Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 21 avril 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   tout le monde dans le prétoire.

 11   IT-04-74-T, l'Accusation contre Prlic et consorts.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue Mmes et MM. les avocats. Je salue tous les

 13   représentants du bureau du Procureur, ainsi que toutes les personnes qui

 14   nous assistent dans nos travaux.

 15   Je vais donner la parole à M. le Greffier qui a un numéro IC à nous donner.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci.

 17   L'Accusation a soumis ses objections aux documents présentés par 2D via le

 18   témoin Davor Korac. Il recevra la cote IC 988.

 19   Merci.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vous salue également et je

 21   donne la parole immédiatement à Me Nozica, qui va terminer son

 22   interrogatoire principal.

 23   LE TÉMOIN : IVAN BAGARIC [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous

 26   et à toutes dans le prétoire.

 27   Interrogatoire principal par Mme Nozica : [Suite]

 28   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

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  1   R.  Bonjour.

  2   Q.  Je vais vous demander, puisqu'il ne me reste que 50 minutes, je sais

  3   que c'est un fardeau que vous portez mais que je porte également, alors je

  4   vous demanderais de répondre le plus brièvement possible aux questions que

  5   je vais vous poser, parce que j'estime qu'il s'agit là de choses que les

  6   Juges de la Chambre savent déjà.

  7   Je vous renvoie au deuxième classeur, 2D 324. On s'est arrêté hier à ce

  8   document précis. J'ai dit 324, pour les besoins du compte rendu.

  9   R.  J'y suis.

 10   Q.  Si vous avez trouvé, Monsieur Bagaric, il s'agit d'un rapport en

 11   provenance du Dr Ljubic portant sur l'évacuation de membres de l'ABiH vers

 12   la Turquie. L'évacuation a été entamée à Medjugorje le 12 juin 1993, et il

 13   s'agit d'une poursuite de soins à leur prodiguer. Est-ce que vous êtes au

 14   courant et est-ce que ce type d'évacuation s'est fait fréquemment ?

 15   R.  Oui, c'est l'une de ces évacuations. Je ne sais pas vous dire combien

 16   il y en a eu, mais c'était assez fréquent, oui.

 17   Q.  Je vous demande maintenant de vous pencher sur le document d'après,

 18   P 2703. C'est le suivant dans votre classeur, du moins c'est mon avis. Il

 19   s'agit aussi d'un rapport des observateurs européens datés du 11 juin 1993.

 20   Au paragraphe 5 de ce rapport, il est question de cette équipe qui a rendu

 21   visite à la rive ouest, et ils apportaient le courrier du commandant du

 22   corps suite à une requête portant sur des médicaments dont il a déjà été

 23   question hier, n'est-ce pas ?

 24   R.  En effet.

 25   Q.  Bien. Je vous demande de vous pencher sur le document d'après, c'est

 26   également les observateurs européens, la Mission européenne. P 2731.

 27   R.  J'y suis.

 28   Q.  Alors j'ai dit P -- oui, c'est consigné. Alors vous avez un rapport

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  1   daté du 12 juin et on y dit que les médicaments, au point 5, que ces

  2   médicaments - c'est la page 1 version anglaise et B/C/S - on dit que ces

  3   médicaments ont été livrés à l'hôpital bosnien en rive est.

  4   R.  Oui. Malheureusement, à cette occasion, il y a eu un membre des troupes

  5   des Nations Unies qui a été tué pendant qu'il transportait ces médicaments,

  6   hélas.

  7   Q.  Je vous renvoie au 2D 276.

  8   R.  J'y suis.

  9   Q.  Monsieur Bagaric, c'est daté du 14 juillet. Il s'agit d'une lettre où

 10   vous indiquez qu'à la date du 13 juillet à Dokmanovic, sur la route de

 11   Capljina, en transportant des blessés, il a été tué d'à partir d'une

 12   embuscade de près par rafales, le chauffeur d'une ambulance. Les mêmes

 13   rafales ont blessé une infirmière qui s'appelle Mijatovic Vesna. C'est

 14   signé par vous et le Dr Sarac. Alors dites-nous ce que c'était. Etait-ce là

 15   une lettre de protestation qui a été envoyée étant donné qu'on ne voit pas

 16   à qui cela a été adressé ?

 17   R.  Ici, nous avons affaire à un cas de figure qui est survenu, et il y en

 18   a eu d'autres. C'est une collègue, une infirmière Lilija Zerno [phon], qui

 19   a été également tuée dans une embuscade alors qu'elle était allée aider des

 20   blessés. C'était une embuscade tendue par l'armée bosnienne. C'était une

 21   infirmière pourtant. On en a eu 37 des personnes de tuées comme ça au

 22   niveau des services de santé du HVO, au total, j'entends. Je m'adresse ici

 23   en réalité à l'opinion publique. En ma qualité d'homme numéro un en matière

 24   de santé publique, aux côtés de mon collègue M. Sarac qui était chargé de

 25   la santé du côté civil, comme je l'ai indiqué hier, nous sommes en train de

 26   supplier et de prier tout un chacun afin que ce type de choses ne se

 27   reproduise plus. Donc nous adressons un appel à la totalité des impliqués

 28   dans la guerre pour leur signaler la nécessité de respecter les conventions

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  1   de Genève pour ce qui est du côté du moins de l'équipe médicale du HVO.

  2   Q.  Monsieur Bagaric, on parle du 13 juillet 1993, mais est-ce que vous

  3   pouvez nous dire qui est-ce qui a bien pu tirer ?

  4   R.  J'ai dit que l'ABiH, les Bosniens ont tendu une embuscade et ont tiré

  5   pour malheureusement tuer l'homme dont il est question dans ce document.

  6   Q.  Veuillez vous pencher sur le suivant, 2D 455.

  7   R.  J'y suis.

  8   Q.  Il s'agit d'une requête. Il est déjà une pièce à conviction. On voit

  9   que c'est rangé dans l'ordre chronologique. Il s'agit d'une demande de

 10   votre part adressée à la FORPRONU, au Bataillon espagnol pour ce qui est de

 11   servir d'intermédiaire vis-à-vis de la partie musulmane pour l'accueil et

 12   les soins à porter aux civils, femmes et enfants compris, à l'hôpital de

 13   Mostar et dans d'autres hôpitaux. Pour finir, vous dites que vous le faites

 14   pour des raisons humanitaires et vous demandez à ce que l'on n'attribue

 15   aucun poids politique à cette demande. Est-ce que vous avez reçu une

 16   réponse à cette requête ?

 17   R.  Oui, c'est l'une des requêtes que j'avais adressées. C'est une requête

 18   sérieuse, importante, qui a été évoquée d'une certaine façon dès hier. Je

 19   l'ai adressée aux représentants de cette communauté internationale et en

 20   concertation avec le commandant Petkovic qui est ici présent ainsi qu'avec

 21   le ministre de la Défense, M. Stojic. Pourquoi l'ai-je fait ? Bien, parce

 22   que j'étais l'homme numéro un en matière de santé au Conseil croate de la

 23   Défense. Je croyais que si un médecin s'adressait et demandait à ce que

 24   l'on soigne ensemble les gens en ville afin que l'hôpital soit, comment

 25   dirais-je, rendu ex-territorial et que les représentants de la Croix-Rouge

 26   internationale puissent accéder et contrôler ces activités, je croyais que

 27   personne ne saurait faire sourde oreille à une telle demande, notamment

 28   pour ce qui est de cette partie est qui était dans une situation plus

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  1   difficile encore que la nôtre du point de vue de l'accueil des blessés. Or,

  2   et hélas, il n'y a guère eu de réponse à ce courrier.

  3   Q.  Je voudrais rectifier la référence, Monsieur le Juge Trechsel, si vous

  4   le permettez. Il s'agissait du document 2D 455. Ça a été consigné de façon

  5   erronée au compte rendu.

  6   Je vais vous demander maintenant de vous référer au 2D 328.

  7   R.  J'y suis.

  8   Q.  Il s'agit ici d'une attestation disant que le service des transfusions

  9   s'est adressé à l'UNHCR pour une certaine quantité de poches de sang ?

 10   R.  Oui. On en a parlé hier déjà. C'est l'une, comment dirais-je, l'une des

 11   tentatives importantes de notre part pour établir la communication et venir

 12   en aide à la partie adversaire.

 13   Mme NOZICA : [interprétation] On vient de me prévenir, je m'excuse de ne

 14   pas avoir vérifié. P 2703, c'est un document sous pli scellé, on l'a vu

 15   tout à l'heure. Alors c'est le 2703. C'est un document P, et je pense qu'il

 16   importe de le souligner. Alors je disais P 2703 et 2731.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez, parce que le greffier m'a dit que le

 18   document n'avait pas été diffusé au public.

 19   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous remercie. 

 20   Q.  Monsieur, je vais vous demander de vous pencher sur le 2D 333. Monsieur

 21   Bagaric, nous avons déjà entendu parler de Mme Sally Backer dans ce

 22   prétoire. Je vais vous demander de nous confirmer si, comme on le dit ici

 23   dans ce document, vous avez bel et bien remis à Mme Sally Backer un

 24   véhicule pour transport de blessés depuis la rive gauche vers l'hôpital de

 25   guerre à Mostar ? Etait-ce encore l'une des activités déployées de votre

 26   part pour aider les blessés à l'hôpital de la rive gauche ?

 27   R.  Oui.  Mme Sally Backer a demandé de l'aide pour aller de l'autre côté

 28   de la rivière, et au risque de sa vie. Au risque de se faire tuer elle-

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  1   même, elle y est allée pour aider et faire sortir des enfants et une femme,

  2   des patients. Elle voulait le faire en traversant les lignes de front, mais

  3   littéralement les lignes de front, et elle avait demandé un véhicule. On

  4   lui a donné un véhicule. Je suis convaincu que n'ayant pas réussi une fois

  5   - elle y est allée deux ou trois fois - alors une fois, elle n'a pas réussi

  6   parce que du côté est, on n'a pas autorisé cette femme à réaliser son idée.

  7   On lui a même confisqué son véhicule. Cependant - et là je suis sûr de la

  8   chose - à deux reprises, elle y est allée avec succès. Elle a fait sortir

  9   des enfants et leur mère. Elle les a amenés de notre côté à nous, et on a

 10   rendu possible un contact avec l'hôpital de Split où ces enfants ont été

 11   accueillis, et où on a poursuivi leurs soins et au-delà. Ils sont allés

 12   plus loin vers l'Europe, je ne sais trop où.   

 13   Q.  Monsieur Bagaric, je vous demande de sauter un document pour gagner du

 14   temps parce que ce sont déjà des pièces à conviction, et je vous renvoie au

 15   2D 23 qui est également un document sous pli scellé, c'est P 2923.

 16   R.  Oui, j'y suis.

 17   Q.  Monsieur Bagaric, paragraphe 5, page 2 en version anglaise, et c'est --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Nozica, les interprètes vous

 19   demandent de répéter la cote.

 20   Mme NOZICA : [interprétation] Oui, je vais le faire, merci. P 2923.

 21   Q.  Avez-vous retrouvé, Monsieur Bagaric ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Au compte rendu, c'est bien consigné. On a vu vos courriers et ici on

 24   voit un rapport des observateurs européens. Au paragraphe 5, deuxième

 25   alinéa, vous leur proposez ce que vous nous avez dit justement au sujet de

 26   la réalisation de cette idée relative à l'hôpital, à savoir que du côté

 27   occidental que soit réalisée cette idée de mettre en place un hôpital

 28   conjoint pour soigner les uns et les autres. Donc la communauté

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  1   internationale a directement obtenu cette proposition de votre part ?

  2   R.  Oui, c'est une confirmation à cet effet. Mais si je puis commenter de

  3   façon très brève. Je dirais que la chose est confirmée, certes. Mais ici,

  4   en plus, on dit aussi que pour ce qui est des échanges de médecins du côté

  5   est, je n'accepterais pas que ce soit fait tant qu'il n'y aurait pas une

  6   liberté de déplacement pour les médecins du HVO qui sont censés travailler

  7   à Travnik, Konjic, Zenica et ainsi de suite. Je ne sais pas comment ils ont

  8   fait pour interpréter de la sorte. J'en ai parlé hier, nous n'avions pas eu

  9   de volontaires désireux de partir du côté est, indépendamment de

 10   l'appartenance ethnique, et c'était là le problème.

 11   Q.  Le dernier document de la série sous pli scellé aussi, P 2929. L'avez-

 12   vous retrouvé ?

 13   R.  Vous avez dit P quoi ?

 14   Q.  P 2929. Ça devrait être le document suivant.

 15   R.  J'y suis.

 16   Q.  Au paragraphe 1, on dit ce qui suit, et c'est déjà une pièce à

 17   conviction. J'attire votre attention qu'il s'agit de ces échanges de

 18   médecins du pourquoi et le comment, et on dit que Bruno Stojic, chef des

 19   services de santé au sein du HVO, a "en principe été d'accord avec nos

 20   propositions." Il est évident que ces observateurs internationaux, ces

 21   facteurs internationaux représentants de la communauté internationale

 22   avaient du mal à comprendre les différentes fonctions.

 23   R.  Oui, il est évident qu'ils se sont trompés là.

 24   Q.  Parce que M. Stojic était le responsable en chef ?

 25   Je vous renvoie à la page suivante, au troisième paragraphe. On donne

 26   "les raisons pour ce qui est de M2 Mostar, donc c'est une équipe qui rédige

 27   le rapport, et non pas l'UNHCR et le CICR est censé s'occuper du problème,

 28   parce que ce n'est rien que l'équipe M2 à Mostar qui contacte avec les deux

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  1   parties au quotidien et inspecte souvent les hôpitaux." Et on dit que "les

  2   différentes organisations internationales, au fil des semaines écoulées,

  3   n'ont pas souhaité se pencher sur le problème."

  4   Monsieur Bagaric, est-ce que ceci confirme ce que vous avez dit au sujet

  5   des positions prises par les organisations internationales à l'égard de ces

  6   problèmes de santé dont vous vous êtes occupé ?

  7   R.  Je veux bien admettre que ceci a été une affirmation subjective de

  8   quelqu'un. Malheureusement, j'ai eu souvent cette impression-là moi-même et

  9   je suis par conséquent d'accord avec ce qui est dit ici.

 10   Q.  Monsieur Bagaric, je voudrais maintenant qu'on se penche sur un sujet -

 11   -

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai une question de suivi à

 13   vous poser.

 14   Indéniablement, les documents que nous venons de voir montrent que vous

 15   avez fait des efforts pour créer un hôpital conjoint entre les deux parties

 16   pour soigner tous les blessés du conflit. Nous avons évoqué ici même, avec

 17   plusieurs autres témoins, avec des centaines de documents, cette question

 18   de l'hôpital de Mostar est et de Mostar ouest. Nous avons appris qu'il y

 19   avait beaucoup d'organisations internationales qui exerçaient d'ailleurs

 20   même dans l'hôpital de Mostar est, des étrangers à votre pays, des médecins

 21   qui venaient prêter leur concours, et je cite de mémoire Médecins sans

 22   frontières. Comment se fait-il que sachant qu'il y avait tous ces gens et

 23   la Croix-Rouge internationale, pourquoi vous ne vous êtes pas tourné vers

 24   eux pour que sous l'égide de la Croix-Rouge il y ait la création de cet

 25   hôpital conjoint où tout le monde se serait retrouvé plutôt que de vous

 26   adresser au Bataillon espagnol en quelque sorte pour jouer un rôle et pour

 27   rassembler les énergies, alors même que nous savons qu'il y avait des

 28   médecins étrangers qui étaient là avec toute leur organisation, avec leur

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  1   pays, et qui eux auraient peut-être pu créer cet hôpital ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie d'avoir posé la question.

  3   Quand il s'agit de la Croix-Rouge internationale, je dirais que c'est une

  4   institution qui n'a guère de puissance, de pouvoir sur le terrain; ils

  5   n'ont pas d'armes, ils n'ont pas d'équipement, donc ils n'ont pas de moyens

  6   de se protéger par eux-mêmes. C'est la raison pour laquelle on s'est

  7   adressé en premier lieu à ce Bataillon espagnol avec lequel nous avons eu

  8   une coopération relativement bonne, je dirais même excellente, parce qu'ils

  9   nous ont rendu possible ce déplacement vers Konjic et les autres localités

 10   et ils ont organisé la réunion que vous savez. M. Morales est resté dans ma

 11   mémoire comme une personne qui est a dénoté du sérieux et aussi une

 12   personnalité qui avait la volonté d'aider. Ce que je puis vous affirmer en

 13   toute responsabilité, c'est avec ce document, avec cette requête,

 14   indépendamment de ce qui est dit ici du fait de s'être adressé aux Nations

 15   Unies, on s'était adressé aussi à la Croix-Rouge internationale. Mais en

 16   termes simples, il n'y a pas eu de réponse. Ils ne pouvaient pas le

 17   réaliser eux-mêmes sans l'aide de la FORPRONU, et la FORPRONU probablement

 18   ne pouvait-elle pas le faire parce que de l'autre côté il n'y a pas eu de

 19   réponse affirmative. Ils ont à 100 % essayé, mais ils n'ont pas réussi, et

 20   du fait de ne pas avoir réussi, on en est resté là.

 21   C'est l'un des rares exemples dans l'histoire de guerre où l'on a publié la

 22   chose dans une revue scientifique en guise d'exemple pour montrer comment

 23   une organisation internationale et l'autre partie n'ont pas pu répondre à

 24   une tentative d'établissement d'une communication utile.

 25   Mme NOZICA : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Bagaric, pour finir, je me propose de vous poser plusieurs

 27   questions se rapportant au centre de détention et au rôle du secteur chargé

 28   de la santé dans ces unités de détention.

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  1   Monsieur Bagaric, est-ce qu'à la direction collégiale du département de la

  2   Défense, de votre souvenir, il a été question de ces prisonniers de guerre

  3   et des centres de détention ?

  4   R.  Pour autant que je m'en souvienne, pendant que j'y étais moi-même à

  5   cette administration collégiale, il en a été question une fois, et ça je

  6   m'en souviens clairement. Il me semble que c'était au début du mois de

  7   septembre. Cependant jusque-là, nos médecins, et quand je dis "nos

  8   médecins" je parle de ceux de la brigade dans la zone de rassemblement

  9   ainsi que des médecins qui faisaient partie de notre secteur de santé à

 10   avoir été chargés de la protection médicale préventive, avec à leur tête le

 11   Dr Curic; ils sont allés vers ces centres. Et j'ai moi-même été l'un

 12   d'entre eux, bien que cela n'ait pas été une obligation, une mission qui

 13   aurait officiellement été la mienne.

 14   Q.  Monsieur Bagaric, pour quelle raison ce secteur de la santé, M. Curic,

 15   service d'infectiologie et d'épidémiologie, pourquoi ont-ils rendu visite

 16   aux prisons et aux centres de détention ?

 17   R.  Pour comprendre la chose à part entière, il convient de savoir quelle

 18   est l'organisation des unités sur le terrain et comment se présente la

 19   situation sur ce terrain. Donc le Dr Curic, qui était chargé de diriger ce

 20   secteur, d'une certaine façon apportait son soutien professionnel, parce

 21   que c'était de mon avis le seul infectologue sur le terrain, donc sur tout

 22   ce territoire où il y avait des unités du Conseil croate de la Défense.

 23   Cela signifie qu'il a rendu visite tant aux unités qu'aux médecins au sein

 24   desdites unités. Mais en outre, il a pris bien soin de l'approvisionnement

 25   en eau potable, des aspects hygiéniques de l'eau, enfin tout ce qui portait

 26   sur la prévention en matière de santé.

 27   Q.  De votre souvenir, M. Curic et ce service dirigé par lui ont-ils aussi

 28   rendu visite aux centres d'accueil des réfugiés ?

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  1   R.  Oui, absolument.

  2   Q.  Est-ce qu'ils ont rendu visite à la totalité des sites où il y a eu

  3   beaucoup de gens de rassemblés ?

  4   R.  Je l'ai confirmé aussi, oui.

  5   Q.  Monsieur Bagaric, est-ce que vous avez considéré que ces centres, parce

  6   que vous avez dit que M. Curic les a visités, que vous avez également

  7   visité l'un d'entre eux, est-ce que vous avez pensé ou estimé que ces

  8   centres, sur le plan organisationnel, faisaient partie du département de la

  9   Défense ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Vous nous avez dit que vous êtes allé visiter un centre de détention.

 12   Veuillez expliquer aux Juges quand et lequel vous avez visité ?

 13   R.  J'y suis allé une fois à l'Heliodrom. Il me semble que c'était -- je ne

 14   sais vraiment pas être très précis, mais il me semble que c'était mi-

 15   juillet 1993 ou par là, lorsque j'ai reçu la visite d'un membre du comité

 16   d'Helsinki et un professeur de la santé  publique originaire de Zagreb, M.

 17   Slobodan Lang. On est allé là-bas à deux, ensemble, et je l'ai prié de

 18   passer par des gens que lui connaissait et de se référer à ses

 19   connaissances et à son expérience pour faire en sorte que nous soyons aidés

 20   afin que nous-mêmes soyons en mesure d'aider les médecins qui étaient

 21   engagés dans la prison que vous avez mentionnée. C'était à une période de

 22   guerre ouverte, de conflit non dissimulé, et une période où on ne savait

 23   pas de quoi allait avoir l'air les lendemains. Donc nous n'étions pas

 24   prêts. Nous ne savions pas non plus faire face à ce que j'ai également

 25   qualifié à l'époque, comme je le qualifie à présent, c'est une conséquence

 26   non souhaitée de cette guerre. Et si les choses devaient être refaites,

 27   j'aurais à présent bien plus d'expérience et de connaissances qu'à

 28   l'époque, comme cela d'ailleurs a été le cas de nos médecins à nous. Mais

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  1   voilà, toujours est-il qu'avec l'aide du Dr Lang et de la totalité des

  2   personnes directement chargées de ce centre, et de nous autres qui étions

  3   venus de l'extérieur pour apporter notre soutien à ces gens et pour mettre

  4   à leur disposition nos connaissances, notamment c'est le cas de M. Curic,

  5   bien, c'est la raison pour laquelle nous avons réussi à faire ce que nous

  6   avons fait là-bas.

  7   Q.  Vous avez en partie déjà répondu à ma question parce que dans ce

  8   prétoire nous avons déjà eu l'occasion de voir certains rapports. Mais

  9   auparavant, laissez-moi vous demander si vous êtes déjà allé à Gabela et

 10   Dretelj.

 11   R.  Non, jamais.

 12   Q.  Dans ces rapports que nous avons déjà eu l'occasion de voir dans le

 13   prétoire, il nous a été donné de voir qu'il y a été proposé des mesures

 14   déterminées, et ce, au niveau d'ordres signés par vous. Qui est-ce qui

 15   était censé mettre en œuvre lesdites mesures, Monsieur Bagaric ?

 16   R.  Dans ces rapports qui sont clairement rédigés, qui sont fort détaillés,

 17   qui sont bien faits, et là, je remercie en premier lieu M. Curic, il est

 18   clair que dans le segment de la protection médicale, il y a notamment nos

 19   intervenants en matière de santé qui étaient concernés, ceux qui se

 20   trouvaient au sein des unités qui elles étaient chargées de la surveillance

 21   de ces centres. Pour ce qui est du reste, je dirais en premier lieu que

 22   c'est les services logistiques des unités et des zones de rassemblement

 23   dont faisaient partie ces centres.

 24   Q.  Nous allons avoir l'occasion de voir, on va parcourir cela brièvement,

 25   mais je crois que ces rapports ont été montrés dans le prétoire, il y en a

 26   eu plusieurs, émanant même de vous, des ordres de ce genre. Alors n'avez-

 27   vous pas l'impression --

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Nozica, je

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  1   voulais poser l'une ou l'autre question.

  2   Monsieur Bagaric, qui vous a autorisé à pénétrer dans l'enceinte de

  3   l'Heliodrom ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai déjà dit que c'était une période de

  5   guerre ouverte, non dissimulée. J'étais chef des services de santé du HVO,

  6   et comme je n'ai jamais ouï-dire qu'il y a eu création officielle de ce

  7   centre -- je n'en ai pas entendu parler du tout, je ne le savais pas, donc

  8   je percevais la chose comme ce que j'ai déjà indiqué. Je pensais qu'en ma

  9   qualité de médecin, avec mon collègue M. Lang, je devais forcément y aller.

 10   On s'est mis donc à bord d'un véhicule.

 11   Ça peut vous paraître inhabituel, mais c'est ainsi que ça s'est passé. On y

 12   est tout simplement allés. On y est allés, disais-je, et à l'entrée, j'ai

 13   rencontré un jeune homme qui s'est mis devant l'entrée et qui a dit, vous

 14   n'allez pas entrer. J'ai dit que j'étais médecin et que j'allais bel et

 15   bien entrer. Et quelqu'un a dû me reconnaître et il a dit à ce jeune,

 16   laisse entrer les médecins. Lang et moi, on est entrés sans qu'il y ait eu

 17   une autorisation officielle à l'époque, parce que c'était une situation

 18   plutôt chaotique. La situation et les temps étaient chaotiques.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 20   Portiez-vous votre uniforme ou étiez-vous en civil ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant la guerre, étant donné que je me

 22   trouvais à la tête de ces services de santé du HVO, je pense que j'ai

 23   toujours porté l'uniforme avec des insignes du CICR pour être reconnu en ma

 24   qualité de médecin, et je ne portais aucune arme.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 26   Et l'homme à l'entrée de l'Heliodrom était-il également en uniforme ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

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  1   Vous avez dit "notre personnel qui s'occupait de la situation là-bas." Je

  2   vous pose la question suivante : vous venez de dire que ce centre de

  3   détention ne relevait pas du mandat du département de la Défense, des

  4   militaires, mais à présent, ce que vous me dites indique tout le contraire,

  5   à savoir que l'autorité responsable de l'Heliodrom à l'époque était la

  6   branche militaire du HVO, à savoir le département de la Défense. Que dites-

  7   vous de cela ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois vous dire -- en réalité, je dois

  9   rectifier ce que j'ai déjà dit jusqu'à présent pour être tout à fait

 10   précis.

 11   Je me sers souvent de ce terme "nos patients", "nos médecins", "nos". Donc

 12   quand je dis "nos" je parle de la profession, mon collègue, indépendamment

 13   de son origine et de l'endroit où il vit. Ces médecins ne faisaient pas

 14   partie de mon QG. Ils ne faisaient pas partie du secteur de la santé. Ils

 15   ne faisaient pas non plus partie du département à la Défense. Ils étaient

 16   sur le terrain au sein de l'unité ou au sein de la brigade, ou au sein de

 17   cette zone de rassemblement. C'est la chose la plus importante à tirer au

 18   clair là.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc vous semblez maintenir l'avis

 20   que l'Heliodrom à l'époque n'était pas placé sous l'autorité du département

 21   de la Défense. Si tel est le cas, qui en était responsable ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas dit et je ne pense pas savoir sous

 23   l'autorité de qui c'était en tant que tel. J'ai dit en fait qu'en ma

 24   qualité de médecin chargé des soins de santé au HVO au niveau le plus

 25   élevé, j'avais ressenti la nécessité d'y aller. Je n'ai pas vu d'ordre de

 26   ce type pour ce qui est de la mise en place de ce centre et je n'ai été

 27   présent à aucune des réunions où il aurait été question de la création de

 28   cette prison-là, ou d'une autre prison, ou d'un centre d'isolement, ou

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  1   appelez-le comme vous voulez. Ça, je ne le savais pas.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'en reste là pour le moment. Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, la question de l'Heliodrom est

  4   une question-clé dans ce dossier. L'Heliodrom c'est la pierre angulaire du

  5   dossier.

  6   Vous nous l'avez dit, vous étiez le responsable du secteur santé au

  7   département de la Défense. En qualité de docteur, vous allez donc avec

  8   Slobodan Lang, votre collègue, vous rendez visite à l'Heliodrom. Vous nous

  9   dites - c'est ce que vous avez dit à mon collègue - qu'avant vous ne saviez

 10   pas comment cet établissement fonctionnait. Donc vous découvrez cela, si je

 11   comprends bien, quand vous allez sur place. Nous avons -- et moi je ne

 12   tiens pas à vous prendre par surprise. Ce sera peut-être le rôle du

 13   Procureur, mais moi ce n'est pas le mien. Moi je suis neutre et j'essaye de

 14   mettre en évidence les points forts du dossier.

 15   Nous avons eu des témoins qui sont venus nous parler de ce qui s'est

 16   passé à l'Heliodrom. Ils nous ont décrit tout cela. Quand vous, vous allez

 17   à l'Heliodrom, est-ce que vous vous rendez compte que c'est un centre où il

 18   y a des personnes détenues, et que s'il y a des personnes détenues se pose

 19   la question de la responsabilité du corps médical de l'armée ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais, Monsieur le Président, on

 21   parle du mois de juillet. C'est le mois de juillet, ce n'est pas le mois de

 22   septembre, le mois d'octobre, le mois de novembre, nous sommes en juillet.

 23   Au mois de juillet, l'Heliodrom on ne pouvait pas le cacher. Je savais

 24   qu'il y avait là-bas une base militaire, c'est-à-dire une caserne, et

 25   prétendument une prison, une prison centrale, dirais-je. Mais après le

 26   début des conflits entre l'ABiH et le HVO dans Mostar, lorsque les

 27   Musulmans et les Bosniens ont retourné leurs armes contre nous et lorsqu'il

 28   est arrivé ce qui est arrivé, il y a eu plus de gens, c'est mes collègues

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  1   qui me l'ont dit, il y a eu plus de gens à avoir été emmenés vers ce

  2   centre, et à ce moment moi je ne connaissais pas son statut, véritablement

  3   pas. Je savais une chose, c'est qu'il fallait y aller et voir ce qui se

  4   passait là-bas, ce qu'on y faisait, mais personne, du moins pas à moi, ne

  5   m'a donné d'instructions à cet effet. Une fois arrivés là-bas, cependant,

  6   on a trouvé des gens qui, entre autres, étaient des infirmiers, certains

  7   étaient même médecins, qui étaient détenus en leur qualité de membres du

  8   HVO suite aux événements. Nous avons donc appris que des médecins

  9   appartenant à la brigade qui se situait là-bas surveillaient la situation

 10   en matière de santé autant qu'ils le pouvaient. Donc pour leur apporter

 11   notre soutien, on y est allés, mais je vais vous dire comment. Ces médecins

 12   qui se trouvaient au centre et les médecins qui étaient à l'extérieur qui

 13   s'efforçaient d'aider ceux qui étaient à l'intérieur.

 14   C'est ce que j'aurais à vous répondre à peu près, nous sommes en

 15   début juillet, donc c'est tout au début, et je ne pouvais pas savoir dès ce

 16   moment-là ce qu'il en allait et ce qu'il en était. J'estimais que c'était

 17   un endroit où il fallait intervenir.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Monsieur Bagaric, vous nous avez dit que vous saviez que dans le cadre

 20   de cette caserne à l'Heliodrom il y avait une prison centrale ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous avez visité ce bâtiment de la prison centrale en

 23   compagnie de M. Lang ou est-ce que vous êtes allé ailleurs, là où on

 24   gardait les détenus ?

 25   R.  Je dois reconnaître que maintenant je ne sais pas vous le dire

 26   exactement, était-ce là ou là. Mais s'agissant des personnes qui étaient

 27   détenues là-bas, d'après leurs âges, d'après - que sais-je - la situation

 28   telle qu'elle se présentait, il me semble -- je suppose du moins que

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  1   c'était là qu'étaient installés les gens mis en détention une fois qu'on a

  2   désarmé les membres de l'armée, ceux qu'on avait jugés potentiellement

  3   dangereux.

  4   Q.  Monsieur Bagaric, est-ce que vous êtes allé dans un endroit qui

  5   ressemblait à une salle de gym ?

  6   R.  Je pense que oui. Enfin je ne pense pas que oui, je suis sûr que oui.

  7   Q.  Fort bien. On a vu des rapports et des ordres datant du mois de juillet

  8   1993 et allant jusqu'à début 1994, rapports et ordres découlant de ce que

  9   M. Curic a demandé qu'on fasse le service d'épidémiologie et le service

 10   dont vous faisiez partie. Alors est-ce qu'on a amélioré la situation en

 11   matière de protection et de santé ? Parce que vous nous avez précisé que

 12   c'était vous qui étiez chargé de cette protection médicale, alors la

 13   situation s'est-elle améliorée après que vous ayez souligné tous les

 14   aspects négatifs ?

 15   R.  Suite à notre intervention venue de l'extérieur, dirais-je, et suite à

 16   l'aide apportée à ces équipes médicales à l'intérieur, suite aux

 17   inspections des activités, je dirais que nous avons absolument amélioré à

 18   tous points de vue la protection médicale dans cet endroit. Il convient de

 19   garder à l'esprit le fait que plus le temps passait plus il fallait en

 20   faire parce que plus le temps passait plus les gens restaient confinés à un

 21   même endroit, plus le danger augmentait de voir des maladies contagieuses

 22   survenir. Donc le Dr Curic, qui par la suite est devenu une sorte de

 23   coordinateur professionnel - puisqu'il est infectologue à l'extérieur - il

 24   en faisait de plus en plus, lui.

 25   Q.  Alors j'aimerais qu'on se penche sur certains documents portant sur ce

 26   domaine.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Nozica.

 28   Vous n'avez pas obtenu réponse à votre question. Vous avez posé la

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  1   question de savoir si la situation s'était améliorée, le témoin a dit

  2   "Oui," vous dites oui, mais vous avez dit d'une manière générale que vous

  3   avez poursuivi vos efforts et que c'était de plus en plus difficile, mais

  4   il s'avère que vous avez réussi à prévenir l'épidémie. Est-ce que vous

  5   pourriez dire à quels autres égards la situation des détenus a été

  6   améliorée ?

  7   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi de me mêler. Mais votre

  8   question est posée du fait d'une erreur au compte rendu. En page 19, ligne

  9   6, on a traduit "we absolutely did promote," donc "on a absolument

 10   amélioré," et lui il a dit "we did improve" en réalité.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ce que j'ai dit. Du moins je

 12   pense l'avoir dit.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ça a dû se perdre dans la

 14   traduction, comme le dirait Me Karnavas, et c'est effectivement précisément

 15   le terme qui est à l'origine de ma question.

 16   Merci. Je pense que nous pourrons donner la parole à Me Nozica.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je plaide coupable parce que je parle trop

 18   rapidement.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Veuillez donc ralentir. Dans tout

 20   état de cause l'on vous préviendra.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ferai de mon mieux.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question en appelant une

 24   autre.

 25   Je suis frappé par le fait que vous mettez en avant le Dr Curic pour les

 26   questions d'épidémies. Très bien. Vous avez sur le plan médical tout à fait

 27   raison, mais vous savez également que concernant les conditions de

 28   détention, il n'y a pas que le problème des épidémies, il y a d'autres

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  1   problèmes; il y a la gestion du moral des détenus, des questions de bonnes

  2   conditions de détention, des questions de mauvais traitements, où là le

  3   médecin peut avoir un autre rôle que de ne s'occuper que des bactéries ou

  4   des infections. Or, ce volet, vous n'en parlez pas.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pensais pouvoir en parler en long et en

  6   large, et que j'aurais suffisamment de temps pour le faire. Je comprends

  7   parfaitement bien votre question. Mais je vois que Mme l'Avocate n'arrête

  8   pas d'accélérer, alors moi aussi j'essaie d'accélérer. Si vous êtes

  9   d'accord vous-même, c'est très volontiers que je répondrai à ce type de

 10   questions ultérieurement lorsque nous aurons plus de temps. Ou alors, si

 11   vous préférez, je peux le faire tout de suite.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Rassurez-vous, quand les Juges posent une question,

 13   ce n'est pas pris dans le temps de l'avocate. Donc répondez à ma question

 14   et Me Nozica n'a aucun préjudice.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, vous avez

 16   tout à fait raison, il ne s'agit pas seulement de soins à l'égard de

 17   certaines personnes, il ne s'agit pas seulement de veiller à ce qu'il n'y

 18   ait pas d'infections en tant que tel, le soin à apporter c'est celui du

 19   suivi général de l'amélioration de l'état de santé, et c'est justement ce

 20   que vous avez dit.

 21   Ce collègue à nous, le Dr Curic, était chef de la protection préventive

 22   médicale, et croyez-moi bien que c'est un professionnel exceptionnel et il

 23   l'a fait absolument bien de mon avis, on voit dans ses rapports qu'il l'a

 24   bien fait, lui et ses collègues. Que cela veut-il dire ? Ça veut dire que

 25   suite à des propositions émanant de lui, il y a eu par nous création d'un

 26   poste sanitaire à l'intérieur même de la prison, ce qui signifie qu'il y

 27   avait un médecin qui était de permanence qui faisait ses visites. Il

 28   portait cette espèce de tenue blanche pour s'occuper des gens comme on le

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  1   fait dans un centre hospitalier ou où que ce soit.

  2   Mis à part ce fait-là, nous avons créé là-bas un petit entrepôt de

  3   médicaments et de matériels sanitaires, ce qui fait qu'on pouvait

  4   intervenir sur-le-champ en cas de besoin. Pour les cas de figure où on ne

  5   pouvait pas à ce niveau-là venir en aide aux intéressés, intervenir de

  6   façon appropriée, on transportait ces gens-là vers l'hôpital de Mostar.

  7   C'est la raison pour laquelle il y avait le directeur de l'hôpital à Mostar

  8   qui a été chargé de la chose directement. De temps à autre, j'intervenais

  9   moi-même au cas où il y aurait eu problème qui serait survenu dans les

 10   communications entre les uns et les autres. Mais il ne faut pas oublier que

 11   l'Heliodrom se trouve dans une zone de guerre et qu'il n'a pas toujours été

 12   facile d'établir la communication entre l'hôpital et l'Heliodrom en tant

 13   que tels.

 14   Quand vous parlez de M. Curic, vous l'avez, je pense, mentionné --

 15   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi. Non, je crois que M. le Juge a

 16   dit "Curic". Il ne faut pas que l'on introduise --

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça prêtait à confusion. Je ne savais pas qu'il

 18   s'agissait d'une question de prononciation.

 19   Est-ce que je peux continuer ?

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puisqu'il y a quand même une

 21   interruption, à la page 21, ligne 19, il est indiqué que cet aspect médical

 22   peut être pris en charge dans n'importe quel dispensaire. Vous disiez

 23   "dispensaire", est-ce que vous ne vouliez pas dire prison, donc "detention

 24   center" plutôt que "health center" ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est exact. Mais j'aimerais qu'on

 26   me montre le document. Mais je sais que c'est ainsi que ça s'est passé.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] La première des choses que nous ayons faite

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  1   c'était de rehausser l'importance des médecins qui ont eux-mêmes été faits

  2   prisonniers dans ce centre. C'est la raison pour laquelle j'ai rédigé un

  3   ordre -- ou plutôt, une requête - je ne sais plus comment je l'avais

  4   qualifié - pour qu'il soit procédé à la création dudit centre et que ce

  5   soit dirigé par des collègues médecins qui se trouvaient à l'intérieur du

  6   centre. Nous avons gardé, d'une certaine façon, ce type de communication

  7   avec eux en procédant à une supervision permanente de ce qui se faisait de

  8   l'extérieur, et ce, à partir de deux niveaux. L'un des deux niveaux était

  9   celui des médecins qui venaient de l'unité du terrain ou de la zone de

 10   rassemblement, et d'autre part c'était, dirais-je, à un niveau plus élevé

 11   que ça se faisait par le Dr Curic ou d'autres individus qui

 12   l'accompagnaient de temps à autre lorsqu'il allait là-bas.

 13   Alors que convient-il de mentionner encore : bien sûr, au fil du temps, la

 14   situation là-bas a changé, et de temps en temps il fallait prendre de

 15   nouvelles mesures, déployer des activités nouvelles, et on peut le voir

 16   dans les rapports, cela.

 17   J'ai gardé en mémoire une question que vous avez posée, et si vous le

 18   permettez j'aimerais y revenir. Lorsque vous avez dit notamment que

 19   l'environnement dans lequel ces gens vivaient, les circonstances dans

 20   lesquelles ces gens vivaient ça a beaucoup à voir avec l'état de santé,

 21   c'est bien exact, mais nous avons fait l'effort qu'il fallait, et grâce à

 22   ces efforts, il y a eu un rendement qui a fait qu'au centre personne n'a

 23   péri. Personne n'a manqué de soins médicaux. Bien sûr, il y a eu des

 24   circonstances qui sont extérieures au centre et qui ont directement mis en

 25   péril l'état de santé des gens dans le centre, mais ça n'a rien à voir avec

 26   la profession médicale. En l'occurrence, ça peut être la qualité de la

 27   nourriture qu'on distribuait. Ça peut être la sécurité des détenus à

 28   l'intérieur du centre. Ça c'est exact, ça ne faisait que compliquer les

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  1   choses à titre complémentaire, et j'ajouterais que cela créait des

  2   difficultés pour ce qui est des médecins.

  3   Alors il y avait des niveaux où l'on pouvait influer sur les choses,

  4   et il y avait des cas de figure où on ne pouvait que proposer, pas nous,

  5   mais les médecins qui étaient chargés de la chose directement, et on ne

  6   pouvait pas influer sur les choses. Mais ces choses-là, elles, elles

  7   influaient sur la santé des gens.

  8   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Q.  Monsieur Bagaric, je voulais vous dire que lorsqu'on en viendra à ces

 10   ordres j'allais certainement en parler. Je n'aurais pas sauté la chose.

 11   Mais je me félicite du fait que vous ayez fait tout ceci dans le temps

 12   imparti aux Juges.

 13   Alors je vous demande de vous pencher sur deux ou trois documents

 14   brièvement qu'on a déjà montrés. Le 2D 915 en premier.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Il s'agit d'un rapport pour ce qui est de la surveillance ou du

 17   contrôle de santé dans la Brigade Petar Kresimir IV. Alors veuillez nous

 18   confirmer si c'est bien l'une des activités effectuées par le Dr Curic, ou

 19   plutôt qui était confiée à ce service d'épidémiologie, de toxicologie et

 20   d'infectiologie ?

 21   R.  Oui. C'est un exemple entre autres. Le Dr Curic visite cette brigade.

 22   Il contrôle l'approvisionnement en eau potable. Il constate la situation en

 23   matière de santé, et je sais qu'il le faisait en coopération avec le

 24   médecin compétent en la matière au sein de la brigade. Puis il procédait au

 25   contrôle pour voir si on désinfectait, dératisait, et cetera, et cetera,

 26   donc s'il y avait toutes ces mesures en matière de santé et s'il y avait

 27   participation active à tout ce que le Dr Curic avait prescrit.

 28   Q.  Monsieur Bagaric, un témoin en a déjà parlé. Alors est-ce que cela

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  1   confirme ce que vous nous avez déjà dit ?

  2   R.  Oui, justement.

  3   Q.  Document suivant, 2D 921. C'est un document qui comporte deux rapports.

  4   Supervision sanitaire dans Sup Vrdi [phon], et ensuite un rapport sur

  5   l'éducation en matière de médecine de guerre préventive. C'est un médecin

  6   de la brigade qui fait l'objet d'un entraînement ou d'une éducation à

  7   Grude.

  8   R.  Absolument.

  9   Q.  On n'a pas consigné le numéro. 2D 921. Ma question n'a pas été

 10   consignée dans son intégralité.

 11   Est-ce que cela faisait partie des attributions de ce que faisait ce

 12   service d'infectiologie et d'épidémiologie ?

 13   R.  Oui.

 14   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent au témoin qu'il doit attendre un

 15   peu au lieu de bondir pour répondre.

 16   Mme NOZICA : [interprétation]

 17   Q.  Penchez-vous maintenant sur P 4756.

 18   R.  J'y suis.

 19   Q.  Il s'agit d'une réunion collégiale, et vous avez dit qu'à l'occasion

 20   d'une réunion collégiale il a été débattu de ces centres de réfugiés et de

 21   détention. C'est daté du 2 septembre 1993. Il s'agit de la page 3 en

 22   version croate, page 4 en version anglaise, et c'est ce qui nous donne une

 23   idée du débat qui a eu lieu où M. Stojic a dit qu'il estimait qu'au

 24   département de la Défense il y avait deux prisons militaires, Heliodrom et

 25   Ljubuski ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Alors attendez un peu, vous allez me répondre tout à l'heure. Ici, on

 28   confie une mission disant que dans un délai imparti il fallait vérifier ce

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  1   qui se passait, que l'on fournisse des observations pour ce qui est de qui

  2   prenait soin de Dretelj et de Gabela, ce qui s'y passait. Pouvez-vous nous

  3   dire si le secteur de la santé a bel et bien procédé à une supervision de

  4   la situation à l'intérieur de ces deux centres de détention avant et après

  5   la date qui est ici indiquée ?

  6   R.  Ceci est lié à la question qui avait été posée par le Président de la

  7   Chambre concernant ce que je savais ou ce que j'ignorais quant au statut

  8   des centres de détention et de ces prisons. A vrai dire, j'étais vraiment à

  9   cette réunion du collegium, et je sais qu'il y a des choses qui ont filtré

 10   exactement telles qu'elles sont consignées ici. Toutefois, je voudrais

 11   souligner qu'indépendamment de tout ceci, je n'ai pas eu le sentiment que

 12   Dretelj ou Gabela étaient directement chargés, et effectivement ils ne

 13   l'étaient pas; toutefois, en vertu des mêmes actions et des

 14   responsabilités, nous devions superviser tous les centres de détention où

 15   il pouvait y avoir des infections qui pouvaient se déclarer, et je sais que

 16   le Dr Curic avec d'autres médecins des unités chargées des deux centres de

 17   détention, entraient dans ces centres avant et également après.

 18   Q.  Parlons maintenant de certains documents où il est question de ces deux

 19   centres de détention. Certains ont déjà été présentés pour versement au

 20   dossier comme éléments de preuve, donc on ne vous demandera pas de

 21   commentaires très longs.

 22   Le premier document est le P 1415. C'est votre demande datée du 12 août que

 23   vous avez déjà vue, vous avez déjà commentée. Effectivement, c'est une

 24   demande à laquelle vous avez demandé qu'un centre médical soit constitué à

 25   Heliodrom, et vous avez expliqué cela au Juge ?

 26    R.  Oui, c'est un document auquel je me suis référé. Il s'agissait d'un

 27   centre pour les fantassins. C'était notre effort supplémentaire de façon à

 28   traiter le problème et à essayer de le résoudre.

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  1   Q.  Pourriez-vous maintenant --

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Nozica, peut-être que nous

  3   pourrions économiser du temps en faisant attention aux numéros, parce que

  4   là encore il s'agit d'un numéro qui n'est pas le bon. Le bon numéro est le

  5   041545, et vous avez dit "1415".

  6   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, je crois que nous n'avons

  7   raison ni l'un ni l'autre. Le vrai numéro c'est le P 4145.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde fait des erreurs avec le numéro; moi

  9   compris.

 10   Monsieur le Témoin, dans ce document il y a une petite particularité. Je

 11   voulais que vous m'expliquiez si vous le savez, parce que vous interroger

 12   sur un document que vous avez signé il y a 15 ans, ça relève de l'exploit,

 13   mais on ne sait jamais.

 14   Les médecins de la 3e Brigade doivent être relevés de leurs fonctions à

 15   l'Heliodrom. Pourquoi ceci est mentionné ? Bien, je répète ma question.

 16   Dans ce document, il est indiqué que les médecins de la 2e Brigade seront

 17   relevés de leurs fonctions à l'Heliodrom. Alors pourquoi cette mention ?

 18   C'est 3e Brigade et pas 2e Brigade.

 19   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Reprenez.

 21   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : On n'entend plus la cabine française.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon collègue, Mirsad Stranjak, qui était

 24   détenu dans le centre lui-même, et le Dr Musa qui était dans la 3e Brigade,

 25   qui jusqu'à présent couvrait le centre ou la prison depuis l'extérieur avec

 26   le Dr Curic, ont proposé que l'on donne une autonomie maximale aux médecins

 27   à l'intérieur du centre, ils disaient que ces personnes étaient importantes

 28   en raison de leur qualité de docteurs, en raison du statut de centre de

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  1   détention, en raison du fait que les hommes avec eux leur faisaient

  2   davantage confiance, pour le dire ainsi. Donc cette personne de la 3e

  3   Brigade ne pouvait pas tout simplement s'en aller et ne plus s'intéresser à

  4   la situation. Mais ce n'était pas le cas. Il ne devait pas être là

  5   régulièrement, et c'est ce qui figure dans les rapports. Il avait des

  6   visites de temps en temps et il continuait à suivre la situation.

  7   Mme NOZICA : [interprétation] Merci pour cette explication.

  8   Q.  Regardons maintenant le document 2D 715, le document suivant, s'il vous

  9   plaît. Il s'agit là d'un ordre que vous avez donné. C'est la première fois

 10   que vous avez donné ou un commandement, est-ce que vous étiez à même de le

 11   faire, d'émettre des ordres ou des commandements ? Nous discuterons de ça

 12   dans un instant. La date est le 18 août, donc voyons à qui il est adressé.

 13   Il est dit que le commandant, à l'intention de Nikica Sutalo, le commandant

 14   de la Brigade de Domagoj, au centre médical à la prison de Dretelj; est-ce

 15   que c'est exact ?

 16   R.  Oui, donc ceci est une situation presque identique ici, et la façon

 17   dont le problème à l'Heliodrom a été résolu. Ils ont essayé de faire la

 18   même chose ici avec M. Sutalo et M. Curic, et je suis sûr qu'il avait

 19   préparé cet ordre. Moi, je ne l'ai pas signé. Je peux voir que quelqu'un a

 20   signé pour moi, ce n'est pas mon écriture manuscrite. Excusez-moi de parler

 21   si vite, je vais essayer de ralentir.

 22   En tout état de cause, comme je le disais, ce n'est pas moi qui ai signé

 23   cela. Mais c'est comme ça qu'étaient les choses, c'était ça la règle. Nous

 24   avions le pouvoir de signer les uns pour les autres. Donc ceci c'était avec

 25   ma connaissance et avec mon accord que ça s'est fait. Ce qui voulait dire

 26   que pour ce qui était de l'entrée de l'extérieur, si je peux dire les

 27   choses, par un niveau de contrôle supérieur, une supervision supérieure, le

 28   fait de rentrer à Dretelj. C'est comme ça. Le même principe s'appliquait.

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  1   Q.  Regardons le même document qui est le 2D 278.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Là il s'agit d'un ordre signé par M. Curic qui est daté du 28 août, et

  4   comme il est dit ici dans l'introduction, une enquête a été effectuée le 17

  5   août, le 18 et le 26, et ça a été envoyé au chef du centre de santé, M.

  6   Sutalo ainsi qu'au colonel Nedeljko Obranovic, et là encore ceci a été lié

  7   à une enquête de Gabela Dretelj, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui. Nous pouvons voir que le processus s'est continué, des personnes

  9   sont venues en visite les 17, 18 et peut-être 19, le 27 août, et une

 10   proposition a été faite que le 28 août.

 11   Q.  Maintenant regardons, s'il vous plaît, le document 2D 412, s'il vous

 12   plaît. Pour le compte rendu je rappelle que le numéro du document c'est 2D

 13   412.

 14   R.  Oui, je peux le voir.

 15   Q.  Il s'agit bien d'un ordre que vous avez donné qui est daté du 28

 16   septembre. Je crois que ça s'est répété plus tard, mais pourriez-vous

 17   expliquer aux Juges ce qui vous a incité à prendre un ordre comme celui-ci

 18   ?

 19   R.  Pendant les questions posées par les Juges ou pendant les questions

 20   posées par vous-même ?

 21   Q.  De façon concise pendant le temps qui m'est imparti, s'il vous plaît. 

 22   R.  Il s'agit là d'un ordre qui est très important. Je suis très fier

 23   d'avoir donné cet ordre. Je sais que ceci a remporté pas mal de succès sur

 24   le terrain et que la situation s'est considérablement améliorée à la suite

 25   pour ce qui est de la santé des détenus. Nous savons que la situation était

 26   difficile, mais très certainement cet ordre ainsi que les médecins qui se

 27   trouvaient à l'intérieur et ceux qui se trouvaient à l'extérieur et tout

 28   particulièrement avec l'aide de mon collègue, le Dr Curic, expert à

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  1   l'extérieur à un niveau supérieur, ceci a favorisé de façon importante les

  2   soins de santé sur les lieux. Ceci s'appliquait à tout ce que nous savions,

  3   ce que nous ne savions pas, s'il y avait eu des centres de détention dont

  4   on n'avait pas connaissance, néanmoins, il aurait incombé aux commandants

  5   de faire de leur mieux pour rendre les mesures voulues.

  6   Q.  Je vais maintenant vous poser des questions concernant un document

  7   suivant, le P 553, rapport qui a trait à la visite à l'Heliodrom.

  8   Rapport de la commission, c'était le 30 septembre, je crois qu'il est

  9   important de souligner la date, et ceci a conduit à la question qui vous a

 10   été posée par le Juge Antonetti en ce qui concerne votre demande sur le P

 11   4145, l'autre document que nous avons vu il y a un moment. Je pense qu'il

 12   est important de le dire ici qu'en plus des trois médecins membres de la

 13   commission, celui pour le centre, M. Stanko Bozic, le chef du centre, le Dr

 14   Pehar et Hadzic, pouvez-vous expliquer aux Juges qui était le Dr Pehar et

 15   qui était le Dr Hadzic à ce moment-là ?  

 16   R.  Le Dr Pehar était le chef, je ne peux pas dire s'il était vraiment le

 17   chef de la brigade ou de la région militaire, mais je crois qu'il était le

 18   chef de la brigade. Le Dr Hadzic était un médecin à l'intérieur du centre,

 19   il était incarcéré. Quant à cette commission de trois membres, tous étaient

 20   des médecins spécialistes, le Dr Kolak était un chirurgien. Enfin, il

 21   n'était pas encore chirurgien à ce moment-là, il était en train de finir

 22   son cours de spécialité. Il y avait le Dr Ivo Sandrk, il était spécialiste

 23   de [inaudible]. Et le Dr Sturic dont j'ai dit qu'il était spécialiste des

 24   infections.

 25   Donc tous trois étaient les chefs de certains départements au sein de notre

 26   secteur de santé. Donc le Dr Curic, du point de vue professionnel,

 27   supervisait lui-même la situation, mais de façon à avoir une vue plus

 28   complète et qui englobe les choses, ces deux autres médecins avaient été

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  1   ajoutés pour faire partie de la commission.

  2   Q.  Je vais répéter le numéro du document dont nous venons de parler, c'est

  3   le P 5503, 5503. Je dis ça pour le compte rendu, Monsieur le Témoin. Je

  4   vais maintenant vous demander de regarder deux autres documents, ce sont

  5   tous deux des rapports. Je voudrais rappeler votre attention sur le fait

  6   qu'il y a à la page 31, ligne 8, il faut lire, "le Dr Pehar" avec un "P" et

  7   non pas un "B".

  8   Regardez, s'il vous plaît, nous avons lu votre ordre du 28 août où vous

  9   demandez que vous soient présentés des rapports -- document numéro 2D 1538.

 10   R.  Oui, je vois.

 11   Q.  Je dis cela pour le compte rendu. Pouvez-vous nous dire si ceci est

 12   bien, c'est le rapport qui a fait suite à l'inspection ?

 13   R.  Oui, c'est l'un des rapports.

 14   Q.  C'est une réponse à M. Nikica Sutalo, et ceci est lié au centre

 15   d'isolation préventive, Gabela, je voudrais appeler votre attention sur la

 16   dernière phrase qui dit qu'aucune difficulté n'a été rencontrée pour les

 17   opérations du centre en ce qui concerne l'aspect médical. Donc vous

 18   receviez des rapports de ce genre de d'autres centres d'isolation

 19   préventive, n'est-ce pas ?

 20   R.  Ma réponse est oui, mais je ne peux pas me rappeler tous les détails

 21   maintenant, parce que le Dr Curic, d'une certaine manière, et je parle au

 22   conditionnel, a été désigné par nous. Enfin, on est parvenu à un accord

 23   pour le nommer de façon à ce qu'il soit chargé de la supervision et du

 24   contrôle à l'extérieur.

 25   Q.  Nous avons ici un rapport qui est daté du 15 janvier 1993, il s'agit de

 26   2D 1537.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, je suis encore dans la

 28   confusion. J'ai un doute en ce qui concerne le dernier document.

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  1   Vous avez dit qu'il s'agissait de la ligne 8, page 32, "c'est une réponse à

  2   M. Nikica Sutalo," mais il semble qu'il s'agisse d'un document qui est

  3   signé par Nikica Sutalo. Donc si c'est une réponse, ça ne peut pas être une

  4   réponse de lui-même à lui-même.

  5   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, oui, vous avez parfaitement

  6   raison. Ce n'est pas à Nikica Sutalo, mais écrit par Nikica Sutalo.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ecoutez, ça pourrait être très

  8   intéressant, peut-être pourriez-vous nous dire, Docteur Bagaric, quelles

  9   étaient les fonctions du Dr Sutalo ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, je crois que mon collègue, M.

 11   Sutalo, était le chef du corps médical de la Brigade Knez Domagoj. Je crois

 12   que c'est ça qu'il faisait, et c'est comme ça qu'il signe ici, chef du

 13   service de santé du corps médical, SNSL.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il était également la personne

 15   responsable pour les aspects médicaux à Gabela ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument, absolument, c'était bien la

 17   personne.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc ceci n'est pas un rapport de

 19   quelqu'un qui se trouvait à l'extérieur et qui serait allé voir si l'ordre

 20   précédent avait été bien respecté et appliqué, mais il s'agit de la

 21   personne à qui l'ordre a été adressé qui a dit : J'ai fait tout ce que vous

 22   m'avez demandé; c'est cela ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien cela, effectivement.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question à poser.

 26   Maître Nozica, il vous reste sept minutes, alors pendant que je pose ma

 27   question, voyez comment vous allez gérer au mieux les sept minutes avec les

 28   quelques documents qui vous restent.

Page 38999

  1   Monsieur le Témoin, je viens de regarder les deux rapports du Dr Sutalo, et

  2   je constate le point suivant. Dans un premier document, le Dr Sutalo fait

  3   le rapport sur la situation du centre d'isolation préventive; c'est

  4   intitulé comme ça, puis dans le deuxième rapport du mois de novembre, il

  5   l'intitule "Rapport sur la situation des mesures prises à la prison

  6   Gabela." Donc en quelques semaines, ce centre d'isolation préventive

  7   devient une prison.

  8   Alors je sais bien que le Dr Sutalo n'est pas un juriste, mais vous avez,

  9   vous, une explication à donner ou vous n'en avez aucune ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas juriste. Mais dites-moi, quel

 11   était le second document ? Parce que je vois le premier --

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Le premier c'est celui qui est le 2D 1538, et le

 13   deuxième c'est le 2D 1537.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois bien.

 15   C'est un rapport typique, un rapport que des médecins rédigeraient

 16   typiquement, ici le Dr Sutalo, tout au moins c'est comme ça que je vois les

 17   choses, il indique "Objet : Rapport sur la situation au centre de

 18   prévention de Gabela," c'est comme ça qu'il met son titre, et deuxièmement,

 19   la situation actuelle à la prison de Gabela et les mesures qui sont prises.

 20   Maintenant, je ne sais pas si le statut du centre a changé du tout, mais ce

 21   ne serait pas surprenant que le Dr Sutalo ait voulu dire la même chose en

 22   utilisant ces deux titres, parce que comme je l'ai déjà dit à ce moment-là,

 23   du point de vue de la terminologie utilisée, nous ne savions pas très bien

 24   comment nommer les choses, quel était le nom correct, et ce qui était

 25   essentiel c'est qu'il y avait des gens qui s'y trouvaient. Ça c'est

 26   l'essentiel.

 27   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Pourrais-je aider peut-être à la question posée par le Juge Trechsel,

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  1   lorsqu'il a demandé qui était Nikica Sutalo, je pense -- en fait, je

  2   voulais simplement vous rappeler le document 2D 715, donc le 2D 715, en

  3   fait j'ai déjà regardé cela, et maintenant je vous parle du 2D 728,

  4   document -- ordre de M. Bagaric qui a été envoyé directement à M. Nikica

  5   Sutalo, et le deuxième était envoyé à M. Curic. Il y est dit qu'il est le

  6   chef de la Brigade Knez Domagoj tout en haut du document.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est bien ce que je viens de dire.

  8   Excusez-moi pour dire cela, Maître, mais c'est ce que j'ai dit --

  9   Mme NOZICA : [interprétation]

 10   Q.  Docteur Bagaric, calmez-vous. Il n'est pas nécessaire de vous troubler.

 11   Je vois que vous avez un tempérament assez vif, mais prenons les choses en

 12   douceur, une par une, si vous le voulez bien.

 13   Alors regardons le document suivant. Pourrais-je avoir une ou deux minutes

 14   de plus, s'il vous plaît, Monsieur le Président, j'aurai fini pour la

 15   suspension de séance. Mais si on pouvait voir le document P 6203, s'il vous

 16   plaît. P 6203 est le numéro.

 17   R.  Je le vois.

 18   Q.  C'est un document qui a été -- qui vous a été envoyé par M. Siljeg

 19   concernant une lettre que vous avez envoyée le 28 octobre, malheureusement

 20   il s'agit d'un ordre que nous n'avons pas. Mais en tout état de cause, il

 21   dit premièrement qu'en ce qui concerne les centres, ceux qui se trouvent

 22   sur le territoire de son ressort, qu'il n'y en avait pas, mais ce qui

 23   m'intéresse c'est ce qu'il dit au point B : "Vous n'avez pas le droit de

 24   commander," ou de donner des ordres, et ceci fait que vos ordres sont nuls

 25   et non avenus.

 26   Est-ce que vous avez des commentaires à faire, à savoir si M. Siljeg, tout

 27   au moins du point de vue formel -- est-ce que vous aviez le droit d'émettre

 28   les ordres, de donner les commandements, est-ce qu'on pourrait avoir vos

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  1   commentaires là-dessus ?

  2   R.  Oui, je ne pouvais pas lui adresser d'ordres à lui, et d'ailleurs je ne

  3   l'ai pas fait, mais je pense que ce qui était plus important ici c'était ce

  4   que nous voulions réaliser et ce que nous avons réalisé. C'est plus

  5   important que la façon dont -- la manière dont on appellerait ce document.

  6   Ça c'était sans importance.

  7   Q.  Est-ce que vous avez reçu une formation militaire d'une façon ou d'une

  8   autre, vous et M. Stojic par exemple et le département de la Défense, de

  9   telle sorte que vous sachiez comment les documents doivent être rédigés, ce

 10   qui est un ordre ou un commandement, quelle était l'instruction en ce sens

 11   ?

 12   R.  M. Siljeg, qui venait de l'armée populaire yougoslave et qui était un

 13   militaire bien formé et bien élevé, connaissait la terminologie mieux que

 14   moi. Quelqu'un qui n'avait pas cette formation officielle militaire de base

 15   aurait pu peut-être nommer les choses avec une appellation différente. Mais

 16   je voudrais répéter encore une fois que c'était sans importance.

 17   Q.  Maintenant voyons le dernier document que nous allons regarder --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Laissons de côté ce qui

 19   à votre avis est important ou pas, je souhaiterais que vous nous disiez :

 20   Bien sûr, vous ne pouviez pas donner d'ordres au colonel Obradovic, n'est-

 21   ce pas, mais ne pouviez-vous pas donner d'ordres au personnel médical qui

 22   était rattaché à Obradovic ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que ce n'était pas important. Cet

 24   ordre que j'ai appelé "ordre" et qui a suscité la protestation de Siljeg en

 25   fait n'était pas adressé à Siljeg, mais à son assistant chargé des

 26   questions de santé. Son adjoint chargé de la santé du point de vue

 27   hiérarchique, et évidemment il se trouvait sous les ordres de M. Siljeg.

 28   Toutefois, du point de vue professionnel, j'estime que je pouvais créer un

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  1   document, l'émettre et l'appeler ordre. Je suis d'accord avec vous, je

  2   crois personnellement que j'étais en mesure et que j'avais le droit de le

  3   faire.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  5   Mme NOZICA : [interprétation]

  6   Q.  Le P 5035, c'est un rapport établi par la délégation espagnole. Je vais

  7   vous montrer seulement certains passages que vous avez déjà vus d'ailleurs

  8   lors de la séance de récolement.

  9   Le point 5 de ce rapport a trait à l'hôpital qui se trouve à Mostar ouest.

 10   Il dit que l'hôpital était en construction pendant dix ans et qu'au cours

 11   des 18 derniers mois, ils avaient eu 6 000 personnes grièvement blessées

 12   qu'ils avaient opérées. Il y avait des problèmes en matière d'eau et

 13   d'électricité. Ils n'avaient pas les médicaments nécessaires. En outre à

 14   cela, ils avaient également besoin d'équipements plus adéquats du point de

 15   vue médical. Les médecins se plaignaient qu'ils n'obtenaient d'aide que

 16   d'organisations religieuses étrangères et qu'ils recevaient à peine un

 17   appui de la Croix-Rouge internationale et du HCR.

 18   Sur la page suivante, nous voyons tous les problèmes que vous avez

 19   signalés en ce qui concernait la situation à Nova Bila, problèmes avec la

 20   Croix-Rouge internationale. Vous avez répété que vous aviez proposé --

 21   R.  Ce n'est pas que je répète cela. C'est lui qui dit cela.

 22   Q.  Ce que je dis c'est que dans la conversation que vous avez eue avec

 23   lui, vous avez répété que vous l'aviez fait maintes et maintes fois, au

 24   point 7 il s'agit de la visite au centre de détention de l'Heliodrom, et il

 25   est dit ici que les conditions sont mauvaises; toutefois, il semble que les

 26   détenus sont assez bien nourris et logés, et les détenus eux-mêmes avaient

 27   mis en place un chauffage central. Ceci était le 14 septembre 1993 lorsque

 28   ce document a été rédigé. Ils avaient de l'eau courante 24 heures sur 24,

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  1   et ils avaient tout ce qu'il fallait en matière de sanitaire, toilettes et

  2   salles de bain. Comme l'Heliodrom normalement est une caserne, il y avait

  3   un système de ventilation. Certains détenus avaient été enregistrés par la

  4   Croix-Rouge internationale. Il y avait deux cliniques pour des patients

  5   ambulatoires de jour, avec un médecin pour chacune et quelques infirmiers.

  6   Il n'y avait pas de problèmes de santé, je cite :

  7   "Lorsque nous avons posé des questions aux détenus en ce qui concernait la

  8   nourriture, ils nous ont dit qu'ils recevaient deux repas par jour, le

  9   directeur a dit qu'ils recevaient trois repas par jour. Les détenus

 10   portaient des vêtements civils normaux, et ils étaient obligés de

 11   travailler dans le camp."

 12   Je vais maintenant vous poser la question d'essayer de comparer ceci avec

 13   le point 10, qui décrit le centre de détention à Mostar est. Ce centre de

 14   détention se trouve dans la cave d'un immeuble civil. Il n'a pas de système

 15   de ventilation, pour ainsi dire. Il y a juste une ampoule électrique. La

 16   lumière est très mauvaise. Tous les détenus portaient des vêtements de

 17   prisonniers, ils venaient juste de rentrer du travail. Ils avaient l'air

 18   assez terrifiés et ils ne voulaient parler en présence de leurs gardes :

 19   "Néanmoins, nous avons reçu quelques renseignements de leur part. Ils ont

 20   confirmé qu'ils recevaient un repas par jour, beaucoup d'eau, et qu'ils

 21   devaient effectuer certains travaux et creuser des tranchées. Ils ont dit

 22   qu'ils n'avaient pas reçu de visite de représentants de la Croix-Rouge

 23   internationale et qu'on ne leur avait pas donné la possibilité d'envoyer

 24   des messages à la Croix-Rouge internationale."

 25   C'est ce que dit la dernière phrase dans ce rapport :

 26   "Les conditions de vie des détenus du côté est sont bien pires que les

 27   conditions de celles qui se trouvent sur la rive ouest à l'Heliodrom et

 28   ceci peut être décrit comme étant vraiment très triste, très regrettable."

Page 39004

  1   Monsieur Bagaric, j'avais gardé ce document pour la fin de votre

  2   interrogatoire principal. Ceci confirme ce que vous nous avez dit, à savoir

  3   qu'à partir du moment où vous avez investi des efforts, les conditions de

  4   santé se sont améliorées. Est-ce que ce rapport c'est bien cela ? 

  5   R.  Combien de temps est-ce que j'ai ?

  6   Q.  Vous me le dites.

  7   R.  Ça confirme bien ceci. D'une certaine façon, ça donne une image

  8   objective de la situation. Il est question d'infirmeries, de médecins, et

  9   cetera, en réalité c'était le résultat des efforts investis par nous aux

 10   côtés des médecins au sein de la prison. Par conséquent, il est évident que

 11   la partie musulmane bosnienne a agi contrairement à ce que j'avais

 12   souhaité, mais ce n'était pas une raison suffisante pour que nous-mêmes

 13   nous ne fassions pas tout ce qui était en notre pouvoir pour ce qui est de

 14   soins de santé. Je suis d'avis que ceci est une confirmation de la

 15   totalité; ou si ce n'est pas la totalité, du moins de la partie que j'ai

 16   évoquée au sujet de cette problématique-là.

 17   Q.  Monsieur Bagaric, ma dernière question pour vous est la suivante : vous

 18   vous êtes employé en personne dans le secteur de la santé et dans ce

 19   segment concret pour essayer d'aider et pour ce qui est de la réalisation

 20   de cette aide à apporter à l'ABiH en matière d'équipements médicaux. Alors

 21   est-ce que vous avez reçu à cet effet un soutien de la part de M. Bruno

 22   Stojic ?

 23   R.  Je dois admettre - je dois être sincère aussi, j'ai dit que j'allais

 24   l'être - pas à chaque fois, peut-être, n'est-ce pas si correct que de

 25   demander d'un point de vue militaire un soutien de la part de M. Stojic

 26   pour ceci ou cela. Mais je pensais à chaque fois que je bénéficierais de

 27   son soutien par avance, et je me comportais de la sorte, même dans les

 28   situations où pour des cas de figure directement parlant je n'étais pas

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  1   tellement la personne chargée de la chose. Mais je me sentais convié à

  2   intervenir et exercer des pressions afin que les choses soient faites ou

  3   améliorées dans ces temps, dirais-je, infernaux. Est-ce que je peux ajouter

  4   quelque chose ?

  5   Q.  Allez-y.

  6   R.  Lorsque nous avons eu à intervenir avec Sally Backer, je ne sais

  7   comment on n'aurait pu différemment faire la chose s'il n'y avait pas eu

  8   cette approbation tant de la part de M. Stojic que de la part du général

  9   Praljak qui à l'époque était je ne sais trop quel commandant dans ce

 10   territoire. Donc il s'agissait d'assurer une cessation des tirs, une

 11   cessation des combats -- du moins de ce côté-ci, afin que l'évacuation

 12   réussisse. C'est la vérité, et toute la vérité.

 13   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous remercie.

 14   Monsieur le Président, j'en ai terminé avec mon interrogatoire

 15   principal.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de faire la pause, la Chambre souhaiterait

 17   connaître les intentions des autres Défenses pour le contre-interrogatoire.

 18   Alors je vais aller très vite.

 19   D3, y aura-t-il des questions au témoin ?

 20   Mme PINTER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. D4.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, nous avons aussi des questions pour ce

 23   témoin.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : D5.

 25   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Pour le moment, nous n'en avons

 26   pas de question. Mais je n'exclus pas la possibilité d'en poser quelques-

 27   unes.

 28   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'allons

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  1   probablement pas avoir de question pour ce témoin. Merci.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

  3   les Juges. Bonjour tout le monde.

  4   Nous n'aurons pas de question. Mais nous avons donné notre temps à la

  5   Défense de Praljak. Mais nous voulons remercier le témoin.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  7   Alors pendant la pause, D3 et D4 arrangez-vous pour le temps, puis D5

  8   également, le cas échéant.

  9   Nous faisons une pause de 20 minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 15 heures 50.

 11   --- L'audience est reprise à 16 heures 14.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je donne la parole au premier avocat.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour. Monsieur

 14   les Juges, bonjour. A toutes les personnes présentes dans le prétoire,

 15   bonjour.

 16   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Bagaric.

 18   R.  Bonjour.

 19   Q.  Docteur, nous nous connaissons, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous serez également le témoin de la Défense Petkovic, n'est-ce pas ?

 22   R.  Si vous le dites, oui en effet.

 23   Q.  Vous témoigneriez au sujet de cette réunion que vous avez évoquée à

 24   Jablanica début mai 1993, que vous témoigneriez également concernant le

 25   départ à Sovici et concernant les visites rendues à Jablanica et à Konjic

 26   et à ces deux régions -- tentatives visant à apaiser les tensions, les

 27   affrontements et à évacuer les blessés ainsi qu'à rétablir une relation

 28   normale, n'est-ce pas ?

Page 39007

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Docteur Bagaric, nous nous sommes entretenus dimanche soir dernier,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Nous nous sommes entretenus environ deux heures; est-ce exact ?

  6   R.  Il me semble que oui.

  7   Q.  Dites pour les Juges de la Chambre si nous avons parlé des documents

  8   que la Défense Stojic a préparés pour votre déposition ou avons-nous abordé

  9   d'autres sujets ?

 10   R.  Je pense que nous n'avons parlé d'aucun de ces documents.

 11   Q.  Très bien. Je vais vous poser quelques questions qui sont liées à votre

 12   déposition. La première série de questions aura trait à vos réponses que

 13   vous avez données aux questions portant sur l'organisation des services de

 14   santé au sein des unités militaires. Je pense que vous avez donné une

 15   interprétation correcte des décisions portant sur l'organisation interne et

 16   la mise en place de ces services au sein des unités militaires, mais il me

 17   semble que certaines choses n'ont pas été suffisamment bien situées dans le

 18   temps.

 19   Je vais vous interroger au sujet de la réunion qui s'est tenue à

 20   Sarajevo vers la fin août 1993 et l'accord Petkovic Delic concernant

 21   l'évacuation des blessés. Vous avez dit avoir été présent au cours de cette

 22   réunion, donc je vais vous interviewer à ce sujet.

 23   Egalement, je vous poserai des questions concernant les centres de

 24   détention, et cela sera lié à vos réponses d'aujourd'hui. Je vous

 25   demanderais également d'éclaircir l'une de vos réponses dont j'estime

 26   qu'elle est extrêmement importante et j'estime que la question se pose

 27   également de savoir si cette réponse est exacte.

 28   Je vous poserai également une question concernant votre visite à

Page 39008

  1   Sovici, bien que cela doive également être l'un des sujets abordés lors de

  2   votre déposition dans la Défense du général Petkovic. Et je poserai

  3   également une question, car j'ai promis à mon confrère M. Scott que je le

  4   ferais. Il s'agissait de ses réactions à l'une des réponses qui a été des

  5   vôtres concernant les crimes dont on a allégué qu'ils avaient été commis ou

  6   non à Sovici.

  7   Commençons par le début. Je vais essayer de résumer ce que vous avez

  8   dit hier, Monsieur Bagaric, et qui fera l'objet de mes questions. Cela est

  9   consigné à la page 21 du compte rendu d'audience d'hier.

 10   Vous avez, Docteur Bagaric, si j'ai bien compris, déclaré la chose

 11   suivante : le secteur de la santé au sein du département de la Défense

 12   organisait et coordonnait les activités du personnel médical au sein des

 13   unités militaires; est-ce bien exact ?

 14   R.  Bien, on peut le formuler ainsi, certes, mais ce n'est pas complètement

 15   exact, bien que l'on puisse le formuler ainsi.

 16   Q.  Vous aurez l'occasion d'éclaircir cela dans ce cas. Vous avez dit,

 17   entre autres choses, que le but de l'organisation de ce service de santé

 18   était de séparer les services de la santé des services logistiques.

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Et que le but était également de permettre que les personnels de santé

 21   au sein des unités aient le statut d'assistants du commandant de l'unité ?

 22   R.  Cela était notre intention, mais je dois reconnaître que nous n'avons

 23   pas abouti en totalité. Nous n'avons pas réussi complètement. A certains

 24   endroits, cela a été fait, à d'autres, non.

 25   Q.  Oui. Vous nous avez dit que cela dépendait principalement du commandant

 26   de l'unité et que pour cela, cela a été accompli à certains endroits, mais

 27   ne l'a pas été ailleurs. Est-ce que cela résume bien ce que vous avez

 28   déclaré hier ?

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  1   R.  Il me semble que oui.

  2   Q.  Regardez maintenant les documents que j'ai préparés. Nous allons

  3   procéder par ordre. Le premier est le 2D 567.

  4   R.  Je l'ai.

  5   Q.  Il s'agit d'une décision portant organisation interne du département de

  6   la Défense. Reportez-vous, s'il vous plaît, à la dernière page de ce

  7   document. Pourriez-vous, Docteur Bagaric, nous dire qui a compétence pour

  8   prendre ce type de décision et qui a pris cette décision ?

  9   R.  Je ne sais pas. Je ne me rappelle pas de ce document précis. Cependant,

 10   si conformément à ce que nous voyons ici, c'est bien ces personnes-là qui

 11   ont signé ce document, bien --

 12   Q.  C'est le chef du département de la Défense qui a pris cette décision

 13   avec l'approbation du président de la HZ HB, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, c'est ce que nous voyons dans ce document.

 15   Q.  Voyons le point numéro 5 au sujet duquel vous avez déposé hier. Cela

 16   concerne le secteur de la santé. Il y est question du responsable des

 17   services médicaux à l'échelon de la brigade. C'est dans le premier alinéa

 18   du point 5, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce qu'il serait juste de conclure que cette personne particulière

 21   n'a pas le statut d'assistant du commandant de la brigade, mais qu'il a le

 22   statut de responsable des services médicaux ?

 23   R.  Non, on ne peut pas conclure cela. On ne peut faire ni l'une ni l'autre

 24   de ces deux conclusions.

 25   Q.  Reportez-vous au point 4, s'il vous plaît. Ce dernier a trait au

 26   secteur de la sécurité, et vous voyez l'alinéa 3.

 27   R.  Un instant, s'il vous plaît. Il faut que je retrouve cela.

 28   Q.  C'est la page précédente, immédiatement précédente. Il y est dit, je

Page 39010

  1   cite :

  2   "Les assistants du commandant chargés de la sécurité au sein des

  3   commandements des zones opérationnelles sont nommés par le chef du

  4   département de la Défense."

  5   Et je passe la suite.

  6   "Les assistants du commandant de brigade chargé de la sécurité sont

  7   nommés par le chef du département de la Défense," et cetera.

  8   Est-ce que de ce dont je viens de donner lecture il ressort que les

  9   commandants des zones opérationnelles et les commandants de brigade

 10   disposaient d'assistants chargés de la sécurité ?

 11   R.  Excusez-moi, et ne vous fâchez pas, s'il vous plaît, mais si je ne suis

 12   pas obligé de répondre à ces questions relatives à la sécurité, je

 13   préfèrerais ne pas y répondre, car je pense que je ne suis pas en mesure de

 14   le faire.

 15   Q.  Monsieur Bagaric, je ne suis pas en train de vous interroger sur des

 16   questions de sécurité. Nous sommes en train d'examiner une décision, et

 17   j'essaie de voir dans quel domaine tel ou tel commandant de zone

 18   opérationnelle ou de brigade dispose ou non d'assistant. J'essaie de vous

 19   montrer qu'il en est disposé ainsi pour le secteur de la sécurité, pour le

 20   secteur dit de l'éducation morale - c'est au point 6 - mais que nous

 21   n'avons pas ces dispositions pour ce qui concerne le secteur de la santé.

 22   C'est pourquoi je vous pose la question de savoir si aux termes de cette

 23   décision, cela ne signifiait pas que les commandants de zones

 24   opérationnelles et commandants de brigades ne devaient pas en fait disposer

 25   d'assistants chargés de la santé, mais qu'il était simplement prévu qu'il

 26   devait y avoir des responsables des services médicaux de la brigade, par

 27   exemple. Est-ce que c'est le cas ?

 28   R.  Non, ce n'est pas le cas.

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  1   Q.  Alors dites-nous comment cela était en réalité.

  2   R.  Je ne sais pas. On peut maintenant en discuter assez longuement, mais

  3   ce que je sais, c'est comment cela a été mis en place en pratique, comment

  4   nous fonctionnions concrètement. Ce qui aurait pu être fait et comment cela

  5   aurait été fait, je ne le sais pas. Excusez-moi de vous répondre de cette

  6   façon, mais je ne comprends vraiment pas l'objet de ce type d'échange. Est-

  7   ce que c'est cela ou est-ce que ce n'est pas cela ? Je ne comprends pas. Je

  8   peux vous dire comment cela se présentait concrètement.

  9   Q.  Monsieur Bagaric, je vous interroge concernant cette décision parce que

 10   vous en avez parlé lors de votre interrogatoire principal effectué par la

 11   Défense Stojic. C'est pour cela que je vous interroge, sur la base des

 12   mêmes documents exactement.

 13   Nous allons passer au document suivant dans la série, qui est le P 2477,

 14   P 2477 --

 15   R.  Oui, je l'ai.

 16   Q.  Décision portant organisation interne du département de la Défense

 17   datant du mois de mai 1993. Reportez-vous au point 5, et là de nouveau il

 18   n'est fait mention que de ce responsable des services médicaux de la

 19   brigade. Pouvons-nous convenir, Docteur Bagaric, que dans cette décision, à

 20   aucun moment il n'est fait mention d'un assistant chargé des services de

 21   santé auprès du commandant de brigade; est-ce bien exact ?

 22   R.  Si l'on examine ce document, il y est dit qu'il s'agit d'un responsable

 23   des services médicaux de la brigade. Cependant, à partir de ce document, on

 24   ne peut pas voir quelle était véritablement sa position au sein de la

 25   brigade. Par conséquent, il n'est pas ici écrit qu'il était assistant

 26   auprès du commandant. Mais on ne peut pas pour autant en conclure qu'il

 27   n'était pas assistant du commandant, car cela a fait l'objet de

 28   dispositions dans d'autres textes. 

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  1   Q.  Monsieur Bagaric, pouvez-vous nous dire si cette position de

  2   responsable d'un service médical d'une part, et un poste d'assistant auprès

  3   du commandant sont des postes équivalents ?

  4   R.  Franchement, je ne le sais pas.

  5   Q.  Pouvons-nous convenir que dans cette décision, il n'est absolument pas

  6   fait mention des zones opérationnelles et des services médicaux au sein des

  7   zones opérationnelles ?

  8   R.  Excusez-moi, mais --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce qu'il peut y avoir une confusion, et

 10   j'essaie de rétablir la clarté.

 11   Un médecin dans une unité militaire, quelle est sa vocation principale ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Sa mission la plus importante est de suivre la

 13   situation du point de vue médicale au sein de cette unité. Et si cette

 14   unité participe à des activités de combat, il doit également déterminer les

 15   voies d'évacuation des blessés, prévoir les points d'accueil nécessaires et

 16   mettre en place les services nécessaires de façon à ce que ces derniers

 17   fonctionnent sur le terrain et dans le cadre d'une unité donnée en suivant

 18   les déplacements de cette dernière.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : -- la question de Me Alaburic sur le point de savoir

 20   pourquoi le commandant de la brigade n'a pas d'assistant. Est-ce parce que

 21   le médecin, il a une vocation spécifique qui est de donner des soins et que

 22   donc lui n'est pas particulièrement en première ligne dans les opérations

 23   militaires comme pourrait l'être l'adjoint à la sécurité ou l'adjoint à la

 24   propagande, ce qui expliquerait que le médecin, comme l'imam ou le prêtre

 25   catholique, a dans l'unité une position particulière ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends bien ce que vous êtes en

 27   train de dire, Monsieur le Président. Cependant, il me semble qu'ici et en

 28   l'espèce, lorsque nous essayons d'analyser ce que nous avons sous les yeux

Page 39014

  1   - je dois reconnaître par ailleurs que je ne me rappelle pas ce document

  2   précis ni l'époque où il a été rédigé - mais il me semble qu'une erreur a

  3   été faite dans ce document. Ici, ce responsable des services médicaux de la

  4   brigade s'est retrouvé dans le texte alors qu'il n'aurait pas dû à mon

  5   sens, et je vais essayer de vous expliquer pourquoi. Nous parlons ici du

  6   secteur de la santé. Je dis bien secteur de la santé. Or, lorsqu'il est

  7   question du secteur de la santé dans le présent document, il est sous-

  8   entendu exclusivement ce segment dans lequel j'étais personnellement à la

  9   tête des 25 ou 30 personnes disponibles et où étaient présents les éléments

 10   suivants : le service des soins aux blessés, le service responsable du

 11   contrôle et des inspections, et le responsable du corps médical. En

 12   d'autres termes, les hôpitaux de guerre c'est une autre histoire, et je

 13   peux comprendre qu'il en soit question ici. Mais pour ce qui est du chef du

 14   corps médical de la brigade et de ce responsable des services de santé au

 15   sein de la brigade, je pense qu'il s'agit ici d'une erreur. Comment ce

 16   dernier pourrait-il être au sein de l'unité ?

 17   Me Alaburic a raison lorsqu'elle demande où se trouve alors cette personne

 18   qui est en charge de la santé à l'échelon de la zone opérationnelle. Cela

 19   nous montre simplement que ce responsable des services de santé de la

 20   brigade s'est retrouvé là où il ne fallait pas dans ce texte. Je ne sais

 21   pas si cela a pu être fait sur proposition de ma part. Véritablement, je ne

 22   sais pas si cela a été le cas à l'époque, mais si cela avait été le cas, ce

 23   serait indubitablement une erreur.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation]

 25   Q.  Il n'y a absolument aucun piège dans les questions que je vous pose.

 26   R.  Il n'y en a pas non plus dans les réponses que je donne.

 27   Q.  Alors passons au document suivant qui vous a été montré par la Défense

 28   Stojic. Il s'agit du 2D 9 --

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, je voudrais revenir

  2   à votre dernière question et à la question de l'assistant du commandant.

  3   Si vous vous en tenez au texte original du dernier paragraphe, du C, il est

  4   question de "bomocnik prestonika", ensuite il y a le "prestonik" lui-même

  5   qui est évoqué. Alors "bomocnik prestonika", est-ce que ce n'est pas cela

  6   l'assistant du commandant ?

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, permettez-moi juste de

  8   vous dire que dans le point 5, il est dit que l'assistant chargé de la

  9   santé auprès du chef de département, donc le Dr Bagaric, procédera à la

 10   nomination de tous les autres personnels, les personnels professionnels

 11   chargés de la santé.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, mais ce n'est pas le cas. Ce

 13   n'est tout à fait exact, il faut que j'éclaircisse cela. Est-ce que je peux

 14   ?

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis dans le document 2477,

 16   numéro 5, paragraphe 2. Je ne vois pas qu'il soit fait référence à

 17   quelqu'un qui nomme quelqu'un ?

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, mon micro n'était pas branché.

 19   Il est dit :

 20   "Tous les autres employés et personnels opérationnels sont nommés par

 21   l'assistant chargé des services médicaux auprès du responsable avec

 22   l'approbation du chef de département ou la personne qui est autorisée par

 23   lui," --

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce qui signifie que je m'étais

 25   fourvoyé. Merci d'avoir éclairé ma lanterne.

 26   Mme NOZICA : [interprétation]

 27   Q.  Docteur Bagaric -- 

 28   R.  Excusez-moi, mais je dois revenir à cela, et je dois fournir un

Page 39016

  1   éclaircissement pour MM. les Juges afin de comprendre cela, car même pour

  2   moi cela est difficile à comprendre. Je pense que ça l'est particulièrement

  3   et plus encore pour vous qui n'avez jamais été dans l'armée. Alors si vous

  4   voulez bien me permettre ?

  5   Au point 5, Messieurs les Juges, Monsieur le Président, --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Ici, on a tous été dans l'armée, alors ne dites pas

  7   que les Juges n'ont jamais été dans l'armée.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas dit cela. J'ai dit "dans

  9   notre armée." Dans cette armée-là qui était assez complexe.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc voilà de quoi il s'agit. Dans ce deuxième

 12   alinéa du point 5 -- je veux croire que c'est la raison pour laquelle Me

 13   Alaburic se fourvoie. Nous avons le constat suivant, tous les autres

 14   employés et personnels opérationnels sont mis en fonction par l'assistant

 15   du responsable de la santé, et c'était moi, cet assistant, et il est dit

 16   avec approbation du chef du département de la Défense, mais cela se

 17   rapporte à ce secteur de la santé qui était le mien -- dont nous avons

 18   parlé hier, c'était notre petite unité au sein du département de la

 19   Défense. C'est au sein de cette unité que je propose et que je nomme des

 20   personnes. Comme je l'ai dit, dans l'ensemble cela représente 25 à 30

 21   personnes tout au plus, et non pas toutes les personnes qui interviennent

 22   dans le secteur de la santé. Ce serait parfaitement absurde. Je n'avais

 23   absolument pas la possibilité de nommer une personne en Bosnie centrale,

 24   avec qui je n'avais absolument aucun contact, dans un contexte où j'ignore

 25   absolument qui là-bas, quel commandant a décidé qu'il serait médecin à cet

 26   endroit précis. Il aurait été absolument impossible pour moi, à partir de

 27   cette position centrale, de donner un ordre pour dire qu'untel ou untel

 28   devait intervenir en Bosnie centrale dans une montagne ou sur le terrain.

Page 39017

  1   Il a déjà été dit plusieurs fois que nous n'étions pas si bien organisés

  2   que cela, mais nous n'étions pas non plus complètement désorganisés. C'est

  3   ce que j'essaie de dire, et je pense que cela permettra d'éclaircir les

  4   choses.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation]

  6   Q.  Il n'y a absolument pas de controverse à ce sujet, mais je voudrais

  7   qu'on soit patient et qu'on examine les documents dans l'ordre. Reportez-

  8   vous au 2D 927, s'il vous plaît, il s'agit d'une décision qui a été prise

  9   par M. Bruno Stojic, nous avons ici l'organigramme et l'organisation du

 10   commandement de la zone opérationnelle. Hier vous avez commenté le point 30

 11   qui figure dans ce document. Il me semble que vous avez éclairci ce point

 12   avec ma consoeur Me Nozica en disant qu'il s'agissait du responsable des

 13   services médicaux, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, il me semble que c'est là -- nous avons là l'organisation de la

 15   brigade ?

 16   Q.  Non, c'est la zone opérationnelle.

 17   R.  Exact.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je vois que vous êtes en train

 19   de parler en même temps. Vous devez vraiment faire un effort pour ralentir

 20   et pour marquer une brève pause après la question, parce qu'il y a un

 21   décalage en raison de l'interprétation. Je sais que c'est très exigeant,

 22   c'est un exercice qui est dur, mais c'est essentiel.

 23   Vous pouvez poursuivre ou reprendre un peu plus loin…

 24   Mme ALABURIC : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Bagaric, nous pouvons dire qu'hier vous avez confirmé à la

 26   Défense Stojic qu'au point 30 nous voyons ce poste de responsable du

 27   service médical; est-ce exact, donc au sein de la zone opérationnelle, je

 28   le répète ?

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  1   R.  Il est ici indiqué "Services médicaux," et pour moi il manque quelque

  2   chose. A mon sens, il est juste écrit "Services médicaux", alors je suppose

  3   que puisqu'il s'agit d'une seule personne nous avons ici affaire au médecin

  4   qui est en charge des services médicaux au sein de la zone opérationnelle.

  5   Q.  Alors reportez-vous au point 26.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Alors je vais répéter juste et nous allons aller lentement pour le

  8   compte rendu d'audience. Reportez-vous au point 26. Il y est dit :

  9   "Assistant du commandant chargé de la logistique;" est-ce exact ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Alors, Monsieur Bagaric, avec votre connaissance des documents de ce

 12   type, est-ce qu'il en ressort que le responsable des services médicaux se

 13   trouvait au sein de ce service logistique, ou plutôt qu'il était subordonné

 14   à l'assistant du commandant chargé de la logistique ?

 15   R.  Non, je ne peux pas l'interpréter de cette façon, il se trouve en

 16   position numéro 30 alors que celui chargé de la logistique se trouve au

 17   numéro 26. Je pense que ça n'est pas le cas, ce n'est pas ainsi que vous

 18   l'avez dit. 

 19   Q.  Non, non, non, nous allons éclaircir tout cela. Passez au document

 20   suivant, qui est le 2D 1370, s'il vous plaît, il s'agit de l'organigramme

 21   de la brigade. C'est encore un document au sujet duquel vous vous êtes

 22   entretenu hier avec ma consoeur Me Nozica, n'est-ce pas.

 23   Alors reportez-vous maintenant, s'il vous plaît, au point suivant.

 24   Vous avez parlé avec ma consoeur de ce poste qui se trouve en page 4 de la

 25   version croate et en page 6 de la version anglaise, c'est au numéro 8, il

 26   est dit : "Responsable du service médical," à ce point 8. Alors pouvez-vous

 27   me confirmer, Docteur Bagaric, que cela reflète bien l'échange qui était

 28   celui d'hier ?

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  1   R.  Cela concerne quel type d'unité, s'il vous plaît ?

  2   Q.  La brigade.

  3   R.  Il me semble que cela devrait être le cas, oui, responsable du service

  4   médical.

  5   Q.  Alors tournez simplement une page pour que l'on voie à quelle unité ce

  6   poste se rattache. Il en ressort que le secteur logistique a en son sein

  7   également un service médical, est-ce que vous pouvez me dire, Monsieur

  8   Bagaric, si cela ressort bien de ce document ? Dites simplement si cela

  9   ressort ou non du document.

 10   R.  Oui, oui. Je dois vous le dire. C'est ce qui ressort effectivement de

 11   ce document. Cependant, je ne sais pas qui a élaboré cette répartition de

 12   postes, cette organisation, pour moi il n'était pas important de savoir si

 13   sur le papier en théorie les choses allaient être décrites de cette façon

 14   ou non. Pour moi, ce qui était important c'était de savoir comment les

 15   choses étaient organisées sur le terrain. Est-ce que cette personne allait

 16   être assistant du commandant ou bien allait être relégué en dixième

 17   position au sein d'un service logistique ?

 18   Q.  Alors passez maintenant au document P 566, nous avons ici

 19   l'organigramme d'un bataillon, et vous avez répondu concernant la page 2.

 20   Si vous regardez juste le côté droit de cette page, il est mentionné

 21   service médical, et on voit que c'est rattaché au Peloton de la logistique.

 22   Alors est-ce que cela confirme ce que vous avez dit hier, à savoir que le

 23   service médical était au sein du Peloton de la logistique ?

 24   R.  De quand date ce document, s'il vous plaît ?

 25   Q.  Du 9 octobre 1992.

 26   R.  Mais c'est là justement que se trouve le problème.

 27   Q.  Nous y viendrons.

 28   R.  Non, mais c'est là qu'est le problème. C'est quelque chose qui a été

Page 39020

  1   couché sur papier par quelqu'un qui l'a fait en fonction de ce qu'il

  2   pensait devoir être l'organisation, mais vous ne devez pas oublier les

  3   faits ici. Les services médicaux, nous les avons organisés, prévus et mis

  4   en place avant que la moindre brigade ne soit créée. Cela a été fait de

  5   telle sorte que nous avons créé ce QG médical principal, nous avons nommé

  6   des responsables des services médicaux municipaux et nous avons également

  7   trouvé des accords aux fins de décider qui était en charge des services

  8   médicaux municipaux à tel et tel endroit. Donc si on regarde ce document,

  9   on peut en conclure ce que vous dites, mais moi ce que je vous dis c'est

 10   autre chose.

 11   Q.  Partant des réponses que vous avez apportées hier, j'ai cru comprendre

 12   que cette organisation de la santé au sein des unités militaires était

 13   mauvaise, et qu'il fallait procéder à une réorganisation. Vous ai-je bien

 14   compris hier ?

 15   R.  Oui, vous avez bien compris dans la partie qui est celle de dire que si

 16   on peut s'exprimer ainsi, nous, médecins, nous ne pouvions pas être

 17   d'accord pour ce qui était de rester dans le service logistique, et nous

 18   nous sommes efforcés de sortir de ce secteur de logistique.

 19   Q.  Alors je vous ai parfaitement bien compris. Je voulais vous avancer la

 20   thèse suivante : l'organisation de la santé devait être séparée de

 21   l'organisation logistique avec un déploiement de médecins dans les unités

 22   qui auraient des fonctions de commandant adjoint pour ce qui est du travail

 23   qui était le leur dans la zone correspondante ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  2D 1540 maintenant, document suivant, il s'agit du document dont vous

 26   avez parlé hier. Il s'agit d'un ordre émanant de Bruno Stojic.

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Daté du 8 octobre 1993; donc il s'agit à peu près d'un an après la

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  1   promulgation des documents qu'on a eu à voir tout à l'heure, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Le 28 octobre 1993, oui, oui, c'est bien cet ordre-là.

  3   Q.  Dans la partie introductive, il est dit que l'ordre est donné en raison

  4   de problèmes dans le commandement et le contrôle au sein des unités du HVO

  5   pour ce qui est de la santé en temps de guerre, et cet ordre vise à

  6   surmonter la situation telle qu'elle se présentait du fait d'un manquement

  7   de respect de cet organigramme militaire; est-ce bien ainsi que ça s'est

  8   passé pour ce qui est des causes et de l'objectif poursuivi ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Si on analyse les trois premiers points dudit document, on verra qu'il

 11   y a des fonctions que nous n'avions pas eues, du moins pas avec cette

 12   appellation, dans les documents qu'il nous a été donné de voir jusqu'à

 13   présent, à savoir responsable de la santé en temps de guerre au niveau de

 14   la zone opérationnelle, puis responsable de la santé en temps de guerre au

 15   niveau de la brigade, et responsable de la santé au niveau du bataillon,

 16   n'est-ce pas, Monsieur Bagaric ? Ce sont des fonctions qu'on n'a pas eu à

 17   voir dans les documents qu'on a vus jusqu'à présent ?

 18   R.  On ne les a pas vues dans les documents, mais on a vu ça sur le

 19   terrain. Ça s'est passé à certains endroits tel que dit ici, et ailleurs ce

 20   n'était pas de la sorte. Alors pour que ce soit comme dit ici, on a demandé

 21   à ce que les choses soient modifiées, ça ce sont les faits.

 22   Q.  Dites-nous, cet ordre-là définit-il que les responsables de la santé en

 23   temps de guerre seraient des adjoints du commandant de la zone

 24   opérationnelle, à savoir de la brigade, à savoir du bataillon ?

 25   R.  Exact.

 26   Q.  Dites-nous, est-ce que cet ordre en substance vient modifier une

 27   décision portant organisation du département de la Défense qu'on a eu à

 28   voir tout à l'heure ?

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  1   R.  Du département de la Défense ?

  2   Q.  Du secteur de la santé au niveau du département, décision portant

  3   organisation interne ?

  4   R.  Non, non, non, cet ordre n'a rien à voir avec l'organigramme dont vous

  5   avez parlé tout à l'heure, rien.

  6   Q.  Bien.

  7   R.  Ça ne change rien au niveau de l'organigramme, mais là-bas, la brigade

  8   ça s'est paumé. Je ne comprends pas comment elle est venue là. Vous n'avez

  9   toujours pas de zone opérationnelle, et là vous avez déjà une brigade ?

 10   C'est dénué de sens.

 11   Q.  Docteur Bagaric, à plusieurs reprises vous nous avez dit, et je vais

 12   vous citer, vous nous avez dit que le rapport relatif aux blessés ne

 13   pouvait être rédigé que par un médecin parce que ces rapports portaient des

 14   descriptifs de blessures. Vous avez parlé de tâches professionnelles en

 15   matière médicale.

 16   A cet effet, j'aimerais que vous nous disiez quelles sont les tâches

 17   que ces intervenants en matière de santé, indépendamment de l'unité à

 18   laquelle ils appartenaient, avaient-ils à effectuer ? Etaient-ce des tâches

 19   professionnelles de médecins ? Etaient-ce des tâches professionnelles ?

 20   C'est, pour commencer, ma question.

 21   R.  Mais il s'entend qu'ils effectuaient des tâches professionnelles en

 22   matière médicale.

 23   Q.  Veuillez nous dire quelles sont les tâches, outre les tâches

 24   professionnelles médicales, qu'ils avaient à effectuer en sus ?

 25   R.  Les tâches médicales professionnelles, c'est une terminologie qui varie

 26   selon le temps de paix et le temps de guerre. Ces tâches professionnelles

 27   en temps de paix c'est uniquement la profession, les soins à apporter aux

 28   malades et ainsi de suite, mais les tâches médicales à titre professionnel

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  1   en temps de guerre; c'est, que sais-je, la définition des voies

  2   d'évacuation des blessés, des patients et d'une certaine façon la

  3   technologie de la prestation de soins sur le terrain, chose qui n'est pas

  4   une chose prévue en temps de paix. Par conséquent, le médecin au sein de

  5   l'unité c'était la personne qui était certes médecin de par sa profession,

  6   mais c'était aussi un soldat. Son commandant pouvait lui dire, que sais-je,

  7   nous avons l'intention de nous déplacer avec l'unité dans cette direction-

  8   là, à toi d'organiser la sécurisation sanitaire. Ce serait à peu près la

  9   réponse que j'aurais à vous apporter.

 10   Q.  Docteur Bagaric, je ne vous ai pas parlé de la teneur des tâches

 11   professionnelles médicales, je vous ai demandé si ces intervenants

 12   médicaux, en sus des tâches professionnelles quelles qu'elles aient été et

 13   sous l'ordre de qui que ce soit cela ait été fait, avaient-ils à faire quoi

 14   que ce soit en sus qui n'aurait pas été des tâches médicales au sens

 15   proprement dit ?

 16   R.  Je ne comprends pas.

 17   Q.  Devaient-ils prendre des décisions de nature militaire, devaient-ils

 18   prendre des décisions en matière de sécurité, avaient-ils à faire quoi que

 19   ce soit qui n'était pas une tâche médicale ?

 20   R.  Ils prenaient bon nombre de décisions qui n'avaient rien à voir avec

 21   leur profession en temps de paix, mais en temps de guerre bien sûr que

 22   c'était lié à leur profession. Je dois reconnaître que je ne comprends pas

 23   où est-ce que vous voulez en venir, pour être sincère.

 24   Q.  Vous allez voir, je vais enchaîner avec mes questions. Penchez-vous sur

 25   le 4D 1326. Il s'agit d'un organigramme que la Défense Petkovic --

 26   R.  Vous avez dit ? 

 27   Q.  Le 4D 1326. Je vais être précise, c'est mon collaborateur Davor Lazic

 28   qui a rédigé ceci partant du document dont nous avons parlé tout à l'heure,

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  1   le 2D 1540. Alors ce document nous laisse voir ce qui est expliqué aux

  2   paragraphes 4, 5 et 6 de l'ordre émanant de M. Bruno Stojic.

  3   Je rectifie le compte rendu, 4D 1326. Je m'excuse -- Non, non, c'est

  4   l'autre numéro qu'il faut corriger. Le document de la Défense Stojic à

  5   partir duquel on a établi cet organigramme, c'est le 2D 1540. Maintenant

  6   c'est consigné.

  7   Alors, Docteur Bagaric, ce document de Bruno Stojic, vous le connaissez,

  8   vous en avez parlé lors du récolement. Ici en bleu, nous avons indiqué

  9   quelle est la filière militaire de responsabilité qui permet de voir

 10   comment l'assistant du secteur de la santé était responsable auprès du

 11   commandant militaire. En rouge, nous avons indiqué la filière rouge des

 12   rapports à présenter et des responsabilités à assumer qui conduisait du

 13   bataillon en passant par la brigade en passant par la zone opérationnelle

 14   jusqu'au secteur chargé de la santé.

 15   Alors, Docteur Bagaric, je vous demanderais de nous dire si cet

 16   organigramme, de votre avis, reproduit de façon exacte ce qui est dit dans

 17   l'ordre de M. Bruno Stojic, ou est-ce que dans cet organigramme il y a

 18   quelque chose d'incorrect, d'erroné ?

 19   R.  Je dirais que cette représentation schématique n'est qu'une

 20   interprétation des choses. Que signifie responsabilité à titre

 21   professionnel ? Je vois de façon évidente que c'est un terme sur lequel

 22   nous ne nous entendons pas. Là-bas, il y a un médecin. Notre secteur de la

 23   santé et mes collègues n'iront pas interroger ou tester leurs aptitudes

 24   professionnelles. Ce sont des gens qui sont des médecins, ils ont déjà été

 25   testés. Donc il est sous-entendu qu'ils ont à accomplir une tâche et il est

 26   sous-entendu également qu'ils le font bien leur travail. Mais il faut que

 27   je --

 28   Q.  Docteur Bagaric, un instant, j'ai le droit de vous interrompre parce

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  1   que je me propose de vous poser la question qui suit : quand on parle du

  2   terme de "professionnalisme" ou de "professionnel", c'est le document de

  3   Bruno Stojic qui en parle, qui le reprend, vous en avez parlé hier. Je vous

  4   renvoie aux paragraphes 4, 5 et 6, où il est dit, le responsable du secteur

  5   de santé en temps de guerre du point de vue professionnel présente des

  6   rapports et assume des responsabilités vis-à-vis du responsable de la santé

  7   en temps de guerre, de l'organisation militaire plus haut placée, à savoir

  8   le secteur de la santé. Donc ce terme de "professionnel", d'après ce que

  9   j'ai cru comprendre --

 10   R.  De quel document, ah, je le vois.

 11   Q.  Si je vous ai bien compris, c'est vous qui avez établi le projet

 12   d'ordre ?

 13   R.  Je pense que oui.

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bagaric, attendez que l'avocate ait terminé

 17   avant de répondre, parce que vous vous chevauchez tous les deux.

 18   Monsieur le Témoin, j'interviens parce que ce document est source de

 19   confusion, et même pour un Juge, il y a toute une problématique derrière ce

 20   document. Je vais prendre un cas concret pour essayer de comprendre ce

 21   schéma.

 22   Prenons un médecin qui est affecté à un bataillon et dont le commandant du

 23   bataillon dit, à 6 heures du matin, on va attaquer les défenses adverses,

 24   et donc il faut que vous veniez avec nous parce qu'il risque d'y avoir des

 25   blessés donc on a besoin de votre présence. Dans cette hypothèse, le

 26   médecin est obligé d'obéir puisqu'il est médecin militaire, et il va suivre

 27   l'unité. Donc ce que l'on voit en bleu, il est donc sous l'autorité du

 28   commandant du bataillon qui lui demande d'être présent. Mais maintenant,

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  1   quand il va soigner les blessés, c'est sa propre responsabilité. Le

  2   commandant du bataillon n'a pas à lui dire s'il faut l'opérer sur place, le

  3   transfuser. C'est la responsabilité du médecin.

  4   Est-ce que vous êtes bien d'accord avec ce schéma que je vous

  5   présente ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument, absolument.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Avec le schéma tel que Me Alaburic vous le présente,

  8   le médecin semble être sous l'autorité du commandant du bataillon, mais

  9   avec les traits rouges, il peut venir vers vous pour dire : voilà le

 10   problème, on a trois blessés, il faut faire venir un hélicoptère, mais il

 11   n'y a pas d'hélicoptère. Il faut que vous, vous preniez à tâche avec, je ne

 12   sais pas moi, le CICR ou le Bataillon espagnol pour régler le problème,

 13   parce qu'il y a un problème médical. Est-ce qu'à ce moment-là, ça se passe

 14   comme cela ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez tout à fait raison. Dans un cas de

 16   ce genre, un va voir son commandant militaire, en l'occurrence, c'est le

 17   commandant militaire qui va demander un hélicoptère. Je ne peux pas

 18   organiser une évacuation en hélicoptère depuis plus loin -- Je ne dispose

 19   pas donc de la logistique, je ne peux pas demander qu'on intervienne, et

 20   c'est là qu'est la difficulté, si je peux utiliser ce terme.

 21   Du point de vue professionnel, d'un point de vue terminologique, je suis

 22   d'accord avec l'avocate que ceci est assez déconcertant, parce que c'est

 23   bien dit sur le papier, et bien que ce soit dit sur le papier, les choses -

 24   - le domaine médical sur le terrain comme vous l'avez dit, et c'est ainsi

 25   que ça s'est passé, c'est ce que nous voulions réaliser. -- numéro 1 au

 26   niveau de l'unité, c'est l'assistant du commandant. Pourquoi ? Parce que

 27   des circonstances particulières où nos commandants, c'étaient souvent

 28   notamment ceux de la logistique qui n'étaient pas formés, c'étaient des

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  1   gens peu instruits, or, le médecin c'est un professionnel, un docteur,

  2   indépendamment des connaissances militaires qu'il pouvait avoir ou pas.

  3   Donc il aurait été bloqué dans ses activités, dans la prise de décisions au

  4   cas où il venait à recevoir des ordres de la part d'un homme chargé de la

  5   logistique au sein de l'unité. C'est la raison pour laquelle nous avons

  6   voulu faire remonter les choses à un niveau supérieur pour un meilleur

  7   fonctionnement. Donc je n'étais en aucun cas son supérieur hiérarchique

  8   pour ce qui est des activités à déployées que vous avez évoquées. Je ne

  9   l'étais rien que, par exemple, dans le cas où le Dr Curic, dont on parle

 10   souvent, venait à aller sur le terrain et qu'il constatait qu'il y avait ou

 11   pas mise en œuvre de la protection médicale préventive comme il se devait,

 12   et il pouvait donner des instructions au médecin de l'unité pour qu'il

 13   rectifie le tir à ce niveau-là. C'est tout, c'est un bon exemple.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, continuez mais prenez des exemples

 15   concrets parce que sinon personne n'y comprendra rien.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : Si vous me permettez un instant. J'aimerais essayer

 17   de faire un exemple pratique.

 18   Disons que le médecin en chef constate que les réserves en plâtre

 19   diminuent vertigineusement, il donne l'ordre de réserver les plâtres pour

 20   les ruptures des jambes mais pas des bras. Les bras, il faut se

 21   débrouiller. Est-ce que ça serait l'exemple d'un ordre qui passerait par ce

 22   qui est indiqué ici par la ligne rouge ?

 23   Vous devez répondre oralement, parce que si vous hochez la tête, on ne le

 24   voit pas dans le transcript.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, le médecin au sein de l'unité était

 26   appuyé sur le plan logistique sur ses propres services logistiques et ceux

 27   de son unité. Par conséquent, s'il avait besoin de pansements ou de quoi

 28   que ce soit d'autre, c'est ce service logistique qui devait le lui fournir

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  1   et il n'avait pas, lui, à prendre soin de la chose. Mais comme nous étions

  2   dans une situation tout à fait particulière où en réalité nous n'avions pas

  3   suffisamment d'équipement, de matériel, de médicaments, et cetera, donc

  4   c'est nous, en notre qualité de QG principal en matière de santé, avant que

  5   de faire partie du département à la Défense, nous avons créé notre propre

  6   entrepôt de médicaments avec les donations qu'on a reçues, et suite à des

  7   demandes de la part d'un médecin sur le terrain, on lui venait en aide

  8   autant que faire se pouvait, parce que il n'y avait pas eu de logistique

  9   médicale de mise en place au sein de l'unité en tant que telle, et c'est la

 10   raison pour laquelle j'ai hoché de la tête tout à l'heure.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 12   Mme ALABURIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Bagaric, j'aimerais que vous nous expliquiez. En répondant à

 14   la question de Monsieur le Juge Antonetti et dans votre témoignage, vous

 15   avez souvent dit que vous aviez conclu du mauvais fonctionnement de

 16   certaines choses, et que vous avez décidé de réorganiser. Quand vous dites

 17   "nous", à qui vous référez-vous en réalité ?

 18   R.  Par exemple, voilà à qui je me réfère, aux médecins. Par exemple, de

 19   temps à autre, certains médecins de mon département, de mon secteur de la

 20   santé, lorsqu'ils inspectaient le territoire, et au vu de ce que faisait le

 21   médecin, il venait à apprendre qu'il y avait des observations concernant

 22   telle ou telle chose, et nous, d'une certaine façon, nous nous efforcions

 23   de mettre en place une politique de fonctionnement du service. Mais par la

 24   suite, nous n'allions pas nous mêler de son travail. Donc d'une manière

 25   générale, nous nous efforcions de procéder à des modifications ou des

 26   changements en vue d'améliorer les choses, mais nous n'avons pas eu au

 27   quotidien une communication avec chacun des médecins sur le terrain, là où

 28   c'était possible. Ça aurait été dénué de sens. Aucune armée au monde ne le

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  1   fait, et cela aurait été tout à fait dénué de bon sens.

  2   Q.  Docteur Bagaric, quand vous dites "nous", pronom personnel, est-ce que

  3   ça veut dire vous qui intervenez au niveau du secteur de la santé du

  4   département à la Défense ?

  5   R.  Pas nous seulement. Quand je dis "nous", je dis "nous, médecins". Je

  6   parle de la profession. Il y a donc ceux qui sont sur le terrain et nous

  7   autres, parce que de temps à autre nous avions des contacts et nous

  8   suivions ce qui se passait sur le terrain, et on s'adaptait autant que

  9   possible pour leur venir en aide.

 10   Q.  Docteur Bagaric, je vous demande qui est-ce qui avait les attributions

 11   de prendre la décision de procéder à une réorganisation du service de la

 12   santé. Qui est-ce qui en avait le pouvoir ?

 13   R.  Pour ce faire, cela relevait des attributions, en premier lieu, du

 14   commandant au niveau le plus élevé dans l'armée, dans notre cas à nous,

 15   cela concernait les chefs des services de santé des zones de rassemblement,

 16   et bien sûr, nous autres, nous prenions part à la chose.

 17   Q.  Docteur Bagaric, je vous prie de m'expliquer qui sont ces commandants

 18   au niveau le plus élevé de l'armée qui avaient les attributions de prendre

 19   les décisions portant sur l'organisation du service de santé dans ces zones

 20   militaires ? Je veux que vous m'indiquiez la fonction ou que vous

 21   m'indiquiez les noms, comme vous voulez, mais dites-nous qui étaient ces

 22   gens ou cet homme.

 23   R.  Je vous l'ai dit. C'était les commandants des hôpitaux militaires,

 24   c'était -- de quoi parlons-nous ?

 25   Q.  Docteur Bagaric, je vous pose une question très concrète, organisation

 26   du service entier de la santé, est-ce que c'était le ministère de la

 27   Défense ou est-ce que c'était l'état-major, est-ce que c'était le chef des

 28   services de santé ou est-ce que c'est l'adjoint du commandant. Donc

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  1   l'organisation complète du domaine de la santé, en matière militaire, qui

  2   avait l'autorisation ou le pouvoir de prendre des décisions ?

  3   R.  A titre formel, pour ce qui est de rédiger quelque chose comme cela est

  4   rédigé ici, c'était le ministère de la Défense, bien entendu. Ça, c'est sur

  5   le plan officiel. Mais ces pouvoirs étaient concertés avec les médecins au

  6   niveau des unités et nous avons vu une décision qui n'était pas dans le

  7   genre que vous indiquez. Et on a quand même fonctionné, je dirais, dans des

  8   circonstances particulières, chose qui est tout à fait compréhensible, et

  9   tout n'était pas conforme à ce qui est dit dans le texte. Je comprends ce

 10   que vous voulez dire, je comprends, mais je ne veux pas l'accepter parce

 11   que ce n'est pas ainsi que ça s'est passé -- excusez-moi, ça ne s'est pas

 12   passé ainsi.

 13   Q.  Mais dites-moi, Docteur Bagaric, à quoi veux-je en venir ?

 14   R.  Vous voulez me convaincre depuis le début qu'en ma qualité de

 15   commandant, ou plutôt, d'adjoint du responsable du département à la

 16   Défense, j'étais le commandant direct de tous les médecins dans les unités.

 17   C'est une bêtise. Ça ne s'est pas passé ainsi, ça n'a jamais été le cas, et

 18   si quelqu'un voulait me pousser à faire ce genre de travail, moi j'aurais

 19   refusé, parce que je trouve que ce n'est pas normal.

 20   Q.  Docteur Bagaric, quelle est ma question ou ma remarque ou propos quel

 21   qu'il soit qui vous laisse tirer cette conclusion, que c'est précisément ce

 22   à quoi je veux en venir ?

 23   R.  C'est de tout ce que vous venez de dire jusqu'à présent que je tire

 24   cette conclusion.

 25   Q.  Docteur Bagaric, vous étiez l'homme numéro un dans le secteur de la

 26   santé au sein du HVO. Vous l'avez dit à plusieurs reprises aujourd'hui,

 27   vous en souvenez-vous ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je veux bien accepter de l'avoir dit. Mais

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  1   cela avait une importance particulière ou symbolique. Qu'est-ce que ça veut

  2   dire, être l'homme numéro un ? C'est être l'homme le plus haut placé,

  3   voilà, mais avec des attributions tout à fait concrètes.

  4   Q.  Bon, je me propose de vous poser encore une question dans le jeu de

  5   questions que j'ai préparé. Et à cet effet, j'ai un document portant sur

  6   l'armée croate, le 4D 1427. A cet effet, je voulais vous montrer un schéma

  7   en page 2 de la version anglaise, et également la page 2, et il y est dit

  8   que dans le domaine d'intervention du chef d'état-major des forces armées

  9   de la République de Croatie, il y a une administration chargée de la

 10   logistique, et à la page d'après, on définit tout ce qui fait partie de

 11   l'administration chargée de la logistique, et il est dit que dans cette

 12   administration-là, il y a également la santé.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Alaburic. Je

 14   souhaiterais, Docteur Bagaric, que vous regardiez la dernière question. On

 15   vous a demandé :

 16   "Est-ce que vous n'étiez pas le numéro un ?"

 17   Et vous avez répondu :

 18   "D'accord, j'accepte de l'avoir dit. Toutefois, ça a un sens très spécial

 19   et symbolique. Qu'est-ce que ça veut dire être la personne numéro un ? Ça

 20   veut dire être la personne qui est dans la position la plus élevée, avec

 21   des pouvoirs très concrets."

 22   Alors, ce qui manque : est-ce que ceci correspond bien à votre situation,

 23   ou est-ce que vous étiez en train d'expliquer que vous n'étiez pas la

 24   personne qui avait vraiment un vrai pouvoir et qui était vraiment le patron

 25   ? Etiez-vous le patron ou n'étiez-vous pas le patron ? C'était ça la

 26   question, mise de façon très simple.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'étais le plus haut placé parmi les

 28   médecins au sein du ministère de la Santé, ou plutôt, du département à la

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  1   Défense, et ensuite c'est devenu un ministère de la Santé. Donc j'étais le

  2   plus haut placé, et je veux bien accepter avec fierté le fait que j'étais

  3   le numéro un. Mais ça ne signifie pas que je donnais directement des ordres

  4   aux médecins et aux unités chargées de la santé sur le terrain, tel que Mme

  5   l'Avocate entend le laisser comprendre.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc je vais être un petit peu

  7   satirique, ne prenez pas ça au sérieux, mais c'est parfois plus facile

  8   quand on donne une image un peu draconienne. Donc pour l'essentiel, ce que

  9   vous aviez c'est un très bel uniforme et un beau chapeau, et tout le monde,

 10   lorsque vous rentriez, s'inclinait et on vous faisait entrer par la porte

 11   avant les autres. Mais quand il s'agissait de donner des ordres, pour que

 12   les gens fassent ce que vous vouliez qu'ils fassent, vous n'aviez pas

 13   vraiment ce type de pouvoir. C'est ça que vous nous dites ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ça. Monsieur le Juge,

 15   j'étais le responsable du QG principal en matière de santé au tout début,

 16   avant qu'il n'y ait création du département de la Défense et avant qu'il

 17   n'y ait création du ministère de la Défense. Lorsque ces derniers ont été

 18   mis en place, j'étais le représentant le plus haut placé des médecins et

 19   j'avais les fonctions d'adjoint du responsable. Donc il ne serait pas exact

 20   de dire que je n'avais pas d'attributions du tout, ce n'est pas vrai. Mais

 21   mes attributions se rapportaient, pour être concret, à la gestion des soins

 22   pour ce qui est de la protection préventive médicale par le biais de mon

 23   collègue Curic sur le territoire entier. Je parle donc de façon générale.

 24   Lorsqu'il s'agit du service qui est chargé de prendre soin des blessés au

 25   niveau des hôpitaux de guerre, parce que ces hôpitaux de guerre c'était le

 26   segment le plus important de notre secteur de santé, on en avait une

 27   vingtaine et ces hôpitaux étaient directement placés sous le commandement

 28   de mon subalterne chargé de la prise en compte des blessés. Donc c'était un

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  1   rôle très important, c'était un maillon important. Ça c'est l'un des

  2   segments du service de santé. Ce sont de grosses responsabilités, collecte

  3   de médicaments, recherche de personnes, de cadres, conduite ou création

  4   d'une politique en matière de santé vis-à-vis des institutions

  5   internationales, vis-à-vis des institutions au niveau national, et

  6   tentatives d'amélioration de cette organisation tout entière, cela relevait

  7   de mes responsabilités.

  8   Mais il y a la partie militaire opérationnelle, ce sont les unités, c'est

  9   l'armée sur le terrain, où il y avait des intervenants médicaux, et moi

 10   directement je ne pouvais pas leur donner d'ordres parce qu'ils avaient

 11   leurs propres commandants au sein de l'unité. Le médecin, lui, était censé,

 12   nous nous sommes employés en faveur de la chose, était censé être l'adjoint

 13   du commandement, et c'est le commandement qui lui donnait les ordres. Ce

 14   que je veux dire par là c'est que je ne pouvais pas, et je ne le faisais

 15   pas d'ailleurs, s'agissant des médecins sur le terrain au sein de son

 16   domaine d'intervention pour ce qui est donc de son unité à lui, je ne lui

 17   donnais pas d'ordres. C'est tout ce que je voulais dire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour bien comprendre ce que vous

 19   faisiez en qualité de numéro un, je vais prendre un cas théorique.

 20   Imaginons, vous visitez l'Heliodrom et vous voyez qu'il y a trois médecins

 21   à l'Heliodrom et que manifestement il y en a un qui se tourne les pouces

 22   parce qu'il n'a pas assez de travail. Vous allez après à Gabela. On sait

 23   que vous n'y avez pas été, mais c'est un cas théorique. Vous allez à Gabela

 24   et vous voyez qu'il n'y a pas de médecin. Vous avez vu qu'à l'Heliodrom il

 25   y en a trois, et à Gabela il n'y en a aucun. Est-ce que vous aviez le

 26   pouvoir de dire qu'un des trois médecins de l'Heliodrom devait être affecté

 27   à Gabela ? Est-ce que ça rentrait dans votre champ de compétences ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Puisque dans le cas que vous venez de citer en

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  1   exemple les deux centres de détention se trouvaient sous la surveillance de

  2   médecins dans le cadre du district militaire, ce que je veux dire c'est que

  3   cela était couvert par des médecins du district militaire, je ne pouvais

  4   pas prendre une personne et la déplacer ailleurs. Ce que je pouvais faire

  5   éventuellement c'était faire une proposition, suggérer que cela soit fait.

  6   Dans l'espèce, je pouvais suggérer que l'on agisse de telle ou telle façon.

  7   De la même façon, je prenais sur moi de procéder à la formation d'un point

  8   d'accueil médical, mais cela était fait en se basant sur les personnels

  9   disponibles qui n'étaient pas sous l'autorité de la brigade ou du district

 10   militaire, et c'est alors, avec les médecins en question dans le district

 11   militaire dont j'ai parlé, que nous avons mis cela en pratique. Il

 12   s'agissait d'une activité de nature exceptionnelle qui n'était décrite

 13   nulle part dans le règlement, cela n'était prévu nulle part au sein du

 14   département de la Défense. Personne ne pouvait prévoir que les événements

 15   allaient prendre ce cours-là et que nous procéderions de cette manière.

 16   Nous agissions au cas par cas aux fins du [inaudible] et de l'amélioration

 17   du système dans son ensemble.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Président,

 19   je souhaiterais simplement demander au Dr Bagaric la chose suivante, en une

 20   phrase simplement compte tenu de ce qu'il a dit, à savoir que j'essayais de

 21   suggérer ou de ne pas suggérer des choses. Donc je voudrais qu'il soit

 22   clairement versé au compte rendu d'audience que la Défense Petkovic ne

 23   suggère ni n'insinue rien, et que si nous avons une thèse donnée, nous

 24   avons toujours fait des efforts dans ce prétoire pour l'expliciter et en

 25   fournir le fondement. Nous avons toujours été disposés à présenter des

 26   excuses s'il s'avérait que nous avions tort. Par conséquent, je tenais à le

 27   dire.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors peut-être que j'ai mal compris ce que

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  1   vous avez dit.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Peut-être avez-vous mal compris, mais je ne

  3   m'attendais véritablement pas à ce que votre interrogatoire prenne cette

  4   tournure-là.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi non plus.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Alors concernant les forces armées de la République de Croatie, il y a

  8   un document qui nous montre que --

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Je me répète.

 10   Q.  Le document 4D 1427 nous montre qu'au sein de la République de Croatie,

 11   c'est dans le domaine des attributions de l'état-major principal des forces

 12   armées que se trouvent les services médicaux, c'est pourquoi je souhaite

 13   vous poser la question suivante, Docteur Bagaric : est-ce qu'en Herceg-

 14   Bosna il n'y a jamais eu le moindre doute ou le moindre débat concernant

 15   l'organisation et le placement de ce secteur de la santé au sein de l'état-

 16   major ?

 17   R.  Je n'ai pas connaissance de débats de cette nature, qu'il en ait eu.

 18   Cependant, si l'état-major avait besoin d'une personne qui en aurait eu la

 19   charge directe en son sein, il avait la possibilité de le faire, cela ne

 20   fait aucun doute. Je pense cela parce que l'état-major donnait des ordres

 21   aux districts militaires, et au sein de ces derniers il y avait un médecin

 22   qui était assistant du commandant du district militaire, et il n'y avait

 23   pas la nécessité d'avoir encore une autre personne intermédiaire dans la

 24   chaîne de commandement.

 25   Q.  Alors vous nous avez expliqué que toutes les activités qui étaient

 26   prises en charge par les personnels médicaux au sein des unités militaires

 27   étaient des activités exigeant des compétences professionnelles, j'en

 28   déduis qu'une personne qui n'a pas suivi de formation médicale ne peut pas

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  1   prendre des décisions compétentes dans le domaine de la santé. Ai-je raison

  2   de conclure cela ?

  3   R.  Si je peux simplement revenir à ce document que vous avez déjà montré,

  4   et je vais répondre à votre question par ailleurs.

  5   Il manque ici un second document, il se trouve que je sais de quelle façon

  6   sont organisés les services médicaux à l'époque au sein de l'armée croate.

  7   Il manque ici leur quartier général médical principal qui, pendant toute

  8   cette période, a fonctionné à peu près de la même manière dont nous avons

  9   fonctionné, nous. Je dois dire cela ici car c'est la vérité, et je l'ai

 10   publié à plusieurs occasions jusqu'à présent dans mes différents travaux

 11   que nous avons mentionnés. Donc lorsque nous avons mis en place ce quartier

 12   général médical principal, nous l'avons fait en nous basant sur certaines

 13   expériences qui étaient déjà disponibles qui provenaient de la République

 14   de Croatie. Dans cet organigramme, on voit qu'ils disposent d'un médecin au

 15   sein de l'état-major, mais ils disposent encore d'un autre organe qui

 16   s'appelle le quartier général médical principal à la tête duquel se

 17   trouvait le général Prodan.

 18   Lorsque, Messieurs les Juges, vous me demandez quelle était ma mission,

 19   cela correspondrait précisément à cela d'une certaine façon. Si je puis me

 20   permettre, nous avons repris ce système déjà existant, nous l'avons copié à

 21   ceci près que nous avons accepté la suggestion émanant des médecins qui

 22   intervenaient au sein de l'armée croate, des suggestions qui allaient dans

 23   le sens d'une amélioration puisqu'ils nous disaient que la situation qui

 24   prévalait au sein des services logistiques était absurde, inacceptable, et

 25   c'est pourquoi nous nous sommes efforcés de séparer les services médicaux

 26   de la logistique.

 27   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, chère consoeur.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Juste une explication.

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  1   Q.  Le document que j'ai présenté concerne l'organisation d'état-major en

  2   2008, et non pas son organisation au début des années 1990, donc cela ne

  3   fait absolument aucun doute, et à l'époque l'état-major était ainsi

  4   organisé en République de Croatie.

  5   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, oui, c'est précisément là-dessus

  6   que je souhaitais attirer l'attention, nous le soulevons en page 1, il y a

  7   une différence évidemment dans l'organisation de l'état-major en temps de

  8   paix et en temps de guerre, et je remercie ma consoeur d'avoir éclairci

  9   cela.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation]

 11   Q.  Docteur Bagaric, passons maintenant à un autre thème puisque ça ne

 12   s'est pas passé comme on l'attendait pour ce premier sujet.

 13   R.  Oui, je suis d'accord avec vous.

 14   Q.  Sarajevo.

 15   R.  Sarajevo n'est pas un sujet facile, mais bien meilleur que les

 16   précédents.

 17   Q.  Passez au document P 4690, s'il vous plaît. Il s'agit d'un accord

 18   concernant l'évacuation des personnes gravement blessées et malades, accord

 19   qui a été signé à l'aéroport de Sarajevo par Rasim Delic et Milivoj

 20   Petkovic en présence du général Francis Briquemont.

 21   Alors, Monsieur Bagaric, est-ce que lors de la réunion que vous avez

 22   évoquée hier en page 67 du compte rendu d'audience d'hier, est-ce que lors

 23   de cette réunion il a été question de cet accord ou d'activités qui font

 24   partie de cet accord ? Si vous ne pouvez pas vous prononcer sur ce sujet,

 25   nous allons avancer.

 26   R.  Je dois dire la chose suivante : c'est le général Petkovic qui m'a

 27   personnellement convié à une réunion qui s'est tenue à Sarajevo en la

 28   présence de Delic, et à cette réunion était également présent M.

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  1   Briquemont. Alors s'agit-il concrètement de cette réunion-ci, je l'ignore,

  2   mais je sais qu'on a discuté et de cette question-là et d'autres questions.

  3   C'est ce dont j'ai fait mention hier. Je suis véritablement reconnaissant

  4   au général Petkovic qui, pour ainsi dire, m'a invité à l'accompagner, car

  5   c'est à cette occasion que je me suis entretenu avec M. Delic et que je lui

  6   ai proposé de me permettre à l'époque de me rendre à Sarajevo avec cette

  7   personne qui était chef des services médicaux. Mais alors je ne peux pas

  8   dire si c'est exactement de cette réunion-là et de cette occasion qu'il

  9   s'agit ou d'une autre.

 10   Q.  Alors pouvez-vous nous dire si cette réunion que vous évoquez s'est

 11   véritablement tenue vers la fin du mois d'août 1993 ?

 12   R.  Excusez-moi, je suis désolé, mais je vais vous dire exactement où cela

 13   s'est tenu. C'était à l'aéroport de Sarajevo, donc s'il s'agit bien de

 14   cela, j'y étais présent.

 15   Q.  Oui, et c'est ce qui est écrit : "Cela a été élaboré à l'aéroport de

 16   Sarajevo."

 17   R.  Oui, excusez-moi, je n'ai pas pu le lire. J'ai été un peu troublé par

 18   vos premières questions, je ne m'attendais pas à ce qu'elles soient aussi

 19   agressives, pour ainsi dire.

 20   Q.  Mais mes questions étaient tout à fait ouvertes, je pense.

 21   R.  Donc oui, j'étais à l'aéroport de Sarajevo.

 22   Q.  Alors le général Petkovic n'était pas le numéro un du HVO, c'était le

 23   numéro deux si nous considérons que le numéro un était Mate Boban. Si nous

 24   passons au document P 4493, c'est une note d'information envoyée par

 25   Slobodan Praljak à la FORPRONU -- je répète le numéro de document, P 4493.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Nous voyons que le général Praljak informe la FORPRONU du fait que le

 28   général Petkovic a autorité pour négocier au nom du HVO.

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  1   Alors selon la connaissance que vous en avez, Docteur Bagaric, est-ce que

  2   c'était bien le cas, est-ce que le général Petkovic, indépendamment du fait

  3   qu'il ait été commandant ou commandant adjoint du HVO, avait bien autorité

  4   pour cela ?

  5   R.  Oui, il se comportait tout à fait en cette qualité-là, et je peux en

  6   tirer bien plus de conclusions qu'à partir d'un document, de quelque chose

  7   qui est écrit sur du papier.

  8   Q.  Alors je vais maintenant vous poser quelques questions qui ont trait

  9   aux centres de détention, dans le troisième ensemble de documents. Nous

 10   allons sauter une référence, mais nous n'en avons pas besoin. Passez

 11   d'abord au 2D 1537, s'il vous plaît, 2D 1537.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Vous avez parlé de ce document aujourd'hui. Référez-vous au coin

 14   inférieur gauche, il y est dit : "Envoyé à…" Alors est-ce que vous pouvez

 15   nous dire à qui ce rapport était envoyé ?

 16   R.  Très concrètement, cela était envoyé au Dr Curic, ainsi que c'est

 17   indiqué ici.

 18   Q.  Alors ici, dans la traduction en anglais de ce document, il est dit que

 19   : "Les institutions à qui cela est adressé font l'objet d'une mention

 20   illisible." Mais à qui cela était adressé, Docteur Bagaric ?

 21   R.  Cela concerne précisément le secteur de la santé à la tête duquel je me

 22   trouvais, le département de la prévention qui était dirigé par le Dr Curic

 23   et qui intervenait de façon supplémentaire en soutien aux médecins qui se

 24   trouvaient dans ces centres de détention ainsi qu'à l'extérieur.

 25   Q.  Docteur Bagaric, l'abréviation "GSS," c'est bien de cela qu'il s'agit,

 26   n'est-ce pas, "Quartier général médical principal; c'est bien ça, n'est-ce

 27   pas ?

 28   R.  Oui, car le "quartier général médical principal" était partie du

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  1   secteur de la santé.

  2   Q.  Passons au document suivant, le 2D 1538. Ce qui m'intéresse c'est à qui

  3   là encore ce document est adressé.

  4   R.  Là encore, cela est adressé au GSS de Mostar, au quartier général

  5   médical principal. Ce n'est pas adressé nominalement, mais cela était

  6   adressé à l'attention du Dr Curic.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Alors je voudrais attirer l'attention de

  8   tous sur une erreur de traduction pour ce qui est de cette partie du

  9   document. En anglais il est indiqué que cela a été adressé à l'état-major à

 10   Mostar. Je voudrais également attirer l'attention sur le fait que la

 11   Défense Stojic, dans sa requête demandant l'ajout de ce document à sa liste

 12   65 ter, a indiqué la chose suivante, à savoir qu'il se serait agi d'un

 13   document qui a été envoyé à l'état-major de Mostar. Il s'agit du paragraphe

 14   5 de cette requête du 16 avril, et je vais citer une partie de la

 15   justification en anglais qui a été fournie par la Défense Stojic, je cite :

 16   "Le document 2D 01538 est crucial pour montrer que les rapports montrant

 17   les conditions qui prévalaient à Gabela étaient envoyés directement en

 18   provenance des brigades à destination de l'état-major et ne passaient pas

 19   dans un première temps par l'assistant auprès du chef du département de la

 20   Défense en charge du secteur de la santé. La façon dont ces rapports

 21   étaient envoyés révèle la nature des liens qui existaient entre les

 22   services médicaux au sein des brigades et les services médicaux centralisés

 23   à Mostar."

 24   Par conséquent, Docteur Bagaric --

 25   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, je dois tout d'abord

 26   m'excuser auprès de l'Accusation et de MM. les Juges. Il y a eu ici une

 27   erreur dans la traduction, donc c'est en se fondant sur la traduction

 28   anglaise que mon collaborateur a formulé la requête, mais il était

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  1   absolument inutile de faire cette remarque de cette façon. Nous aurions

  2   certainement procédé à des excuses et à une correction à cause de cette

  3   erreur. Il n'y avait absolument pas de raison de présenter les choses

  4   ainsi. Il y a manifestement une erreur dans la traduction qui a ensuite

  5   entraîné d'autres erreurs. Et je regrette que cela soit passé ainsi.

  6   J'aurais, moi la première, procédé à une correction si cela m'avait été

  7   signalé plus tôt.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation]

  9   Q.  Docteur Bagaric, compte tenu de ce que vient de dire ma consoeur, Me

 10   Nozica, je n'ai pas d'autres remarques concernant ce document. Je

 11   souhaiterais simplement vous remercier pour ces éclaircissements et dire

 12   également qu'il ne s'agissait que d'une erreur de traduction et, bien

 13   évidemment, nous en aurions averti notre consoeur ainsi que nous le faisons

 14   avec tous nos confrères. Mais étant donné que cette requête a été soumise à

 15   la Chambre et a été signée par ma consoeur, Me Nozica, il ne faisait aucun

 16   doute pour moi, que le conseil principal de la Défense de Bruno Stojic

 17   savait exactement ce qui était écrit dans ce document. Donc, j'ai supposé

 18   qu'il ne s'agissait pas d'une erreur, et je souhaite m'excuser si j'ai mal

 19   compris l'ensemble de cette question.

 20   R.  Excusez-moi, mais est-ce que je peux juste, en quelques phrases, dire

 21   ce que j'estime être très important au sujet de cette question. Nous

 22   l'avons déjà abordée à plusieurs reprises aujourd'hui, mais je pense que

 23   c'est très important. Vous me le permettez ?

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Témoin, malheureusement, vous êtes

 25   là pour répondre à des questions posées par l'avocate.

 26   J'indique à Me Alaburic qu'elle a déjà utilisé 52 minutes.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, pour cette

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  1   information. Nous allons terminer rapidement avec les questions au Dr

  2   Bagaric.

  3   Q.  Alors, Docteur Bagaric, au sujet des centres de détention, vous avez

  4   dit aujourd'hui quelque chose qui est particulièrement important pour la

  5   défense du général Petkovic, c'est pourquoi je vais vous prier de bien

  6   vouloir éclaircir ce que vous avez dit. Essayez de nous dire si vous

  7   pensiez vraiment ce que vous avez dit, ou s'il s'agit d'un lapsus. Cela

  8   figure à la page 13 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, en lignes 21

  9   à 25, et également en page 14, en lignes 1 et 2. Vous avez dit, donc,

 10   Docteur Bagaric, concernant ces instructions dans les centres de détention,

 11   vous avez dit, je cite : "Les médecins au sein des unités qui exerçaient un

 12   contrôle sur ces centres de détention," et en anglais, cela a été consigné

 13   comme suit : "Les unités et les districts militaires auxquels ces centres

 14   de détention appartenaient." Alors, ensuite, vous avez dit, Docteur

 15   Bagaric, qu'à vrai dire, vous ne saviez pas si l'Heliodrom entrait dans le

 16   champ de compétence du Département de la Défense ou non.

 17   Est-ce que j'ai bien résumé vos déclarations d'aujourd'hui à ce sujet ?

 18   R.  Est-ce que vous voulez que je réponde à la première ou la seconde

 19   partie ?

 20   Q.  A l'une et à l'autre.

 21   R.  J'ai bien dit ce que j'ai dit, et m'y tiens, et je vais le répéter. Et

 22   j'accepte bien évidemment la possibilité qu'il y ait eu un mot que j'ai

 23   utilisé et qui représente de ma part une erreur non intentionnelle. Si vous

 24   examinez ma déposition d'il y a cinq ans, lorsque je me suis exprimé ici,

 25   je répondais aux questions de M. le Procureur qui me posait des questions,

 26   et je n'étais absolument pas préparé à cela, car on m'avait dit à l'époque

 27   qu'on m'interrogerait sur les circonstances générales. Et moi, je n'étais

 28   absolument pas préparé. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Beaucoup de

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  1   temps s'est écoulé, je ne peux pas me rappeler tous les détails. Ce dont

  2   j'ai réussi à me souvenir, je l'ai dit, et j'ai fait la même chose

  3   aujourd'hui, à savoir que dans les règlements de tel ou tel centre de

  4   détention, d'isolement ou tel établissement pénitentiaire, il était prévu

  5   que les services médicaux soient assurés par les médecins appartenant à ce

  6   district militaire ou les médecins de la brigade appartenant à ce district

  7   militaire, et ce, conjointement avec les médecins qui étaient détenus dans

  8   le centre en question ou l'établissement en question.

  9   Et, au fil du temps, cela s'est fait également de plus en plus avec notre

 10   soutien, et quand je parle de "notre soutien," je pense au concours des

 11   spécialistes qui était fourni par le Dr Curic. Et je pense qu'ils ont très

 12   bien fait leur travail en la matière.

 13   Q.  Merci. Alors, Docteur Bagaric, à partir de ce que vous avez dit --

 14   R.  Excusez-moi, mais je dois vous répondre également concernant

 15   l'Heliodrom.

 16   Q.  Nous allons y venir. Alors, à partir de ce que vous venez de dire, je

 17   conclus que vous avez formulé votre théorie de façon légèrement différente

 18   par rapport à la formulation précédente. Vous nous dites maintenant que les

 19   services médicaux assurés pour les détenus l'étaient par les services

 20   médicaux de l'unité appartenant à ce district militaire.

 21   R.  Oui, de l'unité militaire.

 22   Q.  Et l'unité militaire appartenant à ce district ou à cette zone ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Mais est-ce que vous ne nous dites pas ou vous nous dites que c'était

 25   cette unité militaire qui exerçait le contrôle du centre de détention en

 26   question ?

 27   R.  Non, absolument pas, car je ne le sais pas, je ne sais pas qui gérait

 28   ou exerçait le contrôle sur ces centres de détention. La seule chose que je

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  1   sais, c'est ce qui concerne la fourniture des services médicaux.

  2   Q.  Très bien. Votre réponse me convient. J'étais prête à approfondir si

  3   votre réponse avait été différente. Et juste encore une question que

  4   j'avais promise à mon confrère, M. Scott.

  5   Alors, Monsieur Bagaric, lorsqu'il a été question de votre déplacement en

  6   Sovici, et c'est consigné en page 53 du compte rendu d'audience, vous avez

  7   dit donc qu'à votre grande satisfaction ainsi qu'à la satisfaction

  8   d'autres, il a été établi qu'aucun crime à l'encontre de civils n'a été

  9   commis à Sovici et que les Musulmans eux-mêmes qui avaient été hébergés à

 10   l'école de Sovici l'ont confirmé. Ai-je bien interprété ce que vous avez

 11   dit ?

 12   R.  De façon générale, oui, c'est une interprétation correcte de ce que

 13   j'ai dit. Cependant, si les Juges de la Chambre souhaitent en savoir plus,

 14   je peux fournir des précisions.

 15   Q.  Très bien, mais cela sera abordé lorsque je présenterai les moyens à

 16   décharge de la Défense Petkovic et que je vous interrogerai. Mais je

 17   voudrais juste vous demander d'éclaircir ce que vous avez dit. Lorsque vous

 18   avez affirmé cela, est-ce que vous pensiez que parmi ces civils il n'y

 19   avait pas eu de tués, de blessés ni de malades, et qu'il n'y avait aucun

 20   besoin que vous ou que certains de vos confrères ou vos collègues des

 21   services de santé entreprennent des mesures à cet égard, est-ce en ce sens

 22   que vous avez dit qu'il n'y avait pas eu de crimes commis contre des civils

 23   ?

 24   R.  Pas tout à fait. Je ne voyais pas les choses ainsi. Alors, à quoi

 25   pensais-je exactement ? Même aujourd'hui, du point de vue qui est le mien,

 26   je ne peux pas dire qu'il n'y a eu là-bas aucun civil de blessé.

 27   Franchement, je l'ignore, cela. Cependant, la partie bosnienne, Messieurs

 28   les Juges, avait des objections extrêmement véhémentes à Mostar concernant

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  1   des viols de femmes à Sovici et concernant des meurtres qui auraient été

  2   commis et les meurtres de très grands nombres de personnes qui se seraient

  3   produits. Ils nous disaient : Vous souhaitez vous rendre à Kostajnica où

  4   nous avons commis tel et tel acte. Et ils savaient bien de quoi il

  5   s'agissait. De façon symétrique, nous leur demandions de se rendre à Sovici

  6   pour voir ce qu'il en était par rapport à ces accusations qu'ils

  7   proféraient à notre encontre. Mais je ne sais pas si cela a réellement été

  8   fait ou non. En tout état de cause, nous nous sommes rendus à Sovici. Et

  9   lorsque avec M. Petkovic et M. Halilovic nous nous sommes donc rendus sur

 10   place, nous avons été dans une école, je pense qu'il y avait là des

 11   personnes qui étaient détenues dans cette école. Mais il ne s'agissait pas

 12   là de ce type de crimes ou d'exactions qui ont été confirmés par des civils

 13   et nous avons été très heureux de constater que cela n'était pas le cas et

 14   qu'il n'y avait pas de situations de cette nature. Je pense même qu'il y a

 15   eu une grande satisfaction exprimée par les Musulmans détenus dans cette

 16   école, satisfaction qu'ils ont exprimé à l'attention de M. Halilovic. Ils

 17   lui disaient : Vous nous avez promis de l'aide et l'aide n'est pas venue.

 18   Je pense à une aide militaire, de nature militaire ici. Et je pense que

 19   c'est en ce sens qu'il faut le comprendre.

 20   Q.  Je vous remercie sincèrement, Docteur Bagaric, et je pense que nous

 21   pourrons reprendre cela lors de la présentation des moyens à décharge de la

 22   Défense Petkovic.

 23   R.  [aucune interprétation]

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Et j'en ai terminé, Messieurs les Juges.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 26   --- L'audience est suspendue à 17 heures 44.

 27   --- L'audience est reprise à 18 heures 10. 

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise, je crois que c'est D3.

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  1   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Contre-interrogatoire par Mme Pinter :

  3   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Bagaric.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Nous allons d'abord un peu guerroyer. Je me propose de vous faire

  6   revenir à l'année 1992, octobre 1992 plus précisément, pour ce qui est de

  7   la situation au niveau de Jajce et pour ce qui est de l'évacuation des

  8   malades, blessés, civils de Jajce au moment où Jajce était sur le point de

  9   tomber et après. Vous en avez parlé avec Mme Nozica à l'occasion de

 10   l'interrogatoire principal. Je me réfère notamment à la page 38 et à la

 11   page 50.

 12   D'abord, je vous demanderais : dans l'interrogatoire principal, vous avez

 13   parlé de cette évacuation des civils, blessés, femmes et enfants pour dire

 14   ça s'est passé par le biais d'autocars blindés ?

 15   R.  Un ou deux, pas beaucoup.

 16   Q.  Je n'ai pas vraiment parlé de beaucoup.

 17   R.  Oui, excusez-moi.

 18   Q.  Alors c'était un ou deux ?

 19   R.  C'est cela.

 20   Q.  D'où sont venus ces autobus blindés ?

 21   R.  C'étaient des temps très difficiles, il fallait sortir les blessés de

 22   là. J'imagine que les Juges de la Chambre ne savent pas quel est l'aspect

 23   de Jajce. Jajce c'est un canyon, c'est une gorge avec une dizaine de

 24   kilomètres de long par où il fallait passer, et il était impossible

 25   d'évacuer.

 26   Q.  Allez un peu plus lentement, je vous prie, c'est important pour ce qui

 27   est du compte rendu.

 28   R.  Certes. Il était impossible d'évacuer les blessés par quelque autre

Page 39049

  1   moyen que ce soit, donc pas d'avions, pas d'hélicoptères, parce qu'on n'en

  2   avait pas. Il fallait prendre la route, or la route là où il fallait qu'on

  3   passe -- mes collègues médecins m'ont rapporté que c'était à peu près sur

  4   20 kilomètres de gorge avec un gros risque de se faire tuer ou blesser, et

  5   c'est pourquoi nous avons demandé de l'aide et nous nous sommes adressés au

  6   général Prodan en République de Croatie que je connaissais en personne --

  7   alors je ne connais pas tous les détails. Mais je pense que M. Praljak a

  8   participé à la chose. Il nous a fourni son soutien pour qu'on nous les

  9   accorde, ces autobus. C'est avec cela qu'on a évacué les blessés, les

 10   civils et les militaires ainsi que les Musulmans bosniens tout comme les

 11   Croates.

 12   Q.  Merci. Justement, j'allais vous poser la question. On va se pencher sur

 13   certains documents, je crois qu'ils sont rangés dans l'ordre. Ils ne sont

 14   pas rangés de façon chronologique ou ordre croissant ou décroissant de

 15   numéros, mais suivant l'ordre que je me propose d'adopter.

 16   Alors vous avez parlé du Dr Kolak.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Je voudrais savoir si vous avez connaissance du fait qu'à l'occasion de

 19   cette action à Jajce dans le cadre du service de santé il y avait le Dr

 20   Gveric ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Le Dr Barisic Jadranko ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Barisic Josip ?

 25   R.  Oui, c'était un médecin à Jajce.

 26   Q.  Justement. Alors je vous renvoie au 3D 01238.

 27   R.  J'y suis.

 28   Q.  Alors ici on voit Dr Josip Barisic ?

Page 39050

  1   R.  Exact.

  2   Q.  C'est le médecin que vous venez de mentionner ?

  3   R.  Exact.

  4   Q.  Là nous voyons qu'il s'agit de son rapport par lequel il demande

  5   l'évacuation urgente de blessés ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Je vous demande à présent de vous pencher sur le document d'après.

  8   R.  Aidez-moi.

  9   Q.  Le 3D 02819, c'est marqué. 

 10   Vous voulez dire le document est intitulé, Aidez-nous, si vous avez

 11   foi en Dieu ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  La situation était difficile ?

 14   R.  C'était un cri au secours parce que les médecins étaient désespérés,

 15   ils étaient dans l'incertitude pour ce qui était de leurs propres vies.

 16   Triste temps.

 17   Q.  Alors quand vous me voyez attendre, j'attends que le compte rendu ait

 18   fini de défiler pour qu'il n'y ait pas de chevauchement. Alors je suis

 19   d'accord avec vous pour dire que c'était bien ainsi que les choses se sont

 20   présentées, le document nous le montre bien.

 21   Alors document suivant, je vous prie, le 3D 2819. C'est adressé au général

 22   Dr Ivo Prodan. Le Dr Bagaric, c'est vous ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Ensuite, Dr Markunovic à Travnik ?

 25   R.  Exact.

 26   Q.  Le Dr Dzambas à Novi Travnik ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Le Dr Saric à Tomislavgrad ?

Page 39051

  1   R.  En effet.

  2   Q.  Là encore, on voit que c'est un rapport présenté par le Dr Josip

  3   Barisic ?

  4   R.  Exact.

  5   Q.  Alors voyons un peu ce que nous dit le Dr Barisic ici. On a pu

  6   également qualifier ce courrier d'un appel au secours ?

  7   R.  Oui, mais on est post factum.

  8   Q.  C'est une constatation disant que le jugement dernier a déjà eu lieu.

  9   R.  En effet.

 10   Q.  Je renvoie maintenant au document 3D 3527. J'aimerais que vous vous

 11   penchiez sur la page 2.

 12   R.  Je peux la voir.

 13   Q.  C'est bien votre signature qu'on voit ?

 14   R.  Oui, c'est ma signature.

 15   Q.  C'est vous qui avez rédigé ce document, n'est-ce pas ?

 16   R.  Si le document est entier, oui, je veux bien croire que oui.

 17   Q.  Oui, il est entier. Vous présentez un rapport au responsable de la

 18   Défense, M. Bruno Stojic ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Sur quoi ?

 21   R.  Je parle de l'évacuation effectuée de ces blessés qui se trouvaient à

 22   Jajce, et c'est justement de cela qu'il est question. Je ne connais plus

 23   tous les détails, mais je sais en général ce qui s'est passé, je l'ai gardé

 24   en mémoire.

 25   Q.  C'est vous qui avez rédigé ce document ?

 26   R.  Je crois bien que c'est moi, ou peut-être avec quelqu'un d'autre, mais

 27   c'est moi qui ai signé, donc j'assume mes responsabilités à cet égard.

 28   Q.  Fait partie de ce document également le rapport qui est ajouté à côté.

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  1   Est-ce que l'inscription manuscrite est de votre main ?

  2   R.  Oui, c'est mon écriture. Mais je ne comprends pas d'où est-ce que vous

  3   avez sorti ce document.

  4   Q.  Ça fait partie du document ?

  5   R.  En effet.

  6   Q.  Merci. On vient d'en finir avec Jajce, ça s'est passé le 29 octobre, la

  7   chute de Jajce -- je parle de l'année 1992, bien sûr. Vous avez parlé tout

  8   le temps de ce service de santé, à cet effet je vous demanderais de vous

  9   pencher sur un document qui porte le 3D 3528.

 10   R.  Oui, je l'ai trouvé.

 11   Q.  C'est intitulé "Rapport sanitaire" ?

 12   R.  Exact.

 13   Q.  Qui est-ce qui rédigeait ce type de rapports ?

 14   R.  Je pense que cela a été établi dans la zone opérationnelle de

 15   l'Herzégovine du sud-est, service de santé de la zone opérationnelle,

 16   j'imagine que c'est le médecin. Pour ne pas revenir à l'histoire de tout à

 17   l'heure, c'était la personne qui était chargée de la santé dans la zone

 18   opérationnelle.

 19   Q.  Justement. C'est envoyé à vous une fois de plus ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous êtes à la tête des services de santé, puis ensuite au chef des

 22   services, le Dr Burkic, et au commandant de la zone opérationnelle ?

 23   R.  Oui, le commandant militaire.

 24   Q.  C'est l'opération Bura ?

 25   L'INTERPRÈTE : Bura signifiant Tempête.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   Mme PINTER : [interprétation]

 28   Q.  Alors quand est-ce commencent les préparatifs pour cette opération Bura

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  1   ?

  2   R.  Le 22 octobre 1992. Je pense que c'est bien cela.

  3   Q.  C'est cela. Alors le rapport dit que l'opération a déjà commencé, et il

  4   y a des conséquences de cette opération en cours ?

  5   R.  C'est exact. Ce qui est caractéristique pour cette opération, d'après

  6   mes souvenirs, c'est que ça s'est terminé de façon malheureuse pour ce qui

  7   est du HVO parce que le commandant, M. Simovic, a été tué, ça je m'en

  8   souviens. Je crois que nous avons eu beaucoup de pertes comme on peut

  9   d'ailleurs le voir ici.

 10   Q.  Oui, le document nous le montre bien. Alors est-ce que nous pouvons

 11   tirer une conclusion qui serait celle de dire -- d'abord, dites-nous où

 12   est-ce que cette opération a eu lieu, pour les Juges de la Chambre et pour

 13   les autres parties dans ce procès ?

 14   R.  Je n'ai pas eu à intervenir dans cette opération, mais je sais que

 15   c'est une opération qui date de l'époque où nous étions en conflit avec les

 16   Serbes.

 17   Q.  Donc les Croates et les Musulmans, c'est-à-dire les Bosniens, étaient

 18   cote à cote ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Ça s'est passé au sud, le secteur de Stolac ?

 21   R.  Exact.

 22   Q.  Ensuite ça s'est élargi sur la vallée du mont Velez ?

 23   R.  Oui. On voit le Dr Edin Obradovic, ça confirme ce que vous venez de

 24   dire. 

 25   Q.  C'est qui ?

 26   R.  C'est lui qui a signé.

 27   Q.  Lui, il est Bosnien ?

 28   R.  Oui. J'imagine parce que son prénom, Edin, laisse entendre. Ou alors

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  1   Obradovic, Edin Obradovic, ça peut être quelqu'un d'un couple mixte parce

  2   que le prénom est musulman.

  3   Q.  Alors on voit qu'il y a des Croates et des Musulmans qui ont été

  4   blessés et tués, enfin ils se sont battus cote à cote ?

  5   R.  Oui, tout à fait.

  6   Q.  Merci. Alors quand vous avez parlé de Bozan Simovic, et là je vous

  7   renvoie à la dernière page du document, on voit que sont tués Bozan Simovic

  8   dans le rapport de la 1ere Brigade d'Herzégovine ?

  9   R.  Je ne vois pas.

 10   Q.  Dernière page du texte croate.

 11   R.  En fait, lui c'était le symbole même d'un soldat honnête, courageux, et

 12   une unité a porté son nom et même une caserne, c'est pour cela que je l'ai

 13   gardé en mémoire.

 14   Q.  Oui, justement. Alors on va sauter un document parce qu'il a été abordé

 15   par ma consœur, Mme Senka Nozica parce que c'est le véhicule pour Sally

 16   Backer. Et nous allons passer au document 3D 03525. Il s'agit d'un

 17   reportage qui a été publié dans une revue professionnelle appelée "Lancet".

 18   Vous connaissez ?

 19   R.  Oui, absolument.

 20   Q.  Que sauriez-vous nous dire au sujet de cet article ? C'est rédigé par

 21   Richard Horton. Savez-vous nous dire qui c'est ? Et là il est fait

 22   référence à vous.

 23   R.  C'est un article qui a beaucoup d'importance à mes yeux. Il a été

 24   publié dans l'une des plus renommées des revues médicales comme doivent

 25   forcément le savoir les Juges de la Chambre parce que "Lancet" avec le

 26   "British Medical Journal", c'est l'une des revues les mieux cotée et ça a

 27   beaucoup d'impact au niveau international. Alors M. Richard Horton est le

 28   rédacteur en chef. Il a inspecté le terrain après la guerre et il s'est

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  1   entretenu avec une partie des médecins qui sont intervenus pendant la

  2   guerre en Croatie ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine. C'est pourquoi il rédige

  3   ici deux articles. D'abord "Les impressions sur la guerre en Bosnie-

  4   Herzégovine et en Croatie." Donc ce sont ses impressions. Deux articles,

  5   l'un se rapporte à la Croatie et l'autre à la Bosnie-Herzégovine. Dans cet

  6   article, il parle de la nécessité pour les médecins de voir plus loin que

  7   les autres et c'est ce que j'ai essayé de vous illustrer, probablement vous

  8   ai-je fatigués tous, mais j'ai toujours cru et j'y crois encore. Il cite

  9   Nietzsche et il termine son article en disant que ce sont les médecins qui

 10   en temps de guerre doivent voir les choses autrement, se comporter

 11   autrement, différemment, analyser les comportements des uns et des autres,

 12   et cumuler les expériences. Et partant de ces expériences, promouvoir pour

 13   le lendemain tout ce qui relève des connaissances humanitaires, aider à la

 14   prévention de la guerre en sa qualité de mal.

 15   Q.  On évoque ici un document que vous avez abordé avec Mme Nozica, cette

 16   lettre à la FORPRONU demandant à ce que soient créés des postes médicaux.

 17   C'est dans l'introduction même, c'est-à-dire cette volonté que vous aviez

 18   de faire quelque chose.

 19   R.  La rumeur a couru parmi les médecins pour ce qui est des activités que

 20   nous avons déployées et c'est la raison pour laquelle il avait tenu à

 21   s'entretenir avec moi, et aussi lui ai-je montré une copie de ce document.

 22   Je l'avais sur moi parce que j'étais en train de rédiger une maîtrise sur

 23   le sujet de la mise en place de ces services médicaux au sein du Conseil

 24   croate de la Défense, et il a considéré que ce document était important. Je

 25   lui en suis reconnaissant d'avoir cité tout ceci. Et c'est sur cela qu'il

 26   fonde le reste de ce qu'il nous raconte.

 27   Q.  Je voudrais attirer l'attention de tout un chacun sur une phrase. Je

 28   sais que ça ne vous sera pas agréable mais je pense que cela est important.

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  1   Le 12 avril 1992, dit-il, votre frère a été tué par un obus serbe; vous

  2   n'avez jamais de ce fait accusé les Serbes, mais vous avez considéré que

  3   c'était la guerre qui était coupable de ce qui s'était passé.

  4   R.  Oui, ça c'est un événement qui m'est resté durablement en mémoire,

  5   parce que quand vous subissez des pertes personnelles, les pertes des

  6   autres ça devient automatiquement des pertes à vous, et vous comprenez

  7   mieux les gens autour de vous. Vous pouvez même plus aisément pardonné. Et

  8   bien entendu cela a laissé sur moi des traces ou des impressions durables.

  9   Q.  Je vous renvoie maintenant au document 3D 03526.

 10   R.  C'est un article dont je suis particulièrement fier parce que ça a été

 11   publié dans "Military Medicine", c'est-à-dire une revue qui parle de la

 12   médecine militaire en temps de guerre notamment, c'est important. Mais ce

 13   qui est plus important à mes yeux c'est qu'ici dans la signature on voit

 14   que l'article a été rédigé, pondu par moi et par M. le Pr Reuben Eldar,

 15   d'abord, et moi ensuite, et je crois que c'est l'un des meilleurs et des

 16   plus grands connaisseurs de la santé militaire et des services sanitaires

 17   dans l'armée. C'est un spécialiste de la santé publique et c'est celui qui

 18   m'a guidé dans mes démarches académiques et c'est avec lui que j'ai publié

 19   cet article.

 20   Q.  Vous savez que le temps ici est précieux. L'article est long et je ne

 21   peux pas le prendre en entier, mais dans une partie vous évoquez les routes

 22   d'évacuation des blessés et des malades.

 23   Vous parlez des voies terrestres, aériennes et maritimes et vous parlez de

 24   la durée de la guerre, et à un endroit, il est question de cette seule

 25   possibilité de procéder à des évacuations par les airs, c'était la Bosnie

 26   centrale, c'était là donc qu'uniquement il y avait nécessité d'avoir des

 27   transports aériens ?

 28   R.  Si l'on peut le dire, je crois que l'une des études du point de vue de

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  1   l'efficacité de service c'était de savoir dans combien de temps vous pouvez

  2   accéder aux blessés et aux malades, et savoir aussi si vous pouvez les

  3   soigner à titre définitif. Donc mes collègues sur le terrain, dans les

  4   premières minutes après les incidents, pouvaient parvenir à ces blessés et

  5   les acheminer vers les hôpitaux. Mais il importait également de savoir ce

  6   qu'il convenait de faire après. Parce que l'hôpital de Bila c'était un

  7   hôpital qui n'était pas à même de prendre bien soin des gens, et c'est la

  8   raison pour laquelle ces vols étaient si importants que cela. Et ces

  9   messieurs ici qui sont désignés ici, il n'y en a pas un seul à ne pas avoir

 10   apporté son soutien pour les approbations, les autorisations de vols pour

 11   qu'on puisse transporter les blessés.

 12   Et s'enchaîne sur ce récit le récit de cette chère Mme Sally Backer qui est

 13   intervenue en même temps vis-à-vis des Musulmans du côté est, et voyant que

 14   ces Croates en Bosnie centrale avaient le même problème et peut-être plus

 15   grand encore, parce que personne n'avait attiré l'attention des médias sur

 16   leur existence, chose qui est très importante d'ailleurs, et c'est elle qui

 17   a procédé à l'organisation de cette évacuation par hélicoptère. Pourquoi je

 18   le dis, eh bien parce qu'à un moment donné où il y avait eu une

 19   interruption dans les évacuations, c'est elle qui est allée prier qui de

 20   droit pour que cela soit entrepris.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez vous souvenir des noms de certains pilotes de

 22   ces hélicoptères ou est-ce trop vous demander au bout de 16 ans ?

 23   R.  Oui, je me souviens de l'un d'entre eux, il avait un nom intéressant

 24   lui. Il s'appelait Yugoslav. Et je me souviens aussi du commandant.

 25   Q.  Natalija ?

 26   R.  Oui, non, lui aussi mais j'avais un autre homme. C'est quelqu'un que je

 27   connais très bien mais le nom m'échappe.

 28   Q.  Je vais vous poser une question au sujet de cet article et d'un autre

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  1   document et on en aura fini.

  2   Dans l'article, il n'y a pas de numéro de pages, mais je dirais que c'est

  3   juste avant la partie qui parle des différents aspects de l'opération, et

  4   vous avez dit, et c'est abordé dans l'article, je crois que vous l'avez

  5   également indiqué à l'interrogatoire principal ou au contre-interrogatoire,

  6   vous avez dit que ce QG du service de santé a été créé avant les brigades ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Vous le dites ici dans l'article ?

  9   R.  Oui, c'est une espèce de phénomène pour être comparé, par exemple, à ce

 10   qu'avaient fait les Israéliens dans les guerres qu'ils ont conduites ou

 11   comment avaient fait d'autres nations. Nous avons procédé à ce type de

 12   comparaisons parce que c'est un phénomène, et c'est la résultante de la

 13   situation impossible dans laquelle nous nous sommes trouvés à un moment

 14   donné en Bosnie-Herzégovine, nous autres, Croates.

 15   Q.  Je veux bien être d'accord. Mais vous avez dit que ce QG en matière de

 16   santé n'est pas devenu membre à part entière du QG militaire, que c'était

 17   en réalité deux instances qui ont coopéré par une nécessité des choses de

 18   façon très rapprochée, mais au sein du HVO, ces deux instances qui se

 19   trouvaient au même niveau hiérarchiquement parlant ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Cela a été plutôt un phénomène en matière de médecine militaire ?

 22   R.  Nous parlons d'une période -- oui, justement, c'est vrai, nous parlons

 23   d'une période de temps où j'ai formellement été nommé chef de ce QG

 24   principal en matière de santé, et à l'époque le QG du HVO n'existait pas.

 25   Ça peut paraître bizarre, mais c'était comme ça. Par la nomination de ce

 26   chef de QG, nous avons pu garder un haut niveau d'autonomie du point de vue

 27   des services de santé que nous mettions en place, et en mettant cela dans

 28   le ministère de la Défense, chacun a pris sa part des responsabilités.

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  1   C'est ce que je donnerais en guise de réponse à la question que vous avez

  2   posée.

  3   Q.  Je vais maintenant vous poser une question tout à fait pratique, qui

  4   est la suivante, afin que nous comprenions bien de quoi il s'agit, un

  5   médecin à Rama qui boit quotidiennement --

  6   R.  Qui boit ?

  7   Q.  Oui, c'est ce que j'ai dit. Excusez-moi, ça n'est pas entré au compte

  8   rendu. Prenons exemple un médecin de Rama qui boit, qui ne vient pas à son

  9   poste tous les jours, qui ne prend pas soin de s'assurer d'un stock

 10   suffisant de médicaments, qui ne prend pas soin de lui et c'est quelqu'un

 11   qui refuse de procéder à des examens et de soigner des patients. Qu'est-ce

 12   qui se passerait dans ce cas-là ?

 13   R.  Je ne connais aucun exemple de ce type-là, mais si c'est quelqu'un qui

 14   doit intervenir au sein d'un hôpital de guerre, alors il sera convoqué par

 15   le commandant de l'hôpital militaire. S'il est au sein d'une brigade, c'est

 16   le commandant de la brigade qui va l'appeler et qui --

 17   Q.  Il peut le révoquer ?

 18   R.  Oui, bien sûr.

 19   Q.  Cela, vous le dites quand le corps médical a été établi, cela est

 20   valable, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui. Mais jusqu'à ce que cela ait lieu, nous avons eu des responsables

 22   de centres médicaux civils qui assumaient ce rôle. C'était le tout début,

 23   car nous avions une organisation rudimentaire au sens de la mise en place

 24   également de l'armée qui était concomitante, l'organisation de l'armée.

 25   Nous étions dans des circonstances tout à fait particulières.

 26   Ultérieurement lors de la guerre, nous nous sommes retrouvés sans

 27   communication avec les principaux centres médicaux et nous avons dû nous

 28   reposer exclusivement sur les médecins des services de médicaux que nous

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  1   appelons primaires; donc les médecins qui étaient au sein des centres

  2   médicaux et des dispensaires. Or, il n'y avait pas là-bas de chirurgien ni

  3   d'anesthésiste, car cela n'était pas habituel. Or, les chirurgiens que nous

  4   avions et l'anesthésiste dont nous disposions étaient à Mostar et à Livno

  5   dans deux hôpitaux, et en plus de cela, un grand nombre des personnels

  6   médicaux est parti.

  7   Q.  Oui, vous étiez dans une situation très difficile. Alors je voudrais

  8   demander l'assistance de M. l'Huissier pour qu'il vous aide à retrouver le

  9   document 2D 00412.

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  Il n'est pas dans ce classeur que vous avez, mais qui vous a été

 12   présenté lors de votre interrogatoire principal. Il s'agit de votre ordre

 13   daté du mois de septembre, 28 septembre 1993.

 14   R.  Oui, je le vois.

 15   Q.  Le même document figure à la référence 2D 00131, mais porte la date du

 16   26 novembre, nous allons nous concentrer sur ce qui nous intéresse ici.

 17   Je vous demande de passer à la page 2. En version anglaise c'est

 18   également la page 2, la version anglaise ne comporte que trois pages.

 19   R.  Entendu.

 20   Q.  Tout d'abord, je voudrais vous demander à qui ce document est adressé ?

 21   Ou plutôt, conviendrez-vous avez moi que ce document n'est pas adressé à

 22   l'état-major principal du HVO, cet ordre donc ?

 23   R.  Oui, cet ordre effectivement n'est pas adressé à l'état-major.

 24   Q.  Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

 25   R.  Nous nous adressons ici aux unités militaires qui se trouvent sur le

 26   terrain, mais nous nous adressons aussi à toutes les personnes qui peuvent

 27   exercer une influence dans le sens d'un changement en matière de services

 28   médicaux, donc pour ce qui est des éléments qui peuvent exercer une

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  1   influence sur les soins médicaux dispensés, mais qui ne sont pas de nature

  2   proprement médicale, par exemple, l'équipement, les vêtements, les vivres,

  3   nous nous adressons donc à toutes ces personnes qui peuvent contribuer.

  4   Nous nous adressons aux commandants des zones opérationnelles en tant

  5   qu'entités militaires dans la hiérarchie de l'organigramme qui peuvent être

  6   en liaison avec les brigades puisque à cet échelon-là nous avions également

  7   des médecins qui intervenaient.

  8   Q.  Mais l'état-major principal n'a pas eu vent de cela ? Il n'en a pas du

  9   tout eu connaissance, n'est-ce pas ?

 10   R.  Pour ce qui concerne cet ordre précis émanant de nous, il n'était pas

 11   nécessaire qu'il soit mis au courant.

 12   Q.  Alors je vous prierais simplement de vous reporter au point 14

 13   maintenant. Je cite : "Les activités des postes médicaux," et ce qui est

 14   mentionné plus haut :

 15   "Ce sont les responsables des services médicaux des brigades et du

 16   HVO et les responsables des centres susnommés qui répondent directement à

 17   ma personne."

 18   Alors vous avez rédigé cet ordre, donc qui était responsable si cet ordre

 19   n'était pas mis en œuvre, qui en aurait été tenu responsable ?

 20   R.  Alors je n'ai pas eu le temps d'entrer dans les détails concernant ce

 21   document, mais après nous être rendu compte de la situation qui prévalait

 22   et après les entretiens que nous avons conduits avec les médecins qui

 23   étaient sur place, nous avons constaté quels étaient les problèmes et nous

 24   voulions améliorer la situation. Donc nous avons ici indiqué que pour ce

 25   qui concernait les activités des postes médicaux et ce qui est exposé plus

 26   haut, c'étaient les responsables des services médicaux au sein des brigades

 27   du HVO qui répondaient directement, et je pense qu'il s'agissait aussi de

 28   ceux qui étaient tout simplement responsables des services médicaux aux

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  1   différents niveaux. Pour ce qui concerne cette mention des centres médicaux

  2   qui sont cités plus haut, je pense que c'est peut-être un peu trop

  3   ambitieux, mais c'est resté formulé ainsi. Je veux dire qu'il y avait de

  4   nombreux aspects qui n'étaient pas de nature médicale, mais qui ont une

  5   influence sur la situation sanitaire, et je le répète encore une fois, la

  6   disponibilité des vivres, la disponibilité de vêtements, dans une localité

  7   et dans un centre donné, et il s'agissait de problèmes qui ne pouvaient pas

  8   être résolus par des médecins.

  9   Q.  Cela concernait la logistique, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, tout à fait, les services logistiques de la brigade ou du district

 11   militaire, les services logistiques, de quelque quantité que ce soit.

 12   Mme PINTER : [interprétation] Très bien. Je n'ai plus de questions. Cela

 13   conclut mon interrogatoire.

 14   Je vous remercie, Docteur Bagaric.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir m'excuser. Je

 17   voudrais simplement intervenir pour la page 96 du compte rendu d'audience,

 18   en ligne 13, le témoin a dit il s'agit des services logistiques de la zone

 19   opérationnelle, de la brigade ou de tout autre service logistique, et les

 20   deux premières mentions ne sont pas entrées au compte rendu d'audience.

 21   Est-ce que le témoin peut confirmer.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à l'heure, l'avocate du général Praljak

 24   abordait avec vous le document 3D3526, que vous avez rédigé sur le corps

 25   médical croate en Bosnie-Herzégovine durant la guerre entre 1992, 1995.

 26   J'ai lu avec intérêt ce document dont vous avez été un des co-auteurs, et

 27   vous indiquez, c'est ce qui m'a frappé, que d'après les statistiques, 11 %

 28   des blessés étaient transportés dans les hôpitaux militaires, alors même

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  1   qu'à Beyrouth -- enfin, alors même que, par comparaison, vous citez dans le

  2   Sinaï, et certainement vous faites allusion à la guerre entre les

  3   Israéliens et les Egyptiens, plus de 50 % des blessés étaient transportés

  4   dans les hôpitaux militaires, et vous abordez la question du taux de

  5   mortalité des blessés en indiquant que, d'après vous, dans les hôpitaux

  6   militaires croates, il y avait un taux allant de 0 à 8 % et quelque, et

  7   vous comparez ce taux à d'autres chiffres qui vous ont été livrés

  8   concernant l'hôpital américain de Beyrouth ou des hôpitaux israéliens, et

  9   vous en tirez la conclusion que, finalement, tout cela marchait bien. En

 10   lisant cela, je me suis plongé et je me suis dit que nous avons eu des

 11   témoins sur l'hôpital militaire de Mostar est. Et comme vous le savez aussi

 12   bien que moi, cet hôpital militaire de Mostar est avait été mis en place

 13   par la BiH afin de secourir les blessés sur le front à Mostar ainsi que de

 14   traiter les civils blessés.

 15   Nous avons même vu ici des vidéos. On pourrait vous la montrer, mais

 16   passons. Et j'ai eu le sentiment, en voyant cette vidéo puis en regardant

 17   les documents, que le taux de mortalité à Mostar est était certainement

 18   supérieur au 8 % des hôpitaux militaires croates.

 19   Alors, pourquoi vous n'avez pas abordé dans votre article la question

 20   concernant cet hôpital de Mostar est ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, la raison en était que

 22   nous travaillions sur le corps médical et le système de santé croate en

 23   Bosnie-Herzégovine et son organisation interne. Par conséquent, je ne

 24   pouvais pas prendre et examiner également la question de l'hôpital de

 25   Mostar du côté est, car ce dernier n'appartenait pas au HVO. Le présent

 26   article concerne les services médicaux du HVO, et c'est ainsi qu'il est

 27   conçu. Cela correspond également à son titre, la façon dont il est

 28   intitulé. Cependant, vous avez justement remarqué que lorsque l'on a une

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  1   vue d'ensemble de ce qui s'est passé, nous avons eu beaucoup de succès dans

  2   les soins que nous avons pu apporter à nos blessés, mais il s'agit là d'une

  3   vision globale, une vision d'ensemble, ce qui ne remet pas en cause le fait

  4   que la situation était loin d'être aussi bonne dans chacun des hôpitaux

  5   individuels. Par exemple, à Bila, la situation était tout à fait

  6   différente. Ici, nous avons affaire à une moyenne d'ensemble qui a été

  7   élaboré, des données qui ont été publiées par chacun des établissements de

  8   santé à titre individuel. Et nous, nous avons adopté une approche globale,

  9   synthétique, mais nous ne pouvions pas en tout état de cause prendre en

 10   considération l'hôpital de Mostar est, car ce dernier n'appartenait pas au

 11   système de santé du HVO. Si nous l'avions fait, cela n'aurait pas été

 12   crédible. On aurait pu nous demander : pourquoi ne vous êtes-vous pas

 13   occupés des hôpitaux de Sarajevo, par exemple ? Il se serait, dans ce cas-

 14   là, agi d'examiner le système de santé dans la Bosnie-Herzégovine dans son

 15   ensemble. Mais là, il s'agissait du système du HVO, des Croates.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Dernière question, et vous me permettez

 17   de la poser, parce que vous avez parlé de Bila. J'ai vu tout à l'heure dans

 18   un document dont je n'ai pas le numéro en tête, que cet hôpital de Bila

 19   gérait 200 000 habitants. C'est le document qui le dit, grosso modo. Au

 20   niveau du ratio médecin population, est-ce que vous aviez le sentiment que

 21   les hôpitaux sous contrôle des Croates en République de Bosnie-Herzégovine

 22   étaient en situation inférieure par rapport à d'autres hôpitaux dans

 23   d'autres pays, voire des hôpitaux qui pouvaient exister dans la zone tenue

 24   par la BiH ? Est-ce qu'il y avait un ratio favorable, défavorable ? Qu'est-

 25   ce que vous pouvez dire sur le ratio ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était absolument défavorable. La situation

 27   était moins bonne. Pourquoi cela ? Alors, ce n'était pas une situation qui

 28   se présentait dans tous les cas. L'"armija," l'ABiH, elle aussi, avait

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  1   certains hôpitaux qui étaient dans des zones très reculées sans possibilité

  2   d'entrer en communication, et dans ces cas-là, on avait affaire à des

  3   hôpitaux qui étaient dans une situation assez proche de celle de l'hôpital

  4   de Bila. Il est important ici de souligner que les grands centres médicaux

  5   qui existaient en Bosnie-Herzégovine, comme c'était le cas à Tuzla - par

  6   exemple, c'était une ville importante avec plusieurs milliers de membres du

  7   personnel médical - c'était le cas à Zenica également, à Sarajevo, ces

  8   grands centres médicaux sont restés, ont subsisté sur les territoires qui

  9   étaient contrôlés par l'ABiH. Cette dernière disposait donc d'hôpitaux

 10   préexistants, qui existaient déjà avant la guerre et qui étaient ouverts

 11   avant à tous, aux Serbes, aux Croates, aux Musulmans, et tout d'un coup,

 12   ces établissements sont devenus inaccessibles pour les Croates. Car nous

 13   n'aurions pas mis en place un hôpital à Bila si, à quelques kilomètres de

 14   là à peine, nous avions eu la possibilité d'utiliser l'hôpital de Travnik.

 15   En effet, Bila était une municipalité qui dépendait de Travnik. Travnik

 16   disposait d'un grand hôpital tout à fait moderne qui existait depuis des

 17   années, avec un personnel bien formé. Si nous nous comparons à eux, nous

 18   nous trouvions dans une situation bien moins bonne, dans une situation

 19   particulièrement défavorable.

 20   Si je peux me permettre une constatation plus personnelle, c'est ma

 21   conviction personnelle en tout cas, pour ce qui est de ces appels au

 22   secours que nous avons adressés, lorsque nous avons proposé et demandé que

 23   l'on collabore à Mostar et que l'on travaille ensemble, la façon de cela a

 24   été interprété par l'"armija" est la suivante : cela aurait été illogique.

 25   Il n'y avait pas de raison de bloquer l'afflux de patients et l'afflux de

 26   Croates qui jusqu'alors étaient traités aux hôpitaux qui étaient sous leur

 27   contrôle, et cela aurait pu contribuer de façon significative à

 28   l'apaisement et l'arrêt des affrontements et aussi à la possibilité

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  1   d'assurer des soins pour tous. Donc, je pense qu'ils ont préféré juste

  2   laisser les choses en l'état et de faire en sorte de prendre le contrôle de

  3   tout ce qu'ils pouvaient en Bosnie centrale. C'est ce dont je suis

  4   persuadé, personnellement.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons eu ici des témoins et des avocats de la

  6   Défense ont évoqué à plusieurs reprises le départ de la JNA de la Bosnie-

  7   Herzégovine qui avait pris les armes et les munitions, l'artillerie, et

  8   cetera. Et jamais jusqu'à présent la question n'a été posée à quiconque en

  9   la matière. Est-ce qu'à votre connaissance, les hôpitaux militaires qui

 10   étaient sous le contrôle de la JNA, quand la JNA les a quittés, est-ce

 11   qu'ils ont pris tout le matériel médical, les blocs opératoires, les

 12   appareils de réanimation, les médicaments, est-ce qu'ils ont vidé les

 13   hôpitaux militaires qu'ils avaient sous leur contrôle ou bien ils les ont

 14   laissés intacts ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, pour

 16   autant que je sache, cela n'a été le cas que dans un seul hôpital, celui de

 17   Sarajevo, donc l'ancien hôpital militaire de Sarajevo que je connais bien,

 18   car j'ai fait mes études à Sarajevo. Il s'agissait d'un hôpital, d'un

 19   établissement moderne et il me semble qu'après la guerre, lors d'un

 20   entretien que j'ai eu lorsque j'ai été employé au ministère de la Santé à

 21   Sarajevo, un entretien que j'ai eu avec le directeur de l'hôpital de

 22   l'époque, ce dernier m'a dit que l'hôpital avait été mis à sac. Il a

 23   utilisé cette expression. Cependant, je sais qu'il y a eu des pressions de

 24   la communauté internationale et peut-être aussi des accords qui ont abouti

 25   à ce que cela ne se produise pas également à Zagreb pour ce qui est de

 26   l'hôpital militaire. Quant à d'autres hôpitaux militaires en Bosnie-

 27   Herzégovine, je pense qu'il n'y en avait même pas. Cependant, il y avait

 28   d'importants centres médicaux comme Banja Luka, Prijedor, et cetera,

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  1   centres qui sont restés sous le contrôle des forces serbes et qui, en tant

  2   que tels, étaient inaccessibles aux Croates. A l'exception de la période de

  3   la guerre, dans ces situations tout à fait inhabituelles dans lesquelles

  4   les Croates étaient en conflit ouvert avec les Bosniens, les Musulmans,

  5   dans ces cas-là, les Croates n'avaient pas d'autre choix que de payer un

  6   lourd tribut, un prix très important pour les soins qui pouvaient leur être

  7   prodigués dans des zones contrôlées par la partie serbe, par exemple, à

  8   Kiseljak, Zepce, et cetera.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : J'allais oublier de demander si D5 avait des

 10   questions pour M. Curic.

 11   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

 12   n'avons pas de questions pour ce témoin. Nous souhaitons simplement le

 13   remercier d'être venu et d'avoir déposé.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 15   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

 16   n'avons pas de questions.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Karnavas.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il ne nous reste que trois minutes. On ne va

 20   pas commencer avec M. le Procureur.

 21   Maître Nozica.

 22   Mme NOZICA : [interprétation] Je souhaiterais juste apporter une correction

 23   au compte rendu d'audience, en ligne 7, page 101, ligne 7. Le nom du témoin

 24   a été versé de façon incorrecte, afin qu'il n'y ait pas de confusion à

 25   l'avenir.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Bien. Alors, Monsieur le Procureur, vous

 27   commencerez demain ?

 28   M. LAWS: [interprétation] Je pourrais commencer maintenant, si vous le

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  1   vouliez, mais je vois bien l'heure qu'il est.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Trois minutes, alors il vaut mieux attendre demain.

  3   Bien. Alors, on commencera donc demain.

  4   Comme vous le savez, nous sommes d'audience dans l'après-midi. Donc

  5   Monsieur le Témoin, je vous demande de revenir à 14 heures 15, demain

  6   après-midi. Voilà.

  7   Je remercie tout le monde et nous nous retrouverons donc demain après-midi.

  8   [Le témoin quitte la barre]

  9   L'INTERPRÈTE : note de la cabine française : dans la dernière réponse du

 10   témoin à Me Pinter, ajouter : C'est ma conviction profonde que pour

 11   l'armija il était beaucoup plus, l'armija s'est contenté de laisser les

 12   choses en l'état et de voir s'il pouvait prendre le contrôle de la Bosnie

 13   centrale. C'était pour eux bien plus important que de se poser la question

 14   de savoir comment les blessés musulmans pouvaient être soignés à Mostar;

 15   est-ce qu'ils pouvaient l'être mieux ? C'est ma conviction profonde.

 16   --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mercredi 22 avril

 17   2009, à 14 heures 15.

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