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1 Le mardi 17 juin 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
8 toutes les personnes ici présents. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre
9 Prlic et consorts. Merci, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce mardi, 17 juin 2008, je salue, M. le Témoin. Je salue MM. les
12 accusés, Mmes et MM. les avocats, Mmes et MM. du bureau du Procureur ainsi
13 que toutes les personnes qui nous aident et notamment les interprètes.
14 Je vais d'abord donner la parole à M. le Greffier qui a quelques numéros IC
15 à nous donner.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le bureau du
17 Procureur a fourni sa réponse à la liste de 1D et 3D par le Témoin 1D-AA;
18 la liste du bureau du Procureur aura le numéro IC 00807 et IC 00808. Merci.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Bien. Maître Karnavas,
20 je vous donne la parole pour la suite de l'interrogatoire principal.
21 LE TÉMOIN : MILE AKMADZIC [Reprise]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, bon après-midi, Monsieur le
24 Président, bonjour à vous, Monsieur les Juges, à toutes les personnes ici
25 présentes, bonjour, Monsieur le Témoin.
26 Est-ce que je peux demander à M. l'huissier d'abaisser le rétroprojecteur,
27 parce que je ne le vois pas bien le témoin.
28 Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]
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1 Q. [interprétation] Les prochains documents portent sur l'accord d'amitié
2 et de coopération.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Voyons d'abord le numéro 1D 01942,
4 1942, dans le premier classeur, Messieurs les Juges.
5 Q. Je vous montre un document qui porte la date du 17 juillet 1992, et qui
6 émane de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine. C'était la
7 145e Séance de travail. Est-ce que vous vous souvenez avoir été présent ?
8 R. Oui.
9 M. KARNAVAS : [interprétation] Je n'ai pas reçu l'interprétation.
10 Q. Nous le voyons, quand nous voyons la première page, enfin la page 2, on
11 vous voit figurant en tant que secrétaire général. Si j'ai bien compris,
12 c'était au cours de cette session-ci qu'il y a eu une discussion concernant
13 la constitution d'une délégation destinée à aller en République de Croatie.
14 Nous le voyons au point 1, page 3; c'est cela ?
15 R. Oui, c'est exact.
16 Q. Nous le voyons, cette délégation devait représenter la présidence ou la
17 Bosnie-Herzégovine avec Izetbegovic, Ljubic et M. Pelivan. On avait donc
18 quelqu'un de la présidence, quelqu'un de l'assemblée, et quelqu'un
19 représentant le gouvernement.
20 Revenons maintenant à la page 2, ordre du jour, est-il écrit, nous voyons
21 qu'il y a une partie de la délégation qui doit aller en République -- pour
22 la République de Bosnie-Herzégovine, et/ou en Croatie et aussi le programme
23 des pourparlers, "la plateforme" comme il est dit ici ?
24 R. Oui, je le vois.
25 Q. Document suivant, 1D 01773. Premier classeur. Nous n'avons pas de date,
26 mais le titre est "Plateforme en vue de réglementer les rapports ou
27 relations avec la République de Croatie."
28 Savez-vous, Monsieur le Témoin, si c'est bien le programme qui avait été
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1 évoqué ou mentionné dans le procès-verbal de la réunion du 17 juillet 1992
2 ? Veuillez examiner ce texte.
3 R. Oui.
4 Q. Point 1, "Coopération dans le domaine militaire et international en vue
5 d'assurer la défense de la Bosnie-Herzégovine contre des agresseurs." Qui
6 était les agresseurs d'alors ?
7 R. D'après la définition de la présidence de Bosnie-Herzégovine, les
8 agresseurs contre la Bosnie-Herzégovine étaient la JNA, qui était l'ex-JNA
9 déjà à l'époque, ensuite la République de Serbie-et-Monténégro ou la
10 République fédérative de Yougoslavie, ainsi que les unités militaires de la
11 Bosnie-Herzégovine qui ont été menées par le Parti démocratique serbe.
12 Q. Si les Juges n'ont pas de questions, je vais passer à un sujet suivant.
13 Très bien.
14 Ceci va concerner M. Jadranko Prlic, à cet égard examinons le document 1D
15 02014.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est le premier classeur, Messieurs les
17 Juges. 1D 02014.
18 Q. La date est le 5 octobre 1992 "Objet : demande afin d'obtenir une
19 partie du prêt en biens fourni par le Turquie." Nous voyons ici président
20 du HVO de la communauté croate d'Herceg-Bosna, M. Prlic, qui écrit au
21 gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine à propos d'un prêt de
22 50 millions de dollars américains donnés par la Turquie. Vous le voyez ?
23 R. Oui, je le vois.
24 Q. Savez-vous s'il y a eu effectivement ce prêt fait par la Turquie
25 portant ce montant ou un autre montant ?
26 R. Je n'en suis pas sûr, mais je pense qu'il y avait un crédit, oui.
27 Q. Document suivant, 1D 02685.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges.
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1 Excusez-moi de vous avoir fourni les documents dans le désordre. 1D 02685.
2 Q. Est-ce que vous avez le document sous les yeux, Monsieur le Témoin ?
3 R. Oui, je l'ai trouvé.
4 Q. Vous voyez qu'il porte la signature du vice-premier ministre, ce
5 monsieur dont vous avez parlé hier, qui a été tué alors qu'il se trouvait
6 dans ce véhicule blindé des Nations Unies ?
7 R. Oui, c'était le vice-président du gouvernement. C'était sa fonction,
8 c'est comme cela que cette fonction était intitulée, il s'appelait Hakija
9 Turajlic.
10 Q. Nous avons vu la lettre de M. Prlic du 5 octobre 1992. Dans un autre
11 document, le document 1D 02014, ici dans celui-ci, dans le document 1D
12 02685, nous sommes le 17 octobre 1992, et ce monsieur indique ceci : "Nous
13 avons examiné avec soin votre demande du 5 octobre que nous avons reçue
14 sous le numéro d'ordre 29-22/S 92, quant à l'utilisation d'un prêt fait par
15 la Turquie d'un montant de 50 millions de dollars américains. Nous vous
16 informons par la présente que ce prêt n'a toujours pas été approuvé en
17 République de Bosnie-Herzégovine. Cependant, les pourparlers avec les
18 autorités turques sont prévus dans un proche avenir, et vous serez averti
19 de leur tenue."
20 "Nous voulons vous informer également que le gouvernement de la
21 République de Bosnie-Herzégovine a pris une décision d'utiliser une partie
22 de ce prêt, s'il est approuvé, pour répondre aux besoins du conflit armé
23 dans la région."
24 Est-ce que vous pouvez tirer une conclusion, d'après ce document,
25 quant au rapport existant entre le gouvernement de Bosnie-Herzégovine et
26 les rapports qu'il entretenait avec la communauté croate d'Herceg-Bosna ?
27 R. --puisque de toute façon on peut voir que le gouvernement de
28 Bosnie-Herzégovine reconnaît le HVO ainsi que la communauté croate
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1 d'Herceg-Bosna à l'époque et qu'il est prêt à coopérer sur le plan
2 financier et aider avec des fonds, des moyens financiers, comme c'est écrit
3 ici.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Rien de tout ce que vous avez dit n'a
5 été traduit parce que vous parlez bien trop vite. Je vous demande de
6 ralentir, je vous en supplie, je vous en conjure.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc on peut en déduire que le gouvernement de
8 Bosnie-Herzégovine reconnaît le HVO, et on peut en tirer la conclusion que
9 le gouvernement de Bosnie-Herzégovine est prêt à aider financièrement le
10 HVO.
11 M. KARNAVAS : [interprétation]
12 Q. Merci. Document -- oui.
13 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Maître Karnavas.
14 Nous aimerions tirer au clair un sujet en posant une question au témoin. Il
15 est intéressant de relever que le paragraphe même que vous avez eu
16 l'obligeance de citer dit ceci : "Nous informons par la présente que ce
17 prêt n'a toujours pas été approuvé en République de Bosnie-Herzégovine…"
18 Dans l'original, on dit : [en B/C/S]
19 Je ne suis pas tout à fait sûr s'agissant de ce prêt; est-ce qu'il fallait
20 qu'il reçoive l'aval du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, parce que
21 quelque part dans la lettre du Dr Prlic, il est dit que c'est un crédit --
22 ou un prêt plus exactement, qui doit être donné par la Turquie au
23 gouvernement.
24 J'aimerais dès lors poser la question au témoin quel est le point de droit
25 concerné ici. Pourquoi est-ce que ce prêt devait être approuvé par le
26 gouvernement concerné ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, je n'étais pas le président du
28 gouvernement. Mais d'après ce que je sais, le gouvernement de Bosnie-
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1 Herzégovine avait demandé un prêt. Et si la République de Turquie avait
2 accordé ce prêt, et si les moyens de fonds étaient transférés sur le compte
3 du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, la décision du gouvernement aurait
4 été d'accorder une partie de ces moyens à l'HVO.
5 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci.
6 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, excusez-moi, je voudrais dans la
7 foulée de la question du Juge Prandler, parce que j'ai les deux lettres
8 devant moi, dans la lettre de M. Prlic, c'est en anglais évidemment mais
9 j'essaie de traduire en français, il demande que le Conseil croate de la
10 Défense reçoive, participe dans la répartition des biens et reçoive un
11 tiers du prêt. Ça, c'est la lettre de M. Prlic du 5 octobre 1992.
12 Alors dans la réponse de M. Hakija Turajlic du 17 octobre 1992, au
13 dernier paragraphe justement, il dit que : Le prêt servira aussi pour
14 couvrir les besoins du conflit armé dans la région. A mon avis, ce
15 paragraphe est sibyllin, c'est-à-dire on peut lui faire dire n'importe
16 quoi, parce que la réponse ne dit pas que le prêt ira au HVO mais le prêt,
17 une partie du moins, servira pour le conflit armé. Mais qui sera, qui
18 recevra cet argent ? Ce n'est pas dit dans le paragraphe ? Qu'est-ce que
19 vous en pensez ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Même avant cette lettre et après, il y avait
21 un accord qui n'avait jamais été précisé ou qui n'a jamais été écrit, à
22 savoir que tous les moyens, tous les fonds allaient être partagés en
23 accordant 30 % à chaque partie, s'il s'agit des trois parties ou 50 % à
24 chaque partie s'il s'agissait de deux parties.
25 Hier, j'ai dit que quand on parle de trois côtés, on parlait des Croates,
26 des Musulmans et des Serbes. Dans ce conflit, à cette époque précisément,
27 il n'y avait que deux côtés, à savoir les Croates et les Musulmans. J'ai
28 rajouté une autre explication, ici il s'agit d'un crédit à marchandise, qui
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1 est exprimé en valeur monétaire. Mais il pouvait comprendre aussi bien
2 l'argent que la marchandise, ou juste l'un des deux puisque ce n'est pas
3 précisé.
4 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, vous avez une
6 question.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé mais votre dernière réponse
8 n'en est pas une. Vous dites que : "C'était un prêt en marchandise…" puis
9 vous poursuivez en disant qu'il aurait pu aussi englober de l'argent et des
10 marchandises ou l'un ou l'autre. D'abord vous dites que ce sont des biens
11 qui vont être prêtés, puis après vous dites que ça pouvait être aussi
12 seulement de l'argent. Vous ne le savez peut-être pas plus précisément, je
13 ne vous le reproche pas d'ailleurs.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme on peut lire dans la lettre et dans la
15 réponse de M. Hakija Turajlic, le prêt n'avait pas encore été accordé,
16 approuvé. Il aurait pu par exemple correspondre à dix millions de dollars
17 américains en espèce, en argent, et 40 millions en marchandise nécessaire
18 pour l'effort de guerre et pour la population civile de Bosnie-Herzégovine.
19 J'ai dit que je n'étais pas le président du gouvernement à l'époque.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] En d'autres termes, ce sont des
21 suppositions et si vous ne savez pas en quoi il consisterait, parce que
22 d'après ce que vous saviez à l'époque ça n'avait pas été précisé. On
23 n'avait pas dit en quoi consisterait ce prêt; est-ce exact ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que je sais, cela n'était pas
25 encore précisé à l'époque.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, une dernière question parce qu'on pourrait y
28 passer des heures sur cette question, mais je vais tout de suite à
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1 l'essentiel. Quand vous dites "n'a pas été approuvé", est-ce qu'il fallait
2 que ce prêt soit approuvé par le gouvernement ou par l'assemblée
3 parlementaire dans la mesure où s'agissant d'un prêt, ça pouvait avoir des
4 conséquences sur l'équilibre budgétaire de la loi de finance qui
5 normalement devait être adoptée annuellement, et donc s'il y a un prêt, il
6 y a certainement des ajouts et donc il faut une approbation parlementaire.
7 Est-ce que c'est dans ce sens que vous dites qu'il fallait que ça soit
8 approuvé ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, il s'agit de l'année 1992 et on peut la
10 séparer en deux parties. Une première partie où la guerre n'était pas
11 encore là, où on avait un budget adopté normalement, voté normalement,
12 ensuite vous avez la deuxième partie de l'année où vous avez un budget de
13 guerre. D'après ce que je sais, et je répète que je n'étais pas à l'époque
14 le président du gouvernement, ici, il s'agit de moyens qui ont été
15 approuvés par des décisions pendant l'époque de la guerre, pendant cette
16 autre période. Donc ici vous avez deux parties, le gouvernement de Bosnie-
17 Herzégovine, puis de l'autre côté, vous avez le gouvernement de la
18 République de Turquie.
19 Le gouvernement de Bosnie-Herzégovine avait demandé à avoir ces
20 crédits mais il ne l'avait à l'époque pas encore reçu de la République de
21 Turquie.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
23 M. KARNAVAS : [interprétation] Je précise que pour ce qui est du document
24 1D 02014, c'est dit très clairement en anglais, on dit que c'est un prêt en
25 biens, en biens, en "commodity" et c'est la raison pour laquelle le témoin
26 a donné cette réponse. Si je vous montrais ceci ce n'était pas tant pour
27 montrer si le prêt avait été accordé ou pas, mais plutôt pour montrer que
28 le gouvernement de Bosnie-Herzégovine reconnaissait la communauté croate
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1 d'Herceg-Bosna. C'était la finalité véritable de ma question.
2 Document suivant, 1D 00898. Le premier classeur, Messieurs les Juges.
3 Q. Vous l'avez sous les yeux, Monsieur le Témoin ?
4 R. Oui.
5 Q. D'abord, nous avons la date du 17 novembre 1992, Sarajevo. Nous y
6 voyons votre nom, président du gouvernement. Donc je suppose qu'à cette
7 date-là le 17 novembre, vous étiez président du gouvernement de la
8 République de Bosnie-Herzégovine ?
9 R. Oui, je l'étais depuis une semaine à cette date-là.
10 Q. Il s'agit d'une décision que vous prenez ou que le gouvernement prend
11 que vous signez puisque vous êtes président de ce gouvernement pour nommer
12 et autoriser M. Prlic, le président du Conseil croate de Défense afin qu'il
13 représente le gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine. Vous
14 poursuivez, vous dites que par la présente, il est autorisé en qualité de
15 membre du gouvernement de la République ou de l'état-major du gouvernement
16 de cette République pour obtenir des éléments afin d'assurer la survie.
17 Est-ce que ce fut une décision collective, collégiale ou une décision
18 personnelle de votre part ?
19 R. C'était une décision officielle du gouvernement de Bosnie-Herzégovine,
20 dont j'étais le président.
21 Q. Est-ce que ceci a paru dans le journal officiel, ce qui aurait permis à
22 tout le monde de voir que c'est une décision prise par le gouvernement de
23 la République de Bosnie-Herzégovine ?
24 R. Oui, ça a été publié et toute la procédure a été faite par rapport à la
25 décision, toute la procédure administrative.
26 Q. Partant de votre réponse, nous allons examiner le document 1D 02147. Je
27 pense qu'il se trouve juste après le document que nous venons de voir dans
28 le premier classeur.
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1 Vous l'avez, Monsieur le Témoin ?
2 R. Oui, oui.
3 Q. Nous avons la date du 20 novembre 1992. Nous y voyons votre nom en tant
4 que président du gouvernement et on parle ici de "pouvoirs" ou "autorités".
5 En quoi consiste ce document ?
6 R. Sur la base de la décision du gouvernement de Bosnie-Herzégovine
7 mentionnée tout à l'heure, le Dr Prlic s'est vu attribuer ce pouvoir alors
8 qu'il s'acquittait de sa mission dans le cadre du gouvernement, il pouvait
9 donc le montrer aux autorités compétentes pour lui permettre de faire son
10 travail.
11 Q. Si je vous ai bien compris, nous avons une décision rendue et publiée,
12 et ici vous avez en fait un décret d'application ou une espèce de
13 procuration qui autorise le Dr Prlic à agir suite en fonction de la
14 décision qui a déjà été rendue; c'est bien cela ?
15 R. Oui, sur la base de cette décision, il peut travailler en Bosnie-
16 Herzégovine et aussi là où se trouvent les centres logistiques, pour la
17 plupart ils se trouvaient en Croatie.
18 Q. Nous ne voyons pas de signature en croate. Je suis sûr qu'au moins il y
19 a un des Juges qui va se demander pourquoi il n'y a pas de signature et en
20 quoi ceci pourrait être une véritable procuration et qu'on serait habilité
21 à utiliser si on n'a pas la signature du président du gouvernement. Est-ce
22 que vous avez une explication à cette absence ?
23 R. Ce document a été émis par l'administration du gouvernement et il est
24 valable, mais accompagné de la décision du gouvernement.
25 Q. Oui, je vois M. le Juge Trechsel.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous allez peut-être aborder le
27 sujet qui m'intéresse maintenant. Nous voyons en effet dans l'avant-dernier
28 paragraphe qu'il est dit "ces pouvoirs prendront effet le jour où ils sont
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1 accordés."
2 La question est de savoir si ces pouvoirs ont été accordés et quand
3 ils l'ont été, je suppose que c'était votre document suivant qui allait
4 nous le dire.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] La semaine dernière, je vous ai dit que les
6 grands esprits se rencontrent, mais c'est vrai aujourd'hui aussi.
7 Q. Mais effectivement, est-ce que vous pourriez, Monsieur le Témoin,
8 répondre à la question du Juge Trechsel.
9 R. En ce qui concerne la différence des dates, vous avez une différence de
10 trois jours. Ce document entre en vigueur après avoir été adopté, ce
11 dernier document, pas le premier. Donc le pouvoir entre en vigueur le 20
12 novembre 1992.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé, Monsieur le Témoin, je ne
14 suis pas encore convaincu. La décision examinée auparavant, elle avait été
15 prise le 17 novembre. Ici, nous sommes trois jours plus tard, mais la
16 phrase que j'ai citée, elle porte sur l'avenir, on dit que ces pouvoirs
17 "…prendront effet le jour où ils sont accordés." Il est difficile que ce
18 soit accordé trois jours avant, sinon on aurait utilisé un passé. On aurait
19 dit "…ont pris effet le jour où la décision a été rendue."
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je me souviens très bien que mes
21 juristes m'avaient dit qu'il serait bien de donner un pouvoir au Dr Prlic,
22 mis à part la décision qu'il avait. Je pensais que la décision suffisait.
23 Ils l'ont fait comme ils l'ont fait. Logiquement, le Dr Prlic ne pouvait
24 pas utiliser le pouvoir sans l'avoir reçu. Il est possible qu'il pouvait
25 utiliser juste la décision du gouvernement.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que les interprètes
27 pourraient donner lecture de cette phrase et la traduire ? Peut-être que
28 quelqu'un pourrait le faire. Monsieur le Témoin, pourriez-vous donner
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1 lecture de l'avant-dernier paragraphe ? "Ovlascenje" en B/C/S c'est le
2 premier mot, ainsi les interprètes pourront nous dire ce qu'il en est en
3 anglais. Peut-être qu'une erreur s'est glissée dans la traduction.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] "Les pleins pouvoirs rentrent en vigueur à la
5 date de leur promulgation."
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous allons en rester là, mais je
7 dois vous dire que je reste perplexe. A l'époque, je pense que votre avocat
8 n'était pas Me Karnavas mais quelqu'un de moindre qualité.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, vous me permettez de vous poser deux
10 questions parce que ce document est à mes yeux très important et il mérite
11 une attention soutenue. Nous avons un document qui vient du gouvernement,
12 le 20 novembre 1992. Ce document, quand on le lit, délègue au Dr Prlic, qui
13 se trouve être lui le président du Conseil croate, la mission de
14 représenter le gouvernement de Bosnie sur le territoire de cette communauté
15 croate. Donc ce texte a des effets juridiques puisque le Dr Prlic est censé
16 représenter le gouvernement avec évidemment tout cela qui peut être
17 impliqué.
18 A votre connaissance, est-ce que vous en aviez parlé à M. Izetbegovic
19 avant de prendre ce texte, qui est pour un juriste une reconnaissance
20 explicite du rôle joué par le Conseil croate au sein de la République de
21 Bosnie-Herzégovine. Alors, est-ce que vous en avez parlé à M. Izetbegovic ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit hier qu'en Bosnie-Herzégovine il y
23 avait trois institutions primordiales de l'Etat : le Parlement, la
24 présidence et le gouvernement. Chaque institution a ses propres
25 attributions en vertu de la constitution. Cette décision relative à la
26 représentation se rapporte au gouvernement et non pas à la présidence. Cela
27 se fonde aussi sur une reconnaissance préalable de la part du HVO et je
28 l'ai indiqué au président Izetbegovic. Mais je n'ai pas posé cela comme
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1 sujet de débat de discussion à la présidence de la Bosnie-Herzégovine. Je
2 me dois d'ajouter ici encore ce qui suit : je ne suis pas sûr que ce soit à
3 cette occasion-là que le président Izetbegovic m'a indiqué, ou que ce soit
4 à cette époque-là qu'il l'ait fait, que le HVO aurait été saisi, il a dit
5 saisi d'un versement d'un million de marks allemand en guise d'aide.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : -- et terminera mes questions. Tout à l'heure vous
7 avez lu et les interprètes nous ont traduit ceci, "Les pleins pouvoirs
8 entre vigueur à la date de leur promulgation." Donc on a l'impression que
9 ce document devait faire l'objet d'une publication officielle et à un
10 moment donné l'avocat a parlé de publication. Alors est-ce que ce texte que
11 nous avons tous sous les yeux a été ou pas publié dans le journal officiel
12 de la République de Bosnie-Herzégovine ? Ou ça n'a pas été du tout publié ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous le confirmer. Ce que je
14 peux confirmer c'est que la décision elle, a été publiée. En ma qualité de
15 non-juriste, je ne vois pas de grosse différence entre ces deux documents-
16 ci. Je pense que le premier document est le document principal, publié au
17 journal officiel et qu'on peut intervenir en s'y référant, mais je me
18 trompe peut-être.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Parce qu'en vous posant cette question, si au
20 journal officiel il y a une publication d'un texte quelconque sur le HVO,
21 inévitablement ça a une conséquence, c'est que sur le plan juridique il y a
22 une forme de reconnaissance de l'entité par le gouvernement en exercice,
23 voire par le président lui-même. S'il n'y a aucune publication, à ce
24 moment-là on est dans une entité de facto. Mais s'il y a un texte officiel
25 qui mentionne le HVO comme jouant un rôle au sein de la République, à ce
26 moment-là, un juriste peut estimer que cette entité est reconnue par le
27 gouvernement en exercice. Alors d'où ma question. Mais là, vous dites vous
28 ne pouvez pas répondre pour le document que nous avons sous les yeux qui
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1 est 1D 02147. Mais par contre pour un autre document, vous dites il a été
2 publié, lui.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] L'autre document, le document principal a été
4 publié et du point de vue terminologique il comporte les mêmes éléments que
5 l'autre.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document principal peut-être que Me Karnavas l'a,
7 moi je ne l'ai pas sous les yeux.
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le
9 témoin, si je ne m'abuse parle du document 1D 00898. Il s'agit de la
10 décision où il est dit que le document sera publié dans le journal officiel
11 de la République de Bosnie-Herzégovine. J'ai travaillé là-bas et je sais
12 qu'après que la décision a été prise, il faut un certain temps avant que la
13 décision ne soit publiée. Enfin c'était la situation à l'époque. Je ne sais
14 pas si le document a été publié ou pas, mais nous pensons qu'il s'agit là
15 d'un extrait du journal officiel, cette décision 1D 00898 est un extrait du
16 journal officiel paru à l'époque.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie. Le document suivant est le
19 document 1D 01945. Il se trouve dans le premier classeur, Messieurs les
20 Juges.
21 Q. Monsieur le Témoin, nous constatons que ce document a été signé par le
22 Dr Jadranko Prlic. Il porte la date du 12 décembre 1992 et est intitulé
23 "Protestation", c'est l'objet de ce document. Il s'agit du document qui se
24 trouve juste après le précédent. Inutile de parcourir l'ensemble du
25 classeur, il s'agit du document qui se trouve juste après le précédent, 1D
26 01945. Bien. Merci.
27 Premier paragraphe, nous voyons votre nom. Je vais en donner lecture :
28 "La raison immédiate pour laquelle nous nous adressons à la
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1 présidence et au gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine est le
2 document du chef d'état-major du commandement Suprême des forces armées, M.
3 Sefer Halilovic, mais les raisons sous-jacentes sont diverses et ne sont
4 pas connues." C'est ce que semble dire le texte en B/C/S.
5 "Nous vous demandons instamment, Monsieur Akmadzic, de faire en sorte que
6 le gouvernement et la présidence débattent de notre protestation et de
7 faire le nécessaire pour que ces deux hautes instances de la Bosnie-
8 Herzégovine répondent sans ambiguïté."
9 Au deuxième paragraphe, le Dr Prlic indique au milieu :
10 "Nous sommes déterminés à préserver la Bosnie-Herzégovine et nous
11 voulons que l'Etat et son organisation interne répondent aux intérêts du
12 peuple croate qui y habite. A cet égard, nous acceptons les solutions
13 proposées en vue de l'organisation interne de la Bosnie-Herzégovine
14 proposées par la Communauté européenne, à savoir la solution selon laquelle
15 la Bosnie-Herzégovine serait une communauté d'Etat constituée de trois
16 peuples constitutifs, les Croates, les Musulmans, et les Serbes, composée
17 de trois unités constitutives formées et organisées sur la base des
18 principes déjà acceptés, à des principes ethniques sacrés."
19 Alors apparemment, il y a eu une plainte selon laquelle Halilovic a
20 fait certaines déclarations et j'en reviens à la page précédente, dernière
21 partie du paragraphe, on peut lire :
22 "Il y a eu des discussions de ce genre à plusieurs reprises
23 concernant la coopération entre les unités du HVO et l'ABiH au sujet du
24 statut des zones défendues ou libérées, au sujet de la communauté croate
25 d'Herceg-Bosna, du HVO en tant que forme d'autorité exécutive provisoire
26 dans la région jusqu'à ce qu'une solution définitive soit trouvée. Nous
27 avons reçu des garanties selon lesquelles les instances officielles du
28 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine acceptent l'état des choses, l'état
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1 de la situation ainsi que le rôle et la contribution du peuple croate pour
2 ce qui est de la défense de la patrie. Cependant, en règle générale, ces
3 discussions et ces accords, les hauts fonctionnaires au niveau politique,
4 au niveau de l'Etat, au niveau de l'armée ont toujours publiquement réfuté
5 ces accords et la coopération planifiée. Cela ne peut plus être considéré
6 comme un hasard, malheureusement il y a des activités politiques qui
7 œuvrent directement contre la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat, sa survie
8 et l'intérêt des peuples croates et musulmans."
9 Est-ce que vous vous souvenez avoir reçu cette lettre de protestation
10 du Dr Prlic ?
11 R. Oui.
12 Q. Pouvez-vous nous dire ce qui est à l'origine de cette plainte ? Au
13 premier paragraphe, vous dites que Sefer Halilovic, qui à l'époque était à
14 la tête de l'ABiH et le fondateur de la Ligue patriotique, ligue qui a été
15 créée en secret, nous le savons. Mais savez-vous de quoi au juste se
16 plaignait le Dr Prlic ?
17 R. Tout d'abord, je voudrais dire que ce document, je l'ai
18 communiqué à la présidence aussi. Il a été pris en considération par cette
19 présidence sans qu'il n'y ait de conclusions particulières de tirées. Ici,
20 le Dr Prlic proteste au nom du HVO et du peuple croate en Bosnie-
21 Herzégovine au sujet de ce traitement d'inégalité, et ici où il est
22 reproché aussi du fait de se servir de l'expression "prétendue HVO" que les
23 autorités de Bosnie-Herzégovine avaient du reste auparavant acceptée comme
24 étant une partie intégrante des forces armées de Bosnie-Herzégovine.
25 Le Dr Prlic parle aussi du fait qu'il s'agit d'accepter les
26 négociations internationales, les plans relatifs à l'organisation de l'Etat
27 de Bosnie-Herzégovine et une coopération entre les deux composantes de
28 forces armées.
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1 Q. J'appelle votre attention sur le document suivant, 1D 02663.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Il se trouve dans le deuxième
3 classeur, Messieurs les Juges. Il s'agit de la 182e Séance de la présidence
4 tenue le 26 décembre 1992.
5 Q. Est-ce que vous avez ce document, Monsieur ?
6 R. Je l'ai, oui.
7 Q. Je ne sais pas exactement quelle est la référence dans la version en
8 B/C/S, mais en haut du texte anglais il s'agit de la référence qui se
9 termine par les chiffres 6416. Ce sont les quatre derniers chiffres en haut
10 de la page en anglais.
11 Est-ce que vous avez trouvé ce document, Monsieur ? Vous souhaitez peut-
12 être suivre le texte en anglais. Monsieur l'Huissier, est-ce que vous
13 pourriez nous apporte votre concours ?
14 R. Non, je n'ai pas retrouvé cela.
15 Q. Les quatre derniers chiffres sont 6416. Nous allons demander à
16 l'huissier de nous aider.
17 Nous voyons votre nom ici, Mile Akmadzic, et vous dites :
18 "Je dirais qu'il serait bon que M. Jadranko Prlic, au nom
19 du Conseil de Défense croate et de la Herceg-Bosna, envoie une lettre au
20 gouvernement et à la présidence. Nous avons mis cela à l'ordre du jour du
21 gouvernement étant donné que M. Sefer était absent."
22 Puis votre intervention se poursuit.
23 Alors inutile d'entrer dans les détails de ce qui s'est passé, car
24 nous pouvons le lire nous-mêmes, et vous avez dit que rien ne s'était
25 passé, qu'aucune résolution n'avait été prise. Mais ce que vous avez
26 mentionné un peu plus tôt, vous avez dit que vous aviez informé la
27 présidence de cela; était-ce lors de cette séance ?
28 R. Oui, c'est à cette session que ça se passait.
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1 Q. Quelques pages plus loin, nous voyons le nom de M. Halilovic, peut-on
2 supposer que M. Halilovic était présent à ce moment-là ?
3 R. Oui, il était présent.
4 Q. Incidemment, il y a un autre point qu'il est intéressant de remarquer,
5 car dans l'acte d'accusation il est question de "croatisation" et on parle
6 notamment de l'utilisation faite de la langue croate. Alors j'appelle votre
7 attention sur les pages 01806433, les quatre derniers chiffres sont 6433.
8 Alors regardez en haut à droite de la page. Nous allons parler de M.
9 Campara, mais avant d'en parler, je souhaiterais vous poser une question.
10 Vous souvenez-vous si lors de cette séance de travail on a évoqué la
11 question de la langue ?
12 R. Oui, c'était à cette session qu'il a été question de la langue, et j'ai
13 participé au débat.
14 Q. Hier nous avons mentionné le fait que vous aviez obtenu votre diplôme
15 de l'Université de Sarajevo dans les langues anglais, allemand, latin,
16 c'est ce que vous avez étudié. Je suppose que vous parliez couramment la
17 langue parlée en Bosnie-Herzégovine quelle que soit cette langue, mais est-
18 ce que vous pourriez nous dire s'il existait une langue appelée le
19 bosniaque, le bosnien à l'époque ?
20 R. Non. A l'époque en Bosnie-Herzégovine on parlait officiellement le
21 croate ou le serbe, que dans la population on abrégeait et même dans les
22 écoles. On disait serbo-croate ou croato-serbe. La langue bosniaque
23 n'existait pas.
24 Q. Bien. Alors voyons ce qui s'est passé lors de cette séance de travail
25 de la présidence. M. Izetbegovic était là, et là encore nous parlons de la
26 date du 26 décembre 1992. Nous avons M. Campara qui dit, je cite :
27 "L'article 4 dispose qu'en République de Bosnie-Herzégovine la langue
28 officiellement utilisée est le serbo-croate ou le croato-serbe dans sa
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1 variante ijkavienne."
2 Ensuite il dit : "Nous sommes d'avis que cette expression ne peut plus être
3 utilisée car il n'y a pas de langue bosniaque, et cetera, et que la seule
4 possibilité, et la présidence pourrait donner l'initiative, qu'à la lumière
5 de ces éléments, l'affaire devrait être renvoyée devant la commission
6 chargée des questions constitutionnelles afin que cette disposition soit
7 annulée pour la période de la guerre et en attendant l'adoption d'une
8 nouvelle constitution. Cette disposition n'existera plus et les langues de
9 toutes les nations seront utilisées."
10 Un peu plus loin, vous dites : "Quelle langue parlerons-nous alors ?"
11 Campara répond : "Serbo-croate, croate, serbe, bosniaque. En fonction du
12 décret, c'est le président Izetbegovic qui décidera, dans l'intervalle il
13 ne faut pas trop en parler." J'imagine que c'était une plaisanterie. C'est
14 bien ça ?
15 R. Oui, c'était une plaisanterie.
16 Q. Ganic dit : "Ils disent que nous devons ajouter le bosniaque aux autres
17 combinaisons permanentes."
18 Campara : "Nous ne pouvons pas faire cela."
19 Puis Pejanovic intervient : "Nous parlerons comme nous parlerons, et ils
20 appelleront sans doute notre langue la langue bosniaque et les autres
21 langues nécessaires pour les peuples qui vivent ici. Il ne s'agit pas
22 vraiment d'une question urgente, il faut conclure que l'affaire sera
23 résolue selon la procédure habituelle en adoptant une nouvelle
24 constitution, ce qui j'espère sera fait bientôt."
25 Puis vous intervenez et vous dites : "Je suis d'accord que nous devrions
26 faire cela. Cependant, il sera difficile de donner un nom à cette langue.
27 Tout d'abord, la langue utilisée par Vuk Karadzic et Ljudevit Gaj,
28 créateurs des langues croate et serbe, c'est le herzégovénien." Cela doit
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1 être clair, alors il y a des rires dans l'assistance.
2 Puis Campara un peu plus loin dit : "Monsieur le Président, je propose que
3 vous portiez cette initiative devant l'assemblée afin qu'elle examine cette
4 requête."
5 Et voilà ce qu'Izetbegovic, qui était président également du SDA à
6 l'époque, voilà ce qu'il dit, le SDA était le parti musulman le plus
7 important en Bosnie-Herzégovine et c'était le représentant musulman lors
8 des pourparlers de paix, il dit :
9 "Ce n'est pas une mauvaise proposition, les gens ne pourront pas dire que
10 nous n'avons pas réagi. Disons que l'affaire devra être examinée par la
11 commission chargée des questions constitutionnelles de l'assemblée. Comme
12 l'a dit Churchill : 'Si vous souhaitez qu'un problème ne soit jamais réglé
13 sans que ce soit la responsabilité de qui que ce soit, présentez-le devant
14 une commission.' Très bien, c'est très bien. Je pense que c'est une
15 proposition. Permettons la commission de l'examiner. Par conséquent,
16 l'affaire a été renvoyée devant la commission chargée des questions
17 constitutionnelles."
18 Monsieur, vous étiez présent lorsque ces débats ont eu lieu. Pourquoi ces
19 débats étaient-ils nécessaires ?
20 R. Il y a eu ce débat relatif à la langue. Je crois que vous avez omis les
21 dires de M. Pejanovic, ligne numéro 3 de cette page. Lorsque j'ai dit que
22 la langue, elle, a été prise ou a ses origines en Herzégovine, et M.
23 Pejanovic a précisé que c'était là-bas que la langue avait été le mieux
24 préservée.
25 Q. Et qu'est-ce que cela signifie ?
26 R. Ça veut dire que Vuk Karadzic, qui est considéré comme étant le père de
27 la langue serbe et Ljudevit Guy, qui est considéré comme étant le père de
28 la langue croate, vers la mi ou la moitié du XIXe siècle, ont pris pour la
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1 langue soit serbe, soit croate, les fondements en Herzégovine et en Bosnie
2 orientale, et à l'époque, les hommes de lettres croates et Vuk Karadzic,
3 lui-même, s'exprimaient en ékavien, comme on le dit ici; et le débat tout
4 entier a porté sur le fait de savoir comment on appellerait la langue en
5 Bosnie-Herzégovine, à partir du moment où c'était devenu un Etat autonome,
6 un Etat indépendant avec trois groupes ethniques constitutifs.
7 Q. Merci. Page suivante, voilà ce que vous dites, c'est peut-être
8 pertinent pour le débat :
9 "Il faut garder une chose à l'esprit, chaque nation a le droit de donner le
10 nom qu'elle veut à sa propre langue. La question qui se pose est de savoir
11 si on peut trouver ce nom ailleurs. En tout cas, toute nation qui parle une
12 langue a le droit de lui donner son propre nom. Les Autrichiens et les
13 Américains n'ont jamais utilisé ce droit."
14 Izetbegovic : "On peut le nom qu'on veut à cette langue. Il ne faut pas
15 l'interdire. Nous dirons probablement qu'on peut appeler le langage que
16 nous parlons ce qu'on veut, que ce soit le serbe, le croate, le bosniaque,
17 donnons-lui à cette langue le nom qu'on veut. Mais il y a d'autres
18 répercussions, et il faudrait le dire, par exemple, dans des diplômes, il
19 faudra dire quelle est la langue maternelle. Fort bien. Il y aura saisine
20 de la commission. Poursuivons."
21 Vu ces échanges, vu ce qu'a dit Izetbegovic, peut-on tirer des conclusions
22 quant aux distinctions éventuelles faites entre la langue parlée par l'un
23 et par l'autre ?
24 R. En Bosnie-Herzégovine, les trois peuples constitutifs parlent comme ils
25 l'entendent. En ces temps-ci ou en ces temps-là plutôt, on appelait cela le
26 serbe, le croate, le serbo-croate ou le croato-serbe. Le troisième peuple
27 n'avait pas encore opté en la matière. Et il se trouve qu'à présent le
28 souhait est exprimé de créer un troisième segment, le bosniaque, à savoir
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1 que d'avoir trois langues. Nous, Croates, on s'était employé en faveur
2 d'une égalité des droits pour ces trois peuples à tous points de vue.
3 Q. Permettez-moi de vous interrompre. Est-ce qu'on parle de langues qui
4 sont radicalement différentes avec une syntaxe, une grammaire, un lexique,
5 un vocabulaire distinct, différent ou est-ce qu'une rose, c'est une rose,
6 quel que soit le nom qu'on lui donne ?
7 R. Ici, on parle des trois variantes linguistiques, je dirais, dont
8 chacune est compréhensible à chacun. Cependant, chaque peuple a le droit de
9 s'appeler par son nom, et c'est pour cela que nous avons donné le droit aux
10 Musulmans, à Washington, nous avons accordé le droit qu'ils s'appellent
11 Bosniens, et chaque peuple a le droit donc d'appeler sa langue avec le nom
12 qui leur convient. C'est pour cela que nous étions d'accord que les
13 Bosniens ait le droit de dire qu'ils parlent la langue bosnienne, mais pas
14 bosniaque, parce que les Bosniaques, ce sont les trois peuples, puis vous
15 avez les Herzégoviniens aussi.
16 Alors que nous avons donné la possibilité aux Musulmans d'appeler leur
17 peuple, le peuple bosnien, et leur langue la langue bosnienne.
18 Q. Passons au document suivant, puis nous reviendrons à un débat que nous
19 avions déjà eu avant que nous ne partions sur cette tangente.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Il s'agit du document 02077, premier
21 classeur, Messieurs les Juges, 9 octobre 1992.
22 Q. Ceci vient du journal "Oslobodjenje." Où est-ce que cette publication
23 s'est faite ?
24 R. C'est un quotidien publié à Sarajevo.
25 Q. Objet : "Conférence de presse donnée par Izetbegovic à Mostar et son
26 avis sur les relations entre Musulmans et Croates." Je ne vais pas donner
27 lecture de la totalité de l'article, je vais plutôt vous demander de vous
28 concentrer sur les deux derniers paragraphes de la page 1 :
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1 "Il a également annoncé que les membres d'un comité de coordination
2 seraient bientôt nommés et chargés de coordonner les opérations militaires
3 entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine contre l'agresseur commun serbo-
4 monténégrin. Les membres ont déjà été ou nommés par la partie croate et le
5 côté de la Bosnie-Herzégovine est d'accord pour qu'il y ait deux
6 représentants de l'ABiH et un représentant du HVO, que la Bosnie-
7 Herzégovine va nommer. Le HVO va nommer son représentant dans un jour ou
8 deux et l'ABiH devrait le faire bientôt ou aussitôt après."
9 Nous parlons ici de relations entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Ici, on parle des rapports entre le peuple croate et le peuple musulman
12 en Bosnie-Herzégovine.
13 Q. Mais cette partie que je viens de vous lire -- un pas à la fois et on y
14 arrivera. On parle ici des rapports entre la Croatie et la Bosnie ?
15 R. Excusez-moi, oui effectivement, ici on parle de la Croatie et de la
16 Bosnie-Herzégovine et des rapports entre les deux.
17 Q. Paragraphe suivant :
18 "Izetbegovic a déclaré qu'il y aurait bientôt un commandement unique des
19 forces armées de Bosnie-Herzégovine qui serait établi et se composerait des
20 chefs de l'ABiH et du HVO. Le président de la présidence de Bosnie-
21 Herzégovine a décrit l'établissement du Conseil des Musulmans d'Herzégovine
22 comme étant une réaction compréhensible vu ce que les Croates avaient fait,
23 mais a dit que c'est une voie inacceptable si l'on veut résoudre les
24 problèmes en Bosnie-Herzégovine et que c'était une voie que les Musulmans
25 ne devaient pas prendre."
26 Quelle conclusion pouvons-nous tirer puisqu'on parle ici d'un commandement
27 unique des forces armées, pour parler ensuite de l'ABiH et du HVO ?
28 R. Donc, il parle des rapports entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine,
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1 et à l'intérieur de Bosnie-Herzégovine, il parle de rapport entre l'ABiH et
2 le Conseil croate de la Défense qui représente les forces armées de Bosnie-
3 Herzégovine. On parle de la coopération, des nominations, il s'agit de deux
4 segments des forces armées de Bosnie-Herzégovine.
5 Q. Examinons le tout dernier paragraphe, il est dit ceci :
6 "Hier, Izetbegovic a eu des pourparlers avec le président du HVO de la
7 communauté croate d'Herceg-Bosna, le Dr Jadranko Prlic, premier ministre du
8 gouvernement de guerre, Jadranko Topic, et cetera." Regardez la photo de
9 celui-ci, l'original, difficile de voir. Mais est-ce que vous reconnaissez
10 les visages qui se trouvent aux côtés de M. Izetbegovic ?
11 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Nous n'avons pas de photo. Moi, je
12 ne l'ai pas trouvée.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] Regardez, ici vous avez la version en B/C/S.
14 Je pourrais poser une question qui dirigera le témoin, parce que je sais
15 qu'il se trouve sur cette photo.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est Jadranko Prlic que l'on
17 voit sur la photo.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est exact. Il est un peu plus chevelu.
19 Vous savez, ça ne s'arrange pour personne de ce côté-là.
20 Q. Sujet suivant, centre logistique, nous allons aborder ce sujet très
21 rapidement. Hier, vous l'avez dit, ces centres logistiques, ils avaient été
22 établis et dans ce cadre, nous allons, pour vous le montrer, examiner
23 certains documents. Le premier sera le document 1D 01145. Tous ces
24 documents se trouvent dans le cinquième -- pardon, dans le premier
25 classeur.
26 Décision portant désignation du directeur du centre logistique de Ploce, M.
27 Raguz; c'est bien cela ?
28 R. C'est exact.
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1 Q. C'est un Croate, c'est cela ?
2 R. Oui, il est Croate, lui.
3 Q. Document suivant, 1D 01146. A Rijeka, Stjepan Meler, lui aussi est
4 Croate, n'est-ce pas, en tout cas le nom semble l'indiquer ?
5 R. Oui.
6 Q. 1D 01147. Split, Munid Karavdic ?
7 R. Karavdic.
8 Q. Merci de m'aider. Il est Musulman ?
9 R. Il est Musulman, lui.
10 Q. 1D 01403. Décision portant désignation d'un chef par intérim du service
11 de l'aide économique, de question économique et de l'aide humanitaire à
12 l'ambassade de la République de Bosnie-Herzégovine en Croatie, un certain
13 Dr Josip Goluza. N'avons-nous pas vu une lettre qu'il avait écrite en guise
14 de protestation ?
15 R. Oui, Dr Josip Goluza, il est Croate. Il travaille dans le bureau du
16 gouvernement de Zagreb.
17 Q. --propos en quelques mots, pourriez-vous nous dire ceci, vous dites
18 l'office ou l'antenne du gouvernement à Zagreb, qu'est-ce que c'était
19 exactement ?
20 R. Au début de la guerre, au tout début, je pense que c'était en avril
21 1992, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine s'étaient mises d'accord que sur
22 le plan international, du point de vue diplomatique, qu'elles allaient
23 s'entraider de toutes les façons possibles. Ensuite, Bosnie-Herzégovine a
24 ouvert un bureau à Zagreb, c'est le gouvernement de Bosnie-Herzégovine qui
25 a ouvert son bureau à Zagreb, qui fonctionnait jusqu'à l'ouverture de
26 l'ambassade de Bosnie-Herzégovine à Zagreb. La Croatie avait aussi une
27 ambassade à Sarajevo.
28 Q. Merci. Document suivant 1D 01287. Décision portant désignation du
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1 directeur du centre de logistique de Ploce, Salko Handzic ?
2 R. Oui, oui, c'est exact.
3 Q. Décision suivante, 1D 01301, décision décidant de licencier, de
4 renvoyer M. Raguz, qu'on avait vu auparavant. Là, nous sommes à la date du
5 29 avril 1993.
6 R. Oui, oui, c'est exact.
7 Q. Examinons 1D 02292. Ceci n'aura, bien sûr, pas échappé aux Juges, ici
8 on a ni sceau ni signature. Pourtant, nous voyons qu'il s'agit d'un résumé,
9 en tout cas c'est ce qui est dit ici, résumé des livraisons effectuées à
10 l'ABiH et au Conseil de Défense croate après demande faite par le ministère
11 de la Défense de la République de Bosnie-Herzégovine et l'état-major
12 principal des forces armées, centre logistique de Visoko.
13 Avez-vous des informations à propos de ce document ? Etes-vous en mesure de
14 le commenter ?
15 R. Je peux confirmer qu'il y avait un centre logistique à Visoko, à une
16 quarantaine de kilomètres de Sarajevo. C'est surtout l'ABiH qui
17 s'approvisionnait dans ce centre logistique.
18 Q. Très bien. Document suivant, 1D 01282, 1282, décision portant
19 établissement de centres logistiques afin d'assurer l'approvisionnement des
20 habitants de la République de Bosnie-Herzégovine. Ici, nous voyons qu'il
21 s'agit de Visoko et la date est celle du 10 mai, alors que c'était avant
22 dans l'autre document le 25 janvier 1993. Est-ce que nous parlons ici d'un
23 centre logistique différent, c'est ça que je vous demande ou est-ce qu'il y
24 avait deux types de centre logistique, l'un pour les armements et l'autre
25 pour l'approvisionnement, ravitaillement pour les habitants ?
26 R. Le premier centre dont on a parlé, celui de Visoko, il s'agissait d'un
27 centre de logistique militaire. Les autres centres de logistique étaient
28 plutôt civils.
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1 Q. Dernier document dans cette série sur ce sujet, 1D 01302, décision
2 portant établissement de centres logistiques d'aide humanitaire sur le
3 territoire de la République de Croatie. La date est celle du 29 avril 1993.
4 Pourquoi a-t-il été nécessaire de créer un centre logistique pour l'aide
5 humanitaire en Croatie ? Le savez-vous ?
6 R. J'ai dit que la plupart des frontières de la Bosnie-Herzégovine sont
7 des frontières avec la Croatie, donc les trois-quarts de ces frontières
8 sont des frontières avec la Croatie, que la Bosnie-Herzégovine pendant
9 toute la période de guerre mais aussi en temps de paix s'approvisionne par
10 la Croatie. C'est dans ce sens qu'il y a eu ces centres logistiques qui ont
11 été créés dans des ports principaux croates, mais pas seulement dans les
12 ports. C'est depuis ces centres qu'arrivait l'aide humanitaire et autre
13 aide destinée à la Bosnie-Herzégovine.
14 Q. Merci.
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais maintenant
16 aborder un autre sujet. Ça va me prendre plus que dix minutes --
17 M. LE JUGE MINDUA : Maître Karnavas, excusez-moi. Nous venons de passer en
18 revue une série de décisions. Et dans chacune de ces décisions, par
19 exemple, la décision -- enfin inutile de les citer pour ne pas répéter.
20 Dans chacune de ces décisions, il est mentionné que la décision en question
21 entre en fonction, entre en vigueur à la date de la publication dans le
22 journal officiel, "Official Gazette". Je voudrais savoir si le témoin peut
23 confirmer qu'en cette période de conflit, le journal officiel était
24 toujours publié et que les décisions en question étaient toujours
25 promulguées conformément à la loi ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces décisions ont été publiées en accord avec
27 la loi en vigueur à l'époque. Le journal officiel était publié dans son
28 format minimal. Certaines décisions entraient en vigueur immédiatement. Par
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1 exemple, les décisions dont on parle ici sont entrées en vigueur après
2 avoir été publiées dans le journal officiel.
3 Les décisions que l'on ne pouvait pas publier dans le journal officiel, à
4 cause des contraintes de temps ou parce qu'il s'agissait de décisions
5 extrêmement urgentes, elles entraient en vigueur sans être publiées, en
6 disant éventuellement qu'on allait les publier par la suite dans le journal
7 officiel.
8 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors le mieux, c'est de faire la pause, comme
10 ça vous attaquerez après l'autre sujet. On fait une pause de 20 minutes.
11 --- L'audience est suspendue à 15 heures 36.
12 --- L'audience est reprise à 16 heures 03.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je peux poursuivre ?
15 Q. Sujet suivant, Monsieur Akmadzic, la question des districts ou "okrug".
16 Examinons le document dans le premier classeur, 1D 00509.
17 Vous l'avez sous les yeux, Monsieur le Témoin ?
18 R. Je l'ai.
19 Q. On voit la date du 13 août 1992, décret ayant force de loi sur
20 l'établissement et l'activité des districts. Est-ce que vous connaissiez ce
21 décret à l'époque ?
22 R. Oui.
23 Q. Pourriez-vous donner quelques explications aux Juges ? Nous voulons
24 comprendre la teneur de ce décret, sur quoi il porte ?
25 R. Le 13 août 1992, c'est une période de guerre déjà, Sarajevo était
26 complètement encerclée. Les autorités de la Bosnie-Herzégovine se trouvant
27 à Sarajevo n'avaient pas la possibilité de rester en contact avec les
28 autorités locales ailleurs sur le territoire de la république. C'est
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1 pourquoi la présidence de la Bosnie-Herzégovine a repris les fonctions du
2 Parlement et pris la décision portant création -- je ne dirais pas
3 décision, je dirais plutôt décret, portant création d'un certain nombre de
4 départements. Il me semble qu'il s'agissait de dix départements ou
5 districts, y compris celui de la ville de Sarajevo.
6 Q. Très bien. Est-ce que -- vous faisiez déjà partie de la présidence de
7 Guerre, je suppose, à ce moment-là ?
8 R. A l'époque, j'étais secrétaire général, et non pas membre de la
9 présidence.
10 Q. Avez-vous un avis sur cette question, ce décret s'inscrit-il dans la
11 constitution de ce qui était alors la République de Bosnie-Herzégovine ?
12 R. La présidence de la Bosnie-Herzégovine a jugé nécessaire de créer ces
13 districts, bien qu'il ne soit pas sûr que la chose se soit faite
14 conformément à la constitution, parce que la constitution ne prévoie pas la
15 création de tels districts. Or, les modifications à la constitution ne
16 sauraient être apportées ni par la présidence ni par le Parlement.
17 Q. Prenons l'article 8, peut-être va-t-il nous aider à mieux comprendre.
18 Il est question ici des droits et obligations du district. Les fonctions
19 énumérées à l'article 8, sont-elles les fonctions qui reviennent à des
20 municipalités ?
21 R. Ce n'était pas les fonctions des municipalités, surtout pas lorsqu'il
22 s'agit des questions relatives à la mobilisation; la municipalité participe
23 à la mobilisation mais en coopération directe avec les autorités centrales.
24 Q. Nous allons examiner le document suivant, 1D 02418.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Dans le deuxième classeur, Messieurs les
26 Juges. Nous avons vu qu'il y avait ce décret adopté le 13 août 1992. Ici,
27 nous avons une lettre du 31 janvier 1993, signée par Izetbegovic pour le
28 SDA de Bosnie-Herzégovine. Il semblerait, par conséquent, qu'Izetbegovic
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1 envoie ceci au nom de son parti. Il est dit en haut : "Conformément aux
2 principes de l'ordre constitutionnel et juridique de la Bosnie-Herzégovine
3 adoptés à Genève et à la charte des Musulmans de Bosnie-Herzégovine et au
4 nom du SDA de Bosnie-Herzégovine, par la présente, je donne pleine" - je
5 souligne pleine - "autorisation au président du comité régional du SDA pour
6 la Bosnie-Herzégovine, M. Damirovic, chef du groupe d'experts, que le
7 comité régional doit établir, et il est proposé que soit constituée la
8 province proposée pour Mostar en coopération avec le représentant du peuple
9 croate, afin de mettre la dernière main aux derniers éléments permettant la
10 constitution de cette province sur le plan constitutionnel, les plans légal
11 et politique."
12 Le dernier paragraphe dit : "Conformément à cette autorisation, le
13 président du comité régional du SDA pour l'Herzégovine et le comité lui-
14 même ont l'obligation d'assurer l'unité démocratique du SDA en Herzégovine
15 dans l'exécution de cette fonction."
16 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'avaient pas le texte.
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous sommes donc plusieurs mois après
18 l'adoption de ce décret, et Izetbegovic envoie cette autorisation pour la
19 province de Mostar.
20 Q. Je vous demande maintenant s'il y avait une contradiction entre ce
21 décret qui est censé établir ce district, laissons de côté la question de
22 savoir si c'était quelque chose de constitutionnel ou pas, et
23 l'autorisation donnée par ce parti pour une coopération avec les Croates
24 pour établir la province de Mostar ?
25 R. Je pense que le président, M. Izetbegovic, ne fait pas la distinction
26 entre les missions du président de la présidence, et celles du président du
27 Parti de l'Action démocratique. En sa qualité de président du parti, il
28 peut donner des autorisations propres au parti même, mais il ne peut pas
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1 donner des autorisations qui relèvent de l'Etat. Le deuxième élément que je
2 tiens à préciser ici, le 31 janvier 1993, c'est une date postérieure aux
3 négociations de Genève pour ce qui est de l'aménagement de la Bosnie-
4 Herzégovine. D'une certaine façon, le président Izetbegovic s'était dit
5 disposé à suivre les instructions telles que données à Genève concernant
6 notamment la création de provinces. D'une certaine façon, ici aussi il se
7 trouve à la recherche d'une coopération avec les Croates. J'imagine que
8 cela sous-entendait le HVO aussi.
9 Q. Regardons l'original de ce texte. Nous y voyons une signature.
10 Pourriez-vous nous dire, en étant certain, si c'est là la signature
11 d'Izetbegovic ?
12 R. Je peux dire cela avec une certitude totale puisque je connais bien sa
13 signature. C'est sa signature, celle de M. Izetbegovic.
14 Q. Bien. Nous allons voir ce qui se passe à peu près un mois plus tard.
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Pour ce faire, nous allons examiner le
16 document 1D 02565, deuxième classeur, Messieurs les Juges.
17 Q. Qu'avons-nous ici ? Une lettre en date du 3 mars 1993, lettre adressée
18 à M. Demirovic par un certain Rusmir Mahmutcehajic, j'espère avoir bien
19 prononcé, et en annexe nous avons une lettre envoyée à M. Pasalic, chef du
20 4e Corps d'armée de l'ABiH. En bas de page nous voyons aussi qu'un
21 exemplaire devrait être envoyé à M. Jadranko Prlic ce que nous voyons
22 également à la toute première page où il est dit : "Transmettre un
23 exemplaire à M. Prlic après avoir copié tous les documents à vos propres
24 fins."
25 Ici au point 2, ceci vient du vice-président du gouvernement, celui-ci
26 envoie une lettre au commandant de l'ABiH, il dit ceci :
27 "Nous vous envoyons les conclusions du gouvernement de la République de
28 Bosnie-Herzégovine sur l'application en urgence d'activités en vue
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1 d'établir les districts de Mostar et de Livno."
2 Arrêtons-nous un instant. Est-ce que ceci, quand on parle de ce district de
3 Mostar, est-ce que c'est conforme au document précédent que nous avons vu
4 qui avait été signé par le président de la présidence qui était aussi
5 président du SDA, Alija Izetbegovic, le 31 janvier 1993 lorsqu'il demandait
6 l'aide du comité régional afin d'établir la province de Mostar ?
7 R. Ce n'est certainement pas conforme parce qu'il s'agit de districts et
8 il est question de la mise en œuvre d'un plan issu d'une suite à des
9 négociations internationales. Les provinces découlaient du plan Vance-Owen
10 et les districts découlent de la décision de la présidence sur laquelle on
11 s'est penchée tout à l'heure.
12 Q. Bien. Et si nous examinons la toute dernière page de cette lettre avant
13 d'examiner la liste des délégués, nous constatons qu'il est dit :
14 "D'après ce que sait le ministère jusqu'à présent, il n'y a pas eu de
15 réponse officielle ni d'opinion officielle reçue de la part de M. Mate
16 Boban. Par conséquent, le ministère de la Défense lance de nouveau une
17 initiative selon laquelle les districts de Mostar et de Livno vont devenir
18 opérationnels et propose au gouvernement de la République de Bosnie-
19 Herzégovine qu'il transmette le dossier à la présidence de la République de
20 la Bosnie-Herzégovine conformément aux articles 56 et 60 du décret en force
21 de loi, projet de décision."
22 Est-ce que vous avez retrouvé ce passage, Monsieur ? Il s'agit de la lettre
23 datée du 25 février 1993 par laquelle sont créés les districts de Mostar et
24 de Livno; cette lettre est signée par Munib Bisic. Est-ce que vous l'avez
25 trouvée ?
26 R. Je l'ai trouvée.
27 Q. Qui est Munib Bisic ?
28 R. C'est le ministre adjoint de la Défense de Bosnie-Herzégovine, c'est
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1 quelqu'un qui est membre du ministère de la Défense.
2 Q. Pourquoi le ministre de la Défense demanderait-il ou prendrait
3 l'initiative de créer les districts de Mostar et de Livno puisqu'il existe
4 également un gouvernement civil ? Est-ce que vous auriez une explication à
5 nous fournir à ce sujet ?
6 R. Je n'en ai jamais discuté avec M. Munib Bisic. Je suppose qu'il s'agit
7 d'un segment militaire, et ça c'est d'un. Je pense d'autre part que ce
8 n'était pas son travail. Il n'était pas censé faire cela.
9 Q. Hier au début de notre entretien, nous avons évoqué les propos de Lord
10 Owen et ce qu'il avait écrit dans son livre. Il a dit qu'à un moment donné
11 la présidence était en réalité une présidence musulmane ou destinée aux
12 Musulmans, et qu'elle était gérée par ses proches collaborateurs.
13 A ce stade, est-ce que la présidence fonctionne comme elle aurait dû
14 fonctionner selon les principes de la constitution ?
15 R. La présidence était censée fonctionner partant de la constitution, mais
16 à partir du 12 décembre, cette présidence, je parle de 1992 il s'entend, du
17 point de vue constitutionnel la concernant, elle-même ne fonctionne pas de
18 façon tout à fait conforme à la constitution, et cela n'est pas le cas pour
19 la période dont nous parlons ici non plus.
20 Q. A la lecture du document précédent qui était daté du 31 janvier 1993,
21 vous avez pu nous raconter un petit peu ce qui se passait à la table des
22 négociations avec les représentants de la communauté internationale. Est-ce
23 que vous pourriez nous aider à comprendre les choses, au début du mois de
24 mars 1993, que se passe-t-il pour ce qui est du processus de négociations
25 pour ce qui est du plan de paix Vance-Owen, où en est-on ?
26 R. Début mars 1993, les négociations relatives à la conclusion d'un traité
27 de paix en Bosnie-Herzégovine basé sur le plan Vance-Owen avaient déjà
28 évoluées grandement, et comme je l'ai dit hier, au mois de mars les deux
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1 parties, musulmane et croate, avaient déjà signé ce plan Vance-Owen.
2 Partant de là, nous avions convenu de la mise en place des provinces, de
3 leur nombre et de leur limite, c'étaient des frontières entre guillemets,
4 donc au conditionnel.
5 Q. Très bien. Nous allons revenir là-dessus plus tard. Pour le moment,
6 passons au document suivant, à savoir 1D 01972.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Il se trouve dans le premier classeur,
8 Messieurs les Juges, 1D 01972, apparemment il n'y a pas de date, on peut
9 lire 1993.
10 Q. Le document est adressé à Lagumdzija qui, si j'ai compris à l'époque,
11 était le vice-président du gouvernement; est-ce exact ?
12 R. C'est exact.
13 Q. Et dernière page, le document provient de Jadranko Prlic mais il n'y a
14 pas de signature. Avez-vous eu l'occasion d'examiner ce document, Monsieur
15 ?
16 R. Oui, je me suis penché dessus.
17 Q. A la première ligne on peut lire :
18 "Dans votre lettre sans numéro de référence, en date du 3 mars 1993,
19 vous m'avez informé des conclusions du gouvernement…" et ainsi de suite.
20 A la lecture de ce document, est-ce que vous n'avez pas l'impression
21 que ce document 1D 01972 a un lien avec le document que nous avons vu plus
22 tôt, à savoir 1D 02418 ou plutôt -- 1D 02565 ?
23 R. Oui, il y a une corrélation.
24 Q. Alors savez-vous ce que dit ici le Dr Prlic ? Quel est son message
25 lorsqu'il dit :
26 "La création des districts de Mostar et de Livno n'est pas régie par la
27 constitution actuelle de la République de Bosnie-Herzégovine qui a été
28 signée par les Musulmans et les Croates lors des pourparlers de paix à
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1 Genève et à Washington."
2 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Genève et New York.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison, je ne
4 sais pas d'où venait Washington. Je ne sais pas pourquoi j'en ai parlé,
5 peut-être que j'avais toujours M. Biden à l'esprit.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que par ce document, M. Prlic cherche
7 à prévenir la partie musulmane en Bosnie-Herzégovine, en l'occurrence M.
8 Lagumdzija, qui se trouve être premier ministre, de la nécessité de s'en
9 tenir aux négociations internationales, de s'en tenir aussi à la
10 constitution et aux lois, de s'en tenir aux signatures apposées par les
11 représentants croates et musulmans aux négociations internationales, chose
12 qu'il ne fait pas. Et il précise également ici que cette communauté croate
13 d'Herceg-Bosna se trouve être une communauté à caractère provisoire, et une
14 fois que les négociations auront abouti, il y aurait modification de cette
15 communauté.
16 M. KARNAVAS : [interprétation]
17 Q. Soyons plus concrets car nous pouvons lire le message de M. Prlic, mais
18 est-ce que vous pourriez nous donner votre avis puisque vous étiez
19 président du gouvernement, alors pourquoi est-ce que le Dr Prlic a dit à
20 l'avant-dernier paragraphe :
21 "Etant donné que votre proposition ne se fonde pas sur la constitution
22 actuelle de la République de Bosnie-Herzégovine ou sur les principes
23 constitutionnels convenus à propos de l'ordre constitutionnel futur de la
24 République de Bosnie-Herzégovine, je n'estime pas qu'il y ait un fondement
25 juridique ou que cela soit conforme aux pourparlers de paix."
26 Alors, je souhaiterais connaître votre opinion, qu'en pensez-vous ?
27 R. Ce que je pense c'est que Jadranko Prlic prévient ici, à juste titre,
28 les instances concernées de l'autorité qui est le destinataire de la
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1 lettre, en disant qu'il convient de s'en tenir à la constitution, aux
2 négociations internationales, et à ce qui a été convenu entre les deux
3 peuples. Cette lettre a été envoyée sans que je le sache, enfin la lettre
4 de M. Lagumdzija a été envoyée sans que je le sache, et je ne l'aurais pas
5 approuvée.
6 Q. Bien. Passons au sujet suivant, nous sommes en janvier 1993. Alors,
7 vous avez peut-être l'impression que je saute d'une période à l'autre, mais
8 j'ai organisé mon interrogatoire par thème et j'espère qu'à l'issue de mon
9 interrogatoire, vous comprendrez la logique.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant, 1D 01314. 1D 01314. Cela
11 se trouve dans le classeur suivant, alors je demanderais à M. l'Huissier de
12 bien vouloir nous aider. Il s'agit du classeur numéro 2. Pour vous,
13 Messieurs les Juges, il s'agit du premier classeur. 1D 01314. Ce document
14 émane du Conseil de sécurité, il porte la date du 6 janvier 1993.
15 Q. Tout d'abord, avez-vous participé aux négociations qui ont eu lieu à
16 Genève à l'époque ?
17 R. J'étais aux négociations à Genève, mais il se peut qu'à ce moment-là --
18 oui, j'étais là-bas.
19 Q. A l'annexe 1, on peut voir et je souhaiterais vos commentaires, page 6,
20 coin supérieur gauche, annexe 1; est-ce que vous l'avez trouvé, Monsieur ?
21 R. Oui, je l'ai trouvé.
22 Q. Nous pouvons lire : Croate de Bosnie, Mate Boban, Mile Akmadzic, et le
23 commandant Milivoje Petkovic. Puis nous pouvons lire : Bosnie-Herzégovine,
24 Alija Izetbegovic, Haris Silajdzic, le commandant en chef, Sefer Halilovic,
25 Kasim Trnka et Hajrudin Somun. Puis nous voyons une liste de Serbes de
26 Bosnie-Herzégovine, Karadzic, Mladic, Buha, Lukic, Plavsic.
27 Monsieur, hier vous nous en avez un petit peu parlé. Vous avez essayé
28 d'expliquer tout cela à M. Biden, mais cela n'a servi à rien. Pour ce qui
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1 est de la Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges
2 de la Chambre quelle était votre objection ?
3 R. J'avais fait objection pour dire que la Bosnie-Herzégovine ne pouvait
4 être représentée que par les représentants des trois peuples, à savoir par
5 une délégation constituée de représentants des trois peuples en présence.
6 En l'occurrence, dans le concret ici comme on peut le voir, il s'agit de
7 délégations des trois parties en présence qui prennent part aux
8 négociations. L'une des parties est la partie croate, l'autre présidée par
9 Izetbegovic est musulmane, et la troisième est serbe. Or, à ces
10 négociations il y avait également une délégation de la République fédérale
11 de Yougoslavie et une délégation de la République de Croatie.
12 Q. Bien. Permettez-moi de vous poser la question suivante, elle peut vous
13 paraître bête mais je vais vous la poser quand même : est-ce que vous vous
14 êtes jamais plaint du fait que les délégations de Bosnie-Herzégovine
15 comprennent uniquement des Musulmans, alors apparemment il y a le
16 gouvernement contre deux autres nations qui participaient aux négociations
17 et non pas trois nations dont l'une serait appelée la délégation de Bosnie-
18 Herzégovine qui lui conférait une fausse légitimité puisqu'on aurait
19 l'impression qu'elle agissait au nom de l'Etat et non pas dans l'intérêt de
20 son peuple ?
21 R. Je dois signaler ici à l'intention des Juges de la Chambre qu'avant
22 cela à Sarajevo on en avait débattu au niveau de la présidence, et la
23 présidence, à ma demande, avait adopté une position disant qu'à l'étranger
24 - d'ailleurs je vous l'ai dit hier - ne pouvait être représentée que par
25 une délégation constituée des trois peuples. Or, s'il s'agit de
26 l'aménagement interne de l'Etat, en l'occurrence, il s'agissait de faire en
27 sorte que les trois peuples négocient entre eux, chaque peuple ayant ses
28 propres représentants.
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1 Dans le cas concret ici présent, indépendamment du fait que j'ai été
2 premier ministre au gouvernement de la Bosnie-Herzégovine, j'ai fait partie
3 de la composition de la délégation des Croates de Bosnie-Herzégovine comme
4 on l'indique ici la délégation présidée par Mate Boban, et non pas au sein
5 de la délégation présidée par Alija Izetbegovic.
6 Si on avait parlé de relations internes à la Bosnie-Herzégovine vis-
7 à-vis de quelqu'un d'autre au niveau international, alors je serais assis
8 au côté de M. Izetbegovic, et au côté du ou des représentants serbes, très
9 certainement, conformément à ce qui a été convenu au niveau de la
10 présidence de la Bosnie-Herzégovine.
11 A cet effet, à Genève j'ai protesté, j'ai demandé au coprésident de
12 procéder à des rectifications. Ils ont accepté mon argumentation, mais très
13 souvent par la suite on a considéré que M. Izetbegovic et ses
14 collaborateurs musulmans étaient la délégation du gouvernement en général
15 au niveau international. Parce que la délégation de la présidence et la
16 délégation du gouvernement au niveau international c'était apparenté,
17 c'était comme si cela était la même chose. On pourrait illustrer la chose
18 par le fait de voir trois parties signer un accord entre elles, et non pas
19 un seul homme signant au nom des trois peuples en présence.
20 Q. Alors très rapidement pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, nous
21 connaissons Alija Izetbegovic, nous savons qui il est, ainsi que Haris
22 Siladzic, Halilovic, mais qui était Kasim Trnka ?
23 R. Kasim Trnka était membre, juge du tribunal constitutionnel, de la cour
24 constitutionnelle, mais je ne sais pas s'il l'était à l'époque.
25 Q. Qu'en est-il de M. Somun ?
26 R. M. Somun travaillait en tant que conseiller dans la présidence de
27 Bosnie-Herzégovine, ensuite il est devenu ambassadeur en Turquie.
28 Q. Alors pour ce qui est des cinq personnes qui se trouvent dans la
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1 rubrique Bosnie-Herzégovine, pourriez-vous nous dire combien de nations
2 sont représentées ?
3 R. Parmi les cinq noms, tous les cinq sont Musulmans.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Passons au document suivant --
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Je souhaiterais que
6 nous comprenions bien ce que vous voulez dire, Monsieur.
7 Il s'agissait de négociations tenues essentiellement entre les
8 peuples constitutifs de Bosnie-Herzégovine, et il y en avait trois. Vous
9 vous êtes plaint du fait que les Musulmans apparaissent dans la rubrique de
10 "Bosnie-Herzégovine". Je l'accepte. J'en suis convaincu. Mais pour ce qui
11 est de la substance, est-ce qu'en principe il n'aurait pas dû y avoir
12 quatre délégations, c'est-à-dire une délégation pour chaque nation, pour
13 chaque peuple constitutif, puis une autre délégation qui aurait été en
14 quelque sorte une délégation mère, qui aurait représenté l'ensemble de la
15 Bosnie-Herzégovine en tant qu'entité tripartite ?
16 Alors est-ce que cela vous paraît réaliste ? A quoi cela aurait pu
17 ressembler à Genève ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais vous dire ce dont on a discuté
19 lors de la session de travail de la présidence et les décisions qui ont été
20 prises, à savoir que les trois peuples, les représentants de trois peuples
21 allaient discuter entre eux, et après cela la présidence comme une entité
22 qui est composée quant à elle aussi de représentants des différents
23 peuples, en tout cas ceci devrait être le cas, allait accepter ces
24 documents s'il pense qu'il faut les accepter.
25 Donc tout d'abord, quand je dis "Bosnie-Herzégovine", je dis qu'ici
26 on ne parle finalement qu'au nom d'un seul peuple. On peut dire que c'est
27 une remarque formelle, de forme, mais ici il s'agissait pendant la guerre
28 d'une remarque de fond, d'un problème de fond.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne savais pas si c'était la fin
2 de la réponse; c'est la fin de votre réponse ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai terminé ma réponse.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] En fait, vous ne répondez pas tout à
5 fait à ma question. Mais pour le moment je vais en rester là. Merci.
6 M. KARNAVAS : [interprétation]
7 Q. Permettez-moi d'enchaîner là-dessus, Monsieur Akmadzic. En premier
8 lieu, vous dites que c'était peut-être une question formelle mais qu'en
9 fait la question est devenue une question de fond. Cela se trouve à la page
10 44, lignes 9 à 11 du compte rendu d'audience.
11 Qu'entendiez-vous par là ? Non, non, ce n'est pas dans le document,
12 Monsieur Akmadzic. Veuillez écouter ma question, je vous indiquerai la page
13 si nécessaire. Je vous citais la référence dans le compte rendu d'audience.
14 Vous avez dit que les Musulmans étaient rassemblés sous la bannière de la
15 Bosnie-Herzégovine. C'était peut-être une question formelle, mais en fait
16 il s'est avéré que c'était une question de fond. Qu'entendiez-vous par là ?
17 R. Ce que je voulais dire c'est que s'il s'agit juste d'un lapsus, d'une
18 erreur, ou une faute technique, c'est une question de forme, un problème de
19 forme. Mais puisqu'il s'agit de trois peuples égaux, constitutifs, et que
20 c'est quelque chose qui s'est produit souvent à plusieurs reprises, ce
21 n'était pas un cas isolé, ceci devient un problème de fond.
22 Q. Bien. Je souhaiterais revenir sur une question qui vous a été posée.
23 Veuillez y répondre sans détour. La question qui vous a été posée était la
24 suivante : il y a trois différentes nations, donc il peut y avoir trois
25 parties différentes, chaque nation aurait son propre représentant et peut-
26 être qu'il y aurait dû y avoir un quatrième groupe, lequel aurait
27 représenté l'Etat.
28 Est-ce que cela aurait été préférable ? C'est ma première question.
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1 Deuxième question : est-ce que cela aurait été possible compte tenu des
2 circonstances qui prévalaient à l'époque ? Et je pense avoir bien compris
3 la substance de la question posée.
4 R. Je pense que le résultat aurait été le même. La présidence de Bosnie-
5 Herzégovine est composée de deux membres plus deux membres plus deux
6 membres plus un membre. La présidence de Bosnie-Herzégovine ne pouvait pas
7 se mettre d'accord sur les questions essentielles pour la Bosnie-
8 Herzégovine puisque le côté serbe souhaitait que la Bosnie-Herzégovine
9 reste à l'intérieur de la Yougoslavie.
10 Q. Permettez-moi de vous interrompre, et je vous demande d'écouter
11 soigneusement ma question. Je vous demandais ceci : vu les circonstances
12 qui prévalaient alors, était-il possible que la présidence agissant au nom
13 de l'Etat ait une délégation, une délégation musulmane, une délégation
14 croate, une délégation serbe et une délégation de la Bosnie-Herzégovine ?
15 Est-ce que c'était possible vu les circonstances ?
16 R. Non, ce n'était pas possible.
17 Q. Très bien. On s'est demandé si c'était un peu la délégation mère, mais
18 pour ce qui est de la communauté internationale, est-ce que ça pouvait être
19 considéré comme étant disons la délégation mère avec trois parties
20 constitutives qui négociaient, est-ce que c'est bien ce que faisait la
21 communauté internationale, à savoir qu'elle était là un peu pour parrainer
22 les réunions, pour essayer que ces trois parties s'asseyent à une même
23 table et négocient ?
24 R. Je dois dire qu'on n'a même pas évoqué la possibilité d'avoir une
25 quatrième partie. Personne n'a proposé cela. Et si on peut parler d'un
26 coordinateur en quelque sorte, quelqu'un qui supervise tout cela, c'étaient
27 les coprésidents de la conférence de paix qui jouaient ce rôle.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais dans le sens de la question de l'avocat et
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1 puis de ce que vous avez posé comme question mon collègue.
2 Il y a cette conférence à Genève. Alors il y a les trois peuples
3 constitutifs, les Serbes, les Croates, les Musulmans qui peuvent, eux,
4 avoir chacun leur propre délégation, ça c'est une chose. Mais comme le
5 disait mon collègue, est-ce qu'il n'était pas envisageable également
6 d'avoir une quatrième délégation qui aurait pu être la présidence de la
7 Bosnie-Herzégovine, elle-même constituée de représentants de chacune des
8 ethnies concernées avec le premier ministre en exercice, voire également
9 deux ou trois autres personnalités, ce qui aurait fait quatre composantes,
10 et tout ça conduit par le président en exercice, M. Izetbegovic.
11 Ce n'était pas possible ? Et si ce n'était pas possible, pour quelle raison
12 ? Parce que vous, vous y étiez dedans, nous on est à l'extérieur. On ne le
13 sait pas. Mais on a les uns et les autres, on sait comment ça marche. Donc
14 était-ce possible ou pas ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois dire que ce sont les sous-présidents
16 Lord Owen et Cyrus Vance qui ont organisé ces négociations. C'est eux qui
17 ont proposé que les trois peuples négocient avec notre accord; cependant,
18 la question que vous venez de me poser, je pense qu'on pourrait y répondre
19 comme suit : la présidence souvent, mais pas cette fois-ci pas à Genève,
20 mais souvent avait ses réunions de travail, ses sessions de travail qui
21 étaient parallèles aux négociations, donc on pourrait dire que d'un côté
22 vous avez les trois délégations qui négocient entre elles et ceci est
23 supervisé par les coprésidents, puis de l'autre côté vous avez cette
24 présidence élargie, mais souvent sans le volet militaire de la présidence
25 parce qu'ils avaient leurs négociations à part, donc cette présidence
26 discutait de thèmes similaires aussi bien chez eux qu'à l'étranger.
27 Pour résumer, la présidence n'avait pas sa propre délégation mais voyageait
28 au complet et négociait, par exemple, avec la délégation de la Communauté
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1 européenne à Bruxelles et quand ils prenaient la décision de négocier, donc
2 l'initiative venait de la présidence.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
4 Maître Karnavas. J'espère que ma question ne vous a pas entravé.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, pas du tout, mais permettez-moi de
6 poser une question de suivi.
7 Q. Hier, vous avez dit qu'à un moment donné Izetbegovic avait des réunions
8 privées avec ses associés et se comportait comme s'il était le chef de
9 l'Etat plutôt que d'être simplement un primus inter pares dans l'entité
10 collégiale de la présidence.
11 Ma question est celle-ci : étant donné que M. Izetbegovic était d'abord le
12 chef de son propre parti, le SDA, et étant donné qu'il se réunissait à huis
13 clos avec ses proches associés et qu'il essayait de faire sa publicité en
14 tant que chef d'Etat, était-ce vraiment possible qu'il compose une
15 délégation solide, véritable, digne de foi et fiable pour ce qui est de
16 cette présidence qui aurait pu aider cette négociation pour l'Etat de
17 Bosnie-Herzégovine vu les circonstances ?
18 R. Non, ce n'était pratiquement pas possible. Je pense que c'est pour cela
19 qu'on ne l'a pas fait.
20 Q. La façon dont j'ai décrit le comportement d'Izetbegovic, était-il
21 correct ou pas à ce moment-là, je veux dire au moment où vous étiez en
22 fonction ? Nous parlons ici du mois de janvier 1993.
23 R. Vous avez dit la vérité. Parce que M. Izetbegovic, même quand on
24 prenait des décisions au niveau de la présidence, il agissait différemment
25 ou parfois même dans le sens contraire des décisions. Je ne dis pas que
26 c'était toujours le cas, mais cela s'est produit, c'est vrai.
27 Q. Fort bien.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé. Je pense que c'était un
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1 moment assez crucial, ce moment des pourparlers de Genève, c'est un sujet
2 capital que celui-là.
3 Monsieur Akmadzic, vous étiez là vous aussi. M. Izetbegovic au cours de ces
4 négociations a-t-il affirmé avoir ou est-ce qu'il a acquis un statut
5 particulier puisqu'il était président de la présidence ou présidence de
6 Guerre ? Ou est-ce qu'on l'a traité comme on traitait la délégation serbe
7 ou croate ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui ont organisé les négociations et qui
9 les présidaient, je peux dire qu'ils ont fait leur travail honnêtement.
10 Mais du point de vue protocolaire, le président Izetbegovic avait un
11 avantage par rapport à son bureau, son hébergement, les traitements au
12 niveau des négociations. Mais nous étions là en tant que délégations et
13 nous avons été traités de façon égale pendant les négociations.
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, c'est vrai que pour un profane
16 ou quelqu'un qui n'est pas de votre pays, c'est très difficile de
17 comprendre ce concept de présidence. Parce que dans les démocraties
18 occidentales, la présidence est toujours incarnée par le chef de l'Etat.
19 Or, on comprend bien par vos propos que, pour vous, cette présidence, M.
20 Izetbegovic, n'avait pas un mandat à négocier tout seul, car il faisait
21 partie de la présidence et que vous étiez au moins trois composantes, et ce
22 n'est pas à lui qui devait décider pour l'ensemble. Mais si je me mets du
23 côté des négociateurs, Lord Owen ou les autres, est-ce qu'ils avaient bien
24 perçu cela de votre point de vue ? Est-ce qu'ils avaient bien compris qu'en
25 réalité M. Izetbegovic était un parmi les autres, et non pas le chef d'Etat
26 tel qu'on le comprend en Angleterre, en France, en Allemagne, et cetera ?
27 Est-ce qu'il n'y avait pas une confusion que vous avez peut-être pu, vous,
28 ressentir ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que Lord Owen et M. Cyrus Vance
2 avaient compris notre situation à travers ces négociations permanentes. Ils
3 ont participé dans le processus des négociations, ils connaissaient très
4 bien quelle était la situation en Bosnie-Herzégovine. Ils voyageaient en
5 Bosnie-Herzégovine, ils venaient à Sarajevo et ailleurs. Ils avaient
6 compris toute la complexité de la situation et du problème, même si dans
7 leurs pays respectifs le système politique n'était pas le même. Justement,
8 un tel Etat composé de trois peuples constitutifs, était à l'origine d'une
9 situation complexe où vous avez un chef de l'Etat qui a un rôle complexe
10 puisque c'est une présidence où se trouvent représentés tous les peuples,
11 et même vous aviez un délégué pour les "autres".
12 Le plan de paix prend en compte même ce groupe défini comme "autres" lors
13 des négociations. Là, je parle de ceux qui ne se sont pas exprimés en tant
14 que Musulmans, Croates ou Serbes, donc des minorités. Elles étaient
15 nombreuses en Bosnie, des Monténégrins, des Juifs, des Yougoslaves qui ne
16 s'étaient pas exprimés tout simplement, pas encore, et cetera.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Karnavas.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Il nous faut avancer. J'espère que ces questions de suivi ne seront pas
20 débitées sur mon compte. P 01158. Je voulais simplement prendre les
21 devants, il fallait bien que je le dise. Quatrième classeur, Messieurs les
22 Juges, P 01158.
23 Q. Nous avons déjà vu ce document, c'est un transcript présidentiel
24 de la journée du 15 janvier 1993. Manifestement, si on voit en bas à droite
25 en anglais, page 40, on voit votre nom. On peut donc supposer que vous
26 étiez présent; c'est exact ?
27 R. Oui, c'est exact.
28 Q. Je ne veux pas trop m'appesantir car le temps nous manque -- tout le
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1 monde a le document ?
2 A la date de cette réunion en mars [comme interprété], où en était-on
3 pour ce qui est du sujet évoqué dans cette conversation ?
4 R. Oui, je me souviens, à l'époque on était revenu de Genève. On a
5 constaté que les négociations-clés se tenaient à Genève, mais il y en avait
6 d'autres à suivre qui devaient avoir lieu à New York. Et dans ce cas
7 précis, le président Tudjman, le président de la République de Croatie,
8 nous a invités à négocier.
9 Q. En quelques mots à peine, regardons ce que vous avez dit dans votre
10 intervention, page 40. Vous dites :
11 "Merci de me permettre d'exprimer mon avis. En effet, en ce qui concerne le
12 fonctionnement des gouvernements sur tout le territoire de Bosnie-
13 Herzégovine, je pense que la situation dans l'administration d'état est
14 pire pour les Croates qu'elle ne l'est pour les Musulmans à Mostar, ce qui
15 a été mentionné par M. Izetbegovic.
16 "Permettez-moi de vous donner quelques faits.
17 "Dans la présidence de Bosnie-Herzégovine, je pense qu'il y a 15 postes
18 réservés aux hauts fonctionnaires du gouvernement. Il n'y a qu'un Croate
19 qui a été accepté depuis les dernières élections, moi, mis à part, moi qui
20 suis secrétaire général, et si je n'étais pas intervenu, il aurait été
21 démis de ses fonctions. On trouve une situation analogue au gouvernement de
22 Bosnie-Herzégovine et à l'assemblée. Bon nombre des nôtres ont été
23 congédiés, relevés de leurs fonctions sans raisons données.
24 "Je dois vraiment dire qu'au sein du gouvernement de Bosnie-Herzégovine,
25 dans un gouvernement où l'on parle d'une égalité des rapports, les Croates
26 n'ont qu'un rôle tout à fait symbolique.
27 "J'ajouterai ceci, il me semble, et je pense que c'est vrai mais je ne veux
28 pas dire que c'est sûr à 100 %, il me semble que les Croates, avec
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1 l'approbation de l'Union démocratique croate, n'ont jusqu'à présenté
2 désigné qu'un diplomate, la dame qui s'occupe de l'organisation pour nous à
3 l'ambassade de Zagreb et qui a d'ailleurs organisé cette réunion. Bon
4 nombre de personnes ont été désignées sans que nous soyons consultés et à
5 l'insu du HDZ…" et cetera.
6 Je voudrais revenir sur autre chose. Tout le problème qui sous-tend
7 les rapports c'est bien celui-ci.
8 Je saute quelques paragraphes, et vous dites ceci :
9 "Je pense qu'il faut mettre en œuvre immédiatement ce qui a été
10 proposé aujourd'hui, que soit formé un nouveau gouvernement, fonctionnant
11 sur un principe de droit, le principe de l'accord entre les trois parties
12 du pays qui devraient y participer."
13 Voyons ce que dit Izetbegovic.
14 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas le texte sous les yeux.
15 M. KARNAVAS : [interprétation]
16 "Je ne sais pas ce qui est juste dans ceci ou ce qui ne l'est pas. Et
17 précisément" -- excusez-moi, page 42. "Je pense que c'est précisément parce
18 qu'il y a plusieurs faits qu'il serait bon que vous nous aidiez à mettre
19 sur pied une entité au cours de cette période de transition qui pourrait
20 nous aider jusqu'à ce que tout ceci soit bien solidifié."
21 Q. Izetbegovic, comment ne sait-il pas qu'il n'a pas de Croates au
22 gouvernement, alors qu'à l'époque vous le lui avez dit ? Est-ce que c'est
23 quelque chose de concevable ?
24 R. C'était possible, puisque M. Izetbegovic attribuait moins d'importance
25 à ce que j'ai dit, surtout précisément ce que j'ai dit au sujet des cadres.
26 Il a abordé d'autres questions. Vous savez, sa façon de travailler était
27 telle qu'il remettait les choses à plus tard.
28 Q. Oui, mais vous avez raté l'essentiel dans ma question. Vous dites qu'il
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1 y avait 15 postes réservés à des hauts fonctionnaires, or il n'y avait
2 qu'un Croate. Pensez-vous qu'Izetbegovic ne connaissait pas ce fait ?
3 R. Il le savait, M. Izetbegovic, il voulait d'ailleurs licencier ce
4 Croate. Il ne l'a pas fait uniquement parce que je suis intervenu en sa
5 faveur.
6 Q. Très bien. Partie suivante de sa réponse : "Il serait bon que vous nous
7 aidiez à établir une entité au cours de cette période de transition."
8 Vous demandez que des mesures soient prises. Concrètement, était-il
9 nécessaire d'avoir des personnalités internationales, comme Vance et Owen,
10 qui devraient vous aider à établir cette entité ? C'était vraiment
11 nécessaire qu'ils interviennent ?
12 R. Ce n'était pas indispensable. On aurait pu le faire nous-mêmes. Mais M.
13 Izetbegovic n'était pas disposé à ce faire. Cette déclaration de sa part
14 visait à faire comme si devant le président Tudjman il faisait la personne
15 qui était d'accord, or, ce n'était pas le cas.
16 Q. Très bien. Document suivant, 1D 01512. Il se trouve dans le premier
17 classeur. Vous avez ce document sous les yeux, Monsieur le Témoin ? 1D
18 01512.
19 R. C'est 21.
20 Q. Excusez-moi, 21, je m'étais trompé. C'est ce que je voulais dire, 1521.
21 Je m'excuse auprès de tout le monde.
22 Deuxième page, on voit dans l'original une date, apparemment c'est le
23 18 janvier 1993. Regardez les signatures, s'il vous plaît, en effet, il
24 semblerait qu'on ait votre nom et une signature en dessous, puis il y a une
25 partie manuscrite disant Boban. Sous votre nom, la signature de qui trouve-
26 t-on ?
27 R. C'est moi qui ai signé. Et ça a été signé par M. Boban avec deux
28 alphabets. Et il y a un PS.
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1 Q. Veuillez nous expliquer l'objet de cette lettre.
2 R. Nous prévenions par cette lettre M. Izetbegovic du fait que les
3 problèmes que nous avions entre nous, il nous convenait de les résoudre
4 nous-mêmes et non pas de s'adresser pour cela au Conseil de sécurité. Nous
5 disions ici qu'on était des partenaires, des amis et que nous souhaitions
6 coopérer.
7 Q. Mais par rapport à une décision qui avait été rendue le 15 janvier par
8 le comité exécutif de la communauté croate d'Herceg-Bosna en matière de
9 subordination, ça a été qualifié d'ultimatum, est-ce que vous étiez au
10 courant de l'existence de cette décision ?
11 R. Oui, j'étais au courant de la chose.
12 Q. Pourriez-vous nous expliquer ceci, car vous étiez à Genève et à Zagreb,
13 comment avez-vous compris la chose à l'époque ? Puisque après, vous avez
14 aussi envoyé cette lettre.
15 R. A Genève, nous avons convenu d'un plan de paix. Comme je l'ai dit hier,
16 les trois parties avaient accepté les principes d'aménagement de la Bosnie-
17 Herzégovine. Nous avions déterminé les provinces qu'il fallait, nous avions
18 établi un accord militaire où il était précisé de quelle façon les
19 effectifs militaires se retireraient vers leurs propres provinces. Nous
20 avons aussi convenu dans la mesure du possible de mettre en œuvre ce plan
21 aussitôt que possible parce qu'il avait aussi été prévu un cessez-le-feu.
22 Partant de tout cela, suite à une proposition émanant de M. Boban, il a été
23 distribué des ordres appropriés.
24 Q. Excusez-moi, poursuivez. Je croyais que vous aviez fini.
25 R. Dans ces ordres, il est prévu deux éléments. L'un des éléments, c'est
26 la resubordination; l'autre élément, c'est la création d'un commandement
27 conjoint. La finalité et l'objectif n'étaient pas la resubordination en
28 tant que telle, c'était un pas intermédiaire avec pour visée la création de
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1 ce commandement conjoint. Alors si vous voulez je peux étoffer davantage ?
2 R. Non, non, c'est bon.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant 1D 0820, premier classeur,
4 Messieurs les Juges, 20 janvier 1993.
5 Q. Regardez la version originale à peine lisible mais on voit en haut
6 Intercontinental, c'est un hôtel de Zagreb, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. Regardez le bas de la page, il semblerait qu'on y voit un nom, une
9 signature. Reconnaissez-vous et le nom et la signature ?
10 R. Je reconnais la signature de feu M. Boban.
11 Q. Fort bien. Merci. Je pense que nous en avons discuté déjà, mais est-ce
12 que vous saviez que ceci avait été envoyé ?
13 R. Dans le principe, Boban me mettait au courant dans la mesure où c'était
14 possible. Dans le cas concret ici présent, je ne suis pas sûr, parce que ce
15 jour justement, le 20 janvier 1993, en raison de problèmes survenus au
16 sujet de la lettre dont on a parlé tout à l'heure, Lord Owen et Cyrus Vance
17 nous ont conviés, moi, Boras et Miro Lasic. Nous sommes allés à Sarajevo,
18 en premier lieu, pour résoudre avec les Musulmans le problème du début des
19 conflits survenus à Donji Vakuf, et pour apaiser la situation suite à
20 ladite lettre.
21 Q. Bien. Très rapidement, je souhaiterais que l'on examine le document 1D
22 02730, 1D 02730, troisième classeur. Il s'agit d'un texte paru dans
23 Vecernji List intitulé "Appel en vue d'une résolution pacifique du
24 conflit." Alors il s'agit du contenu d'une lettre envoyée par Mate Boban et
25 Mile Akmadzic à Alija Izetbegovic demandant que les questions litigieuses
26 soient débattues lors d'une réunion conjointe, et non pas devant le Conseil
27 de sécurité des Nations Unies.
28 Est-ce que vous souvenez avoir envoyé cette lettre, Monsieur ?
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1 R. Oui, je m'en souviens.
2 Q. Est-ce que ce texte reflète fidèlement le contenu de la lettre envoyée
3 à M. Izetbegovic ?
4 R. Oui.
5 Q. Bien.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Document suivant 1D 02729, troisième
7 classeur, Messieurs les Juges.
8 Q. Il s'agit de la même publication en date du 22 janvier 1993 cette fois-
9 ci. Il s'agit d'une interview avec Mate Boban et Mile Akmadzic à Zagreb. Si
10 l'on examine la deuxième page de ce document, on peut lire :
11 "La trêve avec les Musulmans" et il est dit :
12 "Le premier ministre de la Bosnie-Herzégovine, Mile Akmadzic, a parlé
13 des pourparlers tenus à Sarajevo. Il a dit que les Musulmans avaient montré
14 leurs véritables sentiments concernant l'égalité des nations en Bosnie-
15 Herzégovine même avant le début des pourparlers. Depuis qu'ils ont convenu
16 de participer aux négociations, deux membres de la présidence de Bosnie-
17 Herzégovine, M. Boras et M. Lasic seulement au bout d'une heure d'efforts
18 intenses de la part des Croates et des coprésidents de la conférence de
19 Genève en vue de les persuader."
20 Est-ce que cela s'est passé ainsi ?
21 R. Oui. Et je peux vous apporter des explications.
22 Q. Alors je souhaiterais avoir une petite explication puisqu'il y a deux
23 membres de la présidence - et nous avons les coprésidents qui essaient de
24 résoudre le problème - pourquoi est-ce que M. Izetbegovic ou les Musulmans
25 empêchaient ces deux personnes de participer au processus de négociation ?
26 R. Nous sommes allés à Sarajevo suite à une invitation de Lord Owen et de
27 Cyrus Vance. Et la chose a été difficile à organiser parce qu'on voyageait
28 à bord d'avions énormes, de cargos pour le transport de l'aide humanitaire.
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1 On est arrivés à Sarajevo, et M. Izetbegovic a dit qu'il ne voulait parler
2 qu'avec moi des problèmes survenus, sans la présence de M. Boras et de M.
3 Lasic. J'ai refusé et j'ai dit que nous étions des membres sur pied
4 d'égalité au niveau de la présidence, mais M. Izetbegovic a continué à se
5 montrer hésitant parce qu'en raison de nos relations à nous, il a pensé que
6 ce serait plus facile que de tomber d'accord avec moi, et ce n'est qu'après
7 de longues tentatives de le convaincre, déployées par le coprésident, M.
8 Izetbegovic a consenti à ce qu'une réunion conjointe se tienne et elle
9 s'est tenue.
10 Q. Bien. Dans cette même interview, un peu plus loin -- enfin d'abord M.
11 Boban intervient, puis vous :
12 "On leur a demandé s'ils pensaient toujours qu'Alija Izetbegovic était le
13 président légitime de la Bosnie-Herzégovine, en réponse à cette question,
14 M. Boban a dit qu'il était le président de la présidence, le primus inter
15 pares, sept personnes en l'occurrence, et que conformément à la
16 constitution son deuxième mandat avait expiré."
17 R. Je l'ai déjà souligné ici dans le prétoire. Son mandat avait pris fin
18 le 20 décembre 1992.
19 Q. Pourquoi a-t-il refusé de renoncer à sa fonction de président de la
20 présidence, pourquoi n'est-il pas simplement devenu l'un de ses membres ?
21 R. J'estime nécessaire de dire aux Juges de la Chambre ce qui suit : le 20
22 décembre 1991, lorsque M. Izetbegovic a vu la fin de son premier mandat,
23 lors d'une session de la présidence, il y a eu des votes contre la
24 prolongation de son mandat, alors qu'il y avait possibilité à ce que ce
25 soit prolongé en application de la constitution et du règlement, il y a eu
26 donc vote contre, de la part de Fikret Abdic et de deux représentants
27 serbes, M. Koljevic et Mme Biljana Plavsic. La partie croate pouvait se
28 joindre à ces votes. Nos deux membres de la présidence ont voté en faveur
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1 de la prolongation du mandat d'Izetbegovic, indépendamment du fait que nous
2 avions eu droit à ce poste du fait de ce principe de rotation nationale
3 dont j'ai déjà parlé.
4 Donc M. Izetbegovic a eu son deuxième mandat rien que grâce au vote
5 croate. Un an plus tard, il ne pouvait plus, en application du règlement,
6 le rester et il n'a pas eu nos votes non plus. Alors il a expliqué que
7 l'armée ne le laissait pas descendre de son poste de président. Je lui ai
8 posé la question de façon ouverte, et il m'a répondu tout aussi
9 ouvertement. Alors nous, Croates, on pouvait quitter la présidence ou alors
10 supporter la chose telle qu'elle se présentait. Ni l'un ni l'autre n'était
11 bien. Nous voulions préserver la Bosnie-Herzégovine quoi qu'il advienne.
12 Q. Merci.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas,
14 puisque nous parlons maintenant de la légitimité de la présidence. Un autre
15 témoin, Monsieur, a déclaré qu'à l'époque en Bosnie-Herzégovine il y avait
16 une présidence de Guerre, et non pas une présidence normale.
17 Là, encore dans ce document, on ne voit pas le terme présidence de
18 Guerre, il est seulement question de présidence. Alors selon vous, est-ce
19 que c'est une preuve d'illégalité ou est-ce que c'est juste un point de
20 forme auquel on ne doit pas accorder beaucoup d'importance ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après la constitution à l'époque, il
22 n'y avait qu'une présidence de Guerre. On omettait l'adjectif "de Guerre"
23 pour des raisons de simplification ou pour des raisons qui étaient les
24 suivantes : si à la présidence il n'était pas débattu de questions
25 militaires, on jugeait pas si nécessaire que cela d'avoir un représentant
26 militaire. Mais le fait est qu'il s'agissait d'une présidence de Guerre
27 créée après la proclamation d'un état de guerre.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
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1 M. LE JUGE MINDUA : Maître Karnavas, excusez-moi. Je voudrais
2 continuer dans la foulée de la question du Juge Trechsel.
3 Monsieur le Témoin, plusieurs fois les témoins nous ont expliqué
4 qu'en Bosnie-Herzégovine il y avait donc une présidence qui exerçait la
5 charge de chef l'Etat, la présidence étant l'ensemble de sept personnes, et
6 non pas le président de la présidence. Ainsi donc le chef de l'armée, ça
7 devait être la présidence et non pas le président de la présidence. Si donc
8 le mandat du président de la présidence était fini, je voudrais poser une
9 question pratique, que prévoyait votre système pour empêcher tout
10 usurpateur de pouvoir s'approprier les pouvoirs, les attributions de la
11 présidence ? Etant entendu que le président de la présidence était tout
12 simplement un primus inter pares et qui n'avait pas de pouvoir en réalité.
13 Pour être bref, je voudrais savoir si l'armée, par exemple, de la
14 Bosnie-Herzégovine ne pouvait pas suivre la légalité et non pas se ranger
15 derrière quelqu'un qui deviendrait usurpateur ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas si cette question sera
17 évoquée une fois de plus à l'occasion de mon témoignage. Aussi voudrais-je
18 dire pour répondre à la question, que le président de la présidence a
19 effectivement usurpé le pouvoir. Il s'est bel et bien considéré comme étant
20 le commandant suprême à la place plutôt de cette présidence qui en était de
21 fait le commandant collégial.
22 L'armée de la BH a réagi même par écrit à une lettre émanant de M.
23 Fikret Abdic. Je veux parler ici de M. Delic qui, par la suite, est devenu
24 chef d'état-major, et dans la lettre en question, il est dit que l'on se
25 conformera aux décisions d'Alija Izetbegovic indépendamment de toute autre
26 chose. Cette lettre a été envoyée vers les unités de l'armée, vers la
27 totalité des effectifs, M. Abdic à la session de la présidence a protesté
28 contre la chose.
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1 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Je voulais informer les Juges de la Chambre
3 du fait que nous disposons du procès-verbal de cette réunion au cours de
4 laquelle M. Abdic s'est plaint, et nous y viendrons.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors nous allons faire une pause de 20
6 minutes et on reprendra dans 20 minutes.
7 --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.
8 --- L'audience est reprise à 17 heures 50.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur Akmadzic, il nous reste environ une heure et dix minutes
12 aujourd'hui. Nous allons maintenant passer à un autre sujet, et nous allons
13 parler surtout de la signature du plan Vance-Owen.
14 Je vous invite à examiner le document 1D 02852.
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges, 1D
16 02852.
17 Q. Je vous demanderais de bien vouloir répondre de façon concise
18 afin que nous avancions rapidement.
19 Voyez-vous ce document, Monsieur ?
20 R. Oui.
21 Q. La date est celle du 3 mars 1993. Nous avons déjà vu cette date sur un
22 autre document.
23 Au paragraphe 3, il est dit :
24 "Le Conseil de sécurité exige que les dirigeants de toutes les
25 parties au conflit en République de Bosnie-Herzégovine restent pleinement
26 engagées à New York dans le cadre d'un effort soutenu mené conjointement
27 avec les coprésidents du comité directeur de la conférence internationale
28 sur l'ex-Yougoslavie, afin d'obtenir un règlement juste et viable."
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1 Est-ce que vous êtes resté à New York à l'époque, est-ce que vous avez
2 continué à être pleinement engagé dans des discussions comme le demandait
3 le Conseil de sécurité, c'est-à-dire le président du Conseil de sécurité ?
4 R. Oui.
5 Q. Document suivant, 1D 02853. Troisième classeur, nous sommes encore le 3
6 mars 1993. Il s'agit d'un document analogue à un document que nous avons vu
7 hier. Il s'agit d'une lettre provenant de M. Sacirbey, ambassadeur de la
8 Bosnie-Herzégovine auprès de l'ONU à l'époque. Il est dit ici : "J'ai
9 l'honneur de vous présenter l'accord signé le 3 mars 1993." On peut lire
10 les noms d'Alija Izetbegovic, Haris Silajdzic, Mate Boban et Mile
11 Akmadzic."
12 Page suivante, nous voyons en annexe, il s'agit de l'accord lui-même.
13 Cet accord prévoie que les neuf membres de la présidence provisoire
14 désignent un membre chargé d'assumer les fonctions de président de la
15 présidence.
16 Tout d'abord, est-ce que cet accord a jamais été mis en oeuvre ?
17 R. Cet accord a été signé avant la signature définitive du plan de paix
18 Vance-Owen, mais il n'a jamais été mis en œuvre.
19 Q. Bien. Au paragraphe 9, le texte se lit comme suit :
20 "Toutes les parties ont proposé les six noms suivants pour servir au
21 sein de la présidence provisoire : Fikret Abdic, Mile Akmadzic, Franjo
22 Boras, et Ejup Ganic, Alija Izetbegovic et Miro Lasic." Je suppose que les
23 trois autres devaient être des représentants serbes; est-ce exact ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 Q. Bien. Examinons maintenant le document, 1D 02903.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges.
27 Nous voyons l'accord. Si l'on examine la dernière page, la date est celle
28 du 3 mars 1993. Nous voyons plusieurs signatures.
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1 Q. Est-ce que vous pourriez nous confirmer que c'est bien votre
2 signature qui se trouve sous votre nom ?
3 R. Oui.
4 Et je peux confirmer aussi pour les autres signatures.
5 Q. Merci beaucoup. Vous avez lu mes pensées. Le document suivant est le
6 document 1D 01193.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Premier classeur, Messieurs les Juges. Le
8 document est daté du 16 mars 1993 --
9 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas. Je
10 sais que le temps, c'est de l'argent, mais donnez-nous au moins 30 secondes
11 pour trouver les documents afin de pouvoir réagir suite à vos questions.
12 Merci.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] J'aimerais bien que le temps, ce soit de
14 l'argent, mais j'ai bien compris votre message. Est-ce que nous avons tous
15 trouvé le document en question ? Je vois que oui. Bien.
16 Q. Nous voyons ici que la date est celle du 16 mars 1993, il est dit
17 en haut de la page : "La présidence de Guerre de la Bosnie-Herzégovine,
18 lors d'une réunion commune tenue le 14 mars 1993 avec des membres du
19 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine et plusieurs députés de l'assemblée
20 de Bosnie-Herzégovine provenant de sept partis politiques" - et nous voyons
21 la liste de ces partis - "de nombreuses personnalités religieuses,
22 culturelles et publiques, représentant la ville de Sarajevo, après avoir
23 tenu des débats intensifs sur l'avancement des négociations de paix en
24 Bosnie-Herzégovine tenues à Genève et à New York, et compte tenu de la
25 position adoptée par le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine le 11 mars
26 1993, adopte les conclusions suivantes."
27 Ma question est la suivante : est-ce que vous avez participé à ces
28 délibérations au cours desquelles apparemment ces conclusions ont été
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1 adoptées ?
2 R. Je n'ai pas assisté au travail de la présidence, mais j'ai assisté aux
3 négociations à New York.
4 Q. Nous parlons de ce document-ci, des conclusions qui y figurent. Est-ce
5 que vous avez participé au préambule de la conclusion où il est dit : "La
6 présidence de Guerre a participé à une réunion commune le 14 mars 1993."
7 Est-ce que vous avez participé à cette réunion ?
8 R. Non.
9 Q. Bien. Examinons ensemble la deuxième page, il me semble quelque peu
10 curieux que les dirigeants religieux, la présidence de Guerre, les membres
11 du gouvernement, les membres des partis politiques indiquent au point 3.9 :
12 "Un programme de mise en œuvre définissant clairement les mécanismes
13 (forces) et le calendrier (date butoir) doivent faire partie intégrante du
14 plan de paix. Il est question de cessez-le-feu, de retrait des armes
15 lourdes et du retrait des forces chetniks d'une partie des territoires
16 occupés conformément au document militaire signé…" et au dernier paragraphe
17 on peut lire :
18 "Si la délégation chetnik ne signe pas les documents de paix dans
19 leur intégralité, notre délégation présentera de nouveau une demande devant
20 le Conseil de sécurité en vue d'obtenir une levée partielle et immédiate de
21 l'embargo sur l'importation des armes imposé à l'ABiH." La date est celle
22 du 14 mars 1993 et la réunion a été présidée par Alija Izetbegovic.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, est-ce
24 que vous pourriez jeter quelque base avant que le témoin commente ce
25 document, il n'était pas présent, il n'a pas dit qu'il avait vu ce document
26 avant la date d'aujourd'hui. Il a simplement dit qu'il était présent à New
27 York.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, si on me
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1 permettait de poser la question, et si vous pensez que ma question n'est
2 pas bien posée, est sans pertinence ou dépasse les connaissances du témoin,
3 je la retirerai volontiers. Mais ma question portait sur l'utilisation du
4 terme Chetnik, qui est un terme éminemment péjoratif, et je suis sûr que ce
5 monsieur, qui vivait à l'époque en Bosnie-Herzégovine, a pu l'entendre
6 dire, c'est comme si on disait des Oustachi pour un Croate et ainsi de
7 suite.
8 Q. C'est ça que je voulais dire. Si on essaie de faire venir
9 quelqu'un à une table de négociations, par exemple, les Serbes, est-ce
10 qu'on les qualifie de Chetniks ? Parce qu'on dit une délégation chetnik,
11 manifestement ceci montre l'état d'esprit de M. Izetbegovic. C'est mon avis
12 à moi, mais je demande ceci au témoin. Je demandais s'il était correct
13 d'utiliser ce terme à l'époque ?
14 M. SCOTT : [interprétation] J'échoue -- j'avais juré que je n'allais pas
15 intervenir aujourd'hui, mais là j'échoue. Je ne peux pas laisser passer
16 ceci.
17 On n'a pas besoin de témoin. Me Karnavas peut poser les questions et
18 répondre en même temps. Il dit maintenant, c'est mon avis. Si quelqu'un
19 écoute la question, si les Juges intervenaient, ce serait peut-être bien,
20 je ne voulais pas intervenir, je vais rester muet. Mais écoutez la
21 question. Il le dit lui-même, Me Karnavas, c'est mon avis et il demande au
22 témoin s'il est d'accord avec son avis. C'est tout à fait absurde.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez votre question, Maître Karnavas.
24 M. KARNAVAS : [interprétation]
25 Q. Quand on parle de la délégation chetnik, je sais que vous n'étiez pas
26 présent, mais de qui parle-t-on ?
27 R. Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de répondre à la
28 question. Le terme "Chetnik" a été utilisé. Et je suis sûr qu'on ne
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1 l'aurait pas utilisé si j'avais été présent. Parce qu'il s'agit là d'un
2 terme péjoratif. Il s'agit des Chetniks de la Deuxième Guerre mondiale, et
3 dans nos rapports en Bosnie-Herzégovine, quand on parle des Chetniks et des
4 Oustachi, on peut éventuellement utiliser ces mots dans la rue, dans les
5 cafés, mais pas lors des sessions officielles de travail de la présidence
6 avec la signature du président de la présidence, qui est la plus haute
7 instance étatique de la Bosnie-Herzégovine. Voici ce que je peux vous dire
8 au sujet de l'utilisation de ce terme.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je rebondis sur ce que disait Me Karnavas et je me
10 faisais la même remarque.
11 Quand ce terme est dans un document de cette nature, qu'est-ce que ça sous-
12 tend de la part de celui qui l'a signé ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] La personne qui a signé un tel document
14 utilise des termes péjoratifs quand il parle de ce avec lequel il n'est pas
15 d'accord. Ici, je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il y avait des
16 unités paramilitaires serbes qui s'appelaient elles-mêmes des unités
17 chetniks. Mais comme je l'ai dit aujourd'hui, chaque peuple a le droit de
18 s'appeler comme il le souhaite, mais nous, on ne peut pas leur inventer des
19 noms surtout pas les noms qu'ils n'acceptent pas eux.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.
21 Maître Karnavas.
22 M. KARNAVAS : [interprétation]
23 Q. Fort bien. Une dernière question sur ce document. Vous avez vu
24 l'accord, la lettre de Sacirbey. Examinons maintenant les conclusions. Je
25 sais que vous n'étiez pas là mais nous voyons au paragraphe 3, il est dit :
26 "Le plan de paix Vance-Owen pour la Bosnie-Herzégovine au fond est
27 considéré comme acceptable pour autant que les modifications nécessaires ou
28 requises y soient apportées…" Bon, je sais que vous n'étiez pas là, mais
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1 vous y étiez au moment des négociations et de la signature. Ces conditions
2 faisaient-elles partie de l'accord au moment de la signature de ce dernier
3 ?
4 R. Je dois dire qu'ici il s'agissait d'une session de travail élargie de
5 la présidence. J'ai dit hier que la présidence peut inviter à la réunion de
6 la présidence qui il souhaite. Ici on a convoqué les partis politiques,
7 puisque la présidence voulait entendre les points de vue des députés de
8 l'assemblée, ceux qui étaient disponibles, ceux qui pouvaient venir
9 assister à la session de l'assemblée ainsi que les opinions des partis
10 politiques.
11 A la lecture de cela, j'en arrive à la conclusion que la présidence
12 dans le sens le plus large du terme en tant que chef de l'Etat, en tant que
13 la présidence de Guerre ou de l'assemblée, dans toutes ces instances, la
14 présidence a accepté ce plan Vance-Owen sous les conditions indiquées ci-
15 dessus. Au moment de la signature du plan Vance-Owen, le président
16 Izetbegovic avait remis aux coprésidents les conditions qui sont énumérées
17 ici.
18 Q. Monsieur Akmadzic, essayez de vous centrer sur ma question, car je n'ai
19 plus que très peu de temps, très, très peu de temps à ma disposition. Est-
20 ce que ces conditions faisaient partie de l'accord ?
21 R. Non, ces conditions n'en faisaient pas partie.
22 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges, mais la
23 Chambre a l'accord de paix tel qu'il a été signé. C'est dans les archives
24 des Nations Unies, et je pense que c'est la meilleure réponse possible
25 plutôt que de demander au témoin ce dont il a peut-être le souvenir
26 aujourd'hui. Ces conditions se trouvent dans le document. Si vous lisez le
27 document, vous y trouverez les conditions. Merci.
28 M. KARNAVAS : [interprétation]
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1 Q. Mettons ce document de côté. Est-ce que ces conditions ont été
2 négociées lors des négociations qui ont précédé la signature de l'accord ?
3 R. On en a parlé mais elles ne faisaient pas partie de l'accord.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Juste une question qui vient de
5 surgir. Au point 3.4 : "Il est dit ici que les provinces ne devraient pas
6 être des régions ou zones ethniques." Est-ce que c'est inclus dans ce que
7 vous dites ou dans ce qui, d'après vous, ne faisait pas partie du plan de
8 paix Vance-Owen ? Est-ce que ceci est à voir en contraste avec le plan de
9 paix Vance-Owen. Ça se trouve en anglais en bas de page.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je voudrais accentuer ce qui suit : les
11 provinces, dans le plan Vance-Owen, étaient conçues de telle façon qu'il
12 s'agissait de remplir les critères que j'ai évoqués hier le plus possible.
13 D'abord, vous aviez ces critères ethniques mais il y en avait d'autres.
14 Cependant, les provinces ne devaient pas avoir le nom des ethnies qui les
15 composaient. Elles devaient porter le nom de leur capitale.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je n'ai pas encore reçu de réponse
17 précise. Ce point dit que les provinces ne doivent pas être des zones
18 ethniques, est-ce que ceci est compatible avec le plan de paix Vance-Owen à
19 votre avis ou est-ce qu'il s'agit de quelque chose, et vous l'avez dit de
20 façon générale de ces conditions, est-ce que c'est quelque chose qui n'est
21 pas conforme au plan de paix Vance-Owen ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est conforme au plan de paix Vance-Owen
23 ou plutôt avec les neuf principes qui ont été adoptés à Genève le 4 janvier
24 1993.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
26 M. KARNAVAS : [interprétation]
27 Q. Question de suivi. Pour être bien sûr, et je ne veux induire personne
28 en erreur, je ne voudrais pas que la Chambre croit que vous avez induit les
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1 Juges en erreur. Est-ce que toutes ces conditions sont conformes ou
2 concordent avec ce qui avait été conclu ou fait l'objet d'un accord ?
3 R. Oui, mais M. Izetbegovic, quand il s'agit de la question militaire par
4 rapport aux Serbes, il les appelle Chetniks, sur un papier à part il a
5 couché cela qui ne faisait pas partie du plan Vance-Owen.
6 Q. A Genève, est-ce qu'on appelait les Serbes, Chetniks, est-ce qu'on
7 disait d'eux que c'était la délégation chetnik ? Est-ce qu'il y avait une
8 plaque ou un carton qui disait délégation chetnik, par exemple à la table,
9 et Karadzic disons ?
10 R. Non, il s'agit d'un parti qui participait aux négociations, on le voit
11 dans tous les documents et il s'agit du parti serbe.
12 Q. Je sais comment ils se décrivaient eux-mêmes, mais M. Akmadzic, je veux
13 que vous soyez limpide en la matière, est-ce que les autres, par exemple,
14 Izetbegovic a jamais dit : Voilà les Chetniks qui s'amènent. Bien. Je suis
15 content de vous voir Chetnik Karadzic, je ne dis pas, je ne parle pas de la
16 façon dont se qualifiaient les Serbes mais plutôt comment on les voyait.
17 R. C'était un nom péjoratif et vous ne devez pas utiliser un nom péjoratif
18 quand vous parlez d'une délégation, et d'ailleurs même Izetbegovic ne le
19 faisait pas dans les documents officiels.
20 Q. Fort bien.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] 1D 02885, troisième classeur, Messieurs les
22 Juges. Ceci vient de Slobodna Dalmacija, 16 mars 1993, décision
23 anticonstitutionnelle.
24 Q. Est-ce que vous avez déjà vu ce document ?
25 R. Oui, je l'ai vu.
26 Q. De quoi parle cet article ? Intéressez-vous au troisième paragraphe,
27 s'il vous plaît.
28 R. Il s'agit de décisions qui sont prises en absence d'un représentant
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1 croate, soit qu'il s'agisse des réunions de travail de la présidence ou
2 d'autres sessions de travail et réunions.
3 Ce n'est pas le seul exemple, il y a eu beaucoup d'exemples dans ce
4 sens.
5 Q. Monsieur Akmadzic, est-ce que vous savez si ceci est en rapport avec la
6 conclusion que nous venons de voir ? Car si vous examinez le troisième
7 paragraphe :
8 "Comme l'ont annoncé les représentants croates aujourd'hui, ils ont
9 conclu à leur réunion de Zagreb, 'il n'y a pas un seul représentant du
10 peuple croate qui est membre de la présidence ou du gouvernement de Bosnie-
11 Herzégovine et qui aurait participé aux activités de cette séance de
12 travail, pas plus qu'il n'y en a un qui aurait consenti ou donné son aval
13 aux décisions et conclusions adoptées lors de cette séance de travail.'"
14 Est-ce exact ?
15 R. Oui, mais dans le sens de l'égalité entre différentes nations, et pas à
16 la lecture du texte que nous venons d'examiner.
17 Q. Je sais qu'il se fait tard, mais je ne veux pas qu'on s'appesantisse
18 trop là-dessus. A votre connaissance, est-ce qu'il y a un Croate ou des
19 Croates qui auraient voté au moment de l'adoption des conclusions à l'issue
20 de la signature de l'accord ? Est-ce qu'il y a des membres croates de la
21 présidence qui auraient avalisé ceci ?
22 R. Pas un des Croates qui étaient officiellement membres de la présidence
23 ou du gouvernement, peut-être qu'il y avait d'autres parties qui étaient
24 invitées.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] 1D 02908. Troisième classeur, Messieurs les
26 Juges.
27 M. SCOTT : [interprétation] Je veux préciser pour le compte rendu, je ne
28 sais pas si Me Karnavas veut faire une question de suivi, mais il n'y avait
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1 non plus pas d'indication pourquoi les Croates n'étaient pas là.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est une question à poser au contre-
3 interrogatoire.
4 M. SCOTT : [interprétation] Je fais simplement ce que fait souvent Me
5 Karnavas. Je vous remercie.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis content de voir que M. Scott a tiré
7 quelques enseignements.
8 Q. Est-ce que nous pouvons examiner 1D 02908. Rapport présenté au
9 secrétaire général sur les activités de la conférence internationale sur
10 l'ex-Yougoslavie. Page 11, vous allez voir ce numéro en anglais en haut à
11 droite, on parle des gouvernements provisoires provinciaux et ceci
12 permettra de répondre en partie à une question qui vous a été posée.
13 Monsieur le Témoin, est-ce que ceci traduit ce qui était prévu au
14 niveau des dispositifs provisoires intérimaires ? Vous voyez le D,
15 gouvernement provisoire ?
16 R. Oui, avec le plan Vance-Owen cela a été prévu.
17 Q. Document suivant, P 02088. Quatrième classeur. Déclaration conjointe,
18 nous l'avons déjà vue. Est-ce que vous avez ce document ?
19 R. Oui.
20 Q. Veuillez l'examiner pendant que les Juges sont à la recherche de ce
21 document. Page 3, est-ce que vous reconnaissez ces signatures ? Peu importe
22 le numéro de la page, est-ce que vous avez le document ?
23 R. Je l'ai trouvé.
24 Q. 24 avril 1993, Alija Izetbegovic, Mate Boban, réunion et déclaration
25 conjointe à l'issue de cette réunion. Point 1 : "Conformément à l'accord
26 conclu entre Izetbegovic, Silajdzic, Boban et Akmadzic, le 3 mars 1993."
27 Est-ce que c'est de cet accord que nous parlions auparavant ?
28 R. Oui.
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1 Q. Est-ce que c'était avec ou sans les conditions préalables ou plutôt les
2 conditions ou ce document qui a été signé plus tard par Izetbegovic ?
3 R. Non, ces conditions qu'Izetbegovic avait demandées n'avaient pas été
4 remplies.
5 Q. Paragraphe suivant, toujours au numéro 1, l'organe de coordination
6 oeuvrera à l'application du plan de paix Vance-Owen dans la mesure du
7 possible. Est-ce que cet organe de coordination a jamais vu le jour ?
8 R. Oui, cet organe de coordination avait été créé sans pour autant jamais
9 fonctionner vraiment.
10 Q. Examinons rapidement deux documents. Je ne sais pas si vous pourrez
11 nous aider --
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi de revenir à votre
13 première question concernant les signatures. Moi, je ne vois aucune
14 signature, en tout cas pas la signature de notre témoin. Je ne sais pas
15 s'il a une explication à cela, à ce qu'il a dit au début.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Soit que c'est pour Silajdzic.
17 Q. Examinez le document, on a uniquement les signatures de Boban,
18 Izetbegovic, Tudjman étant témoins, pourquoi est-ce qu'on n'a pas votre
19 signature à vous, car c'est conformément à un accord que vous avez signé
20 avec d'autres le 3 mars. Manifestement, si on regarde le préambule, on
21 parle d'une réunion d'Izetbegovic avec Mate Boban.
22 R. Le fait que j'ai assisté ne veut pas dire forcément que je devais
23 signer, puisque cela a été signé par les représentants du côté croate et
24 musulman, puis un témoin. Cela suffisait.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, un petit mystère regardant ce
26 document, et vous allez peut-être le lever. La réunion du 24 avril entre
27 Izetbegovic et Mate Boban semble, d'après les documents, avoir été
28 organisée par Lord Owen et M. Tudjman. Et on découvre qu'il y a également
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1 beaucoup d'ambassadeurs présents, Okun, et cetera, et cetera. Voilà que
2 Mate Boban et Izetbegovic signent ce document. Et voilà que Tudjman en tant
3 que témoin signe aussi, et moi je me pose la question : mais pourquoi Lord
4 Owen n'a pas signé lui aussi ? Vous avez une explication pour nous
5 éclairer. Pourquoi Lord Owen n'a pas signé également ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document qui est un accord entre deux
7 parties, Lord Owen ici était un intermédiaire. Il aurait pu éventuellement
8 le signer comme témoin, mais au moment de la réunion on s'était mis
9 d'accord que ces deux parties allaient signer le document.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, vous venez de le dire. Il aurait pu signer,
11 Tudjman signe, mais lui ne signe pas, et c'est ce que je ne comprends pas,
12 mais bon.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous voulez je peux vous donner une autre
14 explication. Lord Owen en principe et Cyrus Vance ne signaient pas ce type
15 de document parce qu'il s'agissait là des accords bilatéraux, donc même pas
16 en tant que témoins même si c'était sous leurs auspices que les réunions
17 ont eu lieu, les négociations ont eu lieu.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Q. Quelques documents pour terminer l'examen de ce sujet, 1D 01443,
20 premier classeur. Voyons l'original, on y trouve une signature, on voit le
21 nom d'Alija Izetbegovic. Etes-vous en mesure de confirmer que c'est bien sa
22 signature ?
23 R. Oui, c'est bien la signature de M. Izetbegovic.
24 Q. Il n'y a pas de date. Regardons la toute première phrase, elle dit ceci
25 : "Comme nos deux parties ont signé le plan de paix Vance-Owen, je propose
26 qu'on commence à l'exécuter dans la mesure du possible dès maintenant."
27 Vous voyez que ce sont les mêmes termes "dans la mesure du possible" que
28 dans l'accord, les mêmes que dans l'accord.
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1 "A mon avis, ceci écarterait le danger de la poursuite du conflit entre
2 l'ABiH et le HVO et pourrait contribuer à rétablir la confiance qui n'est
3 plus très bonne entre les personnes de bonne volonté sur les territoires
4 libres de Bosnie-Herzégovine.
5 "J'enverrai cette proposition aux coprésidences à Genève et j'attends votre
6 réponse." Nous avons aussi le document, 1D 02832. Troisième classeur, 1D
7 02832, 10 mai 1993. Pourriez-vous nous dire si c'est bien la signature de
8 M. Boban ? La reconnaissez-vous ?
9 R. Oui, oui, c'est la signature de M. Boban.
10 Q. "Ma réponse positive à votre mémorandum du 10 mai 1993 dans lequel vous
11 proposiez de commencer l'application du plan Vance-Owen dans la mesure où
12 il est possible de l'appliquer" - on ne cesse de retrouver ces termes dans
13 la mesure du possible - donc "dans la mesure où il est possible d'appliquer
14 maintenant c'est une obligation qui découle de la signature de la
15 déclaration conjointe du 25 avril 1993."
16 Deuxième paragraphe, M. Boban dit ceci :
17 "Malheureusement, les informations que nous avons reçues en retour sont
18 négatives car vos gens ne l'acceptent pas. Je pense personnellement que
19 vous devez donner les mêmes pouvoirs à tous les hommes politiques légitimes
20 qui viennent de votre peuple parce qu'en général ils invoquent un manque
21 d'autorité quand ils refusent les propositions qui leur sont faites.
22 "Je propose aussi que vous arrêtiez une date pour avoir une réunion de
23 l'organe de coordination censée découler de la déclaration conjointe."
24 Vous étiez sur les lieux à l'époque. Est-ce que vous savez de quoi M. Boban
25 parle lorsqu'il fournit cette réponse à M. Izetbegovic ?
26 R. M. Boban répond en disant qu'il est disposé à coopérer à tout point de
27 vue. Mais qu'il avait des doutes pour se qui est de savoir si M.
28 Izetbegovic avait donné des ordres appropriés à l'intention des autorités
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1 civiles et militaires locales. Et si oui, il dit que les ordres ne sont pas
2 exécutés. Aussi le prie-t-il de se pencher dessus et d'y accorder
3 l'attention qui est due. Qui plus est, M. Boban voudrait que cette instance
4 de coordination se mette à fonctionner puisqu'elle ne fonctionnait pas. Et
5 que dans le rôle de la présidence, il fallait que cette coordination
6 s'occupe des tâches qui étaient prévues par nos accords.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Autre sujet qui concerne plus ou moins le
8 mois de mai 1993. P 02254, quatrième classeur, Messieurs les Juges. P
9 02254.
10 Q. Il s'agit d'une note du président du Conseil de sécurité. Nous avons
11 déjà vu ce document.
12 R. Je le vois, oui.
13 Q. Nous allons prendre conjointement plusieurs documents, chaque fois je
14 vous lirai le passage pertinent avant de passer au document suivant.
15 Troisième paragraphe :
16 "Le Conseil de sécurité condamne sévèrement cette grande offensive
17 militaire déclanchée par les unités paramilitaires croates de Bosnie, ce
18 qui est tout à fait contraire à la signature du plan de paix pour la
19 République de Bosnie-Herzégovine signé par les Croates de Bosnie."
20 Mettons ce document en touche pour passer au document suivant, 1D 02093.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] Pardon, 96, premier classeur, Messieurs les
22 Juges. Le 11 mai 1993. Le lendemain.
23 Q. Toute dernière page, on y voit votre nom, puis un sceau et une
24 signature, un cachet. C'est bien votre signature ?
25 R. Oui, c'est ma signature.
26 Q. Est-ce que c'est vous qui avez rédigé cette lettre ?
27 R. Oui.
28 Q. Elle est adressée à un certain Vorontsov, qui était président du
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1 Conseil de sécurité ?
2 R. Oui, c'est exact.
3 Q. Pourquoi avoir rédigé cette lettre ?
4 R. La finalité de cette lettre était la suivante : il s'agissait
5 d'informer le président du Conseil de sécurité et le Conseil de sécurité
6 des grandes difficultés de mise en œuvre de ce plan Vance-Owen, et il
7 s'agissait de dire que les effectifs de l'armée de BH continuaient à
8 s'attaquer aux unités croates et aux Croates, et c'est la raison pour
9 laquelle je sollicite son intervention.
10 Q. Bien. Mais au paragraphe 3, vous semblez vouloir faire passer un
11 message. Vous dites : "La description faite dans la déclaration du HVO
12 comme étant 'des unités paramilitaires croates de Bosnie' déforment le rôle
13 du HVO. Le HVO est une armée légitime reconnue par le gouvernement et par
14 la présidence…", et le reste est très difficile à lire.
15 R. Oui, c'est ma réaction vis-à-vis du document précédent, que nous avons
16 étudié et où il a été question d'une condamnation s'agissant des attaques
17 aux unités croates qu'on avait qualifiées de paramilitaires; et je voulais
18 informer le président du Conseil de sécurité pour dire que c'étaient des
19 effectifs reconnus en tant que partie intégrante des forces armées, ce
20 n'était pas des forces paramilitaires croates en aucune façon.
21 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je souhaiterais enchaîner là-dessus
22 : Maître Karnavas, il y a un instant vous avez demandé au témoin d'examiner
23 le document 1D 02254 qui vient d'être mentionné de nouveau par le témoin,
24 il s'agit d'un document provenant du Conseil de sécurité qui se trouve dans
25 le quatrième classeur. Il est vrai qu'au troisième paragraphe de ce
26 document, qui émane du président du Conseil de sécurité, donc ce n'est pas
27 une décision du conseil, mais néanmoins il est important puisqu'il a été
28 émis au nom du conseil par son président. Effectivement, le troisième
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1 paragraphe fait référence aux unités paramilitaires croates de Bosnie, et
2 le texte se poursuit, et on peut lire qu'il s'agit d'attaques dirigées
3 contre les zones de Mostar, Jablanica et Dreznica.
4 Voilà ma question : étant donné que cette lettre du président a été rédigée
5 le 10 mai 1993, et comme les combats à Mostar, si je me souviens bien, ont
6 éclaté le 9 mai, je me demande si le témoin pourrait nous dire s'il
7 s'agissait d'un résultat en quelque sorte des combats qui ont éclaté
8 surtout à Mostar, mais également dans d'autres secteurs. Par ailleurs, je
9 souhaiterais savoir quelle est sa réaction, quelle est la réaction du
10 témoin face à la déclaration du président, déclaration faite au nom du
11 Conseil de sécurité ? Est-ce qu'il s'agissait surtout de Mostar ou d'autres
12 questions également ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est ici une déclaration que
14 nous avions qualifié de déclaration présidentielle. Donc c'est à un haut
15 niveau que la chose se passe. J'ai dit que ce n'était pas une décision du
16 Conseil de sécurité mais que c'était une décision du président, et dans le
17 concret il est question de cette situation nouvellement créée à Mostar,
18 nouvellement créée depuis le jour d'avant, et j'insiste donc pour qu'il y
19 soit mis un terme; ma réaction était aussi celle de dire qu'il ne
20 s'agissait pas d'effectifs paramilitaires, et j'ai déjà indiqué aux Juges
21 de cette Chambre que nous, Croates, en Bosnie-Herzégovine, avons eu pas mal
22 de difficultés, beaucoup de difficultés, pour ce qui était de convaincre la
23 communauté internationale du fait que nous étions sur pied d'égalité ou du
24 moins nous devions nous trouver sur pied d'égalité en notre qualité de
25 peuple constitutif souverain en Bosnie-Herzégovine, et nos effectifs
26 militaires étaient-ils ainsi reconnus, notre problème était cependant le
27 suivant : nous n'avions pas nos ambassades, ni de secteurs chargés de
28 relations publiques. Nos lobbys on ne les avait pas, la partie bosniaque,
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1 je veux dire la partie des Musulmans de Bosnie avait tout cela.
2 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie. Le greffier a
3 appelé mon attention sur le fait que j'ai peut-être mal cité le document,
4 alors je tiens à redire que je faisais référence au document 2254. Il
5 s'agissait du document mentionné par Me Karnavas.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] P 0, ce n'est pas un document 1D, c'est un
7 document P, ce qui signifie que c'est un document de l'Accusation.
8 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, mais sur ce document, je peux
9 lire simplement 1D 02254.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, comme mon collègue est revenu sur ce
11 document, une question de suivi. Ce document date du 10 mai. Vous savez que
12 le 9 mai il s'est passé des événements à Mostar. Ce document également fait
13 des références à des événements qui se sont déroulés le 21 avril, enfin,
14 courant avril 1993. Puisque le Conseil de sécurité a aussi fait une
15 déclaration. Mais ce document parle d'unités paramilitaires. Vous, vous
16 êtes informé de cela, et on l'a vu avec le document tout à l'heure, vous
17 rappelez que le HVO est une armée reconnue au sein de la Bosnie-
18 Herzégovine. Mais n'y a-t-il pas un problème si le Conseil de sécurité
19 signale des problèmes liés à des actions militaires d'origine paramilitaire
20 ou d'autres ?
21 Votre attention n'a-t-elle pas été appelée et pour répondre au
22 président du Conseil de sécurité, est-ce que vous avez estimé que votre
23 courrier se suffisait en lui-même ? Le courrier qui figure au 1D 2096.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'existait pas d'effectifs croates, quand
25 je dis Croate, je parle du peuple croate en Bosnie-Herzégovine. Il n'y
26 avait pas d'autres effectifs si ce n'est ceux du HVO, du Conseil croate de
27 la Défense. Alors l'expression unité paramilitaire des Croates de Bosnie
28 c'était destiné aux -- enfin ça voulait parler du Conseil croate de la
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1 Défense. Et si j'ai protesté, si je peux le dire, c'est parce que nos
2 effectifs armés, nos forces armées, celles du HVO étaient reconnues légales
3 et non pas paramilitaires.
4 Et deuxièmement, d'après les rapports qui me parvenaient depuis le terrain,
5 le Conseil croate de la Défense n'avait pas entamé des actions militaires
6 ou instigué des actions militaires au départ à la date du 9 mai à Mostar.
7 M. KARNAVAS : [interprétation]
8 Q. Page 80, ligne 20, me semble-t-il, on peut lire qu'il s'agissait au
9 passé, il s'agissait : "Des unités paramilitaires croates de Bosnie", et ma
10 consœur me dit qu'elle vous a entendu dire non pas il s'agissait "these
11 were," mais ces mots "those words," en anglais.
12 Alors qu'avez-vous dit au juste ?
13 R. J'ai évoqué la citation et je l'ai reprise en anglais, me semble-t-il.
14 Q. Alors je souhaite enchaîner sur les questions posées par les Juges de
15 la Chambre. Vous avez dit qu'il n'y avait pas de groupes de pression, qu'il
16 n'y avait pas de relations publiques, et il est ainsi curieux de constater
17 que nous sommes le 10 mai, que ces incidents ont eu lieu le 9 mai, donc la
18 veille, et puis il y a le président du Conseil de sécurité qui rédige cette
19 note et qui qualifie le HVO d'unités paramilitaires croates de Bosnie, et
20 en quelque sorte il rejette la responsabilité sur l'une des parties au
21 conflit, et une seule.
22 A votre connaissance, est-ce que le Conseil de sécurité a mené des
23 enquêtes pendant ces 24 heures afin de déterminer ce qui s'était passé et
24 en est parvenu à cette conclusion ?
25 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je souhaiterais que l'on
26 supprime les commentaires faits par Me Karnavas au compte rendu d'audience
27 page 80, lignes 10 à 16. Parce que rien ne semble arrêter Me Karnavas, il
28 continue à ergoter, et je souhaiterais qu'à chaque fois qu'il fait de tels
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1 commentaires cela soit supprimé du compte rendu d'audience. Je pense que la
2 Chambre devrait intervenir mais elle ne le fait pas, donc je souhaiterais
3 que cela soit supprimé du compte rendu.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Si vous m'y autorisez, je souhaiterais
5 répondre. Le témoin a répondu à une question posée par le Juge Prandler en
6 disant qu'il n'y avait pas de groupes de pression chargés de relations
7 publiques, alors ce fait fait partie du dossier. Je suis en droit de les
8 utiliser dans le cadre de ma question suivante.
9 Puis nous voyons le 10 mai qu'un incident a eu lieu le 9, donc il
10 s'agit de faits versés au dossier. Ces faits sont présentés au témoin.
11 Donc si vous examinez ma question, en fait, on ne peut pas supprimer mes
12 commentaires du compte rendu d'audience, c'est impossible, mais quoi qu'il
13 en soit, il s'agit de déclarations du témoin, de faits qui ont été
14 mentionnés dans la déposition du témoin. Il s'agit de faits du dossier.
15 C'est la raison pour laquelle je demande comment il est possible que le
16 lendemain on arrive à ce document. Est-ce qu'il y a eu des enquêtes ? C'est
17 une question tout à fait légitime, et je ne vois pas où est le problème.
18 M. SCOTT : [interprétation] Me Karnavas peut appeler cette technique comme
19 il veut, une technique en boucle ou peu importe comme il l'appelle, mais le
20 fait est qu'il dit : N'est-il pas curieux - je n'ai plus la référence de la
21 page, mais il dit : N'est-il pas curieux ou il est quelque peu curieux de
22 voir que le 10, et ainsi de suite. Il est inutile de formuler les choses de
23 cette manière. Il peut simplement poser une question.
24 Comme je l'ai dit hier et comme je continuerai à le dire, on peut
25 poser des questions ouvertes au témoin, inutile de faire des commentaires,
26 inutile de présenter sa thèse, il suffit de présenter des questions
27 ouvertes. Inutile que M. Karnavas continue à qualifier les éléments de
28 preuve. Ce n'est pas approprié et la Chambre devrait intervenir.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Bon, si le mot curieux vous dérange, je vais
2 reformuler ma question.
3 Q. Comment est-il possible qu'en moins de 24 heures le président du
4 Conseil de sécurité émette cette note telle qu'elle est formulée et avec
5 les conclusions qui sont là ?
6 M. SCOTT : [interprétation] On pourrait demander au témoin comment il sait
7 cela. Comment le témoin peut-il répondre à cette question ? Ça fait partie
8 du problème. On demande au témoin de faire des suppositions. Me Karnavas
9 l'a fait tout au long de la journée, il faut que soit mis un terme à cela.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Je vais poursuivre différemment.
11 Q. Savez-vous si la FORPRONU ou les observateurs de la MOCE ont pu, avec
12 un certain degré de certitude scientifique, déterminer qui était
13 responsable, qui a lancé l'agression, qui y a participé, quelles forces ?
14 M. SCOTT : [interprétation] Il s'agit de commentaires, là encore. La
15 Chambre connaît les éléments de preuve. La Chambre a entendu le témoignage
16 des observateurs internationaux qui étaient là le jour des faits, les
17 représentants du Bataillon espagnol, inutile que Me Karnavas présente ainsi
18 sa thèse, il peut simplement poser des questions équitables au témoin.
19 Ce témoin n'a pas montré qu'il était au courant de cela. Il n'était
20 pas à Mostar. Il ne sait rien à ce sujet, rien du tout.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais passer à autre chose. Je vais passer
22 à autre chose.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais je dois dire que ça me dérange de voir
25 que les Juges de la Chambre ne mettent pas un terme à ces interventions.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne suis pas d'accord avec ce qu'a dit M. Scott,
27 mais d'un autre côté M. Scott a raison sur le fait que vous avez employé le
28 mot "curieux" et alors vous avez dit : je retire. Après quoi, vous avez
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1 voulu reposer la question et M. Scott est revenu en disant, mais quelles
2 sont les fondations, est-ce que le témoin savait ce qui s'était passé le 9
3 mai ? Alors c'est peut-être là le petit trou qui manquait. Vous auriez pu
4 demander au témoin, avait-il eu connaissance au moment où il envoie sa
5 lettre au président du Conseil de sécurité de ce qui s'était passé à Mostar
6 le 9 mai. C'était ça qui manquait peut-être.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Vous avez sans doute raison, Monsieur le
8 Président. Malheureusement, j'ai des contraintes de temps. Je vais donc
9 allez de l'avant, 1D 02728, troisième classeur. Il s'agit d'un document
10 daté du 13 mai 1993. "Contenu d'une lettre envoyée par le premier ministre
11 de la Bosnie-Herzégovine, Mile Akmadzic, au Conseil de sécurité de l'ONU,
12 dans laquelle il dénonce ce qu'il considère être une description erronée de
13 la partie croate dans le conflit opposant les Musulmans et les Croates en
14 Bosnie."
15 Q. Vous avez l'original de ce document. Est-ce qu'il reflète le contenu de
16 la lettre que vous avez envoyée et est-ce que ce texte a été publié en fin
17 de compte ?
18 R. Oui, c'est exactement ce que j'ai dit et ce que je pensais.
19 Q. Bien. Je vais passer au sujet suivant. Il est question de Medjugorje.
20 Très rapidement, nous savons qu'un accord a été conclu le 18 mai 1993. Il
21 n'y a plus de mystère là-dessus. Je vous invite à regarder le document 1D
22 02404, deuxième classeur. Tout d'abord, étiez-vous à Medjugorje lorsque cet
23 accord a été conclu ?
24 R. Oui, j'étais à Medjugorje.
25 Q. Au bas de la première page de ce document qui porte la référence 1D
26 02404, il est question des organes de coordination ou d'un organe de
27 coordination plutôt, au singulier. Nous voyons votre nom. "Il a été
28 confirmé" - je cite - "que les personnes suivantes constitueront l'organe
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1 de coordination ainsi qu'il a été convenu à Zagreb le 24 avril." M. Mate
2 Boban, M. Mile Akmadzic, M. Franjo Boras, M. Alija Izetbegovic, M. Ejub
3 Ganic, M. Fikret Abdic, puis nous voyons ensuite qu'il y est fait référence
4 à un gouvernement central au chapitre portant le chiffre romain V, et un
5 peu plus loin, on peut lire qu'il a été convenu que M. Prlic serait le
6 premier ministre.
7 Ce qui m'intéresse surtout, c'est l'organe de coordination. Est-ce qu'il
8 s'est jamais réuni, est-ce qu'il a agi conformément à l'accord conclu, à
9 votre connaissance ?
10 R. Tout d'abord, le 18 mai 1993, date qui est indiquée ici, il y a eu un
11 accord à Medjugorje, et à cette réunion il y avait participation de toutes
12 les personnalités en vue, les présidents, le président Tudjman, la partie
13 croate et bosniaque ont parlé de la mise en œuvre du plan Vance-Owen et des
14 autres questions qui revêtaient de l'importance à l'époque, entres autres,
15 au sujet du conflit survenu le 9 mai à Mostar.
16 Q. Très bien. Ça suffira. Ma question était très brève. Est-ce que
17 l'organe de coordination a jamais fait ce qu'il était censé faire d'après
18 l'accord conclu ?
19 R. Cet organe chargé de la coordination ne s'est jamais réuni.
20 Q. Bien. Nous allons sauter quelques documents, et nous allons voir
21 maintenant le document 1D 02037.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Veuillez garder à l'esprit, Messieurs les
23 Juges, l'accord conclu le 18 mai 1993. Le 1D 02037, premier classeur. Il
24 s'agit d'un extrait du livre de Lord Owen.
25 Q. Très rapidement, peut-on voir la page 196, avant-dernier
26 paragraphe -- 186, et je vais lire lentement :
27 "Ce qui a joué un rôle essentiel dans ma décision, c'était l'insistance
28 montrée par Douglas Hurd, qui a insisté pour envoyer son adjoint, Douglas
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1 Hogg, afin de passer deux heures et demie avec moi pendant le déjeuner à
2 Genève, le 26 mai. Il était accompagné de Jeremy Greenstock, du ministère
3 des Affaires étrangères." Puis le texte se poursuit.
4 A la page suivante, nous pouvons lire à droite :
5 "Doug Hogg voulait que je reconnaisse que le plan de paix Vance-Owen
6 était dans une impasse. Et j'ai reconnu qu'il ne pouvait avancer que si
7 l'Europe assumait pleinement la charge de la mise en œuvre militaire sans
8 l'aide des Etats-Unis mais avec les Européens de l'Est."
9 Saviez-vous à l'époque, c'est-à-dire le 26 mai, que certaines puissances
10 européennes comme l'Angleterre, le Royaume-Uni, essayait de faire en sorte
11 que M. Owen reconnaisse que le plan de paix Vance-Owen était mort ? Est-ce
12 que vous l'avez appris à l'époque ?
13 R. Hélas, non. Lors Owen n'a que tardivement, lors d'une conversation à
14 Genève, dit à mon attention lorsque j'avais insisté sur la mise en œuvre de
15 ce plan Vance-Owen, il m'a dit : M. Mile, le plan Vance-Owen est mort.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous terminerons avec celui-ci, il s'agit du
17 document 1D 02914. Quatrième classeur, Messieurs les Juges, 1D 02914.
18 Q. Il s'agit d'un extrait du livre de Boutros Boutros-Ghali intitulé :
19 "Invaincus, une saga des Etats-Unis et de l'ONU." Vous connaissez cet
20 ouvrage, n'est-ce pas, Monsieur ?
21 R. Je connais le livre, oui.
22 Q. Page 68, dernière partie du paragraphe, je vais en donner lecture, le
23 paragraphe continue sur la page suivante :
24 "En tant que candidat à l'élection présidentielle, Clinton avait exigé des
25 actions militaires multilatérales en Bosnie et il a pris ses fonctions en
26 déclarant que la Bosnie était la crise internationale la plus urgente aux
27 yeux de l'Amérique. Mais très rapidement, la nouvelle administration
28 américaine a mis des barrières pour empêcher une action efficace. Cyrus
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1 Vance était certain que les Etats-Unis accepteraient le plan de paix que
2 lui et David Owen avait négocié."
3 Je vais sauter quelques lignes. Le texte se poursuit ainsi : "La nouvelle
4 équipe de Clinton semble n'avoir pas grand-chose à faire avec lui" - c'est-
5 à-dire Vance - "et encore moins avec Owen.
6 "Ce qui est pire encore, c'est que les chances de la paix sont
7 jetées, alors que Clinton et Christopher, en utilisant des termes forts,
8 ont attaqué le plan Vance-Owen comme un plan cherchant à apaiser les
9 Serbes. Ils avaient tort. Le plan prévoyait une structure de dix provinces
10 qui représenteraient tous les groupes de façon juste et reconstituait la
11 Bosnie en Etat multiethnique et progressivement démilitarisé."
12 Je saute quelques lignes.
13 "Tous ces efforts ont été réduits à néant par Clinton et Christopher, qui
14 ont déclaré que les Etats-Unis proposeraient leur propre plan de paix. Ils
15 ont appelé à la levée de l'embargo sur les armes pour la Bosnie. Ils ont
16 dit qu'ils voulaient des frappes aériennes contre les Serbes, même s'ils
17 savaient que la France, la Grande-Bretagne et la Russie ne seraient pas
18 d'accord. Et ces frappes aériennes" --
19 Je saute quelques lignes, fin de la page.
20 "Vance et Owen sont venus dans mon bureau le 2 février 1993. La
21 veille au soir, Vance avait rencontré Christopher afin de l'informer du
22 plan de paix Vance-Owen. Même si la Communauté européenne avait annoncé son
23 soutien plein et entier, sans ambiguïté, au plan, Christopher semblait
24 sceptique et négatif. Les Serbes avaient exprimé leur accord, mais les
25 Musulmans de Bosnie non, largement en raison de l'attitude négative de la
26 nouvelle équipe de Clinton qui les avait convaincus du fait que les Etats-
27 Unis leur proposeraient un meilleur marché." Je saute quelques lignes.
28 Ensuite on peut lire :
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1 "J'ai décidé de présenter aussitôt un rapport au Conseil de sécurité en
2 demandant l'acceptation du plan Vance-Owen. Le 8 février, Vance, Owen et
3 moi-même avons rencontré le dirigeant croate de Bosnie, Mile Akmadzic,
4 premier ministre de la Bosnie. 'Selon moi', a-t-il affirmé, 'et selon
5 l'opinion de la plupart des citoyens de Bosnie-Herzégovine, le plan Vance-
6 Owen est le meilleur; la seule alternative c'est la guerre. D'après nous,
7 la guerre ne peut pas être couronnée de succès, et aucune des parties ne
8 peut espérer une victoire.'" Le texte se poursuit : "Mais à Washington, le
9 ministère bosniaque des Affaires étrangères, Haris Silajdzic, n'a pas été
10 encouragé à accepter le plan, l'opposition américaine avait considéré que
11 le plan Vance-Owen était un revers important, voire un arrêt de mort."
12 Monsieur Akmadzic, est-ce que vous avez eu cette conversation avec M.
13 Boutros Boutros-Ghali comme il le mentionne, est-ce que vous avez bien dit
14 les propos qu'il vous attribue ?
15 R. Oui, je me souviens du moment où Boutros Boutros-Ghali m'avait reçu, il
16 y avait les coprésidents de présents, c'était le 8 février 1993, au palais
17 des Nations Unies. En cette occasion, j'ai informé M. Boutros Boutros-Ghali
18 et les coprésidents de la situation en Bosnie-Herzégovine et de l'évolution
19 de la guerre, et j'ai dit, comme cela est cité ici, je l'ai dit à la lettre
20 pratiquement, et de nos jours encore je dirais la même chose.
21 Q. Merci. En conclusion, je vous demande ceci, il est dit ici, page 71 :
22 "On a demandé à savoir quelles étaient les intentions américaines,
23 Eagleburger a dit que les Etats-Unis voulaient réduire la partie de 43 % du
24 territoire donné par le plan Vance-Owen aux Serbes. Il allait falloir deux
25 ans et demie de plus de guerre ensanglantée et des crimes de guerre pour
26 que les Etats-Unis donnent aux Serbes 49 %. David Owen plus tard a déclaré
27 que 'si George Bush avait gagné les élections américaines, la guerre en
28 Bosnie aurait été finie depuis belle lurette.'" Est-ce que c'est une bonne
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1 évaluation de la situation vu ce qui se négociait pendant le plan de paix
2 Vance-Owen et ce qui a fini par être --
3 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je fais objection. Comment
4 voulez-vous que le témoin réponde à cette question. Est-ce que c'était
5 l'avis de M. Boutros Boutros-Ghali, du président Clinton, ou de Joseph
6 Biden. C'est absurde, vraiment il faut que cette question soit retirée.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est limpide, Monsieur le Président, et à
8 Dayton il y avait des cartes et des mécanismes très compliqués destinés à
9 assurer avec précision quelle serait la répartition territoriale pour
10 chaque partie.
11 M. SCOTT : [interprétation] M. Karnavas peut présenter des cartes, c'est
12 mieux à faire que de demander l'avis du témoin qui n'en sait rien.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce monsieur était présent aux négociations
14 du plan de paix Vance-Owen. Nous l'avons entendu, il a participé à la
15 totalité du processus. Manifestement, il peut nous dire si le plan de paix
16 Vance-Owen donnait plus ou moins de terre, disons, aux Musulmans et aux
17 Croates par rapport à ce que Dayton leur a donné, et s'agissant de deux ans
18 et demi de plus de combat et de milliers de morts, je pense que quiconque
19 va en Bosnie peut aller au cimetière et le verra.
20 Q. Pourriez-vous répondre à la question ?
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Elle peut être spéculative la question, mais est-ce
22 que vous pouvez répondre ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux répondre, Monsieur le Président. Ici,
24 je voudrais faire la déclaration suivante : il y eu le plan Cutileiro
25 accepté par les Serbes et les Croates, et refusé par les Musulmans. Puis il
26 y a eu le plan Vance-Owen accepté par les Musulmans et les Croates, refusé
27 par les Serbes, puis accepté, puis refusé.
28 Puis il y a eu le plan Owen-Stoltenberg accepté par les Serbes et les
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1 Croates, et rejeté par les Musulmans. Il y eu le plan de Washington signé
2 par les Croates et les Musulmans, et il découle de ce que je viens de dire,
3 les Croates ont accepté tous les plans parce qu'ils tenaient à la paix. Il
4 y a eu les accords de Dayton signé par les Croates sous pression et qui, de
5 mon avis, puisqu'on me pose la question de donner une estimation, va
6 générer un grand mal en Bosnie-Herzégovine parce que les Croates vont en
7 grande partie s'en aller parce qu'ils ne sont pas traités comme un peuple
8 constitutif et sur pied d'égalité, chose que nous avons défendue toute la
9 durée de la guerre, en Bosnie-Herzégovine il y a eu 1 % de Croates de
10 Bosnie tués, et il y a eu 2 % de ces Croates à être blessés.
11 Cette estimation se trouve être tout à fait justifiée.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, je crois que mon -- demain, bon, il y aura un
13 problème technique à aborder. Bien. Alors je m'excuse auprès des
14 interprètes. On a dépassé de presque sept minutes le temps. On essaiera de
15 rattraper cela prochainement. Bien. Alors nous nous retrouverons comme vous
16 le savez demain à 14 heures 15. Sauf erreur de ma part il doit vous rester,
17 Maître Karnavas, autour de 45 minutes. Donc tablez trois quarts d'heure
18 demain, voilà, et puis après quoi les autres avocats interviendront.
19 Donc je vous remercie, et à demain.
20 --- L'audience est levée à 19 heures 07 et reprendra le mercredi 18 juin
21 2008, à 14 heures 15.
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