Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 26 novembre 2007

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

  8   les Juges. Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire et autour du

  9   prétoire. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Bien.

 11   En ce lundi 26 novembre 2007, je salue les représentants de

 12   l'Accusation, qui sont tous présents. Je salue Mmes et MM. les avocats, MM.

 13   les accusés ainsi que toutes les pertinences qui nous assistent dans notre

 14   tâche. Comme vous le savez, aujourd'hui, un témoin va venir déposer pendant

 15   deux jours, mercredi et jeudi, nous commencerons donc nos audiences à 8

 16   heures du matin, puisque nous aurons une vidéoconférence, et également un

 17   témoin qui sera contre -- qui viendra pour l'admission d'un seul document,

 18   donc, je pense que pour ce témoin, ça ira relativement vite.

 19   Avant de continuer, je vais d'abord donner la parole à M. le Greffier

 20   pour quelques numéros IC.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Plusieurs parties ont déposé

 22   plusieurs listes de documents à verser par le Témoin EA. La liste de

 23   l'Accusation recevra la cote IC 722; quant à celle de la Défense 2D, ce

 24   sera la pièce IC 723; la liste de l'équipe 3D recevra la cote IC 724; pour

 25   l'équipe 4D, ce sera la cote IC 725; alors que la liste de l'équipe 5D

 26   recevra la cote IC 726. Merci.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 28   Je voulais indiquer aux parties que, la semaine dernière, la Chambre a

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  1   rendu plusieurs décisions qui ont donc été enregistrées et que je vous

  2   invite à lire. Il y en a une importante qui était la deuxième ordonnance

  3   portant modification du calendrier. Comme vous le savez, vous ne le savez

  4   pas, la Chambre a donc décidé que la présentation des moyens à charge se

  5   terminera le 24 janvier 2008. Les arguments concernant l'article 98 bis

  6   auront lieu du 28 janvier au

  7   6 février 2008. Chacun des accusés ayant trois heures pour présenter ses

  8   arguments et l'Accusation aura neuf heures pour sa réponse. La Chambre a

  9   indiqué qu'il n'y aura aucune réplique, suite à quoi les dépôts des listes

 10   en vertu de l'article 65 ter G auront lieu au plus tard pour le 3 mars

 11   2008. La conférence préalable se tiendra le

 12   13 mars 2008, et comme vous le savez, elle aura convocation à déterminer le

 13   nombre des témoins et le temps qui sera alloué à chacun pour présenter ses

 14   témoins.

 15   Et le commencement de la présentation des moyens à décharge interviendra à

 16   compter du 17 mars 2008.

 17   Donc, je vous invite à lire cette ordonnance qui a été rédigée en français

 18   mais dont vous aurez très vitre la traduction en anglais.

 19   Par ailleurs, je vais demander, pendant quelques minutes, à

 20   M. le Greffier de passer à huis clos.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 22   le Président.

 23   [Audience à huis clos partiel]

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 24   [Audience publique]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour ce témoin, l'Accusation aura trois heures. La

 26   Défense aura trois heures et demie, étant précisé que

 27   M. Pusic aura une heure pour lui et les autres 30 minutes, charge,

 28   évidemment, aux uns et aux autres de se rétrocéder le temps selon leur bon

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  1   vouloir. Mais nous avons estimé que la Défense de M. Pusic devait avoir une

  2   heure pour le contre-interrogatoire.

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous

  5   m'entendez bien. Si c'est le cas, dites : "Je vous entends."

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je vous entends bien. M. LE JUGE

  7   ANTONETTI : Alors, Monsieur, avant de vous faire lire la déclaration

  8   solennelle, je vous demande de me donner votre nom, prénom, date de

  9   naissance.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Amor Masovic. Je suis né, le 29

 11   novembre 1955, à Sarajevo.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous une profession actuellement ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Actuellement, je suis l'un des trois

 14   directeurs de l'Institut chargé des Personnes portées disparues de Bosnie-

 15   Herzégovine et je suis vice-président de la Commission fédérale chargée de

 16   retrouver les Personnes portées disparues.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, avez-vous déjà témoigné devant un tribunal

 18   international ou national sur les faits qui se sont déroulés dans votre

 19   pays, ou bien c,'est la première fois que vous témoignez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis venu déposer deux fois devant ce

 21   Tribunal en 2001, du 20 au 22 mars; et du 24 au 25 septembre; et de même je

 22   suis venu déposer à plusieurs reprises devant le tribunal d'Etat de Bosnie-

 23   Herzégovine, devant la chambre des crimes de guerre commis en ex-

 24   Yougoslavie, devant des tribunaux cantonaux de Bosnie-Herzégovine et devant

 25   le tribunal du district, sa chambre chargée des crimes de guerre à

 26   Belgrade.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je vois que vous avez témoigné à plusieurs

 28   reprises, et notamment deux fois devant ce Tribunal. Pouvez-vous me dire

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  1   dans quel procès avez-vous témoigné ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'en mars 2001, c'était dans

  3   l'affaire le Procureur contre Milorad Krnojelac; c'est là que je suis venu

  4   déposer. En septembre de la même année, si je ne me trompe, c'était le

  5   Procureur contre Mitar Vasiljevic.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire la déclaration

  7   solennelle.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : AMOR MASOVIC [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.

 13   Bien. Alors, quelques éléments d'information sur la façon dont va se

 14   dérouler ces deux jours d'audience. Ces informations seront relativement

 15   brèves puisque vous avez déjà une grande expérience de ce Tribunal. Vous

 16   allez répondre dans un premier temps aux questions que M. Stringer va vous

 17   poser à partir donc de documents qu'il vous présentera, que vous avez dû

 18   voir avec M. Stringer pour le moins ce week-end. A l'issue de cette phase

 19   qui devrait normalement nous retenir aujourd'hui, demain à moins qu'on

 20   commence dans le courant de l'après-midi, la Défense, qui est située à

 21   votre gauche, il y a beaucoup d'avocats mais, en réalité, un avocat

 22   représente un accusé. Ceux-ci vous poseront également des questions dans le

 23   cadre du contre-interrogatoire. Les quatre Juges qui sont devant vous

 24   pourront également vous poser des questions, en règle générale. Il vaut

 25   mieux que nous posons nos questions une fois que les uns et les autres

 26   aient terminé le champ de leur question. mais parfois compte tenu du fait

 27   que le document est sous les yeux du témoin, nous préférons intervenir tout

 28   de suite pour éviter à avoir à perdre du temps à retrouver le document. En

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  1   règle générale, quand nous intervenons comme cela, ce sont dans le cadre

  2   dit des questions de suivi.

  3   Comme vous le savez, nous nous arrêterons toutes les heures et demie pour

  4   faire un break de 20 minutes. Si, à un moment donné, vous ne vous sentez

  5   pas bien, n'hésitez pas à nous le faire savoir. Si vous voulez poser une

  6   question aux Juges, n'hésitez pas non plus à lever la main pour nous poser

  7   la question. Si vous ne comprenez pas le sens d'une question, demandez à

  8   celui qui vous pose la question de la reformuler. Voilà comment va se

  9   dérouler cette audience. Je tiens également à vous informer qu'en fonction

 10   des questions posées et des réponses posées, s'il arrivait à un moment

 11   donné que votre réponse d'après vous serait susceptible de vous incriminer

 12   parce qu'à l'époque, vous exerciez également certaines responsabilités. A

 13   ce moment-là, vous pouvez dire que vous ne voulez pas répondre à la

 14   question. Mais dans cette hypothèse extraordinaire que nous n'avons jamais

 15   rencontrée, la Chambre, à ce moment-là, pourrait vous inviter néanmoins à

 16   répondre. Voilà ce que j'avais à vous dire.

 17   Et je cède la parole au représentant de l'Accusation qui va commencer

 18   l'interrogatoire principal.

 19   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 20   Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à la

 21   Défense et à toutes les personnes qui nous aident autour ce prétoire.

 22   Interrogatoire principal par M. Stringer :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Masovic, et bienvenue.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Vous avez déjà reçu une introduction de la part du Président et

 26   réponses à ces questions. Vous avez dit que, pour le moment, vous

 27   travaillez à l'Institut chargé des Personnes portées disparues en Bosnie-

 28   Herzégovine; est-ce exact ?

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  1   R.  Oui. C'est en parallèle que je travaille comme l'un des trois

  2   directeurs de cet institut, et je suis le vice-président de la Commission

  3   fédérale en même temps de l'une des deux entités de Bosnie-Herzégovine,

  4   chargée des Personnes portées disparues.

  5   Q.  Permettez-moi de vous poser quelques questions à propos de ces deux

  6   commissions, celle qui est au niveau de l'Etat, à l'Institut des Personnes

  7   portées disparues, mais aussi au niveau fédéral dont vous venez de parler.

  8   Pourriez-vous dire aux Juges ce qu'elles font ces deux entités et quelles

  9   sont les différences qu'il y a entre elles et surtout aussi quelle est la

 10   responsabilité des mandats qui leur ont été confiés à ces commissions où

 11   vous travaillez ?

 12   R.  Par les accords de Paix de Dayton, il y a été prévu que deux entités

 13   existent en Bosnie-Herzégovine, la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la

 14   Republika Srpska. Les gouvernement de ces deux entités au début de l'année

 15   1996 se sont dotés de décisions portant création de Commissions chargées de

 16   repérer les Personnes portées disparues. C'était indispensable parce que la

 17   Bosnie-Herzégovine se trouvait dans une situation où le nombre de personnes

 18   portées disparues a été très important suite à l'agression contre la

 19   Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait d'environ 30 000 personnes.

 20   Par les accords de paix de Dayton, il a été prévu d'ailleurs que la

 21   question des personnes portées disparues soit résolue, alors, les

 22   gouvernements ont pris des décisions créant ces commissions. La Commission

 23   qui a été créée par le gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine

 24   de l'époque était la Commission d'Etat chargé des Personnes portées

 25   disparues, et moi-même, j'ai été nommé à sa tête son président et c'est ce

 26   que je suis resté jusqu'au début de l'année passée car c'est, à ce moment-

 27   là, que cette Commission d'Etat a cessé d'exister. En même temps, le

 28   gouvernement de la Republika Srpska a créé sa propre Commission chargée des

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  1   Personnes portées disparues, et le siège de celle-ci était dans la ville de

  2   Banja Luka. Quant au mandat de ces deux commissions, il était identique

  3   d'une certaine façon, mais il y avait aussi des différences. Qu'est-ce qui

  4   était le même ? Les deux Commissions étaient chargées d'essayer de

  5   retrouver les Personnes portées disparues. J'entends par là à la fois des

  6   civils et des militaires, donc, les militaires portés disparus dans des

  7   actions ou l'opération militaire les personnes également qui étaient des

  8   ressortissants des pays voisins, de la Serbie, du Monténégro, et de la

  9   République de Croatie, et qui étaient portées disparues sur le territoire

 10   de l'ex-République de Bosnie-Herzégovine.

 11   Quant aux différences, enfin, une différence essentielle pour ce qui est

 12   des mandats de ces deux commissions, la Commission de l'Etat dont j'étais

 13   président, et d'autre part, la Commission de la Republika Srpska, cette

 14   différence était que la Commission d'Etat, pour sa part, a tenté -- sans y

 15   parvenir toujours, je dois dire, a tenté donc de ne pas faire de différence

 16   pour ce qui est d'appartenance ethnique des personnes portées

 17   disparues;d'autre part, la Commission de la Republika Srpska ne recherchait

 18   que des personnes qui étaient d'appartenance ethnique serbe. La Commission

 19   d'Etat a tenté dans le cadre de son mandat, dans le cas des enquêtes des

 20   exhumations de s'occuper de toutes les personnes jusqu'au juin et juillet

 21   1996, et c'est à ce moment-là qu'on a signé, à Banja Luka, une sorte

 22   d'accord, accord sur des exhumations entre les deux entités. Il a donné le

 23   droit à ces deux commissions de pouvoir procéder à des exhumations des

 24   fosses communes ou individuelles sur le territoire de l'autre entité. En

 25   1997, on a mis sur pied la Commission fédérale chargée des Personnes

 26   portées disparues et de jure c'est en 1997 qu'elle a été créée, mais de

 27   fait, elle n'a commencé à fonctionner que légèrement plus tard. Autrement

 28   dit, à peu près en 2000, c'est à ce moment-là le gouvernement de la

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  1   Fédération s'est mis à la financer.

  2   Q.  Très bien. Permettez-moi d'intervenir à ce stade car je voudrais une

  3   précision, vous venez de mentionner la Commission fédérale formée en 1997,

  4   c'est une commission qui se compose de représentants de la Communauté

  5   croato-musulmane, n'est-ce pas, en Bosnie-Herzégovine ?

  6   R.  C'est ainsi -- il en est ainsi.

  7   Q.  Fort bien. Revenons, si vous voulez bien, à l'Institut s'occupant

  8   des Personnes portées disparues auxquelles vous vous êtes associé

  9   aujourd'hui, cet institut, qu'on appelait MPI; est-ce que c'est une entité

 10   établie plus récemment en vertu d'une loi d'Etat de Bosnie-Herzégovine et

 11   qui a pour vocation de fédérer, de rassembler les trois groupes ou nations

 12   ou groupes ethniques, de même que la Commission internationale des

 13   Personnes portées disparues; est-ce exact ?

 14   R.  L'accord qui portait sur la co-création de l'institut dont vous parlez

 15   a été signé entre le gouvernement de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire le

 16   conseil des ministres, et d'autre part des représentants de la Commission

 17   internationale pour des Personnes portées disparues le 30 août 2005. Et

 18   puisqu'il s'agissait là d'un accord international, il fallait qu'il soit

 19   ratifié par le parlement de Bosnie-Herzégovine, et cette ratification est

 20   intervenue quelques mois plus tard. Je dirais que c'était le 28 novembre

 21   2005, et à partir de ce moment-là, c'est-à-dire à partir du mois de

 22   novembre 2005, nous avons la création de cet Institut chargé des Personnes

 23   portées disparues. Aujourd'hui, ces directeurs sont nommés, son conseil de

 24   surveillance, au conseil d'administration, mais des employés n'ont toujours

 25   pas été engagés et on s'attend à ce que cela se passe dans quelques

 26   semaines à partir du moment où le gouvernement de Bosnie-Herzégovine aura

 27   adopté des documents portant sur le fonctionnement de cet institut.

 28   Q.  Très bien. Est-il exact de dire, Monsieur Masovic, qu'un titre ou un

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  1   autre, vous avez été vraiment en prise direct à haut niveau avec la

  2   Commission qui est responsable de localiser et d'identifier des Personnes

  3   portées disparues sur le territoire de Bosnie-Herzégovine au cours des

  4   années qui se sont écoulées depuis la fin du conflit en 1995 ?

  5   R.  Oui, c'est cela. Je suis président de cette Commission au niveau de

  6   l'Etat. Je préside ou je suis son vice-président au niveau fédéral, et je

  7   suis l'un des trois directeurs de l'Institut chargé des Personnes portées

  8   disparues depuis mars 2006. Je suis vice-président depuis --

  9   Q.  -- compris, pour le moment, vous êtes aussi membre du parlement fédéral

 10   de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui. Je suis député de l'une des deux chambres du parlement de la

 12   Fédération.

 13   Q.  Si vous voulez bien, nous allons revenir en arrière pour que vous

 14   décriviez en quelques mots à la Chambre le rôle que vous avez joué avant la

 15   fin du conflit pour ce qui est des prisonniers de guerre, de l'échange de

 16   prisonniers et les tentatives déployées pour savoir où se trouvaient les

 17   personnes disparues avant la fin du conflit. Est-ce que vous avez participé

 18   à ces efforts, et pourriez-vous nous dire dans quelle mesure vous l'avez

 19   fait ?

 20   R.  Au début de l'agression contre la République de Bosnie-Herzégovine,

 21   autrement dit, dès le mois d'avril 1992, le gouvernement de l'époque de la

 22   République de Bosnie-Herzégovine a créé une commission qui a été baptisée

 23   Commission d'Etat chargée des Echanges de prisonniers de guerre et des

 24   personnes privées de liberté, et chargée de dresser la liste des personnes

 25   blessées et des personnes portées disparues. Je suis devenu membre de cette

 26   commission pour la deuxième moitié du mois d'août 1992, et pendant quelques

 27   temps, j'ai été son membre; j'ai été également pendant un certain temps le

 28   vice-président de cette commission, puis pendant la dernière partie, donc,

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  1   à la dernière phase, avant les accords de Dayton, j'ai été président en

  2   exercice de cette Commission d'Etat. Le mandat de celle-ci découlait de son

  3   nom. Il fallait que cette Commission se charge que le plus grand nombre de

  4   prisonniers de guerre ou de personnes ayant été privées de liberté, donc,

  5   des civils, qui s'étaient trouvés dans des camps ennemis ou dans des

  6   prisons, qu'ils soient libérés par le biais d'un processus d'échange, et

  7   puis, l'autre mission de cette commission était d'identifier toutes les

  8   personnes tuées, blessées et portées disparues pendant le conflit.

  9   Q.  Bien. Peut-on dire que Sarajevo c'est votre ville natale que c'est chez

 10   vous que c'est là que vous étiez basé et que c'était de là que vous

 11   travailliez pas toute la durée du conflit ainsi qu'après ?

 12   R.  Oui, c'est exact. Sarajevo c'est aussi bien le siège de toutes ces

 13   commissions, aussi bien pendant la période de la guerre qu'après, mis à

 14   part la commission que j'ai évoquée qui avait son siège à Banja Luka, dans

 15   la Republika Srpska.

 16   Q.  Je vous demande de vous remémorer l'été et l'automne 1993, est-ce à ce

 17   moment-là que, vous personnellement, vous avez commencé à participer à des

 18   échanges de prisonniers, que vous vous êtes intéressé à des questions de

 19   prisonniers entre l'armija et le HVO, donc, les Musulmans et les Croates du

 20   conflit ?

 21   R.  Pas directement. Je n'ai pas participé aux échanges de façon directe,

 22   mais on peut dire que j'y ai participé de façon indirecte, à savoir que, de

 23   temps en temps, j'ai été informé par les commissions qui faisaient partie

 24   de la Commission d'Etat qui s'appelait les Commissions départementales,

 25   donc, j'ai été informé des échanges qui ont eu lieu à un niveau local entre

 26   l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine et le HVO. Donc, ceci a duré

 27   à peu près jusqu'en automne 1993 quand j'ai commencé à participer

 28   directement à la libération des prisonniers entre l'ABiH et le HVO.

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  1   Q.  Très bien. Ce qui veut dire qu'avant que n'arrive l'automne de 1993,

  2   vous vous concentriez surtout et voire exclusivement sur les questions de

  3   prisonniers par rapport au conflit avec les Serbes; est-ce exact ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Est-ce que vous connaissez un certain Berislav Pusic ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Maître Ibrisimovic.

  7   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense

  8   qu'il y a une erreur qui s'est glissée au compte rendu d'audience. M.

  9   Masovic a dit qu'il recevait ses informations de façon -- enfin, de temps

 10   en temps, je parle des informations venues des Commissions départementales,

 11   alors que dans le compte rendu d'audience, on peut lire qu'il recevait de

 12   façon régulière ces informations.

 13   M. STRINGER : [interprétation] Je ne pense pas que c'est ce qui se trouve

 14   tout du moins dans le compte rendu en anglais. Là, j'examine la ligne 1,

 15   page 15 où le témoin a simplement dit qu'il avait participé de façon

 16   indirecte en recevant des renseignements de ces commissions. Je ne sais pas

 17   si le témoin a dit qu'il avait reçu des informations, de temps en temps,

 18   tout ça ne me semble pas tout particulièrement important. Bien sûr, je

 19   pourrais demander des précisions au témoin.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Je pensais que vous lui poseriez la question mais,

 21   comme vous ne lui avez pas posée, je vais la poser.

 22   Monsieur, on comprend qu'à partir du mois d'août 1992, vous avez à Sarajevo

 23   la charge de vous occuper des échanges des prisonniers. Mais, moi, ce qui

 24   m'intéresse c'est de savoir avant août 1992, que faisiez-vous ? Comment se

 25   fait-il que vous ayez été nommé en août 1992 ? Que faisiez-vous avant le

 26   mois d'août 1992 ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant le mois d'août 1992, j'ai été avocat à

 28   Sarajevo.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous étiez avocat à Sarajevo. Qui vous a nommé

  2   en août 1992 ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, au mois d'août, j'ai été nommé au

  4   poste de membre de la Commission d'Etat chargée de l'Echange des

  5   prisonniers de guerre, et c'est le gouvernement de Bosnie-Herzégovine qui

  6   m'a nommé à ce poste.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci pour ces précisions.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Q.  Monsieur le Témoin --

 10   R.  Vous m'avez demandé si je connaissais un certain Berislav Pusic; la

 11   réponse est affirmative.

 12   Q.  Quand avez-vous rencontré M. Pusic pour la première fois, vous

 13   personnellement ?

 14   R.  Je pense que nous nous sommes rencontrés pour la première fois à

 15   Medjugorje dans la base du Bataillon espagnol; à l'époque, c'était la

 16   FORPRONU et ceci a eu lieu le 29 décembre 1993.

 17   Q.  Très bien. Vous avez sous les yeux un classeur avec des pièces que nous

 18   avons eues l'occasion d'examiner pour la plupart d'entre elles vous et moi.

 19   Prenons la pièce 7417. Il s'agit de la cote P 7417.

 20   Vous avez ici un écran, un rapport qui porte la date du

 21   31 décembre 1993 et qui porte le nom, la signature de M. Pusic. Il fait

 22   état d'une réunion que vous avez eue avec M. Pusic le

 23   29 décembre. Pourriez-vous dire aux Juges dans quelles circonstances cette

 24   réunion s'est préparée ce qui a en fait amené cette réunion, ce que vous

 25   avez appris pourquoi, ce jour-là, vous avez rencontré

 26   M. Pusic à Medjugorje ?

 27   R.  Donc, quand on parle de circonstances qui ont fait que je me suis rendu

 28   à Medjugorje, on peut le voir en partie aussi dans le document en question,

Page 25015

  1   c'est-à-dire qu'après les négociations, plusieurs tentatives de trouver un

  2   accord sur l'échange des prisonniers de guerre à un niveau local, et quand

  3   je parle d'un niveau local, là, il s'agit de Mostar, Jablanica, Prozor,

  4   Konjic et Capljina, donc, des municipalités de l'Herzégovine. D'une

  5   certaine façon, les négociations au niveau local ont été bloquées en

  6   quelque sorte et trois questions contentieuses se sont posées entre l'ABiH

  7   et le HVO, mis à part la question qui était là de façon permanente à savoir

  8   la question des camps, autrement dit, des prisons sur le territoire de

  9   Bosnie-Herzégovine contrôlées par le HVO.

 10   Donc, ces trois nouvelles questions qui ont été la cause immédiate de mon

 11   voyage à Medjugorje ont été comme suit : la question des trois prisonniers,

 12   membres de l'ABiH, qui ont été capturés le

 13   10 mai 1993 dans le bâtiment de Vranica, et on a enregistré leur

 14   arrestation, on les a présentés pas seulement à la télévision croate dans

 15   la région, mais dans le monde entier, et ceci a fait que l'ambiance était

 16   vraiment très tendue sur le territoire de Mostar, le territoire contrôlé

 17   par l'ABiH, parce que les parents de ces prisonniers ont demandé que le

 18   problème soit résolu.

 19   La deuxième raison --

 20   Q.  Excusez-moi, Monsieur Masovic, je vous écoute et j'écoute aussi les

 21   interprètes. Ils n'ont encore rien dit mais il se pourrait que vous leur

 22   prêtiez assistance si vous parliez un peu plus lentement de façon à ce que

 23   les interprètes captent chacun de vos mots et les interprètes dans une

 24   langue que nous comprenons. Excusez-moi de vous interrompre. Vous étiez en

 25   train --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, je voudrais intervenir. Monsieur Masovic, en

 27   vous posant la question, j'ai su que vous aviez été avocat et vous êtes

 28   maintenant député, donc, vous êtes quelqu'un qui sait de quoi il parle. Le

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  1   Procureur vous a présenté un document qui en anglais indique "échange des

  2   détenus." En vous écoutant, à un moment donné, vous parliez des

  3   "prisonniers de guerre." Alors, moi, ce que je veux savoir : c'est que

  4   lorsque que vous évoquez "l'échange de ces prisonniers," s'agit-il de

  5   prisonniers militaires, ou de prisonniers militaires et des prisonniers

  6   civils ? Parce que, dans le document que vous avez -- dans la traduction

  7   anglaise qui peut-être n'est pas fidèle, mais il y a marqué : "La

  8   Commission pour l'Echange des détenus et d'autre personnes." Donc, je

  9   présume qu'il y a autres personnes, ça concerne les civils. Alors, quand

 10   vous répondez aux questions faites-nous bien le distinguo entre les

 11   prisonniers de guerre qui sont normalement des militaires qui ont été

 12   capturés, et puis les prisonniers qui auront un statut civil pour qu'on

 13   sache où l'on va.

 14   Je redonne la parole à M. Stringer.

 15   M. STRINGER : [aucune interprétation]

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   Excusez-moi, vous avez dit qu'il y avait des négociations qui étaient

 18   arrivées, en fait, un peu à une impasse, c'était à un niveau différent.

 19   Est-ce que vous pourriez approfondir ce propos ? Dans quelle mesure est-ce

 20   qu'il y avait eu des communications et des négociations qui s'étaient

 21   écoulées avant que vous ne commenciez à intervenir dans la zone de Mostar

 22   pour ce qui est de l'échange des prisonniers, d'après ce que vous saviez,

 23   qui négociait du côté de l'armija et des Musulmans ?

 24   R.  Avant de répondre directement à la question posée, avec votre

 25   permission, Monsieur le Président, je voudrais répondre à la constatation

 26   que vous venez de faire par rapport au statut de prisonniers de guerre.

 27   Dorénavant, à chaque fois que je vais parler de prisonniers ou de

 28   prisonniers de guerre, je vais à chaque fois faire référence aux deux

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  1   catégories de personnes, à savoir les prisonniers de guerre dans le sens de

  2   la troisième convention de Genève, et aux civils dans le sens de quatrième

  3   convention de Genève, puisque les deux catégories étaient placées dans les

  4   camps, ou dans les prisons, souvent dans les mêmes lieux, dans les mêmes

  5   salles, qu'ils ont été traités exactement de la même façon le plus souvent

  6   par les autorités du camp ou de la prison en question. Depuis le début du

  7   mois d'avril 1992, jusqu'aux accords de Dayton, à chaque fois que je

  8   négociais soit avec le côté serbe ou le côté croate, qui portait sur les

  9   deux catégories de prisonniers. Dorénavant, dans toutes les réponses que je

 10   vais vous donner, quand je vais parler des prisonniers, je vais parler des

 11   prisonniers relevant des deux catégories.

 12   Puis, la question du Procureur donc dans l'introduction de ma déposition,

 13   j'ai dit que le premier contact direct, ayant rapport avec l'échange des

 14   prisonniers sur le territoire de l'Herzégovine, a eu lieu le 19 octobre

 15   1993. C'est à ce moment-là que je faisais partie d'une délégation mixte des

 16   officiels du gouvernement et qu'ils ne faisaient pas partie du gouvernement

 17   de haut rang, ou il y avait M. Silajdzic qui était à l'époque le ministre

 18   des Affaires extérieures, ensuite, il y avait M. Ivo Komsic, M. -- le père,

 19   Petar Andjelovic, et au niveau local, j'y étais. Il y avait aussi un

 20   représentant de la Commission originaire de Konjic. Nous avons parlé de

 21   l'échange de prisonniers entre l'Herzégovine et Konjic. Cet échange

 22   concernait à peu près 800 prisonniers qui ont été libérés le 19 octobre

 23   1993.

 24   Lors de ces négociations du côté croate, vous aviez les représentants du

 25   HVO de Konjic, personne de Mostar. Les gens de Konjic. A cette occasion-là,

 26   l'armée a libéré je pense 309 prisonniers de Konjic alors que le HVO a

 27   libéré à peu près 550 personnes de l'Herzégovine ainsi que deux prisons à

 28   proximité de Konjic, y compris ce qu'on appelait la délégation de Tuzla,

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  1   c'était une délégation qui comptait neuf civils parmi lesquels se

  2   trouvaient un homme de foi musulman, un mufti de Tuzla, M. Efendi Husein

  3   Kavazovic. Je vais revenir sur les raisons de mon voyage à Medjugorje

  4   puisque je vous ai donné qu'une seule raison qui relevait du groupe de

  5   Vranica. La deuxième raison --

  6   Q.  Et avant que vous ne poursuiviez - désolé d'interrompre - vous avez

  7   peut-être mal compris ma dernière question. Il serait utile que je vous

  8   rappelle le troisième paragraphe du document que vous avez sous les yeux, à

  9   ce paragraphe, M. Pusic écrit ceci : "La Commission au niveau de la

 10   République de l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine n'a pas été

 11   complément informée." Il dit que : "Il y a une nouvelle réunion qui est

 12   prévue début janvier," et je voulais simplement vous demander ceci

 13   rapidement. Ceci indique que M. Pusic et d'autre avaient entamé des

 14   négociations avant que vous, vous n'interveniez. Je voulais simplement vous

 15   demander si ceci correspondait à ce que vous ayez dit auparavant à propos

 16   des négociations qu'il y avait lieu dans le secteur de Mostar à un niveau

 17   plus bas que celui de M. Pusic.

 18   R.  Oui, exactement. Ce qui est écrit dans le troisième paragraphe est tout

 19   à fait exact. Les négociations ont eu lieu à un niveau local, par exemple,

 20   Mostar Est et Ouest, et ces négociations-là étaient assez réussies. Il y a

 21   eu que quelques échanges de prisonniers, il y a eu quelques échanges de

 22   corps des personnes, des cadavres, et la raison pour laquelle je me suis

 23   rendu à Medjugorje c'était justement cette impasse.

 24   Q.  Pour ce qui est des questions qui, en fait, ont débouché sur cette

 25   impasse sur ces difficultés, il y avait quelque chose que vous avez déjà

 26   évoqué, et sur quoi nous reviendrons avec plus de détails; c'est la

 27   question des soldats capturés au bâtiment de Vranica. Je pense qu'il y

 28   avait deux autres problématiques dont vous vouliez parler. Pourriez-vous

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  1   dire rapidement aux Juges de ces deux autres sujets qui avaient provoqué

  2   cette impasse dans les négociations ?

  3   R.  La deuxième raison pour cette impasse dans les négociations relevait de

  4   l'emprisonnement de 70 ou 73. Les chiffres ne sont pas toujours les mêmes

  5   membres du HVO ainsi que de quelques membres du HV en Herzégovine qui ont

  6   été détenus, placés en détention dans la prison de l'ABiH dans Mostar Est.

  7   Le côté croate, ou le HVO insistait pour que l'on libère -- qu'il soit

  8   libéré. Mais, en quelque sorte, toutes les négociations futures, portant

  9   sur la libération de ces personnes, étaient conditionnées. Cela venait de

 10   Mostar Est, par la possibilité de connaître au préalable le sort des

 11   prisonniers de Vranica, c'est-à-dire que les familles des prisonniers de

 12   Vranica faisaient des pressions extraordinaires sur le commandement du

 13   4e Corps de l'ABiH pour que, pendant les négociations, on demande -- on

 14   obtient la libération de ces membres de l'armée qui ont été vus vivants

 15   pendant sur les écrans de télévision. Donc, c'était en quelque sorte un des

 16   hommes.

 17   Q.  La question de libération des prisonniers de l'HV ou du HVO de Mostar

 18   Est était subordonnée à ce que la même question, question similaire soit

 19   résolue à Vranica. Il faut dire, oui ou non, pas simplement hocher la tête.

 20   R.  C'est exact. A cette époque-là, c'étaient les deux choses qui étaient

 21   en quelque sorte interdépendantes. La troisième raison pour laquelle je m'y

 22   suis rendu, c'était le blocus de deux hélicoptères médicaux de l'ABiH qui a

 23   eu lieu à Medjugorje. Il s'agissait des hélicoptères sanitaires qui étaient

 24   là pour transporter les blessés entre la Bosnie centrale Zenica et Split,

 25   pour qu'ils y soient soignés, ou transférés dans d'autres pays pour qu'ils

 26   y soient soignés. Ces hélicoptères, si mes souvenirs sont exacts, ont été

 27   bloqués par la force à terre à Medjugorje; on les a forcés à atterrir.

 28   Après cela, les familles de ces 70 Croates emprisonnés à Mostar Est ont

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  1   bloqué ces hélicoptères. Le personnel à bord, ils étaient au nombre de

  2   huit, y compris une infirmière. Elle a été évacuée de façon urgente dans la

  3   base espagnole, du Bataillon espagnol à Medjugorje, alors que les

  4   hélicoptères sont restés sur un plateau peut-être que c'était une cour

  5   d'école, je ne suis pas sûr. Dans les familles croates, ils disaient que

  6   les hélicoptères ne pourraient partir que si les membres de leur famille

  7   soient libérés de la prison à Mostar Est.

  8   Encore une raison pour laquelle je me suis rendu à Medjugorje,

  9   relever de la mission que j'ai reçue directement du président de la

 10   présidence de l'époque, donc, de la République de Bosnie-Herzégovine. M.

 11   Izetbegovic, à savoir d'essayer d'établir quel était le sort et d'obtenir

 12   la libération de l'adjoint du commandant chargé de la logistique du 4e

 13   Corps de l'ABiH, il s'agissait de M. Mirsad Mahmutcehajic, à l'époque, son

 14   sort n'était pas connu, on ne savait pas s'il était vivant ou non.

 15   Il s'agissait aussi de M. Zijad Demirovic qui avait un poste de haut

 16   niveau au niveau du parti de SDA à en Herzégovine. A l'époque, on ne

 17   connaissait pas quel était son sort non plus. Donc, c'est pour ces raisons-

 18   là -- pour toutes ces raisons-là que je me suis rendu à Medjugorje, le 29

 19   décembre 1993, pour y participer aux négociations, toutes les raisons que

 20   je viens de vous évoquer.

 21   Q.  On a l'impression à vous écouter qu'il y a toutes ces quatre

 22   questions, Vranica, les hélicoptères, les prisonniers du HVO, M.

 23   Mahmutcehajic et Demirovic; en fait, que toutes ces questions s'étaient

 24   retrouvées imbriquer, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est vrai. Au cours de toutes ces négociations, les choses sont

 26   devenues tellement complexes que tout cela est devenu lier et conditionner

 27   les unes par les autres. Vous avez parlé des quatre raisons, mais je pense

 28   que la première raison et la raison la plus importante c'était de savoir

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  1   exactement quelle était la situation dans les camps et dans les prisons du

  2   HVO en Bosnie centrale et en Herzégovine, le nombre de prisonniers, leur

  3   situation. Ensuite, il y avait les autres raisons que j'ai énumérées même

  4   si lors des négociations à Medjugorje nous avons évoqué aussi quelques cas

  5   particuliers.

  6   Par exemple, Mme Mersa Krzic, je pense qui avait été arrêtée. C'était

  7   la directrice de l'usine Natron de Maglaj, et puis, je pense que M. Sandrk

  8   avait participé à ces négociations de l'autre côté, et je pense qu'il a

  9   posé la question concernant le sort d'à peu près 200 Croates de Bugojno

 10   qui, d'après ce qu'il disait, avaient été amenés quelque part en direction

 11   de Gornje Vakuf. Je pense qu'il voulait que je lui donne une réponse quant

 12   au sort de ces personnes, et puis, il y a quelques autres cas particuliers

 13   dont on a discuté.

 14   Q.  -- d'examiner avec vous le paragraphe suivant. Ceci aborde un tant soit

 15   peu la question déjà soulevée par le Président de la Chambre. On dit, à

 16   propos de M. Pusic, qu'il demande que lui soit soumise une liste des

 17   personnes détenues qui sont d'appartenance musulmane, qui sont

 18   emprisonnées; est-il dit dans le document "sous votre contrôle" ? C'est un

 19   document adressé à la région militaire de Tomislav, Brigade de Rama. Un

 20   commentaire, s'il vous plaît, est-ce que pendant cette période, il y avait

 21   des périodes d'appartenance musulmane que ce soit des civils ou des soldats

 22   qui étaient détenus par le HVO à ces différents endroits ?

 23   R.  Je ne saurais répondre de façon précise puisque, immédiatement avant la

 24   réunion de Medjugorje qui a eu lieu le

 25   29 décembre 1993, plus que 3 000 prisonniers ont été libérés suite à un

 26   ordre venu enfin d'après ce que l'on pensait, à l'époque, venu de M.

 27   Tudjman, le président de la République de Croatie qui a été mis en œuvre

 28   par M. Mate Boban -- ou plutôt, par la Commission chargée de l'Echange des

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  1   prisonniers à la tête de laquelle se trouvait M. Pusic. Donc, 3 000 ou plus

  2   ont été déjà libérés à ce moment-là. Nous n'avions pas une vision claire du

  3   restant des prisonniers dans les camps de l'Herzégovine, ou ailleurs, à

  4   Livno, Kaonik, Kiseljak, Kresevo, et cetera. Donc, je pense que à l'époque

  5   on pensait qu'il y avait encore à peu près 700 plus, plus que 700

  6   prisonniers qui étaient encore détenus dans les prisons dans les camps du

  7   HVO.

  8   Q.  J'aimerais que nous examinions maintenant un autre document du

  9   classeur, la pièce 6929. Monsieur Masovic, il ne s'agit pas d'un rapport ou

 10   d'un document que vous auriez élaboré ou que vous auriez vu à l'époque,

 11   mais il se trouve dans ce document certains points dont j'aimerais discuter

 12   avec vous.

 13   Vers le milieu de la première page, prenons l'anglais qui est

 14   l'original, il est fait référence à une réunion qui s'est tenue à

 15   Medjugorje. Il ne semble que vous ayez assisté, mais peut-être aurez-vous

 16   un commentaire à apporter sur certains des points. On fait référence au

 17   fait que M. Pusic a dit qu'il n'était pas prêt à accepter un échange de

 18   tous contre tous comme les appelait. Vous voyez ?

 19   "Lors de la deuxième réunion avec le président du comité ou la Commission

 20   chargée de l'Echange des prisonniers du HVO, M. Pusic a informé la MOCE

 21   qu'en l'espèce, il n'était pas prêt à accepter un échange complet car ça

 22   voudrait dire que le HVO devrait libérer 2 500 Musulmans pour ne recevoir

 23   en contrepartie que 70 prisonniers du HVO."

 24   Quelques lignes plus loin, il est fait référence, je pense, à la question

 25   des hélicoptères que vous avez déjà décrites. Je vois bien que ce document

 26   porte une date qui correspond à un mois avant votre début d'activités, le

 27   28 novembre 1993. Compte tenu de ceci, je vous demande deux choses : quelle

 28   était la position du HVO telle que vous l'avez découverte après avoir pris

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  1   vos fonctions pour ce qui était de ces échanges, tous contre tous ? Qu'est-

  2   ce que ça veut dire exactement cela ?

  3   R.  M. Pusic, c'est à peu près ce qu'il dit dans ce document, tous pour

  4   tous. En d'autres termes, le rapport des personnes libérées d'un côté et de

  5   l'autre serait "drastiquement," entre guillemets, préjudiciable au Conseil

  6   croate de Défense. Pourquoi ? Parce que, dans les camps et les prisons du

  7   HVO depuis le tout début du conflit et ce jusqu'aux accords de Washington

  8   puis après l'accord de Washington également, pendant tout ce temps-là, il y

  9   avait pour l'essentiel des civils enfin quoi qu'il en soit il y avait

 10   considérablement plus de civils que de membres des forces armées de la

 11   République de Bosnie-Herzégovine, en l'occurrence, membre de l'ABiH. Si le

 12   principe, tous pour tous, était admis pour le HVO, ceci reviendrait à un

 13   par rapport à dix pour -- donc pour le HVO, dix libérés du côté du HVO,

 14   donc, de Musulmans de Bosnie, libérés par le HVO et en revanche, en

 15   contrepartie, un seul membre du HVO ou un seul Croate serait libéré d'autre

 16   part. Cet accord, tout simplement, n'était pas favorable au HVO. M. Pusic

 17   ne s'est pas contenté de le faire une seule fois, à plusieurs reprises,

 18   lors des réunions il en a parlé. Certes, il lui est arrivé de souligner

 19   qu'il souhaitait que les échanges se fassent selon le principe tous pour

 20   tous, mais au moment où on en venait à la mise en œuvre de ces accords, ces

 21   accords pour tous pour tous, il y avait toujours des obstructions, toujours

 22   de nouvelles conditions étaient posées, et des questions supplémentaires

 23   qui finalement reportaient à plus tard ou empêchaient l'exécution de ces

 24   accords tous pour tous.

 25   Q.  Pour commencer avec votre première réunion du 29 décembre 1993, est-ce

 26   que vous pourriez -- si vous pouvez expliquer de manière générale à la

 27   Chambre de première instance quel était le nombre de réunions que vous avez

 28   eues avec M. Pusic, portant sur les échanges des prisonniers; combien de

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  1   réunions pendant cette période qui a précédé la fin du conflit en Bosnie-

  2   Herzégovine en novembre 1995 ? Donc, je voudrais que, dans votre

  3   témoignage, vous nous parliez tout d'abord de la période avant le conflit,

  4   puis la période après le conflit. Donc cette période qui précède la fin du

  5   conflit, vous avez eu combien de réunions avec M. Pusic portant sur

  6   l'échange des prisonniers ?

  7   R.  Donc, jusqu'à la signature de l'accord de paix, portant donc sur la

  8   Bosnie-Herzégovine, l'accord de paix de Dayton signé à Paris, je pense

  9   qu'il y a eu au sujet de l'échange des prisonniers de guerre ou au sujet

 10   des personnes portées disparues, donc question qui s'est posée après

 11   l'accord de Washington, je pense qu'il y a eu plus de 50 réunions. Il faut

 12   tenir compte du fait qu'il y a eu des réunions qui ont duré plusieurs

 13   jours, deux voire trois jours. Donc, il est arrivé que les réunions

 14   s'interrompent, se poursuivent le lendemain, et puis que le lendemain, elle

 15   ne se termine pas, donc, elle ne se termine que le troisième jour. Je pense

 16   qu'il y a eu plusieurs -- plus de 50 réunions de ce type et elles se sont

 17   tenues à différents endroits, y compris à Medjugorje, le plus souvent là-

 18   bas à Medjugorje. Mais aussi à Kiseljak, à Sarajevo, à Gornji Vakuf, à

 19   Tuzla, et il me semble aussi qu'après Dayton, il y en a eu quelques-unes à

 20   l'extérieur de Bosnie-Herzégovine mais c'était après Dayton.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a eu un changement pour ce qui

 22   est des objets sur lesquels ont porté ces réunions que vous avez eues avec

 23   M. Pusic pendant que le conflit était encore en cours par rapport à la

 24   période qui a suivi, donc, la fin du conflit ?

 25   R.  Pour vous répondre en quelques mots, mais de manière précise, et pour

 26   vous illustrer un petit peu mon propos, je vais dire la chose suivante :

 27   pendant la guerre, donc, jusqu'à la signature de l'accord de Washington,

 28   s'agissant de l'ABiH et du HVO, ces réunions se sont focalisées sur les

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  1   prisonniers de guerre, y compris les civils. Mais après Dayton, ou dès -- à

  2   la signature de l'accord de Washington, toutes nos réunions non plus sur

  3   les vivants mais sur les morts, sur les personnes portées disparues pour

  4   lesquelles on finira par apprendre dernièrement qu'il n'y en a plus qui

  5   sont parmi les vivants, ou que la grande -- la grande majorité n'est plus

  6   en vie. Donc, pendant la guerre, on s'est occupé des vivants et après la

  7   guerre, on pourrait dire que ce sont les morts qui ont attiré notre

  8   attention, surtout les personnes portées disparues donc.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Un point pour préciser, le témoin n'arrête

 10   pas de parler de la période d'après la guerre et il n'arrête pas d'évoquer

 11   à la fois l'accord de Washington, à savoir la première signature et puis

 12   l'accord de paix de Dayton signé à Dayton, et puis à Paris. Donc, qu'est-ce

 13   qu'il veut dire par là ? L'acte d'accusation parle de 1994. Donc, à moins -

 14   -

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- pouvez-vous être plus précis dans ce que vous

 16   dites ?

 17   M. STRINGER : [interprétation] Je vais essayer de tirer cela au clair,

 18   Monsieur le Président.

 19   Q.  Monsieur le Témoin, nous savons que les Croates et les Musulmans ont

 20   arrêté leur conflit au début de mars 1994 par l'accord de Washington.

 21   Essayons maintenant de parler de vos réunions avec

 22   M. Pusic avant la signature de l'accord de Washington et pendant les deux

 23   mois qui ont précédé. Je vais vous montrer quelques documents qui portent

 24   là-dessus, et puis, par la suite, nous allons parler des personnes portées

 25   disparues, des morts et des réunions qui ont porté là-dessus après --

 26   pendant les années qui ont suivi les accords de Washington.

 27   Donc, pendant cette période, vous avez des réunions avec

 28   M. Pusic, donc, avant ou à peu près au moment de l'accord de Washington,

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  1   pouvez-vous nous dire, sur la base de ce que vous avez remarqué, quelles

  2   étaient ses fonctions ? Quel est le rôle qu'il a joué, quel niveau de

  3   responsabilité ? Est-ce qu'il l'a eu pour ce qui est des questions de

  4   prisonniers ?  

  5   R.  Je vais vous relater donc ce que j'en sais, moi, et ce que je sais

  6   c'est que c'était le numéro un, c'était le chef de la Commission ou de ce

  7   service chargé de l'Echange des prisonniers de guerre et d'autres

  8   personnes. Il faut dire que d'ores et déjà Medjugorje, j'avais compris que,

  9   d'une certaine façon, c'était lui qui s'occupait aussi d'autre chose qui

 10   n'avait rien à voir avec les échanges, qu'il faisait donc des évacuations

 11   des personnes civiles du territoire qui était placé sous le contrôle d'une

 12   force armée sur le territoire contrôlé par une autre force armée; plus

 13   concrètement, le territoire placé sous le contrôle de l'armée vers le

 14   contrôle du HVO.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- oui, Monsieur, je suis un peu étonné. Je vais

 16   vous dire pourquoi. Vous avez dit que vous avez rencontré

 17   M. Pusic la première fois à Medjugorje le 29 décembre 1993. Le conflit

 18   entre l'ABiH et le HVO est un conflit qui remonte dans le temps pas au mois

 19   de décembre 1993 car nous savons par des témoins qui sont venus que même

 20   dès 1992, il y a eu des combats, des prisonniers.

 21   Alors, comment se fait-il que vous, qui semblez être le numéro un,

 22   côté de la République de Bosnie-Herzégovine, et M. Pusic d'après ce que

 23   vous dites, le numéro un, côté HVO, vous ne vous rencontrez qu'au mois de

 24   décembre. C'est là où je ne comprends pas. Vous avez une explication ?

 25   Alors, même que le conflit remonte à plus d'un an.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Le conflit -- le conflit de très grande

 27   intensité entre l'ABiH et le HVO a lieu à peu près à partir du milieu du

 28   mois d'avril 1993. Donc, je rencontre pour la première fois M. Pusic, six

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  1   mois après le début du conflit. Les raisons je les ai expliquées dans mon

  2   introduction déjà. La première raison en est que jusqu'à ce moment-là,

  3   jusqu'à ce que j'aie un contact direct avec

  4   M. Pusic, les choses ont fonctionné. Elles se sont déroulées sur le plan

  5   local, il y a eu des échanges en Bosnie centrale, Travnik, Zenica, Vitez,

  6   Stari Vitez, Busovaca, Kiseljak, puis en Herzégovine, Mostar, Konjic, et à

  7   Jablanica, Prozor. Les choses se sont déroulées; il y a eu des échanges à

  8   la fois des prisonniers de guerre et des corps des personnes tombées. Donc,

  9   il n'y avait pas lieu que je sois physiquement présent à ces réunions avec

 10   M. Pusic. Ce n'était pas nécessaire.

 11   La deuxième raison c'est que Sarajevo - et je pense que tout le monde le

 12   sait - était complètement assiégé d'une part; et d'autre part, après le

 13   conflit avec le HVO, Mostar, lui aussi, s'est retrouvé complètement

 14   encerclé -- bloqué. Donc, à chaque fois que je devais sortir de Sarajevo,

 15   c'était une sortie très conditionnelle qui dépendait de l'aide -- de

 16   l'assistance qu'allait m'apporter les membres des forces de protection car,

 17   pour moi, le seul moyen de me rendre à Jablanica, placée sous le contrôle

 18   de l'armija ou dans le Mostar Est sous le contrôle de l'ABiH, ou Medjugorje

 19   sous le contrôle du HVO, le seul moyen de m'y rendre c'était à bord d'un

 20   transporteur blindé et d'être escorté par la FORPRONU, et ce n'était pas

 21   toujours facile. Il y a eu des incidents, il y a eu des moments où d'une

 22   certaine manière ça remettait en question également ma vie, je risquais ma

 23   vie dans ces transporteurs, enfin ce sont des détails, je ne sais pas s'ils

 24   vous intéressent, s'ils sont importants ici.

 25   Six mois après le début d'un conflit massif de très grande intensité entre

 26   l'ABiH et le HVO, c'est pour la première fois que physiquement je rencontre

 27   M. Pusic. Et comme je vous l'ai déjà dit, même avant que je ne rencontre M.

 28   Pusic, le 19 octobre 1993, il y a eu un échange très important. Je ne sais

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  1   pas si, et dans quelle mesure, M. Pusic y a joué un rôle mais puisque cet

  2   échange il a fait l'objet d'un accord à Konjic sous le contrôle de l'ABiH

  3   et puisque

  4   M. Pusic n'a pas joué un rôle direct portant sur les négociations qui

  5   visaient à libérer plus de 800 pour -- y compris les dirigeants de Tuzla,

  6   avec le mufti, Husein Efendi Kavazovic.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour votre réponse qui a un éclaircissement

  8   sur le fait que vous ne l'ayez rencontré qu'au mois de décembre 1993,

  9   Monsieur Stringer.

 10   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, ma dernière question que je vous ai posée, vous

 12   avez répondue, portait sur le rôle et les responsabilités de M. Pusic ce

 13   que vous avez vu sur la base des contacts que vous avez eus avec lui

 14   pendant cette période qui a précédé l'accord de Washington et la période

 15   qui a suivi immédiatement cet accord. Sur cette expérience-là, et aussi sur

 16   la base de ce que vous en savez de la libération du mois d'octobre 1993,

 17   vous en avez déjà parlé; est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont les

 18   conclusions auxquelles vous êtes arrivé au sujet de la politique mise en

 19   place par le HVO portant sur la capture des prisonniers et la libération

 20   des prisonniers qu'il s'agisse de civil ou de militaire ?

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, il n'y a

 22   pas eu de base. Cette question se compose de deux parties, la première

 23   partie prise de prisonniers, capture. Je voudrais savoir de quoi nous

 24   parlons plus exactement.

 25   Deuxièmement, qu'est-ce qui lui permet de poser cette question sur

 26   les connaissances du témoin ? Il a commencé à s'en occuper à un certain

 27   moment, donc, quels sont les mois ? Quels sont les endroits ? Quels sont

 28   les événements dont on parle ?

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  1   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai limité ma

  2   question à ce que le -- ce contact que le témoin a eu avec M. Pusic juste

  3   avant et juste après l'accord de Washington. Donc, disons qu'il s'agit de

  4   la fin du mois de décembre, janvier, février, le témoin nous parlera de ces

  5   contacts et des accords avec M. Pusic au mois de mars également. Puis, de

  6   plus, le témoin a parlé de ses contacts avec d'autres membres du HVO en

  7   octobre 1993, et j'ai explicitement posé des questions au témoin là-dessus,

  8   donc, je pense que j'ai jeté des bases; la Chambre et les conseils, bien

  9   entendu, sont libres de l'apprécier.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, il a posé sa question au sujet de la

 11   politique menée. C'est à que se situe mon objection, puisqu'il n'a pas de

 12   base là-dessus. Il peut lui demander ce qu'il en a été de ce contact avec

 13   un individu précis, à un moment donné, mais poser sa question au sujet de

 14   la politique des événements, par exemple : "La prise de prisonniers," et

 15   là, je le cite, il ne peut pas le faire à moins qu'il jette les bases. Ce

 16   témoin du moins, pour autant que je le sache, n'a aucune connaissance qui

 17   lui permet de parler de cela, cela sort du cadre de ses expériences, de ses

 18   connaissances.

 19   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a eu des

 20   contacts avec les autorités du HVO portant sur des Musulmans qui étaient

 21   placés entre leurs mains ou sur le contrôle. Je pense que le témoin est

 22   compétent, il peut parler de qui était ces gens, il s'agit de prisonniers

 23   qui avaient été capturés, et de la politique du HVO.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Je veux être sûr d'avoir bien compris;

 25   maintenant, il change un petit peu. Il modifie sa question. D'abord,

 26   c'était la politique du HVO dans la capture, dans la prise de prisonniers.

 27   Je voudrais savoir exactement de quoi nous parlons. C'était une question

 28   composée pour commencer.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : -- reposez votre question ? D'après ce que j'ai

  2   compris, votre question part du mois -- du mois de décembre 1993

  3   jusqu'avant les accords de Washington, mars 1994, et c'est dans cette

  4   période que vous voulez que l'intéressé, le témoin ici présent, parle de M.

  5   Pusic; c'est bien ça ?

  6   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et la question de manière

  8   temporelle ?

  9   M. STRINGER : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur le Témoin, je voudrais que ma question porte sur les mois de

 11   janvier, février, mars et avril de 1994, et pour commencer, je vous ai

 12   demandé de ce qu'il en était de la politique de capture de prisonniers. Je

 13   vais vous reformuler ma question : sur la base des contacts que vous avez

 14   eus avec M. Pusic et avec le HVO, également sur la base de vos expériences

 15   avec le HVO en octobre 1993 pour ce qui est donc de l'échange d'octobre

 16   1993 ? Vous en avez parlé. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire qui étaient

 17   ces prisonniers de manière générale, dans ces camps entre les mains du HVO

 18   ? Etait-ce des civils, était-ce des soldats, les deux à la fois ? Que

 19   pouvez-vous nous en dire dans quelle catégorie appartenaient ces Musulmans

 20   auxquels se réfère M. Pusic dans cette pièce ? C'étaient des Musulmans.

 21   R.  Je ne vous parlerais pas de politique. Je vais vous parler de la

 22   pratique dont j'ai été témoin, et je vais vous parler également de ce que

 23   M. Pusic m'a dit directement et non pas seulement à moi mais aussi aux

 24   représentants de la communauté internationale, y compris à la Croix-Rouge

 25   internationale, et M. Pusic disait comme suit : "Tous les hommes, âgés de

 26   18 à 65 ans, sont des militaires, sont des soldats. Ils doivent tous se

 27   trouver dans des camps, c'est-à-dire dans des prisons." Cette pratique - et

 28   j'ai eu l'occasion de vérifier cela dans le cas des entretiens avec des

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  1   centaines -- des centaines de personnes libérées -- de prisonniers libérés

  2   de camps, en particulier en Herzégovine - cette pratique a été traduite

  3   dans les faits. Donc, les hommes, âgés de 18 à 65 ans, mais pas seulement

  4   eux, il y avait dans les prisons également des jeunes hommes, des garçons

  5   qui n'avaient pas encore 18 ans, et il y en avait également plus âgés de 65

  6   ans. Donc, c'était ça cette pratique qui avait été mise en place.

  7   Puis, il y en avait une autre pratique, et celle-ci a réussi partiellement,

  8   et elle a été mise en œuvre par M. Pusic. Il la prônait publiquement, à

  9   savoir je mentionne là son affirmation disant que tous les individus

 10   d'appartenance ethnique croate se trouvant sur un territoire qui n'était

 11   pas sous le contrôle du HVO, que potentiellement, ces gens étaient des

 12   prisonniers et que, lui, il lui appartenait de transférer ces individus du

 13   territoire où ils seraient soi-disant des prisonniers potentiels, donc, de

 14   les transférer aux territoires placés sous le contrôle du HVO, que c'était

 15   ça sa mission, et dans un très grand nombre de cas, cette pratique a été

 16   mise en œuvre. Il est arrivé que localement des autorités autorisent cette

 17   pratique. Il est arrivé aussi parfois qu'elles s'y opposent, et là, je

 18   parle d'autorités locales sur le territoire placé sous le contrôle de

 19   l'ABiH. Cela étant dit, le statut de ces catégories-là de ces civils-là, il

 20   a varié d'un camp à l'autre. Pour la très grande majorité, ces gens se sont

 21   trouvés dans leurs foyers, leurs maisons, leurs appartements, mais il y a

 22   eu également des cas où ces civils ne se sont pas trouvés chez eux, sous

 23   leurs toits, pas dans leurs appartements, ils se sont trouvés dans des

 24   centres pour des Personnes déplacées ou des réfugiés. Je dois le dire,

 25   franchement, il y a eu des cas où ces civils, il est arrivé qu'ils soient

 26   privés de leur liberté, et suite à quelques incidents, il est arrivé qu'un

 27   civil soit privé de sa liberté sans qu'il y ait de justification juridique

 28   à cela.

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  1   Q.  Je vais revenir au premier point que vous avez soulevé. Vous avez parlé

  2   de cette pratiques ou de cette position qui a consisté à considérer que

  3   tous les hommes musulmans, âgés de 18 à 65 ans, étaient des prisonniers.

  4   Vous avez dit que cette pratique a été traduite dans les faits, que ces

  5   gens ont été arrêtés. Mais s'agissant de leur libération, est-ce que ça

  6   posé problème du côté des Musulmans, du côté des négociateurs tels que vous

  7   ?

  8   R.  Mais M. Pusic nous a demandé de l'aide pour mettre en œuvre cette

  9   pratique-là, le principe à respecter devait être un contre un contre un.

 10   Dans la mise en œuvre de ces accords, ce que m'a demandé directement à moi

 11   M. Pusic, c'était que l'on libère les personnes faites prisonniers du côté

 12   du HVO et parfois des membres de l'armée croate, et qu'on échange selon le

 13   principe un contre un ou un pour un, lui, il libère les Bosniens qui

 14   relèvent de la catégorie des civils ayant de 18 à 65 ans, qui se sont

 15   retrouvés dans des camps ou dans des prisons du HVO. Donc pour nous à

 16   Sarajevo pour ce qui est du gouvernement de la présidence, c'était un

 17   dilemme, une question morale qui s'est posée. Fallait-il accepter de

 18   libérer dans les prisons les prisonniers membres du HVO et accepter,

 19   autoriser qu'en échange on libère un individu bosnien. Il y a eu des

 20   organisations internationales, par exemple, le Haut commissariat pour les

 21   Réfugiés qui ont exercé des pressions directes sur le gouvernement de

 22   Sarajevo pour accepter ce genre d'échange, entre guillemets, échange de

 23   prisonniers de guerre.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous parlez du principale un pour un, ça fait

 25   quasiment deux ans qu'on entend ici parler de ce principe un pour un.

 26   Alors, pour être clair, dans les zones contrôlées par l'ABiH, est-ce qu'on

 27   ne faisait pas pareil ? Est-ce qu'on arrêtait pas aussi des civils croates,

 28   âgés de 18 ans à 65 ans, et ensuite, on mettait en œuvre un pour un. Alors,

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  1   c'est la question que je vous pose.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ce n'était pas ça la pratique, ce n'était

  3   pas ça la règle. Je vous ai dit qu'il y a eu des incidents qui se sont

  4   produits et que ce genre de cas s'est produit, et que des individus

  5   d'appartenance croate, des civils, sans qu'il y ait de justification

  6   légale, étaient amenés ou emprisonnés. Mais ça, c'était des incidents. En

  7   règle générale, et la règle qui était respectée par le gouvernement, par le

  8   gouvernement de Bosnie-Herzégovine était que seuls les prisonniers de

  9   guerre pouvaient se trouver en prison et pouvaient faire l'objet d'un

 10   échange en application de la Troisième convention de Genève. Les civils

 11   d'appartenance croate qui avaient été privés de liberté, pour avoir commis

 12   des crimes ou des infractions prévus au terme du code pénal de la

 13   République de Bosnie-Herzégovine, des crimes ou des infractions liés au

 14   conflit de guerre, mais cette loi ne s'appliquait uniquement aux individus

 15   d'appartenance croate. Cette loi, elle a été appliquée face à tout individu

 16   indépendamment de son appartenance ethnique, et il s'agissait là de crimes

 17   ou d'infractions tels que rébellion armée ou refus de se faire mobiliser ou

 18   port d'armes illicite ou possession d'explosifs illicites. Donc, il

 19   s'agissait de crimes ou d'infractions indépendamment de l'appartenance

 20   ethnique de l'auteur. Là, si nous parlions d'un individu croate, il y a eu

 21   des individus relevant du cette catégorie-là qui étaient dans les prisons à

 22   Sarajevo.

 23   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, me semble-t-il que le

 24   moment de la pause est arrivé.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Juste une observation, Monsieur le

 26   Président. J'ai remarqué que précédemment, il a dit que, lorsque les

 27   Croates sont détenus, ils sont des camps de réfugiés. Lorsque ce sont les

 28   Musulmans, ils sont dans des prisons. Les Croates en âge de combattre, ce

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  1   sont des civils quand ils sont capturés, tandis que les Musulmans en âge de

  2   combattre, ils sont des prisonniers. Mais je pense qu'il faudrait y

  3   attacher une certaine importance. Ce sont des questions qu'on ne peut pas

  4   soulever pendant le contre-interrogatoire, il faudrait que la Chambre peut-

  5   être demande plus d'informations à ce sujet de la part du témoin.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Ça ne vous a pas échappé, c'était la

  7   raison pour laquelle j'avais posé la question précédente. Mais M. Stringer

  8   y reviendra certainement, et le cas échéant les Juges aussi. Il est 4

  9   heures moins quart, nous allons faire 20 minutes de pause.

 10   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 11   --- L'audience est reprise à 16 heures 06.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Monsieur Stringer,

 13   vous avez la parole.

 14   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Monsieur Masovic, examinons une autre pièce qui se trouve au début du

 16   classeur, c'est le numéro 5945. Ce document concerne le sujet évoqué juste

 17   avant la pause, 5945. Il s'agit d'un entretien accordé par M. Pusic et

 18   publié le 19 octobre 1993 dans "Slobodna Dalmacija." Examinons une des

 19   questions à laquelle répond M. Pusic et je vais vous demander de commenter

 20   sa réponse. Je ne peux pas vous indiquer le passage en croate, mais prenons

 21   la cinquième page en anglais, bas de page. Le journaliste demande à M.

 22   Pusic s'il a eu des entretiens, des négociations concernant la libération

 23   de soldats croates détenus. Est-ce que vous avez trouvé le passage

 24   correspondant dans l'original en croate ? Je répète la question qui lui est

 25   posée : "Est-ce que vous avez eu des négociations à propos de la libération

 26   de soldats croates détenus ?"

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Voici la réponse donnée. M. Pusic indique qu'il négocie la libération

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  1   des civils comme des soldats croates capturés et que pour le moment les

  2   Musulmans ne considèrent pas que les civils sont prisonniers, mais à mon

  3   avis, dit-il, chaque civil est un prisonnier potentiel, car il n'est pas

  4   libre d'aller où il le veut.

  5   A première vue ce sont des détails sans intérêt que les Musulmans

  6   présentent dans pratiquement toutes les négociations comme des conditions,

  7   sachant qu'on ne peut les accepter, tout ceci en vue d'empêcher, dit-il,

  8   l'échange de détenus.

  9   Est-ce que cette déclaration de M. Pusic correspond à ce qu'il vous a dit

 10   lorsque vous avez eu affaire à lui à propos de l'identité des prisonniers

 11   de la question de savoir comment on définit ces prisonniers, tout du moins

 12   pour ce qui est des Croates, qu'ils soient civils ou soldats, se trouvant

 13   dans le territoire tenu par l'armija ?

 14   R.  Oui, oui. Ce qu'il dit correspond à ce que j'ai déclaré. Mais ce qui

 15   compte ce n'est pas son affirmation, selon laquelle ce sont tous des

 16   prisonniers potentiels ou en puissance. On peut déceler derrière ces propos

 17   une intention dangereuse, et j'en ai déjà parlé dans la pratique. C'est que

 18   ces civils devraient être enlevés de leurs lieux de résidence et transférés

 19   de ces territoires où ils étaient tous des prisonniers potentiels présumés

 20   pour les transférer dans un territoire contrôlé par le HVO. C'était cela

 21   l'intention, et c'était ce qui se faisait couramment, partant de ce que

 22   disait

 23   M. Pusic, à savoir que c'était tous des prisonniers potentiels.

 24   Q.  Mais du côté musulman, quelle était la politique musulmane pour ce qui

 25   était de ce qui était proposé, l'échange de tous les croates, disons, qui

 26   se trouvaient en territoire tenu par l'ABiH ?

 27   R.  Il m'est impossible de répondre à cette question, car je ne connais pas

 28   la politique pratiquée par ce que vous appelez le côté musulman. Je ne sais

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  1   pas si ça existait pour ce qui est des conflits qui ont existé en Bosnie-

  2   Herzégovine. Je peux vous dire quelle était la politique exercée par le

  3   gouvernement qui m'avait nommé à ce poste à la commission.

  4   Q.  Mais c'était bien la question que je vous posais. Quelle était la

  5   politique que vous appliquiez à partir des instructions données par le

  6   gouvernement ?

  7   R.  J'avais pour mission de participer aux négociations portant sur

  8   l'échange de prisonniers de guerre et de personnes privées de liberté, ce

  9   qui impliquait une série d'individus qui se trouvaient dans des prisons se

 10   trouvant sur le territoire contrôlé par le gouvernement et c'étaient des

 11   personnes qui soit avaient été condamnées ou accusées d'un certain nombre

 12   limité d'infractions précisées par la loi alors en vigueur et qu'on aurait

 13   pu considérer comme étant en rapport avec le conflit armée tel qu'il est

 14   décrit dans l'accord du 1er octobre 1992, accord conclu à Genève à l'époque

 15   où il n'y avait pas encore vraiment de conflits de grande envergure entre

 16   l'ABiH et le HVO. En d'autres termes, l'accord conclu à Genève prévoyait la

 17   libération de prisonniers de guerre et de civils qui avaient été placés en

 18   détention en rapport avec des infractions liées aux conflits de guerre.

 19   C'était la politique du gouvernement de Sarajevo, politique que j'avais le

 20   devoir d'appliquer en pratique lorsque j'ai travaillé à l'échange de

 21   prisonniers de guerre et de personnes privées de liberté.

 22   Q.  La politique du gouvernement était-elle de dire que tous les hommes

 23   âgés de 16 à 65 ans, qui étaient d'appartenance croate ou non-musulmane,

 24   qui avaient été arrêtés ou seraient arrêtés et détenus par l'armija afin

 25   qu'ils puissent être échangés ?

 26   R.  Non, pas du tout, pas du tout. Je ne vois pas comment il est possible

 27   de dire ce genre de chose, sachant quelque chose qui est de notoriété

 28   publique, à savoir que des personnes qui n'étaient pas d'appartenance

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  1   bosnienne pendant toute cette période de l'agression dirigée contre la

  2   Bosnie-Herzégovine était au nombre de milliers qui résidaient sur le

  3   territoire contrôlé par les forces gouvernementales. Pour ne parler que de

  4   Sarajevo, il s'agissait de plus de 60 000 personnes à Tuzla aussi, à

  5   Zenica, à Bihac ainsi que dans d'autres villes, localités qui étaient

  6   contrôlées pendant toute la durée de l'agression par le gouvernement. Si ça

  7   avait été vrai, cette politique, si elle avait existé, toutes ces personnes

  8   se seraient retrouvées en prison, or, ce ne fut pas le cas. La meilleure

  9   preuve de cela, ce sont les rapports du CICR qui a pu aller dans les

 10   prisons, aller dans les camps, si nous parlons des forces serbes et en

 11   partie du HVO. A titre illustratif, j'aimerais vous donner quelques données

 12   s'agissant des rapports entre l'ABiH et le HVO, le nombre de victimes

 13   exhumées sur le territoire --

 14   Q.  Excusez-moi, c'est une question que je vais vous poser dans un instant

 15   lorsque nous allons parler des exhumations récemment réalisées, et je vous

 16   demanderais des chiffres à ce moment-là. Mais si vous voulez bien, nous

 17   allons d'abord examiner pour ce faire la pièce 8084.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de passer à l'autre pièce, je reste sur

 19   l'interview de M. Pusic. Dans le cadre de l'interview, il dit que, selon

 20   les rapports en sa possession, 10 149 Croates seraient donc détenus dans

 21   les prisons de la République de Bosnie-Herzégovine, et à partir de ce

 22   chiffre, on lui pose une question mais il y a combien de civils, combien de

 23   militaires ? Et il dit : Il y a 3 149 soldats et le reste sont des civils.

 24   Donc, en faisant la soustraction j'arriverais à 7 000 civils croates

 25   détenus par le côté musulman. Qu'est-ce que vous en pensez ? Ces chiffres

 26   sont exagérés, réels ? Que pouvez-vous dire sur les chiffres avancés par M.

 27   Pusic ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais, jamais jusqu'à ce jour, je n'ai vu une

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  1   liste de prisonniers, que ce soit des prisonniers de guerre ou des civils

  2   qui présenteraient ces chiffres. Aucun des représentants de la communauté

  3   internationale ne les avait vus non plus. Et franchement, je ne pense pas

  4   que M. Pusic n'ait jamais vu une telle liste non plus. Cette liste elle ne

  5   peut pas exister, tout simplement parce que ces prénoms, ces patronymes

  6   n'existent pas où que ce soit. Pour moi, je trouverais assez extraordinaire

  7   qu'une liste de ce genre soit présentée ici à ce procès, car on affirme

  8   qu'elle existe est quelque part dans les archives. Au contraire : pendant

  9   toute la durée du conflit, le nombre de personnes portées disparues, qui a

 10   d'abord été emprisonnés, puis portées disparues, je parle de membres du

 11   HVO, je parle de civils croates, d'après l'ABiH, ce chiffre n'a jamais

 12   dépassé 1 100, jamais, à aucun moment et là je vous parle de la somme des

 13   prisonniers de guerre et des civils. J'affirme aussi que le nombre des

 14   prisonniers de guerre --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- celui qui fait l'interview lui demande : Mais il

 16   y a combien de Croates qui seraient détenus selon les rapports du CICR. Et

 17   il répond 850. Qu'est-ce que vous en

 18   pensez ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément ce que je viens de dire.

 20   J'ai commencé à vous dire qu'il y avait d'après mes informations un nombre

 21   de personnes qui avaient été inscrites, mais qui n'a jamais dépassé les 1

 22   100, et je pense que ça cadre bien avec ce que M. Pusic disait dans

 23   l'entretien à propos du CICR et des chiffres qu'il a donnés.

 24   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Puisque nous parlons de la Croix-Rouge, examinons la pièce 7852. Est-ce

 26   que vous reconnaissez cette lettre, lettre qui vous a été adressée par le

 27   CICR, par la Croix-Rouge ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Je regarde la date, c'est celle du 12 février 1994. Là, on se rapproche

  2   du moment des accords de Washington. La deuxième page de la pièce on y

  3   trouve des chiffres donnés par le CICR pour ce qui est du nombre de

  4   prisonniers musulmans détenus à ce moment-là; vous le voyez ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je vous demande ceci : à votre avis, les chiffres publiés ou fournis

  7   par les deux parties au conflit, au CICR, étaient-ils en général exacts ou

  8   pas ? Est-ce qu'à votre avis ici c'est un relevé assez fidèle faisant état

  9   du nombre de prisonniers musulmans détenus à cette date-là ?

 10   R.  Oui. Je pense que les chiffres sont assez exacts, mais je suis certain

 11   d'une chose après, le CICR a inscrit d'autres prisonniers qui ne figuraient

 12   pas sur la première liste, je parle notamment de Kiseljak, de Livno, à

 13   Grude et Grude -- on ne montre pas Grude ici du tout, et je pense que le

 14   CICR a plus tard inscrit certains prisonniers à Grude, et là je ne vois pas

 15   Grude sur cette liste.

 16   Q.  Je voulais vous demander d'examiner la pièce suivante 8084. Pendant que

 17   vous trouverez cette pièce, Monsieur Masovic, je précise maintenant que

 18   nous allons maintenant passer au 17 mars, quelques semaines après l'accord

 19   de Washington 17 mars 1994. Est-ce que c'est bien ici l'accord que vous et

 20   M. Pusic vous avez signé, accord portant sur la libération du reste des

 21   prisonniers qui devraient, accord, entrer en vigueur après la signature de

 22   l'accord de Washington ?

 23   R.  Oui, je reconnais cet accord. C'est l'accord de Gornji Vakuf du 17 mars

 24   1994, il a été signé par M. Pusic et moi-même en présence de certains

 25   témoins.

 26   Q.  Au paragraphe 1.1 du document, il est dit que : "Le 19 mars 1994,

 27   plusieurs prisonniers vont être libérés qui se trouvaient dans différents

 28   endroits"; vous voyez ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Il est fait référence ici à 73 prisonniers de la prison de Mostar. Est-

  3   ce que vous savez à quoi ceci fait référence ? De quels prisonniers

  4   s'agissait-il ?

  5   R.  Il s'agissait des prisonniers dont nous venons tout juste de parler,

  6   c'est à cause d'eux je suis allé à Mostar en 1993. C'étaient des membres du

  7   HVO, il y avait aussi des membres de la HV parmi eux, ils avaient été

  8   emprisonnés à Mostar Est. Ces prisonniers étaient une des raisons pour

  9   lesquelles finalement le processus de négociations d'un échange était

 10   arrivé dans une impasse.

 11   Q.  Donc la question de la libération de ces prisonniers n'a jamais été

 12   résolue jusqu'au moment --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 14   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 15   Juges, à plusieurs reprises le témoin a dit plusieurs prisonniers de la HV.

 16   Est-ce qu'on pourra avoir leurs noms, tout d'abord pour nous préparer d'ici

 17   à demain, pour voir de qui il s'agit et ce qui leur est arrivé ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Pouvez-vous faire préciser ou -- bon, le

 19   problème c'est que M. Praljak dit que pour le contre-interrogatoire il a

 20   besoin de savoir qui sont ces gens-là.

 21   Alors, Monsieur, vous avez mentionné des prisonniers de l'armée croate le

 22   HV, c'est l'armée de la République de Croatie. Il y en avait combien ? Vous

 23   le savez, quand vous avez signé, est-ce que dans le document qui est signé

 24   avec M. Pusic, il est fait mention explicitement de ces prisonniers de la

 25   République de l'armée de Croatie ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, dans ce document, ils ne sont pas

 27   mentionnés. Le fait qu'ils aient été en prison à Mostar Est, s'il est

 28   contesté, je peux essayer d'obtenir leurs noms d'ici à demain, avant

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  1   demain. Je peux essayer. Je ne sais pas si je vais y parvenir parce que je

  2   ne connais pas ces noms par cœur. S'il y a une question --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- il y avait des soldats de l'armée croate qui

  4   étaient dans la prison de Mostar Est ? Et il y en avait combien ? Dix, 20,

  5   cinq ? Vous avez un chiffre ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il y avait des prisonniers, ils n'étaient

  7   pas très nombreux, deux ou trois peut-être en tout. Ce n'était pas les

  8   premiers membres de l'armée de Croatie qui avaient été capturés par l'ABiH.

  9   Avant cela, nous avions remis les corps de neuf membres du HVO qui avaient

 10   été tués dans une opération qui avait été remis au niveau local à M. Pusic.

 11   J'ai dit HVO, j'aurais dû dire HV.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Merci. Je sais que M. Praljak a un excellent

 13   avocat et que celui-ci pourra examiner cette question d'ici à demain.

 14   Q.  Dans une autre partie de ce document, plus exactement le paragraphe

 15   2.1, il y a un autre passage qui m'intéresse. Au point 1.1., il était

 16   question de la libération de prisonniers qui devait se faire, en même

 17   temps, le 19 mars; vous le voyez bien, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Au paragraphe 2.1, on semble envisager une deuxième phase de libération

 20   qui devrait, elle, se faire le 22 mars; est-ce que c'est bien comme ça que

 21   ça devait se passer ?

 22   R.  Oui, exactement. Et c'est comme ça que ça été fait.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que mon estimé confrère peut poser

 24   une question qui n'est pas directrice ? Parce que c'est un sujet crucial.

 25   Est-ce qu'on peut avoir une précision pour avoir un fondement, mais si le

 26   Procureur guide ce témoin dans ses réponses alors qu'il a eu plusieurs

 27   jours pour l'interroger, pour procéder au récolement, je ne pense pas que

 28   ce soit correct. N'oublions pas non plus que le témoin soit un avocat,

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  1   donc, en d'autres termes, c'est un témoin professionnel.

  2   M. STRINGER : [interprétation] Si j'ai dirigé le témoin dans ces questions,

  3   excusez-moi. Ça va de soi. Je crois que c'est clair. J'essaie d'avancer

  4   vite mais on peut demander au témoin de décrire ce qui est précisé dans ce

  5   paragraphe. Mais ce qui m'intéresse surtout dans ce paragraphe c'est qu'on

  6   a des prisonniers de Bosnie centrale, Novi, Seher, Zepce, Maglaj, Zenica,

  7   et j'avais eu l'intention de demander au témoin précisément ce dont il se

  8   souvenait à propos de ces prisonniers qui se trouvaient à l'Heliodrom.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est comme c'est décrit dans l'accord, c'est

 10   littéralement de cette façon-là que ça été exécuté. Tout ce qui est dit

 11   dans l'accord a été appliqué selon les modalités décrites. Ici, je lis les

 12   dispositions de la totalité de l'accord et je me base sur mes souvenirs

 13   aussi et je dirais que chacun de ces points, y compris le point 3.2, a été

 14   exécuté comme l'avait dit le CICR.

 15   M. STRINGER : [interprétation]

 16   Q.  Terminons l'examen de ce document, au point 3.1 il est fait référence à

 17   un dernier échange ou plutôt libération qui devrait se faire le 24 mars.

 18   Vous le voyez ?

 19   R.  Il s'agit d'une réunion. On ne parle pas là d'une libération. Nous nous

 20   sommes mis d'accord pour nous retrouver à Gornji Vakuf le 24, de façon à

 21   discuter de la libération de tous les prisonniers qui restaient de part et

 22   d'autre. Et je pense que cette réunion s'est faite à Mostar, si je me

 23   souviens bien, et qu'on n'a pas vraiment appliqué l'accord au pied de la

 24   lettre parce que je pense que c'était Mostar, mais je pense que c'était

 25   bien de toute façon le 24 mars.

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez des raisons pour lesquelles il y a eu un

 27   retard dans la libération des prisonniers qui venaient de la Bosnie

 28   centrale ?

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  1   R.  La seule raison, si je me souviens bien, c'est que peut-être qu'il y

  2   avait un certain manque de confiance qui prévalait entre les deux parties,

  3   entre nous qui étions les chefs de la commission, on ne savait pas si

  4   l'autre partie allait vraiment se conformer à l'accord et appliquer ce qui

  5   avait été dit dans d'autres accords qui, eux, n'avaient pas été respectés.

  6   J'en ai fait une expérience. Donc la seule raison dont je me souvienne,

  7   c'est que tout simplement il nous fallait voir si la libération, ce

  8   processus prévu les 19 et 22 mars allait fonctionner de façon à passer à la

  9   dernière phase de libération.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, je voudrais poser une

 11   question : est-ce que cela veut dire que les prisonniers de Bosnie

 12   centrale, ils ont été gardés un peu comme des otages, comme des pions

 13   gardés par le HVO ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Difficile de répondre à votre question,

 15   Monsieur le Juge. Nous, nous sommes effectivement mis d'accord pour prévoir

 16   ce genre d'évolution. J'ai apposé ma signature à cet accord, personne ne

 17   m'a forcé à le faire. Mais j'ai signé cet accord, c'est à cela que

 18   ressemblait l'accord et c'est ce que nous avons appliqué. Ici, en

 19   l'occurrence, je ne me souviens pas exactement la raison pour laquelle ceux

 20   de Bosnie centrale ont fait partie des derniers à quitter l'Heliodrom, mais

 21   je ne peux que faire des suppositions. L'accord avait été négocié au niveau

 22   de Mostar pour cet échange, et les prisonniers les plus importants dans les

 23   deux camps venaient de l'Herzégovine. Au niveau local en Herzégovine, il

 24   était important de libérer le plus vite possible ces gens-là. Alors, ce qui

 25   a pu se passer, c'est qu'il y avait certaines personnes de Bosnie centrale

 26   qui ont fait partie du dernier groupe pour cette raison.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que par ailleurs, et je ne

 28   trouve pas de réponse ici dans ce document, pour ce qui est de votre côté,

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  1   est-ce que vous aussi vous aviez, disons, une réserve de prisonniers que

  2   vous gardiez en vue d'une libération ultérieure ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Si -- comment tenir un certain nombre de

  4   prisonniers ? Enfin, il y a eu un certain nombre de prisonniers que nous

  5   avons libérés par la suite, donc, il s'agit des prisonniers qui étaient

  6   dans les prisons à Sarajevo, à Zenica, peut-être dans d'autres endroits

  7   aussi. Ces prisonniers ont été laissés pour être libérés pendant la

  8   deuxième phase. Les prisonniers de Bosnie centrale, qui étaient à

  9   l'Heliodrom tenus par le HVO, ce n'était pas les seuls prisonniers qui

 10   étaient encore détenus au cours des conflits entre l'armée de la

 11   Herzégovine et le HVO. Le gouvernement avait une dizaine de prisonniers,

 12   peut-être même plus, dans les prisons de Sarajevo, Zenica et Travnik, qui

 13   allaient être libérés au cours de la dernière phase de libération des

 14   prisonniers.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole à

 16   Me Ibrisimovic, je -- je continue la question qui a été posée. Au

 17   paragraphe 3.1, on se rend compte que le 24 mars, il devait y avoir une

 18   nouvelle réunion parce que le document, vous le -- vous le signez le 17

 19   mars 1994. Au paragraphe 3.1, on s'aperçoit qu'il y a encore des

 20   prisonniers détenus en Bosnie centrale, tant par l'ABiH et le HVO. Mais au

 21   paragraphe 3.2, qui, lui, est à lire en relation avec le paragraphe 3.1, on

 22   se rend compte qu'il est demandé, par le HVO, de visiter Tarcin et Mehurici

 23   pour vérifier s'il n'y a pas encore des Croates détenus dans ces lieux.

 24   N'est-ce pas là la véritable raison du fait qu'on a attendu une semaine

 25   pour tout régler parce qu'il y avait des suspicions que certains étaient

 26   peut-être encore détenus à Mehurici et à Tarcin ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, Monsieur le Président. Je pense que

 28   les choses se sont déroulées exactement comme cela. Moi, je parlais d'un

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  1   certain manque de confiance entre différentes commissions et M. Pusic,

  2   encore déjà à Vakuf, et je pense que les membres de -- représentants,

  3   plutôt, de la communauté internationale ont noté cela. Il a insisté que le

  4   gouvernement tenait dans des endroits secrets un certain nombre de Croates

  5   et il insistait pour que la communauté de la Croix-Rouge visite ces

  6   endroits secrets, ce qui a été fait, et le Comité international de la

  7   Croix-Rouge nous a informés du fait qu'il n'y avait pas d'autres prisons

  8   secrètes, qu'il n'y avait pas de prisonniers secrets, et nous avons

  9   continué à relâcher des prisonniers.

 10   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 11   Je vais essayer de me rendre utile. Dans le paragraphe 2.2, parce que c'est

 12   le paragraphe qui a fait l'objet de la question du Juge Trechsel, on parle

 13   de Catici et de Vares, et ce sont les endroits qui ont été contrôlés par

 14   l'ABiH. Peut-être que le témoin pourrait nous expliquer quel était le

 15   statut de Catici -- des gens qui étaient à Catici. Je pense que ceci

 16   pourrait nous aider à comprendre la situation.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le paragraphe 2.2, on parle de trois

 18   localités différentes. Il y en a une qui est contrôlée par le HVO, elle

 19   s'appelle Rotilj. Là, il s'agit d'un hameau à l'extérieur de Kiseljak

 20   contrôlé par le HVO. Ensuite, les deux autres localités, Vares, qui à

 21   l'époque était contrôlée par l'ABiH, et à Vares, on mentionne 32 membres du

 22   HVO qui ont été libérés de la prison. Donc, ils sont libres, qui se

 23   trouvent sur le territoire de Vares qui est contrôlé par l'ABiH.

 24   Ensuite, le troisième lieu -- la troisième localité, c'est Catici, contrôlé

 25   aussi par l'ABiH. Quel est le statut de personnes qui se trouvent dans ces

 26   trois localités ? Rotilj, son statut n'est pas clair. Les gens que j'ai pu

 27   entendre, qui sont sortis de Rotilj, disaient qu'ils avaient été capturés

 28   et détenus contre leur volonté à Rotilj; cependant, je pense que le Comité

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  1   de la Croix-Rouge international, quand il a visité ces gens, ils n'ont pas

  2   répertorié ces gens comme des prisonniers, mais comme des individus qui ont

  3   été isolés en quelque sorte. D'ailleurs, c'est le terme que le Comité

  4   international de la Croix-Rouge utilisait, les "personnes isolées." Donc,

  5   c'était la situation de Rotilj.

  6   Vares, pour Vares, on dit que 32 membres du HVO ont été capturés, placés en

  7   détention, et ensuite, conformément aux accords de Washington, ils ont été

  8   libérés de la prison, et ensuite, on les a laissé la possibilité de

  9   circuler librement, et je pense qu'ils étaient au nombre 30 -- une

 10   trentaine à avoir quitté le territoire de Vares après cela et qu'il y en a

 11   un seul qui est resté à Vares. Donc, ils avaient la liberté de circuler

 12   comme bon leur semblait, et au moment où ils ont été transportés --

 13   transférés de Vares, il ne s'agissait pas là de personnes privées de leur

 14   liberté.

 15   Le troisième groupe de personnes, ce sont des Croates qui étaient

 16   exclusivement ou presque exclusivement des civils qui se sont trouvés dans

 17   la base des unités du Bataillon français à Catici, et c'est d'ailleurs cela

 18   qui est écrit dans cet accord signé par moi et par M. Pusic. Si vous me

 19   demandez pourquoi ils étaient dans la base du Bataillon français à Catici,

 20   je vais vous répondre que c'est sans doute qu'ils ne se sentaient pas en

 21   sécurité chez eux à proximité de Catici ou à Catici, là où ils habitaient.

 22   Donc, ils ont été placés sous le contrôle des forces de la FORPRONU. Il ne

 23   s'agissait pas là de personnes privées de leur liberté ou placées en

 24   isolation par les forces gouvernementales. Cet accord prévoyait que, pour

 25   des raisons exclusivement humanitaires, les problèmes de toutes ces

 26   problèmes de toutes ces personnes soient, qu'il s'agisse de Rotilj, de

 27   Vares ou Catici, soient résolus, et c'est ce qui a été fait.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

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  1   Q.  Monsieur Masovic, pour en finir avec ce document, je pense que vous

  2   avez dit que, dans une grande mesure, l'accord et différents points qui

  3   figurent dans cet accord ont été mis en œuvre et que les prisonniers ont

  4   été effectivement libérés en accord avec cet accord. En tout cas, pour la

  5   plupart d'entre eux; est-ce exact ?

  6   R.  Je pense que cet accord a été mis en œuvre entièrement, mis à part la

  7   réunion qui devait avoir lieu à Gornji Vakuf, vu que ce n'était pas

  8   vraiment important, et cette réunion devait avoir lieu le 24 mars, mais je

  9   pense qu'en réalité, la réunion a eu lieu quand même, mais à Mostar et pas

 10   à Gornji Vakuf.

 11   Q.  Donc, il y a une décision concernant 70 ou 73 soldats du HVO et du HV

 12   et c'était un des problèmes épineux depuis le début; est-ce exact ?

 13   R.  Je n'ai pas très bien compris votre question.

 14   Q.  Au départ, vous avez participé en partie à cause du problème lié aux

 15   soldats du HVO --

 16   R.  Oui, oui. Oui, oui, cette question a été résolue, effectivement, le

 17   problème des 73 membres du HVO et du HV, par cet accord.

 18   Q.  Bien. Une autre question -- un autre problème que vous avez mentionné

 19   portait M. Mahmutcehajic et M. Demirovic. Est-ce que vous pouvez nous dire

 20   si, en vertu de cet accord ou d'un autre, si [imperceptible] libérés

 21   également ?

 22   R.  Donc, il s'agissait d'un accord politique à vrai dire, qui se fait au

 23   niveau de deux présidents. Donc, d'un côté, vous avez

 24   M. Izetbegovic du côté de Bosnie-Herzégovine, et entre Tudjman du côté

 25   croate qui ont été enfin cet accord ensuite a été confirmé par la suite par

 26   le ministre des Affaires extérieures de Bosnie-Herzégovine, et de Croatie,

 27   M. Silajdzic et Granic et, à la fin, c'est moi qui ai mis cela en œuvre

 28   sans que M. Pusic participe à cela puisqu'il était contre cet accord.

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  1   Voici la nature de l'accord : deux membres du HVO qui avaient été arrêtés à

  2   Sarajevo à cause, je pense, du crime de trahison puisqu'il s'agissait là du

  3   commandant d'une brigade du HVO à Sarajevo et son adjoint, et Slavko Zelic

  4   et son adjoint - je ne me souviens pas de son nom - et donc, il s'agissait

  5   de les libérer, et de l'autre côté, le HVO devait libérer M. Mahmutcehajic

  6   qui était l'officier de l'ABiH le plus élevé qui était détenu pendant le

  7   conflit en Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait aussi de libérer M. Zijad

  8   Demirovic. Moi, je suis arrivé avec M. Slavko Zelic par un hélicoptère de

  9   la FORPRONU. Je suis arrivé à la ligne de confrontation, si je puis dire,

 10   parce qu'à l'époque, les accords de Washington avaient été déjà signés mais

 11   il y avait toujours des points de contrôle entre l'ABiH et le HVO de

 12   Mostar. Je pense que ce monsieur, qui était avec moi, a refusé de se rendre

 13   sur le territoire contrôlé par le HVO. Il est resté à Sarajevo, c'est pour

 14   cela qu'on a eu un autre problème. Mais la question de l'échange a été

 15   posée. Il s'agissait du principe deux pour deux.

 16   J'ai été forcé de Mostar d'appeler M. Mato Granic, de lui parler et

 17   de parler aussi avec M. Bozic, M. Izetbegovic,

 18   M. Silajdzic, M. Pusic, et avec d'autres personnes, y compris

 19   M. Orucevic, et après un certain nombre de problèmes auxquels nous avons

 20   rencontrés pendant les quatre ou cinq jours à suivre,

 21   M. Zelic était avec moi à Mostar pendant toute cette période. Nous avons

 22   décidé que l'échange allait avoir lieu sur les principes deux contre un, à

 23   savoir que le HVO allait libérer M. Mahmutcehajic et

 24   M. Demirovic, que le gouvernement de Bosnie-Herzégovine allait libérer M.

 25   Zelic puisque l'autre commandant de la brigade, enfin, les membres celui

 26   qui était commandant de la Brigade de Tvrtko, le bataillon a refusé de

 27   passer sur le territoire contrôlé par le HVO et tout ceci a eu lieu le 29

 28   mars 1994.

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  1   Q.  Monsieur Masovic, pourriez-vous ralentir, s'il vous plaît,   pour

  2   les interprètes et pour les sténotypistes. Donc, de toute façon, je pense

  3   que nous en sommes arrivés à la fin de l'histoire.

  4  

  5   R.  Oui. J'ai voulu juste ajouter que M. Pusic n'a pas assisté à la

  6   libération de ces deux prisonniers parce qu'il n'était pas content parce

  7   qu'il pensait -- il disait que j'ai agi sans qu'il ne soit informé de cette

  8   libération, à savoir la libération de

  9   M. Mahmutcehajic et M. Demirovic. Donc, la Croix-Rouge internationale a

 10   emmené les prisonniers sans que les représentants de la commission de M.

 11   Pusic soient présents.

 12   Q.  Donc, votre accord avec M. Pusic qui a eu lieu le 17 ou le 19 mars --

 13   plutôt, le 17, est-ce que, suite à cela, les autres points épineux ont été

 14   résolus, à savoir la question de soldats de Vranica qui ont été portés

 15   disparus le 10 mai 1993 ?

 16   R.  Non, non, nous avons élaboré cet accord. J'étais conscient même si je

 17   n'avais pas de témoignage direct à ce sujet. Je savais que 13 membres de

 18   soldats de Bosnie-Herzégovine de Vranica n'étaient pas en vie, et qu'il ne

 19   serait pas très intelligent que d'insister pour qu'ils soient libérés et de

 20   continuer enfin, et en même temps, donc, faire en sorte que tous les autres

 21   prisonniers détenus dans les prisons du HVO restent dans les prisons. Donc,

 22   je me suis dit qu'à cause de cette [imperceptible], il n'était pas

 23   judicieux de laisser des milliers de personnes dans les camps.

 24   Q.  Donc, nous en arriverons à un moment après les accords de Dayton, donc,

 25   les hostilités se sont terminées pour la plupart. Comme vous avez dit déjà,

 26   la mission, qui était la vôtre et celle de

 27   M. Pusic, aussi a été modifiée en quelque sorte. Vous n'étiez plus

 28   concentré sur les mêmes points, n'est-ce pas, sur les mêmes

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  1   problèmes ? 

  2   R.  Il allait y avoir encore quelques échanges. Je pense que la dernière,

  3   en date a eu lieu le 21 avril, et ensuite, M. Pusic et moi-même, nous avons

  4   commencé à nous occuper de la deuxième partie de notre mandat, à savoir

  5   étudier le sort de toutes les personnes portées disparues depuis 1992 dont

  6   on ne savait rien.

  7   Q.  Donc, à partir -- à la fin du mois de mars 1994 et ainsi de suite

  8   pendant les années qui vont suivre, et qui vont suivre -- enfin, qui vont

  9   venir après les conflits, pendant combien d'années avez-vous continué à

 10   communiquer, à négocier avec M. Pusic, quand il s'agissait de retrouver les

 11   personnes portées disparues ? Pendant combien de temps avez-vous continué à

 12   coopérer avec M. Pusic après la fin du conflit ?

 13   R.  Nos contacts, qui étaient plus ou moins intenses, ont continué tant que

 14   M. Pusic faisait partie de la Commission fédérale chargée de rechercher les

 15   personnes portées disparues, ce qui correspond à peu près à 1999 -- l'année

 16   1999. Je n'en suis pas sûr. C'est l'année -- enfin, la date à laquelle M.

 17   Pusic a été démis de ses fonctions, par le haut représentant pour la

 18   Bosnie-Herzégovine, à cause de certaines activités qui étaient les siennes

 19   au niveau d'une autre commission, la Commission chargée de déminer.

 20   Q.  Donc, pendant cette période allant du mois de mars, avril 1994 jusqu'au

 21   moment où M. Pusic ne participait plus à la recherche de personnes portées

 22   disparues, vous l'avez rencontré combien de

 23   fois ? Et par rapport à ces questions-là, justement les questions des

 24   personnes portées disparues ?

 25   R.  Il y a eu des rencontres -- des périodes où les rencontres étaient plus

 26   intenses, plus fréquentes, et moins fréquentes. On s'est rencontré dans des

 27   endroits différents pour des raisons différentes, mais je dirais que ceci a

 28   eu lieu 60 ou 70 fois même. Nous nous sommes rencontrés aussi, bien sûr, le

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  1   territoire de Bosnie-Herzégovine qu'à l'extérieur de ce territoire, et pour

  2   des raisons différentes. Parfois à cause des personnes portées disparues,

  3   parfois nous étions -- nous faisons partie d'autres délégations, comme par

  4   exemple, la Commission centrale chargée de rechercher les Personnes portées

  5   disparues. Puis, il y avait une Commission conjointe militaire, et puis,

  6   parfois on a participé à d'autres rencontres entre deux parties, les

  7   rencontres qui avaient eu lieu entre des généraux, des officiers de très

  8   haut niveau des deux côtés au conflit ou des deux parties, et on traitait

  9   des questions courantes -- des problèmes courants.

 10   Q.  Passons sur -- en ce qui concerne la question de soldats de Vranica

 11   disparus, quelle était l'importance de cette question ? Elle a continué à

 12   avoir de l'importance combien de temps encore après la fin du conflit ?

 13   R.  C'était quelque chose de très important par rapport à la fonction qui

 14   était la mienne pendant toute cette période. Pourquoi ? Parce que c'était

 15   un problème qui a eu beaucoup d'influence sur les rapports entre deux

 16   parties, même après que la paix a été instaurée après les accords de

 17   Washington. Les rapports surtout à Mostar étaient très difficiles,

 18   justement à cause du problème de Vranica, et malheureusement, au jour

 19   d'aujourd'hui, le problème existe encore. Il existe encore au jour

 20   d'aujourd'hui 14 années après leur disparition. On peut dire que les gens -

 21   - les habitants des deux côtés de Neretva trouvent cela problématique.

 22   Q.  Pourquoi cette question justement -- la question de ces deux -- de ces

 23   12 personnes a une telle importance à Mostar -- dans la région de Mostar ?

 24   R.  Leur statut était spécifique par rapport au statut de tous les autres

 25   prisonniers, où tout les autres prisonniers également portaient disparus,

 26   puisque nous on est la Croix-Rouge internationale, des gens enregistrés à

 27   l'Heliodrom, des prisonniers à qui sont portés disparus au jour

 28   d'aujourd'hui encore. Mais le problème des 13 soldats de Vranica est revêtu

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  1   d'une importante toute particulière parce qu'on a filmait leur capture, et

  2   leurs familles, les co-combattants, les membres de leurs familles, leurs

  3   voisins, les ont vu alors qu'ils ont été capturés et ils étaient vivants

  4   encore, et ceci a été diffusé, et très souvent sur les écrans de Bosnie-

  5   Herzégovine, à chaque fois qu'il y a eu l'anniversaire de cet événement, ce

  6   triste événement. Le 10 mai de chaque année, on revoyait à nouveau ces

  7   enregistrements, cette émission, ces images. C'est pour cela que le

  8   problème est resté brûlant.

  9   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, la pièce P 09036 est

 10   une vidéo assez brève. Nous l'avons préparé. Nous avons ces mêmes images

 11   qui figurent en tant que pièces à conviction en l'espèce, mais celles-ci

 12   sont de meilleure qualité. Nous avons décidé de le montrer aujourd'hui, et

 13   ensuite je me propose de poser quelques questions au témoin à ce sujet.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   M. STRINGER : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Masovic, c'est une partie de cet enregistrement vidéo que vous

 17   venez de mentionner. Vous avez dit que c'est quelque chose qui a été

 18   diffusée en Bosnie-Herzégovine.

 19   R.  Oui, c'est précisément cet enregistrement, mais un petit peu abrégé.

 20   Q.  Très bien. Je voudrais maintenant que l'on parle de la pièce 8542 dans

 21   votre classeur.

 22   Q.  Reconnaissez-vous ce document, Monsieur ?

 23   R.  C'est le document qui porte l'intitulé : "Communiqué pour le public."

 24   C'est le document qui a été 8542.

 25   Q.  Je ne pense pas que vous ayez plus le bon document 8542.

 26   R.  Je vous prie de m'excuser. Oui, je reconnais ce document. C'est un

 27   document que j'ai rédigé et que j'ai signé. Je vais communiquer aux

 28   familles des prisonniers de Vranica.

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  1   Q.  Je pense que, d'emblée, il faudrait préciser quelque chose. Nous avons

  2   12 noms d'individus sur ce document. Vous avez déjà parlé de cela dans

  3   votre déclaration, et vous avez mentionné 13 prisonniers. Pouvez-vous

  4   préciser à l'attention du Chambre d'où vous provenez ces chiffres 12 et 13

  5   ?

  6   R.  Nous venons de voir un enregistrement vidéo, et on y voir 12 membres de

  7   l'armée qui ont été fait prisonniers dans le bâtiment de Vranica, et c'est

  8   effectivement ce qui s'est passé. Il y en a eu 12 qui ont été capturés au

  9   bâtiment de Vranica. Le 13e, qui est souvent mentionné dans le contexte de

 10   Vranica ou lorsqu'on parle des prisonniers de Vranica, c'est Huskovic,

 11   Fedja. Il a été fait prisonnier le même jour, mais dans le bâtiment de

 12   Vranica. Il était également membre de l'ABiH. Ses parents vivent aussi à

 13   Mostar, et eux, ils ont rejoint les parents des autres 12 prisonniers dans

 14   leurs tentatives de faire appel à l'opinion dans le pays à l'étranger pour

 15   qu'on apprenne quelle a été le sort de ces prisonniers, de ces 13

 16   prisonniers.

 17   Q.  Mais, lui, il ne figure pas à l'enregistrement vidéo ?

 18   R.  Non, lui n'y figure pas, et sa capture n'a pas été enregistrée par les

 19   caméras.

 20   Q.  A présent, je vous invite à examiner la toute dernière phrase que vous

 21   avez rédigée dans ce certificat. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous

 22   voulez dire par là ? Vous dites : "Les explications données par le HVO

 23   disant que certaines de ces personnes se trouvent maintenant à l'étranger"

 24   ne sont pas acceptables aux yeux de la Commission d'Etat, mais à quoi vous

 25   référez-vous là ?

 26   R.  Pendant ce premier contact, M. Pusic, le 29 décembre 1993, j'ai cherché

 27   â me -- est-ce -- je voulais savoir ce qui en était du sort des 13 membres

 28   de l'armée, donc, les 13 de Vranica. M. Pusic m'a dit, et je paraphrase,

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  1   huit de ces personnes sont en vie. Demandez à Orucevic ce qui est advenu de

  2   ces gens. C'est lui qui a procédé à leur échange.

  3   A ce moment-là, je ne savais pas si cette information a été tout à

  4   fait exacte ou pas, dans quelle mesure elle était exacte, et donc, j'ai

  5   pris contact avec M. Orucevic, même j'ai contacté d'autres personnes à

  6   Mostar qui participaient à ce processus d'échange de prisonniers de guerre.

  7   Il y avait un homme -- un policier, Safo Orucevic, Sefkija Djiho, et Alija

  8   Alikadic, et eux m'ont dit que ce n'était pas exact. Ils m'ont dit qu'aucun

  9   de ces 13 n'aient apparu pas en vie. Donc, cette affirmation de M. Pusic,

 10   lorsqu'il m'a dit que M. Orucevic a procédé à l'échangé de ces huit sur les

 11   13 de Vranica et qu'il les ait envoyé à l'étranger, cette affirmation de

 12   toute évidence n'était pas exacte, et ce sont des raisons pour laquelle

 13   j'écris cette dernière phrase. Lorsque je m'adresse aux parents, je leur

 14   dis que cette affirmation tout simplement n'est pas acceptable à mes yeux,

 15   qu'il y en aurait huit qui seraient en vie et à l'étranger.

 16   Q.  Fort bien. Pour que tout soit clair, je vous demande ceci. Vous

 17   avez parlé d'un certain Orucevic; est-ce M. Safet Orucevic, qui était maire

 18   de Mostar à l'époque ?

 19   R.  Oui. M. Pusic me dit, en fait : "Demande à Safo Orucevic

 20   -- demande-lui ce qu'il en est de ces gens, où ils sont."

 21   M. STRINGER : [interprétation]

 22   Q.  Pièce suivante, la pièce 8565, 8-5-6-5.

 23   Monsieur Masovic, regardez la pièce suivante. Est-ce que vous reconnaissez

 24   la signature apposée à ce communiqué ? Pourriez-vous nous dire ce qu'est ce

 25   document et qui l'a signé ?

 26   R.  Ce document, il a été signé, je suppose, pour Me Azra Penava. C'était

 27   l'épouse de Fahir Penava. C'est un communiqué qui s'adresse au public et il

 28   a été émis à partir du moment où sur le plan local à Mostar on avait tenu

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  1   une réunion de la présidence de la municipalité de Mostar. Lors de cette

  2   réunion, entre autres, il a été question du problème de ces 13 capturés

  3   dans le bâtiment de Vranica.

  4   Q.  Fort bien. Cette Azra Penava, qui est-elle ? Pourriez-vous nous le

  5   rappeler ? Ce n'est pas très clair pour le compte rendu, là.

  6   R.  Mme Penava, elle est l'épouse d'un des 12 membres de l'ABiH qui ont été

  7   capturés le 10 mai, et dont les noms -- ou plutôt, dont les visages

  8   figurent sur l'enregistrement vidéo que nous avons visionné.

  9   Q.  Est-ce qu'elle a joué un rôle particulier pour ce qui est de la famille

 10   des disparus, soldats qui se trouvaient dans le bâtiment Vranica ?

 11   R.  Donc, ce que je dirais, c'est qu'ils ont tous joué un rôle très

 12   important pendant tout ce temps-là parce que d'une certaine manière, ils

 13   ont exercé des pressions sur les autorités qui, je dois dire franchement,

 14   n'a pas eu de résultat, même si depuis 14 ans ils exercent des pressions

 15   sur des autorités. J'ai reçu plus d'une centaine de lettres de la part de

 16   l'organisation Amnesty International de ne leurs différents représentants

 17   basés dans divers pays, plusieurs continents. Et dans toutes ces lettres,

 18   des représentants d'Amnesty International m'interrogent sur le sort des 13

 19   membres de l'armée de Vranica, évidemment, je n'ai guère pu répondre. Je

 20   leur ai dit que nous essayons toujours de savoir ce qu'il en est advenu de

 21   ces hommes et que c'est difficile. Mme Penava, je dois dire, se trouvait à

 22   la tête de ce comité. Elle était le membre le plus actif de ce comité au

 23   cours de ces 14 années.

 24   Q.  Peut-on maintenant examiner la pièce 8595, la suivante dans le

 25   classeur. C'est le 17 août 1995. C'est la date que porte ce document.

 26   Est-ce bien une lettre de M. Pusic ? Est-ce que vous reconnaissez ce

 27   document ?

 28   R.  Oui, à en juger d'après l'en-tête, d'après la signature, c'est une

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  1   lettre envoyée par M. Pusic au bureau de l'ombudsman de la Fédération, et

  2   cela concerne la disparition de trois, seuls trois membres de l'ABiH sont

  3   mentionnés ici par lui. L'un d'entre eux fait partie du groupe des 12 de

  4   Vranica que nous avons vus à l'enregistrement, le troisième, Fahir Penava.

  5   Huskovic, Fedja est également mentionné, mais il n'est pas à

  6   l'enregistrement vidéo. Fadil Djelilovic [phon], mais pour l'instant, je ne

  7   peux pas vous dire quel a été son sort.

  8   Q.  Regardez en bas, on fait référence à Jusef Prazina, surnommé Juka,

  9   général de l'ABiH. Voici ma question : est-ce que -- lors des conversations

 10   que vous avez eues avec M. Pusic, est-ce que le nom de M. Prazina a été

 11   évoqué en rapport avec ces prisonniers du bâtiment Vranica ?

 12   R.  Moi, je n'ai pas mentionné cela, mais M. Pusic a souvent mentionné M.

 13   Prazina, disant que c'est l'individu qui, paraît-il, serait au courant du

 14   sort de ce groupe de Vranica, de ces 13 hommes, et même avant cette lettre

 15   envoyée à l'ombudsman, il m'en a parlé, et par la suite, lorsque M. Pusic

 16   était dans la Commission chargée des Personnes portées disparues.

 17   Q.  Est-ce que vous savez qui est Jusuf Prazina ? Etait-il membre de

 18   l'armée ? Connaissez-vous son statut ?

 19   R.  M. Prazina, il a été pendant quelques temps un commandant de l'une des

 20   Unités locales de l'ABiH à Sarajevo. Par la suite, je pense qu'il se

 21   livrait à des activités qui relèveraient de crimes et que c'est à cause de

 22   cela qu'on a trouvé d'une certaine manière des moyens pour le démobiliser,

 23   le faire quitter Sarajevo. Je pense, du moins -- enfin, du moins, c'est

 24   qu'on disait à l'époque il se trouvait révolté par ce fait qu'on l'a chassé

 25   de l'armée, et paraît-il, il aurait rejoint des Unités du HVO. Pendant

 26   quelques temps, je sais qu'il a eu des problèmes, qu'il gardait un poste au

 27   sud de Jablanica et qu'on a volé des gens, pillé des gens qui se

 28   circulaient le long de cette route, Mostar-Sarajevo. Enfin, il y a eu cette

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  1   rumeur qu'il aurait rejoint les unités du HVO. Mais comme je viens de vous

  2   le dire, je n'en sais rien directement. Il y a eu des médias qui ont en

  3   parlé. Il y a eu des histoires qui ont circulé à Sarajevo. Après la guerre,

  4   paraît-il, il aurait été tué dans un règlement de compte, quelque part en

  5   Europe occidentale, en Belgique, je crois.

  6   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir parlé avec M. Pusic ou des

  7   prisonniers de Vranica, Genève ou dans le secteur de Genève en Suisse ?

  8   R.  Je me souviens de cet entretien. C'est l'une des situations où il y a

  9   eu des entretiens sur Vranica avant Genève, et même après cet entretien de

 10   Genève, il y en a eu, M. Pusic, moi-même --

 11   Q.  Permettez-moi de vous interrompre. Je m'en excuse. J'ai quelques

 12   questions à vous poser qui vont déboucher là-dessus. Tout d'abord,

 13   pourriez-vous nous dire à quel moment cette réunion a eu lieu ? Vous

 14   souvenez-vous du mois, de l'année, de la date éventuellement ?

 15   R.  M. Pusic et moi-même, nous nous sommes trouvés à Genève entre le 16 et

 16   21 juillet 1997, à Genève ou dans les environs de Genève. Au cours des

 17   réunions du Groupe de travail du Comité international de la Croix-Rouge qui

 18   était chargé des Personnes portées disparues.

 19   Q.  Est-ce que M. Pusic et vous, vous aviez participé à une série de

 20   réunions de ce Groupe de travail ?

 21   R.  Oui, tous les deux. Quand on a qualifié cela, on était des

 22   représentants actifs au sein de ce Groupe de travail. Nous avons pris part

 23   à ces travaux. Il y avait des représentants actifs et des observateurs. M.

 24   Pusic et moi-même, nous faisons partie des participants actifs des

 25   représentants de ce Groupe de travail chargé des Personnes portées

 26   disparues. Dans le cadre de la série de réunions que vous avez eues à

 27   Genève, vous avez parlé avec M. Pusic des prisonniers de Vranica ?

 28   R.  Oui, des conversations portant sur les prisonniers de Vranica, ça

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  1   c'était un entretien à part, spécifique entre nous, entre le 16 et le 21

  2   juillet 1997.

  3   Q.  Pourquoi ne pas parlez aux Juges de la réunion et de l'endroit où elle

  4   a eu lieu ?

  5   R.  Le dernier jour de cette onzième réunion de la Croix-Rouge

  6   internationale -- ou plutôt, du Groupe de travail -- de son Groupe de

  7   travail à Genève le CICR a organisé une séance d'excursion pour les

  8   participants et on s'est rendu sur le lac de Genève et, entre autres, on

  9   s'est rendu à Montreux, une localité de ce nom, et c'était le 20 juillet

 10   1997, et dans le cas d'une conversation, il avait M. Pusic et moi-même, on

 11   était au bord du lac à côté d'un monument à Freddie Mercury, du groupe

 12   Queen. M. Pusic m'a fait part d'une offre qui m'a semblé intéressante. Il

 13   m'a dit expressément qu'il était prêt à donner 16 membres de l'ABiH de

 14   Vranica si, en échange, j'étais en mesure de lui fournir 21 individus

 15   d'appartenance ethnique croate capturés à Bugojno, capturés par les forces

 16   du gouvernement et qui, après avoir été capturés, ont été emmenés de

 17   prisons et -- ou -- et dans la trace se perd à partir de ce moment-là. On

 18   ignorait tout de leur sort, et ça m'a étonné. Ça m'a surpris parce que

 19   c'était la première fois qu'il a cité ce chiffre de 16 prisonniers. On a

 20   toujours parlé de 12, voire de 13 du groupe de Vranica, et c'est la

 21   première fois, à ce moment-là, que M. Pusic en a évoqué 16. Je n'ai pas

 22   compris plus tard lorsque je me suis posé la question, je me suis demandé

 23   pourquoi il avait parlé de 16, je suis arrivé à la conclusion qu'il voulait

 24   probablement équilibrer les chiffres donc contre 16 à un membre de l'armée

 25   d'une part, et 21 membres du HVO de Bugojno d'autre part. Peut-être qu'il a

 26   pensé que, de cette façon-là, il allait apprendre plus facilement ce qui en

 27   était de ces membres du HVO. Je n'ai pas véritablement attribué une grande

 28   importance à cette offre. Je lui ai dit que j'allais tenter de vérifier

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  1   cela même si je savais d'emblée, à ce moment-là, qu'il m'allait être très

  2   difficile de savoir quoi que ce soit sur ces gens de Bugojno car d'ores et

  3   déjà, à ce moment-là, on pensait que ces gens n'avaient pas survécu qu'en

  4   réalité, ce qui est arrivé c'est qu'après avoir été emmenés on les a tué et

  5   qu'on ne savait pas où ils ont été enterrés. Donc, je savais d'emblée que

  6   je n'allais pas pouvoir accepter cette offre de M. Pusic mais je lui ai dit

  7   que j'allais tenter de vérifier de mon côté de rechercher ce qui en était

  8   de ces gens, mais je n'ai pas vraiment attribuer une grande importance à

  9   cette offre 16 contre 20, parce que 21 -- parce que je ne pensais pas que

 10   c'était une offre sérieuse de la part de M. Pusic.

 11   Q.  En ce qui concerne ces prisonniers, c'étaient les prisonniers du HVO de

 12   Bugojno, n'est-ce pas ?  Et au jour d'aujourd'hui, est-ce qu'on sait ce

 13   qu'il est advenu de ces gens ?

 14   R.  Hélas, on ignore toujours le sort de ces 21 hommes qui se sont trouvés

 15   en prison de l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine. Ils ont été

 16   emmenés de prison 14 ans plus tard. Il est clair aujourd'hui qu'ils ne sont

 17   plus parmi les vivants. Par le biais de la Commission chargée des Personnes

 18   portées disparues, mon collègue, Marko Jurisic, et moi-même, nous avons

 19   essayé de savoir ce qui en était, nous nous sommes rendus à six ou sept

 20   sites différents. Il y a eu même une équipe de plongeurs qui a recherché

 21   dans un lac près de Bugojno parce que nous avions appris qu'après le

 22   meurtre, leur corps aurait été jeté dans ce lac. Nous avons creusé à

 23   différents sites et nous avons pris contact avec la soi-disant exécutante

 24   un de ces crimes sur ces hommes et encore aujourd'hui on ignore ce qui en

 25   est de leur sort.

 26   Q.  Lors de cette réunion où M. Pusic a parlé avec vous des prisonniers de

 27   Vranica, est-ce qu'il y avait quelqu'un d'autre de présent ?

 28   R.  A proximité à deux pas de nous, il y avait ma collègue qui travaille

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  1   dans la commission, qui s'appelle Sanja Mulac. Elle est chargée de Mostar

  2   dans cette commission. J'en ai parlé avec Sanja Mulac; elle aussi, elle a

  3   été étonnée d'entendre cette offre de

  4   M. Pusic où il aurait été question de 16 membres de l'ABiH.

  5   Q.  Prenons le dernier document de ce classeur, il s'agit de la pièce

  6   10354. Vous reconnaissez ce document, Monsieur Masovic ?

  7   R.  Oui, il s'agit d'une photographie qui a été prise le

  8   19 juillet 1997 à Genève. Je pense que c'est lorsque nous nous sommes

  9   rendus à un dîner organisé par le CICR à l'attention des participants de la

 10   11e Session, donc, réunion du Groupe de travail pour rechercher des

 11   personnes disparues.

 12   Q.  Est-ce que vous reconnaissez M. Pusic sur cette photo ?

 13   R.  Oui, M. Pusic est le premier à partir de gauche sur cette photographie.

 14   Q.  Et à côté de lui ?

 15   R.  A côté de lui c'est Mme Sanja Mulac. Elle est chef du bureau chargé des

 16   Personnes portées disparues à Mostar.

 17   Q.  Est-ce qu'on vous voit sur cette photo ?

 18   R.  Moi, je suis cinquième, le cinquième de gauche à droite.

 19   Q.  Avançons dans le temps, nous allons sauter dix années; est-ce que vous

 20   vous souvenez avoir entendu parler d'un charnier d'une fosse commune

 21   éventuelle du côté de Siroki Brijeg, région de Mostar en mai 2007 ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic.

 23   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il me

 24   semble que ce serait utile si M. Masovic pouvait identifier les autres

 25   personnes présentes sur cette photographie. Je pense que ça ne devrait pas

 26   poser problème.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, vous pouvez donner les noms des autres

 28   personnes qui sont sur la photo ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] En plus des noms que j'ai déjà mentionnés

  2   allant de gauche à droite, M. Pusic, Mme Mulac,

  3   M. Perkovic, Madame qui s'appelle, je pense, Margaret, qui travaille pour

  4   le CICR, et ensuite, moi-même, puis la dame dont je ne connais pas le nom,

  5   mais je sais qu'elle est représentante de la Croix-Rouge locale, à savoir

  6   la Croix-Rouge de Bosnie-Herzégovine dont le siège est à Sarajevo. La

  7   dernière dame est Fadila Mujic, elle représente une Association des

  8   Familles des personnes portées disparues de Srebrenica. A l'époque, elle

  9   faisait partie de cette association, mais elle n'y est plus. Elle était à

 10   la tête d'une des associations de Srebrenica à l'époque.

 11   M. STRINGER : [interprétation] Merci. Monsieur le Président.

 12   Q.  Monsieur le Témoin, je vous ramène à ma question posée en dernier. Est-

 13   ce que vous et des collègues, vous avez entendu parler qu'il y avait

 14   éventuellement une fosse commune entre Mostar et Siroki Brijeg ?

 15   R.  Le 17 mai dernier, Mme Mulac m'a appelé par téléphone - elle était à

 16   Mostar - et elle m'a dit qu'une exhumation était en cours, exhumation des

 17   corps d'un certain nombre de victimes, qu'il s'agissait d'un site près de

 18   Mostar sur la route Mostar-Listica-Siroki Brijeg, que cette exhumation

 19   était entre les mains de nos collègues de la Republika Srpska, donc, de

 20   l'autre entité, et qu'elle, donc, Mme Mulac, estimait qu'il n'y avait pas,

 21   parmi les victimes, d'individus d'appartenance ethnique serbe - c'est du

 22   moins ce qu'on lui a dit lorsqu'elle est arrivée sur le site - mais que ces

 23   victimes dans cette fosse commune étaient, en fait, des Musulmans de

 24   Bosnie. A ce moment-là, j'ai dit à Mme Mulac que j'allais me rendre le

 25   lendemain, donc, le 18 mai, là-bas, à l'endroit de cette exhumation, et

 26   c'est ce que j'ai fait; j'y suis allé.

 27   Q.  Vous avez dit que le premier jour, le 17 mai, c'était une exhumation

 28   réalisée par des représentants de la Republika Srpska. Comment se fait-il

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  1   que des représentants de la Republika Srpska se soient trouvés à un endroit

  2   qui est à l'ouest de Mostar ?

  3   R.  La source, qui a aidé à identifier l'endroit où se trouvait cette fosse

  4   commune, a dit que les victimes dans cette fosse commune étaient des

  5   individus d'appartenance ethnique serbe. Je pense que ce témoin a même dit

  6   qu'il y avait là entre huit et 12 victimes et que ces personnes ont été

  7   tuées le 14 ou le 15 juin 1992 près de Mostar, dans un secteur qui

  8   s'appelle Podvelezje. Donc, c'est suite à l'accord régissant les

  9   exhumations entre les deux entités précisant que c'est l'entité pour

 10   laquelle on estime que les victimes lui appartiennent. Donc, là, c'était en

 11   l'occurrence les victimes serbes, qui charge de l'exhumation, donc, c'est

 12   la Republika Srpska qui, en passant par le procureur compétent, à pris les

 13   dispositions pour que l'exhumation ait lieu. Donc, c'est ça qui explique

 14   pourquoi la Republika Srpska est présente dans Mostar Ouest. Si on nous

 15   avait dit que les victimes avaient été des Musulmans de Bosnie ou des

 16   Croates

 17   -- et des Croates, à ce moment-là, l'exhumation aurait été chargée de la

 18   commission que je préside, c'est-à-dire la Commission fédérale.

 19   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais poursuivre.

 20   Je ne suis pas très sûr de l'heure de la pause. Je peux poursuivre pendant

 21   quelques minutes et examiner quelques pièces assez rapidement, si vous me

 22   le permettez.

 23   Q.  Monsieur le Témoin, prenons la pièce 10322. Je vais me risquer à vous

 24   poser quelques questions qu'on pourrait considérer comme étant directrices

 25   de façon à progresser un peu plus rapidement. Je sais que la Défense fera

 26   objection si elle estime que j'exagère. Est-ce que ceci, c'est un rapport

 27   établi par les autorités de la Republika Srpska le 17 mai 2007 ?

 28   R.  Oui, c'est le rapport qui a été fait par Mme Gorbana Salvarica [phon],

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  1   le procureur du district de Trebinje, dans la Republika Srpska.

  2    Q.  Je vois le quatrième nom. Est-ce qu'on parle de Mme Mulac, votre

  3   collègue, dont vous avez déjà parlé ?

  4   R.  Oui, c'est Mme Sanja Mulac, la représentante de notre commission, la

  5   Commission de la Fédération.

  6   Q.  J'ai une erreur pour ce qui est de son nom ici en anglais, mais c'est

  7   bien la même personne, une personne dont on parle, n'est-ce pas ? Est-ce

  8   qu'elle était présente sur les lieux au moment de l'exhumation le 17 mai ?

  9   R.  Dans le document original, son nom est correctement écrit : Sanja

 10   Mulac. Dans la traduction vers l'anglais, c'est une erreur qui s'est

 11   glissée Sanja Mulic. Mais dans le document original, oui, son nom est

 12   correctement orthographié. Donc, c'est elle qui a été présente, et comme je

 13   l'ai dit tout à l'heure, ce jour-là, elle m'a contacté pour m'informer du

 14   fait qu'elle pensait qu'il s'agissait des victimes bosniennes puisqu'elles

 15   portaient des uniformes.

 16   Q.  -- elle porte la cote 10323. Est-ce que nous avons ici le rapport

 17   d'exhumation du lendemain, le 18 mai 2007 ?

 18   R.  Oui, c'est bien le procès-verbal de cette exhumation qui a été fait,

 19   cette fois-ci, par le procureur principal du tribunal de district de

 20   Trebinje. C'était le 18 mai 2007, après l'exhumation. Q.  Ce jour-là, le 18

 21   mai ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Page 2 de la traduction, troisième nom, apparemment, on a mal épelé

 24   votre nom, n'est-ce pas ? Mais nous avons bien établi hier, n'est-ce pas,

 25   que votre nom est mal écrit ici dans l'original aussi ?

 26   R.  Oui. Ni dans le procès-verbal original ni dans la traduction, mon nom

 27   n'a été correctement orthographié.

 28   Q.  Une dernière question avant la pause. Je crois qu'il est utile de la

Page 25068

  1   poser maintenant avant d'aborder la question dans le détail. Il y a eu

  2   cette exhumation, et plusieurs événements qui s'en sont suivis, est-ce que

  3   tout ceci a permis, au bout du compte, de déterminer de façon définitive

  4   l'identité des personnes dont on trouvé les restes à cet endroit ?

  5   R.  L'interprétation que j'ai entendue -- je ne vois pas où est la question

  6   par rapport à ce que j'ai entendu.

  7   Q.  Bientôt, nous allons examiner une série de documents qui ont [aucune

  8   interprétation] vous parlez du travail qui a été effectué par la suite sur

  9   les restes trouvés à cet endroit. Ma question est de savoir si tous ces

 10   résultats sont désormais définitifs et officiels ?

 11   R.  Tout ce qui était toujours en cours, même après l'exhumation, tout ceci

 12   a été fait officiellement, mais il y a des choses qui ne sont pas

 13   définitives.

 14   Q.  C'est ce que je voulais savoir : est-ce qu'il y a une décision finale

 15   déterminant l'identité des personnes dont on a trouvé les restes à cet

 16   endroit ?

 17   R.  Avant tout, je dois dire qu'à cette localité on a trouvé 16 dépouilles,

 18   pas complètes, des victimes donc. Aucune des dépouilles n'a été complète. A

 19   chaque fois, il manquait des parties de squelette, et pour 15 des 16

 20   dépouilles mortelles, de façon préliminaire par la méthode d'identification

 21   ADN, on a pu établir de façon préliminaire, j'ai dit, l'identité. Pour une

 22   victime on n'a toujours pas l'identité de celle-ci.

 23   Q.  Etant donné qu'il s'agit de résultats d'ADN préliminaires, et je

 24   voulais le signaler à l'attention de tous, je ne vais pas vous poser de

 25   questions sur certains des points et sur certains des objets trouvés, des

 26   montres, des bagues, ce genre de chose qui permettent quelquefois

 27   l'identification de la part de membres des familles, nous allons uniquement

 28   parler des résultats d'ADN, n'est-ce pas ?

Page 25069

  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Bien sûr que le témoin peut répondre à la

  2   question, je suis sûr qu'il a été préparé à cet effet. Mais avant qu'il ne

  3   réponde à la question de l'ADN, je crois qu'il faudra poser les bases de

  4   cette question. S'il va simplement dire : voilà c'est le rapport qui nous a

  5   été remis, inutile d'avoir ce témoin pour nous le dire. Pour autant que ce

  6   soit des résultats d'ADN, ça ne veut pas dire que ces résultats soient

  7   exacts, car il faut que ça soit un expert qui les présente, et je ferai

  8   sans doute une objection à ce qu'on transforme le témoin en témoin expert

  9   sur des éléments d'ADN alors qu'à ma connaissance, il est avocat, c'est un

 10   juriste. Peut-être qu'il a fait la faculté de médecine à côté, qu'il a

 11   obtenu un autre diplôme.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Est-ce que vous pouvons passer à huis clos

 13   partiel. Je pourrais vous dire où je veux aller, où je ne veux pas aller

 14   avec ce témoin.

 15   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Stringer, vous avez la parole.

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  1   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Témoin, lorsque nous avons pris la pause nous étions en train

  3   d'examiner la pièce P, excusez-moi, P 010323, c'est le rapport d'exhumation

  4   concernant la date du 18 mai 1993. Voyez-vous cela ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je crois que vous avez indiqué que vous étiez présent sur le site qui

  7   s'appelle le site Goranci ce jour-là.

  8   R.  Le 18 mai, le deuxième jour d'exhumation, le site s'appelle Prikinac ou

  9   Prikunac, et Rimski Bunar est le site en sens plus restreint du terme.

 10   Q.  Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre, s'il vous plaît, en termes

 11   généraux, l'importance de votre expérience en tant que commissaire ou

 12   plutôt directeur de la Commission sur les Personnes disparues. Quelle est

 13   votre expérience sur le processus qui commence par une exhumation et se

 14   poursuit par des tests ADN pour finir par une identification des victimes

 15   pour la famille ? Quelle est votre expérience avec ce processus et quel est

 16   votre niveau de participation ? Qu'est-ce exactement ce que vous faites ?

 17   R.  S'agissant du processus lui-même d'identification, j'y prends part

 18   depuis plus de 15 ans, donc depuis 1992. Au mois d'octobre de cette année-

 19   là, j'ai eu l'occasion d'être présent au moment de l'identification des

 20   corps qui avaient fait l'objet d'échange et qui ont été remis à la

 21   commission dont j'étais membre, plus précisément vice-président à l'époque,

 22   et j'ai continué jusqu'à maintenant. Jusqu'en l'an 2000, les

 23   identifications des victimes se faisaient uniquement en employant des

 24   méthodes classiques, plus précisément par la méthode de la reconnaissance

 25   de la victime par des proches, des membres de famille.

 26   Q.  Pour être sûr que le compte rendu d'audience est correct, je vois dans

 27   la version anglaise que vous parlez "d'identification de témoins," je crois

 28   que c'est une erreur. Nous parlons d'identification des victimes.

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  1   R.  J'ai dit identification des victimes.

  2   Q.  Depuis l'an 2000, quels ont été les changements dans la méthode

  3   d'identification ?

  4   R.  Dans les espaces de l'ex-Yougoslavie, on a vu arriver une Commission

  5   internationale qui se charge des Personnes portées disparues, celle-ci a

  6   créé des laboratoires destinés à d'identification par l'ADN à Tuzla et on a

  7   amorcé ce processus d'identification par le biais de l'ADN. Il s'agit de

  8   comparer des échantillons sanguins qui sont prélevés sur des proches en

  9   vie, donc des membres de familles des personnes portées disparues, et on

 10   procède à leur comparaison à des restes du squelette et de la structure de

 11   l'ADN que l'on obtient sur des restes des ossements, donc des personnes

 12   exhumées, des victimes exhumées. S'il y a "matching," s'il y a

 13   correspondance entre l'échantillon sanguin et l'ADN des os, on dit que la

 14   comparaison est positive, donc, on parle d'identification préliminaire de

 15   victimes. Tel est le cas de 15 victimes exhumées de Goranci, de cette fosse

 16   commune.

 17   Après l'ADN, après cette analyse-là, une fois qu'on a établi cette

 18   correspondance positive, on procède à une identification définitive,

 19   finale, à savoir les résultats de cette correspondance par l'ADN sont

 20   présentés aux membres des familles, aux proches concernés pour une victime

 21   donnée et par la suite on procède à une comparaison. On compare les données

 22   ante mortem et post-mortem. Encore une fois, on vérifie la taille de la

 23   victime, son âge, les vêtements, s'il y a des vêtements, des vêtements qui

 24   pourraient être reconnus par des proches, éventuellement des objets

 25   personnels que l'on retrouve sur des victimes, ça peut être des bijoux, des

 26   montres, crayons, un stylo, briquet, tout objet personnel appartenant à la

 27   victime on le présente, on le soumet aux proches et les proches essaient de

 28   procéder à l'identification de ces objets également. Pour qu'une fois que

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  1   tout ceci a été fait et mené à bien, on dresse un procès-verbal sur

  2   l'identification de la victime, ce PV est signé par un proche, par un

  3   membre de famille, et par la suite la dépouille est remise à la disposition

  4   de la victime [phon] qui décide l'enterrement.

  5   La procédure veut que l'ADN, l'échantillon de l'ADN prélevé sur des

  6   victimes est prélevé pour un médecin légiste local, c'est-à-dire par un

  7   expert en médecine légale qui s'exécute sur ordre du procureur, qui prélève

  8   un seul échantillon, voire plusieurs échantillons de l'ADN, selon le

  9   besoin, s'il s'agit de victimes qui ne sont pas compactes. Tel est le cas

 10   dans la fosse commune de Goranci. Il semblerait à en juger d'après tous les

 11   éléments, que c'est une fosse secondaire, les restes sont complètement

 12   décomposés, il en manque une partie. Très vraisemblablement, cette partie-

 13   là est restée dans la fosse primaire où les victimes ont été inhumées pour

 14   une première fois, ou enterrées pour une première fois, et nous ignorons

 15   l'emplacement de ces premières fosses.

 16   Q.  Pour en revenir à ce site en particulier, laissez-moi vous poser la

 17   question suivante : savez-vous si sur ce site-là en particulier combien

 18   d'os ou les faits manquaient, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas été trouvés sur

 19   ce site.

 20   R.  J'aurais du mal à vous dire cela de manière très précise mais plus de

 21   50 parties du squelette manquent, pour l'essentiel, soit il s'agit

 22   d'ossements de plus petite taille, des cotes, par exemple, des vertèbres.

 23   Q.  Puis-je vous demander de bien vouloir répéter votre réponse ? Nous

 24   avons eu un problème d'interprétation. La question que je vous ai posée est

 25   donc : si vous saviez combien d'os ou des faits manquaient, c'est-à-dire

 26   n'ont pas été retrouvés sur ce site ?

 27   R.  Il serait difficile d'être tout à fait précis sur le nombre total des

 28   parties du squelette qui manque. Mais nous évaluons cela à plus de 50 os.

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  1   Il s'agit là, donc, de 16 victimes en tout et les os qui manquent sont pour

  2   l'essentiel des os de plus petite taille, par exemple des phalanges, des

  3   mains, et des pieds, des côtes, des vertèbres. Parfois c'est dans morceaux

  4   d'os plus grands de l'humérus ou -- et surtout des parties du crâne des

  5   victimes, ce qui nous permet de penser que ces crânes ont été détruits soit

  6   au moment de la liquidation des victimes, soit pendant leur transfert des

  7   fosses primaires au fosses secondaires.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je soulève une objection quant à ce

  9   témoignage. Ce témoin ne parle pas en tant qu'expert alors il donne ici une

 10   opinion d'expert. Ils ont eu des experts --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- la Chambre vous écoute toujours avec attention

 12   mais le témoin ça fait 15 ans qui s'occupe de ces questions. Je ne vois pas

 13   qui mieux que lui peut parler de cela.

 14   Monsieur, j'ai juste une question complémentaire. Depuis 15 ans, vous êtes

 15   dans ce domaine, est-ce que vous êtes occupé de Srebrenica, par exemple ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] En une seule phrase, je vais peut-être pouvoir

 17   vous répondre à toutes les questions posées. Moi je suis sans doute celui

 18   qui a assisté au plus grand nombre d'exhumations qui ont eu lieu sur le

 19   territoire de Bosnie-Herzégovine plus qu'aucun expert. Pourquoi ? Parce que

 20   les experts, vous savez, concentrent sur un territoire donné par rapport

 21   aux compétences de certains tribunaux. Moi, j'ai agi à Prijedor,

 22   Srebrenica, Zvornik et l'Herzégovine, y compris dans d'autres Etats, les

 23   Etats voisins de sorte que je puis dire que je suis expérimenté,

 24   suffisamment expérimenté pour dire si une squelette exhumée est complète ou

 25   non.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Nous n'avons pas pu voir qu'il s'agit d'un

 27   témoin expert. Non. Donc, je soulève une objection. Bien évidemment, il a

 28   des informations de contexte, mais je ne crois pas que le témoin est

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  1   qualifié. S'il témoigne en tant qu'expert, c'est bien mais il n'a pas été

  2   emmené en tant que témoin expert. Nous n'en n'avons pas eu vent et je

  3   soulève dès lors une objection quant à son témoignage parce que maintenant

  4   il se présente comme étant un expert.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : -- continuez, Monsieur Stringer.

  6   M. STRINGER : [interprétation]

  7   Q.  J'ai peu de temps, donc, je vais continuer à avancer à grands pas.

  8   Laissez-moi tout simplement sur le dernier point dont je vous ai entretenu.

  9   Monsieur Masovic, je vous demandais si vous avez une idée en général

 10   de combien d'exhumations ont été faites sous l'égide de la commission dont

 11   vous étiez le commissaire principal ou directeur ? Donc de combien

 12   d'exhumations étiez-vous responsable au cours de vos années de travail pour

 13   la commission ?

 14   R.  Plus que 370 fosses communes. En ce qui concerne les tombes qui ont

 15   plus que cinq victimes, 370 donc ou plus, plus que 2 000 tombes

 16   individuelles, plus de 18 000 victimes, y compris les victimes de

 17   Srebrenica. C'est quelque chose qui relevait du mandat, des mandats, des

 18   commissions auxquelles j'ai participé depuis ces nombreuses années au cours

 19   des 11 dernières années. Plus que, plus de 15 000 victimes ont été

 20   identifiées sur les 18 000 qui ont été exhumées en total.

 21   Q.  Je voudrais maintenant vous montrer une série de pièces ici et vous

 22   demandez rapidement de nous dire, enfin juste très brièvement de quoi il

 23   s'agit, si vous la reconnaissez ou non ? Et ensuite nous reviendrons à

 24   d'autre chose et je vous poserai des questions plus contextuelles.

 25   M. STRINGER : [interprétation] Donc, si vous voulez bien examiner la pièce

 26   10337, s'il vous plaît.

 27   Pour les techniciens, je voulais dire que nous allons passer en revue les

 28   pièces à conviction, donc, nous allons demander que ces pièces soient mises

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  1   sous pli scellé. 

  2   Q.  Témoin, voulez-vous bien examiner cette pièce et dire aux Juges de la

  3   Chambre de quoi il s'agit ? Ce que sont ces trois documents dans cette

  4   pièce ?

  5   R.  Là, il s'agit de trois paires positifs, donc, trois confirmations

  6   indiquant que les échantillons des squelettes au crissio [phon] -- au

  7   niveau des différents endroits du corps appartiennent à une seule personne.

  8   Et après avoir fait les comparaisons avec le sang des membres de la famille

  9   de la personne défunte, on en arrive à une possibilité de 99 999 %

 10   indiquant qu'il s'agit là d'un certain Alija Camo, l'un des membres de

 11   l'ABiH emprisonné dans le bâtiment Vranica. L'un de ceux qu'on a eu la

 12   possibilité de voir dans cet enregistrement vidéo. Donc, là, si vous

 13   voulez, pour être plus précis --

 14   Q.  Excusez-moi, Monsieur Masovic, je vous demande de m'excuser et de vous

 15   interrompre, mais je vais devoir poursuivre pour que nous puissions

 16   examiner du moins brièvement chacune de ces 15 pièces, donc, que nous les

 17   voyons toutes.

 18   Vous venez de mentionner M. Camo, Alija, comme figurant dans la pièce

 19   10337. J'aimerais vous poser une question sur ces rapports ADN. Est-ce

 20   qu'il s'agit là du genre de  rapport qui vous était communiqué dans le

 21   cours normal de vos activités, au sein de la commission et d'avoir rapport

 22   avec les familles des victimes ? 

 23   R.  Oui, c'est une copie. La copie d'un rapport original qui est envoyé à

 24   l'expert de la médecine légale qui prend un échantillon de la victime et

 25   ensuite qui envoie ses propres rapports à nous en tant que membres de la

 26   commission ainsi qu'aux juges du tribunal compétent. Il nous appartient à

 27   nous d'informer la famille d'une identification positive, à savoir du fait

 28   que par le biais de l'analyse ADN on a pu déterminer de façon préliminaire

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  1   l'identité des membres de la -- d'un membre de leur famille.

  2   M. STRINGER : [interprétation] Passons maintenant à la pièce 10338.

  3   Q.  Pouvez-vous me dire à qui appartienne ces résultats de

  4   test ?

  5   R.  Ces résultats concernent M. Senad Cehic. Ici aussi, nous avons

  6   plusieurs résultats des analyses ADN puisqu'ici, on avait pris plusieurs

  7   échantillons, donc, Senad Cehic était aussi l'un des prisonniers de

  8   Srebrenica, qui figuraient dans l'enregistrement vidéo.

  9   Q.  Alors, pour ce qui est de la pièce 10339.

 10   R.  Ici, la victime, qui a été aussi identifiée de façon préliminaire,

 11   Dzevad Colic, il faisait aussi partie du groupe Vranica, identifié lors de

 12   l'enregistrement vidéo qu'on a examiné. Q.  Quand vous avez dit "identifié

 13   auparavant," qu'est-ce cela veut dire exactement ?

 14   R.  Je vous l'ai déjà expliqué tout à l'heure. Il s'agit [aucune

 15   interprétation] --

 16   Q.  -- préliminaire --

 17   R.  -- d'informer la famille par rapport à ces résultats. Là, j'avais, pour

 18   tous les cas, de la fosse commune de Goranci, informé les familles des

 19   résultats positifs pour que la famille puisse se préparer pour l'acte

 20   final, à savoir de signer le procès-verbal de l'identification de la

 21   victime. Après quoi, les dépouilles de la victime sont remises à la famille

 22   pour ensuite déterminer la date et la place de l'enterrement.

 23   Q.  Nous avons la pièce 10340.

 24   R.  M. Mimo Grizovic, le certificat qui a une correspondance a été effectué

 25   entre les restes du "skeleton" et les échantillons sanguins pris chez sa

 26   mère et son père. Là encore, il s'agit d'une des victimes que l'on a

 27   montrée dans la vidéo de la télévision croate quand on a emprisonné le

 28   groupe de Vranica.

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  1   Q.  Pièce 10341.

  2   R.  M. Vahidin Hasic. Donc, à nouveau, on certifie que c'est bien lui sur

  3   la base de comparaisons des échantillons sanguins de sa mère et de son père

  4   et sur la base de l'analyse des restes au niveau du "skeleton" retrouvé.

  5   Encore une fois, une des personnes ayant fait partie du groupe de Vranica.

  6   Q.  10342.

  7   R.  Dzevad Husic. Ici, on prélevé le sang de son père et de sa sœur. Il y a

  8   eu correspondance par le biais de l'analyse ADN, et là encore il s'agit

  9   d'une personne qu'on a vue à la vidéo de la télévision croate, groupe

 10   Vranica.

 11   Q.  10343.

 12   R.  Zlatko Mehic, le prélèvement sanguin a été fait auprès de sa mère et

 13   son frère. La correspondance a été confirmée. C'est la première personne,

 14   un jeune homme avec les cheveux longs, qui porte les bottes, sur la vidéo

 15   de la télévision croate, une des personnes faisant partie du groupe

 16   Vranica.

 17   Q.  10344.

 18   R.  Nenad Milojevic, le prélèvement sanguin fait chez sa mère  et son père.

 19   Une correspondance positive a été établie. Il a été montré aussi dans la

 20   vidéo de la télévision croate, le groupe Vranica. Donc, cette fois-ci, sa

 21   mère a vu un objet qui a été retrouvé près des restes qu'elle a pu

 22   identifier. Il s'agissait d'une bague.

 23   Q.  10345.

 24   R.  M. Fahir Penava, le prélèvement sanguin a été fait auprès de sa femme,

 25   sa fille, son fils, et sa mère, et on a pu établir de façon préliminaire

 26   que c'est bien lui. Il faisait partie aussi du groupe Vranica. On l'a vu à

 27   la vidéo.

 28   Q.  Asra Penava, la femme de M. Penava, est-ce d'elle dont vous avez parlé

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  1   auparavant ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Nous avons maintenant la pièce 10346.

  4   R.  M. Nasif Sarancic, on a fait le prélèvement sanguin auprès de sa mère

  5   et de son père. La correspondance ADN a été établie. Il faisait également

  6   partie du groupe Vranica.

  7   Q.  10347. Et avant de parler de ce document, Monsieur Masovic, jusqu'à

  8   présent, nous avons parlé de soldats identifiés dans la vidéo de Vranica.

  9   Maintenant, nous allons parler de cinq personnes. Que pouvez-vous nous dire

 10   à leur propos ?

 11   R.  Ce que je peux dire avec certitude c'est que, pour les prisonniers que

 12   l'on a vus à la vidéo -- ou à l'émission de la télévision croate, ils n'ont

 13   pas été identifiés par le biais de l'analyse ADN, donc, il est assez clair,

 14   au jour d'aujourd'hui, que deux personnes parmi les 12 qui figuraient dans

 15   l'émission, ne se trouvent pas dans la fosse commune de Goranci. En ce qui

 16   concerne les six personnes identifiées qui ne faisaient pas partie du

 17   groupe Vranica, cinq d'entre eux ont été identifiés. Il reste donc une

 18   victime qui n'a pas encore été identifiée.

 19   Q.  Parlant du groupe de Vranica, il y en avait 12 dans cet extrait vidéo,

 20   et le treizième, nous n'avons pas l'identification de Hasim Balic, Selfko

 21   Pobric ou Fedja Huskovic; est-ce exact ?

 22   R.  Non seulement qu'ils n'ont pas été identifiés, mais il est clair, de

 23   façon définitive, que leurs corps ne se trouvent pas dans cette fosse.

 24   Pourquoi ? Parce que le sang prélevé auprès des membres de leurs familles

 25   ne correspond à aucun échantillon ADN correspondant aux "skeletons" trouvés

 26   dans la fosse.

 27   Q.  Ces cinq personnes dont on a trouvé des restes dans cette fosse,

 28   pouvez-vous donner des renseignements à leur propos aux Juges de la

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  1   Chambre; où les a-t-on vus la dernière fois, quel est leur statut en tant

  2   que personnes portées disparues ?

  3   R.  Nous, les membres de la commission, nous avons fourni neuf noms aux

  4   laboratoires. Il s'agissait de personnes portées disparues entre le 9 mai -

  5   c'était le début du conflit dans la région de Mostar - et le 13 mai, la

  6   date que nous avons pu établir sur la montre d'une victime. Donc, nous

  7   avons fourni neuf noms. Sur les neuf noms, les laboratoires ont pu établir

  8   que cinq personnes faisaient partie de ce groupe-là. Il s'agit là de Sabit

  9   Askraba, Hamza Filipovic, les frères Alica et Dragan Drace ainsi qu'Esad

 10   Husic, tout cela par le biais des analyses ADN. Toutes ces personnes --

 11   enfin, il y en a une pour laquelle nous ne connaissons pas le statut

 12   exactement, mais les autres, les quatre autres, ont été, à ce moment-là,

 13   soldats de l'ABiH qui ne sont pas morts au combat. On sait, par exemple,

 14   que les frères Drace ont été amenés de l'appartement de l'un des frères,

 15   Alica, je pense, et ceci entre le 10 et le 11 mai. Mais toutes ces

 16   personnes, de toute façon, ont été enregistrées en tant que personnes

 17   portées disparues pendant cette période-là.

 18   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais acter que

 19   le test concernant Sabit Askraba avait déjà une cote; la pièce est 10347.

 20   Pour Alica Drace, c'est la pièce 10348. Les résultats de Dragan Drace se

 21   trouvent à la pièce 10349. Les résultats de Hamza Filipovic sont au

 22   document 10350. Enfin, les résultats concernant M. Esad Husic se trouvent

 23   au document 10351.

 24   Q.  Monsieur Masovic, pourrions-nous revenir très rapidement à ceci, peut-

 25   être pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce qu'il en est de la pièce

 26   10324 ? Qu'est-ce que c'est que cette pièce, pourriez-vous le dire aux

 27   Juges ?

 28   R.  Il s'agit de photographies faites par l'expert en balistique, membre de

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  1   la Commission pour les Personnes disparues de la Republika Srpska avec le

  2   siège à Banja Luka. C'est un membre permanent de cette commission qui,

  3   quand il s'est rendu sur place, a fait à peu près 150 photographies en

  4   partant de la situation telle que trouvée au moment où ils sont arrivés sur

  5   les lieux jusqu'à la situation telle qu'elle a été pendant l'exhumation.

  6   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas

  7   saisi toutes ces photos dans le système du prétoire électronique, ça prend

  8   trop d'espace. Il faut longtemps pour les afficher. Plutôt que de nous

  9   servir du rétroprojecteur pour les montrer, je pense que je me contenterai

 10   de les avoir mentionnés à moins que vous n'ayez des vœux particuliers pour

 11   ce qui concerne l'une ou l'autre photo.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai juste une question, Monsieur le Témoin. Je vois

 13   la photo numéro 1 où on voit une clairière avec de l'herbe, des buissons,

 14   et cetera, puis la photo numéro 2, la 3, la 4, la 5, la 6, avant d'arriver

 15   à l'endroit où étaient les corps. Vous avez parlé tout à l'heure d'une

 16   source qui avait indiqué qu'il y avait des Serbes qui étaient enterrés.

 17   Mais pour qu'on aille exactement à l'endroit que l'on voit sur la photo

 18   numéro 7, c'est que la source a bien dû indiquer précisément où se trouvait

 19   le lieu où étaient enterrés les corps parce que sinon, c'est impossible.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Là, je vous parle de mon expérience

 21   personnelle quand il s'agissait de retrouver les sites des fosses communes.

 22   Ce que je peux dire en toute connaissance de cause que sans un témoin qui

 23   va vous montrer l'endroit exact de cette fosse, il aurait été impossible

 24   sur la base d'un quelconque autre indice localiser, retrouver cette fosse.

 25   Donc, on ne voyait aucun changement au niveau de la végétation, la

 26   configuration du terrain, de sorte qu'il a été impossible de retrouver ce

 27   site sans aide du témoin qui a fait venir ce collègue de la Commission de

 28   la Republika Srpska pour lui montrer l'endroit précis où se trouvait la

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  1   fosse.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

  3   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Je vois maintenant en fait que magiquement, quand même, ces photos

  5   apparaissent en prétoire électronique, fort bien.

  6   Q.  Revenons aux tests d'ADN et aux résultats préliminaires que vous venez

  7   de commenter. Au cours des années que vous avez maintenant  passées au sein

  8   de la Commission pour les Personnes portées disparues, est-ce que vous

  9   savez à quel moment il y aurait eu en fait preuve d'une identification

 10   incorrecte en utilisant ces tests d'ADN ?

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Il semblerait que M. Praljak n'entende pas.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Je ne pense pas que le témoin m'ait entendu

 13   non plus. Je vais reposer la question.

 14   Q.  Je vous demandais ceci, depuis plusieurs années vous travaillez à ce

 15   processus au sein de cette commission, est-ce qu'il y a eu un moment où des

 16   moments où ces résultats d'ADN préliminaires se sont avérés incorrects en

 17   matière d'identification ?

 18   R.  Non, jamais. Il faut dire qu'à travers le laboratoire, nous avons

 19   analysé plus que 10 000 restes. Donc, il y a quelque temps nous avons

 20   masqué la dix millième identification pour ce territoire, tout le

 21   territoire de la Bosnie-Herzégovine, la Serbie et le Kosovo. Donc plus que

 22   10 000 identifications ADN, aucune ne s'est avérée être erronée. Ces

 23   analyses par le biais d'ADN nous ont aidé à corriger certaines fautes

 24   survenues lors des identifications classiques pour ainsi dire. Donc c'est

 25   justement par cette méthode-là, la méthode ADN qui nous a permis de

 26   corriger des fautes survenues lors des identifications plus classiques en

 27   reconnaissant les objets personnels, et cetera. Donc, je ne suis au courant

 28   d'aucun fait où d'aucun exemple où une erreur serait survenue au niveau de

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  1   l'identification, et là je parle pour le Kosovo, la Serbie et la Bosnie-

  2   Herzégovine. Un tel cas n'est jamais survenu.

  3   Q.  Dernière question. Vous avez évoqué la question d'une fosse secondaire.

  4   Je sais que vous n'êtes pas expert et qu'il incombe à d'autres de conclure

  5   s'il s'agissait d'une fosse primaire ou secondaire, officiellement du

  6   moins. Parlons de façon générale de la question, disons de Srebrenica, est-

  7   ce que vous avez une certaine expérience pour ce qui est du traitement de

  8   restes qu'on avait trouvé dans des sites secondaires en rapport avec

  9   Srebrenica et d'autres exhumations ?

 10   R.  Oui. J'ai cette expérience effectivement quand il s'agit des sites au

 11   niveau des municipalités de Prijedor et de Srebrenica, même si nous avons

 12   eu à Srebrenica des cas beaucoup plus flagrants, des fosses secondaires,

 13   par exemple, vous avez une victime dont le corps a été retrouvé à quatre

 14   localités différentes qui se trouve à une distance supérieure à 30

 15   kilomètres. Donc, quand on a déplacé son corps depuis la fosse primaire,

 16   les [inaudible] et les camions qui transportaient ces restes humains, et

 17   là, il s'agissait des fosses comportant plus d'un millier de victimes, ont

 18   emporté ces restes dans quatre localités différentes. Ce jeune homme de

 19   Srebrenica, ses dépouilles ne sont toujours pas complètes, il manque encore

 20   quelques morceaux de son squelette. C'est là que cette méthode est

 21   extrêmement importante, parce que sans l'apport de l'analyse ADN, nous

 22   n'aurions jamais pu établir que ses restes se trouvent à quatre localités

 23   différentes. Et grâce à cette méthode, nous avons pu établir cela.

 24   Q.  Pour ce qui est du processus d'identification des familles à qui on

 25   présente les résultats ADN et d'autres objets, pourriez-vous dire aux Juges

 26   quel est l'effet sur les familles des victimes lorsqu'on a des situations

 27   où il y a des sites secondaires, ce qui veut dire que les corps sont

 28   disloqués et qu'on ne retrouve pas des corps complets ? Quelle est

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  1   l'incidence de ceci sur la totalité du processus ?

  2   R.  S'il s'agit d'une fosse commune primaire, cela veut dire que les corps

  3   sont complets, ce qui veut dire la fin de l'agonie pour la famille qui

  4   cesse de souffrir à cause des incertitudes qui parfois ont duré plus que

  5   dix ans. Mais si vous en avez, si vous avez une fosse commune qui est une

  6   fosse commune secondaire, comme ça été le cas pour Goranci, cette agonie va

  7   se poursuivre au-delà de l'identification. Pourquoi ? Parce qu'à partir du

  8   moment où les familles reconnaissent, par exemple, les dix victimes de

  9   Vranica, quand on leur remet leurs restes, quand ils ont été enterrés,

 10   quand vous faites des tombes pour chacune des victimes, cela ne veut pas

 11   dire que c'est la fin de l'agonie pour la famille. Pourquoi ? Parce que si

 12   nous retrouvons ou le jour où nous retrouvons la fosse primaire, ce que

 13   nous allons retrouver là-dedans, ce sont les parties des victimes qu'on a

 14   déjà réunis la famille, et donc, nous serons obligés de frapper à nouveau à

 15   la porte de ces familles pour leur dire que nous avons trouvé encore un os,

 16   encore un bout de bras de leur père ou de leur fils, et cetera. Donc, les

 17   familles qui ont leurs proches, dont les corps des proches se trouvent dans

 18   les fosses secondaires, leur agonie -- leur calvaire ne s'arrête pas là.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Masovic, est-ce que je

 20   pourrais ajouter une toute petite question ? Est-ce qu'il y a des efforts

 21   qui sont entrepris au cas où on a une fosse secondaire pour trouver la

 22   fosse primaire ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, personnellement, je travaille là-dessus,

 24   exactement. Je garde les contacts avec la source qui nous a amené jusqu'à

 25   la fosse secondaire pour essayer de retrouver la fosse primaire et les

 26   dépouilles des trois autres victimes du groupe Vranica pour lesquelles on

 27   sait de façon définitive maintenant qui ne se trouvent pas dans cette

 28   fosse-là, et j'espère que nous allons réussir.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, Monsieur Stringer, vous avez terminé

  3   l'interrogatoire principal. Alors comme vous le savez, le contre-

  4   interrogatoire se poursuivra demain. D'ici là, Monsieur, vous n'avez pu

  5   aucun contact avec l'Accusation, puisque vous avez prêté serment et vous

  6   êtes donc maintenant le témoin de la justice. Demain, nous nous

  7   retrouverons à 14 heures 15, puisque nous sommes d'audience demain après-

  8   midi. Je rappelle que, mercredi et jeudi, nous serons d'audience du matin à

  9   partir de 8 heures du matin. Voilà. Donc, nous nous retrouverons demain

 10   après-midi à 14 heures 15.

 11   --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le mardi 27 novembre

 12   2007, à 14 heures 15.

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