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1 Le lundi 16 juin 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
8 toutes les personnes ici présentes. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre
9 Prlic et consorts. Merci.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce lundi, 16 juin 2008, je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les
12 avocats, Mmes et MM. du bureau du Procureur ainsi que toutes les personnes
13 qui nous assistent.
14 Je vais en premier lire une décision orale. Ça va être un peu long mais je
15 vais essayer d'aller vite. Décision orale relative au dépôt par la Défense
16 Praljak du rapport d'expertise de Slobodan Jankovic.
17 Le 9 mai 2008, la Défense de l'accusé Praljak a sollicité de la Chambre
18 l'admission de deux rapports d'expertise de M. Slobodan Jankovic intitulés,
19 je cite : "Analyse de l'artillerie du HVO, Conseil de Défense croate dans
20 le secteur de Mostar." Et, je cite : "Analyse de la destruction du vieux
21 pont sur la base des enregistrements vidéo disponibles conformément à
22 l'article 94 bis du Règlement."
23 Le 27 mai 2008, la Défense Praljak a retiré le rapport intitulé, je cite :
24 "Analyse de l'artillerie du HVO, Conseil de Défense croate dans le secteur
25 de Mostar." Par réponse, en date du 5 juin 2008, l'Accusation s'est opposée
26 à l'admission du rapport intitulé : "Analyse de la destruction du vieux
27 pont sur la base des enregistrements vidéo disponibles" et a contesté la
28 qualité d'expert de M. Slobodan Jankovic ainsi que la pertinence de ses
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1 conclusions.
2 Selon l'Accusation, le témoin s'est formé son opinion uniquement sur la
3 base d'un examen visuel de l'enregistrement vidéo de la destruction du
4 vieux pont de Mostar. L'Accusation a, par ailleurs, demandé de pouvoir
5 mener le contre-interrogatoire de cet expert.
6 La Chambre qui a délibéré sur cette question observe tout d'abord que M.
7 Slobodan Jankovic a déjà témoigné en tant qu'expert de la Défense en
8 matière de balistique dans deux autres affaires du Tribunal. En outre, à la
9 lecture du rapport d'expertise et du curriculum vitae de son auteur, la
10 Chambre estime que M. Slobodan Jankovic est, à première vue, habilité à
11 témoigner en tant qu'expert sur la matière évoquée dans son rapport,
12 notamment l'analyse des enregistrements vidéo de la destruction du vieux
13 pont de Mostar.
14 Cependant, conformément à la demande de l'Accusation, la Chambre considère
15 que M. Slobodan Jankovic devra comparaître devant le Tribunal, notamment
16 pour être soumis au contre-interrogatoire. A cette occasion, l'Accusation
17 aura la possibilité de contester ses qualifications et la validité et la
18 pertinence des conclusions figurant dans le rapport d'expertise.
19 La Chambre rappelle que c'est à la lumière de l'audition de M. Slobodan
20 Jankovic qu'elle statuera sur l'admission dudit rapport. Selon le dernier
21 calendrier des témoins, le témoin devra comparaître du 30 juin au 3 juillet
22 2008, en tant que témoin expert de la Défense Praljak uniquement.
23 La Défense de M. Praljak interrogera le témoin pendant une heure. La
24 Chambre décide de fixer la durée du contre-interrogatoire pour l'Accusation
25 à une heure 30 minutes. Et pour l'ensemble des autres équipes de la
26 Défense, à 30 minutes. Bien. Donc, en deux mots, la Défense Praljak aura
27 une heure, les autres avocats des accusés auront 30 minutes, et le
28 Procureur aura une heure 30.
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1 Et la Chambre statuera in fine sur l'admission du rapport.
2 Bien. Maître Karnavas, le témoin est prêt ?
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Bonjour,
4 Monsieur le Président, bonjour, Messieurs les Juges, oui.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors on va introduire le témoin, mais je donne la
6 parole à M. le Greffier pour quelques numéros IC.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Certaines
8 parties ont déposé des listes de documents à verser par le truchement du
9 Témoin 1D-AA. Pour 1D, ce sera le numéro IC 00804. Et ensuite, nous aurons
10 IC 00805 pour le bureau du Procureur, et 00806 pour 3D. Merci.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
12 Maître Karnavas, on a donc cinq classeurs. Donc quand vous citerez un
13 document, dites-nous le numéro du classeur.
14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais faire de mon mieux, Monsieur le
16 Président. Tout le monde devrait avoir reçu une liste de l'ordre dans
17 lequel nous allons utiliser ces documents. Ça c'est fait un peu tard, je le
18 sais bien.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous
20 entendez bien dans votre langue la traduction de mes propos. Si c'est le
21 cas, dites que vous m'entendez et vous me comprenez.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de
24 naissance.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mile Akmadzic. Je suis né le 1er octobre 1939.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné devant un
27 tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie ou bien
28 c'est la première fois que vous témoignez ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la deuxième fois.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous m'indiquer quand vous avez témoigné et
3 dans quel procès ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] En l'an 2000, dans l'affaire Kordic.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez témoin de la Défense ou de l'Accusation ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais témoin de la Défense.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai oublié de vous demander de m'indiquer la
8 qualité ou profession que vous avez actuellement ou bien vous êtes retraité
9 ? Qu'est-ce que vous faites actuellement ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis à la retraite à présent.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire le serment.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
13 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
14 LE TÉMOIN : MILE AKMADZIC [Assermenté]
15 [Le témoin répond par l'interprète]
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.
17 Alors, quelques éléments d'information qui vont être très brefs puisque
18 vous avez déjà témoigné, donc vous savez comment la procédure se déroule.
19 Vous allez dans un premier temps devoir répondre aux questions de l'avocat
20 de M. Prlic, en l'occurrence Me Karnavas, que vous avez dû rencontrer dans
21 le cadre de la préparation de cette audience. Me Karnavas va vous poser des
22 questions et va vous présenter des documents.
23 A l'issue de cette phase, le représentant de l'Accusation qui se trouve à
24 votre droite, vous posera des questions dans le cadre du contre-
25 interrogatoire. Et l'Accusation disposera du même temps que la Défense pour
26 poser ses questions. Les quatre Juges qui sont devant vous pourront
27 également vous poser des questions. Pour des raisons de commodité, nous
28 préférons intervenir à la fin des questions posées par la Défense ou le
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1 Procureur, mais il se peut que lorsqu'il y a un document qui mérite des
2 questions de suivi et pour éviter d'avoir à revenir sur le document, à ce
3 moment-là, les Juges peuvent poser des questions dans la suite du document.
4 Essayez d'être synthétique dans les réponses que vous allez apporter aux
5 questions. Si vous ne comprenez pas le sens d'une question, n'hésitez pas à
6 demander à celui qui vous pose la question de la reformuler. Si à un moment
7 donné dans le cadre de l'audience vous voulez une interruption pour
8 diverses raisons, et notamment pour -- parce que vous ne vous sentez pas
9 bien, n'hésitez pas à lever la main. Et à ce moment-là, j'ordonnerai
10 l'arrêt de l'audience. Par ailleurs, nous faisons des pauses toutes les
11 heures et demie, pauses en règle générale d'une durée de 20 minutes, et
12 parfois à titre exceptionnel, d'une durée de 15 minutes.
13 Voilà ce que je tenais à vous dire. Bien entendu, la Chambre est à votre
14 disposition si vous avez des questions à lui poser.
15 Vous venez de prêter serment tout à l'heure, il y a quelques instants, de
16 ce fait maintenant vous êtes le témoin de la justice même si vous avez été
17 appelé par la Défense de M. Prlic. Etant témoin de la justice, ça implique
18 qu'à partir de maintenant vous n'avez plus aucun contact avec la Défense de
19 M. Prlic puisque vous êtes maintenant, après votre serment, le témoin de la
20 justice. Voilà ce que je voulais vous indiquer.
21 Maître Karnavas, vous avez donc la parole, à moins qu'il y ait -- Maître
22 Khan.
23 M. KHAN : [interprétation] Une toute petite chose, Monsieur le Président.
24 Page 5, ligne 10 du compte rendu d'audience, pour que ceci ne surprenne pas
25 le témoin, bien entendu, après que Me Karnavas ait posé les questions au
26 témoin, il sera contre-interrogé par la Défense et non pas par
27 l'Accusation.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez parfaitement raison, oui. J'oubliais ceci,
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1 c'est qu'une fois que Me Karnavas aura terminé, les autres avocats des cinq
2 autres accusés pourront également vous poser des questions dans le cadre du
3 contre-interrogatoire. Je remercie Me Khan d'avoir comblé cette lacune.
4 Maître Karnavas, vous avez la parole.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Et je vous re-
6 souhaite une fois de plus un bon après-midi, Monsieur le Président,
7 Messieurs les Juges, à toutes les personnes de ce prétoire et autour de ce
8 prétoire.
9 Interrogatoire principal par M. Karnavas :
10 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Akmadzic.
11 R. Bonjour.
12 Q. Parcourons votre expérience personnelle assez rapidement. S'il n'y a
13 pas d'objections, je poserai des questions directrices à cet effet. Si je
14 vous ai bien compris, vous avez dit être né en 1939; c'est ça ?
15 R. C'est exact.
16 Q. Après avoir terminé l'école secondaire en 1965, je pense que vous avez
17 suivi des cours à l'Université de Sarajevo et vous en êtes sorti en tant
18 que vous aviez étudié l'anglais et les langues germaniques ?
19 R. C'est exact.
20 Q. De 1964 à 1978, vous avez travaillé pour une grosse entreprise,
21 Energoinvest, à Sarajevo, vous y étiez traducteur et surtout responsable
22 des questions internationales ?
23 R. J'étais traducteur et j'ai travaillé au département international, oui.
24 Q. Ensuite en 1978, vous avez commencé à travailler pour la présidence de
25 ce qui était encore la République socialiste de Bosnie-Herzégovine ?
26 R. Oui.
27 Q. Si je ne m'abuse, vous étiez conseiller pour ce qui est du protocole
28 international ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. En 1982, vous avez rejoint le comité organisateur des Jeux olympiques
3 qui se sont tenus à Sarajevo, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact, oui.
5 Q. Et je suppose que vous y avez travaillez jusqu'au moment des Jeux
6 olympiques qui ont eu lieu en 1984, donc ça fait une paire d'années ?
7 R. C'est exact, jusqu'à l'année 1984.
8 Q. En 1984, vous avez repris vos activités à la présidence où vous étiez
9 chef du secteur chargé du protocole international jusqu'au début de l'année
10 1990; c'est bien cela ?
11 R. Oui.
12 Q. Vers le mois de février 1991, vous avez été élu au poste de secrétaire
13 général de la présidence de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine
14 ?
15 R. Soyons un peu plus précis. En mi-1990, j'étais au cabinet du président
16 de la présidence et en 1991, j'ai été élu secrétaire général de cette
17 présidence en février.
18 Q. D'accord. Poste que vous avez occupé jusqu'au moment où vous avez été
19 élu premier ministre de ce qui est devenu la République de Bosnie-
20 Herzégovine, 10 novembre 1992; est-ce exact ? C'est à ce moment-là que vous
21 avez été élu premier ministre ?
22 R. Oui, oui.
23 Q. Et vous êtes resté à ce poste jusque vers le milieu ou la fin du mois
24 d'août 1993 ?
25 R. C'est exact, jusqu'à la fin août, presque.
26 Q. Parfait. Nous allons revenir de façon plus détaillée sur certains de
27 ces moments, mais revenons sur ceci : le 14 novembre 1992, vous avez été
28 élu un des vice-présidents du HDZ de la Bosnie-Herzégovine ?
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1 R. Oui.
2 Q. Ce qui veut dire qu'alors que vous étiez à la présidence, vous aviez
3 aussi des fonctions dans le Parti HDZ ?
4 R. Oui, à un moment.
5 Q. Vous savez, pas besoin de parler trop fort parce que les micros sont
6 très sensibles. Je comprends, vous êtes peut-être un peu nerveux, je vais
7 essayer de vous aider à vous calmer.
8 Je pense que c'est le 10 décembre 1993 que vous êtes devenu membre du
9 conseil présidentiel de la République croate d'Herceg-Bosna ?
10 R. Oui.
11 Q. Au début de 1995, vous avez été élu vice-président de la République
12 croate d'Herceg-Bosna ?
13 R. Le gouvernement de la République croate d'Herceg-Bosna.
14 Q. Oui, ça c'était avant les accords de paix de Dayton ?
15 R. Oui.
16 Q. Maintenant que nous avons parcouru de façon assez rapide votre
17 itinéraire, Général, revenons un peu en arrière pour parler d'abord de vos
18 fonctions de secrétaire général de la présidence. Expliquez, à l'intention
19 de ceux qui ne connaissent pas ce que représente ce poste, ce qu'il
20 représente comme responsabilités, pourriez-vous nous les relater ?
21 R. La présidence de Bosnie-Herzégovine se composait de sept membres et
22 d'un secrétaire général élu par la présidence de façon directe. Il s'agit
23 d'une fonction administrative très élevée et la personne en question veille
24 au fonctionnement de la présidence de Bosnie-Herzégovine au sein de cette
25 présidence et à l'extérieur, du point de vue des activités administratives.
26 C'est une fonction à responsabilité élevée, mais ce n'est pas une fonction
27 à caractère politique comme sont les fonctions des membres de la
28 présidence, et ce n'est pas non plus une fonction électorale.
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1 Q. Fort bien. Je vais vous demander de ralentir un peu le débit parce que
2 vous savez que chacun de nos mots est interprété, et si l'on va à ce débit-
3 là, je pense que d'ici à la fin de la journée tout le monde sera épuisé.
4 Alors essayons de ralentir le débit si vous le voulez bien.
5 R. Bien.
6 Q. Lorsque vous étiez secrétaire général, est-ce que vous étiez investi du
7 pouvoir ou de l'autorité nécessaire pour voter avec les présidents ou les
8 membres de la présidence ?
9 R. Je ne pouvais pas voter, mais je pouvais prendre la parole.
10 Q. Si je comprends, et corrigez-moi si je me trompe, pour ce qui est des
11 procès-verbaux des réunions, on prenait bien le procès-verbal, on
12 recueillait un procès-verbal ?
13 R. Oui.
14 Q. Etant donné vos fonctions, est-ce que vous étiez en partie responsable
15 de l'élaboration de ces procès-verbaux ou est-ce que ceci revenait à
16 quelqu'un d'autre ?
17 R. Les PV étaient rédigés par d'autres personnes. Je les révisais, je
18 réexaminais, puis je faisais approuver par la session suivante de la
19 présidence.
20 Q. Cette approbation, comment est-ce que vous la donniez ?
21 R. Ce n'est pas moi qui approuvais, j'examinais et lorsque je voyais que
22 cela pouvait aller à la session de la présidence, alors, en application de
23 la réglementation, la présidence, à sa session suivante, les approuvait,
24 les acceptait ou alors ne les acceptait pas.
25 Q. Ces comptes rendus ou procès-verbaux, une fois qu'ils étaient
26 approuvés, est-ce qu'ils devaient être signés par quelqu'un afin d'attester
27 du fait qu'ils avaient été examinés, vérifiés, approuvés ?
28 R. Les PV étaient signés par le président et le secrétaire général.
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1 Q. Donc c'était vous quand vous occupiez ce poste ?
2 R. Oui.
3 Q. S'agissant de la présidence, on en a entendu parler, mais puisque vous
4 étiez un des initiés, faute d'un terme plus adéquat, est-ce que vous
5 pourriez nous dire comment elle fonctionnait, cette présidence ? Quelles
6 étaient les responsabilités de la présidence, de la présidence et de ses
7 membres ?
8 R. Comme je l'ai déjà dit, la présidence se composait de sept membres élus
9 directement par le peuple. Après constitution de celle-ci, donc après sa
10 première session, il y a élection d'un président. Le président est sur pied
11 d'égalité avec les autres membres de la présidence, mis à part le fait
12 qu'il préside aux sessions et il convoque les sessions et il signe les
13 décisions de cette présidence.
14 Q. Nous avons déjà entendu ce terme plusieurs fois, mais peut-être
15 pourrez-vous nous aider à en vérifier l'exactitude. Est-ce que c'est
16 considéré comme étant un organe collégial ?
17 R. Oui. La présidence est un chef d'Etat collégial, d'abord pour ce qui
18 est de cette République socialiste de Bosnie-Herzégovine lorsqu'elle
19 faisait partie de la Yougoslavie, puis ensuite de cette République
20 souveraine -- de l'Etat souverain de Bosnie-Herzégovine.
21 Q. Nous savons qu'il y avait un président de la présidence, est-ce qu'il y
22 avait aussi un vice-président ?
23 R. Non, il n'y avait pas de fonction de vice-président de la présidence.
24 Lorsque le président partait à l'étranger, on désignait une personne qui le
25 remplacerait.
26 Q. S'agissant de l'armée, est-ce que c'était le président qui était le
27 commandant en chef de l'armée ou est-ce que c'était l'organe collégial ?
28 R. C'est l'organe collégial qui était le commandant suprême des forces
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1 armées.
2 Q. Laissons la présidence de côté un instant, parlons du gouvernement,
3 puisque nous savons que vous avez été premier ministre. Pourriez-vous, en
4 quelques mots, nous dire quels étaient les rapports existant entre le
5 gouvernement et la présidence ? Enfin, je dis gouvernement, peut-être
6 devrais-je d'abord vous demander, dans votre système, dans ce qu'il était,
7 ce système, ce qu'était le gouvernement ?
8 R. Le gouvernement était une instance de l'Etat, l'une des instances. Il y
9 a trois instances. Il y avait la présidence en guise de chef d'Etat, puis
10 il y avait le parlement qui était l'instance législative, et le
11 gouvernement qui était l'instance exécutive. Nous sommes en train de parler
12 de l'Etat de Bosnie-Herzégovine ici. L'organe législatif avait un
13 président, un vice-président, des membres du gouvernement et un secrétaire
14 également.
15 Q. Je reviens à la question que je vous avais posée à propos des rapports
16 entre la présidence et le gouvernement. Est-ce qu'il y avait une de ces
17 instances subordonnée à l'autre ? Quels étaient les rapports ?
18 R. En fonction de la constitution et de la législation de Bosnie-
19 Herzégovine, chacune de ces instances avait ses propres attributions; et
20 l'une et l'autre de ces instances étaient des instances exécutives. La
21 présidence avait les compétences d'un chef d'Etat et le gouvernement était
22 le gestionnaire de l'Etat pour ce qui est des questions prévues par la loi.
23 Q. Si je comprends bien, le gouvernement se composait de plusieurs
24 ministères, notamment du ministère des Affaires étrangères ?
25 R. Oui.
26 Q. Avant que vous ne deveniez premier ministre et même après que vous
27 soyez entré en fonction, le ministre des Affaires étrangères c'était Haris
28 Silajdzic, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Pourriez-vous, en quelques mots, nous expliquer les rapports qui
3 existaient entre le ministère et le premier ministre et le président de la
4 présidence ? A qui les ministres étaient-ils, devant qui étaient-ils
5 redevables ?
6 R. Le ministre répond auprès du gouvernement et du premier ministre. Et le
7 président de la présidence est l'un des membres de ce cercle de l'Etat
8 collégial qui, suite à convocation de la présidence, fait en sorte que tel
9 ministre présente un rapport ou répond à des questions. Mais en principe le
10 tout se passe par le biais du premier ministre.
11 Q. Pendant que vous vous étiez en fonction, pas avant que vous ne deveniez
12 premier ministre, pourriez-vous dire à la Chambre à quelle fréquence M.
13 Silajdzic vous faisait rapport des activités qu'il effectuait ? Nous allons
14 revenir là-dessus mais pourriez-vous le dire rapidement ?
15 R. M. Silajdzic, en sa qualité de ministre des Affaires étrangères, fort
16 souvent séjournait à l'étranger. Il ne présentait pas de rapports ni au
17 président, ni au premier ministre, ni au gouvernement en tant qu'entité ou
18 à la présidence en tant qu'entité. Il a eu une fois l'occasion de parler
19 avec moi de questions relatives à ces séjours à l'étranger. Je l'ai prévenu
20 à cette occasion-là en lui disant qu'à l'avenir il ne faudrait pas aller à
21 l'étranger sans l'approbation du gouvernement et sans une "plateforme"
22 concernant ce qu'il conviendrait de dire et de discuter là-bas.
23 Au retour au pays, il s'agissait d'informer, m'informer moi et voir
24 s'il fallait qu'on le transmette à la présidence voire au gouvernement.
25 Malheureusement il ne s'y est pas conformé. Il n'a pas respecté ou il ne
26 s'en est pas tenu à une décision dont je lui avais fait part.
27 Q. Bien. Alors pour m'assurer que je vous ai bien compris, et afin
28 d'effectuer une comparaison avec le système qui prévaut aux Etats-Unis, au
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1 sein du secrétariat d'Etat, ce que l'on appelle le ministère des Affaires
2 étrangères, cette fonction n'est pas une fonction politique. Le ministre
3 n'est pas celui qui conçoit ou applique des politiques de sa propre
4 initiative; cela revient au gouvernement ou aux instances exécutives. En
5 fait c'est le ministre qui est chargé uniquement d'exécuter et d'appliquer
6 la politique étrangère.
7 Est-ce que vous pourriez nous expliquer selon quels pouvoirs le
8 ministre des Affaires étrangères se déplaçait sans faire de rapports et
9 Dieu sait ce qu'il faisait alors qu'il était à l'extérieur du pays.
10 R. Le ministre des Affaires étrangères de Bosnie-Herzégovine à partir du
11 moment où la Bosnie est devenue indépendante, à partir du moment que la
12 fonction existe, c'est un membre du gouvernement qui est égal à tous les
13 autres membres du gouvernement. Il ne s'agit pas de quelqu'un qui a été
14 élu. Ce n'est pas un fonctionnaire qui a été élu. Il a été nommé par
15 l'assemblée au nom de la présidence. Puisque l'assemblée ne pouvait pas
16 siéger pendant la guerre, alors qu'il avait déjà été nommé, c'est la
17 présidence de Bosnie-Herzégovine qui l'a nommé à nouveau et c'est moi qui
18 l'ai proposé ainsi que le premier ministre. Il est obligé conformément au
19 code des Affaires étrangères et aux accords et à la plateforme du
20 gouvernement de représenter la Bosnie-Herzégovine là où il est envoyé, là
21 où il doit aller représenter la Bosnie-Herzégovine, donc il est censé la
22 représenter.
23 Q. Bien. Venons-en maintenant, avançons un peu, ensuite nous reviendrons
24 un peu en arrière pour combler les lacunes éventuelles. Il ressort de votre
25 curriculum vitae qu'entre le mois de février 1991 jusqu'au mois d'août
26 1993, vous étiez membre -- en fait vous travailliez avec la présidence,
27 après quoi vous avez été premier ministre. Vous étiez membre de la
28 présidence de Guerre à l'époque.
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1 Dites-nous en quelques mots la chose suivante : au cours de cette période,
2 et même après à votre connaissance, comment la présidence fonctionnait-elle
3 en tant qu'institution étant donné que vous aviez une constitution et il y
4 avait des règlements en vigueur. Alors comment les choses étaient-elles
5 censées fonctionner et qu'elles étaient les responsabilités des uns et des
6 autres, y compris celles du président de la présidence ?
7 R. La présidence de Bosnie-Herzégovine a été créée le 20 décembre 1990.
8 C'est à ce moment-là que cette présidence a été créée. C'est à ce moment-là
9 que le président de la présidence a été élu. Lors de la première session de
10 travail, son mandat était censé durer un an. C'est à ce moment-là que le
11 règlement du travail de la présidence a été adopté aussi. Selon ce
12 règlement, le mandat du président de la présidence dure un an. Mais au bout
13 d'un an, il existe la possibilité de prolonger ce mandat pour une durée
14 d'un an au maximum.
15 Ensuite le deuxième critère qui existait en Bosnie-Herzégovine était que le
16 poste du président de la présidence de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine et
17 du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, il existe une rotation entre ces
18 trois postes. Il s'agit des députés qui viennent des trois peuples
19 constitutifs qui seront nommés à ces trois postes. La présidence de Bosnie-
20 Herzégovine, à partir de la date du 20 décembre 1990 jusqu'au 20 décembre
21 1991, a fonctionné complètement selon ce cadre législatif conformément à la
22 constitution et conformément aux règlements qui régulent le travail de la
23 présidence.
24 Lors de sa première session de travail, mis à part la nomination du
25 président de la présidence, ont été nommés aussi les présidents de l'organe
26 de la présidence. Vous aviez un organe qui était chargé des questions de la
27 défense. A la tête de cet organe se trouvait d'après sa fonction le
28 président de la présidence et c'étaient les conseils de la défense.
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1 Ensuite vous aviez aussi une autre institution qui était chargée de
2 protéger la constitution et c'est un membre de la présidence qui était à la
3 tête de cette instance-là.
4 Ensuite le troisième organe-clé, c'était la commission des cadres chargée
5 de nommer différentes personnes aux différentes fonctions-clés de la
6 Bosnie-Herzégovine, surtout de la présidence.
7 Donc il s'agissait là de trois instances-clés. Il y en avait deux
8 autres qui existaient et qui dépendaient de la présidence tel que cet
9 organe qui s'occupait des décorations, des promotions et un autre qui
10 s'occupait de toutes sortes de plaintes, pardons présidentiels, et cetera.
11 Il y en avait peut-être quelques autres dont je ne me souviens pas à
12 présent.
13 Mais de toute façon, à la tête de chacun de ces organes de travail se
14 trouvait un membre de la présidence, quelqu'un qui travaillait à la
15 présidence, mais il pourrait y avoir aussi d'autres fonctionnaires qui
16 travaillaient au sein d'autres institutions de l'Etat.
17 Q. Monsieur Akmadiz, vous avez dit que jusqu'à un moment donné tout
18 fonctionnait conformément aux règlements de procédure. Est-ce qu'à un
19 moment donné les choses ont cessé de fonctionner correctement, et dans
20 l'affirmative, pourquoi, si vous le savez ?
21 R. Mis à part ce fonctionnement de la présidence qui était parfaitement
22 légal et légitime, il y avait une autre phase du fonctionnement de la
23 présidence, on pourrait l'appeler la phase d'avant la guerre, où la
24 présidence très souvent siégeait non stop, et ceci a duré jusqu'au 20
25 décembre 1992. Ensuite, c'est la guerre qui a commencé et les membres
26 serbes de la présidence ont quitté la présidence. Ensuite, le 20 décembre
27 1992, le président de la présidence, Alija Izetbegovic, n'a pas accepté
28 cette provision constitutionnelle concernant le travail de la présidence ni
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1 ce qui figure dans le règlement, à savoir de passer son mandat à un autre
2 membre de la présidence, qui à son tour deviendrait le président et, selon
3 ce système de rotation, cette fonction devait incomber à un Croate.
4 Ceci a perturbé le fonctionnement de la présidence. Et à la place des
5 membres de la présidence qui était des Serbes et qui avaient quitté la
6 présidence, vous aviez d'autres personnes qui sont venues et qui étaient
7 aussi des Serbes, mais qui n'avaient pas remporté les élections.
8 Q. Je vous interromps un instant. Examinons ensemble les documents afin de
9 voir si nous pouvons mieux comprendre la situation.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que M. l'huissier pourrait remettre
11 le premier classeur au témoin.
12 Q. Je vous renvoie au document 1D 01408. Nous allons examiner certains de
13 ces documents assez rapidement. Il s'agit là d'une décision -- premier
14 classeur, 1D 01408, 10 novembre 1992, il s'agit d'une décision par laquelle
15 vous avez été élu premier ministre; est-ce exact ?
16 R. Oui.
17 Q. Document suivant, 1D 02873. Cela se trouve au troisième classeur. Nous
18 l'avons vu avec un autre témoin. Il s'agit du document suivant pour vous,
19 Monsieur le Témoin. Les documents sont classés, 1D 02873, ce document porte
20 la date du 2 août 1993, donc nous avançons un peu dans le temps, il s'agit
21 d'une lettre qu'apparemment vous avez signée dans laquelle vous dites que
22 vous, ainsi que d'autres membres, Franjo Boras et M. Lasic, aviez décidé de
23 ne pas participer au fonctionnement de la présidence jusqu'à la fin de
24 l'offensive menée par l'armée musulmane contre la population croate. Vous
25 en souvenez-vous ?
26 R. Je me souviens de ce document. Je l'ai co-signé avec M. Franjo Boras et
27 Miro Lasic qui étaient aussi membres de la présidence, en réalité, à
28 l'époque, à cette date-là, à savoir le 2 août 1993, je n'étais pas membre
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1 de la présidence.
2 Q. -- premier ministre, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, j'y étais. Oui, j'étais le premier ministre et donc j'ai été
4 membre de la présidence à cause de cette fonction qui était la mienne, à
5 savoir la fonction du premier ministre.
6 Q. Et ceci parce qu'il existait une présidence de Guerre à l'époque,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Oui, à cette époque-là, je ne l'ai pas dit auparavant, il y avait la
9 présidence de Guerre qui a été élargie de trois membres supplémentaires, le
10 président du gouvernement, le président de l'assemblée, et il y avait à
11 l'époque encore la Défense territoriale, donc s'ajoute le commandant de la
12 Défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine, moi, j'ai été membre de la
13 présidence de Guerre.
14 Q. Inutile de nous appesantir sur cette lettre, mais s'agit-il d'une
15 lettre de démission de votre part ?
16 R. Non. Cela ne veut pas dire qu'on démissionne, c'est un avertissement de
17 la présidence qu'il fallait agir conformément aux lois, qu'il fallait que
18 la présidence respecte et prenne les décisions en accord avec les lois et
19 qu'en tant que commandant suprême des forces armées de Bosnie-Herzégovine,
20 cette présidence doit prendre des mesures adéquates pour que s'arrêtent les
21 combats et les opérations contre, ici, le peuple croate.
22 Q. Le document suivant, 1D 02673, ce document se trouve dans le troisième
23 classeur. Il est daté du 27 août 1993, nous voyons que le président de la
24 présidence, Alija Izetbegovic, vous relève de vos fonctions; est-ce exact ?
25 R. Oui, c'est à ce moment-là que j'ai été démis de ma fonction de
26 président du gouvernement et de membre de la présidence et de la présidence
27 de Guerre de Bosnie-Herzégovine, et ici on explique pourquoi, parce que les
28 membres du HDZ se sont retirés des organes de l'Etat de Bosnie-Herzégovine,
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1 cependant, en fonction de la constitution de Bosnie-Herzégovine, vous
2 pouvez démettre le président de ses fonctions de deux façons. D'un côté, il
3 peut démissionner lui-même et de l'autre côté, il peut être tenu
4 responsable de quelque chose et il doit faire l'objet d'une procédure
5 appropriée.
6 Q. D'après vous, est-ce que l'on a suivi les procédures idoines en
7 l'occurrence ?
8 R. Non. On a agi contrairement aux lois et contrairement aux règles du
9 fonctionnement de la présidence.
10 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer vos rapports avec M.
11 Izetbegovic, s'il vous plaît ?
12 R. J'ai accueilli M. Izetbegovic après les élections quand il est venu à
13 la présidence, c'était en 1990. Je lui ai fait connaître quelle était la
14 situation dans la présidence et quel était le mode de fonctionnement de la
15 présidence d'avant. C'est moi qui lui ai fait connaître tout cela. M.
16 Izetbegovic m'avait écouté à l'époque, nous avions de bons rapports amicaux
17 et ceci pendant une bonne période de notre collaboration. Le président de
18 la présidence, Izetbegovic, après le début de la guerre, a commencé à mener
19 une politique parallèle, pour ainsi dire. Il prenait des décisions dans le
20 cercle restreint de ses collaborateurs qui n'étaient parfois même pas
21 membres de la présidence. Je n'étais vraiment pas d'accord avec cela ainsi
22 que de nombreuses autres personnes d'ailleurs.
23 Q. Merci. Pourriez-vous maintenant vous pencher sur le document 2D 00191.
24 Ce document se trouve dans le quatrième classeur. Là encore, je vous
25 présente mes excuses, je suis désolé de ne pas avoir classé ces documents
26 dans l'ordre pour tout le monde.
27 Il s'agit du document qui se trouve juste après le document précédent
28 pour vous, Monsieur le Témoin.
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1 Vous ne pouvez pas vous tromper. Il s'agit d'un extrait de "L'odyssée
2 balkanique" de David Owen. Je vais vous donner lecture d'un passage qui se
3 trouve à la page 52, vers le milieu de la page. Et on peut lire, voilà ce
4 qu'écrit Lord Owen :
5 "Lorsque le Croate Mile Akmadzic a été nommé premier ministre de la Bosnie-
6 Herzégovine, il a déployé de véritables efforts pour faire revivre la
7 direction collégiale de la présidence. Il est rentré pour à Sarajevo pour y
8 habiter et il s'est servi de son expérience antérieure en tant que
9 secrétaire avant la guerre auprès de la présidence pour essayer de
10 restaurer l'autorité de la coalition croato-musulmane qui avait gagné le
11 référendum sur l'indépendance que les Serbes avaient boycotté. Cependant, à
12 la fin de l'année 1992, tout le monde a commencé à bien comprendre qu'il
13 allait échouer et que c'est un petit groupe de ministres musulmans nommés
14 par le président Izetbegovic et le vice-président Ejup Ganic qui s'étaient
15 emparés du pouvoir. La présidence collégiale en tant qu'instance
16 démocratique ayant une représentation véritable des trois nations
17 constitutives à l'automne 1993 n'existait plus. Les véritables décisions
18 étaient prises ailleurs. En réalité, nous traitions avec un gouvernement
19 musulman qui s'adressait à une population essentiellement musulmane."
20 Voilà ce qu'a écrit Lord Owen dans son livre qui traite de son expérience
21 dans le cadre des négociations qui ont eu lieu à l'époque. Est-ce que vous
22 êtes d'accord avec ce qu'écrit Lord Owen ?
23 M. SCOTT : [interprétation] Objection, pour ce qui est de ces questions. Il
24 s'agit d'une question directrice déguisée. On lit la déclaration de
25 quelqu'un qui n'est pas dans ce prétoire. Ce même témoignage aurait pu être
26 obtenu auprès du témoin par des questions non directrices : Qu'est-ce que
27 vous faisiez à l'époque ? Que pensiez-vous des fonctions de président ?
28 Qu'est-ce que vous avez fait ? Qu'avez-vous fait pour restaurer le
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1 fonctionnement de la présidence, et ainsi de suite. Tout cela aurait pu
2 être obtenu par des questions non directrices, qui est la bonne manière de
3 procéder lors de l'interrogatoire principal. On lui soumet ce texte et on
4 lui demande s'il est d'accord ou pas. Il s'agit d'une manière assez futée
5 de poser une question directrice, et l'Accusation s'oppose à cela.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Deux points. Tout d'abord, il s'agit de la
7 technique utilisée par M. Stringer. En fait, j'étais très surpris de voir
8 qu'il a réussi à obtenir ce qu'il voulait, donc j'ai bien aimé cela.
9 Puis je vous renvoie à ma question précédente, M. Akmadzic a raconté
10 lui-même qu'il y avait deux politiques parallèles, il a dit qu'Izetbegovic
11 prenait des décisions avec ses proches collaborateurs dont certains
12 n'étaient pas là. Donc le témoin, en quelque sorte, s'est appuyé sur sa
13 propre expérience pour fournir ses réponses.
14 M. Lord Owen valide cela. Cela ne me pose pas de problèmes, je ne
15 pense pas que l'on devrait m'interdire de poser d'autres questions
16 concernant les écrits de Lord Owen. Voilà ce que j'ai à répondre sur
17 l'objection de l'Accusation.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison tous les deux. Simplement, quand on
19 cherche l'efficacité, qu'est-ce qui se passe ? Le témoin, en répondant à
20 une question non directrice, a expliqué qu'il avait été démis de sa
21 fonction de premier ministre et il a expliqué pourquoi. Voilà que Lord Owen
22 écrit son livre où le paragraphe confirme ce qu'il dit.
23 Alors, Me Karnavas aurait pu dire : je vous présente ce document,
24 regardez le milieu de la page, lisez-le, pouvez-vous me dire si ça convient
25 ou ça ne convient pas à ce que vous n'avez -- vous nous avez dit tout à
26 l'heure, et il aurait dit : c'est exactement ce que je vous ai dit. Voilà.
27 Alors les objections tirées de la "common law", pourquoi pas, mais quand on
28 cherche l'efficacité, vaut mieux aller tout de suite au cœur du sujet. Et
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1 M. Stringer, qui n'est pas là, a employé la même technique une fois. Bon.
2 Alors, Monsieur Scott, vous pouvez dire ce que vous voulez, mais l'article
3 de Lord Owen semble confirmer ce que dit le témoin. Alors si vous voulez
4 que la Défense passe des heures pour lui dire : avez-vous entendu parler
5 de quelqu'un qui s'appelle Lord Owen ? Il va répondre oui. Savez-vous s'il
6 a écrit un livre ou pas ? Bon, tout ça pour arriver à la même chose.
7 Oui, Monsieur Scott.
8 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas
9 toujours été présent dans le prétoire lorsque M. Stringer a interrogé des
10 témoins, certes, mais s'agissant du fait que M. Stringer s'est servi de
11 cette technique, c'était dans le cadre du contre-interrogatoire. Il ne
12 s'agissait pas d'un contre-interrogatoire artificiel. Me Karnavas connaît
13 bien le système de "common law", il est bien différent.
14 Et s'agissant des contraintes de temps, on ne peut pas toujours être
15 menés par un souci d'efficacité. Il serait plus efficace de poser des
16 questions directrices à tous les témoins. Le mieux serait de ne pas faire
17 témoigner les témoins et de laisser les avocats parler, mais on ne peut pas
18 toujours agir dans un souci maximum d'efficacité. Mais dans ce cas, on
19 n'aurait plus besoin de témoins, on montrerait des livres, on en donnerait
20 lecture. Ce serait la manière la plus efficace de procéder. Sauf le respect
21 que je dois à Me Karnavas et aux Juges de la Chambre, l'efficacité à tout
22 prix ne permet pas de respecter toujours les principes fondamentaux du
23 droit, donc je maintiens mon objection et les réponses auraient pu être
24 obtenues par des questions non directrices.
25 M. STEWART : [interprétation] Nous nous rallions à ce qu'a dit Me Karnavas,
26 ces principes qui doivent être adoptés dans le cadre de la présentation des
27 moyens de Défense de Me Karnavas vont sans doute être appliqués par les
28 autres équipes de la Défense. Nous notons que Me Karnavas s'est servi de
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1 l'exemple de M. Stringer aujourd'hui, certes, nous voyons qu'il y a eu un
2 débat entre Me Karnavas et M. Scott. Cette technique a été adoptée,
3 toutefois, pendant toute la durée de la présentation des moyens à charge,
4 je m'en souviens. Je n'étais pas là au tout début du procès, mais je me
5 souviens qu'à de nombreuses reprises lorsqu'on a présenté un document des
6 Nations Unies ou d'autres documents à des témoins et que l'on a demandé aux
7 témoins : est-ce que cela correspond à vos souvenirs, en fait, ce n'est pas
8 du tout différent, qu'il s'agisse de l'extrait d'un livre ou d'autre chose,
9 c'est pareil. Il y a eu des objections parfois; parfois on allait un peu
10 trop loin, mais cette approche a été adoptée pendant toute cette période,
11 et Me Karnavas devrait être autorisé à poser ces questions.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à mes collègues ce qu'ils en
13 pensent.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, la Chambre qui a délibéré dit que lors
16 de l'interrogatoire principal, l'avocat peut à partir de documents ou de
17 livres montrer et indiquer au témoin une référence audit document et lui
18 poser une question à partir de là. En ce qui concerne évidemment la valeur
19 probante à attribuer, la Chambre appréciera cette valeur probante à la
20 lumière du type de questions posées.
21 Donc, Maître Karnavas, vous pouvez continuer.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Prenons le document suivant -- excusez-moi.
24 Q. Oui, Monsieur Akmadzic. Oui, vous deviez répondre.
25 R. Tout d'abord, je vais répondre en vous donnant une réponse affirmative.
26 Ce qui est dit ici par Lord Owen, c'est exact, même s'il s'agit ici de
27 compliments qui me sont adressés. Je voudrais aussi ajouter une autre
28 explication, Lord Owen est arrivé à cette conclusion sur la base des
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1 négociations auxquelles nous avons participé. Il s'agissait d'une
2 conférence de paix internationale pour l'ex-Yougoslavie. Même si Lord Owen
3 n'était pas membre de la présidence, il a bien compris comment cela s'est
4 passé.
5 M. Izetbegovic, surtout en 1993, quand son mandant n'était plus
6 valable, quand du point de vue juridique il n'était plus le président de la
7 présidence, il a en quelque sorte pris la fonction, il s'est approprié
8 cette fonction du chef de l'Etat en prenant ces décisions de façon
9 indépendante et avec ses collaborateurs qu'il s'était choisis très proches.
10 Il prenait des décisions au niveau international également.
11 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 00942. Premier
12 classeur, Messieurs les Juges. Vous allez le voir, c'est le programme des
13 activités de la présidence de Bosnie-Herzégovine, page 2, 26 juin 1992.
14 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur ?
15 R. Je le reconnais, oui.
16 Q. Très bien. C'est une plateforme, un programme d'activités. Certains
17 d'entre nous ne savent peut-être pas ce qu'est une plateforme, pourriez-
18 vous nous expliquer ce que ceci est censé être ?
19 R. Ce document était censé montrer ou confier une mission pour ce qui est
20 de faire voir comment il convenait de négocier sur le plan international et
21 défendre les intérêts de la Bosnie-Herzégovine, pour en informer la
22 présidence et prendre des décisions par la suite. La présidence de Bosnie-
23 Herzégovine est une institution comme l'est l'Etat où l'on a fait
24 représenter tous les peuples constitutifs, les trois peuples constitutifs,
25 et il y avait un représentant qui venait des autres groupes ethniques. Ça
26 se rapportait aux minorités, minorités ethniques, voire ceux qui ne
27 voulaient pas se prononcer pour ce qui est de leur appartenance ethnique.
28 Tous ceux qui allaient négocier et représenter la présidence étaient
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1 censés se conformer à la constitution et à la plateforme émise à cet effet
2 par la présidence.
3 Q. Regardons le premier point : quel genre de Bosnie-Herzégovine ?
4 Regardons le deuxième sous-paragraphe, je vais vous lire :
5 "La structure interne de la Bosnie-Herzégovine, en tant que
6 communauté plurinationale et plurireligieuse, se fonde sur le gouvernement
7 autonome, local et régional, lequel reconnaît les critères économiques,
8 culturels, historiques et ethniques. Ce type de gouvernement autonome,
9 local et régional ne peut pas aller à l'encontre des principes d'intégrité
10 territoriale et du fonctionnement uniforme du gouvernement sur la totalité
11 du territoire de Bosnie-Herzégovine."
12 Je vous demande ceci : pour vous, comment comprenez-vous ceci, de
13 quoi parle cette partie du programme, comment interprétez-vous ceci ?
14 Quelle est votre grille de lecture ?
15 R. On peut voir cela sous deux aspects. Le premier, c'est le fait
16 que la présidence de Bosnie-Herzégovine, en sa qualité de chef d'Etat,
17 fonctionne en tant qu'instance collégiale au sein de cet Etat; elle exerce
18 donc les fonctions d'un chef de l'Etat, et cela se rapporte également aux
19 autres organismes centraux de l'Etat. Il convient de ne pas perdre de vue,
20 cependant, leurs intérêts qui sont précisés ici, il y a l'autogestion
21 locale et l'administration au niveau des autres parties de la Bosnie-
22 Herzégovine.
23 Q. Document suivant.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- suivi pour éviter de revenir sur ce document.
25 Monsieur le Témoin, j'allais vous appeler, M. le premier ministre, vu vos
26 fonctions passées. Il apparaît dans cette plateforme qu'il y a une
27 référence très nette aux institutions locales, au pouvoir local et
28 régional, qui auraient, d'après ce que je vois, une compétence dans le
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1 domaine de l'économie, dans le domaine de la culture, les critères
2 ethniques. Alors, ce document qui a été élaboré le 26 juin 1992 à la
3 présidence de la République de Bosnie-Herzégovine, lorsqu'on le lit,
4 n'indique-t-il pas de votre point de vue une reconnaissance d'une forme de
5 pouvoir régional ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] La Bosnie-Herzégovine, dans les différentes
7 phases de son existence, avait eu différentes formes d'autogestion locale.
8 La plus petite des formes d'autogestion locale, c'était la communauté
9 locale. Le premier échelon véritable, c'était la municipalité. Les
10 municipalités pouvaient établir des liens entre elles pour créer des
11 communautés de municipalités. Et ça se basait sur plusieurs critères.
12 Certains de ces critères se trouvent être indiqués ici, mais on n'y indique
13 pas les critères de communication, les critères géographiques et autres.
14 Ces ensembles ou entités de municipalités, on les appelait communauté
15 ou association de municipalités.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : -- dire qu'un peu dans l'histoire il y a eu déjà des
17 associations de municipalités. Vous avez une référence historique ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle ici du temps du système socialiste et
19 le système qui a suivi au système socialiste aussi; mais à l'époque
20 socialiste, ça s'appelait des districts, des régions ou départements.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Ma dernière question. Quand les municipalités se
22 sont réunies à Grude, enfin certainement peut-être que la Défense y
23 reviendra, mais quand les municipalités se sont retrouvées à Grude pour
24 créer le Conseil croate qui donnera par la suite la Republika d'Herceg-
25 Bosna, est-ce que c'est dans ce cadre, dans ces précédents, que des
26 municipalités se regroupent et créent une structure du type de celle de la
27 communauté croate ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que oui. Je ne peux pas l'affirmer à
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1 100 %, mais je pense que oui. Ce que vous venez de me poser comme question,
2 Monsieur le Président, se rapporte à la période de guerre, ça se rapporte à
3 une communauté créée en temps de guerre. La décision en question se réfère
4 à des dispositions telles qu'indiquées ici. Mais la finalité cruciale, si
5 j'ai bien compris, ce n'était pas seulement d'établir des liens mais aussi
6 de mettre en place des préalables à la défense pour que cette Bosnie-
7 Herzégovine soit défendue.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.
9 Maître Karnavas.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
11 Document suivant, P 00743, quatrième classeur.
12 Q. C'est le document suivant qui porte la date du 14 décembre 1992,
13 procès-verbal de la deuxième conférence générale du HDZ. Vous nous l'avez
14 déjà dit, ceci s'est passé le 14 décembre, vous avez été nommé à un des
15 postes de vice-président, nous le voyons d'ailleurs dans ce document.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Page 6, Messieurs les Juges.
17 Q. Vous voyez les numéros de page dans le coin inférieur droit et nous
18 trouvons votre nom.
19 Mais ce qui m'intéresse davantage, c'est d'attirer l'attention des
20 Juges sur quelque chose que vous pourriez commenter. A cette réunion-ci,
21 vous êtes intervenu, en tout cas nous avons le procès-verbal.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Ceci se trouve à la page 5, Messieurs les
23 Juges.
24 Q. Au numéro 13, nous voyons votre nom, M. Akmadzic, premier ministre, qui
25 est fier de faire partie de la nation croate, et on voit le terme en
26 croate, "naciona", et on dit ceci ensuite : "Il a demandé le soutien que le
27 HDZ pourra apporter au gouvernement de Bosnie-Herzégovine."
28 Est-ce que c'est bien rendu, ici, ce que vous avez dit ? Est-ce bien
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1 ce que vous avez dit que vous demandiez au HDZ de soutenir le gouvernement
2 de Bosnie-Herzégovine ? Et nous sommes alors, je rappelle la date, au 14
3 décembre 1992 ? Etait-ce là l'attitude que vous aviez à l'époque ?
4 R. Oui, à l'époque ou peu de temps avant cela, j'avais été élu aux
5 fonctions de premier ministre, j'ai demandé un appui auprès du HDZ de la
6 Bosnie-Herzégovine tant pour le gouvernement que pour la présidence et pour
7 l'exercice des autorités de l'Etat en Bosnie-Herzégovine. Le HDZ de la
8 communauté démocratique croate avait été l'un des trois partis l'ayant
9 emporté aux élections aux côtés du SDA et du SDS.
10 En ma qualité de membre de ce parti et de membre de ce groupe ethnique, je
11 voulais demander leur appui pour mes fonctions et pour l'exercice du
12 pouvoir à la tête duquel je me trouvais.
13 Q. Bien.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 02892, c'est dans le
15 troisième classeur, Messieurs les Juges. Je répète la cote 1D 02892.
16 Q. Veuillez l'examiner, Monsieur, ce document porte la date du 28 janvier
17 1993. Prenons la deuxième page, nous y voyons votre nom, président du
18 gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine. J'aimerais que nous
19 regardions tous le dernier paragraphe de la page 1, ici vous vous adressez
20 à l'Organisation de la Conférence islamique, c'est une lettre. Vous
21 souvenez-vous de l'avoir envoyée ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous dites dans cette lettre, je reprends le dernier paragraphe,
24 première page : "Par ailleurs, les représentants du peuple musulman en
25 Bosnie-Herzégovine n'ont pas encore de politique compréhensible et
26 insistent pour avoir une Bosnie-Herzégovine unitaire, ce qui est
27 impossible."
28 Qu'est-ce que vous vouliez dire par là, "une Bosnie-Herzégovine
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1 unitaire" ?
2 R. A l'occasion de mon élection aux fonctions de premier ministre, au
3 programme du gouvernement on disait que la Bosnie-Herzégovine était censée
4 être un Etat décentralisé et qu'en tant que tel seulement il pouvait
5 subsister, et il était seulement ainsi possible d'avoir cet Etat. Tout
6 autre Bosnie-Herzégovine qui se fonderait sur un aménagement unitariste
7 sans respecter la constitutivité de ses peuples, un tel Etat se trouverait
8 être impossible. Et il fallait donc politiquement s'employer en faveur de
9 l'interdiction d'une telle approche. J'ai envoyé cette lettre à la
10 conférence islamique, à l'intention du secrétaire général de celle-ci,
11 sachant que M. Izetbegovic était influent et considéré dans ce monde-là, et
12 j'avais demandé leur appui également.
13 Q. Oui, mais pourtant lorsque vous dites organisation unitaire, nous
14 voulons bien comprendre : répondez à la question que je vous ai posée, s'il
15 vous plaît. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Qu'est-ce que c'est une
16 "organisation unitaire ?"
17 R. Cela signifie organisation unitariste sans qu'il y ait autogestion
18 locale au sens vaste du terme et sans qu'on se base sur les principes qui
19 étaient discutés jusque-là dans le cadre du plan Vance-Owen et autres plans
20 relatifs à l'aménagement de la Bosnie-Herzégovine, qui se fonderait sur une
21 approche régionale avec l'existence de régions, de provinces ou appelez-le
22 comme vous voulez, qui se fonderait sur la totalité des critères ayant fait
23 l'objet de négociations jusque-là.
24 Q. D'ailleurs, si nous prenons la deuxième page, troisième ligne : "Le
25 peuple croate recherche une Bosnie-Herzégovine indépendante se composant de
26 plusieurs provinces dotées chacune d'un grand degré de démocratie et
27 d'égalité pour les trois peuples constitutifs…" Est-ce bien ce que vous
28 vouliez dire ?
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1 R. Absolument. Nous avons défendu cette attitude, et cette attitude n'a
2 pas évolué pendant toute la durée de la guerre et pendant toute la durée
3 des négociations au plan international.
4 Q. Un peu plus loin, au milieu du troisième paragraphe :
5 "Dans ce même sens, nous vous demandons d'avoir une influence
6 positive sur les dirigeants musulmans de Bosnie-Herzégovine afin qu'ils
7 coopèrent très étroitement avec les dirigeants du peuple croate de Bosnie-
8 Herzégovine et avec la République de Croatie pour s'allier contre notre
9 agresseur commun."
10 R. Oui, c'était à l'époque de la guerre. Nous, les Croates, n'avons pas
11 quitté la présidence. Les membres serbes qui ont été légalement élus sont
12 partis de leur plein gré de cette présidence. Les membres croates de la
13 présidence et en ma qualité de premier ministre et membre de la présidence
14 de Guerre, nous avons gardé nos fonctions, nous sommes restés à ces
15 fonctions en insistant sur une Bosnie-Herzégovine internationalement
16 reconnue qui serait aménagée dans l'intérêt de ses trois peuples, non pas
17 seulement du peuple musulman et croate, mais des trois peuples,
18 indépendamment de l'agression en cours. Et nous avions demandé à la
19 conférence islamique d'influer à cet effet sur M. Izetbegovic afin que
20 celui-ci accepte les négociations et accepte une organisation de l'Etat
21 dans ce sens-là.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, la conférence islamique a
23 répondu à votre lettre du 28 janvier 1993 ? Vous avez eu une réponse ou pas
24 ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais reçu de réponse à cette lettre.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Autre question. Nous avons vu cette
27 plateforme de la présidence de Guerre de Bosnie-Herzégovine il y a quelques
28 instants. Je m'interroge, pourriez-vous nous en dire plus sur les rapports
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1 existant entre ce que vous dites ici, les intentions musulmanes, et ce qui
2 est dit dans cette plateforme de la présidence de Guerre qui fait une
3 référence très claire à l'autogestion ou l'autonomie ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant de la plateforme, l'autogestion est
5 mentionnée et évoquée de façon vague, peu définie. Nous avions accepté ce
6 type de plateforme. Mais dans ce document, les négociations internationales
7 et la situation dictaient, dirais-je, davantage d'éléments concrets. Il
8 fallait qu'en notre qualité de peuple constitutif, tous les trois nous
9 indiquions ce que nous voulions avoir comme Etat. A l'époque, on en est
10 arrivés à une conclusion, du moins était-ce la conclusion de nous autres,
11 Croates, et les autres n'étaient pas loin non plus du reste, que la
12 meilleure des façons d'aménager la Bosnie-Herzégovine se fondait sur un
13 principe de provinces. Dès le 4 janvier 1993, nous avions signé les
14 principes constitutionnels de l'aménagement de la Bosnie-Herzégovine, il y
15 en avait neuf. L'un des principes était l'existence de la mise en place de
16 provinces. Nous avions insisté pour que ces principes acceptés et signés
17 par les trois peuples, le peuple croate, serbe et musulman, soient traduits
18 dans la réalité selon les possibilités ou selon les modalités qui étaient
19 celles du moment.
20 M. KARNAVAS : [interprétation]
21 Q. Il va peut-être falloir que vous répétiez la dernière partie de votre
22 réponse. Et n'oubliez pas de ne pas aller trop vite.
23 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'allais dire la même chose. Ça a
24 déjà été dit deux fois par Me Karnavas. J'allais demander au témoin de
25 ralentir, de penser aux interprètes parce qu'ils ont besoin de vous suivre.
26 Je vais vous demander l'obligeance de faire des pauses entre les questions
27 et les réponses. Je pense que ce serait fort utile.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je peux continuer ?
2 Q. Parfait. Document suivant. Si je l'ai inséré, c'est pour mettre en
3 exergue certains des problèmes que vous avez peut-être rencontrés. 1D
4 02859. C'est une lettre qui vous est adressée. Qui se trouve, Messieurs les
5 Juges, dans le troisième classeur.
6 On me dit qu'il est possible que vous ne l'ayez pas, 2589.
7 Vous ne l'avez pas, apparemment ? Il y a des copies. Vous avez le
8 document 1D 02859 ?
9 R. Je l'ai.
10 Q. C'est une lettre qui vous est adressée. Troisième page. L'auteur, nous
11 le voyons, est un certain Josip Goluza, vous le connaissez ?
12 R. Oui.
13 Q. Bien. Je n'avais pas reçu la réponse par les interprètes. Qui était ce
14 monsieur ?
15 R. Cet individu était adjoint ministre chargé des relations économiques et
16 du fonctionnement des centres logistiques.
17 Q. Point 2. Je vais simplement éclairer certains passages. Si j'ai bien
18 compris, la traduction nous dit qu'il avait la responsabilité du
19 fonctionnement d'un groupe de pression. C'est ça que vous vouliez dire, des
20 "groupes de pression" ou est-ce que vous parlez d'un centre de logistique ?
21 R. Centre de logistique.
22 Q. Monsieur, détendez-vous. Je vais vous montrer les documents que vous
23 devrez examiner, détendez-vous. Deuxième paragraphe, il dit :
24 "L'aide humanitaire venant de l'étranger fournie par plusieurs
25 donateurs n'est pas du tout contrôlée. Les centres logistiques qui sont en
26 train d'être mis sur pied devraient rétablir l'ordre, surtout pour
27 contrôler et distribuer l'aide humanitaire."
28 Troisième paragraphe :
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1 "Ceux qui fournissent l'aide humanitaire, que ce soit dans le pays ou
2 à l'étranger, ces personnes sont connues dans la plupart des cas, mais les
3 dons d'aide financière n'ont pas de source connue. Le gouvernement a ouvert
4 12 comptes en Europe qui doivent servir pour recevoir des dons financiers.
5 Et j'affirme en toute responsabilité que ces fonds ne se trouvent pas dans
6 ces comptes à l'exception de 440 000 dollars américains envoyés par le
7 bureau du gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine à Zagreb
8 venant de la vente de marchandises…" et ainsi de suite.
9 Voici ma question : est-ce que vous connaissiez l'existence de ces
10 problèmes ? Pourquoi est-ce qu'ils existaient, ces problèmes ? Peut-être
11 pourriez-vous nous dire quand ce document a été envoyé à votre bureau ou
12 vous a été envoyé à vous ?
13 R. Cela m'a été remis à Zagreb lorsque j'étais en déplacement à titre
14 officiel, on me l'a remis. J'ai confié cela aux services du gouvernement
15 parce que j'étais constamment en négociations pour que ce soit débattu et
16 que des décisions soient prises. Ceci est le résultat d'un travail effectué
17 en parallèle avec des activités des autorités de Bosnie-Herzégovine. Il a
18 été créé des centres logistiques, de l'aide arrivait, il n'y a pas eu plein
19 exercice d'un contrôle de l'Etat --
20 Q. Permettez-moi de vous interrompre. Pourquoi est-ce qu'il régnait un tel
21 chaos ? Ce document nous le montre clairement, de l'argent disparaît, il
22 n'y a pas de contrôle de l'utilisation des marchandises. Qui en est
23 responsable ? Pourquoi est-ce que ces problèmes existent ? Et c'était au
24 moment où vous étiez premier ministre du gouvernement.
25 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Je voulais
26 donner le temps à Me Karnavas de poser les questions de suivi, mais on n'a
27 toujours pas une réponse pour ce qui est du temps, parce que ça fait une
28 grosse différence, mais je remarque qu'au troisième paragraphe de cette
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1 lettre il est fait référence au président du gouvernement, qui est alors M.
2 Pelivan, et je pense qu'il a cessé ses fonctions de premier ministre ou de
3 président du gouvernement en octobre 1992. Je ne sais pas si ceci peut vous
4 aider, vous, Monsieur le Juge, ou Monsieur le Témoin, mais peut-être que Me
5 Karnavas pourrait poser des questions supplémentaires à propos du temps.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Ça ne m'avait pas échappé.
7 Q. Vous étiez, vous l'aviez dit, premier ministre du 10 novembre 1992 à la
8 fin août 1993. Savez-vous à quel moment votre bureau, votre office a reçu
9 cette lettre ?
10 R. Cette lettre a été envoyée vers mon bureau début 1993, tout début 1993,
11 j'étais premier ministre. Il me semble que ceci se rapportait à un rapport
12 qui englobait aussi la période où M. Jure Pelivan a exercé ses fonctions.
13 Q. Document suivant, 1D 02869.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges, 1D
15 2869, c'est juste le document d'après.
16 Q. Il porte la date du 17 juillet 1993. Nous avançons dans le temps mais
17 nous en sommes toujours à cette période où vous étiez premier ministre,
18 déclaration faite à une réunion de premier ministre de l'initiative
19 d'Europe centrale, Budapest, 17 juillet 1993. Reconnaissez-vous ce document
20 ?
21 R. Je le reconnais, c'est mon document à moi.
22 Q. Très bien. Pourriez-vous nous dire en quoi consistait cet événement ?
23 R. La Bosnie-Herzégovine est membre de cette initiative de l'Europe
24 centrale. Il s'agit d'une dizaine de pays qui étaient d'Europe centrale et
25 des Balkans et qui ont eu une rencontre à un niveau des premiers ministres
26 et des ministres des Affaires étrangères, et ça s'est tenu à Budapest le 17
27 juillet 1993, donc vers cette période-ci de l'année.
28 Q. Page 3, prenons le paragraphe en milieu de page, vers la fin, vous
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1 dites ceci :
2 "Il est possible que la Bosnie-Herzégovine soit un Etat décentralisé
3 et composé de plusieurs unités constitutives permettant la libre
4 circulation des personnes, des capitaux et des marchandises sur la totalité
5 du territoire."
6 Etait-ce là la position que vous défendiez à l'époque ?
7 R. Oui, précisément, et je l'ai communiquée lors de cette initiative de
8 l'Europe centrale. J'ai demandé leur appui, de principe je l'ai reçu
9 d'ailleurs. Ces positions étaient exprimées aussi par d'autres premiers
10 ministres. M. Silajdzic était présent à la réunion, il était ministre des
11 Affaires étrangères et il était tout à fait d'accord avec ce point de vue.
12 Q. Si j'ai bien compris, vous avez participé à plusieurs des initiatives
13 en faveur de la paix, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. S'agissant de ces initiatives auxquelles vous avez participé ou dont
16 vous aviez connaissance, quelles ont été les initiatives les plus
17 acceptables pour la Bosnie-Herzégovine, selon vous ?
18 R. Vu que j'avais des bons rapports avec M. Izetbegovic, même si j'ai
19 contesté la légalité de son mandant après la date du 20 décembre 1992, son
20 mandat de président, je lui ai dit et je l'ai répété partout au niveau
21 international, que la Bosnie-Herzégovine en tant qu'un Etat des trois
22 peuples constitutionnels qui n'est pas un Etat croate, serbe ou musulman,
23 mais un Etat aussi bien des Croates, que des Serbes, que des Musulmans peut
24 exister en tant qu'un Etat décentralisé et que la meilleure organisation
25 pour cet Etat serait l'organisation à laquelle nous avons abouti au niveau
26 des négociations de Genève sous les auspices de cette conférence de paix
27 internationale pour l'ex-Yougoslavie.
28 Les coprésidents étaient, dans le cadre de ces comités directeurs,
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1 Cyrus Vance au nom des Nations Unies, et Lord Owen au nom de la communauté
2 ou l'Union européenne.
3 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va faire la pause, et il est moins dix,
5 nous reprendrons à 4 heures 10.
6 --- L'audience est suspendue à 15 heures 48.
7 --- L'audience est reprise à 16 heures 14.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
9 Maître Karnavas, vous avez la parole.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Peut-on passer au document suivant, 1D 02884. Il se trouve dans le
12 troisième classeur, Messieurs les Juges.
13 Q. Est-ce que vous l'avez trouvé, Monsieur ?
14 R. Oui.
15 Q. Ce document porte la date du 20 juillet 1993. A la deuxième page, nous
16 voyons un cachet, un nom et votre signature. S'agit-il de votre signature ?
17 R. Oui.
18 Q. Il s'agit apparemment d'une lettre adressée au rédacteur dans laquelle
19 vous expliquez que vous vous sentez obligé d'apporter des explications sur
20 certaines questions rapportées à l'époque. Est-ce que vous maintenez ce que
21 vous dites dans cette lettre, Monsieur ?
22 R. Oui, je le maintiens.
23 Q. Je n'ai pas le temps d'évoquer l'intégralité de cette lettre, mais à la
24 page 2, avant-dernier paragraphe, on peut lire : "Le gouvernement bosniaque
25 s'oppose aux sanctions à l'encontre de la Croatie, les sanctions à l'égard
26 de la Croatie signeraient l'arrêt de mort de la Bosnie."
27 Est-ce que vous pourriez expliquer cela ? A l'époque, vous étiez premier
28 ministre, si j'ai bien compris.
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1 R. Oui, j'étais le premier ministre à l'époque de la Bosnie-Herzégovine.
2 Ce n'était pas dans l'intérêt d'avoir ces sanctions, puisque trois quarts
3 des frontières de la Bosnie-Herzégovine sont la frontière avec la Croatie.
4 Même s'il y a des conflits, le rapport, les liens politiques, économiques
5 et humains étaient très étroits, les rapports qui prévalaient avec la
6 Croatie. Donc les sanctions contre la Croatie auraient des répercussions
7 sur la Bosnie-Herzégovine, et ce n'était pas dans son intérêt tout
8 simplement d'avoir et d'imposer ces sanctions.
9 Q. Bien. Passons maintenant à un autre sujet. Nous avons entendu des
10 témoignages ici --
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme nous avons le document sous les yeux, en page
12 2, le premier paragraphe, vous semblez dire ceci, Monsieur, vous dites que
13 les incidents ou les clashs entre les deux armées semblent être le résultat
14 du support implicite de la communauté internationale au génocide serbe
15 commis contre les Musulmans. Alors vous pouvez nous expliciter ce que vous
16 avez voulu dire ? Tel que je lis la phrase, j'ai l'impression que l'état de
17 belligérance qui existe dans votre pays serait dû, en fait, aux Serbes qui
18 eux, commettraient un génocide à l'encontre des Musulmans. Est-ce la bonne
19 lecture ou bien il y a une autre lecture à faire de ce paragraphe ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] En tout cas, la guerre dans mon pays était le
21 résultat de l'agression serbe, de l'agression de la JNA et du Monténégro
22 contre la Bosnie-Herzégovine.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous dites les clashs entre les deux armées,
24 vous parlez du HVO et de l'ABiH, je suppose ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ici, dans ce cas précis, je parle du HVO
26 et de l'ABiH. Mais même ce conflit, il a été provoqué par cette agression
27 que je viens de mentionner. Avant ce conflit, il y a eu ce dont on a parlé
28 au niveau de la présidence et au niveau du gouvernement, à savoir qu'une
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1 agression était en cours surtout en Bosnie-Herzégovine orientale, là il n'y
2 avait pratiquement pas d'unités du HVO.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, merci.
4 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, je
5 souhaiterais enchaîner sur ce qui viens d'être dit. Le témoin vient
6 d'indiquer, et je cite ce qu'il dit au dernier paragraphe :
7 "Nous avons débattu de cela à la présidence et au gouvernement. Il
8 s'avérait que l'agression, en particulier menée en Bosnie orientale, était
9 le résultat du fait qu'il n'y avait pas de HVO…" et ainsi de suite.
10 Cette lettre du 20 juillet que vous avez adressée au New York Times,
11 a-t-elle fait l'objet d'un accord au niveau de la présidence de Guerre ?
12 Avez-vous débattu de ce type de déclaration politique importante au sein de
13 la présidence ou avec le président Izetbegovic ? Voilà ma question : est-ce
14 qu'il y avait une position commune formulée par la présidence de Guerre et
15 au sein de celle-ci ? Merci.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] La présidence de Bosnie-Herzégovine au complet
17 a donné sa définition de la guerre en Bosnie-Herzégovine.
18 Cette définition de la guerre voulait dire que la guerre en Bosnie-
19 Herzégovine était le résultat d'une agression, de l'agression menée de la
20 Serbie et du Monténégro de l'époque, qui faisait partie de la République
21 fédérale de Yougoslavie, de l'armée populaire yougoslave qui existait
22 encore au début, pas à l'époque dont je parle, mais au début, et à cause
23 des différentes unités paramilitaires organisées par le Parti du SDS et par
24 les peuples serbes de Bosnie-Herzégovine. Cette agression, c'était une
25 agression contre la Bosnie-Herzégovine, et d'après ce que l'on disait à
26 l'époque, vous avez eu le cas de génocide dans la Bosnie orientale, alors
27 que vous aviez une agression contre toute la Bosnie-Herzégovine. Cette
28 agression a provoqué de façon indirecte le conflit entre le HVO et l'ABiH
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1 parce que l'espace qui était laissé aux
2 Croates et aux Musulmans était réduit, surtout en Bosnie centrale où la
3 population musulmane commençait à être déplacée de Jajce en direction de la
4 Bosnie centrale, en direction de la rivière Neretva et de l'Herzégovine du
5 sud.
6 Vu ce déséquilibre qui régnait au sein de la population, vous avez eu
7 un changement de rapports entre différentes populations et des conflits
8 sporadiques tout d'abord ont éclaté au niveau local, qui par la suite sont
9 devenus des conflits bien plus importants mais que l'on n'appelait pas "la
10 guerre".
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aurais deux questions d'ordre
12 technique à poser. La première a trait au fait qu'il s'agit d'un document
13 émanant du gouvernement, d'habitude on déploie de gros efforts pour faire
14 en sorte que ces documents soient bien rédigés. J'ai l'impression que la
15 date en haut de la lettre a été modifiée. On a écrit à la machine 1992, et
16 puis ensuite quelqu'un à la main a changé le 2 pour en faire un 3.
17 Est-ce que vous auriez des commentaires à faire sur ce point ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une faute de frappe. C'est moi qui ai
19 fait ce changement parce que le 20 juillet 1992 je n'étais même pas premier
20 ministre.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous n'étiez pas premier ministre
22 mais vous vous êtes servi de l'en-tête du premier ministre, est-ce que
23 c'était pour donner l'impression qu'il s'agissait d'une lettre du premier
24 ministre ?
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge, le témoin a indiqué qu'il
26 avait corrigé la date pour montrer 1993.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, parce qu'en juillet 1992 ce
28 n'était pas --
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous renvoie à la deuxième page. Il y
2 avait une lettre jointe en annexe où on peut lire, juillet 1993, le 20
3 juillet 1993.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je voulais simplement que les
5 choses soient claires. Ma deuxième question est la suivante : est-ce que
6 cette lettre a parue dans le New York Times ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, nous n'étions pas dans la
8 situation de recevoir le New York Times. Moi, j'espère que cette lettre a
9 été publiée, en tout cas, je ne peux pas le confirmer. Je n'ai jamais reçu
10 de réponse du New York Times à ce sujet.
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Par la suite, vous n'avez jamais
12 essayé de le savoir ? Vous aviez sans doute du personnel, puis il y a des
13 outils de recherche, enfin il y en a eu ensuite. J'imagine que vous aviez
14 d'autres soucis, mais j'étais simplement curieux.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, à la fin du mois d'août 1993,
16 j'ai été démis de mes fonctions. Le gouvernement musulman de Bosnie-
17 Herzégovine a pris les contrôles en entier, contrôlant désormais tout. Moi,
18 j'avais du mal à récupérer mes documents personnels que j'avais dans mon
19 bureau.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme on est toujours sur ce document, ça peut être
22 intéressant, le 23 juillet, le diplomate de votre mission permanente à New
23 York transmet votre lettre au New York Times, puisque votre lettre n'a pas
24 été directement au New York Times mais passée par votre ambassade. Si elle
25 est passée par votre ambassade, et là, l'ambassade fait une référence au
26 fait que vous êtes un des membres croates de la présidence. Ça veut dire
27 que c'est votre pays qui est engagé dans cette lettre, pas uniquement vous
28 en tant que Croate puisque la mission, la représentation de votre pays
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1 transmet officiellement ce courrier au New York Times. Est-ce que je fais
2 une erreur ou pas en tirant cette conclusion ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, vous ne vous trompez pas, Monsieur le
4 Président. La représentation ou la mission permanente diplomatique de la
5 Bosnie-Herzégovine à New York, nous avions un représentant, un ambassadeur
6 permanent, M. Sacirbey, c'était un Musulman. Il y avait quelques autres
7 personnes qui travaillaient dans l'ambassade, parmi eux se trouvait M.
8 Miles Raguz. C'était un Américain né en Bosnie-Herzégovine et c'est lui qui
9 m'escortait, qui était avec moi pendant mon séjour à New York. Et moi, je
10 lui ai demandé de communiquer cette lettre, de la transmettre en mon nom,
11 et il l'a fait.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-être que l'on reviendra plus tard sur
14 le contenu de cette lettre. Document suivant, 1D 02906.
15 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, j'attendais de voir si d'autres
16 questions seraient posées au sujet de ce document, mais avant de passer au
17 document suivant, alors il appartient au Juge Prandler de savoir s'il veut
18 poser d'autres questions complémentaires, mais le témoin n'a pas répondu
19 sur la question de savoir si la lettre a été rédigée communément avec
20 d'autres membres de la présidence. J'en reparlerai lors du contre-
21 interrogatoire mais peut-être que le Juge Prandler souhaiterait obtenir une
22 réponse maintenant.
23 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, j'en suis conscient, mais suite
24 à ma question les Juges ont posé d'autres questions donc je n'ai pas
25 insisté pour obtenir une réponse à cette question mais il s'agit d'une
26 question importante. Il est important de savoir si les autres membres de la
27 présidence étaient au courant de cela. De façon générale, je voudrais
28 savoir s'il y avait au jour le jour une certaine coordination, une certaine
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1 coopération entre la présidence de Guerre et le cabinet du premier
2 ministre, donc où travaillait le témoin, est-ce qu'il y avait une
3 coopération sur ces questions importantes ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement non, il n'y avait pas de
5 coordination au jour le jour. C'est très difficile d'habiter à Sarajevo,
6 c'était le premier problème. Ensuite il y avait un autre problème, comme
7 d'autres membres de la présidence, je participais aux négociations
8 internationales sur la paix en Bosnie-Herzégovine et ceci de façon
9 continue. Nous nous rendions à Zagreb, à Genève, à New York, à Washington,
10 dans tous les endroits où les négociations se déroulaient, de sorte qu'il
11 n'était pas possible de mettre en œuvre une telle communication. De sorte
12 que nous, les Croates, nous avions proposé à l'époque que la présidence,
13 conformément aux règles en vigueur en Bosnie-Herzégovine, quitte Sarajevo
14 et déménage là où il a été possible de fonctionner vu les conditions de
15 guerre. Il a été proposé qu'il se rende à Livno puisque depuis la JNA, il
16 existait des conditions sûres de travail pour une présidence à Livno. M.
17 Izetbegovic ne l'a pas accepté, tout comme il n'a pas accepté qu'il y ait
18 des corridors ouverts entre Sarajevo et le reste du pays, le reste du monde
19 alors que Sarajevo était complètement et parfaitement encerclée.
20 Nous étions transportés jusqu'à l'aéroport dans des véhicules blindés
21 de l'ONU, ensuite nous prenions des avions qui transportaient l'aide
22 humanitaire. Mon adjoint, Hakija Turajlic, un Musulman, s'est fait tuer sur
23 le chemin de l'aéroport, entre l'aéroport et Sarajevo, après avoir escorté
24 le ministre des Affaires étrangères turc. Il a été tué dans un blindé de
25 transport de troupes.
26 Pendant la guerre, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
27 pendant la plupart du temps de la guerre à Sarajevo, nous n'avions ni eau
28 ni de électricité. Nous n'avions pas de nourriture. Nous n'avions pas de
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1 chauffage. Nous ne pouvions pas sortir devant chez nous, devant la maison.
2 Les conditions de vie étaient très difficiles, tout simplement. Les gens
3 enterraient leurs propres enfants devant leurs maisons.
4 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.
5 Maître Karnavas, vous avez la parole.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
7 Q. Je souhaiterais maintenant enchaîner sur ce qui a été dit. Vous avez
8 mentionné votre adjoint --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez -- vous êtes pris par
10 une émotion. Vous voulez qu'on s'arrête quelques instants ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je pense qu'on peut poursuivre.
12 M. KARNAVAS : [interprétation]
13 Q. Je suis désolé de revenir sur la question de votre adjoint, vous dites
14 qu'il a trouvé la mort à bord d'un véhicule blindé. Il s'agissait de Hakija
15 Turajlic. En fait, on l'a fait sortir de force du véhicule. Il était sous
16 la protection des Nations Unies, et les Nations Unies en quelque sorte ont
17 autorisé que l'on tue cet homme. Elles ne l'ont pas protégé comme elles
18 auraient dû; n'est-ce pas
19 vrai ?
20 R. Il a été tué au vu et au su des gens des Nations Unies, il y avait la
21 FORPRONU. Il y avait les forces armées qui ont été contraintes à ouvrir le
22 véhicule et il a été tué à bord du véhicule au vu et au su de tous. Je ne
23 me trouvais pas à Sarajevo. Il me remplaçait à ce moment-là. Si j'étais à
24 Sarajevo, peut-être aurais-je raccompagné ce ministre.
25 Q. A votre connaissance, qui a tué ce monsieur ?
26 R. Je ne l'ai jamais appris. C'était à un poste de contrôle qui se
27 trouvait entre l'aéroport et la ville de Sarajevo. C'était un poste de
28 contrôle tenu par l'armée serbe, et c'est là qu'il a été tué.
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1 Q. Revenons-en à la question qui a été posée par M. le Juge, car il s'agit
2 d'un point assez important. Vous étiez membre de la présidence de Guerre et
3 vous étiez premier ministre à l'époque; étiez-vous tenu d'obtenir l'aval de
4 la présidence elle-même pour envoyer des lettres, comme vous l'avez fait,
5 au rédacteur en chef du "New York Times" ?
6 R. Non. Cette lettre doit être comprise comme étant une interview à moi,
7 dont je n'ai pas eu besoin de demander l'autorisation de la présidence,
8 parce que le premier ministre n'a pas besoin d'une autorisation de la
9 présidence pour accorder une interview à un journal. Je ne pouvais pas
10 l'accorder au "New York Times", c'est pourquoi je leur ai envoyé une
11 lettre.
12 Q. Je vous interromps de nouveau. M. Izetbegovic, qui était le président
13 de la présidence, a-t-il eu des réunions, fait des déclarations, rédigé des
14 articles ou des lettres à votre connaissance de la même manière, c'est-à-
15 dire sans obtenir au préalable l'autorisation de la présidence ?
16 R. Oui, il communiquait régulièrement avec l'opinion publique du point de
17 vue politique et du point de vue des relations avec le public. Et ça, ça
18 devait être compris comme une relation avec les médias, ce n'est pas une
19 intervention auprès des Nations Unies ou à un niveau international de haut
20 niveau où il eut fallu recueillir l'opinion des autres, ça c'est une
21 responsabilité propre et une évaluation de ma part. M. Izetbegovic, à
22 l'occasion de ces rencontres internationales d'importance, est intervenu
23 pratiquement en termes propres, en sa qualité de chef de l'Etat, parce
24 qu'en sa qualité de président de la présidence son mandant avait déjà pris
25 fin.
26 Q. Bien. Je souhaiterais parcourir rapidement les trois documents suivants
27 : 1D 02906, qui se trouve dans le troisième classeur, document suivant pour
28 vous, Monsieur le Témoin, ce document est intitulé : "Ministère chargé de
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1 la coopération entre les républiques et les relations internationales."
2 Deuxième page, Mostar, 18 novembre 1993. Reconnaissez-vous ce document ?
3 R. Oui, je le reconnais.
4 Q. Lorsque nous avons évoqué votre parcours, nous avons dit qu'à un moment
5 donné vous étiez membre du gouvernement de la République croate d'Herceg-
6 Bosna. Nous allons voir un document à ce sujet, si j'ai bien compris, à un
7 moment donné vous avez été nommé ministre chargé des relations, de la
8 coopération et des relations internationales; est-ce exact ?
9 R. Oui, exact.
10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, votre langue a fourché,
11 vous parlez du mot "interrelations", en anglais.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, en fait, je voulais parler de la
13 coopération entre les républiques.
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Cela se trouve à la ligne 13 --
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous présente mes excuses.
16 Q. Ce document, de quoi s'agit-il, si vous vous en souvenez ?
17 R. Après la création de la République croate d'Herceg-Bosna et de son
18 gouvernement à l'occasion des négociations internationales, en application
19 de ce qui est convenu d'appeler le plan Owen- Stoltenberg, conformément à
20 ce plan il y a eu création de cette République croate d'Herceg-Bosna qui a
21 disposé de ministères à soi. L'un des ces ministères était le ministère de
22 la coopération interrépublicaine, c'est-à-dire entre les trois républiques
23 de la Bosnie-Herzégovine, et l'autre c'était les relations internationales
24 du point de vue de négociations internationales.
25 Ce document signifie en termes pratiques qu'il s'agit d'un programme
26 de fonctionnement dudit ministère dans le cadre du gouvernement. Comme on
27 peut le voir, il s'agit d'un ministère de coopération entre républiques et
28 non pas le ministère des Affaires étrangères, ce qui démontre que la
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1 République croate d'Herceg-Bosna n'était pas un Etat mais une république au
2 sein d'un Etat souverain, et en vertu de ce plan concerté au niveau
3 international, c'était censé être l'une des unités constitutives de cette
4 Bosnie-Herzégovine.
5 Q. Merci.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 01958. Il se trouve
7 dans le premier classeur, Messieurs les Juges. Vous verrez qu'en haut de la
8 page, nous voyons un numéro, 115, et au bas nous voyons le numéro 1. J'ai
9 expliqué qu'il devait y avoir une modification de la traduction dans ce
10 document, il faut lire "ministère chargé de la coopération entre les
11 républiques" et non pas "adressé au ministère chargé de la coopération
12 entre les républiques".
13 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur ?
14 R. Oui, je le reconnais.
15 Q. Fort bien. Il semblerait - et j'ai de bonnes raisons pour le croire -
16 mais apparemment ceci s'inscrit dans un document qui est plus long. Est-ce
17 que vous vous souvenez du moment où ce document a été produit ?
18 R. Il a été rédigé dès l'époque où ce ministère avait fonctionné, où ce
19 ministère avait existé, et à l'époque où ce ministère présentait des
20 rapports relatifs à ses activités. Comme tout gouvernement, ce
21 gouvernement-ci, celui d'Herceg-Bosna, demandait des rapports pour
22 déterminer si tout se faisait conformément aux dispositions réglementaires.
23 Q. Très bien. Merci.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 02871. Excusez-moi,
25 Messieurs les Juges, ça se trouve dans le troisième classeur. Là, je vais
26 un peu vite, mais nous avons beaucoup de documents à examiner,
27 malheureusement. C'est plus une question d'intendance qui se pose ici. 1D
28 02871.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, je dois quand même
2 intervenir pour revenir au document précédent.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Quelle était la date ?
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais c'est le problème qui se posait,
6 j'avais demandé la date au témoin --
7 Q. Est-ce que vous connaissez au moins l'année ? Nous savons qu'en 1993
8 vous avez été nommé ministre des relations entre les républiques; c'est
9 bien cela, n'est-ce pas ?
10 R. Je n'ai pas la date ici, je ne sais pas vous la confirmer pour sûr,
11 mais il me semble que ça date du début 1994.
12 Q. Document suivant, 1D 02871. Nous le voyons, il porte la date du 16
13 février 1994, décision portant proclamation des membres du conseil
14 présidentiel. Prenons le neuvième nom, nous voyons au regard de ce chiffre,
15 votre nom, et nous voyons Jadranko Prlic, au numéro 6.
16 Nous allons revenir à ça plus tard, mais dites-nous très rapidement ce
17 qu'était le Conseil présidentiel de la République croate d'Herceg-Bosna.
18 R. Certes. Ce conseil présidentiel avait deux stades. D'abord, il y avait
19 eu Mate Boban à la tête de ce conseil, ensuite la phase 2, c'est après son
20 départ. Lorsque ce conseil présidentiel a repris les fonctions de la
21 présidence collégiale de la République croate d'Herceg-Bosna. Et dans le
22 cas concret ici, c'était sa composition initiale. Il y en a eu deux.
23 Q. Nous allons prendre un autre jeu de documents qui vous concernent eux
24 aussi mais qui portent sur la période où vous avez participé à certaines
25 négociations. Monsieur, calmez-vous, c'est le document qui se trouve juste
26 après celui qu'on vient de voir. Il porte le numéro 1D 02308.
27 M. KARNAVAS : [interprétation] Premier classeur, Messieurs les Juges.
28 Q. Parcourez-le, s'il vous plaît, le 2 février 1993, document envoyé
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1 à la mission permanente de la République de Bosnie-Herzégovine. On voit du
2 bas du document votre nom, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, c'est exact.
4 Q. On dit que vous alliez assisté à une réunion du Conseil de sécurité au
5 cours de laquelle sera évoquée la structure politique de la Bosnie-
6 Herzégovine.
7 Est-ce que vous vous êtes rendu à New York ?
8 R. Oui, je suis allé à New York.
9 Q. Bien. Document suivant.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je m'excuse, Maître Karnavas, parce que je découvre
11 qu'au Conseil de sécurité, il va y avoir donc une réunion où le premier
12 ministre se rend et, par ailleurs, dans la délégation, il y a Mate Boban
13 qui est présent.
14 Alors, Monsieur, est-ce que vous vous souvenez de - je découvre au
15 travers de ce document, mais comme tout est très complexe, on apprend tous
16 les jours - il y a donc eu une réunion du Conseil de sécurité. Vous, en
17 qualité de premier ministre, vous deviez être présent, mais est-ce que M.
18 Mate Boban était dans la délégation de la Bosnie-Herzégovine ? Est-ce qu'il
19 était sur un fauteuil à côté de vous ou pas ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Hélas, je n'étais pas présent à cette réunion
21 du Conseil de sécurité, j'aurais dû y être. Dans le bâtiment du Conseil de
22 sécurité, il y a eu des négociations, des pourparlers au plan international
23 sous l'égide de la conférence internationale.
24 M. Boban était reconnu à cet effet comme étant le chef de la
25 délégation de l'une des trois parties prenantes aux négociations. Donc il y
26 a eu trois parties en présence de reconnues : la partie croate, la partie
27 musulmane et la partie serbe. Les délégations étaient dirigées par Mate
28 Boban pour la délégation croate, Radovan Karadzic pour la délégation serbe,
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1 et Alija Izetbegovic pour la délégation musulmane. Il y a souvent eu des
2 façons de traiter les délégations, par exemple, celle d'Izetbegovic comme
3 étant celle du gouvernement. Or, Izetbegovic n'était qu'à la tête de l'un
4 des peuples constitutifs de la Bosnie-Herzégovine. Au Conseil de sécurité,
5 j'étais censé intervenir, mais je n'ai pas pris la parole parce que l'on a
6 contesté la chose.
7 On ne m'a jamais expliqué pourquoi d'ailleurs. Je pense que c'est M.
8 Silajdzic qui est intervenu en sa qualité de ministre des Affaires
9 étrangères.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous n'avez pas pu, vous, intervenir ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas pu intervenir, mais j'ai été reçu
12 par le secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros-Ghali, qui m'a reçu
13 en présence de Lord Owen et de Cyrus Vance, et c'était une réunion
14 officielle au palais des Nations Unies que j'ai présenté mes points de vue
15 et les points de vue de mon gouvernement et de mon peuple pour ce qui est
16 de l'aménagement futur à mettre en place en Bosnie-Herzégovine. M. Boutros-
17 Ghali a compris la chose et il s'y référait dans son livre intitulé, "Saga
18 US-UN."
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci. J'espère que nous allons poser des
21 questions qui vont davantage éclairer ce déplacement.
22 Prenons le document suivant, 1D 02891, 2891. Troisième classeur, Messieurs
23 les Juges. C'est le document qui se trouve juste après ce dernier document,
24 et je vois ici "Itinéraire, M. Mile Akmadzic, premier ministre."
25 Q. C'est bien vous, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. C'est l'itinéraire qui était prévu pour vous le 5 février 1993, nous le
28 voyons de nos propres yeux. Vous étiez censé rencontrer plusieurs
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1 personnalités ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que vous les avez rencontrées en tant que membre de la
4 délégation croate ou plutôt en tant que premier ministre de la Bosnie-
5 Herzégovine ? Et du fait du poste que vous occupiez, vous étiez aussi
6 membre de la présidence de Guerre de Bosnie-Herzégovine ?
7 R. Je dirais l'un et l'autre, parce que dans ce cas concret, il est
8 difficile de dissocier les choses. Il s'agissait ici de représentants des
9 pays membres du Conseil de sécurité à l'époque qui étaient là.
10 Q. Mais je suppose que la question précise que je vous pose c'est de
11 savoir si vous étiez là en qualité de premier ministre de Bosnie-
12 Herzégovine ou si vous étiez là en tant que Croate représentant le peuple
13 croate, les Croates de Bosnie-Herzégovine, ou en qualité de ces deux
14 fonctions ?
15 R. Je dirais que j'étais là-bas dans les deux qualités, l'une n'excluant
16 pas l'autre.
17 Q. D'accord. Nous avons aussi votre itinéraire pour le 10 février 1993,
18 journée au cours de laquelle vous deviez rencontrer plusieurs ambassadeurs.
19 Prenons le document suivant, 1D 02890.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-être que vous alliez aborder le problème,
21 je ne sais pas. Ce document où on voit votre planning de rencontres. Et je
22 vois que vous alliez même rencontrer l'ambassadeur représentant de la
23 France, de la Chine, de la Russie, donc vous voyez tous -- enfin, tous les
24 membres permanents. Mais le plus intéressant - c'est la première page du
25 document - vous êtes accompagné, semble-t-il, de M. Mate Boban.
26 Regardez la première page. Et alors, ma question : est-ce que Mate
27 Boban vous a accompagné pendant toutes ces visites avec tout le monde ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Et pourquoi ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu deux raisons à cela. L'une, c'est
3 que Mate Boban n'avait pas de fonction officielle pour discuter aux Nations
4 Unies avec les ambassadeurs des pays membres. Deuxième volet, c'est que
5 c'était une période entre deux négociations ou une période de plusieurs
6 journées où il y a eu interruption des négociations et où nous nous
7 attendions à ce qu'il y ait une continuation. Mate Boban était parti pour
8 avoir des négociations en Europe et je crois qu'il a été reçu en Allemagne
9 pour des pourparlers à certains niveaux. C'est du moins l'information qu'il
10 m'a transmise.
11 M. KARNAVAS : [interprétation]
12 Q. Vous parlez de moments entre les pourparlers et vous parlez des
13 négociations qui avaient commencé et se poursuivaient avec M. Cyrus Vance
14 et Lord Owen; c'est cela ?
15 R. Oui, justement.
16 Q. Bien. Document suivant, 1D 02890. Il semblerait que ce soit un
17 communiqué de presse. Troisième classeur, Messieurs les Juges. La date est
18 celle du 8 février 1993. Et ceci nous dit pratiquement ce que vous faisiez
19 à ce moment-là.
20 Le troisième paragraphe à partir de la fin, vous dites : "En sa
21 qualité de membre de la délégation croate de la République de Bosnie-
22 Herzégovine, M. Akmadzic a déclaré que les Croates avaient accepté le plan
23 Vance-Owen comme étant un compromis pénible, que toutes les trois parties
24 devaient accepter, car c'était le seul espoir réaliste de mettre fin à un
25 bain de sang."
26 Est-ce que c'est une déclaration exacte ?
27 R. Cette déclaration est exacte, ça se rapporte au 8 février, date à
28 laquelle j'ai été reçu par M. Boutros-Ghali.
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1 Q. Document suivant, 1D 02888, rapport ou lettre du Conseil de sécurité --
2 non. Non, c'est une lettre adressée au Conseil de sécurité. Troisième
3 classeur, Messieurs les Juges. 1D 02888. C'est le document suivant pour
4 vous, Monsieur le Témoin.
5 Nous le voyons, c'est votre lettre que M. Sacirbey remet. Il était le
6 représentant permanent de Bosnie-Herzégovine à l'époque à New York. Page
7 suivante.
8 Voici ce que vous dites au deuxième paragraphe :
9 "Les Croates de Bosnie font aussi partie du gouvernement de la
10 République de Bosnie-Herzégovine. Le gouvernement bosniaque ne saurait être
11 uniquement synonyme des Musulmans de Bosnie."
12 Vous poursuivez en disant ceci : "Lorsqu'on pense à la façon de régler la
13 politique interne de la République de Bosnie-Herzégovine, il nous faut
14 reconnaître trois éléments constitutifs différents…"
15 Au tout dernier paragraphe, vous dites ceci : "Il serait erroné et injuste
16 à l'égard des Croates de Bosnie-Herzégovine de dire que le côté du
17 gouvernement de Bosnie, dans vos rapports, fait uniquement -- quand on dit
18 'gouvernement de Bosnie,' on fait uniquement référence aux Musulmans de
19 Bosnie."
20 Est-ce que vous pourriez nous expliciter ceci de façon à ce que nous
21 comprenions mieux ?
22 R. Nous avons eu de grosses difficultés et on en a toujours eu à ce
23 moment-là. Pour ce qui est de dire que la Bosnie ce n'était pas que la
24 Bosnie mais que c'était la Bosnie et Herzégovine. Et parler de Croates,
25 Serbes ou Musulmans de Bosnie n'est pas une bonne façon de s'exprimer parce
26 qu'il y a aussi l'Herzégovine.
27 Deuxièmement, la communauté internationale telle qu'on la qualifiait, telle
28 qu'on l'entendait à une bonne partie de ces négociations, acceptait
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1 Izetbegovic comme président de la présidence des trois peuples en présence,
2 et elle considérait comme étant ce type de représentants-là aux
3 négociations indépendamment du fait que nous ayons déjà eu une décision
4 émanant de la présidence disant que lorsque nous nous entretenions avec un
5 Etat étranger, il nous appartenait de désigner une délégation
6 représentative des trois peuples. Et lorsque nous avions des pourparlers
7 internes, à savoir des pourparlers relatifs à l'aménagement intérieur de la
8 Bosnie-Herzégovine, indépendamment de la présidence du coprésident de la
9 conférence de paix ou de qui que ce soit d'autre, les négociations avaient
10 eu lieu entre trois peuples, parce qu'il s'agissait de leur Etat à eux et
11 ces trois peuples étaient sur pied d'égalité.
12 C'est donc d'une certaine façon mon mécontentement que je suis en
13 train d'exprimer en demandant, en priant à ce que les représentants croates
14 qui le sont toujours et qui ont l'intention de l'être, d'être membres de ce
15 gouvernement et de la présidence de Bosnie-Herzégovine soient traités de la
16 même façon que les représentants musulmans. Ici je ne parle pas des
17 représentants serbes, puisque eux avaient quitté la présidence et le
18 gouvernement, enfin, du moins ceux qui avaient été élus à des élections.
19 Q. Permettez-moi de vous interrompre, car nous allons voir d'autres
20 documents qui feront peut-être davantage la lumière sur cette question-ci
21 aussi.
22 Document suivant, parce que ça s'imbrique avec le document précédent,
23 il s'agit du document 1D02889. C'est la lettre officielle qui était envoyée
24 et qui renvoie au document précédent, document sur lequel on trouve votre
25 signature, Monsieur, n'est-ce pas, celui que je suis en train de vous
26 montrer le 2889 ?
27 R. Oui.
28 Q. Parfait. Document d'après, 1D 02848. 2848. Troisième classeur. Cette
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1 lettre porte la date du 24 février. Deuxième page on y voit votre nom;
2 c'est votre signature, Monsieur ?
3 R. Oui.
4 Q. Lettre qui est adressée au sénateur Biden. Il était à l'époque
5 président du sous-comité chargé des affaires européennes faisant partie du
6 comité au sénat des Affaires étrangères. Un sénateur bien connu.
7 Vous semblez lui envoyer une lettre, celle-ci dont je vais lire
8 certains passages. Fin de la première phrase :
9 "Je veux vous informer que la déposition de M. Silajdzic en tant que
10 telle ne représente pas totalement la position du gouvernement de Bosnie-
11 Herzégovine."
12 Vous dites que :
13 "Cette position a été établie dans le programme de novembre par
14 consensus au gouvernement et la présidence qui faisait office de Parlement.
15 Ce programme montre que le gouvernement soutient pleinement la conférence
16 internationale sur l'ex-Yougoslavie, les coprésidents du comité directeur,
17 MM. Vance et Owen, et leur volonté de trouver par la négociation une
18 solution à la crise de Bosnie-Herzégovine. Nous cherchons à parvenir à une
19 paix équitable par ce processus. A notre avis, une paix équitable inclut
20 premièrement le retour de tous les réfugiés et personnes déplacées qui
21 veulent rentrer chez elles, l'établissement d'un tribunal pénal
22 international chargé de traduire en justice ceux qui sont accusés de crimes
23 de guerre. Troisièmement, la non-reconnaissance de modifications obtenues
24 par l'agression dont le nettoyage ethnique, et quatrièmement, paiement de
25 dommages et intérêts à ceux qui ont subi des préjudices du fait de la
26 guerre.
27 Vous dites ensuite :
28 "Le gouvernement a également décidé que la Bosnie-Herzégovine ne peut
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1 pas être organisée politiquement en tant qu'Etat décentralisé. Les
2 propositions concernant l'établissement de provinces constituent une
3 solution acceptable pour autant que ce ne soit pas basé sur des principes
4 ethniques mais plutôt sur un mélange de principes ethniques, géographiques,
5 historiques, économiques et autres obtenus par la négociation. Notre
6 programme inclut une égalité totale pour les trois peuples de Bosnie-
7 Herzégovine, les Croates, les Musulmans et les Serbes, comme ils sont
8 reconnus en tant que tels par la constitution de la République de Bosnie-
9 Herzégovine."
10 Là je saute quelques passages. Deuxième paragraphe de la deuxième page. "Je
11 vous demande dès lors de garder à l'esprit ce qu'a dit M. Silajdzic de
12 l'état actuel des pourparlers Vance-Owen, et de l'histoire nationale de
13 Bosnie-Herzégovine est typique de ce que pensent certains membres musulmans
14 du gouvernement, mais pas ce que pense le gouvernement dans sa totalité."
15 Dernière phrase du paragraphe suivant, parce que le reste on peut le lire
16 après.
17 "Tout comme M. Silajdzic, M. Izetbegovic ne parle pas au nom de la
18 totalité de la présidence lorsqu'il parle de l'état actuel des pourparlers
19 Vance-Owen, il parle uniquement en tant qu'un des membres musulmans de la
20 présidence."
21 Pourriez-vous nous expliquer ce que vous essayez de dire ici au sénateur
22 Biden par cette lettre ? Essayez d'être concis, car j'ai d'autres documents
23 qui se rapportent à la même question.
24 R. C'est à peu près comme cela est indiqué dans cette lettre. Avec la
25 réunion de ces pays membres du Conseil de sécurité, j'avais également
26 insisté sur la création d'un tribunal pénal international pour les crimes
27 de guerre. M. Silajdzic est allé à ces entretiens et il a été reçu par M.
28 Biden sans que je le sache et je me trouvais à New York où j'ai d'ailleurs
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1 rédigé cette lettre. Du point de vue politique et du point de vue
2 protocolaire c'était chose très incorrecte que de le faire.
3 Troisièmement, sur ce rapport, pour ce qui est des conversations de
4 M. Silajdzic, ils ont appelé cela témoignage de M. Silajdzic, "testimonez"
5 [phon], à Washington et son témoignage dénotait de nos positions conjointes
6 et de notre plateforme adoptée au sein de la présidence de Bosnie-
7 Herzégovine.
8 Je voulais par là attirer l'attention du sénateur Biden sur les
9 circonstances politiques de la Bosnie-Herzégovine telles qu'elles sont
10 décrites ici. J'ai demandé un traitement sur un pied d'égalité des trois
11 peuples en présence au sein de la Bosnie-Herzégovine.
12 Q. Permettez-moi de vous interrompre. A ce stade des négociations,
13 Silajdzic et Izetbegovic, est-ce qu'ils sont d'accord avec le plan Vance-
14 Owen, ou est-ce qu'ils ont leur propre programme ?
15 R. Justement à cette époque-là à New York, au bâtiment des Nations Unies,
16 nous étions en train de discuter du plan Vance-Owen. M Izetbegovic et M.
17 Karadzic, début janvier à Genève avaient signé ce qu'on a qualifié de
18 principes et avaient en principe accepté le volet militaire. Il restait à
19 convenir des provinces et des frontières de ces provinces et de convenir
20 d'un gouvernement par intérim, à savoir un gouvernement intermédiaire, nous
21 étions donc en phase de négociations.
22 Il n'en demeure pas moins que M. Izetbegovic a fait de son mieux pour
23 reporter à plus tard la mise en œuvre de ce plan qu'ils ont fini par
24 accepter mais qu'ils n'ont jamais réalisé.
25 Q. Je vous arrête. En ce qui concerne M. Silajdzic, il a comparu devant ce
26 sous-comité, et d'après ce que vous avez appris, en quoi ce qu'il a dit
27 n'était-il pas conforme avec la position que défendait la présidence ou la
28 présidence de Guerre ?
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1 R. Les rapports que j'ai reçus montraient bien qu'il n'acceptait pas le
2 plan de négociations, qu'il continue à insister sur une Bosnie-Herzégovine
3 unitaire, et cette Bosnie-Herzégovine unitaire correspondait à ce qu'ils
4 disaient, lui et M. Izetbegovic, un homme, une voix. Et dans une telle
5 situation, la population musulmane qui était majoritaire devait avoir plus
6 de votes que les Serbes et les Croates, et c'est l'une des raisons pour
7 lesquelles la Yougoslavie s'est dissoute.
8 Q. Très bien. Document suivant, 1D 02847; 1D 02847.
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, il y a
10 une phrase que je voudrais présenter au témoin pour qu'il la commente,
11 lignes 16 à 18, page 61, vous avez dit ceci : "M. Izetbegovic a fait tout
12 ce qui était en son pouvoir pour reporter l'adoption de cet accord." Je
13 pense qu'on parlait alors du plan Vance-Owen, et finalement, il a été
14 obligé de l'accepter, mais il ne l'a jamais respecté.
15 Vous dites qu'il a été forcé de l'accepter, qu'est-ce que vous voulez
16 dire par là ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'était pas forcé physiquement, mais les
18 négociations se déroulaient de telle façon qu'il avait accepté le plan
19 signé le 25 mars à New York, alors que même à l'époque il a dit quelles
20 étaient les conditions, il a dit : voici, ce sont mes conditions. Donc il a
21 accepté le plan, mais avec des condition. Ensuite, il n'a jamais permis à
22 ce que ce plan soit réalisé et mis en œuvre.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur, je suppose que vous êtes
24 au courant de la différence entre la signature d'un traité international et
25 sa ratification. Ai-je raison de supposer cela, vous savez pertinemment
26 cela, n'est-ce pas ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bien sûr, je ne suis pas surpris. Je
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1 suis désolé de vous poser une question qui peut vous paraître bête, mais
2 j'ai appris des parties que l'on peut poser ce genre de question.
3 Est-ce que M. Izetbegovic a jamais ratifié -- est-ce que les
4 Musulmans ont jamais ratifié le plan Vance-Owen ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile de parler de ratification par
6 le Parlement dans le sens classique du terme, parce qu'à l'époque il n'y
7 avait pas de Parlement. Mais le plan Vance-Owen a été accepté par la
8 présidence de Guerre comme une solution possible à la guerre en Bosnie-
9 Herzégovine.
10 Le troisième parti aux négociations, le parti serbe, a refusé de
11 signer ce plan à New York. Ils ont accepté les principes, si mes souvenirs
12 sont exacts, ils ont accepté qu'il y ait des provinces, mais ils n'ont pas
13 accepté ce gouvernement temporaire.
14 Il y a eu des "pressions" de la communauté internationale, et à cause
15 de cela, ils ont signé le plan dans sa totalité le 2 mai à Athènes, mais à
16 condition que leur Parlement accepte le plan. Leur Parlement s'est réuni
17 quelques jours plus tard à Pale, c'est dans la région de Sarajevo. D'après
18 les informations dont nous disposons, ce Parlement avait rejeté le plan en
19 expliquant que ceci ne pouvait pas être ratifié que par le biais d'un
20 référendum.
21 Nous avons demandé que les côtés musulman et croate continuent à
22 mettre en œuvre ce plan même s'il a été refusé par le troisième parti dans
23 la mesure du possible. Mais il n'y a jamais eu de véritable mise en œuvre
24 de ce plan.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je dois insister quelque peu. Je ne
26 sais si vous êtes juriste de formation -- je suis juriste moi-même, bien
27 sûr.
28 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ne m'en voulez pas si je coupe les
2 cheveux en quatre. Vous dites que "cela n'avait jamais été respecté", mais
3 du point de vue du droit, Izetbegovic était-il tenu du point de vue du
4 droit de respecter ce plan ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois essayer de vous expliquer. Au moment
6 de la cérémonie solennelle de la signature du plan, dans le bâtiment des
7 Nations Unies à New York, les représentants des trois partis étaient
8 présents. Les Croates ont tout signé. Les Musulmans ont tout signé tout en
9 communiquant un document au co-président, ce document concernait surtout le
10 troisième parti, les Serbes, où ils demandaient que l'on remplisse
11 certaines conditions militaires, mais je ne suis pas expert en la matière.
12 Les Serbes, comme je l'ai dit, avaient refusé de signer le plan à
13 l'époque, mais ils avaient signé un accord de principe à Genève auparavant,
14 je vous l'ai déjà dit aussi.
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup. Excusez-moi, Maître
16 Karnavas, vous avez la parole de nouveau.
17 M. KARNAVAS : [interprétation]
18 Q. Permettez-moi d'enchaîner là-dessus. Monsieur, détendez-vous. Ne vous
19 inquiétez pas, buvez un verre d'eau.
20 A un moment donné vous avez dit que Karadzic a signé à Athènes, mais qu'il
21 a renvoyé la question devant le Parlement de la Republika Srpska qui a voté
22 de façon négative. C'est ce que vous avez dit un peu plus tôt.
23 R. Je me base sur les rapports que j'ai reçus. Malheureusement, je n'étais
24 pas à Athènes, mais je pense que ceci n'est pas contesté.
25 Q. Il y a un instant vous nous avez dit que Karadzic, bien qu'il ait signé
26 ce document, a renvoyé la question devant le Parlement à Pale, c'est là
27 qu'il se trouvait à l'époque, et il y a eu un vote; est-ce exact ?
28 R. [aucune interprétation]
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1 Q. Pour les trois territoires qui ne faisaient pas partie de la
2 Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine, il n'y avait pas d'assemblée, il y
3 avait une présidence de Guerre, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact, oui.
5 Q. Nous avons entendu des témoignages, et corrigez-moi si je me trompe,
6 selon lesquels la présidence de Guerre en quelque sorte assumait les
7 pouvoirs de l'assemblée ?
8 R. C'est exact.
9 Q. Bien. Donc au vu de la question posée par M. le Juge, il semblerait que
10 si le président de la présidence avait signé au nom de la Bosnie-
11 Herzégovine, il aurait fallu qu'à un moment donné la présidence elle-même
12 approuve le texte, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Vous souvenez-vous si le plan de paix, ou l'un des plans de paix Vance-
15 Owen, a été présenté devant la présidence, a-t-il été prévu à quelque
16 moment que ce soit que la présidence l'examine ?
17 R. Je ne me souviens pas qu'on l'ait exposé dans son intégralité.
18 Q. Pendant les pourparlers de paix auxquels vous avez participé, et nous
19 avons entendu des témoignages à cet égard par le passé, est-ce que vous
20 pouvez nous dire si les négociateurs, puisqu'ils traitaient de trois
21 nations différentes, la nation croate, la nation musulmane et la nation
22 serbe, qui faisaient toutes parties de la Bosnie-Herzégovine, qui étaient
23 leurs homologues ? Il y a Owen et qui devait négocier cet accord entre les
24 trois nations ?
25 R. C'était les représentants des trois peuples. Nous avions trois salles
26 séparées à Genève. D'un côté, vous aviez Izetbegovic --
27 Q. Bien. Poursuivez, je vous en prie.
28 R. Le deuxième, Karadzic et le troisième, Boban. Puisqu'on n'arrivait pas
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1 à se mettre d'accord sur les noms des trois parties, Lord Owen et Vance et
2 Stoltenberg, cela dépendait de la période, ils ont décidé de couvrir cela
3 avec les représentants des trois peuples en leur donnant trois noms, en
4 utilisant les trois noms des trois représentants.
5 Q. Nous allons y venir et nous allons voir des documents à ce sujet, mais
6 il semble au vu de votre lettre que, s'agissant d'Izetbegovic, on le
7 considère comme le représentant de la Bosnie-Herzégovine et non pas de la
8 nation musulmane ou du peuple musulman. Est-ce là l'un des objets de vos
9 griefs ?
10 R. Oui, absolument.
11 Q. Nous reviendrons sur la question plus tard. Document suivant, 1D 02847,
12 il s'agit d'une déclaration du sénateur Biden -- troisième classeur. Nous,
13 les Américains, le connaissons bien, il s'agissait d'un sénateur très
14 loquace et dès le premier paragraphe nous lisons ce qui suit :
15 "Il y a une semaine, le sous-comité chargé des affaires européennes a
16 tenu une audition qui a duré toute une journée à propos de la politique
17 américaine en Bosnie. Ce jour-là, le sous-comité a rencontré le ministre
18 des Affaires étrangères de la Bosnie, le Dr Haris Silajdzic, en partie à
19 titre privé et en partie dans le cadre d'une réunion publique."
20 Arrêtons-nous un instant. A ce stade, vous trouviez-vous aux Etats-Unis,
21 avez-vous rencontré le sénateur Biden ? Vous étiez premier ministre et
22 Silajdzic était membre de votre gouvernement.
23 R. J'étais à New York. Les négociations étaient en cours, et le sénateur
24 Biden pouvait savoir que j'étais à New York, bien sûr, et que j'étais le
25 premier ministre.
26 Q. M. Siladzic, le Dr Siladzic, vous a-t-il jamais dit de quoi il avait
27 parlé avec le sénateur Biden à titre privé ? Est-ce qu'il vous l'a dit ? M.
28 Silajdzic a-t-il jamais informé la présidence, la présidence de Guerre ou
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1 vous, en tant que premier ministre, de l'objet de ces discussions ?
2 R. Il ne m'en a pas informé, mais j'ai reçu un rapport de ces
3 négociations, un procès-verbal, et j'ai entendu dire que M. Siladzic avait
4 des liens profonds et sentimentaux dans le cabinet de M. Biden, mais je ne
5 saurais confirmer cela.
6 Q. Vous parlez de sa ou son secrétaire ?
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. Troisième paragraphe, on peut lire :
9 "Hier, j'ai reçu une lettre du premier ministre de la Bosnie, M. Mile
10 Akmadzic, membre croate de Bosnie de la présidence bosniaque. La lettre de
11 M. Akmadzic, que j'ajoute au dossier des procédures tenues jeudi dernier,
12 était de confirmer que ni le président Izetbegovic ni le ministre des
13 Affaires étrangères Silajdzic n'était habilité à s'exprimer au nom de la
14 présidence de Bosnie."
15 C'est la lettre que nous venons de voir, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, s'il ne respectait pas la plateforme.
17 Q. Bien. Puis le texte se poursuit : "Il est impossible de voir tout ce
18 qui peut se trouver derrière cette lettre." En d'autres termes, on met en
19 doute les motifs.
20 "Mais il n'est pas difficile de se rendre compte de l'un des effets
21 possibles, qui est de saper la crédibilité du gouvernement dont fait partie
22 M. Akmadzic et de renforcer l'impression que le problème bosniaque revient
23 à une guerre civile entre trois parties qui sont aussi responsables les
24 unes que les autres des factions divisées sans espoir de trouver un
25 compromis…" et ainsi de suite.
26 Est-ce que c'est Siladzic qui contestait ce qui était dit ?
27 R. [aucune interprétation]
28 [problème technique]
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1 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je soulève une objection quant à
2 la formulation de la question.
3 Je demande à la sténotypiste de me signaler quand elle sera prête.
4 La question est directrice, cela dure depuis quelque temps, mais là je
5 soulève une objection.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, reprenez.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
8 Q. M. Akmadzic, est-ce que l'objet de votre lettre était de saper la
9 crédibilité du gouvernement et de renforcer l'impression qu'il y avait une
10 guerre civile entre trois parties ?
11 M. SCOTT : [interprétation] La question est encore directrice.
12 C'est Me Karnavas qui témoigne à la place du témoin.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous induisez la réponse, là, Maître Karnavas.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien. Je vais reformuler ma question.
15 Q. Nous voyons la réponse du sénateur Biden. Est-ce que vous pourriez
16 faire des commentaires sur sa réponse pour ce qui est de la crédibilité de
17 la réponse et de la manière dont ce monsieur a compris votre lettre ?
18 M. SCOTT : [interprétation] Est-ce que l'on peut donner des instructions au
19 témoin sur ce qu'il doit dire ?
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, c'est une question ouverte. J'utilise
21 la même technique que M. Scott, apparemment ce témoignage lèse
22 l'Accusation, mais c'est la même technique que l'Accusation.
23 M. SCOTT : [interprétation] Non, ce n'est pas du tout la même technique que
24 moi, et si je l'ai fait, c'était dans le cadre d'un contre-interrogatoire
25 et non pas lors d'un interrogatoire principal. Et pour que les choses
26 soient claires, ça ne porte pas atteinte à la thèse de l'Accusation du
27 tout, c'est amusant, mais cela ne nous conduit nulle part.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, Maître Karnavas. Au début, à la ligne 3
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1 de la page 69, vous avez dit -- vous, vous voyez la réponse du sénateur
2 Biden. Pouvez-vous apporter un commentaire ? Et puis laissez-le répondre.
3 Ça sera suffisant.
4 Bien. Alors, Monsieur le Témoin.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] -- a déjà vu ma lettre. Moi, j'ai prêté un
6 serment, et là, je répète ce que j'ai dit. Mon objectif et l'objectif de
7 mes collaborateurs était de renforcer le gouvernement de Bosnie-Herzégovine
8 et pas de diminuer l'importance de ce gouvernement. Parce que quand on fait
9 cela et ceux qui ont fait cela, ce sont ceux qui se sont appropriés une
10 fonction qui ne leur appartenait pas. M. Izetbegovic l'a fait quand son
11 mandat a pris fin, quand il n'a pas donné les pouvoirs à un Croate à qui
12 c'était le tour de prendre le pouvoir selon la constitution et les règles
13 en vigueur. Moi, à aucun moment dans la lettre, je n'ai dit qu'il s'agit
14 seulement d'une guerre civile en Bosnie-Herzégovine.
15 J'ai toujours dit qu'il s'agissait là, avant tout, d'une agression,
16 et d'ailleurs ici, je vous ai donné la définition de la présidence - pas la
17 mienne - de cette guerre. J'ai donné mon point de vue, à savoir que c'est
18 cette agression-là qui a provoqué la guerre entre les Musulmans et les
19 Croates. Le sénateur Biden ne l'a, de toute évidence, pas compris, et
20 d'ailleurs il ne s'est jamais entretenu avec moi. Il ne m'a jamais appelé
21 pour que l'on en parle.
22 Q. Très bien. Je ne vais pas m'appesantir sur cette lettre. Examinons le
23 document 1D 02849, qui se trouve dans le troisième classeur, puis ensuite
24 nous examinerons le document suivant, 1D 02851.
25 Mais parlons d'abord du document 1D 02849. Nous sommes le 28 février 1993.
26 Cette lettre est adressée au sénateur Biden. Vous en êtes l'auteur. A la
27 page 2, vous essayez de lui expliquer l'objet de votre lettre.
28 Manifestement, vous n'avez pas vu sa déclaration intitulée : "Une question
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1 concernant le gouvernement bosniaque."
2 Au paragraphe 2, vous dites : "L'objet de ma lettre était de vous informer
3 de la position du gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine
4 s'agissant des pourparlers de Paix Vance-Owen que l'on confond souvent avec
5 la position des éléments musulmans au sein du gouvernement."
6 Arrêtons-nous un instant. A ce stade, quelle était la position des
7 Musulmans concernant le plan de Paix Vance-Owen ?
8 R. J'en ai déjà parlé. La position du gouvernement musulman, pas seulement
9 par rapport au plan Vance-Owen mais en général, était que la Bosnie-
10 Herzégovine devait être, comme on disait officiellement, un Etat uni, et
11 là, ce que l'on sous-entendait, c'était un terme politiquement moins joli,
12 à savoir un Etat politiquement unitaire.
13 Q. A la dernière partie de ce paragraphe, vous dites :
14 "Alors que le gouvernement dans son ensemble soutient le processus de
15 paix Vance-Owen, il n'y a aucune position unique du gouvernement sur l'état
16 actuel des pourparlers Vance-Owen. Chacune des trois parties aux
17 négociations a sa propre position actuellement."
18 Etait-ce vrai de dire ça ?
19 R. C'est une déclaration véridique, puisque vous avez trois peuples qui
20 font partie du gouvernement et de la présidence et qui n'arrivent pas à se
21 mettre d'accord sur tout.
22 Q. Paragraphe suivant, vous dites :
23 "Je vous ai également informé du fait que le mandat de M. Alija
24 Izetbegovic en tant que président de la présidence était expiré, et ce,
25 afin de montrer le besoin immédiat qu'a la communauté internationale
26 d'aider, non seulement de protéger la souveraineté et l'intégrité
27 territoriale de la Bosnie-Herzégovine, mais également de veiller à ce que
28 le pays soit gouverné conformément à ses principes démocratiques et
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1 constitutionnels."
2 Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit, Monsieur ?
3 R. Bien sûr. Oui, je maintiens cela au jour d'aujourd'hui encore.
4 Q. Avant la pause, et je vois que l'heure de la pause se rapproche, je
5 souhaiterais que l'on examine le document 1D 02851, troisième classeur.
6 Nous sommes en mars 1993, nous voyons que cette lettre a été envoyée le 1er
7 mars 1993 donc, à Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général. Lui, au moins,
8 devait savoir la nature de vos échanges avec M. Biden, n'est-ce pas ?
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, une petite correction à
10 apporter au compte rendu d'audience. Page 4, ligne 14, on peut lire 2581,
11 mais il s'agit de 2518.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, c'est une erreur.
13 Q. Puis dernier document, numéro 1D 2850, apparemment vous vous êtes
14 adressé à Al Gore qui était vice-président américain ?
15 R. Oui, c'est exact.
16 Q. Je ne souhaite pas poser de question directrice, car sinon nous aurons
17 une réaction de la partie adverse, mais pourriez-vous nous dire pourquoi il
18 était nécessaire que vous écriviez une lettre en sus de celle de Biden qui
19 rencontrait à titre privé le ministère étranger, enfin c'est ce qu'il
20 affirme, alors pourquoi était-il nécessaire que vous transmettiez ces
21 lettres à Boutros Boutros-Ghali et à Al Gore ?
22 R. J'ai voulu en informer les représentants principaux de la communauté
23 internationale, de les informer de la situation en Bosnie-Herzégovine, des
24 difficultés au niveau des négociations, et j'ai demandé l'aide avant tout
25 des Nations Unies et des Etats-Unis d'Amérique, puisque j'étais à New York
26 à l'époque, pour qu'ils soutiennent ces négociations et le plan Vance-Owen,
27 et qu'ils soutiennent aussi nos points de vue politiques, à savoir que la
28 Bosnie-Herzégovine était un pays décentralisé qui avait trois peuples
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1 constitutionnels et que de perdre ce caractère serait une véritable
2 catastrophe.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-être que l'heure est venue de faire la
4 pause, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous reprenons à 18 heures.
6 --- L'audience est suspendue à 17 heures 41.
7 --- L'audience est reprise à 18 heures 03.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Je vais demander quelques
9 secondes de huis clos partiel à M. le Greffier.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
11 le Président.
12 [Audience à huis clos partiel]
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19 [Audience publique]
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
21 Q. Une simple question d'intendance. Vous avez été ambassadeur de Bosnie-
22 Herzégovine après la signature des accords de Dayton; c'est bien cela ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Quand et où ?
25 R. Ambassadeur de la Bosnie-Herzégovine à Skopje en Macédoine en 2000 et
26 en 2001.
27 Q. Très bien. Merci de cette information. Abordons d'autres documents.
28 Commençons par le document 1D 01192, premier classeur.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On ne l'a pas. En tout cas, je ne
2 l'ai pas.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Vous n'avez pas 1192 ?
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je l'ai.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.
6 Q. Auparavant, et là je reviens à ce que disait Lord Owen dans son livre
7 lorsqu'il y a eu objection, mais on avait un commentaire de Lord Owen qui
8 disait que le gouvernement devenait de plus en plus musulman -- pour une
9 population surtout musulmane. Nous allons examiner plusieurs séries de
10 documents que je vais éventuellement vous demander de commenter.
11 D'abord celui-ci, c'est un rapport -- est-ce que, d'abord, vous le
12 reconnaissez, ce document ?
13 R. Oui, je le reconnais.
14 Q. Bien. Il semblerait qu'il y a une liste de personnalités destinées à
15 représenter la Bosnie-Herzégovine; est-ce exact ?
16 R. C'est exact.
17 Q. Suis-je en droit de supposer que ce ne sont pas des ambassadeurs en
18 tant que tels, mais que, malgré tout, ces personnes vont se consacrer à des
19 relations diplomatiques au nom de la Bosnie-Herzégovine; est-ce exact ?
20 R. Vous avez raison. C'est exact.
21 Q. Examinons les noms. Est-ce qu'on n'a pas surtout des noms musulmans ?
22 R. Oui. Une prédominance musulmane, oui.
23 Q. [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, il y a un peu de directif dedans,
25 mais bon.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est vrai, mais j'essaie de gagner du
27 temps. C'est manifeste, mais regardons l'Allemagne, je le concède. Là, vous
28 m'avez pris au piège et j'ai une carte jaune là, sans doute.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais écoutez, je peux peut-être
2 détendre le jeu en posant une question. Je vois ici ministère de
3 l'Intérieur, et à regarder le contenu il me semble plutôt quelque chose qui
4 est destiné au ministère des Affaires étrangères. Alors est-ce que la
5 traduction est bonne, parce que quand je vois en croate "Inostrane
6 Poslova," est-ce que c'est bien traduit ? Je vois un conseil qui hoche de
7 la tête.
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Qu'est-ce qu'on a en B/C/S ?
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] "Inostrane."
10 M. KARNAVAS : [interprétation]
11 Q. En dessous de l'intitulé République de Bosnie-Herzégovine, Monsieur le
12 Témoin, veuillez lire. D'où vient ce document ? De quel ministère ?
13 R. Ministère des Affaires étrangères.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel.
15 Q. Si je vois l'Allemagne -- quelle est l'appartenance ethnique de cette
16 personnalité ?
17 R. Je pense que c'est un Musulman, mais je n'en suis pas sûr.
18 Q. Pour la France ?
19 R. Ça, c'est un Musulman.
20 Q. La Belgique et la Communauté européenne ?
21 R. Musulman, oui.
22 Q. La Grande-Bretagne?
23 R. -- n'est pas un Musulman.
24 Q. La Russie ?
25 R. Un Musulman.
26 Q. [aucune interprétation]
27 R. Tchécoslovaquie, Musulman.
28 Q. Tunisie et l'OLP ?
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1 R. Musulman.
2 Q. Arrêtons-nous là. Pourquoi envoyez quelqu'un qui va représenter la
3 Bosnie auprès de l'OLP ? N'oublions pas que nous sommes alors en 1992, si
4 je ne m'abuse.
5 R. Je pense qu'en Tunisie il y a eu beaucoup de réfugiés de l'Organisation
6 de libération de Palestine, ils avaient leur mission de représentation, il
7 était donc pratique d'avoir un représentant pour la Tunisie et être en même
8 temps le représentant pour l'OLP.
9 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Est-ce que je peux vous aider,
10 Maître Karnavas. L'OLP a été reconnu par plusieurs pays ou avait déjà été
11 reconnu comme organisation avant 1990, surtout par les pays qui étaient
12 alors socialistes mais aussi par d'autres pays non aliéné, c'est pourquoi
13 je pense que cette décision a été prise. Je pense que le témoin disait
14 qu'il y avait des réfugiés et que c'était une nécessité supplémentaire de
15 le faire.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Et je pense aussi qu'à ce stade, Yasser
17 Arafat avait installé son siège en Tunisie et c'était la réponse que
18 j'espérais obtenir, mais je ne voulais pas être directif. Donc maintenant
19 c'est moi qui dépose comme dirait l'Accusation.
20 Q. Et puis pour les Emirats arabes unis ?
21 R. [aucune interprétation]
22 Q. -- l'Iran et les républiques islamiques ?
23 R. Un musulman.
24 Q. Je crois que nous avons saisi.
25 Regardez les autres noms, il y en a combien à peu près qui ne donne
26 pas l'impression d'être des noms musulmans ?
27 R. Je n'ai pas compté mais je pense que le pourcentage est plutôt
28 faible.
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1 Q. Page 2, on dit que :
2 "Plusieurs personnes ont été nommées représentants personnels du
3 président de la présidence." Pour les Etats-Unis, Sacirbey; l'Allemagne,
4 Suliak; l'Autriche, Urban; la Turquie, Silayci, et pour la Malaisie on a
5 Ceric.
6 Première question : pourquoi était-il nécessaire que le président de la
7 présidence ait des représentants personnels ?
8 R. Il est le seul à le savoir. Il n'y avait pas de nécessité politique
9 véritable. Il s'agissait ici essentiellement d'amis à lui.
10 Q. D'accord. Cette réponse me satisfait. "Le président de la présidence de
11 la République de Bosnie-Herzégovine a autorisé", même page, page 2, "a
12 autorisé les personnes suivantes à recueillir de l'aide humanitaire au nom
13 de la République de Bosnie-Herzégovine." Est-ce que nous avons ici une
14 décision prise par la présidence ou s'agit-il d'une décision prise
15 personnellement par le président de la présidence. Dites-nous si vous le
16 savez ?
17 R. Je ne le sais pas, mais je n'ai jamais nulle part retrouvé une telle
18 décision de la présidence.
19 Q. Le président de la présidence, était-il habilité à donner une telle
20 autorisation, à faire ce genre de désignation, de nommer des personnes
21 censées représenter la Bosnie-Herzégovine sans avoir l'autorisation au
22 préalable ou sans consultation, tout du moins préalable avec d'autres
23 membres de la présidence ?
24 R. En vertu de la constitution de Bosnie-Herzégovine et en vertu des
25 règles régissant les travaux de la présidence de Bosnie-Herzégovine, il
26 n'avait pas le droit de le faire.
27 Q. Vous qui étiez membre de la présidence de Guerre à l'époque, qui étiez
28 premier ministre, est-ce que vous savez combien d'aide on a obtenu de ces
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1 divers pays ? Pour le dire autrement, est-ce qu'il y avait un système de
2 comptabilité pour que le processus soit transparent et qu'on sache combien
3 de fonds était recueilli, combien disons l'Arabie saoudite ou les Emirats
4 arabes unis ont donné, ou l'Inde ?
5 R. Je ne sais pas. Il est très difficile de le savoir. Je ne pense pas
6 qu'il y ait des renseignements à ce sujet. Chaque pays doit disposer de ce
7 type de renseignements si tant est qu'il en dispose.
8 Q. Pour ce qui est de ces fonds recueillis ou de cette aide obtenue, pour
9 autant qu'il y en ait eu, nous ne savons si l'Arabie saoudite a donné
10 certains de ces pétrodollars à la Bosnie. Sur cette aide, quelle est la
11 partie qui a été donnée aux municipalités et surtout aux municipalités où
12 il y avait des non-Musulmans qui résidaient en majorité ?
13 R. En termes pratiques, rien. Il était convenu au début, au gouvernement
14 de la présidence, de faire en sorte que l'aide humanitaire soit divisée en
15 trois parties. Pendant un certain temps ça a fonctionné. Bien sûr, il est
16 difficile de faire un partage idéal en trois parties. Ça a fonctionné un
17 certain temps plus ou moins bien, puis après ça n'a plus fonctionné. Il est
18 arrivé du pétrole, il est arrivé différentes formes d'aide et d'assistance,
19 et la Bosnie-Herzégovine a survécu et notamment Sarajevo, mais je ne peux
20 pas vous parler en termes de contingent.
21 Q. N'oubliez pas de ralentir, Monsieur le Témoin, parce qu'on n'a pas reçu
22 la dernière partie et chaque mot compte.
23 R. Je ne peux pas parler de contingentement au de contingent arrivant de
24 tel ou tel autre pays. Je sais que l'assistance était considérable et je
25 sais que la Bosnie-Herzégovine en vivait en termes pratiques.
26 Q. Document suivant, 1D 0 --
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas. Est-ce
28 qu'il n'est pas aussi intéressant d'examiner la page suivante qui dit
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1 ceci : "Le président du gouvernement de Bosnie-Herzégovine a autorisé les
2 personnes suivantes à recueillir du secours humanitaire." Donc est-ce que
3 c'est une décision que vous avez prise, vous, Monsieur Akmadzic ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, c'est la date du 21 juin 1992. Je n'étais
5 pas premier ministre à ce moment-là.
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Avez-vous un commentaire
7 supplémentaire sur le fait que le président n'avait pas compétence pour le
8 faire ? Le président du gouvernement avait-il compétence ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non plus. A l'époque où j'étais premier
10 ministre, pour ce qui est des questions économiques, puisque je ne suis pas
11 économiste moi-même, j'ai autorisé mon adjoint, celui que j'ai évoqué,
12 celui qui a été tué sur la route de l'aéroport, à faire ce type de tâche, à
13 exercer ce type de tâche, mais il ne le faisait pas non plus.
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi d'être intervenu, Maître
15 Karnavas.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Pas de problème, Monsieur le Juge.
17 Q. Document suivant, 1D 02431. Nous sommes toujours en train d'examiner ce
18 même sujet, ce même thème.
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Deuxième classeur, Messieurs les Juges, 16
20 octobre 1992, c'est Alija Izetbegovic qui signe ce document. Document qui
21 dit ceci :
22 "Conformément à l'accord d'amitié et de coopération conclu entre la
23 République de Bosnie-Herzégovine et la République de Croatie, les personnes
24 suivantes sont nommées à la commission chargée de coordonner les activités
25 militaires au nom de la Bosnie-Herzégovine."
26 Q. Nous avons trois noms. Quelle est l'appartenance ethnique de ces
27 personnes ?
28 R. D'après les noms, c'étaient tous des Musulmans. Il se peut que
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1 l'un quelconque d'entre eux se soit prononcé comme autre, à savoir comme
2 yougoslave, mais ils ont tous des noms musulmans.
3 Q. Excusez-moi si je vous pose cette question, mais est-ce qu'on
4 peut supposer qu'il n'y avait pas de Croate digne de foi, fiable, solide,
5 compétent et qui aurait été à même d'occuper ce poste ?
6 R. Lorsqu'il s'agit des nominations, il faut que je dise à l'intention des
7 Juges de la Chambre que j'ai eu une conversation avec Alija Izetbegovic et
8 je l'ai prévenu des nominations pour ce qui est de Musulmans seulement au
9 niveau des structures différentes dans la justice, dans les affaires
10 étrangères, et cetera, et il a dit, "On se penchera là-dessus
11 ultérieurement. Maintenant, il en est ainsi."
12 Q. Vous devez ralentir parce que ce que vous dites est important et je
13 n'ai pas le droit de poser des questions qui vous guident. Mais si je
14 regarde votre réponse, la dernière, il me semblerait qu'Izetbegovic prenait
15 des décisions pour nommer des personnes appartenant à un groupe ethnique
16 donné, et il vous aurait dit qu'après, il s'occuperait de la question.
17 C'est cela ?
18 R. C'est exact. Pour ce qui est de cette population concrète, et je parle
19 des Musulmans, on a surtout procédé à des nominations de Musulmans. Alors
20 je l'ai prévenu de la chose, et il a dit : "Ce n'est pas le moment
21 maintenant de se pencher sur l'égalité en droit des populations. On se
22 penchera sur la question ultérieurement."
23 Q. Document suivant, 1D 02870.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges. 1D
25 02870.
26 Q. Une fois de plus, nous avons le ministère des Affaires étrangères, nous
27 avons une liste de noms; n'est-ce pas ?
28 R. C'est exact.
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1 Q. Si on examine ces noms de plus près, parcourez tout le document qui
2 compte plusieurs pages, on voit : "Quelques exemples de népotisme dans le
3 réseau diplomatique et consulaire de la République de Bosnie-Herzégovine."
4 Vous voyez ce titre ?
5 R. Oui. Oui, je le vois.
6 Q. Pouvez-vous nous commenter ce document, le corps diplomatique du
7 ministère des Affaires étrangères est censé représenter la politique
8 officielle de la présidence de Bosnie-Herzégovine plutôt que celle du
9 président de son parti, le SDA --
10 M. SCOTT : [interprétation] Mais ça va s'arrêter quand, Monsieur le
11 Président ? Nous avons un commentaire constant de Me Karnavas, alors
12 apparemment il n'y a que des questions directrices ou des questions qui
13 suggèrent une réponse. C'est Me Karnavas qui témoigne. C'est vraiment une
14 façon très bizarre, vous savez, le "common law" fonctionne depuis des
15 centaines d'années, c'est simple, des questions ouvertes sont posées, et ça
16 se fait tous les jours dans le système de "common law". Me Karnavas semble
17 être incapable de l'appliquer, mais à un moment donné, la coupe est pleine.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Vraiment, je suis triste, je suis navré.
19 Enfin, ici, je blague. J'ai posé les bases, le témoin a déjà donné des
20 indications.
21 Q. Quoi qu'il en soit, Monsieur le Témoin, pourriez-vous examiner ce
22 document et nous dire, ce sont des noms donnés par le ministère des
23 Affaires étrangères, quelle est la nation, le groupe ethnique le plus
24 représenté ?
25 R. Dans le premier document, on voit la signature de Mustafa Bijedic, qui
26 était ambassadeur de Bosnie-Herzégovine à Genève. Je lui ai demandé de me
27 communiquer à l'époque la liste des ambassadeurs à l'étranger, et ici --
28 Q. Ralentissez, Monsieur, parce que ce sont des informations précieuses,
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1 sinon je dois poser des questions qui vous dirigent dans vos réponses.
2 R. J'ai dit que dans la signature, on voit Mustafa Bijedic, qui se trouve
3 être ambassadeur de Bosnie-Herzégovine à Genève. A l'occasion de mon séjour
4 à Genève, je lui ai demandé lors des négociations à ce qu'il me communique
5 une liste des ambassadeurs de la Bosnie-Herzégovine à l'étranger. Il m'a
6 communiqué ce document. Dans ce dernier, il nous est donné de voir en page
7 1 qu'il ne s'agit que d'individus du groupe ethnique musulman.
8 Q. Je pense que les Juges pourront examiner le reste du document, il nous
9 faut avancer.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Prenons quelques exemples concrets, 1D
11 01276, premier classeur, Messieurs les Juges.
12 Q. Il s'agit d'une décision prise le 22 janvier 1993 portant désignation
13 d'un ambassadeur de la République de Bosnie-Herzégovine en Turquie. Quelle
14 est l'appartenance ethnique de la personne ainsi désignée ?
15 R. Ce M. Hajrudin Somun, il est de nationalité musulmane.
16 Q. Document suivant, 1D 01297, toujours dans le premier classeur, 22
17 janvier 1993. Désignation au Pakistan. Silajdzic, un certain Silajdzic.
18 Quelle est son appartenance ethnique ?
19 R. Sadzida Silajdzic est Musulmane ou comme on dirait aujourd'hui, elle
20 est Bosnienne.
21 Q. Je ne voulais pas manquer de respect à qui que ce soit.
22 1D 01348, premier classeur. C'est une décision qui concerne l'Iran.
23 Omer Behmen. Quelle est son appartenance ethnique ?
24 R. Omer Behmen est aussi de nationalité musulmane.
25 Q. 1D 01347, 11 février 1993. Il s'agit d'une décision portant nomination
26 du directeur de l'agence de la République de Bosnie-Herzégovine, chargé de
27 la réception et de la distribution de l'aide humanitaire. Cette personne,
28 Aziz Sunje ?
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1 R. Aziz Sunje est de nationalité musulmane.
2 Q. Je m'excuse de ma prononciation. 1D 01347, premier classeur. La
3 nomination d'un ambassadeur en Tunisie, 18 juillet 1993.
4 R. Nerkez Arkihodzic [phon] est Musulman.
5 Q. Puis nous en venons à 1D 01310, premier classeur. Décision portant la
6 désignation d'un consul auprès du consulat de la République de Bosnie-
7 Herzégovine à Milan.
8 R. Muhamed Kresevljakovic est Musulman.
9 Q. Merci. J'en ai terminé avec ce sujet. A moins qu'il n'y ait des
10 questions, je vais passer au sujet suivant.
11 Bien. Monsieur, nous allons aborder maintenant un autre sujet. Nous
12 allons parler de la présidence. Nous allons examiner les PV des réunions --
13 excusez-moi. Toutes mes excuses. Nous allons parler de la conférence de
14 Londres. Nous allons parler du document 1D 02438, deuxième classeur. Les
15 premiers documents de ce classeur traitent de cette question.
16 Ce document est daté du 21 mai 1992. Nous voyons votre nom au bas de
17 la page, Monsieur Akmadzic, et dans ce document en anglais il est fait
18 référence à une lettre du 20 mars --
19 Puis il y a une lettre de M. Cutileiro.
20 Est-ce que vous pourriez faire des commentaires là-dessus ? Pourquoi
21 était-il nécessaire pour vous d'envoyer une lettre à M. Susak en joignant
22 en annexe des lettres de Cutileiro et de Pinheiro, lettres adressées à
23 Izetbegovic -- vous avez demandé, je pense, d'informer M. Brkic. Pourquoi ?
24 R. A cette époque-là, c'était le 21 mai 1992, j'étais le secrétaire
25 général de la présidence. M. Brkic n'était pas à Sarajevo. J'ai demandé que
26 ce texte tel que reçu par M. Izetbegovic soit aussi envoyé à M. Brkic pour
27 information.
28 Q. Bien. Examinons le document daté du 20 mars 1992. On peut lire : "
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1 Monsieur le Président", et la lettre s'adresse à Alija Izetbegovic, premier
2 [comme interprété] paragraphe, il est dit : "Permettez-moi de rappeler que
3 la seule solution aux problèmes de la Bosnie-Herzégovine réside dans la
4 poursuite des pourparlers constitutionnels afin d'obtenir un accord final."
5 Et le texte se poursuit.
6 Quelle était la position de M. Izetbegovic à l'époque ? Ensuite nous
7 verrons ce que dit Cutileiro à ce sujet.
8 R. A l'époque, c'était un des plans de Cutileiro et Carrington. Le plan de
9 Cutileiro prévoyait une Bosnie-Herzégovine décentralisée et avait plusieurs
10 éléments. Je ne voudrais pas entrer dans les détails de ce plan, mais les
11 Croates et les Serbes avaient accepté ce plan. M. Izetbegovic l'avait
12 refusé.
13 Q. -- le document suivant, il provient de M. Cutileiro, il est daté de la
14 veille, à savoir du 19 mai. Deuxième paragraphe, on peut lire : "Je suis au
15 courant des difficultés, mais je ne peux pas être d'accord pour dire qu'il
16 y a des raisons justifiant un report à une date ultérieure, et je vous
17 demande de revenir sur votre position pour les raisons suivantes…"
18 Et au paragraphe suivant, il est dit :
19 "Je n'ai pas repris les discussions à la légère, comme vous le savez,
20 le conseil des ministres de la Communauté européenne, le secrétaire général
21 des Nations Unies et le Conseil de sécurité des Nations Unies nous ont
22 demandé instamment de reprendre notre travail dans les plus brefs délais."
23 Et après il parle d'une rencontre à Lisbonne le 20.
24 Savez-vous pourquoi on a prié M. Izetbegovic, et c'est moi qui
25 utilise ces termes, quasiment à genoux, d'assister à cette réunion ?
26 R. M. Izetbegovic refusait de négocier tant qu'il le pouvait, les
27 négociations portant sur une Bosnie-Herzégovine qui ne serait pas un Etat
28 unitaire. Donc il a essayé cette fois-ci aussi, alors que M. Cutileiro le
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1 met en garde contre les difficultés des communications, et cetera, quand il
2 s'agit de mener à bien ces négociations et de les organiser.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Le document suivant, 1D 02564, deuxième
4 classeur, Monsieur les Juges. Ce document est daté du 17 août 1992. Il
5 semble être adressé à M. Boban et il provient de Lord Carrington.
6 Q. Vu vos fonctions, est-ce que vous saviez à l'époque que M.
7 Carrington était en rapport avec M. Boban, et dans l'affirmative, en quelle
8 qualité M. Boban traitait-il avec M. Carrington, ou plutôt, Lord
9 Carrington, excusez-moi ?
10 R. Oui, bien sûr. Il s'agit de Lord Carrington, M. Boban était le
11 représentant des Croates de Bosnie-Herzégovine et il était aussi le
12 président de la communauté croate d'Herceg-Bosna.
13 Q. Apparemment M. Boban est invité à la conférence de Londres; est-ce
14 exact ? Deuxième paragraphe. Allez-y.
15 R. M. Boban a été invité à la conférence de Londres, il y est allé, mais
16 pas en tant que représentant officiel. Là-bas il y avait une délégation
17 officielle de Bosnie-Herzégovine, et j'en faisais partie.
18 Q. Qui d'autres faisaient partie de cette délégation ?
19 R. A la tête de la délégation se trouvait M. Izetbegovic, moi j'y étais,
20 pour ce qui est des autres, je ne m'en souviens pas.
21 Q. Bien. Et à l'époque, qui était le président du HDZ, si vous vous en
22 souvenez ?
23 R. Le président du HDZ à l'époque était M. Mate Boban.
24 Q. Fort bien.
25 R. Non, excusez-moi, peut-être pas encore.
26 Q. Qui l'a précédé ?
27 R. C'était M. Brkic, je pense, à l'époque. Je pense, mais je n'en suis pas
28 sûr, parce que M. Boban a été élu en même temps que moi j'ai été élu au
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1 poste de vice-président, c'était au mois de novembre.
2 Q. Bien. Document suivant, 1D 02454, deuxième classeur. Il s'agit du
3 secrétariat de la conférence sur la Yougoslavie. Le document est daté du 24
4 août 1992. Le document provient de M. Boban. Il dit :
5 "Par la présente, je confirme que la délégation croate participera à
6 la conférence de Londres. Je serai accompagné d'un traducteur et nous
7 arriverons à Londres le 25 août."
8 Avez-vous vu M. Boban sur place ?
9 R. M. Boban a assisté à la conférence de Londres mais il ne faisait pas
10 partie de la délégation officielle de Bosnie-Herzégovine.
11 Q. Bien.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 01312, nous avons déjà
13 vu ces documents auparavant, certains d'entre eux. Premier classeur,
14 Messieurs les Juges.
15 Q. J'appelle votre attention, Monsieur, sur la page 13. En anglais,
16 c'est peut-être plus facile. Page 13, il est question de la structure de
17 l'Etat.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur l'huissier, nous aurions besoin de
19 votre concours. Tout en haut de la page, nous voyons en anglais il y a des
20 numéros de page, page 13, point 2, "structure de l'Etat". Et on voit des
21 remarques fondamentales.
22 Sans entrer dans les détails, pouvez-vous nous dire, d'après ce que
23 vous savez, quelle était la structure de l'Etat, qu'est-ce qu'on a examiné
24 à l'époque ?
25 R. On a discuté de l'organisation de Bosnie-Herzégovine, de l'organisation
26 administrative, de façon générale.
27 Q. Examinons le paragraphe 34. Il est dit :
28 "D'emblée, il a été reconnu que les points de vue des trois parties
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1 sont largement différents pour ce qui est de la structure de la Bosnie-
2 Herzégovine future. L'une des parties à l'origine prônait un Etat
3 centralisé unitaire, divisé en plusieurs régions ayant des fonctions
4 essentiellement administratives."
5 Quelle partie prenait cette position, Monsieur ?
6 R. Pour les fonctions administratives, c'est le côté musulman qui prônait
7 ces fonctions administratives. En ce qui concerne l'organisation de cet
8 Etat souverain avec un système décentralisé, c'est le côté croate qui
9 prônait cette organisation-là.
10 Q. J'aurais besoin que vous répondiez à mes questions.
11 "L'une des parties à l'origine prônait la création d'un Etat
12 centralisé et unitaire divisé en plusieurs régions ayant des fonctions
13 essentiellement administratives."
14 Ma question était la suivante : qui prônait cette position, quelle
15 partie prônait cette position ?
16 R. La partie musulmane.
17 Q. Merci. Maintenant, nous allons pouvoir aller de l'avant. Je poursuis la
18 lecture :
19 "Une autre partie a estimé que le pays devait être divisé en trois Etats
20 indépendants, à savoir un Etat pour les peuples musulmans, serbes et
21 croates respectivement, chacun de ces Etats ayant sa propre personnalité
22 juridique au plan international et lesquels états pourraient former une
23 espèce de confédération souple chargée de coordonner certaines de leurs
24 activités."
25 Quelle partie prônait cette position-ci ?
26 R. La partie serbe.
27 Q. Puis ensuite, on peut lire que la troisième partie était en faveur
28 d'une solution intermédiaire. Je pense qu'il s'agit des Croates, n'est-ce
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1 pas ?
2 R. Oui, c'est exact.
3 Q. Paragraphe 37, on peut lire ici :
4 "Les co-présidents ont également reconnus, cependant, qu'un Etat
5 centralisé ne serait pas accepté par au moins deux des principaux groupes
6 ethniques ou religieux en Bosnie-Herzégovine, étant donné que cela ne
7 protègerait pas leurs intérêts, vu les tensions civiles sanglantes qui
8 règnent dans le pays."
9 Page suivante, paragraphe 38 :
10 "En conséquence, les co-présidents estiment que la seule solution
11 viable et durable qui ne confirmerait pas un nettoyage ethnique déjà
12 accompli, et des pratiques inacceptables au plan international, semble être
13 la création d'un Etat décentralisé. En d'autres termes, un Etat où nombre
14 des principales fonctions, surtout celles affectant directement les
15 personnes, seraient assurées par plusieurs provinces autonomes. Le
16 gouvernement central aurait, lui, des responsabilités minimales; celles qui
17 sont nécessaires pour qu'un Etat fonctionne en tant que tel et assure ses
18 responsabilités en tant que membre de la communauté internationale. La
19 décentralisation proposée semble également correspondre aux souhaits de
20 toutes les parties en présence comme en témoignent leurs réponses faites au
21 questionnaires portant sur la répartition des responsabilités
22 gouvernementales mentionnées au paragraphe 32 ci-dessus."
23 Monsieur Akmadzic, le paragraphe 38, il reflète la position de quelle
24 partie, et je parle de la question de l'Etat décentralisé ?
25 R. En Bosnie-Herzégovine il y avait trois parties, trois côtés. Les Serbes
26 et les Musulmans étaient de côtés opposés. La partie croate, pendant toute
27 la durée des négociations, insistait sur une solution de compromis;
28 autrement dit, un Etat commun décentralisé où trois peuples constitutifs et
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1 égaux sont reconnus. Nous pensions qu'un tel Etat était possible à
2 l'avenir, mais aussi à ce moment-là.
3 Q. Bien. Les Croates de Bosnie-Herzégovine, se sont-ils inspirés d'un
4 modèle quelconque, modèle qui aurait servi d'exemple sur la manière dont la
5 Bosnie-Herzégovine, en tant qu'Etat décentralisé, pourrait être mise sur
6 pied ?
7 R. Nous avons étudié plusieurs modèles. Personnellement, j'ai parlé avec
8 M. Mok en Autriche, où je suis allé avec le président du HDZ, Kljuic. Nous
9 avons parlé avec les représentants suisses, nous avons pris leur
10 constitution et nous en sommes arrivés à la conclusion que chez nous, le
11 type d'Etat qui fonctionnerait le mieux serait un Etat qui ne serait pas
12 partagé, séparé en trois entités nationales, mais qui serait composé de
13 plusieurs cantons, provinces, régions basés sur plusieurs principes : de
14 nombreux principes historiques, géographiques, de communication, culturels,
15 économiques, et cetera. Nous, nous pensions que la fédération, avec le
16 peuple majoritaire, souhaite un Etat unitaire, alors que pour ce qui est du
17 peuple non majoritaire, il souhaiterait faire sécession par rapport à la
18 fédération. C'est pour cela que cette fédération n'était pas possible.
19 C'est pour cela que nous prenions cette solution, la solution d'un Etat
20 décentralisé, des Etats régionalisés qui se mettent ensemble.
21 Pour nous, le plan Vance-Owen, c'était le meilleur des plans, la
22 meilleure des solutions.
23 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 02456, deuxième
24 classeur, Messieurs les Juges. 1D 02456 donc, ce document est daté du 21
25 octobre 1992. En haut de la page, nous voyons "sixième mouture."
26 Q. Est-ce que vous voyez cela ? "Structure constitutionnelle
27 éventuelle pour la Bosnie-Herzégovine."
28 R. Oui, je le vois.
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1 Q. Manifestement, il y avait eu cinq projets avant celui-ci. Pourriez-vous
2 nous expliquer ce qui se passait ?
3 R. Là, vous avez des résultats des négociations que vous voyez ici, ce que
4 pourrait être cette Bosnie-Herzégovine. Ici, on prévoit un Etat qui est
5 reconnu dans cette frontière internationale telle qu'elle avait à l'époque
6 de la Yougoslavie, mais un Etat qui comporterait plusieurs provinces et qui
7 serait un état décentralisé.
8 Q. Examinons le document 1D 02883, troisième classeur. 1D 02883. Document
9 suivant pour vous, Monsieur. Dernière page du document en croate. Est-ce
10 votre signature que l'on voit là ?
11 R. Oui. C'est ma signature, oui.
12 Q. Alors, on voit quelque chose d'autre qui est écrit dans une couleur
13 plus sombre, à propos de 1992. Il y a une question. On se demande ce que
14 cela fait là. On peut lire "octobre 1992" et c'est écrit à la main. C'est
15 ce qui apparaît dans la traduction. C'est bien cela ?
16 R. Le mois d'octobre 1992, moi je l'ai rajouté par la suite, d'après mon
17 meilleur souvenir. Ce document, je l'ai préparé pour un groupe de travail
18 qui travaillait au sein de la présidence. C'était mon point de vue sur les
19 arrangements possibles en Bosnie-Herzégovine.
20 Même si je ne suis pas sûr de l'époque dont il s'agit, est-ce que
21 c'était bien cette date-là ou bien une autre date, c'était bien mon point
22 de vue ainsi que le point de vue du peuple croate en Bosnie-Herzégovine à
23 cette époque-là, au tout début.
24 Q. Pour autant que vous le sachiez, ce document a dû être rédigé en
25 octobre 1992; c'est bien cela, ou vers cette date ?
26 R. Oui.
27 Q. En d'autres termes, je veux m'assurer que les choses sont bien claires,
28 ce document n'a pas été rédigé avant votre déposition ici aujourd'hui ou
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1 /avant une déposition que vous auriez faite par le passé. Cela a été rédigé
2 à l'époque, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, c'était fait à l'époque même si je ne l'ai peut-être pas signé le
4 jour même. Je l'ai peut-être signé une autre fois.
5 Q. Et enfin, ce document reflète-t-il fidèlement votre position de
6 l'époque, c'est-à-dire la position qui était la vôtre à l'époque ?
7 R. C'étaient mes réflexions sur une possible organisation de Bosnie-
8 Herzégovine qui ne diffère pas, dans beaucoup des éléments, des solutions
9 que l'on prenait au moment des négociations.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, ceci met un terme à
11 cette partie de mon interrogatoire. Je n'ai pas assez de temps pour passer
12 à l'autre volet. Je sais qu'il n'est pas tout à fait 19 heures, et les
13 interprètes ont travaillé dur aujourd'hui, tout le monde parle assez vite,
14 donc peut-être que nous pourrions finir un petit peu plus tôt.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 19 heures, alors Maître Karnavas, vous avez
16 utilisé deux heures, 30 minutes, grosso modo, ce qui fait qu'il vous
17 restera trois heures et 30 minutes. Peut-être qu'on terminera demain, j'ose
18 espérer que nous pourrons terminer demain, et après il nous restera deux
19 jours pour la suite des événements.
20 Alors, Monsieur le Témoin, donc, comme je vous l'ai dit tout à l'heure,
21 vous reviendrez pour l'audience qui débutera demain après-midi, parce que
22 nous sommes d'après-midi, donc nos audiences débutent à 14 heures 15, donc
23 nous aurons le plaisir de vous revoir demain à 14 heures 15.
24 Il est donc presque 19 heures, je souhaite à tout le monde une bonne
25 soirée et nous nous retrouverons demain matin -- demain après-midi.
26 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mardi 17 juin 2008,
27 à 14 heures 15.
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