Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 44136

  1   Le mardi 1er septembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   tous.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 12   Merci.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce mardi, je salue M. Praljak, je salue Mmes et MM. les Avocats, je

 15   salue M. Pusic, M. Stojic, M. Petkovic, et M. Prlic. Je salue M. Stringer

 16   et M. Ferrara, et je salue également leurs collaboratrices. Je salue

 17   également toutes les personnes qui nous assistent.

 18   Nous allons donc poursuivre le contre-interrogatoire, et je donne la parole

 19   à M. Stringer.

 20   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour à

 23   toutes les personnes présentes dans la salle.

 24   Contre-interrogatoire par M. Stringer : [Suite]

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   R.  Bonjour, Monsieur Stringer.

 27   Q.  Mon Général, vous devriez avoir un dossier qui porte le numéro 7 sur

 28   lequel nous travaillions hier, et nous consultions la pièce P 01187. Hier,

Page 44137

  1   nous parlions du plan de paix Vance-Owen, et si je me souviens bien, nous

  2   étions tombés d'accord pour dire que, tout d'abord, au début du mois de

  3   janvier 1993, Mate Boban avait signé la totalité du plan de paix Vance-

  4   Owen, n'est-ce pas ?

  5   R.  Exact, je crois que cet accord a été conclu un peu avant le nouvel an,

  6   donc encore en 1992, et que Mate Boban, au nom de la délégation croate, a

  7   signé tout ce que la communauté internationale avait mis sur la table en

  8   fait d'accord de paix pour la Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Egalement en janvier, je crois que c'était le 10, Mate Boban -- ou

 10   plutôt, Alija Izetbegovic avait signé le cadre constitutionnel ou les

 11   principes constitutionnels de Vance-Owen, mais n'avait pas signé la carte.

 12   Est-ce que vous vous souvenez que c'était le cas ?

 13   R.  Il me semble que les choses ont été un peu différentes. Il a signé pour

 14   les provinces qui étaient majoritairement peuplées de croates d'une part ou

 15   de Bosniens, c'est-à-dire Musulmans de Bosnie, d'autre part. Par la suite

 16   ces provinces ont été appelées croate et musulmane, mais le terme n'est pas

 17   exact, bien entendu, en tout cas, ces provinces étaient en plus grand

 18   nombre. Il y avait quelques détails qui faisaient problème eu égard au mode

 19   de séparation, et au corridor de la Posavina en particulier, s'agissant des

 20   Serbes. Si je me souviens bien, il a dit qu'il avait signé les cartes, mais

 21   qu'il fallait contraindre les Serbes à signer également dans un délai

 22   déterminé, et que si cela ne se faisait pas, alors ils déchireraient ce

 23   qu'ils avaient signé. Voilà ce qu'il a dit.

 24   Q.  Si vous passez au paragraphe 8 de ce document qui porte sur la reprise

 25   des pourparlers à Genève le 10 janvier, au milieu de ce paragraphe, on

 26   parle du président de cette réunion, je pense que c'est Vance-Owen, et il

 27   est mentionné :

 28   "Ils ont noté que M. Mate Boban pour les Croates de Bosnie a accepté et

Page 44138

  1   signé les deux accords. Le président Alija Izetbegovic de la Bosnie-

  2   Herzégovine a accepté les principes constitutionnels dès qu'un accord

  3   concernant l'observation d'une cessation des hostilités; cependant, il

  4   n'avait pas accepté certaines des frontières provinciales qui avaient été

  5   proposées."

  6   Puis cela se poursuit en disant Radovan Karadzic pour les Serbes de Bosnie

  7   avait décidé de ne pas exprimer son opinion pour l'instant. Voilà, donc,

  8   mon Général, c'était la situation le 10 janvier, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, Monsieur Stringer, c'est exactement ce que je viens de dire,

 10   certaines des frontières proposées étaient encore en discussion. Il n'y

 11   avait pas de désaccord entre les Musulmans et les Croates, mais la

 12   séparation entre les provinces majoritairement croates et la détermination

 13   des provinces à majorité croate à majorité musulmane ne posaient pas

 14   problème.

 15   Q.  Ce n'est pas en fait dans les documents. Soit c'est la totalité, soit

 16   ce n'est aucune des frontières, il n'a rien signé concernant les

 17   frontières, n'est-ce pas ?

 18   R.  Il est écrit très exactement qu'il a refusé de signer certaines des

 19   frontières des provinces, ce qui veut dire qu'il y en a d'autres qu'il a

 20   acceptées; s'il a refusé d'en accepter certaines, cela veut dire qu'il en a

 21   accepté d'autres. J'affirme que ce qu'il a accepté c'était l'objet de

 22   l'accord entre les Croates et les Musulmans, et je suis au courant des

 23   discussions. Il y a des transcriptions du 15 janvier avec Vance-Owen

 24   également, où il a été discuté du corridor -- enfin, des grands corridors,

 25   des lieux de passage.

 26   Q.  Pour conclure sur ce point, étant donné qu'il s'agissait d'un accord

 27   tripartite, il n'y avait pas en fait d'accord du côté des Serbes de Bosnie.

 28   Nous pouvons être d'accord avec cela, n'est-ce pas ?

Page 44139

  1   R.  A ce moment-là, les Serbes ont simplement demandé une suspension de la

  2   conférence pour pouvoir se former un avis. Donc à ce moment-là, ils n'ont

  3   pas signé, mais cela n'a pas gêné pour la poursuite d'une bonne

  4   collaboration entre les Croates et les Musulmans de Bosnie. Sauf que je le

  5   répète encore une fois, Mate Boban disait : nous ne sommes pas favorables à

  6   la guerre.

  7   Q.  Merci, mon Général. Merci. Je voudrais passer au document suivant.

  8   C'est le plan à proprement parler. P 09852.

  9   R.  Quel est le document, je vous prie ?

 10   Q.  Document 9852. Donc, mon Général, il s'agit du rapport du Conseil de

 11   sécurité des Nations Unies du secrétaire général. Je voudrais préciser

 12   plutôt. Il s'agit du rapport du secrétaire général des Nations Unies et sur

 13   les activités de la Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie, et on

 14   parle de ce qui s'est passé à Genève -- ça porte la date du 6 janvier 1993.

 15   J'aimerais passer en revue certaines parties de ce document. Mon Général,

 16   vous ne trouvez pas la tard en croate. Etant donné qu'il s'agit d'un

 17   document officiel des Nations Unies, ce n'est pas un document que nous

 18   avons traduit, et nous n'allons pas consacrer beaucoup de temps à ce sujet.

 19   A la page 2 de ce document, mon Général, au paragraphe 11, on fait

 20   référence à un projet de carte, ainsi que des principes constitutionnels --

 21   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur

 22   Stringer. Est-ce que nous sommes dans le classeur numéro 8 ?

 23   M. STRINGER : [interprétation] Non, nous sommes dans le classeur numéro 7,

 24   Monsieur le Juge.

 25   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je ne le trouve pas. C'est de ma

 26   faute.

 27   M. STRINGER : [interprétation] Cette -- dans le milieu du classeur. C'est

 28   un document que j'avais sauté hier. Document 9852.

Page 44140

  1   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci.

  2   M. STRINGER : [interprétation]

  3   Q.  Mon Général, à la page 2 de ce document, paragraphe 11, on fait

  4   référence au projet de carte et aux principes constitutionnels, qui

  5   figurent dans ce qu'on appelle dans ce document des annexes, et puis à la

  6   page suivante, paragraphe 16, on fait référence à des parties introductives

  7   et des annexes concernant les points suivants, il y a sept points au total.

  8   Premièrement :

  9   "Les mesures pour réaliser une cessation inconditionnelle des hostilités.

 10   "Une mesure pour le rétablissement des infrastructures.

 11   "Des mesures pour l'ouverture de certains itinéraires.

 12   "Des dispositions pour la séparation des forces."

 13   Cinquièmement :

 14   "La démilitarisation de Sarajevo."

 15   Sixièmement :

 16   "Des mesures pour le contrôle des frontières de l'ABiH."

 17   Numéro 7 :

 18   "Le retour des forces dans des provinces précises."

 19   Mon Général, j'aimerais parler brièvement de certaines de ces

 20   mesures. Si vous consultez une des annexes, qui est à la page 31 du

 21   document, vous avez le déroulement des événements; cela fait partie de

 22   l'annexe 4 concernant la séparation des forces, et le déroulement des

 23   événements ici prévoie les éléments suivants :

 24   "Un cessez-le-feu, sous l'égide d'une cessation globale des

 25   hostilités."

 26   Parlons-en rapidement. On parle d'une cessation globale des

 27   hostilités. Nous savons que Boban et Izetbegovic avaient signé le volet

 28   cessez-le-feu, ou cessation des hostilités, à compter du 10 janvier 1993.

Page 44141

  1   Mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi, mon Général, pour dire qu'il

  2   n'y avait pas en fait pas de cessation globale des hostilités étant donné

  3   que les Serbes de Bosnie n'avaient pas signé cet accord ?

  4   R.  Il est exact que les Serbes de Bosnie -- je ne sais pas ce qu'ils

  5   avaient en tête à ce moment-là, mais enfin ils n'ont pas signé les

  6   documents. Je ne sais pas s'ils ont signé l'arrêt des hostilités.

  7   Q.  Très bien. Ensuite nous avons :

  8   "La constitution et la patrouille d'une ligne de démarcation par le

  9   personnel de la force de protection des Nations Unies."

 10   Cet aspect n'avait pas été mis en place à la mi-janvier 1993, n'est-

 11   ce pas ?

 12   R.  Non, en effet. Pour autant que je le sache, il fallait changer la

 13   fonction des forces de paix internationales pour qu'elles puissent le

 14   faire, et eu égard à la Croatie, c'était la même chose pour le HVO, elles

 15   ont toujours demandé de l'aide. Comme vous avez pu le constater plus tard à

 16   Mostar, si un cessez-le-feu était signé, donc une aide était demandée pour

 17   qu'une tierce force contrôle l'application de ce cessez-le-feu et qu'on

 18   puisse voir qui violait le cessez-le-feu. Mais, malheureusement, un mandat

 19   des forces des Nations Unies n'était pas tel qu'ils puissent leur permettre

 20   de le faire.

 21   Q.  Le troisième point dans ce déroulement des événements est :

 22   "Le retrait de tous les systèmes d'armes bien précisés émanant de toutes

 23   les parties."

 24   A la mi-janvier, ceci ne s'était pas encore produit, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non, non, cela n'a pas été atteint, n'a pas été obtenu, pour autant que

 26   je le sache.

 27   Q.  Je vais sauter les deux derniers éléments, il s'agit de déroulements

 28   des événements, et je vais -- c'est à la page 36 de ce document. Il s'agit

Page 44142

  1   de l'annexe 7 du plan de paix Vance-Owen de janvier 1993 :

  2   "Il nous est donné de permettre le processus de retour à la normale et

  3   comme élément de suivi direct de la cessation des hostilités et de la

  4   séparation des forces, d'un retour des forces à les provinces, préciser

  5   qu'il sera réalisé. Ceci pourra commencer dans le cadre du retrait des

  6   armes lourdes mais compte tenu des conditions météorologiques en hiver, il

  7   sera difficile de fixer une date précise pour la fin de ce processus;

  8   cependant, nous devrions tabler sur un retour des forces dans les 45 jours.

  9   "Cet aspect du déroulement des événements sera coordonné avec une

 10   démobilisation des forces en présence qui fera l'objet d'un accord.

 11   "La force de protection des Nations Unies et la Mission de surveillance de

 12   la Communauté européenne assurera le suivi du retrait de ces forces

 13   conformément aux autorités provinciales et nationales."

 14   Donc, mon Général, d'après le plan de Vance-Owen de janvier 1993, le retour

 15   des forces des provinces précises était envisagé mais ce n'était envisagé

 16   que dans un horizon de 45 jours après la signature de l'accord par toutes

 17   les parties concernées et ceci entrerait dans le cadre d'une démobilisation

 18   faisait l'objet d'un accord sous la surveillance des Nations Unies. Ma

 19   question, mon Général, est la suivante : lorsque le HVO de HZ HB, c'est-à-

 20   dire Bruno Stojic et le brigadier Petkovic, avait émis ces ordres et ces

 21   décisions dont nous avons parlées sur la subordination et le retrait des

 22   forces vers des provinces précisément nommées, ils avançaient beaucoup trop

 23   vite car aucune des conditions prévues dans le plan Vance-Owen ne s'étaient

 24   encore produites, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non, Monsieur Stringer. Je répète que ce document a été signé avec M.

 26   Izetbegovic ou plutôt conclu, et donc les choses étaient sur les rails

 27   exactement ce qui était prévu dans ce document, à savoir que les forces qui

 28   sont venues de l'extérieur dans un canton ou une province déterminée

Page 44143

  1   devaient retournées dans leurs lieux d'origine, et il n'était absolument

  2   pas prévu que le plan soutenu par les Croates et les Musulmans ne commence

  3   pas à être appliqué. Je me rappelle que le 11 mai, ou à peu près à ce

  4   moment-là, l'assemblée de Bosnie-Herzégovine a adopté le plan Vance-Owen -

  5   et je parle toujours des Croates et des Musulmans de Bosnie -

  6   malheureusement, c'est des actions offensives ont été lancées c'est en

  7   raison de l'action des Serbes.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   R.  Mais, par conséquent, tout était conforme aux pourparlers, aux accords,

 10   aux signatures qui ont eu lieu.

 11   Q.  Bien. Mon Général, ce que vous nous dites ici c'est que les décisions

 12   et les ordres de subordination et de retrait des forces, que nous avons

 13   abordés hier, n'étaient pas publiés conformément au plan de paix Vance-Owen

 14   mais avaient été émis suite à un accord oral qui avait été conclu à Zagreb

 15   avec M. Izetbegovic; c'est ce que vous nous dites ici ?

 16   R.  Je vous ai décrit exactement de quelle façon on en est arrivé à cet

 17   accord. Je sais que cet accord faisait partie des documents signés en

 18   rapport avec le plan Vance-Owen. Donc il n'y avait aucune raison que cette

 19   partie du plan que les Serbes s'apprêtaient ou ne s'apprêtaient pas à

 20   signer, et qui était important pour la communauté internationale pour le

 21   déroulement de la guerre, pour la situation intérieure de la Bosnie-

 22   Herzégovine, il n'y avait aucune raison de refuser d'appliquer cette partie

 23   du plan qui ne faisait aucun problème entre les Croates et les Musulmans.

 24   C'est logique et c'est donc ce qu'il fallait faire l'appliquer. 

 25   Q.  Mais ce que je vous demande étant donné que nous savons qu'Izetbegovic

 26   n'a signé que le volet constitutionnel et le cessez-le-feu, ce que nous

 27   savons c'est qu'il n'a pas marqué son accord pour la séparation des forces

 28   dans le cadre du plan Vance-Owen, n'est-ce pas ?

Page 44144

  1   R.  Monsieur, il a donné son accord au document que M. Bozo Rajic, son

  2   ministre de la Défense, a publié par la suite. Voilà tout ce que je peux

  3   dire et je ne suis pas d'accord pour déclarer qu'il n'a pas signé --

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   R.  -- les cantons majoritaires croates ou musulmans.

  6   Q.  Très bien. Passons à ce que vous avez déjà mentionnés, à savoir les

  7   comptes rendus présidentiels du 15 janvier 1993; c'est la pièce P 01158.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi.

  9   Monsieur Praljak, ça m'avait échappé jusqu'à présent et je remercie M. le

 10   Procureur de remettre l'accent sur le plan Vance-Owen. On a sous les yeux

 11   un document qui émane du Conseil de sécurité qui fait autorité parce que

 12   c'est le rapport du secrétaire général au Conseil de sécurité, donc il y a

 13   document officiel indiscutable. Dans ce document, à l'annexe 1, je vois les

 14   compositions de délégation et je vois que M. Mate Boban était accompagné de

 15   Milo Akmadzic et de M. Petkovic et puis il y a les autres délégations.

 16   Alors en vous écoutant, je crois comprendre mais c'est tout récent, ça

 17   remonte à quelques semaines. Votre version est la suivante : vous dites que

 18   les délégations ont signé des documents, Izetbegovic et Mate Boban; vous

 19   dites que les Serbes n'ont pas signé mais ça c'est leur problème; et vous

 20   dites que, dans la mesure où les deux délégations ont signé, elles sont

 21   tenues par les documents; et vous rajoutez qu'outre les problèmes

 22   constitutionnels, les problèmes des provinces, il était indiqué dans ces

 23   documents que les forces devaient, à ce moment-là, selon les provinces,

 24   être subordonnées à ceux qui se voyaient octroyer la gouvernance d'une

 25   province, et que de ce fait, il était logique que le HVO, où il était en

 26   majorité, prenne le contrôle de l'ABiH et que l'ABiH où elle était reconnue

 27   majoritaire prenne le contrôle du HVO.

 28   Si je comprends bien, ceci se passe début janvier, ce qui à ce moment-là

Page 44145

  1   expliquerait le document de M. Prlic qualifié d'ultimatum par le Procureur,

  2   mais expliquerait, à ce moment-là, que le document de M. Prlic met en œuvre

  3   ce qui a été signé.

  4   Est-ce que je résume bien votre position ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, absolument en totalité. C'était une

  6   merveilleuse occasion pour les deux parties qui n'avaient pas de

  7   contestations, pas de différends au sujet des principes constitutionnels ni

  8   de différends au sujet de la détermination de la majorité bosnienne dans

  9   certains lieux, de la majorité croate dans d'autres lieux. C'était une

 10   magnifique occasion pour ces deux parties de donner à la communauté

 11   internationale une base pour faire davantage pression sur les Serbes parce

 12   que c'est les Serbes qui posaient problème. Donc quiconque voulait

 13   respecter ce plan devait l'appliquer intégralement, et c'est sur la base de

 14   ceci qu'après discussion avec Alija Izetbegovic, il a accepté ce document.

 15   Je sais dans quelle condition le document a été annulé. Il y a eu une

 16   conférence à Jeddah dont on n'a pas parlé ici, où les pays islamistes ont

 17   posé une espèce d'ultimatum à la communauté internationale, en disant que

 18   si ce plan n'était pas appliqué -- mais enfin, tout ça c'est déjà de la

 19   politique. Je suis au courant pour ma part, personne ne m'interroge là-

 20   dessus, je ne vais pas en parler. Mais pour répondre à votre question, je

 21   dis oui, vous avez très bien compris.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors donc pour synthétiser tout cela. Les documents

 23   émanant du 15 janvier, adressés à tout le monde, disant qu'il devait y

 24   avoir des resubordination des unités. Pour vous, tout cela était écrit dans

 25   le marbre avant le 15 janvier ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, et n'oublions jamais non plus le

 27   contenu. Il s'agit d'une resubordination opérationnelle dans un cadre

 28   propositionnel et parfaitement symétrique, comme tout y est très

Page 44146

  1   précisément indiqué. Il n'y a aucun ultimatum ni aucun désir de domination.

  2   Vous voyez que le 4e Corps reconnaît, en déclarant d'un point de vue

  3   opérationnel, j'accepte Petkovic en tant que chef d'état-major du HVO.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  5   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  6   Q.  J'aimerais avoir un petit éclaircissement de quoi parlons-nous. Nous

  7   parlons de ce qu'Izetbegovic a signé à Genève mais il n'a pas posé sa

  8   signature sur le volet séparation des forces, n'est-ce pas, à Genève ?

  9   R.  J'ignore ce qu'il n'a pas signé à Genève. Je sais ce qu'il a signé à

 10   Genève --

 11   Q.  Très bien, très bien --

 12   R.  -- la séparation des forces.

 13   Q.  Ce n'est pas vrai, Monsieur Praljak, vous inventez tout. Il a signé, il

 14   a posé sa signature sur le volet principes constitutionnels et volet

 15   cessez-le-feu. Les documents officiels nous le disent. Vous le savez,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Je sais qu'à Zagreb, il y a eu un accord autour du texte dont je vous

 18   ai parlé qui portait également sur la séparation des forces et

 19   l'organisation des forces armées de la Bosnie-Herzégovine, donc du HVO, de

 20   l'ABiH, ainsi que cela avait été convenu. La réunion à ce sujet a duré deux

 21   jours.

 22   Q.  Nous y viendrons. Mais moi, je parle de Genève.

 23   R.  Je n'ai pas été à Genève.

 24   Q.  Suite aux documents que nous venons de voir, nous savons que toute

 25   séparation des forces, au titre du plan Vance-Owen, devait avoir lieu que

 26   s'il y avait eu un accord entre les trois parties. S'il y avait possibilité

 27   de surveillance par les Nations Unies, qui de toute façon, il fallait

 28   attendre 45 jours du fait des conditions météorologiques hivernales, donc

Page 44147

  1   la séparation des forces en tant que telle n'est pas envisagée. En tout

  2   cas, elle n'est pas du tout ni en cours ni en projet, en tout cas, les

  3   forces croates et les forces musulmanes au mois de janvier 1993, en vertu

  4   des termes circulés dans l'accord Vance-Owen ?

  5   R.  Non, je ne suis pas d'accord; 45 jours, c'est le délai maximum, mais

  6   cela ne signifie pas qu'il ne faut pas s'atteler à la tâche, et commencer.

  7   Bien sûr, il a été écrit et chacun sait que, pour certains aspects, il faut

  8   du temps. Mais ce que cela signifie c'est : commencez et finissez dans un

  9   délai de 45 jours. Quant à ce que feront les Serbes, cela ici n'est pas

 10   pertinent. Il était nécessaire de parvenir à un accord sur ce qui a été

 11   signé, signé par les Croates et les Musulmans.

 12   Q.  Bien. Donc en ce qui concerne Gornji Vakuf et les demandes du HVO sur

 13   la subordination et le départ des Unités de l'ABiH, là, on leur a donné

 14   cinq jours, à Gornji Vakuf. C'est parfaitement irréaliste, d'ailleurs, même

 15   si l'ABiH avait eu l'intention de le faire, de se subordonner, c'est

 16   beaucoup trop court comme délai.

 17   R.  Non, Monsieur Stringer. La situation avait été apaisée là-bas, et on

 18   n'a pas demandé un retrait de l'ABiH, mais aux termes de cet accord,

 19   uniquement le retrait de la Brigade de Jajce, qui ultérieurement

 20   contrairement à cet accord a bien quitté cette zone pour retourner dans une

 21   autre province.

 22   Q.  Bien. Nous allons donc nous pencher sur la pièce P 0158, le compte

 23   rendu présidentiel. J'aimerais que nous étudiions ensemble certaines

 24   remarques du président Izetbegovic, en page 48 du compte rendu. Donc il dit

 25   :

 26   "Je vais prendre la parole…"

 27   Donc il s'agit - je dis ça pour le compte rendu - d'une réunion qui a eu

 28   lieu le 15 janvier au palais présidentiel, à Zagreb, avec Tudjman,

Page 44148

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 44149

  1   Izetbegovic, Boban, Susak, Vance et Owen, donc toutes ces personnes ont

  2   assisté à cette réunion. Donc à la page 48, Alija Izetbegovic prend la

  3   parole, je donne lecture :

  4   "Je vais prendre la parole une fois de plus, mais je ne reprendrai plus la

  5   parole. Je tiens à dire que je suis d'accord avec le président Tudjman, il

  6   faut mettre un terme à cette discussion. Mais je pense qu'il est absolument

  7   nécessaire d'éclaircir un malentendu. Parce que je pense que c'est peut-

  8   être ça qui est au cœur des combats qui ont eu lieu à l'heure actuelle, à

  9   Gornji Vakuf. Un malentendu peut-être sur une mauvaise interprétation de

 10   ces documents."

 11   Donc je vais sauter quelques phrases, et ensuite il parle d'une

 12   interprétation, il dit :

 13   "M. Boban a déclaré qu'il avait, c'est d'après ces documents, il avait

 14   compris que chaque armée devait se retirer sur son propre territoire. Ce

 15   n'est pas ainsi que j'ai compris les documents, et je ne sais pas quelle

 16   était l'intention du rédacteur du document ou du document.

 17   "Parce que je ne vois pas qu'il s'est défini à qui appartienne

 18   quelque territoire, de quelle armée on parle. Donc ce qui m'inquiète, c'est

 19   ce qui arrive en ce moment à Gornji Vakuf, a sans doute été provoqué -- a

 20   peut-être été provoqué par un malentendu et une mauvaise compréhension de

 21   ce point des accords. Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris, M. Boban.

 22   Mais lui, il semble avoir compris que l'armée bosnienne doit se retirer de

 23   la région, des provinces de Travnik et que le HVO doit en prendre le

 24   contrôle complètement. Mais moi, ce n'est pas ainsi que j'ai compris les

 25   documents."

 26   Ensuite le président Tudjman pose une question à propos des Serbes.

 27   Izetbegovic poursuit, il dit, oui, en fait il y aura ce type de mouvement à

 28   l'avenir, à un moment ou un autre. Mais nous n'en sommes pas encore là, et

Page 44150

  1   je cite :

  2   "J'ai peur que si l'on interprète les documents de cette façon avec

  3   cette disposition ou cette disposition et M. Boban, ce que ce type

  4   d'interprétation a provoqué les conflits à Gornji Vakuf, parce qu'il veut

  5   que l'ABiH se retire de cette région, tout de suite, et puisqu'elle ne le

  6   fait pas, elle doit être chassée du territoire."

  7   Boban réplique:

  8   "Non, ce n'est absolument pas ainsi que les choses sont établies."

  9   Izetbegovic reprendre :

 10   "Mais, Mate, je le pensais, parce que tu as dit il y a quelques minutes on

 11   n'allait pas envisager le retrait."

 12   Boban dit :

 13   "Je pense que tu devrais signer le document, dis à ton peuple qu'il y a eu

 14   un accord sur les provinces 10 et 13, entre les Croates et les Musulmans,

 15   si cela ne pose pas problème pour vous, tu peux le faire comme je l'ai fait

 16   à la télé."

 17   Il poursuit ensuite.

 18   Izetbegovic :

 19   "Je ne pense pas que c'était prévu dans la moindre des dispositions du

 20   document. Il n'a pas été prévu que l'ABiH quitte soit la province de

 21   Travnik, soit Mostar. Ce n'est pas ainsi que j'ai compris les documents. Je

 22   n'en suis pas sûr que c'est ce qui soit écrit. J'ai l'impression, Mate,

 23   j'en suis désolé, mais j'ai l'impression que c'est ton interprétation --

 24    L'INTERPRÈTE : Le "Livenote" ne marche plus, nous dit le sténotypiste.

 25   M. STRINGER : [interprétation] Prenez la page 50 du document, normalement

 26   ce sont --

 27   L'INTERPRÈTE : Le sténotypiste demande un petit moment parce que ça ne

 28   marche toujours pas.  

Page 44151

  1   [Problème technique]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, on va faire le break.

  3   M. STRINGER : [interprétation] Ça remarche.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  5   Monsieur Stringer.

  6   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Q.  Donc pour le compte rendu, je tiens à dire que j'ai terminé de lire la

  8   page 50, et que je vais maintenant donner lecture de la page 51, donc si

  9   nous pouvions avoir à l'écran la page 51 afin que les interprètes puissent

 10   faire une traduction à vue.

 11   Donc Gojko Susak déclare et je donne lecture, enfin nous pouvons tous lire

 12   le premier paragraphe. Il parle des endroits où se trouve une majorité de

 13   troupes musulmanes et de la façon dont le commandement devrait être divisé,

 14   deuxième paragraphe et je donne lecture :

 15   "Je ne comprends pas où est le problème, nous avons un intérêt commun qui

 16   est de nous défendre contre notre ennemi commun. N'avons-nous pas réalisé

 17   cela ? J'étais avec vous dans cette salle, dans l'hôtel, ici, à l'hôtel

 18   Esplanade, lorsque nous avons conclu ce 'gentleman's agreement' selon

 19   lequel vous alliez travailler sur ce point. Donc je ne vois vraiment pas ce

 20   qui est en conflit si, à Gornji Vakuf, même s'il y a plus de Musulmans ou

 21   moins de Croates, de toute façon Gornji Vakuf se trouve dans un territoire

 22   contrôlé par le HVO, donc si les ordres maintenant qui viennent de Sarajevo

 23   sont contraires aux ordres venant de Mostar. Donc vous êtes en train de

 24   vous tuer vous-mêmes, et de ce fait, les Serbes n'ont plus besoin de vous

 25   combattre.

 26   "Je vous remercie."

 27   Nous allons passer maintenant à la page suivante, je vais passer aux

 28   remarques de David Owen. Il dit :

Page 44152

  1   "Je pense que la discussion a été très utile, même si nous ne sommes pas

  2   arrivés à une conclusion finale. Je pense que la seule façon d'obtenir une

  3   solution c'est par le biais de la négociation en discutant de tous ces

  4   points.

  5   "En ce qui concerne les provinces individuelles, alors que je vous

  6   expliquais le système à mettre en place, je vous ai dit que les forces

  7   militaires serbes se retireraient dans les provinces de Banja Luka,

  8   Bijeljina, et Herzégovine orientale.

  9   "Mais je n'ai absolument fait aucune suggestion à propos des autres

 10   provinces, mais je pense que j'ai dit que c'était à l'armée de la BiH et au

 11   HVO d'en parler ensemble.

 12   "De toute façon, cette discussion auquel nous venons de participer

 13   illustre bien à quel point il est urgent d'arriver à un accord ensemble. Je

 14   comprends que le commandement doit être déterminé selon la représentation

 15   majoritaire."

 16   Je m'arrête ici, Général Praljak, car j'ai quelques questions à vous poser

 17   à propos de ce passage. Donc tout d'abord, parlons de la chronologie, nous

 18   sommes le 15 janvier 1993; il s'agit de discussions qui ont eu lieu à 15

 19   heures 50 dans -- presque 16 heures, donc des discussions dans l'après-

 20   midi. Après que vous ayez quitté Zagreb et que vous vous dirigiez vers

 21   Mostar avec le texte de ce soi-disant accord oral qui est appelé ici

 22   "gentlemen's agreement," donc vous nous avez parlé; c'est bien cela ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Mais dans cette discussion, qui s'en suit donc, on voit qu'il n'y a pas

 25   eu d'accord en fait, pas d'accord sur le texte, et en fait c'est Gojko

 26   Susak qui met le doigt sur ce qui était accompli il y a eu un "gentlemen's

 27   agreement," et Izetbegovic allait travailler dessus. Donc enfin aucun

 28   président, même pas Izetbegovic, et je sais que vous êtes très critique

Page 44153

  1   envers Izetbegovic, mais aucun président ne va être d'accord sur cet accord

  2   extrêmement large, extrêmement vague sur ces points, et dans -- et en se

  3   basant uniquement d'un "gentlemen's agreement," accompli dans un hôtel.

  4   R.  Non, c'est inexact. Les accords étaient en général négociés dans des

  5   hôtels, là-bas en tout cas le président Izetbegovic était basé de façon

  6   permanente, et M. Susak dit à l'hôtel Esplanade :

  7   "Lorsque nous avons atteint cet accord au sujet duquel Izetbegovic était

  8   censé travaillé."

  9   Il est exact -- alors je n'ai pas d'interprétation.

 10   [Problème technique]

 11   LE STÉNOTYPISTE : [interprétation] Je suis vraiment désolé. J'ai des

 12   problèmes, il faut que je reboute à nouveau. Je ne sais pas, il se passe

 13   quelque chose avec son système.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire le break.

 15   Bien, on va faire le break de 20 minutes.

 16   [Problème technique]

 17   --- La pause est prise à 9 heures 55.

 18   --- La pause est terminée à 10 heures 15.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 20   Monsieur Stringer.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   Q.  Général Praljak, nous avons donné lecture de ce texte, enfin d'une

 23   grande partie du texte. De toute façon, nous pouvons le lire nous-mêmes et

 24   en tirer nos propres conclusions, mais j'ai quelques points à vous

 25   présenter.

 26   Tout d'abord, d'après moi, ce texte -- donc c'est un texte qui parle d'un

 27   accord, donc ici ce transcript date de la fin de l'après-midi du 15 janvier

 28   mais visiblement donc quand on parle d'un accord, il n'y avait pas d'accord

Page 44154

  1   avec Izetbegovic, on le voit dans ce texte d'ailleurs. On parle d'autre

  2   chose que d'un accord dans ce texte qui date donc de la fin de l'après-

  3   midi. On parle de négociations ou d'autre chose, mais il n'y a pas d'accord

  4   en tant que tel. Alors qu'est-ce que vous dites ?

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce une question ou est-ce une

  6   déclaration ?

  7   M. STRINGER : [interprétation] Je présente cette thèse au Général.

  8   Q.  Je lui dis qu'une fois avoir donné lecture de ce document, j'affirme

  9   que malgré tout ce que vous affirmez vous-même il n'y avait pas d'accord,

 10   il n'y a pas d'accord en tout cas sur le volet séparation des forces,

 11   accord qui aurait été conclu à l'hôtel Esplanade lors de la matinée ?

 12   R.  Non, ce n'est pas vrai. A l'hôtel Esplanade, un accord a été trouvé,

 13   c'est ce qui est écrit ici, et Gojko dit ici : parce que nous avons atteint

 14   cet accord avec cette compréhension. Lord Owen lui souscrit, lui aussi, à

 15   cette interprétation et si vous lisez ce qu'ont écrit M. Stojic et Petkovic

 16   à Travnik ainsi que partout ailleurs à l'échelon des brigades et des zones

 17   opérationnelles, si l'ABiH a amené 60 % de ses effectifs sur la ligne de

 18   front, elle avait 60 % de droit au commandement; si c'était 80 %, elle

 19   avait droit de commander à 80 %. En matière de séparation des forces, on ne

 20   parle pas de séparation de forces, donc sous un délai de 45 jours entre le

 21   HVO et l'ABiH, mais entre la VRS d'un côté et d'autre part l'ABiH et le

 22   HVO. On ne parle pas de retrait des Unités de l'ABiH mais uniquement de

 23   retrait de celles de ces unités qui se sont rendues sur un territoire donné

 24   en provenance d'une autre zone ayant entraîné des désordres. Ici nous avons

 25   quelque chose qui est tout à fait exemplaire en matière de volonté et de

 26   bonne volonté visant à parvenir à un arrêt des conflits et des hostilités

 27   entre les Croates et les Musulmans. J'espérais que MM. les Juges pourraient

 28   lire l'intégralité de ce transcript afin de voir qui est pour la guerre et

Page 44155

  1   qui est pour la paix. Nous sommes d'accord ici, Monsieur Stringer, sur

  2   rien, et rien de ce que vous affirmez n'est écrit ici.

  3   Q.  Bien, voyons si nous pouvons être d'accord au moins sur un point.

  4   Tout chef d'Etat -- ou plutôt, aucun chef d'Etat, même Alija Izetbegovic,

  5   ne conviendrait ou ne serait d'accord avec un accord -- en ce qui concerne

  6   un accord d'une telle importance qui soit aussi large sans l'avoir signé --

  7   sans en avoir signé une version écrite.

  8   R.  C'est son ministre de la Défense, Bozo Rajic qui a signé la version

  9   écrite de cet accord.

 10   Q.  Le Bozo Rajic que nous avons entendu ici, dans cet auditoire, en tant

 11   que témoin de la Défense ? Non, je suis désolé, là, je me suis trompé. Donc

 12   il s'agit de Bozo Rajic, il s'agit d'un membre croate de la présidence de

 13   Bosnie-Herzégovine; c'est bien cela ? Non, je me suis trompé, je vais

 14   essayer peut-être une troisième option.

 15   Visiblement, ce n'est pas notre jour, aujourd'hui, ni à moi ni à personne.

 16   Il s'agit de Bozo Rajic, c'était un Croate, et il était ministre de la

 17   Défense de la République de Bosnie-Herzégovine à l'époque; c'est bien lui ?

 18   R.  C'est exact. Ce n'est pas une journée particulièrement mauvaise, je

 19   crois.

 20   Q.  Donc vous avez évoqué Lord Owen. Essayons de clarifier un peu ces

 21   remarques. Lorsqu'il parle d'une séparation de forces, il suggère ici, je

 22   voudrais avoir la page 52 de ce transcript présidentiel, parce que, là, il

 23   dit :

 24   "Lorsque j'ai expliqué le système, j'ai parlé du retrait des forces

 25   serbes, mais je n'ai fait aucune suggestion à propos du retrait des autres

 26   forces."

 27   Donc visiblement Lord Owen ne semble pas dire qu'il ait eu un accord

 28   à propos de la séparation des forces entre le HVO et l'ABiH, n'est-ce pas ?

Page 44156

  1   R.  Il dit je n'ai pas suggéré quoi que ce soit, mais j'ai souligné qu'il

  2   s'agit d'une question qui doit être résolue par l'ABiH et le HVO. Il ne

  3   s'agit pas de séparation des forces. Mais en page 53, ce qu'il comprend

  4   c'est que l'exercice du commandement doit être déterminé en fonction de la

  5   majorité, du caractère majoritaire ou non. Bien sûr, il s'agit de

  6   commandant militaire. Ce qui est clair ici, c'est bien, allez-y, allez vous

  7   battre sur la ligne de front, et si vous le souhaitez, dans ce cas-là,

  8   prenez en charge l'ensemble du commandement.

  9   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis prêt à passer

 10   à un classeur suivant, à moins qu'il y ait des questions de la Chambre.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je reviens sur le plan Vance-Owen.

 12   Tout à l'heure, j'ai résumé votre position que vous avez développée

 13   abondamment. Le Procureur est revenu sur le sujet, il vous a posé plusieurs

 14   questions et vous êtes toujours resté sur votre position. La difficulté que

 15   j'ai est la suivante : c'est que l'on parle d'accords ou de plans qui ont

 16   été signés que je n'ai pas sous les yeux. Alors est-ce que ce sont les

 17   plans et discussions qui ont eu lieu à Genève et qui auraient été donc

 18   signés ? Alors, bien sûr, on aura le général Petkovic qui viendra

 19   témoigner, on pourra utilement revenir sur la question, parce que lui était

 20   présent, et il nous dira exactement, je l'espèce ce qui s'est passé. Donc

 21   du fait que je ne sais pas quels documents ont été signés, dont le document

 22   que le Procureur nous a montré tout à l'heure, sur la réunion suite à la

 23   Conférence de Genève, le P 9852, il y a l'annexe 7, que l'on peut mettre à

 24   l'écran, si nécessaire, qui est sur le retour des forces dans les provinces

 25   désignées. Donc ce document à l'annexe 7, qui est un document officiel

 26   puisqu'il est partie intégrante des négociations, indique qu'à partir de la

 27   -- en réalité, il y a trois étapes. Il y a première étape, cessation des

 28   hostilités. Deuxième étape, dit le document, séparation des forces, et

Page 44157

  1   troisième étape, retour des forces. Je crois comprendre que le retour des

  2   forces dans les provinces, c'est ça qui doit entraîner les re-

  3   subordinations.

  4   Alors le document que vous dites qui a été signé, est-ce l'annexe 7 ?

  5   Peut-être, je n'en sais rien. Quoi qu'il en soit, cette annexe 7, figure

  6   comme pièce annexée à ce plan et tout le monde peut s'y référer.

  7   Alors, Général Praljak, première question : d'après vous, est-ce

  8   qu'il y avait cet enchaînement : un, cessation des hostilités; deux,

  9   séparation des forces; et trois, retour des forces dans les provinces qui

 10   avaient été désignées ? Est-ce que c'était ça qui était prévu ? Parce que

 11   moi, je lis ça à l'annexe 7.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après les informations dont je

 13   disposais à l'époque, oui, c'est ce qui a été prévu. Ces 45 jours de délai

 14   concernaient les Serbes, toutefois, et le retour des unités, le retour des

 15   forces dans leur zone d'origine, concerne également les Serbes. Ce qu'ils

 16   avaient pris, ce qu'ils avaient conquis, ils devaient le rendre, le cas

 17   échéant, conformément aux cartes qui faisaient partie de l'accord. Quant au

 18   HVO, à l'ABiH, ils avaient cet accord portant sur un commandement conjoint,

 19   à l'échelon des zones opérationnelles et des brigades en respectant un

 20   principe de proportionnalité par rapport au nombre de soldats présents sur

 21   le front.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le classeur, il y a un document que le

 23   Procureur n'a pas évoqué, il avait peut-être l'intention de l'évoquer, mais

 24   faute de temps il ne l'a pas évoqué. Ce document a déjà été versé dans la

 25   procédure, donc je peux l'évoquer, c'est le 3D 00320. C'est le porte-parole

 26   de la conférence qui tienne une conférence de presse et qui explique ce qui

 27   a été signé.

 28   Alors, M. le Greffier peut peut-être mettre à l'écran le 3D 00320.

Page 44158

  1   M. STRINGER : [interprétation] Je tiens à vous informer que j'ai

  2   délibérément sauté ce document. J'allais y revenir, parce qu'en fait, on

  3   parle de mars plutôt que de janvier, j'allais y revenir de toute façon.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Non, ce n'est pas moi -- ce n'est pas le texte.

  5   Monsieur le Greffier, vous avez dû faire une erreur, ce n'est pas le

  6   document que j'ai au 3D 00320.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Si je peux vous aider, le document 3D 00320,

  8   un document extrêmement volumineux -- si vous me permettez, je vais dire au

  9   Greffier quelle est la page exacte qui nous intéresse.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] S'il y a une petite pause,

 11   j'aimerais utiliser cette petite pause pour en revenir à la dernière

 12   réponse que vous nous avez donnée, Monsieur Praljak.

 13   En ce qui concerne l'annexe 7, vous semblez nous dire que ce retrait des

 14   forces et le retour des forces ne s'appliquait qu'aux Serbes. Pouvez-vous

 15   nous confirmer que vous voulez bien dire cela ? Si c'est le cas, pourriez-

 16   vous nous expliquer pourquoi cela ne s'appliquait qu'aux Serbes ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que, d'après le plan Vance-Owen, les

 18   Serbes devaient se retirer d'une grande partie du territoire dont ils

 19   s'étaient emparés. Donc leurs forces, présentes dans ces régions dont ils

 20   s'étaient emparés, devaient se déplacer vers les zones, qui selon le plan

 21   Vance-Owen, devaient être majoritairement serbes, et seules les unités

 22   telle que l'Unité de la Brigade Jajce, devaient repartir pour ce qui

 23   concerne le reste de la Bosnie-Herzégovine. Donc toutes les unités qui

 24   étaient présentes à Konjic, à Jablanica, et celle du HVO à Tuzla, et

 25   cetera, pouvaient rester là où elles étaient.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je consulte ce document et je dois

 27   dire que je ne vois rien dans ce qui est référencé comme l'annexe numéro 7.

 28   Ce n'est tout simplement pas là. Donc j'aimerais savoir d'où vous avez

Page 44159

  1   obtenu ces informations, puisque vous avez rappelé que vous n'étiez pas

  2   allé à Genève. Je ne comprends pas comment nous pouvons accepter cette

  3   explication qui est la vôtre.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est l'explication dont je sais qu'elle

  5   existait; seuls les Serbes pouvaient se retirer des territoires dont ils

  6   s'étaient emparés. Pour ce qui nous concerne, nous n'avions pris aucun

  7   territoire dont nous aurions dû nous retirer selon les dispositions du plan

  8   Vance-Owen.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aurais pu m'imaginer que vous

 10   disiez que l'ABiH aurait dû se retirer de Gornji Vakuf.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourquoi pas ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que nous proposions un commandement

 14   conjoint, si l'ABiH a des unités sur certaines positions, à Gornji Vakuf

 15   elle va recevoir un pourcentage du commandement correspondant proportionnel

 16   au nombre de ses unités, c'est mathématiquement exact; il y avait

 17   réciprocité par rapport aux effectifs de l'ABiH présents sur le terrain.

 18   Monsieur le Juge Trechsel, si le HVO l'avait voulu, il aurait pu exercer le

 19   commandement dans les cantons à majorité croate, et l'ABiH aurait pu le

 20   faire dans les cantons à majorité bosnienne, comme par exemple, Travnik, et

 21   cetera, c'est écrit noir sur blanc dans le plan Vance-Owen s'agissant des

 22   endroits où on faisait face aux Serbes. Cela découle des textes de M.

 23   Stojic et de M. Petkovic. C'était l'accord.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je parle de l'annexe numéro 7 du

 25   plan Vance-Owen, qui part du principe que, tout d'abord, il faudrait qu'il

 26   y ait une cessation des hostilités, et ensuite, s'il y a une cessation des

 27   hostilités, et cela s'adresse également aux Serbes, ce n'est pas uniquement

 28   à l'attention des Musulmans et des Croates, et je ne vois pas pourquoi les

Page 44160

  1   Musulmans devraient ne pas se retirer de Gornji Vakuf, et cetera.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : J'appuie ce que dit mon collègue. La question de mon

  3   collègue, je pourrais vous la poser.

  4   Ce texte, l'annexe 7, s'applique aux trois parties, pas spécialement aux

  5   Serbes. Enfin, c'est la lecture que l'on fait dans le texte. Mais vous

  6   semblez, Général Praljak, dire : non, non, non, ça ne s'applique qu'aux

  7   Serbes. Le document ne le dit pas.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  9   vous dis comment le document a été traduit. Comment peut-on proposer un

 10   commandement conjoint si les forces doivent se retirer de là où elles sont

 11   ? Je ne vois pas de logique dans la création d'un commandement conjoint à

 12   Mostar si l'on dit que l'ABiH doit quitter Mostar. Ce n'était pas

 13   l'intention. L'ABiH et le HVO étaient une seule armée avec deux

 14   composantes.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous donnez cette interprétation, bien.

 16   Moi j'en reviens au document, M. Stringer voulait m'aider en donnant

 17   certainement le numéro 3D 028-0825; ça doit être ça ?

 18   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Les numéros de

 19   page pour l'anglais -- enfin, je n'ai pas le document dans le prétoire

 20   parce que je les avais conservés, mis de côté. Je crois que c'est le numéro

 21   de la page du document 3D 28-0325 pour la version anglaise.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, très bien.

 23   M. STRINGER : [interprétation] Dans la version que possède le général, ce

 24   sera la page 3D 12-0239. C'est la version B/C/S.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Général Praljak, le porte-parole fait le 25

 26   mars, donc c'est deux mois après le mois de janvier, la déclaration

 27   suivante que vous voyez à l'écran. Il dit que le président Izetbegovic et

 28   Boban ont signé ensemble les documents; la carte et l'agrément sur le

Page 44161

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 44162

  1   pouvoir temporaire. C'est donc le porte-parole. Ensuite on apprend que la

  2   délégation des Serbes de Bosnie-Herzégovine dirigée par Karadzic, elle,

  3   n'avait pas signé le plan et était retournée chez elle.

  4   Puis en tournant la page, on voit une déclaration faite par la délégation

  5   de la Bosnie-Herzégovine qui rappelle qu'elle a signé cela, mais que leur

  6   signature ne serait valide que si un certain nombre de conditions sont

  7   remplies. Donc tout ça n'est pas très clair. On sait qu'il y a des choses

  8   qui ont été signées, mais qui sont remises en cause.

  9   Alors saviez-vous, Général Praljak, que le porte-parole avait fait cette

 10   déclaration ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai lu cette déclaration dans la presse, et

 12   on en discutait. Bien sûr, j'étais au courant.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 14   Alors je vais revenir, retour en arrière au P 1158, qui est donc cette

 15   fameuse réunion du 15 janvier à Zagreb. Alors ce document peut être

 16   intéressant parce que tous les participants y sont, et en plus on a Lord

 17   Owen et Cyrus Vance, donc des personnalités qui étaient partie prenante

 18   dans tout cela. Ce qu'elles vont dire semble avoir de l'intérêt. C'est pour

 19   ça que je voudrais qu'on mette la page 25 en version anglaise, où c'est

 20   Lord Owen qui intervient. Page 25.

 21   Lord Owen va intervenir suite à une intervention de M. Izetbegovic sur le

 22   fait que des zones ont été pendant le conflit épurées ethniquement, donc il

 23   pose le problème. On croit comprendre que M. Izetbegovic se pose des

 24   questions, parce que lui il semble dire, quand on lit sa déclaration, qu'on

 25   ne peut pas accepter que parce qu'on a pris par l'épuration ethnique

 26   certains territoires on doit se les garder. Donc Lord Owen intervient sur

 27   ce sujet ô combien important, et à la page 25, ça commence par le texte,

 28   "first of all," il va parler d'un plan de retrait des forces. Alors moi je

Page 44163

  1   me dis s'il dit cela, c'est qu'il y a un plan de retrait des forces quand

  2   il dit cela le 15 janvier. Il ne va pas inventer cela. Donc il dit qu'il y

  3   a une espèce de planification de retrait des forces.

  4   Alors, Général Praljak, ce que dit Lord Owen, est-ce qu'il fait référence à

  5   ces fameux accords que vous nous indiquez ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après tout ce que je sais, d'après toutes

  7   les discussions qui ont eu lieu, c'est bien de ça qu'il s'agit.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous, il fait une référence à cela. Bien.

  9   Alors si vous voulez, on va passer à la page 37 du document où c'est Mate

 10   Boban qui intervient. Alors Mate Boban fait référence à ce qu'a dit Lord

 11   Owen. Il parle des clashes entre les Musulmans et les forces croates, mais

 12   il dit ceci, que, La réponse à tout ça est dans la signature d'un package,

 13   d'un paquet général.

 14   Alors, Général Praljak, quand Mate Boban s'exprime et fait référence au

 15   package, est-ce qu'il englobe dedans toutes ces étapes; cessation des

 16   hostilités, séparation des forces, retour des forces dans les provinces, et

 17   resubordination en fonction des majorités, et cetera. Le terme "package"

 18   qui est employé ici, enfin je ne sais pas dans votre langue qu'est-ce qui

 19   est dit au juste, est-ce que ça englobe tous ces éléments ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après les discussions auxquelles j'ai

 21   participé à l'époque, et d'après le texte qui est écrit ici, les choses

 22   correspondent à votre interprétation, d'après les meilleurs éléments

 23   d'information dont je disposais à l'époque et encore aujourd'hui.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Enfin, je suggère une interprétation. Je ne dis pas

 25   que c'est mon interprétation. C'est une hypothèse, donc tout ce que je dis

 26   je soumets ça comme hypothèse --

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui le dis, c'est moi.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

Page 44164

  1   Je vais terminer par la page 53 où David Owen fait en quelque sorte

  2   la synthèse de toutes les discussions, où il dit qu'il faut que l'ABiH et

  3   le HVO continuent à discuter ensemble. Mais ce qui me paraît intéressant

  4   c'est qu'il parle du président Tudjman. Vous voyez, ça commence par :

  5   "Perhaps." M. Owen dit que le président Tudjman peut servir comme arbitre.

  6   Alors quand j'ai vu cette phrase, cette phrase m'a interpellé, comme on

  7   dit. C'est-à-dire que M. Owen, dans ce débat qui oppose Izetbegovic, Boban,

  8   HVO, ABiH, prend comme arbitre Tudjman, et pour quelle raison il explique.

  9   Il dit que c'est quelqu'un qui a une expérience considérable, donc il

 10   semble vouloir faire jouer au président Tudjman un rôle pour régler tout

 11   cela.

 12   Alors de votre point de vue, ça vous étonne ou pas, un, que l'on prenne

 13   comme arbitre, et deux, qu'il puisse régler le problème alors que M.

 14   Izetbegovic est aussi présent à la réunion ? Pourquoi il prend Tudjman

 15   comme arbitre ? C'est une hypothèse parce qu'il y a "Perhaps." Mais quand

 16   il dit ça, manifestement il se positionne.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Juge

 18   Antonetti, en raison du fait que Franjo Tudjman s'adressait aussi bien aux

 19   Musulmans qu'aux Croates sur le plan politique en Bosnie-Herzégovine, et il

 20   s'adressait aux deux de façon égale, aussi bien du point de vue de

 21   l'acceptation des armes, du transfert des blessés, du problème des émigrés.

 22   Dans les pages précédentes on voit bien qu'il comprenait très bien le

 23   problème. Il comprenait qu'il y avait un million et demi de Serbes qui

 24   étaient encore là, Alija Izetbegovic disait, Arrêtez la guerre; vous allez

 25   vous détruire et détruire la Croatie, nous ne voulons pas répartir les

 26   Serbes dans différents pays, donc ce qu'il faut c'est voir l'ensemble de la

 27   situation. Il faut prendre tous les documents et les lire tous pour

 28   déterminer exactement quelle est la position de Franjo Tudjman eu égard à

Page 44165

  1   la Bosnie-Herzégovine, et vous constaterez que Franjo Tudjman n'était pas

  2   du côté du HVO, mais était en faveur d'une bonne solution des problèmes

  3   étant donné la façon dont il parle.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vais terminer parce que la question de

  5   tout à l'heure de mon collègue sur Gornji Vakuf est une question importante

  6   et je me dois d'y revenir pour essayer de bien comprendre.

  7   Je pars de l'hypothèse où une localité quelconque ou une province

  8   quelconque est contrôlée militairement par le camp adverse, et que le plan

  9   Vance-Owen donne cette province et, en termes militaires, l'autorité

 10   militaire à celui qui était en situation d'infériorité parce qu'il a été

 11   battu. De votre point de vue, le plan Vance-Owen signifie-t-il à ce moment-

 12   là que ceux qui ont gagné doivent partir et laisser la place à ceux qui ont

 13   perdu parce qu'eux ils étaient majoritaires ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. On demandait avant tout que 24 % du

 15   territoire - et c'est déjà dit un peu plus haut dans le document - les

 16   Serbes devaient se retirer de 24 % du territoire dont ils s'étaient emparés

 17   à ce moment-là, d'ailleurs ils s'étaient emparés de davantage encore.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous, vous me parlez des Serbes. Moi, je parle des

 19   Croates et des Musulmans. Je laisse les Serbes de côté.

 20   Je prends le cas d'une -- sans citer nommément une localité, mais je prends

 21   le cas d'une région qui est occupée, par exemple, par le HVO, mais cette

 22   région normalement, d'après le plan Vance-Owen, doit être dirigée par les

 23   Musulmans. Est-ce que ça signifie que le HVO s'en va et que l'armée en

 24   place va être l'ABiH et que les unités militaires du HVO vont être

 25   subordonnées à l'ABiH ? Est-ce que c'est comme ça que ça doit se passer, ou

 26   bien ça doit se passer comme vous avez dit, le commandement conjoint ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, les forces du HVO n'étaient pas censées

 28   quitter les provinces à majorité musulmane et l'ABiH n'était pas censée

Page 44166

  1   quitter les provinces à majorité croate, ce qui était prévu c'était un

  2   commandement proportionnel conjoint. Personne ne devait chasser les armées

  3   du HVO de Tuzla, Zepce, et cetera ni vice versa. Ces unités devaient rester

  4   là où elles étaient, comme elles sont restées pour Tuzla jusqu'au bout sous

  5   la direction de l'ABiH.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Mais vous rajoutez une nouvelle notion,

  7   c'est-à-dire qu'à chaque fois il y a quelque chose de nouveau qui apparaît.

  8   Vous venez de dire maintenant un commandement conjoint proportionnel. C'est

  9   ce que vous venez de dire ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. Clair comme de l'eau de roche, c'est

 11   écrit, proportionnel. En fonction du nombre de soldats qu'une des forces

 12   met sur la ligne de front, face à l'agresseur serbe, le pourcentage de

 13   commandement de la brigade ou de la zone opérationnelle correspondra à

 14   cette proportion des effectifs. C'est ce qui est écrit dans le document que

 15   nous avons eu sous les yeux hier. Très clair, très précis. C'est de cette

 16   façon que s'est comportée l'armée américaine quand elle a libéré la France.

 17   C'est de cette façon que se comportent encore les armées de nos jours;

 18   commandement proportionnel aux effectifs.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre position est au transcript.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand la France est entrée au sein de l'OTAN,

 21   il a été déterminé très précisément combien de Français occuperaient les

 22   postes importants de l'OTAN, et ceci est proportionnel, c'est ce qu'on fait

 23   toujours dans ces cas-là.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 25   Monsieur Stringer, je n'ai plus de question à poser sur ce document. Mais

 26   vous l'avez compris, j'attends avec impatience M. Petkovic pour réaborder

 27   ces questions.

 28   M. STRINGER : [interprétation]

Page 44167

  1   Q.  Mon Général, j'aimerais que l'on reste sur le document que le président

  2   a mentionné, j'allais le faire plus tard, mais étant donné que nous avons

  3   ce document devant nous, nous pouvons le faire maintenant. Pour le compte

  4   rendu d'audience, il s'agit du document qui porte la cote 3D 00320, nous ne

  5   sommes pas en janvier 1993. Mais nous sommes au début du mois de mars 1993.

  6   Pardon, il s'agit du 25 mars 1993.

  7   Mon Général, j'aimerais attirer votre attention sur le document qui

  8   porte la cote 103, qui est le document suivant, dans la version anglaise,

  9   il s'agit du document suivant sur le prétoire électronique. Mon Général,

 10   est-ce que vous avez devant vous le document 103 ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dans la version dans la langue originale, est-ce que vous pourriez nous

 13   lire le titre du document 103 ?

 14   R.  "Plan Vance-Owen : conditions fixées par Alija Izetbegovic pour signer

 15   le présent plan de paix Vance-Owen. New York. Le 25 mars 1993."

 16   Q.  "Les conditions." Pour le compte rendu d'audience, Mon Général, vous

 17   avez oublié de traduire la totalité de la description du document numéro

 18   103. En version anglaise, il est simplement mentionné : "Plan Vance-Owen,"

 19   en fait le sous-titre n'est pas traduit, à savoir les conditions. Je pense

 20   que c'est une correction importante que l'on devrait apporter.

 21   Mme PINTER : [interprétation] Je suis d'accord avec mon collègue M.

 22   Stringer, mais je me dois d'ajouter que la traduction de ces documents est

 23   le fruit du travail du service officiel CLSS, mais pas des collaborateurs

 24   du général Praljak ou de son équipe.

 25   M. STRINGER : [interprétation]

 26   Q.  Mon Général, si l'on regarde ces conditions, je voudrais attirer votre

 27   attention sur le point numéro 2, où il est mentionné :

 28   "Nos signatures sur le document proposé seront considérées comme

Page 44168

  1   nulles et non avenues si les conditions suivantes ne sont pas remplies : a)

  2   Si toutes les parties, et notamment l'agresseur, ne signaient pas les

  3   documents proposés sans amendement ni nouvelles conditions, et ceci dans un

  4   laps de temps raisonnable…"

  5   Petit b), on fait référence à la communauté internationale, et dans

  6   le petit c) on mentionne la condition également que l'agression cesse.

  7   Mon Général, êtes-vous d'accord pour dire que toutes les parties au

  8   conflit n'ont pas signé le plan Vance-Owen, ça ne s'est jamais produit, et

  9   les Serbes ont tenu un référendum et le plan de paix Vance-Owen n'a pas été

 10   entériné et les Serbes n'ont jamais signé l'accord, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je suis au courant de cela. Mais les Croates ont signé, et --

 12   Q.  Nous savons cela. Donc la signature des Musulmans serait devenue nulle

 13   et non avenue puisque les Serbes ne sont pas d'accord avec ce plan, n'est-

 14   ce pas ?

 15   R.  Ce sont des conditions dont ils disent que si à l'avenir ces conditions

 16   ne sont pas réunies. Je crois d'ailleurs que la Défense de M. Prlic l'a

 17   déjà dit ici. Je sais que l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, en date du 11

 18   mai, a adopté le plan Vance-Owen, et que si l'on voulait vaincre

 19   l'agresseur, il importait de conclure des accords très solides avec les

 20   Croates, et il fallait attaquer l'armée de la Republika Srpska et non

 21   attaquer les Croates sur les frontières occidentales, comme le dit Sefer

 22   Halilovic.

 23   Q.  "-- le document signé ne pourra être interprété ou compris comme

 24   s'écartant de la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'entité

 25   étatique, indivisible et indépendante."

 26   Mon Général, est-ce que cette interprétation du plan Vance-Owen ne

 27   serait-elle pas contraire à l'établissement d'une zone croate autonome

 28   telle que vous la souhaitiez ?

Page 44169

  1   R.  D'abord, un territoire croate autonome est déjà prévu dans les

  2   dispositions qui prévoient la création des cantons. Mais avec la signature

  3   du plan Vance-Owen, la désintégration de la Bosnie-Herzégovine a commencé -

  4   - vous avez les documents que j'ai signés, vous avez aussi d'autres

  5   documents qui montrent que par la signature du plan Vance-Owen la Bosnie-

  6   Herzégovine telle qu'elle était n'existe plus et qu'on s'apprête à mettre

  7   en place ce qu'on peut mettre en place selon les dispositions du plan

  8   Vance-Owen. C'était la position de Franjo Tudjman également, c'était la

  9   mienne, c'était celle de M. Prlic, qui a contribué à la mise en place de

 10   ces bases politiques, mais malheureusement, Alija Izetbegovic a dans une

 11   certaine mesure abrogé, aboli, détruit tout cela.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Je suis prêt à passer au classeur suivant,

 13   Monsieur le Président. Il s'agit du classeur numéro 8.

 14   Je vous demande une minute, Monsieur le Président, s'il vous plaît.

 15   Q.  Mon Général, je voudrais revenir à ce que nous avons parlé brièvement

 16   durant une phase précédente du contre-interrogatoire.

 17   Mon Général, vous n'êtes pas sans savoir qu'à la fin du mois de juin 1993,

 18   le général Petkovic a rendu un ordre demandant à tous les hommes musulmans

 19   en âge d'être incorporés dans l'active au sein des zones de responsabilité

 20   du nord-ouest et du sud-est de la Bosnie-Herzégovine, les zones opératives

 21   de l'Herzégovine, d'être arrêtés ?

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, objection. L'ordre

 23   dont vient de parler M. Stringer indique très clairement qu'il s'agit de la

 24   zone opérationnelle du sud-est de l'Herzégovine, donc je demanderais que

 25   cet ordre soit interprété comme un ordre adressé au sud-est de

 26   l'Herzégovine. Merci beaucoup.

 27   M. STRINGER : [interprétation] Je vais reformuler la question.

 28   Q.  Mon Général, saviez-vous qu'au début du mois de juillet et en août

Page 44170

  1   1993, les forces du HVO, les forces armées, dans la zone opérationnelle

  2   d'Herzégovine du sud-est et du nord-ouest étaient arrêtées et détenues en

  3   nombre important, il s'agissait donc d'hommes musulmans en âge d'être

  4   incorporés dans l'active ?

  5   R.  Vous évoquez cela en rapport avec une durée de deux mois. Je ne peux

  6   pas être d'accord. A mon arrivée en date du 24, je ne sache pas qu'il y ait

  7   eu désarmement des Musulmans.

  8   Q.  Vous êtes en train de nous dire qu'avant le 24 juillet, vous ne saviez

  9   absolument rien à ce propos ?

 10   R.  Pas de connaissance ou de renseignement direct, absolument aucun. Je

 11   savais un certain nombre de choses. Je savais qu'il y avait eu trahison, et

 12   cetera. Maintenant ce qui s'est passé au-delà de cela, je ne sais pas,

 13   parce que j'ai passé pas mal de temps en Boksevica, ensuite à Zagreb, et

 14   après j'ai été plongé dans la guerre à Vakuf. Toute cette histoire était

 15   au-delà du champ de mes capacités mentales, spirituelles de l'époque.

 16   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur Stringer.

 17   Correction au compte rendu d'audience, page 18, ligne 18 : le général a dit

 18   : "Monsieur Stringer, c'est vous qui avez parlé de cela dans une période de

 19   deux mois," et pas que cela avait effectivement été fait pendant une

 20   période de deux mois ou que cela avait duré pendant deux mois.

 21   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 22   M. STRINGER : [interprétation]

 23   Q.  C'était ce que vous nous avez déjà dit jusqu'à présent, en tout cas,

 24   lorsque le général Petkovic vous a remis le commandement de l'état-major du

 25   HVO, le 24 juillet, il ne vous a rien dit. Il ne vous a absolument pas

 26   parlé du fait que des hommes musulmans avaient été arrêtés dans les deux

 27   zones opérationnelles d'Herzégovine, le nord-ouest et le sud-est; c'est

 28   bien ce que vous êtes en train de nous dire ?

Page 44171

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai une objection, Messieurs les Juges, à

  2   l'utilisation de ces notions "d'hommes musulmans," car il est très clair

  3   qu'il s'agisse ici de soldats du HVO, appartenant au groupe ethnique

  4   musulman. C'est très clair dans l'ordre, ainsi que le fait qu'il s'agisse

  5   d'hommes en âge de porter les armes. Une telle interprétation à mon sens,

  6   c'est complètement erroné.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Je pense que la question est parfaitement

  8   équitable. Dans les documents et dans tous les éléments de preuve que nous

  9   allons voir, on ne fait aucune différence entre les Musulmans qui auraient

 10   été dans le HVO et les hommes musulmans en âge de porter des armes et

 11   d'être incorporés dans le [imperceptible] civils, ils étaient tous arrêtés

 12   d'une façon parfaitement indistincte. C'est pour ça que je pose la question

 13   au général Praljak.

 14   Q.  Donc pour en revenir à votre déposition précédente, le 26 août, vous

 15   avez déposé de la façon suivante, j'ai dit :

 16   "Parce que vous avez pris le commandement de l'état-major principal du HVO,

 17   le 24 juillet, le général Pektovic ne vous a absolument rien dit à ce

 18   propos ?"

 19   Il s'agissait d'un ordre visant à enlever les Musulmans, enfin retirer les

 20   Musulmans qui étaient dans les rangs du HVO et de les désarmer. Vous avez

 21   dit, non, vous avez répondu :

 22   "Non, non, nous n'avons pas eu le temps d'en parler."

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Bien. Nous allons regarder le premier document portant sur ce sujet. Il

 25   s'agit de la pièce P 03119 [comme interprété]. Mais avant, j'aimerais vous

 26   poser une question à propos de la période qui a suivi le 24 juillet 1993.

 27   Donc après le 24 juillet 1993, les membres musulmans dans les rangs du HVO,

 28   ont-ils été désarmés et détenus sur la base d'un ordre que vous auriez

Page 44172

  1   donné ou sur la base de l'ordre du général Petkovic, qui continue à

  2   s'appliquer ?

  3   R.  Je n'ai pas émis d'ordre de cette nature, et je n'ai pas connaissance

  4   du moindre cas de cette nature qui se serait produit ultérieurement. Je

  5   n'étais pas au courant, je ne sais pas.

  6   Q.  Donc si le HVO arrêtait les membres musulmans du HVO pour les mettre en

  7   prison, après le 24 juillet, vous êtes en train de nous affirmer qu'en tout

  8   cas, vous, vous n'en saviez rien ?

  9   R.  En effet.

 10   Q.  Donc le fait que le HVO ait arrêté tous les hommes musulmans ayant

 11   entre 16 et 60 ans, même s'ils ne faisaient pas partie du HVO, vous aussi,

 12   que vous n'aviez aucune idée, que vous n'étiez pas au courant que ceci

 13   avait eu lieu, après le 24 juillet ?

 14   R.  Non, je l'ignore.

 15   Q.  -- à l'époque ?

 16   R.  Non, je ne le savais pas non plus, à l'époque.

 17   Q.  Il y a un document P 03019. C'est un document en date donc du 30 juin

 18   1993, ordre émanant du général Petkovic, au point 8, paragraphe 8 :

 19   "Donc en tant que chef de l'état-major du HVO, on donne l'ordre que dans

 20   toutes les unités où il reste des soldats musulmans, il convient de les

 21   désarmer, de les mettre à l'isolation. Il faut donc mettre à l'isolation

 22   tous les hommes en âge de porter des armes, qui sont Musulmans, dans votre

 23   zone de responsabilité et que les femmes et les enfants restent dans leurs

 24   maisons."

 25   Vous le saviez, donc vous êtes en train de nous dire que vous n'étiez

 26   absolument pas au courant de cet ordre, le 30 juin 1993 ?

 27   R.  Non, mais je voudrais ici apporter une correction. Il ne dit qu'il faut

 28   arrêter les soldats musulmans, mais les membres du HVO appartenant au

Page 44173

  1   groupe ethnique musulman, les Bojovnici. Ce sont eux qu'il faut désarmer et

  2   isoler, tel que c'est écrit ici. Tous les hommes en âge de porter les armes

  3   doivent être mis en isolement, c'est ce qui est dit là.

  4   Q.  Mais on pourra interpréter cela de la façon suivante, il se pourrait

  5   qu'il y ait trois catégories de personnes qui soient concernées. La

  6   première catégorie étant, les Musulmans, membres du HVO. Il fallait donc

  7   les désarmer et les mettre en isolement, et ensuite tous les hommes en âge

  8   de porter des armes, dans les villages habités par les Musulmans, eux aussi

  9   doivent être mis à l'écart. Ensuite troisième catégorie, les hommes et les

 10   enfants -- les femmes et les enfants, qui eux doivent rester dans leurs

 11   maisons ou leurs appartements. Enfin, nous y reviendrons en ce qui concerne

 12   l'interprétation de ce document. Puisqu'il est vrai que vous n'avez pas

 13   rédigé cet ordre, mais tout ce que j'aimerais savoir, c'est si vous

 14   connaissiez l'existence de cet ordre, le 30 juin 1993 ou peut-être si vous

 15   avez appris de l'existence de cet ordre dans les jours qui ont suivi, le 30

 16   juin 1993 ?

 17   R.  Non, je me trouvais à Boksevica, et ensuite, je suis allé à Zagreb.

 18   Q.  Le général Petkovic ne vous a jamais apporté cet ordre, et ne vous en a

 19   jamais parlé lorsqu'il vous a passé le commandement de l'état-major

 20   principal, le 24 juillet 1992 ?

 21   R.  Non, le 24 juillet, nous étions confrontés à des problèmes trop

 22   considérables pour pouvoir nous occuper de quelque chose qui s'était

 23   produit quatre jours auparavant. Nous étions en train de perdre toute la

 24   zone s'étendant à partir de Bugojno jusqu'aux frontières occidentales,

 25   conformément à ce que Sefer Halilovic avait  préparé.

 26   Q.  Donc le HVO était en train de désarmer, de mettre à l'écart les hommes

 27   musulmans dans toute la zone opérationnelle d'Herzégovine du sud-est, mais

 28   c'était quelque chose qui n'était pas suffisamment important pour que ça

Page 44174

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 44175

  1   apparaisse sur votre radar, lorsque vous avez appris le commandement ?

  2   R.  Non, je souhaite dire que les problèmes, auxquels nous étions

  3   confrontés le 24, étaient si considérables que pour ce qui était d'un ordre

  4   de cette nature; nous n'avions ni le temps, ni le besoin d'en discuter, du

  5   moins cela ne s'imposait pas. En tout cas, si c'est ce que vous souhaitez

  6   avancer, d'un point de vue militaire, je pense que l'ordre du général

  7   Petkovic est tout à fait correct, après la haute trahison et tout ce qui

  8   s'est passé dans la zone opérationnelle de l'Herzégovine du sud-est, et ce

  9   qui a été le fait des Musulmans, membres du HVO. C'est le règlement

 10   militaire, tout simplement qui en dispose ainsi.

 11   Q.  Bien. Nous allons parler des emplacements où toutes ces personnes ont

 12   été détenues. Nous y reviendrons, dans le secteur suivant. Mais étant donné

 13   qu'il s'agit quand même d'un grand nombre de personnes qui doivent être

 14   mises à l'écart et détenues, vous devez quand même avoir un grand problème

 15   à gérer en tant que commandant de l'état-major principal. Vous avez à vous

 16   occuper des installations dans lesquelles ces personnes vont être détenues,

 17   de leurs traitements, ils vont être détenus quand même sur ordre du général

 18   Petkovic ?

 19   R.  Ce que je vous dis, Monsieur Stringer, c'est que je n'étais pas au

 20   courant, et vous, vous me dites : vous saviez et pourquoi n'avez-vous pas

 21   fait ceci ou cela ? Mais, moi, je vous dis que je n'étais pas au courant,

 22   et si bien que votre question n'est fondée sur rien, je n'étais au courant

 23   ni de l'événement en question ni du nombre de personnes impliquées et

 24   concernées.

 25   Q.  Bien, mais vous avez quand même appris certaines choses par la suite.

 26   N'est-il pas vrai que lorsque le général Petkovic vous a remis le

 27   commandement de l'état-major principal, il vous a aussi remis des milliers

 28   de prisonniers musulmans ?

Page 44176

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai une objection à

  2   cette question car elle comprend une supposition selon laquelle les

  3   prisonniers se seraient trouvés sous l'autorité du chef de l'état-major

  4   principal, alors que dans ce prétoire, nous n'avons vu jusqu'à présent

  5   aucun éléments de preuve à cet effet. Si ce n'est pas le cas, le général

  6   Petkovic ne pouvait pas remettre ces milliers de prisonniers sous

  7   l'autorité du nouveau chef d'état-major principal.

  8   M. STRINGER : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, répétez, Maître Alaburic, répétez la dernière

 10   partie qui n'aurait pas été prise parce que, vous voyez, il y a des points

 11   --

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Donc mon objection concerne l'hypothèse

 13   sous-jacente à la question de mon estimé confrère, M. Stringer, selon

 14   laquelle le général Petkovic en sa qualité de chef de l'état-major

 15   principal du HVO aurait eu quelques compétences que ce soit concernant ces

 16   milliers de prisonniers appartenant au groupe ethnique musulman, et que,

 17   par conséquent, il aurait été en position de transférer ces compétences au

 18   général Praljak en sa qualité de nouveau commandant de l'état-major

 19   principal du HVO. Il aurait pu donc transférer ces prisonniers sous son

 20   autorité. Il aurait pu lui transférer ces prisonniers. Cette présomption à

 21   ce jour n'a été appuyée, par aucuns éléments de preuve présentés, dans ce

 22   prétoire. C'est pourquoi j'estime que la question n'est pas adéquate.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 24   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais de toute

 25   façon traiter de cela lors du contre-interrogatoire. Evidemment, la thèse

 26   de l'Accusation est la suivante : lorsque des prisonniers sont arrêtés sur

 27   l'ordre d'un commandant militaire, on ne peut pas tout simplement

 28   s'exonérer de la responsabilité; il faut absolument s'assurer que la

Page 44177

  1   responsabilité est bien passée à d'autres.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, avec votre permission,

  3   j'ai beaucoup d'estime pour la position que vient de préciser l'Accusation;

  4   je souhaiterais, par conséquent, préciser également la position de la

  5   Défense. Il existe une nuance entre le fait de mettre en isolement

  6   quelqu'un et le fait de mettre cette personne en détention de

  7   l'emprisonner. Il y a également une différence entre cela et le fait

  8   d'exercer un contrôle ou une surveillance sur les prisons. Il s'agit

  9   d'aspects différents qui peuvent être confiés à différents organes

 10   étatiques en l'espèce d'organes de la Herceg-Bosna, si bien que la thèse

 11   avancée par l'Accusation n'est ni fondée, ni logique.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ça ne m'a pas échappé parce que j'avais

 13   l'intention de poser la question sur le terme "izolirati." Bien. Mais

 14   j'aborderai cela quand M. Stringer aura terminé le document.

 15   Monsieur Stringer.

 16   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   Donc j'aimerais passer au document suivant --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de passer au document suivant, Général

 19   Praljak, je reste sur l'ordre du général Petkovic, ce n'est pas le vôtre.

 20   Bon. Nous le savons c'est le général Petkovic. Je voudrais d'abord vous

 21   demander une question d'ordre linguistique.

 22   Dans votre langue, quand on commence une phrase par le terme "U" parce que

 23   vous voyez, par exemple, au point 3, ça commence par "U" au point 5, au

 24   point "U" au point 8, "U." Ça veut dire quoi dans votre langue quand vous

 25   commencez en mettant "U" ? Qu'est-ce que ça signifie ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela signifie que les personnes ou  postdrova

 27   [phon], c'est dans les unités, par exemple, donc l'Unité du HVO dans cette

 28   zone est composée de Croates et de Musulmans. Ils sont dans ces unités;

Page 44178

  1   c'est le sens d'"U."

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors le Procureur, tout à fait, vous a exposé

  3   à partir du paragraphe 8, trois situations. Moi, il y en a une quatrième

  4   que je vois qu'il n'a pas mentionnée. Première situation : les Musulmans,

  5   membres du HVO, ils doivent être désarmés et isolés.

  6   Deuxième situation : les Musulmans susceptibles d'être incorporés de

  7   prendre les armes, donc ceux-là doivent être isolés.

  8   Troisièmement, les hommes et les enfants doivent rester dans leurs

  9   maisons.

 10   Mais il y en a une quatrième catégorie, ce sont les Musulmans âgés

 11   qui ont plus de 60 ans, ou 70 ans ou 80 ans, je ne sais pas quoi, qui ne

 12   peuvent pas être par les documents être incorporés, alors "ces vieillards"

 13   - entre guillemets - qu'est-ce qu'ils -- est-ce qu'ils devaient être aussi

 14   arrêtés ou pas ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'est pourquoi il est précisé ici : "Tous

 16   les hommes en âge ou plutôt aptes." Dans la terminologie militaire cela se

 17   rapporte aux conscrits, à ceux qui ont une obligation militaire, et ceux

 18   qui n'appartiennent pas à cette catégorie entre dans la catégorie la même

 19   que celle où entre les femmes et les enfants.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : On revient à l'objection de Me Alaburic.

 21   Quand vous savez, moi, quand j'ai un document, je regarde de A à Z, et donc

 22   c'est pour cela qu'après je prends peut-être un peu trop de temps à poser

 23   des questions. Il ne m'a pas échappé qu'il y a le terme "isolé." Bien. Ce

 24   n'est pas détenu c'est isolé, donc je me suis dit : est-ce qu'ils ont

 25   employé le terme "izolirati" comme cela ou bien ça avait un sens juridique

 26   précis. Alors dans votre langue, quand quelqu'un emploie le terme

 27   "izolirati," qu'est-ce que ça veut dire dans votre langue ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Selon moi, je vous parle ici de mon

Page 44179

  1   interprétation, cela signifie entraver leur liberté de mouvement, les

  2   empêcher de se déplacer. On place ces personnes en un lieu bien précis ou

  3   alors ces personnes restent chez elles et on les empêche de sortir du lieu

  4   où elles sont mises en isolement.

  5   Je vais vous citer un exemple : lorsque j'ai mis en isolement des personnes

  6   après les événements d'Uzdol, j'ai mis en isolement ce membre de la

  7   communauté religieuse musulmane, un représentant officiel, et bien je l'ai

  8   mis en isolement pour éviter tout acte de revanche et pour le protéger

  9   également pour qu'il ne soit pas tué. Lorsque vous avez de grands

 10   rassemblements d'hommes d'Etat, par exemple, vous devez aussi procéder à un

 11   isolement afin de remplir toutes les conditions de sécurité nécessaire. Ils

 12   ne sont pas autorisés à se déplacer n'importe comment.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Je prête toujours attention aux documents, aux

 14   dates, parce que le contexte est important. Examinez un document sans le

 15   replacer dans le contexte, là, il peut y avoir des méprises. Le 30 juin,

 16   pouvez-vous nous redire qu'est-ce qui s'était passé les jours d'avant ou ce

 17   jour-là concernant des Unités musulmanes du HVO, de manière très circoncis

 18   de façon que ce soit au transcript ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Très brièvement, supposons qu'ici nous soyons

 20   une armée et que nous ayons des armes. Le 30 juin, je retourne ces armes

 21   contre vous, Monsieur le Président, qu'il s'agisse du fait que je vous fais

 22   prisonnier, que je vous tue, ou que je vous emprisonne, et ce que je fais

 23   c'est que je prends en charge l'ensemble du contrôle sur les lignes de

 24   front concernées. C'est ce qu'ont fait les soldats du HVO le 30 juin dans

 25   la zone de Mostar, au sens large à l'égard de leurs camarades d'armes,

 26   d'hier, qui étaient les membres croates du HVO, et selon toutes les règles

 27   en vigueur dans toute armée normale, ces hommes auraient dû être exécutés.

 28   M. KOVACIC : [interprétation] Il me semble qu'il y avait une erreur soit

Page 44180

  1   dans le compte rendu soit dans l'interprétation; peut-être même le général

  2   a-t-il lui-même fait un lapsus. Pourriez-vous répéter, Général, cette

  3   phrase-clé ? Que s'est-il passé le 30 juin ? Quels sont les soldats qui le

  4   30 juin ont fait cela ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit des soldats du HVO appartenant au

  6   groupe ethnique musulman.

  7   M. KOVACIC : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Je croyais que mon collègue, non -- oui, le Juge

  9   Mindua a une question.

 10   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin Praljak, tout au long du conflit,

 11   tel que vous nous avez expliqué souvent, il y avait le problème des

 12   effectifs qui se posait, vous manquiez de soldats, donc le personnel

 13   combattant était très important. Lorsque vous prenez le commandement du

 14   HVO, vous est-il arrivé de comparer vos effectifs avec ceux d'avant ? Vous

 15   dites, par exemple : voilà, on voit comment j'arrive, il y avait autant de

 16   soldats et que, pour le moment, j'en ai moins, ainsi de suite. S'il vous

 17   est arrivé de comparer les effectifs d'avant et d'après vous êtes-vous

 18   intéressé, à savoir pourquoi avait-il eu hémorragie diminution de nombres

 19   de combattants ? Je pense sur les soldats musulmans du HVO, et

 20   éventuellement savoir qu'est-ce qu'ils sont devenus ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] A cet instant précis, non. Car comme je l'ai

 22   dit, au même moment, j'ai dû me rendre à Gornji Vakuf. Cependant, vous avez

 23   vu ce document qui concerne la date se situant une quinzaine de jours plus

 24   tard, lorsque j'ai demandé que l'on établisse avec exactitude le nombre de

 25   soldats présents, non pas en se fondant sur des listes qui avaient été

 26   gonflées pour différentes fraisons, mais que l'on établisse le nombre exact

 27   de soldats se trouvant réellement sur le terrain. Il y avait entre les deux

 28   une différence importante.

Page 44181

  1   Quant à la zone, où je me suis trouvé personnellement, j'ai procédé moi-

  2   même à un décompte comme vous avez pu le voir dans la fin de ce document,

  3   où j'ai utilisé ce mot, que nous ne répéterons pas et qui traduit une forme

  4   de désespoir et de résignation, face à un nombre aussi faible d'unités

  5   complètement dispersées et qui s'étaient réduites comme peau de chagrin.

  6   Ils se battaient de façon extraordinaire, mais c'était extrêmement

  7   difficile comme situation, il était extrêmement difficile de continuer dans

  8   une situation où il y avait si peu d'unités, entre 20 et 100 hommes, qui

  9   devaient tenir une ligne de front aussi longue, aussi étendue à Gornji

 10   Vakuf. C'est là que j'ai commencé à comprendre que le nombre réel d'hommes,

 11   qui étaient réellement disposés à se rendre sur les lignes de front si on

 12   retranchait donc ceux qui essayaient de s'échapper, qui étaient en train de

 13   se cacher, ou qui étaient blessés, ou alors qui étaient incapables de se

 14   battre en raison de leur état physique ou psychologique, étaient vraiment

 15   très réduits.

 16   M. LE JUGE MINDUA : J'attendais la traduction parce qu'elle n'était pas

 17   encore finie.

 18   Donc vous ne vous êtes jamais posé la question de savoir où étaient partis

 19   les soldats manquants ou qu'étaient-ils devenus ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Mindua, non, je ne me suis

 21  pas posé cette question, très franchement. Bien entendu, ce n'est que le 1er

 22   septembre que j'ai appris qu'il existait certains problèmes, lorsque Mme

 23   Ivanicevic est arrivée, pour demander un laissez-passer. Je voudrais

 24   souligner que, si l'on passe sous silence le degré de l'agression opérée

 25   par l'ABiH à ce moment précis, on ne pourra pas comprendre la situation

 26   dans laquelle on se trouvait. Moi, j'étais confronté aux problèmes de

 27   l'extraction des blessés, des blessés de l'ABiH à Mostar, le transport des

 28   armes à destination de la Bosnie centrale, Zepce, les blessés encore une

Page 44182

  1   fois, et je pense que personne ne peut comprendre l'étendue des problèmes

  2   auxquels est confronté un commandant qui fait face à une telle agression,

  3   avec si peu d'hommes et qui a à sa charge comme devoir premier, de se

  4   maintenir, de maintenir ses positions, ce qui était mon devoir.

  5   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

  6   M. STRINGER : [interprétation]

  7   Q.  Lorsque l'on regarde la dernière partie de votre réponse à la question

  8   du Juge Mindua, vous parlez de tout ce que vous aviez à faire d'évacuation

  9   des blessés de l'ABiH de Mostar, qu'il vous fallait armer la Bosnie

 10   centrale -- les envoyer en Bosnie centrale par hélicoptères, les évacuer

 11   donc ces blessés, aller à Zepce, il semble que simultanément vous faisiez

 12   énormément de choses alors que vous nous dites que vous n'aviez aucune

 13   connaissance de la détention ou de la mise en isolement de milliers de

 14   Musulmans qui se trouvaient juste là sous vos yeux, en fait. Donc on a du

 15   mal à le croire, quand même.

 16   R.  Cela n'est peut-être pas convainquant pour moi. Mais pour moi, cela

 17   l'est tout à fait. C'était là mes obligations d'un point de vue militaire.

 18   Il est extrêmement important de prendre en charge un soldat blessé. C'était

 19   mon obligation, à titre militaire. Un homme n'acceptera jamais de se battre

 20   s'il ne sait pas qu'en cas de blessure il sera soigné. Cela valait

 21   également pour ces quatre groupes de blessés de l'ABiH qui ont été évacués,

 22   et ainsi de suite. Or, ce que vous, vous pensez quant à ce que j'aurais dû

 23   être en mesure de faire, ou ce pourquoi j'aurais dû avoir le temps de

 24   faire, malheureusement, je me battais à Mostar, au nord, au sud, et

 25   ailleurs, et j'avais d'autres problèmes également comment organiser tout

 26   simplement le maintien des zones opérationnelles de Tihomir Blaskic,

 27   comment assurer le maintien de Zepce, et ainsi de suite.

 28   Q.  Mais pour s'occuper de la zone opérative de Bosnie centrale, Zepce, qui

Page 44183

  1   quand même est assez loin de là où vous étiez, vous deviez être bien

  2   informé, on devait vous tenir au courant de ce qui se passait dans tous ces

  3   endroits ?

  4   R.  Au sujet de quels événements ? Le fait qu'il manquait de munition,

  5   qu'ils étaient attaqués par l'ABiH, qu'il était nécessaire pour moi de

  6   violer l'embargo sur les armes pour leur en envoyer, oui, cela c'était des

  7   informations dont je disposais.

  8   Q.  Vous deviez être tenu au courant de la situation sur le terrain sur

  9   tous ces théâtres, n'est-ce pas ?

 10   R.  La situation militaire, oui. Qu'entendez-vous par "être au fait de la

 11   situation" ? J'étais au fait de la situation militaire sur le terrain.

 12   Q.  C'est peut-être pour cela qu'on a du mal à se comprendre. Voici ce que

 13   je vous affirme : j'ai l'impression que vous êtes en train de nous dire

 14   qu'en ce qui concerne les prisonniers musulmans ou les détenus musulmans,

 15   ou les personnes mis à l'isolement, cela ne rentrait pas dans votre mandat

 16   militaire.

 17   R.  Non, cela n'entrait pas dans mes compétences d'un point de vue

 18   militaire.

 19   Q.  Donc vous n'étiez pas au courant de leur existence - et même était au

 20   courant de leur existence - de toute façon ils n'étaient pas de votre

 21   responsabilité; c'est votre position ?

 22   R.  Je l'ignorais, et il est possible de dire que même si j'avais été au

 23   courant une fois qu'un prisonnier avait été transféré, remis en

 24   établissement pénitentiaire il n'était plus sous la responsabilité de

 25   l'état-major, les prisonniers n'étaient pas sous l'autorité de l'état-

 26   major.

 27   Q.  Pour être bien clair, parce que les prisons étaient sous l'autorité de

 28   qui ? Quand vous dites "prisons en fait," de quelles prisons parlez-vous ?

Page 44184

  1   R.  Je n'ai pas dit à quelle prison je pensais, je n'étais pas au courant

  2   des prisons qui étaient en place à part celle de l'Heliodrom, mais je

  3   savais également qu'il y avait également une prison à Dretelj. Je le savais

  4   parce qu'au mois de septembre, j'ai demandé qu'ils soient détenus également

  5   les membres du HVO qui avaient commis une infraction non pas une infraction

  6   au pénal, mais une infraction de nature disciplinaire. Comme vous avez pu

  7   le voir dans ce document, j'ai émis je crois le 25 septembre ou le 20, et

  8   j'ai demandé que tous soient détenus à un même endroit, tous les membres du

  9   HVO qui avaient été punis par leurs commandants pour telle ou telle

 10   infraction.

 11   Q.  Oui, je me souviens de cette pièce, mon Général. En ce qui concerne les

 12   prisonniers ou les détenus musulmans à Dretelj, si vous dites qu'il ne

 13   relevait pas de la responsabilité de l'état-major principal, est-ce que

 14   vous dites qu'ils tombaient sous le coup du département de la Défense ?

 15   R.  J'en reste uniquement au fait que les prisons n'étaient absolument pas

 16   sous la responsabilité ou dans le domaine de compétence de l'état-major

 17   principal au moment où j'y suis arrivé, un point c'est tout.

 18   Q.  Ma question est la suivante : s'il ne relevait pas de votre

 19   responsabilité, est-ce qu'ils étaient sous la responsabilité du département

 20   de la Défense, d'abord M. Stojic ?

 21   R.  Je l'ignore.

 22   Q.  Qu'en est-il de la police militaire, est-ce qu'ils étaient sous leur

 23   responsabilité ?

 24   R.  Je l'ignore. Vous avez eu dans ce prétoire des témoins qui avaient

 25   appartenu au système judiciaire et d'autres témoins qui auraient été en

 26   mesure d'éclaircir cela. Je ne suis pas expert en ces matières et cela ne

 27   figurait pas non plus dans la description de mes obligations en ma qualité

 28   de commandant de l'état-major principal du HVO pendant la période où j'ai

Page 44185

  1   exercé ces fonctions.

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] M. Stringer vous avait mentionné

  3   votre profil de poste, Monsieur Praljak; est-ce que vous pourriez nous

  4   fournir ceci si tel est le cas ? J'aimerais beaucoup consulter un document

  5   de ce type. Merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, on a déjà ici

  7   montré tous les documents qui précisent l'organisation du HVO. Ils ont été

  8   versés et il est indiqué dans ces documents très précisément qui a la

  9   charge de quoi au sein du HVO, que ce soit dans la branche civile ou dans

 10   la branche militaire. Ils ont pour autant que je m'en souvienne déjà le

 11   statut de pièce à conviction dans cette affaire.

 12   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, merci. J'essaierai de l'obtenir

 13   et de le lire et je vérifierai également ce que vous dites à savoir qu'il

 14   n'y avait rien de mentionner concernant les points. Nous en avons parlé

 15   pendant un certain nombre de minutes ici. Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, en ce qui concerne des prisonniers,

 17   je vous ai déjà posé des questions, et vous aviez répondu, en disant que ce

 18   n'était pas sous votre responsabilité. Bon. Là, vous venez de le dire à

 19   nouveau au Procureur. Je prends cela sous un autre plan, un autre indice.

 20   Vous êtes commandant du HVO, et pendant les combats, il se peut que des

 21   prisonniers soient faits. Hier, on a vu - rappelez-vous Gornji Vakuf - 23

 22   soldats du HVO faits prisonniers. Nous savons également que l'ABiH détenait

 23   des prisonniers du HVO. Nous savons également que le HVO avait aussi des

 24   prisonniers militaires de l'ABiH. Nous savons par les éléments de preuve

 25   qu'il y avait un office pour les échanges de prisonniers et ça ce sont des

 26   fait que tout le monde a sous les yeux.

 27   A partir de là, dans l'exercice du commandement, le fait qu'il y ait des

 28   prisonniers, ça peut jouer sur le moral des troupes, et d'ailleurs j'ai vu

Page 44186

  1   pas plus tard que ce matin, vous allez avoir un expert qui va venir nous

  2   parler de tous ces problèmes psychologiques qui peuvent avoir un effet sur

  3   les soldats. Ça sera intéressant et on abordera à nouveau ce type de

  4   problèmes. Mais vous, en tant que commandant du HVO, quand vous savez qu'il

  5   y a des gens qui sont détenus par l'ennemi, et que vous savez qu'il y a des

  6   échanges, est-ce qu'à ce moment-là cet aspect vous ne vous en occupez pas

  7   du tout. Vous m'avez dit déjà, j'ai posé la question. Alors je me permets

  8   d'insister à nouveau là-dessus parce que dans l'exercice de vos

  9   commandements, c'était un élément à prendre en compte, le moral des troupes

 10   et de savoir, par exemple, que parmi les soldats, peut-être certains

 11   avaient un frère qui était détenu, un père détenu. Ça joue sur le moral.

 12   Là, vous semblez dire : non, moi, je ne m'en occupais pas.

 13   Alors qu'est-ce que vous me dites ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] La question des échanges est une question

 15   complètement différente, et cela non plus je ne pouvais pas m'en occuper à

 16   l'époque. C'est une question particulièrement importante que,

 17   malheureusement, je n'ai pas pu prendre en charge à l'époque; cependant, je

 18   savais qu'à l'échelon du HVO, il y avait des pourparlers quotidiens portant

 19   sur les échanges de prisonniers et j'avais entendu dire que M. Pusic s'en

 20   occupait et j'étais tout à fait sûr qu'il le faisait au mieux de ce qu'il

 21   pouvait.

 22   Quant aux blessés de l'ABiH à l'époque, j'étais présent lors de cet accord

 23   qui a été trouvé précisément pour le moral, pour assurer le moral des

 24   troupes et qui prévoyait l'extraction de tous les blessés de Mostar Est car

 25   les conditions y étaient particulièrement mauvaises, les blessés de l'ABiH

 26   à Mostar Est. En retour, ils étaient censés nous permettre un traitement

 27   égal. Bon c'était une forme de réciprocité.

 28   Malheureusement, à quatre reprises, je me suis livré à ce type d'action

Page 44187

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 44188

  1   d'extractions mais ils ne nous ont pas accordé cette réciprocité. Donc

  2   certains hommes ont été pris -- certains hommes ont pris en embuscade les

  3   hélicoptères au sujet desquels nous nous étions mis d'accord parce qu'ils

  4   attendaient que nous nous remplissions notre part de l'accord et le retour

  5   de leurs propres fils avant de s'acquitter de leur propre part. Il y avait

  6   des personnes qui s'étaient insurgées et qui ont pris en fait les

  7   hélicoptères et je n'aurais pas évité ce problème à l'époque.

  8   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin Praljak, sur ce sujet, je veux poser

  9   une dernière question. Comme vous le remarquez, le sujet des prisonniers

 10   est très important. Alors vous avez dit que les soldats musulmans du HVO

 11   qui ont retourné leurs armes contre leurs frères d'armes du HVO devaient

 12   être effectivement mis de côté, et vous avez ajouté que généralement les

 13   soldats pareils sont exécutés. Je pense que vous avez raison; dans beaucoup

 14   d'armées c'est le cas. Dans plusieurs droits militaires, c'est la situation

 15   qui est prévue.

 16   Alors je reviens sur la question que je vous avais posée avant : les

 17   effectifs militaires. Bon, tous ont fait la plupart nous avons fait notre

 18   service militaire et tous les matins, il y a contrôle des effectifs, et

 19   j'imagine que cela est encore plus important pendant le temps de guerre.

 20   Suite à cet ordre, lorsqu'une demande de mettre de côté les soldats qui ont

 21   trahi un commandant en principe et je parle du principe qui commande, il

 22   aime aussi ses soldats, il tient compte de leur moral. Il s'assure qu'ils

 23   mangent bien et qu'ils sont dans la bonne condition, et cetera. 

 24   Ce commandant, qui aime ses soldats et qui voit que certains ont

 25   trahi, et qui risquent même d'être exécutés, c'est ce que vous avez dit,

 26   une fois le soldat séparé du groupe, le commandant qui en principe aime ses

 27   soldats, il ne s'intéresse plus, ça finit, ça s'arrête là. C'est la

 28   question que je voudrais savoir, donc vous, dès qu'un de vos soldats est

Page 44189

  1   sorti des rangs terminer, qu'il soit exécuté, mis en prison, jeté aux

  2   animaux, ce n'est pas votre problème; c'est ce que vous voulez dire ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Après cela, pour autant que le sache, s'ouvre

  4   une autre chose. Il n'est plus commandant, à mon avis, il doit faire deux

  5   choses. Il doit les isoler pour les empêcher de nuire, lorsqu'ils ont

  6   commencé à exercer les activités nuisibles, et deuxièmement, il doit les

  7   mettre en isolement aussi pour éviter qu'ils ne soient pris pour cible dans

  8   le cadre d'action de représailles, actions qui sont très probables, si ces

  9   hommes ont tué certains de leurs camarades d'arme ou autre chose. Ensuite

 10   ces prisonniers, conformément à la procédure en vigueur sont remis à la

 11   police militaire. Le commandant du moins pour autant que je le sache, et je

 12   suis plutôt bien au fait de cela, nous avons des organes judiciaires qui

 13   dressent des actes d'accusation, qui interrogent ces prévenus. Tout cela

 14   correspond à ce que l'on -- l'organisation que nous avons également dans

 15   d'autres armées.

 16   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : corriger la réponse précédente

 17   du témoin : Certains hommes ont pris en embuscade les hélicoptères qui

 18   intervenaient au titre de l'accord. En effet, ils s'attendaient à ce que

 19   lorsque nous avions rempli notre part de l'accord, eux aussi, libéraient

 20   leur auspice.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] -- si j'ai bien répondu à votre question, les

 22   prisonniers sont remis à la police militaire.

 23   M. LE JUGE MINDUA : J'ai bien compris, Monsieur le Témoin Praljak,

 24   j'attendais la fin de la traduction.

 25   Donc du moment, selon ce que vous nous dites, du moment que le soldat

 26   sorte du rang, fini, vous oubliez complètement; c'est bien ça, j'ai bien

 27   compris.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

Page 44190

  1   M. STRINGER : [interprétation]

  2   Q.  Mon Général, je voudrais développer ceci encore un peu plus pour bien

  3   comprendre votre position.

  4   Nous avons parlé de différentes catégories et pour revenir à l'ordre

  5   que nous avons déjà étudié, du général Petkovic. Les Musulmans qui étaient

  6   membres du HVO, et qui étaient donc désarmés et qui étaient mis à

  7   l'isolement, mettons qu'ils étaient mis à l'isolement à la prison de

  8   Dretelj. Est-ce que vous nous dites que ces prisonniers n'étaient plus sous

  9   la responsabilité de l'état-major principal ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Très bien. Une autre catégorie. Des hommes musulmans susceptibles

 12   d'être incorporés, qui n'étaient pas membres du HVO mais qui étaient donc

 13   détenus et mis à l'isolement; est-ce que ces personnes ne relevaient pas de

 14   la responsabilité de l'état-major principal, d'après vous ?

 15   R.  Si par la suite ils sont emprisonnés, non. S'ils sont isolés, et bien,

 16   l'isolement s'arrête un jour déterminé, c'est-à-dire au moment où le danger

 17   qui a provoqué leur mise en isolement a commencé. D'ailleurs le général

 18   Petkovic vous en parlera plus en détail. Moi ici, je ne fais que des

 19   hypothèses, mais c'est possible, c'est permis. Les hypothèses sont tout à

 20   fait autorisées.

 21   Q.  Parlons de quelque chose que vous connaissez peut-être mieux.

 22   Vous nous avez parlé de l'offensive de l'ABiH qui a eu lieu après que

 23   vous occupiez le poste, après avoir été nommé commandant de l'état-major

 24   principal du HVO. Vous avez eu des combats à Gornji Vakuf et à Prozor,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, mais il n'y a pas eu offensive après que je sois devenu chef de

 27   l'état-major principal. Cela a commencé bien avant. Cela a commencé à

 28   partir de Konjic dont on connaît le sort, et cela a même commencé avec

Page 44191

  1   Bugojno qui a eu lieu avant mon arrivée. Moi, j'ai rencontré ces 15  à 20

  2   000 hommes combattants de l'ABiH, dans le secteur de Gornji Vakuf.

  3   Q.  En août 1993, à Gornji Vakuf, partant du principe par exemple que le

  4   HVO capture des soldats de l'ABiH, qui deviennent donc des prisonniers de

  5   guerre. Est-ce que ces prisonniers de guerre relèvent de la responsabilité

  6   de l'état-major principal ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Donc selon vous, l'état-major principal n'est pas du tout responsable

  9   de toutes ces catégories de prisonniers que nous avons mentionnées. Est-ce

 10   qu'il y a des prisonniers du HVO qui relèvent de la responsabilité de

 11   l'état-major principal ?

 12   R.  Des prisonniers du HVO, vous dites ?

 13   Q.  Oui, est-ce qu'il y a donc des prisonniers du HVO qui relèvent de la

 14   responsabilité de l'état-major principal ?

 15   R.  Monsieur Stringer, je ne comprends pas. Des prisonniers du HVO, comment

 16   ? Oui, oui, maintenant je comprends.

 17   Q.  Je vais reformuler cela.

 18   R.  Je vais vous répondre, je vais vous répondre.

 19   Les soldats du HVO qui arrêtent un soldat ennemi sont responsables du sort

 20   de ce soldat tant qu'ils ne l'ont pas remis entre les mains de la police

 21   militaire. C'est au moment où ils le remettent entre les mains de la police

 22   militaire que cesse leur responsabilité vis-à-vis du prisonnier.

 23   Q.  Donc tout prisonnier remis aux militaires ça doit être à la

 24   responsabilité de la police militaire de s'assurer que ces prisonniers sont

 25   traités correctement; c'est ce que vous nous dites ici ?

 26   R.  Je n'ai pas dit cela. Ça, c'est déjà autre chose. Parce que vous avez

 27   entendu ici des spécialistes du droit, ce qui se passe par la suite, qui

 28   mène les interrogatoires ? Qui est responsable directeur des lieux de

Page 44192

  1   détention ? Tout cela fait l'objet de questions de votre part ici.

  2   Maintenant vous essayez de me pousser vers des domaines où j'ai quelque

  3   réticence à répondre.

  4   Parce que la suite de la procédure, je ne la connais pas et je ne

  5   vais pas accepter de répondre à des questions sur ce point malgré tous vos

  6   efforts pour m'amener dans des domaines au sujet desquels je ne veux pas

  7   répondre. Moi, je vous ai dit ce qu'il en était. Il faut remettre le

  8   prisonnier entre les mains de la police militaire.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire au Procureur qu'il y a des

 10   domaines que vous ne voulez pas répondre au Procureur. Je rappelle, Général

 11   Praljak, que vous avez toujours dit que vous voulez témoigner pour la

 12   vérité.

 13   Deuxièmement, vous avez le droit et c'est le Règlement qui le dit,

 14   que vous pouvez ne pas répondre à une question si vous pensez qu'elle vous

 15   incrimine. Comme le Règlement n'est pas très bien fait, ils n'ont pas pris

 16   en compte le fait qu'un accusé qui témoigne est toujours borderline et que

 17   finalement il peut être amené à répondre à des questions incriminables.

 18   Mais vous avez cette possibilité de dire au Procureur, non, je ne veux pas

 19   répondre à la question, parce qu'elle m'incrimine. Là, nous, on ne peut

 20   rien faire, bien que le Règlement dit ce qu'on peut vous inviter, mais à ce

 21   moment-là, on vous accord l'immunité. Ce qui serait paradoxal. C'est pour

 22   cela que le Règlement, il y a une petite faille.

 23   Néanmoins, le Procureur vous pose des questions sur les prisonniers,

 24   et ce n'est pas nouveau. Moi-même, je vous ai posé cette question. Vous

 25   dites, non, ce n'est pas de ma compétence et vous vous arrêtez là. Votre

 26   position, c'est ce que vous faites. Alors pourquoi dites-vous maintenant à

 27   M. Stringer, je ne veux plus répondre ? C'est ça je n'arrive pas à

 28   comprendre. Il y a peut-être --

Page 44193

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Je n'ai pas dit que je refuserai de

  2   répondre. J'ai dit que je ne veux pas m'introduire dans des sujets que je

  3   ne connais pas, me laisser entraîner à répondre dans des domaines que je ne

  4   connais pas. Qui assure la sécurité, qui remplace qui à son poste, qui

  5   interroge, qui dresse l'acte d'accusation, qui nomme les gardiens ? J'ai

  6   quelques éléments de connaissance à ce sujet mais je n'en ai pas

  7   suffisamment pour me laisser entraîner dans un débat, qui ensuite, sera

  8   considéré comme un témoignage en bonne et due forme. Je n'ai pas de

  9   connaissance suffisamment ferme. Il y avait là des policiers militaires,

 10   des diverses personnes. Vous avez entendu ici des juristes, des directeurs

 11   de prison. Je suppose que tous ces sujets ont pu être éclaircis en

 12   l'absence de Praljak.

 13   Maintenant on me demande à moi, voyez-vous, Monsieur le Juge, quand

 14   je ne sais pas quelque chose, je dis que je ne le sais pas. Quand je sais,

 15   je dis que je sais. J'ai une connaissance énorme mais mon ignorance n'est

 16   pas minime non plus. Quand je sais que je fournis des réponses claires

 17   précises, mais là, où il faut que je devine, je ne peux pas le faire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien, vous dites que vous

 19   voulez répondre à toutes questions mais qu'il y a des domaines qui

 20   dépassent votre champ de compétence et vous en avez cités un certain

 21   nombre, comme par exemple, ceux qui nomment les gardiens de prison, et

 22   cetera. Bon, M. Stringer va tenir compte de tout cela.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] -- connaissances, ce sont les connaissances

 24   que je n'ai pas. Est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît, faire une petite

 25   pause ?

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause de 20 minutes. Merci.

 27   --- L'audience est suspendue à 11 heures 52.

 28   --- L'audience est reprise à 12 heures 12.

Page 44194

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

  2   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Général, le document suivant dans le classeur est le P 03026. Mon

  4   Général, il s'agit d'une communication du colonel Siljeg au département de

  5   la défense à l'attention de Bruno Stojic mais également à l'attention de

  6   l'état-major principal, à savoir le commandant Milivoj Petkovic, le

  7   document porte la date du 30 juin. Pour le compte rendu d'audience, le 30

  8   juin est la date de l'attaque de l'ABiH contre les casernes du sud dans la

  9   zone de Mostar, et ce que Siljeg dit au début de cette communication c'est

 10   que :

 11   "Brada s'est familiarisé avec le rapport de Mostar avec les conversations

 12   entre Pasalic et Halilovic et les commandes émises par le responsable du

 13   département de la défense et du président du HVO du HZ HB."

 14   Mon Général, avant de poursuivre, est-ce que vous êtes d'accord avec moi si

 15   je vous suggère que Brada qui est mentionné par Siljeg et vous-même ?

 16   R.  Je ne sais pas. Moi, j'étais à Boksevica et je ne sais pas. Je viens de

 17   prendre connaissance du contenu de ce document. Comment est-ce que j'aurais

 18   pu connaître ces ordres et savoir de quoi il est question ici. Depuis

 19   Boksevica, j'aurais dû donner des consignes. Je pense que ça, ça ne peut

 20   pas être exact, parce que je sais très bien ce que je faisais le 30 juin.

 21   Q.  Bien, je dirais, mon Général, qu'il s'agit en fait d'une référence à

 22   votre attention qu'il parle de vous ici dans cette communication, que vous

 23   étiez en communication avec Siljeg, et qu'il a mentionné ici, et que sur la

 24   base de cette conversation, Siljeg a fait ces trois demandes qui sont

 25   recensées ici. Donc, mon Général, ma question est la suivante, même si vous

 26   y aviez déjà répondu : le 30 juin, vous étiez en communication avec Siljeg,

 27   et on vous avait informé des événements qui s'étaient produits ce jour-là,

 28   tout du moins, c'est-à-dire l'attaque de l'ABiH et l'ordre émis par M.

Page 44195

  1   Stojic et par M. Prlic, ces ordres qui sont mentionnés dans cette

  2   communication que vous avez devant vous, n'est-ce pas ?

  3   R.  Je ne me souviens pas, je ne parviens pas à me souvenir, Monsieur. Je

  4   répète, si quelqu'un souhaite, je peux vous donner le détail de ce qui

  5   s'est passé pendant les combats de Dreznica. Mais je préfère ne pas me

  6   laisser entraîner dans la considération d'une quelconque possibilité que

  7   j'ai donné des consignes dans une situation comme celle-là. J'étais

  8   combattant sur les lieux, les gens pourront vous dire ce qui se passait. Il

  9   y a d'autres personnes qui ont témoigné ici.

 10   Q.  Mon Général, en fait, il n'y a pas d'autre Brada qui -- que connaîtrait

 11   Siljeg qui pourrait mentionner ici le 30 juin concernant ces points très

 12   importants. Le seul Brada dont il veut parler c'est vous.

 13   R.  Il y en a un autre qu'on évoque quelque fois. Je ne sais pas exactement

 14   de qui il est question ici. Je répète, que je ne vois vraiment pas comment

 15   j'aurais pu donner des consignes à Obradovic pour qu'il prenne Blagoje, ou

 16   dire à Petkovic ce qu'il fallait qu'il fasse dans une telle situation.

 17   C'est absurde. Ce document, ce rapport de M. Siljeg, je ne le considère pas

 18   comme ayant été rédigé sur la base d'une discussion avec moi.

 19   Q.  Très bien. Je voudrais passer à la pièce suivante, la pièce P 03234.

 20   Mon Général, il s'agit d'un autre document provenant de Siljeg, qui porte

 21   la date du 6 juillet 1993, et dans vos ordres, il est mentionné :

 22   "Conformément à la situation actuelle dans la zone de la municipalité de

 23   Rama-Prozor, j'ordonne par la présente :

 24   "D'arrêter et détenir tous les hommes musulmans âgés de 16 à 60 ans.

 25   "Les instances suivantes seront responsables pour mener à bien cet ordre,

 26   c'est-à-dire la police militaire, le SIS et la Brigade de Rama."

 27   Donc, mon Général, il s'agit du 6 juillet, et je sais que vous avez

 28   mentionné que vous étiez à Boksevica à ce moment-là. Est-ce que vous avez

Page 44196

  1   eu vent de cet ordre à un moment donné le 6 juillet aux environs du 6

  2   juillet 1993 ?

  3   R.  -- Monsieur Stringer.

  4   Q.  La pièce suivante est la pièce P 03380. Nous sommes le 11 juillet, et

  5   il s'agit d'un rapport de Luka Markesic, et il est mentionné :

  6   "Sur la base de l'ordre du commandant de la 2e Zone opérationnelle numéro

  7   1489/93, qui porte la date du 6 juillet."

  8   Compte tenu du numéro de référence, nous savons qu'il s'agit d'une

  9   référence à l'ordre de Siljeg que nous venons de consulter :

 10   "Et suite aux instructions des officiers susmentionnés, les personnes

 11   suivantes de nationalité musulmane devront être envoyées à la prison

 12   militaire de Ljubuski."

 13   On doit les envoyer donc à la prison militaire de Ljubuski, et il y a une

 14   liste. Mon Général, je crois savoir que la traduction que nous avons sur le

 15   prétoire électronique n'est pas complète. Donc je voulais vous demander si

 16   vous pourriez en fait nous donner des informations compte tenu de ce que

 17   vous voyez suite à votre lecture de la version originale de façon à ce que

 18   la traduction soit plus complète, car à la dernière page du document en

 19   anglais, on voit que Markesic dit :

 20   "Nous vous informons par la présente que 237 membres des conscrits de

 21   nationalité musulmane ont été envoyés à Rama-Prozor et ont été escortés par

 22   la police militaire.

 23   Donc, mon Général, compte tenu de la version originale, je voudrais

 24   m'assurer que tout ceci est exact, il s'agit d'une liste de 237 prisonniers

 25   musulmans, ou je voudrais plutôt dire des personnes qui ont été envoyées à

 26   la prison militaire de Ljubuski; est-ce bien ce qui est mentionné dans ce

 27   document ?

 28   R.  Mais je n'ai pas la page précédente traduite, je n'ai pas de traduction

Page 44197

  1   de cela. J'ai une liste, mais je n'ai pas de traduction de ce document de

  2   Luka Markesic, malheureusement.

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  Oui, oui.

  5   Q.  Je vois que vous consulter le document que moi je consulte exactement.

  6   Si vous passez à la troisième page, vous verrez que ça finit par le chiffre

  7   237.

  8   L'INTERPRÈTE : signe affirmatif de la tête du témoin.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois, oui, oui, j'ai le document sous

 10   les yeux.

 11   Q.  Très bien.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Le texte qui suit après le nombre de la

 13   personne apparaissant à côté du nombre 237, je ne sais pas quel est le

 14   texte qui suit, Monsieur le Président.

 15   Q.  Est-ce que vous pourriez donc lire le texte qui suit le numéro 237,

 16   s'il vous plaît ?

 17   R.  Je cite :

 18   "Nous faisons remarquer que les personnes sont les noms sont cités

 19   ci-dessus ne sont pas des prisonniers de guerre, mais que ces personnes ont

 20   été placées en détention pour des raisons de sécurité. Les personnes dont

 21   les noms figurent ci-dessus seront escortées par les policiers militaires

 22   suivants."

 23   Ensuite on voit une liste de neuf noms.

 24   Q.  Pour terminer sur cela, est-ce que vous pouvez lire le passage qui suit

 25   qui se finit par le numéro 9 ?

 26   R.  La liste conclut avec numéro de référence 9 : "Pour au nom du service

 27   de Sécurité, Luka Markesic."

 28   Q.  Général, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ce qui apparaît de

Page 44198

  1   cela c'est un cachet de l'état-major principal du HVO avec la date du 11

  2   juillet 1993 ?

  3   R.  Ce cachet est un cachet de réception, mais il n'y a pas le cachet de

  4   l'état-major principal. Ce document a été adressé au SIS de Mostar et au

  5   SIS de la zone opérationnelle, d'après ce que je peux lire en première

  6   page. Je ne sais pas pourquoi ce document aurait le sceau de l'état-major

  7   principal puisque l'état-major principal n'est pas au courant.

  8   Q.  Mais en fait le cachet nous dit que, pour une raison ou pour une autre,

  9   ceci a été reçu au niveau de l'état-major principal le 11 juillet 1993,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Je ne peux pas à répondre à cette question. Je ne peux pas vous dire

 12   s'il a été reçu, pas reçu, les renseignements nécessaires figurent dans le

 13   document.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. KOVACIC : [interprétation] J'aimerais alerter la Chambre d'ailleurs nous

 16   avons versé des éléments de preuve relatifs à cela. Le sceau que l'on voie

 17   en dernière page d'un document, le sceau de réception, n'indique qu'une

 18   seule chose, c'est que le document en question a été expédié par paquet et

 19   a utilisé donc les liaisons par paquet de l'état-major principal. Nous

 20   avons un autre registre --

 21   L'INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur le Juge Trechsel

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois qu'il y a une objection.

 23   M. STRINGER : [interprétation] Oui, nous avons une objection à ce que les

 24   conseils présentent des arguments sur ce que les documents disent ou ne

 25   disent pas. Ce que le témoin dit c'est qu'en fait c'est un cachet

 26   d'arrivée.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic, vous me faites gaspiller le temps

 28   parce que cette question a déjà été évoquée par vous, par vos collègues.

Page 44199

  1   Vous - de mémoire, je n'ai pas les transcripts sous les yeux, mais ma

  2   mémoire m'est assez fidèle - vous avez tous dit que le cachet de réception

  3   signifie une chose; c'est qu'il y a enregistré à l'endroit où il arrive.

  4   Mais ce n'est pas pour autant que les autorités, le commandant du HVO, le

  5   numéro 2, le 3, et cetera, aient eu connaissance. Bon. Ça vous l'avez dit.

  6   Donc si ça arrive à l'état-major, on ne sait pas où ça passe après. C'est

  7   présumé arriver à l'état-major. Voilà, c'est tout. Donc vous l'avez déjà

  8   dit; pourquoi le redire, Maître Kovacic ? Bon. On n'est pas idiot. Vous

  9   savez bien que les Juges, nous suivons ça seconde par seconde tout ce qui

 10   se dit, tout ce qu'on nous présente sous les yeux, donc ce que vous dites

 11   on l'a déjà intégré.

 12   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Non, ce n'était pas le fond de ma pensée. Je sais que ça vous le savez que

 14   cela a déjà été discuté mais je voulais rappeler cet élément effectivement

 15   mais aussi en venir au fond, à savoir que le Procureur ne peut pas affirmer

 16   au général Praljak, c'est-à-dire à la personne qu'il interroge que ce

 17   document a été reçu à l'état-major principal. Non, il ne peut pas faire ça,

 18   exactement pour les raisons que vous venez d'indiquer, ce cachet ne prouve

 19   qu'une chose, c'est que le document a été reçu au centre des Transmissions.

 20   Donc, moi, je fais objection parce que, quand on interroge un témoin, on ne

 21   peut pas soumettre au témoin une affirmation qui ne ressort pas de la

 22   réalité du document. Voilà, c'est tout ce que je voulais dire mais

 23   maintenant je vous ai entendu, puis, pardon, puisque j'ai déjà un peu abusé

 24   de votre temps. La traduction de ce document nous disposons de la

 25   traduction de deux documents. Comme vous pourrez le constater dans vos

 26   classeurs également, et la traduction du document que nous sommes en train

 27   d'examiner ne va que jusqu'au numéro 216 de la liste après quoi en

 28   traduction, il n'y a plus rien. Donc la traduction en question est

Page 44200

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24   

25  

26  

27  

28  

Page 44201

  1   totalement incomplète. Je suppose que c'est la raison pour laquelle mon

  2   collègue de l'Accusation a interrogé comme il l'a fait le témoin, et il y a

  3   -- cette traduction deux pages, mais aucun original, enfin, moi, je suppose

  4   qu'il y a une erreur là. Je vous remercie.

  5   Il serait peut-être bon que l'Accusation communique la traduction complète

  6   du document parce qu'ici on écrit que des documents 1 à 4, des documents 1

  7   à 4, parce qu'ici il s'agit de projet de traduction.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous dites --

  9   M. STRINGER : [interprétation] Je peux répondre --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Ce que vous dites est au transcript.

 11   Comme l'a dit le Juge Mindua, plusieurs des Juges ont fait leur

 12   service militaire, donc pour eux, ce n'est pas une matière vierge. Moi-

 13   même, pendant mon service militaire, j'étais au service affectée au service

 14   des Transmissions, donc je faisais, je remplissais ce qu'on voit là. Bon,

 15   donc on connaît tous cela. On sait que ce n'est pas parce qu'un subalterne

 16   va remplir le rectangle que le numéro un va être au courant; tout le monde

 17   le sait. Bien, et vous l'avez déjà dit à X reprises. Alors vous voulez que

 18   ça soit au transcript, bien entendu, ça l'est, mais nous le savions déjà.

 19   Alors, maintenant, question des traductions, je crois que M. Stringer

 20   voulait dire quelque chose.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Oui, tout à fait, je tenais informer

 22   la Chambre de première instance et tout le monde aussi, que nous nous

 23   sommes penchés sur ce problème; il y avait une traduction précédente qui ne

 24   contenait pas tous les noms de ces Musulmans qui avaient été arrêtés. Puis

 25   nous avons la traduction présente, celle qui est dans le système

 26   électronique, avec laquelle nous travaillons. Mais nous avons l'impression

 27   -- nous ne sommes pas sûr, mais nous avons l'impression qu'il s'agit d'un

 28   des documents pour -- dont la Chambre de première instance a demandé la

Page 44202

  1   traduction totale afin qu'elle comprenne tous les noms des prisonniers,

  2   parce que la Chambre de première instance a demandé d'avoir tous les noms

  3   énumérés. Donc je pense que donc la traduction a été envoyée pour être

  4   modifiée et finalement elle est arrivée incomplète.

  5   Si je puis, s'il vous plaît, terminer mon argument, avant que mon

  6   éminent confrère ne prenne la parole.

  7   Nous avons déjà parlé. C'est dans le système électronique, donc on ne

  8   peut plus le modifier. Donc ma façon de traiter le problème était d'attirer

  9   l'attention de tous ceux sur ce document et de demander au témoin de lire

 10   les passages qui ne sont pas traduits afin de les obtenir pour le biais des

 11   interprètes. C'est tout.

 12   M. KHAN : [interprétation] J'ai une observation à faire, si vous me

 13   le permettez.

 14   J'ai l'impression qu'il s'agit d'un exemple où on voit qu'à nouveau,

 15   les procédures ne sont pas suivies, et ça risque d'ouvrir une boîte de

 16   pandore, parce que si l'une des parties - je sais qu'il y a - si une des

 17   parties commencent à donner des éléments de preuve l'autre partie va faire

 18   la même chose et on perd du temps; là, on perd énormément de temps, --

 19   temps précieux. Donc j'aimerais que vous demandez, Monsieur le Président, à

 20   ce que toutes les parties soient extrêmement disciplinées d'un côté faisant

 21   leurs objections, ce qui est normal, mais ils devraient absolument pas se

 22   lancer dans des plaidoiries. Je ne pense pas que les conseils doivent se

 23   lancer dans des grandes déclarations.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Absolument, essayons de gagner du temps.

 25   Surtout, si un conseil parle déjà d'un sujet qui a déjà été évoqué,

 26   bien entendu, si le sujet est nouveau, il faut nous le dire, mais un sujet

 27   qu'on connaît, ce n'est pas la peine de revenir dessus.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je tiens à dire que je ne --

Page 44203

  1   enfin, qu'aucun membre de la Chambre n'a demandé à ce que tous les noms

  2   soient copiés, parce que ce n'est pas de la traduction, c'est de la copie.

  3   Nous avons un très grand nombre de listes venant de toutes les parties, où

  4   on avait de grandes listes de noms très longs, et en fait en traduction, on

  5   avait juste le premier et le dernier nom. Ça nous suffisait. C'est ce que

  6   nous avions dans la première traduction. Je pense que la deuxième

  7   traduction a été faite, c'est une perte de temps, elle va être directement

  8   à la corbeille. La première traduction était parfaitement satisfaisante, en

  9   tout cas, en ce qui concerne les membres de la Chambre.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] C'est absolument -- je suis absolument

 11   d'accord avec vous à 100 %. Mais le problème c'est que la première

 12   traduction se termine avec le numéro 216 et il manque les deux phrases qui

 13   sont dans l'original aussi -- donc maintenant la traduction est complète

 14   mais uniquement lorsqu'on combine les deux documents, et en plus, il nous

 15   manque certains noms à la liste. Donc il faut qu'on fasse référence aux

 16   deux documents pour voir la traduction complète. C'est compliqué. Mais nous

 17   n'allons pas rentrer plus avant. L'Accusation a dit qu'elle allait fournir

 18   une traduction totale.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Lorsque vous appelez le premier

 20   document dans mon classeur c'est le deuxième document, et moi, je pense que

 21   le document où on a le premier nom de la liste, ensuite dit il y a un

 22   certain nombre de noms sur la liste, et le dernier nom, suffit largement,

 23   sinon, c'est exhaustif. Donc le document auquel vous avez fait référence

 24   qui comporte les 216 noms celui-là, je pense qu'il est parfaitement

 25   inutile, il est bon pour la déchiqueteuse.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Suite à l'intervention de mon collègue, je crois que

 27   M. Stringer a une excellente mémoire. Je me souviens -- je ne sais pas si

 28   c'est sur ce document ou un autre, que la Chambre avait demandé la

Page 44204

  1   traduction des noms figurant sur la liste pour - je ne me souviens plus

  2   exactement quel problème - et M. Stringer a rappelé cela, voilà. A moins

  3   qu'il ait perdu la mémoire, mais il a rappelé cela, et je me souviens qu'il

  4   a dit, et je crois. Mais la juriste de la Chambre fera des recherches. Je

  5   crois que c'était à la deuxième fois du Juge Trechsel qu'il avait été

  6   demandé cette traduction. Alors voilà, donc c'est tout ce que je peux dire

  7   en ce moment.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ecoutez, je vais citer : "Il fait

  9   quand même chaud, personne n'est parfait." Que dire d'autre ?

 10   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 11   Au fin du compte rendu d'audience et compte tenu du commentaire formulé par

 12   M. le Juge Trechsel, je voudrais dire que cette traduction en anglais du

 13   document que nous examinons, à savoir la pièce P 00380, est une traduction

 14   incomplète qui ne comporte pas tous les noms de la liste. Par conséquent,

 15   il faudrait que ce document soit lu parallèlement au transcript, et lorsque

 16   le général Praljak a donné lecture des phrases manquantes, il a précisé

 17   qu'il s'agissait de personnes mises en détention, pour des raisons ayant

 18   trait à la sécurité, et non pas de prisonniers de guerre. Par conséquent,

 19   il faut disposer de l'ensemble du texte lorsque vous vous pencherez à

 20   nouveau sur ces pièces. C'est pour ça qu'il a été suggéré de demander avec

 21   la permission de MM. les Juges de faire verser dans le système e-court une

 22   nouvelle traduction qui sera quant à elle complète.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors attendez, la Chambre va délibérer parce

 24   que je crois qu'il y a un problème au niveau de la Chambre.

 25   M. STRINGER : [interprétation] Puis-je, s'il vous plaît -- enfin, je

 26   m'excuse.

 27   L'Accusation est tout à fait d'accord avec les commentaires faits par Mme

 28   Pinter. La phrase que nous avons demandée au général de lire portant sur la

Page 44205

  1   différence entre les prisonniers de guerre et les gens qui sont détenus

  2   pour des raisons de sécurité est à notre avis une phrase importante, or

  3   elle ne figure pas dans la traduction, la traduction qui est dans le

  4   système électronique. Il s'agit d'un document traduit par le CLSS et le

  5   bureau du Procureur ne peut rien n'y faire. C'est dans le système

  6   électronique, on ne peut pas aller changer le système électronique, donc

  7   nous sommes tout à fait d'accord avec la suggestion de Mme Pinter. La

  8   version originale du document devrait être renvoyée au CLSS pour s'assurer

  9   que la traduction est correcte.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. La Chambre va en délibérer.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, votre micro est allumé.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors la Chambre, qui a délibéré -- constatant

 14   que les parties estiment nécessaire que le document soit traduit dans son

 15   intégralité, la Chambre donc demande au service de Traduction de procéder à

 16   la traduction complète du document et ensuite demandera donc au bureau du

 17   Procureur de télécharger dans le système e-court le nouveau document. Bien.

 18   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Q.  Très bien. Donc une dernière question sur ce document. Donc, nous

 20   sommes le 11 juillet 1993. Si j'ai bien compris, c'est à peu près le moment

 21   où vous êtes parti de Boksevica pour rentrer à Zagreb; c'est bien cela,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Le 11 juillet, j'étais à Zagreb, oui.

 24   Q.  Bien. Nous allons en parler. Donc, ces 237 Musulmans qui devaient être

 25   envoyés à la prison de Ljuboski étaient des personnes dont vous ne

 26   connaissiez pas l'existence, n'est-ce pas ? C'est cela ?

 27   R.  Non. Non. Je n'en avais pas connaissance.

 28   Q.  Maintenant, je voudrais vous montrer votre témoignage du 26 mai. Vous

Page 44206

  1   parliez de Boksevica et vous avez dit, et je cite, à la page 40 777, ligne

  2   11 :

  3   "J'ai passé 11 ou 12 jours là-bas, jusqu'au 9 juillet 1993."

  4   Ensuite, vous abordez la situation à Boksevica. A la page suivante du

  5   compte rendu, vous dites, et je cite :

  6   "Il était impossible de tenir Boksevica. On ne pouvait plus le tenir et on

  7   a dû abandonner les positions là-bas aussi."

  8   Vous poursuivez : "Et je suis ensuite allé voir Mate Boban. Je lui ai parlé

  9   de la situation. Je crois que j'ai eu une réunion très brève avec M.

 10   Petkovic. Non, en fait, je ne crois pas, je sais que nous nous sommes

 11   rencontré, on s'est parlé comme des gens normaux. Non."

 12   Je vais sauter ensuite quelques lignes et vous avez dit :

 13   "Le soir, je me suis entretenu avec M. Stojic. Enfin, le soir, je crois

 14   qu'on était le 10 mai. Désolé, non, le 10 juillet 1993 et je suis allé chez

 15   lui pour prendre un bain et pour manger un morceau parce que la nourriture

 16   là-bas, il y avait rien, il y avait rien à manger."

 17   Je saute encore quelques lignes :

 18   "Donc, j'ai pris un bain. Le matin suivant, je me suis rendu à Zagreb

 19   pour des raisons personnelles. Mon père était très malade."

 20   Donc cela semble indiquer que, comme vous nous l'avez dit, le 11

 21   juillet, vous êtes parti pour Zagreb. Alors, voici ma question : lors de

 22   ces entretiens, de ces réunions que vous avez eues avec M. Boban, M.

 23   Petkovic et M. Stojic, lorsque vous les avez rencontrés à Mostar, le 9 ou

 24   le 10 juillet, vous auraient-ils informé à un moment ou à un autre du fait

 25   que les hommes musulmans avaient été arrêtés et mis à l'isolement ? Ou du

 26   moins, que cela était en train de se faire ?

 27   R.  Non, Monsieur Stringer. Ils ne m'informaient pas. C'est moi qui les ai

 28   informé et uniquement concernant Boksevica, concernant ce qui s'y est

Page 44207

  1   passé, combien de personnes avaient été évacuées, combien d'hommes, et je

  2   l'ai fait précisément comme je l'ai décrit, même s'il y a peut-être un

  3   décalage d'un jour. Il s'agissait de conversations qui étaient très brèves.

  4   Avec Mate Boban, cela n'a pas dépassé une dizaine de minutes, car lui

  5   il pensait qu'il était encore possible de tenir Boksevica, et moi, j'ai

  6   rejeté cette idée, car je savais précisément ce qui se passait sur place.

  7   Auprès de M. Stojic, je m'y suis retrouvé, il me semble, aussi en

  8   soirée. J'ai profité de l'occasion pour prendre un bain car j'étais très

  9   sale. J'avais très froid, donc je me suis donc réconforté. J'ai mangé

 10   quelque chose. Il fait très froid dans les montagnes, à ce moment-là, et

 11   ensuite je suis parti à Zagreb.

 12   Q.  Bien. Nous allons sauter un document. Veuillez, s'il vous plaît, aller

 13   à la pièce P03455. C'est un document en date du 14 juillet 1993. Bien. Vous

 14   étiez à Zagreb, à l'époque. Je prends ça en compte.

 15   Donc, il s'agit d'une communication entre le général Petkovic pour le

 16   colonel Siljeg et donc il y a plusieurs sujets qui sont soulevés. Celui qui

 17   m'intéresse, c'est le numéro 12 où Petkovic dit, et je cite :

 18   "Je vous ai donné l'autorisation pour les Musulmans. Transférez-les depuis

 19   la région."

 20   Maintenant, ça c'est le point numéro 12.

 21   R.  Où cela se trouve-t-il ? C'est très mal reproduit, en tout cas. C'est

 22   peu lisible. Je n'arrive pas à le lire, je n'arrive pas à lire ces deux

 23   lignes ou ces parties de lignes, donc je ne sais pas ce qui est écrit

 24   exactement ici. L'exemplaire que j'ai est illisible.

 25   M. STRINGER : [interprétation] Le Greffier pourrait-il peut-être zoomer sur

 26   ce passage dans le système à l'écran ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai lu le point 11. Il me semble que c'est le

 28   point 11, n'est-ce pas ?

Page 44208

  1   M. STRINGER : [interprétation]

  2    Q.  Le point 12.

  3   R.  Entendu. Je le vois.

  4   Q.  Nous y reviendrons, mais j'aimerais que l'on jette un œil aussi sur le

  5   document suivant, le P 0498.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voulez revenir sur ce document ou pas ?

  7   M. STRINGER : [interprétation] Oui, tout à fait, tout à fait. Je vais

  8   relier ce document au prochain, donc le P 03498. Enfin, je vais essayer

  9   d'établir un lien entre ces deux documents.

 10   Donc, c'est un document du 16 juillet 1993, deux jours après le document

 11   précédent que nous avons vu, donc la communication de Petkovic à Siljeg.

 12   Q.  On voit ici un rapport toujours de Luka Markesic. Il énumère les noms

 13   de 135 personnes de nationalité musulmane qui sont envoyées vers la prison

 14   militaire, en se basant sur l'ordre du 6 juillet 1993, que nous avons vu il

 15   y a un petit moment, un ordre émanant du colonel Siljeg.

 16   Donc, deux jours après la communication reçue du général Petkovic, nous

 17   voyons que ces personnes sont envoyées en prison.

 18   Donc, c'est huit jours avant votre prise de commandement de l'état-major

 19   principal du HVO. Voici ce que je vous affirme : voilà, moi, d'après notre

 20   thèse, vous étiez parfaitement au courant de tout cela, du fait que tous

 21   ces Musulmans étaient envoyés en prison militaire, tous ces Musulmans qui

 22   étaient sur la région de Prozor. Vous l'avez appris lorsque vous êtes

 23   revenu et que vous avez pris le commandement de l'état-major principal du

 24   HVO, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non, ce n'est pas vrai.

 26   Q.  Donc le général Petkovic et le colonel Siljeg ne vous ont jamais parlé

 27   de ces Musulmans -- à aucun moment, ils ne vous ont jamais parlé de ces

 28   Musulmans envoyés en prison, prison militaire, pendant toute la période que

Page 44209

  1   vous avez passé à Prozor ?

  2   R.  Non, il ne l'a pas fait.

  3   Q.  Bien. Passons à la page suivante --

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Un petit détail annexe mais, moi, un document je le

  5   regarde sous de multiples angles. J'écoute évidemment la théorie du

  6   Procureur, mais j'intègre d'autres considérations. Il y a 155 détenus,

  7   prisonniers qui sont conduits à la prison. On a la liste. Puis je vois tout

  8   à la fin que ces gens vont être escortés, alors il y a deux noms, mais on a

  9   l'impression qu'il y a un seul policier militaire, Marko Bosnjak. Partant

 10   de ce constat, je me dis si on escorte 155 prisonniers par un policier

 11   militaire où le cas échéant deux, ça montre que l'état d'esprit des

 12   prisonniers militaires en question, il ne devait pas tellement poser de

 13   problème de sécurité. Ils n'allaient pas s'évader, et cetera.

 14   Alors, Général Praljak, mais vous, vous n'avez aucun élément, vous le

 15   dites, moi, c'est sous un autre angle; quand on fait escorter 155

 16   prisonniers par un ou deux policiers militaires, ça peut signifier quoi ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je puis m'aventurer à spéculer, si j'ai

 18   bien compris, ici, il est indiqué que l'on procède à leur transfert ayant

 19   trait à la sécurité. Des raisons ayant trait à la sécurité, vous avez vu

 20   l'un de mes documents si je puis me permettre d'élargir, un document du

 21   mois d'octobre lorsque la situation autour d'Uzdol s'est apaisée et qu'il

 22   n'y aucune tentative de représailles. Après il y a eu une offensive qui a

 23   démarré, et moi-même, j'ai émis un ordre se fondant sur des raisons ayant

 24   trait à la sécurité pour que l'on déplace des Musulmans. Lorsque vous

 25   comprenez que vous n'arrivez pas à protéger certaines personnes, certains

 26   hommes contre des tentatives de représailles, 15 000 réfugiés, de très

 27   nombreux soldats également, il est logique de procéder au transfert de ces

 28   personnes parce que vous ne pouvez plus assurer leur sécurité. Dans ce

Page 44210

  1   genre de situation, vous choisissez en fait entre deux torchons sales, en

  2   quelque sorte; vous choisissez la moins mauvaise des deux solutions. C'est

  3   une mauvaise chose que de transférer ces personnes mais ce serait encore

  4   pire d'insister en toute impuissance à une situation dans laquelle

  5   quelqu'un se livrerait à des tentatives de représailles, il est tué, il est

  6   violé ou quoi que ce soit d'autre.

  7   M. STRINGER : [interprétation]

  8   Q.  Mais si vous vouliez vous occuper de la sécurité de la population

  9   musulmane, vous auriez déplacé tout le monde, pas uniquement les hommes

 10   susceptibles d'être incorporés ?

 11   R.  Vous essayez à présent de m'entraîner sur un terrain où il s'agirait de

 12   formuler des hypothèses. Moi, lorsque j'ai procédé à des transferts, je

 13   transférais tout le monde. Je ne peux pas ici formuler des hypothèses. Je

 14   peux expliquer et répondre de mes propres actes, si vous m'interrogez à ce

 15   sujet, si vous le souhaitez, toutefois. Dans ce cas-là, je vous dirais

 16   exactement ce qui s'est passé, quelles ont été les raisons de telle ou

 17   telle décision, je vous dirais très précisément.

 18   Q.  Bien. Dans ces documents que nous étudions, il n'y a que des hommes

 19   musulmans susceptibles d'être incorporés. Il n'y a qu'eux qui sont

 20   déplacés, donc qu'on ne fait pas cela pour assurer leur propre sécurité

 21   mais en fait c'est une mesure de sécurité qui a été prise pour protéger le

 22   HVO, n'est-ce pas ?

 23   R.  Monsieur Stringer, vous voulez que je me livre à des spéculations sur

 24   la base d'un document qui est émis par une personne, mis en œuvre par une

 25   autre, ainsi de suite. Je pense que c'est un cadre beaucoup trop large. Je

 26   ne suis pas là pour me livrer à des conjectures concernant le cadre

 27   temporel ou quoi que ce soit d'autre. Je ne sais pas. Comment pourrais-je

 28   commenter un document que vous lisez ? Comme moi-même je peux lire alors

Page 44211

  1   que, moi, j'étais à Zagreb à ce moment-là, comment puis-je proposer des

  2   interprétations à MM. les Juges, qu'il revient d'interpréter ? Je peux

  3   répondre de ce à quoi j'ai participé, de ce sur quoi j'ai des éléments de

  4   connaissance.

  5   Q.  Je vous remercie.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous réagissez d'une façon assez

  7   étrange, Monsieur Praljak. Il y a juste quelques secondes, vous avez dit

  8   que tout ceci était fait pour assurer la sécurité de ces personnes.

  9   Maintenant l'Accusation vous dit que ce n'est pas très convaincant, alors

 10   vous êtes en train de dire que précédemment vous faisiez aussi des

 11   conjectures -- vous vous lancez dans des conjectures. Vous voulez faire une

 12   différence entre tout ça ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce que j'ai dit, j'ai spéculé, j'ai

 14   formulé une hypothèse. Je l'ai dit, si cela a bien été consigné. On m'a

 15   demandé de répondre, de formuler une interprétation en réponse à la

 16   question de M. le Président, et c'est ce que j'ai fait. C'est ce qui aurait

 17   dû être consigné, parce que je l'ai dit.

 18   Mme PINTER : [interprétation] C'est indiqué en page 56, en ligne 17 -- ou

 19   plutôt, ligne 18 --

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors on veut m'entraîner d'une spéculation

 21   vers une seconde, puis une troisième, je vous en prie.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Avec votre permission,  Messieurs les

 23   Juges, en page 57, ligne 13, il est consigné très clairement que le général

 24   Praljak a parlé du transfert de personnes à partir de ces différentes

 25   zones, et non pas du simple fait de les mettre en isolement. Alors

 26   qu'ultérieurement, dans la question suivante de M. Stringer, il y a eu un

 27   mélange de ces deux notions de transfert et de mise en isolement, et peut-

 28   être y a-t-il eu de ce fait une confusion qui a peut-être amené M. le Juge

Page 44212

  1   Trechsel a mal compris ce qu'a dit le général Praljak.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai répondu à titre hypothétique à la

  3   question de M. le Président, question qui a été très précise, moi, j'ai

  4   fait état d'une possibilité. Mais transformez cette possibilité en

  5   conclusion ou -- en fait, et fondez dessus des questions, c'est logiquement

  6   intenable. Je ne suis pas d'accord avec cela.

  7   M. STRINGER : [interprétation]

  8   Q.  Nous allons passer à la pièce suivante; il s'agit d'un clip vidéo

  9   qui est un extrait de l'interview que vous avez donnée à la BBC, qui n'est

 10   pas dans le classeur. Nous avons déjà regardé certains de ces passages, il

 11   s'agit de la pièce P 09258. J'espère que cette fois-ci les dieux de la

 12   technologie seront avec nous et que nous pourrons entendre cette partie de

 13   votre interview.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : le son est de très

 16   mauvaise qualité, les interprètes ne sont pas vu remettre le texte.

 17   [voix sur voix]

 18   "Praljak : Il m'est difficile de répondre à cela, car je ressens de la

 19   honte à cause de cela. Je ne pense pas que l'on puisse considérer cela

 20   comme normal. Il n'y avait pas de guerre ou il n'y a -- s'il a fallu mettre

 21   quelqu'un, s'il fallait mettre quelqu'un en détention, il aurait fallu

 22   mettre en place des camps. Cela n'a rien d'inhabituel. S'il y avait de

 23   nombreux prisonniers, et bien, la Herceg-Bosna n'était pas préparée à faire

 24   face à une situation dans laquelle il y aurait beaucoup de prisonniers de

 25   guerre, elle ne considérait pas non plus qu'il y aurait un conflit avec les

 26   Musulmans. Personne n'était vraiment préparé à cela. A un certain moment,

 27   nous avons dû réagir très rapidement parce que c'était une question

 28   d'heure, pour savoir qui allait procéder au désarmement de qui. Si vous

Page 44213

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 44214

  1   êtes dans une situation dans laquelle vous pouvez réagir soit en désarmant

  2   votre ennemi soit en le laissant vous désarmer vous-même, et ainsi être

  3   confronté à une défaite totale; je ne pense pas que nous aurions été

  4   préparés à accepter la responsabilité de cela. En revanche, je suis prêt à

  5   dire : c'est la responsabilité pour la décision de les désarmer une fois

  6   que tout cela a commencé. Il n'y avait plus aucune confiance et il était

  7   trop dangereux d'attendre et de prendre ce risque. Donc je suis prêt à

  8   prendre la responsabilité de cette décision pour le désarmement à Livno,

  9   Prozor, Vakuf, et cetera."

 10   Q.  Mon Général, nous allons parler des camps un peu plus tard, mais je

 11   voudrais me concentrer sur le passage où vous avez accepté la

 12   responsabilité pour la décision de désarmer, de les désarmer une fois que

 13   ceci avait commencé. Donc, Général, vous aviez eu vent et vous connaissiez,

 14   et vous aviez approuvé la décision de désarmer tout du moins les membres

 15   musulmans du HVO après les événements du 30 juin, n'est-ce pas, malgré ce

 16   que vous avez dit ?

 17   R.  Non. Ceci correspond à l'année 1995. On me met au courant de faits qui

 18   se sont produits entièrement et dans l'explication que je fournis de la

 19   situation dans son ensemble à l'adresse d'un journaliste, et je parle au

 20   conditionnel, je dis : je pourrais prendre cette responsabilité et je parle

 21   au nom des personnes qui sont assises là, les représentants de la HZ

 22   Herceg-Bosna. Je parle au conditionnel et j'explique avec précision qu'en

 23   tant que Croate, j'ai honte que ces événements se soient produits là-bas.

 24   Je dis, comme je l'ai dit ici d'ailleurs, je suis en mesure d'accepter

 25   pleinement la responsabilité qui découle de cette décision du général

 26   Petkovic revenant à mettre en isolement ces hommes mais que d'après les

 27   éléments dont je dispose alors, c'est-à-dire en 1995, il s'est passé dans

 28   ces centres de détention, dans ces prisons des événements dont on ne peut

Page 44215

  1   qu'avoir honte. Mais qu'en revanche, je ne vois pas comment il est possible

  2   d'en assumer la responsabilité donc j'en reste à ces paroles. Je les

  3   confirme à ceci près qu'il s'agit de l'année 1995, et que je m'adresse à un

  4   journaliste de façon globale en fait au nom de tous. Je ne suis pas dans

  5   une position où je peux dire dans une émission de cette nature qu'un tel a

  6   dit telle chose très précisément que telle autre personne a dit autre

  7   chose.

  8   Excusez-moi, excusez-moi.

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   R.  Donc vous avez mal interprété cela. Les faits sont tels qu'ils se sont

 11   produits et j'en reste aux paroles que j'ai prononcées en cette occasion

 12   précise; elles sont tout à fait correctes, humaines, et il faut préciser

 13   que je parle au conditionnel et que je parle au nom de tous pour dire ce

 14   qui était acceptable et ce qui ne l'était pas et pourquoi.

 15   M. STRINGER : [interprétation] Je vais passer à une autre question à moins

 16   d'avoir des questions.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais qu'on revienne au document P 3455.

 18   Bien. Nous avons donc le document à l'écran. Général Praljak, je vais vous

 19   interrogez sur un autre plan que la question des prisonniers. C'est un

 20   document de M. Petkovic, 14 juillet. Nous savons que vous n'êtes pas là

 21   mais j'ai bien cela en tête. Regardez le premier paragraphe, Petkovic

 22   s'adresse à Siljeg et lui demande de donner des cibles à XY. Alors comment

 23   vous analysez cela vous en termes militaires ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vois pas cette

 25   phrase dans la version dont je dispose elle est complètement effacée et il

 26   n'y a aucun moyen pour moi de lire ce qui est écrit ici.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, vous avez raison. Dans votre langue,

 28   ça n'apparaît pas et dans la version anglaise, ça apparaît. Alors je ne

Page 44216

  1   sais pas comment on fait les traducteurs. Bon. Donc je retire ma question

  2   parce que, là, un seul document, je constate que pour vous c'est très

  3   difficile de voir quoi que ce soit. Bien. Là, on n'y voit encore rien du

  4   tout parce que c'est tout noir.

  5   Bon. Monsieur Stringer, passez à la suite.

  6   M. STRINGER : [interprétation]

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer, mais je dois

  9   poser cette question : comment ce document a-t-il pu être traduit si le

 10   texte en croate est illisible& ? Cela ne peut signifier que deux choses,

 11   soit il existe un exemplaire lisible mais il n'a pas introduit dans le

 12   système e-court, soit la première phrase dans la traduction a fait l'objet

 13   d'une invention. Mais, bon, je privilégie plutôt la première option selon

 14   laquelle un exemplaire lisible existe mais ne nous a pas été fourni.

 15   M. STRINGER : [interprétation] Nous verrons si nous pouvons fournir une

 16   copie plus lisible.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci.

 18   M. STRINGER : [interprétation]

 19   Q.  Mon Général, la pièce suivante dans le classeur est la pièce P 03794

 20   qui porte la date du 29 juillet 1993. Donc vous avez repris le commandement

 21   de l'état-major du HVO et il s'agit ici d'un rapport qui a été soumis par

 22   l'adjoint au chef de la sécurité, M. Tucak, et ce rapport est adressé au

 23   chef de la force militaire, M. Coric. C'est au sujet de l'inspection de la

 24   caserne de Dretelj, le 27 juillet, et il y avait 1 699 détenus dans les

 25   prisons au sein de cette caserne, 53 qui étaient détenus séparément parce

 26   qu'on les avait fait prisonniers durant l'attaque sur une Unité du HVO, il

 27   y avait six responsables religieux. Les conditions sont satisfaisantes,

 28   relativement bonnes pour une période de guerre. Cinq prisonniers sont

Page 44217

  1   décédés en prison. Trois ont été tués alors qu'ils essayaient de forcer une

  2   porte d'entrée et deux autres sont décédés de mort naturelle probablement

  3   une crise cardiaque.

  4   Donc, mon Général, durant cette période c'est-à-dire aux environs du 29

  5   juillet, d'après ce que vous avez dit, vous n'avez pas eu connaissance,

  6   vous n'aviez pas connaissance du fait qu'il y avait 1 699 détenus à la

  7   caserne de Dretelj, n'est-ce pas ?

  8   R.  C'est exact.

  9   Q.  Le général Petkovic ne vous a jamais rien dit là-dessus lorsqu'il vous

 10   a transmis le commandement le 24 ?

 11   R.  Le général Petkovic, lui aussi, d'après ce que je sais, n'avait rien à

 12   voir avec les centres de détention. Cela n'est pas adressé non plus au

 13   général Petkovic.

 14   Q.  Je voudrais m'excuser, mon Général, ce n'est pas là ma question. Ma

 15   question était de savoir si le général Petkovic vous a informé qu'il y

 16   avait des détenus à Dretelj.

 17   R.  Mais vous supposez que Petkovic était au courant --

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est précisément

 19   l'objection que j'aurais.

 20   M. Stringer avance à nouveau une question dans laquelle il présuppose un

 21   fait bien précis.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

 23   M. STRINGER : [interprétation]

 24   Q.  Mon Général, est-ce que vous aviez eu vent de ces prisonniers par le

 25   biais de M. Coric ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Est-ce que vous avez jamais abordé la question de prisonniers avec M.

 28   Coric lorsque vous étiez commandant de l'état-major du HVO ?

Page 44218

  1   R.  Non.

  2   Q.  Coric n'a jamais ou plutôt est-ce que vous avez eu des réunions ou des

  3   discussions avec M. Coric concernant d'autres points durant la période où

  4   vous étiez commandant de l'état-major du HVO ?

  5   R.  Malheureusement, je n'ai pu me rendre à aucune réunion de ce type pour

  6   les raisons que j'ai expliquées ici, et j'ignore si cela a été abordé lors

  7   de ces réunions. D'ailleurs, j'ignore si ces réunions ont été tenues ou

  8   non, si elles ont existées.

  9   Q.  On avait parlé de la question de la subordination des Unités de la

 10   Police militaire à l'attention de l'état-major à votre demande, afin de

 11   répondre à l'offensive de l'ABiH. Concernant cela, est-ce que vous avez eu

 12   des discussions avec M. Coric ?

 13   R.  Non. De plus, il n'y avait que le Bataillon léger d'Assaut qui m'était

 14   subordonné. C'était une partie seulement de la police militaire, pas le

 15   gros de la police militaire. Ce n'est uniquement cette partie des effectifs

 16   de la police militaire qui avaient été entraînés pour réagir face à des

 17   actes visant à provoquer des désordres, à mettre en péril l'ordre public de

 18   façon grave.

 19   Q.  Mon Général, la pièce suivante est la pièce P 04260.

 20   R.  Monsieur Stringer, je n'ai pas ce document.

 21   Q.  Je vous prie de m'excuser. Il s'agissait de 3 794. Donc, la pièce

 22   suivante sera la pièce 3 831. 3 831, il s'agit du 31 juillet 1993. Un

 23   rapport de Markesic au SIS, zone opérationnelle d'Herzégovine et nord-

 24   ouest, Brigade de Rama. Dans le deuxième paragraphe, il est mentionné :

 25   "La Brigade Rama, le SIS de la Brigade Rama a pris certaines mesures qui

 26   rentrent dans ses attributions et conformément à un ordre venant de haut,

 27   tous les hommes d'ethnicité musulmane âgés de 16 à 60 ans ont été faits

 28   prisonniers. Par conséquent, un nombre important ont été envoyés en prison

Page 44219

  1   à Ljubuski, à Capljina, et 174 d'entre eux sont à la prison de Prozor et

  2   sont utilisés pour travailler sur le terrain (fortification des lignes de

  3   défense, et cetera)."

  4   Mon Général, cela fait une semaine, à ce moment-là, que vous avez pris le

  5   commandement de l'état-major du HVO; est-ce que vous savez ce que signifie

  6   cet ordre venant d'en haut ou d'un niveau plus haut qui est mentionné par

  7   M. Markesic ?

  8   R.  Je l'ignore.

  9   Q.  Saviez-vous ou ne saviez-vous pas qu'à ce moment-là, ils avaient fait

 10   prisonniers tous les hommes musulmans ou d'ethnicité musulmane entre 16 et

 11   60 ans ?

 12   R.  Je ne disposais d'aucune information en ce sens. Pour ce qui était

 13   néanmoins de personnes venues de Bugojno, comme vous pouvez le voir et ce

 14   qui est précisé plus bas, également, quelles étaient les lignes et les

 15   positions qui avaient été perdues ? C'est alors que l'ABiH a pratiquement

 16   détruit le commandement, et comme vous pouvez le voir, il y a eu des morts,

 17   deux chars ont été détruits, et ce dont je vous parle, ce sont les

 18   questions militaires. Le reste, je n'avais pas d'éléments.

 19   Q.  En fait, il est mentionné où vous dites une fois que vous avez pris les

 20   commandes de l'état-major du HVO, vous vous êtes dépêché d'aller à Gornji

 21   Vakuf parce que la situation nécessitait votre attention, n'est-ce pas ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Q.  Donc, vous étiez en fait présent physiquement au sein de la zone

 24   opérative de Herzégovine nord-ouest, n'est-ce pas ?

 25   R.  La zone opérationnelle d'Herzégovine de l'ouest a une ligne de 200

 26   kilomètres à peu près du côté de Livno, là-haut. Moi, j'étais sur le front

 27  de Gornji Vakuf au cours des combats entre le 1er et le 2, comme c'est écrit

 28   à la fin du document.

Page 44220

  1   Maintenant, quelle était la distance qui séparait les fronts ? A Rama, un

  2   policier militaire a été tué, deux chars(cor5,46) ont été détruits, une

  3   citerne également. Vous comprenez quelle était la situation militaire.

  4   Q.  Nous savons que vous avez consacré une grande partie de votre temps en

  5   août et en septembre, en 1993, dans la zone de Prozor-Rama, n'est-ce pas ?

  6   C'est là-dessus que vous vous êtes concentré, en fonction de la répartition

  7   des activités dont vous nous avez parlé avec le général Petkovic, le

  8   général Tole, c'est-à-dire que Prozor et Gornji Vakuf étaient votre domaine

  9   de responsabilité et c'est là-dessus que vous concentriez le plus de votre

 10   attention, n'est-ce pas ?

 11   R.  Primaire, peut-être, mais pas unique.

 12   Q.  Donc, la prison de Prozor qui est mentionnée ici, où se trouvait-elle ?

 13    R.  Je ne sais pas.

 14   Q.  Donc, vous ne connaissez pas de prison à Prozor ?

 15   R.  Je ne suis pas au courant.

 16   Q.  La pièce suivante est la pièce 3 958, P 03958, en date du 5 août 1993.

 17   C'est un lieu différent. Cela fait référence à l'établissement carcéral

 18   Dretelj.

 19   Encore une fois, mon Général, je pense que je connais la réponse mais est-

 20   ce que vous confirmez que vous ne saviez pas qu'il y avait 1 835 détenus à

 21   la caserne de la police militaire de Dretelj, tel que ceci est mentionné

 22   dans ce document ?

 23   R.  Je n'étais pas au courant.

 24   Q.  Ce rapport est à l'attention de la Brigade de Knez Domagoj, n'est-ce

 25   pas ?

 26   R.  Oui, je le vois.

 27   Q.  La Brigade de Knez Domagoj faisait partie de la chaîne de commandement

 28   de l'état-major principal, n'est-ce pas, pour la zone opérationnelle du

Page 44221

  1   sud-est de l'Herzégovine, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, selon la hiérarchie, état-major principal, zone opérationnelle,

  3   brigade. Pourquoi est-ce que la brigade a demandé qu'on lui transmette ce

  4   document ? Pourquoi elle en avait besoin ? A qui elle l'a adressé ? Je ne

  5   sais pas. Il est tout à fait certain que je n'ai reçu aucun rapport au

  6   sujet de tout cela. Or, les rapports sont des éléments fondamentaux et il

  7   et important aussi de savoir quel est le nombre de destinataires d'une

  8   information et à combien de niveau hiérarchique cette information est

  9   distribuée.

 10   Q.  Mon Général, je voudrais consacrer un peu plus de temps aujourd'hui

 11   pour parler des événements qui se sont produits durant cette période, à

 12   savoir en août 1993.

 13   M. STRINGER : [interprétation] La pièce suivante est la pièce P 09933. Il

 14   s'agit d'une déclaration 92 bis qui a été versée au dossier et admise.

 15   Enfin, en tout cas, en partie. Je ne vais faire référence, bien sûr, qu'aux

 16   passages qui ont été admis au dossier.

 17   [Le conseil de l'Accusation se consulte]

 18   M. STRINGER : [interprétation] Le nom du témoin doit être retiré de

 19   l'écran. Il s'agit d'un témoin protégé qui avait un pseudonyme à l'époque.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, il faut faire une ordonnance.

 21   Bien, il n'y a pas de problème.

 22   M. STRINGER : [interprétation] On me fait savoir que la déclaration n'est

 23   pas confidentielle, donc on peut en parler en audience publique.

 24   Q.  J'aimerais utiliser ce document pour établir les bases des

 25   connaissances que vous auriez pu avoir en ce qui concerne ce qui s'est

 26   passé dans la région de Capljina-Stolac en août 1993. Donc tout d'abord,

 27   pourriez-vous vous pencher sur le paragraphe 19 de cette déclaration ? Cela

 28   se trouve à la page 5 de votre version, c'est le premier paragraphe complet

Page 44222

  1   de la page 5. Avez-vous le document ? Le témoin commence en disant : "Le 23

  2   août 19993."

  3   R.  Oui, oui, j'ai trouvé ce passage.

  4   Q.  Elle dit :

  5   "Le 23 août 1993, un jour que je n'oublierai jamais, vers environ 13

  6   heures, un camion bâché civil et trois voitures civiles de différentes

  7   couleurs sont arrivés près de notre appartement. Un homme en civil avec un

  8   mégaphone est sorti de la voiture, et en utilisant son mégaphone, il a dit

  9   que tous les Musulmans devaient quitter leurs appartements et se réunir

 10   dans la cour."

 11   A Capljina. Ensuite le témoin décrit ce qu'il s'est passé. Les gens ont été

 12   transportés par camions, enfin, aux silos, c'est ce qu'elle appelle les

 13   silos. C'est au paragraphe 23. "Où ils se trouvaient un très grand nombre

 14   de personnes." Elle a dit avoir reconnu beaucoup de personnes venant de

 15   Capljina, et la déclaration se poursuit. Les gens ont dû donner leur

 16   argent. Ensuite au paragraphe 28, malheureusement, votre version n'est pas

 17   numérotée.

 18   "J'ai rassemblé toutes mes affaires dans mes sacs."

 19   L'avant-dernier paragraphe qui est à l'écran. Voyez-vous ce passage ?

 20   R.  Oui, oui.

 21   Q.  "J'ai rassemblé toutes mes affaires dans mes sacs et en sortant je suis

 22   passé près des cartons, sans rien déposer. Dehors, se trouvait une queue de

 23   camions et d'autobus allant des silos jusqu'au restaurant Padjina [phon] 

 24   Gostojna [phon], soit plusieurs centaines de mètres. Il y avait des

 25   véhicules civils et militaires, et parmi ces véhicules j'ai reconnu un

 26   camion avec une cabine rouge appartenant à un certain -- à un homme de

 27   Tasavici [phon]."

 28   Ensuite il poursuit, il parle du fait que toutes ces personnes ont été

Page 44223

  1   entassées dans les camions, et emmenées à l'extérieur de Capljina à bord de

  2   ces véhicules.

  3   Donc c'est une opération quand même d'envergure en matière de logistique,

  4   il faut rassembler les camions et les autobus, il faut pouvoir déplacer

  5   toute la population musulmane de Capljina. Etiez-vous au courant que --

  6   saviez-vous que ceci allait se passer aux environs du 23 août 1993 ?

  7   R.  Non. Elle évoque ici des civils qui sont venus et tout le reste. Non,

  8   je n'ai pas connaissance de cet événement. Je n'ai aucun élément

  9   d'information quant à l'identité de celui qui l'a organisé --

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   R.  -- je ne sais pas comment cela s'est passé, comment les choses se sont

 12   déroulées en ville.

 13   Q.  Précédemment lors de votre déposition vous nous avez dit que M. Stojic

 14   et vous-même étaient soit à Capljina soit à Stolac le 15 août 1993, n'est-

 15   ce pas ?

 16   R.  Ce n'est pas ce que j'ai dit, et c'est inexact. Que je vous ai dit que

 17   le 15 août, j'ai participé au combat au sud de Mostar, aux environs de

 18   Blagaj, sur deux monts différents, dont je n'ai pas besoin de vous donner

 19   les noms car ils n'ont pas d'importance. C'est une chose. Mais que le 15,

 20   j'étais avec M. Stojic après mon retour et après que nous ayons réussi, en

 21   grande partie, à reprendre les positions précédemment occupées par l'ABiH.

 22   En raison de ces attaques, il y avait beaucoup de difficultés à livrer

 23   l'aide humanitaire à Mostar. M. Stojic a eu un malaise devant moi. Ça c'est

 24   passé le 15 août, à Vela Gospa, et si je me -- le jour de Vela Gospa, qui

 25   est une fête religieuse. Si je me souviens bien, après que je lui ai donné

 26   de l'eau fraîche, il a été emmené à l'hôpital, si je ne me trompe,

 27   simplement parce qu'il avait un malaise.

 28   Q.  Où vous trouviez-vous exactement avec M. Stojic à la mi-août ?

Page 44224

  1   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète, Vela Gospa c'est l'Assomption.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je suis rentré des champs de bataille, et

  3   à Citluk, nous étions dans le bâtiment de l'état-major principal. M. Stojic

  4   est venu dans la salle où je me trouvais, ou la mienne ou celle de

  5   quelqu'un d'autre. Je ne sais plus. Je n'avais pas de pièce à moi à ce

  6   moment-là.

  7   M. STRINGER : [interprétation]

  8   Q.  A ce moment-là, donc la mi-août 1993, vous êtes allé au poste de

  9   commandement à Citluk, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je vous l'ai dit, le 15, à un certain moment j'y étais le 15. Est-ce

 11   que j'y étais encore une heure plus tard, ça n'a aucune importance. Le 15,

 12   je vous ai décrit ce qui s'est passé. Donc ce jour-là, le 15, aux environs

 13   de 11 heures, midi. Je suis entré des positions, et M. Stojic est arrivé.

 14   Le reste je vous l'ai raconté.

 15   Q.  Nous savons que, pendant tout le mois d'août, vous permettez que je

 16   vous affirme en tout cas, nous savons que pendant tout le mois d'août, la

 17   population musulmane, c'est-à-dire les femmes et les enfants, puisque les

 18   hommes avaient déjà été arrêtés, avaient été mis à l'écart, nous savions

 19   donc que la population restante -- la population musulmane restante à

 20   Stolac et à Capljina, comme c'est indiqué ici, ont été rassemblés par le

 21   HVO et ont été chassés de leurs maisons. C'est ce qui s'est passé en août

 22   1993, n'est-ce pas ?

 23   R.  Je ne sais pas. Mais, Monsieur, ce qui est écrit ici c'est que deux

 24   hommes en civil sont arrivés, après quoi, nous lisons aussi dans ce

 25   document, que ces gens sont donc venus en civil et qu'un homme est sorti

 26   d'une voiture, et puis il est question de trois véhicules civils bâchés.

 27   Moi, j'ai parlé du contrôle exercé sur les civils. Les Serbes étaient à

 28   Stolac, et tout ce qui se passait à Capljina n'avait aucun rapport avec la

Page 44225

  1   responsabilité de l'état-major principal, sauf si des membres des unités

  2   ont commis des actes répréhensibles. Mais il est certain que la police

  3   militaire si les questions de soldats responsables s'en sont occupés ou que

  4   le maire de la ville s'en ait occupé, s'il s'agit de civils. En tout cas,

  5   moi, je ne suis pas au courant de ces événements.

  6   Q.  Mais, en fait, Général Praljak, il y a des camions quand même -- un

  7   convoi de camions qui s'étire sur plusieurs centaines de mètres, donc ce

  8   n'est pas une petite opération portant sur des membres qui auraient des

  9   renégats. Absolument pas, c'est une opération logistique de grande

 10   envergure visant tous les Musulmans de Capljina.

 11   R.  Je ne sais pas ce qui était nécessaire. Ce qui est écrit dans ce

 12   document, correspond exactement à ce qu'on peut lire, et il est question

 13   dès le début de personnes qui sont des civils, qui disent ce que cette

 14   femme décrit, qui font ce que cette femme dit qu'ils ont fait. Donc, moi,

 15   je ne peux pas commenter, car je ne suis pas au courant. Mais je peux lire

 16   le document. Elle parle de civils après quoi, elle évoque --

 17   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Phrase non terminée.

 18   M. STRINGER : [interprétation]

 19   Q.  Bien. Général Praljak, cela dit, pendant votre mandat lorsque vous

 20   étiez commandant -- lorsque vous étiez chef de l'état-major du HVO, toute

 21   la population musulmane de Stolac a été chassée de Stolac. Stolac a été

 22   nettement nettoyé de ces Musulmans. Au départ, il y avait une majorité

 23   relative de Musulmans, et c'est devenu une municipalité qui n'avait plus un

 24   seul Musulman en octobre 1993 ?

 25   R.  Monsieur Stringer, je n'avais pas la moindre idée d'un quelconque

 26   événement survenu à Stolac, pendant toute la période où j'exerçais mon

 27   commandement. Pour une raison très simple, c'est que Stolac n'était pas une

 28   priorité de l'attaque de l'ABiH, même si je sais que la ville de Stolac

Page 44226

  1   avait plus d'habitants musulmans que d'habitants croates suite à toute

  2   sorte de rapiéçage de la municipalité -- de la surface de la municipalité.

  3   Mais au sujet de Stolac, je n'ai reçu aucun renseignement, et pour les

  4   raisons que j'ai déjà indiquées, Stolac ne pouvait pas être au cœur de

  5   l'énergie des efforts et du temps que j'ai consacré à d'autres choses, dans

  6   cette période.

  7   Q.  Maintenant nous allons passer à une autre pièce dans le classeur, la

  8   pièce 10958. Il s'agit d'un entretien, une interview que vous avez donnée,

  9   pièce 10958. Il s'agit d'une interview que vous avez faite qui a été

 10   publiée dans "Novi List" en avril 2004, et vous parlez des allégations qui

 11   sont dans l'acte d'accusation. Accusation qui venait juste d'être rendue

 12   public. Donc j'aimerais attirer votre attention sur certains commentaires

 13   que vous avez faits sur à propos de Stolac, à la page 5 dans la version en

 14   anglais. Donc c'est dans une case, il est écrit :

 15   "J'ai signé certaines choses et d'autres, je n'ai pas signées à Stolac."

 16   [aucune interprétation]

 17   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer. Mais au

 18   compte rendu d'audience, en anglais, il est écrit que cette interview a été

 19   accordée, le 4 avril 1994, alors qu'à la lecture du document, on voit que

 20   l'année est l'année 2004.

 21   M. STRINGER : [interprétation] J'ai dû faire une erreur, j'ai dû faire un

 22   lapsus. En effet c'est le 4 avril 2004.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne trouve pas ce passage. Où est-ce que

 24   vous me l'avez.

 25   M. STRINGER : [interprétation]

 26   Q.  Il est écrit :

 27   "A Stolac, j'ai signé certaines choses, et d'autres pas."

 28   Donc vous parlez de Stolac.

Page 44227

  1   R.  Je n'arrive pas à trouver ce passage. Vous pouvez m'aider.

  2   M. STRINGER : [interprétation] Oui, la copie n'est pas très bonne, nous

  3   avons peut-être une meilleure. Vraiment l'exemplaire est très mauvais.

  4   Je vais y revenir.

  5   Mme PINTER : [interprétation] Il est impossible de lire ce document ou ce

  6   passage, Monsieur Stringer, car cela se trouve en marge du texte.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Nous allons trouver un exemplaire plus

  8   lisible et nous y reviendrons.

  9   Monsieur le Président, je suis prêt à passer au classeur suivant. Mais nous

 10   devons lever le distribuer, peut-être plutôt pourrions-nous faire --nous

 11   pouvons peut-être lever la séance un peu plus en avance, dix minutes en

 12   avance et je trouverais un meilleur exemplaire de ce document et nous

 13   pourrons aussi diffuser les classeurs.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à fait. D'autant qu'il y a une audience après

 15   nous, et nous allons transporter nos classeurs qui sont déjà fort lourds,

 16   d'en rajouter un troisième, ça pourrait être au-dessus de nos capacités.

 17   Alors nous continuerons demain. Je crois que vous allez revenir sur le

 18   classeur 8, parce qu'il y a un document qui n'est pas terminé, et puis on

 19   commencera avec le nouveau classeur. Voilà.

 20   Donc nous nous retrouverons demain, à 9 heures, puisque nous sommes de

 21   matin. Je souhaite à tout le monde une bonne fin d'après-midi.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   --- L'audience est levée à 13 heures 37 et reprendra le mercredi 2

 24   septembre 2009, à 9 heures 00.

 25  

 26  

 27  

 28