Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 20 mai 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le nom de l'affaire,

  6   s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  8   toutes et à tous dans ce prétoire et autour du prétoire. Affaire IT-04-74-

  9   T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] En ce 20 mai 2008, je salue Monsieur le

 11   Témoin.

 12   Je salue Mmes et MM. les avocats, MM. les accusés, toutes les

 13   personnes qui nous assistent dans cette salle d'audience et l'Accusation.

 14   Je vais lire trois décisions orales qui sont numérotées. Décision

 15   orale numéro 1, décision relative au statut de la déclaration de l'accusé

 16   Prlic. Le 6 mai 2008, l'Accusation a demandé que la Chambre lève la

 17   confidentialité de la pièce P 09078, il s'agit de la déclaration de

 18   l'accusé Prlic admise par la Chambre le 22 août 2007. La Défense ne s'est

 19   pas opposée à cette demande.

 20   Dans la mesure où la Chambre n'a jamais ordonné la mise sous scellé de la

 21   pièce en question, la présente demande est sans objet. La Chambre demande

 22   au greffier de vérifier que, dans la base de donnée e-court, la pièce P

 23   09078 est bien marquée publique.

 24   Décision numéro 2, décision orale relative à la demande de l'Accusation

 25   relative au résumé 65 ter (G) du règlement. Les 6 et 19 mai 2008,

 26   l'Accusation a demandé, premièrement, que la Défense de l'accusé Prlic

 27   fournisse des déclarations écrites des témoins à décharge et, deuxièmement,

 28   que les résumés fournis en application de l'article 65 ter (G) soient

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  1   complétés. La Défense Prlic s'est opposée à cette demande. La Chambre

  2   rappelle tout d'abord qu'à la différence de l'Accusation, la Défense n'est

  3   pas obligée d'obtenir des déclarations écrites des témoins qu'elle entend

  4   citer pour sa cause.

  5   En vertu de l'article 67(A) du Règlement, elle est uniquement tenue de

  6   communiquer les déclarations qu'elle a en sa possession. Par conséquent, la

  7   Chambre rejette la première demande.

  8   En ce qui concerne les résumés fournis en vertu de l'article 65 ter (G) du

  9   Règlement, la Chambre relève que l'Accusation avait l'occasion de faire

 10   valoir ses arguments lors de la conférence préalable à la présentation des

 11   moyens à décharge, le 21 avril 2008. Elle rappelle que l'Accusation a

 12   proposé un ordre du jour pour discuter de certains points liés au dépôt des

 13   listes 65 ter (G) sans pour autant soulever la question dont -- dont la

 14   Chambre est saisie en l'espèce.

 15   La Chambre constate par ailleurs que la qualité des résumés varie d'un

 16   témoin à l'autre. Par conséquent, il n'y a pas lieu de demander

 17   systématiquement un complément d'informations pour tous les résumés fournis

 18   en vertu de l'article 65 ter (G). La Chambre rejette donc la deuxième

 19   demande.

 20   Cela étant dit, la Chambre demandera au cas par cas des précisions et un

 21   complément d'informations par rapport aux résumés si elle l'estime

 22   nécessaire. Bien, ça va être le cas dans la décision numéro 3.

 23   Décision orale relative au Témoin Zdravko Sancevic et les demandes

 24   d'informations supplémentaires à la Défense Prlic. Au vu de la comparution

 25   du 26 au 29 mai 2008, la Chambre a étudié le résumé du témoignage de

 26   Zdravko Sancevic, témoin présenté par la Défense Prlic. La Chambre estime

 27   que certaines des informations fournies par ce résumé sont vagues et

 28   imprécises, notamment, le résumé précise que le témoin s'est déplacé de

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  1   Medjugorje à Sarajevo en 1993 afin de s'entretenir avec les autorités de

  2   l'ABiH. Ce résumé ne précise pas l'objet de ces réunions, leurs fréquences

  3   et leurs dates précises. Par ailleurs, le témoin aurait été présent à une

  4   réunion à Medjugorje le 18 mai lors de laquelle M. Prlic aurait -- je

  5   répète.

  6   Le 18 mai, lors de laquelle M. Prlic aurait été considéré comme, je cite :

  7   "Le candidat idéal pour les trois partis."

  8   A la suite de cette réunion, le témoin aurait eu des contacts avec M. Prlic

  9   en tant que représentant de la BiH. La Défense Prlic n'a cependant pas

 10   précisé la date exacte de cette réunion. Elle s'est limitée à préciser

 11   qu'il s'agissait du 18 mai. Ni les fonctions auxquelles M. Prlic aurait été

 12   nommé.

 13   La Chambre estime que des informations supplémentaires permettrait à la

 14   Chambre de mieux se préparer pour la comparution de témoins et permettrait

 15   à l'Accusation et aux autres équipes de la Défense de préparer leur contre-

 16   interrogatoire. Par conséquent, et conformément à la décision orale rendue

 17   ce jour, la Chambre invite la Défense Prlic à fournir les précisions

 18   nécessaires au résumé du témoignage de Zdravko Sancevic.

 19   Je n'ai plus de décision orale à rendre.

 20   Maître Karnavas, vous avez la parole pour la suite. Il vous reste deux

 21   heures et une minute.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] On me dit que ma consœur n'a pas le prétoire

 23   électronique et elle est sans doute le membre le plus précieux de l'équipe

 24   de la Défense bien plus que moi. Alors, peut-être que la régie peut nous

 25   aider pour qu'elle puisse consulter le prétoire électronique.

 26   Dans l'intervalle, nous devrions d'ici jeudi vous fournir les informations

 27   supplémentaires que vous avez requises s'agissant du témoin suivant.

 28   Bonjour à toutes et à tous.

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  1   LE TÉMOIN : ADALBERT REBIC [Reprise]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Rebic.

  5   R.  Bonjour, Monsieur Karnavas. Bonjour à toutes et à tous.

  6   Q.  Il ne nous reste que deux heures. J'avais demandé une heure de plus

  7   mais j'espère qu'en l'espace de deux heures, nous pourrons nous acquitter

  8   de notre tâche. Alors, s'il vous plaît, je vous en conjure, essayez d'être

  9   concis et direct dans vos réponses, et si j'ai besoin d'un complément

 10   d'information, je vous le dirai.

 11   Examinons le document suivant 1D 02624, 2624.

 12   Tout le monde s'en souviendra, hier, nous nous étions arrêtés au moment où

 13   nous parlions des rapports du fait que vous deviez préparer des rapports

 14   que vous avez effectivement préparés et que vous avez communiqués à la

 15   communauté internationale notamment. Examinons ce document, 2624.

 16   Je précise aux fins du dossier c'est un rapport du 14 octobre 1994,

 17   première page, nous y voyons votre nom et puis un peu plus loin, avant

 18   d'arriver au tableau, nous à la fin du texte nous retrouvons votre nom.

 19   Avez-vous déjà vu ce document ?

 20   R.  Oui, je connais ce document, je l'ai déjà vu.

 21   Q.  Parfait. Il y a beaucoup de données contenues dans ce document. Comment

 22   ces données ont-elle été recueillies ? Comment ce rapport a-t-il été

 23   établi, pourriez-vous nous le dire ?

 24   R.  Ce rapport il a été rédigé par le bureau des Réfugiés et des Personnes

 25   déplacées, en fait, c'est l'analyse finale qui a été menée sur la base du

 26   recensement de l'ensemble des réfugiés et des personnes déplacées avec tous

 27   les éléments pertinents, tout ce qui concerne la prise en charge d'une

 28   personne déplacée et des réfugiés. Et ce rapport a été fourni au ministère

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  1   du Travail et de la Protection sociale avec qui nous avons eu une

  2   collaboration étroite.

  3   Q.  Est-ce que ce rapport il aurait été communiqué au Commissariat des

  4   réfugiés des Nations Unies, à l'Union européenne ou à d'autres ?

  5   R.  Ce rapport a été adressé au président de la République de Croatie, le

  6   Dr Franjo Tudjman, en chef du gouvernement de la République de Croatie,

  7   Nikica Valentic et le vice-premier ministre croate, Dr Nikola Kostovic. Je

  8   suppose également, et je ne suis pas certain, qu'il a été envoyé pour

  9   information au HCR également. Dès que le HCR prenait conscience de

 10   l'existence de ce type de rapport, il exigeait qu'on envoie un exemplaire,

 11   donc, je suppose que c'est ce qui a été fait. Mais officiellement, c'est à

 12   ces trois instances que le rapport a été adressé puisque ces trois

 13   instances étaient directement concernées.

 14   Q.  Très bien. Hier, nous avons effleuré ce sujet, qui a financé ce rapport

 15   ? Qui a payé pour qu'il soit fait ? Est-ce que vous avez reçu des fonds du

 16   gouvernement ou de l'argent d'autres agences externes ? Est-ce que vous en

 17   souvenez ?

 18   R.  Ce rapport a été fait au bureau des Réfugiés et des Personnes déplacées

 19   où les auteurs du rapport étaient rémunérés, étaient salariés par le

 20   gouvernement de la République de Croatie. J'ajoute en passant que le

 21   recensement de l'ensemble des réfugiés et des personnes déplacées cette

 22   année-là ainsi que des années précédentes, ont été financés par le HCR et

 23   le gouvernement croate conjointement.

 24   Q.  Merci.

 25   Document suivant 1D 02628, 2628. C'est lui qui est juste après dans

 26   votre classeur; vous le reconnaissez ?

 27   R.  Je reconnais ce document, Monsieur Karnavas. Ce document a été publié

 28   dans notre journal que nous publions occasionnellement. C'était soit

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  1   annuel, soit biannuel. Nous envoyons notre publication à l'ensemble des

  2   agences humanitaires, à tous les médias et également à toutes les

  3   structures du pouvoir. De manière générale, c'était une publication qui

  4   était diffusée au public, et grâce à ce qui figurait l'opinion était au

  5   courant de ce que nous faisions, comment nous le faisions : combien de

  6   réfugiés et de personnes déplacées nous avions, et combien coûtait

  7   l'ensemble de nos actions et comment le gouvernement de la République de

  8   Croatie couvrait ces frais d'une part, et comment d'autre part on était

  9   aidé par le HCR et l'Union européenne. L'on trouve dans ce document toutes

 10   les données portant sur les réfugiés et les personnes déplacées, leur

 11   répartition en ventilation par sexe, par âge, combien d'enfants, combien de

 12   jeunes, combien de malades, combien d'aptes à travailler, et cetera. Une

 13   série de renseignements qui étaient utiles à l'opinion.

 14   Q.  D'accord. Quelques éléments que je vous demande d'aborder rapidement.

 15   En effet, les Juges auront peut-être des questions à poser sur ce rapport.

 16   Mais regardez, c'est la page qui est après la page numéro 4. Elle n'est pas

 17   numérotée, mais si vous regardez la quatrième page où elle est, vous

 18   verrez, en haut, il est dit : "Statuts et droits des personnes déplacées et

 19   des réfugiés."

 20   Est-ce que vous voyez cet intitulé ? Vous l'avez trouvée ?

 21   R.  Oui, je vois. Je l'ai sous les yeux.

 22   Q.  Cette page, si je ne m'abuse, concerne la loi que votre office

 23   appliquait à l'époque, pour ce qui est de l'octroi de statut tant aux

 24   personnes déplacées qu'aux réfugiés venant de la Bosnie-Herzégovine, et ça

 25   vient de la Réplique de la Croatie.

 26   R.  Vous avez parfaitement raison, Monsieur Karnavas. Il en est ainsi.

 27   Q.  Tournons à une autre page. C'est vers le milieu du rapport. Je vais

 28   vous donner le numéro ERN : 1D 34-0596. Consultez les quatre derniers

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  1   chiffres, Messieurs les Juges, si vous le voulez bien; c'est 0596, en bas à

  2   droite.

  3   Monsieur l'Huissier, pouvez-vous nous aider. Nous allons avoir besoin de

  4   votre aide pendant toute la durée de l'après-midi. Parce que nous sommes

  5   quand même pressés par le temps, je vous serais gré de nous aider, Monsieur

  6   l'Huissier.

  7   Vous voyez ici : "Le nombre de personnes déplacées et de réfugiés, depuis

  8   le début de 1995."

  9   Et sur cette même page, on voit 1993, et ça a été ventilé par moi. Ce qui

 10   nous permet de voir combien il y avait de personnes déplacées et de

 11   réfugiés et le nombre total.

 12   Première question : d'où viennent ces chiffres ?

 13   R.  Ces chiffres, Monsieur Karnavas, proviennent des renseignements qui ont

 14   été faits des réfugiés et des personnes déplacées pendant toutes les années

 15   passées. Car en 1992, et également en 1993 et en 1994, nous avons fait ces

 16   recensements. Les bureaux régionaux et les centres sociaux envoyaient

 17   régulièrement, tous les mois, leurs statistiques au bureau central auprès

 18   du gouvernement, donc nous savions exactement quelle était l'évolution du

 19   nombre de réfugiés et de personnes déplacées d'un mois à l'autre. Et nous

 20   publions cela également. Tout d'abord, on en informait le gouvernement

 21   ainsi que les ministres avec lesquels l'on coopérait de manière plus

 22   étroite, mais nous donnions également ces renseignements au public.

 23   Q.  Très bien. Merci. Je vous le signale, Messieurs les Juges, de façon à

 24   voir si les frontières étaient fermées, s'il y avait influx de réfugiés ou

 25   pas.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi, Monsieur le Témoin. Je

 27   vous demande de regarder le tableau que Me Karnavas nous a indiqué. C'est

 28   donc 0585 -- 0596. C'est un tableau en 1992, 1993, 1994 et 1995. Alors, ce

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  1   tableau est très intéressant parce qu'il synthétise la situation au regard

  2   des déplacés ou des réfugiés. Puisqu'on a une colonne personnes déplacées,

  3   personnes réfugiées. Alors, Monsieur le Témoin, je vous demande de regarder

  4   la colonne des réfugiés. Ce qui m'intéresse, puisque d'après les

  5   définitions des réfugiés, c'est la situation des gens qui ne sont pas de

  6   nationalité croate qui pénètrent à l'intérieur de la Croatie.

  7   Et je me pose la question à travers des chiffres. Entre le stock et

  8   le flux, on voit qu'il y a une montée en flux, puisqu'en 1992, janvier 872

  9   réfugiés; ensuite février, 1 200 et quelques; mars, on passe à 16 000; et

 10   avril, là, il y a un pic, 193 000 et quelques; et puis le stock augmente

 11   progressivement pour se stabiliser, semble-t-il, à des chiffres autour de

 12   350 000 et au-dessus. Et puis curieusement, en 1993, on a un stock de

 13   400 000 réfugiés en janvier, et le stock va décroître au fils des mois.

 14   Puisqu'en décembre, nous n'avons plus que 281 318 réfugiés.

 15   Donc ces chiffres doivent être appréhendés en termes de flux et de

 16   stock. Alors, l'impression qui peut se dégager pour quelqu'un qui a la

 17   connaissance des statistiques, la connaissance des flux et des stocks, on a

 18   l'impression que la situation à partir de juillet 1992 se stabilise en

 19   stock et il ne va pas y avoir de réfugiés nouveaux. Et bien au contraire,

 20   une diminution du nombre de réfugiés.

 21   Alors, quels sont vos -- vos propres commentaires, puisque vous êtes

 22   le spécialiste dans la mesure où vous dirigiez cette office, et ceci n'a

 23   pas dû vous échapper. Alors que pouvez-vous nous dire à partir de

 24   l'interprétation que l'on peut donner sur ces chiffres ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, en 1992, en avril de

 26   cette année-là, a commencé une agression très forte de l'ex-armée

 27   yougoslave dirigée par des officiers serbes, et à ce moment-là on a

 28   commencé à chasser subitement les habitants de Bosnie-Herzégovine qui

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  1   vivaient sur les territoires occupés. C'est la raison pour laquelle, au

  2   mois d'avril, nous constatons soudain 193 000, donc un chiffre très élevé.

  3   L'agression s'est renforcée et s'est accélérée. L'armée a rapidement occupé

  4   des portions importantes du territoire de Bosnie-Herzégovine, et de là le

  5   fait qu'il y ait tous les mois de plus en plus de réfugiés qui arrivent de

  6   Bosnie-Herzégovine.

  7   Nous avons connu un chiffre maximum en novembre et décembre de cette année-

  8   là, puis en 1993, en janvier, février et mars. Avec l'arrivée du printemps

  9   de l'année 1993, en partie les réfugiés ont réussi à rentrer chez eux, et

 10   en partie ces réfugiés ont été accueillis par d'autres pays. Par exemple,

 11   l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche, la Suède, le Danemark et le Norvège.

 12   C'est la raison pour laquelle en 1993 ce nombre s'est stabilisé à environ

 13   270 000. Cependant, il a crû de nouveau en mai, juin, juillet parce que

 14   nous avons vu arriver de nouveau des réfugiés, et cette fois-ci ce sont des

 15   réfugiés qui arrivent de Bosnie centrale et d'Herzégovine. Donc le nombre

 16   de réfugiés croît jusqu'à la fin de l'année 1993. Puis en 1994, après le

 17   mois d'avril, donc de nouveau au printemps, nous voyons ce chiffre

 18   décroître. Donc le nombre de réfugiés diminue, et comme la situation en

 19   République de Bosnie-Herzégovine se calme, comme il y a de moins en moins

 20   de conflits armés, les réfugiés de Bosnie-Herzégovine reviennent de plus en

 21   plus dans leurs foyers. Donc vers la fin de l'année 1994, le nombre, me

 22   semble-t-il, déjà dès le mois de septembre, octobre, ce nombre se stabilise

 23   à 180 ou 190 000, et ce chiffre reste constant, avec quelques légères

 24   fluctuations, jusqu'à l'opération Tempête. 

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Arrêtez. J'ai consulté, en même temps que vous

 26   parliez, les tableaux 1994 et 1995, et je me suis rendu compte qu'il y a,

 27   semble-t-il, un stock incompressible de 188 000 à 200 000 réfugiés.

 28   Puisqu'en juin 1995, on a exactement 188 606, ce qui semble être un stock

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  1   incompressible. Alors si ce stock incompressible d'environ 200 000

  2   personnes, je le soustrais de la période qui, pour nous, est au cœur de

  3   l'acte d'accusation, c'est-à-dire la période de janvier à décembre 1993, où

  4   nous avons un stock d'environ 300 000 personnes, si nous estimons à ce

  5   moment-là qu'il y a un stock incompressible de 200 000 personnes et un taux

  6   de réfugiés de 270 000 à 300 000, est-ce qu'en réalité, pendant 1993, on

  7   aurait un chiffre global de 100 000 réfugiés qui seraient venus en Croatie

  8   ? Est-ce qu'on se tromperait si on estime, en comparant tous les chiffres,

  9   qu'en réalité il y a 100 000 réfugiés qui seraient venus pendant l'année

 10   1993 ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant l'année 1993, au contraire, le nombre

 12   de réfugiés diminue. Sur les 400 000 réfugiés du mois de janvier, par la

 13   suite, le chiffre n'a fait que décroître, donc il n'y a pas eu croissance

 14   de ce chiffre, mais décroissance. Et en mai, juin, le chiffre a quelque peu

 15   augmenté, comme vous pouvez le remarquer, 269 000 en avril, et en mai c'est

 16   devenu 271 000, puis en juin 272 000, puis en juillet 277, puis en août

 17   279. Donc il n'y a pas eu, pendant ces mois-là, décroissance, mais légère

 18   croissance. Cela se rapporte aux réfugiés qui venaient ces mois-là une fois

 19   de plus en République de Croatie, et nous avons dû les héberger là.

 20   Pour finir, le chiffre s'est stabilisé à quelque 180 000 réfugiés en

 21   1994 au mois d'août; et on voit un chiffre de 196 000, et ce chiffre

 22   devient constant, on pourrait dire, jusqu'à août 1995, à savoir jusqu'à

 23   l'opération Tempête.

 24   Après l'opération Tempête, il y a encore un grand nombre de personnes

 25   réfugiées et de personnes déplacées qui reviennent chez eux.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter là parce qu'on pourrait y passer des

 27   heures. Mais je voulais avoir confirmation que dans l'année 1993 le nombre

 28   de réfugiés a décrû au fil du temps.

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  1   Maître Karnavas.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Pendant cette période, est-ce que les réfugiés et les personnes

  4   déplacées quittaient la République de Croatie pour aller dans des pays

  5   tiers ? On a les chiffres. Est-ce que ces chiffres reflètent le fait qu'il

  6   y a des réfugiés qui sont partis pendant cette période ? Il y en a donc qui

  7   s'en vont, d'autres qui viennent les remplacer ? Est-ce que vous pouvez

  8   nous dire quelques mots sur ce point-là ?

  9   R.  Justement, Monsieur Karnavas. Il y a eu des déplacements constants de

 10   réfugiés, tout comme des personnes déplacées, depuis la République de

 11   Croatie vers des pays tiers. Puis le HCR, en 1993, a pris sur soi les soins

 12   nécessaires pour faire en sorte que certaines personnes de Bosnie-

 13   Herzégovine, directement avec nos autorisations de transit, soient emmenées

 14   vers des pays tiers. Il s'agissait souvent de personnes que le HCR aidait

 15   directement en Bosnie-Herzégovine, les prenait en charge et les envoyait

 16   vers des pays tiers.

 17   Au fil de cette année 1993, le HCR a emmené aussi des réfugiés et des

 18   personnes déplacées depuis la Croatie vers des pays tiers dans le souhait

 19   de faciliter la situation au niveau du nombre des réfugiés et des personnes

 20   déplacées en Croatie. Nous étions, à cette époque, complètement exténués.

 21   Q.  Merci. Nous allons passer très rapidement en revue un ensemble de

 22   documents qu'on a déjà examinés la semaine dernière avec M. Zoric, mais je

 23   veux simplement que vous me confirmiez un certain nombre de choses.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai un certain nombre de questions à vous

 25   poser au sujet de ces documents, deux ou trois questions à chaque fois.

 26   Q.  Premier document, 1D 02585. Le reconnaissez-vous, ce document ? On voit

 27   votre nom en bas. Tout le monde connaît maintenant votre signature, donc on

 28   voit bien qu'ici ce n'est pas la vôtre.

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  1   R.  Monsieur Karnavas, c'est exact. Je reconnais ce document. Le document

  2   se trouve être signé par le secrétaire du bureau chargé des réfugiés et des

  3   personnes déplacées, M. Josip Esterajher, qui se trouve être lui aussi une

  4   personne expulsée de Vukovar. C'était un journaliste. Dans ce bureau chargé

  5   des réfugiés et des déplacées, il était chargé des responsabilités

  6   relatives à l'information et aux contacts avec les médias. De temps en

  7   temps, il informait le public, les médias, sur la situation au niveau des

  8   réfugiés et des personnes déplacées, et notamment au sujet de leur nombre

  9   et de l'emplacement où ils sont hébergés, dans quel comté, dans quelle

 10   ville, et cetera.

 11   Q.  Merci. Document suivant, 1D 02590. Première chose que je vais vous

 12   demander de faire, examinez la troisième page, la page 3. A la fin du texte

 13   dactylographié, on a l'impression qu'il y a quelque chose qui a été écrit à

 14   la main. Est-ce que vous reconnaissez ou est-ce que vous voyez ce qui y a

 15   été écrit là ? On dirait que ce sont des initiales.

 16   R.  Je reconnais, c'est le fac-similé de mon nom et prénom dont je me

 17   servais d'habitude pour signer les livrets universitaires à mes étudiants.

 18   Plutôt que de signer tout le temps à la main, j'avais cette espèce de petit

 19   cachet reprenant ma signature que je plaçais dans les livrets

 20   universitaires de mes étudiants. Alors ce document, je le connais. Cela

 21   faisait probablement partie de l'un quelconque de mes exposés ou rapports.

 22   Il comporte en bref une problématique relative à l'hébergement des

 23   personnes réfugiées et des déplacées.

 24   Q.  Bon. Ce document ne porte pas de date, mais si on regarde le premier

 25   paragraphe de la page 1, on voit qu'il est question du 14 août au 23

 26   septembre, avec 21 000 réfugiés qui sont arrivés de la Bosnie-Herzégovine

 27   et de la RFY.

 28   R.  [aucune interprétation]

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  1   Q.  RFY, ça désigne la République fédérale de Yougoslavie. A partir de ce

  2   qui est écrit ici, pouvez-vous nous dire en quelle année ce document a été

  3   rédigé ?

  4   R.  Ce document a pu être rédigé à peu près vers la fin de 1992.

  5   Q.  Merci.

  6   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi, Maître Karnavas,

  7   mais, dans ce document, à la première page, il est question de 1994. Je ne

  8   vois pas donc en quoi ça concerne 1992. En 1994,

  9   390 000, 9 %, et cetera, je ne vois pas comment le document aurait pu être

 10   préparé en 1992. Le témoin peut peut-être nous répondre là-dessus.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation]

 12   Q.  Au troisième paragraphe, effectivement, mais si on regarde le premier

 13   paragraphe, on voit que les chiffres qui sont indiqués ici portent sur

 14   l'année 1992, n'est-ce pas, parce qu'on parle de la RFY.

 15   R.  C'est exact. C'est là qu'on voit qu'il est fait état de durant 1992.

 16   Q.  Bien. Document suivant, 1D 0 --

 17   R.  Vous avez raison, au fait. Il y a également l'année 1993 et l'année

 18   1994 qui sont mentionnées. Donc, il s'agit ici tout de même d'un résumé,

 19   qui, j'imagine, a dû être rédigé en 1994, en effet. Et étant donné qu'il

 20   n'y a pas de date, cela n'était pas un document officiel, on peut le voir

 21   partant du fac-similé que j'ai utilisé pour confirmer que c'était un

 22   document à moi. Et il est probable que je m'en sois servi à l'occasion

 23   d'une conférence quelconque. Et j'allais souvent à la télévision et à la

 24   radio, et je -- j'intervenais à divers congrès à l'étranger également. Et

 25   je prenais avec moi ce type de rapports que j'avais rédigés auparavant et

 26   qui faisaient partie de mes archives privées. Donc, sur la totalité du

 27   rapport, il peut être dit que s'il s'agit probablement de 1994, mais cela

 28   se rapporte à toutes les période de la crise avec les réfugiés de 1992 à la

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  1   fin 1994.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, en vous écoutant, juste une idée

  3   qui -- qui m'est venue. Ces réfugiés dont le nombre est important, s'ils

  4   étaient placés dans les différents centres, est-ce que les médias avaient

  5   accès facilement aux réfugiés, interviews, qu'ils puissent raconter leurs

  6   parcours ? Est-ce qu'il y avait de la part du gouvernement croate et de

  7   l'office une politique de restriction à l'égard des médias, ou bien, les

  8   médias avaient accès à tous ces réfugiés sans aucun problème ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] En principe, les médias étaient censés avoir

 10   une autorisation émanant du bureau chargé des Réfugiés et des Personnes

 11   déplacées pour ce qui est d'aller filmer dans ces centres d'Accueil et

 12   procéder là-bas à des interviews. Mais il arrivait qu'ils y aillent sans

 13   l'autorisation en question. Nous ne créons pas de problème et il s'avère

 14   que certains médias, dans certains centre d'Accueil de réfugiés, ont

 15   interviewé des gens qui, par la suite, ont généré des tensions, voire dans

 16   la presse nationale croate, voire à l'étranger, parce qu'ils

 17   interviewaient, justement, ceux des réfugiés ou des personnes déplacées qui

 18   se trouvaient être particulièrement stressés. Et j'ai eu des expériences de

 19   ce type moi aussi. Ces gens-là faisaient des déclarations non seulement

 20   subjectives au sujet de la situation et de l'hébergement, mais ils disaient

 21   aussi le contraire de la réalité. Je pourrais vous citer toute une série

 22   d'exemples que j'ai eu -- dont j'ai eu à connaître de la part de nos

 23   concitoyens et moins de -- de la part des réfugiés. Ils disaient que la

 24   soupe n'était pas bonne, que le pain était dur, que la viande était comme

 25   ci ou comme ça. Enfin, c'est compréhensible quand vous avez affaire à des

 26   personnes qui sont dans une situation de stress et qui, avant d'arriver,

 27   ont vécu des choses pénibles.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : -- si on ne visait pas des restrictions éventuelles

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  1   sur leurs conditions en Croatie, mais ma question portait sur ce qui leur

  2   était arrivé dans -- en Bosnie-Herzégovine, par exemple, et c'était cela

  3   que je voulais savoir. S'il y avait un contrôle de votre part sur ce type

  4   d'interview par rapport à leurs passés antérieurs.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait, non pas de notre côté à nous, mais

  6   -- enfin, bon. Je dois dire que, lors de l'enregistrement des réfugiés et

  7   des personnes déplacées en 1994, il y a eu un bref entretien avec tout

  8   individu et on a recueilli l'essentiel des données les concernant pour ce

  9   qui est de ce qu'ils avaient traversé ou vécu en République de Bosnie-

 10   Herzégovine, à savoir ce qu'on leur avait détruit ou qui on avait tué des

 11   leurs et ce genre de chose.

 12   Il y a aussi ce que nous avons vu hier, il y a l'enquête faite par

 13   l'agence PULS qui a procédé donc à une enquête au niveau de l'opinion

 14   publique et auprès de réfugiés et personnes déplacées concernant la

 15   situation parmi les réfugiés et, en particulier, parmi les citoyens

 16   croates, ressortissants croates, s'agissant de leur attitude vis-à-vis des

 17   réfugiés et des personnes déplacées. Cela s'est fait avec notre

 18   autorisation parce que cette -- cette agence s'était adressée auparavant à

 19   nous pour demander cette -- l'autorisation en question.

 20   Alors, pour ce qui est des réfugiés et des personnes déplacées, il y

 21   en a qui y allaient sans notre autorisation. Nous ne pouvions pas exercer

 22   un contrôle aussi strict, la télévision allemande, belge, américaine,

 23   arabe, la [imperceptible] et autres, à vrai dire, devaient se présenter au

 24   directeur de ce centre d'Accueil, mais ils interviewaient. Il était

 25   impossible de contrôler ce que l'on posait comme questions.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Une correction, et ensuite, quelques questions de suivi. Je crois qu'à

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  1   la page 16, ligne 20, il faut lire "1991" et pas "1994" -- "1991" et pas

  2   "1994," c'est la date à laquelle on a commencé à faire des recensements.

  3   Ensuite, je souhaiterais vous poser les questions suivantes, à commencer

  4   par celle-ci : vous avez vécu en ex-Yougoslavie pendant l'ère Tito --

  5   Titiste quand la presse était censurée, contrôlée par l'Etat. Est-ce que

  6   vous avez tenté de censurer la presse libre -- les médias libres à l'époque

  7   ? Est-ce que vous avez essayé de contrôler ce qu'ils publiaient après avoir

  8   interviewé les réfugiés ?

  9   R.  Non, jamais parce que, tout simplement, ce n'était pas possible.

 10   Q.  Est-ce qu'on a jamais donné l'autorisation d'entrer dans ces centres à

 11   condition -- de publier uniquement des informations positives ou à

 12   condition, au moins, de laisser votre personnel, les représentants du

 13   gouvernement, prendre connaissance des interviews avant qu'ils soient

 14   publiés ?

 15   R.  Non. Nous faisions confiance aux médias et à ceux qui venaient de

 16   l'étranger, des pays tiers, tant qu'à l'égard de ceux qui se trouvaient en

 17   République de Croatie. Nous leur faisions confiance, nous les laissions

 18   faire et ils pouvaient dire du bien ou du mal, nous ne pouvions pas influer

 19   sur cela, pas du tout. Nous n'avons pas conditionné les choses, nous leur

 20   avons rien demandé.

 21   Q.  Hier, vous nous avez dit que vous alliez souvent à l'étranger et qu'il

 22   vous est arrivé d'aller à des endroits où se trouvaient des réfugiés comme,

 23   par exemple, en Allemagne ou en Hongrie. Quand vous vous rendiez dans ces

 24   endroits, est-ce que vous pouviez y aller sans prévenir ou est-ce que vous

 25   deviez obtenir une autorisation du gouvernement compétent sur le territoire

 26   duquel se trouvait ce centre ?

 27   R.  Oui, Monsieur Karnavas. Chaque fois qu'au nom du bureau des Réfugiés ou

 28   au nom du gouvernement croate, j'allais en Allemagne, en Slovénie, en

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  1   Hongrie, il fallait que j'annonce mon arrivée, ce qui était compréhensible.

  2   Et dans ces maisons -- dans ces pays d'accueil, j'avais une escorte ou

  3   quelqu'un qui m'accompagnait. Je ne pouvais pas entrer dans des centres

  4   d'Accueil de réfugiés seul, j'étais tout le temps accompagné. Et on

  5   interprétait -- on commentait la façon dont les gens étaient hébergés, ce

  6   que je trouve, d'ailleurs, logique.

  7   Q.  Dernière question sur ce thème particulier. Hier, vous nous avez

  8   expliqué qu'il vous était arrivé de vous rendre dans des centres en

  9   République de Croatie accompagné de dignitaires étrangers. Il me semble que

 10   vous nous avez expliqué qu'une fois, cela s'est produit avec le chef du HCR

 11   des Nations Unies. Je voudrais savoir si, lors de ces visites, vous avez

 12   empêché ces dignitaires étrangers de se rendre dans certains sites ou dans

 13   certains endroits dans ces centres ? Est-ce que tout a été préparé à

 14   l'avance pour donner une image positive de la situation ?

 15   M. SCOTT : [interprétation] Je soulève une -- encore une objection. Je ne

 16   l'ai pas fait pour l'instant, mais il s'agit de questions directrices qui

 17   sont posées. Il est tout à fait possible de poser cette question de manière

 18   appropriée, à savoir : quelle était la stratégie ou -- de votre bureau

 19   s'agissant des -- de l'accès par la presse aux réfugiés ? Qu'en était-il de

 20   l'organisation des visites de représentants officiels ? Or, toutes les

 21   questions qui sont posées sont des questions extrêmement directrices,

 22   orientées, et je souhaiterais que la Chambre intervienne.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi de répondre. Souvent, dans

 24   beaucoup de procès, les questions des Juges sont posées à la fin. Ici, nous

 25   acceptons, avec cette voie, les questions qui sont posées par les Juges

 26   parce qu'elles sont pertinentes, elles sont en rapport avec le sujet

 27   abordé. Et lorsqu'une série de questions est posée par les Juges, il faut

 28   ensuite poser des questions de suivi. Ça correspond un petit peu à un

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  1   interrogatoire supplémentaire et, à ce moment-là, les questions directrices

  2   sont autorisées.

  3   Mais je peux tout à fait essayer de m'en abstenir parce qu'hier, au

  4   cours de l'interrogatoire principal, le témoin a dit que Mme Ogata était

  5   allée à un endroit donné avec lui. Donc, la question à suivre, c'était :

  6   est-ce qu'on l'a empêchée d'aller où elle voulait, cette dame, quand elle

  7   est arrivée sur place ? Je vois pas en quoi c'est directeur comme question.

  8   M. SCOTT : [interprétation] Non, ce n'est pas un interrogatoire

  9   supplémentaire. Ici, on est au stade de l'interrogatoire principal. Ainsi,

 10   par exemple, on ne me voit pratiquement plus à l'écran, on a vu Me

 11   Karnavas, après un -- une longue introduction, lui dire : "Est-ce que tout

 12   était préparé à l'avance, mis en scène, pour que vous puissiez donner une

 13   image positive de la situation ?"

 14   Ça, c'est vraiment orienté comme question. Si je dois chaque fois

 15   soulever une objection, je le ferai.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : -- objections, il fallait -- c'était l'objectif que

 17   vous aviez de savoir si des personnalités étrangères étaient venues

 18   visiter. Donc, il fallait demander : à votre connaissance, est-ce que des

 19   personnalités étrangères, en votre compagnie, étaient venues ? Et puis, il

 20   aurait dit oui, et puis vous passiez à autre chose. Bien, continuez.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.

 22   Q.  Je vais passer à la série suivante de documents. On me dit que le

 23   témoin n'a pas encore répondu à la question.

 24   Monsieur le Témoin, je sais que vous l'avez déjà dit hier, mais est-ce que

 25   des dignitaires étrangers se sont rendus dans des centres en République de

 26   Croatie ? Et pour formuler la question tel que le souhaite l'Accusation :

 27   quelle était la procédure suivie une fois qu'ils arrivaient sur place ?

 28   R.  Messieurs les Juges, Monsieur Karnavas et Monsieur Scott, souvent, il

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  1   venait des diplomates et des hommes politiques et des représentants hauts

  2   placés d'organisations humanitaires pour visiter nos centres d'Accueil de

  3   réfugiés. Ces hauts dignitaires, par exemple, il y avait parmi eux le

  4   président Demirel, Mme Ogata, puis d'autres, par exemple, le premier

  5   ministre et ministres. J'étais presque régulièrement là-bas. Si ce n'est

  6   pas moi, c'était le

  7   Pr Granic qui les accompagnait, et ils avaient une pleine et entière

  8   liberté de se déplacer au sein des centres de -- d'Accueil de réfugiés. Je

  9   les faisais entrer par la porte principale, on allait pas leur faire sauter

 10   la clôture. Alors, je les accompagnais et il arrivait que je leur dise :

 11   "Allez-y vous, tous seuls. Allez poser les questions à qui vous voulez." Et

 12   je me souviens que Sadako Ogata, à un moment donné, dans un centre

 13   d'Accueil à -- près de Kutina, je crois qu'il y avait le Danemark ou la

 14   Suède qui avait construit ce centre d'Accueil de réfugiés, et elle a tout

 15   visité; je lui ai montré la cuisine, je lui ai montré les maisonnettes. Et,

 16   à la fin, elle a dit qu'elle voulait s'entretenir avec quelqu'un et elle

 17   m'a dit : "Je vais choisir la maisonnette que je veux." Je lui ai dit :

 18   "Allez-y" et elle a dit : "Je vais aller dans celle-ci." Elle est entrée

 19   dans la maisonnette en question.

 20   Et il y avait là des réfugiés et des personnes déplacées. et elle est

 21   tombée sur une famille, par hasard, qui était arrivée de Vukovar. Il y

 22   avait une vieille femme avec son fils, qui devait avoir une quarantaine

 23   d'années, qui était fortement stressée. Et elle a demandé, Mme Ogata, à

 24   cette dame : "Madame, haïssez-vous les Serbes pour vous avoir fait cela ?"

 25   Elle a dit : "Non, Madame, en aucune façon. Je prie pour que mon fils

 26   n'aille jamais venger la mort de son père et de son frère, et afin que la

 27   conscience tranquille, je puisse aller devant Dieu pour le jugement

 28   dernier." Et lorsque l'ambassadeur américain, M. Zimmerman, est venu, je

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  1   l'ai emmené aussi vers un centre d'Accueil des personnes déplacées. Il a

  2   aussi posé des questions à des personnes sur lesquelles il tombait; moi, je

  3   ne lui soufflais rien du tout. Je ne lui disais pas de poser cette question

  4   ou poser une question à celui-ci ou à celle-là. Il a posé des questions aux

  5   personnes sur lesquelles il est tombé. Et donc, les personnes que

  6   j'accompagnais --

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, je crois que

  8   vous avez bien répondu à la question, mais une petite précision ou une

  9   petite question de détail à laquelle vous répondrez facilement : étiez-vous

 10   toujours présent lorsque les personnes qui venaient s'adressaient aux

 11   réfugiés ou aux personnes déplacées ? Est-ce que vous étiez toujours là ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'étais souvent présent.

 13   Parfois, pour des raisons de repos, je savais aussi me retirer et laisser

 14   les invités aller tous seuls s'entretenir avec des réfugiés ou des

 15   personnes déplacées, notamment si l'interprète était là.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez dit

 17   que soit vous ou soit M. Granic accompagniez ces visiteurs. Donc, si vous

 18   n'étiez pas disponible, à ce moment-là, c'était quelqu'un qui vous -- un de

 19   vos adjoints qui vous remplaçait ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, merci.

 22   Excusez, Maître Karnavas.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation]

 24   Q.  Bien, soyons précis. Vous nous avez dit que, parfois, vous alliez sur

 25   place, mais ensuite, vous aviez besoin de vous reposer, vous partiez. Est-

 26   ce qu'à ce moment-là, quand vous partiez -- est-ce que vos invités -- les

 27   visiteurs, ils étaient accompagnés de quelqu'un d'autre ? En d'autres

 28   termes, est-ce qu'ils pouvaient se déplacer librement, ou est-ce qu'ils

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  1   étaient toujours accompagnés de quelqu'un ?

  2   R.  Il y a eu des cas où l'une de ces personnes demandait expressément de

  3   rester seul, et à ce moment-là, je me retirais. C'est un cas de figure qui

  4   s'est produit qu'une autre personne dise je souhaite rester seul accompagné

  5   d'un interprète et nous avions notre interprète.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, dans la suite, je vais vous poser une

  7   question qui est au cœur de nos préoccupations. Nous avons vu des photos,

  8   des vidéos concernant des personnes qui ont été détenues pendant plusieurs

  9   jours, voire plusieurs mois. Et donc, certaines sont sorties en ayant perdu

 10   20, 30, 30 kilos et on a des éléments qui ont permis de constater un état

 11   d'amaigrissement pour certaines personnes. Ces gens-là ensuite sont partis

 12   en Croatie, en qualité de réfugiés. Est-ce qu'à votre connaissance, vous

 13   avez le souvenir d'accueil de ce type de personnes qui étaient amaigries,

 14   malades, et cetera, qui vous l'ont dit ? Et qui ont eu accès aux médias,

 15   aux personnalités étrangères, au HCR, et cetera, et cetera ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il nous est arrivé de

 17   prendre en charge ce type de personne si elles étaient en mesure de rester

 18   dans un camp, dans un centre de Réfugiés ou de Personnes déplacées, elle

 19   bénéficiait de notre part de tous les soins médicaux et toute la

 20   protection. Si ces personnes qui arrivaient de Bosnie-Herzégovine étaient

 21   tellement exténuées, qu'elles ne pouvaient pas rester dans un centre de

 22   réfugiés pendant un certain temps, elles étaient dépêchées dans un hôpital.

 23   Les soins dans les hôpitaux étaient gratuits pour des personnes déplacées

 24   et des réfugiés.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, vous avez eu connaissance de quelques cas de

 26   ce type ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. En particulier je suis au courant de

 28   nombre de ces personnes arrivées de Bosnie-Herzégovine des territoires

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  1   occupés également de Croatie, et qui sont arrivées sans rien ayant, juste

  2   un tout petit sac en plastique sur eux, et parfois même il est arrivé que

  3   lorsqu'elles traversaient les lignes depuis les zones occupées en Croatie

  4   ou de Bosnie-Herzégovine de la Croatie qu'on leur prenne cela, que ceux qui

  5   étaient de l'autre côté leur prennent cela. Il y a eu beaucoup de

  6   violations des droits de l'homme.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.

  9   Essayons d'examiner rapidement la série suivante 1D 02586.

 10   Q.  On voit votre nom en bas de document et avec la signature de quelqu'un

 11   d'autre, êtes-vous en mesure de confirmer que vous avez vu ce document à

 12   l'époque ?

 13   R.  Oui, c'est un document que j'ai vu. Il date de la fin du mois d'octobre

 14   1992.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 02613, document très

 16   similaire pareille pour le 2614, le 2612, le 2611, et le 2615, ce sont tous

 17   des documents portant la cote 1D 0.

 18   Q.  Dites-nous s'il s'agit de documents préparés par votre office et si

 19   vous en avez pris connaissance à l'époque où ils ont été rédigés.

 20   R.  Monsieur Karnavas, ces documents que j'ai sous les yeux, à présent à

 21   l'époque de mon travail dans ce bureau, je les ai rencontrés, c'étaient des

 22   rapports réguliers en particulier destinés au public, destinés aux médias.

 23   Et les médias n'arrêtaient pas de nous demander des chiffres. Cela concerne

 24   le mois d'avril 1994, octobre 1994, décembre 1994. Et l'on est en mesure

 25   d'en conclure, Monsieur le Président, que pratiquement tous les mois nous

 26   envoyons un rapport au public portant sur la situation des réfugiés et des

 27   personnes déplacées puisque notre public était intéressé par ce sujet. Et

 28   ceci nous permettait de sensibiliser l'opinion, nos citoyens pour qu'ils

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  1   fassent des contributions à la fois financière et en vivres pour que nous

  2   puissions plus facilement nous occuper des personnes déplacées et des

  3   réfugiés.

  4   Q.  Très bien. Examinons un autre document très volumineux.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Il s'agit d'un rapport,

  6   3D 01030, je répète la cote 3D 01030.

  7   Q.  Je vais vous demander de le parcourir en diagonale pour nous dire si

  8   vous reconnaissez son contenu ? Et si c'est le cas, pourquoi ? Celui-ci va

  9   vous aider.

 10   Je répète le numéro de ce document, 3D 1030.

 11   Vous l'avez trouvé ?

 12   R.  Je l'ai trouvé, je l'ai sous les yeux.

 13   Q.  Est-ce que vous le reconnaissez ce document ?

 14   R.  Il s'agit des réfugiés chassés de Bosnie-Herzégovine pendant la guerre,

 15   la guerre de 1991 jusqu'en 1995. C'est un rapport détaillé qui peut --

 16   toutes les personnes qui s'y intéressent fournir des renseignements, leur

 17   permettre de prendre connaissance de la situation portant sur les réfugiés

 18   et les personnes déplacées en République de Croatie. C'est un document

 19   plutôt long qui comporte des renseignements détaillés eus égard à

 20   l'ensemble des réfugiés et des personnes déplacées et voir aussi une

 21   ventilation d'après les localités Velika Kladusa, Kupljensko qui a

 22   constitué un problème particulier en 1995.

 23   Q.  Savez-vous qui a préparé ce document; si vous en connaissez l'auteur,

 24   comment ce fait-il que vous le connaissiez ?

 25   R.  Ce document il sort lui aussi du bureau chargé des Réfugiés et des

 26   personnes déplacées et il a été rédigé au service chargé d'informer

 27   l'opinion --

 28   Q.  Permettez-moi de vous arrêter, je vais vous montrer la première page en

Page 28252

  1   B/C/S.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que vous pouvez

  3   faire attention et venir le chercher ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas cette page-là.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation]

  6   Q.  Pas en anglais. Vous l'avez, mais il est vraiment difficile de le

  7   retrouver. Je vous ai montré la première page du document en version

  8   originale. 

  9   R.  Oui, je le vois à présent. Ce n'est pas un document qui aurait été

 10   réalisé par notre bureau -- notre bureau des Réfugiés et des Personnes

 11   déplacées. La page de garde est très importante parce qu'elle montre qui

 12   est l'auteur du rapport, qui -- il s'agit là de renseignements qui

 13   probablement dans une large majorité se fonde sur des renseignements

 14   fournis par notre bureau, fournis aux médias et aux autres organisations

 15   humanitaires, mais il n'a pas été réalisé par nous.

 16   Q.  A l'examen de la première page, est-ce que vous êtes en mesure de nous

 17   dire -- qui l'a rédigé ?

 18   R.  Je vois que M. Slobodan Praljak est l'auteur de cela.

 19   Q.  Excusez-moi. Je dois vous poser quelques questions plus directes. Est-

 20   ce que le général Praljak n'est jamais venu vous voir et vous a demandé des

 21   documents d'archives afin de préparer ce rapport ?

 22   R.  Monsieur Karnavas, M. Slobodan Praljak un beau jour est venu me voir;

 23   au préalable, il m'avait téléphoné et nous avons eu une conversation et il

 24   m'a demandé si j'avais des documents portant sur les activités du bureau

 25   des Réfugiés et des Personnes déplacées portant sur les statistiques, les

 26   chiffres, toutes sortes de renseignements, que je lui remette ces

 27   documents. Je lui ai dit que j'en avais et que j'étais prêt à les lui

 28   remettre. Il m'a envoyé quelqu'un à qui j'ai remis tous les dossiers, tous

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  1   les documents, tous les classeurs. Je vais vous montrer avec mes mains, il

  2   y en avait à peu près tant. Et dans son bureau, M. Praljak a pris tous mes

  3   documents, documents qui constituaient ces archives très importantes.

  4   C'était soit des documents que j'avais sur moi, c'était généralement des

  5   photocopies. Mais j'ai indiqué à M. Praljak qu'il fallait qu'il se rende

  6   dans le bureau des Réfugiés et des Personnes déplacées, où il trouvera en

  7   plus de mes documents, tous les autres documents qui comportaient une masse

  8   d'information, et à ce moment-là, M. Praljak s'est rendu au bureau des

  9   Réfugiés et des Personnes déplacées. A l'époque, je m'étais adressé au

 10   directeur pour qu'il se tienne à sa disposition, qui lui remette tous les

 11   documents, et je vois maintenant que c'est --

 12   Q.  Permettez-moi de vous arrêter.

 13   L'INTERPRÈTE : Micro, s'il vous plaît.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Une fois de plus, Monsieur le Président,

 15   j'interviens pour demander d'abord une date à laquelle aurait eu cette

 16   conversation avec M. Praljak. Je vais commencer par là puis j'aurais une

 17   question de suivi. 

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Je n'ai pas abandonné le sujet encore.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, si c'est bien ce qu'il en est,

 20   alors --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- si vous n'avez pas abandonné le sujet demandez au

 22   témoin de dire à quelle date M. Praljak est venu parce que c'est important.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est une série d'autres questions que

 24   j'étais sur le point de poser et puis on m'interrompt. C'est peut-être un

 25   peu prématuré cette interruption. Mais écoutons jusqu'à la fin de

 26   l'objection.

 27   M. SCOTT : [interprétation] Vu cette situation, puisque nous n'avons pas de

 28   date, nous n'avons pas d'information datée, et je dois ici me livrer à des

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  1   hypothèses ce que je répugne à faire, ce serait bien plus facile d'avoir

  2   des dates. Mais rien qu'à regarder certains des -- du document, c'est un

  3   document préparé par M. Praljak aux fins précise du procès. C'est un

  4   rapport d'expert qu'il fait pour lui-même, enfin, je me trompe peut-être

  5   mais de prime à bord c'est comme ça c'est l'apparence que ça a. Et je fais

  6   objection à ce qu'on pose des questions à ce témoin; si M. Praljak veut

  7   venir déposer en personne pour défendre le travail qu'il a fait et se

  8   soumettre au contre-interrogatoire peut-être que c'est une des façons de

  9   procéder, mais, maintenant, M. Praljak fait un soi-disant "rapport

 10   d'expert," qui lui convient; moi, je trouve que c'est susceptible

 11   d'objection, et la question en ce qui concerne le temps, la date demeure.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Le document a déjà été admis, première

 13   chose.

 14   Deuxième chose, si j'ai bien compris, ça avait déjà été versé, en

 15   tout cas, on y a fait référence. Deuxième chose, la question qui se pose

 16   est de savoir si le monsieur, qui a préparé ce document, est venu chercher

 17   des informations qui sont désormais contenues dans ce document. Nous avons

 18   ici M. Rebic, qui a dit qu'à un moment donné, le général Praljak était venu

 19   le voir et lui avait demandé les documents d'archive. Je ne sais pas si le

 20   général Praljak va déposer s'il va aborder ce rapport. Je me contente de

 21   poser la question à ce témoin-ci pour le moment car il y a une question de

 22   suivi outre le rapport, et que je voudrais poser dans quelques instants.

 23   Q.  Monsieur Rebic, permettez-moi de vous demander ceci : est-ce que vous

 24   vous souvenez de la date de l'époque ou de la période à laquelle M. Praljak

 25   est venu vous voir, et vous avait demandé à obtenir certains documents de

 26   façon à préparer un livre ou un rapport qu'il a préparé ? Est-ce que vous

 27   vous souvenez d'une année ?

 28   R.  Monsieur Karnavas, je n'arrive pas à me rappeler exactement l'année car

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  1   beaucoup de temps s'est passé depuis. C'était peut-être qu'il y a quatre

  2   ans, six ans, par exemple, mais je ne peux pas situer mieux.

  3   Q.  Bien. On trouve deux photographies dans ce rapport.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-on -- pourrait le placer sous le

  5   rétroprojecteur. Numéro ERN 3D 26-0191, la page suivante étant 0192 ?

  6   Q.  Est-ce que vous pourriez feuilleter ce rapport ? 

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Si on les place sous le rétroprojecteur, ce

  8   serait sans doute plus rapide à mois que ça ne se trouve au prétoire

  9   électronique déjà. Vous savez que là je suis vraiment pressé par le temps.

 10   Q.  Je crois qu'elles sont arrivées, on les voit maintenant à l'écran. Vous

 11   la reconnaissez cette photo ?

 12   R.  Monsieur Karnavas, j'ai cette photographie à la fois à l'écran et

 13   également dans ce classeur que j'ai. Ce sont les archives de notre bureau

 14   des Réfugiés et des Personnes déplacées.

 15   Q.  [aucune interprétation]

 16   R.  Ces archives sont très importantes, c'est là que nous conservons

 17   l'ensemble des documents, l'ensemble des données, l'ensemble des noms et

 18   prénoms de toutes les personnes déplacées et des réfugiés.

 19   Q.  Document suivant, 3D 026-0192, c'est la page suivante, elle va vous

 20   montrer une autre photo. Est-ce que vous avez cette photo à l'écran ?

 21   Reconnaissez-vous ce qu'on voit sur cette photo ?

 22   R.  Je reconnais. Là aussi nous avons les archives du bureau des réfugiés

 23   et des personnes déplacées. Ces archives sont très volumineuses. Plusieurs

 24   personnes pourraient mener des recherches sur la situation de nos réfugiés

 25   et des personnes déplacées ici pendant plusieurs années ces études

 26   pourraient être menées.

 27   Q.  Bien. Vous avez d'ailleurs signalé dans le rapport, rapport que vous

 28   avez fait hier, Monsieur Rebic, ne vous préoccupez plus du classeur. Ne

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  1   vous en faites pas. Je vous demande ceci, dans le rapport que nous avons

  2   parcouru hier --

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que vous

  4   pourriez -- est-ce que vous auriez l'obligeance de nous aider ?

  5   Q.  Hier, nous avons examiné votre rapport, qui est la pièce

  6   1D 2921. Inutile de l'examiner maintenant, mais à la page 21, il dit qu'au

  7   début du mois de septembre, vous avez reçu une délégation du TPIY de La

  8   Haye; c'était en septembre 1994, n'est-ce pas ? Vous parlez d'un certain M.

  9   Antonius Kempenaars, qui était chef de la délégation, et vous leur avez

 10   donné à ces personnes toutes les données qu'avait l'office. Est-ce que

 11   c'est exact ? Est-ce que dès l'année 1994 le TPIY avait une délégation qui

 12   a pu consulter toutes ces données dont nous avons parlé ces derniers jours

 13   ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Merci beaucoup.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais aborder un

 17   autre sujet; est-ce que nous pourrions faire la pause maintenant ? Sinon,

 18   je peux continuer. Moi, ça ne me fait pas de différence. Je peux poursuivre

 19   dix minutes, si vous voulez.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Puisque nous sommes à une "seizure," je dis

 21   ceci s'agissant de ce dernier document, je ne voulais pas interrompre Me

 22   Karnavas tant qu'il n'avait pas fini sa question. Je parle de la pièce 3D

 23   01030, je veux que le dossier soit précis. Apparemment, il y a trois pages,

 24   qui ont été versées jusqu'à présent, trois pages isolées qui ont été

 25   versées : 3D 26-0211, 3D 026-0256, et 3D 26-0258. Alors, les informations

 26   que nous avons reçues en matière de date, c'est que ce document il a été

 27   préparé le 15 juin 2007 dans le cours du procès.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne veux pas que nous nous trouvions dans

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  1   une situation où nous allons commencer à polémiquer. Je veux savoir quand

  2   M. Praljak est allé voir le témoin, ce qui a déclanché tout ceci. On ne

  3   cesse de nous rappeler que les Juges sont des Juges de métier et il leur

  4   reviendra de soupeser le poids de ces rapports. Ce qui compte, c'est que

  5   nous avons examiné plusieurs rapports. Et j'essaie de démonter d'abord

  6   qu'il y ait une parfaite transparence.

  7   Deuxièmement, qu'il y avait des documents archivés disponibles à tous

  8   dans le TPY dans le bureau du Procureur qui pouvait consulter tous ces

  9   documents dès 1994. Et peut-être que si le bureau du Procureur avait pris

 10   la peine d'examiner ces documents, une partie de l'acte d'accusation aurait

 11   été écrite différemment.

 12   M. SCOTT : [aucune interprétation] 

 13   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : On ne va pas passer des heures.

 15   Monsieur le Témoin, vous -- vous l'avez dit : le bureau du Procureur est

 16   venu en 1994, et vous avez dit qu'ils ont eu accès à tous les documents.

 17   Alors, moi, la question que je vous pose :

 18   M. Praljak, il est venu après ou avant ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Après.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, après. Bon, voilà.

 21   Oui, Monsieur Scott.

 22   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Me Karnavas a vraiment

 23   fait vous présenter les conclusions inutilement. J'essaie de vous donner le

 24   plus d'informations possible et j'ai plusieurs fois demandé des dates. Je

 25   crois que c'est tout à fait correct -- rien d'incorrect à cela, et on a

 26   aussi affirmé que le document avait été versé au dossier. Et, moi, je

 27   voulais affiner ceci en vous disant qu'il y avait trois pages, jusqu'à

 28   présent, qui avaient été versées au dossier, et je voulais vous donner des

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  1   dates concernant ce document. D'après nous, c'est le mois de juin 2007, ce

  2   qui tendrait à confirmer ce que j'ai déjà dit à la Chambre, ce que je

  3   pensais, à savoir que c'est un document qui a été préparé par M. Praljak

  4   aux fins mêmes de ce procès, et je voulais simplement que le dossier le

  5   dise, c'est tout.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous êtes cité, qu'est-ce que vous voulez

  7   dire, Monsieur Praljak ?

  8   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Il faut faire une différence entre le

  9   moment où le document a été créé et le moment où le document a été délivré.

 10   Donc, d'une part, où est-ce que ça a été créé, et après, quand est-ce que

 11   ça a été publié, après avoir trouvé les fonds nécessaires ?

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 14   si le Procureur continue de se livrer à ce genre d'opération tactique,

 15   j'estime que j'en ai le droit, moi aussi. Moi aussi, je sais être combatif

 16   dans un prétoire. Je ne veux pas donner l'impression que, parce que je suis

 17   assez [imperceptible] et gentil envers l'Accusation, je le serai toujours à

 18   l'avenir.

 19   Q.  Document -- vous avez le document suivant : 1D 02587, 2587. Veuillez

 20   examiner ce document. Il y a d'ailleurs une série de documents que nous

 21   allons examiner, mais qui tournent tous autour du même sujet, vous allez le

 22   constater, ce sont les garanties. Excusez-moi, ici, ce document porte sur

 23   le financement-- ce jeu de documents porte sur le financement. Est-ce que

 24   vous connaissez Jozo

 25   Martinovic ? Je pense qu'il est décédé depuis.

 26   Q.  Monsieur Karnavas, je connais M. Martinovic. Il a été ministre des

 27   Finances au moment où j'ai été nommé directeur du bureau des réfugiés et

 28   des personnes déplacées.

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  1   Et quand il s'agissait des finances, c'est avec lui que j'avais des

  2   contacts. Entre-temps, hélas, il est décédé.

  3   Q.  Première chose, reconnaissez-vous ce document ?

  4   R.  Je le reconnais, ce document. Il s'agissait de la cellule de Crise pour

  5   la Bosnie-Herzégovine qui s'adresse à la République de Croatie et qui a

  6   reçu 30 millions de dollars américains pour pouvoir répondre à des besoins

  7   urgents concernant nos -- le très grand nombre de réfugiés et aussi pour

  8   des besoins humanitaires en Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Cette question s'est posée la semaine dernière : est-ce que c'était un

 10   prêt qu'il fallait rembourser ou est-ce que c'était un

 11   don ?

 12   R.  D'après ce que j'en sais et d'après mes souvenirs, c'était une -- un

 13   don et il n'y a pas eu de remboursement.

 14   Q.  Bien. Examinons très rapidement le document 1D 02606. Nous l'avons

 15   examiné la semaine dernière, inutile dès lors de nous appesantir sur ce

 16   document. Mais est-ce que vous le reconnaissez et, d'après vous, qu'est-ce

 17   que c'est ?

 18   R.  Je reconnais ce document. Il s'agit de s'approvisionner en poêles à

 19   l'huile que nous achetions pour les centres de réfugiés qui n'avaient pas

 20   d'autre forme de chauffage. C'est généralement les localités qui se situent

 21   sur le littoral ou bien des localités -- ou plutôt des centres dans des --

 22   d'anciens centres militaires où il n'y avait pas de système de chauffage.

 23   Puisque les réfugiés et personnes déplacées protestaient, il a fallu

 24   réagir.

 25   Q.  Document suivant, 1D 02608. Examinons-le rapidement, deuxième page, on

 26   y voit votre nom et on voit où était envoyée cette information. Sujet :

 27   "Assistance financière unique, qui ne va pas se répéter, à des familles

 28   accueillant des réfugiés de Bosnie-Herzégovine."

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  1   Expliquez-nous exactement comment on a utilisé ce document ?

  2   R.  La finalité de ce document était de fournir une aide financière

  3   ponctuelle aux réfugiés de Bosnie-Herzégovine et aux familles d'accueil qui

  4   avaient reçu ces réfugiés. A plusieurs reprises, il y a eu cette aide

  5   fournie. Ici, il s'agit d'une fois. J'ai envoyé un rapport au vice-premier

  6   ministre croate, M. Granic, qui avait la charge des questions sociales, et

  7   au ministre de la famille et de la protection sociale.

  8   Q.  Bien. Le document suivant, 1D 02607. Une fois de plus, l'objet, c'est :

  9   "Une assurance -- une assistance financière forfaitaire donnée à des

 10   réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui ont organisé leur vie de façon

 11   indépendante et pour les familles les accueillant."

 12   Et on voit de nouveau votre nom à la page 2. C'est un document

 13   analogue au précédent, n'est-ce pas, qui aborde les mêmes clauses, n'est-ce

 14   pas ?

 15   R.  C'est cela, c'est analogue. Il s'agit du versement, en février 1993,

 16   d'une aide financière ponctuelle aux réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui

 17   s'organisent eux-mêmes, ou bien, qui sont accueillis par des familles. Cela

 18   nous permet de voir que nombre de réfugiés de Bosnie-Herzégovine ont été

 19   reçus par différentes familles, familles de citoyens croates.

 20   Q.  Très bien. 1D 02778. Nous l'avons vu la semaine dernière, mais veuillez

 21   examiner ce document pour nous dire si vous le reconnaissez. Qui l'a

 22   préparé ?

 23   R.  Nous voyons l'en-tête : "Le gouvernement de la République de Croatie,

 24   bureau des Personnes déplacées et des Réfugiés," ce qui nous permet de voir

 25   clairement qu'il s'agit d'un document du bureau des personnes déplacées et

 26   des réfugiés. Et je reconnais, qui plus est, ce document. C'est une lettre,

 27   en réalité, que nous avons diffusée depuis notre bureau. Cette lettre

 28   s'adressait au public, nous lancions un appel aux citoyens pour qu'ils

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  1   aident dans toute la mesure du possible par fourniture de vivres ou

  2   d'argent pour aider à la fois nos personnes déplacées et les réfugiés de

  3   Bosnie-Herzégovine. C'est de cette manière-là que j'essayais de -- de faire

  4   appel à la solidarité de nos citoyens.

  5   Q.  1D 0--

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, le mieux c'est de faire la pause

  7   parce que c'est 4 heures moins quart.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président. Oui, le

  9   moment s'y prête bien.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on va faire une pause. Au point de vue temps,

 11   il doit vous rester autour d'une heure et quart.

 12   --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

 13   --- L'audience est reprise à 16 heures 06.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 16   Juges.

 17   Q.  Monsieur Rebic, très, très vite, vraiment très vite, on va examiner un

 18   certain nombre de documents dans le deuxième classeur. Le document suivant,

 19   c'est le 02625. D'abord, le reconnaissez-vous, ce document ?

 20   R.  Le 625, le gouvernement de la République de Croatie. Oui, je le

 21   connais. Le document en question est rédigé au gouvernement. Il a été

 22   envoyé au ministère des Finances, au ministère du Tourisme et au bureau

 23   chargé des Réfugiés et des Personnes déplacées. Ce document du côté du

 24   gouvernement croate détermine exactement combien ce bureau chargé des

 25   Personnes déplacées et des Réfugiés doit recevoir de ressources pour

 26   prendre soin de ces personnes réfugiées et les personnes déplacées qui sont

 27   à différents centres d'accueil, à partir des hôtels et autres formes

 28   d'hébergement. C'est ainsi que l'on a déterminé un prix par personne,

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  1   disons 6,7 marks allemands pour l'approvisionner ou prendre soin au

  2   quotidien d'une personne, et on donne une spécification par la suite.

  3   Q.  Merci. Document suivant. Ce n'est pas que je veuille vous presser trop,

  4   Monsieur, mais je suis soumis à des contraintes de temps. La pièce

  5   suivante, c'est la 2589. Vous voyez votre nom en bas du document. De quoi

  6   s'agit-il ?

  7   R.  Je reconnais ce document. La signature est la mienne; c'est

  8   authentique. Il s'agit de versements de rémunération ou d'indemnité

  9   pécuniaire à l'intention de réfugiés en provenance de Vojvodine et de

 10   Bosnie-Herzégovine qui ont bénéficié de cette aide à titre temporaire, et

 11   on leur a confié des biens de la République de Croatie également pour

 12   l'utilisation temporaire.

 13   Q.  Bien. La série de documents suivants, ce sont des documents qui ont été

 14   préparés pour ou qui émanent des représentants de la communauté

 15   internationale. Le premier, c'est le 1D 02609. A la deuxième page, on peut

 16   voir votre signature, 3 février 1993. Lettre d'intention mutuelle aux fins

 17   de conclure un accord avec le HCR des Nations Unies, et nous voyons que ce

 18   document a été signé par

 19   M. Mouchet. Est-ce que vous le connaissiez, M. Jacques Mouchet ?

 20   R.  Monsieur Karnavas, je connais très bien M. Jacques Mouchet,  car

 21   c'était le chef du HCR en 1993. C'est avec lui que j'ai réalisé une

 22   coopération des plus étroites. Nous avons eu à résoudre ensemble les

 23   problèmes qui sont survenus, notamment pour ce qui est de l'hébergement des

 24   réfugiés en provenance de la Bosnie-Herzégovine.

 25   Comme vous l'avez dit, ce document est un accord sur la façon dont 30

 26   millions de dollars, accordés par le HCR pour prendre soin des réfugiés et

 27   des personnes déplacées, seront répartis. Alors, il s'agissait d'une aide à

 28   l'intention de familles qui ont reçu des réfugiés et des personnes

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  1   déplacées. Puis il s'agissait aussi d'autres personnes expulsées de chez

  2   elles, dont on ne va pas parler dans le détail puisque c'est énoncé. Vous

  3   pouvez lire cela dans le texte.

  4   Q.  Bien.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi de demander une

  6   précision. Nous avons vu un document où figurait la même somme qu'ici, la

  7   somme de 30 millions de dollars. C'était une somme qui était promise par le

  8   gouvernement croate à l'office. J'imagine que ce n'est pas la même chose

  9   que la somme que nous voyons ici, mais peut-être pourriez-vous nous fournir

 10   quelques explications.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, il s'agit de deux choses

 12   différentes. Les 30 millions dont on a parlé tout à l'heure, c'était un

 13   cadeau du gouvernement croate à l'intention de cette cellule de Crise, et

 14   c'était censé aider la République de Bosnie-Herzégovine au début de la

 15   guerre pour ce qui est de solutions très importantes à apporter aux

 16   problèmes survenus en Bosnie-Herzégovine. Ces 30 millions-ci, c'est des

 17   fonds que nous avons reçus du HCR des Nations Unies pour nous aider dans la

 18   réalisation de différents programmes, à savoir, hébergement de réfugiés

 19   dans des familles, donc assistance pécuniaire à l'intention de ces

 20   familles, et autres problèmes --

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, merci. Excusez cette

 22   interruption, mais cela suffit.

 23   Maître Karnavas.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 25   Q.  Vous aurez constaté que le premier document dont vous avez parlé,

 26   1D 02587, portait la date du 13 mai 1992, alors que celui-ci date de 1993,

 27   d'août 1993.

 28   Q.  Non, excusez-moi, février 1993.

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  1   Document suivant maintenant, 1D 02592. Deuxième page du document, on y voit

  2   votre signature, et ce document est adressé à

  3   M. Mouchet. Reconnaissez-vous ce document ?

  4   R.  Oui, je reconnais ce document, d'autant plus que c'est signé par moi-

  5   même, et la signature est, dirais-je, authentique. Il s'agit d'une lettre

  6   que j'ai rédigée à l'intention de M. Jacques Mouchet, et ce, au sujet d'une

  7   aide humanitaire à l'intention de Croates en Bosnie-Herzégovine, suite à

  8   une demande du cardinal Vinko Puljic, qui est archevêque à Sarajevo.

  9   Q.  Bien, merci. Document suivant, 1D 02605, 2605. On y voit votre nom en

 10   bas de la page. On voit votre signature. Hier, vous avez parlé de la

 11   société VIP et de M. Binenfeld, vous en avez parlé. Reconnaissez-vous ce

 12   document, et de quoi s'agit-il ? Quelle est la teneur de ce document ?

 13   R.  Oui, je reconnais ce document, Monsieur Karnavas. Il y est question

 14   d'un montant pécuniaire qui a été dépensé pour le recensement des réfugiés

 15   et des personnes déplacées en 1994, ainsi que pour le traitement par

 16   ordinateur de ces données-là. Il s'agit de

 17   404 000 dollars plus 20 000 dollars américains. Il s'agit donc de

 18   ressources dépensées pour ces recensements et enregistrements. C'est une

 19   espèce d'attestation disant que j'ai bien reçu cet argent-là de la part du

 20   HCR et que cet argent a été dépensé.

 21   Q. Merci. Document suivant, 1D 02604, 1er juin 1994, voilà la date. On voit

 22   votre nom en bas de la page, ainsi que votre signature. Lettre adressée à

 23   M. Mouchet. Je présente tous ces documents pour donner des éléments à la

 24   Chambre au sujet de la coopération qui était la vôtre avec le HCR des

 25   Nations Unies. De quoi parle ce document, s'il vous plaît ?

 26   R.  Dans ce document, qui est une lettre envoyée par moi-même au HCR à

 27   l'attention de M. Jacques Mouchet, il parle d'une assistance financière

 28   accordée au bureau chargé des réfugiés et des personnes déplacées justement

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  1   pour héberger les personnes déplacées et les réfugiés en octobre 1993. Le

  2   restant de la somme a fait l'objet d'une demande afin de le dépenser en

  3   1993, alors qu'il était affecté pour début 1994, compte tenu du fait que

  4   nos dépenses étaient par trop grandes.

  5   Q.  Bien. Document 1D 02603, un document en date du 7 juin 1994. Ici encore

  6   on voit votre signature, mais il y a une autre signature sur ce document.

  7   C'est une lettre adressée à M. Mouchet. C'est un document qui ressemble au

  8   précédent, n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est un document similaire à celui dont on a parlé tout à l'heure. Ça

 10   a été signé par moi et cosigné par le Dr Maja Kurent, qui se trouvait être

 11   responsable des relations avec les organisations humanitaires

 12   internationales. C'était une espèce de ministre des Affaires étrangères.

 13   Q.  Bien. Dernier document sur ce thème, 1D 02602, 27 septembre 1994, c'est

 14   la date du document. Document au bas duquel on voit votre nom et votre

 15   signature.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] Et je signale le paragraphe 2 où il est

 17   question du fait que : "La République de Croatie est épuisée par

 18   l'assistance apportée aux personnes déplacées et aux réfugiés,

 19   malheureusement n'est plus à même de subvenir aux coûts occasionnés par

 20   l'hébergement de ces réfugiés."

 21   Si on va, non pas au paragraphe suivant, mais à celui qui suit, on

 22   voit le résumé de ce qui se passe dans les camps, dans certains centres,

 23   dans un hôtel. Il est question d'Obonjan et de Gasinci. Je souhaite attirer

 24   l'attention de tous ici sur ce fait.

 25   Q.  Maintenant, s'agissant de la page suivante, pouvez-vous nous dire ce

 26   qu'on y voit, parce qu'il y a là deux centres dont Mme Azra Krajsek nous a

 27   dit que c'étaient des centres où il y avait des problèmes et où les

 28   réfugiés n'étaient pas traités correctement. Est-ce que vous pouvez faire

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  1   quelques observations sur ce point ?

  2   R.  Pour ce qui est du traitement égal ou inégal, le traitement à l'égard

  3   des personnes déplacées et des réfugiés étaient plus ou moins le même. Il y

  4   a eu des cas où les personnes déplacées étaient moins bien hébergées. Il y

  5   a eu d'autres cas où les réfugiés étaient mieux. Il est difficile là

  6   d'analyser chaque centre d'accueil de réfugiés à part, mais on voit ici que

  7   pour Obonjan, du 1er janvier au 31 juillet 1994, donc, pendant les sept

  8   premiers mois, il a été dépensé là 345 000 dollars.

  9   Et pour Gasinci, à peu près vers la même période, donc il s'agit de

 10   la première moitié de 1994, il a été dépensé 3 millions et presque 500 000,

 11   donc, 300 429 000 dollars. On voit donc que Gasinci, c'était un centre qui

 12   dépensait beaucoup d'argent parce que nous voulions que les réfugiés soient

 13   bien traités ou soignés pour le mieux dans la situation telle qu'elle se

 14   présentait. Puis il a été énuméré les autres centres où il y a eu également

 15   des réfugiés.

 16   Q.  Ce document avait pour objectif de montrer à quel point on faisait

 17   preuve de transparence. Mais si vous passez à la page suivante, vous verrez

 18   que nous avons un autre document qui ne porte pas de numéro - ça, c'est

 19   juste une petite erreur - un document en date du 6 septembre 1994 --

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une question supplémentaire à

 21   poser au sujet de la liste.

 22   Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire à peu près combien on trouvait

 23   de réfugiés et de personnes déplacées à Gasinci et Obonjan ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, en ce moment-ci, je n'arrive

 25   pas à me souvenir des chiffres exacts, donc je vais vous dire cela à peu

 26   près. A Gasinci, à cette époque, il y avait à peu près 4 000 réfugiés;

 27   parfois ça allait jusqu'à 4 005. A Obonjan, le chiffre était plus petit. Il

 28   y en avait entre 2 000 et 2 500 de réfugiés. Je ne pense pas qu'il y en ait

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  1   plus à quelque moment que ce soit, mais il y en a eu moins que cela. C'est

  2   un chiffre global qui m'est resté dans la mémoire.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation]

  5   Q.  Joint à ce document, on trouve un autre document qui est distinct du

  6   précédent. Je ne sais pas s'il convient de lui donner une cote différente,

  7   mais il se trouve que ces trois feuilles ont été présentées ensemble. Une

  8   confirmation de votre part : on voit que la date de ce document c'est le 6

  9   septembre 1994. On voit votre nom ici, mais sans signature. On voit en

 10   revanche la signature du Dr Maja Kurent. Il semble que quelqu'un ait signé

 11   en son nom. Reconnaissez-vous ce document ? C'est la dernière page.

 12   R.  Oui, je reconnais le document. Ce n'est pas moi qui l'ai signé. A vrai

 13   dire, cela a été signé par Maja Kurent, qui se trouvait être médecin et

 14   avait coutume de signer Dr, mais elle était agrégée es sciences médicales.

 15   Elle a signé et elle avait le droit de signer des documents en mon nom

 16   lorsqu'il s'agissait de questions relatives au HCR.

 17   Q.  Très bien. Nous allons maintenant passer à un sujet différent, et pour

 18   ce faire vous devez vous munir du classeur suivant. J'aurais besoin de M.

 19   l'Huissier. Nous allons nous intéresser à un sujet différent. Le document

 20   que je souhaite que vous examiniez, c'est le P 00336. C'est un document de

 21   l'Accusation, le transcript présidentiel du 21 juillet 1992. Si on se

 22   reporte à la troisième page de ce document sur un total de 184 pages, il

 23   semble que vous étiez présent. On mentionne votre nom, Dr Rebic, chef de

 24   l'état-major, ou plutôt, secrétaire du bureau chargé des Réfugiés; est-ce

 25   que vous voyez cela ?

 26   R.  Oui, je le vois.

 27   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de lire ce document ?

 28   R.  Je vois mon nom et je me souviens de l'entretien qui s'est déroulé en

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  1   cette occasion. Je me souviens aussi du document.

  2   Q.  Bien. Je ne vais pas ici parler du fond parce que nous pouvons tous

  3   lire ce document et puis il y aura d'autres témoins qui nous en parleront.

  4   Dites-nous, simplement si vous vous souvenez de cette réunion ? Est-ce que

  5   vous pourriez nous donner une idée de ce qui s'est passé ? Quelle était

  6   l'atmosphère au cours de cette discussion assez longue dont la

  7   transcription est 184 pages ?

  8   R.  Monsieur Karnavas, c'était une rencontre entre une délégation

  9   gouvernementale de la Croatie présidée par le président de la République,

 10   le Dr Franjo Tudjman, et une délégation de Bosnie-Herzégovine présidée par

 11   le Dr Izetbegovic. La réunion s'est tenue le 21 juillet 1992 dans le

 12   cabinet du président. La conversation a duré, je m'en souviens, très

 13   longtemps. Et on a noté que ça a commencé à midi et que ça a duré jusqu'à

 14   10 heures du soir.

 15   Les entretiens, à mon avis, ont été très ouverts. Les uns et les

 16   autres ont présenté à la partie d'en face ses opinions, ses difficultés,

 17   ses problèmes, dans la partie croate à la partie bosno-herzégovienne et

 18   vice versa. Il s'agissait donc de sincérité des uns vis-à-vis des autres.

 19   Les questions traitées étaient graves. Il a été question des

 20   responsabilités des Croates en Bosnie-Herzégovine pour ce qui est de leur

 21   patrie la Bosnie-Herzégovine. Le président Tudjman a défendu fermement ses

 22   positions disant que la Bosnie-Herzégovine devait conserver son intégrité

 23   territoriale avec les trois peuples qui la constituaient et qu'il

 24   s'agissait d'aménager les relations entre ces groupes ethniques. Il a

 25   encouragé M. Izetbegovic pour que celui-ci de son côté, en sa qualité de

 26   président de la Bosnie-Herzégovine, fasse de son mieux pour que dans ces

 27   circonstances de guerre plutôt graves il soit au plus tôt mis un terme à

 28   cette guerre, par le biais d'une coopération mutuelle des Musulmans et des

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  1   Croates de Bosnie.

  2   Du côté croate, il y a eu promesse de soutien et d'aide dans la

  3   mesure où la République de Croatie en sa qualité d'état vis-à-vis de la

  4   Bosnie-Herzégovine en sa qualité d'état également, et ce, dans le cadre des

  5   possibilités des uns et des autres. Les sujets traités étaient graves; il y

  6   a eu des hausses de ton ça et là, mais on s'est efforcé de calmer le jeu

  7   pendant les débats, et au final un document a été signé par le président de

  8   la délégation croate M. Franjo Tudjman et pour la Bosnie-Herzégovine par M.

  9   Izetbegovic. Il s'agissait d'un document partant amitié et coopération

 10   entre deux états souverains pour la défense de la Bosnie-Herzégovine.

 11   Q.  Merci, merci beaucoup. Pour le compte rendu page 43, ligne 9, le Dr

 12   Rebic a parlé du côté bosno-herzégovien, et pas uniquement de bosnien ou

 13   bosniaque. Document suivant, P 00339, un document de l'Accusation, nous

 14   l'avons déjà examiné précédemment, c'est un accord dont vous venez de nous

 15   parler en date du 21 juillet 1992. C'est le paragraphe numéro 3 qui

 16   m'intéresse. Est-ce que vous l'avez trouvé ce document ?

 17   R.  Oui, en commençant par : "Sérieusement préoccupé par".

 18   Q.  Oui, on voit que la délégation de l'état de Bosnie-Herzégovine exprime

 19   sa gratitude envers la République de Croatie pour avoir accueillit les

 20   réfugiés et avoir prêté assistance, vous avez trouvé ce passage ?

 21   R.  Oui, tout à fait, paragraphe 3 : "La délégation de l'état de Bosnie-

 22   Herzégovine exprime sa gratitude à la République de Croatie pour avoir

 23   fourni aux réfugiés de la République de Bosnie-Herzégovine au-delà des

 24   possibilités ou des potentiels de la République de Croatie."

 25   Q.  Je vais vous arrêter. Je vais vous arrêter, on n'a pas besoin de lire

 26   la totalité du paragraphe, mais si on regarde la dernière phrase du

 27   paragraphe suivant, on voit qu'il est question d'un protocole distinct qui

 28   va être signé à cet effet," et si on lit le paragraphe on se rend compte

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  1   que l'objectif c'est de fournir une aide humanitaire, une aide financière,

  2   et cetera, et de construire des centres pour les réfugiés. Vous voyez ce

  3   passage ?

  4   R.  Oui, je le vois. Et cela est bien exact. C'est conformément à ce

  5   document qu'on a œuvré par la suite. Et à Dieu plaise ou j'aurais souhaité

  6   que tout le monde ait respecté ce document et la guerre se serait terminée

  7   plus tôt, et je parle aussi de la troisième partie impliquée, l'armée

  8   yougoslave qui n'a pas bien entendu été signataire de ce document. Hélas.

  9   Q.  A votre connaissance, la République de Croatie a-t-elle tenu promesse,

 10   a-t-elle fourni une aide humanitaire, financière, a-t-elle construit des

 11   centres pour les réfugiés, je vous pose la question puisque vous étiez à la

 12   tête de l'office chargé des réfugiés et des personnes déplacées ?

 13   R.  Oui. D'après ce que j'en sais, la République de Croatie, pour ce qui

 14   est de la construction de ces centres d'accueil de réfugiés, a apporté une

 15   aide extrêmement grande et elle en a fait de même pour ce qui est de

 16   l'accueil des réfugiés en provenance de la Bosnie-Herzégovine. Parce que

 17   c'est justement le gouvernement de la Croatie qui a assumé le gros des

 18   frais. Il est vrai que nous avons été grandement aidé par le HCR, mais la

 19   majeure partie des dépenses, une partie plus grande des dépenses a été

 20   assumée par le gouvernement de la République de Croatie.

 21   Q.  La dernière phrase du troisième paragraphe, du paragraphe 3, il est

 22   question de la signature d'un protocole. Il faut se souvenir que cet accord

 23   date du 21 juillet 1992. J'aimerais maintenant qu'on passe au document

 24   suivant, 3D 02710, le document suivant, c'est un protocole. On voit que ce

 25   protocole a été signé à Zagreb le 22 juillet 1992, c'est-à-dire le

 26   lendemain.

 27   En premier lieu, qui est Jure Pelivan, le savez-vous ?

 28   R.  Oui, Monsieur Karnavas. Je sais fort bien qui est M. Jure Pelivan.

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  1   C'était le président de l'époque. Ce document a été signé au nom du

  2   gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine, tout comme, par

  3   exemple, Franjo Greguric président ou chef du gouvernement de la République

  4   de Croatie avait également signé cela. Alors, M. Jure Pelivan je l'ai

  5   rencontré pour la première fois vers fin janvier 1992, lorsque, avec le

  6   ministre Jurlina, je suis allé en Bosnie-Herzégovine pour rendre visite à

  7   nos réfugiés, les réfugiés croates, qui étaient installés à l'époque en

  8   Bosnie-Herzégovine, étant donné que nous étions déjà en guerre contre

  9   l'armée populaire yougoslave. Il y a eu une agression contre la Croatie qui

 10   a précédé et la Bosnie-Herzégovine, elle, était encore libre.

 11   Cette fois-là, j'ai été reçu avec M. Jurlina et le président Jure

 12   Pelivan.

 13   Q.  Bien. Dans ce protocole, si on le lit, est-ce que vous pouvez nous dire

 14   s'il y a un rapport avec le protocole mentionné dans l'accord signé la

 15   veille à Zagreb dans le cas de l'accord sur la coopération et l'amitié ?

 16   R.  Oui, cela fait partie du document sur l'amitié et la coopération parce

 17   que, bien entendu, ce document devait être signé par l'un et par l'autre

 18   gouvernement pour que le document puisse pleinement entrer en vigueur et

 19   pour qu'il puisse être appliqué.

 20   Q.  Fort bien. Examinons rapidement le point 4, page 2, je le lis : "Le

 21   gouvernement de la République de Croatie et le gouvernement de la

 22   République de Bosnie-Herzégovine vont demander davantage d'aide humanitaire

 23   à la communauté internationale, surtout pour la Bosnie-Herzégovine, mais

 24   aussi l'accueil dans des pays européens voisins de nouveaux réfugiés qui ne

 25   sont pas pris en charge en Bosnie-Herzégovine. Le gouvernement de

 26   République de Croatie n'est pas à même d'assurer les frais encourus par le

 27   transport du secours humanitaire international qui est envoyé directement

 28   en Bosnie-Herzégovine."

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  1   Est-ce que ceci reflète exactement la situation telle qu'elle se présentait

  2   à l'époque ?

  3   R.  Monsieur Karnavas, cela reflète de manière exacte la situation qui

  4   s'est présentée à l'époque et, d'ailleurs, qui va durer puisque la Bosnie-

  5   Herzégovine, ici, se met d'accord avec la République de Croatie pour que la

  6   Croatie aide à prendre en charge les réfugiés de Bosnie-Herzégovine. Comme

  7   la Croatie a fait part de ses craintes disant qu'elle n'était pas certaine

  8   de pouvoir couvrir la totalité des frais, la Bosnie-Herzégovine et la

  9   Croatie vont lancer un appel conjoint à d'autres pays, appel à l'aide, non

 10   seulement uniquement sur le plan humanitaire, l'hébergement et les vivres,

 11   mais également pour ce qui est du séjour des réfugiés de Bosnie-

 12   Herzégovine. Donc pour ce qui est de mon séjour en coopération avec le HCR,

 13   le renvoi dans les pays tiers était conforme à cet accord d'amitié et de

 14   coopération qui a été signé.

 15   Q.  Est-ce qu'ils étaient censés accueillir certains réfugiés ou tous les

 16   réfugiés ? Je parle de ces pays européens avec l'aide du haut commissariat

 17   des réfugiés.

 18   R.  Juste quelques pays puisque la plupart de ces pays n'ont pas répondu

 19   présent lorsque cet appel à l'aide a été lancé. Et pour ce qui est des pays

 20   qui ont répondu, de coopération avec le HCR, ils ont reçu un moindre nombre

 21   de ces réfugiés de Bosnie-Herzégovine, soit directement de Bosnie-

 22   Herzégovine, ces gens se rendaient en passant par la Croatie dans les pays

 23   tiers, soit ils restaient pendant quelques temps en Croatie et puis ils se

 24   rendaient dans des pays tiers. Donc il ne s'est agit que d'un certain

 25   nombre d'entre eux. La grosse majorité est restée en Croatie et c'est là

 26   qu'ils ont été hébergés.

 27   Q.  Très bien. Examinons une autre série de documents qui présentent un

 28   certain rapport avec le sujet que nous venons d'évoquer. Premier document,

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  1   1D 02008, 2008. La date est celle du 21 novembre 1992. Parcourez-le

  2   rapidement, s'il vous plaît, pour nous dire si vous avez des connaissances

  3   à propos du contenu de ce document. Nous savons que votre office --

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation] 

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, on est tous un peu débordés, Monsieur

  6   le Juge.

  7   Q.  -- nous voyons que Mate Granic a assisté à une réunion précise, mais

  8   dites-nous si vous reconnaissez ce document et son contenu.

  9   R.  Je connais la teneur de ce document, l'information de Mate Granic

 10   lorsqu'il s'est rendu à cette réunion tenue en Bosnie-Herzégovine

 11   également, où il a rencontré des représentants du gouvernement de Bosnie-

 12   Herzégovine et aussi des représentants des autorités locales et des Croates

 13   de Bosnie-Herzégovine. C'était une réunion qui portait sur des problèmes

 14   qui se sont posés fin 1992 en Bosnie-Herzégovine. Des problèmes au sujet

 15   desquels on s'était adressés à la République de Croatie lui demandant

 16   d'aider à les résoudre. Enfin, ce serait plus ou moins tout ce que j'en

 17   sais.

 18   Q.  Examinons certains de ces paragraphes. Tout d'abord, nous allons

 19   examiner le sixième. Voici ce qu'il dit : "A la demande d'Herceg-Bosna, il

 20   est nécessaire de trouver une solution le plus vite possible à la question

 21   des conscrits militaires situés en Croatie et d'empêcher que les citoyens

 22   d'Herceg-Bosna deviennent employés en Bosnie."

 23   Est-ce que vous auriez un commentaire ? Pourquoi est-ce qu'il était

 24   nécessaire de le faire ?

 25   R.  Je sais bien que nous, en République de Croatie, eu égard aux personnes

 26   déplacées, des hommes, personnes déplacées en âge de prendre les armes, que

 27   nous cherchions à les convaincre de défendre la patrie. En Croatie, la

 28   plupart des hommes âgés de 20 à 40 ans se sont trouvés déployés au front

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  1   pour défendre le pays et la patrie. Donc c'était naturel que la Bosnie-

  2   Herzégovine, non seulement l'Herceg-Bosna, mais également la partie

  3   bosnienne musulmane, s'adresse à la République de Croatie occasionnellement

  4   et lui demande le retour des hommes qui seraient à même de défendre la

  5   patrie. Et d'ailleurs, l'ambassade de Bosnie-Herzégovine l'a demandé

  6   parfois. C'était aussi une question d'accord d'amitié et de coopération

  7   entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine.

  8   Dans la suite des événements, je n'ai pas rencontré de problèmes

  9   importants, du moins le bureau n'a pas eu à en connaître puisque nous, en

 10   tant que bureau, nous agissions conformément aux conventions de Genève sur

 11   l'hébergement des réfugiés et --

 12   Q.  Je vais devoir vous demander de raccourcir vos réponses parce que nous

 13   avons déjà abordé beaucoup de ces questions lors de la partie narrative

 14   hier.

 15   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Maître Karnavas, excusez-moi de vous

 16   interrompre. J'aimerais poser une question au témoin à propos du premier

 17   paragraphe de ce compte rendu au procès-verbal des entretiens. Nous lisons,

 18   je cite : "En rapport avec les réfugiés, on a insisté sur le fait que la

 19   Croatie n'a pas les moyens physiques, sociaux ou matériels, pour accueillir

 20   une nouvelle vague de réfugiés venant de Bosnie-Herzégovine, un nouvel

 21   afflux qu'on attend. La seule possibilité c'est d'assurer le transit vers

 22   d'autres pays."

 23   Voici la question que je veux vous poser, Monsieur Rebic : de quelle

 24   personne parle-t-on dans ce paragraphe ? Est-ce qu'on parle uniquement

 25   d'hommes ou de ceux dont on parlait il y a quelques instants au sixième

 26   paragraphe de conscrits, ou est-ce qu'il est question ici de façon générale

 27   du fait qu'on reconnaît qu'il n'y aura plus de réfugiés qui seront

 28   autorisés à entrer en Croatie car les capacités n'existent pas pour les

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  1   accueillir, il y a trop peu de ressources pour ce faire ?

  2   Deuxième question : est-ce que des mesures ont été prises ? Si oui,

  3   lesquelles pour permettre le transit de cette personne en partance pour

  4   d'autres pays, est-ce que vous avez des chiffres susceptibles de nous dire,

  5   à cette époque-là en 1992, fin 1992, début 1993, combien de personnes

  6   disais-je ont été transférée ou ont été autorisées à quitter la Croatie

  7   pour partir dans d'autres pays ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, je précise que je n'ai pas

  9   assisté à cette réunion. Je peux parler d'après mes souvenirs et aussi sur

 10   la base de ce que l'on voit ici comme ayant été établi. Premièrement,

 11   Granic a demandé que la partie bosna-herzégovienne s'engage davantage sur

 12   le plan de l'hébergement de leurs personnes déplacées et qu'ils ne soient

 13   pas tous envoyés en République de Croatie qui, à ce moment-là, s'est

 14   trouvée exténuer. Vous m'avez posé la question au sujet des chiffres, il y

 15   avait environ 250 000 réfugiés, à ce moment-là, de Bosnie-Herzégovine.

 16   C'est la raison pour laquelle on a cherché à faire en sorte qu'en Bosnie-

 17   Herzégovine concrètement c'est avec le Dr Prlic qu'on a parlé, donc, qu'en

 18   Herzégovine, il y ait création d'un bureau comparable à celui qui existait

 19   en Croatie qui sur le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine

 20   prendrait en charge les personnes déplacées pour que tous ne soient pas

 21   envoyés soit en Croatie soit dans des pays tiers.

 22   Et pour ce qui est du nombre de personnes qui fin 1992 ont été envoyées

 23   dans les pays tiers, je vais devoir dire qu'à ce moment-là, ce n'était pas

 24   des départs massifs dans des pays tiers. Des départs un peu plus important

 25   vers les pays tiers ont eu lieu en 1993 lorsque le nombre de ces réfugiés

 26   de Bosnie-Herzégovine, compte tenu du nombre de personnes déplacées en

 27   Croatie a dépassé toutes nos capacités d'hébergement. Nous avons parlé hier

 28   du pourcentage, la proportion des personnes déplacées et réfugiés par

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  1   rapport à la population totale de la République de Croatie, et je crois que

  2   vous avez pu mesurer ces proportions et vous avez compris quelles étaient

  3   les capacités de la Croatie. Donc, afin de pouvoir aider, on a demandé à

  4   Prlic -- enfin, M. Prlic a proposé lui-même à Granic ou lui a demandé qu'il

  5   y ait une information diffusée en Croatie et qu'on forme un certain nombre

  6   de personnes en Croatie pour qu'elles puissent fonctionner dans un tel

  7   bureau, et le même a été fait pour la partie bosna-herzégovienne.

  8   Mme Omersoftic est venue dans mon bureau. Elle était de Sarajevo et elle

  9   m'a demandé de l'instruire de manière détaillée sur la manière de procéder

 10   pour créer un tel bureau et pour héberger les personnes déplacées. Mme

 11   Omersoftic de Sarajevo donc a reçu de moi des instructions très précises

 12   sur la manière de prendre en charge les personnes déplacées et les

 13   réfugiés. Donc, il a été question de voir comment la Bosnie-Herzégovine

 14   pourrait s'occuper elle-même de ces personnes déplacées là où elle le

 15   pouvait. Là où il n'y avait pas d'opérations de guerre car il y avait des

 16   territoires qui n'étaient pas dangereux.

 17   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Monsieur Rebic.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Une précision, page 51, ligne 8, vous

 19   parliez de l'année 1993 au moment où les réfugiés qui étaient "en Croatie"

 20   auraient été envoyés dans des pays tiers, veuillez préciser pour que le

 21   compte rendu soit tout à fait exact.

 22   Q.  Mais permettez-moi une question de suivi après la question de M. le

 23   Juge Prandler. Nous sommes ici le 20 novembre 1992; est-ce que vous

 24   pourriez vous remémorer ces moments --

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  -- pour nous dire si les hôtels où étaient logés les réfugiés, réfugiés

 27   et personnes déplacées sur tout le long de l'Adriatique, si ces hôtels

 28   avaient les capacités nécessaires pour accueillir ces réfugiés pendant

Page 28279

  1   l'hiver ?

  2   R.  Là, vous faites référence à la République de Bosnie-Herzégovine ?

  3   R.  Non, ce que je dis c'est que nous sommes là à la date du 20 novembre

  4   1992. Ce jour-là, M. Prlic rencontre M. Granic.

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  Au paragraphe premier, nous voyons que la République de Croatie est

  7   sous pression et on a vu d'autres documents, n'est-ce pas, à propos de

  8   moyens de chauffage ?

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   Q.  Bon. Certains d'entre nous ne sont pas allés sur la côte adriatique,

 11   mais d'autres si. A cette époque-là, dans ces installations, ces lieux

 12   qu'on utilisait pour loger des réfugiés et des personnes déplacées, est-ce

 13   qu'il y avait ce qu'il fallait pour assurer le logement de ces personnes

 14   pendant l'hiver ?

 15   R.  Pour ce qui est de l'hébergement en hiver, non. Ces installations

 16   n'étaient pas équipées pour ça. Ces hôtels, ces centres de repos, de

 17   vacances étaient destinés aux touristes et aux citoyens croates pour y

 18   passer des vacances d'été. Donc, c'était très problématique de prendre en

 19   charge ces personnes dans ces hôtels en hiver. Donc ces précisément le mois

 20   de novembre où l'hiver s'installe, mais encore une fois, très brièvement,

 21   c'est une situation analogique à celle en Croatie. La Croatie était occupée

 22   à ce moment-là et devait prendre en charge ces personnes déplacées, donc,

 23   on se disait que la Bosnie-Herzégovine pourrait faire pareil. Certes, elle

 24   était occupée mais sur les territoires libres, elle pouvait héberger ces

 25   personnes déplacées. C'est dans ce sens-là qu'on a souhaité travailler.

 26   Q.  D'accord. Très rapidement, un dernier paragraphe car il nous faut

 27   avancer. Voyons le cinquième paragraphe, voici ce qu'il dit : "Une

 28   coopération complète doit se mettre en place à propos du statut des

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  1   réfugiés d'Herceg-Bosna, informer le HVO d'Herceg-Bosna des idées à la base

  2   des protocoles proposés entre la République de Croatie et la République de

  3   Bosnie-Herzégovine, s'agissant de l'enseignement, réservée aux réfugiés,

  4   des soins de santé à leur donner et de l'ouverture de centres logistiques

  5   pour s'occuper de l'aide humanitaire."

  6   Un commentaire, s'il vous plaît.

  7   R.  Oui. Sur la base de l'accord signé d'amitié et de coopération entre la

  8   République de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine, mais aussi

  9   sur la base des lois internationales sur l'hébergement des réfugiés, la

 10   Croatie a pris l'engagement de garantir aux réfugiés la scolarité, les

 11   soins médicaux et également quelle allait permettre à la Bosnie-Herzégovine

 12   des centres logistiques, d'avoir des centres logistiques d'aide

 13   humanitaire, que c'est ce qu'on a organisés en Croatie d'ailleurs.

 14   Q.  Bien. O.K. Document suivant 1D 02283. Nous sommes alors à la date du 25

 15   février 1993, nous suivons l'ordre chronologique des jours, nous avions

 16   commencé par la réunion, l'accord d'amitié, le protocole. Et nous voyons

 17   ici un autre protocole en vue de l'établissement de centres logistiques en

 18   République de Croatie afin d'accueillir, de recevoir et de distribuer

 19   l'aide humanitaire envoyée en République de Bosnie-Herzégovine, la date

 20   étant celle du 25 février 1993. Etiez-vous au courant de l'existence de ce

 21   protocole ?

 22   R.  J'étais au courant de ce protocole, et je savais que, conformément à ce

 23   protocole, nous avons assuré cet appui logistique en Croatie, pour l'aide

 24   humanitaire vous aviez ces centres logistiques en Croatie, qui aidaient la

 25   Bosnie-Herzégovine à fournir l'aide humanitaire.

 26   Q.  Autre document, 2D 00454, 2D 00454 se pose ici la question des

 27   transferts vers les pays tiers, des garanties, sujet qui est abordé à un

 28   moment donné. Examinons ce document-ci, Sarajevo, 7 avril 1993. Deuxième

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  1   page, nous voyons le signataire,

  2   R.  Signé par Hajrudin Smajic.

  3   Q.  Très bien. Et tout en haut de la première page, on voit siège de la

  4   FORPRONU à Sarajevo pour la communication avec le bureau du HVO. Objet :

  5   "Demande d'obtention de laissez-passer pour sortir de Sarajevo."

  6   On n'a pas beaucoup de temps mais prenez le premier paragraphe, le

  7   troisième paragraphe, première page : "La plupart de ces individus vont

  8   vers -- de ces personnes vont en direction de Split et toutes ces personnes

  9   sont en possession de garanties individuelles venant d'autres pays

 10   garanties disant que ces personnes vont être prise en charge dans ces pays.

 11   Certaines personnes partent pour aller dans d'autres parties de la

 12   République de BiH et ces personnes ne vont pas quitter la Bosnie-

 13   Herzégovine, et la liste vous permet de voir que parmi les personnes qu'il

 14   faudra évacuer il y a un grand nombre de citoyens croates, ainsi que des

 15   personnes munies des garanties requises de la République de Croatie."

 16   En annexe, il y a une liste, il semblerait que cette liste soit assez

 17   longue.

 18   R.  108 personnes.

 19   Q.  Oui. Regardez cette liste -- ma consoeur me dit qu'il y avait environ 1

 20   200 personnes, c'était peut-être erroné. Mais est-ce que vous pourriez nous

 21   dire si votre bureau, votre office a discerné des lettres de garanties, en

 22   a délivré à des citoyens de Bosnie-Herzégovine afin que ces personnes

 23   passant par la Croatie se dirigent vers les pays tiers ?

 24   R.  Pour ce qui est du départ vers les pays tiers en passant par la

 25   République de Croatie, notre bureau des Réfugiés et des Personnes déplacées

 26   ne pouvait pas délivrer de document. Ce que notre bureau pouvait faire ou

 27   pouvait donner aux réfugiés de Bosnie-Herzégovine c'était un visa d'entrée,

 28   et là le terme visa il faut le comprendre de manière conditionnelle. Ce

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  1   n'est pas un visa comme on entend cela dans les relations internationales.

  2   C'est un visa qui était délivré par notre bureau aux Réfugiés de Bosnie-

  3   Herzégovine, et ce document leur permettait s'ils n'avaient pas de

  4   passeport ou d'autre document, ça leur permettait d'entrer sur le

  5   territoire de la République de Croatie et la police était tenue de leur

  6   permettre l'accès au territoire croate. Parce que d'une certaine manière

  7   ils avaient déjà le statut de réfugié. La République de Croatie

  8   garantissait qu'elle allait leur octroyer ce statu de réfugiés. A l'époque

  9   c'était le plus souvent des Croates qui avaient en Croatie de la famille,

 10   des amis.

 11   Il faut savoir qu'un grand nombre de citoyens croates, en fait, sont des

 12   Croates originaires de Bosnie-Herzégovine. Moi aussi, je suis descendant

 13   d'une famille qui il y a deux siècles a dû s'exiler de Bosnie-Herzégovine,

 14   donc, j'oserais dire qu'un tiers des ressortissants de la République de

 15   Croatie sont originaires de la République de Bosnie-Herzégovine c'est le

 16   résultat de deux siècles pratiquement de nettoyage ethnique contre les

 17   Croates de Bosnie-Herzégovine.

 18   Q.  Monsieur Rebic, je voudrais que vous vous concentriez sur le sujet que

 19   j'évoque avec vous, essayez, je vous en prie, de répondre a à mon avis

 20   question directement. Si d'autres personnes souhaitent un complément

 21   d'information, elles vous le demanderont. Regardons cette liste, et

 22   regardons les noms qu'on y trouve, est-ce que ce sont des Croates, des

 23   Musulmans -- ou des Croates et des Musulmans ? Examinez certains de

 24   certains de ces noms, s'il vous plaît.

 25   R.  Monsieur Karnavas --

 26   Q.  -- pas nécessaire de dire les noms; dites-moi, simplement si on trouve

 27   dans cette liste des noms croates et des noms de Musulmans.

 28   R.  C'est ça; sur la liste. Il y a des Croates et des Musulmans. Des

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  1   Ismets, et des Zeljkos, et Marias, et Samidas, Leilas et des Fadilas, et

  2   cetera.

  3   Q.  Très bien. Document suivant P 10048, P 10048, la date est celle du 16

  4   juillet 1993. Nous voyons votre nom. Regardons le texte en croate, en tout

  5   cas, à première vue, ce n'est pas votre signature que l'on voit. C'est

  6   votre signature ou pas ?

  7   R.  Ceci n'est pas ma signature. Je ne saurais pas vous dire exactement à

  8   qui appartiendrait cette signature.

  9   Q.  D'accord. Mais si vous regardez ce document pourriez-vous nous aider,

 10   objet : "Approbation pour d'entrée et pour séjour temporaire en République

 11   de Croatie." Il y a 500 personnes reprises dans cette liste qui vont être

 12   logées de façon temporaire à Gasinci dans ce centre à Djakovo. A votre

 13   connaissance, est-ce que c'est un document authentique ?

 14   R.  A en juger d'après ce que je vois ici, ça devrait l'être, donc un

 15   document authentique. Ce type de documents étaient délivrés sur demande des

 16   ressortissants de Bosnie-Herzégovine pour que ceux-là puissent sans

 17   difficulté traverser la frontière entre la Bosnie-Herzégovine et la

 18   Croatie.

 19   Car comme vous pouvez le voir, ce document a été envoyé au poste de police

 20   de Vrgorac, c'est la police des frontières, et poste de frontière de Banja

 21   Luka. Donc, la police croate devait avoir à la frontière un document qui

 22   émanait de notre bureau leur permettant de laisser passer ces gens en

 23   sachant qu'il y a une garantie délivrée par votre bureau comme quoi ils

 24   seront hébergés, et s'ils doivent rester durablement en République de

 25   Croatie nous prendrons à notre charge les frais et s'ils partent dans des

 26   pays tiers ceux-ci reviendront au pays tiers.

 27   Q.  Bien. Donc, dès qu'ils arrivaient, à ce moment-là, ils relevaient de la

 28   responsabilité de votre office ?

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  1   R.  Bien.

  2   Q.  Bien, document suivant --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je reviens sur ce document qui

  4   est un document important. Ce document établit que 500 personnes en

  5   provenance de Mostar n'auront pas le statut de réfugié, et ils doivent

  6   partir vers un -- un pays tiers. Qui plus est, ils sont dans des bus avec

  7   des escortes de police. Je me pose la question de savoir le temps qu'il

  8   vous a fallu pour traiter 500 dossiers. Nous sommes le 16 juillet 1993.

  9   Qu'est-ce qui a empêché un habitant de Mostar qui venait en Croatie de

 10   demander le statut de réfugié, alors même que ce document l'exclut

 11   totalement ? Pouvez-vous me donner vos explications ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'en sais, il s'agit de

 13   personnes qui, probablement, et là, je suppose, avaient eu un accord avec

 14   le HCR qui, à l'époque, a pris part à l'accueil de réfugiés bosniaques dans

 15   des pays tiers. Ce que ces personnes-là avaient demandé, c'était, en

 16   Croatie, de pouvoir être, pendant un certain temps, accueillis, et ça a été

 17   fait. Des personnes ont garanti que ces personnes continueraient leur

 18   voyage vers des pays tiers, et partant de là, lesdites personnes se sont

 19   vues attribuer un accueil ou un hébergement provisoire au centre de Gasinci

 20   non loin de Djakovo et dans d'autres centres de façon évidente aussi. Et un

 21   tel nombre ne pouvait pas être à Gasinci seulement, certains sont descendus

 22   chez des amis. Et régulièrement, au bout d'un certain temps, ces personnes-

 23   là demandaient, en passant par le HCR, voire par une ambassade quelconque,

 24   des documents, des papiers afin de pouvoir, dans un pays tiers, se faire

 25   attribuer un séjour. Souvent, il s'agissait de personnes qui allaient en

 26   Allemagne voir des amis ou des familles --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : -- ne partez pas dans des discrétions parce que vous

 28   imaginez bien que le dossier nous le connaissons dans de multiples aspects.

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  1   L'élément important que vous donnez en réponse, c'est de dire que ces 500

  2   personnes avaient été pris en charge par le HCR. Et finalement, si je

  3   comprends bien, vous assuriez, vous, la logistique. Et tout ceci, d'après

  4   ce que je comprends, était sous le contrôle du HCR. Vous vous contentiez

  5   d'assurer le logement, l'hébergement, pendant quelques temps avant leur

  6   départ. Vous n'aviez aucune responsabilité quant à leur sort futur qui

  7   dépendait des pays tiers ou du HCR. C'est bien comme ça qu'il faut

  8   comprendre ce que vous nous dites ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Ces personnes, dès qu'accueillies

 10   dans nos centre d'accueil, de ce fait même qu'elles se fassent attribuer

 11   des papiers officiels concernant leur statut ou pas, à partir du moment où

 12   ces personnes étaient dans des centres destinés aux réfugiés ipso facto,

 13   c'étaient des gens dont nous prenions soin, et aussi longtemps que ces

 14   personnes resteraient en Croatie, elles seraient abritées.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Ne vous égarez pas. Ma question est ultra précise :

 16   ce document témoigne du fait que 500 personnes venant de Mostar vont aller

 17   dans des pays tiers --

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être non, ça dépend.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et que ces personnes n'auront, en aucun cas, le

 20   statut de réfugié, c'est écrit à la fin, au troisième paragraphe. Et vous

 21   nous avez dit que ceci était sous la direction du HCR qui s'était occupé

 22   des lettres de garantie de l'accueil dans les pays tiers et cetera. Très

 23   bien, pourquoi pas ? Mais si cette hypothèse est vraie, à ce moment-là,

 24   votre fils ne joue que le rôle logistique de les accueillir pendant

 25   quelques temps. Ça, c'est une lecture du document à la condition que le HCR

 26   a joué un rôle. Mais si le HCR ne joue aucun rôle parce que ces 500

 27   personnes se sont débrouillées ou, par tout autre moyen, à avoir un accueil

 28   dans un pays tiers, à ce moment-là, le HCR n'a rien à voir. Et dans cette

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  1   hypothèse, je peux m'interroger sur le rôle de votre fils, qui est chargé

  2   également de s'occuper des réfugiés, qui ne reconnaîtrait pas le statut de

  3   réfugié à ces gens-là.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'hypothèse que vous venez d'avancer,

  5   bien que ce n'est pas moi qui aie écrit cette lettre, mais je suppose que,

  6   partant de cette lettre, aussi l'office était censé prendre soin desdites

  7   personnes. Je suppose une fois de plus parce que je ne suis pas -- je

  8   n'étais pas informé dans le détail de -- d'un cas de ce genre, mais j'ai eu

  9   connaissance de cas similaires, des personnes où, dès la frontière, ces

 10   personnes -- disaient qu'elles voulaient partir vers des pays tiers. Donc,

 11   c'était temporairement qu'elles allaient résider là. Et, sur cette

 12   déclaration, on leur a proposé un hébergement temporaire en Croatie.

 13   Lorsque ces personnes restaient de façon prolongée ou de façon durable en

 14   Croatie, et il y a eu des cas aussi de ce type, l'office leur délivrait une

 15   attestation parlant de leur statut de réfugié, et des cas comme ça, il y en

 16   a eu aussi.

 17   Donc, il s'agit d'un -- d'une situation -- d'un incident qui ne peut pas

 18   permettre de tirer une conclusion disant que l'office refusait à de telles

 19   personnes un accueil en République de Croatie. C'est dû au fait que ces

 20   personnes avaient déclaré qu'elles souhaitaient, je ne sais pour quelle

 21   raison, je peux imaginer seulement, vers des pays tiers.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais Monsieur, 500 personnes qui arrivent de Mostar,

 23   c'est pas un petit événement, c'est quelque chose d'important qui aurait dû

 24   appeler votre attention. Et --

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ça a dû appeler votre attention. Mais quand on

 27   constate que ces 500 personnes n'ont qu'une autorisation d'entrer et de

 28   séjour temporaire, c'est-à-dire qu'elles ne vont pas rester en Croatie.

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  1   C'est bien évident, et même vous, vous l'accentuez en disant qu'elles

  2   n'auront pas le statut de réfugié alors même que peut-être elles auraient

  3   souhaité aller en Croatie et elles n'avaient aucun intérêt à aller en

  4   Suisse, en Hongrie ou dans n'importe quel autre pays. Alors c'est là où je

  5   me demande quel est le rôle exact de votre fils ? Est-ce qu'en l'espèce

  6   vous étiez un vecteur de transhumance, ou bien, vous aviez un aspect

  7   hôtelier, vous vous contentiez de leur donner à manger et de les accueillir

  8   pendant quelques temps car ce n'était pas votre problème, c'était le

  9   problème du HCR. C'est ça que j'essaie de déterminer.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non seulement parce que cela ne serait le

 11   problème du HCR, c'était un problème aussi pour la République de Croatie.

 12   Et ces personnes qui venaient de Bosnie-Herzégovine, lorsqu'elles ne

 13   voulaient pas recevoir ou accepter un statut de réfugié en République de

 14   Croatie, mais déclaraient, au contraire, qu'elles souhaitaient continuer et

 15   aller plus loin vers les pays tiers, s'agissant de ce type de personnes, et

 16   là, il y a eu plusieurs cas de ce type, pas un seul seulement; ces

 17   personnes obtenaient un statut de réfugié provisoire et elles pouvaient

 18   rester en République de Croatie jusqu'au départ vers des pays tiers. Donc,

 19   ces personnes demandaient à partir elles-mêmes, ne voulaient pas bénéficier

 20   d'un statut de réfugié, mais d'un statut provisoire de réfugié, non pas

 21   durable. Et la Croatie était censée être une -- un pays de transit pour se

 22   rendre vers des pays tiers. La Croatie ne pouvait prive personne d'un

 23   statut de passage ou de transit parce que tous les -- toutes les personnes

 24   qui souhaitaient aller vers des pays tiers étaient forcément censées passer

 25   par la Croatie.

 26   Il ne faut pas tirer de là une conclusion qui dirait que l'office ne

 27   voulait pas prendre soin de ce type de personnes; cependant, si ces

 28   personnes avaient déclaré vouloir partir vers des pays tiers et ne

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  1   voulaient pas bénéficier d'un statut de réfugié à titre durable, mais à

  2   titre temporaire seulement, ces personnes-là ne -- n'auraient pas le droit

  3   de réclamer un statut durable parce que ce serait une supercherie de la

  4   part de ces -- une tromperie de la part de ces personnes.

  5   Je crois avoir été clair parce que nous devions aussi respecter les droits

  6   -- les droits de certains réfugiés. On ne voulait pas les obliger à rester

  7   en Croatie s'ils ne voulaient pas pour telle ou telle autre raison. Il

  8   fallait bien qu'on leur permette d'aller plus loin. Et il y en avait, de

  9   façon évident, qui souhaitaient partir au-delà. Donc, la Croatie n'avait

 10   pas, elle, le droit de les chasser ailleurs. La Croatie ne pouvait pas

 11   expulser ces réfugiés vers d'autres pays parce que les autres pays ne les

 12   auraient pas reçus de la sorte. Donc, de ce point de vue de -- des choses,

 13   la Croatie était dépendante vis-à-vis des pays tiers et les pays tiers ne

 14   reprocheraient un tel comportement à la Croatie. Donc, il faut imaginer que

 15   ces personnes-là ne voulaient véritablement pas rester à titre durable en

 16   République de Croatie, mais partir vers des pays -- pays tiers, et elles ne

 17   pouvaient pas aller vers ces pays tiers autrement qu'en passant par la

 18   Croatie.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : -- question. Si un habitant de Mostar musulman se

 20   présente à la frontière sans garantie, sans rien du tout, et demande, en

 21   application des conventions de Genève, le statut de réfugié, que se passe-

 22   t-il au niveau de l'office ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Si une personne voulait accepter un statut de

 24   réfugié en République de Croatie, cette personne bénéficiait -- se voyait

 25   attribuer ce statut.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.

 28   Monsieur Rebic, nous avons vu les documents, nous avons vu les décrets, les

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  1   lois qui réglementent les activités de votre office. On y indique les

  2   conditions qui s'appliquent pour qu'une personne soit prise en charge par

  3   l'ODPR. Il y a deux catégories qui sont évoquées dans ces textes : celle

  4   des personnes déplacées et celle des réfugiés. Ici, nous avons un groupe de

  5   500 personnes qui n'appartiennent à aucune de ces catégories. Est-ce qu'il

  6   y avait une base juridique vous permettant, cependant, de dire que votre

  7   office était chargé de s'occuper de ces personnes. ou bien, est-ce que

  8   c'est un événement qui, en fait, sortait du cadre prévu par la

  9   législation ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, et je le réitère, il

 11   s'agit de personnes qui, si elles avaient voulu accepter ce statut de

 12   réfugié en République de Croatie, l'auraient reçu.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, excusez-moi, excusez-

 14   moi. Vous ne répondez absolument pas à ma question, Monsieur le Témoin.

 15   Moi, ce que je vous demandais c'était la chose suivante : ces personnes, ce

 16   n'étaient pas des réfugiés, point barre. Moi, ça ne m'intéresse pas de

 17   savoir s'ils auraient pu l'être ou n'auraient pas pu l'être. La question

 18   que je vous pose, c'est s'il y avait des bases juridiques permettant à

 19   votre bureau de s'occuper d'une troisième catégorie de personnes ou -- ou

 20   alors, est-ce que ça se faisait d'une manière improvisée, ad hoc, par bonté

 21   d'âme ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Notre office s'est comporté conformément à la

 23   loi. S'il s'est agit de ce cas, à savoir de réfugiés de ce type, ces gens-

 24   là avaient droit au statut de réfugié. Je n'arrive pas à me souvenir

 25   exactement, maintenant, aujourd'hui, s'il s'agissait de 500 réfugiés ou

 26   s'il s'agissait de 500 touristes

 27   --

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Rebic, je dois vous

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  1   interrompre. Je note simplement que vous ne voulez pas répondre à la

  2   question que je viens de vous poser, mais que vous vous lancez dans une

  3   autre hypothèse. Mais je vais en rester là, je ne vais pas insister.

  4   Excusez-moi, Maître Karnavas.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais peut-être pouvoir ici apporter mon

  6   concours --

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, excusez-moi. La question, je

  8   l'ai posée au témoin et je ne pense pas qu'un avocat soit habilité à

  9   déposer.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne vais pas déposer mais, apparemment,

 11   vous semblez ne pas tout à fait comprendre que ces personnes -- ces 500

 12   personnes ne pouvaient pas aller en Hongrie sans passer par la Croatie.

 13   Elles ne pouvaient pas aller en Suisse sans passer par la Croatie. Ces

 14   personnes n'étaient pas -- ne pouvaient pas voler. Donc, la question était,

 15   pour elles, de savoir comment elles pouvaient aller à -- à un tel endroit

 16   concrètement. Donc, vous êtes en train de faire des hypothèses s'agissant

 17   des faits.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais quels faits ? Pouvez-vous être

 19   plus précis.

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous partez du principe qu'elles n'ont pas

 21   de statut.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais c'est dit dans le document, il

 23   est dit que ce ne sont pas des réfugiés ni des personnes déplacées, donc,

 24   c'est quelque chose d'autre.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais quand je vais dans un pays et que je

 26   suis en train -- je dois, pour cela, traverser un autre pays, je suis en

 27   transit. La Croatie, c'est le pays de transit, c'est ce qui semble être le

 28   cas. Et si vous me permettez de continuer, mais vous semblez pour -- avoir

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  1   l'impression que je veux moi-même déposer.

  2   Q.  [aucune interprétation]

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Ha, ha, ha, bon. Une autre objection ?

  4   M. SCOTT : [aucune interprétation]

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Et je précise pour le compte rendu

  6   d'audience que le témoin a essayé de répondre à votre question, Monsieur le

  7   Juge Trechsel, mais vous l'avez interrompu à plusieurs reprises. Donc, il

  8   essaie peut-être de nous donner des explications, même si -- même s'il

  9   allait un petit peu lentement pour se faire.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 11   M. SCOTT : [interprétation] Je précise, pour le compte rendu d'audience,

 12   qu'au cours de ces dernières lignes de compte rendu d'audience, on a -- on

 13   a parlé d'un certain nombre d'hypothèses et, moi, je veux être très clair.

 14   Les 15 à 20 dernières minutes de la déposition du témoin reposent sur des

 15   hypothèses. Tout a commencé par les mots suivants : "Si on suppose que -- à

 16   supposer qu'il y avait un accord avec le HCR des Nations Unies, et cetera"

 17   A supposer si hypothèse, et cetera. Donc, nous n'avons aucune base pour

 18   savoir ce qu'il en est et le témoin ne veut pas, apparemment, répondre à la

 19   question du Juge Trechsel. On parle d'hypothèse et on se lance dans de

 20   longues élucubrations comme s'il y avait des faits, mais il n'y en a pas,

 21   et rien n'indique qu'il y avait un accord avec le HCR des Nations Unies, et

 22   partir de ce principe, c'est adopter une hypothèse.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, ce n'est pas ce que nous disons ici.

 24   Mais une question, Monsieur Rebic, et je ne veux surtout pas ici me --

 25   parler à votre place -- déposer à votre place comme les Juges me l'ont dit

 26   à plusieurs reprises.

 27   Q.  Ma question, donc : si ces 100 [comme interprété] personnes qui

 28   figurent sur la liste étaient arrivées et avaient demandé le statut de

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  1   réfugié, quel que soit exactement le statut, le statut de visiteur,

  2   voyageur, touriste. Si ces personnes s'étaient présentées à la frontière et

  3   avaient demandé le statut de réfugié, qu'auriez-vous fait ? Qu'aurait fait

  4   la Croatie, qu'aurait fait votre office ? Veuillez répondre à cette

  5   question pour les Juges de la Chambre.

  6   R.  L'office chargé des Réfugiés de la République de Croatie leur

  7   accorderait un statut de réfugié, je vous le garantie absolument. S'ils

  8   avaient demandé ce statut de réfugié en République de Croatie, ils

  9   l'auraient reçu en République de Croatie, bien que la République de Croatie

 10   s'est vue submergée de réfugiés, mais on aurait trouvé les moyens et des

 11   ressources. Mais il s'agissait, en l'occurrence, de ceux qui voulaient

 12   transiter par la République de Croatie aux fins de se rendre vers des pays

 13   tiers.

 14   Q.  Bien. A supposer que quelqu'un se déplace sur -- en empruntant une voie

 15   transport terrestre et que cette personne veuille aller de Bosnie, mettons

 16   en Allemagne ou en Hongrie, pas très loin, mais vue la situation et là je

 17   parle de quelqu'un qui n'aurait pas emprunté un avion. Comment cette

 18   personne procéderait-elle ? C'est important cette question pour ceux qui ne

 19   connaissent pas la situation géographique.

 20   R.  En aucun cas, les réfugiés de Bosnie-Herzégovine -- ou plutôt, des

 21   personnes disons en provenance de Bosnie-Herzégovine ne pouvaient aller

 22   vers des pays tiers sans passer par des régions de la République de

 23   Croatie. Et la République de Croatie était tenue à l'égard de toute

 24   personne demandant un transit, un passage par le territoire de la

 25   République de Croatie de l'accorder. Et au cas où on demanderait à rester

 26   pendant un certain temps en République de Croatie l'office leur permettait.

 27   Mais cet office ne pouvait pas les obliger à prendre un statut de réfugié

 28   si ces personnes ne voulaient pas pour raisons X, Y, parce qu'ils avaient

Page 28294

  1   déjà notamment un accès à des pays tiers assurés --

  2   Q.  Je vais vous interrompre --

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  Je peux finir cette question, s'il vous plaît -- est-ce que je pourrais

  5   finir ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais, Monsieur le Président --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Ma question va dans la suite --

  9   Bien.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien, très bien, j'ai demandé cinq

 11   heures, vous m'en avez donné quatre et, maintenant, on m'interrompt. Moi,

 12   il faut que j'en termine avec cette série de questions, on m'empêche de le

 13   faire. Ensuite, vous emmenez le témoin dans une autre direction, ça fait

 14   qu'il est pratiquement impossible pour moi de le ramener sur le thème qui

 15   m'intéresse. C'est la raison pour laquelle j'insiste, de pouvoir finir

 16   cette série de questions. Prenez le temps que vous voudrez, Monsieur le

 17   Président, mais il s'agit de l'interrogatoire principal. On a lancé des

 18   accusations contre moi, et cetera, j'ai besoin de préciser tout cela.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous allez l'avoir, donc, il n'y a pas de

 20   problème sur le temps car le temps de ma question ne vous est pas décompté,

 21   premièrement.

 22   Deuxièmement, ce que je veux dire va dans la ligne de ce que vous dites, et

 23   rejoint ce que mon collègue a abordé tout à l'heure.

 24   Monsieur le Témoin, quelqu'un qui traverse votre pays en transit. En

 25   l'espèce c'étaient des gens qui venaient de Mostar, mais ça pourrait être

 26   des Chinois, ça pourrait être des Polonais, ça pourrait n'importe qui. Vous

 27   avez parfaitement expliqué que quand on transite il faut qu'il y ait des

 28   autorisations. Et vous-même vous avez voyagé dans le monde. Vous les savez

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  1   parfaitement, le problème n'est pas là. La seule question que les Juges se

  2   posent. Qu'est-ce que votre office vient faire dans le transit de ces gens-

  3   là ? A la limite, pourquoi ce n'est pas le ministère de l'Intérieur qui

  4   s'occuperait d'eux ? Le ministère chargé des cas sociaux ? Pourquoi votre

  5   office dit des réfugiés ou des personnes déplacées qui a une mission bien

  6   définie dans la loi, pourquoi vous vous occupez de ces gens-là ? C'est ça

  7   qui nous intéresse, pourquoi vous intéressez à cela alors que finalement

  8   ils n'étaient là qu'en transit et ils pouvaient être pris en compte par

  9   d'autres personnes que vous ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne pense pas qu'à

 11   l'époque, ces gens-là puissent ou aient pu être pris en charge par

 12   quelqu'un d'autre et ils étaient très nombreux. Peu de gens pouvaient les

 13   recevoir pendant des journées ou une période. Il n'y avait que l'officier

 14   qui pouvait le faire. On a supposé que c'étaient des réfugiés. Ils allaient

 15   vers des pays tiers. Mais ils pouvaient rester un certain temps en Croatie,

 16   donc, ils seraient vus attribuer ce statut comme bien d'autres personnes

 17   l'ont obtenu. Vous souvenez-vous combien de personnes sont passées par le

 18   territoire de la République de Croatie, et nous n'avons jamais --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous avez répondu à ma question. Vous avez dit

 20   que qui d'autres que vous devaient s'en occuper donc c'est une réponse. Je

 21   prends note. Voilà.

 22   Donc, Maître Karnavas, j'espère que je ne vous ai pas entravé, mais c'était

 23   une suite à vos questions.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation]

 25   Q.  Bien. Partons du principe que nous avons quelqu'un qui entre en Croatie

 26   et cette personne soit déclarée réfugiée. Est-ce qu'on peut expulser cette

 27   personne en Slovénie, en Hongrie, en

 28   Suisse, dire à cette personne : allez en Slavonie. Vous nous avez expliqué

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  1   hier comment on traitait ces gens en Slovénie. on les laissait attendre à

  2   la frontière pendant deux jours et ensuite on refusait des laisser entrer.

  3   Vous pourriez donner des explications à la Chambre sur la situation à

  4   l'époque parce que pour aller en Slovénie, il faut passer par la Croatie,

  5   en tout cas, si on ne voulait pas emprunter un autre moyen de transport.

  6   R.  Monsieur Karnavas, j'ai déjà dit que la République de Croatie ne

  7   pouvait pas -- n'osait pas s'agissant de quelques personnes que ce soit les

  8   envoyer vers des pays tiers sans qu'il y ait des documents et des accords,

  9   soit directes soit en passant par le biais du HCR. Lorsqu'il s'agit de

 10   réfugiés, aucun pays voisin ne voulait accueillir ces réfugiés si ou ne

 11   voudrait les accueillir si la Croatie les poussait pour les leurs --

 12   remettre pour les envoyer là-bas. Donc, si ces 500 personnes avaient

 13   souhaité rester en République de Croatie, en d'autres termes, s'ils

 14   n'avaient pas pu accéder vers des pays tiers ou à des pays tiers pour

 15   quelques raisons que ce soit, la Croatie les aurait gardés, leur aurait

 16   accordé un statut de réfugié, et aurait hébergé ces gens-la, indépendamment

 17   de leurs lieux de provenance et de leur statut préalable.

 18   Q.  Merci. Document suivant, 1D 01710, vous avez parlé du HCR des Nations

 19   Unies. 1D 01710, il y a un certain nombre de documents que je veux examiner

 20   avec vous. Date du 30 novembre 1993. Et on voit ici en bas de la page : "A

 21   la demande du bureau du Haut-commissaire chargé des Réfugiés, le bureau

 22   chargé des Personnes déplacées et des Réfugiés donnent l'autorisation à des

 23   personnes de nationalité étrangère de transiter par la République de

 24   Croatie." Ensuite, il y a une liste de 14 personnes, "qui vont être

 25   envoyées au royaume du Danemark par le HCR des Nations Unies."

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez, Maître Karnavas, cette

 27   interruption. Vous avez parlé du document 1D 1710, et ça n'a pas été

 28   correctement indiqué au compte rendu d'audience.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. 1710.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

  3   M. KARNAVAS : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce que vous connaissez ce type de document ? Si vous regardez

  5   l'original, vous verrez votre signature ou, en tout cas, ce qui ressemble

  6   beaucoup à votre signature.

  7   R.  Monsieur Karnavas, c'est ma signature, c'est authentique, et le texte

  8   de cette requête est tout à fait en règle. C'est correctement énoncé parce

  9   que, suite à une demande du Haut-commissariat aux Réfugiés des Nations

 10   Unies, j'ai donné mon accord pour le transit de ressortissants étrangers

 11   par le territoire de la République de Croatie. Et partant de cette

 12   autorisation, le HCR pouvait faire passer ces citoyens-là par notre

 13   frontière parce que la police ne les aurait pas laissés passer sans ce type

 14   de lettre, parce que ce n'était pas le ministère des Affaires étrangères

 15   qui était compétent pour les réfugiés. Donc, le HCR passait par notre

 16   office pour ces questions-là. Et c'est donc une autorisation qui leur a été

 17   accordée.

 18   Q.  Bien. Un autre document maintenant, 1D 01 --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, on vient de voir un document qui accrédite

 20   ce que vous nous avez dit tout à l'heure et là on n'est pas dans les

 21   hypothèses. On a la preuve que le HCR demandait à l'office des Visas de

 22   transit. Voilà une preuve matérielle indiscutable. Très bien. Oui, oui,

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si ce document avait

 24   été présenté au préalable, ceci aurait pu être plus clair.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais pour les 500 de Mostar, est-ce qu'il y avait eu

 26   un document émanant du HCR ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas le savoir puisque je n'ai pas

 28   signé ce document. Je suppose que je n'étais même pas à Zagreb ou j'étais

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  1   peut-être absent parce que j'étais à Genève, à Strasbourg à une réunion, ou

  2   pour une raison quelconque j'ai été empêché et je n'ai pas pu être dans mon

  3   bureau ces jours-là.

  4   M. SCOTT : [interprétation] Le témoin a apporté une précision. Il n'y a

  5   aucun lien entre cette transaction et les 500 personnes de Mostar, cela

  6   veut dire que ça reste dans le domaine de la supposition.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais sauter

  9   un document pour reprendre le fil où vous vous êtes arrêté, Monsieur le

 10   Président.

 11   Q.  Regardons la série suivante de documents, 1D 02601. Tout en haut du

 12   document, on voit la date, c'est la date du 26 septembre 1994 à la demande

 13   du Haut-commissaire chargé des Réfugiés des Nations Unies. Document suivant

 14   1D 02600, 29 septembre 1994, une fois de plus à la demande du Haut-

 15   commissaire chargé des Réfugiés et on voit votre nom en bas de document.

 16   Puis le document 1D 02599, de nouveau à la demande du Haut-commissaire, on

 17   retrouve votre nom, la date étant celle du 5 octobre 1994. 1D 02598, 17

 18   octobre 1994, à la demande du Haut-commissaire chargé des Réfugiés et on

 19   retrouve votre nom. Je pense que ceci concerne 56 personnes. 1D 02597, 18

 20   octobre 1994, à la demande du Haut-commissaire chargé des Réfugiés des

 21   Nations Unies, une fois de plus nous avons votre nom. 1D 02596, à la

 22   demande du Haut-commissaire des Nations Unies, la date étant celle du 20

 23   octobre 1994, et on trouve votre nom. 1D 02594, 31 octobre 1994, à la

 24   demande du Haut-commissaire chargé des réfugiés des Nations Unies. Prenons

 25   maintenant le document toujours pour la date du 31 octobre 1994, le

 26   document 1D 02595. Enfin, nous avons la date du 2 novembre 1994, le

 27   document étant 1D 02593, où nous voyons une fois de plus votre nom.

 28   Monsieur Rebic, après avoir examiné tous ces documents où apparaît votre

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  1   nom, est-ce que vous connaissez la teneur de ces documents ?

  2   R.  Ces documents, je les connais, même si certains ont été signés par

  3   quelqu'un d'autre qui me remplaçaient, donc, ce n'est pas moi qui les ai

  4   signés. Ces documents ont été adressés à des personnes à l'époque haut

  5   placées par exemple, le vice-premier ministre du gouvernement croate ainsi

  6   que M. Hajker Hajnan [phon] du HCR, le ministère des Affaires intérieures,

  7   poste-frontière; archives. Donc, sur la base de ces documents, il s'agit de

  8   la légalité du fonctionnement de l'office. C'est en respectant la

  9   législation interne et internationale qu'il a agi. L'office a donc donné

 10   l'autorisation que ces personnes passent par le territoire de la Croatie et

 11   soient prises en charge dans un pays tiers. Mais pour que ça ait lieu, ces

 12   personnes avaient besoin de traverser le territoire de la République de

 13   Croatie et le HCR a demandé notre accord, l'accord de notre office.

 14   Q.  Veuillez examiner un document que nous avons sauté à dessein, je le

 15   précise, il s'agit du document 1D 01582. Il faudra peut-être remonter un

 16   peu là, revenir en arrière. Le document est

 17   1D 1582. La date est celle du 26 avril 1994 où nous voyons votre nom en bas

 18   du document. Une lettre émanant du gouvernement de la République de Croatie

 19   qui est adressée à un certain M. Fischer : "Celui qui a survécu à l'hiver."

 20   R.  Oui, je sais, je le vois, Monsieur Karnavas, je vois ce document. M.

 21   Fischer, il s'occupait du déplacement des ressortissants de Bosnie-

 22   Herzégovine vers des pays tiers, et ces gens-là transitaient toujours par

 23   la République de Croatie parce qu'il n'y avait pas d'autre possibilité.

 24   Puisque l'ambassade de Bosnie-Herzégovine, dans le cadre des échanges que

 25   nous avons eus, ait mentionnée cela, le fait qu'il fallait mettre en garde

 26   ce monsieur, c'est ce que j'ai fait. Je l'ai averti du fait qu'à l'avenir

 27   lorsqu'il déplacera des ressortissants de Bosnie-Herzégovine en passant par

 28   la Croatie vers des pays tiers, il fallait au préalable qu'il demande

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  1   l'accord auprès de l'ambassade de Bosnie-Herzégovine. C'est uniquement à

  2   partir de ce moment-là que j'allais, moi, lui donner le feu vert pour le

  3   transit. Donc, c'est le document qui prouve que nous le faisions --

  4   Q.  Permettez-moi de vous interrompre parce que je veux agir de façon

  5   méthodique. Deuxième paragraphe, je le cite : "Effectivement, en raison des

  6   griefs présentés fréquemment par les autorités de Bosnie-Herzégovine qui

  7   affirment que ce bureau ainsi que les organisations humanitaires

  8   internationales aident les Serbes dans ce 'nettoyage ethnique' de la

  9   Bosnie-Herzégovine, et conformément ou en accord avec l'ambassade de

 10   Bosnie-Herzégovine à Zagreb, les organisations humanitaires internationales

 11   doivent faire une demande d'obtention de permis pour transiter par la

 12   République de Croatie et doivent obtenir un consentement écrit de

 13   l'ambassade de Bosnie-Herzégovine à Zagreb."

 14   Pourquoi est-ce que c'était nécessaire de l'obtenir ?

 15   R.  C'était nécessaire précisément pour éviter ce type de malentendus,

 16   comme ceux que l'on vient de voir à l'adresse de l'office. Grâce à

 17   l'ambassade de Bosnie-Herzégovine et à ses objections, et en coopérant avec

 18   eux, nous avons agi de cette sorte dans la mesure du possible. Nous avons

 19   contrôlé les citoyens qui, de Bosnie-Herzégovine en passant par la Croatie,

 20   se rendaient dans des pays tiers. Je dois dire qu'il y avait plusieurs

 21   personnes qui ont agi ainsi à notre insu. La police arrêtait ces gens à la

 22   frontière. Il a fallu que j'intervienne, soit que j'accorde le droit de

 23   transit à ces personnes-là ou il fallait que je les héberge dans la

 24   République de Croatie, que je les traite comme des réfugiés parce que les

 25   autres pays ne voulaient pas les recevoir. J'avais le cas de la Slovénie

 26   par exemple, la police slovène ne voulait pas recevoir ces gens-là, ils les

 27   renvoyaient en République de Croatie, donc, il nous fallait recevoir et

 28   héberger ces personnes à partir de ce moment-là.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, on est obligé de faire la pause

  2   parce que --

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Une seule question, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  5   M. KARNAVAS : [interprétation]

  6   Q.  Si on saute un paragraphe, on le voit : "Nous aimerions souligner ou

  7   indiquer qu'il sera aussi nécessaire comme ceci a été nécessaire jusqu'à

  8   présent de fournir une lettre de garantie valable pour chaque personne

  9   individuellement et il faudra également payer une taxe administrative."

 10   Pourquoi est-ce que c'était nécessaire que cette personne soumette une

 11   lettre de garantie valable ?

 12   R.  C'était nécessaire parce que l'office devait savoir à qui il fallait

 13   verser le montant des frais car toutes sortes d'individus se présentaient

 14   et demandaient que l'on rembourse ou couvre leurs frais, et l'office ne

 15   savait pas de quoi et de qui il s'agissait. C'est la raison pour laquelle

 16   on l'a demandée.

 17   Q.  Est-ce qu'il y avait eu des excès pour ce qui est de ces lettres de

 18   garantie, des lettres fausses, par exemple ? Est-ce qu'on a rapporté ce

 19   problème à votre connaissance ?

 20   R.  Hélas, il y a eu des abus. Il y a eu des faux. Je dois dire que

 21   s'agissant d'un individu de l'office, j'ai licencié cette personne parce

 22   qu'elle agissait de concert avec une association de Banja Luka, elle

 23   faisait un faux de ma signature et utilisait de manière illégale le cachet.

 24   Donc, j'ai été obligé de licencier cette personne, je l'ai regretté, mais

 25   il a fallu que je le fasse puisque c'était une manière contraire à la loi

 26   de se comporter. Donc, j'ai dit, malheureusement, il y a eu des abus et

 27   parfois il était difficile d'arrêter de ces pratiques, parfois on a pu.

 28   Q.  Dernière chose. Si la lettre de garantie était un faux, ça voulait dire

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  1   qu'une fois ces personnes en Croatie, la Croatie ne pouvait pas s'en

  2   débarrasser, c'est ça ?

  3   R.  Oui, oui, c'est ça. La Croatie était obligée de les accepter et de les

  4   prendre en charge, il y avait pas d'alternative.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on va vérifier le temps qui reste. Nous

  6   reprendrons dans 20 minutes.

  7   --- L'audience est suspendue à 17 heures 46.

  8   --- L'audience est reprise à 18 heures 05.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, l'audience est reprise, le

 10   greffier m'indique qu'il vous reste 27 minutes. Donc s'il n'y a pas

 11   d'incidents de procédure ou de questions trop longues des Juges, vous

 12   devriez normalement terminer.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Je pense que oui, Monsieur le Président.

 14   Q.  Troisième classeur pour vous, Monsieur le Témoin. Il s'agira du

 15   document P 03765. Afin de tout parfaitement saisir, il faudrait jeter un

 16   coup d'œil, fut-il furtif, à la pièce P 03708 puisque c'est à cette pièce

 17   qu'il est fait référence dans la lettre qu'envoie Mme Turkovic. Mais

 18   intéressons-nous au document P 03765. Mme Turkovic a dit ceci au troisième

 19   paragraphe :

 20   "Monsieur Rebic, vous me reprochez qu'en ma qualité d'ambassadeur de

 21   la République de Bosnie-Herzégovine je ne manifeste aucun intérêt pour les

 22   Croates qui auraient été chassés de la vallée de la Lasva, et là une fois

 23   de plus, vous vous servez d'informations erronées.

 24   "A cet égard, j'aimerais souligner qu'aussitôt après l'arrivée de

 25   réfugiés venant de Bosnie centrale, je suis allée leur rendre visite à

 26   Poljud. J'ai donné l'ordre d'assurer leur approvisionnement grâce à un

 27   centre de logistique de Split. J'ai travaillé d'arrache-pied pour permettre

 28   leur transfert vers un meilleur centre."

Page 28304

  1   Pour ce qui est des personnes chassées, des Croates qui ont été

  2   chassés de la vallée de la Lasva, à votre connaissance et vu la façon dont

  3   vous voyez les choses, a-t-elle raison de dire ce qu'elle dit et est-ce

  4   qu'elle a rendu visite à ces personnes ?

  5   R.  Monsieur Karnavas, je ne me souviens pas que Mme Bisera Turkovic, avec

  6   qui j'ai entretenu des relations tout à fait correctes par ailleurs, se

  7   soit rendue à Split pour accueillir ces réfugiés croates de la vallée de la

  8   Lasva. Mais je me souviens qu'il a fallu que je prenne un avion appartenant

  9   à l'armée croate pour que je me rende en toute urgence à Split, sinon le

 10   trajet en voiture aurait pris trop de temps, il a fallu que j'y aille pour

 11   régler la question de ces réfugiés.

 12   En deux mots, ils ont été chassés de la vallée de la Lasva de la

 13   République de Bosnie-Herzégovine et ils sont arrivés à Split. A Split, ils

 14   n'ont pas voulu accepter l'hébergement qu'on leur a offert sur l'île de

 15   Peljesac à Perma [phon]. En fait, le ministère de la Défense, je lui ai

 16   demandé de toute urgence qu'il mette à notre disposition des installations

 17   militaires. En fait, c'était un centre de repos militaire près d'Orebic,

 18   sur l'île de Peljesac. Eux, ils ne voulaient absolument pas aller sur cette

 19   île ou cette presqu'île, ils voulaient rester à Split. Or, il n'y avait

 20   aucun moyen de les héberger à Split, mais tous les hôtels étaient pleins,

 21   et eux, ils voulaient descendre dans un hôtel.

 22   J'ai eu des heures très difficiles, il y avait un franciscain avec

 23   eux qui encourageait ces gens à exiger de rester à Split et de ne pas se

 24   rendre à Perma, mais j'ai fait appel à sa conscience et je lui ai demandé

 25   qu'il accepte qu'on aille tous à Perma. Il a accepté et ces réfugiés ont

 26   accepté d'être hébergés à cet endroit. Donc à ce moment-là à Split,

 27   personne, ni ce père franciscain, ni les réfugiés, personne ne m'a évoqué

 28   Bisera Turkovic. Je ne pouvais pas savoir qu'elle s'y soit rendue et je

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  1   doute fort qu'elle y ait été.

  2   Q.  Cet endroit où ces personnes sont allées, à quelle distance se trouve-

  3   t-il de Split ?

  4   R.  Si vous prenez le bac, alors il vous faut à peu près trois quarts

  5   d'heure, 45 minutes à peu près, cela dépend un peu des conditions météo. Et

  6   si vous prenez un autocar, ça prend un peu plus de temps, car on part de

  7   Split vers Dubrovnik, puis il faut prendre la direction de la presqu'île de

  8   Peljesac et ça prend à peu près une heure et demie; cependant,

  9   l'hébergement était tout à fait décent et là, on voit que parfois les

 10   Croates de Bosnie-Herzégovine n'étaient pas satisfaits de leur hébergement,

 11   et parfois c'était le cas des Musulmans de Bosnie-Herzégovine. Que ce soit

 12   les uns ou les autres, il m'est arrivé d'avoir des problèmes avec eux, pas

 13   toujours.

 14   Q.  Dans ce cas-ci, d'après ce que vous nous dites, il semblerait tout du

 15   moins que ce père franciscain était votre interlocuteur avec qui vous

 16   négociiez ?

 17   R.  Oui, je lui ai demandé de comprendre la gravité de la situation et de

 18   convaincre les gens de le suivre à Perma dans ce centre de vacances

 19   militaire. Finalement, ils ont accepté et, en paix, ils ont tous pris le

 20   chemin de Perma.

 21   Q.  Bien. Document suivant, 1D 01432. Il faudrait que vous sautiez quelques

 22   documents qui se trouvent dans le classeur. En raison du temps qui nous est

 23   imparti, nous devons sauter quelques documents. Mais celui-ci, examinons-

 24   le, 1D 1432 --

 25   R.  Le 932 ?

 26   Q.  Le 1432. Ça a l'air d'un 9, mais en fait c'est un 4.

 27   R.  Parfait.

 28   Q.  Est-ce que vous connaissez ce document, Monsieur ?

Page 28306

  1   R.  Je connais ce document. Il est adressé de la part de la Bosnie-

  2   Herzégovine -- de la République croate d'Herceg-Bosna, adressé au

  3   gouvernement de la République de Croatie, à Kostovic, le vice-premier

  4   ministre et à d'autres personnalités, entre autres, à moi-même. Dans ce

  5   document, on demande qu'il y ait enregistrement de la représentation du

  6   bureau des personnes déplacées et des réfugiés de la République croate

  7   d'Herceg-Bosna. Donc Darinko Tadic demande qu'il y ait enregistrement du

  8   bureau des réfugiés et des personnes déplacées de la République croate

  9   d'Herceg-Bosna.

 10   Q.  Permettez-moi de vous arrêter. Il y avait une ambassade de la Bosnie-

 11   Herzégovine qui avait la responsabilité de tous les ressortissants de la

 12   Bosnie-Herzégovine à Zagreb. Ici nous avons une correspondance de Turkovic

 13   et de Krajsek, son associé, qui se plaint surtout à propos d'un groupe

 14   ethnique par rapport aux deux autres. Pourquoi serait-il nécessaire

 15   d'ouvrir un bureau représentant les Croates si vous aviez déjà à Zagreb une

 16   ambassade de Bosnie-Herzégovine responsable, je suppose, de tous ses

 17   ressortissants ?

 18   R.  Je ne comprenais pas pour quelle raison il y aurait enregistrement

 19   d'une telle représentation. Parce que le bureau des réfugiés et des

 20   personnes déplacées auprès du gouvernement de la République de Croatie

 21   suffisait à cet effet. Puis pour ce qui est de la question du problème des

 22   Croates qui étaient des réfugiés de Bosnie-Herzégovine, il y avait là

 23   l'ambassade de Bosnie-Herzégovine qui avait la compétence sur eux en

 24   principe. Mais quand il s'agissait des questions de réfugiés, réfugiés

 25   croates, nous cherchions des solutions tout comme lorsqu'il s'agissait des

 26   Musulmans. Nous traitions tous ces cas à l'office, donc, je ne comprends

 27   pas quelle aurait été la finalité, en réalité, de l'enregistrement d'une

 28   telle représentation.

Page 28307

  1   Puis de surcroît, il y avait en Herceg-Bosna un office chargé des

  2   réfugiés et des personnes déplacées, en fait plutôt pour des personnes

  3   déplacées, on l'a déjà mentionné. Cet office nous avons essayé de lui

  4   apporter un soutien logistique. Nous avons essayé en fait de former des

  5   employés pour qu'ils puissent être à même de faire leur travail, tout comme

  6   j'aidais les ressortissants de la République de Bosnie-Herzégovine qui

  7   étaient des Musulmans. Il y avait

  8   Mme Omerbasic qui est venue dans mon bureau, elle y a passé plusieurs

  9   jours, et je lui ai appris comment faire pour créer un tel bureau à

 10   Sarajevo. Donc j'ai aidé tant les uns que les autres.

 11   Q.  Merci. Document suivant, 1D 02277. "Lieu pour les réfugiés Pineta."

 12   Quatrième paragraphe : "12 000 Croates ont dû quitter la municipalité de

 13   Capljina, ils sont maintenant à Capljina, Stolac, Pocitelj, Ljubosko,

 14   Lipovljani, Bjelolasica, Klaka, Fazana [phon] Selce et Pineta." Et il dit

 15   que : "Il y en a 13 à Pineta où nous avons organisé notre vie quotidienne."

 16   Qu'est-ce que c'était que ce Pineta ?

 17   R.  Pineta c'était un centre touristique avec des bungalows qui dépendait

 18   de la ville de Novi Grad et qui se situe près de la frontière slovène. Cet

 19   endroit était la propriété d'une société slovène. Dans ce centre

 20   touristique, on a placé des réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui étaient

 21   surtout originaires de Vares et de Kakanj. Il y en avait dans d'autres

 22   localités également puisqu'il y avait environ 12 000 personnes. C'était un

 23   nombre important. C'était des Croates de Bosnie-Herzégovine qui ont été

 24   forcés à partir, qui sont arrivés en République de Croatie et qui étaient

 25   demandeurs de statut de réfugié. Ils étaient placés dans d'autres centres

 26   de réfugiés également, Bjelolasica, Lipovljani, Klana près de Rijeka, Selce

 27   et à Pineta.

 28   Q.  Est-ce que des problèmes se sont posés dans cet endroit ? Je veux dire

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  1   à cause du séjour des réfugiés à Pineta ?

  2   R.  Monsieur Karnavas, un problème s'est posé en effet, un problème plutôt

  3   important pour les réfugiés. C'est un problème qui agaçait les réfugiés et

  4   qui les plaçait dans une situation de stress permanent. Il faut savoir que

  5   la société slovène demandait que l'on déménage les réfugiés de ce centre

  6   touristique pour qu'eux puissent avoir des touristes placés dans ce centre

  7   pendant l'été. Et moi je répondais à ces gens en Slovénie que je ne pouvais

  8   pas le faire, puisque tout simplement je n'avais aucun moyen de reloger ces

  9   gens, si ce n'était à Pineta. Donc je leur demandais de placer ces réfugiés

 10   quelque part en Slovénie et de continuer de les héberger là-bas. Ils ont

 11   dit : Non, pas question. Alors, je leur ai dit : Bon, bien essayons de

 12   penser à quelque chose en vitesse. Ils disaient : Non, pas question. Alors,

 13   je disais : Mais qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Ils disaient :

 14   Déménagez-les. Mais je disais : Je ne peux pas les jeter à la rue. Donc, il

 15   y a eu des problèmes.

 16   J'ajoute finalement --

 17   Q.  Permettez-moi de vous interrompre. Si je vous ai bien compris, c'était

 18   une entreprise privée, donc ce n'était pas la propriété du gouvernement

 19   slovène ?

 20   R.  C'était une société, oui, mais il me semble que c'était une communauté

 21   d'affaires. Ils avaient un grand nombre d'employés qui passaient l'été à

 22   Pineta. Je ne me souviens plus exactement quel était le nom de cette

 23   société.

 24   Q.  Laissons de côté les chefs d'entreprise qui doivent faire des

 25   bénéfices. Est-ce que le gouvernement de Slovénie est intervenu au nom de

 26   cette entreprise pour obtenir du gouvernement croate qu'il expulse les

 27   réfugiés qui étaient installés à Pineta ?

 28   R.  Cela fait 12 ou 13 ans, dans la mesure où j'arrive à me souvenir, cette

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  1   société s'est adressée au gouvernement de la République de Slovénie pour

  2   que ce gouvernement prenne des mesures. J'ai reçu une proposition de la

  3   part du gouvernement slovène m'invitant à résoudre ce problème au profit de

  4   cette société.

  5   Si jamais je ne pouvais pas le faire, de me mettre d'accord d'une

  6   manière ou d'une autre avec cette société et de limiter dans le temps

  7   l'utilisation de Pineta par les réfugiés. En fin de compte, nous avons

  8   signé un contrat avec cette société, mais bien entendu hélas par la suite,

  9   nous n'avons pas pu respecter les termes de cet accord sur le plan des

 10   délais parce que nous n'avions aucun moyen de replacer ces réfugiés

 11   ailleurs. Il n'y avait pas d'autres moyens. Donc nous sommes restés là-bas

 12   pendant quelque temps, je pense que cette question a traîné pendant pas mal

 13   de temps, même après mon départ de l'office, et ça fait cinq ou six ans

 14   uniquement que ça été réglé. Parce que tout simplement ces gens ne

 15   pouvaient pas revenir en Bosnie-Herzégovine. Leurs maisons qui étaient à

 16   Kakanj et à Vares avaient été complètement détruites. Je suis allé les

 17   voir. Ils disaient qu'ils étaient stressés, qu'ils ont vu des événements

 18   terribles, ils ont vu des Moudjahidines, que les soldats de l'ABiH les

 19   tuaient. C'étaient des gens qui avaient subi un stress prononcé. Ils ont

 20   raconté des histoires très dures.

 21   Q.  D'accord.

 22   Prenons le document 1D 00927. Il semblerait si nous examinons la page

 23   2 que cette lettre a été remise à l'office des Réfugiés et des personnes

 24   déplacées du gouvernement de la République de Croatie, c'est du moins ce

 25   que dit le texte.

 26   Est-ce que vous vous souvenez avoir reçu cette lettre envoyée par M.

 27   Jadranko Prlic ?

 28   R.  Si mes souvenirs sont bons, j'ai reçu cette lettre à ce moment-là pour

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  1   information. Et j'étais prêt tout comme s'agissant de toutes les autres

  2   personnes de Bosnie-Herzégovine de recevoir cela si c'était nécessaire, si

  3   c'était utile. Parce que, dans cette lettre, le Dr Prlic dit que la Bosnie-

  4   Herzégovine, c'est-à-dire la République croate d'Herceg-Bosna ne pouvait

  5   pas héberger autant de personnes ou prendre en charge autant de personnes.

  6   Donc, pour ce qui est de ceux qu'ils ne pouvaient pas prendre en charge,

  7   s'ils les envoyaient à nous, nous étions tenus de le faire puisque nous

  8   étions le premier pays où ils demandaient la protection.

  9   Q.  Je vois. Vous souvenez-vous si ces gens sont venus en République de

 10   Croatie, s'ils sont venus, où est-ce qu'ils ont fini par se retrouver ?

 11   R.  Mais c'est précisément les gens dont je viens de parler à l'instant.

 12   Donc, ils étaient arrivés de Kakanj, de Vares et on les a placés et

 13   hébergés à Pineta, à Bijelolasica, à Lipovljani et dans d'autres centres

 14   pour Réfugiés en République de Croatie selon les possibilités, Nous en

 15   avons un à Pula.

 16   Q.  Bien. Nous devons passer au sujet suivant pour ce faire examiner le

 17   document 1D 01320. L'avez-vous trouvé ? C'est, bien sûr, la deuxième page

 18   qui m'intéresse, la première page vous l'indique c'est un extrait du livre

 19   d'Ivo Komsic : "Qui, quand et où, on a divisé la BiH."

 20   Première page, 14 septembre 1993, déclaration conjointe. Si vous

 21   prenez au chiffre romain I, deuxième paragraphe : "Veuillez à ce qu'il y

 22   ait un démantèlement mutuel et inconditionnel de tous les camps de

 23   prisonniers et assurer la libération de tous les prisonniers se trouvant

 24   sur les territoires contrôlés par les armées de BiH et du HVO sur-le-champ

 25   et au plus tard d'ici au 21 septembre 1993 à midi. Et veuillez à ce que ces

 26   personnes soient acceptées et prises en charge."

 27   Dernière page, je le mentionne parce que la question a été posée. On a

 28   demandé pourquoi il y avait participation de certaines personnes. Le voyez-

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  1   vous ici ? Le président Franjo Tudjman avait nommé Mate Granic, vice-

  2   président du gouvernement et ministre des Affaires étrangères de la

  3   République de Croatie comme commissaire. Et nous voyons que M. Silajdzic

  4   est nommé par M. Izetbegovic au nom de la République de Bosnie-Herzégovine.

  5   Aviez-vous connaissance de cette déclaration conjointe qui a été signée le

  6   14 septembre 1993 ?

  7   R.  Oui, j'étais au courant de cette déclaration. Cette déclaration nous a

  8   soulagés puisque nous espérions que conformément à cette déclaration

  9   conjointe finalement le conflit non souhaité entre les deux victimes de

 10   cette guerre soit terminé. Je parle là des Catholiques de Bosnie et des

 11   Musulmans de Bosnie.

 12   Q.  Bien.

 13   Document suivant 1D 01936. Tout à la fin du document à la page 3, on lira

 14   que c'est un document du Dr Haris Silajdzic, mais à la première page -- sur

 15   la première page, on voit votre nom. Il est question d'une visite à Klaka

 16   et Varazdin; vous souvenez-vous de cette visite ?

 17   R.  Je m'en souviens, Monsieur Karnavas. de cette visite, qui plus est, à

 18   plusieurs reprises, avec M. Sevko Omerbasic, le responsable religieux des

 19   Musulmans en Croatie; j'ai rendu visite à des centres de Réfugiés. On parle

 20   de Klaka et de Varazdin ici. A Varazdin, il y avait deux grands centres

 21   d'Accueil de réfugiés où il y avait des Musulmans. Oui, je m'en souviens.

 22   Q.  Bien. Et si on se reporte au premier paragraphe, on voit que ce

 23   document a été établi : "Suite à la demande de déclaration conjointe ou

 24   conformément à la déclaration conjointe du président de la présidence de la

 25   République de Bosnie-Herzégovine et du président de la République de

 26   Croatie."

 27   R.  C'est exact.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] On m'indique qu'il faut lire : "Réfugiés

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  1   musulmans," page 84, lignes 1 et 2 du compte rendu.

  2   Q.  Vous êtes jamais vous rendu à Dretelj vous-même ?

  3   R.  Oui, une fois.

  4   Q.  Quand ?

  5   R.  Je devrais me pencher sur mon agenda, ça devait forcément être en

  6   septembre 1993.

  7   Q.  Est-ce que c'était dans le cadre de la déclaration conjointe ?

  8   R.  Oui. C'était une tentative sérieuse du côté de la République de Croatie

  9   visant à aider les Croates de Bosnie-Herzégovine, et dans le concret, la

 10   Communauté croate d'Herceg-Bosna pour résoudre à titre définitif la

 11   question et les séquelles du conflit. Quand nous avons appris à Zagreb

 12   qu'il y avait à Dretelj des prisonniers militaires, des membres du HVO ou

 13   de l'ABiH, je ne m'en souviens plus au juste. Le président Tudjman a donné

 14   l'ordre à Granic d'aller là-bas tout de suite conformément à la déclaration

 15   conjointe et voir ce qui se passait là-bas. Et étant donné qu'un jour ou

 16   deux avant cela Granic avait envoyé des gens pour faire de la

 17   reconnaissance et voir de quoi il s'agissait et constater s'il s'agissait

 18   véritablement de situations graves.

 19   Ensuite, Granic et moi, nous sommes allés là-bas à Grad pour résoudre la

 20   question. Nous voulions que Dretelj soit fermé à l'instant et que les gens

 21   -- et Granic a dit sur place : "Il faut fermer cela sur-le-champ et tous

 22   ceux qui s'y trouvent seront accueillis par la République de Croatie et

 23   bénéficieront d'un statut de réfugié." Nous avons demandé --

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : -- le temps est terminé.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Je sais, Monsieur le Président. J'avais

 26   demandé -- j'ai demandé une heure de plus puisque j'avais dit d'emblée que

 27   j'avais besoin de cinq heures pour interroger ce témoin. D'autre part, il y

 28   a deux témoins à venir et pour lesquels nous avons initialement demandé

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  1   huit heures et j'ai fait passer ces huit heures à six heures. J'ai diminué

  2   donc le temps dont j'aurais besoin pour ces deux témoins. Et pour que je

  3   puisse terminer, il me faudrait jusqu'à la fin de l'audience d'aujourd'hui

  4   parce que j'ai encore un sujet à évoquer au sujet du retour de certaines

  5   personnes, et le témoin était impliqué dans tout cela.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous savez, les autres Défenses auront deux

  7   heures et le Procureur aura quatre heures. Compte tenu des questions des

  8   Juges et des incidents de procédure qui sont excessivement nombreux, il y a

  9   un risque que le témoin soit obligé de revenir la semaine prochaine. Voilà

 10   tous nos problèmes.

 11   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, si cela peut vous être

 12   utile, je peux dire que la Défense de Brujo Stojic n'a pas de question à

 13   poser au témoin.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je puis vous dire

 15   que la Défense du général Petkovic aura bien quelques questions à poser à

 16   ce témoin, mais ce sera très bref, donc, nous n'allons pas mettre à profit

 17   tout le temps qui nous revient.

 18   Aussi, si cela puit -- si cela peut aider la Défense de

 19   M. Prlic, nous nous en féliciterons.

 20   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour qu'il n'y ait pas

 21   de malentendu, la Défense de M. Praljak aura besoin d'un maximum de 15

 22   minutes d'après les notes que j'ai déjà prises, à moins qu'il n'y ait

 23   quelque chose de nouveau qui survienne pour ce qui est du contre-

 24   interrogatoire.

 25   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] La Défense de M. Coric dit qu'elle

 26   n'aura pas de questions.

 27   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] La Défense de M. Pusic n'a pas

 28   l'intention de contre-interroger ce témoin.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, donc, au maximum, les autres Défenses

  2   auront 20, 25 minutes. Donc, ce qui veut dire, Maître Karnavas, si vous

  3   avez 20 minutes de plus, le Procureur aura quatre heures 20, mais je vais

  4   demander à mes collègues s'ils sont d'accord.

  5   [La Chambre de première instance se concerte] 

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, alors, donc, le temps maintenant que vous

  7   prenez, bien, le Procureur aura le même temps.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Très, très bien, très bien, Monsieur le

  9   Président. Nous ne protestons jamais quand on donne suffisamment de temps à

 10   l'Accusation, quand on lui donne le temps dont elle a besoin. Bien.

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 13   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Maître Karnavas, je sais que nous

 14   sommes pressés par le temps, mais comme je ne veux pas poser une question

 15   au sujet d'un document -- ou plutôt, il y a une question que je

 16   souhaiterais poser au sujet d'un document et vous n'avez pas encore posé de

 17   question vous-même, vous n'avez pas posé la question que je souhaite poser.

 18   Il s'agit, en l'occurrence, du document 1D 1320. C'est un document qui

 19   émane d'Ivo Komsic, c'est le livre. Vous avez parlé de la déclaration

 20   conjointe qui figure dans ce document, une déclaration conjointe de

 21   Izetbegovic et Tudjman, plus précisément, une décision des présidents

 22   Izetbegovic et Tudjman en date du 14 septembre 1993.

 23   La question que j'ai est la suivante : quand je vous ai présenté ce

 24   document, Monsieur Rebic, vous avez soulevé la question des personnes

 25   réfugiées et des déplacés en provenance de Bosnie-Herzégovine, et cetera.

 26   Je sais, d'autre part - et le Dr Rebic l'a mentionné - qu'il n'était pas

 27   présent et il ne semble pas être au nombre des signataires de la

 28   déclaration conjointe. Voyez Hrvoje Sarinic, Zeljko Matic, Miomir Zuzul et

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  1   Hidajet Biscevic du côté croate.

  2   Donc, j'ai la question suivante : je suis un petit peu surpris de

  3   voir que, dans cette déclaration conjointe, il n'est nulle part fait

  4   référence au gouvernement du HVO ou au gouvernement de l'époque en

  5   Herzégovine. Il n'est pas fait référence non plus à la coopération qu'ils

  6   auraient pu apporter au rôle qu'ils auraient joué dans la mise en œuvre de

  7   cette déclaration. Si bien que ma question, Monsieur Rebic, est la suivante

  8   : avez-vous des informations au sujet de la mise en œuvre de cette

  9   déclaration et du rôle qui aurait pu être joué dans son contexte par le

 10   gouvernement de la Herceg-Bosna ? Donc, ce n'était pas le nom officiel à

 11   l'époque, en 1993, mais quoi qu'il en soit, cette instance devait bien

 12   jouer un rôle dans la mise en œuvre de la déclaration.

 13   Voilà ma question : quel est le rôle qui aurait dû normalement, être

 14   joué par le HVO et le gouvernement de l'Herceg-Bosna ? Savez-vous s'ils ont

 15   été impliqués dans la mise en œuvre de cette déclaration ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] De part les fonctions qui étaient les miennes,

 17   Monsieur le Juge, je n'ai pas pris part à tout cela, ce qui fait que je ne

 18   peux pas et je peux encore moins vous donner une réponse exacte et

 19   détaillée. Mon domaine d'intervention était d'une nature tout à fait autre.

 20   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Monsieur Rebic.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] On voit que ceci est conforme au principe

 22   dicté lors de la Conférence de Londres. Je précise pour le compte rendu et

 23   je vous signale également qu'étant donné que l'Accusation avance que la

 24   Croatie a participé à une entreprise criminelle commune, et on peut se

 25   poser la question de la raison de cette implication, on peut examiner avec

 26   intérêt cette déclaration conjointe et son objectif.

 27   Pièce 1D 1936 aussi où il est expliqué que M. Rebic arriverait à

 28   Dretelj dans le cadre de la déclaration conjointe.

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  1   Q.  Maintenant, 1D 029735. On peut constater qu'il s'agit du -- d'un

  2   article de presse en date du 26 septembre 1993. On lit : "Les -- les

  3   prisonniers deviennent des réfugiés."

  4   On vous -- on voit votre nom ici. Est-ce que vous avez connaissance de cet

  5   article de presse et est-ce que ce qui y figure

  6   -- concorde avec les faits ?

  7   R.  Je suis au courant de cet article. Pour ce qui est de sa conformité aux

  8   vérités ou à la réalité des faits, il y a eu une médiation du HCR et du --

  9   de la Croix-Rouge internationale, ce qui a permis aux gens de Dretelj de --

 10   d'être transférés en Croatie. Nous les avons accueillis, nous les avons

 11   hébergés à Korcula sur l'île de Badija. Nous leur avons tout de suite

 12   accordé un statut de réfugié et nous nous sommes comportés à leur égard en

 13   leur qualité de réfugiés.

 14   Q.  Merci. Dernier chapitre de mon interrogatoire principal, il s'agit des

 15   retours. Quelle était la procédure à appliquer s'agissant des réfugiés qui

 16   revenaient de la République de Croatie, qui revenaient en Bosnie-

 17   Herzégovine ? Veuillez être bref, s'il vous plaît, nous expliquer comment

 18   ça se passait.

 19   R.  Ce processus était conforme aux conventions de Genève et avec ce qui

 20   était convenu avec le HCR, à savoir, lorsque les domaines ou les régions en

 21   Croatie, s'agissant de personnes déplacées, ou alors, en Bosnie-Herzégovine

 22   pour ce qui est des réfugiés venaient à être libérées, donc, lorsque ces

 23   régions venaient à être mises à l'écart du danger ou des périls de guerre,

 24   nous faisions revenir ces réfugiés graduellement vers la Bosnie-

 25   Herzégovine. Les instructions de la part de notre office disaient, à

 26   l'intention des offices régionaux et des centres de soins sociaux, que l'on

 27   ne renvoyait que des personnes destinées à se rendre ou appelées à se

 28   rendre vers des régions sûres et vers des maisons habitables, autrement

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  1   dit, les personnes qui ne pouvaient pas revenir ou qui était en péril

  2   quelconque, ou qui était malade, ou les parents dont les enfants étaient

  3   scolarisés et autres personnes dont les conditions étaient connues de ces

  4   bureaux n'avaient pas à quitter. Mais tout le monde n'a pas agi en

  5   conséquence.

  6   Q.  Bien. Mais il n'y avait pas une procédure ou une stratégie qui

  7   consistait allait faire entrer si les conditions n'étaient pas appropriées

  8   ?

  9   R.  Donc, une façon si les conditions n'étaient appropriées, ces gens-là ne

 10   devaient pas être renvoyés chez elle. Alors, souvent il y avait des

 11   personnes qui véritablement avaient un statut de réfugié, et qui en Bosnie-

 12   Herzégovine avaient leurs logis et qui se trouvaient donc leurs maisons qui

 13   se trouvaient dans des régions tout à fait sûres aussi.

 14   Q.  Bien. Avant que je passe au document suivant, dans votre rapport qui

 15   s'intitule : "Mon travail au sein du bureau chargé des Personnes déplacées

 16   et des Réfugiés." Inutile de consulter cette pièce. Je précise simplement

 17   que sa cote c'est 1D 2921. Vous dites à la page 33 : "Le 22 août j'ai

 18   rencontré Urs Betschart, ministre adjoint chargé des réfugiés ainsi que son

 19   associé, Petar Haeller. Ils ont demandé à ce que la Croatie reprenne 300

 20   réfugiés de Croatie et 10 000 réfugiés de Bosnie-Herzégovine parce que ces

 21   personnes étaient titulaires de passeports croates."

 22   Vous souvenez-vous de cette réunion ?

 23   R.  Oui, je m'en souviens. La Suisse avait un certain nombre de réfugiés en

 24   provenance de Croatie et de Bosnie-Herzégovine qu'elle voulait à tout prix

 25   renvoyer vers la République de Croatie, et il s'agissait d'un nombre très

 26   considérable de réfugiés en provenance de Bosnie-Herzégovine, donc, bon

 27   nombre disposait d'un passeport croate. Ils avaient conscience du fait

 28   qu'ils avaient le droit de renvoyer ce type de réfugiés vers la République

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  1   de Croatie, parce que la République de Croatie est censée prendre soin de

  2   ces citoyens, et de ceux à qui elle a distribué des passeports qui soient

  3   de confession musulmane ou catholique ou autres, à savoir qu'il s'agisse de

  4   Bosniens ou de Croates de Bosnie. A partir du moment où ils disposaient

  5   d'un passeport croate, ils devaient être pris en considération et en charge

  6   par la Croatie.

  7   Q.  Une question, cependant : vous avez dit qu'en Allemagne c'était pareil,

  8   mais c'est ce que vous avez dit hier. Ma question est la suivante : est-ce

  9   que les représentants de la Suisse ne se sont jamais demandés -- ne se sont

 10   jamais renseignés pour savoir comment il était possible que ces personnes

 11   retournent en Bosnie-Herzégovine, ou est-ce qu'on laissait à la Croatie le

 12   soin de déterminer dans quelle condition les 10 000 réfugiés de Bosnie,

 13   titulaires de passeport croate, allaient retourner en Bosnie-Herzégovine ?

 14   R.  Ils ont confié ce soin à la République de Croatie. Il fallait qu'elle

 15   veille elle-même à ces personnes soit pour les faire revenir en Bosnie-

 16   Herzégovine soit si ce n'est pas possible des garder en Croatie et prendre

 17   soin d'eux.

 18   Q.  Bien. Un document suivant 1D 01798. Nous allons passer en revue

 19   plusieurs documents assez vite. Lettre à l'ambassade de Bosnie-Herzégovine

 20   à Zagreb et c'est un rapport relatif à la mise en œuvre du programme pour

 21   le retour des réfugiés et des personnes expulsées du Royaume du Danemark

 22   jusqu'en Bosnie-Herzégovine. Est-ce qu'à tout hasard, votre bureau a été

 23   impliqué -- travaillait sur le dossier des réfugiés de Bosnie-Herzégovine

 24   qui revenaient du Danemark ?

 25   R.  Oui. La République de Croatie, peu de temps avant cela, a été visitée

 26   par une ministre, Birte Weiss, qui est une femme ministre au gouvernement

 27   du Danemark. Elle nous a fait savoir que le gouvernement danois avait

 28   décidé concernant le fait que, pendant longtemps, il y avait des réfugiés

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  1   au Danemark; il fallait qu'ils rentrent chez eux. Parmi ces gens-là, il y

  2   en avait qui voulait revenir et qui demandait à ce que l'on parle de

  3   possibilité de retour.

  4   Et avec Mme le ministre Birte Weiss, il a été convenu de la chose parce que

  5   je n'ai pas eu le choix. Quand le gouvernement danois renvoie des réfugiés,

  6   nous sommes censés les recevoir suivant la même procédure. Si ce sont des

  7   ressortissants croates, ils restent en République de Croatie; et ils y sont

  8   hébergés, s'ils sont citoyens de la Bosnie-Herzégovine, ils devaient

  9   continuer leur voyage vers la Bosnie-Herzégovine. S'ils ne pouvaient pas

 10   rentrer chez eux, ils restaient en République de Croatie, et là, ils

 11   bénéficiaient ou recevaient un statut de réfugié pour la période à venir

 12   jusqu'à ce que les conditions ne soient requises pour le retour en Bosnie-

 13   Herzégovine.

 14   Q.  Bien. Le document suivant, 1D 02591, on se souviendra qu'hier, vous

 15   nous avez expliqué qu'à un moment donné - oui, je crois que c'est hier que

 16   vous avez dit cela - qu'à un moment donné, il y a eu une sorte d'accord que

 17   vous avez signé au nom du gouvernement de la République de Croatie, accord

 18   signé avec l'Allemagne.

 19   L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige : il fallait entendre conditions

 20   réunies.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il s'agissait d'un retour organisé

 22   graduel de 35 réfugiés qui étaient partis vers l'Allemagne de Bosnie et de

 23   Croatie et les autorités allemandes. Pour être concret, le ministre de

 24   l'Intérieur, Manfred Kanther, a signé avec moi un protocole d'accord au

 25   sujet de ce retour. Et au sujet de ce protocole, nous avons donné une liste

 26   -- nous y avons joint une liste de villes libres où les citoyens pouvaient

 27   regagner leurs maisons, mais on leur a demandé de garder pendant un certain

 28   temps ceux des réfugiés qui ne pouvaient pas rentrer vers les localités

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  1   dont la liste a également été jointe à ce document parce que ces localités

  2   étaient encore occupées soit en Croatie, voire en Bosnie-Herzégovine, et

  3   là, le retour n'était pas encore possible.

  4   Q.  Bien. Encore trois documents très vite, je vous demande de les

  5   parcourir, et ensuite, j'ai une ou deux questions.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une petite précision. Le témoin a

  7   parlé de 35 réfugiés, si l'on en croit le compte rendu d'audience. Or, si

  8   on regarde le document à la cinquième page, on voit qu'il est question de

  9   35 000 réfugiés.

 10   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit 35 000, mais ça a été mal traduit.

 12   J'ai dit 35 000.

 13   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ligne 14, page 92.

 15   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Là, on lit 35 réfugiés.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Moi, j'ai entendu 35 000 aussi

 18   --

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 21   Q.  D'abord, alors, pièce 1D 02620, 1D 02621 et 1D 02619. Examinons

 22   rapidement ce document, ils sont en rapport avec votre réponse précédente

 23   vous nous aviez dit, si j'ai bien compris, qu'au terme de cet accord,

 24   certains lieux avaient été désignés comme des zones sûres et que les

 25   réfugiés, qui étaient originaires de ces secteurs -- de ces régions,

 26   pouvaient graduellement retourner chez eux ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Pour le compte rendu d'audience, veuillez nous dire ce que sont ces

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  1   documents, 1D 02619, 2620, et 2561 ?

  2   R.  Il s'agit d'une liste de la totalité des sites des agglomérations

  3   envoyée à tous les offices des services régionaux qui étaient longs de 21

  4   et à tous les centres de soins sociaux qui étaient au nombre de plus de

  5   200. Donc, une liste de toutes les localités où le retour pouvait être --

  6   être effectué. Et les offices régionaux et les centres de soins sociaux

  7   devaient s'en tenir à cela, donc, renvoyer chez eux seulement les personnes

  8   déplacées et les réfugiés originaires de ces sites-là qui se trouvent

  9   désormais libérés. Et nous sommes au 25 octobre 1995.

 10   Q.  Monsieur Rebic, merci mille fois d'être venu déposer ici. Merci de

 11   votre franchise, de votre honnêteté, et je vais vous demander de garder la

 12   même attitude quand vous répondrez aux questions du Procureur ou à toute

 13   autre question qu'on pourra vous poser ici à La Haye. Merci.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] J'en ai terminé de mon interrogatoire

 15   principal, Monsieur le Président.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci aussi à vous, Monsieur Karnavas.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Témoin, comme vous le savez, vous

 18   reviendrez donc demain après-midi pour la poursuite des questions, et la

 19   Défense de M. Praljak et du général Petkovic vous poseront donc des

 20   questions. Le général Praljak nous a indiqué qu'ils auraient besoin de 15

 21   minutes et la Défense du général Petkovic, il y aura quelques questions.

 22   Après cette période, le Procureur donc procèdera au contre-interrogatoire

 23   et il aura quatre heures et 20 minutes ou quelque chose comme ça, et M. le

 24   Greffier me fera le décompte.

 25   Comme nous nous retrouverons donc demain, je n'ai besoin de vous dire que

 26   vous n'avez plus à avoir de contacts avec quiconque puisque, maintenant,

 27   vous êtes témoin de la justice. C'est ce que je vous ai indiqué.

 28   Donc, je vous souhaite à tous une bonne soirée. Il est quasiment donc 19

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  1   heures et nous nous retrouverons demain après-midi. Je vous remercie.

  2   --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mercredi 21 mai

  3   2008, à 14 heures 15.

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