Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 6 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   tous et à toutes.

 11   Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 12   Merci, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce mardi 6 octobre 2009, je salue en premier M. le Professeur. Je salue

 15   MM. les accusés. Je salue Mmes et MM. les avocats, je salue M. Scott et sa

 16   collaboratrice, et je salue toutes les autres personnes qui nous assistent.

 17   Monsieur le Greffier, je vous donne la parole. Il y a deux numéros IC.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. La

 19   Défense Praljak a déposé son objection à un document soumis par

 20   l'Accusation par le truchement du Témoin Zvinko Tokic. Ce sera la pièce IC

 21   1071. L'Accusation, quant à elle, a déposé son objection à la liste

 22   Praljak. Les documents versés par le même Témoin Tokic. Ce sera la pièce IC

 23   1072. Merci.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 25   Bien. L'interrogatoire du témoin expert va commencer. Le Procureur nous a

 26   remis un classeur. Je le remercie, donc je vais lui donner la parole.

 27   Monsieur Scott.

 28   Oui, Maître Kovacic.

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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

  2   permettez un mot, et je m'en excuse. J'ai montré hier le CV professionnel

  3   au témoin au travers de documents présentés et l'intention était d'en faire

  4   des documents IC. Malheureusement, à la fin de cette partie-là, j'ai oublié

  5   de demander l'octroi de numéros à des fins d'identification et je l'ai en

  6   mains; tout le monde sait de quoi il s'agit. C'est ce qu'on a vu hier, et

  7   je voudrais une cote à des fins d'identification.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez un numéro IC aux fins

  9   d'identification.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Volontiers, Monsieur le Président. Le

 11   document que vient de mentionner Me Kovacic sera le document IC 1073.

 12   Merci.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Scott.

 14   LE TÉMOIN : VLADO SAKIC [Reprise]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   Contre-interrogatoire par M. Scott :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 18   R.  Bonjour, Monsieur le Conseil.

 19   Q.  Ceci a déjà été dit plusieurs fois depuis hier et vous le comprendrez

 20   j'ai peu de temps, mon temps est compté. Je vous saurais gré de me donner

 21   des réponses concises car mes questions le seront aussi; écoutez bien ces

 22   questions.

 23   Si je vous demander un complément d'information, je vous le dirai

 24   exclusivement et je vous remercierai de votre assistance dans ce cas-là.

 25   Une question liminaire pour être sûr que nous sommes d'accord sur certains

 26   détails fondamentaux. A la lecture de votre CV, mais aussi de votre

 27   déposition, on dit que vous êtes né le 2 septembre 1954; est-ce exact ?

 28   R.  C'est ça.

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  1   Q.  Comment s'appelle votre père ? Quel est son prénom.

  2   R.  Ivan.

  3   Q.  Est-ce que vous avez fait votre service militaire, une expérience

  4   militaire ? Je suppose qu'avant que vous ne commenciez votre travail

  5   d'universitaire, est-ce que vous avez fait un service militaire ?

  6   R.  J'ai fait le service militaire dans la JNA en 1980, Monsieur le

  7   Procureur.

  8   Q.  C'est quand le service militaire était encore obligatoire, n'est-ce pas

  9   ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  Vous dites 1980, est-ce que c'était pendant l'année 1980 ?

 12   R.  Monsieur le Procureur, c'était fin 1979 à fin 1980. J'étais censé faire

 13   un service d'un an. Je n'ai fait que dix mois. Le service militaire était

 14   de 15 mois mais, comme j'avais une formation universitaire, les 15 mois

 15   c'était pour ceux qui n'avaient pas fait d'études universitaires, et ceux

 16   qui en avaient fait, c'était plus court. Je suis devenu caporal au sein de

 17   la JNA.

 18   Q.  Bien. J'allais vous poser quelques questions supplémentaires à ce

 19   propos. Vous dites avoir quitté votre service d'active en tant que caporal-

 20   chef; est-ce que vous avez fait une formation spéciale dans le cadre de ce

 21   service dans la JNA ?

 22   R.  Monsieur le Procureur, je l'ai dit : c'est le grade le moins élevé au

 23   sein de la JNA. Il y a une formation particulière que nous avons fait

 24   suivre. C'est tout ce que j'ai fait, je n'ai rien eu d'autre, et je n'ai eu

 25   aucune autre espèce de formation entraînement militaire.

 26   Q.  Très bien. Ma question ne portait pas tant sur le grade, c'était plutôt

 27   de savoir si vous aviez suivi une spécialité particulière, par exemple, en

 28   artillerie ou dans l'infanterie. Est-ce que vous avez fait une formation

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  1   dans les transmissions ? Est-ce que vous avez une spécialité quelle qu'elle

  2   soit ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, je suis caporal dans l'infanterie, donc j'ai

  4   suivi une formation d'infanterie. C'est tout à fait particulier. On envoie

  5   les soldats -- certains soldats, certaines recrus pour qu'ils suivent une

  6   formation aux fins de devenir caporal. Je l'ai fait en Slovénie dans une

  7   petite localité qui s'appelle Vipava.

  8   Q.  Est-ce que vous avez servi à un moment donné de la guerre dans les

  9   forces croates ? Quand je dis "la guerre," je parle de la période qui va de

 10   1991 à 1995.

 11   R.  En 1991, je me trouvais au ministère de la Justice et de

 12   l'administration au département chargé de la Mise en œuvre des sanctions

 13   pénales, et j'y suis resté jusqu'à septembre 1992. C'était la période des

 14   conflits les plus âpres. Pendant ce temps-là, au mois de septembre, je suis

 15   devenu ministre adjoint de la justice. Cela revient à dire que j'étais

 16   responsable, chef de toutes les prisons en Croatie.

 17   Q.  Un instant, une chose à la fois. Vous venez de nous dire qu'à l'apogée

 18   du conflit, vous avez dit, je pense, en septembre 1992, et vous avez dit

 19   que vous y aviez participé, et vous dites aussi que vous étiez ministre

 20   adjoint de la justice en septembre. Alors une précision : quel était votre

 21   rôle quand vous avez participé aux conflits en septembre 1992, ou vers

 22   cette date ?

 23   R.  Non, je ne l'ai pas été, à ce moment-là, Monsieur le Procureur. Il

 24   s'agissait de gouvernement de l'Union démocratique. C'est le gouvernement

 25   de guerre, comme on l'appelle populairement parlant. J'étais donc adjoint

 26   du ministre de la justice et il y avait des fonctions d'adjoint du ministre

 27   de la défense puisque j'étais à la tête de toutes les prisons et de la

 28   police judiciaire, qui c'était d'après la loi en Croatie la troisième des

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  1   formations militaires en présence. Il y a eu création de plusieurs unités

  2   par leurs soins. Au mois de mars 1992, c'est devenu une brigade. C'était

  3   une brigade, 98e Brigade des Effectifs de réserve de l'armée croate,

  4   composée de la police judiciaire et autres agents travaillant dans les

  5   prisons.

  6   Q.  Merci. Je vous l'ai dit, il faut essayer de tenir compte du temps,

  7   utilisons le bien. Vous avez répondu à ma question.

  8   Est-ce que, dans ce service, vous avez plus tard reçu le grade -- est-ce

  9   que vous avez reçu le grade de colonel plus tard de la part du président

 10   Tudjman ?

 11   R.  J'ai été promu au rang de colonel, parce qu'au mois de mars, non plutôt

 12   en début 1992, je ne me souviens pas exactement de la date, j'ai été promu

 13   donc commandant adjoint puis commandant de la brigade. Comme le commandant

 14   ne pouvait pas à ne pas avoir de grade on m'a proposé un grade de brigadier

 15   compte tenu de ma formation supérieure. J'ai plaisanté en disant que je

 16   préfèrerais être colonel parce que c'était un grade inférieur. Alors on m'a

 17   attribué un grade de colonel pour que je puisse commander la brigade. C'est

 18   le président Tudjman qui m'a donné ce grade de colonel de l'armée croate

 19   dans la réserve. Donc j'ai été chargé de la supervision de cette police

 20   judiciaire en ma qualité de commandant adjoint de la brigade et celle-ci a

 21   participé à la guerre de la défense de Croatie et une autre partie de ces

 22   effectifs était chargée du gardiennage des prisonniers.

 23   Alors je vais dire qu'au début de la guerre je n'étais pas directeur

 24   mais il y a eu un décret militaire du gouvernement on a relâché les

 25   prisonniers qui étaient là pour des touts petits délits. C'est coutumier

 26   dans la plupart des pays en temps de guerre.

 27   Q.  Vous avez continué d'exercer vos fonctions au sein du ministère de la

 28   Justice et dans le système pénitentiaire, mais est-ce que vous avez

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  1   participé à d'autres opérations militaires des opérations de combat dans le

  2   cadre de la guerre ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, je n'ai pas participé au combat. Je n'ai fait

  4   que superviser l'entraînement de cette brigade et son expédition vers

  5   certaines zones où il y a eu des combats, zones opérationnelles. Il

  6   s'agissait de zones opérationnelles en Slavonie, dans la Lika, et au front

  7   sud. Les soldats de cette brigade étaient envoyés vers ces zones

  8   opérationnelles pour y être placés sous le commandement direct du

  9   commandant des dites zones opérationnelles et c'est ces commandants qui

 10   étaient leurs supérieurs immédiats pour ce qui est des combats.

 11   Q.  Est-ce que je vous ai bien compris, dites-vous, que vous avez participé

 12   à la formation de ces hommes, mais une fois envoyés sur ces zones, dans une

 13   zone opérationnelle donnée, ces hommes étaient placés sous le commandement

 14   de quelqu'un d'autre ?

 15   R.  Monsieur le Procureur, je n'ai pas participé à l'entraînement. Je n'ai

 16   fait que superviser. Mais il est exact de dire qu'ils ont par la suite été

 17   placés sous le commandement direct d'autres supérieurs, d'autres officiers.

 18   Q.  Ça couvert quelle période ? Donnez-moi une année, je n'ai besoin que

 19   d'une date approximative.

 20   R.  Monsieur le Procureur, ça s'est passé entre le 16 janvier 1992, et la

 21   fin juin 1992. Date à laquelle où cette brigade a été démantelée parce

 22   qu'un décret du ministère de la Défense et du gouvernement a fait que ces

 23   unités ont été démantelées puisqu'on a finalisé la mise en place de l'armée

 24   croate. Donc il n'avait pas besoin de ressource supplémentaire.

 25   Q.  Merci. Veuillez -- vous avez un classeur et vous voyez que les onglets

 26   sont numérotés, voici comment nous allons faire, prenez l'onglet 3D 03727.

 27   Ah, excusez-moi, je me suis trompé. Enfin, oui, c'est une copie de votre

 28   curriculum vitae. Je ne sais pas s'il est nécessaire de l'examiner, mais je

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  1   vais y faire référence.

  2   Dans ce CV, vous indiquez que vous avez reçu le certificat de participation

  3   à la guerre patriotique. Est-ce que ce certificat fait suite à ce que vous

  4   venez de dire à votre service de six mois dans une fonction de surveillance

  5   disons ou de contrôle de la brigade ? Est-ce que c'est pour ce service que

  6   vous avez reçu ce certificat de participation ?

  7   R.  Monsieur le Procureur, c'est exact. C'est une espèce de titre

  8   commémoratif de la guerre patriotique, cela a été distribué à la totalité

  9   de ceux qui ont surveillé les activités de ces brigades au sein du

 10   ministère de la justice, et au moment où la brigade a été démantelée, on

 11   nous a distribué ces titres.

 12   Q.  Très bien. Vous auriez pu dire oui, ça aurait été plus court comme

 13   réponse.

 14   Prenez l'onglet P 11016. P 11016, est-ce que vous voyez que ça fait

 15   partie du journal officiel de la République de Croatie ? P 11016. Vous

 16   l'avez aussi à l'écran, si c'est plus facile pour vous de le lire. Est-ce

 17   que, dans ce journal officiel, dans ce numéro, nous avons la traduction en

 18   anglais mais la colonne du milieu, est-ce qu'elle reprend votre nom comme

 19   étant un des numéros II dans le premier groupe dans le cadre de votre

 20   désignation à la fonction de colonel, ce qu'a fait le président Tudjman ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Nous revenons un instant à la période qui va de 1984 à 1991, vous avez

 23   dit avoir travaillé comme chef du service du traitement des délinquants au

 24   ministère de la justice. Vous en parlez dans votre CV, et vous dites que

 25   1991 à 1992, vous étiez ministre adjoint de la justice; est-ce exact ?

 26   R.  C'est exact pour ce qui est des fonctions d'adjoint. Je suis devenu

 27   chef entre 1986 et 1991, d'un des départements chargés du Traitement. C'est

 28   une section professionnelle pour ce qui est de surveiller tout le personnel

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  1   qualifié dans les prisons, ensuite, j'ai été conseiller.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Professeur, je découvre que vous avez

  3   été ministre adjoint de la justice, vous auriez pu le marquer dans votre

  4   CV, ce qui aurait permis de gagner du temps.

  5   En tant que ministre adjoint de la justice, est-ce que vous aviez rencontré

  6   le ministre adjoint de la défense, le général Praljak ? Est-ce qu'au niveau

  7   du gouvernement croate, il y avait des réunions de ministres adjoints ou ça

  8   n'existait pas ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'étais pas le

 10   suppléent, j'étais juste adjoint chargé d'un département chargé au sein de

 11   la Justice. Il y avait le département de la Justice, de l'Administration et

 12   celui de l'exécution des sanctions au pénal. J'étais chargé, moi, de

 13   l'exécution des sanctions au pénal. Je n'ai pas remplacé le ministre, par

 14   conséquent, je n'ai pas participé aux sessions du gouvernement, et je n'ai

 15   pas eu de réunions avec les autres ministres, voire adjoints. Je n'ai été

 16   que chargé de la surveillance de ce qui concernait les prisons, et au sein

 17   de la brigade, j'étais chargé de veiller à son expédition vers les lignes

 18   de front, et à son entraînement.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous n'avez pas mentionné ça sur votre CV ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, dans mon CV, il est dit

 21   que j'ai travaillé au ministère de la Justice. Je pense que cela y est dit.

 22   Je n'ai jamais caché que j'étais ministre adjoint. C'est ce qui est dit

 23   dans mon CV. On dit aussi que j'ai eu des distinctions, et cetera. Je n'ai

 24   pas mis le grade de colonel dans le CV, parce que dans la communication

 25   scientifique, ce n'est pas une information pertinente. Ça fait partie de ma

 26   participation à la défense patriotique lorsque la Croatie s'est trouvée

 27   menacée par une agression serbe totale. Et, je n'ai pas considéré cela

 28   comme étant important.

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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le souhaitez,

  2   on peut se référer à une page, le 3D 03727, page 3D42-6773. On y dit dans

  3   les références : "Pour ce qui est du travail effectué, ministre adjoint

  4   pour les activités." Enfin, c'est le CV original qui est versé au dossier

  5   comme document. Merci.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Une simple question de suivi après la question posée par le Président

  9   de la Chambre, pour en terminer.

 10   Je vois votre CV, je vous demande une nouvelle confirmation. Dans votre CV,

 11   vous ne dites rien de votre service militaire, ni du fait que vous étiez

 12   colonel. Vous ne pensez pas que ce soit important pour quelqu'un qui lit

 13   votre CV, ça ne risque pas de l'intéresser ?

 14   R.  Monsieur le Procureur, mon CV est un CV scientifique. Je communique

 15   avec des hommes de science. Avec le CV que j'échange, j'ai envoyé donc au

 16   Tribunal mon CV habituel, qui est celui que j'envoie d'habitude pour ce qui

 17   est des activités exercées de par le passé. Dans ma biographie, à des fins

 18   autres, j'aurais indiqué ce que vous êtes en train de dire, mais le

 19   Tribunal ne m'a pas dit de me prononcer de façon distincte à ce sujet, pas

 20   plus que la Défense, sans quoi je l'aurais fait pour sûr. Je ne dissimule

 21   pas la chose; au contraire, je me félicite d'avoir participé à la défense

 22   de la Croatie en ces temps-là.

 23   Q.  Pendant la période où vous étiez au ministère de la justice, et vous

 24   occupiez du système pénitentiaire, ou du traitement des personnes

 25   condamnées; n'est-il pas vrai que vous avez fait l'objet d'une certaine

 26   polémique qui portait sur votre participation à ces questions, à l'époque

 27   et au fait que vous avez travaillé ou à la façon dont vous avez traité des

 28   dissidents, des prisonniers politiques ?

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  1   R.  Monsieur le Procureur, du temps du système totalitaire en Croatie, il

  2   n'y a pas eu que moi à avoir des dilemmes puisque j'ai travaillé dans ce

  3   système. C'était le dilemme de tous ceux en Croatie, pour ce qui est de la

  4   poursuite en justice des prisonniers politiques. Je tiens à mentionner que,

  5   dans le temps où j'ai eu à intervenir dans la justice, je n'ai pas eu de

  6   contact avec les prisonniers politiques. Je n'ai pas été chargé d'eux.

  7   Q.  Est-ce que -- quel était votre dilemme ? Pourriez-vous nous le dire ?

  8   R.  Nous avons parlé de la psychologie sociale et nous avons dit qu'il y a

  9   deux modèles pour ce qui est du conformisme en matière d'information. Il y

 10   a le fait de céder publiquement ou d'accepter à titre privé. Moi, je n'ai

 11   jamais accepté à titre public.

 12   L'INTERPRÈTE : Les interprètes seraient gré au témoin de ralentir un peu

 13   son débit. Son débit est très saccadé et rapide.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais donc accepté la chose en privé,

 15   mais j'ai dû céder comme tous les citoyens en Croatie, parce que cela

 16   mettait en jeu mon existence et le travail qui était le mien, et le travail

 17   dans le ministère de la Justice était le domaine qui m'intéressait. C'était

 18   donc cette psychologie qui m'intéressait et j'ai eu à intervenir dans cette

 19   profession, c'est à ce titre que j'ai acquis un statut d'expert reconnu par

 20   les Nations Unies.

 21   M. SCOTT : [interprétation]

 22   Q.  Désolé. Je sais que vous voulez en parler. Vous l'avez déjà dit hier

 23   mais restons centrés sur le sujet. Vous disiez que vous étiez en point à un

 24   dilemme, et dans le fond, vous dites que vous étiez dans une situation où

 25   ce qu'on vous demandait de faire dans le cadre de votre travail, se

 26   trouvait en conflit immédiat avec vos valeurs personnelles, vos sentiments

 27   personnels, n'est-ce pas ?

 28   R.  A l'époque, où j'ai eu à intervenir dans la justice, on a jamais

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  1   demandé de ma part à ce que je fasse ce genre de choses.

  2   Q.  Je suis désolé mais je vous ai posé ma question plusieurs fois.

  3   Ecoutez-la bien, elle est précise. Si MM. les Juges veulent une explication

  4   supplémentaire, je suis sûr qu'ils vous le diront. Mais la question que je

  5   vous posais, il suffit d'y répondre par oui ou par non. Vous avez dit que

  6   vous étiez en point à un dilemme, et qu'un dilemme que tout le monde

  7   connaît, c'est un effort parce qu'il fallait se conformer au système. Il

  8   fallait faire des choses parce qu'on travaillait, mais en privé dans votre

  9   âme, disons, quel que soit le nom qu'on veuille donner à ce sentiment-là,

 10   vous consentiez à un conflit; est-ce bien vrai ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, je ne peux pas répondre à cette question par un

 12   oui ou par un non parce que ce n'est pas quelque chose que j'ai fait. Si je

 13   l'avais fait, je ne sais pas si j'aurais accepté de le faire. C'est ce que

 14   je voulais vous dire. Si quelqu'un m'avait contraint à faire ce genre de

 15   chose en matière de justice, je n'aurais probablement pas accepté de faire

 16   cela. Donc je ne peux pas en parler aujourd'hui. Donc je n'ai pas eu ce

 17   type de dilemme pour ce qui est donc de faire quelque chose à l'opposé de

 18   mes positions humanistes. Je n'ai pas été placé dans ce type de situation

 19   mais je pense que je ne l'aurais pas fait même au prix de séquelles assez

 20   graves.

 21   Q.  Vous dites, sous serment aux Juges, que vous n'avez pas fait l'objet de

 22   polémique dont on fait état les médias croates à propos de votre

 23   participation de votre implication dans ces affaires ?

 24   R.  Monsieur le Procureur, ceci n'a rien à voir avec la question que vous

 25   venez de me poser tout à l'heure. Je suis ici sous serment et je vous ai

 26   répondu la vérité jusqu'à présent. Si vous me posez des questions au sujet

 27   des médias, c'est une autre catégorie. Posez-moi donc des questions aux

 28   médias, et là, je vous répondrai à ce type de questions.

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  1   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi. Je vais vous demander à

  2   tous les deux, comme d'habitude, de ne pas oublier de ralentir, et je pense

  3   surtout à M. l'expert. Il ne devrait pas oublier que les interprètes ont

  4   quelquefois du mal à vous suivre car vous parlez très vite, et comme

  5   d'habitude, n'oubliez pas de ménager une pause entre la question et la

  6   réponse.

  7   Merci.

  8   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, j'essaierai d'aller moins vite.

  9   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 10   M. SCOTT : [interprétation]

 11   Q.  Donc nous n'avons peu de temps, et il faut que nous  avancions. Nous

 12   pourrons sans doute revenir à ce sujet.

 13   Mais vous n'avez dit que de 1992 à ce jour, vous avez travaillé à

 14   l'institution sociale d'Ivo Pilar et vous avez aidé à la création de cette

 15   entreprise d'ailleurs de cet institut, n'est-ce pas ?

 16   R.  Monsieur le Procureur, c'est exact; cependant, je n'ai pas fondé cet

 17   institut sel. Il a été fondé par un groupe de scientifiques croates.

 18   Q.  Nous allons y venir. C'est à moi de poser la question. Donc à la

 19   première question, vous avez répondu par une affirmative : oui, vous étiez

 20   l'un des membres fondateurs de l'institut. Pouvez-vous nous dire qui

 21   étaient les autres membres fondateurs ?

 22   Par exemple, Miroslav Tudjman n'était-il pas l'un des fondateurs de cet

 23   institut ?

 24   R.  Il y a eu 30 fondateurs parmi lesquels Miroslav Tudjman également.

 25   Q.  Miroslav Tudjman, bien. Qu'en est-il de Miomir Zuzul, qui lui aussi a

 26   été témoin en l'espèce ?

 27   R.  Miomir Zuzul, il ne faisait pas partie des fondateurs de l'institut; il

 28   était l'une des personnes qui ont soutenu l'institut.

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  1   Q.  M. Jurcevic, qui était l'un de vos collègues très proche et qui a

  2   témoigné d'ailleurs ici il y a peu de temps ? N'était-il pas l'un des

  3   membres fondateurs de cet institut ?

  4   R.  Il était parmi les fondateurs, oui.

  5   Q.  Mais à l'époque et pendant certain temps, cet institut n'était-il pas

  6   principalement, ne servait-il pas principalement de véhicule pour les idées

  7   de Tudjman, pour fournir en fait au gouvernement Tudjman une caution,

  8   "caution intellectuelle" ?

  9   R.  Monsieur le Procureur, j'affirme catégoriquement que cela n'est pas

 10   exact.

 11   Q.  Enfin, ce n'est pas un secret, ça arrive aussi aux Etats-Unis

 12   d'ailleurs. Nous avons ce qui s'appelle les "think-tanks," le centre de

 13   réflexion. Parfois lorsqu'il y a un gouvernement américain, il y a des

 14   "think-tanks" qui travaillent pour le gouvernement et lorsqu'il y a un

 15   gouvernement démocrate, ce sont plutôt les "think-tanks" démocrates qui

 16   sont associés au gouvernement. C'est exactement ce qu'était cet institut

 17   Ivo Pilar, c'était un "think-tank," un centre de réflexion pour le

 18   gouvernement. C'était la caution intellectuelle du gouvernement, du

 19   gouvernement Tudjman, n'est-ce pas ?

 20   R.  Monsieur le Procureur, j'affirme catégoriquement qu'aucune de ces

 21   suppositions que vous avez énoncées n'est exacte. L'institut des Sciences

 22   sociales, dès sa fondation, a été conçu comme étant exclusivement un

 23   institut scientifique intervenant au sein de la société, et aujourd'hui, il

 24   est également conçu comme une institution humaniste. C'est ainsi qu'il a

 25   fonctionné depuis le début et aujourd'hui il a acquis une réputation

 26   internationale. Nous avons collaboré avec tous les acteurs au sein de la

 27   structure de la société croate, aussi bien les acteurs économiques que les

 28   institutions politiques, les institutions sociales également. Le fait que

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  1   nous n'ayons pas été centré exclusivement sur le président Tudjman, elle

  2   est appuyée par un exemple que je peux vous citer.

  3   Q.  Je m'excuse mais vous nous avez dit, d'ailleurs M. Jurcevic  nous a dit

  4   nettement la même chose, que c'était un institut qui a été fondé par le

  5   gouvernement qui avait été créé par des personnes très proches du

  6   gouvernement, y compris le fils du président Tudjman, y compris vous-même,

  7   M. Jurcevic, et vous en tant que vice ministre de la Justice. Donc il

  8   s'agissait en fait d'une opération du gouvernement, une entreprise du

  9   gouvernement.

 10   R.  Monsieur le Procureur, je dois répéter encore une fois que cela non

 11   plus n'est pas exact ce que vous venez de dire. L'institut a été fondé le

 12   18 novembre 1991 sur le fondement d'une décision de l'assemblée de

 13   l'Université de Zagreb en tant qu'institution universitaire.

 14   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 15   je n'ai pas voulu formuler d'objection avant que le témoin ne réponde. Mais

 16   je vous prie de bien vouloir revenir sur la question du Procureur. Il

 17   s'agit de pures spéculations car pour poser une question ainsi formulée il

 18   faut connaître le cadre juridique en vigueur en Croatie à l'époque. La

 19   façon dont il était possible de fonder des instituts universitaires et

 20   autres, exclusivement en conformité avec ce cadre juridique. Alors si mon

 21   confrère, M. le Procureur, ignore ce cadre juridique, c'est son problème,

 22   mais s'il le sait, il doit interroger le témoin à ce sujet de toute

 23   manière; autrement, c'est de la pure spéculation qu'il s'agit, et cela

 24   n'est pas acceptable ici. C'est une institution qui n'a rien d'une

 25   institution gouvernementale. C'est absolument incorrect et je ne prendrai

 26   pas plus de temps.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- marqué au transcript. Moi-même,

 28   hier, j'avais posé au témoin des questions sur l'élection de son directeur,

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  1   donc je m'étais posé la question du positionnement de l'institut Ivo Pilar

  2   vis-à-vis du gouvernement croate, d'où mes questions d'hier.

  3   Mais le Procureur, il peut penser également à autre chose. Attendons de

  4   voir s'il termine ou pas.

  5   Bien, Monsieur Scott.

  6   M. KOVACIC : [interprétation] Juste un instant, Monsieur le Président,

  7   Messieurs les Juges. Pour éviter tout malentendu, c'est précisément la

  8   substance de la chose, mais vous avez posé la question de façon correcte,

  9   vous ne vous êtes pas livré à une spéculation dans le sens que ce serait

 10   une institution de tel ou tel type. Vous avez posé une question au témoin

 11   pour comprendre quelle était la nature de cette institution, et c'est

 12   précisément pour cela que j'avance que mon confrère spécule. Il affirme que

 13   c'est une institution gouvernementale. Premièrement, cela ne découle pas

 14   des questions posées hier; et deuxièmement, ce qui est le plus important,

 15   cela ne découle pas non plus de la loi. Alors s'il ne connaît pas la loi en

 16   question, qu'il ne demande pas les choses ainsi ou alors qu'il se mette au

 17   courant de la loi et qu'il pose ses questions ensuite. C'est mon objection.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, on ne sait pas si le Procureur

 19   n'avait pas d'autres questions à poser. Il a peut-être d'autres éléments en

 20   sa possession. Je n'en sais rien. Il veut peut-être nous démontrer que cet

 21   institut dépend totalement du gouvernement. Moi, je n'en sais strictement

 22   rien. Donc attendons de voir ce que dira M. le Procureur.

 23   Mon collègue veut intervenir.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, j'aimerais juste rajouter mes

 25   propos à ceux du Président. Nous ne sommes quand même pas suffisamment

 26   naïfs pour ne pas savoir que le cadre juridique est une chose et

 27   l'orientation politique en est une autre. Nous le savons bien, cela quand

 28   même. Donc je ne vois absolument pas pourquoi M. Scott n'aurait pas le

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  1   droit de poser des questions à propos des orientations politiques de cet

  2   institut, même s'il s'agit d'un institut universitaire au départ, même s'il

  3   est parfaitement indépendant, et cetera.

  4   M. KOVACIC : [interprétation] Je prends acte de ce que vous avez dit,

  5   Monsieur le Juge, je suis d'accord. Mais dans ce cas-là, que mon confrère

  6   interroge le témoin concernant cette orientation politique. Alors excusez-

  7   moi, peut-être que je n'ai pas été assez clair. J'ai juste une objection

  8   quant à la formulation de cette question, car elle est de nature

  9   spéculative et elle implique une affirmation inexacte. D'un point de vue

 10   juridique, elle est inexacte, elle n'a pas non plus de fondement dans les

 11   faits que nous avons eu l'occasion d'entendre jusqu'à ce stade. C'est mon

 12   objection. Veuillez vous référer à la question, telle qu'elle est formulée.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Kovacic, je pense que vous

 14   exagérez un peu. Bien, nous avons compris d'un côté il y a le cadre

 15   juridique, mais M. Scott ne pose pas de question sur le cadre juridique. Il

 16   pose des questions sur la loyauté de cet institut, son affiliation

 17   éventuelle, donc je ne vois pas pourquoi on ne lui permettra pas de poser

 18   ses questions.

 19   Veuillez poursuivre, Monsieur Scott.

 20   M. KOVACIC : [interprétation] Juste aux fins du compte rendu d'audience,

 21   Messieurs les Juges, la question figure au compte rendu d'audience, et on

 22   voit très bien comment elle se présente. Je n'en dirai pas plus, je vous

 23   remercie. 

 24   M. SCOTT : [interprétation]

 25   Q.  Dans votre CV, vous dites aussi que l'on vous a décerné une médaille

 26   pour la création de cet institut. Donc pourriez-vous nous dire à quel

 27   moment vous avez reçu cette médaille ? Je vous demande une date, pas

 28   d'explication, juste une date.

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  1   R.  Monsieur le Procureur, ces médailles ont été distribuées de façon

  2   autonome par l'institution à l'intention de ses fondateurs. Il me semble

  3   que c'était en 1996 ou 1997.

  4   Q.  Très bien. Mais, n'est-il pas vrai qu'un certain nombre de personnes

  5   qui auparavant ont été associées au ministère de la défense croate, avec

  6   une branche en tout cas de ce ministère appelé l'IPD, c'est-à-dire service

  7   de l'Information et de la Propagande ou Information et opération

  8   psychologique, personnes comme M. Zuzul, M. Jurcevic et d'autres étaient

  9   finalement les personnes qui ensuite ont été extrêmement impliquées dans

 10   l'institut Ivo Pilar ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, quelques-uns d'entre eux ont participé à la

 12   fondation de l'institut, au sein de ce large groupe de fondateurs. Ils y

 13   ont pris part en 1990 et 1991, alors que l'IPD n'existait pas encore. Les

 14   accords portant fondation de l'institut étaient en disposition déjà en

 15   1990, juste après les élections démocratiques. C'est dès lors que nous

 16   avons commencé avec cette initiative. L'IPD, personne n'en avait pas

 17   entendu parler. Il n'existait pas.

 18   Q.  Je répète --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous intervenez, Monsieur Praljak ?

 20   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] L'IPD, ce n'est pas de la propagande.

 21   Nous l'avons établi des centaines de fois à partir des documents. C'est la

 22   Section des Activités et d'Information et de la Psychologie.

 23   M. SCOTT : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec M. Praljak, mais

 24   je n'ai pas le temps de traiter tout cela. Nous savons très bien, en fait,

 25   que l'IPD était un service de Propagande. Il y a un nombre de témoins qui

 26   en ont parlé. Je vais parler de mon propre gouvernement, je n'ai pas honte

 27   après tout. Il y a, dans mon gouvernement aux Etats-Unis, des groupes qui

 28   circulent autour du gouvernement et sont dans une relation qui est proche

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  1   d'une -- ça fonctionne comme un peu comme une porte tambour, donc ils

  2   rentrent, ils sortent. Si le gouvernement en place est un gouvernement qui

  3   leur sied, ils sont dedans; sinon, ils sont en dehors.

  4   Q.  Donc c'est exactement la même relation qui existait entre l'IPD et

  5   l'institut Pilar, n'est-ce pas ?

  6   R.  Monsieur le Procureur, l'institut Ivo Pilar n'a aucun lien à part avec

  7   --

  8   Q.  Vous n'écoutez pas mes questions. Je voudrais que vous répondiez par

  9   oui ou par non. Donc vraiment nous utilisons du temps, et j'ai peu de

 10   temps. Donc il faut répondre à mes questions par oui ou par non.

 11   Donc il y avait cette relation de -- puis-je terminer ma question, s'il

 12   vous plaît, Monsieur le Président ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous écoutez la question du Procureur. Lui, il veut

 14   que vous répondiez par oui ou par non. La jurisprudence de ce Tribunal va

 15   dans ce sens. Bien qu'au procès Nuremberg, cette question a été abondamment

 16   débattue quand le procureur Jackson ne voulait pas que le témoin réponde en

 17   faisant des discours. Le tribunal de Nuremberg avait permis au témoin de

 18   préciser sa réponse. Ce qui avait déplu fortement au procureur Jackson,

 19   mais c'était comme ça. Mais, ici, la jurisprudence va dans un sens

 20   restrictif. Le Procureur pose une question, dans le cadre du contre-

 21   interrogatoire, et le témoin répond par oui, par non, je ne sais pas. Si le

 22   Procureur veut avoir des renseignements complémentaires, il demande au

 23   témoin, pourquoi vous dites non, pourquoi vous dites oui. A ce moment-là,

 24   vous, vous argumentez. Parce que le Procureur il a un capital temps qu'il

 25   veut utiliser à bon escient, et donc c'est lui qui a la maîtrise de la

 26   question. Donc le témoin est dans ses mains totalement. Donc chaque fois

 27   que vous sortez de ce chemin, le Procureur vous le reproche.

 28   Voilà vous avez compris, vous répondez oui, non, je ne sais pas, et puis si

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  1   le Procureur veut que vous précisiez, à ce moment-là, vous précisez.

  2   Bien, Monsieur Scott.

  3   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  4   Q.  Donc, s'il vous plaît, veuillez passer à la pièce P 11027, dans votre

  5   classeur, s'il vous plaît. L'original en croate se trouve derrière la

  6   traduction. On n'a pas beaucoup de temps pour étudier ce document en

  7   détail. Mais c'est un document qui établit la relation dont je vous ai

  8   parlé, Miroslav Tudjman, M. Zuzul, donc toutes ces personnes qui venaient

  9   de l'IPD, qui maintenant travaillent au sein de l'institut. Donc c'était

 10   bien la relation qui existait, tous ces membres étaient très proches des

 11   services de Renseignements croates, n'est-ce pas ?

 12   R.  Monsieur le Procureur, c'est absolument inexact, et l'ensemble de cet

 13   article est truffé de mensonges concernant l'institut. Nous avons démenti

 14   tous ces mensonges.

 15   Q.  Très bien. Mais donc votre position est donc que ce n'était pas,

 16   certes. Mais, bon, nous avons parlé de certaines personnes et vous avez

 17   travaillé de façon étroite avec un grand nombre de ces personnes. Vous avez

 18   publié des travaux avec eux. Dans votre CV, d'ailleurs, si je ne m'abuse,

 19   vous dites bien que vous avez co-publié des publications avec M. Zuzul.

 20   Elles étaient au nombre de cinq. Vous avez aussi travaillé avec M. Jurcevic

 21   sur cinq livres ou cinq publications. Vous avez publié au moins une

 22   publication avec Markica Rebic -- un article avec Markica Rebic, qui était

 23   à la tête du service de Renseignement croate; est-ce que c'est le même

 24   d'ailleurs Markica Rebic qui a été condamné pour outrage à ce Tribunal pour

 25   avoir communiqué le témoignage d'un témoin protégé dans l'affaire Blaskic ?

 26   Je pense que c'est le même, n'est-ce pas, c'est le même Markica Rebic ?

 27   R.  Monsieur le Procureur, avec tout le respect que je vous dois, vous

 28   m'avez posé tellement de questions à la fois que je ne sais plus quelle est

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  1   la question. Est-ce que vous pouvez me poser les questions une à la fois,

  2   et dans ce cas-là, je serai à même de répondre. Maintenant vous venez

  3   d'énoncer un certain nombre de thèses et de poser dix questions à

  4   l'intérieur d'une seule. Je vous en prie, vous me mettez dans une position

  5   impossible. Je ne peux pas répondre de la sorte. Ce sont différentes

  6   personnes, à différentes périodes, différentes connaissances, qui peuvent

  7   être les miennes, posez-moi les questions une par une, s'il vous plaît.

  8   Q.  Je vous interromps et je vais reformuler la question. Vous faisiez

  9   partie d'un cercle de personnes, et depuis longtemps d'ailleurs, personnes

 10   qui étaient étroitement liées à M. Zuzul, M. Miroslav Tudjman, M. Jurcevic,

 11   Markica Rebic, et d'autres personnes qui gravitaient dans ce cercle, et en

 12   fait, vos propres opinions sont teintées de l'opinion de ces personnes-là,

 13   sont teintées de leurs propres opinions.

 14   R.  Ce n'est pas exact. J'ai eu affaire à des activités scientifiques après

 15   1992 alors qu'eux intervenaient dans des domaines différents.

 16   Q.  Très bien. Regardons donc la pièce P11020, s'il vous plaît. Dans

 17   l'intervalle, je tiens à dire pour le compte rendu qu'il s'agit d'un

 18   document qui a été compilé par la FORPRONU, donc la force de protection des

 19   Nations Unies. Donc il s'agit d'un document qui a été préparé par la

 20   FORPRONU à propos de la hiérarchie du système de renseignement et de

 21   sécurité croate. On voit que tout en haut il y a le président Tudjman, M.

 22   Sarinic, M. Susak, et en troisième rang, tout à fait à gauche, on voit :

 23   "Vlado Sakic, directeur des sciences sociales à l'institut." C'est bien

 24   vous, n'est-ce pas ?

 25   R.  Excusez-moi, mais je ne vois pas où cela se trouve.

 26   Q.  Très bien. Vous voyez qu'il y a un organigramme dans cette pièce

 27   P11020. Il s'agit d'un organigramme manuscrit. Je pense que vous ne

 28   complissez [comme interprété] pas le document correct, à moins que ce soit

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  1   moi qui n'ai pas la cote correcte. Mais je pense que c'est la pièce P11020,

  2   et d'ailleurs c'est à l'écran.

  3   Vous êtes dans la case légendée "Vlado Sakic," n'est-ce pas ?

  4   R.  Monsieur le Procureur, je suis le directeur de l'institut des

  5   Recherches sociales, et je ne vois pas de quoi -- je ne sais pas de quoi il

  6   s'agit ici. Cela n'a aucun rapport avec la réalité. Je n'ai jamais vu ce

  7   document.

  8   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, la pièce P023.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : La FORPRONU, dont le quartier général était à

 10   Zagreb, fait, en mars en 1994, un document où il positionne, selon eux,

 11   mais ils peuvent faire des erreurs mais tout le système de renseignement

 12   croate, tel que vous le voyez avec photo, titre, et cetera. Dans ce

 13   système, vous êtes partie intégrante du système de renseignement, et dans

 14   la partie C de ce document, ils passent en revue tous les gens, et vous,

 15   vous figurez au petit (f) où on dit que vous êtes un expert en analyse, et

 16   cetera. Bon, donc voilà, et le Procureur dit que vous êtes partie

 17   intégrante au système de Renseignement croate.

 18   Alors, la FORPRONU a fait une erreur, peut-être ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est précisément ce

 20   que je souhaiterais éclaircir. Ceci a été écrit en 1994. Est-ce que M. le

 21   Procureur cela a bien été rédigé en 1994 ?  Quand ce rapport a-t-il été

 22   rédigé ?

 23   M. SCOTT : [interprétation] Comme je vous l'ai indiqué, et comme le

 24   Président de la Chambre vient de vous le dire aussi, ce document a été

 25   rédigé en mars 1994.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges, en

 27   1994, je n'étais pas direction de l'institut des sciences sociales Ivo

 28   Pilar premièrement.

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  1   Deuxièmement, l'institut Ivo Pilar dans toute la durée de son existence,

  2   n'a jamais fait partie d'aucune structure des services de Renseignement ni

  3   n'a jamais eu à s'acquitter de quelque tâche que ce soit ayant trait aux

  4   renseignements. J'affirme ceci sous serment devant cette Chambre et le

  5   simple fait qu'à l'époque je n'ai pas été directeur de l'institut des

  6   sciences sociales en question, nous en disent suffisamment sur la nature

  7   des informateurs qui ont alimenté ce rapport.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être devrions-nous regarder ce

  9   document de plus près, ou du moins, car il y a deux types de relations qui

 10   sont indiqués dans cet organigramme. Certains sont avec une ligne directe,

 11   donc c'est ce qui fait partie des services secrets, alors que d'autres sont

 12   en pointillés. La relation qui est ici indiquée avec l'institut de

 13   recherches sociales est une ligne pointillée. Ce qui signifierait donc que

 14   l'institut ne fait pas partie des services secrets.

 15   Ensuite si l'on passe à la page où R0026529, petit f, on voit juste -

 16   - il est écrit que l'institut est lié au service secret croate. Enfin,

 17   c'est ce que je lis, moi, je ne sais pas si c'est la vérité ou non mais, en

 18   tout cas, quand on lit ce document, ce document n'allègue pas que

 19   l'institut fasse partie du service secret et qu'il est uniquement lié.

 20   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Je vous remercie.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, l'institut ne faisait pas

 23   partie des services de Renseignements mais il n'était pas non plus lié à

 24   ces services, et ce qui est dit dans mon sujet est inexact ici.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce n'est pas une question que je

 26   vous ai posée. C'est à M. Scott de vous poser des questions. Je voulais

 27   juste clarifier ma façon d'interpréter le document pour le compte rendu.

 28   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Trechsel.

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  1   D'ailleurs, j'allais poursuivre en posant ce type de question. Je vous en

  2   remercie.

  3   Donc la clarification ne portait pas juste, cela est tout à fait

  4   essentiel mais donc sa relation existait bien.

  5   Q.  Vous n'étiez -- ne faisiez pas partie intégrante des services du

  6   Renseignement croate que dirige Miroslav Tudjman mais votre institut et

  7   vous-même aviez une relations de travail très étroite avec ces services,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Non, Monsieur le Procureur.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Si nous en avons terminé avec ce sujet, je

 11   voudrais juste attirer votre attention, Messieurs les Juges, aux fins d'un

 12   minimum de prudence qu'il s'agit d'un document des Nations Unies. Il porte

 13   la mention confidentielle de façon très claire et qui aborde des sujets

 14   relatifs aux renseignements. Pour autant que je le sache, cela ne fait pas

 15   partie du mandat de la FORPRONU qui plus est, il y avait une interdiction

 16   de s'occuper des questions relatives aux renseignements. Donc j'imagine que

 17   ce document est peut-être confidentiel et je voudrais juste éviter que l'on

 18   porte dommage à qui que ce soit de la sorte.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Je ne pense pas qu'il y ait -- que toute

 20   personne, qui ait travaillé à la FORPRONU alors à l'époque, soit surprise

 21   de savoir que ce document soit connu.

 22   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, mais il me semble que nous

 23   n'avons pas reçu de décision concernant le caractère confidentiel de ce

 24   document. Tous les documents émanant des Nations Unies, qui ont été abordés

 25   dans ce prétoire, sont confidentiels. Je ne vois pas maintenant pourquoi le

 26   Procureur ne soulève pas la question de la confidentialité de ce document.

 27   Je ne vois pas qu'elle en est la raison.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, ce document relevait de

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  1   l'article 70, ou bien on vous l'a communiqué pour que vous en fassiez

  2   l'usage public ?

  3   M. SCOTT : [interprétation] Je ne pense pas que ce document soit

  4   confidentiel. Je ne demande pas qu'il soit traité de façon confidentielle

  5   parce que je considère que ce n'est pas du tout un problème et c'est ce que

  6   pense l'Accusation. Je ne comprends pas vraiment pourquoi les conseils de

  7   la Défense sont si préoccupés de la confidentialité éventuelle de ce

  8   document. S'ils arrivent à le prouver qu'il faut absolument que ce document

  9   soit confidentiel qu'ils le disent et nous verrons par la suite.

 10   Mais j'aimerais poursuivre.

 11   Q.  Donc je tiens à dire que tout d'abord votre institut soutenait le

 12   régime Tudjman à l'époque et de façon très étroite mais qu'il était aussi -

 13   - qu'il soutenait aussi qu'il a ensuite soutenu les équipes de la Défense

 14   et un grand nombre d'accusés en l'espèce, n'est-ce pas ?  Le Tribunal --

 15   R.  Je ne suis pas au courant de cela.

 16   Q.  Voyons la pièce P 11023, 11023. Il s'agit d'un rapport qui vient d'une

 17   agence du gouvernement croate, troisième paragraphe : en ce qui concerne le

 18   travail avec les défenseurs de M. Dario Kordic, cet avocat insiste sur la

 19   nécessité de recruter -- ce psychologue alors que lui donc Zuzul a suggéré

 20   qu'il s'adresse à "M. Vlado Sakic, directeur de l'institut Ivo Pilar à

 21   Zagreb," à ce propos. Donc Zuzul propose qu'on vous recrute pour soutenir

 22   la défense de M. Dario Kordic, n'est-ce pas ?

 23   R.  Monsieur le Procureur, je n'ai jamais entendu parler de ceci. Jamais

 24   personne ne me l'a dit.

 25   Q.  M. Zuzul ne vous a jamais contacté pour la possibilité éventuellement

 26   de travailler pour M. Kordic ?

 27   R.  Pour autant que je m'en souvienne, jamais Zuzul ne s'est adressé à moi.

 28   J'ai communiqué très rarement avec lui à l'époque et je m'en souviendrais

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  1   s'il s'était adressé à moi à ce sujet. Mais j'imagine qu'il l'a fait parce

  2   que j'étais l'un des psychologues les plus connus en Croatie. Il m'a

  3   proposé en tant qu'expert comme ici la défense m'a demandé au même titre,

  4   et Zuzul le sait puisqu'on a fait nos études ensemble.

  5   Q.  Est-ce que vous connaissez aussi un certain Milan Gorjanc ?

  6   R.  Milan Gorjanc, je n'ai jamais entendu parler.

  7   Q.  Je vais l'épeler. G-o-r-j-a-n-c. Apparemment, c'est un expert de la

  8   Défense. Il s'occupe de la Défense. Vous n'avez jamais lui affaire à lui ?

  9   Est-ce que vous savez qu'on le proposait lui aussi en même temps pour qu'il

 10   soit témoin au nom de M. Prlic ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, je n'ai jamais entendu parler de cet homme. Je

 12   n'ai pas appris qu'on l'avait convié.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Une objection pour ce qui est de la

 14   formulation de la dernière question posée par M. Scott, notre éminent

 15   confrère. Parce qu'il n'est pas clair partant de cette question, qui est-ce

 16   qui était censé proposer M. Gorjanc comme témoin. Est-ce qu'on peut obtenir

 17   des explications à ce sujet pour qu'il n'y ait pas confusion dans ce

 18   prétoire ?

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.

 20   Monsieur le Témoin, page 27, ligne 16, on dit que vous avez répondu ceci :

 21   "Et Zuzul le sait parce que nous avons été à l'unité mais je crois

 22   qu'ensemble, il me semble que vous avez dit autre chose, n'est-ce pas ?

 23   Est-ce que vous pourriez répéter, si vous vous souvenez de ce que vous avez

 24   dit ? Est-ce que vous pourriez le répéter ? Parce que les interprètes me

 25   disent que c'était l'université; c'est bien cela ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez dit, oui; c'est bien.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Enfin, moi, je ne comprends pas ce qui est

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  1   écrit ici, Monsieur le Juge. J'ai fait mes études avec lui. Je n'ai pas été

  2   dans une unité quelconque, et d'autre part, je ne sais pas ce qu'il sait.

  3   Je sais que je n'ai été contacté par personne pour être expert dans cette

  4   affaire.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, oui, ça

  6   suffisait. Je vous ai demandé si ça voulait dire "université." Oui, ça

  7   suffisait mais, sinon, vous n'arrêtez pas de parler. S'il vous plaît, soyez

  8   économe dans l'emploi des mots.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  Permettez-moi de répondre à la question posée par la Défense pour --

 11   peut-être que, si vous voyez le nom écrit, ça vous dirait que peut-être que

 12   j'ai mal prononcé. Mais prenez le dernier paragraphe de ce document qui

 13   porte la cote 11023. Regardez ce passage où il est dit :

 14   "Après cette conversation, les avocats de Kordic ont parlé à Gorjanc,

 15   témoin à décharge éventuel, un général qui a servi dans la zone de Sarajevo

 16   et en Bosnie centrale." 

 17   Est-ce que ça vous rappelle quelque chose ? Est-ce que ça vous permet de

 18   vous souvenir de cette participation éventuelle de ce monsieur ?

 19   R.  Monsieur le Procureur, je n'avais rien à voir avec la Défense de M.

 20   Kordic. Aucune corrélation avec M. Gorjanc. Je ne sais pas qui est ce

 21   monsieur, je ne sais pas, je ne le connais pas.

 22   Q.  Très bien. Avançons.

 23   Prenons votre rapport et notamment la méthode de travail que vous avez

 24   utilisé.

 25   M. KOVACIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Mais ces

 26   documents on nous les a communiqués avant le contre-interrogatoire peut-

 27   être le Procureur pourrait-il nous dire si c'est une partie d'un document

 28   seulement parce que j'ai deux pages ? Je n'ai pas l'en-tête; je n'ai pas la

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  1   signature. Je ne sais pas d'où cela vient. Enfin peut-être peut-on le

  2   déterminer au travers de l'affichage électronique mais pour le moment ce

  3   n'est pas facile à déterminer.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document P 11023; il vient d'où ce document ?

  5   M. SCOTT : [interprétation] Ça a été fourni par le gouvernement croate au

  6   bureau du Procureur. Ça vient d'un des services de Renseignement.

  7   M. KOVACIC : [interprétation] Ce n'est pas une information et une

  8   réponse. Le gouvernement, c'est très vague, il y a une centaine d'agences,

  9   il y a des dizaines de ministères et la question, c'est celle de savoir

 10   quand est-ce que ça a été communiqué. Ce qui m'intéresse aussi, c'est

 11   d'identifier, du moins, je suppose que cela fait partie d'un document et

 12   qu'on nous donne le titre de ce document, l'appellation de l'instance

 13   concernée et la date pour qu'on puisse vérifier. Je ne demande rien

 14   d'autre.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, vous pouvez répondre à la

 16   demande ou vous n'en savez rien.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je peux m'enquérir si le

 18   temps me le permet. Mais tout le monde ici -- tout le monde dans le

 19   prétoire a ce même document qui dit "information," en tout cas, en

 20   traduction, c'est ce que ça donne. On a la date du 22 novembre 1999. J'ai

 21   fait une recherche de ce document pour confirmer que c'est bien le

 22   gouvernement croate qui nous l'a fourni. C'est la seule information

 23   supplémentaire que je peux vous donner pour le moment.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.

 25   M. SCOTT : [interprétation]

 26   Q.  Dans le cadre de votre rapport, vous l'avez dit hier, je pense, vous

 27   n'avez pas de connaissance d'expert à propos de la Bosnie-Herzégovine et de

 28   l'Herceg-Bosna; c'est bien ce que vous avez dit, hier, n'est-ce pas ? Au

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  1   fond, vous avez connu ces événements tout comme tout un chacun aurait pu

  2   les connaître qui suivait la chose dans les médias à l'époque, n'est-ce pas

  3   ?

  4   R.  C'est ce que j'ai dit, j'ai dit aussi que j'ai lu les publications

  5   scientifiques et autres, que je me suis entretenu avec des hommes de

  6   science ainsi qu'avec mes collaborateurs.

  7   Q.  Mais nous avons parcouru votre CV et vous avez fourni une liste longue

  8   de publications. C'est une liste considérable, mais jamais vous n'avez

  9   écrit sur la guerre en Bosnie-Herzégovine, en tant que telle ni sur la

 10   création de l'Herceg-Bosna, vous n'avez rien écrit à ce propos, n'est-ce

 11   pas ?

 12   R.  Monsieur le Procureur, pas directement au sujet de la Bosnie-

 13   Herzégovine. Mais j'ai parlé de l'agression serbe, enfin j'ai écrit sur

 14   l'agression serbe et ça englobait le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 15   Donc, dans mes travaux, il y a sur la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, des

 16   articles parce que l'agression était une seule et unique agression à

 17   l'égard des deux.

 18   Q.  Je vais vous demander ceci : Quels sont les documents de l'Herceg-Bosna

 19   que vous avez étudiés avant de rédiger votre rapport ? Pourriez-vous nous

 20   donner ne serait-ce que quelques exemples ?

 21   R.  J'ai précisé, Monsieur le Procureur, que j'ai lu des publications, des

 22   publications scientifiques.

 23   Q.  Je sais, Monsieur, mais quels documents précis de l'Herceg-Bosna ? Est-

 24   ce que vous avez étudié l'acte constitutif du 18 novembre 1991 ? Le procès-

 25   verbal de réunion de l'assemblée ? Ou des ordres militaires ? Non, non,

 26   jamais vous n'avez étudié le moindre document du HVO; c'est bien cela ?

 27   N'est-ce pas la vérité ? Est-ce exact ou non ?

 28   R.  J'ai lu l'expertise du Dr. Jurcevic.

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  1   Q.  Je vois. C'est précisément ce que vous avez fait et peut-être que vous

  2   nous faites gagner du temps parce que qu'est-ce que vous avez fait, rien

  3   que ça. Pour avoir vos faits comme base, vous vous êtes appuyé -- "vous

  4   avez tout pris," diraient certains, du rapport d'expert préparé par la

  5   Défense de M. Praljak, par M. Jurcevic et pour vous, ça a été l'évangile,

  6   n'est-ce pas ? C'est la seule chose que vous avez faite, la seule chose que

  7   vous avez étudiée ?

  8   R.  Monsieur le Procureur, il n'en est pas ainsi. Je vous ai dit que j'ai

  9   lu toute une série de publications scientifiques, celles de Ivan Markesic :

 10   "Comment on a sauvé la Bosnie-Herzégovine," et autres publications

 11   professionnelles et rapports portant sur les dommages survenus en Bosnie-

 12   Herzégovine, les rapports des médias, et cetera.

 13   Q.  D'accord. Je vais revenir parce que je veux être équitable envers vous.

 14   Si vous avez étudié un document du HVO, un procès-verbal d'une réunion du

 15   gouvernement que présidait Jadranko Prlic, un ordre du général Petkovic qui

 16   était le chef de l'armée du HVO, si vous avez étudié ne serait-ce qu'un de

 17   ces documents ? Dites-le-nous, donnez-nous un exemple.

 18   R.  Monsieur le Procureur, s'agissant des documents et des événements

 19   particuliers, en ma qualité de psychologue en matière sociale, ça n'a pas

 20   la même importance que pour les historiens. Pour moi, ces événements sont

 21   importants --

 22   Q.  Excusez-moi de vous interrompre. Vous avez entendu ce que vous a dit,

 23   Monsieur le Président Antonetti. Je ne vous ai pas demandé ce qui était

 24   significatif. Ma question était très simple et sans détour. Donnez-nous un

 25   exemple de document du HVO ou de l'Herceg-Bosna que vous avez étudié pour

 26   préparer votre rapport, un ordre du général Petkovic donné tel ou tel jour,

 27   un procès-verbal d'une réunion du gouvernement tel et tel jour. Donnez-nous

 28   un document que vous auriez étudié dans le cadre de la préparation de ce

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  1   rapport.

  2   R.  Monsieur le Procureur, s'agissant de documents individuels ou

  3   particuliers, non, je n'en ai pas lu.

  4   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Désolé de vous interrompre, Monsieur

  5   Scott.

  6   Je voudrais demander ceci au témoin, ça vient en partie d'une de vos

  7   questions, mais quand j'ai lu le document, j'ai découvert ceci et Monsieur

  8   le Professeur, je voudrais vous poser une question à propos du contenu même

  9   de votre étude et du rapport de certains grands chapitres ou du nombre de

 10   pages de ce rapport-là entre les différentes parties.

 11   Regardez le nombre de pages, vous avez consacré dix pages à la guerre en

 12   Bosnie-Herzégovine, il y en a 10, de pages. Page 2 du rapport, 2 et 3 du

 13   rapport, vous avez le sommaire, c'est ça, pages 2 et 3. La totalité du

 14   rapport fait environ 110 pages dont les références ou la bibliographie.

 15   Section 3, l'agressivité humaine et la guerre, là, vous parlez de la guerre

 16   en Bosnie-Herzégovine. C'est la partie qui en parle et des causes de la

 17   guerre en Bosnie-Herzégovine en 1991 -- de 1991 à 1995, dans le contexte du

 18   cadre théorique proposé, ça, ça commence à la page 95 et se termine à la

 19   page 105; le reste, tout le reste, à mon avis, est tout à fait général. La

 20   première grande section, la partie A, vous parlez du "Cadre socio

 21   psychologique nécessaire pour comprendre la guerre en Bosnie-Herzégovine de

 22   1991 à 1995," de la page 4 à la page 61. C'est plus de 60 % de votre étude.

 23   La deuxième grande partie, application du cadre socio psychologique à la

 24   guerre en Bosnie-Herzégovine, ici, nous avons, de nouveau, le contexte

 25   historique, par exemple -- je l'ai relu et j'ai regardé cette évolution

 26   intéressante dont vous avez parlé de la Bosnie-Herzégovine entre 1878

 27   jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale, environ 40 ans; vous écrivez

 28   plus sur cette période. Moi, ça m'a intéressé; comme je suis Hongrois, ça

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  1   m'intéresse, si vous voulez. Mais vous consacrez beaucoup moins de temps à

  2   la guerre en Bosnie-Herzégovine de 1991 à 1995.

  3   D'où ma question, lorsque vous avez écrit ce rapport, lorsque vous

  4   l'avez préparé, quelles sont les raisons qui vous ont poussé à ces

  5   proportions assez inégales, à mon avis, dans votre rapport, entre les

  6   différentes parties que je viens d'évoquer ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, vous l'avez remarqué à juste

  8   titre, mon expertise est constituée de sous ensembles, mais il y a deux

  9   grands groupes, en réalité. Il y a l'appareil théorique que j'ai utilisé, à

 10   savoir toute une série de théories socio psychologiques et j'ai estimé que

 11   c'est ainsi que je serai à même d'aider les Juges de la Chambre, c'est-à-

 12   dire prendre les théories contemporaines en matière socio psychologique, et

 13   dans une deuxième partie, j'y intègre les facteurs pertinents qui ont

 14   conduit dans deux directions : Création de groupes identitaires en Bosnie-

 15   Herzégovine -- enfin, Groupes belligérants au travers d'une période

 16   historique, et deuxième élément très important, le démantèlement de la

 17   Yougoslavie sans quoi, de mon avis, il est impossible de comprendre ce qui

 18   s'est produit en Bosnie-Herzégovine entre 1992 et 1994. J'ai pensé que

 19   c'est ainsi que j'aiderai le mieux les Juges de la Chambre, c'est-à-dire

 20   proposer un cadre théorique et partant de ce cadre théorique que vous

 21   qualifiez de général, je me place dans le contexte pour parler des théories

 22   socio psychologiques et quels sont les postulats à mettre en application

 23   pour ce qui est -- ou appliquer pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine et

 24   de sa guerre.

 25   J'ai dit que le psychologue en matière de sociologie ne sous-entend

 26   pas toute une série de faits dont parle M. le Procureur. Il suffit de

 27   parler des processus et des événements susceptibles d'être intégrés dans un

 28   cadre théorique et s'il y a cette série d'événements et s'il y a les

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  1   dessous de ces événements. La psychologie sociologique est intéressée par

  2   les causes et les conséquences. Si nous avons cette phénoménologie-là, il

  3   est possible de rédiger un rapport d'expert de ce type. Si le rapport

  4   d'expert s'était situé à des niveaux inférieurs pour ce qui est des

  5   différents événements aux endroits variés de la Bosnie-Herzégovine,

  6   j'aurais dit : Donnez-moi la possibilité d'analyser chaque incident

  7   particulier et il y en a eu beaucoup ou alors, chaque crime particulier,

  8   j'aurais pu rédiger, moi, ou un collègue à moi aurait pu le faire en se

  9   servant du même contexte théorique pour rédiger une expertise. C'est ainsi

 10   qu'a procédé le collègue Aronson pour le crime de My Lai.

 11   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci de cette réponse. Honnêtement,

 12   je ne suis pas convaincu. Ma question demeure posée, si quelqu'un prépare

 13   un rapport, par exemple, sur la guerre en Bosnie-Herzégovine, une guerre de

 14   cinq ans, cette personne ne va pas simplement consacrer 10 % de ses écrits

 15   à cette question. Moi-même, j'ai écrit certaines publications et je connais

 16   un peu ce métier.

 17   Donc, je ne suis pas convaincu, mais je vous demande de poursuivre,

 18   Monsieur Scott.

 19   M. SCOTT : [interprétation]

 20   Q.  Oui, j'enchaîne, si vous me le permettez sur ces questions. Une des

 21   choses dont nous avons parlées, au cours de cette dernière heure et que

 22   vous mentionnez dans ce rapport, c'est ce que certains des avocats, des

 23   Juges appel parti pris, vous le reconnaissez dans ce rapport, vous étiez

 24   conscient de votre parti pris et vous nous dites que vous avez pris

 25   certaines mesures ou tenté de le faire pour essayer d'y remédier. Vous le

 26   dites à la page 65, en anglais; 63, en croate. Vous dites que vous étiez

 27   conscient qu'il y avait peut-être un certain parti pris dans cette

 28   conception que vous avez, qui est la vôtre et s'agissant de vous, vous

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  1   dites que vous, en tant que scientifique, vous avez essayé de minimiser

  2   l'impact de ce parti pris.

  3   Si c'est ce que vous avez essayé de faire, peut-être pourriez-vous

  4   d'abord nous dire quels sont ces partis pris, quelle est votre conception

  5   du monde qu'il faut qu'il faille essayer d'y remédier ?

  6   R.  Monsieur le Procureur, en ma qualité d'homme de science, je me suis

  7   référé au principe Weber de la neutralité en matière de valeur, je l'ai dit

  8   et j'ai dit que j'avais des difficultés comme tout homme scientifique pour

  9   ce qui est le problème de mon contexte culturel et je partage le sort de la

 10   totalité des hommes de sciences au monde.

 11   Q.  Je comprends cela. Mais soyez plus précis. Ne restez pas si vague. Les

 12   Juges doivent essayer de vous comprendre dans votre déclaration. Ce

 13   faisant, vous dites que vous avez certains préjugés, mais soyez plus

 14   précis. Quels sont ces préjugés, ces partis pris que vous avez, ces

 15   conceptions qui font peut-être que ceci va teinter, va colorer quelque part

 16   le travail que vous faites pour ce procès ?

 17   R.  Je l'ai mentionné pour de qui est de la correction et de l'objectivité

 18   scientifique, je n'ai pas parlé "du monde," j'ai parlé de mes origines

 19   sociales, étant donné que je suis d'origine croate et que l'un des groupes

 20   en belligérance était les Croates, j'ai dit -- enfin, j'ai admis la chose

 21   et j'ai dit que je m'étais efforcé autant que faire se pouvait, du fait de

 22   ma conscience, de faire en sorte que ce contexte culturel n'influe pas sur

 23   l'objectivité de mon expertise. Les auteurs ont coutume d'indiquer quelle

 24   est leur origine sociale pour essayer d'éliminer le fait du parti pris en

 25   matière de valorisation des éléments pour être le plus neutre possible.

 26   Q.  Mais dites-nous, dites-nous quelles sont les mesures que vous avez

 27   prises. Si nous ne savons pas quels sont vos partis pris, impossible

 28   d'aller plus loin, mais quelles sont les mesures que vous avez prises ?

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  1   L'INTERPRÈTE : Les interprètes réitèrent leur demande à l'intention du

  2   témoin pour ce qui est de la rapidité de son débit.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Procureur, je pense ne pas avoir

  4   eu de parti pris. Je me suis servi de l'appareil théorique et je l'ai

  5   utilisé pour ce qui est de l'application aux événements de leur mise en

  6   œuvre pour ce qui est des événements en Bosnie-Herzégovine et de la guerre

  7   sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.

  8   M. SCOTT : [interprétation]

  9   Q.  Ecoutez, je n'invente rien, ici. J'utilise votre rapport même. Prenez

 10   la page 63 -- j'essaie de faire au plus vite. C'est 63 [comme interprété]

 11   en croate, en anglais ce sera la page 66 --

 12   R.  Je ne sais pas à quoi vous faites référence.

 13   Q.  Je le précise pour le compte rendu, il s'agit de la pièce 3D03721. Ça

 14   faisait partie des pièces de la décharge. Je vais vous lire ce passage.

 15   Ecoutez bien. Il est très court. Si je me trompe --  mais vous le voyez à

 16   l'écran. Regardez, c'est encore mieux.

 17   A la fin -- au paragraphe du milieu, en page 66, paragraphe du milieu :

 18   "Pour diminuer toute possibilité de voir l'influence de la parti pris

 19   personnel, l'auteur de ce rapport d'expert a utilisé, outre l'avis d'expert

 20   - et c'est indiscutable - de Josip Jurcevic sur le même sujet qu'avait

 21   l'auteur du précédent rapport, la perspective historique de Noël Malcolm,

 22   notamment pour les parties les plus sensibles, les plus délicates

 23   s'agissant des valeurs."

 24   C'est bien dans votre rapport, n'est-ce pas ? Là, vous pouvez me répondre

 25   par oui ou par non ?

 26   R.  Exact.

 27   Q.  Mais je suis curieux, vous voyez, parce qu'en anglais, quelque chose

 28   assez bizarre. En anglais, vous avez les mots - attendez, je les cherche -

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  1   on dit : "Outre l'avis d'expert de Jurcevic sur le sujet," mais cela ne se

  2   trouve pas dans la version croate. Alors d'où vient cette différence ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, je ne sais vraiment pas d'où ceci vient. J'ai

  4   indiqué, moi-même, que je me suis servi de l'expertise rédigée par Josip

  5   Jurcevic, mais ça, je ne sais pas comment ça s'est produit. Je ne le sais

  6   vraiment pas. Je n'ai pas comparé dans le détail la version croate et

  7   anglaise, mais je ne sais pas vous dire comment ça s'est produit.

  8   Q.  Je vois. Mais en réalité et je vous l'ai dit, il y a quelques instants,

  9   vous vous êtes appuyé pratiquement, intégralement sur le rapport de M.

 10   Jurcevic. Pour vous, ça a servi de fondement à votre rapport, s'agissant

 11   des faits ?

 12   R.  Monsieur le Procureur, comme je l'ai rédigé, j'ai pris son texte et

 13   celui de Noel Malcolm, là où il y a les éléments de valorisation et ceci, à

 14   l'attitude des différents groupes ethniques. J'ai pris Noel Malcolm et je

 15   l'ai indiqué.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je vois l'heure qu'il est, mais est-ce que je

 17   peux terminer ce chapitre-ci.

 18   Q.  Je vois bien et je vois ces termes et vous dites que vous vous êtes

 19   servi de la perspective historique de Noel Malcolm. Mais n'est-il pas vrai

 20   de dire - et je suis sûr que les Juges ont lu votre rapport - si j'avais le

 21   temps, je pourrais prendre toutes les références, toutes les citations que

 22   vous faites de Noel Malcolm, mais la seule fois que vous citez ce monsieur,

 23   c'est surtout quand vous parlez de la Bosnie pendant la période de l'empire

 24   ottoman. Ce n'est pas vraiment le cœur même de votre rapport; vous en

 25   conviendrez ?

 26   R.  Monsieur le Procureur, je tiens à dire que l'histoire a été pertinente

 27   à mes yeux, pour ce qui est de ce chapitre et c'est la raison pour laquelle

 28   je me suis référé à Noel Malcolm et je me suis référé à ce qu'a dit le Dr.

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  1   Jurcevic dans ce chapitre parce que j'avais besoin d'un contexte historique

  2   émanant d'historiens. C'est la raison pour laquelle je m'en suis servi.

  3   Q.  Ce que je vous dis, c'est qu'en fait, ce qui s'est passé --et une

  4   partie de ce mystère sera peut-être expliqué par les différences qu'il y a

  5   entre les deux versions croate et anglaise, mais dans le fond, vous avez

  6   fait votre rapport et puis, quelqu'un - ou vous-même - vous a dit que si

  7   vous ne faites que citer Jurcevic, ce n'est pas la meilleure des idées, que

  8   ça ne montrait pas un rapport équilibré, mais qu'on pouvait émailler ce

  9   rapport de références à Noel Malcolm, mais c'était uniquement pour parler

 10   de l'empire ottoman, n'est-ce pas ? C'est bien cela ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, non, il n'en n'est pas ainsi, bien sûr, parce

 12   qu'on aurait retrouvé Josip Jurcevic en version croate et pas dans la

 13   version anglaise. Ce n'est pas exact. Ce n'est absolument pas exact.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Nous allons, préférablement, faire la pause.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il est moins le quart. Nous allons faire 20

 16   minutes de pause.

 17   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 18   --- L'audience est reprise à 16 heures 10.

 19    M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, vous avez la parole.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   Q.  Avec l'aide de l'huissier, je tiens à dire qu'il y a une partie de

 22   votre rapport -- enfin ce n'est pas la seule, mais c'est une des parties du

 23   rapport qui semble vraiment porter sur l'essentiel de vos propos, page 88

 24   de la version en anglais, qui correspond à la page 85 en version croate.

 25   J'attends de l'avoir à l'écran.

 26   Vous dites, page 88 en anglais, 85 en croate, au milieu du

 27   paragraphe, à peu près : 

 28   "En accord avec le cadre socio psychologique de la formation

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  1   spontanée de groupe dans le cadre des situations de crise, en plus de

  2   comportement collectif, les processus de dé individuation apparaissent

  3   principalement lorsqu'il y a eu un affaiblissement des limites actuels de

  4   comportement, ce qui permet des crimes incontrôlés. Ce type de ces crimes

  5   est principalement arrivé dans le cadre des conflits entre Musulmans et

  6   Croates entre 1993 et au début 1994. Donc en respectant le cadre théorique

  7   fourni, on ne peut pas contrôler ces processus parce qu'en tant que règle,

  8   ce sont des processus qui interviennent de façon spontanée. C'est ce qui

  9   m'intéresse donc.

 10   Ce qui m'intéresse en fait c'est la formation spontanée de groupes et

 11   donc le fait que ce soit un phénomène spontané. J'ai l'impression que vous

 12   prenez comme théorème de départ comme postulat de départ que l'Herceg-Bosna

 13   est donc ce qui correspond pour l'Accusation, à la création d'une Grande

 14   Croatie s'est fait de façon spontanée. C'est ce que vous êtes en train de

 15   dire ?

 16   R.  Monsieur le Procureur, cela n'a pas trait à ce que vous dites. Il n'en

 17   va pas comme vous l'affirmez. Ce qui est écrit ici a trait à la formation

 18   de groupes particuliers et non pas à l'Herceg-Bosna.

 19   Q.  Oui, mais voici ce que l'Accusation affirme et voici ce que les Juges

 20   aimeraient savoir. Ils veulent en savoir plus sur la formation de l'Herceg-

 21   Bosna -- la création de l'Herceg-Bosna. C'est ça ce fameux groupe, c'est

 22   l'Herceg-Bosna. En fait le fonctionnement de ce groupe n'était pas du tout

 23   spontané.

 24   R.  Monsieur le Procureur, en ma qualité de psychosociologue, je ne me

 25   penche pas sur la structure de l'Herceg-Bosna et son organisation mais je

 26   me penche sur la formation de groupes belligérants, de groupes ethniques,

 27   et je m'intéresse également au phénomène de l'ethnocentrisme au sein de ces

 28   groupes ainsi qu'au comportement des Croates et des Bosniens dans le

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  1   contexte des combats. Je me penche sur leur comportement ethnocentrique

  2   face à l'agression venue de la partie serbe.

  3   Q.  Oui, dans ce cas-là, vous venez justement de définir l'essentiel du

  4   problème mais en dehors de votre rapport. Nous sommes ici pour parler de ce

  5   qui se passait ici en l'espèce en Bosnie-Herzégovine, en Herceg-Bosna. On

  6   ne parle pas du Tennessee ou de Stanford, ou de quoi que ce soit. Or vous

  7   êtes en train de dire que vous n'avez pas pris en compte le fait que c'est

  8   arrivé n'était pas spontané mais était très organisé, était dirigé depuis

  9   du haut vers le bas et n'était pas spontané. En fait vous n'avez pas abordé

 10   ce point, vous l'avez tout simplement écarté d'un revers de mains ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, on sait bien quand l'Herceg-Bosna a été formée.

 12   Cela s'est produit lorsque des affrontements ont commencé entre les

 13   Musulmans et les Croates et c'est alors que ces deux parties en conflit ont

 14   formé des institutions particulières aux fins de leur propre défense.

 15   Evidemment, dans le cadre de ce conflit qui représentait encore une fois

 16   une réaction à la cause principale. J'ai dit très clairement qu'on pouvait

 17   se poser sérieusement la question de savoir si ce conflit, cet affrontement

 18   se serait produit s'il n'y avait pas eu d'agressions serbes contre la

 19   Bosnie-Herzégovine.

 20   Q.  Bien. Prenons quelques exemples. Lorsque vous avez préparé ce rapport,

 21   ou vous avez conclu donc que tout ceci était spontané, finalement n'était

 22   la faute de personne et qu'il n'y avait jamais eu de projets ou de plans.

 23   Avez-vous lu le compte rendu de la réunion présidentielle où le président

 24   Tudjman a dit et je le cite :

 25   "La solution c'est la partition de la Bosnie-Herzégovine, et ceci

 26   sera réalisé parce que c'est dans l'intérêt de la Croatie aussi bien que de

 27   la Serbie; et la composante musulmane finalement n'a pas d'autre choix que

 28   d'accepter la solution proposée."

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  1   Avez-vous pris ça en compte lorsque vous avez rédigé votre rapport et que

  2   vous avez formulé votre opinion ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, il me semble qu'il y a ici un malentendu

  4   profond. J'interviens, en ma qualité de psychosociologue. Je ne me suis pas

  5   penché sur le cadre ni le contexte politique. Cela reviendrait à un

  6   historien ou à un politologue et non pas à un psychosociologue. Moi, je me

  7   suis occupé des différents groupes du processus de leur homogénéisation et

  8   leurs différentes sous parties sous ensembles qui ont été les acteurs et

  9   les parties au conflit en Bosnie-Herzégovine. Il me semble qu'il s'agit là

 10   d'une analyse pertinente parce que la psychosociologie nous permet dans son

 11   cadre théorique de comprendre comment on en est arrivé à cette

 12   homogénéisation qui a représenté le socle des affrontements. S'il n'y avait

 13   pas eu d'homogénéisation, il n'y aurait pas eu non plus de conflit. Je ne

 14   me suis pas intéressé à des documents de nature politique mais au cadre

 15   politique.

 16   Q.  Vous n'avez pas employé de documents politiques. Vous avez juste décidé

 17   que le groupe qui vous intéressait c'était d'autres groupes et non pas les

 18   groupes dirigeants de cette entité. C'est bien cela ?

 19   R.  Non. Je ne me suis pas occupé de cela. Je ne me suis penché que sur le

 20   contexte psychosociologique de l'émergence de ces groupes, de leur

 21   formation et de la façon dont des leaders peuvent apparaître ou émerger

 22   dans des groupes dans ce contexte. Je ne me suis pas penché sur le cadre

 23   politique, cela sort du cadre et de la nature même de mon expertise.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Professeur, à la page 85 de votre

 25   rapport, vous intitulez donc le processus de formation de groupes en

 26   période de guerre. Bon. Très bien. C'est très intéressant. Voilà qu'en

 27   République de Bosnie-Herzégovine, plusieurs personnes créent le Conseil

 28   croate de la Défense de la Communauté croate. Donc plusieurs individus vont

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  1   créer une entité. Il aurait été intéressant pour les Juges, pour moi, pour

  2   mes collègues, et pour tout le monde de savoir quel était le processus

  3   psychologique ou sociologique qui a fait que des individus se sont

  4   rassemblés, à un moment donné, pour être dans un groupe. Or ça je n'ai pas

  5   l'impression que vous en parlez. Est-ce que ça a été volontaire de votre

  6   part ou vous n'avez pas vu le problème sous cet angle-là ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, dans mon rapport, tout

  8   cela est expliqué. Bien entendu que certains groupes, lorsqu'ils

  9   connaissent une homogénéisation, en arrivent à fonder certaines

 10   institutions - cela ne fait aucun doute - mais le processus

 11   d'homogénéisation s'est produit préalablement. On ne s'attendait tout

 12   simplement, pas du tout, à ce qu'il se produise des affrontements entre les

 13   Musulmans et les Croates au début de cette agression serbe dirigée contre

 14   la Slovénie et la Croatie. On s'attendait plutôt et c'est également ce qui

 15   s'est passé à ce que si un conflit se produit les Musulmans et les Croates

 16   collaborent, coopèrent entre eux, et c'est ainsi qu'il en a été. Cependant,

 17   à mesure que l'agression serbe s'est décalée de la Croatie vers la Bosnie-

 18   Herzégovine, un nouveau contexte est apparu et c'est ce que j'ai écrit.

 19   C'est alors qu'en Bosnie-Herzégovine, on voit apparaître non pas deux

 20   groupes ethniquement homogènes, les Croates et les Musulmans d'une part, et

 21   d'autre part car ils ne fonctionnaient qu'à un niveau très général. C'est à

 22   l'intérieur de ces différents corpus ethniques que l'on assiste à leur

 23   formation sous forme de nombreux groupes plus petits qui ensuite

 24   connaissent une homogénéisation. Il n'y a pas toujours une communauté

 25   d'objectifs entre tous ces différents groupes. Une partie seulement de

 26   leurs objectifs est commun, et pour d'autres objectifs, il diffère. C'est

 27   la dimension psychosociologique de ce processus qui se rapporte aux

 28   théories d'identité sociale et à l'appareil théorique dont on a parlé

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  1   précédemment.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Un groupe est constitué d'individus. Vous êtes bien

  3   d'accord avec moi. Ces groupes -- ces individus qui vont constituer un

  4   groupe vont peut-être être dans un groupe homogène, peut-être, je n'en sais

  5   rien. Quoi qu'il en soit, il y a des individus qui vont rassembler dans un

  6   groupe. Je vais vous donner deux cas très précis : la situation du général

  7   Praljak, et la situation d'un témoin qui est venu il y a quelque temps

  8   témoigner, le colonel Skender.

  9   Le général Praljak, d'après ce que nous savons, a exercé en Croatie

 10   un métier dans l'art et puis il est devenu ministre de à défense, et on le

 11   voit quitter cette fonction prestigieuse pour partir donner un coup de main

 12   en République de Bosnie-Herzégovine. Premier exemple.

 13   Deuxième exemple, le colonel Skender, qui est un légionnaire dans l'armée

 14   française, qui a eu un grade très élevé pour un étranger, puisqu'il est

 15   devenu lieutenant-colonel, un parcours exceptionnel, alors même qu'il

 16   pourrait tranquillement profiter de sa retraite en Corse, il rejoint le

 17   HVO, d'où interrogation. Pour quelle raison, voulait-il intégrer un groupe

 18   ? Voilà le type de question qu'on a, et ce type de question qu'un juge

 19   raisonnable doit se poser, il peut se le poser au travers de votre rapport.

 20   Mais votre rapport ne semble pas répondre à cette préoccupation;

 21   alors qu'est-ce que vous pouvez me dire ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il est exact que mon

 23   rapport ne correspond pas à cet échelon-là, on ne s'est pas penché sur ce

 24   niveau-là. Mais on peut donner au moins une réponse probable à ce type de

 25   question, à partir du cadre théorique que j'ai présenté. J'ai expliqué que

 26   dans ces théories de l'ethnocentrisme, du nationalisme, de l'identité

 27   nationale, de la formation de groupes ethniques en vertu des principes de

 28   la psychologie sociale, j'ai expliqué quels étaient les facteurs

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  1   principaux, tels que la religion, la culture, la langue, l'appartenance ou

  2   l'identité, tous ces éléments sont caractéristiques des groupes ethniques.

  3   Si bien que lorsqu'un groupe ethnique est menacé, on insiste à une

  4   homogénéisation à l'intérieur de ce groupe conformément à ces principes.

  5   C'est ainsi du reste que ces groupes ethniques se forment. C'est le

  6   principe même de la formation de groupes dans les situations de crise,

  7   groupes qui se fondent sur une ressemblance ou une similarité selon ces

  8   critères. On assiste à une homogénéisation de ces groupes qui constituent

  9   des ensembles plus ou moins cohérents, marqués par une cohésion plus ou

 10   moins forte.

 11   En Bosnie-Herzégovine, c'est précisément de cela qu'il s'agissait, entre

 12   les Bosniens et les Croates. Ils ont connu une homogénéisation, un certain

 13   moment, et ce, pour deux raisons. A l'échelon de différent, ce groupe, on a

 14   vu apparaître différentes stratégies ethniques qui ne se recouvraient pas

 15   pleinement ni d'un côté ni de l'autre. Je l'ai écrit dans mon rapport. A

 16   cause de cela, il arrivait que dans certaines localités, il y ait

 17   coopération entre eux, et qu'il y ait conflit dans d'autres localités. Donc

 18   il n'y avait pas de stratégie ethnique unique ou monolithique, mais d'un

 19   côté comme de l'autre, on a vu apparaître ce phénomène de l'ethnocentrisme

 20   et au troisième stade de cette homogénéisation, on a vu apparaître un

 21   contexte nouveau dans le cadre duquel les événements qui sont bien connus

 22   se sont produits.

 23   Donc pour ce qui concerne MM. Praljak et Skender, je peux répondre

 24   qu'ils sont venus probablement l'un comme l'autre, selon ce même principe,

 25   car ils ont certaines caractéristiques qui établissent un lien avec le

 26   groupe; et pour ce qui concerne M. Praljak, je ne sais pas. Il a été au

 27   sein du ministère de la défense de la République de Croatie, c'est alors

 28   qu'on a signé un accord de coopération avec la Bosnie-Herzégovine, et c'est

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  1   probablement également dans ce cadre-là, qu'il a coopéré et qu'il s'est

  2   rendu en Bosnie-Herzégovine.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, sur cette théorie

  4   de l'ethnocentrisme, il suffit que des personnes ont la religion, la

  5   culture, le langage, et des ancêtres communs pour constituer un groupe

  6   ethnique. Donc si je comprends bien, la Communauté croate qui s'est crée en

  7   Herceg-Bosna, a été créée dans ce contexte. Des gens qui se sont dit, j'ai

  8   une langue, j'ai une religion, une histoire commune, à ce moment-là, on

  9   s'intègre dans ce groupe; c'est comme ça qu'il faut comprendre ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Selon les théories de la

 11   psychosociologie, c'est exact. La religion, la langue, la culture sont des

 12   facteurs pertinents, ainsi que les ancêtres communs. Mais c'est un peu

 13   différent de la formation des communautés nationales, parce que dans le cas

 14   des communautés nationales, il faut également qu'on ait l'existence d'un

 15   état. Mais ce que vous avez dit, Monsieur le Président, est exact.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Perçons un peu mieux ce que vous nous dites,

 17   bien que c'est très difficile, vous le concéderez.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 19   Président.

 20   Donc à la page 46, ligne 9, je lis la phrase suivante :

 21   "Au sein des sous-groupes, il y avait des stratégies ethniques

 22   différentes."

 23   Donc au sein des différents sous-groupes, il y avait des stratégies

 24   ethniques différentes. C'est ce que vous avez dit.

 25   Pourriez-vous expliquer ce que vous voulez dire par "ces stratégies

 26   ethniques au sein d'un sous-groupe" ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, à l'échelon des communautés

 28   ethniques, donc pour ce qui concerne leur organisation politique, bien

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  1   entendu, que différentes décision ont été prises, différents accords ont

  2   été passés, ainsi de suite. Ces accords et ces décisions, bien entendu,

  3   émanaient de ceux qui assuraient la direction et qui étaient à la tête de

  4   ces groupes ethniques. Bien entendu, que ces personnes ont essayé

  5   d'appliquer cela à des groupes ethniques dans leur intégralité; cependant,

  6   en raison de la situation telle qu'elle se présentait en Bosnie-

  7   Herzégovine, et j'en ai parlé à plusieurs reprises, pour ne pas me répéter,

  8   cela était particulièrement difficile à mettre en œuvre parce qu'on a

  9   assisté à la formation de nombreux sous-ensembles ou sous-groupes, en

 10   raison tout simplement des conditions objectives qui prévalaient en Bosnie-

 11   Herzégovine. L'éclatement ou la séparation, disjonction à l'intérieur d'un

 12   même groupe ethnique ou corps ethnique, et cela, en raison des

 13   circonstances de la guerre, ainsi que d'autres facteurs que j'ai aussi

 14   abordés. Mais dans ces groupes et sous-groupes, bien entendu, que l'on

 15   débattait et que l'on suivait dans principes d'un niveau supérieur, qui

 16   étaient ceux du groupe ethnique auquel on appartenait. On se conformait

 17   plutôt à ces principes qu'à d'autres.

 18   Cependant, on élaborait également un certain nombre de stratégies à

 19   l'échelon des sous-groupes, stratégies que dans un contexte

 20   psychosociologique, comme j'ai écrit, on ne peut pas considérer comme ayant

 21   nécessaire eu des liens avec ces principes généraux ou ces principes de

 22   base. C'est cela dont je parle lorsque je parle de ces situations

 23   spontanées, et c'est alors que, dans ce type de groupe, un leader qui est

 24   retrouvé dans cette position ou un groupe d'individus peut établir un

 25   certain nombre de normes. Ce sont les conditions de la guerre.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. Revenons-en à ces groupes

 27   dont parlait M. Scott avant que l'on interrompre.

 28   J'aimerais savoir ce à quoi vous pensez lorsque vous parlez de "groupes,"

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  1   groupes qui sont le résultat d'une formation spontanée; vous parlez du HVO,

  2   là ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il ne s'agit pas du HVO.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. Merci. Je vous remercie.

  5   S'agissait-il donc de criminels, comme ceux qui se faisaient appeler le

  6   "kindrvos" [phon], le Peloton des Enfants ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Des groupes criminels

  8   dans ce type de regroupement entrent dans cette catégorie, mais non pas

  9   uniquement des groupes criminels; également des groupes qui s'étaient

 10   constitués sur des principes différents.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

 12   Monsieur Scott, je suis absolument désolé de vous avoir interrompu.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur --

 14   Q.  Donc je voudrais en revenir aux autres groupes, donc on ne peut pas

 15   tout simplement écarter d'un revers de main certains groupes et choisir ce

 16   qui vous convienne uniquement. Donc vous avez commencé -- parce que ça

 17   signifie que vous aurez commencé votre travail pour arriver à une certaine

 18   fin. Moi, ce qui m'intéresse c'est le groupe des leaders, donc des leaders

 19   comme Mate Boban, comme Franjo Tudjman, comme Jadranko Prlic, Bruno Stojic,

 20   voici les groupes qui m'intéressent. Vous ne pouvez pas les écarter, de les

 21   balayer comme un revers de main, ce n'est pas possible.

 22   Donc lorsque vous avez dit qu'au départ, il n'y avait pas de conflit

 23   anticipé avec les Musulmans, or la citation que je vous ai lue, qui émanait

 24   du président Tudjman, selon laquelle il fallait séparer la Bosnie-

 25   Herzégovine, partager la Bosnie-Herzégovine entre les Serbes et les

 26   Croates, et que les Musulmans n'avaient rien à dire; c'est daté de 1991, ce

 27   ne datait pas de 1994 ni de 1995 ou 1993, ça datait de juin 1991. C'est à

 28   ce moment-là que M. Tudjman a prononcé ces paroles.

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  1   Donc vous parlez ensuite de l'imagination des groupes, mais lorsque

  2   vous avez attaqué cette partie de ce rapport, avez-vous lu le rapport du 27

  3   décembre 1991, dans une réunion, Boban a dit que, si l'on nettoyait les

  4   zones frontières d'Herceg-Bosna, on en arriverait à 65 % -- on arriverait à

  5   une population croate d'Herceg-Bosna qui serait 65 % de la population

  6   totale.

  7   D'après vous, avez-vous pris cela en compte lorsque vous avez parlé

  8   du processus d'homogénéisation ?

  9   R.  Non. Monsieur le Procureur, j'affirme à nouveau que les décisions

 10   politiques, je ne les ai pas examinées, et j'ai dit pourquoi. Je ne parle

 11   que du processus de formation des groupes et des conflits entre groupes, et

 12   c'est de ce point de vue-là que je me pose la question de savoir s'il est

 13   seulement possible d'organiser quoi que ce soit --

 14   Q.  Désolé, Monsieur, non, non, non. Nous parlons de l'organisation de

 15   l'Herceg-Bosna, et vous savez très bien quel rôle l'Herceg-Bosna a joué

 16   dans tout cela. C'est l'entité, c'est la formation, c'est le groupe qui

 17   m'intéresse. Vous dites : ah, non, j'ai tout simplement -- je les ai

 18   écartés parce que ça ne me convenait pas d'en parler; c'est cela ?

 19   R.  Monsieur le Procureur, je ne cherche à éviter rien du tout. J'ai tout

 20   simplement adopté une approche psychosociologique, celle de la formation

 21   des Groupes de belligérants, et je ne suis pas du tout penché sur le

 22   contexte de politique.

 23   Q.  En fait, ce que vous ne voulez pas traiter, c'est les faits en

 24   l'espèce. Vous ne pouvez pas théoriser et lire des manuels sur la

 25   psychologie sociale. Mais nous, ce qui nous intéresse, c'est les faits en

 26   l'espèce. Lorsque vous avez fait cela, avez-vous lu le rapport de Milivoj

 27   Petkovic, en date du 26 juin 1992, où il dit bien que les buts - et je

 28   parle bien des buts du HVO - c'est de contrôler toutes les municipalités

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  1   croates, y compris Mostar et Stolac afin d'établir un gouvernement croate

  2   dans toutes les municipalités ? Avez-vous pris en compte ce document dans

  3   le cadre de vos travaux ?

  4   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Juste un instant. Attendez, s'il vous

  5   plaît. C'est déjà la troisième fois, ou la quatrième fois que M. le

  6   Procureur pose au témoin une question, lui demandant de dire s'il a lu tel

  7   ou tel document, et à chaque fois, il cite ces documents hors contexte. Ce

  8   témoin s'est vu confier la tâche de rédiger un rapport d'expert par la

  9   Défense du général Praljak et c'est le cadre dans lequel il est intervenu.

 10   C'est la limite qu'il lui a été proposé. Il a déjà répété à plusieurs

 11   reprises qu'il ne s'est pas penché sur les faits en l'espèce. Maintenant

 12   nous voyons M. le Procureur parmi les 10 000 documents qui sont déjà au

 13   dossier --

 14   Puis-je finir, s'il vous plaît ?

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : En tout, si on essaie de ne pas perdre son temps, ce

 16   que vous dites, les Juges le comprennent parfaitement. Le Procureur pose

 17   les questions, le témoin répond, et la Chambre en tirera les conclusions.

 18   Donc ne pensez pas que les Juges sont idiots. Ils comprennent une question,

 19   ils comprennent la réponse, ils savant la portée de -- ce n'est pas la

 20   peine de dire aux Juges : attention, ça sert à rien. Le Procureur, s'il

 21   veut perdre son temps, il perd son temps. Il répète trois fois la même

 22   question, le témoin a répondu qu'il n'a pas vu les documents. Le Procureur

 23   continue. Laissez-le faire. Bien.

 24   Mais vous, maintenant, sur le fond, bien sûr que vous avez raison,

 25   parce que le rapport de l'expert ne portait pas là-dessus. C'est évident.

 26   C'était un rapport psychosocial et pas un rapport sur les faits ou sur la

 27   politique. Donc si le Procureur veut passer son temps qu'il l'utilise.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis parfaitement d'accord mais

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  1   je pense que l'objection devrait être retenue. En effet, le témoin nous a

  2   bien expliqué qu'il n'a lu aucun document, document comme on l'entend ici

  3   dans ce Tribunal. Donc je pense que ce type de question ne devrait pas être

  4   reposée.

  5   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Une seconde.

  6   Je vais prendre 30 secondes de votre temps étant donné que M. Scott vient

  7   de mentionner le nom de mon client. Dans le cas où l'un quelconque des

  8   documents lié à mon client soit utilisé, je me réfèrerais à la décision

  9   relative aux lignes directrices pour ce qui est de la présentation des

 10   éléments de preuve de la Défense. Je me réfère notamment au numéro 1 des

 11   lignes directrices. Je demanderais à contre-interroger ce témoin à ce

 12   sujet, et je me suis levée pour justement vous le dire et gagner du temps.

 13   Merci.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Monsieur Scott.

 15   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges, et j'ai

 16   pris en compte le fait que l'essentiel de ma tâche était réalisée puisque

 17   vous avez dit, vous-même, que le témoin n'a pas traité des faits en

 18   l'espèce.

 19   Q.  C'est exactement ce que je voulais prouver. Donc le problème c'est que

 20   votre rapport en fait semble -- n'est pas ce qu'il est. Vous affirmez que

 21   les gens du HVO n'étaient pas contrôlés. Vous affirmez que des gens ont

 22   commis des crimes, que des gens qui ont commis des crimes n'étaient pas

 23   contrôlés, n'étaient pas maîtrisés. Mais voilà ce que je dis, vous ne

 24   pouvez pas le dire tout simplement parce que vous n'avez pas établi les

 25   faits dans votre rapport à la base.

 26   R.  Monsieur le Procureur, pour ce qui est de mon niveau d'analyse, les

 27   faits suffisent que j'aie lus dans les autres publications et ce que je

 28   publie -- suivis dans les médias. C'est de cette façon-là que Aronson a

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  1   procédé à l'analyse de My Lai.

  2   Q.  Vous vous appuyez sur le rapport de M. Jurcevic, et ça suffit à vos

  3   yeux ?

  4   R.  Bon nombre d'autres encore, Monsieur le Procureur.

  5   Q.  -- revenir à cette question-là, nous l'avons déjà abordée à ce stade-

  6   ci. Vu les commentaires de la Chambre, je ne vais pas m'attarder sur ce

  7   point. Mais prenons la partie de votre rapport où vous parlez du recours

  8   aux symboles, aux héros et aux valeurs. Je rappelle la cote de votre

  9   rapport 3D 03721. Par exemple, page 6 en anglais. Ici c'est le 7 en croate.

 10   Vous parlez du système de valeurs d'une culture et d'identité. Vous parlez

 11   de ce diagramme de l'oignon, dites-vous, et on y voit un diagramme. On voit

 12   des valeurs, des pratiques, des rituels, des symboles; manifestement, vous

 13   connaissez ça, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, je le vois, c'est devant moi.

 15   Q.  Prenons une autre pièce, la pièce P 11024 sur le même sujet. Si on

 16   avait le temps, on pourrait étudier d'autres parties de ce document, mais

 17   pour le moment, vu le temps limité que nous avons, nous allons prendre les

 18   pages 8 et 9 de votre article.

 19   Q.  Je vais vous le lire parce que, pour le moment, il y a une partie

 20   seulement qui m'intéresse. Vous y dites, vous parlez des volontaires serbes

 21   à cet endroit. En haut de la page 9 ou -- en haut, page 9 en anglais en

 22   plus. C'est celui qui a donné à Seselj le titre de "Duc" chetnik, ce qui a

 23   créé une continuité du symbole dans les aspirations fascisantes ou

 24   fascistes qu'avaient les Serbes sur le territoire croate, aussi des

 25   prétentions et des aspirations territoriales impérialistes qu'avaient les

 26   Serbes.

 27   Alors vous parlez ici de continuité symbolique. Pourriez-vous vous

 28   expliquer ?

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  1   R.  Monsieur le Procureur, moi, je suis en train de répondre ici à des

  2   questions relatives à mon rapport d'expert. Alors comment voulez-vous que

  3   j'établisse la corrélation entre un ouvrage et un autre et faire la

  4   comparaison des deux ? Je peux parler si vous le souhaitez de la façon dont

  5   le Mouvement chetnik s'est créé, s'est développé et c'est reflété à

  6   l'actualité de nos jours. Mais je ne peux pas établir de corrélation avec

  7   mon rapport d'expert, et ça, c'est un de mes travaux de professionnel que

  8   j'ai exposé à un symposium pour ce qui est de la société. J'ai publié cela

  9   dans un recueil d'ouvrages que le Dr Separovic, qui était vice-président de

 10   la Société victimologique [phon] mondiale. Mais je ne comprends pas la

 11   question que vous me posez.

 12   Q.  Je vois. Vous avez évoqué toutes sortes de concepts :

 13   l'individualisation, le comportement collectif, et cetera. Alors quand vous

 14   dites continuité symbolique, qu'est-ce que vous voulez dire exactement ?

 15   R.  Je ne comprends pas. Là, je ne comprends pas votre question. Il faut

 16   que je sache dans quel contexte je l'ai dit.

 17   Q.  C'est un document que vous avez écrit dont je relis une partie à

 18   l'instant. Vous parlez des Serbes et de leur participation à ce conflit et

 19   vous dites, je vous ai mentionné le rôle des symboles, des rôles, des

 20   rituels et des valeurs dans votre rapport, et je vais vous y montrer un

 21   autre document. Vous avez confirmé en être l'auteur, et là, vous parlez de

 22   la continuité symbolique dans ces aspirations territoriales fascisantes ou

 23   fascistes des Serbes. Alors, bon, ce sont vos propres termes. Vous dites

 24   qu'il y a une continuité symbolique et vous voulez dire que ces termes qui

 25   sont de votre cru n'ont pas de signification.

 26   R.  Monsieur le Procureur, je ne connais pas par cœur mes textes et mes

 27   rapports. Quand j'ai parlé de "continuité symbolique," j'ai intégré cela au

 28   diagramme de tout à l'heure, le diagramme du cercle. En anthropologie et en

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  1   sociologie et en psychologie, c'est le diagramme qui est accepté. Donc on

  2   passe de l'idéologique ou psychologique, et cetera, et j'ai intégré cela en

  3   disant qu'il y avait une continuité symbolique parce que le Mouvement

  4   chetnik c'est une organisation qui est intervenue de façon légitime dans la

  5   première Yougoslavie, puis il y a eu interruption de la continuité dans la

  6   deuxième Yougoslavie, et le prince Djues [phon], qui était un Chetnik et

  7   qui a participé avec les fascistes italiens à la Deuxième Guerre mondiale,

  8   donc c'est de façon symbolique qu'il remet à Vojislav Seselj, ce titre de

  9   "Duc" lorsque l'agression serbe contre la Croatie a commencé. C'est donc

 10   dans ce sens-là que la continuité symbolique du Mouvement chetnik se

 11   poursuit dans les conditions de l'agression serbe.

 12   L'INTERPRÈTE : Les interprètes redemandent au témoin de ralentir son débit.

 13   La vitesse à laquelle il parle est impossible à suivre.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je ne peux pas vous poser des

 15   questions parce que je préside, et je préside le procès qui concerne M.

 16   Seselj, et donc je ne peux poser des questions. Donc je veux que ça soit

 17   inscrit au transcript.

 18   M. SCOTT : [interprétation]

 19   Q.  Nous allons parler d'une autre symbologie [comme interprété]. Prenons

 20   la pièce P 10522. Monsieur.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 22   Apparemment, ça ne se trouve pas dans le classeur. Je ne sais pas pourquoi,

 23   excusez m'en --    

 24   Mais regardons l'écran, Monsieur. Pour que tout le monde s'y retrouve, nous

 25   allons voir la page suivante, Monsieur -- ah si, si, ça se trouve dans le

 26   classeur - me dit-on -

 27   On peut avoir la page suivante, s'il vous plaît. Autant d'images de la

 28   Deuxième Guerre mondiale, le jour de l'indépendance de la Croatie. Page

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  1   suivante, s'il vous plaît. Arrêtons-nous ici un instant puisque nous avons

  2   tellement peu de temps. Ceci mérite un examen.

  3   Q.  Nous avons ici Jure Francetic, on voit un grand U majuscule qui veut

  4   dire Oustacha, n'est-ce pas, sur son casque ?

  5   R.  J'imagine que c'est le cas. Oui, enfin je ne sais pas de quoi avait

  6   l'air Jure Francetic. Bon, maintenant je vois, et mis à part l'inscription

  7   en dessous, je veux bien croire que c'est lui.

  8   Q.  En fait M. Francetic, c'était un des criminels de guerre oustacha les

  9   plus notoires, n'est-ce pas, pendant la Deuxième Guerre mondiale ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  A votre avis, qu'est-ce qu'on véhicule comme valeur et comme symbole

 12   quand Francetic devient le héro d'une municipalité du HVO, notamment

 13   certains des accusés ont assisté à la Cérémonie de création

 14   d'intronisation. Alors à votre avis, pour une formation, un groupe, qu'est-

 15   ce que ceci véhicule -- charrie comme symbole ?

 16   R.  Monsieur le Procureur, je ne le sais pas, et je ne vois aucun lien avec

 17   mon rapport de l'expert.

 18   Q.  Mais vous avez dit que vous vouliez parler de formation de groupe. Je

 19   vous ai montré la page dans votre rapport où vous dites toute l'importance

 20   qu'il y a à des symboles, à des héros, à des valeurs. Si on a une unité --

 21   la Chambre le sait, vous avez vu la vidéo qui montre la cérémonie

 22   d'intronisation et c'est bien là qu'il y a la cérémonie Jure Francetic.

 23   Alors, qu'est-ce que ça envoie comme message aux membres de la brigade, si

 24   c'est un criminel notoire de sinistre réputation qui a donné son nom à

 25   cette unité ? Non, c'est vous, le socio psychologue ici. Vous pouvez

 26   répondre à ma question. 

 27   R.  Monsieur le Procureur, moi, je ne le justifie pas. Si j'avais participé

 28   à la chose, j'aurais dit que jamais une unité ne devait porter le nom de

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  1   Jure Francetic. Dans mon rapport d'expert, j'ai clairement dit ce que je

  2   pensais de cette organisation politique extrémiste des Oustachi en Croatie

  3   pendant la Deuxième Guerre mondiale.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, vous n'avez pas répondu

  5   à la question, Monsieur le Témoin. La question est : Quel est le message

  6   véhiculé quand on donne ce nom-ci à une brigade ? Ce n'est pas tellement de

  7   répondre si vous êtes d'accord ou pas, mais on vous demande quel est le

  8   message qu'on fait passer si on donne à cette brigade le nom de Francetic ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est clair quel est le message qui est

 10   véhiculé ici -- enfin, je ne sais pas si c'est véhiculé et dit, mais ce

 11   qu'on voulait c'était établir un lien entre l'état croate indépendant et

 12   l'armée croate, à ce moment-là. Croyez-moi bien que je ne connais pas cette

 13   unité. Je ne sais pas quand est-ce que cette unité a été créée et où est-ce

 14   qu'elle a été créée. Mais le message, lui, est clair, le message qu'on a

 15   voulu transmettre par là, par ceux qui ont créé cette unité était clair. On

 16   ne peut ne pas établir le lien entre cette unité et l'armée qui existait du

 17   temps de l'état croate indépendant.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je voudrais savoir, Monsieur le

 20   Président, s'il y a des éléments de preuve pour ce que M. le Procureur est

 21   en train d'affirmer. Le message est clair. Son intention à lui est claire

 22   aussi; j'ai répondu, je pense, de façon claire. Mais je ne sais pas -- je

 23   ne sais pas de quoi il en retourne. Là, je suis dans la confusion.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous me posez une question. Vous

 25   demandez quels sont les éléments de preuve que le Procureur a. Le Procureur

 26   vous présente une photo que je découvre à l'instant, parce que je ne la

 27   connaissais pas, où on a un individu, apparemment, il s'appelle Jure

 28   Francetic, qui a une tenue noire, qui un casque de soldat et il y a le U

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  1   devant. Le Procureur vous dit, est-ce que ça veut dire Oustachi ou Oustacha

  2   ? Vous dites, oui. Il vous dit, il y a une brigade qui s'appelait

  3   Francetic. Vous le saviez, vous ne le saviez pas. Le Procureur vous

  4   demande, qu'est-ce que ça véhicule ? Voilà, c'est tout. Vous, vous nous

  5   avez dit, moi, je n'aurais pas utilisé ce nom.

  6   Bien. Monsieur Scott.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement.

  8   M. SCOTT : [interprétation] Prenons la pièce P04020, P04020. Il s'agit d'un

  9   ordre du 8 août 1993, signé par Milivoj Petkovic. J'aimerais que nous

 10   puissions examiner les paragraphes 2, 3 et 4.

 11   Q.  Dans ces trois paragraphes, Monsieur, il est question de Musulmans,

 12   mais on les appelle ici de ce terme péjoratif qu'on a fini par connaître

 13   ici, qui est "balijas." Vous voyez on parle de "balija" au paragraphe 2; on

 14   retrouve ce mot au paragraphe 3 ainsi qu'au paragraphe 4. Alors quelle est

 15   la valeur, le symbole qui est le message véhiculé quand vous avez un chef

 16   militaire qui utilise des termes péjoratifs dans un ordre adressé aux

 17   hommes qu'il a sous son commandement, sous son contrôle et sa direction ?

 18   R.  Monsieur le Procureur, c'est la logique socio psychologique du chapitre

 19   que vous êtes en train de citer. Vous n'êtes pas en train de vous servir de

 20   l'appareil de connaissance terminologique, socio psychologique et vous

 21   placez les choses dans le mauvais contexte. Mais je vais vous répondre pour

 22   ce qui est du contexte qui nous permet d'interpréter ceci.

 23   Ceci apparaît en psychologie sociale au contexte des préjugés. Ça

 24   fait partie, dans ce contexte, des modalités suivant lesquelles on crée des

 25   préjugés à l'égard de certains groupes. Ces préjugés sont mis en place dans

 26   des situations de crise de façon très rapide. Ça s'est produit aussi

 27   pendant la guerre entre -- pour ce qui est du conflit entre les Musulmans

 28   et les Croates.

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  1   La partie cognitive des préjugés, c'est la façon d'exprimer des

  2   stéréotypes. Le stéréotype vous fait parvenir à une généralisation de la

  3   totalité des membres d'un groupe sur la base de caractéristiques

  4   identiques, c'est-à-dire qu'on ne reconnaît aucune différence entre les

  5   individus. Suivant cette logique, le stéréotype ou son utilisation mène à

  6   la partie liée au comportement, c'est-à-dire aux discriminations et aux

  7   conflits. L'un des stéréotypes qui est utilisé à l'égard des Bosniens

  8   musulmans pendant cette guerre-là, c'est, de façon évidente, ce stéréotype

  9   ou terme de "balija." C'est comme --

 10   Q.  Vous avez répondu à ma question, merci.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, si vous me le

 12   permettez, pour les besoins du compte rendu d'audience, je voudrais qu'on

 13   note une observation de la Défense du général Petkovic. Nous n'avons pas

 14   voulu influencer sur la façon dont le témoin allait répondre à la question,

 15   mais j'attire, à l'attention des Juges, sur une mauvaise interprétation de

 16   la part de M. Scott de ce document. Il n'est pas question, ici, de

 17   Musulmans, donc, de membres d'un groupe ethnique, mais il est question de

 18   l'armée ennemie. Il faut qu'on comprenne de façon juste l'utilisation de

 19   cette notion, quelle que soit sa signification positive ou négative.

 20   Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 22   M. SCOTT : [interprétation]

 23   Q.  Passons à une autre partie de votre rapport que vous allez, je crois,

 24   trouver en croate, à la page 85 -- je me suis peut-être trompé, quand j'ai

 25   écrit le numéro de page. Voici ce que vous affirmez dans votre rapport, je

 26   cite :

 27   "Si on tient compte du fait qu'il y avait beaucoup de sous-groupes qui ne

 28   se trouvaient pas contrôlés par des institutions et qu'il est toujours

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  1   possible de -- ou que des possibilités de sanctions de tout écart dans le

  2   droit de la guerre étaient minimes ou inexistantes, d'après le cadre

  3   théorique, il est manifeste que les chefs, à différents degrés, au niveau

  4   de la hiérarchie, pouvaient à peine contrôler leurs hommes en situation de

  5   guerre et nier le comportement de ces sous-groupes, à peine ou pas du

  6   tout."

  7   On revient à la question posée. Ici, vous avez un manuel -- ce n'est pas

  8   simplement un manuel. Vous dites simplement que ces hommes échappaient à

  9   tout contrôle. Mais qui vous l'a dit ? Comment le savez-vous que ces hommes

 10   échappaient à tout contrôle ?

 11   R.  Monsieur le Procureur, les événements survenus en Bosnie-Herzégovine

 12   étaient reproduits et transmis par la totalité des médias, à la télévision.

 13   J'ai lu des publications, j'ai lu des expertises. Il y avait suffisamment

 14   de sources pour ce qui est de cette logique sociopsychologique et ça, c'est

 15   une application du cadre socio psychologique à une situation. Il s'agit de

 16   groupes dont j'ai parlé plusieurs fois hier et nous avons répété la chose,

 17   aujourd'hui, à plusieurs reprises aussi. Ça se situe dans le contexte du

 18   conformisme vis-à-vis de certains groupes. Il y a suffisamment

 19   d'informations à ce sujet. Ce sont des informations qui ont été, de tout

 20   temps, des informations publiques.

 21   Q.  Vous le faites de nouveau, vous faites une affirmation. Je comprends

 22   que si vous voulez, ici, faire une communication, informer, instruire les

 23   Juges sur divers concepts de la psychologie. Le problème, ici, au niveau de

 24   votre rapport, c'est que vous allez plus loin et vous dites : Je ne parle

 25   pas simplement de la théorie; je parle de ce qui s'est véritablement passé

 26   dans les faits. Ici, vous dites que : "Les possibilités de contrôler et de

 27   sanctionner tout écart étaient minimes, voire nuls, inexistants." Vous

 28   dites que : "Il était impossible de contrôler la situation de guerre."

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  1   Vous ne dites pas que ce sont des possibilités. Vous dites à ces

  2   Juges, ici, que c'est ce qui s'est passé sur le terrain, alors que vous

  3   nous dites n'avoir jamais vu un seul document. Retour à la case départ :

  4   Vous n'avez pas examiné les faits de la cause, n'est-ce pas ?

  5   R.  Monsieur le Procureur, non, nous sommes en train de tourner en rond.

  6   Q.  Voyons la pièce P03019, 3019. Je vais faire au plus vite. Je vais vous

  7   montrer quatre pièces et puis, vous poser quelques questions. Merci de

  8   m'aider. P03019.

  9   R.  Est-ce que vous pouvez répéter, s'il vous plaît ?

 10   Q.  P03019. Je ne sais pas si vous avez maintenant ce document, P03019,

 11   c'est un ordre du 30 juin 1993, il porte le nom de Milivoj Petkovic.

 12   Paragraphe 8, s'il vous plaît, deuxième phrase :

 13   "Isoler tous les hommes en âge de combattre dans les villages où

 14   habitent des Musulmans, dans votre zone de responsabilité et emmener les

 15   femmes et les enfants chez eux, dans leurs maisons et appartements."

 16   Je vais demander à revenir à ça. Nous avons un numéro d'ordre. Je

 17   vais faire simple, je vais prendre les derniers numéros, c'est 1244/93.

 18   Vous le voyez ? La dernière partie du numéro d'ordre, c'est 1244/93. Sous

 19   le nom de M. Petkovic, vous voyez que le commandant de la zone

 20   opérationnelle, là, on est juste en dessous de M. Petkovic dans la

 21   hiérarchie et c'est M. Lasic; c'est lui qui envoie ceci aux brigades qu'il

 22   a sous son commandement, la 2e et la 3e Brigade du HVO, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, je le vois.

 24   Q.  Prenons la pièce P03128, ça devrait être juste à côté de celle qu'on

 25   vient de voir. Je répète le numéro de pièce P03128. Encore un ordre du 2

 26   juillet 1993, celui-ci, quelques jours plus tard. Une fois de plus, on a le

 27   nom de M. Petkovic comme signataire et on dit que : "Aussi d'accord ou pour

 28   accord M. Bruno Stojic," le numéro d'ordre ici, c'est -- je reprends

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  1   simplement les derniers chiffres, 1259/93, 1259/93. Là aussi, on a une

  2   série d'ordres qui sont donnés, adressés à plusieurs unités.

  3   Je vois la participation de M. Naletilic, Tuta, le Tuta ATG, les

  4   ordres et les instructions données aux unités de la police militaire; au

  5   point 3, défense de Mostar, Lasic, chef de brigade, et cetera. Vous avez

  6   cet ordre, gardez ce numéro à l'esprit, le numéro d'ordre 1259/93.

  7   Maintenant, prenons la pièce P03117, 3117, c'est juste avant le précédent.

  8   2 juillet 1993, c'est la date de cet ordre de Miljenko Lasic, chef de la

  9   zone opérationnelle, le même jour, 2 juillet 1993. P03117, et que dit M.

 10   Lasic au premier paragraphe :

 11   "En raison de l'ordre donné par l'état-major principal," on voit le

 12   numéro d'ordre, 1259/93, c'est l'ordre qu'on vient de voir et M. Lasic,

 13   lui, il relaie à ses subordonnés par la hiérarchie la même chose. Il parle

 14   de la police militaire, il nomme un chef de secteur. C'est un ordre envoyé

 15   à la police militaire, mais on voit qu'il est fait référence au numéro

 16   d'ordre 1259/93. M. Lasic envoie ceci à la 2e Brigade, 3e Brigade --"

 17   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Scott, s'il vous

 18   plaît, ralentissez.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Je m'excuse.

 20   Q.  Dernier document, avant que je vous pose ma question, le voici, P03156.

 21   Ordre donné le jour suivant, 3 juillet 1993 :

 22   "En application de l'ordre donné par l'état-major principal, on a le

 23   numéro d'ordre 1259/93" - et il est fait référence au supérieur immédiat,

 24   M. Lasic - "3822/93" - c'est le numéro de l'ordre de Lasic, puis M. Broljic

 25   [phon] donne un ordre, le sien, à ses unités à lui.

 26   Tout ceci concerne l'arrestation d'hommes musulmans, notamment, dans la

 27   première quinzaine de juillet 1993. Est-ce que ces documents ne vous

 28   montrent pas qu'il ne s'agit pas, ici, d'actes aléatoires, spontanés, dus

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  1   au hasard ?

  2   R.  Monsieur le Procureur, ici, une fois de plus il y a malentendu. Vous

  3   êtes en train de parler d'un contexte de guerre, d'ordres donnés dans un

  4   contexte de guerre et de faits que je n'ai pas de raison de mettre en doute

  5   et vous établissez un lien avec ce qu'on ne peut pas relier avec. Ça n'a

  6   rien à voir avec les groupes ethniques sur un principe de guerre. Cela a à

  7   voir avec les activités de combat. Or, ce contexte de guerre, moi, je l'ai

  8   déjà dit, je n'en ai pas connaissance et je ne peux pas commenter et je ne

  9   peux pas l'intégrer dans le cadre théorique que je vous ai proposé et ce

 10   n'est pas, non plus, mon niveau d'expertise et le niveau auquel vous vous

 11   référez, ça ne se recoupe pas. Il faudrait que je ré analyse le tout, que

 12   je prenne tous ces documents et ensuite, partant de cette analyse, je

 13   pourrais proposer une réponse socio psychologique car c'est la première

 14   fois que je le vois.

 15   Vous êtes en train de présenter toute une série d'ordres que vous -- enfin,

 16   placez dans une corrélation les uns avec les autres, mais moi, je n'ai pas

 17   eu l'opportunité de suivre de façon suffisamment attentive parce que c'est

 18   une matière que je ne connais pas suffisamment et je suis dans

 19   l'impossibilité de répondre, bien que je le veuille. Je ne peux pas le

 20   situer dans le cadre du contexte que j'ai évoqué, moi-même. Ici, il n'y a

 21   pas de -- on ne peut pas placer cela dans le cadre théorique que je ne vous

 22   ai proposé parce que c'est une matière tout à fait autre.

 23   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, je m'excuse. Pour ce qui

 24   est du compte rendu, je tiens à préciser, il serait correct -- j'ai attendu

 25   que le témoin finisse de répondre; le témoin, on lui demande d'abord : est-

 26   ce qu'il faut lui demander : est-ce qu'il est au courant de ce qui s'est

 27   passé le 30 juin ? Parce que si on place les choses dans le contexte, il

 28   faut qu'on sache aussi pourquoi ces ordres ont été donnés. C'est tout ce

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  1   que je voulais dire, mais je crois que le témoin a déjà répondu à sa façon.

  2   Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Professeur, dans votre rapport, vous indiquez qu'il

  4   y a des groupes incontrôlés. Très bien, c'est écrit noir sur blanc. Le

  5   Procureur, par tous les documents, il vous montre qu'il y a eu certains

  6   faits qui obéissent à une logique de succession d'ordres.

  7   Nous sommes au mois de juillet; il y a début juillet. Il y a des

  8   problèmes avec les Musulmans et le HVO; donc, on peut comprendre cela. Mais

  9   il y a toute une série d'ordres pour isoler des Musulmans, isoler, arrêter,

 10   détenir. On ne rentre pas dans ce débat. Le Procureur a, d'ailleurs,

 11   employé le mot "isoler" également. Il veut savoir si les conclusions de

 12   votre rapport ont appréhendé des situations où comme il le dit, le

 13   Procureur, ce n'était pas aléatoire, ça répondait à toute une succession

 14   d'ordres. C'est là-dessus que porte le point. Sachant qu'il y avait ce type

 15   d'ordres, est-ce que vous auriez écrit la même chose dans votre rapport ou

 16   vous auriez modifié ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, cette partie peut

 18   s'intégrer dans celle où j'ai dit qu'après les affrontements entre les

 19   Croates et les Musulmans, il y a eu certains crimes ou certains actes qui

 20   ont été commis d'un côté comme de l'autre, des crimes de part et d'autre.

 21   Cela aussi, je l'ai intégré dans son contexte et j'ai dit quelle en était

 22   la cause et quelle était la conséquence, mais j'ai également dit, à la fin,

 23   dans les conclusions, cette mention du rapport quantitatif entre les crimes

 24   commis par les Serbes et présenté en tant que cause principale des

 25   affrontements entre Croates et Musulmans. Ensuite j'ai dit que du point de

 26   vue de cette approche psychosociologique, il était impossible d'imputer le

 27   même degré de responsabilité à tous les acteurs lorsqu'on place les

 28   événements dans ce contexte. C'est le contexte que j'ai utilisé pour

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  1   replacer dedans les crimes considérés. Mais dans la situation qu'on est en

  2   train d'examiner, je ne suis pas au courant, je ne connais pas le contexte

  3   pertinent -- le contexte de la guerre, pertinent à ces événements, et c'est

  4   uniquement si j'étais au courant de ces éléments-là que je pourrais, dans

  5   le contexte de l'analyse à laquelle j'ai procédé, répondre à cette

  6   question.

  7   Mais je ne peux pas répondre à la va-vite parce que je n'ai pas de vue

  8   d'ensemble de ces événements, ni de leur contexte.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 10   M. SCOTT : [interprétation]

 11   Q.  Vous dites aussi et je vous ai cité :

 12   "Qu'il n'y avait aucune mesure prise et que les commandants à tout

 13   niveau ne pouvaient pas ou pas du tout contrôler la situation de guerre et

 14   le comportement de ces sous-groupes."

 15   Je vais sans doute obtenir la même réponse, mais je vais quand même

 16   essayer de vous reposer la question : avez-vous étudié les documents

 17   portant sur les sanctions disciplinaires disponibles au sein du HVO et la

 18   mise en œuvre de ces mesures disciplinaires ? Avez-vous étudié des

 19   documents où un officier commandant aurait sanctionné ses troupes pour

 20   comportement inapproprié, ou avez-vous juste déclaré que ces groupes

 21   n'étaient pas contrôlables -- ni contrôlables, ni contrôlés, mais qu'en

 22   fait, vous n'en saviez rien ?

 23   R.  Monsieur le Procureur, non, et je n'ai pas suivi cette logique de cette

 24   manière-là. En disant que le commandant aurait disposé de possibilités très

 25   limitées pour procéder à des sanctions, je veux dire que j'ai vu que le

 26   commandant avait des possibilités limitées en la matière et je me suis

 27   penché ensuite sur la façon dont ces groupes ont été constitués de façon

 28   très hâtive. La conclusion logique qui suit est que le contrôle, lui non

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  1   plus, n'était pas possible au même niveau auquel il y est procédé dans les

  2   armées des états hautement organisés.

  3   Q.  Je m'excuse auprès des interprètes, mais si j'attends la fin de la

  4   réponse de M. Sakic, je perds trop de temps. Je m'excuse vraiment auprès

  5   des interprètes.

  6   Pourrions-nous maintenant passer à la pièce P 02595 ? Avez-vous trouvé la

  7   pièce ?

  8   R.  [aucune interprétation]

  9   Q.  Pendant que vous la cherchez, je tiens à dire, pour le compte rendu,

 10  qu'il s'agit d'un ordre de Mario Cerkez, en date du 1er juin 1993 et ici, M.

 11   Cerkez, commandant de brigade, prend des mesures disciplinaires à

 12   l'encontre d'un de ses soldats, il l'a fait redéployer, voici la sanction.

 13   Dans l'ordre, on donne le nom de la personne, on déclare que :

 14   "…aucunes mesures disciplinaires n'ont été prises à son égard par le

 15   passé et qu'il doit être sanctionné."

 16   On voit que la sanction est un redéploiement sur la ligne de front.

 17   Maintenant pourriez-vous regarder le document suivant, le P02650 ? Ici, il

 18   s'agit encore d'un ordre qui date du 6 juin 1993, quelques jours plus tard,

 19   ordre qui émane aussi de Mario Cerkez, portant sur les mesures

 20   disciplinaires prononcées à l'encontre du soldat Vinko Bosnjak. Il est

 21   écrit que M. Bosnjak, au départ, devait passer sept jours en isolement --

 22   enfin, en détention et qu'il n'aura qu'à faire -- que sa sanction est

 23   réduite à deux jours. Voyez-vous ce qui est écrit sur ce document ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Passez maintenant à la pièce P11033.

 26   Une autre façon de contrôler le comportement, c'est soit de les

 27   envoyer en prison -- enfin en détention ou aussi de leur retirer leurs

 28   responsabilités ou de les démettre de leur poste ?

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  1   R.  Oui, cela peut constituer l'une des mesures possibles. J'ignore de quel

  2   acte il s'agit, je ne peux pas en parler dans le contexte de ces cas

  3   particuliers pour lesquels j'ignore les événements concrets. Vous persistez

  4   à m'interroger sur des événements que j'ignore et nous répétons sans arrêt

  5   la même chose. Je ne peux pas répondre dans le contexte d'événements

  6   particuliers dont j'ignore tout. Mais je peux poser une question à partir

  7   du contexte de l'analyse.

  8   Que se serait-il passé si tous ces soldats avaient quitté leur unité

  9   à ce moment précis ? Auraient-ils été sanctionnés de quelque façon que ce

 10   soit ? Est-ce que le commandant, si ces hommes avaient quitté leur poste,

 11   leur unité, aurait procédé à quelques sanctions que ce soit ?

 12   Q.  Vous avez tort. Je ne vous ai pas posé ce type de questions. Je ne vous

 13   ai pas demandé de parler des faits. Je ne vous ai pas demandé si les

 14   sanctions étaient méritées ou non. Absolument pas. Je parle de concepts et

 15   de mesures. Je vous demandais si le fait de démettre quelqu'un de son poste

 16   ne serait pas une sanction. A la pièce P 11033, en date du 5 juillet 1993,

 17   on voit une décision de M. Stojic où M. Stojic démet de ses fonctions le

 18   vice commandant chargé de la sécurité de la Brigade Stjepan Radic.

 19   C'est écrit noir sur blanc :

 20   "Il est démis de ses fonctions."

 21   Le voyez-vous ?

 22   R.  Vous me demandez si ce document est exact ? Je vois que cela est écrit

 23   --

 24   Q.  Voyez-vous ce document ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Je vous demande à nouveau la chose suivante : Dans votre rapport, vous

 27   disiez qu'il n'y avait aucune mesure disciplinaire qui était disponible.

 28   C'est ce que vous avez affirmé dans votre rapport. Avez-vous étudié ce type

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  1   de documents avant d'écrire ces conclusions ?

  2   R.  Monsieur le Procureur, je ne parle que d'une situation générale dans la

  3   situation du volontariat où le fait d'abandonner un poste au sein de son

  4   groupe, d'une unité ne faisait l'objet d'aucune sanction. Je n'ai pas parlé

  5   de l'organisation intérieure, ni des relations à l'intérieur d'unités

  6   données, ni même de la possibilité d'entreprendre des sanctions. Je ne me

  7   suis pas penché sur l'aspect politique ou militaire.

  8   Q.  Je vais laisser les Juges lire tout votre rapport et toutes les

  9   affirmations que vous faites à propos du manque de sanctions disciplinaires

 10   et ce sera à eux de tirer leurs propres conclusions à ce propos.

 11   Revenons plutôt au sujet du comportement de groupe. En effet, votre rapport

 12   traite de du comportement de groupe, mais avez-vous étudié le rôle joué par

 13   les dirigeants de ces groupes par rapport au comportement du groupe dans sa

 14   totalité ?

 15   R.  Monsieur le Procureur, je m'en suis occupé dans la partie qui porte sur

 16   la façon dont on prend des décisions de groupe.

 17   Q.  En ce qui concerne les décisions prises par le groupe appelé Herceg-

 18   Bosna, avez-vous étudié ces décisions de groupe ?

 19   R.  Non, je ne m'en suis pas occupé, pour ce qui est des décisions de

 20   groupe en Herceg-Bosna.

 21   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, cher confrère, j'ai vérifié,

 22   dans l'intervalle, pendant que mon confrère a poursuivi son contre-

 23   interrogatoire, le document qu'il a appelé le P11033 et dont nous disposons

 24   dans notre classeur, ce document figure également à l'écran, ce document

 25   n'a absolument aucun rapport avec M. Stojic. Je souhaiterais simplement

 26   qu'on établisse cela. Il s'agit du district militaire d'Osijek de l'armée

 27   croate, la HV et cela n'a absolument aucun lien avec M. Stojic. Je pense

 28   qu'il doit s'agir d'une erreur de la part de mon confrère.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je m'étais rendu compte du problème. Mais est-ce que

  2   vous n'avez pas fait une erreur de numéro de document ?

  3   M. SCOTT : [interprétation] Oui, j'ai très certainement fait une erreur et

  4   je remercie Mme Nozica de l'avoir fait remarquer. Je crois que le numéro

  5   correct était P03186 --

  6   M. KOVACIC : [interprétation] Excusez-moi, mais s'il en est ainsi, moi

  7   aussi, j'ai été dans une certaine confusion pour ce qui est des numéros de

  8   document. Lorsque le témoin a répondu à la question, il se référait à

  9   l'écran et il voyait affiché devant lui le document portant la cote P11033.

 10   Par conséquent, je pense qu'il faudrait vérifier cela, le document concerne

 11   la Croatie. Or, lui, dans son rapport d'expert, ne parle pas de la Croatie.

 12   Il ne dit pas qu'en Croatie, il n'aurait pas été possible de procéder à des

 13   sanctions. Ici, nous avons la fin 1993 en Croatie, d'une part et d'autre

 14   part, la situation en Bosnie-Herzégovine qui est complètement différente.

 15   Je pense que mon confrère devrait revenir sur cette question.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- question au témoin, mais dès qu'on

 17   aura le document à l'écran.

 18   M. SCOTT : [interprétation] J'y reviendrai, j'y reviendrai. Mais je ne

 19   pense pas pouvoir terminer avant la pause; pourtant, je n'ai plus beaucoup

 20   de questions à poser.

 21   M. Kovacic n'a pas besoin de parler de ce qui se passait en Croatie.

 22   J'avais justement l'intention de montrer un document qui date du 5 juillet

 23   1993 écrit par M. Stojic. En fait, je me suis trompé de numéro et je vais

 24   essayer de trouver le numéro correct.

 25   Avant la pause -- ou faudrait-il faire la pause tout de suite ? Je ne

 26   sais pas. Vous préférez qu'on fasse la pause plus tard ou maintenant ?

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : La pause maintenant, 20 minutes.

 28   --- L'audience est suspendue à 17 heures 27.

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  1   --- L'audience est reprise à 17 heures 50.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Il vous reste 18

  3   minutes, Monsieur le Procureur.

  4   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. A vrai

  5   dire, je ne pense pas que ceci va changer grand-chose en ce qui concerne ce

  6   témoignage. Je pense que les réponses que j'obtiendrai seront toujours les

  7   mêmes. Je suis absolument désolé de l'erreur que j'ai faite au niveau des

  8   numéros de la pièce. Donc il s'agit bien de la pièce P 03186 qui doit être

  9   disponible et d'ailleurs qui doit être dans le fichier électronique aussi.

 10   Q.  Donc, Monsieur le Témoin, lorsque je fais référence à un ordre ou une

 11   décision en date du 15 juillet -- du 5 juillet 1993, démettant M. Dodig de

 12   ses fonctions, c'était à ce document P 03186 que je faisais référence.

 13   J'espère que vous l'avez trouvé. Je pense que je le vois dans votre

 14   classeur; l'avez-vous trouvé ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Donc pour la clarté du compte rendu, je tiens à dire à vous demander si

 17   cela modifie votre témoignage. Vous n'avez pas pris ce document en compte,

 18   ni aucun document que je vous ai montré où l'on voyait qu'il y avait des

 19   sanctions disciplinaires qui étaient à la disposition des membres du HVO

 20   pour sanctionner tout comportement déviant ? Vous ne l'avez pas pris en

 21   compte dans vos rapports, n'est-ce pas, aucun de ces documents ?

 22   R.  En effet, parce que cela n'entre pas dans le cadre de la méthodologie

 23   ni dans le contexte plus général de mon expertise.

 24   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaiterais juste

 25   intervenir aux fins du compte rendu d'audience et formuler une objection. A

 26   partir de ce document, il est absolument impossible de voir qu'il y aurait

 27   ici un rapport quelconque avec des mesures disciplinaires ni on n'y voit

 28   pas non plus que cet homme aurait été démis de ses fonctions, parce qu'il

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  1   aurait commis quelque chose d'inacceptable. Il s'agit d'un document

  2   administratif qui ne nous montre pas pour quelle raison, pour quel motif

  3   cette personne est démise de ses fonctions. Il s'agit d'une décision qui

  4   n'a absolument rien à voir avec quelle que mesure disciplinaire que ce

  5   soit.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  8   Q.  Donc je vais y revenir afin que ce soit clair sur le compte rendu, mais

  9   j'aimerais d'abord revenir au dernier sujet dont nous parlions avant

 10   d'aborder celui-ci. Je vous ai demandé si vous aviez étudié le rôle joué

 11   par les leaders de l'Herceg-Bosna, à propos des décisions prises sur le

 12   comportement du groupe d'Herceg-Bosna, et vous avez dit que non. Donc c'est

 13   aux pages 70 et 71 du compte rendu d'aujourd'hui.

 14   Aux pages 70 et 71, vous avez répondu :

 15   "Non, je n'ai pas pris en compte les décisions de groupe prises en Herceg-

 16   Bosna."

 17   C'est bien ce que vous avez répondu, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne me suis pas du tout penché sur la prise des décisions de nature

 19   politique ou militaire, qui ont été prises en Herceg-Bosna, aucune d'entre

 20   elles.

 21   Q.  Très bien. Je voulais m'assurer que ceci était correctement au compte

 22   rendu.

 23   J'ai énormément d'interférence dans mon casque. Je m'en excuse auprès de

 24   tous, c'est pour cela que j'ai un petit mal.

 25   Donc passons au point suivant, dernier point d'ailleurs, dans votre rapport

 26   vous parlez du rôle de ce que vous appelez les extrémistes d'éléments

 27   criminels. Enfin, ces personnes, plutôt que de penser que ces personnes

 28   étaient incontrôlées, vous semblez dire qu'ils étaient instrumentalisés --

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  1   plutôt que de penser que ces personnes n'étaient pas contrôlées ni

  2   contrôlables ou avez-vous pensé ou envisagé la possibilité qu'ils étaient

  3   instrumentalisés, et donc qu'ils faisaient en fait ce que les dirigeants

  4   politiques et militaires voulaient qu'ils fassent ?

  5   R.  Monsieur le Procureur, j'ai dit cela aux Juges de la Chambre, hier,

  6   déjà, à savoir que certains groupes au sein de l'agression serbe ont été

  7   instrumentalisés qu'à leur tête se trouvaient des criminels ayant un casier

  8   judiciaire dans de nombreux états. On les a donc instrumentalisés et

  9   utilisés dans le contexte de l'agression serbe. Je l'ai dit, hier.

 10   Q.  Puisque vous dites qu'ils étaient instrumentalisés, pourriez-vous nous

 11   expliquer ce que vous voulez dire par là ?

 12   R.  Je veux dire par là que, lorsque l'on a affaire à de tel groupe,

 13   lorsqu'on a instrumentalise de la sorte des criminels, ils acceptent de

 14   participer à de telles actions, à de tels actes, parce qu'ils savent

 15   pertinemment la raison véritable qui est celle de leur participation, leur

 16   motivation véritable qui est le pillage, et ils savent pertinemment qu'ils

 17   ne seront pas sanctionnés et que ceux qu'ils auront pillé leur

 18   appartiendra. Donc il s'agit de ces groupes antisociaux et asociaux dont le

 19   but est toujours le profit, le gain matériel.

 20   Q.  Vous conviendrez avez moi qu'en ce qui concerne le concept, parce que

 21   vous nous avez dit cet après-midi que vous parlez souvent de concept,

 22   plutôt que de fait, en tant que -- quand on parle de concept, il n'y a pas

 23   que les Serbes qui peuvent se comporter de la sorte, les Musulmans peuvent

 24   se comporter ainsi, les Croates aussi, n'est-ce pas, les différents

 25   éléments criminels peuvent très bien être instrumentalisés, si je reprends

 26   votre terme, n'est-ce pas ?

 27   R.  Bien entendu, Monsieur le Procureur, c'est possible dans toutes les

 28   armées.

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  1   Q.  Donc avant de poser mes dernières questions, pourriez-vous nous dire

  2   qui était Vice Vukojevic ?

  3   R.  Monsieur le Procureur, je connais Vice Vukojevic depuis le début des

  4   années 1990, en sa qualité de député au Sabor.

  5   Q.  Mais dans les années 1980, ou vers 1995 ou d'ailleurs encore de nos

  6   jours, n'était-il pas considéré comme un extrémiste nationaliste croate ?

  7   R.  Je ne puis le dire, Monsieur le Procureur, ni je ne puis non plus

  8   répondre à cette question. Vous pourriez peut-être me poser une question

  9   plus claire, qui considère cela ?

 10   Q.  Mais toute la journée d'aujourd'hui et toute la journée d'hier, vous

 11   nous avez parlé de vos travaux dans ce domaine. Vous avez travaillé dans

 12   cet institut depuis 17 ans. Vous nous avez énormément parlé dans personnes

 13   avec qui vous avez travaillé, de votre réseau. Donc au cours de ces 17

 14   années, vous n'avez jamais entendu parler, vous n'avez jamais lu d'article

 15   de presse, vous n'avez jamais entendu parler de ce M. Vice Vukojevic, qui

 16   aurait été décrit comme un pur et dur du HDZ, un nationaliste croate

 17   extrêmement proche de M. Susak ?

 18   R.  Dans ce cas, posez-moi la question comme suit, Monsieur le Procureur.

 19   Si vous pensez aux médias, de quel média s'agit-il ? J'ai lu dans les

 20   médias de telles allégations.

 21   Q.  Veuillez m'excuser. Bien sûr, cela nous suffit de toute façon. Je ne

 22   vous demandais pas votre avis à propos de cet homme, je vous demandais s'il

 23   n'était pas vu comme étant un nationaliste. Je pense que vous avez répondu

 24   à la question.

 25   Maintenant pourriez-vous, s'il vous plaît, vous pencher sur la pièce P07695

 26   ? Il doit se trouver vers le milieu de votre classeur. Donc il s'agit d'un

 27   compte rendu d'une réunion présidentielle ayant eu lieu le 27 janvier 1994,

 28   j'aimerais attirer votre attention sur une page qui correspondra à la page

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  1   croate, c'est-à-dire la page 16. Vous pourriez peut-être tout d'abord nous

  2   rappeler qui était donc ce Franjo Greguric, quel était son poste en janvier

  3   1994, Dr Franjo Greguric ?

  4   R.  Je l'ignore, Monsieur le Procureur. Il me semble qu'il était premier

  5   ministre, il l'a été en 1992, c'était le gouvernement d'Union démocratique.

  6   Il était à la tête de ce gouvernement. Mais je ne sais pas maintenant

  7   jusqu'à quand ce gouvernement a existé, a été en place.

  8   Q.  Bien. Aux environs des années 1990, M. Greguric était premier ministre

  9   de Croatie, de la République de Croatie, n'est-ce pas ?

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Objection. Le témoin a dit clairement : "Je

 11   l'ignore pour cette période de temps." La question a fait l'objet d'une

 12   réponse. C'est le Procureur qui témoigne maintenant.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je n'étais pas très précis, il m'a dit qu'il ne

 14   savait pas extrêmement bien quel était son poste en 1994. J'y suis revenu

 15   pour lui dire que --

 16   Q.  Au début des années 1990, 1992, 1994, M. Greguric était premier

 17   ministre. C'est tout ce que je vous dis ?

 18   R.  C'est ce que vous dites. Moi, je l'ignore. J'ai dit que je ne sais pas

 19   jusqu'à quand cela a été le cas et à partir du présent document, ce n'est

 20   pas visible.

 21   Q.  Dans les années 1990, il était premier ministre; oui ou non ?

 22   R.  Tout ce que je sais, je l'ai dit, à savoir qu'il a été à la tête du

 23   gouvernement d'Union démocratique. J'ignore jusqu'à quand cela a duré. Il y

 24   a eu dix premiers ministres en Croatie, au cours des années 1990 et je n'ai

 25   pas appris par cœur les dates du début et de la fin du mandat de chacun

 26   d'entre eux.

 27   Q.  Lorsque M. Greguric rencontrait M. Tudjman le 27 janvier 1994, à la

 28   page 7 [comme interprété] et voici ce qu'il déclare à Tudjman :

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  1   "Je dois vous dire, Monsieur le Président, que je ne veux même plus

  2   partager de siège avec Vice Vukojevic."

  3   Je crois que son nom n'est pas écrit correctement, mais plus tard, dans le

  4   document, il est écrit correctement. M. Tudjman et M. Greguric parlent

  5   ensemble et le président Tudjman répond en disant, en bas de la page 16 :

  6   "Oui, mais nous ne pouvons pas terminer sans Vice Vukojevic. Comment vas-tu

  7   faire ? Il est allé aux frontières de l'état croate, il est allé là où les

  8   frontières d'état croate sont en train d'être déterminées."

  9   Le président Tudjman connaissait bien -- il y avait quelqu'un, ici, qui

 10   était instrumentalisé ? Le président Tudjman savait bien que M. Vukojevic

 11   n'est pas une personne extrêmement recommandable, mais finalement, il a

 12   répondu à M. Greguric : on ne peut pas atteindre nos objectifs sans ce

 13   Vukojevic.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais à mon

 15   confrère, M. Scott, de nous aider à nous débrouiller dans le compte rendu

 16   parce que si j'ai bien suivi ce qui se passe dans le prétoire, cette phrase

 17   se rapporte à trois personnes, Vice Vukojevic, Jozo Manolic et Stipe Mesic.

 18   J'aimerais savoir s'il en est ainsi ou si nous sommes en train de lire de

 19   façon erronée le compte rendu ?

 20   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Madame Alaburic. J'avais

 21   l'impression d'être clair puisqu'en bas de la page 16 :

 22   "Le président Tudjman déclare, et je cite :"

 23   Revenons à la fin des propos de M. Greguric. J'essayais de gagner du temps

 24   et je n'ai pas été rapide. Voilà ce qu'il dit :

 25   "Ces hommes sont à l'hôpital et les apparences sont trompeuses, vous savez,

 26   les voitures. Tout a l'air bien. Mais en fait, on est très pauvres. Ils

 27   n'ont plus d'argent et ils ne sont pas contents. Un grand nombre de

 28   personnes sont venues me voir et m'ont dit : la situation est difficile. Il

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  1   faut terminer la guerre le plus rapidement possible. Il n'y a pas d'autre

  2   solution."

  3   "Le président répond : Oui, mais nous ne pouvons pas la terminer sans Vice

  4   Vukojevic. Comment pouvez-vous -- pourquoi n'avez-vous pas compris ?

  5   Vukojevic, aussi, est allé en Herzégovine, alors même qu'on déterminait les

  6   frontières de l'Etat croate."

  7   Voilà ce que je lis. Maintenant, en bas de la page, plus loin, en effet, M.

  8   Tudjman confirme et dit que s'il le pouvait, il se débarrasserait de M.

  9   Vukojevic, mais il dit :

 10   "Je ne peux pas m'en débarrasser, j'en ai besoin du fait de la guerre. Je

 11   m'en débarrasserais, si je pouvais et je donnerais mes réponses -- je me

 12   débarrasserais de lui et d'autres, d'ailleurs, de Mesic, pour d'autres

 13   raisons que je pourrais vous dire, mais je ne peux pas à cause de la

 14   guerre."

 15   Q.  Ici, on a l'exemple d'une personne qui est "instrumentalisé," c'est M.

 16   Vukojevic; il est "instrumentalisé" pour atteindre l'objectif ?

 17   R.  Monsieur le Procureur, partant de cette conversation, ce n'est pas du

 18   tout ce que je pourrais dire. Je ne peux pas vous répondre. Je n'ai pas le

 19   contexte le plus élémentaire pour pouvoir vous répondre. Tout ce que je

 20   sais des activités du président Tudjman à l'époque, je le sais à partir de

 21   ses interviews, de ses comparutions publiques où il s'est toujours employé

 22   en faveur d'une solution pacifique, où il était toujours disposé à

 23   négocier. Il y a bon nombre de traces à ce sujet, bon nombre de signatures

 24   pour ce qui est des tentatives de trouver des solutions pacifiques à la

 25   situation en Bosnie-Herzégovine. Rien d'autre.

 26   Q.  D'accord. Vous n'avez jamais lu les transcripts présidentielles où il

 27   dit quelque chose qui serait le contraire ? Dites oui ou non.

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Très bien. Voyons enfin la pièce P07570, 7570. C'est le procès-verbal

  2   ou la transcription d'une autre réunion qui s'est déroulée d'ailleurs vers

  3   la même date, plus exactement, le 12 janvier 1994, autre réunion avec le

  4   président Tudjman.

  5   Au milieu de la page 62, s'il vous plaît, ce sera la même page dans les

  6   deux langues, là -- ici, Pranjic parle d'une situation précise et le

  7   président Tudjman intervient, en milieu de page, il dit ceci, je cite :

  8   "D'accord. Dis-moi : est-ce qu'ils ont commis des crimes à" - excusez mon -

  9   - si j'estropie ce nom, mais Krizancevo Selo ? C'est exact. Ne nous

 10   trompons pas. Est-ce que vous savez qui ils ont enlevé ? Ils ont enlevé

 11   ceux qui combattaient les uns contre les autres et moi, je vais te dire

 12   autre chose et on devrait en être  conscients. Ils ont pesté contre Mrcip

 13   [phon], mais, moi aussi, je suis contre ça, mais c'était un combat de vie

 14   ou de mort, de Vukovar à Gospic et s'il n'y avait pas eu des gens comme ces

 15   hommes, on n'aurait pas la Croatie aujourd'hui."

 16   N'est-ce pas un parfait exemple où Tudjman dit :

 17   "Et bien, on a besoin de ce genre de gens, on a besoin de gens comme

 18   Mrcip, comme Vukojevic, pour que la besogne soit faite" ?

 19   R.  Je vous réponds de la même façon. Je ne peux pas tirer de conclusion de

 20   ce genre. Je ne peux pas établir de lien avec mon rapport d'expert. Ça se

 21   rapporte à la situation en Croatie et de mon avis, ça n'a rien à voir, ça

 22   n'a aucun lien avec l'objectif et le sens de mon rapport d'expert.

 23   Q.  Mais ça n'a aucun lien parce que vous n'avez étudié aucun des éléments

 24   des documents du dossier. C'est pour ça que ça n'a rien à voir avec votre

 25   rapport, c'est parce que votre rapport n'a rien à voir avec les faits

 26   évoqués dans ce procès.

 27   R.  Je ne suis absolument pas d'accord avec cela.

 28   Q.  Tout l'après-midi, vous nous avez dit que vous n'avez étudié aucun

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  1   document du HVO, vous n'avez vu aucun document, je n'ai jamais étudié les

  2   faits, je n'ai jamais vu les transcripts présidentiels, pas un seul

  3   document d'Herceg-Bosna. C'est bien ce que vous nous avez dit ? Vous n'avez

  4   étudié aucun de ces documents, pas le moindre ?

  5   R.  Monsieur le Procureur, mon analyse s'est rapportée au contexte socio

  6   psychologique et l'application de ce contexte à la guerre en Bosnie-

  7   Herzégovine. Moi, j'ai parlé du contexte, en premier lieu et c'est la

  8   raison pour laquelle je me suis servi de toute la littérature pertinente.

  9   Pour ce niveau-là de mon analyse, je me suis servi des informations

 10   nécessaires puisées dans les documents et publications, en premier lieu,

 11   qui se trouvent être pertinentes à cet effet.

 12   Q.  Ici, est-ce que Tudjman ne dit pas, je le cite :

 13   "Si on n'avait pas eu ces hommes, des hommes comme lui, on n'aurait pas la

 14   Croatie aujourd'hui;" n'est-ce pas exact ?

 15   R.  C'est ce qui est écrit ici.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Sakic. Je n'ai plus

 17   d'autres questions à vous poser.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 20   Je voudrais vous poser deux questions, Monsieur l'Expert et elle

 21   concerne directement votre rapport.

 22   Questions de la Cour :

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Voici la première : page 65, vous

 24   parlez de systèmes -- ou d'identité culturelle, le système de valeurs et

 25   vous dites que la population humaine a développé sa diversité par les

 26   gènes, la langue et la culture.

 27   Comment faut-il vous comprendre ? Est-ce que vous dites ici que la

 28   nationalité c'est quelque chose qu'on trouve dans les gènes ?

Page 45763

  1   R.  Monsieur le Juge, j'ai cité là l'auteur Hofstetter [phon], c'est un

  2   préalable théorique qui est utilisé en anthropologie psychologique et

  3   physiologique, en partie, et en partie, en médecine, qui parle de l'origine

  4   génétique des différentes espèces. Vous en avez probablement entendu parler

  5   à savoir que les gens en médecine se penchent dessus de façon intense.

  6   Alors la nationalité, en partie dans une partie, comporte des éléments

  7   génétiques et en partie des éléments culturels et des éléments

  8   linguistiques pour ce qui est des similitudes entre les différents membres

  9   du groupe. De ce point de vue-là, les nationalités diffèrent les unes des

 10   autres, à ce point de vue-là.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Dites donc aux Juges de la Chambre

 12   sous serment, que les Britanniques, ils ont un gène britannique, les

 13   Français ont un gène français, les Allemands un gène allemand et les

 14   Italiens un gène italien, de sorte qu'on peut prendre une goutte de sang et

 15   on saura de quelle nationalité la personne qui a versé ce sang est ?

 16   R.  Monsieur le Juge, ce n'est absolument pas quelque chose qui pourrait

 17   rester debout ou résister aux épreuves et j'ai dit qu'il y avait --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, mais parce qu'ici vous parlez

 19   d'identité, de diversité par les gènes, à travers les gènes. Maintenant

 20   donc je comprends que je ne peux pas accepter ce texte comme tel parce

 21   qu'il n'est pas possible de découvrir l'identité de quelqu'un en analysant

 22   ses gènes. Enfin peut-être qu'un jour on trouvera une réponse à cette

 23   question mais jusqu'à présent aucune recherche n'a démontré que les

 24   Français auraient un gène différent de celui qu'on les Allemands, disons;

 25   est-ce exact ?

 26   R.  C'est exact.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Deuxième question, page 12,

 28   vous citez Wilhelm Wundt. Vous dites qu'il a fondé la psychologie

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  1   expérimentale. Je ne le conteste pas. Mais vous parlez de

  2   "Voelkerpsychologie," "Psychologie des peuples," en dix volumes, un ouvrage

  3   qu'il a écrit. Vous dites que c'est là un apport précieux ? En quoi est-ce

  4   que ce fut un apport précieux à la science ?

  5   R.  Monsieur le Juge, donnez-moi un instant, un petit rectificatif.

  6   Wilhelm Wundt est fondateur des laboratoires expérimentatifs [phon] et de

  7   la psychologie expérimentale. C'est en 1889 qu'il a créé un premier

  8   laboratoire expérimental en psychologie. J'ai dit que ce n'était pas que

  9   c'était plutôt une espèce d'aperçu. J'ai fait un avant-propos comme les

 10   hommes de science le font pour dire depuis quand l'identité en question,

 11   l'identité nationale ou l'identité ethnique était étudiée. J'ai également

 12   cité Ibn Khaldun, qui a étudié les identités ethniques pour ce qui est des

 13   tribus indigènes en Asie dans le XIVe et XVe siècles, c'est un aperçu. Je

 14   n'ai pas parlé de valeurs. Je me suis fondé dans mon expertise sur les

 15   théories les plus valables des temps modernes.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suppose que vous avez vérifié la

 18   traduction. Oui.

 19   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je sais que c'est votre sujet de

 20   prédilection, Monsieur le Juge, et en croate on ne trouve rien de cela. On

 21   ne dit pas que c'est une contribution, un apport précieux, donc je pense

 22   que la traduction ne rend pas l'original ici.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Je vous crois sur parole.

 24   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je peux vous la lire la phrase.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Allez-y.

 26   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation]

 27   "De par cette première phrase positiviste, il convient de mentionner

 28   certainement un livre de dix volumes du fondateur de la psychologie

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  1   expérimentale, Wilhelm Wundt 'Psychologie et psychologie des peuples,'

  2   analyse psychologique comparative entre différents pays partant de la

  3   langue, des mythes, de la morale des mythes de l'art et des législations."

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Ce fut un apport

  5   précieux.

  6   Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez comment on voit aujourd'hui la

  7   psychologie populaire ou des peuples ? Comment est-ce qu'on voit ce domaine

  8   en science moderne ?

  9   R.  Monsieur le Juge, on considère que cela fait partie de l'histoire de la

 10   psychologie et on s'en sert dans l'histoire de la psychologie lorsqu'on

 11   parle des débuts de la psychologie et de la façon dont ça a évolué.

 12   Aujourd'hui, cela passerait difficilement les vérifications de la théorie

 13   socio valorisante de Tyfol [phon], Turner, et autres qui sont des théories

 14   contemporaines. Donc ça passerait difficilement l'examen de la vérification

 15   actuellement.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Est-ce que vous savez quel

 17   fut l'effet historique de cette théorie, ce qu'on en a fait de cette

 18   "Psychologie des peuples" ?

 19   R.  Monsieur le Juge, je le sais. Ça a été utilisé enfin je sais que ça a

 20   été utilisé dans l'Allemagne Nazi. Mais cela ne signifie pas que si

 21   utilisée il faut l'attribuer à l'auteur. L'auteur c'est un nom connu. Mais

 22   c'est les interprétations ou réinterprétations de la théorie qui ont été

 23   donc utilisées et l'auteur ne le mérite absolument pas.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bon, ce n'est pas M. Wundt qui est

 25   au banc des accusés ici, je ne veux pas insister. Mais j'ai quand même une

 26   autre question à vous poser.

 27   Dans votre analyse, vous parlez assez longuement de l'évolution historique

 28   et de crimes commis par des Serbes. Mais je n'ai trouvé aucune référence où

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  1   que ce soit dans votre rapport. Peut-être est-ce une omission de ma part,

  2   mais je n'ai vu aucune référence à des crimes commis par les Oustachi. Est-

  3   ce que vous pouvez m'expliquer cela ? Est-ce que c'est un élément qui n'a

  4   aucun lien, aucun rapport avec les événements survenus entre 1991 et 1995 ?

  5   R.  Monsieur le Juge, j'ai mentionné les Oustachi dans le contexte des

  6   organisations extrémistes et le crime d'ailleurs à Jasenovac je l'ai

  7   également mentionné dans mon rapport d'expert, et j'ai parlé de trois

  8   groupes extrémistes qui ont influé sur -- de façon aussi grave sur l'avenir

  9   de la deuxième Yougoslavie, je l'ai mentionné dans mon expertise. J'ai

 10   parlé des plus grands des crimes, le reste n'était pas tellement pertinent

 11   pour l'analyse.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Supplémentaire, rapidement. Si on

 13   disait que Jasenovac c'est un mythe, est-ce que vous pensez que c'est une

 14   bonne façon de décrire cet endroit ? Seriez-vous d'accord ?

 15   R.  Monsieur le Juge, je n'ai pas vaqué à l'étude de Jasenovac. Lorsqu'on

 16   parle de mythes en termes sociaux et psychologiques, on indique que c'est

 17   une formulation inexacte de la réalité, donc une invention pure et simple;

 18   cependant, on peut également considérer que cela peut faire partie d'une

 19   idéologie déterminée. Pour ce qui est des propos relatifs aux mythes de

 20   Jasenovac, je crois qu'on fait allusion, si j'ai bien compris de ces abus

 21   grand serbes du nombre de victimes à Jasenovac pour ce qui est de leurs

 22   objectifs agressifs vis-à-vis de la Croatie, ils font allusion au fait que

 23   tous les Croates sont du fait de crimes des Oustachi.

 24   Quand on parle du nombre de victimes qui sont allées jusqu'à un

 25   million parfois, on peut parler de mythes parce que c'est une invention que

 26   d'affirmer que c'était un million, mais qu'ils soient 50 000 ou 800 000, le

 27   crime -- un crime c'est un crime et ça c'est absolument exact.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, pour les questions supplémentaires.

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

  3   pense avoir plusieurs questions à poser.

  4   Nouvel interrogatoire par M. Kovacic :

  5   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, la première des choses que je

  6   voudrais vous demander étant donné que le Procureur a passé pas mal de

  7   temps à insister sur la question et le Procureur vous a présenté de façon

  8   claire une thèse, à savoir que vous n'avez que supposé qu'il enfin que ces

  9   événements pendant le conflit en Bosnie-Herzégovine ne sont pas des

 10   événements organisés et dirigés du haut vers le bas; ça c'est la formule

 11   utilisée par le Procureur. Donc c'est une supposition que vous avez fait

 12   seulement et vous auriez fait ce type d'affirmation. Alors je vous prie de

 13   me dire si le Procureur fait à juste titre bien de vous placer ces propos

 14   dans la bouche.

 15   R.  Non, ce n'est pas exact.

 16   Q.  Est-ce qu'en fait vous êtes en train de faire une espèce de présomption

 17   pour ce qui est d'avoir une organisation de ces événements oraux pour être

 18   transmis vers le bas et que ça n'a pas été spontané en application des

 19   théories psychosociologiques que vous avez évoquées ?

 20   R.  Je ne suppose pas, je n'en n'ai pas du tout, je ne m'en suis pas

 21   occupé.

 22   Q.  Est-ce que pendant les interventions du Procureur, ou suite à ces

 23   interventions-là, vous maintenez les affirmations qui sont celles contenues

 24   dans votre rapport d'expert ?

 25   R.  Monsieur le Conseil, oui, je maintiens à part entière suite à ce qui

 26   s'est dit au niveau des affirmations que j'ai présentées dans mon rapport

 27   d'expert, je pense que c'est homogène et que, méthodologiquement, c'est

 28   tout à fait fondé sur les théories scientifiques qui sont appliquées de

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  1   façon correcte.

  2   Q.  Merci. Suite à d'autres questions de la part de M. le Procureur. Je

  3   voudrais que l'on dise clairement une chose. En votre qualité d'hommes de

  4   science et en votre qualité de citoyen dans ce pays qui est la Croatie

  5   pendant les événements qu'on connaît, et en Bosnie aussi, qu'est-ce qui

  6   vous a notamment intéressé en premier lieu, en tant qu'homme de science les

  7   détails des événements ou les processus globaux ?

  8   R.  Monsieur l'Avocat, en ma qualité d'homme de science, j'ai été surtout

  9   intéressé par les processus et les processus globaux -- nationaux, globaux

 10   et locaux. C'était en termes simples, la façon dont je me suis occupé de la

 11   guerre en Croatie, ce n'est pas seulement scientifique, il y a d'autres

 12   activités scientifiques de ma part j'ai organisé des assemblées, des

 13   tribunes, des réunions internationales afin que le conflit soit placé sous

 14   un éclairage qui est celui qui a été le sien. Pour moi, c'est la chose la

 15   plus importante que celle de placer les choses dans leur contexte.

 16   Q.  Pour mettre en œuvre les théories modernes de la psychologie sociale,

 17   est-il nécessaire que vous connaissiez les détails au niveau subalterne, ou

 18   est-ce que, s'agissant de votre analyse, il suffit de se pencher sur les

 19   événements globaux du point de vue contextuel ?

 20   R.  Monsieur l'Avocat, je me suis servi pour mon analyse ce qui me

 21   suffisait. J'ai dit déjà qu'hier qu'à des niveaux plus bas, lorsqu'on veut

 22   analyser les événements, on peut le faire. Je pourrais le faire, mais il

 23   faudrait donc étudier le détail et on pourrait utiliser le même cadre

 24   théorique mais c'est d'une façon autre qu'on l'utilise et il existe ce type

 25   d'analyse aussi. Ce sont des analyses à des échelons inférieurs. Je

 26   pourrais le faire mais l'approche serait différente, et là, oui, je

 27   prendrais lecture de certains autres documents.

 28   Q.  Merci. On vous a montré le P 11027. L'article du journal appelé

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  1   "Nacional." Je serai bref. Vous nous avez dit que vous avez démenti les

  2   allégations contenues dans cet article ?

  3   R.  C'est exact, nous l'avons démenti.

  4   Q.  Y a-t-il eu d'autres situations où vous avez personnellement voire

  5   votre institut a eu à démentir la teneur de certains articles ?

  6   R.  Il y a eu plusieurs fois des démentis de la part de mon institut, et en

  7   ma qualité de directeur dans mes interviews, j'ai toujours fait référence à

  8   cela pour ce qui est donc des allusions ou affirmations du type de celles

  9   qu'on a entendues de la bouche du Procureur aujourd'hui.

 10   Q.  Encore une question à ce sujet. Si l'article avait dit vrai, seriez-

 11   vous allé démentir ?

 12   R.  Si l'article avait dit vrai, je n'aurais pas eu à démentir. Il y a eu

 13   pas mal d'articles au sujet de l'institut qui étaient tout à fait dans le

 14   vrai. Il y en a eu beaucoup plus de ce genre qui ont loué l'institut comme

 15   étant un établissement de renommée internationale.

 16   Q.  Merci. En guise d'exemple, disant qu'il y a eu des sanctions, qu'il y a

 17   eu des mesures disciplinaires de prise en Bosnie-Herzégovine au sein du

 18   HVO, et à cet effet le Procureur s'est servi du P 02595. Je vous rappelle

 19   qu'il s'agit du document où un commandant de la Bosnie centrale, Mario

 20   Cerkez aurait prononcé une mesure disciplinaire à l'égard d'un soldat, d'un

 21   policier dans la brigade. Ne perdons pas de temps, je pense que vous allez

 22   vous souvenir de ce document.

 23   J'aimerais puisque vous avez vaqué à la pénologie, à l'étude de la

 24   pénologie, dites-moi si vous savez quoi que ce soit enfin vous m'avez dit

 25   que vous ne saviez rien au sujet d'événements et du document en question,

 26   mais ma question est la suivante : est-ce que vous savez si la mesure en

 27   question, la mesure prononcée en question a été mise en œuvre ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Merci. Docteur, dites-moi : puisque vous avez fait de la pénologie,

  2   pour ce qui est du processus de mise en œuvre de sanctions à l'égard d'un

  3   auteur de crimes, donc il faut d'abord une décision, un prononcé de

  4   sentence sur la base d'une loi et il y a la mise en œuvre de la sanction,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, exact.

  7   Q.  Compte tenu du fait que vous avez -- vous intervenez en matière de

  8   pénologie, la décision définissant la sanction sans qu'il y ait mise en

  9   œuvre de ladite sanction, est-ce que cela a un sens quelconque, est-ce que

 10   cela nous permet d'aboutir à une effet quelconque ?

 11   R.  Non, vous n'aboutissez à aucun effet, ni de façon générale, ni de façon

 12   particulière.

 13   Q.  Merci. Tout à l'heure le Procureur vous a interrogé au sujet de Vice

 14   Vukojevic. D'après l'Accusation c'est une chose notoire que d'affirmer que

 15   M. Vice Vukojevic est un grand nationaliste croate. Plaçons les choses dans

 16   leur contexte. Vous nous avez dit que vous ne le connaissiez pas en

 17   personne, mais partant des médias ou d'une façon autre, sauriez-vous qu'à

 18   plusieurs reprises, on l'a jugé pour ce qui est qualifié pour ce qui est de

 19   délit verbal en ex-Yougoslavie ?

 20   R.  J'ai eu l'occasion de lire des articles dans les journaux, tout comme

 21   ce qu'on a évoqué tout à l'heure.

 22   Q.  Merci. Votre rapport d'expert, dans la partie où vous expliquez les

 23   modèles de comportement d'individu en conflit; est-ce que ce modèle que

 24   vous nous avez exposé pourrait être appliqué à une armée parfaitement bien

 25   organisée, disciplinée ?

 26   R.  Ces théories, bien sûr, ne seraient pas des théories aussi reconnues si

 27   elles ne pouvaient pas être appliquées de façon globale. Donc elles doivent

 28   pouvoir être appliquées à la totalité des phénomènes. Il en va de même pour

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  1   ce qui est des phénomènes dont le général a parlé hier, c'est-à-dire les

  2   catastrophes naturelles, les incidents, les rébellions, et cetera. D'après

  3   Poper [phon], un expert mondial soit on procéderait à la révision des

  4   théories ou à la réfutation de ces théories, et ça fait partie de

  5   l'histoire où serait complétée, voire carrément annulée.

  6   Q.  Bien. Professeur, dites-moi : quelle est la probabilité de voir ce type

  7   d'irrégularité, de déviation, faire leur apparition à l'occasion d'un

  8   conflit où il n'y aurait participation que de deux armées hautement

  9   disciplinées et organisées ? Si l'on faisait le parallèle avec le conflit

 10   de la Bosnie-Herzégovine qui est tout à fait différent; est-ce que les

 11   possibilités de voir ce type de chose apparaître seraient plus grandes ou

 12   plus petites ?

 13   R.  Oui, bien sûr, que ce serait plus petit, comme possibilité, et c'est

 14   justement là la signification de l'entraînement subi par l'armée

 15   contemporaine. On doit connaître le droit de guerre, les conventions de

 16   Genève, être apte physiquement et psychologiquement, et cetera, et cetera.

 17   Donc ça fait partie d'entraînement.

 18   Q.  Merci. Le Procureur d'une certaine façon a laissé entendre que vous

 19   n'étiez pas sincère dans votre CV.

 20   Moi, je voudrais vous demander une chose simple, y a-t-il dans votre

 21   vie ou dans vos activités toute une série d'autres éléments qui ne sont pas

 22   dits ou consignés dans le CV ?

 23   R.  Dans ce CV figurent les activités professionnelles depuis 1979 à

 24   ce jour, avec cet épisode qui correspond également aux années de guerre. Il

 25   n'y a rien d'autre qui pourrait décrire mon parcours professionnel et qui

 26   serait dissimulé dans ce CV. La ligne directrice de mon parcours a toujours

 27   été dominée par mon activité scientifique.

 28   Q.  Alors je crois savoir que vous êtes très actif en basket-ball,

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  1   Professeur, que vous êtes un joueur de basket-ball.

  2   R.  Je ne pensais pas à ce type d'activités. J'ai été un joueur de basket-

  3   ball, de ping-pong, je suis footballeur également. Je suis un sportif très

  4   passionné, mais je ne pensais pas à ce type d'activités.  

  5   Q.  Lorsque vous -- si jamais vous deviez rédiger un CV pour décrocher un

  6   poste d'employé ou d'archiviste dans mon entreprise, par exemple, est-ce

  7   que vous indiqueriez que vous êtes un bon sportif dans votre CV ?

  8   R.  Non, je ne le ferai pas. Peut-être que je le ferai pour essayer de

  9   mettre en valeur le fait que je suis en bonne santé. Parce qu'un bon

 10   sportif, quelqu'un qui fait du sport d'une façon intense est en bonne

 11   santé. Mais si j'étais candidat pour être un employé, et bien, je mettrai

 12   en avant ma connaissance de différents langages de logiciels informatiques

 13   et ainsi de suite.

 14   Q.  Le CV, que vous avez présenté, est tout à fait typique du type de CV

 15   qu'on utilise dans votre métier, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est un CV qui est conforme aux normes européennes, et à ce qui

 17   se fait en général.

 18   Q.  Très bien. Merci. Ma dernière question. Le Procureur a passé beaucoup

 19   de temps à vous poser des questions portant sur les fondateurs de votre

 20   institut. Puis il a ensuite élargi cela, à certaines de vos connaissances,

 21   il a parlé de Zuzul, de Miroslav Tudjman, de Josip Jurcevic, ainsi de

 22   suite. Je voudrais abréger tout cela en simplifiant quelque peu et je

 23   voudrais vous poser la question suivante : tout d'abord, en tant que

 24   psychiatre, en tant que professeur, en tant que scientifique, est-ce que

 25   vous connaissez beaucoup de collègues qui présentent les mêmes

 26   caractéristiques que vous, c'est-à-dire de personnes émanant du même

 27   cercle, à Zagreb?

 28   R.  Compte tenu de mes activités professionnelles, de la formation de cet

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  1   institut, de la constitution également de l'université, j'ai été à même de

  2   connaître l'ensemble de la structure sociale des intellectuels et des

  3   humanistes en Croatie. Personnes qui sont titulaires d'un doctorat. C'est

  4   pour cela que j'ai été à même de coordonner à la fondation d'un département

  5   entier. Quiconque s'aventure dans ce genre de tâche et de son

  6   accomplissement, sait à quel point il s'agit d'une tâche exigeante.

  7   Pour ce qui concerne mes connaissances, Zuzul et Tudjman étaient reconnus

  8   en tant que scientifiques. Je me suis associé à eux. Je les ai fréquentés

  9   en tant scientifiques, dans les phases initiales, ils ont participé à la

 10   fondation et l'établissement de l'institut. Lorsque l'institut a été

 11   finalement établi, eux, ont commencé à s'engager dans des activités

 12   politiques, alors que moi, je suis resté centré sur mes activités

 13   scientifiques. Tous les contacts que j'ai eus avec eux étaient informels,

 14   parce que, et sporadiques d'ailleurs, parce que nous nous connaissions mais

 15   pas de façon particulièrement proche.

 16   Q.  Mais, Professeur, peut-on dire que de façon tout à fait concrète, vous

 17   connaissez absolument toutes les personnes qui appartiennent à ce cercle de

 18   scientifiques ou d'intellectuels à Zagreb, qui partagent les mêmes

 19   caractéristiques que celles qui sont les vôtres ? Répondez par oui ou non ?

 20   R.  La plupart d'entre eux, oui.

 21   Q.  Il y a eu aussi cette idée qui a été suggérée selon laquelle ce cercle

 22   d'intellectuels, ce milieu des intellectuels au début de l'agression

 23   lorsque Zagreb a été bombardé; est-ce que ces hommes sont restés à Zagreb,

 24   est-ce qu'ils se sont intégrés dans une forme ou une autre de lutte ou de

 25   combat, ou bien est-ce qu'ils ont en majorité fui Zagreb ?

 26   R.  La majorité est restée à Zagreb, la grande majorité s'est trouvée

 27   intégrer dans des tâches ayant trait à la défense.

 28   Q.  Vous-même, vous étiez parmi eux, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Exact.

  2   Q.  Est-ce que vous considérez cela comme quelque chose de positif dont

  3   vous êtes fier, ou bien y a-t-il une raison pour laquelle vous auriez honte

  4   d'avoir répondu à cet appel au moment où vous étiez utile à votre pays ou

  5   votre pays avait besoin de vous pour se défendre ?

  6   R.  Même si je n'avais pas été dans ce contexte du ministère de la justice,

  7   j'aurais participé d'une façon ou d'une autre avec les capacités qui sont

  8   les miennes. Je l'aurais dans ce cas-là,  évidemment pas fait dans le cadre

  9   du ministère de la justice, mais j'aurais participé à la défense d'une

 10   façon ou d'une autre avec mes capacités intellectuelles, lorsque la Croatie

 11   a été attaquée et qu'il fallait la défendre.

 12   Q.  Nous avons abordé le domaine qui est le vôtre, ici, Professeur; est-ce

 13   qu'on peut dire que la même chose est vraie pour de nombreuses autres

 14   personnes qui se sont intégrées, qui ont participé à cet effort à la place

 15   qui était la leur et du mieux de leurs capacités ? Peut-on dire que c'était

 16   une réalité tout à fait générale ?

 17   R.  Oui, c'était une défense qui était à cet égard généralisée. Les

 18   enquêtes d'opinions conduites à l'institut Ivo Pilar ont montré que la

 19   grande majorité des citoyens croates et également des intellectuels croates

 20   était prête à participer personnellement à la défense contre l'agression

 21   serbe contre la Croatie, car ils considéraient la Croatie, la réalisation

 22   d'une Croatie démocratique comme leur objectif primaire -- primordial et il

 23   souhaitait la défendre en tant que tel.

 24   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Professeur, d'être venu et d'avoir

 25   déposé.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Tomanovic, tout à l'heure vous avez évoqué la

 27   question du contre-interrogatoire supplémentaire. Je rappelle que la

 28   Chambre, dans sa ligne directrice numéro 1, au point 10, a dit ceci, je lis

Page 45776

  1   :

  2   "Dans l'hypothèse exceptionnelle où la Chambre autorise une partie à

  3   procéder à un contre-interrogatoire supplémentaire, celui-ci se limite aux

  4   points déterminés par la Chambre."

  5   Donc la Chambre doit envisager une situation exceptionnelle. La

  6   Chambre est d'avis que lorsque M. Scott a parlé de M. Prlic, comme des

  7   autres, il n'a rien dit de nouveau puisque M. Prlic est dans l'acte

  8   d'accusation. Donc, la Chambre est d'avis qu'il n'y avait rien

  9   d'exceptionnel qui permet à engager un contre-interrogatoire

 10   supplémentaire.

 11   Mme TOMANOVIC : [interprétation] J'attendais l'interprétation, cela a pris

 12   un peu plus de temps.

 13   Je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur le Président, et je ne

 14   formule, en ce moment précis, pas de requête pour un contre-interrogatoire

 15   supplémentaire parce que véritablement rien de nouveau n'a été dit, en

 16   effet. Merci.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, le Juge Prandler a des questions à poser

 18   ou une question, je ne sais pas.

 19   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, je vous remercie, Monsieur le

 20   Président.

 21   Questions supplémentaires de la Cour : 

 22   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'aurais dû poser mes questions

 23   plutôt sans doute, mais je n'étais pas sûr que nous allions terminer

 24   aujourd'hui.

 25   J'aimerais en revenir à la fin de votre rapport où vous avez pris en compte

 26   tous les facteurs de la guerre en Bosnie-Herzégovine. Il s'agit des pages

 27   allant de 101 à la page 103. J'aimerais demander à l'expert la chose

 28   suivante : maintient-il sa démarche et ses conclusions puisqu'à la page

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  1   101, par exemple, il parle, et je cite : "Des éléments déterminant de base

  2   de la guerre en Bosnie-Herzégovine par rapport aux causes, au déroulement

  3   de la guerre, et aux objectifs des groupes en guerre."

  4   Il parle des éléments déterminant, donc il dit que le premier élément

  5   -- le premier élément de base c'est l'agression, agression qui a été le

  6   fait de la Serbie, donc la guerre en Bosnie-Herzégovine aurait été causé en

  7   premier lieu par l'agression contre la Serbie.

  8   Ensuite à la page 101 toujours, il déclare et je cite :

  9   "Dans une région de Croatie et de BiH, la Serbie s'est livrée à un

 10   génocide, un nettoyage ethnique, à une destruction de la culture et une

 11   destruction des villes, "culturalicide" et un "urbicide,"  donc ça c'est le

 12   deuxième élément expliquant la guerre en Bosnie-Herzégovine.

 13   Ensuite en page 102, selon toujours ce même expert, le troisième élément

 14   déterminant la guerre et le conflit ethnique entre les Musulmans de Bosnie

 15   et les Croates provoqués par l'agression serbe contre la Bosnie-

 16   Herzégovine.

 17   Enfin, le quatrième élément ayant provoqué la guerre en BiH ainsi que

 18   comporte sur l'inefficacité, le manque de décisions et les décisions

 19   erronées prises par la communauté internationale, qui n'ont pas réussi à

 20   agir de façon déterminée pour éviter l'agression au départ, donc agression

 21   des Serbes sur la Croatie et sur le territoire de l'BiH.

 22   Voici ma question, j'aimerais savoir, Professeur Sakic, si vous considérez

 23   toujours que ces quatre éléments de base devaient être mentionnés dans

 24   votre rapport, lorsque vous avez résumé votre opinion à propos de la guerre

 25   en BiH, considérez-vous que vous avez fait tout ceci de façon objective et

 26   scientifique, pour éviter tout biais, tout parti pris, et j'aimerais

 27   vraiment savoir si vous considérez que ces quatre facteurs sont les

 28   éléments principaux et qui ont déterminé la guerre.

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  1   R.  Monsieur le Juge, je maintiens tout cela, absolument.

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  4   Monsieur le Professeur, votre témoignage vient donc de se terminer. Je vous

  5   remercie, au nom de mes collègues, d'être venu à la demande de la Défense

  6   du général Praljak, et j'invite M. l'Huissier à bien vouloir vous

  7   raccompagner à la porte de la salle d'audience.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  9   [Le témoin se retire]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 11   Alors, Maître Kovacic, la semaine prochaine donc nous aurons votre dernier

 12   témoin. Ça sera le dernier témoin de la Défense du général Praljak. Puis

 13   après quoi, nous attendrons donc une semaine, pour commencer avec le

 14   premier témoin de la Défense Petkovic. C'est bien le planning ?

 15   M. KOVACIC : [interprétation] Pour ce qui concerne, Monsieur le Président,

 16   du calendrier de la Défense du général Praljak, nous avons, comme vous nous

 17   l'avez dit, un témoin qui viendra à partir de lundi. Alors nous nous sommes

 18   efforcés lorsque nous avons vu que nous pourrions peut-être en terminer

 19   plus rapidement avec le Dr Sakic, de modifier ce calendrier prévisionnel,

 20   mais cela a entraîné toute une série de difficultés supplémentaires dans le

 21   détail desquels je ne vais pas entrer. Cela s'est avéré impossible, et très

 22   peu pratique, c'est pourquoi ce témoin viendra comme prévu lundi.

 23   Merci, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Tout est donc clair pour tout le monde.

 25   Monsieur Scott, pas de sujet à évoquer ?

 26   M. SCOTT : [interprétation] Non, je n'ai pas de sujet à aborder. Je vous

 27   remercie. Nous allons avoir un peu de jours de repose visiblement.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous aurons quelques jours, pour nous permettre de

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  1   lire les millions de pages et les milliers de documents. Ça sera je crois

  2   utile. Bien, et de se préparer bien entendu pour l'audition du témoin qui

  3   est prévu lundi. Ce que nous faisons tous.

  4   Je souhaite à tout le monde une bonne fin de soirée, et nous nous

  5   retrouverons donc lundi à 14 heures 15.

  6   --- L'audience est levée à 18 heures 51 et reprendra le lundi 12 octobre

  7   2009, à 14 heures 15.

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