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1 Le mardi 27 mai 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
9 les Juges. Bonjour, Mesdames et Messieurs. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-
10 T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
12 Bien, en ce mardi, je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats, M. le
13 Procureur, M. le Témoin, ainsi que toutes les personnes qui nous assistent.
14 Concernant tout d'abord la décision que nous devions rendre dans la mesure
15 où le Procureur nous a fait savoir hier qu'il comptait déposer des
16 écritures, nous avons donc décidé de ne pas rendre la décision ce jour.
17 Nous autorisons, bien entendu, le Procureur a enregistré des écritures s'il
18 y a des écritures et nous rendrons une décision écrite, et non pas orale.
19 Donc, il y aura une décision écrite qui sera rendue.
20 Alors, Monsieur Stringer, vous allez bien enregistré des écritures ou pas ?
21 M. STRINGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Effectivement,
22 je n'étais pas tout à fait certain -- ou nous n'étions pas tout à fait
23 certain à la fin de la journée d'hier si, effectivement, il était
24 nécessaire de le faire. Je vais consulter
25 M. Scott, et je suis tout à fait certain que nous allons pouvoir vous
26 déposer ces écritures aujourd'hui afin que vous puissiez rendre une
27 décision dans les plus bref délais. Mais pour l'instant, nous n'avons
28 absolument aucune écriture à vous soumettre, mais nous pourrons nous y
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1 mettre.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
3 Alors, comme la décision aux fins de clarification n'a pas été rendue, je
4 rappelle à Me Karnavas qu'il lui reste une heure et deux minutes et que,
5 dans cette heure et deux minutes, conformément à la ligne directrice numéro
6 5, le temps c'est interrogatoire principal et questions supplémentaires. Je
7 voudrais pendant quelques secondes passer à huis clos parce que je voudrais
8 dire quelque chose à
9 M. Coric.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
11 le Président.
12 [Audience à huis clos partiel]
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2 [Audience publique]
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Je donne la parole à Me Karnavas.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
5 Messieurs les Juges. Bonjour, Mesdames et Messieurs, et ainsi que toutes
6 les personnes qui se trouvent ici dans ce prétoire et à l'extérieur du
7 prétoire.
8 LE TÉMOIN : ZDRAVKO SANCEVIC [Reprise]
9 [Le témoin répond par l'interprète]
10 Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]
11 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Sancevic.
12 L'INTERPRÈTE : Le témoin opine du chef.
13 M. KARNAVAS : [interprétation]
14 Q. Je vous demanderais, Monsieur, de donner des réponses audibles afin que
15 nous puissions vous entendre, donc, essayons de répondre -- à essayer de
16 répondre de façon succincte bien sûr comme hier. Et maintenant, pour la
17 première question, je souhaiterais que vous preniez le document P 06454. Je
18 vais d'abord --
19 M. KARNAVAS : [interprétation] En fait, c'était la page 54 [comme
20 interprétation] en anglais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
21 Q. -- et en croate, il s'agit du document 01322935; est-ce que vous
22 l'avez, Monsieur ?
23 R. Oui.
24 Q. D'accord. Hier avant la fin de l'audience, vous aviez évoqué le fait
25 que M. Arif Pasalic vous avait dit, au cours de cette Mission de bonne
26 office turque, qu'il vous avait dit qu'ils avaient l'intention d'aller
27 jusqu'à la mer. Et à la page 45, vous dites au deuxième paragraphe vers le
28 milieu -- enfin, après la première phrase, vous dites : "Donc, je pense que
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1 s'agissant de l'organe principal et ces autres situations, il nous faudrait
2 d'une certaine façon être certain que notre politique est une symbiose,
3 qu'elle est symbiotique, pour sauver les gens, et pour sauver les habitants
4 de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire, les Croates, mais au même moment,
5 l'importance stratégique de l'organe principal de Bosnie-Herzégovine
6 puisqu'il s'agit d'une question de la survie des habitants de la Croatie du
7 sud."
8 Et ensuite, nous voyons, un peu plus loin, que l'on parle des extrémistes
9 musulmans. Pourriez-vous nous expliquer, s'il vous plaît, ce que vous
10 pensiez exactement, ce que vous vouliez dire lorsque vous aviez dit que
11 vous pensiez à l'importance stratégique de l'organe principal de Bosnie-
12 Herzégovine ?
13 R. Si on examine la carte géographique, on peut voir très clairement que
14 la partie inférieure de la Croatie elle est assez étroite, et ce
15 territoire-là il représente en fait le territoire de l'ancienne république,
16 indépendante de Dubrovnik. Cela signifie que cet espace étroit soit d'une
17 manière quelle que soit relié avec l'arrière pays. Du point de vue
18 stratégique et du point de vue militaire, ce territoire-là -- cette
19 ceinture étroite elle est indéfendable. Et c'est ainsi que la Croatie a
20 voulu libérer cette région des Serbes, puisque vous savez que la ville de
21 Dubrovnik était encerclée, alors, à ce moment-là, j'ai dû demander au
22 gouvernement bosniaque, M. Akmadzic, l'autorisation pour les troupes
23 croates pour qu'elles puissent se rendre sur ce territoire qui sortait en
24 fait des frontières croates mais, autrement, ce n'était pas faisable, c'est
25 pour cette raison-là que cet espace est très important du point de vue
26 stratégique.
27 J'ai réussi à obtenir cette autorisation, on nous le dit très rarement,
28 mais à chaque fois où l'armée croate devait entrer sur ce territoire, cela
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1 s'est fait conformément à un accord passé avec le gouvernement bosniaque,
2 et de ce point de vue-là et notamment en ce qui concerne cette partie du
3 sud de la Croatie.
4 J'ai reçu l'autorisation de M. Akmadzic, du gouvernement bosniaque,
5 permettant aux troupes croates de pénétrer le territoire bosniaque pour
6 mener depuis le territoire bosniaque les opérations visant à libérer la
7 côte de la ville de Dubrovnik. L'importance de cette zone qu'on appelle
8 "Primorije Dubrovasko" est grande et elle est reflétée dans cette
9 déclaration de M. Pasalic. Et là, bien évidemment, quand je parle de
10 Pasalic, je ne me parle pas du gouvernement bosniaque parce que, nous, nous
11 avions des bonnes relations avec le gouvernement bosniaque, mais vous savez
12 très bien qu'il y a eu des éléments extrêmes qui voulaient scinder ce
13 territoire croate de la Croatie afin d'établir les liens de nature
14 extrémiste entre les éléments extrémistes musulmans bosniaques et quelques
15 autres mormons ou éléments extrémistes fondamentalistes dans le monde.
16 Q. Pour bien comprendre votre explication, j'aimerais qu'on se reporte à
17 la page 39 du même document - pour votre version c'est la page qui se
18 termine par les numéros 929, 929, page 39 pour nous autres - et je vais en
19 donner lecture d'un extrait de cette page. Vous dites que l'ambassadeur de
20 Croatie en Bosnie-Herzégovine, et vous dites : "La constante de notre
21 politique c'est de sauver des vies. Cela a toujours été au cœur de nos
22 préoccupations. Cependant, pour l'instant notre politique a eu plutôt un
23 caractère global.
24 "Cependant, parallèlement à cette constante, notre politique en ce qui
25 concerne la Bosnie-Herzégovine - je parle de la politique de la République
26 de Croatie - et un caractère plutôt global."
27 "Cependant, nous allons de l'avant. Nous pouvons constater que la totalité
28 des problèmes de Bosnie-Herzégovine ne peuvent pas être résolus de manière
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1 globale et distincte parce que la situation est telle que dans chaque
2 enclave on rencontre des problèmes bien spécifiques, et si bien, qu'il
3 convient d'une manière ou d'une autre de procéder à une sorte de
4 classification des différentes situations en Bosnie-Herzégovine."
5 Et ensuite, vous dites : "Il y a le principal organe, la République croate
6 d'Herceg-Bosna, dont on peut penser qu'elle n'a pas de frontière. Ceci
7 c'est établi du point de vue constitutionnel.
8 "Cependant, le secteur de l'Herzégovine de l'ouest - Livno, Duvno, et
9 cetera - connaît une situation qui est différente de celle de la Bosnie
10 centrale et du nord de la Bosnie, dans cette partie assez -- qui est plutôt
11 compacte où il y a beaucoup de Croates, de manière générale si on
12 généralise en Bosnie centrale et en Bosnie du nord, il y a des situations
13 différentes.
14 "Ce que j'appellerais l'organe principal n'oublie pas la République croate
15 d'Herceg-Bosna était auparavant la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Il
16 s'agissait d'un organisme hybride. Il s'agissait avec à la base le HDZ,
17 l'Union démocratique croate, puis le HVO - en fait, ce n'est pas le HDO
18 mais le HVO - qui s'y ajoutait, qui continue sa progression, son évolution.
19 Et nous avons vu ce qui accompagne ce phénomène.
20 "Nous savons tous qu'un gouvernement n'est pas tout à fait mis en
21 place correctement, il y a toute sorte de chose qui se passe, contrebande,
22 criminalité, et cetera. En voilà un exemple. Et je pense que nous les
23 Croates, pour l'essentiel, nous sommes parvenus à mettre en place ces camps
24 de détention."
25 Et vous m'avez dit au cours du récolement que : "Il ne faut pas
26 traduire cette phrase de cette manière, ce n'est pas mettre en place les
27 camps de détention…"
28 Est-ce que vous voulez faire une observation sur ce point ?
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1 R. Oui, certainement. J'aimerais dire que je n'ai jamais prononcé les mots
2 créer les camps de détention, mais j'ai dit : "Démanteler les prisons ou
3 les camps de détention." Je vous demanderais de corriger cela parce qu'il
4 s'agit de toute manière d'une erreur parce que, même du point de vue
5 logique à cette époque-là, ces prisons soit elles étaient déjà démantelées
6 soit en cours de l'être. Et je dispose de beaucoup d'informations portant
7 sur le démantèlement des prisons croates, mais je sais qu'il y a eu à
8 l'époque -- à la même époque des prisons musulmanes qui étaient en train
9 d'être démantelées.
10 Q. Excusez-moi, Monsieur Sancevic, mais il faut vraiment qu'on aille de
11 l'avant. Merci de cette précision et ensuite vous poursuivez, c'est la page
12 suivante, page 41, je continue à lire.
13 Vous dites deuxième paragraphe : "Il y a donc quelque chose d'autre
14 qui est en train de se constituer. Examinons rapidement, brièvement la
15 Bosnie centrale. Là, deux tendances se dessinent, d'abord il y a la
16 résistance dans les enclaves de Zepce. Nous venons de nous y rendre et on
17 constate que ça se manifeste par Vares, et cetera.
18 "Cependant, il existe également la tendance que vous avez mentionnée,
19 M. le président, de s'adapter à la République musulmane.
20 "Les gens qui constatent qu'ils n'ont aucune chance de survivre dans
21 ce secteur, essaient de trouver le moyen d'aller à Komsic, là aussi;
22 l'archevêque est là, ainsi que d'autres variantes de cette tendance -- de
23 ce phénomène.
24 "Le problème est que chacune de ces tendances -- de ces courants, à
25 l'exception de Komsic qui était en contact, vous souhaite plutôt se mettre
26 du côté des Musulmans -- aller du côté des Musulmans.
27 "C'est pourquoi je ne sais pas, je ne suis pas d'accord avec le
28 premier ministre parce que dans les enclaves de Bosnie centrale, les
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1 situations sont très variées. Prenez, par exemple, le Zepce, Usora, Orasje,
2 Brcko, Tuzla, et cetera.
3 "Le problème c'est que tout ceci nous ne contrôlons aucune de ces
4 orientations, de ces tendances. Nous ne les contrôlons malheureusement ces
5 tendances revenant à s'accommoder de la situation."
6 Poursuite de la lecture, deuxième paragraphe : "Il faut étudier la
7 situation dans les enclaves différentes, par exemple, la Zepce. Vous avez
8 dit que c'est la partie serbe qu'il faut établir la protection à Zepce.
9 "Cependant, à Usora, il y a déjà des contacts, certains contacts avec
10 les Musulmans.
11 "Cependant, nous ne pouvons pas par exemple s'agissant des Musulmans
12 et de Zepce, les laisser prendre l'initiative envers les Serbes et les
13 Musulmans. Nous devons prendre contact avec chacune des parties en
14 présence, garantir l'existence de ces enclaves parce que, si le mouvement
15 se continue comme il se détermine actuellement, nous allons perdre ces
16 enclaves."
17 Essayez de nous expliquer ce que vous étiez en train de dire au sujet
18 de ces enclaves. Qu'est-ce que vous étiez en train de dire à ces hommes à
19 qui vous parliez y comprend le président Izetbegovic ? Qu'est-ce que vous
20 essayez de leur dire au sujet des enclaves ?
21 R. En substance, ce que je souhaitais dire lors de cette réunion était que
22 à l'intérieure de la Bosnie-Herzégovine différait d'un endroit à l'autre.
23 Et en ce qui concerne la situation des Croates en Bosnie-Herzégovine, il a
24 fallu faire la distinction entre la Bosnie où il y avait des enclaves et
25 Herzégovine où les territoires étaient plutôt homogènes, plutôt compacts.
26 Et je souhaite souligner que la Communauté croate d'Herceg-Bosna n'a jamais
27 eu de frontières. Elle n'a jamais délimité ses frontières. Cela n'était pas
28 possible par ailleurs parce que, dans une partie de la communauté croate,
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1 la population était mixte, alors que dans l'autre partie, la population
2 était plutôt homogène. Cela signifie que la création même de la Communauté
3 croate d'Herceg-Bosna n'était pas définie -- achevée du point de vue
4 géographique. Et ce que je voulais à ce moment-là au président Tudjman,
5 c'était qu'il fallait prendre chaque situation -- chaque cas particulier et
6 l'étudier en fonction de ces circonstances propres. Il y avait des enclaves
7 où les Croates étaient encerclés des Serbes, d'autres, ils étaient
8 encerclés des Musulmans. Encore d'autres, ils étaient encerclés et des
9 Musulmans et des Serbes. Donc, la situation était très complexe et on ne
10 pourrait pas discuter de tous ces endroits d'une même manière globale. Ce
11 n'était pas la même chose, Tuzla à Orasje ou à Zepce. Donc, il fallait
12 considérer chaque de ces enclaves comme un cas particulier et l'analyser
13 comme tel. Et il fallait avoir un suivi ininterrompu parce que la situation
14 fluctuait en plus sur le terrain.
15 Q. Merci. Nous allons toujours continuer à travailler sur le même
16 document. On va passer à la page 81 parce que, sur la base de ce que vous
17 nous avez expliqué précédemment, et sur la base des informations que vous
18 communiquez, le président Tudjman s'exprime à la page 81; pour ce qui est
19 de la page en croate, c'est celle qui se termine par les chiffres 971.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si vous me le permettez, Maître
21 Karnavas, j'ai une question portant sur le passage dont vous venez de
22 donner lecture, si vous me le permettez.
23 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous en prie.
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez parlé, Monsieur le Témoin,
25 des camps -- de la fermeture des camps. Dans la version de ce document,
26 page 41, vous parlez de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, de cette
27 institution principale, et vous dites qu'il n'y a pratiquement pas de camps
28 parce que ça fonctionnait comme une famille.
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1 Est-ce que vous pourriez développer ce point ? Qu'entendiez-vous par là ?
2 Que voulez-vous dire quand vous dites que ça fonctionnait comme une famille
3 ? Et je pense ou j'imagine que vous parliez de Dretelj, Gabela, Ljubuski,
4 l'Heliodrom, et cetera.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'aimerais tout d'abord vous
6 dire quand un pouvoir disparaît, il s'agissait là-bas d'un pouvoir
7 tyrannique du maréchal Tito et ses acolytes, une sorte d'anarchie est
8 arrivée. Cela s'est reflété en Herzégovine occidentale par le fait que les
9 prisons ont disparu. Il n'y avait plus de prison, et celui qui souhaitait
10 créer un gouvernement, organiser, structurer un pouvoir.
11 Et moi, j'étais le représentant de la République de Croatie pendant
12 des années et ce que je suis en train de vous dire c'est je le dis sur la
13 base de mon expérience propre de ce que j'ai pu voir parce que je ne me
14 suis jamais adressé directement à la Communauté croate d'Herceg-Bosna. J'ai
15 tout simplement observé qu'il n'y avait pas de prisons -- tout simplement
16 pas de prisons, et alors quelqu'un est arrivé à Medjugorje et -- or, disons
17 qu'il a été scandalisé, un militaire - peut-être un mercenaire ou je ne
18 sais pas, oui, oui, oui, un britannique, un mercenaire britannique qui
19 combattait dans les rangs des forces musulmanes - et devant l'ambassade, il
20 a commencé à faire tout un cirque ce qui a fait que j'ai dû m'adresser aux
21 policiers de la Communauté croate d'Herceg-Bosna de l'emmener cette
22 personne.
23 Parce que s'est-il passé ? Ils l'ont conduit au poste de police et comme il
24 n'y avait pas de prisons après avoir passé une heure dans leur bureau, ce
25 monsieur a pu partir. Ils l'ont laissé partir. Voilà, donc, il n'y avait
26 pas de prisons et à un moment donné après tous ces conflits et tout -- tout
27 cela, bien, il a fallu trouver des endroits qui pourraient servir de
28 prisons qui n'existaient où on pouvaient tenir les prisonniers ou les
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1 prisonniers de guerre, ou je ne sais pas quoi. Et cela a créé, et chez les
2 Croates et chez les Musulmans, cela a conduit à la création de ces geôles
3 ou des prisons où à proximité de Mostar en Bosnie centrale. Mais tout ça
4 c'était des prisons improvisées. Mais il faut tenir compte là que tout cela
5 s'est passé comme résultat des conflits entre les éléments extrêmes croates
6 et les éléments extrêmes musulmans et non pas entre tous les Croates et
7 touts les Musulmans.
8 Je ne sais pas, Messieurs les Juges, si mon explication a été suffisamment
9 claire.
10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Moi, je vais en rester là. Nous
11 pourrions continuer encore longtemps mais ce n'est pas notre objectif ici.
12 De toute façon, je ne suis pas en train de vous priver du temps qui vous
13 est imparti, Maître Karnavas.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Je le sais bien, Monsieur le Juge.
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin.
16 M. KARNAVAS : [interprétation]
17 Revenons à ce dont nous parlions, et j'aimerais que l'on se reporte à la
18 page 81 en anglais.
19 Q. Page 971 où qui se termine par les chiffres commençant à 71 dans votre
20 langue. Et ici on voit ce que répond le président Tudjman à votre
21 intervention. Je vais commencer ma lecture au milieu de la page, je cite :
22 "Il me semble qu'on pourrait faire ceci. Voilà ce dont Sancevic a parlé. En
23 dehors de direction de l'Etat, de la direction politique et de la direction
24 militaire de la République croate d'Herceg-Bosna, nous devons en dehors de
25 ça, donc à côté de ça avoir une représentation politique de l'Union de la
26 République de Bosnie-Herzégovine. Je suis en train de penser à ce qui est à
27 l'extérieur. Il ne faut pas se bercer d'illusion, enfin je pense à ce qui
28 est à l'extérieur de la République de Croatie.
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1 "On pourrait appeler ça le Conseil croate de l'Union de la Bosnie-
2 Herzégovine. On pourrait envisager cette instance. Et je pense que cette
3 représentation politique du peuple croate qui se trouve à l'extérieur de la
4 république doit objectivement inclure en dehors du HDZ des gens comme
5 Komsic et/ou autres.
6 "Ceci afin de réfuter les arguments politiquant et les arguments
7 malveillant selon lesquels on ne s'occupe pas des Croates de Sarajevo, de
8 Vares, Zepce, et autres. Il faut qu'on prenne -- on adopte une position sur
9 ce point, qu'on détermine notre position."
10 Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous avez compris la réponse du
11 président Tudjman à votre intervention ?
12 R. Oui. Au moment où on parle la proposition de Vance-Owen a échoué. Et
13 ensuite, une modification a été apportée à ce plan et la proposition ou le
14 projet d'Owen-Stoltenberg, de ce qui est convenu à appeler la proposition
15 d'Owen-Stoltenberg a été créée. Parce que si l'on parle de l'Union de
16 Bosnie-Herzégovine, cela en fait c'est le plan d'Owen-Stoltenberg. Mais
17 s'ils n'ont pas réussi à s'assurer le soutien des Serbes et d'une grande
18 partie de Musulmans -- pour le plan Vance-Owen, alors, nous passons donc
19 maintenant dans une nouvelle phase où on envisage la possibilité d'une
20 union, d'une fédération où il existerait trois unités fédérées ou les trois
21 républiques, on peut appeler -- c'est une question de terminologie
22 purement. Donc, le président Tudjman a dit puisqu'on se trouve maintenant
23 dans une nouvelle situation et pour qu'on envisage la manière dont nous
24 allons organiser cette nouvelle situation puisqu'on a là trois unités ou
25 trois entités qu'on appelle même des républiques, alors que nous sommes
26 toujours en train de chercher une option à caractère fédéral.
27 Alors, ce qui est clair c'est qu'on se disait toujours que la future
28 république serbe devait s'adapter à la fédération -- allez-y.
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1 Q. Je vais vous interrompre. Le président Tudjman parle d'un conseil
2 croate et il évoque Sarajevo, Zepce, Vares, et cetera. En quelques mots,
3 dites-nous pourquoi le président Tudjman fait cette proposition vu ce que
4 vous aviez dit précédemment. Parce que lui, il dit : "Oui, Sancevic a parlé
5 de cette question ici." Et vous précédemment vous aviez expliqué qu'il y
6 avait trois cas de figure différents, trois situations différentes en
7 Bosnie-Herzégovine.
8 Or, pourquoi le président Tudjman, à ce moment-là, recommande-t-il la
9 création d'un conseil croate ? Pourquoi est-ce qu'il parle de localités
10 telles que Zepce, Sarajevo, et pourquoi est-ce qu'il parle de personnes
11 comme Komsic ? Très rapidement, s'il vous plaît, je n'ai pas beaucoup de
12 temps.
13 R. Oui, oui. Je peux vous expliquer ça parfaitement bien. Le
14 président Tudjman en réalité en exposant ses idées portant sur le soutien
15 des plans de la communauté internationale telle que Vance-Owen et les
16 autres, il a tenu également en compte la situation des Croates en Bosnie-
17 Herzégovine. Il y avait là un groupe d'intellectuels croates très puissant
18 à Sarajevo parmi lesquels ce
19 M. Komsic, alors, au nom de ce groupe, M. Komsic est allé voir le président
20 Tudjman et il lui a demandé de prendre en compte également une sorte
21 d'opposition croate qui existait l'opposition au HDZ en Bosnie-Herzégovine,
22 et c'est à ce moment-là qu'il m'a recommandé de prendre contact avec ce
23 groupe et d'essayer de voir quels sont les problèmes auxquels ce groupe-là
24 était confronté. Parce que je vous ai dit chaque enclave avait ses propres
25 problèmes, et de la même manière, la ville de Sarajevo avait ses propres
26 problèmes. Alors, le président souhaitait que, moi, en tant qu'ambassadeur,
27 prenne contact avec ces personnes à Sarajevo, et je n'étais pas tout le
28 temps à Sarajevo mais je m'y rendais souvent, donc, il fallait que les vois
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1 pour voir ce qu'ils souhaitaient exactement.
2 Q. Une fois encore, je vous interromps parce que vous ne répondez pas à ma
3 question et le temps dont je dispose est extrêmement limité. Je répète :
4 pourquoi le président Tudjman propose-t-il la mise en place d'un conseil
5 croate, sachant qu'il a parlé de Komsic -- les Croates, de Sarajevo, de
6 Vares, Zepce, et cetera, il ne s'intéresse pas uniquement donc aux gens
7 d'Herzégovine. Essayez de nous donner une explication en une minute; sinon,
8 je passe à autre chose.
9 R. Je souligne sans cesse la différence entre la situation des Croates en
10 Bosnie et la situation des Croates en Herzégovine. Et le Dr Tudjman
11 essayait toujours d'effectuer une sorte de symbiose, de parvenir à un
12 positionnement unique à l'égard des uns et des autres parce qu'il avait des
13 intérêts qui concernaient les Croates en Herzégovine et les Croates en
14 Bosnie, en Bosnie centrale, en Bosnie du nord ou dans les enclaves, lui, il
15 essayait de trouver une position unique.
16 Q. Merci. Nous allons passer à la pièce 1D 02911 -- 1D 02911. Transcript
17 présidentiel du 13 février 1994 --
18 M. STRINGER : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de 2991 --
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, 2911.
20 Et je souhaiterais donner une précision pour le compte rendu d'audience
21 suite à une intervention de l'Accusation du 12 mai 2008 -- enfin, le 12 mai
22 2008. Nous avons déposé une liste de nos pièces à conviction, ainsi qu'un
23 transcript présidentiel, P 06454, où le nom de l'ambassadeur Sancevic est
24 surligné, et l'Accusation s'opposait à certains des passages -- ou plutôt,
25 l'Accusation hier a dit qu'il y a certaines choses que nous présentions,
26 des éléments que nous présentions alors que nous les avions pas prévenus
27 précédemment. Vous voyez que dès cette date-là, nous avions fourni leur
28 transcript présidentiel.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je peux répondre si
2 la Chambre souhaite que nous continuons enfoncer ces portes ouvertes,
3 enfin, parce que je pense que la Chambre de première instance s'est déjà
4 prononcée, il s'agit ici de la question des éléments qui sortent du champ
5 des résumés, aucune note de récolement nous a été fournie. Je ne veux pas
6 me lancer dans une discussion. Je pense que le compte rendu parle de lui-
7 même.
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Je donne cette précision parce que
9 l'Accusation nous a dit : "Oui, nous avons beaucoup de documents on ne peut
10 pas tout consulter, tout passer en revue, or, tout le monde est censé être
11 préparé." Comme je l'ai dit hier, ce sont eux qui ont préparé l'acte
12 d'accusation, et nous utilisons leur document, et affirmer que nous ne nous
13 comportons pas de manière correcte, c'est faux. C'est pourquoi je donne
14 cette information. Il ne faut pas que l'Accusation nous déverse toutes ces
15 informations sur nous, et puis -- et ces éléments et ces documents sur
16 nous, puis quand nous, nous -- et nous en servir qu'on nous accuse de mal
17 faire.
18 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le souhaitez
19 je peux répondre; sinon --
20 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
21 M. STRINGER : [interprétation] Je pense qu'il n'est pas utile que quiconque
22 se présente comme étant -- comme ayant l'avantage moral sur l'autre. Tout
23 ce qui concerne la réunion avec le général Pasalic ne nous a pas été
24 communiqué à l'avance. Dans ce transcript, on trouve énormément
25 d'informations et on ne peut pas s'attendre à ce que les parties
26 recherchent une aiguille dans une botte de foin, et ceci, conformément aux
27 décisions de la Chambre de première instance.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est un petit peu fort parce que c'est nous
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1 -- c'est sur nous qu'on a -- c'est à nous qu'on a donné cette fameuse botte
2 de foin. Donc, je trouve ça un petit peu fort.
3 M. STRINGER : [interprétation] Nous ne leur avons remis tout au long de la
4 présentation de nos moyens nos notes de récolement même si ces notes de
5 récolement sont fournies parfois le week-end.
6 Me Karnavas avait parfaitement comment me contacter ce week-end. Donc, il a
7 essayé de nous prendre par surprise, il essaie de présenter les choses
8 différemment de ce qu'elles sont véritablement.
9 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, vous allez évoquer le transcript
11 présidentiel 2911. Je ne sais pas la question que vous allez poser au
12 témoin. Attendons de voir. Donc, posez votre question, après, on y verra
13 clair. Le Procureur par anticipation semble penser que vous allez aborder
14 des questions qui n'étaient pas dans le résumé. Moi, j'en sais rien. Donc,
15 je vous écoute, et après, on verra.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Page 53, on voit que, vers le bas de la page, on voit le nom de notre
18 témoin, M. Sancevic; et il y a deux semaines nous avons indiqué que nous
19 utiliserions ce compte rendu, et qu'il était un des participants.
20 Q. Ici, vous dites, je cite : "Chaque fois que nous parlons de ces
21 problèmes, on tombe toujours sur Salajdzic. Et tout ce que dit Silajdzic --
22 " 501. Excusez-moi. 501. Donc, c'est les trois chiffres de la fin -- je
23 suis désolé, ces trois derniers du numéro ERN. Je suis désolé de ne pas
24 vous avoir donné le numéro de façon plus précise. Alors 501, s'il vous
25 plaît. Vous verrez votre nom.
26 Vous dites : "Tout ce que dit Silajdzic concernant ces deux républiques
27 revient à l'idée que la Croatie devrait porter tous les Musulmans orientés
28 de façon occidentale sur leurs épaules parce que vous trouvez que ceci est
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1 correct. Toutefois, nous avons mentionné aujourd'hui qu'il y a des
2 factions. Il y a la faction de Ganic; il y a la faction des Moudjahidines,
3 et cetera. L'un des objectifs de cette faction. Les Musulmans en Bosnie-
4 Herzégovine ont deux options."
5 Et donc, je vais en fait passer maintenant à un autre passage, je vais
6 passer à la page 57 avant de vous poser ma question.
7 Alors, si vous prenez, s'il vous plaît, la page 57, il faut sauter quelques
8 pages, et que vous preniez la page 505, donc, prenez la page 505 dans votre
9 transcript vous verrez qu'à la dernière, toute dernière phrase vous dites :
10 "Et ensuite, le mufti de Mostar a prononcé un discours à Berlin à
11 l'occasion d'une réunion des Moudjahidines et il a dit que le moment est
12 venu pour que l'Islam conquière l'Europe."
13 Président Tudjman vous a demandé : "Est-ce que c'est maintenant récemment
14 ?"
15 Et vous avez dit : "Il y a un an à peine."
16 Et ensuite, plus loin dans le passage, vous parlez d'Izetbegovic et vous
17 dites qu'Izetbegovic voudrait aller jusqu'à la mer et que ce n'est pas pour
18 que les Musulmans nagent ou déplacent les biens, nous en avons parlé hier.
19 Et à la page 58, je vais vous donner lecture de la page qui suit, vous
20 dites - et c'est vers le milieu du paragraphe - vous dites : "Je crois que,
21 s'agissant du contexte général de tout ceci, si vous appliquez ceci et les
22 suggestions que vous avez faites à Bonn - trois républiques, une frontière
23 - et ce que nous avons entendu de ces Musulmans, il semblerait, à ce
24 moment-là, beaucoup plus acceptable au monde occidental une fois qu'ils
25 aient compris qu'une différente et terrible possibilité pourrait devenir la
26 réalité. Nous ne sommes pas des menaces mais nous ne faisons qu'expliquer
27 les choses."
28 Ensuite, vous poursuivez, mais je vais sauter.
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1 Et ensuite, le président vous dit : "Cependant, Zdravko, lorsqu'une union
2 de deux républiques avec des frontières clairement définies et est-ce que
3 ceci serait une solution qui vous conviendrait plus ?"
4 Et vous dites : "Oui, si nous le pouvons au moins nous -- d'une certaine
5 façon nous tourner vers l'occident et cette question de Sarajevo en prenant
6 votre suggestion comme point de départ, ceci sont les premières étapes,
7 comme vous le savez, il faut également établir une frontière indépendamment
8 du fait qu'il s'agisse d'une frontière solide ou souple."
9 Pourriez-vous nous dire sur quoi portait exactement cette conversation ?
10 R. Tout d'abord, d'une manière générale, il y avait un désir
11 -- une volonté de la part de la communauté internationale également que ce
12 groupe de Musulmans qui de toute façon était orienté vers l'Europe, qui
13 était pro européen, c'est-à-dire qu'ils adoptaient des éléments européens,
14 qu'il fallait donc faire ce qu'il fallait pour qu'ils s'intègrent le plus
15 facilement en Europe. A la différence de cette autre fraction ou tendance
16 que je qualifierais d'extrémiste qui de toute façon ne souhaitait pas que
17 les Musulmans pro européens intègrent l'Europe mais plutôt d'adopter une
18 position agressive. Comme M. Smajlic l'a déclaré d'ailleurs en lien, en
19 enregistrement vidéo où il annonce la conquête de l'Europe par l'Islam.
20 Donc, c'est une position clairement extrémiste. Alors, il y a toujours eu
21 des Musulmans qui étaient pro européens et d'autres qui étaient
22 extrémistes. Mais les extrémistes, ils n'existaient pas en Bosnie depuis
23 toujours seulement plus tard. C'est à partir du moment où le maréchal Tito
24 s'est positionné en tant qu'un des leaders du tiers monde, qu'il a permis à
25 ces Musulmans, à un grand nombre de Musulmans de se rendre à l'étranger, à
26 des universités étrangères islamiques, où ils ont pu se nourrir de cette
27 idéologie panislamiste et revenir en Bosnie tel que M. --
28 Q. [aucune interprétation]
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1 R. [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je puis simplement vous poser une
3 toute petite question. Vous avez dit récemment. Qu'est-ce que vous vouliez
4 dire ?
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Que vous voulez dire par "récemment" ? Dans
6 quel contexte ? Si vous pourriez peut-être nous indiquer la page où
7 l'endroit précis.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, à la page 20, deuxième ligne,
9 on dit ici : "C'était seulement lorsque le maréchal Tito est devenu le
10 président, ce n'est que récemment que ce groupe est apparu, 22, 23, les
11 extrémistes, les extrémistes musulmans."
12 Vous faisiez référence à quoi exactement lorsque vous avez dit,
13 "récemment" ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Récemment dans le sens que cette
15 tendance pro européenne parmi les Musulmans a existé depuis la monarchie
16 autrichienne, alors que cette -- donc, depuis 1878, alors que les tendances
17 extrémistes ont apparu à partir du moment où les imans -- les Musulmans en
18 Bosnie ont reçu l'autorisation de se rendre à des universités ailleurs dans
19 le monde. Cela a été fait par le maréchal Tito. Donc, cela leur a permis
20 d'étudier ces idées extrémistes et c'était le cas de Smajkic.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc, il y a plusieurs années
22 de cela avant 1991, de toute façon, n'est-ce pas ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Sans aucun doute.
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
25 M. KARNAVAS : [interprétation]
26 Q. Bien. Lorsqu'on a fait cette référence aux deux républiques, est-ce que
27 c'est une référence qui a trait à la Fédération, donc une fédération avec
28 la Republika Srpska, les deux entités contrairement à ce qui existait
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1 auparavant les trois républiques ?
2 M. STRINGER : [interprétation] Objection, Monsieur le Président --
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Donc, retrait -- je retire ma question. Si
4 on a lu le compte rendu d'audience, il est tout à fait clair sur quoi porte
5 cette discussion, Monsieur le Président.
6 Q. Qu'en est-il de Bonn ? On fait ici référence à la Conférence de Bonn;
7 pourriez-vous nous en parler ? Est-ce que vous pourriez nous dire
8 brièvement quelque chose là-dessus ? Le passage dont je vous ai donné
9 lecture évoque le fait que le président s'était rendu à Bonn.
10 R. Oui, c'est exact. Après un certain moment, il s'est rendu à Bonn pour
11 s'entretenir avec M. Kohl.
12 Q. Et sur la base du fait que vous étiez l'un, vous étiez ambassadeur en
13 Bosnie-Herzégovine, vous faisiez partie du cercle interne; est-ce que vous
14 savez de quoi il a été question à Bonn ? Nous avons -- enfin, j'ai donné
15 lecture d'une partie du compte rendu d'audience -- de référence à cela.
16 R. Sans aucun doute, je n'étais pas présent là-bas à Bonn, mais je sais
17 d'après les commentaires que j'ai pu entendre qu'à Bonn, il a été souligné
18 le fait qu'une partie des Musulmans en Bosnie-Herzégovine existait encore.
19 Encore un certain nombre de Musulmans pro européens, et qu'il fallait faire
20 ce qu'il faut pour que ces Musulmans-là puissent à l'avenir accéder à la
21 future Union européenne. Tout tournait autour de cette question-là, c'est-
22 à-dire que tous les Musulmans ne sont pas les mêmes, qu'on ne peut pas les
23 traiter comme un bloc homogène, donc, c'est pour cette raison-là que je le
24 répète, si ici quand on parle des Croates, de quels Croates. Quand on parle
25 de Musulmans, de quels Musulmans on parle; de Serbes, de quels Serbes on
26 parle. Moi, je dis les grands Serbes, quand je parle de ceux qui
27 soutiennent les idées extrémistes. On ne peut pas utiliser ces
28 qualifications, ces appellations et les traiter tous de la même manière.
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1 Q. D'accord, merci. Je souhaiterais laisser de côté les transcripts
2 présidentiels et je souhaiterais aborder quelques documents mais très
3 rapidement. Les documents 1D 02394, je répète,
4 1D 02394.
5 Est-ce que vous avez retrouvé le document, Monsieur ?
6 R. 2394 ?
7 Q. Oui, 2394, voilà. Nous voyons ici que ce document est daté du 16
8 septembre 1993. Le document est envoyé au président du Mesihat, de la
9 communauté islamique de la République de Croatie et la République de
10 Slovénie. Je ne sais pas si vous voyez ceci et au bas de la page, enfin,
11 deuxième page, la signature qu'elle comporte est la signature du Dr Muhamed
12 Alic. Alors, prenons le premier paragraphe : "Le 15 septembre 1993, le MVS
13 -- ou plutôt, les représentants du MDS, le Dr Ismet Hadziosmanovic ainsi
14 que le Dr Muhamed Alic ont rendu visite à l'évêque à sa résidence pour
15 parler de ce qui arrivera aux frères et aux sœurs à Konjic."
16 R. Oui.
17 Q. Hier, nous avons examiné un transcript pour le compte rendu d'audience,
18 il s'agit de 1D 02930. Il n'est pas nécessaire pour vous de consulter mais
19 c'est le transcript que nous avons hier. Gojko Susak disait à Alija
20 Izetbegovic : "Qu'il avait un avion plein de marchandises qui étaient à
21 Zagreb et à moins que la situation à Konjic ne soit résolue, il n'allait
22 pas obtenir une seule balle."
23 Et c'est à la page 26 du compte rendu d'audience. Et c'était un
24 transcript du 27 mars 1993.
25 Maintenant, lorsque Gojko Susak parlait de la situation à Konjic en mars
26 1993, faisait-il référence à ce que nous voyons ici s'agissant d'une
27 situation qui était résolue ou pas encore résolue en fait en date du 16
28 septembre 1993, en parlant des sœurs et des frères qui étaient gardés ou
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1 tenus par les Musulmans, les dirigeants musulmans ?
2 R. Ce sont les musulmans extrémistes qui les tenaient. Justement ce
3 document vous montre qu'il existe des musulmans proeuropéens comme le Dr
4 Muhamed Alic ou Ismet Hadziosmanovic que je connais personnellement.
5 Et vous avez aussi ces Musulmans proeuropéens qui interviennent pour que
6 l'on libère ces prêtres et ces nones, et cetera. Donc, je souhaite vraiment
7 que l'on fasse la différence entre ces Musulmans progressistes, Dr Ismet
8 Hadziosmanovic; Dr Muhamed Alic. Même à l'époque, le président Tudjman
9 proposait qu'ils fassent partie du gouvernement de l'Herceg-Bosna
10 d'ailleurs.
11 Allez-y. Voilà.
12 Q. Excusez-moi de vous interrompre simplement pour m'assurer pour
13 confirmer donc qu'au mois de mars, vous avez Gojko Susak il parlait au
14 président Izetbegovic concernant la situation à Konjic. Et nous avons ici
15 une lettre du 16 septembre 1995 [comme interprété] qui porte sur les sœurs
16 et les frères de Konjic.
17 Parle-t-on de la même situation ?
18 R. Oui, c'est exactement la même situation.
19 Q. Fort bien. Merci. Ensuite passons au document qui suit
20 1D 02275.
21 R. Je l'ai retrouvé, 0275.
22 Q. Le document précédent est certainement un document qui intéressera les
23 Juges de la Chambre et il s'agira du dernier paragraphe où l'on parle de
24 Vlado Maric, un ingénieur qui est directeur technique de Jablanica et du
25 service hydraulique. Je parle seulement de ceci parce qu'on a évoqué la
26 question relative à l'eau avec un témoin précédent.
27 Alors, je voudrais attirer votre attention sur le document
28 1D 02275. Il s'agit d'une déclaration quant à l'application de l'accord de
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1 Washington. Voyez-vous ceci ? Est-ce que vous l'avez trouvé ?
2 R. 2275 ? Oui. Oui.
3 Q. Alors, merci. Donc, au bas de la page, troisième paragraphe à partir du
4 bas, on dit : "En exprimant leur soutien irrévocable quant à la mise en
5 œuvre de l'accord de Washington sur la création de la fédération ainsi que
6 le lien confédéral avec la République de Croatie."
7 Je m'arrête ici. Hier nous avons parlé d'une confédération. S'agit-il du
8 même concept que nous avons abordé hier, le concept que nous avons soulevé
9 hier ?
10 R. [aucune interprétation]
11 Q. D'accord. Merci. Très bien. Merci. Prenez maintenant la deuxième page
12 du même document vers le bas on peut lire : "Confirmant leurs intérêts
13 quant à la mise en œuvre urgent des principes ci haut mentionnés de la
14 déclaration.
15 "L'accord porte sur l'élargissement et la coopération, la défense sur
16 la base d'un accord et d'une amitié et la coopération entre la République
17 de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine du 21 juillet 1992."
18 Je voulais souligner ceci.
19 Nous parlons ici maintenant du mois de juillet, le 21 juillet 1992 ou du 22
20 juillet 1992.
21 Et nous voyons ici qu'en application de l'accord de Washington, on fait
22 référence ici à l'accord sur l'amitié et la coopération qui remonte au 21
23 juillet 1992; c'est bien c'est ce que l'on voie.
24 M. STRINGER : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Question
25 directrice.
26 M. KARNAVAS : [interprétation]
27 Q. Quel était le but de ceci ?
28 R. Pendant toute la période entre 1991 et 1995, vous avez cette idée qui
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1 est présente à savoir qu'il faut qu'il y ait davantage de coopération, plus
2 de proximité entre la République de Croatie et la République de Bosnie-
3 Herzégovine. Les accords de Washington ont été un peu l'apothèse [phon] --
4 ou l'apothéose de tous ces efforts alors qu'au tout début vous avez cet
5 accord sur l'amitié et coopération auxquels j'ai soustrait dès le début et
6 -- je l'ai toujours respecté et tout ceci jusqu'à la culmination avec les
7 accords de Washington. Avec les accords de Washington, j'ai eu un nouveau
8 document valable qui symbolisait cette amitié et la coopération et la
9 proximité entre la République de Croatie et la République de Bosnie-
10 Herzégovine.
11 Q. Bien. Avant de prendre le document suivant, je voudrais évoquer quelque
12 chose que nous avons dit hier. Vous nous avez dit que vous avez pris part à
13 plusieurs réunions -- auxquelles était présent le président Tudjman, soit à
14 des réunions en tête-à-tête, car il présidait plusieurs groupes, n'est-ce
15 pas ?
16 R. Exact.
17 Q. Et si j'ai bien compris vous avez également eu plusieurs occasions
18 d'entendre le Dr Tudjman alors qu'il prononçait des discours, n'est-ce pas
19 ?
20 R. Oui. J'ai écouté tous les discours du président Tudjman. Il y en avait
21 qui concernait la Bosnie-Herzégovine, et ils étaient au nombre de 38, et
22 ceci dans un seul livre de Tudjman intitulé : "On sait comment."
23 Q. -- permettez-moi de vous poser des questions, en fait, nous n'avons pas
24 suffisamment de temps pour terminer. Bien. Alors, vous avez écrit un livre,
25 n'est-ce pas ?
26 R. [aucune interprétation]
27 Q. En quelle année ?
28 R. C'était en 1998.
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1 Q. Bien.
2 Alors, prenons le document 1D 02339.
3 On peut voir ici le titre : "Notes de l'ambassadeur. La politique
4 croate de la BiH."
5 Est-ce que c'est votre livre ?
6 R. Oui, cela vient de mon livre.
7 Q. D'accord. Merci. Je ne vais pas maintenant parler du livre puisque nous
8 pouvons tous le lire, mais je souhaiterais appeler votre attention sur une
9 page en particulier. En fait, il n'y a pas de numéro de page --
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais le numéro ce serait 1D 52-0609. Je
11 répète 1D 52-0609.
12 Q. Et pour vous, Monsieur, il s'agira de la page 0400.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous, je vous
14 prie, nous venir en aide.
15 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
16 M. KARNAVAS : [interprétation]
17 Q. 400.
18 R. [aucune interprétation]
19 Q. Très bien. Alors, dans ce chapitre, ici nous pouvons voir que vous
20 faites références à deux discours en particulier qui étaient prononcés par
21 le Dr Tudjman, et vous dites vers la fin : "Lorsque nous avons entendu ce
22 discours, il y a plusieurs discours sur la politique nationale de la
23 Croatie prononcés par le Dr Tudjman envers la BiH, je m'en suis servi pour
24 faire une synthèse concernant et pour prendre les éléments principaux
25 s'agissant d'une politique nationale croate, mais sans les énumérer car
26 certains éléments étaient plus importants, mais tout ceci faisait en fait
27 une constante, était une constante concernant la politique nationale croate
28 envers la BiH."
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1 Monsieur, Monsieur, nous verrons ici que nous pouvons voir que l'on parle :
2 "D'une préservation de la BiH comme un Etat indépendant, et amical."
3 Est-ce que c'est que vous aviez compris ?
4 R. Pendant toute cette période, et ce n'était pas seulement le président
5 Tudjman c'était la politique de l'Etat croate en général - puisqu'il faut
6 dire que la politique de l'Etat croate par rapport à la Bosnie-Herzégovine
7 même si le président de la république a eu beaucoup d'influence - il faut
8 dire que cette politique était -- découlait beaucoup d'autres éléments
9 facteurs, et la question de la préservation de Bosnie-Herzégovine, en tant
10 qu'Etat indépendant, n'a jamais été mise en question parce que c'était dans
11 l'intérêt aussi bien du peuple croate que du gouvernement croate, et c'est
12 conformément à cela que j'ai agi.
13 Q. D'accord. Vous parlez d'une organisation fédérale de l'importance de
14 l'existence d'une organisation fédérale de l'égalité des trois nations
15 constitutives par le biais d'une mise en place d'une organisation fédérale.
16 R. Est-ce que vous me permettez de répondre brièvement ?
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. Parce que l'organisation fédérale vient de M. Ahtissari de 1991.
19 Q. [aucune interprétation]
20 R. Et depuis le Groupe de contact Cutileiro, Vance-Owen, Owen-Stoltenberg,
21 tous les accords de Washington, tout cela oeuvrait dans le sens d'une
22 fédération.
23 Q. D'accord. Et un peu plus bas vous parlez : "D'une alliance
24 confédérative de la République de Croatie avec une BiH fédéralisée, ou le
25 territoire de la BiH, et une distribution possible des territoires de la
26 BiH en entités fédérales, provinces, cantons, et cetera, avec des attributs
27 nationaux."
28 C'était votre position à l'époque, n'est-ce pas ?
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1 R. [aucune interprétation]
2 Q. Et ensuite, bien sûr, personnes nous en avons parlé hier, et je crois
3 que c'est quelque chose qui est ressorti d'une question, vous dites un peu
4 plus bas : "La protection des municipalités, des enclaves de population
5 minoritaire dans une entité fédérale avec des attributs d'une nation
6 minoritaire et d'une entité fédérale par le biais d'une redéfinition des
7 territoires et des municipalités par l'établissement d'une autogestion
8 locale qui permettrait à la population et à la municipalité ou à l'enclave
9 d'assurer leurs droits."
10 C'est ce que vous vouliez dire, n'est-ce pas, lorsque vos réponses à une
11 question posée par le Juge Trechsel hier, n'est-ce
12 pas ? Je crois hier.
13 R. Oui.
14 Q. En fait, je vous ai posé ces questions car outre le fait d'avoir pris
15 part aux réunions le Dr Tudjman était présent, vous avez fait références à
16 ses discours et à ce qu'il dit. Donc, j'aimerais brièvement attirer votre
17 attention sur la pièce 1D 00401, et j'aimerais vous poser une ou deux
18 questions sur cette question. Donc, la pièce 1D 0401.
19 Nous pouvons voir qu'il s'agit d'un document qui provient de Franjo
20 Tudjman. Nationalisme dans l'Europe contemporaine. Est-ce que vous avez
21 pris connaissance ou est-ce que vous vous êtes inspiré de ses œuvres avant
22 le conflit en Yougoslavie ?
23 R. Sans aucun doute. Voyez-vous en ce qui concerne la vision que l'on
24 avait sur la Bosnie-Herzégovine sa préservation et la coopération de la
25 Bosnie-Herzégovine avec la République de Croatie, et bien, moi, je
26 respectais cette politique donc j'étais conscient bien avant parce que
27 voyez-vous le président Tudjman, il avait lu le livre écrit par mon père;
28 moi, je discutais avec lui directement. Parfois nous avons discuté période
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1 plusieurs heures même, en invoquant tout ce problème. Je sais exactement
2 quelles étaient ses intentions et quelle était la politique de l'Etat
3 croate par rapport à la Bosnie-Herzégovine entre 1991 et 1995.
4 Q. Monsieur l'Ambassadeur, la question que je vous posais était la
5 suivante : vous êtes-vous inspiré des œuvres de M. Tudjman avant les
6 événements; est-ce que vous en êtes servi de ce qu'il avait écrit pour
7 comprendre ses intentions ? C'est pourquoi je vous demande si vous vous
8 êtes référé à cela ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce qu'il s'agit d'une des œuvres auquel vous vous seriez référé :
11 "Nationalisme dans l'Europe contemporaine" ?
12 R. Oui.
13 Q. Bien. Document suivant, 1D 02887, je suis désolé d'avoir à vous presser
14 de la sorte, mais nous sommes soumis à des limites de temps. Et j'ai une
15 seule question à vous poser. Nous avons ici l'ouvrage de M. Tudjman, 1D
16 02887, qui a été publié en 1993. "Le HDZ dans la lutte pour l'indépendance
17 de la Croatie."
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Je sais que je suis en train d'arriver à la
19 fin du temps qui m'est imparti, mais je voudrais vous demander de pouvoir
20 disposer jusqu'à 9 heures 30, jusqu'à la fin du volet d'audience.
21 Q. [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous voulez sans doute dire 10
23 heures 30, peut-être.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, 10 heures 30, c'est tout à fait.
25 Q. [aucune interprétation]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous disposez du temps que vous voulez. Si vous
27 voulez encore passer des heures, il n'y a aucun problème, simplement vous
28 avez une allocation générale pour tous vos témoins. C'est à vous de faire
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1 le dispatching du temps.
2 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Moi, je dois vous dire que je ne
4 suis pas tout à fait d'accord avec cela. On vous avait donné quatre heures.
5 Et moi, je vous donnerais donc jusqu'à 10 heures 30.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. Tout cela ce sont des sciences qui ne
7 sont peu exactes.
8 Q. 1D 02887. Est-ce que vous connaissez ce livre de M. Tudjman ? 1D 02887.
9 R. J'ai le document sous les yeux.
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. Reconnaissez-vous ce document ?
12 R. Oui, je le reconnais.
13 Q. Si j'ai bien compris, dans ce texte on trouve des discours de Tudjman ?
14 R. Exact.
15 Q. Et certains des discours qui se trouvent dans ce document ont été
16 prononcés alors que vous étiez présent ?
17 R. C'est exact. C'est exact.
18 Q. Et si je ne m'abuse ce sont également des discours dont vous vous êtes
19 servi en plus des rencontres que vous avez eues avec lui, pour en arriver
20 aux conclusions qui sont les vôtres, et dont nous avons pris connaissance
21 dans votre livre sur la Bosnie --
22 M. STRINGER : [interprétation] Je sais que Me Karnavas a souligné qu'il a
23 des limites de temps, mais la question est directrice.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Ici, je reviens sur mes pas parce que j'ai
25 déjà établi les bases qui justifient la question. J'ai déjà établi qu'il
26 avait rencontré Tudjman, qu'il avait lu ses discours, qu'il a participé à
27 toute sorte d'autres réunions et qu'il est arrivé à un certain nombre de
28 conclusions. La question peut paraître à priori directrice mais elle ne
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1 l'est pas puisque peu à peu je l'ai, j'ai amené cette question peu à peu.
2 C'est habituel dans le cadre du contre-interrogatoire, et je crois que ça a
3 été déjà fait dans le prétoire, devant des Juges professionnels et je crois
4 que par exemple le Juge May insistait dans l'affaire Kordic pour que les
5 questions soient posées de la sorte, afin de gagner du temps.
6 Q. Donc, Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez consulté ces discours
7 pour déterminer votre propre opinion ?
8 M. STRINGER : [interprétation] Mais est-ce qu'on peut nous dire de quels
9 discours il s'agit ? Est-ce qu'il s'agit de la totalité du volume de
10 discours, est-ce que tout ça va être versé au dossier, la totalité du
11 volume ?
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous avons choisi des extraits de ce livre
13 qui ont été fournis à l'Accusation. C'est la pièce
14 1D 0287. Je ne veux pas ici me lancer dans une dispute personnelle, mais M.
15 Stringer lui est dans le prétoire depuis deux ou trois semaines, enfin en
16 était hors du prétoire alors que son collègue interrogeait les témoins, M.
17 Stringer était également là plutôt et j'imagine qu'il a eu le temps, M.
18 Stringer de consulter ces discours, ces discours qui sont numérotés, dont
19 nous avons identifié un certain passage. Et je demande au témoin s'il s'est
20 servi de ces discours pour se forger sa propre opinion, en plus d'avoir
21 participé à des réunions.
22 M. STRINGER : [interprétation] Si Me Karnavas dit et il ne l'a pas encore
23 dit et le témoin ne l'a pas encore dit, mais ce dont le témoin nous parle
24 c'est un volume extrêmement épais, un livre extrêmement épais. Si Me
25 Karnavas a l'intention de poser des questions au témoin au sujet d'extraits
26 bien particuliers d'accord, mais je ne crois que c'est qu'il soit en train
27 de faire.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Si je menais les débats, l'affaire aurait été
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1 résolue de la manière suivante, la question que j'aurais posée au témoin
2 comme suit, j'aurais demandé au témoin, avez-vous lu les livres écrits par
3 M. Tudjman ? Réponse : Oui, non.
4 S'il répond oui, vous lui demandez lesquels avez-vous lus ? Réponse : Tel
5 livre, tel livre, telle année. Après quoi vous lui dites regardez le
6 document que je vous présente, tel paragraphe, et à ce moment-là, vous
7 posez votre question et le témoin répond, et comme ça, il n'y a pas
8 d'objection.
9 Bon, je sais que vous avez voulu aller très vite, mais sachez que vous avez
10 de l'autre côté une partie qui ne vous laisse rien passer, dès qu'il y a
11 une question directrice on vous le dit, alors, en quelques questions ultra
12 courtes, vous pouvez poser les fondations et amener votre question sans
13 problème.
14 Alors, Maître Karnavas, je vous redonne la parole.
15 M. KARNAVAS : [interprétation]
16 Q. Monsieur l'Ambassadeur, si on regarde cette pièce 1D 02887, veuillez
17 consulter la page où on voit : "Discours du président de la République de
18 Croatie, Franjo Tudjman, prononcé à l'occasion de la 46e Session de
19 l'assemblée générale des Nations Unies, New York, 22 mai 1992." C'est le
20 premier discours. Ce discours, est-ce que vous l'avez lu ? Je vais
21 maintenant vous montrer combien de temps il va falloir pour procéder de la
22 sorte.
23 R. Oui, je l'ai lu.
24 Q. Ça suffit. Discours suivant : "Discours du président de la République
25 de Croatie devant la Chambre des représentants du parlement croate le 8
26 septembre 1992," page 11. Avez-vous lu ce discours ? Etiez-vous présent au
27 moment où ce discours a été prononcé?
28 R. J'étais présent et j'ai lu.
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1 Q. Bien. Passons à la page suivante : "Discours du président de la
2 République de Croatie, M. Franjo Tudjman, lors de la 47e Session de
3 l'assemblée générale des Nations Unies, New York, 22 septembre 1992." Page
4 14. Étiez-vous présent au moment où ce discours a été prononcé ou l'avez-
5 vous lu, discours de M. Franjo Tudjman ?
6 R. Je n'ai pas été présent, mais je l'ai bien lu, avec beaucoup
7 d'attention.
8 Q. Page suivante : "Discours du président de la République de Croatie,
9 Franjo Tudjman, à l'occasion du défilé de l'armée croate et de la marine
10 croate à Dubrovnik, le 22 octobre 1992." Etiez-vous présent au moment où ce
11 discours a été prononcé ou l'avez-vous lu ?
12 R. Je n'ai pas été présent, mais j'ai étudié ce discours.
13 Q. Bien, page suivante : "Discours du président de la République de
14 Croatie, M. Franjo Tudjman, au cours de la campagne électorale en Bosnie,
15 en janvier, à Pazin, 31 janvier 1993." Etiez-vous présent ?
16 R. Je n'ai pas été présent mais je l'ai lu. Je l'ai lu au moment où il a
17 été publié d'ailleurs.
18 Q. Page suivante : "Discours du président Franjo Tudjman devant le
19 parlement croate ou plutôt pendant la campagne électorale à Kula [phon] 31
20 janvier 1993." Etiez-vous présent ou avez-vous lu ce discours ?
21 R. Je n'ai pas été présent, mais j'ai lu le discours.
22 Q. Merci. Discours suivant : "Discours du président de la République de
23 Croatie, Franjo Tudjman, lors de la réunion conjointe des deux Chambres du
24 parlement croate, 23 mars 1993." Étiez-vous présent au moment où ce
25 discours a été prononcé ou l'avez-vous lu ?
26 R. J'ai été présent.
27 Q. Je n'ai pas le temps, bien entendu, de le faire, mais je souhaiterais
28 attirer l'attention de la Chambre sur la dernière partie de cette page, de
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1 la première page. Il y a des informations très intéressantes qui y figurent
2 et aussi la première partie de la deuxième page qui est très intéressante.
3 Ensuite : "Discours du président de la Croatie, à Hvar" - c'est une
4 île pour ceux qui ne le savent pas - "lors de la réunion de PEN." Est-ce
5 que vous étiez présent au moment où ce discours très long a été prononcé le
6 25 avril 1993 ?
7 R. J'ai été présent, j'ai lu le discours et même avec le président
8 on en a discuté par la suite.
9 Q. Sans lire la suite, je voudrais savoir si vous avez lu la totalité des
10 discours du président Tudjman qui figurent dans ce livre ou dans cette
11 pièce, 1D 02887 ?
12 R. Une petite correction, il s'agit de cinq livres parce qu'ici, vous avez
13 les extraits qui sont tirés des cinq volumes, cinq livres et les discours
14 qui sont ici, ce sont les discours qui portent sur leur apport entre la
15 Croatie et la Bosnie-Herzégovine d'après le président Tudjman, c'est-à-dire
16 quand il parlait de la Bosnie-Herzégovine.
17 Q. Je répète ma question, est-ce que vous avez lu tous les discours qui se
18 trouvent dans ce document-là, extrait du livre numéro 2, du tome 2 ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous avez lu les cinq tomes ?
21 R. [aucune interprétation]
22 Q. Bien. Passons au document suivant 1D 02806. Il s'agit d'un autre livre
23 de Franjo Tudjman, paroles croates adressées au monde; est-ce que vous avez
24 lu ce livre ? Il s'agit d'interviews --
25 R. Oui, il s'agit des interviews données aux journalistes étrangers et aux
26 représentants de la communauté internationale. Là, on parle moins de
27 Bosnie-Herzégovine qu'on parlait aux cinq tomes de son premier livre.
28 Q. Bien. Je vous repose une autre question parce qu'il y a une objection
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1 de la part de l'Accusation et la Chambre de première instance nous a donné
2 des instructions sur la manière de procéder. Je voudrais savoir si vous
3 êtes appuyé sur ce type de discours ou ce document en plus de tout ce dont
4 vous nous avez parlé pour en arriver aux conclusions qui sont les vôtres
5 sur ce qui était la politique de la République de Croatie envers la Bosnie-
6 Herzégovine alors que vous étiez sur place en tant qu'ambassadeur de la
7 République de Croatie en Bosnie-Herzégovine ?
8 R. Oui. Moi, j'ai suivi de près tous les discours du président et puis
9 j'ai eu des entretiens personnels avec lui.
10 Q. Bien.
11 M. KARNAVAS : [interprétation] Pour en terminer, il y a trois documents que
12 je souhaiterais présenter très rapidement au témoin, d'abord 1D 02927, 1D
13 02927, qu'on pourra regarder parallèlement au document 2928.
14 Q. Hier, vous nous avez expliqué que vous aviez été nommé consulat général
15 de la République de Croatie au Venezuela ?
16 R. En réalité, je devais être ambassadeur au Venezuela, mais puisque
17 j'avais la double nationalité, la fonction la plus élevée que je pouvais
18 avoir au Venezuela était la fonction du consul général vu que j'avais aussi
19 la nationalité vénézuelienne. C'est pour cela que je n'ai pas été
20 ambassadeur au Venezuela même si c'est la fonction que j'aie, et donc,
21 c'est là que j'ai la fonction de consul général.
22 Q. Merci. Et ces deux documents le confirment, n'est-ce pas ? Les
23 documents que je vous présente 1D 02927 qui portent sur votre nomination à
24 la date du 13 juillet 1999, et il y a une traduction également, un document
25 venant du président de la République de Venezuela. Ceci confirme vos dires,
26 n'est-ce pas ?
27 R. Exact.
28 Q. [aucune interprétation]
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1 R. Ici, on voit quelles sont les deux fonctions que j'avais dans le cadre
2 de la diplomatie et c'est bien en Bosnie-Herzégovine et au jour
3 d'aujourd'hui au Venezuela.
4 Q. Un dernier document 1D 02929.
5 R. Oui, je l'ai trouvé ce document.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Le document que nous avons reçu du témoin ce
7 sera peut-être plus facile pour les Juges de consulter le document
8 directement. On pourrait ainsi le placer sur le rétroprojecteur.
9 Q. C'est un document qui vient de la Ligue internationale pour le
10 développement et le respect du code humaniste et des principes humanistes.
11 Qui vous a décerné ce certificat, à quel moment et
12 quand ?
13 R. Parmi les sept décorations que j'ai reçues, c'est celle-ci que je
14 chéris le plus parce que là j'ai été décoré par la Ligue internationale des
15 humanistes mais nous l'appelons l'humanitaire de la décennie. Pourquoi ?
16 Q. [aucune interprétation]
17 R. Cela a eu lieu à Zenica en 1995, je pense.
18 Q. O.K. Pourquoi ce certificat vous a-t-il été décerné ? Mais soyez très
19 bref, s'il vous plaît.
20 R. Mis à part les fonctions consulaires et politiques, purement
21 politiques, que j'avais, bon, c'était une fonction politique par rapport à
22 la Bosnie-Herzégovine et le consulat, par rapport à la population -- toute
23 la population de Bosnie-Herzégovine, et bien, on voit que j'ai été versé
24 aussi de façon très intense d'ailleurs dans la cause humanitaire, autrement
25 dit, dans la situation telle qu'elle était en Sarajevo et en Bosnie-
26 Herzégovine. Il fallait aider ces gens. Moi, j'ai passé deux années au
27 total à Sarajevo, 1944, 1945, c'était une situation terrible. J'en parle
28 dans mon livre et les besoins existaient, un grand besoin d'aider ces gens,
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1 et moi, je pouvais les aider parce que j'ai été ambassadeur de la
2 République de Croatie. Et il suffit de regarder sur la carte --
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Excusez cette
4 interruption mais il semble que c'est du document qu'on parle ici et ce
5 document il faudrait qu'on puisse le voir. On vient de nous remettre un
6 document noir, une page noire, et si on regarde l'image diffusée par le
7 rétroprojecteur, on voit que c'est tout noir.
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Je peux préciser la chose.
9 Q. D'où vient ce document ? Parce que vous n'avez pas l'original ici. Moi,
10 j'ai vu l'original, mais où est l'original -- l'original ?
11 R. L'original a été délivré par la Ligue internationale des humanitaires.
12 Q. Oui, mais concrètement où il est l'original en ce moment ?
13 R. Là, c'est une photocopie, mais comme c'était quelque chose qui est
14 encadré, la photocopie n'est pas très bonne. Donc, mais si vous le voulez,
15 je peux vous faire parvenir une version meilleure aussi bien en croate
16 qu'en anglais. Je suis vraiment désolé de la qualité, de la mauvaise
17 qualité.
18 Q. Vous n'avez pas répond où c'est --
19 R. A Caracas dans le consulat général.
20 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On vient de me montrer l'exemplaire
22 du Président et quand je le regarde à la lumière j'arrive à distinguer des
23 choses. Donc, je suis satisfait en ce qui me concerne. Inutile de faire
24 venir par courrier -- et par international, l'original. Inutile non plus
25 que le témoin revienne.
26 M. KARNAVAS : [interprétation]
27 Q. Merci infiniment, Monsieur l'Ambassadeur. Je suis désolé d'avoir dû
28 vous presser parfois. Toutes mes excuses mais une fois encore, merci
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1 beaucoup et je suis convaincu que vous serez aussi sincère dans vos
2 réponses à l'Accusation ou à qui que ce soit d'autre. Une fois encore,
3 merci beaucoup.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Nous allons faire donc la pause de 20 minutes.
5 Nous reprendrons dans 20 minutes.
6 --- L'audience est suspendue à 10 heures 38.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Défense a utilisé quatre heures 11 minutes.
9 Monsieur le Témoin, je n'ai pas de questions à proprement à vous poser,
10 mais je voudrais juste une petite clarification qui est importante. Juste à
11 la fin, Me Karnavas vous a demandé si vous aviez lu les livres de Tudjman.
12 On a eu toute la liste, les déclarations de Tudjman, et vous avez rajouté
13 que vous-même vous étiez bien placé puisque vous étiez ambassadeur en
14 Bosnie-Herzégovine. Sur ce,
15 Me Karnavas vous a demandé : "Est-ce que vous étiez donc particulièrement
16 informé pour parler de la politique de Tudjman à l'égard de la Bosnie-
17 Herzégovine" ? Vous avez dit : "Oui," et puis vous n'avez pas dit quelle
18 était cette politique. Alors, j'aimerais, pour les besoins du transcript,
19 de voir ce que vous, de votre point de vue, vous avez estimé relever de la
20 politique de Tudjman à l'égard de la Bosnie-Herzégovine. Donc, pouvez-vous
21 compléter votre réponse ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, de
23 façon générale, je parle de la politique de l'Etat croate à l'égard de la
24 Bosnie-Herzégovine, puisque je faisais partie de cette politique j'ai été
25 son représentant en Bosnie-Herzégovine. Parce que souvent on parle de la
26 politique du président Tudjman; cependant, la politique de l'Etat croate
27 n'était pas que la politique du président Tudjman. Il y avait d'autres
28 facteurs qui comptaient, par exemple, la communauté internationale qui
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1 avait son mot à dire dans tout cela. Ensuite, le parlement croate, puisque
2 la République de Croatie est une démocratie, donc, même si le président
3 Tudjman puisque son système semi-présidentiel avait une grande influence,
4 il n'était pas le seul porteur de cette politique. C'est pour cela que je
5 préfère parler de la politique de l'Etat croate à l'égard de la Bosnie-
6 Herzégovine.
7 Cela étant dit, je peux vous dire quelle était ma position à moi, par
8 exemple, d'une part vis-à-vis de Tudjman et de l'autre côté, quelle était
9 de façon générale la politique croate à l'égard de la Bosnie-Herzégovine ?
10 En général, on était d'accord, puisque le président Tudjman prenait en
11 compte de façon considérable la communauté internationale parce que ces
12 concepts de confédération qui étaient censés résoudre la crise en Bosnie-
13 Herzégovine, cela venait de Cutileiro, Ahtissari, et d'autres plans
14 internationaux quand on recherchait une solution en Bosnie-Herzégovine.
15 Moi, je peux dire que mois aussi à un moment donné j'ai eu mon mot à dire
16 parce que j'ai fourni des informations pas seulement au gouvernement, mais
17 aussi à mon ministre des affaires étrangères, et au président de la
18 république portant sur la situation qui prévalait en Bosnie-Herzégovine,
19 qui était très complexe pendant toute cette période. Ecoutez, parce que les
20 problèmes les plus graves étaient les plus difficiles étaient de comprendre
21 la situation, et donc, ma priorité était de connaître et savoir quelle
22 était vraiment la politique de l'Etat croate à l'égard de la Bosnie-
23 Herzégovine.
24 Et je peux dire que j'en étais très bien informé. D'ailleurs, j'ai suivi de
25 près tout cela pas seulement à travers mes entretiens avec Tudjman mais
26 aussi, j'ai suivi ce que Tudjman disait dans la presse, dans les médias, ce
27 qu'il disait aux autres représentants, par exemple, à Split quand on a
28 discuté avec Churkin, ou Petersen, et cetera; donc, quelle était sa
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1 déclaration devant différents facteurs de la politique internationale ? Ma
2 position dans tout cela était que, moi, je m'étais en œuvre cette
3 politique. Quelle était cette politique ? C'était la politique du
4 rapprochement c'était quelque chose de complètement naturel, c'était une
5 cause naturelle. Parce que si vous examinez la carte, c'est bien clair on
6 voit que la Croatie entoure de trois côtés la Bosnie-Herzégovine à cause de
7 différentes raisons historiques, et donc, un rapprochement est inévitable.
8 Voyez-vous la Bosnie-Herzégovine et la Croatie cohabitent depuis 1878 dans
9 le cadre d'une même communauté, depuis le congrès de Berlin. Donc, il y a
10 eu l'Austro Hongrie, ensuite, l'ancienne Yougoslavie, et ensuite, la
11 Yougoslavie de Tito. Donc, je pense que j'ai eu suffisamment de fondation
12 pour pouvoir évaluer la situation telle qu'elle était, je connais très bien
13 l'histoire de Bosnie-Herzégovine. Moi, j'ai à peu près 6 000 livres portant
14 sur la Croatie et la Bosnie et leur histoire. J'ai tout cela à Caracas chez
15 moi.
16 C'est une des raisons pour laquelle j'ai été nommé au poste d'ambassadeur
17 parce que voyez-vous moi je ne connaissais personne. Je ne me suis jamais
18 rendu dans la Yougoslavie du maréchal Tito. La première fois que je suis
19 venu c'était au mois d'août 1990. C'est la première fois que j'ai mis les
20 pieds en Yougoslavie.
21 Alors, pour répondre de façon plus précise à la question que vous venez de
22 me poser, je devais comprendre cette politique-là, de façon complète, et je
23 devais être d'accord avec cette politique. Et d'ailleurs, j'ai dit d'emblée
24 à Tudjman dès le début; écoutez, si on n'est pas d'accord, et bien, moi, je
25 pars, je quitte.
26 Est-ce que j'ai répondu à la question que vous m'avez posée, ou est-ce que
27 vous souhaitez que je l'aborde ?
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez très bien répondu.
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1 Une question technique accessoire, mais très technique. On a eu plusieurs
2 ambassadeurs qui sont venus - je n'entre pas dans les détails. En règle
3 générale, quand on est ambassadeur dans un pays, on reçoit des instructions
4 de son gouvernement, et on fait des rapports. Alors, question d'ordre
5 technique; est-ce qu'il y a eu entre Zagreb et vous à Medjugorje, des
6 télégrammes diplomatiques, des dépêches vous demandant -- vous demandent
7 des instructions, vous demandant des rapports, et est-ce que vous, vous-
8 même, en sens inverse, quand vous les demandez ou qu'on ne vous l'ait pas
9 demandé, vous leur avez transmis au ministère des Affaires étrangères des
10 informations ? C'est une question ultra technique.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Vous savez, moi, j'avais une certaine
12 expérience. Et je n'ai pas envoyé une sorte d'information au ministère des
13 Affaires étrangères et puis d'autres informations au président Tudjman. Ce
14 qui figurait dans mes rapports, le rapport envoyé au Dr Mate Granic et même
15 avant j'avais un autre ministre des Affaires étrangères c'était le Dr
16 Skrabalo. Voilà ce que j'écrivais, et d'ailleurs, c'était conforme à la
17 constitution donc c'était adressé au président de la République de Croatie
18 et au ministre des Affaires étrangères, qu'il s'agisse de Skrabalo ou un
19 autre, par la suite. Les textes étaient les mêmes. Il n'y avait pas de
20 différence de contenu. Et c'était très important pour moi, que de savoir
21 qu'il n'y avait pas de différence dans les rapports, mes rapports avec le
22 supérieur hiérarchique direct, à savoir le ministre des affaires
23 extérieures et mes rapports avec le président de la république pour éviter
24 tout malentendu. Est-ce que j'ai bien répondu à la question que vous m'avez
25 posée ?
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
27 Je croyais que Me Karnavas s'était levé à un moment donné.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, à la page 52 [comme interprété], ligne
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1 19, le mot "only" "seulement" manque. On a interprété comme quoi il n'a pas
2 reçu l'information de Tudjman donc le mot "seulement" qu'on lit en fait en
3 anglais devrait figurer à la page 42, ligne 19, devrait être inscrit au
4 compte rendu d'audience.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour ceci.
6 Alors, maintenant, la Défense pour le contre-interrogatoire des autres
7 avocats de la Défense, D2. Maître Khan.
8 M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas de
9 contre-interrogatoire pour ce témoin.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Maître Khan.
11 Maître Kovacic, D3.
12 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, avec
13 votre permission, je voudrais vous demander de donner la permission au
14 général Praljak de poser quelques questions. Il s'agit du livre 1D 02808,
15 quatre pages de ce livre. Il s'agit dans l'original des pages 124 à 129, où
16 l'on a publié. Donc, c'est le livre du témoin ici présent, Dr Sancevic.
17 C'est lui qui est l'auteur du livre, et vous avez quatre cartes militaires,
18 qui sont publiées sur les pages de ce livre, correspondant à des activités
19 militaires portant sur les quatre partis au conflit entre 1991 et 1995. Le
20 général Praljak, étant soldat, il a participé directement à ces événements.
21 Il a les noms et il a des connaissances directes, spécifiques et concrètes
22 conformément à la décision que vous avez prise. Il me semble qu'il est
23 légitime qu'il pose ces questions lui-même puisque je pense qu'il sera
24 mieux à même de poser que nous ses représentants. Le témoin a des
25 connaissances là-dessus aussi puisqu'il en parle dans son livre et je pense
26 que l'occasion se présente bien pour utiliser en tant que pièce à
27 conviction cet extrait du livre. Donc, je vous prie de permettre à mon
28 client de poser ses questions.
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1 Je vous remercie.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais consulter mes collègues. Attendez.
3 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président --
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, allez-y, Monsieur Stringer. En règle générale,
5 vous ne faites jamais de difficulté donc c'est pour ça que je vous --
6 M. STRINGER : [interprétation] Je devrais peut-être être plus difficile à
7 ce moment-là.
8 Je vais simplement faire cette observation, Monsieur le Président. On nous
9 a -- enfin, la Défense de M. Praljak nous a remis le document, les extraits
10 du livre montrant des cartes sur -- et le contre-interrogatoire portera sur
11 ces extraits. Il y a un texte -- il y a beaucoup de texte. Je comprends que
12 les cartes sont importantes, enfin qu'elles figurent ici, mais il y a
13 également un texte qui accompagne chaque carte et nous n'avons pas de
14 traduction pour ces textes. Je pourrais peut-être me tromper effectivement
15 et peut-être qu'en parcourant ces documents je verrais en fait. Voilà, on
16 m'informe qu'en fait, la traduction existe mais à la fin du document. Bien.
17 Alors, je voudrais simplement ajouter les affirmations ou plutôt nous
18 aimerions vous dire concernant le contre-interrogatoire de M. Praljak,
19 notre position est la même que celle adoptée précédemment. Mais nous nous
20 en remettons entre vos mains, bien sûr, pour ce qui est de cette question.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Maître Kovacic, la Chambre sur le plan de la
23 pertinence voudrait savoir en quoi - et vous allez pouvoir répondre - en
24 quoi le fait d'aborder ces quatre cartes sur des opérations militaires
25 s'étant déroulées en Bosnie-Herzégovine en 1992-95 a une pertinence par
26 rapport à l'acte d'accusation; et deuxièmement, quel point précis vous
27 voulez mettre en exergue par rapport aux questions que vous poserez. Est-ce
28 que vous pouvez nous informer de cela ?
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1 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, la pertinence de cela
2 découle de la thèse de l'acte d'accusation portant sur l'entreprise
3 criminelle commune et sur le prétendu rôle de la République de Croatie et
4 ses plans par rapport à la Bosnie-Herzégovine, les plans que la République
5 de Croatie avait à l'égard de la Bosnie-Herzégovine. Donc, c'est ces cartes
6 qui s'inscrivent dans les opérations de guerre et les opérations militaires
7 démontrent le contraire ou montrent la contradiction qu'il y a eu, qui
8 existait dans l'existence prétendue existence de ces plans et de la
9 politique de la République de Croatie donc par le Procureur.
10 Ensuite, ces cartes nous donnent la possibilité puisque l'auteur est
11 présent de montrer la complexité des événements et il y a une certaine
12 interaction qui existait et aucun événement qui s'est produit en Bosnie-
13 Herzégovine pendant cette période de guerre ne peut pas être considéré de
14 façon isolée même pas quand il s'agit des événements militaires. Parce que
15 le témoin lui-même dit que les événements là-bas, la situation là-bas était
16 complexe, très complexe et que c'est comme cela qu'il faut la prendre en
17 compte.
18 Je pense qu'ici nous avons une bonne occasion de montrer le contexte des
19 événements pour pouvoir faire la part des choses et juger de l'existence
20 éventuelle de cette entreprise criminelle commune, ou de prétention de la
21 République de Croatie tel qu'elle figure dans l'acte d'accusation, ou de
22 l'Herceg-Bosna et de son volet militaire et du HVO qui était placé sous le
23 commandement du général Praljak. Donc, je pense que la pertinence se trouve
24 là. Peut-être que M. Praljak a d'autres idées là-dessus, mais ce dont je
25 viens de vous parler, c'est dont je parlais avec le général Praljak.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais ajouter un
28 seul commentaire. J'aurais sans doute dû dire ceci un peu plus tôt. Mais
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1 nos objections quant à l'étendue de l'interrogatoire principal et de la
2 portée. Ce que l'on demande ici c'est d'aller au-delà de la portée du
3 contre-interrogatoire présenté par Me Karnavas et les lignes directrices le
4 permettent mais elles ne le permettent pas dans le contexte où
5 l'interrogatoire principal avec des questions directrices serait mené donc
6 s'il s'agit d'un interrogatoire principal -- portant sur quelque chose qui
7 se trouve à l'extérieur de la portée mené par monsieur, enfin dit par
8 M. Karnavas, à ce moment-là, il faudrait nous plier à la procédure.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
10 Deux éléments, Maître Kovacic. Ce que vous nous dites - je vais
11 essayer de le synthétiser et je parle sous votre contrôle, si je fais une
12 erreur, intervenez pour me corriger - vous nous dites qu'à partir du livre
13 écrit par ce témoin, comprenant quatre cartes d'opérations militaires, vous
14 allez par des questions montrer qu'il n'y avait pas eu d'entreprise
15 criminelle au sens où l'Accusation l'entend et que la meilleure preuve en
16 est les opérations militaires qui obéissaient à d'autres impératifs que
17 l'entreprise criminelle commune et par le biais des questions que vous
18 allez posées, vous allez mettre cela en évidence. Et vous profitez de la
19 présence de ce témoin qui dans son livre a évoqué des aspects militaires.
20 M. le Procureur a fait une objection et la Chambre avant d'en délibérer et
21 c'est en son nom que je le rappelle, quand un sujet n'a pas été abordé dans
22 le cadre de l'interrogatoire principal d'un autre accusé, les autres
23 accusés peuvent aborder, à ce moment-là, ce type de questions mais ça
24 entraîne pour conséquence qu'il ne peut y avoir que des questions non
25 directrices et que le temps que vous allez passer peut vous être imputé sur
26 votre temps général. Ce qui veut dire que si, par exemple, M. Praljak
27 utilise 30 minutes ou une heure, l'heure utilisée sera défalquée du volant
28 d'heures qu'on vous a accordées pour l'ensemble de vos témoins.
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1 C'est bien compris ? Oui, M. Praljak dit "da," donc, il a bien
2 compris.
3 Alors, je vais, je --
4 Oui, Maître Kovacic.
5 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez à mon
6 sens justement interprété ce qui était mon intention. Donc, il s'agit des
7 éléments censés contester l'un des éléments de l'existence de cette soi-
8 disant entreprise criminelle commune. Alors, nous demander s'il s'agit du
9 contre-interrogatoire ou d'un international principal supplémentaire; pour
10 moi, il s'agit d'un contre-interrogatoire. Tout d'abord, quand la Défense a
11 interrogé ce témoin, le témoin a répondu et a expliqué clairement la
12 complexité de la situation en Bosnie-Herzégovine. Il a parlé de son
13 évolution et c'est justement cet aspect-là des choses qui nous intéresse,
14 cette complexité, cette fluidité de la situation. Nous souhaitons donc
15 examiner tout ça mais par le biais des opérations militaires qui ont eu
16 lieu sur le terrain pendant cette même période de temps.
17 Deuxièmement, le témoin a mentionné des exemples des événements de Konjic,
18 Usora, Mostar, et ailleurs. Il a fait référence à des éléments bien précis,
19 essayons encore une fois de nous indiquer la complexité de la situation.
20 Donc, pour ces raisons-là, nous considérons qu'il s'agirait du contre-
21 interrogatoire parce que le sujet a été entamé lors de l'interrogatoire
22 principal. Et notamment parce que ce témoin - et nous savons qui est ce
23 témoin - en tant que l'auteur de ce livre et d'après toutes les
24 informations dont je dispose, il s'agit d'un livre qui est hautement
25 reconnu dans l'opinion publique, donc par le biais des cartes utilisées
26 dans ce livre il explique ses propos. Donc, il ne s'agit pas là d'un
27 nouveau sujet à aborder. Cela a déjà été entamé lors de l'interrogatoire
28 principal.
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1 Bien évidemment, question de perte de temps en partie c'est une autre
2 chose.
3 Je considère que sur la base de tout ce que je viens de dire, le
4 contre-interrogatoire représente un instrument reconnu et accepté, censé
5 permettre au clair les questions posées lors de l'interrogatoire principal
6 et c'est une définition traditionnelle.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : -- 22 porte la mention d'Usora, sujet qui a
8 été abordé par le témoin. La carte 23 porte également la mention d'Usora.
9 Donc, voilà, maintenant, on va délibérer.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre, qui a délibéré, unanimement
12 autorise M. Praljak à poser des questions mais la Chambre imputera le temps
13 des questions sur le temps de la Défense de
14 M. Praljak, et de ce fait, M. Praljak ne doit pas poser des questions
15 directrices. Il doit poser des questions neutres, voilà, mais je crois que
16 M. Praljak a très bien compris.
17 Alors, voilà, Monsieur Praljak, vous avez donc la parole.
18 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Juge, de
19 votre générosité.
20 Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :
21 Q. [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur Sancevic, bonjour.
22 R. Bonjour.
23 Q. Vous avez sous les yeux les quatre cartes qui figurent dans votre
24 livre; vous les avez ?
25 R. Oui, oui, je les ai reçus.
26 Q. Il s'agit des cartes numéro 20, 21, 22, 23. Avez-vous dessiné ces
27 cartes vous-même ?
28 R. Oui, j'en suis l'auteur.
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1 Q. En bas de ces cartes, avez-vous rédigé la légende, c'est-à-dire le
2 descriptif des cartes ?
3 R. J'ai l'impression que c'est tout à fait clair, mais quelqu'un qui s'y
4 connaît, un expert, il suffit de regarder la carte. Il n'a pas besoin de la
5 légende que j'ai rédigée. Un seul coup d'œil sur la carte explique beaucoup
6 de choses, et si vous le souhaitez, moi, je peux vous expliquer ce que je
7 voulais représenter par ces cartes.
8 Q. Aujourd'hui, après toute l'expérience acquise en Bosnie, en tant que
9 l'ambassadeur et connaisseur de la région, est-ce que vous auriez
10 aujourd'hui changé quelque chose -- éliminer quelque chose en considérant
11 comme erroné, d'après vous, dans ces cartes ? Là encore aujourd'hui,
12 correct; reflètent-elles la réalité des choses ?
13 R. Écoutez, je peux vous donner qu'une seule réponse. On peut toujours
14 améliorer les choses mais je considère que ces cartes reflètent la réalité
15 encore aujourd'hui.
16 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,
17 de m'avoir accordé ces trois minutes; j'ai fini.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous n'avez pas d'autres questions, très
19 bien. Je pensais que vous avez --
20 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, toutes mes excuses,
21 peut-être que je n'étais pas suffisamment clair au début. Nous avons établi
22 un mécanisme de versement d'éléments de preuve. En ce qui nous concerne ce
23 sont des moyens de preuve. Nous avons ici un témoin, nous avons entendu
24 quelles sont ses qualifications, son expertise, et cetera, mais tout cela
25 sont des éléments qu'il faut prendre en compte lors de l'évaluation de ces
26 moyens de preuve. C'était ça l'objectif de ces questions. Merci.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question aussi technique.
28 Vous étiez ambassadeur, donc, par définition, vous étiez censé savoir ce
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1 qui se passait sur le terrain -- sur le terrain comme l'ont dit les avocats
2 la situation était fort complexe. Aviez-vous, sur les opérations
3 militaires, à votre niveau des renseignements fiables ou des renseignements
4 incertains, dans vos fonctions d'ambassadeur ? Est-ce que vous étiez
5 parfaitement informé de ce qui se passait, ou bien, moyennement informé ou
6 pas informé du tout ? Est-ce que vous pouvez nous apporter un
7 éclaircissement ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. Tout d'abord, je suis aussi un
9 cartographe, c'est-à-dire dans le cadre de ma profession je m'occupe des
10 cartes. Je peux fabriquer -- créer des cartes. Je peux dire également que
11 j'avais, dans mon ambassade à Sarajevo, un conseiller militaire, le général
12 Daidzia. Donc, d'après les faits et la situation telle que je la
13 connaissais sur le terrain, j'étais à mesure de créer ces cartes. Je ne
14 sais pas si ces cartes existent vraiment mis à part celles que j'ai
15 publiées dans mon livre. Mais je suis sûr que ces cartes où qu'elles se
16 trouvent, et bien qu'il faudrait les comparer avec celles que j'ai faites
17 et publiées ici puisqu'elles ont été faites sans aucune intention ou
18 arrière pensée. Il s'agissait tout simplement de montrer la situation de
19 façon objective, et j'ai bénéficié de la coopération du commandant de la
20 FORPRONU, un Britannique, un officier britannique qui a fait des cartes
21 similaires. Donc, on peut dire que ces cartes sont les fruits d'une sorte
22 de coopération militaire et autres.
23 Moi, je ne m'occupais pas vraiment des questions militaires. Ce qui me
24 préoccupait surtout c'était les questions consulaires et politiques,
25 cependant, ces cartes nous montrent vraiment le développement des
26 événements en Bosnie-Herzégovine.
27 En quelques phrases avec votre permission, je voudrais commenter ces
28 cartes.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Non, on n'est pas là pour le commentaire de cartes,
2 mais ma question se mettait à un niveau autre. Ce que je voulais savoir
3 c'est qu'en tant qu'ambassadeur, étiez-vous bien informé de ce qui se
4 passait sur le plan militaire ? Vous m'avez partiellement répondu en disant
5 que vous aviez un conseiller militaire, le général Daidzia, que lui se
6 trouvait à Sarajevo. Ce qui veut dire et - est-ce que je me trompe ou pas -
7 quand vous alliez voir M. le président Tudjman, pour évoquer comme on l'a
8 vu dans les transcripts présidentiels divers sujets, est-ce qu'il
9 participait à ce type de réunions ? Vous étiez dans vos propos celui qui
10 pouvait indépendamment de la présence d'autres personnes - comme d'ailleurs
11 j'ai constaté que le général Praljak participait à ces réunions - que vous
12 pouviez apporter au président Tudjman un éclairage propre à vous basé sur
13 des informations recueillies par vous-même vos collaborateurs de
14 l'ambassade, voire le général Daidzia ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, surtout quand il s'agit des propositions
16 qui émanaient des représentants de la communauté internationale. Puisqu'il
17 s'agissait toujours d'analyser les cartes, de voir quelle est la situation
18 présente ce qu'il faut faire à l'avenir. Donc, moi, j'ai participé à ces
19 entretiens cartographiques pour ainsi dire avec le président Tudjman mais
20 aussi avec d'autres personnes présentes telle que le Dr Mate Granic, et
21 cetera.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
23 Maître Kovacic.
24 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi. J'étais
25 en train de vérifier le compte rendu d'audience, et pour une raison qui
26 m'échappe, c'est sans doute ma faute à moi, et on ne trouve pas dans le
27 compte rendu d'audience le fait que tout cela se trouve -- tous ces
28 documents, les livres, et les cartes donc sont couverts par la cote 1D
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1 02808. C'est probablement de ma faute, je me suis sans doute trompé, et
2 peut-être que je ne l'ai pas dit.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.
4 Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Président,
5 nous n'avons pas de questions pour ce témoin. Merci.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Tomic.
7 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La
8 Défense de Valentin Coric n'a pas de questions pour ce témoin.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic.
10 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] La Défense 6D n'a pas de questions.
11 Merci.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, la Chambre avait alloué deux heures à
13 l'ensemble des autres Défenses. Donc, nous aurons du temps pour les
14 questions supplémentaires certainement.
15 Alors, Monsieur le Procureur, vous pouvez commencer votre contre-
16 interrogatoire, étant précisé que, vous, vous avez quatre heures 11
17 minutes. Mais pour une fois, on n'est pas très pressé, sauf si la Défense
18 de M. Prlic nous introduit jeudi le témoin qui est prévu pour la semaine
19 prochaine.
20 Ça ne sera pas possible, Maître Karnavas ?
21 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Parce que nous
22 devons tous les deux rester dans le prétoire, ma consoeur et moi, c'est une
23 affaire qui repose vraiment sur les documents, et nous devons être là pour
24 être aussi efficaces que possible. Le témoin de la semaine prochaine c'est
25 un témoin pour lequel j'aurais besoin de six heures pour l'interrogatoire
26 principal, et je me demande encore comment je vais y arriver parce qu'en
27 étant réaliste j'aurais plutôt besoin de huit, voire de dix heures pour le
28 faire. Donc, pour répondre à votre question, non, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
2 Monsieur le Procureur.
3 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Et avant que je ne commence, je souhaite préciser à l'intention du témoin
5 et de la Chambre que je n'aurais pas besoin de cette carte, de la carte qui
6 se trouve à côté du témoin, peut-être peut-on l'enlever avant que je
7 commence.
8 Contre-interrogatoire par M. Stringer :
9 Q. [interprétation] Et dans l'intervalle, je souhaite vous saluer,
10 Monsieur l'Ambassadeur. Je m'appelle Douglas Stringer. Je vais vous poser
11 un certain nombre de questions au nom de l'Accusation.
12 R. Enchanté.
13 Q. Quelques questions, tout d'abord, au sujet de votre parcours
14 professionnel, et en particulier au sujet de la période de temps que vous
15 avez passé en ex-Yougoslavie après votre retour en 1991. Si j'ai bien
16 compris, vous êtes retourné en Croatie en août 1991, vous êtes arrivé du
17 Venezuela, le pays où vous avez grandi, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, c'est exact, mais il est également exact qu'en août 1990, je suis
19 allé en Croatie pour la première fois en tant que membre du Conseil croate
20 de diaspora.
21 Q. Et peu après, vous êtes arrivé en Croatie en 1991, vous avez utilisé le
22 terme de "détaché," vous avez été détaché en tant que membre de la Garde
23 nationale vous avez été détaché auprès du ministre croate de l'Information;
24 c'est bien exact ?
25 R. Oui, c'est exact.
26 Q. Et puis ensuite, à la fin de l'année 1991, environ quatre mois plus
27 tard, vous avez été désigné ministre des émigrants; j'ai également vu ce
28 poste décrit comme étant ministre de la diaspora. C'est le poste que vous
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1 avez occupé ensuite; c'est ça ?
2 R. Exact.
3 Q. Est-ce que j'ai bien compris, est-ce que vous avez pris la place de M.
4 Gojko Susak, qui était auparavant ministre chargé de la diaspora ?
5 R. Oui, c'est exact parce que M. Susak ne pouvait pas accumuler deux
6 ministères. Alors, il a choisi le ministère de la Défense, et puis ensuite,
7 il cherchait quelqu'un pour le nommer au poste du ministre des émigrants de
8 la diaspora.
9 Q. Bien. Et M. Susak lui aussi c'était un émigrant qui était revenu en
10 Croatie au moment où la guerre s'est déclanchée en Croatie. C'est bien
11 exact ? Lui, il est venu du Canada, si je ne m'abuse ?
12 R. C'est exact.
13 Q. Donc, alors qu'il était ministre chargé de la diaspora chargé des
14 émigrants, il est devenu ministre de la Défense, et vous, vous l'avez
15 remplacé et vous êtes devenu ministre chargé de la diaspora à la fin de
16 l'année 1991 ?
17 R. Cela n'est pas exact. Je vous ai dit que M. Susak à un moment s'est
18 retrouvé occuper deux postes différents au sein de deux ministères
19 différent, celui de la Défense et celui des Emigrants. Et il a été tout
20 simplement obligé de quitter l'un de ces deux postes, c'était celui des
21 Emigrants, il a continué à exercer ses fonctions au ministère de la
22 Défense. Et ce poste étant resté vacant alors ils ont cherché quelqu'un
23 pour occuper ce poste, et ils m'ont trouvé. Pourquoi ils m'ont choisi,
24 alors, je ne sais pas, peut-être parce que j'étais émigrant moi-même.
25 Q. Bien. Et ensuite en octobre 1992, à peu près, vous avez été nommé par
26 le président Tudjman au poste de premier ambassadeur de Croatie en Bosnie-
27 Herzégovine ?
28 R. Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter la date, s'il vous plaît ?
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1 R. Moi, d'après ce que j'ai obtenu comme information, vous avez été nommée
2 en octobre 1992. Je sais que vous n'avez présenté vos lettres de créances à
3 M. Izetbegovic -- au président Izetbegovic, qu'en décembre.
4 R. Ce que je peux vous dire c'est que la procédure était la suivante :
5 tout d'abord, il y a eu une nomination, ensuite, il a fallu obtenir une
6 autorisation de la part du gouvernement bosniaque ce qui a permis, comme le
7 début d'une lettre de clairance, que j'ai pu remettre ensuite à Sarajevo le
8 18 décembre 1992, et c'était très difficile, vous savez. Je voyageais
9 ensemble avec M. Izetbegovic et on a failli perdre nos vies tous les deux.
10 Mais peut-être que cela ne vous intéresse pas, alors, je ne vais pas vous
11 raconter cet événement.
12 Q. C'est intéressant mais, malheureusement, nous n'avons pas suffisamment
13 de temps pour parler de cela. Tout le monde s'accorde à dire qu'à l'époque,
14 la situation à Sarajevo était très périlleuse.
15 J'ai vu un rapport parce qu'hier, vous avez expliqué que vous êtes resté au
16 poste d'ambassadeur jusqu'au début de l'année 1996; est-ce bien exact ?
17 R. C'est exact.
18 Q. Parce qu'hier, j'ai vu un rapport et ceci n'est pas extrêmement
19 important, mais dans un rapport, j'ai vu qu'en avril 1994, apparemment,
20 vous avez été remplacé par Andro Krstolevic [phon]; est-ce que vous savez
21 quoi que ce soit sur ce point ?
22 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
23 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait nous donner ce rapport
25 ? Si le Procureur fait référence à un document qu'il a vu, je pense que la
26 courtoisie minimum exigerait qu'il nous dise de quel rapport il s'agit et
27 qu'il nous le montre.
28 M. STRINGER : [interprétation] Oui, nous pouvons distribuer ce document, le
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1 document ne se trouve pas dans les classeurs. Ce n'est pas quelque chose de
2 fondamentalement important. Le témoin nous dit qu'il n'en sait rien.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien, si on est ainsi pris au dépourvu comme
4 ça, moi, surtout après ce qui a été dit contre nous, moi, je pense qu'on a
5 même pas le droit de faire référence à des documents qui ne figurent pas
6 dans les classeurs, sauf si ça été déjà versé au dossier.
7 M. STRINGER : [interprétation] Je peux passer à autre chose, Monsieur le
8 Président.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : -- passer à autre chose.
10 M. STRINGER : [interprétation]
11 Q. Je peux vous demander de consulter une pièce qui fait référence à
12 l'étape suivante, si vous voulez. Vous nous avez dit qu'en 1995 - et
13 corrigez-moi si je me trompe - vous avez dit que vous avez été élu au
14 parlement croate, au Sabor; est-ce bien exact ?
15 R. Oui, cela s'est passé vers la fin de 1995.
16 Q. Bien. Et dans les classeurs, il y a un document que je vous demanderais
17 de consulter rapidement. Peut-être dans le deuxième classeur, le document
18 10375. Ce document c'est un communiqué de la BBC, un article de la BBC qui
19 fait référence à votre élection et à la réélection d'autres personnes au
20 parlement à l'époque. Je vais vous donner le temps de regarder ce document,
21 c'est la pièce 10375. Oui, prenez le temps de lire le document.
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. Je crois qu'il y a une traduction qui a été ointe à l'original.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- le temps qu'il lise le document, Monsieur le
25 Procureur, comment vous expliquez que le texte de la BBC comme par hasard
26 le nom du témoin apparaît en gras ? Il y a une raison ?
27 M. STRINGER : [interprétation] C'est parce que l'on fait des recherches
28 dans les sources d'information publics comme l'internet, on fait cette
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1 recherche avec un nom complet, comme par exemple le nom du témoin. Et quand
2 vous trouvez les documents pertinents, automatiquement, le nom de la
3 personne que vous recherchez apparaît en gras.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
5 M. STRINGER : [interprétation]
6 Q. Monsieur l'Ambassadeur, avez-vous eu l'occasion de parcourir le
7 document ?
8 R. Oui.
9 Q. Bien. J'ai deux ou trois questions au sujet de ce document parce que
10 cela va nous permettre de faire la transition avec le thème suivant celui
11 de la citoyenneté croate, un thème que vous avez abordé hier. Est-il exact
12 qu'à la fin 1995, au cours de cette élection, les membres du peuple croate
13 qui ne vivaient pas en Croatie ont eu le droit de voter au cours de ces
14 élections croates ?
15 R. C'est exact.
16 Q. Bien. Et si j'ai bien compris, conformément à la législation croate, il
17 y a un certain nombre de sièges au parlement croate qui à l'époque en tout
18 cas étaient réservés aux membres de la diaspora élue au parlement; est-ce
19 que ça aussi c'est exact ?
20 R. Ecoutez, il y avait là des candidats mais personne ne savait s'ils
21 allaient être élus. Ça dépendait du nombre de votes. Ce qu'il faut établir
22 ici c'est que ceux qui votent à l'étranger doivent être citoyens croates.
23 On ne peut pas laisser n'importe qui voter.
24 Q. Oui, bien sûr. Ici, il est dit comment l'autre, il y avait une autre
25 condition à remplir sur la base du pourcentage des votes obtenus, il y
26 avait une liste spéciale du HDZ qui est mentionnée ici et on indique que
27 cette liste a obtenu 90 % des voix au sein de la diaspora.
28 Et la question que j'ai à vous poser est la suivante : les membres de la
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1 diaspora qui ont été élus au parlement, est-ce qu'ils étaient tous membres
2 du HDZ ?
3 R. Cela je ne le saurais pas vous le dire. Je ne sais même pas si à
4 l'époque moi-même j'étais membre du HDZ, ah oui, oui, j'en étais membre à
5 l'époque.
6 Q. [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer. Vous
8 avez posé une question mais le témoin n'y a pas répondu. Est-ce qu'il y
9 avait des sièges au parlement qui à priori qui d'emblée étaient réservés au
10 Sabor aux représentants des Croates vivant à l'étranger ? Est-ce que
11 c'était vraiment le cas ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois reconnaître que je n'étais qu'un
13 candidat parmi d'autres. Vous savez quand il y a un candidat peut-être lui
14 il peut ne pas être élu. C'est comme ça que se passe une démocratie, et si
15 je suis élu, ensuite, je peux, par exemple, laisser de côté le siège au
16 parlement et m'occuper -- occuper un autre poste. Je ne suis pas obligé
17 d'accepter le siège. Quelqu'un d'autre peut y aller à ma place.
18 M. STRINGER : [interprétation]
19 Q. Monsieur l'Ambassadeur ma question était la suivante : vous étiez vous-
20 même membre du parlement croate, au sein de ce parlement; est-ce qu'il y a
21 un certain nombre de sièges au parlement qui sont réservés aux membres de
22 la diaspora ? Est-ce que vous connaissez la réponse à cette question ou pas
23 ?
24 R. Je ne sais pas s'il y avait des places réservées au sein du parlement,
25 c'est tout simplement une question de résultat des votes. Je ne sais pas.
26 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer et
27 mes excuses à vous aussi, Monsieur l'Ambassadeur, de cette interruption,
28 mais je dois dire que le document que nous avons sous les yeux, le document
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1 10375, répond à la question initialement posée par M. le Juge Trechsel. Il
2 nous dit ici dans l'avant-dernier paragraphe de cette dépêche de la BBC, je
3 cite : "A Zagreb, Olujic a déclaré lors d'une conférence de presse, mardi,
4 il a dit qui était les 12 députés qui représenteraient les citoyens croates
5 n'ayant pas de résidence permanente en République de Croatie. Seule la
6 liste spéciale de l'Union démocratique croate, HDZ, pourra siéger au
7 parlement puisqu'elle a obtenu, elle a dépassé le seuil minimum de voies, 5
8 et 11 %. La liste spéciale du HDZ a remporté 90,02 % des voies de la
9 diaspora et 97 012 électeurs vivant en dehors de Croatie ont voté pour les
10 candidats du HDZ."
11 Il me semble donc assez clair qu'il y avait un seuil qui avait été fixé, un
12 pourcentage minimal et que seule la liste spéciale du HDZ est parvenue à
13 dépasser ce seuil et de ce fait, en fait elle a remporté 90 % des voies.
14 C'est pour cette raison qu'il y a donc 12 parlementaires qui ont été élus
15 par la diaspora. Pour moi, c'est clair.
16 M. STRINGER : [interprétation] Merci.
17 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je pourrais passer à autre chose, mais juste
18 pour terminer, est-ce que vous faisiez partie des 12 députés qui ont siégé
19 au parlement et qui représentaient les Croates ne vivant pas en Croatie,
20 disons la diaspora croate ?
21 R. Oui, j'ai été élu.
22 Q. Et vous étiez membre du HDZ, n'est-ce pas, quand vous siégez au Sabor ?
23 R. Oui, mais plus tard. Vous savez au moment où j'étais élu, j'étais
24 encore à Sarajevo et j'ai dû quitter le poste d'ambassadeur à Sarajevo pour
25 pouvoir occuper mon poste au parlement. Autrement, c'était mon supplément
26 au parlement qui devait siéger.
27 Q. Ce qui nous amène à une question intéressante. Il me semble d'ores et
28 déjà, vous nous avez dit que vous étiez membre du HDZ au moment où vous
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1 étiez ambassadeur; cependant, est-ce que vous étiez membre du HDZ quand
2 vous étiez ambassadeur ?
3 R. Oui, c'est exact.
4 Q. Et vous étiez membre du HDZ de Croatie ou de HDZ de Bosnie-Herzégovine
5 ?
6 R. Écoutez, je n'étais pas citoyen de Bosnie-Herzégovine, j'étais membre
7 du HDZ de Croatie.
8 Q. Vous avez quitté le poste d'ambassadeur de Croatie en Bosnie-
9 Herzégovine, à ce moment-là, vous êtes retourné en Croatie, à un autre
10 titre. A ce moment-là, vous étiez député, membre du parlement.
11 R. C'est exact. Mon siège au parlement Sabor m'attendait.
12 Q. Et donc, vous avez siégé au parlement alors que vous n'aviez jamais
13 habité en Croatie; c'est bien exact ?
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander quelle est
15 la pertinence de toutes ces questions ? Je ne vois vraiment pas la
16 pertinence. Pourquoi est-ce que c'est pertinent le fait de savoir qu'il n'a
17 jamais habité en Croatie, s'il existe une procédure, une règle
18 constitutionnelle qui permet à des gens représentant la diaspora de siéger
19 au parlement ? Je ne vois pas la pertinence de la question. Ça ne me gène
20 pas que M. Stringer perde son temps, mais je voudrais bien savoir où est la
21 pertinence. Je ne vois pas le rapport avec les questions qui nous
22 intéressent ici.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas un problème de pertinence mais c'est un
24 problème juridique. Il semblerait que la diaspora puisse élire des députés
25 les représentant. Et il y en a 12 dans ces conditions. Les textes que nous
26 n'avons pas font-ils obligation pour ceux qui sont élus d'habiter en
27 Croatie ou d'habiter ailleurs. On ne sait pas, là, vous procédez par une
28 affirmation mais vous allez à la pêche à l'information ou vous le savez
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1 vous-même ?
2 M. STRINGER : [interprétation] Je crois que j'ai obtenu les informations,
3 les éléments dont je souhaitais obtenir, Monsieur le Président.
4 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
5 si vous le permettez, puisque déjà il y a eu une interruption. J'ai une
6 objection à soulever. Ce débat qui porte sur des solutions existantes au
7 sein d'un système étatique exige qu'on aie des connaissances préalables, et
8 exige également de disposer des textes de lois en vigueur à l'époque. Si
9 nous sommes en train de discuter de cette question qui, à mon avis, est une
10 question de nature juridique très complexe, qui était en vigueur en Croatie
11 à l'époque et je pense que cette situation a existé et existe toujours
12 ailleurs dans d'autres pays. Je suis sûr qu'on ne peut pas discuter de
13 cette question sur la base seule de cet article de la BBC. Et puis, le
14 témoin n'en a pas parlé pendant l'interrogatoire principal et en plus, il
15 n'est pas juriste. Donc, il n'est pas qualifié de pouvoir discuter les
16 aspects juridiques de cette question. Tout cela c'est une -- je ne sais
17 pas, de toute façon ce n'est pas une approche appropriée à -- à cette
18 question. Si le Procureur souhaitait bâtir ou tirer des conclusions sur la
19 volonté de l'état croate, de laisser les gens venant de l'étranger diriger
20 des [imperceptible] de terrain en Bosnie, alors, ça c'est une autre chose
21 et il n'a qu'à le prouver en utilisant des documents qui existent -- des
22 textes. Mais il ne faut pas s'appuyer, sur des articles, des personnes non
23 qualifiées ou les histoires des garçons dans des restaurants pour discuter
24 des choses comme ça.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais aucune discussion n'a été
26 soulevée. La Défense a soulevé une objection et j'aimerais demander à M.
27 Stringer de répondre quant à la pertinence de ces questions de faits que
28 vous avez posé au témoin. Ce serait peut-être utile.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge, de me permettre de
2 ce faire. Dans le cadre de cet interrogatoire principal, ce n'est pas
3 réellement compliqué. De toute façon, je n'avais pas l'intention de le
4 faire. S'agissant de cet interrogatoire principal, le témoin a dit qu'il
5 est devenu membre du parlement croate. Le but de cette question est
6 simplement de savoir s'il peut nous parler des circonstances dans
7 lesquelles il est devenu membre d'un parlement croate, étant une personne
8 qui n'a jamais vécu dans le pays en question mais néanmoins était nommé
9 ambassadeur de ce pays. Simplement, voilà également eu égard à ce qu'on
10 entendu dans le cadre de l'interrogatoire principal, en fait, je suis prêt
11 à passer à autre chose, à moins que le conseil ne souhaite --
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [hors micro]
13 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
14 M. STRINGER : [interprétation] Très bien.
15 Q. Monsieur l'Ambassadeur, j'aimerais que l'on parle brièvement de la
16 période pendant laquelle vous étiez ambassadeur avant de passer à autre
17 chose. Je vous demanderais de prendre votre classeur et de trouver la pièce
18 1D 903 -- il s'agit de la pièce 10393.
19 Monsieur l'Ambassadeur, vous avez sous les yeux l'original. Il s'agit d'un
20 texte manuscrit composé de deux pages. Vous pouvez peut-être brièvement, le
21 passer en revue et nous dire si c'est bien votre texte.
22 R. Je le reconnais, mais avant, vous avez dit que, moi, je n'ai jamais
23 vécu en Croatie, ce n'est pas exact. Jusqu'à l'âge de 14 ans, j'ai vécu en
24 Croatie.
25 Q. D'accord. Très bien. Merci de cette correction. Vous avez tout à fait
26 raison; désolé d'avoir fait cette erreur.
27 Pour revenir au document 10393, vous nous avons parlé hier des difficultés
28 que vous avez eues dans le cadre de votre nomination, alors que vous étiez
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1 ambassadeur en Bosnie-Herzégovine, et il semblerait que, dans cette lettre,
2 vous parlez de ces difficultés que vous avez rencontrées. Avec votre
3 permission, j'aimerais vous donner lecture de certains passages de cette
4 lettre.
5 D'abord, dites-nous; est-ce que vous vous souvenez d'avoir écrit cette
6 lettre ? C'est une lettre de démission en date du
7 5 juillet 1993 ?
8 R. C'est exact.
9 Q. Bien. Alors, vous avez démissionné, vous avez donné votre lettre de
10 démission au président Tudjman par le biais de M. Granic, à l'époque,
11 n'est-ce pas ?
12 R. C'est exact.
13 Q. Et dites-nous, s'il vous plaît, la chose suivante : au paragraphe que
14 vous avez énuméré comme étant le paragraphe numéro 1, vous parlez de ce
15 dont vous nous avez parlé hier, votre statut. Vous avez dit que vous étiez
16 ambassadeur itinérant; est-ce que c'est de ceci que vous parliez dans ce
17 paragraphe de votre lettre ?
18 R. Voyez-vous cette lettre a été écrite le 5 juillet 1993, au moment où M.
19 Mate Granic a été nommé au poste de ministre. Jusqu'alors, c'est M.
20 Skrabalo qui était ministre des Affaires étrangères. Pendant sa mission, M.
21 Skrabalo, j'ai été un ambassadeur itinérant. Quand M. Granic a pris sa
22 fonction, la question de l'ambassade n'avait pas encore été résolue. Moi,
23 je m'apprêtais à ouvrir notre ambassade à Medjugorje; cependant, sur la
24 liste de
25 M. Granic, j'ai été encore considéré comme stagiaire, alors que j'avais
26 déjà été ambassadeur itinérant. Et comme il me considérait comme
27 ambassadeur stagiaire, j'ai écrit cette lettre de protestation à leur
28 disant, si vous considérez que j'étais encore ambassadeur stagiaire, ce
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1 n'est pas exact, et le président Tudjman et M. Granic ont réagi
2 immédiatement en présentant leurs excuses, en expliquant qu'il s'agissait
3 d'une erreur relevant de l'administration interne du ministère des Affaires
4 étrangères; de sorte que j'ai retiré cette lettre.
5 Q. D'accord. Alors, quelques questions très rapides concernant cette
6 lettre; pourriez-vous, je vous prie, de nous donner des réponses brèves -
7 je sais que c'est difficile - mais dans la mesure où c'est possible,
8 essayez de répondre brièvement. On fait référence au paragraphe 1 à
9 l'ouverture d'une ambassade à Mostar. Est-il vrai que vous vouliez ouvrir
10 une ambassade croate à Mostar avant ou pendant cette période-là, en juillet
11 1993 ?
12 R. A l'époque, j'ai cherché l'endroit où j'allais pouvoir établir mon
13 ambassade. M. Izetbegovic, quand je lui ai demandé de le faire à Sarajevo,
14 m'a demandé de ne pas le faire, il m'a dit que les Serbes allaient le
15 détruire immédiatement. Il a suggéré que je m'établisse à Zenica avec mon
16 ambassade, alors, j'ai réfléchi à cette possibilité. Et j'ai passé en revue
17 différents lieux, y compris Mostar; cependant, à Mostar à ce moment-là il y
18 a déjà eu des problèmes, et donc, j'ai abandonné l'idée de Mostar et je me
19 suis rendu à l'endroit le plus calme, disponible, et c'était Medjugorje.
20 Q. Bien. Merci. Je crois que vous avez déclaré hier que vous avez établi
21 une ambassade à Medjugorje au mois d'août 1993, n'est-ce pas ?
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. Est-ce que c'est exact ? Je suis vraiment désolé de vous interrompre,
24 mais j'ai encore quelques -- enfin, j'ai encore d'autres questions --
25 R. Oui, mais je dois vous donner quelques explications. Quand il s'agit
26 d'ouvrir une ambassade on ne pouvait pas le faire du jour au lendemain.
27 Vous avez besoin d'avoir du personnel, les locaux, et cetera, donc, moi,
28 quand je vous parle du mois d'août, effectivement au mois d'août, j'ai
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1 travaillé de façon intense là-dessus. Mais l'ambassade a commencé à
2 fonctionner tant bien que mal à partir du moment où j'ai pu recueillir
3 suffisamment de personnels.
4 Q. D'accord. Merci. Donc, est-il exact de dire qu'hier, lorsque vous avez
5 parlé de la délivrance de passeport, de visas et d'autres certificats de ce
6 type, est-il exact donc de dire que ceci n'avait pas lieu avant l'ouverture
7 d'une ambassade à Medjugorje ?
8 R. C'est exact. Pendant que j'étais ambassadeur itinéraire, et bien, je ne
9 faisais pas de certificat. Je n'avais pas de personnel. Je n'avais qu'un
10 chauffeur, c'est tout, donc, c'était au cours des six premiers mois de
11 l'année 1992.
12 Q. Bien. Merci. Au paragraphe 2 de votre lettre, vous évoquez quelque
13 chose dont vous faites référence vers la fin de la lettre, et vous parlez :
14 "Des inefficacités et du manque de scrupule s'agissant du personnel du
15 ministère."
16 Donc, Monsieur, j'aimerais savoir si ce que vous exprimez dans cette
17 lettre; est-ce que vos opinions n'étaient pas transmis le long de la
18 hiérarchie ? Est-ce qu'on ne vous prenait pas suffisamment au sérieux ?
19 R. Non, ce n'était absolument pas le cas. Il se trouvait que c'était un
20 ministère relativement jeune puisque le ministère des Affaires étrangères à
21 l'époque n'existait que depuis quelques années. C'était une bureaucratie,
22 une administration, comme cela arrive partout, et cette bureaucratie
23 rendait le fonctionnement plus difficile. Moi, je faisais partie d'un
24 ministère des plus exposés, il fallait que je sois efficace. Et tout d'un
25 coup, vous avez les bureaucrates qui vous posent des questions; est-ce que
26 vous avez ceci, est-ce que vous avez cela, comment on va faire, et cetera ?
27 Et dans le deuxième paragraphe justement, je combats la bureaucratie plutôt
28 que d'autres choses parce que je viens d'un autre entourage. Je travaillais
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1 dans le district pétrolier où tout se passe de façon très efficace.
2 Q. Bien. Merci. Et je vais maintenant passer à la question des
3 nationalités croates. Vous en avez parlé hier un peu dans le cadre de votre
4 interrogatoire principal, et j'aimerais vous demander si vous avez encore
5 les classeurs de la Défense. J'aimerais appeler votre attention sur la loi
6 de la nationalité croate, il s'agit de la pièce 1D 02918.
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. Excusez-moi, Monsieur l'Ambassadeur, ce n'est pas là, en fait. C'est
9 dans l'un des classeurs d'hier, Mme l'Huissière les apportera sous peu.
10 R. Je pense que vous pouvez poser la question parce que j'ai des
11 connaissances à cela sur ce sujet.
12 Q. Merci. On vous a posé un certain nombre de questions hier concernant
13 les personnes qui pouvaient être qualifiées comme étant des émigrants en
14 vertu de l'article 11; vous souvenez-vous de cela ?
15 R. C'est exact.
16 Q. Lorsqu'on est un émigrant, c'est ce qui permet à une personne d'obtenir
17 la nationalité croate conformément à la loi, n'est-ce pas ?
18 R. C'est exact.
19 Q. En fait, je suis en train de regarder l'article 3 qui énumère
20 différentes façons dont on peut devenir un citoyen croate. D'abord, c'est
21 l'origine; pour ce qui me concerne, cela veut sans doute dire qui sont vos
22 parents. Une personne peut devenir un citoyen croate sur la base de la
23 citoyenneté des parents de la personne, alors, ça c'est l'un des critères.
24 Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour ce qui est de ce critère-là ?
25 R. Oui.
26 Q. Ensuite, un deuxième critère serait la naissance, donc une personne qui
27 est née sur le territoire peut également obtenir la citoyenneté de cette
28 façon-là, n'est-ce pas; et en troisième lieu, la naturalisation.
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1 R. C'est exact.
2 Q. Et la naturalisation se trouve à l'article 8 de la loi qui porte sur
3 les citoyens étrangers qui obtiennent la citoyenneté croate, n'est-ce pas ?
4 R. C'est l'article de base pour acquérir la nationalité par voie de
5 naturalisation.
6 Q. Oui. Justement, alors, hier la question s'est posée à savoir si les
7 Croates qui ont toujours habité en Bosnie-Herzégovine si ces derniers sont
8 des émigrants ou pas, et je crois que vous nous avez dit hier que les
9 Croates de Bosnie n'étaient pas des émigrants, donc, ils n'étaient pas
10 touchés par l'article 11.
11 R. C'est difficile d'expliquer ça en deux mots. Je vais essayer toutefois.
12 Qu'est-ce que vous voulez savoir ?
13 Q. Oui, certainement. Je vais vous poser un certain nombre de questions
14 car c'est un peu nébuleux pour ce qui me concerne. Voici c'était l'une des
15 questions pour les Croates de Bosnie : si un Croate de Bosnie veut obtenir
16 la citoyenneté croate, est-ce que cette personne pourrait le faire par le
17 biais de la naturalisation ?
18 R. Exact, parce que l'article 8 est un article de base; ensuite, on peut
19 passer aux articles 11 et 16, qui concernent aussi la naturalisation.
20 Q. En fait, vous avez déjà anticipé ma question suivante. En examinant
21 l'article 8, on peut lire au début de l'article : citoyens étrangers. Il y
22 a également d'autres passages qui font référence aux citoyens croates. Et
23 j'aimerais vous demander de nous dire quelle est la différence entre un
24 citoyen croate contrairement à un membre de la nation croate, dont on fait
25 référence à l'article 16. Y a-t-il une différence entre ces deux concepts ?
26 R. En ce qui concerne les définitions, les définitions ne sont pas très
27 claires dans tout le pays, quand il s'agit de définir la nation, la
28 nationalité et l'appartenance à un peuple. Dans ce sens, je dois dire que
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1 j'apprécie particulièrement la définition du
2 Dr Benjamin Aksin [phon], qui est professeur à l'université de Jérusalem,
3 qui est très clair là-dessus. Et si vous le souhaitez, je peux vous citer
4 ses idées.
5 Q. En fait, permettez-moi d'essayer de vous poser des questions sur le
6 sujet et j'espère que nous allons pouvoir comprendre les choses. Au bas de
7 l'article 16, on dit : les personnes on parle des personnes qui sont
8 membres de la nation croate qui doivent soumettre des déclarations écrites
9 au bureau consulaire de la République de Croatie à l'étranger. En d'autres
10 mots, un membre de la nation croate n'habitant pas en Croatie peut obtenir
11 la citoyenneté croate si ces personnes remplissent les conditions de
12 l'article 8, paragraphe 1, point 5; et/ou si cette personne fait une
13 déclaration écrite selon laquelle cette personne se considère comme étant
14 un citoyen croate. Et plus loin on peut dire que cette déclaration écrite
15 est envoyée à l'organe compétent ou au bureau consulaire ou diplomatique.
16 Donc, après que vous ayez établi l'ambassade à Medjugorje, est-ce que ces
17 déclarations écrites envoyées en vertu de l'article 16 faisaient partie des
18 documents qui vous avaient été donnés à l'appui des demandes de nationalité
19 croate ?
20 R. Si quelqu'un a tout fait conformément à l'article 8, la situation a été
21 claire. Si l'article 8 -- 3 ne s'appliquait pas, nous avions à notre
22 disposition deux autres articles en ce qui concerne la naturalisation :
23 l'article 11 qui concerne les émigrés et l'article 16 qui concernent les
24 non émigrants. Je pense que cela est clair.
25 Q. Bien. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que l'article 16
26 s'applique, par exemple, à une personne qui serait Croate de Bosnie ?
27 R. Je voudrais que quelque chose soit bien au clair. De quelle façon on
28 appliquait un article de la loi, c'était la décision qui appartenait au
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1 ministère des Affaires intérieures.
2 Q. [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Ambassadeur, cette question de
4 nationalité est une question juridique extrêmement complexe dans un bon
5 nombre d'états. Mais au travers de ce que vous avez dit, j'ai l'impression
6 - mais si je me trompe, vous me le direz - que, dans le système en vigueur
7 en Croatie, il y avait un mélange de trois situations : le droit du sol, le
8 droit du sang et la naturalisation.
9 Le droit du sol, on est Croate parce qu'on est né en Croatie, et à ce
10 moment-là, on est Croate.
11 Le droit du sang, on peut être Croate parce que ses parents sont
12 Croates ou ses grands-parents, arrière grands-parents sont Croates. Et dans
13 ce cas-là, quelqu'un qui est en Bosnie-Herzégovine peut-être depuis deux ou
14 trois générations, pourrait dire : mais mon arrière arrière grand-père
15 était Croate, donc, par le sang, je suis Croate; et à ce moment-là, il y a
16 la nationalité croate.
17 Et la troisième voie, c'est la naturalisation des personnes qui sont
18 dans d'autres situations par une procédure administrative demande la
19 naturalisation.
20 Alors, en vous dressant ce tableau, est-ce que je me trompe, est-ce que
21 j'ai raison, ou sur quel point, vous devez apporter une correction ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que vous avez tout à fait raison.
23 C'est exactement ce que je pensais, moi, comment -- comme cela que je
24 voyais les choses pendant que je travaillais comme ambassadeur. Nous avons
25 préparé les documents. Nous avons recueilli les demandes ou des
26 acquisitions de nature -- nationalité selon les cas et l'article qui était
27 appliqué pour à la fin donner -- accorder la nationalité à quelqu'un, cela
28 dépendait du ministère. Ce n'est pas l'ambassade qui en décidait de cela.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
2 Q. Monsieur l'ambassadeur, est-il exact que, par exemple, un Croate de
3 Bosnie, demandant une nationalité croate en 1993, aurait pu l'obtenir soit
4 par la naturalisation en vertu de l'article 8 ou en application -- ou
5 plutôt, en tant que membre de la nation croate qui fournit une déclaration
6 écrite en vertu de l'article 11 ?
7 R. -- vous parlez des Croates -- tout le temps vous parlez des Croates. En
8 ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, pour moi, les gens qui y habitaient
9 c'étaient les citoyens de Bosnie-Herzégovine. Qu'il s'agisse des Serbes,
10 des Croates, ou des Musulmans, ils pouvaient tous demander à acquérir la
11 nationalité selon cette loi. Il pouvait venir de n'importe quel pays du
12 monde, il pouvait demander à acquérir la nationalité. Est-ce qu'il va
13 l'obtenir vraiment, cette décision ne m'appartenait pas.
14 Q. Très bien. Merci. On vous a posé des questions sur cette loi, et c'est
15 la raison pour laquelle je vous pose ces questions, mais je vais vous poser
16 une question qui pourra peut-être élucider peut-être plus certains points.
17 Dans votre livre qui porte la cote
18 1D 02339, il s'agit de l'ouvrage que vous avez écrit, et pendant que
19 l'huissière -- Mme l'Huissière le cherche, il s'agit de la pièce
20 1D 02339, encore une fois, mais de nouveau, vous l'avez rédigé vous-même.
21 Donc, il n'est peut-être pas nécessaire de le trouver.
22 Je vais vous donner lecture d'un extrait du livre, et pour ce qui se trouve
23 à l'écran, en fait, je suis vers le bas de la page, je suis en train de
24 lire -- je vais lire le passage qui commence par : "Immediately,"
25 "Immédiatement après avoir remporté les élections, le président Tudjman a
26 commencé à parler d'une nouvelle politique nationale croate."
27 Monsieur l'Ambassadeur, je vous prie de m'interrompre si vous aimeriez
28 faire référence à certains passages de votre livre, plutôt que d'en donner
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1 lecture. Mais je vais continuer.
2 "-- eu égard aux circonstances et aux changements en Bosnie-Herzégovine au
3 cours des 50 dernières années, conformément à l'article 10 de la
4 Constitution de la République de Croatie qui dit littéralement ceci : 'La
5 République de Croatie protégera les droits et les intérêts de ces citoyens
6 habitant ou vivant à l'étranger, et fera en sorte que leurs liens
7 existeront avec la patrie. Les parties de la nation croate vivant dans
8 d'autres Etats obtiendront une garantie s'agissant de protection spéciale
9 par la République de Croatie'."
10 Et vous dites : "Et c'est ainsi que les Croates en BiH, indépendants du
11 fait qu'ils soient de nationalité croate ou non, ont la garantie qu'on
12 s'occupera d'eux et qu'ils seront protégés."
13 Est-ce que vous êtes d'accord que c'est ce que vous avez dit ou c'est ce
14 que dit l'article 10 de la constitution ?
15 R. Ceci est fondé sur l'article 10 de la constitution, mais, vous savez,
16 on peut toujours interpréter différentes façons les textes, par exemple, à
17 quoi se réfère exactement la première partie de l'article 10 et à quoi se
18 réfère exactement la deuxième partie de cet article, il faudrait tout
19 d'abord pouvoir définir ce que cela veut dire, ce qu'on entend par un
20 membre du peuple croate ? C'est quelqu'un qui s'identifie avec un groupe de
21 personnes appelées les Croates. Donc, c'est l'appartenance. Mais dans la
22 première partie de cette constitution telle que formulée dans la
23 constitution, on parle des nationaux, citoyens. Si vous êtes citoyen d'un
24 état, cet état doit s'occuper de vous tout comme moi je m'occupe des
25 citoyens croates aux Venezuela.
26 Q. Fort bien. Donc, en fait, essentiellement, je veux en venir à ceci.
27 Donc, le Dr Tudjman au cours du conflit 1992/1993, pendant la durée de
28 l'ensemble du conflit, il avait la responsabilité constitutionnelle de
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1 s'occuper des citoyens de Croatie ainsi que les ressortissants croates
2 vivant à l'extérieur de la Croatie; est-ce que c'est exact ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Et cette responsabilité, elle transparaît notamment dans la loi sur la
5 citoyenneté, peut-être, puisque dans cette loi on donne un vecteur un moyen
6 aux citoyens croates, ou aux ressortissants croates d'acquérir la
7 nationalité croate s'ils ne peuvent pas satisfaire à toutes les autres
8 conditions; est-ce bien exact ?
9 M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi, Monsieur le
10 Témoin. Là, on est en train d'ajouter un nouveau terme, "ressortissants
11 croates." Pour un Américain, comme moi, c'est un petit peu étrange parce
12 qu'il faut savoir que jusqu'à présent, on a parlé de "nation croate." Je
13 crois qu'il faut garder les mêmes termes; sinon, ça va entraîner une
14 certaine confusion.
15 M. STRINGER : [interprétation] C'est en effet assez juste comme
16 intervention. Je vais essayer d'utiliser le terme de "citoyens" pour ceux
17 qui sont citoyens et membres de la nation croate pour ceux qui font partie
18 de cette nation mais qui ne sont pas citoyens.
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, parce qu'on peut être membre de
20 la nation croate et être aussi citoyen de Croatie.
21 M. STRINGER : [interprétation] Bien sûr.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Donc, il faut être vraiment précis dans les
23 questions.
24 M. STRINGER : [interprétation] Je crois que je le suis, mais je vais faire
25 de mon mieux pour le rester parce que c'est quand même pas un sujet des
26 plus simples.
27 Q. Ma question porte sur cette disposition évoquant certaines parties de
28 la nation croate dans d'autres états --
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1 M. STRINGER : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est de faire la pause. On va faire une pause de 20
3 minutes, et puis après, nous reprendrons donc dans 20 minutes.
4 --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.
5 --- L'audience est reprise à 12 heures 55.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.
7 Monsieur le Procureur, vous avez la parole.
8 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je ne veux pas trop m'appesantir sur ce sujet,
10 mais encore deux ou trois dernières questions sur cette question de la
11 nationalité afin qu'on arrive à trouver un consensus éventuellement. Est-ce
12 que vous conviendrez avec moi qu'aux termes de la constitution croate, les
13 parties de la nation croate -- les membres de la nation croate - et là,
14 j'utilise les termes que je trouve dans votre livre - donc, des membres de
15 la nation croate qui se trouvent dans d'autres pays, est-ce que ces
16 personnes avaient bénéficié d'une protection spéciale de la part de la
17 République de Croatie ? Est-ce que vous reconnaissez que les membres de la
18 nation croate habitant les sphères de la Croatie étaient en droit ou
19 avaient le droit à une protection spéciale ?
20 R. C'est ce qui est indiqué dans la constitution croate. Excusez-moi.
21 Étant donné que c'est la loi suprême, s'il y a quelque chose
22 d'anticonstitutionnel dans d'autres lois, alors, tant pis pour ces autres
23 lois.
24 Q. C'est exact, c'est la constitution qui constitue le texte suprême ?
25 R. Oui.
26 Q. Est-ce que cette protection particulière, ce statut quelque peu
27 particulier, on voit transparaître dans la loi sur la citoyenneté ou il
28 semble qu'il y a une disposition particulière pour les membres de la nation
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1 croate ?
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi -- excusez-moi avant que le
3 témoin ne réponde. On est en train de lui demander son opinion juridique --
4 une conclusion juridique. C'est une question technique. Ce monsieur n'est
5 pas juriste, il n'est pas professeur de droit. Il n'est pas expert en
6 matière de constitution. Regardez, je vous prie, la question qui lui est
7 posée. On lui demande son opinion juridique, or, nous n'avons pas un témoin
8 expert en la matière.
9 M. STRINGER : [interprétation] Mais Me Karnavas a posé des questions
10 exactement semblablement aux miennes.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Ambassadeur, vous avez écouté le
12 problème. L'Accusation vous pose une question à aspect technique. L'avocat
13 qui vous a fait venir s'y oppose. J'ai cru comprendre mais je parle sous
14 votre contrôle que sur ces problèmes de citoyenneté; vous nous avez dit il
15 y a quelques heures de cela que c'était un sujet que vous connaissez bien
16 en raison de votre fonction d'ambassadeur et du fait qu'en tant que consul
17 à Caracas, vous vous êtes occupé des questions dites de nationalité ou de
18 citoyenneté. Alors, est-ce que vous êtes en mesure de répondre à des
19 questions concernant le droit applicable à des personnes qui sont
20 susceptibles d'avoir la nationalité croate ou pas ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux puisque je connais les
22 dispositions principales tout d'abord de la constitution et je connais
23 également les dispositions principales des lois qui me concernaient, qui
24 concernaient mon travail, lois sur la nationalité, de passeports, et
25 cetera, et cetera. Donc, j'ai une certaine idée sur ces questions-là. Mais
26 je dois dire qu'il n'est pas juste de me considérer ici comme un expert en
27 droit parce que je n'en suis pas. Je sais lire la constitution. Je sais
28 lire des lois et les comprendre, mais discuter l'essence des lois,
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1 interpréter à fond les lois, je ne peux pas le faire, en n'étant pas expert
2 en matière.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous ne comprenez pas une question, dites à celui
4 qui vous pose que vous ne comprenez pas; aussi, si vous ne savez pas
5 répondre, dites : je ne peux pas répondre parce que c'est trop compliqué
6 pour moi. Et en revanche, si vous pouvez répondre, répondez. Voilà.
7 Monsieur le Procureur, continuez.
8 M. STRINGER : [interprétation] Merci.
9 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je vais vous donner lecture de la question que
10 je vous ai posée avant l'objection.
11 Conviendrez-vous avec moi que la protection particulière -- non, je
12 reprends.
13 Cette préoccupation particulière -- cette protection particulière réservée
14 aux membres de la nation croate et qui est mentionnée dans la constitution,
15 est-ce qu'on la trouve -- on la retrouve dans la loi sur la nationalité ou
16 la citoyenneté ? Il semble y avoir une disposition bien particulière
17 réservée aux membres de la nation croate; l'article 16 ? Voilà la question
18 que je vous pose : la protection spéciale qui est prévue par la
19 constitution, est-ce qu'on la retrouve dans la loi sur la citoyenneté ?
20 R. Je dirais que, d'après ce que j'ai pu voir, je n'ai jamais pu établir
21 l'existence de contradiction entre la mort suprême, la constitution et
22 cette loi. Quant à l'application de la loi, alors, ce n'est pas que
23 l'ambassadeur et le corps diplomatique qui décident mais aussi le ministère
24 de l'Intérieur. Donc, là, les tâches sont réparties. Chacun doit faire sa
25 partie de travail. Ai-je bien répondu à votre question ?
26 Q. Pas vraiment. Vous utilisez le terme de "contradiction." Or, il me
27 semble qu'il n'y a pas de contradiction mais plutôt qu'il y a une certaine
28 concordance -- une certaine cohérence si on regarde l'article 10 de la
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1 constitution et l'article 16 de la loi sur les citoyennetés, que dans
2 chacun de ces articles, on mentionne expressément les membres de la nation
3 croate ?
4 R. Vous parlez maintenant de la première partie ou de la deuxième partie
5 de l'article 10 ?
6 Q. Je fais référence à la deuxième partie de l'article 10.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
8 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Messieurs les Juges, en toute
9 tranquillité, de manière raisonnable et courtoise, je refuse de participer
10 à ce procès avant qu'on en arrive à établir quels sont les torts de la
11 Croatie. C'est une matière absolument souveraine que personne n'a le droit
12 de remettre en question surtout pas de cette manière-là. Vous savez
13 s'agissant des opérations militaires, actions militaires, j'ai dû justifier
14 et justifier pour être autorisé à poser des questions, alors qu'ici, on
15 laisse quelqu'un remettre en question la souveraineté de l'Etat et ce qui
16 est son affaire propre. Permettez-moi de finir, permettez-moi, s'il vous
17 plaît --
18 M. LE JUGE ANTONETTI : -- je vais vous permettre de finir, Monsieur
19 Praljak. Justement ce matin, j'avais envie de vous poser la question parce
20 que la semaine dernière vous étiez intervenu de manière véhémente et M.
21 Coric dans la foulée a eu un problème. Je me suis demandé tout ce week-end
22 : mais pourquoi il y a eu ce type de réaction ? Je dois vous avouer que,
23 pour le moment, je ne vois pas le problème. Et j'attends qu'une chose, ce
24 soit que vous expliquiez où est le problème. A plusieurs reprises, vous
25 êtes intervenu là-dessus. C'est apparemment un sujet extrêmement sensible
26 pour vous mais dont moi je ne vois pas les tenants et aboutissants. La
27 dernière fois,
28 M. Scott avait posé donc une question, vous étiez intervenu. Et je voulais
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1 regarder à nouveau le transcript pour voir quelle était la question posée,
2 quelle était votre intervention. Là, M. Stringer est en train de parler de
3 la constitution, des articles de la loi. Bon, il fait son travail de
4 juriste en demandant au témoin des éclaircissements sur tel ou tel point.
5 Là-dessus, vous vous levez et vous dites, et vous avez peut-être raison,
6 moi, je ne vois pas le problème. Vous dites : je refuse de participer au
7 procès. Alors, pouvez-vous calmement - mais vous nous avez dit vous êtes
8 calme - pouvez-vous nous expliquer calmement quel est le problème que, moi,
9 je ne perçois absolument pas ? Pouvez-vous nous expliquer tranquillement
10 qu'est-ce qui provoque chez vous cette réaction lorsqu'on aborde des
11 problèmes de droit, à savoir si quelqu'un est citoyen, pas citoyen, comment
12 il peut être de nationalité croate, pourquoi ne l'est-il pas ? Le témoin
13 nous a dit, lui, ce n'est pas lui qui prend la décision mais c'est le
14 ministère de l'Intérieur alors peut-être qu'on aura quelqu'un du ministère
15 de l'Intérieur qui viendra nous expliquer ça mais avant cela expliquez-nous
16 calmement le problème que vous ressentez. Moi, je suis tout disposé à vous
17 écouter, expliquez-nous.
18 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, très volontiers,
19 très volontiers. Je vous expliquerai pourquoi je dis cela et pourquoi je ne
20 me sens pas en mesure à cause des problèmes de nature morale à poursuivre.
21 C'est l'essence même de cette affaire. Essayez d'imaginer, s'il vous plaît,
22 si quelqu'un se mettait ici à examiner la constitution française, et sur la
23 base de ces questions, de remettre en question la souveraineté du peuple
24 français, du peuple hongrois ou de la confédération suisse, de remettre en
25 question le droit de cette nation, de voter ses lois, et ensuite on se
26 retrouve dans des guerres, guerre d'Algérie, d'Irak, et cetera, et cetera.
27 Puis là, ensuite, vous vous retrouvez ici, puis ensuite, il y a un procès,
28 un procès biaisé et où on entend les questions du genre à la Croatie a-t-
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1 elle eu le droit de voter une telle et telle loi après
2 1 000 quelques années de tyrannie. Alors que les Hongrois tenaient le
3 territoire jusqu'à Rijeka; les Italiens jusqu'à Ljubljana, les Turcs
4 jusqu'à Zagreb et Sisak, et presque jusqu'à Vienne. Et en fin de compte,
5 quand un peuple, qui compte 4 millions et demie de citoyens, quand il a
6 enfin l'occasion de se défendre de tous ces tyrans, alors, il y a un procès
7 où les messieurs les américains se donnent le droit d'accuser quelqu'un,
8 d'accuser un état sur la base de lois qu'eux-mêmes ne respectent pas.
9 Ecoutez, je suis professeur d'éthique et de philosophie et je ne peux plus
10 participer à cela. Ce n'est plus une farce. C'est un burlesque. C'est
11 incroyable. On me fait venir ici et de répondre -- on me fait venir ici
12 pour répondre pour des actes et même pour les idées qui se sont incarnées
13 parfois dans mes paroles qui auraient pu causer un acte qui est illicite ou
14 qui va à l'encontre de la loi. Bon, on peut me juger pour ça mais qu'on
15 aborde maintenant des questions qui ont causé des souffrances de l'Europe
16 depuis une éternité, cette attitude impérialiste je ne peux pas supporter
17 ça. Prenez les choses entre vos mains, décidez, dites au Procureur : de
18 quoi parle-t-on ? Qui est accusé ici ? C'est moi ou la constitution croate
19 ? Est-ce que la souveraineté du peuple croate est sur le banc des accusés ?
20 Est-ce que la langue croate est sur le banc des accusés ? On peut combattre
21 quelques idées absurdes qui figurent dans cet acte d'accusation contre les
22 chaînes de télévision et ce quelles racontent. Mais ce qui se passe
23 maintenant, ça dépasse toutes les limites.
24 Et encore, s'il vous plaît, juste une phrase, Monsieur le Président,
25 Messieurs les Juges. Je suis complètement indifférent en fait de savoir si
26 je suis mort ou vivant, si je vais rester ici cinq ans, 20 ans, 30 ans, 50
27 ans, mais ce que je ne comprends pas c'est les gens qui participent dans
28 les procès farces qui sont là tout simplement pour me faire commander --
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1 condamner. Mais, vous savez, ce n'est même plus une farce, c'est un
2 burlesque, c'est un burlesque impérialiste qui est mené sans aucune
3 logique, et je ne suis pas prêt à y participer. Combien de temps ça
4 prendra, ça m'est égal, 100 ans, 300 ans, que j'en sorte vivant ou mort. Ça
5 m'est égal, ça m'est égal, je suis calme, je suis tranquille. Je vous
6 remercie de m'avoir écouté.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, peut-être que le Procureur va répondre, si
8 j'ai bien compris, et je vais résumer ce que vous dites.
9 Et là, je commence à comprendre pourquoi vous êtes -- vous avez voulu
10 manifester à plusieurs reprises. Vous semblez dire que, quand le Procureur
11 parle de la constitution ou des lois croates, il remet en cause le droit
12 souverain de votre pays à légiférer dans cette matière constitutionnelle ou
13 de nationalité. Et que s'il y a une constitution et des lois, ce n'est pas
14 au Procureur de les critiquer en quoi que ce soit, et qu'au travers des
15 questions qu'il pose au témoin, vous ressentez, vous, une critique de la
16 constitution croate et du droit qu'a votre peuple à édicter des lois, ne
17 serait-ce que les lois qui ont été édictées en 1991, 1992, 1993; donc,
18 c'est ça votre position que je commence à percevoir parce que jusqu'à
19 présent, j'ai eu du mal à comprendre cela, mais vous nous l'avez expliqué
20 calmement et je perçois cela.
21 Alors, c'est une mise en cause du Procureur, c'est à lui de répondre.
22 Monsieur Stringer.
23 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président --
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que la Chambre doit
25 répondre également. Je suis désolé, sauf votre respect, Monsieur Praljak,
26 je pense que vous êtes victime d'un malentendu extrêmement profond. Parce
27 que, moi, je n'ai rien entendu mais vraiment rien qui puisse du point de
28 vue d'une personne ayant suivi une formation juridique. Je n'ai rien
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1 entendu vraiment rien qui puisse être considéré comme une critique de la
2 Croatie, ou même de la législation croate. Moi, dans mon interprétation --
3 dans mon compréhension du débat qui se déroule devant nous - et bien
4 entendu, je peux me tromper et qu'on me corrige si je me trompe - mais,
5 moi, ce que j'ai compris, c'est qu'on s'est interrogé sur savoir comment la
6 législation était conçue, comme elle était appliquée, ce qu'elle
7 signifiait, et cetera ? Et dans le cadre de l'entreprise criminelle commune
8 de cette charge de l'Accusation, l'Accusation va essayer de démontrer qu'il
9 y a eu pratique discriminatoire dans l'application de la législation pour
10 les membres de la nation croate vivant en Bosnie-Herzégovine. Voilà. Bon,
11 c'est une supposition que je fais. Mais pour l'instant, les choses étant de
12 qu'elles sont voilà comment je comprends les questions posées par
13 l'Accusation.
14 Mais je voudrais vous assurer que pour nous en ce qui nous concerne - et je
15 pense que c'est un point de vue qui est partagé par tout le monde - il ne
16 s'agit nullement d'une attaque menée contre la Croatie. Il ne s'agit pas
17 d'essayer de remettre en cause, de miner de saper la souveraineté de la
18 République croate, non, rien de tel. Et je suis vraiment désolé de voir que
19 vous avez vraiment l'air d'être blessé, blessé personnellement, mais
20 croyez-moi, croyez nous, Juges de la Chambre, mes collègues partagent mon
21 opinion, ce n'est -- c'est un malentendu de votre part, rien ne peut
22 confirmer le fait qu'il y ait une attaque morale, juridique ou historique
23 contre la Croatie dans les débats qui se déroulent devant nous.
24 Monsieur Praljak, je crois que nous vous avons suffisamment entendu et
25 qu'il convient maintenant, comme l'a dit M. le Président, de donner la
26 parole à M. Stringer.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Stringer.
28 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas
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1 grand-chose à dire en réponse à M. Praljak. Tous ces documents ils nous ont
2 été communiqués par la Défense pour son interrogatoire principal, et il
3 s'agit de sujets qui ont tous été abordés pendant l'interrogatoire
4 principal; ça c'est la service militaire chose. Et puis, moi, je suis ici
5 pour représenter l'Accusation. Je ne suis nullement ici pour juger un pays.
6 Je ne suis pas ici pour remettre en question la souveraineté d'un pays, je
7 ne suis pas ici non plus pour critiquer sa constitution. Mais je suis en
8 droit de demander comment la constitution s'applique aux lois adoptées,
9 comment la constitution croate et cette législation affecte la politique de
10 la Croatie, et pendant le conflit. Voilà où ce que j'essaie de mettre en
11 évidence, et je vais continuer à le faire. Je suis désolé que certains
12 soient blessés. Mais ce n'est absolument pas mon intention; la constitution
13 dit ce qu'elle dit, la loi dit ce qu'elle dit. Et je suis en droit de poser
14 des questions à ce témoin de lui demander de faire des observations sur ce
15 point. Puisqu'il a manifesté la volonté de le faire très clairement.
16 Et je souhaiterais pouvoir poursuivre avec l'autorisation de la
17 Chambre de première instance.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Poursuivez.
19 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais reprendre
20 certains termes du général Praljak, qui a été peut-être plus succinct que
21 je n'aurais pu l'être.
22 Q. Je ne suis nullement en train de remettre en question l'histoire
23 croate, tout ce qui a amené à la mise en place d'un Etat croate
24 indépendant, une Croate si indépendante. Le général Praljak a fait
25 référence à cette histoire -- cette longue histoire, et il a fait référence
26 à 4 millions et demi de personnes, qui finalement ont eu la possibilité de
27 se prendre en main -- de prendre en main et de se protéger eux-mêmes.
28 Et sans porter de jugement de valeur quel qu'il soit, une question -- une
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1 question neutre; ce droit de se protéger eux-mêmes -- de s'occuper d'eux-
2 mêmes, est-ce que ce n'est pas ce qui transparaît dans l'article 10 de la
3 constitution, le fait que la Croatie protège -- s'occupe des membres de la
4 nation croate quel que soit le lieu où ces personnes résident ?
5 R. -- réponse à cela ? Alors, oui, oui. C'est la réponse sur l'article 10
6 de la constitution de la République de Croatie prévoyant que les membres de
7 la nation croate qu'il faut s'occuper très particulièrement de ces
8 personnes-là. C'est tout.
9 Q. Alors, lorsque vous êtes allé en Bosnie-Herzégovine, n'est-il pas exact
10 de dire que vous en tant qu'ambassadeur étiez en train de vous occuper des
11 intérêts de ces derniers, et vous étiez préoccupé par la protection du
12 peuple croate qui se trouvait en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Très bien.
15 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Stringer, désolé de vous
16 interrompre. Je souhaiterais pouvoir poser une question de suivi, cette
17 question a trait à un document qui a déjà été abordé aujourd'hui, il s'agit
18 d'un document qui est présenté par l'Accusation, le numéro de ce document
19 est le suivant, P 00089, donc, P 00089, il s'agit en effet d'un transcript
20 présidentiel relatif à une réunion qui a eu lieu le 27 décembre 1991.
21 Je dois admettre que vous, Monsieur l'Ambassadeur Sancevic, n'étiez pas
22 présent, mais outre les dirigeants de la République de Croatie, il y avait
23 tous les membres dirigeants de Bosnie-Herzégovine, comme il est indiqué
24 ici, il y avait Mate Boban, Bozo Rajic, Dario Kordic, et Ignac Kostroman,
25 ils étaient tous là. Dans ce document, vous trouverez à la page 21, lorsque
26 le secrétaire Ignac présente -- ou plutôt, a informé les dirigeants de
27 Herceg-Bosna de la réunion. A la page 21, au point 2, il dit, je le cite :
28 "La Communauté croate d'Herceg-Bosna a de nouveau confirmé la volonté de
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1 l'ensemble du peuple croate d'Herceg-Bosna, exprimé le 18 novembre 1991 à
2 Grude, prenant la décision historique d'établir la Communauté croate
3 d'Herceg-Bosna, s'il sert de base juridique pour l'entrée de ces
4 territoires dans la République de Croatie."
5 Et au point 3, on peut lire : "Et je crois qu'il y a, en fait, un lien ici
6 entre les politiques territoriales et la question relative à la
7 nationalité, aux citoyennetés."
8 Je cite ici : "La Communauté croate d'Herceg-Bosna reconnaît une
9 pleine légitimité, le Dr Franjo Tudjman, en tant que président de la
10 République de Croatie et président de l'Union démocratique serbe croate,
11 pour promouvoir les intérêts de la Communauté croate d'Herceg-Bosna se
12 trouvant parmi les acteurs internationaux et au cours des accords inter
13 républicains sur l'établissement des frontières définitives de la
14 République de Croatie."
15 Et je souhaiterais dire que la dernière -- répéter la dernière phrase
16 : "…donc, d'établir les rapports inter -- entre les républiques et la
17 création des frontières définitives de Croatie."
18 Sachant que vous n'étiez pas là, vous n'étiez pas présent à cette réunion,
19 j'aimerais savoir cette réunion présidentielle si vous voyez un lien
20 quelconque entre les questions de nationalité ou citoyenneté tel que
21 stipulé par la constitution de Croatie et, bien sûr, par la loi sur la
22 citoyenneté ainsi que le lien qui pourrait exister entre la Communauté
23 peuple croate d'Herceg-Bosna et l'acceptation par le HD HZ, que le
24 président de la République de Croatie a tous les droits légitimes lorsqu'il
25 promeut les intérêts de la Communauté croate de Bosnie-Herzégovine ? Voici
26 ma question. J'aimerais savoir si vous pourriez nous donner votre opinion
27 là-dessus. Merci.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'on est en train de nouveau de
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1 confondre deux concepts, le concept des relations entre les états et le
2 Herceg-Bosna. Moi, j'étais le représentant de l'Etat croate et j'étais
3 ambassadeur auprès de la République de Bosnie-Herzégovine. Je n'ai pas été
4 nommé pour représenter qui que ce soit devant la Communauté croate
5 d'Herceg-Bosna. La Communauté croate d'Herceg-Bosna faisait partie de la
6 République de Bosnie-Herzégovine, et en tant que l'ambassadeur, je
7 m'adressais aux personnes les plus haut placées de la République de Bosnie-
8 Herzégovine puisque la République de Bosnie-Herzégovine existait et à
9 l'intérieur de cette République, il y avait ce qui avait. Bon, ce sont des
10 faits, très bien.
11 Et deuxièmement, il est absolument faux de dire que je devrais moi,
12 maintenant répondre pour les actes de M. Ignac Kostroman et pour sa
13 position. Ça c'est son avis et je n'ai rien a à voir avec les positions
14 exprimées par M. Kostroman. Il y aurait pu faire tout ce qu'il voulait,
15 dire tout ce qu'il voulait mais au niveau des relations entre la République
16 de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine, ses positions sont
17 complètement sans pertinence pour moi. Ça sort complètement de mes
18 attributions. Si je disais quelque chose à ce sujet-là, alors, ça se serait
19 de l'intervention aux affaires internes de l'Etat bosniaque. Essayez de
20 comprendre, s'il vous plaît, que je me fusse là-bas en tant que
21 représentant de la République de Croatie. J'étais là-bas pour mettre en
22 œuvre la politique croate de la République de Croatie à l'égard de la
23 République de Bosnie-Herzégovine, et mon intention n'était absolument pas
24 de me mêler dans les affaires intérieures de la République de Bosnie-
25 Herzégovine; et M. Kostroman, lui, libre à lui de dire tout ce qu'il
26 voulait.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question par rapport à la
28 question de mon collègue qui allait au cœur des choses. Mon collègue a lu
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1 un extrait qui montre que le 18 novembre 1991 ait créé le conseil croate
2 constitué de plusieurs représentants des territoires, et cela à Grude. Et
3 c'est eux qui décident le
4 18 novembre 91, alors que la Bosnie-Herzégovine ne sera reconnue
5 internationalement qu'en 1992. C'est eux qui décident de constituer cette
6 communauté. Dans le texte, il est dit - et j'appelle votre attention sur ce
7 petit paragraphe - que ça servira de base légale d'entrer de ces
8 territoires dans la République de Croatie. Alors, quand on voit ce texte,
9 on a l'impression que l'impulsion est venue de ces territoires de la
10 Bosnie-Herzégovine qui fait cette déclaration et qui reconnaisse M. Tudjman
11 comme le président qui pourra mettre en valeur ou mettre en place leur
12 aspiration profonde.
13 Alors, vous qui avez été ambassadeur en 92, je présume que vous avez dû
14 rencontrer des représentants des différentes municipalités, peut-être avez-
15 vous rencontré M. Kordic, je n'en sais rien. Mais vous avez dû rencontrer
16 des hommes politiques locaux; est-ce que dans les contacts que vous avez
17 eus avec ces gens vous aviez eu ou pas parce que ma question, elle, va être
18 très ouverte : est-ce que vous avez eu le sentiment que ce mouvement croate
19 en Bosnie-Herzégovine concrétisé par le HVO est venu comme un mouvement
20 spontané des Croates de Bosnie-Herzégovine et c'est eux qui sans demander
21 de l'aide de quiconque ont décidé de créer cette entité, ou bien, dans les
22 contacts que vous avez eus avec eux, il peut y avoir une autre
23 raison ? Qu'est-ce que vous pouvez nous dire ? Puisque vous avez été sur le
24 terrain comme ambassadeur et vous êtes peut-être bien placé pour nous
25 donner un avis sur cette question.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Hier, j'ai dit quelque chose, quelque chose
27 que j'ai appris de la constitution, de statut, si vous voulez, de l'Herceg-
28 Bosna. C'est là que j'ai lu cela. Et là-bas, on ne [imperceptible] pas du
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1 tout les frontières, et j'ai dit de façon très catégorique, l'Herceg-Bosna
2 n'avait pas des frontières, pas du tout. Je ne vois pas de quoi parle M.
3 Kostroman. Il parle d'un territoire, des frontières; moi, je ne vois pas de
4 quoi il parle. Mais de l'autre côté, je n'avais pas rentré dedans parce
5 que, si vous avez une communauté appelée en 1991, la Communauté croate de
6 l'Herceg-Bosna, qui a été créée en 1991 selon les critères que l'on connaît
7 aujourd'hui, et s'il y a des Croates en Bosnie-Herzégovine qui
8 souhaiteraient se réunir avec la Croatie. Il y a des Croates qui -- il y a
9 des Serbes en même temps qui voudraient se réunir avec la Republika Srpska
10 et puis il existe des Musulmans qui voudraient avoir des rapports plus
11 proches, plus étroits avec certains pays islamiques. Moi, je n'ai rien à
12 dire là-dedans. Chacun a le droit d'avoir son point de vue, son opinion.
13 Mais, moi, je ne m'exprime pas en ce moment en vous donnant mon opinion;
14 moi, je parle des faits généraux. Ce que j'ai dit c'est la vérité, ce sont
15 les faits puisque vous m'avez demandé de dire la vérité. Moi, ici, je vois
16 qu'un certain M. Kostroman exprime son point de vue, ses souhaits -- il
17 fait part de ses souhaits.
18 Moi, je pense que j'ai dit clairement quelle était la politique de l'Etat
19 croate parce que, moi, en tant que son représentant en Bosnie-Herzégovine,
20 je ne peux pas me considérer l'ambassadeur de la Communauté croate de
21 l'Herceg-Bosna. Non, ce n'est pas du tout le cas. Moi, je représente les
22 intérêts d'un état vis-à-vis d'un autre état par -- à l'égard d'un autre
23 état. Et cela étant dit, je peux vous dire ouvertement que je n'ai jamais
24 voulu parler officiellement avec les représentants de la Communauté croate
25 de l'Herceg-Bosna, sauf s'il s'agissait de ses rapports avec la Bosnie-
26 Herzégovine parce que là, on aurait eu une politique à double visage. Et je
27 n'ai jamais voulu entrer dans ces zones puisque ma position était toujours
28 très claire. Ma position à l'égard de la Bosnie-Herzégovine, c'est le
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1 rapport d'un état indépendant avec un autre état indépendant. Quelle est
2 vraiment la situation à l'intérieur de cet état ? Comment évoluent les
3 choses, la politique, soit du point de vue ou du côté de la communauté
4 internationale qui a fait toute une série de propositions pour résoudre la
5 situation en Bosnie-Herzégovine qui était fortement appuyée, d'ailleurs,
6 par l'Etat croate. Et puis je veux bien croire qu'en Bosnie-Herzégovine il
7 y avait des gens qui pensaient comme M. Kostroman, mais cela ne me regarde
8 pas, c'est à eux d'en décider. Moi, tout ce qui m'intéressait, c'était
9 quelle -- c'était la politique de l'Etat croate à l'égard de l'Etat de
10 Bosnie-Herzégovine.
11 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je souhaiterais remercier M.
12 l'Ambassadeur Sancevic pour ses réponses. Je ne vais pas insister plus
13 longuement sur cette question, mais je voudrais dire que, conformément au
14 compte rendu, au PV, les -- les points de vue exprimés là ne sont pas les
15 points de vue personnels d'Ignac Kostroman, mais comme le dit le compte
16 rendu d'audience, c'était des extraits issus du PV de la 2e Session
17 régulière de la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna lors de
18 la session avec les membres de la BH HDZ, et cetera, et cetera. Et c'est
19 une session élargie qui a eu lieu le 23 décembre 1991 à Tomislavgrad. C'est
20 bien de cela que nous parlons; nous ne parlons pas d'une personne ou du
21 point de vue individuel ou personnel de M. Ignac Kostroman. Merci.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste une dernière question dans la suite de ce que
23 vous avez dit. Et tout le monde comprend que vous étiez l'ambassadeur de la
24 Croatie en Bosnie-Herzégovine et nous comprenons que vous avez présenté vos
25 lettres de créance à
26 M. Izetbegovic. Mais j'ai cru comprendre, dans ce que vous avez dit, que
27 vous n'aviez pas eu de contact avec la -- la Communauté croate qui s'était
28 constituée. Est-ce dire -- et ma question va être très précise parce que
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1 mon temps est précieux, comme le vôtre, et je vais tout de suite au cœur du
2 sujet.
3 Est-ce dire que vous n'avez pas été voir M. Mate Boban pour vous
4 présenter à lui ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Mis à part que j'ai été l'ambassadeur de
6 la République de Croatie en Bosnie-Herzégovine, mais mis à part cela,
7 j'étais un homme libre. Donc, je pouvais parler avec d'autres personnes.
8 Mais ce que j'ai dit, c'est que je n'ai pas eu de contacts officiels entre
9 moi en tant qu'ambassadeur et avec les membres d'une organisation interne à
10 la Bosnie-Herzégovine. C'est cela que je voulais dire. Je n'ai pas dit que
11 je les fuyais. Non, je les rencontrais même dans ma rue et j'ai discuté
12 avec eux. Et d'ailleurs, j'ai voulu savoir comment ils sont, mieux les
13 connaître pour pouvoir en référer chez moi en Croatie puisqu'il y avait des
14 gens qui avaient certaines ambitions. Alors, quelle importance accorder à
15 cela ? Parce qu'il s'agit de l'année 1991, les scénarios varient au jour le
16 jour. Moi, je vous ai dit qu'il y a eu des scénarios différents qui ont pu
17 avoir une certaine influence sur la politique officielle croate. Mais de
18 l'autre côté, vous avez des constantes qu'il ne fallait jamais -- qu'il ne
19 fallait pas abandonner. Il fallait les respecter. Et je pense que M.
20 Karnavas m'a posé quelques questions à ce sujet. Et d'ailleurs, cela figure
21 dans mon livre. Clairement, je les ai énumérées, j'ai dit ce qui était mes
22 préoccupations de Bosnie-Herzégovine. Parmi ces choses-là, il y avait la
23 préservation de l'indépendance de la République de Bosnie-Herzégovine.
24 Donc, de façon définitive, on peut dire que j'ai appliqué une politique
25 constante qui s'est avérée être constante par la suite de la République de
26 Croatie à l'égard de la Bosnie-Herzégovine. Peu importe ce que ce monsieur
27 en Bosnie-Herzégovine souhaitait un jour ou un autre, moi, j'ai informé M.
28 Tudjman des événements. Cela étant dit, cet incident en particulier, je ne
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1 sais même pas si j'étais en Croatie, à ce moment-là. Quelle était la date,
2 déjà ? Excusez-moi, je n'ai pas très bien suivi. Quelle était la date de
3 cela ?
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Le 17 décembre 1991.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, là, je me lance dans
6 quelque chose où vraiment je n'ai -- je n'avais rien à faire. Cela ne me
7 concernait aucunement. Je ne jouais aucun rôle là-dedans.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je me suis trompé, le 27 décembre
9 1991.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, il vous reste trois ou quatre
11 minutes. Trois minutes, 31 secondes.
12 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, la question, qui a
13 été abordée -- ou évoquée par le Juge Prandler, est une question que
14 j'allais aborder moi-même, mais je crois que j'aurais besoin de plusieurs
15 minutes pour reprendre là où on s'est laissés. Donc je crois qu'il serait
16 peut-être mieux d'en terminer là aujourd'hui et de reprendre demain.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
18 Maître Kovacic.
19 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, un petit instant, s'il
20 vous plaît, puisqu'il allait terminer plus tôt. Par rapport à ce que vous
21 avez dit au sujet du temps que nous avons dépensé aujourd'hui, nous, nous
22 avons dépensé trois ou quatre minutes, mais je considère encore qu'il
23 s'agit là d'un contre-interrogatoire puisque c'était lié au thème et je
24 propose que vous ne le déduisez pas du temps qui nous est alloué, dépendant
25 qu'aucun autre conseil de la Défense ne pose aucune question.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre va délibérer sur cette question, et je ne
27 peux pas vous répondre à titre personnel puisque c'est une décision de la
28 Chambre. Donc, on -- on vous le -- on vous le dira, rassurez-vous.
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1 Alors, Monsieur le Témoin, je vous renouvelle les consignes d'hier donc pas
2 de contact avec quiconque avant donc demain, puisque nous nous retrouvons
3 demain à 9 heures.
4 J'indique au Procureur qu'il a utilisé 49 minutes. Donc, il lui reste
5 beaucoup de temps encore, et donc, nous vous écouterons demain. Je vais
6 donc libérer la salle puisque, moi, dans quelques minutes, j'ai un autre
7 procès. Je vous remercie.
8 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mercredi 28 mai
9 2008, à 9 heures 00.
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