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1 Le mardi 16 juin 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Les accusés Prlic et Coric sont absents]
5 [Le témoin vient à la barre]
6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
8 l'affaire.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
10 toutes les personnes présentes dans le prétoire.
11 Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et
12 consorts. Merci, Messieurs les Juges.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce mardi 16 juin
14 2009, je salue en premier M. Praljak. Je salue MM. Pusic, Petkovic et
15 Stojic. Je salue également les accusés qui ne sont pas présents. Je salue
16 Mmes et MM. les Avocats. Je salue M. Stringer et ses collaborateurs, ainsi
17 que toutes les personnes qui nous assistent.
18 Monsieur le Greffier, nous allons passer pendant quelques instants à huis
19 clos.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes
21 actuellement en audience à huis clos partiel.
22 [Audience à huis clos partiel]
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13 Page 41454 expurgée. Audience à huis clos partiel.
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1 [Audience publique]
2 LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]
3 [Le témoin répond par l'interprète]
4 Questions de la Cour : [Suite]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, je vais continuer mes questions,
6 mais avant cela, par rapport à hier, j'ai juste une petite précision à vous
7 demander. Vous nous avez parlé du fils de M. Tudjman, Miroslav Tudjman. En
8 lisant ce matin aux aurores l'arrêt dans l'affaire Blaskic, je me suis
9 rendu compte au paragraphe 419 de cet arrêt, il était mentionné un Miroslav
10 Tudjman, chef des Services secrets; est-ce le même ?
11 R. Je suppose que oui. Il n'y a pas d'autre Miroslav Tudjman, du moins je
12 n'en connais pas d'autre. Il était à la tête des Services secrets pendant
13 quelque temps.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc il était à la tête des Services secrets.
15 Vous, en tant que ministre adjoint de la Défense, vous aviez des relations
16 professionnelles avec lui ?
17 R. Monsieur le Président, pas pendant cette période-là. Pour commencer, il
18 était au sein de l'IPD avant moi, et c'est plus tard qu'il est devenu chef
19 et non pas du Service secret de l'armée. Il n'a jamais été à la tête du
20 SIS. Plus tard, il est devenu, me semble-t-il, en 1993 uniquement, qu'on a
21 créé le HIS, le service d'Information croate, je pense en 1993. C'est là
22 qu'il est devenu le chef du service de Renseignements croate. C'était un de
23 ces services qu'on peut qualifier de secret. Donc il y avait d'une part, le
24 service militaire, puis le service de la Police, par définition, elle en a
25 un. Puis là, vous aviez un service analytique vers lequel convergeaient les
26 informations venues de différentes parts. A l'époque, je n'avais pas
27 vraiment de contact avec lui, parce que le HIS n'était pas en place pendant
28 que j'étais à l'IPD. Il ne faisait pas partie du ministère de la Défense
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1 non plus.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je vais passer maintenant au général
3 Bobetko qui se trouve, comme vous, cité dans la liste des membres de
4 l'entreprise criminelle commune. A l'inverse, il est décédé entre-temps.
5 Vous, vous êtes bien vivant, et heureusement pour vous.
6 Mais ce que j'aimerais savoir c'est : quel est le point de vue que
7 vous avez sur le général Bobetko ? Quelles étaient les relations que vous
8 aviez avec le général Bobetko ?
9 R. Pour le moment, je suis en vie, nous sommes tous pour le moment en vie.
10 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il est difficile de parler des
11 personnes qui ne sont plus parmi nous. Si l'on venait à dire quelque chose
12 qui ne serait pas tout à fait positif, alors ces individus ne pourraient
13 pas réagir. Je vais essayer d'avancer avec la plus grande précaution et
14 précision. Donc le général Bobetko, il a été le premier partisan de Croatie
15 et de Yougoslavie. Donc il a fait partie de ce petit détachement de 1941
16 créé près de Sisak. Il était jeune, bien entendu, donc c'était une première
17 forme de résistance, de soulèvement dans toute l'Europe. Après la guerre,
18 il est resté au sein de la JNA et il a atteint le grade de général.
19 En 1971, lui aussi, il a connu une déviation sur le plan de la ligne du
20 parti. Il a été membre du Printemps croate, mouvement où on a demandé à peu
21 près les mêmes choses que ce que l'on a revendiqué en 1990, sauf qu'à ce
22 moment-là c'étaient des Communistes croates et des étudiants croates, ceux
23 qui se sont joints. Donc il a été mis à la retraite à ce moment-là. Ça n'a
24 pas été aussi grave comme pour le général Cervenko, qui a été condamné à un
25 an et demi de prison, par exemple. Donc c'était un retraité au moment de
26 ces événements, début des années 90, c'était un homme un peu âgé. Donc il a
27 un petit peu attendu, disons. Ensuite, il est venu se présenter au
28 ministère de la Défense, il a eu un poste, des fonctions. Je pense qu'il
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1 avait la charge de l'éducation au début dans un premier temps. Le Dr
2 Tudjman l'a nommé par la suite commandant du secteur sud du champ de
3 bataille, donc le secteur de Dubrovnik et dans les parages. Il devait jouer
4 le rôle de contact face au HVO pour que le HVO puisse se défendre contre
5 l'armée de la République serbe et la JNA, enfin, les projets d'avancée
6 qu'ils avaient vers Split.
7 Le général Bobetko s'en est chargé, a mené à bien sa mission,
8 libération jusqu'à Prevlaka, Dubrovnik et la par la suite, on l'a nommé à
9 la tête du Grand état-major de l'armée croate. Il est venu remplacer le
10 général Tus. Il est resté à ce poste jusqu'en 1995, au printemps, été, là
11 où il est tombé malade et il a été hospitalisé.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous-même, vous l'avez rencontré à quelle
13 période précise, vous ?
14 R. Monsieur le Président, c'est des -- à Sisak. Lorsque j'étais à Sunja,
15 je l'ai rencontré. Il n'avait pas de poste, pas de fonction, mais il s'est
16 rendu une fois à Sunja. C'était un monsieur âgé. Je lui ai présenté et
17 montré tout ce qu'il voulait voir. Voilà.
18 Ce que je voulais dire, c'était un homme âgé et, sur ce plan, face à ces
19 choses, je me souviens que M. Scott m'a posé cette question pendant que
20 j'étais témoin dans Naletilic. C'est comme Starosa, chez les Russes, on le
21 respecte vu son âge avancé. Mais je peux dire ici que j'ai eu un certain
22 nombre de reproches face à la manière qui était la sienne. Il a voulu
23 occuper un poste un peu plus important que celui qui lui serait revenu
24 naturellement dans le cadre militaire.
25 Je vais donner un exemple sur la base des consultations d'une décision
26 prise par le gouvernement et du président Tudjman : il était interdit de
27 prendre la parole publiquement, donc en uniforme de général ou autre de
28 l'armée croate, et le général Bobetko n'a pas respecté cette consigne. Donc
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1 la question était de savoir comment faire appliquer cela à des échelons
2 inférieurs si on ne pouvait pas demander au général Bobetko de s'y
3 conformer lui-même ? Donc j'avais connu ce problème.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Le général Bobetko est né en 1919. En 1993, il a
5 donc 74 ans. A votre connaissance, dans l'armée croate, on est à la
6 retraite à quel âge ?
7 R. Il me semble que c'est 60 ou 65 ans le plus tard, me semble-t-il.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand il rejoint l'entourage de M. Tudjman, il est
9 déjà retraité. Donc il n'a pas à porter l'uniforme. C'est ça que vous
10 voulez nous dire ?
11 R. Non. A l'époque, il était nécessaire en tant que nom, en tant qu'un
12 antifasciste, surtout parce que pendant 45 ans, la propagande serbe a
13 présenté les Croates comme des Oustacha. Donc savoir son nom et son âge,
14 tout cela c'était important pour qu'il rejoigne les rangs de l'armée
15 croate. On ne pouvait pas faire attention à l'âge à cette époque-là.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire quelque chose qui va me permettre
17 de faire le pont avec une question que j'avais l'intention de vous poser,
18 J'ai lu, puisque c'est de notoriété publique, que ses frères et son père
19 avaient été tués pendant la Seconde Guerre mondiale par les Oustacha, et
20 que lui avait rejoint les Partisans. Est-ce bien l'information que vous
21 avez vous ?
22 R. Oui, je sais pour ce qui est de sa famille. Non, ce ne sont pas ses
23 frères. Je connais un de ses frères, mais je sais qu'en partie, il y a eu
24 des membres de sa famille qui ont péri, de la main des Oustacha, oui.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous nous l'avez déjà dit, mais je pense que
26 c'est important et il faut que ça soit dans l'esprit de tout le monde.
27 De l'extérieur, nous avons l'impression que les Croates s'étaient divisés
28 en deux branches : les "fascistes" - entre guillemets - qu'on pouvait
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1 qualifier d'Oustacha; puis les Partisans qui, eux, étaient dans l'autre
2 bord; et que finalement, l'entourage de M. Tudjman, lui-même, Bobetko et
3 d'autres venaient du courant antifasciste. Est-ce bien cela la situation
4 historique ?
5 R. A 90 %, vous aviez des individus issus de ce courant : Manolic,
6 Tudjman, Bobetko, tous venaient de la JNA, Petkovic, Stipetic, Mesic, et
7 cetera, et n'empêche qu'on les accusait sans cesse d'être des Oustacha, moi
8 aussi, on était tous vus comme des Oustacha dans la propagande.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Si quelqu'un dit que Tudjman, Bobetko, Susak et
10 vous-même étiez des Oustacha, ça serait une erreur capitale.
11 R. Ce ne serait pas une erreur. Ce serait une manière de décevoir. Ce
12 serait de la propagande éhontée.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'est au transcript et c'est bien présent
14 maintenant dans mon esprit.
15 Ce que je voulais vous demander également. Quand vous avez discuté avec le
16 général Bobetko, est-ce qu'il a fait part de ses vues politiques sur la
17 République de Croatie, sur la République de Bosnie-Herzégovine, sur les
18 Croates qui vivaient en Herzégovine ? Est-ce qu'il a manifesté auprès de
19 vous des idées, des points de vue ?
20 R. Oui.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Que vous disait-il ?
22 R. Bien, je dois dire que là j'avais un léger différend avec M. Bobetko,
23 sur un nombre de points, M. Bobetko était resté communiste. Seulement, il
24 ne comprenait pas tout à fait la démocratie. Il préférait ce qu'il avait
25 appris au sein de la JNA. Mais pour ce qui est de la Croatie, pour ce qui
26 est de la Bosnie-Herzégovine et du peuple croate ainsi que de la question
27 des Serbes en Croatie, tout simplement, il était toujours ce qu'il avait
28 été toute sa vie, à savoir un antifasciste, autrement dit, ça ne lui serait
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1 pas venu à l'esprit de percevoir une autre nation autrement que comme sur
2 un pied d'égalité en tout point au peuple dont il était membre.
3 Donc comme nous tous, la Bosnie-Herzégovine était un Etat à ses yeux, la
4 Croatie était un Etat. Il fallait développer ce qu'on développe
5 aujourd'hui, à savoir des normes démocratiques, l'Etat de droits, tout ce
6 qui est dans une société, à partir du moment où il y a eu un changement de
7 système, doit réaliser, mais en l'espace des décennies. On ne peut pas du
8 jour au lendemain avoir le système suisse ou français.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question : nous savons qu'il a participé à
10 de nombreuses réunions avec M. Tudjman et Susak, et vous-même d'ailleurs
11 vous étiez présent à certaines réunions, donc vous avez pu entendre les
12 interventions de M. Bobetko.
13 Vis-à-vis de M. Susak, y avait-il des conflits entre eux deux, car
14 lui était plutôt dans un rôle de conseiller militaire avant de devenir
15 responsable principal. Est-ce que M. Susak admettait que M. Bobetko vienne
16 peut-être s'occuper du fonctionnement du ministère de la Défense ? Est-ce
17 que cela posait des problèmes ou ça n'en posait pas ?
18 R. Des problèmes mineurs, oui. Voilà comment je présenterais les choses :
19 Il n'y avait pas que M. Bobetko. Cela concerne également, plus ou moins,
20 tous les officiers issus de la JNA. Non pas parce qu'ils auraient été de
21 meilleure qualité ou moins bons. Ils acceptaient la politique dans son
22 ensemble, mais ce qui est important de savoir, c'est qu'ils avaient
23 certaines manières de procéder, et à leurs yeux, le ministère devait être
24 subordonné au Grand état-major, et ce n'est pas comme ça que Tudjman voyait
25 les choses. Il n'autorisait pas cela. Donc ils étaient habitués à ce que
26 l'armée soit le numéro 1. La JNA, c'était une corporation. Les officiers
27 bénéficiaient d'un statut spécifique et le ministère de la Défense n'a pas
28 véritablement existé au sein de l'ex-Yougoslavie. Donc il y a eu quelques
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1 petits problèmes parce qu'il a fallu qu'ils s'adaptent, et pour cela, il
2 leur a fallu du temps.
3 C'est comme lorsque vous avez des basketteurs qui ont l'habitude de
4 faire du basket, si vous leur donnez de l'argent, ils vont faire un terrain
5 de basket et pas de water-polo. Donc, là, il a fallu aménager un certain
6 nombre de choses. Ils ont voulu un petit peu reprendre le modèle auquel ils
7 avaient été habitués de par le passé. Nous nous opposions un petit peu à
8 cela, moi aussi.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette précision. Maintenant je vais
10 aborder avec vous les autres participants qui sont, en même temps que vous,
11 accusés. Tout d'abord, vous savez que le règlement vous permet aussi de ne
12 pas vous incriminer. Si vous ne voulez pas répondre à une question, vous ne
13 répondez pas. Je n'insisterai pas dans la mesure où ça peut concerner vos
14 amis. Malheureusement, dans l'acte d'accusation vos amis, dont trois sont
15 présents, sont concernés, donc je suis obligé, pour essayer de comprendre
16 les interactions entre les uns et les autres, d'aborder cela.
17 Alors on va commencer par M. Prlic.
18 Pouviez-vous me dire à quel moment vous avez fait la connaissance de
19 M. Prlic ?
20 R. C'est en 1992 que je l'ai croisé quand je suis venu là-bas et nos
21 rencontres n'étaient pas très fréquentes. Je ne pourrais pas dire cela. Il
22 est arrivé que l'on se voit par ci par là. Quand je venais sur place, il me
23 semble que je l'ai vu peut-être une ou deux fois, et quand je suis devenu
24 commandant du Grand état-major, lui était le président de ce qu'on pourrait
25 éventuellement qualifier de gouvernement, mais ce n'était pas véritablement
26 un gouvernement puisqu'il n'y avait pas d'Etat, à partir de ce moment-là,
27 je l'ai croisé plusieurs fois, mais pas plus que ça. Il me semble que j'ai
28 été présent lors de deux réunions du gouvernement. Je me souviens de l'une
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1 de ces réunions très bien. La question était de savoir si les étudiants
2 devaient aller combattre. J'ai même suscité un incident à la réunion du
3 gouvernement, parce que je ne comprenais pas qu'on puisse exempter les
4 étudiants de la défense du pays.
5 Une autre fois aussi, il me semble que le général Petkovic était avec moi,
6 lorsqu'ils nous ont demandé de leur faire un topo sur la situation de
7 terrain.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : On va rentrer dans le détail. Vous nous dites en
9 1992. Quel mois plus précisément ?
10 R. Ça pouvait être le mois de mai 1992.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Au mois de mai 1992. Quand vous l'avez rencontré la
12 première fois, est-ce que vous avez eu l'impression de rencontrer un
13 technocrate, un technicien de l'économie ? Avez-vous rencontré un homme
14 politique d'envergure ? Avez-vous rencontré quelqu'un dont vous pensiez
15 qu'il allait avoir un destin politique ? Quelle première impression il vous
16 a donnée ?
17 R. Pour être tout à fait franc, je n'arrive pas à me rappeler exactement à
18 quel moment je me suis fait une opinion sur lui, mais premièrement, je me
19 souviens que je me suis dit qu'il était très intelligent, un esprit vif, un
20 homme tout à fait normal qui comprenait la situation, qu'il était du cru.
21 Aussi, je savais qu'il a rencontré un certain nombre de problèmes dans les
22 différentes municipalités auprès de certains individus, parce qu'avant de
23 rejoindre le HVO, il avait été communiste, donc il y a eu quelques
24 animosité qui l'ont suivi dans le cadre de ses activités. Mais en si peu de
25 temps, je me garde de former des conclusions précipitées sur la base d'une
26 conversation, vous savez, arriver à des conclusions -- je fais très
27 attention à ne pas arriver à des conclusions précipitées.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Néanmoins, vous l'avez rencontré. Est-ce que vous
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1 avez échangé des points de vue sur la situation politique ? Est-ce qu'il
2 vous a indiqué quelle était sa conception à lui de l'évolution
3 institutionnelle par rapport à la République de Bosnie-Herzégovine ou est-
4 ce qu'il a eu des débats avec vous ou bien il ne vous a strictement rien
5 dit ou peu de choses ?
6 R. Non, Monsieur le Président. Lorsque nous nous sommes vus les premières
7 fois, c'était à Mostar lorsque l'armée de la République serbe et la JNA
8 pilonnaient la ville de manière très importante, et la conversation portait
9 uniquement sur la question qui était de savoir à partir de quand est-ce que
10 je pensais pouvoir agir. C'était le seul sujet, le sujet militaire. Pas des
11 questions politiques ou sur la Yougoslavie.
12 Plus tard, c'était déjà en 1993, nous avons évoqué les sujets que vous
13 mentionnez.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : On va quitter un peu le champ politique pour aborder
15 maintenant les relations professionnelles que vous avez eues avec lui. Je
16 vais distinguer deux périodes : la période avant juillet 1993, puis la
17 période de juillet 1993. Alors dans la période avant juillet 1993, où de
18 temps en temps vous étiez sur le terrain, nous vous avons vu à Prozor. Nous
19 savons que de temps en temps vous étiez sur le terrain.
20 Est-ce qu'à ce moment-là, avec M. Prlic, vous avez eu des discussions de
21 nature militaire ?
22 R. Il me semble que je l'ai rencontré une ou deux fois lors de cette
23 période s'étendant jusqu'en juillet 1993. Il est très probable que nous
24 ayons abordé tous les sujets. Il m'est difficile maintenant de m'en
25 souvenir.
26 Mais nous avons certainement abordé des questions politiques, vers où
27 nous nous dirigions, pourquoi, comment. Il en a sûrement été question. Nous
28 avons certainement aussi abordé tel ou tel sujet militaire, même si, de
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1 cela, je n'en discutais pas avec lui. Lui était déjà dans la structure et
2 il a davantage été question de la façon dont tout cela allait se terminer,
3 et cette question aussi de savoir ce qu'il allait en être de ces
4 propositions avancées par la communauté internationale, pourquoi cela
5 n'est-il pas mis en œuvre.
6 Pourquoi le signons-nous, ensuite les autres le rejettent-ils, puis
7 on entre de nouveau dans la même spirale. C'était comme ça plutôt.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites qu'il était dans les structures, ce
9 qui me permet d'aller maintenant au nœud du problème.
10 En tant que militaire, est-ce qu'il vous donnait des ordres de nature
11 opérationnelle, ou bien vous étiez vis-à-vis de lui totalement indépendant
12 ?
13 R. J'étais complètement indépendant de lui. Il ne m'a jamais donné quelque
14 ordre de nature militaire que ce soit.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Maintenant je passe à la deuxième période, juillet
16 1993, 8 novembre 1993. Vous voyez il faut être très précis. Pendant cette
17 période où vous étiez commandant militaire du HVO, donc le numéro un sur le
18 plan militaire. Lui, il a été président du HVO, puis premier ministre, mais
19 la fonction pouvait recouvrir quasiment la même totalité du champ de
20 compétence. Mais pendant cette période de juillet à novembre, est-ce qu'à
21 un moment donné M. Prlic vous a dit : "Général Praljak, vous allez faire
22 ceci, vous allez faire cela" ?
23 R. Jamais.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous êtes affirmatif. Il n'est jamais intervenu
25 en matière militaire.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, ceci, nous n'avons
27 pas entendu la traduction de cela.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison. Sur le transcript, à la ligne 13,
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1 il n'y a pas votre réponse. Il est marqué. Alors, je vous repose la
2 question parce qu'il faut que ça soit au transcript, parce que c'est
3 important.
4 Général Praljak, est-ce qu'à un moment donné pendant la période de juillet
5 à novembre 1993, M. Prlic vous a donné des ordres en matière militaire en
6 vous disant il faut faire ceci ou faire cela ?
7 R. Jamais.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il est marqué donc "never;" ça vous convient,
9 Maître Karnavas ? C'est bien enregistré.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas à moi de dire si ça va ou non,
11 mais de savoir si la réponse du témoin est bien enregistrée, Monsieur le
12 Président.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La réponse est enregistrée.
14 Alors donc M. Prlic n'intervenait pas en matière militaire. Il n'en demeure
15 pas moins, Général Praljak, que nous avons vu, et il y a des comptes
16 rendus. Vous-même, vous avez fait allusion d'ailleurs, vous avez dit que
17 vous aviez participé à deux réunions du gouvernement et lors de ces
18 réunions avait été abordée la question des étudiants, à savoir s'ils
19 devaient être conscrits ou pas.
20 Alors est-ce que vous vous souvenez de ces réunions, et à ce moment-
21 là, vous étiez à ce type de réunion; à quel titre pour informer la
22 structure civile du HVO de problème logistique lié au problème de conscrit,
23 au problème des effectifs, ou bien c'étaient des réunions pour faire le
24 point d'une situation militaire, dans votre mémoire ?
25 R. Oui, je m'en souviens, Messieurs les Juges. Lorsque j'ai dit qu'il
26 n'est jamais intervenu dans des questions militaires, vous parliez d'ordre.
27 Vous disiez -- vous m'avez demandé s'il ne m'avait ordonné de faire telle
28 ou telle chose. Cela, bien sûr, il ne l'a jamais fait.
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1 En revanche, bien entendu, que le département de la Défense dépendait
2 du gouvernement au sens où cela leur incombait, par exemple, que de
3 s'assurer que suffisamment de bottes ou de carburant avait été fourni, que
4 la mobilisation se déroulait correctement. Il s'agissait de questions qui
5 incombaient principalement à l'état-major. Evidemment il y avait une
6 coordination en la matière. Alors en l'espèce, il y a eu une réunion chez
7 M. Stojic. Il me semble d'ailleurs que je n'y avais pas été présent.
8 C'était soit moi, soit Matic. Certaines personnes avançaient l'idée
9 suivante qui était mise en œuvre, à savoir qu'il fallait libérer - entre
10 guillemets - les étudiants pour qu'ils puissent aller défendre le pays.
11 Cela entraînait à mon sens des conséquences tout à fait
12 incalculables, le fait d'exempter les étudiants donc de ne pas leur imposer
13 cette obligation d'assurer la défense du pays. On a vu des gens s'inscrire
14 dans toute sorte de cursus, tout d'abord. Ensuite, pour moi, il était
15 inimaginable que quelqu'un ait le pouvoir de décider par exemple, voilà,
16 ton fils qui est ouvrier, qui est mécanicien, que lui allait mourir au
17 combat, alors que le mien qui s'est inscrit à la fac, que lui soit exempté.
18 C'est une véritable ségrégation qu'on aurait là.
19 Donc je me suis rendu à cette réunion face au gouvernement avec
20 l'intention de leur dire ce que je viens de vous dire.
21 Le gouvernement a fini par l'accepter mais un des ministres qui n'est
22 plus des nôtres aujourd'hui, malheureusement, lui non plus a continué à
23 donner des explications nébuleuses pour justifier sa position selon
24 laquelle il fallait continuer à exempter les étudiants. Lorsqu'il a dépassé
25 les bornes, moi, je l'ai attrapé par l'épaule, par le cou, j'ai crié un
26 incident, car j'estimais que c'était du fascisme, que d'imposer aux uns d'y
27 aller et aux autres, de permettre de ne pas y aller. Je jouais une espèce
28 de petit dieu dans cette enceinte. Le gouvernement a décidé que tous
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1 devaient répondre à l'appel à la mobilisation. Excusez-moi.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Oui.
3 Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, aux fins
4 du compte rendu d'audience, page 15, ligne 9, dans la réponse du général
5 Praljak, il manque la négation le "non." Lorsque le général parlait du
6 ministère de la Défense et qu'il listait les tâches incombant au ministère
7 de la Défense, il a été versé au compte rendu d'audience que le général
8 aurait affirmé la chose suivante, à savoir que la fourniture de carburant,
9 la fourniture de bottes et la mise en œuvre de la mobilisation sont
10 effectuées par l'intermédiaire de l'état-major principal. Mais ce n'était
11 pas la réponse du général Praljak, et j'aimerais que cela soit consigné
12 car, d'après le compte rendu d'audience, il apparaît que tous ces éléments
13 se faisaient par l'intermédiaire de l'état-major principal.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. Ces tâches n'incombaient pas à l'état-
15 major. Ce dernier avait sous sa responsabilité l'utilisation qui était
16 faite des unités sur un plan opérationnel. Il y a eu une deuxième session
17 du gouvernement où il me semble que nous avons été invités. Je crois que M.
18 Petkovic et moi-même, nous y étions et nous avions été invités afin
19 d'informer le gouvernement de la situation militaire sur le terrain. Cela
20 est tout à fait normal et légal. Il me semble qu'après cela, nous nous
21 sommes mis d'accord et qu'ils recevaient régulièrement une synthèse de la
22 situation militaire sur le terrain afin qu'ils puissent adapter toutes
23 leurs activités, non pas uniquement politiques mais également tout ce qui
24 avait trait aux ressources y compris financières et ainsi de suite à la
25 situation militaire.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais que vous me renseigniez sur ce que je ne
27 comprends pas. Nous savons que M. Mate Boban a été élu par les différents
28 élus venant des municipalités qui ont créé la Communauté croate d'Herceg-
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1 Bosna. Donc parmi eux, il y a Kostroman, Kordic, Topic, et cetera. Je me
2 suis dit comment se fait-il que le chef du gouvernement, président du HVO
3 ou premier ministre, n'ait pas été un élu, un élu municipal et qu'on est
4 allé chercher M. Prlic.
5 Vous avez une explication ?
6 R. J'ai ma propre explication personnelle, à savoir qu'il était plus
7 compétent en la matière. D'un point de vue technique, technologique,
8 organisationnel pour ce qui était d'assurer ce poste qui consistait quand
9 même à diriger, il était plus compétent que ces espèces tribuns populaires
10 qui étaient les autres, pour la plupart, lorsque les gens ont commencé à
11 s'opposer, à déclarer leur opposition communiste.
12 Dans ce genre de situation, le peuple se réunit autour d'un noyau, vous
13 savez, si, à l'époque, vous aviez présenté la candidature d'une vache, au
14 nom du HDZ, si vous aviez écrit HDZ dessus, elle aurait été élue.
15 Malheureusement, c'est une sélection qui n'est pas toujours positive,
16 compte tenu des principes dont a besoin la société. Il s'avère que la
17 société après a besoin. C'était la nature des gens qui ont été les premiers
18 orateurs, les premiers tribuns dans cette opposition au communisme. Cela ne
19 signifie pas pour autant qu'ils sont les plus aptes à faire partie de
20 l'organisation et de la structure de l'Etat.
21 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Juste
22 pour éclaircir un point du compte rendu. J'ai perdu l'endroit, excusez-moi.
23 J'étais en train de regarder la dernière -- en fait, c'était votre
24 question, Monsieur le Président à la page 17, ligne 9. Il est indiqué que
25 vous vous référez à M. Mate Bobetko et je crois qu'en fait, Mate Boban, je
26 pense.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement. Merci, Monsieur Stringer.
28 Oui, c'était Mate Boban et pas Bobetko. Alors ça me permet de revenir à M.
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1 Mate Boban.
2 J'ai envoyé directement sur M. Prlic mais j'aurais pu passer avant
3 cela par M. Mate Boban.
4 Alors on va revenir à M. Mate Boban. Pouvez-vous me dire, vous,
5 Général Praljak, à quel moment vous avez rencontré Mate Boban, la première
6 fois ?
7 R. En 1992 également, vers le mois d'avril, au mois d'avril.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors même question : quelle impression vous
9 a-t-il donné ? Etait-ce un homme politique, un technicien, un élu qui avait
10 des idées sur la gestion municipale voire de la région ? Etait-ce un
11 illuminé ? Quelle impression avez-vous eu ?
12 R. M. Mate Boban était un homme politique. C'était vraiment un homme
13 politique. Il était capable de coopérer avec les gens, de ne pas toujours
14 dire tout ce qu'il pensait et ainsi de suite. A mon sens, en 1993 lorsque
15 les plans avancés par la communauté internationale ont échoué, aussi bien
16 le plan Cutileiro, où Mate Boban avait été trompé, que lorsqu'il a été
17 également trompé à propos de la formulation exacte de cette question du
18 fameux référendum portant sur l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Ou
19 encore lorsqu'il a été trompé après la Conférence de Londres et le plan
20 Stoltenberg et ainsi de suite, alors même que lui espérait qu'avec l'une de
21 ces solutions, on allait pouvoir résoudre l'ensemble du problème.
22 A mon sens, il a commencé à perdre le contrôle au sens non pas
23 politique mais au sens de l'organisation. Il est resté le même qu'au début
24 mais on ne savait plus quel serait le point de vue de la communauté
25 internationale et jusqu'où elle allait continuer à céder au plus fort. En
26 raison de tous ces événements et tous les entretiens qui ont été organisés,
27 l'organisation de la HZ HB fonctionnait de plus en plus mal. Ce n'est pas
28 quelle ne fonctionnait plus, mais elle fonctionnait de plus en plus mal car
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1 diverses structures apparaissaient au sein d'elle sur toutes sortes de
2 base. Sur des bases économiques, parfois il s'agissait de divergences
3 d'opinions ou de personnes qui étaient de simples profiteurs qui agissaient
4 dans leur coin.
5 A cet égard aussi, lors de cette réunion à Split, j'ai déclaré et
6 j'ai dit que le problème fondamental de la HZ HB était quelle ne disposait
7 pas d'une organisation interne plus solide et je dis ça du point de vue
8 d'un commandant militaire mais également d'une personne qui s'y connaît
9 quelque peu en la matière. Il y avait là des objections lors de cette
10 réunion qui s'adressaient également à M. Boban qui ne comprenait pas
11 vraiment pleinement la situation et la réalité.
12 Il se contentait de dire bien les faits sont là et le monde va peut-
13 être finir de les comprendre. Je l'ai dit à Paris. Je l'ai dit aux
14 officiels à Berlin et je l'ai dit à Londres. Je l'ai dit donc à Berlin et
15 puis mes interlocuteurs m'ont compris. Ensuite dix jours plus tard, ils se
16 montraient ahuris et très surpris de voir que personne n'avait compris et
17 que les choses se déroulaient d'une façon complètement différente. Chez lui
18 cela a commencé à nourrir un profond sentiment d'amertume mais également
19 une forme de passivité, notamment lorsqu'on a commencé à l'accuser d'avoir
20 été celui qui était à l'origine d'une forme de radicalisation et que
21 manifestement on allait plus facilement parvenir à un accord sans lui.
22 Alors évidemment on ne serait parvenu plus facilement à un accord
23 sans lui, sans moi également et il suffisait de rayer de la carte ce peuple
24 et puis tout aurait été sans doute comme il faut. Mais, cependant, moi, je
25 n'ai aucune objection aux positions par rapport à ses positions politiques.
26 La façon dont la Bosnie-Herzégovine était organisée d'un point de vue
27 interne, ses frontières et ainsi de suite; cependant, lors de cette
28 réunion, j'ai mis ma propre démission sur la table et j'ai demandé que lui
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1 aussi quitte ses fonctions et j'ai prononcé cette phrase à cette occasion
2 concernant ces bureaux : quand vous voulez parvenir à un résultat, vous
3 savez bien ce qu'il faut faire, moi, je lui ai dit que Grude ça ne
4 signifiait rien, qu'il fallait qu'il soit à Mostar.
5 Il ne comprenait pas l'importance des informations qui venaient
6 toutes de Sarajevo et qui étaient biaisées. Après on a écrit des dizaines
7 d'ouvrage de plus en plus d'ouvrages, montrant à quel point il y avait une
8 quantité infinie de mensonges qui étaient propagées au quotidien. En 1992,
9 1993, avec mes amis, j'ai monté un projet de télévision à Mostar afin que
10 nous-mêmes nous puissions tourner des images et montrer la vérité de notre
11 point de vue. Mais Mate Boban, lui, ne comprenait pas cela. Il pensait que
12 tous étaient présents et qu'ils allaient probablement dire la vérité.
13 C'était là quelque chose qui lui manquait alors que les Serbes avaient
14 trois chaînes de télévision. Les Musulmans étaient couverts par la
15 télévision de Sarajevo et seul Sarajevo comptait avec ses informations.
16 Quant à nous, on propageait une quantité invraisemblable de mensonges sur
17 notre compte, et lui se contentait de s'asseoir autour d'une table avec des
18 journalistes. Il répétait son propre point de vue mais le résultat était
19 nul.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous dites est intéressant et peut permettre
21 de comprendre plusieurs des événements qui se sont déroulés. Mais je
22 voudrais aborder les rapports entre lui et Tudjman, car vous avez assisté à
23 des réunions où il était présent à Zagreb. Alors était-ce le petit garçon
24 qui allait à Zagreb rencontrer Franjo Tudjman et il allait recevoir des
25 ordres, ou bien il représentait une autorité qui rencontrait M. Tudjman
26 mais en tout indépendance ? Comment avez-vous perçu ce type de rapport
27 quand des délégations de Croates de la République de Bosnie-Herzégovine se
28 rendaient à Zagreb ? Etait-ce une délégation qui venait prendre des ordres,
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1 ou bien qui venait discuter d'égal à égal ?
2 R. Je vais vous répondre très précisément. A l'époque, une grande majorité
3 des gens en Bosnie-Herzégovine aurait préféré pouvoir s'en remettre à
4 quelqu'un à un dirigeant qui les aurait mené. Voilà. "Voilà ce que nous
5 souhaitons. Nous pensons que c'est juste." Il souhaitait beaucoup plus que
6 ce soit Franjo Tudjman qui en soit chargé, mais c'était lui qui refusait,
7 c'est lui qui les rejetait et il ne voulait pas détruire leur propre
8 indépendance. Il les accueillait, il les écoutait et il ne cessait
9 d'insister et de répéter :
10 "C'est votre problème, ce sont vos positions. Je vous soutiendrai
11 pour ce qui est de ces positions de nos positions communes, telles que nous
12 les avons formulées mais vous devez prendre vous-même vos propres
13 décisions."
14 Bon. Ne serait-ce qu'entre autre chose, parce que Franjo Tudjman
15 connaissait d'importantes limitations dans les actions qu'il pouvait
16 entreprendre, tout d'abord, la communauté internationale, à chaque fois
17 qu'il y avait le moindre problème, qu'il s'agisse des ambassadeurs ou
18 d'autres lui demandait d'intervenir ? Puis le lendemain, il disait :
19 "Voilà, vous intervenez dans les problèmes qu'on constate en Bosnie."
20 C'était une situation très pénible. Donc on vous demandait à la fois
21 d'intervenir, on vous disait mais vous pouvez aider à ce que l'on essaie de
22 faire quelque chose et puis ensuite vous -- il s'agissait -- vous essayez
23 de faire quelque chose puis le lendemain un autre venant d'un autre pays
24 débarquait pour vous demander des comptes et réclamer des explications :
25 "Pourquoi vous mêlez-vous des affaires des autres ?" Voilà de quoi il
26 s'agissait.
27 Mate Boban était autonome. Il prenait ses décisions de façon indépendante,
28 et moi personnellement, je pense que pour ce qui est de certains détails ou
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1 de certains événements d'importance moindre il n'en a pas toujours fait
2 état de façon exacte devant Franjo Tudjman. C'était un homme politique qui
3 savait tourner les choses parfois.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : On pourrait laisser longtemps sur Mate Boban, mais
5 il faut avancer, mais je crois que mon collègue a une question à poser.
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, vous avez dit
7 Cutileiro a triché avec Boban, il a trompé Boban; c'est cela ?
8 R. Oui. Non pas Cutileiro. Excusez-moi.
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est ça que vous avez dit.
10 R. Je parlais du plan. M. Cutileiro est venu au nom de la Communauté
11 européenne, et il a proposé, il a avancé avec précision un plan, portant
12 aménagement intérieur de la Bosnie-Herzégovine. Bien entendu, M.
13 Izetbegovic a accepté cela, et ensuite il a dit publiquement qu'il n'avait
14 accepté cela que pour obtenir un Etat mais qu'il ne souhaitait rien du
15 contenu de ce plan.
16 Autrement dit, ceux qui ont signé ou co-signé ce plan, avant tout M.
17 Izetbegovic ont trompé Mate Boban, et pourquoi je parle de Cutileiro ? Mate
18 Boban avait la conviction que lorsque la communauté internationale
19 affirmait une chose, et que lorsque quelqu'un signait un accord qui avait
20 été avancé par elle, il était convaincu qu'en cas de violation de cet
21 accord il y aurait sanction, donc il était convaincu que dès qu'il y avait
22 signature il y aurait aussi mise en œuvre. Malheureusement, il n'y en a pas
23 été ainsi, et la première chose qui s'est présentée ça a été ce plan
24 Cutileiro.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que vous savez quel type
26 d'éducation ou d'institution a reçu M. Boban ?
27 R. Il avait un très haut niveau d'éducation. Maintenant je ne sais plus
28 s'il avait fait des études d'économie ou autre chose. Excusez-moi, mais je
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1 ne peux pas répondre avec précision à cette question.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, Mate Boban, était-il le commandant
3 en chef puisque s'il était chef d'Etat - entre guillemets ? Est-ce que
4 c'était lui le commandant des armées, le chef des armées ?
5 R. Oui.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors avec cette casquette de chef des armées
7 même si vous, vous étiez le commandant du HVO, branche militaire, les
8 opérations militaires, est-ce qu'il vous donnait des instructions précises,
9 ou bien c'était vous qui sur le terrain organisiez tout cela, vous lui en
10 rendiez compte bien entendu ? Mais ce que je veux savoir est-ce qu'il
11 mettait son emprunte direct sur l'armée, sur le HVO, ou bien il vous
12 laissait faire ?
13 R. Dans la période s'étendant du 24 juillet jusqu'au 8 novembre 1993,
14 Messieurs les Juges, il ne s'est pas mêlé des questions de commandement car
15 il n'y avait pas à qui commander. Il n'y avait pas de quoi à commander.
16 C'était uniquement la question de la défense qui se posait et rien d'autre.
17 Mais alors si, moi, par exemple, je souhaitais entreprendre une action
18 militaire, une action tactique ou autre, c'était moi qui en prenais la
19 décision. Alors, bien entendu, je décidais après m'en être entretenu avec
20 mes homologues. Mais la décision finale m'appartenait; cependant, si
21 j'avais élaboré des plans pour reprendre Mostar, pour occuper Mostar, ou
22 comme les Musulmans l'auraient peut-être appelé la libération de Mostar,
23 j'aurais planifié l'action sur le terrain, avec les officiers de l'état-
24 major; cependant, une telle action je ne l'aurais pas mise en œuvre sans un
25 ordre de Mate Boban.
26 Il y a des opérations militaires sur le terrain pour lesquelles c'est moi
27 qui suis responsable, ce sont les opérations militaires ayant trait à des
28 questions tactiques, mais les opérations de plus grande envergure notamment
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1 celles qui comprennent une notion d'attaques sont à mettre en balance aussi
2 avec la situation politique et des décisions politiques, et ce n'est pas le
3 chef d'état-major principal qui prend cette décision mais le commandant
4 suprême des forces armées.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse vous --
6 R. [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE TRECHSEL : -- transcrit. A la ligne 16 de la page 23, on devrait
8 lire jusqu'au 8 novembre, je pense, parce que le mois n'est pas indiqué.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
10 R. Exact, jusqu'au 8 novembre 1993. Donc jusqu'à cette date, cela a
11 fonctionné comme j'ai dit --
12 M. LE JUGE TRECHSEL : Il s'agissait seulement d'insérer le nom du mois,
13 c'est tout. Merci.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Général Praljak, dans votre réponse,
15 vous avez mis l'accent sur quelque chose qui peut être important. Vous
16 dites de juillet à novembre M. Mate Boban ne m'a pas donné d'ordre
17 d'entreprendre des actions militaires d'envergure, d'attaque, et cetera,
18 parce que, si j'ai bien compris, nous étions dans une phase de défense
19 défensive, et que là dans ce canevas militaire c'était vous qui en assumiez
20 la responsabilité.
21 Alors est-ce bien ça que vous avez dit ?
22 R. Un peu différent, Monsieur le Président. C'était moi qui prenais les
23 responsabilités pour ce qui est de la défense, par exemple. A partir du 24
24 juillet au moment de mon arrivée donc je suis arrivé. Puis Tole est arrivé
25 un peu plus tard sur requête de ma part. Alors pour revenir un peu en
26 arrière. En fait, c'est suite à une trahison qu'il a été fait prisonnier
27 par les Serbes à Bugojno en 1992. Il devait se rendre à une réunion et puis
28 il y avait des agents du KOS et des espions qui étaient très nombreux là-
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1 bas, qui l'ont emmené jusqu'à un endroit où il a été fait prisonnier par
2 les Serbes, et il a été dans un camp chez les Serbes jusqu'au mois de
3 juillet 1993 au moment où il a fait l'objet d'un échange.
4 Lorsqu'il est arrivé, nous nous sommes réunis lui Petkovic et, moi, nous
5 avons fait le point sur la situation. Nous avons dit ensuite que Petkovic
6 reste ici pour prendre en charge Kiseljak pour essayer de percer la ligne
7 vers Busovaca, pour s'occuper de Vares, et pour s'occuper également des
8 pourparlers avec la FORPRONU, car il s'en occupait déjà précédemment, ainsi
9 que pour s'occuper des cessez-le-feu futurs.
10 La situation, étant complètement morcelée Tole, avait été chargé du sud de
11 Mostar et du reste, et selon ma propre évaluation, la situation était la
12 pire dans la direction de Vakuf. C'est là-bas que je me suis rendu car dans
13 ces circonstances de système complètement désorganisé et effondré, il
14 n'était pas possible de diriger les choses à partir d'un bureau.
15 Pendant toute cette période, il ne s'agissait que de défense. Je n'avais
16 pas besoin de consulter Mate Boban, il n'y avait qu'un seul et unique ordre
17 se défendre, mais -- et j'insiste, si j'avais élaboré des plans, et dans ma
18 tête j'avais de tels plans, par exemple, comment reprendre et occuper
19 Mostar et infliger une défaite à l'ABiH, un tel plan et un tel ordre pour
20 une action de cette nature, je ne les aurais pas pris seul; une telle
21 action devait recevoir la probation de Mate Boban, et on en est jamais
22 arrivé là. Mais, là, je m'aventure, je parle de façon hypothétique.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Si nous comprenons ce que vous dites, sur le
24 terrain, tous les trois, vous, Petkovic, et Tole, vous étiez répartis sur
25 le plan géographique. Petkovic, lui, c'était Kiseljak et toute cette zone;
26 Tole, le sud de Mostar; et vous, le reste, Gornji Vakuf -- Gornji Vakuf, et
27 cetera. Donc, vous étiez tous les trois sur le terrain et Mate Boban était,
28 lui, dans son bureau, Alors, à cette époque, le HVO ne mène pas des
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1 offensives d'envergure. C'est ça qu'on doit comprendre ?
2 R. Il n'y a aucune action offensive.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, un autre mystère. Depuis trois ans, on a
4 bien, tous les Juges, écouté tous les témoins, les questions posées par
5 tout le monde. Moi, un des mystères sur le plan militaire, c'est Mostar
6 Est. Je me suis toujours demandé, mais comment se fait-il que le HVO n'a
7 pas pu prendre, malgré le boulevard, malgré la défense faite par l'ABiH ?
8 Comment se fait-il que Mostar Est n'a pas été pris par le HVO ? Alors,
9 c'était impossible, ou bien c'était pour des raisons stratégiques et
10 politiques ?
11 R. Avec assez de certitude, je peux dire, Monsieur le Président, que c'a
12 été possible, du moins au moment où il y a eu échec de l'offensive
13 musulmane. C'était un moment propice. L'ennemi n'a pas réussi à mener à
14 bien ses projets, il a épuisé ses réserves en munitions, le moral est bas.
15 C'était en octobre 1993, je pense, je suis convaincu, en fait, qu'on aurait
16 pu, par une action militaire, nous emparer de Mostar Est.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi ça n'a pas été fait ?
18 R. Parce que, d'un point de vue politique, vu comment on écrivait sur nous
19 à ce moment-là, ça aurait été une catastrophe. On aurait été pire que les
20 plus grands fascistes car, pendant qu'on se défendait, on n'arrêtait pas de
21 nous accuser d'attaquer.
22 Par conséquent, il n'y a pas de journal international, pas de rapport parmi
23 ce que vous avez vu disant que, pendant deux mois et demi ou trois mois, il
24 y avait une offensive musulmane. Vous ne verrez pas ce rapport, de temps à
25 autres, une petite bribe chez les Espagnols. Mais l'ABiH, qui a signé un
26 accord militaire avec les Serbes, pendant trois mois, sur 200 kilomètres,
27 attaquent. Si vous posiez cette question à Paris, à Berne, à ceux qui ont
28 suivi les choses, dans les rapports, il était dit que c'était nous qui
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1 attaquions. Donc, figurez-vous, dans ce type de rapport de force, quel
2 aurait été l'impact si le HVO s'était emparé de Mostar Est. Il y aurait eu
3 des déplacements de population. Il se serait passé des choses qui, sans
4 aucun doute, auraient été contraires au droit de la guerre, et c'aurait été
5 une catastrophe.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : On va arriver à M. Stojic, chef du département à la
7 Défense, mais mon collègue a une question.
8 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin Praljak, je voudrais revenir un peu
9 à la période qui va de juillet à novembre 1993. Si j'ai bien compris, vous
10 avez dit que vous étiez dans la phase défensive -- dans la défense
11 défensive : M. le Général Petkovic, à Kiseljak; Tole, au sud de Mostar; et
12 vous-même, à Gornji Vakuf, et cetera. Alors, hier, nous avons suivi ici que
13 le ministre de la Défense ne s'occupait pas des opérations; il s'occupait
14 de la logistique et du matériel. Là, cet après-midi, vous dites que Mate
15 Boban, en tant que commandant suprême des armées, s'occupait plutôt des
16 attaques de la stratégie et de la tactique sur le terrain, c'était votre
17 fait. Alors, ma question : pendant cette période de la défense défensive,
18 est-ce qu'il vous arrivait d'envoyer des rapports au commandement Suprême
19 de l'armée ou des forces armées, ou bien il était tenu tout à fait en
20 dehors du jeu, de sorte que le commandement militaire, en fait, revenait à
21 chacun des généraux, qu'ils étaient totalement indépendants et que les
22 forces armées du HVO n'étaient pas coordonnées au sommet ?
23 R. Quelques petites corrections à apporter. Le général Tole avait la
24 charge de Mostar et le secteur sud par rapport à Mostar -- au sud de
25 Mostar. Le général Petkovic et moi-même, on avait -- enfin, il n'était pas
26 tout le temps à Kiseljak. Il avait Kiseljak, mais je vous dis en gros, il
27 n'y avait pas que ça. Ça ne veut pas dire que j'ai arrêté d'être le chef du
28 Grand état-major. Je ne veux pas me débiner. Mais Monsieur le Juge, Mate
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1 Boban était le commandement Suprême. Au moment où on planifiait une
2 opération de plus grande envergure, qui pouvait avoir un plus grand impact,
3 c'était lui qui devait donner son aval. Nous, nous établissions des plans
4 militaires, mais c'était à lui de donner le feu vert. Pendant tout ce
5 temps, tout d'abord, il faut savoir qu'il recevait des rapports réguliers
6 sur la situation. Je lui écrivais, moi, et même parfois, je me suis mis un
7 petit peu en colère parce que, dans sa ville, je ne pouvais pas obtenir des
8 unités, par exemple, dont j'avais besoin pour les déployer aux positions.
9 Mais si j'avais perdu des positions ou si les Musulmans attaquaient le sud
10 de Mostar, le 13 août, et s'ils prenaient deux ou trois positions, il n'y a
11 pas lieu que je demande à Mate Boban s'il est autorisé que j'essaie de
12 récupérer cela. Bien sûr, que je dois récupérer cela. Lui, il a reçu le
13 rapport comme quoi c'était tombé, et je sais qu'il m'appartient de
14 reprendre ces positions. Donc, je n'ai pas besoin expressément de recevoir
15 une autorisation. Puis, à Rama ou à Gornji Vakuf, il m'est arrivé de perdre
16 par dix fois des positions et de les reprendre. Sur le terrain, ce sont des
17 décisions qu'on prend. Il y a des rapports qui arrivent au Grand état-major
18 et à Mate Boban également, mais je ne lui demande pas ce que je dois faire,
19 puisque je sais comment je dois agir.
20 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Je voulais aborder le cas de M. Stojic, mais, Maître
22 Khan, je n'ai aucune difficulté à l'aborder quand Me Nozica sera de retour,
23 donc c'est comme vous voulez. Si vous souhaitez qu'elle soit présente, je
24 lui poserai la question sur M. Stojic en sa présence, et à ce moment-là, je
25 vais passer tout de suite à M. Petkovic. Je n'ai pas de problème. Qu'est-ce
26 que vous en pensez, Maître Khan ?
27 M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, tout d'abord, à titre
28 tout à fait exceptionnel, je vous remercie de bien vouloir me permettre de
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1 présenter des arguments. Si vous m'offrez cette possibilité -- si cela est
2 à votre convenance, je souhaite effectivement que les questions soient
3 posées lorsque le conseil principal revient. Néanmoins, si cela intervient
4 avec vos différentes questions, bien sûr, non. Je m'en remets à vous.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ecoutez, attendons que Me Nozica soit là parce
6 que, comme elle a conduit l'interrogatoire des principaux témoins pour M.
7 Stojic, il vaudrait mieux qu'elle soit là. Donc, quand elle sera là, je
8 redemanderai à M. Praljak de nous parler de M. Stojic.
9 Alors, de ce fait, je vais passer à M. Petkovic. Alors, Général Praljak,
10 c'est à peu près toujours les mêmes questions. A quel moment avez-vous
11 rencontré pour la première fois M. Petkovic ?
12 R. C'était vers la fin du mois d'avril ou au début du mois de mai 1992, à
13 peu près.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avril, mai 1992. Alors, là aussi, quand vous
15 le rencontrez la première fois, quelle impression il vous fait ? Qu'est-ce
16 que vous pensez de lui ? Quelles sont vos impressions ?
17 R. M. Petkovic, à ce moment-là - et s'il vous plaît, je ne peux pas être
18 très précis sur les dates - à 15 jours près, je ne suis pas sûr, et je
19 pense que ça n'a pas d'importance. A partir de ce moment-là, même s'il
20 avait énormément de travail, une tâche énorme pour organiser tout ce
21 secteur parce qu'il était à la tête du Grand état-major du HVO, et moi,
22 j'étais commandant du secteur Capljina, Mostar, Konjic. Donc on n'a pas eu
23 l'occasion de se voir souvent parce que l'un comme l'autre, on avait une
24 telle quantité de travail à abattre, à commencer par des détails, des
25 tâches menues, vous le savez. Mais je dois dire que, pendant toute cette
26 période, du premier au dernier jour, jusqu'à mon départ, je n'ai eu aucun
27 différend avec M. Petkovic sans parler de conflit ou je ne sais pas trop
28 quoi, rien, aucun pas le moindre divergence sur ce que nous devions faire.
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1 Quand il a été mon commandant, ou quand j'ai été devenu son
2 commandant, ni de susceptibilité ni d'envie, de jalousie. Il y avait tant
3 de choses à faire que pour les différentes questions, pour ce qui est des
4 rapports entre les généraux. C'est quelqu'un de tout à fait normal,
5 normalement constitué. Je pense que je le suis, moi aussi. Il se disait, il
6 faut faire tout ce qu'on est en mesure de faire compte tenu des
7 circonstances. Ça a été ainsi du début à la fin.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Parmi tous les officiers que vous avez
9 rencontrés, le général Petkovic avait, lui, été formé comme officier de
10 l'ex-JNA; est-ce que vous aviez l'impression que c'était un excellent
11 officier, peut-être même le meilleur de tout le HVO ? A part vous, bien
12 entendu, mais en ce qui le concerne lui, est-ce que vous avez estimé que
13 c'était un des meilleurs officiers ?
14 R. Oui. Entre autres, on était complémentaire, on se complétait très bien.
15 Lui, il avait mieux en tête toutes ces questions de structure, et cetera.
16 Moi, j'étais peut-être meilleur sur le terrain, vous savez, au front. M.
17 Petkovic est un homme plus calme, il vient de l'artillerie, et moi, je suis
18 un homme passionné sur le terrain, et on fonctionnait bien, bien en se
19 complétant.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous étiez complémentaires. Alors je me
21 dois d'aborder évidemment la question de l'entreprise criminelle commune
22 comme vous en doutez.
23 Dans les propos que vous avez pu tenir avec lui, lors des rencontres,
24 est-ce qu'il vous faisait part de sa conception de la situation politique,
25 des évolutions, ou bien c'était un militaire plastique qui n'avait pas
26 d'approche politique et qui exécutait les ordres ?
27 R. Il était bien plus un militaire. Mais la question qu'on ne pouvait pas
28 éviter de savoir, quel est le sens, quelle est la substance de ce combat ?
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1 Donc on ne pouvait pas éviter complètement des questions politiques. Il
2 n'avait pas une armée recrutée en France, qui existe en tant qu'état depuis
3 des siècles et des siècles. On a signé un contrat, on est envoyé en
4 mission, et puis on fait ça ou ça. Vu les hommes qu'il avait à sa
5 disposition, il fallait aussi qu'il se penche sur la question de leur
6 sacrifice. C'est au prix de leur vie qu'ils ont combattu. Ils avaient à
7 peine 100 marks de solde. Donc il fallait qu'ils sachent pourquoi ils vont
8 aller se faire geler comme des chiens mal nourris, mal habillés, avec peu
9 de munition à une position, quel en est le sens. C'est ce que vous appelez
10 la politique, même si plus que la politique et même si c'est cette
11 différence qu'on entend généralement lorsqu'on parle de politique. Mais
12 c'était en quantité minimale.
13 Nous nous sommes vus souvent, je dois dire. Monsieur le Président,
14 Messieurs les Juges, je ne peux pas imaginer que M. Petkovic fasse quelque
15 chose qui soit contraire. Je ne sais même pas s'il est capable de mal garer
16 sa voiture. Moi, j'en suis capable mais, lui, je pense que non.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons vu beaucoup de documents où le général
18 Petkovic a participé de façon assez étroite aux discussions à Genève, et on
19 a vu un document où il y a sa signature ainsi que celle du général
20 Halilovic. Comment vous expliquez que le général Petkovic s'est retrouvés
21 dans les arcanes diplomatiques -- militoro [phon] diplomatiques et que
22 finalement il pouvait quitter le terrain pendant quelque temps pour côtoyer
23 toutes ces instances qui réfléchissaient à Genève ? Ça vous a surpris ou
24 pas surpris ?
25 R. M. Petkovic avait quelqu'un qui le suppléait, Monsieur le Président, un
26 suppléant. Pour autant que je le sache, il s'est absenté très peu, en
27 janvier 1993, me semble-t-il. A ce moment-là, ils étaient tous venus là-
28 bas. Tous les commandants des trois armées, je pense que Mladic s'est
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1 trouvé là. Je n'en suis pas certain, mais il me semble.
2 Donc ces entretiens politiques, ils touchaient aussi un certain nombre de
3 questions, de problèmes militaires. Si on signait un cessez-le-feu, la
4 question est de savoir de combien on allait retirer les canons qui allaient
5 assumer le contrôle ? Comment on allait surveiller le respect du cessez-le-
6 feu. Donc à ce moment-là, ils avaient besoin de la présence des commandants
7 militaires pour préciser des points qui ne sont pas de la compétence des
8 hommes politiques. Cet accord s'annonçait, on pensait effectivement que
9 c'était la fin de la guerre.
10 C'est très probable qu'il soit signé, que c'était une bonne
11 proposition. Au sein du peuple croate, dans l'armée également. D'une
12 certaine manière, il y avait une joie très largement répandue que ce soit
13 la fin et quand il y a eu l'échec de cela, M. Boban, en fait avait procédé
14 à une démobilisation des hommes. Donc ils étaient partis, on n'arrivait
15 plus à les récupérer, à les faire revenir. Quand il y a eu l'échec de cela,
16 les remobiliser, ça a été très difficile et de les motiver, très difficile.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous, vous êtes nommé au mois de
18 juillet, commandant du HVO, alors que M. Petkovic occupait cette fonction.
19 L'a-t-il mal ressenti, parce que quand on est numéro un, et qu'on se
20 retrouve numéro deux, psychologiquement, c'est une situation très difficile
21 à vivre. D'abord, pourquoi ? Pourquoi il y a eu ce changement ? Ça aurait
22 pu continuer comme ça. Pourquoi on a décidé de vous nommer, vous, et de
23 vous faire apparaître le numéro un, et lui, à ce moment-là, il devenait
24 numéro deux en retrait ? L'a-t-il bien vécu, mal vécu ?
25 R. Voyez-vous, Monsieur le Président, vous avez un ordre où M.
26 Petkovic me nomme commandant pour libérer un mont, le mont de Boksevica.
27 Sur ces choses sur lesquelles vous m'interrogez, on ne s'interrogeait pas
28 nous, on y prêtait aucune attention. C'était complètement égal. Je ne me
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1 sentais pas inférieur parce que Pektovic était mon commandant. Etre numéro
2 un, être numéro deux, c'était tout à fait égal, pareil. J'ai demandé d'être
3 numéro un, si la situation avait été meilleure, si les brigades avaient été
4 mieux organisées, structurées s'il n'y avait pas eu ce que vous avez vu à
5 Prozor, près de Vakuf, 20 petites unités toutes petites.
6 Sur ce plan - et là, sur le terrain parmi ces hommes parce que je
7 suis un metteur en scène - à ce moment-là, peut-être étais-je meilleur pour
8 m'acquitter de cette tâche ? S'il y avait eu une guerre classique, peut-
9 être que Petkovic aurait été meilleur que moi, mais là, on avait besoin de
10 trois hommes, et c'est la raison pour laquelle j'ai fait quelque chose qui
11 est un petit peu bizarre. Il y a le chef de l'état-major, le commandant de
12 l'état-major, le commandant adjoint Petkovic et l'adjoint du chef.
13 Qu'est-ce qui aurait pu se passer, par exemple, qu'on suive un schéma d'une
14 armée, en bonne et due forme, et qu'on ne respecte pas les réalités sur le
15 terrain ? Donc c'est ça qui aurait pu se produire, qu'on amène n'importe
16 quel général français, et nous avions un colonel brillant de la légion
17 étrangère qui a travaillé pendant 30 ans.
18 Il est très peu utile face à ce type d'unités parce que, lui, il
19 s'est brillamment dirigé des hommes dans une autre situation de guerre, et
20 quand vous avez cette situation, vous pouvez être dans une pièce avec des
21 cartes sur la base desquelles vous allez donner des ordres qui certainement
22 ne seront pas exécutées. C'est la raison pour laquelle il faut se dépasser,
23 se rendre sur le terrain, aller voir les unités, les unes par les autres,
24 perdre des positions, les reprendre, encourager les hommes, tirer avec ces
25 mêmes hommes, risquer sa vie pour qu'ils vous acceptent parce que, sinon,
26 pourquoi est-ce qu'un jeune âgé de 20 ans devrait-il perdre sa vie, et moi,
27 je ne risquerais pas la mienne ?
28 Donc vu la situation, il y avait une telle organisation qu'ils
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1 imposaient où en fait trois hommes étaient -- non, je ne dis pas que je
2 n'étais pas le commandant et je ne cherche pas à me débiner par rapport à
3 la culpabilité qui en découle éventuellement. Nous étions pratiquement
4 égaux mais là, donc je précise que je ne tiens pas à éviter ma
5 responsabilité.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour terminer sur le général Petkovic, comment vous
7 expliquez qu'à Kiseljak, il y avait un individu, Ivica Rajic, qui circulait
8 dans la ville à bord d'un véhicule, et sur le véhicule, il y avait une tête
9 de mort tel qu'on nous l'a raconté et décrit, et cetera, et que
10 manifestement, il y avait des comportements peu conformes à l'étique
11 militaire ? Comment se fait-il que le général Petkovic ait pu ne rien faire
12 face à Ivica Rajic ? Vous avez une explication ?
13 R. Monsieur le Président Antonetti, Messieurs les Juges, le problème
14 suivant se pose : c'est aujourd'hui ici nous savons un certain nombre de
15 choses que je ne savais pas à l'époque. Vous avez donc un problème
16 d'information et de connaissance donc que faisait Ivica Rajic à Kiseljak,
17 que s'est-il passé dans les centres de détention ? Comme si on l'avait su à
18 l'époque. Je ne l'avais pas la moindre idée de ces têtes qu'aurait arboré
19 Ivica Rajic à Kiseljak. Je n'avais --
20 Mme ALABURIC : [interprétation] Juste simplement pour éviter tous
21 malentendus, nous n'avons aucune preuve que ce que vous venez de décrire
22 avec les crânes que cela concerne Ivica Rajic. Cela concerne un autre
23 membre du HVO qui était placé sous le commandement d'Ivica Rajic. C'est
24 effectivement quelque chose qui s'était produit à Kiseljak à en juger
25 d'après les documents, et pas Ivica Rajic.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Quoi qu'il en soit, on sait qu'il y avait un
27 véhicule qui circulait dans la zone de responsabilité d'Ivica Rajic.
28 Que vous, vous venez de nous dire : "Moi, je ne le savais pas et que ceci
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1 ça a été découvert longtemps après."
2 R. Oui, Monsieur le Président Antonetti. Cet homme, il me semble qu'il a
3 été condamné récemment devant un Tribunal de Bosnie-Herzégovine, lorsque ce
4 procès a commencé j'ai lu des choses là-dessus. Il a été condamné à une
5 peine assez lourde.
6 Donc j'ai, un petit peu, peur que ce que nous avons appris soit dans le
7 prétoire, soit ce que nous avons entendu, et bien qu'on n'ait pas la
8 sensation qu'on le savait à l'époque au moment des faits. Ce n'est pas
9 exact.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous dites : moi je ne savais pas -- vous-
11 même ?
12 R. Je ne savais pas.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Pendant l'exercice de vos commandements, est-ce que
14 vous avez été à Kiseljak à un moment donné ?
15 R. Pendant cette période-là, quand j'étais commandant, non, jamais.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous n'avez pas été dans la ville. Vous
17 n'avez pas vu ce type de comportement, donc ça ce n'était pas connu de vous
18 ?
19 R. Ça je l'ignorais complètement, Monsieur le Président. En 1992, quand je
20 suis allé organiser et calmer la situation, mettre de l'ordre, je me suis
21 trouvé une fois à Kiseljak mais c'était une ville paisible, à ce moment-là.
22 J'ai été très étonné de voir 12 parfums de glace dans un commerce.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors il est moins quart; on va faire donc la
24 pause de 20 minutes.
25 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.
26 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je reviens -- M. Stringer a quelque
28 chose à dire.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je peux dire
2 ceci en audience publique. Au début de cette audience, Me Karnavas a
3 demandé une réponse à l'Accusation et j'ai regardé la question de cette
4 réponse qui va être déposée demain.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Demain. Bon. Merci.
6 Général Praljak, je reviens à Kiseljak et à M. Petkovic, puisque j'étais
7 axé sur M. Petkovic. Nous avons entendu des témoins - je ne dis pas leurs
8 noms - qui nous ont relaté donc ce qui s'était passé dans cette localité de
9 Stupni Do avec donc l'attaque au mois d'octobre 1993. Nous savons que M.
10 Ivica Rajic avait donc des unités sous ses ordres. Nous savons qu'il a eu
11 d'énormes problèmes, car il y a même eu une tentative d'assassinat sur lui
12 au mois d'août, et nous savons qu'il a fallu même aller le libérer parce
13 qu'il avait été pris en otage, donc il y avait un certain nombre de
14 problèmes.
15 Sous la foi du serment, est-ce que vous me dites aujourd'hui, moi,
16 ces problèmes je n'en avais jamais entendu parler ?
17 R. Ces problèmes que vous venez d'évoquer, Monsieur le Président, je n'en
18 ai jamais entendu parler. J'ai eu vent des difficultés et des problèmes à
19 Vares car cela se présentait de façon continue. J'ai été au fait de la
20 contrebande, de l'impossibilité de s'organiser du fait que la ligne de
21 front n'était pas assez forte, que les commandants de brigade n'arrivaient
22 pas à tenir ses hommes, qu'on se mêlait -- que quelqu'un se mêlait de ses
23 affaires. Des rapports me parvenaient en ce sens. Alors ça n'est pas
24 pendant la période où le général Petkovic a été en permanence à Kiseljak.
25 Il était absent en ce moment-là. Je ne me rappelle pas exactement la date.
26 Mais, à ce moment-là, j'ai envoyé non pas un ordre mais une information à
27 l'attention de Petkovic en lui demandant de mettre en ordre de cette
28 situation à Vares sans avoir la moindre pitié, sans avoir la moindre pitié
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1 envers les Croates. Evidemment, leur devoir était de se défendre. Alors
2 qu'en fait, sur place, c'était un véritable chaos qui régnait pendant
3 qu'une offensive musulmane avait été lancée.
4 Il pensait que le 2e Corps armée allait les défendre, et ainsi de
5 suite. Je maintiens cette correspondance que j'ai envoyée à Petkovic.
6 Malheureusement, après ce sont produits les événements à Stupni Do et
7 ensuite on a interprété la lettre que j'ai envoyée comme si cela se
8 rapportait à ces mêmes événements. Alors que tout était déjà terminé. Moi,
9 je rejette tout cela. Quant à ce dont vous faites état, non, je n'étais pas
10 au courant.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur le plan militaire, d'après la chronologie des
12 événements, nous avons eu l'impression -- enfin, j'ai eu l'impression que
13 c'est la Brigade de Bobovac qui a besoin du renfort parce qu'ils savent que
14 l'ABiH a envoyé 200 hommes environ dans la région. A ce moment-là, on va
15 demander à Ivica Rajic de venir pour appuyer la Brigade de Bobovac, brigade
16 dirigée par Emil Harah, comme vous le savez.
17 Cette opération militaire, d'envoie de renforts, vous n'avez pas à aucun
18 moment été associé à cela ?
19 R. Non. A aucun moment je n'ai pas le moindre lien avec cela, Monsieur le
20 Juge.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Etait-ce une affaire mineure qui faisait que le
22 commandant du HVO n'avait pas à être informé ?
23 R. C'est exactement cela. C'était une tâche qui incombait à d'autre -- ou
24 plutôt, moi, je commandais aux commandants de zone opérationnelle, eux-
25 mêmes commandaient les commandants de brigades. Ça allait d'échelon en
26 échelon au sein de l'armée. Je ne le savais pas. Je n'avais pas vraiment à
27 le savoir, et ça faisait partie des tâches du commandant sur le terrain.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. A quel moment vous avez été informé de ce
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1 qui s'était passé ? A quel moment, dans votre souvenir ?
2 R. J'ai été informé au sujet des événements s'étant produits à Stupni Do
3 ou plutôt qui s'étaient produits là-bas quelque chose. J'en ai été informé
4 tout de suite on pouvait l'entendre à la radio, puis ensuite des documents
5 papier ont commencé à arriver, et je pense qu'ensuite il a été fait tout ce
6 qui devait être fait à mon sens, à savoir que le général Petkovic était sur
7 place --
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, ce qui m'intéresserait c'est que vous
9 m'indiquiez une date approximative; mais, moi, ce qui m'intéresse c'est la
10 date.
11 R. Même si vous me menacez de mort, Messieurs les Juges, je ne pourrais
12 pas vous dire. En fait, le 23, le 24, le 25, je ne sais pas.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez été informé de cela, est-ce que tout
14 de suite vous avez appelé le général Petkovic pour lui demander mais
15 qu'est-ce qui s'est passé ?
16 R. Nous ne pouvions pas avoir de conversation téléphonique, Messieurs les
17 Juges. Je n'ai pas souvenir que nous ayons eu cette possibilité. Mais nous
18 avons ce document où l'on voit que j'ai demandé à Tole d'exiger
19 immédiatement un rapport à l'attention de l'état-major principal pour qu'on
20 voie ce qui s'était passé. Il me semble que le document porte le date du
21 25, et j'ai tout de suite demandé qu'on dresse un rapport concernant ce qui
22 s'était passé là-bas.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : A quel moment vous en avez parlé directement au
24 général Petkovic ? Ça vous est arrivé ou pas ? Ce que je peux comprendre.
25 Est-ce que vous lui en avez parlé en disant : bon, qu'est-ce qui s'est
26 passé ?
27 R. Nous en avons parlé, Monsieur le Président, parce qu'il est revenu
28 après. Tout d'abord, il a eu des informations qui sont arrivées par liaison
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1 par paquet, et ensuite lorsque le général Petkovic est revenu, nous en
2 avons parlé précisément.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce que vous lui avez dit ? Quelle a été sa
4 vision, lui, des événements ? Qu'est-ce qui vous a dit ?
5 R. Cela a été un véritable choc, une catastrophe, quelle que soit la façon
6 dont les événements étaient présentés dans les médias, que ce soit les
7 médias papier ou autres. Il avait fait tout ce qu'un commandant devait
8 entreprendre, à savoir que la FORPRONU était venue sur place, il a été
9 demandé une enquête conjointe avec la FORPRONU. On a impliqué le procureur
10 militaire afin qu'il procède à une enquête. Il a fait en sorte que l'on
11 exige une enquête auprès des commandants militaires, et notamment auprès de
12 Rajic, pour savoir ce qui s'était passé exactement. C'était là ce qu'on
13 pouvait faire, tout ce qu'on pouvait faire à cet instant-là.
14 Avant tout, il était nécessaire, il est toujours nécessaire dans ces cas-là
15 d'impliquer le procureur militaire. Il faut se procurer tous les rapports
16 nécessaires et les fournir à ce procureur militaire, qui ensuite,
17 conjointement avec les services du SIS et les autres services, procède à
18 l'enquête nécessaire afin de déterminer qui a commis quel acte à quel
19 moment. J'ai signé --
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il est exact que le procureur au plan
21 militaire a été saisi donc de ce côté-là, il n'y a pas de problème, le
22 nécessaire a été fait. Mais indépendamment de cela, est-ce que le général
23 Petkovic vous a donné une explication sur le déroulement ? Est-ce qu'il a
24 analysé, disséqué à son niveau l'opération, ou bien il a dit : "Je n'ai pas
25 assez d'éléments. Il faut attendre les résultats de l'enquête pour y voir
26 clair parce que Rajic me dit ça. L'autre me dit ça, attendons de voir ?" Il
27 était dans quel état d'esprit ?
28 R. Il n'était pas dans un bon état d'esprit au sens où il ne se sentait
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1 pas bien; après que nous ayons rédigé tout cela, il a dit qu'il ne se
2 sentait pas bien, et il m'a demandé de lui accorder sept jours de repos
3 chez lui. Cela à quoi j'ai répondu que ce n'était pas possible, et je lui
4 accordé, il me semble, trois ou quatre jours. Je ne peux pas vous dire
5 exactement à un jour près. Voilà comment dans quel était il était.
6 Alors je lui ai demandé si nos organes chargés de procéder à des enquêtes
7 et notre procureur avait la possibilité si on les avait autorisé à se
8 rendre sur place pour mener les enquêtes. Plus tard il y a eu plus de 100
9 soldats et membres de la communauté internationale, qui sont venus sur
10 place et puis on a reçu une information comme quoi on avait trouvé 15 ou 16
11 corps, et nous avons vu également les photographies correspondantes. Mais -
12 -
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne veux pas entrer dans tous les faits que nous
14 connaissons déjà parce qu'on en a beaucoup parlé. Mais, moi, j'aimerais
15 avoir votre point de vue.
16 Comment se fait-il que le SIS a fabriqué un document dont je donne le
17 numéro, le P 06519, 6519, pour donner une version des événements ? Comment
18 vous expliquez cela ?
19 R. J'ignore, Monsieur le Président, de quel document il s'agit. Mais même
20 si je voyais ce document, je ne saurais vous dire sur quelle base cela a
21 été fait puisque le SIS procède de sa propre ligne pour ce qui est de la
22 collecte d'informations, et sur cette base qu'il a procédé, alors on voit
23 que c'est le 9 novembre --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors il se trouve que vous, vous n'étiez pas
25 là. On sait qu'il y a beaucoup de personnes qui sont intervenus mais vous
26 n'apparaissez à aucun moment. Bon. Où étiez-vous ?
27 R. Pour ce qui est de cette période après le 23 et le 24, il me semble
28 que, non, je sais que j'étais à Gornji Vakuf. Alors quand suis-je arrivé
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1 exactement sur place ? C'était peut-être un ou deux jours avant que
2 Petkovic ne m'ait demandé de rentrer chez moi parce que je sais que,
3 quelques jours auparavant à Vakuf, nous avions réussi à reprendre quelques
4 positions à renforcer nos lignes. A Mostar aussi, nous avions réussi à
5 reprendre les positions, donc j'en ai informé tout le monde afin de montrer
6 que l'offensive musulmane avait été brisée et que notre position n'était
7 plus si mauvaise que cela. Je voulais remonter aux gens, je voulais leur
8 remonter leur moral. Alors quant à savoir quand est-ce que je suis revenu
9 exactement à Grude, je ne pourrais pas le dire avec certitude.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Avec le recul, toutes ces années passées, comment
11 vous expliquez que certains ont pu mettre en œuvre la procédure pour
12 transformer Ivica Rajic en colonel Andric ? Qu'est-ce que vous en avez
13 pensé quand vous avez appris cela ?
14 R. Monsieur le Juge Antonetti, Messieurs les Juges, j'ai appris cela bien
15 plus tard lorsque cela a commencé bien plus tard après mon départ. D'après
16 les informations dont je dispose et je vous prie de bien vouloir les
17 prendre avec réserve, c'est M. Mate Boban qui en aurait fait la demande.
18 Mais je demande à ce que cela soit considéré avec, soit pris avec des
19 pincettes.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le système - oui, alors attendez, parce que je
21 regarde sur le transcript en anglais - vous me dites que c'est Mate Boban
22 qui aurait demandé cela, qui aurait enfin sous réserve vous dites cela qui
23 ---
24 R. Avec de grandes réserves, Monsieur le Président. C'est ce que je
25 souhaiterais, oui, parce que je suis à Zagreb, à ce moment-là, et
26 j'apprends cela, et donc, si je vous dis cela, c'est avec la plus grande
27 réserve. Puisque vous me le demandez, j'ai appris des choses mais je ne
28 puis l'affirmer qu'avec de grandes réserves car je n'étais plus impliqué de
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1 quelque façon que ce soit dans tout cela.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : En tant qu'ancien commandant, quand vous avez appris
3 cela, vous vous êtes dit : c'est une bonne chose, c'est une mauvaise chose,
4 on aurait pu faire autrement ? Quel a été votre réaction ?
5 R. Messieurs les Juges, je n'aurais certainement pas procédé de cette
6 façon-là si cela avait dépendu de moi. J'aurais très certainement relevé,
7 de ses fonctions, cet homme, et non seulement je l'aurais relevé de sa
8 fonction de commandant, mais encore compte tenu du fait qu'il faisait
9 l'objet d'une enquête, j'aurais exigé qu'aucune fonction ne lui soit
10 confiée jusqu'à ce que son rôle dans les événements de Stupni Do ne soit
11 déterminé avec précision.
12 J'estime qu'au minimum, il aurait fallu faire cela et j'estime que ce qui a
13 été fait était complètement erroné, absurde et illogique et inadmissible du
14 point de vue légal.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais passer maintenant à M. Coric. Alors je
16 vais demander à son avocate : est-ce qu'elle préfère que je pose les
17 questions à M. Praljak sur M. Coric quand M. Coric sera là ? Pour moi, je
18 n'ai aucun problème. Maître ?
19 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je
20 ne suis pas sûre du moment où M. Coric pourra être dans le prétoire, par
21 conséquent, et je pense qu'il n'y a pas d'obstacle ici. M. Coric a pleine
22 confiance en son conseil de la Défense et vous pouvez poser les questions
23 en son absence.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Praljak, même question concernant M.
25 Coric; à quel moment avez-vous fait sa connaissance ?
26 R. J'ai fait la connaissance de M. Coric au mois d'avril ou au mois de mai
27 1992 également, et au cours de cette première période s'étendant jusqu'au
28 24 juillet 1993, j'avais eu l'occasion de rencontrer M. Coric. Je l'ai
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1 certainement rencontré lorsque nous étions en train de rédiger cet ordre
2 portant sur la façon dont il convenait d'organiser les points de -- les
3 postes de contrôle de la police militaire. Juste avant cela - c'était fin
4 1992 - je voyageais beaucoup à Konjic, à Jablanica, en Bosnie centrale, à
5 Vakuf et ainsi de suite, et ces aspects-là n'étaient pas bien -- dans ces
6 zones-là, les choses n'étaient pas bien organisées.
7 Je me souviens qu'en 1993, lorsqu'au mois de mars, nous sommes allés en
8 Bosnie centrale, je me suis entretenu avec lui.
9 J'ai été à une réunion. J'ai été présent à une réunion de la police
10 militaire ultérieurement aux événements à Vakuf en janvier 1993. J'y ai été
11 invité à cette réunion par eux, alors je n'ai pas été présent pendant toute
12 la durée de la réunion. Je n'ai fait qu'une présentation introductive
13 expliquant pourquoi nous ne voulions pas de guerre avec les Musulmans.
14 Pourquoi et comment il convenait d'économiser à la fois les munitions et le
15 carburant, le coût de ces différents éléments et ainsi de suite ? Voilà de
16 quoi il s'agissait. Alors je ne saurais dire que nous avons eu encore une
17 autre occasion de nous rencontrer mais, en tout cas, il n'y a rien qui
18 mérite d'être cité.
19 Alors pour la deuxième période, quand j'ai été commandant, je ne peux en
20 toute sincérité dire ni qu'il y avait des réunions ni que nous ne
21 rencontrions pas; cependant, je ne me souviens d'aucune réunion qui aurait
22 eu lieu avec M. Coric, au cours de laquelle nous aurions débattu de quelque
23 chose. Par conséquent, je pense qu'il n'y avait rien d'important, puisque
24 je ne me souviens d'aucune réunion, mais il n'est pas exclu que nous nous
25 soyons rencontrés.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il semble que vous l'ayez vu assez rarement,
27 mais dans le peu de temps vous l'avez vu, quelle impression il vous a
28 donnée ? Etait-ce un technicien, un homme politique, quelqu'un qui avait
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1 des compétences particulières dans la police militaire ? Quelle impression
2 avez-vous eue ?
3 R. Je savais qu'il oeuvrait aux préparatifs nécessaires pour la police
4 militaire et le HVO. Pour ce qui était de leur instruction, leur formation,
5 je parle ici de l'année 1992 et de ces camps de formation qui existaient en
6 Croatie. Je savais également qu'il était un sportif, il avait une forte
7 carrure. Mon impression n'était pas du tout mauvaise, et j'avais un âge
8 suffisant, Messieurs les Juges, pour savoir qu'avant de porter des
9 conclusions, il était nécessaire de fréquenter la personne, de travailler
10 avec elle. Donc je n'ai eu aucune impression négative. Nous avons eu des
11 relations tout à fait normales. Nous n'avons jamais rencontré de
12 difficultés ou de problème important. S'il y avait des choses dont il
13 fallait discuter, je disais à Coric ce qu'il convenait de faire. Je disais
14 qu'il fallait l'envoyer à Bruno Stojic, pour qu'il le signe. Je leur
15 expliquais qu'il fallait qu'ils saluent, comment il convenait de se
16 comporter. Je faisais le nécessaire pour que tout cela soit élevé au niveau
17 qu'il convenait. Il acceptait, et il coopérait. De tout ce dont je suis
18 capable de me souvenir, il n'y a absolument rien qui soit négatif.
19 Cependant, je vous prie de bien vouloir tenir compte du fait que nos
20 rencontres étaient trop rares pour que je puisse --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : J'en viens à l'entreprise criminelle commune. Est-ce
22 que vous avez eu avec lui des entretiens sur la situation politique ? Est-
23 ce qu'il vous a fait part de ses conceptions, ou bien vous n'avez jamais
24 abordé la question des Croates de l'Herzégovine, le plan Vance-Owen,
25 l'intervention de la République de Croatie par les armes données à l'ABiH.
26 Est-ce que vous avez eu des discussions politiques avec M. Coric ?
27 R. Je m'en souviendrai probablement mais, pour autant que je m'en
28 souvienne, jamais, Messieurs les Juges. Je ne peux me souvenir d'aucune
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1 discussion significative à ce sujet.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question sur M. Coric, sur la double chaîne
3 de commandement. Vous nous avez dit que la police militaire parfois pouvait
4 être subordonnée à des unités combattantes parce qu'on avait besoin d'eux.
5 Alors pendant le temps où vous avez exercé votre commandement, est-ce qu'il
6 est arrivé à un moment donné de dire à M. Coric : j'ai besoin de X
7 policiers militaires pour telle opération militaire ? Est-ce que vous lui
8 avez fait une demande verbale ou par écrit, est-ce que vous êtes intervenu
9 auprès de lui ? Si oui, quelle était son attitude ?
10 R. J'étais pleinement conscient de la situation au moment où je suis
11 arrivé en poste, en tant que commandant. Je demandais à ce que les Unités
12 de la Police militaire, en tant que structures organisées, soient
13 resubordonnées pour ce qui était de leur composante opérationnelle, soient
14 resubordonnées à moi-même, compte tenu de la situation telle qu'elle se
15 présentait mais cela ne concernait pas directement M. Coric. Alors, bien
16 entendu, il en était informé, mais cela concernait avant tout, cette
17 requête d'adressait à Mate Boban et à Bruno Stojic. La question de savoir
18 si on procéderait ou non à cette resubordination, c'était Mate Boban qui en
19 décidait et Bruno Stojic devait probablement cosigner cela. On m'a donné
20 l'approbation nécessaire pour cela.
21 Donc si l'on s'aventure de façon plus hypothétique sur la façon de
22 procéder, si vous aviez besoin de quelque chose, vous deviez vous y prendre
23 à l'avance en indiquant le lieu, la durée nécessaire et puis les ressources
24 dont vous aviez besoin. Alors, moi, en l'espèce je n'ai pas précisé le
25 temps parce que je ne savais pas pour combien de temps j'aurais besoin de
26 cela. Alors j'étais tout à fait conscient évidemment qu'on allait affaiblir
27 notre position d'autre part, en ayant recours ainsi à la police militaire.
28 Mais pour nous, aussi bien la police militaire que le département de la
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1 Défense, que le gouvernement ne signifiait plus rien si nous perdions la
2 guerre. Si l'offensive musulmane devait être couronnée de succès, nous
3 aurions été condamnés à fuir en Croatie, ou alors nous devions nous
4 attendre à atterrir.
5 Par conséquent, cette guerre c'était la défense et rien d'autre que
6 la défense. Ma requête, il y a été fait droit. Très franchement, Messieurs
7 les Juges, s'il n'avait pas été fait droit à cette requête, j'aurais
8 immédiatement donné ma démission de ce poste de chef de l'état-major
9 principal. C'était quelque chose d'absolument certain. Si la situation
10 avait été pire encore, j'aurais exigé que le gouvernement fasse l'objet
11 d'une mobilisation ainsi que Bruno Stojic, ainsi que Prlic et tous les
12 autres. Ensuite ils auraient pu continuer à vaquer à leurs différentes
13 tâches. Mais, heureusement, on n'est pas arrivé là.
14 Je sais qu'à un moment donné, M. Coric a demandé -- pardon, a demandé
15 qu'on lui rende ses hommes. Il me semble que les choses sont restées encore
16 en l'état pendant un certain temps jusqu'à ce qu'il devienne tout à fait
17 clair que l'offensive avait été brisée; ce n'est qu'ensuite ultérieurement
18 qu'il a été mis fin à la resubordination.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, j'avais déjà fait part de mon
20 étonnement en regardant le document sous le nom de victimes concernant les
21 effectifs de la police militaire. Ils ont eu beaucoup de tués et évidement
22 un nombre élevé de blessés. J'avais essayé de comprendre pourquoi. A ce
23 moment-là, une des réponses c'était qu'ils étaient dans des unités
24 combattantes, et je crois même me souvenir qu'il nous avait été indiqué par
25 un témoin dont je n'ai pas le nom, que la police militaire était bien
26 équipée, bien formée et que donc ils étaient très opérationnels au niveau
27 des combats, ce qui expliquait que beaucoup d'entre eux ont été tués.
28 Alors, vous, en tant que commandant du HVO à un moment donné, de
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1 juillet à novembre, est-ce que vous avez ressenti que ce corps de policiers
2 militaires était un corps particulièrement vulnérable au point de vue des
3 pertes dans les combats ?
4 R. La police militaire était bien équipée. C'était d'excellents
5 combattants. Les policiers militaires, c'était des gens qui étaient triés
6 sur le volet, on pourrait dire, et comme ils étaient bien organisés,
7 souvent ils se sont chargés de la plus difficile des missions. Donc sur le
8 plan militaire, on pourrait dire que c'était des tâches les plus difficiles
9 de défense. Nous avons eu beaucoup de victimes.
10 Il y a eu des pertes partout, et parmi ceux qui ont combattu le
11 mieux, il y a eu le plus de pertes. Là, il y a quelques Bataillons de
12 Police militaire parmi ces unités-là.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Comme vous le savez, M. Coric a été nommé
14 ministre de l'intérieur, le 20 novembre 1993, alors que, vous, vous n'étiez
15 plus en fonction. Ça vous a paru une promotion, ou une nomination normale ?
16 R. Ce grade c'est deux ou trois mois plus tard que j'ai été mis au
17 courant, Monsieur le Président. Là encore, j'étais absent, j'étais à
18 Zagreb, j'étais très pris, je ne vais pas préciser de quoi je me suis
19 occupé, donc je n'étais pas au courant. J'ai su qu'une nouvelle équipe
20 était arrivée. Je savais qu'on continuait à traiter les informations qui
21 concernaient les gestes qui sont contraires à la loi. J'ai su qu'au début
22 de 1994, il y a eu des fruits, 27 en ont été arrêtés à Rama, à Prozor.
23 J'étais revenu à ce moment-là, mais sur demande adressée par quelques-uns
24 de mes gars, ils m'ont demandé de venir en aide.
25 Mais je dois vous dire que, pour ce qui est du poste du ministre de
26 l'intérieur pendant longtemps, je n'ai pas su que c'était Valentin Coric.
27 Si je l'avais appris, ça m'aurait semblé comme étant une nomination normale
28 à ce moment-là.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors on va passer maintenant à M. Pusic, Berislav;
2 à quel moment avez-vous rencontré M. Pusic ?
3 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, M. Pusic, pour ce qui est
4 de la période de la guerre ou à l'issue de la guerre, je ne saurais rien
5 vous dire à son sujet, parce que je n'ai jamais eu l'occasion de le
6 rencontrer. Il y a eu au moins sept ou huit Pusic là-bas dont j'ai entendu
7 parler. J'ai même entendu parler de Berislav Pusic, mais je ne l'ai
8 rencontré qu'en 2004, me semble-t-il, et ce, peu avant que l'on ne prenne
9 la route pour La Haye. En fait, pendant des années, pratiquement deux fois
10 par ans, on disait il y a un acte d'accusation secret, il va partir pour La
11 Haye. C'était deux fois par an, au moins pendant six ou sept ans avant
12 2004.
13 Puis un jour, en 2004, les actes d'accusation sont arrivés pour cinq
14 personnes; je ne savais pas qui était la sixième personne. Pour cinq, j'ai
15 cru savoir et puis j'ai téléphoné à Mme la Ministre de la Justice, je
16 savais que c'était la vérité, ex-collaboratrice de M. Tudjman - je la
17 connaissais bien - et je lui ai demandé qui était la sixième personne. Elle
18 m'a dit Berislav Pusic. Je lui ai demandé le numéro de téléphone, je me
19 suis adressé à plusieurs personnes, et ça m'a été donné. Je l'ai appelé
20 pour l'en informer en disant qu'il allait être étonné, surpris, même si on
21 a tous été surpris.
22 Donc il était hospitalité -- il était hospitalisé à Ljubljana, après
23 une intervention chirurgicale. Je lui ai dit :
24 "Ecoute, pour qu'on ne vienne pas t'arrêter, si t'es capable, si ce
25 n'est que dans un fauteuil roulant, viens à Zagreb pour te présenter toi-
26 même, comme nous allons tous le faire."
27 C'est tout ce que je peux vous dire au sujet de Berislav Pusic, si ce
28 n'est de la période passée en détention.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce qu'à l'époque, vous saviez qu'il y
2 avait donc un office chargé de l'échange des prisonniers et d'autres
3 personnes; vous le saviez ou vous ne le saviez pas ?
4 R. J'étais au courant. Je savais qu'il y avait un service chargé de
5 l'échange des prisonniers.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous ne saviez pas que M. Pusic en était un
7 des responsables ?
8 R. Il y avait un autre nom qui circulait, mais vraiment je ne savais pas
9 très bien qui s'en occupait. Je savais qu'il y avait un service, mais pas
10 plus.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. On va passer maintenant à un autre qui figure
12 dans l'acte d'accusation. C'est M. Blaskic, qui est cité comme membre de
13 cette entreprise dans laquelle, vous, vous êtes ainsi que vos camarades qui
14 sont ici présents et les -- ou responsables croates qui sont décédés.
15 Alors, tout d'abord, le Blaskic; à quel moment l'avez-vous connu lui ?
16 Quelle a été la date où vous avez rencontré Tihomir Blaskic ?
17 R. J'ai fait sa connaissance en 1992, c'était quelques jours après la
18 chute de Jajce. Jajce est tombée le 28 ou le 29 octobre 1993.
19 Deux jours après la chute de Jajce, ou trois jours après la chute de Jajce,
20 dans tous les cas, c'était quelques jours après la chute de Jajce, j'ai
21 réussi à percer --
22 M. STRINGER : [interprétation] Pardonnez-moi si j'interromps. Le compte
23 rendu indique que le témoin a dit que la chute de Jajce a eu lieu en
24 octobre 1993, je ne sais pas ce qu'il avait l'intention de dire ou s'il y a
25 une erreur au niveau de la traduction. Peut-être qu'il pourrait préciser.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Praljak. Quelle est la date de la
27 chute de Jajce ?
28 R. C'était en 1992. Donc c'est l'année qui est erronée. En 1992, et deux
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1 ou trois jours après la chute de Jajce, je ne pourrais pas préciser. J'ai
2 pu passer, je me suis rendu auprès de Tihomir Blaskic, je l'ai trouvé dans
3 une pièce dans un immeuble. Il avait M. Filipovic là-bas également, et
4 c'était dans une situation de guerre. Il y avait un terrible pilonnage à
5 Travnik par les Serbes. Il y avait des coups de feu, donc j'ai demandé :
6 quelle était la situation ? Où étaient les lignes de front ? "Quand est-ce
7 que tu t'entends à ce que les Serbes attaquent Travnik ?" Puis, je pourrais
8 vous en parler pendant un petit moment quelle était la situation là-bas, et
9 combien de temps je suis resté et ce que j'ai fait. C'est une toute
10 période.
11 J'ai rencontré un jeune homme. J'ai eu des entretiens avec lui. Après je
12 suis venu à mieux le connaître. C'était quelqu'un qui était venu de l'armée
13 populaire yougoslave. Il avait été commandant d'un Bataillon d'Infanterie,
14 je pense, en Slovénie, puis au début de la guerre en Slovénie, il s'est
15 enfui. Il a pris la fuite en Autriche parce que je pense que son épouse
16 avait de la famille là-bas. Il n'a pas pris part à la guerre en Croatie, et
17 il est arrivé, je suppose, je ne sais pas exactement à quel moment, mais il
18 est venu dans sa région natale parce qu'il est né là-bas, et il s'est mis à
19 la disposition du HVO, et lui -- pour ce qui est donc des gens qui avaient
20 commencé à organiser la résistance avant, eux, ils doutaient un petit peu
21 de lui quelque suspicion à son égard, pourquoi il est venu si tard, qu'est-
22 ce qu'il a fait en Autriche, et cetera. Il a fallut que j'essaie arrêter ce
23 genre de rumeurs. C'était un officier. Il connaissait bien son travail et
24 ce qu'il savait faire en sa qualité d'officier de la JNA mais ce n'était
25 pas suffisant pour organiser la défense de Travnik parce qu'en fait, il
26 n'avait pas d'armée. Ceux qui arrivaient sur place, ils prenaient la fuite
27 comme je vous l'ai montré dans mon film. Donc quand on voit que personne
28 n'est là --
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps,
2 Monsieur Praljak, mais vous ne cessez, pendant 18 lignes, de parler d'un
3 jeune homme. Est-ce que vous pourriez nous dire qui c'est, s'il vous plaît
4 ? A la page 51, ligne 25, vous dites : "Je connaissais un jeune homme à
5 cet endroit-là." Ensuite il semblerait que vous parliez toujours de ce
6 jeune homme; qui est-ce ? Est-ce M. Tihomir Blaskic ou --
7 R. Oui, Monsieur le Juge, je ne sais pas comment on traduit cela en
8 anglais; un adolescent c'est une chose, un jeune homme c'est autre chose.
9 Donc, là, je parle plutôt de quelqu'un qui n'est plus tout à fait jeune, il
10 a quelques années de plus qu'un adolescent, mais je parle de Blaskic tout
11 le temps.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous parlez de lui parce qu'il est né, il est né le
14 2 décembre 1960. Vous, vous êtes né en 1945, donc pour vous c'est un jeune
15 homme à l'époque.
16 R. Oui, c'est ça un jeune homme. En 1992, il a 32 ans.
17 R. Bien, à mes yeux, c'était un jeune homme. Il avait 32 ans, je ne savais
18 pas exactement sa date de naissance. Je me disais qu'il était plus jeune,
19 oui 16 ans, c'est une différence.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Fin 1992, il va se retrouver dans quelle
21 fonction militaire, à votre connaissance ?
22 R. Il était commandant de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour les besoins du transcript, pouvez-vous me
24 donner les noms des autres commandants des autres zones opérationnelles,
25 celles de Vitez, par exemple, de Rasa [phon]. Vous pouvez nous donner les
26 noms ?
27 R. Blaskic, il était le commandant de la zone opérationnelle dont faisait
28 partie Travnik, Novi Travnik, Vitez, Busovaca, Kiseljak, Vares. Donc
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1 c'était lui le commandant de cette zone opérationnelle.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Quels étaient les autres commandants des
3 autres zones opérationnelles ?
4 R. A l'époque ?
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
6 R. Le commandant de la zone opérationnelle nord-est d'Herzégovine, c'était
7 Siljeg, pour autant que je m'en souvienne. Le secteur de Mostar, donc sud-
8 ouest d'Herzégovine, à l'époque, c'était Mico Lasic. Pardon. Si Petkovic ne
9 me dérange pas --
10 Mme ALABURIC : [interprétation] On corrigera un petit peu les noms des
11 zones. Nord-ouest Herzégovine avec Siljeg et sud-est --
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. J'ai eu une petite
13 confusion dans mon esprit. Donc sud-est d'Herzégovine, Lasic; nord-ouest,
14 Siljeg; Bosnie centrale, Blaskic; la Posavina, Matuzovic, Djuro Matuzovic.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors vous savez que le colonel Blaskic a été
16 jugé dans les faits qui lui étaient reprochés. Il n'y avait pas été retenu
17 comme participant à une entreprise criminelle. Ce n'est venu que dans votre
18 acte d'accusation. Il fallait que cela soit précisé. Alors ce jeune homme,
19 le colonel Blaskic, aviez-vous eu des conversations politiques avec lui, ou
20 bien vous n'aviez que eu que des relations purement militaires sans
21 connaître ce qu'il pensait sur le plan politique ?
22 R. J'ai abordé beaucoup de sujets avec cet homme dans le cadre de nos
23 conversations, parce que d'une certaine manière il fallait aussi que je
24 rehausse son autorité sur place. On a parlé des sujets militaires, de
25 l'organisation, la discipline, beaucoup de choses; il y avait des unités
26 pour lesquelles il y avait des problèmes de discipline qui se posaient, la
27 question était : comment rétablir l'ordre ? Mais j'ai également évoqué les
28 questions politiques.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : A ce sujet, quelle était sa vision qu'il avait de la
2 situation ?
3 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, sa vision ne divergeait pas
4 de la mienne. Cet homme, au sujet des Musulmans, à l'époque, n'a jamais dit
5 -- rien ne serait-ce que le moindre mal. Il n'a jamais dit rien de mauvais
6 au sujet des Serbes ou qui que ce soit d'autres, ou quelque autre peuple
7 que ce soit. C'était un militaire. J'ai passé beaucoup de temps avec M.
8 Jaganjac, avec d'autres pour essayer de mettre sur pied avec l'ABiH un
9 commandement conjoint. Je me suis régulièrement rendu dans les
10 commandements et les QG de l'ABiH dans ce secteur, Blaskic m'accompagnait,
11 nous avons eu des dizaines d'entretiens à ce sujet avec des commandants de
12 l'ABiH, j'ai reçu des cachets aussi, des sceaux des uns comme des autres.
13 Les uns comme les autres me reconnaissaient d'une certaine manière, surtout
14 après cette défense réussie de Travnik, dont ils reconnaissaient le fait
15 que j'avais un certain nombre de droits, mais je dois dire, encore une
16 fois, que je suis complètement autoproclamé en tant que figure là-bas.
17 D'une certaine manière, je me suis placé à un poste. J'ai été nommé dans
18 cette commission entre Alija Izetbegovic et Franjo Tudjman, c'est-à-dire
19 une espèce de comité conjoint.
20 Mais tout simplement à Travnik après la chute de Jajce, il n'y avait
21 personne. La ville était complètement désorganisée, vous aviez deux armées.
22 Le HVO était un petit peu organisé mais l'ABiH il n'y avait que M. Leka à
23 Turbe mais l'armée n'existait quasiment pas. Donc il fallait bien que
24 quelqu'un s'en charge. Maintenant vous -- on se dit soit on met le moteur
25 en marche et on rentre à la maison, soit les Serbes entreront dans Sarajevo
26 et on prend sur soi et on se met à émettre des ordres. Alors puis on vous
27 écoute, puis donnez d'autres ordres et c'est comme ça de fil en aiguille,
28 c'est comme ça que ça se passe. C'est la manière la plus exacte et la plus
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1 franche; devrais-je dire.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vais pas autant insister sur le colonel
3 Blaskic, mais une petite question : est-ce que vous avez lu les jugements
4 rendus dans l'affaire du colonel Blaskic ? Vous les avez lus ou pas ?
5 R. J'ai lu le jugement de première instance, l'arrêt en appel. J'ai juste
6 appris des détails, mais le jugement, oui.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors vous avez lu le jugement et puis des
8 détails dans l'arrêt en première -- en appel.
9 Ahmici, où étiez-vous à l'époque ?
10 R. A Zagreb.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc à Ahmici, vous n'étiez pas partie
12 prenante. Vous savez ce qui était reproché au colonel Blaskic, ça a été
13 aussi dans ce qui s'était passé notamment à Ahmici.
14 Dans le mémoire préalable de l'Accusation, que vous n'avez pas lu, il
15 est dit au paragraphe 65, je vais vous lire mais c'est très court, il est
16 dit ceci :
17 "Le 19 janvier, à 0 heure 30, le HVO a lancé des offensives contre
18 l'armée de Bosnie-Herzégovine et a brûlé plusieurs villages musulmans de la
19 région." Jugement Blaskic, paragraphe 379.
20 Puis il apparaîtra également d'après l'Accusation qu'Ahmici fait
21 partie de cette offensive du HVO.
22 La Chambre d'appel est venue un peu même pas un peu, disons est venue
23 corriger le point de vue de la Chambre Blaskic sur le fait que, de son
24 point de vue, la Chambre d'appel à Ahmici, ça pouvait être une cible, un
25 village où il y avait des troupes de l'ABiH, et que donc la Chambre d'appel
26 semble dire que les combats qui ont eu lieu au mois d'avril étaient des
27 combats qui ont opposé les deux parties sans que la Chambre d'appel prenne
28 position très nette pour savoir qui était l'attaquant, qui était le
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1 défenseur.
2 Quand, vous, vous avez appris ce qui s'était passé à Ahmici, quelle a
3 été votre réaction ?
4 R. A double titre ou de deux manières. Premièrement, j'ai été choqué
5 et puis, deuxièmement, j'ai eu une certaine méfiance. Je me suis dit que
6 les médias musulmans et étrangers ne l'ont pas correctement relayé. Je me
7 suis rendu compte que ce soit pendant la guerre ou après la guerre, qu'il y
8 a énormément de mensonges qui ont circulé pendant cette guerre. Nous avons
9 entendu pleine chose sur Stupni Do. Simplement personne ne peut me
10 convaincre qu'on peut, dans ce petit village, trouver 15 victimes; eux, ils
11 disent, dans le document, que dix militaires y ont perdu la vie et que,
12 pendant quatre mois plus tard, quelqu'un sans aucune enquête apprend qu'il
13 y a eu des membres de l'ABiH qui auraient été tués, à Stupni Do. Il n'y
14 jamais eu d'enquête digne de ce nom, là-bas. Comment comprendre -- comment
15 arriver à comprendre que ces gens qui ont volé dans ces maisons, qu'ils ont
16 vraiment brûlé là-bas ? Mais qui a fait cela ? Quel a été son objectif ? Le
17 HVO a fait son action dans la matinée, à 4 heures, ils ne sont plus là.
18 Donc on n'a pas enquêté pour savoir la vérité. C'est une guerre de
19 propagande qui prend des proportions inouïes.
20 Aujourd'hui, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, on voit
21 sortir des livres dans les cercles internationaux, américains, des ex
22 agents des Services secrets, qui, eux, citent maintenant où, combien et
23 comment la propagande a fait des choses qui n'ont rien à voir avec la
24 vérité. Donc, premièrement, j'ai été choqué, petit (a) et petit (b), je
25 n'arrivais pas à prendre cela au pied de la lettre.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, êtes-vous allé à
27 Stupni Do ?
28 R. Non, Monsieur le Juge.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc sur quoi fondez-vous votre
2 affirmation. Vous dites que c'était un endroit qui était tout petit.
3 R. Parce que nous avons vu ici les photographies de toutes les maisons de
4 Stupni Do. Je pense qu'on a vu au moins 15 et prises sur tous les angles,
5 chacune de ces maisons; vous vous en souvenez, Monsieur le Juge Trechsel.
6 On a vu tout, millimètre par millimètre. On parle de ruine, on ne voit pas
7 de ruine. On parle de caves qui n'existent pas. On dit qu'ils n'étaient pas
8 armés, eux-mêmes disent qu'ils ont eu dix militaires de tués, et cetera.
9 Puis vous avez 100 personnes représentant les organisations internationales
10 qui rentrent dedans --
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. J'ai posé une question
12 très courte, et vous y avez répondu.
13 Une deuxième question courte. Combien de maisons y a-t-il à Stupni Do ?
14 Donnez-nous simplement le nombre de maisons, si vous l'avez regardé aussi
15 attentivement, vous devez le savoir environ, bien sûr. Cinq, dix, 15, 20 ?
16 R. Il y a 40 maisons.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Dans ce cas, je me demande pourquoi
18 vous vous posez la question. Si on trouve 15 corps et qu'il y a 40
19 maisons, il y avait peut-être quatre à dix personnes par maison. Pourquoi
20 dites-vous que c'est incroyablement élevé comme chiffre de trouver 15 corps
21 ou cadavres dans un village ? Je ne comprends pas très bien la logique de
22 votre raisonnement.
23 R. Non, Monsieur le Juge Trechsel, vous ne m'avez pas bien compris.
24 Prenons un village, si trois groupes de représentants de la communauté
25 internationale avec un enquêteur se rende là-bas, rentrent dedans, passent
26 une journée entière et repèrent 15 corps; et si quatre mois plus tard nous
27 avons 38 corps, qu'est-ce qu'ils ont fait ces gens-là ? On peut dire qu'il
28 y avait trois, dix, personnes par maison. Donc l'enquête a été bâclée. Donc
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1 on pourrait dire qu'il y a eu 300 corps en tout. Ils ont en trouvé 15 et
2 l'enquête est terminée.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez répondu à ma question.
4 Merci.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je vais maintenant aborder le cas
6 de Dario Kordic, qui était peut-être aussi un jeune homme puisqu'il est né
7 le 14 décembre 1960, à Sarajevo.
8 Alors dans quelle condition avez-vous rencontré Dario Kordic ?
9 R. Quand je fais la connaissance de Blaskic, j'ai fait la connaissance de
10 Kordic également, pendant la même période, mais c'était de manière plus
11 superficielle. Nous avons eu peut-être deux petites réunions ou rencontres
12 brèves. Je l'ai vu également dans ce film lorsqu'il y a création de cette
13 brigade à Zenica. Là, il a tenu une sorte de discours. J'ai du mal à me
14 souvenir, et moi, je leur disais de ne pas fumer pendant le passage en
15 revue. Je ne me souviens pas quand je l'ai revue après cela, Dario Kordic.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous l'avez vu peu de fois, alors.
17 R. Au plus, trois fois disons.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous eu des discussions politiques avec lui ?
19 R. Une brève conversation politique, oui, je l'ai eue. Après je me
20 souviens d'une remarque que j'ai donnée, ses discours politiques n'étaient
21 rien que je lui aurais reproché. Mais je lui ai dit d'atténuer un petit peu
22 sa rhétorique. En d'autres termes, je lui ai dit : "Dario, réduisez un
23 petit peu cette rhétorique." Comment faudrait-il traduire cela ? "Ne sois
24 pas passionné à ce point dans tes discours." Je me souviens lui avoir dit
25 cela, donc à l'occasion de ce discours de Zenica. Il ne faudrait pas dire
26 discours au pluriel. Donc ce discours de Zenica.
27 C'était évident, il cherchait à encourager les hommes, c'est une question
28 de moral des hommes et tout un chacun doit se montrer passionner quand il
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1 cherche à faire cela. Parce qu'il faut savoir, Monsieur le Président,
2 Messieurs les Juges, c'est ce que je tiens a vous dire, après Jajce, les
3 Serbes, ils avancent directement sur Travnik et Sarajevo et au-delà. Quand
4 j'ai envoyé Blaskic pour qu'il ramasse des planches et des pelles et qu'il
5 trouve des volontaires pour qu'ils se rendent à des points de rassemblement
6 pour aller creuser des tranchées où il le fallait. Ces gens, ils lui
7 demandaient des certificats pour, je ne sais pas, un demi mètre cube de
8 planche, et le directeur de l'usine, il disait : "Mais pourquoi est-ce que
9 vous m'appelez à 2 heures du matin ? Est-ce que vous savez quelle heure il
10 est ?"
11 C'est difficile de comprendre les choses si on ne tient pas compte de
12 la psychologie de la mentalité des gens dans cette contrée. Ils étaient
13 complètement endormis. La guerre battait son plein. Mais ce n'était pas
14 chez eux, c'était ailleurs -- pardon, puisque ce n'est pas à leur porte,
15 eux, ils ont le comportement d'autruche et ils se disent que ça va passer,
16 et littéralement, vous êtes obligé de leur donner un coup de pied dans le
17 derrière. Les plus importants leur fait faire déclencher ce mécanisme
18 d'éveil psychologique pour qu'il soit capable de combattre.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'en connaissant la personnalité de M. Kordic, même
20 si vous l'avez rencontré peu de fois, quand il s'est retrouvé vice-
21 président du HDZ de la Bosnie-Herzégovine, est-ce que ça a été un
22 étonnement pour vous, ou pas ?
23 R. Monsieur le Juge, je ne savais même pas qu'il avait atteint cette
24 fonction. J'avais fait la connaissance d'un homme portant des lunettes,
25 assez maladroit, plutôt religieux, assez religieux et pour moi, c'était sur
26 la base de cette impression qui avait été la mienne. Initialement c'était
27 une complète surprise d'après ce que j'avais eue c'était un croyant tout à
28 fait sincère, et jusqu'au jour d'aujourd'hui c'est un mystère pour moi,
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1 qu'il y ait un tel décalage entre ce que, moi, j'ai pu voir de lui sur
2 place et la possibilité qu'une telle personne n'ait pu commettre un crime.
3 Je n'émettrai aucun jugement à ce sujet mais, pour moi, c'est un mystère
4 véritablement, c'est ce que j'en pense intimement. Mais je n'entrerais pas
5 dans les détails, le temps et la guerre peuvent transformer n'importe qui.
6 Je parle seulement de cette impression qui avait été la mienne, impression
7 d'avoir eu affaire à un chrétien très pratique qui croyait en les dix
8 commandements.
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une observation concernant le compte
10 rendu.
11 Je crois que c'était aux lignes 23, 24 de la page 60.
12 "Lorsque j'ai entendu dire qu'il avait été accusé de crimes, ceci ne
13 m'a pas surpris compte tenu de l'impression que j'avais de lui."
14 Je me demande si c'est vraiment ce que vous voulez dire ou si c'est
15 l'inverse que vous souhaitiez dire.
16 R. C'était précisément le contraire que je voulais dire. En me fondant sur
17 l'impression qui avait été la mienne à l'occasion de ces quelques
18 rencontres que nous avons eues, j'avais vu que c'était un chrétien
19 pratiquant, qu'il croyait en les dix commandements, pour moi, c'était une
20 très grande surprise.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. A ce moment-là,
22 effectivement, cette phrase est conforme au reste. Bien, allez-y.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vais pas insister sur Dario Kordic parce qu'il
24 y a un cas qui me paraît beaucoup plus intéressant, c'est Naletilic, Tuta.
25 Pouvez-vous me dire quand vous l'avez rencontré ?
26 R. Dans mon enfance, il vient de Siroki Brijeg. Il est plus jeune que moi
27 de deux années, et comme il s'agit d'une petite localité, nous n'étions
28 bien nombreux et nous nous connaissions tous. Tous les enfants se
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1 connaissaient, et c'est alors que j'ai fait la connaissance de Mladen
2 Naletilic.
3 Après cela, en 1961 donc, j'ai quitté Siroki Brijeg, et la fois suivante où
4 j'ai vu Naletilic, Tuta, c'était en 1992. Il se rendait à Sarajevo, puis
5 ensuite je ne sais plus où il est allé à l'étranger, il a immigré et ainsi
6 de suite.
7 Donc il y avait 1960, puis 1992, une trentaine d'années.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors sur le plan de ces idées politiques,
9 avait-il des idées, n'en avait-il pas ? Quelle impression vous donnait-il ?
10 R. Dans les années 90, en 1992, lorsque je l'ai rencontré sur place, il
11 avait déjà rassemblé des gars à lui, quelques unités à Siroki Brijeg, il
12 avait fait précédemment, et parmi eux se trouvait des gars extraordinaires;
13 cependant, il est tout à fait certain et exact, que M. Naletilic n'était
14 pas un homme de l'ordre. S'il pouvait se montrer avocat d'une forme
15 d'ordre, c'était un ordre dans ses termes à lui, c'est-à-dire un ordre dans
16 lequel ses propres unités auraient été à part et au-dessus des autres.
17 D'autre part, il appartenait très certainement à ces cercles
18 politiques qui considéraient les Musulmans comme étant absolument des
19 frères et même plus que cela, donc ces courants émanant de l'Etat
20 indépendant de Croatie, de la Seconde Guerre mondiale, le MDH, où l'on
21 considérait les Musulmans comme des Croates de confession musulmane, et on
22 les considérait même comme le fleuron de la nation croate. Au sens où ils
23 étaient considérés comme la partie la meilleure et la plus saine en quelque
24 sorte, de la nation croate. C'était cette façon-là de voir les Musulmans.
25 Il est tout à fait certain qu'en 1992, et pendant une partie de 1993,
26 Mladen Naletilic Tuta avance et défend ce type d'idées.
27 Ensuite, et jusqu'à l'un de ces événements dont nous avons déjà
28 parlé, je n'ai plus eu de contact avec lui. Du moins, je ne m'en souviens
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1 pas. Au-delà de cet événement, nous n'avons plus eu de contact jusqu'à la
2 mise en détention. Après, il me semble que nous nous sommes encore
3 rencontrés une fois. A cette occasion, il a proféré des excuses, ce à quoi
4 j'ai rétorqué : "Bon, bon, tu aurais pu le faire," mais, moi, je ne veux
5 pas en reparler.
6 Je ne souhaitais pas, je n'ai pas eu et je ne souhaitais pas avoir de
7 contact avec lui. Je ne considérais pas comme quelqu'un s'étant trouvé sous
8 mon commandement, il n'était pas sous mon commandement.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Justement. On va venir au sujet. Vous dites
10 qu'à Siroki Brijeg il a constitué une unité. Est-ce ce fameux Bataillon des
11 Condamnés --
12 R. Il y en avait deux, il me semble. Il y avait le Bataillon des Condamnés
13 et le Bataillon antiterroriste, ou quelque chose comme ça. Il y en avait
14 deux.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
16 R. L'un de ces bataillons était un bataillon régulier qui était tout
17 d'abord commandé par M. Andabak, et ensuite il a été mené par M. Lija
18 Mandic, et c'était une bonne unité tout à fait régulière. Quant au reste et
19 tout ce qui tournait autour, très sincèrement, je ne saurais quoi vous en
20 dire. Je confondais d'ailleurs toujours les noms de l'une et de l'autre,
21 donc je n'arrive pas à me rappeler laquelle, et s'appelait comment. Donc je
22 parle ici d'une unité qui était bonne dont le commandant était Andabak,
23 l'un des Andabak, et ensuite c'est M. Mandic qui en a été le commandant.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous dites, il n'était pas sous mon autorité.
25 Comment est-ce possible ?
26 R. C'est tout à fait possible.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, expliquez.
28 R. Mais, Monsieur le Président, non seulement je ne souhaitais pas lui
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1 donner d'ordre mais il n'appartenait, il n'était pas en dessous de moi dans
2 la hiérarchie. Il ne représentait rien de mon point de vue et je ne pouvais
3 rien contre lui. Il n'était tout simplement pas passé sous ma
4 responsabilité du point de vue hiérarchique.
5 La seule chose que je puisse faire éventuellement c'est de mobiliser
6 une brigade et en dehors de toutes les compétences qui sont les miennes,
7 aller sur place pour prendre militairement la zone concernée ce que je ne
8 suis pas censé faire. Ce n'était pas un problème dont j'étais censé
9 traiter. J'ai dit ça très clairement à Mate Boban et tout le monde le
10 savait.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : On va maintenant aller au cœur le plus sensible.
12 Le 5 mai, dans la thèse du Procureur, qui est développée dans l'acte
13 d'accusation et dans le mémoire préalable, le 5 mai, donc les Musulmans
14 sont arrêtés et c'est Naletilic qui va procéder à ces arrestations. Les
15 gens vont être conduits d'abord dans un premier temps au stade et puis
16 après, à l'Heliodrom.
17 Bien. Dans le jugement Naletilic, tout ceci est décrit en long et en large.
18 Alors, le 5 mai, où êtes-vous ? Oui, enfin le 9 mai, où êtes-vous ?
19 Excusez-moi, le 9 mai, où êtes-vous ?
20 R. Il est absolument certain que je n'étais pas à Mostar. Alors est-ce que
21 j'étais à Zagreb ou est-ce que j'étais en voyage, je ne le sais pas mais je
22 suis absolument sûr que je n'étais pas à Mostar. C'est sûr à 100 % et
23 exact. Mais quant à savoir si j'étais à Zagreb ou en voyage, je ne pourrais
24 le dire avec certitude.
25 Je suis absolument sûr d'être venu le 11 au matin à Mostar et j'ai relaté
26 l'événement avec exactitude.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans vos écritures, vous avez indiqué que, dans les
28 événements du 9 mai, vous n'étiez impliqué en rien.
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1 R. En rien, Messieurs les Juges.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors prenons le cas où ce que vous dites c'est la
3 réalité vous n'êtes impliqué en rien dans ce qui se passe le 9 mai. Le 9
4 mai, nous avons eu et vous avez entendu les victimes nous dire quelles ont
5 été arrêtées, transférées au stade, et puis après, l'Heliodrom. Ça vous
6 l'avez entendu comme moi. Comment vous expliquez cela ?
7 R. Messieurs les Juges, c'est après que cela s'est passé donc le 11; le 11
8 ce qui s'est passé, c'est passé. Je me suis arrêté dans ce virage et puis
9 je suis parti. Mais les gars, avec qui j'ai parlé après cette messe de ce
10 même jour, et puis à partir de la conversation aussi avec Mico Lasic que je
11 connaissais d'avant, j'ai posé la question à ces gens de savoir qui avait
12 attaqué en premier. Personne n'a essayé de me raconter des histoires. Ce
13 n'est pas le HVO qui a attaqué en premier. Mais on a vu ensuite à Vranica,
14 on a retrouvé ces plans qui ont été saisis. On a vu que l'ABiH préparait
15 une attaque et que cette attaque a débuté le 9 mai; c'est ce que je sais.
16 Deuxièmement, il y a deux éléments à prendre en considération. Lorsque des
17 combats commencent en ville, alors supposons à titre d'hypothèse que je
18 sois présent sur place, si des combats commencent en ville, et si vous
19 n'êtes pas en mesure de déterminer où se trouve la ligne d'attaque, la
20 ligne de front où se déroule l'attaque, dans ce cas, vous n'êtes pas en
21 mesure non plus de savoir qui est votre ennemi parmi les bâtiments
22 environnants car on tire à partir des fenêtres, à partir des toits, et
23 ainsi de suite.
24 Personnellement, j'estime qu'à ce moment-là, dans ces circonstances-là, il
25 est possible et on peut autoriser qu'un certain nombre de personnes
26 originaires de cette zone - et certainement pas sur des bases ethniques -
27 mais qu'il est possible d'écarter un certain nombre de personnes de cette
28 zone tant que la situation n'est pas résolue; cependant, la façon de
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1 procéder à l'égard de ces personnes doit être en accord avec les
2 conventions applicables. C'est mon opinion.
3 Donc je pense que cela peut être autorisé. J'ai fait cela à Vakuf parce
4 qu'on a des civils qui se retrouvent en zone de guerre, bien, c'est moi qui
5 ai la responsabilité de leurs vies. Je dis : "Vous allez emmener ces
6 personnes qui se trouvent ici avec leur bétail jusqu'à tel et tel endroit,
7 et toi, tu vas être responsable de…" Voilà.
8 Pour moi, c'est quelque chose dans mon esprit et dans mon cœur qui
9 est tout à fait possible et autorisé. Je ne sais pas si c'est légal. Mais,
10 pour moi, c'est autorisé, c'est possible. Alors après ce qui est très
11 important, évidemment, c'est la façon dont on procède ultérieurement avec
12 ces personnes. Voilà ce que je peux vous dire à titre hypothétique. Je ne
13 sais pas ce qui s'est passé.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : En entrant dans ce que vous venez de dire,
15 qu'on a capturé des personnes qui étaient dans une zone où il y a eu des
16 tirs. Bon. Vous le savez aussi bien que, moi et vous-même, vous avez dit,
17 il y a plusieurs jours - et ça m'avait d'ailleurs frappé - vous m'avez dit
18 -- enfin, vous nous avez dit aux Juges -- vous avez dit ceci et je vous
19 cite verbatim : "Pour moi, la meilleure défense c'est de dire la vérité."
20 Voilà ce que vous nous avez dit. Alors j'embraye sur cela --
21 R. Oui.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc maintenant vous nous dites la vérité. Alors
23 nous savons que des centaines de personnes ont été arrêtés. Nous savons
24 qu'il a fallu plusieurs bus pour les amener, donc il y a eu une opération.
25 D'après vous, si M. Naletilic a mené cette opération, à ce moment-là, le 9
26 mai, il était sous les ordres de qui ?
27 R. Je ne peux pas répondre à cette question, Monsieur le Président. Ce que
28 j'ai dit, j'ai dit à titre d'hypothèse. Seul le commandant de la zone
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1 opérationnelle, Mico Lasic, aurait pu commander de cette façon-là et non
2 pas Naletilic.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne veux pas vous mettre en difficulté mais, là,
4 maintenant on est sur un problème typiquement militaire. Nous avons des
5 soldats du HVO qui arrêtent des gens. Bon. Il faudra déterminer si les
6 arrestations étaient légales, illégales, et cetera, ça c'est un autre
7 problème. Moi, je n'entre pas dans cet aspect. Je veux simplement savoir,
8 dans le cadre de l'opération militaire, les soldats de Naletilic, qui sont
9 sous l'autorité de Naletilic; ça il y a pas de problème. Mais maintenant,
10 M. Naletilic il est sous l'autorité de qui ?
11 R. Je l'ignore, Messieurs les Juges. A ce moment-là, sur place, je
12 n'accomplis aucune fonction de cette nature-là. Je sais qui est le chef de
13 l'état-major principal. C'est Petkovic qui n'est pas sur place. Je sais que
14 je suis arrivé, le 11, que j'ai relaté ce qui était arrivé, et cela je
15 l'ignore.
16 Il est exact que la vérité, pour moi, est la meilleure des défenses
17 et je vous l'a dit exactement tel quelle est. Je ne peux pas vous dire ce
18 que j'ignore précisément parce que je l'ignore. Mais je peux vous dire
19 également si, moi, j'avais conduit cette opération, peut-être que pour des
20 raisons de sécurité, j'aurais procédé de façon similaire à ce que j'ai fait
21 à Vakuf. Cela dépend d'évaluation qu'on fait au moment donné concernant le
22 sort des civils. Est-ce que les civils risquent de périr ? Mais les
23 circonstances étaient différentes. Je ne parle pas ici de chiffre et c'est
24 tout à fait hypothétique, ce que j'ai dit.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne veux pas être directif dans ma question, donc
26 je colle le plus possible aux aspects de technique militaire.
27 Est-ce une opération qui consiste à prendre des gens d'un point A pour les
28 mettre à un point B, et puis après, à un point C : le point B étant le
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1 stade; le point C, l'Heliodrom. Une opération où il y a plusieurs personnes
2 qui font l'objet de cette opération.
3 Est-ce que, sur le plan militaire, ça doit être avant; avant, je dis
4 bien avant pensé, réfléchi, planifié, organisé ? Juste un tout petit
5 détail, les bus, ce n'est pas en claquant des mains qu'on a, dans la
6 seconde, huit bus parce que les bus, il faut mettre de l'essence, il faut
7 avoir les chauffeurs, il faut leur donner l'heure de rassemblement, et
8 cetera.
9 Donc est-ce qu'en termes militaires, d'après vous qui êtes un
10 spécialiste militaire puisque vous avez exercé une autre fonction
11 militaire, est-ce que ceci n'impliquait pas un minimum de planification,
12 d'organisation de logistique ?
13 R. C'est comme vous l'avez formulé, Monsieur le Président. C'est ainsi
14 mais j'ignore quand, à quelle heure cela a commencé quand les gens ont été
15 emmenés, quand les autocars sont arrivés. Il y avait des bus à Mostar qui
16 emmenaient les enfants et les civils. Il faudrait déterminer avec précision
17 quand l'opération a commencé, quand les coups de feu ont commencé à
18 retentir, où se trouvaient les autobus et ainsi de suite.
19 Je ne peux donc pas répondre avec précision. Mais --
20 M. LE JUGE ANTONETTI : On a deux hypothèses de travail. Je dis bien des
21 hypothèses de travail parce que les Juges, on n'a pas discuté entre nous.
22 Donc on ne sait pas quelles sont les conclusions. Les deux hypothèses, et
23 vous les connaissez comme moi. Première hypothèse, c'est celle du
24 Procureur, attaque du HVO et conséquences, on arrête les Musulmans, et
25 cetera.
26 Deuxième hypothèse de travail, offensive de l'ABiH, défense du HVO et dans
27 le cadre de la Défense, à ce moment-là, on estime, on ne sait pas qu'il
28 convient d'arrêter des Musulmans. Ça, c'est la deuxième hypothèse. Mais à
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1 ce moment-là, si dans cette deuxième hypothèse, on décide d'arrêter des
2 Musulmans, qui peut donner l'ordre ? M. Naletilic ? Le commandant de la
3 zone opérationnelle ? M. Petkovic qui n'est pas là ? Les autorités civiles
4 du HVO ? M. Prlic, mais M. Prlic, nous savons qu'il était à Makarska, ce
5 jour-là. M. Boban en personne, qui aurait le lien direct avec Naletilic
6 sans passer par Petkovic et Lasic ? Comment vous analysez cela, vous ?
7 R. Je vais énoncer l'opinion qui est la mienne. A partir des éléments dont
8 j'ai eu connaissance ultérieurement me fondant sur mes entretiens avec les
9 commandants, donc avec les commandants de la Brigade de Ljubuski, Tomic et
10 le commandant Lasic également, le commandant de la zone opérationnelle,
11 également avec le commandant de la 2e Brigade et d'autres; alors j'ai
12 demandé à Tomic, par exemple : "Est-ce que, toi, tu es responsable de
13 l'opération à Mostar ?" Il m'a dit : "Non, moi, j'ai été appelé après,
14 ultérieurement."
15 En d'autres termes, sur la base de toutes les informations dont je dispose
16 et que je maintiens, il n'y a eu d'attaque planifiée par le HVO.
17 Car pour attaquer une ville comme Mostar, Messieurs les Juges, cela
18 ne peut pas se faire sans Boban, sans Petkovic, sans Lasic, c'est
19 impossible.
20 Même jusqu'à la dernière soirée, il y avait sur place encore, je ne sais
21 combien de personnes de la communauté internationale. Il y avait des
22 réunions, je l'ai appris ici, mais pour moi, après l'attaque de l'ABiH, et
23 vous l'avez vu également dans l'ouvrage de Hadziosmanovic, que les
24 Musulmans passaient de notre côté. J'affirme c'est une hypothèse qu'il y a
25 très probablement eu une réaction de panique et que dans cette situation-
26 là, je continue à avancer une hypothèse, Naletilic aurait procédé ainsi.
27 Mais je ne peux parler que de façon hypothétique. Ce n'est pas un
28 témoignage que je peux faire comme quelqu'un qui aurait été présent. Car
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1 dans ce type de situation, on assiste le plus souvent à dans réponses de
2 type hystérique. On arrête des gens, on tire, on affirme qu'il y a des tirs
3 dans le dos.
4 Cette variante est très probable car, Messieurs les Juges, pour ce qui
5 concerne Vranica, ils ont placé leur poste de commandement au centre de la
6 partie ouest de Mostar. Peu à peu, je sais qu'il y avait des objections à
7 cela, ils prenaient du territoire. Ils occupaient du territoire alors
8 qu'ils ne se battaient pas vraiment contre les Chetniks, donc il y avait
9 déjà une animosité non négligeable. Lorsque survient une attaque, il y a
10 des gens qui deviennent hystériques, qui profèrent des insultes, qui
11 affirment des choses comme ces enculés qui nous ont enfoncé un poignard
12 dans le dos et ainsi de suite. Une telle situation peut durer pendant un
13 certain temps, avant que quelqu'un qui ne mène ses propres actions, sa
14 propre politique ou même sa propre guerre, ne la prenne en main.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc aux questions extrêmement précises que je pose,
16 vous n'avez pas de réponse parce que vous ne savez pas s'il y a eu une
17 planification d'ordre. Mais en admettant ce que vous dites, est-il possible
18 qu'un commandant militaire du niveau de Naletilic puisse dans le dos, dans
19 le dos de sa hiérarchie, dans le dos des autorités civiles, arrêter femmes,
20 enfants, vieillards, hommes adultes et en faire incarcérés, placés
21 provisoirement dans un lieu, bon, on peut prendre plusieurs maux pour
22 caractériser ce qui s'est passé.
23 Est-ce que c'est possible qu'un individu puisse de lui-même comme ça tout
24 décider ? C'est ça que j'essaie de comprendre.
25 R. C'est possible. Je dis très clairement c'est tout à fait possible.
26 Naletilic aurait pu le faire. Il était en dehors du système de contrôle.
27 Vous avez vu ce qui s'était passé le 11. Valentin Coric était présent à
28 cette réunion ainsi que le chef du SIS.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Je dois vous dire --
2 R. Il ne pouvait rien contre lui.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Général Praljak, mais je l'ai déjà dit. Mais
4 autant vous le redire pour vous le remettre en mémoire, qu'il y avait un
5 document, malheureusement, je ne l'ai pas pris où il y a un rapport d'un
6 policier militaire qui écrit noir sur blanc que les hommes de Tuta font de
7 l'épuration ethnique. Voilà. Donc ce rapport est envoyé dans la hiérarchie
8 de la police militaire. Donc, manifestement, si ce document dit bien ce que
9 le scripteur avait estimé de la situation, ça montre pour le moins qu'il y
10 a des policiers militaires qui n'ont pas participé à l'opération, et c'est
11 ça qui est assez troublant. Mais, par contre, on a eu des victimes, vous le
12 savez qui nous ont expliqué qu'il y a des policiers militaires qui sont
13 venus dans leur appartement, qu'ils les ont chassés de l'appartement, et
14 cetera. Donc nous avons aussi cela.
15 Donc c'est une mosaïque de témoignages très divers. Vous savez que les
16 Espagnols ont filmé les colonnes et on eu la vidéo. Ensuite ces gens ont
17 été placés à l'Heliodrom où là, il y avait des problèmes pour les nourrir,
18 les loger, et cetera, et cetera. Alors vous me dites : moi, j'ai appris ça
19 le 11 novembre. Mais, le 11 mai, quand vous avez appris ça le 11 mai, est-
20 ce que vous êtes intervenu pour dire : mais il y a des gens qui sont à
21 l'Heliodrom, ils n'ont rien à faire là ? Qu'est-ce que vous avez fait à
22 votre niveau ?
23 R. Monsieur le Président, j'ai appris une partie des éléments, le 11,
24 quand je suis arrivé à cette réunion qui s'est terminée comme on le sait à
25 Mostar. Dans cette pièce, il y avait un certain nombre de personnes. Il y
26 avait Valentin Coric et le responsable du SIS chargé de la sécurité, et
27 moi, il m'arrive ce que l'on sait.
28 Je vous dis tout à fait sincèrement en toute vérité que ces personnes
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1 présentes là-bas à ce moment-là ni Valentin Coric, ni Lucic n'étaient en
2 mesure de remettre de l'ordre dans cette situation et de faire tomber
3 Mladen Naletilic Tuta sous le coup des dispositions légales qui
4 s'appliquent. Il est tout simplement trop fort. Il dispose de ses propres
5 hommes, des ses propres unités, et la seule solution, ça aurait été de
6 prendre 300 hommes et de l'affronter, de tirer les uns sur les autres.
7 Cela, très franchement, n'a rien de si inhabituel que cela. Même dans
8 la guerre du Vietnam, on l'a observé. Il y a des hommes qui sont tout
9 simplement hors de tout contrôle et la seule chose à faire c'est d'attendre
10 que vos propres forces puissent monter en puissance jusqu'au niveau qui
11 vous permettra d'affronter les hommes en question et de surpasser leur
12 propre pouvoir.
13 Deuxièmement, Messieurs les Juges, donc les 11 et 12 mai, avec M.
14 Sefko Omerbasic, le président de la communauté musulmane de Zagreb, je me
15 suis rendu pour mener des entretiens au sein du Bataillon espagnol de la
16 FORPRONU. M. Petkovic, lui aussi, est revenu et on a commencé à éclaircir
17 ces questions. Alors, moi, je n'ai pas participé directement mais
18 uniquement au travers de ces discussions de haut niveau et ce problème a
19 été résolu assez rapidement.
20 A partir des documents que j'ai vus ici, je vous le dis, il y a un
21 accord de cessez-le-feu, qui a été signé lorsque Halilovic est venu puis
22 Petkovic est arrivé, et c'est ainsi que tout cela s'est arrêté. Moi, j'ai
23 de nouveau essayé d'apaiser la situation avec mes entretiens avec
24 Omerbasic, avec Petkovic, avec la FORPRONU afin que l'on voie ce qu'on
25 pouvait faire. Jusqu'au 30 juin de nouveau, nous avons vu un cessez-le-feu
26 s'installer de la manière dont cela a été organisé à l'époque. Voilà la
27 réponse exacte et précise.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelques chiffres avant la pause.
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1 Dans le jugement Naletilic, au paragraphe 45, il semblerait que, ce jour-
2 là, il y a eu 1 500 à 2 000 civils musulmans qui ont été arrêtés et
3 conduits à l'Heliodrom. Entre 1 500 et 2 000, dont vous voyez le chiffre.
4 L'Accusation, dans ses écrits, indique également qu'il y a eu une liste qui
5 a été faite des personnes arrêtées en trois catégories : femmes, enfants,
6 personnes âgées. Alors écoutez les chiffres : 216 femmes, 216; 104 enfants,
7 104 enfants; 31 personnes âgées. Le chiffre aveuglant c'est les 104
8 enfants.
9 Comment vous expliquez ça ?
10 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je vous en prie, je vais
11 répondre en avançant l'hypothèse car vous me demandez d'expliquer quelque
12 chose, je ne sais pas comment procéder autrement.
13 Supposons que, moi, je prépare une attaque à Mostar et que je m'attende à
14 des salves d'artillerie très puissantes, frappant les bâtiments et les rues
15 qui se trouvent derrière moi, qui se trouveront derrière moi. Moi, je
16 procéderais à l'évacuation aussi bien des femmes, des enfants que des
17 personnes âgées de ces bâtiments. Comment pourriez-vous y laisser des
18 enfants, s'il s'agit toutefois de cela ? Je parle en avançant une
19 hypothèse, hein, bien sûr.
20 Lorsqu'à Capljina, j'ai demandé en raison des tirs de snipers à partir de
21 certains appartements que l'on fasse baisser les stores et fermer des
22 volets et que l'on emmène les habitants des appartements qui faisaient face
23 aux positions de l'artillerie serbe pour les emmener vers des appartements
24 plus éloignés, que les projectiles pouvaient atteindre plus difficilement,
25 j'ai indiqué qu'il fallait inclure aussi bien les femmes que les personnes
26 âgées et les enfants. Comment aurais-je pu laisser les enfants ?
27 Alors j'ignore ici quelle est la raison, quel est le motif qui a
28 précisé à cela, et je ne peux entrer dans ces détails-là. Mais je peux vous
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1 parler de ce que j'ai fait à Vakuf, à Gornji Vakuf, lorsque j'ai demandé
2 que l'on emmène toutes ces personnes avec leurs bétails. Je n'allais quand
3 même pas laisser les enfants. J'ai ordonné que l'on emmène ces personnes
4 pour qu'on les accueille, qu'on les héberge et qu'on s'occupe d'elles car
5 j'estimais que c'était nécessaire.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Sous la foi du serment, vous me dites vous ignoriez
7 qu'il y avait au moins une centaine d'enfants qui étaient à l'Heliodrom, ça
8 vous ne le savez pas ?
9 R. Je vous dis sous serment que j'ignorais, que je n'avais connaissance
10 d'aucun de ces détails, aucune de ces données. Je ne le savais pas le 11
11 non plus. Je ne l'ai appris que plus tard. Le 11 mai, c'est complètement
12 désorienté et blessé que j'ai quitté cette réunion et que j'ai continué et
13 poursuivi avec mes activités car je n'avais rien d'autre à faire sur place.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Bon, après la pause, j'arrêterai de poser des
15 questions. Bon. J'en aurai une complémentaire sur Sovici, Doljani, puis
16 j'arrêterai et je commencerai à regarder les documents.
17 Alors nous allons faire 20 minutes de pause.
18 --- L'audience est suspendue à 17 heures 46.
19 --- L'audience est reprise à 18 heures 07.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.
21 Je crois que M. Stringer voulait intervenir.
22 M. STRINGER : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président,
23 simplement une question aussi courte. Aujourd'hui, c'est la date à laquelle
24 l'Accusation doit répondre à une requête déposée par la Défense de Prlic
25 pour rouvrir la présentation de leurs moyens. Aujourd'hui, c'est la date
26 d'expiration de la présentation du dépôt de notre réponse. La réponse est
27 prête mais au moment de déposer notre réponse nous avons constaté que cette
28 requête dépasse de 500 mots le montant mot autorisé. Donc ces 500 mots de
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1 plus et nous vous demandons afin de nous permettre de déposer ceci
2 maintenant, j'ai consulté la Défense Prlic à cet égard, nous demandons en
3 fait à pouvoir déposer cette réponse qui excède de 500 mots la limite
4 autorisée.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, la Chambre que j'ai consultée vous donne son
7 accord pour --
8 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je crois que mon collègue a quelques questions à
10 poser.
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Monsieur Praljak, oui, effectivement, pour parler encore du 9 mai et
13 ensuite du 11 mai.
14 Savez-vous ce qui était responsable de l'Heliodrom ?
15 R. Non, Monsieur le Juge Trechsel.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Se peut-il que Naletilic était le
17 commandant de l'Heliodrom ?
18 R. Monsieur le Juge Trechsel, je ne peux vous fournir aucun élément
19 d'information là-dessus. Vous savez, le 30 avril, au Sabor de la République
20 de Croatie, j'ai pu obtenir une délégation pour se rendre sur place pour
21 aller calmer la situation. Après, je m'étais mis d'accord avec M. Sefko
22 Omerbasic pour qu'on s'y rende ensemble, pour qu'ils s'entretiennent avec
23 la partie et qu'on essaie de calmer le conflit.
24 Je n'avais aucun pouvoir, aucune attribution, je vous ai raconté heure par
25 heure quelles ont été mes activités, je n'en ai pas la moindre idée.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Le 11, au cours de cette réunion,
27 est-ce que vous ou quelqu'un d'autre avait suggéré que ce sujet soit mis
28 sur la table, à savoir que les personnes qui avaient été arrêtées et qui
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1 étaient encore à l'Heliodrom soient relâchées immédiatement ?
2 R. Monsieur le Juge Trechsel, cet entretien pour ce qui me concerne n'a
3 duré que dix minutes. Il n'y a eu aucun discours sur aucun élément
4 d'information mentionné ici. Ça n'a pas été mentionné.
5 Je prônais la paix. Le monsieur dont nous avons parlé a réagi comme il a
6 réagi et j'ai quitté la réunion. Je me suis arrêté au virage, j'ai demandé
7 aux gars de laisser passer la FORPRONU --
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Depuis -- bon, vous n'êtes pas -- on
9 ne vous demande pas de parler de ce qui s'est passé lorsque vous aviez
10 quitté la réunion.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, je vais terminer sur Naletilic en
12 parlant des événements qui se sont déroulés à Sovici et Doljani le 17 avril
13 1993. Alors première question : le 17 avril 1993, où étiez-vous ?
14 R. Je ne sais pas exactement, Monsieur le Président. Je ne sais pas pour
15 le 17 avril, étais-je à Zagreb ou à Mostar ? Donc exactement quel est le
16 jour où, avec Arif Pasalic, je m'étais trouvé du côté est au sujet de
17 l'événement mentionné; là, je ne saurais pas vous le dire, mais j'affirme
18 que je n'avais aucun élément d'information sur Doljani ni Sovici, à
19 l'époque, je n'en avais pas. Je n'avais pas rien entendu à ce sujet, et je
20 ne saurais rien vous dire à ce sujet, je vous l'affirme sous serment.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc si je comprends bien, vous n'avez
22 participé en rien à l'opération militaire qui s'est déroulée à Sovici et
23 Doljani.
24 R. D'aucune manière. Je n'avais aucun moyen. Je vous ai dit exactement
25 dans quelles situations je jouais quel rôle.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je l'avais noté dans vos écritures. Vous
27 l'aviez déjà dit, mais je voulais en avoir la confirmation.
28 Au mois d'avril, le commandant militaire du HVO, est-ce bien le général
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1 Petkovic ?
2 R. C'est exact.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je ne sais pas si mes collègues ont des
4 questions sur Sovici et Doljani. Non. Bon.
5 Alors, Général Praljak, on va maintenant regarder les documents. Je vais
6 d'abord regarder les documents avec vous que vous avez contestés. En disant
7 que c'était des faux, il est vrai que, dans ce Tribunal dans plusieurs
8 procès, il y a toujours la question des faux documents, ce qui est
9 incroyable, mais voilà, ceci apparaît. Alors on va essayer de déterminer la
10 réalité de ces faux documents.
11 Alors je vais demander à M. le Greffier de mettre à l'écran le premier.
12 C'est le P 06937. Je redis. Voilà. Donc il faut voir le document en B/C/S,
13 et la traduction en anglais.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Je demande à M. l'Huissier de bien vouloir
15 aider --
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai le document.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Non, Monsieur le Greffier. La traduction anglaise ce
18 n'est pas la bonne. Le document en B/C/S c'est bon, mais la traduction
19 anglaise ce n'est pas bon. Voilà.
20 Bien, alors, Monsieur Praljak, on a donc un document qui est daté du 8
21 novembre, qui est le jour de la cessation de vos fonctions. Nous voyons
22 qu'il y a un numéro d'enregistrement, 02-717/93. Ce document est un
23 document où il y a déjà des mentions qui sont déjà écrites et après on va
24 les compléter. Donc ce document a dû servir déjà à plusieurs reprises pour
25 d'autres détenus qui ont été utilisés à des travaux à l'extérieur de
26 l'Heliodrom.
27 Alors, Monsieur Praljak, pour vous, en quoi ce document est faux ?
28 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le 8 novembre, je suis
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1 arrivé au Grand état-major à 10 heures du soir. Au plus tôt car, après la
2 réunion de Tomislavgrad la veille, j'étais resté pour y passer la nuit, et
3 le 8 novembre, après j'ai vu le général Roso à midi et toute la soirée pour
4 lui présenter la situation, quand je suis arrivé, j'ai signé deux documents
5 portant sur les blessés, petit A.
6 Et B, au nom de M. Petkovic, j'ai demandé qu'on abrège l'enquête -- ou
7 plutôt, qu'on accélère l'enquête sur Stupni Do. Ça c'est une première
8 chose. Deuxième chose, je n'aurais jamais signé après Mijo Jelic, petit A.
9 Petit B, jamais sur aucun document de ce type-là, je n'ai apposé ma
10 signature, jamais. Il y a des documents, il y a un grand nombre de
11 documents, j'en ai vus beaucoup ici, et c'est uniquement sur ce document du
12 8, quand je suis absent qu'il y a un faux. Il est écrit "le général
13 Slobodan Praljak." Normalement on devrait voir ici : "Sur autorisation du
14 commandant du Grand état-major du HVO, le général de division, Slobodan
15 Praljak," et moi, j'aurais signé simplement.
16 Donc, là, nous avons un faux. Je n'étais pas à Grude à ce moment-là.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Praljak, avant d'arriver dans ce
18 Tribunal, à Paris j'étais spécialisé dans les faux pendant un an et j'ai eu
19 à juger des centaines affaires de faux. Donc c'est une matière que je
20 connais un petit peu.
21 Le document que vous avez, il peut être faux soit totalement, c'est-à-dire
22 que tout le document est faux, ou bien il y a une partie du document qui
23 est vrai, c'est tout le document qui concerne les 40 détenus, la signature
24 de M. Jelic ou de son adjoint parce qu'on voit qu'il y a une petite barre,
25 donc si ça se trouve ce n'est pas lui a signé. Le faux serait à ce moment-
26 là votre signature avec le tampon. Donc le document serait vrai pour le
27 fait qu'il ait demandé 40 détenus mais on a rajouté votre nom.
28 Alors qu'est-ce que vous en pensez, vous ?
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1 R. Monsieur le Président, je ne sais pas quoi vous dire, ce qui ne va pas
2 avec ce document, est-ce que c'est 40 ou pas ? Est-ce que c'est la
3 signature de Mijo Jelic ou pas ? Ce type de document, je n'en n'ai jamais
4 signé. Il y a eu une photocopie qu'on a fait et on a fait apposer ma
5 signature par voie de photocopie comme on le fait.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous l'avez dit déjà.
7 Général Praljak, est-ce que vos avocats, les gens qui les assistent, est-ce
8 que vous avez pensé à envoyer une lettre, alors peut-être qu'il est mort ou
9 il est vivant, je ne sais pas à M. Mijo Jelic, en disant que, dans le cadre
10 des éléments de preuve, vous avez constaté qu'il y a un faux document et
11 vous lui demandez ses explications en disant : mais qui a mis le tampon
12 supplémentaire et le nom Slobodan Praljak ? Est-ce que vous l'avez fait ou
13 vous ne l'avez pas fait ? Si vous ne l'avez pas fait, pourquoi ?
14 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne l'ai pas fait et je
15 ne m'emploierai pas à le faire. Je ne vais pas me justifier puisque, le 8,
16 je n'étais pas là. M. Petkovic le sait. Vous avez la déclaration de M. Roso
17 pour savoir jusqu'à quel moment j'ai été en sa compagnie. Je ne peux pas
18 signer après Mijo Jelic. Il y a aucune mention : "approuver pas." Quelqu'un
19 s'est contenté de copier et c'est tout. Je ne veux pas me justifier. J'ai
20 beaucoup de documents. Quelqu'un cherche à m'imputer cela pour le 8 mais ça
21 ne m'appartient pas. Je ne veux pas me défendre au-delà de ma déclaration.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous avez une petite idée sur ceux qui
23 ont eu cette idée de vous faire endosser ce document, ou bien vous n'en
24 n'avez aucune ?
25 R. Ils sont nombreux. On a falsifié pas mal de documents pour ce qui est
26 de l'affaire Blaskic. Il y a eu beaucoup de services qui se sont mêlés de
27 ça. Je ne pouvais pas rentrer dans les raisons ou dans les détails, enfin
28 les raisons pour me faire traduire devant ce Tribunal pour m'accuser ici.
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1 C'est ça la raison. Du côté des Musulmans, il y avait nombre de ceux qui se
2 réjouissent infiniment. Bien sûr les Croates, ils se réjouissent quand il y
3 a des Musulmans qui sont accusés et les Serbes. Puis les Serbes, ils se
4 réjouissent quand c'est nous. Là, il y a eu pas mal de chose qui ont
5 entouré tout ça, et là je n'ai pas fait ça.
6 Mais au nom de Dieu, le dernier jour comme nous l'avons vu, ça a duré
7 pendant des mois et jamais, quand j'ai assuré ce soi-disant contrôle quand
8 j'étais au front, je n'ai jamais vu des prisonniers en train de crever. Qui
9 que ce soit qui l'a fait me l'a caché, il connaissait bien ma position,
10 elle n'était pas d'hier.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : On va examiner maintenant le deuxième document, le P
12 04131.
13 Mme PINTER : [interprétation] C'est le classeur numéro 1. C'est la liste
14 numéro 1 dans ce classeur qui en porte l'étiquette numéro 1.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Ce n'est pas le bon document en B/C/S qu'on a à
16 l'écran.
17 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons peut-être
18 créé ce malentendu. Ce document nous l'avons retiré de la notification que
19 vous avez demandée quand vous avez demandé quelle est la liste des
20 documents.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, pourquoi vous l'avez retiré,
22 maintenant le document il est vrai ce n'est plus un faux document ?
23 L'INTERPRÈTE : Quel document demande M. Praljak ?
24 R. Quel document ?
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Celui que --
26 M. KOVACIC : [interprétation] Pour des raisons techniques, c'était une
27 erreur technique, un problème de communication au sein de notre équipe.
28 Tout simplement il y avait une erreur de numéro. On n'aurait pas dû mettre
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1 -- inscrire ce numéro sur cette liste. Nous l'avons corrigé dès que nous
2 nous en sommes aperçus.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Passons au document suivant, P 02823.
4 Voilà. C'est un document qui est très court, qui est censé émaner de vous,
5 mais il n'y a pas votre signature, donc on peut penser que ça a été envoyé
6 par paquet à M. Stojic.
7 Alors, Monsieur Praljak, pourquoi ce document du 17 juin 1993 serait un
8 faux ?
9 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, mais je n'aurais jamais
10 écrit "urgent, urgent," je ne suis pas quelqu'un qui panique. Vous avez un
11 document qui se situe à une date proche de mon départ et j'ai dit à Blaskic
12 et aux autres, ne m'écrivez pas urgent, "urgent", "panique," "calmez le
13 jeu," car la situation n'est pas aussi mauvaise que ça. Jamais je n'aurais
14 écrit "urgent, urgent," c'est impossible. J'aurais écrit quand est-ce qu'on
15 verra arriver ce char ou envoyez-le rapidement. Mais "urgent, urgent," ce
16 n'est pas quelque chose que, moi, je ne jamais écrite; je suis certain de
17 cela. Vous pouvez voir cela dans tous mes ordres.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous remarquez que ce document a été enregistré
19 puisqu'il y a le tampon; il a été enregistré le 17 juin, à 8 heures 40, au
20 quartier général.
21 R. Monsieur le Président, il est possible, je ne vais pas me lancer dans
22 des conjectures : qu'est-ce qui se serait passé s'il y avait eu ceci ou
23 cela ? Si j'avais dit à Siljeg si j'étais là, je ne sais pas exactement non
24 plus ce qui se passe à telle ou telle date exactement. Est-ce que j'ai
25 demandé à Siljeg que se passe-t-il, qu'en est-il de ce char et que lui a
26 rédige après. Mais ce n'est pas mon style, je ne suis pas l'auteur de ce
27 texte. Ces changements, au niveau des mots, c'est ce qu'on trouve ailleurs
28 aussi. Ce n'est pas la seule fois qu'on comprenne mal et qu'après on adapte
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1 à son propre style, à sa manière de communiquer, mais là, ce n'est pas ma
2 manière de communiquer. Ça, j'en suis certain. Quant à savoir, je ne peux
3 pas vous en dire beaucoup plus. Je n'ai pas l'idée de ce que c'était, quel
4 char.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Quel aurait été l'intérêt de faire ce faux document,
6 pour aider qui, pour faciliter qui, pour masquer quoi ? Parce que bon que
7 le char soit à Prozor ou à Rama, on ne voit pas de grand intérêt; vous ne
8 voyez pas ?
9 R. Aucune raison, Monsieur le Président; tout simplement les chars doivent
10 arriver. Si j'avais écrit cela, j'aurais dit : "Bruno, qu'en est-il de ces
11 chars ?" Parce que de toute évidence, on a dû recevoir une communication
12 disant qu'ils étaient en train de les préparer parce qu'il y avait tout le
13 temps des pannes. Donc on demande - non pas à Petkovic mais à Stojic -
14 parce que c'est lui qui a la charge de cet atelier, ce garage où on répare.
15 Je ne suis pas hostile à la teneur de ce document. Je vous dis simplement
16 que ce n'est pas mon style. Il n'y a aucune raison, enfin à la différence
17 du document précédent. C'est un faux qui a été créé avec une intention. Là,
18 c'était quelque chose de bénin, et je ne suis pas hostile à ce qu'on
19 demande de char. Tout simplement, je dis que je ne l'aurais pas formulé
20 ainsi.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Regardez ainsi le troisième et dernier document, le
22 P 02280.
23 Ce document n'a pas été admis. Mais indépendamment du fait qu'il n'a pas
24 été admis, essayons de voir pourquoi il y aurait eu un faux. Alors c'est un
25 document qui vient de vous, qui est adressé à Siljeg. Il y a un numéro
26 d'enregistrement et qui détaille quelques données militaires.
27 Alors qu'est-ce que vous dites ?
28 R. Ce document n'a rien à voir avec moi, rien à voir. Ce n'est pas mon
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1 style, ce n'est pas mon écriture. Ce n'est pas ma signature. Je ne sais pas
2 de quoi il s'agit. Ce sont aussi deux écritures différentes. En haut, on a
3 une première écriture, puis une écriture différente en bas. Vous avez vu
4 mon écriture, nous n'avons pas besoin d'expertise graphologique pour ça. Ça
5 n'a aucun lien.
6 Je ne sais pas qui a signé en bas, non plus. Je ne peux rien vous
7 dire de ce document, si ce n'est que ce n'est pas mon style, pas mon
8 écriture et pas ma signature.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous n'avons pas de date sur le document.
10 R. Monsieur le Président Antonetti, Messieurs les Juges, vraiment je ne
11 saurais rien vous dire en plus de ce que je vous ai déjà dit.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Là aussi, quelle est la manœuvre qu'on a voulu faire
13 contre vous ?
14 R. Là, je ne sais pas comment vous répondre. Je ne sais pas qu'est-ce que
15 cela signifie. Il faut détruire tout ce qu'on voit devant soi. Pourquoi il
16 n'y a pas de date ? Je ne peux pas essayer de deviner.
17 Avec l'autre document, je sais ce qu'on cherchait à obtenir, le document du
18 8. On cherchait à démontrer que j'aurais fait soi-disant, fait un certain
19 nombre de choses que je n'ai pas faites. Mais là, je ne vois ni la finalité
20 ni le moment, rien.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, quelques questions de suivi.
22 D'après ce que nous, les Juges, nous avons compris, c'est que les archives
23 du HVO ont été transférées à Zagreb.
24 Donc quand il y a des faux, les faux ont pu être faits avant le transfert
25 ou après le transfert. Si ça a été fait avant le transfert, ça veut dire
26 qu'il y a des participants proches des unités qui ont fait des faux
27 documents. Mais si ça a été fait après le transfert, ça veut dire qu'il y a
28 une opération d'une plus grande envergure, parce qu'il faut rentrer le
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1 document dans les archives de l'Etat de la République de Croatie, donc là,
2 c'est beaucoup plus compliqué.
3 Je sais qu'à un moment donné vous avez travaillé, vous vous êtes occupé des
4 archives. Est-ce que vous pouvez nous dire si d'après vous ça s'est fait
5 avant le transfert ou après le transfert ?
6 R. Monsieur le Président, ce dont dispose la République de Croatie ce
7 n'est pas une archive. Vous appelez cela archive mais malheureusement ce
8 n'est pas une archive.
9 Les documents du HVO ont été laissés en souffrance pendant de longues
10 années, après la guerre, quelque part en Herzégovine, à Grude, à Ljubuski,
11 hors de tout contrôle, premièrement. Ensuite ces documents ont été emmenés
12 me semble-t-il à Split. Là encore, personne n'exerçait de contrôle.
13 Quelqu'un les a chargés à bord d'un camion et les a remis aux archives
14 nationales croates, qui les a réceptionnés et s'est contenté de donner un
15 coup de tampon sur ces documents pour indiquer qu'ils avaient été
16 réceptionnés.
17 Deuxièmement, tout un chacun mais véritablement tout un chacun et vous
18 pouvez le vérifier même, Messieurs les Juges, aujourd'hui, vous pouvez
19 demander à quelqu'un qui appartient au bureau du Procureur de trouver
20 quelqu'un se trouvant à Zagreb de créer un jeu de documents qu'il va
21 confectionner à son gré et qu'il va ensuite emmener aux archives nationales
22 croates, en disant : "Voilà, ce sont des documents que j'avais chez moi."
23 Ces documents vont être réceptionnés recevoir ce coup de tampon, et le
24 lendemain même, vous pouvez vous rendre à ces mêmes archives nationales
25 prendre ces documents et déclarer que vous les avez reçus de la part des
26 archives croates. C'est ainsi que les documents sont apparus là-bas, ont
27 été créés.
28 Ce sont des faits. Les gens se rendaient là-bas à titre privé pour déposer
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1 des documents. C'est pourquoi nous avons sollicité l'avis du directeur
2 d'alors des archives nationales croates afin qu'il nous écrive noir sur
3 blanc exactement comment il s'est procuré ces documents. Il ne s'agit pas
4 de documents d'archives, mais de documents qui ont été réceptionnés par les
5 archives de la part de sujets,alors même qu'entre-temps tout un chacun
6 avait la possibilité d'introduire dans ses archives d'en retirer ce qu'ils
7 voulaient, d'insérer ou de modifier ce qu'ils souhaitaient. C'est un fait
8 notoire.
9 Tous les autres co-accusés dans ce procès le savent, et je crois que
10 c'est M. Kolanovic. C'est son nom, nous avons sa déclaration qui nous dit,
11 la façon dont il réceptionnait des documents pour lesquels on affirme ici
12 qu'ils émanent d'archives et que ce sont des documents des archives de la
13 République de Croatie.
14 Ce sont des papiers, des documents qui se trouvent dans le bâtiment
15 des archives mais ce n'est pas du matériau d'archives.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, vous nous avez indiqué pour quelles
17 raisons il y avait des faux documents. Mais on n'a aucun élément nous
18 permettant d'identifier les auteurs des falsifications.
19 Alors, Général Praljak, maintenant nous allons aborder les problèmes
20 constitutionnels. Mon plan de travail est le suivant : on va d'abord
21 regarder la constitution de l'ex-Yougoslavie, après quoi nous regarderons
22 la constitution de la République de Croatie puis la constitution de la
23 République de Bosnie-Herzégovine, et on terminera par la constitution de la
24 Communauté croate.
25 Alors la constitution de l'ex-Yougoslavie c'est 1D 02976, mais je
26 n'aurais besoin que de la page 1D 60-0579.
27 Voilà. C'est donc les principes de base. Alors, si on pouvait l'avoir
28 en B/C/S.
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1 R. Nous attendons cela, Messieurs les Juges, je vous prie, que l'on confie
2 le document précédent à n'importe lequel graphologue accompagné d'un
3 échantillon de ma propre écriture, afin que l'on établisse ce que l'on voit
4 que cela n'a aucun lien avec -- que je n'ai aucun lien avec ce document.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Général Praljak, dans l'introduction
6 dans cette constitution, il est indiqué qu'il y a un droit pour chaque
7 nation à la "self-détermination," incluant le droit à une sécession. Donc
8 il semblerait que, dans la constitution qui régissait à l'époque toutes les
9 républiques, il était reconnu qu'il pouvait y avoir une autodétermination
10 qui pouvait débouter également sur une séparation, une sécession.
11 Alors ce principe constitutionnel yougoslave, était-il bien compris,
12 accepté par tout le monde ?
13 R. Non, Monsieur le Président, Monsieur les Juges, ce n'était pas accepté
14 par tous. Ce principe est un principe fondamental du Leninisme, à savoir
15 que les peuples -- c'est la doctrine même de Lenin, tous les peuples ont le
16 droit à l'autodétermination, et ce, jusqu'au droit à la sécession à l'égard
17 des autres peuples. Etant donné que ce principe Leninist [phon] était
18 équivalent à un dogme pour les communistes. Il a été inclus dans la
19 constitution de la RSFY et il a été confirmé lors de la session de l'AVNOJ.
20 Il faut bien avoir à l'esprit qu'on est dans les conditions de la
21 Seconde Guerre mondiale et même les partisans étaient divisés. Il y avait
22 l'état-major des partisans de Croatie, des partisans de Serbie, l'état-
23 major des partisans du Kosovo-Metohija. Parallèlement, les communistes
24 étaient persuadés qu'ils avaient résolu la question nationale en adoptant
25 une nouvelle forme d'organisation de la société et que la réalisation de ce
26 droit n'interviendrait jamais, ils ne l'ont pas supprimé. Mais ils
27 pensaient que jamais personne ne chercheraient à le réaliser, à part ce qui
28 concerne la doctrine Brezhnev et la question de la souveraineté limitée,
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1 qui a été introduite après que l'Union soviétique a attaqué la
2 Tchécoslovaquie, mais cela ne concernait pas la Yougoslavie.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Ouvraient-ils de votre point de vue
4 l'indépendance de la République de Croatie vis-à-vis de l'Etat fédéral
5 l'indépendance de la République de Bosnie-Herzégovine vis-à-vis de l'Etat
6 fédéral; est-ce qu'il y avait là un chemin permettant l'accession à
7 l'indépendance et à la reconnaissance de républiques même si le principal
8 était un principal Leninist ?
9 R. Absolument, c'était un droit qui existait. Plus loin - non seulement
10 dans ces premières phrase mais également plus loin dans cette même sous
11 section, ce même point numéro 1 - on parle de cela, on parle des droits
12 souverains, je cite, vers la fin :
13 "Le peuple des travailleurs, et les peuples et nationalités, réalisent et
14 jouissent de leurs droits souverains au sein des républiques socialistes et
15 au sein des régions socialistes autonomes en accord avec leurs droits
16 constitutionnels."
17 Je continue plus loin :
18 "Au sein de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, également
19 lorsque cela se trouve être dans l'intérêt commun établit par la présente
20 constitution."
21 En d'autres termes, la Fédération est l'incarnation d'un intérêt commun qui
22 peut exister mais qui peut aussi ne pas exister. Moi, j'ai encore entouré
23 un certain nombre de points, mais --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ceci est intéressant mais on va progresser
25 comme dit Me Karnavas, "step-by-step."
26 On va passer à l'article 57 dont la page est 1D 60-0639.
27 Voilà dans la version anglaise, ça commence par : "Self-managing."
28 R. Oui, je l'ai trouvé, Monsieur le Juge.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la constitution de l'ex-Yougoslavie, on a
2 l'impression qu'étaient prévus des communautés d'intérêt où des gens
3 pouvaient en quelque sorte s'associer. Alors qu'est-ce que vous en pensez ?
4 Etait-ce cet article, qui pouvait un jour préfigurer une association
5 d'intérêts croates en République de Bosnie-Herzégovine ? Est-ce que, là, il
6 n'y avait pas au travers de cet article l'invitation aux gens a s'autogérer
7 eux-mêmes ?
8 R. C'est exact. La communauté autogérée de l'échelon le plus bas,
9 territorialement parlant, était la communauté locale. Par exemple, à
10 Zagreb, moi, j'étais dans une telle communauté locale qui ne représentait
11 que deux rues et nous étions une communauté locale organisée. Nous avions
12 des droits et des devoirs à la fois, nous pouvions nous associer avec une
13 communauté autogestionnaire d'intérêt d'une rue voisine par exemple. C'est
14 ce que nous avons fait à une occasion pour résoudre la question d'un
15 ruisseau qui nous départageait.
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre
17 permission et dans la mesure où cet article précis vous intéresse si nous
18 pouvons peut-être juste abréger cet article a trait au SIZ
19 qui est l'abrégé de Samuprovna interesna zaenica [phon], donc Communauté
20 autogestionnaire d'intérêt, et je pense que le général va pouvoir nous dire
21 de quoi il s'agit.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est quelque chose
23 d'extrêmement complexe et je crains que malgré -- c'est une théorie du
24 socialisme autogestionnaire qui a été formulée par Kardelj et Suvar qu'on
25 pourrait résumer ainsi. Vous voyez, par exemple, le costume que je porte,
26 il se compose celui qui fabrique le tissu, il se compose du fil, des
27 boutons, de la doublure, et cetera, et tout cela est fabriqué par
28 différentes personnes. A la fin ce que l'on vend c'est un costume, et tous
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1 ces différents fabricants et producteurs vont s'associer au sein d'une
2 communauté autogestionnaire d'intérêt, qui a tous l'intérêt, que soit
3 produit ce costume. Alors maintenant à qui revient, combien d'argent,
4 combien va recevoir d'argent celui qui a produit les boutons --
5 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre. En dépit de
6 l'invitation faite par le conseil pour que le général en fait examine cette
7 voie, je pense que ceci ne répond pas à la question posée par le Président,
8 et ceci est déduit de pertinence.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, ce qui m'intéressait dans cet
10 article 57, c'est l'état d'esprit de cet article qui semble dans l'ex-
11 Yougoslavie inciter les gens à s'associer quand ils ont des communautés
12 d'intérêts, et donc ça peut être des associations diverses. Vous nous avez
13 parlé du fait que dans votre rue, il y avait des associations avec une
14 autre rue. Là, vous donnez un exemple assez compliqué concernant un costume
15 qui peut être fait de plusieurs parties.
16 Moi, l'intérêt que je vois et j'aimerais que vous me donniez votre point de
17 vue, c'est que dans les gènes, dans la mentalité des habitants de l'ex-
18 Yougoslavie, quel qu'ils soient, Croates, Serbes, ou Musulmans, il y avait
19 des gens filigrane le fait qu'ils avaient dans le mens rea dans leur état
20 d'esprit la possibilité qu'un jour ils pourraient s'associer non pas au
21 sein d'un Etat global mais dans des communautés d'intérêts spécifiques
22 comme l'ont fait les Croates. C'est cette espèce de filiation que j'essaie
23 de vérifier et donc je voulais vous demander, Général Praljak : est-ce que
24 cet article ne pouvait pas préfigurer ce que les Croates entre eux allaient
25 faire plus tard à Mostar, Livno, Ravno, et cetera ?
26 R. Non seulement c'était possible mais cela était encouragé, Messieurs les
27 Juges. C'était encouragé sur différentes bases et ce n'est pas pour rien
28 que l'on parvient par exemple à un produit comme ce costume. On voulait
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1 éviter l'économie de marché et on disait aux gens et bien associez-vous
2 même sur des bases territoriales. Par exemple, les SIZ
3 domaine de la culture, du cinéma, et cetera. Je suis très bien au courant
4 de tout cela. Je connais parfaitement.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : On va regarder l'article 59 qui est à la page 1D 60-
6 0640. Tout ça m'a pris énormément de temps mais alors je redis. Oui,
7 attendez mon collègue va vous poser une question.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Aussi longtemps que nous l'avons
9 encore à l'écran, ce qui serait intéressé au dernière alinéa du paragraphe
10 56 qui en fait parle de communautés qui s'autogérent, de communautés de
11 nature territoriale, et si on lit le fait que de telles communautés peuvent
12 être constituées pour une région plus vaste que le territoire d'une
13 commune, ces communautés pourraient être constituées des territoires de
14 plusieurs communes faisant partie de cette communauté d'intérêt qui
15 s'autogére, on pourrait parvenir à la conclusion que c'est exactement ce
16 qu'était l'Herceg-Bosna, la HB, c'est-à-dire qu'Herceg-Bosna était
17 constitutive de la République socialiste fédérale de la Yougoslavie ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exactement tel que vous l'avez formulé,
19 Monsieur le Juge Trechsel. Non seulement on pouvait faire cela mais on
20 demandait qu'il y ait association sur différentes bases afin que
21 l'administration soit plus efficace, que l'on résolve plus efficacement les
22 problèmes qui se présentent, que l'on produise plus efficacement des
23 costumes par exemple. Toutes ces entités, les communautés locales, les
24 municipalités et ainsi de suite, on pouvait -- les municipalités pouvaient
25 s'associer sur toutes questions par exemple la production du tabac, du vin,
26 les compétitions sportives et ainsi de suite.
27 C'était permis. L'association, sur toutes les bases possibles, était
28 permise, associations de communautés locales, de municipalités --
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le même écho, on va regarder l'article 59.
2 C'est 1D 60-0640.
3 Alors, Monsieur Praljak, on a l'impression, en regardant cet article 59,
4 que donc ces communautés d'intérêt peuvent se constituer mais ça dépend
5 d'une assemblée politico sociale qui doit sous certaines conditions de
6 procédure mettre en place des règles, trouver des solutions, et cetera.
7 Est-ce donc quelqu'un ne pouvait pas du jour au lendemain décider : je vais
8 créer une communauté ? Il fallait que ça obéisse à une règle, une
9 procédure; est-ce exact ou pas ?
10 R. C'est exact. Ils enverraient des délégués qui formeraient une
11 assemblée, assemblée qui devait adopter un statut régissant ces activités
12 et précisant le but recherché puis enregistré cela auprès de la Ligue
13 socialiste.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : On va, on va arrêter parce que j'ai un autre article
15 et ça risque de prendre du temps. On verra demain l'article 114 et je vais
16 donner déjà à Monsieur le Greffier le numéro de la page comme ça il nous
17 mettra la page dès demain. C'est la 1D 60-0673. Voilà comme ça on
18 commencera demain après-midi. Donc j'aurai encore quelques articles de la
19 constitution et puis le reste ira assez vite. Mais la constitution
20 yougoslave qui est un véritable monument. J'en ai extrait que quelques
21 articles significatifs. On aurait pu y passer des heures mais j'essaie de
22 prendre ce qui est intéressant par rapport à l'objet de nos préoccupations.
23 Voilà. Donc il est quasiment 19 heures. Je souhaite à tout le monde une
24 bonne fin de soirée. Je vous invite à faire des lectures constitutionnelles
25 cette nuit et nous aurons l'occasion donc d'évoquer cela demain.
26 Merci.
27 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mercredi 17 juin
28 2009, à 14 heures 15.