Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 19 mai 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   toutes les personnes présentes dans le prétoire.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 12   Merci, Messieurs les Juges.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce mardi, je salue M. Praljak, je salue M. Stojic, M. Petkovic et M.

 15   Pusic. Je salue Mmes et MM. les avocats et je salue M. Stringer, ses

 16   collaboratrices et son collaborateur. Je regarde si M. Scott est là, non,

 17   je ne le vois pas sinon je l'aurais salué. Je salue également M. le

 18   sténotypiste, et je n'oublie pas de salue toutes les personnes qui nous

 19   assistent.

 20   Nous devons donc continuer la suite de l'audition de M. Praljak. De ce

 21   fait, je donne la parole à Me Pinter.

 22   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

 25   Messieurs les Juges. Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.

 26   Interrogatoire principal par Mme Pinter : [Suite]

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, mon Général.

 28   Hier, nous nous sommes arrêtés à ce livre : "Les Jeunes Musulmans," et vous

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  1   avez expliqué ce que c'était que les jeunes Musulmans. Vous nous avez dit

  2   que Sead Trhulj avait rédigé un livre à leur sujet. Aussi vais-je vous

  3   demander de vous référer à la page 3D 41-0239, et en version anglaise, ce

  4   serait la page 3D 40-1561. Le document porte le numéro 3D 03540.

  5   Mme PINTER : [interprétation] Pour les Juges, je précise que ça se trouve

  6   dans le classeur numéro 3 parmi ce qui se réfère au livre.

  7   Q.  Mon Général, pouvons-nous commencer.

  8   R.  59, c'est la page 59.

  9   Q.  Moi, je ne fais qu'identifier le livre et les numéros de page, et

 10   maintenant nous allons commencer --

 11   L'INTERPRÈTE : Le témoin est difficilement audible --

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] -- 57.

 13   Mme PINTER : [interprétation]

 14   Q.  3D 41-239. A la version anglaise, 40-1561 et 3D 40-1562 et c'est là

 15   qu'on peut trouver l'intitulé : "Alija Izetbegovic." Alors qui a-t-il

 16   d'important que vous voudriez porter à la connaissance des Juges ?

 17   R.  Nous allons prendre de brefs extraits de l'interview de M. Alija

 18   Izetbegovic qu'il a accordé à Sead Trhulj après la guerre en 1995, et tout

 19   au début, il indique quelles sont les circonstances qui ont conduit à la

 20   création de cette organisation appelé : "Les Jeunes Musulmans."

 21   A cet effet quelques phrases pour dire que le peuple musulman était dénué

 22   d'une direction entre les deux guerres mondiales déjà, et à l'époque du

 23   Royaume de Yougoslavie, il y avait déjà eu un partage d'effectuer pour ce

 24   qui est de la Bosnie; le départ des Musulmans était assez important en

 25   direction de la Turquie et que tout ceci a constitué les raisons pour la

 26   création de ladite organisation.

 27   Alors c'est en guise d'introduction. Maintenant je vous renvoie à la page

 28   59.

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  1   Q.  3D 41-0241 en version croate, et 3D 40-1562 en version anglaise.

  2   R.  Alors, ici, pour répondre à une question celle de savoir s'il y a eu

  3   des documents liés au programme des jeunes Musulmans et comment le tout a

  4   été fait, il indique qu'il y a eu un point où il a été question de l'Unité

  5   des Musulmans du monde entier et il aurait été question là de la mise en

  6   œuvre de l'Islam. Juste en dessous, on disait que c'était "sans

  7   commentaire," et M. Izetbegovic dit qu'eux, les jeunes Musulmans, pour ce

  8   qui est de cet alinéa, il avait toujours lu en tant qu'article portant sur

  9   la création d'un grand Etat musulman.

 10   Q.  Passons maintenant à la page suivante. Veuillez nous indiquer le numéro

 11   de la page.

 12   R.  61.

 13   Q.  3D 41-0242 en version croate, et 3D 40-1562 en version anglaise.

 14   R.  Ici, M. Izetbegovic nous parle de la tragédie du peuple musulman. Il

 15   dit que celui-ci, de leur avis, ne pouvait se mettre ni d'un côté ni de

 16   l'autre; il ne pouvait donc pas se mettre du côté des partisans parce que

 17   les partisans étaient dirigés par les communistes, ce qui signifie que les

 18   Musulmans allaient perdre l'âme s'ils venaient se joindre à cette partie-

 19   là. D'autre part, il y avait des organisations ou des unités nazies qui

 20   menaçaient de les exterminer physiquement. Alors pour savoir comment la foi

 21   a constitué un appui en tout cela, il a dit que c'était une importance

 22   absolue et que c'était à l'époque et maintenant le fondement de l'identité

 23   musulman c'est Islam pour ce qui est des territoires concernés. Il dit que

 24   seul l'Islam pouvait donner une teneur en soi à la population musulmane, et

 25   c'était sa conviction personnelle profonde. Donc il n'y a plus rien d'autre

 26   à dire.

 27   Q.  Je vous renvoie à la page 67 qui, en version croate, est le 3D 41-0249,

 28   et en version croate, il s'agit du 3D 40-1563 et 40-1564.

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  1   R.  Voilà c'est tout au bout, l'auteur du livre pose des questions au sujet

  2   de l'année 1983 et il demande à savoir ce qui a incité ce groupe de gens

  3   pour sortir dans le public, faire une apparition publique. Il y a eu un

  4   grand procès à l'intention des jeunes Musulmans cette année-là. Bon nombre

  5   d'entre eux ont fini en prison; entre eux, il y avait aussi M. Izetbegovic,

  6   et ils voulaient sortir en public pour montrer à l'attention des Musulmans

  7   quelle était la voie à suivre, parce qu'ils disent que l'aliénation de la

  8   population musulmane avait pris tant d'ampleur que cette aliénation vis-à-

  9   vis de la foi commençait à constituer une menace pour ce qui est de voir

 10   les Musulmans se fondre complètement dans cette société athée laïque. Il

 11   indique qu'ils ont été mis en prison, et je cite :

 12   "Il est passé par les prisons et par l'instruction plus de 1 000

 13   personnes."

 14   Il dit que tous les Musulmans en vue, notables, ont été fouillés ou passés

 15   par des prisons, ils ont subi des interrogatoires, et c'est le sort qui

 16   aurait été celui de tous les ex-jeunes Musulmans, donc dans ces procès,

 17   1946, 1947, cela a déjà été le cas.

 18   Q.  Je vous renvoie à la page 70 qui, en version croate, porte le 3D 41-

 19   0252, et en version anglaise, ça se trouve en page 3D -1565.

 20   R.  Juste au bout, on dit qu'il y a eu destruction violente de

 21   l'organisation, mais elle a survécu dans les têtes des gens. Ceux qui

 22   avaient cru en ces idées ont continué à le faire.

 23   Et vient maintenant la phrase que je voudrais citer, je cite :

 24   "En leur for intérieur, ont survécu les souvenirs liés à l'organisation, à

 25   ces messages, à ces exigences, à ces programmes."

 26   Puis il dit qu'un très grand nombre de ces individus - la plupart d'entre

 27   eux - a pris part à la création de ce Parti de l'Action démocratique en

 28   1990. Donc il n'y a pas eu continuité, de par l'organisation, l'existence

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  1   de l'organisation, mais il y a eu continuité de par les opinions

  2   individuelles. Donc c'était une espèce de serment prêté pour dire que ces

  3   gens allaient intervenir en faveur des Musulmans et en faveur de l'Islam.

  4   Ces gens-là dans toutes les localités de la Bosnie-Herzégovine étaient

  5   intervenus en faveur du SDA, et il précise que, de ce point de vue-là, il

  6   convient d'évaluer le rôle historique de cette organisation qui s'appelait

  7   les jeunes Musulmans. Voilà.

  8   Q.  En page 3D 41-0253, page 121, et en version anglaise, c'est le 3D 40-

  9   1565, vous avez là un texte que vous aviez aussi souhaité montrer aux Juges

 10   de la Chambre.

 11   R.  Il s'agit ici de documents que ce monsieur, l'auteur du livre, nous

 12   indique le serment des jeunes Musulmans. C'est clair en soi, et on dit

 13   qu'on se conformera à tout ce que prescrit le Coran. Mais ce qui est

 14   important ici c'est qu'il n'y aura pas de compromis pour lutter contre tout

 15   ce qui n'est pas l'Islam. Donc tout ce qui n'est pas islamique c'est

 16   l'ennemi de l'Islam selon l'interprétation faite par ces jeunes Musulmans.

 17   Puis on dit un peu plus loin qu'on se battra pour la grandeur, la puissance

 18   et l'éclat de l'Islam, et pour le bien-être de tous les Musulmans du monde,

 19   ce qui est une sorte de mouvement islamique, tel qu'ils le perçoivent, je

 20   ne parle pas de l'organisation qui est la leur. Voilà.

 21   Q.  Page 122, maintenant, qui est toujours le même texte 3D 40-1566, et

 22   dans la version croate, 3D 41-0254, il y a également un texte que vous

 23   aviez souhaité montrer aux Juges de la Chambre, me semble-t-il ?

 24   R.  Il s'agit d'une copie ou d'un extrait d'une brochure rédigé pour les

 25   besoins des jeunes Musulmans, et là, on parle du fait qu'ils seraient en

 26   position de supériorité vis-à-vis de l'adversaire, parce qu'ils avaient en

 27   eux une force idéologique, et que c'était ce qu'ils leur attribuaient la

 28   supériorité nécessaire vis-à-vis de leurs adversaires. On dit aussi que

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  1   cette force idéologique leur fournirait une volonté de fer. On dit aussi

  2   qu'ils seraient une sorte de mordus et de fanatiques pour défendre l'Islam,

  3   donc ils disent qu'ils seront fanatiques dans leur débat, dans leur guerre

  4   des nerfs, et cetera, et cetera.

  5   Au paragraphe 2, il enchaîne pour expliquer plus en détail, et indiquer

  6   que, dans leur collectivité, il ne fallait pas qu'il y ait de mésentente et

  7   qu'il ne fallait pas qu'il y ait de divergence de point de vue. Au

  8   paragraphe 3, il est question de la création d'une société islamique.

  9   Q.  Juste un instant. 3D 40-1567 version anglaise, 3D 41-0255 en version

 10   croate.

 11   R.  Donc il est question de se battre pour leur sphère spirituelle et

 12   matérielle pour la libération du monde islamique, pour la mise en place

 13   d'un ordre social islamique pour ce qui est donc de la culture et de la

 14   civilisation.

 15   Au paragraphe 5, ils sortent une phrase qui dit :

 16   "Ce n'est que lorsque nous disposerons de l'autorité ou du pouvoir

 17   politique que nous pourrons sans entrave mettre en œuvre toutes les

 18   dispositions de l'Islam dans une société islamique."

 19   Donc le pouvoir politique c'est la base à partir de laquelle il serait

 20   possible de procéder à la réalisation du mouvement dont il est question.

 21   Parce qu'ils indiquent qu'il faut aboutir à une composition sociale,

 22   spirituelle et autre conformément à ce qu'il est propagé dans l'énoncé de

 23   leurs idées.

 24   Q.  Alors page 124.

 25   R.  126.

 26   Q.  126.

 27   R.  Il n'y a plus rien d'autre à ajouter. On développe.  

 28   Q.  Alors 126. C'est le 3D 41-0258, et en version anglaise, il s'agit du 3D

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  1   40-1568 et 3D 40-1569.

  2   R.  Ici nous avons également une brochure rédigée à Mostar et acceptée à

  3   bras ouvert à Sarajevo. Ça a été rédigé non pas pendant cette dernière

  4   guerre, ça a été rédigé après la Deuxième Guerre mondiale, mais c'est resté

  5   comme étant une espèce de serment à long terme de ladite organisation. On

  6   parle de 1917, année de la honte où les Musulmans ont subi des pertes parce

  7   que les Serbes ont repris leur état après leur victoire dans la Première

  8   Guerre mondiale. C'est pour des raisons tout à fait méconnues, parce que ce

  9   sont les Croates qui ont pâti. Il dit que s'appuyer sur l'amitié des Serbes

 10   et des Croates est la plus grande des sottises et le plus grand des leurres

 11   qui puissent y avoir pour se tromper soi-même. Parce que les Croates et les

 12   Serbes dit-on ceux qui ne croiront jamais à leurs bonnes intentions. Aussi

 13   se réfère-t-on plutôt au Coran qui lui dit, je cite : "Allez-vous

 14   rechercher vos amis parmi les infidèles."

 15   Et une fois de plus, je le cite :

 16   "Ni les Chrétiens, ni les Juifs ne seront vos amis jusqu'à ce que vous

 17   n'acceptiez ou pas avant que vous n'acceptiez les idées qu'ils défendent."

 18   Puis plus loin, on explique ce que veulent dire que d'être Croates ou

 19   Serbes, et on indique qu'ils ne cherchent qu'une chose c'est faire

 20   péricliter l'Islam, se venger du Kosovo et l'emporter sur le -- pour le

 21   croissant, et ainsi de suite et ainsi de suite.

 22   Puis on parle de panislamisme. On parle de la possibilité de la mise en

 23   œuvre pleine et entière dans la vie de tous les jours. On parle de l'aide

 24   d'Allah pour ce qui est d'entrer en guerre sainte dans Jihad, et ainsi de

 25   suite, ça va donc dans le même style jusqu'à la fin du texte, il n'y a rien

 26   à ajouter.

 27   Q.  Passons maintenant à la page 131. Il s'agit du 3D 41-0261 en version

 28   croate, et 3D 40-1570 en version anglaise.

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  1   R.  Il s'agit également d'un texte qui servait d'instruction à l'intention

  2   des membres de l'organisation pour leurs activités sur le terrain. Ça a été

  3   rédigé après la guerre. Quand je dis après la guerre c'est après la

  4   Deuxième Guerre que j'entends, Deuxième Guerre mondiale. Alors les

  5   autorités ce sont des infidèles selon eux. au paragraphe 2, il est question

  6   de redresser les points de vue erronés et il est question aussi d'être

  7   virulent dans les attaques contre tous ceux qui constituent un plan non

  8   islamique, qui sont considérés comme étant quelque chose de bien en Europe

  9   et dans le reste du monde culturel. Alors quand on dit monde "culturel" on

 10   a mis des guillemets, parce que cela signifie que pour eux ce n'est pas un

 11   monde cultivé avec une culture, et ils disent que la morale au sein de

 12   cette société n'est pas bonne, que c'était inhumain. Ils interviennent

 13   contre la peinture, les sculptures modernes, contre les œuvres littéraires

 14   amorales, contre les films tournés --

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi. Il me semble,

 16   Monsieur Praljak, que vous lisez des extraits qui ne font pas partie du

 17   document traduit que nous avons sous les yeux; est-ce exact ?

 18    Maître Pinter, est-ce que vous pouvez confirmer cela ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que non.

 20   Mme PINTER : [interprétation] Ça devrait être traduit. Mais je vois que

 21   c'est au numéro 2 du dernier paragraphe. Alors je vais vous répondre tout

 22   de suite, laissez-moi juste un instant pour retrouver parce qu'on a remis

 23   toutes les pages auxquelles se réfère le général, mais à l'instant là, j'ai

 24   du mal à m'y retrouver.

 25   3D 41570, au lieu d'entendre dernier paragraphe au troisièmement, il faut

 26   entendre dernier paragraphe, au numéro 2, et c'est là que l'on peut

 27   retrouver le texte auquel le général se réfère. Donc ce n'est pas le numéro

 28   3 mais le paragraphe 2.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est le paragraphe 2.

  2   Mme PINTER : [interprétation] Il s'agit d'une erreur dans la traduction

  3   anglaise, parce qu'on y dit que c'est le paragraphe 3.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Veuillez m'aider, s'il vous plaît,

  5   en m'indiquant quelle est la référence que nous avons à propos d'art

  6   moderne et de sculpture. Pardonnez-moi, mais je n'ai pas encore trouvé ce

  7   passage-là.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Paragraphe 2.

  9   Mme PINTER : [interprétation] Paragraphe 2.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   Mme PINTER : [interprétation] Oui, un instant, un instant.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors au milieu du paragraphe 2, on parle de

 13   la peinture et des arts plastiques modernes avec un grand nombre de films

 14   immoraux ainsi que d'œuvres littéraires immorales, et cetera.

 15   Mme PINTER : [interprétation]

 16   Q.  Ça n'a pas été traduit.

 17   R.  Comment se fait-il ? Mais bon.

 18   Q.  Justement on a traduit qu'une partie. C'est là que se situe le

 19   problème.

 20   R.  On dit que l'Europe et l'Amérique se trouvent sur des fondations très

 21   mauvaises et ont pourri, et on va jusqu'au bout.

 22   Q.  Oui, alors pour ce qui est de la fin pour parachever avec ce qu'on

 23   avait à dire au sujet du livre intitulé : "Les Jeunes Musulmans," alors sur

 24   ce livre et sur les extraits, qu'avez-vous estimé important pour ce qui est

 25   de faire comprendre aux Juges le contexte lié à l'acte d'accusation et lié

 26   aux événements ?

 27   R.  Messieurs les Juges, comme l'a indiqué M. Izetbegovic, cette idée est

 28   restée conserver dans les têtes de milliers d'individus fidèles à

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  1   l'organisation qui avait propagé la chose, et ce sont ces mêmes individus

  2   qui ont par la suite organisé le SDA. Bien sûr, on ne peut pas imaginer que

  3   des gens qui pendant des dizaines d'années s'étaient battus en faveur d'une

  4   idée seraient venus subitement à changer d'idée.

  5   Pour comprendre ce qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine, il faut

  6   comprendre cette façon de voir qui est présente auprès d'un grand nombre

  7   d'individus qui se trouvait à la tête dudit parti. Parce que, dans le cas

  8   contraire, on n'est pas censé comprendre ou pouvoir comprendre pourquoi ces

  9   gros efforts que nous avons déployés, nous autres Croates, qu'il s'agisse

 10   des Croates de Croatie ou de la HZ HB, ait péripétie, donc tous les cessez-

 11   le-feu, tous les accords, toute cette volonté de créer un commandement

 12   conjoint sont tombés à l'eau, l'un après l'autre et donc il s'agit de

 13   comprendre pourquoi les Moudjahiddines ont été si bien accueillis et

 14   pourquoi ils ont bénéficié d'autant de soutien en Bosnie centrale. On ne

 15   peut pas le comprendre si l'on ne connaît pas le contexte de la pensée qui

 16   sous-tend le reste, et il convient de le savoir cela afin de bien

 17   comprendre les choses.

 18   Q.  Merci, mon Général. Je vous renvoie maintenant à un document, le 3D

 19   00855 --

 20   R.  Non, non. Il s'agit de la fin de ce paragraphe 2 qui a été traduit, la

 21   fin du paragraphe 2 a été traduite. Je le vois. Il est question là de

 22   rester près pour attiser la volonté de comprendre et de détruire tout ce

 23   qui n'est pas islamique. Donc, en substance, ce mouvement pour ce qui est

 24   de ces individus, je ne parle pas de la totalité des Musulmans en Bosnie-

 25   Herzégovine, car je sais que bon nombre d'entre eux ou la grande majorité

 26   n'était pas infectée par ces idées ou n'avait pas accepté ces idées mais le

 27   noyau dur s'agissant de tout ce qui est non islamiste, il y a eu la même

 28   attitude que celle des Serbes vis-à-vis des non-Serbes. Il faut donc

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  1   prendre cela comme fondement pour mieux comprendre tout le reste.

  2   Là, il y a une toute petite partie du paragraphe 3, page 132.

  3   Q.  3D 41-1570 et 1571 en version anglaise, et le 3D 41-0262 en version

  4   croate.

  5   R.  Oui, seulement ce court extrait. Ils montrent -- ils disent que, dans

  6   les discussions, il faut toujours mettre en œuvre ce à quoi on aspire à

  7   savoir l'éducation et la création du véritable Musulman et par son

  8   intermédiaire, la préservation de l'Islam dans les Balkans, ce qui à cette

  9   instant constitue la mission la plus importante; ensuite c'est également

 10   l'unité du monde musulman afin que soit réalisée la possibilité d'appliquer

 11   dans la ville les lois du Coran et des Hadis, ce qui signifie que

 12   l'organisation de l'Etat doit être conçu en fonction du Coran et non pas

 13   l'inverse.

 14   En page 133, points 3, 4 et 5, très brièvement, donc 3D 41-0263, en version

 15   croate, en version anglaise, c'est 3D 40-1571.

 16   R.  Voilà, là encore, on trouve une sorte, une série d'interdictions,

 17   interdictions de se rendre sur des plages mixtes et des promenades mixtes,

 18   interdiction de participer à des danses. Il est dit qu'un Musulman, qui se

 19   prête à cela, ne serait pas un vrai Musulman et qu'il ne serait pas sur la

 20   voie du Jihad. A défaut d'adopter cette ligne ce qui est dit ici, c'est que

 21   les Musulmans seront effacés de la carte de l'Europe, or ils doivent

 22   résister, ils doivent s'avérer vainqueur face à tout cela.

 23   C'est pourquoi il ne doit exister aucune forme de divertissement. Il

 24   ne faut pas aller au théâtre, à l'opéra, à des spectacles de ballet ou de

 25   cirque ni même au cinéma. A la page suivante qui est le numéro 134 --

 26   Q.  3D 41-0264 en version croate, et en version anglaise 3D 40-1571.

 27   R.  C'est là qu'il donne des justifications sauf que le théâtre se fonde

 28   sur le jeu d'acteurs et que cela est déjà une raison suffisante pour le

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  1   rejeter. Il dit ensuite que le théâtre a fait plus de mal que de bien à

  2   l'Europe puis que dans le théâtre s'établit un contact entre les hommes et

  3   les femmes en tant qu'acteurs et plus encore dans les coulisses, or ça il

  4   faut le rejeter. Et donc ceux qui sont des acteurs et qui mènent une vie

  5   d'acteur ne peuvent pas à de bonnes mères, de bons parents, et cetera.

  6   Ensuite au point 7, qu'il faut réduire au strict minimum les gestes de

  7   salutation, l'on serre la main aux femmes c'est quelque chose qui n'est pas

  8   islamique, enfin le geste lui-même, il ne faut pas tendre la main à une

  9   femme et si l'on fait cela, si l'on évite de faire cela la femme comprendra

 10   qu'elle n'a pas à répondre en tendant la main et on n'évitera ainsi ce

 11   geste qui n'est pas islamique.

 12   C'est tout ce que j'avais à dire sur cet ouvrage.

 13   Q.  Très bien. Je vous prie maintenant d'ouvrir le document 3D 00855. Il

 14   s'agit d'un ouvrage qui est --

 15   Mme PINTER : [interprétation] Egalement référence au classeur numéro 3 pour

 16   MM. les Juges --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous avez dit quelque chose tout à

 18   l'heure mais ça a disparu de l'écran. Vous avez dit, d'après vous, à la

 19   lecture de ce livre que l'Etat doit être, que l'organisation de l'Etat doit

 20   être en concordance avec le Coran et non pas l'inverse. Alors quand vous

 21   avez dit ça j'ai regardé dans le texte voir si ça avait dit noir sur blanc

 22   et je ne le trouve pas. Est-ce que c'est une conclusion que vous tirez ? Ou

 23   est-ce que ça a été dans l'interview de M. Izetbegovic ? 

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est écrit explicitement, Monsieur le

 25   Président, dans les règles dont j'ai donnés lecture. Je peux le retrouver

 26   avec votre permission. J'ai même cité cela tel que c'est écrit à un moment

 27   donné, à savoir que pour pouvoir appliquer le Coran, la société doit tout

 28   d'abord être complètement islamisé. C'est écrit clairement mais il faudrait

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  1   que je reprenne ça au début, alors ça n'est pas écrit explicitement dans

  2   cette interview que nous avons vue du président Izetbegovic mais c'est

  3   écrit explicitement dans cette série de règles que j'ai commentées.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  5   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, c'est la

  6   page 3D 41-1040 [comme interprété].

  7   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges, si je peux

  8   vous apporter mon concours. Excusez-moi de me lever ainsi et d'interrompre,

  9   mais je vois la partie dont il s'agit. Je vois que M. Praljak a répondu à

 10   cela lorsqu'il avait devant lui la page 3D 40-1570 de cet ouvrage précédent

 11   que nous venons juste de laisser derrière nous.

 12   Mme PINTER : [interprétation] C'est la page 131 dans la pagination

 13   originale.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Mais, Général Praljak, le fait que les jeunes

 15   Musulmans, M. Izetbegovic, soutiennent qu'il faut islamiser, est-ce que ça

 16   peut être considéré comme le fait qu'ils pensent que tout le monde doit

 17   être Musulman et donc doivent avoir le Coran, sans pour autant entraîner

 18   des modifications ethniques, juridiques, législatives, ou étatiques ? Est-

 19   ce que ça [imperceptible] insu facto, pour vous, le changement de la

 20   constitution de la Bosnie-Herzégovine ? Car c'est là le sujet fondamental.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Messieurs les Juges, que cela

 22   entraînerait une modification substantielle de la constitution. Mais c'est

 23   là le chemin sur lequel ils souhaitent s'engager. Ils souhaitent mettre en

 24   œuvre ce projet, et certaines de ces personnes sont tout à fait conscientes

 25   qu'à ce moment précis, cela n'est pas possible. C'est pour cela que, dans

 26   la déclaration islamique, et compte tenu du fait qu'elle a été publiée,

 27   imprimée en un si grand nombre d'exemplaire si bien que tout le monde les a

 28   lue, tout le monde a pu la lire, c'est pour ça qu'il y ait indiqué

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  1   clairement : "Pour le moment, nous ne sommes pas encore en position de

  2   réaliser cela, mais si nous obtenons une Bosnie-Herzégovine telle que nous

  3   la souhaitons," et là, nous avons M. Izetbegovic qui dit explicitement :

  4   "Lorsque nous aurons 51 %, à ce moment-là, nous aurons la possibilité,

  5   puisque nous serons en majorité, de choisir un gouvernement qui procédera à

  6   une modification de la constitution. Afin de promouvoir une constitution

  7   qui sera fondée sur la loi islamique et la foi islamique."

  8   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

  9   Q.  Général, revenons à ce document initial dont j'ai donné la référence,

 10   3D 00855. C'est l'ouvrage intitulé : "Le temps des parjures," signé par

 11   Miroslav Tudjman.

 12   Mme PINTER : [interprétation] Pour Messieurs les Juges, cela se trouve dans

 13   le classeur numéro 3, où se trouvait également les extraits, livre : "Les

 14   Jeunes Musulmans."

 15   Q.  Alors, Général, vous souhaitiez présenter cet ouvrage pour les Juges de

 16   la Chambre; pourriez-vous peut-être explique tout d'abord pour vous estimez

 17   qu'il est important que les Juges prennent connaissance des faits énoncés

 18   dans cet ouvrage ?

 19   R.  Parce qu'au cours de ce procès, il a été plusieurs fois fait mention de

 20   réunions soient disant secrètes entre Tudjman et Milosevic, à Karadjordjevo

 21   --

 22   M. STRINGER : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre mais j'ai

 23   besoin d'une clarification, s'il vous plaît. Au compte rendu, il est écrit

 24   que le livre s'appelle : "L'heure des infidèles;" mais, moi, j'ai comme

 25   titre : "L'heure du parjure." J'aimerais savoir s'il s'agit bien de la même

 26   chose.

 27   Mme PINTER : [interprétation] Oui, c'est bien le bon titre. Donc : "Le

 28   temps des parjures," c'est bien le même document.

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  1   Q.  Général.

  2   R.  Donc dans toute cette histoire, ce mythe que l'on a créé, comme on

  3   l'aurait fait en marketing, si vous voulez, au sujet des faits concernant

  4   la guerre de 1941 à 1945, je considère que ces personnes, qui sont à

  5   l'origine de tout cela, comme des personnages à l'Ostap Bender, qui sont

  6   des professionnels pour ce qui est de la fabrication du mensonge. Ils

  7   recourent à cet effet à des recettes éprouvées qu'ils leur permettent de

  8   reconduire et de perpétuer autant qu'il le faudra leur contrevérité jusqu'à

  9   ce que les personnes visées par cette opération finissent par y croire,

 10   comme elle fait. C'est ainsi que la perception de ce mensonge devient la --

 11   ce qui est considéré comme les faits et la réalité. L'un de ces mensonges,

 12   qui a pris des proportions considérables à travers différents Etats et dans

 13   ce Tribunal également, est la suivante : à savoir que lors d'une réunion

 14   secrète à Karadjordjevo en 1991, Tudjman et Milosevic se seraient partagés

 15   la Bosnie.

 16   J'ai déjà dit à plusieurs reprises, Messieurs les Juges, que c'était une

 17   absurdité d'un point de vue purement logique, car si Milosevic a les plans

 18   qu'on sait qu'il a, et qu'il procède à des attaques pour les concrétiser,

 19   comment serait-il possible de partager la Bosnie ? Mais qui se préoccupe de

 20   logique ici ? D'un point de vue politique, cela n'a absolument aucun

 21   intérêt, et c'est pour cette même raison que le fils de Franjo Tudjman,

 22   Miroslav Tudjman, et soi-dit en passant, nous nous connaissons déjà depuis

 23   1971, il est professeur de communications à l'université, et sait --

 24   pertinemment, il sait très bien comment l'on manipule les informations,

 25   comment on les traite, et comment on les fabrique. Il a écrit cet ouvrage -

 26   il l'indique lui-même - de défendre non seulement la vérité mais son propre

 27   père. Je souhaiterais simplement montrer un certain nombre d'éléments - pas

 28   trop d'éléments mais un certain nombre d'éléments - dans ce livre afin de

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  1   mettre en évidence ce dont il s'agit. C'est ce que je voudrais montrer aux

  2   Juges de la Chambre.

  3   Q.  Est-ce que nous trouvons dans cet ouvrage les points de vue de Miroslav

  4   Tudjman ? Est-ce que c'est cela que vous voulez présenter, ou bien s'agit-

  5   il de fait ?

  6   R.  Il s'agira uniquement de faits.

  7   Q.  Merci. Puisque vous avez fait mention de cette réunion secrète à

  8   Karadjordjevo, nous pouvons maintenant passer à la page 136. Donc en

  9   version croate, c'est la 3D 23-0407, alors qu'en version anglaise, c'est la

 10   page 3D 23-0761, et cela continue en pages 3D 23-0762 et 3D 23-0763.

 11   Allez-y, Général.

 12   R.  Ici M. Miroslav Tudjman s'attaque tout d'abord à cette hypothèse selon

 13   laquelle il serait agi d'une réunion secrète, il la discrédite. Donc il

 14   parle de l'académique, Dusan Bilandzic, et sa

 15   parution devant le présent Tribunal dans l'affaire Blaskic, affaire dans

 16   laquelle le Procureur, M. Kehoe, parle de cette réunion secrète mais le

 17   Procureur ne peut même pas se rappeler la date exacte; est-ce que c'était

 18   le 10 ou le 11 mars ?

 19   M. STRINGER : [interprétation] L'Accusation soulève une objection à cette

 20   question.

 21   J'ai regardé le sommaire, Monsieur le Président. Il semble que ce

 22   soit les commentaires de M. Tudjman sur l'affaire Blaskic, le jugement

 23   Blaskic. Il a droit à son opinion, bien sûr, mais j'ai l'impression que ses

 24   opinions ne sont pas plus légitimes que les opinions de quiconque, et faire

 25   des commentaires sur ce qui s'est passé dans un autre procès ne va pas être

 26   très utile pour cette Chambre de première instance. Ce n'est pas plus, il

 27   n'y a rien de plus en fait, c'est une perte de temps à notre avis si nous

 28   voudrions passer à autre chose.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous, c'est une perte de temps. La Défense

  2   estime que ce n'est pas le cas. Les Juges n'ont pas tous les éléments en

  3   leur main. Ils ont eu le procès Blaskic comme tout le monde. Je constate

  4   que, dans le document, on parle du Procureur Kehoe qui faisait

  5   l'interrogatoire. Il me semble que c'est le même Kehoe qui est maintenant

  6   avocat de M. Gotovina, si je ne me trompe. Alors --

  7   Mme PINTER : [interprétation] Si je peux juste ajouter une chose, Monsieur

  8   le Président. J'ai explicitement demandé au général si l'on va énoncer, si

  9   on l'on s'apprêtait à énoncer des points de vue émanant de cet ouvrage ou

 10   bien des faits. Nous n'allons pas nous pencher sur l'ensemble de cet

 11   ouvrage mais uniquement sur les faits qui sont pertinents quant à la

 12   question de savoir s'il y a eu ou non une réunion secrète à Karadjordjevo.

 13   C'est là un point sur lequel porte l'acte d'accusation.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [phon]

 15   M. STRINGER : [interprétation] Je laisse les choses en l'état pour

 16   l'instant, si je puis. Mais j'aimerais faire une remarque mais en séance à

 17   huis clos partiel, s'il vous plaît.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 19   Monsieur le Greffier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 21   partiel.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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  9   [Audience publique]

 10   Mme PINTER : [interprétation]

 11   Q.  Allez-y, Général.

 12   R.  Donc à la page que nous avons maintenant, l'agence de presse croate

 13   HINA, tout comme chaque état dispose de sa propre agence de presse.

 14   L'agence croate s'appelle HINA, et cette agence, le 25 mars, a publié

 15   l'information suivante, à savoir que Milosevic et Tudjman se seraient

 16   rencontrés à Karadjordjevo où ils se seraient entretenus de la crise

 17   économique, du futur des relations au sein de la Yougoslavie et à la

 18   réunion qui était prévue entre les présidents des différentes républiques.

 19   Q.  De quelle année s'agit-il pour le compte rendu d'audience ?

 20   R.  1992. Alors maintenant nous sommes en page 138.

 21   Q.  En version anglaise, la page 3D 23-0764, en version croate 3D 23-04 --

 22   alors en version anglaise, c'est également en page 0765, et en version

 23   croate, la 3D 23-0408.

 24   R.  Dans la suite, il est dit qu'ils ont conclu que la résolution des

 25   problèmes existants en Yougoslavie nécessitait un délai de deux mois. Ils

 26   ont décidé d'envisager la proposition de la Chambre de commerce qui

 27   consisterait à apporter des amendements au comité fédéral exécutif. Tout

 28   cela constitue le contenu, la teneur de cette réunion.

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  1   Ensuite nous avons un article venant de Ljubljana, cela encore l'agence de

  2   presse croate en fait état, le 6 mars. Cette politique telle qu'elle

  3   existait entre Milosevic et Tudjman incompatible qu'elle était commençait à

  4   avoir des conséquences sur les visées, la position de Milosevic et ainsi

  5   que sur l'autorité de Tudjman. A Belgrade, il y avait déjà des

  6   manifestations de masse. La Krajina autour de Knin menaçait déjà de se

  7   séparer, ce qui représentait un problème complètement différent pour

  8   Tudjman, à savoir comment qu'il allait résoudre tout cela. On parle de

  9   nouveau d'une échéance ou plutôt d'un délai de deux mois. On parle de la

 10   mise à pied d'Ante Markovic qui était le président du comité exécutif

 11   fédéral ou l'équivalent d'un premier ministre. Il est également dit que de

 12   nombreuses questions se posent dont la solution devra attendre, la

 13   résolution devra attendre. C'est donc ce que feront état les journalistes

 14   slovènes.

 15   Alors le 27 mars, l'agence croate fait état de ce que le journal français

 16   "La Croix" écrit à ce sujet. 

 17   Q.  Cela se lit : "La Croix."

 18   R.  Il -- l'agence fait état du fait donc qu'il est écrit dans La Croix que

 19   la Yougoslavie se serait engagée sur la voie du confédéralisme conformément

 20   au projet de la communauté européenne et le journal se réfère également à

 21   l'analyse du célèbre historien, alors je ne sais pas comment cela se

 22   prononce en français, François Feuilleteau, et l'on évalue cette réunion

 23   comme ayant représenté un progrès considérable. Alors ensuite il est

 24   question du journal allemand Handelsblatt qui lui aussi fait état de cette

 25   réunion. Georg von Hubbenet, qui est le correspondant sur place, dit

 26   que les amendements constitutionnels devraient être adoptés et il parle de

 27   la mise à pied d'Ante Markovic, de la proposition de la Chambre de Commerce

 28   de Yougoslavie mentionnée ci-dessus, et cetera.

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  1   Donc nous avons ici affaire à une période dans laquelle on parle encore de

  2   la Yougoslavie, de confédéralisme à un moment où Tudjman aussi espère

  3   encore qu'il réussira à persuader Milosevic d'abandonner son projet

  4   politique rigide. Evidemment c'est illusoire, mais voit qu'un effort a été

  5   fait en ce sens par lui.

  6   Donc il est dit ici vers la fin de la page qu'on a adopté la conclusion --

  7   Q.  Un instant, en version anglaise, c'est la page 3D 23-0766; en version

  8   croate, c'est toujours la même page.

  9   R.  Il a donc été convenu que les présidents des républiques allaient se

 10   réunir pour trouver des solutions. C'est alors qu'on a organisé des

 11   réunions tournantes au sens où les présidents des différentes républiques

 12   se réunissaient à tour de rôle dans les différentes républiques à Sarajevo,

 13   à Zagreb, à Belgrade, à Skopje. Ils se rendaient partout et c'était donc ce

 14   groupe de personnes qui s'efforçaient de dénouer -- résoudre ce nœud

 15   gordien; cependant, le fossé entre les options politiques de Milosevic

 16   étaient tout simplement insurmontables.

 17   Ensuite en page 140 --

 18   Q.  C'est la page 3D 23-0409 en version croate, et en version anglaise, 3D

 19   23-0767 et 0768 et 69.

 20   R.  Ici, et c'est ce qu'on a vu d'ailleurs dans cette affaire, j'ai

 21   présenté la lettre écrite à la main d'Izetbegovic, le président Tudjman --

 22   Q.  Attendez. Il s'agit de la pièce 3D 00295. Allez-y.

 23   R.  D'après cette lettre, on voit déjà qu'Alija, avec spin docteurs et ses

 24   agents autour de lui, il avait déjà accepté le récit selon lequel même

 25   avant la réunion on considérait que Milosevic allait proposer à Tudjman le

 26   partage de la Bosnie. Donc la réunion n'avait même pas eu lieu et on

 27   expliquait déjà à Alija ce qui allait se passer et le tout dans le but

 28   d'empêcher une meilleure alliance entre les Croates et les Musulmans. C'est

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  1   évident.

  2   Ensuite, à la page 140, il est facile de conclure ce que nous allons

  3   voir par la suite ce que Milosevic a dit lui aussi : Bon Dieu, si un accord

  4   de partage de la Bosnie-Herzégovine avait été conclu, il n'aurait pas été

  5   nécessaire d'avoir d'autres réunions et la guerre ne se serait pas produite

  6   comme elle s'est produite car avec tout le pouvoir que Milosevic avait avec

  7   son armée, s'il avait conclu un accord portant sur le partage de la Bosnie-

  8   Herzégovine avec Franjo Tudjman, et bien ceci aurait été fait en cinq

  9   jours.

 10   Donc nous pouvons poursuivre.

 11   Mme PINTER : [interprétation] Page 144 du livre et dans la version

 12   électronique, il s'agit de 3D 23-0411 en croate et en anglais 3D 23-0774 et

 13   3D 23-0775, et 3D 23-0776.

 14   Q.  Poursuivez, Général.

 15   R.  A ce moment-là, compte tenu du fait qu'il y a eu d'autres réunions,

 16   cette histoire de Karadjordjevo n'apparaissait plus; elle a réapparu en

 17   1993, lorsque pour des raisons obscures il fallait de nouveau approfondir

 18   ou plutôt lancer un conflit entre les Musulmans et les Croates. Là encore,

 19   une fois sur le territoire peuplé par des Musulmans, on redit : vous voyez,

 20   il y a longtemps Tudjman partageait -- procédait au partage de la Bosnie-

 21   Herzégovine avec Milosevic. Donc c'est ça ce problème jusqu'en 1993,

 22   personne n'en parlait et de nouveau en 1993, l'on a commencé à les attaquer

 23   au sujet d'un dit partage qui aurait survenu deux ans auparavant, entre-

 24   temps la guerre sévissait déjà. Là, nous avons la lettre du 16 juillet

 25   1993, qui a été envoyée par Franjo Tudjman à Boutros Boutros-Ghali, le

 26   secrétaire général à l'époque des Nations Unies, où il dit encore une fois

 27   que ces pressions qui ont été créées maintenant où l'on accusait la Croatie

 28   de vouloir partager la Bosnie-Herzégovine mais il indique que la Croatie

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  1   avait reconnu l'indépendance et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine,

  2   qu'il n'y a pas eu d'accord entre la Croatie et qui que ce soit concernant

  3   le partage de la Bosnie. La Croatie a fait preuve de l'esprit de la

  4   coopération, de la recherche des solutions; la Croatie allait soutenir

  5   toutes les solutions acceptables pour les peuples de la Bosnie-Herzégovine;

  6   la Croatie soutient le principe de l'indépendance et de la souveraineté et

  7   de l'intégrité territoriale; ensuite il indique comment la guerre pourrait

  8   se terminer et ainsi de suite.

  9   Malheureusement, M. Tudjman doit se justifier en raison du fait que

 10   l'on faisait croire qu'il y avait un accord de partage en 1991, et à ce

 11   moment-là, c'était déjà accepté comme un fait. Donc tout simplement nous

 12   étions tous obligés de nous justifier face aux mensonges -- aux

 13   fabrications.

 14   Ensuite Tudjman a répété à d'innombrables reprises au journalistes et

 15   ici aussi il dit : je répète une fois pour toute, il n'y a jamais eu de

 16   prétendu accord concernant le partage de la Bosnie avec moi-même et l'autre

 17   partie. Ceci figure dans la note en bas de page 31, où on explique tout au

 18   sujet des accords signés, et cetera.  

 19   Dans la partie F, ce que, moi, je peux dire en tant que témoin, dans toutes

 20   les discussions, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la Croatie

 21   demandait que la FORPRONU ne se garde pas seulement au milieu des parties

 22   en Croatie, donc entre les forces de Milan Martic et celles de la Croatie,

 23   mais qu'il se place sur les frontières de la Croatie. Si la Croatie est un

 24   Etat reconnu, nous ne cessions de répéter : allez vous mettre à la

 25   frontière de la Croatie pour empêcher que cette guerre ne se répande.

 26   Cependant, ceci n'a jamais eu lieu pour des raisons qui ne sont pas claires

 27   car, vous voyez, dès le début de la guerre, lorsque des émissaires venaient

 28   encore, ceci aurait été possible les forces internationales n'avaient qu'à

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  1   se déployer le long des frontières de la Croatie avec la Bosnie et avec la

  2   Serbie, et personne n'aurait pu les toucher, et à l'intérieur de cela, elle

  3   aurait pu être imposée comme condition, comment protéger les minorités et

  4   respecter les normes et les lois européennes, et cetera. Donc au début, si

  5   le souhait avait existé, cette guerre aurait très facilement pu être

  6   évitée.

  7   Nous allons continuer, il s'agit toujours de la même page. Milosevic donc a

  8   dit cela à Mme Laura Zilber et Alan Little dans le livre qu'ils ont écrit,

  9   à la page 124. Ils ont écrit ce livre en 1996. Là, Milosevic dit : "Tudjman

 10   m'a dit qu'il voulait un Etat indépendant." Nous n'avons pas pu trouver un

 11   accord. Milosevic ne pouvait pas accepter cela. Et puis il dit certains

 12   devenaient et pensaient qu'on avait trouvé un accord sur le partage de la

 13   Yougoslavie. Là, il parlait de façon très directe, c'était typique pour

 14   lui, et il conclut très bien ici, il dit : je vous dis maintenant, si on

 15   avait décidé cela là-bas, on aurait pu immédiatement l'effecteur. Et c'est

 16   ça qui est important.

 17   Donc si des forces serbes aussi puissantes avaient trouvé un accord avec la

 18   Croatie, qui avait des forces aussi en Bosnie-Herzégovine, qui aurait pu

 19   les empêcher ? Ce plan aurait pu être mis en œuvre en trois jours. C'est ce

 20   qu'il dit : on aurait pu le faire, et il n'aurait pas immédiatement après

 21   attaqué la Croatie, il n'y aurait pas eu toute cette guerre jusqu'à l'an

 22   1995.

 23   Puis un peu plus loin, pages 146 et 147 --

 24   Q.  Il s'agit des pages 3D 23-0412 pour la version croate, et 3D 23-0777,

 25   0778 et 0779 en anglais.

 26   R.  Ici nous voyons simplement la citation de la déclaration du président

 27   Tudjman et Milosevic de Genève, signée par les deux le 17 juillet 1993.

 28   Dans cette déclaration, ils disent que les conjectures portant sur le

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  1   partage prétendu de la Bosnie et l'accord de partage n'ont aucun fondement.

  2   Ensuite ils disent aussi que la paix durable en Bosnie-Herzégovine, et dans

  3   l'intérêt des trois peuples constitutifs, et qu'un accord doit être trouvé

  4   sur l'établissement des trois républiques dans le cadre d'une

  5   Confédération. C'était les propositions faites par Stoltenberg et Lord Owen

  6   à l'époque, c'est leur plan.

  7   Les deux présidents ici disent qu'ils sont d'accord avec ce plan. Ensuite

  8   Borislav Jovic s'exprime à ce sujet-là, or il était la main droite de

  9   Milosevic. A mon avis, il faisait tout ensemble, sauf dormir ensemble. Ici,

 10   il dit : pour moi, ça aurait été une énorme surprise car, à ce moment-là,

 11   une telle solution aurait voulu une -- dire une grande déviation de

 12   l'ensemble de notre politique. Autrement dit, il dit notre politique

 13   globale n'était pas d'obtenir un bout de la Bosnie mais d'obtenir la

 14   Yougoslavie allant jusqu'à Karlobag, Virovitica, et Karlovac.

 15   Ensuite Jovic s'exprime à ce sujet-là de nouveau, dans la suite du texte,

 16   et nous avons aussi les notes en bas de page. Il dit que Milosevic -- si

 17   c'était le cas ça aurait voulu dire que Milosevic lui avait caché cela,

 18   mais il dit que ce n'est pas possible car ceci n'était pas conforme aux

 19   objectifs de la direction serbe, et il dit que ceci irait à l'encontre de

 20   nos opinions sur la question serbe la manière de la résoudre en Croatie, et

 21   notre conception de la préservation de la Yougoslavie. Ça c'est tout à fait

 22   clair. C'était la politique serbe qui voulait résoudre la question serbe en

 23   Croatie de la manière que nous avons vue ici, à travers tous les articles

 24   et les livres ici comment voulez-vous qu'ils veuillent partager la Bosnie-

 25   Herzégovine, alors que d'après leur plan, l'ensemble de la Bosnie-

 26   Herzégovine et les trois quarts de la Croatie, allaient faire partie de la

 27   Yougoslavie.

 28   Donc nous avons maintenant les pages 148 et 149, il y a Pr Dr Smilja

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  1   Abramov, qui a participé à plusieurs commissions ici. Elle en parle, elle

  2   aussi, mais, bon, inutile d'entrer dans ces détails-là. Ensuite Bilandzic,

  3   lui aussi, dit qu'il n'y a pas eu de telles discussions. Milan Babic le

  4   dit, lui aussi, il dit que tout simplement il ne comprenait pas cela car

  5   Milosevic lui avait promis un Etat sur le territoire de la Bosnie-

  6   Herzégovine, et ainsi de suite.

  7   Si vous le souhaitez nous pouvons passer maintenant à la dernière partie

  8   brièvement.

  9   Q.  Il s'agit de la page 3D 23-0437, ligne 197 du livre. En anglais, il

 10   s'agit de 3D 23-0847 et la suite. Car les pages suivent l'ordre, donc il

 11   n'est pas nécessaire de citer toutes les pages pour ne pas vous interrompre

 12   mais après je les citerais.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder ce texte, bon, je crois comprendre,

 14   en vous écoutant, que vous contestez cette réunion secrète, alors même que

 15   cette réunion secrète a été actée comme un fait réel dans le jugement

 16   Blaskic, semble-t-il, au paragraphe 105 du jugement. Bon, vous contestez

 17   cette version, très bien, mais je n'ai pas vu dans -- peut-être que ça

 18   viendrait après.

 19   Milosevic, qui a été ici jugé, il a dû être interrogé sur cette rencontre.

 20   Donc vous avez regardé ce qu'il a pu dire lui ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous le dire avec exactitude,

 22   mais je pense que, lors de son procès aussi, il a dit, tout d'abord, il ne

 23   s'agissait pas d'une réunion secrète. Tous les journaux ont rendu public

 24   cette information, ce n'était pas secret, et les Allemands et les Français

 25   et les Croates ont rendu public une information concernant cette réunion,

 26   donc elle n'était pas secrète.

 27   Deuxièmement, absolument tous les participants qui étaient autour, et

 28   Abramov, Bilandzic, Babic, Milosevic et Tudjman, et cetera, ils disent

Page 40326

  1   tous, et peu importe si c'est eux qui le disent, mais logiquement parlant,

  2   Milosevic ne pouvait pas avoir un plan de création de la Yougoslavie qui

  3   ressemble à cela et ensuite vouloir prendre une partie de la Bosnie-

  4   Herzégovine. Logiquement les deux options s'excluent mutuellement, et je

  5   pense que Milosevic l'a confirmé ici aussi avec un témoin. Je pense que

  6   c'était lors du témoignage de Stipe Mesic, mais je ne peux pas l'affirmer

  7   avec exactitude.

  8   Donc je conteste, et ces documents contestent aussi. La réunion elle a eu

  9   lieu, et la réunion n'était pas secrète, or lors de la réunion, il n'y a

 10   pas eu et ceci n'aurait pas été possible d'ailleurs dans le cadre de ces

 11   options politique, il n'était pas envisageable qu'ils parlent lors de cette

 12   réunion du partage de la Bosnie. Si tel avait été le cas --

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, s'il vous plaît. Moi,

 14   je pensais que nous entendions un témoin. J'entends quelqu'un qui plaide

 15   sans cesse. On parle de points de vue, d'aucun, de choses qu'ils disent

 16   dans certains livres, on cite quelqu'un d'autre, et ensuite quelqu'un

 17   d'autre qui est re-cité.

 18   Pardonnez-moi, Monsieur Praljak, mais il ne s'agit pas d'un témoignage ici.

 19   Vous n'évoquez pas des faits. Vous ne faites que plaider. Bien sûr, c'est

 20   quelque chose de tout à fait légitime, mais ceci n'est pas un moment

 21   approprié pour plaider. Je crois qu'il serait bon pour le déroulement de

 22   cette procédure de redevenir à ce que l'on peut à proprement parler ou

 23   évoquer comme un témoignage.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Le fait, mon collègue appelle votre attention là-

 25   dessus. Le fait c'est de savoir si cette réunion a eu lieu oui ou non. Vous

 26   avez dit oui, cette réunion a eu lieu --

 27   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : -- elle n'a pas abordé la partition de la Bosnie-

Page 40327

  1   Herzégovine tel que le soutient le Procureur. Donc ça c'est un fait.

  2   Maintenant pour prouver ce fait, il faut qu'à partir des documents qui vous

  3   sont présentés, vous indiquiez que la réunion a eu un autre objet que celui

  4   allégué par le Procureur ou par d'autres. C'est ça, c'est ça le fait.

  5   Est-ce que vous avez compris ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Entièrement, Monsieur le Président Antonetti.

  7   La réunion a eu lieu, ce n'est pas une réunion secrète puisque les Slovènes

  8   et l'agence croate, et des journaux français et des médias allemands ont

  9   rendu public l'information portant sur cette réunion, et ils ont rendu

 10   public leur connaissance au sujet du contenu de la réunion, selon ce qu'on

 11   pensait à l'époque. Personne d'entre eux ne parlait du fait qu'on aurait

 12   abordé le partage de la Bosnie.

 13   Ceci n'a été mentionné nulle part, moi, j'ai participé à cela à

 14   l'époque. C'est en 1993 que l'on commence pour la première fois à prétendre

 15   que l'on avait parlé du partage de la Bosnie à l'époque. Et, ici pour

 16   corroborer, j'ai présenté la lettre de Tudjman à Boutros-Ghali, la

 17   déclaration de Milosevic, la déclaration de Borislav Jovic et ils disent

 18   tous qu'il n'a pas été question de cela. Donc quelle autre preuve, je ne

 19   vois pas ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre Blaskic, dans son jugement, moi, je ne

 21   suis pas tenu par le jugement Blaskic. Mais puisque vous l'évoquez, je

 22   regarde, pour arriver à la conclusion parce que c'est qu'ils disent qu'il y

 23   a eu cette réunion confidentielle, il y a quatre notes de bas de page que

 24   je ne vois pas. Je vais regarder tout à l'heure le jugement, à quoi ces

 25   notes de bas de page font-elles allusion. Les numéros 204, 205, 206, 207,

 26   apparemment c'est à partir de ces quatre notes de bas de page que la

 27   Chambre en tire la conclusion. Ils se sont peut-être trompés, je n'en sais

 28   rien.

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  1   Mais vous, sans plaider sur les faits, vous dites que cette réunion n'a pas

  2   eu l'objet que certains lui prêtent; c'est ça la conclusion ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président Antonetti.

  4   L'histoire portant sur le partage de la Bosnie, qui aurait été abordée lors

  5   de cette réunion, est apparue pour la première fois en 1993. Vous avez pu

  6   voir hier, qu'en même temps que cette fameuse réunion a eu lieu, Filipovic

  7   est chez Tudjman et on voit bien ce que Tudjman propose à Filipovic

  8   concernant la solution pour la Bosnie-Herzégovine. C'est en même temps que

  9   Filipovic vient en Croatie, en Slovénie, et c'est le document qu'on a vu

 10   hier, et ceci correspond dans le temps à la période pendant laquelle

 11   Tudjman et Milosevic auraient convenu du partage de la Bosnie-Herzégovine.

 12   J'affirme - et on a les faits pour corroborer cela - que cette réunion n'a

 13   pas été secrète et aucun des acteurs présents ne dit qu'il était question

 14   du partage de la Bosnie-Herzégovine.

 15   Troisièmement, cette invention est apparue en 1993 pour des raisons

 16   liées aux pressions que l'on exerçait contre la Croatie.

 17   Mme PINTER : [interprétation]

 18   Q.  Général, --

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite indiquer

 20   un point pas clair dans la traduction, ce qui peut provoquer un malentendu.

 21   A la page 13, lignes 17 et 18; et page 31, ligne 11, si j'ai bien

 22   compris, il est écrit que les histoires concernant le partage de la Bosnie-

 23   Herzégovine sont apparues en 1993. Si j'ai bien compris le général Praljak,

 24   il a dit qu'en 1993, les histoires selon lesquelles lors de la réunion à

 25   Karadjordjevic, il était question du partage de Bosnie-Herzégovine, sont

 26   apparues.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. 

 28   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Madame Alaburic.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour terminer le sujet.

  2   Vous avez parlé tout à l'heure de M. Mesic. Je vois dans le livre de

  3   Miroslav Tudjman, il en fait état. Pour résumer qu'est-ce que M. Mesic dit

  4   sur cette "réunion," - entre guillemets - de Karadjordjevo ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] M. Mesic a déposé devant ce Tribunal et

  6   il a dit qu'il avait entendu dire que, lors de cette réunion, l'on

  7   partageait la Bosnie-Herzégovine. Ce livre a été écrit suite à cette

  8   déposition. Stipo Mesic a fait preuve d'une parjure. Il a dit des

  9   contrevérités ici. Il a menti ici car c'était déjà un règlement de compte

 10   entre lui et Tudjman. Il le faisait du vivant de Tudjman mais surtout après

 11   la mort de Tudjman. Donc M. Mesic n'a pas présenté les faits véridiques, et

 12   s'agissant du "Soldat croate" dont j'ai parlé ici, M. Mesic dit -- comme

 13   dans le livre : "Le Soldat croate" en 1993 dit que la politique appliquée à

 14   l'époque était sage, intelligente; alors comment est-ce qu'il se fait qu'en

 15   1991, M. Mesic, s'il avait entendu parler du partage de la Bosnie-

 16   Herzégovine qui faisait l'objet des discussions entre Tudjman et Milosevic,

 17   et s'il était contre cela, pourquoi il ne l'a pas dit publiquement et

 18   ouvertement à l'époque ? Il était le numéro deux de l'Etat, juste à côté de

 19   Franjo Tudjman; comment se fait-il qu'il n'a jamais mentionné cela lors des

 20   réunions auxquelles j'ai participé moi-même ? Il attendait que tout se

 21   passe c'est seulement --

 22   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, pardonnez-moi

 23   mais je vais m'opposer à ceci et soulever une objection en fait. Parce que

 24   sur cette partie, ce qu'il dit en fait, il commence à proposer des théories

 25   et fait des suppositions sur ce qu'il pense ou ne pensait pas. Ceci ne

 26   constitue pas des éléments de preuve pertinents. La question en fait

 27   maintenant consiste à dire ce qu'a dit Mesic, et en fait ceci devient un

 28   discours contre les propos et témoignages d'un autre témoin devant ce

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  1   Tribunal. C'est la raison pour laquelle je soulève une objection parce que

  2   ce type de commentaire et objection venant de la part de quelqu'un qui est

  3   à la barre, d'un accusé à la barre, à mon sens, n'a pas de sens. Il peut

  4   simplement répondre à la question des Juges de la Chambre, à savoir qu'a

  5   dit Mesic à Karadjordjevic, s'il vous plaît.

  6   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le

  7   général Praljak réponde aux questions et qu'il a dit haut et fort quelles

  8   avaient été les réactions de Stipo Mesic, tout d'abord.

  9   Deuxièmement, il n'annonçait que les faits. Il a dit que Stipo Mesic

 10   a été dans la politique depuis 1991, et que si, en 1991, il était au

 11   courant de cette disons réunion secrète et du partage de la Bosnie-

 12   Herzégovine, s'il le savait pourquoi il ne disait rien à ce sujet.

 13   Donc le général ne présente pas ses propres évaluations et opinions,

 14   mais il présente les faits correspondant aux événements de l'époque. Puis

 15   il a fait référence au livre : "Le Soldat croate," présenté ici dans lequel

 16   Stipo Mesic ne s'est nullement distancié ni n'a parlé d'un partage éventuel

 17   de la Bosnie-Herzégovine qui aurait fait l'objet d'un accord entre le Dr

 18   Tudjman et M. Milosevic. Donc --

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, Maître Pinter,

 20   mais je trouve difficile d'accepter que M. Praljak évoque des faits. En

 21   fait, il lit des extraits d'ouvrages et il nous parle de ce que d'autres

 22   personnes pensent. Pardonnez-moi, là, il ne s'agit pas de fait. Il s'agit

 23   en fait de point de vue d'autres personnes. Pardonnez-moi, s'il avait

 24   assisté à quelque chose, s'il pouvait nous dire, j'ai entendu M. Tudjman

 25   dire quelque chose, telle et telle chose, ce serait différent. Le fait

 26   qu'il vivait à cette époque-là ne signifie pas -- ne dit pas qu'il est

 27   témoin de ces faits, il ne dit pas : je sais ceci ou cela; il lit des

 28   extraits d'ouvrage, et là, il ne s'agit pas d'un témoignage, pardonnez-moi

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  1   mais ce n'est pas un témoignage.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Attendez, s'il vous plaît.

  3   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, voici les faits : en 1991, en

  4   1992, en 1993, à des moments différents, j'ai été membre du Conseil du

  5   VONS, et je rencontrais M. Tudjman et M. Mesic à de nombreuses reprises.

  6   Jamais aucun mot n'a été proféré par qui que ce soit, y compris M. Mesic,

  7   au sujet du fait que Franjo Tudjman et Milosevic, en 1991 au printemps,

  8   auraient trouvé un accord concernant le partage de la Bosnie. Cette

  9   histoire - et c'est mon expérience - est apparue pour la première fois en

 10   1993, et j'en témoigne, donc c'était deux ans après la réunion. Je sais

 11   quelle est apparue en raison du fait que c'était le début du règlement de

 12   compte politique, je le sais. Stipo Mesic n'avait pas assisté à la réunion.

 13   Il sait la même chose que, moi, je sais. Il a déposé ici en se lançant dans

 14   des conjectures ici, lui aussi. Deux personnes ont participé à cette

 15   réunion et ces deux personnes ont dit ce qu'ils avaient à dire. Ce que je

 16   dis jusqu'à maintenant c'est ma déposition et ici nous avons énuméré les

 17   faits qui ont été rendus public et, moi, j'ai dit ce que je dis dans le

 18   cadre de ma déposition.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce que vous venez de nous dire

 20   maintenant ceci constitue votre témoignage. Ça c'est bien. Moi, je n'ai

 21   aucun problème lorsque vous dites : je n'ai jamais entendu quelque chose de

 22   la sorte; ça c'est votre témoignage. Mais ensuite vous évoquez ce que

 23   d'aucun ont dit et ce que d'autres ont rapporté, cela va au-delà du champ

 24   de votre témoignage. Cela relève peut-être de l'expertise ou, en tout cas,

 25   d'une leçon d'histoire.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Si je peux, Messieurs les Juges, Monsieur le

 27   Président, ici il s'agit de la présentation des moyens à décharge. Il ne

 28   revient pas à la Défense de prouver cela. C'est l'Accusation qui a placé

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  1   cette thèse concernant cette réunion et son prétendu contenu, elle a

  2   présenté des éléments de preuve qui s'élèvent seulement à ouï-dire de

  3   troisième main et qui se résume au fait de dire un tel a entendu qu'un tel

  4   aurait dit cela.

  5   Maintenant, dans la déposition de M. Praljak, il a trouvé les faits

  6   corroborant une thèse opposée et il a dit ses propres connaissances à ce

  7   sujet, et il peut dire simplement ce que d'autres personnes disent et

  8   notamment les participants ou des collaborateurs proches, et nous venons de

  9   l'entendre. Donc, à mon avis, c'est justement ça la déposition, la

 10   déposition portant sur les faits qui existent dans la réalité que l'accusé

 11   a réussi à trouver et a classifié, et puis, bien sûr, comme vous le dites

 12   aussi, la partie connue personnellement et directement par l'accusé.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- vérifier quelque chose avec vous et

 14   puis après, ça sera la pause mais je vais être très bref.

 15   Vous nous avez dit que vous avez participé aux réunions du VONS, qui est

 16   l'instance suprême placée auprès du président de la République de Croatie

 17   en 1991, 1992, 1993. Nous avons quelques comptes rendus des réunions. Je ne

 18   sais pas mais je vais vérifier si on a des comptes rendus de 1991. Mais,

 19   comme vous, vous avez participé à ces réunions, quand M. Tudjman

 20   rencontrait des personnalités politiques étrangères, est-ce

 21   qu'automatiquement, lors de ces réunions, il disait aux participaient qui

 22   étaient un nombre très restreint ce qui avait été abordé lors de ces

 23   rencontres avec X, Y ou Z ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, Messieurs les Juges, mis à part

 25   ces réunions au VONS, il y a eu toute une série de réunions qui n'ont pas

 26   été si officielles avec Franjo Tudjman, avec Mesic et ainsi de suite où il

 27   a été débattu de centaines de choses.

 28   Alors, deuxièmement, jamais jusqu'en 1993, je n'ai jamais entendu parler

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  1   quelqu'un parler d'une réunion secrète de Karadjordjevo et le partage de la

  2   Bosnie-Herzégovine.

  3   Troisièmement, Franjo Tudjman avait à l'occasion des entretiens et je le

  4   sais pour sûr c'est mon témoignage à moi. Il avait un défaut que ces gens

  5   ont souvent compris, notamment les Américains. Il a essayé de dissocier

  6   chose qui est une position pragmatique et politique, car preuves de

  7   coopérativité, de démocratisme et tout les reste, mais il voulait à

  8   l'attention de ces gens, et d'après moi, c'était une erreur de sa part. Je

  9   vais vous dire pourquoi.

 10   Il essayait de leur expliquer le contexte historique. Or ces gens-là

 11   n'ont pas le temps d'écouter cela. Ces gens venus d'Amérique, ils n'avaient

 12   que 15 minutes à leur disposition et ils veulent trancher le problème entre

 13   Etat comme des problèmes de Wall Street, on investit tant ici, tant là-bas,

 14   et tac et tout à coup, et s'est terminé. Eux, ça les embêtait ces

 15   histoires, ils ne comprenaient pas. Alors s'ils comprenaient quelque chose,

 16   ils comprenaient à tort et à travers. Aussi souvent pensaient-ils et il y a

 17   eu des malentendus que ces interprétations historiques étaient prises comme

 18   si lui il parlait de sa politique à lui.

 19   Alors, Messieurs les Juges, je vais dire en guise de conclusion, je l'ai

 20   indiqué à mon président. J'ai essayé de lui indiquer pour souligner qu'eux

 21   n'avaient ni le souhait, ni la volonté d'écouter, de prêter oreille à tous

 22   ces détails historiques que lui historien avait estimé devoir dire et ils

 23   voulaient eux trouver des solutions courtes, pratiques, sans objection

 24   aucune. C'est là qu'il y a eu confusion où j'ai attiré l'attention du

 25   présent sur le fait qu'on le comprenait souvent à tort et à travers.

 26   Mme PINTER : [interprétation] Juste une question et la pause ?

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause parce qu'on a déjà dépassé le

 28   temps. Alors vous reviendrez après la pause. On a tout ça, nous, bien en

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  1   tête, donc on pourra continuer dans 20 minutes.

  2   --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

  3   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Maître Pinter, vous vouliez reposer une

  5   question.

  6   Mme PINTER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La question se

  7   rapportait à une des questions que vous avez posée; j'ai jugé que le

  8   général Praljak n'avait pas répondu intégralement à la question que vous

  9   aviez posée, je voulais attirer son attention sur ce fait.

 10   Q.  Une partie de la question du Juge Antonetti, qui était celle de savoir

 11   si, au VONS, le président Tudjman a informé les personnes présentes de ces

 12   réunions avec les représentants étrangers.

 13   R.  Moi, je n'ai pas compris mais j'aurais répondu. La réponse est oui, et

 14   je vais montrer certains PV du VONS. Non seulement il en a informé, mais il

 15   s'agissait là de l'une des choses principales auxquelles vaquait le

 16   président Tudjman, à savoir essayer de comprendre ce que les différents

 17   pays constituant à la communauté internationale cherchaient à faire, il

 18   essayait de s'adapter, essayer de trouver un passage pour sa politique, une

 19   voie pour sa politique aux fins de mettre sur pied cette Croatie, parce que

 20   différents représentants des différents pays avaient des positions variées

 21   et toutes sortes de jeux étaient en train de se produire. La France,

 22   l'Angleterre, l'Amérique, l'Allemagne, et autres n'avaient pas des

 23   positions unifiées. Chacun tirait un peu de son côté, et c'était plutôt

 24   difficile à comprendre ce que les uns ou les autres voulaient faire aboutir

 25   dans les Balkans, et c'était une préoccupation de sa part. Il voulait

 26   s'adapter aux circonstances internationales car il était conscient de la

 27   chose et il a répété cent fois la chose sans s'adapter, sans faire

 28   comprendre aux occidentaux ce qu'ils voulaient faire ils ne réussiraient

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  1   pas à créer cet Etat croate.

  2   Q.  Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- tout à l'heure, vous avez parlé du

  4   Témoin Bilandzic. C'est qui ce Bilandzic ? Qui c'est ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un historien. Enfin c'est un historien

  6   communiste, pour être tout à fait sincère. Pour ce qui ses ouvrages

  7   historiques que j'ai en bonne partie lus, c'est des œuvres ou des ouvrages

  8   que j'estime non objectifs. Mais c'est un homme qui a été membre de

  9   l'académie par son parti, et dans la vie politique, il n'a jamais été très

 10   actif et très important mais pour ce qui est de certains éléments, le

 11   président Tudjman l'a sollicité pour qu'il prenne part également.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous pose la question parce que, moi, je

 13   n'avais jamais entendu parler de cet individu, mais il est cité dans le

 14   jugement Blaskic, qui est un jugement public, auquel je peux me référer,

 15   parce que cet historien a publié dans "National" en octobre 1996, un

 16   article, parlant de cette négociation. Il aurait dit, et c'est dans le

 17   jugement qu'il y aurait eu la mise en place de deux commissions pour

 18   discuter de la division de la Bosnie-Herzégovine. Voilà. Dans le jugement

 19   Blaskic, pour tout vous dire, la Chambre après continue en liant la réunion

 20   Karadzic et Babic à Graz; a tout ceci, donc il y aurait une logique.

 21   Alors, à votre connaissance, est-ce que des commissions auraient été mises

 22   en place pour discuter de la division de la Bosnie-Herzégovine, telle que

 23   la Chambre Blaskic l'indique dans son jugement au paragraphe 105 ? Il

 24   fallut que je fasse mes recherches pendant la pause. (expurgé)

 25   (expurgé)

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, Bilandzic, pour ce qui

 27   est de ce texte publié par le journal "National," pour le moins qu'on

 28   puisse dire, ne dit pas la vérité. Dans l'affaire Blaskic, en page 150 de

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  1   ce livre, il a été cité de façon exacte, parce que du fait du manque de

  2   temps, et ça a été traduit; Madame Nika, vous pouvez le trouver.

  3   Mme PINTER : [interprétation] 3D 23-0783 et 3D 23-0784 et 85; en version

  4   croate, 3D 23-0414.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, alors Mme Avramov en parle, mais c'est là

  6   que lui en parle. Il dit qu'à cette commission, 95 % des négociations

  7   portaient sur la reconnaissance de la constitution de 1974. Ensuite ils se

  8   sont disputés à ce sujet pour ce qui est des cartes et de partages

  9   concrets, et ça n'a pas existé. Il n'a pas du tout été question de partage

 10   dans le sens à retracer des frontières entre la Serbie et la Croatie en

 11   Bosnie-Herzégovine parce que moi et mes collègues, nous ne croyons pas du

 12   tout avant la guerre -- nous ne croyons pas du tout à la réalité de cette

 13   politique et nous avons estimé qu'il ne fallait pas du tout s'aventurer et

 14   en parler.

 15   Alors si Franjo Tudjman a créé une commission aux fins de procéder à un

 16   partage de la Bosnie-Herzégovine, que voulez-vous qu'il vienne à débattre

 17   pour savoir s'il y aurait partage ou pas ? Et lui affirme qu'il n'y a pas

 18   eu débat du tout.

 19   Or, pour ce qui est de cette commission, qui était censée procéder au

 20   partage de la Bosnie-Herzégovine, aurait été créée par Franjo Tudjman,

 21   "c'est ce qui en découlerait" - entre guillemets - ça se sont des

 22   interprétations politiques à posteriori, et là, je vous fournis mon

 23   témoignage qui porte sur un règlement de compte en -- bon historien et

 24   communiste avec des éléments avec lesquels il n'a pas été d'accord. Il dit

 25   dans l'affaire Blaskic qu'il n'y a pas eu de retracés de frontières parce

 26   qu'il ne constituait aucune espèce d'éléments politiques de poids, et s'il

 27   avait eu pour mission de procéder à un partage de la Bosnie-Herzégovine, il

 28   pouvait fort bien le refuser. Mais on ne lui a confié aucune mission. On

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  1   l'a envoyé là-bas pour raconter des bêtises, pour débattre donc de cette

  2   constitution de 1974, et ils ont passé 90 % du temps à le faire.

  3   En page 148, celle d'avant donc il y a le Pr Dr Smilja Abramov, qui était

  4   président de la Cour constitutionnelle, de leur côté et si on veut lire on

  5   a qu'à lire ce que dit Mme Abramov.

  6   L'INTERPRÈTE : Les interprètes seraient gré à M. Praljak de ralentir un

  7   peu.

  8   Mme PINTER : [interprétation] Pour l'information des Juges, il y a une

  9   partie de la réponse qui se rapporte à la question de M. Trechsel. La

 10   Défense s'est penchée sur le sujet en raison d'un fait, à savoir que les

 11   Juges de la Chambre le 7 septembre 2006 ont rendu une décision pour ce qui

 12   est des faits admis, décision numéro 3, où l'on estime que l'on accepte la

 13   teneur du paragraphe 105 du jugement Blaskic où il est question de cette

 14   réunion entre le Dr Tudjman et Milosevic et au sujet d'un partage de la

 15   Bosnie-Herzégovine. Par conséquent, la Défense se trouve être en droit de

 16   contester ces faits admis et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous

 17   nous penchons de façon intense sur ceci et c'est la raison aussi pour

 18   laquelle nous nous référons à des faits et données qui nous sont

 19   accessibles, tout comme nous ont été accessibles ou comme cela a été

 20   accessible à ceux qui en ont parlé dans l'affaire Blaskic.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je dois vous dire que je ne conteste

 22   absolument pas le fait que vous ayez droit vous-même de contester quoi que

 23   ce soit. Ce n'est absolument pas à ce que j'ai à dire. Moi, je vous ai

 24   donné plutôt un point de vue technique. Je vous a parlé de ce qui est d'un

 25   côté témoignage par rapport à des arguments, c'est tout ce que je voulais

 26   apporter à la discussion.

 27   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, ce que je puis vous

Page 40339

  1   apporter en guise de témoignage c'est deux choses. D'abord, à l'occasion de

  2   toutes ces réunions ou rencontres, il n'y a jamais eu jusqu'en 1993 de ma

  3   part l'occasion d'entendre à Karadjordjevo qu'il y aurait eu été fait état

  4   d'un partage de la Bosnie-Herzégovine, ni de la part du Dr Franjo Tudjman,

  5   ni de la part du président du parlement du Sabor, M. Stjepan Mesic, ni de

  6   la part du chef de tous les services secrets de Croatie, M. Manjolic, ni de

  7   la part de Gojko Susak, ni du premier ministre du gouvernement croate, M.

  8   Grigoric, jamais nulle part. Ça c'est d'un.

  9   De deux, ce que j'ai déjà dit, c'est qu'il y a une confusion notable ou de

 10   taille pour ce qui est de l'aménagement intérieure de la Bosnie-

 11   Herzégovine, donc pour ce qui est de savoir quelle est délimitation qui

 12   faisait partie de ce qu'on entendait par partage de la Bosnie-Herzégovine.

 13   Le plan Cutileiro, dans tous les articles de presse, étaient repris comme

 14   étant un partage de la Bosnie. Le plan Vance-Owen s'appelait également dans

 15   la presse le partage de la Bosnie-Herzégovine. Le plan Owen-Stoltenberg lui

 16   aussi a été qualifié de partage de la Bosnie-Herzégovine.

 17   Ce que je dis dans mon témoignage c'est que je sais que les

 18   présidents Tudjman, Izetbegovic, et Milosevic s'étaient réunis le 12 juin à

 19   Split dans la villa Dalmacija; c'était à l'époque une villa ayant appartenu

 20   à Tito.

 21   Q.  Quand ? 

 22   R.  En 1991.

 23   Q.  Date une fois de plus.

 24   R.  Le 12 juin 1991.

 25   Q.  Vous avez bien dit juin.

 26   R.  Oui. Enfin je ne sais pas si c'est tout à fait exact, mais peu importe,

 27   toujours est-il c'est à l'époque, et ils se sont entretenus pendant cinq

 28   heures, par la suite il y a eu un communiqué officiel, et nous, on le

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  1   savait tous. Il y a eu fuite d'information disant sur quoi ils avaient --

  2   de quoi ils avaient parlé, voilà de quoi la presse a parlé.

  3   Q.  Quelle page ?

  4   R.  Enfin je ne vais pas donner lecture, je l'ai lu dans la presse. Donc je

  5   suis en train de témoigner, moi. Il y a eu une fuite d'information disant

  6   qu'ils étaient entretenus sur l'aménagement intérieur qu'il y aurait eu à

  7   mettre en place, en Bosnie-Herzégovine, ces trois hommes, et la presse

  8   attitrée : "Vecernji List," le journal du soir, "la Bosnie comme la

  9   Suisse." Le 13 juin 1991. Le Vecernji List -- le journal Vecernji List a

 10   dit : "Démantèlement de la Bosnie, de l'ABiH et de la Yougoslavie." Puis le

 11   lendemain, le Vecernji List : "Cantonisation intéressant," puis "La

 12   Dalmatie libre" "Cantons, chose faite ?" "Oslobdjenje," libération :

 13   "Démantèlement n'y aura guère," puis "Vijeste Danas," croate : "Toutes ces

 14   nuances bosniaques." Puis "Oslobodjenje" une fois de plus : "Cantonisation

 15   de l'ABiH : pour et contre, idées nébuleuses." Puis "Vijeste," un quotidien

 16   de Croatie : "La cantonisation n'est pas possible." "Borba," un quotidien

 17   serbe : "Combien de cantons pour ce pays qu'est la Bosnie." Et ainsi de

 18   suite.

 19   Donc je l'ai déjà dit. Il y a constamment eu cette notion de réaménagement

 20   interne de la Bosnie-Herzégovine qui était qualifié de partage de la Bosnie

 21   et c'est la raison pour laquelle il y a alors cette notion qui a été

 22   transférée comme idée pour parler d'un partage de la Bosnie entre la Serbie

 23   et la Croatie mais je suis témoin des thèses avancées en 1993, et d'après

 24   moi, jamais personne à des centaines de réunions et rencontres n'a parlé de

 25   cela.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, je demande de passer à huis

 27   clos.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

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  1   partiel.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 20   [Audience publique]

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, hier ou avant-hier, vous

 22   avez pu voir ce que savait le président Tudjman lorsqu'il expliquait à

 23   l'intention de M. Filipovic ce qui allait se produire. C'était avant cette

 24   réunion-ci. Comparez donc ce que le président Tudjman dit à l'intention de

 25   Filipovic et il parle de ce qu'il sait au sujet de la façon dont allait se

 26   produire les choses et il comparait avec le témoignage de Mesic. Ça, c'est

 27   d'un.

 28   De deux, pourquoi M. Mesic, à l'occasion de la session du parlement ou du

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  1   Conseil de la Défense et de la Sécurité nationale du VONS, où en 1993

  2   lorsqu'il a séparé sa voix politique de celle de M. Tudjman, donc ce n'est

  3   que lorsqu'il se séparait politiquement parlant du président Tudjman qu'il

  4   commence à raconter ce récit-là ?

  5   Moi, mon témoignage c'est celui-ci, parce que "Le Soldat croate" c'est un

  6   journal que j'ai publié moi-même dans cette interview que j'ai montrée.

  7   Mesic dit qu'il y a une politique raisonnable de poursuivie. Il l'a dit en

  8   1993. Alors ne serait-il pas logique de voir après cette prise de

  9   conscience de la part de M. Tudjman ? Pourquoi ne lui a-t-il pas dit,

 10   Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord et pourquoi ne l'a-t-il pas

 11   dit haut et fort ? Non, Messieurs les Juges, non et non.

 12   Ici, il a été présenté des éléments de preuve, et ça a été placé au service

 13   de règlement de comptes politique. Ça n'a rien à voir avec ce dont je suis

 14   en train de témoigner portant sur les choses telles qu'elles sont

 15   produites.

 16   Mme PINTER : [interprétation] Le général s'est référé à l'entretien entre

 17   le Dr Tudjman et Muhamed Filipovic. Je me réfère au document 3D 03554, page

 18   croate 3D 41-0834.

 19   Pour les besoins du compte rendu, je vous prie de vous référer au 42, ligne

 20   8 qui ne reprend pas la personne que vous avez mentionnée.

 21   Q.  Qui était le chef des services secrets ?

 22   R.  Manolic.

 23   Q.  Josip Manolic ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Merci. En Croatie, oui, c'est ce qui est entendu.

 26   Général, dans votre livre, vous avez montré et je crois qu'il a été

 27   question de cette lettre rédigée par Alija Izetbegovic à l'intention du

 28   président Tudjman ?

Page 40344

  1   R.  Oui.

  2   Q.  C'est le 3D 00295, c'est déjà une pièce à conviction.

  3   Donc Alija Izetbegovic sait pertinemment bien qu'il allait y avoir cette

  4   réunion. Alors auriez-vous des informations qui diraient que le Dr Tudjman

  5   et Milosevic auraient informé Alija Izetbegovic de la tenue de cette

  6   réunion qu'ils ont eue à Karadjordjevo ? Est-ce qu'il a été question de

  7   cela du tout étant donné que c'est la période où les présidents se

  8   rencontrent encore et où il y a circulation de ces individus comme vous

  9   l'avez indiqué dans la première partie de notre audience d'aujourd'hui ? Si

 10   vous avez des détails à ce sujet.

 11   R.  Le Dr Izetbegovic sait qu'il allait y avoir une réunion. Je crois bien

 12   qu'il a été informé de la chose. Mais ce qui importe ici c'est que comme le

 13   dit Franjo Tudjman parmi ces membres du KOS de la sécurité d'état, il y a

 14   déjà quelqu'un qui avance une thèse, qui fait progresser une thèse selon

 15   laquelle Milosevic allait donc mettre sous le nez de Tudjman la possibilité

 16   de procéder à un partage de la Bosnie-Herzégovine.

 17   Pendant les dizaines de réunions qui ont suivi, on a pu voir comment les

 18   choses ont évolué. Par conséquent, ici déjà on avance un attrape-nigaud,

 19   parce que du côté serbe, ils voulaient qu'il y ait la dispute, la zizanie

 20   entre les Musulmans et les Croates. Lorsqu'il parle à Filipovic, Tudjman,

 21   il lui dit allons-y ensemble et l'autre dit que Izetbegovic est sous

 22   l'influence de ces autres personnalités et les choses allaient être

 23   difficiles à faire.

 24   Q.  Je vous propose de passer à la page 197, la rencontre donc entre, les

 25   rencontres entre Tudjman et Milosevic, 3D 23-0437, en version anglaise, il

 26   s'agit du 3D 23-0847, puis viennent ensuite dans l'ordre les réunions

 27   jusqu'à la 48e réunion.

 28   A vous, Général.

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  1   R.  Ici on a énuméré depuis la première réunion du 25 janvier 1991, à

  2   Belgrade, toutes les réunions entre Tudjman et Milosevic. Bien sûr, il y en

  3   aurait trop. Il me semble qu'il y a eu une erreur, parce que cette réunion

  4   de la villa Dalmacija qui s'est tenue le 28 mars 1991, donc avant la

  5   réunion de Karadjordjevo, et là, il me semble qu'il y a confusion. Mais je

  6   n'en suis pas trop certain. Ça s'est passé il y a trop longtemps et je ne

  7   peux pas vous être plus précis. Je n'ai pas le temps, Messieurs les Juges,

  8   de parcourir la teneur de ces 48 réunions. Mais ce que je voudrais

  9   indiquer, on a fait ici un aperçu pour ce qui est de leur tenue, on indique

 10   également qui a participé à ces réunions et de quoi il a été question.

 11   Ce qui est exact c'est que sur les 48 réunions, à 31 de ces réunions, il y

 12   a eu participation de M. Izetbegovic. A l'occasion de quatre réunions, où

 13   on aurait procédé au partage de la Bosnie, il y a eu participation de

 14   Stjepan Mesic; donc, à part de participer, mais il a été informé. Je ne

 15   peux rien vous dire d'autre si ce n'est qu'il y a eu des gros efforts de

 16   déployés pour ce qui est donc de faire en sorte d'aboutir à la solution des

 17   problèmes, et il n'y a pas eu solution de ces problèmes en 1991, parce que,

 18   je répète, le plan de la pensée politique serbe était celui de faire en

 19   sorte que, et je vais vous le montrer sur la carte. 

 20   [Le témoin s'exécute].

 21   Ça c'est les frontières occidentales de la Serbie, Karlobag. Donc

 22   cette partie-là de la Croatie --

 23   [Le témoin s'exécute]

 24   -- pouvait s'en aller, et tout ce qui est à l'est serait la

 25   Yougoslavie. Je n'ai rien d'autre à ajouter, si vous me posez la question.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Juste pour le compte rendu, je tiens à dire

 27   que le général Praljak regarde la carte, donc il faudrait peut-être que les

 28   Juges ne regardaient pas cela. Donc --

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ecoutez, ce serait peut-être mieux,

  2   Monsieur Praljak, que vous soyez extrêmement précis au niveau de vos

  3   paroles afin que tout soit au compte rendu, le compte rendu ne va pas

  4   montrer exactement vos gestes, on ne peut pas du tout savoir ce que vous

  5   avez pointé.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, une fois de plus, les frontières

  7   occidentales de la Serbie, telles que tracées depuis un siècle et en 1986

  8   ça s'est manifesté dans la mémorandum de l'acédémisation [phon] et ça s'est

  9   traduit dans la politique à Milosevic, toutes les terres à l'est de la

 10   frontière occidentale de la Croatie, à savoir Virovitica, Karlobag,

 11   Karlovac; à l'est, c'est la Yougoslavie, y compris toute la Dalmatie et

 12   toute la Bosnie-Herzégovine ainsi que le Monténégro ainsi que la Macédoine.

 13   Milosevic ne voulait partager cela avec personne. S'il avait voulu

 14   partager, il se serait mis d'accord déjà en 1991. Par conséquent, tout le

 15   territoire de la Croatie exception faite de cette partie du territoire --

 16   [Le témoin s'exécute]

 17   -- qu'ils étaient disposés à lâcher, qui se solde à un cinquième ou à

 18   un sixième de la Croatie, donc pour que personne ne se trouve pas dans la

 19   Yougoslavie ou la Serbie.

 20   Mme PINTER : [interprétation]

 21   Q.  Alors on a commencé à débattre de ce sujet, mon Général. Après le mois

 22   de mars 1991, que se passe-t-il en République de Croatie, après cette

 23   réunion ?

 24   R.  Il a de grands meetings des Serbes qui commencent à Knin, à Obrovac, à

 25   Glina. Tous les émissaires en provenance de Serbie arrivent. On porte la

 26   cocarde chetnik, et l'on attise le soulèvement, l'insurrection des Serbes,

 27   et à ce moment-là, la Croatie se prépare de façon intensive pour la guerre.

 28   Q.  Est-ce que la guerre elle-même commence ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Nous l'avons montré jusqu'à présent.

  3   R.  Oui, ils commencent à poser des troncs d'arbres sur les routes sur la

  4   route en Split et Zagreb. On provoque des éboulements les touristes ne

  5   peuvent pas revenir de la mer. Moi-même, qui revenais de la mer à ce

  6   moment-là, je suis passé par la Bosnie-Herzégovine par Banja Luka, car on

  7   ne pouvait plus circuler sur l'axe Split, Zagreb --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, je vous ai écouté commenter les 48 réunions

  9   entre Milosevic et Tudjman. La réunion de Karadjordjevo a lieu le 25 mars

 10   1991. Si, effectivement, il y a eu ce qui est allégué, à savoir un accord

 11   secret, comment se fait-il alors que ceci n'ait pas été re-évoqué

 12   immédiatement trois jours après le 28 mars, puis deux semaines après le 4

 13   avril à Belgrade, puis le 11 avril, et cetera, à moins que tout ça soit

 14   resté entre quatre yeux ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 16   vous pouvez parvenir à la même conclusion que moi-même. Il n'y avait pas

 17   d'accord car, s'il y avait eu un accord - permettez-moi de suivre ma propre

 18   logique dans ma déposition - pourquoi y aurait-il ensuite eu d'autres

 19   réunions, s'ils étaient parvenus à un accord ? Si on imagine, par exemple,

 20   que nous soyons des hommes au pouvoir et que nous soyons en mesure de

 21   parvenir à un accord, mais que feraient toutes les autres personnes

 22   présentes dans cette salle ? Nous sommes parvenus à un accord, nous nous

 23   sommes convenus de quelque chose, à quoi sert-il encore de procéder à des

 24   réunions ensuite ? Pourquoi y aurait-il eu ensuite s'il y avait un accord

 25   encore 15 ou 30 réunions ?

 26   Mme PINTER : [interprétation]

 27   Q.   [aucune interprétation]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président -

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  1   -

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Juste un problème de traduction.

  3   A la ligne 1 de la page 51, il y a en anglais "entièrement secret." Or,

  4   moi, dans ma langue, j'ai dit "entre quatre yeux, ce qui montre que c'est

  5   entre deux individus." Parce qu'entièrement secret, il peut y avoir

  6   d'autres personnes. Je tenais à faire cette correction au transcript. Bien.

  7   Qu'est-ce que vous vouliez dire ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

  9   je voudrais juste rappeler quelques éléments historiques.

 10   Lorsque Hitler et Stalin ont convenu du partage de la Pologne, ils l'ont

 11   effectivement partagée. Lorsque Chamberland et Hitler sont convenus que la

 12   Grande-Bretagne n'allait pas intervenir dans l'occupation de la

 13   Tchécoslovaquie et l'annexion de l'Autriche, Hitler a procédé à ces

 14   dernières. Je pourrais citer des centaines d'exemples similaires. Lorsque

 15   deux hommes aussi puissants parviennent à un accord, ils le mettent

 16   également en œuvre. Il n'y a pas besoin de tenir des réunions ensuite. Ce

 17   que nous avons là sous les yeux est tout simplement absurde. Excusez-moi,

 18   mais c'est ma déposition. Il s'agit d'un règlement de compte politique a

 19   posteriori.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi. C'est un avis que

 21   vous nous donnez. Il ne s'agit pas d'un témoignage. C'est purement

 22   hypothétique, vous vous livrez simplement à des conjectures. C'est tout.

 23   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 24   Mme PINTER : [interprétation]

 25   Q.  Général, quand la guerre a-t-elle commencé en Croatie avec la JNA de

 26   Serbie et du Monténégro ?

 27   R.  En 1991, au début de l'été.

 28   Q.  Où tous ces événements ont-ils eu lieu ? Nous l'avons déjà dit, mais il

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  1   faut que nous le soulignions à nouveau.

  2   R.  L'ordre constitutionnel de la République de Croatie a été compromis, et

  3   s'est effondré vers la fin du printemps, lorsque les forces de police de la

  4   République de Croatie ont pris le chemin de Knin afin de régler la question

  5   de la circulation et d'assurer le droit et la possibilité de circuler sur

  6   les axes de la République de Croatie. C'est alors que les avions de chasse

  7   de la JNA ont contraint les hélicoptères de la police, de rebrousser chemin

  8   en menaçant de les abattre, et de par la même un acte d'agression a été

  9   commis envers la République de Croatie. C'est un acte d'agression. Dans

 10   l'un des livres, j'ai même mentionné la date exacte de cet événement, et la

 11   façon dont on a coupé la route de ces hélicoptères. L'armée est intervenue

 12   pour s'opposer aux forces de police de la République de Croatie qui était

 13   souveraine, et cela elles n'auraient pas eu le droit de le faire même au

 14   terme de la constitution yougoslave.

 15   Q.  Cela a été en 1991 ?

 16   R.  C'était en 1990, c'est alors que selon moi a commencé l'agression

 17   contre la Croatie, car en Yougoslavie les forces de police de différentes

 18   républiques avaient compétence sur leur territoire respectif, or la JNA,

 19   dans son intervention contre les forces de police se dirigeant vers Knin

 20   dans le but que d'empêcher là-bas certaines destructions, la JNA n'avait

 21   pas le droit de faire cela. Pour moi, c'est cela qui constitue le début de

 22   l'agression contre la Cora qui ensuite s'est développée étape par étape

 23   comme on le sait.

 24   Q.  Dans ces réunions qui se sont tenues entre les six présidents lorsque

 25   l'on a négocié quant à la façon dont il aurait été possible de réorganiser

 26   ou de restructurer la Yougoslavie à ce moment-là, pouvez-vous dire pour les

 27   Juges de la Chambre quelles étaient les positions avancées par la Serbie et

 28   le Monténégro, quelles étaient celles avancées par la Slovénie et la

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  1   Croatie et quelles étaient les positions de la Bosnie-Herzégovine et de la

  2   Macédoine ? Car il faut que nous soulignions une nouvelle fois ceci.

  3   R.  Entendu. La Slovénie et la Croatie ont accepté au début l'idée d'une

  4   Confédération de républiques, à savoir que toutes les républiques de l'ex-

  5   Yougoslavie deviennent une association de type confédérale, une association

  6   d'Etats au sein donc de cette Yougoslavie.

  7   Le Monténégro et la Serbie eux voulaient cette forme de Yougoslavie que

  8   j'ai expliquée à savoir une Serbie élargie; quant à M. Izetbegovic et Kiro

  9   Gligorov ils ont proposé une solution appelée Confédération asymétrique.

 10   Q.  Fédération asymétrique.

 11   R.  Oui, Confédération ou Fédération asymétrique. En d'autres termes, que

 12   la Bosnie-Herzégovine et la Macédoine restent au sein de la fédération avec

 13   la Serbie et le Monténégro alors que la Slovénie et la Croatie auraient été

 14   censées être en rapport confédéraux avec toutes les autres républiques.

 15   C'était l'une des propositions avancées qui étaient évidemment une

 16   absurdité et une sottise mais dans ce genre de situation toutes sortes

 17   d'idées traversent l'esprit des gens lorsqu'ils s'efforcent de trouver des

 18   solutions pour éviter la guerre.

 19   Tous autant qu'ils étaient les Slovènes, les Croates souhaitaient éviter la

 20   guerre au prix des efforts et dans les conditions que nous avons vus dans

 21   les documents.

 22   Q.  D'où vous provenez ces éléments ? Comment en avez-vous connaissance ?

 23   R.  Parce que j'avais au niveau de conscience politique et je suivais tous

 24   ces événements au jour le jour, c'était de notre destin qu'il s'agissait

 25   tout simplement; nous étions impliqués là-dedans quotidiennement.

 26   Q.  Merci. Je pense que nous en avons à présent terminé avec cet ouvrage et

 27   que nous pouvons donc passer au document 3D 02005. C'est un numéro du

 28   "Soldat croate."

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  1   R.  Ce n'est pas le bon numéro.

  2   Q.  Mais alors dites-nous quel est le bon document ?

  3   R.  Non, ce n'est pas l'interview alors on va le faire à un autre moment.

  4   Q.  Entendu. On le fera plus tard.

  5   Général, maintenant que --

  6   R.  Alors je peux dire de quoi il s'agit, nous allons le montrer.

  7   Dans "Le Soldat croate," Messieurs les Juges, à l'occasion de ce grand

  8   rassemblement à Sisak à l'occasion de la commémoration de la formation de

  9   cette 1ère -- toute 1ère Unité des Partisans, aussi bien en Europe que sur

 10   le territoire de la République de Croatie, Franjo Tudjman a donné une

 11   déclaration très claire, c'est en 1993. Je ne l'avais pas soulignée lorsque

 12   j'en ai parlé la première fois mais je le fais maintenant. Donc il a donné

 13   le point de vue qui était le sien par rapport à ce soi-disant accord de

 14   Karadjordjevo, à savoir que devant tous les représentants du corps

 15   diplomatique et de la communauté internationale présents. Il a affirmé la

 16   chose suivante : il n'y a pas eu d'accord entre moi et Milosevic. Voilà.

 17   Q.  Ensuite, nous vous donnerons le numéro exact du document dont il

 18   s'agit.

 19   Mme PINTER : [interprétation] Si vous n'avez rien contre, Messieurs les

 20   Juges, nous vous dirons cela après la pause.

 21   Q.  Alors, Général Praljak, juste pour en terminer avec la situation dans

 22   son ensemble avant de passer à des événements spécifiques.

 23   Je voudrais vous poser une question concernant le référendum du 28 février

 24   en Bosnie-Herzégovine et à la date du 1er mars également, quelles étaient

 25   les circonstances dans lesquelles s'est tenu ce référendum, pourquoi a-t-il

 26   été tenu et quelles connaissances avez-vous personnellement quant à la

 27   façon dont les citoyens de Bosnie-Herzégovine ont participé à ce référendum

 28   et notamment les Croates ?

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  1   R.  Je ne vais pas entrer dans le genre de conversations que j'ai eues

  2   l'occasion d'entendre ici qui est la question de Livanjsko Polje [phon], et

  3   cetera. Mais ce que je sais c'est la chose suivante :

  4   Les Croates de Bosnie-Herzégovine étaient insatisfaits de cette question

  5   qui a fait l'objet d'un vote à l'assemblée de Bosnie-Herzégovine au

  6   parlement. De cette décision au terme de laquelle il fallait confirmer par

  7   référendum la décision portant sur l'Etat de Bosnie-Herzégovine et son

  8   indépendance, ce qui était une précondition de sa reconnaissance

  9   internationale dans les termes mêmes qui avaient été ceux de la Commission

 10   Badinter. Je sais qu'au moment où l'on en était encore aux préparatifs de

 11   ce référendum, Franjo Tudjman s'est adressé à Slavko Degoricija, une

 12   personnalité qui était à un haut rang au sein des autorités croates et que

 13   Franjo Tudjman envoyait de façon générale pour participer aux pourparlers

 14   avec les Serbes. C'était un négociateur confirmé et, entre autres, il avait

 15   participé à plus de 150 réunions avec les Serbes en Croatie pour essayer de

 16   trouver une solution de paix. Tudjman a envoyé cette personne sur le

 17   territoire de la Bosnie-Herzégovine afin qu'il promeuve parmi les Croates

 18   de Bosnie-Herzégovine ce souhait et cette aspiration qui étaient ceux de

 19   Franjo Tudjman, à savoir que les Croates participent à ce référendum,

 20   qu'ils se rendent aux urnes et qu'ils choisissent la réponse "oui."

 21   Deuxièmement : au premier jour du référendum, il y a eu peu de Croates qui

 22   se sont déplacés et la menace s'est présentée que l'ensemble de -- la

 23   menace d'un échec a commencé à se profiler. Je sais que Franjo Tudjman - je

 24   le sais avec certitude - s'est entretenu avec les prêtres catholiques qui

 25   officiaient dans ces différentes zones en Bosnie-Herzégovine car ils

 26   savaient qu'ils exerçaient là-bas une influence considérable et il leur a

 27   demandé qu'au deuxième jour de référendum lors de la messe, ils demandent

 28   au peuple d'aller voter au référendum et de choisir la réponse "oui," à

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  1   savoir "oui" à la question de savoir s'il fallait une Bosnie-Herzégovine

  2   entière, unitaire ou non.

  3   Je sais également avec certitude que c'est par l'entremise du HDZ de

  4   Bosnie-Herzégovine qu'il y a eu une demande du président Tudjman. Le

  5   président Tudjman a donc demandé que le HDZ s'adresse, lui aussi, à la

  6   population pour lui demander d'aller voter et de choisir le oui. Selon la

  7   connaissance que j'en aie, le peuple croate en Bosnie-Herzégovine face à

  8   cette question telle quelle a été formulée et qui ne précisait pas les

  9   lignes directrices fondamentales qui lui aurait permis de savoir comment la

 10   Bosnie-Herzégovine était censée être organisée d'un point de vue interne

 11   face à cette question le peuple croate n'était pas en mesure de participer

 12   comme il se doit à ce référendum.

 13   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : est-ce que l'on pourrait

 14   demander de ralentir un petit peu? Merci.

 15   Mme PINTER : [interprétation]

 16   Q.  Que ce serait-il passé s'ils n'avaient pas participé au référendum ?

 17   R.  Cela je vous laisse le soin de le conclure -- d'en conclure.

 18   Q.  Je voudrais maintenant que nous passions au 3D 02003. La page en

 19   anglais est la 3D 31-0080. Alors, Général, je pense que nous en avons

 20   terminé avec ces différents ouvrages.

 21   Mme PINTER : [interprétation] Je voudrais demander à M. l'Huissier de bien

 22   vouloir remettre à Messieurs les Juges le dossier qui correspond à Capljina

 23   et Stolac.

 24   On m'averti que je dois apporter une correction au compte rendu d'audience.

 25   La page en anglais de ce numéro du "Soldat croate," donc de cette pièce 3D

 26   02003, et la suivante, 3D 40-0933.

 27   Alors nous passons donc maintenant à votre parcours, les mouvements qui ont

 28   été les vôtres en 1993, mais je voudrais juste dire, pour les Juges de la

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  1   Chambre, que nous aurons affaire aux paragraphes 15, 17, 25, 26, 27 et

  2   également le paragraphe 5 de l'acte d'accusation.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je suis un petit

  4   peu perdu. Je ne sais pas très bien où vous voulez en venir, parce que vous

  5   nous avez dit à la page 57, ligne 2 et suivantes que vous alliez vous

  6   reporter à la pièce 3D 02003, ensuite vous avez parlé du classeur sur

  7   Capljina, et ensuite vous demandez ce qui se passait en 1993, et où cette

  8   personne se trouvait. Où allons-nous avec cela ?

  9   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : Me Pinter a énoncé si

 10   rapidement les numéros de paragraphe que la cabine n'est pas sûre que le

 11   numéro 5 -- le paragraphe 5 figure dans l'original ou non.

 12   Mme PINTER : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est ma faute car je

 13   parle trop vite. Je voulais passer à un autre sujet et ensuite mon

 14   confrère, Me Kovacic, m'a montré ce numéro du "Soldat croate" que le

 15   général a évoqué, en disant qu'il s'y trouvait à une interview du Dr

 16   Tudjman au sein de laquelle il a également dit qu'il n'y avait pas été

 17   question du tout d'un partage de la Bosnie-Herzégovine. Alors j'ai donné ce

 18   numéro 3D 02003, qui est un numéro du jour : "Le Soldat croate" et qui

 19   figure donc au sein du classeur intitulé : "Le Soldat croate." Ensuite,

 20   j'ai cité un numéro de page en anglais qui a été mal donné, puis ensuite

 21   j'ai procédé à la correction de ce numéro de page. C'est ainsi qu'on en est

 22   arrivé à cette confusion, mais j'en suis responsable car j'ai parlé trop

 23   vite et je vais m'efforcer d'être aussi lente que possible. Mais je ne vais

 24   pas répéter encore une fois les numéros de pages.

 25   Alors nous passons maintenant à Capljina et Stolac, à savoir l'année 1992,

 26   nous avons déjà entendu jusqu'à présent nous avons présenté des preuves

 27   montrant qu'en 1992, vous êtes arrivé en Bosnie-Herzégovine, et plus

 28   précisément en Herzégovine. Maintenant je peux donc vous demander, Général,

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  1   de nous dire : quand vous êtes arrivé sur place, pour quelle raison et

  2   quelle situation vous avez trouvé sur place à votre arrivée, en Bosnie-

  3   Herzégovine ?

  4   R.  Je ne sais pas vraiment à partir d'où commencer moi-même.

  5   Q.  Commençons par les raisons pour lesquelles vous êtes venu en Bosnie-

  6   Herzégovine.

  7   R.  En mars, nous avions déjà des informations concernant la situation en

  8   Herzégovine, et concernant les intentions de la JNA pour ce qui était de la

  9   Bosnie-Herzégovine. Nous en étions pleinement informés. Les Croates en

 10   Bosnie-Herzégovine étaient déjà en train de procéder à la formation de

 11   petites unités de volontaires dans les villages, dans certains quartiers de

 12   Mostar, et cetera.

 13   Les informations que je recevais, moi, je l'ai déjà expliqué une fois

 14   étaient telles que tout cela s'est avéré tout à fait insuffisant, tout ce

 15   qui était en train d'être organisé. C'était tout à fait insuffisant si l'on

 16   souhaitait s'opposer à ce qui était en préparation du côté de la JNA et au

 17   plan du général Cokic, dont j'ai déjà parlé. J'ai dit cela au ministre de

 18   la Défense, Gojko Susak, le ministre avec qui je me réunissais à titre

 19   amical et assez brièvement après 8 heures 30, le soir, une fois que nous

 20   avions vaqué à toutes les autres tâches. Je le retrouvais vraiment en tant

 21   qu'ami et non pas en tant que subordonné. Lui avait des informations plus

 22   optimistes selon lesquelles la situation n'était pas si mauvaise que ça, et

 23   cela c'est parce que de par la position qui était la sienne, il était

 24   entouré d'informations de cette nature, qu'il s'efforçait à présenter la

 25   situation comme étant bien meilleure qu'elle n'était réellement. Moi, je

 26   lui disais : non, ce n'est pas vrai. Ils vont opérer une percée vers Split,

 27   vers Ploce, nous ne serons pas en mesure de nous défendre. A un moment,

 28   j'ai décidé --

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites en mars; c'est mars 1992 ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit quelque chose tout à l'heure. Vous

  4   dites que, dans les petits villages, il y avait des Croates volontaires qui

  5   formaient des petites unités. Vous savez que la Chambre, nous avons été sur

  6   place, nous avons vu donc tous ces petits villages. Alors est-ce que

  7   c'étaient des formations qui se constituaient comme une génération

  8   spontanée d'eux-mêmes ou bien obéissaient-ils à des ordres ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, Monsieur le

 10   Président, il n'y a eu aucun ordre. C'était, par exemple, à Ljubuski, ils

 11   étaient des individus qui autour d'eux-mêmes rassemblaient des personnes

 12   qui partageaient leurs opinions, et puis ils les emmenaient pour participer

 13   à un entraînement sur la côte, puis ensuite ils revenaient là d'où ils

 14   étaient partis. A Mostar, il y avait neuf bataillons alors que certains

 15   d'entre eux n'étaient même pas de la taille d'un peloton. Il y en avait

 16   neuf qui s'appelaient ainsi à Ljubuski, à Radisici, à Grude. Il y avait

 17   aussi quelques formations de ce type. A l'époque, ce qui était le mieux

 18   organisé c'était le HOS, les forces armées croates qui se trouvaient être

 19   hors de toute structure. C'était les forces armées d'une formation d'un

 20   parti politique donné, qui était le Parti croate du droit, parti qui

 21   disposait de ce même type d'unité en Croatie également, et ce, jusqu'à le

 22   président Tudjman ne donne un ordre précis. Ce parti avait même tout un

 23   bâtiment à Zagreb, qui était armé. Il a fallu intervenir par la force là-

 24   bas pour les désarmer. Donc en Bosnie-Herzégovine, il n'y avait ni la

 25   possibilité ni le temps de créer une organisation qui aurait pu soutenir la

 26   comparaison avec la notion même d'une armée structurée, organisée d'un état

 27   d'Europe occidentale.

 28   Mme PINTER : [interprétation]

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  1   Q.  Puisque nous ne sommes arrivés à la question de l'armée et de son

  2   organisation, une armée bien organisée, pouvez-vous décrire, Général

  3   Praljak, quelle était la situation entre les différentes localités en

  4   Bosnie-Herzégovine au moment de votre arrivée ?

  5   R.  Oui, je vais vous le dire et interrompez-moi si c'est nécessaire.

  6   Je suis arrivé donc sur place. Il y avait un officier croate, M.

  7   Crnjac, qui était également présent, qui était originaire de là-bas.

  8   Q.  Général, nous devons expliquer comment vous vous êtes rendu sur

  9   place; est-ce que vous avez été envoyé par le ministre de la Défense, ou

 10   bien êtes-vous parti de votre propre initiative ?

 11   R.  Non, nous n'avons pas été envoyés par le ministre de la Défense.

 12   Nous sommes partis de notre propre chef.

 13   Il me semble qu'il n'est pas indispensable de le répéter. Il n'était

 14   pas possible qu'il y ait le moindre ordre disposant qu'un soldat croate

 15   soit envoyé dans un autre état.

 16   Q.  Mais il aurait pu avoir un ordre vous demandant de fournir des

 17   renseignements quant à ce qui se passait ?

 18   R.  Non, il n'y a eu aucun ordre.

 19   C'était mon devoir purement et simplement j'avais mon père, ma mère

 20   qui vivaient là-bas. A Sarajevo, il y avait leurs sœurs avec son mari et

 21   deux enfants. J'avais également en Bosnie toute une série de parents, mais

 22   il s'agissait non seulement de la Bosnie-Herzégovine et de son peuple mais

 23   également de la menace de voir ces forces percer jusqu'aux frontières de la

 24   Croatie et elle nous trouverait incapable de nous défendre. Donc je ne

 25   pense pas que nous devions procéder de cette manière. C'est très simple.

 26   Nous avons un seul ennemi, un seul et même ennemi qui attaque tout le monde

 27   de la même façon, avec leurs intentions telles -- avec les intentions qui

 28   sont très claires, qui sont celles de cet ennemi communication, et qui sont

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  1   celles que nous avons montrées dans les documents; c'est un fait.

  2   Nous sommes alors revenus, et j'ai informé de cela Franjo Tudjman. J'ai dit

  3   : M. le président, ils vont faire voler en éclat la Bosnie-Herzégovine, et

  4   ensuite ils feront la même chose avec la Croatie. J'ai proposé qu'il nous

  5   laisse partir moi-même le général Roso et le général Crnjac, qui était

  6   aussi originaire de là-bas, qui nous laisse participer en tant que

  7   volontaires en fait à l'organisation de la défense, car autrement, nous

  8   allions être chassés, tués et vaincus non seulement en Bosnie-Herzégovine

  9   mais en Croatie également.

 10   Cela a été évident, ils avaient déjà pris le contrôle de tout ce qu'on

 11   appelait la Vojvina [phon] --

 12   [Le témoin s'exécute]

 13   -- de la Krajina, et je ne voyais absolument la moindre possibilité

 14   de se défendre sur le plan militaire. Il a été d'accord concernant cela, et

 15   je suis parti volontairement de mon propre chef, et le 10 avril 1992, j'ai

 16   pris en charge la zone opérationnelle de l'Herzégovine du sud-est, et il

 17   s'agissait de la zone s'étendant de Konjic sur la Neretva et jusqu'à

 18   Capljina sur la frontière avec la Croatie. Je suis d'abord arrivé à

 19   Capljina, et je peux vous dire maintenant qu'elle était la situation.

 20   Elle correspondait à ce que l'on appelle en sociologie le chaos complet, ce

 21   que l'on considère comme allant de soi dans un Etat qui fonctionne

 22   normalement; l'électricité, le téléphone, les lignes de bus, la

 23   circulation. Il n'y avait plus rien de tout cela, et ce qui régnait c'était

 24   ce qu'en sociologie on appelle l'hystérie. Les gens voulaient faire quelque

 25   chose dans cette situation, mais personne ne savait exactement ce qu'il

 26   convenait de faire. On avait posé un certain nombre de lignes de défense

 27   dans la zone de Medjugorje. Capljina était en train d'être détruite. A

 28   Mostar les gens défendaient leurs propres quartiers. Les villes étaient

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  1   bombardées, Siroki Brijeg, Grude, Citluk, Capljina, Ljubuski, la JNA, les

  2   forces de la JNA pilonnaient ces villes, tuaient des civils.

  3   C'est dans une situation telle que celle-là que je suis arrivé à Capljina.

  4   Il s'y trouvait une caserne de la JNA, c'était en périphérie de Capljina,

  5   près du village où je suis né, et nous avons commencé à nous défendre.

  6   Qu'est-ce que j'ai trouvé là-bas ? La population de Ljubuski creusait des

  7   tranchées. La municipalité de Ljubuski creusait des trachées face à

  8   Medjugorje. Medjugorje creusait des tranchées face à Ljubuski. A Siroki

  9   Brijeg, le commandant, plutôt, le président de cette sorte de cellule de

 10   Crise était un artiste, et ils avaient creusé des tranchées sur une pente.

 11   C'était un chaos complet.

 12   Q.  Il n'y avait pas de Serbe là-bas. Les Juges de la Chambre ne le savent

 13   pas.

 14   Donc il n'y avait pas de Serbe face auquel ils auraient pu creuser

 15   des tranchées.

 16   Face à qui auraient-ils creusé des tranchées autrement ?

 17   R.  Face à eux-mêmes les municipalités se sont refermées sur elles-

 18   mêmes, et il n'y avait aucune communication entre elles, donc il fallait

 19   bien commencer par un développement d'importance embryonnaire. Mais cela ne

 20   nous dit pas le fait que vous êtes en même temps père, psychiatre, ami,

 21   père ou mère, d'ailleurs psychologue, et que vous avancez froidement, pour

 22   développer par étape cet embryon d'organisation afin que cela finisse par

 23   ressembler à une véritable organisation.

 24   Par exemple, ils ont fait venir à Capljina des jeunes hommes de

 25   Radisa. Ils leur ont dit, Voilà, la Neretva, vous êtes derrière la digue.

 26   Ils les ont oubliés pendant 48 heures. Personne ne leur a apporté de l'eau.

 27   Ce sont des jeunes hommes e 20 ans. Ils ne faisaient pas partie de la JNA.

 28   Ils se tenaient là-bas pendant deux jours, affamés, affolés, ils regardent

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  1   en face en s'attendant que la 6e Flotte américaine arrive de cette

  2   direction ou quelque chose de semblable. La seule chose que l'on pouvait

  3   ressentir qui se cristallisait c'était leur souhait de se battre. Mais

  4   maintenant la question qui se posait était : comment ?

  5   Je vais donner un exemple aux Juges de la guerre franco-turque, la

  6   voici, comme il est dit : un Turc, dans la lutte contre deux soldats

  7   français vaincra. Dix soldats français égale dix soldats turcs. Mais 100

  8   soldats français vaincront 200 soldats turcs. C'est important pour la

  9   guerre. L'organisation est importante pour la guerre, comment l'a créée, si

 10   c'est le chaos vous ne pouvez pas, j'arrête tout cela.

 11   Sachant tout cela de l'histoire, moi, je vous dis pendant au

 12   moins 20 heures par jour, je travaillais. J'allais sur toutes les

 13   positions, j'établissais les positions, je parlais avec tout le monde. Ce

 14   qui était l'état-major mais ça ressemblait à une salle d'attente d'une

 15   gare. Quelqu'un venait si sa maison avait été détruite par un obus. Des

 16   gens venaient avec toutes sortes de problèmes pour en parler. Ce n'était

 17   pas un état-major de l'armée, c'était un état-major d'aide général.

 18   L'hystérie, par exemple, les gens se sont mis à penser qu'il fallait donner

 19   des signes à la partie adverse. Donc, par exemple, les voitures montaient

 20   une colline, et on voyait le reflet de leurs lumières, donc ils donnaient

 21   des signes aux Serbes. Puis à un moment donné, ils ont arrêté un cousin de

 22   Bruno Stojic. Certains policiers l'ont attrapé à Citluk et ils ont dit

 23   qu'il donnait des signes à la partie adverse. Je suis allé intervenir, j'ai

 24   dit : mais à qui est-ce qu'il donnait des signes qui représentaient quoi ?

 25   Personne n'avait aucune idée. Il n'y avait pas d'explication rationnelle.

 26   Mais on n'en a pas besoin dans une hystérie. C'est ainsi que ça se passait

 27   à l'époque.

 28   Quelqu'un de la police civile a pensé à dire qu'il fallait conduire pendant

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  1   la nuit seulement avec les lumières éteintes. Comme moi, souvent pendant la

  2   nuit, je conduisais. Je rendais visite à mes unités, et à des moments

  3   pareils ils sautaient sur un point de contrôle totalement affolées en

  4   demandant pourquoi j'avais les feux allumés. Moi, je demandais, j'étais en

  5   profondeur de l'Herzégovine, j'ai dit : mais quelle importance les feux qui

  6   sont allumés ? Qui est-ce que ça peut intéresser ? L'artillerie tire, les

  7   avions volent. Il y a des GPS. Nous, de toute façon, nous ne pouvons pas

  8   tirer sur les avions, nous n'avons les moyens. Mais, vous savez, il relève

  9   de la sociologie psychologique, des individus dans un tel chaos tout

 10   simplement deviennent des personnes tout à fait irrationnelles, non pas

 11   tout le monde, mais un nombre énorme. Ce sont des gens totalement

 12   déboussolés, et vous devez procéder au pas par pas et déployer votre

 13   énergie et vos connaissances pour travailler et puis il faut élever le

 14   niveau de l'organisation car vous ne devez pas donner un ordre que

 15   quelqu'un ne va pas exécuter, parce que là le tout s'écroule; sinon, le

 16   plus facile c'est de s'asseoir et écrire un ordre, mais ça n'a aucun sens

 17   si les ordres ne peuvent pas être exécutés par qui que ce soit.

 18   Un autre exemple, un commandement de Capljina s'est déplacé à une distance

 19   de quatre à cinq kilomètres derrière Capljina. Soi-disant c'est de là

 20   qu'ils allaient gérer quelqu'un ou commander, mais ils n'avaient personne à

 21   commander là-bas. Moi, j'ai immédiatement remplacé les membres de ce

 22   commandement car en fait ils avaient fui; il faut être sur place et si on

 23   se fait tuer, on se fait tuer. Il ne s'agit pas là d'une organisation qu'il

 24   faut gérer mais qu'il faut créer sur place d'homme à homme, de jeune homme

 25   à jeune homme, d'heure à heure, de jour en jour, patiemment et avec les

 26   connaissances.

 27   Ou bien il n'y avait pas de liens téléphoniques entre Citluk et

 28   Siroki Brijeg. Moi, j'ai envoyé mes hommes pour qu'une ligne soit établie

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  1   pour tirer une ligne pour que je puisse être tenu au courant et à un moment

  2   donné je prends mon téléphone, la ligne a été interrompue et j'ai envoyé

  3   deux jeunes hommes pour voir à quel endroit la ligne avait été coupée. Ils

  4   sont rentrés, il n'y avait toujours pas de liens téléphoniques et voici

  5   leur explication. Nous avons vérifié jusqu'à la frontière de notre

  6   municipalité et c'était bon, et par la suite, ce n'est plus notre

  7   municipalité, ou bien à Citluk, il y avait deux courants qui se sont

  8   disputés, courants politiques ou militaires en raison des dépenses

  9   financières.

 10   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, une correction dans le compte

 11   rendu d'audience en anglais car le sens change à moins que le tout ne soit

 12   interprété. A la page 65, ligne 22, le général Praljak a dit qu'il a reçu

 13   l'explication selon laquelle ils ont vérifié les lignes jusqu'à la

 14   frontière de leur municipalité et que par la suite ça ne les intéressait

 15   pas.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

 17   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, bien sûr, à des moments

 18   ou une période logique, j'aurais regroupé ces personnes en leur disant que

 19   la guerre ne divise pas les municipalités, et cetera. Mais à ce moment-là,

 20   je savais que -- vous savez, avant j'aurais fait un scandale, j'aurais

 21   cassé une chaise, j'aurais crié avec une peur horrible pour qu'ils aient

 22   peur jusqu'à l'os. Moi, je n'avais pas le temps, je n'avais pas six mois

 23   pour créer tout cela, et donc avec mon instinct d'animal, j'ai inculqué la

 24   peur au sein de, bien sûr, le lendemain je les caressais, je leur parlais,

 25   je disais qu'il n'y avait rien de personnel là-dedans et que voilà c'est

 26   ainsi qu'il fallait faire.

 27   Il y avait des milliers de détails de ce genre et il est difficile

 28   d'expliquer cela à qui que ce soit qui ne s'est jamais retrouvé dans une

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  1   telle situation, ou bien ce que j'ai commencé tout à l'heure.

  2   Donc il y avait la réunion et lors de la réunion ils ont dit que tant

  3   que le problème de l'argent ne soit réglé, ils n'allaient plus faire la

  4   guerre, et là encore une fois c'est un scandale, j'ai aligné tout le monde

  5   à 5 heures du matin. Je les ai fait aller marcher vers Capljina -- faire

  6   une marche vers Capljina. J'ai crié, j'ai fait preuve de la force et après

  7   j'ai été gentil comme un parent. Ce n'était pas un commandant qui était en

  8   œuvre mais un parent. C'était des hommes honorables qui voulaient se battre

  9   mais l'organisation c'est autre chose.

 10   Q.  Attendez, Général, encore une fois ce que vous avez dit n'a pas été

 11   consigné au compte rendu d'audience. A Citluk, lors de la réunion, ils ont

 12   dit qu'ils n'allaient pas partir en guerre tant que quoi ?

 13   R.  Tant que la question liée à l'argent ne soit résolue. Je ne sais pas

 14   exactement quoi mais c'était lié à l'argent, ou bien la position de M.

 15   Buntic. Il s'est mis en colère, je ne sais pas pourquoi et il a démissionné

 16   de l'armée. Il a démissionné. Voilà tout simplement. C'est un homme

 17   merveilleux à bien des aspects mais on ne peut pas démissionner pendant la

 18   guerre. Moi, j'ai pointé mon pistolet sur lui, chez lui et je lui ai dit :

 19   reprends ton boulot même si on était ami depuis des ans. J'étais prêt --

 20   non, je n'étais pas vraiment prêt à tirer mais, en me regardant dans les

 21   yeux, il ne pouvait pas savoir jusqu'où j'étais prêt à aller pour ne pas me

 22   prendre pour un idiot. Parce qu'aujourd'hui, il veut travailler dans

 23   l'armée et demain il ne veut pas. Ce n'est pas possible.

 24   Vous avez vu jusqu'au mois de juin déjà nous avons eu une armée qui était

 25   prête et qui a libéré des territoires même si, moi, j'avais été le

 26   commandant légal avec les papiers et pendant une période bien plus brève

 27   entre la nomination et lorsque j'ai été relevé de mes --

 28   Q.  En ce qui concerne Capljina, il y avait un point important qu'il

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  1   fallait résoudre donc lié à la caserne de la JNA à Capljina. C'était une

  2   garnison qui se trouvait là-bas ?

  3   Q.  Grabovina.

  4   R.  Grabovina, c'était ça le nom. A ce moment-là, j'ai parlé avec le

  5   général Perisic à deux, trois reprises et je lui ai proposé que l'armée

  6   quitte Capljina de façon paisible, que les officiers emportent avec eux

  7   leurs armes personnelles; le tout conformément aux règles que j'avais lues

  8   et vues quelque part auparavant, il hurlait au téléphone qu'il allait

  9   dévaster et détruire le tout, qu'il savait où je me cachais. Il me donnait

 10   un surnom "Baco," oui, je sais Baco, tout ça. Enfin, tout ceci était loin

 11   d'un comportement logique et civilisé.

 12   S'agissant de la caserne et suite à l'accord passé sous l'égide de la

 13   communauté internationale les femmes sont venues afin d'essayer de retirer

 14   leurs maris et enfants. Il y avait un musulman qui est arrivé de Bosnie. Il

 15   avait peur pour la vie de son fils. Un Serbe a essayé de retirer son fils.

 16   Il y avait plusieurs femmes dont les maris travaillaient comme sous

 17   officiers et officiers qui vivaient à l'intérieur et sont venus aussi.

 18   Elles vivaient aux alentours. Je n'ai absolument pas réussi à faire en

 19   sorte qu'ils quittent la caserne paisiblement. Bien sûr, la condition était

 20   qu'ils laissent derrière les armes qui se trouvaient dans la caserne. Il y

 21   avait deux chars, beaucoup de mitrailleuses, des canons antiaériens avec

 22   deux canons et un canon. Je pense qu'il y en avait un avec quatre cannons.

 23   De cette caserne, donc Capljina est au milieu d'un côté il y avait les

 24   Serbes vers la Neretva, et de l'autre, c'était la Neretva et ils tiraient.

 25   Ils semaient le chaos.

 26   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, lorsque j'ai essayé de voir

 27   comment je pouvais empêcher la sortie éventuelle des chars, l'on a tiré sur

 28   moi et le groupe autour de moi dans le dos depuis la direction de Capljina,

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  1   et heureusement, les balles ont atterri à côté de mes pieds. Donc dans la

  2   ville, il y avait encore des tueurs, des tueurs qui étaient à Sarajevo

  3   aussi qui tuaient les civils.

  4   Après cela, j'ai interdit qu'on garde les fenêtres ouvertes, il fallait

  5   fermer tous les volets car vous savez quelqu'un aurait pu être tué ainsi.

  6   Il n'y a aucune puissance qui aurait pu empêcher des représailles si

  7   quelqu'un avait été tué lors de cet incident.

  8   Ça suffit maintenant. Nous pouvons traiter maintenant de la caserne, mais

  9   si les Juges ont des questions à me poser, je suis prêt à répondre.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question.

 11   Si je comprends bien, vous organisez tout cela à compter du mois de mars

 12   1992. L'ennemi il n'y en a qu'un, ce sont les Serbes ? Bien.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la constitution que vous mettez sur place des

 15   soldats, y a-t-il des Croates et des Musulmans ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux. Au début, plus de Croates, et par la

 17   suite de plus en plus les Musulmans se joignaient au rang aussi.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : De la position où vous êtes, si on comprend bien,

 19   vous êtes seul et vous n'avez d'ordre de quiconque --

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Personne, Monsieur le Président. A cette

 21   époque-là, il y avait tellement de travail, que lorsque le général est venu

 22   au poste du chef d'état-major principal du HVO, je ne sais pas si jusqu'à

 23   la fin du mois de mai ou début juin. Je pense que c'est rencontré une fois

 24   lors d'une réunion, pas plus, donc vous ne pouvez recevoir d'ordre de

 25   personne, et vous ne donnez pas vous-même non plus d'ordre écrit, car il

 26   n'y a personne à qui l'écrire. D'abord, il faut créer un papier pour écrire

 27   quelque chose dessus. Ici tout se passait oralement, donc tout d'abord sur

 28   une base humaine, et amicale ensuite en criant ensuite en priant. Puis

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  1   lorsque vous aboutissez, il faut faire un choix des personnes. Par exemple,

  2   à Capljina, il y avait un jeune homme de la région, qui avait fait la

  3   guerre près de Vukovar à Borovo Selo, il avait vécu une guerre difficile.

  4   Un jeune homme tranquille, qui avait vécu au Canada pendant un certain

  5   temps, donc il avait des bases très civilisées, et c'est lui que j'ai nommé

  6   comme commandant de Capljina. C'était M. Lukovic, et c'est écrit dans ce

  7   papier, et moi, j'étais le premier à lui donner. J'ai distribué les listes

  8   à l'ABiH pour qu'ils puissent porter leur insigne, c'était lui donc que

  9   j'ai fait venir à ce poste.

 10   Ensuite il fallait inventer le commandant pour Siroki Brijeg, car ce

 11   peintre de l'académie ne s'y connaissait nullement, mais posez-moi des

 12   questions à ce sujet je vais vous répondre.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. On est au mois de mars 1992, vous mettez

 14   tout ça en place --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Le mois d'avril.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : -- au mois d'avril.

 17   Mais à l'époque la République de Bosnie-Herzégovine est reconnue, en avril.

 18   Est-ce qu'il vous est arrivé à l'idée d'essayer de prendre attache avec

 19   ceux qui sont à Sarajevo pour dire : voilà, je suis Praljak, je me mets aux

 20   ordres de l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine ? Est-ce que vous

 21   avez fait ça ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je n'ai pas agi

 23   comme cela. Vous allez voir j'ai d'autres éléments, vous allez voir à quoi

 24   ressemblait la situation à Sarajevo, d'après la description des généraux

 25   musulmans. Mais ils avaient du mal à sauver leur propre vie. Je n'avais

 26   aucune communication même avec Mostar. Il fallait que je prenne la route

 27   pour aller à Mostar alors que de trois positions serbes ont tiré sur cette

 28   route, environ 20 personnes sont mortes sur cette route sur un même virage.

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  1   Moi, je suis entré à Mostar en prenant cette route 13 fois, en pleine

  2   journée, ils n'ont pas réussi à m'atteindre. Je n'ai pas pu avoir de

  3   communication avec Grude. Je n'ai pas pu y aller. Je ne savais pas ce qui

  4   s'y passait sans parler de Sarajevo. Il n'y avait absolument aucune

  5   possibilité d'établir le contact, par exemple, avec Sarajevo.

  6   Deuxièmement, en ce qui concerne les pouvoirs de Sarajevo, les autorités

  7   qui auraient été sur place, pour dire on avait déjà organisé ceci ou cela.

  8   Ceci ne pouvait pas exister si vous voyez quelle était latitude envers la

  9   guerre du commandant suprême, Alija Izetbegovic, même trois jours avant il

 10   disait encore qu'il n'y aurait jamais de guerre. Donc il s'agissait d'un

 11   soulèvement de la population, c'est le mot le plus simple. C'était le

 12   soulèvement de la population qui s'est auto organisé.

 13   Mme PINTER : [interprétation]

 14   Q.  Général, est-ce qu'au mois d'avril 1992 l'ABiH existait ?

 15   R.  Non.

 16   Q.  Vous avez parlé de la caserne à Grabovina et vous avez décrit la

 17   situation, vous avez dit à quoi ça ressemblait, qui était là-bas, et qui

 18   était, enfin sous l'égide de qui les gens se sont regroupés, les gens dont

 19   les membres de famille se trouvaient dans la caserne. Nous pouvons montrer

 20   cela aussi par le biais d'une séquence vidéo, qui correspond au numéro 3D

 21   03131. Il s'agit d'une pièce dans la transcription a été distribuée à tout

 22   le monde, je pense, et je vais vous demander éventuellement de faire un

 23   commentaire là-dessus. Vous allez voir il y a un texte, on l'entend, donc

 24   vous pourrez nous dire qui figure sur la photo et de quoi il s'agit.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   Mme PINTER : [interprétation]

 27   Q.  S'agit-il de Capljina ou de Grabovina ?

 28   R.  Je n'ai pas d'image. Ah, si, si, maintenant je l'ai.

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  1   L'INTERPRÈTE : Inaudible pour les interprètes.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est Grabovina. C'est Grabovina.

  3   Mme PINTER : [interprétation]

  4   Q.  Ça c'est l'armée du HVO ?

  5   R.  Oui.

  6   Voilà Juso [phon].

  7   Q.  C'est le mois d'avril 1992 ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Ce sont les soldats aussi ?

 10   R.  Oui. Certains ont des fusils, certains n'en ont pas. Ce sont simplement

 11   des jeunes hommes qui se sont regroupés, qui n'avaient reçu aucun ordre.

 12   Allez-vous tous les trois, là-bas.

 13   Ce sont les femmes qui attendent cet accord d'après l'accord passé entre

 14   les commandants de cette caserne et les observateurs européens qui étaient

 15   sur place à l'époque. Elles étaient censées partir.

 16   Voilà Luburic, le jeune que j'ai nommé au poste de commandant, c'est le

 17   jeune homme dont j'ai parlé.

 18   Voici donc les femmes, suivant cet accord, étaient censées parler, ça c'est

 19   M. Moro. Donc elles étaient censées aller à la porte, au portail à l'entrée

 20   de la caserne. Bien sûr, ces gens ils étaient habitués à ce qu'il est

 21   difficile à comprendre pour vous, c'est-à-dire qu'un accord entre les

 22   commandants d'une armée régulière, et eux allaient être respectés qu'il n'y

 23   aurait aucun problème qu'elles pouvaient rendre visite à leurs proches, et

 24   qu'eux ils pouvaient6 partir. Alors que, moi, je savais que s'agissant de

 25   l'armée populaire yougoslave les choses ne fonctionnaient pas ainsi, et

 26   j'ai donc envoyé Luburic, et moi, je suis là-bas quelque part aussi. Je

 27   l'ai envoyé pour que l'on contrôle cela, car et j'avais raison j'ai supposé

 28   que pour le moins il y aurait des complications et que peut-être ils

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  1   risquaient de tuer quelqu'un et s'ils avaient tué qui que ce soit, il est

  2   certain que c'était le HVO qui aurait porté le chapeau.

  3    Car j'ai un exemple de ce type, le suédois, le colonel qui était

  4   chef des observateurs européens à l'époque, près de Cula, en avait tué un

  5   de ces hommes. Lorsque ce monsieur est allé voir la JNA et lorsqu'il a vu

  6   les bureaux et l'ordre qui régnait --

  7   Q.  Excusez-moi, Général, mais nous vous voyons sur la vidéo. Pour le

  8   compte rendu d'audience, veuillez nous décrire ce qu'on voit et ce qui se

  9   passe.

 10   R.  Je suis venu contrôler pour voir comment cette discussion allait se

 11   dérouler, car je ne craignais rien de bien. Donc ça, c'est la route qui

 12   mène vers l'entrée nord de la caserne. Peut-on accélérer ? Car là, on voit

 13   déjà ce qui nous intéresse.

 14   Q.  C'est difficile du point de vue technique ou électronique.

 15    L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Une voix : cette nuit, ils ont tiré aussi. Je veux attraper le

 17   maniaque avec le petit calibre, l'enculer."

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc l'un d'eux tire déjà de la caserne en

 19   utilisant un petit calibre, c'est pour cela qu'on n'entend pas de tir.

 20   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 21   "Et moi, j'appelle, enculé, votre idiot est en train de tuer les gens

 22   là-bas. Qu'est-ce que vous pensez ?"

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je profère des injures contre sa mère de

 24   criminelle. Car ces gens-là, ils sont venus dans une visite et l'autre, il

 25   le faisait sans cesse, nous allons le voir. Monsieur le Président,

 26   Messieurs les Juges, moi, je suis au milieu de la route, si je parle de

 27   moi-même, je suis une cible parfaite. Là où je suis debout, c'est un espace

 28   ouvert entre cet endroit et l'entrée de la caserne, à 70 mètres. Si je

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  1   parle de moi, mais il m'affolait totalement. Je perdais tous mes moyens

  2   face au manque de respect de toutes les règles. Ceci faisait disparaître

  3   toute peur en moi, et moi, je me tiens ici comme une cible face à cet

  4   idiot. J'ai dit qu'il y a les mères de ces femmes là-bas, que c'est un

  5   criminel, et c'est vrai que c'en est un.

  6   Mme PINTER : [interprétation]

  7   Q.  Qui ?

  8   R.  Ce crétin.

  9   Q.  Le nom ?

 10   R.  Je ne sais pas le nom, je ne sais pas qui a tiré.

 11   Vous voyez l'entrée de la caserne ici. Messieurs les Juges, vous verrez

 12   plus tard que, dans cette maison qui est déjà détruite parce que personne

 13   n'y vivait depuis longtemps, c'est là que je suis né; c'est la maison de

 14   feu mon grand-père. Ceci soit dit en passant.

 15   Enfin, c'est l'une des femmes dont je parlais; alors arrêtez-la, je vous

 16   prie. Alors ceci est le moment où le caméraman n'ose même pas sortir pour

 17   filmer.

 18   Eux sont venus au portail d'entrée, et ce crétin -- ce singe a tiré

 19   en direction de ces personnes. Ils sont tombés à terre. Ils sont jetés à

 20   terre. Moi, je suis allé les relever pour les ramener. Donc j'étais une

 21   cible parfaite.

 22   S'agissant de tout ceci, ce monsieur Moro et ces femmes ont écrit des

 23   déclarations à l'attention de ce Tribunal à ce sujet. Lorsque je parlerai

 24   de ces déclarations, c'est rien que pour ne pas faire en sorte que je parle

 25   de moi-même, mais faire en sorte que ces déclarations authentiques qui ont

 26   été, qui ont suivi la logique de la vérité et rien que la vérité, et là, je

 27   vous demande à ce que ce soit versé au dossier qu'il en soit donné lecture.

 28   Parce que ça contribuera de façon substantielle à apporter donc de la

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  1   clarté pour ce qui est de la situation que les Juges doivent prendre en

  2   considération.

  3   Alors on voit ici l'entrée de la caserne, on se trouve à 70 muter de

  4   la caserne.

  5   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  6   "Ne crains rien."

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voyez la situation psychologique de ces

  8   gens. Soit dit en passant, dans cette maison à droite --

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ne peuvent pas traduire ce que disent les

 10   intervenants au niveau de la vidéo et ce que dit M. Praljak en même temps.

 11   -- la femme dit elles sont d'accord avec tout ce que vous avez dit. Ils

 12   acceptent tout.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] On leur a tiré dessus, ils sont jetés à terre,

 14   et je suis allé les chercher. Dans toute la taille qui est la mienne, et je

 15   ne suis pas petit. Donc c'est cela le portrait de ce criminel, Slobodan

 16   Praljak. Bien que ce monsieur-là a été un Serbe. Les époux de ces femmes

 17   sont des gens qui travaillent pour la JNA.

 18   Q.  Il se trouvait dans la caserne ?

 19   R.  Bien sûr. Elles sont allées les voir. On peut mettre un terme, il n'y

 20   aurait plus rien à ajouter.

 21   Q.  Vous avez commencé votre phrase, Général, et vous n'avez pas terminé.

 22   Vous avez dit à droite, on peut voir la maison et c'est là que se trouve la

 23   pièce où, et puis, on vous a interrompu.

 24   R.  Et bien, puisqu'on en parle déjà, ma mère avait été à Vis, dans les

 25   partisans, puis elle est tombée amoureuse de mon père, elle est restée

 26   ensemble. On l'a renvoyée chez elle pour qu'elle donne naissance à son

 27   enfant. Ça c'est la maison de mon grand-père et de ma grand-mère. C'est la

 28   maison d'à côté qui est ma maison de naissance. Donc on pourrait peut-être

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  1   dire cela bien que cela ne soit pas si important.

  2   Q.  Pourquoi voulez-vous que ce ne soit pas important ?

  3   R.  Bien, en quoi cela est-il important ? C'est de la littérature.

  4   Q.  Moi, je vous ai interrompu lorsque vous avez commencé à parler de ce

  5   représentant suédois.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Vous étiez en train de nous dire qu'il se trouvait non loin de Cula.

  8   Et, peut-être pourriez-vous terminer ?

  9   R.  Le représentant de la communauté européenne a été tué par la JNA, non

 10   loin de Cula. Or, lorsqu'un représentant de l'armée régulière suédoise

 11   vient chez ses homologues de la JNA, Perisic ou je ne sais qui, il peut

 12   voir une armée organisée, on salue et on se met au garde-à-vous, et cetera.

 13   Lorsque ces gens, s'ils lui disent que son homme a été tué par le HVO, et

 14   lorsqu'il est venu me voir et lorsqu'il a vu mes soldats à moi, bien sûr,

 15   il prête foi aux dires de l'armée aménagée et organisée. J'ai dû l'amener

 16   pour lui montrer où se trouvaient nos positions. Puis ensuite, à ses côtés,

 17   je suis allé jusqu'à l'endroit où son homme à lui a été tué. Je me suis une

 18   fois de plus exposé au tir parce que les positions serbes se trouvaient à

 19   120 mètres, pour lui expliquer de façon évidente qu'il n'y avait pas la

 20   moindre possibilité pas même théorique pour nous voir tirer. Je ne pouvais

 21   le faire qu'en disant, Monsieur, allons donc là-bas, je vais m'expose au

 22   péril, parce que tout autre argument quand il nous voyait, nous étions un

 23   groupe de renégats. Comment m'exprimer des espèces de paramilitaires, des

 24   pas rasés, mal rasés, certains avaient des fusils, d'autres pas, sans être

 25   organisé, ne sachant pas se déplacer en colonne. Enfin je comprends sa

 26   façon de voir. Mais c'est parce que je comprends que j'affirme que ce n'est

 27   pas quand même vrai parce que c'est faux. Il n'était pas préparé à

 28   comprendre la situation.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- parce qu'on arrive en bout de bande,

  2   il faut faire les 20 minutes de pause.

  3   --- L'audience est suspendue à 12 heures 38.

  4   --- L'audience est reprise à 12 heures 58.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, suite à la vidéo-là,  j'ai une

  6   question de suivi à vous poser.

  7   Bon. On vous a vu sur la vidéo. On vous a vu parlementer avec la JNA, avec

  8   un haut-parleur. On a vu les femmes, M. Moro qui est avec vous. Bon. Très

  9   bien. On a vu cela. Mais en voyant cela, sachant le chaos que vous nous

 10   avez décrit à Capljina, je me pose la question suivante : comment se fait-

 11   il qu'un homme seul se mette à interférer dans des problèmes très

 12   compliqués, la JNA, la République de Serbie et la République de Bosnie-

 13   Herzégovine sans aucun mandat et à titre personnel ? Est-ce que vous

 14   pensiez que vous seul vous alliez pouvoir régler une situation extrêmement

 15   compliquée ? A partir de la vidéo, hein, je vous pose la question à partir

 16   de la vidéo.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Comment répondre ? A partir du 10 avril 1991

 18   jusqu'au 7 mai 1992 -- oui, 1992, excusez-moi -- le 10 avril 1992 jusqu'au

 19   7 mai 1992, j'étais officiellement le commandant sur le territoire dont

 20   j'ai parlé. Le 7 mai, j'ai remis mes fonctions à qui de droit et je suis

 21   retourné en Croatie parce que je m'étais porté volontaire et il y avait là-

 22   bas beaucoup de travail dans mon département.

 23   Pour répondre à votre deuxième, à la deuxième partie de votre question,

 24   Monsieur le Juge, il faut bien que quelqu'un le fasse s'il n'y a pas

 25   d'organisation. Il faut donc, s'il n'y a pas d'organisation, qu'il y ait

 26   quelqu'un qui vienne dire et sans savoir jusqu'où ça irait et dans quelle

 27   mesure ce serait couronné de succès, il faut bien commencer par quelque

 28   part parce que, si vous ne commencez pas, ça n'évoluera pas du tout. Donc

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  1   vous avez vu que jusqu'au mois de juin, au début juillet -- donc au mois de

  2   juin, ça s'est soldé par quelque chose parce qu'en si peu de temps avec ces

  3   gaillards on a réussi à faire des unités qui ont réussi à libérer la rive

  4   droite de la Neretva ainsi que la rive gauche de la Neretva, Stolac,

  5   compris.

  6   Donc pendant cette période de deux mois et demie, le 7 mai, je suis parti à

  7   Zagreb, donc j'ai remis mes fonctions à quelqu'un d'autre mais

  8   littéralement je suis allé là-bas au sud à chaque fois que je pouvais le

  9   faire, j'étais capable de monter dans ma voiture et je conduisais moi-même.

 10   A 4 heures de l'après-midi, je quittais Zagreb, j'arrivais là-bas à 11

 11   heures minuit. Le lendemain, je faisais quelque chose, j'étais avec les

 12   gars, je les aidais, je leur expliquais, j'accueillais les réfugiés de

 13   Stolac et puis je reprenais ma voiture pour monter à Zagreb. Pour dire

 14   vrai, je n'informais pas même Gojko Susak de la chose et encore moins

 15   Franjo Tudjman. Ça c'est la vérité, mais à vous de voir quelle est la

 16   théorie qui découlera de cette vérité, moi, je vous laisse faire mais, moi,

 17   je vous parle de la situation de faits.

 18   Ou bien on se jette à l'eau c'est comme la grenouille elle saute dans le

 19   lait et puis elle se débat, elle se débat jusqu'à ce qu'il n'y ait une

 20   motte de beurre avec laquelle on peut faire quelque chose. Alors si vous le

 21   permettez encore j'ajouterais que vous travaillez, vous fonctionnez pendant

 22   plus de 20 heures par jour, je suis à la fois général, sergent et

 23   l'organisateur, le papa, la maman, et que sais-je encore de ces gens. Ce

 24   n'est qu'ainsi qu'on pouvait faire.

 25   Des fois j'aimerais qu'on passe à huis clos partiel et je vais vous donner

 26   un exemple. 

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Greffier, à huis clos partiel.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes à huis

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  1   clos partiel.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, à voir et entendre tout ce que nous

  7   avons fait jusqu'à présent, on peut se rendre compte que vous êtes une

  8   personne avec beaucoup de domaines d'activités, beaucoup de domaines de

  9   recherches. En somme une personnalité d'une grande érudition. Vous êtes

 10   sociologue et vous avez été un chef militaire. Alors j'ai une question qui

 11   m'est taraud de l'esprit. Depuis que j'ai vu cette vidéo des événements de

 12   Capljina avec votre intervention.

 13   Généralement, durant des batailles, les chefs militaires se mettent à

 14   l'abri pour assurer le commandement parce que lorsqu'ils tombent ça

 15   démoralise les troupes et puis le commandant disparaît. Mais vous tout seul

 16   avec votre haut-parleur à la main, vous vous mettez face aux snipers. Alors

 17   la question que je me pose : est-ce que vous aviez conscience que

 18   pratiquement précisément parce qu'il y avait le chaos que les fameux

 19   snipers pouvaient vous atteindre et mettre fin à votre activité de

 20   sauvetage que vous vouliez entreprendre ? Est-ce que vous aviez, à ce

 21   moment précis, une vocation au martyr et laisser tomber votre ambition de

 22   pacifier le village et de récupérer la maison de vos ancêtres ? C'est ça la

 23   question que je me pose. Y a-t-il un principe sociologique ou militaire qui

 24   explique le comportement que vous aviez ce jour-là ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Mindua, oui, cela se peut

 26   faire. Car si d'une façon quelconque je pouvais rester à l'état-major des

 27   généraux, et s'il y avait une armée avec des sergents et autres, là, très

 28   savamment, j'aurais pu rédiger des ordres que les autres auraient pu

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  1   exécuter.

  2   Mais le groupe que vous avez pu voir tout à l'heure, ce n'est pas cette

  3   armée-là. Ce n'est pas le niveau d'organisation qui est susceptible de

  4   recevoir ce type d'ordre, tel que vous l'indiquez vous-même. Pour ce qui

  5   est de ces hommes, on leur a tiré dessus au portail, ils sont jetés à

  6   terre. Moi, je ne peux pas m'attendre à ce que l'un de ces jeunes aille là-

  7   bas pour les relever. A ce moment-là, me faire tuer ou ne pas, et pas que

  8   là à Sunja, et avant et après, je n'en prenais -- enfin, j'en faisais fi,

  9   il fallait le faire à ce moment-là. Ce n'était même pas une réflexion ou

 10   des considérations morales. C'était une nécessité pour le corps et l'âme. A

 11   ce moment-là, on ne réfléchit pas. Là, j'étais en colère, j'étais très --

 12   enfin, fâché contre cet imbécile qui tirait sur ces cinq ou six personnes

 13   et j'allais les relever. A ce moment-là, il n'y avait que cela dans ma

 14   conscience. Il fallait les sortir de là pour les mettre à l'abri. Voilà.

 15   Croyez-moi bien que je sache gérer les différentes organisations, et en

 16   réalité, je suis assez paresseux. Mis à part les livres, rien ne

 17   m'intéressait. Mais je sais gérer les choses, quand on mettait en place une

 18   organisation, j'aurais parfaitement bien pu dire : toi -- à toi de faire

 19   ceci, à toi de faire cela. Mais, Monsieur le Juge Mindua, ce n'était pas

 20   possible au départ. Il fallait d'abord crier quelque chose, et puis

 21   ensuite, au fur et à mesure, donner des ordres à ce quelque chose, mais ça

 22   se passait graduellement. Au bout d'un certain temps.

 23   M. Luburic se faisait commandant, il évoluait comme un commandant, et il y

 24   a eu des jeunes qui ont exercé un contrôle vis-à-vis de leurs unités, et

 25   là, vous avez pu donner des ordres au dénommé Luburic, et c'est lui qui se

 26   trouvait entre ces unités et moi-même. Mais jusque-là, ça n'allait pas.

 27   M. LE JUGE MINDUA : Je vous remercie. Donc j'ai compris, c'est parce que

 28   l'armée -- votre armée ou votre troupe était embryonnaire, et que vous

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  1   étiez mu par des sentiments de colère et d'altruisme. Merci beaucoup.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Pinter.

  3   Mme PINTER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  4   Q.  Mon général, le récit relatif à la caserne n'est pas achevé. On a vu la

  5   vidéo, on vous a vu devant la caserne, alors comment cela s'est-il terminé

  6   avec la caserne ?

  7   R.  Ici, il convient de dire ce que j'ai déjà raconté une fois : la seule

  8   unité qui, à ce moment-là, exception faite de certains gaillards de

  9   Ljubuski et village de Radisici et une Unité du HOS dirigée et commandée

 10   par M. Primorac, mais grâce à sa personnalité, c'était déjà des militaires,

 11   donc ce -- il y avait une partie de l'Unité du roi Tomislav, celle qui

 12   était commandée par Daidza, donc cette unité se trouvait à côté de Citluk,

 13   Tepcici, et Slipcici - si l'interprète a bien entendu les noms - je les ai

 14   pris pour aider à libérer et à placer sous contrôle la caserne. A cet

 15   endroit-là, il est arrivé ces 160 hommes de la 4e Brigade de la Garde, et

 16   ils ont couvert ce territoire, ils sont restés là pendant un certain temps.

 17   Le jeune homme en question est par la suite devenu commandant célèbre de

 18   ladite brigade, il avait fait l'académie militaire. Il est venu jeune

 19   officier de la JNA, et il m'avait demandé que -- de lui confier une zone de

 20   responsabilité. Donc il fallait avec lui trouver moyen de moyenner parce

 21   que ces jeunes-là avaient déjà fait la guerre en Croatie afin que -- pour

 22   indiquer que ses ailes gauche et droite aillent être faibles. Je lui ai

 23   donc dit qu'il fallait qu'il déploie ses hommes, qu'il mette cinq ou six

 24   des siens, ou -- et puis cinq ou six, ou une dizaine des gens du cru. Quand

 25   les gens du cru ont dit qu'ils étaient prêts à prendre en charge leurs

 26   propres zones, là où les Chetnik ont attaqué lorsqu'il y avait les gens du

 27   cru, ils ont tué plusieurs hommes et blessé plusieurs autres. Mais au

 28   début, c'était -- il y avait beaucoup de morts et de blessés. Il fallait

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  1   donc qu'on redéploie. Je lui ai dit, vous voyez -- ou je lui ai dit, tu

  2   vois, ce type d'erreur ça se paie. J'ai cédé. J'avais été plutôt dubitatif,

  3   mais on m'a convaincu qu'on pouvait lui confier la chose.

  4   Donc on nous tirait dessus depuis la caserne. Il y avait des civils de

  5   tués, et là, je crois qu'on a perdu sept ou huit hommes, et on en a eu plus

  6   de 20 qui ont été blessés. Le général Perisic avait fait une bonne chose

  7   sur le plan militaire, parce que le long de la vallée d'une rivière, il a

  8   fait voler ses hélicoptères très bas pour atterrir à l'intérieur de la

  9   caser sur le terrain de foot. C'est là qu'on a fait monter à bord des

 10   hélicoptères les effectifs, les soldats de la caserne, mais il est resté

 11   quand même sur place une trentaine de personnes, et je -- bien avant cette

 12   arrivée des hélicoptères, il y a eu des tirs d'artillerie très forte en

 13   direction de Capljina; 11 avions ont bombardé Capljina, les chars de la

 14   rive gauche, les webers [phon], les canons. Enfin, en terme simple, il y

 15   avait de la fumée partout, du fait des frappes à l'artillerie. Des

 16   centaines et des centaines de projectiles ont été tirées, et j'ai donné

 17   l'ordre aux hommes de ne pas tirer sur les hélicoptères, qu'ils s'en

 18   aillent. Les 30 hommes en question, on les a emprisonnés, on les a

 19   capturés, ils se sont rendus.

 20   Je vous ai raconté l'événement, Monsieur le Juge Mindua. Donc ces

 21   connaissances de semestre de psychologie sociale, et quatre semestres de

 22   psychologie en général, ça me donnait des connaissances qui permettaient de

 23   supposer que, suite à toutes ces pertes en Herzégovine, il se pourrait

 24   qu'il y ait une ou deux personnalités désireuses de se venger, et c'est

 25   pourquoi je n'ai pas abandonné ou laissé seuls ces jeunes gaillards. Je

 26   leur ai dit qu'il -- enfin, je leur ai dit que trouver un autocar, c'était

 27   quelque chose. Il faut d'abord trouver quelqu'un qui pourrait avoir l'idée

 28   de l'endroit où on pourrait rechercher cet autocar, j'en ai envoyé deux

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  1   aller chercher. Puis j'ai négocié avec le propriétaire, parce que qui lui

  2   garantirait son bus, et on -- je m'attendais à ce que Perisic continue à

  3   bombarder la caserne donc son autocar risquait de voler en éclat.

  4   Donc, toujours est-il qu'il y a eu ces deux types qui voulaient se venger à

  5   l'égard des soldats. Je ne vais pas montrer aux Juges de quoi a eu l'air ma

  6   rencontre avec ces deux. Je tire mon pistolet, je le -- je mets la balle

  7   dans le canon, et je lui met le canon dans la bouche, donc c'est le plus

  8   fou qui l'emporte, et c'est mon visage de personne démente qui l'emporte

  9   vis-à-vis de ces deux zigotos. J'ai fait monter les hommes à bord du car et

 10   j'ai eus, il a fallu que je les fasse partir. Donc ils sont allés à

 11   Metkovici, puis ils sont passés par la Croatie pour aller en Hongrie; et de

 12   la Hongrie, ils sont rentrés chez eux. C'est l'itinéraire que les gens

 13   empruntaient depuis ces territoires-là pour passer de l'autre côté.

 14   Vous pourriez me demander ce qu'il est advenu de ces deux hommes, mais je

 15   l'ignore. Je n'avais pas à l'époque la force de les désarmer car je n'étais

 16   pas sûr qu'ils seraient disposés à rendre leurs armes, et il y avait alors

 17   risque d'avoir des tirs dans cet instant-là.

 18   Ce que vous faites, c'est que vous vous concentrez sur la façon de sauver

 19   les personnes qui sont en danger. Or, évidemment, dans une situation

 20   normale, il aurait fallu que quelqu'un arrête ces personnes et qu'elles

 21   soient poursuivies. Mais à l'instant où cela se produit, c'est quelque

 22   chose que je ne peux pas me permettre d'entreprendre.

 23   Alors, le médecin qui était dans la caserne, le jeune Moro, est resté au

 24   sein du HVO et il a été le médecin de la Brigade de Capljina jusqu'à la fin

 25   de la guerre. Il est devenu officier du HVO puis il a suivi une

 26   spécialisation. Bon, le reste n'est pas si important. Voilà.

 27   Q.  Général, le hameau de Zurovci, il est à Grabovina ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Qui vivait là-bas ?

  2   R.  Dans ce hameau que vous avez partiellement vu, dans ce village,

  3   Messieurs les Juges, se trouvait un hameau où vivaient des Serbes, le

  4   hameau de Zurovac, et feu mon grand-père habitait là-bas. J'y passais à peu

  5   près deux à trois semaines chaque été, je connaissais l'existence de ces

  6   personnes. Je saluais le vieux Damjan et je connaissais ces gens. A un

  7   moment, après qu'il y ait eu des morts à Capljina, après qu'il y ait eu des

  8   pertes à la caserne, on m'a dit que des personnes avaient fait irruption,

  9   qu'elles avaient trouvé des armes et qu'elles voulaient les tuer. C'est par

 10   une rapide intervention que j'ai envoyé des hommes. J'ai envoyé Luburic et

 11   nous avons mis à l'écart ces personnes -- ou plutôt, nous les avons mis en

 12   sécurité.

 13   J'ai donné la mission à quelques gars de ce village de protéger les Serbes,

 14   de participer à la protection des Serbes. Je suis allé les voir et je leur

 15   ai dit la chose suivante, alors il y avait beaucoup de Serbes à Capljina,

 16   mais ce que je leur ai dit, c'est que -- alors, je me suis entretenu avec

 17   les plus jeunes, et je leur ai dit qu'il fallait soit qu'ils partent au HVO

 18   ou au sein de leur propre groupe et ils seraient protégés car leurs

 19   compagnons d'armes allaient certainement les protéger, ou autre option, ils

 20   pouvaient passer par la Croatie puis par la Hongrie, et ensuite atteindre

 21   la Serbie pour laisser derrière eux les plus âgés et les autres. C'était à

 22   eux qu'incombait le choix. C'était juste un conseil que je leur donnais,

 23   conseil qui émanait non pas de considérations juridiques ou de mes propres

 24   souhaits mais d'un point de vue pragmatique sur la réalité. Je ne pouvais

 25   pas savoir ce qui se passerait une fois que je serais parti.

 26   Le premier principe qui me guidait, c'était d'éviter que quiconque ne perde

 27   la vie, car quelle en serait l'utilité, quelle serait l'utilité de juger

 28   maintenant quelqu'un qui aurait tué certaines de ces personnes ? Ces

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  1   personnes ne seraient plus là.

  2   Donc certains habitants de Zurovac sont partis ainsi, et ensuite ils

  3   m'ont donné des nouvelles. Quant aux membres plus âgés de la population,

  4   les hommes plus âgés et les femmes sont restés jusqu'à la fin de la guerre

  5   et, eux aussi, finalement, ont écrit des déclarations à l'intention de ce

  6   Tribunal.

  7   Q.  Vous avez mentionné une chose lorsque nous parlions de la caserne de

  8   Capljina et de sa libération. Vous avez dit qu'il y avait une Unité du HOS

  9   des forces armées croates. Est-ce que, par ailleurs et en général, vous

 10   avez des difficultés avec le HOS dans cette zone de Capljina ?    

 11   R.  Le problème avec le HOS s'est présenté là-bas aussi, car M. Kraljevic,

 12   son commandant, était dans une situation… Nous avions deux armées, encore

 13   une fois. Donc quand quelqu'un faisait quelque chose de mal au HVO et qu'il

 14   était puni, il passait simplement au HOS. Et quand quelqu'un du HOS

 15   commettait quelque chose, il passait de l'autre côté, il passait au HVO.

 16   Donc j'avais un rapport difficile avec Kraljevic. J'ai eu une série de

 17   réunions particulièrement difficiles et tumultueuses avec lui mais à

 18   l'époque, il avait pas mal de soldats, un nombre important. Les difficultés

 19   rencontrées, alors, bien entendu, il y avait des combattants

 20   extraordinaires, des gens très bien là-bas dans cette unité. Par exemple,

 21   Stanko Primorac, qui est devenu commandant de brigade à Ljubisa en 1993

 22   lorsque Ivo Tomic a été blessé, c'étaient des combattants exemplaires qui

 23   étaient très bien organisés. Mais il y avait aussi pas mal de voleurs, de

 24   personnalités absolument pas recommandables qui entraient dans ces unités,

 25   qui étaient hors contrôle.

 26   En septembre 1993, Blaz Kraljevic, avec sept de ses hommes --

 27   Q.  C'est 1992, l'année ?

 28   R.  Oui, 1992. Il était là-bas entre Mostar et Citluk et cela représentait

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  1   un grand problème. Après cela, je suis arrivé rapidement en provenance de

  2   Zagreb et jusqu'au mois de mars 1993, nous nous sommes occupés de la

  3   question de savoir comment résoudre ce grand problème. Car certaines Unités

  4   du HOS, notamment celles de Stolac, se sont mises en route pour régler

  5   leurs comptes avec une partie du HVO et y ont participé à cette solution au

  6   grand problème que ça représentait, aussi bien Stojic que le général

  7   Prkacin du HOS, donc de Zagreb, Stanko Primorac et d'autres. Moi aussi,

  8   j'ai participé à tout cela. J'ai joué ce rôle également car ces hommes me

  9   respectaient et je me suis interposé. D'autant plus que l'on a vu commencer

 10   à arriver au sein du HOS un nombre considérable de Musulmans. Ces derniers

 11   ont alors commencé à prendre les armes, et puis ensuite ils passaient à

 12   l'ABiH et ils commençaient à former des unités qui étaient exclusivement

 13   musulmanes, or leurs politiques, leur ligne politique avait été tout sauf

 14   claire.

 15   Qu'est-ce que c'était que le HOS en vérité et le parti auquel il

 16   appartenait, le Parti croate du droit, eux parlaient d'une Croatie allant

 17   jusqu'à la Drina. Donc pour eux, les Musulmans étaient des Croates de

 18   confession musulmane mais, pour moi, c'était tout sauf clair que de savoir

 19   pourquoi Alija Izetbegovic et certains commandants de l'ABiH soutenaient

 20   une telle option militaire et politique.

 21   Alors, il y a eu de nombreuses réunions particulièrement difficiles. Bien

 22   entendu, certaines unités du HOS sont restées, aussi bien à Mostar

 23   qu'ailleurs. Alors, nous avons vu ce document d'Arif Pasalic concernant les

 24   groupes du HOS qui sont restés à Zenica et Mostar qui ont été incorporés

 25   dans l'ABiH. Mais pour ce qui concerne le HVO, le problème a été résolu au

 26   printemps 1993, c'est quelque chose qui a duré assez longtemps.

 27   Vers le mois de septembre ou début octobre 1992, il y a eu un groupe de ces

 28   membres du HOS qui avait organisé un camp à Dretelj pour y détenir des

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  1   Serbes. D'une façon ou d'une autre, j'en ai appris l'existence, quelqu'un

  2   m'en a parlé, je ne peux plus me souvenir de qui il s'agissait. C'est un

  3   événement parmi d'innombrables autres. Ensuite, je m'en suis plaint à

  4   Pavlovic quand je l'ai rencontré à Capljina, il était alors, il

  5   représentait la police militaire et je lui ai dit de préparer des hommes,

  6   je lui ai dit qu'il se passait des événements terribles et je lui ai

  7   demandé de préparer des hommes.

  8   Encore une fois, je le répète, à ce moment précis, je ne détiens aucune

  9   fonction officielle, je n'ai pas été officiellement nommé. Cela répond

 10   exclusivement à ma propre volonté. C'était par ma propre et libre volonté

 11   que j'ai fait cela. Personne ne s'en plaint au sein de la HZ HB, Stojic ni

 12   Petkovic. Tout le monde le sait que je viens sur place et c'est ce que je

 13   fais. J'assume la responsabilité de mes actes. J'accomplis ma mission. Je

 14   donne un rapport concernant ce qui s'est passé globalement. J'en informe

 15   Petkovic et Stojic ou je ne sais plus qui d'autre, et je repars.

 16   Quant au commandant de brigade, Obradovic, je lui ai demandé de mettre en

 17   place deux PAT de l'autre côté de la route face au camp de prisonniers, et

 18   de dire aux membres du HOS qu'ils devaient libérer ces hommes, ou que

 19   j'allais commencer à tirer sur eux, donc ça veut dire les tuer. Alors il

 20   n'y a pas eu de tir. Car lorsque vous faites une démonstration de force et

 21   de détermination face à la partie adverse, à votre adversaire, lorsque vous

 22   montrez que vous êtes déterminé à faire quelque chose, et bien, ces

 23   misérables, car d'habitude il s'agit de misérables qui sont généralement

 24   des personnalités faibles et non pas fortes se retirent.

 25   Donc j'ai reçu des autocars, je les ai préparés, un jour avant je les

 26   avais préparés, j'ai pris en charge des prisonniers et les ai transportés

 27   jusqu'à la caserne de Capljina, et c'était encore une fois la même

 28   histoire. Ou bien, ils allaient attendre sur place une forme ou une autre

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  1   échange, car je ne savais pas comment les faire passer de l'autre côté, ou

  2   alors ils avaient aussi l'option de passer par la Croatie, puis par la

  3   Hongrie, puisque la Hongrie touche en terme de frontière la Yougoslavie,

  4   ils auraient pu rejoindre la Yougoslavie, et ensuite aller où bon leur

  5   semblait.

  6   Voilà pour cette histoire un peu raccourcie.

  7   L'INTERPRÈTE : Les PAT étaient des canons antiaériens.

  8   Mme PINTER : [interprétation]

  9   Q.  Reportez-vous au 5D 00 --

 10   R.  Quel document 5D ? 3D ?

 11   Q.  Non, c'est un document qui commence par 5D. C'est à la fin.

 12   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît. Je

 13   voudrais apporter encore une correction au compte rendu d'audience. Dans la

 14   page 89, à la ligne 25, le général Praljak a dit : "Je leur ai dit qu'ils

 15   pouvaient ou bien attendre un échange," et dans le compte rendu d'audience,

 16   nous avons "foreign exchange," "échange de devise."

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ou bien ils pouvaient attendre un

 18   éventuel échange avec les Serbes, ou bien s'ils le souhaitaient, ils

 19   avaient la possibilité -- je n'avais pas d'endroit où j'aurais pu les

 20   relâcher où ils auraient pu partir. Il n'y avait nulle part où ils

 21   pouvaient aller. Ou alors donc la seconde option c'était pour eux de

 22   traverser la Croatie, alors une partie d'entre eux a choisi la première

 23   option, et l'autre a choisi la seconde.

 24   Mme PINTER : [interprétation]

 25   Q.  5D 00477, afin d'en terminer avec cette question du HOS. Il s'agit d'un

 26   document qui a déjà été versé au dossier. Cela a été émis par le ministère

 27   de l'Intérieur, et son service pour la protection de l'ordre

 28   constitutionnel, c'est en date du 15 octobre 1992. L'objet de ce document

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  1   ce sont les activités des groupes -- les activités du HOS et les

  2   préparatifs pour une "liquidation progressive" - entre guillemets.

  3   Avez-vous connaissance de ce document, Général ?

  4   R.  [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je voudrais apporter une correction

  6   au compte rendu en anglais. A la ligne 17, le numéro est le 5D 00447. Je

  7   pense qu'il manque un "0" en fait.

  8   Mme PINTER : [interprétation] Le numéro est 5D 00477.

  9   Q.  Général, s'agissant des circonstances dont il est question dans ce

 10   document, tout d'abord, est-ce que vous l'avez devant vous ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  S'agissant des circonstances décrites dans le document et le

 13   comportement de ces groupes de liquidations silencieuses et s'agissant des

 14   événements et des actes commis par certains membres du HOS, est-ce que vous

 15   avez des connaissances là-dessus ?

 16   R.  C'était après le meurtre commis sur Blaz Kraljevic et ce qui s'est en

 17   suivi et, bien sûr, le chaos s'est installé au sein du HOS, à partir de ce

 18   moment-là, bien sûr, je ne sais pas à quel point cette information est

 19   véridique. Mais ce que je sais est qu'une Unité du HOS de Stolac,

 20   constituée à 90 % des Musulmans, a commencé à régler les comptes avec le

 21   HVO, et moi, j'ai participé à cet événement avec M. Primorac, qui était

 22   membre du HOS lui aussi. Mais il y avait un grand nombre de bons hommes et

 23   honorables au sein du HOS, mais il y avait aussi de la racaille, des types

 24   absolument obscurs.

 25   Q.  Pour le compte rendu d'audience, qui a reçu ce document, qui était les

 26   destinataires de ce document ? Ceci figure à la page 5, dites-le, pour le

 27   compte rendu d'audience.

 28   R.  C'était envoyé à Manolic, le président du cabinet; ensuite à Jarnjak,

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  1   ministre de l'intérieur; ainsi de suite.

  2   Q.  Bien. Vous avez parlé des événements qui se sont déroulés dans la

  3   municipalité de Capljina et de Stolac en 1992, et vous avez dit aussi que

  4   vous avez participé à l'accueil des réfugiés du territoire de Dubrava,

  5   Brdo, et le territoire autour de Stolac. Est-ce que vous pouvez nous dire

  6   quelque chose de plus concret à ce sujet ? Aussi le territoire de Bivollje.

  7   R.  Je pense que beaucoup a été dit à ce sujet. Au sujet de la conquête

  8   serbe de Stolac, et de la manière dont les gens ont fui devant les Serbes,

  9   cependant, ce qu'il est exact, ce qui pouvait être résumé.

 10   Vous l'avez vu, d'après les éléments de preuve déjà présentés, c'est

 11   que les Musulmans en fait avaient établi de bons rapports avec les Serbes

 12   et au début ils ne voulaient pas se battre pour Stolac, et que les gens du

 13   HVO, qui étaient sortis de Stolac pour se défendre, les gênaient, donc ils

 14   interdisaient de creuser les tranchées sur les champs qui leur

 15   appartenaient sur leur propre terre, ce qui a rendu un certain nombre de

 16   personnes très amères, personnes qui voulaient se défendre.

 17   Ensuite il y avait des rumeurs, je ne sais pas si c'est vrai ou pas. Mais

 18   on disait que, lorsque les gens de la VRS, je crois, sont entrés dans

 19   Stolac, certains Musulmans les ont accueillis avec des fleurs; et que ce

 20   soit la vérité ou pas, lorsqu'une telle rumeur se répand, ils pouvaient

 21   déployer énormément d'efforts pour calmer une telle situation.

 22   Ensuite une autre chose. Ici nous avons eu le "hodja" l'imam de Capljina,

 23   et je lui ai posé des questions; il avait tenu un discours, c'était un

 24   discours public où dans les meilleures intentions il a parlé du Jihad. Or,

 25   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, dans la signification original,

 26   Jihad, ce n'est personnes la guerre sainte. Mais c'est la route que chaque

 27   Musulman dans sa vie doit traverser afin de s'approcher de Dieu, ou plutôt,

 28   d'Allah. Donc il doit le faire en étant bon, et honnête, et remplir tous

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  1   les critères moraux. Donc il s'agit d'une notion positive, tout comme chez

  2   les catholiques, il faut se comporter de manière conforme à la religion.

  3   Or, si vous dites cela lors d'un rassemblement public et j'ai posé la

  4   question à ce monsieur ici, bien sûr, personne n'est capable de faire des

  5   analyses aussi fines. Il s'agit là des analyses que l'on fait chez soi, les

  6   analyses de cabinet, or beaucoup de gens présents ont mal interprété cela

  7   en disant que le Jihad, ça voulait dire qu'ils devaient lancer une guerre

  8   contre tout ce qui n'était pas islamique.

  9   Donc il était nécessaire d'avoir ce genre de conversation aussi et

 10   calmer la situation. Il est tout simplement impossible de tout raconter. Il

 11   est tout simplement impossible de vous relater une telle situation.

 12   Maintenant je ne me concentre que sur certains détails mais je répète

 13   pendant 20 heures par jour, j'allais deux fois par jour à toutes les

 14   positions, je parlais avec des centaines de soldats et ainsi de suite.

 15   Q.  Peut-on présenter maintenant le document 3D 02639.

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   Q.  3D 02639.

 18   R.  Je n'ai pas ce document.

 19   Q.  Si, c'est au début.

 20   R.  Ah, si c'est 26 ?

 21   Q.  39. C'est un extrait du livre de Suad Cupina. Ça figure au début.

 22   R.  C'est ici, oui, je vois. Donc vous avez dit 26 --

 23   Q.  39.

 24   R.  2639. Oui, j'ai trouvé.

 25   Q.  Il s'agit du livre intitulé : "La défense et la trahison de la Bosnie-

 26   Herzégovine," et ce qui nous intéresse c'est 3D 33-0360 en croate. Et en

 27   anglais, il s'agit de 3D 40-1175. Il s'agit de deux extraits de brefs

 28   extraits du livre, extraits dans lesquels M. Cupina parle de ce dont vous

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  1   venez de parler à savoir la conquête de la caserne de Capljina et aussi de

  2   la situation qui prévalait sur le territoire de la municipalité de

  3   Capljina. A son avis, sa position vis-à-vis de ces extraits, enfin d'après

  4   ces extraits, et qu'un accord avait été passé entre les Croates et les

  5   Serbes au sujet de la situation dans la vallée de la Neretva.

  6   Veuillez nous dire votre commentaire puisque vous-même vous y êtes

  7   mentionné ?

  8   R.  J'ai sorti cela seulement en tant qu'exemple de quelque chose que

  9   j'essaie d'expliquer. L'auteur de ce livre et son frère habitaient, rue

 10   Aleksa Santic à Mostar, dans un appartement qui était au-dessus du mien,

 11   donc même bâtiment, même entrée. Je le connais. Ils étaient plus jeunes que

 12   moi mais je les connaissais, ils étaient garçons alors que moi j'étais déjà

 13   au lycée. Donc je le connais bien.

 14   Tout d'abord, s'agissant de ce monsieur, je lui ai donné à plusieurs

 15   reprises moi personnellement des armes pour l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 16   Deuxièmement, cet homme est un expert en karaté qui avait gagné plusieurs

 17   médailles, et cetera, très compétent en la matière. Et voyez-vous, M.

 18   Cupina avec M. Sulejman Budakovic qui lui était l'adjoint d'Arif Pasalic et

 19   le troisième Daidza, donc le troisième c'est un Musulman et ils étaient

 20   assis à Vrgorac en Croatie. Ils faisaient des commentaires alors qu'il

 21   n'est pas si malin que ça, lui le karateka, il dit qu'Anton Tus avait reçu

 22   une expression de gratitude de la part de Perisic car nous avons eu dix

 23   morts et plus de 20 blessés, et puis il dit à savoir ce que Bobetko

 24   faisait, et cetera. Ensuite il dit : ils attentent donc, ils attendent

 25   l'issue de la bataille, donc Praljak et Perisic trouvent un accord pour

 26   qu'ils puissent reprendre le reste des équipements pour le Bataillon de

 27   Mostar -- Bataillon indépendant de Mostar. Or il est très important,

 28   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, de voir comment les gens

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  1   réfléchissent. Donc les trois Musulmans, ils sont assis en Croatie, ils

  2   attendent que Praljak finisse de prendre le contrôle de la caserne pour

  3   qu'ils reçoivent les armes pour le Bataillon de Mostar, et en plus de tout

  4   cela, ils fabriquent -- ils se lancent dans des fabrications et des

  5   discussions qui auraient lieu entre Tus et Perisic, et cetera. Ensuite il

  6   dit qu'on est entré dans la caserne une unité est entrée dans la caserne de

  7   Capljina mais moi je l'ai renvoyée. 

  8   Donc ce sont les mensonges les plus vulgaires qui insultent mon

  9   intelligence et mon âme. Il est difficile de l'imaginer mais ceci illustre

 10   le fait qu'un certain nombre de Musulmans considéraient qu'ils étaient des

 11   maîtres -- dans maîtres pour lesquels il fallait prendre la caserne, leur

 12   donner les armes et ensuite ils pouvaient raconter ce qui bon leur

 13   semblait, et ils n'étaient pas les seuls à  le faire.

 14   De telles opinions circulaient très souvent et produisaient de

 15   profonds malentendus car si, par exemple, les hommes de Bozan, qui avaient

 16   subi des pertes, avaient vu cela, bien sûr, il aurait été difficile

 17   d'empêcher au moins une bonne bagarre car ceci ne mérite pas autre chose.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est à quelques secondes près, il faut qu'on

 19   termine.

 20   Pour la Défense 3D, vous avez utilisé 21 heures et 15 minutes; c'est ce que

 21   le greffier vient de m'indiquer. Voilà.

 22   Alors nous nous retrouverons, comme vous le savez, demain à 9 heures. D'ici

 23   là je vous souhaite à tous une bonne fin de journée.

 24   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 20 mai

 25   2009, à 9 heures 00.

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