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1 Le lundi 7 juillet 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur
8 les Juges. Bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur
9 contre Prlic Jadranko et consorts. Merci.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce lundi, 7 juillet 2008, je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les
12 avocats, Messieurs du bureau du Procureur et Madame, ainsi que toutes les
13 personnes qui nous assistent. Je vais d'abord donner la parole à M. le
14 Greffier qui a deux numéros IC à nous donner.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Certaines
16 parties ont déposé des listes de documents qu'elles souhaitent verser au
17 dossier par l'intermédiaire du témoin Slobodan Jankovic. La liste de 3D
18 reçoit la cote IC 00823 et la liste du bureau du Procureur recevra la cote
19 IC 00824. Merci.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
21 Je vais vous demander de passer pendant quelques instants à huis clos
22 partiel.
23 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, avant de ce faire, et
24 pendant que nous le faisons --
25 [Audience à huis clos partiel]
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28 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour cela, la Chambre souhaite avoir la position de
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1 Me Karnavas concernant le complément d'information demandé par l'Accusation
2 pour les témoins Zoran Buntic et Zoran Perkovic. Maître Karnavas, vous
3 savez que l'Accusation a fait une requête et nous aimerions avoir votre
4 réponse tout de suite.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je leur ai
6 fourni les informations supplémentaires que j'avais reçues du témoin. Je
7 noterais que ce témoin a déposé dans l'affaire Kordic, il avait préparé une
8 déclaration mais ils ne sont pas parvenus à trouver cette déclaration. Ils
9 me l'ont demandée, nous leur avons fournie parce qu'il se trouvait qu'on
10 avait cette déclaration, donc nous avons fourni la déclaration utilisée
11 pour ce témoin dans l'affaire Kordic et à partir de laquelle ont été menés
12 l'interrogatoire principal et le contre-interrogatoire. Je crois que nous
13 avons satisfait à nos obligations. M. Buntic était membre des autorités
14 exécutives. Il a participé à un certain nombre de réunions, à un certain
15 nombre de négociations. Toutes ces informations ont été fournies à
16 l'Accusation. Ils peuvent procéder à leur contre-interrogatoire, je ne vois
17 aucun dilemme et je ne vois aucune information supplémentaire à leur
18 communiquer.
19 S'agissant maintenant de M. Perkovic, je crois qu'il a déjà déposé devant
20 le Tribunal, et dans sa déposition il va aborder des sujets très semblables
21 à ce dont il avait parlé lors de sa précédente déposition. Il a participé
22 aux activités de l'exécutif du HVO, en ce sens qu'il a participé à la
23 rédaction de textes législatifs. Il a participé à un certain nombre de
24 réunions, je ne vois pas où est le problème.
25 Ce ne sont pas des témoins surprises que ces deux témoins, Monsieur le
26 Président. On remet en question M. Zubak par exemple, qui a occupé un poste
27 particulier. L'Accusation a décidé de ne pas poser de questions à M. Martin
28 Raguz, pourtant ils ont les documents. Nous avons fourni à l'Accusation les
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1 documents où on voit que M. Buntic a participé à un certain nombre de
2 réunions. Je ne vois pas comment nous pouvons leur fournir des documents
3 que nous n'avons pas.
4 Hier dans la soirée, nous avons obtenu des informations supplémentaires et
5 à partir de ces informations-là, nous avons eu des contacts avec
6 l'Accusation. Ça correspond à une page, une page d'information
7 supplémentaire que nous avons communiquée. Mais il n'y a pas de surprise.
8 Si l'Accusation avait passé en revue les documents que nous avons
9 l'intention d'utiliser et des documents qu'ils connaissent très bien, ils
10 auraient su ce qu'il en est. Il y a un seul transcript présidentiel où le
11 témoin est mentionné, donc aucun dilemme, aucun problème.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
13 Alors la Chambre va rendre la décision orale qui va être un peu plus longue
14 que la précédente. Décision orale relative à la requête de l'Accusation
15 demandant un complément d'information pour les témoins Zoran Buntic et
16 Zoran Perkovic.
17 Vu la requête écrite de l'Accusation, vu les observations orales de Me
18 Karnavas formulées ce jour, le 3 juillet 2008, l'Accusation a déposé à
19 titre confidentiel une requête demandant à la Chambre de demander à la
20 Défense de l'accusé Prlic de compléter les résumés 65 ter (G) pour les
21 témoins Zoran Buntic et Zoran Perkovic. La Chambre note que le premier
22 témoin concerné, Zoran Buntic, va comparaître cet après-midi. La requête
23 déposée à son égard est par conséquent tardive.
24 En outre, la Chambre note que la Défense a communiqué une déclaration du
25 témoin en date du 18 juin 2000. Cette déclaration lue conjointement avec le
26 résumé 65 ter (G) est suffisamment précise afin de permettre à l'Accusation
27 de préparer son contre-interrogatoire.
28 En ce qui concerne le témoin Zoran Perkovic, la Chambre note que le résumé
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1 65 ter (G) indique que le témoin témoignera notamment sur les instruments
2 légaux adoptés par le HVO, sur les observations qu'il aurait faites alors
3 qu'il tenait le poste de conseiller auprès du président du comité exécutif
4 pour la municipalité de Livno, ainsi que sur ses relations avec divers
5 membres du pouvoir exécutif du HVO. Ces informations sont trop vagues pour
6 permettre une préparation de contre-interrogatoire.
7 En conséquence, la Chambre fait partiellement droit à la requête et demande
8 à la Défense de l'accusé Prlic de compléter ce résumé en indiquant plus
9 exactement, premièrement, les instruments légaux sur lesquels le témoin est
10 censé témoigner; deuxièmement, les noms des personnes avec lesquelles le
11 témoin se serait entretenu, la date et le lieu de ces entretiens;
12 troisièmement, la nature des observations faites en tant que conseiller
13 dans la municipalité de Livno.
14 La Chambre demande ces informations supplémentaires pour le 10 juillet
15 2008, au plus tard.
16 Bien. Donc en un mot, Maître Karnavas, il suffira de compléter sur les
17 trois points.
18 Voilà. Nous allons maintenant introduire le témoin.
19 Simplement, Maître Karnavas, nous avons eu vos deux classeurs, et je vous
20 remercie de bien nous avoir indiqué les pièces qui vont être évoquées,
21 selon les cinq sujets que vous allez aborder. Mais, à titre personnel, mais
22 je pense que mes collègues sont du même avis que moi, si vous pouviez nous
23 indiquer les pièces qui n'ont pas encore été admises. Voilà. Parce que ça
24 aurait l'avantage de nous permettre de regarder encore plus ces pièces.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien que je sache que le travail est quand même
27 important, mais si vous pouvez le faire, nous vous en remercions.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous allons le faire. Je ne sais pas si je
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1 pourrai comme ça au débotté le faire, Monsieur le Président, mais nous
2 allons essayer de répondre à votre demande aussi rapidement que possible.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
4 M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai des listes ici qui vous sont destinées
5 et qui accompagnent les classeurs, je pense que ces listes peuvent vous
6 donner une idée de ce qu'il en est.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Dans l'intervalle et pour le compte
8 rendu d'audience, je relève, Maître Karnavas, que vous avez promis de nous
9 présenter les documents dans l'ordre où vous allez les présenter au témoin,
10 sachant que ce serait une tâche difficile. Or, je remarque que vous n'avez
11 pas tenu votre promesse et je dois dire que je le regrette parce qu'il va
12 falloir qu'on procède à des recherches systématiques dans ces classeurs
13 comme la dernière fois.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Toutes mes excuses. Je ne veux pas jouer ici
15 sur les mots. J'ai dit que j'allais essayer. J'essaie de faire de mon
16 mieux, mais ce n'est pas toujours facile de trouver en plein milieu d'un
17 procès de nouveaux collaborateurs pour nous aider. Cependant, à votre
18 intention, Messieurs les Juges, nous avons préparé des listes de toutes les
19 pièces à conviction, il est également indiqué sur ces tableaux où se trouve
20 la pièce concernée dans quel classeur. Je vais demander à ce qu'on vous
21 remette immédiatement ces listes. Il y en a une également qui a été
22 préparée pour l'Accusation.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
24 Alors, Monsieur le Témoin, levez-vous, s'il vous plaît. Pouvez-vous me
25 donner votre nom, prénom et date de naissance.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Zoran Buntic. Je suis né le 29 août
27 1953, à Citluk.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur Zoran Buntic, déjà témoigné
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1 devant un Tribunal international, voire national; et si c'est le cas, dans
2 quelle affaire ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
4 suis venu déposer devant ce même Tribunal dans l'affaire Kordic en l'an
5 2000.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Et vous étiez témoin de la Défense ou de
7 l'Accusation ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais témoin de la Défense.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
10 Je vous demande de lire le serment.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 LE TÉMOIN : ZORAN BUNTIC [Assermenté]
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, juste un petit problème d'ordre
18 logistique. Il est donc prévu que vous soyez entendu pendant plusieurs
19 jours, et il y a un risque potentiel que nous ne puissions terminer votre
20 audition cette semaine. Y aurait-il à votre niveau des problèmes, s'il
21 fallait rester jusqu'à lundi prochain ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis libéré suffisamment pour venir
23 déposer ici. J'ai pu remettre à plus tard tout l'ensemble de mon travail,
24 donc je suis entièrement à votre disposition.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre vous en remercie.
26 Alors, Monsieur, quelques brèves explications de ma part. Puisque vous avez
27 déjà témoigné, vous savez comment cela se passe. Vous allez dans un premier
28 temps devoir répondre à des questions de Me Karnavas, que vous avez dû
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1 rencontrer. Et Me Karnavas va vous présenter également toute une série de
2 documents.
3 A l'issue de cette phase, qui va durer un certain temps, il se peut que les
4 avocats des autres accusés dans le cadre du contre-interrogatoire qui leur
5 est autorisé pourront également vous poser des questions. A l'issue de
6 cette phase procédurale, M. le Procureur, qui se trouve à votre droite,
7 procédera à ce qu'on appelle ici le contre-interrogatoire. Les quatre Juges
8 qui sont devant vous interviendront certainement également pour vous poser
9 des questions.
10 Comme nous avons beaucoup de documents, il se peut que nos questions
11 enchaînent sur le document pour éviter le maniement des documents qui peut
12 prendre du temps, mais cela c'est en fonction bien entendu de l'événement
13 et des questions posées. Essayez d'être très précis dans les réponses. Si
14 vous ne comprenez pas le sens d'une question, n'hésitez pas à demander à
15 celui qui vous pose la question de la reformuler. Nous faisons des pauses
16 toutes les heures et demie. Nous avons commencé il y a déjà une demi-heure,
17 donc dans une heure nous ferons une pause de 20 minutes. Mais si à un
18 moment donné vous vous sentez pas bien, parce que vous êtes fatigué ou je
19 ne sais quoi, n'hésitez pas à lever la main pour qu'on puisse interrompre
20 l'audience parce que vous allez vous apercevoir que répondre sans arrêt
21 pendant des heures à des questions ça peut être fatiguant, voire même
22 éprouvant.
23 La Chambre est à votre disposition pour répondre bien entendu à toutes les
24 questions que vous pourriez être amené à lui poser en cas de nécessité.
25 Voilà donc de manière très générale comment va se dérouler cette audience.
26 Un dernier élément, vous avez prêté il y a quelques instants un serment, ce
27 qui fait qu'à partir de ce moment vous êtes maintenant le témoin de la
28 justice. Et donc vous n'appartenez plus à quiconque, sauf à la justice, ce
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1 qui implique qu'à partir de maintenant vous n'avez plus aucun contact avec
2 la Défense. Ce qui fait que quand vous allez rentrer dans votre chambre
3 d'hôtel, vous n'avez pas, bien entendu, à avoir de communication avec les
4 uns ou les autres, sauf évidemment avec les membres de votre famille pour
5 leur relater comment ça se passe, et comme ça se passe très bien, je suis
6 convaincu que vous leur donnerez de bonnes nouvelles. Voilà, Monsieur.
7 Sur ce, je vais donner la parole à Me Karnavas.
8 Attendez, je crois qu'il y a Mme Pinter. Oui, Madame Pinter.
9 Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
10 Juges, pour ce qui est de notre témoin, le 4 juin 2008 comme vous le savez
11 nous avons déposé une écriture portant sur M. Buntic. Nous avions
12 l'intention en application de l'article 92 ter de verser au dossier sa
13 déclaration écrite. Je souhaiterais que ceci ne constitue pas une surprise
14 pour lui.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous le savons, et bien entendu, nous
16 envisagerons cette phase procédurale après que nous ayons terminé avec les
17 questions supplémentaires de Me Karnavas. Et si sur la déclaration écrite
18 l'Accusation veut contre-interroger, elle pourra, le cas échéant, le faire.
19 Maître Karnavas, vous avez la parole.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, et Messieurs
21 les Juges.
22 Interrogatoire principal par M. Karnavas :
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Buntic.
24 R. Bonjour.
25 Q. Avant de passer en revue un certain nombre de documents dans le cadre
26 de votre déposition, j'aimerais vous demander un bref récit qui pourrait
27 nous aider justement à passer en revue ces documents de la manière la plus
28 rapide possible. Vous nous avez dit que vous êtes avocat, pouvez-vous nous
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1 dire depuis combien de temps vous exercez cette profession et où vous
2 l'exercez ?
3 R. Je suis avocat depuis 1989. Cela étant dit, j'ai eu des interruptions
4 dans ma carrière d'avocat pour l'essentiel pendant la période de la guerre,
5 pendant laquelle j'ai exercé un certain nombre de postes de responsabilité
6 au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et par la suite au sein de
7 la République croate d'Herceg-Bosna également.
8 Q. Et quel type de droit est votre spécialité ?
9 R. Je suis dans le droit des affaires pour l'essentiel, et actuellement,
10 je suis des études à l'Université de Mostar, c'est un troisième cycle
11 portant sur le droit international.
12 Q. Très bien. Entrons tout de suite dans le vif du sujet. Vous nous avez
13 dit que vous avez participé à la Communauté croate d'Herceg-Bosna et
14 ensuite à la République croate d'Herceg-Bosna.
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardon, Monsieur Karnavas. Pour être
16 tout à fait précis, on a interprété les propos du témoin de manière qu'il
17 ressort qu'il a entrepris des études pour obtenir une licence. Mais il est
18 avocat depuis un bon moment, est-ce que ce ne sont pas plutôt des études
19 post-grade --
20 L'INTERPRÈTE : Oui, en effet.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Juge Trechsel. Encore une fois, je
23 suis désolé de ne pas avoir pu vous remettre tous ces documents dans le bon
24 ordre. Nous continuerons à essayer.
25 Q. Pouvez-vous nous dire quelles ont été vos fonctions initiales au sein
26 de la Communauté croate de l'Herceg-Bosna ?
27 R. C'est par la décision de la présidence de la Communauté croate
28 d'Herceg-Bosna, en date du 15 mai 1991, que j'ai été nommé chef du service
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1 chargé de la justice et de l'administration au sein de la Communauté croate
2 d'Herceg-Bosna. Je pense qu'il convient de préciser que ce n'est pas le 15
3 mai 1991 que je suis entré en fonction, que c'est plutôt un mois plus tard,
4 et que c'est vers le 20 juin 1991 que j'ai occupé effectivement ce poste, à
5 partir de ce moment-là jusqu'à la fin de l'existence de la Communauté
6 croate d'Herceg-Bosna, c'est-à-dire jusqu'au 28 août 1993. C'est à ce
7 moment-là qu'a été créée la République croate d'Herceg-Bosna.
8 Q. Très bien. Vous avez dit que vous n'êtes pas entré en fonction pendant
9 à peu près un mois. Y a-t-il une raison à cela ?
10 R. Je pense qu'une raison justifiée a existé, c'est-à-dire entre le 10 et
11 le 15 mais à peu près, 1992, j'ai eu un entretien à ce sujet avec M. Mate
12 Boban et le président de la municipalité de Citluk, Milan Lovric, ils ont
13 cherché à me convaincre à accepter ce poste, et pendant ces entretiens,
14 j'ai accepté de me charger d'exercer ces fonctions et j'ai demandé de
15 continuer d'exercer les fonctions que j'avais à l'époque, j'étais
16 commandant adjoint de la défense de Citluk à ce moment-là, c'est-à-dire
17 j'étais à la tête du détachement de la Défense, que j'exerce ce poste
18 jusqu'à ce qu'on termine de libérer Mostar et la rive est de Neretva,
19 Stolac, Capljina. Pendant ce temps-là, on était en train de travailler sur
20 les préparations de l'opération, mes arguments ont été acceptés et c'est à
21 cause de ces raisons que c'est uniquement à partir du moment où cette
22 action avait été menée à son terme que j'ai pris mon nouveau poste.
23 Q. Je vous demande de ralentir quelque peu puisque vous êtes interprété et
24 nous devons garder à l'esprit que cela prend un petit peu de temps.
25 Pourriez-vous, en remontant un petit peu dans le temps, nous parler un
26 petit peu de vos fonctions en tant que commandant adjoint. Quelle était
27 cette fonction au juste, quelles étaient vos attributions ?
28 R. Dans un premier temps, le 9 mai 1991, de la part de la cellule de Crise
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1 de la municipalité de Citluk, j'avais été élu membre de cette cellule de
2 Crise de la municipalité de Citluk. Ce qui a présidé à cette élection,
3 c'était la situation de crise qui s'est installée dans la localité de
4 Polak, de la municipalité de Mostar. Une colonne a été arrêtée, une colonne
5 d'à peu près de 200 chars et véhicules transporteurs blindés de l'armée
6 populaire yougoslave, qui partait de Mostar et qui s'acheminait vers le
7 plateau de Kupres, d'une importance stratégique, c'est ce plateau qui
8 sépare l'Herzégovine occidentale de la Bosnie centrale et orientale. Depuis
9 ce plateau, il est possible de développer des opérations militaires de tout
10 genre vers le sud, dans toutes les municipalités qui se situent en
11 Herzégovine occidentale. Ce jour-là, au cours de l'après-midi, le conseil
12 exécutif de la municipalité de Citluk s'est réuni, a élu une cellule de
13 Crise, et pendant les deux ou trois jours qui ont suivi toutes les
14 municipalités d'Herzégovine occidentale ont nommé leur cellule de Crise
15 respectivement, parce que nous étions conscients du fait que tôt ou tard
16 ces chars allaient être utilisés contre nous.
17 Il me semble qu'il convient de préciser ici que pour ce qui est de la
18 composition de la cellule de Crise de la municipalité de Citluk, cette
19 composition reflétait en principe les dispositions de la loi portant sur la
20 Défense populaire généralisée et les statuts de la municipalité de Citluk,
21 à savoir, de par leurs fonctions, ce sont les présidents de la municipalité
22 de Citluk qui ont été élus, le président du conseil exécutif de la
23 municipalité de Citluk, le chef de l'état-major de la Défense populaire,
24 ensuite le chef de la police, et également le chef de la protection
25 sociale, de son état-major, et un certain nombre de personnes qui, en tant
26 que membres de la municipalité de Citluk, ont été élues au sein de la
27 cellule.
28 Par la suite, le 19 septembre 1991, de la part de la cellule de
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1 Crise, j'ai été élu commandant de la défense de Citluk, c'est-à-dire le
2 commandant du détachement de la Défense populaire de la municipalité de
3 Citluk. Et sans aucun doute, ceci a été la première unité armée de Bosnie-
4 Herzégovine à opposer une résistance armée à l'armée yougoslave.
5 Q. J'aimerais que l'on procède étape par étape. Tout d'abord,
6 pouvez-vous nous dire s'il s'agissait de l'ancienne Défense territoriale ?
7 R. Non. Ce n'est pas la Défense territoriale à l'ancienne puisqu'à
8 l'époque, ni moi-même ni qui que ce soit d'autre au sein de la cellule de
9 Crise n'étions capables d'attirer dans nos rangs, sous cette appellation,
10 des combattants. Donc cette appellation, Défense populaire, a été
11 compromise vu ce qui s'était passé précédemment. J'entends par là le fait
12 que l'ensemble de l'armement de la Défense territoriale avait été remis à
13 la JNA, c'est l'état-major de la Défense territoriale qui avait son siège à
14 Sarajevo qui avait fait cela, et un Serbe était à la tête de cet état-
15 major. Pour que le paradoxe soit encore plus grave, l'état-major de la
16 Défense territoriale de la République de Bosnie-Herzégovine a même versé
17 les soldes aux unités de la Défense territoriale qui avaient conquis et
18 occupé des parties de la Bosnie-Herzégovine et qui ont servi des objectifs
19 de la JNA, qui ont coopéré avec elle. C'est ainsi que ces unités ont occupé
20 les deux tiers du territoire de la Bosnie-Herzégovine.
21 Q. Je vous arrête de nouveau parce que certains aspects de ce que vous
22 nous dites sont superflus, d'autres sont importants. Où avez-vous trouvé
23 les armes si la Défense territoriale avait remis toutes ses armes à la JNA
24 ? Où avez-vous pu trouver les armes ?
25 R. Nous avions deux sources. D'une part, à Citluk, il y avait quatre ou
26 cinq entreprises qui comptaient des directeurs courageux qui ont refusé de
27 remettre les armes de la Défense territoriale suite à l'ordre venu de
28 l'état-major de la Défense territoriale de remettre l'ensemble de
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1 l'armement à l'armée yougoslave. Ça, c'était l'une de nos sources.
2 La deuxième, le ministère des Affaires intérieures de la République de
3 Bosnie-Herzégovine nous a remis 400 fusils semi-automatiques neufs. Je
4 pense qu'ils ont déployé des efforts considérables pour nous fournir cela.
5 C'est précisément M. Stojic ici présent qui était adjoint du ministre de
6 l'Intérieur à l'époque et M. Alija Delimustafic, ils ont signé ensemble cet
7 ordre pour que ces armes soient remises au détachement de défense dans la
8 municipalité de Citluk. C'étaient 400 fusils, et les 400 nous ont été remis
9 de la première source. C'était ça notre armement au départ.
10 Q. Encore une fois, je vous prie de parler un petit peu plus lentement
11 parce que plus l'après-midi avance, plus les choses deviendront difficiles
12 pour l'interprétation, notamment.
13 Vous avez dit que certains responsables avaient remis leurs armes.
14 Pour ceux qui ne savent pas très bien comment fonctionnait la Défense
15 territoriale et la défense de tout le peuple, comment cela se fait-il que
16 des directeurs d'entreprises avaient des armes ? Très brièvement, je vous
17 prie.
18 R. Vu le concept de la Défense populaire généralisée, tel qu'il existait à
19 l'époque en ex-Yougoslavie, comptait deux composantes, je suppose que l'on
20 sait ici que l'une de ses composantes était l'armée populaire yougoslave,
21 l'autre était la Défense territoriale. L'armement de la Défense
22 territoriale n'appartenait pas à l'état-major de la Défense territoriale,
23 ce sont plutôt les entreprises qui étaient de la propriété sociale en
24 Bosnie-Herzégovine qui se les procuraient ainsi que les institutions. Donc
25 toute entreprise disposait de son propre plan d'affectation en situation de
26 défense et ainsi son mode d'application de ce plan. Ça existait dans toutes
27 les entreprises sociales de Bosnie-Herzégovine et d'ailleurs dans toute
28 l'ex-Yougoslavie puisque le concept même de Défense populaire généralisée
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1 impliquait ces deux composantes.
2 Il convient de souligner que le commandement de la JNA relevait de la
3 compétence de la présidence de Yougoslavie et du Grand état-major
4 yougoslave, tandis que le commandement de la Défense territoriale relevait
5 de l'état-major de la Défense territoriale des républiques et des
6 municipalités. En l'occurrence, je pense qu'il convient de souligner que ce
7 sont les municipalités qui commandaient la Défense territoriale dans tous
8 les cas si le territoire de telle ou telle municipalité était attaqué. Ce
9 n'était pas seulement un devoir, c'était également une obligation de
10 chacune des municipalités conformément à la constitution de la République
11 de Bosnie-Herzégovine et en vertu de la loi sur la Défense populaire
12 généralisée de la République de Bosnie-Herzégovine.
13 Q. Très bien, merci. A moins que les Juges n'aient des questions précises
14 concernant ce qui vient d'être évoqué, je vais vous poser des questions
15 concernant vos fonctions initiales au sein de la Communauté croate
16 d'Herceg-Bosna; il ne semble pas y avoir des questions de la part des
17 Juges. Est-ce que vous voulez bien nous expliquer quelles étaient vos
18 fonctions initiales ? Que faisiez-vous au juste ?
19 R. Comme je l'ai déjà indiqué, je suis devenu chef du service chargé du
20 judiciaire et de l'administration générale au sein du Conseil croate de la
21 Défense de la Communauté croate Herceg-Bosna. Je suis donc entré en
22 fonctions vers le 20 juin 1992. Le Conseil de la Défense croate était un
23 organe exécutif de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, c'est-à-dire
24 c'était l'organe exécutif comme émanation de sa présidence. Il était
25 composé du président, du Conseil croate de Défense et de six services, dont
26 certains comptaient des sous-services. Il convient peut-être de dire que
27 c'était un organe civil qui était chargé des ressorts civils au sein de la
28 Communauté croate d'Herceg-Bosna et qu'il était conçu en tant que
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1 l'exécutif de la présidence de la HZ HB. Il était composé du département de
2 défense, de celui des affaires intérieures, celui des finances, du
3 département de la justice et de l'administration générale, du département
4 de l'économie qui comptait plusieurs sous-départements et du département
5 des affaires sociales qui également comptait plusieurs sous-services ou
6 sous-départements.
7 Au moment où je suis devenu le chef de ce département de la justice et de
8 l'administration générale, j'ai reçu un certain nombre de documents de la
9 Communauté croate d'Herceg-Bosna parmi lesquels la décision portant
10 création de la Communauté croate d'Herceg-Bosna en date du 18 novembre
11 1991; la décision portant création du Conseil croate de Défense en date du
12 8 avril 1992; décision statutaire portant l'organisation du pouvoir
13 exécutif de l'Herceg-Bosna et la décision statutaire portant sur les
14 autorités locales et municipales de l'Herceg-Bosna et la décision portant
15 ma nomination. Ce sont les documents qui m'ont été remis le jour où je suis
16 entré au poste en tant que chef de ce service.
17 Q. Très bien. Avant d'entrer dans plus de détails, ce serait bien que nous
18 puissions expliciter quelques points pour qu'il n'y ait pas de confusion.
19 Vous nous avez dit qu'il s'agissait d'un organe civil, "organe exécutif de
20 la présidence" avez-vous dit. Pourriez-vous nous expliquer en quoi
21 consistait la présidence et quels étaient les liens entre cet organe
22 exécutif et la présidence ?
23 R. La présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna était composée de
24 plusieurs paires fondateurs, les personnes qui avaient créé la Communauté
25 croate d'Herceg-Bosna, le 18 novembre 1991. Conformément à la décision
26 portant création de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, d'après leurs
27 fonctions c'étaient ceux qui occupaient des postes les plus hauts placés
28 dans les différentes municipalités faisant parties de la HZ HB, ou bien les
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1 numéros un du HDZ dans ces différentes unités territoriales. Je pense que
2 30 municipalités composaient la HZ HB à ce moment-là et ils avaient leurs
3 représentants au sein de la présidence.
4 Conformément à la décision portant création de la HZ HB, la
5 présidence était conçue en tant que l'organe suprême de gouvernance de la
6 HZ HB, c'est-à-dire l'organe qui allait avoir une fonction législative. Je
7 pense qu'il serait peut-être exagéré de dire que c'était l'organe
8 législatif puisque cet organe n'a jamais fait adopté quelque loi que ce
9 soit. Sous forme de texte de loi, oui, il a adopté des textes mais pas des
10 textes qui auraient le caractère d'une loi. Je pense qu'on peut dire que
11 c'était l'organe suprême de gouvernance dont le rôle était celui de se
12 doter d'actes législatifs. Tandis que le Conseil croate de Défense était
13 l'exécutif, l'organe exécutif de la présidence.
14 Je pense qu'il faut tenir compte de quelque chose, je ne sais pas si
15 vous avez eu l'occasion de préciser cela de par le passé, je pense qu'il
16 convient d'opérer une distinction entre le Conseil croate de Défense d'une
17 part qui est composé des forces armées et des unités armées de la
18 Communauté croate d'Herceg-Bosna, et d'autre part cet organe exécutif.
19 Q. Encore une fois, j'aimerais préciser quelques points. Vous avez dit
20 qu'il s'agissait de la plus haute instance au sein de la Communauté croate
21 d'Herceg-Bosna. Comment décririez-vous les liens entre le HVO, organe
22 exécutif et la présidence ? Quel type d'interaction y avait-il entre ces
23 deux instances tant dans les faits que sur le plan juridique ?
24 R. Je pense que ces relations étaient assez classiques et conformes à ce
25 qui pouvait exister dans les différentes municipalités. Si l'on veut faire
26 une sorte de comparaison, la présidence correspondait assez bien à ce qui
27 était l'assemblée municipale d'une municipalité donnée. Alors que le HVO
28 avait des fonctions exécutives similaires à celles que pouvait avoir
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1 l'assemblée municipale d'une municipalité. A mon sens, cela fonctionnait
2 selon un principe assez similaire, de la même façon dont l'assemblée d'une
3 municipalité choisissait les membres de son comité exécutif, la présidence
4 nommait les membres du comité exécutif du HVO qui avait pour fonction de
5 mettre en œuvre les dispositions qui étaient prises au sein de la
6 Communauté croate d'Herceg-Bosna.
7 Q. Très bien. Plus tôt vous avez mentionné le HDZ, et simplement pour être
8 tout à fait clair, étiez-vous membre du HDZ à l'époque ?
9 R. Non, je n'étais pas membre du HDZ à ce moment-là ni précédemment et je
10 ne l'ai pas été plus tard. Je n'étais membre ni du HDZ de la République de
11 Croatie ni du HDZ de Bosnie-Herzégovine. Je pense qu'au moment où j'ai été
12 nommé dans cette fonction, ni le président Jadranko Prlic, président du
13 HVO, ni le ministre des Finances, Neven Tomic, n'étaient eux-mêmes membres
14 du HDZ.
15 Q. Vous avez dit que Mate Boban vous avait contacté. Nous avons beaucoup
16 entendu parler de Mate Boban dans cette enceinte. Pourriez-vous nous
17 décrire sa fonction ou ses fonctions ?
18 R. Au moment où j'ai pris mes fonctions, M. Mate Boban était à la tête de
19 la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et il était président
20 du HVO. Il l'a été à peu près jusqu'au début du mois de juillet, à peu près
21 jusqu'au 3 juillet, je crois, au moment où a été tenue la troisième séance
22 de la présidence du HZ HB, et je pense qu'à ce moment il avait des
23 fonctions importantes au sein du HDZ de Bosnie-Herzégovine. Je ne suis pas
24 tout à fait sûr s'il était ou non vice-président, mais il était membre de
25 la présidence du HDZ de Bosnie-Herzégovine.
26 Q. Pourriez-vous nous décrire la différence entre le fait d'être président
27 de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et le fait d'être président de la
28 présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna ?
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1 R. Je pense que là aussi il s'agit d'un modèle assez classique. Le rôle de
2 président de la présidence était tenu par M. Boban, mais il était un parmi
3 les pairs qui étaient sur un pied d'égalité. La présidence c'est un organe
4 législatif mais en tant que président de la présidence, le président avait
5 la possibilité de convenir des assemblées futures de la présidence. C'était
6 sa fonction dans laquelle il avait également deux suppléants, il y avait
7 deux vice-présidents à la présidence, alors que l'autre fonction, celle de
8 président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, était une fonction en
9 principe de nature exécutive.
10 Il s'agissait là d'une fonction pour laquelle il n'était pas prévu un
11 poste d'adjoint et M. Boban, dans cette fonction, assumait également celle
12 de commandant des forces armées de la Communauté croate d'Herceg-Bosna,
13 c'est-à-dire l'aile militaire du HVO.
14 Q. Simplement à des fins de comparaison, nous avons entendu des
15 dépositions concernant la manière dont fonctionnait la présidence,
16 l'échelon de l'Etat, et à moins que je ne m'abuse, je suis sûr qu'on me
17 corrigera, nous avons appris que tous les membres de la présidence étaient
18 sur un pied d'égalité et ainsi que le président de la présidence, M. Alijas
19 Izetbegovic, était le premier parmi ses pairs, mais il n'avait pas un rôle
20 prépondérant. Pourriez-vous nous dire au sein de la présidence de la
21 Communauté croate d'Herceg-Bosna, quelles étaient les attributions de M.
22 Boban comparées aux attributions des autres membres de la présidence ? En
23 d'autres termes, était-il également premier parmi ses pairs ou avait-il
24 d'autres attributions supplémentaires au sein de la présidence ?
25 R. Je pense que je dois ici établir une distinction par rapport à
26 différentes périodes. Une première période s'étend entre le 8 avril 1992 et
27 le 15 août de cette même année. Dans cette première période, M. Boban
28 assumait la fonction de président de la présidence de la Communauté croate
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1 d'Herceg-Bosna et en même temps celle de président du HVO. C'est donc cette
2 période du 8 avril au 15 août 1992, ou le 14 août 1992, c'est donc cette
3 période pendant laquelle M. Prlic a été chargé par la présidence d'assumer
4 la fonction du président du HVO.
5 De la même manière, suite à l'adoption des dispositions relatives à la
6 création de la HZ HB, c'est-à-dire le 3 juillet 1992, M. Boban assumait
7 également la fonction de président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna
8 et était commandant des forces armées de la Communauté croate d'Herceg-
9 Bosna.
10 Q. Bien. Parlons donc de cette période.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vous écoute attentivement et
12 c'est très compliqué, excessivement compliqué pour bien comprendre comment
13 ça fonctionnait. Si je fais une erreur, corrigez-moi. Je crois comprendre
14 que du 8 avril 1992 au 15 août 1992, M. Boban est président de la
15 présidence et président du HVO; mais vous avez rajouté que M. Prlic devient
16 président du HVO et, à ce moment-là, M. Boban va être président de la
17 Communauté croate plus commandant du HVO.
18 Alors, pouvez-vous nous préciser parce que ça peut être très confus pour un
19 observateur de l'extérieur. Pouvez-vous nous repréciser cela ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
21 vais essayer. Conformément à la décision portant création de la Communauté
22 croate d'Herceg-Bosna, qui avait été adoptée le 18 novembre 1991, M. Boban
23 était président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, c'est-à-dire
24 président de la présidence de la HZ HB. Et c'était là une de ses fonctions.
25 Le 8 avril 1992, la présidence de la HZ HB a adopté une décision
26 portant création du HVO. Et à ce moment, la fonction de président du HVO
27 était assumée de facto et de jure par M. Mate Boban conformément à cette
28 décision, et cela, jusqu'au 14 août 1992. C'est à ce moment, le 14 août
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1 1992, que la fonction de président du HVO, la fonction de président de
2 l'organe civil du HVO a été confiée à M. Jadranko Prlic.
3 Entre-temps, à savoir le 3 juillet 1992, la présidence de la Communauté
4 croate d'Herceg-Bosna a amendé la décision portant création de la
5 Communauté croate d'Herceg-Bosna. C'est alors que, pour la première fois, a
6 été instituée la fonction de président de la Communauté croate d'Herceg-
7 Bosna en tant qu'organe exécutif et en tant que commandant suprême des
8 forces armées.
9 Je ne sais pas si j'ai clarifié quelque peu la situation.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien jusqu'au 14 août 1992, M. Boban
11 assumait la présidence tant dans sa branche militaire que dans sa branche
12 civile, et le 14 août 1992, la branche civile est maintenant sous la
13 responsabilité de M. Prlic. C'est bien ce que vous nous dites ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exactement cela, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : A compter du 14 août 1992 ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
17 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi mais dans
18 le compte rendu d'audience en anglais on n'a pas la réponse du témoin à
19 votre question. Ligne 22, page 27 du compte rendu.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je vais reposer la question parce qu'elle est
21 importante.
22 Je vous ai demandé si jusqu'au 14 août 1992, M. Boban en sa qualité
23 de président de la présidence du Conseil croate -- enfin de la Communauté
24 croate assumait la fonction civile et militaire, et à compter du 14 août
25 1992, la fonction civile passe sous la responsabilité de M. Prlic. Est-ce
26 bien cela que vous nous dites ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : Et une autre précision, s'il vous plaît.
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1 A la ligne 20 --
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Encore pas de réponse. Il faut que le témoin
3 attende. Il faudrait que le témoin réponde une fois encore à la question
4 qui lui a été posée par le Président.
5 M. STRINGER : [interprétation] Je crois que Me Karnavas et moi-même, nous
6 avons entendu parfaitement le témoin, mais malheureusement ce n'est pas
7 consigné au compte rendu d'audience.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, redites-moi ce que vous avez dit
9 parce que deux fois de suite les interprètes n'ont -- voire la sténotypiste
10 n'a pas enregistrée ce que vous avez dit. Alors vous voulez que je vous
11 repose la question pour la troisième fois ?
12 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être on peut
13 économiser un peu de temps. Dans les deux cas, la réponse a bien été
14 enregistrée mais un petit peu plus tard. Voilà dans le second cas, c'est en
15 page 28, ligne 15 après l'interruption. Dans le deuxième cas, je ne vois
16 plus la page qui s'affiche mais c'est un cas similaire.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : A la ligne 15, il y a marqué "That's correct." Donc
18 vous répondez tel que j'ai posé la question, c'est-à-dire que M. Prlic
19 devient responsable de la fonction civile à compter du 14 août 1992, Boban
20 restant responsable militaire.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exactement cela.
22 M. LE JUGE TRECHSEL : J'aimerais préciser ou vous prie de préciser et de
23 confirmer une autre fois. A la page 26, ligne 23, vous parlez du HZ HB, HZ
24 HB, je pense, qui a été établi le 18 novembre 1991, et M. Boban était
25 président de la présidence de cette communauté. Et plus tard à la page 27,
26 ligne 9, vous dites entre-temps le 3 juillet 1992, la présidence -- à la
27 présidence de la présidence, mais la présidence a changé la décision sur
28 l'établissement de la HZ HB et pour la première fois la position de
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1 président de la HZ HB a été introduite. Il y a donc une claire différence
2 entre le président de la présidence d'une part, et le président d'autre
3 part. Merci.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
5 M. KARNAVAS : [interprétation]
6 Q. Bien. Maintenant que tout cela est tiré au clair, parlons du pouvoir
7 exécutif au sein du HVO quand vous y avez travaillé dans votre département.
8 Pouvez-vous nous dire concrètement de quoi était responsable le HVO ? Nous
9 savons que c'est un organe civil, mais est-ce que vous pouvez nous donner
10 des détails supplémentaires sur ce point ?
11 R. Les compétences du HVO en tant qu'organe civil exécutif étaient
12 définies par une décision statutaire, celle relative au pouvoir exécutif de
13 la HZ HB qui a été complétée ultérieurement par une décision prise lors de
14 la séance du 14 août 1992. Dans ces dispositions, les compétences de chaque
15 département étaient décrites de façon séparée et parmi elles également
16 celles de la partie civile du HVO. Donc le HVO, la branche dont je parle,
17 était conformément aux dispositions de la HZ HB, et il était également de
18 facto un organe exécutif et, en réalité, l'organe exécutif qui assumait les
19 fonctions exécutives au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
20 Q. Bien. Au sein de votre département, pouvez-vous nous expliquer avec
21 précision quelle était la nature de vos fonctions, quel était votre travail
22 quand vous étiez chef de ce département, département chargé de
23 l'administration et de la justice ?
24 R. Le département des affaires juridiques et de l'administration avait
25 principalement pour compétences de créer les conditions nécessaires au bon
26 fonctionnement des tribunaux, des tribunaux ordinaires -- ou plutôt des
27 tribunaux civils. Il s'agissait des tribunaux civils se trouvant sur le
28 territoire de la Communauté croate de l'Herceg-Bosna.
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1 Q. Bien. A partir de cette réponse, j'aimerais qu'on essaie d'aller un peu
2 plus loin. Avant la mise en place de la Communauté croate d'Herceg-Bosna,
3 il existait des tribunaux civils déjà. Pourquoi était-il nécessaire à ce
4 moment-là d'intervenir au niveau de ces tribunaux ? Parce qu'on peut
5 partir du principe qu'ils fonctionnaient correctement.
6 R. Je pense qu'il ne faut pas oublier certains faits. Depuis le moment où
7 la Communauté croate d'Herceg-Bosna est instituée le 18 novembre 1991,
8 entre ce moment donc et le moment où cette HZ HB a réellement commencé à
9 fonctionner le 8 avril, manifestement la Communauté croate d'Herceg-Bosna,
10 durant cette période qui suit immédiatement son institution, n'avait
11 pratiquement aucune activité. Ses activités ne commencent réellement qu'à
12 partir du 8 avril -- pardon ce n'est pas le 8 avril mais le 4 août de cette
13 même année, le moment où une guerre généralisée a éclaté sur le territoire
14 de la Bosnie-Herzégovine, et au moment où tous les organes des autorités
15 centrales de la Bosnie-Herzégovine se sont retrouvés encerclés et isolés
16 des autres parties de la Bosnie-Herzégovine. En disant cela, je pense en
17 particulier à tous les organes de la République de Bosnie-Herzégovine, donc
18 à l'assemblée, au gouvernement, et à la présidence. Suite à cette situation
19 où ces organes étaient isolés des autres parties de la Bosnie-Herzégovine,
20 ils n'étaient plus en mesure d'accomplir leurs fonctions telles que
21 définies par la loi et la constitution. Ces organes n'étaient donc plus en
22 situation ni d'assumer leurs fonctions dans les faits ni de commander aux
23 forces armées afin de défendre le pays, et ils n'étaient pas non plus en
24 mesure d'administrer le territoire d'un point de vue civil.
25 Donc après le 8 avril 1992, aucune voie de circulation, aucune des liaisons
26 avec Sarajevo que ce soit par voie ferroviaire, routière, que ce soit les
27 services de la poste, que ce soit les transactions bancaires, rien de cela
28 ne fonctionnait plus. Il n'y avait plus de possibilités de se rendre à
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1 Sarajevo non plus; quant aux décisions des organes de l'Etat, ces décisions
2 ne pouvaient plus parvenir aux territoires qui se situaient en dehors de la
3 capitale assiégée. Tout cela montre que nous étions bien obligés de régler
4 un certain nombre de questions nous-mêmes. Et de la même façon, si nous
5 n'avions pas pris en charge la défense de notre territoire, ce territoire
6 lui aussi aurait été très rapidement occupé et remis aux forces d'agression
7 et d'occupation.
8 De la même façon, je voudrais souligner le fait qu'au début du mois
9 de mai 1992, la présidence de la Bosnie-Herzégovine a rendu une décision,
10 rendu un décret selon lequel un certain nombre des dispositions des
11 règlements de l'ancienne Yougoslavie ont été rendus nuls. Cela a créé un
12 certain nombre de vides qu'il fallait combler. Je pense ici en particulier
13 aux tribunaux militaires et aux services des procureurs des tribunaux
14 militaires car les dispositions de l'ancienne Yougoslavie qui réglaient ces
15 questions ont été rendues nulles et les nouvelles dispositions n'avaient
16 pas encore été prises.
17 Q. J'aimerais rebondir sur votre question. Vous dites que vous deviez
18 réglementer un certain nombre de choses et je suis sûr que la Chambre de
19 première instance voudrait savoir ce qu'il en est parce que nous avons
20 entendu certains soi-disant experts nous parler de certains règlements qui
21 ont été adoptés. La Communauté croate d'Herceg-Bosna et en particulier vous
22 dans votre travail, est-ce que vous avez participé à la mise en place d'un
23 nouveau système juridique ou d'un nouveau système judiciaire, d'un nouveau
24 système de tribunaux dans cette région ?
25 R. Je tiens à souligner que différentes options ont été envisagées.
26 Finalement l'option qui a été retenue était la suivante : la Communauté
27 croate d'Herceg-Bosna allait reprendre dans leur ensemble tous les textes
28 fédéraux et ceux de la République, donc c'était ça le principe à respecter,
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1 à l'exception des parties où il était indispensable de procéder à des
2 modifications pour tenir compte des nouvelles circonstances, pour pouvoir
3 répondre à de nouvelles circonstances par de nouveaux textes.
4 Q. Je vous interromps. Où était-il nécessaire d'intervenir ?
5 R. Pour être tout à fait concret, c'était dans le domaine de la justice et
6 de l'administration. Il nous a fallu intervenir comme je viens de le dire,
7 il a fallu réagir par rapport à la création des tribunaux militaires et des
8 procureurs militaires, et puis pour ce qui est de l'aspect civil du système
9 judiciaire, il a fallu également entreprendre certaines choses. Il a fallu
10 créer à partir de zéro l'organe qui serait compétent de décider sur des
11 remèdes pour des instances de deuxième degré; c'est-à-dire que la Cour
12 suprême de Bosnie-Herzégovine siégeait à Sarajevo.
13 Un appel, une demande de révision contre une décision de deuxième
14 instance ne pouvait aucunement être soumise, présentée à la Cour suprême de
15 Bosnie-Herzégovine pour qu'une décision compétente soit rendue. C'est la
16 raison pour laquelle la Communauté croate d'Herceg-Bosna a procédé à
17 l'établissement d'une section, je ne sais pas exactement comment on
18 pourrait qualifier cela en anglais, je dirais une section, une chambre de
19 la Cour suprême de la république. Il ne s'agissait pas d'un tribunal
20 propre, mais il s'agissait d'une chambre du tribunal de la cour de Bosnie-
21 Herzégovine dont le siège était à Mostar. Egalement, une section du
22 procureur de la république qui également était basée à Mostar, ainsi qu'une
23 section du tribunal correctionnel de la République de Bosnie-Herzégovine
24 qui se prononçait en deuxième instance sur des remèdes suite à des appels
25 après les décisions de première instance pour ce qui est des affaires dont
26 est saisie la correctionnelle.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une petite précision. Les dates
28 sont importantes, 6 avril 1992, la Communauté européenne et les Etats-Unis
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1 reconnaissent la Bosnie-Herzégovine; 22 mai 1992, adhésion de la Bosnie-
2 Herzégovine à l'ONU. Si je me place dans la position d'un juge à Mostar
3 qui, par exemple, devait s'occuper des divorces ou des affaires à
4 connotation civile, avant cette date, avant le 6 avril il était juge de
5 l'ex-Yougoslavie. Voilà que le 6 avril, son pays, la Bosnie-Herzégovine,
6 est reconnu. Donc il devient jute de la Bosnie-Herzégovine. Mais voilà que
7 parallèlement, la Communauté croate crée également une juridiction. Alors
8 vous, qui avez eu des hautes responsabilités en matière judiciaire, les
9 juges n'ont fait aucune entrave à ce processus où en quelque temps ils
10 passent sous trois autorités, d'abord la Yougoslavie, puis la Bosnie-
11 Herzégovine et puis le Conseil croate. Tout ça s'est passé sans aucun
12 problème ou il y a eu des problèmes, à votre connaissance ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
14 pense qu'il y a un petit malentendu. Lorsque j'en parle, je parle des
15 tribunaux civils de Bosnie-Herzégovine. La Communauté croate d'Herceg-Bosna
16 n'a fondé aucun tribunal à part, aucun tribunal civil, elle n'en a pas
17 créé. Elle a entièrement repris la loi de la république portant sur les
18 tribunaux réguliers. Pour ce qui est de l'organisation des tribunaux
19 civils, telle que cette organisation avait existé en Bosnie-Herzégovine
20 précédemment, ça n'a pas été modifié par une décision ou un décret ou tout
21 autre acte de la HZ HB. Pour préciser, il y avait en Bosnie-Herzégovine des
22 tribunaux municipaux ou comme on les appelait à l'époque des tribunaux de
23 base; ensuite, il y a des tribunaux supérieurs de deuxième instance; et
24 troisième instance, il y avait la Cour suprême de Bosnie-Herzégovine.
25 Pour résumer, la Communauté croate d'Herceg-Bosna n'a établi aucun tribunal
26 nouveau, elle n'a pas touché à l'organisation existante qui était régie par
27 la loi portant sur les tribunaux réguliers de Bosnie-Herzégovine. Lorsque
28 je parle de tribunaux réguliers, je ne sais pas comment on traduit cela, là
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1 je me réfère aux tribunaux civils. Dans cette partie-là, il n'y a eu
2 création d'aucun tribunal si ce n'est ce que je viens de dire à l'instant,
3 à savoir qu'on a créé une section, une chambre du tribunal de la République
4 de Bosnie-Herzégovine, cette chambre était basée à Mostar.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Je prends la situation d'un procureur, qui exécute
6 les instructions de son ministre de la Justice. Et quand le procureur se
7 retrouve sous votre autorité à vous, n'y a-t-il pas un changement dans la
8 chaîne hiérarchique ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non. Il n'y a pas eu de
10 modifications pour ce qui est de la voie hiérarchique, vous avez toujours
11 des tribunaux de première instance, des tribunaux supérieurs ou de seconde
12 instance, et puis la Cour suprême de la République de Bosnie-Herzégovine
13 qui comptait à partir de ce moment-là sa section à Mostar. Je pense qu'il
14 convient de souligner que de l'autre côté, la partie bosnienne, à partir du
15 moment où le conflit a éclaté en Bosnie-Herzégovine, des districts ont été
16 créés, Zenica de Tuzla et Bihac. Là aussi, sur le territoire de ces
17 districts, on a créé des sections de la Cour suprême de Bosnie-Herzégovine
18 pour ces mêmes raisons, les mêmes raisons pour lesquelles on les a créées à
19 Mostar. Parce que comme je l'ai déjà dit, les remèdes pour ce qui est des
20 arrêts en deuxième instance ne pouvaient pas physiquement atteindre
21 Sarajevo. La Cour suprême ne pouvait pas se prononcer là-dessus puisqu'elle
22 n'était pas en mesure de les envoyer à Sarajevo.
23 Si je vous ai bien compris, pour ce qui est de votre question qui porte sur
24 l'organisation, vous me demandez quels étaient les textes de lois qui
25 étaient adoptés. Par principe, ce qui a été repris par la Bosnie-
26 Herzégovine c'était repris également par la HZ HB. Dans leur ensemble, tous
27 les textes fédéraux, s'ils n'avaient pas été déclarés invalides, donc toute
28 la législation de l'ex-Yougoslavie à moins qu'il y ait une loi ou un décret
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1 précis qui les invalidait. On a appliqué des lois et des règlements de la
2 république, et pour ce qui est de la HZ HB, uniquement les textes adoptés
3 par la HZ HB.
4 Je ne sais pas si j'ai été clair.
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. En tout cas, en ce qui me
6 concerne, je crois que vous avez répondu.
7 Mais j'aimerais poser une question toute simple, simplement afin de
8 préciser le compte rendu. Je crois connaître la réponse mais j'entends les
9 interprètes parler de tribunaux civils, et la manière dont je comprends ce
10 terme, enfin il y a deux acceptions possibles : civil par opposition à
11 pénal, ou civil par opposition à militaire. Je crois que c'est plutôt cette
12 dernière notion que vous avez à l'esprit, n'est-ce pas ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Par opposition aux tribunaux militaires,
14 lorsque j'ai parlé de tribunaux civils, non ce n'était pas par opposition
15 au pénal. C'était la différence entre civil et militaire que j'avais à
16 l'esprit.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup. C'est bien ce que je
18 pensais, mais je pensais que ce serait bon que ce soit précisé au compte
19 rendu.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il va être l'heure de faire la pause, je crois
22 qu'il faut qu'on se repose tous parce que c'est assez compliqué. Alors 20
23 minutes de pause.
24 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprétation, remplacez le 4 août par le 8 avril
25 à 15 heures 30. Merci.
26 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.
27 --- L'audience est reprise à 16 heures 13.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, vous avez la parole.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pendant la pause, nous avons
3 révisé la liste des pièces que nous vous avions soumises pour vous aider
4 conformément à ce que vous nous aviez demandé. Il y a là de nouveaux
5 exemplaires que nous avons soumis au greffier, vous verrez qu'il y a une
6 colonne, où on voit la rubrique, pièce déjà versée. Donc les autres pièces
7 n'ont pas encore été versées. Cela devrait aider les Juges à savoir quelles
8 pièces ont déjà été versées au dossier. J'espère que cela pourra vous
9 aider.
10 Q. J'aimerais maintenant poursuivre là où nous en étions restés. Nous
11 parlions du pouvoir judiciaire, vous nous avez dit qu'il n'y a pas eu de
12 nouveau système judiciaire mis en place. Pourriez-vous nous dire si les
13 juges qui étaient déjà en fonction, qui travaillaient déjà pour les
14 tribunaux ou le bureau du procureur ont été remplacés par d'autres ?
15 R. Il m'est difficile de vous apporter une réponse directe suite à cette
16 question. Je pense qu'il faudrait peut-être apporter quelques explications.
17 Après la libération de Mostar - Mostar qui est la capitale de l'Herzégovine
18 - le problème qui s'est posé, c'est que de concert avec l'armée populaire
19 yougoslave on a vu partir un grand nombre de juges qui étaient
20 d'appartenance ethnique serbe. Je ne sais pas si les Juges de cette Chambre
21 savent qu'avant que la guerre n'éclate en Bosnie-Herzégovine, la majorité
22 des juges sur ce territoire étaient des Serbes, c'est-à-dire que
23 proportionnellement par rapport au nombre d'habitants, les Serbes étaient
24 considérablement plus représentés dans les organes judiciaires de Bosnie-
25 Herzégovine. A partir du moment où un grand nombre de juges serbes ont
26 quitté Mostar, le problème auquel on a dû faire face c'était de voir
27 comment remplir les postes vacants. Il a fallu réagir vite pour que le
28 système judiciaire puisse fonctionner, c'est-à-dire au niveau du tribunal
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1 municipal de Mostar, et également pour ce qui est du tribunal de seconde
2 instance, sans parler des tribunaux militaires qu'il a fallu faire
3 fonctionner. Et comme vous l'avez déjà mentionné, il a fallu créer une
4 chambre de la Cour suprême, et une section du procureur de la République,
5 et ceci a nécessité un grand nombre de juges.
6 Je tiens à souligner que l'immeuble du tribunal municipal de Mostar avait
7 été complètement détruit par l'armée populaire yougoslave, c'est un
8 bâtiment qui a brûlé, et l'ensemble des archives du tribunal de Mostar sont
9 parties en flammes. Comme je l'ai déjà dit, il a fallu réagir, mais on
10 n'avait aucun contact avec le ministère de la Justice basé à Sarajevo, nous
11 n'avions pas non plus de contact avec le Parlement de Bosnie-Herzégovine,
12 comme vous le savez, il ne se réunissait pas à ce moment-là. Il nous a donc
13 fallu remplir les postes aux tribunaux civils, tribunaux ordinaires, et il
14 a fallu créer des tribunaux militaires, des bureaux de procureurs
15 militaires, et il a fallu nommer des juges à leurs postes.
16 Je tiens à ajouter également que mon département chargé de la justice et de
17 l'administration avait compétence sur des tribunaux civils, tandis que les
18 tribunaux militaires relevaient de la compétence pour l'essentiel du
19 département de la Défense. Cette structure n'était pas un phénomène nouveau
20 parce que du temps de l'ex-Yougoslavie les tribunaux militaires quant à eux
21 étaient exclusivement de la compétence du personnel militaire et ils
22 étaient créés dans les différentes régions militaires. Les juges militaires
23 et les procureurs militaires n'étaient pas des civils, c'étaient des
24 militaires. Pour ce qui est des tribunaux militaires, ils étaient basés
25 dans les centres des différentes régions militaires. C'étaient des
26 bâtiments militaires où ils étaient installés. Ils avaient leurs locaux.
27 Ils étaient en uniforme militaire lorsqu'ils officiaient et c'était tous
28 des membres de la JNA qui avaient leur grade respectivement par rapport aux
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1 fonctions qu'ils exerçaient.
2 A titre de comparaison, nous avons mis sur pied une structure analogue de
3 tribunaux militaires au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai deux questions d'ordre général
5 tout à fait distinctes. Tout d'abord, une question concernant les pouvoirs
6 de l'organisation judiciaire dans l'ex-République fédérale de Yougoslavie.
7 La juridiction civile relevait-elle du pouvoir fédéral ou du pouvoir des
8 Etats, comme en Suisse où les juridictions civiles dépendent des cantons ?
9 Et la deuxième question : quelle était la position du bureau du
10 procureur par rapport au ministère de la Justice ? Est-ce qu'il y avait une
11 structure hiérarchique ou une certaine indépendance du procureur ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je tâcherai de répondre pour commencer à la
13 deuxième question posée. Les bureaux du procureur, conformément au système
14 judiciaire tel qu'il a existé dans l'ex-Yougoslavie - et là je parle des
15 bureaux du procureur civils - étaient totalement indépendants dans
16 l'exercice de leur fonction. Donc c'était un organe de l'Etat, mais
17 indépendant, qui s'acquittait de ses fonctions conformément à la
18 constitution et à la loi, mais d'une manière complètement indépendante.
19 Est-ce que vous pourriez me reposer votre première question ? Je ne
20 suis pas certain de vous avoir bien compris.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je le ferai volontiers. Je suis
22 désolé si je n'ai pas été assez clair.
23 Dans une fédération comme l'ex-République de Yougoslavie, les compétences
24 sont réparties entre la confédération et les différentes parties
25 constitutives de la Fédération, telle que la Serbie, le Monténégro, la
26 Slovénie, et ainsi de suite. Pour en venir à l'organisation du système
27 judiciaire des tribunaux, la nomination des juges, et ainsi de suite, est-
28 ce que cette question relevait de la compétence de l'Etat fédéral ou de la
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1 compétence des entités distinctes telles que la Croatie, la Bosnie-
2 Herzégovine, et ainsi de suite ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. J'ai compris votre question.
4 Dans chacune des républiques de l'ex-Yougoslavie, le système judiciaire
5 était organisé à trois niveaux. Il y avait d'une part des tribunaux de base
6 ou des tribunaux municipaux, la dénomination dépendait des républiques,
7 c'étaient soit des tribunaux de base soit des tribunaux municipaux, c'était
8 la première instance; il y avait des tribunaux supérieurs ou des tribunaux
9 de district, et sous cette dénomination-là, ces tribunaux ont existé dans
10 les différentes républiques, donc ils s'appelaient simplement soit
11 tribunaux supérieurs, soit de district; il y avait une Cour suprême dans
12 chacune des républiques; et il y avait une Cour suprême fédérale qui avait
13 un certain nombre de compétences pour réagir en cas d'infraction ou de
14 violation des fois fédérales ou de la constitution fédérale. Il y avait les
15 trois niveaux dans chacune des républiques, et en plus, il y avait la Cour
16 suprême fédérale qui avait son siège à Belgrade. Et là je parle de
17 tribunaux civils, par opposition aux tribunaux militaires.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup. Oui, c'est une
19 réponse qui est utile, mais qui ne répond pas exactement à ma question. Qui
20 élisait les juges ? Est-ce que les juges étaient élus ou nommés par les
21 autorités croates pour prendre l'exemple des autorités croates ou les
22 autorités fédérales. Est-ce qu'ils étaient rémunérés par le budget de la
23 Croatie ou le budget fédéral ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que nous ne parlons pas de la Croatie
25 maintenant, mais il me semble avoir compris votre question puisque nous
26 sommes en train de parler de la Bosnie-Herzégovine. Les tribunaux
27 municipaux, les tribunaux de base, ils étaient élus de la part des
28 assemblées municipales et leur financement provenait du budget municipal.
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1 Là je parle du système judiciaire du temps de l'ex-Yougoslavie. Lorsqu'il
2 s'agissait de tribunaux ou de bureaux du procureur de seconde instance, là
3 ils étaient financés depuis le budget des municipalités dont le territoire
4 était placé sous leur compétence. La cour Suprême de la république et les
5 procureurs de la république, ils étaient créés et établis par chacune des
6 républiques respectivement et les juges étaient nommés par l'assemblée de
7 la république et leur financement provenait du budget de la république.
8 Quant aux juges de la cour fédérale, la cour Suprême fédérale yougoslave;
9 pour l'essentiel, toutes les républiques pouvaient y être représentées avec
10 un certain nombre de représentants, c'est l'assemblée yougoslave qui les
11 élisait et le financement là provenait du budget yougoslave.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup. Voilà qui répond à
13 ma question. Pardon, Monsieur Karnavas.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Il reste une question d'ordre technique.
15 Parce que, Monsieur le Témoin, vous avez dit quelque chose, c'est la
16 première fois que je l'entends pendant -- depuis cinq ans que je suis ici
17 et ça me paraît très important. Vous avez dit que le bureau du procureur
18 est indépendant, alors même que nous pensions que le procureur est dans une
19 hiérarchie, et là vous avez dit le bureau du procureur est indépendant.
20 Alors à partir de ce que vous dites, je vais vous citer un cas et vous
21 allez me dire quelle est la solution.
22 Imaginons qu'à Mostar il y ait des individus dont on ne sait pas
23 exactement qui ils sont, mais ils font une violation de domicile, ils
24 pénètrent à l'intérieur d'un domicile, ils volent, ils matraquent les gens,
25 et cetera. Il y a une enquête qui est faite par la police civile, voire la
26 police militaire, pensant peut-être qu'il y a des militaires, mais on ne
27 sait pas trop, et ça arrive dans les mains du procureur civil. Si le
28 procureur civil qui est indépendant ne fait rien, ne donne aucune suite,
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1 est-ce une situation qui a pu se passer ou qui ne peut pas se passer ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes sortes de situations peuvent se
3 présenter. Lorsque j'ai dit qu'il y a indépendance dans l'exercice de leurs
4 fonctions, ce sont d'après la loi des organes indépendants, les bureaux du
5 procureur. Le code pénal de l'époque prévoyait que le procureur, à chaque
6 fois qu'il a été mis au courant de la commission d'un crime, était tenu de
7 lancer une enquête, engager une procédure pour constater si la commission
8 de l'acte a effectivement eu lieu et si tel était le cas, le cas échéant,
9 de prendre des mesures afin d'identifier l'auteur ou les auteurs présumés
10 de cet acte. Je ne sais pas si j'ai cité verbatim la loi mais c'était le
11 sens de la disposition en question. En passant par ces différents
12 instruments, le procureur agissait, donc il s'agissait ici du procureur
13 civil, c'était en passant par le biais de la police civile, pouvait
14 demander des compléments d'information. Donc en passant par la police
15 recueillir des preuves.
16 A la différence d'une loi anglo-saxonne, voire même à la différence
17 du code de procédure pénale aujourd'hui en vigueur en Bosnie-Herzégovine. A
18 l'époque, le bureau du procureur ne se chargeait pas de diligenter une
19 enquête. L'enquête relevait du juge d'instruction, c'est-à-dire le
20 tribunal, par la personne du juge d'instruction. Et c'était uniquement à
21 partir de ce moment-là que le procureur pouvait dresser un acte
22 d'accusation, à partir du moment où les résultats de l'enquête révélaient
23 s'il y avait suffisamment d'éléments permettant de dresser un acte
24 d'accusation à l'encontre de tel ou tel individu. En vertu du code pénal
25 qui est aujourd'hui en vigueur en Bosnie-Herzégovine, le bureau du
26 procureur peut engager une enquête de manière indépendante.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais à l'époque s'il y a une enquête et
28 que le juge d'instruction ne fait rien -- non si le procureur ne fait pas
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1 d'acte d'accusation, au-dessus de lui, vous ou une autre autorité ne peut
2 rien faire ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans tous les cas, il existe une
4 responsabilité qui va être assumée. Ce que d'autres instances, disons des
5 organisations politiques ou des organes des instances de pouvoir, ils
6 avaient la possibilité à ce moment-là de relever de ses fonctions ce juge-
7 là, ne pas le nommer, par exemple, ou ne pas renouveler son mandat à
8 l'expiration du mandat. Le mandat était généralement de quatre ans.
9 Aujourd'hui, cependant les juges, les procureurs sont élus à vie à leur
10 poste, leur fonction de juge. Donc il y avait ces deux instruments qui
11 étaient possibles, d'une part, le relever de ses fonctions dans l'ex-
12 Yougoslavie, c'était rare ou ça ne se produisait jamais. Nous n'avons pas
13 beaucoup de cas, d'exemples de ce type. Et puis l'autre possibilité, à
14 l'expiration de son mandat de quatre ans, un juge ou un procureur qui ne
15 s'acquittait pas correctement de ses fonctions n'était pas réélu.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est comme ce Tribunal. Bien.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puisque nous parlons de ces
18 questions. Tout d'abord, je crois que nous avons bien distingué entre les
19 procureurs et les juges. Destituer un juge c'est vraiment une question très
20 épineuse, très sensible. Alors je vais limiter ma question aux procureurs.
21 Si un procureur refuse de donner suite, d'engager une procédure, y avait-il
22 des recours possibles pour les victimes, par exemple, que ce soit un
23 recours adressé à un supérieur hiérarchique du procureur ou un recours
24 adressé à un tribunal ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] En principe, par rapport à la législation en
26 vigueur à l'époque, la victime pouvait s'adresser à un procureur
27 immédiatement supérieur s'il y avait une défaillance dans le fonctionnement
28 du procureur compétent, la victime pouvait s'adresser au procureur
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1 supérieur ou celui du district. Ça dépendait un petit peu de la région où
2 cela se situait en Yougoslavie, et s'il y avait un grief de la part de la
3 victime à l'encontre du tribunal municipal de district ou supérieur, il
4 était possible de s'adresser au procureur de la république qui, lui, à son
5 tour pouvait engager des mesures disciplinaires à l'encontre des procureurs
6 qui, du point de vue de l'hiérarchie, étaient des subalternes, et
7 probablement il y avait la possibilité de proposer qu'il soit relevé de ses
8 fonctions. Comme je l'ai déjà dit, ce n'est pas quelque chose qui s'est
9 souvent produit. Ou bien, il y avait la possibilité de se servir de ce
10 deuxième instrument, donc on ne renouvelait pas le mandat. C'était ce qui
11 était le plus souvent appliqué dans ce genre de situation.
12 Mme NOZICA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
13 Messieurs les Juges. Vous avez posé une question très spécifique. Je pense
14 qu'on pourrait l'aborder pendant le contre-interrogatoire, mais pourquoi ne
15 pas tirer cela au clair dès maintenant si le procureur a renoncé à
16 diligenter une enquête, dans ce cas-là, la victime pouvait-elle s'adresser
17 au tribunal pour continuer la procédure. Il me semble que c'est dans ce
18 sens-là que vous avez posé votre question, Monsieur le Juge Trechsel, et ce
19 serait peut-être une bonne chose que le témoin nous l'explique. Est-ce que
20 la victime pouvait poursuivre la procédure au pénal ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans un certain nombre de cas cette
22 possibilité était prévue par la loi, et dans la pratique également c'était
23 appliqué en Bosnie-Herzégovine et dans le reste de l'ex-Yougoslavie.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie pour ces précisions.
25 Maître Karnavas.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, merci. Mon éminente consoeur ne devrait
27 peut-être pas présumer que je ne connais pas le système du simple fait que
28 je ne suis pas originaire de la région. Ils pourront bien attendre leur
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1 tour, mais je leur suis gré de leur soutien.
2 Q. Maintenant pour rebondir sur les questions posées par le Juge Trechsel
3 concernant les nominations, vous nous avez expliqué de manière assez
4 détaillée la manière dont ces nominations avaient lieu. Puisque vous nous
5 avez dit plus tôt qu'il y avait des postes vacants en raison du conflit,
6 pourriez-vous nous dire comment l'on a pourvu à ces postes vacants au sein
7 de la Communauté croate d'Herceg-Bosna ?
8 R. Pour ce qui est des juges et des procureurs dans les instances civiles,
9 ils étaient nommés conformément à la législation de la HZ HB par la
10 présidence de la HZ HB, et ce, sur proposition émanant du département de la
11 justice et de l'administration. Quant à la procédure elle-même plus
12 concrètement, donc au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, le
13 département de la justice et de l'administration générale s'adressait, pour
14 des propositions et des avis s'il s'agissait du tribunal municipal, à la
15 municipalité; s'il s'agissait d'une instance supérieure, il s'adressait à
16 plusieurs municipalités. Puis suite à la formulation de ces propositions ou
17 l'aval donné par des municipalités, une proposition était formulée à
18 l'adresse de la présidence de la HZ HB. Celle-ci à son tour rendait sa
19 décision sur la nomination des juges à des postes aux tribunaux civils. Il
20 y avait une procédure comparable, à l'identique ou analogue pour la
21 nomination des juges ou des procureurs des instances militaires. Cela après
22 que la proposition adressée à la présidence de la HZ HB dans cette
23 situation-là était présentée par le chef du département de la défense,
24 c'est-à-dire le département de la défense.
25 Q. Très bien, merci. Donc il s'agirait de la présidence et non du
26 président ?
27 R. C'était la présidence, excusez-moi, si j'ai dit autre chose c'était un
28 lapsus.
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1 Q. Très bien. Encore quelques questions avant d'aborder un autre thème.
2 Autant que vous le sachiez, est-ce que qui que ce soit a été destitué,
3 démis de ses fonctions en raison de son appartenance ethnique ?
4 R. C'est de manière catégorique que je dois affirmer devant ce Tribunal
5 concernant la Communauté croate d'Herceg-Bosna, ce genre de situation ne
6 s'est pas produit. C'est à l'opposé, tous les juges d'appartenance ethnique
7 serbe qui sont restés sur le territoire de la Communauté croate d'Herceg-
8 Bosna, ou plutôt, qui ne sont pas partis avec l'armée populaire yougoslave,
9 ils sont restés à leur poste. Ils ont continué d'exercer les fonctions qui
10 avaient été les leurs précédemment, ou ils ont même été promus. Aucun
11 d'entre eux n'a perdu son poste ou n'a été rétrogradé.
12 Dans la structure des tribunaux civils au sein de la Communauté croate
13 d'Herceg-Bosna, les juges qui étaient en poste à l'époque, parmi eux les
14 Bosniens ou les Musulmans de Bosnie étaient plus nombreux que les Croates,
15 même si par rapport à la population les Croates étaient majoritaires. A
16 cela je dois ajouter que la présidente du tribunal du district de Mostar a
17 été pendant tout ce temps une femme bosnienne, Mme Ziba Nozic. Le président
18 du tribunal militaire était un musulman, Enes Memic; et pendant quelque
19 temps le président d'une chambre du tribunal militaire était, me semble-t-
20 il, Samir Huzic.
21 Q. Puis une dernière question avant de commencer à étudier les documents.
22 Nous savons -- et je vais avancer dans le temps, nous savons qu'à un moment
23 donné la Fédération était créée suite à l'accord de Washington, puis il y a
24 eu les accords de Dayton ultérieurement qui ont mis fin à la guerre.
25 Pouvez-vous nous dire si les décisions prises par les tribunaux, y compris
26 l'instance de la Cour suprême instituée à Mostar, est-ce que ces décisions
27 ont été remises en cause et annulées du fait que ces tribunaux n'avaient
28 pas été régulièrement institués ou n'oeuvraient pas dans le cadre du
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1 système juridique de la Bosnie-Herzégovine ?
2 R. Non. Pour autant que je le sache aucun cas de ce type ne s'est produit.
3 Q. Bien.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] A moins que les Juges n'aient d'autres
5 questions.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez dit, c'est la première fois qu'on
7 entendait ça. Quand la JNA est partie, il y a des juges serbes qui ont
8 quitté leur fonction. A votre connaissance, quel était leur ratio, 10, 20,
9 30, 40, 50 % ? Il y a combien de juges qui sont partis et qui ont laissé de
10 par leur départ une situation certainement problématique. Vous avez des
11 chiffres ou pas ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant de l'ensemble du territoire de la
13 Communauté croate d'Herceg-Bosna, je pense que c'était entre 15 et 20, et
14 un certain nombre d'entre eux sont restés. Ils sont restés à leur poste,
15 ils ont continué d'exercer leur métier de juge.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites 15 à 20, 15 à 20 % ou 15 à 20 juges ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Quinze à 20 %. Là, je tiens compte de
18 l'ensemble du territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien. Nous allons maintenant commencer à
21 parcourir certains documents. J'aurais besoin de l'aide de l'Huissier afin
22 qu'il présente le classeur au témoin. Merci beaucoup.
23 Q. Je vais commencer par examiner très rapidement les documents qui ont
24 institué la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Avant même d'étudier le
25 premier document, peut-être pourriez-vous nous décrire brièvement, nous
26 donner une définition sur ce qui était la Communauté croate d'Herceg-Bosna,
27 d'après vous ?
28 R. Je pense que cela relèverait de la spéculation si je m'avançais à dire
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1 autre chose que ce qui est dans l'article 1, instituant la HZ HB, il
2 s'agissait d'une organisation, d'une instance politique avec des
3 compétences politiques, culturelles, sociales, et qui est tout à fait
4 clairement définie dans l'article 1 de la disposition l'instituant.
5 Q. Je vais vous interrompre. Je veux être bien sûr qu'on parle bien de la
6 même chose, document P 00079, P 00079.
7 R. Oui. C'est exact.
8 Q. Bien. Reportons-nous au document suivant, un document qui ressemble
9 beaucoup au précédent, 1D 00488, une décision portant établissement de la
10 Communauté croate d'Herceg-Bosna. J'y fais référence parce qu'il y a
11 d'autres documents qui accompagnaient celui-ci ou qui y sont liés.
12 Veuillez, s'il vous plaît, vous reporter à l'article 2 et nous donner des
13 observations au sujet de cet article.
14 R. Qu'il s'agisse du premier ou du second document, les dispositions sont
15 identiques. Je pense que cela revient au même --
16 Q. Monsieur Buntic, il faut que vous vous reportiez au même document que
17 moi pour que les choses soient bien claires. C'est 1D 00488, c'est le
18 document que nous examinons. Le deuxième.
19 R. L'article 2 stipule : "La Communauté croate d'Herceg-Bosna est
20 constituée des municipalités de Jajce, Kresevo, Busovaca, Vitez, Novi
21 Travnik, Travnik, Kiseljak, Fojnica, Livno, Kupres, Bugojno, Gornji Vakuf"
22 --
23 Q. Monsieur Buntic, nous avons le document sous les yeux inutile donc d'en
24 donner lecture. Veuillez simplement nous expliquer ce qu'il en est. Vous
25 dites qu'il s'agit de secteurs. Est-ce qu'on est en train de partager le
26 territoire de Bosnie-Herzégovine ?
27 M. STRINGER : [interprétation] Objection, je crois qu'il s'agit là d'une
28 question directrice, qui suggère une réponse au témoin.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je reformule.
2 Q. Si vous vous reportez à l'article 1 et ensuite à l'article 2 du
3 document.
4 R. Je pense, qu'en ce qui concerne cet article, il faut souligner qu'il
5 s'agit des territoires des municipalités. Lorsque l'on parle des
6 territoires que recouvrent ces municipalités, je ne suis pas sûr comment
7 cela se traduit vers l'anglais, cette notion de domaine qui est recouvert.
8 Mais il est tout à fait certain qu'en croate cette expression du domaine
9 des municipalités en question n'a pas un sens exactement équivalent à celui
10 de territoire. Il s'agit en croate de deux expressions différentes ayant
11 des sens différents. Donc les domaines de ces municipalités et leurs
12 territoires ne sont pas équivalents.
13 Dans la disposition que nous examinons, l'on ne parle pas des
14 territoires au sens strict de ces municipalités, mais de leurs domaines. A
15 mon sens, lorsque l'on essaie de traduire cela vers l'anglais, il faudrait
16 parler des parties qui constituent ces municipalités, et cela est
17 d'ailleurs confirmé par les indications qui sont fournies entre
18 parenthèses. C'est ainsi que derrière la municipalité de Skender Vakuf,
19 entre parenthèses on trouve Dobratici. Et après la municipalité de
20 Trebinje, entre parenthèses on a Ravno.
21 Q. Bien. Nous allons passer au document suivant, P 00152, P 00152. Un
22 document qui porte la date du 8 avril 1992 : "Décision relative à la
23 création du Conseil de la Défense croate."
24 R. Il s'agit d'un document que j'ai déjà eu l'occasion de commenter dans
25 mes déclarations précédentes. Il est tout à fait patent dans ce document
26 qu'il institue le HVO, le Conseil de Défense croate en tant qu'organe
27 suprême de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, et que c'est la défense du
28 peuple croate, ainsi que d'autres peuples faisant partie de cette
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1 communauté qui serait attaquée par quiconque, qui constitue la compétence
2 de ce HVO.
3 Q. Avant de passer un autre document, je suis sûr que tout le monde a
4 remarqué qu'à l'article 2 il est question d'un espace souverain pour la
5 Communauté croate d'Herceg-Bosna. Est-ce que vous avez des observations à
6 faire sur ce terme ?
7 R. Je pense -- non, je ne pense pas, je suis tout à fait certain, que la
8 Bosnie-Herzégovine constitutionnellement est définie comme l'Etat de trois
9 peuples; partant de là, la souveraineté, d'après toujours cette même
10 constitution, procède du peuple et lui appartient.
11 Je n'ai pas d'autre explication, quant à ce qui figure à l'article 2.
12 Q. Bien. Avez-vous participé à la rédaction de cet instrument juridique,
13 si vous vous en souvenez, bien entendu ?
14 R. Non, car il s'agit là de l'un des documents qui m'ont été remis lorsque
15 j'ai pris mes fonctions le 26, ils avaient déjà été constitués avant.
16 Q. Bien. Document suivant --
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. J'aimerais que nous
18 réexaminions l'article 2 du document. Ici, me semble-t-il du moins, nous
19 avons la troisième référence à un espace, une notion géographique. On a eu
20 d'abord territoire, et on nous a expliqué que c'était une mauvaise
21 traduction de quelque chose qui était plutôt un domaine, une zone; et ici
22 nous avons la notion d'espace, ce n'est ni un territoire, ni un domaine, ni
23 un secteur, qu'est-ce que ça veut dire "espace", que veut dire ce mot ici,
24 à quoi ça fait référence ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce terme "d'espace" est un troisième mot qui
26 peut être utilisé en croate et qui, à mon avis, est beaucoup plus proche du
27 mot "domaine" que du mot "territoire". Je ne suis pas un linguiste qui
28 pourrait donner de chacune de ces expressions une définition précise, mais
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1 c'est mon propre avis que j'expose ici quant au sens de ces expressions
2 dans l'usage quotidien.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Je ne vais pas vous dire que
4 les choses se sont beaucoup éclaircies, mais bien entendu on ne peut
5 attendre de vous que les réponses que vous pouvez nous donner. On ne peut
6 pas en attendre beaucoup plus. Merci beaucoup donc.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel de cette
8 question.
9 J'aimerais que l'on se penche sur le document suivant P 00155, P 00155, un
10 document qui porte la date du 10 avril 1992.
11 Q. On y voit la mention suivante : "Commandement". J'imagine qu'il s'agit
12 encore une fois d'un document qui précédait votre nomination, n'est-ce pas
13 ?
14 R. Pour ce qui est de ce document, j'ai appris sa connaissance peut-être
15 autour du 11 ou du 12 avril 1992, au moment où j'étais commandant adjoint
16 de la Défense, donc à l'époque où j'étais encore dans les forces armées, et
17 par conséquent, avant de prendre mes fonctions de directeur du département
18 de la justice et de l'administration. Et je pense qu'il faut ici souligner
19 que jusqu'au 10 avril 1992, chaque municipalité disposait de ses propres
20 forces armées. Dans la municipalité de Citluk, elles s'appelaient les
21 unités de Défense populaire. A Siroki Brijeg, elles portaient un nom
22 différent. A Ljubusko, un nom encore différent, et jusqu'au 10 avril, ces
23 unités municipales intervenaient sous des appellations différentes et sous
24 l'autorité des cellules de Crise municipales.
25 A cette époque, dans l'espace de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, on
26 trouvait également des forces armées sous la dénomination de HOS. J'ai déjà
27 souligné mon appartenance à l'organisation de la Défense populaire de
28 Citluk et j'ai insisté sur le fait qu'en tant que membre de cette
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1 structure, je n'ai pas réussi à obtenir que ces unités se battent sous
2 l'appellation de Défense territoriale. J'ai déjà énoncé les raisons de
3 cela. Donc le document en question, je le connais depuis le 11 ou le 12
4 avril 1992.
5 Q. Je vais vous interrompre. Nous ne sommes pas en train de parler de la
6 défense nationale comme on peut le lire à la ligne 19, je crois. Non, nous
7 sommes en train de parler de la Défense territoriale, c'est ce à quoi vous
8 avez fait référence au cours du premier volet d'audience, n'est-ce pas ?
9 R. C'est exact.
10 Q. Bien. Et les observations que vous avez faites précédemment au sujet du
11 discrédit jeté sur la Défense territoriale, on en voit l'illustration dans
12 ce document-ci, n'est-ce pas ?
13 R. Ce document fournit également des exemples montrant la façon dont la
14 Défense territoriale qui existait jusqu'alors a été discréditée. Et sur le
15 fait que ce nom n'aurait pas été en mesure de motiver les combattants dans
16 l'accomplissement de leur devoir. Comme on peut le voir, il est mis
17 l'accent sur une appellation unique de toutes les unités des forces armées
18 de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
19 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Maître Karnavas --
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous avons une autre question.
21 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Maître Karnavas, excusez cette
22 interruption. Mais s'agissant de ce document que nous avons actuellement
23 sous les yeux, le document P 00155, j'aimerais que l'on voie ce qui figure
24 au début du deuxième paragraphe de ce document : "La décision de la
25 présidence de Bosnie-Herzégovine relative à la Défense territoriale de
26 Bosnie-Herzégovine, également en date du 8 avril 1992, est une décision
27 hâtive du point de vue politique en ce moment. Depuis le début de l'attaque
28 contre le peuple croate, cette même présidence a gardé le silence
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1 s'agissant des crimes commis contre les Croates."
2 La question que j'ai à poser au témoin est la suivante, serait-il en mesure
3 de nous rappeler cette décision de la présidence de Bosnie-Herzégovine. Je
4 comprends bien qu'il n'a peut-être pas le document sous les yeux, mais
5 étant donné qu'il s'agit là d'un des motifs les plus importants, l'une des
6 raisons qui explique que le commandement du HVO a été mis en place,
7 j'estime qu'il serait bon et utile de nous rappeler de quel type de
8 décision il s'agissait, je parle de la décision de la présidence de Bosnie-
9 Herzégovine, qui est présentée ici comme une décision hâtive. Pourquoi est-
10 ce qu'on estimait que ce document était inutile et sans intérêt ? Voilà la
11 question que j'ai à poser au témoin.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que la présidence elle-même a apporté
13 la meilleure réponse à cette question en changeant, très peu de temps après
14 la date citée, le nom des forces armées de Bosnie-Herzégovine. C'est alors
15 que la présidence a choisi de nommer ses forces armées de la Bosnie-
16 Herzégovine, armée de Bosnie-Herzégovine, cela s'est produit peu de temps
17 après que la présidence ait décidé de renoncer à l'appellation de Défense
18 territoriale. Et j'ai déjà dit qu'à mon sens cela était dû au fait que le
19 nom de Défense territoriale était discrédité.
20 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'aimerais, bien entendu, pouvoir
21 consulter le document, mais comme ce n'est pas possible, je vous remercie
22 de toute manière de cette réponse. Merci.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Le document figure au prétoire électronique,
25 et nous avons parlé longuement de ce document avec M. Akmadzic. Pièce 1D
26 01219. Je ne sais pas si les Juges souhaitent consulter ce document et
27 poser des questions à notre témoin à ce sujet. Je n'ai pas le document en
28 main, mais j'ai sa cote et son numéro de référence, 1D 01219.
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1 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie, Maître.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous en prie.
3 Bien. Passons au document suivant. Il s'agit en l'occurrence du document 1D
4 00899, 1D 00899.
5 Q. Nous avons ici un document qui porte la date du 15 mai 1992. Une
6 décision statutaire. J'aimerais que vous la consultiez. Vous avez trouvé le
7 document ? Vous avez bien trouvé le document, Monsieur le Témoin?
8 R. Oui, je l'ai devant moi. Est-ce que la question a déjà été posée.
9 Q. La première question c'est de savoir si vous avez le document sous les
10 yeux, parce que j'aime procéder par ordre, moi.
11 Bien. Expliquez-nous qu'est-ce que c'est ce document, cette décision
12 statutaire ou réglementaire en date du 15 mai 1992 ? Et en répondant à
13 cette question, peut-être pourrez-vous nous expliquer pourquoi dans le
14 préambule on parle du 18 novembre 1991 ?
15 R. Il s'agit là encore d'un document pour lequel j'ai déjà eu l'occasion
16 de dire que c'était l'un de ceux qui m'ont été remis au moment où j'ai pris
17 réellement mes fonctions de directeur du département de la justice et de
18 l'administration de la HZ HB. Je connais ce document, il s'agit d'une
19 décision statutaire et j'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une décision
20 portant sur l'institution provisoire de la compétence exécutive et de
21 l'administration sur le territoire de la HZ HB, ayant rapport au HVO dont
22 il est dit qu'il a compétence pour exercer le pouvoir exécutif sur le
23 territoire de la HZ HB, donc dans l'article 1.
24 Dans l'article 2, la décision stipule que les membres du HVO sont
25 élus par la présidence de la HZ HB, et cela sur proposition du président du
26 HVO.
27 Q. Je vais vous interrompre. Une fois encore je précise que je procéderai
28 par ordre. Article 3 : "Le Conseil de la Défense croate relève de la
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1 présidence de la HZ HB…"
2 Qu'est-ce que ça veut dire, parce que plus bas il est question de
3 responsabilité collective s'agissant des décisions, et cetera. J'aimerais
4 que vous nous fassiez bénéficier de vos observations sur ce point.
5 R. A mon avis, l'article 3 stipule quelque chose de tout à fait classique,
6 à savoir que les membres de l'organe exécutif sont toujours responsables
7 devant l'organe législatif qui les a mis en fonction. Dans le paragraphe 2,
8 il est stipulé que le président, les vice-présidents, les directeurs des
9 services et les autres membres du HVO sont collectivement responsables des
10 décisions prises par le HVO. Il est également stipulé qu'ils sont
11 responsables à titre individuel, chacun dans leur domaine.
12 Q. Je vais vous interrompre. Comment interpréter la chose, parce que dans
13 mon pays d'origine nous n'avons pas d'organe exécutif collectif. Nous avons
14 généralement une personne qui dirige, qui est au sommet. Ici, quand il est
15 question du président, vice-président, chef de département et autres
16 membres seront responsables collectivement de toutes les décisions, qu'est-
17 ce que ça veut dire ? Si une décision doit être prise, comment est-elle
18 prise cette décision par cet organe collectif ? Qui vote ? En fin de
19 compte, c'est la décision de qui ?
20 R. Concrètement parlant, s'agissant du HVO de la HZ HB, la prise de
21 décision se passe par la majorité des voix, la majorité des voix de
22 l'ensemble des membres du HVO.
23 Q. Est-ce que ça inclut -- non, je vous interromps. Est-ce que ça concerne
24 également les chefs de département, les autres membres, est-ce que tout le
25 monde votait ?
26 R. Le droit de vote lors des réunions était donné à tous les chefs de
27 département, des directions et des sous-directions ou départements et sous-
28 départements. Encore une fois, c'est à la majorité des voix qu'on prenait
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1 les décisions et celles-ci étaient signées par le président du HVO.
2 Q. Je vous interromps. C'était la décision de qui ? Parce que vous nous
3 dites que c'était signé par le président. Il faut que ceci soit précisé à
4 cause des dépositions de certains témoins à charge, de la position adoptée
5 par le bureau du Procureur. C'était la décision de qui ? Nous savons
6 maintenant que c'était le président qui signait la décision une fois que le
7 vote de tous était exprimé. Mais c'était la décision de qui ?
8 R. En l'occurrence, c'était la décision du HVO en tant qu'organe
9 collectif.
10 Q. Bien. Nous allons passer au document suivant, 1D 00174, très
11 brièvement.
12 M. STRINGER : [interprétation] Excusez cette interruption.Monsieur le
13 Président, pour le compte rendu d'audience, avec la pièce 1D 00899, selon
14 la liste de la Défense, ce document n'a pas encore été versé au dossier
15 mais nous pensons que ce document figure déjà au dossier sous la cote
16 suivante P 00206. Dans cette version, il y a une traduction officielle et
17 non pas une traduction officieuse comme c'est le cas pour le document ici.
18 Je pense que ce serait bon d'utiliser le document que je viens d'identifier
19 pour le dossier.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Bon, que ce soit officiel ou pas officiel,
21 nous sommes tout à fait prêts à ce que le document soit traduit à nouveau.
22 Parce que pour certains documents, nous ne nous opposons pas à une nouvelle
23 traduction pour voir ce qu'il en était de la traduction initiale. Mais
24 j'entends bien M. Stringer, nous le remercions de son intervention. Nous
25 comprenons sa préoccupation et nous demandons que les deux traductions
26 soient révisées encore une fois.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Avant de passer à un autre document,
28 j'ai une question pour le témoin.
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1 Qui étaient les autres membres de cette institution, parce que le
2 terme est vraiment vague. Mais qui étaient ces membres ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] L'article 3 énumère uniquement les fonctions.
4 Quant à savoir quels sont les départements qui existaient à l'époque, je
5 les ai déjà énumérés. Mais il faudrait peut-être le répéter. Au sein du HVO
6 --
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, je crois que c'est à l'article
8 2 qu'on fait également mention d'autres membres, on en a déjà parlé et je
9 crois que ce ne sont pas les chefs des départements, ce sont d'autres
10 personnes. Il y a les chefs des départements et d'autres membres. Moi ce
11 qui m'intéresse ce sont ces autres membres. Qui sont-ils ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] On entend par là les directeurs des sous-
13 départements, car comme nous l'avons déjà vu, il y avait des départements
14 de l'économie et des affaires sociales qui comptaient plusieurs sous-
15 départements. Sur-le-champ, je n'arrive pas à retrouver les noms de tous
16 les sous-départements mais je sais qu'il y en avait plusieurs. Le HVO avait
17 aussi ses commissions tout comme un certain nombre de bureaux créés par
18 lui.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pouvez-vous me dire quel était leur
20 nombre en tout, combien de personnes y avait-il au sein du HVO au sens de
21 l'article 2, alinéa 1 de cette décision statutaire ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je viens de le dire je ne suis pas
23 certain quel est le nombre de sous-départements qui ont existé, je ne
24 voudrais pas me lancer dans des conjectures.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourriez-vous nous donner une idée
26 générale ? Y en avait-il 20, 30, 50, 100, même ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que le département de l'économie, là
28 encore je ne suis pas certain, c'est juste des conjectures, il y avait
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1 trois, quatre, ou cinq sous-départements. Egalement pour ce qui est des
2 affaires sociales, dans ce département là il y en avait disons plus que
3 trois à ce département. Je sais qu'il y avait un sous-département chargé de
4 la santé, de l'éducation, de l'assistance sociale. Mais je ne saurais pas
5 vous dire les appellations exactes ni leur nombre exact. Nous pouvons le
6 voir dans un autre document, nous allons le voir je pense, un document qui
7 a été adopté lors d'une réunion de la présidence au mois d'août, le 14
8 août. Il me semble que nous y avons la liste des départements et des sous-
9 départements avec leurs compétences. Il y a très probablement un document
10 sur la base duquel nous allons pouvoir constater cela.
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous vous fournirons une réponse concrète et
13 précise ou peut-être par l'intermédiaire du témoin suivant. Nous prenons
14 bonne note de l'importance que revêt cette question. Malheureusement, je
15 dois l'avouer cela m'avait échappé.
16 Q. Quoi qu'il en soit, 1D 00174, très rapidement. Nous y voyons que la
17 décision concerne votre nomination et la date est le 15 mai 1992. J'imagine
18 que c'est un document exact, n'est-ce pas ?
19 R. Oui, c'est exact. Ce document m'a été lui aussi remis au moment où j'ai
20 pris mes fonctions.
21 Q. Très bien. Venons-en au document suivant, P 00250, il s'agit d'une
22 décision statutaire concernant le pouvoir exécutif municipal et
23 l'administration municipale. Nous voyons que ce document est daté du 13
24 juin 1992, et il serait peut-être intéressant pour les Juges de la Chambre
25 d'en prendre connaissance dans une certaine mesure. Sans parcourir le
26 document de manière détaillée, j'aimerais précisément attirer votre
27 attention sur l'article 6 où il est dit : "Le HVO du HZ HB contrôle la
28 licéité des activités du HVO municipal."
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1 Et il y est dit : "…donnera des instructions au HVO municipal dans les
2 domaines qui relèvent de sa compétence."
3 Pourriez-vous nous dire quel était l'esprit de l'article 6, pour autant que
4 vous le sachiez, quel était l'objectif visé par l'article 6, et question
5 plus importante encore, comment en terme pratique le HVO de la HZ HB
6 pouvait-il mettre en œuvre l'article 6, compte tenu des réalités sur le
7 terrain à l'époque ?
8 R. Pour commencer, je pense qu'il faut reparler de la situation telle
9 qu'elle a été jusqu'à ces dates-là, le mois de juin 1992, donc revoir en un
10 mot le moment de la création de la HZ HB, au moment où des affrontements
11 ont éclaté sur la totalité du territoire de la Bosnie-Herzégovine. A
12 l'époque, la défense d'une part et puis la vie civile devait pouvoir
13 continuer à fonctionner. Dans cette situation d'isolement, lorsque tous les
14 organes centraux de l'Etat se sont trouvés coupés, l'assemblée, le
15 gouvernement, et la présidence, il a bien fallu que quelqu'un se charge
16 d'organiser la vie civile sur ce territoire et il a bien fallu que
17 quelqu'un défende le pays. Concrètement, c'étaient les municipalités qui se
18 sont chargées de cela. Chacune s'est dotée d'un certain nombre de textes de
19 lois et de règlements. Elles l'ont toutes fait respectivement et je ne peux
20 pas vous dire quel est le nombre d'actes qui ont été adoptés de ce type-là
21 par municipalité, mais le fait est qu'à ce moment-là, il a bien fallu
22 qu'elles prévoient une façon de régir toutes les questions civiles et
23 militaires et qu'à ce moment-là un nombre très considérable de textes ont
24 été adoptés dans chacune des municipalités. Il a bien fallu qu'elles gèrent
25 la situation telle qu'elle s'est présentée à partir de ce moment-là. Là
26 encore, à titre d'exemple.
27 En tant que commandant de la défense de Citluk, j'ai vu venir des gens me
28 demander à qui il fallait payer les impôts parce que tout simplement il ne
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1 leur était pas possible de s'acquitter de leurs impôts sur le plan de
2 l'Etat parce que la comptabilité ne fonctionnait pas entre la république et
3 la Yougoslavie, et à partir du début du mois d'avril, il n'y avait plus non
4 plus de comptabilité au niveau de la République de Bosnie. Ça ce n'est
5 qu'un seul exemple. Il a fallu que les municipalités adoptent des textes
6 sur le plan du financement, de la santé, de l'éducation. Les PTT ne
7 fonctionnaient pas, le système bancaire, les réseaux ferroviaires ou
8 routiers. A ce moment-là, il a fallu se doter de textes de lois, de
9 règlements, les municipalités il a bien fallu qu'elles les adoptent. La
10 finalité de cet article c'est d'essayer d'harmoniser ce nombre énorme de
11 dispositions qui avaient déjà été adoptées. Est-ce que de fait réellement
12 c'était possible et dans quelle mesure, ça c'est une autre question. C'est
13 un processus long et pénible et le HVO a dû faire face à cela pendant toute
14 cette période qui va de sa création jusqu'à la sécession de l'existence de
15 la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Tout simplement il n'a pas été facile
16 de gérer tout ça et de résoudre tout cela.
17 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Pardon.
18 J'aimerais poser quelques questions à ce sujet car il me semble que cette
19 décision revêt une grande importance. Prenons l'article 2, où il est dit
20 que : "Le HVO municipal est composé d'un président, des chefs de bureau, et
21 d'autres membres qui sont nommés et destitués par le Conseil de Défense
22 croate de la Communauté croate d'Herceg-Bosna."
23 Et il y a également l'article 7 d'après lequel : "Les questions
24 administratives qui relèvent des compétences de la municipalité sont gérées
25 par les services administratifs qui sont institués conformément aux
26 décisions prises par le HVO municipal, exception faite du département de la
27 défense et de celui de l'intérieur."
28 Ma question est la suivante : jusqu'à cette date, le 15 mai 1992, je suis
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1 sûr qu'il y avait des autorités exécutives municipales et des
2 administrations sur tout le territoire, et ici on ne voit rien qui nous
3 révèle ce que sont devenues les personnes démises de leurs fonctions.
4 J'aimerais que vous nous éclairiez sur cette question parce que, bien
5 entendu, si quelqu'un ou lorsque quelqu'un était démis de ses fonctions que
6 ce soit au sein du conseil municipal ou de l'administration, cela avait
7 certainement pour conséquence des paiements à effectuer pour ne prendre
8 qu'un exemple. Donc ma question porte sur la mise en œuvre de cette
9 décision statutaire à cette époque.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, si je me souviens bien vous
11 m'avez posé votre question au sujet de l'article 2. Donc par analogie,
12 comme on a régi la structure du HVO au niveau de la HZ HB, c'est au niveau
13 municipal qu'on a procédé également. Donc il y a le président, le
14 directeur, à la différence du HVO de la HZ HB où il y a des départements,
15 ici ils s'appellent des bureaux dans cette décision. Donc la définition est
16 comparable des autres membres qui sont nommés et relevés de leurs fonctions
17 par la présidence de la HZ HB. Donc je pense que cette partie-là est
18 claire.
19 Pour ce qui est de la deuxième question que vous m'avez posée, si je l'ai
20 bien comprise, pourquoi on ne nomme pas les chefs des bureaux de la défense
21 et de l'intérieur, c'est quelque chose qui a été repris du système
22 précédent, parce que dans le système précédent, donc du temps de l'ex-
23 Yougoslavie et du temps où existait la République de Bosnie-Herzégovine, le
24 bureau ou le département chargé de la défense et de l'intérieur c'est
25 quelque chose qui ne relevait pas des attributions de la municipalité. La
26 municipalité n'avait pas la compétence de nommer les chefs ou les
27 représentants, mais d'après la législation en vigueur à l'époque c'était de
28 la compétence des organes de la République. Donc ces bureaux dans le
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1 système antérieur ne relevaient pas de la compétence des municipalités. Je
2 pense qu'à mon sens, ça a été repris par analogie.
3 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci pour cette réponse. En fait,
4 ma deuxième question ne portait pas sur ces deux exceptions, les bureaux ou
5 départements de la défense et de l'intérieur puisque ces structures-là me
6 sont déjà familières. Ma question portait plutôt sur le sort réservé à ceux
7 qui ont pu être destitués, car il ne faut pas perdre de vue que la
8 situation était difficile et tendue, et je suis sûr qu'un bon nombre de
9 personnes travaillant au sein de l'administration n'étaient pas Croates,
10 mais Musulmans ou Serbes, pour ceux qui sont restés sur place. Donc ma
11 question est de savoir : y avait-il des recours juridiques dont
12 bénéficiaient les personnes qui ont été démises de leurs fonctions à
13 l'époque, que sont-elles devenues ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Si on estimait que ses droits avaient été
15 bafoués, on avait plusieurs options, plusieurs possibilités d'agir. D'une
16 part, s'il y avait une décision ou un acte par lequel on était licencié ou
17 relevé de ses fonctions, on pouvait engager une procédure administrative
18 s'il s'agissait d'un organe de l'Etat. S'il s'agissait d'un licenciement
19 dans une entreprise, l'individu concerné pouvait engager une procédure dans
20 le domaine du droit de travail devant des tribunaux du travail avec les
21 gestionnaires ou devant un tribunal général. Donc il pouvait y avoir un
22 procès relevant du droit de travail.
23 Si, en revanche, c'était au pénal qu'on se situe, ou si l'intéressé pensait
24 qu'il était victime d'un crime, d'une infraction, ils pouvaient déposer une
25 plainte au pénal contre le suspect.
26 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci beaucoup.
27 M. KARNAVAS : [interprétation]
28 Q. Compte tenu des questions que je vais vous poser concernant ce
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1 document, il serait peut-être bon de vous demander de nous décrire les
2 municipalités et leurs liens avec le HVO, le pouvoir exécutif et bien
3 entendu le rôle quelles ont joué au sein de la présidence. Tout d'abord,
4 quel était le degré d'indépendance ou de dépendance des municipalités à
5 l'époque ? Je vous demanderais de donner une réponse très précise pour que
6 nous puissions accélérer.
7 R. Le document a été adopté le 13 juin 1992. A ce moment littéralement
8 aucune autre structure du pouvoir n'existait, n'était en place, en dehors
9 de celles qui existaient à l'échelon municipal, ni à l'échelon fédéral, ni
10 à l'échelon de la république, n'étaient en place des institutions comme
11 celles de la HZ HB qui seraient en mesure de fonctionner correctement et
12 d'exercer un pouvoir exécutif. La seule chose qui fonctionnait à cette
13 époque, donc au 13 juin 1992, étaient les organes municipaux, et à ce
14 moment nous ne disposons pas de la branche civile du HVO, elle n'est pas
15 encore dans l'état où elle sera le 14 et le 15 août.
16 Q. Bon. Très bien. Plus tôt je vous ai posé des questions concernant la
17 présidence. Alors à l'échelon de la municipalité, qui était membre de la
18 présidence, je parle donc de la présidence de la Communauté croate
19 d'Herceg-Bosna ?
20 R. La présidence de la HZ HB comportait les responsables de plus haut rang
21 des autorités municipales ou les membres du HVO. La présidence de la HZ HB
22 était donc constituée des membres de plus haut rang soit des municipalités,
23 soit des conseils municipaux du HVO; si bien que l'organe administratif le
24 plus élevé de la HZ HB était formé de représentants municipaux des
25 municipalités appartenant à la HZ HB.
26 Q. Dans le concret, nous parlons du président de la municipalité, n'est-ce
27 pas ?
28 R. Le président ou le directeur, selon l'appellation en vigueur
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1 localement.
2 Q. Très bien. Vous avez également mentionné que cet organe collectif,
3 cette présidence était composée, entre autres, des présidents des
4 municipalités ou des plus hauts responsables des municipalités et que cette
5 présidence était hiérarchiquement supérieure au HVO, l'organe exécutif ?
6 R. C'est exact. Et la présidence pouvait relever de ses fonctions à chaque
7 instant tout membre, tout individu membre du HVO, tout comme d'ailleurs le
8 HVO dans son ensemble, si le travail de ces derniers n'était pas
9 satisfaisant. Et si cela se produisait, donc je le répète, le HVO dans
10 l'ensemble ou un membre individuel pouvait être relevé de ses fonctions.
11 Q. Cela me ramène à l'article 6, est-ce que vous ne voyez pas une
12 contradiction, car il y est dit que : "Le HZ HB HVO contrôle la légalité,
13 la licéité du travail effectué par le HVO municipal et donne des
14 instructions au HVO municipal dans les domaines qui relèvent de sa
15 compétence."
16 Mais comment peut-on contrôler la licéité des activités d'un organe qui est
17 hiérarchiquement supérieur, notamment si cet organe a même la compétence de
18 vous destituer. N'y a t il pas là une contradiction ?
19 R. Personnellement c'est assez clair. Il est assez difficile à l'égard de
20 quelqu'un qui a le pouvoir de vous nommer, de vous instituer dans vos
21 fonctions et qui a le pouvoir de vous en relever, il est difficile donc
22 d'agir à l'égard d'une telle entité. Il s'agit d'une situation qui, de fait
23 comme de jure, est conflictuelle. Mais c'est ainsi qu'il en a été disposé.
24 Par conséquent, à mon avis, on ne pouvait pas vraiment s'attendre à
25 ce que le HVO soit en mesure de relever le président d'une municipalité ou
26 le directeur d'une municipalité de ses fonctions alors même que le HVO
27 était responsable précisément devant ces personnes. Mais cet état de fait,
28 c'est par cette décision qu'il a été institué. Dans la pratique, de
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1 nombreux problèmes apparaissaient à cause de cela, mais c'est là la
2 décision telle qu'elle a été prise.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la deuxième pause, il nous restera une
4 heure après.
5 Donc on va faire 20 minutes de -- à moins qu'il y avait une question
6 tout de suite, Maître Karnavas, vous vouliez --
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je pense
8 qu'en fait c'est un bon moment pour faire la pause.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous faisons 20 minutes de pause.
10 --- L'audience est suspendue à 17 heures 37.
11 --- L'audience est reprise à 17 heures 57.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
13 Maître Karnavas, vous avez la parole.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
15 Q. Passons à un autre sujet maintenant qui a trait à des événements -- à
16 des textes législatifs qui sont entrés en vigueur ou se sont déroulés vers
17 le 3 juillet 1992. On va commencer par le document 1D 1670, DD 01670.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Vous constaterez, Messieurs les Juges, que
19 dans la version en anglais il est dit qu'il y a eu une réunion le 3 juillet
20 1993, en fait il faut lire 1992 et pas 1993.
21 Q. Avez-vous trouvé le document, Monsieur le Témoin ?
22 R. Oui, j'ai le document devant moi. Ce que vous venez de dire est exact,
23 ce document remonte au 3 juillet 1992, et non pas 1993.
24 Q. Si on regarde ce document on va y trouver votre nom et il est exact,
25 n'est-ce pas, que vous avez assisté à cette réunion de la présidence de la
26 Communauté croate d'Herceg-Bosna; c'est bien le cas, n'est-ce pas ?
27 R. C'est exact j'étais présent.
28 Q. Bien. On peut constater au paragraphe 8 qu'il y a eu une discussion et
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1 qu'un certain Blago Artukovic de Zenica est intervenu, ensuite vous
2 répondez à ce monsieur, je souhaite simplement l'indiquer. Je ne vais poser
3 aucune question à ce sujet, la Chambre en aura peut-être quant à elle une
4 ou deux à vous poser. Ce qui m'intéresse plus c'est le numéro II, le grand
5 II en chiffres romains, ça se trouve à la page suivante, page 5 pour nous.
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'espère que je ne suis pas trop
7 insupportable, Maître Karnavas, mais ici il est dit qu'il y a une liste des
8 présents qui fait partie intégrante du document et qui est jointe au
9 document, d'après ce que je peux lire. Or, cette liste des présents, je ne
10 la trouve pas et je pense que c'est un document qui ne serait pas sans un
11 certain intérêt.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous, et
13 vous comprenez bien entendu que si j'avais ce document je n'hésiterais pas
14 à vous le montrer. Malheureusement, tout ce que j'ai, c'est ce que je vous
15 montre, c'est le document que nous avons sous les yeux, toutes mes excuses.
16 Je vais continuer à chercher cette liste --
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] -- nous pouvons peut-être demander au témoin
19 s'il se souvient de la réunion, il pourra peut-être nous donner des noms de
20 participants, cela peut-être pourra intéresser la Chambre.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, je ne crois pas. Ce que
22 j'aurais aimé voir, c'est la liste dans son ensemble. Ça aurait pu me
23 permettre aussi de mieux comprendre un certain nombre d'autres choses en
24 rapport avec une question précédente.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien.
26 Q. Si on se reporte au grand II : "Décision modifiant la décision relative
27 à l'établissement de la HZ HB."
28 Ici, on voit votre intervention -- vous donnez les raisons, l'objectif qui
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1 explique cette décision portant modification. Est-ce que vous pouvez nous
2 donner quelques explications à ce sujet ?
3 R. Il est exact que j'ai été présent à cette réunion, à savoir à la
4 réunion de la présidence de la HZ HB, et au cours de cette même réunion,
5 j'ai participé aux débats et j'ai présenté aux membres de la présidence les
6 raisons et les buts d'un certain nombre de dispositions qui ont été
7 adoptées lors de cette réunion de la présidence. Je me souviens qu'un
8 certain nombre de dispositions ont été prises et que parmi elles, l'une des
9 plus importantes concernait la décision instituant la HZ HB. Au cours de
10 cette réunion, cette décision a été amendée et complétée. En disant cela,
11 je pense avant tout à l'article 7 --
12 Q. On va y arriver. Procédons par ordre. Commençons d'abord par ce
13 document-ci, je ne veux surtout pas ici vous agresser ou vous interrompre,
14 mais nous avons une procédure qui s'applique ici et il faut être très
15 strict.
16 Grand VII, vous intervenez au sujet du décret portant confiscation des
17 biens de certains occupants et transfert de ces biens à l'HZ HB, et vous
18 donnez un certain nombre d'explications. Nous pouvons voir ces documents,
19 mais j'aimerais que vous nous disiez quelques mots au sujet de ce qui
20 figure ici.
21 R. Je peux y aller. Je pense les points 6 et 7 sont très similaires. Il
22 s'agit de deux dispositions semblables. Le premier décret concerne la
23 saisie de certains biens de l'ex-armée populaire yougoslave sur le
24 territoire de la HZ HB. Concernant ce décret, j'estime que le but de ce
25 décret était avant tout de protéger les biens en question, les biens qui
26 ont été abandonnés par l'armée populaire yougoslave, ou plus précisément il
27 s'agissait de biens dont le HVO avait pris possession lors de conflits avec
28 l'armée populaire yougoslave.
Page 30300
1 Je pense qu'il faut ici souligner qu'il s'agit de biens sociaux pour
2 lesquels il n'est pas possible d'affirmer que la propriété en revenait à
3 quelqu'un de précis. Car ce concept même de propriété sociale est un
4 concept sui generis qui est difficile à expliciter à toute personne qui n'a
5 pas pris part ou participé au système juridique de l'ex-Yougoslavie. Je
6 pense que si cela l'on traduisait cela de façon simple, comme on le dit
7 souvent chez nous, il s'agirait de biens qui n'appartiennent à personne ou
8 qui appartiennent à tous, comme on le dit couramment, ou encore de
9 propriété sociale. Il faut également souligner que la JNA a procédé avec
10 tous les biens qui étaient sous le régime de la propriété sociale, les
11 biens mobiliers sous le régime de la propriété sociale, et qui n'étaient
12 pas propriété de la JNA, je parle ici des navires, des hélicoptères, des
13 avions, de l'artillerie, des armes d'infanterie, tous ces éléments ont été
14 confisqués par la JNA alors qu'il s'agissait de biens qui appartenaient à
15 tous les citoyens de l'ex-Yougoslavie. Ces mêmes biens ont été utilisés par
16 la JNA aux fins d'agression et d'occupation de la Bosnie-Herzégovine.
17 Par les présentes dispositions, la HZ HB a pris possession de ces biens. Il
18 s'agissait de biens dont elle ne pouvait pas prendre possession au nom d'un
19 tiers, cela n'était pas possible, et c'est pour cela que ces biens ont été
20 repris par la HZ HB en son nom propre et à son propre compte. En
21 définitive, ces biens entraient dans le problème de la succession de l'Etat
22 de l'ex-Yougoslavie.
23 Q. Bien. Maintenant je vais passer à --
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, mais
25 là nous abordons un point qui ne manque pas d'intérêt ni d'importance. Pour
26 ce qui est des autres décrets envisagés, ce procès-verbal nous indique
27 qu'ils ont été adoptés à l'unanimité. Or ce n'est pas ce qui est mentionné
28 pour le grand VII. Est-ce que ça veut dire que le texte en question n'a pas
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1 été adopté, ou est-ce qu'une erreur s'est glissée dans le procès-verbal ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que toutes les dispositions ont été
3 prises à l'unanimité.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge, est-ce que vous parlez du
5 décret concernant les compagnies publiques ?
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, je parle du décret concernant
7 la confiscation des biens des occupants, mais je suis prêt à croire le
8 témoin sur parole s'il me dit que ce décret a été adopté. A ce moment-là,
9 je partirai du principe que le procès-verbal en question n'est pas tout à
10 fait fiable.
11 M. KARNAVAS : [interprétation]
12 Q. Bien. Passons maintenant au numéro IX. Il s'agit du décret relatif à
13 l'organisation, au travail et au domaine de compétence du système
14 judiciaire. On y voit votre nom, j'aimerais que vous parcouriez rapidement
15 ce passage, on constate que vous parlez d'une sorte de vide juridique qui
16 est apparu suite à l'adoption par la République de la Bosnie-Herzégovine
17 d'un décret sur la non-application du règlement fédéral, et cetera. Vous y
18 expliquez ensuite d'autres choses.
19 Sans entrer dans les détails, est-ce que vous maintenez ce que vous
20 nous avez dit précédemment ici et ce qu'on peut lire dans ce compte rendu ?
21 R. Je maintiens cela, et je pense qu'il s'agissait du décret de la
22 présidence de Bosnie-Herzégovine du 2 mai 1992. Concernant les tribunaux
23 militaires et les procureurs militaires, il existait effectivement un vide
24 qu'il fallait combler. J'estime qu'il faut aussi souligner que c'est
25 important, bien que ce décret précis n'a jamais été concrètement appliqué.
26 Il n'a jamais été publié au journal officiel de la HZ HB, et par
27 conséquent, il n'a jamais pris force de loi, il n'a jamais été mis en
28 œuvre.
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1 Un nouveau décret a été adopté lors de la réunion du 17 octobre 1992,
2 réglant ces mêmes questions.
3 Q. On va y arriver. Je vous le promets, on va y arriver. Passons au
4 document suivant, P 00 --
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, en regardant les délibérations
6 pour l'adoption de ces décrets, l'impression qui se dégage pour un
7 observateur extérieur, c'est qu'il y a un véritable débat démocratique
8 entre tous les membres qui participent à la discussion, et que M. Boban est
9 une voix parmi d'autres, et que l'adoption de ce décret est une adoption
10 collective qui engage tout le monde. Est-ce qu'on se trompe en disant cela
11 ou pas ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Les minutes de cette réunion montrent qu'il
13 n'y a pas eu de contestation de ce décret et qu'il n'y avait pas eu de
14 propositions d'amendement ou que ce décret soit complété. Concernant ce
15 décret particulier, il n'y a pas eu de débat et qu'en tant que tel, il a
16 été adopté à l'unanimité. Il est un fait qu'au cours des réunions de la
17 présidence, les débats ne se développaient pas de la même façon que ce à
18 quoi l'on peut s'attendre dans une assemblée régionale ou dans le cadre de
19 l'assemblée d'un Etat. Il existe probablement différentes raisons à cela.
20 L'une d'elles est probablement liée à la structure même de la présidence de
21 la HZ HB, il s'agissait d'une structure liée à un seul parti. Je pense que
22 dans cette structure de la présidence, il n'y avait pas à mon avis de
23 représentants d'autres partis politiques. Je ne suis pas sûr, mais s'il y
24 en avait, je pense qu'ils étaient très peu nombreux.
25 Si bien que nous étions en présence d'une présidence marquée par ce
26 phénomène d'un parti unique.
27 Dans ce cadre, il n'y avait pas une force d'opposition qui aurait
28 permis qu'un décret soit contesté ou que des opinions dissidentes soient
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1 avancées.
2 Les participants de cette réunion ont débattu d'un certain nombre
3 d'autres questions. Peut-être qu'il est intéressant de se reporter à ce que
4 l'on peut trouver, je crois, en page 2. Mijo Tokic de Tomislavgrad au point
5 4 aborde une question, et je mentionne cela par rapport à un point qui été
6 soulevé précédemment. Ce monsieur de Tomislavgrad affirme que Rama et le
7 front de Kupres se trouvent en totalité sur le territoire de la
8 municipalité de Tomislavgrad, ce qui signifie que la municipalité de
9 Tomislavgrad supporte tous les frais aussi bien de Kupres que de Rama.
10 De cela s'ensuit ce dont nous débattions précédemment, à savoir que
11 les municipalités devaient s'en sortir elles-mêmes seules, et souvent
12 étaient obligées de pourvoir aux besoins financiers d'autres municipalités.
13 Je pense que cela ressort clairement de cet exposé de M. Mijo Tokic de
14 Tomislavgrad. Mais cela se rapportait à la question précédente, et je vous
15 prie de m'excuser d'être revenu sur ce point.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Passons maintenant au document suivant P 00302, P 00302. Il s'agit
19 d'une décision portant création de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Si
20 on se reporte à la fin de ce document on constate qu'il y est indiqué
21 Mostar, 18 novembre 1991; mais si on regarde la toute première page du
22 document, on voit qu'il y est question de septembre 1992; et si on se
23 penche sur ce qui figure dans le préambule on voit qu'il est indiqué, la
24 décision du 18 novembre 1991 a été modifiée le 3 juillet 1992. Tout ceci
25 est un petit peu confus. Peut-être serez-vous en mesure de nous expliquer
26 ce qu'il en est en quelques mots. Précisons cette chose d'abord, avant que
27 je n'attire l'attention de tous ceux qui sont présents ici dans ce prétoire
28 sur ce qui figure à l'article 7.
Page 30304
1 R. Il s'agit d'une question d'ordre technique. Il est tout à fait
2 indubitable que c'est le 18 novembre 1991 qu'a été prise la décision
3 instituant la HZ HB. Etant donné qu'à cette époque la HZ HB ne disposait
4 pas de son propre journal officiel, elle n'était pas en mesure de publier
5 cette décision de façon officielle. Ça a été publié mais pas de façon
6 officielle. Comme on peut le voir ici, cette décision a été modifiée le 3
7 juillet 1992 au sujet de quoi je me suis déjà exprimé, au sujet de ces
8 amendements du 3 juillet 1992.
9 Ce n'est que dans le premier numéro du journal officiel, en septembre
10 1992, que cette décision a été publiée dans son texte intégral, à savoir
11 dotée de ces amendements dans son texte intégral.
12 Q. C'est bon. Avant d'examiner l'article 7, je ne sais pas s'il y a des
13 questions de la part des Juges au sujet du I, raisons, motifs, c'est le
14 préambule si l'on peut dire. Ce sont les raisons qui expliquent la mise en
15 place de la communauté. Donc s'il n'y a pas de questions sur ce point, je
16 vais passer à l'article 7.
17 L'article 7 on peut y lire :
18 "L'autorité suprême sera conférée aux personnes qui sont mentionnées
19 ci-après, le président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna…
20 "Deuxièmement, la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna
21 qui sera constituée de représentants du peuple croate et des organes
22 municipaux détenant le pouvoir de leur chef, de leur responsable principal
23 et des présidents des Conseils croates de la Défense municipaux."
24 Je crois que vous en avez déjà parlé, vous nous avez expliqué que M.
25 Boban était devenu président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, c'est
26 de ça que vous parliez par rapport à ses autres fonctions, dont celle de
27 président de la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna; est-ce
28 bien cela ?
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1 R. C'est exact. Je pense que j'ai déjà eu l'occasion de répondre à cette
2 question, quand j'ai répondu à une question du Président. Effectivement,
3 cette décision introduite pour la première fois à la fonction de président
4 de la présidence de la HZ HB en tant que fonction indépendante et qui
5 n'existait pas avant le 3 juillet 1992.
6 Q. C'est très bien. Cela nous est très utile. Pour préciser les choses,
7 parce que précédemment vous avez expliqué qu'à un moment donné M. Mate
8 Boban était également président du HVO, j'aimerais que très rapidement on
9 retourne à un autre document, je m'excuse auprès de tout le monde parce que
10 je n'ai pas évoqué la question précédemment, le document 1D 00174, décision
11 portant sur votre nomination. Là on voit Mate Boban, président du HVO et de
12 la HZ HB. Au moment où il vous nomme à votre poste, le 15 mai 1992, il
13 semble qu'il ait les deux casquettes, qu'il soit à la fois président du HVO
14 et président de la HZ HB. J'imagine qu'il a également une troisième
15 casquette, celle de la présidence, sans oublier l'autre casquette encore de
16 chef du HDZ; est-ce que c'est bien exact ?
17 R. C'est exact. J'ai eu l'occasion de répondre déjà à cette question. A
18 l'époque qui s'étend jusqu'au 14 et au 15 août, Mate Boban assumait
19 effectivement toutes ces fonctions.
20 Q. Très bien. Ceci a été maintenant établi, document P 00424 et c'est un
21 document sur lequel on ne va pas vraiment s'appesantir à moins qu'il n'y
22 ait des questions de la part des Juges, parce que nous avons déjà examiné
23 en détail certaines des discussions qui se sont déroulées au cours de la
24 réunion du 3 juillet 1992. Le document P 00424, c'est un document qui est
25 un décret portant transfert des ressources de la JNA. C'est un document qui
26 est mentionné dans le procès-verbal de la réunion, n'est-ce pas ? Le
27 décret, n'est-ce pas ?
28 R. Je crois que j'ai déjà dit cela mais la première phrase de ce texte
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1 précise les choses. L'article 1 parle de propriétés sociales et l'article 2
2 le dit également de façon également tout à fait explicite. Il est question
3 de propriétés sociales.
4 Cela complète ce que j'ai déjà pu dire, je crois.
5 Q. Merci. Examinons maintenant le document suivant, P 009553.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] Je me tourne d'ailleurs vers les Juges pour
7 leur dire que si jamais je vais trop vite, et s'ils veulent poser des
8 questions au sujet des documents, qu'ils n'hésitent pas à m'interrompre.
9 Q. Le document que j'appelle c'est le P 09553. Un ordre portant sur la
10 prise de contrôle des ressources ou des actives de la JNA. Pourriez-vous,
11 s'il vous plaît, donner lecture de l'intitulé de ce document en croate
12 parce qu'en anglais on lit : "Ordre". Pouvez-vous nous donner lecture du
13 titre, simplement du titre de ce texte juridique ?
14 R. Il y figure la même chose, donc dans l'un comme dans l'autre des
15 documents que j'ai en face de moi, il est mentionné : "décret".
16 Q. Il s'agit du document portant la référence P 0953. C'est le document
17 que je suis en train d'examiner.
18 R. C'est exact.
19 Q. Bien. C'est un document qui porte sur les ressources de la JNA, la
20 prise de contrôle de ses ressources, et ça correspond aux explications que
21 vous nous avez données précédemment, n'est-ce pas ?
22 R. Exactement.
23 Q. Bien. Document suivant, 1D 00 --
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Qu'en est-il de la signature ? On
25 voit : "Communauté croate d'Herceg-Bosna, présidence, et ensuite président,
26 Mate Boban." Donc Mate Boban était président de la présidence et occupait
27 également une fonction à caractère législatif.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Vous me posez la question à moi, Monsieur le
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1 Juge ?
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, bien entendu, je vous regardais
3 naturellement mais --
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, je me demandais si c'était une question
5 qui m'était destinée.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me demandais si c'était une question qui
7 s'adressait à moi ?
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que vous avez bien pris la mesure de
10 la situation telle qu'elle était dans la réalité. Nous avons déjà dit qu'à
11 partir du moment où la HZ HB a été créée en novembre, M. Boban assumait la
12 fonction de président de la présidence de la HZ HB et nous avons également
13 rappelé qu'à partir du 8 avril 1992, il assumait également la fonction de
14 président du HVO. Nous avons également dit qu'à partir du 3 juillet 1992,
15 Mate Boban assumait également une troisième fonction qui est celle de
16 président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et de commandant suprême
17 des forces armées du HVO.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
19 M. KARNAVAS : [interprétation]
20 Q. Bien. Passons au document suivant 1D 00161. Il s'agit d'un décret
21 portant sur la confiscation des biens de l'occupant et du transfert des
22 biens de l'occupant. En bas du document, on voit président du HVO et de la
23 HZ HB, Mate Boban, document du 3 juillet 1992. C'est un des instruments
24 juridiques qui ont été évoqués pendant la réunion dont nous avons vu le
25 procès-verbal, n'est-ce pas ?
26 R. C'est exact. Il s'agit bien de l'un des documents qui ont été évoqués.
27 Cependant, il importe peut-être de souligner que si des transferts de
28 propriété ont effectivement eu lieu cela concernait l'article 1(a), donc
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1 relatif à l'organisation et au corps de l'ex-fédération et à ma
2 connaissance aucun bien n'a été repris, la propriété d'aucun bien n'a été
3 transféré tombant sous les alinéas (b), (c), (d) de l'article 1. Je veux
4 dire que personnellement, je ne suis au courant d'aucun cas de biens qui
5 auraient été saisis, de biens d'entreprises dont le siège se serait trouvé
6 en Serbie ou en Monténégro, ou de personnes physiques ressortissantes de
7 Serbie-et-Monténégro et de Bosnie-Herzégovine.
8 Q. Très bien. Merci.
9 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Pardon de vous poser encore une
10 question se rapportant à ce document 1D 00161. Un décret important
11 concernant la confiscation des biens de l'occupant et la cession de ces
12 biens à la communauté croate.
13 Dans le texte de l'un des décrets je ne vois pas une explication
14 concernant qui était l'occupant et de quels biens s'agissait-il dans le
15 cadre de ce décret. Nous savons bien qu'il y a eu une offensive menée par
16 la JNA, que l'on parlait de la JNA, des Chetniks, et ainsi de suite. Mais
17 il me semble que dans un texte juridique aussi important que celui-ci, avec
18 des conséquences aussi importantes, l'on s'attendrait à ce qu'il y ait pour
19 ainsi dire une définition de l'occupant.
20 Donc je vous demande, d'après vous, est-ce que l'occupant en tant que
21 tel avait déjà été identifié et défini de manière juridique ? Est-ce que
22 vous pensez que la mise en œuvre de ce décret se serait heurtée à des
23 difficultés notamment quant à savoir quel type de biens devaient être
24 saisis ? Est-ce qu'il ressortait clairement de ce texte qui était concerné
25 par ce décret ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le nom de l'agresseur et des forces
27 d'occupation de la Bosnie-Herzégovine avaient été précisés par une décision
28 de la présidence de Bosnie-Herzégovine portant proclamation de l'état de
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1 guerre en date du 20 juin 1992. Dans le préambule de cette décision, il est
2 précisé ainsi que dans le texte de la décision que les agresseurs contre la
3 Bosnie-Herzégovine sont l'armée populaire yougoslave; les unités du SDS de
4 l'armée serbe; et me semble-t-il les unités paramilitaires en provenance de
5 la République de Serbie. Donc en tant que parti politique on a précisé et
6 désigné le SDS ainsi que la JNA dans la décision en question.
7 On a également dit dans cette décision de proclamer l'état de guerre, on a
8 précisé que d'ores et déjà les deux tiers du territoire de Bosnie-
9 Herzégovine étaient occupés. Donc on nomme l'agresseur, on nomme les forces
10 d'occupation. On constate que les deux tiers du territoire de la Bosnie-
11 Herzégovine du pays sont déjà occupés. Ce décret, si vous souhaitez
12 connaître mon opinion, je dois vous dire que tout comme la décision de
13 proclamer de mettre sur pied la Communauté croate d'Herceg-Bosna, rappelle
14 les textes de lois et de règlements qui ont été adoptés pendant la Seconde
15 Guerre mondiale par le Mouvement de libération de la résistance des
16 partisans. Donc tout comme les comités de résistance dans la Seconde Guerre
17 mondiale réunissaient les différentes fonctions du pouvoir, le législatif,
18 l'exécutif, le judiciaire, il me semble que c'est un peu à l'image de cela
19 qu'au sein de la HZ HB, on a rassemblé les pouvoirs législatifs et
20 exécutifs enfin pour toutes les fins qui vous intéressent et nous en avons
21 déjà parlé. Mais il convient de dire que le conseil antifasciste de
22 libération de la Yougoslavie avait, lors de sa deuxième session, pris ce
23 type de décision au moment où on a pris les biens des forces d'occupation
24 et de ceux qui avaient collaboré avec ces forces-là.
25 Les membres de la présidence, en bon connaisseur de l'histoire, me semble-
26 t-il se sont davantage attachés à l'histoire qu'au droit dans les deux cas,
27 dans l'un comme dans l'autre tout comme la décision de la municipalité de
28 la HZ HB dans sa version initiale ne cite pas la constitution pas plus
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1 qu'aucune autre disposition législative, même si des dispositions
2 constitutionnelles fermes existent permettant la création de la HZ HB, ceci
3 fait défaut; mais il existe cet aspect historique, tout comme ici il y a la
4 décision de la l'AVNOJ portant sur la confiscation des biens de l'agresseur
5 et des collaborateurs. Et là, je vous donne mon avis, je vous dis ce qui à
6 mon avis a permis que cette disposition soit formée de cette manière-là
7 dans le cadre de la création de la HZ HB.
8 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci de ces explications. Je
9 n'aurai plus qu'une question.
10 Si je vous ai bien compris, ce décret se rapporte peut-être aux entités
11 juridiques de l'ancienne JNA et les "Chetniks" pour ainsi dire et ne se
12 rapportait pas au citoyen "moyen", encore une fois pour ainsi dire, du
13 territoire en question, c'est-à-dire, tous les citoyens d'origine serbe en
14 Herceg-Bosna. Pour être tout à fait franc, ce que je me demande, c'est si
15 l'absence de définition dans le texte n'aurait pas abouti à des injustices
16 commises à l'encontre des citoyens ordinaires du territoire concerné.
17 Si ma question n'est pas très claire, je vais la réitérer. N'est-il pas
18 possible que lors de la mise en œuvre de ce décret, ce ne sont pas
19 seulement ceux qui étaient responsables de l'agression qui ont été touchés
20 et dont les biens ont été confisqués, mais que des citoyens ordinaires ont
21 également été touchés, des citoyens d'origine serbe qui vivaient sur ce
22 territoire ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je vous remercie de m'avoir
24 posé cette question. Je pense que je l'ai bien comprise et il me semble que
25 je n'y ai répondu que partiellement jusqu'à présent. Oui, ce texte a été
26 adopté et il a été publié dans le journal officiel de la HZ HB; mais je
27 vous ai également dit qu'à ma connaissance aucun cas ne s'est produit où
28 conformément à cette disposition on ait confisqué des biens appartenant à
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1 un citoyen, quel qu'il soit, de nationalité serbe qui aurait été citoyen de
2 la Serbie ou du Monténégro. Ce qui s'est produit bel et bien produit,
3 c'était le fait de confisquer les biens appartenant à la JNA et au
4 secrétariat à la Défense nationale. Et pour l'essentiel, c'était des
5 casernes, c'était des bâtiments militaires appartenant à la JNA et
6 abandonnés par la JNA, ou s'agissant des casernes qui avaient été prises
7 par le HVO dans le cadre des affrontements avec la JNA. Ce que je tiens à
8 vous dire, c'est qu'en réalité, je pense qu'aucun cas ne s'est produit où
9 on aurait appliqué cette disposition pour saisir des biens appartenant à
10 d'autres citoyens et où ces biens auraient été repris pour devenir des
11 biens de la HZ HB.
12 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, un décret qui prévoit la
14 confiscation peut être légalement justifié quand il s'agit de prendre des
15 biens appartenant à une entité comme la JNA qui s'en va, et il faut bien
16 que la caserne soit occupée par quelqu'un. Mais comme le dit mon collègue,
17 je prends le cas du Serbe classique, prenez, par exemple, je ne sais pas si
18 ça existait, mais à titre d'exemple, imaginez qu'il y a un coiffeur serbe à
19 Mostar, la JNA s'en va pour une raison qui lui est personnelle. Il dit : Je
20 m'en vais moi aussi. Que devient son salon de coiffure, que devient son
21 appartement ? A priori ça peut être confisqué, mais y a-t-il un processus
22 d'indemnisation, voire de restitution ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne cherche pas à défendre la teneur de
24 cette disposition. Je ne cherche pas non plus à affirmer qu'il s'agit d'une
25 disposition raisonnable ou honnête. De ce point de vue-là, je pense qu'aux
26 petits (b), (c) et (d), comme je l'ai déjà dit, elle n'est pas justifiée et
27 je ne pense pas qu'on puisse trouver un argument raisonnable pour défendre
28 cette disposition pour ce qui est de l'article 1 (b), (c) et (d).
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1 Toutefois, j'ai souligné précédemment les raisons qui ont été des motifs
2 pour qu'une telle disposition soit adoptée. En tant que juriste encore une
3 fois je ne peux pas justifier la finalité ni la teneur des petits (b), (c),
4 et (d) de l'article 1.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, après les accords de Dayton,
6 Washington, il y a eu des contentieux de gens qui ont -- ce sont vus
7 "dépossédés" de leurs biens ? Y a-t-il eu des contentieux, des procès ? Ou
8 bien il n'y a eu aucun problème ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible qu'on se soit mal compris ou
10 je n'ai pas été assez clair peut-être en évoquant les différents cas de
11 figure. Lorsqu'il est question de biens qui sont la propriété de personnes
12 physiques, là, j'entends la propriété au sens classique du terme, comme on
13 l'entend entre juristes. Là où il y a eu des violations, c'était lorsqu'on
14 s'est emparé de logements abandonnés qui ne faisaient pas partie de la
15 propriété privée, c'était plutôt de la propriété sociale ces logements-là.
16 Une fois que la JNA ait abandonné disons Mostar, il s'est trouvé un grand
17 nombre de logements militaires abandonnés qui faisaient partie de la
18 propriété sociale, mais il y avait des logements où habitaient des citoyens
19 d'appartenance ethnique serbe qui faisaient partie de la propriété sociale,
20 ces logements-là. Ces citoyens, certes, avaient le droit d'usufruit, ils
21 étaient des locataires en bonne et due forme. Je ne sais pas s'il faut que
22 je précise ce que serait le droit de propriété, est-ce que c'était le droit
23 de location ou d'occupation pour un logement de propriété sociale ?
24 Et je tiens à ajouter que les dispositions légitimes qui régissaient à
25 l'époque la question de la propriété sociale et des logements en propriété
26 sociale stipulaient que dans le cas d'abandon d'un appartement qui était en
27 propriété sociale, abandon pour une période qui dépassait six mois, on
28 perdait le droit d'occupation d'un tel logement, puisqu'il ne s'agissait
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1 pas d'une véritable propriété.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, de mon point de vue, sur la
3 propriété sociale il n'y a pas de problème apparent. Ma question, c'est sur
4 la propriété privée d'un Serbe qui a son petit appartement à lui parce
5 qu'il l'a acheté ou il l'a eu par une succession, je ne sais pas, et il
6 s'en va, et puis il y a quelqu'un qui vient habiter son appartement. Voilà
7 le problème. Ce phénomène était-il important ou tout à fait marginal ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais que ce cas de figure aurait pu se
9 produire entre deux individus sur le plan des particuliers, mais je pense
10 vous avoir déjà dit que je ne connais aucun cas où la Communauté croate
11 d'Herceg-Bosna ou le Conseil croate de Défense se soit doté d'une décision
12 qui, pour ce qui est de la propriété privée, aurait permis que la
13 Communauté croate d'Herceg-Bosna la reprenne en son nom ou que ce soit le
14 HVO qui la reprenne.
15 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne suis au courant de
16 l'existence d'aucun cas de ce type-là pendant toute la durée de la guerre.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui a posé problème, et il y a eu pas mal
19 de problèmes, ce sont des logements abandonnés qui faisaient partie de la
20 propriété sociale et où le droit d'occupation revenait à des citoyens
21 d'appartenance ethnique serbe. Il y a eu nombre de cas de ce type, mais là
22 encore ce n'est pas la HZ HB qui a repris ça en sa propriété, s'il ne
23 s'agissait pas de logements militaires, je précise. Ça c'est une catégorie
24 à part et j'ai déjà dit au petit (a) que c'est quelque chose qui s'est
25 produit effectivement, on a saisi les biens qui faisaient partie de la
26 propriété de la JNA et du secrétariat fédéral à la Défense, c'est comme ça
27 que ça s'appelait SSNO, donc c'est le point (a), l'article premier en son
28 petit (a).
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1 M. KARNAVAS : [interprétation]
2 Q. Merci.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, peut-être par
4 l'intermédiaire d'un autre témoin, nous étudierons la loi régissant les
5 biens abandonnés et les mesures prises deviendront beaucoup plus claires.
6 Passons au document suivant P 00292, daté encore une fois du 3 juillet
7 1992.
8 Q. Un décret concernant le traitement des personnes faites prisonnières
9 lors de combat armé, à l'article 1 nous voyons qu'ils doivent bénéficier de
10 la protection prévue par la convention de Genève concernant le traitement
11 des prisonniers de guerre. Puis on peut lire à l'article 2, et j'aimerais
12 que vous nous fassiez part de vos observations à ce sujet, il est dit : "Le
13 directeur du département de la justice et de l'administration en
14 collaboration avec le directeur du département de la défense et celui du
15 département de l'intérieur désigneront les lieux où les prisonniers seront
16 détenus, conformément aux dispositions de la convention mentionnées à
17 l'article premier de ce même décret."
18 Avant de vous poser la question, je vous donnerai lecture de l'article 3
19 également où on peut lire : "Le département de la défense sera responsable
20 de ces installations…" c'est assez clair, mais il est dit à l'article 2 que
21 vous-même en collaboration avec les autres chefs de département deviez
22 désigner ces emplacements. Pouvez-vous nous dire comment cet article a été
23 appliqué, autant que vous le sachiez ?
24 R. C'est exact. Il s'agit là d'un décret qui lui aussi a été adopté le 3
25 juillet 1992 lors de cette réunion de la présidence que nous avons déjà
26 évoquée. A ce sujet et au sujet de ce décret, je peux préciser qu'à chaque
27 fois qu'il y a guerre, et là également il y a eu des prisonniers de guerre.
28 Je pense qu'il n'est pas possible de faire la guerre sans qu'il y ait de
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1 prisonniers de guerre, de personnes capturées. Je pense également qu'il a
2 été nécessaire de se doter d'un règlement qui allait régir cette question.
3 L'article premier précise que, s'agissant des personnes capturées, elles
4 font l'objet des dispositions des conventions de Genève portant sur le
5 traitement réservé aux prisonniers de guerre; l'article 2, quant à lui,
6 précise de quelle manière seront définies les installation ou les sites où
7 seront placés les prisonniers de guerre; l'article 3 à son tour précise qui
8 exercera le contrôle sur ces installations ou les sites, donc il est dit à
9 l'article 2 que c'est le département de la justice et de l'administration
10 en coopération avec les départements de la défense et le département de
11 l'intérieur qui déterminent les endroits, les lieux. Et à l'article 3, il
12 est stipulé que le contrôle sera exercé par le département de la défense.
13 Je pense que les dispositions sont claires, le décret est clair, et j'ai
14 déjà expliqué la finalité et la motivation.
15 Q. Très bien. Dans la mesure où nous avons sous les yeux cet article 2,
16 pouvez-vous nous expliquer dans quelle mesure vous avez, aux côtés des
17 autres chefs de département, été impliqué dans le choix du lieu où les
18 prisonniers allaient être détenus, conformément à ce décret signé par Mate
19 Boban le 3 juillet 1992.
20 R. Une petite explication s'impose, me semble-t-il. Sur l'ensemble du
21 territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, plus précisément de ces
22 30 municipalités dont il est question dans le décret portant création de la
23 HZ HB, il n'y avait ne serait-ce qu'une seule institution d'ordre
24 pénitentiaire. La seule chose que nous avions à l'époque dont nous pouvions
25 nous servir, c'était la prison qui relevait de la phase d'instruction du
26 tribunal de Mostar, du tribunal supérieur donc de seconde instance. Ce
27 n'était pas un établissement pénitentiaire, c'était un lieu de détention en
28 phase d'instruction. Et à partir du moment où je suis entré en fonction en
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1 tant que chef du département de la justice et de l'administration, je m'en
2 suis occupé immédiatement, j'ai eu un entretien avec le directeur de cette
3 institution à Mostar qui a porté à ma connaissance la situation à la prison
4 qui dépendait du tribunal de Mostar, il y avait là des personnes qui
5 purgeaient des peines de prison mais on y a placé également un certain
6 nombre de prisonniers de guerre en l'absence de décision prise par
7 différents tribunaux, ils se sont trouvés dans cette prison. Et évidemment
8 il fallait régler cette question.
9 Très vite --
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous arrêter parce qu'il y a une question de
11 procédure soulevée avec l'Accusation et M. Praljak. Je ne sais pas
12 laquelle. Le sujet est important et je pense que Me Karnavas y reviendra
13 demain. Il y reviendra donc demain.
14 Alors, Monsieur le Témoin, je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir
15 vous raccompagner et je vous invite donc à revenir pour l'audience qui aura
16 lieu à 9 heures demain, parce que nous sommes de matinée.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] A 9 heures donc.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je ne sais pas qui va intervenir en premier,
19 l'Accusation ou --
20 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Oui, en effet,
21 pour les conseils de la Défense, en fait, cela ne se rapporte pas à ce
22 témoin mais un témoin entendu la semaine passée, le Pr Jankovic. Vous nous
23 avez demandé de veiller à ce que le compte rendu montre bien que les
24 écritures présentées la semaine passée par l'Accusation concernant les
25 objections aux documents dont le versement était demandé par la Défense de
26 M. Praljak, par le biais des pièces introduites dans le cadre de ce
27 témoignage, nous avons déposé un document formulant nos objections
28 concernant ces documents. Il y avait donc des documents en annexe.
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1 [Le témoin quitte la barre]
2 M. STRINGER : [interprétation] Et comme la Chambre le sait, nous nous
3 sommes conformés à la procédure IC en vigueur mais en l'occurrence c'était
4 un peu particulier car nous avions certains arguments étayés par des
5 documents en annexe. Donc c'était une écriture que nous avons déposée
6 vendredi. Le dépôt a eu lieu avant que le Greffe n'attribue une cote IC aux
7 pièces concernées. Donc nous aimerions qu'il soit consigné au compte rendu
8 que les écritures de l'Accusation de vendredi passé, nous formulons nos
9 objections concernant certaines pièces se rapportant au témoin Jankovic, --
10 en fait cela concerne les pièces de la Défense dont le versement a été
11 demandé et qui portent les cotes IC 823-3D. Cela a semé un peu de confusion
12 du point de vue procédural. Nous avons déposé cette écriture assez tôt afin
13 que les conseils de la Défense puissent en prendre connaissance pendant le
14 week-end et y réagir le cas échéant. Le délai est assez court pour ce qui
15 est de ce type d'écritures et des réponses, donc nous avons déposé ce
16 document même s'il n'avait pas encore été officiellement versé par la
17 Défense Praljak.
18 Donc pour être clair, nos écritures s'appliquent au numéro IC 823-3D.
19 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
20 je pense que mon confrère a déjà expliqué pour l'essentiel de quoi il
21 s'agit. Nous avons estimé qu'il était nécessaire d'acter au compte rendu
22 d'audience ce qui s'est passé. Comme mon confrère vient de le dire, le 3
23 juillet, la Défense du général Praljak a fourni une liste comme on le fait
24 d'habitude, liste IC. On s'attendait à ce que les cotes soient attribuées
25 aujourd'hui, comme on le fait depuis deux ans maintenant, mais le Procureur
26 pour des raisons déjà évoquées que je respecte, il a répondu dès le
27 lendemain, le 4 juillet avant que la liste IC ne soit finalisée, ne
28 devienne un document formel, puisqu'il n'y avait pas encore de cotes
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1 attribuées. Et je me suis attaché à examiner votre décision du 4 avril, à
2 ce moment-là, et pour être tout à fait certain j'ai vérifié le paragraphe
3 32 de cette décision où il est question des délais, jour pour jour. Comme
4 des interprétations diverses étaient possibles, je me suis dit qu'il valait
5 mieux que je réponde dans un délai de 24 heures, et c'est ce que j'ai fait.
6 Cette écriture a été enregistrée comme l'autre évoquée par mon confrère.
7 Et, je pense pouvoir le dire franchement, tout à fait ouvertement, que ces
8 deux concernent le IC 823, c'est l'objection du Procureur et la réponse
9 conformément à votre décision du 24 avril, ligne directrice numéro 8. Donc
10 je pense que nous entendons l'un comme l'autre qu'en fait il ne faudrait
11 pas réagir suite à ces types d'écriture tant que la liste IC ne s'est pas
12 vue attribuer un numéro. C'est cela. Je vous remercie.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour ces mises au point de l'Accusation et de
14 la Défense. Nous avons bien compris que la contestation vient du numéro IC
15 823, l'Accusation faisant une objection.
16 Bien. Il est donc 19 heures. J'informe Me Karnavas qu'il a utilisé presque
17 deux heures, une heure 59 minutes et quelques secondes, mais je lui fais
18 cadeau de ces quelques secondes, presque deux heures. Voilà. Donc nous nous
19 retrouverons tous demain à 9 heures. Je vous remercie et bonne soirée.
20 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 8 juillet
21 2008, à 9 heures 00.
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