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1 Le mardi 22 septembre 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [L'accusé Coric est absent]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appeler le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
9 tous dans le prétoire.
10 Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et
11 consorts. Je vous remercie.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
13 En ce mardi, 22 septembre 2009, je salue en premier M. Prlic, M. Stojic, M.
14 Praljak, M. Petkovic et M. Pusic. Je salue également Mmes et MM. les
15 avocats, je salue tous les membres du bureau du Procureur qui sont
16 aujourd'hui nombreux, je salue également toutes les personnes qui nous
17 assistent dans nos travaux.
18 Je vais d'abord donner la parole à M. le Greffier qui a des numéros IC à
19 nous donner.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. Je vous remercie.
21 Certaines parties ont présenté la liste des documents à verser par le biais
22 du témoin Josip Jurcevic. La liste présentée par 3D recevra la cote IC
23 1042. La liste présentée par 1D recevra la cote IC 1043. La liste présentée
24 par 4D recevra la cote IC 1044, et la liste présentée par l'Accusation
25 recevra la cote IC 1045.
26 L'Accusation a aussi soumis ses objections concernant la liste des
27 documents versés par l'équipe 3D et 4D par le biais du témoin Slobodan
28 Praljak. Ces listes recevront les cotes IC 1046 et 1047 respectivement.
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1 Je vous remercie.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
3 La Chambre va rendre une décision orale, que je vais lire lentement.
4 Décision orale relative au délai de réponse des parties à la demande
5 présentée par la Défense Praljak en vertu de l'article 92 bis du Règlement.
6 Le 22 septembre 2009, l'Accusation a déposé à titre confidentiel une
7 réponse à la demande d'admission de déclarations écrites en vertu de
8 l'article 92 bis du Règlement déposée par la Défense Praljak le 14
9 septembre 2009. L'Accusation demande à titre principal le rejet de la
10 demande de la Défense Praljak. A titre subsidiaire, l'Accusation demande
11 une prorogation du délai de réponse à ladite demande jusqu'au 23 novembre
12 2009.
13 La Chambre estime qu'il est dans l'intérêt de la justice d'analyser la
14 demande de la Défense Praljak à la lumière des réponses de toutes les
15 parties qui souhaitent répondre avant de se prononcer sur son admission.
16 Cependant, la Chambre estime que la prorogation de délai demandée par
17 l'Accusation entraînerait un retard excessif dans la procédure. Par
18 conséquent, la Chambre octroie une prorogation de délai jusqu'au 28 octobre
19 2009 pour toutes les parties souhaitant répondre à la demande de la Défense
20 Praljak.
21 Bien. En un mot, les parties ont jusqu'au 28 octobre, c'est-à-dire dans un
22 mois, pour nous adresser leurs écritures en réponse à la requête de la
23 Défense Praljak. Voilà. Tout le monde a bien compris cette décision orale.
24 Concernant le calendrier, nous avons été informé par un courrier de Me
25 Kovacic que le témoin Skender ne pourrait venir que jeudi. C'est bien ça,
26 Maître Kovacic ?
27 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est précisément
28 cela.
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1 M. Skender va venir comme il a été prévu. Comme je l'ai dit dans
2 notre note, nous avons essayé d'accélérer un peu les choses, mais il n'y a
3 pas pu prendre l'avion, et il n'arrive de Corse que ce soir, et nous ne
4 pourrons pas procéder au récolement avant demain matin. Je vous remercie.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
6 On va introduire le premier témoin, Arbutina Alojz.
7 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Pouvez-vous, si vous m'entendez,
9 me donner votre nom, prénom et date de naissance, s'il vous plaît.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Alojz Arbutina, né le 24 novembre 1931, en
11 France.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous êtes né en France. Où ça exactement ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Haltbont [phon].
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vu votre âge, vous devez être retraité. Quelle
15 a été votre dernière profession ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais électricien au sein de l'entreprise
17 Elektra, et je suis à la retraite depuis 1988.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné dans un procès ou
19 bien c'est la première fois que vous témoignez ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois ici.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous demande de lire le serment.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
23 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
24 LE TÉMOIN : ALOJZ ARBUTINA [Assermenté]
25 [Le témoin répond par l'interprète]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.
27 Alors, Monsieur, quelques éléments d'information de ma part afin que cette
28 audience se déroule le mieux possible pour vous-même et pour tout le monde.
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1 Dans un premier temps, vous allez répondre à des questions qui vont vous
2 être posé par la Défense du général Praljak, voire le cas échéant par le
3 général Praljak lui-même, si les questions entrent dans son domaine de
4 compétence. A l'issue de cette phase dont l'avocat nous a dit que ça
5 devrait prendre une heure environ, les autres avocats des autres accusés
6 qui sont nombreux devant vous pourront eux aussi vous poser des questions,
7 et pour cela la Chambre a prévu 30 minutes de questions pour les autres
8 accusés. Le Procureur qui avait droit à une heure pour ses questions nous a
9 fait savoir la semaine dernière qu'il n'avait pas l'intention de poser de
10 questions. Les quatre Juges qui sont devant vous vous poseront peut-être,
11 voire certainement, des questions à partir des éléments que vous allez nous
12 apporter en répondant aux questions des uns et des autres.
13 Essayez d'être précis et synthétique dans vos réponses. Si vous ne
14 comprenez pas une question n'hésitez pas à demander à celui qui vous pose
15 la question de la reformuler.
16 Si à un moment donné vous vous ne sentez pas bien, on ne sait jamais,
17 parce qu'une audience c'est très stressant et ça peut parfois provoquer des
18 malaises, n'hésitez pas à lever la main pour qu'on puisse interrompre
19 l'audience immédiatement.
20 Voilà ce que je voulais vous dire, mais pour vous ça ne doit pas être une
21 surprise parce que les avocats de M. Praljak ont dû vous dire cela. Par
22 ailleurs, comme vous parlez la même langue que les avocats de M. Praljak,
23 attendez qu'ils aient fini de parler avant de répondre pour éviter le
24 chevauchement des propos des uns et des autres.
25 Voilà, Monsieur.
26 Maître, vous avez la parole.
27 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à vous
28 et à toutes les personnes dans le prétoire.
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1 Interrogatoire principal par Mme Pinter :
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Arbutina. Je suis ici, vous pouvez
3 regarder dans ma direction.
4 R. Bonjour.
5 Q. Oui, vous pouvez regarder bien sûr où vous voulez, mais je vous signale
6 que je suis dans cette partie du prétoire.
7 Alors, je vois que du côté de l'Accusation on a noté la présence d'une
8 liasse de papier que vous avez devant vous. De quoi s'agit-il ?
9 R. C'est la déclaration que j'ai donnée préalablement déjà en Croatie
10 concernant Sunja, et j'ai cela devant moi maintenant.
11 Q. Vous avez dit avoir donné une déclaration, l'avez-vous donnée
12 volontairement et au meilleur de la connaissance que vous avez des
13 événements et du souvenir que vous en avez, vous avez fait une déclaration
14 véridique ?
15 R. Oui, j'ai dit la vérité dans ces déclarations, et je n'ai subi aucune
16 influence ni contrainte, et c'est un plaisir pour moi que d'être un témoin
17 de la Défense du général Praljak.
18 Q. Merci. On a fait état de votre naissance en France, mais où résidez-
19 vous ?
20 R. Je réside à Sunja, en Croatie.
21 Q. Alors, nous allons compléter ainsi votre déclaration car votre date de
22 naissance n'y figure pas, nous venons de la consigner au compte rendu et
23 votre adresse n'y figurait pas non plus. C'est la raison pour laquelle je
24 vous pose cette question. Depuis quand résidez-vous à Sunja ?
25 R. Depuis 1936, l'année dans laquelle mes parents et moi-même avons
26 emménagé dans ce qui était encore la Yougoslavie à l'époque.
27 Q. Pouvez-vous décrire à l'attention des Juges de la Chambre la situation
28 ce qui prévalait à Sunja jusqu'au début de la guerre en République de
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1 Croatie, ou plutôt, jusqu'au début de la guerre à Sunja, et pouvez-vous
2 préciser quand cette guerre a commencé à Sunja ?
3 R. La population était mixte à Sunja. Il avait davantage de Croates que de
4 Serbes. Quant à la guerre, elle a commencé à Sunja le 27 juillet 1991, dans
5 la matinée, entre 7 heures et 8 heures, par des attaques au mortier. Cela a
6 été un choc considérable, et une surprise énorme pour nous. Par exemple, le
7 26 juillet, un de mes amis appartenant au groupe ethnique serbe que j'avais
8 vu le jour précédant l'attaque n'était plus présent, lui et les siens
9 n'étaient plus à Sunja le jour de l'attaque.
10 Q. Avez-vous été informé qu'il y aurait une attaque, est-ce qu'eux en
11 étaient informés ?
12 R. Non, ils ne nous ont pas du tout informés, et je pense qu'il y a même
13 eu des cas dans lesquels les personnes étaient liées par des liens de
14 parrainage, des gens qui étaient collègues, qui travaillaient ensemble,
15 mais personne n'a informé ces connaissances, ils ont simplement disparu.
16 Cela correspond à une période de quelques jours avant l'attaque, et au jour
17 de l'attaque lui-même, c'est-à-dire du 26 au 27 juillet.
18 Q. Dans votre déclaration, en douzième page du texte en croate, il est dit
19 qu'ils sont partis, c'est ce que vous dites, en traversant la voie ferrée.
20 Qu'est-ce que cela signifie, les habitants appartenant au groupe ethnique
21 serbe seraient partis en traversant la voie ferrée ?
22 R. Bien, c'est ce que nous avons désigné comme étant la voie ferrée.
23 C'était la frontière.
24 Q. La frontière entre quoi et quoi ?
25 R. La frontière nous séparant de ces forces paramilitaires, les Chetniks
26 de Martic, ainsi que des habitants qui étaient ceux des villages serbes se
27 trouvant de l'autre côté également de cette voie ferrée.
28 Q. Cela se trouvait, par ailleurs, sur le territoire de la République de
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1 Croatie, n'est-ce pas ? Il ne s'agit pas de la frontière étatique avec la
2 Bosnie-Herzégovine ? C'était la frontière séparant pour ainsi dire deux
3 parties; est-ce exact ?
4 R. Non, c'était bien le territoire de la Croatie. C'était notre frontière,
5 nous savions qu'il ne fallait plus traverser la voie ferrée, parce qu'au
6 moment même de l'attaque lorsque cette dernière a commencé le matin,
7 lorsque nous avons essayé de nous organiser immédiatement, puis au cours de
8 la journée et de la nuit nous avons procédé à l'évacuation de la population
9 civile, aussi bien des Croates que de ceux des Serbes qui étaient restés
10 sur place, ou bien de ceux également qui se trouvaient à proximité de la
11 gare, parce qu'ils étaient menacés par les attaques intenses qu'ils avaient
12 commencé à lancer contre nous.
13 Q. Merci. Alors, dites-nous comment était organisée cette ligne ? A quoi
14 ressemblait-elle ?
15 R. Je crois que je devrais être en mesure d'expliquer cela à l'attention
16 de la Chambre. Par exemple, cette frontière s'étendait le long de la voie
17 de chemin de fer en direction du poste, où la route traversait la voie
18 ferrée en direction de Sisak --
19 Q. Excusez-moi, mais ce qui m'intéresse, c'est de savoir comment se
20 présentait cette ligne les premiers jours, le premier jour, le second jour.
21 Est-ce que cela a fait l'objet de renforcement, est-ce qu'il y a eu une
22 organisation, des problèmes qui sont présentés ? Je ne vous demande pas où
23 cela se trouvait, mais comment la situation se présentait.
24 R. Je ne sais pas comment je pourrais le décrire. A ce tout début, nous
25 avons exercé une surveillance par mesure de prudence, nous nous sommes
26 retrouvés comme sur une forme de presqu'île. La Save était une sorte de
27 porte de sortie pour nous si jamais les lignes devaient tomber, parce que
28 nous ne pouvions aller nulle part ailleurs, ni à gauche ni à droite. La
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1 ligne allait de la rivière Sava en direction de la gare, en partie
2 également de Zema [phon] vers Bobovci [phon], à travers les champs, après
3 avoir passé par la rue Vladimir Masal.
4 Q. Est-ce qu'il y avait des bunkers, est-ce qu'il y avait des tranchées ?
5 Les soldats étaient-ils bien protégés ?
6 R. Au début, nous n'avions rien de tout cela, car nous ne nous attendions
7 absolument pas à ces événements. Le seul véritable obstacle se trouvait à
8 la gare même, car l'entrepôt de la gare se trouvait à proximité, et cette
9 défense qui a été assurée au tout début le long de cette ligne et de cette
10 voie ferrée l'a été alors que la "milicija" s'y trouvait au début, alors
11 que nous n'étions que quelques volontaires, nous nous étions organisés au
12 cours des tout premiers jours jusqu'à l'arrivée de la 2e Compagnie des
13 Gardes nationaux, il me semble qu'ils sont arrivés au troisième jour, et
14 ce, depuis Zagreb.
15 Q. Alors, est-ce que la situation sur la ligne de front reste telle que
16 vous l'avez décrite ou bien change-t-elle ultérieurement ?
17 R. Le premier commandant était Zarko Pesa. C'est ensuite au mois de
18 septembre qu'il y a un changement avec l'arrivée du général Praljak.
19 Lorsque le général Praljak a pris le commandement à sa charge à Sunja, la
20 situation a complètement changé. Cependant, les choses étaient difficiles
21 avec tous ces volontaires. D'ailleurs, ils ne comprenaient pas
22 véritablement eux-mêmes à ce moment-là qu'il s'agissait de la guerre, que
23 c'était une guerre. Lorsque le général Praljak est arrivé, on a commencé à
24 organiser de façon plus systématique la défense. De notre côté, on a
25 construit des bunkers, on a mis en place une ligne de défense plus solide
26 et on a introduit des mesures de discipline également plus strictes. Tout
27 est devenu mieux organisé.
28 Comment vous décrire cela ? La situation est difficile lorsque vous
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1 avez des gens du cru qui exercent le commandement. Personnellement, j'étais
2 officier de la JNA, j'avais fait l'école d'officier, et j'étais lieutenant,
3 mais j'expliquais aux hommes comment on faisait pour construire des
4 bunkers, des tranchées, ainsi de suite, mais ils ne m'écoutaient pas
5 vraiment. Tout cela fonctionnait de façon très sporadique, alors que
6 lorsque le général Praljak est venu, les choses ont changé du tout au tout.
7 Il a été respecté, c'était un homme venu d'ailleurs, et on l'écoutait. Il
8 n'y avait pas de discussion quand il disait quelque chose.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites que le général Praljak est arrivé.
10 Vous êtes né en 1931, donc en 1992, vous aviez plus de 60 ans. Quand vous
11 voyez arriver le général Praljak, qu'est-ce que vous vous dites ? Il est
12 envoyé par Zagreb ou il arrive tout seul comme Zorro qui arrive quelque
13 part ? Qu'est-ce que vous vous dites ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas, à vrai dire, comment je
15 pourrais vous répondre. Il est venu comme volontaire, de sa propre
16 initiative. Zarko Pesa l'a fait venir, c'était le commandant précédent.
17 C'est à titre volontaire qu'il est venu chez nous à Sunja pour nous aider à
18 nous défendre contre notre ennemi qui se trouvait de l'autre côté de la
19 voie ferrée.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous nous dites que Zarko Pesa l'a fait venir,
21 et lui est venu comme volontaire. Alors, comment se fait-il que quelqu'un
22 qui vient de l'extérieur va se trouver à commander les troupes, alors même
23 que sur place il y a des gens comme vous qui avaient été lieutenant dans la
24 JNA ? Comment se fait-il que quelqu'un qui vient de l'extérieur se retrouve
25 commandant ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que ce n'est pas vraiment de
27 l'extérieur que c'est venu, mais que cela émanait de l'état-major de
28 l'armée croate et que c'était aux fins de la défense de l'état croate. Lui,
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1 cependant, est venu en tant que volontaire pour nous aider et afin que nous
2 soyons plus actifs dans cette défense, dans l'ensemble. Comme je vous l'ai
3 dit, les choses sont plus simples si quelqu'un d'autre vient assurer le
4 commandement plutôt que quelqu'un du cru, car je ne sais pas, mais
5 j'aimerais que vous compreniez qu'il y a quand même une forme de respect
6 dans ce cas-là. Moi, lorsque j'essayais d'expliquer quelque chose ou de
7 dire quoi que ce soit, je pouvais le faire, je pouvais dire qu'il fallait
8 faire telle ou telle chose. Au début, je l'ai fait, d'ailleurs. Mais on me
9 rétorquait : Qu'est-ce que tu vas aller nous donner comme leçon, toi. Nous
10 savons comment il faut se défendre et nous savons ce qu'il convient de
11 faire.
12 Alors je peux expliciter la chose davantage, mais il y a eu des cas
13 concrets où je m'adressais à des hommes qui ont érigé des bunkers dans des
14 étables chez eux, ou juste à côté. Donc le fumier était juste à côté de
15 l'étable et le bunker juste à côté. Ensuite on trouvait leur champ de maïs,
16 et si quelqu'un souhaitait avancer en direction de ce bunker, on pouvait le
17 voir au moment où il aurait traversé ce champ de maïs. Il aurait été
18 visible à une distance de 30 mètres. Mais une fois que la personne aurait
19 réussi à s'approcher de plus près, on n'aurait pas pu déceler sa présence,
20 car il n'aurait plus été dans un champ de vision clairement accessible.
21 Donc il aurait pu se rapprocher et lancer des grenades ou des bombes.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
23 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 Q. Alors savez-vous comment l'armée croate était organisée au mois de
25 juillet 1991 ? Aviez-vous quelque élément de connaissance à ce sujet à
26 l'époque ? S'agissait-il d'une armée bien organisée, sous forme de brigade
27 et ainsi de suite, en 1991 bien sûr, ou a-t-elle fait l'objet d'une
28 organisation qui n'a été que progressive ?
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1 R. Cela a commencé en Croatie. Il y a eu une formation de l'armée. Je
2 parle de la zone que je connais. Donc nous avons commencé à nous organiser.
3 Au début, il y avait des volontaires, et il me semble qu'au 1er septembre,
4 les appels à la mobilisation sont arrivés. Depuis le mois de juillet,
5 depuis le 20 juillet, nous avions tous été des volontaires et nous formions
6 une compagnie indépendante à Sunja dans le cadre d'une unité de Sisak. Avec
7 le temps, notre unité a vu ses effectifs augmentés, des hommes nous ont
8 rejoint, et c'est ainsi que nous sommes devenus une brigade. Nous étions
9 une brigade de réserve, mais il y avait aussi des brigades d'active.
10 A Sunja, nous avons reçu l'aide d'autres brigades, de brigades de la Garde
11 nationale, la Seconde Brigade, la 101e, mais pour ne pas me répéter, cela a
12 été le cas pendant toute cette période. Tout ça a beaucoup changé jusqu'en
13 1995.
14 Q. Très bien. Alors, lorsque nous parlions de l'arrivée du général Praljak
15 pour la première fois à Sunja, en quelle année est-il arrivé et à quel
16 moment ?
17 R. En 1991, en septembre.
18 Q. Merci. Vous avez été en contact avec le général Praljak lorsqu'il est
19 arrivé à Sunja ?
20 R. Oui. Dès le début, l'état-major de la cellule de Crise m'a nommé
21 commandant chargé de la logistique sur place.
22 Q. Merci. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre quel était le rapport
23 qu'entretenait le général Praljak avec les civils, si vous en avez
24 connaissance ? Je parle des civils qui étaient restés à Sunja.
25 R. Ce que je peux vous dire, c'est que le général Praljak ne faisait pas
26 de grande distinction entre les civils et les militaires. Il prenait tout
27 en charge. J'ai alors été nommé assistant du commandant chargé de la
28 logistique, j'ai alors coopéré au sens strict avec le général Praljak, et
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1 nous convenions ensemble de tout ce qui relevait de ma fonction d'assistant
2 chargé de la logistique.
3 Tous les soirs, je devais me présenter devant lui pour que nous convenions
4 de ce qu'il convenait de faire, nous recevions des vivres, tous nos vivres,
5 à vrai dire, de Sisak, et je devais me rendre à Sisak tous les jours pour
6 récupérer cela. Et à une occasion j'ai demandé au général Praljak ce qu'il
7 en était. Je lui ai dit : Général, je pense que je ne devrais peut-être pas
8 venir tous les soirs vous voir et vous présentez cette liste juste pour que
9 vous sachiez que le lendemain je vais aller chercher, je ne sais pas, 300
10 kilogrammes de pommes de terre ou 100 kilogrammes d'oignons. Et il a
11 répondu : Je ne vois pas de problème. Cela fera un souci de moins pour moi.
12 Cependant, nous avons eu une très bonne coopération. A chaque fois
13 que j'avais un problème ou que je ne parvenais pas à obtenir quelque chose,
14 je m'adressais au général. C'était une très bonne coopération.
15 Q. Est-ce que les civils ont souffert de la faim à Sunja ?
16 R. Non, car nous avions pris soin de cela. Le général Praljak m'a donné un
17 ordre à titre personnel. Il m'a dit : Ne t'occupes pas uniquement des
18 militaires mais également des civils, parce qu'à vrai dire il y a pas mal
19 de civils croates qui étaient restés sur place également, des civils
20 appartenant au groupe ethnique serbe. Plus tard, ils ont rejoint l'armée
21 croate. Il y avait aussi quelques Musulmans qui se trouvaient à Sunja. Mais
22 à chaque fois, il me disait de faire bien attention à ce que personne parmi
23 les civils n'ait faim. Nous avions même des civils appartenant au groupe
24 ethnique serbe dont nous avons pris soin aussi et qui ont toujours reçu de
25 façon régulière des vivres, tout comme les militaires.
26 Aucun magasin ne fonctionnait. Les magasins existaient toujours, mais
27 ils étaient fermés.
28 Q. Les civils serbes étaient-ils restés volontairement ? Etaient-ils en
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1 détention ? Vivaient-ils dans des conditions
2 normales ? Qu'en était-il d'eux ?
3 R. Ils vivaient normalement. Il n'y avait aucune différence entre le sort
4 qui était le leur et celui de la population croate. Nous procédions de la
5 même façon vis-à-vis des uns et des autres, à ceci près des remarques qui
6 pouvaient être le fait de certains à certains moments, mais c'était très
7 sporadique. Personne parmi eux n'a subi de contraintes. Pour que les Juges
8 de la Chambre le voit clairement, à partir de la gare et jusqu'au centre de
9 Sunja, sur une zone couvrant peut-être 500 ou 600 mètres, nous avons évacué
10 tous les civils qui étaient présents, qu'il s'agisse de civils croates ou
11 de civils serbes, et il y a eu des Serbes qui sont restés à Sunja, tout
12 comme d'autres qui étaient un peu plus loin de cette même zone, d'autres
13 encore sont allés rejoindre leurs familles à Sisak, à Zagreb ou ailleurs
14 encore.
15 Q. Les avez-vous chassés ou sont-ils partis de leur propre
16 gré ? Je pense aux Serbes.
17 R. Oui, je sais, j'ai compris à qui vous vous référiez. Personne ne les a
18 chassés. Ceux qui souhaitaient partir ont pu le faire, car il y a eu un
19 certain ordre mis en place au sein de la compagnie. Au début lorsque
20 c'était Pasa qui exerçait le commandement, cela fonctionnait normalement
21 jusqu'à l'arrivée du général Praljak. Mais ceux qui voulaient partir se
22 voyaient remettre par nous des laissez-passer pour pouvoir prendre le bac
23 et rejoindre leurs familles de l'autre côté de la rivière dans d'autres
24 parties de la Croatie.
25 Q. J'ai encore deux questions à vous poser. Tout d'abord : quel était le
26 rapport envers les soldats; et deuxièmement, comment se présentait la
27 situation en termes de discipline, dans les rangs des hommes des forces
28 armées ?
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1 R. Je peux vous dire simplement que la discipline a été bien mieux
2 respectée après l'arrivée du général Praljak, car il a dit : Nous sommes
3 une armée, nous défendons cette Croatie qui est la nôtre, et nous devons
4 respecter de la façon la plus stricte les règlements de l'armée et les
5 devoirs militaires qui sont les nôtres.
6 Donc les hommes étaient tenus de respecter les obligations qui étaient les
7 leurs. Je veux dire qu'il était difficile d'introduire le respect de cette
8 discipline auprès de certains, mais ce n'était pas une sévérité extrême qui
9 émanait du général Praljak. Il exigeait simplement que l'on respecte
10 l'ordre et la discipline. Et ce qui m'a beaucoup surpris, c'était la façon
11 dont il tenait nos briefings. Le matin, le général Praljak organisait la
12 levée du drapeau, on remettait des rapports au général Praljak, et on
13 jouait également l'hymne croate. Il y avait également un trompettiste qui
14 tous les matins jouait cet hymne. Les briefings que nous avions étaient
15 très courts. M. Praljak demandait : Que se passe-t-il avec la 1ère Compagnie,
16 a-t-il eu des problèmes ou non; la 2e, la 3e, qu'en est-il de la logistique.
17 Ça prenait tout au plus une demi-heure, et ensuite il disait : Eh bien, on
18 continue, les enfants, faites attention à ce que vous faites, faites
19 attention à vous. On continue à fortifier la ligne.
20 Q. Merci. Quand est-ce que le général Praljak a quitté Sunja, si vous
21 connaissez la date de son départ ou à peu près ?
22 R. Je ne connais pas la date exacte, mais je crois que c'était en avril
23 1992.
24 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges, nous en avons
25 fini de nos questions. Je demanderais simplement que ce document dont la
26 cote est 3D3699, c'est-à-dire la déclaration préalable de M. Arbutina, soit
27 versé au dossier.
28 Je ne sais pas si le général Praljak aurait quelque chose à ajouter.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, regardez-moi.
2 J'ai toute une série de questions de suivi à vous poser. J'en reviens
3 aux civils.
4 Sunja fait partie d'une municipalité et, si j'ai bien compris, cette
5 petite localité avait grosso modo 1 300 et quelques habitants au
6 recensement de 2001. On peut penser qu'en 1991 et 1992, il y avait au
7 minimum 1 000 habitants. Le recensement de 2001 fait ressortir grosso modo
8 17 % de Serbes. Dix ans avant, si on prend comme base une population de 1
9 000 habitants, il y avait au moins 100 Serbes, c'est-à-dire peut-être 40 à
10 45 familles, voilà, quelques chiffres pour s'y repérer.
11 Vous nous avez dit qu'il y avait une rue face à la gare, et là, vous avez
12 décidé de faire partir les Croates et les Serbes, peut-être pour des
13 raisons liées au conflit, mais vous êtes resté très discret sur le sort des
14 Serbes. Alors, les Serbes qui habitaient dans cette rue, pourquoi vous les
15 avez fait partir ? Quand je dis vous, ce n'est pas vous spécialement, mais
16 disons les Croates sur un plan général, pourquoi les avoir fait quitter
17 leurs maisons ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, personne ne les a
19 convaincus ni contraints à partir. Vous venez de dire que cet endroit était
20 un petit bourg. Sunja, avant la guerre, faisait partie de la municipalité
21 de Sisak. Nous étions une communauté locale. Je vais essayer de vous faire
22 comprendre les choses plus clairement. Cette partie de Sunja qui part de la
23 voie ferrée et qui va jusqu'à la Sava, cette partie était habitée à 90 %
24 par des Croates; Sunja, Bobovac, Gornja, Donja, Letina, Krivaj, c'était les
25 lieux-dits jusqu'à la Sava. De l'autre côté de la voie ferrée, la majorité
26 de la population était serbe. C'est comme ça qu'on parlait. Il y avait
27 Citvertkovac [phon], Drljaca, Donji Leskovac [phon], Paukova [phon], Mala,
28 Velika Gradusa, toutes ces localités faisaient partie de la communauté
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1 locale de Sunja, mais tous ces lieux-dits étaient habités par des Serbes.
2 Dans ma déclaration préliminaire, j'ai dit que c'était seulement cette
3 partie de Sunja qui part de la voie ferrée et qui s'arrête à la Sava, où se
4 trouvait la rue, à l'époque existait l'Alliance socialiste, et le siège de
5 l'Alliance socialiste était dans des rues qui se trouvaient dans cette
6 partie de Sunja, dans la région qui va de Sunja à Dubica sur la route. Mais
7 quand on prend la route qui va vers Novska, ça, c'était une partie de la
8 route où nous ne pouvions plus nous engager. Nous étions à la limite entre
9 la rue Milos Podric et la rue de Vladimir Nazer, qui mène à la voie ferrée
10 menant à Sisak. Nous étions dans une zone où se trouvait le siège de la
11 société Vajda, tout près de la voie ferrée, donc à 50 à 60 mètres à peine
12 de la gare ferroviaire, mais nous ne pouvions pas entrer dans cette société
13 Vajda, à cause d'eux. C'est dans ce quartier que se trouvait ce qu'on
14 appelait la première ligne.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous arrête parce que vous ne répondez pas à ma
16 question. Je veux savoir ce que les Serbes civils sont devenus, est-ce
17 qu'ils sont partis d'eux-mêmes ou bien vous les avez forcés à partir ? Quel
18 a été leur sort ? C'est ça qui m'importe.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, personne ne les a
20 forcés. Si vous me permettez de finir, ils sont partis de leur propre
21 initiative. Nous n'avons même pas su à quel moment ils sont partis.
22 Simplement le 27, ils n'étaient plus là, et ceux qui sont restés sont
23 restés.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, le 27 de quel mois ? Vous dites le 27, ils
25 n'étaient plus là. De quel mois ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 27 juillet 1991. Si vous me permettez,
27 quelques mots encore.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce que mon temps est précieux.
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1 Le 27 juillet 1991, ils étaient partis tous ou bien il y en a
2 quelques-uns qui sont restés là ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma déclaration préliminaire, j'ai dit
4 qu'il en était resté. Ceux qui sont restés n'ont pas subi de représailles.
5 Ceux qui sont partis sont partis de leur propre chef, dans les parties de
6 Croatie où ils avaient de la famille, et les jeunes sont entrés dans
7 l'armée.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Combien de Serbes sont restés à Sunja, combien ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurai pas vous dire quel était leur
10 nombre, mais dans l'armée croate, il y en avait plus de dix, et nous avions
11 trois Musulmans aussi dans l'armée croate, qui étaient des habitants de
12 Sunja.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous nous dites qu'il y a des Serbes qui sont
14 entrés dans l'armée croate ainsi que des Musulmans, mais moi, ce que je
15 veux savoir, c'est combien de civils serbes sont restés dans leurs maisons
16 à Sunja, un, 10, 50, combien ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il en est resté une dizaine seulement.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez dit que le général Praljak vous avait
19 demandé de vous occuper de la logistique. Est-ce que ces Serbes qui étaient
20 là ont eu à manger, ont eu de l'alimentation comme les autres ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont tous eu la même chose à manger que les
22 Croates, pas seulement les habitants serbes au début, mais aussi les
23 Croates.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai cru comprendre qu'à Sunja, il a dû y avoir des
25 combats, oui ou non ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il y a eu d'importants
27 combats tout à fait au début, ils n'ont jamais réussi à enfoncer nos
28 premières lignes, mais ils nous ont pilonnés horriblement.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que dans la population de Sunja, à cause du
2 pilonnage, il y a eu des tués et des blessés ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, deux femmes -- trois femmes ont été
4 tuées suite au pilonnage ainsi qu'un homme, mais je parle uniquement des
5 civils.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Les forces de Sunja dirigées par le général Praljak,
7 est-ce que vous avez capturé des ennemis, oui ou
8 non ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Tant que c'est le général Praljak qui exerçait
10 le commandement, nous n'avons pas capturé de prisonniers, mais tout à fait
11 au début nous en avons capturés deux, au moment où M. Praljak n'était pas
12 encore au commandement, c'était Zarko Pesa qui commandait, et
13 personnellement j'ai discuté avec lui d'un échange entre l'un des nôtres
14 qui avait été fait prisonnier et un des leurs qui avait été arrêté sur la
15 route.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Une des dernières questions. A votre souvenir, le
17 général Praljak a exercé le commandement pendant combien de temps, et quand
18 a-t-il quitté son commandement à Sunja ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai dit dans ma déclaration préalable, en
20 septembre 1991. Je ne sais pas exactement quel jour il a pris le
21 commandement. Et au mois d'avril, il a quitté Sunja, c'est dans cette
22 période qu'il a exercé le commandement pour la défense.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question. Vous nous avez dit tout à l'heure
24 que tous les matins le général Praljak faisait lever le drapeau et
25 quelqu'un jouait de la trompette. Je présume que c'était l'hymne national
26 croate qui était joué. Le général Praljak tenait un briefing d'une durée de
27 30 minutes, vous nous avez dit, et il interrogeait tout le monde pour
28 savoir ce qui se passait. Ce tableau que vous nous avez fait, est-ce que
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1 pendant les six mois où le général Praljak est resté, tous les jours il
2 faisait comme cela, c'est-à-dire lever le drapeau, briefing ? Est-ce que ça
3 se passait comme ça tous les jours ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Tous les jours pendant qu'il a exercé le
5 commandement. D'ailleurs, quand il a cessé d'être le commandant à Sunja la
6 même chose s'est poursuivie, enfin je n'appellerais pas ça une "tradition,"
7 mais tout de même c'était sur le plan militaire --
8 M. LE JUGE ANTONETTI : -- hommes, les forces à Sunja, vous étiez combien,
9 100, 200, ou 300, combien étiez-vous ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire que durant les quelques
11 premiers mois, les effectifs présents à Sunja, en tout cas pas seulement à
12 Sunja mais enfin ceux d'entre nous qui étions restés à Sunja, étaient,
13 selon le moment exact, le nombre de 1 500 à 2 000 soldats, quelquefois 2
14 500. Et il y en avait aussi d'autres régiments dans des unités spéciales,
15 et cetera.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : De 1 500 à 2 000, ce qui est un chiffre important.
17 Dans toute armée il y a toujours des brebis galeuses. Il y a des soldats
18 qui se mettent à boire, à se battre, qui volent, est-ce qu'il y a eu à
19 votre connaissance des poursuites disciplinaires contre ces soldats, et
20 est-ce qu'à votre connaissance le général Praljak s'était montré inflexible
21 à l'égard des soldats qui manquaient à la règle de la discipline, ou bien
22 c'était le chaos général ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous venez d'évoquer un
24 certain nombre de choses -- oui, il est arrivé de temps à autre qu'il se
25 trouve un homme qui boive un peu plus que normal, mais ce que je veux dire
26 c'est que la discipline était à un niveau très élevé. De façon générale, il
27 n'y a absolument pas eu de chaos, car vraiment nous étions à ce moment-là
28 tous ensemble. On ne faisait pas attention à l'appartenance ethnique, on
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1 était tous ensemble pour conserver nos foyers.
2 Et si vous me le permettez, je vais vous dire, Monsieur le Président,
3 car je tiens à le signaler, qu'à Sunja nous parlions de petit déjeuner,
4 déjeuner et dîner, chaque fois que nous apportions à manger aux soldats, il
5 y avait des pilonnages, de façon permanente, jusqu'à l'arrivée de la
6 FORPRONU au mois d'avril, et les pilonnages ont un peu baissé. Mais sinon,
7 dans la période antérieure il y avait au quotidien 100, 200 et même 300
8 obus qui tombaient sur Sunja. Juste avant l'arrivée de la FORPRONU, 40 000
9 obus au total étaient tombés sur Sunja.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous avez participé en présence du
11 général Praljak à des briefings pour la mise en œuvre de la défense de la
12 localité, et est-ce que vous vous rappelez de ce que le général Praljak
13 avait pu donner comme instruction aux soldats ? Vous avez été lieutenant à
14 la JNA. Donc, ce que je veux vous
15 demander : est-ce que les forces de Sunja étaient commandées par quelqu'un
16 qui s'y connaissait ou bien le général Praljak donnait-il l'impression
17 d'être un amateur ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] A chaque briefing quotidien pendant la période
19 où le général Praljak a exercé le commandement, mais aussi sous les autres
20 commandants, j'étais présent et j'avais le rang de commandant de l'armée
21 croate, dont la mission était d'assister le commandant dans les questions
22 de logistique. Tous les jours, j'avais des contacts et je collaborais avec
23 le général Praljak car les briefings se déroulaient le matin. Après quoi,
24 mon obligation était après d'avoir assisté à ces réunions, de me rendre sur
25 la première base de logistique qui se trouvait à Sisak, après quoi elle
26 s'est étendue jusqu'à Zagreb. Je devais circuler pas mal pour assurer
27 l'approvisionnement en biens, en armes, et en toutes sortes d'articles.
28 Et j'ajouterais qu'au début nous n'étions absolument pas armés, en
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1 tout cas pas beaucoup, quelques rares armes avaient été achetées mais c'est
2 tout. Tout à fait au début il y avait là des chasseurs armés de leur fusil
3 de chasse, j'en ai parlé d'ailleurs. J'ai dit qu'au début c'était comme
4 cela quand j'ai répondu aux questions de Mme l'avocate, jusqu'au moment où
5 sont arrivés les réservistes de la police de Zagreb et les membres de la 2e
6 Compagnie des Gardes qui nous ont beaucoup aidés car ils étaient bien
7 armés. Cela a réduit assez rapidement, dès le début la peur que chacun
8 ressentait parce que tout à fait au début, nous avons sécurisé tous les
9 chemins, tous les sentiers contre l'arrivée impromptue de chars que nous
10 craignions.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question. Mais vous imaginez, je peux
12 continuer pendant des heures à vous poser des questions. Mais juste ma
13 dernière question.
14 Vous nous avez dit que vous étiez adjoint du commandant chargé de la
15 logistique. Dans votre souvenir, est-ce que le général Praljak signait des
16 ordres militaires ou bien il ne signait pas grand-chose et il avait délégué
17 la signature à ses assistants ? Ou bien il voulait tout regarder, tout lire
18 et tout signer ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si j'ai bien compris
20 votre question, j'y répondrai en disant qu'il n'y avait pas d'ordres
21 écrits, car nous nous entendions sur tout aux réunions d'information du
22 matin. Et tout à fait au début, comme je l'ai déjà dit, là, je parle de moi
23 personnellement, en tant que responsable de la logistique j'avais besoin
24 parfois de signatures de sa part, mais j'ai dit que j'avais discuté avec
25 lui et qu'il a interrompu cette pratique, qu'il ma chargé de cette
26 responsabilité et que c'est moi qui m'en occupais. La seule chose c'est que
27 chaque fois, je lui disais oralement ce que j'avais fait, je lui parlais
28 des problèmes éventuels que j'avais pu avoir. Parfois, je lui demandais son
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1 aide, si j'avais un problème particulier, mais rien d'autre.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je croyais que le général Praljak voulait vous
3 poser des questions.
4 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Interrogatoire principal par M. Praljak :
6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Arbutina.
7 R. Bonjour, Monsieur le Général.
8 Q. Je vous appelais, n'est-ce pas, Monsieur en français Arbutina ?
9 R. Oui.
10 Q. Puisque vous êtes né en France. Alors, dites-moi, y avait-il une
11 vieille famille serbe musulmane ou croate à Sunja qui serait restée sans
12 vivres, qui aurait eu faim et que vous n'auriez pas aidée à quelque moment
13 que ce soit ?
14 R. Non.
15 Q. C'était l'hiver. Qu'est-ce qui se passait du point de vue du carburant
16 ? Est-il exact que toutes les familles avec des personnes âgées recevaient
17 du carburant sans problème ? Est-ce que vous avez reçu l'ordre d'agir ainsi
18 dans ce sens ?
19 R. Oui. Et d'ailleurs, je me suis particulièrement occupé de cela, en
20 particulier lorsqu'il y avait des personnes âgées ou des personnes sans
21 ressources. Nous assurions leur approvisionnement en carburant et autres.
22 Q. Est-ce qu'une seule maison a été incendiée à Sunja durant ma présence à
23 Sunja ?
24 R. Non.
25 Q. Y a-t-il eu une seule maison dans laquelle on serait entrée par
26 infraction et qui aurait été cambriolée ou pillée pendant la durée de mon
27 séjour à Sunja ?
28 R. Non.
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1 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci bien, Monsieur Arbutina d'être
2 venu ici. Je n'ai plus de questions à vous poser.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais interroger les avocats des autres Défenses.
4 Maître Nozica, Maître Khan, des questions à poser ?
5 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour
6 Messieurs les Juges. Merci. Nous n'avons pas de questions à poser à ce
7 témoin.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : J'avais oublié Maître Karnavas qui n'est pas là,
9 mais la Défense de M. Prlic, vous avez des questions, Maître ?
10 Mme TOMANOVIC : [interprétation] La Défense de M. Prlic n'a pas de
11 questions à poser à ce témoin. Je vous remercie.
12 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense du
13 général Petkovic n'a pas de questions non plus pour ce témoin.
14 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] La Défense de M. Coric n'a pas de
15 questions à poser à ce témoin.
16 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pas de questions non plus, Monsieur le
17 Président. Je vous remercie.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, vous n'aviez pas de questions
19 ou vous en aviez ?
20 M. LONGONE : [interprétation] Pas de questions à poser, Monsieur le
21 Juge.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Arbutina, votre audition vient de se
23 terminer, puisque l'essentiel des questions vous ont été posées par la
24 Défense, et puis je vous ai posé quelques questions ainsi que le Général
25 Praljak. Les autres parties et le Procureur ont estimé qu'il n'y avait lieu
26 à vous poser des questions.
27 Donc je vous remercie d'être venu à la demande de la Défense du Général
28 Praljak apporter votre concours. Et je vous souhaite un bon retour dans
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1 votre pays, et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous
2 raccompagner.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci bien.
4 Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin est déjà
5 présent dans le bâtiment, pour que vous le sachiez simplement.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ce que nous allons faire, on va faire la
7 pause; comme ça, on reprendra avec le nouveau témoin après cette pause.
8 Donc on fait une pause de 20 minutes.
9 [Le témoin se retire]
10 --- L'audience est suspendue à 15 heures 18.
11 --- L'audience est reprise à 15 heures 42.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour le témoin Miroslav Crnkovic, j'ai
13 cru comprendre, Maître Kovacic, que vous allez utiliser une heure. C'est
14 bien cela ?
15 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous avons
16 gagné un peu de temps sur l'audition du premier témoin, c'est ma consoeur,
17 Me Pinter, qui va interroger M. Crnkovic. Il est possible que cela dure un
18 peu plus d'une heure. Nous verrons, nous ne savons pas exactement, mais
19 selon le plan, nous nous efforcerons d'en terminer dans les délais.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va introduire le témoin.
21 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur.
23 J'espère que la traduction fonctionne.
24 Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de naissance ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Miroslav Crnkovic, et je suis né le 24
26 novembre 1969, à Hrvatska Kostajnica.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession actuelle, Monsieur ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis à la retraite. J'étais officier de
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1 l'armée de Croatie.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes bien jeune pour être à la retraite, mais
3 c'est toujours possible. Vous avez terminé avec quel grade dans l'armée
4 croate ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais commandant.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce que, Monsieur, vous avez déjà témoigné
7 devant un tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie
8 ou bien c'est la première fois que vous témoigné ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 LE TÉMOIN : MIROSLAV CRNKOVIC [Assermenté]
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je vais vous donner quelques explications sur
18 la façon dont va se dérouler cette audience.
19 C'est Me Pinter qui va vous poser des questions. Elle a dû vous expliquer
20 qu'elle va vous poser des questions. Vous allez donc devoir répondre à ses
21 questions. A l'issue de cette phase, il se peut que les autres avocats des
22 autres accusés vous posent également des questions. Il se peut également
23 que le Procureur qui se trouve à votre droite, dans le cadre du contre-
24 interrogatoire, vous pose également des questions. Et il se peut, mais
25 quasiment sûr, que les Juges vous poseront également des questions.
26 Alors, essayez d'être très précis dans les réponses, parce que le temps de
27 tout le monde est compté, et en tant qu'ancien officier de l'armée croate,
28 vous savez ce que cela veut dire. Soyez précis dans vos réponses. Répondez
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1 exactement à la question.
2 Si vous ne comprenez pas une question, et ça peut arriver, n'hésitez pas à
3 dire à celui qui vous pose la question de la reformuler.
4 Nous faisons des pauses toutes les heures et demie, donc la prochaine pause
5 interviendra dans une heure et 25 minutes. Mais si jamais pour une raison
6 ou pour une autre, vous ne vous sentez pas bien, levez la main et dites
7 qu'il faut qu'on arrête pour vous permettre de vous reposer ou faire venir
8 le médecin en cas de nécessité. On ne sait jamais.
9 Voilà ce que je voulais vous dire pour que votre témoignage se déroule pour
10 vous le mieux possible, parce que dans une existence, c'est une épreuve,
11 dont vous vous souviendrez toute votre vie, certainement. Donc, autant que
12 ça se passe dans les meilleures conditions.
13 Sur ce, je vais donner la parole à Me Pinter qui va vous poser des
14 questions.
15 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Interrogatoire principal par Mme Pinter :
17 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Crnkovic.
18 R. Bonjour.
19 Q. Vous avez reçu des consignes du Président de la Chambre. Et pour ma
20 part, la seule chose que je vais vous dire, pour peu que cela ne vous ait
21 pas été dit avant le début de votre audition, c'est qu'il importe que vous
22 ne parliez pas trop vite et que vous attendiez que j'aie terminé de poser
23 ma question avant de commencer à répondre. Je dois, pour ma part, respecter
24 la même règle, car il est préférable que nos voix ne se chevauchent pas.
25 Normalement vous devriez avoir devant vous les documents 3D03758, qui ont
26 normalement été remis également aux Juges de la Chambre ainsi qu'à nos
27 collègues de l'Accusation. J'aimerais savoir si vous avez lu ce dossier ?
28 R. Oui.
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1 Q. Y a-t-il quelque chose dans cette déclaration préalable de votre part
2 qui ne correspond pas à ce que vous auriez dit ou qui aurait été consigné
3 de façon erronée par écrit ou mal enregistré ?
4 R. Non.
5 Q. Merci. Eu égard aux commentaires formulés par M. le Juge Antonetti, qui
6 a semblé surpris de votre jeune âge et de votre retraite à un âge aussi
7 jeune, pourriez-vous dire à la Chambre pourquoi vous êtes déjà à la
8 retraite ?
9 R. En raison des circonstances. J'ai été grièvement blessé pendant la
10 guerre.
11 Q. Donc vous êtes à la retraite en raison d'une invalidité ?
12 R. Oui.
13 Q. Merci. Vous avez également communiqué à M. le Juge Antonetti, Président
14 de la Chambre, des éléments personnels vous concernant, et pour que l'on
15 comprenne bien pourquoi nous conversons comme nous le faisons, j'aimerais
16 que vous nous parliez de votre carrière militaire ou plus précisément que
17 vous nous disiez où vous vous êtes trouvé pendant la guerre, et au sein de
18 quelle unité. Je parle de la guerre qui a duré entre 1991 et 1993.
19 R. Au mois de mars 1991 et jusqu'au mois de juin 1991, j'étais membre de
20 la police spéciale de l'armée croate. Entre le mois de juin 1991 et le
21 moment où j'ai été blessé et mis à la retraite, j'étais membre de la 2e
22 Brigade des Gardes.
23 Q. Quand avez-vous été blessé ?
24 R. J'ai été blessé le 7 juillet 1992.
25 Q. Nous en parlerons un peu plus tard de cette blessure. Mais pourriez-
26 vous nous dire dans quel secteur vous vous êtes trouvé en tant que membre
27 de l'armée croate ?
28 R. Je me suis trouvé principalement dans des lieux qui entouraient mon
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1 lieu de résidence, qui est Banovina. Donc je me suis trouvé plus
2 précisément dans les villes de Glina, de Kozibrod, pas Kosovo, Kozibrod, de
3 Sunja, de Komarevo, puis j'ai passé une dizaine de jours à Mostar, et
4 quatre à cinq jours dans la Posavina, juste avant d'être blessé.
5 Q. Je vous remercie. Commençons par Sunja. Cela dit, vous venez d'indiquer
6 que vous avez fait la guerre dans la Banovina. Qu'est-ce que c'est la
7 Banovina ?
8 R. La Banovina est un secteur qui se trouve autour de Sisak, Hrvatska
9 Kostajnica, Glina, Sunja, donc dans ce secteur-là.
10 Q. Quand êtes-vous arrivé à Sunja ?
11 R. Je suis arrivé à Sunja, le 31 août 1991.
12 Q. Pourriez-vous nous dire comment était organisé le front quand vous êtes
13 arrivé à Sunja ?
14 R. Le front n'existait pas en tant que tel, c'est très simple.
15 Q. Qu'avez-vous trouvé sur place ?
16 R. Nous avons trouvé des maisons, dont certaines fenêtres étaient
17 protégées par des sacs de sable, c'était censé constituer une espèce de
18 ligne de front. Mais dans la réalité, les choses ne fonctionnaient pas
19 ainsi.
20 Q. Vous dites "quand nous sommes arrivés sur place", de qui s'agit-il, de
21 quelle unité, était-ce une brigade ou quoi ?
22 R. C'était ma compagnie, de la Brigade des Gardes.
23 Q. Qui comptait combien d'hommes ?
24 R. Quarante-sept.
25 Q. Merci. Ce front, comme vous dites que vous avez trouvé sur place, est-
26 il resté identique pendant tout le temps que vous avez passé à Sunja ?
27 R. Non, bien sûr que non. Après il y a eu élargissement avec création
28 d'une première, deuxième, troisième ligne de front et beaucoup de choses
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1 ont changé.
2 Q. Quand ?
3 R. Tout a changé après l'arrivée du général Praljak.
4 Q. Pouvez-vous nous décrire la situation exacte et les modifications
5 concrètes du front ? Est-ce qu'il y a eu renforcement de certaines
6 positions, des tranchées qui ont été creusées, la construction de bunkers ?
7 Ne parlez pas trop vite, je vous prie.
8 R. Quand le général Praljak est arrivé là-bas, il a vu quelle était la
9 situation, et il a immédiatement pris les mesures nécessaires pour
10 renforcer les lignes. Il s'est occupé de la défense civile, et il a fait
11 appel aux membres de la défense civile et aux gens qui à ce moment-là
12 n'avaient pas encore d'armes, qu'il a transformés en auxiliaires de la
13 défense dans des sections responsables d'approvisionner la ligne de front
14 avec des sacs de sable, des bûches de bois utilisées pour construire des
15 bunkers et ce genre de choses. Tout le monde était engagé dans la
16 résistance. Je faisais partie de ceux qui n'ont pas beaucoup apprécié tout
17 cela parce que nous étions très fatigués à ce moment-là. Pour sa part, il a
18 commencé tout seul, c'était tout simple, quand il a vu que nous n'étions
19 pas prêts à l'accompagner dans ses efforts.
20 Quelques jours après la création du premier bunker un peu à l'arrière
21 de la gare ferroviaire où nous étions installés, il y a eu une attaque qui
22 a provoqué l'incendie de toute la gare ferroviaire et sa destruction. Nous
23 pouvons dire tout simplement qu'à ce moment-là le bunker qui avait été
24 construit nous a sauvé la vie. C'est dans ces conditions qu'a été créée la
25 deuxième, la troisième, la quatrième ligne de front, et tous les soldats
26 qui se trouvaient dans les villages dont j'ai parlé étaient organisés au
27 plus haut niveau. On savait exactement qui devait faire quoi, qui était
28 chargé de quoi, et à ce moment-là les choses fonctionnaient très bien.
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1 Q. Aujourd'hui, malgré le temps passé, pouvez-vous vous rappeler le nombre
2 de bunkers qui ont été construits, à peu près en tout cas ?
3 R. Je crois qu'il y en a eu plus de 200, des tranchées, des bunkers.
4 Q. Je vous remercie. Vous avez parlé des sections de travail. Est-ce que
5 vous pouvez nous dire si ces sections de travail allaient creuser des
6 tranchées et construire des bunkers, et lorsqu'elles le faisaient, est-ce
7 qu'elles étaient en sécurité d'une façon ou d'une autre ? Est-ce qu'il y
8 avait des gens qui accompagnaient ces personnes et qui s'occupait d'elles ?
9 R. C'était nous qui nous occupions de ces personnes et qui assurions leur
10 sécurité, autrement dit, quand je dis "nous," ce sont les hommes qui
11 étaient en première ligne de front. Nous veillions à les informer chaque
12 fois qu'il y avait un risque d'attaque contre eux en particulier. Nous
13 avons assuré leur sécurité dans la mesure du possible durant une guerre. En
14 tout cas, je n'ai pas le souvenir d'un seul civil qui aurait trouvé la mort
15 alors qu'il creusait une tranchée ou construisait un bunker.
16 Q. Quand vous parlez de "civils," vous parlez de jeunes gens, d'hommes
17 d'âge moyen ou d'hommes âgés ?
18 R. Des hommes d'âge moyen qui à ce moment-là étaient répartis dans des
19 unités militaires parce que les effectifs étaient insuffisants et qu'il n'y
20 avait pas d'armes en nombre suffisant.
21 Q. Vous avez parcouru pas mal de champs de bataille. J'aimerais que vous
22 nous disiez aussi quel était l'état de la discipline à Sunja ? Quel était
23 le sens du mot discipline à Sunja dans cette période ? Je vous prierais de
24 nous donner quelques exemples de la discipline appliquée aux soldats, de la
25 discipline dont faisaient preuve les soldats par rapport aux civils
26 également ?
27 R. Il n'y avait pas de discipline avant l'arrivée du général Praljak. Il
28 s'est opposé à toute tentative d'écart. Il n'autorisait personne à
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1 s'écarter de la ligne la plus stricte de ce qu'exigeait l'armée. Il ne
2 tolérait en aucun cas que quiconque mette le feu à une maison ou s'empare
3 de la propriété d'autrui, notamment dans les maisons abandonnées.
4 Malheureusement, il y avait pas mal de maisons abandonnées, et il importait
5 pour lui que chacun sache exactement qui était le chef. Il intervenait
6 lorsqu'il y avait des rixes entre des hommes car cela est arrivé, pour les
7 interrompre. Je peux vous donner quelques exemples. Je pourrais parler de
8 mes hommes qui ont enlevé trois couteaux, cinq cuillères et quelques
9 assiettes d'une maison dans laquelle ils étaient entrés, ainsi qu'un petit
10 téléviseur noir et blanc. Et l'un des membres de mon unité --
11 Q. Ne prononcez pas de nom, sinon il faudrait passer à huis clos partiel.
12 R. Un des membres de mon unité avait perdu son domicile parce que sa
13 maison avait été incendiée par l'ennemi. Son épouse l'avait appelé et lui
14 avait dit qu'il n'y avait plus rien dans l'appartement où elle avait
15 emménagée à Sisak et trois ou quatre soldats ont été pris en faute sur un
16 bateau alors qu'ils traversaient la rivière pour aller à Sisak, et on les a
17 renvoyés à Sunja.
18 Q. Qui les a attrapés ?
19 R. Un membre de la police.
20 Q. Est-ce que c'était des policiers civils ?
21 R. Oui, parce que la police militaire n'existait pas à l'époque.
22 Q. Bien. Veuillez poursuivre.
23 R. A ce moment-là, l'un de mes amis qui revenait du QG m'a dit que puisque
24 j'étais en première ligne sur le front, le général Praljak les avait
25 désarmés, leur avait enlevé leurs insignes et leurs emblèmes et les avait
26 fait se mettre en rang devant la caserne des pompiers de Sunja. C'était un
27 endroit qui servait de QG à la Garde patriotique d'une certaine façon, et à
28 ce moment-là je suis monté dans ma voiture, je suis allé sur place, je lui
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1 ai demandé ce qui était en train de se passer. Il m'a dit que c'était très
2 simple, que je devais emmener ces hommes à Sisak à la prison et les y
3 enfermer, parce qu'en fait il n'y avait pas de vraies prisons à Sunja, donc
4 il fallait que je trouve une maison. C'était une petite maison qui avait
5 été transformée en prison sur la première ligne de front, mais personne
6 n'assurait sa sécurité. J'ai appliqué cet ordre et j'ai conduit ces hommes
7 au centre de détention en question et ils ont été pris en charge par la
8 police sur place. Trois ans plus tard, le tribunal militaire de Zagreb a
9 jugé cette affaire et j'ai été témoin à ce procès.
10 Q. Ces trois soldats faisant partie de votre unité, est-ce qu'ils ont eu
11 une aide juridique ?
12 R. Oui, et moi je suis allé parler au commandant. Il s'est occupé de toute
13 l'affaire puisqu'il est allé voir un de ses amis à Zagreb qui est allé à
14 Sisak au centre de détention pour résoudre le problème.
15 Q. Qui est ce "il ?"
16 R. Le "il" c'est le général Praljak.
17 Q. Je vous remercie. J'ai un renseignement à vous donner. J'aimerais vous
18 demander si vous avez des informations à ce sujet. Est-ce qu'il y a eu des
19 exécutions, des semblants d'exécution qui ont été organisés à un certain
20 moment ?
21 R. Il a dit qu'il les ferait exécuter, mais à ce moment-là quand s'est
22 passé ce que j'ai déjà décrit devant la caserne des pompiers, un grand
23 nombre de personnes du coin se sont rassemblées. C'était des gens qui
24 faisaient partie des unités de Sunja et qui étaient, entre autres, membres
25 des forces de police, et tout le monde a entendu dire que si des situations
26 du même genre devaient se renouveler à Sunja, la même chose se passerait.
27 En fait, il n'y a plus eu de situations de ce genre.
28 Q. Vous avez dit que c'était la police civile qui avait arrêté les soldats
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1 sur les bateaux alors qu'ils traversaient la rivière et avaient découvert
2 sur eux un certain nombre d'objets volés. Est-ce que vous savez quand la
3 police militaire est arrivée ?
4 R. La police militaire est arrivée à la fin du mois d'octobre ou au début
5 du mois de novembre. C'est M. Praljak qui l'a fait venir. C'était des gens
6 qui venaient de l'extérieur, des gens que nous ne connaissions pas parce
7 que lui savait bien, en tout cas il pensait que si c'était des gens de la
8 région qui constituait la police militaire, autrement dit des voisins, il
9 serait plus difficile de régler des situations de ce genre qu'à l'aide de
10 gens venus de l'extérieur.
11 Q. Vous avez été vous-même témoin de réaction de la part du général
12 Praljak en cas de vols, pillages de maisons, ou chose de ce genre en dehors
13 du cas que vous venez de citer ?
14 R. J'ai été témoin d'une situation dans laquelle deux des hommes qui
15 transportaient à bord d'un ferry les gens d'un côté à l'autre de la
16 rivière, de Sisak et de Zagreb vers Sunja, avaient sur eux des armes, et
17 ils ont refusé d'appliquer un ordre très important.
18 Q. Pouvez-vous nous dire de quel ordre il s'agissait, et nous décrire
19 exactement la situation ?
20 R. Dans cette période, on discutait de la possibilité de lancer une action
21 importante pour rejoindre les unités de Komarevo-Kozibrod -- Sunja et
22 Dubica, entre autres. Et l'ordre relatif à cette opération ne pouvait venir
23 que de Zagreb et par écrit, il fallait qu'ils soient transportés à bord du
24 ferry qui traversait la rivière. Puisque le général Praljak insistait pour
25 que le ferry reste pendant la nuit sur la rive du côté de Sunja pour éviter
26 que qui que ce soit soit blessé, ils n'ont pas écouté les gens qui
27 appelaient de l'autre côté de la rivière. Mais comme la personne qui avait
28 sur elle l'ordre écrit a téléphoné au commandement de Sunja pour dire que
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1 les responsables du ferry refusaient le passage, le général a donné l'ordre
2 --
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour apprécier la portée de vos
4 réponses, il y a quelque chose qui manque, parce que vous me donnez
5 l'impression de quelqu'un de cultivé et d'instruit, et je ne sais
6 absolument pas avant d'être dans l'armée croate est-ce que vous aviez fait
7 des études ou pas. Vous pouvez me dire si vous aviez fait des études, et si
8 oui, lesquelles ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai terminé mon éducation secondaire.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et vous avez indiqué qu'avant d'arriver dans
11 la 2e Brigade des Gardes vous étiez dans la police spéciale de l'armée
12 croate. C'est quoi la police spéciale ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une appellation spéciale, mais c'est une
14 police qui à ce moment accomplissait des tâches tout à fait normales,
15 gardait les locaux du Tribunal de Sisak. Certains points de passage
16 importants, il n'y avait aucune opération de nature militaire dans cette
17 zone.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends mieux.
19 Madame Pinter.
20 Mme PINTER : [interprétation]
21 Q. Vous vous êtes arrêté à ce moment où les deux employés sont emmenés au
22 commandement, pouvez-vous continuer ?
23 R. Oui. Alors, bien entendu, dans tout ce désordre ils se sont disputés
24 tous les deux.
25 Q. Qui sont ces deux hommes ?
26 R. Excusez-moi. Le général Praljak est l'un de ces deux hommes qui a
27 commencé à crier, à se disputer avec le général Praljak, ils en sont
28 quasiment venus aux mains. Et --
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1 Q. Pouvez-vous décrire de quoi il s'est agi ?
2 R. Dans la terminologie qu'on utilise, le vocabulaire qu'on emploie il
3 s'agit tout simplement de mettre des coups de pied au derrière de
4 quelqu'un.
5 Q. Avez-vous discuté de la raison pour laquelle le général a réagi de
6 cette manière ?
7 R. Bien sûr que je le savais. Si une action devait démarrer et que nous
8 n'avions pas reçu nos ordres, vous pouvez imaginer ce qui se serait passé.
9 Les deux unités qui se seraient mises en route ce seraient retrouvées
10 prises en embuscade et il y aurait eu un véritable massacre.
11 Mme PINTER : [interprétation] Je voudrais qu'on apporte une correction au
12 compte rendu à la page 36, ligne 24. Je ne vais pas parler à votre place,
13 je vais simplement vous donner lecture de la façon dont cela a été consigné
14 au compte rendu.
15 Q. Il a été indiqué qu'au compte rendu que beaucoup de coups au derrière
16 ont été assénés. Alors est-ce qu'il y a eu beaucoup de coups ou y en a-t-il
17 eu plusieurs autrement dit ?
18 R. Oui, on peut dire qu'il en a eu plusieurs.
19 Q. Alors vous avez parlé de la police militaire. Est-ce que vous avez
20 quelques éléments que ce soit en ce qui concerne le rapport du général
21 Praljak avec les membres de la police militaire dans les situations où ces
22 dernières auraient pu se comporter de façon non conforme au règlement en
23 vigueur ?
24 R. Oui, les membres de la police militaire, après un certain temps, ont
25 commencé à prendre à leur charge de plus en plus de prérogatives à régler
26 leur compte avec des soldats, et des situations dangereuses se sont
27 présentées où il y avait un risque d'assister à des tirs. Cependant, le
28 général Praljak a renvoyé ce groupe de polices militaires à Zagreb ou à
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1 Sisak, je ne sais plus d'où ils étaient, il a mis en place une nouvelle
2 section de la police militaire formée de gens du cru.
3 Q. Et dans ce cas-là il n'y a pas eu de problème particulier du fait qu'il
4 s'agissait de locaux ?
5 R. Non, il n'y a plus eu aucun problème qu'il s'agisse de refus d'exécuter
6 les ordres ni d'aucune autre sorte de problème.
7 Q. Très bien. Nous y reviendrons. Je voudrais encore vous demander de dire
8 ou d'énumérer plutôt tout ce qui vous avait été interdit par le général
9 Praljak quand vous étiez à Sunja, ou bien l'avez-vous déjà dit ?
10 R. Il était interdit de porter atteinte aux biens de qui que ce soit où
11 que les maisons étaient vides, en effet. Il était interdit d'ouvrir le feu
12 si on n'avait pas été visé préalablement et si on n'avait pas essuyé des
13 tirs. Il était strictement interdit de procéder à quelque incendie
14 volontaire que ce soit, et il n'y a pas eu en effet d'incendie volontaire.
15 Toutes les mesures de prudence et de précaution ont été prises.
16 Q. Mais alors quelle était la sanction prévue si un homme se livrait à des
17 tirs et de façon non autorisée ?
18 R. Les sanctions dépendaient des unités et des personnes concernées. Il
19 pouvait s'agir de travaux.
20 Q. Qu'est-ce que cela signifiait d'être sanctionné par des travaux ?
21 R. On pouvait être envoyé pour participer à des travaux de renforcement de
22 la ligne de front pour construire un bunker.
23 Q. Est-ce qu'il fallait parcourir à pied une certaine distance pour cela ?
24 R. Oui, malheureusement, il fallait s'y rendre à pied.
25 Q. Pouvez-vous décrire cela ?
26 R. Il s'agissait juste d'une forme d'exercice pour que les hommes ne se
27 relâchent pas. A l'époque déjà, ces soi-disant cessez-le-feu qui étaient en
28 place, mais c'est lors de ces périodes de cessez-le-feu qu'il y avait le
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1 plus de victimes et de blessés, parce que les hommes s'ennuyaient. Donc,
2 pour empêcher cela, il s'agissait de parcourir à pied, dans la boue, ces 2
3 kilomètres ou 2 kilomètres et demi jusqu'à la ligne de front, et lorsque
4 nous sommes arrivés, nous avons vu un groupe de soldats qui ne nous ont
5 même pas remarqués. Alors on nous a ordonné de mettre des masques sur nos
6 têtes et de simuler une attaque à leur encontre comme si nous avions été
7 des soldats ennemis, parce qu'ils n'avaient pas du tout remarqué notre
8 arrivée.
9 Q. Il s'agissait de membres de la HV, n'est-ce pas, non pas des civils,
10 mais des soldats ?
11 R. Oui, ils montaient la garde autour de ces bunkers.
12 Q. Très bien. Alors continuez, s'il vous plaît.
13 R. Ils étaient tellement pris par leurs activités, ils étaient en train de
14 faire la cuisine, ou je ne sais plus exactement quoi, que nous avons réussi
15 à les surprendre et à faire prisonniers certains d'entre eux. Nous avons
16 réussi à les faire prisonniers. C'était une simulation, bien sûr, de notre
17 part, nous nous sommes comportés comme si nous avions été des soldats
18 ennemis qui les auraient pris par surprise. Donc vous pouvez imaginer la
19 façon qu'ils ont vécu cela et comment ils les ont ensuite punis.
20 Q. Alors vous parlez ici d'hommes qui faisaient la cuisine, avez-vous
21 d'autres exemples de comportements inconsidérés ou un peu légers ? Est-ce
22 que certains hommes quittaient la ligne de front ?
23 R. Non, ils ne quittaient pas les lignes de front.
24 Q. Qu'en était-il de la Garde patriotique ?
25 R. Pendant la journée, on pouvait voir certains hommes quitter leurs
26 bunkers, mais devant eux, ils avaient un champ de quelque 3 kilomètres. Ils
27 pensaient que rien ne pouvait leur arriver. C'étaient des hommes
28 originaires du village le plus proche. A une occasion, dans le village de
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1 Zemen, il y a eu tout un village qui a abandonné les postes de garde aux
2 bunkers.
3 Q. Nous n'allons plus mentionner le nom des villages, mais est-ce que vous
4 pourriez nous dire s'il y a eu une situation analogue avec une personne qui
5 a abandonné un bunker et qui se trouvait chez elle ? Est-ce que cela vous
6 rappelle quelque chose ?
7 R. Oui. Cet homme qui a abandonné son bunker, nous l'avons retrouvé chez
8 lui, dans la cour de sa maison. Il a reçu l'ordre du général Praljak de
9 revenir occuper son poste, mais il a refusé d'exécuter cet ordre en arguant
10 qu'il devait travailler, qu'il était un paysan. A ce moment-là, le général
11 Praljak m'a dit de tuer une de ses vaches. Je savais, moi aussi, qu'il ne
12 serait pas nécessaire d'en arriver là. J'ai fait semblant, et cela a suffi.
13 Le paysan en question a abandonné toutes ses activités séance tenante, a
14 pris son fusil et est reparti occuper son poste. Il n'a plus jamais
15 abandonné ce poste.
16 Q. Avez-vous ensuite discuté avec le général Praljak quant à la raison qui
17 l'avait poussé à vous demander de tuer cette vache ?
18 R. C'est précisément ce dont je parlais précédemment. Avec certaines
19 personnes, il est nécessaire de se battre; avec d'autres, il faut procéder
20 ainsi, comme je viens de l'expliquer. Il m'a dit : C'est tout simplement la
21 mentalité des paysans. Met le feu à son village et met le feu à sa maison,
22 il ne se plaindra pas, mais dès que tu touches à son bétail, c'est une
23 autre histoire.
24 Q. Alors vous venez de dire que tout cela était adapté à la situation;
25 qu'avec certains, il fallait se comporter ainsi; qu'avec d'autres, il
26 fallait se battre. Mais selon vous et d'après ce que vous avez vu, lorsque
27 le général Praljak procédait à une sanction physique d'un homme en raison
28 de son comportement, est-ce que cela ne pouvait pas constituer un signe, un
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1 message envoyé à ses hommes leur indiquant qu'il pouvait se comporter
2 également de cette façon-là envers les gens ?
3 R. Non, absolument pas.
4 Q. Pourquoi ? Pouvez-vous expliquer ?
5 R. [aucune interprétation]
6 Q. Si le général Praljak frappe cet employé qui était chargé de faire
7 traverser le ferry ou s'il le menace de tuer une vache, est-ce que cela
8 n'envoie pas un message à votre adresse, à l'adresse des soldats, vous
9 indiquant que vous pourriez procéder de la même manière, que vous pourriez
10 battre quelqu'un, par exemple ?
11 R. Non, bien sûr que non, parce que nous connaissons très bien la
12 hiérarchie. Nous savions ce que nous pouvions ou ne pouvions pas faire à
13 chaque moment. Donc nous ne pouvions pas nous promener le long de la route
14 et régler nos comptes avec tout un chacun, comme cela nous passait par la
15 tête.
16 Q. Avez-vous eu des prisonniers de guerre ?
17 R. Oui.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Lorsque vous avez confirmé que
19 Praljak punissait les gens physiquement, qu'est-ce que vous aviez en tête
20 exactement ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Prenez cet employé du ferry, c'est une
22 question d'interprétation. Cet homme n'a pas été battu au point de devoir
23 passer plus de cinq jours à l'hôpital. Le jour suivant, il est retourné à
24 son travail. D'ailleurs, ce jour suivant où il est revenu travailler, il y
25 a eu un soldat qui est tombé à l'eau et il l'a sauvé en sautant à l'eau
26 pour le repêcher. Mais c'était suffisant que d'agir ainsi à son égard pour
27 le rappeler à l'ordre. Donc lorsqu'il était suffisant -- il ne s'agissait
28 pas de régler ses comptes physiquement avec les gens ni de les battre de
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1 façon aussi grave qu'ils auraient fini à l'hôpital.
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai bien entendu cela. Je ne
3 laissais pas entendre du tout que Praljak a agi de façon excessive. Ce que
4 vous décrivez me semble très impulsif. Lorsque je pense à une punition, je
5 pense plutôt à quelqu'un qui a fait quelque chose qui n'est pas bien. On
6 lui a dit que ceci doit être puni, et si c'est à caractère physique, ceci
7 peut être formalisé sous la forme d'un certain nombre de coups de bâton ou
8 peut rester informel, par exemple, une gifle. Pourriez-vous nous parler de
9 cela un petit peu de cela, s'il vous plaît, ou est-ce que vos observations
10 n'étaient pas, disons, aussi techniques que vous nous l'avez indiqué ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai participé à certaines situations où
12 l'ordre donné à un homme se trouvant sur la ligne de front n'était pas
13 exécuté, car ce dernier ne le voulait pas. Il se levait et voulait partir,
14 et ce n'était qu'en le menaçant d'en venir aux mains qu'il revenait à son
15 poste. Donc le général Praljak ne venait pas régler ses comptes avec les
16 hommes, mais uniquement, procédait comme il convenait avec ceux pour
17 lesquels il n'y avait pas d'autre solution que de recourir à la force et
18 pour réagir à tous les actes qui pouvaient être commis et qui étaient
19 contraires aux règles et aux coutumes de la guerre. Il y a eu des
20 situations de cette nature sur le front. Il n'y avait pas de police
21 militaire ni de police. Il fallait bien que quelqu'un s'occupe de ces
22 tâches.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'ai bien compris, vous avez dit que parfois le
25 général Praljak, pour faire respecter la discipline, pouvait faire usage de
26 la force. Et j'ai cru comprendre, mais j'ai peut-être fait une erreur et
27 n'hésitez pas à me corriger parce que si je commets une erreur, je vous
28 saurai gré de me la corriger, mais j'ai cru comprendre, à titre d'exemple,
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1 qu'il pouvait arriver au général Praljak de donner un coup de pied au
2 derrière d'un soldat qui s'était mal comporté. Vous l'avez vu de vos
3 propres yeux cela ou c'était une rumeur ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu de mes yeux ce cas que j'ai décrit
5 avec l'employé du ferry.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors on peut comprendre, par exemple, qu'un père
7 gifle son enfant qui aurait pris des bonbons sans l'autorisation des
8 parents. Bien. Mais quand il s'agit d'un commandant militaire qui peut
9 faire preuve d'acte de violence sur un subordonné, de votre point de vue,
10 est-ce que ça ne peut pas avoir un effet ultérieur après sur ces soldats,
11 qui feront prisonnier quelqu'un et lui donneront un ordre : Mets-toi dans
12 le rang, le prisonnier ne s'exécute pas, et à ce moment-là, pourraient le
13 frapper. Est-ce que, pour vous, ça peut, le cas échéant, avoir un effet
14 incitateur ou pas ?
15 J'en reconnais que ma question est très délicate, mais c'est la thèse
16 du bureau du Procureur, qui a posé cette question déjà. Voilà. Comme vous
17 êtes un témoin visuel, ce que j'aimerais savoir, c'est quelle était votre
18 impression ? Est-ce que vous étiez d'accord avec cela ou pas d'accord ?
19 Parce que vous êtes le premier témoin qui nous parle de cela, donc autant
20 en profiter.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] On pourrait dire que c'était un message qui
22 était envoyé également à notre adresse, mais c'est le contraire de ce que
23 vous venez de dire, Monsieur le Président. Nous savions que nous n'avions
24 pas le droit de nous comporter de cette manière vis-à-vis de quelque
25 prisonnier que ce soit. Il nous l'a fait savoir très clairement. Il nous a
26 fait savoir très clairement que si tel était le cas, le même sort pourrait
27 nous être réservé. Mais celui qui s'est vu mettre plusieurs coups de pied
28 au derrière, dans le meilleur des cas si on avait porté plainte contre lui
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1 en cour martiale, il aurait été envoyé en prison. Je pense qu'en l'espèce,
2 il s'en est tiré bien mieux.
3 Je crois qu'il faut se reporter au contexte d'alors qui était
4 particulièrement difficile. Je crois qu'il est particulièrement difficile à
5 des personnes qui n'ont pas été présentes là-bas à ce moment-là de
6 comprendre ce que cela représentait.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
8 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, j'ai juste une petite question.
9 Les législateurs de tous les pays prescrivent ce qu'ils veulent dans
10 leurs différents codes, en général. Et, les règlements militaires, comme
11 les codes de justice militaire dans certains pays, prescrivent parfois des
12 châtiments physiques. La question que je voudrais vous poser, c'est de
13 savoir, parce que vous êtes un ancien major de l'armée croate, comme le
14 général Praljak lui-même est un ancien général aussi de l'armée croate, je
15 voudrais savoir si dans le règlement militaire ou dans les pratiques de
16 l'armée croate, est-ce qu'il était admis parfois des corrections physiques
17 ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'existe pas, n'est pas prévu par les
19 règlements dans l'armée croate. Mais en 1991, 47 hommes et plus d'une
20 centaine de civils se trouvant sur la ligne de front, cela n'est pas
21 l'armée croate. Cela ne constituait que les débuts d'un processus de
22 création de ce qui finirait par être l'armée croate.
23 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
24 Mme PINTER : [interprétation]
25 Q. Je vais vous reposer encore une fois la question pour que nous ayons
26 une vue complète. Vous l'avez dit, mais je vais demander de répéter une
27 nouvelle fois.Pourquoi cela était-il important ? Pourquoi vous avez dit
28 qu'ils auraient pu se retrouver en cour martiale, être punis de longues
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1 peines de prison ? Alors dites-nous pourquoi était-il important que ce
2 message parvienne au
3 commandement ? Y a-t-il quelque opération militaire que ce soit qui s'est
4 trouvée menacée ? Est-ce que la vie des soldats ou des civils était menacée
5 ?
6 R. Parce que les vies des soldats et des civils étaient menacées, les vies
7 des soldats de deux unités avec lesquelles nous étions supposés nous
8 engager conjointement dans une opération, mais simultanément. Et vous
9 imaginez bien ce qui aurait pu se passer si ces deux unités s'étaient mises
10 en route et que nous, à cause de cette omission stupide, n'ayons reçu aucun
11 ordre. Vous pouvez imaginer les conséquences que cela aurait pu avoir.
12 Q. Nous parlons toujours de cette même --
13 R. Oui, c'est toujours cette même opération.
14 Q. Très bien. Les interprètes demandent que je répète le nom de
15 l'opération, car il y a eu chevauchement de nos voix. Je vous ai demandé si
16 nous sommes toujours en train de parler de cet incident avec l'employé du
17 ferry. Maintenant, attendez avant de répondre, s'il vous plaît.
18 R. Oui, nous parlons de cette opération Jour J.
19 Q. Et cela comprend également cet incident avec l'employé du Ferry, n'est-
20 ce pas, cette opération Jour J ?
21 R. En effet.
22 Q. Nous disposons également d'un certain nombre d'autres informations.
23 J'aimerais que vous décriviez ce qui s'est passé lorsque la station de
24 radio 101 est arrivée à Sunja et lorsqu'il y a eu des soldats quelque peu
25 éméchés. Est-ce que vous pourriez décrire dans vos propres mots ce qui
26 s'est alors passé et quel type de sanction a été appliqué, si cela a bien
27 été le cas ?
28 R. Au mois de septembre et d'octobre 1991, un groupe de jeunes de Zagreb
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1 sont arrivés et ont mis sur pied une station de radio pour que les hommes
2 se trouvant sur le front puissent recevoir les messages de leurs proches.
3 Il s'est trouvé sur place une jeune fille dans ces conditions, elle a amené
4 son chat avec elle, de Zagreb. Quatre membres de l'armée croate qui
5 revenaient de Zagreb sont allés à la station de radio et ils voulaient que
6 l'on passe un certain nombre de titres à la radio. Après la réaction qui a
7 été la sienne et qui a consisté à dire qu'ils devraient attendre un peu,
8 l'un de ces hommes a pris son chat, l'a jeté contre le radiateur et l'a
9 ainsi tué. La jeune fille a commencé évidemment à pleurer, à crier, est
10 venue me voir, et tout cela s'est terminé chez le général qui est venu, a
11 désarmé les quatre hommes, leur a retiré leur insigne et leurs uniformes et
12 les a renvoyés à Zagreb. Ces hommes n'ont plus jamais été membres de
13 l'armée croate à Sunja.
14 Q. Alors comment expliquez-vous pour vous-même ce comportement du général
15 Praljak ?
16 R. C'était un message très clair : Si tu peux être renvoyé de l'armée
17 croate à cause d'un chat, tu peux imaginer ce qui t'attends pour quelque
18 chose de plus grave lorsqu'il s'agit d'un être humain, par exemple.
19 Q. Alors nous avons parlé du cas de tirs inutiles et de la sanction qui
20 était prévue dans ce cas-là. Mais pourriez-vous nous dire pourquoi la date
21 du 15 janvier 1992 est importante pour la République de Croatie ?
22 R. C'est l'une des dates les plus importantes de notre histoire, c'est la
23 date de la reconnaissance internationale de la République de Croatie.
24 Q. Où vous trouviez-vous à ce moment-là lorsque la Croatie a été
25 internationalement reconnue ?
26 R. J'étais sur les lignes de front à Sunja.
27 Q. Est-ce que cette reconnaissance internationale a fait l'objet de
28 célébrations ? Et si oui, pouvez-vous décrire comment ?
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1 R. Non, il n'y a pas eu de célébrations. Il était interdit de tirer la
2 moindre balle. Il n'y a que l'ennemi qui nous a gratifié de ses propres
3 tirs d'obus de mortier.
4 Q. Quels uniformes portiez-vous ? Quel type d'uniformes l'armée avait-elle
5 ?
6 R. Des uniformes de camouflage.
7 Q. Très bien. Y avait-il des uniformes noirs ?
8 R. Non.
9 Q. Etait-il permis de porter des insignes comme la lettre U ou écrire sur
10 les antichars ou sur le mur du bâtiment du commandement quelque chose ?
11 R. Non, pas à Sunja.
12 Q. Pourquoi ?
13 R. C'était interdit. Certains hommes, je ne sais pas d'où ils venaient car
14 il venait des hommes de différentes contrées et ils étaient fréquemment
15 remplacés, ils avaient dessiné quelque chose sur le mur d'une maison et ils
16 ont été contraints de nettoyer cela ou de le recouvrir de peinture.
17 Q. Alors, M. Arbutina qui a déposé avant vous, nous a informé que tous les
18 matins il y avait un briefing, il y a une levée du drapeau. Est-ce que cela
19 a été le cas pendant toute la durée de votre séjour à Sunja ?
20 R. Oui, après la venue du général, mais pas avant, tous les commandants
21 qui se trouvaient sur les lignes de front avaient l'obligation de se rendre
22 devant la caserne des pompiers, d'assister à la levée du drapeau et
23 d'entendre l'hymne et d'informer le général des événements de la nuit, s'il
24 y avait eu des incursions, des tirs, des attaques et combien d'obus de
25 mortier étaient tombés, et ainsi de suite.
26 Q. Comment les communications et l'envoi des rapports étaient-ils
27 organisés ? Vous venez de dire qu'il fallait remettre des rapports au
28 général Praljak. Mais quelle était l'organisation de cela ? Est-ce qu'il y
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1 avait des problèmes dans la façon dont vous receviez des informations ?
2 R. Non, il n'y avait pas de problèmes. Toutes les positions étaient
3 reliées par des téléphones de campagne, et tous les commandants qui se
4 trouvaient sur la ligne dans notre compagnie et les autres avaient la
5 possibilité de communiquer aux moyens des appareils Motorola pendant toute
6 la journée.
7 Q. Avez-vous eu ou reçu parfois des informations fausses selon lesquelles
8 vous deviez participer à une opération alors que cette dernière n'existait
9 pas ?
10 R. Oui, cela arrivait assez souvent. On parlait d'opérations ou d'attaques
11 héliportées et, à chaque fois, nous nous rendions sur place pour vérifier
12 ce qu'il en était. Je sais que deux fois le général est venu avec nous mais
13 nous n'avons, à chaque fois, rien trouvé de tel.
14 Q. Mais dites-moi, quand vous étiez sur le front sur les lignes, est-ce
15 que vous aviez toujours suffisamment d'armes ou est-ce qu'il était
16 nécessaire - et quand je dis les lignes, je pense toujours à la première
17 ligne de front - est-ce qu'il arrivait que vous ayez besoin qu'on vous
18 apporte des armes ?
19 R. Bien entendu, cela dépendait de l'intensité des attaques. Il est arrivé
20 fréquemment que nous nous retrouvions sans armes ou plutôt sans munitions.
21 Mais un certain nombre de fois, je dirais une dizaine de fois, M. le
22 général a lui-même apporté des munitions sur la première ligne de front,
23 qu'il apportait avec le responsable de la logistique et, tout cela, sous le
24 feu de l'ennemi.
25 Q. Très bien. Est-ce que le général a participé à des opérations
26 militaires ou est-ce qu'il était assis au commandement en train d'attendre
27 des rapports de votre part ?
28 R. Le général communiquait beaucoup avec les hommes en général, et il
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1 circulait pas mal sur le front, c'est-à-dire en première ligne. C'était
2 quelqu'un qu'on avait l'habitude de voir en première ligne. Il a participé
3 d'ailleurs à mes côtés à une opération en tant que fantassin, pas en tant
4 que commandant mais il a agi exactement comme un fantassin. L'opération
5 était destinée à sauver un civil dans un village ennemi.
6 Q. Vous étiez son commandant ce jour-là ?
7 R. Oui.
8 Q. Pourriez-vous nous dire, je vous prie, davantage en détail quelle a été
9 la nature de cette opération, quel a été ce civil, quelle était
10 l'appartenance ethnique de ce civil et où il se trouvait ?
11 R. Cela se passait non loin du front. Un membre de notre unité ou plus
12 précisément son père était resté dans le village. C'était un Serbe. Il
13 avait refusé donc de quitter le village et son fils avait peur pour sa vie,
14 son fils qui était dans notre unité. Il craignait que son père ne soit tué,
15 et il nous a demandé de l'accompagner la nuit pour faire sortir son père du
16 village. Il ne pouvait pas le faire tout seul. Il avait peur d'être fait
17 prisonnier. Donc nous avons réussi cela sans qu'une seule balle ne soit
18 tirée. Nous sommes rentrés et cet homme est resté avec son fils sur notre
19 territoire.
20 Q. Donc cela s'est fait à la demande du fils, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, le fils est venu nous soumettre cette demande. Il l'a soumise au
22 général Praljak et le général Praljak nous a demandé de nous en occuper.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je viens de découvrir, en vous écoutant, mais on le
24 savait déjà par le témoin précédent, que dans votre unité il y avait des
25 Serbes. Vous confirmez cela ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, est-ce que vous pouvez nous dire dans quelle
28 situation psychologique était vos camarades serbes qui étaient sur la ligne
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1 de front et face à eux, il y avait des Serbes, comment ils arrivaient à
2 surmonter ce problème ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions tous des volontaires de l'armée
4 croate à ce moment-là. Nous étions des hommes qui étions entrés dans
5 l'armée de notre plein gré, de notre initiative personnelle, sans avoir été
6 mobilisés. Chacun de nous s'est fait connaître de son propre chef et a été
7 versé dans l'armée sur sa propre initiative. Nous étions des jeunes gens.
8 Nous avions 22, 23 ans, et nous n'avons jamais posé la moindre question à
9 qui que ce soit pour connaître son appartenance ethnique.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne répondez pas exactement à ma question. Je
11 reconnais qu'elle est difficile.
12 Vous êtes dans une unité où il y a des camarades serbes avec vous.
13 L'ennemi, ce sont les Serbes. Et moi, j'essaie de comprendre votre camarade
14 serbe, comment il fait alors qu'en face de lui, il y a des Serbes comme lui
15 ? Comment il arrive à résoudre cette difficulté ? C'est ça que j'essaie de
16 comprendre.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est simple. Si une attaque démarrait du fait
18 de l'ennemi serbe, les hommes se défendaient. Bien sûr, ils tiraient. Moi,
19 j'avais dans mon unité un soldat qui était donc Serbe et son frère était à
20 100 mètres de l'autre côté. Il faisait partie de l'armée ennemie. Donc
21 voilà, c'était simplement comme ça. Je ne sais pas comment je peux vous
22 expliquer davantage cette situation. Les gens, les hommes se battaient pour
23 leur vie d'un côté comme de l'autre.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la première fois que j'entends ça, mais on
25 découvre à tous les jours.
26 Vous avez dans votre unité un soldat croate qui était serbe et à 100
27 mètres de l'autre côté, il y avait son frère, qui était dans le camp
28 adverse. Et là, vous dites s'il y a une attaque, on se défend. C'est-à-dire
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1 qu'à ce moment-là, les valeurs de l'individu sont supérieures à tout projet
2 politique ou autre. C'est ça que vous voulez dire ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, si vous parlez précisément de cette
4 situation de cet homme qui était de notre côté et de son frère, bien sûr,
5 cet homme se sentait assez mal. Je suppose qu'il se sentait assez mal. Mais
6 pas à un seul moment, il n'a donné le moindre signe d'une quelconque
7 volonté de passer de l'autre côté ou d'entreprendre quoi que ce soit ou
8 qu'il ne se sentait pas écrasé par le mal-être. Je ne sais pas très bien
9 comment vous expliquez. Il était là, il est resté là. On ne demandait
10 jamais à personne à quelque moment est-ce que tu es Serbe, est-ce que tu
11 n'es pas Serbe. Lui, c'est lui qui nous l'a raconté. C'est lui qui nous a
12 rejoint un jour, à un moment où il y avait des pourparlers, des pourparlers
13 de paix entre notre partie et la leur. Son frère était chef d'un groupe du
14 côté serbe; lui, il était chef d'un groupe de notre côté. Et ils se sont
15 retrouvés sur le front où les deux commandants avaient décidé une trêve, ou
16 je ne sais pas exactement comment les choses se sont passées. Le mieux
17 serait que vous lui demandiez à lui.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez parfaitement raison, il vaudrait mieux lui
19 demander à lui. Mais on n'a pas le temps, malheureusement.
20 Pouvez-vous me dire, est-ce que le général Praljak faisait des speechs aux
21 soldats. Si c'est le cas, ces speechs portaient-ils sur l'idée, il faut se
22 défendre, il y a une ligne de front, ou bien il vantait les valeurs de la
23 République croate, sur quel terrain il mobilisait les énergies des soldats
24 ? Qu'est-ce qu'il disait ? Enfin, s'il en tenait. S'il n'en tenait pas.
25 Vous dites que vous ne pouvez pas répondre à mes questions. Mais si vous
26 avez le souvenir de discours du général Praljak devant les soldats, qu'est-
27 ce qu'il leur disait ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je me rappelle seulement un discours de
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1 ce genre, un discours au moment où nous renouvelions notre serment. Donc
2 rien, rien de particulier. Nous n'avions pas de temps. Tout cela, ça a duré
3 très peu de temps. Les gars, tenez-vous bien, défendez-vous, faites
4 attention à vous. Ne vous compromettez en rien. Tout simplement faites
5 attention à vous. Ce n'était pas une époque qui donnait envie de prononcer
6 de long discours.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, est-ce qu'il ne disait pas aux
8 soldats, il faut se défendre, parce qu'il y a des agresseurs, la République
9 est en danger, ou bien, il ne donnait aucune explication sur les raisons de
10 se défendre ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais nous savions très bien pourquoi il
12 fallait se défendre. Personne n'avait besoin de nous le dire. Nous n'étions
13 pas des enfants de la maternelle. Nous savions qui nous avait attaqué, et
14 contre qui nous nous battions.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors dites-moi, il fallait se défendre pourquoi ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il fallait se défendre parce qu'à ce moment-
17 là, il y avait quelqu'un qui nous attaquait, moi, en particulier. Moi, à
18 qui on avait incendié ma maison à moi, avant. Bien sûr que je devais me
19 défendre. Tout homme se défend quand il est attaqué.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Pinter.
21 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Q. Suite aux questions que vient de vous poser M. le Juge Antonetti,
23 j'aimerais vous demander la chose suivante : à ce moment-là, quand vous
24 étiez à Sunja, et plus tard aussi d'ailleurs, vous est-il arrivé à quelque
25 moment que ce soit de vérifier l'appartenance ethnique de quelqu'un ?
26 R. Non. En 1991 -- enfin pendant que moi je me suis trouvé dans l'armée,
27 on ne parlait pas d'appartenance ethnique. Par la suite, je ne sais pas.
28 Q. Avez-vous entendu le général Praljak à quelque moment que ce soit
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1 vérifier auprès d'un homme quelle était son appartenance ethnique, et de
2 cette façon, vérifier si un homme pouvait ou ne pouvait pas faire partie de
3 l'unité ?
4 R. Non, je n'ai jamais vu ça. Mais simplement un jour, un jour de Noël
5 orthodoxe, il allait d'un bunker à un autre pour demander aux soldats qui
6 fêtaient, qui ne fêtaient pas Noël. Ça, ça montrait simplement qu'il
7 n'était pas au courant. Et lorsque un homme lui disait, moi, je fête Noël
8 aujourd'hui, il lui tendait la main, il lui disait : Nous ne sommes pas de
9 la même religion, mais je vous souhaite un joyeux Noël, comme on le fait
10 normalement. Il le faisait aussi avec les Musulmans. Dans mon unité, il y
11 avait un grand nombre de soldats et d'officiers musulmans.
12 Q. Et des Catholiques, est-ce qu'il souhaitait le Noël catholique aux
13 soldats catholiques ?
14 R. Oui, comme il le faisait pour les deux autres groupes.
15 Q. Y avait-il des fêtes particulières au moment des fêtes religieuses ?
16 R. Non.
17 Q. Est-ce que vous aviez des moments de repos, des moments où vous pouviez
18 vous asseoir, bavarder les uns avec les autres ? Est-ce que vous aviez à
19 Sunja un mess ou un restaurant ou un café où vous pouviez vous réunir ?
20 R. Les cafés ont été fermés par M. le Général, mais il a créé une cantine
21 militaire où un certain nombre d'hommes, donc 20 % de la première ligne, de
22 la deuxième ligne, de la troisième ligne de front pouvaient venir boire un
23 nombre déterminé de verres. Chaque homme était autorisé à un nombre
24 déterminé de verres.
25 Q. D'accord. Maintenant, je vais vous poser encore deux ou trois questions
26 qui me restent, si je ne me trompe. Vous avez évoqué à plusieurs reprises
27 la gare ferroviaire. Vous avez dit qu'elle constituait une espèce de ligne
28 de démarcation et qu'il y avait des wagons sur les rails. Que contenaient
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1 ces wagons ?
2 R. Du blé, et depuis le mois de juillet 1991, ces wagons étaient alignés
3 devant la gare.
4 Q. Est-ce que quelqu'un s'est emparé de ce blé ?
5 R. Les membres de l'armée ennemie ont pris ce blé.
6 Q. Pourriez-vous expliquer cela ?
7 R. Il y a eu une situation à laquelle j'ai assisté. J'ai vu un certain
8 nombre d'hommes, mais simplement à partir de la ceinture, je ne voyais pas
9 leur visage. Je les voyais donc de l'autre côté et je les ai vus ouvrir les
10 wagons et sortir du blé de ces wagons. J'en ai informé M. Praljak, parce
11 que certains de mes hommes s'apprêtaient déjà à tirer. Cela se passait en
12 pleine journée. Le général est arrivé sur place et il a interdit à tout le
13 monde de tirer. Nous avons appris par la suite que les gens que nous avons
14 vus étaient des civils, autrement dit, des gens qui ont été amenés sur
15 place par l'armée ennemie, et contraints de sortir le blé de ces wagons de
16 manière coercitive, sans penser au risque auquel on soumettait ces
17 personnes.
18 Q. Il n'y a donc eu qu'une seule occasion où cela s'est passé, où des
19 choses ont été enlevées d'un wagon ?
20 R. C'est arrivé à plusieurs reprises, mais personne n'a jamais tiré sur
21 les gens qui faisaient cela.
22 Q. [aucune interprétation]
23 R. De jour, en plein jour.
24 Q. Mais même de nuit éventuellement ?
25 R. Je ne sais pas.
26 Q. Donc quelle était la nature de l'ordre; de ne pas tirer ?
27 R. C'est exact, de ne pas tirer. Il n'y a pas eu de tir.
28 Q. Vous avez dit à un certain moment que les opérations militaires ont été
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1 d'une intensité moindre au moment où la FORPRONU est arrivée, qu'il y a eu
2 une sorte d'accalmie. Disons les choses comme cela. Est-ce que vous
3 pourriez nous dire comment les choses étaient organisées à ce moment-là ?
4 Qu'est-ce que vous avez fait pendant cette accalmie ? Est-ce que vous étiez
5 dans cette cantine militaire ? Est-ce que des hommes sont rentrés chez eux
6 à Sisak ou est-ce que tout le monde est resté sur le front ?
7 R. Tout le monde est resté sur le front. Nous pouvions rentrer chez nous
8 dans les mêmes conditions que précédemment. Il y avait aussi des
9 entraînements, des exercices d'attaques de défense, des marches, comme dans
10 le cas d'une mobilisation. Donc nous n'avions pas de loisirs. Nous n'avions
11 pas de temps libre pour faire ce que nous voulions.
12 Q. Mais qui dirigeait ces manœuvres, ces exercices ?
13 R. Le général.
14 Q. Est-ce qu'il dirigeait les manœuvres ou est-ce qu'il participait à ces
15 exercices ? Est-ce qu'il se contentait de dire : Toi, tu vas là, ou là, et
16 tu fais ça ou ça ?
17 R. Non, il participait pratiquement à tous les exercices lui-même.
18 Q. Pouvez-vous nous dire quelle était la nature de ces exercices, si vous
19 vous en souvenez ? Si vous ne vous en souvenez pas, tant pis.
20 R. Je l'ai déjà dit, des exercices, des simulations d'attaques et de
21 défense, et cetera.
22 Q. Mais des simulations à quel endroit, à l'air libre, à l'intérieur des
23 maisons ?
24 R. A l'air libre mais aussi à l'intérieur d'un lieu fermé sur des
25 positions.
26 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous avez dirigé vous-même des exercices
27 pour vos hommes à Sunja ?
28 R. Oui, j'ai entraîné un certain nombre de jeunes gens qui sont arrivés un
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1 peu plus tard et qui n'avaient aucune formation militaire. Donc tout
2 simplement, on les préparait à la possibilité de devoir se trouver en
3 première ligne.
4 Q. Je suppose qu'il y a eu des moments pendant la période de forte
5 intensité de pilonnage et pendant les accalmies où vous avez pu avoir des
6 contacts avec le général Praljak en pleine opération militaire. Voilà, ce
7 sera ma question : est-ce qu'il y a eu des moments où vous avez discuté
8 avec le général Praljak sans être dans une situation où vous étiez en train
9 de lui faire rapport de ce qui s'était passé sur le front ou de la blessure
10 d'un homme, et cetera ?
11 R. Oui, c'est arrivé. Il nous arrivait de nous rendre auprès de lui à son
12 poste de commandement et il nous lisait un livre. Voilà.
13 Q. Dites-nous, sans vous gêner, de quel livre s'agissait-il ?
14 R. Tolstoï.
15 Q. Pourquoi tenait-il à Tolstoï ?
16 R. Parce qu'il nous disait que d'après Tolstoï, il n'était pas suffisant
17 d'être un bon combattant, il fallait aussi avoir de l'éducation. Bien
18 entendu, nous trouvions cela assez ennuyeux mais nous devions rester assis
19 et écouter.
20 Q. Peut-être finalement que cela a eu une certaine utilité ?
21 R. Oui.
22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur certains d'entre nous sont
23 intéressés à d'autre chose que le droit. Quel livre il a lu : c'était
24 "Guerre et Paix" ou c'était "Anna Karenina" ou autre chose ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ça, je l'ai lu tout seul plus tard.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Alors c'était "Guerre et Paix" ou
27 une des autres histoires ? Vous ne vous souvenez pas ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, j'ai dit que le général nous a lu Tolstoï
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1 mais moi par la suite, c'est tout seul que j'ai lu "Guerre et Paix" et
2 "Anna Karenina." Il n'y avait pas suffisamment de temps pour lire tout
3 Guerre et Paix".
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, tout à l'heure, vous avez évoqué
6 un fait et je voudrais y revenir. J'ai cru comprendre que le général
7 Praljak avait donné des instructions pour ne pas tirer sur des civils si
8 ceux-ci se mettaient à piller les entrepôts. C'est ça que vous nous avez
9 dit ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais bien sûr. C'était des civils
11 serbes.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez dit ça parce que vous avez su qu'au
13 Canada, il y avait eu un procès contre des officiers qui avaient donné des
14 ordres de tirer - je crois que c'était en Somali - contre des civils qui
15 pilleraient des entrepôts. Vous le saviez ou vous avez répondu ignorant ce
16 cas particulier canadien dont, d'ailleurs de mémoire, un des officiers
17 avait été défendu par un avocat qui plaide assez souvent ici même ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, je ne suis pas au courant de cette
19 affaire. Mais l'affaire dont je vous parle, je suis au courant parce que
20 j'étais personnellement présent sur place. Donc je vous parle de ce que
21 j'ai vu moi-même.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, si je comprends bien, un civil serbe pouvait
23 venir piller tranquillement et puis il repartait et les ordres étaient de
24 ne rien faire ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Eux, ils étaient devant la ligne tenue par
26 nous, parce que finalement c'était un no man's land, voyez-vous, et il y
27 avait cet alignement de wagons qui étaient là depuis je ne sais combien de
28 mois. D'ailleurs vous savez, ce blé, je ne crois pas qu'il leur a servi à
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1 grand-chose parce que cela faisait plus de six mois que le blé était
2 entreposé dans ces wagons. Et finalement, je ne sais pas si c'était
3 vraiment du pillage.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc pendant ce conflit, des Serbes qui étaient de
5 l'autre côté venaient en toute tranquillité prendre du blé et les ordres
6 étaient surtout de ne pas tirer sur eux. C'est ça. C'est ce qu'on doit
7 comprendre de votre témoignage ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était l'ordre qu'a donné le général Praljak
9 dans cette situation précise.
10 Mme PINTER : [interprétation]
11 Q. Monsieur Crnkovic, reprenons cette histoire du blé. Est-ce qu'à ce
12 moment-là il était difficile de régler les problèmes d'alimentation, ou
13 est-ce que c'est à un moment où il est permis de penser qu'il y avait des
14 gens qui mourraient de faim ?
15 R. Ecoutez, quand on voit des gens en plein jour qui sont en train de
16 risquer leur vie pour mettre la main sur du blé, il est assez facile de
17 penser que leur faim n'était pas assouvie.
18 Q. Bien. Je vais maintenant vous poser de nouvelles questions. Jusqu'à
19 quand le général Praljak est-il resté à Sunja ou plus précisément pouvez-
20 vous nous dire de quand à quand il était présent à Sunja ?
21 R. Il est arrivé, ça je le sais, au mois de septembre, et je crois qu'il
22 est reparti à la fin février, début mars 1992.
23 Q. Autrement dit, il est arrivé en septembre 1991 ?
24 R. Oui, c'est son arrivée.
25 Q. Quand je vous ai parlé de votre carrière militaire au début de votre
26 audition, vous avez dit que vous étiez combattant dans l'armée croate. Vous
27 avez indiqué dans quel lieu vous vous étiez battu et vous avez mentionné
28 Mostar et la Posavina. J'aimerais maintenant que vous nous expliquiez
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1 comment il est advenu que vous vous trouviez à Mostar et à quel moment,
2 bien sûr, vous vous êtes trouvé à Mostar ainsi que de nous dire quelle
3 était la situation à Mostar quand vous vous y êtes trouvé.
4 R. Cela s'est passé au mois d'avril 1992, et le commandant de Sunja de
5 l'époque est arrivé et nous a dit - nous on l'appelait Stari, le vieux à
6 l'époque - et il nous a dit : Il faudrait que vous alliez à Mostar et que
7 vous aidiez le vieux, autrement dit le général Praljak, à former les hommes
8 et à créer des lignes de front dans l'éventualité d'une attaque de la JNA.
9 Tous les commandants, bien sûr, ont le devoir de rendre compte à leurs
10 supérieurs. Et je peux vous dire avec certitude, s'agissant de rendre
11 compte du nombre de volontaires qui se sont proposés, qu'il y a eu au moins
12 500 hommes. Tout le monde voulait y aller. Et c'est moi qui étais chargé de
13 choisir les neuf hommes qui allaient m'accompagner après avoir été choisi
14 et sélectionné moi-même. Donc j'ai effectué cette sélection et nous avons
15 pris la route. Nous sommes partis vers la fin du mois d'avril 1992.
16 Q. Est-ce que la guerre battait déjà son plein à Mostar ou est-ce qu'une
17 véritable guerre avait déjà commencé à Mostar ? Quelle était la situation ?
18 R. Non, une vraie guerre n'avait pas encore éclaté à Mostar. Mais étant
19 donné les situations, on se rendait bien compte qu'une guerre était en
20 préparation.
21 Q. Ces jeunes gens qui vous ont accompagné, vous avez dit que 500 d'entre
22 eux voulaient vous accompagner et vous n'en n'avez choisi que neuf. Pouvez-
23 vous me dire qui étaient ces jeunes gens ? Est-ce que c'étaient des jeunes
24 gens qui étaient déjà dans les rangs de l'armée croate précédemment ? Est-
25 ce qu'ils avaient une certaine expérience, une certaine connaissance de
26 l'armée ? Est-ce que c'étaient des jeunes gens qui faisaient partie de la
27 même unité que vous ? Ce que vous savez, est-ce que vous pourriez le dire
28 parce que tous les renseignements sont utiles aux Juges de la Chambre qui
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1 doivent en tenir compte.
2 R. Un seul d'entre eux venait de mon unité. Les huit autres, non. Les huit
3 autres étaient membres du Régiment des Domobrani, donc de la Garde
4 patriotique, et ils venaient de la région de Kostajnica. Puisque vous me
5 parlez d'appartenance ethnique, je vous dirais qu'il y avait cinq Croates,
6 trois Serbes et deux Musulmans. C'est moi qui les ai choisis. Pendant toute
7 la durée des combats auxquels j'ai participé, pour moi, l'appartenance
8 ethnique n'avait aucun sens particulier. D'ailleurs, le général ne m'avait
9 jamais demandé non plus d'emmener neuf Croates avec moi, mais neuf jeunes
10 gens.
11 Q. Merci. Combien de temps êtes-vous resté à Mostar ?
12 R. Pas plus de dix jours.
13 Q. Qu'y avez-vous fait ?
14 R. C'était très simple, deux hommes sont restés sur place pour essayer
15 d'entraîner les hommes à la guerre antiaérienne, deux d'entre nous ont
16 essayé de former les membres des unités de police militaire de façon à ce
17 qu'en ville la police puisse agir, deux d'entre nous sont partis pour la
18 partie orientale de la ville de Mostar, donc la partie musulmane, et moi et
19 un autre sommes restés dans la partie occidentale.
20 Q. Pourriez-vous en très peu de mots décrire comment les Croates et les
21 Musulmans ont abordé cette formation ?
22 R. Il n'y avait là que des unités de défense civile qui n'avaient
23 pratiquement aucune arme à leur disposition. Les Croates ont collaboré. Si
24 nous leur disions, C'est là qu'il faut creuser une tranchée ou ici, ils le
25 faisaient. En tout cas, ils ont à peu près bien coopéré dans ces efforts de
26 défense. Mais dans la partie orientale de Mostar, là où se trouvaient les
27 Musulmans, nous n'avons obtenu aucun résultat. Les gens là-bas refusaient
28 de faire quoi que ce soit, tout simplement. Ils disaient que personne ne
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1 s'apprêtait à les attaquer et qu'ils n'avaient aucune raison de se défendre
2 contre qui que ce soit, donc ils ont refusé toute idée de nécessiter de
3 défense.
4 Q. Merci. J'ai maintenant deux questions à vous poser au sujet de la
5 Posavina. Il me semble que le général Praljak, si la Chambre l'y autorise,
6 aura quelques questions à poser.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'arriver à la Posavina, c'est très
8 intéressant ce que vous nous dites, parce que vous êtes un des rares
9 témoins qui s'est porté volontaire et qui vient nous raconter cela.
10 Vous allez à Mostar avec les neuf autres que vous avez sélectionnés.
11 Je constate qu'il y a cinq Croates, trois Serbes et deux Musulmans. Mais
12 quand vous allez à Mostar, vous allez défendre quoi ? Parce que Mostar,
13 c'est la République de Bosnie-Herzégovine, ce n'est pas la République de
14 Croatie. Alors pourquoi vous allez là-bas, vous ? Qu'est-ce qui vous anime
15 pour aller là-bas ? Parce que c'est le général Praljak qui vous a dit :
16 J'ai besoin de vous, et il vous aurait dit de vous jeter à l'eau, vous vous
17 serez jeté à l'eau ou bien vous avez été là-bas pour défendre quelque
18 chose, mais à ce moment-là, défendre quoi exactement ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'avais pas de raison pour aller défendre
20 quoi que ce soit là-bas. On ne m'a pas non plus dit d'aller là-bas faire la
21 guerre. Ce qu'on m'a dit, c'est d'aller organiser les choses pour montrer
22 aux hommes comment s'organiser, comment mettre sur pied des unités, comment
23 entraîner et former leurs commandants. C'était tout. Nous avons été engagés
24 sur place dans aucune action militaire.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, je suis d'accord avec ce que vous venez de
26 dire. Mais vous étiez dans un Etat étranger ou bien cette notion n'avait
27 pas cours ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas très bien où vous voulez
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1 en venir. Dans l'armée croate, il y avait des gars originaires de Bosnie-
2 Herzégovine aussi, et nous pensions tous à l'époque que nous nous battions
3 contre le même ennemi, contre la JNA. Ce n'est qu'après ces affrontements
4 croato-musulmans qu'on a commencé à se poser ces questions. Mais
5 jusqu'alors personne ne raisonnait de cette façon-là. On allait tout
6 simplement aider les hommes sur place pour qu'ils ne leur arrivent pas la
7 même chose que ce qui nous était arrivé à nous, pour qu'ils parviennent au
8 moins à se défendre d'une façon ou d'une autre. Nous nous rendions sur
9 place simplement pour leur transmettre l'expérience et les connaissances
10 qui étaient les nôtres, le vécu qui avait été le nôtre, uniquement dans le
11 but qu'ils ne connaissent pas le même sort que le nôtre.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous me dites que, pour vous, l'ennemi était la
13 JNA, et vous ne vous êtes pas posé d'autres problèmes, et c'est pour ça que
14 vous avez été à Mostar. C'est ça que nous devons comprendre ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien entendu, car c'est selon ces mêmes
16 modalités que ces deux membres du groupe ethnique musulman m'ont accompagné
17 sur place pour venir en aide à leurs amis, pour les aider à se défendre
18 contre la JNA. C'était pour cette raison et aucune autre.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand le général Praljak vous demande cela, est-ce
20 qu'il vous dit : A Mostar il y a la JNA, ça nous fait courir un péril, donc
21 il faut y aller, ou bien il vous dit : Il faut aller à Mostar, parce qu'à
22 Mostar il y a des Croates qui peuvent être en danger ? Quel discours il
23 vous tient ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Praljak nous a simplement envoyé un message
25 nous demandant si possible d'aller et venir aider les gens à s'organiser.
26 Nous savions très bien à ce moment-là qui attaquait les Croates et les
27 Musulmans. Et le message de Praljak ne mentionnait ni les Croates ni les
28 Musulmans. Il n'avait pas besoin d'expliquer ce qu'il en était de la JNA
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1 sur place parce qu'ils étaient plus que prêts à attaquer Mostar.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai cru comprendre, mais si je fais une erreur,
3 corrigez-moi, n'hésitez pas, c'est un service que vous me rendrez. Mais
4 j'ai cru comprendre qu'en arrivant là-bas, vous avez accompli votre
5 mission, mais que vous avez trouvé les Musulmans, en quelque sorte, peu
6 coopératifs, alors même qu'ils auraient dû, la main dans la main avec vous,
7 travailler dans un but commun, et que donc les Musulmans, vous les avez
8 perçus comme non adhérents à cette défense commune. C'est ça que vous avez
9 dit ou je me trompe ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ce que j'ai dit. Je suis un
11 soldat, pas un homme politique. Je ne peux pas entrer dans les raisons pour
12 lesquelles ils ont refusé cela. J'ai essayé de leur expliquer la façon dont
13 on renforce les lignes, la façon dont on les organise. Ils ont rejeté cela.
14 Je suis revenu, j'en ai informé le général qui a dit : Très bien, il n'est
15 plus nécessaire que vous alliez là-bas.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous aviez sélectionné deux Musulmans, il y en
17 avait deux, vous avez discuté avec vos deux camarades musulmans pour leur
18 demander pourquoi les Musulmans ne veulent pas coopérer ? Vous leur avez
19 posé la question à vos deux camarades musulmans que vous aviez sélectionnés
20 ou bien vous n'avez rien dit ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne leur ai rien demandé.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Et sur le moment, vous avez essayé de comprendre
23 pourquoi ils ne voulaient pas ou bien ça vous dépassait totalement ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris que je ne pouvais absolument pas
25 influencer leur comportement, et je n'ai pas spécialement réfléchi à la
26 raison pour laquelle cela s'est produit ainsi.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors la Pasovina, Maître Pinter.
28 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense
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1 qu'avec cela j'aurai utilisé complètement l'heure que j'avais à ma
2 disposition, en posant ces questions sur la Posavina.
3 Q. Nous savons, Monsieur, que vous vous êtes rendu en Posavina, mais quand
4 et dans quelles circonstances ?
5 R. J'y suis allé le 3 juillet 1992. C'est ainsi que cela fonctionnait dans
6 les casernes à l'époque. On disait aux soldats : Montez dans ce car et
7 rendez-vous sur place. On nous a informé de cela deux jours à l'avance,
8 seulement. Ensuite, au deuxième village où nous nous sommes trouvés, on
9 nous a dit que nous nous rendrions en Slavonie, plus précisément à
10 Slavonski Brod. Là-bas, le général Praljak nous attendait, et il m'a dit de
11 monter dans le car et d'informer les hommes que cela dépendait de leur
12 bonne volonté que de savoir s'ils allaient traverser ou non. Je l'ai fait
13 et il y a eu la moitié des soldats qui sont passés, la moitié qui ne l'ont
14 pas fait.
15 Q. Avez-vous connaissance, concernant ces 50 % de soldats qui n'ont pas
16 traversé, de toute sanction ou procédure disciplinaire qui aurait pu être
17 engagée contre eux ?
18 R. Non, personne n'a été puni. Ces hommes ont continué leur travail.
19 Certains d'entre eux travaillent au jour d'aujourd'hui, certains autres
20 sont à la retraite, et d'autres sont décédés. De façon générale, en raison
21 de ce qui s'est produit alors, personne n'a eu la moindre difficulté ou le
22 moindre problème. On leur a laissé le choix. On leur a dit qu'ils pouvaient
23 traverser ou non.
24 Q. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez décidé de traverser ?
25 R. Le commandant de la compagnie d'alors nous a dit qu'il avait vu
26 Slavonski Brod détruite, qu'ils étaient la cible de tirs d'obus et qu'en
27 vertu de la loi applicable, nous pouvions entrer sur une profondeur de 30
28 kilomètres dans le territoire de l'autre Etat si, à partir de ce
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1 territoire, on tirait sur nos villes. Et c'était là la raison principale,
2 parce qu'à partir de ce territoire, on visait le territoire croate. C'était
3 la raison la plus impérieuse, c'est ce que nous a dit le commandant en
4 question.
5 Q. Vous venez de dire que c'était le général, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que lorsque vous êtes arrivé en Posavina, vous avez rencontré le
8 général ? Est-ce que vous pourriez nous décrire comment cela s'est passé ?
9 Est-ce que vous vous êtes rendu personnellement sur le front, est-ce qu'on
10 vous a montré où passait cette ligne de front et comment cela s'est-il
11 passé ?
12 R. Bien sûr que nous ne savions pas où se trouvait la ligne de front. Nous
13 sommes arrivés sous le couvert de la nuit, et le général nous a emmenés en
14 personne pour nous montrer, en tout cas dans la mesure où cela a été
15 possible cette même nuit, où se trouvait la ligne de front.
16 Q. Comment cela se présentait lorsque vous étiez en train d'essayer de
17 retrouver cette ligne de front ? Si vous ne vous en souvenez pas, ce n'est
18 pas grave.
19 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Madame Pinter, je suis désolé de
20 vous interrompre, mais j'aimerais vérifier un point.
21 Lorsque vous avez demandé au témoin ce qu'il avait fait lorsqu'il est allé
22 à Slavonski Brod, et le témoin a répondu en disant que le problème, c'était
23 qu'ils auraient pu traverser pour rentrer en territoire serbe, non pas à
24 Slavonski Brod mais en territoire serbe. Je cite :
25 "Les obus tombaient sur nous alors que nous approchions, mais il nous a dit
26 qu'au titre du droit militaire, nous pouvions rentrer dans le territoire de
27 l'ennemi sur une profondeur de 30 kilomètres si quelqu'un pilonnait nos
28 villes et nos villages depuis ce territoire. C'est la raison la plus
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1 importante, le fait que les territoires croates étaient pilonnés depuis ce
2 territoire."
3 Donc, j'aimerais savoir quel est ce territoire ? Si j'ai bien compris, des
4 actions ont été entreprises contre les Serbes ou contre la JNA à partir du
5 territoire détenu par les Serbes. C'est ce que j'ai cru comprendre, mais si
6 je me suis trompé, veuillez, s'il vous plaît, me le faire savoir.
7 Mme PINTER : [interprétation] Peut-être serait-il préférable que le témoin
8 apporte une correction pour que je ne me livre pas à un témoignage. Il me
9 semble qu'il s'agit là d'un malentendu, M. le Juge Prandler.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, cette zone que nous avons traversée se
11 trouve en Posavina. Ce sont des villages croates, des populations croates.
12 Mme PINTER : [interprétation]
13 Q. Dans quel état se trouve la Posavina ?
14 R. En Bosnie-Herzégovine.
15 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie. Mais j'ai bien
16 compris que Sunja était en territoire croate. Vous avez traversé la
17 Posavina, qui est une partie du territoire de Bosnie-Herzégovine. C'est ce
18 que je voulais vérifier.
19 Mme PINTER : [interprétation]
20 Q. S'agissait-il d'un territoire de l'Etat serbe ou de l'Etat de Bosnie-
21 Herzégovine ?
22 R. De la Bosnie-Herzégovine, et non pas de la Serbie.
23 Q. Qui vivait dans cette partie de la Posavina ?
24 R. En majorité, des populations croates et musulmanes.
25 Q. Merci.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Pinter, le Greffe me dit il ne reste que cinq
27 minutes de bande. Est-ce que vous préférez qu'on arrête maintenant, qu'on
28 fasse la pause et vous continuerez après ? Oui. Parce qu'on arrive en bout
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1 de bande, et il va falloir faire la pause maintenant.
2 Mme PINTER : [interprétation] Dans ce cas-là, faisons la pause, Monsieur le
3 Président. Nous suivons vos indications, bien entendu. J'ai terminé pour ma
4 part, et c'est le général Praljak qui poursuivra.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Le mieux, c'est de faire la pause et on
6 continuera après. Donc on fait 20 minutes de pause.
7 --- L'audience est suspendue à 17 heures 19.
8 --- L'audience est reprise à 17 heures 46.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Maître Kovacic.
10 La Chambre va rendre deux décisions orales qui sont importantes, donc
11 je demande à tout le monde d'écouter.
12 Première décision, décision orale portant sur l'attribution du temps pour
13 la comparution du témoin Zvonimir Skender des 24 et 28 septembre 2009. La
14 Chambre va rendre une décision relative à l'attribution du temps pour le
15 témoignage de Zvonimir Skender, qui comparaîtra en vertu de l'article 92
16 ter du Règlement.
17 La Chambre décide d'accorder une heure à la Défense Praljak pour
18 l'interrogatoire principal et l'éventuel interrogatoire supplémentaire du
19 témoin. En l'absence de demandes spécifiques de la part des parties et au
20 vu des sujets abordés par le témoin, la Chambre décide d'accorder 45
21 minutes à l'ensemble des autres Défenses pour leur contre-interrogatoire et
22 une heure et 30 minutes à l'Accusation.
23 Donc je me résume. Pour la Défense Praljak, une heure; pour les
24 autres avocats, 45 minutes; et pour le Procureur, une heure 30.
25 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, pour autant que le
26 sache, Me Alaburic, elle vous le dira plus précisément, souhaitait procéder
27 à un contre-interrogatoire. Nous attendions votre décision pour nous mettre
28 d'accord. Nous avons donc 45 minutes, l'ensemble des Défenses, et si les
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1 autres équipes de la Défense n'ont pas l'intention de poser des questions,
2 peut-être que ma consoeur et moi-même pourrions procéder à un contre-
3 interrogatoire dans le cadre de ces 45 minutes. Je voudrais toutefois
4 signaler à la Chambre que j'aurais besoin de 20 à 30 minutes pour mon
5 propre contre-interrogatoire, et je voudrais d'ores et déjà informer les
6 Juges de la Chambre que je suis tout à fait disposée à voir ce temps
7 retranché du temps global dont dispose la Défense Stojic. Je vous remercie.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Maintenant, la deuxième décision est longue. Je vous
9 demande de l'écouter, parce qu'elle est importante.
10 Décision orale relative au calendrier des audiences.
11 Lors de l'audience du 16 septembre 2009, et après avoir pris connaissance
12 des calendriers amendés des témoins communiqués respectivement par les
13 Défenses Praljak et Petkovic, la Chambre a constaté que la Défense Praljak
14 envisageait de terminer la présentation de sa cause le lundi 19 octobre
15 2009, et que la Défense Petkovic souhaitait, quant à elle, commencer la
16 présentation de sa cause le lundi 2 novembre 2009.
17 La Chambre note également que la Défense Praljak a informé les parties,
18 lors de l'audience du 16 septembre 2009, de l'éventuelle annulation de la
19 comparution de son dernier témoin, le Témoin 3DA, initialement cité à
20 comparaître du mercredi 14 octobre 2009 au lundi 19 octobre 2009. Dans ce
21 cas, la présentation de sa cause se terminerait le mardi 13 octobre 2009.
22 La Chambre relève, par ailleurs, que la Défense Petkovic a exprimé
23 son souhait, lors de l'audience du 16 septembre 2009, de débuter la
24 présentation de sa cause par la déposition du témoin expert, Milan Gorjanc,
25 le 2 novembre 2009. La Chambre rappelle, à cet égard, sa décision rendue à
26 titre confidentiel le 5 novembre 2008, qui prévoit un délai de deux mois
27 entre le dépôt d'un rapport d'expert en vertu de l'article 94 bis du
28 Règlement et la comparution dudit témoin expert, et constate que la date du
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1 début de l'audition du témoin expert en l'espèce est conforme aux délais
2 requis par la Chambre. La Chambre note ainsi que, dans le cas d'espèce,
3 l'audition du témoin expert, Milan Gorjanc, ne peut débuter avant
4 l'expiration de ce délai, soit le 2 novembre 2009.
5 Soucieuse de veiller au déroulement efficace du procès, la Chambre
6 estime qu'il relève de son pouvoir discrétionnaire et de l'intérêt de la
7 justice de clarifier le calendrier d'audience afin d'éviter une suspension
8 des audiences pour une durée non raisonnable entre la fin de la
9 présentation de la cause de la Défense Praljak et le début de la
10 présentation de la cause de la Défense Petkovic. En conséquence, la Chambre
11 enjoint la Défense Praljak à clarifier le statut de la comparution du
12 Témoin 3DA pour le vendredi 29 septembre 2009.
13 La Chambre demande, par ailleurs, à la Défense Petkovic de se tenir
14 prête à commencer la présentation de sa cause le lundi 19 octobre 2009,
15 dans l'hypothèse où la comparution du Témoin 3DA serait annulée, ou cinq
16 jours après la fin de l'audition du Témoin 3DA, soit le lundi 26 octobre
17 2009.
18 La Chambre invite également la Défense Petkovic à modifier l'ordre de
19 comparution des témoins qu'elle entend citer à comparaître afin d'être en
20 mesure de procéder à l'audition d'un ou deux témoins aux dates
21 susmentionnées fixées par la Chambre, et ce, avant la comparution du témoin
22 expert, Milan Gorjanc, prévue pour le 2 novembre 2009.
23 En résumé, la Chambre demande, avant le 29 septembre 2009, à la
24 Défense Praljak de nous faire savoir si le Témoin 3DA vient ou ne vient
25 pas. Si le Témoin 3DA ne vient pas, la Défense Petkovic doit commencer le
26 19 octobre. Si le Témoin 3DA vient, la Défense Petkovic commencera le 26
27 octobre. La Chambre confirme, concernant le témoin expert, que celui-ci ne
28 pourra déposer qu'à compter du 2 novembre 2009, et donc demande à la
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1 Défense Petkovic de faire venir un ou deux témoins qu'elle avait déjà
2 prévus après et de les mettre avant le témoin expert, Gorjanc.
3 Voilà ce que nous avons décidé pour éviter qu'on perde du temps. Tout
4 ça est très clair.
5 Maître Alaburic.
6 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite vous
7 remercier de m'avoir donné la parole. Je voudrais juste prononcer quelques
8 phrases à ce sujet, et j'ose espérer que cela n'entravera pas la poursuite
9 de l'audition de ce témoin.
10 Je vous remercie pour cette décision. Cependant, au nom de la Défense
11 du général Petkovic, je souhaiterais vous dire qu'il est absolument
12 impossible de prévoir le début de la présentation de la thèse de notre
13 Défense selon d'autres options, alors même qu'aucune de ces options ne
14 dépend ni des souhaits ni de la volonté de la Défense du général Patkovic.
15 Nous estimons que nous ne pouvons pas constituer une forme d'otage de la
16 Défense du général Praljak, en ce sens qu'en fonction de ce qui se passera
17 ou non avec la Défense du général Praljak, nous devrions nous tenir prêts à
18 occuper le temps qui pourrait éventuellement être dégagé pour les
19 audiences.
20 Je voudrais, à cet effet, rappeler à la Chambre la décision qui a été
21 rendue avant le début de la présentation de la thèse de Défense de M.
22 Stojic. Nous avons terminé fin novembre 2008 nos débats, parce que la
23 Défense Stojic, à mon sens, de façon légitime, a refusé de commencer la
24 présentation de ses moyens à décharge avant que la Défense de M. Prlic n'en
25 ait terminé avec la présentation de ses propres éléments. La Défense Stojic
26 a également alors informé les Juges de la Chambre qu'elle avait envisagé la
27 présentation de sa thèse avec l'audition d'un témoin expert et que,
28 consécutivement à l'audition de ce témoin expert, d'autres témoins seraient
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1 cités à comparaître et appelés à fournir des explications concernant
2 différents éléments abordés par le premier témoin expert. A l'époque,
3 j'avais considéré qu'une telle position de la Défense de M. Stojic était
4 tout à fait légitime, et j'avais trouvé particulièrement équitable et juste
5 la décision de la Chambre de respecter cette décision prise par la Défense
6 Stojic.
7 En cet instant précis, la Défense du général Petkovic se trouve dans
8 une situation assez analogue. Je souhaiterais rappeler que nous avons eu
9 plusieurs jours d'audience - il me semble que c'était deux ou trois jours
10 d'audience - qui se sont écoulés entre la fin de la présentation de la
11 thèse de la Défense Stojic et le début de la présentation de la thèse de la
12 Défense Praljak. Et ça n'a posé de problème à personne.
13 Maintenant, la Défense du général Petkovic se trouve être la première
14 Défense placée dans cette situation de devoir être prête à occuper un temps
15 d'audience qui pourrait se libérer sans se voir accorder la moindre marge
16 de manœuvre pour ce qui est des jours d'audience qui pourraient ne pas être
17 tenus et utilisés pour la préparation de notre présentation des éléments à
18 décharge. Dans ce contexte, je voudrais rappeler à la Chambre que nous
19 avons un temps supplémentaire qui a été reconnu, non seulement à
20 l'Accusation mais à toutes les autres Défenses à cet effet, et je voudrais
21 signaler que la Défense Petkovic est également intéressée pour préparer un
22 contre-interrogatoire de l'un ou plusieurs des 150 témoins pour lesquels la
23 Défense Praljak a soumis ses écritures qui sont toujours pendantes. Dans la
24 mesure où la Défense Petkovic ne se verrait pas garantir les mêmes
25 conditions pour ce qui est de la préparation du contre-interrogatoire des
26 témoins de la Défense Praljak, nous considérons que cela reviendrait à nous
27 placer dans une situation inéquitable par comparaison aux autres Défenses.
28 De plus, notre premier témoin est un général de la HV dont le temps n'est
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1 véritablement pas à notre disposition. Nous l'avons déjà informé que nous
2 nous attendions à ce qu'il dépose au cours de la première moitié du mois de
3 novembre. Nous lui avons demandé de se mettre à notre disposition aux fins
4 de sa déposition. Et dans la mesure où les Juges de la Chambre en
5 resteraient à la décision qu'ils viennent de rendre, nous ferons tout ce
6 qui est dans notre pouvoir pour faire venir le témoin au moment qui sera
7 déterminé par la Chambre, mais je dois dire maintenant que nous sommes
8 véritablement tout sauf en mesure de décider comment il sera disposé du
9 temps d'autrui, et cela représenterait un cas de force majeure pour
10 quiconque de devoir réorganiser leur emploi du temps afin de venir déposer
11 devant ce Tribunal.
12 C'est pourquoi je souhaite respectueusement demander à la Chambre de bien
13 vouloir reconsidérer la question, à savoir de permettre à la Défense
14 Petkovic de commencer la présentation de ses moyens au 2 novembre de cette
15 année. Je vous prie de bien vouloir réexaminer notre requête visant à
16 commencer au 2 novembre, et je vous prie de bien vouloir croire qu'il
17 existe des raisons justes et légitimes pour nous de vouloir commencer avec
18 la déposition du témoin expert, car tous les autres témoignages de nos
19 témoins des faits se relieront à ce premier témoignage du témoin expert.
20 Tout cela est conçu comme un ensemble. La Défense du général Praljak --
21 pardon, la Défense du général Petkovic serait particulièrement
22 reconnaissante si les Juges de la Chambre pouvaient lui accorder la
23 possibilité de commencer le 2 novembre de cette année.
24 Je vous remercie.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Votre demande de reconsidération fera l'objet de la
26 part de la Chambre d'une décision dans les délais les plus brefs. C'est
27 tout ce que je peux vous dire.
28 Monsieur le Procureur.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie de bien vouloir me donner
2 la parole, Monsieur le Président.
3 Bonjour à vous. Bonjour, Messieurs les Juges.
4 Je souhaite m'excuser auprès de Me Pinter ainsi qu'auprès du témoin. Je
5 sais qu'ils tentent de terminer, mais étant donné que nous abordons des
6 questions de procédure maintenant, j'ai une observation à faire et je dis
7 que ceci est conditionnel, car c'est quelque chose que je dois évoquer avec
8 d'autres membres de l'Accusation, à savoir la personne qui va contre-
9 interroger le témoin expert Gorjanc, alors il se peut que dans un cas comme
10 celui-ci, l'Accusation soit disposée à les contre-interroger une semaine
11 avant cette période de deux mois qui a été fixée. Nous pourrions être prêts
12 plus tôt et peut-être commencer avec ce témoin-là le 26 octobre. Je dis
13 ceci au conditionnel. Je vous demande de ne pas me demander de respecter ce
14 que je dis maintenant, parce que la personne qui est en charge de cela
15 n'est pas quelqu'un que je viens de consulter à l'instant, donc je veux
16 simplement m'assurer que ceci soit exact. Mais il se peut que nous
17 puissions commencer l'expert le 26. Ça, c'est le premier point. Nous
18 remercions les Juges de la Chambre pour la décision qu'ils ont rendue,
19 parce que je crois qu'éliminer cette éventualité, à savoir qu'il y ait des
20 blancs entre la présentation des moyens de la Défense, je pense que ceci,
21 effectivement, est inquiétant.
22 Ma deuxième requête, puisque je suis debout, Monsieur le Président :
23 aujourd'hui, la Défense Praljak a déposé une requête en vertu du 92 quater
24 afin de faire admettre quatre déclarations de témoin en vertu de cet
25 article, et nous demandons, Monsieur le Président, que l'Accusation dépose
26 sa réponse à cette requête-là le 28 octobre en même temps que le dépôt de
27 sa réponse à toutes les requêtes 92 bis. Comme cela, vous pourrez passer en
28 revue toutes les déclarations, et ceci fera partie d'un seul et même lot.
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1 Donc nous demandons une prorogation jusqu'au 28 octobre pour nous permettre
2 de répondre au 92 quater de cette requête de Praljak.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
4 [La Chambre de première instance se concerte]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre qui vient de délibérer vous donne donc
6 jusqu'au 28 octobre pour répondre à la requête 92 quater concernant quatre
7 témoins. Pas de problème.
8 La Chambre invite aussi le Procureur très vite à nous dire s'il peut
9 réduire son délai concernant le témoin expert, ce qui permettrait à ce
10 moment-là de commencer, comme vous l'avez indiqué, dès le lundi 26 octobre,
11 si jamais 3DA venait. Par contre, si 3DA ne vient pas, à ce moment-là, on
12 aura une semaine de battement.
13 Mais il faudrait que Me Kovacic nous informe le plus tôt possible si 3DA
14 vient ou ne vient pas. Mais si 3DA venait et si le Procureur raccourcit son
15 délai, à ce moment-là, il y a aucun problème, on enchaîne dès le 26
16 octobre.
17 Alors on va continuer maintenant avec le témoin. Excusez-nous, Monsieur,
18 mais il fallait régler procéduralement quelques problèmes.
19 Oui, Général Praljak, vous aviez des questions à poser au témoin.
20 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous
21 remercie.
22 Interrogatoire principal par M. Praljak :
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Crnkovic. Quelques brèves questions
24 s'agissant des aspects militaires.
25 Dites-moi, est-ce que vous aviez un grade à Sunja ? Quand j'exerçais le
26 commandement à Sunja, j'avais moi-même un grade ? Comment m'appeliez-vous à
27 Sunja ?
28 R. Hemingway.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais je dois vous rappeler le
2 règlement. Il faut marquer des pauses entre les questions et les réponses.
3 Le témoin a peut-être répondu, mais aucune réponse n'a été consignée, donc
4 je pense qu'il serait préférable de reposer votre première question.
5 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
6 Q. A Sunja, vous-même ou un autre membre de ce que j'appellerais l'armée
7 croate avant le Nouvel An de l'année 1991, est-ce que l'un ou l'autre
8 d'entre vous avait un grade ?
9 R. Non.
10 Q. Mais moi, quand j'étais à Sunja jusqu'au Nouvel An 1991, est-ce que
11 j'avais un grade ?
12 R. Non.
13 Q. Comment m'appeliez-vous lorsque nous étions à Sunja ?
14 R. Hemingway.
15 Q. Est-ce que j'ai imposé des punitions comme, par exemple, des marches de
16 7 à 8 kilomètres ? Est-ce que j'ai imposé de telles sanctions à vous-même
17 ou aux autres hommes sur le front ?
18 R. Oui.
19 Q. Dites-moi, Monsieur Crnkovic, est-ce que l'un ou l'autre des hommes qui
20 ont été punis par moi est resté sur le front et est resté en bonne relation
21 d'amitié avec moi ?
22 R. Ils sont restés sur le front et ils sont restés en bonne relation
23 d'amitié avec vous.
24 Q. Quand j'ai demandé dix hommes pour Mostar, combien d'hommes se sont
25 fait connaître pour aller à mes côtés faire la guerre contre l'armée
26 populaire yougoslave ?
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On a déjà répondu à cette question,
28 500 fois. Nous l'avons entendu.
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1 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bon. Pardon.
2 Q. Où avez-vous été blessé, Monsieur Crnkovic ?
3 R. A Bosanska Posavina.
4 Q. Quelle est la partie du corps qui vous a été enlevée ?
5 R. Ma rate, mon mollet, une partie de mes intestins. Pas mal d'organes.
6 Q. Combien y avait-il de soldats à Sunja à mon arrivée, à côté des 47
7 hommes de la police de réserve et des quelques hommes qui étaient, en fait,
8 d'anciens paysans des villages environnants ?
9 R. Je ne saurais pas vous le dire exactement, mais quelques centaines.
10 Q. Quelle était la longueur de la ligne de défense à Sunja depuis Desnos
11 [phon] jusqu'à Bobovac ?
12 R. Je crois que le front faisait plus de 10 kilomètres.
13 Q. Réfléchissez un peu, Monsieur Crnkovic. Dix kilomètres ou combien ? Le
14 front.
15 R. Je ne saurais pas vous le dire exactement, je veux dire --
16 Q. Combien avions-nous de mortiers à Sunja à mon arrivée ?
17 R. Je crois que nous en avions au maximum deux.
18 Q. Vous rappelez-vous combien nous avions d'obus pour ces mortiers ?
19 R. Enfin, moins de dix.
20 Q. Merci. Dites-moi, est-ce qu'à un moment nous avons reçu deux canons de
21 203 millimètres sur le territoire de Sunja, si vous vous en souvenez ?
22 R. Je m'en souviens. Nous en avons reçu.
23 Q. Vous rappelez-vous que ces canons n'ont pas pu tirer un seul obus parce
24 que nous n'avons pas de tables de tir ?
25 R. Oui, je m'en souviens. Vous les avez tous renvoyés à l'expéditeur en
26 leur faisant retraverser la Sava.
27 Q. Dans la Posavina, quelle était la situation du point de vue des champs
28 de bataille ? Organisée comme à Sunja ou en plein chaos, par rapport à ce
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1 qui se passait à Sunja ?
2 R. C'était à l'opposé de ce qui se passait à Sunja; c'était le chaos le
3 plus complet.
4 Q. Vous avez encore eu des relations par la suite avec l'armée, donc vous
5 avez entendu ce qui se passait. Est-ce que vous auriez entendu qu'un autre
6 champ de bataille aurait été mieux organisé ou organisé aussi bien que
7 Sunja, d'après ce qu'on vous a dit ?
8 R. D'après ce qu'on m'a dit, non.
9 Q. Monsieur Crnkovic, je vous remercie d'être venu. Je vous remercie
10 d'avoir répondu à mes questions.
11 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je remercie les Juges de la Chambre.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous aussi.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
14 Monsieur le Témoin, une question de suivi.
15 Le général Praljak vous a demandé s'il y avait des grades. Vous avez
16 dit : "Non." Et il vous avait demandé comment vous l'appeliez, et vous avez
17 dit : Je vous appelais Hemingway. Alors vous l'appeliez Hemingway parce
18 qu'il avait une barbe ou bien parce que la personnalité de M. Praljak
19 correspondait un peu à l'œuvre d'Hemingway, à savoir le dépassement de lui-
20 même et le goût de l'aventure ? Pourquoi l'avez-vous appelé Hemingway ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas moi qui lui ai donné ce surnom,
22 c'est un de mes amis qui l'a fait. Maintenant, pourquoi il l'a fait, je
23 n'en suis pas sûr.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci. Oui.
25 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, juste une courte question.
26 Vous avez fait la comparaison entre la situation à Posavina et à
27 Sunja. Alors qu'à Sunja, il y avait de l'ordre; à Posavina, c'était le
28 chaos complet. Comment justifiez-vous cette différence ? Pourquoi il y
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1 avait de l'ordre à Sunja, et le chaos complet à Posavina ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] A Sunja, il y avait des lignes de défense
3 renforcées et il y avait des commandants qui dirigeaient les hommes sur ces
4 fronts. Il y avait une distribution régulière de vivres et de munitions. Il
5 y avait des unités de la police civile et de la police militaire qui
6 maintenaient l'ordre au sein de l'armée ainsi que parmi les habitants,
7 autrement dit, les civils. Donc la vie se déroulait aussi normalement que
8 c'était possible dans de telles circonstances. Il y avait aussi
9 suffisamment d'eau, alors que dans la Posavina, rien de tout cela
10 n'existait.
11 M. LE JUGE MINDUA : Il n'y avait pas de commandants militaires à Posavina ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait des commandants militaires, mais il
13 n'y avait pas de fronts avec des commandants commandant de façon déterminée
14 certaines parties du front. Les unités ne correspondaient pas à des parties
15 du front.
16 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors maintenant les Défenses.
18 Pour M. Prlic.
19 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 La Défense de M. Prlic n'a pas de questions à poser à ce témoin. Je
21 vous remercie.
22 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense de M.
23 Stojic n'a pas non plus de questions à poser à ce témoin.
24 Mme ALABURIC : [interprétation] Pas plus que la Défense du général
25 Petkovic, Monsieur le Président.
26 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] La Défense de M. Coric n'a pas de
27 questions pour ce témoin. Je vous remercie.
28 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.
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1 Je vous remercie.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
3 M. STRUGGLES : [interprétation] Bon après-midi, Monsieur le Président. Nous
4 n'avons pas de questions à poser.
5 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de
6 questions à poser à ce témoin, mais je vous prierais de m'autoriser à
7 consacrer deux minutes à vos décisions du début de la reprise des débats.
8 Mais nous pourrions laisser partir le témoin avant cela, bien sûr.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
10 Monsieur le Témoin, au nom de mes collègues, je vous remercie d'être
11 venu apporter votre concours à la demande de la Défense Praljak. Je formule
12 mes meilleurs vœux pour votre retour dans votre pays, et je vais demander à
13 M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
15 vous remercie également.
16 [Le témoin se retire]
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.
18 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, merci du temps que
19 vous m'avez accordé. Je serai très bref.
20 Il vaut peut-être mieux que je parle anglais pour être mieux compris.
21 Cela porte sur la décision que vous avez rendue au début de cette audience.
22 Je tiens juste à vérifier certains points dans cette décision.
23 Cette décision était en réponse à la réponse de l'Accusation qui avait été
24 déposée hier, si je ne m'abuse, et l'Accusation avait principalement
25 demandé, en principal, que la requête Praljak soit rejetée ou, de façon
26 alternative, à ce que l'on augmente le délai. La décision orale du début de
27 cette journée a rallongé le délai de réponse.
28 Mais voici pourquoi je demande une clarification : je comprends bien
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1 que la décision orale, implicitement, a rejeté la réponse où l'on
2 demandait, en fait, de rejeter la requête Praljak. J'aimerais savoir si
3 j'ai bien compris les choses. La demande a-t-elle été rejetée une bonne
4 fois pour toute ?
5 Voici ce que je voulais comprendre. Je n'ai pas très bien compris la
6 décision.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez pas bien compris parce que vous n'avez
8 pas bien écouté. Je relis le deuxième paragraphe de notre décision qui
9 était très claire.
10 La Chambre estime qu'il est dans l'intérêt de la justice d'analyser la
11 demande de la Défense Praljak à la lumière des réponses de toutes les
12 parties qui souhaitent répondre avant de se prononcer sur son admission.
13 Voilà. Donc la Chambre, elle dit : avant de se prononcer sur la requête du
14 Procureur, nous voulons connaître ce que pense les parties, après quoi on
15 va analyser tout cela et nous nous prononcerons, le cas échéant, sur
16 l'admission que vous avez formée dans votre requête demandant l'admission
17 de 155 témoins 92 bis. Avant de rejeter ou d'admettre, on a besoin de
18 savoir la position du Procureur et des autres. Est-ce que vous avez compris
19 ?
20 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.
21 C'est exactement ce que j'avais compris, mais je n'étais pas absolument
22 sûr.
23 En cet instant même, vous n'avez pas rendu de décision, si je puis
24 utiliser le mot, sur le mérite de la demande de la requête Praljak. Et
25 c'est seulement lorsque tout le monde aura déposé sa réponse, l'Accusation
26 l'a déjà fait, mais lorsque les autres parties auront déposé leur réponse,
27 à ce moment-là, bien entendu, vous rendrez votre décision.J'étais obligé de
28 vous poser la question que je viens de vous poser pour une raison simple,
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1 c'est que si votre réponse n'avait pas été ce qu'elle a été, j'aurais dû
2 demander de reconsidérer la réponse de l'Accusation, car la réponse de
3 l'Accusation est dénommée "Réponse préliminaire," or, il n'existe pas de
4 réponse préliminaire selon le Règlement. Donc je tenais à être tout à fait
5 au clair.
6 Je vous remercie de votre réponse qui a fait la clarté dans mon
7 esprit.
8 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, puisque nous avons
9 un peu de temps, je prendrais la liberté de vous demander l'autorisation de
10 déposer une réponse à la réponse que nous avons reçue du Procureur
11 aujourd'hui. Cette réponse concerne la requête conjointe de la Défense de
12 M. Bruno Stojic, de M. Praljak et de M. Petkovic. Dans cette requête, il
13 est demandé à la Chambre d'ordonner à l'Accusation la communication de tous
14 les documents émanant des procès jugés par ce Tribunal contre les officiers
15 de l'ABiH et émanant de toutes les autres procédures, donc ces documents
16 qui sont en la possession du bureau du Procureur et qui ont un rapport avec
17 la direction de l'ABiH ainsi que les dirigeants politiques musulmans et
18 leurs dirigeants militaires. Je ne vais pas rentrer dans les détails.
19 Dans la réponse du Procureur, certaines questions sont évoquées, y compris
20 la différence entre l'obligation de communication qui s'applique à certains
21 documents et pas à d'autres; je veux parler du fait que certains documents
22 peuvent être transmis à la Défense par ADS ou d'autres moyens techniques.
23 Nous considérons que les questions que l'Accusation évoque dans sa réponse
24 méritent une réplique. C'est la raison pour laquelle je vous prie de nous
25 autoriser à répliquer à la réponse de l'Accusation.
26 Merci bien.
27 [La Chambre de première instance se concerte]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, la Chambre vous autorise donc à
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1 répliquer et vous donne 15 jours pour faire vos écritures.
2 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. De
3 toute façon, nous étions prêts à soumettre notre réplique vendredi, mais
4 nous sommes très satisfaits de cette prorogation du délai. Je vous
5 remercie.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Je crois qu'il vaut mieux pas allonger les débats,
7 parce que c'est un sujet que je connais particulièrement bien. Mais si vous
8 continuez, vous allez m'obliger à intervenir.
9 Monsieur Stringer, vous êtes debout.
10 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie.
11 Je tiens juste à répondre rapidement aux remarques de Me Kovacic.
12 J'ai un peu l'impression qu'il essaie de -- enfin je n'ai pas très bien
13 compris ce qu'il disait, mais je pense qu'il est en train de déformer notre
14 position.
15 L'Accusation a déposé une première réponse, tout d'abord parce que
16 cela n'aborde pas la teneur des 150 déclarations qu'il a présentées en
17 masse, si je puis dire, et que nous devons maintenant étudier. Au vu de la
18 décision prise par la Chambre, nous comprenons bien que nous avons jusqu'au
19 28 octobre pour déposer une véritable réponse étoffée et substantielle, en
20 comprenant les 150 déclarations qui ont été proposées. Et après cette
21 réponse, la Chambre de première instance étudiera quel type de décisions
22 elle peut prendre. Donc je veux être très clair. Je tiens à vous dire que
23 le 28 octobre, l'Accusation déposera une réponse étoffée concernant chacune
24 de ces 150 déclarations. Et nous sommes très reconnaissants que d'avoir
25 obtenu un délai supplémentaire.
26 Nous vous remercions.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous remercie, Monsieur
28 Stringer. C'est effectivement ce que la Chambre attend de vous, donc vous
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1 avez également bien compris la décision.
2 De ce fait, demain nous n'avons pas d'audience, puisque le témoin ne
3 viendra que jeudi. Donc ça vous permettra de préparer son audition de
4 jeudi. Jeudi, nous n'aurons qu'une pause, on terminera à 18 heures, et on
5 reprendra avec ce témoin lundi puisqu'il est prévu sur deux jours.
6 Donc voilà ce que je voulais vous dire. Je vous souhaite à tous une
7 bonne fin de journée et à jeudi, 14 heures 15.
8 --- L'audience est levée à 18 heures 27 et reprendra le jeudi 24
9 septembre 2009, à 14 heures 15.
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