Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 26 février 2008

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 8 heures 31.

5 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appeler le numéro de

7 l'affaire, s'il vous plaît.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, affaire IT-03-67-T, le Procureur

9 contre Vojislav Seselj.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce mardi, 26 février

11 2008, je salue les représentants de l'Accusation. Je salue M. le Témoin, je

12 salue M. Seselj, ainsi que toutes les personnes qui nous aident dans notre

13 mission.

14 Le contre-interrogatoire va se poursuivre aujourd'hui. L'accusé nous a

15 donné - et je l'en remercie - trois gros classeurs avec donc des documents.

16 Tout le monde, les Juges les ont. L'Accusation a dû les avoir et l'accusé

17 les aura également certainement, ce qui vous nous permettre de suivre plus

18 facilement les questions qui vont être posées.

19 Si M. Seselj n'a pas de questions de nature administrative à évoquer, il

20 peut donc commencer poursuivre le contre-interrogatoire.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai deux questions

22 administratives à soulever qui sont importantes d'ailleurs et il me semble

23 que si ces questions ne sont pas tirées au clair, il ne nous sera pas

24 possible de continuer le contre-interrogatoire de ce témoin-ci.

25 Mais au préalable je vous demanderais de remettre un jeu de documents à ce

26 témoin-ci aussi, et j'aimerais que le témoin ait cela -- ou plutôt, qu'il

27 ait la possibilité de se pencher dessus pendant la pause. Je ne vais pas

28 m'en servir avant la pause, donc, je voudrais qu'il se pencher sur ces

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1 documents afin de nous permettre un gain de temps lors du contre-

2 interrogatoire. C'est un nombre considérable de documents. Certains ne sont

3 pas encore traduits, mais j'ai tout remis en temps utile pour traduction,

4 il y a presque trois mois de cela.

5 Alors, premier problème : le bureau du Procureur ne m'a pas communiqué ni

6 la déclaration, ni l'audition du général Zivota Panic et ils étaient tenus

7 de le faire, et donc, il y a déjà violation de l'article 21, alinéa 1, 2,

8 et 4(b) ainsi que (e) du Statut. Il y a eu violation de l'article 68(1) de

9 l'article -- du Règlement de procédure et de preuve et de l'article 6 de la

10 Convention européenne des droits de l'homme.

11 La Cour européenne des droits de l'homme a déjà eu un certain nombre de

12 jugements rendus pour prendre position et dire que la procédure dans toute

13 affaire pénale doit être contradictoire en tout état de cause et garantir

14 l'égalité des armes. Et dans les jugements rendus par la Cour européenne

15 des droits de l'homme, cela s'appelle "l'égalité des armes," justement et

16 il s'agit là d'un aspect fondamental du droit à un procès juste et

17 équitable.

18 Tout non divulgation des éléments de preuve pertinents enfreints cette

19 règle de procès équitable en application de cet article 6(1) de la

20 Convention européenne des droits de l'homme, l'obligation tombe sur

21 l'Accusation de communiquer tous les éléments de preuve pertinents en sa

22 possession. Ensuite, ce droit au processus contradictoire implique la

23 possibilité de faire en sorte que les parties soient mises au courant des

24 observations et réflexions de l'autre partie pour pouvoir en débattre.

25 Je vous rappelle qu'il y a l'affaire Franzepen [phon] contre l'Autriche de

26 1991; Hit contre la Grande-Bretagne de 1996; et Jasper contre la Grande-

27 Bretagne en 1995, et cetera.

28 Donc, il n'y a aucune raison pour que, dans cette affaire-ci, il y ait ce

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1 type de restriction et le bureau du Procureur par quelques commentaires que

2 ce soit de sa part n'a évoqué la nécessité de restrictions du point de vue

3 de l'audition et de l'interview avec Zivota Panic. Etant donné que la

4 Convention européenne des droits de l'homme protège les intérêts des

5 parties ainsi que l'intérêt de la justice en même temps, les parties au

6 procès doivent pouvoir bénéficier de la possibilité de se prononcer sur le

7 fait de savoir si un document vaut la peine d'être commenté et d'être

8 utilisé dans le procès ou pas; faire confiance à la justice et au

9 fonctionnement de ces instances se fonde, entre autres, sur la nécessité

10 pour toutes parties de se prononcer au sujet de tout documents et tout

11 éléments de preuve que comporte le dossier.

12 Donc, il ne fait pas l'ombre d'un doute que la déclaration du général

13 Panic, qui se trouve être avoir été commandant de la

14 1ère Région militaire du 1er District militaire, dont la compétence englobait

15 Vukovar et sous les ordres de qui se trouvait la

16 1ère Division de la Garde des prolétaires et la 1ère Brigade de la Garde,

17 secteur sud et secteur nord par voie de conséquence, ceci se trouve donc

18 être pertinent, on ne peut plus pertinent parce que -- revêtant une

19 importance capitale pour ma défense tout comme pour l'issue finale de ce

20 procès. Moi, je n'ai pas eu la possibilité de prendre connaissance de la

21 teneur de cette déclaration et de façon appropriée me pencher sur le

22 témoignage de ce Témoin Theunens qui fait partie de l'équipe de

23 l'Accusation. Et vous avez vu la fois passée qu'il nous a bien confirmé

24 qu'en sa qualité de membre de l'équipe de l'Accusation, il a participé à

25 l'audition des témoins, des suspects, au récolement des témoins pour

26 témoignage et qu'il a accompli toutes les tâches qui sont celles des autres

27 membres de l'équipe du bureau du Procureur.

28 Ici, donc, il n'y a absolument pas d'égalité des armes et je vous ai

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1 communiqué pour ma part deux déclarations qui me sont parvenues hier, donc,

2 il n'y a pas eu de possibilité, je les ai retrouvées dans ma cellule à 5

3 heures de l'après-midi et j'ai eu ma famille en visite toute la journée. On

4 m'a remis ça à 5 heures de l'après-midi. Peut-être l'administration de la

5 prison a-t-elle reçu cela un peu plus tôt dans la matinée. Je n'ai donc pas

6 pu faire traduire cela en temps utile. Il s'agit d'une déclaration du

7 lieutenant-colonel Vidoje Mijailovic et la déclaration du colonel Mijo

8 Milosevic, qui sont témoins. Du fait que le 27 octobre 2002, à Pancevo, à

9 l'assemblée de l'Association des ex-membres de la

10 51e Brigade mécanisée dont le siège se trouve être à Pancevo et dont le

11 commandant jadis avait été le commandant -- le général Zivota Panic, se

12 sont entretenus avec ledit général Panic et je me propose de vous donner

13 lecture de parties les plus pertinentes de ces déclarations afin que vous

14 ayez une idée et que vous verrez que cela a été visé au tribunal

15 municipalité de Pancevo le 25 février 2008, à savoir cela a été visé hier.

16 Le lieutenant-colonel Vidoje Mijailovic et le colonel Mijo Milosevic

17 ont vu l'enregistrement de l'interrogatoire principal du présent témoin et

18 j'ai insisté sur la déclaration et le texte de l'audition de Zivota Panic

19 et c'est ce qu'il les a incité à s'adresser à l'équipe de -- qui aide à ma

20 défense, l'avocat Pete Vijojic pour lui proposer ces déclarations. Le

21 lieutenant-colonel Vidoje Mijailovic nous dit ici : par cette occasion-là

22 Zivota Panic s'était plaint auprès de lui d'avoir de gros problèmes vitaux,

23 qui lui sont causés par les enquêteurs du Tribunal de La Haye et qu'il a

24 peur pour sa vie et pour la vie de ses enfants. Il a dit que les enquêteurs

25 de La Haye l'ont entendu 12 journées pendant dix heures à chaque fois et

26 qu'ils ont exercé des pressions -- d'échange du chantage et qu'ils l'ont

27 menacé de dresser un acte d'accusation à son encontre au cas où il

28 n'accepterait pas d'être témoin de l'Accusation devant le Tribunal de La

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1 Haye et où s'il ne venait pas à déclarer ce que les enquêteurs de La Haye

2 demandait qu'il déclare. A l'occasion de ces auditions, les enquêteurs lui

3 auraient montré de nombreux documents, et lui, s'agissant de ces documents,

4 il ne les avait jamais vu et n'en a jamais entendu non plus. Et c'est cela

5 qui le mettait en peine parce qu'on lui demandait de confirmer ces

6 documents, et au cas où il ne le ferait pas, le Procureur de La Haye

7 dresserait un acte d'accusation pour crime de guerre en son encontre.

8 D'après le lieutenant-colonel Mijailovic, le général Panic lui a encore dit

9 que les enquêteurs de La Haye l'ont contraint à signer une déclaration.

10 Alors, je vais un commentaire : La déclaration existe donc parce qu'il y a

11 deux témoins qui confirment que Zivota Panic leur a bel et bien dit qu'il

12 avait signé une déclaration.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Une seconde. Je vous écoute attentivement, mais ma

14 collègue voudrait être éclairée sur le lien qu'il pourrait y avoir entre le

15 contre-interrogatoire de ce témoin et le général Panic. Est-ce que vous

16 pouvez en plus nous préciser cela ? Donc, après vous continuerez ce que

17 vous vouliez nous dire.

18 M. SESELJ : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je vais vous

19 dévoiler un petit secret dont n'est pas au courant le bureau du Procureur.

20 Au mois d'août de l'an 2004, avec une attestation numéro 6. Alors, je

21 vous demanderais de demander au bureau du Procureur la teneur complète du

22 document qui accompagne l'attestation ou le certificat numéro 6. Il m'a été

23 communiqué par l'Accusation un bref résumé de la déclaration du général

24 Zivota Panic qui à mes yeux se trouve être tout à fait à décharge. Et pour

25 ce qui est de cette déclaration, je dois la montrer à ce témoin lors de mon

26 contre-interrogatoire.

27 Or, à la Conférence de mise en état, à la date du 4 octobre 2004,

28 j'ai demandé au Juge de la mise en état de l'époque, M. Agius, d'enjoindre

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1 au bureau de l'Accusation de me communiquer ces déclarations intégrales. Et

2 Agius a répondu - vous pouvez voir les comptes rendu de la Conférence de

3 mise en état du 4 octobre 2004 que la Juge de la Chambre de première

4 instance ne recevait pas ces documents disculpatoires [phon] que le bureau

5 du Procureur était censé me communiquer, et il a demandé à ce que je fasse

6 une demande par écrit. Suite à un instant, à un moment, j'ai demandé par

7 écrit la même chose et je n'ai jamais reçu de la part de l'Accusation ces

8 déclarations de Zivota Panic.

9 Zivota Panic a déclaré que tous les volontaires du Parti radical

10 serbe faisaient partie des rangs de la JNA et qu'il n'y en avait pas un

11 seul de suspecter pour crimes de guerre, que c'était des gens disciplinés.

12 Il affirme que les Aigles blancs n'ont jamais fait partie de la JNA et

13 ainsi de suite. Donc c'est la teneur de sa déclaration, c'est pourquoi

14 cette déclaration de Zivota Panic est très importante pour moi. Pour ce qui

15 est de certaines parties de cette déclaration, je veux que ce témoin expert

16 se prononce à ce sujet, et il fait d'ailleurs partie de l'équipe de

17 l'Accusation. Et si vous le permettez, très brièvement, je me proposerais

18 d'en terminer avec ce que j'avais à citer sur ces deux déclarations.

19 J'en suis à la fin de la déclaration du lieutenant-colonel Vidoje

20 Mijailovic, et ensuite, très brièvement, je pourrais vous lire un extrait

21 de la déclaration de ce colonel Mijo Milosevic. Et par la suite, je

22 demanderais aux Juges de la Chambre la prise de mesures adéquates à ce

23 sujet.

24 Alors, je disais, le général Zivota Panic a aussi dit à Vidoje

25 Mijailovic tel que cette déclaration nous l'indique, que les enquêteurs de

26 La Haye l'ont contrait à signer cette déclaration que eux ont rédigé et que

27 cette déclaration il ne la reconnaîtrait jamais comme étant la sienne, et

28 que cette déclaration qu'il a signé, jamais on ne la lui a donné. Et il

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1 regrette énormément le fait de ne pas avoir un exemplaire de ladite

2 déclaration afin de pouvoir nous montrer --

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite. Pouvez-vous redire ce que vous

4 venez de dire, mais dites-le lentement pour qu'on perçoive parfaitement ce

5 que vous voulez dire. Donc, je vous demande de recommencer mais doucement,

6 lentement.

7 M. SESELJ : [interprétation] La signification de ce que je viens de citer,

8 c'est quelque chose de complémentaire. Dans la déclaration, il y aurait des

9 éléments que Zivota Panic n'aurait pas souhaité faire figurer dans sa

10 déclaration. Mais suite à toutes ces pressions, il a tout signé sans lire.

11 Il a dit donc que le lieutenant-colonel Vidoje Mijailovic --

12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- que le général Panic a signé alors même que la

13 semaine dernière le Procureur nous a affirmé qu'il n'y a jamais eu un

14 écrit. Alors, c'est pour ça que je vous ai redemandé de nous redire cela

15 lentement pour qu'on se rende bien compte du problème posé.

16 M. SESELJ : [interprétation] Monsieur le Président, j'insiste justement sur

17 le fait que la déclaration du général Panic existe bel et bien et qu'elle

18 est dissimulée par le bureau du Procureur.

19 Le lieutenant-colonel Mijailovic dit que Zivota Panic lui a encore

20 dit que les enquêteurs de La Haye l'ont contraint à signer une déclaration

21 qu'ils ont rédigé eux mais que cette déclaration il ne la reconnaîtrait

22 jamais comme étant la sienne. Et la déclaration qu'il a signée, on ne l'a

23 lui a jamais donnée. Il regrette énormément le fait de ne pas avoir un

24 exemplaire de ladite déclaration à lui. Pour nous montrer quelles sont les

25 souffrances qu'il a subi et quelle a été la terreur, quelles ont été les

26 pressions et les chantages qu'on a exercés à son égard. C'est ce que nous

27 dit le lieutenant-colonel Mijailovic.

28 Le général Panic lui a encore dit que les enquêteurs de La Haye lui

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1 ont proposé toute assistance à partir d'une aide financière et autres

2 avantages, jusqu'à exonération de rédaction d'un acte d'accusation à son

3 encontre à condition qu'on accepte d'être témoin du bureau du Procureur. Il

4 m'a également dit que pendant toutes ces menaces, pressions, et tortures,

5 il a refusé de témoigner faussement il n'a accepté aucun autre avantage.

6 Mais, en sa qualité de malade cardiaque, il a été contraint de signer cette

7 déclaration sous la contrainte et sous des menaces. Au bout de 12 journées

8 de tortures, ils l'ont brisé et il n'en pouvait plus.

9 Alors, vous n'ignorez pas que très peu de temps après, Zivota Panic a

10 eu une attaque cardiaque, une crise cardiaque et il est mort. D'après la

11 déclaration du colonel Mijo Milosevic, faite également le lundi 25 février,

12 donc, hier, ce colonel Milosevic décrit la même rencontre des officiers ex-

13 membres de la 51e Brigade mécanisée à Pancevo et dit :

14 "A l'occasion de cet entretien avec le général Zivota Panic, j'ai vu

15 qu'il a été très préoccupé. Il s'est plaint à ce moment-là du fait d'avoir

16 été auditionné par des enquêteurs de La Haye, et instruit pendant douze

17 journées entières, sans interruption et que ces enquêteurs de La Haye lui

18 créaient de gros problèmes parce qu'ils demandaient à ce qu'il soit témoin

19 du bureau du Procureur du Tribunal de La Haye. Et ils l'ont terriblement

20 fait souffrir. Il a toutefois refusé d'être le témoin de l'Accusation et

21 indiqué qu'il ne voulait pas témoigner faussement contre la direction

22 militaire et politique de notre Etat."

23 En outre, le général Panic a dit que les enquêteurs de La Haye ont

24 exercé à son encontre des pressions, qu'ils l'ont fait chanter et qu'ils

25 l'ont menacé, qu'à son encontre il y aurait un acte d'accusation de dressé

26 au cas où il n'accepterait pas d'être témoin de l'Accusation et au cas où

27 il refuserait la coopération avec ce bureau du Procureur.

28 Et ils ne lui ont pas remis un exemplaire de sa déclaration.

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1 Ici, le colonel Milosevic nous dit qui encore était présent. Il y

2 avait Enes Taso -- le général Taso -- Enes Taso; le colonel Zoran

3 Jovanovic; le lieutenant-colonel Milenko Lukic, et autres.

4 Donc, j'ai deux éléments de preuve disant qu'au bureau du Procureur,

5 il existe une déclaration du général Zivota Panic. Mes éléments de preuve

6 c'est une attestation, un certificat numéro 6 du bureau du Procureur. Et

7 alors, avant que vous ne preniez quelques décisions que ce soit, je veux

8 que vous exigiez du bureau du Procureur la communication immédiate de ce

9 certificat numéro 6 ainsi que le résumé de certaines des déclarations qui

10 m'ont été remises, à ce moment-là, il y figure le résumé de la déclaration

11 du général Zivota Panic. Ils m'ont envoyé cela en application de l'article

12 68.

13 Zivota Panic a subi des pressions pour être faux témoin dans le procès de

14 Slobodan Milosevic, et chemin faisant, il a parlé du rôle des volontaires

15 du Parti radical serbe, et à mon égard, il a fait des déclarations tout à

16 fait exonératoires.

17 Le bureau du Procureur n'a pas prêté attention à cela parce que la pression

18 principale était dirigée contre Milosevic et un témoignage dans son procès

19 alors que son procès durait depuis un an et quelques. Et il n'avait même

20 pas envisagé de dresser un acte d'accusation à mon encontre, c'est la

21 raison pour laquelle ça leur a échappé que de me communiquer ces éléments à

22 décharge.

23 Je veux que le bureau du Procureur communique immédiatement la déclaration

24 de Zivota Panic et la transcription de son audition, de son interview. Je

25 n'ai pas à quelque moment m'en servir si ce n'est à l'occasion du contre-

26 interrogatoire du témoin expert de l'acte d'accusation M. Theunens.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais résumer le problème, et ensuite, je

28 demanderais à l'Accusation sa position.

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1 Le problème est venu de la manière suivante : la semaine dernière, lors de

2 l'interrogatoire principal, a été évoqué à un moment donné le rôle du

3 général Panic qui à l'époque de Vukovar, dont je tiens à rappeler que la

4 Chambre est saisie dans l'acte d'accusation des événements de Vukovar. Le

5 général Panic était donc à l'époque le responsable militaire du 1er

6 District, et le 1er District avait dans sa zone de compétence Vukovar.

7 A ce moment-là, l'accusé Seselj, lors d'une objection, a indiqué qu'il

8 avait en sa possession un résumé d'une déclaration du général Panic, qui

9 établirait selon M. Seselj, que celui-ci a fait une déclaration écrite au

10 bureau du Procureur.

11 Et M. Seselj précise que ce résumé c'est le certificat numéro 6.

12 Ceci étant dit, je suis obligé de faire un retour en arrière dans la phase

13 de mise en état, dans laquelle mes deux collègues n'étaient pas présents et

14 de ce fait ils leur manquent des éléments, s'ils n'ont pas eu le temps de

15 se plonger sur les centaines de pages de la mise en état qui a duré pendant

16 des heures et des heures. A un moment donné dans la mise en état, l'accusé

17 avait fait part du fait qu'il avait été informé de l'existence de 207 000

18 pages de documents à décharge. Et conformément aux Règlements, il en

19 exigeait la communication, compte tenu du problème soulevé.

20 J'avais alors indiqué à Mme Dahl de faire le nécessaire pour que l'accusé

21 ait dans la mesure du possible le maximum de pages concernées, mais que

22 pour aider également à la réalisation de cette obligation, l'accusé pouvait

23 demander par des mots-clés à l'Accusation de faire des recherches. Ce qui a

24 été fait, et j'ai cru comprendre que grâce à certains mots-clés 3 000 pages

25 ont été communiquées à l'accusé.

26 Il se trouve que l'accusé estime que tout ce que le général Panic a pu dire

27 rentre dans le cadre de l'article 67, et que de ce fait il pourrait aussi

28 au titre donc d'autres articles du Règlement avoir connaissance de la

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1 déclaration écrite du général Panic, et de ce fait l'Accusation a

2 l'obligation de communiquer cela sous peine de sanctions qui peuvent être

3 des sanctions graves. Je tiens à le souligner.

4 Conscient du problème, la semaine dernière j'ai de manière solennelle

5 demandé à l'Accusation de bien vérifier qu'il n'y a jamais eu de

6 déclaration écrite signée. A la fin de la semaine dernière, l'Accusation

7 nous a dit, ici même, qu'il y avait eu effectivement l'audition du général

8 Panic en tant que suspect, mais il n'y avait pas eu de déclaration écrite

9 signée.

10 Depuis la fin de la semaine dernière apparaît maintenant deux nouveaux

11 documents de deux colonels, qui relatent dans des déclarations que nous

12 avons en B/C/S, mais non traduites, qui relateraient que le général Panic,

13 avant de mourir, car il aurait eu une crise cardiaque, aurait révélé que le

14 bureau du Procureur, après 12 jours d'interrogatoire, l'aurait fait signé

15 un document, et que ce document donc existerait bien, puisque le général

16 Panic l'aurait indiqué à ces deux colonels qui viennent de l'attester dans

17 ce document.

18 Alors, quelle est la situation exacte ?

19 Alors, Monsieur Marcussen, pouvez-vous nous éclairer ?

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour à

21 vous.

22 Tout d'abord, pour évoquer la dernière question, à savoir celle qui porte

23 sur les éléments qui nous viennent du général Panic. Nous recherchons

24 toujours -- nous sommes toujours en train de faire des recherches là-dessus

25 depuis les débats de la semaine dernière, mais en l'état actuel des choses,

26 nous disposons d'aucune déclaration écrite signée de la main du général

27 Panic. Nous avons les enregistrements de l'audition du suspect. Nous avons

28 des comptes rendus -- les retranscriptions d'un documentaire préparé par la

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1 BBC. Cette retranscription a reçu des initiales ceci a été paraphé par le

2 général Panic où il indique qu'il adopte ce qu'il acquiesce à ce qu'il y a

3 dans cette transcription. Et ensuite, nous avons un document du mois

4 d'août, que je n'ai pas recherché qui est à l'écran -- que j'ai recherché à

5 l'écran, qui semble être une notification ou une convocation ou citation à

6 comparaître de l'accusé pour obtenir la teneur de l'audition du suspect de

7 M. Panic.

8 L'accusé présente deux déclarations de personnes qui disent que Panic a

9 signé une déclaration. A savoir si c'est exact ou non, si M. Panic a dit

10 cela ou non, et bien, pourquoi il aurait dit cela, je ne le sais pas. Je

11 vous remercie, vous m'avez donné du temps pour effectuer des recherches. Je

12 souhaite avoir davantage de temps pour pouvoir faire toutes les recherches

13 nécessaires pour voir si un tel document existe au sein du bureau du

14 Procureur, jusqu'à ce jour, nous n'avons rien trouvé et nous avons fait des

15 recherches là-dessus.

16 Donc, en l'état actuel des choses, je crois qu'il y a une confusion peut-

17 être dans l'esprit du témoin à cause de différentes déclarations écrites

18 liées à M. Panic. Mais à mon sens aujourd'hui, tel que je vous parle, nous

19 ne disposons pas d'un tel document écrit. Nous allons continuer nos

20 recherches, et revenir vers vous.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Le certificat numéro 6, qui est le résumé que

22 l'accusé a. D'après vous, est-ce que ce résumé a été fait à partir de son

23 audition comme suspect, qui est dans le DVD, ou bien, aurait pu être faite

24 à partir d'une déclaration écrite que vous ne retrouvez pas ?

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] En fait, le document en fait je suis en

26 train de le faire imprimer de façon à pouvoir le regarder plus près. Je

27 pense que ceci a été fait sur la base en fait de l'enregistrement de

28 l'audition du suspect. Nous l'aurions communiqué si nous l'avions jugé

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1 nécessaire, la déclaration ou des extraits de cette déclaration pour autant

2 qu'une telle déclaration existe par la nature même de ce type de document.

3 Je pense que c'est la raison parce que nous ne disposons pas de déclaration

4 mais nous disposons d'un enregistrement qui est moins facile à utiliser.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : L'autre question que j'ai, le général Panic qui

6 commandait le 1er District militaire, normalement s'il y a eu des crimes

7 commis à Vukovar, la question aurait pu se poser de son implication dans

8 les crimes; soit au titre du 7(1) soit au titre du 7(3). Apparemment, le

9 général Panic n'a fait l'objet d'aucune poursuite.

10 Il n'en demeure pas moins que tout ce qui a été recueilli au bureau du

11 Procureur sur le général Panic devait être communiqué à l'accusé, car

12 l'accusé doit répondre de ce qui s'est passé à Vukovar. Et, de ce fait, il

13 doit également puisque c'est d'après son point de vue des éléments à

14 décharge, avoir la transcription dans sa langue du DVD.

15 Alors, est-ce que l'Accusation aujourd'hui a l'intention de lui faire

16 traduire cela et de lui communiquer, parce qu'il a demandé à double titre,

17 au titre de l'article 67 mais également au titre de l'article 68 du

18 Règlement.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ce que

20 l'accusé juge être à décharge d'après lui, il indique que des volontaires

21 avaient été re-subordonnés à la JNA alors qu'ils étaient à Vukovar. C'est

22 également la thèse de l'Accusation. L'Accusation présente un certain nombre

23 de questions comme s'il s'agissait en fait d'éléments à décharge et qu'il y

24 avait encore une incohérence avec les allégations de l'Accusation. Mais en

25 réalité, ceci n'est pas le cas. M. Theunens a parlé de la resubordination

26 des volontaires à la JNA pendant la campagne de Vukovar, et pendant à

27 d'autres moments également que concerne l'acte d'accusation. Donc --

28 M. LE JUGE ANTONETTI : -- je ne vais pas vous faire un cours de droit, mais

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1 quelques rappels de principes juridiques qui permettront peut-être de mieux

2 comprendre l'enjeu du débat.

3 S'il y a eu des crimes à Vukovar, la question qui : Qui ont commis ces

4 crimes ? Si s'avère que ceux qui ont commis les crimes sont des membres de

5 l'armée subordonnée à la JNA, responsabilité de la JNA. Qui de la

6 responsabilité de l'accusé ?

7 L'accusé dans l'acte d'accusation est poursuivi au titre de l'article 7(1)

8 dans toutes ces formes, et notamment l'entreprise criminelle. Dans

9 l'hypothèse de l'entreprise criminelle forme 3, s'il y a des crimes commis

10 par la JNA, il pourrait au titre de la forme 3 de l'entreprise criminelle

11 se retrouver donc en responsabilité. Mais s'il n'y a pas d'entreprise

12 criminelle parce que l'Accusation n'arriverait à prouver l'entreprise

13 criminelle, il resterait à ce moment-là la responsabilité de M. Seselj dans

14 les autres formes de l'article 7(1); notamment a-t-il ordonné, a-t-il

15 planifié, et cetera.

16 Et donc, lui peut légitimement estimer qu'il est important pour lui de

17 savoir si les crimes ont été commis par des auteurs placés sous l'autorité

18 de la JNA, autorité de la JNA sur laquelle lui n'a aucun pouvoir

19 d'ordonner, de planifier, et cetera, d'où l'importance de savoir si M.

20 Panic, qu'est-ce qu'il a pu dire, et cetera.

21 Et donc, il doit avoir communication de cela.

22 Vous, en tirez d'autres conclusions. Vous estimez que vous n'avez pas à lui

23 communiquer parce que ça ne rentre pas comme éléments à décharge. Ça, c'est

24 votre point de vue. Mais lui, il a un autre point de vue. Voilà tout le

25 débat. Alors, vous lui avez quand même communiqué puisque le DVD lui a été

26 envoyé.

27 Simplement la décision avait été prise que quand il s'agit d'éléments

28 à décharge, ça doit être communiqué en "hard" de copie et dans sa langue

Page 4073

1 afin qu'il puisse l'utiliser.

2 Alors, qu'est-ce que vous dites à cela ?

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président, je

4 ne pense pas qu'il y a un désaccord sur ce point ni sur la portée en fait

5 de l'article 68 ni sur l'importance éventuelle de l'audition de M. Panic.

6 Nous sommes actuellement en train de passer en revue les auditions de M.

7 Panic. Il a été interrogé pendant un certain nombre de jours, donc, nous

8 sommes en train d'analyser les différents enregistrements pour voir si

9 certains éléments relèvent de l'article 68 en fait.

10 L'obligation qui est la nôtre de nous conformer à l'article 68 du côté de

11 l'Accusation, nous sommes tout à fait conscients de nos obligations à

12 l'égard de cet article et nous prenons ceci très au sérieux.

13 Mais ce n'est pas parce que l'accusé déclare que quelque chose est à

14 décharge que d'après lui cela relève forcément de l'article 68. Il n'y a

15 pas d'éléments à décharge qui soient pertinents. Nous sommes, nous avons

16 essayé de lui communiquer les éléments jeudi et vendredi, lorsque nous

17 avons essayé de lui remettre le DVD avec l'enregistrement de l'audition.

18 S'il y a quelque chose qui relève de l'article 68, Madame, Messieurs les

19 Juges, vous avez statué sur la question, vous avez dit que nous devrions

20 lui fournir tout ceci par écrit, et nous allons le faire si nous jugeons

21 qu'il y a des éléments à décharge dans l'audition en question.

22 Donc, pour ce qui est de la retranscription et de ce processus, je crois

23 que ces 43 heures en fait d'audition, ce n'est pas quelque chose qui peut

24 être fait du jour au lendemain. Et, si nous devons le faire, une fois que

25 nous avons examiné les différents éléments nous le ferons. Donc, ceci n'est

26 pas contesté mais comme je l'ai dit, il y a une question qui se pose par

27 rapport aux éléments à décharge dans cette affaire.

28 Si vous rendez une ordonnance et vous nous obligez à préparer la

Page 4074

1 retranscription de tout ceci, mais pour l'instant, nous nous conformons au

2 Règlement, tel que nous les avons compris à savoir les éléments relevant de

3 l'article 68(b) et 68(2) sont fournis à l'Accusé sous la forme telle que ça

4 a été présenté, 68(b) les déclarations de témoins, et cetera, sur copie

5 papier.

6 Et donc, nous sommes en train de faire tout ceci --

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Autre question : vous avez dit les 12 entretiens

8 avec le général Panic représentent 43 heures.

9 Pendant que vous disiez ça, je faisais un calcul, 43 heures; quatre heures

10 ça fait à peu près 100 pages, donc, 43 heures, il y a au minimum 1 000

11 pages -- il y aurait 1 000 pages de transcript. Est-ce que ces 43 heures

12 avec ces 1 000 pages rentrent dans les 207 000 documents dont l'accusé a

13 été informé ou ça ne rentre pas dedans ?

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Écoutez, je n'ai pas vérifié. Je suppose

15 que non, la raison est la suivante : le nombre important de pages qui a été

16 évoqué ici émane de différentes collections de documents que le bureau du

17 Procureur a reçu à différentes époques. Donc, il s'agit d'éléments de

18 preuve documentaires. Ici, nous parlons d'autre chose, nous parlons

19 d'audition de suspect qui tombe dans une catégorie différente, si vous

20 voulez, de document.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, voilà donc votre position que je résume comme

22 suit, je vais donner la parole à M. Seselj.

23 1 : il n'y a pas déclaration écrite, mais vous continuez à vérifier.

24 2 : vous confirmez qu'il y a eu 12 entretiens, 43 heures, donc, ça -- des

25 centaines de pages, et vous allez faire le maximum pour communiquer cela à

26 M. Seselj au travers de la grille de l'article 68.

27 C'est bien votre position. Alors, Monsieur Seselj, oui, à moins, que vous

28 vouliez rajouter quelque chose, Monsieur Marcussen.

Page 4075

1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui. J'estime que c'est nécessaire en fait

2 de récuser les allégations de pression exercées sur les témoins pendant les

3 auditions. Nous pouvons vous remettre un enregistrement des auditions de

4 suspect de façon à ce que vous puissiez juger par vous-même de la façon

5 dont ceci se déroule. En fait, il n'y a pas d'allégation du tout de

6 pression exercée contre ces témoins. Bien sûr, en fait, ceci reprend

7 d'autres allégations du même genre. Et nous allons aborder ceci plus tard,

8 si vous estimez que c'est nécessaire, mais ma position est celle-ci, il est

9 très important de récuser cela parce qu'il n'y a pas de fondement à cela.

10 Et je trouve que c'est assez préoccupant de continuer à entendre ces

11 allégations qui viennent comme cela spontanément à la dernière minute et

12 que ce soit abordé de cette façon-ci. Mais nous allons y revenir plus tard,

13 je suppose.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à signaler deux

16 choses.

17 Premièrement, vous avez mentionné des mots-clés sur la base desquels le

18 Procureur devrait identifier les documents potentiellement à décharge qui

19 devraient m'être communiqués. Ce qui m'a été communiqué comme étant

20 potentiellement à disculper, et bien, c'était sur la base de trois mots

21 uniquement : les Tigres d'Arkan, les Guêpes jaunes, et les Aigles blancs.

22 Ils ont évité de me communiquer des documents potentiellement à disculper

23 sous les mots-clés "la Garde serbe," et vous avez mentionné les quatre, si

24 mes souvenirs sont bons, et je crois qu'ils sont bons.

25 Cependant, deux mots-clés essentiels, pour identifier des documents

26 potentiellement de nature à disculper doivent être mon nom et "le Parti

27 radical serbe," donc ils auraient dû me communiquer tous les documents

28 qu'ils ont en leur possession et où est mentionné, ne serait-ce qu'une

Page 4076

1 seule fois mon nom, ou bien, le nom du Parti radical serbe. Il me semble

2 que ce serait le minimum du minimum des documents potentiellement de nature

3 à disculper.

4 Deuxièmement, ici le Procureur a souligné à plusieurs reprises qu'ils ne

5 savaient pas si la déclaration de Zivota Panic était de nature à disculper

6 ou non, que c'était moi qu'il l'affirmait, Messieurs les Juges, mais je ne

7 l'affirme pas -- je n'affirme pas que l'audition et la déclaration du

8 général Zivota Panic sont de nature potentiellement à décharge pour moi.

9 C'est ce qui a été établi par le Procureur le 19 août 2004, dès ce moment-

10 là avec la certification numéro 26. Ils m'ont communiqué 23 résumés de

11 nature différente en application de l'article 68(1). Des déclarations de

12 différentes personnes, 26 éléments. Et au numéro 14, il y avait le résumé

13 de la déclaration du général Zivota Panic. Le résumé de la déclaration du

14 général Zivota Panic m'a été remis sous huit points à ce moment-là. Vous

15 n'allez pas imaginer que quelqu'un s'est amusé dans le bureau du Procureur

16 à revoir les enregistrements pour retrouver ces huit points.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : -- arrête tout de suite, Monsieur Seselj.

18 Monsieur Marcussen, M. Seselj, je n'ai pas mentionné cela tout à l'heure,

19 mais dans l'audience de mise en état, avec le Juge Agius, la question avait

20 été abordée officiellement, et le Juge Agius à juste titre avait dit que

21 ces documents doivent être communiqués de l'Accusation vers M. Seselj, et

22 avait donc invité à l'époque l'Accusation à transmettre à M. Seselj tous

23 ces documents.

24 M. Seselj vient de nous dire que le 19 août 2004, il y aurait donc 23

25 résumés qui lui auraient été communiqués, dont le fameux certificat numéro

26 6, ce qui veut donc dire que dès 2004, pour l'Accusation, le dit résumé

27 contiendrait des éléments à décharge.

28 Et par ailleurs, avec Mme Dahl on avait convenu que par des mots-clés, elle

Page 4077

1 devait rechercher dans tous les documents tout ce qui a trait, bon, les

2 Guêpes jaunes, et cetera, mais également le nom de Seselj, et le Parti

3 radical serbe.

4 Alors, dans les 43 heures d'entretien avec le général Panic, normalement

5 par le logiciel, vous devez pouvoir retrouver si le général Panic a parlé

6 de M. Seselj. Et à mon avis, il a dû en parler ne serait-ce que par le fait

7 que M. Seselj est venu à Vukovar, donc, il est quasi certain qu'il en a

8 parlé. Et a-t-il évoqué les volontaires du Parti radical serbe ? Ça, je

9 n'en sais rien.

10 Alors, Monsieur Marcussen, avant de redonner la parole à

11 M. Seselj, sur les 23 résumés, qui auraient été communiqués au titre de

12 l'article 68, dont figure le certificat du numéro 6, c'est bien que dès le

13 mois d'août 2004, l'Accusation avait estimé qu'il y avait des éléments à

14 décharge.

15 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y a deux questions, Monsieur le

16 Président.

17 Tout d'abord, pour ce qui est des moteurs de recherches qui permettent en

18 fait de retrouver facilement des éléments d'information concernant

19 l'audition de Panic, lorsqu'un fichier -- lorsque nous avons un

20 enregistrement audio lorsque nous faisons une recherche de termes sur

21 certains documents, ceci en fait ne peut pas intégrer un enregistrement

22 audio. Il ne peut le faire que sur des documents écrits. Donc à ce moment-

23 là ce type de documents ne pourraient pas être examinés.

24 Donc, je viens de recevoir en fait le numéro 6 et le résumé, effectivement

25 on fait état de -

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir, Monsieur le

27 Président, s'il vous plaît ? Puisque le Procureur a eu le certificat numéro

28 6, qu'il retrouve tout d'abord le numéro 14 et qu'il vous donne lecture du

Page 4078

1 point 1 du résumé de la déclaration de Zivota Panic dans son intégralité.

2 C'est très bref, il n'y a que quelques phrases. Est-ce que vous pouvez lui

3 demander qu'il le fasse.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, vous avez peut-être qu'il aurait été

5 intéressant que la Chambre ait ce document numéro 6, mais vous venez de

6 confirmer qu'effectivement, il est fait état de M. Seselj et, Monsieur

7 Seselj, vous voudriez que vous nous lisiez le point.

8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ecoutez, je ne suis pas tout à fait

9 d'accord avec le fait que M. l'accusé en fait me coupe la parole pendant

10 que je suis en train de présenter mes arguments et que je ne puisse pas

11 poursuivre.

12 Je donne ici une copie de l'accusé de réception numéro 6.

13 J'étais en train d'expliquer pourquoi la recherche de mots en fait le

14 système de recherches ne peut pas s'appliquer à un document audio.

15 Deuxième point : pour ce qui est du reçu numéro 6, effectivement, le 19

16 août 2004, il y a une communication qui a été qualifiée comme un document

17 relevant de l'article 68 et ici nous avons un résumé de huit points qui

18 étaient considérés comme étant éventuellement des éléments à décharge,

19 relevant de l'article 68 à l'époque.

20 Donc, cette information a été fournie à l'époque à l'accusé, donc on lui a

21 dit quels éléments étaient considérés comme relevant de l'article 68 à

22 l'époque.

23 Je comprends que, par la suite, en fait, le système de présentation a

24 changé la façon de communication dont ce faire a été modifiée, donc,

25 maintenant, il faut fournir tout ceci sur copie papier, ce qui n'était pas

26 le cas en 2004, au mois d'août 2004.

27 Je crois que ce qui est très important c'est que les éléments dont

28 l'accusé devrait être en possession lui ont été remis depuis le mois

Page 4079

1 d'août. Encore une fois, ce que nous dit l'Accusation sur la base de ce

2 document, c'est qu'à savoir les volontaires du SRS/SCP agissaient sous le

3 commandement de la JNA. En fait, ceci n'est pas contesté par le bureau du

4 Procureur, c'est que nous disons en fait. Mais nous disons dans notre thèse

5 qu'il y a une question supplémentaire qui consiste à savoir si lui ou non

6 l'Accusation contrôlait ces volontaires à ce moment-là. Et nous allons

7 présenter des éléments là-dessus, nous allons présenter d'autres pendant la

8 présentation des moyens au cours de ce procès. Donc, comme je l'ai dit, le

9 bureau du Procureur peut retranscrire l'audition dans son intégralité, ceci

10 prendra du temps mais nous sommes disposés à le faire, mais ça n'est pas

11 quelque chose qui peut être fait du jour au lendemain. Mais l'accusé refuse

12 de travailler avec les enregistrements audio, et donc, c'est ce qui nous

13 gêne.

14 Le bureau du Procureur, et bien nous ne disposons pas d'une

15 retranscription du texte en anglais, et nous sommes en train de présenter

16 des éléments à l'accusé dont nous ne disposons pas nous mêmes. Et donc,

17 nous devons faire une retranscription des solutions en B/C/S, et nous

18 allons citer à la barre des témoins. Donc, il y a beaucoup de processus de

19 retranscription en ce moment, donc, nous pouvons y ajouter cette

20 retranscription-ci ou alors nous pouvons essayer en fait de mettre en

21 exergue les éléments qui nous intéressent dans l'audition de Panic sur ces

22 huit points, au numéro 10 de façon à pouvoir le retranscrire pour l'accusé.

23 Mais je crois que cet accusé de réception notifie l'accusé du fait qu'il y

24 a des éléments pertinents dans cette audition avec le général Panic. Et

25 pour le contre-interrogatoire du témoin de M. Panic, en fait, il peut

26 présenter ces arguments ou en tout cas poser les questions au témoin. Il

27 n'a pas besoin d'une déclaration de Panic pour poser les questions au

28 témoin. Donc, je ne vois pas dans quelle mesure cette question devrait

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1 gêner l'accusé dans son contre-interrogatoire.

2 M. SESELJ : [interprétation] Monsieur le Président, vous pouvez vérifier ce

3 qui a été dit le 4 octobre 2004 lors de la Conférence de mis en état, et

4 puis, à plusieurs reprises par la suite, j'ai insisté sur le fait que je

5 devais recevoir l'intégralité de la déclaration du général Zivota Panic. A

6 l'époque, je ne savais même pas que le général Panic avait été auditionné

7 en tant que suspect et que, nécessairement, il y avait un enregistrement

8 vidéo. En 2004 même, personne ne m'a proposé cet enregistrement vidéo. Un

9 résumé est établi sur la base des déclarations et non pas sur la base des

10 enregistrements vidéo. Donc, figurez-vous que maintenant quelqu'un, qui

11 travaille au bureau du Procureur, à chaque fois qu'ils ont besoin de

12 quelque chose dans l'audition de quelqu'un, aille tout revoir, prend des

13 notes et établit un résumé sur la base de ces notes. S'il vous plaît, dans

14 l'intérêt de la publicité et de l'opinion, je peux et je me propose de

15 donner lecture d'un point, un seul point sur ces huit points du résumé de

16 la déclaration de Zivota Panic. J'en donnerai lecture, peut-être que le

17 Procureur en a honte, peut-être qu'il ne veut pas le faire parce qu'il en a

18 honte. Est-ce que vous m'autorisez à le dire ?

19 Premier point --

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Quel est le point que vous voulez mettre en évidence

21 ?

22 M. SESELJ : [interprétation] Juste le point 1 du résumé de la déclaration

23 du général Zivota Panic, juste le point 1, pas le reste, je ne lirai pas le

24 reste si vous m'y autorisez et si le Procureur ne s'y oppose pas.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Procureur. Le point 1 que nous

26 avons à la page 2 --

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] En fait, si l'accusé estime que ce soit moi

28 qui le lise, soit bien. Le premier point :

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1 "Les Chetniks qui sont venus dans les zones de combat (Vukovar et son

2 voisinage) sont placés sous le commandement de la JNA et, par conséquent,

3 ne pouvaient plus être considérés par des paramilitaires. Les tâches qui

4 leur ont été confiés par le secteur sud --"

5 Pardonnez-moi.

6 L'INTERPRÈTE : Veuillez lire plus lentement.

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] "-- ils ont donc rempli les tâches qui leur

8 avaient été confiées par le secteur opérationnel sud. Seselj a envoyé un ou

9 deux groupes de volontaires à Vukovar et ils ont été intégrés dans des

10 unités opérationnelles du Groupe opérationnel sud mais sont restés ensemble

11 comme un groupe distinct au sein de la JNA, ils portaient des insignes de

12 la JNA. Panic a dit qu'il avait donné l'ordre à Mrksic d'équiper et de

13 vêtir les volontaires du SRS qui étaient venus au Groupe opérationnel sud.

14 Nous n'avons pas en fait d'heures ici. Aucun rapport ne figure là-dessus.

15 Pourquoi n'ont-ils pas été intégrés aux forces armées parce qu'il

16 s'agissait de criminels. Panic a dit catégoriquement qu'au cours des

17 opérations en Croatie il n'y avait jamais de groupes paramilitaires qui

18 faisaient partie du Groupe opérationnel sud."

19 Donc, si je puis ajouter un commentaire, je crois que ceci concorde

20 avec la déposition de M. Theunens jusqu'à présent.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : On termine, Monsieur Seselj. Alors, le

22 Procureur va faire le nécessaire pour vous donner, dès qu'il pourra parce

23 que tout ça va prendre du temps, les dires du général Panic. Le Procureur,

24 et je crois qu'il a raison, estime qu'au vu du résumé, vous pouvez mener

25 votre contre-interrogatoire sur ces questions à partir du résumé. Voilà,

26 alors, ça c'était le premier point que vous vouliez mettre en évidence.

27 Et quel était le deuxième point que vous vouliez souligner ?

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être est-ce dû à

Page 4082

1 une mauvaise interprétation ou traduction, mais dans le résumé il est dit

2 que le général Zivota Panic a ordonné au colonel Mrksic que l'on arme

3 également les volontaires du Parti radical serbe, ça n'a pas été dit dans

4 la traduction ou dans l'interprétation. Egalement, un point que j'avais

5 remarqué, que ces volontaires ont mené à bien des missions du Groupe

6 opérationnel sud. Et il y est dit que le général Panic a employé des termes

7 tels que "hommes à Seselj, des sympathisants du Parti radical serbe" et

8 "les adeptes du Parti radical serbe," pour identifier ces volontaires.

9 Donc, le général Panic savait bien que les hommes à Seselj étaient un

10 groupe spécifique et qu'on ne pouvait pas appeler tous les Chetniks des

11 hommes à Seselj.

12 Et ce que je tenais à vous dire, c'est que mes droits ne sont pas

13 respectés ici. Bien entendu, ce témoin, je peux le contre interroger même

14 si on ne me communique pas un seul document. D'aucune manière, je ne vais

15 pas causer une interruption du procès, mais j'estime que cela fait partie

16 de mes droits, qu'à chaque fois je stigmatise des actions contraires au

17 règlement du Procureur.

18 La déclaration du général Panic à mes yeux est un document qui relève

19 de l'article 68(1). Vous comprenez maintenant que ce document ne m'a pas

20 été communiqué, or, j'ai le droit de le recevoir. Ce témoin était un témoin

21 idéal pour que je me serve de ce document dans le cadre de ce contre-

22 interrogatoire; cependant, je ne peux pas me servir d'un résumé dans le cas

23 du contre-interrogatoire, et je ne vais pas m'en servir.

24 Autre chose encore que je tiens à vous dire. Il n'y aucun élément de

25 preuve disant que le bureau du Procureur, depuis jeudi de la semaine passé

26 aurait commencé à mettre sur papier les transcriptions de l'audition de

27 Zivota Panic, ils n'ont même pas entamé -- commencé à le faire. Ils

28 estiment tout simplement qu'ils peuvent l'éviter, c'est le problème auquel

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1 je fais face -- auquel je suis confronté. Un exemple concret maintenant,

2 c'est par hasard que j'ai été à même de démasquer tout ce qui se passe en

3 arrière plan. Imaginez combien de cas il y a d'analogue, dont je n'ai

4 aucune idée ce qui se passé à présent et dont nous débattons à présent

5 c'est un modèle de comportement du bureau du Procureur au fil des cinq

6 années écoulées. On dissimule des documents à mon égard. On me communique

7 des documents à la petite cuillère. On procède à un choix, on me donne -- à

8 une sélection, on me donne des choses moins importantes et on dissimule les

9 choses importantes. Ce sont des faits auxquels je suis confronté. Bien sûr,

10 je suis conscient de ces faits-là, et en dépit de ces faits-là je

11 continuerai à me défendre, je vais poursuivre avec le contre-interrogatoire

12 de ce témoin. Mais j'estime qu'à force d'amonceler des éléments de preuve

13 concernant le comportement contraire aux droits de la part du bureau du

14 Procureur, il va falloir que les Juges de la Chambre prennent des mesures

15 parce que jusqu'à quand cela va-t-il durer ainsi.

16 Nous n'avons eu aucuns témoins sans qu'il y ait un problème de nature liée

17 à la procédure.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole à

19 M. Marcussen, je voudrais à titre personnel faire une observation qui est

20 importante. L'article 68 du Règlement. Je vais le lire et je vais vous

21 donner mon point de vue sur la mise en œuvre de cet article. Il y a deux,

22 deux paragraphes importants, le paragraphe (i) et le paragraphe (ii).

23 Le paragraphe (i) dit ceci : "Le Procureur communique aussitôt que possible

24 à la Défense tous les éléments dont il sait effectivement qu'ils sont de

25 nature à disculper en tout ou en partie l'accusé ou à porter atteinte aux

26 éléments de preuve de l'Accusation." Ça c'est le paragraphe (i)

27 Et il y a le paragraphe (ii) qui dit ceci : "Sous réserve du paragraphe

28 (i), le Procureur met à la disposition de la Défense sous forme

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1 électronique les collections de documents pertinents qu'il détient et les

2 logiciels qui permettent à la Défense d'y effectuer des recherches

3 électroniquement."

4 Alors, cet article 68, quand un accusé a un avocat et quand l'avocat

5 connaît donc la langue anglaise ou la langue française, l'avocat peut

6 recevoir les documents sous différentes formes. Mais quand un accusé se

7 défend seul, et c'est le cas de M. Seselj, à ce moment-là, mon

8 interprétation de l'article 68(i) c'est qu'il doit recevoir dans sa langue

9 et en documents papier tout ce qui relève du (i).

10 Maintenant, pour le reste, les recherches sous forme électronique; si, par

11 exemple, M. Seselj voudrait avoir d'autres renseignements, à ce moment-là,

12 là, c'est sous forme électronique. Mais concernant et ça c'est ma position

13 qui n'est peut-être pas celle de mes collègues mais qui est la mienne

14 concernant le général Panic qui est le commandant du 1er District qui a eu

15 dans les événements de Vukovar à agir, il m'apparaît que cette "audition,"

16 entre guillemets, relève du 68(i) et il m'apparaît qu'elle doit être

17 communiquée dans sa langue en copie papier; sinon, pour moi, il y a une

18 atteinte aux droits de la Défense et atteinte à l'égalité des armes.

19 Voilà ce que je tenais à dire pour que ça soit inscrit au transcript.

20 Monsieur Marcussen, que voulez-vous dire ?

21 M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation]

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience,

24 j'ajouterais pour le compte rendu d'audience puisque le Président de la

25 Chambre a donné son avis personnel que, personnellement, je pourrais

26 partager ce point de vue mais que je ne suis pas en mesure de me prononcer

27 de façon définitive quant au fait de savoir si l'audition du général Panic

28 relève ou pas du 68(i) avant d'avoir lu le texte de cette audition.

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1 Mme LE JUGE LATTANZI : -- aussi j'ai quelque chose a ajouter -- qu'on

2 prendra en considération l'opinion naturellement du Juge Président mais

3 jusqu'à maintenant la Chambre n'avait pas décidé de cette façon, donc cela

4 justifie aussi pourquoi le Procureur n'a pas encore fourni ces documents

5 peut-être c'est là la raison qu'il considérerait à décharge.

6 Et je voudrais aussi ajouter qu'en tout cas selon l'article 68, c'est

7 au Procureur qui incombe de vérifier s'il s'agit ou non de documents à

8 décharge et naturellement s'il va cacher quelque chose, il encourra dans sa

9 -- ses responsabilités que la Chambre pourra -- pourrait sanctionner. Mais,

10 en tout cas, c'est à lui qui incombe de vérifier si cela existe ou non.

11 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Messieurs, Madame les Juges.

12 S'agissant de l'interprétation fournie par le Président de l'article 68(i),

13 je crois que cela figure déjà dans une décision officielle de la Chambre

14 relative au mode de communication et je crois pouvoir dire que nous avons

15 respecté cette décision dans nos communications à l'accusé.

16 En 2004, le bureau du Procureur a déjà communiqué en qualité de documents

17 potentiellement à décharge les divers documents évoqués dans l'accusé de

18 réception numéro 6. Il a été fait mention de l'article 68 et en l'espèce il

19 est un peu difficile de déterminer si tout relève de l'article 68(i) ou

20 (ii), l'aspect à décharge est donc pertinent. Et parfois il est aussi

21 difficile de distinguer entre un document à décharge et de déterminer si

22 quelque chose est à décharge, comme, par exemple, le fait de la

23 resubordination à la JNA était-ce un élément à décharge.

24 Alors, comme je l'ai déjà dit, nous sommes en train de repasser en

25 revue toute une série d'auditions pour essayer de trouver dans ces

26 auditions des documents à décharge.

27 Je dois dire que j'ai compris la déclaration du Président comme un

28 ordre donné à l'Accusation nous intimant donc l'ordre de transcrire et nous

Page 4087

1 devons donc transcrire l'audition d'un suspect -- de la personne dont nous

2 parlons, bien entendu, si c'est un ordre qui nous est donné par la Chambre,

3 nous le ferons.

4 Nous ne voulons assurément rien cacher et je suppose que finalement

5 c'est cela le fond du problème. Nous avons communiqué les documents

6 nécessaires à l'accusé. Nous l'avons informé de l'existence de cette

7 audition de suspect. Nous l'avons fait en 2004. Nous nous sommes préparés à

8 lui communiquer les enregistrements audio. Il refuse de les recevoir. Il a

9 exactement les documents qu'il devait recevoir. Si on nous ordonne de

10 transcrire l'intégralité, nous le ferons. Et je le dis s'agissant -- je dis

11 que ça ne peut pas se faire en une nuit, cela dit.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- pour compléter ce que j'ai dit compte tenu de la

13 position de ma collègue, le Juge Lattanzi.

14 Je demanderais à la juriste de la Chambre de sortir les décisions qui ont

15 été rendues par la Chambre sur la question de la communication des

16 documents parce que la Chambre a déjà statué sur ce qui relève de l'écrit

17 et ce qui relève de la communication électronique. Par ailleurs, je partage

18 entièrement l'avis de mon collègue, le Juge Harhoff, sur le fait qu'avant

19 de savoir s'il y a des éléments à décharge ou pas, encore faudrait-il

20 connaître la teneur de la déposition du général Panic, et ça, pour le

21 moment, les Juges nous ne l'avons pas, donc, peut-être qu'il y a des

22 éléments à décharge peut-être qu'il y en a pas, j'en sais strictement rien.

23 Et pour ce déterminer encore faut-il la connaître.

24 Donc, l'Accusation avant de faire quoi que ce soit, il faut que vous nous

25 communiquiez, y compris sous forme électronique, cette déclaration du

26 général Panic, la Chambre va l'étudier et on vous dira s'il y a lieu à ce

27 moment-là à communication en hard copie de cela.

28 Mais de toute façon, il y a déjà un problème matériel important, c'est que,

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1 pour les 1 000 pages, il n'y a certainement pas

2 1 000 pages qui sont particulièrement pertinentes à Vukovar; il doit

3 aborder d'autres éléments. Donc, encore faut-il que nous, dans ces

4 1 000 pages, on sache exactement quels sont les passages pertinents

5 concernant Vukovar, M. Seselj et les volontaires serbes. Mais ça, encore

6 faut-il qu'on en ait connaissance.

7 Donc, communiquez-nous le DVD, on verra, et ensuite, on vous dira

8 quels sont les passages à communiquer si la Chambre est unanime. Si la

9 Chambre n'est pas unanime, à ce moment-là, la Chambre rendra une décision.

10 Il pourra y avoir des opinions individuelles et tout ceci pourra être le

11 cas échéant soumis à la Chambre d'appel. Donc, voilà ce que je voulais

12 dire.

13 Alors, on a passé plus d'une heure et quart sur cette question de

14 procédure.

15 Monsieur Seselj, vous avez levé la main.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, de mon avis et selon la

17 façon dont je comprends le Règlement de procédure et de preuve, vous et vos

18 collègues, vous prenez en considération la pertinence de certains éléments

19 de preuve au moment où vous êtes dans un processus de rédaction de

20 jugement. Certains éléments ont moins de valeur, certains autres plus,

21 certains nul. Mais de par le Règlement, c'est le bureau du Procureur qui

22 évalue -- qui soupèse les documents pour dire quels sont les documents qui

23 sont potentiellement exculpatoires [phon]. Alors, ce bureau du Procureur a

24 déjà rendu cette appréciation en 2004. Il est déplacé de les faire

25 réévaluer la chose à eux.

26 Deuxièmement, j'ai insisté que l'on rende, donne lecture du point 1 de ce

27 résumé. Il y a encore sept points qui sont également pertinents pour ma

28 Défense parce que cela se rapporte à la prétendue entreprise criminelle

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1 commune. Or, cette entreprise criminelle commune me place en corrélation

2 avec Slobodan Milosevic qui et tous les autres. Par conséquent, on ne peut

3 dire qu'à mon égard il n'y a de pertinent que ce qui se trouve dans la

4 déclaration du général Panic, là les passages où on mentionne mon nom ou

5 les volontaires du Parti radical serbe. Il est pertinent aussi de parler

6 des parties où il parle du rôle de Milosevic, Kadijevic, Adzic, et autres

7 personnalités, toute une série d'autres personnalités qui ont été déclarées

8 dans les actes d'accusation multiples de l'Accusation comme étant des

9 participants de l'entreprise criminelle commune au plus haut niveau. Je

10 suis honoré de voir mon nom se trouver là. Ne m'interprétez pas à tort et à

11 travers. Je suis honoré de me trouver au plus haut niveau être qualifié de

12 cette entreprise criminelle commune inventée de toutes pièces parce que

13 cela renforce mon rôle historique et la valeur historique qui est la

14 mienne.

15 Mais il faut que le bureau du Procureur me communique toutes les

16 informations qui peuvent contester l'existence même de cette entreprise

17 criminelle commune. Et, je suis en outre contre le fait de voir ces membres

18 du bureau du Procureur réexaminer les enregistrements pour juger eux,

19 quelles sont les parties qui sont pertinentes ou qui sont éventuellement

20 exculpatoires. Il faut qu'ils mettent ça sur papier et à moi de juger ce

21 qui peut m'être utile et ce qui peut ne pas m'être utile. Parce que si on

22 se place dans un rôle de filtre qui évaluera tout ceci, les Juges de la

23 Chambre s'exposent à un péril à savoir d'être une instance auxiliaire de

24 l'Accusation, à vous de voir s'il vous appartient à vous de juger si c'est

25 utile ou pas. Je ne vois pas ce que le bureau du Procureur cherche à

26 réaliser, et je crois que les Juges de la Chambre ne doivent pas tomber

27 dans ce type de rôle.

28 Le minimum de ce qui est potentiellement disculpatoire dans ce

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1 procès, c'est la totalité des documents où on mentionne mon nom et le nom

2 du Parti radical serbe. Tout ceci à mon avis est potentiellement

3 disculpatoire. Et c'est un minimum de documents qu'il faut que le bureau du

4 Procureur me communique sur papier en langue serbe.

5 A plusieurs reprises, j'ai attiré l'attention, Monsieur le Président,

6 sur le fait que le bureau du Procureur n'était pas prêt pour ce procès. Je

7 n'ai jamais rien fait au fil des cinq années écoulées. On en est au début

8 de la sixième année, et dimanche passé j'ai célébré le cinquième

9 anniversaire de ma détention à La Haye, avec mes familles et mes amis. Ça

10 fait une sixième année que j'entame. Et je n'ai jamais rien fait pour

11 ralentir ce procès parce que ralentir le procès de mon côté, on ne peut pas

12 le comprendre comme étant une chose qui découlerait de la lutte pour mes

13 droits. Je me bats de façon acharnée pour mes droits. Je vous ai fait

14 savoir aussi que c'était justifié de ma part. Et dans l'occurrent dans le

15 cas concret, c'est également justifié. Il faut que j'aie sur papier

16 l'audition complète de Zivota Panic ainsi que la déclaration rédigée

17 partant de cette audition, de ces interviews parce que le résumé découle de

18 sa déclaration et non pas de cette interview.

19 Imaginez maintenant la chose suivante : le bureau du Procureur se

20 place dans une situation où il s'entretient avec un suspect potentiel, une

21 personne donc suspectée. Pendant 15 jours, on enregistre la documentation,

22 à chaque fois qu'ils ont besoin de quelque chose pour un autre procès, ils

23 réexaminent tout cela puis ils font des résumés partant des notes qu'ils

24 auraient prises à l'occasion du réexamen. Mais ça ne se fait nulle part

25 comme cela. Ce serait dénué de sens.

26 Ils ont une déclaration. Cette déclaration constitue un document

27 rédigé par l'Accusation partant de l'audition de l'intéressé. Cette

28 déclaration est une sorte de résumé de l'audition, du moins ça devrait

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1 l'être.

2 Or, on me communique à moi un résumé d'une déposition, parce que le

3 Procureur dans son résumé de la déposition de Zivota Panic, il parle de lui

4 à la troisième personne. Il n'a pas mis cela à la première personne. On ne

5 dit pas : "Je soussigné, Zivota Panic, déclare ceci." Non, c'est le

6 Procureur qui dans son résumé décrit ce qu'il a relevé dans les dires de

7 Zivota Panic qui à son avis pour ce qui me concerne pourrait être

8 éventuellement disculpatoire. Donc, les sept points suivants sont

9 extrêmement importants et donc ces sept points, et les documents sur

10 lesquels se fondent ces différents points doivent m'être communiqués pour

11 que je puisse contester l'existence même de l'entreprise criminelle

12 commune. Ça n'a rien d'impossible.

13 Je vous rappelle que pour ce qui est du général Mrksic, le colonel

14 Sljivancanin et le commandant Radic, l'entreprise criminelle commune est

15 tombée à l'eau. Les Juges de la Chambre ont rejeté l'existence d'une

16 entreprise criminelle commune à Vukovar. Or, si le général Mrkic et le

17 colonel Sljivancanin et le commandant Radic n'ont pas fait partie d'une

18 entreprise criminelle à Vukovar, comment voulez-vous que je le sois moi ? A

19 ce que j'aurais été là-bas tout seul, membre d'une entreprise criminelle

20 commune avec moi-même, mais ce sont des choses qui sont ordinaires.

21 Il faut qu'on puisse en sortir pour qu'on puisse en venir à bout, il

22 faut qu'on me montre le document.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Ça, c'est un autre sujet.

24 Pour en terminer avec la communication des documents, je rappelle qu'il y

25 avait une décision rendue le 7 juin 2007 par moi-même au titre donc de la

26 Chambre saisit de la mise en état, qui porte comme titre, décisions

27 relatives à la requête 289 [phon] concernant le mode de communication des

28 pièces. Il a été indiqué dans la décision dans le dispositif, cette

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1 décision fait dix pages, il était indiqué : "Ordonnant que l'Accusation

2 communique aussitôt que possible sur support papier et dans une langue que

3 l'accusé comprend les pièces visées à l'article 68(1)."

4 Donc, il y avait une décision qui avait été rendue. Et, cette Chambre avec

5 les deux Juges qui composent la Chambre a rendu le

6 5 novembre 2007 une autre décision de la Chambre qui porte comme titre :

7 "Seconde décision relative aux obligations de l'Accusation résultant de

8 l'article 68 du Règlement de procédure et de preuve."

9 Le dispositif était celui-ci : "Ordonne que l'Accusation communique

10 aussitôt que possible sur copie papier et dans une langue que l'accusé

11 comprend les quelque 3 000 documents que l'Accusation a identifiés grâce au

12 mot clé présenté par l'accusé."

13 Bien, Monsieur Marcussen.

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je suis un peu inquiet par rapport à toutes

15 ces accusations qui semblent s'accumuler vis-à-vis à du bureau du Procureur

16 dans ses relations avec la Chambre, et cetera. Donc, cela nous prendrait

17 sans doute deux ou trois semaines, mais j'aimerais que vous nous permettiez

18 de retrouver toutes les auditions qui sont en anglais et en B/C/S. Il y a

19 interprétation pour l'accusé, les gens du bureau du Procureur parlent

20 anglais, c'est retraduit en B/C/S donc avec de l'aide, les employés du

21 bureau du Procureur pourront retrouver tous ces documents. Vraiment, très

22 sincèrement nous ne voulons rien cacher. Il est très difficile pour

23 l'Accusation de comprendre pourquoi l'accusé insiste pour continuer à agir

24 comme il le fait. Mais compte tenu des accusations qui viennent d'être

25 portées, je crois qu'il faut que l'Accusation se charge du fardeau et

26 commence à zéro pour fournir à l'accusé tout ce qui vient d'être évoqué

27 dans ce cas particulier, nous allons faire cet immense travail pour qu'il

28 soit fait.

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1 Je vous remercie.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Que tout le monde soit bien au clair, la décision

3 avait donc rendue une -- la Chambre avait rendu une décision disant que

4 l'Accusation devait communiquer les 3 000 documents identifiés grâce aux

5 mots-clés. Ça c'est une chose qui n'est pas remise en cause par la Chambre.

6 En revanche, l'élément nouveau c'est Panic, qui apparemment ne ferait pas

7 partie des 3 000 documents. Donc, on peut comprendre par les propos de M.

8 Seselj qu'il veut avoir dans sa langue et en "hard copy" ceci.

9 Et donc, il faudra que la Chambre prenne une position sur cette demande, et

10 nous ne pourrons prendre une position que quand nous aurons connaissance de

11 ce qu'a pu dire M. Panic, ce n'est pas la peine d'aller vous demander de

12 traduire 1 500 pages pour un intérêt nul. Donc il faudra qu'on regarde ça

13 de près et à ce moment-là on rendra une décision.

14 Alors, il est quasiment maintenant l'heure de faire la pause, on va faire

15 la pause, et ensuite, oui, il reste trois minutes avant la pause.

16 Monsieur Seselj.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je mettrais à profit ces

18 trois minutes-là, pour ne pas vous privez de votre temps dans la

19 continuation, et pour nous consacrer au contre-interrogatoire.

20 Si j'ai bien compris, jeudi, le Procureur a demandé à ce que les autres

21 documents du classeur, qu'il n'a pas eu le temps d'utiliser dans son

22 interrogatoire principal, il veut que ce soit versé au dossier dont je me

23 suis opposé à la chose.

24 Et vous m'avez dit qu'il fallait que je me prononce à ce sujet, or, pendant

25 le week-end -- ou plutôt, hier, le 25 février, j'ai reçu une liste bien

26 plus grande de documents que le bureau du Procureur voudrait faire

27 directement verser au dossier. Cette liste me rappelle la liste du mois de

28 novembre. Je n'ai pas réussi si cela à voir si c'était -- ça coïncidait

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1 absolument. Il y a peut-être eu quelques modifications.

2 Je ne conteste pas le droit du bureau du Procureur à demander et le droit

3 de les Juges de la Chambre d'accepter que certains documents soient

4 directement versés au dossier indépendamment de l'interrogatoire principal

5 ou du contre-interrogatoire du témoin, mais j'estime que s'agissant de

6 chacun de ces documents, il faut qu'au moins il y ait eu un "oui" ou un

7 "non" de ma part en le prétoire. Il faut qu'aux comptes rendus, s'agissant

8 de chacun de ces documents, il y ait une trace écrite disant que ça a été

9 proposé pour versement, à quelle date avec quel numéro, est-ce que c'est un

10 numéro de versement ou à des fins d'identification, et il ne faut pas que

11 je me prononce par écrit à ce sujet. Parce que si je dois me prononcer par

12 écrit à tous ces sujets-là, alors, on pourrait peut-être avoir un procès

13 par écrit, on pourrait avoir un procès par correspondance.

14 Moi, par écrit, les Juges par écrit, l'Accusation, les témoins par écrit.

15 Donc, il n'y aurait pas besoin d'avoir une communication, or moi, je suis

16 disposé à parler à titre individuel de chacun de ces documents et pour deux

17 tiers de ces documents je vais être d'accord en disant un mot pour qu'ils

18 soient versés au dossier, notamment lorsqu'il s'agit des extraits en

19 provenance de mes livres, parce que ce sont des documents qui ne peuvent

20 pas être mêlés à des documents qui ne peuvent pas être versés directement.

21 Il faut qu'ils soient montrés aux témoins et il faut qu'on discute de leur

22 pertinence et de l'authenticité.

23 Donc, je vous demande de désigner une journée - point n'est besoin de se

24 presser - ou le bureau du Procureur présenterait tous les documents qu'il

25 voudrait faire verser directement au dossier afin que nous passions

26 document par document en revue afin que je puisse me prononcer. Parce que

27 c'est un nombre énorme de documents, et on ne peut pas à la légère laisser

28 tout cela aller au dossier.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur vous a donné une liste de documents

2 vous les avez étudiés, et vous venez de nous dire que le deux tiers vous ne

3 serez pas contre de leur admission. Alors, quand vous aurez terminé votre

4 contre-interrogatoire, il serait utile que vous indiquiez oralement à la

5 Chambre que vous êtes contre et puis vous nous indiquez les numéros des

6 documents. Voilà. Et comme ça vous aurez dit : "Yes or No." Et comme ça, on

7 saura, et la Chambre rendra une décision, parce qu'il y a peut-être

8 beaucoup de documents qui de votre part n'appelle aucun problème. Mais

9 c'est à vous de nous le dire; moi, je suis incapable de savoir quelle est

10 votre position sur les documents. C'est à vous de nous dire.

11 Nous, on était parti de l'idée que vous étiez contre l'admission de tous

12 documents non présentés au témoin. Maintenant, vous avez un peu amendé

13 cette position en disant, qu'il y a des documents qui peuvent être

14 néanmoins admis. Bon. C'est déjà un progrès.

15 Alors, il sera utile la prochaine fois quand vous aurez terminé de nous

16 dire : "Je suis contre l'admission de tel, tel, tel, tel, tels documents,"

17 et à ce moment-là, la Chambre rendra une décision.

18 Alors, on a passé quasiment une heure et demie en questions de procédure --

19 Oui.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous le permettez, juste brièvement, une demi-

21 minute. Monsieur le Président, je n'ai pas changé ma position, peut-être y

22 a-t-il des éléments qui vous ont fait conclure de la sorte. On a modifié le

23 sujet du débat.

24 Jeudi, le bureau du Procureur si j'ai bien compris, peut-être n'ai-je pas

25 bien compris, peut-être l'interprétation n'a-t-elle pas été bonne, jeudi, a

26 demandé -- le Procureur a demandé que les autres documents dans les trois

27 classeurs qu'il n'y a pas eu le temps d'utiliser dans son interrogatoire

28 principal, il veut que ce soit versé au dossier, et je me suis opposé.

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1 Maintenant, je parle d'autre chose, on a changé de sujet pendant le week-

2 end, maintenant, la liste des documents est encore plus grande, et il y a

3 bon nombre de documents qui ne sont pas contestés. Si ce sont des extraits

4 de mes livres, ce n'est pas contesté du tout. Je ne peux pas déterminer si

5 la traduction est bonne, mais c'est le problème du Tribunal, pas le mien.

6 Donc, là, je peux me prononcer, mais il y a des documents qui ne sont pas

7 des extraits de mes livres que le bureau du Procureur n'a pas utilisés lors

8 de l'audition de ce témoin. Ils n'ont qu'à attendre un autre témoin pour

9 les utiliser, voyez-vous. Vous avez vu le document où il n'y a pas de

10 signature, il n'y a pas de date, où il n'y a rien comme désignation

11 officielle, si je n'étais pas intervenu sur le champ, peut-être aurait-on

12 versé la chose au dossier.

13 Donc il y a ce type de péril constamment et je suis toujours prudent,

14 peut-être à votre avis suis-je pas trop prudent, mais que voulez-vous que

15 je fasse ? Je ne peux pas changer cela, moi.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : -- faisons une pause de 20 minutes.

17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 00.

18 --- L'audience est reprise à 10 heures 25.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, l'audience est reprise.

20 Monsieur Seselj, pour le contre-interrogatoire.

21 LE TÉMOIN : REYNAUD THEUNENS Reprise]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 Contre-interrogatoire par M. Seselj : [Suite]

24 Q. [interprétation] Monsieur Theunens, nous avons pu constater jeudi

25 que, pendant ces huit années où vous avez travaillé pour le bureau du

26 Procureur du Tribunal de La Haye, vous avez participé pratiquement à toutes

27 les formes d'activités du bureau, à savoir vous avez pris part aux

28 auditions des témoins, aux auditions des suspects, à la rédaction des actes

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1 d'accusation, au récolement des témoins du Procureur, et cetera; est-ce

2 exact ?

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne crois pas que le témoin ait déclaré

5 qu'il avait participé à la préparation des actes d'accusation, ce qu'il a

6 dit au cours de sa déposition, c'est qu'il avait fourni des informations

7 lorsqu'on le lui demandait, des informations aux avocats qui eux

8 préparaient les actes d'accusation.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas dit que M. Theunens a pris part à

10 la rédaction de l'acte d'accusation, mais que l'on a consulté M. Theunens

11 lorsqu'on a préparé l'acte d'accusation. C'est une chose de rédiger, c'est

12 une autre chose de préparer. Mais il a pris part à cela et c'est ce qu'il a

13 déclaré dans sa déposition, jeudi dernier.

14 Q. N'est-ce pas, en sa qualité d'expert sur des questions militaires ?

15 R. Tout d'abord, je souhaiterais répondre à la question initiale quand il

16 a été fait référence à huit années. Comme je l'ai dit au départ, j'ai

17 commencé à travailler au bureau du Procureur le 28 juin 2001, ce qui nous

18 mène à sept ans, tout au plus au jour d'aujourd'hui.

19 Pour répondre au deuxième volet de la question, il est exact que je

20 travaille en tant qu'analyste du renseignement au sein du bureau du

21 Procureur, et que les premiers substituts du Procureur, les substituts du

22 Procureur, les juristes, les enquêteurs me demandent de les aider en ce qui

23 concerne la chose militaire, mais il m'est impossible de dire dans quelles

24 mesures les informations que je fourni aux personnes que je viens de

25 mentionner sont incluses dans les actes d'accusation.

26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Theunens, est-ce que comme

27 semble l'indiquer l'accusé, vous participez à l'audition des témoins, au

28 récolement des témoins et aux autres activités qu'il a énumérées ? Tous les

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1 types d'activités du bureau du Procureur, que vous préparez les actes

2 d'accusation, et cetera. Est-ce que vous pourriez être plus précis, nous

3 dire quel est le rôle exact que vous jouez en ce qui concerne cet acte

4 d'accusation ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que votre question comporte deux

6 volets. D'abord, je dirais que j'ai participé à l'audition de témoins et de

7 suspects militaires de haut niveau. J'étais là pour aider ceux qui menaient

8 l'interrogatoire en matière militaire, j'étais là pour les aider dans ce

9 domaine. En ce qui concerne les auditions de témoins militaires de haut

10 niveau, il m'est arrivé aussi de poser des questions, de choisir des

11 documents susceptibles d'être présentés au témoin pendant l'audition, bien

12 entendu celui qui décide en dernière analyse c'est celui qui est

13 responsable de l'interrogatoire, pas moi.

14 Et s'agissant de l'acte d'accusation en l'espèce, on m'a envoyé aux

15 différents stades de préparation de l'acte d'accusation, on m'a envoyé des

16 projets d'acte d'accusation et je n'ai regardé que la section consacrée aux

17 faits, où il y avait un certain nombre de dates ou faits qui étaient

18 présentés, il y avait des noms d'organisations, de personnes, de

19 structures. Et on m'a demandé mon assistance, mon intervention, mon conseil

20 pour voir si, pour que je dise si les informations qui figuraient dans ces

21 projets d'acte d'accusation étaient correctes.

22 Il est vrai, je ne suis pas juriste, je n'ai pas suivi véritablement,

23 suivi de formation juridique, donc, je ne suis jamais intervenu dans les

24 questions juridiques, on ne m'a jamais consulté, je ne suis jamais

25 intervenu, je ne me suis jamais ingéré à tout ce qui a trait aux questions

26 purement juridiques, aux chefs d'Accusation, et cetera.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- général Panic, vous étiez parmi ceux qui

28 l'ont interrogé ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et je me réjouis de pouvoir vous fournir

2 peut-être une idée plus exacte de son audition, peut-être d'un volet

3 d'audition par rapport à ce qui était dit précédemment à ce sujet, dans ce

4 prétoire.

5 Si je me souviens bien, il y a eu deux sessions de réunions avec le

6 Témoin Zivota Panic.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Si M. Seselj veut vous poser les questions, il vous

8 posera la question. Ma préoccupation également, parce que vous avez

9 compris, c'est de savoir la proximité que vous avez avec le bureau du

10 Procureur. Comme nous avons Vukovar dans notre affaire, est-ce que vous

11 avez procédé à des auditions ou à des proofings dans l'affaire dit des

12 trois de Vukovar : Radic, Sljivancanin et Mrksic. Est-ce que vous avez

13 participé à des auditions lors de la préparation de ce procès ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai participé à un certain nombre de

15 séances de récolement pour le procès de Vukovar et en particulier pour des

16 témoins militaires de haut niveau.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]

18 M. SESELJ : [interprétation]

19 Q. Vous avez confirmé ici, Monsieur Theunens, que vous avez pris part

20 également à la préparation des témoins pour qu'il vienne déposer dans

21 différentes affaires dans ce qu'on appelle le récolement; est-ce que mes

22 souvenirs sont bons là-dessus ?

23 R. Oui, mais je ne vois pas en quoi cela pose véritablement un problème

24 direct à moins que je ne me mette à faire le travail du juriste dans ces

25 conditions. Moi, je suis analyste en matière de renseignements militaires

26 et ma mission, à ce moment-là, dans ce cadre, c'était d'assister les

27 juristes qui menaient à bien la séance de récolement. Je les aidais en

28 sélectionnant des documents susceptibles d'être utilisés au cours de ces

Page 4101

1 séances de récolement. Voilà tout ce que je fais. Je ne m'implique pas dans

2 les questions juridiques.

3 Q. Je n'ai pas prononcé ne serait-ce qu'un mot en vous accusant de vous

4 occuper des aspects juridiques, je voulais juste vérifier tout simplement

5 ce qui en a été de votre déposition de jeudi, et vous venez de confirmer

6 toutes mes questions. Vous avez pris part à la préparation de mon acte

7 d'accusation, vous avez pris part à la réalisation de sa version élargie,

8 vous avez pris part à l'audition des témoins de l'Accusation. Vous avez

9 pris part à l'audition des suspects. Vous procéder au récolement des

10 témoins en la compagnie d'autres employés du bureau du Procureur. Bien

11 entendu, dans le domaine de vos compétences là-dessus, je ne remets pas en

12 question ce que vous avez dit. Mais je ne vais jamais vous accuser d'être -

13 - ou suspecté d'être un expert juridique. Et au moment où vous êtes devenu

14 l'employé du bureau du Procureur, vous vous êtes engagé par écrit à garder

15 ses secrets, ce qui me permet d'arriver à la conclusion que vous êtes ici

16 témoin de votre propre affaire. C'est un petit peu comme si M. Mundis

17 venait déposer ici ou M. Marcussen, ou Mme Christine Dahl. Vous êtes tous

18 membres de l'équipe de l'Accusation à ceci près que vos rôles, les rôles

19 que vous jouez ne sont pas les mêmes dans le cas des travaux du bureau du

20 Procureur. Ai-je raison là-dessus, Monsieur Theunens ?

21 R. Je crois que c'est une façon erronée de présenter le rôle qui est le

22 mien.

23 Je voudrais nous ramener à notre rapport parce que ce rapport il explique

24 ma présence ici et je voudrais attirer votre attention sur le fait que tout

25 ce qui est -- figure dans ce rapport repose sur des documents et ces

26 documents on en voit les références dans les notes de bas de page, il n'y a

27 rien qui soit affirmé dans ce rapport. Il n'y a aucune conclusion de ce

28 rapport qui ne soit pas étayé par au moins un document.

Page 4102

1 Bien entendu, il appartiendra aux Juges de la Chambre de première instance

2 de déterminer le poids qu'il convient d'accorder à ma déposition, c'est-à-

3 dire le poids à accorder aux documents qui figurent dans mon rapport.

4 J'ai également déclaré la semaine dernière et je souhaiterais le

5 répéter aujourd'hui que j'ai écrit ce rapport pour le bureau du Procureur,

6 l'armée belge, un institut de recherche ou qui que ce soit d'autre, le

7 rapport en a été exactement le même parce que la teneur de ce rapport est

8 déterminé par les sources que j'ai consultées. Il est vrai que j'ai

9 consulté essentiellement des documents qui sont à la disposition du bureau

10 du Procureur, comme on l'a dit ce matin, il y a énormément de documents

11 relevant de l'article 68, de documents exculpatoires dont dispose le bureau

12 du Procureur.

13 Je pense qu'il serait erroné de réduire ma déposition et mon rapport

14 à la présence ou à la déposition d'un représentant du bureau du Procureur

15 qui dépose dans son propre procès parce que je pense que ça ne serait pas

16 une façon juste de décrire la situation.

17 Mme LE JUGE LATTANZI : Mais, Monsieur le Témoin, ici c'est une

18 question préliminaire. Ce n'est pas la question du contenu, de votre

19 témoignage, la question du contenu de votre rapport. C'est une préliminaire

20 parce qu'on doit se -- examiner si la soi-disant proximité avec le bureau

21 du Procureur a pu vous induire à faire des choix plutôt que d'autres. Donc,

22 c'est une question plutôt préliminaire à celle que vous avez abordée

23 maintenant. Merci.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous comprends bien, Madame le Juge,

25 mais je voulais simplement dès le départ dire clairement quel était mon

26 point de vue à ce sujet.

27 M. SESELJ : [interprétation]

28 Q. Dans un cas hypothétique, Monsieur Theunens, si M. Mundis ou M.

Page 4103

1 Marcussen venait à comparaître ici en tant qu'expert du bureau du

2 Procureur, assis sur -- au même endroit où vous êtes assis maintenant, eux

3 ils ne viendraient pas déposer sur des questions militaires en tant

4 qu'expert militaire, mais ce serait avant tout sur des questions

5 juridiques. Mais est-ce qu'il y aurait une différence de principe entre

6 leur comparution en tant que témoin expert et la vôtre, donc, une

7 différence de principe ? Faisons abstraction pendant un instant le fait que

8 vous êtes un expert militaire tandis que eux seraient des experts

9 juridiques, une différence substantielle de principe ?

10 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je ne sais pas ce

11 que dirait M. Marcussen ou M. Mundis. Je ne sais pas s'ils prépareraient un

12 rapport, quel serait la teneur de leur rapport mais s'ils le faisaient, et

13 si j'étais compétent en la matière abordée dans le rapport qui ferait

14 l'objet de leur déposition et j'examinerais la chose avec un sens -- le

15 sens critique qui est le mien en tant qu'analyste. J'écouterais ce qu'ils

16 auraient à dire et j'essaierais de déterminer s'ils font ou non preuve de

17 partialité.

18 La question de l'impartialité ou de la partialité, c'est une question

19 qui se pose à tous les analystes du renseignement ou que ce soit dans le

20 monde et il est important d'éviter la partialité, le parti pris et

21 d'identifier où il peut se manifester. C'est une des premières choses que

22 j'ai apprises non seulement au début de ma carrière. Mais avant même ma

23 carrière dans le cadre de ma formation, il y a différentes formes de

24 partialité. Bien entendu, le fait que quelqu'un travaille pour telle ou

25 telle organisation peut entraîner une saine ou telle partialité, un certain

26 parti pris, mais à ce moment-là, il appartient à l'individu concerné en

27 l'occurrence moi de faire en sorte que le fait d'appartenir à telle ou

28 telle organisation ne se manifeste pas sur la manière dont il ou elle

Page 4104

1 accomplit son travail, c'est-à-dire éviter toute manifestation de

2 partialité.

3 Q. Monsieur Theunens, veuillez bien écouter attentivement mes questions,

4 et dans la mesure du possible, ne répondez à ce que je vous ai demandé. Ne

5 me répondez pas aux questions que je ne vous ai pas posées, n'élargissez

6 pas trop l'objet de notre échange parce que, comme vous le savez très bien,

7 j'ai très peu de temps à ma disposition. Pour autant que je le sache, en

8 fait, je ne sais pas que M. Mundis ou M. Marcussen ait pris part à la

9 préparation de l'acte d'accusation contre moi ou qu'ils aient participé à

10 l'élargissement de l'acte d'accusation contre moi, pas plus que du fait

11 qu'ils aient pris part à l'audition des témoins de l'Accusation qui

12 allaient venir déposer ici.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur. Il y a un problème.

14 Bien. Alors, il y a un problème technique. "Stop." Bon. Alors, il faut

15 qu'on fasse un break parce que -- en minutes -- "two minutes, yes."

16 Alors, on va attendre quelques minutes.

17 Bien, ça marche.

18 Alors, Monsieur Seselj, poursuivez -- reprenez, s'il vous plaît.

19 M. SESELJ : [interprétation]

20 Q. Un exemple. Monsieur Theunens, je n'ai aucun élément d'information nous

21 disant que M. Mundis ou Marcussen ait pris part à la préparation de l'acte

22 d'accusation contre moi ou qu'ils aient participé à l'élargissement de cet

23 acte accusation, ou bien qu'ils aient participé à l'audition de témoin

24 potentiel ou à d'autres préparatifs menant à ce procès. En revanche, j'ai

25 des preuves me montrant que vous avez participé à la préparation de cet

26 acte d'accusation, de sa version élargie, à l'audition des témoins, aux

27 séances de récolement des témoins, à l'audition des suspects, et cetera.

28 Ai-je raison de dire qu'il y a plus de raison pour moi de faire

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1 confiance à l'impartialité de MM. Mundis et Marcussen qu'à la vôtre ? Mais

2 répondez-moi brièvement s'il vous plaît, par un "oui" ou par un "non," si

3 possible ?

4 R. Je réponds "non."

5 Q. Monsieur Theunens, vous souhaitez que cet acte d'accusation soit

6 couronné de succès -- cet acte d'accusation dressé contre moi, puisque vous

7 avez participé à sa création, à la préparation du procès, à la collecte des

8 informations, préparation des témoins, et cetera; est-ce vrai ?

9 R. Mon intérêt d'ailleurs - j'ai dit la même chose dans l'affaire Vukovar

10 quand l'avocat de Mrksic m'a interrogé - j'avais répondu que mon intérêt à

11 moi, c'est d'apporter ma contribution aussi minime soit telle à la justice.

12 Enfin, je reprends, la signification que ça aura pour l'acte d'accusation,

13 on le verra à la fin du procès mais moi, ce qui me meut dans mon travail et

14 la raison pour laquelle je suis venu travailler au bureau du Procureur,

15 c'est de faire en sorte que la justice soit rendue, soit faite.

16 Q. Monsieur Theunens, puisque vous avez travaillé pendant des années pour

17 les services de Renseignements belges, vous savez, à quel point

18 l'espionnage en tant qu'activité est quelque chose d'impartial. Nous avons

19 pu nous en rendre compte dans le cas d'Yves Tomic, l'espion du

20 renseignement français, et puis, maintenant, nous avons un espion du

21 service belge, c'est vous. Les deux, vous affirmiez que vous êtes

22 impartiaux, mais les espions par avance, j'ai du mal à me dire qu'ils sont

23 impartiaux, parce que je sais ce que représentent ces services. Ne cherchez

24 pas à vous justifier -- à affirmer votre impartialité. Tout le monde sait à

25 quel point les espions sont impartiaux.

26 Enfin, vous êtes sorti de l'académie belge --

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis obligé d'interrompre M. Seselj parce qu'à la

28 ligne 9, page 49, M. Seselj dit que vous êtes un espion des services

Page 4106

1 secrets belges. Alors, c'est "oui," c'est "non;" qu'est-ce que vous dites ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que M. Seselj comprend mal ce que

3 c'est que l'espionnage parce que l'espionnage, moi, tel que je le connais -

4 et ça c'est attesté par tous les ouvrages écrits au sujet du renseignement

5 - l'espionnage c'est une méthode clandestine utilisée par les services de

6 Renseignements hostiles pour obtenir des informations relatives à la

7 sécurité nationale d'un pays, information à laquelle ils n'ont pas le droit

8 d'avoir accès normalement. Je n'ai jamais participé à telles activités.

9 En ce qui concerne M. Tomic, je n'ai pas lu son CV, mais j'ai écouté

10 certains passages de sa déposition, mais ça me surprendrait fort

11 d'apprendre qu'il n'ait jamais participé à ce type d'activités.

12 M. SESELJ : [interprétation]

13 Q. Monsieur Theunens, je sais très bien de quoi il s'agit lorsqu'on parle

14 de l'espionnage, mais avançons pas à pas et puis on en viendra au fond de

15 l'affaire concernant l'espionnage, et nous verrons en quelle qualité vous

16 étiez dans les Balkans en tant qu'officier de l'OTAN.

17 Enfin, vous êtes sorti de l'académie militaire de l'armée belge;

18 c'est bien ça ?

19 R. Je ne suis jamais allé dans les Balkans en tant qu'officier de

20 l'OTAN. J'ai participé à deux missions en tant que membre de la force de

21 protection des Nations Unies, et puis, en tant que membre de

22 l'administration de transition des Nations Unies pour la Slavonie

23 orientale, et ma troisième mission c'était une mission à caractère

24 national. J'étais membre des forces armées belges dans ce cadre et j'ai

25 accompli un certain nombre de missions auprès de la SFOR. Il est exact que

26 j'ai suivi les cours de l'académie royale militaire belge.

27 Q. En votre qualité d'officier des Nations Unies, vous avez envoyé

28 des rapports du renseignement à certaines structures onusiennes mais

Page 4107

1 également aux renseignements belges et à la centrale de l'OTAN; c'est bien

2 cela ?

3 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai fourni mon CV

4 qui est en annexe du rapport, et dans ce CV, on trouve un rappel de mon

5 parcours professionnel, de mes activités aussi bien au TPY qu'avant que je

6 ne commence à travailler ici. En ce qui concerne mes activités

7 professionnelles avant 2001, je suis soumis à la loi sur l'habilitation en

8 matière de sécurité, loi belge qui du 11 décembre 1998 et qui m'empêche de

9 parler de manière détaillée de questions -- de certaines questions envers

10 des personnes qui n'ont pas reçu l'habilitation nécessaire de la part du

11 gouvernement belge. Et même ce que j'ai fait en tant que chef de section

12 des forces belges en Allemagne, fait partie de cette interdiction qui m'ait

13 imposé.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai pris note de votre réponse.

15 M. Seselj vous pose une question qui est la suivante : quand vous étiez

16 membre de l'UNPROFOR, avez-vous envoyé des rapports au service secret belge

17 et avez-vous envoyé des rapports au service de renseignements de l'OTAN ?

18 Donc, la question, elle est très claire et très précise. Vous répondez à

19 cette question, en disant que votre statut vous empêche de répondre; est-ce

20 bien ce que j'ai compris ? Oui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, c'est exact. Je peux parler

22 de ces questions dans la mesure où elle figure dans mon CV, dans le CV qui

23 est en annexe du rapport, mais je ne suis pas habilité à parler des

24 relations entre les services où je travaillais et d'autres services, les

25 priorités des services de Renseignements, les méthodes utilisées ainsi que

26 d'autres questions classifiées.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

28 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je souhaitais insister sur le fait que le

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1 témoin est dans une situation que vous serez amené à rencontrer avec toutes

2 les personnes ayant son parcours, c'est-à-dire des militaires ou des

3 policiers qui sont soumis à certaines restrictions dans leur pays

4 d'origine. Dans l'état des choses, le témoin peut nous parler de certaines

5 de ces missions mais il n'a pas droit de donner de détail à caractère

6 opérationnel pour des raisons évidentes et que tout le monde connaît.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

8 Monsieur Seselj.

9 M. SESELJ : [interprétation]

10 Q. Evitez la réponse, Monsieur Theunens, c'est pour moi la meilleure des

11 réponses possibles, parce que tout est clair désormais, mais le Procureur

12 n'a pas à bondir comme si l'avait échaudé. J'ai le droit de poser ma

13 question et je dois préparer le témoin à la question que je vais lui poser.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen qu'est-ce que vous vouliez

15 ajouter ?

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Objection à la manière dont ceci est

17 présenté de manière tout à fait inexacte. Le témoin n'essaie pas d'éluder

18 les questions, il a simplement l'obligation de ne pas parler de toutes ces

19 questions. Ce n'est pas que le témoin refuse de répondre, mais il y a des

20 questions auxquelles il n'a pas le droit de répondre.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

22 En tout cas, moi j'ai compris. Je pense que mes collègues ont également

23 compris.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la Chambre a délibéré, bien, nous sommes un

26 peu dubitatifs sur cette question en l'état, donc, la question elle était

27 très claire, vous ne confirmez ni n'affirmez quoi que ce soit. Vous dites :

28 "Je ne réponds pas parce que, dans mon statut d'officier belge, je suis

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1 tenu à certaines règles," même si vous êtes fonctionnaire international.

2 Parce que n'oubliez pas on est dans la justice internationale.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je comprends très bien, Monsieur le

4 Président, et je pense qu'il est peut-être utile que je vous apporte une

5 précision.

6 Il est clair que, lorsque je servais au sein de l'UNPF, de la FORPRONU et

7 ensuite à l'UNTAES -- au QG de l'UNTAES, il est clair que j'ai établi ce

8 que nous appelions des rapports de renseignements militaires ou

9 d'informations militaires, des évaluations, des documents divers pour les

10 membres du QG de l'ONU ainsi que pour les autres autorités pertinentes en

11 dehors du QG. Il arrivait parfois que des informations -- des éléments

12 d'information soient fournis pour répondre à certaines questions posées par

13 le Conseil de sécurité. Mais s'agissant de toute relation que j'aurais eue

14 ou que je n'ai pas eue avec le service pour lequel je travaillais en

15 Belgique, ou une organisation quelconque de l'OTAN, et bien, s'agissant de

16 tout cela, cela relève ou tombe sous le coup de la loi belge du 11 décembre

17 1998.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, c'est bien ce qu'on a compris dans votre

19 réponse.

20 Mme LE JUGE LATTANZI : Je voudrais savoir une chose.

21 Mais les règles d'engagement dans l'UNPROFOR vous permettaient d'avoir --

22 de continuer d'avoir vos rapports avec les services d'Information de votre

23 pays ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça c'est une question extrêmement complexe.

25 Pourquoi ? Parce que la FORPRONU a été envoyée sur place en tant que

26 mission de maintien de la paix, c'est-à-dire que vous avez d'abord un

27 accord de paix que les parties en présence ont la volonté de mettre en

28 œuvre cette accord et de faire tout pour qu'ils s'appliquent très vite, dès

Page 4110

1 le début de l'arrivée de la FORPRONU nous nous sommes rendus compte que la

2 FORPRONU n'était en réalité pas une mission de maintien de la paix parce

3 qu'en fait il n'y avait pas de paix à maintenir, pour dire les choses

4 simplement. Il est apparu très vite que les pays qui avaient envoyé des

5 soldats, qui se rendaient compte que ces soldats étaient en but à des

6 périls qui allaient au-delà de ce qu'on aurait pu attendre d'une opération

7 de maintien de la paix, donc, de nombreux pays ont entrepris de mieux

8 protéger leurs hommes. Et cela impliquait notamment la réunion, la collecte

9 et puis la communication d'informations.

10 Mme LE JUGE LATTANZI : Le chapitre 7, ce n'est pas seulement le maintien de

11 la paix qui est le but des mesures du chapitre 7. Aussi d'établir.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai. Et UNTAES, la mission suivante,

13 elle a été envoyée sur place au titre du chapitre 7, mais la mission de

14 UNCRO, qui a remplacé la FORPRONU en Croatie, faisait référence également

15 au chapitre 7 de la charte des Nations Unies, mais la première résolution

16 qui a créé la FORPRONU, si je me souviens bien, fait référence au chapitre

17 6 de la charte des Nations Unies.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : -- juridiques, bien qu'au départ vous nous avez dit

19 que vous n'étiez que militaire. Mais c'est toujours bien de faire du droit.

20 Monsieur Seselj.

21 M. SESELJ : [interprétation]

22 Q. Je suis surpris, Monsieur Theunens, par le fait de vous voir vous

23 référez à des dispositions d'une loi belge qui vous interdirez de donner

24 des informations relatives à vos activités. Pour plus de raisons. Pourquoi

25 voulez-vous que ce soit concerné, préoccupé par la législation belge ? La

26 Belgique a été l'un des pays agresseurs dans la guerre contre la Serbie,

27 n'est-ce pas ?

28 R. Je ne pense pas que ce soit une bonne manière, une manière exacte de

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1 représenter les faits.ère exacte de représenter les faits.Q. Bon. Mais

2 pendant votre témoignage, lors du procès à l'encontre du général Mrksic, du

3 colonel Sljivancanin et du commandant Radic, en répondant à une question

4 d'un conseil de la Défense, vous avez confirmé le fait qu'en votre qualité

5 d'officier des Nations Unies, vous avez communiqué des informations de

6 nature du renseignement à l'armée belge. Et le fait d'avoir confirmé cela

7 se trouve à la page 10 754 du compte rendu d'audience dans l'affaire contre

8 le trio de Vukovar.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous pouvez retrouver cela dans le prétoire

10 électronique, Madame et Messieurs les Juges. Donc, c'est la page 10 754.

11 Q. L'avez-vous confirmé ou pas ?

12 R. Là, on a cité seulement partiellement ma réponse. Il est vrai que

13 l'avocat de M. Mrksic m'a demandé si pendant que je travaillais pour la

14 FORPRONU j'avais envoyé des rapports, et il a parlé de rapports en général,

15 pas forcément de rapports de renseignements. Il a demandé si j'avais envoyé

16 des rapports aux forces armées belges. J'ai d'abord expliqué aux Juges

17 qu'il existait une loi sur l'habilitation en matière de sécurit, et cetera,

18 je n'ai peut-être pas utilisé les mêmes mots, mais enfin j'ai expliqué

19 qu'il y avait un certain nombre de conditions juridiques qui s'appliquaient

20 à moi. Et à ce moment-là, le Président de la Chambre, le Juge Parker, m'a

21 répondu : "Oui, nous comprenons bien, mais répondez par "oui" ou par "non."

22 Et à ce moment-là, j'ai répondu : "Oui."

23 Q. Et comme à ce moment-là, Monsieur Theunens, vous avez dit "oui," alors,

24 le secteur d'espionnage belge vous a remonté les bretelles, et dans le

25 procès contre moi, vous ne voulez dire ni "oui" ni "non," n'est-ce pas ?

26 R. Madame, Messieurs les Juges --

27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- très intelligent essaie de vous faire dire ce que

28 vous ne voulez pas dire. Bon, et c'est pour cela que

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1 M. Marcussen intervient.

2 Monsieur Marcussen.

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, tout à fait. Je ne suis même pas

4 certain que le témoin doive dire ceci. En fait, il n'a pas la liberté

5 d'évoquer ces sujets, et il ne peut pas répondre à ces questions. Donc,

6 l'accusé est tout à fait au courant de cela. Et très honnêtement, en fait,

7 je mets en doute la pertinence de ce type de questions, le rapport du

8 témoin ainsi que son travail en tant qu'expert pour le bureau du Procureur.

9 Donc, je pense que ces questions ne sont pas pertinentes, premier point. Et

10 ensuite, j'estime qu'il a été tenu au courant du fait que le témoin est

11 dans l'impossibilité de répondre à ces questions.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- indiqué qu'il ne pouvait pas répondre parce qu'il

13 est officier belge, il est tenu par ces lois internes même si devant le

14 Tribunal international nous nous ne sommes pas dépendant des lois internes,

15 mais on ne va pas le soumettre à la question pour qu'il réponde dans un

16 sens ou dans l'autre.

17 Donc, il ne [imperceptible] question, y répond qu'il est soumis -- qu'il

18 est soumis. Bon. Alors, passez à autre chose.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'espère que ceci ne

20 sera pas compté dans le temps mis à ma disposition.

21 Mais ce témoin a pris part en 1995, en sa qualité d'officier des

22 Nations Unies, à la préparation de l'opération Eclair croate et de

23 l'opération Tempête à l'encontre de la République de la Krajina serbe. Il

24 avait pour siège Zagreb à l'époque, il savait que l'on préparait ces

25 opérations, et il n'a rien entrepris pour les empêcher, c'est le moins

26 qu'on puisse dire. Donc il est directement impliqué dans les conflits sur

27 le territoire de l'ex-Yougoslavie parce que l'agression de la Croatie à

28 l'égard de la Krajina serbe s'est faite avec l'aide directe du pacte de

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1 l'OTAN; nous en avons des preuves innombrables. Et il a pris part à tout

2 cela, et il vient, il comparait ici comme étant un témoin impartial, alors,

3 ça fait une heure que je mets pour ce qui est de son rôle dans ces

4 événements en sa qualité d'officier des forces armées belges. Et, par

5 avance, il déclare qu'il n'a le droit de parler en aucune façon de son

6 service là-bas pour le compte des services de Renseignement belges. Que

7 voulez-vous que je le contre-interroge alors ?

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, M. Seselj allègue qu'en

9 1995, alors que vous étiez membre de la FORPRONU, vous auriez préparé de

10 concert avec les Croates, les opérations "storm-and-flash." Bon. Alors,

11 c'est vrai, c'est faux, vous pouvez répondre, "oui," et "non" ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ceci n'est bien

13 évidemment pas vrai. J'ai travaillé comme officier -- enfin, comme

14 militaire au sein de l'armée de la FORPRONU, et si

15 M. Seselj le souhaite, en fait, on peut parler dans le détail de ce que

16 j'ai fait, j'étais à ce QG par rapport aux opérations Tempête et Flash --

17 Eclair. En fait, rien ne permet d'étayer ce type d'allégation politique.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Seselj.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, dans ce curriculum vitae

20 tardif, parce qu'on me l'a communiqué tardivement de la part de

21 l'Accusation, au point 5, alinéa 3, il est dit que : "A compter du mois de

22 décembre 1994 à octobre 1995, le présent témoin a travaillé au siège de la

23 FORPRONU à Zagreb pour accomplir là-bas les tâches de suivi : d'analyse,

24 d'évaluation de la situation politique et militaire en Croatie, en Bosnie-

25 Herzégovine en ex-République yougoslave de Macédoine, et en République

26 fédérale de Yougoslavie s'agissant des plans stratégiques opérationnels et

27 tactiques." C'est ce qu'il a fait.

28 J'ai en ma possession des documents disant que la Croatie a officiellement

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1 informé les forces de la FORPRONU des préparatifs de son agression et elle

2 a demandé à ces forces-là de s'enlever, d'évacuer les axes d'avancer de

3 l'armée croate pendant l'agression, et ce qui a été fait, parce qu'il n'y a

4 pas un seul soldat des Nations Unies à s'être opposé à l'agression, à avoir

5 résisté, à avoir essayé d'effectuer sa mission de protection de la

6 population serbe.

7 Puisqu'on me place dans cette situation dans laquelle le témoin refuse de

8 répondre aux questions, je passerais à d'autres questions, je ne vais plus

9 insister là-dessus, mais, pour moi, c'était là la réponse la plus

10 convaincante pour ce qui est de ce que le témoin nous a déjà dit.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaut mieux passer à d'autres questions. Mais est-

12 ce que vous voulez répondre sur le fait ? C'est la théorie de M. Seselj.

13 Qu'il y avait une collusion en quelque sorte entre la FORPRONU et l'armée

14 croate. Et d'après M. Seselj, la meilleure preuve en est c'est que quand il

15 y a eu l'offensive, bien, les troupes de la FORPRONU ne se sont pas

16 opposées. Bon. Voilà. Alors, vous dites : "Je n'ai rien à dire," "C'est

17 faux," "C'est vrai," qu'est-ce que vous dites ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, il s'agit bien

19 évidemment de quelque chose qui n'est pas vrai dans la mesure où si vous

20 regardez la taille de ces opérations, ces opérations avaient été préparées

21 des mois à l'avance. Et ce n'est que pour l'opération Tempête, je crois,

22 une ou deux heures avant que les autorités croates en ont informé le

23 commandant le plus haut placé de l'UNPF, qui était le général Janvier,

24 celui qui commandait les forces en fait de l'opération qui allait avoir

25 lieu. Mais tout le monde savait -- c'était clair pour tout le monde, à ce

26 moment-là, toute personne qui suivait la situation en Croatie, qu'il ne

27 fallait pas attendre ce coup de fil de la part des Croates à Janvier pour

28 savoir que les Croates préparaient une opération de grande envergure contre

Page 4116

1 la Krajina.

2 Et si vous voulez et si M. Seselj le souhaite, on peut aborder ceci dans le

3 détail.

4 Comme je l'ai dit un peu plus tôt, je peux parler de mes activités dans les

5 différents QG chargés du maintien de la paix, mais je ne veux pas évoquer

6 des questions qui ont trait directement aux activités des services du

7 Renseignement belges avant et après ma participation à cette opération

8 chargée du maintien de la paix.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : -- d'autres sujets.

10 M. SESELJ : [interprétation]

11 Q. Lorsque vous avez terminé votre académie militaire, vous étiez sous

12 lieutenant, n'est-ce pas ?

13 R. Ce grade de sous lieutenant est un grade que l'on donne lorsqu'on est

14 dans la troisième année d'académie militaire, dans la division dans

15 laquelle je me trouvais.

16 Q. Quel a été votre grade lorsque vous avez terminé entièrement les études

17 à l'académie militaire ?

18 R. J'étais encore sous lieutenant.

19 Q. C'est bien ce que je disais. C'est en votre qualité de sous officier

20 que vous avez terminé l'académie militaire. Le commandement le plus élevé,

21 le poste de commandement que vous avez occupé à titre le plus élevé a été

22 celui de chef d'un peloton blindé, n'est-ce pas ?

23 R. A ce moment-là, j'étais commandant de peloton, et j'étais le commandant

24 en exercice à ce moment-là ou par intérim pendant plusieurs mois.

25 Q. Monsieur Theunens, quand j'ai fait mon service militaire, moi aussi, en

26 ma qualité de simple soldat, j'ai remplacé le chef de la compagnie, un

27 capitaine de première classe, pour ce qui est de l'enseignement à dispenser

28 aux soldats, et en ma qualité de docteur es science, on m'a confié les

Page 4117

1 cours à l'attention de toute la classe, donc, qu'est-ce que ça veut dire,

2 j'ai été le remplaçant ou j'ai remplacé, donc vous avez pu remplacé le

3 commandant de la compagnie ou le chef de la compagnie lorsqu'il a été -- se

4 pressait pour aller aux toilettes et ailleurs.

5 Répondez à ma question. Donc, vous aviez été chef d'un peloton,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Je n'ai pas très bien compris la question, Madame, Messieurs les

8 Juges.

9 Q. Le poste de commandement le plus élevé que vous ayez occupé dans les

10 rangs de cette armée belge a été celui de chef d'un Peloton de blindés,

11 n'est-ce pas ?

12 R. Non, Madame, Messieurs les Juges, ceci n'est pas exact. Comme je l'ai

13 déjà expliqué, pendant plusieurs mois, j'ai remplacé le commandant de ma

14 compagnie puisqu'il suivait des cours de formation en langue.

15 Q. Quand il a fait un stage de langue. Il aurait pu être en vacances,

16 aussi, bon, souhait, Monsieur Theunens.

17 Quand bien même auriez-vous été chef d'une compagnie, c'était un rang trop

18 peu élevé pour que vous puissiez vous qualifier expert pour quelque type de

19 question que ce soit, n'est-ce pas ?

20 R. Madame, Messieurs les Juges, je pense que c'est une question qui pourra

21 être traitée par les Juges de cette Chambre.

22 Q. A votre avis, Monsieur Theunens, que signifie le mot "expert" ?

23 R. Madame, Messieurs les Juges, je crois que mon avis n'est pas pertinent

24 en la matière. Au niveau du statut du TPIY, on précise quelles sont les

25 exigences appliquées à quelqu'un qui est un expert et c'est aux Juges de

26 décider si une personne présentée par l'une ou l'autre partie est en mesure

27 --- ou/et de préparer un rapport et de témoigner, alors soit oui, soit non,

28 et voir si la personne en est capable et ensuite de voir quel est le poids

Page 4118

1 que l'on peut accorder à la déposition d'un tel expert.

2 Q. Monsieur Theunens, je remets en question votre crédibilité, et vous

3 devez me répondre. Qu'est-ce qui, à votre avis, signifie -- qu'est-ce que

4 signifie une notion concrète sur la notion d'expert ? Vous pouvez dire que

5 vous ne savez pas me répondre, mais vous ne pouvez pas essayer de vous

6 débiner pour apporter une réponse.

7 "Expert" dans toutes les langues de cette planète, ça est une signification

8 déterminée et c'est toujours la même. Que signifie, à votre avis, le terme

9 "d'expert" ? Je remets en question votre qualité

10 -- vos qualités professionnelles; savez-vous ce que signifie cette notion ?

11 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

12 M. MARCUSSEN : [interprétation] -- avec d'autres témoins, nous avons fait

13 le même exercice, nous avons abordé des questions sémantiques, la

14 connaissance du témoin à propos de différents termes. Et à savoir si, oui

15 ou non, le témoin est en mesure en fait de donner une définition d'un

16 "expert" avec cet échange avec l'accusé n'est absolument pas pertinent

17 compte tenu des questions qui se posent aux Juges de la Chambre dans cette

18 affaire.

19 Donc, je crois que vous pouvez simplement passer et passer à une autre

20 question.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaudrait mieux passer à une autre question. Vous

22 avez répondu en disant que l'expert c'est les Juges qui diront si vous êtes

23 in fine expert ou pas. Les Juges, je rappelle ont rendu déjà une décision

24 en la matière, la question se posera d'admission de votre rapport

25 d'expertise.

26 Mais indépendamment de ce débat, pour vous, Monsieur, un expert c'est

27 quoi au juste, un expert en automobile, un expert en plomberie, en

28 balistique; qu'est-ce qu'il a comme qualités l'expert ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] De façon générale, je dirais qu'un expert et

2 vous avez cité un certain nombre d'exemples, un exemple -- un expert est

3 quelqu'un qui, de par sa formation et de par ses activités professionnelles

4 ou autres, a acquis une certaine connaissance qui va au-delà du citoyen ou

5 l'homme de la rue, du citoyen moyen dans un domaine donné.

6 M. SESELJ : [interprétation]

7 Q. Alors, ai-je raison de dire, Monsieur Theunens, quand je dis qu'un

8 expert c'est une personne qui dispose des connaissances les plus grandes et

9 de l'expérience la plus grande possible dans un domaine déterminé, est-ce

10 que ma définition de "l'expertise" se trouve être plus complète que celle

11 que vous avez improvisée tout à l'heure ?

12 R. Madame, Messieurs les Juges, je n'ai rien improvisé et c'est la

13 définition proposée par M. Seselj. Moi, j'ai peut-être une autre

14 définition. Si vous allez dans la rue et demandez aux gens de La Haye ce

15 qu'est un expert, ils vous fourniront quatre définitions différentes. Je

16 crois que nous tournons en rond ici. Dans ma première réponse, j'ai

17 simplement indiqué que c'était aux Juges de la Chambre d'en décider et

18 c'est là finalement la réponse définitive que je donne.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il vaudrait, là aussi, mieux passer

20 à autre chose.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais passer à autre chose.

22 M. SESELJ : [interprétation]

23 Q. Avez-vous acquis un titre de master es sciences, Monsieur Theunens ?

24 R. Oui, Madame, Messieurs les Juges. Lorsque j'ai terminé mes études sur

25 l'académie militaire, cela s'appelait "licentiaat" - "licencié, licences"

26 en français - et d'après ce que j'ai compris, compte tenu des mesures mises

27 en œuvre en Europe pour trouver des équivalences entre le diplôme

28 universitaire, je crois que la licence -- je crois que la licence de la

Page 4120

1 municipalité -- de l'académie militaire correspond en fait à une maîtrise.

2 Q. Donc, vous avez acquis un titre de master par l'application de ce que

3 l'on appelle la déclaration de Bologne, n'est-ce pas, Monsieur Theunens ?

4 R. Je l'ai obtenu en raison des études que j'ai terminées avec succès, ce

5 qui s'est passé au-delà je n'ai aucun contrôle là-dessus.

6 Q. Je ne vous accuse pas de la mise en application de cette convention, de

7 cette déclaration de Bologne. Ça porte au détriment à la totalité de

8 l'éducation -- ça soit dit en passant, mais là n'est pas la question. La

9 déclaration de Bologne et grâce à elle a fait que vous avez un rang ou un

10 titre correspondant au titre de master es

11 es sciences. Ai-je raison de le dire ? Dites oui, et que j'aille de

12 l'avant.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bologne, c'est la ville en Italie, et pas Boulogne

14 qui est une ville en France. Et je vois au transcript la référence à une

15 ville française qui serait Boulogne -- Billancourt [phon], mais je pense

16 que c'est Bologne en Italie.

17 M. SESELJ : [interprétation]

18 Q. Ayez l'obligeance de répondre brièvement à ma question ?

19 R. En deux mots, la réponse est "oui."

20 Q. Avant que d'appliquer en Belgique les dispositions de cette déclaration

21 de Bologne - et moi, je prononce bien le nom de la ville, vous avez préparé

22 un mémoire de master en matière de politique internationale, n'est-ce pas ?

23 R. Non, ceci n'est pas tout à fait exact, Madame, Messieurs les Juges.

24 Lorsque je travaillais à Bruxelles, j'ai assisté à des cours du soir, et si

25 vous terminez vos études dans ce cadre, vous êtes autorisé à avoir le titre

26 de Maître es politique -- sciences politiques -- non, maître es politiques

27 internationales, mais ceci n'était pas le titre officiel.

28 Avant de terminer mes études on m'a demandé de venir travailler pour le

Page 4121

1 bureau du Procureur, donc, je n'ai pas terminé les études et je n'ai pas

2 terminé ma thèse. J'espérais le faire mais ce sont mes activités

3 professionnelles qui ont pris le pas là-dessus, mes activités

4 professionnelles à La Haye.

5 Q. Très bien, Monsieur Theunens. Je m'attendais à une brève réponse de

6 votre part, mais votre réponse a été affirmative. Vous avez été empêché de

7 venir un master, entre-temps, vous avez acquis ce niveau grâce à la

8 déclaration de Bologne et puis un point c'est tout. La question est

9 épuisée.

10 Passons à autre chose. Je vais vous dire comment les choses se présentent

11 en Serbie, c'est-à-dire en ex-Yougoslavie et puis vous me direz s'il y a

12 quelque chose d'analogue en Belgique.

13 En Serbie, et dans l'ex-Yougoslavie, un officier qui est sorti de

14 l'académie militaire, il pouvait avoir une promotion régulière jusqu'au

15 grade de capitaine de 1ère classe qui correspond à votre grade de

16 commandant. Et puis par la suite, l'intéressé allait à l'école de l'état-

17 major qui dure deux ans et puis il passait un examen pour devenir

18 commandant. Et puis, il pouvait être promu au grade de sous lieutenant-

19 colonel, colonel, et puis pour certains, il y avait à partir de ce moment-

20 là la possibilité d'aller à ce qu'on appelait l'école de guerre ou l'école

21 de la défense nationale qui elle aussi durait deux ans, et puis on

22 rédigeait un mémoire de général, on passait un examen pour devenir général

23 et puis on devenait docteur es sciences en se présentant, en réussissant

24 cet examen. Donc, pour -- lorsqu'on est commandant c'est au niveau du

25 master, mais lorsqu'on est général c'est au niveau de la thèse du troisième

26 cycle. Est-ce qu'il y a l'équivalent en Belgique ?

27 R. Non, Madame, Messieurs les Juges, parce que les cours de formation

28 auxquels on assiste après l'académie militaire en somme, nous avons un

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1 cours qui dure un an pour les officiers candidats, officiers supérieurs

2 candidats, c'est ce que nous appelons le troisième cycle. C'est en fait le

3 cours de formation pour les officiers hauts gradés, et ces cours-là ne

4 dispensent aucun diplôme universitaire quand bien même il s'agit d'études

5 complémentaires qu'il faut rédiger une thèse et qu'il faut passer des

6 examens. Néanmoins, ceci, en fait, ne permet pas d'obtenir un diplôme

7 universitaire. Premièrement, en Serbie non plus on n'obtient un titre

8 académique mais c'est l'équivalence des grades, des niveaux, donc, le

9 niveau du master correspond au commandant, mais on ne peut pas se prévaloir

10 de ce titre, et le même pour les généraux et la thèse de troisième cycle.

11 Donc, quelqu'un qui a réussi à cet examen pour devenir général, il ne peut

12 pas dire qu'il a soutenu une thèse de troisième cycle mais c'est une

13 question d'équivalence notre système éducatif.

14 Lorsqu'un colonel est sorti de l'école de guerre et lorsqu'il a

15 réussi l'examen pour devenir général, il ne le devient pas automatiquement,

16 il y a d'autres éléments, est-ce qu'il y a des postes à pouvoir, et cetera,

17 mais à partir du moment où il est devenu général de brigade, c'est

18 pratiquement un niveau d'assistant professeur et puis il devient quasiment

19 professeur régulier à partir du moment où il est général de corps d'armée;

20 est-ce que ce système correspond ? Et, sinon, nous allons aller de l'avant.

21 R. Madame, Messieurs les Juges, ceci s'applique peut-être à la Serbie mais

22 ceci ne s'applique pas aux forces armées belges.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Ma question de suivi, M. Seselj semble faire un lien

24 entre les grades et les diplômes, par exemple, en Serbie un général c'est

25 un niveau doctorat. Donc, il voudrait savoir, semble-t-il, si en Belgique

26 ça fonctionne de la même façon. Mais je pense que, dans les pays de l'Union

27 européenne, ça ne fonctionne pas comme ça. On peut être simple lieutenant

28 et avoir un titre universitaire de docteur troisième cycle; vous confirmez

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1 ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président, la seule

3 chose que l'on puisse dire c'est que quelqu'un, en fait, qui fait

4 l'académie militaire et qui termine ses études, aura une maîtrise ou sera

5 ingénieur. Et ce qui se passe après, il y a des gens quelquefois qui

6 préparent leur doctorat deux ans plus tard, mais ceci n'a aucune incidence

7 sur leur grade, à moins qu'il y ait un groupe d'experts dans un domaine

8 donné comme les questions juridiques, par exemple, ou le fait qu'ils aient

9 obtenu un diplôme supplémentaire, un titre universitaire, ceci peut en fait

10 les faire avancer plus rapidement dans leur carrière.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, vous n'avez peut-être

12 pas parfaitement compris ma question, peut-être que l'interprétation

13 n'était pas bonne. Vous savez, moi, j'avais un rang inférieur à l'armée

14 mais j'avais un doctorat. Donc, le doctorat ne vous permet pas d'avoir un

15 grade automatiquement. Mais si je voulais travailler, par exemple, en tant

16 que docteur es sciences dans un service juridique de l'armée, on m'aurait

17 reconnu le grade de colonel. C'est une question de niveau de poste. Comme

18 j'ai jamais cherché à devenir un employé de l'armée, je n'ai pas eu besoin

19 de le demander. Mais de toute évidence le témoin ne me comprend pas. Donc,

20 je vais changer de sujet.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je crois que le témoin a compris et

22 les Juges ont compris également. Dans l'armée belge, il n'y a pas une

23 équivalence entre les grades et les diplômes. On peut être général dans

24 l'armée belge sans avoir de doctorat, comme on peut être lieutenant dans

25 l'armée belge avec un doctorat universitaire.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, Madame, Messieurs les Juges.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est pas la substance de ce qui m'intéresse

28 au premier chef, mais je veux pas perdre de temps là-dessus. Je parle de

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1 niveau et de grade, d'équivalence de niveau. Je ne parle pas du fait

2 d'avoir un doctorat ou pas, enfin.

3 M. SESELJ : [interprétation]

4 Q. Avec vos diplômes et vu votre grade de commandant, c'est-à-dire de

5 capitaine de 1ere classe, est-ce qu'au Belgique, vous auriez pu être appelé à

6 être expert en quelque matière que ce soit ?

7 R. Madame, Messieurs les Juges, avec le grade lieutenant, comme vous

8 pouvez le voir d'après mon curriculum vitae, j'ai été nommé à ce poste pour

9 rapporter des informations à la personne à la tête de l'état-major de la

10 Défense et des officiers de haut rang sur les questions portant sur la

11 situation au Balkan. Donc, il n'y a pas d'équivalent direct entre un rang

12 et une connaissance particulière et surtout pas dans les forces armées à

13 laquelle j'appartenais.

14 Q. Monsieur Theunens, pendant l'interrogatoire principal, vous nous avez

15 expliqué la méthodologie du travail du renseignement, et vous avez exposé

16 cela point par point. Je ne vais pas revenir à cela mais est-ce que vous

17 n'avez jamais travaillé sur les méthodes scientifiques ?

18 R. Madame, Messieurs les Juges, je fournirais deux éléments de réponse à

19 cette question. Tout d'abord, pendant mes études à l'académie militaire,

20 des premiers cours étaient un cours qui portait sur la consultation des

21 sources ainsi que les critiques des sources. Ceci en fait portait sur des

22 questions assez simples, assez mondaines entre guillemets sur comment

23 travailler dans une bibliothèque.

24 Le deuxième point que je souhaite évoquer c'est qu'au moment où j'étais

25 analyste chargé du renseignement, j'étais en contact avec différentes

26 personnes dans différents contextes : des professeurs d'université, des

27 gens qui préparaient un doctorat. Et nous évoquions la question de

28 méthodologie, la méthodologique qu'ils utilisaient, eux, et celle que nous

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1 utilisions, nous, et nous étions parvenus à la conclusion qu'il y avait

2 beaucoup de ressemblance, par exemple, dans le cycle du renseignement et la

3 méthodologie utilisée par les chercheurs, par exemple les personnes qui

4 préparaient un doctorat ou les professeurs universitaires.

5 Q. A en juger d'après votre réponse, j'en arrive à la conclusion que ce

6 n'est pas la méthodologie qui vous a intéressé mais en fait vous avez

7 croisé des gens qui eux étaient versés dans la méthodologie; ce qui me

8 rappelle ma tante Mira qui n'a même pas fait l'école primaire mais qui s'y

9 connaît très bien en médecine car un de ses voisins était médecin. Donc,

10 c'est la méthodologie du travail scientifique qui fait l'objet de ma

11 question. Est-ce que vous faites la différence entre la méthodologie et la

12 méthodique ?

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons plaisir à savoir que vous avez la tante

14 Mira qui faisait la médecine sans être médecin. Mais ce n'est pas ça qu'il

15 a répondu le témoin. Il a dit que la méthodologie dans le renseignement

16 avait une ressemblance avec la méthodologie dans d'autres domaines, comme

17 par exemple, dans l'université ou -- voilà c'est ça qu'il a dit.

18 M. SESELJ : [interprétation]

19 Q. Monsieur Theunens, est-ce que vous avez jamais travaillé sur un projet

20 dans le domaine des sciences militaires qu'il soit scientifique ou

21 technique avant de devenir employé du Tribunal international ?

22 R. Madame, Messieurs les Juges, je ne comprends pas très bien ce que M.

23 Seselj entend par projet d'expert ou projet scientifique.

24 Q. Mais c'est ça le problème, vous ne comprenez pas. Tout un chacun qui

25 travaille dans le domaine des sciences et qui est expert dans un domaine

26 sait très bien de quoi il s'agit lorsqu'on parle de projet scientifique ou

27 de projet d'expert.

28 Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, vous pensez que seulement les

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1 professeurs universitaires peuvent être des experts ? Je trouve cela un peu

2 drôle. Je suis professeur, donc, je pense connaître ce qu'on fait, ce qu'on

3 ne fait pas. Mais quand même on pourrait être expert même sans avoir des

4 connaissances scientifiques, des méthodologies scientifiques et être des

5 experts. Pourquoi pas ?

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne comprends pas comment --

7 Mme LE JUGE LATTANZI : C'est à la Chambre de finir -- de conclure sur cet

8 aspect et donc c'est pas à vous de commenter les réponses que l'expert va

9 donner.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis d'accord avec ce que je viens de dire ma

11 collègue. On peut être expert sans nécessairement être titulaire d'un

12 diplôme, être professeur, prenez par exemple en matière automobile, on va

13 demander à quelqu'un de parler d'une bougie de l'automobile, peut-être que

14 le simple mécanicien peut donner un avis d'expert sur le fonctionnement

15 d'une bougie dans un moteur de voiture. Voilà, donc, il n'est pas

16 nécessaire d'avoir comme vous, la qualité de professeur d'université pour

17 se dire expert. Alors, c'est peut-être ça qui pose problème.

18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis convaincu, Monsieur le Président,

19 Madame le Juge, qu'il n'y a pas de professeur d'université qui serait

20 capable de réparer votre voiture en tant que bon mécanicien. Mais, nous

21 avons ici devant nous un rapport d'expert sur plus de 400 pages, qui

22 normalement aurait dû être réalisé selon la méthodologie du travail

23 scientifique, ce n'est pas la même chose que de réparer une voiture.

24 Un expert doit être celui qui connaît le mieux un domaine donné, enfin,

25 l'un parmi les meilleurs connaisseurs, et pour ce qui est de l'expertise de

26 ce type que nous avons ici doit connaître la méthodologie du travail

27 scientifique. Par la suite dans votre jugement, vous pouvez dire que je

28 n'avais pas raison, mais c'est sur cette base-là que je fonde mon contre-

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1 interrogatoire. Je dois vous montrer que ce témoin ne doit absolument pas

2 être expert.

3 Votre conclusion me donnera tort, peut-être, mais je ne vois pas

4 comment on peut se sortir de cette situation autrement.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, montrez par vos questions en quoi

6 son rapport d'expertise n'a pas suivi une méthode scientifique. En quoi son

7 rapport pèche, présente des lacunes. Qu'est-ce qu'il aurait dû faire qu'il

8 n'a pas fait de votre point de vue. Et par votre question que vous allez

9 peut-être mettre cela en évidence.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Là, je suis parfaitement d'accord, Monsieur le

11 Président.

12 Q. Monsieur Theunens, quelle est la méthode scientifique dont vous vous

13 êtes servi dans la réalisation de ce rapport d'expert. Identifiez-moi la

14 méthode scientifique appliquée.

15 R. Monsieur le Président, comme je l'ai expliqué lors de l'interrogatoire

16 principal, la méthode que j'ai appliquée est la méthode que je connais sous

17 le terme de "cycle de renseignements." Je peux vous expliquer comment cela

18 fonctionne. Donc, en étudiant les différents aspects de cette méthode, j'ai

19 compris que cette méthodologie était également appliquée par certaines

20 universités comme je l'ai déjà expliqué en répondant à des questions

21 antérieures. Cette méthodologie est très proche de la méthodologie

22 appliquée par les gens avec qui j'avais des contacts lorsque je travaillais

23 encore au sein des forces armées comme par exemple les professeurs ou

24 étudiants en doctorat et lié aux questions des Balkans.

25 Q. Par conséquent, Monsieur Theunens, vous ne faites pas la différence,

26 vous ne comprenez pas la différence entre la méthodologie en tant que

27 science et la méthodique en tant que discipline technique. Et votre méthode

28 de cycle de renseignements qui fait partie de la méthodique du

Page 4129

1 renseignement, vous essayez de nous présenter cela comme une approche

2 scientifique, méthodologie. Ai-je raison ?

3 R. Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'avais cru

4 comprendre quelle était la méthodologique que j'ai appliquée dans la

5 rédaction de mon rapport et j'ai répondu en disant que je m'étais fondé sur

6 la méthodologie des cycles de renseignements pour rédiger mon rapport.

7 Q. Votre cycle de renseignements fait partie de votre méthodique du

8 travail, du renseignement tel que prévu dans votre service de

9 renseignements, mais ça n'a rien à avoir avec la méthodologie scientifique.

10 Savez-vous, Monsieur Theunens, ce que c'est que l'épistémologie ?

11 R. Non.

12 Q. C'est la théorie de la connaissance scientifique. Elle se pose la

13 question des bases logiques et de l'accès à la connaissance scientifique,

14 et c'est sur l'épistémologie que se fonde la méthodologie. Si je vous pose

15 cette question, c'est parce que j'ai remarqué que, dans votre rapport

16 d'expert, vous faites une confusion entre l'anthologie, la gnoséologie et

17 l'axiologie, les trois volets du problème. Donc, je dois vous demander ce

18 que c'est que l'anthologie.

19 R. Non, non, Monsieur le Président, je ne sais pas.

20 Q. Savez-vous, Monsieur Theunens ce que c'est que la gnoséologie ?

21 R. Non, Monsieur le Président, je ne sais pas.

22 Q. Monsieur Theunens, est-ce que vous savez ce que c'est que l'axiologie ?

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous êtes en train de faire passer

24 un examen à M. Theunens. En revanche, ce qui était intéressant au départ

25 dans vos questions, c'est savoir si la méthodologie suivie en matière de

26 renseignements, renseignements militaires, peut-être appliquée dans le

27 domaine dont il a été chargé par le bureau du Procureur, à savoir les

28 questions militaires, les questions de rapport entre les volontaires, ce

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1 qui s'est passé sur le terrain et le Parti radical serbe, et cetera. Ça, ça

2 peut être pertinent. Mais là, si vous lui faites passer un examen sur

3 l'anthologie, la gnoséologie et cetera, il va répondre qu'il ne sait pas

4 parce que n'oubliez pas que c'est à l'origine un officier militaire. Ce

5 n'est pas un professeur de l'université.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je lui pose des

7 questions qui correspondent au niveau des connaissances d'un lycéen. Tout

8 élève d'école secondaire en Serbie - et je suppose que c'est le même cas en

9 France - sait que l'anthologie de l'existence, la gnoséologie, la théorie

10 de la connaissance, et l'axiologie, la théorie des valeurs. Mais il ne le

11 sait pas, alors, vous continuez d'insister sur son statut d'expert. Moi,

12 j'essais de démontrer que c'est un ignorant, le Procureur, le présente

13 comme un expert, et vous vous cherchez à éviter mes questions qui le

14 disqualifient.

15 Je l'ai déjà disqualifié en tant qu'expert mais vous pouvez le

16 proclamer ce que vous voulez, je n'y peux rien. Il n'a pas les

17 connaissances qui correspondent au niveau du secondaire.

18 Q. Monsieur Theunens, puisque vous ne savez pas ces choses-là, je suis

19 impuissant, je ne peux pas vous poser des questions scientifiques, des

20 questions qui portent sur la méthodologie du travail scientifique.

21 Toutefois, je peux vous poser des questions concrètes.

22 Comment avez-vous pu écrire dans ce rapport, et c'est page 3 de votre

23 rapport, page 3 en langue serbe. Que l'armée populaire yougoslave se

24 compose du Grand état-major et des trois armes, donc, de la marine, l'air

25 militaire et l'aviation. Comment est-ce que vous avez pu écrire cela ? Vous

26 êtes un expert militaire. Vous êtes un expert de premier ordre.

27 R. Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'ai introduit ce

28 paragraphe dans le résumé de ma déposition, et on retrouve dans mon rapport

Page 4131

1 les renseignements y afférant, y compris dans leur référence juridique. Il

2 est exact qu'il n'y a pas de référence juridique indiquant que le Grand

3 état-major faisait partie de la JNA, mais je voulais simplement résumer les

4 références juridiques, et donc, j'ai rédigé ma conclusion dans ce sens.

5 Q. Monsieur Theunens, est-ce que vous avez estimé que ce rapport serait lu

6 par un ignorant qui n'en sait rien et que vous étiez libre de décrire que

7 l'armée populaire yougoslave était composé du Grand état-major et des trois

8 armées. Mais enfin, comment est-ce que vous avez pu faire figurer le Grand

9 état-major comme partie intégrante comme partie intégrante de l'armée

10 populaire yougoslave ? Sur quelle base juridique ? Qu'est-ce qui vous a

11 permis d'écrire ça ?

12 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] La deuxième partie de ce que nous venons

14 d'entendre est effectivement une question, mais, à mon avis, la première

15 partie, selon laquelle l'expert n'est pas un véritable expert, je pense que

16 c'est inacceptable.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je vous en prie, je n'ai pas dit que

18 l'expert était un idiot, je ne sais pas ce qu'on vous a traduit. J'ai dit :

19 est-ce que vous avez estimé que ce rapport serait lu par quelqu'un qui ne

20 comprend pas cela, par un idiot qui ne comprend pas cela ? Et vous allez

21 essayer de -- je n'ai pas dit que c'est l'expert qui était un idiot. Je

22 vous prie de ne pas mal interpréter intentionnellement ce que je dis. Donc,

23 je peux dire que l'expert est un ignorant, je peux dire qu'il ment sur

24 certains points. Mais je ne vois pas pourquoi je me permettrais en

25 "gentleman" en Vojvoda chetnik de me départir de mes manières

26 chevaleresques ?

27 Ne riez pas, ne riez pas, Monsieur Marcussen, parce que le rire est

28 contagieux.

Page 4132

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

2 Juges, je vais essayer de répondre à la première partie de la question.

3 En page 19 de la version anglaise de mon rapport, première partie, j'ai un

4 titre : "Grand état-major des forces de l'armée de la RSFY," et j'ai dit

5 que le Grand état-major faisait partie de l'armée yougoslave du concept de

6 Défense populaire généralisée et impliquait un certain nombre de missions.

7 Et la référence sur laquelle je me suis appuyé pour dire, cela c'est le

8 document 65 ter 496, à savoir le décret présidentiel de la RSFY numéro 26

9 datant du mois d'août 1997 [comme interprété]. C'est par ce décret que le

10 Grand quartier général de la JNA est intégré au Grand quartier général des

11 forces armées de la RSFY, ce que l'on trouve expliquer plus avant dans le

12 chapitre relatif au plan de réorganisation que vous trouverez en page 26,

13 de la version anglaise, première partie de mon rapport. Et c'est par ce

14 décret que le Grand quartier général devient partie intégrante des forces

15 armées de la RSFY.

16 M. SESELJ : [interprétation]

17 Q. Alors, je fais observer que vous aviez en votre disposition un document

18 qui date de 1997, lorsqu'on a transformé le Grand état-major de la JNA en

19 Grand état-major des forces armées, et en dépit de cela, dans la partie

20 d'introduction de votre rapport et dans le résumé que j'ai reçu il y a

21 quelques jours, vous avez dit que l'armée populaire yougoslave se compose

22 du Grand état-major et de trois armées. Alors, comment est-ce possible ?

23 Est-ce que ce sont différents auteurs, qui ont rédigé cela donc il y en a

24 qui écrit une chose, et l'autre qui écrit une autre ? Est-ce qu'on ne

25 dirait pas que c'est schizophrène, comme nature d'un rapport d'expert, on

26 trouve d'une part des choses d'autre part d'autres choses ? Ou ce sont

27 plusieurs auteurs qui ont rédigé cela ? Et vous ne saviez pas ce que fait

28 l'autre ? De quoi s'agit-il, Monsieur Theunens ?

Page 4133

1 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, ce rapport a été

2 rédigé par moi et uniquement par moi, et il est vrai qu'à première vue, il

3 y a une différence entre ce que je dis dans le résumé d'une part et ce que

4 je dis dans le corps du rapport, d'autre part, mais ma façon de concevoir

5 le Grand quartier général c'est que même quand il a été rebaptisé pour ne

6 plus être le "Grand quartier général de la JNA" mais devenir le "Grand

7 quartier général des forces armées de la RSFY," ceci n'a pas eu d'impact

8 sur son rôle, hormis, bien sûr, que ces attributions sont devenus élargies

9 car elles englobaient désormais la Défense territoriale.

10 Donc, si M. Seselj veut interpréter de sa façon, c'est son affaire, mais

11 j'espère avoir apporté les explications nécessaires à la Chambre sur ce

12 point.

13 Q. Monsieur Theunens, non, je ne fais pas un grand cas, mais le Grand

14 état-major des forces armées se voyait subordonné la JNA et la Défense

15 territoriale; c'est bien cela, dans son ensemble -- dans leur ensemble la

16 JNA et la Défense territoriale; c'est bien ça ?

17 R. En effet, mais il ne s'agissait pas d'une subordination, oui, c'est

18 exact. Le Grand état-major de la JNA, lorsqu'il a été rebaptisé Grand état-

19 major des forces armées de la RSFY, est devenu l'autorité compétente de la

20 JNA et de la Défense territoriale, et il faut préciser à ce sujet que le

21 Grand état-major n'a pas de rôle de commandement. Il ne peut que

22 transmettre les ordres émanant du secrétariat à la Défense généralisée.

23 Q. Dans la structure du commandement des forces armées, c'est la

24 présidence de la RSFY qui est au sommet, puis le secrétariat chargé de la

25 Défense populaire, puis le Grand état-major des forces armées; c'est bien

26 ça ? Ai-je raison ?

27 R. C'est exact, Monsieur le Président.

28 Q. Et le Grand état-major, au quartier général, en tant que troisième

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1 niveau, il a sous son commandement la JNA et la Défense territoriale à

2 titre égal; c'est bien ça ?

3 R. Oui. A partir de 1997 en effet.

4 Q. Pourquoi avez-vous dit que le Grand état-major est au sein de la JNA

5 puisqu'il est au-dessus de la JNA ? Je voudrais savoir pourquoi cela figure

6 dans votre rapport ?

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. -- être un peu perdu parce qu'on parle

8 après 1997, nous, ce qui nous intéresse c'est la situation en 1990, 1991,

9 1992, 1993. 1997 c'est -- ça n'a pour nous aucun intérêt. Alors, ce qui

10 compte c'est la chaîne de commandement qui décide au sommet et comment

11 l'ordre est transmis, vous pouvez nous -- et période de 1990, 1991, 1992,

12 1993.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de 1987, et

14 non pas de 1997. C'est depuis 1987, qu'il en est ainsi, que la situation

15 est telle. Donc, il n'y a pas de confusion, c'est peut-être

16 l'interprétation qui pose problème.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, alors, à partir de 1987, quelle est pour

18 vous la chaîne de commandement ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, à partir du haut du

20 sommet, c'est-à-dire du niveau politique, on passe au commandement Suprême,

21 qui se compose de la présidence de la RSFY, sous la direction du président

22 de la présidence, on passe par le Grand quartier général du commandement --

23 on passe par l'état-major du commandement Suprême, qui se compose du

24 secrétariat à la Défense populaire généralisée, aider par les membres du

25 secrétariat, ainsi que le chef du Grand quartier général, donc, qui à

26 l'aide du Grand quartier général et on descend vers les unités

27 opérationnelles. En termes clairs, ceci signifie que le secrétariat fédéral

28 à la Défense populaire généralisée a le droit d'émettre des ordres

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1 directement à destination des régions militaires, donc, il n'est pas dans

2 l'obligation de passer par le chef du Grand quartier général, même s'il

3 existe des exemples d'ordres qui ont été transmis par le secrétariat

4 fédéral à la Défense populaire généralisée, par l'intermédiaire du chef du

5 Grand quartier général à destination des unités opérationnelles, et au

6 niveau opérationnel, les ordres venaient donc du plus haut niveau de temps

7 de paix.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : -- très important. Si je comprends bien, et si je

9 fais une erreur, corrigez-moi.

10 Le commandement Suprême est constitué de la présidence avec son président,

11 et il est assisté d'un état-major de la présidence ou le secrétariat de la

12 Défense joue un rôle, et le secrétariat de la Défense transmet des ordres

13 aux unités sans obligatoirement passer par le chef du Grand quartier

14 général; c'est bien cela ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président, et c'est

16 différent de ce qui existe dans certains pays occidentaux.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

18 Et alors, pour rejoindre les préoccupations de M. Seselj, la JNA et la

19 Défense territoriale, sont situées au niveau inférieur. Donc, eux, ils

20 reçoivent des ordres du secrétariat de la Défense --

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais la

22 modification intervenue en 1987 réside en ce que le chef du Grand quartier

23 général quand il reçoit des ordres du secrétariat fédéral à la Défense

24 populaire est autorisé à les transmettre directement à la JNA et à la

25 Défense territoriale alors que par le passé la ligne directe établisse un

26 contact entre le secrétariat à la défense et la Défense territoriale sans

27 passer par le niveau du chef du Grand quartier général car avant 1987 il

28 n'était responsable que devant la JNA, alors qu'après 1987, le chef du

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1 Grand quartier général --

2 M. LE JUGE ANTONETTI : -- doit retenir une chose c'est qu'à partir de 1987,

3 les ordres qui sont transmis à la Défense territoriale passent par le chef

4 du Grand quartier général, ce qui n'était pas le cas avant.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président, et il y a

6 autre chose c'est que la Défense territoriale devient subordonnée à ce

7 qu'il est convenu d'appeler les unités de niveau opérationnel stratégique

8 c'est-à-dire les régions militaires, donc avant c'était à un niveau

9 parallèle.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- il fallait -- il fallait bien préciser cela parce

11 que, sinon, on risquait d'être totalement perdu.

12 Il va falloir faire la pause donc on va faire 20 minutes de pause.

13 --- L'audience est suspendue à 11 heures 55.

14 --- L'audience est reprise à 12 heures 20.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà, alors, l'audience est reprise, nous

16 terminerons à 1 heures et quart.

17 Je voudrais indiquer à M. Seselj qu'il a utilisé pour le moment une heure

18 et 17 minutes.

19 Je voudrais également indiquer que demain l'audience commencera à 9 heures

20 et non pas à 8 heures 30 parce qu'il n'y aura pas pour mes autres collègues

21 le procès Delic, qui n'aura pas lieu donc demain après-midi, donc, nous

22 commencerons à 9 heures.

23 En revanche, jeudi, nous commencerons à 8 heures 30, et nous irons donc

24 jusqu'à 13 heures 15, jeudi.

25 J'informe également que demain la Juge Lattanzi ne sera pas présente ni

26 demain pour des raisons donc professionnelles elle ne sera pas là demain,

27 mais nous serons, demain et après demain. Et donc, nous serons tous les

28 deux présents.

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1 Voilà ce que je voulais indiquer à titre liminaire.

2 Monsieur Seselj, continuez.

3 M. SESELJ : [interprétation]

4 Q. Monsieur Theunens, il faudrait que vous ayez connaissance du fait que

5 la Yougoslavie, vers la fin des années 1960, a développé une conception

6 spécifique, une doctrine et un système de Défense populaire générale ici.

7 Vous le saviez, n'est-ce pas ?

8 R. J'en ai connaissance et j'en parle dans mon rapport, dans la version en

9 anglais. Ça se trouve à la page 4. J'explique que la doctrine de la Défense

10 populaire généralisée a été publiée en 1969 c'était la doctrine militaire

11 officielle.

12 Q. Seriez-vous à même, Monsieur Theunens, en quelques mots seulement, de

13 nous dire ce que constituait en substance, la conception de la Défense

14 populaire généralisée. En quelques mots, comment expliqueriez-vous cela à

15 quelqu'un qui n'en sait rien ?

16 R. Cela signifie que toutes les ressources humaines et matérielles sont

17 utilisées à la Défense du pays. Je fais référence, par exemple, à un manuel

18 pour le commandement, pour les officiers, qui date de 1976 quand j'explique

19 la signification de la "Défense populaire généralisée."

20 Q. Seriez-vous d'accord pour dire qu'en substance, s'agissant de ce

21 concept de Défense populaire généralisée, c'est le concept marxiste du

22 peuple armé ?

23 R. Je n'ai pas étudié la Défense populaire généralisée dans cette

24 perspective, dans la perspective marxiste pour voir s'il y avait un

25 rapprochement qu'on pouvait faire avec le concept marxiste de la Défense.

26 Donc, je ne peux pas répondre.

27 Q. Mais, Monsieur Theunens, vous avez pu retrouver cela dans une

28 littérature assez ample où l'on explique la substance de cette Défense

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1 populaire généralisée. Il n'y avait pas à étudier Marx et Engels pour cela.

2 Et vous auriez pu vous pencher sur une littérature assez importante pour ce

3 qui est de vous procurer ces connaissances-là.

4 Mais, en quelques mots, comment procéderiez-vous à la définition de

5 cette doctrine de la Défense populaire généralisée ?

6 R. Il me semble que j'ai déjà répondu à la question. Cette doctrine, elle

7 signifie que toutes les ressources disponibles, les ressources humaines

8 aussi bien que matérielles, toutes ces ressources sont utilisées aux fins

9 de Défense, c'est-à-dire pour lutter contre un agresseur.

10 Q. Monsieur Theunens, ça vous l'avez dit quand vous avez répondu à ma

11 question relative à la conception, mais la "conception" et la "doctrine" ce

12 n'est pas la même chose. Vous me répondez avec la même réponse pour ce qui

13 est de la doctrine. Vous ne savez donc ni ce que c'est que la conception,

14 ni le concept, ni la doctrine en substance. Si je vous dis que la doctrine

15 de la Défense populaire généralisée c'est une "doctrine" de conduite d'une

16 guerre de Défense nationale généralisée. Est-ce que vous êtes d'accord avec

17 moi pour dire que c'est cela la substance ?

18 R. Pour moi "doctrine" -- la "doctrine" militaire, ce sont les principes

19 directeurs dont s'inspirent les forces armées pour mettre en œuvre des

20 objectifs politiques. Je crois que lorsque M. Seselj répond -- enfin, ici

21 M. Seselj répond lui-même à sa question. Mais enfin, c'est une question de

22 traduction, je ne sais pas.

23 Mme LE JUGE LATTANZI : J'aimerais savoir dans ce contexte dans lequel vous

24 parlez, Monsieur; est-ce que c'est une question de Défense contre un

25 agresseur externe seulement ou aussi contre un ennemi interne ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, on insiste plutôt sur l'ennemi qui

27 vient de l'extérieur.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la doctrine que M. Seselj vous demande de

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1 définir ou de confirmer son point de vue, il y a le mot "nationale" --

2 "guerre de Défense nationale," donc, il y a le mot "national." Et pour

3 rejoindre la question de ma collègue, si la nation est menacée à

4 l'intérieur, est-ce que cette doctrine peut s'appliquer ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] La doctrine insiste sur le fait que l'on

6 implique toutes les nations, toutes les nationalités de la République

7 socialiste fédérale de Yougoslavie et la JNA est une force armée fédérale

8 qui recouvre toutes les républiques de la RSFY, représente toutes ces

9 républiques, et la Défense territoriale, quant à elle, est établie et

10 organisée par république.

11 Comme je l'ai dit en répondant à la question de M. Le Juge Lattanzi, les

12 documents que j'ai examinés, par exemple, les manuels militaires, insistent

13 tous sur la menace venant de l'extérieur. Mais, au sein des forces de la

14 RSFY, il y a des organes que, par exemple, l'administration chargée de la

15 Sécurité qui travaille essentiellement sur les menaces internes, et aussi

16 bien internes qu'étrangers, contre les forces armées. Et puis au sein du

17 ministère de l'Intérieur, vous avez des organes, des services qui

18 travaillent sur les menaces qui peuvent venir de l'intérieur, qui peuvent

19 menacer la stabilité et l'ordre du pays.

20 Comme je l'ait dit, la doctrine, son accent est mis essentiellement

21 sur l'utilisation de ces forces armées, donc, face à une menace externe

22 lors de l'invasion du pays par des forces étrangères. Il est question d'un

23 plan de type S-1 ou S-2, suivant que la menace vienne ou non d'un pays du -

24 - de Varsovie. Ensuite, on a parlé également d'une menace venant d'un pays

25 de l'OTAN. En tout cas, c'était les orientations qui guidaient la mise en

26 place de l'organisation des forces armées pour établir un plan défensif.

27 M. LE JUGE ANTONETTI : La question nationale est peut-être à l'ordre

28 du jour.

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1 Avant les événements de Vukovar ou de Slavonie, la question nationale

2 c'est la Yougoslavie dans toutes ses composantes, diverses et nationales.

3 Les Musulmans, les Croates, et cetera, c'est la Yougoslavie. Mais si un des

4 composants a des tendances scissionnistes, est-ce qu'à ce moment-là, la

5 structure fédérale peut intervenir pour garantir le concept national, mais

6 au sein

7 yougoslave ? C'est peut-être compliqué mais vous avez peut-être une

8 réponse.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui et c'est exactement ce qu'on peut

10 constater quand on regarde ce qui se passe au début de l'année 1991. Le

11 secrétariat fédéral à la Défense nationale et son secrétaire Kadijevic

12 estiment que la présidence, c'est-à-dire son commandement Suprême, doit lui

13 donner des instructions pour agir contre les forces scissionnistes en

14 Slovénie et plus tard en Croatie.

15 Par exemple, au cours de la session de la présidence de janvier et de

16 mars 1991, Kadijevic a demandé au commandement Suprême, cas aux membres de

17 la présidence, de décréter l'état d'urgence, ceci afin de remplir les

18 conditions juridiques permettant aux forces de la RSFY ou ce qu'il en reste

19 d'intervenir face à cette menace interne.

20 Mais, tout d'abord quand j'ai répondu à la question, je me

21 concentrais sur ce que j'avais vu dans les manuels militaires, et d'après

22 ce que j'ai vu dans ces manuels militaires, il n'est pas question de la

23 lutte contre un ennemi interne, à l'exception du manuel de l'administration

24 chargée de la sécurité.

25 M. SESELJ : [interprétation]

26 Q. Monsieur Theunens, savez-vous quelle est la différence entre un concept

27 et une doctrine ? Je crois que j'ai l'impression que vous confondez ces

28 deux notions.

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1 R. Je connais la différence entre la "notion de concept" et de "doctrine."

2 Mais, au sujet -- plutôt quand M. Seselj a posé la question du "concept,"

3 je l'ai renvoyé à mon rapport où j'explique ce que signifie la doctrine de

4 Défense populaire généralisée.

5 Q. Le problème, justement, Monsieur Theunens, c'est le fait de confondre

6 le "concept" et la "doctrine." Vous apportez la même réponse lorsque je

7 vous pose une question au sujet du "concept" et lorsque je vous pose une

8 question au sujet de la "doctrine."

9 Mais il n'y en a pas une seule à nous satisfaire. Mais répondez-moi à une

10 nouvelle question : dans quel cas de figure contre un ennemi interne, en

11 application du système juridique de Yougoslavie, il est autorisé, il est

12 permis d'avoir recours aux forces armées. Répondez brièvement, je vous

13 prie.

14 R. Est-ce que votre question pose sur une question d'ordre juridique, ou

15 est-ce que vous me demandez ce que pourrait faire la présidence, c'est-à-

16 dire le commandement Suprême et comme ce serait mis en œuvre ?

17 Q. C'est vous le prétendu expert, Monsieur Theunens, je ne veux pas savoir

18 ce que le président de la présidence doit faire en tant que commandement

19 Suprême. Moi, je veux que vous me répondiez brièvement, comme vous avez

20 déjà dit que les forces armées sont en premier lieu tournées vers

21 l'opposition à un ennemi extérieur donc vers un agresseur potentiel. Donc,

22 quel est le cas les forces armées peuvent être utilisées contre des ennemis

23 internes ? Répondez-moi brièvement en deux ou trois mots. Si vous le savez,

24 si vous ne savez pas, on va de l'avant.

25 R. L'armée fait ce que lui dire de faire le commandement Suprême, c'est-à-

26 dire la présidence. Du point de vue juridique, nous avons vu ce qui figure

27 à l'article 214 de la constitution que la mission des forces de la RSFY

28 couvre également le maintien de l'intégrité territoriale de la RSFY ainsi

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1 que de l'ordre social. Si bien qu'en cas de menaces pesant sur l'ordre

2 social ou sur l'intégrité territoriale, menaces venant de l'intérieur et

3 qui d'après le commandement Suprême, c'est-à-dire la présidence, justifie

4 l'intervention des forces armées, à ce moment-là, toutes les conditions

5 sont réunies pour permettre l'emploi des forces armées afin de réagir à

6 cette menace.

7 Q. Votre réponse est assez satisfaisante, il y a un petit complément à

8 apporter. Au cas où il y aurait tentative de changer l'ordre

9 constitutionnel par la force, la tentative doit être de faire de force pour

10 que le commandant puisse se servir des forces armées.

11 Donc, pas toute tentative parce que nous avions un mouvement assez

12 développé du point de vue de la dissidence dans les années 80. J'ai été

13 plutôt en vue dans ce mouvement. Et nous n'avons pas voulu modifier l'ordre

14 constitutionnel par la force mais par des moyens pacifiques, donc, dans ce

15 cas de figure, il n'a pas été prévu d'utiliser les forces armées, donc, il

16 faut qu'il y ait une tentative de le faire par la force pour que les forces

17 armées soient utilisées. Ai-je raison de dire cela ou pas ?

18 R. Oui, Madame, Messieurs les Juges. Je souhaite simplement apporter une

19 correction au compte rendu, à la page 85, ligne 25. On devrait lire -- ça

20 devrait être "l'article 240," et non pas "l'article 214" de la constitution

21 de la RSFY de 1974.

22 Q. Monsieur Theunens, qu'englobait le système de la défense populaire

23 générale ici ? Quelles étaient les composantes dudit système ?

24 R. Madame, Messieurs les Juges, en sus des forces armées de la RSFY, il

25 y avait la JNA et la TO, mais il y avait également une structure connue

26 sous le nom de "Défense civile" qui avait été organisée par les

27 républiques. Il y avait également un service de contrôle ou de surveillance

28 ainsi que d'autres organes que je n'ai pas cités de façon plus explicite.

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1 Q. Ça vous ne le savez pas, Monsieur Theunens. Le système de Défense

2 populaire généralisée englobait tous les intervenants sociaux ainsi que

3 tous les individus qui sont majeurs, donc, le système était -- englobait le

4 tout : toutes les instances de l'Etat, toutes les institutions de la

5 société, les organisations sociales et politiques, et tous les individus

6 étaient des intervenants agissant au sein de ce système de Défense

7 populaire généralisée, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, Madame, Messieurs les Juges. J'avais mal compris la question. Je

9 vais revenir à mon rapport et je déclare à la page 4 de l'anglais que

10 l'ensemble de la population était partie prenante selon la doctrine de la

11 Défense populaire généralisée afin de défendre le pays.

12 Q. Monsieur Theunens, savez-vous nous dire quelles étaient les

13 organisations politiques qui existaient dans cette Yougoslavie communiste

14 avant qu'il n'y soit mis en place d'un système

15 pluripartite ?

16 R. Madame, Messieurs les Juges, j'ai un vague souvenir d'un certain nombre

17 d'organisations qui existaient mais je ne les ai pas abordées dans mon

18 rapport parce que j'estimais que ces dernières n'étaient pas pertinentes

19 pour le sujet que j'étudiais.

20 Q. Mais c'était une chose plutôt importante et pertinente, Monsieur

21 Theunens, parce qu'il y avait la Ligue des Communistes, il y avait

22 l'alliance socialiste du peuple travailleur qui était une espèce de front

23 populaire puis il y avait l'alliance -- la Ligue de la jeunesse socialiste

24 puis l'alliance des étudiants, puis l'Union des anciens combattants des

25 vétérans de guerre, puis il y avait une Confédération des syndicats qui

26 avaient certaines caractéristiques d'organisation politique en sus de la

27 lutte pour les droits syndiqués -- syndicaux. Donc, tout ça c'étaient des

28 organisations sociopolitiques et chacune de ces organisations avait sa

Page 4145

1 place et son rôle au sein de ce système de Défense populaire généralisée,

2 n'est-ce pas ?

3 R. Madame, Messieurs les Juges, je n'ai ni analysé, ni étudié le rôle joué

4 par ces différentes organisations dans mon rapport. Je ne suis pas en

5 mesure de fournir davantage d'éléments là-dessus tels que vient de

6 l'indiquer M. Seselj.

7 Q. Vous auriez dû le faire, Monsieur Theunens, parce qu'à l'interrogatoire

8 principal, le Juge Antonetti a attiré votre attention sur les dispositions

9 de la loi portant -- pour la Défense populaire généralisée parlant du rôle

10 de la Ligue des Communistes dans ce système de la Défense populaire

11 généralisée et qui plus est dans la sphère du commandement des forces

12 armées, n'est-ce pas ? Alors, la Ligue des Communistes avait un rôle

13 déterminé à jouer en sa qualité d'organisation politique ?

14 R. Madame, Messieurs les Juges, je n'ai pas rencontré de documents, et

15 lorsque j'ai analysé les documents qui ont été inclus dans mon rapport, je

16 n'ai pas vu des documents qui indiquaient que la Ligue des Communistes

17 intervenait d'une manière ou d'une autre, ou qu'ils intervenaient dans les

18 questions opérationnelles ou dans les questions de commandement ou de

19 contrôle, et ce n'était pas pertinent dans le cadre de mes recherches.

20 Q. La loi stipule de façon précise quel est le rôle de la Ligue des

21 Communistes au sein des unités militaires. Saviez-vous que tout Unité de la

22 JNA et tout organisation de la Défense territoriale avaient sa propre

23 cellule de la Ligue des Communistes ? Le saviez-vous ou pas ?

24 R. Madame, Messieurs les Juges, comme nous l'avons dit pendant

25 l'interrogatoire principal, je suis au courant de l'existence d'organes

26 chargés de l'Orientation police militaire et chargé des Questions de morale

27 au niveau des différents états-majors et commandements de la JNA et des

28 Unités de la TO, et le rôle joué par ces organes.

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1 Q. Devant un système juridique où se trouve être défini le rôle des

2 organisations politiques s'agissant du domaine de la défense du pays. Le

3 système vient à être modifié pour devenir -- pour se muer d'un système mono

4 partite vers un système pluripartite, mais toutes les dispositions légales

5 restent en place pour ce qui est des activités des organisations politiques

6 au sein de ces unités. Alors, pourquoi le Parti radical serbe lorsqu'il a

7 été créé, février 1991, officiellement, n'aurait pas donc une fonction

8 d'intervenant officiel au sein de la défense du pays ? Et cela aurait été

9 l'un des intervenants puisqu'il n'y a plus de Ligue des Communistes. C'est

10 un système pluripartite désormais. Donc, il ne serait pas donc illogique de

11 voir, à l'époque, il y avait un parti; maintenant, il y a plusieurs partis,

12 mais le rôle des partis dans la défense du pays, ça a été inchangé, ou

13 avez-vous des preuves disant qu'au contraire cela a été modifié ?

14 R. Non, Madame, Messieurs les Juges, je souhaite simplement redire que les

15 documents portant sur les règlements et les manuels, ainsi que les

16 différents documents portant sur des activités opérationnelles, les ordres

17 et les rapports, je les ai abordés dans mon rapport et je les ai examinés

18 et les rapports ne disent rien à propos des rôles joués par les partis

19 politiques sur les questions pertinentes dans mon rapport.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : -- expert, en écoutant les questions et réponses, je

21 me demande si, dans l'approche que vous avez menée au point de vue

22 méthodologie dans votre rapport d'expertise, est-ce que vous n'avez pas vu

23 les problèmes qui se sont déroulés avec les yeux d'un Européen de quelqu'un

24 qui n'était pas derrière le fameux rideau qui pouvait exister et que vous

25 avez appliqué sur ce propre fonctionnement des conceptions européennes,

26 allemandes, italiennes, françaises, belges ou tout ce que voulez sans

27 prendre en compte cette dimension politique du fait que la Yougoslavie

28 appartenait quand même à un bloc qui n'était pas le bloc occidental, et

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1 qu'il y avait un fonctionnement interne politique avec le rôle de la Ligue

2 communiste qui disparaît mais qui est remplacée par d'autres partis comme

3 le Parti radical serbe, et qu'à ce moment-là, la doctrine ou le concept de

4 la Défense nationale va être vue avec le prisme -- par le prisme qui

5 existait avant la dissolution de la Yougoslavie.

6 Est-ce que vous ne vous êtes pas posé cette question dans votre

7 travail parce que les partis politiques belges, je présume qu'en situation

8 de conflit, ils auraient certainement joué un rôle en votant une loi, et

9 cetera, mais peut-être pas le même rôle que dans l'ex-Yougoslavie où les

10 partis politiques jouaient un rôle. Il y avait -- je vous ai même posé la

11 question : y avait-il un commissaire politique ? Et vous avez répondu :

12 oui, d'une certaine façon, par le fait que, dans les unités, il y avait

13 quelqu'un qui était chargé de la morale, et cetera. Et ce qui peut peut-

14 être manqué à votre rapport c'est le fait que ce fonctionnement qui

15 existait sous Tito n'a pas été appréhendé à sa juste mesure.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je ne pense

17 pas avoir appliqué un point de vue occidental aux difficultés que je devais

18 -- que j'ai rencontrées au cours de mes analyses, en fait, surtout en ce

19 qui concerne une partie de mon rapport. La doctrine communiste, en tout

20 cas, celle qui était interprétée par Tito, ici joue un rôle essentiel au

21 niveau de la défense et des forces armées sur le fonctionnement des forces

22 armées, et le rôle qu'il joue. Et je ne souhaite en fait apporter une

23 correction par rapport à ce que j'ai dit lors du premier jour de ma

24 déposition, en fait l'ex-Yougoslavie n'a jamais fait partie du pacte de

25 Varsovie.

26 Et il est vrai qu'à la fin des années 80, nous constatons qu'il a

27 d'autres partis politiques qui sont créés et il y a des élections

28 multipartites -- pluripartites qui ont lieu mais après avoir analysé un

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1 nombre important de documents, je n'ai rencontré aucun document qui

2 laisserait entendre que ces autres partis politiques sont en droit de jouer

3 un rôle au sein des forces armées ou si aucun de ces partis politiques en

4 fait assume ce rôle, à savoir d'orientation ou morale ou idéologique, tel

5 que ce rôle est joué par la Ligue des Communistes, c'est bien le contraire

6 en fait. Les documents qui émanent en fait des organes chargés de la

7 Sécurité ainsi que d'autres organes, je veux parler de l'administration,

8 des questions sécuritaires, en fait, surveillent les partis politiques de

9 très près surtout les partis politiques qui font surface dans les autres

10 républiques de la Yougoslavie et sont très soupçonneux à l'égard de ces

11 partis politiques surtout lorsque ces derniers tentent d'infiltrer les

12 forces armées.

13 Et donc, pour en revenir à la question essentielle de ce rapport, à

14 savoir le rôle des volontaires, la législation qui était en vigueur à

15 l'époque communiste n'a pas évoqué le rôle joué par les partis politiques.

16 En fait, la diminution des ordres adoptés entre le mois d'août 1991 et

17 septembre 1991 ne fait état d'aucun parti politique que ce soit au niveau

18 du recrutement ou de la formation ou l'entraînement des volontaires. Donc,

19 si ces partis politiques avaient eu le droit de jouer un quelconque rôle,

20 ceci aurait été traduit dans des textes de façon officielle; à ce moment-

21 là, la Ligue des Communistes aurait été autorisée à participer à la

22 libération, la mise en œuvre en fait des doctrines de défense. En fait,

23 ceci aurait été consigné par écrit quelque part mais il n'y a pas de trace

24 de ce genre. C'est tout à fait le contraire.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans une approche marxiste de la Défense

26 populaire généralisée, tout le monde participe, les syndicats, les

27 associations, les partis politiques, et cetera. La meilleure preuve en est,

28 vous avez cité l'article 240 de la constitution de 1974, le dernier

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1 paragraphe où il est indiqué que : "Tout citoyen qui prend part à la

2 résistance contre l'agression de son pays est membre des forces armées." Ça

3 veut dire que tout citoyen, y compris les volontaires qui sont des

4 citoyens, ils sont automatiquement membres des forces armées. C'est

5 constitutionnel. Et, de ce fait, les partis politiques peuvent aussi entrer

6 dans cette notion de défense généralisée, mais il semble que vous n'en

7 tirez pas les mêmes conséquences à votre niveau.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, pour les partis

9 politiques, si vous voulez parler des différents partis politiques qui ont

10 fait surface une fois la mise en œuvre d'un système pluripartite, je dois

11 vous dire que ces partis politiques en tant que tel avaient, en fait, leurs

12 idéologies et leurs programmes politiques mais n'ont pas joué un rôle de

13 jure au niveau de la Défense du pays.

14 Et il est clair que, dans la situation qui précède celle d'un système

15 pluripartite au cours duquel les différents -- ou qui existait au sein de

16 différents syndicats, de la RSFY, les mouvements politiques et tout le

17 monde partageait la même idéologie qui était l'interprétation de Tito, de

18 l'idéologie communiste ou appeler ça l'idéologie socialiste, si vous

19 voulez. Ce qui n'est pas le cas lorsque nous avons affaire à un système

20 pluripartite. Et, je crois que c'est la question en fait qui se pose là-

21 dessus.

22 En fait, il ne s'agit pas d'un point de vue d'occidental, et ceci

23 s'applique à toutes les forces armées.

24 On ne peut pas avoir un système de défense ou chaque partie a sa

25 propre composante ou fait partie de la défense, par exemple, le parti bleu

26 a une partie, le parti jaune a une partie, parce qu'à ce moment-là, on

27 enfreindrait les principes de sécurité, de commandement et de contrôle.

28 C'est quelque chose que nous avons abordé un peu plus tôt, l'analogie

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1 entre la Défense populaire généralisée et la guerre des guérilleros sans

2 faire, en tout cas, la doctrine qui est celle de Mao, qui sous-tend ce

3 genre de régime; et pour Mao, l'idéologie est la composante-clé, mais il

4 n'y a qu'une seule idéologie, c'est l'idéologie communiste ou socialiste

5 ici, si vous voulez. Et donc, quel que soit le parti politique en question

6 pour autant qu'il partage la même idéologie, quelle que soit l'organisation

7 pour autant qu'il partage la même idéologie, il pourrait jouer un rôle au

8 niveau de la défense du pays.

9 Mais lorsqu'on a d'autres idéologies comme les idéologies pas sur la

10 liste qui vont à l'encontre des idées maîtresses des forces armées de la

11 RSFY, à ce moment-là, l'unité et la fraternité, il ne peut pas y avoir de

12 rôle au niveau de la défense du pays, en tout cas, c'est mon interprétation

13 et ceci se fonde sur les documents que j'ai étudiés.

14 Sinon, si vous regardez de l'autre côté, les autorités de la RSFY

15 c'est quelque chose, les autorités auraient tout intérêt à recueillir

16 autant de volontaires politiques que possible, si les partis politiques

17 avaient eu le droit de jouer un rôle au niveau de la défense du pays. Mais

18 Kadijevic, les autres ont joué un rôle très négatif. Ils tentaient en fait

19 d'inscrire les volontaires dans leur loi, ils n'ont pas d'autres moyens,

20 c'est leur réponse à la mobilisation, une réponse assez faible. Ils doivent

21 utiliser ces gens non pas parce qu'ils veulent en fait les utiliser dans un

22 système de défense mais parce qu'il manque d'effectifs.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : -- réponse très longue. On va redonner

24 --

25 Mme LE JUGE LATTANZI : Je suis un peu perdue. Peut-être je me trompe, mais

26 je trouve tout cela très, très pertinent avec nos problèmes, avec nos actes

27 d'accusation et le rapport de l'expert, qui n'avait pas pour tâche de voir,

28 je pense, si c'était légitime ou non là, participation des volontaires au

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1 titre de la défense généralisée selon les lois yougoslaves. La question,

2 selon moi, c'était tout autre. Donc, je suis dans la dernière partie de

3 notre audience ici, je me suis un peu perdue, je dois dire.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Témoin.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est vrai que nous allons au-delà en fait de

6 la portée même de mon rapport. Je comprends qu'il y a une préoccupation de

7 la part des Juges de la Chambre parce qu'en réalité, cela n'était pas

8 gênant que les partis politiques mobilisaient leurs propres volontaires,

9 parce que ceci n'avait pas été prévu par la doctrine de la Défense

10 populaire généralisée. La constitution prévoyait que tous les citoyens qui

11 participaient armés ou non à une agression seront considérés comme étant

12 des membres des forces armées.

13 Mais ce que j'ai essayé de mettre en exergue dans la réponse que j'ai

14 donnée, c'est que toutes ces lois et toute la doctrine existait et a été

15 adoptée au moment où il n'y avait qu'une seule idéologie, à savoir

16 l'idéologie communiste ou l'interprétation communiste de Tito donc une

17 idéologie socialiste. Il y avait beaucoup d'organisations qui étaient

18 organisées de façon collective, les étudiants, et cetera, mais tout le

19 monde partageait la même doctrine. Ce n'était pas un système plus réparti.

20 Et le problème se pose lorsque des différents partis politiques,

21 différentes idéologies, idéologies qui sont parfois contraires les unes les

22 autres, et contraire à l'idéologie communiste, estiment qu'ils doivent

23 jouer un rôle au niveau de la défense du pays parce qu'ils constatent, par

24 exemple, que c'est le cas en fait des nationalistes, on peut utiliser une

25 idéologie nationaliste et essayer de faire valoir cette idéologie dans le

26 cadre des forces armées, à savoir pour essayer d'influencer la façon dont

27 les forces armées vont être déployées. Ceci, à mon sens, ne correspond pas

28 à la doctrine de la Défense populaire généralisée.

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1 M. SESELJ : [interprétation]

2 Q. Monsieur Theunens, qui a attiré votre attention sur le fait que,

3 pendant l'interrogatoire principal, vous avez fait une erreur lorsque vous

4 avez dit que, dans les années 50, la Yougoslavie est sortie du pacte de

5 Varsovie ?

6 R. En fait, Madame, Messieurs les Juges, je crois me rappeler que

7 l'audience s'est terminée à 13 heures 15. J'étais sur mon vélo, je rentrais

8 chez moi, et c'est à ce moment-là que je me suis rendu compte que j'avais

9 fait une erreur. Je savais que la Yougoslavie avait quitté ou avait été

10 expulsée du Cominform à l'époque de Stalin en raison du conflit opposant

11 Tito et Stalin, mais je voulais vérifier ce qu'il en était du pacte de

12 Varsovie. Et je me suis rendu compte à ce moment-là que la Yougoslavie

13 n'avait jamais fait partie du pacte de Varsovie, donc, voilà comment les

14 choses se sont passées.

15 Q. Monsieur Theunens, qui vous accompagnait à vélo et qui vous a aidé à

16 comprendre cela ?

17 R. Je ne sais pas si je suis tenu de répondre à cette question, Monsieur

18 le Président.

19 Q. Monsieur Theunens, vous avez cherché l'avis de quelqu'un sur la teneur

20 de votre déposition, et cette personne a attiré votre attention sur

21 l'erreur que vous aviez faite, n'est-ce pas ?

22 M. LE JUGE ANTONETTI : -- c'est qui alliez vérifier ou c'est quelqu'un qui

23 vous aidé ? Pas votre vélo parce qu'il ne parle pas, lui.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai fait moi-même, Monsieur le Président,

25 Madame, Monsieur les Juges. Et pour être très franc avec vous, j'ai repassé

26 en revue les documents de l'académie militaire, et j'ai vérifié de près

27 parce que je voulais être certain. Dans les cours d'histoire que j'ai reçus

28 à l'académie militaire, on a étudié le pacte de Varsovie et la création des

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1 différents blocs en Europe, et cetera, et cetera, et c'est en me re-

2 penchant sur mes cours que j'ai finalement découvert que quelque chose que

3 j'avais dite n'était finalement pas tout à fait exacte.

4 M. SESELJ : [interprétation]

5 Q. Monsieur Theunens, vous venez de déclarer que la Yougoslavie a quitté

6 le Comintern. A quel moment ?

7 R. Oui, oui, mais je crois que j'ai employé le mot "Cominform," en tout

8 cas, à mon avis, cela s'est passé à la fin des années 50. Je n'ai pas la

9 date exacte en tête, mais je sais que c'était suite au conflit qui a opposé

10 Tito à Stalin.

11 Q. Monsieur Theunens, la Yougoslavie comment a-t-elle pu quitter le

12 Comintern en 1950 -- dans les années 50, puisque par ces instances

13 officielles, en 1943, il y a eu dissolution donc de Comintern ? Comment la

14 Yougoslavie aurait-elle pu restée seule dans quelque chose qui n'existait

15 plus ?

16 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il y a peut-être un

17 problème de compte rendu parce que le terme que j'ai utilisé, moi, dès le

18 départ c'était "Cominform." "Cominform," non pas "common formation,"

19 "Common forum."

20 Q. Et qu'est-ce que c'est le Cominform, Monsieur Theunens ?

21 R. Je n'ai pas souvenir exact, Monsieur le Président, de la nature de

22 cette organisation. Je sais qu'elle regroupait des pays d'Europe centrale

23 et d'Europe orientale et que l'ancienne Union soviétique y jouait un rôle

24 dirigeant, mais je ne saurais vous donner d'autre renseignement.

25 Q. N'était-ce pas une alliance militaire, une forme d'alliance militaire,

26 Monsieur Theunens ?

27 R. Non, non, ce n'était pas le cas, Monsieur le Président.

28 Q. Alors, quel lien est-ce que cela a à voir avec le pacte de Varsovie ?

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1 R. Non, ce dont je discutais c'étaient les dates, Monsieur le Président,

2 et le rapport entre la République socialiste fédérative de Yougoslavie et

3 diverses organisations que j'appellerais supranationales ou internationales

4 existant dans les pays communistes, et c'est que c'était -- est-ce que leur

5 Cominform était le Cominterm -- le Cominform, je ne sais plus.

6 Q. Vous voulez dire que c'est une organisation supranationale des pays

7 communistes; c'est ça le Cominform ?

8 R. Non, Monsieur le Président. Ce que je m'efforce de dire c'est que

9 c'était une organisation regroupant des pays dont le régime pouvait être

10 qualifié de communiste ou de socialiste, comme ils le disent eux-mêmes, des

11 pays qui se trouvaient principalement en Europe centrale et orientale, et

12 que l'ancienne Union soviétique, sous la direction de Stalin, a joué un

13 rôle dirigeant dans cette organisation. Je suis sûr qu'un expert en

14 Cominform pourrait vous en dire beaucoup plus long sur ce sujet, mais voilà

15 ce que moi, je peux en dire.

16 Q. Monsieur Theunens, le Cominform, est une organisation internationale ?

17 R. D'après mon souvenir, Monsieur le Président, le Cominform regroupait

18 différents pays d'Europe centrale et d'Europe de l'est dirigés par des

19 régimes communistes ou socialistes, comme ils disaient. Et que quand on a

20 un regroupement de plusieurs pays, on peut parler d'organisation

21 internationale.

22 Q. Monsieur Theunens, et d'après vous, comment se définit une organisation

23 internationale ? Qu'est-ce que cela signifie une organisation

24 internationale ?

25 R. Peut-être y a-t-il une confusion, Monsieur le Président, entre les

26 termes "international," et "supranationale", mais, en tout cas, le mot

27 "international" pour moi signifie que l'organisation en question regroupe

28 des pays différents ou des membres de pays différents, comme par exemple,

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1 des équipes de football.

2 Q. Simplifions, votre question est pratiquement correcte. Les

3 organisations internationales sont des organisations des Etats; est-ce que

4 nous sommes d'accord ? Ce sont des Nations Unies, ce fût la Communauté

5 européenne avant la création de l'union, c'est l'OTAN, c'est l'ACN, c'est

6 la Ligue arabe, c'est l'Organisation de l'unité africaine; ce sont des

7 organisations des Etats par définition, n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Tandis que le Cominform c'était un bureau d'information des partis

10 communistes et des partis de travailleurs. Donc, ça n'avait rien à voir

11 avec des Etats. Donc, c'était des Partis ouvriers et des Partis communistes

12 qui étaient regroupés dans le Parti communiste français et italien, même

13 s'ils n'étaient pas au pouvoir dans leurs pays respectifs.

14 C'est ça qui pose problème, Monsieur Theunens, le fait que vous ne sachiez

15 rien. C'est ça. Mais allons de l'avant.

16 R. Je ne sais pas si je dois répondre à la question, Monsieur le

17 Président, mais --

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous appelez en anglais, le "common forum,"

19 tel que ça apparaît dans le transcript, vous ne faites pas référence à

20 l'international communiste ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je parlais -- je peux

22 l'épeler ce mot, C-O-M-I-N-F-O-R-M. Donc, ce n'est pas un "forum," c'est

23 "forme," qui, d'après ce que j'en sais, était une organisation qui

24 regroupait -- qui était le lieu d'une coopération entre des pays d'Europe

25 centrale et d'Europe de l'Est avez l'Union soviétique. Peut-être qu'il y

26 avait d'autres membres. Comme je l'ai dit, je ne suis pas spécialiste du

27 Cominform. Mais, en tout cas, il y a eu un moment où Tito a décidé -- ou

28 plutôt, la Ligue des Communistes yougoslave a décidé de quitter le

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1 Cominform suite à l'affrontement entre Tito et Stalin qui durait déjà

2 depuis longtemps. Et la seule raison pour laquelle j'ai évoqué le Cominform

3 c'est que j'ai confondu les deux organisations quand j'ai dit que la

4 Yougoslavie avait quitté le pacte de Varsovie dans les années -- à la fin

5 des années 50 car c'est en fait le Cominform que la Yougoslavie a quitté.

6 Q. Monsieur Theunens, vous ne comprenez toujours pas que le Cominform est

7 l'organisation internationale des Partis communistes et ouvriers car

8 l'Italie et la France n'ont jamais été des pays communistes; cependant,

9 leurs Partis communistes ont été membres du Cominform; est-ce exact ?

10 R. Oui, Monsieur le Président, c'est exact, et il faut, effectivement, que

11 j'apporte une précision, à savoir que c'est la Ligue des yougoslaves

12 communistes qui a quitté le Cominform. Le mot semble difficile à épeler

13 mais enfin --

14 Q. Mais vous ne le saviez pas au moment où il fallait l'expliquer, car

15 vous n'avez eu de cesse d'insister sur le fait que le Cominform était une

16 organisation que regroupait des Etats. La Yougoslavie de Tito, à quel

17 moment est-ce qu'elle a été membre d'une alliance militaire, et laquelle,

18 le savez-vous ?

19 R. D'après mon souvenir, la Yougoslavie de Tito n'a jamais fait partie

20 d'aucune alliance militaire.

21 Q. Monsieur Theunens, j'annulerais immédiatement le diplôme que vous avez

22 eu à l'académie militaire belge car à partir de 1953 jusqu'en 1956, la

23 Yougoslavie de Tito était membre de l'Alliance balkanique avec la Grèce et

24 la Turquie et l'Alliance balkanique a été considérée comme le bras prolongé

25 de l'OTAN. C'est uniquement à partir du moment où la Grèce et la Turquie

26 sont devenus membres directs de l'OTAN, cette alliance -- elle s'est

27 éteinte. Vous n'êtes pas un expert à mes yeux à partir du moment où vous

28 êtes capable de proférer des choses comme ça, mais en fin la Belgique peut-

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1 elle le tolérer puisqu'elle est connue de par son passé glorieux sur le

2 plan de la guerre.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur -- Monsieur Theunens,

4 M. Seselj indique que la Yougoslavie, entre 1956 et 1966, a été membre de

5 la --

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- 1953 et 1956.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : -- 1953 et 1956, semble-t-il, pendant trois ans, a

8 été membre de la Ligue balkanique qui avec la Grèce et la Turquie, et ce

9 n'est que quand la Grèce et la Turquie ont intégré l'OTAN, qu'à ce moment-

10 là, la Yougoslavie s'en s'est séparée. Vous étiez au courant de cela ou pas

11 ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Apparemment pas à l'instant, Monsieur le

13 Président; sinon, je n'aurais pas fait cette erreur. Je l'ai su par le

14 passé sans doute mais je ne m'en suis pas souvenu à l'instant.

15 M. SESELJ : [interprétation]

16 Q. Ma question suivante était celle-ci : en 1940, pendant combien de temps

17 la Belgique a-t-elle opposé une résistance à l'armada d'Hitler ?

18 M. LE JUGE ANTONETTI : 1940, pas 1946. Il y a une erreur dans le

19 transcript.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] En 1940, je veux dire.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, la pertinence --

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je n'ai plus besoin de parler.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis en train de remettre en question la

24 crédibilité du témoin, Monsieur le Président, c'est la crédibilité que je

25 remets en question. Je suis en droit de le faire de cette manière-ci.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin -- vous teste -- Monsieur le Témoin,

27 l'accusé vous teste sur vos connaissances en vous posant une question

28 historique. La Belgique, en 1940, elle a résisté pendant combien de temps ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de

2 souvenirs exacts. Cela n'a pas duré plusieurs mois.

3 M. SESELJ : [interprétation]

4 Q. S'agissait-il des heures et des minutes, Monsieur

5 Theunens ?

6 R. J'ai répondu à la question, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il a répondu.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord, il ne le sait pas.

9 Mme LE JUGE LATTANZI : -- un historien.

10 M. SESELJ : [interprétation] A l'académie militaire, j'imagine qu'on lui a

11 enseigné la tradition glorieuse de la Belgique, Madame. Aux académies

12 militaires serbes, nous enseignons les traditions glorieuses de l'armée

13 serbe, donc, la Belgique, elle aussi, elle a un passé héroïque, n'est-ce

14 pas ? Enfin, peu importe, je vais passer à ma question suivante. Tout

15 simplement je n'ai pas pu résister à la tentation de poser cette question

16 parce que je veux vous présenter ce soi-disant expert comme un ignorant.

17 Q. Enfin, Monsieur Theunens, savez-vous que, dans la Yougoslavie

18 communiste, il y avait des unités de volontaires spécifiques ?

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une objection, vous avez dit que l'expert est

20 ignorant.

21 Monsieur Marcussen.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'était mon objection. L'accusé peut

23 nourrir tous les avis qu'il veut au sujet du témoin, mais il n'a pas à

24 utiliser ces mots devant la Chambre.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je suis libre d'en parler soit dans le

26 prétoire soit en prison. Je n'ai pas d'un lieu tiers. Je suis obligé de

27 vous le dire à vous qu'il s'agit d'un témoin expert qui est un ignorant,

28 mais enfin.

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1 M. SESELJ : [interprétation]

2 Q. Je vous demandais cette chose-ci : Monsieur Theunens, dans la

3 Yougoslavie communiste, il y avait des unités --

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne pouvez pas; vous pouvez dire que l'expert

5 n'est pas expert, mais ce n'est pas la peine de lui dire qu'il est

6 ignorant. C'est deux choses différentes.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me permets de vous rappeler, Monsieur le

8 Président, le précédent historique du procès intenté à Oscar Wilde. Tout ce

9 qui a pu être dit là dans le contre-interrogatoire, je suis en droit de le

10 faire ici et je suis bien plus clément que ceux qui ont pris part à ce

11 procès. Je suis bien plus clément. Enfin, je n'arrive même pas à me

12 reconnaître moi-même à quel point j'ai de la compréhension face à des

13 témoins et des experts qui sont de faux témoins et de faux experts.

14 Enfin, il me reste deux questions avant la fin de l'audience d'aujourd'hui

15 puisqu'une phase de ma conception du contre-interrogatoire se termine là,

16 si vous m'y autorisez.

17 M. SESELJ : [interprétation]

18 Q. Donc, Monsieur Theunens, est-ce que vous savez que, dans la Yougoslavie

19 communiste, il y avait des unités de volontaires spécifiques au sein du

20 système de la défense généralisée ?

21 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je connais la

22 définition des unités de volontaires que j'ai tiré du lexique militaire de

23 1991. On la trouve en page 72 -- on la trouve évoquer en page 72 de mon

24 rapport, où il est question de l'emploi des unités de volontaires dans

25 l'histoire et d'ailleurs pas seulement en Yougoslavie mais également

26 ailleurs. Je parle donc de l'existence des unités de volontaires en

27 Yougoslavie même si l'accent semble être mise sur la Seconde Guerre

28 mondiale. Je n'ai pas trouvé de renseignements indiquant l'existence --

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1 d'unités de volontaires dans la doctrine de la Défense populaire

2 généralisée.

3 Q. Si je vous disais, Monsieur Theunens, qu'en tant qu'élève de -- pendant

4 ma troisième année d'école secondaire, j'étais devenu membre d'une unité de

5 volontaires de la Défense territoriale de la ville de Sarajevo et que j'ai

6 pris part à une revue des unités de la Défense territoriale faite par le

7 commandant de l'état-major de la république, le général Franjo Heljevic

8 [phon], et c'est le commandant de la TO municipale, M. Stefan Valter, qui

9 lui a fait rapport, et j'étais l'un des plus grands et j'avais un fusil

10 mitrailleur à l'épaule. Est-ce que vous me croiriez et que c'était pendant

11 ma troisième année d'école secondaire, vous me faites confiance là-dessus

12 que c'est comme ça s'est passé ?

13 R. Monsieur Seselj -- ou plutôt, Monsieur le Président, Madame, Monsieur

14 les Juges, si M. Seselj le dit, je ne vois pas de raison de ne pas le

15 croire. Mais quand j'ai répondu en disant que --

16 M. LE JUGE ANTONETTI : La question n'est pas si innocente que cela par

17 rapport aux volontaires du Parti radical serbe parce que, si avant les

18 événements de 1991, 1990, 1993, si avant les événements dans la

19 Yougoslavie, il y avait un système des volontaires, alors, là, il vous

20 donne un exemple sur le fait que lui-même alors qu'il allait à l'école il

21 était intégré dans une unité de volontaires. Alors, peut-être que c'était

22 tout à fait normal dans l'ex-Yougoslavie qu'il y ait des unités de

23 volontaires qui participaient parallèlement, conjointement avec l'armée à

24 ce concept de Défense nationale -- ou Défense nationale généralisée.

25 Pourquoi vous ne vous êtes pas penché là-dessus ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne crois pas que

27 problème est que je ne me suis pas penché sur quelque chose. Le problème

28 c'est que j'ai examiné des documents et que je devais tirer des conclusions

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1 sur la base de ces documents.

2 Comme je l'ai dit dans ma déposition, le concept de la Défense populaire

3 généralisée est défini par la loi. Les références juridiques prévoient un

4 âge minimal pour les volontaires. J'ai parlé du concept des volontaires

5 dans mon rapport, et si je ne m'abuse, l'âge minimal était de 18 ans.

6 Alors, si les lycéens sont organisés d'une façon ou d'une autre et que

7 d'une façon ou d'une autre, on leur fait porter une arme automatique,

8 d'après ce que je connais du système, ce n'est pas la même chose que

9 d'avoir une notion légalement définie de volontaire, à savoir la notion et

10 la définition que l'on trouve dans la loi sur la Défense populaire

11 généralisée, par exemple, où on voit un âge minimum et d'autres conditions

12 qui doivent être respectées.

13 Je n'ai trouvé nulle part la moindre donnée qu'il s'agisse de législation

14 ou d'autre indiquant que les élèves des lycées pouvaient rejoindre la

15 Défense territoriale en cas de conflit armé.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez votre dernière question parce que c'est déjà

17 13 heures 15, et il faut terminer. Alors, je crois que vous avez une

18 deuxième question.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je puis le faire, j'aurais une question

20 adjacente et une question principale.

21 J'attire l'attention de M. Theunens sur l'année 1972, j'avais 18 ans à

22 l'époque et je suis devenu membre de cette unité deux ou trois mois avant.

23 Nous avions des uniformes particuliers, il y avait des bérets de mis en

24 place pour la première fois notamment pour les volontaires.

25 M. SESELJ : [interprétation]

26 Q. Alors, ma dernière question pour aujourd'hui : si je vous dis qu'en ma

27 qualité d'étudiant en droit, à la faculté de droit, j'étais membre d'un

28 Détachement d'étudiants qui comptait quelque

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1 1 000 membres et qu'en personne, en application des directives de

2 l'organisation de la Défense populaire en ma qualité de président de

3 l'Alliance des étudiants de la faculté, j'organisais ce détachement à

4 l'intention duquel la faculté a acheté des uniformes auprès de la Défense

5 territoriale, alors, me croiriez-vous si je vous disais

6 cela ?

7 R. Monsieur le Président, je n'ai aucune raison de ne pas croire à cela,

8 mais je tiens à dire une nouvelle fois que dans le cours de la préparation

9 de mon rapport, j'ai étudié des documents et notamment les documents

10 relatifs aux forces armées et à leur composante, à savoir JNA et Défense

11 territoriale et il était également question de composantes qui ne faisaient

12 pas partie de la JNA ou on lisait qu'elles faisaient partie de la Défense

13 territoriale mais je n'y ai trouvé aucune mention des étudiants ou d'une

14 quelconque Unité d'étudiants. Cela étant dans le cadre du concept de la

15 Défense populaire généralisée, je n'ai aucune raison de ne pas croire à ce

16 que M. Seselj vient de dire.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous expliquer juste la substance,

18 Monsieur le Président.

19 J'ai été président de cette alliance des étudiants de la faculté de droit.

20 Le comité universitaire de cette faculté de droit dans l'exercice de son

21 rôle au sein d'une organisation politique dans un système de Défense

22 populaire généralisée avait créé un Détachement d'étudiants et

23 d'enseignants, et ce détachement de volontaires et ça s'appelait le

24 "Détachement de Mosa Pijade" un non révolutionnaire d'entre les deux

25 guerres.

26 Q. Alors, donc, une organisation estudiantine a créé ce Détachement

27 estudiantin et cela faisait partie du système de la Défense populaire

28 généralisée; j'imagine que vous avez été surpris par le fait tel que je

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1 vous l'ai présenté, n'est-ce pas, Monsieur Theunens ? Vous n'aviez aucune

2 de cela, n'est-ce pas ?

3 R. Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, puisque nous parlons

4 de la Défense populaire généralisée, je dirais que cela ne me surprend pas

5 car un aspect important c'est que cela est expressément autorisé par les

6 autorités. Si l'on reprend l'article 118 de la loi sur la Défense de la

7 République de Serbie datant de 1990, nous y lisons expressément que seules

8 les autorités de l'état sont habilités à créer et entraîner et organiser

9 des forces armées. Donc, dans le contexte de l'application du concept de la

10 Défense populaire généralisée, si les autorités estiment qu'il est

11 nécessaire d'organiser les étudiants dans une forme de la Défense, qu'il

12 s'agisse de la Défense civile ou de la Défense territoriale, mais ce qu'il

13 importe de remarquer c'est que ceci correspond -- en tout cas, est conforme

14 aux décisions des autorités et que ceci correspond à l'idéologie de la

15 Défense populaire généralisée.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous continuerons donc demain. L'audience commencera

17 donc demain à 9 heures.

18 Je vous remercie.

19 --- L'audience est levée à 13 heures 20 et reprendra le mercredi 27 février

20 2008, à 9 heures 00.

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