Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi, 24 mars 2017

  2   [Audience publique]

  3   [Audience d'appel]

  4   [Les appelants sont introduits dans le prétoire]

  5   [L'appelant Pusic est absent]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 31.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  8   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Merci. Il

 10   s'agit de l'affaire IT-04-74-A, le Procureur contre Prlic et consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. L'Accusation.

 12   M. GILLETT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

 13   Monsieur le Juge. Matthew Gillett pour le Bureau du Procureur, accompagné

 14   de M. Douglas Stringer; de Barbara Goy; de Laurel Baig et notre commis à

 15   l'affaire, Mme Janet Stewart.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 17   La Défense.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, bonjour, Messieurs les Juges. Je suis

 19   rejoint aujourd'hui par Me Suzana Tomanovic, et je suis Michael Karnavas.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 21   Pour M. Stojic.

 22   M. KHAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. M. Stojic

 23   est représenté par le conseil principal de Senka Nozica; Aidan Ellis et

 24   moi-même, Karim Khan.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 26   Pour l'accusé suivant.

 27   Mme PINTER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 28   toutes et à tous dans le prétoire et en dehors. Le général Praljak est


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  1   représenté par Natacha Fauveau-Ivanovic et Nika Pinter.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  3   Pour M. Petkovic à présent.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Le général

  5   Petkovic est représenté par la même équipe de la Défense, Vesna Alaburic et

  6   Lasic, et notre commis à l'affaire, Slavko Mateskovic.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  8   Pour M. Coric.

  9   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. M.

 10   Coric est représenté par Dijana Tomasegovic-Tomic, conseil principal; co-

 11   conseil, Drazen Plavec et Dan Ivetic.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 13   Et l'accusé suivant.

 14   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. M. Pusic

 15   est représenté par Roger Sahota et Fahrudin Ibrisimovic.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 17   Je voudrais juste m'assurer que tous les appelants peuvent suivre les

 18   procédures dans une langue qu'ils entendent et qu'ils comprennent; est-ce

 19   le cas ? Je vois que tout le monde opine du bonnet. Très bien.

 20   Monsieur le Greffier, je vois que mon attention est attirée sur le fait

 21   qu'il fait un petit peu trop chaud dans le prétoire, est-ce que vous

 22   pourriez baisser la température.

 23   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Aujourd'hui, à moins qu'il

 25   n'y ait de questions préliminaires, je ne vois rien allant dans ce sens-là.

 26   C'est à la Défense de M. Coric de s'exprimer aujourd'hui.

 27   Vous avez deux heures. Vous avez la parole.

 28   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.


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  1   Bonjour à toutes et à tous dans le prétoire et en dehors. Valentin Coric

  2   pour l'équipe de la Défense sera défendu de la façon suivante aujourd'hui.

  3   La première partie sera abordée par Me Dan Ivetic qui répondra aux

  4   questions de la Chambre que vous nous avez envoyées avant l'audience, et

  5   puis je m'occuperai des erreurs factuelles que nous avons relevées dans nos

  6   arguments. J'espère que nous aurons le temps d'aborder tout cela

  7   aujourd'hui.

  8   Je passe la parole à Me Dan Ivetic à présent.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.

 11   M. IVETIC : [interprétation] A ce stade-ci, nous aimerions répondre à votre

 12   première question sur la question de s'agissant de l'allégation de l'état

 13   d'occupation ayant existé pendant la période couverte par l'acte

 14   d'accusation. J'aimerais vous faire remarquer que nous avons discuté de

 15   cela en détail aux paragraphes 75 à 83 de notre mémoire en appel et que

 16   nous maintenons ces arguments dans leur intégralité. Nous aimerions

 17   souligner dès le départ que toute recherche s'agissant de l'occupation en

 18   l'espèce, au titre de l'acte d'accusation, se fonde sur des erreurs. Etant

 19   donné qu'il n'y a pas eu de notification donnée à la Défense Coric dans

 20   l'acte d'accusation selon laquelle l'occupation faisait partie des

 21   allégations qui étaient reprochées à l'accusé. Aucune Chambre n'aurait pu

 22   raisonnablement lire le paragraphe 232 de l'acte d'accusation dans ce sens-

 23   là.

 24   De même, dans le tome 1, paragraphe 91 du jugement, il est allégué que

 25   l'état d'occupation était connu par Petkovic et Praljak, mais qu'en est-il

 26   de la notification à Coric ? Eh bien, la Chambre est silencieuse sur cette

 27   question parce qu'il n'y a pas eu de notification. Dans l'acte

 28   d'accusation, paragraphes 8 et 10, Petkovic et Praljak auraient "exercé le


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  1   commandement de jure et/ou de facto sur les forces armées d'Herceg-Bosna ou

  2   du HVO", mais on ne parle absolument pas d'occupation. Où sont les mots-clé

  3   nécessaires pour pouvoir procéder à cette notification ? Même si

  4   l'Accusation affirme renoncer à la question de l'occupation dans sa

  5   réponse, au paragraphe 69, mémoire en réponse, cet argument ne tient pas la

  6   route étant donné que, pour Coric en tout cas, car l'Accusation dans le

  7   même paragraphe dit que la Défense de Coric avait soulevé une objection à

  8   cet égard. Nous l'avons fait dès que l'Accusation a révélé que l'occupation

  9   faisait partie de sa thèse, qui ne se trouvait que dans son mémoire en

 10   clôture.

 11   De plus, même si cette exigence de notification devait être prise en

 12   compte, la Chambre de première instance a tout de même commis une erreur

 13   dans l'examen des faits. Et nous aimerions nous joindre aux arguments

 14   soulevés par nos confrères de la Défens à cet égard, concernant les

 15   constatations sur le conflit armé international et l'occupation. Au lieu de

 16   répéter ce qu'ils ont dit, je vais ajouter certains éléments.

 17   La Chambre de première instance a commis une erreur de droit, car

 18   elle n'a pas mentionné l'invasion comme élément essentiel pour établir un

 19   état d'occupation. La Chambre ne cite aucun élément ni ne conclut nulle

 20   part que le HVO en tant qu'armée étrangère avait envahi le territoire qui

 21   aurait été occupé après cela. Le HVO n'a pas procédé à l'invasion à partir

 22   de la Croatie. Le HVO, au lieu d'être une puissance étrangère, se composait

 23   d'habitants nationaux, locaux de toutes les zones où ils se trouvaient. Et

 24   dire que les frontières et les zones occupées étaient quelquefois passées

 25   pour approvisionner l'autre partie, l'autre camp, l'ABiH et le HVO avec en

 26   armes, en munition, en formation, et cetera, dire cela était mentionné par

 27   d'autres représentants de la Défense cette semaine. Mais ces éléments de

 28   preuve montrant l'intégration et les liens étroits qui existaient entre le


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  1   HVO et l'ABiH ne peuvent pas cadrer avec cette existence supposée d'un

  2   conflit armé international, ni avec cette thèse de zones occupées par des

  3   forces armées étrangères du HVO. La citation de l'Accusation, note de bas

  4   de page 266 de sa réponse, confirme ce fait.

  5   Toutes les références concordent pour dire qu'il n'y a qu'une

  6   définition, c'est-à-dire qu'un territoire est occupé lorsqu'il est placé

  7   sous l'autorité de l'armée hostile et de l'Etat auquel il appartient qui a

  8   cessé d'exercer sa propre autorité. D'après de nombreux éléments de preuve,

  9   comme nous l'avons entendu cette semaine, notamment la pièce 4D410, et des

 10   déclarations des autorités de BiH, le HVO faisait partie intégrante au même

 11   titre que d'autres des forces armées de RBiH ou de la BiH. Et donc le HVO

 12   ne peut pas être considéré comme une puissance étrangère. Comme l'établit

 13   la constitution de SRBiH dans son article 256, et conformément à la loi sur

 14   la Défense populaire généralisée dans son article 63, les communautés

 15   croates ont créé des structures de Défenses territoriales et de protection

 16   civile conformément à un esprit d'unité avec les municipalités voisines

 17   telles qu'établies par l'Etat de BiH.

 18   Et il convient de souligner dès le début que non seulement le HVO se

 19   trouvait sur ce territoire à partir du premier moment de la guerre et

 20   n'avait pas envahi ce territoire, mais que les structures du HVO étaient

 21   des structures légales qui s'étaient composées de personnes qui avaient des

 22   postes similaires dans ce territoire même avant la guerre. Par exemple,

 23   dans certaines régions, comme Posusje, Grude, Tomislavgrad, et à d'autres

 24   endroits, il n'y avait pas de combat, ni de modification des pouvoirs

 25   existants et des structures existantes. Les organes municipaux locaux sont

 26   restés les mêmes, même s'ils tombaient sous la coupe du HVO. Mais il n'y a

 27   pas de forces "hostiles" entre guillemets, ni d'"invasion" et ce manquement

 28   au fondement nécessaire pour établir l'occupation fait qu'automatiquement,


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  1   tout le concept ne doit pas être pris en considération.

  2   Un conflit armé ne peut se définir comme étant international qu'à la

  3   condition qu'un Etat étranger a le contrôle total sur les forces armées

  4   subordonnées qui ne lui appartiennent pas directement. Mais le contrôle

  5   exercé doit inclure plus que cette disposition d'aide financière ou

  6   d'équipement militaire ou de formation approvisionnée.

  7   Aucune Chambre ne peut raisonnablement conclure qu'un conflit armé

  8   international existait, ni que le HVO était une armée étrangère, ni que la

  9   République de Croatie avait fourni une aide uniquement au HVO et pas à

 10   l'ABiH. Je ne vais pas répéter la pléthore d'éléments de preuve que nous

 11   avons entendus cette semaine s'agissant de l'approvisionnement en armes que

 12   la Croatie a fournies au HVO et à l'ABiH, mais j'aimerais mettre en exergue

 13   un élément de preuve, 90 % des armes et de l'aide matérielle et technique

 14   de l'ABiH était fournie par la République de Croatie et par le HVO. Page du

 15   compte rendu 42146.

 16   Je vais également souligner le fait qu'à toute cette période, le président

 17   de BiH, M. Izetbegovic, s'est rendu en d'autres pays en passant par la

 18   Croatie. Nous avons déjà entendu d'autres équipes de la Défense cette

 19   semaine arguer que l'accord sur l'amitié et la coopération du 21 février

 20   1992, qui a reconnu que l'ABiH et le HVO faisaient partie intégrante de la

 21   même force de Bosnie-Herzégovine.

 22   Le 29 juin 1993, le président Izetbegovic lui-même a déclaré que le HVO

 23   était une partie constituante des forces de l'armée de BiH. Le 24 avril

 24   1993, les présidents de Croatie, de Bosnie-Herzégovine et du HVO se sont

 25   rencontrés à Zagreb pour discuter du commandement conjoint qui existait

 26   entre le HVO et l'ABiH. Et donc, Messieurs les Juges, si nous devions

 27   suivre la logique de l'Accusation selon laquelle il s'agissait d'un organe

 28   de facto, étant donné l'appui qui avait été apporté de Croatie, eh bien,


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  1   les éléments de preuve nous montrent clairement que l'ABiH devrait

  2   également être considérée comme un organe de facto de la Croatie, comme le

  3   HVO; en conséquence, il n'y a aucun élément fondant cette application et,

  4   en conséquence, on ne peut appliquer les protections additionnelles dans ce

  5   cas-ci.

  6   Messieurs les Juges, j'aimerais à présent me tourner vers la question

  7   numéro 4, étant donné qu'elle porte sur la constatation hypothétique que

  8   l'intention de la Chambre de première instance selon laquelle l'intention

  9   des forces du HVO s'agissant des morts et de civils qui avaient pris refuge

 10   à Enver Sljivo, et notamment l'impact que cela aurait eu si la Chambre de

 11   première instance s'était trompée sur l'entreprise criminelle commune et le

 12   plan criminel commun.

 13   Je voudrais revenir sur ce que Me Khan a mentionné plus tôt cette semaine.

 14   Il a fait référence à l'affaire Jogee, la référence complète est UKSC 8,

 15   cette affaire a été traitée en 2016, et dans cette affaire, la Cour suprême

 16   d'Angleterre et du Pays de Galles s'est prononcée, mais je ne vais pas

 17   entrer dans les détails, mais la Cour suprême a, en gros, conclu que le

 18   droit anglais, au moment de l'affaire Tadic et sur laquelle la Chambre

 19   d'appel s'était fondée - et là, je vous renvoie à la note de bas de page

 20   287 de l'arrêt Tadic - formulant le modèle de l'ECC du TPIY, était erroné.

 21   Pour la Cour suprême, la position adéquate serait la suivante : la partie

 22   secondaire ne serait coupable du crime commis par l'auteur principal que

 23   s'il y avait intention et que cette intention peut être conditionnée à

 24   l'occurrence de faits qui ont mené à la commission des crimes. Et donc, se

 25   dire qu'il se peut que le crime allait se passer n'est pas le bon critère

 26   juridique, mais ce critère devrait plutôt se fonder sur les éléments de

 27   preuve en possession de celui qui était animé de l'intention requise. Donc,

 28   l'affaire était Jogee UKSC 8, paragraphes 83 et 92. Comme l'a fait


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  1   remarquer la Cour suprême dans ce jugement :

  2   "L'anomalie frappante d'exigence d'un seuil plus bas, d'un seuil minimal

  3   pour établir la culpabilité en l'espèce s'agissant de l'élément accessoire

  4   ou de l'élément principal n'était pas la bonne."

  5   Et je laisse toute discrétion aux Juges de cette Chambre de corriger cette

  6   erreur, s'ils l'estiment nécessaire.

  7   Alors, nous allons ensuite parler de la troisième catégorie d'entreprise

  8   criminelle commune lorsque nous aborderons les deux documents au point

  9   4(c)(ii). Et je vais essayer de ne pas trop répéter ce que mes collègues

 10   ont déjà fait valoir pendant la semaine, et c'est la raison pour laquelle

 11   nous estimons que non seulement les événements de Gornji Vakuf étaient un

 12   événement local isolé qui ne peuvent prouver aucune existence d'objectif

 13   criminel commun. Si cette constatation selon laquelle le bombardement

 14   d'Enver Sljivo constituait des crimes d'homicide intentionnel est

 15   renversée, la constatation de la Chambre de première instance sur

 16   l'existence d'un schéma systématique, d'un comportement systématique sur

 17   les attaques du HVO devrait également être renversée, ainsi que leurs

 18   conclusions s'agissant de meurtres, assassinats, d'homicides intentionnels

 19   à Mostar et à l'Heliodrom et plus tard, après le 30 juin 1993, et ce, en

 20   faveur du défendant. La raison est assez simple. La Chambre de première

 21   instance s'est fondée pour cette constatation sur les homicides

 22   intentionnels et les meurtres ou assassinats tels que ce bombardement

 23   d'Enver Sljivo pendant les attaques à Gornji Vakuf et Mostar, et s'était

 24   fondée là-dessus pour arriver à l'entreprise criminelle commune.

 25   Le jugement de la Chambre de première instance au paragraphe 65, au

 26   tome 4, en se fondant sur sa conclusion, à savoir qu'il y avait un objectif

 27   criminel commun tel qu'il est allégué, c'est-à-dire "une ligne de conduite

 28   manifeste" de la part des forces du HVO. Donc, si le pilonnage susmentionné


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  1   de la maison d'Enver Sljivo est affirmé, à ce moment-là, la conclusion

  2   portant sur les homicides intentionnels et le meurtre à Gornji Vakuf ne

  3   dispose plus d'aucun élément de preuve pour l'étayer. Donc, le concept de

  4   "une ligne de conduite manifeste" de la part des forces du HVO est ensuite

  5   remis en cause et annulé, d'autant qu'il n'existe pas d'autres conclusions

  6   analogues d'homicides intentionnels et de meurtres par rapport à d'autres

  7   municipalités, à l'exception de Mostar plus tard. Cela ne coïncide pas avec

  8   la thèse de l'Accusation sur l'entreprise criminelle commune. Aucune ligne

  9   de conduite manifeste signifie qu'il n'y a pas d'objectif criminel commun

 10   qui remet en cause la théorie de l'entreprise criminelle de catégorie

 11   numéro 1 dans les municipalités. Cela signifie qu'à cette période, on ne

 12   peut pas estimer que M. Coric est responsable pénalement de l'entreprise

 13   criminelle commune de première catégorie.

 14   Et donc, si nous partons maintenant sur les événements de Mostar. Si aucune

 15   conclusion ne peut être déduite à partir des éléments de preuve qu'il y

 16   avait une "ligne de conduite manifeste" et qu'il n'y a donc pas

 17   d'entreprise criminelle commune originale de catégorie 1, que celle-ci

 18   n'existait pas dans les municipalités, ensuite il est illogique de dire que

 19   cette entreprise criminelle non existante serait élargie pour inclure

 20   Mostar, comme la Chambre de première instance l'a constaté à tort au tome

 21   4, paragraphe 54. Le meurtre en tant que "ligne de conduite manifeste" est

 22   essentiel aux conclusions de la Chambre de première instance pour dire

 23   qu'un plan criminel existait; et sans conclusion permettant d'étayer les

 24   meurtres au vu des éléments de preuve, Messieurs les Juges, vous devez

 25   acquitter Coric du chef 2 et du chef 3. D'autant que si au vu des éléments

 26   de preuve il est raisonnable de constater que les crimes allégués sont le

 27   résultat d'opérations strictement militaires sur lesquelles Coric

 28   n'exerçait aucun rôle; et deuxièmement, concernant la période qui a suivi


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  1   le mois de janvier jusqu'à la fin du mois de juin et juillet, il n'y a

  2   aucune opération militaire quelle qu'elle soit, en somme.

  3   En outre, si nous revenons à la question de la maison d'Enver Sljivo, la

  4   Défense doit préciser quelque chose - hormis ce qu'ont déjà dit les avocats

  5   de la Défense - l'Accusation indique qu'il y avait de la fumée qui sortait

  6   de la cheminée, mais l'Accusation ignore ce qu'elle avait concédé elle-

  7   même, c'est-à-dire que les défenseurs armés se trouvaient à des dizaines de

  8   mètres de la maison, ou les références de mes collègues aux éléments de

  9   preuve qui montrent que ces défenseurs étaient encore plus près de la

 10   maison. Donc, une analyse correcte n'a pas été faite pour exclure le fait

 11   que cet obus ne faisait pas partie d'une opération militaire légitime entre

 12   les deux forces armées qui s'opposaient ou dans lesquels les décès

 13   malheureux constitueraient des dommages collatéraux.

 14   Donc, la Chambre de première instance a commis une erreur en indiquant que

 15   ces obus faisaient partie de catégorie générique puisque armes

 16   indiscriminées sans mener une analyse correcte. Je vous rappelle ce qu'a

 17   déclaré la Chambre d'appel dans l'arrêt Galic qu'un obus ne peut être

 18   défini comme étant "indiscriminé" qu'après "avoir déterminé qu'il n'y avait

 19   aucune possibilité ou qu'il n'était pas raisonnable de conclure que les

 20   victimes … ont été atteintes de façon non intentionnelle par les combats à

 21   proximité de l'endroit où ils se trouvaient."

 22   Paragraphes 232 à 235 de l'arrêt Galic.

 23   Il existe de nombreuses conclusions raisonnables alternatives. Par exemple,

 24   si les civils se trouvent sur les lignes de front ou les forces de l'ABiH

 25   défendent ou placent leurs unités à proximité de structures civiles, de

 26   nombreuses conclusions qui qualifient les décès de non intentionnels et

 27   pour lesquelles on ne peut pas être tenus responsables militairement

 28   parlant. Nous attirons votre attention également sur le fait que


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  1   l'Accusation vous présente maintenant une version différente de celle

  2   avancée par la Chambre. Autrement dit, l'Accusation avance que des tirs à

  3   partir de char, très précis ont été utilisés. Si l'Accusation soutient cet

  4   argument, à ce moment-là l'Accusation vous dit que le jugement de première

  5   instance est erroné. Donc on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du

  6   beurre.

  7   Je vais maintenant passer à l'élément moral, la mens rea dans les chefs 2

  8   et 3. La Défense n'a cessé de dire et d'expliquer dans le détail dans son

  9   mémoire en clôture et son mémoire en appel, que Coric n'a pas reçu des

 10   rapports de combat, n'avait aucun pouvoir de commandement sur les

 11   opérations militaires, ou que la police militaire utilisée lors de ces

 12   opérations, n'était pas présente dans la zone de combat à Gornji Vakuf. En

 13   réalité, nous disposons de différents éléments, qu'au cours de la période

 14   pertinente, M. Coric se trouvait à l'hôpital de Zagreb. P1350; pages du

 15   compte rendu d'audience 50967, 51082, 51087 et -8. Au tome 4, paragraphes

 16   920 et 921 du jugement, le seul élément sur lequel se fonde la Chambre eu

 17   égard aux connaissances qu'avait Coric des crimes et ce qui s'est passé à

 18   Gornji Vakuf, ce sont deux rapports qu'il a envoyés, le P1635 et le P3090.

 19   Il a délivré ces rapports simplement pour fournir des données statistiques

 20   sur les victimes au combat de la police militaire, ce que l'on peut

 21   interpréter comme étant des combats légitimes, et le fait d'avoir combattu

 22   contre et capturé des combattants de l'ABiH ainsi que d'avoir fourni dans

 23   ces rapports des éléments d'information sur la nécessité d'augmenter les

 24   activités contre ces crimes. De tels rapports ne peuvent pas constituer un

 25   fondement pour l'élément moral de crime, d'homicides intentionnels ou de

 26   meurtres à Gornji Vakuf de la part de Valentin Coric.

 27   En outre, par exemple, au paragraphe 33 du mémoire en appel, nous avons

 28   abordé différents volets des éléments de preuve qui montrent que Coric ne


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  1   disposait pas de l'élément moral requis, notamment l'entraînement

  2   professionnel adéquat pour un policier militaire, aux termes du droit

  3   international ou du traitement humain des détenus.

  4   En outre, au paragraphe 34, nous avons parlé des efforts déployés par Coric

  5   pour organiser des cours d'entraînement avec le CICR pour former la police

  6   militaire et leur expliquer qu'il fallait agir correctement. Au paragraphe

  7   35 de notre mémoire en appel, nous citons les éléments de preuve qui

  8   indiquent qu'il n'y avait pas moins de 2 000 rapports au pénal déposés par

  9   la police militaire contre les auteurs croates de ces crimes, qui ont dû

 10   ensuite être traités par les organes judiciaires compétents. La Défense a

 11   soumis des exemplaires de certains registres du bureau du procureur

 12   militaire qu'elle a pu se procurer de différents bureaux. Cela se trouve à

 13   la pièce 5D4288. Un nombre important d'affaires non classées ont été

 14   transférées par les organes judiciaires aux nouveaux tribunaux après les

 15   accords de Washington. 5D5027, 5D5032, 5D5024, et la déposition du Témoin

 16   Vidovic à la page du compte rendu d'audience 51562 à 51569.

 17   Et il nous faut insister sur le rôle de la police militaire ou civile qui

 18   s'arrête au moment où ces rapports au pénal sont présentés; jugement, tome

 19   4, paragraphes 882, question que nous aborderons plus tard.

 20   Et c'est quelque chose sur lequel il faut insister, dans l'affaire

 21   Milutinovic, le président Milutinovic a été déclaré non coupable et

 22   acquitté même s'il a fait état des crimes qui se sont produits parce qu'il

 23   disposait d'informations et avait prévu que l'exécution de la loi et des

 24   organes judiciaires traitaient de ces questions-là et visant à poursuivre

 25   les auteurs. Milutinovic, jugement de la Chambre de première instance, tome

 26   3, paragraphes 132, tome 3, paragraphe 143. Cet acquittement n'a pas fait

 27   l'objet d'un appel.

 28   Les actions de Coric montrent également qu'il avait prévu que les organes


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  1   de la police et les organes chargés de faire exécuter la loi ont travaillé

  2   ensemble pour empêcher les crimes et pris les mesures nécessaires pour

  3   faire en sorte que ces forces fonctionnent de façon légitime pour empêcher

  4   et punir toute activité criminelle. Travail conjoint entre la police

  5   militaire et la police civile. On ne peut exclure les éléments de preuve

  6   qui indiquent que Coric pensait qu'il faisait partie d'un état légitime qui

  7   intervenait ou agissait dans le cadre d'un rôle policier légitime et que

  8   les crimes faisaient l'objet d'enquête et étaient sanctionnés conformément

  9   à la loi. Il s'agit là des conclusions plus raisonnables que tout objectif

 10   criminel commun dont il serait un auteur.

 11   Les éléments de preuve les plus importants concernant le manque d'intention

 12   aux fins de commettre les crimes peuvent être constatés dans deux documents

 13   qui émanent directement de Coric lui-même, délivrés à la même époque.

 14   P5471, alors qu'il faisait partie de l'administration de la police

 15   militaire; et le P6837, alors qu'il travaillait pour le ministère de

 16   l'Intérieur. Dans les deux cas, Coric informe toutes les autres personnes

 17   et, en substance, il plaide auprès des commandants militaires du HVO qu'il

 18   manque de policiers militaires et de policiers dans la police civile pour

 19   empêcher les crimes comme il se doit, parce que les effectifs ont été

 20   resubordonnés à la police militaire du HVO pour des activités de combat.

 21   Coric demande à ce que ces personnes reviennent de façon à ce qu'elles

 22   puissent empêcher et lutter contre les crimes de façon plus efficaces.

 23   Au vu de tous ces éléments de preuve, Messieurs les Juges, il était

 24   incohérent et effectivement illogique qu'une personne conclue que Coric

 25   disposait ou était animé de l'élément moral requis pour commettre les

 26   crimes aux chefs 2 et 3, étant donné que son désir où il souhaite à tout

 27   prix empêcher les crimes sur l'ensemble du territoire. Donc, aucun élément

 28   de preuve n'existe sur lequel la Chambre pourrait se fonder pour en déduire


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  1   que Coric partageait ou était animé de l'intention de commettre ces

  2   meurtres ou une entreprise criminelle commune.

  3   Donc, si les conclusions eu égard à Gornji Vakuf sont infirmées,

  4   étant donné cette pléthore d'autres éléments de preuve qui montrent que

  5   Coric combattait ces crimes à d'autres endroits, il sera impossible de lui

  6   attribuer un élément moral criminel en vertu de l'entreprise criminelle de

  7   catégorie numéro 1. Au vu des éléments de preuve, il ne peut simplement pas

  8   partager l'intention d'éventuelles ou de co-auteurs allégués de ces

  9   meurtres. Et il serait impropre de conclure cela eu égard au poste qu'il

 10   occupait en tant que représentant officiel engagé dans les rangs de la

 11   police et chargé de faire respecter la loi.

 12   Je vais maintenant parler de la mens rea ou de l'élément moral au

 13   titre de la responsabilité de l'entreprise criminelle commune de catégorie

 14   numéro 3. A titre préliminaire, je souhaite insister que si la Chambre

 15   d'appel infirme la conclusion concernant la maison d'Enver Sljivo et les

 16   décès à Gornji Vakuf, à ce moment-là, cela nie encore davantage ou écarte

 17   la question de la prévisibilité de ces crimes additionnels en vertu de

 18   l'entreprise criminelle commune de catégorie numéro 3 de Coric. Ces décès

 19   étaient prévisibles en tant que crimes dans le cadre d'un objectif criminel

 20   commun - dont il a été établi dans l'arrêt Sainovic, paragraphe 1557 - et

 21   en lieu et place de cela, il s'agit en réalité d'une action militaire

 22   légitime ou à d'autres raisons ou motifs tels qu'un crime arbitraire qui

 23   aurait pu être prévu par un représentant officiel de la police. Encore, du

 24   fait de son poste de représentant de la police, par définition, la

 25   prévisibilité des crimes ne signifie pas qu'il avait l'intention ou qu'il

 26   cautionnait ces crimes dans le cadre d'un objectif criminel commun, en

 27   particulier, les éléments de preuve susmentionnés indiquent qu'il faisait

 28   de son mieux avec les effectifs limités dont il disposait pour empêcher les


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  1   crimes et ensuite remplir son rôle de policier.

  2   En outre, dans des conclusions antérieures sur les décès à Gornji

  3   Vakuf et ces constatations de meurtre ont été écartés, il ne reste plus

  4   aucune possibilité pour que Coric ait pu prévoir les meurtres commis à

  5   Dretelj - il s'agit donc d'une conclusion erronée, tome 4, 1021 du jugement

  6   de première instance, qui se sont produits plus tard - parce qu'il n'a pas

  7   eu de notification antérieure.

  8   Je vais maintenant parler de la question numéro 4 soulevée par vous,

  9   Messieurs les Juges, sur l'importance des pièces à conviction P01414 et

 10   P01393 eu égard à l'appréciation de la capacité à Coric de prévoir les

 11   meurtres en vertu de l'entreprise criminelle commune de catégorie numéro 3.

 12   A titre préliminaire, je souhaite insister sur le fait que M. Coric n'a

 13   jamais fait partie d'une quelconque entreprise criminelle commune ni d'un

 14   objectif criminel commun. Je souhaite également faire remarquer qu'il est

 15   important, pas seulement cette question au niveau du fond, mais également

 16   les dates des documents qui ont été présentés dans le cadre de cette

 17   analyse, et de regarder la totalité des éléments de preuve ainsi que le

 18   contexte selon lequel ils ont été examinés par les Juges de la Chambre de

 19   première instance.

 20   Premièrement, le P01939, et c'est un document du Département de la

 21   police militaire, qui rapporte des crimes moins conséquents, et donc ne

 22   font pas allusion à des meurtres, commis par des membres de la police

 23   militaire contre les prisonniers envoyés à Coric à l'administration de la

 24   police militaire.

 25   Le P01414 est un autre document, il s'agit de l'ordre envoyé

 26   directement par Coric le lendemain, après avoir reçu le P1393, envoyé le

 27   lendemain aux fins d'enquêter dans ces événements particuliers de crimes

 28   allégués et de prendre les mesures nécessaires contre les fauteurs.


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  1   Dans le P01414, Coric utilise tous les moyens nécessaires dont il

  2   dispose pour agir correctement en tant qu'officier de la police militaire.

  3   Entre autres, il demande à ce qu'un rapport sur les événements soit envoyé

  4   sur les mauvais traitements et les blessures infligées dans la prison de

  5   Tomislavgrad. Il demande à ce que soient précisées les circonstances dans

  6   lesquelles les blessures ou les atteintes aux détenus, les atteintes à

  7   l'intégrité physique aient été infligées aux détenus de la prison de

  8   Ljubuski; il souhaite que l'on découvre les noms de ces auteurs, des

  9   personnes qui ont participé à ces événements; le nom des unités à

 10   lesquelles ces personnes appartenaient; et que tous les biens volés soient

 11   rendus à leur propriétaire; et dans le cas d'objets manquants, que les

 12   explications écrites soient fournies. P01414 montre ainsi que Coric n'avait

 13   jamais une intention de voir commettre ces crimes et il ne les soutenait

 14   pas non plus. Tout à l'inverse, le P01414 montre que la réaction appropriée

 15   est celle qui convenait de Coric, à savoir lorsqu'il était informé des

 16   crimes ou qu'il soupçonnait que des crimes avaient été commis ou il

 17   connaissait que ceci avait été commis par des membres de la police

 18   militaire. Effectivement, la Chambre de première instance considère que le

 19   P0414 est la preuve que Coric a bien agi en essayant de combattre les

 20   activités criminelles. Il ne s'agit pas d'un document qui l'incrimine. Je

 21   cite ici le tome 4 du jugement de première instance, paragraphe 881, note

 22   de bas de page 1645, dont je vais parler un petit peu.

 23   Malheureusement, le dossier en l'espèce ne démontre pas si on a n'a

 24   jamais répondu par écrit à Coric à propos du résultat de cette enquête en

 25   particulier, ou si les auteurs avaient pu être identifiés et, si c'était le

 26   cas, comment ils avaient été punis. Nous ne savons pas quel a été le

 27   résultat de cette enquête. Cependant, nous avons d'autres éléments de

 28   preuve qui ont montré que Coric avait un point de vue très, très strict qui


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  1   interdisait la commission de tout crime de la part de la police militaire.

  2   Par exemple, le dossier est clair et montre que dans l'exercice de ses

  3   compétences limitées, Coric avait cherché à ce que la police militaire soit

  4   la plus professionnelle possible. Nous avons la pièce P129 qui nous montre

  5   que Coric avait envoyé des unités de la police militaire sur le terrain

  6   pour leur expliquer les règles de discipline qu'ils devaient suivrent. De

  7   même, le comportement personnel de Coric a été décrit aux pages du compte

  8   rendu 50953 à 50954 et indiquent que la politique était très stricte,

  9   politique disciplinaire de la police militaire, et je cite :

 10   "…tout auteur doit être poursuivi et un rapport doit être déposé …

 11   quiconque entache le nom de la police militaire sur des champs de bataille

 12   en Bosnie-Herzégovine devrait être éjecté de l'unité."

 13   Ces éléments de preuve montent donc que ces crimes ont été commis par

 14   la police militaire, étaient connus de Coric, et qu'il adhérait à la

 15   politique stricte précitée et qu'il a renvoyé les auteurs, qu'il les a

 16   révoqués de leurs fonctions et a exigé que des rapports doivent être

 17   transmis au parquet parce que, pour reprendre ses mots à la pièce P3571 :

 18   "Les susnommés ont souillé l'honneur de la police militaire et s'ils

 19   restaient dans cette unité, leur présence serait dommageable."

 20   Et dans ce cas-là, dans cet exemple-là, les auteurs renvoyés et qui ont

 21   fait l'objet de rapports avaient commis des viols.

 22   La pièce P03571 est datée après la pièce P01414 et montre dès lors qu'après

 23   la pièce P01414, Coric, en sa qualité de chef de l'administration de la

 24   police militaire, dans le cadre de son autorité limitée, s'était battu pour

 25   empêcher les crimes commis par les membres de la police militaire. Et la

 26   charge de la preuve ne revient pas à la Défense, avec tout le respect que

 27   je dois à cette Chambre, la Défense n'a pas à prouver le résultat et les

 28   conclusions de l'enquête ordonnée, que l'on retrouve à la pièce P01414,


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  1   mais dans le contexte des éléments de preuve uniformes et ultérieurs, l'on

  2   peut conclure raisonnablement que Coric n'avait pas cautionné ces crimes.

  3   Nous estimons que la pièce P01414 est bien comprise comme un ordre

  4   d'enquête émis par l'accusé et elle prouve qu'il a pris les mesures

  5   nécessaires dans le cadre de ses compétences limitées pour empêcher ou

  6   punir ces crimes.

  7   Alors, je voudrais maintenant revenir à ce que je vous ai dit tout à

  8   l'heure, nous devons insister sur le fait qu'à la lumière de ces éléments

  9   et dans ce contexte, la pièce P01414 est utilisée comme exemple des efforts

 10   de Coric, efforts de prévenir ces crimes. La pièce P01414 est mentionnée

 11   dans le jugement en note de bas de page 1645, au tome 4, et plus tard dans

 12   le jugement au paragraphe 882 également, où la Chambre de première instance

 13   déclare :

 14   "A la lumière de ce qui précède la Chambre conclut qu'en sa qualité de chef

 15   de l'administration de la police militaire, Valentin Coric avait la

 16   capacité de participer à la prévention des crimes au sein du HVO, mais que

 17   son pouvoir était limité à l'enquête des auteurs des crimes, alors que la

 18   responsabilité de poursuite se retrouvait entre les mains ou dépendait du

 19   procureur militaire."

 20   Ces paragraphes se retrouvent dans le tome 4 du jugement, au titre :

 21   "Pouvoirs de Valentin Coric dans la lutte contre les crimes". Et cela doit

 22   être considéré dans son ensemble. A ce moment-là, Coric avait pris des

 23   mesures contre les crimes dont il avait connaissance, il avait les mains

 24   liées, il avait n'avait pas tous pouvoirs en raison de sa position, donc il

 25   ne pouvait pas faire tout ce qu'il désirait, mais il a fait ce qu'il

 26   pouvait, tout ce qui était en son pouvoir pour exercer cette discipline.

 27   Et à ce propos, nous aimerions vous renvoyer à la pièce P01678. C'est le

 28   propre document de Coric, daté du 17 mars 1993, où il parle de la


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  1   subordination des unités de la police militaire et où il déclare qu'ils

  2   élimineraient quiconque de la police militaire dont le travail s'oppose au

  3   commandant ou au SIS. Il est clair, au vu de ce document, que Coric

  4   n'annonçait pas seulement son intention de lutter contre toute forme de

  5   crime ou de manquement à la discipline dans la police militaire, mais il

  6   déclare également que la police militaire suivrait les informations reçues

  7   par ceux auxquels les unités de la police militaire étaient subordonnées -

  8   les commandants militaires - et ceux aussi qui avaient l'obligation de

  9   lutter contre le crime dans toutes les unités du HVO sans exception.

 10   Donc, dans la mesure où Coric pouvait prévoir la survenance d'autres

 11   crimes, tels que meurtres ou assassinats, nous devons tenir compte du fait

 12   légitime suivant : les auteurs seraient punis et interrogés conformément à

 13   sa ligne de conduite stricte par les organes appropriés lorsque lui n'était

 14   pas directement compétent pour le faire. A cet égard, l'autre document, et

 15   c'est un élément à prendre en compte également, la pièce P01393 n'est pas

 16   mentionnée dans le jugement s'agissant de Coric. Cela étant, la pièce

 17   P01393 est un document interne de la police militaire. Donc, là encore,

 18   dans ce cas-là, Coric réagit comme il le faut et conformément à la

 19   législation lorsqu'on l'a informé par la filière hiérarchique régulière de

 20   devoir informer la police militaire. Ces documents ne peuvent donc pas être

 21   utilisés pour déduire que Coric avait la capacité de prévoir ces meurtres

 22   qui auraient été autrement punis et soumis à d'autres voies de recours

 23   appropriés, comme il l'a fait pour d'autres crimes.

 24   Et puis, le meurtre ou l'assassinat n'est pas mentionné dans ces documents.

 25   Vous avez là les pièces P01393 et P01414. Seuls des vols et des rouages de

 26   coups étaient mentionnés. Même l'Accusation - dans sa réplique au

 27   paragraphe 73 - concède que la prévisibilité du meurtre est fondée sur la

 28   connaissance de meurtres commis préalablement et pas d'autres délits tels


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  1   que le vol, et cetera. Et partant, même si l'on tient compte uniquement des

  2   critères valables aux yeux de l'Accusation, les pièces P01393 et P1414 ne

  3   peuvent être utilisées pour déduire que Coric avait la capacité de prévoir

  4   les meurtres qui n'auraient pas autrement été punis ou soumis à d'autres

  5   voies de recours.

  6   Tous les témoins se sont exprimés sans équivoque lorsqu'ils ont dit

  7   qu'aucun rapport de combat n'a été envoyé à Coric, sous quelque forme que

  8   ce soit, par les subordonnés de la police militaire dans les zones de

  9   combat à l'armée. Les éléments de preuve qui existent en la matière

 10   montrent que l'administration de la police militaire n'a reçu que des

 11   statistiques telles que l'emplacement, la situation générale de l'unité de

 12   la police militaire, le nombre, et cetera. Pièce 5D5110, paragraphe 5.

 13   S'agissant des crimes qui lui ont été rapportés et dont il avait

 14   connaissance, Coric a reçu notification de la part des autorités

 15   pertinentes qui menaient des enquêtes, qui arrêtaient et qui renvoyaient

 16   des rapports au pénal pour des poursuites ultérieures. Pièce P4058.

 17   Nous souhaitons également insister sur un rapport envoyé par Coric au

 18   Département de la défense, 5D2113, qui précise quelles sont les mesures

 19   contre les crimes qui ont été mises en place à Mostar avec des "résultats

 20   notables", à savoir lorsque la police militaire a décidé de prendre le

 21   contrôle de certains quartiers de la ville pour empêcher le pillage. De

 22   même, la pièce 5D4110, où Coric prend les mesures nécessaires dans le

 23   domaine limité qui est le sien pour contribuer à faire appliquer la loi,

 24   des efforts à cet égard à Mostar, pour essayer d'améliorer l'efficacité des

 25   mesures contre les crimes et soutenant ainsi la formation d'officiers de la

 26   police scientifique et encourageant la police militaire à travailler plus

 27   étroitement avec la police civile. Et sa position était la même lorsqu'il a

 28   quitté la police militaire et qu'il est devenu ministre de l'Intérieur.


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  1   En outre, en nous fondant sur les deux documents à la question numéro

  2   4(ii), Coric n'aurait pu prévoir les meurtres qui ont été commis par la

  3   suite à des dates différentes et dans des circonstances différentes, en

  4   particulier les crimes commis par le personnel qui ne relevait pas de son

  5   autorité et qui ne relevait pas de ses compétences et qui ne lui rendait

  6   pas compte. Les dates et le contexte sont assez importants.

  7   Il faut rappeler que d'autres éléments de preuve montrent que Coric

  8   ne disposait pas les compétences nécessaires sur toute la police militaire,

  9   parce qu'il était engagé sur les lignes de front avec des militaires du

 10   HVO. L'autre jour, M. Stringer, aux pages du compte rendu d'audience 422 à

 11   423 a indiqué, à vous, Messieurs les Juges, que la majorité de la Chambre

 12   avait à juste titre conclu que d'autres appelants que la police militaire

 13   leur aurait été subordonnée et non pas Coric. Mais mon confrère abordera la

 14   question de la resubordination de la police militaire et civile plus tard

 15   aujourd'hui. Encore une fois, je parlerai des efforts de Coric consistant à

 16   essayer de faire revenir les membres de la police militaire et civile pour

 17   les engager dans des activités pour faire respecter la loi.

 18   Donc à tous moments, Coric - du fait dans son rôle de policier - devait

 19   prévoir les crimes, mais il a également prévu que les organes chargés de

 20   faire respecter la loi pouvaient travailler dans ce sens et empêcher de

 21   tels crimes. Et si cela s'avérait nécessaire, il était important que les

 22   membres du personnel puissent revenir pour remplir ce rôle. Sauf votre

 23   respect, nous sommes surpris par la question posée par la Chambre d'appel,

 24   lorsqu'elle pose certaines questions, et l'appel du bureau du Procureur et

 25   le mémoire de l'intimé posent un certain nombre de questions dans la mesure

 26   où ces documents ne sont pas cités par l'Accusation concernant Coric. Il

 27   s'agit ici de la réplique du bureau du Procureur dans la pièce P01393 dans

 28   le contexte de Pusic.


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  1   La Chambre de première instance reconnaît que tome 4, paragraphes

  2   881, 882, que Coric a combattu les crimes. Il utilise ce document à titre

  3   d'exemple, pour montrer comment il remplissait ses obligations de policier,

  4   que l'entreprise criminelle commune est une forme de responsabilité, qu'il

  5   remplissait ses devoirs en combattant les crimes, cela ne peut pas

  6   constituer une part importante d'une entreprise criminelle commune, cela ne

  7   peut pas être interprété non plus comme contribuant à la réalisation d'une

  8   entreprise criminelle commune. En accomplissant ses devoirs au quotidien,

  9   celui d'un officier de police, pour prévoir et réagir contre les crimes,

 10   cela devient un élément clé d'un autre crime ou la preuve qu'un crime

 11   serait commis plus tard; et donc le seul élément de preuve, le seul fait de

 12   combattre un crime devient un crime en soi. Ce qui est absurde et tout à

 13   fait contraire aux systèmes juridiques du monde entier.

 14   Nous rappelons aux Juges de la Chambre d'appel que conclure, comme

 15   dans la Chambre d'appel dans Halilovic au paragraphe 59 du jugement :

 16   "Par exemple, un officier de police peut empêcher et punir les crimes

 17   qui relèvent de sa compétence, mais cela ne fait pas de lui un supérieur

 18   hiérarchique, (au sens de l'article 7(3) du Statut) par rapport à un

 19   quelconque auteur qui relève de sa compétence."

 20   Sauf votre respect, la même analyse s'applique à l'entreprise

 21   criminelle commune quelle que ce soit sa catégorie. Le rôle de Coric en sa

 22   qualité de militaire et ensuite de policier de la police civile ne peut

 23   être utilisé pour imposer une responsabilité contre lui, parce qu'il a agi

 24   en sa capacité officielle, et qu'il avait prévu les crimes et qu'il avait

 25   également prévu de faire appliquer la loi par les organes compétents pour

 26   empêcher et punir ces crimes, comme tout autre policier du monde. Un autre

 27   résultat consisterait à dire ou une autre conclusion consisterait à dire

 28   que cela constituait un crime que d'agir comme un policier. Encore une


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  1   fois, nous devons insister sur le fait que ces documents en cause dans la

  2   question 4 (c)(ii) que nous ne parlons pas de crimes sélectifs, mais que

  3   Coric combattait ces crimes lorsqu'il faisait partie de la police

  4   militaire, il a fait en sorte d'empêcher et de punir ceux qui commettaient

  5   des crimes contre le groupe le plus vulnérable à ce moment-là, les

  6   prisonniers musulmans. Donc, pour que l'appelant Coric soit condamné et

  7   tenu responsable pénalement pour avoir rempli ses obligations serait un

  8   mauvais précédent pour n'importe quelle instance judiciaire. La question

  9   que cela pose, si quelqu'un fait des efforts pour empêcher et punir des

 10   crimes du fait de son rôle au sein de la police et lorsqu'il combat les

 11   crimes, est-ce qu'une telle personne peut automatiquement et strictement

 12   être responsable de tout crime futur commis par des auteurs qu'il ne

 13   connaissait même pas, qu'il ne pouvait pas empêcher ? Sera-t-il sanctionné

 14   pour avoir fait quelque chose de bien ? N'importe quel policier combat les

 15   crimes, c'est son devoir. Il ne peut pas être sanctionné ou puni parce

 16   qu'il était tout simplement, malheureusement un policier, et il doit être

 17   efficace et remplir ses fonctions en empêchant et punissant les crimes qui

 18   sont commis dans son domaine de compétence ou dans la région qui relève de

 19   ses compétences. Et il ne peut pas non plus prévoir que cela aurait pu se

 20   produire.

 21   Donc j'en termine avec ces questions, nous insistons sur le fait que

 22   l'entreprise criminelle de catégorie numéro 3 est la question qui est posée

 23   ici dans l'analyse dolus eventualis, dans ce critère qui est retenu et

 24   appliqué dans le cas de l'accusé, qui n'avait pas l'intention de voir

 25   réaliser ce résultat, mais savait que les actions d'un groupe pouvaient

 26   conduire à ces résultats et qu'il a volontairement pris ce risque. Ces deux

 27   documents qui sont remis en cause -- ni ces documents ni la totalité des

 28   éléments de preuve montrent que Coric avait l'intention de commettre les


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  1   crimes ou de les laisser impunis et il a encore moins délibérément pris ce

  2   risque. C'est tout à fait tout le contraire eu égard aux compétences

  3   limitées qui étaient limitées, qui étaient les siennes, il avait

  4   l'intention de les combattre et de s'opposer à ce risque, et de s'assurer

  5   que ces crimes contre les auteurs fassent l'objet d'enquête et soient

  6   sanctionnés.

  7   Alors je vais maintenant parler de la question numéro 5 sur

  8   l'éventuelle annulation de la conclusion de la Chambre de première instance

  9   sur la question de la destruction des biens provoquée à Dusa, Hrasnica,

 10   Zdrimci et Uzricje, qu'il s'agissait d'une destruction arbitraire et non

 11   justifiée par des nécessités militaires. Encore une fois, certains de mes

 12   confrères vous ont déjà parlé de cette question, et je souhaite me joindre

 13   à leurs arguments et simplement aborder certains points. Dans le jugement

 14   de la Chambre de première instance, tome 3, paragraphe 1569, la Chambre de

 15   première instance déclare qu'elle a reçu des éléments de preuve qui

 16   indiquaient que des membres de l'ABiH étaient présents dans la ville de

 17   Gornji Vakuf, et précisément dans les villages de Dusa, Hrasnica, Zdrimci,

 18   et Uzricje à l'époque de l'attaque par le HVO et la destruction allégée des

 19   maisons. Certains hommes musulmans armés étaient cachés à l'intérieur des

 20   maisons, de temps en temps. Néanmoins, la Chambre de première instance a

 21   établi que le pilonnage de ces villages était indiscriminé. En outre, la

 22   Chambre de première instance a conclu de façon explicite qu'à Uzricje où un

 23   policier musulman avait été resubordonné à l'armée du HVO a été déployé,

 24   qu'il y avait également des hommes armés musulmans. Ce village ainsi était

 25   défendu par une force militaire adverse et armée qui comprenait des hommes

 26   musulmans. Confer le jugement de la Chambre de première instance, tome 2,

 27   paragraphe 370, et la même chose valait pour la situation à Zdrimci et

 28   Hrasnica. Il ne s'agit pas d'endroits qui n'étaient pas défendus.


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  1   Nous n'avons aucune information sur l'emplacement des civils, c'est-

  2   à-dire à quelle distance ces civils se trouvaient de la zone de combat, des

  3   lignes de front ou des combattants ou des combattants de la partie

  4   belligérante. Nous n'avons pas non plus, d'information sur la quantité, le

  5   nombre de bombardements, nous n'avons pas d'éléments de preuve ou d'expert

  6   qui décrirait clairement toutes les conditions qui entouraient ces

  7   bombardements et qui seraient nécessaires pour les apprécier. La charge de

  8   la preuve revient à l'Accusation, et l'Accusation n'a pas présenté

  9   d'élément de preuve à cet égard. Donc aucun Juge du fait raisonnable ne

 10   pourrait conclure qu'il n'y avait qu'une seule conclusion à être tirée, à

 11   savoir qu'il s'agissait d'action indiscriminée parce que cette conclusion

 12   est entachée d'un doute raisonnable. Il y a plusieurs possibilités,

 13   plusieurs conclusions possibles à la lumière des éléments de preuve, y

 14   compris le combat légitime.

 15   De plus, la Chambre de première instance n'établit aucun distinguo

 16   entre nécessité militaire et acte indiscriminé, ne dit rien sur le moment à

 17   partir duquel quelque chose ou une nécessité militaire devient

 18   indiscriminée. Et cela est assez étrange, étant donné que la Chambre de

 19   première instance reconnaît qu'il y avait des combattants de l'ABiH sur le

 20   terrain et même des pertes du HVO lors des combats avec les forces de

 21   l'ABiH dans ces villages.

 22   L'autre jour, j'ai entendu M. le Procureur Stringer atténuer le

 23   niveau de combat dans ces villages, page du compte rendu 419. Mais,

 24   Messieurs les Juges, contentez-vous de regarder les éléments de preuve qui

 25   ont été versés au dossier et vous verrez qu'il y avait des pertes

 26   significatives lors de ces combats dans ces villages. Par exemple, la pièce

 27   P03090, qui nous montre que la police militaire resubordonnée à l'armée du

 28   HVO a perdu 10 hommes et 63 ont été blessés suite à ce combat. Ce qui veut


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  1   dire qu'au moins, il y avait un certain niveau de combat légitime qui

  2   existait. Mais la Chambre de première instance n'a pas tenu compte de ces

  3   éléments de preuve et cette autre conclusion raisonnable au regard des

  4   éléments de preuve serait de dire qu'il s'agit d'une violation du principe

  5   in dubio pro reo. Il n'y a pas d'analyse concertant une marge d'erreur

  6   acceptable lors des bombardements d'artillerie. Il n'y a pas de fixation de

  7   normes claires à cet égard. Je vous rappelle, Messieurs les Juges, que la

  8   Chambre de première instance devait conclure qu'il n'y avait qu'une seule

  9   conclusion raisonnable, pas plusieurs.

 10   L'analyse du jugement nous montre que la norme établissant la

 11   différence entre les bombardements en raison d'actions militaires légitimes

 12   et d'une part ceci et d'autre part, la nécessité militaire. Et

 13   malheureusement, même le bombardement militaire légitime peut provoquer des

 14   dommages collatéraux non intentionnels à des biens.

 15   Qui plus est, le jugement au tome 2 de la Chambre de première

 16   instance, paragraphe 353, nous indique que :

 17   "Elle a admis des éléments de preuve montrant que la destruction, en

 18   particulier de maisons dans la ville de Gornji Vakuf, ne résultait pas

 19   simplement de bombardements du HVO mais aussi de combats à l'intérieur de

 20   la ville entre le HVO et l'ABiH et de bombardements de la VRS."

 21   Donc, sur la base de cette constatation, la Chambre de première

 22   instance ne pouvait pas conclure au-delà de tout doute raisonnable que la

 23   destruction était le fruit d'actes délibérés, indiscriminés ou illégaux du

 24   HVO, ni de M. Coric.

 25   J'aimerais à présent -- la dernière question, question numéro 10 de

 26   votre liste de questions, Messieurs les Juges, sur l'impact potentiel de la

 27   condamnation de l'entreprise criminelle commune de notre client si vous

 28   deviez accueillir le moyen d'appel numéro 1(A) de l'Accusation.


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  1   Alors, tout d'abord, nous aimerions vous faire remarquer que

  2   accueillir cette branche du moyen d'appel de l'Accusation, 1(A), n'aurait

  3   aucune incidence sur notre appel s'agissant des condamnations de

  4   l'entreprise criminelle commune de troisième catégorie. J'aimerais tout

  5   d'abord attirer votre attention sur le paragraphe 198 de notre mémoire en

  6   appel, où nous expliquons clairement que la possibilité est l'étalon

  7   adéquat pour apprécier l'ECC de troisième catégorie et nous déclarons que

  8   la Chambre de première instance a commis une erreur lorsqu'elle a appliqué

  9   cette norme et a conclu que les crimes étaient prévisibles à Coric parce

 10   qu'il n'avait pas connaissance, et donc qu'il ne pouvait pas prévoir que

 11   ces crimes étaient possibles.

 12   De plus, nous remarquons que même si la Chambre de première instance,

 13   d'un point de vue linguistique, a utilisé la terminologie "probabilité" et

 14   "possibilité", s'agissant des crimes supplémentaires pour lesquels Coric a

 15   été condamné au titre de l'ECC 3, il est clair que la Chambre de première

 16   instance avait appliqué le critère exact qui était la possibilité, mais

 17   n'avait pas appliqué ce critère dans son analyse des éléments de preuve

 18   pour constater que Coric était coupable de ces crimes et qu'il n'aurait pas

 19   pu les prévoir.

 20   Par exemple, nous aimerions renvoyer les Juges de la Chambre aux

 21   paragraphes 200, 207 et 209 de notre mémoire, où nous décrivons davantage

 22   en détail les erreurs commises par la Chambre de première instance. Je vais

 23   vous en donner un à titre d'exemple. Au tome 4, paragraphes 1018, 1020,

 24   Coric est condamné à tort par la Chambre de première instance au titre de

 25   sa responsabilité au titre de l'ECC 3 pour des meurtres à Dretelj,

 26   précisément en utilisant le critère idoine et la terminologie selon

 27   laquelle "des crimes auraient pu être commis pour pouvoir apprécier cette

 28   prévisibilité". Donc, nonobstant notre constatation sur l'appel interjeté


Page 607

  1   par l'Accusation, vous devriez acquitter M. Coric de toute responsabilité

  2   au titre des crimes de troisième catégorie, car il a été condamné pour ces

  3   derniers à tort.

  4   De plus, comme nous l'avons déjà détaillé dans le reste des

  5   paragraphes de notre huitième moyen d'appel, à la lumière des éléments de

  6   preuve présentés, on ne peut appliquer ce critère de probabilité ou de

  7   possibilité, parce qu'aucun Juge du fait raisonnable ne pourrait conclure

  8   que Coric était coupable au titre de l'entreprise criminelle commune de

  9   troisième catégorie, parce qu'il n'avait pas la possibilité de prévoir tous

 10   les crimes étant donné l'ensemble des éléments de preuve présentés.

 11   L'Accusation dans son appel fait valoir que la jurisprudence de la

 12   Chambre d'appel confirme que la responsabilité au titre de l'entreprise

 13   criminelle commune de troisième catégorie découle du fait que si les

 14   membres de l'ECC savaient que les crimes allaient être commis était une

 15   conséquence "possible" de l'exécution de l'objectif criminel commun.

 16   En outre, l'Accusation dans son appel déclare que le critère adéquat

 17   pour conclure à l'entreprise criminelle commune de catégorie 3 et la mens

 18   rea d'élément moral exigent que les crimes puissent éventuellement être

 19   perpétrés dans l'exécution d'un objectif criminel commun. Et l'accusé a

 20   délibérément pris ce risque en décidant de poursuivre sa participation à

 21   cette entreprise. Cependant, l'Accusation au paragraphe 198 a précisé que

 22   Coric met en exergue et reconnaît que le doute raisonnable va à l'encontre

 23   de sa responsabilité :

 24   "En restant au poste qu'il occupait et le pouvoir qu'il avait, il

 25   avait l'intention ou savait que des crimes seraient commis, de façon

 26   délibérée, il a pris le risque que les crimes relevant de l'entreprise

 27   criminelle commune de catégorie 3 puissent être commis." Sauf votre

 28   respect, compte tenu de son rôle au sein de la police, il ne suffit pas de


Page 608

  1   dire qu'il avait connaissance des crimes. Il est important qu'il ait eu

  2   l'intention de commettre ces crimes. Et l'analyse montre qu'il s'est donné

  3   beaucoup de mal pour essayer d'empêcher les crimes, ce qui est contraire à

  4   une intention visant à délibérément prendre le risque que ces crimes

  5   puissent être commis. Il faut insister encore une fois, insister sur

  6   l'arrêt dans l'affaire Sainovic, paragraphe 1557, qui déclare que l'accusé

  7   doit prévoir que les crimes puissent être commis "…pour réaliser l'élément

  8   moral de ces crimes qui font partie de l'objectif criminel commun."

  9   Comme nous l'avons démontré, Coric n'a jamais fait partie d'un

 10   quelconque objet criminel commun, et mon confrère abordera cette question

 11   davantage.

 12   L'Accusation fait valoir qu'à la branche du moyen d'appel 1(A) de son

 13   appel, qu'en vertu du critère adéquat Coric serait non pas condamné et non

 14   acquitté de certains crimes, étant donné que l'application du critère

 15   juridique donnerait lieu à des acquittements, pour ce qui est de Coric en

 16   tout cas. Mais hormis le fait d'utiliser un libellé imprécis la Chambre

 17   semble avoir appliqué ce même critère de possibilité à la fois lorsqu'elle

 18   l'a condamné et lorsqu'elle a acquitté Coric.

 19   L'INTERPRÈTE : Branche du moyen d'appel 1(A) précision de l'interprète.

 20   Page 28 et ligne 24.

 21   M. IVETIC : [interprétation] La Défense de Valentin Coric a fourni une

 22   réponse très précise et détaillée à la branche du moyen d'appel de

 23   l'Accusation 1(A) aux paragraphes 19 à 23 de son mémoire en réponse, je

 24   vous renvoie, Messieurs les Juges, à ces paragraphes car ce sont des

 25   éléments qui étayent nos arguments. Encore une fois, il faut insister que

 26   l'Accusation a concédé et reconnu que le doute raisonnable existe quant à

 27   l'intention de Coric, au paragraphe 198 de l'appel.

 28   Si Coric était simplement au courant des crimes qui étaient commis sur son


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  1   territoire, même si cela relève de tout devoir d'un policier, et il n'avait

  2   pas l'intention de commettre ces crimes; par conséquent, il ne peut être

  3   tenu responsable de ces crimes. Au contraire, les éléments de preuve

  4   montrent à l'envi qu'il a pris les mesures nécessaires, celles qu'il

  5   pouvait prendre, mais qui n'a pas pu toujours traiter les situations comme

  6   il le souhaitait. Paragraphes 186 à 210, et ailleurs dans notre mémoire en

  7   appel, nous citons de nombreux éléments de preuve qui indiquent que Coric

  8   n'était pas au courant de certains événements comme, par exemple, il était

  9   hospitalisé à Zagreb pendant un certain temps, et compte tenu de la

 10   resubordination de la police militaire au HVO, et ensuite parce qu'il

 11   pouvait de façon légitime interpréter des informations dont il disposait eu

 12   égard au combat légitime et l'application légitime du droit concernant les

 13   biens qui avaient été abandonnés. De même, dans ces mêmes paragraphes, nous

 14   citons précisément de nombreux éléments de preuve qui montrent que ni Coric

 15   ni la police militaire ne toléraient les crimes, avaient pris des mesures

 16   pour les empêcher et en punir les auteurs. Le comportement de Coric en

 17   agissant ainsi pour empêcher ces crimes ne permet pas à une quelconque

 18   Chambre de première instance raisonnable de conclure qu'il a délibérément

 19   et sciemment pris le risque que ses actes ou ses contributions contribuent

 20   à une éventuelle commission de crimes ou conduisent à une éventuelle

 21   commission de crimes. Encore il s'agit d'une contradiction. En outre, il ne

 22   pouvait pas prévoir la possibilité des décès qui lui ont été rapportés et

 23   qui étaient différents compte tenu de ce qui s'était passé plus tôt, il

 24   s'agissait de morts au combat, et dans ce cas il s'agit des morts de

 25   Dretelj, par exemple, que nous avons abordé au paragraphe 208 de notre

 26   appel.

 27   Nous allons revenir au simple fait que la Chambre de première instance n'a

 28   pas utilisé le critère erroné, malgré ce que l'Accusation allègue, hormis


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  1   le fait que la Chambre de première instance sur un plan linguistique soit

  2   remise en cause et soit imprécise quant à l'emploi des termes qu'elle

  3   utilise "la probabilité" ou que "un crime soit commis" avec "pourrait" ou

  4   "pourrait être commis", la totalité des conclusions de la Chambre doivent

  5   être prises en compte. Et je fais valoir que la totalité des éléments de

  6   preuve ont été pris en compte, la Chambre de première instance n'a pas

  7   utilisé un critère erroné et les acquittements ont été rendus comme il se

  8   doit en accord en conformité avec le critère qui convient.

  9   La Chambre de première instance, en fait, cite le volume 1, paragraphes 216

 10   à 217 concernant l'entreprise criminelle commune de troisième catégorie et

 11   le critère retenu conformément à la jurisprudence de la Chambre d'appel,

 12   que l'Accusation accepte qu'il s'agit là du critère adéquat au paragraphe

 13   30 de leur appel et que la jurisprudence dans le cadre d'un appel confirme

 14   les jugements de la Chambre de première instance que l'Accusation cite

 15   comme étant le critère correct pour les crimes additionnels relevant de

 16   l'entreprise de catégorie numéro 3, l'entreprise criminelle commune dans le

 17   même paragraphe, donc le critère de la possibilité et le critère exact qui

 18   a été appliqué. Donc il est clair que la Chambre de première instance

 19   utilise le critère adéquat et cela peut être déduit non seulement de cette

 20   citation mais également d'autres notes de bas de page et les citations qui

 21   figurent dans le jugement.

 22   En outre, au moyen 1 de l'appel de l'Accusation, nous pouvons même dire :

 23   en tenant compte des déclarations de la Chambre concernant les meurtres à

 24   Stolac et Capljina et dans la prison de Dretelj, la Chambre de première

 25   instance fait une analyse correcte et utilise le critère correct et indique

 26   que ces acquittements sont corrects, à savoir la conséquence d'un manque

 27   d'élément de preuve, et non pas l'application ou une application erronée

 28   d'un critère inférieur ou plus élevé au moment d'évaluer le poids à


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  1   accorder aux éléments de preuve. Donc ces acquittements ne seraient pas

  2   affectés si vous faisiez droit au moyen d'appel 1(A) présenté par

  3   l'Accusation dans son appel.

  4   En résumé, hormis quelques malheureux termes utilisés et l'emploi des

  5   termes "probable" et "serait", la Chambre de première instance a appliqué

  6   et s'est fondée sur le critère de possibilité dans sa conclusion; et même

  7   l'Accusation et l'appelant admettent cela, mais constate que la Chambre a

  8   utilisé un critère dans son jugement et a utilisé le terme

  9   "d'occasionnellement".

 10   L'Accusation utilise cette interprétation verbale et ces expressions se

 11   retrouvent aux paragraphes 216 à 220 du jugement, et il n'est pas logique

 12   qu'il s'agit d'une interprétation systématique de la loi, une explication

 13   des textes juridiques d'après les règles de la logique formelle et une

 14   comparaison avec d'autres critères juridiques d'autres conclusions de la

 15   Chambre de première instance. Donc les allégations de l'Accusation sont

 16   sans fondement. La Chambre a utilisé le critère correct, le critère tel

 17   qu'élaboré et appliqué par la Chambre d'appel dans sa jurisprudence; pour

 18   ces raisons, ce moyen d'appel devrait être rejeté.

 19   Au paragraphe 23 de sa réponse, la Défense a déclaré la conclusion

 20   concernant la branche du moyen d'appel 1 du moyen de l'Accusation ne porte

 21   pas sur les conclusions factuelles et les critères juridiques dans le

 22   jugement, parce que l'acquittement dont ils se plaignent dans leur appel

 23   n'est pas le résultat d'une erreur de l'application de critères juridiques

 24   comme ils l'avancent. La Chambre de première instance a appliqué et utilisé

 25   qu'un seul critère dans tout le jugement, quand bien même différents termes

 26   sont employés.

 27   Au vu de ce qui précède, la Défense de Coric avance, sauf votre respect,

 28   que la responsabilité pénale au titre de crimes additionnels dans le cadre


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  1   de l'entreprise criminelle de troisième catégorie ne peuvent être attribués

  2   à M. Coric étant donné qu'il n'était pas prévisible par Coric, même si on

  3   retient le critère de la possibilité, parce que les informations dont il

  4   disposait n'étaient pas suffisantes pour lui permettre d'être notifié de la

  5   possibilité de ces crimes, en particulier dans l'hôpital de Zagreb, et le

  6   fait qu'il n'avait pas l'intention de commettre ces crimes de toute façon.

  7   En outre, les mesures qu'il a prises pour empêcher les crimes montrent

  8   qu'il n'a pas délibérément et sciemment pris le risque que ces crimes

  9   pouvaient se produire mais, au contraire, les a combattus à tous moments.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Alors, je peux vous expliquer ce point

 11   page 4 du compte rendu, je souhaite reprendre ce que vous avez dit.

 12   Lorsque nous traitons de la question de l'occupation et l'aspect de la

 13   notification, vous avez dit que : L'Accusation fait valoir sur ce point que

 14   la question de l'occupation concernant -- en réponse à votre mémoire et

 15   votre mémoire en réponse au paragraphe 69, que l'argument ne peut être

 16   retenu étant donné que Coric dans ce même paragraphe que l'Accusation

 17   concède que la Défense de Coric s'est opposée à cela. Nous nous y opposons

 18   parce que l'Accusation a indiqué que l'occupation faisait partie de leur

 19   thèse telle qu'indiquée dans le mémoire en clôture et les plaidoiries

 20   réquisitoires.

 21   J'ai vérifié au paragraphe 69 et ce paragraphe 69 ne dit rien de la sorte.

 22   En réalité, il va à l'encontre de ce que vous dites.

 23   "L'acte d'accusation allègue l'existence", je parle ici du mémoire en

 24   réponse de l'Accusation, paragraphe 69 :

 25   "L'acte d'accusation allègue qu'eu égard à la thèse contre lui, Coric avait

 26   compris que compte tenu la position qu'il occupait, le HVO était la force

 27   occupante sur le territoire contrôlé par le HVO. Coric avait été notifié

 28   qu'il y avait un territoire occupé, mais qui a été contesté par les autres


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  1   accusés de ce procès. Son manquement à s'opposer à un quelconque manque de

  2   notification lors du procès doit être considéré comme une dérogation de ses

  3   droits."

  4   Nulle part la Chambre de première instance ni l'Accusation n'ont dit que

  5   ceci a fait l'objet d'une concession. Regardez la fin du paragraphe. Vous

  6   parlez du paragraphe ici, page du compte rendu d'audience 19, les deux

  7   dernières lignes, page 20, et ensuite, au paragraphe 73 du mémoire en

  8   réponse de l'Accusation, d'après le compte rendu d'audience, on peut lire :

  9   "En outre, les meurtres ne sont même pas cités dans ces deux documents,

 10   Messieurs les Juges. Vous avez posé des questions au sujet de cela, P1393

 11   et 1414. Il s'agit des vols, mauvais traitements et passages à tabac qui

 12   sont cités. L'Accusation, dans son mémoire en réponse, au paragraphe 73,

 13   concède qu'il y a eu prévisibilité des meurtres et connaissance des

 14   meurtres précédents et pas d'autres crimes, comme les vols, les passages à

 15   tabac et les mauvais traitements. Quand bien même l'Accusation accepterait

 16   ce critère, P1393, 1414…" et cetera, et cetera.

 17   Penchez-vous sur le paragraphe 73 de l'Accusation, encore une fois :

 18   "…les arguments de Coric, la Chambre a constaté que les opérations

 19   relevaient du contrôle général du HVO en Croatie qui a mené des opérations

 20   militaires."

 21   Si je continue à lire, ceci n'a rien à voir avec ce que vous avez

 22   dit, donc je vous suggère de vérifier cela. Je vais maintenant vous

 23   redonner la parole et l'Accusation reprendra cet après-midi --

 24   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans ma

 25   présentation, je vais d'abord parler de quelques documents dont

 26   l'authenticité est douteuse et par rapport auxquels il y a une série

 27   d'indices qui montrent qu'il est manifeste qu'il s'agisse de contrefaçons,

 28   et sur ces documents, la Chambre de première instance s'est fondée pour


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  1   rendre son jugement et pour rendre sa conclusion concernant la

  2   responsabilité de mon client. Etant donné que je n'ai pas beaucoup de

  3   temps, je fais valoir que ce sujet est exposé de façon détaillée aux

  4   paragraphes 262 jusqu'à 265, 296 et 297 de notre mémoire d'appel.

  5   Les deux premiers documents sur lesquels j'aimerais attirer votre attention

  6   sont les documents P03216 et P03220. Il s'agit, en fait, du même document

  7   qui porte deux numéros différents. La Chambre de première instance, par

  8   exemple, au tome 1, paragraphes 912 à 914 du jugement de première instance,

  9   s'est fondée justement sur ces documents pour formuler ses conclusions

 10   qu'aucune Chambre raisonnable n'aurait dû formuler, compte tenu des

 11   documents douteux qui ne peuvent pas écarter un doute raisonnable, en

 12   particulier lorsqu'on tient compte d'autres moyens de preuve qui les

 13   réfutent et qui imposent une conclusion contraire.

 14   La conclusion pour ce qui est de l'acquittement de l'accusé. En se

 15   fondant sur de tels documents et en ignorant de nombreux moyens de preuve

 16   qui démontrent le contraire, la Chambre de première instance a commis une

 17   erreur en violant le principe selon lequel le doute profite à l'accusé.

 18   Monsieur le Président, je crois que vous allez vous pencher sur cette

 19   erreur pour y remédier.

 20   Les documents cités sont souvent les seuls moyens de preuve sur lesquels la

 21   Chambre de première instance s'est fondée pour formuler sa conclusion

 22   disant que mon client avait l'autorité sur les prisons et sur la libération

 23   des prisonniers de ces prisons. Je souligne que la Chambre de première

 24   instance a omis d'évaluer ces moyens de preuve de façon correcte en

 25   appliquant des critères de droit idoines. Pour ce qui est du principe de

 26   présomption d'innocence, c'est l'Accusation qui doit prouver ses

 27   affirmations au-delà de tout doute raisonnable. De la même façon, la

 28   Chambre de première instance doit se pencher sur tous les cas où il y a un


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  1   doute raisonnable pour les traiter conformément au principe que le doute

  2   profite à l'accusé. Par rapport à cela, je formule que les conclusions de

  3   la Chambre de première instance concernant la responsabilité de mon client

  4   concernant les prisons ne sont pas les seules conclusions raisonnables qui,

  5   si on se fonde sur des moyens de preuve versés en l'espèce, ne peuvent pas

  6   être réfutées par d'autres conclusions raisonnables.

  7   En plus, d'autres documents fiables, en grand nombre, ainsi que des témoins

  8   et leurs témoignages montrent que ces documents sont des contrefaçons et

  9   qu'il n'est pas possible de se fonder sur ces documents pour rendre des

 10   décisions et pour formuler des conclusions.

 11   Etant donné que je n'ai pas beaucoup de temps, je ne peux pas décrire en

 12   détail le contenu de ces deux documents contestés, et cela n'est pas

 13   nécessaire, d'ailleurs, puisque cela est exposé en détail dans notre

 14   mémoire d'appel aux paragraphes que j'ai mentionnés au début de ma

 15   présentation.

 16   Je vais dire seulement que M. Coric, et c'est aux paragraphes 912 à 914 du

 17   jugement de première instance, que Coric répond à un autre document

 18   antérieur émanant du colonel Obradovic et que, sur la base de ce document,

 19   la Chambre de première instance a conclu que ce sont les moyens de preuve

 20   démontrant que les prisons militaires n'étaient que sous l'autorité de

 21   l'administration de la police militaire et que cette administration avait

 22   l'autorité de les libérer.

 23   Bien que la Chambre de première instance ait constaté que la Défense a fait

 24   valoir que ces documents sont des contrefaçons, elle n'estime pas qu'il

 25   soit nécessaire d'analyser si la Défense avait raison et s'il s'agit

 26   effectivement de faux. Et est-ce qu'il est raisonnable de conclure que la

 27   Défense a raison ou qu'au moins il existe un doute raisonnable qu'il s'agit

 28   de faux ?


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  1   D'abord, je dois faire valoir que Coric n'est pas l'auteur de ces documents

  2   et ces documents n'émanent pas non plus de l'administration de la police

  3   militaire. Par rapport à cela, je fais valoir que les témoins auxquels ces

  4   documents ont été montrés ont confirmé que sur ce document ne figure pas la

  5   signature de mon client. Nous en parlons en détail dans notre mémoire

  6   d'appel au paragraphe 264. Il est vrai que la signature sur ce document

  7   ressemble à la signature de l'adjoint de mon client, Lavric; pourtant, des

  8   moyens de preuve démontrent qu'il ne s'agit pas de sa signature non plus.

  9   Le Témoin Slobodan Bozic, adjoint du chef département de la Défense, qui

 10   connaissait très bien la signature de mon client ainsi que la signature de

 11   son adjoint, il a dit clairement qu'il ne s'agissait pas de la signature ni

 12   de l'un ni de l'autre.

 13   L'analyse plus détaillée de cet argument est exposée dans notre mémoire

 14   d'appel au paragraphe 264, ainsi que dans le compte rendu du témoignage du

 15   Témoin Bozic, pages 36413 et 3614 [comme interprété]. Bien que l'argument

 16   susmentionné soit important, cet argument n'aurait pas le poids qu'il a

 17   s'il n'y avait pas d'autres arguments montrant clairement de quoi on parle

 18   ici.

 19   Monsieur le Président, pendant ce procès, des témoins de l'Accusation

 20   et de la Défense ont été entendus : les Témoins E, C, Vidovic; trois

 21   témoins, donc, dont deux témoins de l'Accusation, qui ont confirmé que ces

 22   documents contestés, qu'ils les ont vus la première fois dans le prétoire

 23   et pas auparavant. Pourquoi c'est important ? C'est important parce que ces

 24   témoins, de par leurs fonctions, auraient dû voir ces documents au moment

 25   où ces documents ont été rédigés. Qu'est-ce que cela prouve ? Cela prouve

 26   que ces documents, à l'époque en question, à l'époque où ils ont été

 27   rédigés, n'existaient pas.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] S'il vous plaît, Maître Tomasegovic,


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  1   ralentissez votre débit. C'est parce que les interprètes ont dit que vous

  2   parlez trop vite.

  3   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Qu'est-ce que cela prouve ? Cela

  4   prouve que ces documents, à l'époque relevante [phon], à l'époque où ils

  5   auraient été rédigés, n'existaient pas. Il n'y en avait pas. Monsieur le

  6   Président, personne n'était au courant de ces documents. Les détails

  7   concernant des positions de ces témoins se trouvent au paragraphe 264 de

  8   notre mémoire d'appel, ainsi que dans des notes de bas de page

  9   correspondantes.

 10   Je poursuis. Ces documents ont été adressés, entre autres, à la prison de

 11   l'Heliodrom. Je rappelle, Monsieur le Président, que le registre de

 12   réception de l'Heliodrom, la pièce à conviction P285, a été versé au

 13   dossier en tant que pièce à conviction en l'espèce. Je rappelle, Monsieur

 14   le Juge, qu'au début de ma présentation, j'ai dit que ces documents

 15   contestés représenteraient une réponse au document signé par le colonel

 16   Obradovic, la pièce P03201. Qu'est-ce qu'on peut constater en examinant le

 17   registre de réception de l'Heliodrom. Nous pouvons constater que dans ce

 18   registre, sous le numéro 683, est enregistré le document émanant du colonel

 19   Obradovic, mais les documents contestés n'y sont pas. Les documents

 20   contestés n'y sont pas. Ils n'existent pas, personne ne les a vus et

 21   n'était au courant de ces documents pendant la période pertinente. Et

 22   personne n'a agi dans le sens imposé par ces documents.

 23   La façon à laquelle la Chambre de première instance a traité mon client

 24   concernant les constatations eu égard à cette preuve, à savoir eu égard au

 25   registre de réception de l'Heliodrom est injuste, et met mon client en

 26   position d'inégalité. La Chambre de première instance au tome 2, paragraphe

 27   1431 de son jugement de première instance, confirme l'authenticité du

 28   registre de réception de l'Heliodrom ainsi que sa fiabilité. Il est


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  1   inexplicable pourquoi, alors cette même Chambre de première instance ne

  2   tient pas compte du fait que ces documents contestés n'avaient pas été

  3   enregistrés dans ce registre, bien que cela aurait dû être le cas. Si ces

  4   arguments ne suffisent pas à engendrer le doute, un doute raisonnable

  5   concernant la fiabilité de ce document, je ne sais pas quels arguments

  6   suffiraient. J'affirme que par rapport à ces arguments et par rapport à

  7   d'autres moyens de preuve versés au dossier en l'espèce, que la Chambre de

  8   première instance n'aurait pas dû fonder sa décision sur ces contrefaçons,

  9   et que la Chambre de première instance aurait dû au moins conclure qu'il

 10   s'agissait d'un doute raisonnable concernant ces contrefaçons. Tout Juge

 11   raisonnable des faits aurait appliqué ici le principe selon lequel le doute

 12   profite à l'accusé. En place et lieu de l'application de ce principe, la

 13   Chambre de première instance, au tome 1, paragraphe 813, note de bas de

 14   page 2234, n'indique que brièvement que la Défense n'a pas demandé

 15   autorisation aux fins d'interjeter appel des décisions par lesquelles ces

 16   documents ont été versés au dossier en tant que pièces à conviction. Sauf

 17   votre respect, la Défense pendant le procès s'est opposée à l'admission de

 18   ces documents en audience, oralement donc, et ainsi dans les requêtes; par

 19   exemple, dans la requête conjointe aux fins de rejeter certaines requêtes

 20   de l'Accusation portant sur l'admission des moyens de preuve documentaires

 21   en raison de l'abus du droit de procès. Cette requête a été déposée le 4

 22   septembre 2007. Je souligne qu'il n'y a pas d'obstacle pour la Chambre

 23   d'appel qu'elle évalue la fiabilité de ces documents en tenant compte de

 24   nos arguments et d'autres moyens de preuve versés en l'espèce.

 25   Pourquoi il est essentiel de se pencher en particulier sur l'évaluation de

 26   ces documents ? C'est parce qu'il s'agit des documents sur lesquels la

 27   Chambre de première instance s'est fondée pour formuler ses conclusions

 28   concernant la présumée responsabilité de M. Coric par rapport aux prisons.


Page 619

  1   Sans ces documents --

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Juste un instant. Il faut que je vous

  3   interrompe là. C'est parce que cela ne m'est pas clair. Regardez le compte

  4   rendu, la page 38 du compte rendu, la ligne 6 :

  5   "La Chambre de première instance, tome 1, paragraphe 813, ne cite que

  6   brièvement que la Chambre [comme interprété] n'a pas demandé l'autorisation

  7   aux fins d'interjeter appel…"

  8   Et je souligne donc "autorisation ou certification pour interjeter

  9   appel."

 10   "Des décisions sur la base desquelles ces moyens de preuve ont été

 11   versés au dossier."

 12   Ensuite vous continuez pour dire :

 13   "La Défense s'est opposée en audience dans le prétoire à l'admission

 14   de ces moyens de preuve ainsi que dans les requêtes."

 15   Ensuite vous citez un exemple, l'exemple de la requête par laquelle

 16   la Défense l'a demandé. Il s'agissait de la requête pour demander le rejet

 17   de quelque chose et vous parlez de la certification d'interjeter appel.

 18   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas

 19   peut-être été suffisamment précise. J'ai voulu dire que nous n'avons pas

 20   contesté, que nous n'avions pas demandé la certification de l'appel, nous

 21   ne contestons pas cela, mais il n'est pas vrai que nous n'ayons pas attiré

 22   votre attention sur les problèmes concernant ces documents pendant toute la

 23   durée du procès en première instance. Et nous considérons que bien que nous

 24   n'ayons pas demandé la certification pour interjeter appel, qu'il n'y a

 25   aucun obstacle pour la Chambre d'appel pour qu'elle se penche sur nos

 26   arguments concernant la fiabilité de ces documents. C'est ce que j'ai voulu

 27   dire, peut-être que je n'étais pas suffisamment précise.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Continuez.


Page 620

  1   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Merci.

  2   Pourquoi est-il important d'attribuer une si grande attention à

  3   l'appréciation de ces documents ? Parce que ce sont des documents sur

  4   lesquels les Juges de la Chambre de première instance fondent leur

  5   conclusion concernant la responsabilité alléguée de M. Coric au sujet des

  6   prisons. Sans ces documents-là, le lien entre Coric et les prisons et la

  7   responsabilité de Coric ou sa participation à l'entreprise criminelle

  8   commune prétendue n'existerait pas ou alors devrait être évaluée de façon

  9   substantiellement autre. Messieurs les Juges, il y a encore quelques

 10   documents sans cachet et sans signature dont l'authenticité est à remettre

 11   en question, et c'est sur ces documents que les Juges de la Chambre de

 12   première instance font leur constatation, volume 3, paragraphe 75., et

 13   volume 1, paragraphe 405.

 14   Ces documents ont été examinés par la Défense lorsqu'elle a fait son moyen

 15   d'appel 298.

 16   Pourquoi la Défense insiste-elle sur l'analyse détaillée de ces documents,

 17   tant pour ce qui est de leur forme et de leur contenu, que pour leur

 18   corrélation avec les autres pièces à conviction ? Parce que, Messieurs les

 19   Juges, c'est assez indicatif que de voir que la Chambre de première

 20   instance, en dépit de milliers et milliers de documents où il y avait des

 21   cachets et des signatures qui ont été confirmées par des témoins entendus

 22   au procès, fondent leur appréciation sur la responsabilité de M. Coric sur

 23   les quelques documents qui sont les seuls à ne pas avoir de signature et de

 24   cachet et dont l'authenticité et la teneur n'ont été confirmées par aucun

 25   des témoins entendus dans le procès. Et leur teneur est à l'opposé de la

 26   teneur des autres documents en bonne et due forme et, en opposition avec

 27   les témoignages que nous avons entendus à l'occasion de ce procès.

 28   Messieurs les Juges, tout au long de ce procès, la Défense a en vain essayé


Page 621

  1   de retrouver les registres de réception et d'envoi de l'administration de

  2   la police militaire. Ces registres ont disparu. Si ce n'était pas le cas,

  3   on aurait eu à 100 % la certitude nous permettant de vérifier

  4   l'authenticité et la crédibilité de chacun des documents qui serait

  5   prétendument venu ou arrivé à la police militaire. Mais, même sans cela, en

  6   analysant de façon attentive les documents et en établissant une

  7   corrélation avec les autres éléments de preuve, le moins qu'on puisse dire

  8   c'est qu'il y a un doute raisonnable pour ce qui est de leur fiabilité.

  9   Cette analyse n'a pas été faite par les Juges de la Chambre de première

 10   instance, raison pour laquelle j'affirme qu'il y a eu une erreur grave de

 11   commise constituant un exemple éclatant de déni de justice.

 12   L'erreur suivante des Juges de la Chambre de première instance  sur

 13   laquelle j'aimerais attirer votre attention, Messieurs les Juges, c'est le

 14   fait d'avoir ignoré les éléments de preuve présentés par la Défense.

 15   L'exemple le plus éclatant de cette façon d'agir est l'élément de preuve

 16   5D04288. Il s'agit des livres de réception et registres de plusieurs

 17   tribunaux et de plusieurs parquets datant de la période pertinente à l'acte

 18   d'accusation et en droit pertinent pour ce qui est de l'acte d'accusation

 19   se trouvant être enregistrés sur trois disques durs. En sus de ces

 20   registres, on a versé au dossier le registre du tribunal militaire de

 21   Mostar, pièce P100 et P101.

 22   Messieurs les Juges, ces registres comportent des centaines de dépôts de

 23   plaintes au pénal effectuées par la police militaire à l'intention des

 24   procureurs pour ce qui est d'enquêtes à diligenter à l'encontre d'auteurs

 25   connus et inconnus de tout un éventail de délits au pénal commis au

 26   détriment des Musulmans. Ces registres-là et ces cahiers de réception ont

 27   été pris suite aux accords de Washington et ils ont été utilisés par la

 28   totalité des tribunaux et parquets de Bosnie-Herzégovine.


Page 622

  1   Messieurs les Juges, la Chambre de première instance a constaté que

  2   Valentin Coric était responsable ou considéré responsable parce que les

  3   auteurs de différents crimes n'ont pas été poursuivis en justice ou

  4   sanctionnés. Au paragraphe 982, volume 4, la Chambre de première instance

  5   constate que Coric, en sa qualité de chef de l'administration de la police

  6   militaire, avait la possibilité de lutter contre la criminalité et que ses

  7   attributions n'ont été limitées qu'au niveau des enquêtes, alors que la

  8   poursuite en justice relevait des attributions du procureur militaire.

  9   Messieurs les Juges, justement, ces éléments de preuve, ces registres

 10   montrent bien que la police militaire a fait des dépôts de plaintes au

 11   pénal auprès des autorités compétentes. Si la police militaire ou les

 12   accusés avaient l'intention d'encourager les crimes commis au détriment des

 13   Musulmans, pourquoi auraient-ils fait des dépôts de plaintes au pénal

 14   contre des membres du HVO s'agissant de crimes commis au détriment des

 15   Musulmans ? La conclusion des Juges de la Chambre est celle de dire que les

 16   crimes font partie intégrante d'un plan destiné à accomplir un objectif ou

 17   à réaliser un objectif communication, et Coric y aurait pris part en

 18   amenuisant ou en atténuant la gravité des crimes commis ou en omettant de

 19   procéder à des enquêtes ou en omettant d'empêcher ou de punir la

 20   perpétration de ces crimes. Si les Juges de la Chambre avaient pris en

 21   considération ces éléments de preuve tels qu'énoncés, ce type de

 22   constatation n'aurait pas pu être possible. Ces registres sont un élément

 23   de preuve crucial de la Défense. Ils montrent que Valentin Coric s'était

 24   bel et bien battu contre la criminalité. Ces éléments de preuve permettent

 25   de voir que le Procureur n'a pas démontré au-delà de tout doute raisonnable

 26   que Coric avait voulu que les crimes commis contre les Musulmans soient

 27   impunis. Alors, en sus d'avoir ignoré ces éléments documentaires, les Juges

 28   de la Chambre de première instance, sans explication aucune, n'ont accepté


Page 623

  1   ou pas pris en considération dans leur totalité les témoignages des témoins

  2   qui sont énoncés au paragraphe de notre mémoire en appel 301 à 303, 305 à

  3   308. Ces dépositions n'ont pas été prises en considération par les Juges de

  4   la Chambre indépendamment du fait que ces témoins se sont prononcés

  5   conformément aux éléments de preuve documentaires et conformément aux

  6   témoignages faits par d'autres témoins, tant de la Défense que de

  7   l'Accusation. D'autre part, la Chambre de première instance a accepté de

  8   façon non critique, par exemple, les propos tenus par le témoin E.

  9   S'agissant de celui-ci, au dossier, il y a bon nombre d'indices qui disent

 10   qu'il n'est pas fiable. Sa déposition est contradictoire en soi. Elle est

 11   contraire aux témoignages d'autres témoins de l'Accusation et de la Défense

 12   et elle est contraire aussi aux éléments de preuve documentaires. La

 13   Chambre de première instance n'a pas accepté la déposition de ce témoin,

 14   mais elle l'a accepté dans les éléments de son témoignage, de ce qui est

 15   corroboré par les affirmations de la Défense. Il s'agit là d'un autre

 16   exemple de déni de justice au détriment de mon client.

 17   L'erreur suivante de la Chambre de première instance que je voudrais

 18   mentionner, c'est la façon dont la Chambre de première instance a évalué

 19   les attributions de Valentin Coric à l'égard de la police militaire à

 20   l'époque concernée et pour soupeser sa contribution à l'entreprise

 21   criminelle commune. C'est traité dans le détail dans le moyen d'appel

 22   numéro 2, paragraphe 39 à 58 de notre appel. Et du fait du peu de temps que

 23   j'ai à ma disposition, je ne vais évoquer que quelques éléments principaux.

 24   S'agissant de ses conclusions au sujet du contrôle effectif de Coric compte

 25   tenu de ses attributions de facto et de jure, on a mis de côté la situation

 26   de facto qui a été de façon similaire décrite par bon nombre de témoins,

 27   tant de l'Accusation que des différentes Défenses ici présentes. Les

 28   dépositions de ces témoins relativement à la situation de facto se trouvent


Page 624

  1   être contraires aux conclusions adoptées par les Juges de la Chambre de

  2   première instance portant sur le contrôle effectif. Je me réfère ici au

  3   volume 4, paragraphes 871, 872, 876, 878, et je me réfère également à notre

  4   appel, paragraphes 39 à 58. En dépit des témoignages des différents

  5   témoins, la Chambre de première instance, dans ses conclusions, parle d'une

  6   double chaîne de commandement fantôme et prête à confusion pour ce qui est

  7   des ordres donnés à la police militaire. Alors, cette conclusion est tirée

  8   du fait d'une interprétation erronée des témoignages de témoins et du fait

  9   d'avoir ignoré ce qu'ont fourni comme déposition les témoins qui n'ont pas

 10   corroboré ce type de conclusions des Juges de la Chambre.

 11   A titre d'illustration, on dit que les réformes au sein de la police

 12   militaire en juillet et en décembre 1993 ont jeté la lumière sur la chaîne

 13   de commandement et, ce faisant, on cite à tort et à travers le Témoin

 14   Biskic, en disant que, quand il a quitté les rangs de la police militaire,

 15   la chaîne de commandement était plus transparente et le système de

 16   présentation de rapport meilleur. Mais qu'a dit ce témoin ? Messieurs les

 17   Juges, ce Témoin Biskic a dit que jusqu'en décembre 1993, les unités de la

 18   police militaire ont été retirés de la ligne de front, ce qui leur a permis

 19   d'être plus efficaces, page du compte rendu d'audience 15181 à 15182. Donc,

 20   ce témoin n'a pas parlé d'une double chaîne de commandement fantôme. Il n'a

 21   dit qu'une chose, à savoir que la police militaire n'était pas à même

 22   d'accomplir ses tâches, du fait d'avoir été engagé dans les combats.

 23   S'agissant de ce sujet-là, je voudrais encore attirer l'attention des

 24   Juges de la Chambre sur la contradiction au niveau du jugement en tant que

 25   tel. Si on lit le volume 4, paragraphes 624 à 628 et paragraphes 661 à 663,

 26   816 à 818, puis 872, 876 et 878, ce qu'on peut remarquer, c'est que ces

 27   pièces sont contradictoires entre elles et les conclusions étaient adaptées

 28   à la finalité poursuivie, pour ce qui est de la définition ou la


Page 625

  1   constatation de la responsabilité des trois différents accusés. Alors, il

  2   n'est pas logique dans une armée quelle qu'elle soit, notamment pour ce qui

  3   est de la doctrine militaire en général dans des conditions de guerre en

  4   particulier, qu'il y ait plusieurs commandants du même rang ou du même

  5   garde sur le même secteur et qui commanderaient les mêmes unités. Alors,

  6   dans la suite, nous allons nous pencher sur les enfreintes au principe in

  7   dubio pro reo lorsqu'il y a eu prise de décision de la part des Juges de la

  8   Chambre de première instance concernant la responsabilité de M. Coric et sa

  9   contribution à l'entreprise criminelle commune. Et je dirais que la Chambre

 10   de première instance a soupesé la responsabilité de M. Coric à l'entreprise

 11   criminelle commune et de la responsabilité qui en découlerait, aux

 12   paragraphes 1000 et 1001 du volume 4.

 13   Pour dire que la Chambre s'était assurée au-delà de tout doute

 14   raisonnable que Valentin Coric entre janvier '93 et le 10 novembre '93, en

 15   sa qualité de responsable de la police militaire du HVO avait pour

 16   attribution le commandement des unités de la police militaire, ce qui avait

 17   inclus des attributions relatives à la resubordination de ces unités au

 18   HVO. Alors on dit que -- la Chambre a dit que la seule conclusion

 19   raisonnable était le fait que M. Coric avait, en été '93, avait pour

 20   mission de lutter contre la criminalité sur le territoire de la HZ HB. Et

 21   étant donné qu'il n'y avait pas suffisamment d'effectifs, M. Valentin Coric

 22   n'a pas pu combattre cette criminalité. Alors si l'on se penche sur la

 23   totalité de ce qui vient d'être dit, la question logique qui se pose est

 24   celle de savoir, s'il avait des attributions à l'égard de la police

 25   militaire conforme à celles qui figurent aux conclusions des Juges de la

 26   Chambre de première instance, pourquoi tout simplement n'a-t-il pas donné

 27   l'ordre aux policiers de la police militaire de se retirer de la ligne de

 28   front ? La réponse est simple, il est évident qu'il n'avait pas les


Page 626

  1   attributions qui lui sont attribuées par les Juges de la Chambre de

  2   première instance ou, du moins, existe-t-il un doute raisonnable qui permet

  3   de tirer une autre conclusion mis à part celle qui a été tirée par les

  4   Juges de la Chambre de première instance. Par la suite, la Chambre de

  5   première instance a pris comme conclusion le fait que Valentin Coric avait

  6   fermé les yeux devant la perpétration des crimes et que ces crimes sont

  7   restés impunis. Je vous rappelle les registres et les livres d'entrée dont

  8   j'ai parlé au début de mon exposé et le fait que cela ait été ignoré par la

  9   Chambre de première instance. Mais en sus, il y a un grand nombre de dépôts

 10   de plaintes au pénal, documentations d'enquête à effectuer, et jugements

 11   rendus qui vont à l'encontre de ce qui est énoncé ici.

 12   Mon collègue a parlé du document 3571. Ce document qui se rapporte à la

 13   date du 19 juillet 1993. Dans ce document, M. Coric demande et donne

 14   l'ordre de révoquer de leurs fonctions certains membres de la police

 15   militaire pour que le procureur militaire entreprenne des démarches à leur

 16   égard. Alors si quelqu'un veut garder impunis certains crimes, ce n'est pas

 17   la façon dont le responsable est censé se comporter. La Défense de Valentin

 18   Coric s'est penchée sur la responsabilité de son client au niveau des

 19   prisons, cela se trouve dans le moyen d'appel numéro 6 (B), (C), (D),

 20   (E),(F), (G), (H) et le moyen d'appel 7, paragraphes 161 à 185. Nous

 21   n'avons pas le temps de tout élaborer. Mais comme nous l'avons dit mon

 22   client a sciemment -- la Chambre a dit que mon client avait sciemment

 23   contribué à la mise en détention de certaines personnes dans des conditions

 24   difficiles, qu'ils ont été malmenés, battus, et faits l'objet de

 25   traitements cruels.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais ralentissez, je vous prie.

 27   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Partant de tout ce qui a été dit

 28   dans ces paragraphes, aucun Juge des faits raisonnables ne saurait conclure


Page 627

  1   que Valentin Coric avait encouragé ce type de comportement à l'égard des

  2   détenus.

  3   Et pour finir, Messieurs les Juges, je voudrais dire pour ce qui est de

  4   notre 17e moyen d'appel, nous maintenons l'intégralité de ce qui figure dans

  5   notre mémoire en appel, et nous voudrions, qu'au moins, si jamais il n'y a

  6   pas invalidation du jugement rendu, nous demandons à ce que l'on prenne en

  7   considération le temps passé à l'hôpital et en détention en garde à vue de

  8   notre client comme étant une partie de la peine purgée.

  9   L'objectif d'un procès c'est que la justice soit rendue. Et la justice est

 10   rendue si l'on déclare quelqu'un coupable ou innocent. Un jugement

 11   équitable, un procès équitable n'est équitable que si l'on entend les

 12   éléments de preuve des deux parties en présence. Nous affirmons que la

 13   Chambre ne s'est pas conformée aux principes du indu bio pro reo et aux

 14   principes de l'égalité des armes des parties et l'équité des procès. Nous

 15   vous demandons donc, Messieurs les Juges, de rectifier ou de remédier aux

 16   erreurs commises par la Chambre de première instance, non seulement parce

 17   que c'est dans l'intérêt de notre client ou de la totalité des six inculpés

 18   mais c'est dans l'intérêt de la justice internationale. Messieurs les

 19   Juges, la Défense propose aux Juges de la Chambre d'appel de modifier le

 20   jugement rendu en première instance et d'acquitter M. Valentin Coric.

 21   Mon collègue vient de me dire que j'avais encore cinq minutes, je pensais à

 22   avoir épuisé mon temps.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Votre collègue a raison. Vous avez

 24   encore cinq minutes.

 25   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Nous avons le document sous les

 26   yeux et je vais peut-être dire quelque chose encore pour que ce que je

 27   viens d'exposer prenne tout son sens.

 28   Les documents montrent que Valentin Coric a entrepris la totalité de ce


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  1   qu'il pouvait entreprendre pour résoudre les problèmes survenus au niveau

  2   des prisons. Suite à ses mises en garde, d'abord en juillet, il y a eu

  3   création de commissions, le commandant suprême, M. Boban, avait nommé un

  4   coordinateur pour ce qui est d'inspecter la totalité des prisons. Une fois

  5   qu'il a appris que cela n'avait pas été fait, en page 4 de la version

  6   anglaise de la pièce --

  7   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à Mme -- au conseil de la

  8   Défense de nous dire quelle est la référence de la page qu'elle est en

  9   train de lire.

 10   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] -- met en garde pour dire que la

 11   situation est mauvaise dans les prisons militaires. Paragraphe 141 de notre

 12   mémoire en appel.

 13   La Défense estime que l'analyse de cette déclaration permet de tirer une

 14   conclusion raisonnable, à savoir que M. Coric a considéré que les

 15   conditions dans la prison n'était pas bonne et qu'il s'agissait d'y

 16   remédier. Suite à la réunion d'une commission collégiale de septembre dans

 17   le même mois, Boban envoie un ordre pour ce qui est des modalités et des

 18   traitements infligés aux prisonniers; et en décembre il démantèle la

 19   totalité des centres de détention. Paragraphes 141 et 142 de notre mémoire

 20   en appel, notes de bas de page 352, 353, et 354.

 21   Messieurs les Juges, je vais maintenant revenir à la fin de ce que j'ai dit

 22   à l'occasion de mon exposé. J'ai été un peu confuse vers la fin de mon

 23   exposé parce que je pensais n'avoir plus de temps. Une fois de plus donc,

 24   je vous demande de remédier aux constatations faites par la Chambre de

 25   première instance, de vous conformer aux principes de in dubio pro reo, aux

 26   principes de l'égalité des armes et de l'équité de la procédure conduite

 27   pour prononcer un acquittement à l'attention de M. Coric.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.


Page 629

  1   Maître Ivetic, est-ce que vous pouvez nous éclairer notre lanterne pour ce

  2   qui est du paragraphe 69 ?

  3   M. IVETIC : [interprétation] Je pourrais peut-être le faire -- mais je n'ai

  4   pas un document. Et je préfère m'en assurer plutôt que de faire une erreur.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon.

  6   Alors nous allons maintenant faire une pause de 30 minutes.

  7   --- L'audience est suspendue à 11 heures 33.

  8   --- L'audience est reprise à 12 heures 00.

  9   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 10   permettez, j'ai les informations que vous m'avez demandées tout à l'heure

 11   pour répondre à l'Accusation.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allez-y.

 14   M. IVETIC : [interprétation] S'agissant de votre première question sur le

 15   paragraphe 69 de la réponse de l'Accusation, nous aimerions attirer votre

 16   attention sur la note de bas de page 242 de ce paragraphe qui cite le

 17   mémoire préalable au procès de Coric, au paragraphe 75. Ce mémoire

 18   préalable au procès a été rédigé par le conseil précédent, il n'est pas

 19   aussi éloquent que nous l'aurions aimé, mais il présente l'argument qui

 20   vous semblait lacunaire et que l'Accusation a cité. La Défense, à savoir

 21   l'objection de la Défense de Coric s'agissant de l'occupation. A vous,

 22   Messieurs les Juges, de comparer les termes utilisés dans ce mémoire.

 23   S'agissant de la deuxième question que vous avez soulevé, j'aurais dû

 24   renvoyer les Juges de la Chambre au mémoire en appel de l'Accusation,

 25   paragraphe 227, où il est dit que pour des meurtres prévisibles, lorsque

 26   l'on parle d'homicides intentionnels à Gornji Vakuf, aucun autre crime

 27   n'avait été utilisé comme fondement de ces arguments.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci.


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  1   L'Accusation a la parole à présent.

  2   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Messieurs les Juges, M. Coric a présenté une défense complète lors du

  4   procès. En appel, il a représenté des arguments détaillés, notamment des

  5   plaidoiries détaillées que vous avez entendues ce matin.

  6   Mais nous faisons valoir, avec tout le respect que nous devons à nos

  7   confrères, qu'il n'a démontré qu'aucune erreur n'avait été commise

  8   s'agissant des condamnations qui avaient été prononcées. J'aimerais vous

  9   expliquer pourquoi. Valentin Coric était un participant important dans

 10   l'entreprise criminelle commune. En sa qualité de chef de la police

 11   militaire au sein de l'administration, Coric aurait dû arrêter les crimes

 12   perpétrés par les membres du HVO. C'est une fonction-clé de la police

 13   militaire. C'est peut-être la fonction principale de cette dernière. Au

 14   lieu de cela, Coric a utilisé son poste et ses pouvoirs pour contribuer aux

 15   crimes commis sur les Musulmans de Bosnie. Il a fait participer la police

 16   militaire à des expulsions violentes et à des opérations d'arrestation

 17   ciblant les Musulmans. Toutes ces opérations ont eu lieu en masse. Il a

 18   joué un rôle-clé dans la détention brutale et l'utilisation de détenus

 19   musulmans pour terrifier cette population et les forcer à effectuer des

 20   travaux. Et il a ordonné les expulsions en masse de Musulmans du territoire

 21   d'Herceg-Bosna.

 22   Parallèlement, Coric a protégé les membres du HVO de leur responsabilité

 23   criminelle pour leurs actes. Il les a dédouanés de leur responsabilité pour

 24   expulsions brutales de civils de l'ouest de Mostar en 1993, ces expulsions

 25   ont eu lieu et des Musulmans ont été intimidés, roués de coups, volés et,

 26   dans certains cas, violés, avant d'être jetés en dehors des lignes de

 27   front. Il a protégé également des membres du HVO et les a dédouanés de leur

 28   responsabilité pour avoir forcé les détenus à travailler, notamment du


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  1   travail pour lequel les détenus étaient souvent blessés et tués.

  2   Ses actions étaient un reversement cruel de ses responsabilités vis-

  3   à-vis des habitants musulmans sur les territoires proclamés par l'Herceg-

  4   Bosna, et j'aimerais que vous gardiez cela à l'esprit dans mes arguments.

  5   Messieurs les Juges, le manque de réponse de Coric pour ses actions

  6   face aux crimes, crimes dont il était bien informé, et le devoir qu'il

  7   avait de protéger les civils, les Musulmans de Bosnie, n'a pas été fait.

  8   Lors de l'appel, la Défense de Coric a fait valoir qu'il convenait de

  9   contester toute constatation de la Chambre de première instance, comme vous

 10   l'avez entendu aujourd'hui. Il fait valoir qu'il n'avait pas d'autorité sur

 11   la police militaire et les camps de détention, malgré les ordres et les

 12   rapports qu'il a rédigés. Cependant, il a été informé de plusieurs sources,

 13   à savoir la communauté internationale et des membres du HVO, de ces crimes,

 14   et la plupart de ces rapports lui étaient adressés personnellement.

 15   Messieurs les Juges, lorsqu'on lui a montré les pièces prouvant qu'il avait

 16   été fortement impliqué dans le travail forcé et les expulsions en masse -

 17   il s'agit de crimes qui vont au cœur de l'ECC - il a répondu qu'il y avait

 18   eu falsification. Je vous renvoie là à la pièce P3316 et P3320. Les

 19   documents corroborant cela foisonnent et la Chambre de première instance a

 20   eu raison de les apprécier de la façon dont elle l'a fait. Pour référence,

 21   je vous renvoie également aux pièces P4263, P4404, P10188 et P10187. Et il

 22   ne s'agit là que de la partie émergée de l'iceberg. Il y en a encore

 23   énormément. Les éléments de preuve à son encontre sont irréfutables.

 24   Et plutôt que de revenir sur tous ses arguments, je vais me

 25   concentrer sur deux domaines qui ont été abordés à plusieurs reprises dans

 26   son mémoire : d'abord, l'autorité qu'il a exercée, et puis ses

 27   contributions à l'entreprise criminelle commune; après cela, je vais

 28   répondre aux questions que les Juges de la Chambre d'appel ont posées.


Page 632

  1   Je voudrais avant cela vous faire remarquer trois choses. Premièrement, mes

  2   références aujourd'hui seront uniquement tirées du jugement, à moins que je

  3   l'indique. Deuxièmement, s'agissant de documents confidentiels, j'y ferai

  4   référence, mais je le ferai de sorte à ne révéler l'identité d'aucun témoin

  5   protégé. Et s'agissant des arguments que nous n'allons pas couvrir

  6   aujourd'hui, nous maintenons notre position dans notre mémoire.

  7   Avant de passer à l'essence des arguments de Coric, j'aimerais faire

  8   remarquer que d'abord, il y a une répétition d'arguments dans son mémoire

  9   en appel. Coric répète à plusieurs reprises, et ce, de faire presque mot à

 10   mot, les éléments qui ont déjà été soulevés dans le mémoire en réponse de

 11   l'Accusation. Et comme vous l'avez à juste titre remarqué au début de

 12   l'audience lundi, il ne s'agit pas d'un procès de novo.

 13   Dans certains cas d'ailleurs, le compte rendu a mal repris les arguments de

 14   Coric. Par exemple, il fait valoir au paragraphe 162 de son mémoire que :

 15   La Chambre avait constaté que Coric n'était pas informé des mauvais

 16   traitements, il n'avait pas de raison de croire que les détenus étaient

 17   maltraités. Le paragraphe qu'il cite au tome 4 ensuite, le paragraphe 955,

 18   nous dit exactement le contraire. Ce paragraphe constate que Valentin Coric

 19   avait des raisons de croire que les détenus de l'Heliodrom étaient

 20   maltraités pendant la détention. Et l'Accusation a soulevé cela en réponse,

 21   au paragraphe 171, mais Coric n'a pas saisi cette opportunité dans sa

 22   réplique pour éclaircir les choses. Il y a plus d'exemples, mais je voulais

 23   me contenter de vous donner ces exemples-ci.

 24   Passons à la première partie de mes arguments sur l'autorité que

 25   Coric exerçait sur la police militaire, repris aux moyens 2 et 6 de son

 26   mémoire. Comme vous le savez, il ne s'agissait pas d'un procès court.

 27   Enormément d'éléments de preuve ont été présentés, notamment ceux prouvant

 28   qu'il exerçait le commandement sur la police militaire. Après avoir revu et


Page 633

  1   étudié les éléments de preuve, la Chambre de première instance a conclu

  2   qu'en sa qualité de chef de l'administration de la police militaire,

  3   abrégée en APM, Coric exerçait le commandement et le contrôle des unités de

  4   la police militaire. Tome 1 [comme interprété], paragraphe 1000. Mais la

  5   constatation de la Chambre a bien été étayée au dossier et Coric n'a pas pu

  6   démontrer qu'une erreur avait été commise.

  7   Dès le départ, je voudrais également dire quelques mots pour vous

  8   décrire la nature de la police militaire et son rôle dans les crimes. Les

  9   membres de la police militaire étaient recrutés pour leur fidélité et leur

 10   adhésion à l'idée d'une mère patrie croate. Tome 1, paragraphe 848. A la

 11   fin de l'année 1992, il y avait plus de 2 000 membres de la police

 12   militaire, qui étaient généralement organisés en bataillons, chacun étant

 13   composé de centaines de personnes. P00956, page 7.

 14   Leur première responsabilité était premièrement de découvrir et de

 15   combattre les crimes commis par les membres du HVO ou à leur encontre;

 16   deuxièmement, de garder les détenus; et troisièmement, de contrôler la

 17   liberté de mouvement au moyen de postes de contrôle tels que remarqués au

 18   tome 1, paragraphe 888.

 19   Cependant, ils étaient impliqués de façon essentielle à la commission de

 20   plusieurs crimes contre les Musulmans. Ils ont participé à l'expulsion et à

 21   l'arrestation de Musulmans civils pendant les opérations du HVO à Gornji

 22   Vakuf, Mostar, Stolac et Capljina. Ils ont participé au siège terrifiant de

 23   Mostar est et à accentuer le désespoir des habitants musulmans. Ils ont

 24   abusé des détenus musulmans, des milliers d'entre eux, à l'Heliodrom,

 25   Dretelj et Ljubuski. Ils ont utilisé les Musulmans, les détenus, pour

 26   effectuer des travaux forcés dangereux.

 27   Comme la Chambre de première instance l'a constaté à juste titre, la police

 28   militaire était sous l'autorité de Coric. Cela est prouvé par des éléments


Page 634

  1   de preuve irréfutables, par exemple la pièce P0956, page 3, qui déclare

  2   que:

  3   "M. Valentin Coric avait été nommé commandant adjoint de la sécurité et des

  4   services d'information pour toutes les unités existantes de la police

  5   militaire qui étaient placées sous son commandement."

  6   Il poursuit sa citation en disant qu'en avril 1992, les postes de la police

  7   militaire étaient organisés en 25 municipalités en Herceg-Bosna sous le

  8   commandement conjoint, l'administration de la police militaire. Les détails

  9   de la constatation de la Chambre sont repris au tome 1, paragraphes 847 à

 10   974, et tome 4, paragraphes 864 à 915.

 11   Les pouvoirs qu'exerçaient Coric sur la police militaire n'étaient pas

 12   exclusifs. La Chambre de première instance a constaté qu'il existait une

 13   double chaîne de commandement dans les opérations. Cette double chaîne

 14   permettait aux commandants des brigades du HVO et à l'administration de la

 15   police militaire d'exercer, dans certains cas, le commandement sur la

 16   police militaire. Et Coric fait valoir que la Chambre de première instance

 17   a commis une erreur lorsqu'elle a constaté cela. Cependant, vous pouvez

 18   vraiment vous rendre compte du fait que cette filière hiérarchique double

 19   existait dans plusieurs pièces, notamment les rapports de Coric lui-même,

 20   telle que la pièce 957, page 5.

 21   A présent, Coric argue qu'il a perdu tout pouvoir sur les bataillons de la

 22   police militaire une fois que les bataillons légers d'assaut ont été

 23   resubordonnés au HVO le 28 juillet 1993. Il s'agit là du mémoire en appel

 24   de Coric, paragraphe 58. Dans quelle mesure la Chambre de première instance

 25   a-t-elle rejeté cet argument ? Eh bien, vous le voyez au tome 1,

 26   paragraphes 964 à 970.

 27   Ses conclusions sont fondées, comme il se doit, sur la base des éléments de

 28   preuve. Par exemple, le transparent que vous avez ici, P4010, est un ordre


Page 635

  1   de Coric envoyé au 2e Bataillon léger d'assaut pour déployer à Mostar.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous n'avons pas de version anglaise.

  3   M. GILLETT : [interprétation] Oui, nous allons le faire.

  4   Ce qui est important ici, c'est la date du 7 août, vous le voyez en haut du

  5   document, 7 août 1993. C'est après le 28 juillet, et l'ordre de

  6   resubordination dans lequel Coric affirme avoir perdu tous les pouvoirs sur

  7   les bataillons légers d'assaut.

  8   Je tiens à vous faire remarquer que c'est Zoran Suton qui a signé ce

  9   document, et c'est le directeur du personnel et des affaires juridiques de

 10   Coric, comme la pièce P5689 le montre.

 11   Coric a délivré beaucoup d'autres ordres après le mois de juillet 1993,

 12   après le moment où il a affirmé qu'il n'avait plus d'autorité. Par exemple,

 13   ces ordres de déploiement tels que la pièce P4151 du 13 août envoyant la

 14   police militaire à participer à des activités à Mostar, au siège de Mostar.

 15   Un ordre de discipline concernant les uniformes de la police militaire,

 16   pièce P4126 du 12 août. Des ordres ordonnant de contrôler les mouvements

 17   tels que la pièce P5863 du 13 octobre exigeant à la police militaire

 18   d'arrêter et de fouiller le convoi du HCR.

 19   Messieurs les Juges, en réponse, Coric fait valoir, et il l'a dit à

 20   plusieurs reprises aujourd'hui, que ces constations et conclusions se

 21   fondent sur des sources de jure et ont ignoré la situation de facto. Cela

 22   est incorrect. Il existe énormément d'éléments de preuve montrant que les

 23   ordres de Coric à la police militaire ont été mis en œuvre. Par exemple la

 24   pièce P2535, un rapport de la 4e Brigade de la police militaire datée du 27

 25   mai 1993, où il est dit que la police militaire est en train de transférer

 26   des prisonniers de Ljubuski à l'Heliodrom sur les ordres de Pusic et Coric.

 27   Et ce transfert est confirmé dans la pièce P2546.

 28   S'agissant de la pièce P4010 que je viens de faire afficher à


Page 636

  1   l'écran, vous verrez là aussi que cet ordre a été mis en œuvre. Pour

  2   preuve, la pièce P4103, page 4, faisant remarquer que le Bataillon léger

  3   d'assaut a effectivement été à Mostar sur ordre de Coric.

  4   Messieurs les Juges, les éléments de preuve établissent clairement

  5   que les pouvoirs, l'autorité de Coric étaient reconnus par les personnes

  6   dont il dépendait. Les éléments prouvent également que ceux qui étaient au-

  7   dessus de lui dans la filière hiérarchique dans le cadre de l'ECC et dans

  8   les structures de pouvoir, ou avait reconnu son pouvoir et son influence.

  9   Par exemple, en octobre 1993, le CICR a notifié le président

 10   d'Herceg-Bosna, Mate Boban, du fait qu'ils se plaignaient du traitement des

 11   détenus à la prison de l'Heliodrom. Il a transmis le rapport en réponse à

 12   cela à Coric, avec une note manuscrite et il lui a demandé de traiter la

 13   question. Pièce P5792. Les plaintes n'étaient pas des futilités. Le CICR a

 14   fait remarqué que les détenus avaient été "gravement roués de coups par

 15   certaines unités qui utilisent des personnes pour exécuter des travaux

 16   forcés".

 17   Ensuite, au mois de novembre 1993, lorsque Coric a été nomme

 18   ministère de l'Intérieur d'Herceg-Bosna, nous voyons que lors d'une réunion

 19   entre Franjo Tudjman et Jabranko Prlic que, et je cite :

 20   "Pour ce poste, nous avons besoin de la personne faisant preuve de

 21   plus d'autorité."

 22   Prlic a répondu : "Coric fait plus que l'affaire."

 23   Et ensuite, il a expliqué que Coric avait la confiance large, le

 24   large assentiment de l'armée. Pièce P6581, pages 26 à 29. Et Tudjman a, en

 25   conséquence, nommé Coric au poste de ministère de l'Intérieur.

 26   Messieurs les Juges, M. Coric n'a pas pu démontrer que la Chambre de

 27   première instance n'a pas raisonnablement apprécié ses pouvoirs.

 28   Je vais maintenant parler des arguments portant sur la contribution


Page 637

  1   significative de Coric à l'ECC et aux crimes commis dans ce cadre-là. La

  2   Défense a contesté ceci longuement dans son mémoire et en a parlé dans ses

  3   arguments aujourd'hui. Messieurs les Juges, Coric a déployé des unités de

  4   la police militaire chargées des évictions en masse et des arrestations, il

  5   les a équipés de centaines et de milliers de balles et de milliers de

  6   grenades, ainsi que d'autres matériels militaire. Voire tome 4, paragraphe

  7   1000 et la pièce P03090, page 27. Il a été l'architecte de ces centres de

  8   détention violents, au tome 4, paragraphe 982. Il a ignoré les rapports

  9   envoyés régulièrement, déclarant que des détenus musulmans étaient blessés

 10   et tués alors qu'ils effectuaient des travaux forcés sur le front. Tome 4,

 11   paragraphe 971. Et lui-même a autorisé les détenus à travailler sur le

 12   front dans le cadre de travaux forcés. Il a envoyé ses troupes pour

 13   assiéger la ville de Mostar est, tout en coupant l'acheminement de l'aide

 14   humanitaire, ce qui ne faisait qu'empirer sa situation pour les habitants

 15   musulmans piégés. Il a ordonné l'expulsion à grande échelle de détenus

 16   musulmans dans ce qu'il avait appelé un soi-disant programme de remise en

 17   liberté. Tome 4, paragraphe 1001.

 18   En même temps, je vais regarder une de ces contributions essentielles

 19   à l'entreprise criminelle commune, autrement dit dans la mesure où il n'a

 20   pas pu combattre les crimes par les membres du HVO. Ces arguments

 21   reprennent les arguments déjà présentés lors du procès, souvent

 22   littéralement. C'est ce que j'ai remarqué. Par exemple, dans son mémoire en

 23   réponse, paragraphe 41, où il ne montre pas que la Chambre d'appel a agi de

 24   façon raisonnable en parvenant à cette conclusion et cette conclusion, en

 25   fait, c'est qu'il a ignoré les crimes et n'a pas pris les mesures

 26   nécessaires et n'a pas fourni la réponse nécessaire, les mesures

 27   nécessaires à ces crimes. En réalité, il a fermé les yeux sur des crimes

 28   violents commis par les forces du HVO. Je vais vous citer un exemple, en


Page 638

  1   fait. Les expulsions à Mostar est, ces évictions ou ces expulsions, il y en

  2   a eu au mois de juin 1993, impliquaient des soldats du HVO, notamment des

  3   membres du groupe antiterroriste Vinko Skrobo, et soumettant des Musulmans

  4   à des intimidations, des -- et cetera. Ces personnes ont été passées à

  5   tabac, frappées, voire tome 2, paragraphes 872 à 876. Il a été informé de

  6   cela et il en a été informé par des membres de la communauté

  7   internationale. Tome 2, paragraphe 873, vous verrez que l'administration de

  8   la police militaire dispose de récits sur ces expulsions qui ont été

  9   libellées nettoyage ethnique. Tome 2, paragraphe 873 des éléments de

 10   preuve.

 11   Donc, comment Coric a-t-il réagi à ces affirmations ? Devant les membres de

 12   la communauté internationale, il a essayé d'écarter ou d'ignorer ces faits.

 13   Il a dit cela ne s'est pas produit; si cela s'est produit, cela a été fait

 14   par des personnes qui n'étaient pas sous son contrôle, et pas des

 15   criminels, en tout cas. Vous verrez les pages du compte rendu d'audience

 16   21047 à 21048.

 17   Ensuite, qu'il n'y avait pas d'éléments incontrôlés. En réalité,

 18   c'étaient des membres de la 3e Brigade du HVO et de l'unité de Skrobo

 19   antiterroriste, paragraphe 181, qui étaient aussi placés sous le

 20   commandement du HVO; tome 1, paragraphes 818, 819, qui menaient ces crimes.

 21   Alors, on s'attend à ce que l'homme numéro 1 de la police réagisse à ces

 22   crimes. En lieu et place de cela, Coric a fait des concessions, à la fois

 23   littéralement et métaphoriquement parlant, à commencer par les auteurs qui

 24   n'ont pas été arrêtés ou sanctionnés. Tome 2, paragraphe 898, et P3666. Et

 25   un peu plus loin, Coric a particulièrement donné des instructions à ses

 26   hommes de la police militaire de ne pas tenir compte des crimes commis par

 27   ces auteurs-là. Nous disposons d'un élément de preuve, autrement dit, un

 28   rapport, qui est le P3928, qui émane du département de la police judiciaire


Page 639

  1   et qui fait partie de l'administration de la police militaire. Et dans ce

  2   rapport, l'auteur se plaint du fait que Coric avait demandé à son

  3   département de ne pas enquêter sur certains crimes qui avaient été commis

  4   par le groupe antiterroriste de Vinko Skrobo, comme l'indique la Chambre au

  5   tome 4, paragraphes 931 à 933. Et Coric a consenti à ce que des membres du

  6   HVO et de la police militaire entrent dans les maisons et les appartements

  7   des Musulmans chassés de Mostar ouest. Tome 4, paragraphe 929, et le P2879,

  8   et page du compte rendu d'audience 25421.

  9   Vous constaterez que ce scénario était le même en octobre 1993 lorsque

 10   Coric a demandé aux membres du HVO de s'installer dans les appartements

 11   dont avaient été chassés les Musulmans, confer le P6233, le P05554, P05518,

 12   et la page du compte rendu d'audience 17208.

 13   Les manquements de Coric et ses réactions, à savoir le fait qu'il

 14   était disposé à s'accommoder de ces crimes, ont eu des conséquences graves

 15   pour les habitants de Mostar et dans ces parties du territoire. Le même

 16   groupe antiterroriste de Vinko Skrobo a continué à commettre des crimes

 17   épouvantables contre les Musulmans, y compris des expulsions à large

 18   échelle, des vols, des viols, à Mostar, en septembre 1993, qu'ils ont

 19   commis ensemble quelques fois avec les membres de la police militaire. Ils

 20   ont également provoqué la mort de détenus musulmans, puisque ces derniers

 21   étaient utilisés comme bouclier humain. Confer le tome 3, paragraphes 727

 22   et 782, et 933, volume 4.

 23   Messieurs les Juges, il existe encore énormément d'éléments de preuve de ce

 24   type. La Chambre de première instance a agi raisonnablement lorsqu'elle a

 25   conclu que Coric a contribué à l'entreprise criminelle commune en

 26   protégeant les membres du HVO de leur responsabilité, en les soustrayant à

 27   leur responsabilité pour leurs crimes contre les Musulmans de Bosnie.

 28   Coric a avancé aujourd'hui qu'il n'a pas remis de rapports et qu'il a


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  1   tenté de faire ce qu'il pouvait, compte tenu des circonstances. Cependant,

  2   la Chambre de première instance a abordé ces arguments, elle a examiné de

  3   près ces arguments. Et correctement et à juste titre, la Chambre de

  4   première instance a conclu qu'il a omis de le faire lorsqu'il a été informé

  5   des crimes commis par le HVO contre des Musulmans de Bosnie, ce qui porte,

  6   en fait, sur le cœur de cette entreprise criminelle commune, des victimes à

  7   Mostar est, des crimes de détention et de travaux forcés. Tome 1,

  8   paragraphes 918 à 919, que la Chambre de première instance a abordé ces

  9   arguments. Et vous constaterez que malgré le fait qu'il y a eu des rapports

 10   au pénal déposés, il s'agit essentiellement de crimes qui ont été atténués

 11   et qui étaient différents de ceux qui figurent dans l'entreprise criminelle

 12   commune présentée en l'espèce, par exemple, de cambriolage de voitures ou

 13   d'évasion fiscale, et cetera, dans le P4699, pages 24, 25. Si vous regardez

 14   le type de catégorie de crime contre la population civile, le génocide, le

 15   terrorisme, ce que nous abordons au paragraphe 26 dans ces notes - P4699 -

 16   que le rapport envoyé au procureur militaire est un rapport qui émane de la

 17   police militaire et que ceci était exclusivement contre les Serbes et les

 18   Musulmans qui s'en prenaient aux Croates, qui étaient des victimes. Donc,

 19   on fait mention de crimes qui font l'objet de poursuites, mais aucune

 20   mention de crime contres les Musulmans, tels que les travaux forcés

 21   violents, les expulsions massives ou les évictions. Où retrouve-t-on ces

 22   crimes ? Ils ne figurent nulle part.

 23   Il y a d'autres exemples de ce type. Le P3616, page 4, lors d'une

 24   réunion qui est datée du 21 juillet 1993, le procureur militaire, Jurisic,

 25   a déclaré :

 26   "Nous sommes maintenant surchargés d'accusations de personnes qui refusent

 27   de répondre à l'appel à la mobilisation, d'accusations contre des criminels

 28   de guerre et d'accusations contre des membres des forces armées musulmanes,


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  1   mais il n'y a aucune accusation contre des criminels dans la ville de

  2   Mostar."

  3   Comme nous venons de le constater, les accusations graves contre la

  4   population civile, les accusations de crimes de guerre ne faisaient pas

  5   l'objet de poursuites contre ces crimes commis contre les Musulmans de

  6   Bosnie, et donc, aucune accusation n'a été portée contre les membres du

  7   HVO.

  8   Messieurs les Juges, la Chambre de première instance a fondé ses

  9   conclusions sur des éléments de preuve solides et Coric n'a pas démontré

 10   qu'il avait agi raisonnablement.

 11   Comme il a été avancé aujourd'hui, il a soumis des demandes à la police

 12   militaire pour que certains membres reviennent du front pour lui permettre

 13   de faire son travail, comme cela est cité à la pièce P5471 et P6837. Encore

 14   une fois, la Chambre de première instance en a tenu compte au tome 1,

 15   paragraphe 972. Et ce que Coric omet de dire, c'est que c'est lui qui avait

 16   déployé la police militaire sur le front, conformément à son rôle en tant

 17   que membre de l'entreprise criminelle commune qui impliquait une multitude

 18   de personnes, il remplissait ses fonctions. Il a envoyé la police militaire

 19   pour que celle-ci répète ces opérations d'expulsion, comme je l'ai indiqué.

 20   Il est également important de dire que ces demandes dont il parle

 21   aujourd'hui datent de septembre à novembre 1993. Ceci est tardif au niveau

 22   de ces interventions. Et Coric a continué à déployer les membres de la

 23   police militaire sur le front, notamment à Gornji Vakuf, 29 septembre 1993,

 24   P5478; et à Mostar, où lui-même s'est rendu personnellement sur le front et

 25   a constaté que des crimes étaient commis, il a vu les résultats des crimes;

 26   P5657, 5 octobre 1993. Dans de nombreux cas, c'était la police militaire

 27   qui commettait les crimes, et de faire revenir ces gens du front n'aurait

 28   occasionné que davantage de crimes, c'était effectivement la culture qui


Page 642

  1   prévalait dans les rangs de la police militaire. Vous voyez cela, par

  2   exemple, illustrer dans un rapport sur les activités à Prozor, 1993. Il

  3   s'agit du P4177. Il s'agit d'un rapport du HVO. Et on y dit que :

  4   "La police militaire est en train de mettre en œuvre un ordre à haut niveau

  5   pour détenir les Musulmans entre les âges de 16 et 60 à leur façon, plaçant

  6   en détention des hommes sans exception, notamment ceux qui ont moins de 16

  7   et voire même ceux qui ont plus de 60 ans, en les traitant de façon tout à

  8   fait inhumaine."

  9   Il fait remarquer qu'ensemble avec les soldats, la police militaire est

 10   impliquée dans les crimes, notamment le meurtre de prisonniers musulmans,

 11   le fait de voler leurs biens, de les violer et d'humilier les femmes

 12   musulmanes, les contraignant à se déshabiller devant des membres de leurs

 13   familles demandant à leurs pères de se déshabiller devant elles. Pages 2 et

 14   3 à la pièce P4177.

 15   Messieurs les Juges, c'est cette culture, cette tendance, et ce scénario

 16   qui a conduit un membre de la communauté internationale qui était en

 17   relation avec la police militaire de les décrire comme étant les plus

 18   contre-productifs et radicaux sur le terrain, et les personnes qui

 19   commandaient la police militaire, d'après lui, étaient clairement des

 20   radiaux. Page du compte rendu d'audience 25818.

 21   Messieurs les Juges, je vais maintenant parler à la contribution de Coric à

 22   l'entreprise criminelle commune par l'intermédiaire du réseau des centres

 23   de détention et des travaux forcés. La Chambre de première instance a

 24   conclu, après avoir examiné les éléments de preuve en profondeur, que Coric

 25   disposait de pouvoirs très importants sur le réseau des centres de

 26   détention. C'est lui qui a créé les prisons de l'Heliodrom et de Ljubuski.

 27   Et il était responsable de la sécurité des détenus à l'Heliodrom, à

 28   Dretelj, et à Ljubuski. C'est lui qui a autorisé l'emploi des détenus pour


Page 643

  1   accomplir des travaux forcés, c'est lui qui avait le pouvoir d'ordonner les

  2   transferts et la soi-disant remise en liberté des détenus musulmans.

  3   Coric nie tout élément lié à ses pouvoirs. Par exemple, il n'a pas ordonné

  4   la création de l'Heliodrom. Néanmoins, la Chambre de première instance a

  5   conclu au tome 2, paragraphe 1394, que ceci a pu être démontré au vu des

  6   éléments de preuve. Par exemple, P6805, c'est un rapport émanant de

  7   l'administration de la police militaire qui déclare que le centre de

  8   détention militaire à Mostar a été réinstallé à l'Heliodrom sur les ordres

  9   du chef de la police militaire, cet homme c'était Valentin Coric. Coric a

 10   nié le rôle qu'il a joué vis-à-vis l'Heliodrom et ceci a été, à juste

 11   titre, rejeté. Il est important de comprendre le rôle -- l'importance des

 12   pouvoirs de Coric sur l'Heliodrom. Il est important que Coric à, de maintes

 13   reprises, reçu des informations alarmantes sur les conditions déplorables

 14   et les mauvais traitements des détenus. J'ai parlé plus tôt du rapport

 15   envoyé par Boban à Coric faisant observer que les détenus étaient

 16   maltraités.

 17   Une des pires formes de mauvais traitement dont il est question aujourd'hui

 18   dont j'ai déjà parlé sont les travaux forcés. Coric était informé

 19   régulièrement que les détenus à l'Heliodrom étaient maltraités, blessés ou

 20   tués alors qu'ils travaillaient sur le front. Tome 4, paragraphes 955, 966,

 21   1001.

 22   En quoi consistaient ces travaux forcés ? Ceux-ci ont été décrits par le

 23   Témoin Mujo Copelj qui a dit que lorsqu'il était détenu à l'Heliodrom, les

 24   soldats du HVO l'ont emmené ainsi que d'autres détenus dans des groupes de

 25   30 jusqu'au front. Les soldats du HVO ont contraint les détenus musulmans,

 26   sous la menace d'une arme, à courir dans des zones exposées et chaque

 27   détenu devait placer au moins cinq sacs de sable sur la ligne de défense.

 28   Alors que les détenus s'exécutaient, les balles pleuvaient de l'autre côté.


Page 644

  1   Certains détenus ont été tués, de nombreux détenus ont été blessés, alors

  2   que Copelj regardait cela se dérouler sous ses yeux. De nombreux autres

  3   témoins ont fourni des récits semblables concernant les travaux forcés,

  4   tome 2, 1602.

  5   Coric fait valoir encore une fois qu'il n'avait pas le pouvoir d'autoriser

  6   ou d'ordonner le recours à des détenus pour des travaux forcés. Paragraphe

  7   136. Encore ce qu'il avance est incorrect et ne correspond pas à la vérité.

  8   Regardez la pièce P4039, il s'agit d'un ordre qui émane de Petkovic daté du

  9   8 août 1993 et il a été envoyé à différents commandants de brigade du HVO.

 10   Au point 1, Petkovic déclare :

 11   "Vous occupez immédiatement d'une fortification maximale des lignes

 12   atteintes. Vous pouvez avoir recours aux prisonniers et aux Musulmans

 13   détenus pour fortifier les lignes. Obtenir l'autorisation du département de

 14   la police militaire (qui est responsable de l'emploi des prisonniers)."

 15   Coric a reçu de nombreux rapports où étaient décrits les résultats, souvent

 16   brutaux et meurtriers de ces travaux forcés. Par exemple, le 4 août 1993,

 17   on lui a dit que les détenus musulmans ont été passés à tabac au moment où

 18   ils ont été transférés de l'Heliodrom pour effectuer des travaux et cela a

 19   été fait par la 3e Brigade du HVO. P3939.

 20   Le 16 août, il a été informé du fait qu'un prisonnier musulman a été tué et

 21   trois autres blessés au moment où ils ont été transférés de l'Heliodrom

 22   pour effectuer des travaux forcés. P04221.

 23   Et sur le transparent on voit le rapport, P5008, du 13 septembre 1993, un

 24   autre rapport, et il y en a beaucoup d'autres, dans ce rapport il est dit,

 25   je cite, et c'est en gras :

 26   "Pendant qu'ils effectuaient des travaux, 50 prisonniers ont été blessés

 27   alors que six autres ont été tués par les forces armées musulmanes. Pendant

 28   que les groupes des soldats du HVO ramenaient les prisonniers chez eux pour


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  1   pouvoir rendre visite à leurs familles, certains de ces soldats ont malmené

  2   ces prisonniers. Dans nos rapports 522 du 4 août et 524 du 7 août, vous

  3   avez été informés des mauvais traitements infligés aux prisonniers de la

  4   part du 2e Bataillon de la 2e Brigade et de la défense antiaérienne de

  5   Siroki Brijeg."

  6   Il est important de faire valoir que ce rapport a été envoyé par le

  7   directeur de l'Heliodrom, Stanko Bozic, et ensuite il continue à informer

  8   Coric du fait que :

  9   "Le 10 août, le Comité international de la Croix-Rouge est venu dans la

 10   prison pour la visiter. Ils ont travaillé pendant trois jours, et ils ont

 11   enregistré tous les détenus et les prisonniers. Le représentant de la

 12   Croix-Rouge international, M. Franco Faoro, a discuté avec le directeur de

 13   la prison des conditions inadéquates dans des cellules d'isolement, de la

 14   qualité et de la quantité de la nourriture et de son amélioration, et du

 15   fait que les détenus allaient sur la ligne de front pour y effectuer des

 16   travaux forcés (ce qui est interdit conformément aux dispositions des

 17   conventions de Genève)…"

 18   Coric affirme que les rapports émanant du directeur de l'Heliodrom n'ont

 19   pas été adressés à lui ni à l'administration de la police militaire, et il

 20   réitère son argument qu'il a présenté en audience lors du procès. Et cela a

 21   été rejeté à juste titre en audience lors du procès, parce que beaucoup de

 22   ces rapports lui ont été adressés en personne. C'est ce qu'on peut voir en

 23   bas du rapport où on a le nom de la personne à laquelle le rapport a été

 24   adressé.

 25   En outre, il y a des rapports détaillés pour ce qui est des mauvais

 26   traitements infligés de multiples sources. C'est le rapport du 30 septembre

 27   1993 du 5e Bataillon de la police militaire où il est dit que les

 28   prisonniers de l'Heliodrom ont été amenés sur la ligne de front, et que


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  1   parfois ils ont été mutilés, blessés, et parfois ne revenaient plus. C'est

  2   P5497. Ce rapport aussi a été envoyé à Coric en personne ce qu'on peut voir

  3   à la page 16. Dans le jugement il y a beaucoup d'autres exemples, par

  4   exemple, au tome 2, dans la note de bas de page 3754. Coric affirme qu'il

  5   n'était pas au courant de cette pratique et ces affirmations ne sont pas

  6   correctes, elles sont erronées.

  7   Voyons comment Coric a réagi à ces informations ? Comme la Chambre de

  8   première instance a conclu, il n'a rien fait pour prévenir cette pratique,

  9   en fait, il a permis que cette pratique se poursuive, et il a donc donné

 10   son aval pour que cela continue. Nous avons les moyens de preuve montrant

 11   qu'en août il a permis que les prisonniers musulmans de Vitina Otok, il

 12   s'agit d'une prison du HVO, donc il a autorisé à ce que ces prisonniers

 13   soient amenés sur les lignes de front pour y effectuer des travaux forcés,

 14   comme c'est indiqué au tome 4, paragraphe 977 du jugement. Les moyens de

 15   preuve ne relatent pas le sort qui a été réservé à ces prisonniers, mais il

 16   y est dit que ces prisonniers ont été amenés sur les lignes de front et que

 17   c'est Coric qui a autorisé cela et a approuvé cette pratique. Il n'a pas

 18   prévenu cette pratique du tout.

 19   Monsieur le Président, ces rapports concernant les travaux forcés, en

 20   particulier les rapports de Stanko Bozic, demandent que des mesures soient

 21   prises. Lorsque vous regardez ces rapports, vous allez voir qu'il a demandé

 22   dans ces rapports, à multiples reprises, d'intervenir, que Coric fasse

 23   quelque chose en tant que chef de la police militaire. Coric n'a rien fait.

 24   Entre-temps, des dizaines de détenus musulmans ont été tués et traumatisés.

 25   Ses affirmations selon lesquelles il n'a pas reçu ce rapport ne sont qu'un

 26   prétexte et, cela a été rejeté lors du procès, à juste titre.

 27   Monsieur le Président, la troisième contribution et la dernière

 28   contribution que Coric a fait à l'entreprise criminelle commune concerne


Page 647

  1   l'implication de Coric aux déplacements des détenus musulmans et de leurs

  2   familles en utilisant le système de libération sous condition, d'abord de

  3   lettres de prise en charge, ces détenus devaient quitter, en quelques

  4   heures, le territoire d'Herceg-Bosna pour se rendre au pays tiers et on

  5   leur a demandés de partir avec leurs familles. Il s'agissait de l'expulsion

  6   organisée en masse des Musulmans. Après que la Chambre de première instance

  7   a évalué tous les moyens de preuve en détail, elle a constaté que Coric a

  8   ordonné et a facilité les expulsions durant ce processus. Tome 4,

  9   paragraphe 982. Et cela est étayé par les moyens de preuve.

 10   Par exemple, en août 1993, Coric a donné un ordre concernant la libération

 11   des Musulmans de Ljubuski qui possédaient ces lettres de prise en charge,

 12   il s'agissait des détenus musulmans. Ces détenus musulmans qui étaient

 13   concernés par l'ordre de Coric ont eu un délai de 24 heures pour quitter ce

 14   territoire, quitter leurs domiciles avec leurs familles et se diriger vers

 15   les pays tiers. C'est au paragraphe 1644, tome 2, page du compte rendu

 16   22095.

 17   Conformément à cet ordre de Coric, les détenus ont été expulsés de

 18   l'Heliodrom, de Vitina Otok, de Ljubuski, de Dretelj et de Gabela, donc de

 19   toutes ces prisons. La réaction de Coric à tout cela était le déni complet.

 20   Vous avez entendu les arguments de la Défense selon lesquels Coric n'avait

 21   pas le pouvoir de libérer ces prisonniers. Monsieur le Président, cela

 22   n'est pas correct et il y a beaucoup de moyens de preuve qui corroborent

 23   cela. Par exemple, P10191 qui est montrée sur ce transparent où on peut

 24   lire :

 25   "Conformément à la loi et à l'ordre émanant du chef de la police militaire,

 26   M. Valentin Coric, nous demandons au commandement de l'Heliodrom à Mostar

 27   de libérer les gens d'appartenance ethnique musulmane qui possèdent des

 28   lettres de prise en charge. Ce sont les détenus : Fadil Maksumic, né en


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  1   1955, Ismet Micijevic, né en 1956, Admir Osmic, et ces détenus se

  2   trouvaient dans la prison militaire d'Heliodrom à Mostar, ils doivent être

  3   remis à la police militaire à Ljubuski, puisque leurs familles se trouvent

  4   à Ljubuski et ont été en exil de la Croatie."

  5   Il y a encore d'autres exemples, beaucoup d'autres exemples, certains

  6   desquels j'ai déjà cités au début de ma présentation.

  7   Monsieur le Président, Coric savait que ces expulsions concernaient un

  8   grand nombre de détenus musulmans et d'autres Musulmans. Par exemple, il

  9   savait qu'à Dretelj seul il y avait plus de 2 000 Musulmans qui ont été

 10   détenus pendant les arrestations de masse, la campagne des arrestations de

 11   masse à Capljina. Tome 4, paragraphes 985, 986, et 993.

 12   Leur expulsion, ainsi que l'expulsion de leurs familles, a eu et aurait une

 13   incidence énorme sur leur santé mentale, leur moral, et l'existence de la

 14   population musulmane en Bosnie-Herzégovine.

 15   Coric affirme que même s'il avait été impliqué dans ces libérations, que

 16   ces libérations étaient pour le bien-être des prisonniers. Au paragraphe

 17   180 de son mémoire d'appel. En fait, il a dit qu'en faisant cela, il a

 18   improuvé [phon] ces conditions déplorables. Il a omis, par contre, de dire

 19   que le HVO ainsi que la police militaire ont commis des crimes affreux, qui

 20   ont été à l'origine des conditions déplorables dans ces centres détention,

 21   et c'est justement pour ces conditions déplorables que les détenus

 22   musulmans voulaient partir. Les prisonniers se trouvaient dans des

 23   installations surpeuplées, avec des conditions hygiéniques déplorables. Ils

 24   ne pouvaient pas donc avoir suffisamment de places pour dormir. Ils

 25   recevaient si peu d'eau qu'ils devaient boire leur propre urine. Et chaque

 26   jour ils avaient peur d'avoir été choisis pour effectuer des travaux

 27   forcés, et il s'agissait en fait d'une vraie roulette russe. C'était la

 28   terreur et l'état désespérant dans lequel ils se trouvaient.


Page 649

  1   Donc c'est le contexte dans lequel il a été décidé que ces détenus soient

  2   "libérés". Coric était bien conscient de ces conditions. Et la Chambre de

  3   première instance a conclu de façon correcte que les prisonniers n'avaient

  4   aucun choix, aucun vrai choix pour ce qui est de ces circonstances et a

  5   conclu de façon correcte qu'il s'agissait d'un moyen de les expulser. Tome

  6   2, paragraphe 1648; tome 3, paragraphe 817.

  7   Vous avez vu les ordres montrant que Coric a joué un rôle-clé dans cette

  8   expulsion à une échelle industrielle, pour ainsi dire. Et il a été à juste

  9   titre tenu responsable de la contribution faite à l'entreprise criminelle

 10   commune.

 11   Maintenant je vais passer à vos questions dans l'ordonnance pour ce qui est

 12   de cette audience en appel, d'abord la question 4, qui concerne l'incidence

 13   sur la portée des déclarations de culpabilité au titre de l'entreprise

 14   criminelle commune, en particulier pour ce qui de meurtre si les

 15   conclusions concernant la contribution faite à Gornji Vakuf pour ce qui est

 16   du meurtre et de l'omission intentionnelle était infirmé.

 17   Comme vous avez déjà vu par rapport à la partie A et la partie B de

 18   votre question, c'est si ces intentions de culpabilité étaient infirmées

 19   concernant Dusa, cela n'aurait aucune incidence sur l'existence du plan

 20   criminel commun ni sur l'élément moral de l'entreprise criminelle commune

 21   pour ce qui est du meurtre. Beaucoup de meurtres ont été commis dans le

 22   cadre de l'entreprise criminelle et si on élimine un incident, cela

 23   n'aurait aucun incident sur ces déclarations de culpabilité.

 24   Maintenant, je vais me concentrer sur la troisième catégorie de

 25   l'entreprise criminelle commune par rapport à quoi vous avez posé votre

 26   question et vous avez entendu deux présentations concernant deux documents

 27   P1393 et P1414.

 28   La réponse brève est comme suit : il n'y aurait aucune incidence sur


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  1   les déclarations de culpabilité prononcées à l'encontre de Coric et il n'y

  2   aurait aucune incidence sur l'appel de l'Accusation pour ce qui est de

  3   d'autres déclarations de culpabilité au titre de l'entreprise criminelle 3

  4   pour le crime de meurtre.

  5   Et si on regarde ces déclarations de culpabilité pour l'entreprise

  6   criminelle commune de la troisième catégorie prononcée à l'encontre de

  7   Coric eu égard à deux meurtres de détenus musulmans à Dretelj en août 1993

  8   qui ont été battus jusqu'à ce que la mort s'ensuive, c'était au tome 4,

  9   paragraphe 1017, la Chambre de première instance a adopté une approche très

 10   restrictive lorsqu'elle a analysé cela, et l'Accusation affirme qu'il

 11   s'agit là d'une erreur. Nous avons dit cela dans notre mémoire d'appel

 12   également. Mais même en adoptant une telle approche stricte et restrictive,

 13   il y a suffisamment de moyens de preuve pour corroborer la conclusion selon

 14   laquelle il y avait ces deux meurtres à Dretelj en août 1993 qui suffisent

 15   à conclure qu'il y avait l'entreprise criminelle commune.

 16   Pourquoi ? Parce qu'il était au courant d'autres membres de détenus

 17   musulmans dans le même centre de détention en juillet, juste quelques

 18   semaines avant ces meurtres-là. Monsieur le Président, cela veut dire qu'il

 19   avait suffisamment d'informations pour pouvoir prévoir que d'autres crimes

 20   auraient pu être commis. Donc, chacun aurait pu prévoir cela et encore plus

 21   le chef d'une station de la police militaire. Monsieur le Président, les

 22   références concernant cela se trouvent au tome 4, paragraphe 1018.

 23   Je regarde l'heure, Monsieur le Président, et j'aimerais donc aborder

 24   un autre sujet.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez encore six minutes.

 26   M. GILLETT : [interprétation] Je vais continuer, merci.

 27   Si on regarde d'autres meurtres commis dans le cadre de l'entreprise

 28   criminelle commune de la troisième catégorie, pour lesquels Coric, d'après


Page 651

  1   la thèse de l'Accusation, aurait dû être condamné, vous allez voir qu'il

  2   s'agit de meurtres en rapport avec les centres de détention. Cela se trouve

  3   dans le mémoire d'appel de l'Accusation au paragraphe 242. Dans beaucoup de

  4   ces cas, la Chambre de première instance a tout simplement oublié de

  5   statuer sur la responsabilité pénale individuelle de Coric dans le cadre de

  6   l'entreprise criminelle commune de troisième catégorie. Et pour ce qui est

  7   de ces moyens de preuve, encore une fois, ces moyens de preuve seraient

  8   suffisants pour prononcer une déclaration de culpabilité, même si on écarte

  9   les meurtres survenus à Dusa. Donc, pour ce qui est de cette campagne

 10   violente de nettoyage ethnique qui, donc, comprenaient l'utilisation

 11   délibérée de la violence extrême; c'est la première chose. Et la deuxième

 12   chose, c'est parce qu'il a été informé à plusieurs reprises du fait que des

 13   crimes violents et graves ont été perpétrés contre les Musulmans.

 14   Maintenant, je vais parler de sa participation à la mise en œuvre de

 15   l'entreprise criminelle commune. Et comme on a déjà dit, la campagne

 16   criminelle qui est au centre de l'entreprise criminelle commune impliquait

 17   les crimes violents, les crimes graves, y compris les crimes de meurtre.

 18   J'ai déjà longuement parlé du rôle de Coric dans les opérations d'éviction,

 19   d'expulsion, dans la commission des crimes dans les centres de détention et

 20   dans l'utilisation des détenus pour effectuer des travaux forcés et pour

 21   les utiliser en tant que boucliers humains.

 22   Il a également contribué à des crimes commis à Mostar est, y compris

 23   le crime de meurtre. Il avait un bureau dans le centre de Mostar à l'époque

 24   et il se rendait sur la ligne de front. Tome 4, paragraphe 936, page du

 25   compte rendu 18341. Il était au courant de la campagne de pilonnage et de

 26   tirs isolés, mais néanmoins, il envoyait les unités de la police militaire

 27   pour apporter leur concours au siège de la ville, et pour couper

 28   l'acheminement des approvisionnements et de l'aide humanitaire aux


Page 652

  1   habitants musulmans pris au piège. Tome 4, paragraphes 937 et 943.

  2   Le rôle de Coric et sa participation et l'implication dans la

  3   campagne de l'extrême violence commis sur les bases ethniques est

  4   clairement pertinent pour ce qui est de l'élément moral de l'entreprise

  5   criminelle commune de troisième catégorie. Par exemple, à l'arrêt Sainovic,

  6   paragraphe 1089 et 1591.

  7   La Chambre a confirmé la pertinence de ces éléments pour ce qui est

  8   de la responsabilité d'un accusé concernant l'entreprise criminelle commune

  9   de la troisième catégorie.

 10   Monsieur le Président, comme j'ai déjà mentionné à plusieurs reprises

 11   concernant ces rapports que Coric recevait, il s'agissait des rapports

 12   rapportant d'un crime violent perpétré contre les Musulmans.

 13   Je regarde l'heure, Monsieur le Président. Je pense que le moment est

 14   propice pour faire la pause.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, certainement. Nous allons faire la

 16   pause et nous allons reprendre à 14 heures 30.

 17   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures.

 18   --- L'audience est reprise à 14 heures 30.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Gillett.

 20   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur le

 21   Juge.

 22   Au tout début quelques petites rectifications au compte rendu d'audience

 23   pour que nous soyons sûrs d'avoir tout consigné de façon appropriée et de

 24   ne pas avoir de lapsus. En page 54 du compte rendu, le document P5689 a été

 25   consigné alors qu'il fallait entendre P5869.

 26   En page 61 du compte rendu, j'ai cité le volume 1, paragraphe 972, il

 27   fallait entendre volume 1, paragraphe 940.

 28   Et quand j'ai fait référence à deux pièces à conviction, P3316 et


Page 653

  1   P3320, j'aurais dû dire en fait P3216 et 3220. Merci.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Merci.

  3   Allez-y.

  4   M. GILLETT : [interprétation] Je vais revenir maintenant aux arguments

  5   présentés avant la pause. J'ai déjà mentionné qu'à plusieurs reprises Coric

  6   avait reçu des notifications portant sur des crimes violents, y compris ce

  7   qui a été commis à l'encontre de Musulmans par des membres du HVO. Je vais

  8   d'abord faire référence aux documents que vous avez mentionnés de façon

  9   concrète dans vos questions, à savoir le P1393 et P1414, qui se rapportent

 10   à la troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune.

 11   Alors, Monsieur le Président, ce P1393 est un rapport du 2 février 1993,

 12   émanant de Berislav Pusic et autres du département de la police criminelle

 13   faisant partie de l'administration de la police militaire à Coric, et on y

 14   dit que la police de Tomislavgrad a passé à tabac et pillé des détenus à

 15   Ljubuski. Des victimes portaient des traces visibles de coups.

 16   Et dans la pièce P1414, toujours relative à Coric, il s'agit d'un

 17   rapport de circonstances et portant sur des biens dont on a dépossédé les

 18   prisonniers et on a dit qu'il fallait les confier à l'administration de la

 19   police militaire. La Défense avait prétendu que ceci avait été la preuve de

 20   prises de mesures effectives et adéquates en réponse et que cela était sa

 21   réponse à des violences. Alors, s'agissant du premier point, la JCE, c'est

 22   l'entreprise criminelle commune. Quand on parle de violence, c'est une

 23   chose qu'on ne peut effacer. On ne peut pas perdre la conscience de

 24   violences subies.

 25   Et quand on se penche sur le compte rendu d'audience, il y a bon

 26   nombre de raisons de douter du sérieux des mesures prises par lui suite à

 27   ces rapports, parce qu'il n'est pas fait mention de punitions à l'égard de

 28   membres de la police militaire. Ce qu'on sait, c'est que le chef de cette


Page 654

  1   police militaire, Zdenko Andabak, a été promu à un poste meilleur quelques

  2   jours plus tard, le 10 février 1993, suite à une recommandation de la part

  3   de Coric. Nous savons également que Coric a autorisé la police militaire de

  4   Tomislavgrad qui a passé à tabac de façon grave un certain nombre de

  5   détenus à Ljubuski, a continué à assurer le gardiennage de ces détenus en

  6   1993. On peut le voir dans la pièce P1460 et la pièce P3551.

  7   Qui plus est, Messieurs les Juges, ça n'a pas été la première fois où

  8   Coric a pu avoir vent des penchants criminels auprès de ces policiers de la

  9   police militaire de Tomislavgrad. En octobre 1992, il a été informé

 10   d'indiscipline et de délits au pénal de commis par la police militaire de

 11   Tomislavgrad avec Zdenko Andapak, on lui a demandé de prendre des mesures à

 12   leur rencontre. Et la Chambre de première instance s'est penchée sur les

 13   éléments de preuve et a constaté qu'il ne l'avait pas fait. On peut le voir

 14   aux paragraphes 1246 et 1252, qui constitue le fondement pour ce qui est de

 15   sa responsabilité en application de l'article 7(3), et ce, avant le début

 16   de l'entreprise criminelle commune.

 17   Alors, Monsieur le Juge, la Défense a aussi fait référence au

 18   témoignage de Zdenko Andabak, page du compte rendu d'audience 50953, pour

 19   affirmer que Coric avait tenté de mettre en place un modèle de comportement

 20   correct dans la police militaire, mais la Chambre n'a prêté que peu de foi

 21   au témoignage d'Andabak s'agissant des crimes commis en octobre 1992 et on

 22   peut le voir au volume 2, paragraphe 59.

 23   Et vous allez voir aussi que les auteurs de ces infractions ont

 24   continué à faire partie de l'unité et il y a eu même escalade de délits et

 25   crimes commis par eux.

 26   Le point crucial du mens rea pour ce qui est de l'entreprise

 27   criminelle commune de catégorie 3, c'est qu'il avait conscience du risque

 28   et de la possibilité de voir des violences graves être commises à


Page 655

  1   l'encontre des Musulmans de Bosnie dans le cadre de cette entreprise

  2   criminelle commune.

  3   En octobre et en janvier 1993, il avait conscience des rapports

  4   nombreux portant crimes, meurtres, commis à l'égard de Musulmans. Il a eu

  5   vent des expulsions violentes à Mostar en mai 1993. On peut le voir au

  6   volume 4, paragraphe 926 à 928.

  7   Messieurs les Juges, ces expulsions ont été brutales, les Musulmans

  8   recevaient des coups de pieds, recevaient des coups de crosse, des coups de

  9   toutes sortes, et les soldats du HVO les menaçaient de mort, ils pointaient

 10   leurs fusils contre les familles et les enfants en bas âge. On peut le voir

 11   au volume 2, paragraphe 822.

 12   Il y a un rapport du 9 juin relatif à Prozor. Je parle de la pièce

 13   P2697. Et ce document a été envoyé à Coric, on voit donc qu'il a été

 14   informé des crimes commis, y compris meurtres, mises à feu et pillages. Il

 15   a été informé du fait que la police militaire avait relâché les meurtriers.

 16   Il a été informé du fait qu'un prisonnier avait été tué et des autres

 17   incidents survenus.

 18   Donc, tout ceci, ce sont des éléments de preuve montrant que Coric,

 19   vers la mi-1993, avait connaissance du fait que le HVO gardait des

 20   Musulmans de détenus à Prozor. On peut le voir au volume 4, paragraphe 998.

 21   Et, Messieurs les Juges, l'implication de la police militaire dans les

 22   crimes commis à Prozor était notoire. J'ai mentionné la pièce P4177, un

 23   rapport où il est question de l'implication de la police militaire dans des

 24   viols, meurtres et mauvais traitements infligés aux Musulmans.

 25   A la mi-juillet 1993, un représentant d'une organisation

 26   internationale avait protesté auprès de Coric à l'occasion de toute une

 27   série de réunions au sujet des expulsions, pillages, destruction de biens

 28   et campagnes généralisées dirigées à l'encontre des Musulmans sur les


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  1   territoires dont il avait été question. Coric a bien dit qu'il allait

  2   prendre des mesures, mais ça ne s'est jamais matérialisé. Je parle ici du

  3   compte rendu d'audience, pages 18340 à 18344. Vous pouvez voir sur la pièce

  4   P4058, il s'agit d'un rapport de la police militaire à Coric auquel fait

  5   référence la Défense aujourd'hui. Ceci montre qu'il avait été mis au

  6   courant des expulsions forcées et des meurtres commis à l'égard de

  7   plusieurs Musulmans et des liquidations de Musulmans, pur et simple.

  8   Donc, en termes brefs, Messieurs les Juges, Coric était bel et bien

  9   informé de ce qui se passait et toute personne partant de ces informations

 10   relatives aux crimes, aux violences graves, y compris meurtres à l'égard de

 11   Musulmans, aurait été censée réagir, et ce, dans le cadre de la mise en

 12   œuvre d'une entreprise criminelle commune.

 13   Les Juges de la Chambre d'appel ont posé une question au sujet de la

 14   teneur d'un rapport de Zeljko Siljeg de janvier 1993, où il est question de

 15   meurtre et destruction à Gornji Vakuf. Nous pensons que Coric a

 16   probablement reçu des informations contenues dans ce rapport aux côtés de

 17   Petkovic. Coric était chargé de veiller à la réalisation de l'opération à

 18   Gornji Vakuf. Et bien qu'il n'ait pas été présent lui-même dans l'exécution

 19   de cette opération, il a été dit qu'il a été exercé un commandement général

 20   à l'égard de la police militaire en septembre à Gornji Vakuf et suite à ces

 21   opérations, il a envoyé un rapport afférent, on peut le trouver dans le

 22   volume 4, paragraphes 921, 923.

 23   Donc, Messieurs les Juges, il était au courant des violences à Gornji

 24   Vakuf. Il était au courant d'une campagne de violence à l'égard des

 25   Musulmans et il y a contribué de façon variée par des travaux forcés avec

 26   brutalisation [phon], expulsions et bon nombre d'autres crimes. Je crois

 27   devoir dire qu'il a également contribué à bon nombre de crimes commis dans

 28   le cadre de l'entreprise criminelle commune.


Page 657

  1   Et il est évident que tout ceci répond aux critères du mens rea

  2   d'après la jurisprudence de ce Tribunal. Aussi faudrait-il prononcer une

  3   peine en condamnation pour ce qui est de l'entreprise criminelle commune

  4   catégorie 3, comme nous l'avons indiqué dans notre appel.

  5   Je vais maintenant faire référence à la question numéro 5 dont la

  6   Défense a également parlé ce matin. Il s'agit de la destruction de villages

  7   sur le territoire de la municipalité de Gornji Vakuf. Et mardi, nous allons

  8   présenter nos arguments à ce sujet. Mais en substance, je dirais que nous

  9   sommes d'avis qu'il s'agissait de destruction injustifiée et arbitraire et

 10   que dans ces crimes commis, il y avait un modèle de suivi, et vous verrez

 11   que dans le village, les soldats du HVO avaient mis à feu les maisons et il

 12   n'y avait aucune justification militaire au fait de mettre le feu à des

 13   maisons de civils.

 14   Très brièvement, au sujet de la question 10, qui a également été évoquée un

 15   peu plus tôt dans la journée d'aujourd'hui, vous allez en entendre

 16   davantage dans les arguments présentés par l'Accusation mardi prochain.

 17   Mais le fait est que les arguments avancés par Coric sont minés par la

 18   bonne mise en œuvre des normes pour l'entreprise criminelle commune

 19   catégorie 3 s'agissant du mens rea, il ne s'agit pas de probabilité. Dans

 20   les écritures présentées par eux au paragraphe 187 s'agissant de Gornji

 21   Vakuf, vous verrez qu'on affirme dans la Défense de Coric qu'il y ait eu

 22   erreur, ou plutôt que l'Accusation n'a pas démontré comme il se devait le

 23   fait qu'il avait pris le risque de voir des pillages commis. Donc on

 24   procède à des normes de probabilité.

 25   Or, à Mostar, paragraphe 199 de leur mémoire, une fois cela dit, on

 26   avait conscience du fait que des vols pouvaient être commis. Et Coric, de

 27   façon raisonnable, avait pu prévoir les crimes ou les violences sexuelles

 28   commises par les membres du HVO.


Page 658

  1   Donc ceci mettrait en péril l'argumentation avancée par sa Défense.

  2   S'agissant maintenant de l'élément d'occupation dont on a parlé ce matin.

  3   Je dirais, Messieurs les Juges, qu'il n'a pas été démontré qu'il y

  4   avait une erreur dans le jugement de première instance. En affirmant que le

  5   HVO ne pouvait pas occuper son propre territoire, la Défense laisse de côté

  6   un fait, à savoir qu'il s'agissait d'une occupation secondaire. C'est-à-

  7   dire, c'est la Croatie qui est la force d'occupation en premier.

  8   Et contrairement aux arguments de la Défense, cet état d'occupation

  9   ne retire pas qu'il y ait invasion. On peut le voir à l'article 2.2 de la

 10   quatrième convention de Genève :

 11   "Cette convention s'applique également à la totalité des cas

 12   d'occupation partielle ou totale d'un territoire commise par l'une

 13   quelconque des signataires de la convention, quand bien même il n'y a pas

 14   de résistance armée à l'occupation."

 15   On a déjà entendu bon nombre d'argumentations détaillées sur ces

 16   questions précédemment.

 17   En sus du fait que le Croatie ait apporté son soutien à l'ABiH en

 18   armes, ceci ne porte pas atteinte au fait que le contrôle ait été exercé

 19   par la Croatie vis-à-vis du HVO, et ce, non pas seulement pendant les

 20   périodes et dans les régions qui ont été mentionnées dans cette affaire, on

 21   a pu le voir la semaine précédente, à savoir que les transcriptions, les

 22   comptes rendus présidentiels montrent que la Croatie a, à plusieurs

 23   reprises, exprimé le contrôle et affirmé le contrôle exercé vis-à-vis du

 24   HVO, il s'agit pas seulement de l'approvisionner en armes, mais d'organiser

 25   ces forces-là.

 26   Donc la Croatie a été, à juste titre, considérée comme étant

 27   impliquée dans l'organisation et la planification des opérations militaires

 28   en Bosnie-Herzégovine pour ce qui est de ce que faisait le HVO contre


Page 659

  1   l'ABiH. Donc ceci est déjà démontré dans la jurisprudence.

  2   Alors quant à maintenant contester l'entreprise criminelle commune,

  3   chose mentionnée à plusieurs reprises, Messieurs les Juges, la Défense a

  4   parlé d'abord de la législation relative à l'entreprise criminelle commune

  5   pour vous demander de modifier, de changer de cours à mi-chemin, et ce, en

  6   faisant référence à l'affaire Jogee de la Cour suprême du Royaume-Uni. La

  7   Défense a également dit, dans le compte rendu page 7 d'aujourd'hui, que la

  8   Chambre d'appel dans Tadic avait fait référence à la jurisprudence anglaise

  9   pour dire qu'il y avait une doctrine légale en vigueur pour ce qui est de

 10   l'entreprise criminelle commune. Mais la Chambre d'appel dans Tadic s'est

 11   référée au droit international coutumier lorsqu'elle a formulé ses

 12   constatations au sujet de l'entreprise criminelle commune, et elle a dit

 13   qu'on ne pouvait pas se fonder sur les dispositions nationales pour

 14   déterminer la responsabilité commune. Et vous allez le voir aux paragraphes

 15   195 à 226 de la décision de la Chambre d'appel Tadic.

 16   La Défense a évoqué le paragraphe 224, note de bas de page 287, dans

 17   ses arguments, et elle fait référence également à la jurisprudence

 18   anglaise. Mais le fait de citer une loi anglaise est l'une des choses que

 19   la Chambre d'appel a évoqué en concluant qu'on ne pouvait pas se baser sur

 20   cette source-là au niveau des principes internationaux ou la doctrine

 21   internationale du point de vue des principes généraux de loi et de droit

 22   adoptés par les nations du monde, puisqu'il y avait une approche différente

 23   dans les différents systèmes juridiques. Et depuis le jugement Jogee, il y

 24   a eu un arrêt de rendu dans l'affaire Stanisic et Zupljanin où l'on a

 25   rétabli la validité de la notion de l'entreprise criminelle commune. On

 26   peut le voir au paragraphe 974.

 27   Lorsqu'il s'agit de l'existence d'une entreprise criminelle commune,

 28   la Défense n'a, en fait, pas du tout examiné la substantifique moelle de


Page 660

  1   l'analyse faite par les Juges de la Chambre de première instance

  2   lorsqu'elle a affirmé qu'il n'y avait pas de modèle dans la perpétration

  3   des crimes commis.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Ivetic.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Est-ce que je peux m'absenter pour apporter un

  6   certain nombre de documents, je vous prie.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Vous pouvez sortir.

  8   Monsieur Gillett, continuez.

  9   M. GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

 10   commencer par les propos d'un témoin international haut placé qui a dit que

 11   les Croates de Bosnie avaient voulu faire en sorte que les provinces 8 et

 12   10 disposent d'une majorité des plus grandes possibles de Croates de

 13   Bosnie. En fait, ils ont procédé à des expulsions, dans ces provinces, des

 14   Serbes de Bosnie et de ceux qu'ils appelaient les Musulmans de Bosnie. Page

 15   17535 du compte rendu d'audience, volume 4, paragraphe 15. Les provinces 8

 16   et 10 comportent des municipalités où s'est produite la plupart des crimes

 17   dont on a parlé ici.

 18   Et ce témoin haut placé, qui était très au courant de ce qui se passait,

 19   l'ambassadeur Herbert Okun, a expliqué le double jeu qui était joué par la

 20   direction des Croates de Bosnie. Il a dit, en 1993, en janvier que :

 21   "Les Croates de Bosnie avaient signé un accord, et ce, en procédant à

 22   des opérations de nettoyage ethnique en Herzégovine et en Bosnie centrale.

 23   Ils ont fait les deux."

 24   Volume 4, paragraphe 45.

 25   Messieurs les Juges, les éléments de preuve étayent la présence d'un modèle

 26   de perpétration de crimes, y compris crimes de meurtres, faisant partie de

 27   l'entreprise criminelle commune. Par exemple, lorsqu'il s'agit des

 28   expulsions, vous allez voir que les victimes étaient des familles, une


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  1   femme qui était en train de laver son linge à Mostar lorsque l'attaque a

  2   été lancée, des vieillards de santé précaire, et tous ces gens-là ont été

  3   obligés par des soldats du HVO à courir à travers des lignes de front. Et

  4   de dos c'était le HVO qui leur tirait dessus et de devant c'était l'ABiH

  5   qui leur tirait dessus parce qu'ils ne savaient pas de qui il s'agissait.

  6   Messieurs les Juges, quelle est la finalité militaire de ce genre de crimes

  7   ? Il n'y a aucune. La finalité de ces crimes c'est la finalité qui est

  8   celle de l'entreprise criminelle commune.

  9   Je peux vous demander de vous pencher sur des données démographiques dont

 10   on vous a parlé également, deux choses à ce sujet. D'abord, les crimes

 11   relatifs à l'entreprise criminelle commune se sont traduits par des

 12   expulsions à grande échelle de la population musulmane; et deuxièmement,

 13   ces expulsions reflètent les propos tenus par les membres de l'entreprise

 14   criminelle commune. Les chiffres parlent pour eux-mêmes. Comme les Juges de

 15   la Chambre de première instance ont pu le remarquer au paragraphe 57 du

 16   volume 4, il y a eu une chute dramatique du nombre de Musulmans entre

 17   septembre et octobre 1993. Et ce qui est peut-être le plus significatif,

 18   c'est qu'à Stolac, les Musulmans étaient 8 093 et par la suite, ils étaient

 19   zéro.

 20   Vous avez entendu ce qu'ont déclaré les membres ou les participants à

 21   l'entreprise criminelle commune. Vous avez entendu ce qu'a déclaré Mate

 22   Boban en décembre 1991 au sujet du nettoyage des secteurs frontaliers de

 23   l'Herceg-Bosna. Vous avez entendu ce que Praljak a dit en septembre 1992 au

 24   sujet des réfugiés musulmans, "si on ne les fait pas partir, ces gens-là,

 25   on n'aura pas de majorité dans ces territoires". Volume 4, paragraphe 522.

 26   Et vous avez entendu la déclaration à Praljak portant homogénéisation de la

 27   population, et ce, à une réunion du 2 avril 1993 avec la présence de Coric.

 28   Et là, Praljak a dit :


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  1   "Maintenant, nous avons ce que nous voulions. Une homogénéisation de notre

  2   population qui se poursuit. Nous ne pouvons placer des clôtures qu'autour

  3   de ce qui nous appartient et on peut édifier notre propre espace faisant

  4   partie de notre propre Etat. Au moins là, les choses sont clairement

  5   dites."

  6   Je fais référence à la pièce P01788.

  7   Messieurs les Juges, la Défense n'a pas du tout parlé de ces éléments

  8   cruciaux qui sont la substantifique moelle illustrant l'existence de

  9   l'entreprise criminelle commune. Et pour finir, je vais dire que Coric a

 10   été bel et bien informé à plusieurs reprises des crimes commis par le HVO

 11   contre les Musulmans. Il était chef de l'administration de la police

 12   militaire et la substance de son métier était de se pencher sur les crimes

 13   commis par les membres du HVO. Mais il a toujours gardé le silence face à

 14   ces crimes graves. Il a gardé le silence face au mauvais traitement de Mujo

 15   Copelj lorsqu'il a été envoyé en travaux forcés, comme beaucoup d'autres.

 16   Il a gardé le silence lorsqu'on a expulsé les victimes de Ljubuski et le

 17   départ en exil de familles entières.

 18   Pourquoi a-t-il gardé le silence ? Et pourquoi le chien n'a-t-il pas

 19   aboyé, comme nous on le dirait dans le langage familier ? Eh bien, la

 20   raison, c'est qu'il a été partie prenante de cette entreprise criminelle

 21   commune, qu'il a contribué à celle-ci. Il s'est servi de la police

 22   militaire dans les opérations, là où les crimes graves à grande échelle se

 23   sont produits. Il a facilité l'arrestation en masse de Musulmans sans

 24   discrimination aucune. Il a participé à la détention brutale et mauvais

 25   traitements de gens au travers de tout un réseau de détention avec mauvais

 26   traitements, homicides, travaux forcés de Musulmans. Et pour finir, il a

 27   ordonné des expulsions en masse de Musulmans à partir de plusieurs

 28   territoires, y compris la Bosnie centrale.


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  1   Coric n'a pas fait preuve, Messieurs les Juges, ou n'a pas affirmé

  2   que son procès a été inéquitable, il n'a pas démontré qu'il n'y avait pas

  3   de base raisonnable pour ce qui est de son jugement rendu. Nous avons

  4   entendu leurs arguments, mais il n'a pas démontré qu'il y avait erreur, et

  5   il n'a pas démontré le fait ou l'assertion au terme de laquelle sa

  6   condamnation devrait être infirmée.

  7   S'il n'y a pas d'autres questions, je dirais que j'en ai terminé avec

  8   les arguments que je voulais présenter. Merci.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Le bâton vous revient plus

 10   tôt que vous ne l'espériez. Vous avez la parole, Maître Tomasegovic-Tomic.

 11   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

 12   sommes prêts.

 13   Au début de sa présentation, l'Accusation a affirmé que nous nous

 14   répétions dans nos arguments; elle a partiellement raison. Effectivement,

 15   depuis le début de l'audience lundi, nous avons essayé de marteler les

 16   mêmes choses, et je vais vous donner deux exemples pour montrer que nous

 17   avions raison.

 18   Tout d'abord, lorsque le bureau du Procureur a abordé la question du

 19   commandement et de la responsabilité s'agissant de M. Coric et de la

 20   resubordination aux unités de la police militaire ainsi que sa demande

 21   selon laquelle, son exigence selon laquelle la police militaire devrait

 22   être retirée de la ligne de front, eh bien, dans ce contexte, le bureau du

 23   Procureur a déclaré deux choses. Tout d'abord, M. Coric attendait, il a

 24   attendu jusqu'en septembre, ensuite jusqu'en novembre pour réagir. Et puis,

 25   deuxième chose, les avocats du bureau du Procureur ont déclaré qu'il

 26   n'avait pas perdu son autorité et qu'il était toujours responsable et avait

 27   le commandement.

 28   S'agissant du premier argument soulevé par l'Accusation, il est clair que


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  1   M. Coric n'aurait pas demandé à la police militaire de se retirer des

  2   lignes de front avant le mois de novembre, parce que c'est à ce moment-là

  3   qu'il est devenu ministre de l'Intérieur. Avant cette date, il n'avait rien

  4   à voir avec la police civile.

  5   Deuxième argument disant qu'il a demandé en septembre est incorrect.

  6   Dans la partie introductive, nous pouvons lire : Nous avons prévenu à

  7   plusieurs reprises du danger. Et cela veut dire que la demande du mois de

  8   septembre n'était pas la première demande de la sorte effectuée par M.

  9   Coric.

 10   S'agissant de l'adaptation de leurs arguments en fonction de  ce qui

 11   leur plaisait le plus à quel que moment que ce soit, nous voulions rappeler

 12   aux Juges de la Chambre les paragraphes 742 et 748 du mémoire de

 13   l'Accusation où il est dit qu'un autre accusé avait rendu impossible la

 14   demande de Coric et que cette autre personne était responsable du fait que

 15   les policiers de la police militaire se trouvaient sur la ligne de front.

 16   De plus, l'Accusation a essayé de faire entendre que la politique en

 17   matière de personnel de la police militaire était telle que, si je ne

 18   m'abuse, ils ont déclaré que seuls des gens comme ça pouvaient être admis,

 19   car ils étaient des personnes dévoués à l'administration croate et étaient

 20   membres de l'ECC. Mais les documents montrent le contraire. Le document

 21   2490, par exemple, confirme que le 26 juin 1993, 20 à 30 % du personnel du

 22   2e Bataillon de la police militaire était représenté et était composé de

 23   membres d'appartenance ethnique musulmane. Il y a des éléments de preuve

 24   dans les pièces qui ont été versées au dossier, des dépositions également

 25   qui ont confirmé que pendant la période couverte par l'acte d'accusation

 26   pour notre client, la composition de la police militaire était multiple,

 27   composition ethnique et que les commandants d'unités individuelles étaient

 28   des Musulmans.


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  1   L'Accusation a également fait référence à certains documents dans sa

  2   présentation qui n'ont rien à voir avec M. Coric ou à la politique

  3   militaire ou à autre chose. L'un de ces documents est le document P1088

  4   portant sur la construction d'une usine thermique en Bosnie-Herzégovine. Un

  5   autre document est un ordre. C'est la pièce P01087, qui n'a dépendu ni du

  6   commandement de Coric ni du commandement de l'administration de la police

  7   militaire, et il ne se trouvait pas sur la liste des destinataires non

  8   plus.

  9   Tout comme les références faites à ces documents, nous avons entendu

 10   d'autres références de la part de l'Accusation qui n'avaient rien à voir

 11   avec M. Coric ou peut-être que l'Accusation l'a mal interprété. Mon

 12   confrère, M. Stringer, par exemple, à la page 182 du compte rendu

 13   d'audience, a déclaré que M. Coric, après l'ultimatum, avait envoyé des

 14   unités de la police militaire à Gornji Vakuf pour mener le nettoyage

 15   ethnique. Et aujourd'hui le confrère de l'Accusation qui a pris la parole a

 16   également déclaré que dans le document portant la cote P1053, et désolée si

 17   ma langue fourche pour les chiffres, il a déclaré que M. Coric avait

 18   rencontré le plus haut commandant de la police militaire. Le document dont

 19   je parlais était le rapport à mi-parcours de M. Coric datant du 1er janvier

 20   1993 et qui a été rédigé avant l'ultimatum. On y voit que la police

 21   militaire était dans la zone au mois de septembre pour maintenir la paix et

 22   l'ordre, pour protéger les foyers et pour rendre le trafic plus fluide. On

 23   ne parle pas du tout d'opérations de combat ou de nettoyage ethnique.

 24   L'un de nos confrères de l'Accusation qui s'est exprimé à la page 186 du

 25   compte rendu d'audience, lorsqu'il a fait référence au document P4177, a

 26   déclaré qu'il s'agissait d'un rapport de la police militaire qui avait été

 27   envoyé à Coric, et il a continué d'y faire référence pour prouver que Coric

 28   était au courant des crimes qui étaient commis dans le secteur de Prozor.


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  1   Ce rapport n'a pas été rédigé par la police militaire. Il n'a pas été

  2   envoyé à Valentin Coric. Et lorsqu'elle a présenté ce rapport, l'Accusation

  3   a impliqué qu'au vu des événements qui se déroulaient à Prozor, Coric

  4   aurait pu prévoir les suites à Mostar. Cependant, cette date sur le

  5   document est le 14 août 1993.

  6   M. GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je suis vraiment

  7   désolé d'interrompre la Défense. Et je ne veux pas priver la Défense de

  8   l'occasion de consigner certains éléments au compte rendu mais je voulais

  9   arrêter avant que de plus graves erreurs ne soient commises. Je voulais

 10   dire que la pièce P10188 est bien consignée au compte rendu, mais j'ai cru

 11   comprendre que ma consœur était en train de parler de la pièce P1088, qui

 12   est une autre cote. Et ensuite elle a parlé de la pièce P1087, et moi, dans

 13   mes arguments, j'avais parlé de la pièce 10187. Je pense que c'est cela qui

 14   a créé la confusion.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que c'est clair, à présent,

 16   Maître ?

 17   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Messieurs les Juges, même si les

 18   choses sont claires à présent, je n'ai pas le temps de revenir en arrière.

 19   Donc si vous me le permettez, je laisserai à votre personnel le soin de

 20   vérifier les choses.

 21   S'agissant des événements qui se sont déroulés à Prozor, la Défense n'a pas

 22   le temps de répondre dans son intégralité aux arguments soulevés par

 23   l'Accusation. Cependant, nous avons discuté de certains éléments dans notre

 24   mémoire en appel, aux paragraphes 220, 221, 222, 223, 224, et 225, ainsi

 25   que 226, de points importants. Beaucoup de pièces sont cités en notes de

 26   bas de page de ces paragraphes et renvoient aux activités de la police

 27   militaire à Prozor et au fait que ces activités étaient hors du contrôle de

 28   Coric et de l'administration de la police militaire.


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  1   Je poursuis, Monsieur le Président, à un moment, le bureau du Procureur a

  2   déclaré que M. Boban avait délivré un ordre à M. Coric afin de gérer la

  3   situation dans les prisons. L'Accusation a fait référence à une note

  4   manuscrite. Il n'y a aucune confirmation que M. Coric l'a reçu ni même

  5   qu'il n'ait jamais agi en fonction de cet ordre. Nous aimerions également

  6   attirer votre attention sur les paragraphes de notre mémoire en appel

  7   suivants, 141, 140, et aux documents, aux pièces P5104, P5188, 3D915,

  8   P5199, 1D1704, et P7096. Ces différents documents montrent clairement à qui

  9   M. Boban a envoyé l'ordre et qui était l'exécuteur de cet ordre, et ce

 10   n'était pas M. Coric.

 11   S'agissant des travaux forcés, travaux forcés des prisonniers, l'Accusation

 12   a fait référence deux fois aujourd'hui au document portant la cote P4039,

 13   et a affirmé qu'il était dit, pardon, dans le document que le travail forcé

 14   des prisonniers avait été approuvé et devait être obtenu de

 15   l'administration de la police militaire. Messieurs les Juges, lors du

 16   procès nous avons pu voir des milliers et des milliers de documents émanant

 17   de personnes qui avaient été emmenées effectuer des travaux forcés. Et

 18   pourtant, dans aucun de ces milliers de documents, nous n'avons vu le nom

 19   de M. Coric ni lien que l'on puisse lui imputer, ni entre lui et

 20   l'administration de la police.

 21   Monsieur le Président, j'aimerais que nous passions à huis clos, si

 22   cela est possible ?

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Passons à huis clos

 24   partiel, s'il vous plaît.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 18   [Audience publique]

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes en audience publique,

 20   Maître.

 21   Mme TOMASEGOVIC-TOMIC : [interprétation] Les documents auxquels

 22   l'Accusation a fait référence sont P20235, P04424, et P02546. Il s'agit des

 23   documents qui avaient été évoqués par l'Accusation et qui portent sur ce

 24   que j'ai abordé à huis clos partiel.

 25   Tout à l'heure je vous ai parlé de Prozor, et j'aimerais ajouter quelque

 26   chose. Dans ce même prétoire le Témoin Zdenko Andabak est venu déposer, il

 27   était un témoin à décharge, et l'Accusation a estimé qu'il n'était pas

 28   crédible. Il cite l'exemple d'une promotion. Certes, M. Andabak a été promu


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  1   mais il n'a pas terminé sa carrière au sein du HVO; il a terminé sa

  2   carrière dans l'ABiH. Et il serait difficile de croire que M. Andabak

  3   serait devenu un colonel de l'ABiH si on l'avait soupçonné d'une façon ou

  4   d'une autre ou si sa hiérarchie avait pensé qu'il n'allait pas faire

  5   l'affaire à ce poste-là.

  6   L'Accusation a également mentionné que la police militaire ne s'occupait

  7   que de petits délits à Mostar, qu'elle s'occupait de non-paiements d'impôt

  8   ou d'autres questions mineures, mais ce n'est pas vrai. Dans nos registres

  9   nous disposons de 264 rapports au pénal qui ont été déposés dans des

 10   affaires impliquant des Musulmans comme étant la partie lésée.

 11   En outre, d'après le document 5D043 -- 4236, nous constatons qu'un rapport

 12   au pénal a été déposé contre un membre du HVO pour meurtre de deux

 13   personnes, dont un Musulman; ensuite un rapport au pénal qui a été déposé

 14   contre un certain nombre de membres du HVO également pour des meurtres de

 15   Musulmans; et encore -- un instant, s'il vous plaît. Le rapport au pénal

 16   suivant, eh bien, je vais en énumérer d'autres, eh bien, je vais énumérer

 17   d'autres documents : le 5D2095, le 5D2097, le P6727, 5D4169, 5D4168,

 18   5D4154, 5D4165, 5D4231, P3571, P3483, P3523, P3508, P3513, P3482, P3497,

 19   5D4183, 5D4240, 5D4242, 5D4243, 5D4248, 5D4249, 5D4255, 5D4212, 5D4194,

 20   P9465, 5D4199, P3118, 5D4207, P4139, 5D4201, 5D4203, 5D4200.

 21   Messieurs les Juges, nous avons également entendu un témoin à décharge qui

 22   était membre du département de la police criminelle chargée des enquêtes du

 23   HVO. Sa déposition porte précisément sur le dépôt de rapports ou de

 24   plaintes au pénal contre différents membres du HVO concernant différents

 25   crimes commis contre les Musulmans. Un peu plus tôt aujourd'hui,

 26   l'Accusation a invoqué un rapport qui contient une phrase que se lit comme

 27   suit : Que pour l'instant, des crimes commis par l'unité antiterroriste de

 28   Vinko Skrobo ainsi que d'autres unités devrait être enregistrés de sorte à


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  1   ce qu'ils croupissent au fond d'un tiroir pendant longtemps et qu'on les

  2   oublie. Ceci n'est pas exact, Messieurs les Juges. Ceci a été consigné aux

  3   fins de préparer une opération importante qui ne pouvait pas se dérouler

  4   parce que la police militaire et civile était engagée sur le front plutôt

  5   que de faire leur travail normal ou quotidien. Ceci impliquait des groupes

  6   très armés et pour arrêter ces personnes et les poursuivre, il fallait un

  7   plan de taille, pour que cela soit couronné de succès. Ceci a donné lieu,

  8   en fait, à l'opération Pauk, qui signifie "araignée", et les défenseurs ont

  9   été arrêtés et poursuivis. Le Témoin Vidovic en a parlé aux pages 41477 à

 10   51481, 51495 à 51499, 51500 à 51503. Le Témoin Bandic en a parlé également

 11   aux pages 38214, 382116, 38212 à -214, -216, 38213, et le document 3D422.

 12   A plusieurs reprises lors des arguments présentés par l'Accusation, le

 13   Procureur a dit que la Défense n'avait pas couvert tel et tel domaine ou

 14   n'avait pas prêté attention à tel et tel sujet. Messieurs les Juges, la

 15   Défense a fait tout ce qui était en son pouvoir compte tenu du temps qui

 16   lui a été imparti. Nous avons toujours été très clairs et notre position

 17   reste inchangée par rapport au premier jour de ce procès. Et nous

 18   maintenons tout ce que nous avons dit jusqu'à présent pendant tout le

 19   procès et dans nos mémoires en appel ainsi que nos mémoires en réponse,

 20   notamment les présentations de mes confrères et consœurs devant la Chambre

 21   dans le prétoire aujourd'hui.

 22   Je souhaite réitérer que nous continuons d'affirmer que les erreurs

 23   commises lors du procès sont d'une importance telle qu'on ne peut les

 24   ignorer, que le jugement ne peut être retenu en l'état et que M. Coric doit

 25   être acquitté.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître, c'est ce qui nous ramène à la

 27   fin de la journée d'audience d'aujourd'hui.

 28   M. IVETIC : [interprétation] J'ai deux corrections à apporter au compte


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  1   rendu d'audience qui ont été portées à mon attention.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous en prie.

  3   M. IVETIC : [interprétation] A la page 15, ligne 19 du compte rendu

  4   d'audience provisoire, la pièce P1939 devrait correspondre à la pièce 1393.

  5   Ma langue a fourché. Et un de mes confrères a indiqué à la page du compte

  6   rendu d'audience page 88, ligne 16, on devrait lire "les Musulmans" au lieu

  7   de "mémoires". Je pense que ceci aurait été corrigé je suis sûr à un moment

  8   donné, mais je souhaitais apporter ceci à votre attention pour que cela

  9   soit corrigé au compte rendu d'audience.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Maître Ivetic.

 11   L'audience est levée, nous reprendrons lundi matin à 9 heures 30. C'est

 12   l'équipe de Défense de M. Pusic qui prendra la parole.

 13   Je vous remercie.

 14   --- L'audience est levée à 15 heures 28 et reprendra le lundi, 27 mars

 15   2017, à 9 heures 30.

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