Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 23 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, appelez le numéro de l'affaire,

  8   s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   Bonjour à tous, Messieurs les Juges.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic et

 12   consorts. Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce mardi 23 juin

 14   2009, je salue en premier M. Praljak. Je salue ensuite M. Pusic, M.

 15   Petkovic et M. Stojic. Je salue Mmes et MM. les avocats ainsi que leurs

 16   collaboratrices qui sont à leurs côtés. Je salue M. Stringer ainsi que ses

 17   collaborateurs et collaboratrices, et toutes les personnes qui nous

 18   assistent.

 19   Je vais donc normalement terminer, aujourd'hui, des questions à M.

 20   Praljak.  

 21   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   Questions de la Cour : [Suite]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : De ce fait, Monsieur Praljak, je vais aborder avec

 25   vous un autre élément que vous avez soulevé, enfin qui a été soulevé dans

 26   le mémoire préalable de la Défense et qui me paraît très important.

 27   Vous avez indiqué que vous excluez la responsabilité du HVO pour les

 28   crimes commis par des groupes indépendants, et vous dites qu'il y avait des

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  1   groupes rebelles ou des criminels qui se présentaient comme des combattants

  2   de la liberté, et agissaient de leur propre chef ne se soumettant pas au

  3   contrôle effectif d'aucun commandement militaire. Donc vous dites, d'après

  4   vous, qu'il y avait des combattants qui n'obéissaient à personne sauf à

  5   eux-mêmes, et que si crime il y a eu, ils leur sont imputables pas au HVO.

  6   Alors pouvez-vous développer cela et donnez des exemples précis ?

  7   R.  C'est exact, Monsieur le Juge Antonetti. Le HVO est une

  8   organisation, et quand on dit, comme on le fait souvent, que le HVO a

  9   commis des crimes, ça veut vouloir dire qu'il y a un crime dans la filière

 10   de commandement. On peut donner des ordres par écrit ou oralement. Il doit

 11   y avoir donc une autorisation, il peut y avoir une autorisation tacite

 12   aussi. Mais ça, il n'y a pas eu au HVO. Il n'y a pas eu cela à quel que

 13   niveau que ce soit; cependant, et hélas, ces situations de guerre, et

 14   notamment de guerre de ce type, je ne vais pas répéter une fois de plus ce

 15   que je vous ai déjà dit à ce sujet. Il y a des individus et des groupes qui

 16   émergent et qui sont aptes à commettre des violations du droit de guerre et

 17   des us et coutumes de guerre.

 18   Alors à l'encontre de ce type d'individus ou de groupe d'individus,

 19   pour autant que je le sache, moi compris, on a tous essayé de voir qui

 20   c'était, déterminer, identifier les individus. Il y en a eu qui ont été

 21   poursuivis en justice. Il y a un nombre non négligeable à avoir été

 22   incarcéré et je maintiens ma thèse, à savoir que le HVO en sa qualité

 23   d'organisation militaire qui commence à partir de Mate Boban, ça passe par

 24   moi et ainsi de suite, jamais nulle part il n'y a eu des ordres ou des

 25   autorisations ou des possibilités de fournies par pensée, parole ou par

 26   omission, qu'il y ait de quelle que façon que ce soit on puisse faire ou

 27   laisser faire quelque chose de contraire aux us et coutumes de guerre.

 28   Malheureusement, je n'ose pas trop élaborer le sujet parce que M. le Juge

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  1   Trechsel va faire objection. Mais la pratique dans une société humaine, et

  2   notamment en cas de guerre, est-elle que crimes il y a; il y a toujours un

  3   certain nombre d'individus ou de groupes qui se passent hors contrôle et

  4   commettent des choses qui ne sont pas admissibles. C'est ce que j'aurais à

  5   dire sur le sujet.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous indiquez également qu'il y avait un désordre

  7   important qui rendait impossible d'instaurer et de maintenir une discipline

  8   ferme et d'exercer un contrôle effectif sur les troupes. Alors si je

  9   comprends bien, vous semblez dire qu'en raison du chaos qui régnait, vous

 10   ne pouviez maintenir une discipline et un contrôle effectif sur les

 11   troupes.

 12   R.  C'est exact. Alors les sociétés diffèrent. Toutes les sociétés de ce

 13   monde diffèrent les unes des autres et justement cela diffère du fait du

 14   degré d'organisation propre car toutes les structures de la société du

 15   pouvoir exécutif, du pouvoir judiciaire, et de l'organisation au total

 16   d'une société de tout ce qui constitue une société il y a des sous

 17   structures par centaines dans une société. Là, je ne veux pas trop

 18   m'étendre mais dans ce type de société la quantité d'individus capables de

 19   commettre des crimes n'est pas petite, et notamment en cas de guerre, plus

 20   particulièrement encore lorsque ces conditions de guerre signifient un

 21   démantèlement total de l'Etat.

 22   Lorsqu'il y a agression ou lorsqu'il s'agit d'éléments de guerre civile ou

 23   d'éléments qui sont venus par la suite de guerre religieuse. Donc lorsque

 24   toute l'organisation d'une société d'un Etat se démantèle, tant le

 25   judiciaire, l'administration, et lorsque l'approvisionnement en eau,

 26   l'électricité, les téléphones, les chemins de fer, la circulation routière,

 27   et je ne vais pas énumérer enfin toutes ces sous structures font défaut, et

 28   on a démontré de façon scientifique et en avançant bon nombre d'exemples

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  1   pour dire que, dans ce type de situation, le nombre d'individus qui sont

  2   décompensés sur le plan moral comme on le dit dans le langage professionnel

  3   s'accroîtra.

  4   Pour être sincère, Messieurs les Juges, lorsque l'on a fait de la

  5   sociologie sociale, de la psychologie sociale en temps de guerre, je

  6   m'attendais à ce qu'on ait même pire. Les efforts que nous avons déployés

  7   ont été dirigés de façon claire et logique vers notre objectif et ces

  8   efforts étaient énormes. Il s'agissait donc de diminuer la quantité de ces

  9   délits mais il eut été illusoire de s'attendre à ce qu'il n'y en ait pas,

 10   personne n'a jamais réussie à le faire. Ça ne veut pas dire donc qu'en

 11   dépit, que ces efforts feront qu'il n'y aura pas d'événements de ce type.

 12   Les choses surviennent de la sorte pour bon nombre de raisons, et l'Etat

 13   mis à part le territoire à contrôler, il faut contrôler aussi le pouvoir et

 14   cela veut sous-entendre des structures sur le plan de la stabilisation.

 15   En Bosnie-Herzégovine en 1992, cela ça n'existe plus, et il y a, à ce

 16   moment-là, un chaos total qui s'installe sur le plan économique, sur le

 17   plan politique et sur le plan socio psychologique. Le nombre des personnes

 18   désespérées, le nombre de personnes qui seront déboussolées ne peut être

 19   que supérieur à ce qui est le cas dans une situation de fonctionnement

 20   normal de l'Etat et c'est ce qui s'est produit. Donc nos efforts, hélas,

 21   n'ont pas toujours portées leurs fruits, mais je maintiens mes allégations,

 22   à savoir que ces efforts ont été déployés au maximum à tout points de vue,

 23   à tout moments.

 24   L'INTERPRÈTE : Vous êtes hors micro, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, pour terminer sur ce plan, vous

 26   dites :

 27   "Le HVO n'était pas une armée à proprement parler. Il faut considérer que

 28   le HVO n'était composé qu'une force -- qu'était qu'une force composée de

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  1   volontaires ne voyant d'autre choix que celui de défendre leur société

  2   contre l'envahisseur."

  3   Alors vous semblez dire que le HVO dans sa composante militaire, ce n'était

  4   pas une armée, c'était des volontaires qui venaient défendre leur société

  5   contre l'envahisseur, et que donc à bien vous suivre c'était on peut peut-

  6   être penser que c'était des civils à qui on avait fourni des armes mais

  7   sans formation, sans encadrement, sans discipline, sans directive. Voilà

  8   c'est ça qui apparaît dans vos écritures. Alors qu'est-ce que vous pouvez

  9   nous dire sur ce thème ?

 10   R.  Bien, Monsieur le Juge Antonetti, Messieurs les Juges, c'est

 11   essentiellement exact ça. Si j'avais fait une analyse comparative du côté

 12   gauche de ma feuille, j'aurais mis ce qui caractérise une armée aménagée,

 13   organisée, quels sont les éléments qui la composent, l'armée américaine,

 14   française, et ainsi de suite. Du côté droit, je pourrais mettre ce qui

 15   était à ce moment à la disposition du HVO. Et en procédant à cette analyse

 16   comparative malheureusement on a abouti à ce qui suit : le HVO était

 17   embryonnaire par rapport à ce qui dans la notion occidentale normale est

 18   considérée comme étant une armée ou étant des armées. Alors si on prend les

 19   éléments immédiats des hommes armés, la plupart d'entre eux a acheté leurs

 20   propres armes, ils portent des uniformes, ils ont unités et les unités

 21   comportent certains éléments propres à l'armée, mais tous les autres

 22   segments, tels que la formation militaire, tel que le contrôle à exercer

 23   depuis le niveau le plus bas, et notamment ce qui est important, c'est le

 24   chef de peloton, c'est le caporal dans l'armée américaine, c'est le

 25   sergent, puis il faut que vous ayez une organisation d'édifier du point de

 26   vue des sanctions. Puis vous avez des réserves; s'il y en a un qui n'est

 27   pas bon, vous pouvez le remplacer par quelqu'un d'autre qui a suivi une

 28   formation qui a fait des écoles, donc on peut procéder à une sélection

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  1   positive. Or, nous, on n'a pas tout cela. Il n'y a pas de remplaçants ce

  2   sont des gens qui sont portés volontaires --

  3   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre,

  4   Monsieur Praljak, mais je pense que c'est important. La question qui vient

  5   de vous être posée par M. le Juge Antonetti est absolument essentielle.

  6   C'est une question qui porte sur la nature même de l'armée, de cette armée.

  7   Vous serez d'accord pour dire que cette armée était une armée de

  8   volontaires, et donc qu'elle ne possédait pas les éléments essentiels d'une

  9   armée professionnelle. Mais si je me souviens bien, le HVO et le

 10   gouvernement se sont toujours référés aux lois et aux législations

 11   existantes qui avaient été héritées de l'ancienne, des anciennes

 12   républiques de Yougoslavie et vous appliquiez ces lois et ces règlements. 

 13   Vous avez dit, par exemple, un moment que vous étiez en faveur d'une

 14   conscription des étudiants venant des universités, parce que selon vous ils

 15   devaient faire leur service national, et cetera, et cetera, et d'ailleurs

 16   vous aviez appelé sous les drapeaux les citoyens musulmans ou des Bosniens,

 17   à cause des règlements existant à propos du service national obligatoire,

 18   de ce fait, ils appartenaient donc à la TO, et cetera.

 19   Donc voici ma question : d'après vous, cette armée était-elle vraiment une

 20   armée de volontaires qui accueillait ceux qui voulaient combattre ? S'ils

 21   ne voulaient pas combattre, ils pouvaient rester chez eux ? Ou était-ce une

 22   véritable structure militaire organisée -- véritable force militaire qui a

 23   combattu pendant au moins deux années de ce conflit ? Merci.

 24   R.  Monsieur le Juge Prandler, c'est justement ce que je souhaite faire,

 25   mais, hélas, ils ne nous aient pas possible de simplifier les choses en de

 26   ça du seuil de compréhensibilité. Il y avait des lois, mais la substance de

 27   la loi c'est sa réalisabilité, comment la réaliser, comment la mettre en

 28   œuvre. On a hérité des lois, et on a fait que copier, on a dit : bon, c'est

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  1   la loi, et maintenant vient la tâche plus difficile, celle de l'appliquer.

  2   C'est ce qui correspond à la vérité. Tout un chacun à partir du territoire

  3   - et là, je parle de l'Herceg-Bosna - pouvait quitter ce territoire de

  4   l'Herzégovine, ou de l'Herceg-Bosna, et aller dans un pays tiers sans que

  5   vous n'ayez la possibilité de le punir ni de le faire revenir d'ailleurs

  6   mais vous ne pouviez pas non plus le sanctionner. Si les choses sont

  7   telles, et elles étaient ainsi, ceux qui sont restés, d'après ma définition

  8   à moi, sont restés de leur plein gré.

  9   Cet ensemble se subdivise en deux sous ensembles, à savoir : ceux qui sont

 10   tout à fait venus -- enfin venus à titre tout à fait volontaire et ceux que

 11   vous avez appelés sous les drapeaux en application de la mobilisation. Or,

 12   ceux, que vous avez fait mobiliser, pouvaient répondre présents à l'appel,

 13   et pouvaient ne pas le faire. La police militaire, ces derniers, est allé

 14   les chercher, souhaite ils refusaient de venir, vous aviez eu des cas où

 15   toute l'unité a refusé d'aller prendre telle position, pour des

 16   explications les plus variées. Avec cette unité, vous alliez négocier, vous

 17   entretenir avec. Alors quand vous vous entretenez avec des soldats à titre

 18   parlementaire, Oui, allez-y les gars, il faut, et cetera, ce ne sont pas

 19   des éléments d'armée dont nous parlons.

 20   C'est donc de façon exacte et précise que je vous ai relaté la chose : ils

 21   pouvaient y aller; et ils y avaient ceux qui allaient de leur plein gré; et

 22   il y avait ceux sous ensemble qui restaient sur le territoire de la Bosnie-

 23   Herzégovine mais qui n'ont pas répondu présent à l'appel, à la

 24   mobilisation. Quand il y en a trois qui ne viennent pas, vous pouvez

 25   éventuellement les faire chercher à des adresses données, mais quand il y

 26   en a 200 qui ne se présentent pas, alors vous n'avez aucun moyen effectif

 27   de faire en sorte que 200 bonhommes soient ramenés, il suffit qu'ils

 28   aillent dans une autre maison dans un autre village et vous n'êtes plus

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  1   capable de le retrouver.

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Praljak.

  3   Ça suffit.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous indiquez également que vous

  5   contestez l'existence d'un conflit armé international; je n'entre pas dans

  6   les problèmes juridiques, qui seront développés dans des écritures finales

  7   de vos avocats, mais simplement concernant le contrôle global et les faits

  8   précis sur le contrôle global; qu'avez-vous à nous dire à votre niveau ?

  9   R.  Je ne sais pas, peut-être vais-je sauter les implications juridiques,

 10   mais un conflit armé au niveau international, ça commence par une

 11   déclaration de guerre d'un Etat à un autre. Mais prenons, par exemple, la

 12   relation qui s'est installée entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. La

 13   Croatie a reconnu l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Elle avait son

 14   ambassadeur là-bas. La Bosnie-Herzégovine avait son ambassadeur à Zagreb.

 15   Il y avait des sessions du gouvernement qui avaient lieu à Zagreb. Il y

 16   avait des missions militaires en Croatie, les antennes militaires. Mais

 17   l'armée croate n'est pas allée faire la guerre en Bosnie-Herzégovine. C'est

 18   des volontaires qui sont allés.

 19   D'autre part, la Croatie a aidé les forces armées de la Bosnie-Herzégovine,

 20   l'ABiH et le HVO, afin que ceux-ci puissent se défendre contre l'agression;

 21   d'autre part, en appli du droit, si vous la considérez comme telle, et là,

 22   on en arrive à un absurde mais la Bosnie-Herzégovine a agressé la Croatie

 23   parce que, depuis le territoire de la Bosnie-Herzégovine, il y a des

 24   effectifs qui sont attaqués à la Croatie pendant toute la durée de la

 25   guerre.

 26   Monsieur le Juge, moi, je maintiens les positions que je vous ai déjà

 27   présentées, en ex-Yougoslavie, le début de la guerre et l'évolution de

 28   cette guerre se sont faits en raison des idées politiques de la direction

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  1   politique serbe, ou à savoir des Serbes, au terme de quoi ils étaient

  2   propriétaires d'une partie de la Yougoslavie telle que je vous l'ai montré

  3   une dizaine de fois déjà, et ça c'est de l'agression. Tout le reste c'est

  4   de la défense, visant à faire en sorte que ce plan ne se réalise pas, tant

  5   qu'en Croatie qu'en Bosnie-Herzégovine, et moi, je ne vois là aucun conflit

  6   international en matière de guerre entre la Croatie et la Bosnie-

  7   Herzégovine.

  8   D'abord je vois la défense des Croates à l'égard des Serbes et, ensuite

  9   malheureusement, à un moment donné et sur un territoire déterminé de la

 10   Bosnie-Herzégovine il y a eu une défense de ces Croates vis-à-vis de l'ABiH

 11   qui s'était dit qu'ils pouvaient résoudre certains de leurs problèmes,

 12   notamment parce qu'ils n'avaient pas suffisamment de force et suffisamment

 13   d'idée pour ce qui est donc de s'attaquer aux Serbes. M. le Juge Antonetti

 14  a déjà probablement dû voir que ni la 7e ni la 17e Musulmane ne sont battues

 15   contre les Serbes ni pour débloquer Sarajevo ni pour autre chose. Donc je

 16   ne serais pas d'accord avec vous pour dire qu'il y aurait eu un conflit de

 17   guerre international sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, du moins

 18   pour ce qui concerne la Croatie et la Bosnie-Herzégovine.

 19   De là, à savoir comment cela va être caractérisé du point de vue des

 20   conquêtes serbes de territoire et du point de vue de leur souhait de créer

 21   une Grande-Serbie, sur la ligne Karlobag-Karlovac-Virovitica, ça je laisse

 22   au bon soin des Juges. La Croatie, elle s'est défendue. Le HVO s'est

 23   défendu.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre mémoire, vous abordez la question de

 25   l'entreprise criminelle commune. On a énormément parlé. En termes généraux,

 26   vous rejetez cette notion en disant qu'elle est fondée sur des

 27   insinuations, des rumeurs et une interprétation fautive des événements.

 28   Vous contestez les arguments de l'Accusation de manière synthétique et je

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  1   vais les rappeler, il me permettra de mieux comprendre votre position.

  2   Alors c'est à la page 40  de votre mémoire préalable, vous dites :

  3   Une mauvaise interprétation de plusieurs déclarations ou discours ou

  4   articles du président Tudjman, qui selon vous, ont été entièrement sorti de

  5   leur contexte et qui pourraient donner lieu à d'autres interprétations.

  6   Vous évoquez également le prétendu projet de créer une Banovina. Vous

  7   indiquez également les vues historiques et ou politiques attribuées au

  8   président Tudjman. Vous dites également qu'il y a eu une interprétation

  9   erronée de la politique adoptée par la Croatie concernant ces

 10   ressortissants résidant à l'étranger et vous dites :

 11   Il est impossible ou du moins très improbable que pas un seul document

 12   officiel ne vienne étayer directement ou indirectement la thèse de

 13   l'Accusation selon laquelle la République de Croatie aurait eu des visées

 14   secrètes sur la Bosnie-Herzégovine; ou qu'elle y serait intervenue à des

 15   fins illégales.

 16   Vous concluez, en disant, si ce que l'Accusation affirme est vrai, il

 17   devrait exister une décision officielle du président, du parlement, du

 18   gouvernement, du premier ministre ou de toute autre institution de l'état

 19   croate. Or, il n'y en a pas. Alors pouvez-vous compléter ce qui est écrit.

 20   R.  Je pense en avoir parlé plus de dix fois devant cette Chambre.

 21   J'affirme et cette affirmation est sans équivoque. Il n'y a pas ne serait-

 22   ce qu'un embryon d'entreprise criminelle commune, pas même un embryon de

 23   celle-ci ou une volonté, une pensée visant à le réaliser. Pour ce qui est

 24   d'une quelconque Banovina, qui viendrait être quelque chose au titre

 25   d'élément suppléent à cette zone de territoire ou de municipalité où les

 26   Croates étaient en majorité absolue ou relative dans la Bosnie-Herzégovine

 27   pour aller s'annexer ces territoires à la Croatie, jamais personne n'a

 28   envisagé telle chose. Il n'en a pas, jamais personne n'en a parlé, jamais

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  1   personne ne l'a fait.

  2   Tout ce que nous avons entendu dire ici devant ce Tribunal, pour ce

  3   qui est des signatures de traités internationaux, pour ce qui est des

  4   référendums qui se sont tenus, pour ce qui est de la reconnaissance de la

  5   Bosnie-Herzégovine, pour ce qui est de l'armement des troupes de la Bosnie-

  6   Herzégovine, puis des réfugiés, de l'éducation, des Unités de l'ABiH qui

  7   ont été créées en Croatie pour aller se battre en Bosnie-Herzégovine, pour

  8   ce qui est de l'assistance apportée en matière de sport, pour ce qui est

  9   des soins dispensés aux blessés, pour ce qui est des centres que l'ABiH

 10   avait à sa disposition sur le territoire de la Croatie, Split, Samobor,

 11   Zagreb et ainsi de suite, tout cela est à tel point contraire ou opposé à

 12   cette thèse fondamentale de l'entreprise criminelle commune que j'ai

 13   l'impression qu'il serait plus facile de prouver qu'il n'y a pas

 14   d'entreprise criminelle commune que de convaincre que quelqu'un de l'un

 15   plus un égal deux.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors à l'appui de votre thèse, vous dites que

 17   c'est la Bosnie-Herzégovine qui a attaqué la République de Croatie. Alors

 18   vous dites que des Unités de la JNA, soutenues par les Serbes de Bosnie,

 19   ont directement ou indirectement continué leur attaque contre le territoire

 20   croate depuis le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Vous rajoutez que la

 21   République de Croatie a donc déployé ses troupes en Bosnie-Herzégovine pour

 22   défendre son territoire, et donc de soutenir le HVO qui était la seule

 23   force capable de bloquer l'avance des forces de la JNA et des Serbes de

 24   Bosnie. Pour appuyer cela, vous expliquez c'est au paragraphe 77 de vos

 25   écritures que la République de Croatie a déployé une nouvelle stratégie de

 26   défense militaire dans le sud. C'est la région côtière qui va de Split à

 27   Dubrovnik.

 28   Vous dites, à titre d'exemple, qu'en été 1992, un bataillon de

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  1   l'armée croate composée de 159 combattants, sous le commandement de M.

  2   Krsticevic, a pris position près de la ville de Citluk, pour empêcher les

  3   Unités de la JNA et de la VRS d'avancer vers Split. Vous dites que cette

  4   action a apporté ses fruits et la progression de la JNA a été arrêtée, et

  5   puis vous rajouter quelque chose d'autre; vous dites qu'au même moment, le

  6   général Bobetko a lancé, lui, une offensive sur Bisce Polje, qui est en

  7   Bosnie-Herzégovine, avec un bataillon, mais à l'issue de l'état-major de

  8   l'armée croate et sans son autorisation, et que l'attaque menée par ce

  9   bataillon s'est soldée par un échec complet.

 10   Alors en réfléchissant à ce que vous écrivez, j'ai l'impression que

 11   vous dites que vous ne contestez pas que l'armée croate, à un certain

 12   moment, a pénétré en République de Bosnie-Herzégovine, et là, vous citez

 13   deux exemples, mais c'était dans le cadre d'une stratégie qui visait à

 14   bloquer l'avance des Serbes et non pas, si je comprends bien, apporter une

 15   atteinte directe aux Musulmans. Alors pouvez-vous expliciter cela ?

 16   R.  Oui, Monsieur le Président. Il s'agit du 10 avril 1992, le moment

 17   où une petite unité de 159 hommes est arrivée pour apporter son aide, afin

 18   de mettre un terme -- d'arrêter la mise en œuvre des plans dont j'ai ici eu

 19   l'occasion de parler en me fondant sur des ouvrages de généraux de la JNA,

 20   des plans tout à fait clairs dont nous avions tous connaissance, donc la

 21   prise de Split, de Zadar, et ainsi de suite. Ces hommes sont restés là-bas

 22   peut-être un mois et demi. Par conséquent, ce n'est que lorsque le re-

 23   complètement a atteint un niveau quelque peu satisfaisant qu'ils sont

 24   partis. Il n'y avait aucun conflit, il s'agissait de défendre également les

 25   Musulmans et non pas uniquement les Croates, c'était une défense visant à

 26   éviter que l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine ne tombe entre les mains de

 27   la JNA et de la VRS. Vous avez eu l'occasion de voir toute une série de

 28   plans qui étaient ceux de la JNA. Par ailleurs, je peux vous en apporter

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  1   autant que vous le souhaitez, et des officiers musulmans, eux aussi, ont

  2   écrit à ce sujet, qu'ils se sont trouvés au sein de la JNA. Je vous ai

  3   montré d'ailleurs quelle étant la nature de ces différents plans. Quant à

  4   cette petite unité aux mois d'avril, mai, et me semble-t-il, jusqu'au début

  5   du mois de juin, elle est venu en aide au HVO pour la défense le long d'un

  6   axe qui menait à Split, à Makarska et Split. Alors vous avez pu également

  7   voir dans les documents cet instant où Franjo Tudjman dit non à Dubrovnik;

  8   à partir de Dubrovnik nous ne nous engageons pas dans une conquête de la

  9   Bosnie-Herzégovine. C'est là le seul problème à vrai dire; j'ai déjà

 10   expliqué du point de vue du droit de la guerre.

 11   Si vous êtes attaqué, si quelqu'un attaque Dubrovnik et le détruit ainsi

 12   que cela a été le cas, si toute la zone au sud de Dubrovnik est occupée, et

 13   ce, à partir des territoires de la Bosnie, dans ce cas-là, si l'on observe

 14   les choses du point de vue des Etats et de leurs territoires, d'un point de

 15   vue uniquement territorial, car personne évidemment à partir de Sarajevo ne

 16   contrôle cette zone occupée. Mais vous êtes dans cette situation-là,

 17   disons, on vous attaque militairement, on vous tue, et le droit de la

 18   guerre vous dit que vous avez le droit de vous défendre et de passer sur le

 19   territoire à partir de laquelle on vous tire dessus et on vous tue. Je vous

 20   ai montré des exemples venant de la Seconde Guerre mondiale.

 21   Cela va de soi. La Croatie n'a pas pénétré sur ce territoire du sud

 22   et mis à part le cas de quelques petites unités, il n'y a jamais eu cela

 23   sauf aux fins de la défense de son propre territoire. Je peux vous montrer

 24   pendant des heures et des heures de nombreux documents montrant la façon

 25   dont il a été procédé à la destruction et à l'attaque ainsi que le nombre

 26   de personnes qui ont été tuées. Il s'agit d'une agression contre la Croatie

 27   d'un agresseur qui n'a absolument pas cure de savoir s'il s'agit de la

 28   Bosnie-Herzégovine ou de la Serbie mais il attaque le sud de la Croatie, le

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  1   nord, l'ouest, ou partout où c'est possible.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce mémoire préalable que vous aviez adressé à

  3   l'époque, vous abordiez le point suivant, en disant que c'était les

  4   autorités de Sarajevo et la stratégie de l'ABiH, qui étaient à l'origine du

  5   conflit entre Musulmans et Croates, et vous précisez, en disant que les

  6   autorités de Bosnie-Herzégovine ne cherchaient une solution acceptable que

  7   pour les Musulmans - j'insiste sur le mot "pour" les Musulmans, c'est ce

  8   que vous dites - et donc, en disant ça, vous excluez la prise en compte des

  9   intérêts des Croates, et vous dites :

 10   "Quand les autorités de Sarajevo se sont rendues compte que le territoire

 11   serait divisé en fonction des victoires militaires lors des pourparlers de

 12   paix, c'est alors pour vous que l'ABiH a attaqué pour prendre le contrôle

 13   de territoires qui jusque là étaient contrôlés par le HVO."

 14   Donc vous incombez la responsabilité de tout ce qui s'est passé aux

 15   autorités de Sarajevo qui, d'après vous, lorsqu'elles ont vu que dans les

 16   négociations de Genève, il allait être prise en compte la question des

 17   territoires, les zones 3, 8, 10, et cetera, à ce moment-là, l'ABiH a fait

 18   ces attaques pour avoir le plus de territoires possibles.

 19   Il y a une erreur au transcript. J'avais dit 3 et pas 2; 3, 8 et 10.

 20   Et que donc ils ont fait des attaques pour avoir le plus de

 21   territoires possibles. Donc vous expliquez si je comprends bien que,

 22   contrairement à la thèse de l'Accusation, les attaquants c'est les

 23   autorités de Sarajevo et l'ABiH qui n'avaient qu'un seul but, c'était de

 24   défendre l'intérêt des Musulmans et de prendre le maximum de territoires

 25   possibles. Alors est-ce que vous pouvez expliciter cela ?

 26   R.  Oui, c'est ce que j'affirme. Je l'affirme parce que cela découle des

 27   faits suivants, à savoir que M. Izetbegovic et la direction du parti à la

 28   tête duquel il se trouvait a eu des objectifs qui étaient clairs dès le

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  1   début avec la Ligue patriotique qui était définie comme une organisation

  2   visant à la défense du peuple musulman. Il a procédé en fait à une forme de

  3   coup d'Etat ensuite car il n'a pas permis son propre remplacement après son

  4   mandat -- à la fin de son mandat qui durait deux ans, comme cela a été

  5   prévu au terme de la constitution. J'affirme qu'à aucun moment à partir du

  6   début de la guerre et au-delà, il n'a proposé une solution visant à

  7   organiser la Bosnie-Herzégovine sur le plan intérieur.

  8   J'affirme que, donc sur la base des entretiens qui ont été tenus avec lui,

  9   qu'il s'agisse de cet accord historique qu'il a essayé de passer avec les

 10   Serbes, et ceci semble inclure les Croates dans ces négociations, qu'il

 11   s'agisse ultérieurement de la position qui était la leur selon laquelle il

 12   fallait laisser les Croates et les Serbes se vider de leur sang pour

 13   qu'ensuite eux puissent subsister et jouer en final. J'affirme qu'il a

 14   signé tous ces accords internationaux pour ceux qui la signait en tout cas

 15   et que chaque fois ensuite il a changé d'avis, j'affirme qu'il a signé le

 16   plan Cutileiro uniquement afin que les Croates se présentent au référendum

 17   et que lui puisse obtenir un Etat qui pourrait ensuite être présenté à

 18   l'occident sous un jour complètement trompeur complètement différent de ce

 19   qu'il était en réalité.

 20   J'affirme que, malheureusement, les médiateurs et les négociateurs

 21   internationaux ont adapté leurs propositions de solution, de résolution du

 22   conflit en Bosnie-Herzégovine à la situation des conquêtes sur le terrain.

 23   C'est ainsi qu'ils ont fait des concessions aux Serbes et concédé aux

 24   Serbes jusque pratiquement à la fin, jusqu'à Srebrenica. Bien sûr, lorsque

 25   la direction et Alija Izetbegovic ont vu, ont compris que, dans le cadre de

 26   ces négociations internationales, on tenait compte de la situation

 27   militaire sur le terrain, l'ABiH s'est tournée en 1993, et dès la fin mars,

 28   en direction des territoires, qui à l'époque étaient soit sous le contrôle

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  1   du HVO, soit sous un contrôle conjoint comme à Konjic et à Travnik pour

  2   conquérir ces territoires. Vous avez pu lire sous la plume de M. Sefer

  3   Halilovic la déclaration selon laquelle il s'agissait de la première grande

  4   offensive que nous menions -- que nous menons."

  5   Alors, Messieurs les Juges, je vous en prie, si cette armée dont lui

  6   affirme qu'elle compte 250 000 hommes, et ce, à -- si cette armée mène sa

  7   première grande offensive contre le HVO contre le HVO en mars 1993, alors

  8   qu'il y a des attaques par les Serbes depuis avril 1992 et que cette même

  9   armée n'a pas levé le blocage de Sarajevo, n'a pas coupé le corridor, n'a

 10   pas engagé d'offensive contre en direction de Gorazde ou de Srebrenica,

 11   alors j'affirme qu'en réalité, l'ABiH s'est livrée à des attaques contre

 12   les territoires où les Croates étaient majoritaires de façon relative ou

 13   absolu. En 1993, c'était tout à fait clair sans l'ombre d'un doute.

 14   J'affirme également que nous avons réussi à nous défendre mais qu'il s'en

 15   ait fallu de véritablement très peu.

 16   J'affirme également qu'à l'inverse de ce qu'affirme le Procureur,

 17   dans les municipalités de Novi Travnik, de Vitez, de Busovaca, de Kiseljak

 18   et de Kresevo, en Bosnie centrale donc, se trouvent selon le recensement de

 19   1991 et en totalité 51 140 habitants, c'est cette partie de la Bosnie

 20   centrale correspondante aux deux enclaves qui avaient subsisté.

 21   Si, parallèlement, Monsieur le Juge, vous voulez bien prendre en

 22   compte le fait qu'un certain nombre de personnes ont déjà fui pendant la

 23   guerre, et que vous voyez qu'à partir de ce chiffre de 51 140, on a réussi

 24   à effectuer la mobilisation de cette proportion incroyable de 15 % de la

 25   population, c'est un chiffre tout à fait incroyable, vous obtenez peut-être

 26   quelque chose comme 7 500 soldats qui, à ce moment-là, sont déjà séparés du

 27   HVO, par une distance d'au moins 100 kilomètres, ils sont au sud. Comment

 28   est-il possible qu'ils se lancent dans l'attaque de deux corps d'armée de

Page 41825

  1   l'ABiH comptant 80 à 90 000 hommes ? Les parties du 1er, du 2e, du 3e Corps

  2   d'armée car le nombre de Musulmans qui se sont installés dans ces

  3   territoires est à peu près équivalent au nombre total de Croates

  4   correspondant à ce recensement de 1991.

  5   Malheureusement, ceux, qui travaillaient à la propagande lors de

  6   cette guerre et qui pour -- ils le faisaient pour des raisons qui -- ils le

  7   faisaient pour des raisons qui étaient propres à eux, ont essayé de créer

  8   une image complètement fausse de cette guerre. En revanche, d'un point de

  9   vue logique et élémentaire, cela n'a absolument aucun fondement. Il y avait

 10   51 140 personnes qui, pour lesquelles il faut dire qu'ils n'étaient plus

 11   présents pour un grand nombre d'entre eux, car un grand nombre d'entre eux

 12   avaient déjà fui, donc au maximum on peut supposer que cela pouvait

 13   représenter 7 500 soldats -- un si petit nombre de soldats répartis entre

 14   Busovaca, Kiseljak, et ainsi de suite, ne peuvent attaquer personne. Au

 15   mieux ils peuvent se défendre.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais approfondir ce que vous venez de dire.

 17   Les chiffres que vous citez c'est à partir du tableau du recensement de

 18   1991 que vous aviez évoqué hier. Alors si je comprends bien vous citez les

 19   localités de Travnik, Vitez, Busovaca, Kiseljak, et Kresevo, et vous dites

 20   dans cette zone il y a 50 000 Croates grosso modo. Quand on mobilise les

 21   troupes, le ratio de mobilisation c'est 15 %; donc vous dites à tout

 22   casser, maximum, on avait 7 500 soldats. C'est les forces HVO mais

 23   recrutées sur le plan local, face à eux, et vous vous appuyez sur le livre

 24   d'Halilovic et sur d'autres éléments, vous dites, face à cela, il y a de

 25   l'autre côté 90 000 individus, voire même 200 000, si on suit les chiffres

 26   d'Halilovic. Vous dites comment 7 500 personnes peuvent attaquer 90 000 ou

 27   200 000 autres soldats, et ce fait, pour vous, semble établir que ce n'est

 28   pas le HVO qui a attaqué mais les autres. C'est ça votre démonstration, et

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  1   c'est pour ça que vous vouliez utiliser les statistiques du recensement ?

  2   R.  C'est partiellement exact, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez.

  4   R.  Je sais pertinemment que le HVO n'a pas lancé d'attaque. Ce sont des

  5   faits; cependant, si l'on veut disséquer ces faits, on a au premier plan

  6   les faits eux-mêmes. Le HVO n'a pas lancé d'attaque. Mais c'est l'armija

  7   qui procède à une attaque dès le mois d'avril, en expulsant des personnes

  8   via le mont Blasic [phon], et ainsi de suite. Mais alors examinons

  9   également la logique des choses, même si l'on ne disposait pas de ces

 10   données factuelles, basons-nous sur la seule logique.

 11   Si on a 50 000 habitants qui ne sont pas présents soi-dit en passant parce

 12   qu'ils sont devenus moins nombreux, et puis on a la moitié qui sont des

 13   femmes, et puis il y a la partie, la fraction de la population qui a moins

 14   de 17 ans, ceux qui ont plus de 60 ou 65 ans, ceux qui sont malades, et les

 15   15 %, Messieurs les Juges, de ratio de mobilisation, c'est le maximum qu'on

 16   pouvait obtenir donc tout homme de plus de 18 ans étaient -- ça veut dire

 17   que tout homme en bonne santé plus de 18 ans était soldat, et c'est ainsi

 18   que j'en viens à ce chiffre.

 19   De l'autre côté, on a Zenica, on a les brigades de la Krajina, on a

 20   quelques milliers de Moudjahidines dans cette zone, le 2e Corps. Vous étiez

 21   occupé déjà de ces aspects-là, Messieurs les Juges. Alors on ne sait rien

 22   des ordres qui ont été passés, on se sait rien de ce qu'on écrit les

 23   généraux de l'ABiH dans leurs ouvrages, supposons qu'on ne sache rien de

 24   cela, mais d'un point de vue purement logique, en face du côté de l'adverse

 25   on a 80 000 soldats, non pas 250 000 qui seraient l'effectif total de

 26   l'ABiH, mais sur ce territoire-là, on a 80 000 soldats de l'AbiH. Le seul

 27   fait logique de ce rapport de forces nous amène à nous poser la question de

 28   savoir comment ces 80 000 hommes au sein de deux enclaves qui d'un point de

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  1   vue logistique étaient encore disjointes, séparées.

  2   Vous vous rappelez qu'à la mi-1992 ils avaient refusé le passage aux

  3   forces destinées à participer à la défense de Jajce, et l'approvisionnement

  4   était extrêmement difficile, impossible par voie routière et par

  5   hélicoptères il se faisait très difficilement. Et on en arrive à cette

  6   supposition que 7 000 hommes auraient attaqué 80 000 qui se trouvaient dans

  7   ces zones. C'est complètement absurde. Ils les auraient attaqué, et de

  8   surcroît, cela aurait été pour étendre leur propre territoire. C'est

  9   complètement absurde. Les ouvrages du général Alagic et du général

 10   Muslimovic le disent très clairement. C'est écrit noir sur blanc. Nous

 11   avons donné l'ordre d'attaquer et ainsi de suite. Et l'un et l'autre sont

 12   en opposition complète avec la thèse du Procureur.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, avant d'aborder les écritures

 14   que vous avez présentées au mois d'avril, les 124 pages et puis la

 15   cinquante de documents, je voudrais juste faire une petite transition. J'ai

 16   regardé, de manière approfondie, tout votre audition publique dans

 17   l'affaire Naletilic, vous avez -- ça remontre à plus de sept ans. Vous

 18   aviez témoigné les 2, 3, 4, 5 et 8 avril 2002, et rappelez-vous, c'était M.

 19   Scott qui vous avait contre-interrogé à l'époque. Je pense que, dans les

 20   prochains jours, ça sera M. Stringer. J'ai regardé pour voir s'il y avait

 21   des éléments différents de ce que vous avez écrit, de ce qu'on a déjà

 22   entendu ici.

 23   Il y a juste un petit élément différent que j'ai découvert et je

 24   voudrais que vous précisiez cela. Quand vous avez déposé dans l'affaire

 25   Naletilic, vous avez dit que de nombreux actes de guerre avaient été

 26   attribués faussement aux forces du HVO. Alors que, pour vous, seul les

 27   Serbes étaient responsables, et vous avez cité trois faits, destruction des

 28   ponts sur la rivière Neretva, et vous dites -- vous aviez dit, à l'époque,

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  1   que c'est la JNA qui les a détruits à partir du moment où elle a considéré

  2   que la rive gauche de la Neretva lui appartenait. Pour ceux que ça

  3   intéresse, c'est au compte rendu page 9 376. Ensuite vous avez dit que la

  4   destruction du Vieux pont, ça vous l'attribuez à la JNA - et le compte

  5   rendu également page 9 376 - enfin, vous dites que les Serbes ont pilonné

  6   et incendié Mostar - et là, compte rendu, page 9 377.

  7   Alors si je comprends bien, une partie des événements qui se sont

  8   déroulés à Mostar ou aux environs, les ponts, et cetera, ce n'est pas le

  9   HVO, ce sont les Serbes. Alors pouvez-vous détailler cela ?

 10   R.  Messieurs les Juges, j'étais présent sur place à l'époque,

 11   j'étais commandant. Or, une fois les Serbes ont détruit tous les ponts dès

 12   qu'ils ont été chassés du mont Hum, donc quand on a procédé à la libération

 13   de la rive droite de la Neretva, ils ont alors sans doute revu à la baisse

 14   leur plan et ont décidé de rester sur la rive gauche de la Neretva. Alors

 15   si, moi, après cette libération de la rive droite de la Neretva, peut-être

 16   dix ou 15 jours après, je m'engage dans une opération de libération de la

 17   rive gauche de la Neretva, pourquoi le HVO, avec les Musulmans,

 18   procéderaient-ils à la destruction des ponts ? Celui qui détruit les ponts,

 19   c'est celui qui affirme : tu ne passeras plus du côté où je me trouve.

 20   Là encore, non seulement les faits sont parfaitement clairs mais la

 21   logique dont ils procèdent est parfaitement limpide. C'étaient eux qui

 22   détruisaient cette ville. Moi, j'étais à Mostar à l'époque. Ils ont détruit

 23   les ponts et la seule chose à l'époque que je n'ai pas faite, c'est de

 24   diligenter une enquête qui aurait peut-être permis de déterminer comment le

 25   Vieux pont avait été détruit et non pas qui l'avait détruit mais comment.

 26   Il est un fait; cependant, que sur chaque pont qui était praticable en

 27   Yougoslavie, la JNA disposait d'explosifs qui avaient été posés d'avance,

 28   intégrés et pouvaient être activés, déclenchés à distance par signal radio.

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  1   Chacun des ponts qui étaient construits devaient l'être, Messieurs les

  2   Juges, de telle sorte que l'on ménage un emplacement pour y placer des

  3   explosifs afin que ce pont puisse être éventuellement être détruit. C'était

  4   une exigence de la JNA en vue d'une attaque quelle qu'elle soit, émanant du

  5   Pacte de Varsovie ou de l'OTAN.

  6   En quelques jours de façon télécommandée, ils ont procédé à la

  7   destruction de tous les points sur la Neretva, afin que nous ne puissions

  8   pas passer. Selon les informations dont je dispose, ils avaient le même

  9   type d'explosifs sur le vieux pont. Un homme d'ailleurs est mort, et c'est

 10   le Gazette, un journal serbe qui l'a publié, cet homme était censé faire

 11   détoner ces explosifs. Or, le passage que nous avons opéré a été

 12   extrêmement rapide et couronné de succès. Ils ont été très surpris, ils

 13   pourraient probablement -- n'imaginaient-ils même pas que nous oserions

 14   passer la Neretva pour atteindre, pour gagner la rive gauche.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors Général Praljak, je vais maintenant aborder

 16   les 124 pages; rassurez-vous, je ne vais rentrer dans toutes les pages qui

 17   constituent 399 paragraphes. Alors dans ces paragraphes, il y a beaucoup de

 18   paragraphes sur des sujets qu'on a longuement évoqués donc je ne vais pas y

 19   revenir. Mais je vais en prendre quelques-uns afin que vous approfondissiez

 20   ce qui est écrit.

 21   Ainsi au paragraphe 10 mais, là, votre avocat va suivre parce qu'il a ses

 22   écritures sous les yeux. Vous dites que le HVO n'était pas organisé comme

 23   une unique force militaire. Vous évoquez le fait qu'il y avait aussi des

 24   unités municipales, indépendantes. Alors pouvez-vous clarifier cela.

 25   R.  Je ne sais pas comment cela a été exactement rédigé, mais il n'y a pas

 26   eu d'unité municipale indépendante. Il n'y a pas eu donc d'unité municipale

 27   et non plus y a-t-il eu un HVO en tant qu'armée unifiée à partir d'où, on

 28   exécutait les ordres sans discussion, comme on le fait dans les armées.

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  1   Vous avez vu dans l'exemple de Livno et autres. Hélas, Messieurs les Juges,

  2   il y a dans cette logique qu'on qualifie de binaire des réponses oui et

  3   non, la porte est ouverte et fermée, il pleut, il ne pleut pas, et cetera.

  4   Ici, on ne peut pas peindre les choses en noir ou en blanc.

  5   L'influence des municipalités selon les différentes filières quand il

  6   s'agit des unités du HVO, alors dans certaines municipalités cette

  7   influence était trop grande. Il y a partout eu des influences mais des fois

  8   c'était moyen, des fois peu, mais des fois très important, et ça,  ça a

  9   constitué un gros problème dans le commandement. Je vous ai montré toute

 10   une série de documents qui montrent que dans certaines municipalités on

 11   n'obéissait pas tout simplement. Vous donnez un ordre mais ils se sentaient

 12   non concernés.

 13   Deuxièmement, j'ai indiqué qu'il y avait une désobéissance directe et

 14   qu'il y avait aussi toute une série d'astuces, de ruses, de petites ruses

 15   où on ne vous laisse pas faire et vous tombez dans une zone grise. On

 16   n'exécute pas mais vous ne pouvez pas déterminer pourquoi ça n'a pas été

 17   exécuté.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 19   permettez, juste un élément. Vous avez demandé dans votre question,

 20   paragraphe 10, et M. Praljak vous a répondu à la question, en disant que

 21   pendant tout ce temps-là, mais au paragraphe 10, à partir duquel vous êtes

 22   parti, l'on résume une allégation avancée par le général Praljak, disant

 23   que les premières tentatives, visant à établir un commandement intégral au

 24   sein du HVO, n'aient survenu qu'à partir du mois d'avril 1992 et au-delà.

 25   C'est pour cela que le général a répondu comme il l'a dit, puisque vous

 26   n'avez pas donné référence temporelle, donc il a parlé de la période

 27   entière. Or, ici, il y a une séparation, jusqu'en 1992, ça n'existe pas

 28   tout simplement, et c'est au niveau municipal que ça se passe. Le général a

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  1   confirmé, et par la suite, on commence à édifier et là, le général en a

  2   longuement parlé. Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Général Praljak.

  4   R.  Encore un point, Messieurs les Juges. Etant un organisme vivant, tout

  5   un chacun et notamment lorsqu'il fait face à la mort, le récit n'est plus

  6   linéaire. Il y a tout le temps une évolution, après des succès militaires,

  7   il y a eu des avancées. Tout le monde s'attendait à ce que la guerre

  8   finisse, qu'on finirait donc par aboutir à des accords de paix, et puis il

  9   y a une légère débandade. Après la signature du plan Vance-Owen, il y a

 10   même eu démobilisation, diminution du nombre des effectifs. Là, nous sommes

 11   en début 1993, il y a beaucoup de gens qui sont repartis en Allemagne. Ils

 12   ont de la famille parce que chaque maison avait quelqu'un a travaillé en

 13   France, en Allemagne, en Autriche, et les gens s'étaient dit : voilà le

 14   plan Vance-Owen, ça y est démobilisation, ils prenaient leur passeport et

 15   ils allaient voir leurs frères, cousins, que sais-je encore, parce que bon

 16   vous savez ces liens familiaux qui sont très développés chez nous, ils s'en

 17   allaient, ils ne reviennent plus. Alors c'était donc une bagarre permanente

 18   comme si vous aviez une espèce d'élément qui se décompose, c'est comme une

 19   avalanche et on essaie de déblayer l'avalanche pour qu'il n'y ait pas trop

 20   de dégât.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais passer au paragraphe 13 qui peut être

 22   intéressant. Vous expliquez, dans ce paragraphe 13, que vous-même, vous

 23   n'avez donné aucun ordre écrit ou verbal incluant des attaques ou des

 24   persécutions contre les civils dont vous dites : moi, je n'ai jamais donné

 25   un ordre pour attaquer des civils. Puis vous rajouter également, à la fin

 26   du paragraphe, vous dites que tous les ordres du HVO étaient des ordres qui

 27   concernaient strictement la JNA VRS mais que ce n'est qu'à partir du mois

 28   de juin 1993 que ces ordres ont concerné l'ABiH.

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  1   Alors à bien vous comprendre, avant juin 1993, les seuls ordres militaires

  2   concernaient uniquement JNA, VRS, et ce n'est qu'après juin 1993, en

  3   raison, semble-t-il, de la désertion des Musulmans dans les unités du HVO,

  4   qu'à ce moment-là, il y a eu des ordres qui ont été donnés contre l'ABiH;

  5   pouvez-vous confirmer, préciser ?

  6   R.  Voyez-vous, ça c'est l'explication rédigée par les avocats suite à un

  7   entretien avec moi mais ce ne sont pas les informations fournies par moi de

  8   façon directe. Je sais qu'en 1992 et en 1993, il n'y a eu de ma part un

  9   engagement inépuisable pour empêcher potentiellement le conflit risquant de

 10   survenir entre l'ABiH et le HVO. Si les conflits finissaient par éclater

 11   comme à Rama et Vakuf, il s'agissait d'y mettre fin, et pour autant que je

 12   le sache, ce n'est qu'après le 30 juin que le HVO a compris que l'ABiH  --

 13   enfin, si on a compris même avant pour ce qui est de Konjic et autres mais

 14   on avait pensé que ça allait finir par être surmonté.

 15   Mais du fait de la trahison survenue, il est devenu clair que ce ne sont

 16   plus des escarmouches ou des conflits dus à des spécificités de telle ou

 17   telle autre ville, mais qu'il s'agissait d'une agression tout à fait claire

 18   et nette de la part de l'ABiH et j'en ai parlé. C'est là que les ordres

 19   s'agissant de l'ABiH sont donnés mais uniquement à titre défensif du moins

 20   pendant que j'étais commandant du HVO si ce n'est les cas de prise tactique

 21   de Rastani parce que, si je ne prenais pas Rastani, j'allais me faire

 22   écraser sur la rive droite donc il s'agissait de récupérer des côtes

 23   perdues. Ça, oui, mais il n'y a pas eu à quelque moment que ce soit de

 24   façon tout à fait sincère, il n'y était pas possible ni souhaitable

 25   d'attaquer ou de lancer de plans d'attaque ni à Mostar, ni à Vakuf, ni en

 26   Bosnie centrale.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Général Praljak, je vais aborder le paragraphe

 28   15. Je présume que vous l'avez dit que ce sont vos avocats qui ont rédigé

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  1   cela, mais je ne pense pas qu'ils aient rédigé des choses qui vont à

  2   l'encontre de ce que vous leur avez dit et de votre position. Au paragraphe

  3   15, il est dit que vous ne niez pas qu'il y ait eu des crimes qui ont été

  4   commis du côté croate. Mais en ce qui vous concerne, vous dites que ces

  5   crimes n'ont pas été ordonnés explicitement ou implicitement par vous.

  6   Et que la conclusion de ce paragraphe, c'est de dire que ce serait dû à la

  7   situation chaotique de la République de Bosnie-Herzégovine. Bien. Alors,

  8   premièrement, mais vous l'avez déjà dit, est-ce que vous admettez que des

  9   crimes ont été commis côté croate ?

 10   R.  Voyez-vous, Messieurs les Juges, tirons ceci au clair. Mes juristes,

 11   mes conseillers sont bons, je les apprécie, je les respecte; cependant, il

 12   y a toujours, entre mise en forme juridique, c'est une chose, et ma

 13   réflexion à moi, des divergences du moins elles peuvent exister. Je ne suis

 14   ni investigateur, ni juge, moi, et je vous dis ce qui suit : les jugements

 15   en justice, les jugements effectifs donc qui sont en vigueur, rendus par ce

 16   Tribunal et au tribunal de Bosnie-Herzégovine, il y a eu bon nombre

 17   d'individus, de Croates, de condamner pour des choses qu'ils auraient

 18   commises pour des années de prison à purger et la preuve est qu'il y a eu

 19   ce type d'actes ou de délits qui ont été commis. Je ne vais pas affirmer

 20   une chose qui ne relève pas du travail qui serait le mien. Donc j'ai ouï-

 21   dire qu'il s'est produit des choses mais j'affirme à chaque fois qu'il

 22   convient de bien diligenter des enquêtes et conduire les choses jusqu'à un

 23   jugement en vigueur. C'est là qu'on peut dire qu'un nom, un prénom, un tel

 24   croate ou autres a fait telle chose et il a été condamné à purger une peine

 25   de.

 26   Ce que je peux dire, c'est que non seulement je n'ai donné d'ordre par

 27   écrit ou de façon orale, mais là où j'étais. Là, jusqu'où je pouvais avoir

 28   une vue d'ensemble sur ce qui se passait et les informations, ou si là où

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  1   je pouvais émettre des hypothèses concernant la possibilité de voir

  2   quelqu'un commettre telle chose ou telle autre, donc une unité que je

  3   prendrais à assister à la messe, et cetera, donc mon engagement mental,

  4   physique et tout ce que j'ai pu apprendre, c'est -- ça s'est passé je vous

  5   dirais 20 heures par jour de façon non discontinue et j'ai fait en sorte

  6   que ça ne se produise pas. Et si ça s'est produit j'ai fait en sorte que

  7   cela soit su par tout un chacun. Vous avez entendu des exemples, j'ai eu

  8   bon nombre de succès pour ce qui est de mettre un terme à des succès, pour

  9   ramener des gens, pour les sanctionner, pour m'opposer à certaines choses

 10   en personne au risque de me faire tuer moi-même.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais passer au paragraphe 19, où il est dit que

 12   vous avez essayé de trouver une solution pacifique au conflit, que vous

 13   avez essayé de jouer un rôle dans le processus politique et il est dit ceci

 14   ce qui m'a intéressé. Vous dites que vous aviez des contacts avec des

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18   M. KOVACIC : [interprétation] C'est un témoin protégé, protégé en vertu de

 19   l'article 70.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la question que je m'étais posé alors on va

 21   faire une expurgation.

 22   Monsieur le Greffier.

 23   Parce que vos écritures, Maître Kovacic, c'était confidentielles -- non,

 24   c'était publiques et annexes confidentiels. Donc je me suis dit le nom

 25   devait être public, mais vous avez bien fait de dire que ça sera, il

 26   bénéficiera de mesures de protection donc on va expurger.

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)

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  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Ma question était large. Mais essayez de préciser de

  8   quel conflit il s'agit, de quelle période. Essayez d'être précis, parce que

  9   le paragraphe, lui, n'est absolument pas précis donc le Procureur aimerait

 10   - moi aussi - savoir exactement quel conflit, qui, quand, comment.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je pense qu'il y a ici un

 12   petit court-circuit. Peut-être serait-il préférable de déterminer avec plus

 13   de précision à l'attention de M. Praljak de quoi il s'agit, parce qu'ici,

 14   il a été indiqué que Praljak allait témoigner et qu'on aurait cru

 15   comprendre qu'il avait coopérer avec toute personne pouvant jouer un rôle

 16   dans le processus politique visant à une solution pacifique. Donc c'est un

 17   cadre. Je vais coopérer avec tout le monde, et puis après, on a approfondi

 18   dans le détail, on rentre dans le détail. C'est la raison pour laquelle il

 19   n'a pas été question d'un conflit concret ou d'une période concrète.

 20   C'était une pensée générale, une approche générale.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me propose de vous étoffer mon propos. En

 22   ma qualité de ministre assistant du ministre adjoint Zagreb, j'ai contacté

 23   - et c'est une chose que vous avez pu voir dans bon nombre de documents -

 24   j'ai contacté des ambassadeurs, des attachés militaires, des ambassades,

 25   enfin des dizaines et dizaines de réunions ou de rencontres de ce type, et

 26   s'agissant de ce monsieur qui se trouvait être l'attaché militaire d'une

 27   grande puissance. A partir du moment où il est arrivé jusqu'au moment où il

 28   est reparti, on lui a fourni la possibilité de venir chez moi quand bon lui

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  1   semblait, et demandait tout ce qu'il voulait demander. Je lui fournissais

  2   la possibilité d'aller vers le terrain où il voulait quand il voulait, et

  3   il le faisait. A plusieurs reprises il est allé en Bosnie-Herzégovine pour

  4   inspecter les positions. L'objectif poursuivi était toujours le même.

  5   Tenez, voilà les faits, et la vérité nous concernant, on voit du blanc

  6   c'est du blanc, on voit du gris c'est du gris, on voit du noir c'est du

  7   noir. Personne jamais n'a dissimulé quoi que ce soit ni à l'attention des

  8   journalistes ni à l'attention de cet homme.

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 17  (expurgé)

 18   Je vais passer à huis clos. Monsieur le Greffier, on va passer à huis clos.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 20   partiel.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 41838-41840 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : En audience publique, c'est maintenant quasiment

  7   l'heure de la pause. Je demanderais à M. le Greffier, pour tout à l'heure,

  8   de faire venir le document suivant, le P 04260. Voilà donc on va commencer

  9   après à regarder tous les documents.

 10   Bien, nous faisons une pause de 20 minutes.

 11   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 12   --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors l'audience est reprise.

 14   On a un document à l'écran. Au paragraphe 23 de vos écritures et au

 15   paragraphe 25, on verra tout à l'heure, vous parlez de la question du

 16   travail forcé. Vous dites au paragraphe 23 que vous aviez fait un ordre

 17   demandant donc le retrait des prisonniers qui avaient été donc placés dans

 18   des endroits où ils n'auraient pas dû être. Alors quel est votre

 19   commentaire sur ce document ?

 20   R.  Messieurs les Juges, je ne disposais d'aucune information quelle soit

 21   de nature écrite ou quelle procède de ma propre expérience sur le terrain.

 22   J'ai été sur les lignes de front bien des fois, j'avais aucune information

 23   indiquant que quelqu'un aurait emmené des prisonniers là où ils n'étaient

 24   pas censés se trouver.

 25   Le présent document a été rédigé en se fondant sur des informations de

 26   Zarko Tole, le chef d'état-major qui, un jour avant, donc le 16 d'août,

 27   avait probablement été informé, alors je ne sais par qui, par Bozic ou

 28   quelqu'un d'autre, informé donc de l'existence de cas où certaines

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  1   personnes emmenaient des prisonniers afin de les faire travailler. Donc, en

  2   me basant sur cette information-là, je ne disposais d'aucune autre

  3   information que celle-là, j'ai émis cet ordre. Il me semble que c'est trois

  4   ou quatre jours plus tard après être revenu à Grude, alors que ce document-

  5   ci je l'ai rédigé à Rama, donc c'est une fois rentré à Grude que j'ai émis

  6   un ordre général adressé à toutes les brigades ou leurs commandants, et aux

  7   commandants de zones opérationnelles, ordre interdisant ce type de

  8   pratique, donc dans cet ordre j'établissais clairement que tout cela était

  9   interdit et je leur ai même interdit d'emmener les prisonniers où que ce

 10   soit même pour leur faire effectuer des travaux qui étaient autorisés

 11   normalement.

 12   Pour ce qui concerne ce que j'ai dit oralement ou à mes commandants, bon,

 13   ce n'est pas ici le lieu de répéter et de citer cela, mot pour mot. C'était

 14   un discours assez véhément que j'ai tenu, et lorsque j'ai demandé qui avait

 15   ça, personne ne répondait, bien sûr. Mes questions étaient de savoir qui,

 16   où et quand on avait procédé à ce genre de chose, et personne ne m'a

 17   répondu.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Passons à un autre document qu'on a déjà vu parce

 19   que je vous ai longuement posé des questions mais pour mettre ce document

 20   en perspective avec le premier document. C'est le P 06937. Voilà. Alors,

 21   Général Praljak, vous avez la version B/C/S puis la version anglaise. Bon.

 22   Dans la version en B/C/S, il y a en dessous votre nom. Bon. C'est le

 23   document où vous dites qu'il n'a pas été signé par vous et fait le 8

 24   novembre 1993. Au paragraphe 24 de vos écritures, vous dites que vous

 25   n'avez jamais signé ce document. Bon, vous confirmez cela ? Vous l'avez

 26   déjà dit.

 27   R.  Oui, Messieurs les Juges. Le 8 novembre, je n'étais pas à Grude, à

 28   Citluk, pardon. Avant, pas avant 22 heures 31, premièrement.

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  1   Deuxièmement, ce n'est pas la façon dont j'appose ma signature sur

  2   des documents, regardez des centaines d'autres documents qui sont

  3   disponibles, c'est tout à fait clair. Ici, nous avons affaire à une

  4   photocopie qui a été faite en prenant ailleurs ma signature. Vous verrez

  5   dans tous les documents qui émanent du commandant d'état-major, que jamais

  6   je n'aurais signé quelque chose de cette nature, de toute façon. Vous avez

  7   pu voir des dizaines d'exemples du comportement qui est le mien et des

  8   ordres que j'émis.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Le paragraphe 33, mais je ne présenterai pas de

 10   document. Au paragraphe 33, vos avocats mais vous avez dû en discuter avec

 11   eux, concernant les transcripts ils disent ceci :

 12   "Qu'il n'y a pas de bande audio d'origine ni de version électronique,

 13   et que tous les transcripts que nous avons sont des textes qui ont été pris

 14   à partir de ces bandes mais dont nous ne savons pas si ces textes disent

 15   exactement ce qui a été dit dans les bandes."

 16   Deuxièmement, vous dites que ces bandes -- enfin, que ces transcripts

 17   ont été obtenus illégalement, et vous dites que le président Mesic, qui a

 18   succédé au président Tudjman, n'avait, d'après vous, pas de base légale

 19   pour communiquer ces transcripts. Mais vous rajoutez et c'est ça qui

 20   m'intéresse, vous rajoutez que ces transcripts, semble-t-il, avant d'être

 21   adressés au bureau du Procureur, auraient été en quelque sorte soumis à

 22   l'examen de journalistes sélectionnés. Alors d'où savez-vous cela ?

 23   R.  C'est exact, et le premier et le deuxième, et le troisième point que

 24   vous avez soulevés. Il est exact que l'on ne dispose pas des originaux, à

 25   savoir des bandes audio. J'affirme qu'au moins en ce qui me concerne, ce

 26   que l'on a transcript à partir d'un enregistrement audio ne peut pas faire

 27   foi, car on laisse de côté le langage gestuel, l'intonation et ainsi de

 28   suite. J'en ai déjà parlé. C'est pour cela qu'à chaque fois qu'on a un

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  1   entretien avec un journaliste, par exemple, si on ne vous demande pas, si

  2   on ne donne pas l'autorisation spécifique nécessaire, le texte de la

  3   retranscription sera une image déformée de ce que vous avez réellement dit.

  4   Ce n'est que lorsque l'auteur peut intervenir dans la transcription à

  5   partir de l'enregistrement audio que l'on peut obtenir quelque chose qui

  6   reflète la réalité de sa pensée.

  7   Deuxièmement, il est exact que le président croate a donné accès à ces

  8   transcriptions à des journalistes. Ces derniers ont donc été remis de façon

  9   sélective à certains journalistes, et c'est de notoriété publique, en

 10   Croatie.

 11   Troisièmement, l'approbation nécessaire pour donner accès à ce type de

 12   documents, alors qu'ils représentent une forme de propriété de l'état, ils

 13   peuvent avoir une influence sur la défense des intérêts de ce dernier.

 14   Cette approbation nécessaire en temps normal n'a pu reposer sur aucune

 15   disposition légale en vigueur pour ce qui est de la révélation de documents

 16   en Croatie. Cela surtout si l'on prend en compte la façon dont ils ont été

 17   fournis, d'une part aux journalistes, d'autre part au présent Tribunal.

 18   Enfin, il n'y a rien dans ces procès-verbaux présidentiels que je puisse

 19   considérer comme mauvais et défavorable. Au contraire, si vous lisez

 20   l'ensemble de ces comptes rendus, au lieu de vous contenter d'en extraire

 21   des morceaux, si vous n'omettez rien, vous verrez que la politique croate

 22   était tout à fait claire, et ça montre également toutes les peines que nous

 23   avons eues à cette époque pour rester fidèle à ces principes qui étaient

 24   tout à fait clairement formulés, notamment en ce qui concerne la Bosnie-

 25   Herzégovine.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais passer au paragraphe 56, mais là, il n'y

 27   aura pas besoin de regarder de document. Le paragraphe 56, on l'a abordé

 28   déjà tout à l'heure, mais là, c'est un peu plus précis. On parlait des

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  1   crimes commis sur le terrain et vous dites, par des gangs, des groupes ou

  2   de personnes non identifiées qui avaient par exemple démoli des maisons, en

  3   raison du caractère ethnique de leur propriété. Vous citez en disant qu'il

  4   y a eu des activités criminelles, le Kinder Vod et Garavi. Bien, alors

  5   Garavi, c'est qui d'après vous ?

  6   R.  Il me semble qu'ici, le conseil de la Défense s'est peut-être livré à

  7   des éclaircissements qui allaient un peu au-delà des éléments dont je

  8   dispose moi-même. Il était tout à fait clair que l'agent du SIS à Rama

  9   était en train de parler de certains événements qui se produisaient de nuit

 10   et qu'il disposait d'informations indiquant que c'étaient certains membres

 11   du peloton des enfants de Kinder Vod qui en étaient à l'origine. Il est

 12   également exact d'information émanant du SIS que certains membres de

 13   l'Unité Garavi de Bugojno auraient été concernés. Mais, Messieurs les

 14   Juges, on n'arrivait jamais à déterminer de qui il s'agissait exactement, à

 15   obtenir des noms. Les informations que nous recevions étaient toujours de

 16   la même nature, certains membres, mais quels membres et quelle preuve était

 17   celle dont on disposait ? Quelle information exacte ? Pourquoi tel ou tel

 18   avait-il été arrêté et remis aux enquêtes militaires ?

 19   En d'autres termes, nous avions des informations générales, mais que peut

 20   faire un commandant sur la base d'information aussi générale. J'organisais

 21   des réunions et je demandais à ces personnes de dire de qui il s'agissait.

 22   Je les suppliais, je les menaçais, et ainsi de suite, mais toute cette

 23   histoire en fait ne va pas plus loin, ça s'arrête à la connaissance que

 24   quelqu'un quelle part a commis quelque chose, point.

 25   Il faut ici dire que le nombre de maisons croates qui ont été incendiées

 26   par des Croates eux-mêmes à Rama est très important. A Ljubuski aussi, le

 27   nombre de maisons incendiées par des Croates, de maisons croates incendiées

 28   par des Croates est largement plus important que ce qu'on doit ensuite

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  1   déterminer comme étant le nombre de maisons de Musulmans qui ont été

  2   incendiées. C'est très important. Par exemple, si on dit qu'il y a une

  3   statistique aux Etats-Unis selon laquelle il y a tant et tant de millions

  4   de personnes appartenant à telle catégorie, ça ne représente aucune valeur

  5   comme information. Il faut trouver de qui il s'agit. C'est comme dans le

  6   cas du massacre de My Lai, on ne peut pas se contenter d'une information

  7   générale. Dans le cas de My Lai, ce n'était pas l'armée américaine dans sa

  8   totalité.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, si je vous ai bien compris, quand

 10   il y a des maisons qui sont brûlées, elles peuvent être brûlées par

 11   l'ennemi, mais elles peuvent être également brûlées par les personnes qui

 12   quittent les lieux et mettent le feu à la maison, et on va imputer le feu à

 13   la partie adverse. Est-ce que c'est ça que vous voulez dire quand vous

 14   dites qu'il y a des maisons qui ont été brûlées par des Croates ? Mais est-

 15   ce que ça sous-entend que des maisons de Musulmans ont pu être brûlées

 16   également par des Musulmans, sachant qui vont partir sans espoir de retour,

 17   disent : Ma maison ne va pas tomber dans les mains des autres et j'y mets

 18   le feu.

 19   R.  Je vais vous répondre très précisément, Monsieur le Président. Tout

 20   d'abord, il a certainement eu des cas de ce type, c'est tout à fait

 21   certain. Mais je vais vous dire ce que j'ai vu de mes propres yeux. A la

 22   fin du mois de juillet, entre 31 juillet au 1er août, lorsqu'il y a eu

 23   retrait des unités de Vakuf et lorsque toutes les lignes y sont tombées sur

 24   35 ou 40 kilomètres, il y a eu dix à 15 maisons croates que les Croates,

 25   eux-mêmes, ont incendié. Ils ont incendié leurs propres maisons sous mes

 26   yeux. Je voyais ces gens, alors que le soir même, nous avons réussi à

 27   reprendre ces positions et ces mêmes gens se sont retrouvés à regarder

 28   leurs maisons brûlées, leurs propres maisons qu'ils avaient incendiées le

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  1   matin même. C'est ma propre expérience.

  2   Je redoute par ailleurs les généralisations. Je n'aime pas beaucoup ce

  3   genre de généralisation. Ce qu'il faut, c'est déterminer qui a fait quoi, à

  4   quel endroit. C'est indispensable. On ne peut pas se contenter de dire que

  5   là-bas, il s'est passé quelque chose. Si on est, par exemple, ici dans la

  6   ville de La Haye et qu'on dit que quelqu'un a été tué quelque part, comment

  7   va-t-on avancer et faire une enquête ?

  8   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui concerne

  9   votre question précédente, parce que maintenant le général Praljak vient de

 10   répondre assez complètement, mais au compte rendu d'audience, il a été

 11   versé pour votre question : "Cela concerne des crimes qui ont été commis,

 12   comme vous dites, par des groupes d'individus non identifiés qui ont

 13   détruit des en raison de l'appartenance ethnique du propriétaire de ces

 14   maisons."

 15   Donc ici vous citez un résumé de la déposition du général Praljak, mais en

 16   réalité, dans ce paragraphe numéro 56 que vous avez sous les yeux, en ligne

 17   20 de ce paragraphe, au tout début, nous avons, je cite :

 18   "Praljak va parler indépendamment --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Arrêtez. "Technical problem."

 20   M. KOVACIC : [interprétation] Je vais répéter maintenant si le compte rendu

 21   fonctionne bien. Je répète. Au paragraphe 56 de ce résumé que vous citez au

 22   compte rendu d'audience, en page 36, ligne 20, il est dit explicitement, je

 23   cite : "Indépendamment de l'appartenance ethnique du propriétaire."Donc

 24   c'est là l'essentiel. Des maisons sont incendiées indépendamment de

 25   l'appartenance ethnique de leur propriétaire et c'est ce qu'a commencé à

 26   expliquer le général Praljak et c'est également la question que vous avez

 27   posée : est-ce qu'on incendie des maisons indépendamment de l'appartenance

 28   ethnique du propriétaire ? Alors peut-être qu'il avait ici un élément qui

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  1   n'était pas clair et que le général n'a pas répondu jusqu'au bout pour

  2   cette raison, car ici on parle même de conflit entre membres de différentes

  3   unités du HVO. C'est ce que je voulais ajouter.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, peut-être que je peux

  5   vous parler de deux meurtres à Ljubusko où ce sont des Croates qui ont tué

  6   des Croates, des soldats l'ont fait. Ils se sont disputés autour d'une

  7   fille, une insulte, puis dans la situation telle qu'elle était, il y en a

  8   qui a pris un fusil qui a tiré, puis voilà, il y a eu un mort. Vous, vous

  9   retrouvez contraint à le mettre en prison. Ou alors en 1994, à Rama, il y a

 10   eu des conflits entre cette unité Garavi et une autre Unité de Rama.

 11   C'était une véritable guerre. Il y a eu deux personnes qui ont été tuées

 12   dans la rue, il y a eu des blessés. En fait, la ville avait été

 13   complètement sous l'emprise de cette guerre qui s'était déclanchée entre

 14   eux. Il y avait des chars dans les rues, avec des morts, des blessés --

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, est-ce qu'on

 16   trouve ces choses-ci dans l'acte d'accusation ? Je crois que vous n'avez

 17   même pas pris la peine de lire l'acte d'accusation, mais je peux vous dire

 18   que ceci n'a rien à voir avec notre procès.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, on va revenir maintenant aux

 20   volontaires en regardant le paragraphe 62 de vos écritures et on va

 21   regarder la pièce P 00670.

 22   M. KOVACIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Avant de

 23   poursuivre, M. le Juge Trechsel, je ne comprends vraiment pas le

 24   commentaire que vous venez de faire. Les événements de cette nature sont

 25   manifestement des éléments d'une défense tout à fait pertinente et reconnue

 26   comme telle. On sait ce que l'Accusation allègue. Il ne s'agit pas de

 27   conflit entre l'Unité Garavi et d'autres, mais ce qui nous intéresse ici,

 28   c'est la thèse de l'Accusation. Nous connaissons tous l'acte d'accusation

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  1   et ici, il s'agit d'une défense absolument pertinente et légitime. Vous ne

  2   pouvez pas exclure que l'accusé se défend en l'espèce. Il dépose au sujet

  3   de quelque chose qui ne figure pas dans l'acte d'accusation, mais qui

  4   manifestement est pertinent au regard de l'acte d'accusation, car c'est une

  5   façon de répondre à ce qui y figure.

  6   Peut-être que cela n'a pas été correctement interprété ou peut-être avez-

  7   vous été rapide, mais il me semble que quelque chose manque peut-être et

  8   que nous ne pouvons pas objecter à cela. Voilà ma consoeur me le rappelle,

  9   et je pensais que ce n'était pas nécessaire de le dire, mais il était ici

 10   indubitablement question de contrôle effectif et de la possibilité de

 11   mettre en œuvre un contrôle effectif. Alors si nous n'avons pas affaire ici

 12   à un sujet qui est pertinent dans le cadre de la déposition, je ne sais

 13   plus par quel bout prendre les choses. Excusez-moi une nouvelle fois et je

 14   vous remercie.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, Maître, je ne m'attendais pas à

 16   un début de discussion avec moi. Je suis quelque peu surpris de cette

 17   longue intervention. Je ne sais pas quel en est le poids procédural. Si

 18   vous avez des griefs, présentez-les officiellement.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Non, je ne veux pas du tout discuter avec

 20   vous, mais il faut que ce soit dit dans le dossier quelque part, qu'il y

 21   ait des traces, parce que vous avez dit que c'était sans pertinence. Vous

 22   dites : Ceci n'a rien à voir avec l'acte d'accusation, n'en parlons pas.

 23   C'est ce qu'on trouve maintenant dans le procès-verbal et je voulais

 24   simplement que ce soit bien dit dans le compte rendu. Maintenant c'est dit.

 25   Merci.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne peux pas laisser ceci sans

 27   commentaire. M. Praljak parle de crimes commis entre Croates, et alors ? Ce

 28   n'est pas surprenant. Dans l'acte d'accusation, vous n'allez rien trouver

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  1   qui fasse référence à ce genre d'infractions. On ne reproche pas du tout

  2   aux accusés quels qu'ils soient de n'avoir pas agi dans la mesure où des

  3   "crimes" - entre guillemets - aient été commis. C'est tout ce que je

  4   voulais dire.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à M. le Greffier de monter le texte

  6   en anglais, parce qu'il n'y a que le début et ce qui est important ici,

  7   c'est la suite. C'est un document du 29 octobre 1992, apparemment adressé

  8   au colonel Blaskic en même temps par M. Praljak et M. Stojic, puisqu'il y a

  9   les deux noms. Ça concerne Jajce et l'envoi de volontaires. Alors je vous

 10   pose la question, parce que dans les écritures, Monsieur Praljak, vos

 11   avocats indiquent que, dans l'envoi des volontaires, en citant ce document,

 12   il y aurait eu 80 % de Musulmans qui auraient quitté la République de

 13   Croatie pour être volontaires. Alors je peux en tirer une conclusion en me

 14   disant : Lorsque l'on parle des volontaires, est-ce qu'il n'y a pas des

 15   Croates et des Musulmans ? Or, là, apparemment, il y avait des Musulmans,

 16   parce que quand on regarde -  et c'est pour ça que j'ai demandé qu'on monte

 17   le texte en anglais - il y a eu des discussions avec le SDA sur l'envoi de

 18   ces soldats. Alors qu'est-ce que vous nous dites, Général Praljak ?

 19   R.  Messieurs les Juges, pour ce qui concerne ce document, mais également

 20   le rapport dont vous disposez, rapport d'Ante Prkacin qui conduisait cette

 21   unité, tout cela vous parle d'un événement proprement incroyable, d'un

 22   comportement absolument incroyable. Pour nous à vrai dire, cela

 23   représentait un signe parfaitement clair de ce qui était en train de se

 24   passer au SDA et dans l'ABiH en Bosnie centrale.

 25   Voyez, je vous prie, quelle est la situation. Jajce est en train de tomber

 26   aux mains des Serbes. Une unité d'environ 270 hommes est en train d'arriver

 27   de Croatie, unité formée à 80 % de Musulmans et à 20 % de Croates qui se

 28   proposent de participer à titre volontaire à la défense de Jajce. M. Stojic

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  1   a la charge, à Capljina, de procéder au recomplètement de cette unité.

  2   S'ils n'ont pas de fusils, de munitions, d'uniformes ou de vêtements

  3   adaptés, et ainsi de suite.

  4   Cette armée conjointe, avec la composition ethnique qui est la sienne, n'a

  5   pas réussi à atteindre la Bosnie centrale, plus précisément Travnik, et

  6   ceci parce que les unités et la politique des Musulmans leur ont barré le

  7   passage. Ils ont passé trois jours dans des cars entre Gornji Vakuf et

  8   Travnik, soumis à des traitements plus que contestables. On a pointé des

  9   armes sur eux, on les a maltraités. Et j'estime que c'est là le début d'une

 10   préparation organisée de l'ABiH et de certains dirigeants du SDA visant la

 11   conquête ultérieure de la Bosnie centrale, car comment pourriez-vous

 12   accorder du crédit à leurs intentions sincères de mener un combat conjoint

 13   lorsqu'ils refusent, ils ne laisseront à aucun prix passer une telle unité

 14   vers Jajce quelques jours après la chute de cette localité ?

 15   C'était là un événement absolument sidérant qui a reflété, de façon très

 16   précise, l'évolution ultérieure de la politique et des choix militaires des

 17   Musulmans.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais aborder les relations ABiH/HVO par le

 19   paragraphe 69. Il y a deux documents. Le premier, qui est très long, le 3D

 20   00418. Alors j'attends qu'il soit à l'écran avant de poser ma question qui

 21   sera longue aussi, mais j'espère que la réponse sera courte.

 22   Voilà. C'est un rapport du Groupe tactique de Konjic en date du 4 novembre

 23   1992 et qui est adressé à Sefer Halilovic. Alors vous voyez au paragraphe

 24   1, on parle de Juka Prazina, de ses activités. Au paragraphe 4, et ça

 25   recoupe ce qu'on disait tout à l'heure sur les maisons brûlées, il est

 26   indiqué qu'à Prozor, il y aurait 80 maisons de Musulmans qui auraient été

 27   détruites et brûlées. Au paragraphe 5, il y a une rencontre entre le SDA et

 28   des Croates, dont vous-même. Au paragraphe 5, l'auteur de ce document dit

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  1   que vous êtes visiblement embarrassé et qu'il a été proposé un commandement

  2   conjoint. Au paragraphe 7, vous intervenez sur ce fameux commandement

  3   conjoint pour dire qu'il faudrait des individus capables et non par

  4   nationalité; que dans cette structure, il y doit y avoir que des soldats

  5   capables sans que ça soit des Croates ou des Musulmans spécialement.

  6   Bien. Alors ce document, vous le connaissez ?

  7   R.  Oui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce que ce document reflète tous les

  9   efforts que vous aviez faits quand vous vous êtes rendu à Prozor pour, et

 10   on verra un deuxième document tout à l'heure, faire cesser tout ce qui a pu

 11   se passer et essayer de trouver une solution dans un commandement conjoint

 12   ?

 13   R.  Ce document ne traduit pas même 10 % de mes activités concernant les

 14   conflits à Rama, moins de 10 %. Deuxièmement, il ne s'agit pas de 80

 15   maisons. C'est une exagération absolue; 80 maisons, il n'y en a pas eu

 16   autant d'incendiées. C'est des exagérations à n'en plus finir. Il n'y a pas

 17   eu 10 % de ce qui est dit ici. Mes activités, de ce point de vue, ont été

 18   incomparablement plus importantes qu'indiquées ici.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va regarder le deuxième document, qui est

 20   un complément, 3D 00391. Non, ce n'est pas la carte.

 21   M. KOVACIC : [interprétation] Au compte rendu, on lit 391. Je crois que

 22   vous vouliez le 291, Monsieur le Juge.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : 3D 00391. Non, non -- oui, excusez-moi. C'est 291,

 24   excusez. 3D 00291. --

 25   Voilà. C'est un rapport du 8 décembre qui concerne votre arrivée à

 26   Prozor.

 27   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est un document sous pli scellé, donc il n'est pas

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  1   diffusé à l'extérieur. Vous avez ordonné la libération d'un groupe de

  2   prisonniers, dont le commandant de l'ABiH qui avait été prisonnier. Vous

  3   avez dû étudier ce document. Est-ce que vous confirmez que, dès que vous

  4   êtes arrivé, vous avez pris des ordres pour libérer tous ceux qui avaient

  5   été arrêtés ?

  6   R.  Oui, et bien d'autres choses dont ce document ne parle pas, parce qu'il

  7   est trop petit. J'ai tenu, à l'époque, des dizaines et des dizaines de

  8   réunions à Konjic, Jablanica, dans les villages mêmes, avec des villageois,

  9   des prêtres, avec une partie, l'autre partie --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, essayez d'être très bref dans vos

 11   réponses, parce que plus vous serez bref, plus je pourrai poser des

 12   questions. Pour Prozor - et après j'arrêterai de poser des questions là-

 13   dessus - la thèse de l'Accusation, vous le savez, Prozor est un événement

 14   très significatif de la concrétisation de l'entreprise criminelle commune,

 15   et ce, en octobre 1992. Vous, cette thèse, vous la contestez. Comme vous

 16   avez été sur place, vous avez tenu des réunions, vous vous êtes dépensé.

 17   L'origine du conflit à Prozor, de votre point de vue, est due aux Croates

 18   locaux ou aux Musulmans locaux qui, en fait, auraient eu un conflit interne

 19   sans que ce conflit soit relayé à un vaste plan d'ensemble ?

 20   R.  Il n'y a pas eu de plan général et il n'y a pas de lien avec, Messieurs

 21   les Juges. Ça, c'est d'un. De deux, il s'agissait d'un conflit interne qui,

 22   depuis des mois, avait tout doucement, à petit feu, augmenté et crû.

 23   Lorsqu'on s'est installés pour parler à une réunion au sujet d'écoles, il y

 24   a eu meurtre, à un poste de commandement, d'un ou deux Croates. Ils ont été

 25   tués par des Musulmans. C'est là que tout a pété. J'ai été l'un des chefs

 26   de l'entreprise criminelle commune; moi qui est allé là-bas, qui est

 27   intervenu pour apaiser les choses au bout de deux ou trois mois. Mais il

 28   n'y a pas logique à ce qu'on dit, aucune.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Si le détonateur, c'était le meurtre de un ou deux

  2   Croates par des Musulmans, comme vous aviez eu des rencontres avec le SDA

  3   avec tous les hommes politiques Musulmans, pourquoi vous ne vous êtes pas

  4   entendu avec eux pour qu'on arrête les Musulmans qui avaient tué et les

  5   déférer, les remettre à la police, puis après ils auraient été jugés ?

  6   Pourquoi ça n'a pas été fait ?

  7   R.  Monsieur le Juge, j'avais essayé de convenir la chose. J'ai réclamé

  8   ceci. Enfin, je n'ai pas seulement été me concerter, j'ai demandé la chose.

  9   D'une part, j'ai demandé à ce qu'on restitue les objets que tous ceux qui

 10   avaient volé quelque chose parmi les nôtres et, en bonne mesure, on a

 11   réussi à le faire. Puis j'ai demandé à ce que reviennent les gens qui

 12   avaient fui, et celui qui a tué ces deux hommes, il fallait le capturer.

 13   Alors je vous affirme ici, en toute responsabilité, que malheureusement,

 14   dans cette politique des Musulmans, dans les têtes des Musulmans, on a

 15   commencé à comprendre qu'en Bosnie-Herzégovine ils étaient ce que les

 16   Serbes avaient été au niveau de la Yougoslavie. C'est ça l'idée motrice.

 17   Parce que si on dit : On est sur un pied d'égalité, et eux se sentaient

 18   tout à coup menacés. Ils avaient perdu à Rama aux élections, ils avaient

 19   participé au pouvoir à 50 %/50 % et ils voulaient que la langue s'appelle

 20   serbo-croate, parce que eux le voulaient ainsi. Et ça, ça mettait les

 21   Croates en colère. Petit à petit, ça n'a fait qu'augmenter et le moindre

 22   prétexte venait rompre le cheminement des énergies négatives, tel que je le

 23   qualifie.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, vous allez peut-

 25   être m'aider, parce que j'ai un petit souci avec ce document. Ce document

 26   commence de la façon suivante :

 27   "Le général Praljak est arrivé à Prozor le 30 décembre 1992…"

 28   Mais lorsque l'on poursuit la lecture, on parle d'un grand nombre

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  1   d'événements. Je crois que c'est toujours les choses qui se passent à

  2  Prozor, mais ça va jusqu'au 1er décembre 1992. Est-ce une erreur ? Vous êtes

  3   arrivé là le 30 novembre plutôt que le 30 décembre 1992, n'est-ce pas ? Il

  4   y a une erreur dans le document ?

  5   R.  Oui, Monsieur le Juge Trechsel. C'est exact. Je ne suis pas arrivé le

  6   13 [comme interprété] décembre. C'est une erreur de frappe ici. Je pense

  7   être arrivé un ou deux jours avant, mais peut-être -- je ne sais pas trop -

  8   - mais là, c'est une erreur. C'est des erreurs qui arrivent quand quelqu'un

  9   tape un texte sans trop être regardant.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va regarder le document suivant, le 3D

 12   00419, qui est un document qui émane de vous, qui est en date du 6 novembre

 13   et qui met en place des contrôles de route, ou check points, avec le HVO et

 14   l'ABiH. C'est un document qu'on a déjà vu, mais qui peut illustrer ce que

 15   vous nous avez dit sur votre recherche de trouver des solutions au problème

 16   qui est survenu à Prozor. Alors je regarde -- voilà. Alors vous avez le

 17   document. Vous connaissez ce document.

 18   R.  Oui.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce que vous nous dites sur ce document ?

 20   R.  Ce que je peux affirmer, Messieurs les Juges, c'est que d'après moi,

 21   ceci était censé constituer la pierre de fondation pour ce qui est des

 22   relations entre le HVO et l'ABiH. Tout y est dit. On devait avoir un

 23   commandant conjoint, des postes conjoints, respecter des rapports

 24   paritaires, créer des gardes villageoises, parce que c'était important.

 25   Personne ne voulait comprendre cela.

 26   Mais dans ce type de circonstance de guerre, on doit savoir qu'il y aurait

 27   des gens portés à commettre des crimes. Nous ne sommes pas des imbéciles.

 28   Je suis une personne instruite. Je sais ce qui risque de se passer et je

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  1   propose à ce que, ensemble, dans ces villages et hameaux, qui sont au

  2   nombre de centaines et centaines dans le coin, il s'agissait donc

  3   d'organiser une autoprotection de la part de cette population, et ça ne

  4   pouvait pas être ni contrôlé par la police ni par l'armée ni par le SIS.

  5   C'était impossible, et je maintiens la teneur de ce document à part

  6   entière. Je pense que c'était une proposition claire de la part du HVO et

  7   de moi-même, enfin de nous tous ensemble. J'ai dépensé des mois et des mois

  8   de travail pour ce qui est de la mise en place de ce commandement conjoint.

  9   Je n'étais pas le seul à le faire. Mais, hélas, il y a eu de l'obstruction

 10   de la part de Halilovic, Muslimovic et autres, eux, ils ne nous percevaient

 11   pas comme étant des gens sur un pied d'égalité. Pour eux, nous n'étions pas

 12   des égaux en droit. Nous étions à leurs yeux des Oustachi. Nous étions à

 13   leurs yeux, un peuple qui n'avait pas les mêmes droits en Bosnie-

 14   Herzégovine qu'eux, c'était ce qui était dans leur tête. C'est cela la

 15   cause de l'échec. Puis ensuite la mise en place technique, il y a des

 16   centaines de moyens de faire autrement.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : On va regarder une carte, 3D 00543, c'est la carte

 18   que vous mentionnez au paragraphe 74. Alors on va la regarder. C'est une

 19   carte sur le déploiement des forces, le 12 janvier 1993. Alors apparemment

 20   en bleu, si on est en couleur, c'est le HVO, et en vert, l'AbiH.

 21   Général Praljak, vous souvenez de cette carte, c'est vous qui avez -- ?

 22   R. Oui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors si cette carte est citée dans votre

 24   Défense, c'est pour prouver quoi ?

 25   R.  C'est pour montrer que l'ABiH, à Gornji Vakuf, a pris position sur

 26   toutes les hauteurs, et a bloqué complètement le passage par Vakuf, en

 27   interdisant à part entière même l'arrivée du commandant de la brigade de

 28   Vakuf vers son état-major sans l'aide de la FORPRONU. Donc l'ABiH a placé

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  1   Vakuf et le HVO complètement sous son contrôle, et ce, par le truchement

  2   d'une agression rampante, au fil des mois ou au fil de mois, auparavant.

  3   J'ai montré une carte similaire au capitaine anglais qui était dans le

  4   secteur, et je lui ai demandé si j'avais bien dessiné les choses. Je lui

  5   demandais s'il y avait des rectifications à apporter. J'ai prié de

  6   rectifier. Il a signé ma carte. Il s'agissait là d'un acte d'agression de

  7   la part de l'ABiH vis-à-vis du HVO. A gauche, Messieurs les Juges, sur la

  8   carte à gauche à quelque dix kilomètres, il y avait les lignes face aux

  9   Serbes.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je vais donner la parole à mon collègue, mais

 11   je termine. Donc le positionnement que l'on voit en vert des Unités de

 12   l'AbiH, qui occupaient toutes les hauteurs montre d'après vous qu'ils

 13   avaient donc l'intention en quelque sorte de lancer un jour ou l'autre une

 14   offensive car, sinon, pourquoi auraient-ils été là, et que donc du fait de

 15   leur positionnement le HVO était dans une position difficile ? C'est la

 16   leçon militaire qu'on doit tirer de la carte ?

 17   R.  Oui.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une question technique, Monsieur

 19   Praljak. Pourriez-vous nous dire à quel moment tout ceci s'est passé ?

 20   Donnez-nous une date de référence qui pourrait s'appliquer à cette carte.

 21   R.  Il s'agit - c'est écrit en bas - c'est janvier, 12 janvier 1992. C'est

 22   donc un jour après le début des conflits. Ça, c'est donc le début des

 23   conflits, un jour après.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 25   R.  Excusez-moi, 1993, je m'excuse.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup.

 27   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous en

 28   sommes aux références chronologiques, j'aimerais une petite clarification

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  1   sur cette carte, pendant qu'elle est encore à l'écran, enfin, une partie de

  2   la carte en tout cas. Plus au sud, au sud de Gornji Vakuf, il y a cette

  3   espèce de serpentin vert qui se termine par une flèche qui pointe vers la

  4   crête de Makljen, et de l'autre côté, il y a le mont "Neretvica."

  5   J'aimerais savoir s'il s'agit d'une référence à l'opération suivante,

  6   c'est-à-dire l'opération Neretva, mais qui elle a eu lieu un peu plus tard.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak.

  8   R.  Non, non. Ceci est une carte qui montre la situation au 12 janvier et

  9   une partie des activités par la suite. Neretvica c'est une Brigade de

 10   l'ABiH, qui a reçu des ordres et ces ordres ont été versés au dossier ici

 11   au Tribunal. Il s'agissait d'aller vers Makljen et de s'emparer de Makljen.

 12   Cet ordre existe au niveau du Procureur, au niveau des Juges et dans toutes

 13   les considérations, il en a été question si on a le temps, on peut en

 14   parler. Cette Brigade de Neretvica au sein de l'ABiH a reçu des ordres de

 15   se diriger vers Makljen, de couper la route et de s'emparer de Prozor et de

 16   continuer au-delà. Donc les documents de l'ABiH démontrent que même le

 17   cessez-le-feu qu'on avait signé n'était pas respecté par eux, et ils

 18   demandaient à ce qu'il y ait évolution des événements de façon à ce que

 19   nous soyons complètement coupés de Vakuf et pour qu'une attaque de Prozor

 20   soit préparée.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Je m'excuse mais j'aimerais une petite

 22   question de suivi. Il n'y a pas de position bleue du HVO sur la crête de

 23   Makljen. Donc le témoin semble dire que le HVO ne tenait pas la crête de

 24   Makljen. Alors je ne sais pas, je n'en vois absolument pas où seraient les

 25   positions du HVO qui seraient mentionnées sur cette carte du côté de la

 26   crête de Makljen.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Général Praljak, pourquoi vous mettez une

 28   flèche vers Makljen alors que le HVO n'est pas à Makljen ?

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  1   R.  Le HVO se trouvait à Makljen mais on ne l'a pas indiqué.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait des soldats à Makljen ?

  3   R.  Non, pas des soldats. Il y avait un poste de police. Il n'y avait

  4   aucune nécessité d'avoir des soldats à Makljen. Mais en coupant Makljen et

  5   en s'emparant de ce poste de contrôle, tout le récit relatif à Prozor

  6   tombait à l'eau, donc si Neretvica avait réussi à réaliser la chose, la

  7   situation militaire aurait été très mauvaise.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Général Praljak, je ne vais pas vous présenter

  9   des documents pour les paragraphes 95, 99, c'est sur Mostar. Vous dites que

 10   vous étiez rarement à Mostar après le 24 juillet 1993, parce que le

 11   quartier général était à Citluk et que donc vous n'aviez aucune

 12   connaissance des événements de Mostar en 1993, et que vous n'aviez jamais

 13   été informé des crimes allégués commis à Mostar. Bon. Ça c'est ce qui est

 14   écrit; vous confirmez cela ?

 15   R.  Oui, c'est exact, Monsieur le Juge. J'ai inspecté une fois certaines

 16   positions pendant cette période. Mais comme je savais que sans prendre

 17   Vakuf et Rama, l'offensive de Mostar n'avait aucune chance de succès,

 18   j'estimais que nos positions à Mostar ne deviendraient critiques que si

 19   nous perdions Vakuf et Prozor, et on le savait M. Petkovic et moi-même et

 20   les autres, donc je me suis centré sur Prozor et Vakuf, ce secteur-là. Je

 21   précise que, le 15 août, et puis au combat de Vrde, lorsqu'ils ont essayé

 22   d'opérer des percées, je suis intervenu, quand ils ont essayé de passer par

 23   le sud, aussi, je courais là-bas pour un jour ou deux. Enfin, il est

 24   difficile de reconstruire maintenant toutes mes allées et venues mais je

 25   n'ai pas eu d'autres éléments si ce n'est des rapports militaires.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit mais c'est au paragraphe 99 que, le 11

 27   mai, à un check point, il y a eu un problème avec un soldat du SpaBat qui

 28   avait été blessé, et qu'à ce moment-là, vous êtes intervenu; vous rappelez

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  1   de cela ?

  2   R.  Oui.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Vos avocats disent qu'à ce moment-là, vous n'aviez

  4   pas d'autorité formelle sur le HVO.

  5   R.  C'est exact, aucune.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 101, c'est une date importante pour

  7   vous, le 30 juin 1993; vous dites qu'il y a eu une mutinerie des soldats

  8   musulmans au sein des Unités du HVO. Voilà. Alors cette mutinerie, vos

  9   services de Renseignements vous n'aviez pas pu la prévoir ?

 10   R.  Monsieur le Président, même à l'époque, je n'accomplissais aucune

 11   fonction au sein du HVO à cette date-là. J'étais soldat à Boksevica et j'ai

 12   décrit cela avec précision. Cela a duré peut-être jusqu'au 10 juillet 1993.

 13   Je ne sais pas de quoi ils disposaient et en quel nombre. Je l'ai appris de

 14   la part de M. Siljeg, et ce n'était pas seulement qu'à Mostar et Stolac,

 15   mais également en partie à Livno et ainsi de suite, donc j'étais en

 16   position en tant que soldat à Boksevica. Aux fins de l'expression de la

 17   vérité, Messieurs les Juges, indépendamment du fait que j'étais soldat et

 18   que M. Petkovic m'a ensuite nommé commandant d'opération de libération de

 19   Boksevica, mon influence en tant que soldat, mon influence sur ce groupe

 20   d'hommes qui sont restés avec moi était significative, importante. J'étais

 21   simple soldat mais, lorsque j'ai déclaré que je ne voulais pas abandonner

 22   Boksevica, eux, qui étaient extrêmement frustrés et épuisés, ont décidé de

 23   rester avec moi. Ça veut tout dire ici de façon précise.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Paragraphe 105, il est question du siège de Mostar.

 25   Il y a donc une contestation sur le siège de Mostar. Par ces écritures, il

 26   n'y aurait pas eu de siège de Mostar parce que Mostar Est était, je lis,

 27   contrôlé par l'ABiH, qu'il y avait des communications, que même s'il n'y

 28   avait pas des routes principales, ils pouvaient donc utiliser des routes

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  1   secondaires. Vous dites, et vous indiquez qu'il y avait un passage qui

  2   existait au pont de Bijela nord. Bien.

  3   Alors ce terme de "siège." Quand on parle du siège de Mostar, on a

  4   l'impression que c'est Stalingrad, que c'est Vukovar. Alors pour vous,

  5   était-ce un siège en terme militaire, ou bien c'était une situation peut-

  6   être problématique mais qui ne constituait pas un siège ? C'est ce que vous

  7   développez au paragraphe 107.

  8   R.  Mostar n'a pas été encerclé ni d'un point de vue militaire ni à quelque

  9   autre point de vue que ce soit. Dans les communications entre Mostar et

 10   Jablanica par la voie routière, par l'intermédiaire de ce pont de Bijela,

 11   cette communication existait, elle était possible et du reste, l'ABiH en a

 12   fait usage jusqu'à ce qu'eux-mêmes ne détruisent l'une des travées de ce

 13   pont de peur probablement que leur propre population ne prenne la fuite. La

 14   seconde travée a été détruite par eux ultérieurement en octobre 1993 et

 15   même alors ils pouvaient opérer un contournement pour maintenir leurs

 16   communications, il y avait toutes sortes de solutions.

 17   Messieurs les Juges, en termes militaires, le HVO était coupé du nord au

 18   sud; il était disposé principalement le long de la Neretva de façon éparse

 19   et la partie est de Mostar était contrôlée par l'ABiH alors que la HVO

 20   était en face. Mais comment pouvons-nous parler d'encerclement, notamment

 21   après avoir vu tous ces documents émanant de généraux et la façon dont ils

 22   n'avaient plus de vraies lignes de défense faisant face aux Serbes ? Quel

 23   encerclement parle-t-on ici ? Ils avaient des patrouilles qui opéraient du

 24   sud de Mostar et jusqu'à Konjic.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, sur le paragraphe 110, vos avocats

 26   - mais certainement sous votre contrôle - ont développé la théorie, à

 27   savoir que l'ABiH avait des positions d'artillerie près de l'hôpital

 28   militaire. C'est ce que vous nous aviez dit lors du contre-interrogatoire

Page 41864

  1   de certains témoins, que le commandement du 4e Corps et de la 1ère Brigade

  2   étaient donc à Mostar Est, alors qu'avant le 9 mai, c'était à Mostar Ouest,

  3   qu'il y avait un mélange de militaires et de civils, que les tenues de

  4   camouflage étaient communes à tout le monde, un civil avait parfois un

  5   vêtement militaire et vice versa, que fréquemment les civils étaient armés.

  6   La conclusion qui est au paragraphe 110, c'est qu'il était impossible de

  7   distinguer potentiellement les cibles.

  8   Alors, Général Praljak, que pouvez-vous apporter comme complément à cela ?  

  9   R.  Messieurs les Juges, vous avez pu voir, en examinant les documents

 10   émanant du Bataillon espagnol, il y en avait au moins une dizaine que ces

 11   derniers avertissaient l'ABiH et exigeaient de sa part quelle écarte les

 12   mortiers qui se trouvaient près de l'hôpital. Mais, eux, c'est exprès

 13   qu'ils avaient disposé ces mortiers non seulement près de l'hôpital mais

 14   également sur la route près des maisons, entre les maisons à Mostar. Ils

 15   avaient conservé là-bas des canons, des mortiers, des canons antiaériens,

 16   et ils faisaient feu à partir de ces différents équipements, premièrement.

 17   Deuxièmement, un corps d'armée dispose de son propre commandement,

 18   des brigades ont le leur également, les bataillons aussi, les compagnies

 19   ont également leur propre commandement. Messieurs les Juges, cela

 20   représente au moins 50 ou 60 commandements, qui étaient tous des cibles

 21   militaires qui se trouvaient à Mostar et disposés intentionnellement parmi

 22   les bâtiments, de façon éparse, dans les avenues principales, l'avenue du

 23   maréchal Tito. Dans la partie ouest de Mostar, il y avait le commandement

 24   du 4e Corps d'armée, le commandant de la police militaire, et ainsi de

 25   suite. Ça a été fait intentionnellement. Dans cet ouvrage écrit par le

 26   commandant du 4e Corps d'armée, le général Drekovic, vous avez eu cette

 27   information selon laquelle 520 soldats ont été tués en 1993 du côté de

 28   l'ABiH. S'il y avait eu de notre part utilisation d'une logique militaire

Page 41865

  1   habituelle, et si nous avions tiré de façon non sélective, il y aurait eu

  2   au moins deux ou trois fois plus de civils tués que de soldats tués. Vous

  3   avez vu lorsque le Procureur a amené à la barre cette dame qui a déposé, le

  4   nombre de civils tués était négligeable. Ça confirme ce que je dis.

  5   J'affirme que sur mon ordre et l'ordre de mes commandements, il y a

  6   eu un nombre minimal de réponses aux tirs de mortiers auxquels ils

  7   procédaient, et que cela a toujours été sélectif. Nous n'avons jamais visé

  8   l'hôpital, parce que je n'ai jamais permis à mon artillerie de viser des

  9   postes de mortier qui avaient été stratégiquement placés, et ce,

 10   intentionnellement, en espérant que la cible serait manquée et que le

 11   projectile toucherait l'hôpital, ce qui aurait permis au monde entier de

 12   continuer à parler du HVO comme d'une entité criminelle.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 125, vous dites que vous n'avez jamais

 14   été informé de quelque incident lié aux tirs des snipers. C'est ce que vous

 15   écrivez. Bien, alors sous la foi du serment, vous nous dites aujourd'hui

 16   que quand vous aviez vos fonctions de général commandant le HVO, de juillet

 17   à novembre, vous n'aviez pas été informé de tirs de snipers avec des

 18   conséquences de morts ou de blessés.

 19   R.  Jamais je n'en ai été informé, et je conteste la thèse selon laquelle

 20   les tireurs embusqués tiraient et tuaient, ainsi qu'il a été présenté

 21   devant cette Chambre. Il faut amener des preuves de chaque cas concret.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : On va revenir au document, un document qu'on a déjà

 23   vu, le 3D1469. J'ai juste une question d'ordre technique. C'est la lettre

 24   que vous envoyez à M. Tudjman concernant la destruction du vieux pont,

 25   lettre du 14 octobre 1997.

 26   Bon, alors cette lettre, vous la connaissez bien. Vous dites qu'il

 27   avait refusé de vous voir, donc c'est pour ça que vous lui écrivez, et

 28   puis, vous lui dites : mais, s'il vous plaît, demandez à Miroslav Tudjman,

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  1   Rebic et Lucic, de répondre aux questions suivantes, et vous énumérez

  2   toutes les questions. Alors, Miroslav Tudjman, nous savons, vous nous

  3   l'avez dit, c'est le fils de son père et il était responsable donc du HIS.

  4   Markica Rebic, c'était qui ?

  5   R.  A cette époque, il était le responsable du SIS de l'armée croate. Quant

  6   à M. Lucic, il était le directeur du SIS du HVO. Je ne sais pas s'ils

  7   l'étaient à ce moment précis; mais à l'époque où le vieux pont a été

  8   détruit, c'était leurs fonctions.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous, vous estimiez que ces trois

 10   personnes avaient tous les renseignements nécessaires ?

 11   R.  J'ai estimé que de par leurs fonctions et les devoirs qui étaient les

 12   leurs, ils devaient poursuivre avec cette enquête visant à déterminer ce

 13   qui s'était passé. Je sais que l'enquête avait été diligentée, et ensuite

 14   qu'elle a été arrêtée, et ensuite plus personne ne se préoccupait du fait

 15   que c'était mon nom qui apparaissait dans les journaux chaque semaine

 16   concernant la destruction du vieux pont de Mostar, et c'était quelque chose

 17   qui était quasiment devenu de notoriété publique.

 18   Je n'écris même pas avec des formules de politesse, j'écris tout simplement

 19   "Monsieur le Président", et en bas je dis "Avec sincérité", "Sincèrement",

 20   et je ne signe pas en tant que général. Je signe en tant qu'ingénieur et

 21   professeur, sans aucune salutation respectueuse. Donc, en tant que Pr

 22   Slobodan Praljak, et non pas "Général", car c'est alors qu'a commencé à

 23   être en circulation quelque chose qui est très au courant aujourd'hui, à

 24   savoir qu'on a mis en circulation une fausse information, et c'est du point

 25   de vue de l'information d'un véritable fascisme qu'il s'agit là.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : On va examiner des conséquences des personnes

 27   déplacées, vous l'évoquez au paragraphe 144, et pour cela on va voir deux

 28   documents. Le premier, 1D01198. Alors, vous indiquez qu'il y a eu des

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  1   personnes déplacées de Stolac et qui ont causé des problèmes à Capljina, et

  2   que donc, tout ça a créé des tensions. A l'appui de cela, il y a donc deux

  3   documents que l'on va examiner. Alors, le premier document, c'est un texte

  4   qui émane de M. Markovic, qui est le président du HVO de Stolac, sur les

  5   droits et obligations des réfugiés. Alors, pourquoi vous avez cité ce

  6   document ?

  7   R.  J'en n'en sais rien, Monsieur le Président. Moi, je n'aurais pas cité

  8   ce document. Cela ne se passait plus au moment où j'étais présent. Je

  9   voudrais que l'on permette à Me Kovacic de répondre et que l'on m'autorise

 10   à sortir juste un instant du prétoire, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voulez, bon, allez-y. On va attendre. Il y a

 12   une urgence. Bien. On vous attend.

 13   Alors, Maître, pendant ce temps-là, Me Kovacic va nous dire pourquoi il a

 14   cité ce document.

 15   M. KOVACIC : [interprétation] Comme vous le voyez, Monsieur le Président,

 16   il s'agit tout simplement d'une liste des éléments de preuve versés à titre

 17   d'aide-mémoire. C'est juste pour rendre l'ensemble plus lisible. Ça ne

 18   constitue pas un élément de preuve à proprement parler. Donc, c'est juste

 19   la prévision que nous avons faite pour la déposition en question. C'est un

 20   groupe de documents qui ont trait à ce sujet et étayent les affirmations

 21   présentées au paragraphe 144. Autant que je me souvienne, cela correspond

 22   au début du mois de mai 1992, il faudrait le vérifier, et il me semble que

 23   nous avons utilisé certains de ces documents lors de l'interrogatoire

 24   principal du général Praljak. Peut-être -- en tout cas, ils étaient prévus

 25   dans notre classeur, peut-être que nous n'en avons pas fait usage. En tout

 26   état de cause, tout cela concerne l'année 1992.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. En attendant que M. Praljak revienne, on va

 28   faire venir le deuxième document, le P 00492.

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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être serait-il

  2   bon, à l'occasion de cette question que vous posez au général Praljak, de

  3   préciser de quelle période il s'agit exactement dans le temps, car il ne

  4   sait pas où nous en sommes. Peut-être pourrait-il répondre plus précisément

  5   dans ce cas.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, les personnes déplacées à Stolac

  7   qui ont créé des problèmes à Capljina, d'après vous, c'est à quelle période

  8   de temps, parce que là vous voyez le document que vous ne connaissiez pas,

  9   a été pris en décembre 1992.

 10   R.  Ce document -- je ne peux pas parler du mois de décembre 1992 à

 11   Capljina, car à l'époque j'étais en Bosnie centrale si j'ai même été dans

 12   ce territoire.

 13   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, mais il y

 14   a peut-être une erreur au compte rendu et dans l'interprétation. Ici nous

 15   avons un document qui, par sa référence, est exactement celui que vous avez

 16   mentionné, qui porte la date du 16 septembre 1992.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, j'avais dit qu'il y avait deux

 18   documents. Un premier document qui est de décembre 1992 par le président du

 19   HVO de Stolac. Un deuxième document, qui va certainement poser un problème

 20   à M. Stringer, parce que la traduction n'est pas en anglais mais il y a une

 21   traduction en français, qui est du 16 septembre 1992. Alors ce document du

 22   16 septembre 1992, il n'y a pas besoin d'avoir la traduction, et émane de

 23   la Brigade Bregava Stolac. Donc on est dans la période de septembre 1992,

 24   avant le texte de décembre 1992, et c'est le commandant Pizovic qui fait ce

 25   document, disant que la Brigade Bregava a été formée le 25 août par

 26   décision de l'état-major des forces armées de Bosnie-Herzégovine, qu'ils

 27   ont reçu 300 volontaires, et ils ont fait un entraînement militaire

 28   théorique et pratique. Ils indiquent qu'ils peuvent mettre à la disposition

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  1   une compagnie de 120 personnes équipées d'armement d'infanterie.

  2   Bon. Alors ce document militaire, Monsieur Praljak, qu'est-ce qu'il

  3   signifie au niveau de Stolac, Capljina ?

  4   R.  Cela signifie que la théorie sur l'entreprise criminelle commune n'est

  5   pas fondée. Car pourquoi quelqu'un qui souhaiterait procéder au nettoyage

  6   ethnique de Stolac permettrait-il, comme nous l'avons fait au mois de juin

  7   1992, la formation d'une brigade ? Quant à cette instruction militaire,

  8   cette formation complémentaire par M. Pizovic, il l'a faite en Herzégovine

  9   occidentale et en partie sur la côte croate après cette date où nous avons

 10   transféré tous ces réfugiés de Stolac, y compris les Musulmans, sous ma

 11   direction. Vous vous rappelez que le témoin avait répondu que les droits

 12   des Musulmans et des Croates étaient égaux, que tous avaient le même droit,

 13   lorsque j'ai posé cette question au témoin qui était venu.

 14  Ici, c'est un rapport qui est adressé au HVO, c'est à la 1ère Brigade du HVO

 15   qu'il dit : voilà ce dont je dispose, et dites-moi : quelle est la zone

 16   maintenant que je vais défendre ? Ensuite, cette brigade a accru pour

 17   atteindre un effectif d'un millier de personnes avec des armes que nous

 18   leur avons fournies, et ainsi de suite.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors va regarder un document qui est peut-

 20   être le document le plus important, qui est le P 09811. On l'a déjà vu,

 21   mais raison de plus pour le revoir. Ce document, vous le mentionnez au

 22   paragraphe 154 de vos écritures. Votre position est de dire que vous n'avez

 23   jamais écrit ce document et que vous n'avez jamais dit "pas de pitié, pas

 24   de merci."

 25   Alors regardons, si vous le voulez bien, le document. On constate que ce

 26   document a été fait par l'officier de permanence des opérations, un certain

 27   Zorinko Bosnjak. Ce document émane de la Brigade Ban Jozip Zelovic [phon]

 28   de Kiseljak. Ce document est daté du 24 octobre 1993, et il est adressé à

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  1   la Brigade Bobovac. Egalement on voit qu'il y a un autre destinataire,

  2   Ivica Rajic. Vous voyez il y a son nom.

  3   Donc curieusement au niveau de la couleur du nom, ce n'est pas de la même

  4   couleur que ce qui a au-dessus, Bobovac, Vares. C'est bizarre,

  5   théoriquement ça devrait être du même caractère. On peut même se demander

  6   si ça n'a pas été ajouté après. Bien, alors vous regardez le contenu du

  7   document. Donc c'est une information suite à une requête du côté XY. Ce qui

  8   est important c'est le post-scriptum, où d'exit, ce que nous voyons vous

  9   auriez à un moment donné dit qu'il ne devrait pas y avoir de pitié ou de

 10   merci à l'égard de quiconque.

 11   Alors, comment vous interprétez ce document, vous ? Parce qu'on va être

 12   très clair, Monsieur Praljak. Un Juge raisonnable pourrait dire, en lisant

 13   ce document : Voilà, le général Praljak fait savoir à Rajic qu'il n'y a pas

 14   de pitié à avoir pas de -- voilà. Donc vous voyez l'enchaînement; qu'est-ce

 15   que vous nous dites ?

 16   R.  C'est très simple. Je n'ai rien écrit à l'attention de Rajic ni de la

 17   Brigade de Bobovac ni à qui que ce soit. Aucun ordre à quelque, Rajic, ou

 18   Brigade de Bobovac que ce soit. J'ai écrit en m'adressant au général

 19   Petkovic, au général Petkovic donc, un document authentique, le document

 20   original dont il s'agit, après avoir reçu toute une série d'information de

 21   documents concernant le chaos qui prévalait à Vares, la contrebande, la

 22   situation désespérée du commandant de brigade Emil Harah, j'ai reçu un

 23   premier, un deuxième, un cinquième, un septième rapport à ce sujet. Donc,

 24   ce que je fais, c'est que j'adresse un courrier à Petkovic, je ne lui

 25   envoie pas d'ordre évidemment, je lui envoie un courrier, et c'est là que

 26   nous avons cette formulation : règle la situation à Vares, sans pitié. Dans

 27   notre compréhension des choses - et je prie les interprètes de traduire

 28   cela correctement - c'est, donc à chacun son dû sans tenir compte d'aucun

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  1   critère. Il faut être impartial. C'est dans ce sens-là qu'il faut être sans

  2   pitié. Ne pas tenir compte des liens, des liens que pouvaient avoir les uns

  3   ou les autres, car il faut garder à l'esprit --

  4   Messieurs les Juges, la façon dont fonctionnait le système précédent, les

  5   gens s'appuyaient sur leurs relations; les amis, les membres de la famille,

  6   les liens avec les autorités locales. L'autre aspect c'était qu'il fallait

  7   retrouver des personnes capable, une fois qu'on aurait réussi à régler la

  8   question de tous ces voleurs, criminels, et cetera, il s'agissait de

  9   trouver les hommes qui étaient à la hauteur des besoins de la défense, la

 10   tâche qui était la nôtre de nous défendre. C'est ainsi que Petkovic l'a

 11   compris, tel que c'est écrit : trouve des Croates.

 12   Il ne s'agit pas ici de pitié envers les Musulmans, au nom de Dieu. Il

 13   s'agit des Croates ici, et un Juge raisonnable interpréterait cela

 14   correctement, ainsi que cela est réellement. Ici, il s'agit des Croates et

 15   de leur structure. Moi, j'ai écrit ceci, le document original en tout cas,

 16   après que tout a été terminé déjà à Stupni Do, et à ce moment-là, il y a eu

 17   des personnes qui ont cru qu'ils pouvaient manipuler cela comme si c'était

 18   moi qui leur avait donné des instructions, mais il s'agit ici d'une

 19   tromperie tellement évidente que je ne peux que m'en remettre à la sagesse

 20   de MM. les Juges.

 21   J'estime que c'est très clair et que vous devez le savoir. Quel est le sens

 22   des phrases que j'ai pu prononcer ou écrire, à qui j'ai envoyé le document,

 23   qu'est-ce qui s'est passé préalablement, quand j'ai envoyé ces documents,

 24   et donc, quelle est la signification de tout cela ? Il faut tenir compte de

 25   l'ordre des documents, et de la situation précédente à laquelle, on se

 26   réfère. Il est tout à fait clair qu'il s'agit ici de régler la situation

 27   entre Croates, entre les Croates eux-mêmes. C'est tout ce que je peux dire

 28   de cette situation, et je m'en remets à la raison de MM. les Juges.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : On va avoir la pause qui va intervenir dans peu de

  2   temps. On va regarder deux documents qui ont trait au paragraphe 167 sur,

  3   toujours, les commandements conjoints. Alors, le premier, c'est le P 01198.

  4   Bien. Alors, je dois vous dire, Monsieur Praljak, je n'ai pas très bien

  5   compris pourquoi ce document est cité. Il s'agit, ça vient de la Brigade

  6   Ante Starcevic, Gornji Vakuf. C'est adressé à l'IPD de Mostar, et c'est 18

  7   janvier 1993. Alors, quelle est l'utilité de citer ce document ?

  8   R.  Pour moi, ce n'était pas essentiel. A mon sens, ce document n'est pas

  9   essentiel. C'était à la discrétion de mes conseils de la Défense. C'est eux

 10   qui l'ont estimé utile.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on va voir un autre document, le P

 12   01324. C'est un document qu'on a déjà vu. C'est la 22e session du Conseil

 13   croate de la Défense, 27 janvier 1993. Bien, il y a une réunion, on voit il

 14   y a M. Zubak, Stoljic, Tomic, et cetera. Vous, vous n'y êtes pas. Donc, il

 15   y a un agenda, vous voyez, il y a tous les décrets qui vont être adoptés.

 16   Alors, pourquoi avoir introduit ce document pour illustrer, au paragraphe

 17   167, les commandements conjoints, HVO, ABiH ?

 18   R.  C'est tout à fait peu clair pour moi, d'un point de vue logique, mais

 19   Mme Nika est ici --

 20   Mme PINTER : [interprétation] Il me semble qu'il s'est produit quelque

 21   chose de nature tout à fait technique, à savoir qu'il y a eu une confusion

 22   dans nos notes de bas de page, et que c'est là l'origine du problème. Nous

 23   n'avons probablement pas réussi à contrôler cela. On avait ce sujet

 24   intitulé : "Le général Praljak apaise la situation," or, ce document ne se

 25   trouvait pas dans ce jeu de documents ou dans ce classeur. Le paragraphe

 26   167 de notre résumé concernait le commandement conjoint, c'est ce que vous

 27   avez dit. Mais le cadre plus général était ce sujet du général Praljak qui

 28   vient apaiser la situation, et je pense que c'est moi qui suis fautive, car

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  1   je n'ai pas contrôlé chaque document individuellement.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause, et je demanderais donc à M. le

  3   Greffier d'afficher pour la reprise tout à l'heure le 3D03519. Voilà, donc

  4   on embraiera avec ce document. Je ne sais pas si je pourrai terminer, parce

  5   qu'il en reste quand même plusieurs encore.

  6   Bien, alors 20 minutes de pause.

  7   --- L'audience est suspendue à 12 heures 22.

  8   --- L'audience est reprise à 12 heures 43.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Praljak, vous avez donc à l'écran un

 10   document de M. Pasalic, 14 novembre 1992, donc c'est plusieurs jours après

 11   les événements de Prozor. Manifestement, ce document reconnaît le fait

 12   qu'il peut y avoir donc des unités de l'ABiH et du HVO conjointes. Qu'est-

 13   ce que vous nous dites ?

 14   R.  Mes efforts visaient, à l'époque que j'étais là-bas, de faire en sorte

 15   que les Unités de l'ABiH et du HVO réalisent des opérations en commun pour

 16   qu'ils aient ce sentiment d'être une armée commune défendant la Bosnie-

 17   Herzégovine. L'un des éléments que j'avais convenus avec eux, c'était de

 18   faire en sorte qu'une position de la VRS, sur les hauteurs de Konjic, dans

 19   le village de Bijela, à partir desquelles positions on avait notamment mis

 20   en péril Konjic, il s'agissait donc de les repousser, de s'emparer de ces

 21   positions.

 22   Les commandants du -- enfin, en compagnie des commandants du HVO et

 23   de l'ABiH, je suis allé en personne procéder à des reconnaissances, deux

 24   fois. Une fois, il y a eu même des échanges de coups de feu entre nous et

 25   les soldats de la VRS. Nous avions convenu de procéder ensemble à cette

 26   opération, et d'après mes instructions et ce qu'on avait convenu, il

 27   s'agissait de tout préparer ensemble, mais là, soyons précis, Messieurs les

 28   Juges.

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  1   Il y a eu pas mal de Musulmans dans l'ABiH qui voulaient bien établir une

  2   coopération, mais au fil du temps, ce nombre était de plus en plus petit,

  3   et on les mettait sur la sellette. On les accusait de coopérer avec le HVO,

  4   comme si on les accusait de coopérer avec l'Allemagne nazie. Comme mon

  5   opération à Komar était tombée à l'eau, non loin de Travnik, il y a eu là

  6   une supercherie, on m'a tourné en bourrique. Quand ils sont venus pour

  7   réaliser cette opération, l'ABiH a renoncé, je n'ai jamais appris d'où

  8   l'ordre était venu de ne pas y aller avec nous.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : On va regarder le paragraphe 171. Il y a un document

 10   dont je vais donner le numéro, 3D 00484. C'est sur les liaisons entre le

 11   HVO et le HOS. Ce document est très long. Ce document est signé par Ante

 12   Prkacin, qui est commandant d'une unité du HOS. C'est ce que vous dites au

 13   paragraphe 171, et à un moment donné, c'est l'avant-dernier paragraphe.

 14   Donc, Monsieur le Greffier, aller à la fin du document.

 15   Alors dans l'avant-dernier document, il semble dire qu'il peut apporter de

 16   l'aide à M. Blaskic, M. Kordic, et il dit : "Nous pouvons prendre 30 de mes

 17   hommes et 40 combattants locaux."

 18   Alors comment vous -- est-ce que ce document vous le connaissiez déjà ?

 19   R.  Oui, je me trouvais là-bas à l'époque. Monsieur le Juge, ce document

 20   entier se rapporte à celui dont on a parlé tout à l'heure et qui a été

 21   signé par Bruno Stojic et moi-même concernant l'envoi de 240 ou 50 hommes -

 22   je ne sais plus au juste le nombre exact - et dont 80 % étaient des

 23   Musulmans. Ils étaient conduits par Ante Prkacin et qu'Alija Izetbegovic

 24   reconnaît en public comme étant un général de l'AbiH. C'était donc

 25   quelqu'un en vue. Voilà comment ça s'est passé.

 26   Ceci constitue un rapport exhaustif de la part d'un homme, où il y

 27   avait 80 % de Musulmans et on ne les a pas laissés passer vers la Bosnie

 28   centrale. Il est passé quand même avec un petit groupe d'hommes. C'est

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  1   quelqu'un avec qui je coopérais. Je l'avais même nommé dans les rangs du

  2   commandement qui était censé intervenir pour ce qui était d'essayer de

  3   récupérer Jajce, mais c'était une illusion. Ça n'a pas pu porter des

  4   fruits, notamment parce que du côté de l'ABiH, il n'y avait aucune volonté

  5   de le faire, exception faite de ces gars-là, pas l'ABiH toute entière.

  6   Lindo avait saboté la chose, mais un homme, Leko, un Musulman originaire de

  7   Turbe, s'était battu de façon brillante. Il n'était pas le seul. Il y avait

  8   de petites unités musulmanes qui avaient réclamé mon aide et voilà.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, votre avocat dans un paragraphe

 10   intitulé : "Documents spécifiques," c'est au paragraphe 183, dit que vous-

 11   même, M. Praljak, vous vouliez évoquer qu'il y a 33 documents. J'ai regardé

 12   ces documents. On peut les voir très vite si vous ne faites pas de trop

 13   longs commentaires, mais si votre avocat a écrit ça, c'est qu'il a dû le

 14   faire à votre demande. Comme je vais être exhaustif et évoquer tous les

 15   points de votre défense, on va regarder ces documents, mais faites des

 16   commentaires très courts, ce qui nous permettra d'aller très vite.

 17   Alors le premier document, c'est le P 02526. C'est un document du 26 mai

 18   1993, adressé par Petkovic à la Brigade de Ljubuski. Vous êtes mentionné

 19   dans ce document au paragraphe 2. Alors qu'est-ce que vous nous dites ?

 20   Pourquoi ce document est important ?

 21   R.  Je ne sais pas pourquoi ce document est important. Le 26 mai,

 22   probablement y a-t-il eu des combats contre l'ABiH. Ça avait déjà commencé.

 23   Les escarmouches avaient commencé, mais je ne sais pas pourquoi.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Le deuxième, le P 02781. C'est le commandant Ivica

 25   Lucic qui envoie ce document au colonel Siljeg. C'est suite à une

 26   conversation avec le général Praljak, Petkovic et Bruno Stojic le 14 juin à

 27   Mostar, où il avait été demandé d'envoyer un équipage de tanks à Prozor;

 28   qu'est-ce que ce document évoque ?

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  1   R.  C'est un document militaire et celui de tout à l'heure montre :

  2   "Comprends," dit Milivoj Petkovic, comprenait donc. Alors dans un document

  3   militaire, vous voyez quelqu'un qui dit : Comprenez donc qu'il s'agit d'un

  4   péril qui pèse sur Vakuf et l'autre localité. On dit qu'il y aurait des

  5   attaques de l'ABiH et on demande un char, probablement pour une réparation,

  6   mais c'est Stojic qu'il faut interroger.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant, me semble avoir un intérêt, le P

  8   03912. C'est un ordre verbal que vous avez donné le 3 août 1993. Vous

  9   l'avez dans votre langue où il est demandé l'envoi de "sniper" qui sont

 10   membres de pelotons de la 2e Brigade du HVO à Mostar.

 11   Donc, Monsieur Praljak, ce document, pour un Juge raisonnable, établit

 12   qu'il y a quatre individus qui font partie d'un peloton de "sniper" à

 13   Mostar et, apparemment, on demande que ces individus aillent quelque part

 14   et que le rapport soit fait au général Praljak. Alors comment vous

 15   interpréter ce document ?

 16   R.  C'est tout à fait correct du point de vue militaire. Il y a des tireurs

 17   d'élite avec des fusils à lunette au sein de l'armée. Pour être tout à fait

 18   sincère, je n'arrive pas à m'en souvenir dans le détail, mais je ne nie pas

 19   qu'il y ait eu un ordre de ma part de ce type si j'avais eu besoin de ces

 20   quatre hommes. Donc je n'ai aucune raison de contester ce type d'ordre.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant, P 03971. C'est un document en date

 22   du 5 août 1993 qui vient de la Brigade de Prozor-Rama et qui est adressé au

 23   président du HVO de Prozor. Ça concerne la question des conscrits âgés de

 24   16 à 60 ans. Comment vous interprétez ce document ?

 25   R.  Il s'agit d'un document signé par un membre du SIS et, par ce document,

 26   ce dernier informe la présidence du HVO et le commandement de brigade du

 27   fait d'avoir à exécuter un ordre venu d'un niveau élevé. Qui est le niveau

 28   élevé et quel est l'ordre exécuté, ça je ne sais pas vous le dire, je ne

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  1   sais pas qui se trouvait au niveau qui a donné l'ordre. Peut-être pourrait-

  2   on poser la question au chef du SIS pour savoir qui lui a donné l'ordre. Je

  3   n'ai rien à voir avec.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors le suivant, P 05355. Ça vient d'un dénommé

  5   Zlatko Ferencevic. Apparemment, il est commandant du poste militaire 313,

  6   et il écrit à la zone d'opération du nord-ouest de l'Herceg-Bosna disant

  7   qu'il y a eu un renfort de 350 soldats, ce qui impliquerait l'intervention

  8   de la République de Croatie en Bosnie-Herzégovine. Alors comment vous

  9   interprétez ce document ?

 10   R.  Je ne sais pas ce que cet homme a écrit. Ce document, je ne l'ai jamais

 11   vu à ce jour et jamais ces soldats-là ne sont arrivés sur ce territoire-là,

 12   jamais. Je ne sais pas d'où cela vient d'ailleurs. Je suis complètement

 13   ignorant de la chose.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va passer au document suivant, P 07034. Ça

 15   vient de M. Siljeg, 4 décembre 1993. Vous n'êtes plus en fonction à cette

 16   époque, mais votre nom est mentionné dans le document.

 17   R.  Oui. Bien, il est évident que cet homme, Anton Juric, que je connais,

 18   qui s'était battu à Vukovar et qui, en 1992, était avec moi à Capljina, à

 19   Mostar, ainsi de suite. C'est un officier brillant, un très bon combattant.

 20   J'ai réussi à le convaincre de rester. Mais ce n'est pas un ordre verbal,

 21   enfin Siljeg le dit, mais c'est plutôt une requête. Il est resté, il a

 22   assumé ses fonctions et il lui donne une attestation pour l'armée croate.

 23   On dit : Praljak l'a gardé afin qu'il puisse confirmer qu'il avait été

 24   volontaire. Il était volontaire en 1992, c'était un volontaire de Vukovar.

 25   Il a réussi à se frayer un passage, lui et un homme nommé Brekalo, ils

 26   étaient tous les deux des gens originaires de l'Herzégovine.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Un document, vous pourrez peut-être nous éclairer.

 28   Je n'ai pas très bien compris la teneur de ce document, le P 01194. Il est

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  1   sous pli scellé, donc il ne faut pas le sortir à l'extérieur. Ça concerne

  2   une opération Alpha-Bravo. On parle d'Halilovic et de Petkovic. Il y a la

  3   question de l'ultimatum. La situation à Mostar et à Jablanica. Alors quel

  4   est l'intérêt de ce document pour votre Défense, puis avez-vous eu

  5   connaissance de ce document ? Est-ce que vos avocats vous l'ont montré ?

  6   R.  J'ai vu le document. C'est tout à fait dénué de sens. C'est le 18

  7   janvier. De quelle date est ce document au juste ? Le 17 janvier ? En

  8   termes simples, ils ont reçu un récit de la part de l'ABiH portant sur un

  9   ultimatum. Il n'y a pas eu d'ultimatum. Il y a eu une demande, pas un

 10   ultimatum, demandant à ces gens-là de se retirer des côtes dont ils

 11   s'étaient emparés. On peut appeler ultimatum ou alors une revendication. Il

 12   n'y a pas eu d'autre ultimatum. Il y a eu un ordre émanant d'Alija

 13   Izetbegovic et de son ministre de la Défense, un dénommé Rajic.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que ce document de nature internationale

 15   parle d'ultimatum, mais ce n'était pas un ultimatum.

 16   R.  Non, ce sont des rumeurs, du ouï-dire. Il y a tout un tas de documents,

 17   pour être tout à fait sincère, qui se trouvent être complètement dénués de

 18   valeur. Dans la plupart des cas, ça ne faisait que rebalancer les positions

 19   de l'ABiH sans pour autant vérifier la véracité de ces positions-là.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : P 01330. Vous allez le voir apparaître. C'est un

 21   rapport du SIS, 27 janvier 1993, rapport manuscrit qui parle de Gornji

 22   Vakuf, des maisons brûlées et une mise en cause de la police militaire du

 23   HVO. Alors qu'est-ce que vous dites ?

 24   R.  Rien. Si le SIS a reçu un rapport en application des dispositions de la

 25   loi, il faut diligenter une enquête, appréhender les individus qui ont

 26   commis cela et on les envoie vers le procureur militaire pour qu'ils soient

 27   poursuivis en justice. C'était leur devoir, leur devoir fondamental,

 28   dirais-je même.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : On va regarder le document suivant que vous avez

  2   cité, P 05330. Vous voyez ce document étant rapproché d'autres documents

  3   concernant les détenus que l'on enlève de l'Heliodrom pour les faire

  4   travailler à l'extérieur. Il y a donc un document qui est déjà préimprimé

  5   et on marque les dates, les noms, voilà. C'est un document du 23 septembre

  6   1993. A l'époque, vous étiez commandant du HVO. Donc il y a 30 détenus qui

  7   ont quitté l'Heliodrom. Alors quel est votre commentaire ?

  8   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous vous référez

  9   au résumé ici, ça devrait être le P 05530; et au PV, on dit que vous auriez

 10   dit 5330 et c'est le document qu'on nous a montré. Dans le résumé de M.

 11   Praljak, on n'a pas fait état de 5330, mais du 5530, si c'est la liste que

 12   vous suivez, et j'imagine que c'est bien celle-là.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, bon, disons par hasard, mais parfois le

 14   hasard fait bien les choses, il y a eu une erreur sur le document parce

 15   qu'on a le 5330, et dans la liste, c'était un autre document. Mais

 16   indépendamment de cette erreur, Monsieur Praljak, on a un document qui

 17   montre que le 2e Bataillon de la 2e Brigade a retiré 30 détenus, le 23

 18   septembre 1993. Alors, vous le saviez, vous ne le saviez pas ?

 19   R.  Je n'ai eu vent d'aucun de ces cas, Monsieur le Juge. Aucun. Ça, ça n'a

 20   pas été plus loin du tout.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, alors peut-être qu'avec le document suivant, on

 22   va aller beaucoup plus vite, parce qu'on l'a déjà vu, ce document, le P

 23   00147, 6 avril 1992. C'est une réunion à Zagreb avec Susak, vous-même,

 24   Munivrana, et vous intervenez après M. Lucic. Bon, on en a parlé, peut-être

 25   que vous n'assistez pas. Pas de commentaire sur ce document, Général

 26   Praljak, puisqu'on l'a déjà vu.

 27   R.  Non, je n'aurais aucun commentaire à faire. Je ne vois pas, maintenant

 28   mais si, mais j'en ai parlé. Je n'ai rien à ajouter.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Vous en avez parlé.

  2   Le document suivant, P 00466. Bien. C'est un document, vous en avez déjà

  3   parlé. C'est le 11 septembre 1992, toujours à Zagreb. Vous êtes là avec

  4   Susak, Radic, Agotic, Lucic et Tudjman, il y a Manolic, également. Vous

  5   parliez de l'industrie militaire. Bon, si vous le permettez, on peut passer

  6   à un autre document, puisque ce document a déjà été vu.

  7   R.  Je n'ai rien à ajouter, mais ce n'est pas Lucic, c'est le général

  8   Lucic. Ce n'est pas la même chose qu'Ivo Lucic.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Un autre document qui a déjà été vu, le P 00524, 26

 10   septembre, Conseil national de la Défense. Il y a M. Mesic, vous-même,

 11   Susak, et là, vous êtes intervenu à plusieurs reprises.

 12   R.  Je n'ai rien à ajouter.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on va passer -- alors ça, c'est un ordre, P

 14   01202, 18 janvier 1993. C'est la situation de Gornji Vakuf. C'est un ordre

 15   qui émane de vous. Vous voyez, ça vient de vous.

 16   R.  Oui.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. Alors, quels sont vos commentaires sur ce

 18   document ?

 19   R.  Pas de commentaires. Il s'agit de cinq MGL, c'est tout à fait en règle

 20   dans -- c'est une arme qui existe dans les armées occidentales, on peut les

 21   voir au cinéma, dans les films. Il n'y a rien d'autre à ajouter.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Document suivant --

 23   R.  Monsieur le Juge, ce n'est pas moi qui ai signé ce document. Entendons-

 24   nous bien. J'ai dit, bon, vous avez mon autorisation, on demandera à cette

 25   Unité Kralj Tomislav pour la restitution de trois armes, et c'est quelqu'un

 26   d'autre qui a signé pour moi.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.  Ce n'est pas votre signature, mais il y a

 28   quelqu'un qui a signé pour vous. Document suivant, P 01350. C'est un

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  1   document qui vient de la police militaire, 29 janvier 1993. On l'a déjà vu,

  2   ce document. C'est un long document où vous allez -- où vous avez répondu à

  3   des questions à Ljubuski à une réunion qui avait commencé à 18 heures. Bon,

  4   je présume que vous n'avez rien de plus à rajouter à ce qui a déjà été dit

  5   ?

  6   R.  Non.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Autre document, P 01852. C'est un document

  8   concernant Travnik, 12 avril 1993.

  9   R.  Je connais le document, enfin, je veux dire, je l'ai déjà vu. Ils

 10   demandent à ce que je revienne là-bas parce que, pendant que j'y étais,

 11   c'était beaucoup mieux que quand je n'y étais plus, du point de vue de la

 12   discipline, de l'ordre, de l'organisation militaire proprement dite, et

 13   cetera.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il semblerait que les drapeaux ont été brûlés

 15   par la police de l'ABiH. C'est au paragraphe 4.

 16   R.  Oui. Il y a eu -- enfin, l'ABiH, à l'époque, avait déjà commencé à

 17   provoquer de façon ouverte à Travnik, et ça conduira à ce que vous savez.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous remarquerez, Général Praljak, que dans ce

 19   document, il y a la présence des Moudjahidines à Travnik, et vous nous

 20   aviez montré une vidéo là-dessus. Vous confirmez cela ?

 21   R.  Oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va passer au document suivant, P 02043.

 23   C'est un document de M. Pasalic, 23 avril 1993. C'est une protestation

 24   envoyée à l'UNPROFOR et apparemment, à l'Union européenne.

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. [hors micro] -- ce document ?

 27   R.  En effet.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, vous êtes mis en cause. Il semble lier tout

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  1   ce qui se passe à vous.

  2   R.  C'est un misérable menteur, paix à son âme. Quelques jours à peine

  3   avant cette date, il prenait un café avec moi, se promenait dans Mostar

  4   Est, et après que j'aie empêché que 30 de ses hommes ne commencent à tirer

  5   sur des positions qui se situaient en profondeur dans Mostar Ouest, paix à

  6   son âme, mais c'est vraiment un sale menteur. Il sait exactement de quoi il

  7   s'agissait, car il a parcouru Mostar de long en large en ma compagnie afin

  8   d'éviter que n'éclatent des conflits.

  9   Ici, c'est de la politique. Il s'agit de politique telle qu'on la pratique,

 10   de la politique dans le plus mauvais sens du terme, qui passe par

 11   l'utilisation du mensonge. Il avait pris un café avec moi, on avait décidé

 12   de se montrer publiquement en compagnie l'un de l'autre afin que les gens

 13   voient qu'il n'y aurait pas de conflit. Ensuite, lui, il écrit cette lettre

 14   à la FORPRONU.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant, P 02280. C'est un document qui

 16   vient de vous-même, qui est adressé au colonel Siljeg. On n'a pas tout à

 17   fait la date, mais vous allez peut-être nous renseigner.

 18   R.  Je ne vous renseignerai absolument pas concernant ce document car

 19   il n'émane pas de moi. C'est l'énième fois que je le dis et je vais le

 20   répéter encore une fois. Ce n'est pas mon écriture, ce n'est pas ma

 21   signature, ni le style qui est le mien, ce n'est pas un document qui émane

 22   de moi.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : On l'avait déjà vu ce document.

 24   Document suivant, P 03682. C'est un document qu'on a également déjà

 25   vu et ça va aller très vite. C'est dès votre prise de fonction le 24

 26   juillet, vous écrivez à M. Tudjman pour demander du renfort.

 27   R.  Ce document émane bien de moi. Je l'ai signé. J'ai demandé précisément

 28   ce qui est indiqué ici et je n'ai rien reçu de tout cela. Cela je l'ai

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  1   réitéré le 5 novembre à Split lorsque j'étais en train d'expliquer que je

  2   partirais et la façon dont il convenait de procéder. J'ai encore demandé

  3   qu'on m'accorde deux bataillons, ce qui prouve que je n'ai reçu -- je n'ai

  4   pas non plus reçu les deux qui sont mentionnés ici, et pour autant que je

  5   sache, ils n'ont pas été envoyés ultérieurement non plus. L'armée croate

  6   n'est pas venue sur place. Il y a eu un petit nombre de volontaires qui

  7   sont venus, et ici, nous avons tout simplement la preuve que si j'avais à

  8   ma disposition des brigades de l'armée croate entière. Je ne serais pas en

  9   train de demander piteusement de supplier pour qu'on m'accorde deux

 10   bataillons, et vous savez à quoi ressemblaient ces bataillons.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document suivant, P 03821, c'est un document qui

 12   vient du 4e Bataillon Petar Kresemir, 30 juillet 1993. Donc c'est six jours

 13   après votre prise de fonction. Donc c'est un rapport où vous êtes cité dès

 14   le premier paragraphe, et puis vers la fin du rapport, on parle du Musulman

 15   extrémiste, Paraga. Alors est-ce que vous connaissez ce document, et quel

 16   intérêt il a pour votre défense ?

 17   R.  La portée de ce document est tout à fait claire, Monsieur le Juge. Il

 18   s'agit d'un Bataillon professionnel du HVO, qui littéralement ne me

 19   supporte absolument pas, pas le moins du monde. Un petit commandant,

 20   Vucica, qui est à la tête dont je ne sais combien de ces soldats, dit tout

 21   simplement que je suis un imbécile, un imbécile qui ne sait pas ce qui se

 22   passe dans son commandement, lui dispose de certaines informations; moi, je

 23   lui en donne d'autres. Ensuite lorsqu'il a pris -- il a entendu tout cela,

 24   il a vu combien de soldats il y avait sous son commandement, il a déclaré

 25   qu'il n'obéirait pas à cela, et que Praljak était un imbécile. Aucun des

 26   soldats sous ses ordres n'obéiraient à cet imbécile de Praljak. Voilà. Vous

 27   voyez ce que c'est cette armée, et dans une situation comme celle-là, moi,

 28   il faut ensuite que je passe un mois pour essayer de trouver quelqu'un qui

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  1   va pouvoir le remplacer, en plus lui il est protégé par ses relations sur

  2   place.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document suivant, P 06203. P 06203. C'est un

  4   document du 28 octobre 1993. Vous êtes toujours en fonction. C'est le

  5   colonel Siljeg qui écrit au chef du département de la Défense, secteur

  6   santé. On a déjà vu le document et l'objet. Est-ce que vous avez un

  7   commentaire supplémentaire à faire ?

  8   R.  Non, je n'ai pas de commentaire supplémentaire à faire.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document P 02039, c'est un document qui est daté

 10   du 22 avril 1993, qui est sur la situation de Jablanica et Konjic, et qui

 11   est adressé au quartier général du HVO à Mostar. C'est un rapport

 12   classique. Quel commentaire voulez-vous faire ?

 13   R.  Aucun commentaire. Ce document correspond à une période de temps où je

 14   n'accomplissais aucune fonction officielle, je n'ai pas de commentaire, à

 15   ceci près que je suis plutôt bien au courant de tout ce qui s'est passé,

 16   mais il ne m'appartient pas de commenter ces événements, sauf si vous le

 17   souhaitez, bien sûr, ce document est adressé à l'état-major du HVO à

 18   Mostar; à ce moment précis, c'est M. Petkovic que cela concerne.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais petit problème, Général Praljak. Vous êtes en

 20   copie -- votre nom apparaît comme destinataire du document. Regardez à la

 21   fin.

 22   Monsieur le Greffier, faites voir la dernière page. Là, vous voyez -- non,

 23   encore, après --

 24   R.  Oui, je le vois. Il est absolument certain qu'à cette époque-là je n'ai

 25   pas reçu ce document, mais puisque je circulais sur place et que j'essayais

 26   d'apaiser la situation, probablement qu'on a souhaité me mettre au courant,

 27   moi aussi, pour que je sache ce qui était en train de se passer.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Document P 03957. Bon, c'est un document qu'on a

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  1   déjà vu. C'est un document que vous n'avez pas signé mais qu'on a signé

  2   pour vous, qui concerne Kapular et Tole. Est-ce que vous avez un

  3   commentaire complémentaire à faire ?

  4   R.  Kapular était né dans un village en contre-haut de Capljina. Tole est

  5   né dans un village près de Siroki Brijeg. Il a été fait prisonnier à

  6   Bugojno suite à une trahison, et ensuite emmené en prison, une prison de la

  7   VRS, c'était un membre de la HV, de l'armée croate, et moi, je demande donc

  8   qu'on veuille bien m'accorder ces deux officiers. Zarko Tole est venu, et

  9   Kapular lui faisait son apparition de temps en temps sur place, il était

 10   avec des volontaires du 9e -- de le 5e Brigade de la Garde nationale qui

 11   avait à peu près 200 hommes.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document suivant est sous pli scellé, le P 04272.

 13   Donc il ne faut pas qu'il apparaisse à l'extérieur. Bien, alors dans ce

 14   document traditionnel c'est un rapport sur tout ce qui se passe à Mostar, à

 15   Travnik, à Tuzla, la question humanitaire. Bien. Alors quel est l'intérêt

 16   pour votre Défense de citer ce document ?

 17   R.  Pardon.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être qu'il serait

 19   bon que le général puisse voir le point numéro 3 sur l'autre page, sur la

 20   seconde pas. C'est la raison pour laquelle nous avons cité ce document. Or,

 21   il ne peut le voir sur l'écran, c'est la page 2 en B/C/S.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, regardez le point numéro 3. Voilà,

 23   vous avez le numéro 3 dans votre langue. Il est fait état d'une rencontre

 24   avec vous-même.

 25   R.  Oui. Ça n'a pas été rapporté de façon exacte. C'est en partie exact,

 26   disons. Il dit, il parle des victoires emportées contre les Musulmans mais

 27   on ne peut pas vaincre les Musulmans, on ne peut que se défendre contre

 28   leurs attaques. Il dit que je vais bloquer le passage de l'aide humanitaire

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  1   mais ça c'est une idiotie car cela n'a jamais traversé l'esprit. Vous avez

  2   par ailleurs eu l'occasion de le voir, donc c'est tout à fait clair et il

  3   s'agit là d'ajouts. Quant à cette histoire d'approvisionnement en eau,

  4   c'est une totale absurdité. Je ne sais pas comment cela est venu à l'esprit

  5   de ces gens-là. On ne peut pas bloquer cet approvisionnement à Vakuf. Je ne

  6   sais même pas où est la source d'approvisionnement.

  7   Chaque localité a une forme ou une autre d'approvisionnement de

  8   source d'eau, d'approvisionnement en eau et ce ne sont pas de petites

  9   villes. Rama a sa propre source. Vakuf a la sienne. Ce sont des bêtises.

 10   Ils ont probablement lu ça quelque part. On va bloquer l'approvisionnement

 11   en eau de je ne sais pas quelle ville, de San Francisco, sans doute. Cela

 12   n'a absolument aucun lien.

 13   Alors il est exact que les négociations sur le plan politique

 14   allaient dans le sens que nous renoncions à Zepce, à Vares, à Tuzla, à

 15   condition que l'on parvienne à un accord. Donc que ces localités ne se

 16   trouveraient pas des provinces croates mais à condition qu'il y a un accord

 17   au terme duquel les Croates là-bas puissent être protégés de la même façon

 18   que les Musulmans seraient protégés ailleurs donc que les Croates soient

 19   protégés dans ces zones où ils avaient une majorité de voix. Bien sûr, il

 20   s'agit d'un corridor qui mène à la côte ? Mais vous voyez l'absurdité de la

 21   situation. Ils parlent d'un Etat conjoint, d'un Etat commun, et ils veulent

 22   un corridor menant à la mer. Mais alors à qui appartient cet Etat ? Cela

 23   veut dire qu'ils se préparent à prendre leur part et à nous expulser. Un

 24   corridor c'est comme si on parlait d'un corridor qui mènerait de Paris

 25   jusqu'à la côte en traversant toute la France pour certaines catégories de

 26   citoyens français.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document suivant P 04640, c'est un document que

 28   vous avez signé qui est adressé à M. Stanic, Marko et ça concerne Klis.

Page 41889

  1   Alors quel est l'intérêt de ce document ?

  2   R.  L'intérêt est de montrer qu'on ne peut pas s'adresser ainsi à une armée

  3   en disant sans la moindre contestation immédiatement exécuter cela, sans la

  4   moindre discussion. Quand on rédige un ordre au sein d'une armée organisée,

  5   tout cela est implicite alors qu'ici on voit qu'il y a des ajouts et puis

  6   après je les menace, si je les menace de les arrêter, de leur couper l'eau

  7   et les vivres parce qu'ils refusent d'obéir à cet ordre. Il y a un autre

  8   document qui où je dis : enfermez-les, coupez-leur les vivres et l'eau

  9   jusqu'à ce que j'arrive.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant est à mettre en relation avec

 11   celui-là; c'est le P 04645. Ça vient de Bozo Pavlovic. C'est adressé au

 12   commandement avancé à Citluk, 31 août 1993. Donc ça parle du Bataillon

 13   indépendant Klis. Alors, Monsieur Praljak, vos commentaires ?

 14   R.  Ils n'ont pas exécuté l'ordre mais c'est ce qui est dit ici, on est

 15   parvenu à un accord verbal, donc ce qui est dit c'est que le 1er septembre

 16   ils vont accomplir les devoirs qui sont les leurs. Mais dans l'armée il ne

 17   s'agit pas de devoirs et tout cela nous en dit beaucoup sur ce qu'était la

 18   réalité de ce que nous appelons "une armée." A ceci près que je voudrais

 19   souligner qu'un grand, un très grand nombre d'hommes a combattu

 20   honorablement et a accompli son devoir. Mais il y a eu aussi énormément de

 21   situations comme celle-ci, on va se mettre d'accord oralement et puis on va

 22   assumer nos obligations par rapport à telle ou à telle question.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant, P 05188. Alors ce document il est

 24   signé par vous. Il n'y a pas de date. Vous dites que c'est un ordre qui

 25   vient du président de la HR HB et c'est adressé à toutes les unités. Alors

 26   qu'est-ce que vous dites sur ce document ?

 27   R.  Rien de particulier. Selon la logique qui est celle du commandement

 28   militaire, parce que j'ai reçu de Mate Boban l'ordre qui était le sien, il

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  1   était de mon devoir de faire suivre cet ordre à destination des échelons

  2   inférieurs. Donc les commandements des zones opérationnelles, des brigades

  3   devaient se voir accorder une aide, et conformément à cet ordre la police

  4   militaire et les autres employés et fonctionnaires doivent, eux aussi, être

  5   informés, on doit leur assigner des tâches propres. On doit leur fournir

  6   les explications nécessaires. Alors, là, il s'agissait d'encore une de ces

  7   tentatives pour essayer de remettre de l'ordre dans cette situation. Il

  8   s'agissait de l'organisation de ce territoire du passage des convois et

  9   ainsi de suite. Il faudrait avoir l'ordre précis dont il s'agit pour

 10   vérifier.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant P 0 --

 12   Oui, Monsieur --

 13   M. STRINGER : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président. Mais

 14   vous nous avez dit que le document n'a pas de date, mais je regardais dans

 15   la version originale, et la date est dans la version originale. Elle n'est

 16   pas traduite, c'est tout, c'est le 18 septembre 1993, mais elle ne figure

 17   pas dans la traduction.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La date figure dans le document original mais

 19   pas dans la traduction, donc 18 septembre 1993.

 20   Vous êtes d'accord, Monsieur Praljak ?

 21   R.  Oui, Monsieur le Président. C'est à 99 % certain. Pour ce qui est de

 22   l'accord secret entre Tudjman et Izetbegovic, au terme duquel cet ordre a

 23   été adressé, nous voyons qu'en même temps, ils commencent une offensive, en

 24   fait, ils ont commencé même quelques jours auparavant. Etiez-vous censé

 25   faire comme si rien ne s'était pas passé, agir comme des idiots ? 

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document suivant P 05279, c'est un document signé

 27   par vous, qui est adressé à toutes les zones opérationnelles, et qui

 28   concernent les sanctions disciplinaires et les sentences de prison qui

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  1   peuvent être imposées par un commandant ou une personne autorisée par la

  2   loi et il y a la mention de la prison de Dretelj. Alors quel est votre

  3   commentaire sur ce texte ?

  4   R.  Je pourrais ajouter ceci. Le 22 septembre, tous les éléments dont je

  5   dispose sont clairement indiqués ici, Dretelj est une prison et je demande

  6   que tous les soldats qui ont été condamnés à purger une peine soient

  7   envoyés à Dretelj. Voilà. C'est ce que je sais concernant Dretelj. Cela en

  8   fait pour les raisons suivantes car dans les petites localités où il y

  9   avait des prisons, ils avaient les tendances à relâcher les soldats qui

 10   avaient été condamnés, parce que ces derniers avaient des relations. Afin

 11   d'éviter le genre d'objection qui me parvenait et qui disait, voilà, celui-

 12   ci a été condamné mais je l'ai vu se promener en liberté dans telle ou

 13   telle localité, je demande qu'il soit envoyé à Dretelj, et que les

 14   documents soient également envoyés là-bas, documents précis indiquant

 15   pourquoi il a été condamné à purger telle et telle peine, à partir de

 16   quelle date, et cetera.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Document suivant, P 05724. C'est un document qui

 18   émane de la République de Croatie, district militaire d'Osijek, 5e Brigade

 19   de la Garde, et qui vous est adressé.

 20   R.  Oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vos commentaires ?

 22   R.  Ceci est exact, à savoir qu'à partir de la 5e Brigade de la Garde

 23   nationale, la Brigade de Vinkovci, il a été fourni des volontaires qui se

 24   sont trouvés sur le champ de bataille, et ce sous le commandement du HVO.

 25   Dans les documents où j'énumère les unités dont je dispose à Rama, une

 26   vingtaine unités, il s'y trouve 140 et quelque personnes, 140 et quelque

 27   hommes originaires de cette unité. Il s'agissait de fantassins. Il y avait

 28   peut-être encore 30 ou 40 autres personnes accomplissant d'autres fonctions

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  1   et il s'agissait en tout cas de volontaires. Si ce sont des volontaires,

  2   j'ai déjà expliqué c'est parce qu'il s'agit de cette population qui dans

  3   les années 1950 avait quitté les terres pauvres de l'Herzégovine pour aller

  4   s'installer dans des terres plus fertiles, en Slavonie, mais ils ont

  5   conservé leur lien avec leur région d'origine. C'est pour cela qu'il s'agit

  6   ici de volontaires, car ce sont des personnes qui sont nées en Herzégovine

  7   ou alors leurs parents sont nés en Herzégovine et plus précisément en

  8   Herzégovine occidentale.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : On va regarder le document suivant qui est constitué

 10   de deux ordres réquisitionnant des prisonniers, P 06442.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, afin de

 12   gagner du temps, ce document P 06442 nous l'avons en fait inclus ici par

 13   erreur. Alors à l'époque, pardon, nous l'avons inclus dans la description

 14   que nous avons fournie dans le prétoire électronique. Ultérieurement, cette

 15   liste a été modifiée, et le document lui-même l'a été aussi. Par

 16   conséquent, ce document n'est pas un document que nous souhaitons citer. Il

 17   avait été cité à l'époque, mais quand cela a été corrigé, nous avons estimé

 18   qu'on n'en avait plus besoin.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : On le retire et on va passer au document P 08765.

 20   C'est une interview que vous avez donnée, "je ne suis pas responsable."

 21   Alors ne commentez pas longuement l'interview, mais simplement pouvez-vous

 22   nous dire pourquoi vous aviez trouvé la nécessité de faire cette interview,

 23   à ce moment-là, c'est-à-dire le 9 mai 1997.

 24   R.  Parce que, Monsieur le Président, nous avons, en fait c'est Nebojsa

 25   Taraba, si vous lisez ici ce qu'il écrit comme étant une affirmation dans

 26   la partie introductive de son article, il sera tout à fait clair pour vous

 27   que c'était une véritable chasse aux sorcières qui était en train de se

 28   dérouler, et que nous tous, dans ce contexte, dans le contexte de cette

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  1   chasse aux sorcières et de ce journaliste communiste hérité de l'ancienne

  2   Yougoslavie, nous étions tous des voleurs, des vauriens, des criminels et

  3   que sais-je encore, à leurs yeux. Cette interview, que j'ai lue, est

  4   truffée de mensonge de leur part. il y a certaines parties qui sont

  5   exactes, mais les inter articles, les sous-titres sont faux, mensongers. On

  6   me prête des paroles, de nombreuses paroles que je n'ai jamais prononcées

  7   et les mots qu'il prononce au début sont tout à fait honteux, les mots

  8   qu'il écrit. Très sincèrement, Messieurs les Juges, cette chasse aux

  9   sorcières a atteint un tel degré que dans une certaine mesure j'ai même été

 10   content au moment où je me suis retrouvé ici dans ce Tribunal, afin que

 11   l'on voie enfin de quoi il s'agissait, car c'était devenu insupportable.

 12   Or, il est difficile d'être détenu, de répondre à tout ce qui est

 13   allégué dans l'acte d'accusation, mais permettait enfin que je puisse

 14   savoir de quoi je suis coupable et pourquoi en se fondant sur des

 15   documents. Quant à ceci, cette façon de procéder où tout un chacun peut

 16   salir votre honneur et écrire tout et n'importe quoi à votre sujet, c'est

 17   tout à fait courant en Croatie, et vous, vous ne pouvez rien faire contre

 18   cela. Cela représente une source de frustration considérable qui peut être

 19   dangereuse y compris pour la santé.

 20   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, j'aimerais

 21   demander si vous procédez d'autres articles parus dans la presse croate de

 22   l'époque, qui pourraient étayer votre position, puisque ce document dont on

 23   parle, je ne suis pas responsable, est un peu l'exception à la règle. En

 24   général, votre comportement et le comportement du HVO étaient traduits

 25   d'une façon extrêmement positive dans les autres magazines ou publications

 26   croates à l'époque.

 27   R.  Messieurs les Juges, la presse croate s'est partagée en une aile

 28   gauche qui a tout simplement repris l'héritage communiste sans souhaiter

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  1   avancer le moins du monde, ni prouver quoi que ce soit. C'était une partie,

  2   et ensuite il y avait une minorité, qui eux, s'efforçaient d'arriver à la

  3   vérité. Mais c'est chaque semaine qu'au moins un imbécile avait l'occasion,

  4   la possibilité d'écrire quelque part, de dire que, moi, j'avais détruit le

  5   Vieux pont de Mostar. Au début, j'essayais de réagir, mais j'ai fini par

  6   renoncer, car c'est impossible lorsque cela est répété, réitéré aussi

  7   régulièrement. J'ai demandé qu'on me fournisse au moins une preuve de cela,

  8   mais c'était impossible.

  9   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci. Votre réponse montre,

 10   me semble-t-il, que vous n'avez pas de confirmation écrite de ce genre, que

 11   vous n'avez non plus des négations de ce qu'on trouve dans cet article-ci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, il me reste exactement une

 13   douzaine de documents, et le prochain, on le verra demain, c'est le P

 14   00742, donc je demanderais au Greffier, dès demain, pour gagner du temps

 15   d'afficher ce numéro. Voilà, donc et puis on reverra votre dernier document

 16   demain, n'oubliez pas de me le rappeler. Puis, bon, peut-être à ce rythme

 17   30 à 40 minutes, ça me suffira. Alors je voudrais savoir qui va commencer

 18   après, pour la Défense, pour le contre-interrogatoire ?

 19   Oui, Monsieur Praljak.

 20   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge

 21   Antonetti, vous avez dit que l'on examinerait également la question des

 22   tireurs embusqués qui ont agi à Mostar, à l'époque où j'étais présent où je

 23   commandais, afin de déterminer précisément ce qui s'est passé. Cela

 24   prendrait tout au plus 20 minutes, afin de montrer sur un plan strictement

 25   mathématique comment la situation se présentait sur le terrain par rapport

 26   aux allégations de l'Accusation.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement j'avais dit que je vous interrogerais

 28   là-dessus, j'avais préparé un petit tableau. J'essaierais de faire vite

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  1   pour aborder cela mais donc en 30, 40 minutes, je devrais terminer demain.

  2   Mais ce que je voudrais savoir c'est qui va commencer demain.

  3   Maître Karnavas.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour,

  5   Monsieur les Juges. C'est moi qui vais commencer demain et je demanderais

  6   sans doute une brève interruption après que vous en aurez terminé. S'il

  7   vous faut 45 minutes ou une heure, peut-être qu'on fera une pause; sinon,

  8   je commencerai -- j'enchaînerai tout de suite.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais comme ça nous ne perdrons pas de temps.

 10   Bien, donc je souhaite à tout le monde une bonne fin de soirée. Nous nous

 11   retrouverons donc demain matin à 9 heures.

 12   --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 24 juin

 13   2009, à 9 heures.

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