce qu'ils ont conclu cet

10 accord ? Il y avait donc ce corridor qui leur permettait de passer par le

11 territoire serbe et de descendre jusqu'en Croatie. Donc en fait ils avaient

12 des convois pour faire venir les vivres qui étaient nécessaires à la survie

13 de la population dans une ville.

14 Q. Combien de temps avez-vous passé dans ce troisième endroit ?

15 R. Trois ou quatre jours me semble-t-il.

16 Q. Que s'est-il passé donc au bout de trois ou quatre jours ?

17 R. Je sais que cette cellule où nous nous trouvions se trouvait juste près

18 de la route, l'une se trouvait près de la route. Il y avait donc une

19 fenêtre avec des barreaux, nous ne pouvions pas véritablement bien voir par

20 cette fenêtre, mais nous avons entendu des soldats croates qui avaient des

21 haut-parleurs et qui exhortaient la population croate à évacuer, la partie

22 basse de Vares, appelée Vares-Majden. Puis, de passer à partir de Vares par

23 le territoire serbe, comme je l'ai mentionné il y a quelques instants,

24 puis, ceci jusqu'à Kiseljak.

25 Q. Avez-vous été libéré de ce centre de détention ?

26 R. Non, non. Nous avons réussi à nous échapper. Ce tout seul. Nous avons

27 cassé la porte et nous nous somme enfuis.

28 Q. Après cette fuite, où êtes-vous allés ?

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1 R. Lorsque nous avons donc cassé la porte d'entrée et lorsque nous avons

2 réussi à casser la porte de la cellule, au niveau de la porte d'entrée, il

3 y avait une porte en fer. Nous avons trouvé une clé, tous les gardes du HVO

4 s'étaient échappés. Ils étaient allés voir ce qu'il était advenu de leurs

5 familles. Donc, nous avons trouvé la clé, nous avons réussi à partir vers

6 la route, à un moment donné nous avons vu la FORPRONU, un véhicule de

7 transport de troupes qui appartenait à la FORPRONU. Nous avons commencé à

8 leur faire des signes à gesticuler, en utilisant le langage des signes. Ils

9 nous ont fait monter, ils ont appelé deux ou trois autres véhicules de

10 troupes et c'est ainsi qu'ils nous ont transportés jusqu'à Vares.

11 Q. Cela donc a marqué la fin de votre épreuve, en détention ?

12 R. Lorsque je suis arrivé à Vares dans l'école élémentaire Vladimir Nazor,

13 j'ai vu qu'il y avait des gens de Vares là. Il y avait des personnes qui se

14 trouvaient là, l'école était gardée par des soldats de la FORPRONU. Je veux

15 dire que je me suis senti tout à fait en sécurité là-bas.

16 Q. Est-ce que vous avez pu reprendre immédiatement après votre -- après le

17 fait que vous avez réussi à vous retrouver en liberté, est-ce que vous avez

18 repris votre service régulier auprès de votre Unité de l'ABiH ?

19 R. Non, non, je ne pourrais pas le faire. J'ai mentionné, il y a quelques

20 instants de cela, que j'avais été tellement roué de coups que j'avais de si

21 nombreuses fractures que j'ai quand même passé plusieurs mois à être

22 traité. Ensuite, je ne suis pas -- je n'ai pas réintégré mon unité, ils

23 m'ont aidé. Ils m'ont fait un travail, ils m'ont proposé un travail, ce

24 travail que j'ai toujours d'ailleurs aujourd'hui.

25 Q. Est-ce que ce traitement donc dont vous parlez a été organisé à présent

26 l'ABiH ?

27 R. Est-ce que vous pourriez répéter cette question, je vous prie ?

28 Q. Ce traitement médical pour vos blessures, est-ce que c'est l'ABiH qui

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1 avait pris ces dispositions pour vous, pour ce traitement ou c'est vous-

2 même qui avez organisé d'une façon indépendante ?

3 R. Cela s'est passé au dispensaire local de Vares, au centre médical,

4 c'est là que j'ai été traité par des médecins.

5 M. FLYNN : [interprétation] Je souhaiterais pouvoir disposer de l'aide de

6 M. l'Huissier, car je souhaiterais montrer au témoin un jeu de pièces à

7 conviction.

8 Q. Monsieur Cerenic, je souhaiterais que vous preniez la première pièce à

9 conviction, la pièce 06042, qui existe en anglais et en bosnien. Je pense

10 qu'il va falloir que vous tourniez quelque huit à neuf pages pour trouver

11 la version dans votre langue.

12 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, devons-nous passer du

13 temps à montrer ce document. Je ne peux pas m'exprimer quant à

14 l'authenticité de ce document, mais ce document ne comporte ni cachet, ni

15 signature, ni numéro. On ne sait pas qui a compilé le document, qui l'a

16 préparé ? Pour ce qui est des documents médicaux qui sont présentés en

17 annexe au document, pour ce qui est de certaines parties du document, là,

18 je ne vois pas véritablement qu'il y a des blessures qui auraient trait à

19 la torture dont -- auraient fait les frais. Le témoin -- parce que je vois

20 qu'on parle d'un examen ophtalmologique avec sans traumatisme, dans un

21 autre cas, il est question d'un syndrome borderline qui est mentionné.

22 D'après les quelques connaissances que j'ai cela n'a rien à voir avec cela.

23 Il s'agit d'un état psychologique qui aurait pu exister auparavant, et que

24 je soulève cette objection car j'ai quelque difficulté à évaluer

25 l'authenticité dudit document qui ne comporte aucun des éléments

26 nécessaires pour être versé au dossier ou être admis comme élément de

27 preuve. Alors --

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Flynn, je pense que vous allez répondre à

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1 l'objection.

2 M. FLYNN : [interprétation] Très brièvement, Monsieur le Président. Je

3 comprends bien qu'il n'y a pas de signature pour certains des documents,

4 mais j'aimerais peut-être attirer votre attention sur le document qui se

5 trouve au début du jeu des documents en langue bosnienne. Là, vous voyez

6 qu'il y a une photocopie des cachets, et je peux vous dire que ce document

7 nous a été présenté par les autorités bosniennes et j'allais tout

8 simplement demandé ou posé au témoin quelques questions brèves afin de voir

9 si les conclusions des différents spécialistes qui sont mentionnés dans le

10 rapport médical correspondaient aux blessures qu'il a décrites à notre

11 intention.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

13 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai déjà

14 dit, je n'ai aucune objection à ce que le témoin puisse répondre aux

15 questions portant sur les dossiers médicaux et son nom est mentionné. Mais

16 là, je vous parle d'un aspecte technique, ces documents ont été présentés

17 avec un autre document et nous ne savons rien sur ce premier document de

18 base, qui, quand, comment, pourquoi, et cetera, et cetera. Si le Procureur

19 veut faire usage des documents médicaux à propos de ce témoin, certes, mais

20 il y a d'autres documents qui n'ont rien à voir avec le témoin. Alors, pour

21 ce qui est de ce témoin et le document visant ce témoin, nous n'avons

22 aucune objection. Bien sûr que le témoin peut dire : "Oui, je suis allé

23 voir le médecin ce jour-là," mais il ne peut rien dire à propos des autres

24 témoins, et il ne peut pas non plus parler du document. D'ailleurs,

25 personne ne peut rien confirmer à propos de ce document parce qu'à la page

26 2, nous voyons la table des matières, donc, visiblement, cela fait partie

27 d'un autre document, mais cela nous ne pouvons absolument pas le vérifier.

28 Donc, c'est une quantité tout à fait -- c'est tout à fait inconnu. Puis à

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1 la page 3 nous voyons une description des événements mais nous ne voyons

2 pas qui, quoi, comment pourquoi, et puis à la page 4, nous voyons qu'il

3 s'agit d'un document médical ou deux documents médicaux présentés en

4 annexe, donc, vous pouvez poser des questions à ce témoin à propos des

5 documents médicaux présentés en annexe et en ce qui me concerne, il n'y a

6 absolument pas à propos d'autres personnes.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le document, la première page c'est une

8 synthèse qui fait trois lignes; la deuxième page, c'est un sommaire,

9 description d'événements, une page; documentation médicale, 19 pages; carte

10 d'identification de la Croix-Rouge, 37 pages; déclaration de personnes

11 détenues, 418 pages - que je n'ai pas, bien entendu. Je n'ai pas les 37

12 pages concernant les cartes d'identification et je ne sais pas d'où vient

13 ce document. Alors, pouvez-vous nous éclairer ?

14 M. FLYNN : [interprétation] Tout ce que je peux faire pour le moment,

15 Monsieur le Président, et c'est l'un des documents que je vais présenter

16 comme pièce à conviction, alors, je disais donc que tout ce que je peux

17 vous dire pour le moment c'est que le bureau du Procureur a obtenu ces

18 documents auprès des autorités de la Bosnie, et ce il y a quelques années.

19 Vous verrez, si vous examinez le document, qu'il trouve des -- qu'il y a

20 des photocopies de différents récépissés, qu'il y a différents diagnostics

21 --

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

23 M. FLYNN : [interprétation] -- des certificats. Bien entendu, il va falloir

24 évaluer ou les Juges vont devoir évaluer la valeur du document. Je pourrais

25 peut-être revenir sur le premier document pertinent.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre, qui a délibéré, estime que vous pouvez

28 continuer à poser vos questions et nous verra après -- sur les éléments

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1 médicaux. Voilà. La Chambre souhaite que vous posiez des questions

2 uniquement sur les éléments médicaux parce qu'il y a des cachets, des

3 tampons, des signatures, des noms. Voilà. Alors, sans porter atteinte au

4 travail de l'Accusation la Chambre est d'avis que vous deviez poser vos

5 questions sur les éléments médicaux respectant votre travail que --

6 M. FLYNN : [interprétation] C'était mon intention, Monsieur le Président,

7 et de toute façon, je ne vais pas passer trop de temps à étudier cet

8 aspect.

9 Q. Monsieur Cerenic, il y a beaucoup de documents donc dans ce jeu de

10 documents. J'aimerais attirer votre attention sur la version bosnienne, en

11 bas de la page, vous verrez qu'il y a un très long numéro qui commence par

12 0031, et je vous demanderais de prendre la page 00315983, et il s'agit de

13 la page 6 de la version anglaise.

14 Vous nous avez dit que lorsque vous étiez en détention ce premier jour, que

15 vous avez été frappé à la poitrine par ce soldat du HVO et que vous avez

16 également subi d'autres blessures. Nous avons maintenant ce qui semblerait

17 être un document médical où il est fait référence à un diagnostic établi

18 pour traumatisme à la tête. Alors, est-ce qu'il y avait donc -- est-ce que

19 vous avez eu donc une blessure à la tête, et est-ce que vous avez été

20 soigné par des médecins ? Après donc que vous avez échappé à la détention,

21 est-ce que vous avez été traité par des médecins pour ces blessures ?

22 R. Bien, j'ai dit que j'avais été roué de coups partout. Pour ce qui est

23 de la tête, c'est exact. C'est ce que j'ai dit, et j'ai dit que j'avais eu

24 des fractures au niveau de la tête. C'est ce que j'ai dit.

25 M. KOVACIC : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, mais je

26 dois dire que ce document n'a pas tellement de valeur.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous savez, tout l'intérêt que je porte à ce que

28 vous dites, je reviens à la semaine dernière. Vous savez que tout le

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1 problème est venu parce que vous avez fait des objections de la façon que

2 le Procureur posait des questions de travailler.

3 Vous avez mis donc la Chambre dans l'obligation d'intervenir. Nous

4 vous avons déjà dit que vous pouvez faire des objections, poser vos

5 questions dans le cadre du contre-interrogatoire, donc, au contre-

6 interrogatoire vous pouvez dire au témoin : "Voilà, il y a un document, il

7 n'y a pas de signature, il n'y a pas de nom. Qu'est-ce que vous en dites ?"

8 Parce que, là, après, le Procureur va nous reprocher de l'empêcher de

9 travailler. Si vous passez votre temps à faire des objections à ce que dit

10 le Procureur, on va se trouver dans la situation de la semaine dernière.

11 Les Juges ont compris. Nous avons vu dans ces documents qu'il y a des

12 documents, la première page on ne sait pas d'où cela vient. J'ai constaté

13 également, je ne l'ai pas dit, mais je peux vous le dire qu'il y a des

14 documents où, manifestement, ils ont été -- plusieurs documents médicaux

15 ont été photocopiés les uns sur les autres, ne serait-ce que le 315984, on

16 s'aperçoit qu'il y a des photocopies. Bien. Donc, les Juges ont fait leur

17 confiance. On est capable, nous, de faire -- enfin, personnellement, je

18 suis capable de faire cette distinction, de voir si le document est fiable

19 ou s'il ne l'est pas fiable, et cetera. Donc, vous pouvez faire des

20 objections; j'ai tout mon temps. Si vous voulez, on peut y passer des

21 heures, mais est-ce bien l'intérêt de tout le monde ?

22 M. KOVACIC : [interprétation] Je suis d'accord. Je suis d'accord. Mais pour

23 commencer avec ce problème de temps -- cette lutte pour le temps, cela ne

24 sert à rien de perdre du temps à étudier un document que vous n'allez

25 probablement pas admettre comme élément de preuve demain. Puis, il y a une

26 des parties qui va présenter des objections puis il faudra encore beaucoup

27 plus de temps pour régler le problème. Je vais juste prendre l'exemple de

28 ce document et je ne veux pas parler des autres documents médicaux.

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1 Car voyons la date du document, il semblerait qu'il ait été compilé

2 le 15 mai 1994, à savoir sept mois plus tard. Nous voyons le diagnostic

3 établi, et là, on voit post commotion cérébrale. Alors, c'est écrit en

4 latin. Nous connaissons tous le latin, nous savons ce que cela signifie en

5 latin. Donc, voilà : contusion capitus. Bien, nous savons donc que dix, 20

6 jours, un mois après la blessure, on peut voir cela, mais sept mois après,

7 il n'y a pas de traces médicales visibles de contusion capitus, alors, je

8 ne sais pas si, pour ce qui est des autres données médicales, c'est exact.

9 Mais la minute où il y est question de contusion capitus, et puis ensuite,

10 le médecin poursuit en disant que la personne a souffert de traumatisme, ce

11 que je crois, mais cela on ne peut pas le voir à la lecture de ce document

12 médical, donc, je vous propose cela pour faire l'économie d'une minute ou

13 deux, bien que je vienne de parler pendant cinq minutes, mais cela va être

14 un gain de temps à l'avenir que cela n'a aucun sens.

15 M. FLYNN : [interprétation] Je n'ai pas perdu le temps. J'allais tout

16 simplement montrer les documents et il appartient à la Chambre de première

17 instance de les évaluer. Si vous voulez présenter une objection, et bien

18 présentez votre objection par écrit et cela aura beaucoup plus de poids en

19 plus.

20 Q. Donc, Monsieur, j'étais en train de vous demander si vous aviez

21 souffert de blessures à la tête ?

22 R. Oui, oui.

23 Q. Est-ce que vous avez été -- est-ce que vous avez fait l'objet d'un

24 traitement médical pour ces blessures ?

25 R. Il ne s'agissait pas d'un traitement adéquat. J'ai été examiné, et pour

26 ce qui est de traitement médical adéquat, pas véritablement parce que je

27 n'ai pas les fonds nécessaires pour pouvoir bénéficier du traitement

28 médical dont j'ai besoin, même de nos jours d'ailleurs. Pour ce qui est de

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1 mes maux de tête, j'ai des maux de tête, des maux de nuque et j'ai mal au

2 dos.

3 Q. Si vous prenez le document suivant et -- les deux documents suivants,

4 vous voyez qu'il y a une référence à des ecchymoses à la poitrine, et est-

5 ce que vous avez pu bénéficier d'un traitement médical pour ces ecchymoses

6 à la poitrine ?

7 R. Oui. Cela a trait à ce que j'avais déjà mentionné. Les cotes cassées,

8 donc, les différentes fractures voilà ce genre de chose.

9 Q. C'est tout ce que je voulais vous poser comme question à ce sujet.

10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous n'allez plus aborder ces

11 documents, Monsieur Flynn ?

12 M. FLYNN : [interprétation] Non, non, je vais encore -- je voulais juste en

13 examiner un dernier, Monsieur le Juge.

14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bien.

15 M. FLYNN : [interprétation]

16 Q. Le document dont nous avons parlé au début, le document qui a trait à

17 la tête. Mon confrère suggérait que cela a été établi en 1994. Mais quand

18 est-ce que vous avez commencé à être soigné pour cela ?

19 R. Est-ce que vous pourriez répéter la question, je vous prie ?

20 Q. Quand est-ce que vous avez commencé à être soigné pour ces blessures à

21 la tête ? Quand est-ce que cela s'est passé ?

22 R. Dès que -- pas littéralement dès que je suis parti, en fait, un ou deux

23 jours plus tard lorsque le centre médical de Vares a commencé à

24 fonctionner. Bon, j'étais censé il y allé, j'étais censé subir des examens

25 à Zenica également parce qu'à Vares, il ne disposait pas du matériel

26 nécessaire au centre médical. Mais comme je l'ai dit il y a quelques

27 instants, je n'ai toujours pas terminé mon traitement médical pour ce qui

28 est de ma tête et de mes vertèbres cervicales.

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1 Q. Mais les documents que nous avons, en tout cas le document dans sa

2 version anglaise comporte des dates et il est indiqué que les médecins vous

3 ont examiné et -- qu'ils vous ont examiné et qu'ils ont donné leur avis

4 médical inter alia entre le 15 décembre 1994 et le 19 janvier 1994 [comme

5 interprété]; est-ce que cela est exact ? Est-ce que vous êtes allé voir les

6 médecins pendant cette période ?

7 R. Oui.

8 Q. Quand est-ce que vous avez pu reprendre votre travail ?

9 R. Je n'ai pas réintégré l'armée de l'ABiH pour des raisons de santé,

10 comme je vous l'avais expliqué. Maintenant, je ne me souviens pas

11 véritablement quand est-ce que j'ai commencé en 1994, mais j'ai repris le

12 travail en 1994. La présidente de la présidence de Guerre de Vares -- la

13 municipalité de Vares m'a persuadé de reprendre le travail et j'ai commencé

14 donc à travailler en tant qu'économiste dans la municipalité de Vares.

15 M. FLYNN : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser à propos de

16 ce document, donc, je vais passer à autre chose.

17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, oui. Je vous remercie.

18 J'aimerais poser une question au témoin.

19 Est-ce que vous aviez déjà vu auparavant ces dossiers médicaux, ces

20 documents médicaux ? Oui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ce sont mes documents.

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous, vous les aviez obtenus

23 personnellement ces documents ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est exact. Oui, oui,

25 personnellement.

26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

27 M. FLYNN : [interprétation]

28 Q. Et --

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1 R. Je peux vous dire que je dispose des documents originaux chez moi. Ils

2 se trouvent tous chez moi ces documents.

3 Q. Simplement comme un suivi --

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les besoins du transcript - parce que je fais

5 mon travail de Juge - c'est en grande partie pour les uns ou pour les

6 autres, mais je constate que le document 315983 qui apparemment est le

7 document qui le concerne lui. Quand je regarde le bas de la page, je vois

8 dans la version B/C/S un tampon qui est à moitié, à moitié caché. Donc, un

9 spécialiste, un Juge moyen va tout de suite se poser la question de savoir

10 si ce document, que nous avons eu en photocopie, n'est pas une photocopie

11 de deux documents ?

12 Alors, vous voyez le problème que j'ai, moi. Je vois cela. Je me pose la

13 question, donc, je peux poser la question au témoin. Bien.

14 Monsieur le Témoin, vous avez suivi ce que je viens de dire. Est-ce

15 que vous êtes sûr que c'est un document, et que je peux poser la question

16 au témoin ?

17 [hors micro]

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux vous donner une

19 explication ? Je suis sûr qu'il s'agit d'un seul et même document. Je peux

20 vous expliquer comment cela s'est produit ou comment il se trouve que vous

21 voyez cela sur deux ou trois feuilles de papier. Vous pouvez voir deux

22 cachets. Vous voulez que je vous donne l'explication ?

23 Comme vous le voyez, il s'agit de feuilles de papier qui ne sont pas très

24 grandes et j'ai mis en fait ces petites feuilles de papier sur une grande

25 feuille lorsque je l'ai photocopié. J'ai vu -- j'ai mis donc j'ai placé

26 plusieurs papiers sur la photocopieuse pour pouvoir les photocopier en même

27 temps.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur, est-il exact que le

2 document qui se trouve en dessous est le document qui se trouve en dessous

3 est le document qui se trouve à la page 00315980 ? Parce que si je vois ce

4 que nous avons en bas des autres documents, il semblerait que c'est

5 toujours ce que l'on voie sur le document de l'ophtalmologue, celui qui a

6 examiné donc vos yeux.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément ce que je voulais vous dire.

8 Si vous regardez le bas des documents, il s'agit des conclusions que l'on a

9 eues avant les autres documents --

10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, oui.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

12 M. FLYNN : [interprétation] Juste une question de suivi, une question de

13 suivi à la suite de la question posée par Monsieur le Juge.

14 Q. Est-ce que vous vous souvenez qui vous a donné ces documents ? A qui

15 vous avez donné ces documents ? Est-ce que vous les avez ces documents au

16 bureau du Procureur, ou est-ce que vous lez aviez donné ces documents aux

17 autorités de l'ABiH ? Est-ce que vous vous en souvenez de cela ? Est-ce que

18 vous vous souvenez à qui vous avez transmis et remis ces documents ?

19 R. Je pense que je les ai donnés au bureau du Procureur. Je parle des

20 photocopies; ils étaient déjà photocopiés.

21 Q. C'est vous qui avez fait les photocopies; c'est cela ?

22 R. Oui, je pense que j'ai donné les photocopies.

23 M. MURPHY : [interprétation] Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Murphy.

25 M. MURPHY : [interprétation] -- alors, dans la mesure où cela a une

26 importance - et je ne sais pas si cela a une importance - mais si cela est

27 une source de préoccupation pour vous, Messieurs les Juges, d'après ce que

28 dit le témoin, il serait facile d'avoir ces documents. Je sais qu'aux pages

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1 54 et 55 du compte rendu d'audience, Me Kovacic avait soulevé une question

2 à propos de l'authenticité des documents en annexe. M. Flynn avait dit que

3 c'étaient des documents qui avaient été obtenus de la part des autorités de

4 la Bosnie. Mais, maintenant, il semblerait qu'ils ont été remis par le

5 témoin, donc, si le témoin a les documents originaux, je pense qu'il serait

6 possible des envoyer par fax pour que nous puissions régler ce problème.

7 M. FLYNN : [interprétation] Je vais faire de mon possible pour élucider

8 cette question. Notre commis aux audiences nous dit que pour le moment le

9 dossier montre que les documents étaient obtenus en 1995 et que c'est le

10 ministère de l'Intérieur de l'ABiH qui a fourni cela par le truchement des

11 services de la Sûreté d'état à Visoko. Donc, il y a tout un dossier portant

12 sur les événements qui se sont déroulés à Vares en date du 23 octobre 1993.

13 C'est tout ce que je peux vous dire pour le moment, bien entendu.

14 Mais je vais essayer d'éclaircir cette question.

15 Q. Monsieur Cerenic, alors, nous allons poursuivre. A la suite de votre

16 épreuve en détention, est-ce que vous avez formé avec d'autres une

17 association d'anciens prisonniers ou de personnes qui avaient été détenus

18 en ces centres de détention ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce que vous étiez un membre officiel ou un représentant officiel de

21 cette association ?

22 R. Dès le début, j'ai été le président de cette association.

23 Q. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges très brièvement quel était

24 l'objectif de cette association ? Pourquoi est-ce que cette association a

25 été créée ?

26 R. La situation en Bosnie est telle que, pour des groupes organisés, des

27 associations de citoyens, des associations de ce style, des tentatives sont

28 faites pour aider les gens qui se sont retrouvés à la fin de la guerre

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1 invalides, qui étaient vétérans. Il y a des associations qui représentent

2 les personnes détenues dans les camps et un effort a été fait pour les

3 aider à exercer leur droit. Je pense par exemple au droit pour l'assurance

4 médicale.

5 Q. Est-ce que vous avez dressé une liste des personnes qui avaient été

6 détenues dans les centres de détention de Vares à partir du 23 octobre 1993

7 jusqu'à la libération ou la mise en liberté que vous avez décrite ?

8 R. Oui, nous l'avons fait.

9 Q. Quels sont les critères que vous avez utilisés pour compiler cette

10 liste ? Est-ce que vous avez pris comme référence des documents officiels ?

11 R. Les documents qui sont nécessaires pour prouver qu'une personne était

12 détenue dans des camps sont des cartes qui ont été émises par la Croix-

13 Rouge internationale et qui ont été délivrées sur le champ. C'était l'un

14 des critères qui permettait de prouver que quelqu'un avait été détenu dans

15 un camp.

16 Q. J'aimerais maintenant vous demander de prendre la pièce à conviction

17 08850. Il semblerait qu'il y avait une liste de noms qui ont été compilés

18 par l'association des détenus de Vares. A la dernière page, vous voyez

19 qu'il y a un cachet et une signature. Est-ce que vous reconnaissez cette

20 signature dans la version en B/C/S ?

21 R. Oui, il s'agit de ma signature.

22 Q. Cette liste de noms, il y a au total 249 noms dessus, est-ce que c'est

23 bien exact 249 personnes gardées en détention à Vares pendant la période

24 que j'ai mentionnée ?

25 R. Le chiffre est plus grand que cela.

26 Q. Chacune de ces personnes se trouvant sur cette liste a fait-elle

27 l'objet d'un document correspondant du CICR ?

28 R. Je pense que ce n'est pas le cas pour tout le monde.

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1 Q. Mais la liste est-elle précise et dans quelle mesure l'est-elle ?

2 R. La liste est à 100 % précise.

3 Q. Pendant votre témoignage, vous nous avez dit que vous avez été battu et

4 vous avez parlé d'autres personnes qui ont été battues. Puis-je vous

5 demander de vous pencher sur la pièce numéro 6180. L'avez-vous trouvé ? Il

6 s'agit d'un rapport daté du 28 octobre 1993.

7 R. Oui.

8 Q. Cela a été émis par le corps médical du Conseil du HVO, c'est signé par

9 le Dr Drazen Grgic ?

10 R. Grgic.

11 Q. Est-ce que vous le connaissiez, le Dr Drazen Grbic ?

12 R. Oui.

13 Q. Était-ce un officier médical faisant partie du Conseil croate de la

14 Défense à Vares ?

15 R. Probablement que si parce que je l'ai vu dans un uniforme avec des

16 insignes du HVO.

17 Q. L'avez-vous vu --

18 M. FLYNN : [interprétation] Oui, M. Kovacic est debout.

19 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai l'impression

20 qu'il y a une erreur au compte rendu d'audience ou peut-être c'est mon

21 confrère qui l'a dit à tort. Page 67, ligne une, on dit que c'est un

22 document du 28 octobre. Je me réfère au document, c'est la date du 27

23 octobre. Je ne voudrais pas que nous ayons par la suite des difficultés au

24 niveau de l'identification du document en question.

25 M. FLYNN : [interprétation] J'étais en train de me référer à la version

26 bosniaque et on dit le 28 octobre 1993, rapport journalier émanant de la

27 Brigade de Bobovac portant sur les journées du 27 et 28 octobre 1993.

28 M. KOVACIC : [interprétation] Je crains fort que nous ne parlions pas du

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1 même document. Parce que c'est le -- si c'est le 6180, et c'est ce que nous

2 dit le compte rendu d'audience, 6180. C'est un document avec un entête le

3 27 octobre, en première ligne du texte il est dit c'est un rapport

4 quotidien des services sanitaires de la Brigade de Bobovac pour la journée

5 du 26 octobre. Le document lui, est daté du 27 octobre.

6 M. FLYNN : [interprétation] Je m'excuse. Vous avez tout à fait raison. Je

7 m'excuse, je m'étais déjà éloigné vers le document d'après.

8 Q. Dans cette pièce 6180, il y a une lettre de la Brigade de Bobovac,

9 datée du 27 octobre 1993. J'aimerais que vous vous penchiez sur la toute

10 dernière phrase qui dit : "Qu'il y a 251 civils musulmans sous supervision

11 au sein de deux écoles, dont 27 malades, et des personnes âgées qui seront

12 relâchés aujourd'hui," dit-on. C'est signé par le Dr Drazen Grgic. Alors,

13 vous nous avez dit que c'était un officier du corps médical et vous nous

14 avez dit que c'était soit à l'école secondaire soit à l'école primaire que

15 vous avez été gardé à un moment là-bas.

16 R. Je me souviens qu'à l'école secondaire Ivan Goran Kovacic, il était

17 entré une fois pour nous aider, pour enfin à l'intention de nous qui étions

18 dedans, il nous donnait des comprimés ou nous pansait, que sais-je. Je

19 crois que littéralement à coup de pied, les soldats du HVO l'ont fait

20 sortir de la salle. Je ne me souviens pas des termes exacts, alors : "Tu es

21 venu soigner des balija," alors que -- enfin, je ne sais plus.

22 Q. Mais le Dr Grgic a-t-il eu la position de voir le nombre de gens qui se

23 trouvaient dans ces écoles ?

24 R. Oui, il a eu l'occasion de voir.

25 Q. S'agissant du chiffre que vous nous avez donné à l'origine, c'était

26 plus de 251. Alors, Dr Grgic parle de 251 civils musulmans, c'est plus ou

27 moins les chiffres que vous avez évoqués vous-même ?

28 R. Oui. Nous étions plus que cela.

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1 Q. Le Dr Grgic a-t-il été en situation de voir que les gens gardés là-bas

2 avaient été frappés ?

3 R. Oui. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure c'était dans cette intention

4 qu'il était venu nous voir, pour nous aider, j'avais à l'esprit des examens

5 médicaux, quand je dis nous aider.

6 Q. J'aimerais que vous vous référiez maintenant à la pièce suivante, 6201

7 --

8 M. LE JUGE ANTONETTI : -- plus de ce document, le 6180 ? C'est fini --

9 M. FLYNN : [interprétation] Oui, c'est fini. Je parle -- je vais passer à

10 l'autre le 6201.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : -- j'appelle votre attention quand j'ai comparé la

12 version B/C/S et la version anglaise, comme ici, il y a beaucoup de

13 problèmes de traduction, il vaut mieux être prudent parce que si ce

14 document est admis. Quand je regarde la version anglaise, je me rends

15 compte qu'il est indiqué qu'il n'y a pas donc de rapport sur les civils

16 croates qui ont été blessés et que le commandant de la brigade a informé le

17 corps médical qu'il y avait 25 membres du MOS, il y a une barre, un

18 virgule, et 20 civils qui ont été tués dans la bataille de Stupni Do, alors

19 que dans le texte en B/C/S, on voit qu'il y a le mot, "I," qui veut peut-

20 être dire "et" [comme interprété], cela je ne le sais pas. Ma question est

21 de savoir - et je vous interroge, Monsieur Flynn : ces 25 membres du MOS et

22 20 civils, ce qui ferait 45 personnes qui ont été tuées. Je ne comprends

23 pas très bien le texte.

24 M. FLYNN : [interprétation] Je ne suis pas en mesure de vous aider sur ce

25 point, Monsieur le Président, parce que ce document ne fait pas état à

26 cette partie ou ne concerne pas cette partie parce qu'il est présenté juste

27 pour cette dernière phrase qui vient confirmer la présence de ces civils

28 musulmans sous supervision dans les deux écoles.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Monsieur Scott, vous -- Monsieur Scott. Je pense

2 qu'à M. Scott, mais au travers vous, c'est M. Flynn. Vous venez de dire que

3 votre interrogatoire s'est fondé sur la dernière phrase, très bien, mais

4 quand nous, les Juges, nous auront à délibérer dans plusieurs mois -- dans

5 plusieurs années, je ne sais pas, on va regarder ce document, et ce

6 document, qui sera admis peut-être - je ne sais pas - mentionne avant les

7 251 civils musulmans, qu'il y aurait 25 membres du MOS et 20 civils qui

8 auraient été tués. Voilà c'est d'où est l'interrogation.

9 M. FLYNN : [interprétation] Le point où je voulais en venir, Monsieur le

10 Président - et cela va dans le sens de ce que M. Scott disait aujourd'hui -

11 il y a des questions que nous ne posons parce que nous savons que le témoin

12 ne s'est pas répondre à elle. Le témoin n'a pas été interrogé pour ce qui

13 est de ce point-là parce qu'il n'est pas en position d'en parler.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

15 M. FLYNN : [interprétation] Je peux simplement aborder la dernière partie.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais, là, c'est totalement précis. Mais mon

17 inquiétude - et comprenez-là bien - c'est que si plus tard personne ne

18 revient là-dessus, ni vous ni la Défense, les Juges dans leur délibéré vont

19 regarder le document et peuvent, à ce moment-là, aboutir à des conclusions.

20 Voilà. C'est cela que je voulais vous faire comprendre.

21 M. FLYNN : [interprétation] Cela pourrait fort bien être le cas et il se

22 peut que d'autres témoins soient saisis enfin soient amenés devant les

23 Juges de la Chambre, à un moment donné, pour ce qui est des éléments de

24 fait pour que ce point-là soit évoqué, et cela ne serait certainement pas

25 ce témoin-ci.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

27 M. FLYNN : [interprétation] Je sais que l'heure n'est peut-être venue pour

28 la pause, mais j'en ai presque terminé. Vous voulez que je continue ou --

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Simplement, terminez, puis on fera la pause après.

2 M. FLYNN : [interprétation] Fort bien.

3 Q. Alors, j'étais en train de vous demander si nous pouvions parler du

4 document suivant, le 6201. A ce sujet, vous nous avez dit que le Dr Grgic a

5 été en position --

6 M. MURPHY : [interprétation] Non, Monsieur le Président, le témoin n'a pas

7 dit cela. Il a dit clairement -- enfin, qu'il ne pouvait pas savoir ce que

8 le Dr Grgic avait vu, et ce n'est pas une utilisation appropriée de ce

9 document pour essayer de le prouver par ces moyens-là. Je voulais juste

10 dire cela -- pour dire que c'est une opinion distendente [phon] -- enfin,

11 distincte que de savoir ce que ce témoin pouvait évoquer au niveau de

12 problèmes qui n'ont pas eu à être mentionnés.

13 M. FLYNN : [interprétation] J'allais poser la question de toute façon.

14 Q. Monsieur Cerenic, je voudrais savoir si M. Grgic était en position

15 d'entrer dans le hall et de voir les prisonniers qui ont été battus ?

16 M. MURPHY : [interprétation] Non, je ne pense pas qu'il peut répondre à

17 cela. Je crois qu'il a vu le Dr Grgic en train d'examiner des prisonniers

18 et il a décrit ce que le docteur a vu, mais nous ne pouvons pas lui

19 demander à lui de nous donner quelles sont les conclusions qu'a tirées le

20 Dr Grgic sur ce qu'il a vu.

21 M. FLYNN : [interprétation] Ma réponse est celle de dire que le témoin a

22 déjà dit qu'il y a eu des gens battus. Il a vu des gens qui ont été

23 tabassés. Personne ne lui a attiré l'attention dessus, donc, compte tenu

24 des conditions qui prévalaient dans le hall, je lui ai demandé si le

25 docteur une fois entré dans la dalle, a pu remarquer qu'il y a eu des gens

26 qui ont été battus auparavant ou pas. C'est tout.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Il a pu le remarquer. Qui plus est, il a

28 essayé d'intervenir auprès de certains d'entre eux de façon médicale. Il a

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1 peut-être essuyé le sang qu'ils avaient encore sur leur visage. Il a pu

2 voir cela parce qu'il a traversé toute la salle. Il nous a tous vus, il a

3 pu normalement constaté que des gens avaient été battus, et il a même

4 fourni de l'aide à certains de ces gens-là pour ces raisons-là, comme je

5 l'ai dit.

6 M. FLYNN : [interprétation]

7 Q. Je voudrais maintenant que vous vous penchiez sur le paragraphe 4 de la

8 lettre dont j'ai parlé, où il est question du 27 octobre 1993, le Dr Grgic

9 dit, dans la deuxième phrase du paragraphe 4 : "Ceux qui ont été gardés ont

10 bénéficié de soins médicaux et on a autorisé une visite de membres de la

11 FORPRONU et on a fait cesser les passages à tabac qui sont survenus

12 auparavant."

13 Est-ce que cela correspond à ce que vous nous avez dit tout à l'heure, à

14 savoir qu'il a été en position de voir que des prisonniers avaient été

15 battus ?

16 R. Oui.

17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Flynn, j'ai l'impression

18 que vous avez terminé avec ce document.

19 M. FLYNN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puis-je ajouter une question ?

21 Monsieur le Témoin, pouvez-vous confirmer ou infirmer le fait qu'après le

22 28 octobre, les prisonniers n'ont pu été battus ? Parce que c'est ce que le

23 docteur déclare dans ce document.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'ils ont battu ceux qui se trouvaient

25 dans la salle de l'école primaire ou de l'école secondaire, cela je ne sais

26 pas parce que j'ai été déjà dans un troisième site. J'étais au site de

27 Majdan. C'est déjà indiqué ailleurs.

28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup.

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1 M. FLYNN : [interprétation] Je ne pense pas avoir d'autres questions pour

2 ce témoin, Messieurs les Juges. Je suis sûr que les Juges peuvent avoir

3 certaines questions, mais je n'en ai plus e ce moment.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Flynn.

5 Nous allons faire la pause. Il est moins 25, et nous reprendrons dans 20

6 minutes.

7 --- L'audience est suspendue à 17 heures 33.

8 --- L'audience est reprise à 17 heures 55.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise. On a une heure cinq

10 devant nous.

11 Monsieur Flynn.

12 M. FLYNN : [interprétation] Donc, avant de faire entamer le contre-

13 interrogatoire, Messieurs les Juges, j'aimerais avoir des instructions de

14 la part des Juges pour ce qui est du témoin suivant. Comme vous le savez,

15 un autre témoin a été prévu pour aujourd'hui. Toutefois, étant donné

16 l'heure tardive, je voudrais savoir si les Juges ont l'intention ou alors

17 les collègues de la Défense pourraient nous donner des indications des

18 questions qu'ils ont à poser.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : -- question à poser, je ne sais pas. Il reste une --

20 on a dit que la Défense aurait une heure et demie, donc, cela veut dire 15

21 minutes par chacun des défenseurs. Donc, pour moi, je n'ai pas de vision;

22 cela dépend entièrement des avocats de la Défense et des accusés eux-mêmes

23 s'ils ont des questions.

24 Maître Karnavas.

25 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

26 les Juges. Je voudrais remercier ce témoin d'être venu ici, mais nous

27 n'avons pas de questions pour lui.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Murphy.

Page 15915

1 M. MURPHY : [interprétation] Je ne pense pas avoir des questions pour lui,

2 Monsieur le Président.

3 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que nous

4 étions les premiers à être prévu et nous laissons notre temps à M. Praljak.

5 M. KOVACIC : [interprétation] M. Praljak aurait des questions à poser pour

6 ce témoin.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a aussi et -- Madame Alaburic, oui aussi.

8 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai besoin de dix à

9 15 minutes à mon avis. Merci.

10 Mme TOMANOVIC : [interprétation] J'ai fait signe que nous avions des

11 questions à poser, mais pas plus d'une dizaine de minutes.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on va commencer. Alors, qui commence le

13 premier ?

14 Alors, mes collègues disent qu'on n'aura pas le temps -- il vaut mieux

15 demander au deuxième témoin de revenir demain.

16 Très bien.

17 M. FLYNN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Praljak, vous avez la parole.

19 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

20 Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :

21 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

22 R. Bonjour.

23 Q. J'aurais des questions à vous poser pour ma part et je vous demanderais

24 de nous dire ce que vous savez de le dire, et si vous ne le savez pas,

25 dites que vous ne le savez pas. Je ne vais pas pour ma part parler de ce

26 qui s'est passé de désagréable vous concernant là-bas. Ce sont des choses

27 dont je n'ai pas connaissance. Je ne voudrais rajouter du sel sur vos

28 blessures. Mais nous allons parler de certaines circonstances.

Page 15916

1 Vous avez dit que Vares était entouré des effectifs de l'armée de la

2 Republika Srpska. Vous avez dit "Chetniks" ici, mais c'est l'armée de la

3 Republika Srpska. D'autre part, il y avait l'ABiH, à savoir le 2e et le 3e

4 Corps; est-ce que c'est bien exact ?

5 L'INTERPRÈTE : Le témoin n'a aucun micro de brancher chez lui.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Mettez votre micro devant vous.

7 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

8 Q. Alors, vous avez dit que le HVO à Vares avait quelque chose de convenu

9 afin qu'un convoi de vivres et d'autres besoins de première nécessité pour

10 la population passe par le secteur contrôlé par l'armée de la Republika

11 Srpska afin qu'on puisse s'alimenter et continuer de vivre; c'est bien

12 exact ?

13 R. Oui.

14 Q. Saviez-vous que ce même corridor a été utilisé pour le passage de ces

15 convois qui via Vares allaient disons vers Tuzla ?

16 R. Je ne le savais pas.

17 Q. Vous ne le saviez pas. Mais vous saviez quand même que Tuzla c'était un

18 grand bassin et qu'il y avait beaucoup de gens. Il fallait forcément que

19 ces gens mangent.

20 R. Oui.

21 Q. Alors, saviez-vous -- savez-vous me dire quels sont les autres

22 itinéraires empruntés par les convois pour arriver à Tuzla ?

23 R. Non.

24 Q. Bon, vous ne le savez pas. Savez-vous que la population croate de

25 Kakanj a quitté Kakanj, et elle a été chassée de Kakanj au mois de juin

26 1993 ?

27 R. Oui.

28 Q. Savez-vous nous dire qui est-ce qui l'a fait ? Qui est-ce qui leur a

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1 dit : "Allez-vous en" ?

2 R. D'après eux c'est l'ABiH qui l'a fait.

3 Q. Saviez-vous que plus exactement ce sont les effectifs du

4 3e Corps de l'ABiH qui l'ont fait ?

5 R. Etant donné que Kakanj faisait partie de la zone du

6 3e Corps d'armée cela me semble être, effectivement, le cas, je suppose.

7 Q. Bon. Vous êtes travailleur en métallurgie.

8 R. Oui.

9 Q. Vares c'était une espèce de centre en matière de Métallurgie avec une

10 composante ouvrière importante ?

11 R. C'est l'une des plus grandes -- c'est l'un des plus grands centres

12 miniers de l'ex-Yougoslavie.

13 Q. Mais Kakanj aussi ?

14 R. Certainement, mais c'est quand même un peu différent. Nous avons

15 exploité du minerai de fer, eux ils ont exploité du charbon.

16 Q. Bien entendu. En même temps, à Kakanj et dans les villages

17 environnants, il y avait une population musulmane ?

18 R. A Kakanj.

19 Q. Non, non, excusez-moi à Vares.

20 R. Oui, oui, certainement.

21 Q. Il y avait un nombre respectable de Serbes, dirais-je ?

22 R. Oui.

23 Q. [aucune interprétation]

24 R. Est-ce que je peux compléter ?

25 Q. Allez-y.

26 R. Les termes -- les Serbes ont été dans un certain nombre et puis après

27 ils s'en sont allés. S'agissant de la période qui est examinée ici donc en

28 1993, il y en avait très peu à Vares.

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1 Q. Oui, mais 1993, c'est long.

2 R. Oui, notamment dirais-je en octobre de 1993.

3 Q. Oui, mais jusqu'en octobre, il y en avait ?

4 R. Ce que je me dois de dire alors c'est parlé d'un moment où les forces

5 du HVO se sont attaquées à des agglomérations serbes â Plananica et Slavin,

6 alors, de là à vous dire exactement le mois. Je ne sais pas trop mais je

7 sais que cela s'est passé avant le mois d'octobre. Il me semble que c'était

8 en été.

9 Q. Le HVO était en train de se battre contre l'armée de la Republika

10 Srpska ?

11 R. Ce n'était pas exactement du combat, c'était des combats du style de

12 qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine. Il me semble que le HVO avait

13 demandé à ce que ces deux Serbes -- villages serbes soient désarmés, une

14 fois que ceux-ci ont refusé d'être désarmés, ils ont été attaqués.

15 Q. Toujours, est-il qu'il y a eu une opération militaire du type visant à

16 assurer les arrières de ces villages serbes ?

17 R. Ecoutez, sur le plan stratégique, je ne suis pas compétent pour ce qui

18 est de parler des arrières, et je sais seulement qu'il y a eu des combats,

19 qu'il y a eu des tués, et des blessés, pourquoi je ne sais pas trop.

20 Q. C'est ce que j'ai dit. Donc, il y a eu des combats. Allons de l'avant.

21 Lorsque vos collègues ou cette partie de la population qui vivait là-bas,

22 vos collègues ouvriers de Kakanj, arrivés là comme on l'a dit expulsés de

23 là-bas, qui parmi les Bosniens que les Musulmans ou vous-même ou quelqu'un

24 d'autre serait allé parmi eux pour les aider, leur expliquer ce qui s'est

25 passé, essayer de les apaiser. Il en arrivait des milliers, n'est-ce pas ?

26 R. Oui. Ils étaient en grand nombre. Il me semble que les chiffres

27 mentionnés étaient de l'ordre de 15 000 personnes.

28 Q. Merci. Alors, d'après vos souvenirs, d'après ce que vous en savez, est-

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1 ce que qui quiconque au niveau du SDA, de la direction du SDA de la

2 présidence qui était présente dans ce village serait allé parmi ces gens et

3 dire ce n'est pas de notre faute ? Est-ce que quelqu'un s'est entretenu

4 avec ces gens-là ?

5 R. Je ne peux pas vous répondre par l'affirmative, je ne m'en souviens pas

6 et je n'en ai pas vraiment connaissance.

7 Q. Bon. Merci. Mais sauriez-vous nous dire si M. Alija Izetbegovic qui

8 était le commandant de tous les effectifs de la Bosnie-Herzégovine, aurait

9 donné des ordres à ces effectifs pour dire : "Ce que vous avez fait ne doit

10 pas être fait, et il faut rendre -- enfin, faire en sorte que tous les gens

11 de Kakanj expulsés retournent chez eux." Sauriez-vous -- aurez-vous

12 connaissance de telle chose ?

13 R. Non.

14 Q. Bien. Alors, s'agissant de cette partie placée sous le contrôle de

15 l'ABiH, et ma question s'énonce comme suit, à un moment donné, vous êtes

16 allé vers ce village qui s'appelle - un instant, je vous prie, Davrani --

17 R. Davravina.

18 Q. Oui, Davravina. Alors, vous êtes allé là-bas. A un moment donné, vous

19 avez obtenu une permission, une coure pour arriver à Vares avant que ce que

20 vous avez vécu ne vous arrive, n'est-ce pas ?

21 R. Oui.

22 Q. Alors, avez-vous eu vent du fait que un habitant de Vares pouvait aller

23 de Vares vers Kakanj et demander à ce qu'on le laisse partir pour couper du

24 bois afin que sa famille puisse se chauffer ?

25 R. Je ne sais pas. Je n'en ai pas connaissance. Il se peut qu'il n'ait pas

26 voulu rentrer. Il faut tenir compte aussi du fait qu'il y avait bon nombre

27 de Croates, de catholiques dans la municipalité de Kakanj qui sont restés

28 là-bas, qui ne sont allés nulle part.

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1 Q. Alors, vous dites pas mal, mais est-ce que vous savez combien ?

2 R. Je ne sais pas exactement combien mais je sais qu'ils étaient assez

3 nombreux.

4 Q. Est-ce qu'ils étaient placés sous la protection des forces Nations

5 Unies, ou est-ce qu'ils pouvaient déambuler dans Kakanj comme bon leur

6 semblait ?

7 R. Je pense que je priverais de beaucoup de temps si je vous disais tout

8 ce que j'ai entendu dire et tout ce que j'ai vu, pour ce qui est des

9 réfugiés -- ou plutôt, de la population croate de Kakanj.

10 Q. Mais les gens croates de Vares que ce soit ceux qui sont arrivés de

11 Kakanj ou ceux qui étaient de Vares, pouvaient aller librement vers Zenica

12 ou vers Tuzla, vers ces territoires libérés qui étaient tenus par ces deux

13 armées, encore régulières de la Bosnie, à savoir le HVO et l'ABiH ?

14 R. Excusez-moi, est-ce que vous pourriez reprendre votre question ?

15 Q. On sait que Vares est plein d'habitants de Kakanj. C'est entouré, la

16 ville est entourée par les effectifs de l'armée de la Republika Srpska.

17 Tuzla et Kakanj sont sous le contrôle de l'ABiH ?

18 R. Oui.

19 Q. Alors, les gens de ces territoires libérés de Bosnie-Herzégovine

20 pouvaient-ils aller de Vares vers Tuzla, pour des soins médicaux, enfin, je

21 suis en train de parler de Croates, de Tuzla vers Zenica, pouvaient-ils y

22 aller ?

23 R. Ils pouvaient aller vers Zenica parce qu'il y avait là-bas l'hôpital

24 cantonal. Il y a eu des Croates et des Musulmans de Bosnie ainsi que des

25 Serbes qui sont allés se faire soigner. J'ai dit tout à l'heure, que Vares

26 pour ce qui est des services médicaux, ce n'était pas quelque chose de --

27 enfin je ne sais pas je n'en ai pas connaissance de la terminologie

28 médicale appropriée, mais je dirais que mis à part d'une radiographie ou un

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1 examen cardiologique, il n'y avait pas grand-chose. Alors, il fallait aller

2 à Tuzla, c'était assez loin de Vares, il y a plus de 100 kilomètres de l'un

3 à l'autre. Il me semble que c'était à plus de 100 kilomètres que les gens

4 allaient.

5 Q. Mais dites-moi, saviez-vous à l'époque où ce qui s'est passé à Vares

6 s'est passé, combien de Croates il est resté à Zenica ? S'il en est resté

7 peu où sont allés ceux qui ont dû quitter Zenica ?

8 R. A vrai dire je ne le sais pas. Ce que je sais c'est qu'en ma qualité

9 de membre de l'armée, j'ai eu l'occasion d'entendre de la bouche d'un

10 membre plus âgé qui avait quelqu'un à lui à Zenica, il envoyait de Vares

11 des choses vers Zenica. Je sais que moi-même, j'ai porté de la farine, de

12 l'huile, du sucre, pas parce que le Croate de Vares n'osait pas y aller

13 mais c'était parce que cet homme était plutôt âgé. C'est à peu près la

14 réponse que je vous apporte pour dire qu'il y a encore eu des Croates à

15 Zenica.

16 Q. Mais vous ne savez pas nous dire combien il en est resté, combien il en

17 a été chassé ?

18 R. Je ne sais pas. Vous vouliez dire de Zenica, chasser de Zenica ?

19 Q. Oui.

20 R. Je ne sais pas. Je n'ai même pas eu connaissance du fait que des gens

21 aient été chassés de Zenica.

22 Q. Bien. Dites-moi la chose suivante, dans votre déposition vous avez dit

23 que le 21 ou le 22 octobre 1993, il est arrivé 200 soldats Oustachi, les

24 Apostoli, et autres. Vous les avez qualifiés d'"Oustachi" ?

25 R. Oui.

26 Q. Dites-nous ce que c'est que les Oustachi ?

27 R. Ce terme est connu de la période de Deuxième Guerre mondiale et même

28 avant, il me semble que certaines personnes à Vares ont vu cela comme étant

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1 -- ils étaient plutôt joyeux lorsqu'on les appelait Oustachi.

2 Q. Je ne conteste pas cela.

3 R. Vous savez qu'en Bosnie il y avait des Chetniks des Oustachi et des

4 balija, pour ce qui est de la composition ethnique.

5 Q. Je sais que certaines personnes en utilisaient ces termes, mais je ne

6 sais pas s'il existait cette division, comme vous avez dit. Mais voilà ma

7 question, donc, les Oustachi étaient les membres de l'armée, d'un régime en

8 vigueur en Croatie qui avait des liens avec l'Allemagne Nazie qui a été

9 condamnée à cause des crimes commis. Les Oustachi faisaient partie de ce

10 régime; cela vous le saviez ?

11 R. Oui.

12 Q. Savez-vous quel est le pourcentage des forces armées de la Croatie

13 pendant la Deuxième Guerre mondiale appartenant aux Oustachi et quel

14 pourcentage appartenait au Domobrani ?

15 R. Je ne n'en sais rien.

16 Q. Savez-vous quel était le nombre des Musulmans pendant la Deuxième

17 Guerre mondiale qui faisait partie des Unités des Oustachi ?

18 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous dire quel était le pourcentage,

19 quel était ce pourcentage ni les nombres de Musulmans.

20 Q. Vous n'avez jamais entendu parler de la Division des Handzar ?

21 R. Oui, j'en ai entendu parler.

22 Q. La Division d'Oustachi, dans la Deuxième Guerre mondiale, qui

23 appartenait et qui était dans sa majorité des Musulmans ?

24 R. Je vous dis que j'ai entendu parler de la Division des Handzar.

25 Q. Vous avez dit ensuite la chose suivante, les Croates ont pris le

26 pouvoir à Vares et d'une certaine façon remplacer les autorités légalement.

27 Qui était parti dans le village de Dabravine ?

28 R. Oui.

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1 Q. Dites-moi : dans les autorités légalement élues aux premières élections

2 démocratiques, il y avait le Parti politique du HDZ, du SDA, la Ligue des

3 Communistes, c'est-à-dire le SDP, les réformistes, et le Parti d'Ante

4 Markovic; est-ce que c'étaient les partis politiques principaux à Vares ?

5 R. Oui. Je pense que c'est vrai.

6 Q. Lorsque vous êtes parti à Dabravine est-ce qu'il y avait avec vous

7 quelqu'un de ces autorités légales, comme vous l'avez dit, du SDP, qui

8 était composé principalement des Serbes et en partie des Croates ? Vous

9 souvenez-vous de quelqu'un qui dans ces autorités légales aux premières

10 élections du SDP ou des Réformistes -- qui était à Dabravine ?

11 R. Je vous dis qu'il y avait des Croates à Dabravine, et à la présidence

12 de Guerre également. La présidence de Guerre de la municipalité Vares, il y

13 avait des Croates. Par exemple, je peux citer un nom. Il y avait Kreso

14 Romic, par exemple, à la présidence de Guerre, et dans la structure

15 militaire, il y avait des Croates. Je vais peut-être omettre certains mots.

16 Kreso Romic y était. Je le sais qu'il y ait Mijatovic Ljudevit. Il y avait

17 Kreso Romic.

18 Q. C'est à deux reprises, Kreso Romic ?

19 R. Kreso Romic, il était à l'armée. Il a essayé de partir. J'ai énuméré

20 trois personnes. Il y avait des Croates dans l'armée en tant que simples

21 soldats. Aux autorités légales, ces autorités légales étaient les autorités

22 légales pour toute la population de Vares. Il s'agissait des autorités

23 légales, et lui aux élections démocratiques, et au début il me semble que

24 le parti politique qui a gagné, cela vous intéresse ?

25 Q. Je vais vous poser de questions là-dessus. Le SDP, lors des premières

26 élections démocratiques, a gagné 26 ou 27 sièges - c'est un témoin qui m'a

27 -- qui nous a dit cela - de 50 sièges possibles. De ces 26 sièges

28 appartenant au SDP légalement élu, combien se trouvaient dans ces autorités

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1 légales à Dabravine ?

2 R. Je ne peux pas vous répondre à cette question.

3 Q. Merci. Dites-moi : lorsque Vares était sous les attaques du 2e et du 3e

4 Corps lorsque les Croates ont -- sont partis, et lorsque les organes de

5 pouvoir étaient revenus - vous parlez de la présidence de Guerre - qui a

6 nommé les membres de la présidence de Guerre ?

7 R. La présidence de Guerre, pour vous être franc, je n'ai pas suivi

8 vraiment tous ces événements politiques. Je ne savais pas qui à l'époque

9 aurait pu nommer les membres de la présidence de Guerre.

10 Q. Vous pouvez répondre par : "Je ne sais pas."

11 R. Je ne sais pas.

12 Q. Ne serait-il pas logique lorsque les autorités étaient revenues à

13 Vares, ou les autorités légales et non plus les autorités croates

14 illégales, qu'aurait fallu nommer les personnes qui ont gagné aux élections

15 de 1990, c'est donc les mêmes personnes, et non pas d'autres personnes pour

16 désigner les membres de la présidence de Guerre, parce que la présidence de

17 Guerre, cela veut dire un pouvoir imposé ?

18 R. Non, non. A l'époque, toutes les présidences municipales s'appelaient

19 les présidences de Guerre en Bosnie-Herzégovine.

20 Q. Très bien. C'est au côté des Bosniens. Est-ce que la présidence de

21 Guerre -- cette présidence de Guerre était composée des gens qui ont été

22 élus aux premières élections démocratiques à Vares ? Pouvez-vous nous dire

23 cela ?

24 R. Pouvez-vous répéter la question ?

25 Q. Dans la présidence de Guerre, est-ce que c'était les mêmes personnes

26 qui ont été élues aux premières élections à Vares -- 13 membres du HDZ, et

27 cetera ?

28 R. Je ne sais pas.

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1 Q. Savez-vous que le Croates qui ont été chassés de Kakanj ont été chassés

2 entre autres par les Moudjahiddines, Moudjahiddines qui étaient à l'époque

3 donc à Zenica ?

4 R. Je ne sais pas.

5 Q. Connaissez vous le nombre de Musulmans qui -- sur le territoire de la

6 municipalité de Zenica, du nombre de Moudjahiddines ? Avez-vous des

7 informations sur leur nombre, sur leur mode de guerre ?

8 R. Non. Je ne savais rien là-dessus.

9 Q. Bien. Après être -- après avoir survécu ce calvaire, parce que je ne

10 veux pas donc en discuter plus, lorsque vous rentrés à Vares à bord des

11 véhicules de la FORPRONU, est-ce que vous aviez trouvé les Croates qui

12 habitaient avant cela à Vares ?

13 R. A l'époque élémentaire, il y avait des Musulmans et des Croates, qui

14 ont trouvé refuge près de la FORPRONU. Il y avait des Croates et des

15 Bosniens.

16 Q. Mais vous serez d'accord pour dire que la plupart des Croates étaient

17 partis de Vares ?

18 R. La plupart de Croates étaient partis de Vares, oui.

19 Q. Les Musulmans et les Croates qui ont demandé abri à l'école

20 élémentaire, auprès de qui ils ont demandé de l'aide ? De quoi ils ont eu

21 peur ? Parce que l'ABiH était arrivée. Est-ce qu'ils ont eu peur des

22 groupes de l'ABiH qui faisaient ce qu'ils faisaient à Vares de façon

23 incontrôlée ? Est-ce qu'on peut décrire cela ainsi ?

24 R. Non. Je ne sais pas cela ainsi. C'est un moment où on ne savait pas

25 s'il y avait des soldats du HVO ou d'autres soldats. Les Bosniens donc ont

26 fuit la ville. Nous ne savions pas que la population croate a été évacuée

27 avec l'armée pour -- il faut que je vous dise que les Croates ont chassé

28 par -- la population croate de Vares, ceux qui -- même ceux qui ne

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1 voulaient pas partir. Ils nous en forçaient d'être [imperceptible].

2 Q. Le 23 -- dans la matinée du 23, vous avez été arrêté et vous avez été

3 emmené dans la cour d'une école, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. Vous dites que, neuf ou dix jours, vous avez été détenus à de

6 différents endroits, n'est-ce pas ? C'est ce que vous avez dit ?

7 R. Non. Si je me souviens bien, le Procureur m'a demandé pendant combien

8 de jours j'étais dans ces trois écoles. J'ai dit que, cinq ou six jours,

9 j'étais dans l'école secondaire Ivan Goran Kovacic, deux jours à l'école

10 élémentaire là en Vares au troisième étage. Ensuite, nous avons été caché

11 dans cette école, et finalement, à Majdan, nous sommes restés je ne sais

12 pas combien de temps, mais il me semble qu'au total, j'ai été détenu à 14

13 ou 15 jours.

14 Q. Dites-vous : pendant que vous avez été détenu, où certaines personnes

15 du HVO vous ont frappé et maltraité, même cinq fois par jour ? Vous avez

16 été battu ? Comment avez-vous appris que les soldats du HVO ont chassé par

17 la force la population croate de la municipalité de Vares ?

18 R. Tout à l'heure, j'ai mentionné qu'à -- pendant que nous étions à

19 Majdan, c'était avant l'évacuation de la population croate de Majdan. Les

20 véhicules du HVO dit -- je -- qu'un soldat du HVO appelait la population en

21 utilisant un mégaphone pour être évacué.

22 Q. Il aurait pu leur dire que la ligne de front a été percée, et qu'il n'y

23 avait plus de protection. Vous avez entendu qu'il a dit cela. Est-ce que

24 vous avez en vue que la population a été chassée par la force, par la force

25 de l'évacuation, en utilisant les -- des fusils ?

26 R. Non, mais j'ai entendu parler de cela plus tard.

27 Q. Après la guerre, nous avons entendu parler de beaucoup de choses.

28 Uniquement la -- ici on vous a montré deux documents. L'un de ces deux

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1 documents est rédigé par un médecin le 27, et l'autre le 28.

2 Si, comme vous avez dit -- si vous étiez dans ces trois écoles

3 différentes avant d'avoir été emmené à Majdan, et que vous avez passé neuf

4 jours dans ces trois différentes écoles, et tout à l'heure vous avez dit

5 que vous n'allez pas pu voir ce que le médecin faisait, est-ce qu'il est

6 vrai que, le 27 et le 28 octobre 1993, vous étiez dans une école -- dans

7 une école secondaire, et que vous avez vu ce médecin arrivant ?

8 R. Je l'ai vu parce que j'étais dans l'école secondaire.

9 Q. Un membre du HVO, de l'Unité médicale, il est venu pour aider les

10 gens, pour leur panser les plaies, et cetera ?

11 R. Oui.

12 Q. Certains membres du HVO lui donnaient des coups de pied, et l'a été

13 jeté dehors; c'est ce que vous avez dit ?

14 R. Oui.

15 Q. Lorsque les habitants de Kakanj sont arrivés à Vares, personne ne les a

16 appelé de revenir, personne n'a donné d'ordres aux forces qui les ont

17 chassés de les ramener. Est-ce que, pour ce qui est de la présidence de

18 Guerre qui a été formée à Vares -- est-ce que toute la présidence de guerre

19 ou une partie de la présidence de Guerre est partie pour dire : "Croates de

20 Vares, revenez, revenez, enfin, les Croates de Kakanj revenaient à Vares.

21 Nous vous garantissons la sûreté, les moyens pour survivre la liberté de

22 circulation ?" Est-ce que cela s'est passé ?

23 R. J'ai entendu parler d'un acte qui a été envoyé à Kiseljak, mais on ne

24 pouvait pas aller à Kiseljak parce que ce n'était pas sûr. Mais j'ai

25 entendu parler d'un acte que la présidence de guerre a envoyé en appelant

26 la population croate de revenir à Vares. Je pense qu'au début, non en 1994,

27 ils ont commencé à -- les Croates ont commencé de revenir à Vares de leur

28 propre gré.

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1 Q. Dites-moi la chose suivante --

2 R. Je suis convaincu que cela s'est passé.

3 Q. Savez-vous si quelqu'un de la présidence de Guerre de Bosnie-

4 Herzégovine a ordonné aux commandants du 2e et du 3e Corps de former des

5 Unités d'élite pour les envoyer à Vares pour envoyer la présence de ces

6 Unités de l'autorité civile auprès des Croates pour dire aux Croates

7 revenez, nous vous garantissons la sûreté ? Est-ce que cela a été possible

8 selon vous ?

9 R. Je ne vous ai pas compris. Je m'excuse, pouvez-vous répéter votre

10 question ?

11 Q. Oui. Je vais répéter ma question. Est-ce que vous savez -- vous étiez -

12 - vous travailliez auprès de la présidence de Guerre.

13 R. Non, non.

14 Q. Est-ce que quelqu'un de la présidence de Guerre de Bosnie-Herzégovine a

15 ordonné aux commandants du 2e et du 3e Corps de former des unités pour les

16 envoyer sur ce territoire, et pour dire aux autorités civiles : "De

17 rassembler les gens qui avaient quitté ce territoire de revenir parce que

18 nous leur garantissons la liberté de circulation sur ce territoire de

19 Bosnie-Herzégovine" ? Vous n'étiez pas au courant de cela ?

20 R. Non.

21 Q. Savez-vous que les Bosniens à Vares, les Croates de Kakanj, les Croates

22 de Vares et les Serbes qui y étaient, est-ce qu'ils -- par rapport à

23 n'importe quel autorité en Bosnie-Herzégovine, la présidence, ou les

24 autorités à Tuzla, ou à Zenica, est-ce qu'ils ont reçu des carburants, par

25 exemple, des armes, du bois de chauffage, des vivres, des salaires ?

26 R. Je ne sais pas.

27 Q. Savez-vous lorsque vous êtes rentré --

28 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je m'excuse de vous avoir

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1 interrompu. Je voudrais vous demander de combien de temps avez-vous besoin

2 encore parce que nous avons 30 minutes qui nous restent.

3 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Cela a été ma dernière question, en

4 fait.

5 Q. Si les gens rassemblés à Vares ne pouvaient pas se rendre librement ni

6 à Zenica ni à Tuzla sauf à un accord conclu avec les Serbes, et qu'ils ne

7 recevaient ni farine ni huile, rien. Est-ce que ces gens-là n'auraient pas

8 été les gens détenus dans une sorte de camp qui dépendait de convois

9 arrivés de la Croatie en passant par le territoire serbe, à votre avis ?

10 R. C'était un endroit encerclé de cette façon donc n'aurait pas pu

11 recevoir de telles provisions.

12 Q. Ma dernière question, voilà : lorsque vous êtes rentré à Vares, et vous

13 avez trouvé l'ABiH à Vares. Savez-vous que l'ABiH, e entrant à Vares a

14 pillé, a incendié et a fait d'autres choses ? Est-ce que vous avez vu cela

15 à la télévision, ou est-ce que vous avez vu cela au moment où vous êtes

16 arrivé à Vares ? Quel était l'aspect de la ville de Vares après l'entrée de

17 l'ABiH ? Répondez-moi de façon correcte.

18 R. Je ne suis pas entré après l'armée, la FORPRONU nous a ramené dans la

19 ville où il n'y avait toujours pas d'armée, ni HVO ni l'ABiH. On nous a

20 amené devant l'école élémentaire, où nous avons passé une nuit ou deux

21 nuits, je ne sais plus, et après quoi je suis rentré chez moi mon épouse a

22 été évacuée par la FORPRONU dans la base de la FORPRONU. Elle est rentrée,

23 c'est-à-dire elle a donc ouvert la porte d'entrée de notre appartement en

24 utilisant la clé de l'appartement. Pour vous répondre à votre question, à

25 savoir si j'ai vu quelque chose ou personnes, pendant quelques mois, j'ai

26 été très malade, et je me déplaçais à bord d'une voiture de ma maison au

27 dispensaire. C'était tout. Je ne pouvais pas me promener dans la ville.

28 Q. La ville de Vares c'est une petite ville --

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1 M. TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, pourriez-vous dire à la

2 Chambre combien de dernières questions vous avez encore à poser au témoin ?

3 Puisque tout à l'heure vous avez dit que c'était votre dernière question.

4 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je voulais dire que la ville de Vares

5 est une petite ville, et comme cela a été montré à la télévision, je

6 voulais poser au témoin la question concernant l'aspect de la ville après

7 l'entrée de l'ABiH.

8 Q. [aucune interprétation]

9 R. J'ai dit qu'il y avait un bâtiment incendié par les soldats du HVO en

10 quittant la ville, et j'ai vu que le bâtiment où se trouvait la police

11 militaire du HVO. Les vitres sur ce bâtiment ont été cassées. C'est tout ce

12 que j'ai vu du bord des voitures.

13 Q. Comment avez-vous pu voir que le HVO a incendié ce bâtiment ?

14 R. C'est parce que c'était -- lors de l'évacuation de la population ce

15 bâtiment a été incendié lorsque les soldats du HVO étaient toujours en

16 ville.

17 Q. Il y a un moment où vous avez dit que vous êtes arrivé en ville lorsque

18 le HVO n'était plus en ville. Je vous remercie.

19 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je n'ai plus de questions à vous poser.

20 Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai quelques questions simples à vous

21 poser.

22 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

23 Q. [interprétation] Premièrement, est-ce que vous pouvez nous dire si vous

24 avez remis tous vos dossiers médicaux au bureau du Procureur ?

25 R. Pour vous dire la vérité, je n'en sais rien, mais pour ce qui est de

26 tous les documents médicaux de cette période, j'ai tous les originaux chez

27 moi.

28 Q. Je vous pose la question parce que si j'ai bien examiné les documents

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1 médicaux qui vous ont été montrés et qui faisaient partie du jeu de

2 documents montrés par mon confrère de l'Accusation, il est évident que le

3 31 décembre 1993, correspond à la date du premier document, alors que

4 maintenant, vous nous dites dès que vous êtes arrivé à Vares, à savoir le 3

5 novembre 1993, vous êtes allé consulter un médecin. Donc, je me demande

6 tout simplement comment se fait-il qu'il n'y a pas de fiche médicale pour

7 ce mois et il s'agit d'un mois et de 20 jours, est-ce que vous pouvez nous

8 expliquer cela ?

9 R. Ecoutez, je ne sais pas comment vous l'expliquer aussi simplement que

10 possible. Je suis allé au centre médical, mais comment est-ce que je

11 pourrais m'exprimer ? Il n'y a pas eu de conclusion qui a été tirée. En

12 fait, je n'ai pas pu être soumis à un véritable examen ou contrôle médical.

13 Premièrement, j'y suis allé et on m'a donné des analgésiques,

14 essentiellement pour mes maux de tête, puis j'avais dit que j'avais des

15 côtes fracturées. Je l'ai déjà mentionné, et pour cela ils ont utilisé un

16 pansement médical pour traiter cela.

17 Q. Le premier document, votre premier document, en fait, il s'agit d'une

18 ordonnance pour une paire de lunettes; est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Alors, dites-nous, Monsieur : pourquoi est-ce que vous avez utilisé les

21 mots "d'Oustachi" et de Chetniks lorsque vous avez parlé des membres du HVO

22 et des membres de l'armée de la Republika Srpska ?

23 R. Ecoutez, je l'ai déjà expliqué C'est une terminologie qui était

24 utilisée pour les trois populations.

25 Q. Mais qu'en est-il du terme "Balija" ? Est-ce qu'il s'agit d'un terme

26 qui fait partie de la même catégorie de langage pour décrire les

27 Musulmans ?

28 R. C'est ce qu'ils nous disaient, c'est ainsi qu'ils nous appelaient.

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1 Q. Vous avez dit que vous aviez témoigné au tribunal cantonal de Zenica à

2 propos des événements de Stupni Do; est-ce que vous pourriez nous dire de

3 quel procès il s'agissait, contre qui était-il mené ?

4 R. Pour ce qui est de Stupni Do, je n'en n'ai pas fait partie. En fait, il

5 s'agissait d'un procès mené à l'encontre de Dominik Ilijasevic, Como.

6 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire s'il était habituel que les membres

7 de l'ABiH et ce jusqu'en septembre 1993, rentre chez eux pour se reposer,

8 passait quelques jours à Vares et puis ensuite regagnait leurs unités

9 respectives ?

10 R. Oui, oui, c'était habituel.

11 Q. Dites-moi : est-ce que vous êtes allé à Vares en uniforme militaire ou

12 en habit civil ?

13 R. En habit civil. Est-ce que vous voulez savoir pourquoi, pourquoi est-ce

14 que les gens arrivaient --

15 Q. Peut-être plus tard, si nous avons suffisamment de temps. Vous nous

16 avez dit que Vares est une petite -- une petite bourgade -- une petite

17 ville comme vous nous l'avez dit ?

18 R. Oui.

19 Q. Les habitants de Vares, est-ce qu'il savait que vous faisiez partie de

20 l'ABiH ? Puisque -- puisque cela n'était un secret pour personne, n'est-ce

21 pas ?

22 R. Oui, la plupart des gens le savaient.

23 Q. L'unité à laquelle vous apparteniez, vous nous avez dit que c'était le

24 peloton attaché au QG; est-ce qu'il s'agissait d'un peloton indépendant ?

25 Ou est-ce qu'il s'agissait d'un peloton au sein d'une unité militaire plus

26 importante ?

27 R. Il s'agissait du peloton qui était attaché au QG ou à la présidence de

28 Guerre de la municipalité de Vares.

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1 Q. Dites-moi, je vous prie : le commandant de votre peloton, est-ce qu'il

2 était au courant des plans de l'ABiH pour ce qui est de Vares et des

3 environs ?

4 R. Je n'en sais rien.

5 Q. Vous personnellement, est-ce que vous étiez informé des plans de l'ABiH

6 qui voulaient s'emparer de Vares ?

7 R. Non.

8 Q. En septembre 1993, lorsque vous êtes arrivé à Vares, est-ce que c'était

9 environ la fin du mois, la mi-septembre ?

10 R. Je pense que c'était le début du mois, le début du mois de septembre.

11 Q. Lorsque vous dites que vous aviez obtenu une permission de 30 jours;

12 c'est cela, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, oui, il s'agissait d'un mois.

14 Q. Alors, comment ce fait-il que vous étiez alors à Vares le 30 octobre,

15 c'est 20 jours plus long donc.

16 R. Oui, mais j'avais demandé une permission supplémentaire par la suite

17 parce que je n'avais préparé le bois de chauffage. Je vous l'ai expliqué il

18 y a quelques moments. Je voulais le faire à la main. Je devais prévoir pour

19 que ma famille puisse avoir du chauffage, donc du bois pour se chauffer

20 pour l'hiver.

21 Q. Dites-moi, comme vous viviez à Vares, est-ce que vous aviez entendu

22 qu'avant le 20 octobre, l'ABiH avait -- s'était emparé de certains villages

23 croates dans les environs de Vares ?

24 R. Non.

25 Q. Qu'en est-il du village de Kopljari ? Vous n'avez pas entendu dire que

26 ce village était tombé entre les mains de l'ABiH ?

27 R. Je vous ai dit que j'étais préoccupé par ce travail que je devais faire

28 pour que je puisse ensuite repartir pour m'acquitter de mes fonctions.

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1 Q. Mais vous avez passé tout votre temps dans les bois à couper du bois de

2 chauffage ?

3 R. Oui, oui, si vous le faites à la main, cela prend beaucoup, beaucoup de

4 temps.

5 Q. Mais nous avons tous comment cela se fait.

6 R. Oui, et la forêt d'ailleurs est assez éloignée de mon domicile.

7 Q. Le 23 octobre, vous avez dit que c'était le jour où vous avez été placé

8 en détention. Dites-nous si tous les détenus étaient des hommes, toutes les

9 personnes qui ont été emmenées ou détenues, est-ce qu'il s'agissait

10 d'hommes ?

11 R. Je le pense.

12 Q. Est-ce qu'il y avait des hommes en état de porter les armes -- en âge

13 de porter les armes ?

14 R. Des hommes de tous les âges.

15 Q. Il s'agissait d'homme en âge de porter les armes ?

16 R. Il y avait des hommes de tout âges. Il y avait des hommes qui avaient

17 l'âge de porter les armes, des personnes plus âgées, des garçons plus

18 jeunes de 17, 18 ans. Il y avait même des grands-pères, dans gens qui

19 avaient 70 ans environ.

20 Q. Vous savez très bien que les hommes en âge de porter les armes ont

21 entre 16 ans, même 15 ans, voire partir de 15 ans même d'après le Règlement

22 de la Bosnie-Herzégovine ?

23 R. Je ne sais pas ce qui prévalait comme doctrine à l'époque.

24 Q. Dites-moi, à ce moment-là, parmi les personnes qui étaient là outre --

25 hormis vous, est-ce qu'il y avait des personnes qui faisaient partie de

26 l'ABiH ?

27 R. Oui.

28 Q. Est-ce que vous pouvez dire combien ?

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1 R. Je ne sais pas exactement.

2 Q. Est-ce que cela correspondait peut-être au groupe que vous avez

3 mentionné qui avait été séparé du lot ?

4 R. Non, non, non. Nous étions peut-être trois ou quatre, pas plus.

5 Q. Bien. Aujourd'hui, vous nous avez dit que vous n'avez pas été mis en

6 liberté mais que vous vous êtes échappé ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous êtes échappé de Majdan ?

9 R. Oui.

10 Q. Alors, est-ce que vous pourriez peut-être nous relater cela de façon un

11 peu plus détaillée ? Comment se fait-il que vous avez réussi à vous

12 échapper et avec votre permission j'aimerais vous rappeler certaines

13 parties de votre déclaration, et je vais vous rappeler la date

14 premièrement. La date du 7 avril 1994, et cela a été donné au centre

15 responsable des Enquêtes pour les crimes de guerre. Voilà ce que vous avez

16 dit : "La nuit -- auparavant" - c'est tout à la fin du document - "donc la

17 nuit avant d'entrer dans Vares, nous n'avions pas de gardes donc nous nous

18 sommes demandés comment nous pourrions nous échapper. Vers 9 heures les

19 gardes sont arrivés et ils nous ont demandé ce dont nous avions besoin et

20 ils nous ont donné des sceaux pour que nous puissions faire nos besoins.

21 Ils nous ont donné de l'eau, mais ils ne nous ont pas donné à manger dans

22 cette prison. Au vu des mouvements des Croates de Vares, nous savions que -

23 - les gens -- que nos hommes allaient bientôt entrer dans la ville.

24 "Le lendemain nous avons appelé les gardes, mais personne n'a répondu et il

25 y en avait un de nous qui montait toujours la garde près de la porte pour

26 voir si quelqu'un viendrait nous libérer. Après un petit moment, nous avons

27 entendu un camion près de la prison et nous pensions qu'il s'agissait de

28 l'armée du HVO, et nous nous apprêtions à nous défendre. Toutefois, Kreso

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1 Pejcinovic est arrivé et il nous a dit qu'il allait voir Ivica Gavran pour

2 voir ce qu'il fallait faire de nous. Toutefois, s'il ne revenait pas

3 bientôt, nous devrions courir là où nous pouvons."

4 L'INTERPRÈTE : Les interprètes faisant remarquer qu'ils n'avaient pas le

5 document qui a été lu.

6 Mme ALABURIC : [interprétation]

7 Q. Donc, Monsieur, ce dont je viens de vous donner lecture, est-ce que

8 cela correspond à ce qui s'est passé lorsque vous êtes échappé ?

9 R. Oui. En vous expliquant, cela s'est passé.

10 Q. Non, non, non, non, non, pas de détails. Vous avez fait une déclaration

11 très semblable par la suite également. Donc, ce n'est pas la peine de

12 développer.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

14 M. FLYNN : [interprétation] Je m'excuse d'intervenir, mais je pense qu'il

15 ne serait qu'équitable que jusque que Me Alaburic lise la phrase suivante

16 pour compléter la lecture du paragraphe et là, tout sera placer dans le bon

17 contexte.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison, Monsieur Flynn. Il faut toujours

19 replacer une phrase dans un contexte de phrase générale pour bien

20 comprendre le sens.

21 Mme ALABURIC : [interprétation]

22 Q. Suite à ces instructions, Monsieur, si on passe au phrase suivante :

23 "Au bout d'une heure, Meho Trklja a brisé la porte et nous sommes sortis

24 dans le couloir et nous avons laissé sortir les autres. Nous sommes allés

25 jusqu'à l'ONU et c'est eux qui nous ont transporté jusqu'à Vares vers la

26 sécurité."

27 Je ne crois pas que cela modifie le sens de ce qui s'est dit avant. Mon

28 intention n'avait pas été de sauter ces deux lignes qui sont nécessairement

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1 lues une fois qu'on lit le tout.

2 Alors, compte tenu de ce complément, Monsieur le Témoin, est-ce que cela

3 correspond à ce qui s'est véritablement passé lorsque vous avez quitté les

4 lieux où vous avez été interné ?

5 R. Oui, cela correspond parce que les soldats du HVO qui nous gardaient

6 sont partis en nous disant qu'ils allaient nous laisser seuls, pour

7 quelques heures, pour aller voir ce qui s'était passé avec leurs familles

8 respectives.

9 Q. Bien.

10 R. C'est la raison pour laquelle nous sommes restés seuls sans gardiens et

11 c'est ce qui s'est passé.

12 Q. Bien. Une autre question encore --

13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Alaburic, auriez-vous

14 l'amabilité de dire aux Juges de la Chambre quel est le document que vous

15 avez cité ?

16 Mme ALABURIC : [interprétation] Il s'agit de la déclaration qui nous a été

17 communiqué par le bureau du Procureur. C'est la déposition de ce témoin

18 auprès du centre d'enquête portant sur les crimes de guerre daté du 7 avril

19 1994. Le Procureur n'a pas prévu ce document comme pièce à conviction mais

20 je crois qu'il vous a communiqué, tout comme il l'a fait pour nous, toutes

21 les déclarations faites par ce témoin. Alors, si cela peut vous aider, je

22 peux donner le numéro ERN. Il y a une autre déclaration --

23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Le numéro de la pièce à conviction

24 serait utile. Je vois M. Kovacic hoché de la tête mais nous, nous ne

25 l'avons pas, juste pour notre information -- enfin pour votre information à

26 vous.

27 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, justement je

28 viens de l'indiquer. Ce document, le Procureur ne l'a pas prévu comme pièce

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1 à conviction.

2 M. KOVACIC : [interprétation] Si je puis aider ma consœur, Mme Alaburic, je

3 ne sais pas ce que vous a été communiqué ou pas, mais dans la situation

4 précédente, il me semble que vous avez toujours reçu les déclarations

5 faites par le témoin auprès du bureau du Procureur ainsi que cette

6 déclaration faite au service chargé d'enquêter sur les crimes de guerre.

7 Nous avons remarqué que jusqu'à présent, vous avez disposé de ces pièces.

8 Enfin, toujours, est-il qu'on s'excuse, nous ne savons pas ce que le

9 Procureur vous a communiqué ou pas. Nous cela nous a été communiqué.

10 Mme ALABURIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Juge

11 --

12 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Oui. Le fait est que, parfois,

13 nous n'avons pas de déclaration du tout. Parfois, nous avons une

14 déclaration qui est faite auprès des enquêteurs du bureau du Procureur.

15 Nous en avons plus parfois. Mais cette fois-ci on ne l'a pas. Je ne porte

16 pas le blâme sur personne. Je veux juste vous faire savoir la chose. Ce que

17 je voulais savoir aussi c'est si vous ne devriez peut-être pas donner la

18 parole à Mme Tomasegovic Tomic parce qu'elle a dit qu'elle avait besoin

19 d'une quinzaine de minutes. Enfin je ne sais pas. Peut-être avez-vous été

20 en contact direct mais je voudrais être sûr que personne d'entre vous ne

21 vienne à connaître des frustrations vers la fin de cette journée.

22 Mme ALABURIC : [interprétation] Absolument, Monsieur le Juge. Ma consoeurr

23 dit qu'elle aura besoin de cinq minutes et moi je n'ai plus qu'une

24 question. J'ai tout comprimé en raison de l'heure tardive.

25 Q. Alors, Monsieur le Témoin, quand vous avez fait une déclaration auprès

26 des enquêteurs de ce Tribunal, vous avez parlé de l'ambiance qui a évoluée

27 à Vares même -- au mois de septembre 1993 lorsque vous êtes allé là-bas

28 pour un congé de 30 jours. Alors pouvez-vous nous expliquer étant donné que

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1 vous n'en n'avez pas parlé jusqu'à présent quel est ce changement

2 d'ambiance que vous avez constaté ?

3 R. L'attitude des Croates de Vares, pas de tous, pas de tous, un certain

4 nombre avait changé de comportement dans ce sens. Je répète, Vares c'est

5 une petite ville et on se connaît tous ou plutôt on se connaissait tous à

6 l'époque. Alors, ceux qui étaient jusqu'au jour d'avant des amis, ne

7 voulait plus me voir, ne voulait plus regarder vers moi pour une raison qui

8 m'échappe. Ensuite, nous avons eu --

9 Q. Excusez-moi. Je vais vous poser les questions à cette fin. Alors, ce

10 changement d'ambiance, a-t-il quoi que ce soit à voir avec l'arrivée des 15

11 000 habitants de Kakanj à Vares ?

12 R. Probablement que si. Les gens de Kakanj eux étaient en colère contre

13 les Croates de Vares et les Musulmans de Vares aussi.

14 Q. Je vous rappelle qu'au paragraphe 4 de votre déposition, à l'intention

15 de ceux qui veulent vérifier, vous dites donc qu'il était difficile

16 d'entrer dans la ville parce que quelques 15 000 Croates de Bosnie,

17 originaires de Kakanj avaient fui vers Vares. Ils étaient en colère vis-à-

18 vis des Musulmans de Vares. C'est eux qu'ils blâmaient ainsi que l'ABiH

19 pour le fait d'avoir été expulsé de chez eux.

20 Est-ce que c'est exact ce que je viens de donner comme lecture de

21 votre déposition ?

22 R. Oui.

23 Q. [aucune interprétation]

24 R. [aucune interprétation]

25 Q. Alors, dites-nous : ces 15 000 Croates de Kakanj, où ont-il été logés ?

26 Est-ce que certains auraient été installés dans l'école ?

27 R. C'est la raison pour laquelle ils ont été en colère contre les Croates

28 de Vares parce que là aussi c'est un grand nombre de personnes qui sont

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1 arrivées à Vares et ils ont été installés dans des écoles primaires, enfin

2 dans les bâtiments des écoles, les bâtiments des écoles secondaires.

3 Ensuite, quelques étages plus bas, comme on appelle ce bâtiment qui a ce

4 type de pièces qu'en guise de chambres, et c'est là qu'on a installé -- on

5 a monté des toilettes un peu plus sur les hauteurs de la rivière et ainsi

6 de suite.

7 Q. Veuillez m'indiquer : est-ce qu'il s'agit justement des écoles et des

8 installations où vous avez été hébergé vous-même et les Musulmans qui

9 étaient en âge de combattre qui se sont faits interner le 23 octobre 1993 ?

10 R. Oui. C'est les deux écoles qui avaient à Vares à la différence près que

11 nous on était logé dans les salles de l'école primaire et de l'école

12 secondaire, et eux ils ont été installés dans des salles de classe qui

13 étaient déjà adaptées ou peut-être pas adaptées. Disons qu'on les a aménagé

14 pour ces réfugiés parce qu'on avait mis des couvertures, des matelas et

15 ainsi de suite.

16 Q. Donc, si on peut utiliser le mot d'"hériter," vous avez hérité ce qui

17 se trouvait déjà là ?

18 R. Non. Non. Dans la salle, on a rien trouvé du tout. Vous savez, par

19 exemple, que comment dirais-je ces tapis -- ces tatamis de gym, vous savez

20 ce que sait que ces tatamis ?

21 Q. Oui, oui, on sait ce que c'est les tatamis. A l'époque, enfin, mon

22 œuvre, mon temps prend fin. Je dois donner la parole à ma collègue.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Tomic.

24 Contre-interrogatoire par Mme Tomasegovic Tomic :

25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je m'efforcerai d'être le plus

26 rapide possible et je me suis levée pour poser les questions qui enchaînent

27 sur ce que vous avez déjà dit à l'interrogatoire principal. Ensuite, vous

28 avez été interrogé par le Juge Trechsel et il a posé une question à ce

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1 sujet et je crois qu'en répondant à la mienne, vous répondrez en partie à

2 ce que le Juge Trechsel avait à l'esprit lorsqu'il a posé la question ainsi

3 qu'à ce que M. Praljak avait à l'esprit.

4 Nous avons entendu dire aujourd'hui que le 27 et le 28, vous avez vu le Dr

5 Grgic, enfin vous ne saviez pas comment il s'appelait, mais vous l'avez vu

6 dans le document comment il s'appelait. Mais ce médecin est venu dans la

7 salle à l'école et qu'il a apporté de l'aide médicale et qu'il a même été

8 attaqué physiquement, n'est-ce pas ? C'est ce que vous nous avez dit ?

9 R. Cette deuxième partie est exacte, je n'ai pas dit et je n'affirme pas

10 non plus que cela s'est passé le 26 et le 27 ou le 28, quelle que soit la

11 date pour ce qui est du moment où j'ai vu le

12 Dr Drazen. Je n'ai pas mentionné la date parce que je ne sais pas quelle

13 date c'était.

14 Q. Mais vous l'avez vu arriver dans la salle -- de cet événement ?

15 R. Oui.

16 Q. Bien. Vous nous avez dit que ultérieurement on vous a transféré vers

17 Majdan; c'est bien exact ?

18 R. De l'école secondaire, on a été dans l'école primaire et de l'école

19 primaire vers Majdan.

20 Q. Alors, vous nous avez dit qu'à Majdan, vous avez été gardé par des

21 gardiens qui étaient des soldats et des soldats de la police militaire de

22 Bobovac ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous nous avez dit qu'à Majdan, on ne vous a pas battu ni malmené

25 physiquement ?

26 R. Non.

27 Q. Alors, je vous demanderais à présent de parcourir ensemble un document.

28 Vous pouvez le voir sur votre moniteur ? Je crois qu'on vous le montrera.

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1 Il s'agit du 5D 02017.

2 Vous allez obtenir la version papier également. Je crois que vous venez de

3 l'avoir. Alors, il s'agit d'un document daté du 28 octobre 1993. Cela vient

4 du commandant de la Brigade Bobovac,

5 M. Kresimir Bozic, et il s'est adressé au commandant de la police militaire

6 du HVO, d'après ce que nous avons vu aujourd'hui dans les documents cela

7 devrait à peu près se situer un jour ou deux après la visite du Dr Grgic.

8 Ce que je voudrais c'est la première phrase du document, il est dit :

9 "J'interdis le recours à des mesures de répression, en particulier les

10 mauvais traitements physiques et les mesures de coercition à l'égard de

11 personnes placées en détention ou en isolation dans le secteur de

12 responsabilité du HVO de la Brigade Bobovac du HVO."

13 Alors, d'après mes calculs, vous êtes arrivé à Majdan après le 28 parce que

14 si vous avez passé tant de jours ici puis tant de jours là-bas.

15 R. Oui, probable si j'additionne bien les jours.

16 Q. D'après moi, il découlerait de ce document qu'à Majdan l'on a respecté

17 les interdictions qui sont énoncées ici, à savoir qu'on ne vous a pas

18 malmené physiquement, n'est-ce pas ? C'est ce qu'on a déjà évoqué. Je crois

19 que vous pourriez répondre par oui ou par non.

20 R. Probablement que c'est le cas.

21 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je

22 n'ai plus de questions.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci. Monsieur Flynn, questions

24 supplémentaires pour les quelques minutes qui restent ?

25 M. FLYNN : [interprétation] J'avais une question. J'ai une question au fait

26 et je ne sais pas si M. le Témoin peut répondre.

27 Nouvel interrogatoire par M. Flynn :

28 Q. [interprétation] Monsieur Cerenic, M. Praljak vous a posé une question

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1 au cours de son contre-interrogatoire concernant la population croate qui

2 quittait Vares et vous avez dit que la population croate a été expulsée et

3 ceux qui ne voulaient pas quitter Vares mais ils ont dû. Mais ils ont été

4 forcés par leurs propres gens. Alors, vous avez dit que vous avez entendu

5 parler de la chose. Alors, dites-nous, de la bouche de qui l'avez-vous

6 entendu dire ?

7 R. A vrai dire, je n'arrive plus à me souvenir du nom de la personne mais

8 c'est encore des récits qui sont relatés de façon ouverte de la part des

9 Croates qui ont survécu, et eux-mêmes en arrivant comme réfugiés à Kiseljak

10 ce sont fait traiter : "De Balijas de Vares. On aurait dû vous tuer, à

11 Vares vous aussi." Des choses de ce genre, c'est le récit qui court de nos

12 jours encore à Vares. Mais je n'arrive pas à me rappeler de la bouche de

13 qui j'ai entendu parler de la chose pour la première fois.

14 Q. Merci.

15 M. FLYNN : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Merci, Monsieur le

16 Président.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, je vous remercie d'être venu à la demande

18 de l'Accusation témoigner à La Haye sur les faits qui se sont déroulés dans

19 votre pays. Je veux formule mon meilleur vœu pour le retour dans votre

20 pays. Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

22 [Le témoin se retire]

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais me tourner vers M. Mundis pour le planning

24 de l'audience de demain. On a pris un retard, parce qu'apparemment il y a

25 un témoin qui attendait, qu'on n'a pas pu prendre. Mais peut-être pourrait-

26 on rattraper le retard.

27 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons

28 faire de notre mieux et tout ce qu'il a de possible pour rattraper le

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1 temps. Je vais certainement consulter les autres membres de l'équipe pour

2 la matinée de demain et voir quels sont les raccourcissements que nous

3 pourrions effectuer pour entendre les six témoins qui nous restent. Nous

4 allons commencer demain matin avec le témoin qui a déjà été prévu dans

5 l'ordre chronologique et dans le calendrier et je crois que je vais voir

6 quel est le temps que nous pourrions économiser dans la mesure du possible.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Si le Témoin n'est pas protégé, vous pouvez donner

8 le nom de celui qui va venir demain ?

9 M. MUNDIS : [interprétation] Je crois qu'il a des mesures de protection qui

10 ont été prévues pour ce témoin suivant.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Bien. Nous nous retrouverons donc demain.

12 Puisque nous sommes cette semaine l'après-midi, et nous nous retrouverons

13 demain à 14 heures 15, ce qui me permettra de lire les transcripts. Merci.

14 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 20 mars 2007,

15 à 14 heures 15.

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