Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 24 février 2011

  2   [Plaidoiries de la Défense Pusic]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   [L'accusé Pusic est absent]

  6   --- L'audience est ouverte à 8 heures 59.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, appelez le numéro de l'affaire,

  8   s'il vous plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Affaire

 10   IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame la Greffière.

 12   Au nom de la Chambre, je salue toutes les personnes présentes, les

 13   accusés, Mmes et MM. les Avocats, les membres du bureau du Procureur et

 14   toutes les personnes qui nous assistent, en n'oubliant pas les officiers de

 15   sécurité qui sont en permanence dans la salle d'audience et nos

 16   interprètes.

 17   Je donne donc la parole à l'avocat de M. Pusic, M. Pusic étant

 18   toujours absent car malade. Mais il est représenté, et donc son avocat va

 19   continuer sa plaidoirie.

 20   M. SAHOTA : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Hier, nous avons

 21   examiné certaines des grandes thématiques de la Défense de Pusic. L'un de

 22   ces piliers, c'est que nous avons pour nous soutenir les témoins à charge.

 23   C'était un fonctionnaire, Pusic, qui n'avait aucun pouvoir de décision; ce

 24   n'est pas, comme l'affirme l'Accusation, un des dirigeants du HVO.

 25   Autre grand thème de notre Défense, il repose sur une critique faite par

 26   l'Accusation à l'appui de ses arguments, rappelez-vous, hier soir, nous

 27   parlions des activités qu'avait M. Pusic en fin de l'année 1993, et

 28   maintenant je voudrais me pencher sur une autre allégation faite au


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  1   paragraphe 1 247 du mémoire en clôture de l'Accusation. A cet endroit,

  2   l'Accusation essaie de créer un lien entre le comportement de M. Pusic et

  3   l'évacuation de civils et la saisie de leurs biens à Mostar.

  4   A notre avis, cette thématique n'a pas vraiment été abordée dans notre

  5   mémoire, parce que c'est quelque chose de nouveau que vient d'affirmer

  6   l'Accusation, quelque chose qu'elle n'a pas présenté de façon détaillée

  7   dans l'acte d'accusation ni dans son mémoire préalable au procès, pas plus

  8   que dans les arguments présentés en application de l'article 98 bis par

  9   l'Accusation.

 10   Examinez aussi certains des documents cités par l'Accusation à l'appui de

 11   cette nouvelle affirmation; notes de bas de page 2 669 et 2 678. A notre

 12   avis, ces documents n'impliquent pas M. Pusic, et parfois on ne fait aucune

 13   référence à lui d'ailleurs dans ces documents ainsi cités par l'Accusation.

 14   A l'évidence, je vous le disais hier, c'est à vous qu'il revient de juger

 15   s'il est utile d'attacher un poids quelconque à ces documents, mais lorsque

 16   vous allez étudier le dossier, vous devrez conclure que l'Accusation n'est

 17   pas parvenue à s'acquitter de la charge de la preuve qui lui revient.

 18   Puisque nous sommes en train de voir si certains des documents présentés

 19   par l'Accusation sont dignes de foi, parlons des centres de détention,

 20   autre sujet.

 21   Vous le voyez, grâce à un extrait cité à l'écran, au paragraphe 1 211 du

 22   mémoire en clôture de l'Accusation, qu'affirme-t-elle ? Des choses tout à

 23   fait extravagantes, à notre avis, quant à M. Pusic -- apparemment, il

 24   aurait un contrôle maximum, je ne sais pas ce que ça veut dire, sur les

 25   prisonniers ou sur les centres de détention administrés par le HVO. Nous

 26   avons parlé longuement de ceci dans notre mémoire en clôture, je ne vais

 27   donc pas répéter ce que nous avons dit à cet endroit. Mais s'agissant des

 28   listes qu'a citées l'Accusation pour essayer de corroborer ce qu'elle


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  1   avance, vous verrez qu'il est fait référence à M. Pusic qui aurait signé au

  2   moins 13 listes de prisonniers en un seul jour, le 15 septembre 1993, à

  3   l'Heliodrom, donnant ainsi des détails sur 1 494 détenus.

  4   S'agissant de ces listes, voici ce que nous observons : vous vous

  5   souviendrez sans doute de ce que j'ai dit hier, une des fonctions

  6   principales du service d'échange c'était d'établir et tenir à jour une base

  7   de données des personnes placées sous détention. C'est une exigence

  8   clairement exposée dans le mandat du service chargé des échanges, document

  9   que nous avons déjà cité hier.

 10   Il s'en suit que si, comme le disent ces éléments de preuve, M. Pusic est

 11   celui qui a établi ces listes dans le cadre de l'exercice de ses fonctions

 12   puisqu'il était chef du service chargé des échanges, le fait est que ce

 13   sont des listes et rien d'autre, à notre avis. Par conséquent, on pourrait

 14   y tirer une conclusion différente de celle que souhaite vous voir tirer

 15   l'Accusation.

 16   N'oubliez pas non plus la date évoquée par l'Accusation, 15 septembre 1993.

 17   C'est ce jour-là que sont établies ces 13 listes. Or, la date est

 18   importante parce que le lendemain -- c'est le lendemain de la signature de

 19   l'accord Tudjman-Izetbegovic, un des moments forts des négociations HVO et

 20   BiH en 1993. Cet accord demandait la fermeture de tous les centres de

 21   détention, la libération de tous les détenus. Vous avez posé la question de

 22   savoir si ces listes avaient été éventuellement produites pour, en fait,

 23   frapper d'effet l'accord, appliquer l'accord qui avait été conclu la

 24   veille.

 25   Un dernier point s'agissant de la question des centres de détention, voyez

 26   ce qui est peut-être une contradiction dans les termes utilisés par le

 27   bureau du Procureur.

 28   Il y a des termes directs employés au paragraphe 1 211 s'agissant du rôle


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  1   de Pusic qui aurait exercé un contrôle maximum sur les prisonniers.

  2   Ailleurs dans le mémoire en clôture de l'Accusation, on ne fait aucune

  3   référence à Pusic. Rappelez-vous les parties de ce mémoire de l'Accusation

  4   qui parlent des pouvoirs dont M. Coric et la police militaire sont investis

  5   dans la même région. L'analyse de l'Accusation semble indiquer que la

  6   police militaire était l'organe principal qui avait la responsabilité de

  7   tous les centres de détention du HVO; paragraphes 1 163, 1 062, 1 065, 1

  8   068, 1 079 et   1 081 du mémoire en clôture de l'Accusation.

  9   Parlons d'un autre sujet qui est en rapport direct avec le fonctionnement

 10   des centres de détention du HVO, je veux parler de la question de savoir si

 11   M. Pusic a participé d'une quelconque façon à des missions de travaux

 12   forcés. Nous en parlons de façon détaillée dans notre mémoire en clôture.

 13   Cependant, rappelez-vous que l'Accusation n'a pas apporté la moindre preuve

 14   de l'existence d'un ordre écrit qu'aurait signé M. Pusic, ordre qui aurait

 15   donné l'ordre à des prisonniers d'effectuer des travaux sous contrainte.

 16   En outre, à notre avis, et c'est clair par nos arguments, nous contestons

 17   la crédibilité de Josip Praljak -- pas de façon générale, mais ici, nous

 18   contestons sa crédibilité lorsqu'il témoigne à propos d'un sujet qui risque

 19   de l'incriminer lui-même. Il faut à ce moment-là examiner ce qu'il dit sur

 20   ce sujet de très près, à la loupe. Mais aucun autre témoin à charge n'est

 21   venu témoigner ici pour corroborer ce qu'affirmait Josip Praljak, et c'est

 22   cette caractéristique, l'absence de corroboration, que vous conjuguez avec

 23   d'autres incohérences; par exemple, le fait que Josip Praljak et son

 24   supérieur immédiat, Bozic, que ces deux hommes ne mentionnent pas du tout

 25   M. Pusic dans certains de leurs rapports qui font état des exactions subies

 26   par des prisonniers en fin 1993. C'est important de montrer que ces

 27   rapports n'étaient jamais destinés à M. Pusic; il ne faisait pas partie de

 28   la liste des destinataires. Et si vous examinez tous ces éléments à la


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  1   lumière de ce que nous disons dans notre mémoire en clôture, ceci montre

  2   que l'Accusation n'a pas apporté la preuve, elle ne s'est pas acquittée de

  3   cette charge de la preuve. Elle n'a pas prouvé au-delà de tout doute

  4   raisonnable que M. Pusic était invité d'un pouvoir l'habilitant à ordonner

  5   des travaux forcés à des détenus.

  6   Un dernier élément sur la question des travaux forcés.

  7   Vous voyez ceci à l'écran, plusieurs documents sont cités. Si nous les

  8   citons, c'est pour montrer que c'est à tort qu'ils ont été attribués à M.

  9   Pusic. L'Accusation affirme, en effet, qu'il y a un lien entre le

 10   comportement de M. Pusic et les nombreux meurtres et assassinats ou actes

 11   illégaux qui découlent de cette pratique des travaux forcés à l'Heliodrom.

 12   Rien n'a été apporté en guise de preuve. Vous avez ici le P 03351, P 04325,

 13   P 04393, P 04542, P 04648, P 04718, P 04830, P 04858, P 04860, P 05050, P

 14   05242, P 05280,       P 05307, P 05430, P 07069, P 07118. Ces documents se

 15   trouvent en note de bas de page 2 625 du mémoire en clôture de

 16   l'Accusation.

 17   Abordons maintenant les autres thèmes que j'esquissais auparavant en début

 18   de journée, à savoir le fait que beaucoup de témoins à charge importants

 19   venus témoigner contre Pusic sont venus dire des choses qui, à notre avis,

 20   soutiennent notre thèse et donnent lieu à l'existence et à la conclusion

 21   d'un doute raisonnable.

 22   J'avais déjà ici parlé de Marijan Biskic. Nous en parlons de façon

 23   détaillée dans notre mémoire en clôture, mais j'y reviens. Nous disons que

 24   ce qu'il a déclaré s'agissant de M. Pusic est important. En effet, il

 25   confirme que M. Pusic n'avait aucun pouvoir de décision. Rappelez-vous ce

 26   que nous disions hier. D'après lui, M. Pusic n'était pas habilité à lui

 27   donner le moindre ordre, ni à lui ni à quiconque d'autre. Et ceci montre

 28   une pérennité, une continuité par rapport à ce que concluaient les Témoins


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  1   DZ et DV, qui, eux, avaient eu des contacts réguliers avec M. Pusic, et

  2   ceci, depuis le printemps 1993, alors que Biskic, lui, est arrivé en Bosnie

  3   en novembre 1993.

  4   Regardez un autre extrait du témoignage de M. Biskic. Il donne son avis sur

  5   le mandat -- sur les pouvoirs donnés à la Commission chargée des échanges.

  6   Il le fait dans une lettre envoyée à Susak le 7 décembre 1993. Dans cette

  7   lettre, il demande la création d'une commission au niveau ministériel. Il

  8   décrit le service chargé des échanges comme étant une entité composée de

  9   personnes qui ne sont pas aux niveaux de responsabilité les plus élevés

 10   dans le HR HB. Il dit :

 11   "Personne ne contrôle son travail, et il n'est pas compétent pour faire ce

 12   travail, qui est pourtant un travail de responsabilité."

 13   On voit bien ici que Pusic n'avait pas le pouvoir nécessaire pour donner

 14   des ordres à des fonctionnaires du HVO. C'est bien ce que dit Biskic ici.

 15   Je vais terminer l'examen que je faisais des éléments de preuve présentés

 16   en l'espèce en examinant le rôle de Pusic s'agissant de la libération des

 17   prisonniers fin 1993.

 18   Il est utile de se souvenir de ce que disait Watkins, un autre témoin

 19   international. Nous avons examiné son témoignage de façon détaillée dans

 20   notre mémoire, et il est juste de dire que tout ce qu'il dit n'est pas

 21   nécessairement accepté par la Défense. Cependant, lorsque arrive le mois de

 22   décembre 1993, peu de temps après le 10 décembre, lorsque Mate Boban, par

 23   une déclaration, demande la fermeture de tous les centres de détention et

 24   demande la libération de tous les détenus, on demande à Watkins de déposer.

 25   C'est ce qu'il déclare à propos du rôle joué par M. Pusic. Il dit que :

 26   "Il tient à avancer et à faire libérer le plus de prisonniers possible, et

 27   il se tourne vers la FORPRONU pour ce faire plutôt que le CICR. Et donc,

 28   par rapport à la MOCE, M. Pusic essaie de poursuivre ce processus d'échange


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  1   de prisonniers annoncé par Boban, qui lance là un signal important pour

  2   montrer qu'il veut coopérer avec la communauté internationale."

  3   C'est la référence du compte rendu d'audience 18 824 et 25.

  4   Nous ne faisons pas de concessions quant au pouvoir qu'aurait M. Pusic de

  5   libérer des prisonniers. Ce que nous disons, c'est qu'à ce moment-là, tout

  6   ce qu'il faisait, c'était faire des listes et qu'il les transmettait à qui

  7   de droit, de façon à traduire en actes la déclaration qu'avait faite Mate

  8   Boban le 10 décembre.

  9   A notre avis, la déposition de M. Watkins réfute directement ce

 10   qu'affirme l'Accusation lorsqu'elle dit que M. Pusic a fait obstacle à

 11   l'échange ou à la libération de prisonniers. Nous parlons de cela de façon

 12   plus détaillée dans notre mémoire en clôture.

 13   A ce stade, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais passer à

 14   l'examen de ce qu'ont dit trois témoins à charge, tous libérés après

 15   décembre 1993, et sont venus témoigner devant vous. Ici, vous voyez leurs

 16   témoignages dans leur ensemble. Ils montrent que M. Pusic n'avait aucun

 17   pouvoir lorsqu'il s'agissait de libérer des prisonniers. Et il faut

 18   conclure de leurs témoignages que le rôle de M. Pusic se limitait à celui

 19   de la délivrance de lettres de libération et de certificats.

 20   Lizde. Lizde, d'après ce que Garic a dit, il a été libéré avec d'autres

 21   détenus, non pas parce qu'il y aurait eu un ordre direct de M. Pusic. S'il

 22   a été libéré, c'est parce que les autorités du HVO avaient décidé de faire

 23   un geste de bonne volonté et de libérer de façon unilatérale et

 24   inconditionnelle un groupe de détenus, et ceci suivait les termes de

 25   l'accord du 14 septembre entre Izetbegovic et Tudjman.

 26   Paragraphe 312 de notre mémoire en clôture, vous verrez là davantage de

 27   détails sur ce qu'a concédé Josip Praljak. A un moment donné, il a dit

 28   qu'il s'était peut-être trompé, qu'il avait peut-être à tort attribué la


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  1   responsabilité de la décision de libérer M. Lizde à M. Pusic.

  2   Puisque nous parlons de ce témoin-ci, j'aimerais corriger une autre erreur

  3   que nous avons constatée dans le mémoire en clôture de l'Accusation.

  4   L'Accusation affirme, au paragraphe 1 198 - note de bas de page 2 504 - que

  5   M. Pusic avait un bureau dans le même bâtiment que celui où se trouvaient

  6   les bureaux de MM. Stojic et Coric. Ceci se base sur un document présenté

  7   par van der Grinten, P 0826 [comme interprété], qui dit que lui, il a

  8   rencontré ces deux [comme interprété] hommes, Stojic, Pusic et Coric, le

  9   même jour dans le même bureau. Ce que nous disons, c'est que ce document ne

 10   prouve pas forcément que le bureau de M. Pusic se trouvait dans le même

 11   bureau [comme interprété] que celui où le bureau de ces deux hommes se

 12   trouvait. Il a dit même le contraire. Dans sa déposition, pages du compte

 13   rendu d'audience     17 835 et 36, M. Lizde confirme que le bureau de M.

 14   Pusic se trouvait au centre-ville, qu'il était à 7 kilomètres des

 15   installations de détention de l'Heliodrom et qu'il était près du stade de

 16   football. M. Lizde a donné des indications quant à l'itinéraire, et c'est

 17   confirmé par le transport sur les lieux de la Chambre de première instance,

 18   c'est la référence C 0001, page 10. Le compte rendu de cette visite parle

 19   du fait que le bureau de M. Pusic se trouve près du vieux stade Velez.

 20   Le deuxième témoin dont nous voudrions citer les propos c'est

 21   Rizvanbegovic. C'était un intellectuel en Bosnie, une nouvelle personnalité

 22   montante en Bosnie-Herzégovine qui n'avait jamais entendu parler de M.

 23   Pusic. Rizvanbegovic, nous évoquons sa déposition aux paragraphes 338 à 340

 24   de notre mémoire en clôture. Il est venu confirmer, lorsqu'il parlait des

 25   conditions dans lesquelles il avait été libéré, il a confirmé qu'il avait

 26   été libéré après ce qu'avait dit Mate Boban et en réaction à des pressions

 27   exercées par diverses organisations internationales. Et même si M. Pusic a

 28   signé le certificat de libération en date du 10 décembre 1993, il a dit,

 


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  1   sans aucune ambiguïté, que le rôle joué par M. Pusic dans sa libération

  2   était tout à fait insignifiant. Il s'agit de la page du compte rendu

  3   d'audience 2 268 et 69.

  4   Est-ce que nous pouvons passer rapidement à huis clos partiel, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière.

  7   M. SAHOTA : [aucune interprétation]

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

  9   Monsieur le Président.

 10   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. SAHOTA : [interprétation] Excusez-moi. J'ai été un petit peu trop vite.

 15   Si vous déclarez M. Pusic coupable parce qu'il aurait un pouvoir

 16   quelconque, à ce moment-là, il faut accepter toutes les conclusions

 17   présentées par l'Accusation. Il faut faire un choix dans les éléments qui

 18   seraient cohérents et il faudrait exclure ce qui ne serait pas cohérent,

 19   par conséquent, pour trouver une systématicité qui n'est pas, à notre avis,

 20   justifiée. Le choix est clair. Il faut croire Masovic, Cupina, Josip

 21   Praljak, si vous allez dans ce sens, des témoins qui avaient une revanche à

 22   prendre ou qui étaient frustrés par rapport à M. Pusic, comme les Témoins

 23   BB, BC, BD, et qui n'ont eu que peu de contact avec Pusic, des témoins

 24   indirects, ou il faut croire ce que dit Bozic, Lavric et les documents qui

 25   viennent du SIS.

 26   A défaut, Messieurs les Juges, vous pourriez accorder du poids à ce qu'ont

 27   dit d'autres témoins internationaux, comme DZ ou DV, et d'autres initiés

 28   comme Biskic.

 


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  1   Le fait qu'après cinq ans de procès l'Accusation peut vous dire

  2   sérieusement qu'il faut condamner M. Pusic parce qu'il avait des pouvoirs

  3   découlant du poste qu'il occupait, à savoir ce poste de président d'une

  4   commission qui n'existait pas, celle du 6 août, ou parce que M. Suad Cupina

  5   vous a dit certaines choses est vraiment invraisemblable. On vous demande

  6   de le condamner parce que ça aurait été un dirigeant haut placé de

  7   l'entreprise criminelle commune, et c'est contraire à la logique. Le fait

  8   que l'Accusation puisse se lever et affirmer qu'elle a apporté la preuve de

  9   sa responsabilité au-delà de tout doute raisonnable alors qu'il y a une

 10   foison d'éléments contradictoires, ceci est vraiment un défi à la

 11   crédibilité, ceci nous laisse incrédules.

 12   Parlons maintenant de la responsabilité du supérieur hiérarchique. Je

 13   pourrais parler de façon très brève sur ce point et le dire en quelques

 14   mots.

 15   Jamais l'Accusation n'a prouvé que M. Pusic aurait eu des subordonnés

 16   identifiables, et ceci, du tout face aux affirmations invraisemblables que

 17   fait l'Accusation quant à son état, sa situation et son influence

 18   considérable. Ceci corrobore, conforte et consolide tous nos arguments et

 19   montre une des failles principales dans la thèse de l'Accusation, à savoir

 20   qu'elle n'est pas capable de montrer la place qu'occupe M. Pusic dans ce

 21   grand projet directeur d'une entreprise criminelle commune sans faille.

 22   Parlons justement de l'entreprise criminelle commune. Nous disons que ce

 23   que Me Khan et Karnavas ont dit est tout à fait juste, et nous soutenons

 24   leurs propos. La théorie de l'entreprise criminelle commune ne fait pas

 25   partie du droit international coutumier vu les décisions récentes prises

 26   par la Cour européenne de la Justice, puis la pratique de la [inaudible].

 27   Veuillez examiner aussi la question de la responsabilité de l'entreprise

 28   criminelle commune sous un éclairage quelque peu différent. Nous avons


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  1   parlé de cette théorie de l'Accusation aux paragraphes 41 à 46 de notre

  2   mémoire en clôture. Nous disons que c'est une théorie trop simpliste,

  3   élémentaire, elle est monodimensionnelle, elle est naïve. Pourquoi le dire

  4   ainsi ? C'est parce que la théorie avancée par l'Accusation dépeint le HVO

  5   comme étant un outil dans les mains d'une poignée d'hommes politiques

  6   nationalistes de Croatie et de Bosnie qui cherchent à mettre en place un

  7   système monolithique et sans faille d'entreprise criminelle commune.

  8   Je vous disais que j'avais une formation en histoire. Voyons comment

  9   parle l'Accusation de l'entreprise, ça me rappelle ce que les marxistes

 10   disaient lorsqu'ils parlaient de l'Etat d'après l'école instrumentaliste.

 11   L'Etat c'était un outil dans les mains d'une classe économique précise, et

 12   dans cette analyse monodimensionnelle, il n'y a qu'une classe dirigeante

 13   qui contrôle l'appareil d'Etat.

 14   Mais si vous remplacez le terme "classe dirigeante" par la

 15   description qu'on vous a faite des hommes politiques dans la théorie de

 16   l'entreprise criminelle commune, il y a peut-être un parallélisme manifeste

 17   qui apparaît. A notre avis, il y a des failles dans la théorie de

 18   l'Accusation quant à l'entreprise criminelle commune. Me Karnavas vous le

 19   montrait très clairement dans son mémoire en clôture. Que peut-on dire pour

 20   critiquer la théorie de l'Accusation ? C'est à peu près la même critique

 21   que celle de l'école marxiste instrumentaliste de l'appareil d'Etat.

 22   L'Accusation exclue dans sa théorie toute possibilité d'une évolution de la

 23   politique du HVO face à ce qui se passe sur le terrain au jour le jour. La

 24   théorie de l'Accusation exclue la possibilité d'une action autonome du HVO

 25   par rapport à Tudjman et autonome par rapport à la République de Croatie.

 26   Pour le dire autrement, l'Accusation, sa théorie, exclue la possibilité

 27   d'une réponse du HVO motivée par la volonté de permettre la survie d'un

 28   Etat qui ne faisait que naître.


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  1   Ici, cette discussion de théorie politique qui vient de mes études en

  2   histoire m'amène à dire ceci : il est nécessaire de se poser la question de

  3   savoir si le conflit croato-musulman en Bosnie-Herzégovine de 1991 à 1993

  4   peut être caractérisé comme résultant de cette entreprise criminelle

  5   commune monolithique qui aurait été dirigée par des hommes politiques

  6   nationalistes. Il faut se poser la question donc de savoir si c'est une

  7   question appropriée à poser devant un tribunal ou bien si elle ne devrait

  8   être laissée aux étudiants de l'histoire.

  9   Notre position est que le bureau du Procureur a étiré la théorie de la

 10   responsabilité au titre de l'entreprise criminelle commune au-delà de toute

 11   limite raisonnable; ils ont défini les objectifs de cette entreprise

 12   criminelle commune, la portée et le cadre territoriaux et temporels de

 13   cette dernière, et ce faisant, ils ont étiré cette théorie au-delà de ses

 14   limites. Mais lors du procès, il y a eu très peu d'éléments de preuve, en

 15   tout cas pas d'élément de preuve direct, indiquant que les accusés auraient

 16   conspiré avec Tudjman et d'autres dirigeants allégués de l'entreprise

 17   criminelle commune aux fins de procéder au nettoyage ethnique de la Bosnie.

 18   Par conséquent, l'Accusation vous demande de procéder à des déductions

 19   approximatives dont nous estimons qu'elles ne peuvent pas être justifiées

 20   en partant d'une quantité considérable d'éléments de preuve de nature

 21   historique présentés à la Chambre.

 22   Nous relevons, Messieurs les Juges, l'approche qui a été retenue par la

 23   Chambre d'appel dans l'affaire Blaskic aux paragraphes 518 à 523 de

 24   l'arrêt, où la Chambre d'appel a relevé qu'il y avait une quantité

 25   considérable d'éléments contradictoires et qu'il n'était pas possible de

 26   tirer des conclusions contradictoires quant à la responsabilité pénale

 27   individuelle de l'accusé.

 28   Messieurs les Juges, je voudrais revenir sur le texte d'Hannah Arendt


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  1   qui a déjà été cité par l'Accusation. C'était le moment où elle se penchait

  2   sur la question de savoir quelle devrait être la fonction d'un tribunal,

  3   elle se demandait si un tribunal est censé se pencher sur des questions

  4   historiques d'ordre général ou bien s'il n'était pas plutôt investi d'une

  5   fonction particulière au regard de "la théorie d'une fin supérieure au sein

  6   du système de la justice pénale internationale." Ceci figure en page 253 du

  7   premier épilogue de son ouvrage, et je cite :

  8   "La finalité d'un procès est de rendre la justice, et rien d'autre. Tout

  9   objectif autre, même le plus noble, ne peut que s'écarter de cet objectif -

 10   même lorsqu'il s'agit de Robert G. Storey, procureur au tribunal de

 11   Nuremberg, qui proposait de constituer 'La documentation du régime

 12   d'Hitler, documentation qui survivrait aux siècles' - toute autre finalité

 13   s'écarterait de cette fonction, à savoir peser les éléments retenus contre

 14   l'accusé, rendre un jugement et appliquer une peine adaptée."

 15   Je poursuis :

 16   "Le jugement dans le procès Eichmann, dont les deux premières parties ont

 17   été rédigées en fonction de la théorie d'une finalité supérieure comme il a

 18   été présenté à l'intérieur et à l'extérieur de ce prétoire, ne pourrait

 19   être plus clair à cet égard : il convient de résister à toute tentative

 20   d'élargir le cadre d'un procès. Le tribunal ne saurait se permettre de

 21   s'aventurer sur un terrain qui ne se trouve pas être de son ressort… le

 22   procès possède une mécanique qui lui est propre, qui est définie dans le

 23   droit et qui ne change pas quel que soit le sujet sur lequel on se penche.

 24   "Les juges, de plus, ne sauraient enquêter sur ces limites sans

 25   prendre le risque d'un échec total" --

 26   M. LE JUGE PRANDLER : [aucune interprétation]

 27   M. SAHOTA : [interprétation] "Non seulement le tribunal ne dispose pas des

 28   outils nécessaires pour se pencher sur des questions d'ordre général, mais


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  1   la parole qu'il prononce repose sur une autorité dont le poids dépend

  2   justement de sa propre limitation. Personne n'a fait de nous, les juges,

  3   des personnes censées se pencher sur des questions extérieures au champ du

  4   droit, questions pour lesquelles il convient de n'accorder à notre opinion

  5   aucun poids supplémentaire par rapport aux opinions de ceux qui s'y

  6   consacrent par l'étude de la pensée. Par conséquent, la question qui était

  7   communément posée lors du procès d'Eichmann, à savoir quel bien en ressort-

  8   il, reçoit ici la réponse la plus claire possible : justice sera rendue."

  9   Le mandat du présent Tribunal, Messieurs les Juges, affirme que

 10   l'objectif n'est pas seulement de rendre la justice, mais également

 11   d'encourager un processus de réconciliation nationale. A la lumière de

 12   ceci, je crois que la façon dont le Procureur caractérise le HVO comme

 13   ayant constitué une entreprise criminelle commune monolithique, une

 14   machinerie bien huilée au sein de laquelle les ordres se transmettaient de

 15   haut en bas, n'est pas dans cet esprit. Je vous réfère au paragraphe 46 du

 16   mémoire en clôture de l'Accusation, ce qui est essentiel ici, c'est que

 17   parmi les politiques du HVO nous trouvons également les tentatives

 18   d'accorder des droits pleins et entiers aux combattants du HVO, leur

 19   accorder un plein droit à leur retraite.

 20   Personne ne peut affirmer qu'un procès tel que celui-ci peut se

 21   substituer à une enquête d'historiens. Le danger en espèce c'est, pour les

 22   Juges de la Chambre, de s'aventurer dans un exercice qui reviendrait au

 23   révisionnisme en histoire lorsque la question est posée de savoir s'il

 24   existait ou non une entreprise criminelle commune.

 25   Alors, je voudrais revenir sur un autre point de nos arguments

 26   concernant la responsabilité au titre de l'entreprise criminelle commune, à

 27   savoir la participation de M. Pusic à une entreprise criminelle commune

 28   dont on a allégué qu'elle fonctionnait comme une machinerie bien huilée au


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  1   sein de laquelle les ordres se transmettaient de haut en bas.

  2   Au paragraphe 49 de notre mémoire en clôture, nous soulignons

  3   l'existence d'une clause d'exclusion, qui apparaît dans l'article 98 bis et

  4   dans les arguments que nous avons avancés en application de ce dernier. Au

  5   paragraphe 230 de l'acte d'accusation, il est clairement indiqué que M.

  6   Pusic ne se voit pas accusé d'avoir commis des crimes dans la municipalité

  7   de Gornji Vakuf en janvier 1993 et dans celle de Prozor en 1992. Nous avons

  8   déjà avancé précédemment des arguments indiquant que cette clause

  9   d'exclusion était incohérente avec la notion même que M. Pusic aurait été

 10   un participant ou même un dirigeant de l'entreprise criminelle commune

 11   alléguée. Et dans nos arguments en application de l'article 98 bis, nous

 12   avons fait le tour de cette question et nous avons conclu en posant une

 13   question. Nous avons demandé au Procureur d'expliquer pourquoi M. Pusic

 14   avait la possibilité de participer à cette entreprise criminelle commune et

 15   comment il pouvait y participer étant donné la teneur de cette clause

 16   d'exclusion. Vous vous rappellerez peut-être que l'Accusation a choisi de

 17   ne pas répondre à cette question dans la présentation des arguments en

 18   application de l'article 98 bis.

 19   Alors, environ deux ans plus tard, on nous a fourni une réponse.

 20   L'Accusation nous a donné sa réponse, qui est contradictoire à bien des

 21   égards, parce que dans le mémoire en clôture de l'Accusation, note en bas

 22   de page 2 328, il est question d'éléments de preuve montrant que M. Pusic

 23   aurait rejoint les rangs des participants à cette entreprise criminelle

 24   commune au plus tard en avril 1993. Pendant leur réquisitoire, l'Accusation

 25   a ajusté son point de vue, ce qui revient à dire qu'elle a changé son fusil

 26   d'épaule, en réalité, en affirmant catégoriquement que le rôle de M. Pusic

 27   et sa participation au sein de l'entreprise criminelle commune avaient

 28   commencé en avril 1993.


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  1   Comme vous pouvez le voir dans l'extrait qui figure à l'écran devant vous,

  2   je cite :

  3   "Des éléments montrant le rôle et la participation de Pusic dans

  4   l'entreprise criminelle commune pendant plusieurs mois à partir du mois

  5   d'avril 1993 et au-delà sont convaincants et cohérents."

  6   Page du compte rendu d'audience 52 141.

  7   Alors, Monsieur le Président, Monsieur les Juges, le fait que l'Accusation

  8   n'est même pas en mesure d'établir quand M. Pusic est censé avoir commencé

  9   à participer à cette entreprise criminelle commune est suffisamment

 10   éloquent de notre point de vue. Nous suggérons que ceci doit soulever un

 11   doute plus que raisonnable quant à la participation même de M. Pusic à

 12   l'entreprise criminelle alléguée, et cela nous donne un autre exemple de la

 13   façon dont l'Accusation a façonné ses arguments afin de les faire

 14   correspondre aux paramètres de ce procès tels qu'ils évoluaient au fur et à

 15   mesure.

 16   Une autre partie de nos arguments relatifs à l'entreprise criminelle

 17   commune est relative aux critères nécessaires à l'établissement d'une

 18   participation significative pour un membre à l'entreprise criminelle

 19   commune alléguée.

 20   Au début de son réquisitoire, l'Accusation a essayé d'établir des

 21   comparaisons entre Pusic et Prcac. Mais l'affaire Prcac, à notre avis, est

 22   tout à fait différente de celle qui nous occupe ici. Les accusés dans ce

 23   procès-là, et notamment dans le procès Kvocka, étaient cantonnés à

 24   différents centres de détention, et Prcac lui-même était l'adjoint du

 25   commandant d'Omarska. Et il y a eu plusieurs témoins lors de son procès qui

 26   ont déposé à l'appui de ceci. Alors, Messieurs les Juges, nous avançons

 27   que, à la différence de Pusic, le rôle qui a été celui de Prcac dans ce

 28   centre de détention rend impossible toute comparaison significative entre


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  1   ces deux affaires.

  2   Je voudrais passer maintenant à la question de la participation

  3   significative alléguée de M. Pusic, et nous estimons que l'Accusation n'a,

  4   en la matière, rien démontré de convaincant.

  5   Nous estimons que la seule façon possible de justifier une condamnation

  6   consisterait à prouver que M. Pusic a pu contribuer de façon significative

  7   à l'entreprise criminelle commune en dépit du fait qu'il ne jouissait

  8   d'aucune autorité lui permettant de donner des ordres ou d'exercer la

  9   moindre influence ou autorité sur les membres du HVO. Nous suggérons qu'il

 10   serait erroné sur le plan des principes, tout comme il serait erroné de

 11   tirer cette conclusion du point de vue des critères qui doivent être

 12   satisfaits, donc de parvenir à la conclusion qu'il y aurait là

 13   responsabilité pénale avérée, et cela reviendrait à s'aventurer sur le

 14   terrain d'une culpabilité par association. Nous rappelons à cet effet la

 15   façon dont la Chambre de première instance dans l'affaire Milutinovic a

 16   constaté que le président de Serbie n'avait pas contribué de façon

 17   significative à l'entreprise criminelle commune. C'est la façon dont cette

 18   Chambre a conclu.

 19   Alors, je voudrais vous demander de vous pencher très brièvement sur le

 20   jugement en première instance dans l'affaire Milutinovic, non pas pour

 21   faire des comparaisons entre l'espèce et l'affaire Milutinovic, mais juste

 22   pour porter à l'attention des Juges l'approche particulière adoptée par

 23   ladite Chambre de première instance sur ce point particulier. Et à cet

 24   effet, j'attire votre attention sur le paragraphe 284, je cite :

 25   "Si la charge de la preuve avait consisté à mettre en balance différentes

 26   probabilités plutôt que d'établir quelque chose au-delà de tout doute

 27   raisonnable, le résultat aurait pu être différent. Cependant, ce n'est pas

 28   la mission d'une Chambre de première instance que d'évaluer la culpabilité


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  1   au sens moral de Milan Milutinovic, mais bien plutôt de se demander si

  2   l'Accusation a démontré au-delà de tout doute raisonnable les allégations

  3   figurant à l'acte d'accusation."

  4   Messieurs les Juges, si M. Milutinovic a pu être acquitté sur ce fondement,

  5   nous ne voyons pas de raison pour laquelle un fonctionnaire subalterne

  6   comme M. Pusic ne pourrait pas être lui aussi acquitté.

  7   Pour finir sur ce sujet particulier de l'entreprise criminelle commune et

  8   sur le point particulier de l'intention sous-jacente à une telle entreprise

  9   criminelle commune.

 10   Dans leur réquisitoire, l'Accusation s'est référée au document P 07007. Il

 11   s'agit d'un rapport du SIS pour le mois de décembre 1993, et il s'agissait

 12   là d'un rapport du SIS contenant des allégations de faute professionnelle

 13   ou d'écart de conduite proférées à l'encontre de M. Pusic. On y trouve

 14   également une allégation selon laquelle M. Pusic aurait agi contre

 15   l'intérêt du peuple croate, et ceci figure en pages 52 143 à 145 du compte

 16   rendu d'audience pendant le réquisitoire de l'Accusation. Il s'agit d'un

 17   document émanant du SIS, et je le répète, c'est un document qui allègue que

 18   M. Pusic aurait agi contre les intérêts du peuple croate.

 19   Alors, l'Accusation ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre. Elle

 20   ne peut pas affirmer que M. Pusic aurait été un opportuniste patenté

 21   agissant contre les intérêts du peuple croate et en même temps affirmer,

 22   comme elle le fait dans son réquisitoire en page du compte rendu d'audience

 23   52 146, que M. Pusic aurait été un nationaliste extrémiste qui était prêt à

 24   mentir concernant l'idéologie qui était la sienne afin de servir cette

 25   dernière. A l'appui de cette affirmation, l'Accusation cite d'ailleurs le

 26   document P 08431.

 27   Je n'en dirai pas plus sur l'entreprise criminelle commune et je vais

 28   passer à la question de la peine.


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  1   Messieurs les Juges, pour quelqu'un qui appartient au système anglo-saxon

  2   c'est quelque chose d'assez inédit pour moi que d'avoir à me pencher sur la

  3   question de la peine avant une éventuelle condamnation. Mais je voudrais

  4   porter à l'attention des Juges tous les éléments d'information nécessaires

  5   à cet effet, à savoir la personnalité, le contexte familial, les détails

  6   personnels ainsi que la situation d'un point de vue médical de notre

  7   client. Vous vous êtes déjà penchés, Messieurs les Juges, sur une grande

  8   quantité de dossiers médicaux de notre client lorsque vous avez eu à

  9   décider quant à des demandes de mise en liberté provisoire.

 10   M. Pusic voudrait exprimer sa reconnaissance aux Juges de la Chambre pour

 11   la compréhension et la compassion dont ils ont fait preuve. Nous avançons

 12   que M. Pusic a également fait preuve du plus grand respect du présent

 13   Tribunal pendant les périodes de liberté provisoire qui lui ont été

 14   accordées.

 15   Quant à l'absence de M. Pusic aujourd'hui dans ce prétoire, elle

 16   n'est absolument pas liée à un manque de respect à l'égard des victimes.

 17   Les raisons de son absence sont tout à fait claires, il n'est pas en bonne

 18   santé, et c'est la seule raison de son absence.

 19   Les Juges de la Chambre sont très bien informés de l'état médical de

 20   M. Pusic, au sujet duquel lui-même s'est adressé à plusieurs reprises à la

 21   Chambre. Nous vous rappelons la date du 5 octobre 2006, page 7 950 du

 22   compte rendu d'audience, 50 et 51. M. Pusic a alors dit aux Juges de la

 23   Chambre qu'il trouvait insoutenable d'écouter les dépositions des victimes

 24   dans l'espèce.

 25   Donc, lorsque le Procureur, dans son réquisitoire, avance que M.

 26   Pusic n'aurait pas exprimé le moindre remords, nous nous opposons avec

 27   véhémence à une telle affirmation. Messieurs les Juges, M. Pusic a

 28   également déclaré que sa maladie était liée aux images de la guerre et aux


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  1   événements qui ont marqué de façon indélébile sa mémoire, et à tout ce

  2   qu'il a vu après 1994.

  3   Avant de finir ma plaidoirie, je voudrais vous remercier, Messieurs

  4   les Juges, pour la possibilité que vous m'avez donnée, ainsi qu'à M.

  5   Ibrisimovic et aux autres membres de la Défense Pusic de mettre un terme à

  6   nos travaux dans ce prétoire ainsi qu'à l'extérieur de celui-ci. Je

  7   voudrais exprimer, au nom de M. Pusic, ma reconnaissance et réitérer les

  8   observations qui ont été formulées le 5 octobre 2006.

  9   Pour conclure, je voudrais demander aux Juges de la Chambre de faire

 10   preuve de pondération et de ne pas hésiter à s'y reprendre à plusieurs fois

 11   avant de prononcer un jugement concernant M. Pusic. Au cours des mois qui

 12   vont suivre, vous aurez amplement l'opportunité de réfléchir et de prendre

 13   une décision quant à la question de savoir si les éléments de preuve dont

 14   vous avez été saisis étaient réellement les allégations de l'Accusation.

 15   Vous aurez à décider si les éléments de preuve dont vous avez été saisis

 16   étaient les conclusions que l'Accusation vous demande de tirer.

 17   Messieurs les Juges, j'ai l'obligation également de vous rappeler que

 18   vous ne pouvez condamner quelqu'un au-delà de tout doute raisonnable, en

 19   l'espèce M. Pusic, que si vous êtes absolument certains de sa culpabilité.

 20   Si une autre explication est possible à vos yeux, vous serez contraints de

 21   constater qu'il existe un doute possible, et dans ce cas-là, vous ne

 22   pourrez que conclure à l'acquittement de M. Pusic de tous les chefs retenus

 23   à l'acte d'accusation.

 24   L'Accusation a terminé par un appel très éloquent qui n'aura pas

 25   manqué de marquer votre mémoire, et les mots de M. Scott résonnent toujours

 26   dans ce prétoire. Je voudrais terminer en me référant à la déposition d'une

 27   victime, à la voix d'une victime quant à ce qui a été le rôle de M. Pusic,

 28   je parle de Mustafa Hadrovic, qui a dit, je cite :

 


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  1   "C'était Berislav Pusic, et je dois dire que ceci restera dans ma

  2   mémoire aussi longtemps que je vivrai. J'ai confiance en vous, Messieurs

  3   les Juges, j'ai confiance en la décision qui sera la vôtre, malgré tout ce

  4   que j'ai eu à traverser."

  5   Je n'ai rien à ajouter. Merci, Messieurs les Juges.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je remercie la Défense de M. Pusic. J'ai

  7   attendu parce que l'interprète n'avait pas terminé.

  8   Alors, en application du Règlement, je me tourne vers M. le Procureur pour

  9   lui demander s'il y a réplique de sa part.

 10   M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 11   Messieurs les Juges.

 12   En effet, Monsieur le Président. Comme l'Accusation l'a mentionné plus tôt

 13   cette semaine, et je voudrais répéter que je n'avais absolument pas

 14   l'intention de prendre les devants, mon intervention s'insérait entre les

 15   interventions de deux Défenses, mais bon, je répète que nous aurons besoin

 16   d'un temps assez considérable pour présenter des éléments en réplique.

 17   C'est quelque chose qui ne nous apparaît pas à la dernière minute. C'était

 18   clair depuis un moment déjà. Nous intervenons donc en toute bonne foi.

 19   Donc nous demanderons du temps pour présenter des éléments en réplique afin

 20   de pouvoir reprendre les éléments qui ont été avancés dans les plaidoiries,

 21   notamment la légitimité et les agissements de la présidence de la Bosnie-

 22   Herzégovine, et le rôle d'Izetbegovic dans ce cadre, y compris ce qui est

 23   présenté comme une déclaration, et la caractérisation de cette dernière. La

 24   Défense a allégué que la participation des Croates au référendum serait

 25   contradictoire avec la théorie d'une entreprise criminelle commune en

 26   Herceg-Bosna, mais ce n'est pas du tout le cas. Et nous souhaiterions

 27   pouvoir répliquer également à l'argument de la Défense selon lequel les

 28   autorités de la Bosnie-Herzégovine ne fonctionnaient pas comme raison


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  1   d'être même de l'Herceg-Bosna. L'Accusation voudrait également répliquer

  2   aux arguments de la Défense relatifs à la branche militaire du HVO, qui a

  3   été présentée comme la seule force armée qui fonctionnait et qui était en

  4   mesure de s'opposer aux Serbes en 1992, ainsi que l'argument selon lequel

  5   le HVO aurait été partie intégrante des forces armées de la Bosnie-

  6   Herzégovine. A ce sujet, l'Accusation est toujours en désaccord.

  7   La Défense a passé un temps considérable à attaquer les témoins de

  8   l'Accusation. Nous souhaiterions pouvoir répliquer à ceci également.

  9   Certains des accusés ont également consacré un temps considérable à

 10   affirmer que des témoins qui étaient des représentants de la communauté

 11   internationale n'auraient pas été informés ou auraient été mal informés.

 12   Nous souhaiterions pouvoir répliquer à cela également. Nous pourrons être

 13   amenés également à nous repencher sur la question de la crédibilité d'un

 14   certain nombre de témoins de la Défense.

 15   Les Juges de la Chambre ont eu l'occasion d'entendre un certain nombre

 16   d'attaques visant les témoins de l'Accusation et leur crédibilité. Alors,

 17   jusqu'à présent, l'Accusation a préféré choisir une approche consistant à

 18   ne parler que de ses propres témoins et de ne pas se pencher trop sur les

 19   témoins de la Défense. Mais compte tenu des attaques qui ont visé les

 20   témoins de l'Accusation, je souhaite avancer maintenant qu'il serait

 21   parfaitement équitable de nous donner la possibilité de répliquer d'une

 22   façon ou d'une autre.

 23   Nous souhaiterions également répondre aux arguments systématiques des

 24   différents accusés consistant à dire que la fourniture par la Croatie

 25   d'aide militaire et humanitaire à la Bosnie-Herzégovine serait, en quelque

 26   sorte, totalement incohérente avec la théorie d'une entreprise criminelle

 27   commune en Herceg-Bosna. Le Procureur a été accusé d'avoir complètement

 28   passé sous silence un certain nombre d'éléments, et je souhaiterais pouvoir


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  1   y répondre.

  2   Nous souhaiterions également pouvoir répliquer quant aux déclarations

  3   faites par la Défense Prlic relativement au fonctionnement du gouvernement

  4   du HVO, et également par rapport aux arguments des Défenses Stojic et

  5   Petkovic à l'égard du rôle de Prlic au sein du HVO.

  6   Nous souhaiterions pouvoir revenir sur l'argument de Stojic quant aux

  7   différentes composantes du département de la Défense du HVO et à

  8   l'allégation selon laquelle ils auraient fonctionné de façon indépendante,

  9   également les arguments de la Défense Stojic concernant à dire que ce

 10   dernier n'aurait pas eu de compétence en matière militaire et d'émission

 11   d'ordres directs, ainsi qu'à l'argument des Défenses Stojic et Petkovic

 12   selon lequel Stojic n'aurait pas été responsable des camps du HVO.

 13   Nous souhaiterions pouvoir répliquer aux arguments de la Défense

 14   Petkovic concernant le 30 juin, ce qui est présenté comme étant le début de

 15   la guerre.

 16   Nous souhaiterions également répliquer en détail aux arguments de la

 17   Défense concernant les territoires occupés, le statut des prisonniers et

 18   les obligations qui doivent être prises en considération. Il y a un point

 19   de droit important également, selon l'Accusation : un nombre d'arguments

 20   assez importants de la Défense ont été présentés de façon erronée, à notre

 21   avis, et il faudrait présenter les choses de façon plus détaillée et plus

 22   précise à cet égard pour les Juges de la Chambre, indépendamment de la

 23   question de savoir s'ils seront d'accord avec l'Accusation ou non au terme

 24   de cet exercice. Nous souhaiterions pouvoir répliquer.

 25   Alors, le Juge Trechsel a dit au premier jour des réquisitoires et

 26   plaidoiries, je crois, que la Défense aurait la possibilité de répliquer,

 27   que chaque Défense aurait la possibilité de le faire si elles le

 28   souhaitaient, de façon indépendante de l'Accusation et indépendamment de la


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  1   question de savoir si l'Accusation demanderait ou non à pouvoir répliquer.

  2   Il a également été dit que chacun des accusés se verrait accordée la

  3   possibilité de prendre la parole une dernière fois. Alors, je ne sais pas

  4   si cela aura lieu ou non, si les Défenses souhaiteront s'adresser les unes

  5   aux autres, ni d'ailleurs si les accusés souhaiteront prendre la parole.

  6   En tout cas, je crois qu'il serait équitable de nous permettre de

  7   répliquer également.

  8   L'Accusation a commencé avec ses réquisitoires et plaidoiries. Nous

  9   avons présenté un tiers du volume de pages qui ont été présentées par la

 10   Défense, 400 pages. Et pour nous, il a été quasiment impossible d'anticiper

 11   le volume de pages qui allait nous être présenté, 1 200 pages. Par

 12   ailleurs, Monsieur le Président, nous avons disposé de la moitié du temps

 13   dont a disposé la Défense pour présenter nos arguments, à savoir 15 heures,

 14   contre 30 heures pour la Défense. Encore une fois -- et manifestement, il

 15   nous était impossible de tenter même de répondre à tous les arguments de la

 16   Défense, parce que si nous l'avions fait, nous aurions eu besoin de 30

 17   heures. Et si je m'arrêtais maintenant pour répondre à chacun des arguments

 18   de M. Sahota présentés au cours de trois heures seulement, cela me

 19   prendrait trois heures ou à peu près. Mais manifestement, nous ne parlons

 20   pas de cela. Cependant, nous avons traité et réfléchi aux arguments

 21   présentés par la Défense pendant le temps qui lui a été imparti, et

 22   l'Accusation n'a pas besoin davantage pour y répondre.

 23   Il est regrettable, réellement, que nous n'ayons pas obtenu un temps

 24   supplémentaire pour présenter l'ensemble de notre mémoire. Nous étions

 25   préparés à le faire. Nous avons détaillé nos arguments par écrit. Nous

 26   aurions pu fournir 100 pages sur Mostar uniquement pour parler de chacun

 27   des faits concernés du début à la fin. Manifestement et malheureusement,

 28   nous n'avons pas pu le faire.


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  1   Bien sûr, il n'y a pas de mémoire en réplique. Cela n'existe pas en

  2   l'espèce, donc vraiment, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'est

  3   la seule possibilité à présent qui nous est donnée d'essayer de présenter

  4   l'ensemble des éléments dans leur unité. Et c'est après avoir entendu les

  5   arguments de la Défense que nous estimons avoir réellement une occasion

  6   valable d'y répondre.

  7   En fonction de tout cela, et en fonction de l'examen que l'Accusation

  8   a mené depuis ces derniers jours, je parle de l'équipe toute entière, à

  9   savoir de moi-même, de M. Stringer, de Mme West, de M. Kruger et d'autres,

 10   Messieurs les Juges, nous estimons que l'Accusation aura besoin et

 11   demandera quatre heures à peu près de temps d'audience pour présenter ses

 12   arguments en réplique.

 13   Je regarde l'horloge, je vois que les aiguilles tournent à l'horloge

 14   de ce prétoire. Il est 10 heures, et nous travaillons jusqu'à 13 heures 45,

 15   donc si l'Accusation devait se voir accorder quatre heures… Vous comprenez

 16   ce que je veux dire. Monsieur le Président, sauf le grand respect que je

 17   dois à chacun des Juges de cette Chambre, ainsi qu'à mes collègues de la

 18   Défense et aux accusés, sauf ce grand respect, après quatre ans et demi de

 19   procès, il n'y a rien d'indispensable à mettre un terme à ce procès

 20   aujourd'hui, et le désir de terminer le travail ne doit pas nuire à

 21   l'équité.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre va se retirer pour délibérer, et nous

 23   reviendrons dans 20 minutes --

 24   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre va délibérer sur la demande des

 27   quatre heures. La question de la duplique est un autre problème.

 28   --- L'audience est suspendue à 10 heures 05.


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  1   --- L'audience est reprise à 10 heures 20.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  3   Alors, la Chambre, qui a délibéré, estime qu'elle doit écouter les

  4   observations de la Défense, et donc je vais donner -- sur la demande du

  5   Procureur, je vais donc donner la parole aux avocats dans l'ordre, Me

  6   Karnavas qui va intervenir en premier.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

  8   les Juges. Bonjour à tous dans le prétoire et autour du prétoire.

  9   Je commencerais par dire que nous avons présenté des mémoires en clôture

 10   qui, en fait, reviennent à présenter par écrit, c'est la seule différence

 11   des réquisitoires et des plaidoiries. Ensuite, il a été demandé que soient

 12   présentés réquisitoires et plaidoiries qui ont pour but de fournir les

 13   éléments qui éventuellement ne figurent pas dans les mémoires écrits. Donc,

 14   dans la pratique, il s'agit d'arguments à réplique.

 15   Il ne fait aucun doute que l'Accusation savait à quoi elle était

 16   confrontée, quels étaient les témoins de la Défense, et donc aucun des

 17   arguments de la Défense ne pouvaient constituer une surprise pour

 18   l'Accusation. Si vous examinez de près ces arguments, Monsieur le

 19   Président, Messieurs les Juges, vous ne trouverez pas un seul élément qui

 20   n'a pas été évoqué précédemment, soit dans le mémoire en clôture ou qui

 21   n'aurait pas pu être prévu, car lorsqu'on fonctionne bien à ce stade d'une

 22   procédure, il importe de prévoir ce que va dire l'adversaire.

 23   L'Accusation parle de déficit. Elle joue du violon pour les Juges et

 24   n'arrête pas de jouer du violon en disant qu'elle n'a disposé que de 15

 25   heures. Je vous rappellerai, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   que l'Accusation vous a indiqué auparavant qu'elle pouvait présenter son

 27   réquisitoire en 13 heures, et elle a même joint les mains pour dire : Est-

 28   ce que je pourrais récupérer mes deux heures, après avoir parlé de 13


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  1   heures pour le réquisitoire, après avoir dit que 13 heures seraient

  2   suffisantes. Donc voir l'Accusation dire aujourd'hui qu'elle a subi un

  3   déficit est risible.

  4   La présente affaire est arrivée à son terme à un moment déterminé. Si vous

  5   permettez à l'Accusation de disposer de quatre heures supplémentaires

  6   demandées par elle, vous devrez fournir au moins quatre heures à la

  7   Défense, sinon plus.

  8   Car je vous prie d'examiner les éléments dans leur détail et de voir ce que

  9   ces éléments indiquent. Est-ce que nous n'avons pas contesté la crédibilité

 10   des témoins internationaux ? Tout ce que nous avions à notre disposition a

 11   été présenté de manière unie.

 12   L'objectif des réquisitoires et plaidoiries, si je les comprends bien,

 13   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, consistait à vous apporter

 14   simplement des éléments d'orientation. Nous n'allons pas gagner l'affaire

 15   grâce à des envolées verbales qui emporteront l'adhésion pour obtenir le

 16   verdict que nous souhaitons. Peut-être cela se passe-t-il dans certains

 17   systèmes judiciaires, mais pas devant des Juges professionnels.

 18   Les mémoires en clôture disent ce qu'ils ont à dire. Vous avez entendu tous

 19   les arguments présentés oralement. Il n'est pas nécessaire que l'Accusation

 20   dispose d'un temps supplémentaire.

 21   Ayant dit cela, je suis venu ici prêt à présenter une requête pour

 22   arguments en réplique en fonction de ce qu'a indiqué M. le Juge Trechsel

 23   lorsqu'il a dit ce que nous pouvions faire par rapport aux autres. Et je

 24   demande donc 10 à 15 minutes pour vous parler d'un sujet qui a été abordé

 25   par Me Alaburic de la Défense Petkovic au sujet du centre de détention de

 26   Ljubuski, qui ne figure pas dans son mémoire en clôture, mais ce que je

 27   tiens à dire concerne les prisonniers de guerre. Et nous ne faisons pas

 28   seulement objection de façon catégorique à la proposition qui nous est


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  1   présentée maintenant, mais nous avons des références précises à fournir à

  2   la Chambre. Nous estimons que, dans un sens, ceci est un élément nouveau --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour D2, Maître Khan.

  4   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous

  5   sommes très reconnaissants d'avoir la possibilité de traiter de la

  6   proposition faite par mon collègue M. Scott.

  7   Si l'on s'arrête pour y réfléchir, il est compréhensible, d'une certaine

  8   manière, d'apprendre qu'après avoir vécu avec cette affaire pendant cinq

  9   ans à peu près, il apparaît difficile de laisser partir cette affaire et de

 10   dire ce qui a été présenté suffit. Assez d'éléments preuve ont été

 11   présentés, assez d'arguments ont été entendus, assez de témoins ont été

 12   auditionnés et assez d'explications apportées. Nous sommes satisfaits de la

 13   possibilité pour cette affaire d'être enfin jugée par des Juges

 14   professionnels. Mais ce n'est pas ce que souhaite l'Accusation. M. Scott a

 15   été très franc sur un certain nombre de questions. Il parle d'assistance

 16   militaire et humanitaire et se demande si, oui ou non, ceci est pertinent

 17   par rapport à l'entreprise criminelle commune alléguée par lui.

 18   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, aucun de ces sujets n'est un

 19   sujet nouveau. Tous ces sujets ont déjà été débattus à l'envie devant les

 20   Juges de façon très importante, et la Défense de M. Stojic n'a présenté

 21   aucun argument dans sa plaidoirie, aucun qui ne figure pas dans son mémoire

 22   en clôture.

 23   Par conséquent, voir l'Accusation affirmer tout simplement qu'elle a le

 24   droit d'un temps supplémentaire pour sa réplique est, à mon avis,

 25   inacceptable.

 26   Je dirais, avec le respect que je dois à la Chambre, que des

 27   explications aussi générales ne suffisent pas et que l'Accusation devrait

 28   être beaucoup plus précise dans sa requête qu'elle ne l'a été. En effet,


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  1   l'Accusation a invoqué toutes sortes de griefs en disant, comme Me Karnavas

  2   vient de le rappeler, qu'il y aurait une espèce d'absence de justice que

  3   l'Accusation ne saurait laisser de côté puisque l'Accusation a entamé son

  4   réquisitoire en présence d'un certain déficit. Eh bien, Monsieur le

  5   Président, Messieurs les Juges, je remarque que l'équité ne dépend pas pour

  6   la Défense du fait qu'elle obtienne ou pas tout ce qu'elle a demandé et ne

  7   dépend certainement pas, c'est le test ultime, du fait que l'Accusation

  8   puisse obtenir tout ce qu'elle demande. L'équité relève du judiciaire, elle

  9   relève de la nécessité pour les Juges de répondre positivement à certaines

 10   requêtes qui le méritent et de trouver à tout moment la solution la plus

 11   équitable. C'est ce que cette Chambre a fait dans la décision qu'elle a

 12   prise le 1er novembre dans son ordonnance portant calendrier.

 13   L'Accusation aurait pu demander à faire appel de cette décision si

 14   elle l'avait trouvée inéquitable et s'il y avait eu, effectivement, une

 15   absence de justice dans cette décision. Je remarque que l'Accusation ne l'a

 16   pas fait. Elle ne l'a pas fait, à mon avis, parce que l'ordonnance portant

 17   calendrier qui a été présentée par la Chambre était raisonnable. Personne

 18   n'obtient jamais tout ce qu'il souhaite, mais cette décision était

 19   raisonnable et entrait manifestement dans le cadre du pouvoir

 20   discrétionnaire dont les Juges sont investis.

 21   Messieurs les Juges, l'Accusation demande, en fait, ce que je

 22   qualifierais d'une deuxième chance. Elle demande quatre heures

 23   supplémentaires, alors que 15 heures lui ont déjà été accordées et alors

 24   que tous les arguments de M. Stojic ont déjà été soumis en public devant

 25   l'Accusation, avant même que M. Scott ne se lève. A mon avis, l'Accusation

 26   n'a fourni aucun argument valable ou suffisamment convaincant pour

 27   justifier une demande aussi importante.

 28   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je remarque que M. Scott


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  1   affirme qu'il lui a été difficile d'aborder tous les points qu'il aurait dû

  2   aborder dans le temps imparti. Eh bien, nous ne pouvons pas revenir sur une

  3   décision antérieure relative au temps alloué aux parties en passant par la

  4   petite porte de la réplique. Ceci consisterait à contourner l'objectif même

  5   et l'intention judiciaire qui est manifeste dans l'ordonnance portant

  6   calendrier de la Chambre.

  7   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la jurisprudence est très

  8   claire s'agissant des conditions dans lesquelles est présentée une

  9   réplique.

 10   Dans l'affaire Naletilic/Martinovic, en date du 30 octobre 2002, page

 11   12 820 du compte rendu d'audience, M. le Juge Liu a dit au sujet de la

 12   réplique, je cite :

 13   "Dans les conditions du présent Tribunal, la présentation des

 14   éléments en réplique doit être liée à des questions précises qui émanent

 15   des mémoires en clôture et des plaidoiries de la Défense, éléments qui

 16   n'auraient pas pu raisonnablement être prévus à l'avance."

 17   Ce sont des mots importants venant d'un Juge aussi expérimenté. Il ne fait

 18   aucun doute qu'aucune question présentée par la Défense ne pouvait être

 19   prévue à l'avance par l'Accusation. Nous n'avons pas dressé une embuscade

 20   pour l'Accusation. Nous n'avons pas surpris l'Accusation en présentant des

 21   théories qui n'auraient pas été présentées auparavant par la Défense. Nous

 22   avons été conséquents, à mon avis, en l'espèce, et nous n'avons avancé que

 23   dans une ligne droite menant directement à notre mémoire en clôture.

 24   M. le Juge Liu a déclaré, je cite :

 25   "La réplique ne consiste qu'à répéter ce qui a déjà été dit pendant les

 26   plaidoiries et réquisitoires dans le seul but de renforcer ses arguments.

 27   Ce test concerne également toutes les équipes de la Défense…"

 28   Et cetera, et cetera.


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  1   Eh bien, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'est exactement ce

  2   que l'Accusation demande à faire. Elle demande à renforcer ses arguments

  3   antérieurs parce qu'elle estime que les Juges n'ont peut-être pas été

  4   suffisamment convaincus.

  5   Et, bien sûr, elle ne tient pas compte de la situation de la Défense,

  6   elle ne tient pas compte de ce qu'ont dit un certain nombre de collègues,

  7   ce qui a été difficile pour l'Accusation. Bien entendu, les arguments

  8   présentés par les divers accusés dans ce prétoire ont été difficiles pour

  9   certains à entendre par l'Accusation. Nous sommes dans un système

 10   contradictoire, et lorsqu'il s'agit de mettre en compétition les différents

 11   arguments présentés de part et d'autre, finalement, il appartient aux Juges

 12   de se prononcer pour régler cette compétition. Mais il ne suffit pas de

 13   présenter aucun motif pour demander simplement quatre heures

 14   supplémentaires.

 15   Dans l'affaire Halilovic, en date du 17 août 2005, et ceci sera mon

 16   argument de conclusion, page 107, M. le Juge Liu, encore lui, déclare, je

 17   cite :

 18   "Je dois souligner que la réplique n'est pas une occasion donnée aux

 19   parties de renforcer leurs arguments, mais simplement de répliquer à des

 20   éléments qu'ils n'attendaient pas dans les mémoires en clôture et qui sont

 21   apparus au moment des plaidoiries."

 22   On ne peut pas être plus clair sur le sujet, que l'on soit en février, jour

 23   de beau temps ou pas. C'est absolument clair comme de l'eau de roche, et

 24   c'est la jurisprudence de ce Tribunal.

 25   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous sommes ici face à une

 26   question concrète. J'admets, si l'Accusation avait pu souligner par rapport

 27   à l'un des six accusés qu'une question soulevée par la Défense était

 28   imprévue et ne pouvait pas être prévue à l'avance raisonnablement, j'aurais


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  1   admis par rapport à un point tout à fait précis que l'Accusation adresse

  2   une requête à la Chambre. Ça c'est la justice, c'est l'équité. Mais

  3   l'Accusation n'a pas agi ainsi, et c'est important de le remarquer.

  4   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si les quatre heures étaient

  5   accordées à l'Accusation, qu'adviendrait-il ? Est-ce que les équipes de

  6   Défense pourraient immédiatement à la suite de ces quatre heures se mettre

  7   debout pour répondre au pied levé ou est-ce qu'il y aurait ajournement de

  8   la procédure pour réfléchir à toutes ces questions ? Messieurs les Juges,

  9   ces éléments qui sont tout à fait réels ne nécessitent pas, à mon avis,

 10   d'être discutés en cet instant parce que mon collègue de l'Accusation n'a

 11   simplement pas été capable de mettre l'accent sur tel ou tel élément

 12   important pour lui pendant le temps de son réquisitoire. La réplique n'est

 13   pas faite selon la jurisprudence de ce Tribunal, et les mots très clairs de

 14   la décision des Juges pour servir à cet objectif. L'Accusation n'a pas

 15   démontré qu'il existait un motif valable, à mon avis, pour que cette

 16   requête ne soit pas rejetée.

 17   Monsieur le Président, encore un point. Il n'y a pas de demande de l'équipe

 18   Stojic pour une extension du temps. L'accusé a droit à un procès rapide et

 19   juste, et un jour, deux jours ou trois jours devraient suffire --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 21   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je tiens

 22   d'abord -- bonjour, Messieurs les Juges, Monsieur le Président.

 23   Je dois dire que je ne peux que souscrire à l'argumentation de Me Khan, qui

 24   est très pertinente, et je crois que les Juges de la Chambre vont trouver

 25   utile de se pencher sur ces arguments.

 26   Dans la partie de la requête de mon confrère, M. le Procureur, qui

 27   portait sur le temps qui lui a été alloué, il s'est efforcé de dire qu'il

 28   n'aurait pas eu l'occasion de répondre à l'ensemble des arguments qui ont


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  1   été avancés pendant le procès et de les analyser. Mais je voudrais

  2   simplement rappeler qu'il s'agit ici d'une res judicata, ceci a fait

  3   l'objet de décision et nous ne pouvons pas débattre plus avant de ceci. Le

  4   1er novembre 2010, vous avez pris une décision dans laquelle vous avez,

  5   Messieurs les Juges, donné explicitement la possibilité aux parties, et

  6   notamment aux Défenses, ce que nous apprécions, de procéder de la manière

  7   que vous indiquiez.

  8   A un moment donné, le Procureur a renoncé à une partie du temps dont

  9   il a bénéficié, et puis il est revenu vers vous pour vous demander à ce que

 10   lui soit restitué le temps en question, les deux heures, et tel Oliver

 11   Twist, il a obtenu ceci. Cependant, cette façon pour le Procureur

 12   d'affirmer que le temps aurait été particulièrement comprimé, le temps dont

 13   il a bénéficié, je dois dire qu'au premier jour de son réquisitoire,

 14   apparemment, le Procureur a eu largement le temps de faire passer un

 15   enregistrement vidéo de 40 minutes. Il s'agissait pourtant d'un élément de

 16   preuve qui avait déjà été visionné par tout un chacun. Alors, quand on veut

 17   agir de façon efficace, on donne simplement la référence du document. Si

 18   l'on veut obtenir un effet particulier, éventuellement, on peut passer un

 19   extrait d'un tel enregistrement quelques secondes.

 20   Mais pour revenir à ce que je disais, le temps alloué est res

 21   judicata. Cela a déjà été statué. Et deuxièmement, le Procureur nous a fait

 22   une ample démonstration du fait qu'il a disposé d'un temps largement

 23   suffisant.

 24   Deuxièmement, et c'est là l'une des questions qui ont été posées, la

 25   Défense du général Praljak n'éprouve aucun besoin de demander du temps

 26   supplémentaire pour répondre à d'éventuelles allégations des autres

 27   Défenses. Nous n'avons pas besoin de reprendre position à ce sujet. Vous

 28   avez entendu les témoins, Messieurs les Juges, vous avez été saisis des


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  1   éléments de preuve et vous en déciderez en Juges professionnels que vous

  2   êtes. Alors, devant le présent Tribunal et la présente Chambre, reprendre

  3   la parole comme nous pourrions le faire, à vrai dire, sur ces différents

  4   points ne nous mènerait nulle part. A mon avis, cela risquerait plutôt de

  5   rouvrir les débats et de le faire sans une fin prévisible.

  6   Alors, la substance de cette question qui consiste à se demander si

  7   quelqu'un à droit ou non à une réplique est la suivante : est-ce que l'une

  8   quelconque des parties ici présentes, au cours de ces deux semaines, qu'il

  9   s'agisse du Procureur ou d'une Défense, a présenté une théorie ou un

 10   argument tout à fait nouveau, que ce soit sur le plan factuel ou dans le

 11   domaine du droit ? Force est de constater que personne ici n'a avancé quoi

 12   que ce soit de nouveau que nous n'aurions entendu ni dans les mémoires

 13   préalables au procès ni lors de ces cinq années de procès. Il n'y a rien de

 14   nouveau. Et il aurait été naïf, du reste, de s'attendre à ce que quiconque

 15   puisse présenter quoi que ce soit de totalement nouveau après cinq années

 16   de procès. En tout cas, pour notre Défense, je suis absolument sûr que cela

 17   n'a pas été le cas. Et je suis absolument sûr que si maintenant nous nous

 18   asseyions pendant quelques heures autour d'une table et si nous examinions

 19   toutes les théories et arguments que nous avons avancés dans notre mémoire

 20   en clôture, eh bien, il serait possible de tout retrouver, de faire tout

 21   remonter à notre mémoire préalable au procès et de retrouver tous ces

 22   éléments au long des cinq années de procès. Il n'y a rien de nouveau.

 23   Rien de ce que le Procureur a avancé ne m'a surpris le moins du

 24   monde. Chacun des éléments qu'il a avancés, je l'ai anticipé, je savais

 25   qu'il allait le dire. Il n'y a donc rien de nouveau à cela, et moi, j'ai

 26   répondu en temps et en heure. C'est la raison pour laquelle je souscris à

 27   ce qu'a dit mon collègue. Merci.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.


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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  2   bonjour. Je vais être très brève, parce qu'il n'y a pas lieu de répéter ce

  3   que mes collègues ont pu dire avant moi. Mon confrère Me Khan a exprimé la

  4   position, qui est également celle de la Défense Petkovic, quant à un

  5   éventuel droit à une réplique au terme des réquisitoires et des

  6   plaidoiries.

  7   Je souhaiterais simplement ajouter quelque chose au sujet des quatre sujets

  8   avancés par le Procureur qui concernent la Défense Petkovic, et qui serait

  9   l'objet de la réplique. Donc ces quatre sujets ont fait l'objet de débats

 10   très longs par cette Chambre. Ils concernent l'occupation. Ils ont été

 11   débattus dans ce prétoire. Cependant, c'est le Procureur lui-même qui a

 12   abordé le premier de ces sujets dans son mémoire en clôture. Je crois qu'il

 13   a dit tout ce qu'il convenait de dire au sujet de l'occupation. Nous avons

 14   répondu lors de notre plaidoirie, et nous estimons qu'il n'y a rien de plus

 15   à dire.

 16   Nous estimons que nos estimés confrères de l'Accusation n'ont pas

 17   rempli les conditions nécessaires à l'octroi de temps au titre d'une

 18   réplique, et nous estimons pour cela qu'il conviendrait de ne pas faire

 19   droit à leur requête.

 20   Je profite de l'occasion pour vous dire que la Défense de M. Petkovic

 21   n'aura pas besoin de revenir sur les propos de quelque autre équipe de la

 22   Défense que ce soit. Quant à la Défense de M. Prlic, nous n'avons pas

 23   d'objection à ce que cette dizaine de lignes de notre plaidoirie fassent

 24   l'objet d'un réexamen par la Défense Prlic et qu'elle reprenne la parole à

 25   ce sujet. Nous sommes, à vrai dire, curieux d'entendre ce qu'ils auront à

 26   dire, parce que nous croyons faire état d'arguments qui pourraient être

 27   utiles à toutes les équipes de la Défense lorsqu'ils auront parlé de ces

 28   centres de transit. Merci.


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Tomic, pour M. Coric.

  2   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Si l'on se penche avec soin sur ce qui a été dit par M. Scott et sur les

  4   raisons pour lesquelles il demande à bénéficier d'une réplique, on peut

  5   voir facilement qu'en fait, M. Scott demande à ce que lui soit donnée la

  6   possibilité d'un nouveau réquisitoire. Peut-être a-t-il l'impression que ce

  7   réquisitoire serait meilleur ou qu'il serait différent. Mais ce qu'il

  8   demande n'est autre qu'un nouveau réquisitoire.

  9   Pourquoi suis-je en train de dire cela ? Parce qu'à mon sens, la finalité

 10   du premier réquisitoire était de répondre à ce qui figurait dans les

 11   mémoires en clôture des Défenses. Il a fait usage, en partie, de ce droit

 12   qui était le sien, et le Procureur, M. Scott, tout autant que ses autres

 13   collègues de l'Accusation, a fait référence à des parties des mémoires en

 14   clôture des Défenses. Cependant, pour l'essentiel, le Procureur a répété le

 15   contenu de l'acte d'accusation, de son mémoire en clôture et de ce que nous

 16   avions déjà entendu des milliers de fois pendant le déroulement du procès.

 17   Aucune des raisons avancées par l'Accusation comme justifiant une réplique

 18   ne représente quoi que ce soit de nouveau, ni au regard des mémoires

 19   préalables au procès ni au regard du déroulement antérieur du procès dans

 20   le prétoire. Et du reste, tout cela figurait déjà dans les mémoires en

 21   clôture des Défenses, non seulement dans ces mémoires en clôture des

 22   Défenses, mais le Procureur lui-même avait déjà abordé toute une partie de

 23   ces différents sujets tant dans son mémoire en clôture que dans son propre

 24   réquisitoire.

 25   Le Procureur a indiqué que certaines Défenses auraient pris pour cible des

 26   témoins de l'Accusation et qu'elles les auraient critiqués. C'est bien le

 27   cas, et nous avons été l'une de ces Défenses. Cependant, Messieurs les

 28   Juges, nous avons consacré une grande partie de notre mémoire en clôture


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  1   précisément aux témoins de l'Accusation qui ont été pris pour cible par la

  2   Défense Coric dans sa plaidoirie. A vrai dire, les mêmes témoins avaient

  3   déjà fait l'objet d'une critique dans notre mémoire en clôture, et ce, au

  4   moyen des mêmes arguments. Donc ce que nous avons avancé dans notre

  5   plaidoirie avait déjà été fait dans notre mémoire en clôture, si bien que

  6   le Procureur avait l'occasion, dans son réquisitoire, d'apporter une

  7   réponse aux critiques que nous formulions dans notre mémoire en clôture. Il

  8   ne l'a pas fait.

  9   De même, le Procureur a suggéré que l'Accusation se serait efforcée de ne

 10   pas prendre pour cible les témoins de la Défense et qu'elle aurait préféré

 11   une approche plus positive. Mais ceci est inexact. Parce que dans son

 12   mémoire en clôture, le Procureur indique qu'il était impossible d'accorder

 13   foi aux témoins de la Défense parce qu'il s'agissait de témoins initiés et

 14   que du fait de ce statut, les témoins en question entretenaient de bons

 15   rapports avec chacun des accusés concernés ou, à défaut, que chacun de ces

 16   témoins concernés aurait eu pour intérêt de ne pas dire la vérité pour se

 17   protéger lui-même. Et cette affirmation générale a été avancée par le

 18   Procureur pour tous les témoins de la Défense.

 19   Ensuite, le Procureur a pris pour cible les accusés en qualité de témoins,

 20   qui sont également des témoins de la Défense. Ils ont saucissonné la

 21   déposition des accusés en dizaines et dizaines de paragraphes, et pour

 22   finir, ils ont attaqué dans leur réquisitoire les propos de M. Coric en le

 23   qualifiant de criminel de guerre et en avançant que pour cette raison il

 24   serait impossible de lui accorder foi.

 25   Alors, le Procureur s'est vu accorder un certain temps pour son

 26   réquisitoire, et ce temps, le Procureur l'a utilisé de la meilleure façon

 27   possible, la façon qu'il estimait être la meilleure possible. De même,

 28   chacune de nos équipes de la Défense a employé le temps qui lui était


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  1   alloué de la façon qu'elle estimait la meilleure, en choisissant sa propre

  2   stratégie.

  3   Je crois que personne dans ce prétoire, pas même le Procureur, n'a le droit

  4   de se voir accorder la possibilité de compléter son mémoire en clôture ou

  5   son réquisitoire, respectivement, ou sa plaidoirie. C'est tout ce que

  6   j'aurais à dire à ce sujet. Ou plutôt, accorder ce droit de répliquer au

  7   Procureur ne représenterait rien d'autre et reviendrait à répéter encore

  8   une fois à l'envie tout ce que nous avons déjà pu lire ou entendre dans les

  9   mémoires en clôture, réquisitoires et plaidoiries.

 10   La Défense de M. Coric, Messieurs les Juges, ne demandera pas à pouvoir

 11   répliquer à l'une quelconque des autres équipes de la Défense.

 12   Je souhaiterais simplement dire brièvement encore une chose, qui n'est pas

 13   liée au sujet que nous sommes en train d'aborder. Je crois qu'il s'agit

 14   d'une erreur au compte rendu. Je ne suis pas sûre d'avoir encore une autre

 15   occasion de le dire. Il s'agit de la page  52 637 du compte rendu

 16   d'audience, ligne 16. J'ai donné lecture de façon erronée d'un numéro. Au

 17   lieu de la référence "2D 8454", il convient de lire "2D 854".

 18   Merci.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic, pour la Défense de M.

 20   Pusic, pour terminer.

 21   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Notre point de vue est qu'à un moment ou à un autre, pour mettre un terme

 23   au présent procès, je crois que ce moment est venu.

 24   Nous avons entendu les arguments du Procureur, mais nous estimons

 25   quel est son fondement. Et pour demander une réplique, il faut présenter

 26   des circonstances ou des éléments nouveaux, ce que nous n'avons pas

 27   entendu.

 28   Alors, lorsque nous avons pris la parole, nous avons fait référence


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  1   au mémoire en clôture du Procureur, le Procureur s'est référé au nôtre

  2   lorsqu'il a pris la parole, et notre position est qu'il convient de ne pas

  3   faire droit à la demande de M. Scott.

  4   Tout comme Me Khan, nous allons nous référer à la décision du 28 août

  5   2000dans l'affaire Popovic, Srebrenica. Le Procureur était confronté aux

  6   mêmes difficultés, et il n'a pas été fait droit à sa requête. Merci.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donc demander à mes collègues leur point de

  8   vue avant que la Chambre rende sa décision.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Ce ne sera qu'une minute, Maître Kovacic.

 10   Nous savions bien que le procès doit arriver à son terme. Nous le savons et

 11   tout le monde le sait. D'ailleurs, je dirais même que nous souhaitons tous

 12   que ce procès s'achève. Je ne connais personne dans ce prétoire qui ne

 13   voudrait pas que le procès s'achève le plus rapidement possible. Mais par

 14   ailleurs, nous ne demandons pas une durée extraordinaire ou

 15   particulièrement longue; notre requête est particulièrement modeste, je

 16   dirais.

 17   Nous aimerions reprendre dans le détail, un par un, les arguments qui ont

 18   été présentés. Nous avons examiné tout ce que la Défense a dit.

 19   Je voudrais, en une minute, vous donner simplement un exemple.

 20   M. Stringer me rappelle qu'il a été dit, par exemple, que l'Accusation

 21   aurait soulevé la théorie de l'occupation du territoire pour la première

 22   fois. Ceci est un exemple pour nous d'une question pour laquelle nous

 23   devrions obtenir l'autorisation de répondre.

 24   Merci, Monsieur le Président.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 27   Alors, la Chambre, qui a délibéré, rend la décision orale suivante.

 28   En premier lieu, la Chambre donne acte à la Défense de M. Prlic d'avoir 15

 


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  1   minutes pour faire valoir ses observations concernant des points émanant

  2   d'autres Défenses. Donc 15 minutes.

  3   Concernant la demande du Procureur, la Chambre constate que c'est un droit

  4   qui lui est ouvert par le Règlement et que dans le cas de l'utilisation de

  5   ce droit, la Chambre n'a qu'une compétence pour la détermination du temps.

  6   Concernant le temps qui va être alloué au Procureur, la Chambre, à

  7   l'unanimité, décide d'attribuer trois heures au Procureur. Concernant le

  8   temps éventuel que la Défense aura droit pour sa duplique, qui est

  9   également un droit qui lui est reconnu dans le Règlement, la Chambre

 10   déterminera ce temps après avoir écouté l'intervention du Procureur.

 11   La Chambre tient à rappeler au Procureur qu'il doit axer

 12   l'utilisation de ces trois heures sur des points essentiels, et notamment

 13   des points qui, selon lui, n'auraient pas été abordés.

 14   Par ailleurs, la Chambre rappelle qu'elle donnera aux accusés la

 15   possibilité, s'ils le veulent, d'intervenir chacun à l'issue des

 16   interventions du Procureur et des avocats.

 17   Compte tenu du temps alloué et de la possibilité également que la

 18   Défense aura à dupliquer, la Chambre constate qu'en ce jour, elle ne pourra

 19   pas donc terminer. Elle renvoie donc la poursuite de l'audience à mardi

 20   prochain, 9 heures, du fait que l'un des Juges est dans l'affaire Tolimir

 21   et ne pourra pas siéger lundi après-midi parce que l'affaire Tolimir est

 22   déjà programmée. Mais par ailleurs, l'affaire Tolimir a lieu également les

 23   après-midi de la semaine prochaine, donc nous continuerons mardi prochain à

 24   9 heures, et nous demandons également au greffe de réserver la salle

 25   d'audience pour mercredi également, 9 heures, pour les dupliques

 26   éventuelles à toutes fins utiles.

 27   Voici donc notre décision orale.

 28   Sur ce, je souhaite à tout le monde une bonne continuation de la


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  1   journée, et nous nous retrouverons mardi, à 9 heures.

  2   --- L'audience est levée à 10 heures 57 et reprendra le mardi, 1er mars

  3   2011, à 9 heures.

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