Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 8010

  1   Le mercredi 13 mai 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   tous dans le prétoire.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, l'Accusation contre Prlic et consorts.

 12   Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce mercredi 13 mai 2009, je salue M. Pusic, je salue M. Petkovic et M.

 15   Stojic. J'associe également M. Praljak dans mes salutations matinales, et

 16   je n'oublie pas également Mmes et MM. les avocats, M. Stringer et tous ses

 17   collaborateurs et collaboratrices, ainsi que les personnes qui nous

 18   assistent.

 19   J'indique à Me Kovacic qu'il a utilisé jusqu'à présent 12 heures, et je

 20   crois comprendre que c'est le tiers du temps qu'il a prévu pour le

 21   témoignage de M. Praljak.

 22   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, j'ai deux questions de suivi qui

 25   me sont venus dans la nuit, et il me semble important de vous les poser.

 26   La première concerne ce que vous nous avez dit hier, sur le discours tenu

 27   par M. Tudjman devant les officiers croates, j'ai cru comprendre que votre

 28   thèse est de dire que les officiers de l'armée croate - je parle de l'armée


Page 8011

  1   croate, je ne parle pas du HVO - de l'armée croate était des officiers qui

  2   avaient rejoint les rangs de l'armée croate sans aucun engagement

  3   politique, et que lorsque nous, on était officier dans l'armée croate, on

  4   ne devait pas faire part de ces opinions politiques. Nous savons, car vous

  5   nous l'avez dit, pendant quelque temps, vous avez été secrétaire général

  6   d'un petit parti politique. Alors ce que je voudrais savoir : quand vous,

  7   vous avez rejoint l'armée croate, est-ce que vous avez mis totalement de

  8   côté les opinions politiques que vous auriez pu avoir et qu'à ce moment-là,

  9   dans l'exercice de votre mission militaire, vous n'exécutiez que les ordres

 10   qu'on vous donnait partant de Tudjman passant par le ministre de la

 11   Défense, sans aucune considération politique ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à tous

 13   et à toutes dans le prétoire.

 14   Il n'en est pas tout à fait ainsi. Voilà comment ça se présente. Une bonne

 15   partie des officiers qui sont venus, et on en a énuméré un certain nombre à

 16   être venus de l'armée populaire yougoslave; c'est des gens qui sont venus

 17   pour des raisons du jugement politique, et là, je voudrais faire une

 18   distinction pour ce qui est de la façon de percevoir la politique lorsque

 19   l'Etat est aménagé, impôt et tout le reste. Moi, je parle de cette époque

 20   en tant que période pré-politique. On parle de moralité en guise de

 21   politique. Alors ils sont venus pour des raisons politiques, ces gens-là,

 22   parce qu'ils ne voulaient plus faire partie des rangs de l'armée populaire

 23   yougoslave qui s'est mise au service de la politique du Grande-Serbie. Donc

 24   ceci, avec toutes les réserves qui s'entendent, c'est ce que j'entends par

 25   période pré-politique.

 26   J'ai été secrétaire général d'un parti qui n'était pas si petit que

 27   cela, c'était le quatrième parti dans l'ordre de grandeur en Croatie. Une

 28   fois de plus, comme tous les autres partis de l'époque, ce n'était pas de


Page 8012

  1   la politique telle qu'on l'entend de nos jours en parlant de politique.

  2   Tous les statuts et les déclarations liées au programme pour ce qui est des

  3   partis en Croatie se ressemblaient comme un œuf ressemble à un autre. Nous

  4   voulions donc une solution pacifique à la crise yougoslave, nous voulions

  5   la démocratie, nous voulions des élections libres, nous voulions une

  6   économie de marché. Donc ce sont les thèses fondamentales qui, le jour venu

  7   quand ça se réaliserait donc au niveau de l'Etat fournirait la possibilité

  8   de faire vraiment de la politique. De ce point de vue-là, pour ce qui est

  9   de faire de la politique, et auparavant ça n'avait rien à voir du tout avec

 10   le souhait que j'avais eu de faire de la politique dans le sens où vous

 11   l'utilisez vous-même en parlant de "politique."

 12   Troisièmement, un grand nombre de personnes qui ont rejoint les rangs

 13   de l'armée croate, c'étaient des gens qui étaient venus pour des raisons

 14   politiques, si je puis m'exprimer ainsi, mais pas la politique dans le sens

 15   que vous l'entendez, mais l'obligation morale qu'on a de se défendre

 16   lorsqu'on est attaqué, l'obligation morale. Parce que si la politique c'est

 17   une volonté d'établir une démocratie, un libre marché, oui, là, c'est de la

 18   politique.

 19   Mais dans l'armée croate, il ne devait pas y avoir, il n'était pas

 20   permis d'avoir des débats politiques. Les soldats ainsi que les officiers

 21   croates n'étaient pas censés faire leur apparition à des assemblées

 22   politiques voire des manifestations politiques et en portant l'uniforme. En

 23   tant que militaires, ils n'avaient pas le droit de faire de la politique.

 24   Ils devaient intervenir dans le cadre de la politique de l'état croate.

 25   Donc ce que le parlement ou le président ou le gouvernement déterminait,

 26   ils devaient s'y conformer. Alors quand il y a des élections et quand on

 27   veut faire de la politique, on peut faire de la politique. On a pris, par

 28   exemple, sur le modèle allemand qui dit que le militaire c'est un civil en


Page 8013

  1   uniforme, lorsqu'il est en uniforme. Lorsqu'il enlève cet uniforme, il peut

  2   prendre part à la vie politique. Au cas où il viendrait à être élu à des

  3   fonctions politiques, il doit forcément quitter l'armée.

  4   Je vous prierais une fois de plus, pour ce qui est de cette notion de

  5   "politique," de ne pas l'entendre tel que cela est entendu de nos jours

  6   lorsqu'on parle de la politique de la France ou même de la Croatie, ainsi

  7   de suite, parce que c'était comme ça.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour ces précisions.

  9   Deuxième question d'ordre technique, mais c'est une question

 10   importante. Hier, vous nous avez montré plusieurs documents concernant M.

 11   Tudjman, concernant la politique croate et tendant à établir qu'au niveau

 12   de l'entreprise criminelle, M. Tudjman n'avait pas de velléité d'annexion

 13   d'une partie de la Bosnie-Herzégovine, très bien. Vous nous avez montré

 14   plusieurs documents à ce propos. Partant de là, je me pose la question

 15   suivante relative à la notion de contrôle global.

 16   Comme vous le savez, vous avez dû lire tous les jugements rendus par

 17   ce Tribunal : Blaskic, Kordic, Aleksovski, Tadic et d'autres. Je ne vais

 18   pas tous les citer, mais je présume que vous et votre avocat, vous vous

 19   êtes penché là-dessus. Vous savez que, concernant la Croatie et le HVO, il

 20   y a eu une série de jugements qui ont été rendus. Vous savez, par exemple,

 21   dans Blaskic, la Chambre Blaskic a reconnu qu'il y avait un contrôle

 22   global. Vous savez également que, dans l'affaire Aleksovski, la majorité

 23   des Juges n'avait pas conclu au contrôle global de la Croatie sur le HVO,

 24   et que la Chambre d'appel avait infirmé ce constat en se fondant sur

 25   l'interprétation donnée dans l'arrêt Tadic, interprétation dans laquelle le

 26   contrôle global doit être apprécié en fonction de plusieurs paramètres. Il

 27   ne suffit pas qu'un Etat fournisse des armes, fasse de la formation, donne

 28   de l'argent, mais il faut également que cet Etat joue un rôle dans les


Page 8014

  1   opérations militaires menées par un groupe armé, une unité combattante dans

  2   l'autre Etat. Il faut qu'il y ait donc un rôle qui ne soit pas simplement,

  3   comme l'avait pensé la majorité des Juges dans l'affaire Aleksovski, des

  4   instructions spécifiques. Il fait qu'il y ait un rôle.

  5   Alors ma question - et voyez que mes questions sont maintenant de

  6   plus en plus précises - ma question est la suivante : quand vous étiez à la

  7   tête du HVO du mois de juillet au mois de novembre, donc vous voyez dans le

  8   temps je suis également très précis; ma question ne vise que cette période

  9   de juillet à novembre. Est-ce qu'à votre connaissance, dans les opérations

 10   militaires que vous avez pu diriger personnellement puisque vous étiez en

 11   charge des opérations militaires, puisque vous étiez le commandant du HVO -

 12   - est-ce qu'à votre connaissance à ce moment-là, vous avez eu le sentiment

 13   qu'au niveau du commandement que vous exerciez voire au niveau des

 14   instructions que vous receviez de M. Boban, qui je le rappelle était le

 15   commandant de l'armée du HVO, c'était le numéro un, puisque c'était le

 16   commandant suprême lui; est-ce que vous avez eu le sentiment que la

 17   République de Croatie a pu jouer un rôle dans les opérations militaires que

 18   vous aviez dirigées ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais, Monsieur le Juge, pas même Boban,

 20   jamais n'a rien dit. A l'époque où j'étais commandant, il me semble que je

 21   n'ai rencontré que deux fois M. Boban, et pour peu de temps. Donc je suis

 22   arrivé à un moment où Bugojno était déjà tombé et où l'offensive de l'ABiH

 23   était déjà lancée. Ça a duré jusqu'à une atténuation des activités mi-

 24   octobre, sans interruption aucune sur 200 kilomètres entre Uskoplje et

 25   Donji Vakuf, jusqu'à Mostar. Donc jamais, pendant cette période-là, je n'ai

 26   parlé ni rencontré ni vu M. Franjo Tudjman, et je ne sais pas si j'ai vu

 27   une fois peut-être Gojko Susak. Il me semble qu'on s'était vu à un moment,

 28   il me semble que c'était le 1er août, cinq ou six jours après mon arrivée.


Page 8015

  1   Lorsque toutes mes lignes étaient tombées à Uskoplje et lorsque l'armée et

  2   la population avaient commencé à se replier, selon la logique qui suivent,

  3   on aurait vu tomber Rama et tout le reste effondrer. Je crois que j'ai

  4   rencontré alors Gojko Susak parce qu'il était venu voir sa mère; sa mère

  5   résidait non loin de chez Siroki Brijeg. Je l'ai vu très peu de temps, je

  6   lui ai dit qu'on a réussi à récupérer certaines positions, mais jamais

  7   personnes n'a influé en rien ou dit quoi que ce soit à ce sujet pendant que

  8   j'étais commandant.

  9   J'ai été commandant qui, à l'époque, prenait ses décisions militaires, et

 10   ces décisions militaires pour l'essentiel se résumaient à la façon dont je

 11   pourrais me défendre, produisait ainsi du jour au lendemain, d'une nuit à

 12   l'autre. Enfin, on sait comment la guerre se produit, c'est un combat

 13   ininterrompu où je perdais des positions et puis je les récupérais, puis je

 14   les perdais, puis je les récupérais. Enfin, je dis "moi," mais c'est

 15   "nous".

 16   Mais jamais Mate Boban, je n'avais pas de quoi parler avec Mate Boban

 17   et jamais Franjo Tudjman. Donc j'ai rencontré Gojko Susak lorsqu'il était

 18   venu voir sa mère à titre privé, le jour où j'étais revenu.

 19   Alors, si vous le permettez, je vais vous raconter un

 20   événement. Penchez-vous donc sur cette carte ici, ici à côté de Neum.

 21   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont du mal à entendre M. Praljak parce qu'il

 22   est tourné du côté opposé au microphone.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, la Bosnie-Herzégovine a son débouché

 24   sur la mer et nous avions nos lignes de Stolac en direction de Neum. Mais,

 25   là, pour la Défense de cette partie sans route, on voit mal ici en passant

 26   par Metkovic. On est sorti jusqu'à Neum pour prendre position, et lors

 27   d'une relève, la police croate a Metkovic a dit justement, compte tenu des

 28   objections qui étaient formulées concernant la participation de la Croatie,


Page 8016

  1   ils ont dit qu'ils ne laisseraient pas passer l'armée de l'autre Etat, et

  2   ils les ont renvoyés, ils leur ont dit de rebrousser chemin.

  3   Moi, j'ai demandé à la police militaire de mettre la police à la frontière

  4   de la Bosnie-Herzégovine à Neum, et la relève de l'armée croate, qui était

  5   sensée aller vers Dubrovnik, est arrivée à la frontière, et la police

  6   militaire du HVO a dit : non. J'ai été alors contacté non pas par les

  7   militaires, mais par le ministre de l'Intérieur, M. Jaganac [phoen].

  8   Il a dit : "Mais, écoutez, comment se fait-il que vous ne nous

  9   laissiez pas passer par Dubrovnik ?"

 10   J'ai dit : "Mais comment se fait-il que vous ne nous laissiez pas

 11   passer par Neum ? Nous sommes aussi un Etat, nous avons des frontières, et

 12   vous ne passerez pas."

 13   Ça vous illustre la complexité des relations. Bien sûr, il a demandé

 14   à ce que l'on arrange les choses, et j'ai dit qu'on allait les laisser

 15   passer pour aller jusqu'à Dubrovnik parce qu'ils ne pourraient pas faire

 16   autrement que de passer par la Bosnie-Herzégovine. Mais vous allez me

 17   permettre que mes unités que je commande sortent par ici en passant par

 18   Metkovic à la frontière de Neum parce que, moi, je n'avais pas la

 19   possibilité de passer ou de faire autrement. Il y avait déjà les Serbes de

 20   l'autre côté, donc il n'y avait pas de routes. Donc je me suis disputé, et

 21   étant donné que là la Croatie défendait son territoire, j'ai demandé à ce

 22   qu'ils se chargent de cette partie-ci du territoire, et que le HVO n'ait

 23   pas à défendre la Croatie sur ce bout de territoire.

 24   A un moment donné, ils ont accepté, cela fait que cette partie-là des

 25   positions, on l'a abandonné à l'armée croate parce qu'elle défendait des

 26   territoires croates, et je pense que, là, la communauté internationale - et

 27   je vais être plus précis - les Américains ont dit que l'armée croate ne

 28   pouvait pas être sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, et donc on a


Page 8017

  1   tout ramené aux positions de départ.

  2   Je ne comprends toujours pas de nos jours encore pourquoi je

  3   défendrais autre chose si ce n'est Metkovic et amener quelques unités ici

  4   pour défendre Neum, c'était plutôt compliqué.

  5   Enfin, la frontière est compliquée, les positions sont compliquées,

  6   et on n'a pas dit c'est un autre Etat et on va intervenir ailleurs. Il y

  7   avait là l'armée de la Republika Srpska qui avait encore ses aspirations à

  8   l'égard du sud, et je leur ai dit : "Vous n'avez qu'à vous défendre."

  9   A un moment donné donc ils ont accepté, puis sous pression ou compte

 10   tenu des observations faites par les Américains, on a tout ramené à la case

 11   départ. Je crois qu'il y a eu une résolution du Conseil de sécurité pour ce

 12   qui est du retrait de l'armée croate des frontières de la Bosnie-

 13   Herzégovine; ça se rapportait justement à Neum, et c'est la vérité vraie.

 14   Alors on ne me laisse pas passer par Metkovic pour emmener mes soldats ici,

 15   moi, je ne les laissais pas passer non plus, et [imperceptible] plutôt un

 16   débat mouvementé, avec -- voir plutôt élevé.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur Kovacic,

 19   mais j'ai une question à propos de ce que M. Praljak vient de dire. Peut-

 20   être une petite erreur dans la traduction. Ici je parle de la page 8, ligne

 21   6 et ligne suivante. Vous commencez par dire :

 22   "Un moment, ils ont été d'accord et ensuite nous avons laissé l'armée

 23   croate tenir les positions là sur place parce qu'elles défendaient le

 24   territoire croate."

 25   Ensuite, vous parlez de la réaction de la communauté internationale, et en

 26   conclusion, vous dites : "Et nous avons donc dû les retirer." Donc là, le

 27   "les," ça doit être les troupes croates, l'armée croate.

 28   Alors dans la première partie du paragraphe, vous, vous vous identifiez


Page 8018

  1   avec l'Herceg-Bosna et le HVO, et ensuite vous faites plutôt référence à la

  2   fin du paragraphe à l'armée de la Croatie. Alors, j'aimerais savoir comment

  3   vous arrivez à expliquer cela, mais je suis certain que vous allez le

  4   faire.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est peut-être une erreur dans

  6   l'interprétation ou l'utilisation des prenons. Les choses sont claires,

  7   Monsieur le Juge.  Le HVO avait très peu de soldats. Alors nous avons -- le

  8   HVO a demandé à ce que cette partie-ci entre Stolac à droite, c'était nous

  9   - voilà Stolac ici - jusqu'ici c'était nous. Ensuite, on a demandé à ce que

 10   l'armée croate défende cette partie-ci de la Croatie afin que la partie

 11   entre Stolac et la droite, puisqu'il y a eu attaque de Metkovic qui se

 12   trouvait en Croatie, j'ai demandé à ce que ça soit pris en charge par

 13   l'armée croate. A un moment donné, ils ont accepté et il y a eu un

 14   [imperceptible], donc il y a eu de petites Unités du HVO, tactique groupe -

 15   - Groupe tactique 2 s'est retiré et il y a eu l'armée croate qui était

 16   revenu.

 17   Ensuite il y a eu des objections soulevées par les Américains,

 18   d'après ce que j'ai ouï-dire, à savoir que l'armée croate se trouvait sur

 19   le territoire de la Bosnie-Herzégovine, et que c'était une violation de je

 20   ne sais quelle loi ou convention, et une fois de plus, on a ramené les

 21   choses à la case départ. L'armée croate s'est retirée, et nous on s'est ré

 22   emparé des positions ici pour défendre en réalité la frontière de la

 23   Croatie.

 24   J'ai dit qu'il y avait mal entendu. J'ai dit que, de façon évidente,

 25   l'armée croate, sous pression probablement, nous a interdit de faire passer

 26   par Metkovic nos militaires pour défendre cette partie-ci de Neum parce

 27   qu'autrement, on ne pouvait pas accéder à cette partie-là. Alors, moi, j'ai

 28   interdit en retour à l'armée croate de passer par le territoire de la


Page 8019

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8020

  1   Bosnie-Herzégovine pour aller vers Dubrovnik, et là il y a eu dispute.

  2   Ensuite on a fini par convenir de laisser passer les uns, les autres, parce

  3   que comment voulez-vous défendre ? Il n'y avait pas d'aviation, on ne

  4   pouvait pas passer par la mer, donc voilà.

  5   C'est les problèmes classiques qui étaient apparus, mais

  6   effectivement c'était là un contentieux. Je pense bien le savoir - peut-

  7   être pas à 100 % - mais l'existence de cette partie-ci a amené à la

  8   présence de l'armée croate qui s'est chargée de la ligne plus à droite de

  9   Stolac, et c'est ce qui a donné lieu à l'adoption de cette résolution

 10   demandant, ou constatant la présence de l'armée croate sur le territoire de

 11   la Bosnie-Herzégovine, bien qu'autrement, elle ne pouvait pas défendre son

 12   propre territoire sur cette partie étroite entre l'embouchure de la Neretva

 13   et Metkovic et plus au sud.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 15   M. STRINGER : [interprétation] Est-ce que le général Praljak pourrait nous

 16   dire exactement à quel moment s'est passé ce conflit avec l'armée croate ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Petkovic, tu connais mieux les dates. Moi,

 18   Messieurs les Juges, pour ce qui est des dates, il y a eu tellement

 19   d'événements, je ne peux pas tout retenir. Il y a eu tant d'événements, un

 20   nombre incroyable que je risque de me tromper de dates. A vrai dire, pour

 21   moi, les dates c'est ce qu'il n'y avait pas de plus important dans tout ce

 22   méli-mélo.

 23   M. KOVACIC : [interprétation] Peut-être pourriez-vous nous donner l'année ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] 1993.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est 1993, c'est entre juillet et novembre.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne sais pas vraiment. Petkovic, non,

 27   non. Enfin je ne sais pas. Je suis au courant du problème. Je sais qu'il y

 28   a eu les coups de fil. J'ai tout confondu les années. Je ne sais plus


Page 8021

  1   maintenant vous distinguer ce qui s'est passé dans un intervalle de deux

  2   ans. Je vais peut-être me tromper alors. 

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous avez, à propos de ce cas, dit

  4   que les Américains ne voulaient pas que l'armée croate pénètre en Bosnie-

  5   Herzégovine. Il y a quelques jours, vous nous avez dit qu'il y avait la 6e

  6   Flotte américaine, donc je présume que c'est par leur système de contrôle

  7   d'écoute et leurs observations qu'ils ont vu que l'armée croate avait

  8   pénétré en Bosnie-Herzégovine, d'où leurs interventions. Est-ce que c'est

  9   une conclusion à laquelle vous pouvez souscrire ou pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Les officiers américains -- leur attaché

 11   militaire et son assistant, avaient absolument le droit de se déplacer vers

 12   quelque territoire que ce soit du théâtre de guerre et c'est souvent que je

 13   les emmenais en 1992 déjà, par exemple, lorsqu'ils sont allés voir si

 14   l'usine de la JNA non loin de Mostar à Bijelo Polje pouvait produire des

 15   gaz, des poisons toxiques, et avec un général de l'armée croate qui avait

 16   été partisan, puis général de la JNA, puis mis à la retraite, puis

 17   réactivé. Binenfeld était là. Ils étaient intéressés par le fait de savoir

 18   si, dans cette usine, on pouvait fabriquer de l'ypérite, ou je ne sais trop

 19   quoi. Ils ont pris des échantillons et ils m'ont rendu visite à Uskoplje,

 20   ils sont allés où ils voulaient, quand ils voulaient et comment ils

 21   voulaient. Ils n'avaient pas besoin de la 6e Flotte américaine que je sais

 22   avoir été présente ou enfin je sais qu'il y a eu des parties de la 6e

 23   Flotte, un porte avion qui contrôlait l'arrivée ou l'entrée des vaisseaux.

 24   Mais les attachés militaires américains étaient aux côtés de observateurs

 25   européens, de la FORPRONU et ils allaient où ils voulaient, quand ils

 26   voulaient, exception faite du moment où il y avait des combats parce qu'on

 27   leur disait n'y allez pas, on ne peut pas garantir voter sécurité. S'ils

 28   vous arrivent quelque chose, on nous mettra en accusation pour ceci ou


Page 8022

  1   cela. C'était donc les seuls fois où il y avait des combats violents où

  2   nous demandions pour des raisons de sécurité les concernant de ne pas y

  3   aller.

  4   Mais je vous affirme, Messieurs les Juges, en ma qualité d'homme qui

  5   dispensait ces autorisations au niveau de l'IPD et ailleurs, tout

  6   journaliste, tout observateur européen, tous les observateurs militaires

  7   pouvaient se déplacer dans l'Herzégovine dans la Bosnie jusqu'à Uskoplje

  8   tant qu'on était là-bas autant qu'ils le voulaient, quand ils le voulaient

  9   et ils pouvaient obtenir des informations --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- vous avez la parole.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à

 12   toutes et à tous.

 13   Interrogatoire principal par M. Kovacic : [Suite]

 14   Q.  [interprétation] Mon Général, au sujet des deux premières questions qui

 15   avaient été posées par M. le Juge Antonetti, j'ai une question de suivi

 16   parce que quelque chose n'a pas été tout à fait précisé.

 17   Suite à la première question posée par M. le Juge Antonetti, vous n'avez

 18   pas dis expressément si formellement et réellement vous avez cessé d'être

 19   membre du HDS avant de vous joindre au ministère, c'est-à-dire l'armée

 20   croate.

 21   R.  Oui. Au printemps 1991, j'ai cessé d'être membre du HDS.

 22   Q.  Très bien. Au sujet de la deuxième question du Juge Antonetti, vous

 23   parliez des relations avec l'armée croate pendant que vous étiez commandant

 24   au sein du HVO. Pendant que vous étiez commandant du HVO en novembre 1993,

 25   est-ce que vous avez jamais eu l'occasion de rencontrer le commandant du

 26   Grand état-major de la HV, le général Stipetic ?

 27   R.  Ce n'était pas Stipetic qui était le chef du Grand état-major.

 28   Q.  Très bien. Je me suis trompé de nom, mais est-ce que vous n'avez jamais


Page 8023

  1   vu l'homme qui occupait ce poste ?

  2   R.  Jamais.

  3   Q.  Sur le terrain, si vous aviez eu une coopération, est-ce que d'office

  4   vous auriez eu nécessairement des contacts avec cet homme ?

  5   R.  Ça aurait été indispensable et souhaitable.

  6   M. KOVACIC : [interprétation] Pour aider les Juges peut-être au sujet de

  7   ces dernières explications qui ont été fournies par le général Praljak sur

  8   cette frontière autour de Metkovic qui n'est pas tout à fait claire, 3D

  9   03544.

 10   Q.  C'est une feuille à trois où l'on peut trouver une carte, la carte de

 11   la Bosnie-Herzégovine. Je pense que vous devriez normalement savoir

 12   maintenant qu'il y a là une partie de la côte qui constitue un territoire

 13   qui appartient à la Bosnie-Herzégovine, donc il n'y a pas de continuité

 14   territoriale pour ce qui est de la Croatie le long de la côte pour se

 15   rendre de Split à Dubrovnik, par exemple, en empruntant la route qui longe

 16   la côte à un moment on doit traverser il me semble neuf milles sur le

 17   territoire de la Bosnie-Herzégovine ?

 18   R.  Oui.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Donc en sachant cela, ce détail évoqué par le

 20   général devient clair, à un moment donné l'armée croate pour quelle puisse

 21   se déplacer jusqu'à Dubrovnik, le HVO s'est déployé le long de la frontière

 22   avec la Bosnie-Herzégovine et a dit à l'armée croate : non, vous n'allez

 23   pas passé.

 24   Bon, je ne sais pas si ça peut peut-être vous aider à comprendre la carte.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Non, bon. Là, moi, j'ai très bien compris. Il y a

 26   une discontinuité territoriale; la Croatie est coupée, à un moment donné.

 27   C'est clair.

 28   M. KOVACIC : [interprétation] Oui, il en est ainsi. Je vous remercie.


Page 8024

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  3   pour aider à comprendre.

  4   La Croatie n'était pas coupée à un moment donné, même aujourd'hui il y a

  5   cette discontinuité. La Bosnie-Herzégovine a toujours eu cette issue à la

  6   mer près de Neum et la Croatie se trouve couper là à cet endroit.

  7   M. KOVACIC : [interprétation] Alors pour que ce soit tout à fait

  8   précis --

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est la frontière de l'Etat tout

 10   simplement, c'est la frontière.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Mais il y en a été ainsi pendant la RSFY,

 12   pendant cette période qui nous intéresse et aujourd'hui. Jamais il n'y a eu

 13   de déplacements de cette frontière et jamais il y a eu contestation de

 14   cette frontière. Je vous remercie.

 15   Q.  Mon Général, 3D 01998. Nous ne l'avons pas commencé.

 16   R.  Non, non, non. Mais le 996 nous ne l'avons pas terminé, M. Kovacic

 17   Q.  Excusez-moi. Il nous reste encore des choses à dire.

 18   R.  Oui, nous n'avons pas terminé. Je n'ai pas terminé, c'est le discours

 19   prononcé par M. Tudjman lorsqu'il y a eu constitution de la chambre haute

 20   du parlement croate. Page 6 du : "Soldat croate."

 21   Q.  3D 31-0028, en anglais 3D 40-0805, je vous en prie, mon Général.

 22   R.  Il me semble que j'ai tout dit, sur cette partie du texte où M. Tudjman

 23   dit qu'on garantira aux Serbes tous les droits conformément aux meilleures

 24   normes d'autonomie locales reconnues en Europe, et là, il parle de la

 25   Croatie et de la guerre en Bosnie-Herzégovine. Il dit que les causes de la

 26   guerre en Bosnie-Herzégovine sont clairs; il dit que la Croatie y trouve un

 27   intérêt vital à ce que cette guerre soit terminée au plus vite et qu'une

 28   solution politique à la crise Bosno Herzégovine soit trouvée, que la


Page 8025

  1   Croatie doit garder cet intérêt quant à la solution de la crise. Donc il

  2   n'y a là aucun doute.

  3   Puis il dit au petit a : premièrement qu'il en est ainsi vu les liens

  4   géostratégiques entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine.

  5   Au petit b : qu'une bonne partie du peuple croate vit en Bosnie-

  6   Herzégovine, qu'ils y sont depuis des siècles, et que cette population

  7   représente un peuple constitutif en Bosnie-Herzégovine.

  8   Au petit c dit que : vu les effets de la guerre en Bosnie-Herzégovine

  9   sur l'ensemble des aspects économiques et politiques de la vie en Croatie,

 10   et ce, au point que la normalisation de la vie dans les foyers de crise en

 11   Croatie ne seraient être atteints tant que la crise en Bosnie-Herzégovine

 12   n'a pas été résolue, ce qui est tout à fait logique, les zones APNU ne

 13   seraient trouvées de règlement parce que c'est une armée, un Etat, un

 14   champs de bataille. Ça m'a étonné d'ailleurs que les Américains exercent

 15   une telle pression qu'ils souhaitent partager cela. J'aurais compris qu'ils

 16   le souhaitent partager, et puis ils ont déployé la FORPRONU le long de nos

 17   frontières et puis que quelqu'un d'autre résolve la crise en Bosnie-

 18   Herzégovine. Avoir une approche aussi partiale puisque -- tout cela était

 19   occupé par les Serbes, tout cela était occupé par les Serbes et je ne

 20   voyais pas très bien comment on pouvait négliger ce fait, qu'il s'agissait

 21   politiquement et militairement d'une seule et même option. Le président le

 22   sait, il dit : si on ne résout pas le problème en Bosnie-Herzégovine, on ne

 23   pourra pas résoudre le problème de l'autre côté. Finalement, c'est ce qui

 24   s'est passé. Ce n'est que grâce à des opérations lancées avec l'avale de la

 25   communauté internationale, les opérations Eclair et Tempête, qu'on a pu

 26   apporter une solution au problème du sud de la Croatie, des zones APNU et

 27   aussi le problème de la Bosnie-Herzégovine dans la mesure où il a été

 28   résolu.


Page 8026

  1   Puis il est dit dans la suite du texte que, malheureusement, sur le plan

  2   international, on n'était pas pleinement conscient du fait qu'en Bosnie-

  3   Herzégovine, il y a eu condensation de tous les problèmes qu'on pouvait

  4   constater en ex-Yougoslavie de par le passé et qu'ils ont été exacerbés en

  5   Bosnie-Herzégovine.

  6   Et que le moment est venu de mettre fin à cette guerre atroce, il est plus

  7   que temps de mettre fin à cette guerre atroce, et puis il y a une

  8   énumération des conséquences possibles de cette guerre si elle se

  9   poursuivait, parce que les Moudjahiddines sont déjà là. Il y a déjà trop de

 10   volontaires du côté serbe qui sont arrivés de Grèce, d'Ukraine, de Moscou,

 11   et que tout cela risque de se répandre et de contaminer la région au sens

 12   plus large.

 13   Puis il parle de l'antifascisme en Croatie. Tout simplement parce que

 14   pendant 30 ans ou pendant 40 ans, il y a une propagande diffusée depuis

 15   Belgrade que sur le plan international. On a fini par admettre que même

 16   Franjo Tudjman était un Oustachi, qui a été lui général de la résistance

 17   qui a fait la guerre du côté des partisans pendant quatre [comme

 18   interprété], et Bobetko également qui a été un partisan, et moi-même. Nous

 19   avions tous été des Oustacha. Donc c'est un mensonge qui a été répandu

 20   pendant des décennies, on était dégoûté par ce mensonge face auquel on

 21   était toujours appelé à se défendre et c'était inutile. Voilà c'est tout.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre,

 23   Maître Kovacic. La page qui nous avait été donnée c'était "805" les trois

 24   derniers chiffres, mais je pense que c'est 895; ce serait les chiffres

 25   exacts.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] 805, Monsieur le Juge. Vous dites 805, et

 27   c'est la page qui était affichée à l'écran.

 28   Q.  Général, il me semble que vous avez mentionné hier le procureur


Page 8027

  1   militaire en Croatie, vous avez dit que c'était un Musulman, un colonel

  2   Baksic.

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète signale que le témoin est quasiment inaudible

  4   parce qu'il feuillette ses pages.

  5   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais la

  6   cabine anglaise n'a pas entendu les derniers échanges, il y a trop de bruit

  7   de fond.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, quand vous tournez vos feuilles,

  9   faites-le de manière plus silencieuse, parce que ça fait des interférences

 10   pour les interprètes.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Très bien. La partie qui n'a pas été

 12   interprétée n'est pas très importante, j'informe mon confrère que j'avais

 13   posé une question au général, je lui ai demandé si c'était parlé du

 14   procureur militaire, du colonel Baksic, c'est l'article suivant, il s'est

 15   contenté de le mentionner hier, et le général a répondu par la négative; il

 16   a dit qu'on pouvait passer cela.

 17   Q.  Mon Général, vous avez dit que 3D 01998, nous n'allions pas l'aborder.

 18   R.  Si ce serait peut-être utile de montrer deux choses.

 19   Q.  Je vous en prie.

 20   R.  Voilà, les félicitations à l'occasion de Pâque au commandant suprême.

 21   Le 27 mars 1993, le HVO d'Usora, est-ce que ce serait intéressant de lire

 22   cela ?

 23   Q.  Oui, c'est la seule chose traduite, 3D 40892, page croate du prétoire

 24   électronique, en anglais, 3D 40892 -- pardon, c'était en anglais; 3D 31-038

 25   en croate.

 26   Je vous en prie.

 27   R.  Voilà, donc Usora se situe, bien entendu, en Bosnie centrale. Je ne

 28   peux pas montrer cela ici sur cette carte maintenant. Ils ont leurs


Page 8028

  1   raisons, que je ne souhaite pas interroger, donc ils s'adressent au

  2   président Tudjman, ils disent qu'ils ont brisé une offensive chetnik. Ils

  3   disent qu'il y a 20 000 obus qui ont été tirés sur eux, qu'ils avaient

  4   lancé une attaque avec 34 chars.

  5   Mais il dit que tout cela a été fait à cause du soutien musulman, et

  6   l'offensive a été brisée. Ils disent qu'ils ont 19 hommes de tués des

  7   Croates et des Musulmans. 162 blessés, si on compte aussi les civils.

  8   Ils disent de même que puisque cela doit se trouver dans une province

  9   musulmane, et là, voyez-vous c'est un moment où le plan Vance-Owen, portant

 10   cantonisation, a déjà été signé; Usora, cela se retrouve dans un canton. On

 11   n'arrête pas de déformer cela, on dit qu'il s'appelait les provinces

 12   croates, que ça aurait dû être les provinces purement croates, peupler

 13   uniquement de Croates. Mais c'est un plan Vance-Owen et, bien entendu,

 14   c'est une simplification. Vous avez des gens qui disent qu'ils étaient dans

 15   une province musulmane, ainsi par analogie, on disait que c'était une

 16   province croate. Mais il n'en est rien; d'une part il n'y avait pas de

 17   province musulmane et d'autre part, là où il y avait plus de Croates que

 18   d'autres peuples dans des provinces qu'on a appelées croates, il n'y avait

 19   que le nom de Croate, mais ça n'a rien à voir avec ces interprétations

 20   qu'on a pu entendre disant que ces provinces sont appelées à être

 21   ethniquement pures, non, pas plus que les musulmanes. Donc vous avez là ces

 22   combats; les Croates et les Musulmans combattent les Chetniks, et, vous

 23   voyez qu'ils s'adressent au président, ils l'appellent président, président

 24   et ce n'est pas leur président, M. Tudjman n'est pas leur président. Mais

 25   ils expriment leur espoir de se retrouver dans une entité administrative

 26   parce qu'il y la majorité des Croates.

 27   Bien entendu, on parle de la Bosnie-Herzégovine. Il n'est pas question de

 28   ces sessions de défense par quelqu'un d'autre, tout simplement le plan


Page 8029

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8030

  1   Vance-Owen a été signé par Boban et co-signé par Tudjman, et il fallait le

  2   mettre en œuvre. Bien entendu, les Serbes ne l'ont pas signé du tout et M.

  3   Izetbegovic quant à lui, il a tout d'abord signé et puis comme c'était son

  4   habitude, après il a renoncé à sa signature.

  5   Q.  L'article suivant.

  6   R.  Non, non, là, on n'a plus rien à dire.

  7   Q.  Très bien. Nous passons.

  8   R.  Un instant, s'il vous plaît. Si, si, il y a quelque chose.

  9   Q.  Seks ?

 10   R.  Non, non, on ne parlera pas de Seks. Nous allons passer, il n'y a là

 11   rien d'important.

 12   Q.  Très bien.

 13   R.  Non, non, prenons ce message.

 14   Q.  Mais quel numéro ?

 15   R.  C'est le même.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] S'il y a une accalmie, pourrait-on

 17   nous dire où se trouve Usora ? Parce que la carte de Google ne connaît pas

 18   ce lieu, appelé Usora.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Usora est trop petite. Pardon, je sais où elle

 20   se trouve, mais je n'arrive pas à la retrouver sur la --

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est tout près de Doboj, je pense que le

 22   vice-président Zubak était originaire d'Usora. Maintenant ça fait partie de

 23   la Republika Srpska, me semble-t-il.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'arrive pas à trouver cela sur la carte.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Kovacic.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Kovacic, "nous construirons la

 27   Croatie."

 28   M. KOVACIC : [interprétation]


Page 8031

  1   Q.  3D 01998, donc un article long, c'est un entretien.

  2   R.  Non, ce n'est pas un entretien.

  3   Q.  Oui. Il ne s'agit pas là d'un entretien. On reprend simplement ici un

  4   discours prononcé par le président Tudjman, 3D 31-0044, dans le prétoire

  5   électronique en croate, 3D 40-0895 pour le texte anglais jusqu'à 0903.

  6   Général, à partir du moment où vous citerez des chapeaux est-ce que nous

  7   pourrions toujours citer la page anglaise en prétoire électronique ?

  8   R.  Oui.

  9   C'est un message adressé par le président, c'est un peu comme lorsque le

 10   président américain s'adresse à la nation. Je ne sais pas comment, quels

 11   sont les usages dans d'autres pays. C'est un discours général qu'adresse le

 12   président à l'ensemble de la population, en l'occurrence de la Croatie, en

 13   citant les principales orientations de la politique dans tous les domaines.

 14   Alors la guerre d'une part, les aspirations, l'économie, la culture, tous

 15   les volets de la substance de la politique menée par la Croatie, à un

 16   moment donné, sont évoqués, donc on appelle cela le message adressé par le

 17   président.

 18   Donc nous pouvons commencer par la partie qui évoque le contexte dans

 19   lequel nous avons créé l'Etat indépendant. Vous verrez, Monsieur le

 20   Président, Messieurs les Juges, que le président de l'Etat croate, Franjo

 21   Tudjman, est parfaitement conscient du fait qu'il ne serait jamais parvenu

 22   à créer l'Etat croate s'il n'avait pas bien compris les circonstances

 23   historiques et politiques internationales et s'il n'avait pas su s'y

 24   adapter. Donc c'est un historien, un homme d'Etat qui avait une immense

 25   érudition, qui était parfaitement au fait de ce qui se passait sur la scène

 26   internationale, quelles étaient les politiques qui étaient menées et on le

 27   voit repris ici clairement; donc s'attendre à ce qu'il essaie en cachette,

 28   par derrière de parvenir à la réalisation d'un je ne sais pas quel plan


Page 8032

  1   avec la Bosnie-Herzégovine. Ça me semble tout à fait impossible.

  2   Voyons maintenant, donc je ne vais pas donner lecture de la totalité de

  3   l'article. Je ne vais reprendre que les thèses principales que le discours

  4   contient. 

  5   Il dit que l'ordre international s'opposait en réalité à la création de

  6   nouveaux états indépendants, que pour ce qui est de la Yougoslave, cet

  7   organe international se fondait sur la situation de Traité de Versailles et

  8   la fin de la Première Guerre mondiale, la création de la Yougoslavie, que

  9   la création de nouveaux états ait rencontré une résistance opposée --

 10   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Désolé de vous interrompre. C'est

 11   simplement pour dire qu'il y a une erreur dans le compte rendu d'audience.

 12   Vous parliez de l'issue du résultat de la Première Guerre mondiale, et vous

 13   avez parlé de l'accord de Varsovie, mais c'était Versailles, bien entendu.

 14   Il faut que "Warsaw" soit remplacé par "Versailles." Merci.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Monsieur le Juge

 16   Prandler.

 17   Il poursuit en disant donc que s'oppose la création d'une Croatie

 18   indépendante, ceux qui sont favorables en matière de la Yougoslavie, que

 19   pour l'essentiel, ce sont les grandes puissances européennes et

 20   internationales, ils présentent leur raison, ce qui les incitait à prôner

 21   ce type de solution; à savoir le maintien de la Yougoslavie. Ensuite il dit

 22   qu'à l'intérieur de la Yougoslavie, les relations -- la situation n'était

 23   pas favorable, que les principaux protagonistes croates qui occupaient des

 24   postes aux institutions fédérales que c'étaient des hommes qui n'étaient

 25   pas favorables de la création d'une Croatie indépendante. Il dit que

 26   quasiment tous acceptaient le fait que la Slovénie devait avoir la

 27   possibilité de partie si elle le souhaitait, les Serbes reconnaissaient ce

 28   droit à la Slovénie, mais que la Croatie devait peut-être bénéficier de


Page 8033

  1   quelques droits confédéraux, mais que la Bosnie-Herzégovine et les autres

  2   républiques devaient rester au sein de la Yougoslavie. C'était des

  3   propositions visant à la création d'une fédération asymétrique, comme on

  4   l'a appelé lors de ces multiples réunions, on a inventé toute sorte de

  5   solutions invraisemblables, mais surtout pour satisfaire Milosevic. Mais

  6   rien ne pouvait le satisfaire si ce n'est la grande Serbie.

  7   Au point 5, il dit que la Croatie, à ce moment-là, était dans une

  8   situation. On cherchait à lui imposer aussi cette tâche sur son image, à

  9   savoir de la Croatie indépendante dans le passé, on contestait son droit,

 10   donc à la création d'un Etat indépendant maintenant. En plus, il dit qu'il

 11   garder tout cela à l'esprit, que tout cela est toujours présent, et qu'il

 12   faut en tenir compte dans l'ensemble de la politique que nous menons sur le

 13   plan intérieur et étranger. Donc qu'il serait stupide de ne pas tenir

 14   compte de tout cela, et parfois il y a eu quelques demandes de passer à des

 15   solutions plus rapides. Bien entendu, il y a eu des voix de ce type qu'on a

 16   pu entendre en Croatie. Par la suite, il dit qu'un certain mécontentement

 17   existe dans la population croate parce que le pouvoir n'a pas été établi

 18   sur l'ensemble de son territoire, qu'on aurait dû avoir recours à la force

 19   pour y parvenir, et il dit aussi :

 20   "Pourquoi menons-nous la politique que nous menons eu égard à la

 21   solution de la crise en Bosnie-Herzégovine ? Il est évident que la

 22   communauté internationale, jusqu'à présent, de part les efforts qu'elle a

 23   déployée, n'a pas réussi à résoudre, elle a hésité à avoir recours à des

 24   solutions politiques ou militaires plus fortes."

 25   Maintenant, je cite : "En se basant sur une observation objective et à la

 26   prise en compte des circonstances d'alors et d'aujourd'hui, il ressort

 27   indubitablement --"

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur Praljak, vous parlez beaucoup trop


Page 8034

  1   -- vous lisez beaucoup trop vite; en plus, les interprètes ne connaissent

  2   pas les numéros de la page en anglais. J'essaie d'aider un peu tout le

  3   monde. Donc peut-être que votre conseil pourrait nous donner toutes ces

  4   informations. Ce n'est pas à moi de faire cela puisque ce n'est pas moi qui

  5   suis en charge de cet interrogatoire principal.

  6   L'INTERPRÈTE : De la cabine française, même si les interprètes avaient le

  7   numéro de la page, ils ne l'auraient pas s'affichant devant eux.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je cite : "En se fondant sur les circonstances

  9   mentionnées --"

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, on vous demande :

 11   d'où vous tirez votre citation ? C'est une question qui est en suspens,

 12   vous n'y avez toujours pas répondu.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] A partir du même texte.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Certes, mais les interprètes

 15   aimeraient savoir quelle est la page que vous lisez parce qu'il y a trois

 16   colonnes, c'est écrit en tout petits caractères et leur tâche est bien

 17   assez difficile, ils ont besoin de savoir où -- d'où vous lisez.

 18   M. KOVACIC : [interprétation]

 19   Q.  Vous êtes dans le sous titre : "La Croatie et la guerre en Bosnie-

 20   Herzégovine," n'est-ce pas ?

 21   R.  Non, Maître Kovacic : "Les circonstances internationales dans

 22   lesquelles nous avons créé un Etat indépendant." "Circonstances

 23   internationales," c'est la page 2.

 24   M. KOVACIC : [interprétation] C'est la page 3D 40-0895 en version anglaise,

 25   dans le prétoire électronique jusqu'à la page 0896.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous n'allez pas lire tout ce

 27   discours qui est très dense, simplement faites ressortir les temps forts à

 28   l'appui de ce que vous soutenez.


Page 8035

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'espérais faire.

  2   Donc à partir de ce texte, donc j'espère qu'il sera versé et qu'il

  3   sera lu. Il ressort de façon indubitablement, que Franjo Tudjman comprend

  4   l'ensemble des forces en présence sur la scène politique internationale. Il

  5   en a eu compréhension tout à fait froide et il adapte sa politique en étant

  6   conscient du faite que tout élément qui s'opposerait à ses forces et

  7   politiques aboutirait à une catastrophe, à savoir, à la possibilité de la

  8   création de l'Etat croate.

  9   Donc il dit que sa politique qu'il a menée était irréprochable et

 10   qu'il a fait extrêmement attention, qu'il a reçu quotidiennement les

 11   acteurs de la communauté internationale, il leur donnait fréquemment toutes

 12   les explications qu'il souhaitait, bien qu'il n'ait pas pu toujours être

 13   d'accord avec eux, et surtout qu'il y a eu souvent aussi des exigences de

 14   leur part qui étaient plutôt incompréhensibles. Il dit également dans ce

 15   texte qu'il s'agissait là d'une politique raisonnable et raisonnée qui a

 16   permis que la Croatie soit reconnue et admise au sein des Nations Unies, et

 17   que les représentants, la communauté internationale la comprennent peu à

 18   peu.

 19   Il dit également qu'il ne faut pas oublier que la Croatie, sur ce

 20   chemin de son indépendance n'était pas armée, qu'elle a été au contraire

 21   été désarmée, qu'en tant qu'Etat elle a mis en place un système

 22   démocratique stable et constitutionnel, une constitution dans laquelle sont

 23   entrée toutes les valeurs du monde civilisé.

 24   Juste avant il dit que nous sommes reconnus par 103 Etats, que 75

 25   Etats et l'Union européenne ont des relations diplomatiques avec nous, que

 26   nous avons établi de bonnes relations avec la plus grande puissance

 27   mondiale, que sont les Etats-Unis.

 28   Il dit ensuite que notre système doit garantir à tous les citoyens,


Page 8036

  1   et notamment aux minorités techniques et nationales, tous les droits qui

  2   sont [imperceptible] de l'humanité contemporaine, et que rien ne nous

  3   détournera de ce chemin. Il dit ensuite que c'est ainsi que l'on a été en

  4   position -- dans une position où la Croatie a pu signer le plan Vance-Owen,

  5   et qu'il apparaît clairement à cette occasion, et à partir de ce qui se

  6   passe en Bosnie-Herzégovine, il ressort clairement donc tout ce que

  7   l'agresseur serbe était encore disposé à détruire en Croatie.

  8   Il parle de la FORPRONU en disant qu'elle rempli sa mission, qu'elle

  9   rencontre des difficultés qui sont -- auxquelles on recherche une solution.

 10   M. KOVACIC : [interprétation]

 11   Q.  Général Praljak, vous êtes maintenant passé à cette deuxième partie

 12   concernant les zones de protection et le rôle de l'ONU. Alors, c'est la

 13   page 0897 en version anglaise, 3D 40-0897.

 14   Continuez, s'il vous plaît.

 15   R.  Alors il parle de la FORPRONU document, et donc avant ce passage sur la

 16   guerre en Bosnie-Herzégovine, je voudrais juste mentionner ce qu'il dit là.

 17   Donc il dit qu'il persistera dans cette politique et que tous les droits

 18   civiques et les droits des minorités seront garantis à tous les citoyens

 19   ainsi que le droit de jouir d'une autonomie conforme aux normes les plus

 20   exigeantes de pays occidentaux.

 21   Il parle des relations avec les Serbes sous la protection des forces

 22   de paix internationales. Il dit que la Croatie est tout à fait favorable à

 23   la tenue d'élection pour que soient organisés des gouvernements locaux dans

 24   ces zones et il propose que le Sabor permette à des représentants des deux

 25   districts où il représente une majorité d'entrer dans son sein et il

 26   propose également que l'on examine au sein du Sabor, la question de la

 27   minorité serbe. 

 28   Donc à cette époque, Franjo Tudjman dit, au sujet des districts de


Page 8037

  1   Kotor et de Glina, qu'il propose aux représentants serbes de disposer de

  2   leur propre autonomie locale et nous verrons ultérieurement également de

  3   leur force de police, et leur propose également d'envoyer directement des

  4   représentants aussi bien dans la chambre au Sabor -- donc envoyer des

  5   représentants au Sabor dans la chambre basse aussi bien que dans la chambre

  6   haute.

  7   Q.  Alors vous parlez ici de la page 3D 40-899, et 898 précédemment.

  8   Merci. Continuez.

  9   R.  Je ne vais pas ici répéter les trois éléments fondamentaux où il

 10   affirme l'intérêt de la Croatie d'aller dans le sens d'une résolution.

 11   Il dit à nouveau que nous assistons à une intervention croissante de

 12   certaines forces extérieures qui pourraient amener à une escalade, à une

 13   recrudescence. Il dit que le monde a condamné l'agression serbe mais qu'il

 14   y a aussi des acteurs internationaux craignant la naissance d'un Etat

 15   islamique en Europe, et que, malheureusement, ces agents extérieurs ne

 16   comprennent pas complètement dont il s'agit. Il affirme que le peuple

 17   croate s'est organisé en Bosnie-Herzégovine mais j'entends contre -- pour

 18   sa défense contre l'agresseur serbe et qu'il a réussi à défendre la majeure

 19   partie de son territoire que par la même occasion l'ensemble de la Bosnie-

 20   Herzégovine a été sauvegardée.

 21   Il dit également que, dans le cadre des Conférences de Londres, de

 22   Genève et de New York, la position de principe a toujours été prise qui est

 23   la suivante, à savoir que la solution à adopter devait être tel qu'elle

 24   permette de mettre -- d'arriver à une paix durable au fil des années.

 25   Il dit que la Bosnie-Herzégovine, en tant qu'Etat, ne pourrait subsister

 26   que si elle est formée de trois peuples constitutifs qui seront sur un pied

 27   d'égalité qui disposeront de certains pouvoirs dans la partie où ils sont

 28   chacun majoritaires car - et nous le reverrons plus tard dans le cas


Page 8038

  1   contraire - c'est ce dont la Bosnie-Herzégovine -- déjà depuis des siècles

  2   qui proviendrait à savoir que tout ce qui a été imposé de l'occupation

  3   turque à l'occupation austro-hongroise aux tentatives serbes, à savoir que

  4   toute solution non fondée sur ces principes conduira à une situation

  5   chaotique dans cet Etat, situation dans laquelle elle est aujourd'hui

  6   également car la solution adoptée n'est pas bonne. On reporte tout au

  7   calant de grec. Les problèmes ne sont pas résolus pour ne pas dire -- sans

  8   même parler de la haine qui ne cesse qui est toujours là et qui augmente.

  9   Je ne vais pas m'attarder davantage.

 10   Ce discours est un discours général et je voudrais simplement dire

 11   qu'un homme qui concevait et comprenait ainsi la politique et les forces en

 12   présence sur la scène internationale ne peut absolument pas se voir

 13   reprocher d'être en train de préparer sous la table en quelque sorte ou en

 14   cachette la séparation ou la sécession de telle ou telle partie de la

 15   Bosnie. C'est quelque chose qui n'est absolument pas, c'est contraire à la

 16   raison.

 17   Q.  Général, peut-être que --

 18   R.  Je vais vous dire quelle partie maintenant nous passerons. Nous allons

 19   passer le document suivant.

 20   Q.  Très bien.

 21   R.  Puis nous avons passé également celui-ci afin de faire plus court.

 22   Q.  Alors 3D 0202. Est-ce que vous souhaitiez le commenter ?

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- de regarder l'autre document, j'ai

 24   une question à partir de ce discours qui est fait devant les deux, les deux

 25   chambres, donc c'est le discours du président de la Croatie qui intervient

 26   devant ses compatriotes et devant les élus. Donc a priori, ce qu'il dit il

 27   doit le penser et il doit exprimer la politique qu'il va mener.

 28   Partant de là, Monsieur Praljak, j'ai vu que dans ce discours le


Page 8039

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8040

  1   président Tudjman aborde la question des conflits en Bosnie-Herzégovine. Il

  2   dit, malheureusement, en Bosnie-Herzégovine, il y a donc des conflits entre

  3   les troupes croates et musulmanes, et il rajoute "en certains lieux." Donc

  4   il ne dit pas que le conflit est général. Il prend le soin de dire en

  5   certains lieux, c'est important. Quand un président parle, il n'a pas droit

  6   à l'erreur et donc tout ce qu'il dit doit restituer une réalité. Là, il dit

  7   "en certains lieux," et il va, semble-t-il, en donner les causes. Bon. Il

  8   semble dire que c'est la conséquence de l'agression serbe mais aussi par

  9   les intentions et actes d'irresponsables extrémistes musulmans.

 10   Alors l'analyse des causes du conflit entre les Croates et les

 11   Musulmans en Bosnie-Herzégovine à laquelle il se livre lui, était-ce une

 12   analyse qu'avait toute la classe politique croate à l'époque ou bien c'est

 13   un sentiment personnel qu'il émet.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 15   Juges, je ne peux pas répondre avec précision à cette question. Alors, bien

 16   entendu, il y avait différents textes et déclarations quant aux raisons

 17   pour lesquelles un conflit est apparu. Il y avait tout un spectre de

 18   positions différentes entre ceux qui rejetaient la faute uniquement sur les

 19   Serbes, ceux qui le rejetaient uniquement sur les Musulmans, ceux qui le

 20   rejetaient sur le HVO ou l'Herceg-Bosna, mais comme le président Tudjman

 21   l'a une fois déclaré, il n'y aurait pas eu de guerre sur ce territoire si

 22   la Croatie avait accepté de rester dans le cadre dans la Yougoslavie. Alors

 23   il est simple d'éviter la guerre si vous acceptez de rester en esclave.

 24   C'est la même chose qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine. Il n'y a

 25   pas eu de conflits entre les Croates et les Musulmans à Bihac. C'est la

 26   zone que je montre. Il n'y a pas eu de conflits entre eux non plus en

 27   Posavina, pas plus que dans l'ensemble de la partie centrale, Tuzla,

 28   Zenica, et cetera. Les affrontements ont éclaté à Konjic, par exemple, ou


Page 8041

  1   en Bosnie centrale. Ensuite, ils ont pris de l'ampleur.

  2   Alors, moi, évidemment, je partage cette position que je vais montrer

  3   en détail dans les documents suivants et qui est la suivante, à savoir que

  4   ces affrontements sont la résultante de plusieurs facteurs qui y ont

  5   contribués; l'un d'eux notamment est l'afflux d'un très grand nombre de

  6   réfugiés. Mais j'affirme la chose suivante et c'est par mes propres

  7   analyses que je suis arrivé à cette position qui est la mienne, à savoir

  8   que la communauté internationale n'était pas en mesure de contraindre les

  9   Serbes qui avaient occupé une grande partie du territoire d'accepter un

 10   accord de paix, donc ceci c'est la partie de la Bosnie-Herzégovine qui a

 11   été laissée aux Croates et aux Musulmans, et cette situation a amené les

 12   négociateurs - je pense notamment à Alija Izetbegovic - ou plutôt, aux

 13   personnes qui condisaient [phon] sa politique, car nous verrons qu'en la

 14   matière, M. Izetbegovic n'était pas tout à fait indépendant. Cela les a

 15   incités à dire la chose suivante : entendu, quelle que soit la partie du

 16   territoire que nous déclarerons auprès de la communauté internationale

 17   comme étant sous notre contrôle, elle le reconnaîtra, elle l'a reconnue,

 18   elle a accepté les conquêtes serbes, donc elle fera aussi, car son but

 19   n'est pas l'adoption d'une solution juste, mais la paix, et ce, à n'importe

 20   lequel prix. C'est de ce type de réflexion, c'est ce que j'affirme qu'a

 21   résulté la tentative d'occuper la Bosnie centrale. Le fait que Sefer

 22   Halilovic opère une percée sur les frontières occidentales et que Neum est

 23   plus loin à Ploce, il déclare à la communauté international : nous avons

 24   résolu la question. Les Serbes ont leur partie; nous avons la nôtre. Ce que

 25   je vous dis, Messieurs les Juges, à partir de tout ce que je sais, c'est

 26   que cela aurait été accepté, tout comme ils ont accepté la division de la

 27   Bosnie-Herzégovine, comme les Serbes l'ont fait au cours de la guerre; 49 %

 28   d'un Etat qui aurait subi le nettoyage ethnique. Cela à mon sens est


Page 8042

  1   contraire à mes principes moraux.

  2   Nous avons la position non seulement du président Tudjman, mais

  3   également du Sabor et de toutes les personnes qui observaient la chose de

  4   façon raisonnable.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- si vous répondez de manière

  6   plus concise à mes questions, ça me permettrait de vous poser plus de

  7   questions.

  8   Alors j'ai une deuxième question, ça sera la dernière à partir

  9   de ce document, c'est une question qui est posée au travers de la grille

 10   d'analyse du double discours de M. Tudjman du double jeu, que l'Accusation

 11   allègue.

 12   A la page -- je cite la page anglaise 3D 40-0899; c'est dans la première

 13   colonne, et c'est le premier paragraphe de la première colonne, il dit ceci

 14   :

 15   "La Croatie a reconnu la Bosnie-Herzégovine, et c'est le premier et jusqu'à

 16   maintenant le seul qui a envoyé un ambassadeur dans ce pays."

 17   Tudjman dit et rappelle que c'est la Croatie qui a reconnu en premier la

 18   Bosnie-Herzégovine et qui a envoyé un ambassadeur. Comment vous interprétez

 19   cela, de la part de M. Tudjman ? Est-ce que, dans son esprit, c'est un acte

 20   symbolique ? Est-ce que c'est un acte qui va en parallèle avec la

 21   reconnaissance d'un Etat, ou y a-t-il quelque chose de plus, dans le fait

 22   immédiatement d'être le premier et d'envoyer un ambassadeur, comment vous

 23   analysez cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Précisément de cette façon, à savoir que si

 25   l'on souhaite que l'intégrité d'un Etat soit préservée, on va être les

 26   premiers à reconnaître cet Etat, et envoyer un ambassadeur à Sarajevo, qui

 27   était M. Sancevic. C'est M. Izetbegovic qui ne voulait pas le laisser

 28   monter à bord de son avion pour qu'il puisse se rendre à Sarajevo, car cela


Page 8043

  1   aurait empêché certains jeux politiques, mais pas du côté croate.

  2   Je le répète. Franjo Tudjman a envoyé un de ses éminents collaborateur pour

  3   qu'il passe un mois en Bosnie-Herzégovine en exerçant du lobbying afin que

  4   l'organise en premier lieu un référendum, en exerçant des pressions car,

  5   Messieurs les Juges, les Croates en Bosnie-Herzégovine n'étaient pas si

  6   favorables que cela à l'organisation d'un référendum portant sur le

  7   maintien de la Bosnie-Herzégovine, sans que l'on sache avec précision et

  8   sans que cela soit décrit, la façon dans la Bosnie-Herzégovine allait être

  9   organisée, de quel -- l'ancien Herzégovine il s'agirait ? La question

 10   essentielle n'était pas la Bosnie-Herzégovine ou non, mais c'était quelle

 11   forme de Bosnie-Herzégovine. Qu'est-ce que, moi, en tant que Croate, au

 12   sein d'une telle Bosnie-Herzégovine, je suis censé avoir ? L'on s'attendait

 13   continuellement à ce que M. Izetbegovic présente, et j'ai eu une longue

 14   conversation au mois d'octobre à Mostar avec lui, et on s'attendait donc

 15   constamment à ce qui se présente avec une proposition claire. Voilà ce que

 16   je propose aux Musulmans, aux Croates, aux Serbes, en terme d'organisation

 17   interne de la Bosnie-Herzégovine. Maintenant battons-nous pour une telle

 18   structure. Je reviendrai sur cette conversation que j'ai eue et je vous

 19   donnerais plus de détails encore.

 20   Le président Tudjman a soutenu jusqu'à la limite soutenable cette question

 21   qui devait être partie du référendum, et au sujet de laquelle les Croates

 22   n'auraient certainement pas donné leur accord, c'était le problème de

 23   Livanjski Polje. C'était la véritable pierre d'achèvement, il était censé

 24   être l'organisation de la Bosnie-Herzégovine comme cela aurait été aussi

 25   pour l'organisation de l'Etat français ou de l'Etat de Suisse ? La Bosnie-

 26   Herzégovine en elle-même ne posait absolument aucun problème, c'était son

 27   organisation qui était en question, nous avons Franjo Tudjman qui envoie

 28   son ambassadeur et les autres Etats aussi comme la Turquie, les Pays


Page 8044

  1   musulmans, qui ont envoyé leur propre ambassadeur. Il s'agissait d'Etats,

  2   et d'hommes d'Etat, comme le président Demirel, qui comprenait beaucoup

  3   mieux tout ce que la Croatie avait fait pour la Bosnie-Herzégovine, le

  4   président Demirel avait même une fois organisé une délégation conjointe

  5   avec le président Tudjman pour se rendre à Mostar et essayer de trouver une

  6   solution pacifique.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- extrêmement longues. Essayez d'être

  8   plus concis.

  9   Mais vous venez de dire quelque chose qui n'oblige à vous oser une

 10   question, parce que je n'avais pas vu cet aspect et je le découvre à

 11   l'instant. Vous venez de dire que le président Tudjman avait fait le

 12   maximum en faveur du référendum, le référendum qui ne pouvait que déboucher

 13   sur l'existence de la République de Bosnie-Herzégovine. Mais sur un plan

 14   logique, si le président Tudjman avait dans l'esprit l'annexion de

 15   l'Herzégovine, est-ce qu'il n'aurait pas dû, à ce moment-là, agir auprès

 16   des Croates de l'Herzégovine particulièrement pour leur dire, Votez non au

 17   référendum, parce qu'il faut intégrer la Croatie ? Est-ce que ce n'est pas

 18   comme cela qu'il aurait dû agir ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Qu'est-ce qui aurait été plus logique que

 20   cela, Messieurs les Juges ? Il n'avait même pas besoin de leur dire, Ne

 21   votez pas. Car les Croates en Bosnie-Herzégovine, sans son intervention,

 22   n'auraient même pas voté. En d'autres termes, la Commission Badinter

 23   n'aurait même pu dire que la Bosnie-Herzégovine existait en tant qu'Etat,

 24   car deux peuples s'y seraient opposés; nous aurions pu très important

 25   procéder à la séparation de cette partie d'un point de vue militaire et

 26   comme à d'autres égards. Au début nous étions beaucoup plus puissants que

 27   la Bosnie-Herzégovine. Même en 1992 lorsqu'il y avait déjà la guerre là-

 28   bas, moi-même, avec le HVO et Petkovic, nous avions la possibilité, tout


Page 8045

  1   comme les Serbes, de procéder à la séparation d'une grande partie du

  2   territoire; aussi bien à Uskoplje que Rama, une bonne partie de la Bosnie

  3   centrale. Or pendant toute cette période, nous sommes venus en aide et nous

  4   avons armé l'ABiH; alors où se trouve la logique derrière tout cela ? Vous

  5   reconnaissez un Etat et vous poussez le peuple à l'accepter à la

  6   reconnaître tout cela avec l'arrière pensée de faire autre chose après,

  7   alors que dans le même temps, vous envoyez des ambassadeurs, et vous signez

  8   des traités et des accords de paix. C'est là la substance que je vous dis,

  9   Monsieur le Juge. C'est totalement aberrant et personne ne pourrait

 10   comprendre une chose pareille.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il nous reste cinq minutes avant la pause. 

 12   Maître Kovacic.

 13   M. KOVACIC : [interprétation]

 14   Q.  Peut-être avant de passer au document suivant, Général Praljak, puisque

 15   vous avez répondu à cette question du Président Antonetti, en faisait état

 16   de cette conversation que vous avez eue avec Alija Izetbegovic au mois

 17   d'octobre, c'est à la page 34, ligne 5 du compte rendu d'audience; est-ce

 18   que vous pouvez préciser de quelle année il s'agit?

 19   R.  1992.

 20   Q.  Merci. Alors nous sommes maintenant arrivés à ce document 3D 0221.

 21   R.  Non, c'est le 3D 02000 --

 22   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le numéro exact, j'ai un très

 23   court extrait ici, c'est le numéro 3D 02000. Il s'agit d'une interview

 24   accordée par Ivo Sanader, l'actuel premier ministre de la République de

 25   Croatie. A l'époque, il était l'adjoint du ministre des affaires

 26   étrangères.

 27   Q.  Un instant, s'il vous plaît. Alors en version croate, la page que le

 28   général Praljak examine --


Page 8046

  1   R.  Je vais vous le dire, Maître Kovacic, c'est la page 11 du : "Soldat

  2   croate." Je voudrais simplement dire -- citer la chose suivante : "Est-ce

  3   que, dans le contexte cité, pouvons-nous contrer la diplomatie serbe qui

  4   depuis des années déjà répande des mensonges au sujet de la politique

  5   croate."

  6   Q.  Cette partie n'est pas traduite.

  7   R.  Comment ça ?

  8   Q.  Dans la colonne du milieu, à partir de la question, je cite : "Vous

  9   avez dit quelque chose d'intéressant, Monsieur Sanader, récemment."

 10   R.  Je vais en donner lecture.

 11   Q.  Oui, allez-y.

 12   R.  Le Dr Sanader dit dans ce texte tout ce que l'on trouve en matière de

 13   propagande dans la guerre et tout un chacun s'étant intéressé à ces

 14   questions sait de quoi il s'agira, je cite :

 15   "Le lundi de Pâques, le 12 avril 1993, les agences de presse mondiale

 16   internationale ont fait état d'un mensonge serbe et l'on relayait selon

 17   lequel les affrontements entre les Croates et les Musulmans à Travnik ont

 18   commencé avec ces appels vigoureux au nationalisme et au génocide."

 19   Je cite ici, et je continue à citer :

 20   "…ces propos ont été tenus par personne d'autre que 'le nationaliste

 21   et l'extrémiste bien connu,' le ministre Gojko Susak. Bien entendu, ces

 22   informations ont été confirmées par deux hauts fonctionnaires de la

 23   FORPRONU. Le même jour, j'ai réagi à cette contrevérité car j'ai été

 24   présenté aux côtés d'autres responsables éminents du HDZ, à la grande foire

 25   où nous avons tenu la réunion du comité principal de notre parti.

 26   "Le ministre Susak" - et vous pouvez le voir dans la presse - "était

 27   assis au premier rang lors de cette assemblée. Par la suite, M. Susak a

 28   reconnu à mon intention que jamais de sa vie il n'avait été à Travnik."


Page 8047

  1   Alors Messieurs les Juges, c'est l'un des exemples et il y en a eu

  2   bon nombre, on en a longuement parlé, pour ce qui est de la propagande de

  3   guerre et des mensonges qu'on a disséminés dans ces territoires. Il y a eu

  4   des affirmations disant que Gojko Susak aurait fait ce discours à Travnik

  5   et il y a une photo du même jour, ailleurs.

  6   Donc la propagande et les mensonges se propageaient à l'échelle

  7   incompréhensible. Tout le monde le faisait, les Français avaient les leurs,

  8   les Anglais les leurs, les Serbes les leurs, les Musulmans les leurs,

  9   hélas, nous, non, parce que nos responsables n'avaient pas su faire leur

 10   propre chaîne de télévision pour essayer de contrecarrer tout cela. Il n'y

 11   avait pas de structure, des structures nécessaires pour résister à ces

 12   désinformations qui au quotidien ont tout perturbé au niveau des vérités

 13   qui devaient être dites sur ces territoires, voilà.

 14   Q.  Mon Général, la chose s'est perdue dans l'interprétation. Je vous

 15   prie de répéter ce que vous avez dit parce que en page 37, lignes 17 et 18,

 16   ce n'est pas clair. Vous avez dit que Gojko Susak prétendument aurait été à

 17   Travnik et que le même jour, il se serait trouvé où, et la photo a été

 18   publiée où ?

 19   R.  Il était à la grande foire.

 20   Q.  Où ?

 21   R.  A Zagreb, à l'occasion de cette assemblée du comité principal du HDZ.

 22   Ça a été publié le jour même par la presse et même la télévision a dû

 23   montrer où il se trouvait.

 24   Q.  Merci, je crois que c'est clair.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause, parce que c'est l'heure. On

 26   fait une pause de 20 minutes.

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 28   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.


Page 8048

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise, Maître Kovacic.

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

  3   remercie aussi les interprètes.

  4   Q.  Mon Général, le 3D 02-001 et suivant 2002 -- 2002 on va le sauter, on

  5   va gagner du temps. On en vient au 3D 02-003. Là, il y a un grand article

  6   relatif à la célébration de la lutte antifasciste et de l'anniversaire

  7   d'une bataille de Sisak, 400e anniversaire, et le président Tudjman a fait

  8   un long exposé. A cet effet, je voudrais que nous relevions certains

  9   passages, si vous n'y voyez pas d'inconvénients. Je vous suivrai. En croate

 10   ça commence au 3D 31-00776, en affichage électronique anglais, 3D 40-0229.

 11   A vous, mon Général.

 12   R.  Il y a eu une double assemblée à se tenir. Le 22 juillet 1942, il a été

 13   créé non loin de Sisak, un 1er Détachement antifasciste de Partisans, et on

 14   estime que c'est le premier à avoir été créé en Europe, et il en a de même

 15   été -- enfin, c'était le 400e anniversaire d'une grande bataille à Sisak

 16   entre les Croates et l'Empire ottoman. On estime dans l'histoire qu'après

 17   cette bataille qui a été remportée par les Croates, cela a mis un terme à

 18   l'avancée de l'Empire ottoman vers l'occident, et c'est là qu'a commencé la

 19   chute de l'Empire, longue certes, mes certaines. Alors, il semblerait qu'à

 20   Sisak, on ait pour l'occasion invité les membres du corps diplomatique, et

 21   il y a deux antifascistes, M. Franjo Tudjman et Janko Bobetko. Ils ont tenu

 22   des discours. Le texte est assez long, et d'après les instructions de M. le

 23   Juge Antonetti, je me proposerais de me référer à ce que dit Tudjman pour

 24   ce qui est de la façon dont a été créé le mouvement antifasciste en Croatie

 25   et dans quelle mesure, dans combien de partisans, il y a eu dans le peuple

 26   croate sans pour autant nier la participation des Serbes, bien entendu,

 27   Serbes de Croatie qui, proportionnellement parlant, s'agissant du nombre

 28   des habitants, ils ont été plus nombreux que les Croates. Il dira par la


Page 8049

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8050

  1   suite qu'il y a eu une Compagnie antifasciste allemande, puis un Bataillon

  2   italien antifasciste également, bien sûr, puis un Bataillon juif et une

  3   Brigade tchèque, une Brigade musulmane également. Puis il sera précisé que,

  4   partant de ce mouvement antifasciste en Croatie qui s'opposait au régime à

  5   Pavelic, c'est ce qui a fait de la Croatie, lors des sessions du ZAVNOH et

  6   AVNOJ, qui étaient des éléments constitutifs de la lutte antifasciste lui

  7   ont conféré -- constitutionnellement les droit à une république à soi et ce

  8   n'était en aucune façon une province comme l'a affirmé ces jours-là un

  9   homme d'Etat européen en application de la constitution le peuple croate

 10   donc avait un droit à l'autodétermination.

 11   Puis il se réfère à l'histoire et à l'évolution de l'hégémonie serbe à

 12   l'égard des Croates.

 13   Q.  Un instant, mon Général. Il s'agit du sous titre : "Prendre les

 14   enseignements de l'histoire," le 0930, version anglaise --

 15   R.  Non, non, on est loin des enseignements de l'histoire. On en est

 16   maintenant arrivé à : "Jamais plus d'hégémonie serbe en Croatie," puis

 17   ensuite on en vient à : "La lutte antifasciste dans la Deuxième Guerre

 18   mondiale."

 19   Q.  Alors on se réfère au 3D 410931 --

 20   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à ce que Me Kovacic ralentisse

 21   lorsqu'il lit tous ces chiffres en série et lorsqu'il est question. Les

 22   interprètes ne peuvent pas traduire s'ils parlent en même temps.

 23   M. KOVACIC : [interprétation] L'interprète n'a pas pu traduire une partie

 24   de l'exposé des intervenants.

 25   Q.  Veuillez continuer.

 26   [aucune interprétation]

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   Q.  [aucune interprétation]


Page 8051

  1   R.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que vous avez

  3   écouté les interprètes, Maître Kovacic et Monsieur Praljak ? Il est

  4   impossible de vous suivre, vous vous chevauchez. Alors ralentissez, s'il

  5   vous plaît.

  6   M. KOVACIC : [interprétation] Je m'excuse. Ça a été une erreur. Nous avons

  7   essayé justement d'aider les interprètes avec les numéros de pages.

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que les numéros à cette vitesse-là ne

  9   servent à rien.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Juge Prandler. Je

 11   m'excuse auprès des interprètes. Malheureusement, la pensée et le langage

 12   sont interconnectés et en dépit des efforts que je fais pour ralentir ma

 13   pensée, la pensée ne se laisse pas contrôler et échappe au contrôle de ma

 14   volonté, d'où les problèmes que nous rencontrons.

 15   Il rappelle ses amis en France ici, ainsi que ceux qui n'étaient pas enclin

 16   à l'égard de nous autres pour des raisons variées et il précise que le

 17   commandant du mouvement de résistance en France du sud c'était un Croate,

 18   Ilic, qui a obtenu un grade de général dans l'armée française et il a été

 19   décoré de la légion d'honneur et de la croix de guerre, s'il ne se trompe

 20   pas. Il précise que cet homme-là, par la suite, est devenu l'époux de Zinka

 21   Kunc, qui était elle l'une des grandes chanteuses d'opéra, de l'opéra

 22   métropolitain à New York.

 23   J'ai déjà évoqué le reste pour ce qui est des solutions constitutionnelles

 24   et du droit que la Croatie a obtenu en sa qualité de forces victorieuses

 25   dans la lutte antifasciste.

 26   Ensuite je passerai au passage qui dit : "Nous souhaitons une solution

 27   politique."

 28   Q.  En version anglaise, c'est le 3D 40-0932, la partie qui nous intéresse.


Page 8052

  1   R.  Il indique là ce qu'il souhaite et comment il compte en arriver à faire

  2   en sorte que les Serbes et il parle de Knin et du Corps de Knin. Donc il

  3   propose aux Serbes une autogestion locale qu'ils devaient avoir. Il dit que

  4   l'option militaire n'est pas ce qu'il souhaitait. Il précise aussi que la

  5   normalisation des relations croato-serbes, et on parle là de la Serbie, et

  6   il dit que c'est une chose indispensable tant pour la Croatie que pour la

  7   Serbie. Il indique qu'il y a plus de 20 ans déjà à l'occasion de réunions

  8   scientifiques. Il a pris la parole et déposé des écrits disant que le temps

  9   -- ou l'heure viendrait où dans ces Balkans malheureux la raison finirait

 10   par l'emporter et qu'il finirait par y avoir scandinavisation [phon] de ces

 11   Balkans. C'était un sujet sur lequel avait œuvré le Dr Franjo Tudjman

 12   pendant au moins 20 ans et il explique quelles sont les solutions

 13   qu'avaient trouvé les Finlandais, les Suédois, les Danois et les

 14   Norvégiens.

 15   Il parle du malheur apporté par la Deuxième Guerre mondiale où les

 16   partisans s'étaient battus contre les Oustachi et les Domobrani puis les

 17   catholiques avaient fait la guerre aux orthodoxes. Il dit qu'il faut tirer

 18   les enseignements de cette histoire afin que ça ne se répète pas et il

 19   propose des solutions politiques à cet effet. Par la suite, il parle en

 20   long et en large de l'intérêt européen que cela constituait, que de voir,

 21   par exemple, la séparation pacifique entre Tchèques et Slovaques, puis la

 22   séparation des ex-républiques de l'URSS.

 23   J'ai suivi ces activités scientifiques et politiques, ça a été

 24   constamment les mêmes thèses, donc là on nous parle de l'absence d'un

 25   accord entre Belgrade et Zagreb.

 26   Q.  0933.

 27   R.  Alors il dit une fois de plus qu'il faut mettre un terme à cette guerre

 28   en Bosnie-Herzégovine suivant des modalités qui feraient en sorte que la


Page 8053

  1   solution politique soit satisfaisante pour les trois peuples en présence

  2   parce que ce n'est qu'ainsi qu'il y aura des bases pour une paix durable et

  3   stable. En sa qualité d'homme politique, il sait que toutes les solutions

  4   en Bosnie-Herzégovine depuis le Congrès de Berlin, et même avant jusque-là,

  5   s'est traduit par des solutions imposées et cela a toujours -- ça s'est

  6   toujours soldé par des catastrophes.

  7   Puis il parle d'un plan, du point de vue historique, pour expliquer

  8   pourquoi les choses devaient être faites ainsi et il indique ce qui s'est

  9   passé dans l'histoire lorsque les solutions n'ont pas été les bonnes. Une

 10   fois de plus, il est question de ce qui s'est produit en Bosnie, à savoir

 11   un conflit, et il dit qu'il y avait parmi les Musulmans, on le sait fort

 12   bien, une thèse qui disait qu'il n'était pas disposé à se joindre aux

 13   Serbes, mais qu'il voulait se joindre aux Croates. Et il a dit que c'était

 14   fatal comme option, que c'était du suicide.

 15   Il précise, on a reconnu la Bosnie-Herzégovine.

 16   Il parle des réfugiés, il dit que la population croate en Bosnie

 17   centrale s'est vu attaquée, et il dit que les hommes politiques musulmans,

 18   les soldats musulmans, et on le sait, on verra les documents à cet effet,

 19   peuvent déambuler librement en Croatie comme s'ils étaient chez eux.

 20   D'ailleurs ils déambulent plus facilement en Croatie que, dans leur propre

 21   pays, et certains d'entre eux ont quand même fait des déclarations à la

 22   presse pour convier à faire péricliter ce pouvoir ou ces autorités

 23   démocratiquement élues en Croatie, et il se demande : mais quel est le Dieu

 24   ou Allah qui leur donne ce type d'idées, et ne voient-ils donc pas où cela

 25   les mène?

 26   Une fois de plus, toujours la même chose, dans l'intérêt des trois

 27   peuples, une paix stable, de bonnes solutions, et je ne dirai plus rien de

 28   votre sujet.


Page 8054

  1   Q.  Merci.

  2   Nous pouvons passer maintenant au 3D --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais rester -- juste un petit sujet, m'enfin

  4   qui est très important.

  5   La question du nombre de réfugiés. M. Tudjman dit qu'il y a eu un demi

  6   million de réfugiés qui sont passés en Croatie. Il dit qu'il y a 400 000 en

  7   provenance de Bosnie-Herzégovine, 400 000, le nombre est important, et

  8   apparemment dans ce nombre, il indique 272 000 Musulmans.

  9   Alors, moi j'essaie de chercher une logique dans toute chose, j'essaye de

 10   comprendre.

 11   Si la République de Croatie était dans l'état d'esprit en liaison avec les

 12   dirigeants d'Herceg-Bosna de mener une épuration ethnique, pourquoi aurait-

 13   elle reçu sur son territoire 272 000 Musulmans alors qu'il aurait pu être

 14   indiqué à ces Musulmans d'aller vers les zones contrôlées par l'ABiH ?

 15   Monsieur Praljak, est-ce que vous avez une explication à me donner sur le

 16   flux de 272 000 Musulmans, et pourquoi ces Musulmans n'auraient-ils pas été

 17   dirigés vers les zones contrôlées par l'ABiH plutôt que de passer en

 18   République de Croatie ? Est-ce qu'il y a une explication ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y en a une, bien sûr, Monsieur le

 20   Juge.

 21   Tout d'abord, le chiffre avancé par Franjo Tudjman c'était la situation du

 22   moment. Il y a eu bien plus de réfugiés venus de Bosnie-Herzégovine et de

 23   personnes expulsées à s'être retrouvées en Croatie. Ils y ont séjourné,

 24   puis ils sont partis vers d'autres pays occidentaux qui ont bien voulu

 25   d'eux.

 26   On a vu les chiffres chez M. Rebic, qui a tenu cela à jour, et ce

 27   chiffre était considérablement plus grand. Ça c'est d'un.

 28   De deux, 30 % des territoires de la Bosnie-Herzégovine ou un peu


Page 8055

  1   moins de 30 %, disons que 68 % des territoires de la Bosnie-Herzégovine

  2   avaient été occupés par les Serbes, toujours en Bosnie-Herzégovine. Le

  3   nombre des réfugiés en provenance de ces territoires probablement devait se

  4   chiffrer à un million et quelques. Une partie des réfugiés est restée, et

  5   c'est ce qui a perturbé l'équilibre ethnique. Une partie de ces gens, d'une

  6   certaine façon, s'était casée dans les régions sous contrôle de l'ABiH, et

  7   dans les régions sous contrôle du HVO. Mostar s'était vu submergée, la

  8   Bosnie centrale submergée, Uskoplje, submergée aussi. Alors, Messieurs les

  9   Juges, vous ne pouvez pas, les premières pelleteuses pour essayer de frayer

 10   des passages dans les forêts, des routes de forêts pour créer la route du

 11   salut vers Rama. En 1992, on l'a fait, M. Stojic et moi, parce qu'on avait

 12   réussi à convaincre des personnes, des privés qui avaient des pelleteuses

 13   et dénivreuses [phon] pour essayer de déblayer le passage parce que les

 14   voitures se renversaient, s'embourbaient, enfin, vous ne pouviez pas

 15   laisser tomber la population. Comment voulez-vous les laisser tomber ces

 16   gens alors qu'ils n'arrêtent pas d'affluer. Vous ne pouvez pas les renvoyer

 17   chez eux. Personne n'a eu l'idée d'essayer de le faire. Des centaines de

 18   milliers de gens sont passés par cette route, et le premier arrêt c'était à

 19   Posusje, c'est là qu'ils recevaient à manger, qu'ils pouvaient passer la

 20   nuit, et puis il fallait ensuite organiser le déplacement au delà, le

 21   transport. C'était des quantités immenses de gens qui ont nécessité des

 22   efforts énormes et des ressources dont nous ne disposions pas.

 23   Donc on avait convaincu trois conducteurs d'engins pour qu'ils

 24   acceptent de déblayer, et puis il y a eu un Bataillon anglais qui, pour des

 25   raisons qui étaient les siennes a réparé la route pour la suite, mais on ne

 26   pouvait pas renvoyer les gens chez eux. Peut-être auriez-vous pu avoir un

 27   droit et de dire : non, vous ne pouvez pas passer, mais vous ne pouvez pas

 28   le laisser dans la forêt. Quand vous avez 15 000 personnes arrivant à Rama,


Page 8056

  1   on n'a pas pensé à cela.

  2   Ils allaient vers la Croatie, et la Croatie, au delà de toutes les

  3   ressources qui étaient les siennes, a rempli tous les hôtels le long du

  4   littoral, toutes les maisons et, bien sûr, il fallait faire attention à ce

  5   qu'il n'arrive pas trop prêt des endroits ciblés.

  6   Sisak, Varazdin, Demistura, c'était plein à craquer. Il y avait aussi

  7   des croates de Croatie, des Musulmans. Personne n'a été rejeté, personne

  8   n'a été repoussé ou recalé. Ni les blessés, ni les réfugiés, ni les

  9   expulsés, on n'a pas songé un instant à remettre la chose en question pour

 10   savoir où les mettre, il n'y a pas eu de nettoyage ethnique, et aucune

 11   pensée, pas la moindre pensée à cet effet. C'était des gens qui étaient en

 12   fuite, qui sauvaient leur peau. Ils ont donc été accueilli et on a fait --

 13   on a travaillé jour et nuit dans les conditions qui étaient les nôtres, et

 14   je pense que tout un chacun sait parfaitement quelles étaient les

 15   conditions financières et autres qui étaient les nôtres.

 16   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Vous êtes au courant de la partie

 18   où je me suis chargé d'une action pour ce qui est de la traversée de la

 19   Neretva lorsqu'ils étaient venus de Stolac. Il y avait 15 000 personnes

 20   arrivant dans une seule vague, avec 3 000 voitures, j'y reviendrai. Mais on

 21   a pris des radeaux, des radeaux pour transporter les gens, les voitures, et

 22   qui plus des camions lourds qu'on a réussi à charger, et tous ont été

 23   accueillis à Medjugorje, Citluk, une partie a été transférée vers la

 24   Croatie dans des maisons, et cetera. Alors tout ce qui était offensant à

 25   l'époque l'est de nos jours encore. Une partie d'entre eux, la première

 26   nuit, lorsqu'ils n'ont pas pu être accueillis sont restés dehors, ils ont

 27   reçu des couvertures et il y a eu des observateurs européens qui venaient

 28   dire : mais voyez donc ce que vous faites. On a trouvé la chose offensante


Page 8057

  1   et on la trouve de nos jours encore. Parce que quand les conditions

  2   n'étaient pas celles que les gens s'imaginaient devoir avoir en arrivant de

  3   Munic ou de Paris, ou de je ne sais où, c'était du dénigrement de la non

  4   compréhension de l'effort que nous avons investi.

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Bien.

  6   Q.  Mon Général, je voudrais que vous vous référiez maintenant au 3D 02004.

  7   Il s'agit d'un article intitulé : "Où il n'y a pas de police, il ne serait

  8   y avoir de vie." Il s'agit d'une interview avec le ministre de l'Intérieur

  9   de la République de Croatie à l'époque. Je crois que vous avez voulu

 10   prélever une partie pour en parler.

 11   R.  Oui : "La frontière sans fil barbelé."

 12   Q.  Alors 3D 31-0091, en anglais, et 004 en croate, et ça passe au 005.

 13   R.  Première phrase. On pose la question de savoir, Quelles sont les

 14   frontières de l'Etat qu'il maîtrisait ? Il indique que ce sont les

 15   frontières qui sont contrôlées à part entière comme suit : la frontière

 16   hongroise, la frontière avec la Slovénie, avec le Monténégro, et avec

 17   l'Italie au niveau maritime, et une partie de la frontière avec la Bosnie-

 18   Herzégovine.

 19   Donc le ministre de l'Intérieur contrôle les frontières de l'Etat, et avec

 20   la Bosnie-Herzégovine, c'est la partie -- et il ne peut pas contrôler ici

 21   parce qu'elle est Serbe, et il ne peut pas contrôler l'autre, parce que

 22   notamment la partie à l'ouest, c'est la partie libérée de la Bosnie-

 23   Herzégovine. Cette partie-ci il ne peut pas la contrôler nous nous plus

 24   parce que de l'autre côté les forces serbes. Voilà, c'est ce qu'il y a à

 25   dire à ce sujet.

 26   Q.  Merci.

 27   R.  On voit qu'il parle des autres Etats : l'Italie, la Hongrie, la

 28   Slovénie, et la Bosnie-Herzégovine. Ce sont d'autres Etats.


Page 8058

  1   Q.  3D 02005, on va le sauter, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  3D 02006, on va le sauter ?

  4   R.  Non, non, on ne va pas le sauter.

  5   Q.  Oui, il y a un article. 3206 : "Le soldat croate," du 10 septembre

  6   1993, et ici en page 4, et en affiche électronique c'est le 3D 31-0110. Un

  7   article portant sur une session du Conseil chargé de la Défense et de la

  8   Sécurité nationale. On parle de : "L'Herceg-Bosna dans une Bosnie-

  9   Herzégovine intégrale." Je précise que c'est le 0007, et ça passe à la page

 10   0008 pour ce qui est de la suite.

 11   Alors, Général, que vouliez-vous dire ?

 12   R.  Pas grand-chose. C'est une confirmation de plus de la vérité claire

 13   dans tout ceci, à savoir qu'à la date en question, le Conseil chargé de la

 14   Défense et de la Sécurité nationale en Croatie redit que, pour ce qui est

 15   de la Croatie, la Bosnie-Herzégovine est un membre internationalement

 16   reconnue des Nations Unies et que l'on acceptait les propositions avancées

 17   par la communauté internationale relatives à l'aménagement interne de la

 18   Bosnie-Herzégovine en tant qu'union de trois républiques, on dit que la

 19   Bosnie-Herzégovine -- qu'en Bosnie-Herzégovine, il fallait faire cesser

 20   cette guerre. On dit que tous les facteurs internationaux ont fait

 21   qu'Izetbegovic avait d'abord accepté tout ceci puis ensuite rejeté tout ce

 22   qui était convenu; la Bosnie était donc favorable à l'intégrité de la

 23   Bosnie-Herzégovine en tant que membre des Nations Unies. La Croatie

 24   acceptait en outre les plans proposés. Elle voulait que soient

 25   conséquemment respectées toutes les dispositions du droit humanitaire

 26   international, et cetera. Donc ce serait tout.

 27   Q.  Pour qu'il reste une trace au compte rendu, je précise qu'on sautera le

 28   3D 0328.


Page 8059

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17   

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8060

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document.

  2   Regardez la photo, s'il vous plaît. Est-ce que c'est dans cette salle

  3   où se réunissaient les personnes qui étaient reçues au palais présidentiel

  4   ? Car on y reviendra plus tard, il y a des transcripts, où vous-même vous

  5   étiez présent. Est-ce que c'est la salle où tout le monde se réunissait,

  6   était-ce la salle habituelle des réunions ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'était la pièce où les

  8   réunions se tenaient d'habitude.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- question. Nous savons que tout

 10   ce qui se disait était enregistré. Les micros ils étaient placés où ? Ou

 11   vous ne le savez pas.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur la table normalement, c'est là qu'il

 13   y avait des micros. Je n'en vois pas ici, mais je vois des présentations

 14   devant toutes les personnes présentes, et quand il était question de la

 15   conférence de Genève, Mate Boban était présent, et il a été invité à

 16   assister à la réunion, vous voyez il le troisième sur la droite. Vous avez

 17   le général Bobetko, Gojko Susak, puis Mate Boban, le Dr Franjo Tudjman

 18   préside la tête, sur sa gauche Stipe Mesic qui est aujourd'hui le

 19   président. Sur sa droite, mais à l'image c'est à la gauche, c'est à gauche.

 20   Sur la droite de l'image Seks, Mate Granic. Après je ne sais pas c'est un

 21   petit peu flou dans la suite.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Question de nature technique. Le Conseil de

 23   Défense et de la Sécurité nationale, au niveau des réunions, était-ce une

 24   des réunions les plus secrètes ? Réunions où il y avait le premier cercle

 25   du président de la République ? Est-ce que ce type de réunions rassemble

 26   des acteurs principaux, et proches du président en exercice ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Une décision a été prise, une décision portant

 28   sur la composition du conseil de Défense et de la Sécurité nationale, et on


Page 8061

  1   peut lire dans cette décision qui fait partie du conseil. Mais on pourrait

  2   dire que c'était des représentants de l'armée, de la police, du parlement,

  3   le président du parlement, le vice-président du parlement. Donc les numéros

  4   un de toutes les institutions de l'Etat; de l'armée, du parlement, du

  5   gouvernement, et de la police, et des affaires étrangères.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans ce type de réunions, est-ce que tout le

  7   monde était en accord, ou y avait-il des divergences qui auraient pu

  8   entraîner un contrôle des propos ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président Antonetti. Les

 10   réunions étaient menées de manière tout à fait ouverte. Il y avait un sujet

 11   à débattre, on ne débattait tout à fait ouvertement, tout un chacun pouvait

 12   s'exprimer, faire part de son opinion. Bien entendu, on se posait un

 13   certain nombre de questions, si ceci alors croit cela, c'était un débat au

 14   sens classique du terme. Il y a un sujet et puis on s'exprime. On ne venait

 15   pas simplement se contenter de dire ce qu'on en pensait, et on n'allait pas

 16   contrer à tout prix, on allait contrer pour voir si votre thèse était

 17   solide.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Le 10 septembre 1993, on voit dans ce document

 19   qu'une position est prise par les participants à cette réunion. C'est celle

 20   qui indique la République de Croatie continue à soutenir l'Unité de la

 21   Bosnie-Herzégovine.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Justement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand ceci est dit, est-ce qu'il peut y avoir un

 24   double langage ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président Antonetti, mais

 26   face à qui tiendrait-on un double langage ? Les Nations Unies avaient

 27   reconnu la Bosnie-Herzégovine. Il y a des ambassadeurs qui sont en poste.

 28   Très franchement, très sincèrement au prix de grands efforts, je n'arrive


Page 8062

  1   pas à comprendre cette thèse. Qu'est-ce que cela veut dire ? On vient de

  2   dire quelque chose, on va faire le contraire. Mais face à qui, des Nations

  3   Unies. Mais la Croatie a reconnu la Bosnie-Herzégovine, a envoyé son

  4   ambassadeur, a aidé les réfugiés, a armé. J'ai répété déjà plusieurs fois.

  5   Donc je n'arrive pas à concevoir face à qui, sous la table on aurait pu

  6   prendre cela. Supposons qu'on mente, mais qu'on me dise alors qu'est-ce

  7   qu'on était censé de faire, comment on aurait dû agir secrètement. Là, ma

  8   réflexion s'arrête. Je ne suis pas -- je n'ai pas l'intelligence qui me

  9   permettrait de comprendre la thèse exposée par l'Accusation. Je suis trop

 10   stupide pour comprendre cela. Je connais la vérité parce que j'y ai pris

 11   part d'emblée, et tout simplement là je n'y comprends rien, et je vous le

 12   dis très franchement. Jamais une telle chose n'a existé que ce soit au

 13   niveau de la pensée ou au niveau des actes parce que nous allons vous

 14   montrer les actes, les gestes croates face à la Bosnie-Herzégovine au

 15   profit de la Bosnie-Herzégovine et des Musulmans. Donc je n'arrive pas à

 16   comprendre, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Voilà, c'est tout

 17   ce que je peux en dire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question.

 19   Dans ce document, il réaffirme également le fait que la République de

 20   Croatie soutient également la République de l'Herceg-Bosna dans le cadre de

 21   l'union des trois républiques, bien. Donc c'est écrit noir sur blanc.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais c'est une proposition formulée par

 23   la communauté internationale. C'est la communauté internationale qui a

 24   avancé cette proposition. Vous verrez plus tard, cela ressortira des

 25   documents que je vous soumettrai. Documents du conseiller d'Alija

 26   Izetbegovic, l'Herceg-Bosna était une solution temporaire qui était

 27   envisagée par un groupe de municipalités pour pouvoir se défendre. Dès

 28   qu'une première proposition a été formulée par la communauté


Page 8063

  1   internationale, à ce moment-là, et je pense que Me Karnavas en a parlé, et

  2   cetera, donc dès que cette solution aurait été acceptée, nous, nous aurions

  3   renoncé à l'Herceg-Bosna.

  4   Donc cette appellation, je pense que sur le plan Vance-Stoltenberg --

  5   ou Owen-Stoltenberg, plutôt. Donc ils ont présenté ce plan et Franjo

  6   Tudjman, pour ce qui est de la Croatie, a co-signé, et Boban a signé tout

  7   de suite au nom de cette Herceg-Bosna.

  8   J'ai une anecdote à ce sujet; il y avait un slogan qui accompagnait

  9   le Dr Franjo Tudjman : "Privez-le du crayon parce qu'il signe tout ce que

 10   la communauté internationale lui soumet. Il y avait des graffitis, des

 11   inscriptions en gros, prenez-lui son crayon."

 12   Mais vous avez lu tout ce qu'il a dit; 103 pays ont reconnu la

 13   Croatie, elle est devenue membre des Nations Unies. Comment voulez-vous que

 14   maintenant, sans l'appui des Etats-Unis et la France, comment est-ce qu'il

 15   aurait pu procéder sans leur aval ? Je n'arrive pas à comprendre, je suis

 16   trop bête pour ça.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.

 18   M. KOVACIC : [interprétation]

 19   Q.  Je reformule la question, 3D 02134, 3D 03228, ce sont les deux derniers

 20   numéros du : "Soldat croate."

 21   R.  Mais il ne s'agit pas de la même publication, ce n'est pas  "Le soldat

 22   croate." C'est une publication musulmane.

 23   Q.  Mais nous ne verrons pas, nous ne passerons pas en revue ces deux

 24   numéros.

 25   R.  Non.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, ou plutôt un détail.

 27   Il y a deux jours, Monsieur le Président, il y a eu un échange sur la carte

 28   de membre du HVO; le général Praljak a dit qu'il avait cela sur lui, il l'a


Page 8064

  1   apportée. Je propose qu'il la place sur le rétroprojecteur. Nous avons fait

  2   des photocopies à l'attention de toutes les parties présentes, mais je

  3   pense qu'il serait important de le diffuser à l'aide du rétroprojecteur.

  4   Monsieur l'Huissier, pouvez-vous nous aider ?

  5   Q.  Général, je vous invite à décrire --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a encore un problème. C'est vraiment la

  7   malchance.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Montrez cela, s'il vous plaît, aux Juges.

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Oui, je propose que vous voyiez l'original.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pouvez le remontrer un autre moment, le temps

 11   que ça soit réparé.

 12   M. KOVACIC : [interprétation] Oui, très bien. Nous voulions simplement vous

 13   montrer que nous n'avons pas perdu de vue ce sujet.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 15   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous auriez dû offrir

 16   l'alternative -- plutôt, faire -- ce sera mieux à fonctionner.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà. C'est ce que nous avions encore que

 18   même ça nous l'avons eu tardivement. C'est ma carte du HVO -- du membre du

 19   HVO, et puis les deux autres, une carte de la HV, de l'armée croate. Puis

 20   je montrerais; là, vous voyez au moment où j'étais colonel, et là, où

 21   j'étais général. Vous voyez que je signe moi-même, en tant que personne

 22   habilité à signer parce qu'il n'y avait personne d'autre à Sunja au moment

 23   où il a fallu délivrer cela.

 24   Puis, là, celle-là je l'ai eue le 1er mai 1992, cette carte du HVO.

 25   Là, j'ai aussi une carte de l'ABiH. Voilà, j'ai eu cela et ça a été signé

 26   par M. Arif Pasalic. Je pense que je l'ai eu quand nous sommes allés en

 27   1992, fin octobre, calmer la situation à Rama. Sa signature s'est effacée

 28   mais on voit la trace, l'empreinte, donc vous verrez qu'il était commandant


Page 8065

  1   du 4e Corps d'armée de l'ABiH à Mostar, M. Arif Pasalic, je peux présenter.

  2   Si on regarde de biais, ils verront la signature de M. Arif Pasalic.

  3   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette carte militaire

  4   de l'ABiH, nous l'avons dans le document. Nous en demanderons le versement.

  5   Nous avons déposé une requête récemment demandant quelle soit ajoutée sous

  6   la liste 65 ter. Puis ces trois cartes de membres de l'armée croate, nous

  7   n'avions pas l'intention de verser cela au dossier puisque c'est un fait

  8   notoire que M. Praljak était membre de la HV. Mais c'est une question qui

  9   avait à voir avec la mort d'un soldat mentionné dans le jugement

 10   Kordic/Cerkez, oui. Il aurait pu avoir sur lui uniquement ce type de carte

 11   de membre qui ne comporte pas de détails supplémentaires ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement pas. On avait que ce type de

 13   cartes de membres, et comme vous pouvez le voir, j'ai fait la guerre tout

 14   seul contre moi-même. Je me suis fait la guerre à moi-même. Il y a eu des

 15   conflits intenses entre le HVO et l'ABiH mais c'était un conflit qui se

 16   déroulait sur un territoire limité pendant une période limitée et qui a pu

 17   être calmé.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Je pense que nous avons ainsi mené à son

 19   terme.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation]

 21   Monsieur Kovacic, si je me souviens bien et si j'ai bien compris les

 22   choses, nous n'avons pas uniquement parlé de cartes d'identité, mais aussi

 23   d'un livret militaire, donc je vous le rappelle. On disait que ce livret

 24   militaire n'est pas disponible. Je ne suis pas en train de dire que c'est

 25   une pièce absolument indispensable mais peut-être que si on avait eu le

 26   livret militaire avec les cartes d'identité, on aurait ainsi un ensemble

 27   complet, résumant la carrière de M. Praljak en tant que militaire.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, le livret militaire


Page 8066

  1   n'arrive que beaucoup plus tard, lorsqu'il y a eu la fin du service

  2   régulier du premier groupe des conscrits, et jamais ce livret n'est remis

  3   aux militaires lui-même. Il est archivé et il est conservé au secrétariat

  4   de la Défense, comme le livret de travail en Croatie. On ne les a pas en

  5   notre possession pour la population qui travaille. Donc un militaire, il a

  6   son livret, conservé et archivé dans le secrétariat, dans les différents

  7   tiroirs en fonction des localités, et cetera, qui a besoin d'être mobilisé.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais --

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Peut-être

 10   pourrais-je vous expliquer les choses parce que, moi, j'ai mon livret

 11   militaire chez moi et on y retrouve tous mes états de service, les

 12   promotions éventuelles, et cetera ? Donc je pensais que peut-être ce serait

 13   la même chose pour vous mais on en apprend tous les jours.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, est-ce que vous, vous aviez eu un

 15   livret militaire ? Est-ce qu'il en a été confectionné un qui était gardé au

 16   secrétariat de la Défense ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, le livret

 18   militaire je l'ai reçu deux jours avant de quitter les rangs de l'armée

 19   croate en 1995 et c'était au moment où j'allais me présenter au secrétariat

 20   de la municipalité du quartier de Tresnjevka à Zagreb où j'étais. Là, ils

 21   m'ont confectionné ce livret militaire et ils ont mis que j'étais inapte au

 22   service parce que, dans le dossier qu'ils avaient, dossier hérité de la

 23   JNA, ils ont recopié la décision de la commission que j'étais inapte au

 24   service dans la JNA. Bien entendu, ça m'a fait sourire, peu m'importait ce

 25   qui était rédigé dedans et il s'y trouve toujours ce livret là-bas.

 26   Jusqu'à ce que j'ai 65 ans, je suis censé être appelé sous les drapeaux et

 27   je peux encore l'être à l'avenir; deux jours avant que je quitte l'armée

 28   croate ce livret a été confectionné là-bas et je me suis présenté au


Page 8067

  1   bureau, je suis me présenter et c'est là que je l'ai trouvé.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais où est-il ce livret ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Au secrétariat chargé de la Défense populaire

  4   du quartier de Tresnjevka à Zagreb. Tresnjevka c'est une partie de Zagreb,

  5   une municipalité de Tresnjevka dans la ville de Zagreb.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je pose cette question, c'est parce que je

  7   voudrais être sûr que, dans ce livret militaire, il n'y a que la mention

  8   inapte au service, tout en me posant la question de savoir s'il n'y a pas

  9   des mentions de vos différentes affectations.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Les affectations n'y figurent certainement pas

 11   dans ce livret militaire, Monsieur le Juge. Une fois depuis le début

 12   jusqu'à la fin, je pense que j'ai occupé 15 ou 17 postes différents, non

 13   seulement au sein de l'armée. Je suis rentré, je suis ressorti, mais jamais

 14   -- mais personne ne l'a vraiment su, ça n'a jamais été mis au propre. Je

 15   pense que personne ne s'en soucie.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Je ne souhaite pas témoigner mais une

 18   municipalité faisant partie de la ville de Zagreb a été mentionnée par le

 19   général. Moi, je viens d'une contrée tout à fait différente, mon livret

 20   n'existe tout simplement pas. A au moment, j'ai voulu le trouver en

 21   souvenir et tout simplement il n'existe pas parce que l'ancien secrétariat

 22   n'a pas bien géré ses affaires administratives, tout simplement ça s'est

 23   perdu apparemment, mais bon.

 24   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'est ma consoeur, Me Pinter,

 25   qui souhaite continuer. Juste deux minutes, s'il vous plaît, juste pour

 26   déplacer ce classeur.

 27   Nous n'avons pas besoin de suspendre.

 28   Merci.


Page 8068

  1   Mme PINTER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

  2   Juges.

  3   Interrogatoire principal par Mme Pinter :

  4   Q.  [interprétation] Général, bonjour encore une fois.

  5   R.  Bonjour.

  6   Q.  Je propose de parler encore de la présence de l'armée croate en Bosnie-

  7   Herzégovine. Nous allons essayer de terminer avec ce sujet. P 00153. C'est

  8   le document que je vous invite à prendre. Ce document a déjà été versé au

  9   dossier, et j'ai une question pour commencer au sujet de ce document.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Pinter, vous voyez que nous

 11   avons toute une montagne de classeurs derrière nous. Pourriez-vous nous

 12   aider à trouver le bon classeur ? Bon. Je vois que notre classeur ressemble

 13   au vôtre.

 14   Mme PINTER : [interprétation] Oui, il est pareil.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ça doit ressembler au vôtre.

 16   Mme PINTER : [interprétation] A l'avenir, je vous en préviendrai, excusez-

 17   moi.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 19   Mme PINTER : [interprétation]

 20   Q.  Général, j'allais vous demander la chose suivante : ce document a été

 21   délivré par Petar Stipetic. Il est question de Porobic, Mustafa et d'autres

 22   soldats P 0015 [comme interprété] --

 23   R.  Oui, oui, je vois, je vous en prie.

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25   R.  Donc l'adjoint du chef du Grand état-major de l'armée croate, le

 26   général de division Petar Stipetic, dit que sur demande de l'inspecteur

 27   principal de la Défense, du général de corps d'armée, il convient de

 28   prendre une décision sur le redéploiement d'une partie des combattants des


Page 8069

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16   

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8070

  1   soldats et des officiers de la région militaire de Rijeka, surtout des

  2   Croates et des Musulmans qui sont prêts à s'engager en tant que volontaires

  3   en Bosnie-Herzégovine pour qu'ils aident au combat du peuple en Bosnie-

  4   Herzégovine, et que cette décision a été accepté par les instances

  5   militaires les plus hauts placés, et il s'agit de 300 à 400 soldats et

  6   officiers. Je sais qu'il y a plus de 300 musulmans là et qu'ils sont placés

  7   sous le commandement de Mustafa Porobic, et qu'ils ont un équipement des

  8   munitions, du matériel militaire. Et ils conservent tous leurs droits, les

  9   droits qui leur incombent en tant qu'enrôlés au sein de la HVO, y compris

 10   leur solde. Ce qui est particulièrement important, c'est qu'ils ne peuvent

 11   pas arborer les insignes de la HVO sur leur uniforme, et ils ne peuvent pas

 12   non plus se servir d'autres documents utilisés par les membres de la HV.

 13   Donc c'était interdit, mais entre l'interdiction et l'exécution d'un

 14   ordre, vous avez l'homme, et l'homme il peut conserver son insigne, ne pas

 15   enlever les insignes de la HV, et puis les remarquer, vu par quelqu'un qui

 16   dira par la suite, l'armée croate combat en Bosnie-Herzégovine; ce qui

 17   n'est pas exact.

 18   C'était exactement comme on le lit dans ce document.

 19   Q.  Donc ils ont conservé tous les droits qui leur revenaient en tant que

 20   membres de l'armée croate ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Document 3D 004 --

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, vous avez fait une

 24   affirmation normative puisque vous avez dit qu'arborer un insigne du HV

 25   aurait été illégal. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez affirmé cela

 26   ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une mauvaise interprétation. Je n'ai pas

 28   dit illégal, mais le non-respect de l'ordre. J'ai dit que l'ordre est


Page 8071

  1   clair. Quant au respect, exécution de l'ordre, bien entendu, dans des

  2   armées bien constituées, mais là, vous avez plutôt une espèce de

  3   soulèvement populaire. Donc vous avez des gens qui n'obéissent pas.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  5   Mais on n'écrit pas dans tous les ordres, on n'écrit pas cela dans tous les

  6   ordres donnés. Mais ici, il est écrit que c'est interdit. Alors, pourquoi

  7   est-ce que c'était interdit ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'à partir du moment où ils se rendent

  9   là-bas, ils ne sont plus l'armée croate, ce sont des volontaires qui vont

 10   défendre leurs foyers. Nous ne souhaitons pas que l'armée croate s'y rende,

 11   mais nous ne pouvons pas empêcher des hommes d'y aller tuer leurs parents,

 12   nous ne pouvons pas les empêcher d'y partir. Mais qui va obéir à un tel

 13   ordre ? Moi, je n'y ai pas obéi non plus.

 14   Monsieur le Juge Trechsel, vous ne pouvez pas dire qu'ils vous tuent là-

 15   bas, mais notre règle est la suivante : mais, vous savez, une telle règle

 16   on la viole. La Croatie dit : cela étant, si vous vous y rendez pour

 17   défendre vos foyers, pour résister à l'ennemi, faites-le, mais pas en tant

 18   que l'armée croate. Vous avez toujours votre solde parce qu'il vous faut

 19   toujours une rémunération, c'est limpide.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous nous l'avez déjà répété. Je

 21   n'affirme rien; sachez que je pose des questions, il y a quand même une

 22   différence. Je vous pose la question parce qu'on pourrait très bien avoir

 23   une autre interprétation des faits, on pourrait se dire que la Croatie ne

 24   voulait pas que les gens de l'autre côté sachent qu'ils envoyaient leur

 25   propre troupe. Vous dites, j'imagine. Donc c'est peut-être un point de vue

 26   juridique ici, mais je pense -- vous dites donc que la Croatie n'avait

 27   nullement l'intention de cacher le fait que des soldats, sous le nom du --

 28   sous le commandement de personne dont on a le nom dans ce document, étaient


Page 8072

  1   envoyés en Bosnie-Herzégovine ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge Trechsel.

  3   Prenons une hypothèse; vous vous êtes rendu en Croatie pour la défendre, et

  4   vous êtes venu de Suisse. Imaginons quelqu'un attaque la Suisse, et

  5   quelqu'un vous dit : non, vous ne pouvez pas partir pour la Suisse, c'est

  6   une attaque lancée par les Serbes contre les non-Serbes. J'affirme, jamais

  7   nous n'avons proclamé publiquement que la Croatie souhaite aider à la

  8   Défense de la Bosnie-Herzégovine, aider à la Défense des Croates et des

  9   Musulmans. C'est ainsi que nous nous sommes conduits, mais nous n'allions

 10   pas envoyer une armée. Nous avons laissé partir des volontaires pour qu'ils

 11   défendent leurs foyers. Ça toujours --

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je l'ai remarqué.

 13   Mais je pense que la comparaison avec la Suisse n'est pas très juste,

 14   enfin, pour de nombreuses raisons.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais vous auriez eu la possibilité de venir

 16   malgré tout.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, dans ce document, il y a le mot

 18   "volontaires." Bien.

 19   A votre connaissance, y a-t-il eu des Croates et des Musulmans qui étaient

 20   dans l'armée croate, qui ont dit : non, moi, je n'ai pas envie d'aller en

 21   Bosnie-Herzégovine ? Parce que prenons les choses de manière militaire, et

 22   c'est à un spécialiste que je m'adresse. Est-ce que ça s'est passé de la

 23   manière suivante : dans une unité quelconque, le matin, au moment où on

 24   rassemble tout le monde, le colonel qui commande l'unité dit : voilà, nous

 25   avons besoin de 300 volontaires, faites tous un pas en avant ? Puis, le

 26   groupe fait un pas en avant, et le colonel dit : bien, voilà, j'ai 300

 27   volontaires; ou bien, le colonel dit à la troupe : voilà, vous savez ce qui

 28   se passe en Bosnie-Herzégovine, nous avons besoin des volontaires; ceux qui


Page 8073

  1   sont volontaires, levez la main.

  2   Alors, comment ça se passait ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] D'aucune des deux façons que vous avez

  4   décrites, Monsieur le Président. C'était d'une troisième façon que l'on

  5   procédait, à savoir qu'à la télévision, à la radio, les gens voyaient ce

  6   qui était en train de se passer. Ensuite, entre eux, ils s'en parlaient :

  7   moi, je suis de Doboj, moi, je suis de Tuzla, je suis de telle ou telle

  8   localité. Bien entendu, ils avaient là-bas leurs frères, leurs sœurs, leurs

  9   familles, leurs maisons, et lorsqu'ils se seraient rassemblés autour, dans

 10   cette situation-là, ils allaient voir un commandant et puis ils lui

 11   disaient : moi, je voudrais aller me battre là-bas, c'est moi-même qui suis

 12   visé, et lui leur donnait l'approbation. Nous prenons acte de la demande :

 13   "Voilà on te signe une décharge, tu gardes ta solde, et tu peux aller te

 14   battre là-bas, mais il ne faut pas porter d'insigne de l'armée croate ni

 15   utiliser ta carte d'identité de l'armée croate dans un autre Etat." C'est

 16   ainsi que j'ai procédé aussi, moi-même.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Toujours ce même sujet, ces

 18   personnes ont été placées sous un commandement, ça paraît évident. Alors,

 19   comment se sont-ils rendus en Bosnie-Herzégovine; ensemble, sous le

 20   commandement ou alors un par un ? S'ils y sont allés un par un, comment

 21   savaient-ils où se rendre ? 

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait toute sorte de possibilités

 23   différentes, Messieurs les Juges; il y a aussi des cas individuels. Alors,

 24   je n'ai pas tout à fait répondu à M. le Juge, il y avait beaucoup plus de

 25   cas, de personnes, qui étaient originaires de Bosnie-Herzégovine et qui ne

 26   souhaitaient pas aller se battre là-bas. Cela m'attristait mais c'était ces

 27   personnes qui n'avaient pas voulu de -- ce qui pouvaient continuer à se

 28   passer en Bosnie-Herzégovine. Parmi les 13 000 qui étaient originaires de


Page 8074

  1   Bosnie-Herzégovine au sein de l'armée croate, moi, au sein du HVO, je les

  2   connaissais tous. Il y en avait peut-être 600 qui venaient à titre

  3   individuel ou en groupes, et parfois arrivait un groupe qui n'était pas

  4   bien formé. Vous verrez, par exemple, qu'à un moment donné, est arrivé un

  5   groupe qui s'appelait le groupe Jelen, et lorsque j'ai vérifié un certain

  6   nombre d'informations les concernant, je les ai chassés. Je les ai

  7   congédiés. J'ai dit à la police militaire de s'en occuper. Je leur ai dit :

  8   "Ecoute, si tu ne disparais pas de ce territoire sous 24 heures, tu vas

  9   finir en prison," et je donnais mes instructions évidemment à la police

 10   militaire également.

 11   Il y avait également des personnes qui sont venus, en tant que volontaires,

 12   mais qui n'étaient pas des soldats croates. Le chaos qui prévalait, c'est

 13   une chose, mais quant aux instructions au principe que nous suivions pour

 14   que cela soit organisé comme nous le voulions, c'en est une autre.

 15   Evidemment, la nature humaine est ce qu'elle est, et il y a eu aussi des

 16   manquements. Il y a eu de mauvaises interprétations de la part des

 17   observateurs qui les ont vus.

 18   C'est une unité, par exemple, telle unité est allée sur place à bord de

 19   camions avec un laissez-passer, et ils sont allés en tant que volontaires.

 20   C'est le cas de l'équipe Porobic et nous y reviendrons.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais, Monsieur Praljak, ceux que

 22   vous avez menacé d'arrêter, s'ils ne partaient pas, vous les considériez

 23   aussi comme des volontaires ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était des volontaires. Evidemment, nos

 25   services n'étaient pas ainsi faits ou organisés que je sois en mesure d'en

 26   apprendre tant que cela sur eux; cependant, mes soupçons étaient fondés.

 27   Leur comportement à divers égards était inacceptable pour moi. L'importance

 28   qu'ils se donnaient, c'était ma décision, et ma propre évaluation, qu'une


Page 8075

  1   équipe ainsi constituée ne pouvait pas être sur place.

  2   Dans de telles conditions où vous disposez d'un certain volume

  3   d'information qui sont les informations disponibles et rien de plus, et

  4   vous disposez d'une demi-minute ou d'une minute pour prendre une décision,

  5   et c'est ce que j'ai fait; aujourd'hui encore, j'estime cette décision.

  6   J'ai chassé ce groupe car j'ai estimé qu'ils n'étaient pas venus avec des

  7   intentions honnêtes et honorables. C'était mon évaluation d'alors, et c'est

  8   mon évaluation d'aujourd'hui encore.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez dit 13 000 volontaires. Là, on a un

 10   document qui établit qu'il y avait parmi ces volontaires des Musulmans.

 11   Alors sur le chiffre de 13 000, de manière approximative, combien de

 12   pourcentage de Musulmans, combien de pourcentage de Croates, voire, le cas

 13   échéant, de Serbes ? Je ne sais pas.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ignore s'il y avait des Serbes originaires

 15   de Bosnie-Herzégovine. En tout cas, dans l'armée croate, il y avait

 16   beaucoup de Serbes, chez moi à Sunja. Il y avait une vingtaine de Serbes

 17   sur ce petit champ de bataille. J'ignore l'importance respective numérique

 18   des Musulmans par rapport aux Croates et vice versa, mais je sais que

 19   récemment on a dressé cette liste au sein de la communauté musulmane en

 20   Croatie. On a inauguré un mémorial près de la mosquée de Zagreb, je suis

 21   sûr qu'il serait possible d'apprendre avec plus de précisions combien il y

 22   avait de Musulmans là-bas. Je suis, cependant, sûr qu'il y avait plus de

 23   Croates que de Musulmans. J'en suis absolument certain.

 24   Excusez-moi, il y avait aussi beaucoup de Musulmans dans l'armée croate.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- oui.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] -- excusez-moi, avec votre permission,

 27   Monsieur le Président, c'est une chose. Les Musulmans originaires de

 28   Bosnie-Herzégovine, qui étaient dans l'armée croate, ça en est une autre


Page 8076

  1   que de considérer les Musulmans qui habitaient en Croatie et qui étaient

  2   citoyens de la Bosnie-Herzégovine, deux groupes distincts.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Les Musulmans du groupe de Mustafa --

  4   Oui.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi

  6   d'interrompre, mais il me semble que nous devrions corriger une erreur dans

  7   le compte rendu d'audience. En page 66, ligne 2, ce deuxième groupe de

  8   Musulmans concerne les Musulmans qui vivent en Croatie et qui sont des

  9   citoyens de la République de Croatie, et non de Bosnie-Herzégovine. Le

 10   premier groupe ce sont les Musulmans originaires de Bosnie-Herzégovine, et

 11   le second ce sont les Musulmans citoyens de la République de Croatie. Il me

 12   semble que c'est ce qu'a dit le général Praljak, et que c'est important.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- effectivement, c'est important, et

 14   j'ai compris cela.

 15   Général Praljak, prenons des Musulmans du groupe de Mustafa Porobic, qui

 16   partent en avril 1992, mai 1992, qui partent en Bosnie-Herzégovine. A votre

 17   connaissance, est-ce que, parmi ces volontaires de la HV, qui sont

 18   Musulmans ? Est-ce que, parmi eux, il y en a qui ont rejoint l'ABiH, après

 19   ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement, c'est même juste après être

 21   arrivé sur place, qu'ils ont rejoint l'ABiH. Ils étaient bien obligés

 22   d'entrer dans le cadre de l'armée. Ceux qui arrivaient pour une part,

 23   certains d'entre eux rejoignaient le HVO, et les autres rejoignaient

 24   l'ABiH.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors faites des courtes réponses, parce que ça me

 26   permet d'enchaîner sur des sujets extrêmement importants, parce que là,

 27   vous venez de dire quelque chose qui a une importance.Quand ces volontaires

 28   partaient en Bosnie-Herzégovine, est-ce qu'obligatoirement, ils devaient


Page 8077

  1   rejoindre les Unités du HVO, ou bien ils étaient libres de rejoindre une

  2   Unité du HVO ou une Unité de l'ABiH ? Est-ce qu'il faisait ce qu'ils

  3   voulaient, ou bien on leur disait : "Vous enlevez l'insigne HV, mais vous

  4   allez aller obligatoirement dans une Unité du HVO" ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. De par leur

  6   arrivée en Bosnie-Herzégovine, ils avaient la possibilité de choisir s'ils

  7   allaient rejoindre l'ABiH ou le HVO. Ce groupe - pour autant que je le

  8   sache, et je suis bien informé - est allé rejoindre l'ABiH.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc ce groupe-là que nous avons sous les yeux, lui,

 10   il est allé à l'ABiH, et les Croates, qui étaient avec eux, ils ont été à

 11   l'ABiH aussi ? Vous ne savez pas ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ignore, Monsieur le Président. Je sais

 13   que, dans ce groupe, il y avait sûrement plus de 300 Musulmans et qui se

 14   sont rendus quelque part en Bosnie centrale où ils ont rejoint l'ABiH.

 15   Quant à la question de savoir si tous les Croates y sont allés aussi ou

 16   s'ils se sont dispersés, ce n'est probablement pas la totalité du groupe de

 17   Musulmans qui s'est rendu en tant que groupe unique pour aller rejoindre

 18   l'ABiH. Ils allaient en fait se rendre chacun dans leurs villages. L'un

 19   était originaire d'un village et l'autre d'une autre localité. Ils

 20   n'arrivaient pas en tant qu'unité ou qui se présentaient en se disant :

 21   nous sommes arrivés, nous nous mettons à votre disposition. Ils se sont

 22   dispersés entre le HVO et l'ABiH, et selon la localité où ils étaient nés,

 23   et selon la localité dont ils estimaient qu'il fallait la défendre.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Au niveau du commandement, des autorités militaires

 25   de haut rang, comme l'indique d'ailleurs le document, puisqu'ils disent que

 26   ces départs ont été acceptés par les autorités militaires de haut rang,

 27   est-ce qu'il avait été envisagé que ces soldats musulmans allaient partir à

 28   l'ABiH, et puis peut-être aller retourner leurs armes contre les Croates du


Page 8078

  1   HVO ? Est-ce que ça a été envisagé, ou bien tout le monde était innocent,

  2   ou n'avait pas du tout évalué les conséquences qui pouvaient en résulter à

  3   la date que nous voyons là ?

  4   Stipetic et Spegelj ne disposaient d'aucun moyen -- ou plutôt, ils ne

  5   pouvaient absolument pas imaginer que des affrontements se produiraient en

  6   Bosnie-Herzégovine entre l'ABiH et le HVO. J'étais l'une des rares

  7   personnes à interpréter, à savoir qu'il y avait une interprétation

  8   complètement différente de l'organisation antérieure de la Bosnie-

  9   Herzégovine entre d'une part, disons Alija Izetbegovic, et d'autre part,

 10   les Croates. Plutôt je savais qu'une interprétation complètement différente

 11   de part et d'autre pouvait tôt ou tard amener à des conflits. Je savais

 12   tant qu'il y aurait des attaques des Serbes, notre unité serait bonne, et

 13   qu'ensuite, à cause d'option politique différente quant à l'organisation

 14   antérieure de la Bosnie-Herzégovine, il y aurait probablement des conflits.

 15   Je le savais mais ces personnes-ci, à ce moment-là, ne le savaient, n'y

 16   pensaient certainement pas, car les choses semblaient claires; les Serbes

 17   sont les ennemis, deux autres peuples se défendent et il n'y aura pas de

 18   problème.

 19   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges.

 20   Je voudrais juste signaler qu'en page 64 - peut-être que ma consoeur, Me

 21   Pinter, peut faire revenir le général à cette partie - en lignes 6 à 9,

 22   nous avons au compte rendu d'audience quelque chose qui est très peu clair

 23   alors que ce que disait le général Praljak était très clair, lorsqu'il a

 24   parlé de ce groupe nommé Jeleni. Mais j'ai compris qu'il avait convoqué le

 25   commandant de ce Groupe Jeleni, et qu'il lui a fait savoir qu'ils avaient

 26   12 heures pour quitter ce territoire. Or, au compte rendu d'audience, il

 27   n'est pas -- la chose est assez floue. On ne sait pas si c'est le

 28   commandant du Groupe Jeleni qui est convoqué ou si c'est le commandant de


Page 8079

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8080

  1   la police militaire.

  2   Ensuite le général Praljak a dit avoir donné des instructions à la police

  3   militaire pour qu'elle s'occupe du cas Jeleni. Or, au compte rendu

  4   d'audience, il est consigné que c'est la police militaire qui aurait donné

  5   des instructions pour que quelqu'un s'occupe du cas du Groupe Jeleni. Donc

  6   ce sont deux choses assez différentes.

  7   Mme PINTER : [interprétation]

  8   Q.  Vous avez entendu de quoi il s'agit, Général Praljak ?

  9   R.  Oui, j'ai parlé avec le commandant du Groupe Jeleni et je lui ai dit

 10   qu'il devait partir. J'ai demandé -- j'ai exigé même de Valentin Coric, qui

 11   était à la tête de la police militaire, qu'il écarte l'Unité Jeleni du

 12   territoire de la Bosnie-Herzégovine, et cela a été fait.

 13   Q.  Alors question de suivi par rapport à celle posée par M. le Président.

 14   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre.

 15   Ce que vient de déclarer le général à propos des communications qu'il y

 16   avait avec M. Coric, on pourrait avoir une date ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1993, en août ou en septembre environ. Il y

 18   a des documents qui montrent.

 19   Mme PINTER : [interprétation]

 20   Q.  Donc nous sommes toujours sur ce même document, P00153. Dans le premier

 21   passage de ce document, daté du 9 avril 1992, nous avons également la

 22   raison pour laquelle les volontaires peuvent partir en BiH. Cette raison

 23   est invoquée, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est pour venir en aide, pour aider au combat qui est celui du

 25   peuple de Bosnie-Herzégovine.

 26   Q.  Merci. Passons maintenant au document 3D 00443. Il s'agit d'un document

 27   daté du 8 avril, donc un jour plus tôt que celui que nous venons de voir.

 28   Il est émis par le général Petar Stipetic, et il est adressé à la région


Page 8081

  1   militaire de Split -- à la zone opérationnelle de Split. Il fait état de la

  2   position qui est celle de l'armée croate en ce qui concerne l'envoi ou le

  3   départ de l'armée croate en dehors du territoire de la République de

  4   Croatie.

  5   R.  Tout se répète de la même façon dans ce document. Donc ils ne sont pas

  6   autorisés à porter les insignes. A ce moment-là, des attaques terribles ont

  7   déjà commencé à être lancées en Bosnie-Herzégovine. Pourquoi on parle

  8   toujours de Rijeka et de Split ? Parce qu'il y avait là-bas beaucoup de

  9   personnes qui y travaillaient qui étaient originaires de Bosnie-

 10   Herzégovine, dans les chantiers navals et ailleurs. Lorsque la guerre a

 11   commencé, ils ont rejoint l'armée croate. Maintenant, ce qui se passe c'est

 12   que leurs maisons sont détruites et ils veulent aller se battre; si bien

 13   que les autorités politiques et ensuite les autorités militaires de la

 14   Croatie, car cela part tout d'abord d'une décision politique. Evidemment

 15   Stipetic ou moi-même, nous n'avons pas la possibilité de faire cela, de

 16   prendre ce genre de décision s'il n'y a pas eu un accord préalable avec le

 17   ministre Susak ou le président Tudjman.

 18   Q.  Alors ici il y a approbation et on apporte toute l'aide possible,

 19   l'aide technique et matérielle disponible.

 20   R.  En effet.

 21   Mme PINTER : [interprétation] Alors je dois juste attirer l'attention de

 22   MM. les Juges, vous rappellerez ce document qui est la pièce 3D 00299. Nous

 23   y voyons le bureau de la Bosnie-Herzégovine en Croatie, qui s'adresse au

 24   ministère de la Défense de la République de Croatie. Le numéro est le 3D --

 25   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Maître - j'allais dire

 26   Novica - Maître Pinter, désolé de vous interrompre, mais j'aurais voulu

 27   poser une question à propos du document précédent, le document 3D 00443.

 28   Vous l'avez présenté auparavant. Voici ma question, et je la pose à M.


Page 8082

  1   Praljak. La toute première phrase du document de ce message -- ou plutôt,

  2   de ce genre de commandement, enfin à mes yeux, dit ceci :

  3   "Les systèmes de formation de l'armée croate ne sont pas valables ou

  4   d'application en dehors du territoire la République de Croatie."

  5   Je pense que c'est une phrase importante dans le système de formation de

  6   l'armée. On parle là des unités, de la façon dont elles sont organisées. Il

  7   est dit que ce système ne vaut pas en dehors de la Croatie. Mais pourquoi

  8   est-ce que ceci doit être intégré dans ce message, dans ce commandement qui

  9   vient de Petar Stipetic qui est l'officier commandant si c'était de toute

 10   façon des unités de volontaires qui allaient en Bosnie-Herzégovine, qui

 11   allaient aider ? Mais quand on le met dans cette phrase, c'est un

 12   commandement très strict. On dit qu'il ne faut pas que les soldats ou les

 13   hommes aient l'apparence d'unité régulière de l'armée croate.

 14   Cette phrase-ci en particulier mais tout le texte d'ailleurs en effet,

 15   regardez la troisième phrase, elle dit que les hommes n'ont pas le droit

 16   d'arborer les insignes de la HV ou d'autres documents. Ce dont nous avons

 17   déjà parlé. J'aurais voulu davantage d'éclaircissement sur la question.

 18   Merci.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Prandler. C'est très

 20   important. En effet, l'organisation fondamentale c'est celle de l'unité

 21   militaire, donc les pelotons, les bataillons, les compagnies. Ici, le

 22   général major Stipetic dit que l'on ne peut pas envoyer une unité

 23   organisée, vous pouvez envoyer des volontaires et là-bas, sur place, ils

 24   s'organiseront de la façon appropriée au sein du HVO ou de l'ABiH. Mais

 25   permettez-moi d'expliquer de quoi il s'agit. Il y a eu un certain nombre de

 26   cas - notamment en Posavina - où il y avait de nombreuses personnes

 27   originaires de l'armée croate parce qu'ils étaient originaires de certains

 28   villages qui -- leurs soldes. Il s'était notamment occupé de cas autour de


Page 8083

  1   Slavonski Brod, peut-être même leur commandant était originaire de Bosnie-

  2   Herzégovine et ce qui se passait, par exemple, c'était que leur commandant

  3   leur disait : voilà, je donne l'ordre que nous allions en Bosnie-

  4   Herzégovine. Peut-être que 70 ou 80 % de l'unité s'y rendait, mais nous

  5   verrons plus tard que c'est là un problème qui s'est présenté, à savoir que

  6   vous ne pouvez pas envoyer toute une unité. Vous pouvez envoyer des

  7   volontaires mais il n'est pas possible d'envoyer une unité entière d'armée

  8   croate en Bosnie-Herzégovine.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : La question de mon collègue est importante, et vous

 10   avez reconnu que cette phrase était importante et ce qui m'amène à revenir

 11   là-dessus.

 12   Il est indiqué que les systèmes de formation de l'armée croate ne sont pas

 13   valables à l'extérieur de la République de Croatie. C'est la phrase du

 14   début du texte. Bien. Pour comprendre ma question, prenons le cas des

 15   forces de l'OTAN actuellement en Afghanistan. Quand il y a des Unités

 16   britanniques, qui sont intégrées dans la force de commandement de l'OTAN,

 17   c'est la règle de l'OTAN qui s'applique. Quand il y a des forces françaises

 18   qui sont à l'OTAN, c'est les règles de l'OTAN qui s'appliquent a priori.

 19   Ici même, est-ce que ce n'est pas le même principe ? Est-ce qu'il n'est pas

 20   rappelé, à ce moment-là, aux militaires qui étaient dans l'armée croate que

 21   dorénavant du fait qu'ils sont volontaires et qu'ils vont basculer

 22   ailleurs, ce n'est plus le fonctionnement de l'armée croate mais c'est

 23   certainement un autre fonctionnement auquel ils devront répondre. Est-ce

 24   que ce n'est pas un principe qui est affirmé mais qui a une conséquence ?

 25   C'est que la conséquence, il y a plus de contrôle. Alors qu'est-ce que vous

 26   en pensez ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois, Monsieur le Président. Il y a

 28   une disposition constitutionnelle qui a été adoptée dans un esprit qui


Page 8084

  1   était tout sauf relevant du militarisme, à savoir que le soldat croate, en

  2   tant que tel, en tant qu'élément de l'armée croate, n'a pas le droit de

  3   participer à des activités de guerre en dehors du territoire de la

  4   République de Croatie. C'est la constitution même de la République de

  5   Croatie qui en disposait ainsi, et le ministre Susak, dans cette émission

  6   de télévision que nous allons montrer, l'a dit publiquement à la

  7   télévision.

  8   Cependant, il y a aussi un deuxième élément. Ni à l'époque, ni

  9   ultérieurement, on a vu Izetbegovic, et ce, jusqu'en 1995, accepter de

 10   signer un accord militaire, autrement dit, l'OTAN va là-bas où il y a eu un

 11   accord, une approbation qui ont été signés avec l'Etat ou le gouvernement

 12   concerné. Ensuite on a, en Afghanistan, par exemple, des Unités de l'armée

 13   croate et de l'armée allemande, de l'armée française; non, il n'y a pas de

 14   Français, je ne sais plus -- enfin, des Unités de l'armée britannique et

 15   d'ici c'était interdit. On n'avait pas le droit de le faire.

 16   Certains commandants pour les raisons que j'ai expliquées, à savoir que

 17   leurs maisons avaient été incendiées à telle ou telle localité, ils avaient

 18   essayé de transférer l'ensemble de leur unité. Certains avaient rédigé des

 19   ordres allant dans ce sens. Un major qui a fait l'objet d'une demande

 20   d'enquête de la part du président Tudjman a fait l'objet de poursuite,

 21   d'une procédure d'enquête, et vous verrez toutes les données allant dans ce

 22   sens. M. Buzo Butmir, qui était major général, avait émis un ordre pour

 23   envoyer toute une unité sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Il a

 24   été poursuivi pour cela. Il pouvait faire ce qu'il pouvait faire, c'était

 25   rejoindre le HVO ou l'ABiH, et cela, sur deux fondements comme nous l'avons

 26   dit. Tout d'abord, c'était alors c'était impossible parce que c'était

 27   anticonstitutionnel et ensuite il n'y avait pas d'accord militaire. Il y a

 28   eu ensuite un accord militaire qui permettait à l'armée croate d'opérer


Page 8085

  1   dans les zones frontalières mais j'ai trouvé étranger que les Américains se

  2   plaignent de ce que le HVO se rende dans ces zones-là; cependant, si

  3   l'ordre était arrivé nous enjoignant de nous retirer, nous nous retirions.

  4   Mme PINTER : [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, mais, moi aussi, je

  6   considère que c'est une question au centre même des débats. Deux questions

  7   à propos de ce document.

  8   Voici la première : je relève la deuxième phrase, qui dit ceci :

  9   "Le départ des volontaires," et j'insiste sur la chose suivante : "Organisé

 10   en unités adéquates, ce départ est autorisé."

 11   Tout du moins ici, nous n'avons pas une source permettant à des individus

 12   de faire ce qu'ils veulent et d'aller en Bosnie-Herzégovine de regarder aux

 13   alentours et de voir avec qui ils veulent combattre. Est-ce qu'il y a

 14   quelque chose d'autre, un ordre, une autre acte législatif qui permet cela

 15   ? Puis je poserai mon autre question.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, chez nous il faut

 17   toujours faire la distinction entre position de principe et ce que l'on

 18   pouvait mettre en œuvre et les violations variées des réglementations.

 19   Alors on dit général Stipetic devrait rassembler dans le secteur d'Imotski

 20   et organiser un groupe de travail. Imotski ça se trouve - je vois, je ne

 21   vois pas bien ici mais on le trouvera - là, Imotski c'est ici à la

 22   frontière même de la République de Bosnie-Herzégovine.

 23   A l'époque, sur cette partie-ci et en partie dans la Posavina, et l'un

 24   n'excluant pas l'autre, il dit : si vous créez des groupes, il s'agit de

 25   les envoyer en application du plan opérationnel depuis Imotski. Avec la

 26   participation d'autres forces, on a essayé de stopper la percée venant le

 27   Livno et de Glamoc en passant par Kupres en direction de Split. C'était les

 28   plannings que vous avez vus chez le général Tokic.


Page 8086

  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On ne vous entend pas non plus.

  2   M. STRINGER : [interprétation] Les interprètes disent qu'ils ne sont pas en

  3   mesure d'entendre le général s'il ne parle pas dans le micro parce que tout

  4   ce qu'il a dit à propos de la carte n'a pas été saisi au compte rendu parce

  5   que les interprètes n'ont tout simplement pas entendu.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous devrez sans doute répéter votre

  7   réponse.

  8   Mme PINTER : [interprétation] Mon Général, excusez-moi. Peut-être serait-il

  9   plus intelligent de mettre la carte sur l'affichage électronique, il n'aura

 10   pas à se retourner vers la carte. Il sera toujours devant ses microphones.

 11   J'aimerais qu'on nous montre le 3D 3545.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] En attendant, Monsieur le Juge Trechsel, je

 13   vais vous répondre. Ce n'est pas ou unités, ou individus, c'est l'un et

 14   l'autre. Il y a beaucoup plus de cas de départs individuels, ce genre de

 15   chose, mais au début --

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé. Je le sais. Vous l'avez déjà

 17   dit. Mais ici nous avons un document et ce document n'était qu'une partie

 18   seulement. Je vous demandais s'il y avait un autre document, ou si on n'a

 19   pas pris vraiment l'ordre ou la loi au pied de la lettre. Je ne pense pas

 20   qu'il faille une carte ici.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, la loi a été

 22   respectée au sens strict du terme. Ici on a montré des documents de Split,

 23   l'organisation musulmane qui a envoyé les centaines de gens vers la Croatie

 24   suivant le même principe, et ça a été expliqué de façon précise. Le

 25   document parle de la chose dans un segment. S'il y a des volontaires, ces

 26   volontaires seront utilisés à partir d'Imotski pour défendre Livno et

 27   résister aux percées de la JNA et de la VRS au début de la guerre, d'après

 28   la carte et les intentions telles qu'illustrées par le général Cokic.


Page 8087

  1   Mme PINTER : [interprétation]

  2   Q.  Vous avez la carte devant.

  3   R.  Oui, c'est les axes prévues pour l'attaque où la Croatie n'était pas

  4   censée envoyer son armée afin qu'elle se défende. Alors, voilà Mostar ici

  5   et Imotski là. Alors, si vous avez une unité à côté d'Imotski, d'après les

  6   plannings --

  7   Q.  On ne voit rien sur l'écran.

  8   R.  Bon, si on ne voit pas, on ne voit pas. Mais on n'a pas besoin de la

  9   carte, ce n'est pas indispensable, on ne fait que compliquer les choses.

 10   En ce moment-ci, Stipetic est en train de nous dire que les

 11   volontaires de Croatie -- il avait probablement quelqu'un à l'esprit. Il

 12   s'attend à l'arrivée d'effectifs d'autres unités du HVO. Il arrive des

 13   effectifs, il n'arrive pas des unités, dit-il. Il s'agit de les organiser.

 14   Dans la première partie où il s'agissait de résister à la première frappe

 15   depuis Livno et Mostar, il fallait les envoyer sur ce secteur-là. Les

 16   choses sont tout à fait claires, l'armée croate n'a pas le droit d'y aller

 17   --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, merci. Voici ma

 19   deuxième question, elle se rapporte aux derniers mots : "Ils sont censés

 20   être engagés en application du plan du Groupe opérationnel." Pourriez-vous

 21   dire aux Juges de la Chambre ce qu'ils doivent comprendre sous ces

 22   vocables, "Groupe opérationnel" ? Est-ce que c'est ce groupe qui décide du

 23   lieu d'engagement des volontaires ? Parce que, manifestement, ça montre que

 24   ces hommes ne vont pas où ils veulent, où ça leur convient, où habite leurs

 25   mères, mais qu'ils sont dans les mains -- entre les mains d'un Groupe

 26   opérationnel qui leur dit où aller, c'est comme ça que je lis le texte.

 27   Peut-être en fais-je une interprétation erronée.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, Monsieur le Juge Trechsel, le


Page 8088

  1   général Stipetic ne sait pas à ce moment-là ce qui se passe là-bas, il

  2   n'est pas au courant, il n'a pas été là-bas. C'est une expression typique

  3   d'un officier formé à l'ancienne. Il a dit qu'il y a un Groupe

  4   opérationnel, or il n'y a pas eu de Groupe opérationnel, le 8 avril; moi,

  5   je suis arrivé là-bas le 10 avril. Le général Petkovic est arrivé le 14, et

  6   ce n'est qu'ultérieurement qu'il est devenu chef de l'état-major. Quel

  7   Groupe opérationnel pouvez-vous avoir, il n'y en a pas. Je n'en ai aucune

  8   idée. Il y avait une zone opérationnel de Split, mais l'existence d'un

  9   Groupe opérationnel, ultérieurement quand je suis arrivé, moi, entre

 10   autres, d'après les demandes que j'ai formulées pour ce qui est de l'envoi

 11   de gens là-bas pour empêcher les attaques, et puis il y a eu l'arrivée de

 12   Roso à Livno, et puis le général Gotovina. Moi, j'ai été remplacé par

 13   quelqu'un d'autre, et le général Petkovic, lui, restait constamment là-bas.

 14   Par conséquent, donc c'est une expression militaire qui a voulu

 15   probablement dire qu'il existe probablement un Groupe opérationnel. C'est

 16   un officier formé à l'ancienne école, mais là-bas il n'y avait aucun Groupe

 17   opérationnel. Il y avait des zones opérationnelles --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] -- témoignage, je vais vous montrer de quoi ça

 20   l'aire cette zone opérationnelle, ce que sont les Groupes opérationnels.

 21   C'est une insurrection pure et simple de la part de gens qui l'a nécessité

 22   --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est midi 30, il faut qu'on fasse la deuxième et

 24   dernière pause. On fait une pause de 20 minutes.

 25   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 26   --- L'audience est reprise à 12 heures 53.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 28   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


Page 8089

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8090

  1   Q.  Général, veuillez ouvrir le 3D 00453, s'il vous plaît. Il s'agit d'un

  2   document qui est déjà une pièce à conviction et c'est une pièce que vous

  3   avez signée vous-même.

  4   Alors pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre de quoi il s'agit ici ?

  5   Comment ce document a-t-il été généré ?

  6   R.  Oui, je peux le faire, bien sûr. Le document était généré suite aux

  7   problèmes qui se sont manifestés. La Croatie, à ce moment-là, à partir du 3

  8   janvier -- à partir du 3 juillet, disais-je, la Croatie a signé un cessez-

  9   le-feu.

 10   Q.  Quelle année ?

 11   R.  En 1992. Mais la guerre en Bosnie-Herzégovine a quand même éclaté et il

 12   y a eu un grand problème notamment comme suit : il y a des positions de

 13   principe adoptées au niveau politique et au niveau du commandement de

 14   l'armée croate pour s'y dire comment, qui et de quelle façon pouvait partir

 15   en Bosnie-Herzégovine. Mais les soldats ce sont des êtres humains, et

 16   notamment dans l'armée qui était la nôtre à l'époque, et donc ces gens se

 17   sont comportés de façon qui est généré par le problème qu'ils ressentent en

 18   eux-mêmes, les Serbes ont frappé violemment ici. Notamment avant la chute

 19   de la Posavina en Bosnie, il y a eu de grandes batailles avec énormément de

 20   morts. Il y a eu des combats conduits par le HVO et il y avait beaucoup de

 21   Musulmans à l'époque dans les rangs. C'était complètement mixte.

 22   Q.  Tournez-vous donc vers les micros.

 23   R.  Il s'agissait de gens qui faisaient partie de la zone opérationnelle de

 24   l'armée croate. Parmi ces soldats de l'armée croate, il y avait énormément

 25   de gens qui avaient rejoint les rangs de l'armée croate en venant de la

 26   Posavina de Bosnie. J'étais là-bas en début juillet 1992, et je sais

 27   exactement de quoi cela avait l'air. Il y avait, par exemple, la 139e et la

 28   157e -- non, la 137e et la 159e Brigades de l'armée croate où 70 % des gens


Page 8091

  1   étaient originaires de la Bosnie-Herzégovine. Ces unités ne voulaient pas

  2   traverser la rivière Save. Je me suis entretenu la demie -- la moitié

  3   voulait traverser et l'autre, non. Les commandants demandaient à ce qu'on

  4   les passe de l'autre côté parce que la partie doive être défendue et que la

  5   Croatie risque d'être en position aggravée, mais c'était non-conforme aux

  6   instructions. Alors dans ce document, je dis exactement que certains

  7   membres ont donné des ordres pour passer de l'autre côté contrairement à

  8   toutes les règles mises en place. Je dis que de ce point de vue-là il y

  9   aurait du travail pour les instances de la justice militaire. Je suis

 10   d'accord, bien sûr, ces gens-là c'est de l'ébullition en eux, comment

 11   voulez-vous que j'explique ? Ce n'est pas simple. Je suis d'accord avec

 12   l'estimation qui dit que la République de Croatie porte de l'intérêt à la

 13   Posavina de Bosnie, comme à l'époque tout comme maintenant, il y a beaucoup

 14   de Croates. C'est une zone frontalière, nous sommes conscients du fait que

 15   ce sont des problèmes que rencontrent d'autres zones opérationnelles. Mais

 16   la République de Bosnie-Herzégovine c'est un Etat étranger; nous avons des

 17   intérêts, certes, mais c'est un Etat étranger. Publiquement, le ministre de

 18   la Défense de la HV a confirmé, donc il ne faut pas qu'il y ait des mesures

 19   de répression. Ils sont donc en colère de ne pas être obéi parce que les

 20   gens s'étaient référés à la constitution, à la déclaration du ministre et à

 21   d'autres documents. Ils ne voulaient pas traverser la rivière, et moi, que

 22   voulez-vous que je propose ? J'ai proposé qu'il y ait des entretiens qu'on

 23   dise que les Chetniks allaient détruire tout comme on a vu, comme on a vu

 24   que ça s'est produit à Vukovar et ailleurs, et qu'il faut résoudre la

 25   question d'une certaine façon par des entretiens et des explications parce

 26   qu'on ne pouvait pas trancher tout simplement.

 27   Je demanderais aux Juges de comprendre la chose. Dans une armée française,

 28   ce serait -- ça serait tranché par des ordres parce que là-bas l'armée


Page 8092

  1   obéit, mais là, ce n'était pas si simple que cela parce que ce n'était pas

  2   une armée telle que l'armée française ou anglaise, c'est des soldats d'un

  3   autre type. Enfin je ne sais pas vous expliquer autrement, c'est une guerre

  4   d'une autre nature. Il y a un mélange, un brassage de gens de toutes sortes

  5   de régions et il se passe -- ce qui se passe, donc, moi, je propose

  6   d'envoyer rien que des volontaires. C'était la chose -- seule chose à faire

  7   et il s'agissait de diligenter des enquêtes ou plutôt de procéder à des

  8   interviews avec les gens pour leur proposer des contrats de trois ou de six

  9   mois, et en application de ces contrats, ils pourraient bénéficier d'un

 10   statut de soldats professionnels mais c'était une question à trancher par

 11   l'administration du personnel.

 12   La guerre était terrifiante. On tirait sur tout le territoire de la

 13   Croatie et il y avait énormément de victimes à Slavonski Brod, plus de 500.

 14   Il y a eu des enfants de tuer, et toute une série d'intérêts humains se

 15   reflètent dans la réalité. Ça se reflète dans l'armée tout aussi bien. Bien

 16   entendu, la chose n'est pas facile à résoudre comme dans l'armée américaine

 17   ou française, ou les choses sont comme ça et il n'y a pas à discuter.

 18   Q.  Mon Général, je vous propose de vous pencher sur le 3D 017 --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : La mention du contrat qui est au dernier paragraphe,

 20   est-ce que c'est un contrat de trois à six mois avec la République de

 21   Croatie ou avec la République de Bosnie-Herzégovine, HVO ou AbiH ? Qui, qui

 22   va, quelle est l'autre partie qui signe le contrat ? Bon, il y a le soldat

 23   volontaire, très bien.

 24   Mais de l'autre côté, c'est qui ? Qui l'a signé le contrat ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] La Croatie, la Bosnie-Herzégovine ni le HVO,

 26   ni l'ABiH n'avait aucun type de contrat avec quelque soldat que ce soit,

 27   rien.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Avec la Croatie. Alors c'est là où il y a quelque


Page 8093

  1   chose que je ne comprends pas. Prenons un soldat du HVO, de l'armée croate

  2   qui est à Zagreb dans une unité à Zagreb. Il est volontaire. Donc il touche

  3   son traitement et puis il dit : je suis volontaire. Est-ce, à ce moment-là,

  4   qu'il va signer un nouveau contrat avec la République de Croatie alors même

  5   qu'il a déjà un salaire ? Comment ça se passe ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait eu des contrats entre les soldats

  7   et l'armée croate concernant leur statut professionnel notamment et

  8   seulement pour les Brigades de la Garde. Pour les autres, il n'y en avait

  9   pas.

 10   En d'autres termes, tant qu'il était là-bas et qu'il était mobilisé,

 11   il percevait un salaire. On a vu quelles étaient les démobilisations. Donc

 12   dès qu'ils étaient démobilisés, ils n'avaient plus de soldes. Or on sait

 13   ici -- on propose qu'il y ait des contrats de trois mois de présenter aux

 14   volontaires, mais ils disaient, dès que je pars là-bas, moi, ma famille va

 15   rester sans sous, donc je voudrais bien y aller mais donnez-moi un contrat,

 16   parce que d'abord si je me fais tuer, il faut que la famille bénéficie des

 17   avantages fournis par l'Etat, donc trois ou six mois de contrat pour que

 18   les gens puissent résoudre leurs problèmes vitaux. Mais avec la Croatie,

 19   ils pouvaient le signer avec personne d'autre.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est très clair.

 21   Mme PINTER : [interprétation]

 22   Q.  C'est peut-être un bon moment, Général, pour ce qui est --

 23   R.  Jamais --

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais j'ai une

 25   question, moi aussi.

 26   J'ai cru comprendre, mais je me suis peut-être trompé que la guerre dont

 27   vous parliez ici était la guerre combattue contre les Serbes par les

 28   Musulmans et les Croates ensemble. Il y a eu des allégations dans l'acte


Page 8094

  1   d'accusation selon lesquelles des troupes croates en Bosnie-Herzégovine

  2   combattaient les Musulmans. Et de ce fait il y a le problème du conflit

  3   armé international. Y a-t-il un problème si la Croatie envoie ses propres

  4   troupes mais avec le consentement de la Bosnie-Herzégovine sur le

  5   territoire de Bosnie-Herzégovine pour lutter contre l'ennemi commun ? Dans

  6   ce cas, on a un conflit armé international qui existe de toute façon entre

  7   la Croatie et la Bosnie-Herzégovine d'un côté contre les Serbes de l'autre

  8   côté.

  9   Alors pourriez-vous expliquer un petit peu ce qui s'est vraiment passé ?

 10   J'ai l'impression que Me Karnavas voudrait se lever pour nous expliquer, à

 11   la place du témoin, mais c'est au témoin de répondre.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Cette question m'étonne un peu, Monsieur le

 13   Juge. Elle est excellente, bien sûr, loin de moi de dire le contraire.

 14   Mais, bon, vous savez parfois je suis surpris -- parfois je surprends,

 15   mais, bon, vous semblez demander une opinion juridique au vu de la

 16   question. Au vu de la question, on pourrait penser aussi que vous êtes en

 17   train de demander à ce profane de nous donner une opinion juridique.

 18   J'imagine que la question que vous vouliez poser c'est de savoir si c'était

 19   ce qu'il pensait de la chose puisqu'il vous a dit qu'il a quelques notions

 20   de droit -- enfin, sinon, quand même il semble que c'était une question que

 21   vous auriez peut-être plutôt dû poser à un expert juridique.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, il est vrai que vous avez

 23   raison, et poser une question juridique à un profane, ça va totalement à

 24   l'encontre de mes principes. Mais enfin je vais retirer ma question.

 25   Mais j'aimerais quand même corriger le compte rendu, ligne 14, page

 26   84. Ce que je disais c'était assez ironique, je vous disais que vous ne

 27   pensiez pas que c'était moi qui allais poser la bonne question, mais

 28   c'était ironique, bien sûr. Donc je pense qu'il n'y a plus besoin de


Page 8095

  1   rajouter quoi que ce soit.

  2   Madame Pinter.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, mon collègue retire la

  4   question mais je reviens parce qu'il y a quelque chose d'important qu'il a

  5   dit et que je n'avais pas vu jusqu'à présent. Bon.

  6   On voit le système des volontaires, vous nous le décrivez, le

  7   Procureur dans son contre-interrogatoire apportera aussi son point de vue.

  8   Très bien. Mais mon collègue a abordé un point qui mérite réflexion.

  9   Il y a un conflit contre les Serbes, comment se fait-il alors que la

 10   République de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine dans le cadre

 11   d'une coopération d'un partenariat n'aient pas officiellement toutes les

 12   deux engagé le combat contre les Serbes, ce qui aurait permis à l'armée

 13   croate officiellement de traverser la frontière "pour aller donner un coup

 14   de main" - entre guillemet - à l'ABiH contre l'ennemi commun ? Pourquoi ça

 15   n'a pas été fait cela ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que l'OTAN n'acceptait pas, enfin, M.

 17   Alija Izetbegovic n'avait pas accepté parce qu'il y avait du côté croate

 18   des propositions de ce type, parce qu'il y avait un ennemi commun qui avait

 19   un objectif stratégique clair, et le fondement c'était de s'opposer

 20   conjointement à un ennemi commun.

 21   Mais si vous revenez, Monsieur le Juge, sur un fait, à savoir que -- et je

 22   vais montrer, à savoir qu'Alija Izetbegovic avait essayé de conclure un

 23   accord historique avec les Serbes en informant très peu la partie croate;

 24   il a dit, à partir du village de Ravno, ce n'était pas leur guerre à eux.

 25   Quelques jours avant, et je vais vous montrer les documents avant que

 26   Sarajevo ne soit pilonné. Il disait qu'il n'y aurait pas de guerre parce

 27   que, pour une guerre, il fallait deux, or, eux n'étaient pour une guerre.

 28   Il affirmait à plusieurs reprises et on a vu des documents à cet effet que


Page 8096

  1   la JNA allait assurer une paix en Bosnie-Herzégovine. Ce monsieur que je

  2   connais, et pour qui, j'ai beaucoup d'estime, ne pouvait pas ou ne voulait

  3   pas comprendre de quoi il s'agissait là. Il pensait que cette guerre, il

  4   allait l'éviter. Il refusait des accords de ce type, accords dont vous

  5   parlez de coopération militaire, jusqu'en 1995, et là, il l'a signé à

  6   Split, et ce n'est que là, en application de cet accord -- de cet accord-

  7   là, qu'il été rendu possible que les forces croates, après Knin, libèrent

  8   Bihac et Banja Luka pour libérer tout ce territoire-ci. Mais,

  9   malheureusement, en été 1992, il a signé un accord sur les frontières, et

 10   ici, il est question de frontière. C'est la raison pour laquelle il y a

 11   toutes ces interprétations. Est-ce qu'on peut donner des ordres pour

 12   traverser la frontière et aller sur 20 à 30 kilomètres pour chasser

 13   l'artillerie serbe, qui tire depuis le territoire de la Bosnie-Herzégovine

 14   sur les villes croates, Slavonski Brod et autres ?

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- important ce que vous dites, il ne

 16   voulait pas. Donc il ne voulait pas que la République de Croatie vienne

 17   officiellement en Bosnie-Herzégovine l'aider, bien. Mais il savait qu'il y

 18   avait des volontaires. Donc il acceptait implicitement que la Croatie

 19   l'aide par l'envoi des volontaires ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. A l'époque, à ce moment, Monsieur

 21   le Président, Messieurs les Juges, il a vu les erreurs qui avaient été

 22   faites, et là, il s'est mis à accepter ce qui est logique, à accepter

 23   d'accueillir du monde venu des pays islamiques. Parce que quand il s'est

 24   retrouvé dans cette situation, c'était devenu d'une importance vitale pour

 25   son peuple. Ces pays qui sont venus des pays islamiques et qu'on appelle

 26   des Moudjahiddines par la suite, ce n'était pas écrit sur leur front de

 27   quel type de personne qu'il s'agissait. Il était en train de se noyer. Il a

 28   accepté la première main tendue.


Page 8097

  1   Donc on ne peut pas juger, c'était une planche de salut pour lui à ce

  2   moment-là.

  3   Donc j'en ai déjà parlé, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

  4   A ce moment-là, de Zagreb, Alija Izetbegovic arrive à Slavonski Brod avec

  5   ses proches collaborateurs et c'était face à une défaite imminente. Là, il

  6   a demandé s'il pouvait envoyer une armée de Bosnie-Herzégovine, bien

  7   entendu --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : A chaque fois que vous répondez, vous ouvrez

  9   d'autres questions importantes. Vous dites qu'il a fait venir les

 10   Moudjahiddines parce qu'il ne pouvait pas faire autrement vu la situation.

 11   C'est ce que vous venez de dire. Mais --

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, j'ai cru comprendre cela. C'est que, vu la

 14   situation --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- excusez.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'a pas accepté les Moudjahiddines, mais

 18   des volontaires. C'est plus tard qu'on a découvert qu'ils étaient venus

 19   répandre l'Islam et combattre pour la cause islamique. Vous savez, à ce

 20   moment-là, auquel cas vous êtes en train de vous noyer; quelqu'un vous tend

 21   la main, vous l'attrapez, vous ne savez pas de quel homme il s'agit. C'est

 22   peut-être Hitler qui vous tend la main, mais à ce moment-là, vous voyez que

 23   la main.

 24   Donc j'affirme qu'Alija Izetbegovic, à ce moment-là, ne savait pas ce

 25   qu'allait apporter avec eux ces hommes arrivés des pays islamiques. Il a

 26   accepté des hommes, de l'aide -- toute forme d'aide, tout de la part de

 27   Croatie, mais aussi des aides venues d'autre part. parce que la situation

 28   était catastrophique sur le plan militaire. Les Serbes allaient prendre


Page 8098

  1   Sarajevo, je ne sais pas comme la Bosnie-Herzégovine se serait maintenue si

  2   c'était produit en dépit de l'aide internationale.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  4   Mme PINTER : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Général, document 3D 00299, à présent, s'il vous plaît. Je pense que

  6   vous ne l'avez pas dans votre classeur. C'est une pièce à conviction qui a

  7   déjà été versée au dossier. Je vais vous soumettre ce qui est contenu dans

  8   ce document. Vous nous expliquerez comment est-ce que cela est possible.

  9   Vous avez le document s'afficher à l'écran devant vous. C'est une lettre

 10   qui est adressée au ministère de la Défense de la République de Croatie. La

 11   date est celle du 4 janvier 1993, signé par le colonel Hasan Efendic, qui

 12   était secrétaire chargé des questions militaires auprès du bureau de la

 13   République de Bosnie-Herzégovine en République de Croatie. Par cette

 14   lettre, le colonel Hasan Efendic s'adresse au ministère de la Défense et

 15   lui demande une autorisation aux fins des besoins des forces armées de la

 16   République de Bosnie-Herzégovine. Il demande qu'on engage des officiers de

 17   l'armée croate, Avdic, Ismet, colonel, Ahmet Puskar, commandant et qui se

 18   trouvait à Dubrovnik, dans le cas de la défense de Dubrovnik; et Dr

 19   Rakanovic, Sadik, colonel, lui aussi. Dans cette demande, l'on précise que

 20   le statut de ces officiers devrait être réglé comme de par le passé, qu'il

 21   convient de geler leur statut, à savoir qu'ils continuent de bénéficier de

 22   tous les droits en tant qu'officiers de l'armée croate et qu'une fois la

 23   mission accomplie, qu'on leur permette de continuer d'être engagé dans les

 24   rangs de l'armée croate.

 25   Pourriez-vous, s'il vous plaît, préciser aux Juges de la Chambre comment

 26   une telle chose était possible ?

 27   R.  Madame Pinter, mais possible ou non possible, c'est ainsi que les

 28   choses se passaient. La Bosnie-Herzégovine avait ses représentations


Page 8099

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 8100

  1   militaires en République de Croatie. Voilà, elle avait une mission

  2   militaire en République de Croatie. Vous verrez plus tard qu'elle avait

  3   aussi des antennes du Grand état-major de l'ABiH chargé de Logistique en

  4   Croatie, sur autorisation croate, bien entendu. Donc tout est clair, comme

  5   de l'eau de roche.

  6   Donc vous avez un principe de base. Ils se sont entendus avec ces

  7   gens. Ils ont dit qu'ils sont prêts à venir aider mais nous souhaiterions

  8   conserver nos droits pour pouvoir retourner ici.

  9   C'est ce que nous avons vu il y a deux jours, le cas de Jasmin Jaganac

 10   [phoen], il était à Mostar. Il a terminé, il est revenu, donc c'était la

 11   règle, l'aide de la République de Croatie s'est manifestée précisément par

 12   ces voies-là. Volontaires, vous êtes libres de partir, votre statut

 13   militaire est conservé. Si vous êtes toujours en vie, revenez, on vous

 14   réintégrera, et sinon, vos proches bénéficieront de tout ce qui revient aux

 15   proches d'un soldat qui aurait été tué à la défense de la République de

 16   Croatie. Donc c'était ainsi à l'époque et de tous les points de vue.

 17   Q.  Ces trois individus sont des Musulmans de Bosnie ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  A présent une vidéo, 3D03127.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Evidemment ce document mérite une réflexion en

 21   profondeur. Sans conteste, la République de Bosnie-Herzégovine demande

 22   l'affectation de trois officiers de l'armée croate afin qu'ils exercent

 23   leurs fonctions dans l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine, et

 24   ceci, le 4 janvier 1993. Alors en regardant ce document, en écoutant la

 25   question de votre avocate, en écoutant votre réponse, je fais un lien avec

 26   les événements de Prozor, octobre/novembre quelques semaines avant.

 27   Si l'autorité de la Bosnie-Herzégovine adresse une telle demande

 28   alors même qu'il savait qui s'était déroulé des événements à Prozor,


Page 8101

  1   quelles pouvaient être leurs conclusions pour Prozor, un incident local, ou

  2   un incident s'inscrivant dans un plan ? Qu'est-ce que vous pouvez dire ?

  3   Surtout que nous savons que vous avez été à Prozor.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Un incident local, de portée locale, voilà, je

  5   ne peux pas, j'en parlerais, quand je suis allé calmer cette situation et

  6   puis quand je suis allé à Uskoplje, là, quand ils m'ont demandé de bien

  7   vouloir m'y rendre, je n'arrive absolument pas à déterminer, l'une de ces

  8   fois, il y a eu M. Izetbegovic; et deux fois, il y a eu M. Tudjman, et une

  9   fois il y a eu tant M. Franjo Tudjman qu'Alija Izetbegovic. Ils m'ont

 10   demandé : Praljak, vas-y parce que -- le président disait : Praljak, vas-y,

 11   va là-bas, on ne veut pas la guerre avec les Musulmans, s'il te plaît, vas-

 12   y, essaie de calmer. Donc c'était un incident local.

 13   Comme vous le savez, je suis resté pendant longtemps en Bosnie

 14   centrale. En un mois et demi, dans le secteur de Konjic, Rama, Uskoplje,

 15   Travnik, Novi Travnik à la défense de Travnik après la percée des Serbes,

 16   après la chute de Jajce j'ai considérablement contribué à ce qu'on calme la

 17   situation. Hélas, c'était reparti plus tard, c'est reparti, vous savez,

 18   c'est ça se développe, ça bouge à chaque fois d'un poil, petit à petit.

 19   C'est une détérioration progressive. Mais jusqu'au 30 juin, même jusqu'à

 20   Jajce, je le démontrerais de manière tout à fait claire, il y avait de

 21   notre côté le souhait, la volonté et l'espoir que nous parviendrons à

 22   éviter un conflit ou plutôt qu'on évitera qu'ils nous attaquent comme ils

 23   nous ont attaqué, et on est parvenu. Vous verrez que la Croatie, à l'été

 24   1993, autorise l'état-major de l'ABiH de créer ces antennes logistiques à

 25   Zagreb, Rijeka, et Split, donc qu'ils soient actifs sur le territoire de la

 26   République de Croatie. Qu'on mette tout à leur disposition, même si le

 27   conflit en Bosnie centrale et à Konjic s'était déjà bien développé, les

 28   premiers conflits à Mostar également.


Page 8102

  1   Q.  Aux fins du compte rendu d'audience, Général, vous avez dit tout cela

  2   jusqu'au 30 juin, mais de quelle année ?

  3   R.  1993.

  4   Q.  Excusez-moi. Mais il nous faut placer les choses dans le contexte

  5   historique. Vous avez parlé de Jajce. C'est pour ça --

  6   R.  Non, non, tout à fait, le conflit était déjà clair. Mais même après

  7   cela, la République de Croatie n'a rien modifié à l'aide qu'elle

  8   fournissait à l'ABiH, rien. C'était devenu un peu plus difficile de

  9   transporter et de faire passer ces armes là-bas. Mais de principe dans

 10   l'approche il n'y a eu aucun changement.

 11   Q.  Très bien. La vidéo à présent 3D 03127, s'il vous plaît. Général, quand

 12   on aura visionné la vidéo, pourriez-vous nous fournir votre explication,

 13   mais pour voir d'abord --

 14   L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'elle n'a pas le texte, la

 15   transcription.

 16   M. STRINGER : [interprétation] Est-ce que nous avons un numéro pour cette

 17   pièce, Monsieur le Président ?

 18   Mme PINTER : [interprétation] 3D 3127. Ça figure déjà au compte rendu

 19   d'audience.

 20   Est-ce que nous avons la bande son. Hélas, il nous semble que nous ne

 21   serons pas en mesure de diffuser.

 22   Q.  Général, en attendant, vous connaissez cette émission sur la télévision

 23   croate ou --

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Qui était présent ? Est-ce que vous vous en souvenez ?

 26   R.  Oui. C'est Gojko Susak qui était l'arrêt image. Il y avait le général

 27   Lucic, j'étais présent moi-même, et il y avait encore quelques personnes de

 28   l'administration du personnel qui ont répondu à certaines questions.


Page 8103

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  Des personnes des services sociaux également.

  3   Q.  Très bien. Vous souvenez-vous des thèmes qui ont été abordés lors de

  4   cette émission ?

  5   R.  C'était de nature générale; la prise en charge des blessés de la HV,

  6   leurs droits, et cetera.

  7   Q.  Avez-vous connaissance qu'il ait été question aussi du départ de

  8   soldats croates en Bosnie-Herzégovine ?

  9   R.  Oui.

 10   M. STRINGER : [interprétation] Objection, c'était une question directive.

 11   Si on veut écouter la bande son de la vidéo, fort bien. Sinon, on peut y

 12   revenir plus tard, parce que ce n'est pas très utile.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Stringer intervient rarement, mais quand il le

 14   fait, c'est toujours à bon escient. Effectivement, si vous allez passer la

 15   bande son, ce n'est pas la peine de poser ce type de question avant, à

 16   moins que vous renonciez.

 17   Mme PINTER : [interprétation] Cela dépend de la technique, pas de nous.

 18   Malheureusement, il n'y a pas la bande son.

 19   Q.  Général Praljak, pendant que nous attendons le son, juste une question.

 20   Quand cette émission a-t-elle été diffusée, vous en souvenez-vous ?

 21   R.  Cela a été diffusé soit au mois de juillet ou peut-être début du mois

 22   d'août 1992, dans cette intervalle de temps. Je ne peux pas être plus

 23   précis, mais je sais que c'était après mon retour de la Posavina de Bosnie.

 24   [Diffusion de la cassette vidéo]

 25   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "Nous avons dû recourir à des volontaires

 26   non seulement de Croatie mais l'ensemble de la Croatie. Il y avait des

 27   milliers de personnes de l'Herceg-Bosnie. Il y avait des Croates de

 28   l'immigration aussi qui avaient la capacité et la volonté de prendre part à


Page 8104

  1   cela. C'est ainsi que nous avons formé ces premières unités non pas parce

  2   qu'ils étaient membres du HDZ mais parce que le HDZ était la seule

  3   structure organisée qui pouvait rassembler toutes ces personnes."

  4   L'INTERPRÈTE : La cabine français précise que nous n'avons pas la

  5   transcription de la bande son.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   Mme PINTER : [interprétation] C'est de ça qu'il s'agit, ce n'est pas la

  8   peine d'aller plus loin.

  9   Mme PINTER : [interprétation] Il y a aussi une justification donnée par le

 10   ministre.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   Mme PINTER : [aucune interprétation]

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui est important dans cette partie c'est

 14   la question qui est posée par le peuple lui-même : pourquoi l'armée croate

 15   n'intervient-elle pas en Posavina de Bosnie, en Bosanska Posavina, puisqu'à

 16   partir de cette zone qui est occupée, les Serbes pilonnent, tirent sur les

 17   zones frontalières de la Croatie et tuent des gens. Le ministre Susak

 18   explique que c'est impossible.

 19   Autre question à laquelle il répond en disant que la Croatie n'est

 20   pas en guerre, qu'elle a signé un accord de collègue et qu'elle n'est pas

 21   en guerre.

 22   Troisièmement, à la question d'une mère qui demande si un soldat

 23   croate, refusant de se rendre -- de traverser la frontière pour aller à

 24   Derventa, doit craindre d'être puni, il répond que non, et il explique que

 25   le président Tudjman ainsi qu'un certain nombre d'officiers supérieurs ont

 26   expliqué la chose clairement, à savoir que les volontaires, qui sont nés

 27   sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine mais également ceux qui n'y sont

 28   pas nés, s'ils souhaitent partir en tant que volontaires pour se battre


Page 8105

  1   contre l'ennemi commun qui est le même ennemi, car la Croatie a signé un

  2   accord de cessez-le-feu mais la guerre n'est pas finie, ils peuvent partir,

  3   dans ce cas-là, dans les conditions qui y sont précisées. On ne peut rien

  4   de dire de plus précis que cela. C'était la politique de l'Etat et il en a

  5   émané la position de l'armée telle que nous l'avons devant nous.

  6   Mme PINTER : [interprétation] Juste une information pour les Juges de la

  7   Chambre, la transcription de la bande son de cet extrait vidéo en anglais a

  8   son propre numéro qui est le 3D 41-0682 ainsi que 3D 41-0683. Ce sont les

  9   numéros de pages dans le prétoire électronique de la transcription en

 10   anglais de la bande son.

 11   Q.  Alors, Général Praljak, je voudrais que vous commentiez à présent un

 12   document que vous avez déjà évoqué précédemment. C'est le 3D 00963. En même

 13   temps, le 3D 01719. Le premier de ces deux documents, la pièce 3D 00963

 14   représente la décision du président, le Dr Franjo Tudjman, portant

 15   nomination d'une Commission qui enquêtera au sujet des agissements du

 16   général Bozo Budimir et prendra les actions nécessaires; avez-vous retrouvé

 17   cela ?

 18   R.  Oui. Dans le premier point de cet ordre du commandant suprême, il est

 19   dit :

 20   Le fondement sur lequel le général Bozo Budimir a pris une décision

 21   et a émis un ordre envoyant le 57e Bataillon indépendant en Posavina de

 22   Bosnie, alors qu'il n'en n'avait pas l'autorité, l'autorité ne lui en avait

 23   pas été donnée par l'état-major et donc il avait commis une infraction.

 24   Alors on demande aussi un certain nombre de choses relatives à l'enquête,

 25   mais portant sur ce cas, soit dit en passant ce général était le commandant

 26   de la zone opérationnelle de Sisak et il était mon commandant lorsque

 27   j'étais à Sunja. C'est une personne admirable, un ancien officier de la JNA

 28   mais qui était animé au plus haut degré par la volonté de combattre. Il


Page 8106

  1   voulait combattre la JNA et la VRS et il a enfreint les ordres qui étaient

  2   les siens. Il n'a pas été le seul. Entendons-nous bien.

  3   Comme je l'ai écrit, il y a eu encore des conséquences de tout cela en

  4   Bosanska Posavina, et lui a été poursuivi, mais tout le monde ne l'a pas

  5   été. Nous avons essayé de régler ces situations par une discussion franche

  6   en expliquant que cela n'était pas autorisé, qu'il ne fallait pas procéder

  7   ainsi, qu'il fallait suivre une procédure bien précise. C'était sans doute

  8   la meilleure façon de procéder que d'insister sur la nécessité de maintenir

  9   les principes.

 10   Ceci dit, quand des personnes sont tuées, lorsque dans une ville vous avez

 11   28 enfants qui sont tués, que dans une zone plus large, vous avez 500

 12   civils qui ont péri, tout ce qui relève des ordres de la loi commence à

 13   être perçu dans une perspective complètement différente. Le sang qui a été

 14   versé, les enfants morts, les victimes, tout cela crée un état d'esprit

 15   différent chez les gens. Alors une armée parfaitement organisée aurait sans

 16   doute traiter cela d'une façon différente, mais là ce n'était pas le cas,

 17   les gens étaient préoccupés par ce qui -- par le sort réservé à leurs

 18   proches et il s'agissait ici tout simplement du facteur humain.

 19   Cependant, les règles étaient en vigueur et nous nous y tenions. Il s'agit

 20   ici vraiment d'un honnête homme qui a donc fait l'objet d'une enquête.

 21   Q.  Je voudrais pour en finir que vous regardiez le document 3D 01719.

 22   C'est une proposition de mettre en accusation le Procureur du tribunal

 23   militaire disciplinaire et on voit que cela a été effectivement fait et

 24   conduit. 

 25   R.  Oui. C'est une personne qui a recours, qui a utilisé des unités du HVO

 26   sans que -- l'état-major de l'armée croate en ait connaissance. Il n'y a

 27   pas de mention spécifique de la Posavina ici mais je le sais. Lui aussi

 28   était volontaire. Il était à Sisak lorsque j'étais à Sunja. C'était un


Page 8107

  1   soldat. Il savait ce qu'était la discipline et je sais qu'il a été

  2   sanctionné d'une façon ou d'une autre. Dans aucune armée, dans aucune

  3   guerre, il n'est possible d'affirmer que les commandants obéissent

  4   strictement aux ordres. C'est une fausse conception que de s'imaginer

  5   qu'une armée fonctionne comme un mécanisme à 100 % déterminé.

  6   Ce n'est le cas nulle part ni aux Etats-Unis, ni en France.

  7   Lorsqu'une guerre commence et que l'on est confronté à la mort, au sang,

  8   chaque armée commence à présenter toute une série de dysfonctionnement.

  9   J'ai fait mention de cet unique cas dont j'ai connaissance dans l'histoire,

 10   la désobéissance du général de Gaulle lorsque le général Eisenhower lui a

 11   ordonné de ne pas envoyer ses troupes pour quelles entrent à Paris.

 12   Evidemment, le général de Gaulle n'était pas du tout enchanté à cette idée

 13   que les Français ne seraient pas les seuls à entrer à Paris et il a

 14   justement envoyé la 3e Division avec Leclerc à sa tête pour quelle entre à

 15   Paris -- que les Français ne soient pas les premiers donc à entrer à Paris.

 16   Les choses ne sont pas aussi simples qu'il y paraît. Ce n'est pas

 17   commun ou en laboratoire.

 18   Q.  Très bien. Juste pour le compte rendu d'audience, en page 97, ligne 22,

 19   le document auquel le général vient de se référer est le 3D 01719.

 20   Nous en avons terminé avec cette question particulière pour ce qui est de

 21   l'interrogatoire principal.

 22   R.  Est-ce que tu veux qu'on parle du 3D 01719 ?

 23   Q.  Non, nous venons de le faire.  

 24   R.  La partie relative à Stipetic.

 25   Q.  Cela a été traité avec les exemplaires du : "Soldat croate" pour que

 26   nous ne revenions pas là-dessus.

 27   Notre sujet suivant à présent. C'est l'aide accordée par la République de

 28   Croatie à la République de Bosnie-Herzégovine. Alors je suis maintenant


Page 8108

  1   entre les mains de la Chambre. Est-ce que nous allons démarrer maintenant

  2   avec un nouveau sujet, ou bien lever l'audience maintenant pour reprendre

  3   demain matin ?

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Disons à quelques minutes près, c'est l'heure de

  5   terminer. Il vaut peut-être mieux reprendre le nouveau sujet demain. Si le

  6   général Praljak n'y voit pas d'inconvénient, on abordera le sujet nouveau

  7   demain. Bien.

  8   Alors comme vous le savez, demain, nous sommes de matinée. Donc nous

  9   commencerons notre audience à 9 heures 00.

 10   Je vous remercie. Je souhaite une bonne fin d'après-midi.

 11   --- L'audience est levée à 13 heures 39 et reprendra le jeudi 14 mai 2009,

 12   à 9 heures 00.

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28