Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 41896

  1   Le mercredi 24 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à tous dans le prétoire.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic

 12   et consorts.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce mercredi 24 juin 2009, je salue M. Praljak en premier; je salue M.

 15   Pusic, Petkovic et Stojic ainsi que tous ceux qui sont, malheureusement,

 16   pour des raisons diverses, absents. Je salue Mmes et MM. les avocats. Je

 17   salue M. Stringer et tous ses collaborateurs et collaboratrices ainsi que

 18   toutes les personnes qui nous assistent.

 19   La Chambre va rendre une décision orale concernant les délais liés aux

 20   dépôts des listes IC. Alors voilà le titre de la décision orale : décision

 21   orale portant modification des délais prévus pour le dépôt des listes IC à

 22   l'issue de la comparution de l'accusé Praljak. Par décision orale du 22

 23   juin 2009, les parties ont été informées des délais quelles devaient

 24   respecter à l'issue de la comparution de l'accusé Praljak pour le dépôt de

 25   leurs listes IC, en admission de pièces, de leurs objections à ces listes

 26   IC et de leurs éventuelles répliques aux objections.

 27   La Chambre rappelle que ces délais sont ceux prévus par la ligne directrice

 28   numéro 8 de la décision portant adoption de lignes directrices pour la

Page 41897

  1   présentation des éléments de preuve à décharge. A l'audience du 22 juin

  2   2009, la Défense Praljak et l'Accusation ont néanmoins sollicité de la

  3   Chambre une prorogation des délais prévus dans la décision orale.

  4   Compte tenu de l'importance prévisible du nombre de documents qui pourrait

  5   être demandé en admission par les parties, la Chambre décide de faire

  6   exceptionnellement droit aux demandes de la Défense Praljak et de

  7   l'Accusation, de modifier en conséquence sa décision orale du 22 juin, mais

  8   uniquement en ce qui concerne les délais prévus et demander à toutes les

  9   parties de respecter les délais suivants :

 10   Le dépôt des listes IC de demande en admission de pièces devra être

 11   effectuée dans les trois jours suivant le dernier jour de l'audition de

 12   l'accusé Praljak. Le dépôt des objections à ces listes IC devra être fait

 13   dans le délai de sept jours suivant le dépôt des listes IC. Le dépôt des

 14   éventuelles répliques à ces objections devra être effectué dans le délai de

 15   trois jours suivant le dépôt des objections.

 16   Bien. Donc voilà la décision. Quand M. Praljak aura terminé, le dépôt donc

 17   des listes interviendra dans les trois jours après. S'il y a des

 18   objections, elles devront être faites dans le délai de sept jours et s'il y

 19   a des répliques aux objections, le délai sera de trois jours à ce moment-

 20   là. Voilà c'est compliqué, mais vous lirez la décision à tête reposée, et

 21   j'espère que cette décision permettra à tout le monde de bien travailler

 22   compte tenu du fait qu'il y a énormément de documents.

 23   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Questions de la Cour : [Suite]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Praljak, je vais donc terminer

 27   aujourd'hui, je l'espère, mais je pense que j'y arriverai. La liste donc

 28   des pièces qui vont faire l'objet donc de mes questions, il y a une

Page 41898

  1   douzaine de documents. Après cela, comme je l'avais dit il y a longtemps

  2   déjà, je vous poserai des questions sur les tirs par les snipers concernant

  3   sept victimes, et je vous dirai cela tout à l'heure.

  4   Alors pour le moment, nous allons donc regarder le document qui est

  5   affiché, et qui est le document P 742. Comme vous le voyez, Monsieur

  6   Praljak, ce document émane de la République de Croatie, du ministère de la

  7   Défense.

  8   Il est daté du 14 novembre 1992, et cet ordre fait suite donc à une demande

  9   qui aurait été formulée par vous-même pour transférer plusieurs officiers

 10   qui étaient dans la zone opérationnelle de Split vers Capljina. Bien. Alors

 11   c'est vos propres avocats qui ont mentionné ce document. C'est dans quel

 12   but ?

 13   R.  Ces officiers suite à un entretien que j'ai eu avec eux à Split ont

 14   accepté donc de partir en Bosnie centrale pour un mois, Travnik, Novi

 15   Travnik, et autres localités car, suite à ce qu'on a vu -- enfin, déjà la

 16   chute de Jajce, la débandade, la grande désorganisation, tant au niveau du

 17   HVO que dans l'ABiH, je suis allé à la zone opérationnelle de Split pour

 18   m'entretenir avec les gens là-bas, pour demander aussi qu'est-ce qui

 19   voudrait bien aller pour un mois dans la région aux fins d'aider à

 20   organiser tout ce qui constitue le système militaire. J'ai demandé à avoir

 21   quelqu'un au niveau de l'artillerie, puis que j'aie quelqu'un pour les

 22   transmissions, pour qu'on ait de meilleures transmissions, puis

 23   organisation de la brigade, puis quelqu'un pour aider à expliquer comment

 24   on fortifie une première ligne de défense, et ainsi de suite. Alors il a

 25   été convenu avec ces gens de la chose, ils ne sont pas tous allés. Cela, je

 26   crois qu'au début, ils étaient huit, et ensuite on a convenu que cinq

 27   suffiraient, donc il y en a cinq qui sont partis vers la Bosnie centrale à

 28   l'attention du HVO et de l'ABiH, aux fins donc d'aider à organiser les

Page 41899

  1   choses comme je vous l'ai dit. Ils sont restés un mois et ils sont rentrés

  2   chez eux.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je vais passer maintenant au paragraphe

  4   192 qui a trait aux événements de Stupni Do, et on va revoir un document

  5   qu'on a déjà vu mais il m'apparaît nécessaire maintenant de s'étendre

  6   encore sur ce document, c'est le P 06026. Voilà, alors je regarde à

  7   l'écran, voilà, alors on a le document version anglaise et ce qui est très

  8   important c'est le document en B/C/S qui est à l'écran, et que ce matin aux

  9   aurores j'ai été recherché pour l'étudier de manière très approfondie.

 10   Alors, Général Praljak, ce document est un rapport de M. Rajic, rapport qui

 11   est adressé, comme on le voit, à M. Kordic, à M. Petkovic, et à M. Blaskic,

 12   ainsi comme on le voit à M. Mario Bradara. C'est un rapport daté du 23

 13   octobre 1993. Nous voyons qu'il y a un tampon d'arrivée, vous le voyez, 28

 14   octobre 1993. Ce document a été officiellement donc enregistré sous le

 15   numéro 5021.

 16   Alors que dit ce document, M. Rajic fait un rapport sur les attaques par le

 17   MOS dans la zone de responsabilité de la Brigade de Bobovac. Il évoque la

 18   situation de Stupni Do, comme quoi les Musulmans ont établi donc leurs

 19   forces et il dit qu'il y a eu une attaque le matin Bogos. Il explique que

 20   plusieurs membres du MOS ont été tués et quelques civils et concernant les

 21   pertes du HVO il y aurait deux tués et sept blessés. Puis il continue en

 22   disant qu'il a passé en isolation Pejcinovic, Duznovic et Gavran. Bien.

 23   Alors sur le document, on voit écrit d'une main, le mot "Petkovic," comme a

 24   été souligné également les trois noms, Pejcinovic, Duznovic et Gavran, et

 25   il y a deux phrases.

 26   Alors première question, Monsieur Praljak : est-ce que c'est votre écriture

 27   qui est sur ce document ?

 28   R.  Oui.

Page 41900

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxièmement, Monsieur Praljak, vous avez pris

  2   connaissance de ce document; à quelle date exactement ? Etant précisé que,

  3   moi, je vois un tampon d'arrivée, 28 octobre, mais est-ce que vous avez

  4   pris connaissance le 28 octobre ou après, ou avant le 28 octobre ?

  5   R.  Le 23 octobre 1993, vers 11 heures du soir, donc à 23 heures à peu

  6   près.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, alors j'ai découvert un problème de traduction

  8   concernant la phrase que vous avez écrite parce que, dans le jugement

  9   Rajic, on a traduit le début de la phrase par les mots : "sort out" alors

 10   que, dans le document que nous avons, nous, sous les yeux, il y a les mots,

 11   "deal with." Alors je ne comprends pas que, dans le jugement Rajic, se

 12   trouve la traduction "sort out" sans note de bas de page qui permet de

 13   savoir à quel document se réfèrent les conclusions de la Chambre Rajic.

 14   Alors, Monsieur Praljak, pouvez-vous lentement me lire la première phrase

 15   que vous avez écrite.

 16   R.  "Régler la situation à Vares, sans pitié à l'égard de quiconque.

 17   "Trouver les hommes -- trouver des hommes à la mesure des --" relevez, s'il

 18   vous plaît, le texte; relevez, oui.

 19   "Alors trouver les hommes qui sont à la taille des temps et des

 20   missions à accomplir."

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, en lisant la phrase dans la version

 22   française, la traduction c'est : "régler la situation à Vares," et là, vous

 23   voyez, au transcript, ça a été traduit par "sort out" ce qui est dans le

 24   jugement Rajic.

 25   Vous pouvez regarder dans le document en anglais, Monsieur le Greffier,

 26   faites venir la dernière page du document anglais.

 27   Voilà, vous voyez à la deuxième page, il n'y a pas "sort out" mais "deal

 28   with." Alors je ne comprends pas qu'il n'y ait pas exactement les mêmes.

Page 41901

  1   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors ceci me paraît important, Monsieur Praljak,

  3   parce que, dans le jugement Rajic, il a été écrit que vous aviez ordonné

  4   donc de régler la situation à Vares sans merci à l'égard de quiconque. Mais

  5   il n'y a aucune référence au contenu du document. Alors un Juge raisonnable

  6   qui voit ça, peut se dire par cet ordre, il a dit de tuer tout le monde.

  7   Alors il faut maintenant regarder le document.

  8   Alors première question, Monsieur Praljak : quand M. Rajic fait ce rapport,

  9   il y a déjà eu des victimes puisque, des deux côtés, il dit dans son

 10   rapport qu'il y a eu des victimes de part et d'autre; est-ce que vous êtes

 11   d'accord avec ça ou pas ?

 12   R.  Oui.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Le rapport de M. Rajic est postérieur aux événements

 14   ?

 15   R.  Oui.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : La phrase de ne pas faire -- "de ne pas faire de

 17   merci" n'a pas une application rétroactive parce que les victimes, elles

 18   existent déjà.

 19   R.  C'est exact. Mais cela ne se rapporte pas du tout. --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je me suis dit, je me suis posé la

 21   question et je voudrais que vous essayiez de m'éclairer, je me suis dit

 22   pourquoi il a indiqué, "régler la situation." Alors je fais peut-être une

 23   erreur. Mais comme vous avez souligné les trois noms et que vous avez pris

 24   la peine de rédiger un texte, je me suis demandé est-ce qu'il n'y a pas une

 25   liaison entre les noms qui sont soulignés et le texte, à savoir régler la

 26   situation des trois qui sont détenus et que s'il y a, à ce moment-là, des

 27   fautes commises, il faut ne pas faire de merci, j'allais dire de fleur ou

 28   il faut être sans pitié même si ce sont des gens du HVO. Ce qui

Page 41902

  1   expliquerait pourquoi vous avez dit à l'égard de quiconque, "anyone." Alors

  2   est-ce bien cette interprétation ou il peut y avoir une autre ?

  3   R.  C'est une bonne interprétation. Voilà, il a placé en isolement des

  4   gens. La situation est peu claire déjà, et en croate, on dit de la sorte,

  5   c'est ce que j'ai dit dans la vie, dans le quotidien. Règle la situation,

  6   parce que c'est le bazar. Alors vis-à-vis de tout le monde, que se passe-t-

  7   il donc. La deuxième phrase dit : trouve-moi des hommes qui sont à mêmes,

  8   qui sont à la mesure du problème. C'est je crois toute personne le dirait

  9   cela, et dans les autres langues, on dit aussi : règle la situation, parce

 10   que c'est le bazar. On a placé des gens dans l'isolement, moi, je n'ai pas

 11   tous les faits à ma disposition, mais c'est adressé à Petkovic. Petkovic

 12   comprend parfaitement bien ce que je suis en train de le dire.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à M. l'Huissier de mettre sur

 14   l'ELMO le paragraphe 39 du jugement.

 15   Monsieur l'Huissier, allez mettre sous l'ELMO le paragraphe 39 du jugement

 16   qui est en anglais, mais les avocats vont voir ce qui est écrit.

 17   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis désolé de

 18   vous interrompre, mais j'ai besoin de prendre la parole puisque c'est le

 19   moment opportun. Au cours des dernières questions, à propos de ce fameux

 20   "sort out" par rapport à "deal with," le problème de traduction en langue,

 21   les interprètes de la langue anglaise à plusieurs reprises ont bien fait

 22   savoir -- ont fait des commentaires mais qui ne sont que partiellement

 23   retranscrits au compte rendu. A la page 15, par exemple de la ligne 6, et

 24   la page 17, vous avez remarqué en effet qu'il y avait une différence entre

 25   les deux traductions, pour régler on a "deal with" ou "sort out." Peut-être

 26   que les interprètes -- peut-être que la clarification apportée par les

 27   interprètes, elle doit être totalement retranscrite, parce qu'il manque un

 28   morceau à l'heure actuelle.

Page 41903

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors attendez. On va essayer de régler cela

  2   s'il y a un problème, on pourra demander à CLSS de nous faire la

  3   traduction.

  4   Alors, Monsieur Praljak, lentement pouvez-vous nous relire la première

  5   phrase.

  6   R.  "Régler la situation à Vares sans pitié à l'égard de quiconque."

  7   Alors, Messieurs les Juges --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Le problème c'est un problème de

  9   traduction. On voit que les interprètes anglais ont mis "sort out or deal -

 10   -"

 11   L'INTERPRÈTE : La même chose --

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : -- ils disent, pour eux, c'est la même chose. Bon.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors quand on dit "srediti" en langue croate,

 14   dans la racine du mot, il y a "sred." "Sred" veut dire "ordre" -- non, non,

 15   je ne vais pas le dire en anglais parce que je ne parle pas, or "ordnung"

 16   en allemand. Bon. Mais toujours est-il, il y a un désordre donc le

 17   contraire de l'ordre, ce qui est la débandade. Alors quand ont dit

 18   "srediti" ça veut dire remettre de l'ordre. En langue croate, ça veut dire

 19   remettre de l'ordre dans le prétoire, sur la route, dans une entreprise, au

 20   sein de la police, donc régler la situation, remettre de l'ordre, et c'est

 21   l'explication de la signification de ce mot en croate. Ça veut dire

 22   "remettre de l'ordre."

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors j'ai voulu mettre, sous l'ELMO, le

 24   paragraphe 39 parce que, quand on le lit tel qu'il est dans le jugement,

 25   vous auriez vous donné l'ordre à M. Rajic de ne pas faire de merci, et que

 26   cet ordre était connu par les commandants locaux, et cetera, et que donc il

 27   pouvait y avoir une attitude agressive à l'encontre des Musulmans dans la

 28   région de Vares. Simplement ce que ne dit pas le paragraphe 39 c'est que

Page 41904

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41905

  1   votre mention est postérieure aux événements et qu'elle ne prend pas en

  2   compte la situation des trois Croates qui ont été mis à l'isolation par

  3   Rajic.

  4   Bien. Alors, Monsieur Praljak, pour terminer sur ce document, vous avez dit

  5   que quand vous dites régler la situation --

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- c'est-à-dire rétablir l'ordre. C'est ça que vous

  8   vouliez dire ?

  9   R.  Exact.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors --

 11   R.  Puis-je ajouter ? Il faut remettre de l'ordre en retrouvant des

 12   personnes, et comment voulez-vous qu'il les trouve parmi les Musulmans ? Il

 13   doit les trouver parmi les Croates donc dans cette situation il faut qu'il

 14   trouve des hommes qui soient à la mesure de la situation et de la tâche à

 15   impartir et remettre de l'ordre, mais enfin ça ne peut pas être plus clair.

 16   Ça avait déjà eu lieu. Ils ont reçu cela le 24 au matin lorsque tout ce

 17   qu'ils avaient à faire avait déjà été fait.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors on va regarder maintenant le document

 19   suivant, P 06020. Oui.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé parce que je ne

 21   trouve pas les choses si claires que ça. Remettre de l'ordre, bien. Mais

 22   quels étaient les troubles ? Où était le désordre ? Quel est donc ce

 23   désordre qui doit être, auquel il faut mettre fin pour rétablir l'ordre ?

 24   R.  Monsieur le Juge Trechsel, je vais être sincère et vous dire que nous

 25   ne pouvons pas recommencer ce procès 100 fois à partir du début. Vous avez

 26   déjà des documents qui parvenaient d'Emil Harah, à Vares et autres, tout un

 27   tas de documents, où il est possible de voir quel est le désordre qui

 28   régnait là-bas. Le commandant de la brigade ne pouvait plus assumer ses

Page 41906

  1   fonctions et il demandait à être révoqué de ses fonctions du reste. Il

  2   disait qu'il allait devenir fou. Il y a des informations portant sur la

  3   contrebande et tout le reste enfin dans le procès ça existe déjà depuis

  4   deux ans cela.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans la suite de la question posée par mon

  7   collègue, le fait que le commandant de la Brigade Bobovac est incapable

  8   d'assurer sa mission, est-ce que c'est -- est-ce que ça peut justifier la

  9   mise à nouveau en ordre de la brigade par un nouveau commandant ou par une

 10   enquête, et cetera, et que donc il faut remettre de l'ordre ? Est-ce qu'on

 11   peut comprendre cela ?

 12   R.  Oui, il faut l'interpréter ainsi, Monsieur le Président. Dans ce

 13   document, il est écrit que l'attaque de l'ABiH a commencé. Il n'a

 14   absolument plus de temps disponible pour diligenter des enquêtes ou quoi

 15   que ce soit. Ce sont des choses que l'on fait à posteriori. Dans ces

 16   instants-là, ce qu'il faut prendre ce sont des décisions instantanées,

 17   claires et précises. Alors ensuite, à posteriori, on peut enquêter sur ce

 18   qu'ont fait les uns et les autres mais dans la situation telle quelle est

 19   décrite ici, à savoir que les attaques de l'ABiH ont commencé, alors que

 20   préalablement à cela et nous avons toute une série de documents qui

 21   l'attestent moi j'écris, j'adresse au général Petkovic des instructions ou

 22   plutôt je lui demande de régler, de mettre de l'ordre dans cette situation,

 23   d'écarter ces gens. Voilà, c'est ce que l'on fait dans ces situations-là.

 24   Un commandant on peut le mettre à l'écart en trois minutes mais après

 25   seulement on règle la situation d'un point de vue administratif par écrit.

 26   Dans l'instant, on prend les décisions nécessaires.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour terminer, on va regarder le dernier document, P

 28   06020. C'est un rapport fait par Emil Harah à 11 heures 45 le 23 octobre.

Page 41907

  1   Il vous est adressé à vous personnellement. Bon. Il relate les événements,

  2   et il explique à la fin qu'Ivica Rajic a insisté pour que, lui, Harah vous

  3   envoie ce rapport. Alors, qu'est-ce que cela signifie ?

  4   R.  M. Ivica Rajic, du point de vue hiérarchique, était le supérieur dans

  5   cette partie du champ de bataille; ensuite immédiatement sous lui, il y

  6   avait Tihomir Blaskic. Ici, il s'agit d'un rapport militaire tout à fait

  7   ordinaire dans lequel on voit tout simplement que les Unités du 3e Corps

  8   d'armée attaquent la Brigade Bobovac en provenance de Zenica, Kakanj, et de

  9   Vares, et à un moment donné, on a des indications selon lesquelles un autre

 10   corps de l'ABiH va lui venir en aide, le 2e Corps. Il dit ici que les

 11   lignes sont très étirées donc à partir de ce document. Je ne pouvais rien

 12   conclure d'autre que le fait qu'ils sont attaqués et qu'à cause de cet

 13   ordre, Vares serait amené à tomber. C'est pourquoi j'ai envoyé ceci et je

 14   le répète c'est une situation dans laquelle il est nécessaire de réagir

 15   très rapidement et de façon très déterminée.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges. Je ne

 17   souhaiterais pas intervenir de quelque façon que ce soit dans ce document

 18   mais je voudrais juste rappeler que le témoin protégé EA a abordé ce

 19   document et il a dit qu'il s'agissait d'un faux, et de même dans la

 20   déclaration 92 bis du témoin qui a rapport avec tous ces documents, il est

 21   déclaré que cette personne a déclaré qu'elle n'avait jamais signé ce

 22   document ainsi qu'on le voit ici. Alors on pourrait peut-être demander des

 23   éclaircissements.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Stringer, on va aborder cela.

 25   Oui, Monsieur Stringer.

 26   M. STRINGER : [interprétation] Simplement pour dire ceci, Monsieur le

 27   Président, et je pense qu'effectivement qu'il faut aborder ceci. Je me

 28   souviens que c'était un autre document dont a parlé le Témoin EA. Peut-être

Page 41908

  1   que je me trompe, mais je pense qu'il faudrait vérifier si c'est bien le

  2   cas. Moi, je me souviens que c'était un autre document mentionné par le

  3   témoin.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes sûre que c'est bien ce document que -- a

  5   dit qu'il était faux.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation] J'en suis absolument sûre, Monsieur le

  7   Président, et au cours de la pause suivante, je peux récupérer les numéros

  8   de page exactes du compte rendu d'audience, ainsi que la déclaration 92 bis

  9   dont il s'agit.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous avons maintenant ces deux

 11   documents sous les yeux, je vous pose dès lors la question suivante : on

 12   voit le même terme dans les deux documents, c'est "mop up." Rajic dit que :

 13   "La ville de Vares a été nettoyée et que tous les Musulmans en âge de

 14   porter les armes ont été mis sous surveillance."

 15   Dans ce document, Emil Harah, lui aussi, parle de village musulman proche

 16   de la ville qu'ils ont nettoyée. Comment est-ce que vous, vous traduiriez

 17   "mop up," ou pourriez-vous nous décrire la notion ?

 18   R.  Monsieur le Juge Trechsel, très franchement, du point de vue qui est le

 19   point de vue factuel, il serait probablement nécessaire de choisir un autre

 20   terme en langue croate, mais il s'agit ici d'un terme qui est tellement

 21   habituelle dans le discours sur la guerre qu'il s'agisse des films, des

 22   journaux. Alors je ne sais pas quel est le terme anglais mais en croate on

 23   dit toujours qu'un endroit a été nettoyé, c'est au sens des unités

 24   militaires, c'est-à-dire que suite aux combats, il y a eu une victoire, les

 25   autres ont été vaincus et ce terme de "nettoyé," est un terme strictement

 26   militaire qui signifie que les adversaires armés de l'autre partie ont été

 27   vaincus. C'est ce que l'on retrouve dans tous les films de guerre. On voit

 28   passer des unités et puis on entend un des protagonistes dire "ocisnceno"

Page 41909

  1   cela a été nettoyé, et lorsque les protagonistes rentrent dans des

  2   bâtiments, tout le monde dit "cisto" "cisto," donc c'est nettoyé, nettoyé,

  3   c'est comme ça qu'on le traduit en tout vers le croate au sens où cela a

  4   été sécurisé, par exemple, par le FBI ou la police à New York. C'est comme

  5   ça, en tout cas, qu'on les traduit en croate et c'est dans ce sens-là que

  6   ce terme a été utilisé.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Moi aussi, je serai franc, dans le

  8   cadre de ce procès on s'étonne, on se demande si ceci ne fait pas référence

  9   au nettoyage ethnique.

 10   R.  Monsieur le Juge, mais non. Au sens militaire lorsqu'on parle de

 11   "nettoyage" ou d'un endroit qui a été nettoyé, on entend ce que je viens

 12   d'expliquer, à savoir "nettoyé," des membres armés de la partie adverse.

 13   Vous passez par un village, par exemple, est-ce que vous comprenez c'est ce

 14   qu'il avait exactement à comprendre, à savoir qu'il n'y a pas quelqu'un qui

 15   est en train de se cacher dans la maison d'à côté --

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Entendu.

 17   R.  Alors maintenant si l'on parle de "nettoyage ethnique," c'est là --

 18   excusez-moi.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez répondu à ma question.

 20   Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, sur ce qu'a dit Me Alaburic. Si le

 22   document est un faux alors première question ultra simple. Est-ce que dans

 23   votre souvenir vous, le 23 octobre 1993, après 11 heures 45, voire le 24

 24   octobre, le 25, est-ce que vous avez eu connaissance d'un rapport d'Emil

 25   Harah ?

 26   R.  Monsieur le Président, il m'est impossible de répondre en théorie à

 27   cette question avec la moindre certitude --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors en regardant le contenu du document, si c'est

Page 41910

  1   un faux, le faux est très bien fait parce que, regardez, il y a déjà un

  2   numéro d'enregistrement 01-70-3-1/93. Donc les auteurs de la falsification

  3   peuvent s'exposer au fait qu'on aille regarder sur le registre s'il y a eu

  4   un 702 et un 704.

  5   Bon, deuxièmement, le document n'est pas signé, donc on peut penser

  6   que ça a été un message qui a été envoyé soit par paquet par un moyen

  7   électronique. Mais si c'est faux, quel était le but de la manœuvre de ceux

  8   qui ont fait le faux ? Qu'est-ce que vous diriez sur la manœuvre ? Alors si

  9   vous n'avez pas d'idée, je vais peut-être vous en avancez une.

 10   R.  Je n'en ai pas la moindre idée, Monsieur le Juge. Je ne sais pas.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Un Juge raisonnable, qui a une connaissance du

 12   dossier, pourrait-il envisager l'hypothèse qu'en adressant le 23 octobre à

 13   11 heures 45, ce rapport ça implique que vous étiez au courant de

 14   l'opération que Harah sur instructions de Rajic qui lui est pris dans

 15   l'opération, il a autre chose à faire qu'à faire des rapports écrits, il

 16   vous adresse ce rapport afin que vous soyez informé en temps réel de tout

 17   ce qui se passe. Le fait même qu'il y a marqué votre nom personnellement,

 18   est-ce qu'on pourrait en tirer l'idée que vous étiez au courant avant,

 19   pendant, et après ?

 20   R.  Je ne puis répondre avec précision à cette question, Monsieur le

 21   Président, à ceci près qu'il y a une chose que je sais avec certitude, à

 22   savoir que les documents qui ont été ultérieurement falsifiés afin d'étayer

 23   une certaine thèse, il y en a eu un très grand nombre au moment où ce

 24   Tribunal a commencer avec ces travaux. Cela je le sais avec certitude, je

 25   sais également avec certitude que certaines choses concernant Vares m'ont

 26   été imputées dans les journaux, c'est ce qu'on s'était forcé de faire, et

 27   on l'a fait comme si j'avais su avant les événements de Stupni Do que ces

 28   derniers allaient se produire; cependant, moi, je suis tout à fait sûr des

Page 41911

  1   éléments dont je dispose -- je sais avec certitude que je suis arrivé à

  2   l'état-major vers 23 heures. Je me rappelle que du document que nous avons

  3   vu, et du document précédent, je me rappelle exactement aussi ce que j'ai

  4   écrit à l'attention de M. Petkovic, et cela je le maintiens. Quant au

  5   reste, j'affirme qu'il y a eu des documents falsifiés, ce document du

  6   dernier jour aussi selon lequel j'aurais approuvé qu'on emmène des

  7   prisonniers a été falsifié. Il y a des documents comme celui-là qu'on a

  8   essayé de me mettre sur le dos pour ainsi dire au dernier moment, le

  9   dernier jour de ma présence, des centaines de documents.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, avec votre permission, je

 11   voudrais juste attirer l'attention sur la dernière phrase dont il ressort

 12   que ce jour-là, le 23 octobre, vers 11 heures, Ivica Rajic se serait trouvé

 13   à Kiseljak car il est dit que lui dirige les opérations à partir de

 14   Kiseljak. Alors peut-être s'agit-il ici de la clé des questions que nous

 15   nous posons pour ce qui est de ce document.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Praljak, Me Alaburic indique que M.

 17   Rajic lui il dirige les opérations à partir de Kiseljak alors même qu'il

 18   est présent sur les lieux. Donc voilà peut-être une explication.

 19   R.  Pour autant que j'ai reçu des éléments ultérieurement, Ivica Rajic

 20   n'était pas à Kiseljak. Alors si on a essayé d'opérer une falsification

 21   ultérieurement c'était peut-être pour dire que, et bien, moi, Ivica Rajic,

 22   je n'étais pas à Stupni Do, à Vares, mais j'étais à Kiseljak. Cependant, il

 23   n'était pas à Kiseljak. Emil Harah devait savoir qu'Ivica Rajic n'était pas

 24   à Kiseljak, mais qu'à Vares déjà, il se livrait à des actions qui n'étaient

 25   pas admissibles. Il dit, j'ai placé des Musulmans sous surveillance, et non

 26   pas, je les ai mis en détention.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Ça va aller beaucoup plus vite maintenant, parce

 28   qu'il y a quelques documents qui vont être examinés de manière assez

Page 41912

  1   rapide. Au paragraphe 203, c'est le document 3D 00278. Ce document vous

  2   concerne, attendez il va apparaître. Voilà, ce document précise votre

  3   situation administrative et il est bien clair indiqué que vous aviez fait

  4   une requête dès le 1er juin pour quitter la République de Bosnie-

  5   Herzégovine.

  6   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation] 

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais maintenant c'est le paragraphe 280, le

  9   document 1D 02962. Alors c'est une démonstration que vous faites dans ce

 10   paragraphe, du fait qu'il n'y avait pas d'entreprise criminelle, car

 11   comment expliquer que s'il y a une entreprise criminelle, les victimes,

 12   entre guillemets, se rendent à une réunion a Zagreb, où elles vont demander

 13   de la part du gouvernement croate la caution d'un emprunt.  Alors excusez-

 14   moi, le document c'est 1D 02942. C'est un document qu'on a déjà vu.

 15   Voilà, Monsieur Praljak, vous connaissez ce document ?

 16   R.  Oui, je l'ai déjà vu.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors dans vos écritures, vous avez indiqué cela.

 18   Alors est-ce que vous pouvez expliciter ?

 19   R.  Ici, nous avons un seul parmi sans doute une centaine de documents

 20   possibles. Ce que j'ai dit est tout à fait clair, la Croatie, représentait

 21   pour la Bosnie-Herzégovine et plus précisément pour les Musulmans une sorte

 22   de terrain où ils pouvaient faire tout ce qu'ils voulaient, c'était

 23   complètement ouvert, qu'il s'agisse d'organiser des réunions de

 24   gouvernement, d'obtenir une aide financière, une aide militaire, ils

 25   disposaient de dizaines même de centaines d'organisations à Zagreb et dans

 26   toute la Croatie, des organisations civiles, militaires, éducatives,

 27   religieuses. C'est arrivé à un tel degré qu'ils se livraient à des actions

 28   de propagande en Croatie même contre cette dernière.

Page 41913

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41914

  1   Parfois, la Croatie pouvait même donner le sentiment d'être devenue

  2   une colonie du gouvernement de Sarajevo et d'Alija Izetbegovic. Une

  3   véritable colonie sans qu'il y ait la moindre question de posée, sans qu'il

  4   y ait besoin d'obtenir une approbation, ils utilisaient cet état croate et

  5   ces institutions comme ils le souhaitaient. Moi, de temps en temps, je

  6   m'élevais contre ça, j'estimais qu'il fallait qu'il y ait plus d'ordre. On

  7   ne savait plus qui était le représentant de quoi, qui venait et à quel

  8   titre, et il y a eu des centaines de situations de cette nature.

  9   Maintenant, cet Etat est accusé d'avoir été impliqué dans une entreprise

 10   criminelle commune, je ne sais simplement pas quelle est la logique qui

 11   préside à cela.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : On va examiner le paragraphe -- je vais

 13   examiner le contenu du paragraphe 346, qui a trait à la visite des

 14   parlementaires du Sabor. On a vu déjà ce document, 3D 01091. Je redis, 3D

 15   01091, voilà.

 16   R.  J'ignore de quoi il s'agit ici.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez voir, attendez qu'il arrive. C'est le

 18   rapport de l'assemblée parlementaire, voilà. C'est le rapport des

 19   parlementaires qui ont été donc en Bosnie-Herzégovine. Au paragraphe 340,

 20   vos avocats disent que vous avez fait du lobbying auprès du Sabor pour

 21   qu'ils aillent visiter la République de Bosnie et d'établir les faits et la

 22   situation. Donc ce rapport relate par le menu les personnes qu'ils ont

 23   vues, les conclusions qu'ils en ont tirées. J'ai constaté que cette visite

 24   était étroitement dépendante de l'UNPROFOR car elle devait les convoyer,

 25   assurer leur sécurité; est-ce que vous pourrez me confirmer cela ?

 26   R.  Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Il semble que c'est le général Wahlgren, en

 28   personne, qui s'est occupé de la logistique de cette mission ?

Page 41915

  1   R.  En effet.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre souvenir, est-ce que ces parlementaires

  3   ont été en permanence escortés par les soldats de l'UNPROFOR ?

  4   R.  Lorsqu'ils sont allés voir la partie est de Mostar et lorsqu'ils

  5   devaient avoir la possibilité d'aller à Konjic, Jablanica et en Bosnie

  6   centrale, conformément à leur volonté, à leur libre choix, ils avaient

  7   raison -- ils avaient une escorte.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : En regardant le rapport, je lis que ces

  9   parlementaires qui sont de parti politique différent même s'ils participent

 10   tous au gouvernement d'union nationale, arrivent à la conclusion qu'il y a

 11   eu des conflits entre la partie croate et la partie musulmane, sans qu'ils

 12   déterminent exactement qui est à l'origine des conflits. En conclusion,

 13   c'est au paragraphe 4(a), ils disent que les causes du conflit seraient

 14   dues finalement à l'incompréhension du système interne de l'ABiH. Alors ça

 15   veut dire quoi, cela ?

 16   R.  Mais c'est ça dont je ne cesse de parler tout le temps. Ça signifie

 17   précisément la chose suivante, à savoir -- donc la Bosnie-Herzégovine, oui.

 18   Donc nous avons les deux parties, les Croates et les Musulmans qui ont des

 19   points de vue différents pour ce qui concerne l'organisation intérieure de

 20   la Bosnie-Herzégovine, des points de vue différents à savoir que celui des

 21   Musulmans est le point de vue d'un Etat unitaire au sein duquel un citoyen

 22   représente une voix alors que les Croates avancent l'idée d'une

 23   organisation cantonale, des provinces ou des cantons où les parties

 24   constitutives seraient représentées et se verraient reconnaître une forme

 25   d'autonomie là où les Croates sont majoritaires.

 26   Mais avec votre permission, Messieurs les Juges, j'ai parlé de tout cela

 27   devant le Sabor de la République de Croatie, devant le parlement, j'en ai

 28   parlé avec beaucoup de véhémence. Ils ont essayé de m'arrêter mais ils n'y

Page 41916

  1   sont pas parvenus. Ce qu'il faut comprendre ici c'est que, dans une

  2   situation, ce que nous avons c'est la guerre, "les gens compétents,

  3   intelligents," ont tendance plutôt à s'écarter des événements, les hommes

  4   politiques s'en éloignent autant que possible. Ils sont assis dans des

  5   cafés, ils participent à des réunions à Londres, à Paris, ils séjournent

  6   dans de grands hôtels et c'est ce qui se passe aujourd'hui encore, et ce

  7   qui se passe c'est qu'ils prennent des décisions qui sont souvent fondées

  8   sur de fausses informations. Moi, j'étais désespéré et très en colère. Ce

  9   que j'exigeais c'est qu'ils se rendent sur place, qu'ils aillent voir et,

 10   Messieurs les Juges, à l'opposé ceux qui restent dans la situation de la

 11   guerre et qui souffrent lors de tous ces événements ce sont eux qui sont

 12   les coupables en fin de compte les boucs émissaires. Alors, moi, ce que je

 13   leur dis mais au nom de Dieu, venez voir vous-même. Voilà Praljak est donc

 14   un imbécile, Praljak ne souhaite certainement pas la guerre, alors venez,

 15   mettez-vous d'accord avec l'autre partie et arrêtez la guerre. Praljak,

 16   Petkovic ne la souhaitent pas.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous l'avez déjà dit. En conclusion, au (c) et

 18   au (d) du paragraphe 4, bon, ils imputent cela à une partie des Musulmans

 19   qui rejettent le plan Vance-Owen et ça serait eux les provocateurs. Bon.

 20   C'est un peu leurs conclusions  mais j'ai constaté également une chose et

 21   malheureusement dans les conclusions, ils ne donnent pas de solutions à

 22   cela. Ils ont constaté qu'il y a eu des crimes, qu'il y a eu des crimes et

 23   ils ont dit que des individus en uniforme avec des insignes profascistes

 24   ont commis des crimes dans des villages musulmans. Alors ils disent : ils

 25   doivent être identifiés et punis. Bien. Donc cette délégation a eu

 26   conscience qu'il y a eu des crimes dans les villages musulmans et on

 27   comprend cette phrase quand on sait qu'ils ont rencontré une délégation du

 28   SDA.

Page 41917

  1   Bien. Alors le fait même que ces parlementaires avaient conscience et ils

  2   l'ont écrit dans le rapport qu'il y a eu des crimes commis, est-ce qu'ils

  3   vous l'ont dit et qu'il fallait punir ces gens-là ? Est-ce que ça vous l'a,

  4   ça a été porté à votre connaissance, ce constat qu'ils ont fait au mois

  5   d'avril ?

  6   R.  Mais, Messieurs les Juges, cela je le savais même sans leur

  7   intervention et c'est justement pour ça que j'ai demandé qu'ils aillent sur

  8   place et qu'ils essaient eux d'arrêter la guerre. On peut faire des

  9   milliers d'enquêtes, des crimes en ont fait l'objet de nombreuses enquêtes,

 10   et après, les auteurs seront ou ne seront pas punis 15 ou 20 ans après.

 11   Mais la guerre, le problème c'est que plus elle dure, plus elle amène de

 12   victimes et de crimes supplémentaires. Leur devoir à eux c'est de l'arrêter

 13   cette guerre et pour cela d'être informé avec exactitude et de savoir qui

 14   est à l'origine de la guerre. Par ailleurs, moi, j'étais en Croatie à ce

 15   moment-là. Je n'avais -- je n'ai pas la responsabilité de diligenter des

 16   enquêtes concernant ces crimes. Seulement j'affirme là que je comprenais

 17   parfaitement la situation d'où elle procédait, ce qui était en train de se

 18   passer et ce qui était sur le point de se produire.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : L'avant-dernier paragraphe que je voulais examiner

 20   c'est le 366; c'est sur la coopération entre la Croatie et l'ABiH. Alors le

 21   document c'est le 3D 00299. C'est une lettre de Hasan Efendic au ministère

 22   de la Défense de la République de Croatie, une lettre du 4 janvier 1993.

 23   Voilà. Alors vous avez là le document sous les yeux. Vous l'indiquez dans

 24   les écritures. Alors en quoi ceci est important pour votre thèse ?

 25   R.  Afin de confirmer ce que je ne cesse de répéter, à savoir que, pour ce

 26   qui concerne les volontaires originaires de l'armée croate appartenant au

 27   groupe ethnique musulman, la Croatie a adopté exactement la même position,

 28   le même comportement que vis-à-vis des membres du groupe ethnique croate.

Page 41918

  1   Voilà. On demande qu'à être autorisé à partir : un colonel, un major, et un

  2   médecin qui est également colonel, qu'on les laisse rejoindre l'ABiH, tout

  3   en réservant -- en conservant leur statut au sein de l'armée croate ainsi

  4   qu'il en a été disposé dès le début.

  5   Voilà c'est très clair. La situation est la suivante : votre seconde partie

  6   est attaquée et ce que nous vous disons c'est que vous pouvez aller vous

  7   battre là-bas pour cette seconde patrie et nous, nous n'allons pas vous

  8   priver de votre statut au sein de l'armée croate ni votre droit à la

  9   protection sociale et à la retraite. Lorsque vous en aurez terminé de vos

 10   activités de combat en Bosnie-Herzégovine, lorsque votre mission sera

 11   arrivée à votre termine, que vous soyez victorieux ou vaincu, nous vous

 12   reprendrons enfin nous vous reprendrons car c'est la seule chose honnête et

 13   logique à faire. La même chose s'appliquait et aux Musulmans et aux Croates

 14   et j'affirme qu'il y a eu beaucoup, beaucoup plus de Musulmans de Croatie

 15   entraînés en Croatie qui sont allés battre en Bosnie-Herzégovine que de

 16   Croates.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Le dernier document, P 00149. C'est sur les

 18   relations diplomatiques entre la République de Croatie et la Bosnie-

 19   Herzégovine. Vous dites, dans vos écritures, qu'elles ont été excellentes.

 20   Voilà. C'est donc une lettre de M. Tudjman à M. Izetbegovic, comme vous

 21   voyez, du 7 avril 1992 concernant la reconnaissance de la République de

 22   Bosnie-Herzégovine comme Etat souverain et indépendant. Bien. Vous

 23   connaissez ce document ?

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous l'avez cité dans vos écritures afin de prouver

 26   quoi, afin d'établir quel élément ?

 27   R.  Comme dans le document précédent, Monsieur le Juge, tenez, il s'agit

 28   d'abord de cette question de confit international de guerre, M. Efendic est

Page 41919

  1   colonel, attaché militaire en Croatie. Il prend des militaires en Croatie

  2   pour l'ABiH et en même temps pendant la durée de cette entreprise

  3   criminelle commune de ce peuple. Ici, il convient de mentionner que le chef

  4   de l'Etat indique :

  5   "Partant des articles 94 et 99 de la constitution de la République de

  6   Croatie, et conformément aux conclusions du parlement du 27 mars 1992," et

  7   donc c'est le parlement par ses conclusions et pas la proposition du

  8   gouvernement du 6 avril 1992, et on a ordonné ou donné obligation à Franjo

  9   Tudjman de reconnaître la Bosnie-Herzégovine partant donc d'une décision du

 10   parlement et d'une -- parce que ce n'est pas Franjo Tudjman qui reconnaît

 11   les états, c'est le parlement d'un Etat. Le document est important parce

 12   qu'il y a eu un acte d'accusation portant sur l'entreprise criminelle

 13   commune.

 14   Or, si on reconnaît un Etat, on reconnaît cet Etat et son intégrité

 15   territoriale en premier lieu. Donc alors maintenant imaginez la ruse,

 16   allons reconnaître l'intégrité territoriale, on donnera des soldats et que

 17   sais-je encore, et puis ensuite on va arracher un bout de cet Etat. Enfin,

 18   je n'ai pas de commentaire pour ce qui est de cette façon de penser et de

 19   tirer des conclusions à l'acte d'accusation. 

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Maintenant je vais aborder, comme je l'avais indiqué

 21   pour terminer donc mes questions, les événements liés aux tirs des snipers.

 22   Ma grille personnelle d'analyse qui n'engage que moi, qui n'engage en

 23   aucune façon mes collègues, chacun réagit en fonction de lui-même, mais ma

 24   grille d'analyse, c'est qu'une victime d'un tir de sniper, un Juge pénal

 25   doit établir formellement pour imputer une responsabilité quelconque d'où

 26   est parti le tir, et que si le Juge pénal n'arrive pas à établir le point

 27   de départ du tir, il y aura toujours un doute sur l'origine du tir. Voilà,

 28   et moi, dans mon passé professionnel, j'ai eu à gérer un certain nombre

Page 41920

  1   d'affaires concernant des tirs tant qu'en qualité de Procureur qu'en

  2   qualité de Juge. Et, dans mon expérience personnelle, toute victime d'un

  3   tir, on doit identifier exactement le lieu de départ du tir et qui se

  4   trouvait derrière là, pour ensuite arriver à des conclusions sur une

  5   responsabilité.

  6   Alors de ce fait, moi, j'ai sélectionné sept victimes pour des tirs

  7   qui ont eu lieu quand vous étiez commandant du HVO, donc entre le mois de

  8   juillet et le mois de novembre. Alors pour gagner du temps parce que j'ai

  9   eu le temps de me plonger là-dessus, je vais vous expliquer donc, vous

 10   donnez les éléments les plus objectifs possibles et vous me donnerez votre

 11   position dans la mesure où vous avez une connaissance très précise de tout

 12   cela.

 13   Cet incident est arrivé le 27 juillet 1993. La victime s'appelait

 14   Saric Harem. Il a été touché à la partie inférieure de la jambe, alors

 15   qu'il aidait les pompiers à éteindre un incendie dans le cimetière de Saric

 16   Harem. D'après lui, il était de notoriété publique que les tireurs isolés

 17   du HVO tiraient depuis le plateau de Stotina. D'après l'expert du bureau du

 18   Procureur, M. Patrick van der Weijden, il est indiqué que la portée du tir

 19   en question et le type de blessure occasionnée suggère l'utilisation de

 20   calibre adapté au tir isolé, tel que les calibres 7.62 51-millimètres, 7.62

 21   54-R millimètres ou 792-millimètres Mauzer. Bon, voilà donc cet incident.

 22   Alors il en résulterait que le tir vient du plateau de Stotina. Qu'est-ce

 23   que vous dites ?

 24   R.  Tout d'abord, je dis que c'est la date du 27 juin 1993, date à

 25   laquelle je n'y étais pas. Ça c'est un. De deux, je n'ai pas eu le loisir

 26   d'analyser cette carte, pas trop, pour une raison simple. Je n'ai pas eu

 27   les éléments, enfin des éléments à confirmer et je n'ai pas eu comme dans

 28   d'autres cas de figure un moyen de démontrer que ceci était impossible.

Page 41921

  1   Bien que ce que je saurais reprocher de manière générale, c'est que

  2   les distances de 600 mètres, 700 mètres, Messieurs les Juges, ça doit être

  3   deux hommes pour ce qui est du sniper, il faut qu'il y ait calibrage du

  4   fusil. Ce sont de si grande distance pour des tireurs isolés, que ça doit

  5   être des supers professionnels. En termes pratiques, voyez-vous, enfin je

  6   ne sais pas si vous avez tenu un fusil pour tirer à 600 mètres. Si vous

  7   avez observé au travers d'une lunette pour voir comment ça bouge, et si

  8   vous bougez d'un centième de millimètre, tout s'en va. Je ne vais pas

  9   commenter plus en avant, parce que c'est la date du 26 juin, donc je ne

 10   sais pas trop en parler. Je n'ai pas eu suffisamment d'éléments pour

 11   contester cela intégralement et le faire tomber à l'eau comme je l'ai fait

 12   dans d'autres cas.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Le deuxième, il s'agit d'Omer Dilberovic, c'est

 14   survenu le 30 août 1993, c'est un Musulman du quartier de Pasica [phon] de

 15   Mostar Est. Il a été touché à la jambe droite alors qu'il traversait un

 16   espace découvert d'environ 20 mètres, qui était situé à Mazulidjice [phon].

 17   Celui-ci a dit qu'il a entendu la détonation de la balle  et que la balle

 18   provenait de la partie ouest de Mostar. Mais il ne précise pas exactement

 19   d'où est parti le tir.

 20   Pour l'expert, le tir, proviendrait du bâtiment Ledara, qui est situé à 670

 21   mètres de l'emplacement de la victime. Car pour l'expert, ce bâtiment offre

 22   la meilleure vue sur le site de l'incident, et d'après l'expert, le tireur

 23   se trouvait dans les étages supérieurs. Voilà, alors qu'est-ce que vous

 24   dites sur ce cas ?

 25   R.  Je dis que ce cas est absurde. Parce que si vous vous penchez et là,

 26   j'aimerais qu'on puisse placer cela ici. D'abord, la distance est de 700

 27   mètres. Le gars est monté sur le bâtiment de Ledara, de cette fabrique de

 28   glace, et il n'a pas pu voir, mais là, j'aimerais vous le montrer,

Page 41922

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41923

  1   Messieurs les Juges, si possible.

  2   Or, ici, on a tracé le sens du déplacement de la victime. La balle est

  3   venue comme ça, et la victime a été touchée au dessus du genou à droite.

  4   Alors penchez-vous maintenant sur cette photo-ci. C'est là que se trouvait

  5   la victime. On ne voit pas ces deux chemins qui sont tracés, qui sont

  6   dessinés ici. Je vais les mettre cote à cote. C'est ça l'endroit. Alors par

  7   où est passé cet homme ? Va-t-il de là à là ou est ce bâtiment Ledara ?

  8   Est-ce qu'il descend la route ? Pourquoi ? Je ne vois pas du tout par où

  9   cet homme a voulu passer. Nous n'avons pas les éléments relatifs à son

 10   déplacement, à son itinéraire, et là, j'ai fait une variante possible.

 11   Puis Ledara c'est haut. J'ai vu la blessure. Il devrait y avoir une

 12   blessure d'entrée et une blessure à la sortie de la balle on ne voit pas

 13   ça. Alors on a pris une photo de l'endroit et il n'a pas montré, est-ce

 14   qu'il venait de droite, à gauche ? Est-ce que Ledara c'est dans cette

 15   direction ? A gauche ? Est-ce que la victime se dirige vers ici ou vers là-

 16   bas ? On a tracé quelque chose mais le schéma ne correspond pas à la

 17   photographie et ce n'est pas la bonne façon de procéder.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous demandez l'admission du schéma ? On va donner

 19   un numéro.

 20   R.  Monsieur le Juge, j'ai fait verser au dossier tous les schémas pour ce

 21   qui est de l'expertise.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, nous allons passer à l'autre incident, 7

 23   septembre 1993. La victime s'appelle Alija Jakupovic, c'est un pompier qui

 24   a été atteint à l'arrière de la tête alors qu'il conduisait le camion

 25   citerne après avoir éteint un incendie. Il traversait un espace découvert

 26   de 100 à 150 mètres dans la rue Lakisica. Alors nous savons, selon Elmer

 27   Demic, qui est un sapeur-pompier de Mostar, que les tirs ont touché le

 28   camion citerne ainsi que le chauffeur. D'après Elmer Demic, les tris

Page 41924

  1   provenaient d'un complexe d'immeuble blanc en forme d'escalier situé à

  2   l'ouest de la ville de Mostar. Le Centar 2. Donc voilà ce que dit Elmer

  3   Demic. L'expert dit que cet incident a pu être causé par l'utilisation des

  4   calibres que j'ai cités tout à l'heure, donc ce n'est pas la peine de

  5   revenir. Que, pour lui, le lieu de tir le plus possible est le bâtiment

  6   Ledara situé à 586 mètres de l'emplacement de la victime, et il pense que

  7   le tireur se trouvait dans les étages supérieurs du bâtiment Ledara.

  8   Alors, Général Praljak, quel est votre point de vue sur cet incident ?

  9   R.  Monsieur le Juge, je pense qu'on n'a pas à penser dans une expertise.

 10   On doit l'affirmer et le prouver. D'abord, qu'il y a discordance entre les

 11   dires de la victime, qui dit que c'était de la ville qu'on lui avait tiré

 12   dessus et que l'expert dit que c'était de Ledara. Enfin, il le pense, nous

 13   penchons dessus nous aussi --

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur Praljak,

 15   vous nous dites des choses qui ne sont pas correctes. Vous nous dites à

 16   nous autres, les Juges, que nous devons prouver ce que nous avançons, et

 17   cetera, et cetera. Attendez, ce n'est pas à nous de prouver quoi que ce

 18   soit. C'est au Procureur de le faire et, nous, nous sommes uniquement là

 19   pour tirer la conclusion à la fin. C'est une erreur de traduction --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-être il y avait un problème, dans la traduction

 21   en anglais, parce qu'en français, ce n'est pas ce qui a été dit. Bien.

 22   Monsieur Praljak, qu'est-ce que vous avez dit ? Vous n'avez pas parlé des

 23   Juges, bien, moi, je n'ai pas entendu.

 24   R.  Non, Monsieur le Juge. J'ai dit que l'expert dans son expertise n'a pas

 25   à utiliser "je pense" peut-être, et il ne doit pas y avoir discordance

 26   entre ce que dit la victime, qui affirme que c'était venu de bâtiments; et

 27   un expert, qui dit que c'est venu de Ledara.

 28   Alors penchons-nous maintenant sur la variante plus précise. Voici la route

Page 41925

  1   empruntée par ce camion des sapeurs-pompiers, et ça a été photographié

  2   depuis l'endroit potentiel d'où la balle était venue. Voici le schéma. Là

  3   où le camion se déplace par ici, et c'est à 90 degrés par rapport à son

  4   sens de déplacement que la balle arrive. On fait un trou dans la vitre

  5   arrière de la cabine et l'homme a été blessé à la nuque.

  6   Comment ? Si je suis placé assis comme cela et quand si je me déplace vers

  7   le Juge Trechsel, et si la balle vient de là-bas, comment peut-elle me

  8   toucher à la nuque ? C'est ce qui est plus incroyable encore c'est qu'il a

  9   dessiné la chose. On dit que la balle est venue d'ici, on voit sur la photo

 10   que c'est la vitre arrière qui est trouée et la blessure est à la nuque.

 11   Alors il y a peut-être des balles qui font des virages, qui juste à

 12   l'arrivée de la victime font un virage et puis -- non, c'est complètement

 13   dénué de sens. C'est insensé, déraisonnables; ce qui est triste c'est de

 14   voir un expert poser et pouvoir dessiner chose pareille. La balle vient

 15   d'ici, penchez-vous dessus, le véhicule se déplace dans cette direction-là,

 16   on voit ici le véhicule, l'emplacement, et la balle est venue donc d'ici

 17   pour le toucher à la nuque. Vous avez vu la vitre arrière, celle qui est

 18   juste derrière lui pour voir derrière, et on ne peut pas tirer ce type de

 19   conclusion. Je ne sais pas comment il a fait. Ce que l'expert affirme c'est

 20   une bêtise.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais passer maintenant à une victime, qui

 22   est un témoin protégé donc je ne vais pas dire son nom. C'est le 29

 23   septembre 1993, c'est le Témoin DB. Il est touché à l'omoplate droite par

 24   un tireur embusqué alors qu'il essaie lui d'aider - je ne vais pas dire le

 25   nom de la victime parce qu'on pourrait l'identifier - donc d'aider

 26   également une autre victime qui a été touchée aussi par un sniper.

 27   L'incident a eu lieu dans la rue Brkica, à 15 mètres environ de la caserne

 28   des sapeurs-pompiers. La victime - c'est aux pages 13 314 et 13 315 -

Page 41926

  1   lorsqu'elle a comparu n'a pas été certaine de l'origine des tirs.

  2   Le site de l'incident n'offre pas une vue dégagée sur le lieu du tir

  3   présumé, mais on est près de la place d'Espagne, et le tir aurait pu

  4   provenir de ce lieu ou d'un lieu proche dans la mesure où les bâtiments qui

  5   sont situés des deux côtés de la rue Brkica forment un tunnel limitant la

  6   ligne de tir.

  7   Donc d'après l'expert, le lieu de tir le plus plausible serait une

  8   plateforme d'un mètre 80 de haut qui est située entre les arbres du côté

  9   ouest de la place d'Espagne à environ 625 mètres du lieu de l'incident,

 10   voilà. Donc l'expert dit, que ça vient de cette plateforme, et quand lui

 11   est allé sur place il indique que cette plateforme était encore présente,

 12   et qu'apparemment, il est monté sur la plateforme, et de là, il avait une

 13   vue sur le site de l'incident.

 14   R.  Mais il n'a pas photographié et cette plateforme -- il n'a pas demandé

 15   si la plateforme s'y trouvait pendant les conflits.

 16   Deuxièmement, j'ai fourni toute une série de photos où on montre

 17   clairement qu'à partir de cette plateforme on ne peut voir l'endroit qu'il

 18   nous décrit, et personne -- pas même un fou à la place d'Espagne là où il y

 19   avait des lignes de démarcation ne pouvait tirer depuis une plateforme.

 20   C'est absurde sur absurde.

 21   Donc à une distance de 750 mètres un homme sur une plateforme, et depuis

 22   cette plateforme, on ne voit rien. J'ai pris des dizaines de photos depuis

 23   cette plateforme en direction de la partie adverse, il s'entend. A la place

 24   d'Espagne, il y avait des combats très forts, très puissants et vous voyez

 25   maintenant quelqu'un a montré une planche avec un fusil lunette est tiré à

 26   700 mètres, tiré donc sans pouvoir ré avoir et il n'a même pas essayé de

 27   prendre des photos pour le montrer.

 28   Il y a deux pages d'éléments de preuve. Regardez, Messieurs les

Page 41927

  1   Juges, le schéma, tenez voilà je vais le mettre ici. Alors c'est d'ici que

  2   vient l'explication : c'est peut-être ceci, c'est peut-être cela. Enfin, je

  3   vais être bref. Depuis cette plateforme, on ne voit pas l'endroit en

  4   question. Je vous l'affirme. On peut le vérifier et j'espère que vous allez

  5   pouvoir enfin je ne sais pas si vous, vous pouvez envoyer quelqu'un pour

  6   qu'il filme cela ou prenne des vues pour le Procureur. Moi, j'ai vérifié et

  7   j'ai donné des photos à l'appui. On ne voit pas le lieu des événements

  8   depuis cette plateforme.

  9   Deuxièmement, une plateforme qui n'existait pas là-bas pendant la

 10   guerre, on ne pouvait pas tirer depuis parce qu'on était en plein conflit,

 11   l'expert est venu affirmer qu'on avait peut-être placé sur un arbre cette

 12   plateforme. Mais si vous êtes dans l'arbre et que vous êtes en train de

 13   tirer, celui vers qui vous tirez, il peut vous abattre comme un singe. Ce

 14   n'est pas comme ça qu'on fait. Voilà.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- incident du 29 septembre 1993,

 16   il s'agit de Damir Katica - à l'époque, il était âgé de 14 ans - et son

 17   ami, Neno Mackic. Ils ont été touchés à plusieurs reprises alors qu'ils

 18   traversaient, tous les deux, la rue Orucevica Sokak dans le quartier Donja

 19   Mahala. Alors selon Damir Katica, les tirs provenaient d'une maison située

 20   sur la colline de Stotina. Cette maison représentait la seule direction

 21   depuis laquelle les tirs pouvaient provenir. Car il était de notoriété

 22   publique que les tireurs embusqués tiraient de cette maison à Stotina. Il a

 23   indiqué lors de son témoignage que l'arbre et la maison qui auraient été

 24   revêtus d'un satellite qui se situe sur la trajectoire entre cette maison à

 25   Stotina et le lieu de l'incident était plus petit à l'époque des faits.

 26   Donc il dit que l'arbre, et la maison était plus petite, et il dit que

 27   cette maison était contrôlée par le HVO. Alors l'expert, lui, il dit que la

 28   maison est située à 470 mètres de l'emplacement de la victime. Voilà.

Page 41928

  1   Alors, Général Praljak, qu'est-ce que vous dites ?

  2   R.  Penchons-nous sur ce schéma, celui de l'expert. Le garçon se déplace

  3   dans cette direction-là. La balle vient d'ici, la rue Orucevica. L'endroit

  4   où il a été touché se trouve à la moitié de ce carrefour et les

  5   déclarations nous disent que cette rue a une largueur de - et vous voyez

  6   sur la photo, voilà la flèche sur la photo qui vous l'indique. C'est cette

  7   petite rue, elle fait cinq, cinq mètres et demi de large. Donc à la moitié

  8   de cette rue, il a donc fait à peu près deux mètres cinq en courant et il a

  9   été touché depuis une distance de 470 mètres.

 10   Allons plus loin. Alors Stotina c'est moi qui ai tracé ce schéma.

 11   Voilà le centre du Déplacement, voilà le profil s'il est debout et la

 12   direction vers laquelle il se déplace. Puis j'ai calculé ici 470 mètres; le

 13   garçon court quatre mètres à la seconde, il doit avoir 14, 15 ans, et j'ai

 14   pris cela comme paramètre, aucune balle de 7,62 ou similaire fasse 470

 15   mètres. Il faut 0,7 secondes en sortant du canon de l'arme. Pendant ce

 16   temps-là, à la vitesse à laquelle court ce jeune gars, lui, il fait deux

 17   mètres en 0,5 secondes donc en 0,7 secondes, il serait déjà ici et s'il

 18   court normalement comme tous les garçons le font. Là, il ne s'agit pas de

 19   cibler, il n'y a pas le temps de cibler et de tirer entre le moment où la

 20   balle sort du canon et le vol de la balle, la trajectoire c'est 0,7

 21   secondes. Le garçon lui il est touché à 0,5 secondes de sa course parce que

 22   c'est à mi-chemin de ce carrefour dont il a été touché avant que la balle

 23   n'ait pu arriver. Voilà. Penchez-vous maintenant, ça c'est l'avant, c'est

 24   là que la balle est entrée. Alors on nous l'a montré. S'il court dans cette

 25   direction, et si la balle vient d'ici, comment cette balle peut-elle le

 26   toucher ici, là6 Si je cours vers vous depuis là où je suis et que la balle

 27   vient de gauche, comment est-ce que je peux être touché devant et ainsi de

 28   suite ? Donc il a été touché depuis la direction vers laquelle il se

Page 41929

  1   dirigeait. C'est de la direction vers laquelle il courait que la balle est

  2   arrivée et c'est ce qu'on nous a montré, la balle est entrée devant et elle

  3   est sortie derrière.

  4   Ensuite Stotina, même si on spéculait c'est à 60, 70 mètres de haut,

  5   la balle qu'on a vue est entrée et sortie à l'horizontal. Alors si je

  6   spécule mais à fond, la balle était censée rentrer de haut plus haut que la

  7   blessure de sortie. Je l'ai déjà montré. Je ne vais pas vous fatiguer donc

  8   ça c'est des conjectures. Alors penchez-vous une fois de plus sur ceci,

  9   quand vous êtes à 500 mètres, ça fait cinq terrains de foot et quand

 10   quelqu'un court de ce côté, d'un côté de cette petite ruelle vers l'autre,

 11   pendant ce temps-là il faut qu'il soit vu depuis 500 mètres, il faut qu'il

 12   puisse cibler, tirer et le toucher le tireur. Enfin je ne sais pas ce que

 13   vous allez tirer comme conclusion, vous pouvez tirer la conclusion que vous

 14   voulez mais ça n'existe pas, c'est dans les romans de science fiction que

 15   ça peut exister.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Le dernier incident, sauf un. Le 10 octobre 1993, il

 17   s'agit de Munib Klaric qui habite Mostar Est, qui est touché au talon par

 18   une balle d'un tireur isolé alors qu'il va prendre de l'eau dans la rivière

 19   Neretva. Il se trouvait donc à Podharemi qui est situé à Mejdan à Mostar

 20   Est devant les escaliers qui terminent la rue Kusalova et il tourne le dos

 21   à la Neretva et à Stotina. Il émet l'hypothèse que les tirs provenaient --

 22   que le tir provenait de Stotina. Il émet cette hypothèse en raison de la

 23   position des orifices d'entrée et de sortie de sa blessure parce que les

 24   tireurs étaient positionnés sur Stotina qui offrait une vue dégagée sur

 25   l'endroit où il a été blessé. L'expert dit que le lieu le plus plausible

 26   est la maison qui est située à 449 mètres de l'emplacement de la victime.

 27   Alors, Général Praljak, qu'est-ce que vous nous dites ?

 28   R.  Quelque chose de similaire à ce que j'ai déjà dit. Ici voilà le schéma,

Page 41930

  1   la Neretva est là. Il y a un espace ici puis il y a l'escalier là, et ça

  2   c'est la trajectoire suivie par la balle depuis Stotina.

  3   Alors regardez maintenant, je veux vous montrer ce que nous a été montré

  4   comme photo de l'Accusation. Alors voilà comment où se trouvait cet homme

  5   au moment où il a été touché. La balle était donc censée arriver ici. Cet

  6   angle est de 30 degrés; si ceci est 90 degrés, ici on a 30 degrés par

  7   rapport à ce bâtiment. Donc ça doit arriver à 30 degrés de façon latérale.

  8   Regardez la blessure d'entrée. La blessure de sortie se trouve sous le

  9   talon. J'ai calculé cet angle, il fait 45 degrés.

 10   Donc cet homme est debout ici, il est tourné vers l'escalier, son talon est

 11   tourné donc vers la Neretva. La balle vient, elle, d'après le rapport de

 12   l'expert, à 30 degrés d'angle par rapport à la position de son corps. La

 13   balle entre du haut dans son talon et sort à 45 degrés sous le talon. Pour

 14   être tout à fait sincère, moi, je n'arrive pas à le comprendre, je n'arrive

 15   absolument pas à le comprendre. J'ai dessiné ici toute sorte d'angles pour

 16   essayer de voir comment cet homme pouvait bien être placé. Donc cette

 17   balle, si on me pose la question à moi, c'est probablement quelqu'un qui

 18   avait tiré en l'air, et une fois que la balle retombe, elle peut tuer

 19   quelqu'un et ça a dû cogner le talon du haut. Parce qu'il n'y a aucune

 20   possibilité de faire en sorte que ce type de blessure soit occasionné par

 21   une balle qui est venue latéralement et que la balle sorte vers le bas à 45

 22   degrés. Il faudrait procéder à des expertises médico-légales, mais la façon

 23   dont cela a été fait par l'expert, j'ai demandé à l'expert s'il avait

 24   honte. Il a dit non, mais, moi, j'ai honte d'un expert de ce genre.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors dernier témoin, mais tout à l'heure concernant

 26   le premier témoin, j'avais indiqué que c'était le 27 juillet 1993. Vous

 27   avez dit le 27 juin, j'ai fait vérifier la déclaration 92 bis de ce témoin,

 28   dans la déclaration 92 bis, c'est 27 juillet, voilà. Alors peut-être que la

Page 41931

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41932

  1   victime s'était trompée, mais dans la déclaration c'est 27 juillet.

  2   Alors le dernier témoin, 30 octobre 1993, enfin dernières victimes, excusez

  3   moi, 30 octobre 1993, victimes Enver Dziho et Stojan Kacic. Enver Dziho a

  4   été touché alors qu'il traverse la rue, Ali Sekitar [phon], qui est près du

  5   bâtiment Razvitak. Stojan Kacic, qui est ambulancier, a été touché à la

  6   jambe alors qu'il est en train de transporter Dziho qui a été blessé

  7   jusqu'à l'ambulance. Donc il y a une première victime qui est Dziho, et la

  8   deuxième, c'est l'ambulancier qui le porte.

  9   D'après un habitant de Mostar, Dzemal Barakovic, qui est le chauffeur de la

 10   Brigade des Pompiers, il pense que le tir qui a touché Kacic provenait du

 11   bâtiment en verre, situé au niveau de la place d'Espagne. L'expert dit que

 12   les bâtiments de type gratte-ciel constituent des lieux de tir plausibles,

 13   et dans le cas d'espèce, le bâtiment en verre qui est situé à 743 mètres de

 14   l'emplacement de la victime. L'expert dit bien que cette distance est

 15   importante, 743 mètres, elle est néanmoins praticable pour un spécialiste

 16   compétent et bien équipé.

 17   Alors avant la pause et j'aurais terminé : qu'est-ce que vous nous dites ?

 18   R.  Moi, ici toutes les photos. Si vous vous en souvenez, j'ai posé la

 19   question à une victime. Dites-moi, Monsieur : est-ce que vous vous posez la

 20   question de savoir à partir d'où on vous a tiré dessus ? Il a dit : oui,

 21   Général. A l'endroit où ces deux-là ont été blessés, on ne peut pas le voir

 22   ça depuis la partie occidentale de Mostar, de nulle part ni depuis le

 23   bâtiment en verre ni à partir d'un autre endroit. L'expert ici a donné une

 24   mauvaise photo, c'est un faux élément de preuve pour montrer qu'on y voit

 25   alors qu'on n'y voit pas. Je voulais montrer déjà, et on verra ça après la

 26   pause, si vous le voulez bien. On ne peut voir cela --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est fini, je ne pose plus de questions.

 28   R.  Alors c'est bon. Alors, voyez-vous, Messieurs les Juges, ici vous avez

Page 41933

  1   ce schéma, le bâtiment devrait se trouver sur cet axe, l'axe d'arriver de

  2   la balle. Ici, il a pris une photo avec une vue vers la place d'Espagne,

  3   personne ne sait de quoi il s'agit au juste ici cette photo. Alors, ici, il

  4   montre un building, un bâtiment qui n'a rien à voir du tout avec le

  5   bâtiment en verre, c'est complètement dénué de sens, et ça, probablement ce

  6   sont des balcons de l'hôtel. Ici, ce qu'il a tracé n'a rien à voir avec

  7   l'endroit de l'incident, parce que ce bâtiment ancien n'existe pas dans

  8   cette rue. C'est un mensonge. Une supercherie des plus ordinaires. Ici, on

  9   dit : "Vu depuis la plateforme à la place d'Espagne." Mais je ne sais pas

 10   quelle vue il a, lui. Mais ça n'a rien à voir avec l'endroit que vous avez

 11   vu et que vous allez revoir tout à l'heure.

 12   Je vais de l'avant. Voilà, c'est ça l'endroit où ça s'est passé. Ça,

 13   c'est la rue du maréchal Tito; là, se trouve l'entreprise Razvitak. Où est-

 14   ce que vous voulez -- où est-ce que vous voyez ce bâtiment que le Procureur

 15   nous a montré ? Ça, c'est Razvitak. Ça, c'est une partie tout à fait autre

 16   de Mostar, c'est une tromperie. Voilà ce que l'on voit depuis l'endroit de

 17   l'incident. C'est tourné vers l'occident. On voit un vieux bâtiment de

 18   Mostar, vieille maison.

 19   Voilà une deuxième photo du même endroit, où ils ont été touchés, c'est là

 20   que se trouve la maison des sapeurs pompiers.

 21   Allons encore de l'avant. Moi, bien sûr, j'ai rapproché la chose avec un

 22   zoom, et on voit l'hôtel Bristol qui dissimule complètement la vue. Puis

 23   j'ai rapproché encore et derrière, il n'y a rien d'où on pourrait voir, ça,

 24   c'est la place d'Espagne, ça, c'est le lycée, là, le boulevard. Maintenant

 25   on s'est tourné vers le côté est, voilà ce qu'on peut voir depuis la place

 26   d'Espagne si on restait donc sur cette plateforme, c'est ce qu'on pourrait

 27   voir du côté est. Ici se trouvaient les lignes de démarcation. Puis nous

 28   allons -- voilà l'immeuble en verre qui est à l'extérieur de la place. Un

Page 41934

  1   instant.

  2   Voilà ce que l'on peut voir de la place d'Espagne en direction de l'est.

  3   C'est ça la plateforme à partir de laquelle selon lui on avait pu tirer. La

  4   plateforme, elle a dû être, elle a probablement été construite

  5   ultérieurement pour une espèce de célébration ou de fête. Là, j'ai mis un

  6   quelqu'un, j'ai demandé à ce qu'il soit pris en photo, et puis depuis là,

  7   j'ai pris l'appareil pour montrer ce que l'on peut voir du côté est depuis

  8   cet endroit-là. Alors, regardez, et là, j'ai zoomé, ça c'est le pont du

  9   maréchal Tito, et c'est là qu'il y a cette rue à gauche, et puis ce n'est

 10   qu'après vers la droite qu'on tombe sur le foyer des pompiers, et j'ai

 11   rapproché davantage. Mais on peut aller vérifier de visu.

 12   Cet homme prend ce Tribunal pour des imbéciles. Il nous prend tous

 13   pour des imbéciles. C'est inadmissible que de se servir de ce genre de

 14   chose à un Tribunal pénal international. Parce que si on avait voulu sauver

 15   des gens, en raison de cette impudence éhontée, bien il faudrait les mettre

 16   en tôle ces gens parce que dans des Etats normalement constitués ces gens

 17   sont poursuivis en justice pour tentative d'induire le Tribunal dans

 18   l'erreur et faire condamner des innocents. Vous pouvez me prendre avec des

 19   menottes aux mains avec vous.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors j'ai donc, moi, terminé mes questions.

 21   La Chambre souhaiterait connaître de la Défense le temps approximatif que

 22   vous allez utiliser.

 23   Alors, Maître Karnavas, comme c'est vous qui intervenez en premier, qu'est-

 24   ce que vous avez prévu comme durée ?

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 26   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous.

 27   Franchement, Monsieur le Président, il me sera impossible de vous

 28   dire exactement combien de temps je nécessiterais. J'ai préparé pouvoir

Page 41935

  1   bénéficier de tout le temps qui m'a été accordé. Mais j'essaierai bien sûr

  2   d'être le plus efficace possible. Il est certain que je prendrai le reste

  3   de la journée d'aujourd'hui.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  5   Maître Nozica, de manière approximative.

  6   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  7   bonjour.

  8   Moi aussi, il me semble que je vais avoir besoin de tout le temps qui

  9   m'a été accordé. Il me semble même qu'au début de mes questions je serai

 10   amenée à demander si la Chambre dispose encore de temps qu'elle doit

 11   allouer, et si c'est possible, je demanderais à pouvoir en bénéficier.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Le temps c'était 20 heures, vous avez 20 heures; 20

 13   heures divisées par cinq, ça fait quatre heures par Défense.

 14   Bien, Maître Alaburic.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 16   bonjour.

 17   Je crois que six heures devraient être suffisantes à la Défense du

 18   général Petkovic pour que l'on aborde certains sujets essentiels avec le

 19   général Praljak. Nous estimons qu'avec la requête de temps supplémentaire

 20   que nous avons faite nous pouvons entrer dans le cadre du temps global qui

 21   a été alloué aux défenses. Comme vient de le dire ma consoeur, Mme Nozica,

 22   si jamais il reste encore du temps qui peut être distribué entre tous, nous

 23   exprimons notre souhait de pouvoir en bénéficier également. Je vous

 24   remercie.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Excusez-moi. C'est quoi cette requête du temps

 26   additionnel ? Je n'en ai pas entendu parler.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour le moment, nous

 28   n'avons encore soumis aucune requête de temps supplémentaire car c'est la

Page 41936

  1   première fois que nous nous exprimons sur le temps qui nous est nécessaire,

  2   mais pour autant que j'ai pu l'apprendre de mes confrères, pour ce qui est

  3   de faire un contre-interrogatoire ou non, j'estime que nous pourrons

  4   rentrer dans le cadre du temps global alloué au --

  5   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Comme mes consoeurs, je vais faire tout mon possible pour en terminer avec

  7   mes questions dans le cadre du temps qui m'a été alloué, donc dans le cadre

  8   de ces quatre heures, lorsqu'on partage en cinq, et si jamais je n'y

  9   arrivais pas, si jamais il devait rester une partie de ces 20 heures qui

 10   sont à partager entre tous; alors je demanderais à pouvoir bénéficier d'une

 11   quantité égale de ce temps restant. Merci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Ibrisimovic.

 13   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai eu

 14   d'entretien avec personne concernant un éventuel partage du temps. Dans la

 15   mesure où nous serions amenés à poser des questions à M. Praljak, il nous

 16   sera probablement suffisamment d'intervenir entre deux pauses, et si jamais

 17   nous avons besoin de plus, nous nous en remettrons à la Chambre. Merci.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, la Chambre va donc faire maintenant le break de

 19   20 minutes.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 50.

 21   --- L'audience est reprise à 11 heures 16.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 23   Maître Alaburic.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, avec votre

 25   permission, je voudrais simplement vous dire ce que j'ai pu établir en

 26   rapport avec le document P 06020; c'est le rapport d'Emil Harah daté du 23

 27   octobre 1993 pour lequel j'ai dit que des éléments de preuve ont déjà été

 28   avancés montrant qu'il s'agit d'un faux. Ce que je vais dire maintenant

Page 41937

  1   j'en ai convenu avec M. Stringer si bien qu'il ne devait pas y avoir de

  2   divergences. Je voudrais que l'on puisse passer à huis clos partiel car il

  3   s'agit de témoins qui sont des témoins protégés et je voudrais les citer

  4   par leurs noms.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Audience à huis clos, s'il vous plaît.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

  7   partiel.

  8   [Audience à huis clos partiel]

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)

Page 41938

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, je vous ai vu agiter le document

 17   qui, semble-t-il, a été rédigé à partir du recensement ethnique en 1991

 18   dans la région Travnik, la région centrale. Est-ce que vous voulez demander

 19   l'admission de ce document et on peut donner un numéro IC ? 

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] [aucune interprétation] 

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Bien. Alors dites --

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur le Greffier, donner un numéro

 24   au document et l'huissier va le remettre au greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ce sera la

 26   pièce IC 01031.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Huissier, s'il vous plaît, présentez le

 28   document à M. Stringer pour le cas où il ferait des objections au document.

Page 41939

  1   M. STRINGER : [interprétation] Pas d'objection à ce qu'il va verser. Bien

  2   sûr, nous nous réservons le droit d'en contester l'authenticité.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  4   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi une

  5   brève intervention pour réagir à ce Me Alaburic vient de dire, inutile de

  6   repasser en audience à huis clos partiel pour se faire. Je voulais

  7   simplement vous indiquer que Me Alaburic s'était bien prononcée.

  8   Manifestement les Juges pourront vérifier. Il s'agissait du Témoin EA.

  9   Auparavant, Me Alaburic avait dit que ce témoin avait déclaré que ce

 10   document était un faux. Techniquement, c'était incorrect parce qu'il a dit

 11   qu'il ne savait pas, qu'il ne l'avait pas vu et qu'il lui était impossible

 12   de dire si c'était un faux ou pas. Mais comme Me Alaburic vient de le dire,

 13   nous avions une déclaration 92 bis précédente d'un autre témoin lequel

 14   affirmait que ce document c'était un faux.

 15   La seule réserve que j'aurais, c'est qu'en fin d'intervention, Me Alaburic

 16   a dit que l'Accusation était d'accord pour dire que c'était un faux ce

 17   document.

 18   Mais, à mon avis, vu la comparution et ce qu'ont dit ces deux témoins, il

 19   revient à la Chambre de -- ou en dernière instance, de trancher la

 20   question. L'Accusation a dit au Témoin EA que c'était un faux. Le témoin a

 21   refusé d'accepter cette hypothèse. Il a bien dit qu'en fait il avait donné

 22   l'ordre qu'un rapport soit fait comme c'était dit dans la pièce. Par

 23   conséquent, c'est en partie corroboré pour ainsi dire mais je ne voudrais

 24   pas qu'on dise que l'Accusation partage tout à fait l'avis de la Défense à

 25   savoir que c'est un faux. Je pense qu'il faut que le compte rendu soit

 26   précis sur ce point.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le compte rendu est donc précis sur ce point.

 28   Je vais d'abord demander à mes collègues si, eux, ils ont à leur niveau des

Page 41940

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41941

  1   questions à poser. Alors je vais demander au Juge Mindua, pas de questions;

  2   Juge Prandler. Bien. Donc il n'y a pas de questions.

  3   Alors, Maître Karnavas, vous avez donc le pupitre. Vous nous avez donné vos

  4   documents, donc je vous cède la parole.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,

  6   Messieurs les Juges. Bonjour à tous et à toutes.

  7   Avant de commencer, permettez-moi cette remarque suite à ce que vient

  8   de dire l'Accusation. Lorsqu'une partie que ce soit la Défense ou

  9   l'Accusation soumet une idée à un témoin, il faut partir de l'idée que

 10   c'est fait de bonne foi parce que quelque part c'est aussi une allégation.

 11   Donc je ne ferais pas moins -- pas la mienne nécessairement cette

 12   interprétation, ma voix assez libérale qui a été présentée. Mais enfin

 13   laissons ceci pour un autre débat.

 14   Contre-interrogatoire par M. Karnavas :

 15   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Praljak.

 16   R.  Bonjour, Maître Karnavas.

 17   Q.  Parfait. J'espère que vous allez être tout à fait concentré. Si vous

 18   restez concentrer nous pourrons agir vite. D'abord quelques questions

 19   d'intendance disons. Je vais quelquefois faire référence au compte rendu

 20   d'audience.

 21   Commençons par la question du 30 juin 1993. Le Juge Antonetti, à la page 41

 22   602, a fait référence à certains documents, notamment à un document dont

 23   l'auteur est M. Siljeg. Prenons la pièce P 03026. Je répète P 03026. Vous

 24   avez déjà vu ce document. Il vous a été montré par M. le Président, le Juge

 25   Antonetti - voyons la toute première ligne tout d'abord, parce que ça a

 26   attiré l'attention de tout le monde - c'est la page 2, Messieurs les Juges,

 27   en anglais.

 28   "Brado a pris connaissance du rapport de Mostar de cette conversation

Page 41942

  1   entre A. Pasalic et S. Halilovic, et avec le commandement donné par le chef

  2   du département de la Défense et le président du HVO de la HB HZ et partant

  3   de cela, il a demandé ceci."

  4   Moi, ce qui m'intéresse c'est l'expression "avec le commandement donné

  5   par;" ça donne l'impression que mon client, M. Jadranko Prlic, donnait des

  6   ordres des commandements. Quand on parle de commandement, est-ce que c'est

  7   un commandement, à votre avis, qu'a donné M. Prlic ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Très bien. Savez-vous si, à un moment donné, M. Prlic a donné des

 10   commandements à qui que ce soit, notamment ou surtout à M. Siljeg ?

 11   R.  Je ne sais pas. Je sais que jamais pendant la durée où j'étais un poste

 12   de commandement il ne m'a donné d'ordre ni à moi ni à l'un de mes

 13   subordonnés, dans le mesure où moi je suis intervenu. Alors en ce qui me

 14   concerne moi personnellement c'est tout à fait sûr, et pour ce qui est

 15   d'autres qui auraient pu recevoir des ordres de lui, je n'ai jamais

 16   rencontré de cas où il aurait émis des ordres à destination de sous

 17   officiers.

 18   Q.  Restons sur ce sujet voyons la pièce P 03038, et en rapport avec ce

 19   document nous allons aussi voir le document suivant P 03039. Ce serait

 20   utile de les avoir côte à côte. Prenons d'abord le 3038, il porte la date

 21   du 30 juin 1993. Il y a un numéro, 02-1-765/93. Je crois comprendre que, la

 22   première partie de ce document c'est une proclamation et puis à la fin on

 23   donne une forme d'ordre à cet effet dans une certaine mesure, ce sera la

 24   deuxième page de votre document. Mais voyons d'abord la première partie.

 25   Est-ce qu'il s'agit ici d'un ordre ou d'une proclamation ?

 26   R.  C'est une annonce, une proclamation.

 27   Q.  Page suivante où il est bien dit que :

 28   "Conformément à l'autorisation et vu la nouvelle situation, le chef du HVO

Page 41943

  1   de la HZ HB -- ou plutôt, du département de la Défense, M. Stojic, donne

  2   l'ordre suivant."

  3   Mais regardons cet ordre ce n'est pas un ordre opérationnel, n'est-ce pas ?

  4   R.  En effet.

  5   Q.  Document suivant P 03039, on voit "objet," et on voit un numéro

  6   d'ordre, les destinataires ont parmi eux, il y a notamment M. Siljeg, bien

  7   sûr. Voyons la teneur; finalement, est-ce que ce n'est pas le même ordre ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Nous sommes d'accord pour dire que ce n'est pas un ordre opérationnel,

 10   dans la mesure où ni M. Prlic ni M. Stojic ne donne d'ordre opérationnel à

 11   M. Siljeg ?

 12   R.  Siljeg dit avec exactitude qu'il s'agit ici d'un message qui lui est

 13   envoyé.

 14   Q.  Il y a peut-être certains d'entre nous qui ont oublié ce qui s'est

 15   passé ce jour-là, ou vers cette date, n'est-ce pas, établit que c'est vers

 16   cette date qu'il y a eu un incident qui a attiré l'attention de tous ?

 17   R.  Ce n'est pas un incident, Maître Karnavas. C'est une trahison et une

 18   agression simultanément, une trahison -- ou plutôt, une haute trahison plus

 19   précisément, car les combattants du HVO appartenant aux groupes ethniques

 20   musulmans ont procédé à une attaque conformément à un plan préparé

 21   d'avance, attaque dirigée contre leurs camarades d'arme. Ils les ont

 22   désarmés, ils en ont tué de nombreux, et ce jour-là l'ABiH s'est livrée à

 23   une agression ouverte contre le HVO. Cela on ne peut pas le qualifier

 24   d'incident.

 25   Q.  Très bien. Excusez-moi. J'essaie d'être le plus neutre possible pour

 26   que ce soit vous qui vous exprimiez, que ce ne soit pas moi qui est --

 27   toute mon avis, même si nous sommes en contre-interrogatoire.

 28   Je m'en tiens à cette période pour l'heure, donc si nous voyons, c'est un

Page 41944

  1   document qui la précède cette période ou qui la suivre, nous verrons, parce

  2   qu'il y a une question posée à la Chambre celle du nettoyage ethnique à

  3   rebours. Voyons le document 1D 01668. Nous avons déjà vu ce document, il

  4   s'agit d'un procès-verbal d'une réunion. Nous voyons l'ordre du jour, au

  5   tout premier point, il est question du fait que le chef du département de

  6   la défense dit ceci :

  7   "Dans son rapport, il a dit que les forces musulmanes avaient effectué ou

  8   effectuaient des attaques coordonnées en Bosnie centrale et dans le nord de

  9   l'Herzégovine afin de capturer des zones qui d'après le plan Vance-Owen

 10   devaient être incluses dans les zones où il y avait une majorité croate,

 11   (provinces 8 et 10), il continue d'isoler, de terroriser, et de détruire

 12   tout ce qui est croate. Dans la zone de Travnik, municipalités de Kiseljak,

 13   Vitez, Vares, et dans les municipalités de Konjic et Jablanica, mais aussi

 14   là où les Croates sont minoritaires, (par exemple, à Sarajevo, Zenica, et

 15   Tuzla), la survie de chaque Croate et du peuple croate dans sa totalité est

 16   sérieusement compromise."

 17   A cette date-là, est-ce que ceci est le reflet fidèle de ce qui se passait

 18   dans ces lieux vers le milieu du mois de juin 1993 ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Page 3 en anglais, là, nous avons des conclusions - je ne sais pas -

 21   oui, ce sera la page 3. Voyons ces conclusions :

 22   "Il est proposé à la présidence de la HZ HB et au commandant suprême

 23   du HVO de demander d'urgence l'assistance militaire de la République de

 24   Croatie afin de protéger les Croates en Bosnie-Herzégovine."

 25   Nous savons qui était la présidence mais le commandant suprême du HVO

 26   c'était qui encore ?

 27   R.  Mate Boban.

 28   Q.  Conclusion suivante :

Page 41945

  1   "Une proposition a été faite à la présidence de la HZ HB et au commandant

  2   suprême du HVO afin qu'une décision soit adoptée visant à retirer toutes

  3   les unités militaires de zones qui sont en dehors des provinces croates

  4   désignées, avec les habitants qui s'y trouvent et qui vivent. A cet effet,

  5   il faut demander la coopération et l'assistance de la FORPRONU et du Haut

  6   commissariat aux réfugiés."

  7   Vu votre poste et la compréhension que vous aviez des événements, pourriez-

  8   vous nous expliquer pourquoi on proposait ce genre de conclusion ?

  9   R.  Avec l'agression de l'ABiH visant le HVO, dans les zones où l'ABiH

 10   exerçait le contrôle, il y avait toujours dix à 15 000 soldats du HVO qui

 11   se battaient à ses côtés et qui étaient placées sous les ordres de l'ABiH

 12   et que cela était toujours le cas, alors que l'ABiH s'était lancée dans la

 13   conquête des territoires peuplés de Croates, s'étaient lancés dans

 14   l'attaque du HVO. Donc dans ces autres zones où des Unités du HVO

 15   continuent à assurer la défense sous le commandement de l'ABiH contre les

 16   Serbes, on a une situation qui est difficile à accepter, à comprendre.

 17   C'est pour cela que cela a été ainsi proposé mais cela n'a pas été

 18   appliqué.

 19   Q.  Numéro 5, il est dit :

 20   "Envoyez une proclamation spéciale aux volontaires de la République

 21   de Croatie et de la diaspora pour qu'ils ne s'inscrivent ou rejoignent les

 22   rangs du HVO, pour défendre ces zones croates."

 23   Mais est-ce que les Herzégovins de Croatie ne sont pas allés en

 24   Croatie lorsque la Croatie a été attaquée par la JNA ?

 25   R.  En effet, il y en a eu plus de 13 000, au moins 13 000 d'entre eux se

 26   sont battus au sein de l'armée croate.

 27   Q.  Si je comprends les choses, le président Tudjman, mais aussi l'armée

 28   croate telle qu'elle était, tel qu'elle était en train de se former

Page 41946

  1   dépendait beaucoup des Herzégovins pour défendre la Croatie ?

  2   R.  En effet, nous étions de bons combattants au sein de l'armée croate car

  3   nous avions une conscience nationale particulièrement prononcée. Nous

  4   étions des patriotes au sens du peuple dans son intégralité et non pas dans

  5   un sens étroitement régional.

  6   Q.  N'est-ce pas un fait, beaucoup des volontaires qui sont allés là-bas,

  7   ils sont restés. Pourquoi y a-t-il ce genre de conclusion, n'est-ce pas,

  8   pour inviter les volontaires qui étaient allés lutter pour la Croatie ? Ne

  9   sont-ils pas invités à revenir défendre leur village, leur foyer, leur

 10   ville ?

 11   R.  C'est exact. Un très petit nombre d'entre eux sont revenus.

 12   Malheureusement, et ce, pour de nombreuses raisons.

 13   Q.  Document suivant, 1D 02309, 2309. Nous sommes maintenant le 1er juillet

 14   1993. Nous sommes toujours à l'examen de ce thème, à cette époque. C'est

 15   une lettre de Mile Akmadzic. Il est venu en tant que témoin, nous le voyons

 16   tout en haut. C'est envoyé au secrétaire général des Nations Unies, au

 17   président du Conseil de sécurité des Nations Unies, au président de la

 18   Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie. Ici, il parle des

 19   événements du 30 juin 1993. Dites-nous tout d'abord, si M. Akmadzic fait

 20   ici un récit fidèle à la réalité.

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que, dans les Nations Unies, quelqu'un est venu enquêter pour

 23   voir ce qui s'était véritablement passé ? Est-ce qu'on a dépêché quelqu'un

 24   envoyer une commission, quelqu'un pour voir ce qui s'y était passé pour les

 25   Croates qui avaient été abattus par les Musulmans ?

 26   R.  Non, ils ont continué à faire circuler des informations complètement

 27   erronées et mensongères, des rapports erronés et mensongers.

 28   Q.  Très bien. Document suivant, P 03413. Là, nous avons quelque peu

Page 41947

  1   dépassé cette période puisque nous avons la date du 13 juillet 1993. Vous

  2   voyez, nous avons une conclusion du HVO de la HZ HB prise le 15 juin 1993,

  3   qui dit ceci :

  4   "Le peuple croate de Bosnie centrale est de l'Herzégovine

  5   septentrionale sont menacés de massacre et d'extermination des unités

  6   musulmanes. Dans la zone, ils sont beaucoup plus forts et leur force

  7   augmente à l'heure, par conséquent si nous ne prenons pas les mesures

  8   nécessaires, l'exode des Croates de ces zones, ces zones qui sont depuis

  9   des siècles leurs zones natales sera inévitable…"

 10   Est-ce que c'est vrai, cette situation décrite par M. Prlic ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  On trouve des propositions, mais dites-nous est-ce que les Nations

 13   Unies ont dépêché des effectifs afin d'empêcher des massacres, des

 14   atrocités commises contre les Croates de Bosnie centrale à cette époque,

 15   vers cette époque ?

 16   R.  Non. On ne voulait même pas en entendre parler. On ne voulait rien

 17   savoir à ce sujet, et on a continué à affirmer obstinément que le HVO était

 18   en train d'attaquer quelqu'un d'autre.

 19   Q.  Maintenant, nous --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Je ne vais pas vous interrompre, parce que

 21   je sais que c'est toujours désagréable d'être interrompu quand on veut

 22   mettre en évidence quelque chose, mais là, ma question elle va dans le

 23   sens.

 24   Général Praljak, vous avez fait référence à plusieurs reprises au fait que

 25   j'avais présidé un autre procès qui concernait des généraux musulmans. Le

 26   jugement a été rendu, c'est public. Je me souviens qu'à Guca Gora, la

 27   population croate s'était enfuie de Guca Gora alors même qu'il n'y avait

 28   même pas la présence d'un soldat de l'AbiH. Ils étaient partis par terreur

Page 41948

  1   et après les Moudjahidines sont arrivés après. Mais quand les Moudjahidines

  2   sont arrivés, il n'y avait plus de population, les gens étaient partis.

  3   Alors est-ce que vous, vous avez constaté que cet événement arrivait assez

  4   souvent dans les villages croates où la rumeur le fait qu'à 10, 20 ou 30 

  5   kilomètres, il s'était passé quelque chose, faisait que la population

  6   d'elle-même quitte les lieux par peur, combien compréhensible. Est-ce que

  7   vous avez été témoin de cela, à plusieurs reprises ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai eu connaissance de cas de cette

  9   nature. Donc il y avait deux scénarios possibles, trois, en fait, soit que

 10   l'armée soit en fuite car elle avait été vaincue, et dans ce cas-là, la

 11   population suivait l'armée dans sa fuite; ou alors c'était la population

 12   qui partait la première et le HVO n'avait plus rien à défendre et partait

 13   lui aussi. Le troisième scénario, c'était là où la population n'était pas

 14   protégée par le HVO, et où elle finissait à fuir par peur. Car si à

 15   quelques kilomètres de là, c'est tout à fait compréhensible, si on entend

 16   dire que des gens ont été tués, qu'ils ont été décapités ou quoi que ce

 17   soit d'autre, bon, les gens fuient.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Je vais bientôt vous poser la question suivante, mais nous pourrions

 20   peut-être vous donner les documents à la fois, en les retirant du classeur,

 21   peut-être que ce sera plus facile pour vous. C'est ce que je voulais dire.

 22   Ma consoeur, Me Tomanovic, pourrait vous les présenter.

 23   R.  [aucune interprétation]

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puisque vous parlez des classeurs,

 26   pourriez-vous nous expliquer s'il y a une logique quelconque dans la

 27   séquence de présentation des documents ? Parce que, moi, je n'en vois pas.

 28   Quelquefois c'est plus difficile parce qu'on n'a "EXH" pour "exhibit," mais

Page 41949

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41950

  1   je ne vois pas pourquoi.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge, honnêtement,

  3   apparemment, quand il s'agit de pièce, on le dit, "EXH," excusez-moi. Moi,

  4   je me suis préparé toute cette nuit pour essayer de tenir compte des

  5   instructions qui m'avaient été données. J'ai réorganisé tout ceci ce matin,

  6   mais je pense que vous verrez bien sous peu où je veux en venir. Je

  7   prendrai le temps qu'il faut pour examiner les documents.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, donnez-nous des indications

  9   parce que ce n'est pas nécessairement le document qui suit le précédent que

 10   vous mentionnez, et c'est pour vous aider je dis ça --

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous voulons parfaitement vous

 13   suivre.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends tout à fait.

 15   Q.  Mais permettez-moi d'enchaîner, de rebondir sur ce que je disais, M. le

 16   Juge Antonetti, à propos des Moudjahidines, si j'ai bien compris, étaient

 17   surtout du côté de Zenica et dans les environs. Est-ce que c'est là qu'ils

 18   avaient leur QG ?

 19   R.  La majorité d'entre eux, oui, mais ils étaient répartis sur une zone

 20   beaucoup plus large, Maître Karnavas.

 21   Q.  Je suppose que Zenica faisait l'objet de menaces constantes d'attaques

 22   que ce soit venant des Serbes ou des Croates ?

 23   R.  Oui. Vous voulez dire une attaque contre les Croates ?

 24   Q.  Mais est-ce que Zenica était un lieu qui exigeait la présence des

 25   Moudjahidines pour que Zenica soit protégée ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  C'est ce que je voulais vous dire. Alors avez-vous une idée qui

 28   expliquerait pourquoi on a autant de combattants étrangers quand on est à

Page 41951

  1   un endroit où il n'était pas nécessaire, par exemple, parce qu'il n'y avait

  2   pas là de combats avec les Serbes ?

  3   R.  Ces hommes ont fait leur apparition en Bosnie-Herzégovine dans le cadre

  4   d'une politique bien précise et ceci dans le but bien plus de répandre

  5   l'Islam que de mener une guerre pour la défense de la Bosnie-Herzégovine.

  6   Leur but premier et le plus important était de propager l'islam et

  7   d'entraîner d'autres hommes qui, ensuite, seraient capables de participer à

  8   d'autres activités, que ce soit en Europe ou dans le monde, plutôt que de

  9   participer à une guerre défensive en Bosnie.

 10   Q.  D'accord. Mais à ce moment-là, Sarajevo était toujours assiégée ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Si j'ai bien compris, nous y viendrons, vous aviez encouragé

 13   Izetbegovic à apporter son aide à la libération de Sarajevo, mais il ne

 14   voulait pas discuter du sujet avec vous ?

 15   R.  Non, il n'a pas accepté cela. Il me semble qu'il n'a jamais vraiment

 16   souhaité lever sérieusement le blocage de Sarajevo. Il y a eu deux

 17   opérations où il semblait qu'il ait eu cette intention-là, mais ces

 18   opérations ont été mises en œuvre avec si peu d'effectifs qu'on peut aussi

 19   bien conclure que ce n'était pas là son intention véritable.

 20   Q.  C'est une des raisons pour lesquelles je vous ai posé la question. Vous

 21   avez offert de contribuer à la levée du siège - c'était bien en 1992, quand

 22   Izetbegovic est arrivé dans la zone de Mostar - vous avez voulu apporter

 23   votre concours à la levée du siège de Sarajevo. Mais une question s'impose

 24   qui n'a pas encore été posée ici : Les Moudjahidines à Sarajevo, pourquoi

 25   est-ce qu'ils n'ont pas essayé de lever le siège de Sarajevo ? Pourquoi

 26   est-ce qu'ils étaient à Zenica, alors qu'il n'y avait rien à faire ?

 27   Pourquoi est-ce qu'ils étaient là ?

 28   M. STRINGER : [interprétation] Objection, parce qu'on demande au témoin de

Page 41952

  1   se livrer à des conjectures sur des faits qu'il ne connaît pas

  2   personnellement.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] D'abord, nous parlons à un Général qui a

  4   servi dans l'armée. Si lui ne le sait pas, qui va le savoir ? Vu sa

  5   participation dans la zone autour de cette zone, vu qu'il a rencontré

  6   Halilovic et d'autres commandants militaires, comment se fait-il qu'il ne

  7   serait pas capable de donner son avis ?

  8   Parce que j'ai déjà posé les bases. Zenica n'a pas besoin de protection.

  9   Pourtant on a les Musulmans qui circulent, alors qu'ils ne sont pas

 10   nécessaires. Sarajevo est attaquée et, comme l'a dit le Général, c'est

 11   peut-être parce qu'Izetbegovic avait un autre plan qui était de faire tuer

 12   ses propres gens pour jouer la victime pour obtenir de la communauté

 13   internationale qu'elle intervienne, car nous l'avons entendu et ça a été

 14   écrit par M. Owen. Il voulait que la communauté internationale intervienne

 15   dans les combats. Donc il sacrifiait ses propres ressortissants, car il

 16   voulait établir un Etat islamique.

 17   M. STRINGER : [interprétation] De nouveau, nous avons cette théorie de la

 18   conspiration, mais ceci répond à la question fondamentale qui était qu'on

 19   avait invité le témoin à présenter ses idées sur une théorie de la Défense.

 20   Libre à la Défense de le dire, mais le témoin ne sait rien sur cette

 21   question précise.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais reformuler ma question.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un instant, parce qu'au sein de la Chambre, il

 24   peut y avoir déjà une divergence sur la question. Il faut que je demande à

 25   mes collègues si vous pouvez continuer sur ce terrain. Donc je vais

 26   demander à mes collègues.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, votre micro. Veuillez appuyer sur le

Page 41953

  1   casque.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre a délibéré sur la question et elle estime

  4   qu'il faut éviter les spéculations. Ça, la Chambre est unanime.

  5   Deuxièmement, la Chambre pense que le témoin peut expliquer pourquoi

  6   les Moudjahidines étaient à Zenica, car en termes militaires, il y a certes

  7   une raison. Là, est-ce que militairement leur présence était légitime ou

  8   pas, ça peut être intéressant.

  9   Mais maintenant à titre personnel, je veux rajouter quelque chose à

 10   cette décision de la Chambre. Moi-même, j'ai eu l'occasion dans l'autre

 11   procès de poser la même question que Me Karnavas vient de poser. J'avais

 12   posé la question à un témoin pour savoir comment se fait-il que le 3e Corps

 13   avec ses 130 000 soldats n'avait rien fait pour aller débloquer Sarajevo.

 14   Ceux qui connaissent tous les éléments du dossier ont cette question

 15   légitime en tête. Et j'avais posé cette question à un témoin pour savoir

 16   comment se faisait-il qu'on avait rien fait pour aller sur Sarajevo plutôt

 17   que de faire une attaque en Bosnie centrale. Donc il y a peut-être des

 18   raisons précises en la question.

 19   Donc, Maître Karnavas, essayez de limiter vos questions à des faits

 20   et évitez qu'il y ait de la spéculation, parce qu'immédiatement le

 21   Procureur va se lever, puis on va être obligé de délibérer.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Fort bien, Monsieur le Président.

 23   Q.  Je suis toujours à l'examen de ce sujet. Savez-vous s'il y a des

 24   Moudjahidines qui ont été redéployés sur Sarajevo pour essayer de lever le

 25   siège de Sarajevo pendant cette période ? Question factuelle, je pense que

 26   celle-ci. Je suis sûr que vous pourrez y répondre.

 27   R.  Non, ce n'est pas le cas, mais j'interviens en tant que témoin. Je me

 28   suis entretenu avec M. Izetbegovic en automne 1992. A l'époque, nous étions

Page 41954

  1   forts. On enregistrait des victoires; le HVO était donc fort. J'ai proposé,

  2   pour ma part, de débloquer Sarajevo conjointement et M. Izetbegovic,

  3   appelons-le de son langage diplomatique, a fait savoir qu'il y aurait

  4   intervention de la communauté internationale. J'ai dit : Mais vous avez

  5   déjà 5 000 morts. Ils ne sont pas intervenus lorsqu'il y a eu 5 000 morts,

  6   donc ça signifie qu'ils n'interviendront pas. Lui a refusé et il a dit :

  7   Ils interviendront.

  8   Alors la conclusion exacte est celle de dire que M. Izetbegovic - et ça je

  9   vous l'affirme, c'est ma conclusion à moi, pas la vôtre, M. Karnavas, la

 10   mienne - il avait espéré que, parce que les Serbes avaient pilonné Sarajevo

 11   et qu'il n'y avait pas beaucoup de morts, cela donnerait naissance à une

 12   masse critique au niveau de l'opinion publique mondiale et que la

 13   communauté internationale ne manquerait pas d'intervenir. Je disais que

 14   non. Et j'avais raison. Et je l'affirme de nos jours encore.

 15   Non seulement les Moudjahidines, mais les unités musulmanes d'élite, la 7e,

 16  la 17e, et cetera, donc le 3e Corps et pas même les parties du 1er Corps qui

 17   se trouvaient à l'extérieur de Sarajevo n'ont jamais entrepris des

 18   opérations visant à libérer Sarajevo. Ce n'est pas du radotage, c'est les

 19   conclusions que j'ai tirées moi-même.

 20   Q.  Fort bien. Merci. Nous allons abandonner ce sujet pour le moment pour

 21   revenir à cette période de juin/juillet. Je vais maintenant passer à la

 22   période du mois de novembre tout en examinant ce sujet du nettoyage

 23   ethnique à rebours. En effet, nous allons examiner le document 1D 01269 et

 24   le document 1D 01270. On va les examiner côte à côte. Je reprends les

 25   cotes, 1D 01269 et 1D 01270.

 26   Premier document, le 1269, il porte la date, vous le voyez, du 4 novembre

 27   1993. Bas de page, c'est Franjo Komarica qui signe. En haut, on voit qu'il

 28   est l'évêque de Banja Luka. Vous l'aurez peut-être oublié, Banja Luka était

Page 41955

  1   à l'époque en Republika Srpska, territoire occupé par les Serbes, n'est-ce

  2   pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  C'est ce même évêque qui a été proposé comme prix Nobel de la paix

  5   pendant toute la guerre. Il a en effet refusé de quitter Banja Luka. Il a

  6   décidé de rester à Banja Luka pour essayer de protéger les Croates qui

  7   habitaient à Banja Luka et dans les

  8   environs ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Très bien. A l'examen de ce document, il semblerait que M. Komarica

 11   essaie d'obtenir de l'aide pour que les Croates qui sont piégés soient

 12   aidés, soit que lui aussi participe en tant que membre d'une entreprise

 13   criminelle commune ou encore, en tout cas, au bas mot, il est complice,

 14   parce que ceci serait une assistance matérielle, pourrait-on dire en

 15   conclusion, puisqu'il demande d'urgence de l'aide pour qu'on permette

 16   d'extraire ces Croates de la zone.

 17   Dites-nous, si vous le savez, partant de votre expérience et de vos

 18   connaissances à l'époque, dites-nous si l'évêque Komarica, dans cette

 19   lettre, décrit des faits exacts ou est-ce que c'est son imagination qui lui

 20   joue des tours, simplement parce qu'il veut encourager et promouvoir le

 21   nettoyage ethnique à rebours ?

 22   R.  Ce sont des faits qui correspondent à la vérité et j'aimerais qu'on ait

 23   le temps de vous montrer un film concernant le pillage de Vares par la 7e

 24   Brigade musulmane lorsqu'elle est entrée dedans. Vous verriez alors de quoi

 25   cela avait l'air. Ici on supplie pour trois tonnes de pétrole et c'est la

 26   soi-disant coopération avec les Serbes, afin que ces gens qui ont été

 27   expulsés soient évacués du territoire à bord d'autocars. Le plan d'attaque

 28   sur Vares a été établi bien avant les événements de Stupni Do. Ça a

Page 41956

  1   commencé bien avant.

  2   Q.  Très bien. Il semblerait, c'est ce qu'il semble laisser entendre -- il

  3   demande au président du HVO de la HZ HB de fournir des ressources, on

  4   pourrait qualifier ce qu'il demande de ressources, de donner ces ressources

  5   aux Serbes pour permettre l'évacuation; c'est exact ?

  6   R.  C'est exact, il faut leur donner du carburant.

  7   Q.  Ces gens qui étaient piégés dans cette zone pouvaient-ils sortir d'une

  8   autre façon sans avoir de l'aide venant de l'extérieur ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Dernière question : A votre avis, l'évêque Komarica, qui est resté sur

 11   place avec ces ouailles en pleine guerre, vous le connaissez, vous l'avez

 12   dit pendant l'interrogatoire principal, est-ce le type d'homme qui se

 13   livrerait à un nettoyage ethnique à rebours pour que les Croates soient

 14   chassés de leurs terres ancestrales en Bosnie ?

 15   R.  C'est impensable. Je connais M. l'évêque Franjo Komarica, je sais quel

 16   a été son travail après et il a été proposé entre cinq autres personnes

 17   pour une nomination au prix Nobel de la paix, donc ce serait inconcevable.

 18   Q.  Très bien. Passons à un autre sujet, ça ne sera pas long. Cette carte

 19   de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, on a aussi parlé de la banovina,

 20   nous avons vu des cartes et les Juges ont même posé cette question. On a

 21   dit que nous n'avions pas prouvé ou montré, en tout cas c'est comme ça que

 22   j'ai entendu les choses, qu'on n'avait pas prouvé cela. Voyons donc

 23   quelques documents et j'aimerais que vous nous en parliez.

 24   Voyons d'abord 1D 02253, 1D 00253. Puis ce sera 2255. Au fond, ces

 25   documents se ressemblent fort. Il s'agit d'une décision du 8 juillet 1992 :

 26   "En vertu de la décision réglementaire prise sur l'établissement temporaire

 27   des autorités exécutives et de l'administration dans la partie croate de la

 28   municipalité de Teslic, le HVO, le conseil croate de la Défense de Teslic-

Page 41957

  1   Komusina adopte par la présente la décision suivante…"

  2   Décision portant constitution de bureaux administratifs sur le territoire

  3   de la partie croate de la municipalité de Teslic-Komusina. Nous n'allons

  4   rouvrir ce débat sur la question du territoire, parce que la traduction

  5   n'est pas toujours la même. Ici on n'a pas le mot "territoire," dans la

  6   traduction. Mais est-ce que c'est une zone géographique qu'il est possible

  7   de voir sur une carte; est-ce qu'il est possible d'en faire le tracé; est-

  8   ce qu'il est possible de dire ça fait partie de la Communauté croate

  9   d'Herceg-Bosna qui, elle-même, ferait partie de la soi-disant banovina dont

 10   l'Accusation affirme qu'on essayait de la recréer ?

 11   R.  Monsieur Karnavas, ceci n'a rien à voir avec la banovina, aucun lien.

 12   Si vous le permettez, je dirais qu'il s'agit ici d'une décision prise

 13   partant de deux principes. Le premier, c'est le principe du droit d'un

 14   homme et d'un peuple à la défense. C'est un droit au-dessus de tous les

 15   autres droits; et l'autre, c'est les lois qui sont en vigueur à l'époque en

 16   Bosnie-Herzégovine, alors le droit et le devoir de s'associer et de se

 17   défendre contre l'ennemi.

 18   Q.  Très bien. Mais ma question concernait plutôt l'aspect géographique. En

 19   effet, on semble avoir tout du moins l'impression, la perception quelque

 20   part, qu'il est possible de placer toutes ces municipalités sur une carte,

 21   de les entourer d'une ligne et de dire : Voilà, ça c'est la zone qu'on a

 22   essayé d'occuper, de conquérir, de prendre, d'annexer, d'enlever à la

 23   Bosnie-Herzégovine. C'est pour ça que je vous demande d'examiner cette

 24   décision et d'autres.

 25   Est-ce que cette décision-ci vous permet de conclure qu'il y aurait une

 26   espèce de territoire qu'on peut découper sur une carte, pour ainsi dire ?

 27   C'est la question que je vous pose.

 28   R.  Non, ça ne peut pas ce faire. On peut prendre des bouts, mais il n'y a

Page 41958

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41959

  1   pas d'entité ou d'ensemble ni propre à la Banovina ni propre à quoi que ce

  2   soit d'autre.

  3   Q.  D'accord --

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourriez-vous nous aider en nous

  7   disant à peu près de l'endroit dont on parle, parce que moi je ne connais

  8   pas bien ce lieu. Ce nom ne se trouve pas sur une carte de Google, peut-

  9   être qu'on le voit sur la carte qu'on a dans le coin de la salle

 10   d'audience, en principe ça ferait partie de quelle municipalité d'Herceg-

 11   Bosna, pour autant que ça existe.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis content de votre dernière remarque,

 13   pour autant qu'il y ait eu une communauté. Mais, Monsieur le Juge, est-ce

 14   qu'il est possible de faire ça pendant la pause, on peut le faire tout de

 15   suite si vous voulez, mais pendant la pause on pourrait essayer de repérer

 16   l'endroit sur la carte et on reviendra.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, oui, moi je suis toujours en

 18   faveur de l'économie de temps et de forces. Merci, Maître Karnavas.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Document 1D 02255, une décision qui concerne

 20   Usora. Rappelez-vous, on vous a demandé où se trouvait Usora. Moi je me

 21   suis trompé, j'ai dit que c'était en Republika Srpska, mais aujourd'hui ce

 22   lieu se trouve dans la Fédération, et si j'ai bien compris, c'est près de

 23   Doboj qui se trouve, elle, en Republika Srpska.

 24   Q.  Mais regardons cette décision, peut-on en conclure qu'on découpe un

 25   territoire qui pourrait être ajouté à autre chose ?

 26   R.  Exact.

 27   Q.  Usora se trouvait où ? Ça fait quelle superficie cette zone ?

 28   R.  Tout petit, c'est un territoire tout petit.

Page 41960

  1   Q.  Vous dites "petit;" pour certains, petit ça fait 100 kilomètres carrés;

  2   en fait, qu'est-ce que c'est concrètement ?

  3   R.  C'est peut-être 10 kilomètres sur 10 kilomètres, ça fait 100 kilomètres

  4   carrés. Mais, Monsieur Karnavas, tout ceci peut être tracé, mais il n'y a

  5   pas de lien. Ce sont des bouts de peuples croates conscients qui

  6   s'associent pour constituer la défense de la Bosnie-Herzégovine. Là où ils

  7   étaient conscients du fait de ce qui était en train de se préparer, et ils

  8   disaient, On essaiera de garder la vie sauve, de garder nos maisons, de

  9   garder nos postes de travail, et l'état qui est le nôtre.

 10   Q.  Très bien. Autre sujet que nous allons aborder rapidement. Le 15

 11   janvier 1993, le soi-disant - j'insiste bien, "soi-disant" - ultimatum. Le

 12   Juge Antonetti en a parlé avec vous assez longuement, vous nous avez aussi

 13   expliqué le rôle que vous avez joué à cet égard. Mais je me disais qu'il

 14   serait peut-être utile d'examiner certaines choses à propos du procès-

 15   verbal de la réunion de Zagreb avec Tudjman, Cyrus Vance, Owen, Izetbegovic

 16   et Mate Boban, le 15 janvier 1993, il s'agit de la pièce P 01158, P 01158.

 17   Pourquoi ? Parce que plus tard je vais revenir sur l'avis généreux que vous

 18   aviez d'Izetbegovic et je vais un peu là le contester.

 19   Prenons d'abord la page 16 en anglais, c'est Ahtisaari ici, c'est bien lui

 20   qui a reçu le prix Nobel de la paix, n'est-ce pas ? Voici ce qu'il dit.

 21   Monsieur Praljak, prenez le bas de la page -- ou plutôt, en haut, 01322259,

 22   c'est le numéro ERN de cette page.

 23   "En ma qualité du groupe de travail" - dit-il - "je ressens l'obligation de

 24   parler du processus dont nous parlons encore.

 25   "Il a fallu plusieurs mois pour que cette proposition dont nous

 26   discutons aujourd'hui voie le jour et nous les avons ici ces propositions

 27   aujourd'hui.

 28   "Je parle ici des propositions militaires, constitutionnelles et

Page 41961

  1   géographiques ou de la carte.

  2   "Si nous voyons le paquet de mesures qui est soumis à discussion dans sa

  3   totalité, il serait juste de dire, me semble-t-il, que c'est le reflet le

  4   plus fidèle de l'avis du gouvernement de Bosnie-Herzégovine ou de la

  5   délégation de M. Izetbegovic.

  6   "Je pense que nous devons tenir compte du fait, et c'est très important, du

  7   fait que les Musulmans comme la délégation de M. Mate Boban reconnaissent

  8   et acceptent la solution constitutionnelle, ce qui, quelque part, facilite

  9   la tâche des co-présidents qui pourront ainsi mieux faire pression sur les

 10   Serbes…"

 11   Il poursuit, parle de ce qu'a indiqué très clairement M. le Président

 12   Tudjman, qu'il faut un compromis, à la page 17, je vais lire cela. Puis

 13   Tudjman intervient.

 14   Prenons, Messieurs les Juges, la page 20, Alija Izetbegovic dit ceci :

 15   "Permettez-moi de vous rappeler qu'il y a un sujet, une disposition, dans

 16   les propositions faites par MM. Vance et Owen, une disposition qui stipule

 17   et dit clairement que la Bosnie-Herzégovine sera un Etat où il y aura

 18   communication ouverte entre toutes les provinces…"

 19   Il dit ensuite :

 20   "Un corridor spécial ça veut dire que la Bosnie-Herzégovine ne sera pas

 21   ouverte, c'est une simple formalité dans ces dispositions …"

 22   Il parle d'un couloir ou d'un corridor, est-ce qu'il ne parle pas d'un

 23   couloir de communication avec les Serbes; en tout cas, c'est allusion qu'il

 24   fait, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Voyons ce que dit alors M. Cyrus Vance.

 27   "M. le Président" - dit-il - "puis-je vous demander ceci ? Est-ce que vous

 28   avez la moindre proposition, suggestion positive, ce qui nous permettrait

Page 41962

  1   de poursuivre nos activités dans un esprit constructif, de façon

  2   constructive ?"

  3   Et : "Il faudrait que l'agresseur accepte toute notre proposition, tout le

  4   texte qu'il propose, toutes les modifications que nous souhaitons apporter

  5   à la carte. C'est ce qu'il devrait faire. Ce sera alors une démarche

  6   positive en vertu de cette question."

  7   Alors, ici, quel genre de réponse est-ce que M. Izetbegovic donne ? De quel

  8   agresseur parle-t-il ?

  9   R.  Les Serbes.

 10   Q.  Très bien. Puis Cyrus Vance - à la page suivante, page 22 -dit ceci :

 11   "Est-ce que vous êtes prêt à accepter la carte en état ?"

 12   Réponse : "Non."

 13   Vous l'avez indiqué - et nous y reviendrons dans un instant - vous croyez

 14   que M. Izetbegovic était un brave homme, un homme honnête à certains égards

 15   qui était manipulé quelque part, il donnait son accord, mais vous aviez

 16   ensuite les extrémistes, vous avez parlé de Silajdzic, ou que c'était peut-

 17   être Halilovic aussi, que c'étaient les hommes qui l'obligeaient à changer

 18   d'avis. Etes-vous toujours de cet avis aujourd'hui ? Est-ce que vous êtes

 19   toujours de l'avis que vous avez exprimé sous serment pendant

 20   l'interrogatoire principal ?

 21   R.  Je le maintiens, mais il faut apporter un éclaircissement. Ce qui est

 22   sûr, Monsieur Karnavas, qui l'était du moins, c'est ce que M. Cyrus Vance

 23   dit aussi, Avancez, vous, une proposition à M. Izetbegovic. M. Izetbegovic

 24   n'a jamais présenté quelque proposition positive que ce soit pour ce qui

 25   est de l'apparence que devrait prendre cet Etat de Bosnie-Herzégovine.

 26   C'est un fait.

 27   Deuxièmement, j'ai été aimable, j'ai été charmeur, j'ai été posé, mais le

 28   fait est que chaque fois qu'il a signé il a stoppé la chose. Chaque accord

Page 41963

  1   international signé par lui, au bout d'un certain temps a été annulé. Moi,

  2   j'imaginais que c'était parce que d'autres le manipulaient ou peut-être

  3   faisait-il partie --

  4   Q.  Très bien --

  5   R.  -- du groupe de ces gens-là aussi.

  6   Q.  -- très bien, nous allons y venir, mais pas tout de suite. Pour

  7   l'instant je suis en train d'établir les bases. Passons maintenant à la

  8   page 28 de ce document, ici M. Mate Boban parle.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Il commence à la page 27 dans votre version,

 10   Messieurs les Juges.

 11   Q.  Général Praljak, regardez, s'il vous plaît, la pièce 0132-2270, donc

 12   ici il dit les choses très clairement, en tout cas sur papier c'est très

 13   clair :

 14   "Lorsque nous avons signé ce train de mesures, nous savions que chacun des

 15   trois camps affrontant les Croates ne voudrait pas signer et qu'ils

 16   auraient des objections et des propositions différentes, et cetera.

 17   "Donc de toute façon, il faut écouter la raison et faire des compromis pour

 18   arrêter la guerre et pour que la Bosnie-Herzégovine et l'Etat prévu par M.

 19   Izetbegovic dans son discours soit un pays libre avec libre circulation des

 20   peuples et du capital.

 21   "Mais c'est complètement incompatible avec ce qu'il dit lorsqu'une

 22   organisation territoriale doit donner quelque chose alors que la Bosnie est

 23   une entité unique.

 24   "On ne peut pas tout donner à quelque chose, et tout le monde a des droits

 25   égaux de toute façon, et ces droits doivent être déterminés par le biais de

 26   négociations.

 27   "Donc on peut en revenir à la déclaration de M. Vance et de Lord Owen parce

 28   qu'ils ont dit qu'ils avaient de toute façon épuisé tous les arguments

Page 41964

  1   possibles. Nous avons épuisé tous les arguments il y a bien longtemps."

  2   Je vais pas poursuivre, mais c'est Mate Boban qui parle. Donc Mate Boban

  3   est-il précis dans ce qu'il dit, s'agit-il de son interprétation du plan

  4   Vance-Owen qui était en discussion à l'époque ?

  5   R.  Oui, c'est exact, mais il n'y a pas que cela, il y avait aussi ce qui

  6   s'était produit auparavant. Donc la phrase clé ici qui sort de la tête de

  7   ce qui constitue la direction musulmane c'est celle-ci, C'est nous qui

  8   sommes ici en premier plan et c'est nous qui accordons quelque chose. Mais

  9   ça, ça a suscité l'horreur chez les Serbes et chez les Croates par la

 10   suite. A qui donnez-vous ou octroyez-vous quoi que ce soit, alors que c'est

 11   à nous, c'est ce que je vous dis, Monsieur Karnavas. C'est cet élément clé

 12   dans la tête des gens là-bas, c'est qu'il y a eu comme origine pour ce qui

 13   est de s'attaquer aux Croates. Parce que les Serbes pouvaient partir en

 14   Serbie, c'était leur mère patrie. Les Croates pouvaient partir vers la

 15   Croatie, c'était leur mère patrie, et cetera.

 16   Q.  Très bien. J'ai encore quelques passages de ce document à étudier, page

 17   33, s'il vous plaît - puis on passera ensuite à la page 34 en anglais - ici

 18   c'est Izetbegovic, donc le 0132275 [comme interprété]. Donc Izetbegovic

 19   parle, il dit, Je suis très reconnaissant à Lord Owen d'avoir posé cette

 20   question, on voit que Lord Owen essaie de faire avancer les choses, et

 21   voici ce que propose M. Izetbegovic. Ce sera à la page 45, la page

 22   suivante.

 23   "Nous devrions peut-être établir une commission mixte pour essayer de

 24   résoudre ces problèmes de façon juste" et ensuite il dit :

 25   "C'est la première idée qui me vient à l'esprit."

 26   Donc j'essaie de vous dépeindre la scène. Il y a toutes sortes de

 27   représentants internationaux, l'un qui représente les Nations Unies,

 28   l'autre l'Union européenne. Ensuite il y a Ahtisaari qui dit que ça fait

Page 41965

  1   quand même longtemps qu'il essaie de proposer quelque chose, et Izetbegovic

  2   doit prendre une décision. Il dit donc à ces arbitres internationaux qu'il

  3   s'agirait maintenant de former une commission d'arbitrage mixte, ce serait

  4   utile.

  5   Donc d'après vous, est-ce qu'on a l'impression qu'Izetbegovic veut vraiment

  6   trouver une solution ?

  7   M. STRINGER : [interprétation] Objection. Ici on appelle à des conjectures.

  8   Tout le monde peut lire le transcript et peut en tirer les conclusions

  9   qu'il veut et ensuite argumenter sur ce qui est dit. Le témoignage du

 10   général sur son interprétation de la chose n'est ni plus ni moins

 11   pertinente que l'interprétation de quiconque. Donc à moins qu'il ne puisse

 12   confirmer quelque chose et parler de faits, à notre avis c'est parfaitement

 13   inutile.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais vous expliquer pourquoi c'est utile.

 15   Mme GILLETT : [interprétation] Non --

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai écouté des témoignages ici. J'étais

 17   assis et j'ai écouté des témoignages, j'ai écouté les questions posées par

 18   les Juges aussi et certaines des questions portaient sur M. Izetbegovic et

 19   sa personnalité. Donc à un moment ou à un autre au cours de mon contre-

 20   interrogatoire je vais passer en revue les commentaires faits par le

 21   général à propos de M. Izetbegovic et de sa personnalité où il est assez

 22   indulgent, d'ailleurs. Je vais vous montrer des documents qui ont été

 23   montrés aux parties du SDA comme étant la plateforme électorale, et je vous

 24   montrerai ce qu'était vraiment ce qu'Izetbegovic avait en tête, il avait en

 25   tête exactement ce qui est écrit dans sa déclaration islamique. Il se

 26   rendait en Iran, il mettait en place une force armée bien avant que le HVO

 27   n'ait commencé. Donc il avait quand même des motifs, des idées en tête, et

 28   ce n'est pas Izetbegovic qui était manipulé par ses frères et sœurs qui

Page 41966

  1   l'avaient connu précédemment, pas du tout. C'est Izetbegovic au sommet de

  2   sa gloire, il est au sommet. C'est lui qui a rédigé la déclaration

  3   islamique, il a été emprisonné pour cela. Dès qu'il en est sorti, il s'est

  4   rendu en Iran; et il l'a publiée. Donc je tiens juste à faire savoir qu'il

  5   veut créer un Etat islamique, il le voulait depuis qu'il était jeune, il

  6   voulait créer un Etat musulman en Bosnie-Herzégovine, et les Jeunes

  7   Musulmans, vous savez, certains collaboraient avec les Nazis --

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous êtes en train de témoigner --

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Bien --

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- vous êtes en train de nous dire

 11   tout cela, vous étiez censé poser des questions au témoin, vous êtes en

 12   train de témoigner.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Non. On vient de me dire que ce que je dis

 14   n'a aucune pertinence --

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, absolument pas --

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] -- et je me défends.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On ne vous a pas attaqué parce que

 18   votre question n'était pas pertinente, c'est parce que vous demandiez au

 19   général de se lancer dans des conjectures sur ce que voulait Izetbegovic.

 20   Mais posez-lui des questions, ce qu'il a vu, demandez-lui l'interprétation

 21   de ce à quoi il a assisté, ça c'est possible : mais si vous lui demandez de

 22   nous dire ce qui était dans la tête d'Izetbegovic, là je pense que c'est

 23   spéculer, rien de plus.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, il donne son opinion sur Izetbegovic.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Moi ce que je veux démontrer c'est

 27   qu'Izetbegovic n'est pas la personne qu'il croyait être. On le voit

 28   d'ailleurs clairement. Si cette personne était un négociateur honnête, il

Page 41967

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41968

  1   ne serait pas en train de jouer à tous ces jeux. Moi je suis en train

  2   d'essayer de revenir sur l'impression que le général avait d'Izetbegovic.

  3   La question est venue directement du Juge Antonetti d'ailleurs. Donc

  4   personne n'a soulevé d'objection, il lui a demandé quand même de spéculer

  5   sur la personnalité d'Izetbegovic. Je lui demande maintenant si ce qui est

  6   écrit ici reflète bien l'opinion qu'il avait de l'homme. C'est pour ceci

  7   qu'on a passé en revue toutes ces pages.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Hm-hm.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Si ma technique n'est pas adéquate,

 10   j'essaierai d'y remédier.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'essaie de vous aider, peut-être

 12   essayez plutôt de lui poser des questions du genre : Comment pouvez-vous

 13   réconcilier ce qui est écrit ici avec ce que vous avez dit précédemment ?

 14   Je pense que ce serait un contre-interrogatoire plus correct --

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci --

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- enfin, c'est vous qui nous avez

 17   appris cela, Monsieur Karnavas, comment faire un contre-interrogatoire

 18   correct.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Bien, je vais essayer donc de mettre en

 20   œuvre mes théories tout de suite et d'améliorer ma technique.

 21   Q.  Donc, là, si je vous disais que lors de cette réunion ou un petit peu

 22   avant ou un petit après, mais il me semble que c'est un petit peu avant que

 23   lorsque M. Susak était ministre de la Défense, il est indiqué qu'on est

 24   arrivé à "gentlemen's agreement" --

 25   R.  Je souhaiterais avant déclarer quelque chose, Maître Karnavas, avec

 26   votre permission. Vous avez mal compris la caractérisation que j'ai donnée

 27   de M. Izetbegovic. Moi, j'ai parlé de son comportement lors des entretiens,

 28   qui était le comportement d'un gentleman. Mais à aucun moment je n'avais de

Page 41969

  1   doute concernant la politique de M. Izetbegovic. Il ne faut pas mélanger

  2   ces deux choses. Moi, je parlais de la personne, Alija Izetbegovic, de la

  3   façon dont il se comportait, mais non pas de la façon dont j'interprétais

  4   les différentes réunions que nous avions. Moi, à Mostar, il n'a pas fallu

  5   plus d'une heure et demie, pour que je sache avec exactitude en me fondant

  6   sur la déclaration islamique, et ce que je savais d'avant quelle allait

  7   être la politique des dirigeants musulmans. Ce sont deux choses distinctes.

  8   Permettez-moi encore une chose, pour -- en ce qui concerne Ahtisaari, cela

  9   avait été signé, M. Izetbegovic avait signé les principes constitutionnels

 10   et à ce moment-là M. Ahtisaari dit : "Vous avez singé et si maintenant vous

 11   annulez cela vous revenez en arrière, la guerre va se poursuivre," et M.

 12   Izetbegovic revient en arrière.

 13   Alors lorsqu'il forme une commission, n'oubliez pas cette phrase ce

 14   principe, Si vous voulez rendre la situation encore plus compliquée, si

 15   vous voulez quelque chose ne se passe pas, contentez -- il vous suffit de

 16   former une commission supplémentaire. C'est parfaitement clair. Si vous

 17   voulez que les choses avancent, il ne faut pas créer une commission

 18   d'arbitrage. Il faut mettre en œuvre les choses sur le terrain. Car si

 19   quelque chose a fait l'objet d'un accord si on en a convenu, il n'a pas

 20   besoin de Commission d'arbitrage.

 21   Q.  Je vous remercie, Général Praljak, on voit d'ailleurs qu'à la page 44

 22   c'est exactement ce que nous dit M. Boban. Ce qu'il dit -- il s'agit de la

 23   page -- enfin, les deux derniers chiffres seraient 286, veuillez le

 24   trouver, s'il vous plaît. Il dit :

 25   "Ont doit trouver un comité nous permettant d'arbitrer alors que nous

 26   sommes tous là, je pense que notre coopération ne va pas être fructueuse.

 27   Ce qui signifie que quelqu'un ici ne veut pas arriver à un accord. Nous

 28   voulons un accord. Nous sommes en faveur d'un accord. Nous pensons qu'il

Page 41970

  1   faudrait qu'il y ait des arbitres et comités qui soient établis entre les

  2   Musulmans et les Serbes, et les Croates, et pas entre les Musulmans --

  3   Serbes, les Musulmans et les Croates. Nous rencontrons tous les jours M.

  4   Izetbegovic, nous passons des heures à parler pour arriver à un accord, et

  5   on arrive à rien."

  6   Vous pensiez à l'époque qu'un accord avait été conclu, et c'est ce que vous

  7   avez déclaré à Mostar d'ailleurs, nous avons une décision qui date de

  8   janvier, 15 janvier 1993. Cette fin, n'est-ce pas ?

  9   R.  On est parvenu à cet accord et il a été signé, Maître Karnavas. On est

 10   parvenu et il a été signé. On est venu à Zagreb, avec des solutions

 11   constitutionnelles il fallait commencer à y travailler. Moi, j'ai

 12   contribué, j'ai participé avec ces entretiens avec M. Izetbegovic, pour

 13   élaborer cet accord afin que l'on évite un conflit.

 14   Q.  Très bien. Maintenant penchons-nous sur --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est quasiment l'heure faire la pause, il vaudrait

 16   mieux qu'on regarde ce document après, parce que --

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Mais je vais aussi me référer à

 18   un autre document que ce P 01150. Donc si je pouvais juste donner quelques

 19   instructions au général --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Karnavas, c'est presque -- bon, allez-y.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Je pense que je peux terminer ce chapitre

 22   dans les dix minutes qui me restent et je passerai ensuite à autre chose.

 23   Q.  Pièce P 01150 donc un document qui date du 16 janvier 1993, et cela

 24   émane de Bozo Rajic. On voit le but; le but est établi dans le préambule,

 25   dans le but d'établir la paix sur le territoire entier de la République de

 26   Bosnie-Herzégovine et de protéger les citoyens et leur bien, et j'ordonne

 27   ce qui suit. Ceci se base sur ce que vous aviez transmis à M. Rajic, qui à

 28   l'époque était le ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine; c'est bien

Page 41971

  1   cela ?

  2   R.  C'est exact. M. Rajic a reçu cet ordre qui a fait l'objet de l'accord

  3   de M. Izetbegovic, des co-présidents, de M. Gojko Susak, et moi, j'ai œuvré

  4   à l'application de cela, et à la rédaction de cela, je l'ai fait en accord

  5   avec M. Izetbegovic. J'avais participé aux pourparlers. Cet ordre a été

  6   rédigé ainsi et remis à M. Rajic qui était ministre dans le gouvernement de

  7   M. Izetbegovic.

  8   Q.  Pièce 1D 01195, c'est un article de journal en date du 21 janvier 1993,

  9   d'une interview avec M. Rajic, qui est donc ministre de la Défense.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Si nous pouvions agrandir ce qui est à

 11   l'écran. Je crois que ça ne peut pas être beaucoup plus gros.

 12   Q.  J'aimerais aborder quelques points abordés aussi par M. Rajic. On lui

 13   demande :

 14   "Dans quelle mesure et sur quel territoire de l'Etat souverain de la

 15   Bosnie-Herzégovine et il peut travailler en tant que ministre de la Défense

 16   ?"

 17   Il répond :

 18   "J'ai l'intention de créer un ministre de la Défense qui soit approprié au

 19   modèle et aux besoins d'un Etat souverain. Bien que mes informations soient

 20   incomplètes, elles m'indiquent que le ministère actuel n'est qu'une agence

 21   de gouvernement qui est plutôt comme un greffe, qui n'est qu'une extension

 22   en fait du quartier général de l'AbiH. Or ce n'est pas du tout ce que cela

 23   devrait être."

 24   D'après vous, est-ce que ce qu'il déclare est exact ? Si vous n'êtes pas au

 25   courant, ne vous lancez pas dans des spéculations, s'il vous plaît.

 26   Je vous le répète. Il déclare ici qu'il a l'intention : "De créer un

 27   ministère de la Défense qu'il soit approprié au modèle et aux besoins d'un

 28   Etat souverain. Bien que mes informations soient incomplètes elles

Page 41972

  1   m'indiquent que le ministère actuel n'est rien de plus qu'une agence du

  2   gouvernement au niveau d'un greffe, en fait c'est une extension de l'état-

  3   major général de l'ABiH. Ce n'est absolument pas ce que devrait être."

  4   D'après vous, M. Rajic a-t-il raison lorsqu'il décrit ce qu'est exactement

  5   le ministère de la Défense à l'époque alors qu'il est ministre de la

  6   Défense lui-même de l'ABiH ? Est-ce qu'il décrit correctement son ministère

  7   ?

  8   R.  La situation est pire que ce que décrit M. Rajic.

  9   Q.  Très bien.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Passons à la deuxième page, s'il vous plaît.

 11   Q.  On lui pose la question suivante :

 12   "L'ordre stipule que les commandants des trois armées en Bosnie-Herzégovine

 13   envoient des rapports réguliers, vous envoie des rapports réguliers en tant

 14   que ministre de la Défense et que chaque armée ensuite se retirera dans

 15   leur propre province."

 16   Un peu plus loin, voici ce qu'il dit, il dit dans le premier

 17   paragraphe au milieu du premier paragraphe : 

 18   "A vrai dire, je ne m'attendais pas à ce que l'ABiH soit aussi

 19   emphatique lorsqu'elle a rejeté ce plan parce que -- qui n'est finalement

 20   que la mise en œuvre de l'accord conclut à Genève. Il est tout à fait

 21   étonnant que certains cercles au sein de l'ABiH ne comprennent pas et ne

 22   voit pas l'efficacité de cet ordre. Pourquoi ? Parce qu'il prend en compte

 23   le fait que chaque armée doit se retirer dans sa propre province."

 24   Un peu plus tard, un peu plus loin, il est écrit :

 25   "Cela dit en politique parfois on a besoin de très peu de temps pour

 26   retourner sa veste, et je crois profondément qu'après les deux manches de

 27   négociations à Genève, voire peut-être même avant, tout sera différent et

 28   tout sera décidé sur de nouvelles raisons."

Page 41973

  1   Il continue :

  2   "Il y a plusieurs raisons qui expliquent pourquoi j'ai donné cet

  3   ordre. Je voulais qu'il y ait vraiment une véritable possibilité de paix.

  4   Je crois que le ministre de la Défense doit faire une déclaration dans ce

  5   but même si c'est à un moment où il n'était pas acceptable d'essayer de

  6   remettre toute la zone et tout ce qui était arrivé au service de l'intérêt

  7   d'un seul, ce seul étant l'Etat de Bosnie-Herzégovine tel qu'il est et tel

  8   qu'il peut être.

  9   "De plus, en tant que Croate en Bosnie-Herzégovine, je pensais, et je

 10   tiens à dire que nous reconnaissons l'Etat de Bosnie-Herzégovine et je

 11   voulais réaffirmer que les bureaux de l'Etat, qui avaient été suspendus que

 12   la présidence, le gouvernement, le ministère de la Défense étaient revenus.

 13   Je voulais dire aux gens que la Défense était à nouveau un ministère actif

 14   au sein de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, et je voulais aussi obtenir des

 15   points à la veille de la poursuite des négociations de Genève pour que les

 16   hommes politiques et les négociateurs aient des arguments afin de relier

 17   les armées en Bosnie-Herzégovine pour qu'ils soient -- qu'ils puissent

 18   ensemble discuter et prennent des décisions."

 19   Donc à votre avis, lorsque Bozo Rajic nous dépeint les événements

 20   ici, est-ce que sa relation des événements est fidèle ? Fallait-il

 21   vraiment, à ce moment-là, tout relire ? Fallait-il vraiment, à ce moment-

 22   là, que le ministère de la Défense possède une certaine autorité ?

 23   R.  Oui, bien entendu. Si nous avons un ministère et un ministre de la

 24   Défense, si ces derniers existent, alors ils doivent accomplir leurs

 25   fonctions, ne serait-ce qu'envers les armées qui sont censées leur obéir et

 26   cela devait être constitué par l'ABiH et le HVO. Pour ce qui est des Serbes

 27   et de la VRS, évidemment, ils avaient leur propre plan mais l'ABiH avait

 28   également les leurs. Quant au HVO, il était le seul, les Croates étaient

Page 41974

  1   les seuls à être en permanence en négociations à offrir des solutions de

  2   commandement conjoint et d'administration internationale quel quelle soit,

  3   la présidence, le gouvernement. Maître Karnavas, pour être à même

  4   d'apporter une solution à quelque situation que ce soit vous êtes obligé de

  5   reconnaître quels sont les symptômes de la maladie fassent à laquelle vous

  6   êtes témoin. Ce que je vous affirme que ce que nous avions en Bosnie-

  7   Herzégovine c'était un véritable cancer et tout ce que les représentants de

  8   la communauté internationale se contentaient de faire c'était de proposer

  9   des remèdes contre la grippe.

 10   Q.  Bien. Nous allons en terminer avec ce document pour enfin pouvoir faire

 11   la pause. Donc à la page 3, maintenant au deuxième paragraphe, il est écrit

 12   :

 13   "Le dernier incident de Gornji Vakuf démontre que nonobstant ces deux

 14   facteurs destructeurs au sein de l'armée de l'ABiH, il y a quand même un

 15   leadership politique à la tête de cette opération. Les ordres récents de

 16   l'état-major général de l'ABiH ainsi que les déclarations d'Alija

 17   Izetbegovic ont indiqué de façon non ambiguë que le parti, que la SDA

 18   correspond à l'entité politique qui est en haut de la hiérarchie politique

 19   et la hiérarchique de commandement et que les combats se font par le biais

 20   de directives et la mission très claire est de faire obstacle au processus

 21   de Genève et de dévaluer les réalisations principalement du peuple croate.

 22   C'est une autre tentative par des moyens autres -- par moyens de violence -

 23   - si éventuellement d'établir un Etat centralisé unitaire et civique. Si

 24   par le passé, nous avons pensé secrètement qu'il ne s'agissait que

 25   d'extrémisme, il faut maintenant quand même que nous le disions qu'il

 26   s'agit maintenant de politiques; il s'agit d'une conduite organisée et

 27   délibérée de ces opérations. C'est un combat pour le territoire qui vise à

 28   détruire le projet Vance-Owen."

Page 41975

  1   Donc c'est sa propre interprétation des événements mais vous étiez là

  2   aussi, vous saviez ce qui se passait sur le terrain. Vous avez rencontré

  3   Izetbegovic. Donc pourriez-vous nous dire si M. Rajic relate correctement

  4   ce qu'il a vu et qu'est-ce que --

  5   R.  Je souscris entièrement à l'analyse de M. Rajic.

  6   Q.  Très bien.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Je pense que nous devrions faire la pause

  8   maintenant.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va faire une pause de 20 minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 44.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 10.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

 13   Maître Karnavas, vous avez la parole.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   Q.  Voyons d'abord un document qui nous permettra de terminer ce sujet,

 16   c'est un transcript présidentiel, et puis nous verrons une carte pour

 17   évoquer précisément la question qui avait été soulevée auparavant grâce à

 18   la question posée par M. le Juge Trechsel.

 19   Voyons d'abord le document P 01240, P 01240. C'est un transcript

 20   présidentiel en date du 20 janvier 1993, cinq jours après le transcript

 21   présidentiel que nous avons déjà examiné. Prenez la page 5 -- la discussion

 22   en fait commence avec M. Akmadzic, page 4, quand c'est M. Akmadzic qui

 23   intervient. La discussion porte sur Gornji Vakuf, au milieu du paragraphe.

 24   Pour vous, Monsieur le général Praljak, ce sera 301 et 302. Ce sont des

 25   pages qui vont nous intéresser.

 26   Il est dit ceci au milieu :

 27   "…M. Izetbegovic a refusé à la réunion d'aujourd'hui, même si à Genève il a

 28   dit qu'il acceptait qu'il n'y avait pas de litige concernant les provinces

Page 41976

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41977

  1   appartenant au peuple croate à titre conditionnel et pour ce qui est des

  2   provinces appartenant au peuple musulman".

  3   Il a refusé à Genève, mais il a dit qu'il acceptait à condition que.

  4   Page 19 maintenant, je pense, en anglais. Les trois derniers chiffres de la

  5   page pour vous seront 316 et 317. Nous avons Lord Owen. Il dit :

  6   "Nous le savons parce que M. Izetbegovic a fait une déclaration officielle

  7   disant qu'il accepterait les principes constitutionnels et le document

  8   portant sur le cessez-le-feu même si Silajdzic n'a eu de cesse de l'en

  9   dissuader; cependant, au cours de ces dernières semaines, je pense qu'ils

 10   semblaient plus prêts à participer au processus de Genève et qu'il sera

 11   peut-être possible de les garder dans cet état d'esprit. Le moment est

 12   peut-être propice de parler d'un gouvernement provisoire ou d'un

 13   gouvernement intérimaire. M. Vance est d'accord aussi sur cette idée".

 14   De la façon dont vous voyez les choses, vous avez ici Owen qui dit

 15   qu'Izetbegovic a fait une déclaration officielle disant qu'il était

 16   d'accord sur les principes constitutionnels. Savez-vous si Izetbegovic a

 17   tenu sa promesse, qui était d'accepter les principes constitutionnels ?

 18   Vous pouvez répondre par un simple oui ou un non.

 19   R.  Non.

 20   Q.  Très bien. Voyons un peu plus loin dans ce document. Ici, c'est le

 21   président qui intervient - ce serait le président Tudjman - il dit :

 22   "J'ajouterais que ce qui peut influencer Izetbegovic lors de pourparlers à

 23   venir c'est le fait dont j'ai parlé à ces gens là-bas. Ils nous ont

 24   demandé, hier et aujourd'hui, de maintenir le soutien aérien de leurs

 25   forces dans la zone de Bihac et de leur remettre deux hélicoptères. Je ne

 26   sais pas si vous le savez, Messieurs, mais un vaisseau a été confisqué hier

 27   dans l'Adriatique. Il transportait du blé, mais aussi des armes assez

 28   conséquentes, qui apparemment viennent du Pakistan et qui auraient été

Page 41978

  1   confisquées. On peut supposer, si c'est le cas, que ceci leur a été envoyé,

  2   donc aussi belligérant qu'ils sont, ils devront voir comment poursuivre la

  3   guerre s'ils ne peuvent pas se procurer cela parce que le bateau a été

  4   arrêté par les forces de maintien de la paix dans l'Otranto et il a été

  5   inspecté dans un port de l'Adriatique…"

  6   Voici ce qui retient mon attention. De quoi parle le président Tudjman,

  7   pour autant que vous le sachiez, lorsqu'il parle du "maintien du soutien

  8   aérien pour la poche ou la zone de Bihac…"

  9   Qui assurait ce soutien aux forces dans la zone de Bihac ?

 10   R.  L'Etat croate et les forces aériennes de l'armée croate ont, sans

 11   interruption, apporté leur soutien à la région de Bihac, et c'est grâce à

 12   cela uniquement que cette dernière a pu se maintenir jusqu'en 1995, jusqu'à

 13   ce que l'armée croate ne libère la région. Je suis pleinement au courant de

 14   tout cela.

 15   Q.  A votre connaissance, est-ce que c'était autorisé à l'époque ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Est-ce qu'on se servait d'hélicoptères pour transporter des armes, pour

 18   aider les forces musulmanes, pour transporter des armes de Croatie sur la

 19   zone de Bihac ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce qu'il y avait un embargo en vigueur à l'époque ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Ici, je vous demande peut-être de vous livrer à des conjectures, mais

 24   pensez-vous que M. Vance, qui représentait les Nations Unies, M. Owen

 25   représentant l'Union européenne, est-ce qu'ils  savaient à l'époque qu'il y

 26   avait un embargo ou est-ce que c'était quelque chose de secret, que ne

 27   savait personne ?

 28   R.  Ils étaient au courant de l'existence de l'embargo. Ce n'était pas du

Page 41979

  1   tout un secret. C'était une décision du Conseil de sécurité.

  2   Q.  Très bien. Vous avez eu des réunions, en tout cas vous avez assisté à

  3   certaines réunions, est-ce que vous vous souvenez si l'un ou l'autre de ces

  4   négociateurs, Vance, Owen ou d'autres, auraient prôné envers la Croatie

  5   qu'elle n'aille pas aider les forces musulmanes en Bosnie-Herzégovine,

  6   auraient dit que la Croatie ne devait pas fournir cette assistance

  7   militaire en transportant des armes ?

  8   R.  Non. Tous étaient au courant, les Américains et tous les autres, qu'une

  9   aide était fournie, indépendamment de l'existence de cet embargo. On

 10   laissait courir tout cela. Et à mesure que le temps passait, on le laissait

 11   courir d'autant plus, à mesure que des armes arrivaient de Turquie, d'Iran,

 12   et ainsi de suite. Un des premiers avions qui ont atterri en provenance

 13   d'Iran a fait l'objet d'une demande des Américains demandant qu'on

 14   confisque ces armes. Ils disposaient d'information complète quant à la

 15   nature de ces armes et à la quantité d'armes. Alors nous avons détruit

 16   l'essentiel de ces armes, et le reste, nous avons fermé les yeux dessus et

 17   les avons fait passer.

 18   Q.  Très bien.

 19   R.  Maître Karnavas, dans ce procès-verbal présidentiel, il se trouve deux

 20   éléments qui sont très importants dont je suis au courant. Tout d'abord, à

 21   Sarajevo, M. Izetbegovic a refusé que deux membres de la présidence, deux

 22   Croates, participent aux pourparlers; et deuxièmement, après l'échec de son

 23   agression à Vakuf, il a accusé la Croatie d'avoir envoyé là-bas des

 24   brigades blindées. Il voulait que ce programme soit soulevé dans l'enceinte

 25   du Conseil de sécurité. Lorsque toute l'opération a échoué à Gornji Vakuf

 26   après un grand nombre de pertes que nous avons connues, il a accusé la

 27   Croatie d'avoir envoyé un certain nombre de brigades, ce qui est un

 28   mensonge éhonté. Akmadzic le dit expressément.

Page 41980

  1   Q.  Ecoutez, je ne voulais pas en parler longuement, mais parlons-en quand

  2   même, en quelques mots. Dans la présidence, il y avait deux membres dont

  3   Izetbegovic ne voulait pas la présence ?

  4   R.  Il me semble que c'était Boras et Lasic à l'époque.

  5   Q.  Très bien. Puis vous avez parlé de Gornji Vakuf. Vous avez dit

  6   qu'Izetbegovic voulait se présenter aux Nations Unies et, si j'ai bien

  7   compris, accuser aussi la République de Croatie; c'est bien cela ?

  8   R.  C'est exact. Le président Tudjman ici fait état de ce problème devant

  9   Lord Owen, et il demande quoi faire. Qu'est-ce que je suis censé faire

 10   maintenant face à des accusations aussi mensongères ? Que dois-je dire à la

 11   communauté internationale ? Et Lord Owen lui répond simplement, Essayez

 12   d'apaiser les choses. Poursuivez les grandes lignes de votre programme, et

 13   essayez d'apaiser les choses. Mais ils savaient que ce n'était pas vrai.

 14   Q.  La Chambre pourra le constater, mais effleurons simplement ce sujet,

 15   car d'une part, vous avez l'arrivée d'armes avec l'aide, dans une large

 16   mesure, de pays des Nations Unies, dont des membres du Conseil de sécurité.

 17   Soit qu'ils le savent, soit qu'ils participent et assistent dans ce

 18   processus. D'autre part - donc ça c'est dans l'intérêt d'Izetbegovic - et

 19   d'autre part, Izetbegovic fait volte-face, et il veut se plaindre auprès de

 20   cette même institution. Il dit que, quelque part, ce sont les Croates qui

 21   sont responsables de Gornji Vakuf. C'est bien ce que vous nous dites ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Q.  Est-ce que le président Tudjman a jamais dit que le moment était venu

 24   de cesser d'aider les Musulmans tout simplement, de les arrêter à la

 25   frontière, de ne pas permettre qu'ils entrent dans le pays, et que ceux qui

 26   sont déjà dans le pays, qu'on les renvoie chez eux ou dans un pays voisin

 27   comme la Slovénie ? Est-ce que vous avez jamais entendu dire ce genre de

 28   chose par le président Tudjman, vu la façon dont Izetbegovic et les siens

Page 41981

  1   agissaient à l'égard de la République de Croatie ?

  2   R.  Jamais personne n'a dit ni fait cela, ni Tudjman, ni Gojko Susak, ni le

  3   gouvernement, ni moi-même. Pour parler franchement, Izetbegovic considérait

  4   que la Croatie devait être un point d'appui pour lui dans sa lutte contre

  5   les Croates de Bosnie. Dans une large part, nous lui avons aidé. La Croatie

  6   a servi de base logistique, organisationnelle, et à bien des autres égards,

  7   de base pour l'ABiH dans ses attaques contre le HVO. C'est ainsi que cela

  8   s'est passé pendant toute la durée de la guerre.

  9   Q.  Très bien. Avant de passer au document suivant, nous devrions sans

 10   doute regarder la carte. Il s'agit de la carte 1D 02843, qui se trouve dans

 11   le système électronique. Vous pourriez peut-être nous montrer où se

 12   trouvent les deux régions dont j'ai parlé précédemment. Je sais qu'il y a

 13   un code -- une légende qui reprend les différentes municipalités. Si vous

 14   arrivez à trouver le code correspondant à la zone de Teslic --

 15   R.  Usora.

 16   Q.  Très bien.

 17   R.  [Le témoin s'exécute]

 18   Q.  Très bien.

 19   R.  J'indique le numéro 1. Je ne vois pas très bien. Voilà, Teslic.

 20   Q.  Pourriez-vous placer un 1 sur Usora et un 2 sur Teslic, puis nous

 21   pourrons nous y retrouver plus tard.

 22   R.  [Le témoin s'exécute]

 23   Q.  Dites-nous si le HVO existait dans toutes ces municipalités ?

 24   R.  Oui. Sur cette grande carte que j'ai dressée, où se trouvaient les

 25   positions du HVO, j'ai oublié de signaler Olovo. A Olovo, numéro 3, que

 26   j'indique ici, se trouvait également une petite unité du HVO. Voilà, HVO à

 27   Olovo. C'est un ajout que je fais.

 28   Q.  Très bien. Lorsqu'on regarde cette carte, comme je l'ai dit, il y a des

Page 41982

  1   codes couleur qui reprennent les différentes municipalités. Pouvez-vous

  2   nous dire avec certitude si la Communauté croate d'Herceg-Bosna reprenait

  3   véritablement toute cette région ou s'il y avait d'autres portions de

  4   municipalités qui auraient dû être reprises dans le code couleur de la

  5   Communauté croate d'Herceg-Bosna ?

  6   R.  Elle recouvrait des parties de municipalités dans lesquelles la

  7   population croate était plus ou moins compacte au moins dans quelques-uns

  8   des villages ou certaines des parties de la municipalité, ou alors -- ou

  9   les Croates étaient en nombre inférieur, en nombre faible, mais s'était

 10   malgré tout organisé pour former au moins une unité d'une centaine

 11   d'hommes, par exemple, pour pouvoir se défendre, la localité où les Croates

 12   étaient peu nombreux et se sont organisés, c'était à Olovo.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous avez des questions à poser sur cette

 14   carte, vous pouvez le faire maintenant; sinon, je vais demander un numéro

 15   IC et je passerai à autre chose.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, donnez un numéro IC, Monsieur le

 17   Greffier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document recevra la cote IC 01032.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vois qu'il n'y a pas de questions de la

 20   part des Juges, donc je vais passer au document suivant.

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puisque nous avons la carte encore à

 23   l'écran, on nous a dit qu'il y avait une présence du HVO dans ces communes.

 24   Mais cela ne signifie pas qu'elles appartiennent à l'Herceg-Bosna, n'est-ce

 25   pas ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est après qu'ils se sont associés et unifiés

 27   au sein de la Herceg-Bosna, mais ce n'est pas une totalité, une entité

 28   globale dont on peut extraire quelque chose. Ici on imagine toujours que la

Page 41983

  1   banovina est quelque chose que l'on peut séparer mais ce n'est pas vrai. Il

  2   -- et à Olovo, on est dans une zone à majorité absolue musulmane. Il y

  3   avait juste quelques villages en Herceg-Bosna qui avaient une majorité

  4   musulmane. Nous parlons d'opérations de défense sur l'ensemble du

  5   territoire.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je sais bien que les choses étaient

  7   très compliquées sur le plan ethnique mais pour ce qui concerne la liste

  8   des municipalités comprenant -- faisant le HZ HB, on ne les pas ici n'est-

  9   ce pas dans cette liste du 18 novembre -- par rapport à la liste qui a été

 10   faite le 18 novembre 1991 ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] -- elle est entrée dans cette liste, Monsieur

 12   le Juge Trechsel.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous voyez qu'il y a un code couleur,

 15   Monsieur le Juge, qui fait référence à des documents. Donc cette carte a

 16   été établie sur la base de ces documents qui sont déjà versés au dossier,

 17   et c'est ce que nous avons utilisé pour créer la légende couleur de cette

 18   carte. Donc si vous voulez des clarifications supplémentaires, nous pouvons

 19   tout simplement faire référence aux documents qui sont mentionnés dans les

 20   codes couleurs.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, ce n'est pas nécessaire.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.

 23   Q.  Bien. Passons à un document suivant maintenant qui va sans doute nous

 24   prendre un petit moment. Je vais faire une avance rapide. Nous allons aller

 25   un peu dans le futur.

 26   Nous allons aborder le document 1D 03141.

 27   Donc nous allons donc partir dans un moment ultérieur et ensuite nous

 28   reviendrons en arrière. S'il vous plaît, tout d'abord rapidement regarder

Page 41984

  1   ce document. Il s'agit d'un article publié le 19 avril 2002 portant sur le

  2   terrorisme mondial, et il fait référence à une affaire bien précise qui est

  3   l'affaire de Pogorelica.

  4   Avez-vous déjà entendu parler de cette affaire ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Ce document nous explique que cette affaire porte sur des services de

  7   renseignement étrangers qui travaillent avec les services du renseignement

  8   bosnien -- en Bosnie-Herzégovine pendant et après, non avant et après les

  9   accords de paix de Dayton.

 10   Saviez-vous par exemple : que les services secrets iraniens opéraient en

 11   Bosnie-Herzégovine ?

 12   R.  Oui. Pasdaran et leur service secret, qui s'appelait VEVAK ou quelque

 13   chose de ce genre. Je ne sais pas vous donner l'appellation exacte. Il y

 14   avait quatre ou cinq lettres pour les désigner et ils étaient des centaines

 15   en Bosnie-Herzégovine. Tout le problème, Monsieur Karnavas, s'est manifesté

 16   lorsque les Américains se sont sentis menacer par ce groupe d'hommes et

 17   lorsqu'ils ont senti que ça avait quelque chose à voir avec des attaques

 18   lancées contre des installations militaires américaines et l'attaque qui a

 19   eu lieu par la suite à New York, et là, ils sont devenus plus malins.

 20   Q.  Bien. D'abord dans ce document on voit qu'il y à des affirmations qui

 21   sont faites selon lesquelles les Américains savaient très bien ce que

 22   faisaient les Iraniens, d'après ce qu'ils font aujourd'hui à la télévision,

 23   donc les Américains savaient très bien que les services secrets iraniens

 24   opéraient en Bosnie en 1993/1994 et par la suite aussi. Savez-vous quoi que

 25   ce soit à ce propos ? Passons à la page 2, par exemple, où il y a un

 26   chapitre appelé : Bosnie et Iran, au dernier paragraphe, ce qui explique :

 27   "Pour expliquer les relations avec les structures iraniennes, Alispahic les

 28   a comparé pour en ce qui concerne les enquêteurs comme étant parfaitement

Page 41985

1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 41986

  1   au niveau des autres services et structures des pays d'Europe de l'ouest,

  2   mais il y a une seule différence a-t-il dit."

  3   Ensuite il dit qu'il est allé aux Etats-Unis en 1993, "en demandant à leurs

  4   propres services de renseignements de nous aider," c'est-à-dire aider les

  5   Musulmans de Bosnie.

  6   Donc j'ai une question : Alija Izetbegovic est le président de la

  7   présidence; il est censé représenter la nation entière, donc si ce qui est

  8   écrit ici est correct, comment se fait-il qu'il est en train d'essayer de

  9   demander l'aide de services secrets étrangers qui viendraient travailler en

 10   Bosnie mais uniquement au service de son propre peuple, des Musulmans,

 11   voire de son parti ?

 12   R.  Parce qu'Alija Izetbegovic n'a pas renoncé au fondement qu'il a intégré

 13   à la rédaction de sa déclaration islamique mais, Monsieur Karnavas, ce que

 14   les services secrets américains et autres

 15   le savaient, les hommes politiques ne l'acceptaient pas jusqu'au moment où

 16   il y a eu les événements de New York avec les tours là, enfin l'attentat

 17   contre les jumelles, les tours jumelles.

 18   Q.  Passons maintenant à la page 3, tout en haut de cette page, il est

 19   écrit :

 20   "Les sources connaissant bien la situation du renseignement à Sarajevo au

 21   cours de la guerre," donc c'est la page 1D 51-1814 pour la version en

 22   B/C/S.

 23   Donc il est écrit :

 24   "Les sources connaissant bien la situation du renseignement à Sarajevo

 25   pendant la guerre explique que le MUP et l'AID avaient des relations

 26   simultanées à la fois avec les Iraniens, les Américains, les Français et

 27   les Italiens, enfin avec les services secrets de ces quatre pays. A un

 28   moment, Dani a publié la déclaration de H.K. Roy, qui était le directeur de

Page 41987

  1   la CIA à Sarajevo, déclarant qu'au cours de l'été 1995, Nedzad Ugljen" - je

  2   m'excuse d'écorcher son nom - "l'avait trahi auprès du directeur du service

  3   secret iranien à Sarajevo."

  4   Je ne vais pas poursuivre. Mais pour ce qui est du MUP donc c'est le

  5   ministère de l'Intérieur, AID, et il s'agit des services secrets musulmans,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact. Si je puis compléter, Monsieur Karnavas. M. Roy a eu du

  8   mal à se sauver à s'enfuir de Sarajevo parce que les Iraniens allaient,

  9   enfin avaient préparé un attentat contre lui. Je n'ai pas à raconter le

 10   détail, mais il a eu du mal à sortir de Sarajevo et garder vie sauve.

 11   Q.  Il avait aussi des rumeurs selon lesquelles Izetbegovic -- "le

 12   gouvernement" -- enfin, pas "le gouvernement," je ne peux pas le dire, mais

 13   qu'Izetbegovic et/ou ses congénères se lançaient dans des assassinats

 14   politiques, il avait un plan pour assassiner M. Halilovic après que M.

 15   Halilovic était attaché avec le SDA ?

 16   M. STRINGER : [interprétation] Non, ce sont des rumeurs, objection.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, ce n'est pas une rumeur sa femme et son

 18   beau-frère ont quand même été tué --

 19   M. STRINGER : [interprétation] Il est en train de déposer, là. Il doit

 20   demander la question s'il est au courant de cela, et rien de plus, ce sont

 21   des rumeurs, Me Karnavas est en train de déposer, il est en train de mettre

 22   des mots dans la bouche du témoin. Ce n'est pas correct.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Karnavas, s'il vous plaît, posez la

 24   question, et le témoin vous apportera ce que vous attendez.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Tout à fait, je vais le faire.

 26   Q.  Un peu plus bas dans la page, nous voyons qu'un accord a été signé avec

 27   les Américains, avec le général Wesley Clark, le 12 février 1996, ensuite

 28   quatre jours plus tard, à partir du dernier paragraphe, on voit qu'il y a

Page 41988

  1   eu largage sur Pogorelica, donc sur un camp, et il y a une citation de

  2   Bradley Graham :

  3   "A propos de 200 instructeurs militaires iraniens qui se trouvent

  4   encore en Bosnie."

  5   Il s'agit de la pièce 1D -- trouvez la page en B/C/S, donc il est

  6   écrit :

  7   "Leur camp de base se trouve à Fojnica, environ 30, 45 kilomètres au nord-

  8   ouest de Sarajevo. 'Il se pourrait que les Iraniens et les Bosniens soient

  9   en train d'essayer de trouver un nouveau statut pour les gardes en faisant

 10   des instructeurs civils, plutôt que des instructeurs militaires,' a déclaré

 11   l'officier américain supervisant la région."

 12   Ensuite, si on passe à la page suivante, deuxième paragraphe, il est écrit

 13   :

 14   "En utilisant des hélicoptères et des transporteurs, les forces de l'IFOR

 15   ont occupé le camp et ont arrêté, soit dans la bâtiment même soit en route

 16   vers le bâtiment -- huit Musulmans de Bosnie et trois Iraniens. L'amiral

 17   américain Leighton Smith en a rendu visite au camp le lendemain et a

 18   condamné de façon extrêmement sévère les activités qui avaient lieu, je

 19   cite :

 20   "'On n'a pas besoin d'être un génie pour se rendre compte que ce qu'on a

 21   trouvé sur place était un camp d'entraînement de terroristes, et on ne peut

 22   pas nier non plus que l'entraînement au terrorisme dispensait dans ce camp

 23   se faisait en coopération directe avec les gens du gouvernement'."

 24   C'est bien ça, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est exact. Puis ces forces par une action militaire classique ont

 26   fait intrusion dans ce campement, ont arrêté les gens et ont saisi bon

 27   nombre de documents permettant de conclure qu'il s'agit là de terroriste de

 28   l'al-Qaeda; ça c'est d'un.

Page 41989

  1   De deux, c'est Nedzad --

  2   M. STRINGER : [interprétation] J'aimerais juste que l'on mette au compte

  3   rendu mon objection qui porte sur la période puisqu'il s'agit de quelque

  4   chose qui date de février 1996. Cela ne concerne pas la période de l'acte

  5   d'accusation.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] J'aimerais qu'il attende un petit peu la

  7   réponse; nous avons perdu environ deux semaines avec un M. Miller qu'avait

  8   présenté l'Accusation, qui allait nous parler de la soi-disant entreprise

  9   criminelle commune. J'avais soulevé une objection à ce moment-là.

 10   Néanmoins, la Chambre de première instance a décidé que nous allions quand

 11   même l'entendre. Donc, moi, je vous ai dit, nous allons revenir en arrière

 12   dans le temps, ce que j'essaie de montrer c'est que même après les accords

 13   de Dayton, Izetbegovic est encore en train d'essayer d'atteindre son but,

 14   un but qu'il a en tête depuis très longtemps et qui explique pourquoi

 15   Izetbegovic n'a jamais voulu en fait que la Bosnie-Herzégovine soit

 16   gouvernée depuis l'intérieur. Donc il n'y a pas d'entreprise criminelle

 17   commune de la part des Croates, mais plutôt de la part des Musulmans

 18   dirigée par Izetbegovic.

 19   M. STRINGER : [interprétation] Deux réponses rapides. J'étais là lorsque ce

 20   M. Miller était là. Nous avons soulevé une objection à propos des discours

 21   faits par le conseil de la Défense. Là encore, c'est la même chose, et là

 22   nous sommes en 1996, cela n'a rien à voir avec la période qui est

 23   pertinente à l'acte d'accusation.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, quand vous dites que l'entreprise

 25   criminelle commune a commencé avant 1992 et s'est poursuivi après 1995, là

 26   il ne doit pas y avoir de problème; mais la Défense essaie de nous dire par

 27   les questions qu'elle pose que M. Izetbegovic a continué son entreprise je

 28   crois d'islamisation après 1996 et il veut mettre en parallèle les deux --

Page 41990

  1   bon, moi, c'est ce que j'essaie de comprendre.

  2   Maître Karnavas, je me trompe ou j'ai compris ce que vous essayez de

  3   démontrer.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, vous avez raison, Monsieur le

  5   Président. Tout à fait. Je veux m'en assurer parce qu'ici il ne s'agit

  6   absolument pas de tu quoque, en plus. Ceci a trait avec le motus operandi

  7   d'Izetbegovic. Nous considérons -- nous affirmons qu'une partie très

  8   honnête et faisait les choses ouvertement mais il se rendait compte en fait

  9   qu'il n'y avait pas d'accord de l'autre partie, et ensuite les

 10   protestations arrivaient au Conseil de sécurité. Voici notre position

 11   l'interlocuteur principal en ce qui concerne les Musulmans c'est

 12   Izetbegovic. Jusqu'à présent, on nous la dépeint comme étant le président

 13   d'un pays avec une armée alors que non il ne s'occupe que des intérêts

 14   d'une nation constitutive. Il a peut-être le droit de le faire mais en tout

 15   cas on ne peut pas dire que c'est un courtier honnête qui est en train

 16   d'essayer d'aider à arriver à un accord qui plaira à tout le monde, c'est

 17   ce que nous considérons, en tout cas, et nous sommes -- et c'est tout à

 18   fait -- c'est pour cela que nous avons dit ce que nous avons dit.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, c'est l'heure, c'est 13 heures 45. Le temps

 20   passe tellement vite. Je crois que vous reviendrez sur ce document demain,

 21   je présume, donc on le garde tous en mémoire. Donc nous serons donc

 22   d'audience demain matin à 9 heures. Je souhaite à tout le monde donc une

 23   fin de journée et je vous dis donc à demain.

 24   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 25 juin 2009,

 25   à 9 heures 00.

 26  

 27  

 28