Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 3502

  1   Le mercredi 13 février 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 8 heures 30.

  5   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci et bonjour, Monsieur, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-03-67-T, le Procureur contre

 10   Vojislav Seselj.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je salue, ce mercredi

 12   13 février 2008, M. le Témoin, les représentants de l'Accusation, M.

 13   Seselj, ainsi que toutes les personnes qui nous aident dans notre tâche.

 14   Nous allons donc poursuivre le contre-interrogatoire de M. Seselj --

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'entends aucune interprétation. Depuis que

 16   vous avez commencé à parler, rien ne m'a été interprété.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : [inaudible]

 18   Voilà, ça marche.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Désormais, je l'entends.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, j'indiquais que nous allons donc, après avoir

 21   salué tout le monde, poursuivre le contre-interrogatoire, et j'ai indiqué

 22   hier qu'il restait à M. Seselj trois heures et huit minutes, si je ne fais

 23   pas d'erreur.

 24   Monsieur Seselj, vous avez la parole.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, pour commencer, une

 26   information brève que je dois vous donner. J'ai eu un entretien avec Boris

 27   Petrov du greffe hier, parlant du financement de ma Défense; en quelques

 28   mots, il m'a fait savoir que le greffe n'avait pas l'intention de prendre


Page 3503

  1   en charge la totalité de ma Défense, mais à partir de maintenant il m'a dit

  2   explicitement qu'ils n'avaient pas l'intention de financer tout ce qui

  3   concerne la phase préalable au procès. Il m'a dit également que c'est de

  4   cette manière-là qu'ils interprétaient votre décision. Je me suis senti le

  5   devoir de vous le dire.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Alors sur ce point, je rappelle pour mes

  7   collègues qui le savent et qui ne le savent pas, c'est que vous aviez il y

  8   a très longtemps, alors que cette affaire avait été confiée à la Chambre II

  9   dont j'étais membre, vous aviez à l'époque formé une requête demandant

 10   qu'on vous rembourse toutes les sommes que vous auriez dépensées dans la

 11   préparation de votre défense. De mémoire, ça faisait quelques millions

 12   d'euros, mais je n'ai plus les chiffres en tête. A l'époque la Chambre II

 13   devait rendre une décision sur cette question. Personnellement, mais je

 14   vous l'ai dit lors d'une audience de mise en état, j'avais préparé une

 15   opinion personnelle sur cette question, mais cette opinion personnelle je

 16   n'ai pas pu la faire enregistrer parce qu'entre-temps l'affaire avait été

 17   transférée de la Chambre II à la Chambre III ou I, je ne me rappelle plus.

 18   Il y avait eu un transfert et de ce fait la Chambre II n'avait pas répondu

 19   à votre demande.

 20   Dans la décision de cette Chambre sur votre défense, la décision n'avait

 21   pas abordé cette question. Si maintenant vous souhaitez qu'il y ait un

 22   effet rétroactif à notre décision, encore faudrait-il que vous formiez une

 23   requête en demandant au greffe de vous rembourser des frais qui avaient été

 24   engagés préalablement à cette décision et la Chambre statuera en ayant bien

 25   entendu à ce moment-là la réponse du Greffe. Donc c'est tout ce que je peux

 26   vous dire sur cette question qui concerne un effet rétroactif de notre

 27   décision. Voilà.

 28   Alors nous allons donc maintenant passer au contre-interrogatoire.


Page 3504

  1   LE TÉMOIN : TÉMOIN VS-004 [Reprise]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   Contre-interrogatoire par M. Seselj : [Suite]

  4   Q.  [interprétation] Monsieur VS-004, vous avez donné, jusqu'à présent,

  5   deux déclarations aux Procureurs de La Haye ou plusieurs ?

  6   R.  Deux.

  7   Q.  Il y en a une le 1er, le 2, le 3 et le 4 mai 2002 et la deuxième le

  8   1er, le 2, le 14 août 2006; c'est bien cela ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  En 2006, en fait, ce qui s'est passé c'est qu'ils vous ont informé du

 11   fait que votre déclaration initiale pouvait être utilisée dans le procès

 12   contre moi; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  A ce moment-là vous avez déclaré que vous n'étiez pas prêt à venir

 15   déposer en tant que témoin dans un procès contre moi; c'est bien cela ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous l'avez déclaré parce que vous estimiez à l'époque que je

 18   constituais un danger pour vous personnellement ?

 19   R.  Non, pas vous personnellement.

 20   Q.  Eventuellement de membres du Parti radical serbe dont je suis président

 21   ou de l'un de mes proches collaborateurs ?

 22   R.  Je ne peux pas nommer précisément la personne ou la source de danger ou

 23   de mauvais traitements éventuels, je voulais tout simplement protéger ma

 24   famille de tout incident ou de toute attaque que ce soit des sympathisants

 25   de vos idées ou autres, mais s'agissant de vous, je ne vous ai pas nommé en

 26   tant que source éventuelle de mes problèmes.

 27   Q.  Dans cette nouvelle déclaration, vous avez parlé de nouveau de mon

 28   arrivée en Slavonie occidentale, et par deux fois vous êtes venu à La Haye


Page 3505

  1   depuis le début de l'année pour déposer; c'est bien cela ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  La première fois vous n'avez pas pu déposer parce qu'il y avait des

  4   dépositions qui se sont prolongées, puis maintenant vous avez réussi à

  5   commencer votre déposition; c'était finalement votre tour ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Le Procureur à ce moment-là a organisé des séances de récolement avec

  8   vous ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Ces récolements, ils ont duré combien de temps ?

 11   R.  Je pense que ça a duré une journée.

 12   Q.  Une journée à votre première arrivée, puis une journée la deuxième fois

 13   ou en tout ça a pris une journée ?

 14   R.  En tout ça a pris une journée.

 15   Q.  Est-ce que vous pourriez nous donner le nombre d'heures ?

 16   R.  Il se peut que ce soit je pense cinq ou six heures.

 17   Q.  Quel a été l'objectif de ces entretiens qui ont pris cinq ou six heures

 18   ?

 19   R.  C'était pour que je me rappelle la déclaration que j'avais donnée, que

 20   j'examine de nouveau certains documents relatifs à cette affaire, documents

 21   qui sont présentés ici, et nous avons parcouru une partie des événements

 22   qui font l'objet de ma déclaration.

 23   Q.  Le représentant du Procureur, est-ce qu'il vous a parlé des questions

 24   que j'allais éventuellement vous poser pendant le contre-interrogatoire ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Vous dites ici que je suis arrivé en Slavonie occidentale fin octobre

 27   ou début novembre 1991; c'est bien ça ?

 28   R.  C'est exact.


Page 3506

  1   Q.  Est-ce que je pourrais vous rafraîchir la mémoire, c'est le 18 novembre

  2   que je suis arrivé à Banja Luka par hélicoptère de la JNA ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Savez-vous qu'est arrivé Ilija Sasic, votre ministre des Affaires

  5   étrangères, avec moi de Belgrade à bord de cet hélicoptère ?

  6   R.  Ilija Sasic est arrivé avec vous mais il n'était pas ministre des

  7   Affaires étrangères.

  8   Q.  Mais il était membre du gouvernement. Quel était sont poste au

  9   gouvernement, quelle fonction ?

 10   R.  Ce gouvernement n'a pas fonctionné, ce n'était pas vraiment un

 11   gouvernement, M. Ilija Sasic c'était un atome libre ou plutôt c'était

 12   quelqu'un qui bénéficiait de la confiance de Veljko Vukelic.

 13   Q.  Mais le simple fait que j'étais arrivé à bord de l'hélicoptère de la

 14   JNA illustre bien le fait que je n'étais pas arrivé à titre privé ?

 15   R.  Oui, c'est comme ça qu'on peut l'interpréter, mais je ne sais pas qui

 16   l'a organisé.

 17   Q.  Deux officiers de la JNA sont arrivés avec moi, des pilotes de

 18   l'hélicoptère.

 19   R.  Si c'est comme ça que les choses se sont passées, je suppose que c'est

 20   ainsi.

 21   Q.  Le jour où je suis arrivé, j'ai fait un discours dans le grand hall de

 22   Borik, à Banja Luka. Vous vous en souvenez ?

 23   R.  Je m'en souviens.

 24   Q.  Vous êtes venu assister à ce rassemblement ?

 25   R.  Oui, je suis venu là-bas.

 26   Q.  Donc vous vouliez savoir ce que j'allais dire. Ça devait avoir une

 27   signification pour vous si vous êtes arrivé de Pakrac à Banja Luka pour

 28   assister au rassemblement ?


Page 3507

  1   R.  Il s'est trouvé que j'étais à Banja Luka, j'étais sur place, j'ai

  2   entendu parler de ce rassemblement, donc je suis venu.

  3   Q.  Vous pourriez vous rappeler certaines positions dont j'ai fait part

  4   pendant ce discours ?

  5   R.  Croyez-moi je ne me rappelle pas ce qui a été dit pendant le

  6   rassemblement.

  7   Q.  Il est difficile de se rappeler après tant d'années si personne ne vous

  8   rafraîchit la mémoire ni le Procureur ni moi-même, je suis parfaitement

  9   conscient du fait qu'il faut vous aider à vous rappeler des choses, des

 10   détails. Mais n'est-il pas vrai que je me suis consacré à chercher à éviter

 11   la guerre civile en Bosnie-Herzégovine pendant ce discours ?

 12   R.  Oui, je m'en souviens.

 13   Q.  N'ai-je pas dit que le seul moyen de préserver la paix en  Bosnie-

 14   Herzégovine était que la Bosnie-Herzégovine reste partie intégrante de la

 15   Yougoslavie ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous souvenez-vous du fait que j'ai dit que c'était le seul moyen

 18   également pour les Serbes, les Croates et les Musulmans de Bosnie-

 19   Herzégovine pour éviter ce qui était en train de se produire en Croatie ?

 20   R.  Je pense que vous avez dit quelque chose qui allait dans ce sens.

 21   Q.  Même si j'avais été belliqueux là où il y avait des opérations de

 22   guerre, même si je souhaitais la victoire là-bas, là où il n'y avait pas de

 23   guerre, je souhaitais la paix, n'est-ce pas ? N'était-ce pas la conclusion

 24   de mon discours ?

 25   R.  Oui, je pense que c'est ainsi qu'on peut le qualifier.

 26   Q.  Je suis arrivé à bord d'un hélicoptère de la JNA avec Ilija Sasic, donc

 27   je suis arrivé tout seul; je n'avais pas d'escorte, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est ça.


Page 3508

  1   Q.  En d'autres termes, je ne pouvais même pas avoir d'escorte quand je

  2   suis arrivé en Slavonie occidentale, or, dans votre déclaration, ils disent

  3   que j'avais une escorte de sept ou huit personnes. Mais seuls des habitants

  4   de Slavonie occidentale pouvaient m'accompagner puisque ce sont eux qui

  5   m'ont accueilli sur place.

  6   R.  Vous n'étiez pas seul, je n'ai pas dit que vous aviez une escorte

  7   composée d'officiers ou je ne sais pas.

  8   Q.  Mais si je me déplaçais seul, je suppose que je me serais perdu, égaré,

  9   parce que c'était la première fois de ma vie que j'étais venu en Slavonie

 10   occidentale, n'ai-je pas raison ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Puis en plus il fallait que quelqu'un me transporte, je ne pouvais pas

 13   me déplacer à pied.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Puis de Banja Luka, c'est M. Cavic qui est venu en ma compagnie le

 16   premier jour. Vous le connaissiez ?

 17   R.  Juste de nom. Je n'arrive pas à me rappeler la personne.

 18   Q.  Je vais vous rafraîchir la mémoire. Il était fondateur du Parti radical

 19   serbe de Banja Luka. C'est lui qui a organisé le rassemblement du hall de

 20   Borik.

 21   R.  Oui, maintenant je me souviens. Je me souviens de cet homme.

 22   Q.  C'est lui qui m'a conduit en Slavonie occidentale, il m'a ramené le

 23   même jour.

 24   R.  Ça je ne le sais pas. Je ne m'en souviens pas.

 25   Q.  Dans votre déclaration, vous dites à plusieurs endroits que Veljko

 26   Vukelic était le commandant de la Défense territoriale de Slavonie

 27   occidentale; c'est bien ça ?

 28   R.  Oui.


Page 3509

  1   Q.  Mais le Procureur lui-même vous met en garde et vous dit que le

  2   commandant de la Défense territoriale était le colonel Trbojevic et non pas

  3   Veljko Vukelic; c'est bien cela ?

  4   R.  Oui, on m'en a averti, mais au début du mois d'août et même avant, je

  5   ne sais pas exactement à partir de quelle date, puis jusqu'à la fin du mois

  6   d'octobre ou début novembre, M. Vukelic était le commandant de la Slavonie

  7   occidentale, puis il s'est retiré. Il doit savoir pour quelle raison, et M.

  8   Jovan Trbojevic est venu occuper ce poste. Quand il est arrivé de Belgrade,

  9   il a dit qu'il était envoyé par les plus hautes instances de la JNA.   

 10   Q.  Je vais vous rappeler un fait. Jovan Trbojevic était arrivé en Slavonie

 11   occidentale un peu avant la date de la fin octobre que vous citez; ai-je

 12   raison ?

 13   R.  Je ne me souviens pas la date exacte de l'arrivée de M. Trbojevic, ce

 14   que je sais c'est que le 15 octobre, quand il y a eu le premier exode de

 15   Grubisno Polje, que Veljko Vukelic était toujours le commandant à ce

 16   moment-là et ça a duré quelques semaines de plus.

 17   Q.  Vous venez de dire le 15 août, n'est-ce pas ?

 18   R.  Non, je dis le 15 octobre.

 19   Q.  Le 15 octobre.

 20   R.  C'est là qu'il y a eu le premier exode de Grubisno Polje, et à l'époque

 21   c'est Veljko Vukelic qui était encore le commandant.

 22   Q.  Savez-vous que conformément à la loi les forces armées de la RSFY

 23   constituaient une entité unique ?

 24   R.  Oui, je le sais.

 25   Q.  Et que la JNA et la Défense territoriale avaient un QG, un état-major

 26   unique des forces armées à Belgrade ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Donc le fait que la JNA ait envoyé le colonel Trbojevic pour qu'il soit


Page 3510

  1   commandant de la Défense territoriale, c'est une preuve par excellence qui

  2   nous montre que la Défense territoriale faisait partie de la JNA, n'est-ce

  3   pas ?

  4   R.  Oui, par la suite je l'ai compris quand la JNA est arrivée dans le

  5   secteur d'Okucani. Quels ont été leurs contacts, leurs communications,

  6   jusqu'à ce moment-là, je ne le sais pas.

  7   Q.  Jusqu'à ce que la JNA ne prenne en charge la Défense territoriale

  8   c'étaient des formes spontanées d'auto-organisation de la population serbe

  9   de Slavonie occidentale; n'ai-je pas raison ?

 10   R.  Ils étaient organisés par l'entremise de la Défense territoriale, je

 11   l'ai déjà mentionné, c'était le secrétariat à la Défense nationale. Je ne

 12   sais pas comment ils se sont organisés, qui les a organisés.

 13   Q.  Savez-vous que des volontaires du Parti radical serbe ne passaient que

 14   par la JNA pour se rendre en Slavonie occidentale ?

 15   R.  Dans les médias, j'ai appris que vous aviez dit que c'était en agissant

 16   de concert avec la JNA, mais je ne sais pas concrètement comment c'était

 17   organisé, ni qui passait des accords, qui organisait cela et de quelle

 18   manière.

 19   Q.  Mais vous vous souviendrez du fait qu'à l'époque la Bosnie-Herzégovine

 20   n'était pas encore en guerre, mais que les forces de police et la Défense

 21   territoriale étaient déjà renforcées, qu'on commençait à voir apparaître

 22   des unités paramilitaires à différents endroits ?

 23   R.  Oui, c'est ce que j'ai appris par les médias.

 24   Q.  Les volontaires du Parti radical serbe comment auraient-ils pu passer

 25   par la Posavina si ça n'avait pas été dans une colonne de la JNA ?

 26   R.  Je suppose qu'il fallait qu'il y ait une escorte.

 27   Q.  Dans la Posavina, il y avait pas mal de Musulmans et de Croates. Il y a

 28   des municipalités où la majorité était croate ou d'autres où c'était une


Page 3511

  1   majorité musulmane ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Si ça n'avait pas été organisé par la JNA, nos volontaires, ils

  4   auraient été obligés de livrer combat pour passer par là, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne sais pas dans quelles circonstances cela se serait passé. La

  6   seule chose que je puisse dire c'est que la JNA c'était en fait le Corps de

  7   Banja Luka à l'époque en Slavonie occidentale et qu'il y avait là parmi les

  8   militaires des Croates et des Musulmans.

  9   Q.  Savez-vous que parmi les volontaires du Parti radical serbe il y avait

 10   des musulmans et des catholiques ?

 11   R.  J'ai entendu cela.

 12   Q.  Radovan Novacic, vous avez entendu ce nom ?

 13   R.  Oui, je l'ai entendu. 

 14   Q.  Il était commandant des volontaires du Parti radical serbe en Slavonie

 15   occidentale; c'est bien cela ?

 16   R.  Oui, il me semble avoir entendu cela.

 17   Q.  Vous savez que son père est Croate et que sa mère est Serbe ?

 18   R.  Ça, je ne le sais pas.

 19   Q.  S'il est exact ce je suis en train d'affirmer, est-ce que cela ne

 20   signifie pas que nous avons envoyé cet homme, non pas en souhaitant que des

 21   crimes soient commis contre la population croate mais tout à l'opposé,

 22   qu'on agisse contre l'ennemi en protégeant l'ensemble de la population

 23   civile ?

 24   R.  C'est ainsi que cela normalement aurait dû se passer si c'est un homme

 25   qui vient d'une famille mixte, il devrait tenir compte normalement des

 26   ressortissants de toutes les religions.

 27   Q.  Il n'avait aucune raison de haïr des musulmans ou des catholiques, mais

 28   il était hostile à ceux qui voulaient briser la Yougoslavie, n'est-ce pas ?


Page 3512

  1   R.  Concrètement, je ne sais pas ce qu'il pensait ou ce qu'il voulait. La

  2   conclusion que vous venez de citer est tout à fait permise.

  3   Q.  Les volontaires du Parti radical serbe recevaient régulièrement leur

  4   solde de la part de la JNA; le savez-vous ?

  5   R.  Ça, je ne le sais pas, on racontait cela.

  6   Q.  Vous savez que des membres de la Défense territoriale de la Slavonie

  7   occidentale étaient payés par la JNA ?

  8   R.  Oui, ça oui.

  9   Q.  C'étaient des soldes qui n'étaient pas très importantes, mais c'était

 10   quand même mieux que rien, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, à l'époque c'était important pour les gens parce qu'ils n'avaient

 12   pas d'autres ressources.

 13   Q.  La Slavonie occidentale, sur le plan territorial, dépendait du Corps

 14   d'armée de la Banja Luka; c'est bien cela, de la JNA ?

 15   R.  Oui. Le Corps de Banja Luka, au bout de 30 ou 60 jours depuis le début

 16   de la guerre, est passé en Slavonie occidentale et il s'est chargé à partir

 17   de ce moment-là de la Défense territoriale.

 18   Q.  Sur le plan territorial, savez-vous comment était organisé la JNA avant

 19   la guerre ?

 20   R.  Non. Ce n'était pas quelque chose que je connaissais particulièrement.

 21   Q.  Vous avez fait votre service militaire ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous savez qu'à un moment donné il y a eu des régions militaires de la

 24   JNA, de Zagreb, Sarajevo, Belgrade ?

 25   R.  Ça, je le sais.

 26   Q.  Vers la fin des années '80, ça a été changé, il y avait trois

 27   groupements stratégiques à partir de ce moment-là.

 28   R.  Oui, ça aussi je m'en souviens.


Page 3513

  1   Q.  Est-ce que vous savez que du temps où il y avait une région militaire

  2   de Sarajevo avec son siège à Sarajevo, donc en Bosnie-Herzégovine, que

  3   cette région englobait pratiquement toute la Slavonie également ?

  4   R.  Ça je ne m'en souviens pas.

  5   Q.  D'accord. Est-ce que vous savez que tout volontaire du Parti radical

  6   serbe se voyait reconnaître ses années de guerre suite à son engagement en

  7   Slavonie occidentale ?

  8   R.  J'arrive à cette conclusion parce que je sais que des membres de la

  9   Défense territoriale ont demandé également que ça leur soit reconnu, le

 10   statut de vétéran.

 11   Q.  Il y avait soit la période de combat sur la période de travail.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Parce que reconnaître les années de combat c'était quelque chose qui

 14   était inscrit dans le livret militaire et les années de travail dans le

 15   livret de travail ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous savez que tous les blessés parmi les volontaires du

 18   Parti radical serbe ont immédiatement eu de reconnus tous les droits des

 19   invalides de guerre ?

 20   R.  Concrètement je ne sais pas ça, mais je sais que dans la Défense

 21   territoriale parmi les blessés ou les invalides il y en a qui ont pu

 22   bénéficier de leurs droits, donc je suppose que les volontaires du Parti

 23   radical serbe se sont trouvés dans le même cas.

 24   Q.  Donc ceux qui avaient fait partie de la Défense territoriale étaient

 25   sur un pied d'égalité avec les militaires de la JNA pour ce qui est de leur

 26   droit ?

 27   R.  Je pense que oui.

 28   Q.  Est-ce que vous savez lorsqu'il y avait un volontaire du Parti radical


Page 3514

  1   serbe qui se faisait tuer en Slavonie occidentale que c'est la JNA qui

  2   transportait son corps en Serbie dans sa localité natale et que c'est la

  3   fanfare militaire qui était engagée comme si ça avait été un militaire

  4   d'active qui était tombé ?

  5   R.  Je ne sais pas ça exactement, mais lorsque des membres de la Défense

  6   territoriale étaient morts c'est comme ça que ça se passait. Je suis allé

  7   une ou deux fois à l'enterrement des membres de la Défense territoriale

  8   près d'Okucani, je sais que c'était avec les honneurs militaires qu'ils ont

  9   été enterrés.

 10   Q.  Parmi les Serbes, en plus des Croates, lorsque des hommes à Seselj sont

 11   arrivés, certains Serbes se sont mis à quitter cette région parce qu'ils

 12   avaient peur de mes hommes, c'est ce que vous avez dit. Est-ce que vous

 13   pouvez nous citer le nom d'un Serbe qui avait peur des volontaires du Parti

 14   radical serbe et c'est ce qu'il l'a incité à quitter la Slavonie

 15   occidentale ?

 16   R.  J'ai entendu parler de cela. Quant au nom c'est Luka Krajinovic, qui

 17   malheureusement est décédé, qui m'a dit cela. Vous m'avez posé la question,

 18   je vous dis concrètement, lui, il m'a dit qu'il avait peur, qu'il avait eu

 19   une rencontre. Je ne sais pas de quelle nature, voilà c'est ce que j'ai

 20   entendu.

 21   Q.  Vous étiez un haut placé dans les autorités civiles de Slavonie

 22   occidentale, vous ne faisiez aucune distinction sur le terrain entre les

 23   volontaires du Parti radical serbe et les autres volontaires, n'est-ce pas

 24   ?

 25   R.  A l'époque je n'étais pas très haut placé, tout ça ça fonctionnait en

 26   passant par des QG de la Défense territoriale, mais les gens me

 27   respectaient dans la région parce qu'ils me connaissaient. Pour moi, les

 28   volontaires étaient pratiquement tous les mêmes. Je ne savais pas qui était


Page 3515

  1   originaire d'où. Ils ne venaient pas se livrer à moi et je ne vérifiais

  2   rien. Pour moi, ils étaient tous pratiquement pareils.

  3   Q.  Si vous, vous ne repériez aucune distinction, alors, comment est-ce que

  4   le commun des mortels pouvait faire cette distinction ? Ç'aurait été encore

  5   plus difficile pour quelqu'un d'autre, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, je suis d'accord avec vous, je pense que l'homme de la rue pouvait

  7   difficilement distinguer les uns des autres, il ne pouvait savoir qui est

  8   qui.

  9   Q.  Les Procureurs vous ont interrogé sur le général Dusan Pekic. Vous

 10   savez qui c'est, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, il est originaire de la Banija.

 12   Q.  C'est un héro de la Deuxième Guerre mondiale, un général de la JNA et

 13   il avait été à la tête de l'association des vétérans de la guerre de

 14   libération.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Savez-vous qu'il avait été l'un des employés de l'association des

 17   fonctionnaires de l'Association des Serbes de Croatie avec le QG à Belgrade

 18   ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous savez que le Parti radical serbe avait coopéré avec

 21   cette association dès le début ?

 22   R.  J'ai entendu dire cela.

 23   Q.  Puisque vous viviez en Slavonie occidentale, est-ce que vous voyez une

 24   différence essentielle entre l'activité des volontaires du Parti radical

 25   serbe depuis le printemps 1991 jusqu'en septembre 1991, puis à partir de

 26   septembre 1991, lorsque la JNA a pris part aux opérations de combat et

 27   pendant la période qui a suivi ? Est-ce que vous pouvez faire une

 28   différence entre les deux ?


Page 3516

  1   R.  Vous venez de me préciser cela dans le temps, vous précisez des

  2   périodes différentes, mais c'est des périodes assez brèves, donc je ne

  3   pense pas que je pourrais différencier ces périodes-là. C'était une

  4   situation chaotique. Beaucoup de choses se produisaient en peu de temps.

  5   Donc ces nuances que vous citez maintenant, vraiment je ne pourrais pas les

  6   faire maintenant.

  7   Q.  Est-ce que vous savez que dès le mois de mars, en fait fin février

  8   début mars 1991, une délégation de Serbes de Slavonie orientale et de Srem

  9   est venue me voir à Belgrade me demandant que le Parti radical serbe envoie

 10   des volontaires qui prendraient part à la défense des villages serbes qui

 11   étaient menacés dans cette région ?

 12   R.  J'ai vu quelque chose allant dans ce sens dans les médias.

 13   Q.  Est-ce que vous savez que le 9 mars je suis venu dans sept villages

 14   serbes de Slavonie orientale qui se sentaient les plus menacés ?

 15   R.  Je ne me souviens pas de cela puisque le 9 mars j'étais à Pakrac et

 16   j'ai eu des négociations très difficiles avec des représentants des

 17   autorités croates, donc je n'étais pas en mesure de suivre le reste de

 18   l'actualité.

 19   Q.  Avez-vous entendu dire que tout de suite après nous avons commencé à

 20   envoyer des volontaires dans les villages de la Slavonie orientale et dans

 21   le Srem occidental ?

 22   R.  J'en ai entendu parler, mais je ne sais pas à quel moment.

 23   Q.  S'agissant de mes déclarations disant que je commandais ces volontaires

 24   pouvez-vous le rattacher à la période où la JNA n'a pas participé au

 25   conflit armé direct ?

 26   R.  Je pense que vous avez fait ce type de déclarations à l'époque, il n'y

 27   avait pas eu de JNA en ce moment-là.

 28   Q.  Avez-vous entendu dire que j'avais déclaré être commandant lorsque la


Page 3517

  1   JNA a pris part au conflit armé et lorsque les volontaires ont agi dans le

  2   cadre de la JNA ?

  3   R.  Je ne m'en souviens pas. Je n'en ai pas entendu parler.

  4   Q.  Vous n'avez pas entendu dire dans le public que je me présentais comme

  5   étant leur commandant ?

  6   R.  Non, je n'ai pas entendu dire cela.

  7   Q.  Saviez-vous qu'au début septembre l'état-major des forces armées de

  8   Yougoslavie a promulgué un décret concernant le déploiement des volontaires

  9   au sein des unités de la JNA ?

 10   R.  Je ne le sais pas.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : On vient de vous poser toute une série de questions

 12   qui pour moi ont beaucoup d'importance. Pour approfondir vos réponses.

 13   Vous-même, est-ce que dans le temps vous aviez fait votre service militaire

 14   dans la JNA ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Et votre service militaire a duré combien de temps ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça durer un an, moi j'ai fait un peu moins,

 18   parce que j'ai eu des journées de récupération, de permission, et cetera.  

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre expérience brève, enfin d'une année, au

 20   sein de la JNA, serait-il possible que dans la JNA il y aurait une double

 21   chaîne de commandement, une chaîne de commandement militaire et une chaîne

 22   de commandement politique, à partir d'un parti politique qui serait à

 23   l'extérieur de la chaîne de commandement militaire ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il y avait eu un commandement

 25   militaire. Je n'ai pas très bien compris la question dans la partie où vous

 26   évoquez un parti politique. Il y avait un parti à l'époque.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais préciser ma question. Lorsqu'on était

 28   militaire de la JNA, est-ce qu'on devait obéir aux ordres de l'autorité


Page 3518

  1   militaire ou aux ordres d'un parti politique auquel on pourrait apparaître

  2   -- appartenir ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Chaque soldat est tenu de se conformer aux

  4   ordres de son supérieur hiérarchique immédiat, et on suit la verticale vers

  5   le haut, donc il faut obéir au commandement militaire.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Lorsque vous-même vous étiez soldat de la JNA, à

  7   l'époque est-ce que vous apparteniez à un parti politique ou pas ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque j'étais membre de la Ligue des

  9   Communistes comme bon nombre d'autres personnes. C'était un seul parti

 10   politique à l'époque.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : A l'époque vous étiez membre de la Ligue des

 12   Communistes, est-ce que dans votre activité militaire et dans celle de vos

 13   camarades, les officiers de la JNA, ils étaient en permanence connectés

 14   avec la Ligue des Communistes pour savoir quel devait être leur

 15   comportement ou bien vous n'étiez connecté qu'avec la hiérarchie militaire

 16   ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai eu affaire qu'à la hiérarchie

 18   militaire.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Continuez votre contre-interrogatoire.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, c'est précisément la

 21   raison pour laquelle j'insiste sur une différence importante entre ces

 22   périodes, la période où la JNA n'avait pas participé au combat et à la

 23   période où elle a rejoint les activités de combat, et c'est pour cela que

 24   j'insiste sur ces faits-là pour que vous compreniez bien vous et vos

 25   collègues.

 26   M. SESELJ : [interprétation]

 27   Q.  On a parlé ici d'armement des unités serbes de la Défense territoriale

 28   en Slavonie et dans d'autres régions serbes, et on vous a demandé si le


Page 3519

  1   général Dusan Pekic avait participé à l'armement de la population de la

  2   Slavonie occidentale, et vous avez dit que vous n'aviez pas d'information,

  3   mais les médias vous ont fait savoir qu'il y a pris part ?

  4   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit.

  5   Q.  Se pourrait-il qu'en raison d'une mauvaise interprétation vous ayez

  6   donné une réponse erronée qui ne correspondrait pas à l'état de fait, ou

  7   est-ce que c'est parce que vous étiez sous l'influence des médias que vous

  8   l'avez dit. 

  9   R.  J'ai répondu à cette question, au tout début lorsqu'il a été question

 10   d'armement, je ne sais pas qui est-ce qui l'a fait, dans quelle

 11   organisation, mais pour l'armement au tout début en Slavonie occidentale,

 12   c'est ce que j'ai appris par la suite, à savoir qu'il y a eu participation

 13   de M. Pekic. Mais je n'étais pas présent à des réunions où il aurait

 14   négocié ou pris des obligations à cet effet.

 15   Q.  Le Procureur vous a probablement montré un extrait de l'émission de la

 16   BBC sur "La mort de la Yougoslavie" où je m'attaquais à Radmilo Bogdanovic,

 17   l'ex-ministre de la police de Serbie, en disant que c'était lui qui avait

 18   donné des armes aux volontaires. Vous en souvenez-vous ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous souvenez-vous de cet enregistrement ?

 21   R.  Oui, je m'en souviens.

 22   Q.  Saviez-vous que cet entretien a eu lieu en 1995 ?

 23   R.  Ça, croyez-moi bien, je ne m'en souviens pas.

 24   Q.  Mais si je vous le dis et le Procureur a les données relatives à la

 25   date de cet entretien, vous n'avez aucune raison de douter de mes propos.

 26   Saviez-vous que moi-même et le Parti radical serbe en 1995 avions un

 27   conflit politique violent avec Slobodan Milosevic et la totalité de son

 28   régime ?


Page 3520

  1   R.  Oui, ça je m'en souviens.

  2   Q.  Est-ce que dans la vie politique serbe il était habituel ou pas,

  3   lorsqu'il y avait des règlements de compte de ce type, il y ait des

  4   fumigènes, dirais-je, pour faire un écran de fumée dans l'opinion publique

  5   et jeter l'adversaire dans la confusion ?

  6   R.  Ça c'est bien connu, oui.

  7   Q.  Vous vous souviendrez que le régime Milosevic m'avait attaqué et dit

  8   que j'étais un criminel, un alcoolique, un malfaiteur. Moi qui ne bois

  9   jamais, on m'a traité d'alcoolique. Alors je ne peux pas aller d'un lecteur

 10   à l'autre des journaux pour expliquer que je ne bois pas, n'est-ce pas ?

 11   Vous souvenez-vous de ces attaques-là ?

 12   R.  Oui, je m'en souviens. J'attendais que l'interprétation se fasse pour

 13   répondre. Je me souviens des attaques, elles étaient agressives.

 14   Q.  Vous souvenez-vous d'un dîner à Zvecevo, vous y étiez présent, m'avez-

 15   vous vu consommer de l'alcool ?

 16   R.  Ecoutez, je ne m'en souviens pas. Je veux bien vous croire que non, si

 17   vous dites que vous ne buvez pas, mais je ne pense pas qu'on ait bu grand-

 18   chose.

 19   Q.  Mais il y en a qui ont bu de l'alcool, moi non, alors on a même fait

 20   des blagues à mes dépens parce que je ne buvais pas. Vous en souvenez-vous

 21   ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Peu importe. Donc vous avez conscience du fait que dans ces règlements

 24   de compte politique de part et d'autre il a été tiré vers le public des

 25   salves de choses qui ne correspondaient pas à des faits véridiques, n'est-

 26   ce pas ?

 27   R.  Certes.

 28   Q.  On m'a accusé faussement et moi avec imagination je ripostais visant un


Page 3521

  1   responsable du régime avec toute une salve d'accusations à son encontre

  2   pour lui rendre la pareille ?

  3   R.  Oui, vous avez eu beaucoup d'imagination.

  4   Q.  Oui. Vous avez eu de l'expérience au sujet de l'imagination qui est la

  5   mienne, n'est-ce pas ?

  6   R.  En effet, j'ai eu cette expérience-là.

  7   Q.  Mais j'avais eu des raisons particulières pour ce qui était de frapper

  8   le régime de Slobodan Milosevic à l'époque, parce que ce régime était à la

  9   tête de cette politique, qui est soi-disant pacifiste, avait bloqué la

 10   Republika Srpska et avait commencé à accepter toutes les initiatives ou

 11   prétendues initiatives de paix de la part de l'occident, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui. A l'époque, M. Slobodan Milosevic s'était efforcé de faire en

 13   sorte que soient adoptés des programmes, des plans demandés ou exigés par

 14   l'Occident de sa part et vous, vous étiez contre cette politique.

 15   Q.  Vous souvenez-vous du fait qu'en fin 1994, début 1995, pendant quatre

 16   mois, j'ai été en prison du régime Milosevic et en plus par la suite deux

 17   mois supplémentaires en été 1995 ?

 18   R.  Je me souviens que vous avez été mis en prison, je ne me souviens pas

 19   de la durée que vous avez passée là-bas.

 20   Q.  Oui, à moi de me souvenir combien de temps j'y ai passé. Mais avais-je

 21   des raisons d'épargner Milosevic et son régime si ce régime m'a enfermé de

 22   façon contraire au droit ?

 23   R.  Je crois que vous avez eu bien des raisons d'être en colère et de

 24   riposter comme vous avez coutume de le faire parce qu'il vous a gardé en

 25   prison.

 26   Q.  Mais avais-je une autre raison pour ce qui était de tirer ces bombes

 27   fumigènes, en disant que c'est Radmilo Bogdanovic qui avait procuré des

 28   armes à la TO et aux volontaires locaux pour dissimuler en réalité qui est-


Page 3522

  1   ce qui l'avait fait pour de bon ?

  2   R.  Vous devez connaître forcément les raisons, les causes et les effets,

  3   mais le fait d'avoir été emprisonné, cela a peut-être été cette attaque

  4   contre M. Radmilo Bogdanovic.

  5   Q.  Mais peut-être la mission avait-elle visé à dissimuler à l'égard du

  6   public que c'était en réalité le général Dusan Pekic qui avait organisé

  7   l'armement de la Défense territoriale et des volontaires, n'est-ce pas ?

  8   R.  Cela se peut.

  9   Q.  Alors je ne parlerai pas du général Dusan Pekic, malheureusement il est

 10   décédé il y a deux mois, mais personne ne peut maintenant lui porter du

 11   tort. On ne peut pas le mettre en prison et on ne peut pas le mettre en

 12   accusation. Saviez-vous que le général Dusan Pekic était décédé il y a deux

 13   mois ?

 14   R.  Non, je n'en ai pas entendu parler. Je ne le savais pas.

 15   Q.  Saviez-vous que c'était les armes les plus anciennes des entrepôts de

 16   la TO sorties d'on ne sait où, des armes automatiques de type Thompson

 17   datant de la Deuxième Guerre mondiale, des fusils M-48, des Spagin, des

 18   armes automatiques de fabrication soviétique, puis M-56, également des

 19   armes automatiques très anciennes. Le saviez-vous ?

 20   R.  J'ai ouï dire de la part des gens qu'ils se plaignaient d'avoir reçu

 21   des armes très vieilles.

 22   Q.  Se pouvait-il qu'en passant par le général Pekic on n'ait pu se

 23   procurer des armes que la JNA avait déjà mises de côté depuis longue date ?

 24   R.  Je ne sais pas si c'est la seule façon et le seul moyen d'avoir des

 25   armes, mais étant donné que c'était si ancien, peut-être voulaient-ils s'en

 26   débarrasser.

 27   Q.  Mais se pouvait-il que les volontaires reçoivent des armes modernes,

 28   des kalachnikovs, et ce, seulement au moment où la JNA a pris part au


Page 3523

  1   combat; vrai ou faux ?

  2   R.  On a remarqué par la suite qu'il y a eu des armes plus récentes.

  3   Q.  Quand vous dites plus tard, c'était après août 1991, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Donc là aussi on voit une différence substantielle du point de vue de

  6   la période de l'auto-organisation des volontaires serbes dans la Slavonie

  7   et dans la Krajina de Knin, le recrutement des volontaires du Parti radical

  8   serbe dans une phase initiale, et ensuite dans la phase où la JNA a pris

  9   part aux activités de combat et où tout discours politique de ma part

 10   comportait une position disant que nous étions tous une seule et même

 11   armée, que nous étions tous la JNA, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui. Vous avez déclaré que c'était une seule et même armée, que c'était

 13   la JNA, et que vos soldats étaient placés sous le commandement de la JNA.

 14   C'est ce type de déclarations que vous avez faites.

 15   Q.  Avez-vous eu vent d'un cas à quelque champ de bataille où il y aurait

 16   eu des volontaires du Parti radical serbe faire leur apparition hors des

 17   rangs de la JNA après le 1er septembre 1991 ?

 18   R.  A l'époque je n'ai pas eu à voir ce qui se passait au large de la

 19   Slavonie occidentale, et en temps de guerre on avait du mal à se déplacer,

 20   même quand on était du cru, moi qui étais de l'extérieur, je ne pouvais pas

 21   me déplacer, je ne pouvais pas le savoir, mais pour ce qui est de la

 22   Slavonie occidentale, je peux dans une certaine mesure savoir ce qui

 23   s'était passé là-bas.

 24   Q.  N'avez-vous pas dit aux enquêteurs de La Haye que c'était moi qui étais

 25   responsable des meurtres de civils croates à Vocin ?

 26   R.  Je n'ai jamais dit que vous étiez responsable. J'ai dit que j'ai ouï

 27   dire que les volontaires avaient participé à ce crime.

 28   Q.  Alors ces enquêteurs de La Haye ont intégré cela à la déclaration que


Page 3524

  1   vous avez par la suite signée et il semblerait qu'à votre avis je serais

  2   responsable des meurtres à Vocin. Ça se trouve en page 5, début du

  3   paragraphe 2, et que la raison pour laquelle vous pensez de la sorte, c'est

  4   qu'on avait estimé que j'étais venu inspecter mes unités à Vocin. Est-ce

  5   que c'est le Procureur de La Haye qui a mis cela dans votre déclaration ?

  6   R.  Nous en avons longuement parlé. J'ai dit que j'ai ouï dire que les

  7   volontaires y avaient pris part. J'ai dit que vous étiez venu inspecter ou

  8   rendre visite à vos volontaires à Vocin. Vous les avez donc vus. Mais je

  9   n'ai jamais dit que vous aviez ordonné ou que vous aviez une responsabilité

 10   directe pour ce qui est de ces meurtres.

 11   L'INTERPRÈTE : Hors micro.

 12   M. SESELJ : [interprétation]

 13   Q.  Donc les enquêteurs de La Haye ont mis cela dans votre déclaration de

 14   leur propre gré.

 15   R.  C'est ce qui est marqué. Ils ont dû tirer une conclusion de la sorte,

 16   mais moi, je ne vous ai jamais mis en accusation personnellement disant que

 17   vous aviez ordonné ou dit de faire cela.

 18   Q.  Ce n'est pas vous qui avez rédigé cette déclaration. Ils ont rédigé la

 19   déclaration et vous l'ont donnée pour que vous la signiez.

 20   R.  Moi, je donnais des réponses, ils ont pris des notes et par la suite

 21   j'ai signé la déclaration.

 22   Q.  Vous avez ouï dire que cette unité de volontaires s'était trouvé

 23   présente dans les environs de Vocin, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est ce que j'ai entendu dire.

 25   Q.  Saviez-vous que c'était à peu près à dix kilomètres de distance de

 26   Vocin ?

 27   R.  Croyez-moi bien que je ne sais pas, je ne connais pas les lieux, je ne

 28   sais pas quelle est la distance.


Page 3525

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8  

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  


Page 3526

  1   Q.  Mais si vous pouviez vérifier où se trouvait cette unité, si vous étiez

  2   allé sur les lieux pour voir cette unité, pour voir ces hommes-là, pensez-

  3   vous qu'ils vous auraient tué ?

  4   R.  Je ne pense pas que j'aurais été tué, bien que je n'étais pas très aimé

  5   par les milieux militaires, mais je ne vois pas de raison pour ce qui était

  6   de m'abattre. Je ne sais pas. Je n'y ai pas pensé. Je ne suis pas allé là-

  7   bas, donc je ne peux pas l'affirmer. Mais je ne vois pas de raison de me

  8   tuer.

  9   Q.  Mais les enquêteurs de La Haye ont mis dans votre déclaration des dires

 10   disant que vous êtes allé là-bas, que vous avez vérifié le fait que l'unité

 11   du SRS se trouvait à Vocin, et vous avez semble-t-il dit, probablement

 12   m'aurait-on tué. Troisième ligne, deuxième paragraphe, page 5 de votre

 13   déclaration. Et c'est daté du 14 août 2006, donc ce n'était pas vos mots à

 14   vous ?

 15   R.  Je vais vous dire peut-être pourquoi cela est dit de la sorte. Jovo

 16   Vezmar qui a fait partie du QG de la Défense territoriale de la Slavonie

 17   occidentale a attiré l'attention sur le fait qu'il ne fallait pas avoir de

 18   contact ou rendre visite aux unités militaires, parce que j'avais eu un

 19   contact au tout début. Il m'a fait venir au QG, il m'a menacé, il m'a dit :

 20   si tu les contactes encore une fois, eux ou quelqu'un d'autre, tu seras

 21   tué, donc j'en ai tiré une conclusion qui était celle de dire que si

 22   j'essayais de visiter ou d'établir un contact, que cette promesse de la

 23   part d'un commandant pourrait bien être tenue. C'est ce qu'on m'avait dit.

 24   Q.  Mais ça n'avait rien à voir avec les volontaires du Parti radical

 25   serbe. Lui, il était de Pakrac, pour autant que je le sache, non ?

 26   R.  Oui, il était de Pakrac. Il a d'abord été commandant du QG de la TO à

 27   Pakrac, puis ensuite il a fait partie du QG de la Slavonie occidentale.

 28   Q.  Est-ce que cela signifie qu'on ne vous a jamais menacé d'être tué par


Page 3527

  1   moi ou par des volontaires du SRS ?

  2   R.  Tout comme Jovo Vezmar m'avait menacé, personne ne m'a menacé de la

  3   sorte parmi les volontaires à vous ou vous-même comme l'a fait Jovo Vezmar

  4   ou comme l'ont fait d'autres hommes de la Défense territoriale.

  5   Q.  Est-ce qu'en 1991 je me suis mêlé du tout dans vos conflits à vous en

  6   Slavonie occidentale ? Quand je parle de conflits à vous, je parle des

  7   conflits ou des oppositions qu'il y avait entre les hommes politiques, les

  8   dirigeants de l'époque. Me suis-je mêlé de tout cela ?

  9   R.  Non. A l'époque vous étiez là-bas, vous ne vous en êtes pas mêlé.

 10   Q.  A ce dîner à Zvecevo, vous ai-je dit cordialement bonjour comme à tous

 11   les autres, et est-ce que la conversation dans l'ensemble a été cordiale ?

 12   R.  Oui. La conversation a été correcte. Il n'y a pas eu d'incidents. Il

 13   n'y a pas eu de disputes.

 14   Q.  Donc on peut en tirer une conclusion qui serait celle de dire que je

 15   n'avais aucun préjugé à votre encontre, aucune animosité à votre encontre,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est cela.

 18   Q.  Ici dans la déclaration que vous avez faite à la date du 14 août 2006,

 19   il est dit, pour autant que vous le sachiez, en Slavonie occidentale il y

 20   aurait eu seulement des volontaires liés au Parti radical serbe, et qu'il

 21   n'y a pas eu de volontaires à être liés à d'autres partis politiques. Avez-

 22   vous dit cela ?

 23   R.  Oui, je l'ai dit parce que personne n'a fait son apparition, personne

 24   n'a dit qu'il avait ses propres volontaires. Partant de là, j'en ai tiré la

 25   conclusion que les vôtres étaient les seuls, c'est ce qu'on disait en

 26   Slavonie occidentale du reste, à savoir que tous les volontaires étaient

 27   ceux du Parti radical serbe.

 28   Q.  Oui, mais quelques années plus tôt, dans une déclaration datée de 2002,


Page 3528

  1   en page 30, vous dites : "Il y avait une unité des Aigles blancs à Vocin et

  2   une autre unité à Kamenska qui comptait une trentaine d'hommes. On dit

  3   qu'il y avait une unité de la garde serbe de Vuk Draskovic. Je n'ai pas eu

  4   de contact avec ces gens-là."

  5   Vous l'avez déclaré en 2002 lorsque vos souvenirs étaient plus vifs

  6   pour ce qui est de cette période par rapport à l'année 2006, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, je me souviens de cette déclaration que j'ai faite en 2002.

  8   Q.  Alors y a-t-il eu des Aigles blancs en Slavonie occidentale ou pas ?

  9   R.  Par la suite j'ai fait cette déclaration telle que parce que j'ai ouï

 10   dire qu'il n'y avait des volontaires venus que dans l'organisation d'un

 11   seul parti. Il a été question des Aigles blancs. Je ne les ai pas vus, j'en

 12   ai entendu parler. Je ne sais pas qui les avait envoyés.

 13   Q.   Mais vous saviez qu'à Kamenska il y avait une trentaine d'hommes qui

 14   faisaient partie des Aigles blancs. C'est du moins ce que dit votre

 15   déclaration.

 16   R.  Oui, c'est la rumeur qui a couru au sujet de ces gens et il y a eu ce

 17   chiffre.

 18   Q.  Mais savez-vous qui est-ce qui a amené les Aigles blancs en Slavonie

 19   occidentale ?

 20   R.  Ça non, je ne le sais pas.

 21   Q.  Combien de fois avez-vous rencontré le général Aleksandar Vasiljevic ?

 22   R.  Je ne l'ai jamais rencontré de ma vie.

 23   Q.  En début 1992, vous avez accusé dans les médias les volontaires du

 24   Parti radical serbe d'avoir commis ce crime. Je me suis donc attaqué à vous

 25   ainsi que le général Aleksandar Vasiljevic en disant que vous aviez fait

 26   venir des Aigles blancs en Slavonie occidentale, n'est-ce pas ? Enfin,

 27   écoutez, je n'ai pas dit que c'était vrai, n'est-il pas vrai de dire que je

 28   vous ai accusé de cela ?


Page 3529

  1   R.  Oui, vous m'avez accusé et vous avez dit que j'avais une responsabilité

  2   relative aux événements de la Slavonie occidentale.

  3   Q.  Vous souvenez-vous du fait que j'ai mentionné le général Aleksandar

  4   Vasiljevic ?

  5   R.  Je me souviens que vous l'avez mentionné, mais je ne me souviens pas si

  6   c'était dans ce même contexte, pour ce qui est de lui et de moi-même.

  7   Q.  Mais ne savez-vous pas que de nos jours encore il n'a pas été tiré au

  8   clair le fait de savoir comment les Aigles blancs sont arrivés en Slavonie

  9   ? Les volontaires du Parti radical serbe allaient d'abord dans cette

 10   caserne de Bubanj Potok à Belgrade. C'est là qu'on leur donnait des

 11   uniformes, on leur donnait des armes. Des fois, les armes les attendaient à

 12   Okucani. Ils sont tous allés là-bas dans la sorte. Les Aigles blancs ne

 13   sont pas eux passés par cette caserne de Bubanj Potok. De nos jours encore,

 14   on n'a pas tiré au clair le fait de savoir comment ils se sont retrouvés en

 15   Slavonie occidentale; le saviez-vous ?

 16   R.  Comme vous le dites vous-même, on n'a pas tiré la chose au clair, alors

 17   comment voulez-vous que nous, à l'époque, nous sachions qui venait comment

 18   dans l'organisation de qui, et cetera. Mais je n'ai jamais compris comment

 19   ils étaient venus, qui est-ce qui les avait emmenés et qui est-ce qui leur

 20   avait donné des missions.

 21   Q.  Mais quand vous avez accusé dans les médias les volontaires du PRS pour

 22   ce qui est des crimes à Vocin, vous l'avez fait par cœur, au petit bonheur

 23   la chance, sans avoir vérifié les informations.

 24   R.  Il n'y a pas eu d'enquête si vous voulez dire que j'avais pu faire des

 25   affirmations concrètes partant d'une enquête. J'ai dit que j'ai ouï dire

 26   cela de la bouche de gens qui venaient de cette région et qui avaient

 27   affirmé que dans la liquidation de ces personnes-là il y a eu implication

 28   de volontaires du Parti radical serbe. De quels volontaires parlaient-ils


Page 3530

  1   concrètement et qui se trouvaient là-bas dans le concret, je ne le sais

  2   pas. J'ai fait une déclaration partant de ce que j'ai ouï dire. Je n'ai pas

  3   dit ce que j'ai dit partant d'une enquête.

  4   Q.  Mais vous avez quand même mentionné les volontaires du Parti radical

  5   serbe, c'est la raison pour laquelle il y a eu réaction très forte de ma

  6   part. Vous vous êtes attaqué aux volontaires et moi, je vous ai riposté que

  7   c'était votre faute à vous s'il y a eu des Aigles blancs là-bas, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Oui. Je vous avais attaqué, je vous avais qualifié de responsable pour

 10   les volontaires et vous avez dit dans les médias en riposte que c'était ma

 11   responsabilité à moi.

 12   Q.  Bon, c'est ce que je voulais que nous tirions au clair ici. Ce qui

 13   m'intéresse c'est de savoir comment vous en êtes venu en 2002 à parler de

 14   l'existence de ces unités d'Aigles blancs, qui plus est de deux unités,

 15   vous avez parlé de la garde serbe de Vuk Draskovic et, par la suite, en

 16   2006, dans vos déclarations, vous avez nié le fait qu'il y ait eu du tout

 17   de volontaires d'autre nature si ce n'est ceux du Parti radical serbe; est-

 18   ce que c'est les enquêteurs de La Haye qui vous ont suggéré la chose ou

 19   est-ce qu'ils l'ont juste placé et intégré dans cette dernière déclaration

 20   ?

 21   R.  Non, les enquêteurs ne m'ont suggéré de faire aucune espèce de

 22   déclaration, l'un et l'autre a été déclaré par moi. Personne ne m'a rien

 23   suggéré. Personne ne m'a rien imposé.

 24   Q.  Mais comment se fait-il qu'il y ait cette divergence très importante

 25   entre les deux déclarations ?

 26   R.  Peut-être tout de suite avant ma première déclaration, ai-je appris

 27   dans des conversations avec je ne sais qui qu'il a été question des Aigles

 28   blancs ou de la garde, et je ne sais plus sous l'influence de qui. Vous


Page 3531

  1   savez bien que c'était dans la confusion générale qu'on ne savait pas qui

  2   envoyait qui. Et j'ai dit aussi qu'il y en avait d'autres. De nos jours

  3   encore on se perd en conjectures et on ne sait pas comment cela s'est passé

  4   dans l'ensemble. Il n'y a pas eu de représentant politique de présent à

  5   représenter les Aigles blancs ou une autre organisation, on a pensé que

  6   c'étaient tous des mêmes volontaires. Ils étaient tous casés dans le

  7   groupement des volontaires, dans l'organisation de qui, je ne sais trop. Il

  8   se peut que j'aie été influé par ce film où vous avez parlé des Aigles

  9   blancs et que, partant de là, j'aie tiré une conclusion que c'était dans le

 10   même sac des volontaires qui étaient Aigles blancs et autres tout confondu

 11   et peut-être est-ce là la raison pour laquelle j'ai tiré la conclusion de

 12   dire que c'étaient tous les mêmes volontaires.

 13   Q.  Mais faites-vous la différence entre un Aigle blanc à deux têtes

 14   bicéphales, qui est le vieux symbole serbe datant de la dynastie des

 15   Nemanjic, qui est repris des traditions byzantines et qui, de nos jours

 16   encore, est le symbole officiel sur l'emblème de l'Etat et le drapeau et

 17   une organisation concrète qui s'est appelée les Aigles blancs ?

 18   R.  Je pense que les emblèmes de l'Etat c'est une chose, et les Aigles

 19   blancs en leur qualité de volontaires c'est tout à fait autre chose.

 20   Q.  Avez-vous entendu dire de ma part que j'aie nié la perpétration de

 21   crimes à l'égard de civils en Slavonie occidentale ?

 22   R.  Non, je ne vous ai pas entendu nier ces crimes.

 23   Q.  Avez-vous ouï dire que j'avais accusé directement les Aigles blancs

 24   d'avoir commis ces crimes ?

 25   R.  Oui, vous l'avez mentionné.

 26   Q.  Vous avez vu hier ce document qui vous a été soumis par l'Accusation

 27   où, si je me souviens bien, on mentionne 68 victimes des crimes commis

 28   contre les civils en Slavonie occidentale. Vous avez vu ce document ?


Page 3532

  1   R.  Oui, je l'ai vu.

  2   Q.  Est-ce que vous avez vu qu'il n'y avait que le nom d'habitants de

  3   Slavonie dans ce document, de Slavonie occidentale ?

  4   R.  Oui, mais je crois qu'au début il est tout de même dit que ce n'était

  5   pas tous des habitants de Slavonie occidentale.

  6   Q.  Est-ce qu'il y a le nom d'un seul volontaire du Parti radical serbe

  7   dans cette liste ?

  8   R.  Je ne sais pas qui appartenait à quoi parmi ceux qu'on retrouve dans

  9   cette liste, croyez-moi.

 10   Q.  Est-ce que quand j'étais en Slavonie occidentale ou quand j'ai prononcé

 11   des discours officiels vous m'auriez entendu une seule fois me prononcer en

 12   faveur de l'expulsion de la population croate hors de Slavonie occidentale

 13   ?

 14   R.  Non, ça vous ne l'avez pas dit.

 15   Q.  Mais ici, on vous a fait mettre dans votre déclaration écrite de 2006

 16   en page 6, paragraphe 14, que s'agissant des Croates, j'aurais dit que le

 17   mieux pour eux était de partir pour la Croatie. Ce qui signifierait que la

 18   Grande-Serbie serait un Etat n'appartenant qu'aux Serbes. Page 6 de votre

 19   déclaration écrite de 2006. Est-ce que vous qui avez dit cela ou est-ce

 20   l'Accusation qui l'a introduit dans le texte ?

 21   R.  C'était lié à la vidéo qu'on a vue je crois, quand on parlait de l'Etat

 22   croate. Je crois que c'est à partir de la vidéo où on montre votre discours

 23   sur la façon de créer un Etat serbe et sur la vie à organiser. Je crois que

 24   c'est tiré de ça.

 25   Q.  Mais durant l'interrogatoire principal vous avez dit vous-même que je

 26   considérais qu'aujourd'hui la grande majorité des Croates était des Serbes

 27   catholiques et que les Musulmans de Bosnie étaient des Serbes de religion

 28   musulmane, n'est-ce pas ?


Page 3533

  1   R.  Oui, vous l'avez dit.

  2   Q.  Est-ce que dans votre région en Slavonie occidentale, eu égard aux

  3   catholiques de Slavonie, on les appelait des Sokci; est-ce que cette

  4   expression était utilisée ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et ce mot, les Sokac, qu'est-ce que cela veut dire, vous pouvez

  7   l'expliquer ?

  8   R.  Pour les Croates de là-bas, on considérait que c'était Marie-Thérèse

  9   qui les avait convertis à la religion catholique. D'ailleurs, on sait bien

 10   quelle est la partie de cette population qui a été concernée par cela, des

 11   gens qui se sont convertis; certains sont restés ce qu'ils étaient à

 12   l'origine et d'autres sont passés au catholicisme romain.

 13   Q.  Donc il s'agissait à l'origine d'orthodoxes serbes qui ont adopté la

 14   religion catholique et les autres sont restés orthodoxes, donc on les

 15   appelait des Sokci, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je ne sais pas si c'était la raison du fait qu'on les appelait des

 17   Sokci, mais je sais qu'une partie d'entre eux s'est convertie au

 18   catholicisme romain.

 19   Q.  Puisque vous êtes un homme éduqué, je vais vous rappeler que les

 20   orthodoxes serbes, quand ils font le signe de la croix, le font avec trois

 21   doigts de la main, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Alors que les catholiques font le signe de la croix avec les cinq

 24   doigts de la main alignés, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que dans l'histoire, c'était une façon de désigner la façon dont

 27   on fait le signe de la croix, parce que Saka ça veut tous les doigts de la

 28   main. Donc quand on fait le signe de la croix avec les cinq doigts de la


Page 3534

  1   main, on le fait avec la Saka et ça donne le mot Sakci, qui plus tard s'est

  2   transformé en Sokci. Est-ce que c'est l'origine du mot --

  3   R.  Oui, c'est possible.

  4   Q.  -- que l'on peut trouver dans la littérature; Saka, Sakci, Sokci,

  5   n'est-ce pas ? Est-il exact que chaque fois que j'ai pris la parole, j'ai

  6   dit que les Sokci de Slavonie étaient des Serbes de religion catholique ?

  7   R.  Oui, ça vous le disiez.

  8   Q.  Vous avez parlé des catholiques grecs, les uniates, vous connaissez

  9   l'union de la Zumberacka, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce qu'encore aujourd'hui, dans les environs de Zagreb, on trouve

 12   des catholiques grecs de rite grec qui reconnaissent le pape comme leur

 13   autorité suprême mais qui ont un rite et des cérémonies orthodoxes ?

 14   R.  Oui, cela existe encore.

 15   Q.  Et à la télévision, on voit encore des émissions qui retransmettent

 16   leurs offices, n'est-ce pas ? Je le vois d'ailleurs encore actuellement,

 17   puisque nous avons à notre disposition la télévision croate.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Donc le rite et les cérémonies sont totalement orthodoxes, mais ils

 20   mentionnent le pape dans leurs prières et on les considère pour la majorité

 21   d'entre eux comme étant Croates, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce qu'encore aujourd'hui on voit des Serbes qui continuent à se

 24   convertir au catholicisme romain ?

 25   R.  Si cela se passe, c'est une procédure individuelle.

 26   Q.  Oui, bien sûr c'est individuel, puisque chacun décide pour soi sur ces

 27   questions. Mais savez-vous que plus de 30 000 orthodoxes serbes se sont

 28   déjà convertis à la religion catholique romaine et que c'est prouvé par des


Page 3535

  1   chiffres officiels ?

  2   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

  3   Q.  Est-ce que vous savez que lorsqu'un orthodoxe serbe se convertit au

  4   catholicisme, en Croatie, il est automatiquement considéré comme étant

  5   devenu Croate ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Donc la différence entre les Serbes et les Croates est définie par eux

  8   exclusivement comme étant fondée sur la question de la religion ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que la Croatie de Pavelic, l'Etat Ustasha, a mené une politique

 11   qui avait pour but de tuer un tiers des Serbes, d'expulser un deuxième

 12   tiers des Serbes vers la Serbie et de convertir au catholicisme le

 13   troisième tiers ?

 14   R.  Oui, c'était la politique d'Ante Pavelic.

 15   Q.  Bien, Monsieur VS-004. Les Procureurs de La Haye vous ont montré des

 16   documents pendant la préparation de votre déposition, n'est-ce pas, et vous

 17   vous êtes exprimé sur un certain nombre de ces documents. Ceci est-il exact

 18   ?

 19   R.  Oui, exact.

 20   Q.  Ils vous ont montré une déclaration relative à la situation en

 21   Yougoslavie, texte qui date 28 octobre 1991. Vous m'avez entendu ? Ils vous

 22   ont montré une déclaration relative à la situation yougoslave qui date du

 23   28 octobre 1991 et vous avez déclaré ne jamais avoir eu ce document sous

 24   les yeux avant le jour où ils vous l'ont montré, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, en effet.

 26   Q.  Ceci figure en page 8 de l'annexe à votre déclaration écrite de 2006.

 27   Sur la base de votre réponse dans laquelle vous disiez n'avoir jamais vu ce

 28   document, les Procureurs de La Haye l'introduisent dans la déclaration


Page 3536

  1   écrite relative à votre déposition et affirment que vous ne l'avez jamais

  2   vu ce texte avant qu'on ne vous l'ait montré.

  3   R.  J'ai déclaré que je n'avais jamais vu ce document avant qu'on me l'ait

  4   mis sous les yeux, et nous avons vu ici qu'il a été versé au dossier.

  5   Q.  Et pour la déclaration conjointe de Brioni du 7 juillet 1991, vous avez

  6   également déclaré ne l'avoir jamais vue auparavant, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, je n'ai pas pu voir ce document avant. Je n'ai jamais eu

  8   l'occasion de le voir avant d'arriver ici auprès des Procureurs.

  9   Q.  Et pourtant, ils déclarent, étant donné que ce document est versé au

 10   dossier, que vous l'auriez déjà vu, n'est-ce pas ?

 11   R.  Eh bien, je l'ai vu sur la liste des pièces à conviction.

 12   Q.  Ils vous ont montré un autre document, Epoha, où, en page 1, on voit

 13   une photo de Dobrica Cosic, un écrivain serbe très connu, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Ils vous ont trompé quant au fait d'établir un lien qui n'existe pas

 16   entre la photo de Dobrica Cosic en page 1 et un article qui se trouve dans

 17   cette revue Epoha en vous disant que c'était Dobrica Cosic qui était

 18   l'auteur de l'article ?

 19   R.  C'est la conclusion que j'ai faite. J'ai conclu que c'était un texte

 20   écrit par Dobrica Cosic.

 21   Q.  L'Accusation a déclaré que tel était le cas, parce que c'est ce qu'on

 22   voit ici écrit dans votre déclaration écrite, que Dobrica Cosic est

 23   l'auteur de ce texte. Est-ce que Dobrica Cosic était à la convention

 24   relative à la troisième Yougoslavie ?

 25   R.  Je ne m'en souviens pas. C'était une réunion où il y avait beaucoup de

 26   monde, je ne m'en souviens pas.

 27   Q.  Mais s'il y avait assisté, vous vous en seriez souvenu, parce que c'est

 28   un auteur particulièrement connu, et nous nous sentions tous comme


Page 3537

  1   n'arrivant même pas à la cheville de ce grand homme.

  2   R.  Il avait ce genre de célébrité, donc je crois que je l'aurais remarqué

  3   s'il avait été présent, en effet.

  4   Q.  Ils vous ont montré une traduction de mon interview au Spiegel,

  5   magazine allemand, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Publié en août 1991, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je crois que c'est cela.

  9   Q.  Pour paraître le 8 août, il fallait bien que cette interview je l'aie

 10   donnée durant le mois de juillet, n'est-ce pas ?

 11   R.  C'est une conclusion qui est naturelle. On ne peut pas publier une

 12   interview avant qu'elle n'ait été accordée.

 13   Q.  Puisque dans cette interview je parle de ma position de commandement,

 14   il faut bien que j'aie fait cette interview avant le 1er août 1991, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  Oui. C'est ce qu'il est permis de conclure.

 17   Q.  Est-ce que vous avez déjà accordé des interviews à des correspondants

 18   étrangers ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous avez relu le texte de l'interview avant parution ou

 21   vous répondez aux questions, le journaliste s'en va et le texte paraît ?

 22   R.  Je n'ai jamais vérifié les interviews avant parution, c'était la

 23   responsabilité du journaliste de vérifier et de le faire paraître.

 24   Q.  Vous est-il arrivé que, dans l'interview publiée, se trouve quelque

 25   chose qui ne correspondait pas tout à fait à ce que vous auriez dit ou une

 26   petite erreur ?

 27   R.  Il y a eu des cas de ce genre.

 28   Q.  Mais en général, vous n'avez pas vu le texte publié de votre interview


Page 3538

  1   une fois que le texte paraît, parce qu'il paraissait dans la presse

  2   étrangère.

  3   R.  Oui, c'est ça, le texte paraît et puis plus jamais.

  4   Q.  Mais quand le texte paraît, en général, vous n'êtes même pas informé

  5   que le texte paraît ce jour-là parce qu'il n'arrive jamais entre vos mains.

  6   R.  Il arrivait rarement que le texte arrive entre mes mains.

  7   Q.  Avez-vous déjà entendu parler de Renate Flottau qui était

  8   correspondante du Spiegel à Belgrade ?

  9   R.  Non, je ne me souviens pas.

 10   Q.  Savez-vous qu'en 1999, le Parti radical serbe faisait partie d'une

 11   coalition avec le parti de Milosevic et que nous avions 15 ministres au

 12   sein du gouvernement serbe ?

 13   R.  Je sais qu'il y a eu une période correspondant à ce que vous venez de

 14   dire mais je ne me souviens pas exactement si c'était en 1999, mais je sais

 15   que vous avez formé une coalition avec le parti de Milosevic et que vous

 16   avez eu un pouvoir assez important au sein du gouvernement.

 17   Q.  Savez-vous que Renate Flottau a été officiellement expulsée par notre

 18   gouvernement de Belgrade ?

 19   R.  Je me souviens qu'il y a eu un cas de journaliste officiellement prié

 20   de partir, mais je ne sais pas si c'était Renate Flottau.

 21   Q.  La raison de son expulsion, c'était une activité subversive vis-à-vis

 22   de la guerre au Kosovo-Metohija, vis-à-vis de contacts avec l'OTAN, des

 23   terroristes albanais, de leurs rebellions, et cetera. Vous n'avez pas

 24   entendu parler de cela ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Très bien. Vous avez également vu ici une vidéo, une partie du film de

 27   la BBC "Vie et mort de l'ex-Yougoslavie", et dans cette séquence vidéo on

 28   voit une partie d'une déclaration faite par moi où je dis que Milosevic a


Page 3539

  1   demandé aux radicaux d'envoyer des volontaires sur le front. Vous vous

  2   rappelez cela ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Vous rappelez-vous peut-être que c'était ma première rencontre avec

  5   Milosevic en mai 1992 ?

  6   R.  Je ne connais pas ce détail, croyez-moi.

  7   Q.  Je le dis dans ces images. Mais ce n'est pas important si vous ne vous

  8   rappelez pas. Savez-vous que la Yougoslavie a reçu un ultimatum de la part

  9   des puissances occidentales et du Conseil de sécurité, si je me souviens

 10   bien, ultimatum selon lequel avant le 19 mai 1992, il fallait que toutes

 11   les unités de la JNA se retirent de Bosnie-Herzégovine ?

 12   R.  Oui, je me rappelle ça.

 13   Q.  Est-il évident que Milosevic et moi-même à l'époque discutions du

 14   destin des Serbes de Bosnie-Herzégovine après le retrait de la JNA ?

 15   R.  Oui, il est permis de le conclure.

 16   Q.  Savez-vous que pendant toutes ces journées, je me prononçais largement

 17   dans les médias pour dire que la JNA ne devait pas se retirer de Bosnie-

 18   Herzégovine et que nous devions rejeter l'ultimatum des puissances

 19   occidentales quoi qu'il arrive ?

 20   R.  Oui, je me souviens de cela.

 21   Q.  Manifestement Milosevic et moi-même discutions du destin du peuple

 22   serbe après le retrait de la JNA, n'est-ce pas ?

 23   R.  Il est permis de le conclure.

 24   Q.  Quand je demande ce qu'il adviendra des Serbes de Bosnie-Herzégovine,

 25   quand je pose cette question à Milosevic, il me répond : "Envoyez davantage

 26   de volontaires."

 27   R.  Je ne me souviens pas de ce détail, croyez-moi. Cela s'est passé il y a

 28   longtemps, et je n'ai pas suivi de très près tout cela.


Page 3540

  1   Q.  Vous savez certainement que la JNA s'est effectivement retirée le 19

  2   mai, et qu'en Bosnie-Herzégovine ne sont restés que les Serbes nés en

  3   Bosnie-Herzégovine qui ont créé l'armée de la Republika Srpska à ce moment-

  4   là, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Donc les volontaires du Parti radical serbe qui par la suite sont allés

  7   là-bas ne pouvaient plus y aller dans les rangs de la JNA, n'est-ce pas ?

  8   R.  Il est permis de le conclure. Mais je ne sais pas ce qui s'est passé à

  9   partir de ce moment-là. Mais cela semble logique. S'il n'existe plus de

 10   JNA, les volontaires ne peuvent plus se joindre à la JNA là-bas.

 11   Q.  Donc à partir de ce moment-là, si nous y envoyions des civils, ils

 12   devaient y aller en civil. Ils ne pouvaient plus porter l'uniforme. Ils ne

 13   pouvaient plus porter des armes et ils ne pouvaient faire le voyage qu'en

 14   tant que civils normaux, et ils se faisaient connaître au commandement

 15   local qui leur donnait leurs lieux d'affectation, n'est-ce pas ?

 16   R.  Il est permis de le conclure logiquement, je ne peux ni le confirmer ni

 17   l'infirmer.

 18   Q.  Vous rappelez-vous qu'en 1991, je portais moi-même un uniforme de

 19   camouflage de temps en temps ?

 20   R.  Oui, je m'en souviens.

 21   Q.  Et je portais un revolver quand je faisais la visite des unités sur le

 22   front. Quelquefois je portais aussi une kalachnikov ou un fusil

 23   automatique, quelquefois un M-56, cela dépendait des jours.

 24   R.  Oui, on pouvait vous voir à la télévision avec différentes armes.

 25   Q.  Est-ce qu'après le 19 mai 1992, donc après le retrait de la JNA de

 26   Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous m'avez jamais vu revêtu d'un uniforme ?

 27   R.  Je ne me souviens pas. Je ne pourrais affirmer que je vous aurais vu

 28   par la suite revêtu d'un uniforme. Je ne me souviens pas.


Page 3541

  1   Q.  Mais est-ce que vous avez vu les images de télévision me montrant en

  2   train de visiter la Republika Srpska ou la Krajina de la Republika Srpska ?

  3   J'y suis allé à plusieurs reprises, j'ai même organisé des meetings en

  4   Krajina de Republika Srpska. Je suis allé aussi à Okucani. Est-ce que dans

  5   toutes ces occasions, vous avez pu constater et voir à la télévision que je

  6   portais toujours des vêtements civils ?

  7   R.  Oui, je me souviens que les transmissions de votre visite à Okucani à

  8   la télévision vous montraient en civil et d'autres fois aussi.

  9   Q.  Donc en tant que citoyen de la Serbie et en tant que personne ayant

 10   fait son service militaire dans les rangs de la JNA, je n'ai plus jamais

 11   quitté la Serbie en portant un uniforme par la suite ?

 12   R.  Je ne me souviens pas vous avoir vu par la suite revêtu d'un uniforme

 13   en effet.

 14   Q.  Bien. Nous venons de terminer toute une série de questions. Maintenant

 15   j'aimerais que nous parlions des circonstances --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de ma part qui pourrait synthétiser

 17   toute la problématique qu'on découvre par le jeu des questions et des

 18   réponses. M. Seselj semble vous demander de confirmer le point suivant : la

 19   JNA s'est retirée en 1992, à une date que l'on pourra trouver sans problème

 20   particulier. Quand la JNA se retire, il semble ressortir le fait que

 21   Milosevic aurait demandé qu'on envoie des volontaires. Des volontaires

 22   seraient arrivés in situ et ces volontaires auraient été pris à ce moment-

 23   là par les unités locales dites de Défense territoriale qui les auraient

 24   intégrés dans leurs unités. Est-ce bien ce que de votre point de vue vous

 25   avez perçu comme événement lié au retrait de la JNA et à l'arrivée de

 26   volontaires ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est ce qu'il est

 28   permis de conclure. Moi, concrètement, je n'étais pas informé dans le


Page 3542

  1   détail de la façon dont ils arrivaient, dont ils recevaient leurs uniformes

  2   ou leurs armes. Je sais que la JNA était en train de quitter la Bosnie-

  3   Herzégovine à cette époque-là, et que les officiers qui vivaient en Bosnie-

  4   Herzégovine sont passés dans les rangs de l'armée de la Republika Srpska,

  5   et donc comme je l'ai dit dans ma déclaration écrite, c'est seulement par

  6   déduction que je dis qu'il est permis de conclure que les volontaires

  7   appartenaient désormais à l'organisation de l'armée de la Republika Srpska

  8   puisqu'il n'y avait plus de JNA là-bas. Ça c'est qu'on peut déduire de la

  9   suite de la chronologie des événements. Je n'étais plus sur place à ce

 10   moment-là, et en tant que civil, je n'avais plus de détail particulier au

 11   sujet du fonctionnement interne de l'organisation militaire.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Témoin [comme interprété], il faut

 13   que je vous donne un renseignement. Je crois que vous n'avez pas bien

 14   compris une partie de mon contre-interrogatoire.

 15   J'ai dit au cours du contre-interrogatoire que Milosevic avait demandé

 16   l'envoi de volontaires supplémentaires, parce qu'il faut prendre en compte

 17   le contexte, il ne m'a pas demandé officiellement d'envoyer des volontaires

 18   au nom de la Serbie. Mais quand j'ai dit ma crainte et mon opposition au

 19   retrait de la JNA de Bosnie-Herzégovine, quand j'ai demandé comment les

 20   Serbes qui vivaient là-bas pourraient résister aux Croates et aux Musulmans

 21   qui avaient uni leurs forces avec le soutien des puissances occidentales,

 22   il a répondu : "Vous devriez envoyer davantage de volontaires."

 23   La Serbie officiellement n'avait rien à voir avec l'envoi des

 24   volontaires et il n'y a pas la moindre preuve que la Serbie aurait

 25   officiellement participé à l'envoi de ces volontaires. Mais s'agissant de

 26   l'implication de la Serbie officiellement, tout était terminé. Il

 27   appartenait désormais à nous, au Parti radical serbe, à nos représentants

 28   d'apporter leur aide à leurs frères de l'autre côté de la Drina. Je pense


Page 3543

  1   que ceci doit être dit clairement de façon que la déposition de ce témoin

  2   puisse être comprise.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez entendu la précision qui vient d'être

  4   apportée. Qu'est-ce que vous en pensez ? C'est plausible ? Vous ne pouvez

  5   rien dire ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas ce que je pourrais dire de

  7   plus, Monsieur le Président, parce que je ne suis pas initié dans toutes

  8   ces affaires. La seule chose que je peux dire, c'est que la JNA est partie

  9   et que l'armée qui est restée sur place a désormais porté l'appellation

 10   d'armée de la Republika Srpska, et que tout ce qui se faisait localement

 11   était organisé par l'armée de la Republika Srpska. Maintenant comment cela

 12   s'est passé exactement, je ne suis pas initié et je ne saurais vous le dire

 13   exactement.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Je voulais seulement observer que le témoin a rendu

 15   un témoignage assez clair et que c'est à la Chambre d'en tirer les

 16   conclusions.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur Seselj, il nous reste sept

 18   minutes avant la pause.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je vais utiliser ces quelques minutes

 20   pour traiter d'une autre question importante, à savoir les circonstances

 21   générales. Puisque j'en ai terminé avec l'examen des aspects concrets liés

 22   au crime, le Procureur n'avait pas le droit de faire état de crimes

 23   présumés en Slavonie occidentale, donc j'ai été obligé de parler de Vocin,

 24   des civils, des crimes, et cetera, même si le Procureur, je le répète, n'a

 25   pas été en mesure d'asseoir ses affirmations.

 26   M. SESELJ : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur le Témoin VS-004, est-ce que vous êtes au courant du fait que

 28   Franjo Tudjman a été l'un des premiers dans l'ex-Yougoslavie à mettre en


Page 3544

  1   cause officiellement la commission de crimes durant la Seconde Guerre

  2   mondiale et à remettre en question les données officielles à ce sujet ?

  3   R.  Oui, je suis au courant.

  4   Q.  Est-ce que vous savez qu'actuellement certains représentants du régime

  5   actuel le font également, je veux parler de Stipe Mesic et d'autres hauts

  6   responsables de l'Etat ?

  7   R.  Je crois qu'ils s'efforcent de remettre en cause les informations qui

  8   avaient cours durant l'ex-Yougoslavie en les remplaçant par d'autres

  9   éléments d'information dont ils veulent qu'ils soient acceptés largement et

 10   officiellement dans l'opinion.

 11   Q.  Savez-vous que lorsqu'on parle du nombre des victimes de Jasenovac au

 12   procès de Nuremberg le chiffre utilisé a été celui de 700 000 victimes ?

 13   R.  Oui. C'est le chiffre qui a été avancé officiellement jusqu'à la

 14   dernière guerre dans l'ex-Yougoslavie.

 15   Q.  Savez-vous que la majorité des Etats occidentaux sanctionnent toute

 16   tentative de réduction du nombre des victimes d'un événement de la Seconde

 17   Guerre mondiale en tant que crime de guerre ?

 18   R.  Oui. Je sais que c'est une question particulièrement sensible et qu'il

 19   est interdit de le faire.

 20   Q.  En général ceux qui veulent réduire le nombre de victimes sont des

 21   forces revanchistes et pronazi dans certains pays, n'est-ce pas ?

 22   R.  Je dirais plutôt que ceux qui veulent réduire le nombre des victimes

 23   sont ceux dont les ressortissants sont responsables de ces crimes ou y ont

 24   participé.

 25   Q.  Savez-vous que Franjo Tudjman s'est efforcé de réduire à 40 000 le

 26   nombre officiel des victimes de Jasenovac ? 

 27   R.  Oui. C'était son objectif et son intention.

 28   Q.  Savez-vous que Stipe Mesic et les représentants officiels de la Croatie


Page 3545

  1   actuelle s'efforcent de réduire à un chiffre situé entre 80 000 et 100 000

  2   le nombre des victimes de Jasenovac ?

  3   R.  Oui. Certaines recherches et certaines études menées en Croatie

  4   actuellement avancent ce genre de chiffres.

  5   Q.  Est-ce que vous avez entendu parler de Yad Vashem, un grand musée de

  6   l'Holocauste en Israël ?

  7   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

  8   Q.  Avez-vous entendu dire que selon les chiffres officiels de Yad Vashem

  9   600 00 personnes auraient été tuées à Jasenovac ?

 10   R.  Oui, j'ai entendu ce chiffre.

 11   Q.  Connaissez-vous le nom de Miroslav Krleza ?

 12   R.  Bien sûr, je le connais.

 13   Q.  Conviendrez-vous avez moi que Miroslav Krleza est l'un des plus grand

 14   écrivain croate de tous les temps ?

 15   R.  Je suis d'accord.

 16   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que Miroslav Krleza a dirigé l'institut

 17   lexicographique dont le siège était à Zagreb pendant plusieurs décennies ?

 18   R.  Oui, je suis d'accord avec vous.

 19   Q.  Savez-vous que l'encyclopédie yougoslave à la rédaction de laquelle il

 20   a participé a fait savoir que 500 à 600 000 Serbes, Croates et Juifs ont

 21   été assassinés à Jasenovac ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Avez-vous entendu parler de Jakov Gelo, un démographe ?

 24   R.  Non, je n'ai pas entendu parler de lui.

 25   Q.  Donc vous ne savez pas qu'à Zagreb il a publié en 1987 un livre

 26   intitulé "Transformations démographiques en Croatie entre 1870 et 1981" et

 27   qu'il a dit que plus de 700 000 personnes avaient été tuées à Jasenovac,

 28   c'était l'édition Globus qui a fait paraître cet ouvrage ?


Page 3546

  1   R.  J'en ai entendu parler, mais je n'en ai pas un souvenir précis.

  2   Q.  Vous rappelez-vous qu'en 1961 et 1962 un groupe de cinq professeurs

  3   d'université, au nombre desquels on trouvait le Pr Ante Pogacnik, légiste

  4   de Ljubljana; le Pr Ante Predl, professeur de médecine légale; et le Dr

  5   Zivanovic, anthropologue retraité, professeur de l'université à Londres; et

  6   le Dr Zdravko Maric, archéologue, professeur d'université à Sarajevo; ainsi

  7   qu'un cinquième professeur d'université, et que ce groupe a conclu que dans

  8   les seules fosses de Jasenovac avaient été enterrés plus de 700 000

  9   cadavres ?

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez moins vite parce que les interprètes ont du

 11   mal à suivre.

 12   M. SESELJ : [interprétation]

 13   Q.  Ma question est la suivante : est-ce que vous savez que cette

 14   commission qui a été composée majoritairement de Croates et de Slovènes est

 15   arrivée à la conclusion, et ce, sur la base de données recueillies sur le

 16   terrain, que dans les fosses qui ont été étudiées plus de 700 000 cadavres

 17   ont été ensevelis ?

 18   R.  Oui, j'ai entendu ça.

 19   Q.  Ils n'ont pas pu étudier la situation devant toutes les fosses parce

 20   que c'est une région où il y a souvent des inondations de la Sava et il y a

 21   beaucoup de corps qui ont été emportés par la rivière; c'est bien cela ?

 22   R.  Oui, je suis au courant de ça.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 10 heures, nous allons faire une pause de 20

 24   minutes.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 00.

 26   --- L'audience est reprise à 10 heures 20. 

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est donc reprise à 10 heures 20

 28   minutes. Je donne la parole à M. Seselj.


Page 3547

  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur VS-004, avez-vous entendu parler du centre de Simon Weisenthal

  3   pour la persécution des criminels de guerre, cette institution est située à

  4   Vienne ?

  5   R.  J'entends la question de M. Seselj, mais la traduction que j'entends

  6   est en anglais et ça créé une confusion. J'entends la traduction en anglais

  7   dans le casque. Or, j'entends la voix de M. Seselj dans l'original.

  8   Oui, j'ai entendu parler du centre de Simon Weisenthal.

  9   Q.  Savez-vous que le centre de Weisenthal officiellement considère qu'il y

 10   a eu 600 000 victimes du camp de Jasenovac pendant la Seconde Guerre

 11   mondiale ?

 12   R.  Oui, j'ai entendu cela.

 13   Q.  Par conséquent il et évident qu'on ne saura jamais le chiffre exact,

 14   puisque des agglomérations entières ont été anéanties. Mais de toute

 15   évidence il n'y a pas eu moins de 600 000 victimes, n'est-ce pas ?

 16   R.  Il est exact que jamais on ne connaîtra le chiffre exact. Nous les

 17   Serbes qui estimons être des victimes là dans ces contrées, nous pensons

 18   que le chiffre de 600 000 est exact.

 19   Q.  Vous avez également dit que beaucoup de vos proches, membres de votre

 20   famille ont été victimes du camp de Jasenovac ?

 21   R.  Oui. A Gradiska, le camp de Stara Gradiska qui faisait partie du camp

 22   de Jasenovac.

 23   Q.  Dix-sept de vos plus proches ont été tués ?

 24   R.  Dix-sept uniquement du côté de mon père.

 25   Q.  Votre père et votre mère en tant qu'enfant, mais ceci ne révèlera pas

 26   l'identité du témoin, n'intervenez pas. J'en tiens compte.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aurai quelques questions à poser vers la fin


Page 3548

  1   de mon contre-interrogatoire, mais je vous en avertirai. Ceci comportera

  2   quelques renseignements personnels, et cetera, mais maintenant ceci ne

  3   permettra pas à l'opinion de connaître l'identité du témoin.

  4   M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Vous êtes bien d'accord avec moi, Monsieur V-004, ceci ne peut pas

  6   révéler votre identité ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Votre père et votre mère ont connu un sort comparable, c'étaient des

  9   enfants au moment de la guerre ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Savez-vous que l'Etat Oustacha de Pavelic, dans le cadre de sa

 12   politique officielle, enlevait des enfants mineurs aux Serbes liquidés et

 13   les remettait à des familles croates pour qu'ils soient élevés, pris en

 14   charge, éduqués par ces familles-là ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Plusieurs dizaines de milliers d'enfants ont connu ce sort-là; c'est

 17   bien cela ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  La majorité de ces enfants était si petits qu'ils ignoraient

 20   complètement l'identité de leurs parents. Ils ne savaient ni qui était leur

 21   père, ni qui était leur mère et il leur aurait été très difficile de

 22   découvrir cela après la guerre ?

 23   R.  Oui, il y a eu des cas comme ça.

 24   Q.  Bien entendu, il y a beaucoup de Croates qui sont intègres et honnêtes

 25   et vos parents ont eu la chance que c'est ce type de famille qui les prenne

 26   en charge, n'est-ce pas, mais il y en a eu d'autres qui ont procédé à une

 27   conversation catholicisme immédiatement de ces enfants, les ont rebaptisés,

 28   et cetera, n'est-ce pas ?


Page 3549

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  


Page 3550

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Un autre détail qui concerne la déclaration que vous avez donnée au

  3   bureau du Procureur. Vous auriez dit, paraît-il, que le 19 décembre, les

  4   volontaires du Parti radical serbe auraient bu à Masicka Sagovina et que

  5   des Croates les auraient tués. Est-ce que vous avez déclaré cela ?

  6   R.  Oui, j'ai entendu dire cela et c'est ce que j'ai déclaré.

  7   Q.  Qui vous a dit qu'ils ont bu et que c'est à cause de cela qu'ils ont

  8   été tués ?

  9   R.  Cette date, on la cite parce qu'il s'agit d'une grande fête de Saint-

 10   Nicolas, et j'ai compris d'après ce qu'on m'a raconté qu'ils ont fêté et

 11   c'est ce que j'ai appris à la fin de '91, début '92.

 12   Q.  Masicka Sagovina, c'est un endroit où l'on fête plutôt la Saint-

 13   Georges, n'est-ce pas, et non pas ce que vous venez de dire.

 14   R.  Je ne sais pas, peut-être que ces gens-là avaient pour saint Saint-

 15   Nicolas, ou peut-être était-ce l'un de leur camarade de guerre qu'ils

 16   avaient pour saint.

 17   Q.  Mais est-ce que vous vous souvenez qui vous a dit qu'ils ont bu ?

 18   R.  Je ne me souviens pas.

 19   Q.  Et vous savez que ce jour-là des unités paramilitaires croates ont

 20   attaqué Masicka Sagovina en employant des forces très importantes ?

 21   R.  Ces jours-là il y a eu une offensive plus importante en Slavonie

 22   occidentale à partir de Pakrac --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à M. le Greffier de passer à huis

 24   clos pendant quelques instants, parce que j'ai une question à soumettre à

 25   la Chambre.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 27   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre] 

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. J'interviens parce que tout à l'heure M. Seselj


Page 3551

  1   a posé des questions au témoin sur le fait que des orphelins serbes

  2   auraient été adoptés et confiés à des familles croates pendant la Seconde

  3   Guerre mondiale. Cet événement que je découvre à l'instant a peut-être été

  4   vrai ou peut-être c'est faux. Mais je me place à ce moment même dans la

  5   position de Croates qui entendraient cela et qui pourraient se poser des

  6   questions sur leur lien familial avec leurs propres parents. Donc je vais

  7   demander à mes collègues s'il convient ou pas d'expurger cette partie

  8   puisque dans les 30 minutes on a encore le temps de prendre une ordonnance

  9   d'expurgation. Ces problèmes d'adoption sont toujours des problèmes humains

 10   très délicats et que certains pourraient, apprenant cela, subir un

 11   traumatisme, poser des questions à leurs parents, et cetera, et je voudrais

 12   me consulter avec mes collègues pour savoir qu'est-ce qu'on décide.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant cela puis-je dire quelque chose, Monsieur

 14   le Président ?

 15   C'est de notoriété publique, c'est quelque chose qui a été décrit dans un

 16   grand nombre de livres, de journaux, ce n'est un secret pour personne. Et

 17   pratiquement tous ces enfants, à moins qu'ils aient été des tout petits

 18   bébés, à ce moment-là ils ont cherché à connaître leur identité et c'est

 19   avec beaucoup de difficultés qu'ils ont pu connaître leurs origines. Mais

 20   si vous prenez ici une position de principe comme ça et si vous évitez de

 21   faire connaître cela au public, vous ne protégerez personne. Vous ne

 22   susciterez aucun trouble auprès de personne, je pense, si ceci est révélé

 23   parce que tout le monde le connaît. Je pense que M. le Témoin le sait.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, bon, la Chambre qui a délibéré a juste une

 26   question à poser au témoin.

 27   Monsieur le Témoin, vous avez entendu les questions qui ont été posées là-

 28   dessus. A votre niveau, est-ce que ça a une répercussion ou pas pour vous ?


Page 3552

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Ces enfants, ils

  2   ont aujourd'hui 70 ans, s'ils sont encore en vie. On est au courant d'un

  3   grand nombre de personnes qui ont connu ce destin, en particulier pour des

  4   enfants du mont de Kozara. On sait que Jasarebasko [phon] a été un camp

  5   pour enfants unique en Europe, que nombre de ces enfants ont été placés

  6   dans des familles et qu'ils n'ont pas pu connaître l'identité de leurs

  7   parents, pour certains, ils l'ont connue. C'était l'une des choses qui se

  8   sont produites pendant la Seconde Guerre mondiale.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, d'accord. Alors la Chambre qui a délibéré

 11   décide de laisser publique toute la partie.

 12   Bien. Alors on repasse en audience publique.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'exige que la partie de

 14   l'audience qui a été à huis clos partiel soit également révélée au public,

 15   je pense que le public est en droit de savoir quels sont les dilemmes qui

 16   se sont posés devant les Juges de la Chambre à un moment donné, sans que

 17   cela révèle l'identité du témoin.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, la Chambre y répondra.

 19   Continuez votre interrogatoire.

 20   [Audience publique]

 21   M. SESELJ : [interprétation]

 22   Q.  Avez-vous entendu dire que plus de 20 000 enfants mineurs serbes ont

 23   été tués au camp de Jasenovac ?

 24   R.  Oui. C'est un chiffre que j'ai rencontré dans le public.

 25   Q.  Et le gouvernement Oustacha d'Ante Pavelic, pour un certain nombre

 26   d'enfants, orphelins de parents serbes, a placé pour adoption dans des

 27   familles croates pour qu'ils deviennent Croates ?

 28   R.  C'était leur objectif à l'époque.


Page 3553

  1   Q.  C'était leur objectif. Revenons à Masicka Sagovina. Quelqu'un vous a

  2   dit, un inconnu, que ces volontaires avaient bu. Est-ce que vous savez que

  3   les volontaires du Parti radical serbe à Masicka Sagovina ont défendu de

  4   manière décidée et persévérante tant que toute la population n'a pu être

  5   évacuée, qu'ils se sont sacrifiés pour que d'autres puissent se sauver.

  6   Est-ce que vous avez entendu parler de cela ?

  7   R.  J'ai entendu dire qu'il y a eu des combats, mais les détails que vous

  8   venez de citer, non.

  9   Q.  Est-ce que vous savez que 11 volontaires du Parti radical serbe ont été

 10   tués ce jour-là et qu'un certain nombre d'entre eux ont été blessés et

 11   qu'ils ont été capturés ?

 12   R.  Je ne connais pas le nombre exact de tués, je sais qu'il y en a eu pas

 13   mal, je sais que certains ont été capturés.

 14   Q.  Est-ce que vous savez que parmi les capturés il y a eu également Dusica

 15   Nikolic, une jeune femme, qui par la suite a été députée du Parti radical

 16   serbe à l'assemblée serbe ?

 17   R.  J'ai entendu ça.

 18   Q.  Dans une prison croate, elle a fait l'objet de tortures des plus

 19   brutales, des plus cruelles. Le savez-vous ?

 20   R.  Oui, j'ai entendu dire cela.

 21   Q.  Est-ce que vous savez qu'aucun de ces volontaires capturés n'a fait

 22   l'objet de poursuite par des autorités croates ? Au bout de quelques mois,

 23   ils ont tous été relâchés, le savez-vous ?

 24   R.  Oui, c'était au moment des échanges.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, on repasse en audience à huis

 26   clos.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre] 


Page 3554

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Seselj, vous avez indiqué que Dusica

  2   Nikolic, qui a été donc députée, avait été emprisonnée dans une prison

  3   croate et qu'elle a fait l'objet de tortures cruelles, et cetera. Alors moi

  4   je ne sais pas si c'est un fait de notoriété publique, mais je me pose la

  5   question de savoir si Mme Dusica Nikolic serait d'accord à ce qu'on évoque

  6   sa situation. Donc voilà le problème. Pouvez-vous me confirmer que ceci a

  7   été de notoriété publique ? Ça a fait l'objet d'un jugement, d'enquête,

  8   parce que peut-être que Mme Nikolic ne tient pas à ce que ceci soit porté

  9   sur la place publique.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Dusica Nikolic vit à

 11   Belgrade. S'agissant de ses tortures dans les prisons croates, elle en a

 12   parlé beaucoup au sein du parlement serbe. Elle a accordé plusieurs

 13   entretiens aux journaux. Elle viendra ici en tant que témoin de ma défense.

 14   Elle viendra témoigner publiquement ici parce que je n'aurai aucun témoin

 15   secret, donc elle viendra parler ouvertement, publiquement de tout ce

 16   qu'elle a subi en prison en Croatie.

 17   Vous voyez, même le témoin a entendu parler de ce cas, il n'en aurait

 18   pas entendu parler si ça n'avait pas été quelque chose dont l'opinion a été

 19   avertie. Il n'y a eu aucun procès à ce sujet, car les autorités croates

 20   hésitent à engager des poursuites contre leurs propres criminels. C'est

 21   uniquement si elles subissent des pressions venues de l'extérieur qu'elles

 22   s'y résignent. Sinon leurs criminels passent impunis.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors on va repasser en audience publique

 24   et tout ce passage peut être public.

 25   M. SESELJ : [interprétation]

 26   Q.  Revenons maintenant à un certain nombre de détails --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut que le greffier dise qu'on est en audience

 28   publique.


Page 3555

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience publique,

  2   Monsieur le Président.

  3   [Audience publique]

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors en audience publique, j'indique qu'en

  5   audience à huis clos on a abordé la situation de Mme Dusica Nikolic. Donc

  6   M. Seselj nous a annoncé que cette dame sera dans le futur un témoin de la

  7   Défense. De ce fait, tout le passage qui avait été à huis clos devient

  8   public.

  9   M. SESELJ : [interprétation]

 10   Q.  Fin 1991, on a adopté le plan Vance visant à déployer les forces des

 11   Nations Unies en Krajina serbe, Slavonie occidentale, Slavonie orientale,

 12   la Baranja et le Srem occidental, et c'est un plan portant sur le repli de

 13   la JNA de ces mêmes régions ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  A un moment quelconque, où que ce soit, les Serbes, après le

 16   déploiement de la FORPRONU, ont-ils engagé le combat, ont-ils ouvert le feu

 17   de leur propre chef contre les Croates ?

 18   R.  Il n'y a pas eu d'actions armées. Du moins pour autant que je le sache,

 19   en Slavonie occidentale il y a eu quelques groupes qui ont fait des

 20   incursions en profondeur derrière la ligne de séparation établie, à

 21   l'époque il y a eu quelques embuscades tendues aux policiers, il y a eu

 22   même des civils tués.

 23   Q.  C'était des groupes croates qui ont fait incursion sur le territoire

 24   serbe ou l'inverse en passant par cette ligne de séparation ?

 25   R.  Ce que je viens de citer, c'était des groupes serbes qui s'infiltraient

 26   en traversant la ligne de séparation. Ils se rendaient dans leurs villages,

 27   et je suppose qu'ils tombaient sur une patrouille policière qu'ils ont

 28   éliminée, et puis il y a eu des cas où on a aliéné des véhicules et des


Page 3556

  1   civils croates en Slavonie occidentale.

  2   Q.  Mais on ne peut pas dire que c'étaient des combats armés, c'étaient des

  3   incidents, n'est-ce pas ? C'étaient des individus qui agissaient de leur

  4   propre chef, de manière isolée ?

  5   R.  Oui, c'étaient des incidents.

  6   Q.  Et les armes de l'armée serbe de la Krajina étaient placées doublement

  7   sous clé ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  La FORPRONU les contrôlait d'une part et, d'autre part, c'était

 10   contrôlé en Slavonie occidentale par les autorités ?

 11   R.  Oui, mais c'était des armes lourdes.

 12   Q.  Et les QG de la Défense territoriale continuaient d'opérer, même si les

 13   employés se rendaient au travail en civil; c'est bien ça ?

 14   R.  C'était en 1992 et en 1993. Après, les QG avaient repris les uniformes

 15   et c'est comme ça qu'ils sont restés jusqu'à fin 1995.

 16   Q.  Mais c'était uniquement à partir du moment où les Croates se sont mis à

 17   attaquer certains territoires passés sous la protection de la FORPRONU,

 18   c'est là qu'ils ont repris l'uniforme et l'arme.

 19   R.  C'était après Maslenica, je pense que ça s'est produit en janvier 1993.

 20   Il y a eu un changement d'autorité en Slavonie occidentale parmi nos

 21   dirigeants. Les rapports de force ont changé, les QG ont repris les armes.

 22   Q.  Est-ce que vous savez qu'en septembre 1993 une attaque a été menée par

 23   des forces croates sur la poche de Medak, dans la Krajina serbe ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Dans le cas de cette attaque, est-ce qu'on a tué tous les civils qu'on

 26   a trouvés sur place ? Est-ce qu'on a incendié les villages - Citluk,

 27   Divoselo et Pocitelj - placés sous le contrôle de la FORPRONU. Ces trois

 28   villages ont été rasés ?


Page 3557

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous savez qu'un général de la FORPRONU, Jean Cot, a déclaré

  3   à cette occasion qu'il s'était rendu sur place et qu'il n'a trouvé aucune

  4   trace de vie, qu'il s'agisse d'hommes ou d'animaux, que le degré de

  5   destruction menée par les forces croates étaient systématique, intentionnel

  6   et entier ?

  7   R.  Oui, je m'en souviens.

  8   Q.  Vous avez mentionné la Slavonie occidentale, vous avez parlé de la

  9   destruction des villages serbes. En tout, quel est le nombre de villages

 10   serbes qui ont été incendiés, détruits, anéantis par des Croates après le

 11   mois de décembre 1991 lorsqu'ils se sont emparés de la majeure partie de la

 12   Slavonie occidentale ?

 13   R.  Cent soixante-cinq villages ont été entièrement détruits en Slavonie

 14   occidentale.

 15   Q.  Il y en a eu une vingtaine qui ont été partiellement détruits en plus;

 16   c'est bien ça ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  En 1995, le 1er mai, les Croates ont lancé l'opération connue sous le

 19   nom d'Eclair, c'est bien ça ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  L'objectif de cette opération était de s'emparer de toute la Slavonie

 22   occidentale et de chasser la population serbe qui y résidait; c'est bien ça

 23   ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Ces parties-là de la Slavonie occidentale étaient placées

 26   officiellement sous la protection de la FORPRONU, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que cela veut dire --


Page 3558

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : A deux reprises M. Seselj vous demande de confirmer

  2   que ces territoires étaient sous la protection de la force de l'ONU,

  3   l'"UNPROFOR", d'après vous ça veut dire quoi, c'est quoi cette protection ?

  4   Elle aurait consisté en quoi au juste ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette région, il y avait le déploiement

  6   des forces des Nations Unies, Monsieur le Président, à la fois c'était des

  7   militaires et la police. C'est eux qui exerçaient le contrôle dans cette

  8   région pour qu'il n'y ait pas de guerre entre les Serbes et les Croates, la

  9   guerre qui avait éclaté en 1991. Entre-temps, il y a eu plusieurs

 10   résolutions qui ont modifié les compétences des Nations Unies, donc à la

 11   fin, en 1995, ils ont décidé que c'était une zone de protection en Croatie,

 12   et c'est ce qui a encouragé les Croates à penser que c'était leur

 13   territoire et qu'ils étaient en droit d'attaquer. Sinon, normalement, ils

 14   n'avaient pas le droit d'attaquer, parce que c'était sous la protection des

 15   Nations Unies. Et les forces des Nations Unies devaient empêcher qu'il y

 16   ait un conflit qui n'éclate et devaient mettre en garde, à l'époque, la

 17   population du fait qu'une action ou une opération était en préparation du

 18   côté croate pour que la population soit prête et qu'il n'y ait pas de

 19   victimes comme ça s'est produit dans la poche de Medak, comme ça s'était

 20   produit en Slavonie occidentale.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Selon votre opinion, la force de l'ONU,

 22   l'"UNPROFOR", avait le mandat de s'opposer militairement à toute attaque ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une question délicate. Je vais essayer

 24   de vous tirer ça au clair.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est parce quelle est délicate que je vous la pose.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] J'accepte. Lorsque j'ai négocié avec les

 27   Nations Unies, avec la FORPRONU, au cours de l'année 1992, et en Slavonie

 28   occidentale lorsque nous avons procédé à la démilitarisation, les armes


Page 3559

  1   lourdes ont été placées sous contrôle, des membres de la Défense

  2   territoriale étaient en civil désormais et seule la police - avec des

  3   canons courts, à savoir des pistolets - était en armes, à partir de ce

  4   moment-là le commandant du secteur ouest nous a donné la garantie qu'en cas

  5   d'attaque menée par l'armée croate ils allaient riposter en défendant ce

  6   territoire contre l'armée croate.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : C'était qui le commandant qui vous a donné cette

  8   garantie ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était le général Zabala, il était le

 10   commandant du Bataillon argentin, je ne me souviens pas de son prénom. En

 11   1992, c'est par écrit qu'il nous a fourni ces garanties et, vers le 2

 12   septembre 1992, on a vu arriver sur ce territoire Marrack Goulding, qui

 13   était le vice-secrétaire général des Nations Unies pour nous féliciter de

 14   la bonne mise en œuvre du plan Vance et pour apporter le soutien à notre

 15   action.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous dites que vous aviez eu un écrit de

 17   ce général argentin qui s'était engagé à intervenir si jamais votre secteur

 18   était attaqué ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ainsi que cela s'est passé,

 20   Monsieur le Président, en 1992.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et la suite des événements n'a pas été

 22   conforme -- oui.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je puis ajouter ? Puis au cours de l'année

 24   1993, un ordre a été donné de la part de notre commandant serbe, un général

 25   de la Banija, Novakovic était son nom, que nous en Slavonie occidentale

 26   attaquions avec des chars - nous avions cinq chars en tout - qu'il fallait

 27   qu'on attaque Novska et Gradiska, ce sont des villes placées sous contrôle

 28   croate, des villes voisines, parce que c'est de là qu'une offensive nous


Page 3560

  1   menaçait. Il y a eu une réunion organisée d'urgence entre les représentants

  2   militaires, les autorités civiles, la FORPRONU, et nous pour notre part

  3   avons interdit, nous les civils, que l'on mette les chars en action parce

  4   que le général Zabala nous avait garanti qu'il allait nous protéger en cas

  5   de conflit. Et de nouveau les armes lourdes avaient été placées sous le

  6   contrôle, et je dis dans ces moments délicats, et à l'époque nous avions sa

  7   garantie fournie par lui, et c'est ainsi que nous avons agi dans l'esprit

  8   du respect du plan de Vance.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et après, quand les Croates ont attaqué,

 10   personne n'a respecté les engagements, si je comprends bien.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1995 -- entre-temps j'ai été emprisonné. Je

 12   n'ai plus fait partie des autorités. J'étais un simple citoyen. En 1995,

 13   lorsqu'il y a eu une fois de plus une nouvelle offensive de l'armée croate,

 14   les unités de la FORPRONU se sont écartées, elles se sont retirées de leurs

 15   postes, toutefois une patrouille de cette armée-là a été capturée par une

 16   unité serbe. Elle ne les a pas capturés, elles les a gardés là pour que

 17   nous puissions établir un contact avec les représentants des Nations Unies,

 18   afin que des négociations soient entamées concernant un cessez-le-feu et

 19   nous n'avons réussi qu'au bout de 24 heures à le mettre en place grâce à

 20   cette petite patrouille. Parce qu'ils se sont tous enlevés de là lorsqu'il

 21   y a eu ces offensives à l'artillerie, ils ont tout simplement disparu. On

 22   ne savait pas ce qui se passait et c'était seulement cette patrouille-là

 23   qui nous avait aidé à rétablir le contact qui par la suite a donné lieu à

 24   des négociations jusqu'à la reddition finale.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 26   M. SESELJ : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que l'armée croate dans cette opération Eclair a tué des civils

 28   serbes, ceux sur lesquels elle tombait ?


Page 3561

  1   R.  Oui. Il y a eu des cas où des civils serbes se sont faits tuer.

  2   Q.  Y a-t-il eu beaucoup de civils serbes à être tués sur la route de

  3   Bosanska Gradiska ?

  4   R.  Il en a été longuement question. J'ai eu l'occasion d'entendre les gens

  5   qui ont essayé de se frayer un passage. Ils ont dit qu'il y avait eu

  6   beaucoup de morts gisant, beaucoup de blessés aussi. Il y a eu une

  7   instruction à ce sujet, mais on n'a jamais appris le chiffre final parce

  8   que les traces ont été effacées. Il y a eu bon nombre de gens qui n'avaient

  9   personne des leurs, donc il n'y avait personne pour poser des questions à

 10   leur sujet. Donc nous n'avons jamais su quel a été le nombre de civils

 11   morts pendant le repli.

 12   Q.  Est-ce qu'il est vrai de dire que cette colonne de civils a été

 13   fortement battue par l'artillerie croate ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que l'aviation croate a pris part aux bombardements des civils

 16   lorsque ceux-ci se retiraient ?

 17   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

 18   Q.  Est-il vrai de dire que l'autoroute, la route par laquelle s'étaient

 19   retirés les civils était tellement pleine de sang qu'ils ont dû utiliser

 20   des tuyaux d'arrosage et de la lessive pour laver cela ?

 21   R.  C'est entre Okucani et Gradiska. Ce n'est pas une autoroute, c'est une

 22   route nationale, ça va vers Bosanska Gradiska, cette route.

 23   Q.  Savez-vous nous dire qui était le lieutenant-colonel Harambasic ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Ce lieutenant-colonel Harambasic était-il le commandant des forces

 26   serbes à Pakrac ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que le lieutenant-colonel Harambasic avait négocié par le biais


Page 3562

  1   des Nations Unies avec les Croates afin que son unité rende les armes à la

  2   FORPRONU afin que les Serbes sans armes puissent se retirer de ce

  3   territoire et faire sortir 1 500 soldats et 4 000 civils ?

  4   R.  Il y a eu des négociations pour ce qui est d'une reddition, j'y ai pris

  5   part en personne et le dépôt des armes s'est fait, il a été question de

  6   faire partir les soldats qui voulaient s'en aller.

  7   Q.  Serait-il exact de dire que dès que les Serbes ont remis leurs armes,

  8   l'artillerie croate s'est mise à leur tirer dessus et a demandé une

  9   reddition inconditionnelle ?

 10   R.  Après toutes ces négociations qui ont duré, il devait y avoir une

 11   négociation finale qui a été remise à plus tard ou reportée à trois

 12   reprises, à proximité de nous autres négociateurs il y avait des

 13   représentants des observateurs européens qui ont tout le temps été présents

 14   aux négociations. Lors de ces ajournements de négociations, il y a eu

 15   pilonnage. Pendant le pilonnage on nous a fait savoir qu'on demandait une

 16   reddition inconditionnelle de civils parce qu'il n'y avait plus de soldats

 17   portant armes. Ils avaient tous enlevé leurs uniformes et ils étaient tous

 18   des civils et ils attendaient l'évolution de la situation. Par la suite, il

 19   y a effectivement eu reddition.

 20   Q.  Qu'est-il advenu de ces soldats une fois qu'ils se sont rendus ?

 21   R.  Presque tous entre 18 et 60 ans, et il y avait des gens qui avaient 80

 22   ans et qui ont été capturés pour être emmenés vers les prisons de Bjelovar,

 23   Varazdin, Pozega, Osijek. Il y a eu des prisons privées pendant un certain

 24   temps, c'est du moins ce qu'on m'a dit, un bon nombre d'entre eux,

 25   notamment à Varazdin, ont été malmenés fortement sur le plan physique.

 26   Certains ont péri, d'autres ont mis le temps à se remettre et un certain

 27   nombre d'entre eux ont été relâchés suite à instruction, interrogatoire.

 28   Lors de leur retour jusqu'à Pakrac par autocars, la police les a obligés à


Page 3563

  1   se donner des gifles l'un à l'autre et il est arrivé que les frères se

  2   donnent des baffes sur ordre de la police. Il est venu des gens qui ont

  3   quitté la Slavonie occidentale parce qu'ils avaient eu des craintes et ils

  4   ont redouté les séquelles, et il y en a eu d'autres qui la nuit ont été

  5   malmenés. Le cas notoirement connu est celui du village de Brusnik où des

  6   policiers venaient la nuit chez eux et les obligeaient à lécher du sel, ils

  7   ont donc ramassé et plié bagages et sont partis avec leurs familles vers la

  8   Serbie.

  9   Q.  Est-il exact de dire que dans cette offensive Eclair quelque 20 000

 10   Serbes ont été chassés du territoire de la Slavonie occidentale ?

 11   R.  C'est le chiffre dont il a été question à l'époque. Il y a eu quelque

 12   15 000 personnes sur le territoire d'Okucani, et 5 et 6 000 sur le

 13   territoire de Pakrac.

 14   Q.  Serait-il exact de dire qu'à l'époque seulement 1 000 Serbes sont

 15   restés sur le territoire de la Slavonie occidentale ?

 16   R.  Tout de suite après ces événements et après l'exode, après le départ

 17   des gens, nous avons procédé à un recensement pour le cas où il y aurait

 18   des événements, nous devions forcément savoir qui est-ce qui manquait, et

 19   nous en sommes arrivés à un chiffre de 1 700 personnes, 1 700 Serbes à être

 20   restés.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça n'a pas l'air de marcher. Le micro ne se met

 22   pas en marche. Il ne réagit pas. Ah, le voilà. J'ai essayé d'être assez

 23   attentionné mais je ne sais pas.

 24   M. SESELJ : [interprétation]

 25   Q.  Est-il exact de dire que les maisons serbes ont également été pillées

 26   et incendiées à ce moment-là ?

 27   R.  C'est arrivé sur le territoire d'Okucani et sur le territoire de Pakrac

 28   où nous nous trouvions nous autres il y a eu des pillages, mais il n'y a


Page 3564

  1   pas eu de mise à feu.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le voilà, c'est bon.

  3   M. SESELJ : [interprétation]

  4   Q.  Est-il exact de dire que les civils serbes restant ont été massivement

  5   malmenés et que certains ont même été tués ?

  6   R.  Il n'y a pas eu d'exécution massive. Il y a eu des exécutions de

  7   personnes et personne n'a encore été tenu responsable de la chose, il y a

  8   eu de mauvais traitements par contre et j'ai été personnellement présent à

  9   l'occasion de ces mauvais traitements dans un village, les villageois m'ont

 10   demandé de les emmener de là-bas, qu'ils avaient beaucoup de problèmes,

 11   qu'ils étaient malmenés, et à l'instant même dès que je suis revenu --

 12   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Simplement une remarque. Tous ces

 13   événements se sont déroulés en 1995. Ce qui est tout à fait après l'acte

 14   d'accusation.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, quelle est la pertinence de ce qui

 16   s'est passé en 1995 par rapport à ce que vous voulez démontrer ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tous ces événements nous disent quelle a été

 18   l'attitude des autorités croates à l'égard des civils serbes, et cette

 19   attitude-là a duré dans la continuité sur cinq ans de façon identique,

 20   égale. C'est pour cela que c'est important. Il importe de dire que les

 21   Serbes de là-bas n'avaient pas d'autre issue si ce n'est de s'opposer

 22   l'arme à la main à ces attaques croates. Leur sort final est la meilleure

 23   des preuves possibles que c'était la seule façon de faire. Ils n'ont pas

 24   réussi à gagner, à vaincre et à préserver leurs villages et leurs maisons.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, j'ai une question à vous poser. Puisque

 26   même si en 1995, ce n'est pas dans l'acte d'accusation, vous, vous étiez

 27   présent dans les environs de Pakrac, et vous avez donc été un témoin de

 28   l'offensive "Flash" menée par l'armée croate. Il apparaît d'après les


Page 3565

  1   questions qui vous ont été posées et vos réponses que 20 000 Serbes

  2   auraient quitté les lieux, auraient été expulsés. Et c'est ça qui

  3   m'intéresse. C'est d'essayer de comprendre pourquoi tous ces gens sont

  4   partis de telle sorte qu'il ne restait sur place, d'après les recensements

  5   que vous avez effectués, que 1 700 Serbes.

  6   Alors, vos voisins ou les personnes de cette région, quand elles sont

  7   parties, elles sont parties parce qu'elles avaient peur de ce qui allait

  8   arriver ou bien parce qu'il y avait des ordres qui avaient été donnés

  9   qu'elles s'en aillent ? Etait-ce plutôt un départ lié à un sentiment de

 10   panique fort compréhensible dans ce type de situation, ou bien à un plan

 11   concerté qui faisait que ces gens devaient partir ? Qu'est-ce que vous

 12   pouvez nous donner comme éclairage, puisque vous étiez présent, donc vous

 13   avez vécu tout cela, et vous-même, pourquoi vous n'êtes pas parti aussi ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, le territoire de Slavonie

 15   occidentale était spécifique parce qu'il s'y est développé une façon de

 16   vivre normale. Il y a eu des contacts, des communications avec la partie

 17   adverse, pour ce qui est des Croates. Il y a même eu des projets à

 18   plusieurs endroits où les parents, la famille et les amis s'étaient réunis.

 19   On a ouvert l'autoroute, les Serbes allaient massivement vers les stations

 20   à essence croates pour acheter du carburant. Puis, il y a eu délibérément

 21   des incidents créés par la Croatie parce qu'à cette station d'essence, il y

 22   a eu un Serbe tué au couteau. Je vais vous donner cela en exemple, un

 23   cadavre gît au niveau d'une station tué par un Croate au vu et au su de

 24   tout le monde. Les gens continuent à verser du carburant dans le réservoir

 25   sans prêter attention, ne pensant pas que ce serait un danger généralisé

 26   mais un incident. Il y a eu fermeture de l'autoroute par la police croate

 27   pour empêcher ce type de contact afin qu'il n'y ait pas, d'après leur

 28   explication, de nouveau meurtre.


Page 3566

  1   Alors, lorsqu'il y a eu cette offensive généralisée avec une forte

  2   intervention de l'artillerie et des chars, il y a certainement eu panique

  3   et peur de ces gens pour qu'il n'y ait pas eu le sort de la poche de Medak,

  4   comme le pont de Maslenica. Et par peur, ils ont fui, ils ont quitté ce

  5   territoire. Nous qui sommes restés là-haut, dans le secteur de Pakrac,

  6   d'abord pendant quatre jours, nous avons été encerclés dans une enclave, et

  7   comme je l'ai déjà dit auparavant, grâce à cette patrouille qui a été

  8   gardée là nous avons eu un contact avec les Nations Unies, nous avons pu

  9   négocier pendant quatre jours. En notre qualité de groupe, groupe de 4, 500

 10   à  5 000 personnes qui ont réussi à se maintenir là, nous sommes restés

 11   jusqu'au 4 mai. Après avoir été tabassés en prison, après tous les mauvais

 12   traitements, les gens sont partis en bon nombre. Un certain nombre de

 13   conscrits avaient redouté la possibilité d'être mobilisés pour aller

 14   combattre d'autres parties de la République de Krajina. Ils ne se sentaient

 15   pas en sécurité.

 16   Nous essayions de les convaincre d'essayer de rester, de prendre des

 17   pièces d'identité de la part des nouvelles autorités de la République de

 18   Croatie et de continuer à nous battre pour nos droits, nous n'avons pas

 19   trouvé sol fertile pour nos dires. Les gens ont été tabassés, ils ne

 20   croyaient plus à personne. Je sais que je me suis entretenu avec bon nombre

 21   d'observateurs européens et ils m'ont dit, c'est votre obligation, c'est

 22   votre droit de l'homme que de vous battre pour vivre ici, pour combattre en

 23   faveur de vos droits. Tout départ d'ici signifierait que vous avez renoncé

 24   à ce qui vous appartient. Donc certains de mes collègues et moi-même avons

 25   décidé de rester. Je vais vous dire, ça a été très, très dur parce que ceux

 26   qui sont restés jusqu'à nos jours - et ça fait déjà 12, 13 ans - n'arrivent

 27   pas à trouver du travail dans les services publics et il n'y a que chez les

 28   privés qu'ils peuvent travailler, mais en tant que main-d'œuvre physique.


Page 3567

  1   Nous n'avons aucun droit de citoyenneté pour ce qui est du travail et pour

  2   ce qui est du droit à la consommation, oui, on l'a, mais là aussi, il y a

  3   eu des difficultés après cette opération Eclair. A Noël, en 1996, nous

  4   avons eu des extrémistes qui ont fait irruption, qui nous ont pris par la

  5   poitrine et qui nous ont menacés. C'était des temps durs, et je vous dis

  6   que de nos jours encore c'est dur; vous n'avez pas le droit au travail, et

  7   lorsque vous n'avez pas le droit de travailler, vous n'avez pas le droit à

  8   l'existence.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Cette réponse est complète.

 10   M. SESELJ : [interprétation]

 11   Q.  Lorsque vous parlez du droit au travail, serait-il exact de dire que

 12   les autorités croates ont dépossédé de leur droit au logement tous les

 13   Serbes qui ont été chassés du territoire de la Croatie, ou qui sont partis

 14   par peur, d'eux-mêmes ?

 15   R.  Oui, ça c'est un fait notoirement connu. Le droit de locataire a été

 16   retiré aux Serbes qui ont -- ça a été retiré parce que les gens n'étaient

 17   pas dans leur appartement pendant plus de six mois. Bon nombre d'entre eux

 18   ont été menacés, d'autres ont été expulsés, c'est-à-dire qu'ils sont partis

 19   au travail et ils ont retrouvé dans leur appartement quelqu'un d'autre qui

 20   a changé les serrures et qui ne laissait plus entrer personne d'autre.

 21   Q.  Etant donné que les Juges de la Chambre ignorent probablement ce que

 22   c'est qu'un droit de locataire, peut-être pourrions-nous expliquer un droit

 23   au bail. C'est une forme de droit de propriété qui a été spécifiquement

 24   développé dans cette Yougoslavie communiste de l'époque, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Dans cette Yougoslavie communiste, les gens n'avaient pas la

 27   possibilité de construire leur propre maison ou d'acheter leur appartement.

 28   Rares étaient ceux qui pouvaient le faire.


Page 3568

  1   R.  Ils étaient rares et point n'était nécessaire de le faire, parce qu'on

  2   recevait des appartements pour y habiter en propriété publique ou en

  3   propriété d'Etat.

  4   Q.  Pour abonder dans ce sens, les gens qui avaient un emploi se voyaient

  5   prélever une partie de salaire vers des fonds de logement ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  C'est à partir de ces fonds destinés aux logements qu'on achetait dans

  8   ces compagnies, sociétés en propriété publique ou sociale, que l'on

  9   achetait les logements et qu'on les distribuait au personnel, n'est-ce pas

 10   ?

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  Une fois que quelqu'un se voit attribuer un droit de bail, plus

 13   personne ne peut le déposséder, mais il n'a pas le droit de le vendre ce

 14   logement, donc cela pouvait être hérité par les membres de la famille, par

 15   les ayants droit, les descendants. Donc, c'était une espèce de droit à la

 16   propriété limité. Il ne pouvait pas le vendre, mais personne ne pouvait le

 17   déposséder de ce titre, de ce droit, n'est-ce pas ?

 18   R.  C'est vrai.

 19   Q.  Cependant, les autorités croates nouvelles de Tudjman ont privé les

 20   Serbes sans scrupule de tout cela parce qu'ils ont séjourné pendant plus de

 21   six mois hors de leurs logements, cela était contraire à la constitution

 22   ainsi qu'à la législation, n'est-ce pas ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Cela n'a été fait qu'à l'égard des Serbes. Lorsque les Croates étaient

 25   absents pour plusieurs années, personne ne remettait en question ce droit

 26   au bail, n'est-ce pas ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Je n'ai plus qu'une question concernant l'année 1995. Ensuite, nous


Page 3569

  1   allons revenir à des éléments qui sont bien plus pertinents pour ce qui est

  2   de l'acte d'accusation. En août 1995, il y a eu une nouvelle grande

  3   opération croate contre la Krajina serbe qui s'appelait Tempête, n'est-ce

  4   pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Savez-vous nous dire si dans l'organisation de cette opération, il y a

  7   eu utilisation d'une organisation soi-disant privée, mais proche du

  8   Pentagone qui s'appelle IMPR ?

  9   R.  Je ne sais pas quelle est son appellation particulière, mais je sais

 10   qu'il y a eu une organisation privée d'engagée qui est venue aider aux

 11   préparatifs.

 12   Q.  Savez-vous nous dire si la force américaine a frappé tous les systèmes

 13   radars serbes avant le début de l'opération croate ?

 14   R.  Ça oui, je l'ai appris.

 15   Q.  Saviez-vous que les Américains avaient de la sorte rendu inaptes à

 16   fonctionner les postes de commandement serbes ?

 17   R.  C'est ce que j'ai appris.

 18   Q.  Est-ce que cela signifie qu'il ne s'agit pas seulement d'une offensive

 19   ou d'une agression non seulement croate, mais aussi américaine sur la

 20   Krajina serbe qui était placée sous protection des Nations Unies ?

 21   R.  D'après ce que j'ai pu entendre, l'aviation de l'OTAN a aidé la

 22   Croatie.

 23   Q.  Serait-il exact de dire qu'à l'occasion de cette opération Tempête,

 24   quelque 200 000 Serbes ont été expulsés de la région occidentale de la

 25   Krajina serbe ?

 26   R.  Ça oui, c'est exact.

 27   Q.  Saviez-vous qu'à l'occasion, 22 000 maisons serbes ont été détruites ?

 28   R.  Oui, c'est le chiffre qui est sérieusement avancé.


Page 3570

  1   Q.  Avez-vous entendu parler d'une organisation qui s'appelle Veritas ?

  2   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

  3   Q.  Savez-vous qui se trouve à la tête de cette organisation qui s'appelle

  4   Veritas ?

  5   R.  Je sais, je connais l'homme, mais je ne me souviens plus de son nom.

  6   Q.  Savez-vous que cette organisation Veritas a déterminé qu'au moins 1 791

  7   Serbes ont été tués ou sont considérés disparus pour ce qui est de

  8   l'opération Tempête à elle seule ?

  9   R.  Oui, je l'ai appris.

 10   Q.  Saviez-vous que sur ce chiffre il a été tué 996 civils serbes ?

 11   R.  J'ai entendu parler de ces chiffres avant, c'est par Veritas.

 12   Q.  Saviez-vous que sur les 996 civils serbes, on a tué 449 femmes ?

 13   R.  Je connais le chiffre, je l'ai appris de Veritas.

 14   Q.  Saviez-vous que 11 enfants serbes ont été également tués à ce moment-là

 15   ?

 16   R.  C'est un chiffre également qui est connu du fait d'être avancé par

 17   Veritas.

 18   Q.  Bon. Revenons maintenant à l'année 1991, vous souvenez-vous du fait que

 19   les autorités de la Slavonie occidentale, en avril 1992, ont déterminé

 20   qu'en 1991, il a été au total détruit 4 118 maisons serbes en Slavonie

 21   occidentale ?

 22   R.  Oui, je m'en souviens.

 23   Q.  Saviez-vous que ce même document comporte des données disant qu'à

 24   l'époque, en 1991, il a été détruit 27 églises orthodoxes serbes sur le

 25   territoire de la Slavonie occidentale ?

 26   R.  Je l'ai appris aussi.

 27   Q.  Avez-vous eu connaissance du rapport de Boutros-Ghali, daté du mois de

 28   mai 1993, selon lequel la Croatie - hors la République de la Krajina serbe,


Page 3571

  1   donc ce qui est incontestablement la Croatie, a expulsé 251 000 Serbes des

  2   villes ?

  3   R.  J'ai entendu parler de ce rapport. Je n'arrive plus à me souvenir du

  4   chiffre, mais si c'est dans le rapport de Boutros-Ghali, on peut consulter

  5   le rapport pour vérifier le chiffre.

  6   Q.  Saviez-vous que le professeur de l'université Zagreb, Svetozar Livade,

  7   patiemment et de façon systématique vaque aux persécutions des Serbes sous

  8   le régime à Tudjman ?

  9   R.  Oui, je le sais.

 10   Q.  Saviez-vous que dans plusieurs publications et livres il a fait

 11   connaître des renseignements concrets concernant les modalités suivant

 12   lesquelles les autorités croates, sous Tudjman et après, ont persécuté les

 13   Serbes et quelles sont les mesures de discrimination mises en œuvre à

 14   l'encontre des Serbes ?

 15   R.  J'ai entendu parler de ses ouvrages, oui.

 16   Q.  Saviez-vous, puisqu'à l'occasion de l'interrogatoire principal il a été

 17   question du plan Vance et il a été même versé au dossier, saviez-vous donc

 18   que ce plan Vance prévoyait uniquement des négociations en tant que moyen

 19   de résoudre les problèmes entre la Krajina serbe et la République de

 20   Croatie sans préjuger des résultats ?

 21   R.  J'en ai eu connaissance.

 22   Q.  N'est-il pas vrai que ce plan Vance a été une grande supercherie pour

 23   ce qui est des Serbes ? Nous avons fait confiance, vous et moi, aux Nations

 24   Unies, et au final il s'est avéré que nous avons été trompés, n'est-ce pas

 25   ?

 26   R.  Le résultat s'est avéré mauvais. Ce que je puis dire en ce moment-ci

 27   c'est que la direction à Knin n'a pas beaucoup eu recours aux possibilités

 28   de négociations. Peut-être ont-ils laissé s'échapper des opportunités. Ce


Page 3572

  1   qui ne veut pas dire que les choses n'auraient pas tourné de la même façon,

  2   mais peut-être auraient-ils dû chercher d'autres solutions par des

  3   négociations.

  4   Q.  Est-ce que vous voulez dire --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question. Vous avez évoqué le rapport de

  6   Boutros-Ghali de mai 1993 et la publication du Dr Svetozar Livade,

  7   professeur à Zagreb. Ces deux documents semblent indiquer qu'il y aurait eu

  8   au moins 251 000 expulsés. Pourquoi vous n'introduisez pas ces documents ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation dispose de

 10   ces documents. Dès 2006, en application du 68(i) du Règlement de procédure

 11   et de preuve, le Procureur m'a communiqué tout un tas de textes du

 12   professeur Svetozar Livade. Ils ont tout cela. Ici, je suis en train de

 13   contre-interroger le témoin. Il ne m'appartient pas à moi de prouver que je

 14   suis innocent. Je suis en train de démontrer que c'est un faux acte

 15   d'accusation et je veux démontrer qu'ils n'ont pas de preuve contre moi.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais le problème, vous avancez une thèse, mais si

 17   nous les Juges, après nous n'avons pas les documents qui étayent votre

 18   thèse, parce qu'on ne se contentera pas de la question et de la réponse, à

 19   ce moment-là votre thèse ne sera pas corroborée par un élément ou des

 20   éléments documentaires. Alors, vous dites oui, mais ces documents c'est le

 21   Procureur qui les a. Oui, mais si le Procureur ne les introduit pas, voilà

 22   le problème.

 23   Donc, je vous l'ai déjà dit il y a plusieurs jours, je vous le redis

 24   à nouveau. Il peut être important de savoir que, suite à toutes ces

 25   opérations, "Flash", Tempête et autres, il y a eu des mouvements

 26   migratoires très importants en Slavonie orientale et en Slavonie

 27   occidentale, mais si ce n'est pas corroboré par des documents, il ne

 28   restera que la question et la réponse au transcript. Voilà.


Page 3573

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  


Page 3574

  1   Alors que techniquement pour vous c'est très simple. Vous auriez pu

  2   dire : "Voilà, Monsieur le Témoin, je vous présente le rapport Boutros-

  3   Ghali où il est indiqué cela", et le témoin dit : "Oui, c'est écrit", et

  4   vous demandez l'admission. "Je vous présente le livre du Dr Livade." Le

  5   témoin dira : "Oui, dans le livre il y a marqué cela", et vous demandez

  6   l'admission. Bien. Voilà ce que je voulais vous indiquer. Continuez.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, si j'avais un assistant

  8   à portée de main, je pourrais vous le montrer, tout cela. Mais étant donné

  9   que je fonctionne tout seul et que je me prépare pour ma défense suivant

 10   les modalités que j'estime être les meilleures pour mes intérêts à moi, si

 11   j'avais mes commis à l'affaire, mes assistants, tout serait différent. Tout

 12   de suite, on me passerait les documents illico. Alors moi, je ne peux pas

 13   trimbaler des boîtes entières tous les jours. Déjà mon cartable est très

 14   lourd. Alors, permettez-moi à l'occasion de dire qu'à l'occasion de cet

 15   interrogatoire principal de ce témoin, il n'y a eu aucun acte à me

 16   reprocher. Ce témoin n'a aucun chef d'accusation à démontrer vis-à-vis de

 17   moi-même. Alors je parle de circonstances générales. Si j'avais à contester

 18   les dires qu'il aurait faits, il n'y a rien à ma charge, et nous sommes

 19   hostiles l'un à l'autre depuis 15 ou 16 ans. Nous étions opposés l'un à

 20   l'autre. On ne pouvait pas se voir, dirais-je même. Alors pourquoi voulez-

 21   vous que je trimbale tous ces papiers ?

 22   J'apporte ce qui est important. Le témoin vous a confirmé que cela

 23   existait, cela me suffit. Permettez-moi de conduire ma propre défense. Que

 24   voulez-vous que je fasse du plan de Boutros-Ghali pour démontrer que c'est

 25   un faux acte d'accusation contre moi ? Je n'en ai pas besoin. Quand on

 26   viendra à du concret, j'apporterai des documents, mais comme il n'y a rien

 27   de concret contre moi pendant son témoignage, je ne peux pas perdre mon

 28   temps sur des choses accessoires. Je me suis dit qu'il fallait exploiter


Page 3575

  1   ces quatre heures de la meilleure des façons possibles. Permettez-moi de

  2   continuer, si vous n'y voyez pas d'objection.

  3   M. SESELJ : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur VS-004, savez-vous que Franjo Tudjman, en 1992, lors du

  5   jubilée de la proclamation de l'indépendance, premier anniversaire, a

  6   déclaré sur la place Jelacic de Zagreb qu'il n'y aurait pas eu de guerre si

  7   la Croatie ne l'avait pas voulue. Vous rappelez-vous cette déclaration de

  8   sa part ?

  9   R.  Je me souviens de cette déclaration de sa part. Je ne sais pas s'il a

 10   fait ce discours sur la place que vous avez évoquée, mais je sais que cette

 11   déclaration a été faite.

 12   Q.  La déclaration Tudjman est plus importante que la place où il l'aurait

 13   proférée, mais selon les renseignements dont je dispose, c'était sur la

 14   place Jelacic. Ils l'appellent place, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, c'est comme ça qu'ils l'appellent.

 16   Q.  Ce jour-là, Tudjman a-t-il dit que les dirigeants croates avaient

 17   estimé que seule la guerre pouvait les faire accéder à l'indépendance ?

 18   Est-ce que vous avez le souvenir de cela ?

 19   R.  Oui, j'en ai le souvenir.

 20   Q.  Avez-vous déjà entendu parler de Tomislav Mercep ?

 21   R.  Oui, j'ai entendu parler de lui.

 22   Q.  Savez-vous que Tomislav Mercep a tué des civils serbes et les a

 23   malmenés, torturés à Vukovar avant que la JNA ne rentre dans le conflit

 24   avec les formations paramilitaires serbes ?

 25   R.  J'ai entendu que ces exactions lui étaient imputées.

 26   Q.  Ces crimes et ces exactions de sa part ont-ils atteint un tel niveau

 27   que même les autorités croates ont finalement dû le retirer de Vukovar ?

 28   R.  Oui.


Page 3576

  1   Q.  Tomislav Mercep est-il alors parti pour le territoire de la Slavonie

  2   occidentale ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Tomislav Mercep, accompagné de son groupe de paramilitaires armés, a-t-

  5   il alors commis des crimes très graves dans la région de Pakrac ?

  6   R.  Les crimes commis dans cette zone de Pakrac, à Pakracka Poljana, lui

  7   sont imputés.

  8   Q.  Est-ce qu'une enquête a été menée au sujet des actes de Tomislav Mercep

  9   par la suite ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Savez-vous comment s'appelait le témoin principal, celui qui était le

 12   plus au courant et qui a expliqué toutes les manières utilisées pour tuer

 13   les Serbes ?

 14   R.  J'en ai entendu parler, j'ai lu des articles à ce sujet, mais je ne me

 15   rappelle pas de son nom aujourd'hui.

 16   Q.  Est-ce qu'il avait pour nom de famille Bajramovic ou quelque chose

 17   comme ça ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Ce témoin contre Mercep a-t-il été assassiné par la suite ?

 20   R.  Je sais qu'il y en a un qui a été assassiné et que l'autre est mort de

 21   mort naturelle, mais maintenant je ne sais pas si c'est Bajramovic qui a

 22   été assassiné, mais je sais qu'il y a un témoin qui a été assassiné et

 23   l'autre qui est mort de mort naturelle.

 24   Q.  Savez-vous que pendant toute la durée de la guerre, pendant toute la

 25   durée de l'existence de la République serbe de Krajina, les Croates qui

 26   vivaient sur ces territoires vivaient très tranquillement et sans le

 27   moindre problème ? A Knin, par exemple.

 28   R.  Pour Knin, je sais qu'ils y vivaient normalement.


Page 3577

  1   Q.  Il y a eu quelques incidents, ça je ne le conteste pas. Il y a même eu

  2   parfois ce qu'on peut appeler des problèmes, mais ceux qui voulaient

  3   résider sur le territoire de la République serbe de Krajina n'étaient pas

  4   empêchés de le faire par le gouvernement, et le gouvernement ne menait pas

  5   une politique d'expulsion à l'encontre des Croates habitant là, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Plus tard, quand la République serbe de Krajina a été créée et quand

  8   les autorités civiles ont commencé à fonctionner, je pense qu'ils ont pu y

  9   vivre sans la moindre persécution, mais il y a eu des expulsions et des

 10   assassinats avant.

 11   Q.  Mais ces persécutions n'étaient pas organisées par le gouvernement.

 12   Elles illustraient des incidents au sein de la population, n'est-ce pas ?

 13   R.  Je ne sais pas si on peut parler d'incidents, parce que quand on a tué

 14   plusieurs personnes, ça ressemble plus à une opération. Mais je ne conteste

 15   pas qu'il n'y ait pas eu d'ordres pour que cela arrive. Cela dit, des

 16   extrémistes ont agi seuls -- les extrémistes ont été portés à ma

 17   connaissance comme les causes de ces incidents.

 18   Q.  Le 20 novembre 1991, nous avons déjà établi que j'étais à Banja Luka,

 19   le 19 et le 20 novembre. Est-ce que vous savez que le 20 je suis retourné à

 20   Banja Luka dans la soirée ?

 21   R.  Ce que je sais, c'est que deux heures plus tard vous êtes rentré, donc

 22   vous étiez probablement allé à Banja Luka.

 23   Q.  J'étais censé trouver un hélicoptère à Banja Luka le 21 pour rentrer.

 24   Est-ce que vous savez que pendant la nuit des responsables du Parti

 25   démocratique serbe de Banja Luka m'ont emmené à Knin ?

 26   R.  J'en ai seulement entendu parler.

 27   Q.  Est-ce que vous savez pourquoi je suis allé à Knin dans une telle

 28   urgence ?


Page 3578

  1   R.  Non, non, je ne le sais pas.

  2   Q.  Est-ce que vous savez que là-bas j'ai eu un affrontement avec celui

  3   qu'on appelle publiquement le capitaine Dragan, à savoir Dragan Vasiljkovic

  4   ?

  5   R.  Oui, j'ai entendu parler d'un affrontement entre vous et le capitaine

  6   Dragan.

  7   Q.  Est-ce que c'était un affrontement personnel ou est-ce que nous avions

  8   des divergences au sujet du destin de la République serbe de Krajina ?

  9   R.  Pour autant que je le sache, en tout cas c'est ce qu'ont dit les

 10   médias, il y a eu un affrontement entre vous en raison de la façon dont les

 11   choses fonctionnaient dans la région.

 12   Q.  Est-ce que vous savez qu'il avait été expulsé de cette région de la

 13   République serbe de Krajina précédemment ?

 14   R.  J'ai entendu quelque chose à cet effet, mais je ne sais pas précisément

 15   ce qui s'est passé parce que j'étais loin et je n'avais aucune possibilité

 16   de vérifier les détails des faits.

 17   Q.  Vous ne savez pas qu'en novembre il est revenu et a commencé à créer de

 18   l'agitation parmi les soldats pour renverser le gouvernement de Milan Babic

 19   ?

 20   R.  J'ai entendu parler de cela dans les médias, mais rien de précis.

 21   Q.  Le bureau du Procureur ici a montré une vidéo de mon affrontement avec

 22   le capitaine Dragan à Benkovac et on vous a montré à vous une séquence

 23   vidéo d'une conversation que j'ai eue plus tard avec les soldats sur

 24   différentes questions, et une courte séquence seulement de cette vidéo a

 25   été diffusée.

 26   R.  Oui, je m'en souviens.

 27   Q.  Vous rappelez-vous que lorsque j'ai essayé de les convaincre qu'ils

 28   devaient respecter les officiers certains m'ont interrompu en me disant que


Page 3579

  1   c'étaient des communistes ? Savez-vous que j'ai dû les convaincre de porter

  2   un casque parce qu'il était très dangereux de se battre dans une guerre

  3   sans porter un casque, cela risquait davantage de les exposer à être

  4   blessés, notamment dans ce secteur, car si un seul obus tombait non loin

  5   d'eux et frappait un soldat à la tête, il pouvait en mourir ?

  6   R.  Je vous ai vu, oui, essayant de les convaincre de respecter les

  7   officiers, bien sûr j'ai vu toute la séquence vidéo, donc je ne saurais

  8   reprendre mot pour mot vos propos ici aujourd'hui, mais je l'ai vue.

  9   Q.  Est-ce que vous avez pu conclure que ce sur quoi j'insistais c'était le

 10   respect de la discipline et de l'obéissance aux officiers, parce que

 11   finalement c'est une question de discipline ?

 12   R.  Il est permis de le conclure.

 13   Q.  Est-ce que vous avez pu conclure à voir la façon dont je leur parlais

 14   et à voir leur comportement qu'ils n'étaient pas volontaires du Parti

 15   radical serbe parce que les volontaires du Parti radical serbe auraient

 16   gardé le silence pendant que je parlais, ils m'auraient écouté, ils

 17   m'auraient manifesté plus de respect. Donc, j'ai dû, moi, leur dire de se

 18   taire pendant que je parlais. Vous vous rappelez de cela ?

 19   R.  Oui, j'ai reconnu l'homme qui était assis à côté de vous, et à en juger

 20   par le ton de leurs voix et par leurs accents, c'étaient des gens de la

 21   région.

 22   Q.  C'étaient des gens de la Krajina de Knin, de Benkovac et des environs.

 23   Vous avez pu le constater. Donc si je parlais à des soldats qui n'étaient

 24   pas volontaires du Parti radical serbe, il était tout à fait évident que je

 25   leur parlais de discipline. Est-ce que vous avez pu le conclure à la vision

 26   de ces images ?

 27   R.  J'ai conclu que vous leur demandiez de respecter et de faire confiance

 28   aux officiers de la JNA.


Page 3580

  1   Q.  Je leur disais de faire confiance à la JNA comme étant la seule armée

  2   régulière d'un Etat existant internationalement qui s'était libéré de

  3   l'étau communiste. Est-ce que c'est vrai ?

  4   R.  Oui, c'est ce que vous avez dit.

  5   Q.  Est-ce que vous savez que sur le territoire de la Croatie il y avait un

  6   grand nombre de camps et de prisons dans lesquels étaient détenus des

  7   civils serbes ?

  8   R.  Oui, j'en ai entendu parler. J'ai surtout entendu parler de la Slavonie

  9   occidentale, mais il y a eu des camps dans d'autres villes, dans d'autres

 10   régions.

 11   Q.  Quels sont les camps dont vous avez connaissance en Slavonie

 12   occidentale où les Croates détenaient des civils serbes ?

 13   R.  J'ai entendu parler de Pakrac, de Daruvar, de Pozega, de Slatina, de

 14   Gradiska, de Novska.

 15   M. LE JUGE HARHOFF : Témoin, je vous demande d'observer une petite pause

 16   entre la question qui a été posée par M. Seselj et votre réponse, parce

 17   qu'autrement les interprètes auront du mal à vous suivre. Merci.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vais le faire. Je vous remercie de

 19   votre avertissement.

 20   M. SESELJ : [interprétation]

 21   Q.  Donc sur ce petit territoire de la Slavonie occidentale, il y avait un

 22   nombre énorme, dirais-je, de camps dans lesquels les Croates détenaient des

 23   civils serbes, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, pratiquement dans toutes les localités un peu importantes.

 25   Q.  Avez-vous entendu parler des méthodes de torture auxquelles étaient

 26   soumis ces civils serbes détenus ?

 27   R.  J'ai entendu parler d'exactions, de passages à tabac, de menaces.

 28   Q.  Avez-vous entendu dire qu'ils étaient souvent frappés à l'aide de


Page 3581

  1   câbles électriques ?

  2   R.  Oui, j'ai aussi entendu parler de cela.

  3   Q.  Avez-vous entendu parler de torture à l'électricité basse tension,

  4   courant d'induction ?

  5   R.  Oui, j'ai entendu parler de ça aussi.

  6   Q.  Avez-vous entendu parler d'un nombre de cas importants où il était

  7   ordonné aux civils serbes détenus de se couper mutuellement les oreilles et

  8   ensuite de manger ces oreilles coupées ?

  9   R.  Oui, j'ai lu ça dans les journaux.

 10   Q.  Cela émanait de déclarations faites par les détenus serbes civils

 11   survivants, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, c'était un détenu serbe civil survivant qui avait été dans le camp

 13   de Pakrac Poljana, du village de Kipa, si je ne me trompe pas.

 14   Q.  Quand on regarde la carte géographique de la Croatie, on peut voir

 15   quelle est la structure démographique selon les villages, n'est-ce pas, et

 16   on peut constater que là où les Serbes étaient les moins nombreux, la

 17   situation était plus dure pour eux que là où ils étaient plus nombreux.

 18   Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Là où les Serbes étaient les plus minoritaires, ils subissaient le plus

 21   les mesures discriminatoires dû à l'Etat croate, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous avez déjà dit que tout le territoire de la Slavonie occidentale a

 24   beaucoup souffert durant la Seconde Guerre mondiale. Est-ce que d'autres

 25   territoires de la République serbe de Krajina ont souffert également à ce

 26   moment-là ?

 27   R.  La Banija et Kordun sont les territoires qui ont le plus souffert,

 28   suivis par la Slavonie occidentale et ensuite Lika et une partie de la


Page 3582

  1   Dalmatie.

  2   Q.  Je suppose que vous savez que la Banija et Kordun étaient des places

  3   fortes des partisans pendant la Seconde Guerre mondiale et que là-bas il y

  4   avait très peu de Chetniks ?

  5   R.  Oui, la Banija et Kordun sont connus comme des lieux où il y avait

  6   beaucoup de partisans.

  7   Q.  C'est dans la Lika et en Dalmatie qu'il y avait le plus de Chetniks ?

  8   R.  Oui, dans une partie de la Lika et une partie de la Dalmatie.

  9   Q.  Est-ce que vous savez que les villages autour de Vukovar et d'Osijek de

 10   la Slavonie orientale ont également beaucoup souffert durant la Seconde

 11   Guerre mondiale ?

 12   R.  Oui. J'ai aussi entendu parler de cela.

 13   Q.  Savez-vous que durant la Seconde Guerre mondiale des conversions

 14   imposées aux orthodoxes serbes à la religion catholique l'ont été en

 15   majorité en Slavonie ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous savez que Bobota [phon], par exemple, un village serbe

 18   et d'autres villages ont vu toute leur population forcée de se convertir à

 19   la religion catholique ?

 20   R.  J'ai entendu parler de cela.

 21   Q.  Savez-vous que ceci s'est majoritairement passé sur le territoire de

 22   l'évêché de Djakovica ?

 23   R.  Oui, ça aussi je l'ai entendu dire.

 24   Q.  Vous rappelez-vous que le nouveau gouvernement de Tudjman a utilisé

 25   l'amendement numéro 68 de la constitution croate pour supprimer

 26   complètement l'alphabet cyrillique comme alphabet enseigné dans les écoles

 27   de Croatie ?

 28   R.  Je ne sais plus quel était le numéro de l'amendement, mais je sais


Page 3583

  1   qu'une lettre officielle a permis de supprimer cela et elle venait du

  2   gouvernement de Tudjman.

  3   Q.  En Slavonie occidentale, la résistance des Serbes au régime de Tudjman

  4   et à ces actes délibérés dus uniquement à sa volonté personnelle, a-t-elle

  5   été organisée, encouragée et instiguée de l'extérieur ?

  6   R.  C'est une question complexe. Je vais essayer d'avancer pas à pas. Les

  7   Serbes de Slavonie occidentale ont vu arriver le gouvernement de Tudjman

  8   avec méfiance vis-à-vis de sa rhétorique, de ses actes et des provocations

  9   qui s'en sont suivies. Cela a nui à la confiance, a créé la crainte. Je me

 10   souviens qu'à toutes les réunions auxquelles nous participions pour

 11   discuter des changements de la constitution, il y a eu des problèmes,

 12   notamment à Okucani, nous discutions avec un professeur de droit

 13   constitutionnel, nous voulions parler de façon modérée en nous concentrant

 14   sur les aspects techniques de la question, mais les gens se sont mis à

 15   hurler : "Donnez-nous simplement des armes, donnez-nous des armes", parce

 16   qu'ils avaient terriblement peur en voyant les unités de l'armée croate à

 17   la télévision. On ne pouvait plus discuter avec eux. Ils exigeaient des

 18   armes. C'était la seule chose qu'ils faisaient. Il y avait déjà une

 19   véritable psychose. Ils estimaient que seules les armes pourraient les

 20   protéger, pourraient les sauver parce qu'il ne restait plus rien pour eux.

 21   Donc finalement, ils se sont organisés et ont mis en place un état-major,

 22   mais est-ce qu'ils ont eu de l'aide de quelqu'un pour s'organiser de cette

 23   façon, je n'en sais rien. Je sais que moi ce n'était pas mon rôle, je n'ai

 24   subi aucune pression pour ma part, aucune influence de l'extérieur. Mais je

 25   n'avais pas pour rôle d'organiser qui que ce soit sur le plan militaire,

 26   tout ce que je sais c'est que j'ai eu des problèmes parce que j'ai essayé

 27   de négocier et de discuter avec Tudjman, j'ai eu des problèmes de la part

 28   d'un certain nombre de personnes qui étaient plus extrémistes et qui m'ont


Page 3584

  1   considéré comme traître. Je sais que pas mal de gens ont estimé qu'il n'y

  2   avait plus d'utilité à négocier. C'était un combat perdu d'avance.

  3   Q.  Est-ce que vous savez qu'en 1995, lorsque la Slavonie occidentale a été

  4   prise et qu'une partie de la Krajina serbe a été occupée, et que la

  5   Slavonie orientale a participé à des négociations au sujet d'une solution

  6   pacifique, ce qu'on appelait une solution pacifique vis-à-vis de l'autorité

  7   croate, les Croates ont accusé à tort un certain nombre de Serbes de crimes

  8   de guerre ?

  9   R.  Il y a eu des accusations de ce genre qui ont été proférées surtout en

 10   1992 et 1993 en l'absence des personnes concernées, et je sais que nous

 11   étions pas mal à être convoqués à la police pour des interrogatoires et que

 12   certains ont été officiellement mis en accusation. Il y a eu des actes

 13   d'accusation collectifs qui n'étaient pas étayés par beaucoup de documents,

 14   pas beaucoup d'éléments de preuve, donc il y a eu des gens qui ont essayé

 15   plus tard de rentrer en Croatie pour continuer à y habiter, et qui ont été

 16   arrêtés, ont fait l'objet d'enquêtes et ont finalement été relâchés, ce qui

 17   indique qu'aucune preuve n'existait de leur responsabilité.

 18   Cela se produit toujours en Croatie. On ne sait rien de façon exacte. Je

 19   dois dire que pour les gens qui sont en prison et qui purgent des peines de

 20   plusieurs années tout en étant innocents, même en ayant été condamnés à 20

 21   ans d'emprisonnement, je dois dire que leur procès n'a pas été équitable.

 22   Leur défense n'a pas été capable de s'exprimer correctement. Les témoins

 23   qui ont témoigné étaient des témoins politiques. Et les condamnations ont

 24   été prononcées en fonction d'actes d'accusation de 1992 et 1993 sans

 25   l'ombre d'un document pour les étayer.

 26   Q.  Est-ce que cela signifie que les autorités croates ont mis en

 27   accusation des Serbes délibérément et à tort, qu'ils ont diligenté des

 28   enquêtes et mis ces personnes en prison afin de décourager les Serbes de


Page 3585

  1   revenir revendiquer leur propriété en Croatie ?

  2   R.  Nous avons traité de ces problèmes et nous sommes arrivés à cette

  3   conclusion, nous avons essayé de faire pression sur la Croatie

  4   officiellement par le biais de la communauté internationale pour que ces

  5   actes d'accusation collectifs cessent et que la population ne soit plus

  6   intimidée de cette façon, pour que la justice prévale et que seules des

  7   personnes responsables de délit soient condamnées, de façon à ce que les

  8   personnes qui rentraient puissent continuer à vivre là-bas.

  9   Q.  Mais dites-moi, je vous en prie, ce qu'il en est des autres Serbes

 10   résidant en Croatie. Ils sont très peu nombreux aujourd'hui. Comment

 11   réagissent-ils quand ils voient, par exemple, Miro Bajramovic, on a parlé

 12   de lui tout à l'heure comme étant un homme de Mercep, quand on l'entend

 13   avouer en public qu'il a assassiné en leur coupant la gorge 72 Serbes, dont

 14   neuf femmes, et qu'ensuite ils voient que les tribunaux croates acquittent

 15   cet homme pour défaut de preuve ? Comment est-ce que les Serbes qui

 16   habitent là-bas encore aujourd'hui réagissent à cela ?

 17   R.  Ce n'est pas une question d'indifférence de leur part. Ils savent que

 18   pas mal de choses répréhensibles ont eu lieu, ils ressentent de l'amertume

 19   vis-à-vis des autorités croates et ils se sentent impuissants, ils ont de

 20   l'amertume parce qu'ils voient que les personnes mises en accusation sont

 21   traitées de façon inéquitable ou en tout cas que tout le monde n'est pas

 22   traité de la même façon. Lorsque des crimes sont commis contre les Croates,

 23   les procès sont rapides; et lorsque les crimes sont commis contre les

 24   Serbes, ils se terminent toujours sur une déclaration de défaut de preuve.

 25   Q.  Vous avez sans doute le souvenir d'une grande réunion publique de la

 26   population serbe le 25 juillet 1995 dans un lieu qui s'appelait Srb ?

 27   R.  Oui, j'en ai le souvenir, j'y ai participé.

 28   Q.  Vous rappelez-vous que j'ai assisté à ce meeting ?


Page 3586

  1   R.  Oui, je me rappelle que vous étiez à ce meeting. Il y a d'ailleurs des

  2   gens qui se sont adressés à moi en pensant s'adresser à vous.

  3   Q.  Il y a des gens qui pensaient que vous me ressembliez ?

  4   R.  Oui, et ils nous ont confondus, même si à l'époque vous n'étiez pas

  5   encore d'une grande actualité sur le plan politique pour la région.

  6   Q.  Ils l'ont pensé à cause des lunettes peut-être, parce que je suis

  7   beaucoup plus grand que vous et je suis aussi plus gros.

  8   R.  Je ne sais pas si c'est uniquement à cause de ça, mais enfin ils nous

  9   ont confondus.

 10   Q.  Ne vous fâchez pas à cause de cette petite plaisanterie.

 11   R.  Non, je ne me fâche pas.

 12   Q.  A ce meeting, je n'ai pas pris la parole, n'est-ce pas ? J'étais

 13   simplement observateur ?

 14   R.  En effet, vous n'avez pas pris la parole ce jour-là.

 15   Q.  Vous rappelez-vous qu'à ce meeting une déclaration de la population

 16   serbe vivant sur le territoire de la République serbe de Croatie a été

 17   adoptée ?

 18   R.  Oui, je me rappelle cette déclaration.

 19   Q.  Je vais vous donner une interprétation rapide maintenant de cette

 20   déclaration sur le fond, vous pourrez confirmer ou infirmer si mon

 21   interprétation est exacte.

 22   Est-ce que les dirigeants politiques serbes ont proposé à la population qui

 23   était rassemblée là trois positions fondamentales pour adoption par

 24   acclamation ? Si la Croatie continuait à faire partie intégrante de la

 25   Yougoslavie fédérale, les Serbes n'exigeaient qu'une autonomie culturelle. 

 26   Si la Yougoslavie devenait une confédération, les Serbes insistaient

 27   pour obtenir une autonomie territoriale.

 28   Et si la Croatie se séparait de la Yougoslavie, les Serbes


Page 3587

  1   demandaient à se séparer de la Croatie pour demeurer en Yougoslavie.

  2   Est-ce que j'ai bien interprété cette déclaration sur le fond ?

  3   R.  C'étaient les exigences concrètes exprimées par les personnes présentes

  4   à ce meeting et par les dirigeants politiques de l'époque.

  5   Q.  Est-ce que c'était la ligne politique générale qui a ensuite été prise

  6   en compte également par le Parti radical serbe ?

  7   R.  Oui.

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, s'il vous plaît, à propos de la

  9   deuxième position, vous parlez de confédération ou fédération ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] La deuxième position, c'était une fédération,

 11   autrement dit le maintien de la situation existante. D'ailleurs, c'est la

 12   première position. Si la Yougoslavie continuait à être une fédération, les

 13   Serbes ne demandaient qu'une autonomie culturelle, autrement dit protection

 14   de l'alphabet, de la langue et de tous les aspects caractéristiques

 15   culturels, rien de plus. Mais si l'Etat devait devenir une confédération,

 16   alors les Serbes demandaient une autonomie territoriale et politique au

 17   sein de la Croatie. Et si la Croatie se séparait de la Yougoslavie, alors

 18   les Serbes ne voulaient plus vivre dans cette nouvelle Croatie, ils

 19   demandaient à se séparer de cette nouvelle Croatie pour continuer à vivre

 20   en Yougoslavie. C'étaient les bases de la politique générale des Serbes à

 21   cette époque-là.

 22   M. SESELJ : [interprétation] 

 23   Q.  A cette époque-là, le dirigeant du Parti démocratique serbe était le Dr

 24   Jovan Raskovic, un intellectuel de renom, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Jovan Raskovic était un homme particulièrement libéral et démocrate,

 27   n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.


Page 3588

  1   Q.  Est-ce que le Pr Jovan Raskovic qualifiait souvent le régime de Tudjman

  2   d'Oustachi ou prooustachi ?

  3   R.  Je crois qu'il l'appelait régime prooustachi.

  4   Q.  Vous avez dit qu'à la fin de 1990, il y a eu division au sein du SDS

  5   serbe et que Milan Babic a séparé le SDS de la Krajina du SDS qui

  6   continuait à être dirigé par Jovan Raskovic, n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est cela.

  8   Q.  Mais est-ce que la cause principale de cette division, c'était que le

  9   régime de Tudjman a compromis Jovan Raskovic dans l'opinion ?

 10   R.  Je crois que Milan Babic s'est uniquement servi de cela. Mais dans la

 11   période antérieure entre Raskovic et Milan Babic il y avait déjà eu des

 12   frictions. Je me rappelle d'un certain nombre de réunions où cela s'est vu.

 13   Q.  Est-il exact que Tudjman a convoqué Raskovic pour une rencontre, que

 14   Raskovic a esquivé d'abord, puis finalement a accepté, qu'il est allé à la

 15   résidence de Tudjman à Zagreb et qu'il a discuté avec lui, et qu'ensuite

 16   Tudjman a rendu public les entretiens enregistrés de cette rencontre qui

 17   ont été publiés ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Et qu'il a été établi que durant cet entretien, Jovan Raskovic a dit à

 20   Tudjman : "Nous les Serbes, nous sommes un peuple de cinglés ?"

 21   R.  Oui. Cette déclaration du Pr Raskovic est bien connue.

 22   Q.  Raskovic voulait sans doute faire comprendre à Tudjman qu'il ne fallait

 23   pas trop titiller les Serbes. Est-ce que vous, vous l'avez compris comme

 24   ça.

 25   R.  Oui, c'est à peu près ça.

 26   Q.  Mais l'enregistrement complet de cet entretien a eu un effet assez peu

 27   positif sur la population serbe ?

 28   R.  Je crois que c'est cette déclaration qui a été le plus mal reçue, que


Page 3589

  1   c'est elle qui a fait l'objet de l'opposition la plus vive, parce que les

  2   gens pensaient que la possibilité qui avait été donnée à Jovan Raskovic de

  3   faire quelque chose ne devait pas être anéantie de cette façon et nuire

  4   finalement à la population serbe.

  5   Q.  Mais est-ce qu'il n'est pas tout à fait malhonnête de rendre public

  6   ainsi un enregistrement secret d'une conversation entre un dirigeant serbe

  7   et Tudjman ? Est-ce qu'il était normal de rendre cela public ?

  8   R.  Nous avons pensé que c'était un acte malhonnête de la part de Tudjman

  9   parce que cet entretien était secret, et le Pr Raskovic était quelqu'un de

 10   très connu, ce qui rend la chose encore plus grave.

 11   Q.  Donc le Pr Raskovic souhaite trouver une solution au problème et

 12   Tudjman, en rendant public tous les détails de l'entretien, le compromet

 13   dans l'opinion. Ceci va à l'encontre de l'intérêt de ceux qui défendaient

 14   Raskovic et qui avaient sans doute des intérêts bien définis et des

 15   objectifs politiques plus élevés ?

 16   R.  C'est comme ça que je l'ai compris. J'ai compris que Raskovic jouissait

 17   encore d'une certaine autorité, mais que le groupe étroit qui constituait

 18   l'environnement de Babic a décidé de faire sécession sur le plan de leur

 19   parti politique, donc de se séparer du parti dirigé par Raskovic, sans

 20   doute pour défendre des intérêts qui étaient des intérêts plus étroitement

 21   individuels.

 22   Q.  Vous avez dit aussi que Stipe Mesic et Ante Markovic ne pouvaient pas

 23   vraiment être qualifiés d'Oustachi, mais moi je les ai qualifiés

 24   d'Oustachi, n'est-ce pas ? 

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Nous avons déjà vu qu'il y a des preuves qui montrent que Stipe Mesic

 27   était invité par les immigrants Oustachi à l'étranger et qu'il faisait des

 28   déclarations là-bas. Vous m'avez rappelé vous-même sa déclaration selon


Page 3590

  1   laquelle les Croates avaient vécu deux victoires, notamment l'une d'entre

  2   elles étant l'établissement de l'Etat Oustachi ?

  3   R.  Oui, c'est une déclaration qui a été faite par M. Mesic en effet.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter parce que c'est l'heure de la pause.

  5   Je signale à M. Seselj qu'il a utilisé trois heures et dix minutes.

  6   Et qu'il lui restera donc 50 minutes. Nous nous retrouverons à midi dix.

  7   --- L'audience est suspendue à 11 heures 50.

  8   --- L'audience est reprise à 12 heures 12.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise. Monsieur Seselj, vous

 10   avez la parole.

 11   M. SESELJ : [interprétation]

 12   Q.  Nous voici enfin arrivés à Ante Markovic et le fait qu'en 1991 je l'ai

 13   qualifié d'Oustachi. C'est bien ça ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je suppose que vous savez que dans la Yougoslavie communiste au poste

 16   du premier ministre fédéral, on a vu se relayer des hommes politiques venus

 17   de différentes entités fédérales, c'était la règle, périodiquement il y

 18   avait une relève ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous savez qu'au moment du décès de Tito en 1980, c'était

 21   Veselin Djuranovic, un Monténégrin, qui était premier ministre fédéral ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Après lui, c'était le tour de la Croatie, en tant qu'entité fédérale de

 24   proposer son homme au poste de premier ministre fédéral, et c'était Milka

 25   Planinc, une Croate, qui a été proposée ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Après Milka Planinc, le tour est venu à la Serbie. C'était à elle de

 28   proposer son homme au poste du premier ministre fédéral ?


Page 3591

  1   R.  Oui.

  2   Q.  La Serbie souhaitait proposer Ivan Stambolic, mais il y a eu opposition

  3   de la Croatie et de la Slovanie, à ce moment-là; c'est bien ça ?

  4   R.  Il me semble que oui.

  5   Q.  Sans consensus obtenu auprès de toutes les entités fédérales, ce genre

  6   de questions ne pouvaient pas être résolues; est-ce bien cela ?

  7   R.  C'est ça.

  8   Q.  La Serbie, à ce moment-là, est-ce qu'elle a renoncé à avoir son homme

  9   au poste de premier ministre fédéral, malgré le fait que c'était son tour,

 10   est-ce que c'est Branko Mikulic, un Croate de Bosnie-Herzégovine qui est

 11   venu occuper ce poste, qui a été élu ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Donc, voici que deux Croates déjà se sont succédés, Milka Planinc et

 14   Branko Mikulic au poste de premier ministre fédéral ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  En 1989, encore une fois, le mandat expire au gouvernement fédéral, et

 17   maintenant c'est le tour de la Serbie, on doit élire quelqu'un de Serbie ?

 18   R.  Il me semble que oui.

 19   Q.  La Serbie a proposé Borisav Jovic, cependant là encore les Croates et

 20   les Slovènes n'ont pas accepté ?

 21   R.  Je ne me souviens pas des détails.

 22   Q.  La Serbie accepte là encore que ce soit un Croate qui devienne premier

 23   ministre fédéral et c'est Ante Markovic, un Croate, qui est nommé à ce

 24   poste; c'est bien ça ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Donc nous avons eu trois Croates qui se sont succédés au poste de

 27   premier ministre fédéral, successivement, même si normalement c'était,

 28   d'après la règle, un candidat venu d'une autre entité fédérale qui devait


Page 3592

  1   se relayer à chaque fois ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  C'était un système de gestion collective sur le plan politique parce

  4   que nous avions une présidence collective, n'est-ce pas ? La prise de

  5   décision au niveau fédéral, dans le parlement fédéral, c'était les

  6   délégations fédérales, des entités fédérales qui devaient s'exprimer. Est-

  7   ce que c'était le poste du premier ministre fédéral qui était en fait le

  8   poste le plus important ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  La Serbie ne s'est pas opposée à ce que par trois fois ce soit un

 11   Croate qui exerce les fonctions du premier ministre fédéral et tout ceci

 12   pour préserver la Yougoslavie fédérale ?

 13   R.  Je suppose que c'était ça la règle.

 14   Q.  En 1989, au poste de premier ministre - au poste de ministre des

 15   Affaires étrangères fédéral n'était pas un Croate également, Budimir Loncar

 16   ?

 17   R.  Si.

 18   Q.  Le ministre de la Défense, général d'armée Veljko Kadijevic n'est pas

 19   quelqu'un issu d'un mariage mixte, Croate et Serbe à la fois ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Son père est Croate et sa mère est Serbe, ou inversement, je n'arrive

 22   pas à me rappeler exactement; ai-je raison ?

 23   R.  Oui, moi aussi, il me semble que c'est ça. Je ne sais plus qui est qui

 24   dans la famille.

 25   Q.  Donc la guerre civile éclate en Yougoslavie au moment où au nombre de

 26   postes fédéraux et au QG, l'état-major envoie des Croates, des Slovènes et

 27   des membres appartenant à d'autres ethnies occuper des postes importants ?

 28   R.  Oui.


Page 3593

  1   Q.  Ante Markovic, est-ce qu'il est devenu premier ministre fédéral en tant

  2   que candidat du seul parti politique de l'époque, à savoir la Ligue des

  3   Communistes de Yougoslavie ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  En 1989, il est communiste, il arrive en tant que communiste au poste

  6   de premier ministre fédéral. En 1990, il est chef de gouvernement et il

  7   proclame la création de son propre parti politique qu'il a appelé Ligue des

  8   forces de réforme [comme interprété] ; c'est bien ça ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  C'était à l'été 1990, si mes souvenirs sont bons, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, c'était après les élections en Croatie.

 12   Q.  Est-ce que la critique de fond qu'on a adressée à Ante Markovic en

 13   Serbie, par les intellectuels serbes, dans les médias était le fait qu'il

 14   ait attendu que les élections pluripartites soient terminées en Slovénie et

 15   en Croatie, que des séparatistes l'emportent là-bas avant de proclamer son

 16   parti soi-disant proyougoslave et c'est uniquement dans les autres entités

 17   fédérales qu'il a présenté sa force politique. Etait-ce cela la principale

 18   critique ?

 19   R.  Oui, c'est ce qu'on lui a reproché.

 20   Q.  Oui. En réalité, Ante Markovic s'est mis à faire des discours, des

 21   rassemblements en Bosnie-Herzégovine, près de Banja Luka, en Serbie, et

 22   cetera. C'est vrai ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Donc, nous qui l'avions critiqué, nous sommes arrivés à la conclusion

 25   qu'il avait pour objectif de briser le corps électoral serbe avant les

 26   élections qui allaient se tenir en Serbie et en Bosnie-Herzégovine; c'est

 27   bien cela ?

 28   R.  Je ne sais pas ce que vous aviez à l'esprit, vous, à ce moment-là


Page 3594

  1   concrètement, je sais qu'on lui a reproché de ne pas s'être présenté aux

  2   élections en Slovénie et en Croatie pour que son mouvement puisse être

  3   représenté pleinement dans toutes les républiques, et pas seulement en

  4   Bosnie-Herzégovine et en Serbie. Les protagonistes politiques ont réagi à

  5   ce moment-là parce qu'ils avaient peur qu'il s'empare de leur corps

  6   électoral, qu'il y ait une scission auprès des Serbes entre ceux qui

  7   étaient proyougoslaves et ceux qui étaient favorables à d'autres idées.

  8   Q.  La plupart des Serbes étaient favorables, la grande majorité,

  9   l'écrasante majorité disons, pratiquement tous les Serbes étaient

 10   favorables à la Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, en effet, les Serbes se voyaient en Yougoslavie et ils estimaient

 12   que c'était là qu'ils avaient vécu le mieux et que c'est là qu'ils avaient

 13   les meilleures conditions.

 14   Q.  Pratiquement tous les Serbes ont vécu dans cet Etat, à l'exception de

 15   la diaspora en Albanie, en Hongrie et en Roumanie. Pratiquement tous les

 16   Serbes vivaient en Yougoslavie.

 17   R.  Oui, une majorité écrasante des Serbes vivaient en Yougoslavie, une

 18   petite partie s'est exilée en Autriche, en Hongrie et en Albanie.

 19   Q.  Cette masse de Serbes, est-ce qu'elle se voyait en Grande-Serbie

 20   puisqu'ils avaient déjà la Yougoslavie ?

 21   R.  Non. Rien d'autre ne leur venait à l'esprit, ils étaient en

 22   Yougoslavie.

 23   Q.  Vous vous souvenez la première fois que j'ai pris la parole en public

 24   avec le concept de Grande-Serbie. Vous vous souvenez, c'était uniquement si

 25   les Slovènes et les Croates allaient insister pour se séparer de la

 26   Yougoslavie, faire une scission ?

 27   R.  Oui. Vous avez dit que si les Slovènes et les Croates ne souhaitaient

 28   pas rester en Yougoslavie qu'ils étaient libres de partir, mais uniquement


Page 3595

  1   en apportant les territoires qui étaient croates.

  2   Q.  Vous vous souvenez lorsqu'on a créé en 1918 l'Etat yougoslave, on l'a

  3   créé par l'unification du Royaume de Serbie avec ce qui a été improvisé

  4   comme Etat des Slovènes, des Croates et des Serbes qui d'ailleurs n'était

  5   pas reconnu internationalement; est-ce exact ?

  6   R.  Si mes souvenirs sont bons, c'était l'Etat des Croates, des Slovènes,

  7   des Serbes d'un côté et de la Serbie d'autre part.

  8   Q.  La Serbie, avant que cet Etat ne soit créé, avait déjà la Macédoine en

  9   tant que sa partie reconnue internationalement ainsi que le Monténégro et

 10   la Vojvodine; est-ce exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  La population de Monténégro, lors d'un grand rassemblement populaire en

 13   1918, a pris la décision de se rattacher directement à la Serbie, n'est-ce

 14   pas ?

 15   R.  Il me semble que oui.

 16   Q.  L'assemblée du peuple serbe et des Bunjevci de Vojvodine a pris la

 17   décision de se rattacher directement à la Serbie également; c'est bien ça ?

 18   R.  Il me semble que oui.

 19   Q.  L'Etat des Slovènes, des Croates et des Serbes comptait uniquement la

 20   Slavonie, la Croatie, la Dalmatie, la Slovénie, la Bosnie et l'Herzégovine;

 21   c'est bien ça ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  A l'époque, il n'est pas question d'une Croatie qui engloberait

 24   également la Slavonie et la Dalmatie, n'est-ce pas ?

 25   R.  Il me semble que non.

 26   Q.  Du temps de l'Autriche-Hongrie, la Dalmatie faisait partie de

 27   l'Autriche, et la Croatie et la Slavonie faisaient partie de la Hongrie;

 28   ai-je raison ?


Page 3596

  1   R.  Il me semble que oui.

  2   Q.  Seriez-vous d'accord pour dire que, pour les Croates et les Slovènes

  3   également, le fait de créer un Etat commun avec les Serbes, c'était une

  4   manière de se sauver face aux aspirations qu'avaient les pays voisins ?

  5   R.  Oui, c'est ainsi qu'on a interprété cela. Je sais que l'évêque Juraj

  6   Strossmayer était favorable à l'idée yougoslave et que c'étaient les

  7   Croates qui étaient à l'origine de cette idée de créer une Yougoslavie.

  8   Q.  Est-ce que vous savez que jamais dans aucune constitution yougoslave il

  9   n'y avait eu une disposition qui prévoyait le droit à la sécession ?

 10   R.  Je ne sais pas. Je ne connais pas ce détail.

 11   Q.  Est-ce que vous avez jamais entendu dire qu'il y avait ce genre de

 12   disposition à la constitution ?

 13   R.  Si, j'en ai entendu parler.

 14   Q.  Qu'il y en avait une ? Que ça existait dans la constitution ?

 15   R.  Ce détail sur le droit à la sécession, il me semble que non, qu'ils

 16   n'avaient pas le droit.

 17   Q.  En 1991, les Serbes étaient prêts à ce que ce droit soit introduit dans

 18   la constitution et que l'on prévoit une procédure qui permettrait de

 19   bénéficier de ce droit. Donc, l'assemblée fédérale allait décider quelle

 20   serait la procédure qui permettrait à une entité fédérale d'opérer

 21   sécession ?

 22   R.  Je sais qu'il en a été question, mais je ne connais pas les détails.

 23   C'était il y a longtemps, et vraiment je ne me souviens pas précisément de

 24   quoi il s'est s'agi.

 25   Q.  Mais tous étaient hostiles à ce qu'il y ait une sécession par la force,

 26   n'est-ce pas, à la fois les hommes politiques serbes dans le gouvernement

 27   et l'opposition ?

 28   R.  Oui, ils étaient opposés à une sécession par la violence.


Page 3597

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

 14 

 15 

 16 

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28  


Page 3598

  1   Q.  Mais ils acceptaient la possibilité qu'on opère cela, une sécession,

  2   par des moyens démocratiques ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Ante Markovic, est-ce qu'il a pris la décision que l'armée populaire

  5   yougoslave intervienne en Slovénie ?

  6   R.  Oui, c'est ce qu'on lui attribue à lui.

  7   Q.  Des hommes politiques slovènes lui ont attribué cela ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Les dirigeants serbes étaient-ils hostiles à ce que la JNA intervienne

 10   en Slovénie ?

 11   R.  Oui, c'est ce que j'ai entendu dire.

 12   Q.  Est-ce que la grosse majorité des hommes politiques serbes a estimé que

 13   si les Slovènes ne souhaitaient pas vivre en Yougoslavie, qu'il ne fallait

 14   pas qu'ils y restent, qu'il ne fallait pas les garder par la force en

 15   Yougoslavie ?

 16   R.  Oui, c'est ce qui a été dit.

 17   Q.  Est-ce qu'il a été possible que la Croatie ait opéré une sécession

 18   aussi facilement que la Slovénie, par rapport à la Yougoslavie ?

 19   R.  Non, et surtout pas avec les autorités qu'on avait à l'époque en

 20   Croatie.

 21   Q.  Pas avec les autorités, le pouvoir de Tudjman, qui s'est déclaré

 22   prooustachi ouvertement.

 23   R.  Surtout, il y avait un manque de démocratie, et les Serbes ne lui

 24   faisaient pas confiance. Ils éprouvaient plutôt de la méfiance.

 25   Q.  La Croatie ne pouvait pas opérer une sécession de la Yougoslavie si les

 26   Serbes, en tant que peuple constitutif de la Croatie, n'étaient pas

 27   d'accord avec cela ?

 28   R.  Les Serbes étaient un peuple constitutif de la République de Croatie


Page 3599

  1   qui avait contribué de manière considérable aussi à ce que la Croatie soit

  2   reconnue. Je veux dire, pendant la Seconde Guerre mondiale, la Croatie a

  3   fait partie de la Yougoslavie. Ils ont estimé que sans leur consentement la

  4   Croatie ne devait pas quitter la Yougoslavie.

  5   Q.  Est-ce que vous vous souvenez qu'Ante Markovic, à la fin de l'année

  6   1989, ou plutôt, à partir du 1er janvier 1990, a proclamé le dinar

  7   convertible ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  A ce moment-là, est-ce qu'on a rattaché le coût du dinar par rapport au

 10   deutsche mark; sept dinars, je pense, contre un mark ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  A ce moment-là, la RSFY, avait-elle à peu près dix milliards de dollars

 13   de réserve en devises étrangères ?

 14   R.  Il me semble que c'était ça.

 15   Q.  A ce moment-là, les républiques les plus développées, à savoir la

 16   Croatie et la Slovénie, en particulier la Slovénie, est-ce qu'elles ont

 17   fait marcher la planche à billets pour racheter les devises étrangères ?

 18   Est-ce qu'elles ont commencé à faire ça en masse ?

 19   R.  J'en ai entendu parler.

 20   Q.  Très rapidement, est-ce qu'on n'a pas vidé ainsi les caisses de devises

 21   étrangères ?

 22   R.  Il me semble.

 23   Q.  Ante Markovic, est-ce que je l'ai accusé d'avoir vidé ainsi les caisses

 24   et est-ce qu'il n'a pas provoqué ainsi intentionnellement que les devises

 25   trouvent le chemin de la Slovénie et de la Croatie ?

 26   R.  Je ne peux pas dire qu'il ait fait ça intentionnellement, puisque je

 27   n'étais pas suffisamment près pour savoir exactement ce qui s'est passé. Je

 28   n'étais pas un initié.


Page 3600

  1   Q.  Mais lorsqu'on agit ainsi sur le plan économique et politique et

  2   lorsqu'on tire un parallèle avec la création d'un nouveau parti politique

  3   qui allait se représenter aux élections dans le reste de la Yougoslavie

  4   sans que cela se passe en Slovénie et en Croatie, je pense qu'il y a une

  5   conclusion qui s'impose.

  6   R.  Je dirais qu'à l'époque il y a eu des choses un peu étranges qui se

  7   sont produites et qui ont échappé au contrôle. Il y avait beaucoup de

  8   doutes, de suspicions, et les devises sont parties. On s'est dit que ce

  9   n'était pas par des moyens très honorables. C'était très important pour

 10   tout l'Etat et pour toute la population, et évidemment que ça a créé une

 11   certaine méfiance eu égard à Markovic, après quand il s'est présenté aux

 12   élections.

 13   Q.  Donc j'ai dû avoir raison lorsque j'ai dit pendant ces années-là

 14   qu'Ante Markovic était un Oustachi bien plus dangereux que Franjo Tudjman.

 15   Franjo Tudjman agissait ouvertement, on savait à qui on avait affaire,

 16   tandis qu'Ante Markovic minait la Yougoslavie de l'intérieur. Il piétinait

 17   les intérêts serbes, et en même temps il faisait semblant d'être partisan

 18   de la préservation de la Yougoslavie. Il était en même temps en train

 19   d'aider les séparatistes slovènes et croates. Etait-ce la substance de mes

 20   déclarations ?

 21   R.  Oui, c'était la substance de vos déclarations, mais je dois dire que M.

 22   Ante Markovic, on ne peut pas dire que c'était un Oustachi. Les Oustachi

 23   avaient fait d'autre chose. Avait-il des objectifs perfides, ça je ne peux

 24   pas le dire. Je ne le sais pas. Mais il est certain que les Serbes ont

 25   éprouvé de la méfiance à son égard à cause de ses actes.

 26   Q.  Etaient-ce des arguments à moi que de le traiter plus dangereux comme

 27   Oustachi que Franjo Tudjman ? C'est ça la substance de ma question pour

 28   vous.


Page 3601

  1   R.  A vous écouter aujourd'hui et auparavant, je pense que oui.

  2   Q.  Vous avez mentionné le fait que Milan Martic et Milan Babic, parce que

  3   vous l'avez dit, avaient été les représentants d'une option extrémiste.

  4   C'est ainsi que vous vous êtes exprimé à l'occasion de l'interrogatoire

  5   principal ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Donc, une option extrémiste du point de vue de la politique dans la

  8   République de la Krajina serbe. Saviez-vous que, de façon ininterrompue,

  9   Milan Babic et Milan Martic ont été en conflit l'un avec l'autre ?

 10   R.  Oui, ils étaient en conflit.

 11   Q.  Une fois, je me suis efforcé d'intervenir, de servir de médiateur afin

 12   que ce conflit entre les deux s'apaise.

 13   R.  Oui, je pense que cela s'est produit.

 14   Q.  Lorsque j'ai apporté publiquement un soutien au nom du Parti radical

 15   serbe au plan Vance pour la Krajina serbe et que Babic s'est y opposé, est-

 16   ce que j'ai insisté à ce moment-là à ce que les hommes politiques serbes se

 17   réconcilient et adoptent des positions unifiées ?

 18   R.  Je pense que oui.

 19   Q.  Le fait d'avoir insisté pour que les hommes politiques serbes

 20   coordonnent leurs positions, qu'ils se réconcilient si conflit il y avait,

 21   est-ce que cela signifie qu'à leurs côtés j'ai pris part à une entreprise

 22   criminelle commune quelconque ?

 23   R.  Je ne vous ai jamais accusé pour ma part d'avoir pris part à une

 24   entreprise criminelle commune. J'ai dit que vous aviez réclamé de leur part

 25   une unité.

 26   Q.  Est-ce que quiconque au niveau de la scène politique serbe depuis 1990

 27   à ce jour, mis à part le Parti radical serbe, s'est employé en faveur de la

 28   Grande-Serbie ?


Page 3602

  1   R.  Pour autant que je m'en souvienne, je crois qu'il n'y a que vous, à

  2   savoir le Parti radical serbe, à l'avoir fait. Je ne pense pas que

  3   quiconque l'ait fait.

  4   Q.  Se peut-il que Slobodan Milosevic ait été favorable à une Grande-Serbie

  5   ?

  6   R.  Je pense que non.

  7   Q.  Est-ce que Jovan Raskovic était favorable à une Grande-Serbie ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Est-ce que Milan Babic a déclaré à quelque moment que ce soit qu'il

 10   était favorable à une Grande-Serbie ?

 11   R.  Lui, à la veille du référendum du 12 mai 1991, avait insisté pour que

 12   la question du vote soit celle-ci, à savoir que les Serbes rejoignent les

 13   Serbes de Serbie et non pas la Yougoslavie, et c'est là qu'il y a eu

 14   divergence avec lui. Nous voulions que les Serbes restent en Yougoslavie;

 15   c'était notre souhait. Lui souhaitait que la Krajina rejoigne la Serbie.

 16   C'est ainsi qu'on a interprété la chose comme quoi il était favorable à une

 17   Grande-Serbie et non pas à la Yougoslavie.

 18   Q.  Mais lui n'a jamais mentionné la Grande-Serbie. Lui, il a voulu que la

 19   Krajina de Knin rejoigne la Serbie.

 20   R.  Exact.

 21   Q.  Vous souvenez-vous du fait que l'assemblée nationale de la République

 22   de Serbie avait refusé la demande formulée par ses soins à lui pour ce qui

 23   était de réunir ces territoires de la Krajina serbe à la Serbie ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que Radovan Karadzic a, à quelque moment que ce soit, été

 26   favorable à une Grande-Serbie ?

 27   R.  Non, lui s'est employé en faveur d'une alliance des terres serbes.

 28   Q.  Oui, mais avant cela, il était favorable au fait de laisser ceux qui


Page 3603

  1   voulaient une Yougoslavie rester en Yougoslavie.

  2   R.  C'est ce qu'il disait au début.

  3   Q.  Il n'a jamais demandé à ce que la Republika Srpska soit annexée à la

  4   Serbie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne me souviens pas qu'il y ait eu une telle demande.

  6   Q.  Est-ce que Veljko Kadijevic, ministre de la Défense, s'est employé en

  7   faveur d'une Grande-Serbie ?

  8   R.  Non, je n'en ai entendu parler.

  9   Q.  Je n'ai pas pu vous poser de question plus bête, n'est-ce pas ?

 10   R.  Certes.

 11   Q.  Avez-vous entendu parler d'un parti politique qui s'appelle la Ligue

 12   des Communistes, mouvement pour la Yougoslavie ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Qui est-ce qui a créé ce parti politique ?

 15   R.  Je pense que c'étaient des officiers à la retraite de la JNA, si mes

 16   souvenirs son bons. Il y avait Branko Mamula et d'autres à ses côtés, le

 17   général Mirkovic et d'autres.

 18   Q.  Branko Mamula était amiral et il était ministre de la Défense avant

 19   Kadijevic, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous souvenez-vous du fait qu'ont fait partie de ce parti des généraux

 22   d'active, Kadijevic, Adzic, Vasiljevic et autres ?

 23   R.  Je pense que oui.

 24   Q.  Vous souvenez-vous du fait que les officiers de la JNA étaient tenus de

 25   s'affilier à ce parti ?

 26   R.  Je l'ai appris, oui.

 27   Q.  Saviez-vous que ce parti avait un plan, à savoir organiser un coup

 28   contre Tudjman et Milosevic et s'emparer du pouvoir en Yougoslavie ?


Page 3604

  1   R.  J'ai entendu dire que la direction au sommet de l'armée avait envisagé

  2   un coup.

  3   Q.  Saviez-vous qu'ils avaient demandé un soutien à l'étranger, d'abord à

  4   l'Ouest, puis ensuite à l'Est ?

  5   R.  J'ai entendu dire que Kadijevic avait essayé de le faire.

  6   Q.  Ils avaient d'abord demandé l'accord de l'Amérique et de l'OTAN, et

  7   quand ils ont été refusés ils sont allés voir l'Union soviétique. Kadijevic

  8   y a voyagé.

  9   R.  Je sais qu'il est allé voir là-bas.

 10   Q.  Vous savez que la direction de la Serbie avait redouté un coup

 11   militaire jusqu'à ce que Kadijevic et Adzic ne soient mis à la retraite ?

 12   R.  Je ne le savais pas.

 13   Q.  Savez-vous pourquoi en Serbie il n'y a pas eu de mobilisation réussie

 14   en 1991, parce que les autorités de l'unité fédérale du régime Milosevic ne

 15   voulaient pas s'impliquer eux-mêmes pour ce qui était de procéder à la

 16   mobilisation ?

 17   R.  Je sais que la mobilisation n'a pas été une mobilisation réussie et que

 18   jamais, de façon publique, il n'y a eu appel sous les drapeaux, et on a

 19   reproché la chose au régime.

 20   Q.  Kadijevic a fait des reproches à Milosevic à cet effet, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et Milosevic, lui, ne voulait pas permettre un succès de la

 23   mobilisation pour que Kadijevic ne le fasse pas tomber du haut du pouvoir,

 24   n'est-ce pas, c'est clair ?

 25   R.  Ça, je ne le sais pas. Milosevic devait savoir forcément ce qui se

 26   passait.

 27   L'INTERPRÈTE : L'interprète saurait gré à ce qu'il n'y ait pas de

 28   chevauchement entre les deux.


Page 3605

  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Je voudrais maintenant poser des questions qui pourraient permettre de

  3   dévoiler l'identité du témoin, à vous d'en décider. Mais je crois que ce

  4   témoin n'a aucune raison de laisser son témoignage inaccessible au public,

  5   parce que je ne vois pas ce qu'on pourrait lui reprocher partant du

  6   témoignage effectué jusqu'à présent. Mais au témoin de voir. Je lui poserai

  7   la question en fin de course.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : [chevauchement] -- à huis clos.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Juge, nous sommes 

 10   actuellement à huis clos partiel.

 11   [Audience à huis clos partiel]

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 3606

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12 

 13  Pages 3606-3621 expurgées. Audience à huis clos partiel.

 14 

 15 

 16 

 17 

 18 

 19 

 20 

 21 

 22 

 23 

 24  

 25 

 26 

 27 

 28 


Page 3622

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14   [Audience publique]

 15   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Avant de commencer, une petite remarque.

 16   Je pense que j'aurais pu faire objection souvent pendant le contre-

 17   interrogatoire parce que je ne pense pas que c'est de cette manière que ce

 18   contre-interrogatoire doit être mené avec ce genre de questions, mais je ne

 19   l'ai pas fait parce que je ne pensais pas que c'était dans l'intérêt de

 20   l'Accusation. C'était donc la meilleure manière de procéder pour nous.

 21   Nouvel interrogatoire par M. Mussemeyer :

 22   Q.  [interprétation] Vous avez dit hier, Monsieur le Témoin, au cours du

 23   contre-interrogatoire, en réponse à une question du Président, si les

 24   Serbes qui vivaient en Croatie en 1991 connaissaient le nom de Seselj.

 25   "Est-ce que les gens le connaissaient, est-ce qu'ils connaissaient ce nom

 26   ?" Vous avez répondu que : "Les Serbes de Croatie ne le connaissaient

 27   absolument pas à l'époque. C'était un inconnu total pour eux."

 28   Monsieur le Témoin, savez-vous que l'accusé a été arrêté en 1984, à


Page 3623

  1   l'époque de Milosevic ?

  2   R.  En 1984 ? Je sais qu'il a été arrêté. Je ne sais pas exactement en

  3   quelle année, mais s'agissant de la question que vous venez de me poser, en

  4   1991, il me semble que c'est l'année 1990 qui a fait l'objet de la question

  5   de M. le Président. En 1991, à partir du mois de mai à peu près, oui, on

  6   avait entendu parler de Seselj, mais en 1990, il n'avait pas d'importance.

  7   Nous avons entendu aujourd'hui que lors du rassemblement de Serbes en

  8   juillet 1990, c'était quelqu'un qui était encore complètement inconnu. Il

  9   n'avait même pas pris la parole.

 10   Puis, pour ce qui est de l'année 1984, oui. Je sais qu'il a été arrêté à un

 11   moment, mais je ne sais pas quand.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Monsieur le Président, le Procureur

 13   essaie d'induire en erreur le témoin. Il essaie de lui faire dire que c'est

 14   sous Milosevic que j'ai été arrêté en 1984, mais il n'était pas au pouvoir,

 15   Milosevic. En 1984, il était président du comité municipal de la Ligue des

 16   Communistes de Belgrade.

 17   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je n'ai pas l'intention d'induire en

 18   erreur qui que ce soit. Je souhaitais simplement revenir au fait que M.

 19   Seselj, à ce moment-là, avait été arrêté et qu'il était en prison.

 20   R.   Je sais qu'il se trouvait en prison, je ne sais pas en quelle année.

 21   Q.  Etait-ce un dissident célèbre à ce moment-là, connu dans toute la

 22   Yougoslavie ?

 23   R.  Oui, on a entendu parler de lui en tant que dissident.

 24   Q.  Donc est-ce qu'on peut dire qu'il était connu à cette époque-là ou non

 25   ?

 26   R.  Franchement, c'est un nom qu'on connaissait, mais pas dans le même

 27   contexte, le contexte national où on l'a situé par la suite. Par la suite,

 28   on savait que M. Seselj était à la tête d'une certaine option politique.


Page 3624

  1   Je pense qu'à ce moment-là où ceci s'est produit, il y avait un peu

  2   moins de gens qui le connaissaient. Je ne pense pas que c'est de la même

  3   façon qu'il était connu, comme il l'est devenu par la suite.

  4   Q.  Mais on le connaissait ou un cercle restreint de personnes le

  5   connaissaient. Je ne sais pas si c'est très exact, un nombre limité ou un

  6   grand nombre ?

  7   R.  Je pense que c'était un nombre limité de personnes qui connaissaient

  8   son nom, savaient qui il était, ce qu'il voulait. Enfin, des gens qui

  9   étaient plutôt versés dans les choses politiques.

 10   Q.  A la fin des années 1980, à partir de 1989, 1990, 1991, il y a eu un

 11   renouveau, en quelque sorte, du mouvement chetnik et de l'idéologie

 12   chetnik. Etiez-vous au courant de cela ?

 13   R.  Oui, j'ai vu cela dans les médias. On a parlé des Chetniks, de

 14   l'idéologie chetnik, du mouvement de la Ravna Gora, et cetera.

 15   Q.  Quelles personnes étaient associées à ce mouvement chetnik ?

 16   R.  Je sais qu'on a cité le nom de Vuk Draskovic qui aujourd'hui cherche à

 17   réhabiliter Draza Mihajlovic, mais par la suite, il y avait M. Seselj qui

 18   est devenu voïvode et il a été promu à ce grade par le plus grand voïvode

 19   vivant, qui vivait aux Etats-Unis. C'était la personnification du Chetnik.

 20   Q.  Ce n'était pas un fait connu des Serbes en Croatie ?

 21   R.  Oui. A l'époque, on a entendu parler de ça.

 22   Q.  Donc est-ce que l'on peut dire qu'il était totalement inconnu à cette

 23   époque-là ?

 24   R.  Je n'ai pas dit qu'il était complètement inconnu, mais si j'ai cité

 25   l'exemple d'un rassemblement de 250 000 Serbes en Serbie en disant qu'il

 26   n'était pas connu des gens, enfin il y avait des gens qui avaient entendu

 27   prononcer son nom, mais ils ne savaient pas qui il était. Donc on pouvait

 28   voir que les gens ne lui attribuaient pas vraiment d'importance. Il y avait


Page 3625

  1   Milan Babic qui était un protagoniste de la scène politique, une figure

  2   politique, Raskovic, également.

  3   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

  4   expliquer une nouvelle fois quel est le sens du terme "Oustachi" pour un

  5   Serbe ?

  6   R.  Si je puis, à titre de comparaison, je dirais que c'est la pire chose

  7   qui soit au monde, un bourreau. Oustachi, aux yeux des Serbes, c'est

  8   quelqu'un qui détruit un foyer, une famille, la vie, qui prive les gens de

  9   tous les droits. C'est la pire chose à laquelle on aurait eu à faire face

 10   dans son histoire.

 11   Q.  Est-ce que l'on peut qualifier tous les Croates d'Oustachi, est-ce que

 12   ceci est justifié ?

 13   R.  Non, non. Absolument pas. Il y a nombre de Croates dans la résistance

 14   et ils n'étaient pas loyaux au régime Oustachi.

 15   Q.  Est-ce que l'on peut appeler Ante Markovic un Oustachi ? Est-ce

 16   justifié ?

 17   R.  J'ai déjà dit que ce n'était pas le cas. D'après moi, Ante Markovic ne

 18   peut pas être appelé Oustachi, il n'acceptait pas cette idéologie ni ce

 19   mode de comportement. Il était membre de la Ligue des Communistes.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je souhaite demander au greffier de nous

 21   montrer une nouvelle fois la version en serbe de la pièce 411, qui est la

 22   pièce P39 marquée aux fins d'identification.

 23   Il s'agit là de l'article du Spiegel daté du 6 août 1991. Je faisais

 24   référence à cet article pendant mon interrogatoire principal et M. Seselj

 25   l'a évoqué pendant son contre-interrogatoire.

 26   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez regarder le bas de la

 27   deuxième page, s'il vous plaît. La deuxième page du texte en serbe. Un peu

 28   plus bas, s'il vous plaît. Davantage, s'il vous plaît. Plus bas. En bas de


Page 3626

  1   la page. Ceci n'est pas le bas de la page.

  2   Vous voyez quelque chose qui s'appelle Tanjug Press. Qu'est-ce que cela

  3   signifie, s'il vous plaît ?

  4   R.  Tanjug c'est l'abréviation pour une agence de presse, d'information

  5   yougoslave. Je ne sais pas exactement comment elle est faite. Je sais que

  6   c'est en passant par Tanjug que toute la presse écrite reçoit

  7   l'information.

  8   Q.  Si je ne me suis pas trompé, la date de cet article est celle du 8 août

  9   1991. Est-ce qu'on peut voir ceci, s'il vous plaît ? Cela figure peut-être

 10   à la première page.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Encore une fois, le Procureur essaie

 12   d'induire en erreur le témoin. Il s'agit d'une publication interne de

 13   Tanjug qui n'est fournie qu'aux rédactions des journaux et à certaines

 14   institutions ou organes politiques d'Etat, et cetera, donc des

 15   destinataires privilégiés. Ce n'est pas quelque chose qui est mis en vente

 16   générale et certains textes considérés comme intéressants publiés dans la

 17   presse étrangère étaient traduits par cette agence.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. On a pris note de ce que vous dites. Attendons

 19   la suite de la question.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 21   Q.  Je n'affirme pas que ceci était du domaine public. Ce que je souhaite

 22   dire, c'est que ceci a été publié par Tanjug, et ma question au témoin est

 23   celle-ci : avez-vous jamais entendu dire que M. Seselj s'est distancé de

 24   cet article et de sa teneur ?

 25   R.  Je ne connaissais pas cet article, je ne l'avais pas lu jusqu'au bout.

 26   Maintenant je suis en train de le faire. C'est seulement maintenant que je

 27   vois tous les détails de cet article, mais je n'ai jamais entendu dire

 28   qu'il ait pris ses distances par rapport à cet article.


Page 3627

  1   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges, je

  2   n'ai plus de questions.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, je vous remercie au nom de mes collègues

  4   d'être venu à La Haye pour témoigner. Je vous souhaite un bon retour pour

  5   votre voyage. Avant de quitter donc Mme l'Huissière baissera les rideaux

  6   pour que vous puissiez quitter cette salle.

  7   J'informe donc tout le monde que demain nous commencerons à 8 heures et

  8   demie avec l'expert M. Theunens.

  9   C'est bien cela, Monsieur Mundis ? L'expert est à la disposition de

 10   la Chambre.

 11   M. MUNDIS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 12   Merci beaucoup.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Qui va mener l'interrogatoire principal ?

 14   M. MUNDIS : [interprétation] Du côté de l'Accusation, c'est mon confrère,

 15   Mathias Marcusson, qui va mener l'interrogatoire principal.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je vous souhaite donc à tous un bon après-

 17   midi, et nous nous retrouverons demain matin à 8 heures et demie.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous également, au revoir.

 19   --- L'audience est levée à 13 heures 26 et reprendra le jeudi 14 février

 20   2008, à 8 heures 30.

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28