Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 7 décembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Praljak est absent]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   toutes les personnes ici présentes.

 11   Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci,

 12   Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce lundi, je salue en premier M. le Témoin Filipovic, je salue MM. les

 15   accusés présents, je salue Mmes et MM. les avocats, je salue M. Scott, ses

 16   collaborateurs et collaboratrices, ainsi que toutes les personnes qui nous

 17   assistent.

 18   Le contre-interrogatoire va donc se poursuivre. Je crois, Monsieur Scott,

 19   il vous reste une heure 30. Je vous donne la parole.

 20   LE TÉMOIN : FILIP FILIPOVIC [Reprise]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   Bon après-midi, Monsieur les Juges. Bonjour au conseil de la Défense

 24   et à toutes les personnes dans ce prétoire comme autour de celui-ci.

 25   Contre-interrogatoire par M. Scott : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Filipovic.

 27   Nous allons terminer le sujet que nous allions terminer la semaine

 28   dernière, jeudi après-midi plus précisément, car il restait une question et

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  1   il y avait eu des échanges nourris entre les Juges et les parties. C'était

  2   à propos de cette question de la pièce P1131, inutile de la reprendre, mais

  3   c'était l'article de la BBC qui faisait état du rapport de l'agence de

  4   presse croate. On en a parlé non pas vendredi mais jeudi, et il y avait une

  5   déclaration qui vous a été attribuée, c'était ce que vous aviez dit, à

  6   savoir que :

  7   "Pour moi, c'est la troisième agression (à la suite de l'agression des

  8   Serbes et des Musulmans) troisième agression contre les Croates en Bosnie

  9   centrale. Celle-ci est menée par la communauté internationale."

 10   La question que je vous avais posée et qui était restée sans réponse jeudi,

 11   c'était de savoir :

 12   "C'est ce que vous pensiez à l'époque, et aussi lorsque vous avez été

 13   témoin dans le procès Kordic, et c'est toujours l'avis que vous avez

 14   aujourd'hui, n'est-ce pas ?"

 15   R.  Monsieur le Président, j'ai accordé nombre d'interviews. Je ne sais pas

 16   si mes propos ont été relatés de manière exacte. Je ne suis pas sûr d'avoir

 17   parlé "d'une troisième agression contre les Croates." Mais connaissant

 18   l'accusé Ivica Santic et l'accusé Pero Shopljak, à ce moment-là, et

 19   finalement je connaissais Aleksovski aussi, Blaskic, Kordic, et je ne sais

 20   qui d'autre -- je trouvais cela étrange que les premiers actes d'accusation

 21   sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine concernaient une défense qui

 22   était la défense la plus pure qui soit, à savoir il s'agissait de la

 23   défense face à l'agression. Donc je ne suis pas sûr d'avoir employé ce

 24   terme, mais encore aujourd'hui je n'aurais pas évité d'utiliser ce terme

 25   portant sur un groupe d'accusés.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai une intervention concernant le compte

 27   rendu d'audience.

 28   Ligne 25 de la page 2, il est écrit que le témoin aurait dit que c'est le

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  1   premier acte d'accusation portant sur l'Herceg-Bosna, mais le témoin a dit

  2   "la Bosnie-Herzégovine."

  3   M. SCOTT : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur, est-ce que vous dites que ceci concerne ce que vous qualifiez

  5   de "la défense la plus pure," mais les Juges se rappelleront les décisions

  6   dans le procès Kordic, dans le procès Blaskic, dans le procès Aleksovski et

  7   dans le procès Cerkez, qui ne donnent pas la même idée de la situation que

  8   ce que vous dites maintenant. Vous comprenez cela, n'est-ce pas ?

  9   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je parle de l'expérience

 10   que j'ai vécue pendant trois ans et demi. J'ai passé huit mois enfermé sur

 11   un espace que l'on défendait, même les oiseaux ne pouvaient pratiquement

 12   pas entrer dans cet espace. Donc les Musulmans pouvaient tirer les uns sur

 13   les autres, si vous voulez, mais là il s'agissait vraiment d'une défense

 14   absolument pure.

 15   Q.  Passons au rôle qu'a joué le HVO dans la structure de ce qui se passait

 16   à l'époque. Plusieurs questions vous ont été posées par Me Alaburic à ce

 17   propos. Commençons par des faits fondamentaux.

 18   La République de Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant qu'Etat

 19   souverain indépendant par la Communauté européenne le 6 avril 1992 et par

 20   les Etats-Unis le lendemain, le 7 avril 1992, n'est-ce pas ?

 21   M. KOVACIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le

 22   Président.

 23   Encore une intervention par rapport au compte rendu d'audience. Lignes 22

 24   et 23, ce qui est écrit dans le compte rendu d'audience n'est absolument

 25   pas clair. Il est vrai que la phrase du témoin était difficile à

 26   interpréter. J'ai compris, mais peut-être le mieux est que le témoin

 27   répète.

 28   En fait, le témoin a dit que les soldats musulmans auraient pu

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  1   "transpercer" cet espace de leurs balles, et ainsi "s'entretuer." Peut-être

  2   ceci n'est pas tout à fait clair. Moi, je travaille dans cette affaire, je

  3   comprends ce qu'il voulait dire, mais peut-être il pourrait s'expliquer.

  4   Mais vu la manière dont le témoin s'est exprimé et vu la manière dont ceci

  5   a été interprété, je pense que ses propos ne sont absolument pas clairs,

  6   donc je propose que l'on donne l'occasion au témoin de s'expliquer. Merci.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux répéter ce que j'ai dit. La vallée de

  8   la Lasva, l'enclave qui était défendue, était tellement étroite que les

  9   Musulmans d'un côté auraient pu tirer sur les Musulmans qui se trouvaient

 10   de l'autre côté, et c'est dans ce sens que j'en ai parlé, c'est-à-dire pour

 11   indiquer à quel point cet espace était réduit. 

 12   M. SCOTT : [interprétation]

 13   Q.  Je vais devoir vous reposer la question que je vous avais posée : vous

 14   conviendrez que la République de Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant

 15   qu'Etat souverain indépendant par la Communauté européenne le 6 avril 1992

 16   et par les Etats-Unis le lendemain, le 7 avril 1992 ? Vous n'avez aucune

 17   raison de douter de ces faits, n'est-ce pas ?

 18   R.  J'étais fier du fait que la Bosnie-Herzégovine était reconnue en tant

 19   qu'Etat et du fait qu'aujourd'hui je suis général de l'ABiH.

 20   Q.  En plus, ce nouvel Etat indépendant souverain avait un gouvernement

 21   reconnu par la communauté internationale, un gouvernement légal, sous la

 22   forme de la présidence de la Bosnie-Herzégovine et du gouvernement et avait

 23   effectivement un territoire souverain qui allait jusqu'aux confins de ses

 24   frontières internationales ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Vous êtes soldat de métier, vous ne serez donc pas du tout surpris si

 27   je vous dis que le nouveau gouvernement de ce nouvel Etat souverain a pris

 28   aussitôt des mesures pour constituer ses forces armées ?

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  1   R.  Lorsque la communauté internationale a reconnu la Bosnie-Herzégovine et

  2   son territoire, il faut savoir qu'il y avait trois peuples : les Serbes,

  3   les Croates et les Musulmans. Et en ce qui concerne votre question, la

  4   réponse est oui.

  5   Q.  Vous savez, en tout cas de façon générale, n'est-ce pas, que le 8 avril

  6   1992, la présidence de Bosnie-Herzégovine a aboli ce qui avait été la

  7   Défense territoriale dans le système de la JNA et avait établi une nouvelle

  8   Défense territoriale qui, quelques semaines plus tard, est devenue l'ABiH

  9   ou armée de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je ne connais pas la date exacte, mais je connaissais le commandant

 11   Efendic. Je le connaissais personnellement, il était --

 12   Q.  Ce n'est pas la question que je vous posais, et je vais vous demander

 13   de coopérer avec moi de façon à tirer le meilleur parti possible du temps

 14   que j'ai.

 15   Dès que ce pays est devenu un nouvel Etat, le gouvernement de la Bosnie-

 16   Herzégovine a pris des mesures pour établir ses forces armées. Avant,

 17   c'était la Défense territoriale, mais c'était une nouvelle Défense

 18   territoriale, n'est-ce pas ?

 19   R.  Je ne savais pas et je ne pouvais pas le savoir. Je savais que l'on

 20   prenait des mesures afin de défendre le pays, car il avait été soumis à une

 21   agression.

 22   Q.  Je vous prie d'examiner la pièce 155, P00155. Nous allons examiner

 23   assez rapidement trois pièces du dossier, puis je vous poserai quelques

 24   questions. Commençons par la pièce P00155, 155.

 25   Monsieur l'Huissier, vous voulez bien aider le témoin.

 26   Prenez connaissance de ce document. La Chambre a déjà vu ces trois

 27   documents plusieurs fois. Je ne veux pas m'y attarder. C'est un ordre donné

 28   par Mate Boban le 10 avril 1992, où il déclare notamment que le bras

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  1   militaire du HVO est la seule force légale en Herceg-Bosna.

  2   Prenons maintenant la pièce P00195, qui devrait être tout près de celle que

  3   nous venons de voir. P00195.

  4   Ordre très similaire au précédent, et nous n'avons pas le temps de tout

  5   comparer, mais c'est un texte du général Ante Roso, la date est celle du 8

  6   mai 1992, et là on dit, au premier point :

  7   "Les seules unités militaires légales sur le territoire de la HZ HB sont

  8   les unités du HVO."

  9   Prenons maintenant la pièce P00200, qui devrait elle aussi être tout près

 10   des deux autres. P00200.

 11   Ici aussi je vous dirais à propos de ce document que c'est un ordre du

 12   général, ou colonel plutôt à l'époque, colonel Blaskic, donné le 8 [comme

 13   interprété] mai 1992, où il fait état de l'ordre en donnant le numéro de

 14   l'ordre de M. Roso, et regardez ici aussi au point numéro 1 :

 15   "Les seules unités militaires légales de la zone de la municipalité de

 16   Kiseljak sont les unités du HVO," et le texte continue.

 17   Commençons par M. Boban et son ordre du 10 avril 1992. Pouvez-vous

 18   expliquer aux Juges si Boban avait la moindre base juridique l'autorisant à

 19   donner un tel ordre ?

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, objection par

 21   rapport à cette question, qui est véritablement une question de nature

 22   juridique.

 23   Donc je pense par conséquent qu'il n'est pas opportun de la poser à

 24   un officer militaire.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   Blaskic était pendant tout ce temps-là sous mes ordres. J'étais dans la

 27   vallée de Lasva, lui à Kiseljak. C'est lui qui émet cet ordre, mais moi en

 28   tout cas, je n'ai pas transmis cet ordre. Je ne l'ai pas communiqué à mes

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  1   subordonnés. Bien sûr, j'étais commandant, je commandais l'état-major

  2   régional de Bosnie centrale, mais je ne l'ai pas transmis.

  3   M. SCOTT : [interprétation]

  4   Q.  Ma question, vous venez de nous dire il y a un instant qu'en fait, vous

  5   aviez un rôle de commandement supérieur. Vous devez avoir une idée du

  6   fondement qui permettait au commandement du HVO dirigé par Mate Boban, de

  7   dire que le HVO était la seule force militaire légitime et légale sur place

  8   ?

  9   R.  En Bosnie centrale, ni Mate Boban ni Roso ne commandait l'état-major

 10   régional à cette époque. C'est moi qui étais nommé commandant en raison de

 11   la situation et des circonstances. Pourquoi est-ce que mon nom s'est imposé

 12   ? Parce qu'il y avait des documents qui circulaient, qui provenaient du

 13   président de Bosnie-Herzégovine, mais moi, mon rôle à moi était de défendre

 14   la population à cette époque bien précise et de l'organiser du mieux

 15   possible, et c'est ce que j'ai fait.

 16   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Je suis absolument désolée.

 17   Mais je prierais le témoin de bien vouloir ralentir un peu son débit, car

 18   la moitié de ce qu'il a dit n'a pas été repris par les interprètes.

 19   Pourrait-il ralentir un peu son débit. Je suis sûr qu'à ce moment-là, les

 20   interprètes vont être plus exhaustifs.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 22   peut-être est-ce dû à mon tempérament et peut-être est-ce dû aux pressions

 23   exercées en permanence sur moi. Car je dois confirmer, je dois affirmer, je

 24   dois dire des choses que je ne connais pas.

 25   J'aurais dû savoir, j'aurais dû entreprendre, alors que je n'ai cessé

 26   pendant toute cette période d'entreprendre ce que je devais entreprendre

 27   pour assurer la protection de la population et défendre le territoire de la

 28   Bosnie centrale. Les documents qui arrivaient ou qui étaient envoyés ne

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  1   m'intéressaient pas. Ce qui m'intéressait c'était la réalité sur le terrain

  2   sur lequel je me trouvais.

  3   Je répète que ni Mate Boban ni Roso ne m'a nommé à mon poste, et je n'ai

  4   pas davantage eu tous ces papiers sous les yeux, je ne les ai pas vus. Mais

  5   lors d'une réunion des municipalités de Bosnie centrale à laquelle étaient

  6   représentées 12 municipalités, parce que c'est Asko [phon] qui exerçait le

  7   commandement à ce moment-là, et jusqu'à ce moment-là, il a été décidé que

  8   désormais ce serait moi qui l'exercerais.

  9   M. SCOTT : [interprétation]

 10   Q.  Peut-être pas les premiers jours, mais vous savez pertinemment qu'en

 11   l'espace de quelques jours, il y avait une structure dont vous faisiez

 12   partie, le HVO, et que vous avez occupé un poste précis, Blaskic a occupé

 13   un poste précis, et vous savez parfaitement que ceci s'est fait dans le

 14   cadre de la structure qu'on appelait alors le HVO ?

 15   R.  Oui, c'était la structure du HVO. Blaskic est arrivé et s'est inséré

 16   dans cette structure 20 jours après moi.

 17   Q.  Regardons l'ordre de M. Roso, P00195, point 2 :

 18   "Toutes les autres unités militaires se trouvant sur ce territoire doivent

 19   rejoindre ce seul système de défense, système unique."

 20   Pourquoi est-ce que Roso dit ici que toutes les unités se trouvant sur le

 21   territoire de la HZ HB doivent rejoindre ce système de défense unique ?

 22   R.  Parce que des actions avaient été engagées contre le HVO, qui

 23   consistaient à dire que le HVO était illégal, qu'il n'existait pas. Moi,

 24   personnellement, j'ai été contacté par le commandant de la Défense

 25   territoriale de Zenica, de son état-major, qui m'a dit dix jours après mon

 26   arrivée que tout cela était illégal. Donc lui, était légitime, et moi,

 27   j'étais illégitime. Moi, en fait, je me trouvais sur le front, je créais la

 28   ligne de front, et lui avait un bureau à Zenica. Donc cette question de

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  1   légal/illégal, légitime/illégitime c'était un jeu qui se jouait à l'époque.

  2   Q.  Essayez de répondre à ma question. Vous n'avez pas répondu. Essayez de

  3   coopérer.

  4   "Toutes les autres unités du territoire doivent rejoindre ce système de

  5   défense unique," est-il dit ici.

  6   Pourquoi ?

  7   R.  Dans la vallée de la Lasva, c'est moi qu'ils ont accepté en qualité de

  8   commandant durant les premiers mois de la guerre dans un système de défense

  9   unifié, car il était impossible de le faire autrement. Donc y compris la

 10   Défense territoriale, les gens qui se trouvaient là-bas dans la région et

 11   même dans les premiers temps après l'arrivée des Moudjahidines, ils m'ont

 12   toléré parce que c'était dû à la situation, système unifié de défense.

 13   Q.  Pourquoi est-ce que Roso a dit que toutes les unités se trouvant sur le

 14   territoire de la Herceg-Bosna devaient reconnaître l'état-major principal

 15   du HVO comme était leur "commandement Suprême" ?

 16   R.  Vous devriez poser cette question à lui, ça fait quatre fois que vous

 17   me la posez à moi. Je vous dis qu'il existe un système de défense unifié,

 18   et cela dans le but de créer un système de défense efficace. Pourquoi

 19   unifié ? Parce que dans cette région, il y avait des unités, des armements,

 20   il y avait des effectifs humains, et donc ceux qui étaient les mieux à même

 21   d'assurer la sécurité et de porter le poids de la structure c'était le HVO.

 22   Q.  La semaine dernière, nous l'avons établi. Vous êtes toujours d'accord

 23   là-dessus, j'espère, le commandant suprême du HVO c'était bien Mate Boban,

 24   qui était le président de l'Herceg-Bosna ?

 25   R.  Exact.

 26   Q.  Alors, à votre avis, pourquoi est-ce que M. Roso dit - c'était votre

 27   supérieur à l'époque - et vous avez dit très clairement il y a quelques

 28   instants qu'on vous a accusé d'être inégal, de faire partie d'une force

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  1   militaire illégale. Alors comment se fait-il que Roso dise que toute unité

  2   militaire se trouvant sur le territoire de l'Herceg-Bosna devait au fond

  3   reconnaître, pour faire court, Mate Boban comme étant leur supérieur, leur

  4   commandant suprême ?

  5   R.  D'abord, je ne sais pas ce que c'est ce territoire de l'Herceg-Bosna

  6   qui n'a jamais été défini, en tout cas pas à ma connaissance. Deuxième

  7   point, pourquoi Roso ? Moi, je ne connaissais pas Roso, je ne le

  8   connaissais pas. Troisième point, je vous dis une nouvelle fois que suite à

  9   une action, il y a une réaction, et l'action a sans doute consisté à penser

 10   que la Défense territoriale était la seule force existante et que tout

 11   devait dépendre de cela et ensuite il y a eu réaction, par conséquent.

 12   Q.  Je vais le dire autrement, en avril et mai 1993, en Bosnie-Herzégovine,

 13   qui était le commandant suprême, le chef des armées, Mate Boban ou la

 14   présidence ?

 15   R.  Mais pour toute la Bosnie-Herzégovine, il y avait la présidence de la

 16   Bosnie-Herzégovine. Alors que dans la vallée de la Lasva, c'était moi et

 17   personne d'autre entre les deux, personne d'autre si nous parlons de

 18   l'arrivée d'ordre, d'armement, de rapport ou de quoi que ce soit qui soit

 19   lié à la défense.

 20   Q.  Prenons le troisième ordre, il dit :

 21   "Tous les membres des unités militaires susmentionnées doivent arborer

 22   l'insigne du HVO…"

 23   Vous le saviez, c'était bien la pratique imposée ?

 24   R.  C'est seulement plus tard que nous sommes parvenus à coudre ces

 25   insignes sur les uniformes, et donc à obtenir que les hommes les portent.

 26   Q.  Le 8 mai 1992, Ante Roso ordonne ceci : tous les membres de ces unités

 27   militaires susmentionnées - légales, d'après lui - se trouvant sur le

 28   territoire de l'Herceg-Bosna devaient arborer l'insigne HVO. N'avez-vous

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  1   pas dit dans le procès Kordic que l'insigne du HVO, que c'était "l'insigne

  2   du peuple croate" ? Là, je vous citais.

  3   R.  Les insignes du Conseil croate de Défense et les insignes du peuple

  4   croate. Et pas seulement du peuple, mais du HVO.

  5   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges quelles mesures, en avril, mai, juin,

  6   juillet 1992, les forces militaires du HVO ont prises pour se placer sous

  7   le commandement de l'Etat de Bosnie-Herzégovine et sous le commandement de

  8   sa présidence ?

  9   R.  Les forces du Conseil croate de Défense avaient pour fonction d'assurer

 10   la défense de la Bosnie-Herzégovine et du peuple croate de Bosnie-

 11   Herzégovine.

 12   Q.  Ce n'est pas la question que j'ai posée. Vous n'avez cessé de répéter

 13   cela, mais dites-moi les mesures précise qu'ont prises les forces

 14   militaires du HVO en avril, mai, juin, juillet 1992 pour se placer sous le

 15   commandement de la présidence de Bosnie-Herzégovine, de cet Etat souverain

 16   indépendant de l'Herzégovine. Quelles sont les mesures concrètes ?

 17   R.  Ce que nous avons entrepris c'est qu'au sein des unités et dans la

 18   région concernée, nous avons accueilli tous les membres de Bosnie-

 19   Herzégovine, il a déjà été question ici des gens de la Krajina qui

 20   affluaient à ce moment-là.

 21   Q.  Quelles sont les mesures que vous, vous avez prises pour vous placer

 22   sous le commandement de la présidence ? Ça n'a rien à voir avec le fait de

 23   prendre la population de la Krajina. Quelles sont les mesures que vous,

 24   vous avez prises pour vous placer sous le commandement et la direction de

 25   la République de Bosnie-Herzégovine, de sa présidence ? La question est

 26   claire et simple.

 27   R.  Il est très simple que je n'ai pas pris la moindre mesure pour placer

 28   sous un commandement déterminé quelqu'un qui ne pouvait pas exercer ce

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  1   commandement, il n'y avait pas d'infrastructure suffisante, il n'y avait

  2   pas de système bien en place pour agir de cette façon, pour que tout

  3   fonctionne bien. Donc je n'ai pas pris la moindre mesure dans cette

  4   direction.

  5   Q.  Vous et les autres membres commandants de haut grade, de haut rang du

  6   HVO autour de vous, vous saviez bien que le HVO n'avait aucune intention, à

  7   l'époque et même après, de s'intégrer dans un système unifié, unique, sous

  8   le commandement de la présidence ? Jamais vous n'avez eu cette intention,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Aujourd'hui, en 1999, vous affirmez cela à l'époque. Nous ne savions

 11   rien faire d'autre que d'essayer de survivre, de rester en vie.

 12   Q.  Vous ne vous rendez pas service là. Vous êtes un homme instruit, un

 13   officier de carrière. Vous savez ce que je vous demande, et maintenant vous

 14   essayez d'éviter de répondre à cette question. Elle était pourtant précise.

 15   Vous avez dit plusieurs choses, nous faisions tous partie du même ensemble.

 16   Et moi, ce que je vous dis, c'est que vous saviez pertinemment à l'époque

 17   que vous n'aviez pas du tout l'intention de vraiment vous placer sous le

 18   commandement de la présidence de Bosnie-Herzégovine. C'est vrai, n'est-ce

 19   pas ?

 20   R.  Je vous en prie, au sein du commandement de l'état-major régional de

 21   Vitez est arrivé un membre de la présidence de Bosnie-Herzégovine, un

 22   certain Boras quelque chose, enfin je crois qu'il était membre de la

 23   présidence, et lorsque j'ai discuté avec lui, je n'ai pas eu le sentiment

 24   que j'étais illégitime, que je n'avais pas le droit de faire ce que j'étais

 25   en train de faire. Tout à fait le contraire.

 26   Q.  Et le gouvernement de Bosnie-Herzégovine, les Juges ont vu des

 27   documents qui représentaient les revendications de ce gouvernement, et

 28   c'est simple dans le fond, ça ressemble à ce que disait Roso. Roso dit,

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  1   Toutes les unités militaires opérant sur un territoire doivent rejoindre un

  2   seul système militaire. C'est normal. Quand ce territoire est reconnu par

  3   la communauté internationale, il faut qu'il y ait un seul système dans

  4   lequel on s'intègre. Et Roso dit bien qu'il faut reconnaître ici, c'est

  5   comme ça qu'il voit les choses, il faut dire que l'état-major principal du

  6   HVO c'est votre commandement Suprême. Et le gouvernement de Bosnie dit,

  7   Non, non, c'est le gouvernement qui détermine.

  8   Et on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre, on ne peut pas

  9   avoir deux maîtres. Il n'y a qu'un chef des armées, un commandant suprême,

 10   le HVO n'avait aucune intention de se soumettre au commandement du

 11   gouvernement de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 12   R.  Monsieur le Président, Monsieur les Juges, ce que vous venez d'entendre

 13   est une infirmation de M. le Procureur, pourquoi des éléments de Bosnie-

 14   Herzégovine ou d'Herceg-Bosna ne pourraient pas être entre autres la

 15   Bosnie-Herzégovine ? Tout ce que dit le Procureur ce sont des pensées qui

 16   lui viennent, qu'il invente, mais qui n'ont rien à voir avec la situation

 17   sur le terrain où nous étions.

 18   Q.  Vous savez exactement quelle est la question que je vous pose parce que

 19   M. Nice vous a posé la même question pratiquement dans l'affaire Kordic, et

 20   je cite :

 21   "En reprenant ce que vous venez de dire, si vous voulez organiser

 22   conjointement une défense, pourquoi ne pas avoir une seule armée, quel

 23   était le besoin d'en avoir deux ?"

 24   Et voici la réponse que vous avez donnée sous serment dans l'affaire Kordic

 25   exactement dans ce Tribunal il y a quelques années :

 26   "Nous avions trois armées en Bosnie-Herzégovine, l'armée de la Republika

 27   Srpska, qui s'est séparé et qui a pris les armes pour atteindre ses

 28   objectifs; ensuite le côté musulman, qui portait les fez verts, qui avaient

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  1   leurs propres drapeaux et leurs propres insignes; et puis l'élément croate

  2   ou partie qui représentait les intérêts de ce côté-là. Et si vous parlez de

  3   la défense conjointe entre Croates et Bosniaques, c'est-à-dire Musulmans,

  4   elle était conjointe mais elle n'était pas identique. Elle n'était pas

  5   unique et on n'aurait pas pu avoir une même armée. Ça aurait été un concept

  6   uniquement théorique."

  7   On n'aurait pas pu avoir une même armée, donc c'est ce que vous avez dit

  8   dans l'affaire Kordic. Est-ce que vous le maintenez encore aujourd'hui ?

  9   R.  Aujourd'hui, l'ABiH se compose des éléments que vous venez d'énumérer.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   R.  A cette époque-là, nous ne pouvions pas --

 12   Q.  Je parle de l'année 1992 et 1993. Il y a quelques années, sous serment,

 13   vous avez dit à d'autres Juges de ce Tribunal, qu'à l'époque, il ne pouvait

 14   pas y avoir une seule armée, c'était impossible, que chaque camp avait sa

 15   propre armée et que ça ne pouvait pas être une seule armée unique.

 16   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Je voudrais apporter mon aide au

 17   Procureur, de façon à ce qu'il n'y ait pas un malentendu avec le témoin.

 18   Le témoin avait commencé à répondre à votre question, les interprètes n'ont

 19   pas eu le temps de finir. Donc si vous avez la patience d'écouter la fin de

 20   la réponse, vous verrez qu'elle vous convient tout à fait. Merci.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, mais cette question commençait

 22   avec le mot "aujourd'hui" et je ne parle pas d'aujourd'hui.

 23   Malheureusement, on n'a pas beaucoup de temps.

 24   Q.  Donc vous savez très bien ce dont je parle, essayez de ne pas jouer

 25   avec moi. Vous avez fait des études.

 26   Vous avez témoigné dans l'affaire Kordic qu'il ne pouvait pas y avoir

 27   d'armée unifiée avec les Musulmans; qu'il aurait pu y avoir une armée

 28   conjointe éventuellement, mais certainement pas une armée unique. Et c'est

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  1   vos mots, et je vous cite, vous avez dit que ça ne pouvait être qu'un

  2   concept théorique et rien de plus.

  3   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je n'ai pas appris, mais

  4   peut-être que je ne suis pas allé dans la même école que M. le Procureur,

  5   peut-être que je ne m'exprime pas aussi bien que lui, mais je suis en train

  6   de témoigner ici en disant ce qui s'est passé. Et je ne change rien à mes

  7   dires. Ce que j'ai dit il y a huit ou neuf ans dans un autre procès, je le

  8   dis encore une fois aujourd'hui.

  9   Q.  Bien, passons maintenant aux deux documents suivants qui vous ont été

 10   montrés sur ce sujet, sujet du HVO et sur le statut du HVO par rapport au

 11   gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Je ne vais pas vous le montrer, pas

 12   beaucoup de temps, mais je parle de l'accord de  cessez-le-feu du 20 avril

 13   1993 que vous avez montré, il s'agit de la pièce P01988, et la déclaration

 14   commune signée par Boban et Izetbegovic à Zagreb le 25 avril 1993, qui

 15   porte la cote P02078.

 16   On vous a montré ces deux documents, Monsieur le Témoin, et ils comprennent

 17   des déclarations à propos du HVO qui auraient été un élément légitime des

 18   forces armées de Bosnie-Herzégovine. Je vais y revenir d'ailleurs.

 19   Mais essayons un petit peu de réconcilier les choses. Vous pouvez

 20   déjà nous confirmer que vers la fin avril, vous avez rejoint cette

 21   commission conjointe qui est abordée dans ce document ?

 22   R.  Exact.

 23   Q.  Vous avez été membre de cette commission jusqu'au 10 juin 1993, où vous

 24   avez repris votre poste avec le colonel Blaskic en Bosnie centrale; c'est

 25   bien cela ?

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, une objection sur le

 27   fondement du document que M. le Procureur vient d'évoquer. C'est un

 28   commandement conjoint qui a été créé, pas une commission.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, commandement conjoint,

  2   oui, mais qui travaillait également en qualité de commission chargée de la

  3   séparation. Dans les quelques premiers jours qui ont suivi la nomination du

  4   commandant --

  5   M. SCOTT : [interprétation]

  6   Q.  Ma question est la suivante, et je ne vais pas jouer sur les mots, ça

  7   ne m'intéresse pas : vous faisiez partie de cette commission, cette entité,

  8   du 28 avril 1993 jusqu'au 10 juin 1993 ? Répondez par oui ou par non ?

  9   R.  J'ai fait partie de cet organe depuis le 20 ou le 21 ou le 22 avril

 10   déjà.

 11   Q.  Si j'ai bien compris, cette commission conjointe ne s'est plus réunie

 12   après le 14 mai 1993, à cause du conflit armé en cours et surtout des

 13   événements de Mostar ?

 14   R.  Il est exact qu'elle ne s'est pas réunie.

 15   Q.  Malheureusement --

 16   R.  En tout cas, je ne suis pas au courant qu'elle se soit réunie.

 17   Q.  Malheureusement, vous êtes d'accord avec moi, n'est-ce pas, pour dire

 18   que cette commission a eu une durée de vie extrêmement courte, et en fin de

 19   compte, il n'y a pas eu de paix ou d'amélioration en quoi que ce soit qui

 20   aurait pu résulter de cette commission ?

 21   R.  Il est exact qu'elle a duré peu de temps.

 22   Q.  Bien. Essayons de lier ces deux documents auxquels je fais référence,

 23   le cessez-le-feu du 20 avril et la déclaration conjointe du 25 avril. Il

 24   s'agit de déclarations qui ont été faites au cours des négociations qui,

 25   finalement, n'ont abouti absolument à rien. Il ne s'agit que papier rien de

 26   plus, des mots inscrits sur du papier ?

 27   R.  Il y avait de très nombreuses activités liées, des déclarations et des

 28   actions du commandement conjoint pendant la durée de ce mois-là. Des

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  1   milliers de personnes ont été libérées de certaines espèces de lieux

  2   d'emprisonnement d'un côté et de l'autre.

  3   Q.  En fin de compte, au bout de quelques jours, les deux camps se sont

  4   retrouvés à s'entretuer, c'est-à-dire le HVO envoyait les Musulman à

  5   l'Heliodrom. Donc quelques jours après, la guerre a continué comme avant ?

  6   R.  Je connais les prisons, y compris des prisons où se trouvaient des

  7   Croates. En Bosnie centrale, Delic, Sefer et moi avons libéré -- 

  8   Q.  Mais la guerre s'est poursuivie ?

  9   R.  La guerre s'est poursuivie pendant la deuxième quinzaine du mois de

 10   mai, oui.

 11   Q.  Je vais vous présenter le résumé que nous a fait un autre soldat de

 12   carrière comme vous-même, un témoin en l'espèce. C'est un observateur

 13   international, Bo Pellnas, il est venu dans ce prétoire et on lui a posé

 14   des questions à propos des cessez-le-feu, et il a dit qu'il y en avait un

 15   grand nombre de cessez-le-feu. Voici ce qu'il a dit :

 16   "Après un moment dans ces conditions, le papier, on ne s'y intéresse plus

 17   tellement ni les déclarations. On attend de voir ce qui se passe sur le

 18   terrain. Disons qu'on est ni optimiste ni pessimiste quand on annonce un

 19   cessez-le-feu. On attend pour voir ce qui va se passer avant d'évaluer la

 20   valeur de la déclaration du cessez-le-feu."

 21   Etes-vous d'accord avec cette déclaration faite par M. Pellnas ?

 22   R.  C'est une déclaration qui vient d'un véritable professionnel.

 23   Q.  Dans votre déposition de la semaine dernière, vous avez dit quasiment

 24   la même chose. Lundi dernier, en réponse à une question posée par le

 25   Président de la Chambre et de la Cour constitutionnelle, vous avez dit, je

 26   vous cite :

 27   "Tous ces documents, ces accords, ça ne voulait rien dire pour moi, puisque

 28   j'étais là sur le terrain pendant des heures à me faire tirer dessus."

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  1   Finalement, tout ce qui est écrit sur le papier ça n'était pas très

  2   important ?

  3   R.  Pendant toute cette période, il y a eu des pourparlers et des combats,

  4   oui.

  5   Q.  A la fin avril, vous êtes d'accord avec moi, n'est-ce pas, pour dire

  6   que les combats ont repris, la commission conjointe est partie, les accords

  7   de cessez-le-feu, on en parlait plus et la faute pouvait être mise sur les

  8   deux côtés, les Croates attaquaient, les Musulmans attaquaient, c'était la

  9   faute de tout le monde, et finalement le processus s'est terminé de lui-

 10   même ?

 11   R.  Moi, je dirais les choses un peu autrement. Les Musulmans attaquaient

 12   et se défendaient aussi, et les Croates se défendaient.

 13   Q.  Dans l'affaire Kordic vous avez témoigné. Vous avez dit :

 14   "Il y avait eu une grande réunion à Travnik à la fin avril. Il y avait

 15   Thebault, l'Union européenne, d'autres. Les attaques n'ont pas cessé, et

 16   pas seulement du côté musulman. Je répète cela, il y avait des incidents

 17   auxquels participaient les Croates aussi."

 18   Ensuite, un peu plus tard, vous avez dit que vous ne pouviez pas dire

 19   que c'était uniquement de la faute des Musulmans, "mais aussi de la faute

 20   des Croates." Vous l'avez dit dans l'affaire Kordic, n'est-ce pas ?

 21   R.  A la réunion de Travnik à laquelle a participé Thebault, c'est Cuskic

 22   qui m'a sauvé face à des centaines de canons musulmans. Ils voulaient me

 23   tuer. Cuskic a eu le courage de se mettre devant. Alors, voilà qu'elle

 24   était la situation avec les tentatives.

 25   Q.  Donc la faute incombait aux deux parties. Vous l'avez dit dans

 26   l'affaire Kordic à deux occasions bien différentes et sous serment à chaque

 27   fois. Et vous changez votre réponse ?

 28   R.  Je ne change rien. Je dis que les deux parties provoquaient des

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  1   incidents dans ces combats extrêmes.

  2   Q.  Dernier document sur le sujet.

  3   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé.

  4   Mais l'interprète de la cabine anglaise demande au témoin de répéter

  5   la fin de sa dernière phrase, car elle n'a pas été interprétée et n'a pas

  6   été comprise.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux parties provoquaient des incidents et

  8   des conflits pendant toute la durée qui a précédé la signature des accords

  9   de Washington.

 10   M. SCOTT : [interprétation]

 11   Q.  Sur ce point, on vous a montré un transcript de la réunion de la

 12   présidence de Bosnie-Herzégovine du 29 juin 1993. Vous vous souviendrez

 13   peut-être de cela, car au début du document, sans aucune référence ou

 14   citation à la teneur du document, il est écrit :

 15   "Nous reconnaissons le HVO comme étant une partie constitutive des forces

 16   armées de l'ABiH."

 17   En fait, vous n'étiez au courant de rien à propos de tout cela; c'est bien

 18   ce que vous nous avez dit, n'est-ce pas ?

 19   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, depuis le jour de sa

 20   création, le HVO a fait partie intégrante des forces armées de Bosnie-

 21   Herzégovine. La date de la reconnaissance a peut être une importance

 22   juridique, mais de facto sur le terrain, elle a été reconnue tout le temps.

 23   Q.  Vous avez déjà dit que vous n'étiez pas au courant parce que ça ne vous

 24   intéressait absolument pas, donc voici ma question : vous n'étiez pas du

 25   tout au courant de ce document; vous n'étiez pas à la réunion; vous ne

 26   saviez pas ce qui a été dit; personne dans le prétoire ne sait ce qui a

 27   vraiment été dit; et finalement, on ne sait absolument pas ce qui a été dit

 28   et l'emploi qu'on a fait de cette déclaration ?

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Objection, objection.

  2   Je demanderais à M. Scott de bien vouloir nous donner la page du

  3   compte rendu d'audience dans laquelle on peut lire ce que le témoin est

  4   censé avoir dit, qui a été cité à l'instant, car nous ne pouvons pas

  5   contrôler.

  6   Nous montrerons qu'à certains moments, il y a eu légère déformation

  7   des propos du témoin dans sa déposition antérieure. Donc ligne 5, lorsque

  8   M. Scott dit que le témoin a dit quelque chose précédemment, il serait bon

  9   qu'il nous dise à quel moment se situe ce précédemment et à quelle page du

 10   compte rendu d'audience on peut trouver la citation en question. 

 11   M. SCOTT : [interprétation]

 12   Q.  Vous savez très bien, Monsieur le Témoin, que Mme Alaburic vous a

 13   montré le document 1D02664. Il s'agit d'un compte rendu d'une réunion de la

 14   présidence. Tout le monde dans cette salle connaît cette réunion et sait

 15   bien que je n'invente rien. Mais ce que je vous affirme, c'est que vous ne

 16   savez rien de ce document; vous n'étiez pas à la réunion; vous ne pouvez

 17   pas parler de ce document, de cette réunion. Vous n'y étiez pas et vous

 18   n'avez pas vu le document par la suite, donc vous n'êtes pas au courant de

 19   rien à ce propos ? C'est tout ce que je vous demande.

 20   R.  Je ne suis pas au courant de ce document, sauf le fait que dans la

 21   presse, dans les journaux, je l'ai vu et on me l'a montré aussi pendant que

 22   je me préparais à ce témoignage.

 23   Q.  Mais dans la presse, avez-vous entendu parler de l'article selon lequel

 24   les propos ou décisions de la Cour constitutionnelle selon lesquels

 25   l'Herceg-Bosna aurait été illégale ? En avez-vous eu vent de cela par le

 26   biais de la presse ?

 27   R.  C'est après la guerre que cela m'a été dévoilé. Mais pendant les

 28   événements, je ne savais rien ni dans un sens ni dans l'autre.

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  1   Q.  Vous avez émis une opinion en réponse à une question posée par un

  2   conseil à propos de savoir si M. Delic devait participer à une réunion de

  3   la présidence si M. Petkovic n'y participait pas. Saviez-vous que le droit

  4   en Bosnie-Herzégovine en temps de guerre faisait en sorte que la présidence

  5   élargie comprenait le chef des forces armées de Bosnie-Herzégovine ?

  6   R.  Je ne le savais pas, mais Delic n'avait rien à demander à la présidence

  7   si Petkovic n'était pas présent.

  8   Q.  D'après vous, pourriez-vous nous dire à combien de réunions du

  9   département de la Défense du HVO dirigées par M. Stojic ou à combien de

 10   réunions du gouvernement du HVO dirigées par M. Prlic ont assisté des

 11   militaires haut gradés musulmans ?

 12   R.  Je ne peux rien dire sur ce sujet.

 13   Q.  Donc vous n'étiez au courant d'aucun; c'est bien cela?

 14   M. KOVACIC : [interprétation] J'ai vraiment une objection, Monsieur le

 15   Président.

 16   Bien sûr que ce n'est pas une seule réunion, puisqu'il n'est pas au

 17   courant. Bien sûr que le Procureur n'a pas établi le fondement, Est-ce que

 18   vous avez participé à des réunions du HVO ? Oui. Alors, dans ces

 19   conditions, est-ce qu'étaient présents à ces réunions des membres de

 20   l'armée musulmane ? Mais non, mon collègue de l'Accusation passe en revue

 21   ce qu'il veut passer en revue, puis tout d'un coup, quand le témoin dit je

 22   ne sais pas, alors il en tire des conclusions. Non, vraiment, ce n'est pas

 23   acceptable. Devant un tribunal en Croatie, moi, je serais tancé si

 24   j'agissais ainsi.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Depuis trois quarts d'heure, je n'ai pas posé une

 26   question, j'ai laissé à M. Scott le soin de faire comme il entendait. Mais

 27   vu les dernières questions posées, je vais vous le demander.

 28   Et je demande à M. le Greffier de nous mettre le document

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  1   1D2664, c'est le document que M. Scott a cité.

  2   Voilà, on a le texte en anglais, et je voudrais qu'on le voie en B/C/S

  3   également.

  4   Donc tout le monde a sous les yeux les deux documents. Le texte en

  5   B/C/S, manifestement, a été retranscrit à partir d'une bande audio que

  6   personne n'a, mais le problème n'est pas là.

  7   Nous sommes, Monsieur le Témoin, le 29 juin 1993, il est 13 heures 30, et

  8   cette réunion est présidée par M. Izetbegovic en personne. Le Procureur

  9   vous a dit que vous n'étiez pas à cette réunion. Evidemment que vous

 10   n'étiez pas, sinon votre nom apparaîtrait. Mais il y a eu beaucoup de

 11   témoins qui sont venus témoigner à partir des transcripts présidentiels et

 12   ils n'étaient pas non plus à ces réunions.

 13   Ceci étant dit, Monsieur le Témoin, je vois la première

 14   phrase :

 15    "Nous reconnaissons le HVO comme partie constituante des forces

 16   armées."

 17   J'ai l'impression - mais je me trompe peut-être - que c'est M.

 18   Izetbegovic qui préside la réunion et qui dit ceci, mais on ne voit pas son

 19   nom. Il aurait dû y avoir normalement Izetbegovic, deux points, mais le nom

 20   n'apparaît pas. Mais on peut penser que c'est lui qui intervient. Sur ce,

 21   il y a Pejanovic qui intervient, vous voyez le texte après, et ce qui

 22   m'intéresse c'est après. Le président, c'est Izetbegovic, qui reprend les

 23   propos de Pejanovic et il dit

 24   ceci :

 25   "Il est dit qu'ici il y a seulement un commandant des forces armées."

 26   J'ai l'impression que M. Izetbegovic a reconnu que le HVO faisait

 27   partie des forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine, mais que

 28   pour lui il y a plusieurs commandants, parce que Pejanovic intervient

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  1   avant.

  2   Alors, Mon Général, vous qui connaissez bien, je suppose, tout cela,

  3   puisque vous avez rappelé tout à l'heure que vous êtes général à la

  4   retraite de l'ABiH, en voyant ce document, est-ce que, pour vous, M.

  5   Izetbegovic a formellement déclaré à tous les participants de cette réunion

  6   que pour lui le HVO était composante des forces armées de la République de

  7   Bosnie-Herzégovine ?

  8   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président.

  9   Je sais que ce n'est pas du tout la coutume, mais c'est ça ma

 10   question. Il ne peut pas savoir qui l'a dit, il ne peut le dire. Le témoin

 11   a bien dit qu'il n'était pas là. Il va se livrer à des conjectures, il ne

 12   peut pas faire grand-chose d'autre. Il ne peut pas dire qui a prononcé ces

 13   paroles.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais ce que vous dites au témoin comme quoi il

 15   spécule, je ne suis pas dans la spéculation. J'ai un document et je lui

 16   demande --

 17   M. SCOTT : [interprétation] Sur le document, qui a prononcé ces mots, ce

 18   n'est pas écrit, on ne sait pas. Si on en tire la conclusion que c'est

 19   Izetbegovic, c'est une spéculation, rien de plus, puisque ce n'est pas

 20   écrit.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 22   Alors, Monsieur le Témoin, j'ai indiqué que la première phrase, nous

 23   ne savons pas qui a dit cela. C'est exact, et M. Scott le note. Mais quand

 24   on lit le document, il y a une discussion sur ce sujet à laquelle M.

 25   Izetbegovic participe. Alors, pour vous, est-ce que Izetbegovic a reconnu

 26   que le HVO était membre composant de la République de Bosnie-Herzégovine ou

 27   bien il ne le reconnaît pas ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Il reconnaît que le HVO fait partie intégrante

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  1   des forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine, là il n'y a pas

  2   l'ombre d'un doute. Mais il pousse Delic à être membre de la présidence de

  3   la Bosnie-Herzégovine alors que cela ne pourrait se passer que de concert

  4   avec Petkovic. Et c'est ça le sujet du débat. Et d'ailleurs toute cette

  5   transcription présidentielle, en tout cas, toute cette partie du transcript

  6   présidentiel porte sur exactement ce point. Le HVO est sur un pied

  7   d'égalité avec l'ABiH.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, mettez la page 2 en anglais et

  9   la page en B/C/S. Voilà.

 10   Monsieur le Témoin, je vous demande de regarder, il y a Boras qui

 11   intervient et le président Izetbegovic intervient après lui. Et voilà ce

 12   que dit M. Izetbegovic :

 13   "Nous pouvons mettre la question du statut des forces armées sur l'agenda

 14   dans le futur. Comment résoudre ce problème ? Nous essaierons si vous vous

 15   en souvenez, nous essayerons de résoudre la matière avec un commandement

 16   conjoint."

 17   Alors d'après vous, en termes militaires, qu'est-ce que M. Izetbegovic veut

 18   dire là ? Parce que là, c'est lui qui intervient.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, ce que je peux dire qu'on

 20   n'avait pas réussi à créer un commandement conjoint malgré nos efforts. Et

 21   à ce moment-là, il n'y a pas eu donc de commandement conjoint d'après la

 22   manière dont il concevait de son côté ce commandement conjoint.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question et je redonnerai la parole à

 24   M. Scott. Il lui reste 50 minutes.

 25   Tout au début de l'audience, à 14 heures 20, M. Scott a commencé avec le

 26   premier document qu'il vous a montré, ce n'est pas la peine de le regarder,

 27   c'était le document signé de Mate Boban. Et dans ce document signé de Mate

 28   Boban, c'est le P155, M. Mate Boban, le 10 avril 1992, 10 avril, indique

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  1   que la TO, qui est un service de l'armada serbo-chetnik n'existe pas pour

  2   les Croates en Herceg-Bosna, et donc à ce moment-là, il demande la création

  3   des unités militaires du HVO.

  4   Tel que vous l'avez perçu quand vous étiez sur le terrain, et ensuite

  5   toutes les questions du Procureur étaient pertinentes, parce que j'aurais

  6   posé les mêmes questions, exactement les mêmes questions. Mais moi, ce que

  7   je voulais savoir : au mois d'avril, au 10 avril, est-ce que la Défense

  8   territoriale dans l'Herceg-Bosna existait avec des Musulmans, ou bien il

  9   n'y en avait pas, et comme il n'y en avait pas, Mate Boban a profité de ce

 10   créneau pour dire, Comme il n'y a rien, c'est les Croates qui vont créer

 11   ces unités. Alors dans votre souvenir, est-ce qu'il y avait des unités de

 12   la Défense territoriale à composante musulmane ?

 13   A titre d'exemple, à Kiseljak, on a vu un document que le Procureur

 14   vous a montré où Blaskic organise, est-ce qu'à Kiseljak il y avait des

 15   unités musulmanes ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant

 17   de la période dont nous sommes en train de parler, il n'y avait pas de

 18   Défense territoriale. Elle avait existé du temps de la Yougoslavie et à ce

 19   moment-là, la Défense territoriale n'a pas eu d'armes ni d'organisation.

 20   Elle était démantelée et les Serbes l'avait quittée. Il y avait simplement

 21   des dossiers archivés dans certains bureaux appartenant auparavant à la

 22   Défense territoriale. Et sur la base de cela, il fallait créer une armée,

 23   les forces qui allaient défendre la Bosnie-Herzégovine. De la Défense

 24   territoriale ne restait que le nom. Or, c'est le HVO qui existait à

 25   Kiseljak, de même que le début de la création de la Défense territoriale,

 26   ou plutôt, de l'ABiH.

 27   Lorsque je suis arrivé en Bosnie centrale, je suis tombé sur un grand

 28   nombre d'individus armés et 90 % en étaient des Croates. Les Musulmans ne

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  1   disposaient pas d'armes et n'étaient pas organisés dans le sens de pouvoir

  2   opposer une résistance. C'est seulement à la deuxième moitié du mois de mai

  3   et au mois de juin qu'ils ont pu mener à bien des activités militaires.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Scott vous a posé une question que je vous aurais

  5   également posée. Il vous a demandé qu'est-ce que vous avez fait, vous, pour

  6   vous mettre en contact avec les forces armées de la République de Bosnie-

  7   Herzégovine de la présidence. Il vous a posé la question. Et vous avez dit,

  8   Moi, je n'ai rien fait. Bien. Mais il y a une question qu'il aurait pu vous

  9   poser et qu'il n'a posé et moi je vous la pose.

 10   Qu'est-ce que la République de Bosnie-Herzégovine a fait pour prendre

 11   contact avec vous ? Puisque, de vous vers Sarajevo, vous n'avez rien fait,

 12   mais est-ce que Sarajevo vers vous a fait quelque chose ? Et à un moment

 13   donné vous avez dit, J'ai rencontré M. Boras, le même "Boras" que l'on voit

 14   dans le document que je vous ai montré tout à l'heure. Alors qu'est-ce que

 15   Sarajevo a fait vers vous ? Et si c'est M. Boras, qu'est-ce qu'il vous a

 16   dit ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le colonel Suvalic est

 18   venu me voir à Vitez. Il était chef de la Défense territoriale du district

 19   de Zenica déjà à l'époque de la Yougoslavie, et il m'a dit la chose

 20   suivante, "Nous sommes en train de créer notre armée, je souhaite que tu

 21   sois le chef de l'état-major et nous aurons tout résolu." Le colonel

 22   Suvalic avait des cartons, avait aussi une garnison avec des chars à Zenica

 23   et ainsi de suite. Moi, j'avais déjà résolu le problème de la garnison à

 24   Travnik, car j'avais été un otage. Mais ils sont partis, je suis en train

 25   de créer une armée, j'ai un certain nombre d'individus armés dont je

 26   dispose, donc j'ai dit, Je suis en train de créer une armée et nous allons

 27   lutter ensemble. Alors que lui il ne peut pas encore lutter, il n'a pas

 28   d'unités, je lui ai dit, Crée des unités et on va lutter ensemble. Pour

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  1   moi, il sera plus facile si je deviens ton chef de l'état-major, mais ceci

  2   est infaisable. Donc ça c'est la relation avec la Défense territoriale,

  3   mais à ce moment-là, au moment où il m'a rendu visite, il n'avait pas de

  4   lien avec Sarajevo, au moins pour ce qui est des combats, des activités de

  5   combat.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Et le Sieur Boras, qu'est-ce qu'il vous a dit ?

  7   Puisque vous avez dit à M. Scott, J'ai vu Boras. Qu'est-ce qu'il vous a dit

  8   Boras ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que Boras était là au cours de cette

 10   journée-là. Pendant que de nombreux développements se déroulaient, mais le

 11   plus important est que Boras a dit qu'à Sarajevo, ils étaient déjà en train

 12   de s'organiser un peu, et lorsque je les ai informés un petit peu de mes

 13   activités, tout d'abord il fallait établir une ligne de défense afin

 14   d'empêcher que l'armée de Republika Srpska s'empare de cette région,

 15   c'était l'essentiel, et à Bugojno, à Jajce, à Travnik, et ainsi de suite,

 16   et lorsque je lui ai expliqué cela, il m'a dit, Continue tes activités,

 17   c'est très bien. Donc on n'a pas du tout parlé de la subordination,

 18   resubordination, ou ce genre de choses.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous dites que M. Boras, qui était membre de

 20   la présidence vous a dit, Continue, c'est très bien ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 23   M. SCOTT : [interprétation]

 24   Q.  Ce que vous avez dit ailleurs vous contredit. C'est pour ça que je

 25   passe autant de temps à revenir sur ce que vous avez déclaré la semaine

 26   dernière.

 27   Sous serment, il y a à peine quelques jours de cela, vous avez dit

 28   que vous êtes arrivé en Bosnie centrale, où tout était désorganisé, il y

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  1   avait finalement peu d'hommes armés, que vous avez dû partir de zéro, de

  2   rien, pour constituer le HVO. Vous avez ajouté qu'en très peu de temps, la

  3   Défense territoriale était numériquement supérieure, était plus puissante

  4   et avait plus d'officiers de carrière que le HVO, arrivé le mois de mai ou

  5   juin. Un exemple, vous avez dit qu'en mai, il y avait 2 000 soldats

  6   musulmans qui étaient arrivés en Bosnie centrale, et vous y avez vu une

  7   menace, en mai 1992.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je fais objection,

  9   car il s'agit là d'une interprétation tout à fait erronée de la déposition

 10   du général Filip Filipovic concernant la période commençant par le 10

 11   avril, lorsqu'il est arrivé en Bosnie centrale, jusqu'au mois de juin. Il

 12   s'agit d'une interprétation tout à fait erronée de ses propos. Si M. Scott

 13   considère qu'il présente de manière exacte la déposition de ce témoin, je

 14   l'invite à nous indiquer les pages du compte rendu d'audience auxquelles le

 15   témoin aurait dit quelque chose de semblable.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je suis convaincu que c'est bien ce que le

 17   témoin a déclaré. S'il ne s'en souvient pas, je laisserai le soin à la

 18   Chambre d'examiner sa déposition. C'est ce qu'il a dit précisément. Ce

 19   n'est pas Me Alaburic qui va dicter la façon dont je mène mon contre-

 20   interrogatoire.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je considère que

 22   réellement, en ce moment, dans le cadre de ce contre-interrogatoire aussi,

 23   il faudrait respecter les règles qui régissent notre travail devant ce

 24   Tribunal. Je vous invite à demander à M. Scott de faire en sorte que nous

 25   soyons informés de la page du compte rendu d'audience lorsqu'il fait

 26   référence à la déposition du témoin. Nous avons le droit de vérifier si

 27   l'Accusation présente les propos du témoin de manière exacte on erronée. Et

 28   quant à la question de savoir s'il est convaincu de la véracité de ces

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  1   propos, je ne doute pas du fait que même s'il se trompe, il est convaincu

  2   d'avoir raison, mais il me revient de vérifier. Je suis sûre que M. Scott a

  3   toutes les pages du compte rendu d'audience. Qu'il nous les indique.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison tous les deux. M. Scott n'a pas

  5   sous les yeux les pages du compte rendu, donc il ne peut pas vous donner

  6   tout de suite la page. Il a raison en disant : les Juges vérifieront, bien

  7   entendu. Et vous aussi, vous avez raison parce qu'il vaudrait mieux qu'il

  8   n'y ait pas d'erreur et que si M. Scott fait référence à des dires du

  9   témoin, il faut qu'il soit précis. Mais comme nous avons la chance d'avoir

 10   le concerné devant nous, lui, il peut soit aller dans le sens de M. Scott

 11   ou dire à M. Scott qu'il se trompe. Le seul qui peut départager sans qu'on

 12   ait le texte sous les yeux, c'est le témoin.

 13   Bien, alors, Mon Général, vous avez suivi ? M. Scott dit quelque

 14   chose, Me Alaburic a dit oui, moi j'aimerais connaître la page exacte.

 15   Alors, est-ce que votre mémoire vous permet de vous souvenir ce que vous

 16   avez dit lors de votre témoignage antérieur ou bien, comme ça remonte à

 17   neuf ans, vous ne vous en souvenez plus ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je me souviens non

 19   seulement de ce que j'ai dit il y a neuf ans, mais je l'ai dit aussi il y a

 20   trois jours. L'Accusation n'a de cesse de dire que je ne dis pas la vérité,

 21   que j'évite de répondre aux questions, que je ne suis pas précis et ainsi

 22   de suite. S'agissant de cette dernière question, il faut savoir que lorsque

 23   l'on parle du 10 avril, c'est une chose, et lorsque l'on parle du 10 avril

 24   et de mon arrivée dans cette région, car j'ai dit exactement que j'avais

 25   trouvé sur place un grand nombre d'individus armés, mais il ne s'agissait

 26   pas d'une armée, il ne s'agissait pas d'une organisation. Et déjà au mois

 27   de juin, fin mai, début juin, il y avait la Défense territoriale avec

 28   l'arrivée des cadres de la JNA.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas moi qui suis tombé, mais les classeurs

  2   sont tombés.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Et j'ai même indiqué les noms de certaines

  4   personnes. S'agissant du mois de juin 1992, j'ai parlé de Lendo, Alagic,

  5   Cuskic, et ainsi de suite, je passe. Donc, l'ABiH, à ce moment-là, était

  6   plus forte, pour ce qui est du nombre de personnel, par rapport au HVO.

  7   S'agissant des cadres professionnels, elle avait plus de cadres

  8   professionnels, de même qu'un nombre plus élevé de soldats par rapport au

  9   HVO. C'est ce que j'ai dit également.

 10   M. SCOTT : [interprétation] Mais c'est précisément ce que je vous ai dit,

 11   en toute exactitude.

 12   Je renvoie l'exemple 47 652, c'est la page du compte rendu d'audience, je

 13   le dis pour les Juges ou Me Alaburic, où le témoin a dit qu'en très peu de

 14   temps, lorsque est arrivé le mois de mai ou de juin 1992, les forces

 15   musulmanes étaient numériquement supérieures et avaient un corps d'officier

 16   plus important.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

 18   simplement dire que ce que le témoin a dit portait sur juin 1992, alors que

 19   M. Scott avait présenté ça comme se déroulant en mai 1992, et c'est pour

 20   cela que j'ai réagi en disant qu'il s'agissait d'une interprétation

 21   erronée.

 22   M. SCOTT : [interprétation] Je ne veux plus de ces allers et venues de ce

 23   qui s'est dit et ne s'est pas dit. Le compte rendu était très clair. Je

 24   viens de donner un exemple de dires antérieurs du témoin, lorsqu'il parlait

 25   d'avril, mai et juin 1992, et c'est précisément ce que je lui ai présenté

 26   comme situation.

 27   Q.  Autre question que vous posait M. le Juge Antonetti, s'agissant des

 28   transmissions, communications et de l'existence de la nouvelle Défense

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  1   territoriale et des communications qui venaient de cette nouvelle TO.

  2   Prenez, si vous le voulez bien, la pièce 1D00970.

  3   Je vais demander l'aide de M. l'Huissier pour essayer de faire au

  4   plus vite.

  5   Peut-être qu'on pourrait -- oui, on a l'écran. Peut-être qu'on pourrait

  6   utiliser l'écran. Vous avez l'anglais et la version croate à l'écran.

  7   Monsieur le Témoin, regardez l'écran, s'il vous plaît. Regardez l'écran.

  8   Nous avons ici une transmission en date du 6 mai 1992 de la cellule de

  9   Crise de l'assemblée municipale de Jablanica. Je commence la lecture :

 10   "Lors de sa réunion du 6 mai 1992, la cellule de Crise de Jablanica a

 11   décidé d'organiser un système de défense unifié pour la municipalité de

 12   Jablanica et fait ici l'annonce suivante :

 13   "Tous les citoyens de la municipalité de Jablanica sont ainsi informés

 14   qu'un système de défense unifié est en train d'être organisé dans notre

 15   municipalité et se composera des forces de la Défense territoriale, du HVO,

 16   des Bérets verts et de toute personne souhaitant se placer sous le

 17   commandement unifié du QG de la Défense territoriale à Jablanica."

 18   Après le 6 mai 1992, quelles sont les mesures prises par le HVO pour se

 19   placer sous ce commandement unifié de la Défense territoriale ?

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, objection.

 21   Il s'agit de la municipalité de Jablanica, et nous savons que pendant

 22   cette période et pendant l'ensemble de la guerre, le témoin a été en Bosnie

 23   centrale. Comment le témoin peut-il déposer au sujet de ce que le HVO

 24   aurait fait ou n'aurait pas fait à Jablanica ?

 25   M. SCOTT : [interprétation] Mais comment peut-il parler d'une réunion à

 26   laquelle il n'a même pas assistée ?

 27   Q.  Monsieur, ma question c'était -- ici vous avez un exemple, et je

 28   reviens sur la question qui a été posée : quelles étaient les transmissions

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  1   avec la TO. Et vous avez dit que la TO n'existait pas en Herzégovine. Vous

  2   l'avez dit sous serment. Maintenant, vous avez ce système unifié de

  3   commandement de la TO. Or, vous avez dit que la TO n'existait pas. La

  4   question que je vous ai posée il y a 45

  5   minutes : quelles sont les mesures prises par le HVO pour se placer sous le

  6   commandement unifié de la présidence de Bosnie-Herzégovine ?

  7   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je n'ai jamais dit qu'il

  8   n'y a pas eu de Défense territoriale à Jablanica, ce que vient d'affirmer

  9   le Procureur. J'ai simplement parlé du fait qu'au cours des premières

 10   journées suite à mon arrivée en Bosnie centrale, le HVO était plus fort

 11   pour ce qui est de l'état de préparation de la population à la défense

 12   contre l'agression, car ils avaient déjà traversé l'épreuve de Vukovar,

 13   Ravno, et cetera. Alors que les Musulmans, grâce, entre autres, à la

 14   déclaration faite par Alija Izetbegovic selon laquelle ce n'était pas leur

 15   guerre, n'étaient pas préparés à cela. Donc au mois d'avril et début mai

 16   1992, la seule force réelle dans la région de la Bosnie centrale était le

 17   HVO. La Défense territoriale était en cours de constitution. Elle cherchait

 18   les commandants, elle les trouvait, et en juin 1992 environ, elle était

 19   plus forte que le HVO.

 20   Q.  Passons à un sujet différent car le dossier montrera clairement ce qui

 21   a été dit la semaine dernière.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, dans la ligne de la question du

 23   Procureur et dans la ligne de ce document du transcript présidentiel de la

 24   République de Bosnie-Herzégovine, est-ce qu'on n'a pas la preuve par ce

 25   document qu'il était demandé aux municipalités de mettre en place une

 26   formation militaire réunissant ceux qui étaient là ? Dans le cas de

 27   l'espèce, à Jablanica, il y a les Bérets verts et les Croates du HVO, mais

 28   il pouvait y avoir d'autres configurations ? Et dans le document, chose

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  1   intéressante, on voit que le président de la municipalité dit que ceci ne

  2   préempte pas des solutions politiques qui pourraient intervenir

  3   ultérieurement. Est-ce donc à dire qu'au mois de mai 1992, alors même de

  4   mémoire où il y avait la constitution de la VRS en Republika Srpska, il y

  5   avait dans certaines municipalités la création de formations armées

  6   conjointes telles que le document que le Procureur vous montre semble dire

  7   ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, en ce qui concerne les

  9   soldats sur papier, et les papiers il y en avait beaucoup, c'est ce que je

 10   vois dans le cadre de ce procès aussi. Roso, Blaskic, le président de la

 11   municipalité, donc si vous voulez, les papiers s'envolaient un peu de

 12   partout. Mais le problème, c'était de faire les choses sur le terrain et de

 13   réaliser la défense sur le terrain.

 14   S'agissant du document cité concernant Jablanica, il est écrit qu'il faut

 15   unifier les Bérets verts, ça veut dire que jusqu'à ce moment-là, ils ne

 16   faisaient pas partie de la Défense territoriale. Il faut unifier la Ligue

 17   patriotique et d'autres unités, de même que le HVO. Donc c'est ce qui est

 18   écrit ici. Il est écrit ce qu'il convient de faire afin de réaliser quelque

 19   chose d'idéal. Le président a peut-être reçu un tel papier ou bien peut-

 20   être il l'a rédigé lui-même.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 22   M. SCOTT : [interprétation]

 23   Q.  Passons à un autre sujet, et ici c'est un rapport avec ce que vous avez

 24   dit lorsque vous avez dit que M. Pasalic et vous aviez passé un certain

 25   temps à la base de Dracevo, base du Bataillon espagnol. La semaine

 26   dernière, vous avez fait vraiment tout un effort pour donner une impression

 27   erronée aux Juges de la Chambre, n'est-ce pas ? Et je vais vous dire

 28   pourquoi pour que vous n'ayez pas à le deviner. Vous saviez parfaitement

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  1   bien que si Pasalic a été retenu et si vous n'avez pas pu entrer dans

  2   Mostar, c'est parce que le HVO ne laissait pas Pasalic passer ni entrer

  3   dans Mostar, et vous le saviez, n'est-ce pas ?

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, par

  5   rapport à cette question.

  6   Quel est le rapport entre le HVO et Pasalic ? Nous avons entendu un certain

  7   nombre de témoins qui sont venus ici et qui ont dit dans leur témoignage

  8   que Pasalic était dans un véhicule de la FORPRONU. Alors, comment est-ce

  9   que le HVO aurait pu faire quoi que ce soit en rapport avec des gens qui

 10   étaient sous la protection de la FORPRONU ? Je voudrais prier mon collègue,

 11   M. Scott, de préciser ce qu'il veut dire exactement, parce que si la date

 12   qu'il a réellement à l'esprit est le 8 ou le 9 mai, alors sa question est

 13   vraiment infondée.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est tout simplement pas vrai, parce qu'ici

 15   j'ai ce qu'a dit le témoin la semaine dernière. Nous avons 1er décembre,

 16   compte rendu, pages 43 à 47, voici ce que le témoin a dit en réponse à

 17   cette question : 

 18   "Est-ce que vous pouvez commenter, Général, ce qui est affirmé ici quant à

 19   savoir si M. Pasalic a été retenu par le HVO ?"

 20   Voici la réponse de M. Filipovic sous serment la semaine dernière :

 21   "La route que nous avons passée traverse sur une zone surtout contrôlée par

 22   l'ABiH, et je ne sais pas comment le HVO aurait pu empêcher Arif Pasalic de

 23   sortir du véhicule blindé transport de troupes."

 24   Donc vous le saviez parfaitement bien et -- attendez, attendez, Maître.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, vraiment, j'ai une

 27   objection. Je crois que j'ai écouté avec une immense patience M. Scott

 28   jusqu'à présent. J'ai vu comment il interrogeait le témoin et j'espère que

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  1   pendant les questions supplémentaires de ma part je pourrai donner des

  2   indications utiles aux Juges de la Chambre qui contrediront les siennes.

  3   Mais vraiment cette partie de la déclaration du témoin a été très claire.

  4   Il était très clair que la question portait sur le fait que le 9 mai 1993,

  5   Arif Pasalic ne se serait pas trouvé à Mostar parce que le HVO lui aurait

  6   empêché l'entrée de la ville. C'est ce que disait le Procureur. Nous avons

  7   démontré qu'à ce moment-là Pasalic était à l'intérieur d'un véhicule de la

  8   FORPRONU. Et si mon collègue, M. Scott, veut dire quoi que ce soit en

  9   rapport avec cela, je lui demanderais simplement de présenter la question

 10   et la réponse ensemble intégralement et de ne pas nous laisser à mi-chemin,

 11   ce qui donne une version tout à fait différente des dires par rapport aux

 12   dires qui ont été proférés dans le prétoire.

 13   Arif Pasalic était dans un véhicule de la FORPRONU. Il allait de Jablanica

 14   à Dracevo. Il est en train de traverser Mostar Est. Et s'il avait voulu

 15   quitter le véhicule, il aurait pu le faire. Voilà le cœur du problème. Le

 16   HVO ne pouvait pas exercer le moindre contrôle sur lui par rapport à ce

 17   qu'il avait envie de faire.

 18   M. SCOTT : [interprétation] Prenez la pièce P11138.

 19   Monsieur l'Huissier, restez sur le qui-vive pour m'aider, parce que

 20   j'ai vraiment peu de temps. 

 21   Q.  Nous avons ici un rapport du Bataillon espagnol. Ça se trouve dans

 22   l'autre classeur, Monsieur l'Huissier -- non, voilà. Excusez-moi, non, ici

 23   c'est un jeu de documents séparé. Je croyais qu'on l'avait remis au témoin.

 24   Je m'excuse.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, avant que l'on ne

 26   distribue le document, est-ce que je peux dire quelque chose ?

 27   M. SCOTT : [interprétation] Ecoutez, je ne veux pas maintenant que le

 28   témoin prenne de mon temps pour faire une déclaration.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, nous allons avoir le document,

  2   comme vous d'ailleurs.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je voudrais dire quelques mots au sujet

  4   de la dernière question, celle qui a fait l'objet de l'objection de Me

  5   Alaburic, et moi, je n'ai rien dit. Peut-être bien que je suis ici pour

  6   dire quelque chose dans ce prétoire, tout de même.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Je retire la question tant qu'on n'a pas reçu

  8   ce document. Il n'y a pas de question comme ça laissée en suspens.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : La question a été retirée, mais elle va peut-être

 10   revenir avec le document maintenant ?

 11   M. SCOTT : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

 12   Q.  Prenons la pièce P11138 [comme interprété], point 6.1 de ce rapport,

 13   "Divers" :

 14   "A 18 heures 50, un convoi espagnol qui escortait le général de brigade

 15   Pasalic et Filipovic a été retenu au poste de contrôle E5. A 21 heures 08,

 16   un officier de la police militaire du HVO s'est présenté à ce poste de

 17   contrôle pour les renforcer et pour encourager ces hommes à afficher une

 18   attitude agressive à propos du convoi. L'autorisation de poursuivre la

 19   route a été donnée à 21 heures, mais à 21 heures 40, le convoi a été de

 20   nouveau retenu à Vrapcici, à ce poste de contrôle où on a affirmé qu'il y

 21   avait des groupes incontrôlés qui minaient la route."

 22   Prenons maintenant la pièce P02241 dans ce même jeu de documents. Je répète

 23   le numéro, P02241.

 24   Autre rapport du SpaBat, point 1.1, "Zones de responsabilité", "Poste de

 25   contrôle" :

 26   "Le 9 mai 1993, après de laborieuses consultations avec M. Bozic," je pense

 27   que c'est Slobodan Bozic, du HVO, "la patrouille espagnole qui escortait le

 28   général Pasalic et le colonel Filipovic a été autorisée à franchir le poste

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  1   de Vrapcici à condition qu'elle n'entre pas dans Mostar, mais aille

  2   directement à Dracevo."

  3   Prenons la pièce P02235, c'est toujours dans ce même jeu de documents,

  4   P02235, "Autres activités", page 5 en anglais, je cite :

  5   "Le transport et la protection par escorte a été fourni pour Pasalic et

  6   Filipovic de Jablanica à Mostar. Le HVO a refusé l'entrée de ce convoi

  7   après une attente de plus de sept heures. Les personnes qui étaient

  8   escortées étaient emmenées à Drecevo, où elles ont passé la nuit et y sont

  9   toujours."

 10   Prenons la pièce P1139, autre rapport du SpaBat pour les 10 et 11 mai.

 11   Cinquième point, rubrique "Mostar", je cite :

 12   "Le général Pasalic, commandant du 4e Corps d'armée de l'ABiH, continue de

 13   se trouver au Détachement du SpaBat à Dracevo. Le HVO avait érigé des

 14   postes de contrôle autour de ce détachement pour empêcher son départ."

 15   C'est pour ça, Monsieur, et c'est là que Pasalic était et c'est pour cela

 16   qu'il ne pouvait pas circuler librement et qu'il ne pouvait pas être à

 17   Mostar les 8, 9 et 10 mai 1993. C'était commode cette omission qui était la

 18   vôtre, mais rappelez-vous la question du Président, vous avez oublié de

 19   dire et vous avez créé cette impression erronée lorsque vous avez dit que

 20   c'était le HVO qui avait arrêté les deux. Vous voulez donner l'impression

 21   que le HVO qui contrôlait où se trouvait M. Pasalic, n'est-ce pas ?

 22   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, tout ce que j'ai dit est

 23   exact, et je vais me répéter.

 24   A la réunion de Konjic et de Jablanica, nous nous trouvions, Pasalic et

 25   moi-même. A cette époque-là, ma fonction était supérieure à la sienne. Ma

 26   fonction était, à ce moment-là, supérieure au sein des forces armées de

 27   Bosnie-Herzégovine. J'étais membre du commandement conjoint. J'étais le

 28   numéro 2 d'une partie, voire le numéro 3 ou le numéro 4 du commandement

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  1   dans son ensemble, alors que Pasalic n'était qu'un commandant d'un corps

  2   d'armée. 

  3   Si le HVO empêchait l'entrée à Pasalic, il empêchait également l'entrée de

  4   Filipovic, et cela eut été un non-sens. Ça, c'est mon premier point.

  5   Deuxième point, avant le départ du convoi de Jablanica, le HVO ne pouvait

  6   avoir aucune influence sur le départ. Pendant quatre à cinq heures, le

  7   convoi n'a pas pu prendre le départ, parce que M. Pasalic ne voulait pas

  8   que le convoi démarre pour une raison ou pour une autre, et il n'a pas

  9   cessé de se disputer avec le commandant Carlos. J'espère que cet homme est

 10   encore vivant et qu'il pourra en témoigner.

 11   Quant aux points de contrôle qui viennent d'être évoqués, je n'en ai

 12   pas connaissance, parce que j'étais enfermé dans le blindé transport de

 13   troupes. Pasalic était dans le véhicule comme moi, il ne voyait rien et moi

 14   non plus. Je me suis réveillé à Dracevo. Il était 3 ou 4 heures du matin et

 15   Pasalic s'est réveillé lui aussi. Aujourd'hui, on sous-entend que j'aurais

 16   su qu'il était interdit pour Pasalic de sortir du blindé de transport de

 17   troupes et toutes sortes d'autres choses. Nous avons été appréhendés par le

 18   Bataillon espagnol des quatre côtés du côté du conteneur. Il y avait des

 19   gardes, et ni Pasalic ni moi-même n'aurions pu sortir pour aller où que ce

 20   soit. Je l'ai déjà dit avant, je le redis aujourd'hui et je peux le répéter

 21   100 fois, si cela est nécessaire.

 22   Q.  Mais vous étiez un officier supérieur du HVO, vous étiez à bord

 23   de ces véhicules, vous avez été retenus au moins sept heures de ces postes

 24   de contrôle. Et vous nous dites que pendant cette période, alors que vous

 25   étiez officier supérieur, vous n'avez jamais communiqué avec les hommes du

 26   HVO qui tenaient ce poste de contrôle, alors que vous y avez été détenu

 27   sept heures ? Jamais vous n'avez jeté un coup d'œil à l'extérieur ? Jamais

 28   vous n'avez posé une question ?

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  1   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, Pasalic et moi étions

  2   enfermés dans le blindé transport de troupes. Le véhicule est immobile,

  3   ensuite il circule, ensuite il est immobile, et ensuite il circule, voilà.

  4   Q.  Passons à autre chose, à moins que les Juges aient des questions à ce

  5   propos. Mais je pense qu'il est l'heure de la pause peut-être

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste avant la pause, Monsieur le Témoin, il y a

  7   deux versions. Il y a la vôtre que vous faites sous serment et il y a le

  8   Procureur qui conteste formellement votre version à partir de tous les

  9   documents espagnols, qui sont clairs, qui expliquent qu'il y a eu des

 10   points de contrôle et que M. Pasalic n'a pas pu se rendre à sa destination

 11   car le HVO empêchait la circulation. Et vous, vous dites autre chose. Vous

 12   avez répondu au Procureur en maintenant votre version.

 13   Moi, ce qui m'a étonné, et je vous avais posé la question. Je vous

 14   avais dit comment ça se fait que vous, vous n'étiez pas en contact avec le

 15   HVO, et vous m'aviez dit, Non, on était prisonniers, puisque même quand on

 16   allait aux toilettes, on était surveillés. Alors, en écoutant le Procureur

 17   et en vous écoutant, il n'y a que deux versions. Ou c'est vous qui ne dites

 18   pas la vérité ou ce sont les Espagnols qui, pour vous garder tous les deux

 19   sous la main, ont fait état de contrôle tout en écrivant qu'il y avait des

 20   groupes incontrôlés, donc ils attribuent cela au HVO bien qu'ils disent que

 21   ce sont des groupes incontrôlés.

 22   Mais dans les documents, parce que moi à chaque fois qu'il y a un

 23   document, je regarde le document dans sa version originale, là dans la

 24   version espagnole, le document P11138 est rédigé, c'est le timbre des

 25   Espagnols, parce qu'ils avaient l'habitude de mettre des cachets partout.

 26   Il est rédigé le 8 mai à 23 heures 30, 8 mai, 23 heures 30, et vous savez

 27   qu'à Mostar le 9 mai, il s'est passé quelque chose.

 28   Mais dans ce document espagnol, il est indiqué que quelqu'un du HVO

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  1   les avait informés de la possibilité que se produise une confrontation dans

  2   la nuit entre le HVO et l'ABiH. Voilà ce que dit le document.

  3   Alors vous êtes tout à fait sûr de vous, à savoir, M. Pasalic et vous-même

  4   vous avez été retenus par les Espagnols ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai dit qu'à Jablanica

  6   il y a eu des heures de discussion entre Carlos et Pasalic avant que le

  7   convoi finalement ne démarre, quatre blindés de transport de troupes. Et

  8   pendant tout le voyage, d'ailleurs chez les Britanniques et les Français

  9   aussi, quand on entre dans un blindé de transport de troupes, on n'a plus

 10   la possibilité de communiquer avec qui que ce soit. Donc pendant tout le

 11   voyage, ni Pasalic ni moi n'avons eu la possibilité de communiquer avec qui

 12   que ce soit. Nous ne savions pas non plus ce qui se passait à l'extérieur;

 13   ni lui ni moi.

 14   Quand nous nous sommes réveillés, ou plus précisément quand les Espagnols

 15   ont ouvert la porte du blindé, nous nous sommes retrouvés au milieu de

 16   conteneurs à Dracevo. Et ils nous ont simplement demandé s'ils pouvaient

 17   nous laisser ensemble dans ce conteneur. On a dit qu'il n'y avait de

 18   problème. Et on nous a donc fait entrer dans un conteneur sous la garde la

 19   plus sévère, la plus stricte des Espagnols comme un Spandau.

 20   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] M'autorisez-vous, Monsieur le

 21   Président, à poser une question technique au témoin. Pourquoi est-ce que le

 22   Bataillon espagnol ne dit pas dans son rapport que le convoi circulait au

 23   moins 7 kilomètres à travers Mostar, qui était sous le contrôle de l'ABiH,

 24   et pourquoi Pasalic n'a pas frappé au milieu du blindé pour demander que le

 25   convoi s'arrête ? Pourquoi est-ce que les Espagnols n'ont jamais dit qu'ils

 26   avaient traversé au moins 7 kilomètres de Mostar Est, sous le contrôle de

 27   l'ABiH et personne d'autre ? Nous avons vu une centaine de fois déjà,

 28   Monsieur le Président. Pourquoi est-ce que le Bataillon espagnol ne l'a pas

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  1   dit, pourquoi est-ce que Pasalic, à ce moment-là, n'a pas tapé au mur du

  2   blindé pour le faire arrêter, parce qu'il ne pouvait pas le faire même s'il

  3   avait voulu le faire.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous n'avons pas malheureusement sous les yeux une

  5   carte qui nous aurait permis de suivre le convoi pour voir par où

  6   exactement il était passé. Le général Petkovic dit que d'après lui - mais

  7   c'est son point de vue - ce n'est peut-être pas le vôtre - que vous avez dû

  8   passer sur une portion de route qui était sous le contrôle des Musulmans.

  9   Alors est-ce possible ou impossible ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans tous les territoires sous le contrôle de

 11   l'ABiH, ces territoires étaient trop grands pour qu'on les ignore, donc

 12   c'est possible. Il n'y avait aucune raison de penser qu'aucun morceau du

 13   territoire que nous avons traversé n'était sous le contrôle de l'ABiH.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous étiez dans ce véhicule blindé, vous ne

 15   pouviez pas voir ce qu'il y avait à l'extérieur ou pas ? Vous êtes comme

 16   dans une boite de sardines ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un soldat espagnol qui tenait

 18   l'ouverture existante. Et nous, on pouvait jeter un coup d'œil par cette

 19   ouverture, mais on voyait le ciel, on ne pouvait pas appuyer notre œil sur

 20   l'ouverture, on pouvait simplement regarder à côté de l'ouverture. Donc le

 21   champ de vision pour nous à partir de l'intérieur du blindé transport de

 22   troupes, le champ de vision était pratiquement nu.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Si ce véhicule blindé a été arrêté pour des

 24   contrôles, du fait qu'il y avait une ouverture, vous auriez dû entendre des

 25   voix où on demandait à la FORPRONU où ils allaient. Est-ce que vous vous

 26   souvenez avoir été arrêtés ? Et est-ce que vous avez entendu des voix de

 27   conversations ou pas ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Le blindé était immobile. D'ailleurs, il est

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  1   resté immobile pendant des heures. Quand je dis "pendant des heures," ce

  2   que je veux dire c'est qu'il a été stoppé à un endroit et il est resté là.

  3   Nous, ce que nous pouvions voir c'était un petit peu de terre et un peu de

  4   ciel. Les discussions, les pourparlers, est-ce qu'il y en a eu ou pas, nous

  5   n'avons pas pu le constater. Nous n'étions pas en mesure de le faire.

  6   Voilà.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'entendiez pas ce qui se disait ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'entendions pas parce que le moteur

  9   n'est jamais éteint. Donc le moteur des blindés était allumé. Et puis par

 10   ailleurs, cela ne m'intéressait pas. Parce que déterminer en voyant un

 11   morceau de terrain où je me trouvais, je n'en avais pas la possibilité.

 12   Donc si Pasalic avait pu, en jetant un coup d'œil par l'ouverture du blindé

 13   et en se fondant sur un tout segment de terrain, déterminer où il était,

 14   peut-être qu'il aurait pu le faire, moi, en tout cas, je ne pouvais pas le

 15   faire.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 4 heures moins 5, nous allons faire 20

 17   minutes de pause.

 18   M. STEWART : [interprétation] Il est vrai que j'aime bien être précis, vous

 19   l'avez dit déjà précédemment d'ailleurs, et je ne voudrais pas qu'il y ait

 20   de malentendu en ce qui concerne la traduction anglaise du document 11138,

 21   référence à la CIA. La CIA, on sait très bien ce que c'est, mais là je

 22   pense que ce n'est pas la même CIA dont on parle. Il est écrit que "les

 23   sources du HVO ont informé la CIA qui travaillait en ville." Donc je pense

 24   que c'est la compagnie A, donc ce n'est pas la CIA en fait, je tiens juste

 25   à le faire remarquer parce que dans ce document il est fait référence à

 26   cette CIA qui ne semblait pas être la CIA que nous connaissons.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison, Maître Stewart. J'avais noté dans

 28   la version anglaise, il y a le "CIA", mais dans la version espagnole, il y

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  1   a marqué "Al Cap." Donc j'ai pensé que c'était le capitaine de la

  2   compagnie.

  3   M. STEWART : [interprétation] Oui, je crois que "CIA" c'est en effet

  4   l'abréviation espagnol de "Compagnie". Donc je suis tout à fait d'accord

  5   avec votre interprétation.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, c'est clair pour tout le monde. Il est donc 4

  7   heures, nous allons faire 20 minutes de pause.

  8   --- L'audience est suspendue à 15 heures 57.

  9   --- L'audience est reprise à 16 heures 20.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 11   Monsieur Scott.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 13   Q.  Monsieur Filipovic, j'aimerais que nous passions maintenant au sujet de

 14   Sovici/Doljani. On vous a posé un certain nombre de questions à ce propos.

 15   Donc tout d'abord, veuillez trouver le document P01933. Il devait être dans

 16   le grand classeur. C'est la pièce P01933.

 17   Il s'agit d'un rapport du colonel Siljeg, 17 avril 1993. J'ai deux

 18   questions rapides à vous poser à ce propos. Tout d'abord : 

 19   "Du fait d'actions T-130…"

 20   Pourriez-vous nous dire ce que veut dire ce T-130 ?

 21   R.  Je ne sais pas exactement, mais ce que je peux imaginer c'est qu'il

 22   s'agit d'un TEP 130-millimètre, c'est-à-dire un canon. 

 23   Q.  Un peu plus bas, il y a une phrase :

 24   "Les forces de l'ABiH à Sovici ont été écrasées, un certain nombre de

 25   soldats et de civils s'enfuient de Sovici et d'autres se rendent."

 26   Vous êtes d'accord avec M. Siljeg. Il s'agissait bien de ce qui se

 27   passait à Sovici le 17 avril 1993 ?

 28   R.  Je ne peux répondre ni par oui ni par non.

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  1   Q.  Donc vous n'avez aucune raison de ne pas être d'accord avec les

  2   constatations faites par M. Siljeg dans ce document, n'est-ce pas ?

  3   R.  Je n'en ai pas, en effet.

  4   Q.  Nous avons vu la vidéo d'une réunion qui a eu lieu le 4 mai. Pouvez-

  5   vous nous dire à quel moment de la journée cette réunion a commencé ?

  6   C'était il y a très longtemps, je le sais, mais peut-être vous souvenez-

  7   vous de l'heure à laquelle la réunion a débuté et de l'heure à laquelle

  8   elle s'est terminé ?

  9   R.  Je peux supposer que la réunion a commencé vers 9 heures et demie, 10

 10   heures du matin, et qu'elle s'est terminée vers midi, midi et demi, puisque

 11   après nous étions censés partir dans trois directions différentes.

 12   Q.  Très bien. Pour que le compte rendu soit bien précis, j'aimerais savoir

 13   s'il s'agit du matin ou de l'après-midi, lorsque vous dites 9 heures 30, 10

 14   heures, c'est du matin, n'est-ce pas, jusqu'à midi et demi environ ?

 15   R.  Exact.

 16   Q.  En ce qui concerne le compte rendu, puisque nous n'avons pas eu la

 17   traduction en simultanée de la réunion lorsque nous avons vu ce clip, mais

 18   il y avait une transcription écrite. Et d'après cette transcription, on

 19   voit que lorsque M. Halilovic tend "la main de l'amitié" au HVO, cela

 20   soulève un certain nombre de questions : la détention d'un Musulman, les

 21   Musulmans chassés de leurs maisons, Mostar devant un centre de détention.

 22   Il voudrait que M. Petkovic réponde à ses questions lorsqu'il lui tend la

 23   main; c'est bien cela ?

 24   R.  Ce qu'a dit Sefer est exact et ce qu'a dit Petkovic est exact.

 25   Q.  Mais n'êtes-vous pas d'accord avec moi lorsque je dis qu'étant donné

 26   les griefs qu'avaient M. Halilovic et M. Pasalic ce jour-là, ils avaient

 27   quand même des raisons de ne pas être très contents, c'est le moins qu'on

 28   puisse dire ?

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  1   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la réunion de Jablanica a

  2   fait suite à une dizaine de jours de réunions très intensivement menées en

  3   Bosnie centrale, et nous avons aussi eu des réunions --

  4   Q.  Je n'ai pas beaucoup de temps, Monsieur le Témoin. M. Pasalic et M.

  5   Halilovic avaient des raisons de ne pas être très contents, oui ou non ?

  6   R.  Je ne vais pas témoigner ici en répondant par oui ou par non. Je n'ai

  7   pas consacré tout le temps que j'ai consacré à cela pour -- enfin, moi je

  8   vous parle de ce qui s'est passé.

  9   A cette réunion, ce qui m'a frappé, moi, c'est l'approche de M. Sefer et de

 10   M. Arif Pasalic --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous devez répondre aux

 12   questions du Procureur. On est dans une procédure où il a le droit de vous

 13   donner son point de vue en disant que cette réunion s'est passée mal, bon.

 14   C'est son point de vue. Vous, vous lui dites : oui, non. Et à ce moment-là,

 15   s'il veut savoir pourquoi vous n'êtes pas d'accord avec lui, il vous dit :

 16   "Why" et puis ainsi de suite. C'est lui qui mène l'interrogatoire.

 17   L'avocate a dû vous l'expliquer.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il m'a demandé et il a

 19   affirmé qu'Arif Pasalic et Sefer avaient des raisons de réagir comme cela.

 20   Moi je ne sais pas s'ils avaient des raisons. Je n'étais pas au courant. Ce

 21   que je m'efforce de dire simplement, c'est que ce qui m'a frappé, ce qui

 22   m'a paru frappant, ce sont les interventions de ces deux hommes durant la

 23   réunion qui étaient différentes de tout ce qui s'était dit avant.

 24   M. SCOTT : [interprétation]

 25   Q.  Bon, la réponse c'est que vous ne savez pas.

 26   Cela dit, lors de cette réunion, M. Pasalic s'est plaint du fait que le HVO

 27   avait arrêté 14 de ses soldats, des soldats de M. Pasalic, la veille. Et il

 28   a abordé la question avec M. Petkovic, et M. Petkovic dit à la page 11 du

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  1   compte rendu de cette réunion :

  2   "Donne-moi la liste de ces 14 qui ont été arrêtés et ils seront libérés ce

  3   soir, dès que je rentre à Mostar."

  4   Ensuite, Mme Alaburic, une fois avoir vu la vidéo, vous a demandé la chose

  5   suivante :

  6   "Le général Petkovic était-il prêt à coopérer et qu'elle était votre

  7   impression, d'après vous, est-ce qu'il voulait coopérer ?

  8   Vous avez répondu : "Nous voulions, nous voulions tous de notre côté

  9   que ça se fasse."

 10   Donc, M. Petkovic semble dire qu'il va s'occuper immédiatement de

 11   libérer ces 14 hommes qui viennent d'être arrêtés par le HVO, donc

 12   j'aimerais maintenant que vous regardiez la pièce P02182.

 13   Il s'agit d'un ordre de M. Petkovic envoyé à Stipe Polo le 4 mai

 14   1993, à 22 heures, c'est écrit en haut, c'est manuscrit en haut de ce

 15   document.

 16   Il s'agit du même Polo que celui auquel vous avez fait référence en

 17   ce qui concerne les informations que vous déteniez à propos des événements

 18   de Sovici/Doljani; c'est la même source ce Stipe Pole ?

 19   R.  Exact.  

 20   Q.  Très bien. Donc ici, M. Petkovic donne l'ordre suivant à M. Pole :

 21   "Libérez tous civils détenus à Doljani et Sovici, mais gardez les hommes

 22   aptes au service militaire."

 23   Je vais prendre ces éléments en ordre inverse.

 24   Lorsque vous avez collecté des informations, vous avez parlé de M.

 25   Polo et à d'autres personnes, avez-vous obtenu ces informations selon

 26   lesquelles c'était M. Petkovic qui avait ordonné que tous les hommes

 27   musulmans soient détenus ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  A votre connaissance, savez-vous si des efforts ont été faits pour

  2   arriver à faire la différence, parmi les hommes musulmans, entre ceux qui

  3   avaient été engagés au combat et ceux qui ne l'avaient pas été ?

  4   R.  Je n'ai pas de connaissance de cas où la différence a été faite.

  5   Q.  Nous sommes ici le 4 mai 1993. Maintenant, revenons à un sujet que nous

  6   avons abordé précédemment. C'est après le cessez-le-feu en date du 20 avril

  7   1993 et après la déclaration conjointe de Boban et d'Izetbegovic du 25

  8   avril, où normalement il était censé y avoir la paix et vos armées étaient

  9   censées travailler et combattre conjointement. Pourquoi M. Petkovic aurait-

 10   il ordonné que l'on garde les hommes musulmans en détention ? Il y avait la

 11   paix. Vous étiez maintenant dans le même camp. Alors, pourquoi détenir les

 12   Musulmans ?

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur Scott. Je

 14   suis un peu perdu.

 15   J'ai ici un document où M. Petkovic ordonne la libération. Or, je ne vois

 16   pas l'ordre de détention.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Oui. Il y est écrit après le mot "Sovici", il

 18   est écrit :

 19   "… continuer à détenir les hommes aptes au service militaire." "Keep" en

 20   anglais.

 21   Est-ce que cela vous aide ?

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je vois.

 23   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] En fait, on ordonne qu'ils "restent

 25   en détention," c'est un peu équivoque, mais j'ai compris. Merci.

 26   M. SCOTT : [interprétation]

 27   Q.  Pourquoi vouliez-vous continuer à détenir des hommes musulmans le 4 mai

 28   ?

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  2   je prierais simplement M. Scott d'être très précis, car ici il est très

  3   précisément question des hommes en âge de porter les armes, et pas d'hommes

  4   d'appartenance ethnique musulmane. Donc soyons, je vous prie, très précis.

  5   M. SCOTT : [interprétation] Cette intervention était inutile. Le document

  6   est très clair : "Garder les hommes aptes au service militaire," et ça ne

  7   change rien à ma question.

  8   Q.  Parce qu'ici il y a un cessez-le-feu, et vous dites que le HVO fait

  9   partie licitement des forces armées de l'ABiH, Nous sommes du même côté.

 10   Pourquoi continuer à détenir les Musulmans quels qu'ils soient, comme l'a

 11   ordonné le général Petkovic ?

 12   R.  J'ai déjà répondu. J'ai dit que je ne connaissais pas la pratique

 13   consistant à garder. Je ne sais pas si ce document est authentique. Je ne

 14   sais pas pourquoi les hommes en âge de porter les armes auraient été

 15   séparés des autres.

 16   Q.  Mais prenons la première partie : "Relâcher tous les civils détenus à

 17   Doljani et à Sovici…" Pourquoi avaient-ils été placés en détention ces

 18   civils, le savez-vous ?

 19   R.  Monsieur le Président, comme je viens de le dire, je ne sais rien

 20   concernant Sovici et Doljani, sauf sur la base des discussions qui ont eu

 21   lieu à Jablanica.

 22   Q.  Mais c'est précisément ce que je fais valoir, et c'est pour cela que

 23   j'ai fait objection pendant l'interrogatoire principal. Vous déposez sur

 24   des choses et vous ne savez strictement rien. Vous ne savez pas du tout ce

 25   qui s'est passé à Sovici et à Doljani ?

 26   Vous --

 27   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, inutile d'intervenir. Le témoin ne

 28   peut pas comme ça gagner sur tous les tableaux. Il ne peut dire, Je ne sais

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  1   rien, mais je peux témoigner à propos de Sovici et Doljani.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas

  3   pourquoi M. Scott a l'air de perdre patience concernant ce contre-

  4   interrogatoire. Le témoin a dit clairement qu'il ne savait rien au sujet

  5   des événements de Sovici et Doljani. Il a dit qu'il était au courant de

  6   l'accord concernant l'évacuation des gens de Sovici et Doljani et il a dit

  7   qu'il était au courant du fait qu'ils allaient à Gornji Vakuf, ensuite à

  8   Jablanica. Mais c'est un sujet différent. Ça ne veut pas dire que le témoin

  9   sait ce qui se passait là-bas, qui était détenu, et cetera.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, laissons le général Filipovic

 11   répondre. Il est assez capable de comprendre une question et de répondre.

 12   On perd du temps pour des objections qui n'ont aucun intérêt. Le Procureur

 13   lui demande pourquoi dans ce document il y a des civils qui ont été

 14   détenus. Bon, le témoin peut dire, Je n'y étais pas, je n'en sais rien,

 15   puis il peut lui poser une question en disant, Etait-ce normal que des

 16   civils soient détenus ? Puis, il dira, Oui, Non.

 17   Monsieur Scott, continuez.

 18   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne Sovici et Doljani, je sais

 20   ce qui a fait l'objet de mes conversations avec Biskit [phon], Ola, Zuka et

 21   Nihad.

 22   M. SCOTT : [interprétation]

 23   Q.  Mais est-ce que vous savez que ce Tribunal a spécifiquement rejeté

 24   cette description, que ce n'était pas une évacuation ?

 25   R.  Non.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, qu'on soit clairs.

 27   Quelle est la Chambre qui a réfuté cela ? Car en croate, nous avons entendu

 28   que c'était "cette Chambre-là".

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  1   M. SCOTT : [interprétation] Le cas de Tuta Stela.

  2   Q.  Est-ce que vous êtes au courant de cela, Monsieur le

  3   Témoin ?

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Donc aucune autre Chambre ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  6   M. SCOTT : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez dit que vous avez participé à l'organisation des autocars qui

  8   étaient venus. Qu'est-ce que vous avez pris comme disposition pour veiller

  9   à ce que ces véhicules arrivent à Sovici ? Qui avez-vous contacté ? Quelles

 10   dispositions avez-vous prises ?

 11   R.  J'ai vérifié si les cars avaient été envoyés à Sovici et Doljani.

 12   Q.  Je n'ai pas demandé ce que vous aviez vérifié. Je vous ai demandé ce

 13   que vous aviez fait pour prendre les dispositions pour que ces véhicules

 14   viennent ? Vous avez parlé à Slobodan Bozic, n'est-ce pas ?

 15   R.  J'ai parlé avec quelqu'un à l'état-major principal. Je ne sais pas si

 16   c'était l'officier de service ou quelqu'un d'autre.

 17   Q.  D'où venaient ces véhicules ?

 18   R.  Je ne le sais pas non plus.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai écouté de manière très

 20   attentive votre réponse, qui est importante, mais pour une autre raison,

 21   qui est Mostar.

 22   Le Procureur vous demande combien avez-vous fait pour envoyer les bus, et

 23   vous dites, J'ai appelé quelqu'un au quartier général. Ce qui veut dire que

 24   quand il y avait ce type de problème logistique où il faut envoyer des bus

 25   avec des chauffeurs, il faut que les bus aient de l'essence, qu'ils savent

 26   où aller, et cetera. D'après vous, c'est l'état-major qui organise tout

 27   cela ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, l'état-major, car Petkovic a dit, Vérifie

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  1   si les cars ont été envoyés à Sovici et Doljani, et je ne sais pas d'où non

  2   plus. Donc moi, à ce moment-là, je ne pouvais pas savoir d'où les cars

  3   avaient été envoyés et qui les avait organisés, mais apparemment c'était

  4   l'état-major principal.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, le général Petkovic vous demande de vérifier

  6   si les cars ont été envoyés ? Donc il ne vous demande pas à vous de vous

  7   organiser, de régler le problème; il vous demande de vérifier simplement ?

  8   Ce qui veut dire que quelqu'un d'autre a organisé la question relative aux

  9   cars. Vous, vous n'avez que vérifié ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Imaginons que vous avez un problème de transport de

 12   civils à votre niveau, il faut évacuer des civils. A qui faut-il s'adresser

 13   pour les évacuer ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement aux autorités civiles, car

 15   l'état-major principal, je ne sais pas s'il disposait des cars. Donc

 16   c'étaient les autorités civiles qui étaient censées organiser cela.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais dans le cas d'espèce de Sovici et

 18   Doljani, pourquoi c'est l'état-major qui s'en occupe, et pas les autorités

 19   civiles ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que Sefer, conformément à ce que vous

 21   avez vu dans le film, et Petkovic parlaient, ils se mettaient d'accord, et

 22   je ne sais pas pourquoi l'état-major principal, ou plutôt, Petkovic s'en

 23   occupait. Je suppose que ceci était fait suite à la demande de Sefer.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Mes questions sont très importantes, comme vous

 25   imaginez. Je ne pose pas une question comme ça. Quand je pose une question,

 26   c'est qu'il y a une importance. Je ne gaspille pas mon temps.

 27   Quand on évacue des civils, il peut y avoir des problèmes liés à leur état

 28   de santé, à la nourriture. Est-ce que cet environnement ne doit pas être

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  1   pris en charge par la protection civile ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est possible, c'était la protection civile

  3   qui devait s'en occuper, mais le HVO était toujours censé être impliqué

  4   pour que le tout se déroule sans problème.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, j'en reviens à Sovici et Doljani. Imaginons

  6   que le général Petkovic apprend qu'à l'issue des combats, il y a des civils

  7   qu'il faut faire partir, parce qu'il y a des problèmes, soit pour les

  8   protéger, soit pour toutes autres raisons. Est-ce qu'il n'aurait pas dû,

  9   lui, demander à la protection civile de s'occuper de ce problème ? Pourquoi

 10   il s'en est occupé, lui ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas s'il s'en occupait ou pas. Il

 12   m'a dit à moi, Vérifie si les cars sont partis, s'ils sont allés à Sovici

 13   et Doljani. C'est ce que je sais. Quant à la question de savoir qui l'a

 14   organisé, je ne sais pas.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il faut retenir de tout ce que vous nous dites

 16   que vous, vous avez simplement vérifié, et tout le reste vous échappe.

 17   Bien.

 18   Monsieur Scott.

 19   M. SCOTT : [interprétation]

 20   Q.  Un instant pour parler de la discipline militaire. Lorsque vous avez

 21   déposé dans le procès Kordic, vous avez dit que les commandants du HVO

 22   avaient le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires à divers niveaux

 23   contre leurs subordonnés ?

 24   R.  Ils avaient des autorisations sur papier, le règlement ou un autre

 25   document, mais au fond, ils avaient très peu de marge de manœuvre, sauf si

 26   l'erreur était importante, dans ce cas-là, il y avait une prison à Busovaca

 27   où ils étaient envoyés.

 28   Q.  Mais ceux qui font partie de la voie hiérarchique participent à des

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  1   enquêtes de mesures disciplinaires, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Vous avez dit notamment ceci auparavant -- non, plus exactement ce que

  4   M. Petkovic a dit lorsqu'il a déposé dans le procès Blaskic, il a dit qu'un

  5   commandant peut notamment placer en détention un subordonné à concurrence

  6   de 15 jours, n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact, mais la question qui se pose, c'est de savoir où

  8   l'emprisonner.

  9   Q.  Petkovic, dans le procès Blaskic, a également déclaré que le colonel

 10   Blaskic avait le pouvoir de punir tout officier ou soldat du HVO qui aurait

 11   commis des crimes à Ahmici. Seriez-vous d'accord avec M. Petkovic pour dire

 12   que Blaskic avait cette autorité, ce pouvoir ?

 13   R.  Le crime à Ahmici dépassait le niveau où l'on plaçait les soldats en

 14   détention. Ce crime a eu lieu après une opération de combat. Personne ne

 15   nie ce combat, mais le crime dépassait les mesures prévues telles que 15

 16   jours de détention, et ainsi de suite.

 17   Q.  Ce n'était pas tout à fait la question que je vous posais, parce que je

 18   vous donne ici les dires de M. Petkovic dans le procès Blaskic, notamment à

 19   la page du compte rendu 24 166 :

 20   "Blaskic avait le pouvoir de punir tout officier ou soldat du HVO qui

 21   aurait participé à des crimes ou à des exactions à Ahmici."

 22   Etes-vous d'accord ou en désaccord avec ce que dit à ce moment-là M.

 23   Petkovic ?

 24   R.  Blaskic était autorisé à placer un soldat ou un officier en détention.

 25   Q.  En réponse à une de mes questions à propos d'Ahmici, vous avez dit que

 26   Blaskic avait ce pouvoir. D'ailleurs, auparavant, ici dans ce Tribunal,

 27   dans le procès Kordic, vous avez dit que vraiment vous avez assez minimisé

 28   les crimes d'Ahmici ? Vous avez dit ce qui s'est passé à Ahmici, tout ça,

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  1   ce n'était pas très important. Ça n'est devenu important que quelques

  2   années plus tard. Vous avez dit que cette impression qui avait été créée

  3   avait été "orchestrée ou montée de toutes pièces." C'est bien ce que vous

  4   avez dit en tant que témoin dans le procès Kordic ?

  5   R.  J'ai dit qu'au cours des premiers jours après Ahmici ou Santici, ce

  6   n'était pas le cas, car lors de toutes les réunions à partir du 20 et par

  7   la suite, la question d'Ahmici ou Santici ne se posait plus, mais je n'ai

  8   pas dit que c'était au bout de plusieurs années.

  9   Q.  Et à la page 17 054 et page suivante, vous avez dit ceci à  propos

 10   d'Ahmici dans le procès Kordic : ce n'était pas quelque chose de spécial,

 11   ce n'était que plus tard en 1994-1995, et vous dites qu'en fait, on avait

 12   un peu monté ça de toutes pièces et on voulait donner une impression

 13   absolument artificielle. C'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas, à propos

 14   d'Ahmici dans le procès Kordic ?

 15   R.  J'ai dit à l'époque et je le redis aujourd'hui, au cours des premières

 16   journées ou pendant le premier mois, il faut savoir que j'étais non-stop en

 17   contact avec les commandants de l'ABiH. J'étais avec eux, j'avais passé

 18   deux nuits à Konjic et deux nuits à Zenica au sein du commandement

 19   conjoint. Personne ne posait la question d'Ahmici ou d'Ahmici ou Santici.

 20   Et dans ce sens-là, c'est seulement suite à la visite de Mazowiecki à

 21   Ahmici, seulement lorsque l'on a vu  à travers le monde, le minaret de la

 22   mosquée qui avait été détruit, c'est seulement à ce moment-là que les

 23   événements d'Ahmici sont devenus quelque chose de semblable à Srebrenica.

 24   Q.  Dans le procès Kordic, vous avez dit que c'est seulement en 1994 ou en

 25   1995 que cette controverse à propos d'Ahmici a été -- là, je reprends vos

 26   termes, a été orchestrée, a été vraiment une histoire montée de toutes

 27   pièces.

 28   R.  Après que cette image a été répandue concernant Ahmici, tous les

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  1   éléments positifs que j'avais intégrés dans la défense sont tombés dans

  2   l'eau, car on était tous traités comme des criminels. C'était le cas à

  3   l'époque et maintenant.

  4   Q.  Vous ne répondez pas à ma question, mais je n'ai pas le temps

  5   d'insister.

  6   Et d'ailleurs, vous n'avez mené d'enquête sur aucun crime de guerre

  7   pendant le temps où vous avez été commandant. Vous n'avez pas donné

  8   d'instruction pour qu'on mène des enquêtes, et vous, vous-même, n'avez pas

  9   participé à des enquêtes sur des crimes de guerre, n'est-ce pas ?

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Objection.

 11   Il faut d'abord demander au témoin s'il avait le pouvoir de

 12   diligenter des enquêtes judiciaires et criminelles, et puis en fonction de

 13   la réponse qu'il donnera, on peut lui demander s'il a effectivement mené

 14   des enquêtes.

 15   M. SCOTT : [interprétation]

 16   Q.  Vous n'avez pas mené d'enquêtes sur des crimes de guerre, vous

 17   l'avez dit dans le procès Kordic, vous avez répondu : 

 18   "Non, je n'ai pas mené d'enquêtes sur des crimes de guerre."

 19   C'est ce que vous avez déclaré dans le procès Kordic, n'est-ce pas ?

 20   Page 17 239.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je me rallie à

 22   l'objection de mon collègue et je souhaite que M. Scott nous dise tout

 23   d'abord où il est écrit qu'un commandant militaire est censé lancer des

 24   enquêtes afin d'entamer une procédure judiciaire. Si l'on constate que les

 25   fonctions de M. Filipovic correspondaient à cela, il faut lui poser cette

 26   question.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour que tout le monde soit bien clair, parce que le

 28   Procureur tout à l'heure vous a dit qu'on n'avait pas puni. J'ai vu qu'il y

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  1   avait un problème et j'attendais le moment pour vous poser la question,

  2   mais les avocats ont fait des objections. Alors moi, je ne parle pas

  3   d'Ahmici, je parle d'un cas théorique.

  4   Vous êtes commandant d'une unité, et il y a un crime qui se commet. Vous

  5   êtes informé du fait que le soldat X a, par exemple, brûlé une maison, volé

  6   l'argent, tué les habitants de la maison, et vous le savez. Dites-moi,

  7   qu'est-ce que la réglementation de la JNA à l'époque prévoyait et celle du

  8   HVO ? Que doit faire le commandant militaire ? Voilà, c'est très clair. Que

  9   devez-vous faire ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, en ce qui concerne la

 11   JNA, il n'y a pas de dilemme. Il y avait le système d'Etat, les tribunaux

 12   qui étaient derrière la JNA. Concernant le HVO, notamment de la région de

 13   la Bosnie centrale, aucun tribunal ne fonctionnait. Il n'était pas possible

 14   de l'organiser car chacun disposait d'un fusil automatique, il suffisait de

 15   tirer pour que vous receviez 30 balles. Donc l'on exige que je dise si j'ai

 16   lancé des enquêtes, et cetera. Mais tout d'abord --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Ma question est ultra précise. Elle ne peut pas être

 18   plus précise. Alors je vais l'affiner.

 19   Vous êtes à Travnik, vous apprenez qu'un de vos soldats a brûlé une maison,

 20   volé l'argent, tué les habitants de la prison. Qu'est-ce que vous faites ?

 21   C'est très clair, qu'est-ce que vous faites ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je devais prendre des mesures afin que ceci ne

 23   se répète pas. Un soldat était emprisonné en raison du fait qu'il avait tué

 24   un soldat du HVO, il a été emprisonné à Travnik. Le lendemain, le frère de

 25   la personne tuée a tué le prisonnier dans la prison. Donc je dis cela pour

 26   illustrer avec l'image ce qui se passait. Il faut que tout un système

 27   existe et soit mis en place pour permettre au commandant de prendre des

 28   mesures appropriées.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie pour l'exemple du frère, parce que

  2   pour vous ça a été un cas concret. Mais prenons un autre exemple.

  3   J'en reviens toujours à mon exemple. Un soldat brûle une maison, vole

  4   et tue les habitants. Quelles sont les mesures que vous devez prendre, les

  5   mesures immédiates, que devez-vous faire ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je devrais arrêter ce soldat, l'incarcérer, le

  7   désarmer et le remettre aux organes chargés de l'enquête. Voilà.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous voyez, c'est très précis. Vous devez

  9   l'arrêter, le désarmer et le remettre aux organes chargés de l'enquête. Et

 10   quels sont les organes chargés de l'enquête ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça devrait être un tribunal, ou le juste

 12   d'instruction, tout un système. Or tout ceci n'existait pas.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Normalement, vous devez le remettre au juge

 14   d'instruction et au tribunal, mais vous dites que tout ceci n'existait pas,

 15   à Travnik ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'ensemble de la zone opérationnelle de

 17   la Bosnie centrale.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voyez que c'est facile de répondre à des

 19   questions précises. C'est tout ce que j'ai besoin moi.

 20   Monsieur Scott.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Prenez s'il vous plaît la pièce P11128, 11128.

 23   Madame l'Huissière, vous pourriez aider le témoin. Madame l'Huissière.

 24   Pendant que Mme l'Huissière vous aide, je vous demande ceci : en avril

 25   1994, vous étiez commandant de la zone opérationnelle de Bosnie centrale,

 26   peut-être que ça s'appelait à l'époque la région militaire de Vitez; c'est

 27   bien cela ?

 28   R.  La zone opérationnelle de Vitez.

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  1   Q.  Est-il exact de dire qu'en avril 1994, M. Petkovic était redevenu à

  2   cette date-là, le chef du HVO militaire, donc il occupait le poste numéro

  3   1, disons ?

  4   R.  Je le suppose.

  5   Q.  Lorsque vous êtes devenu chef de la zone opérationnelle de Bosnie

  6   centrale, le colonel Blaskic était passé en Herzégovine, quel poste

  7   occupait-il en Herzégovine; le savez-vous ?

  8   R.  Blaskic est allé remplacer Petkovic, et moi, j'ai remplacé Blaskic.

  9   Q.  Ce qui veut dire qu'à la date du mois d'avril 1994, M. Petkovic était

 10   redevenu le chef du HVO militaire, le numéro 1, M. Blaskic était le numéro

 11   2, et vous, vous étiez chef de la région militaire de Bosnie centrale; est-

 12   ce exact ?

 13   R.  Lorsque Blaskic a pris ces fonctions, avant lui c'était Petkovic, mais

 14   lorsque Blaskic a repris ces fonctions, c'était lui le commandant.

 15   Q.  Très bien. Je n'ai pas assez de temps, malheureusement, pour rentrer

 16   dans les détails.

 17   Veuillez maintenant regarder la pièce P 11128. Il s'agit d'un rapport de la

 18   FORPRONU. La page qui nous intéresse, c'est la page 3, point numéro 16,

 19   "secteur sud-ouest." Il est écrit, et je cite :

 20   "Le commandant de la zone, Filip Filipovic, a été promu depuis le rang de

 21   colonel au rang de général de brigade."

 22   Vous souvenez-vous à quel moment vous avez été promu général de brigade ?

 23   R.  C'était au mois de mai 1994.

 24   Q.  Veuillez maintenant, s'il vous plaît, regarder la pièce 11129.

 25   Au même moment que lorsque vous avez été promu général de brigade, M. Ivica

 26   Rajic a aussi été promu au même grade, M. Kordic lui aussi, et M. Nakic au

 27   même grade ?

 28   R.  Je le sais avec certitude pour Nakic, de même que pour Kordic. Ivo

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  1   Lozancic et je suppose Ivica Rajic aussi, ça s'est fait le même jour.

  2   Q.  Etiez-vous surpris que l'on fasse de Kordic un général de brigade,

  3   alors que vous avez dit à de nombreuses reprises que Kordic n'était pas un

  4   militaire, il n'avait pas joué de rôle militaire, il n'était pas impliqué

  5   dans tout cela ?

  6   R.  Un grade peut être accordé afin de commander les unités, mais aussi

  7   afin de gérer d'autres éléments de l'organisation à laquelle il appartient.

  8   Par exemple, en 1992, Lucic, à Kiseljak, a reçu le grade du colonel

  9   simplement en raison du fait qu'il était censé commander la défense, alors

 10   qu'il n'avait pas d'unité qu'il commandait.

 11   Mme NOZICA : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait dire quel est

 12   le prénom de ce Lucic, qui est cette personne ? A mon avis, c'est important

 13   que faisait ce Lucic à Kiseljak. Est-ce que mon collègue pourrait lui poser

 14   cette question ?

 15   M. SCOTT : [interprétation] Non, pas sur mon temps à moi.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi cher collègue, mais moi je n'ai

 18   plus de temps, c'est pour cela que j'ai pris la parole, je sais de qui il

 19   s'agit, et c'est la raison pour laquelle j'ai pris la parole.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Quel était son prénom, si vous le savez ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Lucic. Je ne me souviens pas maintenant. Je le

 22   connais très bien, et il est originaire de Kiseljak. Lucic.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est tout ce que vous pouvez nous dire.

 24   Dans le document, on voit que vous avez signé après M. Ivica Rajic, qui

 25   devient général, comme vous ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, à ce moment-là, il ne

 27   s'agissait pas d'un grade de général. Je suis devenu général de brigade

 28   seulement en février 1995. Donc c'est le grade de brigadier, c'est le grade

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  1   le plus élevé chez les officiers, sauf pour ce qui est du général.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Votre question a été mal traduite vers la

  3   langue croate comme s'il s'agissait du grade du général. C'est la raison

  4   pour laquelle le témoin a fourni cette réponse.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  6   M. SCOTT : [interprétation]

  7   Q.  Le général de brigade, c'est le deuxième grade dans le HVO; au-dessus,

  8   il y a un autre grade de général et ça ne peut pas aller plus haut, n'est-

  9   ce pas ?

 10   R.  Exact.

 11   Q.  Etiez-vous surpris qu'Ivica Rajic soit promu à ce grade très élevé du

 12   HVO, au vu de ses accomplissements ?

 13   R.  A ce moment-là, il était commandant d'un groupe opérationnel, ou plutôt

 14   tactique, comme Ivo Lozancic --

 15   Q.  Il était sous vos ordres, n'est-ce pas, lorsque vous étiez commandant

 16   adjoint de la zone opérationnelle de Bosnie centrale, donc le deuxième

 17   semestre 1993, et il était aussi sous vos ordres lorsque vous êtes devenu

 18   commandant de cette zone opérationnelle de Bosnie centrale ?

 19   R.  Quand je suis devenu commandant, Rajic n'était plus à Kiseljak.

 20   Q.  Il était sous votre commandement ?

 21   R.  Il était sous mon commandement pendant le temps où j'étais numéro 2 de

 22   la région militaire, la région de conscription.

 23   Q.  Le connaissiez-vous sous le nom d'Ivica Rajic ou sur le nom de Viktor

 24   Andric ?

 25   R.  Après l'accord de Washington, à partir du moment où j'ai pu me rendre à

 26   Kiseljak, j'ai constaté que le commandant de la brigade Mijo -- Mijo --

 27   Q.  Vous ne répondez pas à ma question. Je ne sais pas pourquoi vous ne

 28   voulez pas répondre à ma question, je ne sais pas du tout pourquoi, mais en

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  1   tout cas vous n'avez pas répondu à ma question.

  2   Donc cet homme a été promu au rang de général de brigade le même jour que

  3   vous, cet Ivica Rajic. Le connaissiez-vous à ce moment-là sous son nom

  4   d'Ivica Rajic ou sous son nom de Viktor Andric ?

  5   R.  Je l'ai toujours connu sous le nom d'Ivica Rajic.

  6   Q.  Vous étiez commandant adjoint à la fin octobre 1993, et vous saviez

  7   qu'à Stupni Do il y avait des atrocités épouvantables et vous saviez quand

  8   même qu'Ivica Rajic était le suspect numéro 1 dans cette affaire, n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Non. Ça, je l'ai appris après la guerre.

 11   Q.  Jetons un œil sur la pièce P 06182.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, il vous reste cinq minutes.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   Q.  Il s'agit d'un communiqué de presse de la FORPRONU en date du 27

 15   octobre qui fait rapport des massacres de Stupni Do. Il est aussi rapporté

 16   que la FORPRONU n'a pas pu rentrer dans Stupni Do et que c'est le HVO qui

 17   l'a empêchée de rentrer pendant trois jours dans le village. Nous avons

 18   entendu beaucoup parler de Stupni Do. Nous savons que ces événements ont

 19   été relayés dans le monde entier, à New York, aux Nations Unies, dans

 20   toutes les capitales d'Europe, en peu de jours. Donc c'est quelque chose

 21   qui s'est passé dans votre zone. Vous étiez adjoint du commandant, donc

 22   vous ne pouvez pas ne pas être au courant de cette controverse qui a eu

 23   lieu dans votre zone de responsabilité, n'est-ce pas ?

 24   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'affirme que je ne savais

 25   pas et que je ne pouvais pas savoir. Quant au fait de savoir si New York le

 26   savait, moi, je sais que pour Ahmici aussi le monde entier a été au courant

 27   au moment où ça s'est produit, alors que je ne le savais pas.

 28   Q.  Passons à la pièce P 07394. Il s'agit d'un ordre du général Blaskic, 30

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  1   décembre 1993, par lequel il démet Ivica Rajic de ses fonctions. Les motifs

  2   exposés par le colonel Blaskic sont les suivants, je cite :

  3   "Le colonel Rajic est démis de ses fonctions suite à une série de

  4   faiblesses de commandement et de contrôle et à une mauvaise influence

  5   irresponsable sur ses unités lors des opérations de combat."

  6   Donc ce document a été envoyé à l'état-major principal du HVO, au ministère

  7   de la Défense du HVO, et cetera, et cetera.

  8   Gardons à l'esprit ce document, et passons maintenant au document P 09981.

  9   Il s'agit d'un document du 5 novembre 1993, toujours du même Blaskic,

 10   recommandant à M. Rajic :

 11   "Votre attitude militaire concernant vos missions et la contribution énorme

 12   que vous avez apportée à l'organisation de la défense et au salut des

 13   Croates de Vares ont été une inspiration immense pour nous tous."

 14   Donc le 5 novembre, Blaskic loue Ivica Rajic pour l'excellence de son art

 15   militaire, l'organisation des forces militaires pour avoir contribué à ceci

 16   et cela, pour être une inspiration à tous. Et plusieurs semaines après, on

 17   a ce même colonel Blaskic qui démet de ses fonctions exactement le même

 18   homme pour des motifs de faiblesses de commandement et de contrôle et d'une

 19   mauvaise influence qu'il pourrait avoir sur ses unités. Alors, quelle est

 20   la bonne version ?

 21   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, au moment dont nous

 22   parlons, nous n'avions pas de communication avec Kiseljak. Il y avait 12

 23   kilomètres de ce secteur qui était contrôlé par l'ABiH. Blaskic a, deux ou

 24   trois fois, pris un hélicoptère à partir de la vallée de la Lasva pour se

 25   rendre dans le sud. Il a pu apprendre la vérité ou je ne sais quoi d'autre.

 26   Moi, je ne pouvais pas l'apprendre.

 27   Q.  J'ai presque fini, Monsieur le Président. Veuillez, s'il vous plaît,

 28   Monsieur le Témoin, vous penchez sur la pièce P 07401.

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  1   Il s'agit d'un ordre du même colonel Blaskic, ordre qui a été écrit

  2   exactement le même jour que l'un des deux que je vous ai montrés

  3   précédemment, donc le 30 décembre 1993, nommant le colonel Viktor Andric en

  4   tant que commandant du poste de commandement avancé de la région militaire

  5   de Vitez. Voici ce que je vous affirme, c'est un ordre qui se fait sous

  6   votre nez; vous êtes commandant adjoint de cette zone opérationnelle et

  7   quelqu'un -- vous êtes dans l'hôtel Vitez à quelques mètres du bureau de M.

  8   Blaskic où les ordres étaient préparés. Donc vous étiez quand même

  9   commandant adjoint de cette zone opérationnelle et vous deviez être au

 10   courant de ce subterfuge. Vous saviez très bien que Viktor Andric et Ivica

 11   Rajic étaient la seule et même personne, n'est-ce pas ?

 12   R.  Monsieur le Président, le village de Krizancevo est à 15 minutes de

 13   distance du commandement de la zone de conscription. Et pendant ces

 14   journées de Noël 1993, parce que c'était Noël et il s'est passé beaucoup de

 15   choses, et on me montre maintenant un document dans lequel il est dit que

 16   j'aurais dû être au courant. Je n'avais rien à voir avec tous ces

 17   documents. Je n'étais pas un soldat maniant des documents. Ce que je

 18   savais, c'étaient des choses concrètes. Donc quand je dis que je ne savais

 19   pas, je ne mens pas. Je dis que je ne sais pas.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Une dernière pièce, s'il vous plaît, la pièce P

 21   07840, Monsieur le Président.

 22   Q.  [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- parce que le temps est expiré.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Il s'agit de mon dernier document. Il s'agit

 25   donc de la pièce P 07840, et j'ai deux questions à poser à propos de cette

 26   pièce. Après, j'en aurai terminé. Je vous remercie.

 27   Q.  Il s'agit d'un rapport du Conseil de sécurité en date du 10 février

 28   1994, donc bien avant que l'on nomme M. Rajic général de brigade.

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  1   Au paragraphe 12 de ce rapport du Conseil de sécurité, deuxième moitié du

  2   paragraphe, M. Ivica Rajic est décrit comme étant le suspect numéro 1. Et

  3   c'est un fait connu de tous dans le monde entier. Il s'agit du Conseil de

  4   sécurité des Nations Unies. Voici ce que je vous affirme, dans le document

  5   11129, lorsqu'il y a eu cette promotion de M. Rajic, vous saviez

  6   extrêmement bien que M. Ivica Rajic était Viktor Andric, vous connaissiez

  7   toute l'histoire, n'est-ce pas ?

  8   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne savais pas, je ne

  9   pouvais pas savoir, et je ne sais absolument pas pour quelle raison M.

 10   Ivica Rajic a été mis en accusation. Je ne sais pas s'il était à Stupni Do,

 11   je ne sais rien en rapport avec cela. Je demande et j'exige que l'on tienne

 12   compte de ce que j'ai dit. Quand je dis que je ne sais pas, c'est que je ne

 13   savais pas.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions, Monsieur le

 15   Président.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   Maître Alaburic, vous avez la parole pour les questions supplémentaires.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je proposerais que

 19   l'on fasse une pause. Je vous demande de bien vouloir faire droit à ma

 20   requête de façon à ce que je puisse m'organiser et commencer mes questions

 21   supplémentaires de la façon la plus efficace qu'il soit.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez envisagé combien de temps pour les

 23   questions supplémentaires ? Autant précisé que tout le temps que vous allez

 24   prendre sera réduit de votre capital temps.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, à l'instant,

 26   j'évalue la situation comme étant la suivante, je pense pouvoir faire tout

 27   ce qu'il est indispensable que je fasse en une heure environ. J'espère que

 28   vous accepterez, mais si vous vous incluez dans la discussion sur des

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  1   documents et certaines questions, cela signifie que nous pourrions discuter

  2   avec ce témoin jusqu'à la fin de la journée d'aujourd'hui à peu près. Mais

  3   je pense que nous pourrions faire la pause maintenant.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Parce que si ça avait été moins, il aurait

  5   plus sage de terminer les questions supplémentaires avec le témoin et de

  6   reprendre le témoin qui va déposer après. Mais là vous me dites il me faut

  7   peut-être une heure.

  8   De ce fait, je vais demander à mes collègues ce qu'ils veulent.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause. On va faire donc 20 minutes de

 11   pause. Merci.

 12   --- L'audience est suspendue à 17 heures 18.

 13   --- L'audience est reprise à 17 heures 41.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Stewart. 

 15   M. STEWART : [interprétation] Oui, très rapidement. Je tiens à dire que

 16   l'équipe et l'Accusation ont convenu, sous réserve de votre approbation,

 17   bien sûr, que nous aurions peut-être jusqu'à jeudi pour déposer les listes

 18   IC des pièces qui pourraient être présentées par le truchement de ce

 19   témoin. Donc si ça vous va, jeudi, c'est un accord que nous nous sommes

 20   convenus entre nous, entre l'Accusation et l'équipe Petkovic.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Puisque vous êtes d'accord, les choses sont réglées.

 22   M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, la Chambre voudrait que vous nous

 24   indiquiez les points ou les sujets sur lesquels vous avez l'intention de

 25   poser les questions.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie.

 27   Je vous salue, je salue les collègues de l'Accusation, le témoin

 28   ainsi que toute personne dans le prétoire.

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  1   J'ai l'intention de parler d'abord de l'arrivée d'Arif Pasalic à Dracevo,

  2   en analysant les documents qui ont été soumis au témoin par le Procureur

  3   aujourd'hui et en montrant au témoin des cartes pour lui permettre de les

  4   annoter afin de montrer quels sont les sens de déplacement d'Arif Pasalic

  5   et les endroits qu'il a dû traverser pour arriver à Dracevo. Sujet suivant,

  6   le départ de la JNA de Bosnie-Herzégovine. Je pourrai donner des détails

  7   sur ce sujet, mais je pense que ce n'est pas indispensable immédiatement.

  8   Troisième sujet avec vidéo montrant les images d'un discours prononcé par

  9   Dario Kordic à Busovaca le 16 janvier 1993. Donc cette vidéo ce sera mon

 10   troisième sujet. Le quatrième sujet ce sera la déposition du général

 11   Filipovic dans l'affaire Kordic, et les éléments auxquels la Chambre a

 12   retenu une pertinence par rapport au commandement de Dario Kordic.

 13   Et puis cinquième sujet, ce sera l'organigramme du HVO qui a été utilisé

 14   par le général Petkovic dans l'affaire Blaskic, avec notamment mention du

 15   Bataillon des Condamnés et de sa resubordination. Et puis j'indique

 16   également que mon sixième sujet sera le statut des hommes aptes au combat.

 17   On me demande de corriger. Le discours prononcé par Kordic, il l'a été en

 18   1992 et pas en 1993, comme je l'ai dit à tort. Toutes mes excuses. Donc

 19   septième sujet, il concernera les éléments de l'Accusation et les missions

 20   d'un commandant de métier dans une situation où l'on ne connaît pas

 21   l'auteur d'un acte répréhensible. Huitième sujet, ce sera la légalité et la

 22   légitimité du HVO. Neuvième sujet, l'organisation du HVO en tant que force

 23   militaire significative pendant l'année 1992 ou plus tard. Mon dixième

 24   sujet portera sur les raisons pour lesquelles le général Filipovic a été

 25   surpris par le fait que les mises en accusation émises par ce Tribunal

 26   contre les Croates de Bosnie-Herzégovine ont commencé par les Croates qui

 27   ont opéré en Bosnie centrale et pas dans d'autres régions de Bosnie-

 28   Herzégovine.

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  1   Je soumettrai au témoin un certain nombre de nouveaux documents. Je pense

  2   que je serai très brève dans mes questions et que je contribuerais à

  3   l'éclaircissement encore nécessaire sur certaines questions en suspens.

  4   Si vous me permettez, Monsieur le Président, je voudrais maintenant aborder

  5   d'emblée mon premier sujet.

  6   Nouvel interrogatoire par Mme Alaburic :

  7   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons analyser le voyage

  8   d'Arif Pasalic, qui s'est rendu à Dracevo à bord d'un véhicule de la

  9   FORPRONU. Monsieur Filipovic, vous étiez à bord de ce blindé transport de

 10   troupes de la FORPRONU, n'est-ce pas, donc vous savez quel était l'aspect

 11   de blindé ?

 12   R.  Exact, en effet.

 13   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que la personne qui se trouve à

 14   l'intérieur d'un tel véhicule est capable de décider à quel moment elle

 15   peut sortir la tête par la portière de ce véhicule et à quel moment elle va

 16   sortir du blindé ou est-ce que la porte est contrôlée par quelqu'un d'autre

 17   ?

 18   R.  Dans tous les blindés transport de troupes à bord desquels je me suis

 19   trouvé, la personne qui est conduite à bord de ce véhicule n'a la

 20   possibilité d'agir sur rien du tout. Elle ne peut pas ouvrir la portière en

 21   particulier.

 22   Q.  Dites-moi, est-ce que du point de vue de la sécurité, de votre point de

 23   vue, il pourrait être autorisé à une personne qui se trouve à l'intérieur

 24   d'un blindé de la FORPRONU, de tout simplement sortir la tête par la

 25   tourelle pour voir ce qui se passe à l'extérieur ?

 26   R.  C'est impossible. Cette personne pourrait le faire par la toute petite

 27   ouverture à côté du soldat qui lui, commande le blindé, et pourrait donc

 28   peut-être voir un petit quelque chose.

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  1   Q.  D'après ce que vous savez, Général, si un blindé de la FORPRONU arrive

  2   au milieu d'un poste de contrôle, est-ce que les soldats de la FORPRONU

  3   diraient immédiatement aux hommes qui tiennent le poste de contrôle qui

  4   sont les personnes à l'intérieur du blindé de transport de troupes et ce

  5   qu'elles font, ou est-ce que tout de même ces renseignements comportaient

  6   un certain élément de confidentialité ?

  7   R.  Il est absolument inadmissible de fournir de telles informations si

  8   elles portent sur les personnes à l'intérieur du blindé de transport de

  9   troupe.

 10   Q.  Général, lorsque cette colonne de blindés transport de troupes dont

 11   vous faisiez partie avec Arif Pasalic, si cette colonne est arrivée à un

 12   poste de contrôle tenu par le HVO, est-ce que le soldat du HVO qui tenait

 13   ce poste pouvait savoir qui était à l'intérieur de l'un ou l'autre des

 14   blindés de la FORPRONU ?

 15   R.  Nous, à l'intérieur, ne savions pas qui était à l'extérieur, et ceux

 16   qui étaient à l'extérieur ne savaient pas qui était à l'intérieur.

 17   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je tiens à vous demander de

 18   ralentir.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci bien, Monsieur le Juge. Toutes mes

 20   excuses si nous avons été trop rapide.

 21   Q.  Général, dans les documents du Bataillon espagnol que nous avons vus

 22   tout à l'heure, il est question de deux postes de contrôle où les blindés

 23   de la FORPRONU ont été arrêtés. Le premier de ces postes est désigné sous

 24   les termes de E-5, et s'agissant du deuxième poste de contrôle, il est

 25   indiqué qu'il se trouvait non loin de la localité dont le nom est Vrapcici.

 26   Avez-vous remarqué cela dans les documents qui vous ont été soumis ?

 27   R.  Je ne l'ai pas remarqué, mais je sais où se trouve Vrapcici.

 28   Q.  Dans les documents du Bataillon espagnol, il n'est pas indiqué qu'après

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  1   la localité de Vrapcici, la colonne a été arrêtée à quel qu'autre poste de

  2   contrôle jusqu'à Dracevo.

  3   R.  Je ne l'ai pas remarqué.

  4   Q.  Je me contente de le constater, parce qu'à l'instant j'ai relu ces

  5   documents, et effectivement, suite à la mention du poste de contrôle non

  6   loin de Vrapcici, il n'est plus mentionné aucun autre poste de contrôle.

  7   J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur la carte 4D1646. C'est

  8   une carte de la région de Mostar, elle est très simple mais elle nous

  9   suffira pour notre débat.

 10   Je dois admettre, Général, que je ne sais pas si elle se trouve au

 11   début ou à la fin de la liasse de documents que vous avez devant vous.

 12   C'est une carte dont les couleurs principales sont le rouge, le bleu et le

 13   vert, vous avez l'avez trouvé, très bien.

 14   Général, en regardant cette carte, je demanderais qu'elle soit

 15   agrandie, la partie de cette carte qui concerne Mostar. Très bien.

 16   Vous pouvez regarder l'écran, Général, Vous voyez ici à la limite de

 17   la zone verte qui indique Mostar Est, vous voyez "Vrapcici", n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, au nord.

 19   Q.  Général, si un véhicule arrive jusqu'à Vrapcici, il emprunte par

 20   conséquent la grand-route M-17, et que ce véhicule veut poursuivre son

 21   chemin, où est-ce qu'il est obligé d'aller vers le sud pour poursuivre son

 22   chemin ?

 23   R.  Il doit longer la rive gauche de la Neretva, donc emprunter la route

 24   qui va de Vrapcici vers le sud-est, vers le M qui indique Mostar, puis au

 25   sud jusqu'au point trigonométrique 346 de Hum. Ensuite, parcourir 500

 26   mètres vers l'est et prendre au sud en passant par Ortijes et en

 27   poursuivant encore plus au sud jusqu'à Dracevo qui ne figure pas sur la

 28   carte, et qui est au moins à 15 kilomètres au sud d'Ortijes.

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  1   Q.  Alors résumons, Général. Si le véhicule poursuit sa route à partir de

  2   Jablanica vers Vrapcici et encore plus loin vers le sud, ce véhicule est

  3   obligé de passer par Mostar Est, n'est-ce pas ?

  4   R.  Il est obligé de passer par là.

  5   Q.  Mostar Est, à savoir la zone indiquée en vert sur la carte était-elle

  6   un territoire qui était sous le contrôle de l'ABiH et des autorités

  7   musulmanes ?

  8   R.  Oui. Tout ce territoire était sous ce contrôle.

  9   Q.  Merci. Dans le dernier document du Bataillon espagnol qui vous a été

 10   soumis, pièce P11139, il est indiqué que des postes de contrôle du HVO ont

 11   été érigés autour de Dracevo. Et je tiens à être absolument précise, donc

 12   autour de Dracevo pour qu'Arif Pasalic ne puisse pas partir.

 13   Dites-moi, Général, puisque vous avez passé quatre jours là-bas, pendant

 14   ces quatre journées, y a-t-il eu des véhicules de la FORPRONU qui sont

 15   entrés ou sortis de la base de Dracevo ?

 16   R.  Nous ne pouvions rien voir, mais enfin, le deuxième ou le troisième

 17   jour, le lieutenant du Bataillon espagnol a été amené; il avait été blessé

 18   à Sarajevo. Arif Pasalic et moi-même avons vu ce lieutenant et nous avons

 19   tout de suite conclu qu'il ne pouvait pas s'en tirer, que ses blessures

 20   étaient trop graves. Et cela signifie par conséquent qu'il y avait des

 21   véhicules qui entraient et sortaient de la base de Dracevo.

 22   Q.  En partant de l'hypothèse que les véhicules de la FORPRONU pouvaient

 23   entrer et sortir de la base de Dracevo, et qu'Arif Pasalic aurait pu

 24   vouloir quitter Dracevo à bord d'un véhicule de la FORPRONU, je vous

 25   demande si quiconque aurait pu savoir qu'il se trouvait dans l'un ou

 26   l'autre des véhicules de la FORPRONU qui seraient sortis de Dracevo ?

 27   R.  Il aurait pu embarquer à bord d'un blindé transport de troupes sans que

 28   personne ne le sache, mais il n'aurait pas pu demander à partir, parce que

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  1   pendant les deux premières journées, les Espagnols nous ont maintenus à

  2   l'endroit où nous étions, donc cela aurait été impossible. 

  3   Q.  Si je me souviens bien de ce que vous avez dit en réponse aux questions

  4   de l'interrogatoire principal, vous-même et Arif Pasalic avez assisté à la

  5   réunion de Medjugorje le 12 mai ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Réunion à laquelle ont assisté également Petkovic et Halilovic; ceci

  8   est-il exact ?

  9   R.  Exact.

 10   Q.  Dites-moi, Général, Arif Pasalic, à ce moment-là, ou à quelque autre

 11   moment ultérieur à cette réunion, vous aurait-il dit qu'il avait le souhait

 12   de quitter Dracevo mais qu'il n'a pas pu le faire en raison des postes de

 13   contrôle érigés par le HVO aux environs de Dracevo ?

 14   R.  Il n'a même pas été question des postes de contrôle.

 15   Q.  Pourriez-vous répéter votre réponse ?

 16   R.  Arif Pasalic ne pouvait pas parler des postes de contrôle, d'abord

 17   parce qu'il n'a pas pu les voir et deuxièmement, parce qu'il n'avait aucune

 18   raison d'en parler. Donc il n'a à aucun moment mentionné les postes de

 19   contrôle.

 20   Q.  Etant donné, Général, qu'à cette réunion de Medjugorje le 12 mai, ont

 21   assisté également des représentants de la FORPRONU, par exemple, le général

 22   Morillon, mais il y en avait également d'autres des représentants de la

 23   communauté internationale à cette réunion, je vous demande si à quelque

 24   moment que ce soit pendant cette réunion ou suite à cette réunion, selon ce

 25   que vous savez, l'un ou l'autre d'entre eux aurait dit que le HVO avait

 26   bloqué la base de la FORPRONU de Dracevo pour empêcher Arif Pasalic de

 27   sortir de Dracevo ?

 28   R.  Personne n'a dit cela. Sefer lui-même ne l'a pas dit. Donc rien n'a été

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  1   dit sur ce sujet.

  2   Q.  J'aborde maintenant mon deuxième sujet, Général, la JNA quitte la

  3   caserne de Travnik. Vous en avez parlé en répondant aux questions de mon

  4   éminent collègue, M. Scott, en page 47 684 du compte rendu d'audience, 47

  5   684, 684, et les trois pages suivantes. M. Scott vous a soumis la thèse

  6   suivante à peu près : il vous a demandé à quel moment la JNA a quitté la

  7   caserne de Travnik. Et vous avez répondu que cela s'était passé le 6 mai

  8   1992. Après quoi, M. Scott a évoqué à votre intention la rencontre entre

  9   Karadzic et Boban, ainsi que l'accord conclu entre eux à Graz, conclu le

 10   même jour, et il vous a demandé si cette réunion de Graz et l'abandon de la

 11   caserne de Travnik par la JNA avait le moindre rapport entre eux. Vous avez

 12   répondu, je cite :

 13   "Je ne pense pas que les deux événements soient le moins du monde en

 14   rapport, mais je n'en n'exclus pas la possibilité."

 15   C'est la raison pour laquelle, Général, je m'apprête à présent à vous

 16   montrer plusieurs documents.

 17   Commençons par le document 4D2016, 4D2016, c'est le document suivant

 18   dans votre dossier, 4D 2016. Il s'agit d'un recueil d'information publié

 19   par le centre croate d'information. Et deux dates m'intéressent ici.

 20   Ecoutez-moi, Général, nous avons la traduction anglaise. Ce sera très

 21   court.

 22   Pour la date du 4 mai 1992, voici la nouvelle qui a été publiée :

 23   "La présidence de la Yougoslavie a décidé de retirer la JNA hors de Bosnie

 24   dans un délai de 15 jours."

 25   Et pour la journée du 15 mai, 1992, l'information publiée est la suivante,

 26   je cite :

 27   "A Tuzla, des extrémistes musulmans ont attaqué une colonne de soldats de

 28   la JNA en train de se retirer de la Bosnie en direction de la Serbie. Et

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  1   selon des renseignements dont la source est inconnue,  200 soldats à peu

  2   près auraient été tués."

  3   Et puis le document suivant, Général, qui n'existe qu'en anglais, dit la

  4   chose suivante, donc écoutez-moi après quoi je vous poserai ma question. Il

  5   s'agit du document 4D2017, 4D2017 - c'est bon. Donc il s'agit de deux

  6   affaires où il est question du retrait de la JNA choisi au hasard. La

  7   première affaire est Zejnil Delalic, et au paragraphe 116 du jugement il

  8   est constaté, je vais le lire en anglais. Je fais une petite pause pour les

  9   interprètes.

 10   "Le 4 mai 1992, les autorités de Belgrade ont annoncé que tous les

 11   personnels de la JNA qui n'étaient pas citoyens de Bosnie-Herzégovine

 12   devaient partir de cette région de cette république le 19 mai au plus tard.

 13   En conséquence, environ 14 000 troupes de la JNA ont quitté la Bosnie-

 14   Herzégovine."

 15   Maintenant, je vais parler de nouveau un peu en B/C/S.

 16   L'affaire suivante est l'affaire allant contre Dusko Tadic, où

 17   justement le retrait de la JNA des casernes de la Bosnie-Herzégovine

 18   constituait la date cruciale pour décider de la question de savoir s'il

 19   s'agissait d'un conflit international ou pas. Au paragraphe 571, l'on

 20   énonce un fait, et je vais lire de nouveau en anglais :

 21   "… après le retrait de la JNA, le 19 mai 1992."

 22   Voilà la fin de la citation.

 23   Mais on me dit qu'il faut corriger la date à la page 81, ligne 3, il

 24   faut écrire la date qui est celle du "19 mai."

 25   Voici ma question maintenant, Général : si vous vous en souvenez, est-ce

 26   que la JNA ne se retirait que de Travnik ou bien qu'elle se retirait de

 27   toutes les régions de la Bosnie-Herzégovine qui n'étaient pas contrôlées

 28   par les autorités serbes ?

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  1   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le retrait de Travnik a été

  2   le résultat des négociations avec le commandant qui ont duré pendant deux

  3   ou trois jours, donc ça n'a rien à voir avec le 6. Avec le commandant, nous

  4   avons dû mener des négociations pendant plusieurs jours, et c'est à ce

  5   moment-là qu'il a été décidé que chaque personne qui partait devait prendre

  6   seulement les armes personnelles, et des détails de ce genre. Il a été

  7   décidé que cinq hauts responsables musulmans et cinq hauts responsables du

  8   côté du HVO soient gardés en tant qu'otages pour permettre à la colonne de

  9   partir vers les zones contrôlées par l'armée de la Republika Srpska. Et je

 10   faisais partie des otages.

 11   Quant à la question de savoir si ceci concernait toutes les

 12   garnisons, là où la JNA pouvait organiser cela tout seule, elle le faisait.

 13   Je suppose que c'était le cas à Tuzla. Mais à Travnik, elle n'allait partir

 14   seule sans avoir négocié le départ et sans le faire avec moi.

 15   Q.  Général, ma question pour le moment est de savoir si vous êtes au

 16   courant du fait que la JNA partait aussi de Sarajevo, de Tuzla et d'autres

 17   villes de Bosnie-Herzégovine qui n'étaient pas contrôlées par l'armée de la

 18   Republika Srpska, et après on parlera de Travnik, car la situation y était

 19   particulière.

 20   R.  Je le sais d'après les informations que j'ai reçues par la suite. A

 21   l'époque, je ne le savais pas.

 22   Q.  Et je souhaite que nous clarifions les conditions qui ont fait l'objet

 23   de vos négociations avec la JNA concernant le retrait de la JNA, et la

 24   raison de ma question est comme suit : l'Accusation vous a suggéré la

 25   réponse selon laquelle la JNA avait reçu l'autorisation de partir de

 26   Travnik en emportant les armes, et vous avez répondu à cela, avec les armes

 27   personnelles. Maintenant, j'ai l'impression que les choses ne sont pas tout

 28   à fait claires. Qu'est-ce qui était convenu pour ce qui est des conditions

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  1   du retrait de la JNA ?

  2   Que pouvaient emporter les soldats et qu'est-ce qu'ils ne pouvaient pas

  3   emporter ?

  4   R.  Je ne souhaitais pas humilier la force à laquelle j'appartenais jusqu'à

  5   quelques jours auparavant, donc ils sont partis en toute dignité avec leurs

  6   armes personnelles s'agissant de la garnison de Travnik. Mais ils ne

  7   pouvaient emporter avec eux le canon Praga, les mortiers, et tout ce qui

  8   était de calibre plus important que les armes personnelles. Et les armes

  9   personnelles, pour les officiers, il s'agissait de pistolets, et pour les

 10   soldats, il s'agissait des fusils. Chaque groupe de dix soldats pouvait

 11   emporter un Zolja, rien de plus.

 12   Q.  Dites-nous, Général, s'agissant des armes de gros calibre qui sont

 13   restées dans la caserne de la JNA, qu'en avez-vous fait ?

 14   R.  Nous avons partagé cela avec les Musulmans selon la base

 15   50:50. Et en ce qui concerne le partage de la caserne et toutes les

 16   installations au sein de la caserne, ceci a été divisé moitié-moitié aussi.

 17   Q.  Dites-nous, est-ce que quelqu'un parmi les soldats ou officiers

 18   musulmans avait participé à vos négociations avec les représentants de la

 19   JNA concernant leur retrait ?

 20   R.  Il y avait Dzemal Merdan et Halid Genjac en tant que dirigeants

 21   politiques à l'époque de nos négociations, de même que le président de la

 22   municipalité, Tamburic. C'était plus ou moins les représentants musulmans.

 23   Q.  Bien. Général, je pense que ceci est clair maintenant.

 24   Maintenant, quelques clarifications concernant la réunion qui a eu lieu à

 25   Busovaca en 1993 et le discours prononcé par Dario Kordic.

 26   Excusez-moi, je me suis trompée ici encore. Je voulais dire "1992."

 27   Donc examinons le document 4D2018, c'est un document en anglais. Veuillez

 28   vous concentrer sur mes paroles. J'ai préparé cela pour que les choses

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  1   soient claires et pour que l'on explique les raisons pour lesquelles jeudi,

  2   dans ce prétoire, tout le monde s'était excité alors que peut-être M. Scott

  3   ne comprenait où résidait le problème.

  4   Donc, Général, l'Accusation vous a posé des questions au sujet du discours

  5   tenu par Dario Kordic en paraphrasant les propos de Dario Kordic. Ensuite,

  6   il a été dit que le peuple croate n'allait pas faire partie d'une

  7   quelconque autre Croatie. C'est ce mot "Croatie" qui a provoqué une vive

  8   réaction, car nous avions tous compris et entendu que Dario Kordic parlait

  9   de la Yougoslavie tronquée.

 10   Et pour que les choses soient tout à fait claires, apparemment il y a eu un

 11   malentendu : dans le compte rendu d'audience de votre déposition, la

 12   question de M. Scott a été reflétée de manière exacte, donc il n'a pas dit

 13   "autre Croatie", mais il a parlé d'une quelconque "autre création" en

 14   anglais, "any other creation." Donc ça veut dire que le malentendu était

 15   lié à l'interprétation, que c'est ce qui avait provoqué cette vive réaction

 16   dans le prétoire. Et c'est pour cela que je souhaitais clarifier cela.

 17   Mais dites-nous maintenant, Général, ce 16 janvier 1993 --

 18   R.  1992.

 19   Q.  1992. A Busovaca, à ce moment-là, l'on célébrait d'une certaine manière

 20   la reconnaissance internationale de la République de Croatie; est-ce exact

 21   ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Q.  A ce moment-là, la République de Slovénie aussi était restée en dehors

 24   de la Yougoslavie; est-ce exact ça aussi ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Général, comment appelait-on le reste de la Yougoslavie une fois la

 27   Slovénie et la Croatie sorties ?

 28   R.  La Yougoslavie tronquée. Mais en ce qui me concerne, ce n'était plus la

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  1   Yougoslavie du tout.

  2   Q.  Dites, Général, d'après vos connaissances, à quoi ressemblaient votre

  3   position et la position des Croates que vous connaissiez concernant la

  4   possibilité que la Bosnie-Herzégovine continue à faire partie de la

  5   Yougoslavie tronquée ?

  6   R.  Ceci était inconcevable, impossible.

  7   Q.  Dites-nous, Général, les Croates en Bosnie-Herzégovine ont-ils profité

  8   de la première occasion qui s'est présentée, et c'était le référendum

  9   permettant à la Bosnie-Herzégovine de sortir de la Yougoslavie tronquée ?

 10   R.  Afin qu'elle devienne un Etat indépendant ?

 11   Q.  Est-ce que les Croates ont profité de cette occasion ?

 12   R.  Oui, ils ont profité de l'occasion.

 13   Q.  Dites-nous, Général, pour vous personnellement, au moment où la Bosnie-

 14   Herzégovine a été reconnue internationalement comme Etat indépendant, est-

 15   ce que vous compreniez que les frontières de la Bosnie-Herzégovine en tant

 16   qu'Etat internationalement reconnu ne pouvaient pas être modifiées sans

 17   approbation de la communauté internationale ?

 18   R.  Lorsque les pays les plus importants du monde ont reconnu la Bosnie-

 19   Herzégovine, ces frontières devenaient inviolables, et c'était le cas des

 20   frontières des républiques de l'ex-Yougoslavie.

 21   Q.  Général, je souhaite que l'on traite maintenant de votre déposition

 22   dans l'affaire Kordic et de Dario Kordic lui-même. Le document, encore une

 23   fois, est en anglais, donc veuillez vous concentrer sur ce que je dis. Il

 24   s'agit de la pièce 4D2019, 4D2019.

 25   Général, mon éminent collègue, M. Scott, vous a présenté deux paragraphes

 26   du jugement de la Chambre de première instance dans l'affaire Dario Kordic.

 27   Cependant, nous ne comprenions pas du tout ce à quoi ces paragraphes

 28   faisaient référence. Si vous vous en souvenez, il s'agissait des

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  1   paragraphes 585 et 586. M. Scott vous a soumis la thèse selon laquelle ni

  2   le Tribunal ni la Chambre de première instance dans l'affaire Kordic n'a

  3   accepté vos propos et n'a accepté votre position selon laquelle Dario

  4   Kordic n'était pas un commandant militaire.

  5   C'est la raison pour laquelle je souhaite indiquer que les paragraphes que

  6   l'Accusation vous a présentés portent sur le conflit à Busovaca au mois de

  7   janvier 1993. Or, s'agissant du conflit de Busovaca, vous avez dit dans

  8   l'affaire Kordic, à la page 17 217 du compte rendu d'audience, et je vais

  9   relire en anglais cette partie-là :

 10   "Question : Est-ce que vous nous dites vraiment que vous n'aviez aucune

 11   connaissance d'une attaque quelle qu'elle soit à Busovaca fin janvier 1993

 12   ?

 13   "Réponse : L'attaque de Busovaca, d'après ce que je sais, a été déclenchée

 14   par l'ABiH, la Défense territoriale, afin de prendre des positions -- afin

 15   de prendre Busovaca. C'est ce que je sais à propos de Busovaca."

 16   Général, est-ce que vous pouvez nous dire -- enfin, c'est tout ce que vous

 17   avez dit au sujet du conflit à Busovaca et ce qui s'est passé en janvier

 18   1993; est-ce exact ?

 19   R.  Ces questions concernant Kordic m'ont pris de court. J'ai été surpris

 20   du fait que la Chambre de première instance n'a pas pris en compte ma

 21   déposition et qu'ils ont été condamnés. Je pense qu'au cours de ma

 22   déposition, tous mes efforts visant à aider la Chambre de première instance

 23   dans sa décision ont échoués, et j'avais l'impression que j'étais

 24   complètement déshonoré et inutile.

 25   Q.  Nous allons clarifier cela plus tard, mais par rapport aux faits, je

 26   souhaite indiquer que l'Accusation vous a présenté une thèse erronée

 27   lorsqu'elle a dit que vos positions dans l'affaire Kordic n'ont pas été

 28   maintenues. Avec votre permission, je souhaite montrer ce que vous avez dit

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  1   ici et que la Chambre de première instance dans l'affaire Kordic aussi

  2   avait accepté votre position.

  3   Je souhaite maintenant vous dire la chose suivante : dans le jugement en

  4   appel dans l'affaire Kordic, la Chambre d'appel a conclu et confirmé la

  5   position prise par la Chambre de première instance indiquant que Kordic

  6   était un dirigeant politique avec une influence militaire et, qu'en tant

  7   que tel, il avait participé à la planification et au processus par le biais

  8   duquel l'on donnait des ordres concernant les événements dont il est

  9   question. Il est question des événements qui se sont déroulés à Busovaca en

 10   janvier 1993.

 11   Maintenant, concernant Dario Kordic en tant que homme politique, qui avait

 12   une certaine influence politique, je vais attirer votre attention sur votre

 13   déposition au sujet de ses relations avec Blaskic. Il s'agit de la page 17

 14   220 du compte rendu d'audience dans l'affaire Kordic.

 15   L'Accusation vous a présenté une conversation entre Blaskic et Kordic,

 16   conversation qui a été écoutée et qu'au sujet de laquelle vous avez fait un

 17   commentaire en disant que vous ne pensiez que c'était la vérité et que

 18   probablement c'était un coup monté pour les écouter. Voici ce que vous avez

 19   répondu, et je vais citer encore une fois en anglais :

 20   "Tout d'abord, je ne suis pas sûr, ou plutôt, je ne sais pas que si c'est

 21   une conversation entre Blaskic et Kordic. S'il a le pouvoir, c'est bien ce

 22   que vous dites, à ce moment-là, ça doit être dû au rapport personnel

 23   existant entre ces deux hommes."

 24   Autrement dit, Général, vous avez dit même si Kordic pouvait suggérer

 25   à Blaskic quoi faire sur le plan militaire, il s'agissait de leur relation

 26   personnelle. Est-ce que vous vous souvenez de cette partie de votre

 27   déposition ?

 28   R.  J'ai dit dans ma déposition que les relations entre Blaskic et

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  1   Kordic et entre Kiseljak et Busovaca, en ce qui concerne leur contact, ils

  2   ne pouvaient pas en avoir. Donc le compte rendu ou la transcription que

  3   j'ai lue dans "Slobodna Bosna" après la guerre, j'ai dit que c'était

  4   certainement une fabrication. Et même si c'était authentique, il s'agissait

  5   de leurs relations personnelles avec des gérants et ce genre de choses,

  6   mais ceci n'avait pas le niveau de réalité impliqué dans la question.

  7   Q.  Général, dans notre affaire, à la page du compte rendu d'audience 44

  8   738, vous nous avez dit et je vais paraphraser en langue croate. Vous nous

  9   avez dit comme suit : Kordic ne pouvait pas commander dans la zone

 10   opérationnelle de Vitez. Il pouvait avoir de l'influence sur certains

 11   commandants. Il avait un certain charisme et de l'influence, de la

 12   puissance dans certaines situations. Mais voici ce que je peux vous dire :

 13   il ne pouvait pas commander à Travnik ni à Vitez, ni à Novi Travnik. Il ne

 14   pouvait pas donner des ordres à Zepce ni à Lozancic. Il ne pouvait rien

 15   faire à Kiseljak, sur le territoire de Kiseljak. Il ne pouvait pas donner

 16   des ordres à qui que ce soit. Je pense que la suite n'est pas nécessaire.

 17   Général, vous admettez la possibilité selon laquelle Dario Kordic avait une

 18   certaine influence importante sur le plan politique, sur les gens en Bosnie

 19   centrale ?

 20   R.  Il avait une influence politique sur les gens en Bosnie centrale. Il

 21   les avait organisés pendant les élections et avant les élections, donc il

 22   avait une influence, mais il ne les commandait pas, il ne pouvait les

 23   commander. Il n'essayait même pas de le faire. En ce qui me concerne,

 24   s'agissant des soldats, pour moi, c'était un mannequin, il ne portait pas

 25   des armes, mais il y avait autour de lui des gens qui le gardaient, mais ce

 26   n'était pas un combattant. Il n'était pas armé et il ne participait au

 27   combat.

 28   Q.  J'avais une autre question et l'on reviendra à Dario Kordic.

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  1   Lorsque vous dites, Général, "commandant" et lorsque vous dites "la chaîne

  2   de commandement," est-ce que vous parlez de celui qui dispose d'un titre de

  3   commandant militaire et d'une chaîne qui implique le commandant militaire

  4   de haut niveau et va vers les commandants inférieurs ?

  5   R.  Le "commandement" implique que la personne a le savoir et la compétence

  6   lui permettant de commander ses subordonnés et les subordonnés sont censés

  7   exécuter ses ordres; c'est ça une "chaîne de commandement".

  8   Q.  Que diriez-vous, Général, s'agissant de la situation suivante : nous

  9   savons déjà que la HVO était organisé selon les brigades et que les

 10   brigades ont été plus ou moins créées pour les territoires des

 11   municipalités. Si vous avez le commandant d'une brigade qui se rend tous

 12   les jours, par exemple, quelque part pour avoir une conversation du matin

 13   ou un café du matin avec le président du HVO de la municipalité en

 14   question, et disons que d'autres personnalités ayant certaines fonctions au

 15   sein de cette municipalité y viennent, et que le commandant de la brigade

 16   aime entendre l'opinion du dirigeant civil local et est enclin à respecter

 17   ses souhaits. Voici ma question : ce dirigeant local, à votre avis, est-ce

 18   qu'il a une place dans la chaîne de commandement ?

 19   R.  Moi, je fais la différence entre le commandement et l'influence sur le

 20   commandant. Ce n'est pas la même chose. Donc Grubesic pouvait avoir des

 21   contacts avec Kordic, ou Blaskic pouvait avoir des contacts avec Kordic. Et

 22   ils pouvaient agir conformément à cette influence ou à ces souhaits, mais

 23   c'est Kordic ou Grubesic à Busovaca qui commandait.

 24   Q.  Revenons à la situation potentielle, autrement dit, cet homme

 25   d'influence, ce dirigeant local ne fait pas partie de la chaîne de

 26   commandement ?

 27   R.  Il ne fait pas partie de la chaîne de commandement.

 28   Q.  Est-ce que ce fait qu'il ne fait pas partie de la chaîne de

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  1   commandement, si les circonstances sont telles qu'on les a décrites, change

  2   le fait que le dirigeant politique local a un pouvoir de fait et qu'il peut

  3   suggérer ce qu'il faut faire au commandant ?

  4   R.  Il a un pouvoir de fait. Il peut influencer le développement de la

  5   situation. Il propose certaines activités. Il critique ce qui n'a pas été

  6   fait, mais tout ceci c'est une influence politique et non pas le

  7   commandement.

  8   Q.  Bien. Maintenant, si l'on souhaite résumer le rôle de ce dirigeant

  9   local, est-ce qu'il serait exact à votre avis de dire qu'il n'est pas un

 10   commandant militaire, qu'il ne fait pas partie de la chaîne de

 11   commandement, mais il a le pouvoir et il influence le développement sur le

 12   territoire de sa municipalité ?

 13   R.  Vous parlez de Travnik. M. Tamburic m'a accusé, m'a condamné en raison

 14   du fait que Karula [phon] était tombé, donc il exerce la pression, il a de

 15   l'influence. Il dit ce qu'il considère comme étant juste, mais il ne peut

 16   pas me commander, il n'est pas mon supérieur hiérarchique.

 17   Q.  Parlons maintenant de nouveau de Dario Kordic dans le contexte de ce

 18   qui a déjà été dit au sujet de Dario Kordic.

 19   Si je vous ai bien compris, Général, nous pouvons dire à son sujet

 20   qu'il n'était pas un commandant militaire, qu'il ne faisait pas partie de

 21   la chaîne de commandement, mais qu'il avait un certain pouvoir et qu'il

 22   pouvait influencer un certain nombre de commandants militaires ?

 23   R.  Oui, il avait beaucoup de pouvoir et il pouvait influencer les

 24   commandants avec son influence personnelle.

 25   Q.  Et voyons maintenant de quelle manière la Chambre d'appel de ce

 26   Tribunal a adopté sa décision concernant l'affaire Kordic. Donc la Chambre

 27   n'a pas conclu qu'il était commandant militaire dans la chaîne de

 28   commandement, mais il a été conclu qu'il était dirigeant politique avec une

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  1   certaine influence militaire. Et compte tenu de son influence de fait, il

  2   pouvait avoir une influence sur les événements. Donc si j'ai bien compris,

  3   cette Chambre d'appel a justement adopté la même position que la vôtre.

  4   R.  C'est exact. Mais l'on n'arrêtait pas de me poser des questions

  5   concernant le commandement et moi je disais toujours : il ne commandait pas

  6   et il ne pouvait pas commander.

  7   Q.  Général, nous devons faire une distinction entre le commandement et un

  8   contrôle externe sur les commandants militaires.

  9   R.  Oui, sans cesse, car je suis un commandant et pour moi, le commandement

 10   est une notion tout à fait différente de quoi que ce soit d'autre.

 11   Q.  Merci. Le sujet suivant concerne un organigramme que l'Accusation vous

 12   a montré.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Avant que le conseil ne poursuive, j'ai une

 14   petite intervention à faire. J'ai fait de mon mieux pour ne pas soulever

 15   d'objection, mais des allégations assez sérieuses sont faites à propos du

 16   fait que j'aurais déformé le compte rendu, donc je vérifie la pièce 4D2019.

 17   On a entendu toutes sortes de choses au cours des dernières minutes à

 18   propos du témoignage de M. Filipovic dans l'affaire Kordic. Mais si vous

 19   regardez ce qui est à droite sur la page, juste en dessous de l'arrêt, il y

 20   a une référence à certains comptes rendus d'audiences, à commencer par la

 21   page 17 051. Je ne voulais pas anticiper quoi que ce soit donc j'ai un

 22   petit peu attendu, mais je tiens à dire pour le compte rendu que la

 23   citation qui n'a pas été prise en compte par le conseil est justement la

 24   citation bien précise qui a été faite par la Chambre de première instance

 25   Kordic.

 26   A gauche, on voit :

 27   "Un grand nombre d'éléments de preuve ont été présentés pour montrer

 28   que Kordic n'avait joué aucun rôle militaire au conflit. Il voulait

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  1   seulement aider son peuple. La Défense se base sur les éléments de preuve

  2   concernant le rôle allégué de Kordic dans le conflit de Busovaca, qui est

  3   en note de pied de page 1 069."

  4   Mais si on va à 1 069, en bas de la page, on peut lire la note

  5   suivante :

  6   "Un grand nombre des témoins ont témoigné, y compris les

  7   commandants militaires; le général de brigade Filip Filipovic au compte

  8   rendu page 17 045."

  9   Et ensuite, on voit que la Chambre de première instance a dit s'agit-il

 10   bien de la déposition du témoin.

 11   J'ai dit que M. Kordic n'avait aucun commandement sur aucune unité

 12   militaire dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale. C'est exactement

 13   ce qui a été cité par la Chambre de première instance Kordic, et non pas

 14   les autres points qui ont été repris, en revanche, par le conseil lors de

 15   son interrogatoire.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il n'est pas

 17   nécessaire d'interpréter ceci. Il est clair à mes yeux que M. Scott tient

 18   beaucoup à ce que quelque chose de ce genre soit consigné au compte rendu,

 19   mais il est tout à fait clair qu'il n'y a ici pas une seule déclaration du

 20   général Filip Filipovic au sujet d'un conflit à Busovaca en janvier 1993

 21   qui serait susceptible de corroborer ce qu'a dit mon collègue de

 22   l'Accusation. Mais je pense que les choses sont tout à fait claires. Quoi

 23   qu'il en soit, je ne vais pas m'appesantir plus longtemps.

 24   Q.  Général, nous avons parlé de cet organigramme utilisé par le général

 25   Petkovic dans l'affaire Blaskic. Il s'agit de la pièce

 26   P11123.

 27   En attendant que le document n'arrive sur les écrans, je souhaite

 28   simplement dire que la traduction anglaise de ce document manque dans une

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  1   portion tout à fait capitale du texte. En effet, entre le commandant

  2   suprême et l'état-major principal, il n'est pas fait mention de la liaison

  3   existante, qui est une liaison directe. Donc il existe une liaison directe

  4   entre le commandant suprême et l'état-major principal, ce qu'on voit très

  5   bien à la lecture de ce document dans sa version croate, alors que dans la

  6   version anglaise de ce même document, le lien en question ne figure pas sur

  7   le papier. Je pense qu'il faudrait donc une correction.

  8   Général, en rapport avec ce document, une question vous a été posée qui

  9   portait sur la resubordination. Entre autres, on vous a demandé, dans votre

 10   brigade de Travnik, qui vous appelleriez si vous souhaitiez qu'une partie

 11   du Bataillon des Condamnés vienne vous renforcer. Et le Bataillon des

 12   Condamnés, sur cet organigramme, est directement lié uniquement et

 13   exclusivement au commandement Suprême ? Vous avez répondu à cette question

 14   en disant que sur le plan technique, vous auriez adressé par communications

 15   par paquet ou par d'autres moyens de transmission cette demande à

 16   destination de l'état-major principal.

 17   Après quoi, M. le Président de la Chambre, le Juge Antonetti, a constaté,

 18   je cite :

 19   "Pour vous, par conséquent, il est naturel de passer par l'état-major

 20   principal."

 21   Voici la question que je vous pose, Général : si le Bataillon des Condamnés

 22   était uniquement subordonné et exclusivement subordonné au commandement

 23   Suprême du HVO, qui avait le pouvoir de décider de la resubordination de

 24   certaines unités du Bataillon des Condamnés, dans l'intérêt de la zone

 25   opérationnelle de Vitez, par exemple ?

 26   R.  D'abord, cela ne me serait pas venu à l'esprit, mais si j'avais eu

 27   nécessité de demander des renforts, il ne me serait pas venu à l'esprit de

 28   demander le Bataillon des Condamnés. Mais si j'avais besoin d'être renforcé

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  1   par une autre unité, sur le plan technique toujours, je dis que je me

  2   serais adressé à l'état-major principal. Quant à l'auteur de la décision à

  3   prendre, l'organigramme le montre bien, c'est le commandant en chef.

  4   Q.  Je vous remercie, Général, cela me suffira. Voici maintenant une brève

  5   question au sujet de ce que vous avez dit aujourd'hui dans votre

  6   déposition.

  7   Nous voyons un document où figure le nom du général Petkovic dans un

  8   document qui vous a été soumis alors qu'il était question des hommes aptes

  9   au combat. Il a été inscrit dans ce document que les hommes aptes au combat

 10   devaient être maintenus à Sovici et Doljani. Voici ma question, Général :

 11   ces hommes aptes au combat avaient-ils une quelconque obligation militaire

 12   ?

 13   R.  Oui, ils en avaient une.

 14   Q.  Pendant la guerre, ces jeunes gens qui faisaient leur service le

 15   faisaient-ils dans les forces d'active ou dans les forces de réserve ? Est-

 16   ce qu'il était naturel qu'ils contribuent à la défense de leurs pays ou

 17   étaient-ils considérés comme étant des civils ?

 18   R.  En Bosnie-Herzégovine, ou en tout cas dans le secteur où je me

 19   trouvais, tout le monde avait une obligation militaire. Et on pouvait se

 20   voir affecter un poste civil également, mais l'obligation militaire

 21   incombait également à chacun.

 22   Q.  Mais s'ils n'avaient pas une obligation de nature militaire, si on leur

 23   confiait, par exemple, une obligation civile, étaient-ils d'active ou

 24   réserve ?

 25   R.  Ils étaient membres de l'armée, plus précisément ils appartenaient à

 26   une unité ou à une autre.

 27   Q.  Aujourd'hui, Général, la question vous a été posée de savoir ce que

 28   vous auriez fait dans votre rôle de commandant si l'un des soldats sous vos

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  1   ordres avait mis le feu à une maison ou avait commis un acte répréhensible

  2   et passible des tribunaux, et vous avez répondu que vous l'auriez privé de

  3   liberté. Alors, Général, votre réponse permet de penser que vous savez qui

  4   a mis le feu à la maison ou qui a commis l'acte passible de tribunaux.

  5   C'est la raison pour laquelle je vous demande si en votre qualité de

  6   commandant militaire, vous auriez mené à bien des actions d'investigation

  7   pendant la période où l'auteur de l'incendie de la maison ou de l'acte

  8   passibles des tribunaux était inconnu ?

  9   R.  Entreprendre une action, prendre une mesure sous-entend que de telles

 10   mesures auraient pu être efficaces, que ma vie n'était pas en danger. Je

 11   vous dis que lorsque Dzemal Merdan est venu dans le village de Jelinak,

 12   c'était la même chose que dans le village de Santici et d'Ahmici, sans

 13   doute. C'est que nous avons vu à ce moment-là des soldats en train de

 14   mettre le feu aux maisons, nous avons vu des corps sans vie. Nous avons vu

 15   des soldats qui étaient en train d'attaquer de toute leur force Dzemal

 16   Merdan, ce dernier n'ayant dû son salut qu'à l'intervention des soldats

 17   britanniques. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire ?

 18   Quand on voit que même lorsqu'on parle d'un des plus hauts gradés de

 19   l'ABiH, Dzemal Merdan, arrive et dit, Qu'est-ce que vous êtes en train de

 20   faire en présence des Britanniques de la communauté internationale, et il

 21   se fait agresser. Cela vous donne une idée de ce qui se serait passé si un

 22   homme d'un grade inférieur était intervenu. Donc ce que peut entreprendre

 23   un militaire dans une situation réelle de ce genre, en tout cas dans la

 24   région où je me trouvais moi-même à l'époque, est quelque chose de très

 25   relatif.

 26   Q.  Général, je ne vous interroge pas maintenant au sujet de ce qui était

 27   possible de faire, de la réalité, mais de ce qu'un homme d'un tel grade

 28   avait le devoir de faire en théorie.

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  1   R.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- parce que je voudrais que vous

  3   terminiez aujourd'hui - il reste 20 minutes et il y a encore quelques

  4   sujets à aborder - mais très vite, j'apprends l'événement avec M. Merdan,

  5   où les soldats voulait le tuer et il n'a dû son salut qu'à l'intervention

  6   du Bataillon britannique. Très bien, tant mieux pour lui, mais en vous

  7   écoutant, je pensais aux mutineries qui s'étaient déroulées en 1917 où des

  8   soldats, hors tout contrôle, avaient décidé de ne pas aller au combat à ce

  9   moment-là, les généraux, comme vous, avaient pris la solution de créer des

 10   cours martiales, de passer en jugement ces soldats et de les fusiller dans

 11   la foulée. Vous n'étiez pas dans la capacité de créer une cour martiale et

 12   de faire juger ces soldats qui s'en prenaient à M. Merdan sous vos yeux et

 13   sous les yeux de la communauté internationale et de prendre des sanctions ?

 14   C'était au-delà de vos capacités ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Impossible, impossible de créer une cour

 16   martiale, parce qu'il n'y en avait pas en Bosnie-Herzégovine pour autant

 17   que je le sache. Ce qui aurait pu être possible, c'était de faire

 18   intervenir un peloton qui était tout de même davantage contrôlé par le

 19   commandant ou la police militaire qui, elle, était plus éloignée du front,

 20   parce que la police militaire ne se trouve pas en première ligne. Donc un

 21   peu plus tard, une fois que les soldats n'étaient plus à l'endroit où

 22   l'événement s'était produit, ceci aurait pu être possible éventuellement.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation]

 24   Q.  Quels sont les soldats qui ont essayé de tuer M. Dzemal Merdan ?

 25   R.  Des membres de l'ABiH, je pense, de la 7e Brigade musulmane. Donc je

 26   répète, des membres de la Défense territoriale nettoient le village de

 27   Jelinak, et nous arrivons pour régler le problème. Voilà, c'était ce cas-là

 28   dont j'ai parlé tout à l'heure.

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  1   Q.  Général, une précision rapidement au sujet des documents de MM. Roso et

  2   Blaskic, qui datent de mai 1992 et qui portaient sur le thème suivant, le

  3   HVO étant le seul légal, puis qui est-ce qui est légal ou illégal, le HVO

  4   ou l'ABiH, à cet endroit-là.

  5   A cet égard, je voudrais vous rappeler les documents que le Procureur vous

  6   a montrés, notamment celui du 11 mai. Il vous en a montré plusieurs, mais

  7   notamment celui du 11 mai, qui traite de ce sujet. Revenons, si vous voulez

  8   bien, sur l'accord d'amitié et de coopération signé le 21 juillet 1992 par

  9   Alija Izetbegovic et Franjo Tudjman. Vous vous rappelez, n'est-ce pas, il

 10   s'agit de la pièce

 11   P 339. Voici ma question : dans ce document, nous voyons indiqué pour la

 12   première fois de la façon la plus claire qui soit que le HVO et l'ABiH sont

 13   des composantes égales des forces armées de Bosnie-Herzégovine. Donc voici

 14   ma question, Général : d'après ce que vous saviez, est-ce qu'à quelque

 15   moment que ce soit plus tard il y a eu débat correspondant à ce que vous a

 16   indiqué M. le représentant du bureau du Procureur sur le fait de savoir si

 17   le HVO était la force militaire légale et légitime représentant le peuple

 18   croate en Bosnie-Herzégovine ou s'il y avait également les Musulmans et

 19   toute autre personne souhaitant participer au combat qui auraient pu être

 20   aussi légitimes ?

 21   R.  Nous parlons de juillet 1992. Cet accord très particulier était bon,

 22   c'était un accord convenable, en tout cas s'agissant de la situation sur le

 23   terrain, même si à l'époque des tentatives ont été faites pour obtenir

 24   davantage que ce que prévoyait cet accord.

 25   Q.  Très bien. Une question rapide, Général, pour éviter tout malentendu.

 26   M. Scott vous a suggéré une réponse en vous disant que le HVO était une

 27   force organisée, conséquente et significative en 1992, à la fin de l'année

 28   1992, page 47 696 du compte rendu d'audience. En entendant cela, vous avez

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  1   précisé en disant qu'il y avait une différence par rapport au mois d'avril

  2   1992. Sur cette base, j'aurais quelque chose à vous demander qui concerne

  3   une partie de votre déposition dans l'affaire Kordic, page 17 017 du compte

  4   rendu d'audience, où vous dites que le temps manquait pour mettre en place

  5   une organisation militaire complète, qu'il fallait le faire pendant un

  6   certain temps en temps de paix, et une année encore par la suite pour

  7   qu'une armée en bonne et due forme soit complètement organisée.

  8   Alors, Général, d'après ce que vous savez, que diriez-vous ? A quel moment

  9   le HVO est-il devenu une armée organisée, capable de mener à bien des

 10   actions offensives comme défensives, que l'on aurait donc pu considérer

 11   comme étant organisée à l'égal de n'importe quelle armée professionnelle

 12   moderne ?

 13   R.  Je l'ai déjà dit devant ce Tribunal, en 1994, nous avions une armée.

 14   Mais  simplement une partie de l'armée, parce que nous avions des brigades

 15   de gardes qui avaient été créées, qui étaient structurées, qui étaient des

 16   unités manoeuvrables. Donc c'est seulement en 1994 que nous étions

 17   pleinement en mesure de mener à bien les tâches qui nous incombaient.

 18   Q.  Bien. Général Filipovic, le Procureur a essayé d'affaiblir la confiance

 19   que les Juges de la Chambre pouvaient avoir dans votre déposition en

 20   reprenant la déclaration que vous auriez faite à l'agence HINA eu égard à

 21   l'acte d'accusation dressé contre six Croates de Bosnie centrale. D'après

 22   ce que vous avez en mémoire, les premières mises en accusation de la part

 23   du bureau du Procureur de ce Tribunal contre les Croates de Bosnie-

 24   Herzégovine ont-elles concerné exclusivement la Bosnie centrale; c'est bien

 25   cela ?

 26   R.  Pas seulement les Croates, mais les 20 premières mises en accusation,

 27   les 20 premiers actes d'accusation, sur ces 20 il y en avait 15 qui étaient

 28   dressés contre des Croates. Quand je me suis rendu compte de cela, cela m'a

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  1   paru vraiment très surprenant et très étonnant, parce que si vous tenez

  2   compte du nombre d'années de prison qui ont été prononcées, ce nombre était

  3   vraiment surprenant, en tout cas pour moi, parce que comme je l'ai dit,

  4   nous avons participé à de la défense pure. Malheureusement, dans mon Etat

  5   de Bosnie-Herzégovine, il y a eu pas mal de crimes commis par les Serbes

  6   contre les Croates et vice-versa. Malheureusement, des gens de la

  7   communauté internationale ont dû venir dans mon pays pour apporter leur

  8   aide, et finalement ils ont perdu la vie, ils ont été tués ou ils ont été

  9   grièvement blessés, handicapés ou quoi que ce soit. Donc dans un certain

 10   sens, la vallée de la Lasva n'aurait pas pu être le point névralgique de

 11   ces événements négatifs qui ont eu lieu dans mon pays, la Bosnie-

 12   Herzégovine.

 13   Q.  Général, vous avez commencé à répondre à ma question. J'ai dit que nous

 14   allions venir à cela en temps utile. Donc M. Scott s'est efforcé de vous

 15   compromettre en tant que témoin en disant que vous aviez été témoin de la

 16   Défense dans Dario Kordic devant ce Tribunal. Dites-moi, Général, que

 17   pensez-vous de cela ? Qu'avez-vous à dire à ce sujet ? Cette tentative de

 18   discréditer un témoin, simplement à partir du fait qu'il aurait été témoin

 19   de la Défense ?

 20   R.  C'est terrible, c'est vraiment un message terrible qui a été envoyé. Le

 21   fait qu'un homme ait témoigné dans une affaire avec un accusé qui a été

 22   déclaré coupable, c'est vraiment un message terrible. C'est quelque chose

 23   qui m'a beaucoup secoué.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Toutes mes excuses -- 

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Non, non, pas du tout. Ce n'est pas ce que

 26   dit le témoin. Laisser le témoin --

 27   M. SCOTT : [interprétation] -- je ne peux pas laisser au compte rendu ce

 28   qui vient d'être dit à mon encontre. Je vais laisser le témoin finir sa

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  1   réponse, mais ensuite je tiens à avoir la parole.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président --

  3   Mme ALABURIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur le Témoin, comment avez-vous vécu la chose, pouvez-vous le

  5   dire ?

  6   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'ai le sentiment que ce

  7   Tribunal est, pour partie, un endroit où personne n'a le droit de dire quoi

  8   que ce soit d'autre que ce que dit le bureau du Procureur et où personne

  9   n'a le droit de témoigner dans un sens différent de ce qu'affirme le

 10   Procureur.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation]

 12   Q.  Répétez encore une fois, Mon Général, votre réponse n'a pas été

 13   consignée au compte rendu.

 14   R.  Un témoin devant ce Tribunal se perd de toute façon dans la cacophonie,

 15   les voix multiples, les chevauchements, et cetera. J'ai dit les choses très

 16   clairement. Le bureau du Procureur de ce Tribunal est comme la femme de

 17   César, personne n'a même le droit de penser une seconde qu'il peut se

 18   tromper.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Un instant. En anglais : "That the

 20   Prosecution is Caesar's." D'accord, parfait.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- Vous voulez dire.

 22   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   Tout d'abord, je n'ai jamais vu personne qui n'était pas prêt à critiquer

 24   l'Accusation, donc je ne pense pas être la femme de César, enfin, bon.

 25   Ensuite, ici, ma position a été totalement déformée par Mme Alaburic.

 26   Je tiens à le dire.

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. SCOTT : [interprétation] Je n'ai jamais dit que je ne dirai jamais que

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  1   la déposition du témoin devrait être remise en question parce qu'il

  2   témoigne pour la Défense, absolument pas. Je n'ai jamais dit ça. Il y a

  3   autre chose, certes, en ce qui concerne la nature même de la déposition

  4   dans l'affaire Kordic, les éléments de preuve qu'on lui a présentés, et

  5   l'évaluation de la Chambre de première instance a été contraire à ce que le

  6   témoin a dit. Mais moi je n'ai jamais dit que le témoin devait être jugé

  7   d'une façon ou d'une autre parce qu'il témoignait pour un camp ou un autre.

  8   Je refuse que ce soit mis au compte rendu.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Dernière question, Monsieur le Président.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, si vous vous rappelez, M. Scott vous a dit que vous

 12   aviez témoigné pour Dario Kordic et que vous considériez Dario Kordic comme

 13   un héros. Vous vous êtes efforcé de lui expliquer que Dario Kordic n'avait

 14   rien d'héroïque à vos yeux et vous avez essayé de lui expliquer pour

 15   quelles raisons vous avez accepté d'être le témoin de la Défense de Dario

 16   Kordic. Mais vous n'avez pas pu terminer votre propos. Je vous prierais

 17   donc maintenant de dire si Dario Kordic est à vos yeux un héros et pour

 18   quelles raisons vous avez décidé de témoigner pour Dario Kordic ?

 19   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, dans l'affaire Kordic ainsi

 20   que dans la présente affaire, ainsi que lorsque Alagic a été mis en

 21   accusation, j'ai proposé de témoigner parce que j'ai vécu à l'époque où les

 22   événements ont eu lieu et j'étais donc dans une situation qui me permettait

 23   d'aider les Juges dans des décisions difficiles à prendre.

 24   Donc, Kordic, un héros ? Mais enfin, il ne peut pas être un héros en ce qui

 25   me concerne.

 26   Q.  Ma dernière question, Général, dites-nous, est-ce qu'à vos yeux, à un

 27   quelconque moment pendant les affrontements en Bosnie-Herzégovine, vous

 28   avez eu la moindre hésitation de la nécessité dans laquelle vous étiez de

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  1   défendre la Bosnie-Herzégovine ou pas ?

  2   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, à l'époque des faits, avant

  3   et maintenant, en Bosnie-Herzégovine, j'ai toujours défendu non pas la

  4   Bosnie-Herzégovine dans ses contours reconnus ou je ne sais quoi, mais le

  5   mode de vie et la civilisation qui avaient cours en Bosnie-Herzégovine. Je

  6   crois que tel était mon obligation car je suis un professionnel. J'aurais

  7   pu, vous savez, me sortir de là. J'avais des moyens pour cela. Mais jour

  8   après jour, je me suis tenu tête haute dans le cadre de la défense de la

  9   Bosnie-Herzégovine.

 10   Q.  Je vous remercie, Général Filipovic.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé de

 12   ces questions supplémentaires. Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, votre audition vient de se terminer. Je

 14   vous remercie au nom de mes collègues d'être venu à La Haye à la demande de

 15   la Défense du général Petkovic pour apporter votre concours à la

 16   manifestation de la vérité. Je vous formule mes meilleurs vœux de retour

 17   dans votre pays et je vais demander à Madame l'Huissière de bien vouloir

 18   vous raccompagner.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, très rapidement,

 20   quelques mots ?

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, si c'est pour nous dire qu'on vous a

 22   écouté, ça vous pouvez le dire. Mais si c'est pour faire des déclarations

 23   sur le procès, et cetera, ce n'est pas le lieu.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, les représentants du

 25   bureau du Procureur, tous ceux qui représentent le Tribunal me saluent

 26   toujours, donc je tiens simplement à remercier la Chambre de première

 27   instance et le Tribunal en disant qu'ils m'ont permis d'exprimer mon point

 28   de vue.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

  2   [Le témoin se retire] 

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, le témoin de demain matin est prêt.

  4   Il n'y aura aucun problème ?

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce témoin est déjà

  6   venu ici, nous lui avons dit de rentrer à l'hôtel. Il est donc tout à fait

  7   disponible et il sera prêt demain matin au début de l'audience.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  9   Maître Kovacic, M. Praljak est malade ? Pourquoi n'est-il pas là ?

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Mon client est tout simplement fatigué. Il

 11   n'est pas malade ni souffrant, mais fatigué. Il a dit que c'est le motif

 12   qu'il fait se sentir pas au mieux de sa forme et qu'il est resté au

 13   quartier pénitentiaire.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous espérons qu'il va se rétablir et qu'il sera là

 15   demain.

 16   Je remercie tout le monde et je vous souhaite une bonne fin de soirée et

 17   nous nous retrouverons donc demain matin à 9 heures.

 18   --- L'audience est levée à 18 heures 57 et reprendra le mardi 8 décembre

 19   2009, à 9 heures 00.

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