Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 13 juillet 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à

 10   toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et

 11   consorts.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce lundi 13 juillet 2009, je salue en premier M.

 13   Praljak. Je salue M. Prlic, M. Stojic, M. Petkovic et M. Pusic. Bien

 14   entendu, j'ai une pensée pour M. Coric. Je salue également Mmes et MM. les

 15   Avocats. Je salue M. Stringer et tous ses collaborateurs et collaboratrices

 16   ainsi que toutes les personnes qui nous assistent.

 17   Me Kovacic veut intervenir.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, je

 19   m'excuse de vous priver de votre temps précieux, je serai vraiment bref.

 20   En effet, l'Accusation nous a informés la semaine passée, une fois de plus,

 21   que les documents qu'elle a l'intention d'utiliser pendant le contre-

 22   interrogatoire seraient communiqués par segment, c'est-à-dire au compte-

 23   goutte. Moi, j'ai relu les dernières interventions de l'Accusation en 2009,

 24   et ce qui a été dit peut être interprété de façon variée, et c'est la

 25   raison pour laquelle je n'ai pas réagi à la date du 9, lorsqu'il a été

 26   question de la chose pour la dernière fois.

 27   Mais toujours est-il, que j'estime qu'il importe de dire que jusqu'à

 28   présent, dans l'affaire conformément à vos instructions depuis le début, il


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  1   y a toujours la partie qui est contre-interrogée, qui informe la partie

  2   adverse des documents en remettant des listes, documents donc qui seront

  3   utilisés pendant le contre-interrogatoire.

  4   La semaine passée, on a reçu un classeur de la part de l'Accusation

  5   et de façon inéquivoque [phon], le Procureur nous a fait savoir qu'il y en

  6   aurait un autre. Nous comprenons les difficultés techniques, certes, mais

  7   nous estimons que la Défense a droit à une liste complète de documents.

  8   Pour le moins pour que l'on puisse, nous autres, être efficaces aussi dans

  9   le prétoire. Parce que ces documents, il faut se pencher dessus, par

 10   avance, pour toute une série de raisons, et notamment de nature technique.

 11   Parce qu'il peut y avoir une mauvaise traduction, il se peut que ce soit

 12   non authentique. Donc il y a plein de choses que nous devons vérifier et

 13   pourrons vérifier avant que ces documents ne soient montrés ici dans le

 14   prétoire. Cela veut dire que nous pouvons, en temps utile, présenter des

 15   objections qui s'imposeraient; par exemple, une page qui manque, une erreur

 16   de traduction, et chose similaire.

 17   Donc je propose, à cet effet, que l'Accusation, dès que possible,

 18   remette à la Défense la liste des documents qu'elle a l'intention

 19   d'utiliser pendant le contre-interrogatoire.

 20   Nous sommes, bien sûr, conscients du fait qu'il peut y avoir des

 21   compléments dans cette liste. Il peut aussi y avoir des retraits de

 22   documents, comme cela a toujours été le cas. Nous ne pouvons pas demander

 23   une exactitude à 100 %, mais nous demandons de bonnes intentions et

 24   demandons à ce que l'on nous communique en temps utile ces documents, comme

 25   nous l'avons du reste fait nous-mêmes pour ce qui est de la présentation

 26   des éléments à charge par l'Accusation.

 27   Alors je précise que l'Accusation, de façon unilatérale et de son plein

 28   gré, a renoncé à ses contacts avec l'accusé pendant son témoignage pour ne


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  1   pas atténuer la crédibilité de ce témoignage. Mais nous ne voulons pas nous

  2   désister de la possibilité de nous pencher sur ces documents-là et voir

  3   s'il y a lieu d'élever des objections de nature plus ou moins technique.

  4   Merci, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, qu'avez-vous à dire ?

  6   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour au

  7   conseil de la Défense et à toutes les personnes ici présentes.

  8   Je ne vois pas quelle serait l'utilité étant donné les circonstances tout à

  9   fait uniques qui sont les nôtres, nous avons dix semaines de déposition.

 10   Puis dans quatre jours, nous allons voir une pause de quatre semaines. Je

 11   peux vous garantir, Messieurs les Juges, que cette période de vacation

 12   judiciaire sera utilisée pour la préparation de mon contre-interrogatoire,

 13   vu la longue déposition qui a été faite à ce jour.

 14   Je comprends ce que dit Me Kovacic, il n'y aura pas de contact, nous

 15   dit-il, pendant les vacations judiciaires avec le général Praljak, en tout

 16   cas, pas à propos des documents présentés pendant mon contre-

 17   interrogatoire. Mais je pensais que ce que nous proposions était

 18   raisonnable et rend bien compte de la façon nous pouvons travailler de

 19   façon plus efficace pendant cette période.

 20   Nous avons un classeur prêt aujourd'hui, il va nous permettre

 21   d'aborder la phase qui se terminera sans doute fin de cette semaine. Nous

 22   n'avons pas préparé d'autres classeurs, car franchement, Monsieur le

 23   Président, je ne sais pas trop dans quel sens je veux aller après la pause.

 24   Je n'ai pas l'obligation pour le moment de dire quelle sera ma destination

 25   ultime, pour ainsi dire.

 26   Je peux donner une liste de documents potentiels. Sans doute y en

 27   aura-t-il 2 500 sur cette liste de documents potentiels que je peux

 28   remettre à Me Kovacic. Je ne vais pas les remettre en "hard copy," parce


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  1   que je ne peux pas demander à mon personnel de photocopier tous ces

  2   documents, de les placer dans des classeurs, alors qu'il n'est pas sûr que

  3   je vais utiliser ces documents en contre-interrogatoire. Mon contre-

  4   interrogatoire, il va sans doute jusqu'à la fin du mois de septembre. C'est

  5   donc fort peu efficace de faire autre chose que qu'est-ce que nous faisons

  6   maintenant, à savoir fournir à l'avance à toutes les parties. Me Kovacic a

  7   déjà reçu avant le week-end les documents que vous avez dans votre

  8   classeur. Nous avons un autre classeur. Ils sont ordonnés, ils sont dans

  9   l'ordre que je vais utiliser pour les présenter au témoin. Vu l'expérience

 10   acquise à ce jour, je crois que tout le monde préfère de loin cela plutôt

 11   que d'essayer de sauter d'un classeur à un autre.

 12   Permettez-moi en quelques mots d'expliquer pourquoi il s'agit d'une

 13   déposition unique. Nous avons un accusé ici, la Chambre de première

 14   instance et la Chambre d'appel ont dit que les communications peuvent se

 15   poursuivre pendant la déposition du témoin, même si c'est pendant la phase

 16   du contre-interrogatoire, ce qui rend la situation tout à fait inédite par

 17   rapport aux témoins que nous avons déjà entendus en ce procès. Je comprends

 18   ce que dit Me Kovacic. Il y a un accord entre l'accusé et sa Défense, pour

 19   ne pas parler du contre-interrogatoire, mais il n'y a rien de contraignant,

 20   rien ne les empêche de changer de cap.

 21   Pour nous, le contre-interrogatoire c'est la possibilité de soumettre

 22   au témoin un document. Etant donné les circonstances, nous pensons que ceci

 23   c'est une composante essentielle du contre-interrogatoire, si vous avez un

 24   témoin qui va être contre-interrogé pendant quelques jours. Or, jusqu'à

 25   présent, ça a toujours été la donne. Bien sûr, la procédure que nous avions

 26   adoptée marchait pour tout le monde. Nous donnions les classeurs au témoin,

 27   les classeurs étaient distribués à toutes les parties, et personne n'avait

 28   de contact, personne n'était autorisé à contacter ce témoin qui était


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  1   encore à la barre des témoins puisqu'il était toujours sous serment. Bien

  2   entendu, les documents utilisés en contre-interrogatoire pourraient être

  3   examinés dans l'espace de quatre heures, voire plus pour quelques témoins.

  4   Mais ce n'est pas du tout le cas ici. On dit que tous les contacts sont

  5   autorisés. Il se peut qu'il faille attendre la fin du mois de septembre

  6   pour que la déposition soit tout à fait terminée, et ceci, à notre humble

  7   avis, risque fort de compromettre notre droit à un contre-interrogatoire

  8   efficace. Car l'efficacité, elle est largement tributaire de la façon dont

  9   les documents sont présentés à un témoin en contre-interrogatoire. Ça a été

 10   vrai pendant tout ce procès, aussi pour toutes les équipes de la Défense.

 11   Voilà quelle sera notre réponse. A la fin de cette semaine, nous

 12   partirons en vacances judiciaires. Nous avons les documents qu'il faudra

 13   cette semaine, nous allons les distribuer sous peu. Je n'ai rien qui soit

 14   ni de près ni de loin définitif s'agissant des documents que nous allons

 15   examiner dans quatre ou six semaines, ou dans cinq semaines. Tout ça va

 16   être préparé pendant les vacations judiciaires. Si Me Kovacic veut une

 17   longue liste de documents que nous allons peut-être utiliser, je suis tout

 18   à fait prêt à inclure des documents que j'avais peut-être utilisés pour ne

 19   pas avoir des difficultés. Mais je pense - et permettez-moi de penser que

 20   ce n'est pas ce qu'il veut. Pourtant c'est tout ce que je peux lui donner

 21   pour l'heure. Si c'est qu'il veut, nous pouvons le lui donner. Mais à mon

 22   humble avis, Monsieur le Président, la façon la plus efficace et la plus

 23   équitable, ce serait la procédure que nous souhaiterions

 24   adopter : distribuons des classeurs au fur et à mesure des sujets abordés,

 25   et lorsque nous serons suffisamment avancés dans cet exercice, nous verrons

 26   s'il y a des problèmes de traduction. En général c'est uniquement quand on

 27   regarde les documents qu'on se rend compte qu'il y a un problème de

 28   traduction.


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  1   Mais voilà en quelques mots ma réponse, vu les circonstances tout à

  2   fait uniques, inédites, je pense que c'était le mieux que nous pouvions

  3   faire. Merci, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, vous nous avez dit la dernière

  5   fois que vous allez aborder les sujets par thème. Quand est-ce que nous

  6   aurons la liste des thèmes ? Est-ce qu'on l'aura dans les prochains jours,

  7   ou bien vous attendrez la reprise, le 17 août, pour nous les donner ?

  8   Puis, deuxièmement, si j'ai bien compris, on va terminer la semaine

  9   avec ce classeur, puis il y en a un deuxième ?

 10   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Permettez-moi de

 11   répondre à votre dernière question. Ici, nous avons un autre classeur, nous

 12   allons le distribuer quand vous voulez. Il est prêt.

 13   Permettez-moi de répondre à votre première question. Je ne voulais

 14   pas distribuer une liste des sujets en tant que tels, parce que les

 15   documents sont sériés par sujet.

 16   Vous l'avez dit la semaine dernière, Monsieur le Président. Le jeu de

 17   documents que nous avons porte sur les questions de crédibilité vu les

 18   dépositions antérieures du témoin, le jeu suivant portera sur la question

 19   du confit armé international. Je pense que ça apparaîtra très rapidement

 20   une fois que nous commençons l'examen du document, après quoi, nous allons

 21   passer à l'entreprise criminelle commune, aux faits à la base des

 22   accusations après la pause.

 23   Donc je n'ai pas l'intention de vous soumettre une liste précise des

 24   sujets, mais plutôt que les classeurs reprendront, si vous voulez, les

 25   sujets. Ils seront regroupés par sujet. Je peux vous donner cette liste de

 26   sujets, Monsieur le Président, si vous le voulez.

 27   Mais, à ce stade, car sans doute que je vais affiner mon contre-

 28   interrogatoire pendant les vacations, la liste que je vous donnerai


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  1   aujourd'hui ne sera pas forcément celle que j'utiliserai après la mi-août.

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne vais pas entrer

  3   dans toute l'argumentation qui nous a été présentée. Je me félicite d'une

  4   chose, à savoir que l'Accusation, pour le moins, nous ait exposé plus en

  5   détail ses positions, mais il y a cependant deux segments des positions à

  6   adopter par l'Accusation qui requiert un commentaire de ma part.

  7   Tout d'abord, le fait est que le Procureur a entendu le témoignage en

  8   entier. Il l'a écouté en continuité et cela fait que le contre-

  9   interrogatoire a pu être préparé dans la continuité. Par conséquent, je ne

 10   serai pas d'accord avec cette assertion qui est celle de dire que

 11   l'Accusation prépare son contre-interrogatoire à partir du moment où le

 12   témoin termine son témoignage. Ces activités, elles auraient dû être

 13   entreprises par l'Accusation dès le départ, et j'imagine que c'est le cas

 14   en parallèle avec l'avancée du contre-interrogatoire.

 15   En sus, le Procureur savait d'ores et déjà ce qui allait être abordé, parce

 16   qu'il savait que le témoignage du général Praljak allait durer plus ou

 17   moins X, par rapport à ce qui a été annoncé, et il le savait aussi à

 18   l'époque que la Chambre, deux mois avant le début même de ce témoignage, a

 19   rendu une décision autorisant, à présent, la Défense à communiquer avec

 20   l'accusé pendant son témoignage. Donc tous ces éléments-là, qui sont

 21   nécessaires pour ce qui est donc d'une décision à prendre par l'Accusation

 22   concernant les préparatifs de son contre-interrogatoire, étaient bel et

 23   bien connus avant le témoignage et pendant le témoignage.

 24   Juste un petit argument pour finir.

 25   Si le Procureur estime que c'est une bonne chose que de faire en sorte que

 26   la Chambre et la Défense et les autres Défenses se voient communiquer une

 27   liste de documents par segments au compte goutte, alors j'enchaînerais sur

 28   la question évoquée par M. le Juge Antonetti, c'est-à-dire la liste des


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  1   thèmes : "The Topics," comme on dit en anglais.

  2   Pour procéder de façon analogue à celle de Mme Alaburic, notre

  3   consœur, elle aussi, elle a eu un grand contre-interrogatoire et c'est

  4   justement pour cela qu'elle a eu recours à une autre méthode de préparation

  5   et elle a informé en temps utile tout le monde dans le prétoire, la Chambre

  6   et les conseils pour ce qui est de sa façon de procéder. Je vous rappelle

  7   qu'elle nous a dit exactement tous les thèmes et les groupes de documents

  8   qui accompagneraient les différents thèmes. Donc cette proposition de la

  9   part de notre confrère, l'Accusation, pour ce qui est de communiquer une

 10   liste en gros, ça n'est pratiquement d'aucune utilité véritable parce que

 11   ce serait une liste que l'Accusation nous a déjà communiquée parce qu'il

 12   peut employer tous ces documents bien sûr mais il faut qu'il soit un peu

 13   plus précis. J'estime que nous pourrions être d'accord sur les choses, à

 14   savoir que ce soit communiqué par bloc, et j'estime pour -- toutefois que

 15   la pratique de ce prétoire veut que la liste de documents utilisés devaient

 16   être communiqués dès le début du contre-interrogatoire -- du témoignage en

 17   contre-interrogatoire.

 18   Alors si les Juges de la Chambre, pour des raisons qui seraient les

 19   siennes, jugent que l'Accusation devrait être à même se faire attribuer la

 20   possibilité de procéder au fur et à mesure parce que la tâche est grosse,

 21   alors il faut qu'on nous communique au moins les thèmes et une liste de

 22   documents avant que d'entamer les différents thèmes. Je reviendrai une fois

 23   de plus pour souligner ce que j'ai dit au début. Le Procureur n'est pas

 24   pris de cours s'agissant de cette situation, il avait déjà tous les

 25   éléments à l'époque où Praljak a commencé à s'en servir. Il le savait. On

 26   connaissait les règles du jeu dans le prétoire. Donc il ne devait pas

 27   prendre sur soi le risque de se voir accorder et attribuer des solutions

 28   autres qui seraient plus aisées pour l'Accusation.


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  1   Je vous remercie.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Les juges vont examiner entre eux la question. Il y

  3   a en fait, il y a deux options :

  4   La première option c'est celle de M. Stringer qui consiste à dire vous

  5   aurez à la rentré au fur et à mesure la liste des documents avec les

  6   "topics," les sujets. L'autre option, c'est celle que Me Kovacic vient de

  7   nous dire. Bon, lui, il préférerait avoir tout mais il serait d'accord,

  8   semble-t-il, avec le fait qu'au minimum, le Procureur fournisse la liste

  9   des sujets. Voilà. Donc les Juges vont voir cela entre eux et puis ils vous

 10   diront qu'est-ce qu'on a décidé.

 11   Alors avant de donner la parole à M. Stringer pour la suite, je voudrais

 12   m'adresser à M. Praljak parce que la semaine dernière, je vous ai écouté

 13   attentivement sur la notion d'action défensive. Alors j'ai longuement

 14   réfléchi à cela samedi et dimanche, et je crois qu'il me serait utile,

 15   quand j'aborderais des questions supplémentaires que vous soyez en mesure

 16   de me fournir, à ce moment-là, pour pouvoir répondre utilement à mes

 17   questions supplémentaires, je souhaiterais avoir fait de votre main une

 18   carte, ou je vais aller lentement -- vous positionneriez les Unités de la

 19   JNA avant la reconnaissance de la République de Bosnie-Herzégovine, savoir

 20   où se trouvaient les unités sur le territoire.

 21   J'aimerais également savoir comment se répartissaient les forces HVO, ABiH,

 22   au moment où la communauté internationale reconnaît l'existence de la

 23   République de Bosnie-Herzégovine. Cela ça pourrait être la deuxième carte.

 24   La troisième carte qui serait utile, ça serait que si vous pouviez

 25   positionner les Unités du HVO et de l'ABiH en octobre 1992 pour voir

 26   comment elles se répartissaient dans la République de Bosnie-Herzégovine.

 27   Ensuite il serait utile d'avoir une carte où les unités seraient réparties

 28   au mois de janvier. Vous savez cette fameuse date de l'ultimatum de janvier


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  1   savoir où se trouvent les uns et les autres.

  2   Une autre carte serait utile, c'est le positionnement du HVO ou de l'ABiH

  3   au mois d'avril, c'est-à-dire la période critique avril, 9 mai, savoir où

  4   se trouvaient les uns et les autres. Après quoi, il serait utile d'avoir

  5   une carte où seraient positionnés également HVO et ABiH au 30 juin au

  6   moment où les Musulmans du HVO vont quitter les unités, savoir comment sur

  7   le terrain se répartis ces uns et les autres.

  8   Ensuite savoir au moment où vous prenez vos fonctions le 24 juillet, quelle

  9   est la situation sur le terrain des unités ? Telle brigade, la 101e, la

 10   102e, et cetera, où se trouvent exactement sur le terrain les brigades ?

 11   Puis dernière carte, à savoir octobre, novembre, où se positionnent les

 12   différentes unités ?

 13   Alors, malheureusement, pour vous, Général Praljak, vous savez que la

 14   Chambre d'appel a rejeté votre demande de mise en liberté et donc

 15   malheureusement vous allez rester là et donc pendant tout ce temps vous

 16   pourrez vous colorier ces cartes pour qu'à la rentrée, nous puissions

 17   utilement étudier ces cartes.

 18   Alors je ne vous demande pas ça parce que je sais que vous êtes

 19   contraint et forcer à rester là mais je pense que ce serait utile parce que

 20   la notion d'action défensive, moi, me pose problème et j'aimerais bien

 21   avoir la conviction qu'effectivement ce sont des actions défensives et non

 22   pas des offensives, d'où l'importance de voir sur ces cartes : qu'est-ce

 23   qui s'est au juste passé, est-ce que c'était des micros opérations ou des

 24   mégas opérations militaires et en comparant tout le positionnement en

 25   fonction des dates, on aura certainement une meilleure vision ? Voilà.

 26   Alors comme ce n'est pas demain mais après que le Procureur aura

 27   terminé il y aura des questions supplémentaires, et à ce moment-là, je

 28   reviendrai sur Gornji Vakuf, en vous demandant si vous avez fait ces


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  1   cartes. Bien entendu, je pourrais faire ce travail aussi à partir des

  2   éléments qu'on a mais vous êtes mieux placé que moi pour positionner les

  3   Unités du HVO et, bien entendu, ce que vous ferez passera évidemment au

  4   filtre des éléments que les Juges ont.

  5   Voilà ce que je voulais vous dire, Général Praljak.

  6   Sur ce, Monsieur Stringer, je vous donne la parole.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Permettez-moi

  8   de répondre très brièvement à cette question de communication soulevée par

  9   Me Kovacic. C'est important. Vous savez, ce qui se passe c'est ceci : ils

 10   veulent qu'on leur communique à la Défense les sujets, les documents, que

 11   nous avons l'intention d'utiliser en contre-interrogatoire; de cette façon,

 12   le témoin pourra pendant les vacations judiciaires étudier tout ceci, y

 13   réfléchir aux réponses qu'il va donner, or ça ne s'est jamais fait pour

 14   quelques contre-interrogatoires que ce faire. A notre avis, ceci compromet

 15   le concept même du contre-interrogatoire. C'est pour ça que nous avons des

 16   sentiments très vifs à ce propos.

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Je vais être bref. Nous ne demandons

 18   absolument pas au Procureur qu'il nous fournisse d'avance des documents. Il

 19   nous suffit d'avoir la liste on travaillera avec l'affichage électronique

 20   enfin le prétoire électronique. Tout de suite après les faits, on aura

 21   d'abord la liste des thèmes et ensuite la liste des documents qui tombent

 22   sous la coupe de ces thèmes. On ne demande pas les documents physiquement

 23   remis à nous.

 24   Merci.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre, on parlait entre nous, entre eux, et

 26   puis on vous dira qu'est-ce qu'on a décidé.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Kovacic, il serait utile pour

 28   moi et peut-être pour mes collègues, eux aussi, que vous nous expliquiez


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  1   pourquoi vous attachez tellement d'importance à ceci, parce que d'après

  2   notre expérience, une fois qu'un témoin est contre-interrogé, sa "partie" -

  3   entre guillemets - écoute et est disposée à intervenir si quelque chose se

  4   passe mal. En général, la réaction se fait immédiatement. Donc à un moment

  5   donné, bien sûr, il y aura les questions supplémentaires, c'est quelque

  6   chose dont nous sommes au courant, et je ne vois pas très bien pourquoi il

  7   faut la communication ou ceci exige la communication que vous nous

  8   demandez. C'est une question technique que je vous pose.

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Juge, permettez-moi de répondre à

 10   votre question. Nous le demandons tout d'abord parce qu'on a toujours fait

 11   de la sorte dans ce prétoire. Mais pas rien que pour le principe même pour

 12   donc respecter la pratique de légalité en arme, mais en premier lieu, pour

 13   des raisons pratiques. Parce que, comme vous le savez fort bien, il est

 14   arrivé très souvent dans ce prétoire, par exemple, que le document qu'on a

 15   reçu n'a pas la bonne traduction à côté. Alors pour que je sois sûr, moi,

 16   j'aime bien me pencher sur ces documents avant qu'ils ne soient présentés

 17   au témoin. Parce que c'est dans le calme du travail de bureau que je

 18   remarque les détails de la traduction du document, parce que des fois on ne

 19   voit pas cela de prime à bord, et quand on soulève une objection dès que le

 20   document est présenté, alors nous savons tous, l'expérience, qu'on a

 21   dépassé pas mal de temps à parler de questions qui ont été générées par des

 22   erreurs de traduction au niveau de documents.

 23   Nous voudrions le faire pour des raisons pratiques lorsqu'il s'agit

 24   notamment de documents comportant plusieurs pages. Est-ce qu'on a arraché

 25   les choses dans leur contexte ?

 26   Est-ce que le document, par exemple, celui qu'on a vu vendredi passé,

 27   on a mis le temps pour savoir de quoi il faisait partie ? Parce que ça

 28   commençait d'un chapitre, d'une partie de rapport qui était plus grand,


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  1   mais il n'y a pas eu de dégât, mais je vous donne l'exemple, en tant que

  2   tel.

  3   Donc pour des raisons pratiques, pour être bref, je vous le dis. Je

  4   ne suis pas en mesure en deux minutes ici dans le prétoire de but en blanc,

  5   ni ma collègue non plus, par exemple, déterminer qu'il y a une erreur de

  6   traduction, ou s'il y a plusieurs pages de ce document. D'ici à ce qu'on

  7   est parcouru le document dans son entier, on constate à la fin qu'il n'est

  8   pas signé, donc il se pose la question de l'authenticité, et ainsi de

  9   suite.

 10   Je vous remercie. -- mais, ah, oui.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   Contre-interrogatoire par M. Stringer : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Praljak.

 17   R.  Bonjour, Monsieur Stringer.

 18   Q.  Général, je souhaite revenir à la date du 4 mai de cette année, qui est

 19   la date à laquelle vous avez commencé votre témoignage, et je regarde

 20   maintenant la page 39 500 du compte rendu d'audience, qui concerne la

 21   situation à Mostar pendant l'été de l'année 1993. Vous avez dit ceci. Vous

 22   posiez une série de questions rhétoriques, si je puis m'exprimer ainsi, et

 23   vous avez dit :

 24   "Comment se fait-il que les autorités de Mostar Est, après l'attaque contre

 25   l'ABiH, le 9 mai 1993, et le cessez-le-feu sur lequel on est tombé d'accord

 26   après, n'ont pas demandé à ce que les conduits principaux sur le boulevard

 27   et les tuyaux soient inspectés ?"

 28   A propos de l'eau :


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  1   "Pourquoi n'ont-ils pas réparé la tuyauterie le long de l'ancien pont ?

  2   Pourquoi l'attaque de l'ABiH et la trahison du HVO" - je crois que vous

  3   vouliez dire - "la trahison du HVO de la part des membres musulmans du HVO,

  4   pourquoi les autorités de Mostar Est ont-elles engagé la FORPRONU et

  5   présenté le problème de l'eau comme si c'était un problème lié aux blessés

  6   et ensuite la question a été résolue ?"

  7   Vous souvenez-vous avoir dit ceci au début de votre témoignage ?

  8   R.  Oui, je m'en souviens. Je me souviens en avoir parlé. Alors je veux

  9   croire que vous l'avez correctement cité, bien qu'il me semble qu'en fait,

 10   j'ai parlé de toute l'année qui s'est écoulée à partir de la destruction du

 11   pont et des raisons pour lesquelles l'approvisionnement en eau ne se

 12   faisait pas, alors peut-être quelque chose m'a échappé mais --

 13   Q.  Très bien. Dans votre classeur, si vous regardez la pièce P 02611, vous

 14   constaterez qu'il s'agit là d'un document, une lettre, qui est datée du 2

 15   juin 1993, qui est le jour qui suit le conflit du 9 mai 1993. Vous

 16   constaterez qu'il s'agit d'une lettre qui vient d'Arif Pasalic qui est

 17   envoyée au HCR des Nations Unies et THW, qui était la société allemande qui

 18   était là pour régler le problème de la canalisation d'eau. Est-ce que vous

 19   voyez cela ?

 20   R.  Oui, je vois ça.

 21   Q.  En parcourant ce document, ce que vous leur envoyez c'est une solution

 22   à une proposition -- de solution au problème de distribuions d'eau sur la

 23   rive gauche. Au deuxième paragraphe, ceci se trouve sur la deuxième page en

 24   anglais, deuxième paragraphe de cette proposition, il dit :

 25   "Pour l'instant, la rive gauche est alimentée en eau par quatre tuyaux en

 26   plastique qui traversent dont le diamètre est de cinq et quatrième de

 27   pieds."

 28   Ensuite il poursuit :


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  1   "Pour alimenter en eau ceci ne suffit pas pour répondre aux besoins des

  2   habitants susmentionnés."

  3   Ensuite à la page 2, il poursuit en disant :

  4   "D'après les éléments susmentionnés et pour éviter toute catastrophe, la

  5   priorité consiste à mettre en place un projet de reconstruction provisoire

  6   et partielle du système d'approvisionnement en eau sur la rive gauche."

  7   En bas, il dit :

  8   "Nous insistons sur le fait que les habitants sur la rive gauche sont

  9   disposés à faire des efforts extraordinaires pour permettre un projet de ce

 10   type d'être réalisé, et de s'occuper de la protection civile et de l'ABiH."

 11   Donc conviendrez-vous avec moi, Général, que malgré ce que vous avez dit ou

 12   suggéré dans votre témoignage le 5 ou le 4 mai, en tout cas, le 2 juin, il

 13   y a ici un représentant officiel à Mostar Est, Arif Pasalic, qui se plaint

 14   de la situation au niveau de l'eau à Mostar Est ?

 15   R.  Monsieur Stringer, Monsieur le Procureur, je ne suis pas d'accord. Tout

 16   d'abord, ce n'est pas une tâche qui revient à Arif Pasalic. Car il est un

 17   commandant militaire, il s'agit ici d'une tâche qui incombe aux autorités

 18   civiles car d'ailleurs elles s'y attelaient a cela -- c'était à elle que

 19   cela incombait.

 20   Deuxièmement, Monsieur le Procureur, il est dit ici que cette zone de la

 21   ville a fait l'objet d'un arrêt de l'approvisionnement en eau après la

 22   destruction du pont, or les ponts à Mostar ont été détruits aux mois de mai

 23   et juin 1992, et cette lettre est écrite un an plus tard.

 24   De plus, si en l'espace d'un an il y a eu approvisionnement de la rive

 25   gauche, de cette façon très limitée, avec des branchements de deux pouces

 26   et de cinq pouces un quart, aussi rudimentaire que cela, alors il n'y a

 27   aucune raison de penser que les structures civiles du HVO qui avaient en

 28   charge sur place ce type de problème, n'auraient pas réussi à mettre en


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  1   place des tuyaux de 200 ou de 500 millimètres. Donc ils n'ont rien fait à

  2   cet égard, bien que comme vous pouvez le voir ici, cela a fait l'objet

  3   d'efforts concertés d'une commission conjointe croato-musulmane, alors

  4   ensuite quand ils attaquent, quand ils se préparent à une offensive, ils

  5   affirment, ils déclarent qu'ils sont prêts à cela

  6   Q.  Pardonnez-moi, en réalité, la question a un lien avec ce que vous avez

  7   dit le 4 mai, à savoir vous avez dit qu'il n'y avait pas de plainte émanant

  8   des autorités de l'ABiH. Veuillez vous reporter au document suivant

  9   maintenant, s'il vous plaît. C'est le P 02923. On me dit que celui-ci est

 10   un document confidentiel qui ne peut pas être vu à l'extérieur de ce

 11   prétoire, mais nous pouvons en parler. Il s'agit d'un rapport de la MOCE

 12   qui est daté du 24 juin 1993 et qui porte sur une réunion au cours duquel -

 13   - auxquelles ont assisté un certain nombre de personnes, y compris M. Bilic

 14   qui vient de l'armija.

 15   Ensuite si nous regardons la troisième page de l'anglais, Général, on

 16   peut lire :

 17   "Il s'agit du rapport de la MOCE du côté est, M. Bilic nous a dit

 18   encore une fois qu'il manque d'eau, de nourriture, de médicaments et que

 19   certaines maladies ont éclaté, comme des maladies de la peau. Ils n'ont pas

 20   d'eau courante."

 21   Conviendrez-vous avec moi, Général, qu'en réalité, le 24 juin, il y a

 22   une autre personne qui font partie des autorités de l'ABiH de l'armée de

 23   l'ABiH qui se plaignent du fait qu'il y a un manque d'eau à Mostar Est ?

 24   R.  Monsieur le Procureur, il n'est pas controversé que la partie est de

 25   Mostar ait connu une pénurie d'eau plus sévère que la partie ouest, cela je

 26   ne le remets pas en cause. La seule chose que je remets en cause c'est que

 27   le HVO ait été la cause de cela. Or dans le document précédent, vous voyez

 28   qu'un des tuyaux de 283 millimètres a été mis en place à travers le pont de


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  1   Musala, et là, nous avons une organisation qui aurait dû mettre sur pied

  2   d'autres infrastructures. Ensuite l'approvisionnement en eau aurait été

  3   réactivité, après tous les travaux, des instructions nécessaires. Mais, là,

  4   on s'imagine qu'un problème technique très complexe peut être résolu en à

  5   peine quelques minutes en posant des tuyaux de très faible diamètre. Mais

  6   c'est impossible et ce n'est pas de la faute du HVO c'est de la faute de

  7   ceux qui se trouvaient sur la rive gauche et qui n'ont pas suffisamment

  8   agi.

  9   Q.  Maintenant j'aimerais que vous passiez au document suivant, le P 03532.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le dernier document, il y a peut-être une

 11   raison au fait que l'eau n'arrive pas. Regardez le paragraphe 5, le dernier

 12   paragraphe du 5. Il semblerait qu'à cette époque au moment où ce rapport

 13   est rédigé, donc au mois de juin, que la compagnie allemande, le THW,

 14   serait retournée en Allemagne. Or, j'avais cru comprendre qu'ils étaient

 15   investis de la mission justement d'approvisionner en eau Mostar. Or, là, on

 16   dit qu'ils sont repartis en Allemagne. Comment vous interprétez cette

 17   phrase ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, dans ce document

 19   précédent, ils disent que cette entreprise est en retard pour ce qui est

 20   des livraisons de pièces très complexes. Il y a un retard déjà de 20 jours

 21   pour ce qui est de ces pièces destinées à une construction devant enjamber

 22   la Neretva. Ici nous avons un document qui est daté du 24 juin, et à cette

 23   date-là, selon les informations dont, moi, je dispose, l'ABiH se livre déjà

 24   à des tirs de grande échelle dirigés contre le HVO. Nous avons vu les

 25   documents qui nous ont montré combien il y a eu de victimes, combien de

 26   morts au sein du HVO, alors, bien sûr, les Serbes aussi tirent dans les

 27   environs du pont. Ce tuyau a été percé et fui, et les gens sont partis,

 28   sont revenus d'où ils étaient partis car ils ne voyaient pas comment ils


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  1   auraient pu terminer leurs travaux, soit en raison des activités de la

  2   guerre, soit comme, moi, je l'affirme, en raison de l'inertie de cette

  3   Commission conjointe qui était censée régler le problème mais qui a été

  4   inefficace pendant un an, et cela notamment pour ce qui est de

  5   l'approvisionnement en eau de Mostar Est, problème qui n'avait rien à voir

  6   avec le HVO. Je pense notamment à la partie qui concerne la source de

  7   Rastani, du côté de Rastani. Je l'ai démontré, Rastani était sous le

  8   contrôle de l'ABiH et l'eau là-bas, à l'époque, n'avait rien à voir avec le

  9   HVO, mis à part que ces sources n'étaient pas suffisantes en été pour

 10   approvisionner l'intégralité de la ville de Mostar en eau, et il ne suffit

 11   pas d'approvisionner seulement la rive gauche ou la rive droite. Si vous

 12   avez des tuyaux de deux pouces ou de cinq pouces, quatre, seulement, cela

 13   montre clairement qu'ils n'étaient pas si préoccupés que cela d'assurer un

 14   bon approvisionnement. Après tout, cela retombe à la charge du HVO, mais

 15   c'est inexact.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, indépendamment du fait que tout le

 17   monde se tire dessus à l'époque, mais si j'ai bien compris - et si je fais

 18   une erreur, corrigez-moi - cette société allemande, THW, avait été appelée

 19   comme technicien pour remettre en état le système. Apparemment, tout le

 20   monde était d'accord pour qu'ils travaillent. Mais voilà qu'eux, ils s'en

 21   vont. Alors comme ils sont partis, qui aurait pu les remplacer pour faire

 22   le même travail ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, personne n'aurait pu le

 24   faire. Les tuyaux, qui sont ici énumérés, ainsi que les ponts sous lesquels

 25   passaient des tuyaux de 200 à 500 millimètres, il s'agit du pont des

 26   douanes; donc avec un tuyau de 250 millimètres, le pont du maréchal Tito,

 27   avec un tuyau de 280 millimètres; le pont du port avec un tuyau de 300

 28   millimètres; le pont Hasan Brkic avec un tuyau de 500 millimètres; le pont


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  1   de l'Aviation avec un tuyau de 300 millimètres. Tout cela représente un

  2   chantier que seul une grande entreprise peut prendre à sa charge et encore,

  3   en prévoyant des travaux de plusieurs mois, et personne à Mostar même en

  4   théorie ne peut assumer cela. Or ces ponts ont été détruits fin mai, début

  5   juin 1992, en même temps que les lignes téléphoniques que donc les tuyaux

  6   que je viens d'énumérer. Dans le document précédent, ils disent qu'un tuyau

  7   de 280 millimètres a été posé passant par le pont Musala et que pour les

  8   autres canalisations d'approvisionnement en eau, des tuyaux sont arrivés

  9   mais l'ouvrage d'art, l'infrastructure sensé enjamber la Neretva n'est pas

 10   arrivée.

 11   Alors qu'est-ce que cela veut dire ? Ou bien cette entreprise allemande

 12   n'est plus intéressée, ou bien elle n'a pas reçu l'aide et le concours

 13   nécessaire, ou bien les moyens financiers étaient insuffisants. En tout

 14   cas, le problème tel qu'il s'est présenté avec le bombardement des pompes

 15   par les Serbes aurait dû avoir déjà été résolu pendant tout le temps qui

 16   s'est écoulé. A ce moment précis, il ne pouvait absolument être résolu à

 17   Mostar et d'aucune façon que ce soit.

 18   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Vous avez dit quelque chose il y a quelques instants. Je vais vous

 20   relire vos propres termes. Vous avez dit ceci :

 21   "Ceci signifie simplement -- signifiait simplement, si je puis m'exprimer

 22   ainsi qu'ils s'en moquaient, ils s'en moquaient."

 23   Parce que vous suggérez que les autorités de Bosnie-Herzégovine du

 24   côté est ne s'intéressaient pas à la remise en fonctionnement du système

 25   d'approvisionnement en eau d'une manière ou d'une autre et ne souhaitait

 26   pas que ceci soit fait ?

 27   R.  Non, Monsieur Stringer, ce n'est pas ce que je dis. Mais si quelqu'un

 28   pendant un an avait véritablement voulu de façon très déterminée résoudre


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  1   cela, s'il avait demandé de l'aide, en disant l'été va arriver, nous allons

  2   avoir des difficultés, ce problème aurait été pris en compte. On aurait pu

  3   demander aux Français, aux Suisses, aux Américains de venir parce que nous

  4   avions ce problème. Nous, nous aurions aimé le faire mais peut-être qu'eux

  5   auraient fait mieux, mais ce n'est pas une question de volonté ou de désir

  6   de le faire ou de ne pas le faire, c'est la véritable question c'est que

  7   les intéressés n'étaient pas suffisamment désireux d'avancer.

  8   Q.  Très bien. Nous allons donc continuer à regarder le document qui est le

  9   P 02923, et nous allons toujours regarder le même paragraphe 5, qui

 10   concerne l'eau.

 11   Quelqu'un déclare qu'il y avait de l'eau mais qui ne coulait de façon

 12   continue. Il y avait de l'eau qui tombait sur une partie importante de la

 13   base, à propos de Stari Most, l'ancien pont. Ensuite, ils sont allés le

 14   réparer. Les membres du HVO ont tiré sur ceux qui travaillaient et ensuite

 15   se sont retirés, laissant entendre que les travailleurs ont fait l'objet de

 16   tir de la part des membres du HVO lorsqu'ils tentaient de réparer la

 17   canalisation à Stari Most.

 18   En fait, c'est véritablement ce qui s'est passé, Général,

 19   malgré votre déclaration du 4 mai, où vous laissez entendre qu'ils n'ont

 20   rien fait pour essayer de réparer les canalisations sur le vieux pont. En

 21   réalité, on leur a tiré dessus, ce sont les forces du HVO qui ont tiré

 22   dessus, n'est-ce pas ?

 23   R.  Non, c'est inexact. Le HVO n'avait pas de positions à partir desquelles

 24   il aurait pu tirer sur le vieux pont. A part pour ce qui est des armes

 25   d'infanterie. Cela, on peut le voir très clairement et encore plus si l'on

 26   se rend sur place, car à partir d'aucune position d'artillerie à part du

 27   mont Hum, il n'est possible de voir en ligne droite le vieux pont. On ne

 28   voit pas pourquoi on aurait tiré sur des tuyaux de deux pouces ou de 5.4


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  1   pouces, des tuyaux d'approvisionnement en eau. C'est tout simplement une

  2   version, qu'a propagée l'ABiH auprès des observateurs internationaux, c'est

  3   un mensonge.

  4   Q.  La pièce suivante, le P 03532, pour revenir à la déposition que vous

  5   avez faite le 4 mai. Après le 30 juin, pour les autorités de Mostar Est,

  6   n'ont-elles pas engagé la FORPRONU, en tout cas, ne leur ont-elles pas

  7   soumis le problème de l'eau ? Il s'agit d'un rapport de la FORPRONU qui est

  8   daté du 18 juillet 1993, à savoir après le 30 juin.

  9   Il s'agit là d'un document confidentiel également, Monsieur le

 10   Président, donc ceci ne peut être communiqué à l'extérieur.

 11   On fait mention des autorités civiles dans la partie musulmane de

 12   Mostar. M. Klaric, si vous regardez le haut de la page 2, il s'agit du

 13   point 2, et compte tenu du blocus du HVO, 35 000 personnes sont sur la rive

 14   est sans électricité et sans service public. Ce qui pourrait faire peser

 15   une menace importante étant donné qu'il y a déjà une épidémie.

 16   Contrairement à ce que vous déclaré le 4 mai aux Juges des la Chambre, en

 17   réalité ici les Juges, les autorités civiles soulèvent plus

 18   particulièrement la question de l'eau qui est difficile à Mostar Est et en

 19   parle à la FORPRONU, n'est-ce pas exact ?

 20   R.  Je ne comprends pas la question pour ce qui est de la question de

 21   l'eau et d'amener cette eau, par exemple, dans des jerricanes. Comment

 22   envisagez-vous cette question de l'eau ? Est-ce que vous imaginez des

 23   verres d'eau, la question de l'eau, lorsque vous vous référez, je ne

 24   comprends pas qu'est-ce que vous entendez par là.

 25   Q.  Je vais reformuler la question. Le 4 mai, vous avez dit de façon

 26   rhétorique pourquoi les autorités à Mostar Est n'ont-elles pas engagé sa la

 27   FORPRONU, ne leur ont pas soumis le problème de l'eau; c'est ce que vous

 28   avez dit aux Juges de la Chambre. Ce que je fais, Général, je vous montre


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  1   ce donc et je vous suggère qu'en réalité, les autorités ont soulevé le

  2   problème de l'eau et on en parlait à la FORPRONU. Vous avez -- lorsque vous

  3   avez laissé entendre le contraire, le 4 mai, vous vous êtes trompé. En

  4   réalité, ils ont soumis ce problème de l'eau à la FORPRONU ou les

  5   autorités, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est manifeste à partir de ce document. Mais lorsque, moi, j'ai

  7   dit qu'ils ne sont pas adressés à la FORPRONU pour aborder la question de

  8   l'eau de la même façon qu'ils l'avaient fait pour celles des blessés, ce

  9   que j'ai dit c'est  que la FORPRONU ne s'est pas rendue auprès de moi, à

 10   l'état-major, et n'a pas fait état de ce problème de l'eau de la même façon

 11   que le problème des blessés avait été soulevé et résolu. Le problème de

 12   l'eau, lui, n'aurait pas pu être résolu, car d'un point de vue technique il

 13   était difficile et complexe. Mais on aurait pu améliorer la situation, on

 14   aurait pu compléter l'approvisionnement en eau avec des pompes électriques

 15   qui auraient pompé l'eau de la Neretva, en un dizaine de points et il

 16   aurait été possible de cette façon-là de s'approvisionner en une eau qui à

 17   l'époque aurait été suffisamment pure pour être potable et répondre à des

 18   besoins supplémentaires.

 19   Q.  Pardonnez-moi, je vais donc vous poser cette question-ci. Après

 20   avoir regardé ce document, on peut regarder d'autres documents.

 21   Conviendrez-vous avec moi pour dire que vous vous êtes trompé lorsque vous

 22   avez suggéré que les autorités de Mostar Est n'ont pas évoqué la question

 23   de l'eau avec les autorités de la communauté internationale comme la

 24   FORPRONU; vous vous êtes trompé, n'est-ce pas, lorsque vous avez dit cela,

 25   le 4 mai ?

 26   R.  Non, je ne me suis pas trompé, car cette question d'aborder ou

 27   non la question de l'eau par eux, je l'ai liée au fait que la FORPRONU ne

 28   m'a pas fait suivre cette information. Ce qu'ils voulaient c'est que l'on


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  1   vienne réparer l'eau pendant que eux étaient en train d'attaquer, si bien

  2   que lorsque le HVO eut été contraint de répliquer à des tirs, il aurait été

  3   déclaré agresseur. Donc c'est un jeu pervers auquel on a affaire ici.

  4   Ensuite l'ABiH dit : donc venez, venez ici, réparez, amenez le HVO pour

  5   qu'il répare les canalisations d'eau, ensuite tirez sur eux, et lorsqu'ils

  6   répliqueront, ils seront déclarés comme étant à l'origine des tirs et des

  7   agresseurs. C'est un jeu véritablement perfide.

  8   Monsieur Stringer, en plus, voyez de quoi il s'agit, s'ils tiennent

  9   bien Bijelo Polje, nord de Mostar et Rastani, en quoi ont-ils besoin pour

 10   réparer les canalisations d'eau ? Il n'en a pas besoin.

 11   Q.  Monsieur le Président, justement, vous laissiez entendre que les

 12   autorités de l'ABiH ne se sont jamais plaintes du problème de l'eau auprès

 13   de la FORPRONU. Ceci n'est pas exact, n'est-ce pas, en réalité, ils se sont

 14   plaints auprès de la FORPRONU.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, dans ce document, il apparaît

 16   que les autorités de l'ABiH ont évoqué le problème, enfin les autorités de

 17   l'ABiH, disons les autorités civiles. C'est M. Klaric qui, a 10 heures du

 18   matin, le 17 juillet 1993, avec une communication radio, soulève plusieurs

 19   problèmes, notamment comme vient vous le dire M. Stringer, le fait qu'il y

 20   a un problème au niveau de l'eau, et M. Klaric dit aux représentants de la

 21   FORPRONU, affaire civile qu'ils ont le sentiment de l'abandon par la

 22   communauté internationale. Mais quand on regarde le document, on s'aperçoit

 23   qu'à 20 heures, le même jour, c'est-à-dire dix heures après, les affaires

 24   civiles de la FORPRONU rencontrent M. Stojic, et on a le compte rendu de la

 25   rencontre. Curieusement, sauf erreur de ma part, la question de l'eau ne

 26   figure pas au compte rendu.

 27   Alors c'est là où je suis un peu étonné. Si la FORPRONU constate une

 28   situation de l'eau catastrophique, ils auraient dû en parler à M. Stojic, à


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  1   20 heures, et M. Stojic aurait certainement fait le point. Or ici, M.

  2   Stojic ne parle pas de l'eau. Alors comment vous interprétez cela, Général

  3   Praljak ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, avant tout, l'armée n'a

  5   rien à voir avec la question de l'eau. Il faut être tout à fait clair, je

  6   peux en parler ici, je peux en parler ici car je connais cette situation. A

  7   cet instant dont nous parlons, l'ABiH contrôle une source

  8   d'approvisionnement en eau et l'ensemble des territoires s'étendant de

  9   cette source jusqu'à la partie est de Mostar. J'ai déjà eu l'occasion de

 10   l'expliquer de façon limpide précédemment et j'ai dessiné un schéma

 11   expliquant cette configuration. Il est impossible de comprendre comment ils

 12   auraient besoin de l'aide du HVO au nom de quoi pour amener de l'eau à

 13   Mostar Est. Ils ont la source de Rastani. Ils contrôlent le territoire de

 14   Rastani, le territoire de Bijelo Polje aussi c'est au nord de Mostar ainsi

 15   que les abords et l'entrée même dans Mostar. "Par l'intermédiaire du pont

 16   ferroviaire, il y avait d'ailleurs une partie des canalisations

 17   d'approvisionnement en eau qui passait déjà avant. Ils n'avaient qu'à

 18   s'approvisionner en tuyaux et les faire passer par là-bas et faire le

 19   nécessaire. Le HVO n'en n'avait absolument pas besoin pour faire cela. Ce

 20   qu'ils veulent ici c'est quelque chose de complètement différent.

 21   Ils passent leur temps à accuser la partie adverse pour couvrir leurs

 22   propres opérations militaires. Ici on voit que, dans cette réunion, ils ne

 23   parlent même pas de l'eau. Quant à tout le reste, les hôpitaux, les

 24   médicaments, les blessés, tout ce qui a été demandé auprès de nous, cela a

 25   d'ailleurs été offert par le HVO et comme M. Stojic le dit ici

 26   explicitement, si vous le souhaitez, nous allons transférer tous les

 27   enfants pendant que durent les combats que vous, vous avez initié pendant

 28   les attaques que vous êtes en train de lancer pour qu'il n'y ait pas de


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  1   victimes. Si vous le souhaitez, nous allons faire sortir la population

  2   civile pour qu'il ne reste que les armées, pour que seul les armées restent

  3   à combattre. C'est cela la position du HVO.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, j'ai deux

  5   questions. Une en rapport direct avec ce que vous venez de dire. Je suis

  6   surpris de voir que personne n'a dit à là FORPRONU que l'ABiH avait assez

  7   d'eau et avait le moyen d'apporter cette eau à Mostar Est, je ne vois pas

  8   que quelqu'un aurait dit vu les griefs formulés par les autorités de Mostar

  9   Est, écoutez, vous avez de l'eau, servez-vous en. Pourquoi est-ce qu'on n'a

 10   aucune trace de ceci ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, c'est parce que les

 12   documents sont mauvais. Ils ne vous disent pas 5 % de ce qui s'est dit à la

 13   réunion et chacun a prélevé ce qu'il l'arrangeait pour le mettre dans le

 14   document. D'après ce que j'ai su moi on leur a dit à ces réunions quelles

 15   sont les sources et on l'a vu dans les documents. Il y a les témoins qui

 16   nous ont parlé, ils nous ont parlé de contrôle des sources des territoires

 17   et des tuyauteries. Il suffisait juste de passer outre la Neretva, c'est-à-

 18   dire traverser la Neretva.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] D'accord. Excusez-moi, Monsieur

 20   Stringer, j'avais promis de poser deux questions. Voici la seconde : il y a

 21   quelques instants vous avez dit que le HVO n'avait pas la possibilité de

 22   tirer sur le pont car depuis Hum ce n'était pas possible. Mais nous avons

 23   vu des séquences vidéos, me semble-t-il, montrant un char, je ne sais pas

 24   pourquoi mais ce char il se trouvait sur un territoire qui était contrôlé

 25   par le HVO et lequel char tirait sur le pont. Est-ce qu'il n'y aurait pas

 26   là une contradiction ? Je vous demande une précision à ce propos.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, j'ai dit justement

 28   l'inverse, à savoir que depuis le mont Hum, on pouvait tirer à l'artillerie


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  1   en direction du vieux pont. Je n'ai pas dit qu'on ne pouvait pas tirer

  2   dessus. J'ai dit qu'on pouvait tirer dessus et que depuis Hum, on pouvait

  3   détruire le vieux pont en une minute à tout moment. J'ai dit que depuis Hum

  4   on n'a pas tiré en direction du vieux pont, pas même quand l'armée

  5   traversait quand on faisait passer des armes, on n'a pas tiré depuis Hum

  6   lorsque les ouvriers avaient essayé de réparer ce pauvre tuyau qui avait

  7   éclaté. J'ai dit qu'on ne pouvait pas, à l'armée d'infanterie, voir le

  8   Vieux pont mais depuis Hum, on pouvait tirer à l'artillerie en direction du

  9   Vieux pont, et je l'ai déjà expliqué. Si j'ai expliqué, j'ai dit que, si

 10   j'avais voulu le faire tomber, je l'aurais fait en une minute.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur Praljak. Il dit ici

 13   : mis à part Hum, bon, effectivement peut-être que ça se trouvait dans le

 14   compte rendu, je ne l'ai pas vu ou vous avez raison sur ce point.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Par rapport à ce que vous venez de dire, nous avons

 16   vu la vidéo où le char tire sur le pont mais comme j'ai une bonne mémoire,

 17   je me souviens qu'il y avait des balles traçantes. Comment vous expliquez

 18   cela alors ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je n'ai pas très bien compris ?

 20   Est-ce que vous voulez parler du moment de l'impact ? Ou parce que quand on

 21   filme la rapidité d'un obus de char avec un film on peut le voir, on peut

 22   même voir cela à l'œil nu. Ceux qui voient bien peuvent le voir cela, mais

 23   ça dépend aussi de la charge de l'obus de char. Est-ce que ça va exploser

 24   au moment du choc ou est-ce que ça va d'abord percer le blindage puis

 25   exploser ensuite, donc on utilise différentes charges pour différents types

 26   d'armes.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, votre avocat pendant les vacances

 28   pourra regarder à nouveau la vidéo et verra que, quand le char tire sur le


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  1   pont, il y a en même temps on voit des balles traçantes qui sont

  2   rectilignes et qui frappent le pont. Alors d'où se trouve le tireur, sinon,

  3   sur Hum.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge. Hum se trouve tout à

  5   fait en haut. Pour ce qui est de la trajectoire suivie par les obus ou

  6   balles, alors il y a des obus qui n'ont pas été tirés depuis des chars, et

  7   moi, j'ai des doutes, donc on n'a pas tiré juste depuis ce char

  8   hypothétique qu'on ne voit pas -- qu'on ne voit pas très bien là-bas, mais

  9   il y a un tiers qui était là-bas qui n'est pas du HVO, et qui a tiré -- qui

 10   a tiré en direction du pont avec une arme qui n'est pas un char. Parce que

 11   la trajectoire qu'on voit depuis la Neretva - si vous le permettez, je

 12   voudrais terminer - du côté nord aussi, il y avait quelque chose qui avait

 13   frappé le pont. Il y a eu un grand éclair et avec des experts, j'ai essayé

 14   de constater d'où était venu cet obus, ce projectile. Dans une émission de

 15   télévision, j'ai publiquement posé la question de savoir et j'ai affirmé

 16   qu'il y a eu des tirs depuis les positions de l'ABiH avec des obus de

 17   diamètre plus petits que celui d'un char mais je n'ai pas pu le prouver

 18   parce que ce n'était pas de Hum. La trajectoire le démontre de façon

 19   claire.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous dites que les balles traçantes que

 21   l'on voie ont été tirées non pas de l'emplacement du char mais d'une zone

 22   sous contrôle de l'ABiH et c'est l'ABiH qui a tiré, pas le HVO. C'est ça

 23   que vous venez de dire ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est avec une grande probabilité -- j'ai posé

 25   la question face au public. Je ne peux pas l'affirmer jusqu'au bout cela

 26   mais c'est donc avec une grande probabilité ou pas mal de certitude que j'y

 27   crois durement.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Enfin ceux qui auront du temps, ils ont qu'à


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  1   faire comme moi, ils ont qu'à regarder à nouveau la vidéo et ils verront

  2   très bien que l'on voit des balles traçantes qui vont frapper le pont.

  3   Voilà. Bien.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Je l'ai dit publiquement à une émission de

  5   télévision et je l'ai montrée, j'ai demandé une réponse et personne ne

  6   s'est pointé pour apporter une bonne réponse pour dire d'où est-ce que cela

  7   venait ? Ça venait du nord aussi parce qu'on a vu une grande boule et c'est

  8   ce que nous montre aussi l'ombre de l'explosion. Voilà.

  9   M. STRINGER : [interprétation]

 10   Q.  Pièce suivante, P 03925. Vous l'avez trouvé dans votre classeur, c'est

 11   aussi une pièce qui a été versée sous pli scellé.

 12   Général, revenons, si vous le voulez bien au point principal, qui était de

 13   savoir si les autorités de Bosnie-Herzégovine se sont plaintes auprès de la

 14   FORPRONU de la situation en matière d'eau à Mostar Est. C'est un rapport du

 15   Bataillon espagnol que nous avons ici, qui porte la date du 3 août 1993. Le

 16   point qui nous intéresse est le premier, numéro 1.2, ce sera la page 4 en

 17   anglais. Alinéa -- ah, voici ce qui est dit dans le rapport du SpaBat.

 18   "Après les sources de Bosnie-Herzégovine les premiers cas de typhoïdes ont

 19   été enregistrés dans la partie musulmane de la ville parce que de l'eau qui

 20   n'avait pas été traité a été bu par -- consommé par des personnes qui

 21   avaient pris directement l'eau dans la Neretva."

 22   Dans ce rapport du SpaBat, on a des griefs à propos de la situation en

 23   matière d'eau et griefs présentés à la FORPRONU, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je n'ai pas retrouvé cela. Pouvez-vous me redire la page, je vous prie.

 25   Q.  Regardez section 1, zone d'influence. Vous avez 1.1, ça ce sont les

 26   différents itinéraires ou routes. Vous voyez ce point 1.1 ? C'est à propos

 27   des routes.

 28   R.  Oui, oui. Rien.


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  1   Q.  Continuez, vous arrivez au point 1.2 qui concerne les zones. En dessous

  2   référence est faite à Mostar et au pilonnage. Suite alors, ce qui est dit

  3   comme rapport, et là, vous avez un premier paragraphe.

  4   "D'après les sources de Bosnie-Herzégovine en ville on a constater le

  5   premier cas de typhoïdes parce que des gens ont bu -- pris de l'eau

  6   directement dans la rivière Neretva et l'ont consommé sans que l'eau ait

  7   été traité."

  8   R.  Oui, oui.

  9   Q.  Une fois plus, en dépit, de ce que vous avez dit le 4 mai 2009, en

 10   réalité les autorités de Bosnie-Herzégovine de Mostar Est ont fait rapport

 11   de la situation à la FORPRONU pendant toute cette période qui est

 12   consécutive au 30 juin; êtes-vous d'accord pour dire qu'on a fait part de

 13   ce problème de façon répétée à la FORPRONU ?

 14   R.  Ici la FORPRONU, Monsieur le Procureur, ne fait que transmettre ce que

 15   les sourdes de Bosnie-Herzégovine dans la ville lui ont dit. Rien de plus.

 16   Ce n'est pas un rapport confirmé par la FORPRONU. Ils disent l'ABiH nous a

 17   dit telle chose. Moi, je n'y prête aucune espèce d'attention. Si vous le

 18   voulez, je vais vous montrer toutes les autres --

 19   Q.  Excusez-moi, Général, je ne vous demande pas votre avis. Je vous

 20   demande ce que vous avez déclaré ici sous serment lorsque vous avez dit que

 21   ces autorités n'avaient pas contacté la FORPRONU sur le problème de l'eau.

 22   Je vous lis ce que vous avez déclaré sous serment le 4 mai 2009. En fait,

 23   ce que vous avez déclaré n'est pas vrai. Ces gens se sont bien plaints, ils

 24   ont bien présenté le problème de l'eau à la FORPRONU, n'est-ce pas ?

 25   Etes-vous d'accord sur ce point ? Est-ce que vous ne vous êtes pas trompé

 26   ce 4 mai 2009 ? N'aviez-vous pas tort de dire cela ?

 27   R.  Non, c'est constamment que vous voulez essayer d'omettre une partie de

 28   mon intervention et faire de moi une espèce d'individu à un quotient


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  1   d'intellectuel trop petit pour savoir ce qu'ils ont dit à la FORPRONU. Moi,

  2   ce que j'ai dit c'est qu'eux n'ont pas dit à la FORPRONU l'information qui

  3   m'ait parvenu à moi. Je ne suis pas si bête pour pouvoir dire, par exemple,

  4   ce que vous avez affirmé à votre collaboratrice, mais moi, j'ai établi un

  5   rapprochement. J'ai dit que la FORPRONU n'a pas dit au HVO le problème en

  6   indiquant, par exemple, quel a été le problème au niveau des blessés, et le

  7   problème des blessés a été résolu. Donc ne me faites -- enfin ne vous sous-

  8   estimez pas, ne pensez pas que je suis bête à ce point-là et que j'aurais

  9   menti de la sorte.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Peut-être si vous le permettez, je voudrais

 11   intervenir.

 12   Il y a un malentendu au niveau des dates ou alors j'ai mal entendu mon

 13   confrère. Le rapport dont nous sommes en train de parler maintenant, le 3D

 14   25 de la FORPRONU, est rédigé le 3 août 1993. Donc c'est après le 30 juin

 15   1993. Merci.

 16   M. STRINGER : [interprétation]

 17   Q.  J'aimerais relire ce qu'a déclaré le général le 4 mai. Je le cite :

 18   "Après l'attaque lancée par l'ABiH et la trahison des membres musulmans du

 19   HVO, le 30 juin 1993, pourquoi est-ce que les autorités de Mostar Est n'ont

 20   pas contacté la FORPRONU pour lui faire part du problème que posait l'eau

 21   ?" Ce sont les dires du général.

 22   Ici, nous parlons précisément de cette période qui a suivi le 30

 23   juin. Essayons de nous y prendre autrement. Vous avez dit que ces autorités

 24   n'avaient pas soumis le problème de l'eau à la FORPRONU. Mais êtes-vous

 25   d'accord pour dire que ce n'est pas vrai que ce problème de l'eau a bien

 26   été soumis à la FORPRONU après le 30 juin ?

 27   R.  Non, je ne serais pas d'accord non plus là. Parce que ma phrase dit

 28   justement, moi, je suis quelqu'un qui a fait de la logique, ne faites pas


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  1   de moi quelqu'un -- non, non. Ma phrase, si elle a été bien traduite depuis

  2   le croate n'ont pas parlé auprès de la FORPRONU un problème qui m'aurait

  3   été transmis implicitement par la FORPRONU à moi. Il n'y a aucune

  4   possibilité, Monsieur, que de faire en sorte d'obtenir de ma part partant

  5   d'une phrase incomplète ou de quelque chose d'implicite qui ferait de moi

  6   un menteur. Ça ne passera pas. Je n'ai pas menti. Je ne mens pas et je ne

  7   suis pas en collision avec ce que j'ai déjà dit. Mais bon.

  8   Q.  D'accord.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous êtes d'accord pour reconnaître que

 10   la FORPRONU a été informée avant le 3 août, qu'il y avait, d'après eux,

 11   parce qu'ils ont peut-être menti, eux, mais on ne sait pas, que d'après

 12   eux, il y avait des cas de typhoïdes qui sont la conséquence que des

 13   personnes vont se ravitailler dans la rivière la Neretva avec de l'eau non

 14   traitée, et c'est ça qui a entraîné le typhoïdes.

 15   Est-ce que vous êtes d'accord que ce document le dit ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Si la FORPRONU avait dit on est à l'hôpital et

 17   il y avait notre médecin et il y a eu de la fièvre typhoïde, et cetera,

 18   mais ça c'est de la propagande de guerre tout à fait ordinaire de la part

 19   d'une équipe très menteuse ou portée sur le mensonge qui s'appelait l'ABiH.

 20   C'est des menteurs. C'est de la propagande parce que, pour autant que je le

 21   sache, et ça, s'il y a eu de la fièvre typhoïde, il y avait aussi des notes

 22   médicales au niveau de cette fièvre typhoïde et on aurait pu peut-être

 23   amener des notes ou des rapports de médecin pour dire qu'ii y a eu de la

 24   fièvre typhoïde dans Mostar Est.

 25   M. STRINGER : [interprétation]

 26   Q.  Général, nous allons bientôt passer au document suivant, mais

 27   j'aimerais revenir à ce sujet que nous allons aborder de façon plus

 28   approfondie après lorsque nous parlerons de Mostar Est. Mais vu vos dires


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  1   d'aujourd'hui, tout du moins, vous affirmez que l'ABiH, l'armija avait les

  2   capacités nécessaires pour rétablir l'approvisionnement en eau à Mostar Est

  3   s'il avait voulu le faire, mais que pour une raison quelconque elle n'a pas

  4   voulu le faire. C'est bien ce que vous avez affirmé ?

  5   R.  L'ABiH, et je vous le répète, avait exercé son contrôle, suite au 30

  6   juin, à l'égard d'une grande source d'eau, l'une des deux sources majeures

  7   approvisionnant la ville de Mostar en eau. Donc il y avait un contrôle

  8   ininterrompu à l'égard du territoire qui se trouvait là et il y avait la

  9   conduite d'eau juste qu'à la Neretva. Il s'agissait donc de traverser la

 10   rivière Neretva avec une tuyauterie. Alors tout l'argent qui était versé en

 11   quantité énorme par ces institutions musulmanes étrangères a été dépensé à

 12   ces fins. Il n'appartient pas à moi d'émettre des hypothèses à ce sujet.

 13   Mais pour autant que je sache, ils avaient suffisamment d'argent et je sais

 14   absolument qu'ils avaient sous leur contrôle la source et la possibilité

 15   d'acheminer l'eau. Pourquoi ils ne l'ont pas fait, il n'appartient pas à

 16   moi de me perdre en conjecture à ce sujet.

 17   Q.  Est-ce que vous niez qu'en fait la situation en matière d'eau à Mostar

 18   Est, la situation humanitaire de façon générale qui prévalait à Mostar Est,

 19   après le 30 juin 1993, est-ce que vous niez que cette situation disons-le

 20   carrément désastreuse pour la population de Mostar Est ? Est-ce que vous

 21   êtes d'accord sur ce point ou pas ?

 22   R.  Alors je le nie à part entière pour ce qui est de cette situation

 23   catastrophique. Regardez les vues prises par caméra, par des observateurs

 24   internationaux. Ils n'ont jamais été dans une situation catastrophique. Ils

 25   ne sont jamais restés sans vivre. Ce n'est pas une catastrophe. A vous, de

 26   vous pencher sur les clips vidéo tournés par -- je suis d'accord pour dire

 27   que la situation était catastrophique dans son ensemble.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Dans ce cas, nous allons examiner quelques


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  1   images.

  2   Nous avons un bref extrait, Monsieur le Président, d'une vidéo P 06365, que

  3   nous avons déjà versé au dossier. C'est avec le système Sanction, l'extrait

  4   sera très bref, quelques secondes à peine, et puis, j'aurais quelques

  5   questions pour le général.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   M. KOVACIC : [interprétation] Quelle est la date ?

  8   M. STRINGER : [interprétation] C'est une pièce versée au dossier. C'était

  9   un documentaire de la BBC qui s'appelait : "Une besogne qui n'est pas

 10   terminée." Vous avez août et septembre 1993.

 11   M. KOVACIC : [aucune interprétation] --

 12   M. STRINGER : [interprétation]

 13   Q.  Ecoutez, Monsieur le Général, je n'ai pas encore posé de question. Si

 14   vous voulez revoir ces images, nous pourrons vous les montrer, je vous le

 15   promets.

 16   Mais tout d'abord, j'aimerais voir le document suivant, P 04440, 4440.

 17   C'est un autre document versé sous pli scellé, me semble-t-il, Monsieur le

 18   Président, rapport de la MOCE.

 19   [aucune interprétation] 

 20   R.  Vous ne m'avez pas donné lecture, enfin, moi, je n'ai pas vu le

 21   document, on ne me l'a pas montré encore.

 22   Q.  Je répète le numéro, 4440, rapport du 23 août 1993, de la MOCE, 4440.

 23   R.  4440, le voilà.

 24   Q.  Rapport de la MOCE.

 25   R.  Quelle est la question au sujet du document que vous m'avez montré tout

 26   à l'heure, enfin je ne sais pas, dans quelle direction coule la Neretva. Je

 27   ne sais pas si elle a été touchée à la rive droit ou la rive gauche,

 28   puisque la Neretva roule, s'écoule vers le bas. Donc ça exclut le HVO parce


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  1   qu'il était sur la rive opposée. Donc je crois qu'il faudrait se comporter

  2   avec toute l'attention et le respect qui est dû à ces personnes qui sont

  3   faites tuer comme cela.

  4   Q.  Deuxième paragraphe du document que vous avez sous les yeux, il

  5   concerne une réunion avec le Haut commissariat aux Réfugiés des Nations

  6   Unies, et le rapport de la MOCE dit que d'après l'auteur, les tireurs

  7   embusqués du HVO --

  8   R.  Je ne reçois pas la traduction.

  9   Q.  Je vais recommencer. Vous m'entendez maintenant ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Paragraphe 2 du rapport, à propos de la situation dans Mostar. Les

 12   tireurs embusqués du HVO empêchaient même la population de prendre de l'eau

 13   des la rivière Neretva, et on exhorte toutes les organisations

 14   internationales à faire pression pour qu'ils puissent y avoir accès d'un

 15   convoi humanitaire sur la rive est.

 16   Prenons ceci et prenons ces images. Etes-vous d'accord pour dire que

 17   la situation en matière d'eau à Mostar Est était tellement déplorable que

 18   les gens risquaient leur vie pour aller chercher de l'eau dans la rivière

 19   et pour y laver leur linge ?

 20   R.  Alors s'agissant d'un document du type de celui que vous avez

 21   montré, moi, je ne sais rien d'autre tirer comme conclusion, rien d'autre

 22   que le fait que quelqu'un s'est tué. Cette femme qui est sur une rive, il

 23   me semble que la rive droite, compte tenu de la façon l'eau s'écoule, parce

 24   que ça exclut toute possibilité et je crois que vous avez vu, les Juges ont

 25   vu les pentes abruptes pour ce qui est des rives de la rivière. Donc dans

 26   90 % des endroits, on peut descendre jusqu'à la Neretva sans être vu,

 27   exception faite de la première rangée de maisons le long de la rivière

 28   sinon d'autre part, on ne sait pas, on ne peut pas vous voir.


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  1   Donc je répète, j'exclus toute possibilité qu'il y ait eu un sniper

  2   du HVO, exception faite de quelques endroit isolée, mais à 90 % des

  3   endroits sur la Neretva, quand vous allez prendre de l'eau on ne peut pas

  4   vous tirer dessus si ce n'est depuis les positions tenues par l'ABiH.

  5   Alors pour ce qui est maintenant des convois humanitaires --

  6   Q.  Non, moi, je parlais de l'eau, ici, je veux me concentrer sur la

  7   question de l'eau et sur ce que vous avez dit au début de témoignage. Vous

  8   avez répondu, je passe maintenant au sujet suivant.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous qui connaissez Mostar, les

 10   Juges nous connaissons un peu puisqu'on y est allé, mais nous ne

 11   connaissions pas les conditions antérieures à 1993. Est-il une tradition à

 12   Mostar que des femmes aillent laver leur linge dans la Neretva ? Est-ce que

 13   ça se fait, ça se faisait habituellement ou bien comme le dit le Procureur,

 14   cette dame ne pouvait laver son linge chez elle et comme vous l'avez vu

 15   dans la vidéo, elle était là pour laver son linge, puisqu'on voit le linge

 16   sur un rocher. Donc elle devait tremper son linge dans la rivière quand

 17   elle a été touchée par une balle.

 18   Les images sont effroyables puisqu'on voit cette dame étendue, raide morte,

 19   tirée par un tir.

 20   Alors, moi, ce que je veux savoir, est-ce qu'il arrivait que des dames

 21   aillent laver leur linge dans la rivière, comme ça se fait un peu dans tous

 22   les pays du monde, ou bien, là, elle est allée laver son linge parce

 23   qu'elle n'avait pas d'eau chez elle ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors je ne sais pas vous  répondre pour ce

 25   qui est de cette femme. Mais je sais que, moi, à Mostar, avant que je

 26   n'aille faire mes études à la faculté, on allait essorer le linge dans la

 27   Neretva, notamment le linge de maison, c'est-à-dire les draps, enfin ce qui

 28   était lourd. Alors je ne sais pas dans quelle mesure on a fait la même


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  1   chose plus tard, ça je ne peux pas vous le dire avec certitude, mais je

  2   dirais aussi que tous civils tués pendant la guerre - et on en a vu des

  3   centaines ou des milliers - c'est terrifiant, quand on voit cela on est

  4   horrifié. Malheureusement, c'est allé jusqu'à l'infini. Ce qui est

  5   intéressant ici, c'est que je n'en suis pas sûr mais j'aimerais qu'on me

  6   remontre la vidéo, il me semble qu'elle était sur la rive droite.

  7   Si vous vous en souvenez de la Neretva, Monsieur le Juge, il y a des rives

  8   verticales. Quand on se trouve tout en bas - et là, on est à 45 degrés

  9   d'angle par rapport à là-haut - donc 90 % de -- ou même plus de 90 % des

 10   sites où on peut descendre jusqu'à la Neretva, on ne peut pas être touché à

 11   moins de tirer à partir de maisons qui sont juste à côté de la rive ou sur

 12   la rive. Ça vous pouvez le vérifier, et vous pouvez me dire : Praljak, tu

 13   n'es qu'un menteur. Ceux qui sont là-bas -- la Neretva, elle est là-bas,

 14   les maisons qui étaient là-bas sont toujours là-bas, et moi, je suis allé

 15   me baigner dans la Neretva. Je descendais par la rue Santiceva, là où

 16   j'habitais, je le sais fort bien cela.

 17   M. STRINGER : [interprétation] Je crois qu'il est l'heure de faire la

 18   pause. Je ne sais pas si vous souhaitez faire la pause maintenant, Monsieur

 19   le Président.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison. J'avais complètement oublié cette

 21   pause.

 22   Nous allons faire 20 minutes de pause.

 23   --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.

 24   --- L'audience est reprise à 16 heures 10.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, vous avez la parole.

 26   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   Q.  Général, je vais passer au point suivant eu égard à cette série de

 28   documents. Vous vous souviendrez de votre déposition du 13 mai pendant


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  1   l'interrogatoire principal. On vous a posé cette question. En réalité c'est

  2   M. le Juge Antonetti qui vous a posé la question.

  3   Le Juge Antonetti vous a posé cette question-ci. Ceci se trouve à la page

  4   40 014 du compte rendu d'audience. Il vous a posé cette question-ci :

  5   "A l'époque lorsque vous étiez le commandant de l'état-major principal du

  6   HVO, à savoir entre le 24 juillet et le 8 novembre 1993, si au cours de

  7   cette période" - comme l'a dit le Juge Antonetti - "et étant donné que vous

  8   étiez responsable des activités militaires en tant que commandant du HVO,

  9   je souhaite savoir, d'après vous, à l'époque en ce qui concernait votre

 10   commandant et peut-être d'après les instructions que vous receviez de M.

 11   Boban."

 12   Je continue un peu plus bas :

 13   "Est-ce que vous estimez à l'époque que la République de Croatie a

 14   joué un rôle au niveau des opérations militaires que vous avez dirigées ?"

 15   Vous avez répondu, Général, en disant comme suit :

 16   "Jamais, Monsieur le Président. Boban ne m'a rien dit à aucun

 17   moment."

 18   La partie qui m'intéresse c'est ceci :

 19   "A l'époque où j'étais commandant, je crois que j'ai rencontré M.

 20   Boban brièvement à deux occasions."

 21   Je vais maintenant passer deux lignes plus loin :

 22   "A cette époque-là, je n'ai jamais vu, je ne me suis jamais entretenu

 23   avec, je n'ai jamais rencontré M. Franjo Tudjman et je crois que j'ai vu

 24   Gojko Susak une seule fois, me semble-t-il."

 25   Ensuite deux lignes plus loin :

 26   "J'ai vu Gojko à cette occasion-là, parce qu'il avait rendu visite à

 27   sa mère qui habitait près de Siroki Brijeg. Nous nous sommes rencontrés

 28   très brièvement et j'ai dit que nous avions pu remettre les lignes en


Page 42943

  1   place. Il n'a jamais exercé aucune influence, n'a jamais rien dit."

  2   Un peu plus loin, ligne 23, page 40 025, vous avez redit ceci :

  3   "Je n'ai jamais parlé à Franjo Tudjman et je crois que je n'ai

  4   rencontré et parlé à Gojko Susak ce jour-là seulement lorsqu'il est venu

  5   rendre visite à sa mère."

  6   La pièce suivante, Général, dans nos documents. Il s'agit d'un compte

  7   rendu présidentiel qui est la pièce P 05080. Il s'agit d'une réunion avec

  8   le président Tudjman, Mate Boban et d'autres personnes, y compris vous-

  9   même. Le 15 septembre 1998 -- le 15 septembre 1993, je souhaite vous poser

 10   cette question : Général, étiez-vous le commandant de l'état-major

 11   principal du HVO ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Je peux vous demander de vous reporter à la page 80 -- 18 du

 14   compte rendu et votre nom y figure. En réalité -- pardonnez-moi, oui, c'est

 15   bien la page 18. Le président Tudjman vous demande de prendre la parole.

 16   Est-ce que vous y êtes ? Page 18.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Ensuite comme l'indique le haut de la page, le président Boban était

 19   également -- Mate Boban était également présent à cette réunion et vous

 20   constaterez qu'à la page 18, Gojko Susak a également assisté à cette

 21   réunion. Pardonnez-moi, ce n'est pas la page 18. C'est à la page 16. Vous

 22   constaterez que Gojko Susak a assisté à cette réunion et qu'il prend la

 23   parole également mention est faite de Mate Boban, et donc lorsque vous avez

 24   témoigné sous serment le 13 mai, vous avez dit n'avoir ni vu ni parlé à --

 25   ni rencontré Franjo Tudjman à l'époque où vous commandiez l'état-major

 26   principal du HVO. Ceci n'est pas exact puisqu'en tout cas à cette occasion-

 27   là le 15 septembre vous l'avez rencontré dans son bureau.

 28   R.  C'est exact.


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  1   Q.  Le point suivant, Général, porte sur votre déposition du 19 mai. On

  2   vous a posé la question suivante : vous parliez de la réunion qui a eu lieu

  3   entre le président Tudjman et le président Milosevic en avril 1992 à

  4   Karadjordjevo. A la page - pardonnez-moi - 40 328 du compte rendu

  5   d'audience, vous avez dit, dans votre témoignage, que le récit. Je suis en

  6   train de vous relire vos propres propos pendant l'interrogatoire principal

  7   : l'histoire à propos de la division de la Bosnie-Herzégovine est quelque

  8   chose qui est apparue en 1993 seulement.

  9   Je poursuis, je parle toujours de la réunion de Karadjordjevo.

 10   "J'affirme, compte tenu de tout ce que je sais et compte tenu des faits

 11   dont j'ai connaissance, que la réunion n'était pas une réunion secrète et

 12   qu'aucun participant affirmera que ceci portait sur la division de la

 13   Bosnie-Herzégovine. Ce mensonge politique n'a fait surface qu'en 1993 afin

 14   d'exercer de la pression -- des pressions sur la Croatie et pour cette

 15   raison-là seulement."

 16   Ensuite à la page 40 332 de votre témoignage, vous dites :

 17   "Ce récit-là - et c'est ce que j'ai vécu et c'est sur quoi je témoigne - ce

 18   récit-là n'a vu le jour en 1993, seulement deux ans après la réunion et je

 19   sais que ce récit est sorti de nulle part en raison des confrontations

 20   politiques parce que les confrontations politiques avaient commencé."

 21   Vous souvenez-vous de votre témoignage lorsque vous avez dit ceci,

 22   Général, lorsque vous avez dit que ce récit ou cette histoire à propos de

 23   la division de la Bosnie-Herzégovine qui aurait été évoquée à

 24   Karadjordjevo, ceci n'a fait surface cette idée-là qu'en 1993 ?

 25   R.  Oui, je m'en souviens et j'ai bien précisé en me fondant sur tous les

 26   éléments dont j'en dispose, à savoir ce dont je disposais à partir de

 27   toutes les réunions auxquelles j'ai été présent et c'est bien ce qui a été

 28   le cas. A aucun moment jusqu'en 1993 ou au moment où cette histoire, cette


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  1   version est apparue, on avait entendu dire cela jusqu'au moment où ça a

  2   commencé à se répandre.

  3   Q.  Je vois que vous vous êtes reporté à ce qui me semble être la pièce

  4   suivante qui est la pièce P 10968. Est-ce que vous y êtes à cette pièce P

  5   10968 ?

  6   R.  Oui.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, passez à la pièce suivante. Ce qui est très

  8   embêtant c'est que le Procureur va dans un sens et on voit des documents

  9   qui sont excessivement importants et dont il est difficile parfois de

 10   suivre le Procureur à 100 % parce qu'on se demande : mais est-ce qu'il va

 11   revenir sur le document ? Alors, moi, je suis pris entre deux feux : d'un

 12   côté, je tiens à ce que le Procureur développe sa thèse mais, d'un autre

 13   côté, j'ai aussi la manifestation de la vérité. Dans le document qu'on

 14   vient de voir où manifestement en lisant ce que dit Tudjman et vous-même,

 15   j'ai la nette conviction que parfois vous n'êtes pas d'accord avec Tudjman.

 16   Il demande votre avis, vous répondez, et on semble voir un léger déphasage

 17   entre vous et Tudjman. C'est très net à la page 19 où le président Tudjman

 18   vous dit, et c'est important sur la question de l'entreprise criminelle

 19   commune si elle a eu lieu et à quel moment elle commence et à quel moment

 20   elle termine. Parce que là, Tudjman dit et vous êtes entre vous, il n'y a

 21   pas d'internationaux, il n'y a personne. Il y a Tudjman, Boban, vous et

 22   d'autres, mais vous êtes en petit comité et il dit ceci :

 23   "Mais le combat contre les Musulmans doit stopper, donc sa position

 24   est claire. Il ne doit plus y avoir d'opérations contre les Musulmans."

 25   Puis vous vous intervenez à nouveau. Alors est-ce que vous souvenez

 26   que, ce jour-là, nous sommes au mois de septembre, le 15 septembre

 27   exactement, Tudjman dit en petit comité à Boban et à vous : "Le combat

 28   contre les Musulmans terminé." Est-ce que vous vous souvenez de cela ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le confirme. J'ai été présent à cette

  2   réunion et je confirme avoir dit cela. Je confirme également que, dans ma

  3   déposition, j'ai oublié la tenue de cette réunion mais j'assume ce qui est

  4   ici et je ne pense pas qu'il y ait eu de désaccord entre nous bien que,

  5   bien sûr, je n'aie pas toujours été d'accord ni avec Susak, ni avec Boban

  6   ni avec Franjo Tudjman. Je n'étais pas systématiquement d'accord tout

  7   simplement parce que j'avais ma propre opinion fondée sur des faits et il

  8   était nécessaire de l'énoncer à chaque réunion et c'est ce que je fais ici.

  9   Cependant, les combats s'arrêteront, Monsieur le Président, lorsque les

 10   Musulmans arrêteront de lancer des offensives, et je le répète encore une

 11   fois, je n'ai signé aucun ordre demandant de se lancer dans une offensive

 12   si ce n'est pour reprendre Rastani que nous avions perdu et telle ou telle

 13   colline que nous avions également perdues. Donc il faut lire le texte dans

 14   son intégralité. Il s'agit ici d'un accord qui a été signé dans un contexte

 15   qui a été si clairement exposé dans son ensemble, et moi, je parle de cette

 16   situation dans laquelle nous nous trouvons, situation qui est très claire.

 17   La phrase de Franjo Tudjman est au conditionnel :

 18   "Il faudrait que les combats avec les Musulmans s'arrêtent."

 19   C'est l'expression d'une volonté, d'un souhait mais, moi, je dis :

 20   "Ces combats s'arrêteront dans telle et telle condition."

 21   Je dis très simplement que leur offensive s'était essoufflée. Je dis

 22   la façon dont nous approvisionnons Vitez et d'autres localités, Zepce, et

 23   cetera. Je dis que les Musulmans veulent percer jusqu'à Neum et tout ce que

 24   j'ai énoncé alors ce sont les faits.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une personne que je ne sais pas qui c'est,

 26   Ivan Milas, c'est qui ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Ivan Milas est juriste de profession. Il a

 28   longtemps été un émigré qui vivait et travaillait en Autriche, il occupait


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  1   un poste au sein du HDZ, et j'ignore exactement de quel poste il s'agissait

  2   mais, en tout état de cause, il était haut placé au sein du HDZ et il était

  3   littéralement le garde du sceau de l'Etat. C'était la dénomination

  4   littérale de sa fonction au parlement également.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, excusez-moi de vous avoir

  6   interrompu, mais je voulais éclaircir la position de Tudjman par rapport au

  7   combat.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais Tudjman dit aussi un peu plus tôt que

 10   dans, cet accord et pour ce qui est de s'adresser à l'opinion publique, il

 11   faut dire que les Musulmans nous ont attaqué, il faut dire combien de

 12   personnes ils ont expulsées, chassées et cela, je peux vous le montrer,

 13   j'ai des documents.

 14   M. STRINGER : [interprétation]

 15   Q.  Bien, Général, moi, je suis maintenant passé au sujet suivant, qui

 16   porte sur votre témoignage à propos de Karadjordjevo et votre affirmation

 17   en faisant des rapports sur le plan lequel il consistait à diviser la

 18   Bosnie-Herzégovine et que ceci ne soit apparu que deux ans plus tard. Je

 19   vous ai ensuite demandé de regarder la pièce P 0 - P 10968 qui est un

 20   article qui est écrit par quelqu'un qui répond au nom de Mohamed Filipovic;

 21   est-ce que vous avez cet article sous les yeux ?

 22   R.  Je le vois.

 23   Q.  Simplement pour rappeler aux Juges de la Chambre, il s'agit du même

 24   Mohamed Filipovic, dont vous avez présenté l'ouvrage aux Juges de la

 25   Chambre pendant une partie de votre interrogatoire principal; vous en

 26   souvenez-vous ?

 27   R.  Exact.

 28   Q.  Ceci est la pièce 3D 03554, et le 18 mai 2009, en réalité, vous avez


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  1   dit aux Juges de la Chambre que M. Filipovic était un partisan, une partie

  2   des parties à la guerre en 1943. Vous avez ensuite commencé à parler de

  3   lui, vous avez dit que c'était un étudiant en philosophie. Il a obtenu sa

  4   thèse de doctorat, c'était un membre de la faculté de philosophie à

  5   Sarajevo. Il a écrit dix à 11 ouvrages, c'était un membre de l'Académie de

  6   Bosnie-Herzégovine, et ce sont vos propres termes. Le 18 mai, c'est un

  7   intellectuel de haut volt parmi la communauté intellectuelle, un homme très

  8   important pour le peuple musulman en Bosnie-Herzégovine. Donc ça, c'est

  9   Mohamed Filipovic.

 10   Je regarde le premier paragraphe de cet article maintenant, qu'il a publié

 11   le 10 juin 1991, c'est sans doute six semaines environ après la réunion de

 12   Karadjordjevo, où il dit ceci, récemment des rapports nous arrivent de

 13   différentes sources et de différentes parties indiquant qu'un accord aux

 14   fins de partager la Bosnie-Herzégovine se prépare entre la Serbie et la

 15   Croatie. Les premiers rapports ont commencé à être distribués après la

 16   réunion entre Tudjman et Milosevic, qui s'est auréolée de secret, tout

 17   d'abord à Karadjordjevo et ensuite à proximité de Siljeg. A l'époque, on a

 18   indiqué qu'il s'agissait de tenir compte du conflit entre la Serbie et la

 19   Croatie, de la participation de la Bosnie-Herzégovine qui ressemblait à ce

 20   qui avait été fait en 1938 et 1939, par Cvetkovic-Macek, cet accord qui

 21   visait à résoudre le conflit serbo-croate.

 22   Je vais poursuivre et regarder l'article toujours du Pr Filipovic. Je

 23   regarde la deuxième page, maintenant au milieu de la page, dans la version

 24   anglaise, à la page 2, et Tudjman a indiqué dans une conférence de presse,

 25   mais ce de façon détournée, que des travaux avaient été lancés sur une

 26   partition de la Bosnie-Herzégovine. Il a fait porter ceci et l'idée ainsi

 27   que le mobile qui l'animait aux politiques de Milosevic et la politique

 28   serbe en général. Donc il poursuit en disant, nous avons la citation que


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  1   tout un chacun peut lire. Ensuite un paragraphe plus loin, ce que Filipovic

  2   dit, c'est ceci :

  3   "Tout ceci a été fait sans nous, contre nous et contre les intérêts de la

  4   majorité de la population de Bosnie-Herzégovine. Comme des propriétaires de

  5   notre destin, de notre pays, bien sûr, ceci ne tient pas compte de nos

  6   desiderata. Nous, Musulmans et Bosniens, nous n'avons pas succombé au virus

  7   de la partition ni à la corruption de nos corps. Nous allons y résister

  8   âprement et il n'existe aucune méthode pour réaliser ceci sans avoir

  9   recours à la violence. Ceci doit être évité car; sinon, on ripostera en

 10   nature.

 11   Général, la première question que j'ai à vous poser, c'est celle-ci.

 12   Lorsque vous avez témoigné le 19  mai, lorsque vous avez affirmé qu'il

 13   existait aucun rapport sur la partition de la Bosnie-Herzégovine, avant

 14   1933, ceci n'était pas exact, n'est-ce pas ? Ceci n'était pas vrai, en

 15   réalité cet homme très respecté que vous avez présenté aux Juges de la

 16   Chambre pendant votre interrogatoire principal, cet homme très respecté

 17   donc en réalité a fait un rapport sur la question de la division qui a été

 18   évoquée à Karadjordjevo. Il l'a fait six semaines seulement après la

 19   réunion de Karadjordjevo; ceci est vrai, n'est-ce pas ?

 20   R.  Si la date est exact, ce que nous avons ici dans le journal est exact,

 21   mais, moi, je n'ai pas dit que M. Filipovic n'avait pas écrit telle ou

 22   telle chose dans -- mais j'ai dit qu'à ma connaissance, cela ne s'est pas

 23   vraiment présenté avant 1993. J'ai dit très précisément qu'avec les

 24   éléments dont je disposais la pression exercée sur la Croatie de cette

 25   façon, apparaît véritablement et de façon intense en 1993. Pour ce qui est

 26   de ce texte, si l'on examine en détail, il s'agit de propos rapporté quasi

 27   exclusivement. On a entendu dire, on aurait relaté telle ou telle chose.

 28   Une deuxième chose, c'est qu'à l'époque, rien n'était fait en secret,


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  1   qu'il s'agit de le démontrer. Toutes les réunions des présidents des

  2   républiques ou de la République de Bosnie-Herzégovine, rien de tout cela

  3   n'était fait en secret. C'était fait avec l'accord de la communauté

  4   internationale et c'était fait publiquement. C'était une proposition qui

  5   émanait d'Alija Izetbegovic et de Kiro Gligorov, le président de la

  6   Macédoine, dont il s'agit ici.

  7   Q.  Pardonnez-moi, je souhaite que vous reveniez à ce que vous aviez

  8   dit sous serment, le 19 mai; les récits à propos de la division de la

  9   Bosnie-Herzégovine nous n'ont fait surface qu'en 1993. Je continue à lire

 10   des extraits de votre déposition, vous poursuivez ceci se trouve à la page

 11   44 028 du compte rendu d'audience, 44 328 du compte rendu d'audience, vous

 12   avez dit :

 13   "Hier, j'ai vu MM. les Juges, au moment même où cette réunion

 14   tristement célèbre avait lieu, Filipovic s'était entretenu avec Tudjman, et

 15   Tudjman proposait des choses pour la Bosnie-Herzégovine, qui était tout à

 16   fait différente. Ceci s'est passé en même temps."

 17   Donc, Général, compte tenu de ce que vous nous avez dit pendant

 18   l'interrogatoire principal, Filipovic, en réalité discutait directement

 19   avec Tudjman sur ce sujet ? Conviendrez-vous avec moi donc en réalité, il

 20   était en bien meilleure position que vous, il pouvait donc donner son avis

 21   sur la question de la division de la Bosnie-Herzégovine, ceci était à

 22   l'ordre du jour à Karadjordjevo.

 23   R.  Bien sûr que non. Il a été présent à une réunion auprès de Franjo

 24   Tudjman. Il l'a relaté exactement dans son ouvrage. Il a décrit ce qu'on

 25   lui avait proposé. Il était en opposition radicale avec le projet politique

 26   de Alija Izetbegovic et il est tout à fait sûr qu'à cette époque, moi-même,

 27   au sein du conseil pour la sécurité nationale dont je faisais partie,

 28   j'avais des informations meilleures que celles dont disposait Filipovic. Ce


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  1   dernier ici, se livre à de pures spéculations. Là, il n'y a pas de fumée

  2   sans feu. On répand des rumeurs, alors c'est un intellectuel pour les

  3   Musulmans; moi, je ne lui accorderais pas autant d'importance que cela,

  4   bien que j'aie de l'estime pour lui.

  5   Q.  Est-ce que, pour le moins, vous pourriez être d'accord avec moi en ce

  6   qui concerne ceci. L'histoire de la division de la Bosnie-Herzégovine, elle

  7   n'est apparue qu'en 1993. Conviendrez-vous avec moi, Monsieur, que lorsque

  8   vous avez dit cela, ceci est erroné ? En réalité, cette histoire a commencé

  9   à voir le jour très rapidement après la réunion de Karadjordjevo en 1991 ?

 10   R.  Je parle de ce que je savais et de la façon dont cette histoire est

 11   apparue. Au cours des réunions, où parmi les personnes avec qui j'avais

 12   l'occasion de communiquer en Croatie à cette époque, ce texte de Filipovic

 13   dans le journal, Vjesnik, pour moi, à cet égard, n'est pas pertinent. Le

 14   texte est exact, mais la véritable histoire est apparue en 1993, avec les

 15   pressions exercées contre la Croatie afin que cette dernière cède. J'en

 16   reste à mon point de vue et je peux souscrire à votre interprétation

 17   d'aucune façon que ce soit.

 18   Q.  Je vais maintenant vous demander de vous reporter au dernier extrait de

 19   cet article de Filipovic, où il dit ceci :

 20   "A propos de la partition, il n'existe aucune méthode pour réaliser

 21   ceci sans violence."

 22   Général, conviendrez-vous avec moi que ces propos ressemblaient à une

 23   prophétie, si quelqu'un peu considérer qu'une division de la Bosnie-

 24   Herzégovine, quelqu'un qui pensait que la création de territoires

 25   départagés sur un plan ethnique devait savoir qu'il y aurait recours à la

 26   violence si un tel plan était adopté ?

 27   R.  Je ne comprends pas votre question ni à quoi elle se rapporte. Elle me

 28   semble être de nature spéculative et je pourrais vous en parler pendant une


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  1   heure, si cela vous intéresse. Mais pour ce qui est de répondre à une

  2   question aussi complexe en un seul mot, c'est quelque chose que je ne puis

  3   que rejeter. Ce n'est pas quelque chose que vous pouvez obtenir de moi. Si

  4   vous voulez que je confirme ici certaines de vos thèses, qui ne sont que

  5   des spéculations. Par ailleurs, c'est bien Filipovic qui a élaboré un

  6   accord historique et avec les Serbes au nom d'Alija Izetbegovic, avec les

  7   Serbes et non avec les Croates. Si vous voulez la vérité -- de l'interroger

  8   sur la vérité, si vous voulez jouer avec moi pour obtenir quelque chose qui

  9   sort du cadre de la vérité, je vous dirais très clairement que je ne peux

 10   pas répondre à une question dans laquelle vous résumez --

 11   Q.  Merci, Général.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Prlic s'est rendu compte de quelque chose. 

 13   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je crois qu'il y a une erreur au niveau

 14   du compte rendu d'audience parce qu'il a parlé d'accord historique entre

 15   les Musulmans et les Serbes. Mais dans le compte rendu, on dit que cet

 16   accord historique était entre Alija Izetbegovic et les Croates. Je crois

 17   qu'il est important de préciser cela.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, quand vous parlez : D'accord

 19   historique," c'est entre les Musulmans et les Serbes, ou entre Izetbegovic

 20   et les Croates ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Entre Izetbegovic et Milosevic ainsi que

 22   Karadzic, Siladzic, et Mladic. C'est entre eux qu'un accord historique

 23   avait alors été élaboré dans le cadre duquel on souhaitait rattacher la

 24   Bosnie-Herzégovine à la Yougoslavie. Les Croates n'ont exercé aucune

 25   influence ni n'ont de quelque façon que ce soit participé à ce processus,

 26   ils n'ont qu'été vaguement mis au courant, et Filipovic était impliqué dans

 27   cela, mais Izetbegovic l'a trahi ainsi que Zulfikarpasic.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je me demande si vous avez compris


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  1   la question de M. Stringer. M. Stringer, en vous montrant le document, vous

  2   demande de confirmer ou d'infirmer le point de vue de M. Filipovic, qui

  3   dit, dans ce texte, que si on veut faire de la partition ethnique, ça se

  4   passera par la guerre ou la violence. Voilà. Donc en 1991, M. Filipovic

  5   tire la sonnette d'alarme en disant s'il y a un projet qui va vers une

  6   partition ça ne pourra passer que par la violence ou la guerre.

  7   Je crois que c'est ce que M. Stringer voulait mettre en évidence dans la

  8   question, et je crois que vous n'avez pas saisi.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai parfaitement bien

 10   compris la question. Tout d'abord, ça ne va pas forcément être exact parce

 11   qu'il y a eu des exemples où ce site de choses s'est défait sans guerre.

 12   Par exemple, la partition entre la Tchéquie et la Slovaquie n'a pas généré

 13   de guerre, et les partages ethniques au sein de l'URSS n'ont pas conduit à

 14   des conflits suivant les partages ethniques. Ce n'est pas forcément donc le

 15   cas. Je peux vous donner bon nombre d'autres exemples. Ça c'est d'un.

 16   De deux, jamais en Bosnie-Herzégovine du point de vue de la communauté

 17   internationale, il n'a jamais été question d'un partage, une partition

 18   ethnique mais de prédominance ethnique, culturelle. C'est Cutileiro qui a

 19   proposé en premier à une partition, et que même  Cutileiro et la communauté

 20   internationale qui ont été les premiers à proposer la chose. C'était une

 21   condition sine qua non pour la tenue d'un référendum, au sein ou à

 22   l'intérieur de toutes ces questions-là, et la première demande de partition

 23   dans le cadre de la pensée politique c'est venu du côté serbe. C'est eux

 24   qui ont lancé l'histoire, et puis après, ça suivit son cheminement. Les

 25   Croates n'ont pas participé à la chose en tant que partie qui a été

 26   attaquée par les Serbes et qui s'est défendue --

 27   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'attendais la fin de la traduction,

 28   Monsieur Praljak. La première question que j'ai pour vous ou plutôt


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  1   commentaire, c'est que bien évidemment vous pouvez parler de plan, comme le

  2   plan Cutileiro, et cetera, mais je crois qu'il ne serait pas approprié de

  3   votre part de dire ensuite que tous les efforts menés par la communauté

  4   internationale qui visaient à une division ethnique. Je crois qu'on ne peut

  5   pas avoir ce point de vue. Il y a évidemment des plans comme le plan Vance-

  6   Owen qui tenait compte des compositions ethniques et nationales et

  7   divisions dans certaines parties de la Bosnie-Herzégovine, mais de dire que

  8   l'intégrité et l'unité de la Bosnie-Herzégovine devaient être maintenues.

  9   Donc c'est ce que disaient les représentants internationaux

 10   lorsqu'ils proposaient de tels plans. Ça c'est une question et c'est une

 11   toute autre question que de parler de la situation réelle, à savoir que ces

 12   plans n'ont jamais abouti. Egalement, je vous demande de bien vouloir

 13   ralentir. C'est ce que j'ai voulu dire. M. Stringer parle parfois un petit

 14   peu rapidement, mais vous devriez encore faire quelques efforts

 15   supplémentaires, pour ralentir, Monsieur Praljak.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, je ne sais pas

 17   comment on vous a traduit la chose. Mais, moi, j'ai explicitement dit que

 18   les plans internationaux ne se sont pas basés rien que ou uniquement sur

 19   les partitions interethniques, on s'est efforcé de faire en sorte que la

 20   population prédominante reste sur un territoire mais on a tenu compte aussi

 21   des éléments culturels, économiques, de voies de communication

 22   territoriales, et cetera, donc ce plan Vance-Owen qui n'a pris qu'en partie

 23   en compte la population majoritaire relative ou absolue de certaines

 24   ethnies, mais les frontières de la Bosnie-Herzégovine n'ont jamais été

 25   remises en question, et notamment pas dans la politique croate, ça n'a

 26   jamais été remis en question ces frontières de la Bosnie-Herzégovine.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le

 28   permettez. Je sais que c'est tout à fait inapproprié que de faire objection


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  1   concernant une question qui a déjà reçu une réponse, mais si vous le

  2   permettez, j'aimerais quand, avec un certain retard, apporter une objection

  3   pour ce qui est de la question qui a été posée par M. Stringer en page 50,

  4   lignes 12 à 16. Parce que, dans la question posée par mon confrère, M.

  5   Stringer, on contient il y a deux questions de contenu. Une première partie

  6   de la question se rapporte à la partition de la Bosnie-Herzégovine, et le

  7   deuxième segment de la question se rapporte à la création de territoires

  8   ethniquement fondés. J'imagine qu'il a voulu dire dans les frontières de la

  9   Bosnie-Herzégovine, dans le cadre des frontières de la Bosnie-Herzégovine.

 10   Mais dans la question il y a deux thèses de contenu, où il est apporté --

 11   il est possible d'apporter des réponses différentes, et je crois bien que

 12   la réponse de M. Praljak -- du général Praljak et l'intervention de M. le

 13   Juge Prandler constituent des conséquences du fait que la question posée

 14   par mon éminent confrère, M. Stringer, comporte deux thèses où on peut

 15   répondre de façon différente. Alors j'aimerais qu'on dissocie les éléments.

 16   Il faut poser cela en tant que deux questions qu'il faut traiter de façon

 17   différente. Je m'excuse une fois de plus de mon intervention.

 18   Merci.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, il y avait deux aspects dans

 20   votre question ou pas ?

 21   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, dans une certaine

 22   mesure, nous interprétons tous ce qui a été écrit par M. Filipovic

 23   lorsqu'il parle du virus de la partition. Je ne peux que vous dire que tel

 24   que je le vois, je ne fais pas de distinction de division à l'intérieur des

 25   frontières de la Bosnie-Herzégovine ou si la division signifie la

 26   modification des frontières de la Bosnie-Herzégovine. Donc tel que je le

 27   voie et que je l'entends, et c'est comme ceci que j'ai posé ma question. Je

 28   ne faisais pas de différence entre les deux. Lorsqu'on parle de la création


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  1   de territoires sur une base ethnique, la violence va certainement, il y a

  2   une très grande probabilité que la violence surgisse surtout lorsqu'il

  3   s'agit des frontières d'un pays, d'un endroit que la Bosnie-Herzégovine.

  4   C'est un point sur lequel je vais revenir bien sûr beaucoup comme étant une

  5   des composantes de l'entreprise criminelle commune.

  6   Je suis satisfait de la réponde du témoin à ce stade et je suis disposé à

  7   poursuivre si c'est ce que vous souhaitez. Mais je vois qu'il y a une

  8   question.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez bien vu.

 10   Monsieur Praljak, même page du document. Nous trouvons un passage et je

 11   vous demanderais de le commenter. Il s'agit du troisième paragraphe,

 12   deuxième page. Je lis :

 13   "Aujourd'hui, nous savons, nous tenons de sources fiables de l'opinion

 14   politique internationale que Tudjman lorsqu'il est allé en visite en

 15   Grande-Bretagne s'est exprimé à trois reprises à propos de la partition de

 16   la Bosnie en disant de cette partition que c'était une véritable

 17   possibilité, une solution acceptable dans le cadre de la politique que lui

 18   y mène."

 19   Vous direz peut-être qu'à votre avis ceci n'est pas vrai que Tudjman

 20   voulait dire autre chose. Vous pouvez dire que vous refusez de commenter ce

 21   passage mais je voulais vous donner l'occasion de vous exprimer sur ce

 22   point.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma position c'est celle-ci : si un dénommé

 24   Mohamed Filipovic ne dispose pas d'information concernant la diplomatie de

 25   l'Etat auquel il appartient, il ne lui appartient pas de spéculer de la

 26   sorte. Alors c'est habituel de dire : partant de sources habituellement

 27   bien informées, et cetera, et cetera, enfin c'est le type de phrases qu'on

 28   entend tous les jours. A chaque fois qu'on veut laisser faire passer une


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  1   thèse dans les journaux, c'est justement la formulation qu'ils disent, des

  2   sources bien informées nous ont fait savoir bla-bla, alors on dit ce qu'on

  3   veut. On attend les réactions d'autrui et c'est ce qu'on appelle laissez

  4   faire, envoyez des ballons d'essai. Alors je ne veux pas commenter ce genre

  5   de choses.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  7   M. KOVACIC : [interprétation] Je voudrais exprimer mon inquiétude pour ce

  8   qui est de l'argumentation présentée par mon éminent confrère, M. Stringer,

  9   page 55, début, page 55, du compte rendu. En effet, ce que je crains c'est

 10   qu'ici l'on ne veuille laisser entendre qu'il y a un changement d'acte

 11   d'accusation en cours. Parce que mon confrère dit de façon explicite qu'il

 12   ne fait pas la différence entre la partition de la Bosnie au sein de ses

 13   propres frontières. Par là, il veut dire si en réalité cela implique des

 14   changements au niveau des frontières de la Bosnie-Herzégovine ou pas. Puis

 15   plus loin, il dit que, lorsqu'il est question de la création de territoires

 16   qui se fonderaient sur des appartenances ethniques, c'est la force qui

 17   probablement jouera un rôle à cet effet, notamment lorsqu'il s'agit de

 18   certains territoires dans le cadre de frontières, appartenant, à la Bosnie-

 19   Herzégovine. C'est une nouvelle thèse cela parce que l'acte d'accusation ne

 20   le dit pas cela et si je puis paraphraser, et non pas entrer dans le

 21   moindre détail, juridique, l'acte d'accusation dit que la Croatie et les

 22   Croates de Bosnie-Herzégovine au travers d'une entreprise criminelle

 23   commune avaient voulu s'emparer d'une partie de la Bosnie-Herzégovine,

 24   c'est-à-dire la prélever, la dissocier de la Bosnie-Herzégovine cette

 25   partie de territoire.

 26   Or on laisse entendre de façon implicite que les Croates de Bosnie-

 27   Herzégovine qui sont intervenus dans pour ce qui est de la définition

 28   particulière de certains territoires pour ce qui est donc de savoir quels


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  1   seraient les groupes ethniques qui seraient majoritaires sur tel ou tel

  2   autre territoire en coordination ou avec l'accord de la communauté

  3   internationale, l'auraient fait et on laisse entendre ici avec la

  4   participation de Cutileiro.

  5   Alors j'aimerais qu'on me dise si on maintient l'acte d'accusation tel quel

  6   parce que nous ne devrions pas aller chercher ce que l'Accusation voulait

  7   encore dire par là.

  8   Merci.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez, Monsieur Praljak, laissez répondre M.

 10   Stringer parce que votre avocat a soulevé un problème juridique sur le

 11   champ de l'acte d'accusation; y aurait-il changement, ou M.Stringer va

 12   repréciser les choses ?

 13   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous sommes

 14   ici au stade du contre-interrogatoire. Je le répète. Je ne veux pas faire

 15   de discours sur la portée de l'acte d'accusation. Il dit ce qu'il dit et je

 16   suis sûr que la Chambre nous connaît et sait que la théorie, que nous avons

 17   sur la portée d'une entreprise criminelle commune, n'a pas changé, pas du

 18   tout.

 19   Nous allons revenir à toute cette thématique de l'entreprise criminelle

 20   commune. Si vous me permettez de m'exprimer ainsi, je préférerais terminer

 21   ce volet du contre-interrogatoire car nous pourrons ainsi aborder par le

 22   menu de cet autre thème. Merci.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 24   M. STRINGER : [interprétation]

 25   Q.  Laissons de côté l'article de Filipovic --

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Nous avons évoqué le sujet de Karadjordjevo, nous allons en parler un

 28   peu plus. Pendant l'interrogatoire principal, le 19 mai, vous avez évoqué


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  1   le témoignage de Stipo Mesic en ce Tribunal à propos de Karadjordjevo, page

  2   40 330 du compte rendu du 19 mai, à un endroit où vous dites que :

  3   "M. Stipo Mesic a fait un faux témoignage ici et qu'il disait des mensonges

  4   ici parce qu'il voulait se venger de Franjo Tudjman, et qu'il n'a pas

  5   présenté les faits tels qu'ils se sont produits en vérité."

  6   Vous souvenez-vous de ces mots que vous avez prononcés ?

  7   R.  Si vous citez bien les choses, je dis bien. Si vous le citez bien,

  8   c'est ce que j'ai dit. J'aimerais, quand vous citez des choses que j'ai

  9   dites, alors citez-les à la lettre, il faut donner la citation à la lettre,

 10   donnez-nous la page, la ligne, et dites : "je cite," pour que je n'ai pas,

 11   moi, à redire, à dire "oui" ou "non" sur une interprétation de votre part.

 12   Donc citez et je dirai : "Oui." Je ne vais pas vous confirmez des

 13   interprétations de votre part. Je vous prie d élément faire ainsi.

 14   Q.  Je ne fais pas d'interprétation. Je me contente de lire le compte rendu

 15   d'audience. Mais puisque vous parlez d'interprétation, je vais essayer de

 16   préciser quand je vous cite et je peux vous garantir que je cite ce que

 17   vous avez dit au compte rendu d'audience. Ce compte rendu d'audience dit

 18   ceci, là, je vous cite :

 19   "Stipo Mesic a fait un faux témoignage, il disait des mensonges ici…" 

 20   Vous vous souvenez de vos dires ?

 21   R.  Oui, je m'en souviens et je le maintiens.

 22   Q.  Parlons plus longuement de Karadjordjevo et de ceci. La réunion même,

 23   je pense ne pas me tromper en disant qu'elle a eu lieu fin mars 1991 ?

 24   R.  Ça s'est passé exactement à la date que où ça s'est passé. Il faut donc

 25   donner la date exacte, il ne faut pas parler de fin mars, de début ceci. Si

 26   vous avez la date, veuillez nous indiquer la date de la tenue de cette

 27   réunion à Karadjordjevo, or, vous l'avez cette date.

 28   Q.  Fin mars 1991, Général, vous ne faisiez pas partie de l'armée croate,


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  1   n'est-ce pas ?

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  Vous n'apparteniez pas non plus au gouvernement de la République de

  4   Croatie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Exact.

  6   Q.  S'il y a eu des réunions du président Tudjman et d'autres membres de

  7   son cabinet de son gouvernement, vous n'avez pas participé à l'époque à ces

  8   réunions, n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Corrigez-moi si je me trompe, parce que je n'ai pas le compte rendu

 11   mais je pense qu'auparavant, en interrogatoire principal, vous avez dit

 12   quelque chose qui nous indiquait qu'au cours du printemps 1991, vous, vous

 13   étiez dans la région de Sandzak, vous étiez en train de réaliser un

 14   documentaire; est-ce bien ce que vous faisiez au moment où ont eu lieu les

 15   réunions de Karadjordjevo ?

 16   R.  Je ne peux pas vous confirmer que pendant cette réunion à Karadjordjevo

 17   ou au moment précis, j'étais pendant peu de temps à Sandzak pour filmer un

 18   documentaire. Mais c'est de façon très attentive que j'ai suivi la presse

 19   et j'ai été bien informé de toutes les réunions des présidents des

 20   républiques et n'ayez crainte ce déplacement vers la région du Sandzak, en

 21   plus du tournage de ce film documentaire était aussi destiné à tâter le

 22   pouls de la situation au Sandzak. Parce que là-bas aussi, il y avait de

 23   grands meetings de Serbes qui sont tenus juste avant mon déplacement. Vuk

 24   Draskovic a tenu un grand meeting où il y avait eu plus de 100 000

 25   personnes à s'être déplacées.

 26   Q.  Par ailleurs, conviendrez-vous avec moi que le président Mesic était au

 27   fond un des membres du cercle le plus rapproché des initiés dans le

 28   gouvernement du président Tudjman, parce qu'il avait régulièrement des


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  1   réunions avec d'autres membres du gouvernement et avec le président Tudjman

  2   pendant la période de Karadjordjevo. Nous sommes là, fin mars, avril 1991 ?

  3   R.  C'est exact, et c'est précisément ce qui surprend. Il n'en jamais dit

  4   un mot, oui, excusez-moi, il n'en a jamais dit un seul mot à l'occasion de

  5   toutes les réunions.

  6   Q.  Excusez-moi, Général. Vous avez déjà répondu à ma question. N'est-il

  7   pas aussi vrai que le président Mesic et le président Tudjman se

  8   connaissaient depuis longtemps. Ils avaient été en prison ensemble, début

  9   des années 1970, après les incidents du printemps croate, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non, non, ce n'est pas exact de dire qu'ils se connaissaient bien,

 11   d'après mes informations; et de deux, Mesic, pour autant que je sache, n'a

 12   pas été incarcéré. Oui, il a fait un peu de prison, oui.

 13   Q.  Très bien. Prenons ce qu'a déclaré le président Mesic sur ce point dans

 14   le procès Blaskic.

 15   Les documents sont publics aujourd'hui et nous avons ceci grâce au

 16   système Sanction.

 17   Peut-on afficher la partie qui m'intéresse, que je voudrais présenter

 18   au général.

 19   Il s'agit de la page 7136, du compte rendu d'audience Blaskic. Nous

 20   commençons à la ligne 11, voici ce que dit, à cet endroit le président

 21   Mesic, je le cite :

 22   "Mais Tudjman à un moment donné nous a dit qu'il allait aller à

 23   Karadjordjevo seul, ça s'est passé le 30 mars 1991, il a dit qu'il voulait

 24   voir ce qu'il voulait."

 25   Je saute quelques lignes, là où le président Mesic explique pourquoi

 26   il est opposé à cette réunion. Ligne 20, je le cite :

 27   "Tudjman est revenu de Karadjordjevo le même jour. Il nous a dit que

 28   l'armée n'allait pas nous attaquer, qu'il avait obtenu des garanties de


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  1   Veljko Kadijevic qui était chef d'état-major et de Milosevic, et que la

  2   Bosnie aurait du mal à survivre, que nous pouvions obtenir les frontières

  3   de la Banovina."

  4   Je saute quelques pages de sa déposition pour arriver à la page 7

  5   137, ligne 16, voici ce que dit le président Mesic, je le cite :

  6   "La politique publique croate est toujours partie de la prémisse disant que

  7   la Bosnie-Herzégovine était un Etat, un Etat unifié, et que la Croatie

  8   avait été la première à reconnaître l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Mais,

  9   objectivement, compte tenu de tout ce qui s'est passé plus tard, quand

 10   Milosevic a créé une République serbe sur le territoire de Bosnie-

 11   Herzégovine, les Croates ont formé la Communauté croate d'Herceg-Bosna, qui

 12   est devenue plus tard la République d'Herceg-Bosna. Il est apparu

 13   clairement que ceci n'allait pas renforcer la Bosnie-Herzégovine mais qu'au

 14   contraire, elle allait en compromettre l'existence, d'autant qu'après une

 15   certaine période de temps, Fikret Abdic a fait son apparition et a proclamé

 16   l'autonomie de la Bosnie occidentale, cette zone de Cazin, Kladusa et

 17   Bihac.

 18   "Par conséquent, d'un côté nous avions l'expression publique de la volonté

 19   de soutenir une Bosnie unifiée de la part de la Croatie, alors qu'en fait,

 20   nous avions emboîté le pas à Milosevic à cause de ce qu'il avait fait. Ceci

 21   a été fatidique surtout pour les Croates parce qu'à cause de cela, 850 000

 22   Croates, la plus grande partie de 850 000 Croates, sont passés de Bosnie-

 23   Herzégovine, sont partis de Bosnie-Herzégovine, il n'en restait donc plus

 24   que 350 000 en Bosnie-Herzégovine."

 25   Voici ma première question : convenez-vous avec moi que, vu la position

 26   exprimée par M. le président Mesic, la fonction qu'il exerçait ici et

 27   lorsqu'il parle ici, lorsqu'il parle du printemps 1991, qu'il est mieux à

 28   même de jauger la politique du président Tudjman, eu égard à la Bosnie-


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  1   Herzégovine, qu'il est mieux placé que vous pour le savoir ?

  2   R.  A supposer que M. Mesic l'ait dit en 1991, 1992 ou 1993, je serai

  3   d'accord avec vous. Mais quand quelqu'un dit cela au Tribunal, juste avant

  4   l'an 2000, je dis que ce monsieur ment pour des raisons politiques. Parce

  5   que son option était celle que de noircir le plus possible un président

  6   auquel il n'arriverait pas jusqu'aux genoux -- jusqu'aux genoux duquel il

  7   n'arriverait jamais. M. Mesic était vice-président de la Yougoslavie, il

  8   pouvait le faire autrement cela. Donc c'est un homme; mis à part ce fait,

  9   il dit, "nous," il ne dit pas "à Mesic," il dit "nous" le dit, qui sont les

 10   autres.

 11   Q.  Vous ne répondez pas à ma question.

 12   Je vous répète la question : est-ce que, lui, Mesic, n'est pas mieux placé

 13   que vous pour savoir quelle était la politique ? Vous ne le connaissiez

 14   même pas Tudjman à l'époque, n'est-ce pas, au cours du printemps 1991 ?

 15   N'est-il pas vrai de dire qu'il sait mieux que vous ce qui était la

 16   politique de la Croatie lorsqu'il parle de Karadjordjevo ?

 17   R.  Il est vrai de dire qu'il était mieux placé et justement parce que

 18   cette position de la Croatie était une position de principe, il est resté

 19   dans cette politique au côté de Franjo Tudjman, et pour des raisons

 20   politiques, lorsqu'il a fallu changer de disque, il a changé de disque.

 21   Donc si c'était quelqu'un de respectueux des principes et si de principe il

 22   n'était pas d'accord avec la politique de Franjo Tudjman, il aurait pu et

 23   dû, par principe, quitter les fonctions qui étaient les siennes; donc c'est

 24   quelque chose qui ne s'est pas comporté de façon conforme à ces principes

 25   qui a posteriori arrive à des conclusions qu'il savait que la politique de

 26   Franjo Tudjman était tout à fait correcte et ce avec tous les milliers de

 27   documents que j'ai montré, mais pour des raisons de politiqua, il fournit -

 28   - et il le fait en tant que témoin secret président de l'Etat, et il ment


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  1   l'opinion public croate qu'il était le témoin de la Défense mais qu'il

  2   était au contraire le témoin de l'Accusation, et vous pouvez vous excuser

  3   autant que vous voulez.

  4   Q.  Document suivant, P 0037.

  5   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer.

  6   M. STRINGER : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur le Juge.

  7   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je répugnais à intervenir pour vous

  8   dire ceci, Monsieur Praljak. Bien sûr, il faut que votre opinion soit

  9   reprise au compte rendu d'audience, votre déposition est tout à fait

 10   importante; mais par ailleurs, j'ai vraiment le sentiment que puisque nous

 11   avons déjà parlé plusieurs fois de M. Mesic, vous devez, vous aussi,

 12   comprendre ceci. Nous voulons vous entendre, vous exprimer sur les points

 13   auxquels vous avez été partie prenante, lorsque vous faites des rapports

 14   uniquement ce qui nous intéresse quand vous avez été un participant aux

 15   événements, lorsque vous répondez aux questions que vous pose le Procureur,

 16   M. Stringer. Lui, je dirais aussi que vous avez déjà répondu, qui était de

 17   savoir si vous étiez mieux placé que Mme Mesic pour connaître la politique

 18   de M. Tudjman, et au lieu de répondre à la question à certains égards, vous

 19   vous mettez à dire que M. Mesic est un menteur, et ainsi de suite, nous

 20   avons déjà les interventions de M. Mesic dans un compte rendu d'audience,

 21   dans un procès qui s'est tenu ici, et vous avez ici la possibilité de nous

 22   donner votre avis, mais vous ne devez parler que des questions soulevées

 23   soit par la Défense, par l'Accusation, ou par les Juges, C'est ça que je

 24   voulais vous dire.

 25   Merci.

 26   M. STRINGER : [interprétation] Merci.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, je suis en train de

 28   répondre aux questions, s'il est possible de répondre sans pour autant


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  1   dissimuler les vérités. On m'a posé la question de savoir, et moi, j'ai dit

  2   que mes connaissances ont été publiées. M. Mesic, en revenant de La Haye,

  3   aurait déclaré en public qu'il était témoin de la Défense, qui n'était pas

  4   vrai.

  5   M. Antonetti m'a posé des questions au sujet de plus de 30 transcriptions,

  6   où, pour une grande partie des cas, c'était des transcriptions de Stipe

  7   Mesic, et à aucun moment, Stipe Mesic n'a dit : Franjo Tudjman doit, au

  8   côté de Slobodan Milosevic, t'es concerté pour ce qui est d'une partition

  9   de la Bosnie. Je ne serais pas d'accord avec sa thèse, comme M. le Juge

 10   Antonetti l'a fait remarqué, alors s'agissant de problèmes moindres,

 11   lorsque je n'étais pas d'accord avec Tudjman, je le disais, moi qui

 12   occupais des fonctions bien moins élevées, et ça ce sont des faits pour ce

 13   qui est des événements où j'ai pris part.

 14   Jamais dans les 40 transcriptions qu'on a montrées ici, Stipe Mesic à aucun

 15   endroit n'a dit quoi que ce soit au sujet de Karadjordjevo et de la

 16   politique de Tudjman. Il était d'accord, et c'était un haut responsable qui

 17   était d'accord avec la politique conduite par la Croatie. Ça c'est des

 18   faits, à vous de tirer des conclusions sur le reste.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : De manière accessoire, M. Tudjman qui tenait de

 20   nombreuses réunions, on les a vues. Est-il vrai qu'il laissait parler tous

 21   les interlocuteurs en toute liberté ? C'est étonnant qu'un chef d'Etat

 22   puisse tenir pendant des heures et des heures des réunions, comme on l'a

 23   vu, et tout le monde intervient. Etait-ce quelqu'un de très libéral, de

 24   très permissif ? Il laissait tout le monde s'exprimer, donner son point de

 25   vue, y compris ceux qui n'étaient pas d'accord avec lui ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Aussi bien pour ceux qui avaient une opinion

 27   différente, que ceux qui avaient une opinion contraire, que ceux encore qui

 28   se contentent de bavarder, tous il leur demandait : quel est ton avis ? Que


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  1   penses-tu ? Il s'agissait de débats ouverts très longs, et sauf dans les

  2   cas on quelqu'un dirait : "Maintenant, il faut que je parte pour une

  3   réunion importante, on a épuisé le sujet, tout un chacun pouvait dire ce

  4   qu'il avait sur le cœur aussi longtemps qu'il le souhaitait, et ce n'était

  5   que dans ces premiers cas que je viens d'évoquer qu'il essaie d'accélérer

  6   un peu les choses. Vous le verrez à partir de tous les procès-verbaux, qui

  7   sont des pavés entiers extrêmement épais, à quel point il était possible de

  8   s'y exprimer.

  9   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  Vous avez maintenant la pièce P 00037, transcript présidentiel du 8

 11   juin 1991. Ça se passe assez tôt. Dans la chronologie, c'était même avant

 12   que vous ne rejoigniez les rangs de l'armée croate, n'est-ce pas ?

 13   R.  Exact.

 14   Q.  Si je me souviens bien, vous avez rejoint l'armée croate le 3 septembre

 15   1991; c'est bien cela ?

 16   R.  C'est exact.

 17   Q.  Le 8 juin c'est 17 jours à peu près avant que la Croatie ne déclare son

 18   indépendance; indépendance de l'ex-RSFY, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, c'est le 25 juin qu'ont été rompus tous les liens après que

 20   l'aviation a bombardé le plais présidentiel et presque a manqué de peu tuer

 21   le président Tudjman, ce qui montrait que la JNA savait exactement où se

 22   trouvait Markovic, le président du comité exécutif fédéral.

 23   Q.  Ma question concernait uniquement la date, je vous remercie d'avoir

 24   répondu. Ce jour-là, nous avons une réunion du Conseil suprême d'Etat de la

 25   République de Croatie; êtes-vous d'accord pour dire que vous n'étiez pas

 26   présent à la réunion ?

 27   R.  Non, je n'étais pas présent.

 28   Q.  Page 5, s'il vous plaît, c'est le président Tudjman qui parle, en haut


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  1   de page dit :

  2   "Il faut voir la façon dont on peut créer une alliance ou voire ou

  3   faire une partition."

  4   Je saute un paragraphe, et je le cite :

  5   "Voir si la réalité que nous ne pouvons ignorer, Messieurs, si nous options

  6   pour l'indépendance de la Croatie, que ce soit au sein d'une analyse ou

  7   qu'il ne s'agisse d'une indépendance totale, les frontières de la Croatie,

  8   telles qu'elles existent aujourd'hui, sont absurdes, elles sont

  9   impossibles, en matière d'administration, de commercer."

 10   Je saute quelques lignes, deux lignes exactement. Je cite le paragraphe

 11   suivant :

 12   "Par conséquent, à notre avis, à notre point de vue, mais aussi tout comme

 13   pour le point de vue serbe, il y a le problème, la nécessité de trouver une

 14   solution essentielle au problème, n'est-ce pas, parce que l'établissement

 15   de la Bosnie, les frontières de la Bosnie-Herzégovine, établies après la

 16   Deuxième guerre mondiale, sont sur le plan historique absurdes; c'est la

 17   résurrection d'une création coloniale qui date d'une période qui est allée

 18   du XVe au XVIIIe siècles.

 19  

 20   "Nous en sommes finalement arrivés à un point où, au niveau des

 21   représentants officiels de toutes les républiques yougoslaves, ce point est

 22   pris à l'ordre du jour et il est convenu qu'il faut y trouver une solution.

 23   Il semble aussi qu'Izetbegovic, président de la Bosnie-Herzégovine, se rend

 24   compte qu'il est désarmé face au mouvement serbe et que pour ce qui est

 25   aussi du démantèlement de la Bosnie. Il sait aussi que les Croates de

 26   l'Herzégovine n'acceptent pas non plus cette situation. Il poursuit."

 27   Seriez-vous d'accord avec moi ? Vous ne le savez peut-être pas parce que

 28   vous n'avez pas vraiment participé au gouvernement ni à l'armée, mais


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  1   saviez-vous que même avant le démantèlement ultime de la RSFY des Serbes et

  2   les Herzégovins n'acceptaient pas l'idée d'avoir une Bosnie-Herzégovine

  3   unifiée indépendante ayant gardé intact ses frontières ?

  4   R.  Cela n'est pas exact. C'est complètement faux. Ils voulaient une

  5   réponse qui porte sur ce dont il s'agit ici en substances c'est sur ces

  6   débats. Il dit que le dé tricotage de la Bosnie-Herzégovine c'est quelque

  7   chose à quoi les Serbes procèdent; et deuxième élément important que vous

  8   avez sauté, Monsieur Stringer, c'est le fait que M. Izetbegovic a fait une

  9   proposition particulière pour ce qui est de la position de la Bosnie-

 10   Herzégovine en regard de la Yougoslavie.

 11   Q.  Pardonnez-moi, vous ne répondez pas à ma question.

 12   R.  J'ai répondu. L'Herzégovine, ce n'était pas censé être contre la

 13   Bosnie-Herzégovine donc c'est inexact ce que vous m'avez demandé, à savoir

 14   que les Serbes et les Herzégoviniens auraient voulu modifier les frontières

 15   de la Bosnie-Herzégovine. C'est faux.

 16   Q.  Donc si le président Tudjman a dit cela, il s'est trompé. C'est cela

 17   que vous nous dites.

 18   R.  Ce n'est pas ce que le président a dit ici car on ne peut pas sortir

 19   une phrase de son contexte ni de l'écarter de ce dont il a été question

 20   juste avant et la façon dont vous m'interrogez ici est tout à fait absurde

 21   et insensé et je ne peux pas vous répondre ainsi. Ou bien nous nous

 22   occuperons de l'essentiel, ou bien vous allez continuer à manipuler des

 23   bouts de phrases et cela ne mènera à rien. De plus cela est faux et je

 24   continuerai à clamer haut et fort que cela n'est pas quelque chose que

 25   Tudjman dit.

 26   Q.  Passons alors à la page 38 du même compte rendu. Le président se met à

 27   parler. Il s'agit du président Tudjman. Il parle d'une proposition faite

 28   par Izetbegovic et Gligorov, et il dit qu'en réalité, c'est une tentative


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  1   de conservation et de renforcement de la constitution de 1974. Au fond

  2   c'est cela. Il poursuit en disant, et je vais le lire :

  3   "La Serbie l'a accepté, l'a interprété à sa manière pour ce qui est de la

  4   création d'une Fédération démocratique efficace. Ils sont certains de ne

  5   pas changer leur position à cet égard. Par conséquent, la solution est

  6   celle qui est indiquée ici à savoir la partition de la Bosnie-Herzégovine,

  7   et si nous réalisions ceci, à ce moment-là, nous pourrons trouver le

  8   fondement d'une alliance entre les républiques fédérales -- une alliance

  9   entre les républiques souveraines et les Etats. Je crois que nous pouvons

 10   réaliser ceci qui est dans l'intérêt de la Serbie et de la Croatie alors

 11   que la composante musulmane n'a pas d'autres solutions que d'accepter cette

 12   solution. Bien que cette solution ne sera pas facile à trouver, mais en

 13   somme, il s'agit de cette solution-là."

 14   Général, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ceci a été dit deux

 15   mois après Karadjordjevo et que ce que le président Tudjman décrit ici sur

 16   la partition coïncide avec le rapport et le témoignage du président Mesic

 17   sur la discussion entamée à Karadjordjevo ?

 18   R.  Non, c'est complètement faux. A ce moment-là, Izetbegovic propose que

 19   son peuple, le peuple musulman, reste dans le cadre de la Yougoslavie en

 20   affirmant qu'il compte six millions de personnes, ce peuple musulman en

 21   Yougoslavie, et ce n'est qu'à ce moment-là, que les Croates ont dit qu'ils

 22   ne voulaient pas rester dans ces circonstances-là en Yougoslavie.

 23   Izetbegovic pouvait bien emmener les Serbes et les Musulmans vers la

 24   Yougoslavie, mais dans de telles conditions, la proposition avancée par

 25   Izetbegovic, à savoir que l'on maintienne la Yougoslavie impliquait que

 26   l'on conserve la constitution de 1974, qu'on l'amende à peine car de cette

 27   façon-là le peuple musulman en comptant le Kosovo, le Sandzak et ainsi de

 28   suite, aurait compté environ six millions d'individus. C'était un bon


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  1   projet du point de vue des Musulmans mais pas pour les Croates. Ce que dit

  2   Franjo Tudjman c'est que, dans ce cas-là, ce n'était pas une bonne

  3   solution, mais pour ce qui est de Milosevic, c'est Izetbegovic qui passe

  4   des accords avec lui et non pas Tudjman.

  5   Q.  Très bien. Veuillez vous reportez à la page 47, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il y a au niveau du compte rendu

  7   quelque chose a été consignée de façon erronée, page 70, la ligne 13, on a

  8   dit qu'il y aurait six Musulmans et demi dans cet Etat. Je pense qu'il doit

  9   s'agir de six millions et demi et non pas de six et demi.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 11   M. STRINGER : [interprétation]

 12   Q.  Page 47, Général, le président Tudjman dit ce qui suit :

 13   "Il parle d'une association," et je souhaite vous poser une question à cet

 14   effet. Par conséquent, d'après cette proposition à cette réunion pour être

 15   clair, je ne suis pas en train de vous suggérer qu'il s'agit de

 16   Karadjordjevo lorsqu'il parle de cette réunion-là. Le seul fondement c'est

 17   que le point de départ c'est la souveraineté des républiques et

 18   l'association de républiques souveraines, d'Etats souverains. Ce point de

 19   départ est acceptable. Le reste doit être discuté. Il est vrai ce qu'ils

 20   disent que si nous parvenons à un accord sur ce point-là qui est une

 21   question importante et contestée entre la Croatie et la Serbie, c'est-à-

 22   dire la Bosnie-Herzégovine, si nous arrivons à définir des frontières

 23   réalistes pour la République de Croatie et si ce problème des Serbes à

 24   l'extérieur de la Serbie peut être résolu pour que la Serbie soit

 25   satisfaite, à ce moment-là, nous pouvons travailler encore avec la Serbie

 26   pour qu'elle accepte un tel fondement en vue d'une association qui pourrait

 27   lui être -- qui pourrait être acceptable à ses yeux et acceptable pour

 28   nous. Ou d'autres ou accepter une séparation. Donc s'il s'agissait de


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  1   mettre en place une telle association, il s'agirait, à ce moment-là, de

  2   disperser les organes de la Fédération qui iraient où en fait, on ne sait

  3   pas très bien quel statut aurait ces organes. De toute façon, ce serait

  4   ingérable pour toutes les personnes qui resteraient au centre.

  5   Tout d'abord, Général, conviendrez-vous avec moi que le président Tudjman

  6   ici parle d'une association compte tenu du fait que l'ex-Yougoslavie

  7   n'existait plus ?

  8   R.  Ici on parle de Tudjman -- d'une Fédération qui aurait correspondu à ce

  9   que avait été l'ex-Yougoslavie. Donc on ne parle toujours pas d'un Etat qui

 10   n'aurait pas été composé de l'ensemble des républiques de l'ex-Etat. A

 11   ceci, avant tout, une Fédération d'Etats souverains. Le président Tudjman a

 12   été extrêmement clair, mais comme tout homme politique, il observe

 13   également ce que les autres acteurs de la scène politique souhaitent. Les

 14   Etats-Unis souhaitent maintenir la Yougoslavie, la France le souhaite

 15   également pour ses propres intérêts. 

 16   Q.  En fait, je ne suis pas en train de vous parler de ce que souhaitait la

 17   France et les Etats-Unis.

 18   R.  Très bien. Mais voilà ce que veut Izetbegovic. Izetbegovic veut des

 19   rapports privilégiés avec les Serbes, avec la Serbie, et il dit ici aux

 20   Serbes ce qu'il en est des problèmes que ces derniers rencontrent de façon

 21   très réaliste, et il dit : voilà quels nos points de départ, si -- excusez-

 22   moi.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a M. Prlic qui veut intervenir.

 24   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je ne sais pas très bien si je me rends

 25   utile et pour qui je vais être utile. Mais je crois que tout ceci sera

 26   abordé sous un angle différent si une phrase est changée à la page 4. Il

 27   s'agit du troisième chapitre :

 28   "Par conséquent, je propose une réunion des présidents de Bosnie, Serbie et


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  1   Croatie, et que les deux en question ont accepté, et les trois autres

  2   également."

  3   Ce qui signifie qu'un accord a été conclu entre six présidents de

  4   république, et que trois d'entre eux ont eu une discussion a eu lieu à

  5   Split, le 12 juin. Il faut avoir tout ceci à l'esprit pour bien comprendre

  6   la situation.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais à voix

  8   haute, en tout cas, je souhaitais dès le départ, clairement indiquer que la

  9   réunion dont il est cité ici est la réunion Karadjordjevo. Je l'ai bien

 10   précisé, donc je pense qu'il est clair d'après le compte rendu que

 11   lorsqu'il parle d'une réunion au moins il ne parle pas de Karadjordjevo. Il

 12   parle de discussions qui ont eu lieu entre les représentants des

 13   différentes républiques.

 14   Q.  Ce qui m'intéresse le plus, Général, encore une fois compte tenu du

 15   fait d'après ce qu'il a dit un peu plus tôt, le président Tudjman pensait

 16   que les frontières de la Croatie telles qu'elles existaient à l'époque

 17   étaient absurdes. C'était une création absurde qui datait de l'après

 18   Deuxième Guerre mondiale. Dans ce cadre-là, le processus qui allait mener à

 19   la désintégration de la Yougoslavie, ceci allait constituer un objectif ou

 20   en tout cas c'est un objectif qu'il souhaite réaliser pour reprendre son

 21   terme, et arriver à définir des frontières réalistes, n'est-ce pas,

 22   effectivement ce que souhaitait voir le président Tudjman ? Ceci faisait

 23   partie des négociations, faisait partie de ces événements. La Croatie

 24   devait s'efforcer d'obtenir des frontières qui sont plus utiles ou dans le

 25   meilleur intérêt de la Croatie que les frontières croates existantes et

 26   absurdes à l'époque.

 27   R.  C'est inexact. Franjo Tudjman dit que, si Alija Izetbegovic emmène la

 28   Bosnie-Herzégovine vers la Yougoslavie, qui est un ennemi déclaré, qui


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  1   bombarde le palais présidentiel, dans cette hypothèse, ces frontières ne

  2   sont pas tenables. Izetbegovic est à la tête de la majorité des Musulmans

  3   et si, dans un tel contact, lui, il accepte cela, nous n'accepterons pas.

  4   Nous n'accepterons pas d'être vendus. Nous sommes un peuple souverain.

  5   Franjo Tudjman ne cesse pas de parler d'une Fédération d'Etats souverains,

  6   et il dit que si la Bosnie-Herzégovine doit devenir indépendant, alors

  7   jamais et à aucun prix on ne touchera aux frontières. En revanche, si

  8   jamais la Bosnie-Herzégovine - et ce, parce que les Musulmans et les Serbes

  9   le souhaitent - est appelée à rejoindre la Yougoslavie, nous, peuples

 10   croates, ne serons pas d'accord avec cela. C'est tout à fait limpide,

 11   Monsieur Stringer.

 12   Q.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, la question de M. Stringer touche

 14   au cœur même de notre acte d'accusation. La question se pose : y a-t-il un

 15   projet de Grande-Croatie ? S'il y a projet de Grande-Croatie, on doit le

 16   confronter avec le projet de Milosevic, de Grande-Serbie, si aussi de son

 17   côté il y a un projet. De ce fait, il y aurait deux projets, Grande-

 18   Croatie, Grande-Serbie. On se rend compte, en regardant le document à la

 19   page 47, que M. Tudjman dit ceci :

 20   "Il faut que le problème des Serbes à l'extérieur de la Serbie soit

 21   résolu."

 22   En disant cela, je pense - mais si je me trompe, dites-le-moi - qu'il a

 23   dans l'esprit la question des Serbes qui sont en Croatie, dans la Krajina

 24   de la Croatie.

 25   A ce moment-là, s'il y a deux projets, le projets de Tudjman de la

 26   Grande-Croatie, et le projet de Milosevic de la Grande-Serbie, de votre

 27   point de vue, que reste-il de la République de Bosnie-Herzégovine, si ces

 28   deux projets sont des projets sérieux, réalistes, à quelle portion va être


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  1   réduite à ce moment-là, la République de Bosnie-Herzégovine ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  3   Monsieur le Juge Antonetti, j'ai exposé des milliards de preuve portant sur

  4   la façon dont s'est comportée la Croatie. Nous l'avons vu à l'occasion de

  5   centaines d'exemples. Je vais le répéter une fois encore.

  6   Ici il est dit qu'à partir de la proposition avancée à cette réunion, le

  7   seul point de départ possible est de partir de la souveraineté des

  8   républiques et d'une Fédération de républiques et d'Etats souverains. Mais

  9   ici, vous oubliez en permanence le troisième acteur qui est Alija

 10   Izetbegovic. Lors de cette réunion à Split, nous avons tous tendance à

 11   oublier ce qui s'y est passé. Alija Izetbegovic souhaite, petit (a), une

 12   Bosnie-Herzégovine musulmane; et petit (b), une solution B, de disposer

 13   d'un territoire dans le cadre duquel il va pouvoir mettre sur pied un tel

 14   Etat. Mais au nom de Dieu, la Croatie procède à posteriori, si Izetbegovic

 15   veut un Etat musulman, mais la question qui se pose c'est de savoir sur

 16   quel territoire et de combien de territoire il dispose. Les Serbes veulent

 17   par ailleurs une Grande-Serbie, et alors nous donc, à aucun moment, on a le

 18   droit de dire aux autres si c'est ce que vous voulez, nous, nous refusons

 19   de mettre notre tête sur la hache du bourreau et de nous laisser massacrer.

 20   Il n'y avait de plan, il y avait des réunions au cours desquelles des

 21   réunions se sont tenues. Tout cela était ouvert. Vous pouvez en prendre

 22   connaissance, vous pouvez le lire, il y a eu des procès-verbaux en Croatie.

 23   Alors il y a eu un plan qui a été élaboré à l'échelon international,

 24   et ce qu'on a ici c'est un faux témoignage et deux phrases qui peuvent être

 25   mal interprétées, même si nous avions un million de preuves, nous ne

 26   pourrions pas découvrir ici un plan visant la mise en place d'une Grande-

 27   Serbie. Quelle Grande-Serbie ? Il n'y a même pas de Croatie, à ce moment-

 28   là. Nous sommes en train de couper les cheveux en quatre autour de quelque


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  1   chose qui n'existe même pas.

  2   M. STRINGER : [interprétation]

  3   Q.  Le président Tudjman parle de la réalisation réaliste. Un peu

  4   plus tôt, au niveau de compte rendu, le président Tudjman évoque les

  5   frontières actuelles et indique qu'elles sont absurdes; est-ce que vous

  6   dites dans votre témoignage que M. Tudjman était satisfait des frontières

  7   de la Croatie telles qu'elles existaient en juin 1991 ?

  8   R.  Absolument. Pour ce qui concerne la Croatie, sa seule

  9   préoccupation était de tenir compte de l'existence de 900 000 croates dans

 10   les frontières de la Bosnie-Herzégovine, qui constituait un peuple

 11   autonome, et suite à l'effondrement de la Yougoslavie, face à cette idée

 12   d'une Bosnie-Herzégovine qui elle aussi pourrait s'effondrer, l'idée qui

 13   était soutenue aussi bien par Izetbegovic et Milosevic, sa préoccupation

 14   première, sa seule préoccupation c'était l'intérêt national de ces Croates

 15   à cause de la position dans laquelle il s'était retrouvé.

 16   Q.  Général, veuillez mettre ces documents de côté maintenant je vais

 17   passer à autre chose à moins que les Juges de la Chambre n'aient une

 18   question à poser au témoin.

 19   Mme PINTER : [interprétation] Juste aux fins du compte rendu d'audience,

 20   Messieurs les Juges, puisque M. Stringer a décidé de passer à un autre

 21   sujet, en page 75, lignes 21 et 22, lorsque le général Praljak a parlé de

 22   plans, il ne parlait pas du plan d'une Grande-Serbie, mais il disait qu'il

 23   n'y avait pas de plan visant à créer une Grande-Croatie si bien que je

 24   voudrais que l'on corrige cela au compte rendu d'audience pour que cela

 25   soit tout à fait compréhensible ici.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous me laissez un peu sur ma faim.

 27   Je vous ai donné toutes les données du problème et j'attendais une réponse

 28   un peu plus précise. Je partais de l'hypothèse où M. Milosevic a dans


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  1   l'idée de créer une Grande-Serbie. Donc dans cette idée si on suit à

  2   l'époque la pensée de M. Milosevic se pose la question des Serbes qui

  3   habitent en Croatie et Tudjman le mentionne.

  4   Maintenant si on se met du côté de M. Tudjman et c'est M. Stringer qui a

  5   mis cela en évidence, où il dit que les frontières ça peut poser un

  6   problème; à ce moment-là, est-ce que M. Tudjman a, lui aussi, dans la tête

  7   cette Grande-Croatie, qui aurait comme espace géographique l'Herzégovine,

  8   par exemple ? Alors vous avez deux individus qui se réunissent avec

  9   d'autres mais qui ont -- qui pourraient - j'emploie le conditionnel - qui

 10   aurait chacun leur idée, Grande-Serbie d'un côté, Grande-Croatie de

 11   l'autre; et dans cette hypothèse où ces deux individus auraient ces deux

 12   concepts dans la tête, moi, je veux savoir que resterait-il, à ce moment-

 13   là, de la République de Bosnie-Herzégovine et des idées de M. Izetbegovic

 14   d'avoir lui une République ? Qu'est-ce qui lui resterait ? C'est ça que je

 15   voudrais savoir.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà répondu. Je ne sais plus à quelle

 17   occasion à cette question, et je vais répéter ma réponse mais c'est la

 18   raison pour laquelle je suis étonné d'entendre de telles questions.

 19   Essayez d'imaginer, Messieurs les Juges, ce qu'il en était à l'époque

 20   de Milosevic et de ses projets politiques, qui étaient exprimés très

 21   clairement par écrit, tout comme avait été publié le fameux mémorandum de

 22   l'Académie serbe. De l'autre côté, on a quelqu'un de relativement puissant

 23   comme pouvait l'être Franjo Tudjman. Mais essayez, s'il vous plaît,

 24   d'imaginer cette situation où il n'y a pas d'armée de Bosnie-Herzégovine.

 25   Les Musulmans n'avaient même pas de fusils. Combien de temps aurait-il

 26   fallu pour partager la Bosnie-Herzégovine dans ces conditions s'il y avait

 27   réellement eu un accord entre Tudjman et Milosevic ?

 28   Encore une question venant en apparence de moi, Messieurs les Juges,


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  1   combien de temps la Bosnie-Herzégovine aurait-elle pu tenir au printemps

  2   1992, si moi-même ou quelqu'un d'autre sur place, j'avais passé un accord

  3   avec Mladic pour procéder au partage de la Bosnie-Herzégovine ? Combien de

  4   temps l'ABiH inexistante alors et qui ne disposait de quasiment aucune arme

  5   aurait-elle pu tenir ? Cela n'aurait pas pu tenir plus de 24 heures.

  6   Alors comment au nom de Dieu peut-on parler de quelque forme d'accord

  7   que ce soit entre Milosevic qui dispose de la JNA, qui est déployée sur

  8   l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine; et d'autre part, Franjo Tudjman qui ne

  9   dispose encore de rien mais voilà on suppose qu'ils se sont mis d'accord.

 10   C'est quelque chose qui donne lieu à une résolution en termes politiques en

 11   24 heures à peine, si la situation est réglée. De la même manière,

 12   militairement parlant, il y aurait eu le même résultat si moi ou Petkovic

 13   ou Roso, nous étions mis d'accord avec Mladic. Quant à cette réunion tenue

 14   à Split, Izetbegovic y était présent. N'oublions pas, Messieurs les Juges,

 15   tout d'abord qu'il existe aussi un projet d'une Grande Bosnie-Herzégovine.

 16   Que nous avons la déclaration islamique qui représente le projet de

 17   la Grande Bosnie-Herzégovine et c'est un projet qui a été rédigé par écrit.

 18   Il y a également le projet noir sur blanc de la Grande-Serbie mais il n'y a

 19   pas de Grande-Croatie. Nous ne faisons qu'essayer de nous sauver de cette

 20   situation -- ce soit trop rapide, excusez-moi.

 21   Pouvons-nous faire une pause et puis après, je pourrais vous répéter

 22   l'ensemble ?

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous constaterez à la page 48 du

 24   document - et pendant la pause vous pouvez le regarder que M. Tudjman,

 25   sentant peut-être que l'affaire est très complexe, veut créer une espèce de

 26   groupe de travail de trois ou cinq personnes, et dans ce groupe de travail,

 27   il y aurait le vice-président Ramljak; il y aurait le Pr Sokol; il y aurait

 28   également M. Milas, Ivan Milas; et il y aurait M. Seks - je ne sais pas qui


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  1   c'est - et, semble-t-il, ce groupe aurait pour tâches également d'étudier

  2   les problèmes constitutionnels parce qu'évidemment, ça doit poser des

  3   problèmes constitutionnels et de travailler sur un document de type

  4   confédéral. Bien. 

  5   Alors je ne sais pas si le groupe de travail a été mis en place, et

  6   cetera, mais M. Tudjman s'est rendu compte que c'était peut-être beaucoup

  7   plus complique que cela. Est-ce que vous êtes d'accord ou pas ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous sommes d'accord. Ce que l'on essaie de

  9   maintenir ici encore, c'est la base confédérale de la Yougoslavie, ce

 10   qu'Izetbegovic n'accepte pas.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire la pause parce que c'est six

 12   heures moins quart et on est obligé de faire la deuxième pause.

 13   --- L'audience est suspendue à 17 heures 43.

 14   --- L'audience est reprise à 18 heures 06.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Stringer.

 16   Oui, Maître Kovacic.

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   Je pense que ce serait une bonne chose que de rectifier tout de suite une

 19   erreur au compte rendu pour qu'il n'y ait pas de confusion. En page 78,

 20   lignes 11 et 12, il y a deux erreurs qui modifient complètement le sens, et

 21   je crois que c'est parce que M. Praljak a un peu accéléré son débit. On dit

 22   :

 23   "Dans cette réunion politique, Izetbegovic était présent."

 24   Or, je crois que le général a dit :

 25   "A cette réunion de Split, et il y a eu la présence d'Izetbegovic."

 26   Puis ensuite il y a une autre phrase qui au compte rendu est

 27   consignée comme suit, je cite :

 28   "Il y a eu un plan pour une grande Herzégovine."


Page 42983

  1   D'après moi, le général Praljak a dit, du reste qu'il n'a que le dire lui-

  2   même. Parce que, dans la ligne d'après -- ou dans la phrase d'après, c'est

  3   expliqué mais toujours est-il que ce n'est pas tout à fait clair ? Le mieux

  4   ce serait peut-être de lui demander de répéter.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai un peu accéléré, il est vrai, je

  6   m'en excuse. Je m'excuse auprès de tout le monde et notamment auprès du

  7   Juge Prandler. Je vais vite, oui, je vais vite. Je voulais dire : rien n'a

  8   été fait derrière le dos d'autrui. Toutes ces thèses étaient publiquement

  9   exposées et diffusées à l'occasion de cette réunion de Split, et là, il a

 10   été question à cette réunion-là de la cantonisation de la Bosnie-

 11   Herzégovine. Donc il a été créé des commissions qui étaient censées

 12   débattre de tout ceci. Mais il n'y a pas de plan secret, tout ceci a été

 13   présenté de façon publique, et je l'ai indiqué dans le livre que j'ai

 14   montré ici, à savoir qu'à toute une série de réunions qui, le 25, parce

 15   qu'il y a eu bombardement le 25 et le la JNA avait voulu tuer Tudjman,

 16   Mesic, et Markovic, et le parlement croate adopte une déclaration relative

 17   à l'indépendance qui a été mise en souffrance pendant trois mois suite à la

 18   demande de la communauté internationale et il a été débattu de la chose en

 19   parallèle avec l'agression.

 20   Alors la chose a été clairement dite, il n'y a pas été question d'une

 21   grande-Croatie et on n'en a pas eu la moindre des pensées du point de vue

 22   politique, et bien que je n'ai pas fait, à l'époque, partie du

 23   gouvernement, en ma qualité d'homme qui a vaqué à ce type d'occasion, j'ai

 24   lu pas mal de choses à ce sujet et j'en savais long à ce sujet aussi.

 25   M. KOVACIC : [interprétation] Avec l'autorisation des Juges de la Chambre,

 26   je vais rappeler au général Praljak qu'il y a eu une rectification en

 27   cause. Vous avez parlé d'une grande Herzégovine, d'une grande Bosnie-

 28   Herzégovine et à qui appartiendrait cette Bosnie-Herzégovine majorée, pour


Page 42984

  1   qu'on rectifie le compte rendu.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu deux plans de mis sur pied. Un plan

  3   serbe, qui a été rédigé et mis en œuvre, c'est la plateforme de leur

  4   académie dont on a parlé. Puis il y a eu la guerre.

  5   Il y a aussi la déclaration islamique qui, au travers de la structure du

  6   SDA, avait exprimé comme désir qui visait donc à faire de la Bosnie-

  7   Herzégovine un pays islamiste. Ce sont deux plans de publiés. La Croatie

  8   n'a rien eu de similaire ni à peu près semblable. Il ne s'est pas comporté

  9   de la sorte de ce point de vue-là à aucun point de vue, dans aucun détail.

 10   Je répète qu'on a rien fait derrière le dos d'autrui. Tout a été débattu

 11   avec la participation de M. Alija Izetbegovic à l'occasion des réunions des

 12   présidents des présidences des différentes républiques. Or, ces réunions,

 13   comme vous avez pu le voir, elles ont été au nombre de 40 et quelques.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

 15   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Général, je crois que vous avez de nouveau jeu de documents, en tout

 17   cas, le suivant, et ces documents sont classés dans l'ordre dans lequel je

 18   vais les aborder avec vous.

 19   Premier document du classeur, P 00734. En tout cas, ce serait le numéro,

 20   Monsieur le Président, permets-moi de vous informer de ceci, ce jeu de

 21   document concerne en gros le thème du conflit armé international. Je crois

 22   qu'on peut dire que ce sujet ne pouvait pas se limiter à un seul jeu de

 23   documents.

 24   Document du 12 novembre 1992, on semble avoir votre signature. C'est bien

 25   votre signature; vous la reconaissez ?

 26   R.  Oui, je reconnais cela.

 27   Q.  C'est bien la lettre que vous envoyez à Ivan Cermak, ministre adjoint à

 28   la Défense de la République de Croatie, vous écrivez à propos du colonel


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  1   Siljeg. Donc vous dites qu'il est, et je le cite :

  2   "Colonel de l'armée croate qui est maintenant dans la 115e et qui est

  3   aujourd'hui commandant de la zone opérationnelle de l'Herzégovine du nord-

  4   ouest, qui est sur la ligne de front depuis le 1er février."

  5   Puis vous mentionnez sa solde, vous voulez vous assurer que le salaire

  6   qu'il reçoit est conforme au règlement de la République de Croatie, et vous

  7   dites que :

  8   "Il faut payer le solde de cette solde."

  9   Ça ne porte pas ce jour-là, le 12 novembre 1992; le colonel Siljeg c'était

 10   bien le colonel de la zone opérationnelle de l'Herzégovine du nord-ouest du

 11   HVO ?

 12   R.  C'est exact, je pense que c'est exact.

 13   Q.  La date est celle du 12 novembre, c'est peu de temps après les

 14   événements de Prozor peu de temps après la chute de Jajce, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous dites ici qu'il est sur la ligne de front depuis le 1er février.

 17   Quand vous faites référence à la ligne de front est-ce que vous faites

 18   référence à la ligne de front qui se trouve à l'intérieur de la République

 19   de Bosnie-Herzégovine ?

 20   R.  Ça je ne le peux pas vous le confirmer au juste, si c'était le premier

 21   ou le 2, en février 1992. Je ne sais pas ce qu'il pourrait faire à ces

 22   dates-là. Peut-être devait-il être en Croatie, au front, mais je ne pense

 23   pas qu'au 1er février il ait pu être sur les premières lignes de front en

 24   Bosnie-Herzégovine parce qu'il n'y avait pas eu de première ligne.

 25   M. KOVACIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur, il y a une erreur de

 26   traduction. Je ne suis pas convaincu que ce soit exact, parce que le texte

 27   original dit :

 28   "Sur le champ de bataille, à la date du 1er février."


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  1   La traduction anglaise dit que :

  2   "Sur la ligne de front et au champ de bataille," et aux lignes de

  3   front ce n'est pas pareil. Merci.

  4   M. STRINGER : [interprétation]

  5   Q.  Général, ce qui est dit ici c'est que, quand il était commandant de la

  6   zone opérationnelle d'Herzégovine du nord-ouest, en tout cas, en novembre

  7   1992, il était payé par l'armée croate.

  8   Etes-vous en état de confirmer que c'était bien l'armée croate en

  9   République de Croatie qui a continué à payer la solde du colonel Siljeg, à

 10   compter de cette date ?

 11   R.  A ce moment-là, Siljeg, de façon évidente, nous fait savoir qu'il ne

 12   recevait pas régulièrement. Il était censé toucher un salaire par le biais

 13   du ministère de la Défense de la République de Croatie, en sa qualité de

 14   volontaire. Sur les théâtres de combat en Bosnie-Herzégovine.

 15   Q.  Vous parlez maintenant de volontaire. Nous allons revenir à ce sujet.

 16   Est-il vrai que n'importe qui, parmi les volontaires, comme vous dites, qui

 17   venaient de la République de Croatie pour combattre en Bosnie-Herzégovine

 18   que ces volontaires ont toujours été payés par le ministère de la Défense

 19   de la République de Croatie ?

 20   R.  Pas tous, mais la majorité des volontaires venus de l'armée croate qui

 21   s'étaient donc portés volontaires pour aller défendre la Bosnie-Herzégovine

 22   de leur plein gré parce qu'ils étaient originaires de là-bas. Siljeg est

 23   d'origine de Bosnie-Herzégovine, il est originaire de Bosnie-Herzégovine,

 24   donc des Musulmans et les Croates avaient le droit de garder le salaire

 25   qu'ils touchaient jusque-là.

 26   Q.  Général, je vais vous demander de sauter un document pour regarder le

 27   document P 01332. Nous avons ici un document du 27 janvier 1993 qui

 28   provient d'un certain colonel Tomislav Hasic-Alisic, et en page 2, vous


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  1   allez le voir, vous avez une pièce jointe. C'est une déclaration des

  2   indemnités de guerre, et nous trouvons votre signature.

  3   Ce sera ma première question : est-ce que vous reconnaissez votre

  4   signature, en bas de page 2, là où on a un tableau qui reprend les

  5   différentes indemnités ?

  6   R.  C'est exact; c'est bien ma signature. J'ai prié au sujet de ce groupe

  7   qui était parti défendre la Bosnie-Herzégovine. Donc c'est à ma demande,

  8   suite à ma propagande à moi que ça s'est fait. Mais il faut rectifier.

  9   C'est P 001332. Il faut rectifier au compte rendu. Or, il y a un 132 donc

 10   il manque un "3" du moins sur ce que j'ai pu voir.

 11   Q.  Vous avez raison, il s'agit du document P 01332. C'est donc le bon

 12   document que vous avez sous les yeux. Veuillez prendre la première page de

 13   cette pièce. Il s'agit de la lettre de la demande du colonel et il envoie

 14   cette demande à M. Susak.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Une remarque à propos

 16   du compte rendu d'audience. Page 84, ligne 85, la première ligne, je pense

 17   que M. Praljak a dit : "Après mes activités de propagande;" c'est bien cela

 18   ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était donc des prières de ma part et le

 20   résultat de ma propagande à moi, oui.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est ce que vous avez dit. Merci.

 22   M. STRINGER : [interprétation]

 23   Q.  Revenons à la première page, s'il vous plaît, première page de la pièce

 24   P 01332. C'est une lettre du colonel qui transmet votre demande à vous. Il

 25   la transmet au ministre Susak. Il demande de la part de M. Susak

 26   l'approbation des indemnités de guerre que les gens ont droit de toucher et

 27   il fait référence à plusieurs zones de combat. Nous allons revenir à ça

 28   plus tard mais si je me souviens bien ce que vous avez dit, il y avait


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  1   plusieurs champs de bataille ou le front du sud, le front méridional. C'est

  2   une façon de faire référence à une partie de l'Herzégovine où il y avait

  3   des combats opposant les Croates et les Musulmans; c'est bien cela ?

  4   R.  Non, ce n'est pas exact.

  5   Q.  Lorsqu'on voit une référence au front méridional, est-ce que cela fait

  6   référence à tel ou tel lieu de Bosnie-Herzégovine ?

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Nous reviendrons à ce sujet et je vous donnerai l'occasion de nous

  9   préciser ce front méridional. J'ai plusieurs documents qui portent sur ce

 10   point. Nous allons revenir à cela plus tard. Ici ce qui est dit en tout cas

 11   ce que le colonel dit c'est qu'il ne vous -- il vous demande d'approuver le

 12   paiement des indemnités auxquelles ont droit les combattants de la zone de

 13   bataille du sud. Ça a été envoyé partant de votre ordre du ministère de la

 14   Défense, comme la pièce jointe le prouve. Il dit ensuite ceci, je le cite :

 15   "Même si nous sommes sans arrêt sur la première ligne de front en

 16   Herceg-Bosna, nous avons été déployés là par le commandant de la zone de

 17   bataille méridional, le général Janko Bobetko."

 18   Est-ce que ceci ne confirme pas qu'il y avait des membres de l'armée

 19   croate, de présents en Herceg-Bosna en janvier 1993 et que ces hommes

 20   étaient là, comme c'est dit ici, sur ordre du ministère de la Défense ?

 21   R.  Non. D'abord, ils ont été intégrés à cela suite à un ordre du ministre

 22   adjoint, le général Slobodan Praljak. Donc c'est moi qui les ai envoyés là-

 23   bas. Le général Bobetko, lui, les a reçus, accueillis parce que - je le

 24   répète - il importait, il importait énormément de faire en sorte que les

 25   volontaires qui iraient défendre la Bosnie-Herzégovine et c'était une

 26   condition sine qua non aux fins de faire en sorte qu'en cas de décès leurs

 27   familles qui aient leurs dus à savoir suite au décès ou à des blessures

 28   qu'il y ait des garanties par la Croatie comme si c'était des soldats de la


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  1   Croatie. Ils sont portés volontaires. Je les ai trouvés suite à "une

  2   propagande" - entre guillemets - de ma part et je les ai envoyés là-bas

  3   parce qu'ils le voulaient et je demande à ce qu'ils perçoivent des

  4   salaires, des émoluments. 

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Je crains, une fois de plus, qu'une partie de

  6   perdu parce qu'il y a eu un malentendu entre le général Praljak et mon

  7   confrère du fait d'une erreur de traduction. Parce que le document

  8   original, P 1332 dit :

  9   "Envoyez suite à ordre de votre part, le ministre adjoint, général de

 10   division, Slobodan Praljak."

 11   Or, dans la version anglaise, ça n'existe pas. La version anglaise

 12   dit :

 13   "Qui ont été envoyés," là, partant de votre ordre, de l'ordre du

 14   ministre de la Défense.

 15   On peut en tirer la conclusion, donc on a omis le général Praljak dans la

 16   version traduite. Dans l'original, il est mentionné, et le général Praljak

 17   a dit lui-même "que c'était suite à sa demande à lui" que ça s'était fait. 

 18   M. STRINGER : [interprétation] Je remercie Me Kovacic de son intervention.

 19   Je vais peut-être demander au général de lire la première phrase dans

 20   l'original.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 22   L'ACCUSÉ PRLIC : [interprétation] -- peut-être simplement une question de

 23   traduction. En croate, il est écrit : "A/A."

 24   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, mais je

 25   voulais demander au témoin de lire le document pour qu'il n'y ait pas de

 26   commentaire sur commentaire sur ce que veut dire le document. Est-ce qu'on

 27   peut lire le document en original, si M. Prlic se souvient bien, on peut

 28   demander au témoin de lire en croate et nous allons entendre la traduction.


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, je voulais moi-même poser la

  2   question, mais M. Prlic l'a posée. Alors je ne sais pas si vous, vous

  3   l'occultez. Mais vous remarquez que, dans le document en B/C/S, il y est

  4   marqué à la main : "A/A," et puis une phrase en B/C/S et je lis "HVO."

  5   Alors c'est important, et à ce moment-là, M. Praljak peut peut-être nous

  6   lire ce que ça veut dire.

  7   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Ça n'a pas été traduit en anglais, cette

  8   mention, cette phrase --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Cette mention n'a pas été traduite en anglais, vous

 10   le voyez sur le texte, ça je l'avais remarqué. Alors M. Praljak, pouvez-

 11   vous nous dire ce qui est écrit à la main.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] "Salaire au sein du HVO." Alors je ne vois pas

 13   ce qui est écrit juste au début, enfin je crois comprendre qu'ici il est

 14   question de les payer pour ce qui n'est pas payable par le HVO.

 15   M. STRINGER : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Praljak, pourquoi ne pas continuer à lire la première partie

 17   dactylographiée pour en terminer ?

 18   R.  Alors je donne lecture :

 19   "Nous nous adressons à vous avec une requête. Celle d'approuver le

 20   paiement d'allocation de guerre qui nous revienne en notre qualité de

 21   combattant au théâtre de guerre sud, puisque envoyés suite à votre ordre,

 22   celui du ministre adjoint de la Défense, général de division Slobodan

 23   Praljak, chose qu'on peut voir dans la documentation ci-jointe."

 24   C'est donc moi qui ai envoyé ces gens là-bas, Slobodan Praljak. C'est ce

 25   que je vous déclare.

 26   Q.  Question suivante, Général, en haut à gauche, il est fait référence à

 27   un groupe d'officiers et de soldats de la 101e Brigade HV et puis on a un

 28   R. Qu'est-ce que ça veut dire ce R, Brigade R ?


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  1   R.  "RR, réserve, réserviste," brigade de réserve. Donc le 27 janvier, il a

  2   déjà des combats qui ont pris fin en Croatie, il y a eu démobilisation et

  3   il y a eu beaucoup de gens qui s'étaient portés volontaires auprès de moi,

  4   qui étaient venus me voir à cet effet. Je connaissais les hommes de cette

  5   brigade, parce que pendant un certain temps ils s'étaient battus non loin

  6   de Sisak, et je pense qu'il y a des parties de cette unité qui étaient chez

  7   moi à Sunja. Je connaissais donc ces gars, et eux étaient disposés à aller

  8   défendre la Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Quand ils étaient là-bas, attendez question suivante. Ici, il est dit,

 10   vers la fin du texte :

 11   "Nous sommes de façon continue sur la première ligne de front en Herceg-

 12   Bosna…"

 13   Est-ce que vous savez exactement où ces soldats étaient déployés quand on

 14   dit la première ligne de front ? Est-ce que vous savez à quel endroit il

 15   est ici fait référence ?

 16   R.  Je ne sais pas.

 17   Q.  Dernière question à propos de ce document : quand ces soldats étaient

 18   en Herceg-Bosna, confirmation, ils étaient toujours payés par le ministère

 19   de la Défense de Croatie qui faisait partie des personnes qui se trouvaient

 20   sur la fiche de paie, disons ?

 21   R.  C'était censé être de la sorte. Je ne sais pas si chacun a fait son

 22   devoir. Mais, ici, il est dit qu'il y en a un qui a reçu de l'argent, donc

 23   il a touché ses allocations. Ils étaient en Herceg-Bosna et ceci prouve une

 24   fois de plus qu'il ne s'agissait pas de brigade. Parce que, quand on parle

 25   de 12 hommes, il ne peut pas être question d'une brigade.

 26   Q.  Très bien. Nous allons avancer maintenant --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- regardez le document que vous avez

 28   signé, qui est le tableau, où les 12 ont une allocation mensuelle,


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  1   apparemment de 60 000 dinars. Mais, tout en haut - et ça n'a pas été

  2   traduit en anglais - il y a des mots, il y a des phrases dans votre langue;

  3   est-ce vous qui avez écrit cela ou si ce n'est pas vous, qu'est-ce que ça

  4   veut dire, ou bien c'est illisible ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour être tout à fait sincère, ce n'est

  6   certainement pas moi qui l'ai écrit et j'ai du mal, j'ai du mal à lire.

  7   J'ai aussi beaucoup de mal à lire l'écriture d'autrui avec la meilleure des

  8   volontés du monde, j'essaie en haut, c'est Vujic qui a dû signer. Peut-être

  9   parce qu'il a reçu, il a perçu une somme. Monsieur le Juge Antonetti, je ne

 10   peux pas vous dire de quoi il s'agit.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie.

 13   Q.  Général, nous pouvons passer au document suivant qui est le P01458. Il

 14   s'agit là d'un document qui est daté de 13 jours au plus tard, il s'agit de

 15   10 février 1993. Veuillez regarder ce document pendant quelques instants.

 16   Je ne sais pas si vous l'avez déjà vu; est-ce que vous reconnaissez ce

 17   document ?

 18   R.  Il s'agit certainement d'un document en bonne et due forme, mais vous

 19   ne me croirez peut-être pas. Je dois, cependant, vous dire que je ne l'ai

 20   jamais lu. Je ne m'occupais ni de la question de mon salaire ni de la date

 21   à laquelle il était versé. J'ai simplement dressé une procuration aux

 22   bénéfices de mon épouse pour qu'elle puisse retirer de l'argent à la

 23   banque.

 24   Q.  Donc ce document précise qu'à partir de cette date-là, nous savons que

 25   vous étiez un ministre de la Défense adjoint de la République de Croatie,

 26   et vous étiez également un général de division dans l'armée croate; c'est

 27   exact ?

 28   R.  Cela est exact, en effet.


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  1   Q.  Au cours de cette période, en février 1993, ceci peut de temps après

  2   les événements de Gornji Vakuf, je vais vous l'exprimer comme ceci, vous

  3   étiez toujours salarié de la République de Croatie lorsque vous étiez en

  4   Bosnie-Herzégovine, à savoir pendant des événements qui se sont déroulés à

  5   Gornji Vakuf, l'incident de Gornji Vakuf ?

  6   R.  Au moment des événements à Gornji Vakuf - et j'appelle cela l'attaque

  7   de l'ABiH, plus précisément, le blocage total du HVO - à partir du 16

  8   jusqu'au 23, comme je l'ai déjà dit, j'étais sur place et je recevais ma

  9   paye du ministère de la Défense, parce que je m'étais rendu sur place à la

 10   deuxième de Franjo Tudjman et d'Alija Izetbegovic.

 11   Q.  Avançons un petit peu et passons la fin de l'année 1993. Est-ce que

 12   vous étiez toujours sur la fiche de paye du ministre de la Défense croate

 13   pendant toute l'année 1993 jusqu'au 8 novembre 1993, disons ?

 14   R.  La réponse de très loin la plus probable est oui. Je suis presque sûr

 15   que oui. Mais puisque je ne me suis jamais penché sur les papiers pour voir

 16   quel était mon salaire, quand il arrivait et ce que faisait le service du

 17   personnel, je l'ignore. Je ne peux dire avec certitude. Mais le plus

 18   probable, c'est que l'armée croate effectivement procédait à ces

 19   versements.

 20   Q.  Bien. Je souhaite préciser l'interprétation que je viens d'entendre. Je

 21   vais vous poser cette question-ci : Lorsque vous étiez commandant du HVO à

 22   l'état-major principal, étiez-vous salarié de la République de Croatie ?

 23   Est-ce que vous étiez toujours salarié ou sur la fiche de paye de la

 24   République de Croatie pendant que vous étiez commandant du HVO à l'état-

 25   major principal ?

 26   R.  Il est extrêmement probable que oui, bien que, comme je vous l'aie dit,

 27   je ne suivais pas tout cela de près. J'ai probablement continué à

 28   bénéficier du même salaire une fois que je me suis rendu sur place et au-


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  1   delà. Soit dit en passant, mon salaire était inférieur à celui du

  2   commandant d'un bataillon de la Garde nationale, car j'étais au livre de

  3   paye à titre civil.

  4   Q.  Donc au niveau du compte rendu -- est-ce que je peux préciser cela ?

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Il y a manifestement deux fois la même

  6   question deux fois la même réponse pour cette raison, car au compte rendu

  7   d'audience, en page 92, ligne 8, il faudrait lire que le général Praljak

  8   était au livre de paye du HV comme le compte rendu ne l'indique.

  9   LE TÉMOIN : Plutôt du ministère et non pas du HVO.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Oui, en effet, c'est pour ça qu'il y a deux

 11   fois la même question qui est répétée.

 12   M. STRINGER : [interprétation] En réalité, je suis encore un peu plus

 13   confus maintenant.

 14   Q.  Général, je regarde la ligne 7, page 92 et vous avez dit :

 15   "Il est fort probable que le HVO règle les salaires."

 16   C'est ce que nous avons au compte rendu, mais je vous ai entendu dire "HV"

 17   et non pas "HVO."

 18   R.  Il est exact de dire que très probablement c'est le ministère de la

 19   Défense, et non pas l'armée croate qui me payait. J'avais un salaire bien

 20   inférieur, car j'étais dans la branche civile. Cependant, je ne suis pas à

 21   100 % sûr qu'il n'y ait pas eu, à un moment donné, un changement. Cela

 22   arrivait sur mon compte en banque. Je ne m'en suis jamais occupé pendant

 23   les années de guerre. C'est mon épouse qui se débrouillait avec tous ces

 24   aspects-là, donc il est extrêmement probable que je touchais un salaire au

 25   sein du ministère de la Défense de la République de Croatie. C'est aussi

 26   précis que cela peut l'être.

 27   Q.  Merci. Général, la pièce suivante est un des comptes rendus

 28   présidentiels. Le numéro de cette pièce est le P 03112. Il s'agit là d'une


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  1   réunion du conseil de Défense de sécurité national, le VONS de la

  2   République de Croatie, le 2 juillet 1993. Le nombre de personnes qui

  3   assistent à cette réunion est cité. Je souhaite vous poser des questions à

  4   ce propos.

  5   J'avance un petit peu dans le temps maintenant. Nous étions au mois de

  6   février 1993, maintenant nous sommes au 2 juillet 1993. Donc très peu de

  7   temps après les événements, à savoir l'attaque ou l'offensive lancée par

  8   l'ABiH le 30 juin 1993. C'est le président Tudjman qui préside cette

  9   réunion. Et un des éléments à l'ordre du jour, si vous regardez à la page

 10   2, c'est la "Politique de la Croatie à l'égard de la Bosnie-Herzégovine."

 11   Il poursuit en expliquant en quoi consiste la politique en question et ce

 12   qu'elle avait été. Regardez la page 3. Il parle de critiques qui émanent

 13   d'autres personnes eu égard à cette politique et eu égard de ce qu'a été

 14   cette politique. A la page 4 - je suis maintenant au haut de la page - il

 15   remarque que parmi le HDZ au pouvoir, ainsi que des membres du conseil qui

 16   ne soutenaient pas de façon unanime la politique qui a été remise en place,

 17   si vous voulez, je cite :

 18   "En mettant en place ceci, j'écoute les membres du conseil et d'autres,

 19   néanmoins j'ai rendu cette décision et je pensais que ceci concordait aux

 20   intérêts historiques du peuple croate et de l'Etat croate."

 21   Maintenant nous allons passer à la page 5. Tudjman parle de la façon dont

 22   certaines personnes avaient, en réalité, demandé au président Tudjman de

 23   remplacer le ministre Susak de façon à diminuer l'influence de Mate Boban

 24   sur les Croates d'Herzégovine. A la page

 25   6 :

 26   "…parce que cette politique croate envers les Musulmans a eu des résultats

 27   désastreux et menace l'existence de la Croatie."

 28   Et c'est Tudjman qui parle de critiques émanant d'autres personnes, ensuite


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  1   il poursuit en disant :

  2   "Et ils ont conclu qu'ici et à l'étranger il n'y a eu ni confirmation ni

  3   infirmation de telles déclarations ou rapports."

  4   Donc ma première question à propos de ce compte rendu présidentiel est

  5   celle-ci : étiez-vous au courant à l'époque qu'il y avait, en réalité, des

  6   critiques sévères même parmi les dirigeants croates en Croatie et ailleurs,

  7   à l'égard de la politique menée par Tudjman en ce qui concernait la

  8   question de la Bosnie-Herzégovine ?

  9   R.  J'en avais connaissance, oui.

 10   Q.  Veuillez passer à la page 50 du compte rendu. Donc nous allons sauter

 11   une partie du texte, parce que ce qui m'intéresse davantage, ce sont les

 12   discussions sur la façon dont cette politique doit être menée à l'avenir,

 13   donc à partir de ce moment-là.

 14   En haut de la page -- en bas de la page 50, vous pouvez lire que le

 15   ministre de la Défense Susak prend la parole et parle de l'attitude et de

 16   l'opinion de différents pays, les Européens, la Grande-Bretagne, les Etats-

 17   Unis. En haut de la page 2, il dit :

 18   "C'est la raison pour laquelle je pense qu'il nous faut faire ce qu'il nous

 19   faut faire en Bosnie-Herzégovine, ensuite les déclarations publiques

 20   parlent toujours d'une Bosnie-Herzégovine unifiée, mais il faut toujours

 21   insister sur le fait que nous allons tout faire pour protéger les intérêts

 22   des personnes croates qui se trouvent là. Les Croates qui y vivent le

 23   comprendront. Ce que nous faisons, je crois, c'est ce qui est opportun en

 24   matière de politique."

 25   Ensuite la discussion se poursuit. Je vais sauter une partie du texte et

 26   passer à la page 54 et ce que le président Tudjman dit. Il dit :

 27   "Bien, Messieurs, terminons-en.

 28   "Pour ce qui est des sanctions, je ne pense pas que dans un tel cas


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  1   ceci constitue une véritable menace. Même avec le gouvernement de Greguric,

  2   même avec le gouvernement actuel, les premiers ministres m'ont appelé et

  3   ont pris des mesures. En même temps, on connaissait mon évaluation de la

  4   situation. Je crois que cette menace est encore plus infime qu'avant, mais

  5   il faut faire attention de ne pas leur donner un prétexte pour mener leur

  6   politique. Clairement, c'est quelque chose que nous ne devons pas faire,

  7   mais en même temps, nous devons prendre des mesures pour protéger les

  8   intérêts croates au plan territorial également. Vous deux, le ministre

  9   Susak et le général Bobetko, veuillez vous occuper de cela et rencontrer

 10   les dirigeants de l'Herceg-Bosna avec le général Praljak, Petkovic,

 11   l'ambassadeur Sancevic et les dirigeants qui se trouvent là, avec Boban et

 12   Prlic, pour parler très précisément de ce qui devrait être fait. Mais cela

 13   va sans dire que vous ne devez pas mener cette opération de telle sorte à

 14   induire une participation directe. Ce que j'ai dit un peu plus tôt, j'ai

 15   parlé de commerce, j'ai parlé de paiements, je ne sais pas, ne donnez pas

 16   l'impression à ces personnes qu'on les laisse à leur sort."

 17   Donc lorsque je vous ai lu ces extraits, nous parlons de critiques

 18   émanant de l'extérieur, l'éventualité de sanctions qui seraient dues à une

 19   politique croate, le ministre Susak qui évoque ce qui est opportun en

 20   matière de politique, et d'après moi, ceci semble indiquer qu'il y a une

 21   politique parallèle - haut de la page 52 - que ce qui est évoqué ici par

 22   Susak ainsi que par le président Tudjman, à la page 55, est une politique

 23   qui a deux axes, alors qu'en public on va dire certaines choses. En

 24   réalité, dans les coulisses, il y aura des activités, des discussions, des

 25   politiques croates menées par vous ainsi que d'autres personnes, comme

 26   c'est indiqué ici, qui seront différentes de ce qui est exprimé dans les

 27   déclarations publiques afin d'éviter les sanctions. Est-ce que vous êtes

 28   d'accord avec moi sur ce point ?


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  1   R.  Je suis en désaccord complet avec vous. Avant cela, Gojko Susak

  2   dit et je cite : "Je pense que la Grande-Bretagne, elle aussi, tout comme

  3   le reste des Etats européens, y compris d'ailleurs les Etats-Unis, sont à

  4   la recherche du premier prétexte venu afin de nous loger tous à la même

  5   enseigne et de nous imposer à nous les mêmes sanctions qu'aux Serbes."

  6   Donc la politique, Monsieur Stringer, menée par la France, la Grande-

  7   Bretagne, les Etats-Unis, était perfide. Ils défendaient leurs propres

  8   intérêts sur place comme ils le font partout ailleurs dans le monde. Ils

  9   fabriquaient une vérité concernant le HVO qui ne correspondait pas à la

 10   réalité. Ils exerçaient des pressions aux moyens de ces contrevérités et de

 11   sanctions envers la Croatie. Susak dit :

 12   "Entendu, nous allons nous adapter, mais nous ne pouvons pas

 13   abandonner ce qui, en vertu du droit et par Dieu, nous appartient. Nous

 14   défendons la Bosnie-Herzégovine. Nous avons versé notre sang pour elle.

 15   Nous nous battons pour une Bosnie-Herzégovine dans l'intégralité de son

 16   territoire, mais également pour les intérêts du peuple croate dans cette

 17   même Bosnie-Herzégovine. La politique qui est menée, Monsieur Stringer,

 18   c'est la politique de la force. Or, la force n'est ni la vérité ni la

 19   morale ni la justice."

 20   Q.  Donc le défi a consisté à continuer à mener la politique croate en

 21   Bosnie-Herzégovine tout en dissimulant cela des représentants de la

 22   communauté internationale, les Européens, les Américains et les

 23   Britanniques, afin d'éviter les sanctions qui allaient s'ensuivre suite à

 24   la mise en œuvre de la politique croate en Bosnie-Herzégovine. Donc c'est

 25   quelque chose qu'il fallait dissimuler, c'est bien ce qui est évoqué ici,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, Monsieur Stringer. Il n'y avait rien à cacher. Ici on se demande

 28   jusqu'où on va courber l'échine pour satisfaire aux exigences de cette


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  1   politique de la force qui n'a rien dit au sujet de Konjic, rien dit au

  2   sujet du 9 mai à par des mensonges, rien au sujet des événements du 30

  3   juin. Donc cette même politique de la force produit des contrevérités alors

  4   que nous courbons l'échine jusqu'à ne plus pouvoir aller plus loin pour

  5   faire plaisir aux autres, tout simplement parce que quelqu'un dans la

  6   communauté internationale affirme que quelque chose est la vérité alors que

  7   c'est une contrevérité. C'est ainsi que les politiques internationales sont

  8   élaborées. Ce que je dis ici, en votre présence et devant cette Chambre,

  9   c'est que ce n'est pas la vérité. C'est ainsi que cela était présenté au

 10   public croate et je suis intervenu au sein du parlement croate, car eux se

 11   contentaient d'être assis. On donnait lecture de tout cela, mais ce n'était

 12   pas la vérité.

 13   Q.  Donc lorsque le président Tudjman dit : "Ne menez pas cette opération

 14   de façon à impliquer une participation directe," vous n'êtes pas d'accord

 15   avec moi pour dire que les travaux que vous et d'aucuns menaient, vous et

 16   Praljak, par exemple, et Petkovic en Bosnie-Herzégovine ne doivent pas être

 17   fait de façon directe de façon à provoquer des sanctions de la communauté

 18   internationale et une condamnation de cette dernière. Donc ceci devait être

 19   caché; c'est bien ce qu'il dit, n'est-ce pas ?

 20   R.  Mais nous n'avons rien à cacher. Quelle intervention directe ? Mais de

 21   quoi parlez-vous ? On n'a même pas donné deux bataillons. Vous avez juste

 22   choisi quatre phrases, alors excusez-moi. Je vais parler lentement.

 23   Q.  Général, je vais vous poser cette question-ci --

 24   R.  -- procéder en se fondant juste sur deux phrases. Je vous répondrais

 25   volontiers, mais je ne peux pas répondre à cette question où vous faites

 26   état d'une "ingérence." Il n'y a pas d'ingérence. A cette époque-là, il y a

 27   déjà 5 000 Moudjahidines. Ça, c'est une ingérence. Mais je vous en prie.

 28   Q.  Parlons de cela alors : Si la Croatie ne se mêle pas comme vous nous


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  1   l'avez dit, parlons alors du rôle que vous avez joué, puisque vous êtes

  2   parti porter votre concours à la Bosnie-Herzégovine à cette époque. Ceci se

  3   passe très peu de temps avant que vous n'assumiez le commandement de

  4   l'état-major principal. Je crois que déjà en juillet 1993, vous faisiez

  5   partie de l'opération militaire lancée dans la région de Boksevica, n'est-

  6   ce pas ?

  7   R.  Oui, à Boksevica, c'est exact.

  8   Q.  Mais vous étiez à tout moment en Bosnie-Herzégovine et votre travail

  9   consistait à vous assurer que la politique de Tudjman était menée à bien.

 10   Ça toujours été votre supérieur. Vous deviez répondre de vos actes devant

 11   lui, n'est-ce pas ? Donc c'était à vous de veiller à la mise en œuvre de sa

 12   politique.

 13   R.  Non, je mettais en œuvre la politique de l'Etat croate. Je n'ai pas été

 14   présent en permanence. Je me suis rendu sur place à des périodes très

 15   précisément déterminées en répondant à une impulsion qui était la mienne.

 16   Ce n'était pas toujours suite à un accord ou à une approbation ou même à

 17   une demande formulée par Tudjman ou qui que ce soit d'autre. Par exemple,

 18   lorsque j'y suis allé en 1992, les deux mois que j'y ai passés, je n'avais

 19   été autorisé par personne. Je suis parvenu à un accord avec Alija

 20   Izetbegovic et j'étais en contact avec lui. J'étais en contact avec son

 21   conseiller militaire et cela a toujours été fait pacifiquement, aussi bien

 22   à Mostar qu'à Prozor, en Bosnie centrale et à Vakuf. J'ai toujours agi de

 23   cette même manière et j'ai accompli mes devoirs.

 24   Q.  Lorsque vous étiez en Bosnie-Herzégovine, et je vais corriger ma

 25   question en fonction de ce que vous nous avez dit, vous mettiez en oeuvre

 26   la politique de la République de Croatie par opposition à une politique

 27   individuelle de M.

 28   Tudjman ?


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  1   R.  Je mettais en œuvre avant tout la politique qui était celle de la

  2   Bosnie-Herzégovine. Que ce soit dans les combats contre les Serbes ou dans

  3   l'aide à apporter aux réfugiés, aux blessés -- entendu. La question ne me

  4   permet pas de répondre correctement. C'était ma politique qui était menée

  5   parallèlement à celle de Franjo Tudjman et de la République de Croatie, de

  6   Gojko Susak, de Petkovic, et des autres.

  7   Q.  Donc les politiques que vous avez mises en place, vous étiez là

  8   justement pour les mener à bien sûr le terrain en Bosnie-Herzégovine,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  De la politique, si vous voulez. Je travaillais à des tâches tout à

 11   fait concrètes, apaiser tel ou tel conflit, venir en aide aux réfugiés, aux

 12   blessés. N'employons pas de grands mots, mais tenons-nous-en aux événements

 13   et au sens qui se cache derrière. Lorsqu'on tient une réunion pour ce qui

 14   est des armes à remettre à Tuzla, alors c'est de cela qu'il s'agit.

 15   Lorsqu'il y avait encore une autre réunion pour fournir des armes à

 16   Sarajevo, que ce soit en compagnie de Bruno Stojic ou tout seul, alors il

 17   s'agit d'armes à fournir à Sarajevo et de rien d'autre. Evitons de recourir

 18   à des grands mots par lesquels on essaie d'ajouter un sens aux événements

 19   qui n'y figurent pas.

 20   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que j'en ai

 21   terminé avec ce document. Peut-être que je pourrais garder le suivant pour

 22   demain.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Stringer, le Greffe m'informe

 24   que vous avez déjà utilisé deux heures et 45 minutes.

 25   Comme vous le savez tous, nous sommes d'après-midi demain. Nous nous

 26   retrouverons dans cette salle d'audience à 14 heures 15. Voilà.

 27   Sur ce, je souhaite à tous une bonne fin de journée.

 28   [Le témoin quitte la barre] 


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  1   --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le mardi 14 juillet

  2   2009, à 14 heures 15.

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