Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 4 mars 2009

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez, s'il vous plaît, le

  6   numéro de l'affaire.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Bonjour, Monsieur le Président,

  8   Madame, Messieurs les Juges.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav

 10   Seselj.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 12   En ce mercredi 4 mars 2009, je salue Mme Biersay, M. Mundis, tous

 13   leurs collaborateurs. Je salue M. Seselj ainsi que toutes les personnes qui

 14   nous assistent.

 15   Nous avons tenu cette audience qui n'avait pas été programmée en

 16   début de semaine, en raison de l'état de santé du témoin; comme vous le

 17   savez, ce témoin devait déposer il y a plusieurs jours. Il n'a pu le faire

 18   en raison de son état de santé et nous n'avons eu la certitude qu'hier que

 19   l'intéressé serait en mesure de témoigner. C'est dans ces conditions que

 20   nous avons prévenu tout de suite M. Seselj, pour qu'il sache que le témoin

 21   devait venir, aujourd'hui.

 22   Compte tenu de la décision qui avait été rendue sur l'ajournement, ce

 23   sera le dernier témoin qui viendra. Voilà donc la situation.

 24   Alors, Monsieur Seselj, est-ce que vous avez quelque chose à nous

 25   dire avant qu'on fasse venir le témoin ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 27   Je crois que l'Accusation a pour obligation d'informer les Juges de

 28   la Chambre ainsi que moi-même de l'état physique de ce témoin et des

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  1   raisons pour lesquelles ce dernier n'est pas venu témoigner lorsqu'il a été

  2   prévu pour venir témoigner. Je crois que c'est vraiment important, et

  3   d'ailleurs je doute que le témoin avait des problèmes de santé. Je crois

  4   que tout ceci était un jeu de l'Accusation, orchestré par l'Accusation,

  5   c'est parce que je crois qu'ils ne savaient pas du tout si jusqu'à la

  6   dernière minute, il devait faire venir ce témoin ou pas. Puisque

  7   l'Accusation est très consciente de toutes les conséquences possibles et

  8   imaginables qui peuvent encourir après la venue de ce témoin.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- je vais poser des questions à

 10   l'intéressé, mais comme il s'agit de questions liées à son état de santé,

 11   quand il sera là, nous ferons cela en audience à huis clos parce que ça

 12   touche à des questions qui n'aient sans intérêt pour autrui, mais peut être

 13   intéressantes. Donc vous allez avoir une réponse très rapide à ce problème

 14   que vous pouvez vous poser.

 15   Nous allons introduire le témoin.

 16   Alors je rappelle que l'Accusation aura une heure pour l'interrogatoire

 17   principal, et M. Seselj aura une heure. La Chambre a décidé d'attribuer

 18   ceci compte tenu de son état.

 19   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Bonjour, Monsieur. Avant de vous faire prêter

 21   serment, j'aurais des questions à vous poser. Tout d'abord, donnez-moi

 22   votre nom, prénom et date de naissance.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Alija Gusalic, né le 3 mars 1968.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession actuelle ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis ouvrier.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné devant un

 27   tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie, ou bien

 28   c'est la première fois que vous témoignez ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà témoigné deux fois.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez témoigné deux fois. Pouvez-vous nous dire

  3   dans quel procès, si vous le savez ? --

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai témoigné une fois ici -- une fois ici

  5   dans l'affaire Milosevic, et une autre fois à Tuzla.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : C'était à l'encontre de qui ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était contre --

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas bien entendu.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] -- contre Fikret Fiklic.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. J'ai d'autres questions, mais je vais vous les

 11   poser à huis clos.

 12   Monsieur le Greffier, nous passons à huis clos partiel.

 13   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation] 

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 13   [Audience publique]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, relisez, s'il vous plaît, la

 15   déclaration.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : ALIJA GUSALIC  [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.

 21   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 23   Monsieur, quelques brèves explications de ma part. Vous allez devoir

 24   répondre à des questions que Mme Biersay va vous poser. Elle vous

 25   présentera peut-être quelques documents et nous avons prévu un temps

 26   maximum d'une heure pour cela. Il se peut que pendant cette période les

 27   Juges qui sont devant vous vous posent également des questions. Une fois

 28   que ceci sera terminé, M. Seselj qui est à votre gauche, qui est accusé

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  1   dans ce procès, a le droit c'est le Règlement qui le prévoie de vous poser

  2   des questions dans le cadre du contre-interrogatoire. Vous savez comment ça

  3   se passe puisque comme vous avez témoigné dans l'affaire Milosevic vous

  4   savez que vous avez dû répondre également à des questions posées par les

  5   uns et les autres.

  6   Alors essayez d'être clair et précis dans vos réponses. Si vous ne

  7   comprenez pas le sens d'une question, n'hésitez à demander à celui qui vous

  8   la pose de la reformuler mais surtout si à un moment donné vous ne vous

  9   sentez pas bien, dites-le-nous, nous sommes ici également pour vous prêter

 10   aide et assistance.

 11   Voilà ce que je voulais dire.

 12   Madame Biersay, je vous donne la parole.

 13   Oui, Monsieur Seselj.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai encore une remarque préliminaire puisque

 15   le témoin a déclaré avoir déposé lors d'un procès qui s'est tenu à Tuzla.

 16   Je n'ai dans les documents qui m'ont été fournis aucune trace de cela peut-

 17   être  que cela m'a été fourni, mais j'ai pu le retrouver nulle part c'est

 18   pourquoi je demande que l'Accusation s'en explique et me dise si elle m'a

 19   fournie cette information. Si oui, quand et de quoi il s'agissait

 20   exactement.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Je vais lire une lettre -- une partie d'une lettre envoyée le 23 février

 24   2009 à M. Seselj, et dans cette lettre, nous lui avons dit:

 25   "Aujourd'hui" - et il s'agissait du 23 février 2009 - "que le témoin a

 26   informé l'Accusation qu'il avait témoigné à Tuzla en 2001 ou en 2004" -

 27   plus probablement en 2004 - "et nous avons demandé son témoignage."

 28   C'est une lettre que nous avons soumise à M. Seselj une fois que nous

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  1   avions rencontré le témoin pour le récolement la semaine dernière.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, ce témoignage de Tuzla vous ne

  3   l'avez pas eu parce que c'est le témoin qui vous a dit ça quand vous l'avez

  4   vu le 23 février; c'est bien cela ?

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, c'est exact. Nous avons entendu parler

  6   de la déposition de Tuzla le jour où nous avons rencontré le témoin donc le

  7   jour même où cette lettre avait été datée, c'est-à-dire le 23 février 2009,

  8   et nous avions également déposé une requête formelle pour obtenir le compte

  9   rendu de cette déposition.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je respecte évidemment

 12   toutes les lettres que je peux recevoir de Mme Biersay, mais une lettre de

 13   Mme Biersay ne serait remplacée la documentation relative à la déposition

 14   de ce témoin. Si l'Accusation n'a appris que le 23 février que ce témoin a

 15   déposé à Tuzla, nous sommes aujourd'hui le 4 mars, cela veut dire que

 16   l'Accusation avait le temps de se procurer la déposition et les documents

 17   complets, le compte rendu d'audience en provenance de Tuzla qui n'est pas à

 18   l'autre bout du monde afin de me les remettre. L'Accusation n'a pas le

 19   temps de faire traduire cela en anglais mais à Tuzla on parle toujours le

 20   serbe et je suis en mesure de lire tous ces comptes rendus --

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non pas le serbe mais bosniaque.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc vous pourriez peut-être avertir le témoin

 23   qu'il ne peut pas interrompre et qu'il ne peut que répondre aux questions.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- n'interrompez pas M. Seselj.

 25   Monsieur Seselj, la représentante du bureau du Procureur nous dit que quand

 26   elle a appris le 23 février que monsieur a témoigné à Tuzla, elle a envoyé

 27   une lettre immédiatement aux autorités pour qu'on envoie le transcript,

 28   mais qu'à ce jour ce n'est pas revenu.

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  1   C'est bien ça, Madame Biersay ?

  2   Mme BIERSAY : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- et voilà le --

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que cela ne

  5   justifie en rien, n'excuse en rien l'Accusation. L'Accusation aurait pu

  6   envoyer un coursier à Tuzla, procéder à des photocopies de cette déposition

  7   et que cela soit amené à La Haye. Qu'est-ce que cela signifie ? "Nous avons

  8   fait une demande et nous n'avons pas obtenu satisfaction."

  9    Ce n'est pas la première fois; rappelez-vous le cas du Témoin Kulic et

 10   d'autres témoins. A chaque fois, je n'ai pas reçu les documents nécessaires

 11   parce que des raisons similaires ont été évoquées, alors à chaque fois, on

 12   passe outre ce genre de situation et je voudrais insister sur mon droit à

 13   obtenir ces documents de Tuzla car cela est nécessaire pour mon contre-

 14   interrogatoire. On ne peut pas se justifier en disant qu'on n'a pas reçu

 15   les documents de Tuzla.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- comment fonctionne la justice à

 17   Tuzla. Mais imaginons que l'intéressé aurait été dans un procès en France,

 18   à Paris, et qu'il le dise "le 23 février" à Mme Biersay, Mme Biersay aurait

 19   saisi les autorités françaises pour avoir non pas le transcript parce qu'en

 20   France, il n'y a pas de transcript mais avoir le jugement de je ne sais

 21   quoi. Croyez-moi, ça mettrait certainement plusieurs mois avant de revenir.

 22   Voilà. Je pense qu'en Italie, ça serait pareil, peut-être pire. Voilà. Donc

 23   c'est tout ce qu'on a. On peut déplorer -- on peut déplorer cela, mais

 24   c'est comme ça.

 25   Bien, Madame Biersay.

 26   Mme BIERSAY : [interprétation] Conformément aux décisions de la Cour

 27   concernant l'heure qui nous est allouée, je demanderais une certaines

 28   souplesse, Monsieur le Président, concernant mes questions et je dirais,

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  1   dès à présent à la Cour, que je vais passer au-dessus de certains éléments

  2   de la déposition du témoin pour pouvoir justement respecter l'heure qui

  3   m'est allouée.

  4   Interrogatoire principal par Mme Biersay :

  5   Q.  [interprétation] Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre de

  6   première instance quel est votre lieu de naissance ?

  7   R.  C'était à Gornji Sepak près de Zvornik.

  8   Q.  Où avez-vous été élevé en grande partie ?

  9   R.  A Bijeljina.

 10   Q.  Pourriez-vous nous dire où se trouve Bijeljina par rapport à la

 11   République de Serbie ?

 12   R.  C'est une localité qui se trouve à côté de la Drina en amont, quatre

 13   kilomètres à peu près. 

 14   Q.  Quelle est votre formation sur le plan scolaire ?

 15   R.  J'ai terminé l'école primaire et secondaire puis j'ai fini -- et que je

 16   suis spécialisé en tant qu'ouvrier du bâtiment -- ou 11 ans.

 17   Q.  Pourriez-vous décrire à la Chambre de première instance la composition

 18   ethnique de Bijeljina ? Y avait-il un seul groupe ethnique ou plus d'un

 19   groupe ethnique dans cette localité ?

 20   R.  A Bijeljina, il y avait des Musulmans, des Serbes et des Croates. A

 21   Bijeljina, c'était les Musulmans qui étaient majoritaires alors que les

 22   villages environnants étaient Serbes. Nous, nous entendions tous très bien

 23   jusqu'à la guerre.

 24   Q.  Vous-même -- et vous êtes-vous marié à un moment donné ?

 25   R.  Oui, je me suis marié par deux fois. Ma première femme était Serbe et

 26   ma seconde épouse également était Serbe. En ce moment, je suis célibataire,

 27   je ne suis pas marié.

 28   Q.  A quel groupe ethnique appartenez-vous ?

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  1   R.  Je suis Musulman -- bosnien.

  2   Q.  Vous avez dit à la Chambre de première instance que ces différents

  3   groupes ethniques s'accordaient très bien; est-ce qu'il est arrivé un

  4   moment où la situation a changé ?

  5   R.  Oui. Il y a déjà quelques mois déjà avant le début de la guerre,

  6   c'était une situation assez catastrophique. Tout avait changé déjà.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation]

  8   Q.  Pourriez-vous nous décrire comment les choses ont changé ?

  9   R.  Des personnes en arme ont commencé à apparaître quelques mois avant le

 10   début de la guerre.

 11   Q.  Comment ces personnes étaient-elles vêtues ?

 12   R.  Il s'agissait de membres de la Défense territoriale et également de

 13   Serbes qui s'étaient infiltrés et qui avaient été entraînaient des

 14   personnes. Bien sûr, il y avait aussi des membres de l'ex-JNA.

 15   Q.  La personne, qui au cours de cette période dont vous venez de parler -

 16   et vous parlez de la période avant la guerre - est-ce que vous parlez de

 17   1992 ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Donc la personne, qui occupait le poste de maire, savez-vous à quel

 20   groupe ethnique cette personne appartenait - je parle du maire de Bijeljina

 21   ?

 22   R.  Je pense qu'il était Serbe mais je ne sais pas cela avec exactitude. Je

 23   ne m'intéressais pas à la politique. Je ne sais pas vraiment.

 24   Q.  Que pouvez-vous nous dire du commandant de la police; est-ce que vous

 25   savez à quel groupe ethnique il appartenait à ce moment-là ?

 26   R.  Il était Serbe.

 27   Q.  Est-ce qu'il est arrivé un moment où il y a eu des lettres d'envoyées

 28   pour appeler les réservistes en 1992 ?

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  1   R.  Oui, moi, j'ai trois frères, je suis le quatrième et aucun d'entre nous

  2   n'a reçu d'appel à la mobilisation. Cela ne concernait que les Serbes.

  3   Q.  Est-ce que vous avez fait votre service militaire dans la JNA ?

  4   R.  Oui, pendant dix mois.

  5   Q.  Je voudrais maintenant attirer votre attention sur un village du nom

  6   d'Amajlije. Où se trouve ce village par rapport à Bijeljina ?

  7   R.  Cela se trouve à trois ou quatre kilomètres de Bijeljina. Encore une

  8   fois, c'est sur le cours de la Drina.

  9   Q.  Est-ce que c'était du côté de la République serbe ou du côté de

 10   Bijeljina ?

 11   R.  Du côté de Bijeljina, à côté de la Drina, car la Drina sépare la Bosnie

 12   de Serbie.

 13   Q.  Pendant la période à laquelle vous faites référence, avant le début de

 14   la guerre en 1992, quel est le type de formation, de formation militaire si

 15   vous le savez qui a été dispensée dans ce village ?

 16   R.  C'était en 1992, c'était les hommes d'Arkan en provenance de Serbie qui

 17   procédaient à des entraînements et également les hommes de Seselj, afin de

 18   procéder à des attaques contre la population locale. C'est dans ce but que

 19   les entraînements étaient organisés.

 20   Q.  Connaissez-vous le nom de quelqu'un du nom de Mirko Blagojevic ?

 21   R.  Oui, je connais très bien.

 22   Q.  En 1992, au début de l'année 1992, était-il politiquement engagé à

 23   votre connaissance ?

 24   R.  Oui. Il était considéré comme un voïvode dans Parti radical serbe de M.

 25   Seselj, c'était donc un membre du SRS.

 26   Q.  En 1992, en particulier, savez-vous si M. Mirko Blagojevic était membre

 27   du Parti radical serbe, à Bijeljina ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Quel est le poste --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Je regardais votre âge, et en 1992, vous aviez 24

  3   ans. Je crois comprendre que vous étiez marié avec une femme serbe; c'est

  4   bien cela ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, par deux fois.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous nous avez dit que vous n'aviez pas

  7   d'engagement politique. Alors comment se fait-il que vous sachiez qu'untel

  8   faisait partie de tel parti politique, tel autre, comment saviez-vous cela

  9   ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des choses qui se savaient, les gens

 11   en parlaient, on parlait des choses et d'autres.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : On parlait où, au café, sur le stade de terrain de

 13   football, dans la rue, à la télévision ? Ou est-ce, chez le coiffeur ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Par exemple, M. Seselj, on disait de lui de

 15   façon tout à fait publique qu'il était au SRS, qu'il était Chetnik. C'est

 16   lui-même qui le disait de façon tout à fait publique. Pour ce qui concerne

 17   M. Mirko Blagojevic, c'est la même chose. Les gens parlaient de lui dans

 18   les cafés de la même façon que pour M. Seselj qui était du Parti radical.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, en 1992, vous aviez

 20   entendu parler de M. Seselj, et M. Blagojevic disait qu'il appartenait au

 21   parti de M. Seselj ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le connais personnellement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 24   Madame Biersay.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation]

 26   Q.  Saviez-vous si M. Seselj a rendu visite, s'est rendu en visite dans la

 27   région de Bijeljina au cours de la première parie de 1992 ?

 28   R.  Je ne connais pas la date mais il est venu une fois. Il y a eu un grand

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  1   meeting à Bijeljina, à cette occasion. Mais je ne sais pas à quelle date

  2   c'était, c'était en face du bâtiment de la municipalité. J'étais présent à

  3   ce meeting en vérité.

  4   Q.  Est-ce que ceci s'est produit avant le début de la guerre ou après le

  5   début de la guerre ?

  6   R.  C'était avant.

  7   Q.  Pour en revenir à M. Blagojevic, était-il d'une façon ou d'une autre

  8   associé à un café à Bijeljina ?

  9   R.  Oui, il était propriétaire du café "Srbija" parce que c'était lui le

 10   propriétaire.

 11   Q.  Ce café portait-il un nom différent avant le début de la guerre ? Vous

 12   n'avez pas besoin de me donner de nom, mais y avait-il un autre nom ?

 13   R.  Oui, il s'appelait "Foco" avant --

 14   Q.  Combien de temps avant la guerre le nom de ce café a été changé pour

 15   s'appeler Srbija ?

 16   R.  C'était deux ou trois mois avant, je ne sais pas exactement comment de

 17   temps ça représentait. C'était deux ou trois mois avant le début de la

 18   guerre.

 19   Q.  Est-ce qu'à Bijeljina - là encore au cours de 1992 dont nous avons

 20   parlé - est-ce qu'il y a eu un moment où les hommes serbes se sont

 21   retrouvés armés ?

 22   R.  Oui, ils ont été armés. Ils tenaient la garnison, et ils avaient tout

 23   entre leurs mains, en fait.

 24   Q.  Quelles sont les personnes, s'il y en a associées au Parti radical, qui

 25   ont aidé à armer les hommes serbes à Bijeljina ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Il s'agit d'une question directrice.

 27   Il faudrait dire : "Est-ce qu'il y avait également des personnes membres du

 28   SRS qui ont participé à l'armement des locaux ?" Mais ça ne peut passer

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  1   ainsi.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  3   Mme BIERSAY : [interprétation]

  4   Q.  Avez-vous compris la question que je vous ai posée ?

  5   R.  Est-ce que vous pourriez répéter, s'il vous plaît ? J'ai entendu mais

  6   j'avais juste écouté ce que le général était en train de dire.

  7   Q.  Bien. Pouvez-vous me dire quels sont les membres du Parti radical

  8   serbe, qui ont participé à cette opération, qu'ils ont armés les hommes

  9   serbes notamment de cette localité ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nouvelle objection. Il ne faut pas demander

 11   "quels membres," mais est-ce qu'il y a eu "il y a également des membres."

 12   Si elle pose la question ainsi ça suppose qu'il y avait certainement des

 13   membres du SRS.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- demandez-lui par une question large,

 15   qui avait armé, et puis petit à petit, vous arriverez, sinon, ça fait,

 16   téléphonez comme on dit.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation]

 18   Q.  Pourriez-vous nous donner les noms de personnes qui armaient les serbes

 19   dans la localité de Bijeljina les hommes serbes ?

 20   R.  Dois-je donner des noms ?

 21   Q.  Oui, s'il vous plaît.

 22   R.  Il y avait donc M. Seselj, il y avait Arkan, et Mirko Blagojevic, que

 23   je connais bien, qui était du cru. C'était eux qui armaient les serbes

 24   locaux. C'était eux qui donc les Serbes qui ont pris tout à leur compte

 25   pour ce qui est des armes, des armes qui appartenaient à l'ensemble des

 26   trois peuples musulman, croates, serbes, de l'ancienne Yougoslavie.

 27   Q.  J'aimerais maintenant attirer votre attention sur le mois de mars 1992.

 28   Je sais que beaucoup de choses se sont passées en mars 1992, mais ce sur

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  1   quoi j'aimerais vous poser une question ce sont les événements, les

  2   événements qui vous ont emmené à être hospitalisé. D'accord.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Encore une fois, une question non

  4   pertinente. Nous voyons -- il faut d'abord voir la nature des événements

  5   qui ont eu lieu à Bijeljina, et ensuite ce qui est éventuellement arrivé au

  6   témoin, si toutefois quelque chose lui est arrivé, et non pas demandez

  7   immédiatement : "Comment se fait-il que vous vous soyez retrouvé à

  8   l'hôpital ?"

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- il s'est passé des événements, alors

 12   progressez dans les questions.

 13   Mme BIERSAY : [interprétation]

 14   Q.  Par rapport à ces événements qui vous ont emmené à être hospitalisé,

 15   pouvez-vous décrire à la Chambre de première instance comment vous êtes-

 16   vous retrouvé à l'hôpital en mars 1992 ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Comment pourrait-il le savoir ? L'accusation

 18   pourrait-elle savoir que le témoin s'est retrouvé à l'hôpital si ce dernier

 19   n'a même pas encore eu le temps de le dire dans sa déposition ? Comment Mme

 20   Biersay peut-elle le savoir ?

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Ceci est dans le résumé du 65 ter, par

 22   exemple.

 23   Monsieur le Président, s'il continue a nous interrompre, cela va demander

 24   beaucoup plus de temps, et si la Cour est prête à nous laisser continuer,

 25   je pourrais poser mes questions.

 26    M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- travail, et puis lors du contre-

 27   interrogatoire, vous reviendrez là-dessus.

 28   Bien, Madame Biersay.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puisque vous exigez de moi que je tolère les

  2   questions directrices de Mme Biersay, je vais le faire, mais il est

  3   absurde, dans ce cas-là, de procéder à quelque contre-interrogatoire que ce

  4   soit.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Mme Biersay ne va pas poser de questions

  6   directrices. Le problème n'est pas là. Il y a des événements qui sont

  7   passés à Bijeljina, apparemment lui il en a été victime, alors le tout est

  8   de savoir qu'est-ce qui s'est passé, qui a fait quoi, est-ce qu'il y avait

  9   des gens du Parti radical serbe; si oui, lesquels, et cetera. C'est ça qui

 10   est plus important.

 11   Madame Biersay.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Président,

 13   je suis inquiet à présent parce que je m'inquiète de savoir sur la base de

 14   quoi vous considérez que ce témoin a été une victime quelconque à

 15   Bijeljina. Ce témoin n'a jamais été victime de quoi que ce soit à

 16   Bijeljina. Sur la base de quoi considérez-vous que ce témoin est une

 17   victime ? C'est l'Accusation qui vous a abusé.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- on va voir, on va voir. On va voir.

 19   Bien. Madame Biersay, ne procédez pas à pas parce que, sinon, M. Seselj va

 20   continuer à faire des objections.

 21   Si je conduisais l'interrogatoire en dix minutes, moi, je règle le

 22   problème, mais, malheureusement, c'est vous qui la menez, alors allez-y.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie de poser des

 24   questions.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, pourriez-vous décrire à la Chambre de première

 26   instance quand est-ce qu'on vous a tiré dessus en mars 1992 ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Sur la base de quoi peut-on considérer comme

 28   connu que quelqu'un a tiré sur le témoin ?

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- toutes les questions que vous posez

  2   c'est des questions directrices. Vous n'avez qu'à lui demander : "Dites-

  3   nous, Monsieur, au mois de mars, qu'est-ce qui s'est passé ?" A ce moment-

  4   là, il va dire : "Au mois de mars, on m'a tiré dessus." Là, vous embrayez.

  5   Vous avez compris, Madame Biersay, ou pas ?

  6   Vous êtes issue du système "common law," donc vous savez bien que,

  7   concernant les questions directrices, il faut les aborder de manières les

  8   plus délicates possibles. Il faut éviter de poser des questions directrices

  9   dans l'interrogatoire principal. Donc demandez-lui qu'est-ce qui faisait en

 10   mars 1992, et il va expliquer qu'en mars 1992, il y a eu une attaque, et

 11   puis là, vous rentrez dans le détail; sinon, M. Seselj ne va pas vous faire

 12   de cadeau. Dès que vous sortez des plans, il va faire une objection. Voilà.

 13   Alors que je rappelle ce témoin ça aurait pu être un 92 bis,

 14   personnellement, je n'ai pas très bien compris la position de l'Accusation

 15   de le faire venir à tout prix. Vous avez certainement des raisons que

 16   j'ignore. Deuxièmement, nous savons quel est son état, il ne faut pas trop

 17   non plus le stresser. Troisièmement, nous savons qu'il est dans la ligne--

 18   il vient pour témoigner sur une ligne directrice, sachant ce qui s'est

 19   passé à Bijeljina, c'est tout ce qu'on a présent dans l'esprit.

 20   Alors allez-y, Madame Biersay.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Comme le sait la Cour, j'ai une heure pour

 22   cet interrogatoire. J'essaie de bien centrer mes questions. J'ai déjà

 23   rencontré ce témoin auparavant et je lui ai demandé ce qui s'est passé en

 24   1992, et il y a beaucoup de choses qui se sont passées en 1992. Pour la

 25   Cour et pour le bénéfice de M. Seselj, j'essaie d'être aussi précise que

 26   possible.

 27   M. Seselj m'a constamment interrompue et c'est une question extrêmement

 28   simple que je pose à ce témoin. J'essaie de passer sur certains événements

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  1   pour arriver à ce qui à mon sens peut intéresser la Chambre de première

  2   instance.

  3   Q.  Etes-vous jamais allé à l'hôpital à Bijeljina en tant que malade ?

  4   R.  Oui. J'ai été blessé le 31 mars 1992, à 8 heures 15 lorsque les

  5   Chetniks ont tiré dessus les membres du Parti radical et cela devant le

  6   café Srbija.

  7   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance ce que vous

  8   faisiez ou ce que vous essayez de faire au moment où on vous a tiré dessus

  9   ?

 10   R.  Je voulais jeter une grenade dans le café Srbija.

 11   Q.  Comment avez-vous essayé de procéder ?

 12   R.  Une heure plus tôt, j'ai été dans ce même café et tous les hommes qui

 13   étaient présents étaient en armes, des hommes de Seselj, des hommes

 14   d'Arkan, des hommes de Mirko, et ils étaient prêts à attaquer Bijeljina.

 15   Ils étaient prêts l'attaquer et à l'occuper.

 16   Q.  Pourriez-vous décrire à la Chambre de première instance pourquoi vous

 17   avez décidé de vous rendre au café Srbija ? Est-ce qu'il s'agissait d'une

 18   bombe ou d'une grenade à main ?

 19   R.  C'était une grenade à main, une grenade à main, oui.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : Un moment, s'il vous plaît.

 21   Monsieur le Témoin, vous aviez la grenade avant quand vous êtes allé au

 22   café Srbija ? Quand vous avez compris qu'ils allaient attaquer Bijeljina,

 23   vous aviez déjà la grenade ou vous vous êtes doté de la grenade après ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne l'avais pas la première fois et je

 25   me la suis procurée ensuite spécialement. Il y a deux cafés à cet endroit.

 26   Il y avait le café Srbija et le café Istanbul éloigné l'un de l'autre de 50

 27   à 60 mètres. Quelques jours plus tôt une grenade avait été lancée dans le

 28   café Istanbul.

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  1   Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai une autre question.

  2   Comment avez-vous compris quand vous êtes rendu au café Srbija ? Comment

  3   avez-vous compris qu'ils étaient les gens qui étaient là, les hommes

  4   d'Arkan, de Seselj, de Blagojevic, ils étaient prêts à attaquer Bijeljina ?

  5   De quoi l'avez-vous compris ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis rendu au café Srbija et il y avait

  7   deux gardes à l'entrée. Ils portaient des masques, des uniformes et des

  8   fusils, et c'était, je pense, une preuve suffisante. Quand je suis entré,

  9   les endroits étaient pleins d'hommes en arme. De plus, les hommes qui

 10   étaient présents ne parlaient pas comme nous; ils avaient un fort accent

 11   serbe. Ils avaient des accents d'hommes de personnes originaires de Serbie

 12   et non pas de l'accent qui m'est familier, l'accent de la région où j'ai

 13   grandi.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci. 

 15   Mme BIERSAY : [interprétation]

 16   Q.  Pendant combien de temps avez-vous été hospitalisé après que l'on vous

 17   ait tiré dessus ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je pensais que Mme Biersay allait vous poser

 19   d'autres questions que je vais vous poser.

 20   La grenade, vous avez été la chercher où ça ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Café Istanbul.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors si je comprends bien, quelqu'un, qui a

 23   24 ans et qui est marié avec une femme serbe, voit dans un café des

 24   individus et ne trouve rien de mieux que d'aller chercher au café Istanbul

 25   une grenade pour aller jeter la grenade dans le café Srbija; c'est comme ça

 26   que ça s'est passé ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous l'avez fait ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'une grenade avait été lancée contre

  2   le café Istanbul et c'est des civils qui fréquentaient cet endroit de tous

  3   les groupes ethniques, des Serbes, des Musulmans, alors que, dans le café

  4   Srbija, c'était des hommes en arme, il n'y avait pas de civils. Donc

  5   c'était des gens qui voulaient faire ce qui a été fait dans l'ex-

  6   Yougoslavie, se livrer à un massacre.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez voulu vous venger tout seul à cause de ce

  8   qui était arrivé au café Istanbul. Vous avez décidé, vous, de vous venger

  9   et d'aller jeter une grenade dans le café Srbija ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Parce que j'étais dans le café, et

 11   lorsque j'étais dans le café, Mirko Blagojevic m'a dit : "Que tu n'es pas

 12   le bienvenu dans cet endroit." J'ai demandé : "Pourquoi ?" Il m'a répondu :

 13   "Parce que tu es Musulman," et il a ensuite dit qu'il n'avait pas dit cela.

 14   Je suis ensuite parti et tous les hommes en arme sont restés dans le café.

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc c'était pour empêcher l'attaque

 16   sur Bijeljina à laquelle vous vous attendiez; était-ce cela la raison ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on peut -- on pourrait dire comme cela.

 18   Peut-être que, si j'avais lancé cette grenade dans le café Srbija, des

 19   Chetniks, qui étaient venus à Bijeljina et en Bosnie en provenance de

 20   Serbie, auraient été tués, peut-être que j'aurais été tué aussi, ainsi que

 21   d'autres personnes, mais la population aurait pu continuer à vivre en paix

 22   et normalement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors si je comprends bien, vous jetez la

 24   grenade et on vous tire dessus et vous êtes blessé.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors là, je ne comprends plus rien.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, malheureusement, je n'ai pas réussi à

 28   lancer cette grenade. Je n'y suis pas arrivé car alors que j'étais encore à

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  1   dix ou 15 mètres, ils m'ont tiré dessus et ils m'ont blessé.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous étiez à 15 mètres à l'intérieur du café ou

  3   à l'extérieur ? A l'intérieur ou à l'extérieur ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'extérieur, devant, devant le café.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand ils vous ont vu arriver, ils vous ont tiré

  6   dessus ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes tombé au sol ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis tombé. Je suis tombé et mon

 10   cheval aussi puisque j'étais allé à cheval.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez à cheval, et le cheval n'a rien eu, donc

 12   vous êtes tombé.

 13   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Personne n'est venu et on vous a laissé blesser par

 15   terre ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est alors que les tirs ont commencé et mon

 17   cheval a été blessé. Je ne l'ai plus jamais retrouvé d'ailleurs.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Qui vous a amené à l'hôpital ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est alors que l'un comme l'autre des deux

 20   côtés ont commencé à tirer. Moi, je m'en suis tiré et un homme m'a emmené à

 21   l'hôpital.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 23   Bien, Madame Biersay. Voilà on est à l'hôpital.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation]

 25   Q.  Combien de jours êtes-vous resté à l'hôpital ?

 26   R.  Neuf jours.

 27   Q.  Je vais vous demander maintenant de vous reporter au -- est-ce

 28   quelqu'un est venu à l'hôpital, il vous a maltraité d'une façon ou d'une

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  1   autre ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Qui vous a maltraité ?

  4   R.  Les tirs avaient déjà commencé, à ce moment-là. L'hôpital était encore

  5   tenu par les Musulmans, pendant deux ou trois jours; après ça, l'hôpital a

  6   été occupé par les Chetniks.

  7   Q.  Vous avez dit que vous avez été maltraité pendant que vous étiez à

  8   l'hôpital.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Avant que Mme Biersay puisse

 10   poser la question de savoir qui a maltraité le témoin dans l'hôpital, et le

 11   témoin a répondu que l'hôpital était aux mains des Musulmans et qu'ensuite

 12   les Chetniks sont venus. Mais le témoin n'a même pas encore confirmé qu'il

 13   avait été maltraité. Si vous trouvez ça acceptable, je n'interviendrai

 14   plus.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vais demander à la Cour de regarder

 16   la page 28, ligne 2.

 17   "Question : Est-ce que quelqu'un est venu à l'hôpital et vous a

 18   maltraité ?

 19   Réponse : Oui."

 20   Maintenant qu'il a dit qu'il avait été maltraité, j'aimerais qu'il réponde

 21   à la question, à savoir qui l'a maltraité.

 22   Q.  Pourriez-vous le dire à la Chambre de première instance, et de lui dire

 23   qui vous a maltraité ?

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas eu la réponse du témoin en langue

 25   serbe. Ce qui a au compte rendu d'audience, cela vous concerne. Mais le

 26   témoin a été clair. Il était à l'hôpital, et l'hôpital était entre les

 27   mains des Musulmans pendant trois jours, ensuite les Chetniks sont arrivés.

 28   Quant aux mauvais traitements, il n'en a pas dit un seul mot dans cette

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  1   réponse.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, bon, vous avez été pendant trois jours à

  3   l'hôpital, l'hôpital a été occupé par les Chetniks. Alors vous avez dû être

  4   maltraité après les trois jours ?

  5   Non, expliquez-nous quand vous avez été maltraité ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas resté que trois jours à

  7   l'hôpital, j'y suis resté neuf jours. Pendant tous les trois premiers,

  8   l'hôpital était encore entre les mains des Musulmans, après la chute de

  9   l'hôpital et après la prise de l'hôpital par les Chetniks, c'est alors que

 10   j'étais maltraité.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Là, on comprend mieux.

 12   Mme BIERSAY : [interprétation]

 13   Q.  Qui vous a maltraité ?

 14   R.  Je peux simplement dire le nom ou --

 15   Q.  Oui, le nom, s'il vous plaît.

 16   R.  Mirko Blagojevic et deux autres.

 17   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance comment est-ce

 18   qu'il vous a maltraité ?

 19   R.  Il a arraché la perfusion. Il a planté sa baïonnette dans ma blessure.

 20   Il a dit qu'il reviendrait, qu'il m'emmènerait à Amajlije pour se défouler

 21   sur moi.

 22   Q.  Qu'est-ce qu'il vous a dit concernant le village d'Amajlije, Mirko

 23   Blagojevic ?

 24   R.  Je sais que tous ceux qui ont été emmenés là-bas ne sont jamais

 25   revenus. Personne n'en est revenu vivant.

 26   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance si oui ou non des

 27   responsables politiques connus ont rendu visite à l'hôpital ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  De qui s'agissait-il ?

  2   R.  La présidente Plavsic, Fikret Abdic, Arkan.

  3   Q.  Après Marko Blagojevic, après qu'il ait mis quelque chose dans vos

  4   blessures, enfoncé quelque chose dans vos blessures comme vous l'avez dit à

  5   la Chambre de première instance, l'avez-vous revu par la suite ?

  6   R.  Il est revenu quand Fikret s'est rendu sur place avec la présidente

  7   Plavsic, et lui était en tête. Il est revenu à ce moment-là, avec lui.

  8   Q.  Vous a-t-il dit quelque chose ou vous a-t-il fait quelque chose ?

  9   R.  Je n'ai pas compris la question, excusez-moi. Vous pensez à l'hôpital ?

 10   Q.  Oui, à l'hôpital, est-ce qu'il vous a dit quelque chose pendant que

 11   vous étiez avec -- est-ce que les autres personnes dont vous avez parlé,

 12   Plavsic, Abdic, Arkan, vous ont-ils dit quelque chose ?

 13   R.  Il a dit que tout cela était des forces paramilitaires et que tout

 14   allait bien car la JNA allait venir, et que tout allait s'apaiser. C'est ce

 15   qu'il a dit et c'est ce qui s'est passé finalement.

 16   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais voyons qui lui a dit cela, il est question

 18   ici de trois personnes, on ne voit pas qui a tenu ces propos.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 20   Monsieur le Témoin, qui vous a dit ça ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est Mme Plavsic et M. Abdic qui m'ont dit

 22   cela. Ils appartenaient à un groupe et ils étaient en conversation.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation]

 24   Q.  Quand -- comment se fait-il que vous êtes sorti de l'hôpital au bout de

 25   ces neuf jours dont vous nous avez parlé ?

 26   R.  C'est Arkan qui m'a libéré. Il m'a dit de rentrer chez moi, et que

 27   personne n'allait me porter préjudice. Mais, en même temps, il m'a dit de

 28   ne pas quitter ma maison.

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  1   Q.  Est-ce que vous décrirez cela comme une arrestation à domicile ou

  2   s'agissait-il d'autre chose ?

  3   R.  Il s'agissait pour moi simplement de savoir quand ils allaient arriver

  4   pour venir me chercher et me tuer. C'était cela : "On te relâche mais tu

  5   n'as nulle part où aller; qu'à attendre jusqu'au moment, ils allaient venir

  6   me chercher pour m'égorger."

  7   Q.  Etes-vous resté chez vous ?

  8   R.  Oui, un temps, je suis resté chez moi.

  9   Q.  Après ce temps dont vous venez de parler, pourquoi avez-vous quitté

 10   votre domicile ?

 11   R.  J'ai reçu une lettre qui m'a fait plus de peur, et j'ai fui.

 12   Q.  Que disait cette lettre qui a pu vous faire peur ?

 13   R.  C'étaient quelques phrases, il était écrit : "Turc, l'heure est arrivée

 14   pour toi de payer pour ce que tu nous as fait." Je ne sais pas ce que

 15   j'avais fait mais c'était signé : "Les Chetniks serbes." Quiconque, qui a

 16   écrit cette lettre, n'avait pas osé signer de son nom, mais c'était marqué

 17   : "Les Chetniks, Chetniks serbes."

 18   Q.  Avez-vous été arrêté lorsque vous avez quitté votre domicile ?

 19   R.  Peut-être après cinq ou je ne sais pas, cinq jours ou je ne sais pas

 20   combien de temps exactement, oui, j'ai été arrêté.

 21   Q.  Qui vous a arrêté ?

 22   R.  C'était ce qu'on considérait encore comme la police civile à l'époque,

 23   le MUP. C'était plutôt une chance pour moi.

 24   Q.  Est-ce la seule et unique fois que vous avez été arrêté ?

 25   R.  Non, j'ai été arrêté alors, je ne sais pas exactement combien de temps,

 26   peut-être deux, trois, puis j'ai fui, je me suis enfui. J'ai réussi à

 27   m'enfuir.

 28   Q.  Lorsque vous dites : "Le temps là-bas," cela veut dire que vous voulez

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  1   parler du MUP, c'est-à-dire que vous êtes resté au MUP ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Après avoir fui le MUP, vous avez été arrêté une nouvelle fois, n'est-

  4   ce pas ?

  5   R.  Oui. Peut-être après quelques mois, deux mois et demi peut-être, un

  6   mois ou deux, je ne sais pas exactement.

  7   Q.  Qui vous a arrêté la deuxième fois ?

  8   R.  Ils étaient masqués et en uniforme.

  9   Q.  Où vous a-t-on emmené lorsque vous avez été arrêté ?

 10   R.  On m'a également emmené au MUP.

 11   Q.  Vous a-t-on dit pourquoi on vous arrêtait cette fois-là ?

 12   R.  Non, personne ne m'a rien dit. On m'a simplement frappé, personne ne

 13   m'a dit un seul mot.

 14   Q.  Combien de temps êtes-vous resté au MUP ?

 15   R.  Quatre jours, mais c'était comme si j'étais resté quatre ans.

 16   Q.  Le quatrième jour, est-ce que d'autres prisonniers vous ont rejoint au

 17   MUP ?

 18   R.  Oui, trois prisonniers.

 19   Q.  A quel groupe ethnique appartenait-il, si vous le savez ?

 20   R.  Ils étaient Musulmans eux aussi.

 21   Q.  Vous souvenez-vous du nom de ces trois personnes ?

 22   R.  Il y avait Ejup Smajic, il y avait le dénommé Zlatar et puis Ferid

 23   Zecevic.

 24   Q.  Comment étaient-ils traités au MUP ?

 25   R.  De façon que j'aie été traité, moi, personne ne leur a rien demandé,

 26   ils ont simplement reçu des coups.

 27   Q.  Après votre quatrième jour au MUP, vous a-t-on emmené ailleurs ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Où vous a-t-on emmené ?

  2   R.  On nous a mis des sacs pardessus la tête et on nous a dit qu'on nous

  3   emmenait à Amajlije -- des sacs ou des bas qu'on nous a passé par -- sur la

  4   tête.

  5   Q.  Avant qu'on ne vous recouvre la tête de bas ou de sacs, avez-vous pu

  6   voir quel était le type de véhicule à bord desquels on allait vous faire

  7   monter ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Qui d'autres a été emmené avec vous ?

 10   R.  Ejup Smajic a été emmené, je ne sais pas si Zlatar était là aussi --

 11   Q.  Est-ce que nous parlons des mêmes trois personnes qui vous ont rejoint

 12   au MUP ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  En fait, est-ce que l'on vous a emmené à Amajlije comme on vous l'avait

 15   dit ?

 16   R.  Non. On nous a emmené au camp de Batkovic.

 17   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance à quoi ressemblait

 18   ce camp de Batkovic une fois que vous avez pu voir ?

 19   R.  Il s'agissait de deux hangars séparés. Il y avait -- un enclos de

 20   barbelé autour, des gardes, des hommes qui étaient tous -- le crâne rasé --

 21   il y avait deux tentes. On ne pouvait pas faire entrer tout le monde dans

 22   les deux hangars c'est pourquoi il y avait ces deux tentes à l'extérieur.

 23   Q.  Combien de temps êtes-vous resté au camp de Batkovic ?

 24   R.  La première fois je suis resté environ trois mois.

 25   Q.  Au cours de ces trois mois, avez-vous pu évaluer grosso modo le nombre

 26   de prisonniers dans ce camp ?

 27   R.  Environ 2 000, peut-être un peu plus ou un peu moins mais à peu près

 28   cela.

Page 14314

  1   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance, pendant la durée

  2   approximative où vous êtes resté là-bas ? De quel mois s'agissait-il en

  3   1992, la première fois ?

  4   R.  C'était en juin, en juin ou en juillet. Je sais qu'il faisait une très

  5   forte chaleur.

  6   Q.  Pour reparler de ce chiffre approximatif que vous venez de donner à la

  7   Chambre de première instance, parmi toutes ces personnes, étiez-vous à même

  8   de juger de la composition ethnique de ce groupe de 2 000 personnes ?

  9   R.  C'était une majorité des Musulmans. Il y avait un nombre moins

 10   important de Croates aussi.

 11   Q.  Lors de votre premier séjour, les trois mois dont vous venez de parler,

 12   est-ce que vous avez appris de quels villages venaient certaines de ces

 13   personnes ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Pardon, de quels villages ?

 16   R.  De Vlasenica, Bratunac, Zvornik, de Brcko, de Brezovo Polje, de

 17   Kalesija, de Tojcici, et il y en a d'autres encore de toutes les régions.

 18   Q.  Pour que la Chambre de première instance comprenne bien, où se trouve

 19   Batkovic par rapport à Bijeljina ?

 20   R.  Cinq à six kilomètres de Bijeljina, mais du côté opposé par rapport à

 21   Amajlije.

 22   Q.  Lors de votre premier séjour au camp de Batkovic, avez-vous vu des

 23   prisonniers plus âgés ?

 24   R.  Il y avait beaucoup de personnes âgées et d'enfants.

 25   Q.  Des femmes ?

 26   R.  Il y avait une femme.

 27   Q.  Sur ces 2 000 personnes approximativement, à votre sens, combien

 28   d'entre elles étaient des civils et combien n'étaient pas des civils ?

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  1   R.  C'était tout des civils. Il y avait deux prisonniers qu'on appelait

  2   "les Bérets verts," et tous les autres étaient des civils -- et plutôt des

  3   infirmes des gens qui sont -- des gens qui étaient impuissants.

  4   Q.  Savez-vous qui était le commandant du camp, du camp de Batkovic ?

  5   R.  La première fois c'était un homme de Novi Sad, un officier de Novi Sad

  6   mais je pense que j'ai oublié son nom.

  7   Q.  Avant le début de votre détention donc c'était en juin 1992, vous nous

  8   avez décrit qu'il faisait extrêmement chaud au moment de votre détention.

  9   Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre de première instance s'il y a

 10   eu des morts du fait des conditions de vie dans le camp de Batkovic ?

 11   R.  Oui, il y en a eus.

 12   Q.  Approximativement combien de personnes sont décédées en raison des

 13   conditions de vie dans le camp ? Plusieurs centaines, et des trois

 14   personnes qui sont venues avec moi, deux ont été tués par tabassage, sont

 15   morts suite au tabassage qu'ils ont subi, Zlatar et Ferid Zecevic, et il

 16   n'y a que Smajic et moi qui avons survécu de ce groupe-là.

 17   Q.  Est-ce que vous avez été passé à tabac lorsque vous étiez dans le camp

 18   de Batkovic pendant ces trois mois ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  A quelle fréquence avez-vous été passé à tabac ?

 21   R.  Cinq fois par jour, et parfois plus encore. A l'heure du déjeuner, du

 22   dîner, de la mise en rang, et puis pendant la nuit c'était le pire

 23   lorsqu'ils nous tabassaient autant qu'ils le pouvaient le faire pendant la

 24   nuit.

 25   Q.  Avec quoi vous frappaient-ils ?

 26   R.  Il aurait été peut-être préférable de demander avec quoi ils ne nous

 27   ont pas frappés.

 28   Q.  Mais pourriez-vous nous donner des exemples de ce qu'ils ont utilisé ?

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  1   R.  Des chaînes, des barres, des manches de hache. Ils ont utilisé tout ce

  2   dont ils disposaient, et ensuite ils ont pris également des blocs de

  3   roches, des pierres, et j'ai dû m'agenouiller pour rendre leur tabassage au

  4   moyen de ces pierres plus faciles.

  5   Q.  Pourquoi vous demandait-on de vous agenouiller ?

  6   R.  Parce qu'ils étaient petits et, moi, j'étais grand donc ils ne

  7   pouvaient pas me frapper à la tête.

  8   Q.  Quelles sont les blessures qu'ils vous ont été infligés suite à ce

  9   passage à tabac ?

 10   R.  J'ai eu des côtes cassées, mon bras était cassé également, des

 11   fractures au dos. J'ai également eu une blessure à la tête avec huit points

 12   de suture. Donc j'avais deux côtes cassées d'un côté et trois de l'autre.

 13   Il y aurait certaines cicatrices sont toujours visibles.

 14   Q.  Quels sont les aliments, si tant est, qu'on vous en donnait, que vous

 15   receviez pendant ces trois mois ?

 16   R.  On nous donnait des haricots, de soupe d'haricots qui avait été déjà

 17   périmée, qui était -- comment pourrait-on la manger ? Je ne la mangeais

 18   pas. Ils me battaient et ensuite ils me donnaient quelque chose à manger,

 19   comme à un chien.

 20   Q.  Les personnes qui vous frappaient, à quel groupe ethnique

 21   appartenaient-ils, pour autant que vous puissiez le savoir ?

 22   R.  C'était les Serbes.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   R.  C'était des Serbes, mais malheureusement, il y avait aussi deux

 25   Musulmans qui étaient, eux aussi, des prisonniers. Mais eux y participaient

 26   aussi au tabassage. Pourquoi ? Sans doute pour sauver leur propre peau.

 27   Q.  Est-ce que l'on n'a jamais cru que vous étiez mort pendant ces trois

 28   premiers mois de détention au camp de Batkovic ?

Page 14317

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Qu'est-ce que -- quel est donc

  2   cette question ? Est-ce que l'accusé a pensé qu'il était mort à un moment

  3   donné ? Peut-être aujourd'hui le -- comment le témoin peut-il seulement

  4   penser qu'il est mort ? Qu'est-ce que --

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Ce n'était pas là ma question, je vais

  6   la reformuler.

  7   Q.  D'autres personnes ont-elles cru que vous étiez décédé --

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] L'interprète vient de se reprendre, c'était une

  9   erreur dans l'interprétation. L'interprète avait traduit si le témoin avait

 10   -- qu'on a demandé au témoin s'il avait pensé être mort.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une erreur dans l'interprétation.

 12   Reprenez, Monsieur Biersay.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Biersay, est-ce que vous

 14   pourriez également voir avec le témoin s'il est à même de nous donner des

 15   informations sur les gardes serbes de la prison, et s'agissait-il des

 16   soldats de la JNA, de volontaires, ou toute autre information que le témoin

 17   pourrait nous donner.

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Certainement, Monsieur le Juge.

 19   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre de première instance est-ce que

 20   d'autres personnes vous ont considéré comme mort ?

 21   R.  A quatre reprises, j'ai été transporté parmi les cadavres, et pendant

 22   que j'étais transporté, est-ce que c'est parce que j'ai bougé un bras ou

 23   une jambe, que l'on s'est rendu compte que j'étais encore en vie, et qu'on

 24   m'a fait sortir du convoi ? Je ne sais pas, mais c'est arrivé à quatre

 25   reprises.

 26   Q.  Avant que je n'attire votre attention sur la question posée par le Juge

 27   Harhoff, pourriez-vous dire à la Chambre de première instance si, oui ou

 28   non, on vous ait mis dans un groupe particulier pendant que vous étiez au

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  1   camp de Batkovic ?

  2   R.  Oui. Nous étions dix dans un groupe, et on nous appelait "les

  3   spéciaux." Enfin, spécial, je ne sais pas ce que cela veut dire, ce que ça

  4   voulait dire pour eux. Peut-être que nous étions spécialement destinés à

  5   être tabassés.

  6   Q.  Maintenant je vous reporterais à la question de -- êtes-vous à même de

  7   décrire, par exemple, les uniformes, que les personnes qui vous passaient à

  8   tabac, ceux qui n'étaient pas prisonniers, portaient ? Est-ce que vous vous

  9   souvenez quels étaient les uniformes que portaient ces personnes qui vous

 10   frappaient ?

 11   R.  Il y avait différents types d'uniformes. Il y avait des uniformes de la

 12   JNA, il y avait des uniformes multicolores, des uniformes noirs, des

 13   "hommes d'Arkan" portaient ces uniformes. Il y avait différentes sortes

 14   d'uniformes.

 15   Q.  Au cours de votre détention, votre première détention au camp de

 16   Batkovic, est-ce que la Croix-Rouge internationale est venue en visite dans

 17   ce camp pendant la période où vous y trouviez ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  N'avez-vous jamais été inscrit sur une liste par la CICR pendant que

 20   vous étiez au camp de Batkovic ?

 21   R.  Ces neuf autres spéciaux et moi-même, non, n'ont pas été enregistrés.

 22   Ils ont enregistré les personnes âgées et les enfants, mais nous, on nous a

 23   cachés. On nous a cachés à un ou deux kilomètres de distance du hangar, et

 24   ils informaient le CICR que des -- ils étaient toujours informés de la

 25   venue du CICR donc ils nous cachaient avant.

 26   Q.  Avez-vous été maltraité pendant que l'on vous cachait aux yeux de la

 27   CICR ?

 28   R.  Oui, nous autres, les dix personnes que nous étions, nous étions

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  1   toujours à part, et ils nous ont emmenés dans un hangar bétail qui

  2   s'appelait le "Cardak [phon]," et là, ils se livraient à toutes sortes de

  3   mauvais traitements inimaginables, quelque chose qui ne traverserait même

  4   pas à l'esprit d'une personne normale.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question.

  6   Ce camp de Batkovic, je regarde dans le mémoire préalable, il n'en

  7   est question nulle part, rien n'indique ce camp. Le témoin apparaît en note

  8   de bas de page dans le mémoire préalable à deux, trois reprises, mais, moi,

  9   je parle du mémoire préalable. Je ne parle pas de la déclaration. Dans le

 10   mémoire préalable, le témoin il est cité pour le siège de la ville. Il est

 11   cité à la note de bas de page 238, parce que les volontaires ont encerclé,

 12   attaqué Bijeljina. Il est cité à la note de bas de page 241, pour la

 13   participation de Blagojevic à des agressions. En fait, il est cité au 244,

 14   concernant le café Srbija où M. Seselj serait venu au café Srbija. Voilà.

 15   Donc vous passez quasiment une heure sur ce camp, alors que dans le

 16   mémoire préalable et l'acte d'accusation, il n'en est fait état nulle part.

 17   Comme vous voulez.

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Comme le sait la Cour, nous présentons

 19   ces éléments de preuve pour montrer le schéma suivi au niveau des crimes.

 20   Je comprends que cela ne figure pas clairement dans l'acte d'accusation et

 21   que cela concerne donc le site du crime; et le témoignage est là pour

 22   donner une idée du schéma des crimes commis comme nous l'avons dit.

 23   Je voudrais attirer votre attention sur le résumé du 65 ter, où ces

 24   événements sont décrits.

 25   Monsieur le Président, je regarde l'heure et je pense que vous

 26   souhaitez peut-être faire une pause.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire une pause --

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux faire juste une remarque

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  1   avant la pause ?

  2   Monsieur le Président, puisque nous avons été informés que le médecin --

  3   qu'un médecin est présent au Tribunal, j'exige que, pendant la durée de

  4   cette pause, le médecin examine les jambes de ce témoin. L'une de ses

  5   jambes - je suppose qu'il s'agit de la jambe gauche - ce témoin doit porter

  6   la cicatrice d'une blessure portée par un tir de pistolet et que le médecin

  7   nous dise si au niveau de cette blessure causée par un pistolet, nous

  8   trouvons les traces de quelque blessure que ce soit causée par une

  9   baïonnette. C'est là quelque chose que tout médecin peut établir de façon

 10   très simple. Une blessure causée par une baïonnette peut cicatriser mais

 11   pas sans laisser justement des cicatrices visibles.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre demande sur le plan de la procédure pourrait

 13   être intéressante, mais le problème c'est que le médecin en question fait

 14   le minimum, quasiment rien, à part faire les piqûres ou faire des

 15   certificats, il n'agit pas. Donc si on lui demande ça, il refusera. Mais,

 16   moi, je laisse le médecin de côté.

 17   Monsieur, sous la foi du serment, vous nous avez dit que vous avez été

 18   battu, on vous a cassé des os, et cetera, et cetera. Est-ce que vous portez

 19   sur votre jambe la trace d'un coup de baïonnette ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Ça se voit ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été blessé, c'est visible.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être que cela n'a pas été traduit. Mais le

 24   témoin mélange aussi la blessure due à la balle, tirée par un pistolet, et

 25   la blessure due à la baïonnette. Ce sont deux choses distinctes.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous avez dit quand vous étiez à l'hôpital, il

 27   y a Marko Blagojevic qui est venu, avec sa baïonnette, il vous l'a mise

 28   dans la blessure. C'était la blessure à la jambe --

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  1   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]  

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Il a rentré la baïonnette ou il vous a fait une

  3   estafilade ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, c'est-à-dire il vous a percé la jambe ou il

  6   vous a coupé la jambe ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand j'ai été blessé, la balle en fait est

  8   sortie de l'autre côté. Il y a, là encore, la trace du chemin qu'a emprunté

  9   la balle qui est entrée par l'avant de la jambe et qui est sortie par

 10   l'arrière. C'est dans cette blessure qu'il a planté la baïonnette.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, si la balle est sortie,

 12   il est bien connu que dans ce cas-là aucune intervention chirurgicale n'est

 13   pratiquée, que la blessure se cicatrise. Il s'agit d'une blessure externe,

 14   dans ce cas-là, cela se cicatrise très vite.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il a raison. Il indique que c'est

 18   une question de contre-interrogatoire. Vous aurez l'occasion de revenir là-

 19   dessus.

 20   Nous, on en enregistre à ce stade que le témoin a été blessé par une balle

 21   qui est rentrée et qui est sortie, et il nous dit que Blagojevic lui a mis

 22   la baïonnette dans le trou. Voilà, c'est tout.

 23   Oui.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation] Très rapidement, pour le compte rendu

 25   d'audience, je voudrais dire que le témoin n'a jamais parlé de baïonnette.

 26   M. Seselj utilise des éléments repris dans le compte rendu d'audition et

 27   crée un faux problème. Ceci fait l'objet d'un contre-interrogatoire mais la

 28   baïonnette a été mentionnée pour la première fois par M. Seselj, dans ce

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  1   prétoire.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, cela n'est tout

  3   simplement pas vrai. J'ai noté que le témoin a fait mention d'une

  4   baïonnette. 

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est peut-être une erreur. Moi, j'ai à moins d'être

  6   dans une confusion mentale, j'ai cru comprendre que le témoin nous avait

  7   dit qu'il était à l'hôpital, M. Blagojevic a pris une baïonnette pour lui

  8   mettre dans la blessure. Moi, c'est ce que j'ai compris.

  9   Monsieur le Témoin, il n'y a que vous qui pouvez lever le doute. Est-

 10   ce que vous avez dit que c'était M. Blagojevic, qui avait enfoncé sa

 11   baïonnette dans votre blessure ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il s'agissait d'un couteau ou 

 13   d'une baïonnette mais c'est la même chose pour moi.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Un couteau ou une baïonnette, pour vous, c'est

 15   la même chose.

 16   Bien. Nous allons faire 20 minutes de pause.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la même chose.

 18   --- L'audience est suspendue à 15 heures 51.

 19   --- L'audience est reprise à 16 heures 16.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise, Madame Biersay.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation]

 22   Q.  Où vous a-t-on emmené après vos trois mois de détention au camp de

 23   Batkovic ?

 24   R.  On nous a emmené à Doboj, c'était un petit camp qui s'y trouvait à

 25   Usora.

 26   Q.  S'agissait-il d'un camp comme le camp de Batkovic ?

 27   R.  C'était encore plus petit et il y avait aussi moins de personnes et

 28   c'était également des hangars.

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  1   Q.  Est-ce que vous y étiez prisonnier dans ce camp également ?

  2   R.  Oui, à ceci près qu'il nous frappait moins.

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  Onze mois et demi.

  5   Q.  Ce camp portait-il un autre nom ?

  6   R.  Usora.

  7   Q.  Outre le fait que vous avez été battu également dans ce camp, est-ce

  8   que les prisonniers étaient forcés d'accomplir certaines tâches ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  De quel type de tâches s'agissait-il ?

 11   R.  Il s'agissait de tous les travaux possibles imaginables, couper du

 12   bois, travailler dans des entrepôts, creuser des tranchées, sortir les

 13   cadavres des Chetniks morts.

 14   Q.  Qu'entendez-vous par "ramener les Chetniks décédés ?"

 15   R.  Quand il y avait des tirs, quand il y avait des affrontements, et bien

 16   il fallait aller chercher les morts, qu'il s'agisse d'ailleurs des Chetniks

 17   ou des Musulmans. Je n'avais peut-être pas bien répondu.

 18   Q.  Où, alliez-vous chercher des personnes décédées ?

 19   R.  Nous allions les chercher sur les lignes qui entouraient Doboj et puis

 20   dans les villages environnants.

 21   Q.  Est-ce que c'est vrai que vous avez utilisé le terme "Chetniks." Est-ce

 22   que cela était vrai aussi bien pour les Chetniks que pour les Musulmans ?

 23   R.  Pour ce qui est des morts.

 24   Q.  Après votre détention à Doboj, vous a-t-on emmené ailleurs ?

 25   R.  Oui. On nous a ramené à Batkovic à cause d'un échange important.

 26   Q.  Combien de temps avez-vous passé à Batkovic la deuxième fois ?

 27   R.  Trois mois.

 28   Q.  Quand avez-vous enfin été libéré ?

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  1   R.  Le 8 novembre 1993.

  2   Q.  Comment est-ce que vous voyez ce jour, cette journée du 8 novembre 1993

  3   ?

  4   R.  C'est comme un autre anniversaire, un jour d'anniversaire pour moi.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] L'Accusation n'a pas d'autres questions,

  6   Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci, Madame Biersay.

  8   Juste une petite question complémentaire, Monsieur le Témoin. Vous aviez

  9   dit très vite que M. Seselj avait tenu un meeting en mars 1992, c'est ce

 10   que j'ai cru comprendre à Bijeljina. C'est vrai ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non pas en mars 1992 mais avant l'éclatement

 12   de la guerre à Bijeljina, c'est donc avant le mois de mars 1992.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- l'année 1990, 1991, 1989, quelle

 14   année ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] 1992. 1992 avant l'éclatement de la guerre,

 16   1991 ou 1992 mais quelques mois avant le début de la guerre.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit que vous avez été à ce meeting --

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] 31 mars c'était le début de la guerre.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'était avant. Vous avez été à cette réunion ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout le monde était là, tous les citoyens

 21   de la ville étaient venus.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Seselj a tenu un discours ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tous les citoyens étaient présents et

 24   c'est lui qui tenait ce discours.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez écouté son discours ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] J'en ai écouté un petit peu, ensuite je suis

 27   parti. Après, il y a eu une bagarre qui a éclaté. C'est ce que j'ai entendu

 28   dire.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Ça devient intéressant. Il y a eu une bagarre; une

  2   bagarre entre qui et qui ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Entre les Serbes et les Musulmans, c'est lui

  4   qui avait d'ailleurs incité à cela par son discours.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : La police était présente ou pas ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la police était présente, la situation

  7   était encore normale. Ça n'était pas encore la guerre.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'était pas encore la guerre. Alors si ce que

  9   vous dites est vrai - je dis bien "si" - s'il y a eu ce discours et ce

 10   meeting, vous le savez, vous ne le savez pas; est-ce qu'à l'époque, il

 11   fallait demander une autorisation à la police pour tenir un meeting

 12   politique ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Il avait tout cela en sa disposition. Il avait

 14   ce qu'il fallait, il faisait ce qu'il voulait. Il se rendait là où il le

 15   souhaitait.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous dites : je suis allé au discours, je ne

 17   suis pas resté pendant --

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas resté jusqu'à la fin.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous, vous êtes sûr que c'est en 1992 ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était deux ou trois mois avant le début de

 21   la guerre, donc en 1991 ou en 1992 -- fin de 1991 ou début 1992.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne vous rappelez pas comment vous étiez habillé

 23   ? Vous aviez un manteau, un costume, un jean; vous ne vous rappelez pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne me souviens pas de la date.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait des journalistes qui étaient là ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suppose qu'il y avait des -- qu'est-ce

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  1   que je pouvais en fait en savoir ? Je suppose qu'il y avait effectivement

  2   des journalistes.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, il y a eu des articles de

  4   presse après ou pas sur le meeting ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. J'ai déjà déclaré que je

  6   n'étais pas intéressé par la politique et je n'ai pas lu quoi que ce soit

  7   de cet ordre. Il y avait des choses qu'on pouvait voir à la télévision.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous pourrez donner une explication sur

  9   le fait que dans tous les témoins qui ont été entendus sur Bijeljina,

 10   personne n'a parlé de ce meeting ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'ils avaient peur. Ils se cachent

 12   tous. C'est quelque chose que je n'ai jamais fait. Moi, je ne pense jamais

 13   revenir à Bijeljina.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Ils avaient peur vous dites, mais --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il s'agit de personnes qui ont peur et

 16   qui, par conséquent, n'ont pas le droit de dire quoi que ce soit. J'aime

 17   mon propre pays, la Bosnie, j'aime mon peuple, mais ma place n'est plus là-

 18   bas, malheureusement.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, très bien.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous rappelez

 21   pendant ce meeting, c'était ou l'hiver, c'était le début du printemps,

 22   comment les gens étaient-ils habillés ? Y avait-il la neige ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il n'y en avait pas, c'était un temps

 24   normal.

 25   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc peut-être aussi le début du printemps ? A peu

 26   près le passage entre l'hiver et le printemps ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en sais rien. Comment pourrais-je

 28   savoir le moment exact de l'année où cela s'est passé.

Page 14328

  1   Mme LE JUGE LATTANZI : Vous ne vous rappelez pas, vous n'avez pas besoin de

  2   vous rappeler. Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous avez une heure.

  4   Contre-interrogatoire par M. Seselj :

  5   Q.  [interprétation]   Monsieur Gusalic, est-ce que vous habitez toujours

  6   aux Etats-Unis ?

  7   R.  Ce n'est pas ton problème.

  8   Q.  Je vous vouvoie, donc j'apprécierais que vous me vouvoyiez aussi.

  9   R.  Vous n'avez pas besoin de savoir où je réside.

 10   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] S'il vous plaît, dites-lui, Monsieur le

 12   Président, qu'il n'a pas le droit de me demander où j'habite. Je vous

 13   demande, Monsieur le Président, de bien vouloir le faire.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Seselj a le droit de vous contre-interroger, et

 15   de mettre en doute tout ce que vous avez dit. Donc nous savons que vous

 16   n'habitez pas aux Pays-Bas, c'est certain, maintenant le reste est

 17   secondaire.

 18   Oui, Madame Biersay.

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, M. Seselj n'a fait

 20   preuve d'aucune -- n'a pas montré la pertinente de cette question. Si nous

 21   devons parler de l'endroit où vit ce témoin, je demanderais à ce que soit

 22   fait à huis clos. La première chose que je voudrais dire c'est que cela n'a

 23   aucune pertinence ici.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est pas un témoin protégé.

 26   M. SESELJ : [interprétation]

 27   Q.  Est-ce que vous habitez encore dans l'état de l'Iowa aux Etats-Unis ?

 28   R.  Je vis à Bijeljina.

Page 14329

  1   Q.  Bijeljina ? Quand est-ce que vous avez quitté l'Iowa ? Vous devez

  2   répondre à ma question. Quand avez-vous quitté l'état de l'Iowa des Etats-

  3   Unis d'Amérique ?

  4   R.  C'est lorsque j'ai quitté ma femme, après le procès 1993.

  5   Q.  Vous êtes rentré en conflit également avec les autorités américaines ?

  6   R.  [imperceptible]

  7   Q.  Vous me dites que je le sais. Vous devez d'abord me vouvoyez. Vous

  8   devez vous comporter adéquatement devant ce Tribunal. Vous avez

  9   l'obligation de le faire.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, continuez.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous n'avez peut-être pas bien entendu,

 12   Monsieur le Président. Mais le témoin m'a dit : "Voilà, tu vois que tu le

 13   sais." Je sais maintenant que vous êtes rentré en conflit avec les

 14   autorités américaines.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, ne tutoyez pas l'accusé. Il vous

 16   vouvoie, vouvoyez-le. S'il vous dit "vous," vous dites "vous;" s'il vous

 17   dit "tu;" vous pourrez lui dire "tu." Mais pour le moment où il vous dit

 18   "vous," le "vous" c'est une marque de respect pour quelqu'un. Vous avez

 19   compris.

 20   Continuez, Monsieur Seselj.

 21   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation] 

 22   M. SESELJ : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous avez eu des conflits ou un conflit avec les autorités

 24   américaines alors que vous étiez aux Etats-Unis d'Amérique ?

 25   R.  Non, je n'ai pas eu de conflit.

 26   Q.  Est-ce que vous ne vous êtes pas jamais fait arrêter ?

 27   R.  [imperceptible]

 28   Q.  D'abord. On vous a interdit de -- vous avez une interdiction de vous

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  1   rapprocher -- de vous approcher de votre ancienne épouse, une certaine

  2   distance parce que vous lui avez fait subir de mauvais traitements, vous

  3   l'avez maltraitée; est-ce qu'effectivement, il y a une interdiction de

  4   l'approcher ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Vous avez enfreint ce jugement de la Cour et vous avez été arrêté. Par

  7   la suite, la police vous a appréhendé alors que vous conduisez en état

  8   d'ébriété ?

  9   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 10   R.  Oui.

 11   Q.  C'est également la raison pour laquelle vous avez été arrêté, et

 12   "Cityview," c'est un quotidien qui sort dans la ville Des Moines dans

 13   l'état de l'Iowa.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin et Monsieur

 15   Seselj, une fois de plus nous nous retrouvons avec le même problème, les

 16   interprètes ne peuvent pas suivre ce que vous dites parce que vous parlez

 17   en même temps, et que vous ne marquez pas de pause entre la question et la

 18   réponse, ce qui fait qu'il est impossible pour les interprètes de pouvoir

 19   vous suivre. Si les interprètes ne peuvent pas vous suivre, alors nous ne

 20   pourrons pas non plus vous suivre. Donc je vous demanderais de faire un

 21   effort, tous les deux, tout particulièrement vous, Monsieur Seselj, parce

 22   que vous avez l'habitude du système ici. Ne posez pas votre question avant

 23   d'être sûr que l'interprétation est bien terminée.

 24   Merci.

 25   M. SESELJ : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que les journaux américains ont parlé de ces arrestations ?

 27   R.  Je ne le sais pas.

 28   Q.  N'avez-vous jamais entendu parler le quotidien qui s'appelle "Cityview"

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  1   qui sort dans la ville de Des Moines ?

  2   R.  Je ne parle pas anglais, donc je ne sais pas.

  3   Q.  Quel le nom de la ville dans laquelle vous habitiez ?

  4   R.  Je ne m'en souviens plus.

  5   L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait se rapprocher des micros,

  6   Monsieur le Président ? On entend à peine.

  7   M. SESELJ : [interprétation]

  8   Q.  Mais on vous a arrêté également -- vous avez été appréhendé parce que

  9   vous avez conduit en état d'ébriété, vous avez également enfreint une

 10   décision de la Cour par laquelle vous n'aviez pas le droit de vous

 11   rapprocher de votre ex-épouse ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Avant la guerre est-ce que vous avez été arrêté à Bijeljina ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Jamais ?

 16   R.  Non.

 17   L'INTERPRÈTE : Le témoin est inaudible, Monsieur le Président.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, répondez plus fort parce que les

 20   interprètes ont du mal à vous entendre. Alors mettez le micro près de vous

 21   et puis parler plus fort.

 22   C'est un moment très difficile le contre-interrogatoire. Vous venez de vous

 23   en rendre compte, puisque M. Seselj a passé votre vie privée et il a

 24   énormément de renseignements. Donc, vous voyez, c'est un moment très

 25   difficile, bon, alors répondez tranquillement, ne vous énervez pas, soyez

 26   calme. Voilà.

 27   Monsieur Seselj, continuez.

 28   M. SESELJ : [interprétation]

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  1   Q.  Vous venez de dire qu'à Bijeljina avant la guerre vous n'avez jamais

  2   été arrêté, vous n'avez pas de casier judiciaire, n'est-ce pas ?

  3   R.  Qu'est-ce que vous entendez par "casier judiciaire" ?

  4   Q.  Vous n'avez pas de casier judiciaire, vous n'avez jamais été arrêté.

  5   R.  Vous voulez dire que j'ai tué quelqu'un ?

  6   Q.  Non. On ne va pas aux Juges -- au pénal parce qu'on a tué quelqu'un ou

  7   on ne va pas pour cela.

  8   R.  Vous voulez dire une bagarre, une bagarre ?

  9   Q.  Oui. Les bagarres, par exemple. Je viens de vous rappeler de bagarre.

 10   R.  Oui, oui, oui.

 11   Q.  En 1990, selon mes informations et en 1991, vous avez été arrêté à

 12   trois reprises.

 13   R.  Non, seulement une fois. En 1987.

 14   Q.  D'après mes informations, vous avez été --

 15   R.  En fait en 1987, je n'ai même pas eu de casier judiciaire pour ce qui

 16   est de 1987.

 17   Q.  En fait, ça ne m'intéresse pas du tout voilà. Parlons maintenant de

 18   l'année 1990, le 26 février, par la décision 755/90, vous avez violé la loi

 19   concernant le maintien de la paix car vous avez attaqué une personne

 20   physiquement; est-ce exact ?

 21   R.  Je ne le sais pas. Si c'est comme ça, si tu dis que c'est vrai, alors

 22   c'est vrai.

 23   Q.  Bien, moi, je vois un document ici, c'est un document officiel.

 24   R.  Je ne sais pas ce que ça veut dire.

 25   Q.  Ensuite le 21 août 1990, par la décision 6995/90 --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- je pense que vous allez dire ce

 27   qu'on a déjà dit, à savoir que ce document vous ne l'avez pas; c'est ça ?

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Tout à fait, exact, Monsieur le Président.

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  1   Nous voudrions que cela soit inscrit dans le procès-verbal. Est-ce que je

  2   pourrais demander un exemplaire de ce document à M. Seselj ?

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, M. Seselj nous a dit, il y a

  4   plusieurs semaines, ce n'était peut-être pas avec vous ou avec un de vos

  5   collègues qu'il avait interrogé les autorités pour avoir des renseignements

  6   sur les casiers judiciaires de toute une série de témoins, et on lui a

  7   répondu et il nous a montré le document qui était rédigé en B/C/S, où les

  8   autorités répondaient témoin par témoin sur les condamnations avec les

  9   numéros des dossiers. Voilà, je me souviens parfaitement de cela. Alors je

 10   présume que M. Seselj est en train de lire ce document.

 11   C'est bien ça, Monsieur Seselj ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président, c'est un autre

 13   document. C'est tout à fait un autre document. C'est un document qui ne

 14   porte que sur ce témoin, et Mme Biersay aurait sans doute dû trouver le

 15   document ou elle aurait pu le trouver, mais je ne vais pas le lui remettre.

 16   Mais elle peut vérifier en composant un certain numéro de téléphone que je

 17   peux lui donner, si effectivement il a violé la loi quant au maintien de la

 18   paix. C'était l'obligation de Mme Biersay de se procurer ce document, et

 19   non la mienne. Je ne vais pas lui venir en aide, plus particulièrement

 20   maintenant, après cette interruption de procès. Je ne vais absolument lui

 21   venir en aide. Je n'ai absolument aucune obligation de lui venir en aide.

 22   Je viens de remarquer que ce témoin pendant les deux années en question, a

 23   violé la paix à trois reprises alors que son corps est rempli de blessures

 24   il dit qu'il a pris part à -- enfin, il a pris part à des incidents tous

 25   les jours.

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : Si le témoin ne confirme pas, est-ce que vous pensez

 27   que nous pouvons prendre automatiquement votre mot pour vérité, ou ce ne

 28   serait pas mieux que vous lui donniez le document, traduit en anglais, en

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  1   demandiez la traduction pour qu'on puisse avoir l'appui pour cela ? Je ne

  2   peux pas vous croire automatiquement si le témoin ne confirme pas.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame Lattanzi, vous devez sans doute savoir

  4   depuis très longtemps que je ne m'entends absolument rien de vous. Je ne

  5   m'attends pas à ce que vous croyez quoi que ce soit, je n'essaie pas de

  6   vous convaincre que je dis la vérité.

  7   A la première question que j'ai posée au témoin, le témoin a confirmé qu'il

  8   avait été trouvé coupable en 1990. Ensuite pour le 21 août 1990, il m'a dit

  9   : "Oui, si c'est ce que tu me dis." C'était sa réponse. Alors j'ai

 10   maintenant une troisième donnée concernant un délit que le témoin a dit et

 11   voilà.

 12   Je sais que vous êtes venu ici avec un préjugé, vous avez un parti pris et

 13   vous savez déjà à l'avance quelle sera l'issue de ce procès, indépendamment

 14   de mon contre-interrogatoire. Alors c'est pour cela que je ne fais aucun

 15   effort. Tout ce que je veux c'est que le public comprenne que je conteste

 16   l'ensemble du témoignage de ce témoin --

 17   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro] -- réponse de ma part, Monsieur.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Seselj, je ne suis pas d'accord avec

 19   ce que vous venez de dire. Moi, je parle pour moi. Je ne parle pour mes

 20   collègues, c'est leur problème. Moi, le mien je suis dans un procès et

 21   j'essaie de comprendre ce qui s'est passé à l'époque. J'essaie d'évaluer ce

 22   que dit le témoin. J'écoute ce que dit le Procureur, j'écoute ce que dit

 23   l'accusé. Voilà. C'est au vu de tout cela que je me déterminerai.

 24   Donc j'ai cru comprendre, parce que vous nous aviez montré un premier

 25   document, que le deuxième document que vous avez est un document d'une

 26   autorité, qui vous indique quel est le passé du témoin. Bon. Voilà. Mais

 27   très bien. Même en admettant qu'il était condamné, la question qui se pose,

 28   c'est le reste.

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  1   Alors allez-y.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie ici de

  3   démontrer, en posant ces questions et en vous faisant comprendre les

  4   réponses, quel était le comportement de ce témoin à Bijeljina avant

  5   l'incident du café Srbija. De par son casier judiciaire, on peut voir très

  6   bien qu'il est passé par un très grand nombre de bagarres, et c'est un

  7   homme qui était connu par son comportement asocial. C'est ma thèse. Vous

  8   n'arrêtez pas de m'interrompre, j'ai l'impression que les Juges de la

  9   Chambre ne sont pas heureux de l'efficacité de mon contre-interrogatoire,

 10   et que vous n'êtes pas en accord avec les effets que j'obtiens, ça ne vous

 11   plaît pas. Alors, moi, je vous affirme que le témoignage de ce témoin est

 12   complètement faux, et c'est ce que j'essaie de vous prouver, mais vous

 13   n'arrêtez pas de m'interrompre.  

 14   C'est Mme Biersay qui aurait dû se procurer ce document.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- personne ne va vous interrompre

 16   mais, Monsieur Seselj, moi, je vous dis, les yeux dans les yeux, si vous

 17   avez un iota de soupçons contre moi, faites immédiatement une demande de

 18   récusation, si vous avez un iota; sinon, continuez votre interrogatoire.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Président,

 20   vous pensez que je suis un homme si naïf. Vous pensez que, dans ce

 21   Tribunal, il est absolument impossible de trouver quelqu'un de meilleur que

 22   vous. Mais, non, Monsieur le Président, s'il vous plaît, ne me faites pas

 23   rire, vous m'avez au moins permis de parler. Les autres se lèvent, hurlent

 24   à chaque fois que je dis un mot, mais ma position est critique envers le

 25   comportement de l'ensemble de la Chambre de première instance mais plus

 26   particulièrement de vos collègues.

 27   Je ne vais pas demander que l'on vous récuse, ni l'un ni l'autre de

 28   vos collègues mais vous parce que j'estime vous les trois Juges ici et vos

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  1   collègues -- que les autres seraient pires que vous. Mais je ne vais pas

  2   demander une récusation, et vous pouvez en faire ce que vous voulez.

  3   Je vous dis ça très gentiment sans vous offenser, sans vous insulter. C'est

  4   pour cela que vous avez, je crois, l'obligation de m'écouter lorsque je

  5   vous dis quelque chose qui ne vous plait pas et qui est désagréable. Alors

  6   permettez-moi de terminer ce contre-interrogatoire, s'il vous plaît

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Continuez.

  8   M. SESELJ : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que, le 20 mai en 1991, par la décision de la cour municipale de

 10   Bijeljina, avez-vous été trouvé coupable d'une violation de la loi qui

 11   selon laquelle vous avez enfreint la paix à cause d'un comportement qui

 12   était particulièrement désagréable ?

 13   R.  Il y a dix minutes, tu m'as dit que je mentais; je ne mens pas. Je n'ai

 14   jamais menti.

 15   Q.  Je ne vous ai pas dit que vous mentiez ?

 16   R.  Oui, oui.

 17   Q.  Il est une chose lorsque je dis aux Juges de la Chambre que vous mentez

 18   mais, lorsque je me suis adressé à vous, je n'ai jamais dit que vous

 19   mentiez; c'est deux choses complètement différentes, vous devez le

 20   comprendre ces deux nuances.

 21   Je comprends très bien que vous avez des problèmes quant à la compréhension

 22   de certaines choses. Je vois de par d'autres indices de votre CV ou de

 23   votre biographie, mais vous devez comprendre une chose. Lorsque je

 24   m'adresse à vous, je ne suis pas désagréable mais j'ai le droit d'informer

 25   les Juges de la Chambre que je qualifie votre témoignage comme étant faux

 26   et vous ne pouvez pas donc intervenir.

 27   Donc est-ce que c'est vrai ce que j'ai affirmé tout à l'heure ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Ce n'est pas vrai. D'accord.

  2   Avez-vous connaissance qu'une plainte ait été déposée au pénal contre vous

  3   et que vous avez été jugé conjointement avec 160 autres personnes, 160

  4   autres Musulmans ?

  5   R.  Des Musulmans.

  6   Q.  Qui ont participé à ces événements de la guerre à Bijeljina en 1992 ?

  7   R.  Non, j'en n'ai pas connaissance.

  8   Q.  Avez-vous connaissance que le MUP de la Bijeljina le 18 mai 1995 a

  9   déposé une plainte auprès du Procureur contre vous et contre 160 autres

 10   personnes et vous êtes en 161e position, dernière position ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Qu'il a été décidé de diligenter une enquête sur la base de laquelle un

 13   acte d'accusation a été dressé, n'est-ce pas ? Vous le connaissez-vous ?

 14   R.  C'est dans le cadre de la Republika Srpska ?

 15   Q.  Oui.

 16   R.  Donc d'un Etat souverain et reconnu.

 17   Q.  Oui. Un Etat reconnu actuellement.

 18   R.  Non, j'en n'ai pas connaissance.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, là

 20   encore, s'il s'agit de documents que l'Accusation aurait dû se procurer et

 21   me fournir car s'il s'agit de données qui concernent le témoin. 

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors que dois-je dire lors de ce qui s'est

 23   passé quand j'étais prisonnier de votre -- chez vous ?

 24   M. SESELJ : [interprétation]

 25   Q.  C'est vous qui devez répondre à mes questions, Monsieur le Témoin.

 26   J'ai été surpris par l'une des choses que vous avez déclarée lors de

 27   l'interrogatoire principal aujourd'hui. Vous avez dit avoir terminé vos

 28   études primaires et secondaires, et après, vous avez fait trois ans pour

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  1   devenir ouvrier en bâtiment, donc l'école de bâtiment ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Selon les informations dont je dispose, vous n'avez terminé que l'école

  4   primaire et secondaire ?

  5   R.  J'ai -- je ne suis pas véritablement allé à l'école mais j'avais

  6   quelques examens encore à passer.

  7   Q.  Mais vous n'êtes donc pas vraiment aller dans une école spécialisée,

  8   vous avez juste passé des examens ?

  9   R.  C'est ce que j'ai dit.

 10   Q.  Non, ce n'est pas ce que vous avez -- ce n'est pas ce qui a été dit.

 11   R.  Il s'agissait d'une école en bâtiment.

 12   Q.  Alors j'ai également relevé des données relatives à votre parcours

 13   scolaire au primaire. Je ne vais pas dire tout parce que sinon on passera

 14   immédiatement à huis clos. Mais je vois que vous avez eu des 2, vous n'avez

 15   eu que des 2 dans toutes les matières, mis à part l'éducation physique,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Oui, vous voyez que j'ai tout regardé en détail. Alors dans toutes les

 19   déclarations que vous avez données au bureau du Procureur en 1997, on voit

 20   au premier paragraphe, je cite : "J'ai terminé l'école primaire et

 21   secondaire lorsque j'avais à peu près 15 ans."

 22   Vous ne citez nulle part l'école du bâtiment. Vous dites, je cite : "Mon

 23   père et mes frères sont ouvriers en bâtiment et c'est auprès d'eux que j'ai

 24   appris ce métier."

 25   Donc il n'y avait absolument aucune école en bâtiment. Pourquoi avez-vous

 26   aujourd'hui inventé une école en bâtiment ?

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française, la réponse du témoin n'a pas

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  1   été entendue.

  2   M. SESELJ : [interprétation]

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- n'a pas été enregistrée. M. Seselj

  6   vous a demandé si vous avez été à une école du bâtiment, alors vous

  7   répondez "oui," "non," mais il faut qu'il y ait une réponse.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai terminé ces écoles. C'était un cours

  9   en bâtiment, un cours pour ouvrier en bâtiment.

 10   M. SESELJ : [interprétation]

 11   Q.  C'était une école ou juste un cours ?

 12   R.  C'était un cours. J'ai terminé mes huit années d'école -- d'études

 13   primaires et secondaires et ensuite j'ai choisi cette spécialisation en

 14   bâtiment.

 15   Q.  Dans votre déclaration, vous ne citez absolument pas une école, mais

 16   vous dites simplement que votre père et vos frères sont des ouvriers en

 17   bâtiment et que c'est auprès d'eux que vous avez appris ce métier. Il n'y a

 18   absolument aucune mention de fait de cette école.

 19   R.  Il n'y en avait pas alors mais cela existe bien.

 20   Q.  Mais cela ne figure pas dans votre déclaration.

 21   R.  Cela doit bien figurer quelque part. Il doit y avoir une trace de ce

 22   que j'ai terminé comme étude.

 23   Q.  Passons à la suite. Vous avez dit avoir assisté au meeting du SRS que

 24   j'aurais tenu à Bijeljina quelques mois avant la guerre, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Bien, moi, je vous dis qu'il n'y a absolument eu aucun meeting du SRS à

 27   Bijeljina avant la guerre. Le premier meeting à Bijeljina je l'ai tenu en

 28   1993 au printemps devant la mairie, mais vous n'étiez pas présent à ce

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  1   meeting.

  2   R.  Devant la maison des travailleurs.

  3   Q.  Attendez. Dans la déclaration que vous avez donnée au bureau du

  4   Procureur en 1997 et cela figure à la page 2, au dernier paragraphe vous

  5   dites : "Je connais Vojislav Seselj de par la télévision mais je ne l'ai

  6   jamais vu à Bijeljina."

  7   R.  Je ne vous ai jamais vu personnellement, ni parler personnellement

  8   comme maintenant.

  9   Q.  Mais je vous en prie il est dit ici noir sur blanc : "Je ne l'ai jamais

 10   vu à Bijeljina."

 11   R.  [aucune interprétation]

 12   Q.  C'est la page 2 de votre déclaration, avant-dernier paragraphe.

 13   R.  Ça n'a pas été bien consigné.

 14   Q.  Ah, ça n'a pas été bien consigné. Vous avez dit qu'il y avait eu une

 15   bagarre à ce meeting ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous avez, je suppose, consulté la déposition d'un témoin précédent qui

 18   a parlé d'une bagarre en 1992 à Mali Zvornik, n'est-ce pas, et c'est pour

 19   ça que maintenant, en 1991 -- et c'est pour ça que cette bagarre apparaît

 20   maintenant à chaque fois, à chaque meeting du Parti radical ?

 21   R.  C'est ainsi que vous vous comportiez.

 22   Q.  Je vous remercie. Ensuite vous avez parlé de cette grenade à main qui

 23   aurait été jeté contre le café Istanbul, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous ai posé toute une série de questions tout à

 26   l'heure sur ce fameux meeting parce que cette question est très importante.

 27   Elle figure à l'article 22 de l'acte d'accusation et moi pour moi elle me

 28   pose un très, très gros problème.

Page 14343

  1   Alors vous nous avez dit tout à l'heure sous la foi du serment et je vous

  2   ai posé toute une série de questions. Je vous ai demandé : êtes-vous bien

  3   sûr que vous avez été au meeting du mois de mars 1992 à Bijeljina. Vous

  4   m'avez dit : "Oui." Vous avez donné un luxe de détails sur la bagarre à

  5   l'issue, et cetera. Bon. J'avais vu que, dans votre déclaration 1997, vous

  6   n'en avez pas mentionné. Alors dans mon interrogation : qu'est-ce que cela

  7   veut dire ? Vous êtes sûr de vous, ou bien vous ne vous rappelez plus très

  8   bien ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'en souviens, et je m'en souviens bien,

 10   mais ce n'était pas en mars 1992. C'était avant. En mars 1992, c'est la

 11   guerre, les affrontements de la guerre qui ont éclaté à Bijeljina, mais

 12   c'est quelques mois avant, fin 1991 et début 1992, que cela a eu lieu,

 13   environ trois mois avant, M. Seselj tenait des meetings à travers toute la

 14   Bosnie, par ailleurs

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je l'ai fait, mais pas en 1991.

 16   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, s'il apparaissait que M. Seselj

 18   n'ait jamais venu à Bijeljina en 1992 et en 1991, qu'est-ce que vous diriez

 19   ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Comment est-ce possible, puisqu'il y était ?

 21   Je sais personnellement.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 23   Monsieur Seselj.

 24   M. SESELJ : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez ici déclaré qu'une grenade à main avait été lancée dans le

 26   café Istanbul ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Vous souvenez-vous de la personne qui a fait cela ?

Page 14344

  1   R.  Un certain Goran ou Zoran. Un Serbe, cela je le sais.

  2   Q.  Cependant, les données officielles de la police du MUP à Bijeljina nous

  3   disent que c'est un Aleksandar Zekic connu sous le nom d'Andalaga de

  4   Dvorovi qui a lancé cette grenade ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Il s'appelle Aleksandar Zekic, connu sous le surnom d'Andalaga, en

  7   provenance de Dvorovi et cela a été une dizaine de jours avant le début de

  8   la guerre ?

  9   R.  C'était quelques jours avant.

 10   Q.  C'était au moins dix jours avant, le chef du MUP à Bijeljina, Predrag

 11   Jesuric; est-ce que vous avez entendu parler de lui ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  C'est un Serbe et il est le chef de la police à Bijeljina. Il a arrêté

 14   le dénommé Andalaga et l'a envoyé à Tuzla ?

 15   R.  Oui, j'en ai entendu parler.

 16   Q.  Avez-vous entendu dire qu'il a été emmené à Tuzla ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  A Tuzla c'était les Musulmans qui non seulement étaient toujours

 19   majoritaires mais dominants ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Pendant toute la durée de la guerre Tuzla a toujours été entre les

 22   mains des Musulmans, jamais aux mains des Serbes, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Donc dix jours avant la guerre, Pedrag Jesuric, le chef de la police

 25   agit de façon tout à fait ordinaire et normale. Il arrête un Serbe qui a

 26   lancé une grenade et l'envoie à Tuzla au centre région de la sécurité,

 27   n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est ce que vous dites.

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  1   Q.  Mais est-la vérité, vous venez de dire oui ?

  2   R.  Mais je ne sais pas.

  3   Q.  Très bien. Vous avez dit que lors de ces incidents des Musulmans ont

  4   été blessés ?

  5   R.  Il y avait des Musulmans et des Serbes. Il y avait sept blessés.

  6   Q.  Vous souvenez-vous de l'identité des Serbes qui ont alors été blessés ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Est-ce que vous connaissez un certain Kriska ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  C'était un joueur de basket connu, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Lui aussi a été blessé au café Istanbul ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors nous avons donc aussi bien des Serbes et des Musulmans qui ont

 15   été blessés au café Istanbul ? Donc cette personne qui a lancé une grenade

 16   est arrêté et a été condamné et a purgé sa peine dans la Republika Srpska;

 17   en avez-vous eu connaissance ?

 18   R.  Non, et cela ne m'intéressait pas.

 19   Q.  Avez-vous connaissance d'une jeune fille qui avait été blessée là-bas

 20   qui s'appelait Sofija ? Etait-elle Serbe ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Cette Serbe Sofija qui a été -- a-t-elle été blessée par la grenade à

 23   main ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Alors cette grenade a blessé à la fois des Serbes et des Musulmans, le

 26   perpétrateur a été arrêté et placé en détention à Tuzla où il a été jugé ?

 27   R.  Je n'en avais pas connaissance. Cela ne m'intéressait pas.

 28   Q.  Très bien. Mais le bureau du Procureur aurait dû s'intéresser à cela et

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  1   aurait dû enquêter sur le sujet. Alors vous dites que vous avez parlé d'un

  2   incident qui a eu lieu devant le café Srbija. Avez-vous connaissance du

  3   fait que le café avait deux étages, que le café à proprement parler se

  4   trouvait au rez-de-chaussée et qu'un autre café se trouvait dans la cave de

  5   ce bâtiment ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Savez-vous comment s'appelait le café qui se trouvait dans la cave ?

  8   R.  C'était le café qui s'appelait avant "Foco," et à ce moment-là il

  9   s'appelait "Srbija."

 10   Q.  Non. C'était le café qui était au niveau -- de plain-pied avec la rue

 11   qui s'appelait Srbija, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, mais c'est la même chose.

 13   Q.  Il y avait pourtant deux cafés, n'est-ce pas ?

 14   R.  En fait, c'était qu'un seul et même café.

 15   Q.  Et celui de la cave était appelé "Marlboro," et il était tenu par un

 16   Musulman qui était ami de Mirko Blagojevic, n'est-ce pas ?

 17   R.  Non, je ne le savais pas.

 18   Q.  Lorsque vous êtes allé à cheval lancer la grenade à main dans le café,

 19   qui vous a donné cette grenade à main au café Istanbul ?

 20   R.  C'était un ami qui tenait le café.

 21   Q.  Comment s'appelle-t-il ?

 22   R.  Goga.

 23   Q.  Coso était également avec lui, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous connaissiez également Coso ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ils vous ont donné une grenade à main ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Vous êtes monté sur votre cheval, n'est-ce pas ?

  2   R.  Ne mentionnez pas Coso, il est mort, ce n'est pas correct de mentionner

  3   son nom.

  4   Q.  Mais il était avec Gogo [phon]  en fait lorsqu'on vous a remis la

  5   grenade à main ?

  6   R.  C'est Gogo qui me l'a donnée.

  7   Q.  Est-ce que Coso était présent ?

  8   R.  Non. Bien, il était dans le café.

  9   Q.  Selon mes informations tous les deux, ces deux personnes vous auraient

 10   remis la grenade à main mais ce n'est pas vraiment important, à savoir qui

 11   était la personne qui vous l'a vraiment remise, qu'il a mise dans votre

 12   main. En fait, je ne veux pas vraiment parler beaucoup de Coso ici. Je ne

 13   vais pas en parler du tout. Vous avez donc pris la grenade à main, vous

 14   êtes monté sur votre cheval, et en gallot vous vous êtes dirigé vers le

 15   café Srbija ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Ensuite vous avez fait un signe de la main, vous vouliez lancer la

 18   grenade à main ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Les Serbes qui se trouvaient dans le café Srbija vous ont dit, vous ont

 21   vu ?

 22   R.  Oui, ceux qui étaient blessés.

 23   Q.  Personnellement, il y avait Mirko Blagojevic, n'est-ce pas ? Est-ce que

 24   Mirko Blagojevic était présent en personne ?

 25   R.  Il y avait plusieurs personnes.

 26   Q.  Mirko Blagojevic a pointé du revolver et vous a tiré dessus ?

 27   R.  Non, il y avait des gens qui ont tiré depuis les fusils.

 28   Q.  Vous avez été blessé par pistolet par balle à la jambe ?

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  1   R.  Ce n'est pas toi qui vas me dire qui m'a blessé. Moi, j'ai été blessé.

  2   Q.  Fort bien. Vous n'avez été blessé que par une balle ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  C'est un pistolet, c'est une balle de pistolet ?

  5   R.  Je ne sais pas, c'est les médecins qui le savent. Moi, je ne le sais

  6   pas.

  7   Q.  Moi, je le sais parce que cette balle provenait du pistolet, et vous

  8   avez une plaie d'entrée et de sortie ?

  9   R.  Ce n'était pas du tout -- moi, ce qui m'intéressait ce n'était pas de

 10   savoir quelle arme m'a blessé.

 11   Q.  Vous avez lancé la grenade main mais vous avez oublié de tirer la

 12   goupille ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  La grenade à main est tombée devant le café ?

 15   R.  Non. Non, en fait, elle est tombée lorsque je suis tombée du cheval.

 16   L'INTERPRÈTE : Pourrait-on demander aux deux personnes de ralentir, s'il

 17   vous plaît, Monsieur le Président ? C'est impossible.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Ralentissez, tous les deux, les interprètes lèvent

 19   le drapeau blanc. Ils en peuvent plus. Ralentissez.

 20   M. SESELJ : [interprétation]

 21   Q.  Mirko Blagojevic a sorti son revolver et il vous a tiré à la jambe, et

 22   ensuite vous êtes tombé du cheval, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Par la suite, les Serbes du café Srbija se sont approchés de vous et

 25   vous ont emmené à l'hôpital ?

 26   R.  C'est un mensonge.

 27   Q.  Qui vous a emmené à l'hôpital ?

 28   R.  Qui m'a emmené à l'hôpital ?

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  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  C'est un Musulman à bord d'un véhicule.

  3   Q.  Mais tout près de là il n'y avait pas de Musulman, il n'y avait que des

  4   Serbes du café Srbija.

  5   R.  Mais je n'étais pas tout près, Monsieur Seselj.

  6   Q.  Oui, vous étiez tout près. Puisque si on vous avait tiré dessus depuis

  7   un fusil automatique personne ne serait approché de vous ?

  8   R.  Non, j'étais entre -- j'étais dans un feu croisé, et je me suis tiré

  9   tout seul.

 10   Q.  Vous avez été touché à 8 heures 15 dans la soirée ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Les escarmouches entre les Serbes et les Musulmans ont eu lieu vers 9

 13   heures ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Donc 45 minutes plus tard ?

 16   R.  Mensonge.

 17   Q.  Alors si c'est un mensonge comment est-ce que c'est possible que vous

 18   soyez tiré -- qu'on vous ait tiré d'un feu croisé ?

 19   R.  Je me suis tiré tout seul.

 20   Q.  Ce n'est pas vrai. C'est les Serbes qui vous ont pris et vous ont

 21   emmené à l'hôpital.

 22   R.  Non, ce n'est pas vrai, non, absolument pas. On ne peut pas dire que

 23   c'est vrai alors que ce n'est pas vrai.

 24   Q.  Votre cheval était blessé ?

 25   R.  Non, il n'a pas été blessé.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur un plan logique, on voit la scène, vous êtes à

 27   cheval, peut-être au grand gallot, on ne sait pas, et vous voulez lancer et

 28   vous avez lancé la grenade entre les Serbes, Mirko Blagojevic vous tire

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  1   dessus, vous tombez. Alors s'il n'y a personne d'autre, on voit très bien

  2   quel pouvait être la réaction des Serbes. Vous tuez séance tenante, vous

  3   achevez, on ne sait pas puisque vous alliez leur jeter une grenade. Donc,

  4   là, il y a mystère, car apparemment il ne se passe rien et vous nous dites

  5   que c'est un Musulman qui vous ramène. Alors il y a peut-être une autre

  6   explication. C'est qu'il y avait des tirs de part et d'autre entre les

  7   Musulmans et les Serbes, et que vous avez profité de cet échange de tir

  8   pour vous enfuir et aller à l'hôpital. Alors est-ce possible, n'est-ce pas

  9   possible ?

 10   Moi, je n'y étais pas. Vous, vous y étiez. Il n'y a que vous qui

 11   pouvez nous dire ce qui s'est passé.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Voilà c'est ce que j'essaie

 13   d'expliquer à M. Seselj.

 14   C'est que j'ai été blessé, les Chetniks tiraient devant le café

 15   Srbija, ce sont eux qui ont tiré sur moi parce qu'ils pensaient que

 16   j'allais lancer la grenade à main. Lorsque je me suis approché de 15 à 20

 17   mètres d'eux, ils m'ont tiré dessus. Je suis tombé du cheval. J'ai été

 18   blessé, mon cheval aussi. Entre ce moment-là, en fait après --

 19   immédiatement après les Musulmans ont commencé à tirer depuis le café

 20   Istanbul, il y a eu donc un échange de tirs, il y a eu un feu croisé. Je me

 21   suis tiré moi-même, et par la suite les Musulmans m'ont emmené à l'hôpital.

 22   Alors je ne vois pas pourquoi M. Seselj a dit que c'est un Serbe qui m'a

 23   emmené à l'hôpital.

 24   M. SESELJ : [interprétation]

 25   Q.  Cette rue qui se trouve entre le café serbe et le café Istanbul, c'est

 26   une rue étroite, n'est-ce pas ?

 27   R.  C'est une rue normale.

 28   Q.  Mais oui, avec un trottoir très étroit. Il y avait -- c'est une rue à

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  1   deux sens.

  2   R.  Oui, il y a aussi un arrêt d'autobus.

  3   Q.  Il y a un arrêt d'autobus qui est tout près mais pas dans cette rue-là.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Entre le café Istanbul et le café Srbija, il n'y a pas d'arrête

  6   d'autobus ?

  7   R.  Oui, il y a un arrêt d'autobus.

  8   Q.  D'accord. Alors, est-ce que vous savez que ce cheval, dix jours plus

  9   tard, a été vu en train de brouter l'herbe dans les parcs avoisinants près

 10   du café Srbija jusqu'à ce que quelqu'un ne l'emmène quelque part ?

 11   R.  Non, je ne le sais pas, et je ne l'ai pas vu. Je n'ai pas eu l'occasion

 12   de le voir.

 13   Q.  Est-ce que vous savez que moi, j'ai su un mois ou deux mois plus tard

 14   de cet événement. Est-ce que vous savez que M. Blagojevic  était un

 15   excellent tireur en ex-Yougoslavie; c'était l'un des meilleurs tireurs, sa

 16   spécialité était justement de tirer à même le pistolet ?

 17   R.  Vous savez tout, vous savez tout.

 18   Q.  Est-ce que vous connaissez Marko Blagojevic ? Tous les [imperceptible]

 19   savent très bien manier les pistolets, tout ça. Moi aussi, je suis un

 20   excellent tireur. Vous trouvez peut-être ça drôle étant donné que je porte

 21   des lunettes mais je suis très bon, moi aussi. Mais est-ce que vous saviez

 22   que Mirko Blagojevic était un excellent tireur en ex-Yougoslavie, l'un des

 23   meilleurs tireurs en ex-Yougoslavie ?

 24   R.  Non, je ne le sais pas.

 25   Q.  Est-ce que vous saviez que --

 26   R.  C'était le meilleur parce que c'est le tien, c'est ton homme à toi,

 27   c'est pour ça que tu le dis.

 28   Q.  Oui, oui, c'est un de mes meilleurs hommes à Bijeljina, voilà. Est-ce

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  1   que vous savez que, quelques mois plus tard après avoir appris de cet

  2   événement, j'ai critiqué Mirko Blagojevic car, lorsqu'il vous a vu galoper

  3   sur ce cheval, qu'il vous a tiré dans la jambe, parce qu'il aurait pu

  4   risquer de blesser le cheval aussi, je lui ai dit qu'il aurait dû vous

  5   tirer à la tête.

  6   R.  [aucune interprétation] 

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. M. Seselj,

  8   je dirais ceci, n'a pas sa place dans ce prétoire.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est un fait. Ce n'est pas du tout

 10   inapproprié. S'il est nécessaire, j'appellerai Mirko Blagojevic en tant que

 11   témoin dans ce procès. Il viendra dire tout ce qu'il faut dire. Mais c'est

 12   un fait, je l'avais critiqué --

 13   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 14   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous considérons que c'est un peu comme une

 15   menace, et ce n'est pas approprié ici dans ce prétoire. Cela ne devra pas

 16   être toléré.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, je ne comprends pas très bien votre

 18   objection.

 19   M. Seselj reconnaît qu'il avait un rapport avec M. Blagojevic, un.

 20   Deuxièmement, il nous dit que, deux mois après, il l'a critiqué,

 21   Blagojevic, lui reprochant de ne pas l'avoir tué, lui. Voilà, qu'est-ce que

 22   vous voulez dire ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, c'est un aveu. C'est un aveu de ma part,

 24   Monsieur le Président. Mais je crois qu'il aurait dû tuer l'homme qui se

 25   lance sur lui avec une grenade à main, non pas de tirer à la jambe et de

 26   risquer de tuer le cheval. C'est une réaction tout à fait normale. Ça

 27   aurait été une défense, autodéfense.

 28   M. SESELJ : [interprétation]

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  1   Q.  Ensuite vous avez dit après le début du conflit, que pendant quelques

  2   jours, l'hôpital était tenu par les Musulmans, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Le conflit armé à Bijeljina a duré combien de jours ?

  5   R.  Environ trois jours, deux ou trois jours.

  6   Q.  Trois jours, peut-être quatre ?

  7   R.  Oui, peut-être quatre, peut-être quatre, je ne sais pas, j'étais à

  8   l'hôpital.

  9   Q.  Ce n'est que le quatrième jour que les Serbes s'emparent de l'hôpital ?

 10   R.  L'hôpital était le dernier bastion.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, quelque chose de

 12   vraiment très, très précieux du point de vue de témoignage d'autres

 13   témoins, car ce témoin vient de confirmer que le conflit a duré quatre

 14   jours.

 15   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, puis-je continuer

 16   ?

 17   M. SESELJ : [interprétation]

 18   Q.  Ensuite vous êtes emmené à l'hôpital, votre blessure est une blessure

 19   par balle, il y a un point d'entrée, un point de sortie; vous saignez ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  La première chose qu'ils ont fait à l'hôpital c'est de vous donner une

 22   perfusion parce qu'ils avaient peur que vous ne perdiez trop de sang ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Ensuite, ils ont vu que l'artère n'avait pas été touchée ou atteinte et

 25   on a pansé votre plaie, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Par la suie, après un certain temps, on a pu arrêter le saignement ?

 28   R.  Je ne sais pas, je ne sais pas à quel moment on a arrêté le saignement.

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  1   Q.  Après combien de temps ?

  2   R.  Quelques heures, après quelques heures, je ne saignais plus.

  3   Q.  Donc vous avez passé la première nuit sous perfusion, et ensuite

  4   lorsqu'on a arrêté le saignement, dites-moi pourquoi est-ce que vous auriez

  5   gardé la perfusion ? Quelle était la raison pour laquelle vous seriez sous

  6   perfusion ?

  7   R.  Parce que j'ai perdu beaucoup de sang ?

  8   Q.  Alors pourquoi est-ce qu'on aurait continué la perfusion pendant trois

  9   jours, vous buviez de l'eau, vous buviez du thé à l'hôpital, vous mangiez à

 10   l'hôpital, vous étiez tout à fait normal ?

 11   R.  J'avais perdu trop de sang.

 12   Q.  Vous savez je m'y connais un peu dans cette matière. Il est également

 13   arrivé de me garder sous perfusion pendant 20 jours, vous savez. Donc vous

 14   arrivez sur place, vous saignez. On vous donne un litre, deux ou quatre

 15   litres de solution, on panse votre plaie, on réussit à arrêter les

 16   saignement, pourquoi est-ce que les perfusions dureraient trois jours ?

 17   R.  Demandez au Dr Kicanovic et aux autres médecins qui m'ont traité.

 18   Q.  Oui, je vais lui poser justement la question, très bien. Et le

 19   quatrième jour, Mirko Blagojevic arrive, selon vos allégations ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous êtes toujours sous perfusion ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous dites que ce dernier vous enlève le tube, il arrache la perfusion,

 24   il fait tomber la bouteille ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Alors c'est une invention de toute pièce puisque le quatrième jour,

 27   vous n'aviez pas du tout de perfusion, vous n'étiez pas sous perfusion.

 28   R.  Qu'est-ce que tu regardes, qui regardes-tu lorsque tu mens ?

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  1   Q.  Je vous regarde. Vous n'avez pas du tout reçu de perfusion. Mirko

  2   Blagojevic n'est jamais venu vous voir à l'hôpital. Vous avez également

  3   inventé qu'il a enfoncé sa baïonnette dans votre plaie car à la jambe vous

  4   ne portez aucune trace de baïonnette ni de couteau. Vous n'avez qu'une

  5   trace de blessure par balle causée par un pistolet. Puisqu'on n'a pas --

  6   puisque cette balle n'avait pas touché votre artère, on a simplement pansé

  7   votre plaie qui était externe. C'est tout ce qui était fait. Voilà,

  8   montrez-nous ici la trace d'une baïonnette.

  9   R.  Vous voulez que j'enlève mes vêtements ? Oui, oui, voilà, je vais me

 10   déshabiller, si vous voulez. 

 11   Q.  Alors c'est aux Juges de la Chambre de décider. Vous n'avez absolument

 12   aucune trace de baïonnette à la jambe.

 13   R.  Mirko Blagojevic n'était pas à l'hôpital ? Oui, ça c'est marqué dans

 14   votre truc à vous, là. 

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : On ne va pas vous faire déshabiller. Je serai dans

 16   mon pays, il n'y aurait pas de problème, vous montrerez ça à tout le monde,

 17   mais avec les Règles qui régissent ici, c'est beaucoup plus compliqué.

 18   Alors vous, vous dites j'ai une trace de baïonnette, l'accusé proteste. 

 19   Continuez.

 20   M. SESELJ : [interprétation]

 21   Q.  Vous avez dit que vous avez passé neuf jours à l'hôpital, n'est-ce pas

 22   ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Donc le 31, dans la soirée, on vous a emmené à l'hôpital ?

 25   R.  [imperceptible]

 26   Q.  Jusqu'au 9 avril, et vous êtes resté à l'hôpital ?

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   L'INTERPRÈTE : Le témoin est inaudible.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Ensuite vous dites qu'Arkan vous a laissé partir de l'hôpital ?

  3   R.  Oui, personnellement.

  4   Q.  Il faut attendre un peu que les Juges puissent entendre ce que vous

  5   nous dites c'est très important. Voilà.

  6   Alors est-ce que cela veut dire qu'Arkan a personnellement laissé sortir

  7   des personnes de l'hôpital ? Le 9 avril, Arkan n'aurait pas du tout pu être

  8   à Bijeljina parce que, le 7 avril, au moins au plus tard le 7 avril, il se

  9   trouvait à Zvornik et, le 8 avril, il a participé personnellement au combat

 10   de Zvornik. Le 9 avril, en fait il est impossible qu'il soit à Bijeljina,

 11   le 9 avril, impossible.

 12   R.  Ça c'est possible.

 13   Q.  Alors que vous dites que c'est tout à fait possible qu'Arkan vous ait

 14   laissé -- autorisé à sortir de l'hôpital ?

 15   R.  Oui, parce qu'il voulait me sauver d'une altercation --

 16   Q.  Nous avons des centaines de preuves qui nous permettent de voir

 17   qu'Arkan, à l'époque, était en train de faire la guerre à Bijeljina. Alors

 18   comment est-ce qu'on peut avoir deux Arkans ? Comment peut-on avoir un

 19   Arkan à Bijeljina et un autre Arkan à Zvornik ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous venez de dire quelque

 21   chose. Vous venez de dire qu'Arkan a voulu vous sauver de Mirko Blagojevic;

 22   pour quelle raison ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que ce dernier voulait me tuer.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Arkan, dans sa bonté quasi légendaire, vole au

 25   secours de tout le monde ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas s'il a été bon ou non, mais en

 27   cette occasion précise, il m'a sauvé. Est-ce qu'il s'agissait d'un jeu

 28   entre Chetniks mais, en tout cas, en l'espèce, il s'est montré bon. Je n'en

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  1   sais vraiment rien. Tout ce que je peux dire c'est qu'il m'a sauvé.

  2   M. SESELJ : [interprétation]

  3   Q.  Si Mirko Blagojevic avait voulu vous tuer, il aurait déjà pu le faire

  4   en ce quatrième jour. S'il vous a planté sa baïonnette dans la blessure que

  5   vous aviez à la cuisse, qu'est-ce que cela aurait coûté ? Qu'est-ce que ça

  6   lui aurait coûté de plus de planter sa baïonnette dans votre cœur ?

  7   R.  Parce que, selon lui, je ne méritais pas de mourir vite mais il fallait

  8   qu'il puisse se défouler, il fallait que je souffre.

  9   Q.  Donc il voulait chaque jour de vous planter un peu plus la baïonnette

 10   dans votre blessure et vous faire souffrir ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Mais alors combien avez-vous reçu de blessures du fait de cette

 13   baïonnette exactement ?

 14   R.  Une seulement.

 15   Q.  Alors comment expliquez-vous que vous ayez été maltraité à chaque jour

 16   un peu plus si vous n'avez été blessé à la baïonnette que le premier jour

 17   et -- cette seule fois ? Ensuite Arkan vous libère et il vous renvoie chez

 18   vous.

 19   R.  Oui. C'était -- j'étais en résidence surveillée.

 20   Q.  Ce n'est pas une résidence surveillée. Il n'y avait pas de garde chez

 21   vous.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, j'essaie de trouver une logique dans tout ça.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pouvais même pas aller aux toilettes. Il

 24   y avait des gardes à l'extérieur de ma maison. Il y avait une garnison en

 25   fait juste à l'extérieur.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : J'essaie de trouver une logique dans ce que vous

 27   dites. Ce fameux café Srbija où se réunissait Arkan, si j'ai compris, les

 28   gens de M. Seselj et puis d'autres, ce café est, d'après vos propres dires,

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  1   attaqué par un individu, qui est vous à cheval avec une grenade. Bon.

  2   J'imagine l'état d'esprit de ceux qui sont dans ce café, qui apprennent que

  3   vous, vous aviez l'intention de jeter une grenade sur eux.

  4   Bien, voilà, que parmi ceux qui seraient dans ce café, il y en a un qui

  5   vient vous sauver, M. Arkan, et puis l'autre, Blagojevic, il vient vous

  6   titiller avec sa baïonnette. Sur un plan logique, j'ai du mal à comprendre.

  7   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

  8   M. SESELJ : [interprétation]

  9   Q.  Donc il était important pour Arkan de vous libérer ?

 10   R.  Non, pas pour Arkan, pour les Aigles blancs.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 12    LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une très bonne question personnes ne me

 13   l'a jamais posée.

 14   Lorsque j'ai décidé de partir avec cette grenade, personne ne m'a

 15   demandé où j'avais l'intention de lancer cette grenade -- et qui se

 16   trouvait dans le café Srbija, les hommes de Seselj, les hommes d'Arkan et

 17   tous ces hommes en arme qui étaient -- qui s'apprêtaient à attaquer

 18   Bijeljina, à perpétrer des crimes. Mirko Blagojevic et les autres qui

 19   étaient prêts à se jeter sur la population. Il n'y avait aucuns civils. Il

 20   n'y avait ni femmes, ni enfants. Il y avait des hommes en arme, des hommes

 21   de Serbie et des Serbes bosniaques locaux.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis d'accord avec vous, Monsieur. Mais si vous

 23   faites ce que vous avez dit de jeter une grenade, ces gens-là ils peuvent

 24   aussi vouloir se venger, y compris Arkan qui lui pouvait recevoir la

 25   grenade. Or lui il vient vous sauver et l'autre il vient enfoncer sa

 26   baïonnette. C'est là où j'ai du mal à comprendre mais tout est possible.

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Monsieur Seselj, continuez.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] 

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Arkan ne m'a pas sauvé.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je poursuis.

  4   M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur le Témoin, vous avez dit que le café était plein d'hommes de

  6   Seselj, d'hommes de Mirko Blagojevic, d'hommes de Seselj et de membres des

  7   forces armées ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-il logique qu'un nombre aussi important des membres d'unités de

 10   l'armée se concentrent dans un café ?

 11   R.  Oui, c'est tout à fait possible.

 12   Q.  A ma connaissance, il n'y avait absolument aucun homme d'Arkan à

 13   Bijeljina avant le début des affrontements. Arkan ne s'est rendu à

 14   Bijeljina qu'avec une trentaine d'hommes, y compris lui-même, et le jour

 15   suivant, et il a participé alors au combat. Par conséquent, vous avez

 16   inventé que des hommes d'Arkan étaient venus avec Arkan plus tôt. Vous avez

 17   également inventé que les hommes d'Arkan et les hommes de Seselj

 18   procédaient à des entraînements d'hommes en arme à Amajlije ?

 19   R.  J'aurais inventé cela.

 20   Q.  Oui. Il n'y avait ni hommes d'Arkan, ni hommes de Seselj à Amajlije.

 21   R.  Comment pourrais-je le savoir ?

 22   Q.  C'est moi qui donnais leurs instructions et qui entraînais les hommes

 23   qui étaient à Amajlije, la Défense territoriale et la JNA qui se trouvait

 24   là-bas.

 25   R.  C'était vos hommes qui les entraînaient.

 26   Q.  Mes hommes entraînaient la JNA ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  J'avais des experts pour entraînement de la Défense territoriale, c'est

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  1   ce que vous affirmez maintenant ?

  2   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit.

  3   Q.  Très bien. Si c'est ce que vous pensez, je peux ici témoigner -- si

  4   c'est bien ce que je vous dites, je vais poursuivre. Un deuxième point,

  5   pendant les affrontements à Bijeljina, il y avait uniquement des membres du

  6   SRS en arme, des membres du SRS de Bijeljina, pas un seul membre du SRS de

  7   Serbie n'était présent. C'est ce que d'autres témoins musulmans ont ici

  8   déclaré.

  9   R.  Cela signifie que --

 10   Q.  Mais Arkan est venu à Bijeljina, le 1er avril, au centre de Bijeljina,

 11   la seule résistance aux forces musulmanes était celles des forces de Mirko

 12   Blagojevic menées par les forces du SRS -- menées par Mirko Blagojevic. Il

 13   n'y avait personne d'autre à part les membres du Parti radical et Mirko

 14   Blagojevic. Vous avez donc inventé qu'Arkan était à Bijeljina à cette

 15   époque, n'est-ce pas ?

 16   R.  Non, ce n'est pas exact.

 17   Q.  Très bien. Vous avez affirmé que moi-même et Mirko ainsi qu'Arkan, nous

 18   avons armé les Serbes. D'où tenez-vous cette information ?

 19   R.  C'est ce que les gens disaient.

 20   Q.  Mais qui -- où avons-nous trouvé ces armes ?

 21   R.  C'est à moi que vous le demandez ?

 22   Q.  Qui racontaient cela, les femmes -- les femmes chez les coiffeurs ?

 23   R.  Oui, les femmes chez les coiffeurs. Les gens racontaient cela.

 24   Q.  Donc les gens disaient que moi-même, Arkan et Mirko armions les gens ?

 25   R.  Oui. Ce à quoi nous avons contribué pendant 50 ans, nous tous ensemble,

 26   les Musulman, les Serbes et les Croates.

 27   Q.  Mais vous parlez ici des dépôts d'armes et munitions de la JNA; selon

 28   vous, nous les aurions -- nous en aurions pris possession ?

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  1   R.  Oui, vous avez pris possession de tout. Vous avez mis la main sur tout. 

  2   Q.  Merci. Très bien. Tout cela est très intéressant.

  3   R.  Vous avez mis la main sur tout.

  4   Q.  Vous avez dit, donc passons cela, je n'ai pas de raison de m'attarder

  5   sur cela.

  6   Vous avez dit avoir été emmené au camp de Batkovic ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  C'est exact, n'est-ce pas ?

  9   R.  Mais vous n'avez pas réussi à perpétrer le nettoyage ethnique que vous

 10   aviez en vue.

 11   Q.  Laissons ça de côté. Cela ne m'intéresse pas pour le moment. Vous avez

 12   dit que les Serbes vous ont battu au camp de Batkovic, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce qu'au camp de Batkovic vous avez été également battu par des

 15   prisonniers musulmans ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  De qui s'agissait-il ?

 18   R.  Il y avait deux personnes.

 19   Q.  Comment s'appelaient-ils ?

 20   R.  Dzemal Zahirovic, et Fikret Piklic.

 21   Q.  Ne s'agissait-il pas de Dzemal Zahirovic ?

 22   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit.

 23   Q.  Fikret Piklic, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Pourquoi vous ont-ils battu ? Ils vous ont vraiment battu de façon très

 26   violente ?

 27   R.  Pas seulement moi-même. Mais tous les autres Musulmans du camp.

 28   Q.  Dzemal Zahirovic et Fikret Piklic vous ont battu, de façon

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  1   particulièrement vicieuse, parce que (expurgé)

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  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7   Q.  Puisque vous avez attaqué un jeune homme, les autres Musulmans vous ont

  8   battu, n'est-ce pas ? N'est-ce pas exact ?

  9   R.  Quel animal tu es toi ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire une pause ?

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voulez qu'on fasse une pause ?

 12   Oui. Bien, on va faire une pause de 20 minutes.

 13   --- L'audience est suspendue à 17 heures 25.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   --- L'audience est reprise à 17 heures 52.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Monsieur Seselj. La

 17   Chambre a décidé d'expurger le passage où (expurgé)

 18   (expurgé) témoin. Ceci n'a rien à voir, n'a rien à voir et on va

 19   expurger également les trois phrases que je viens de prononcer. Voilà.

 20   Alors on va introduire maintenant le témoin.

 21   Monsieur l'Huissier, allez chercher le témoin.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

 23   n'entre, est-ce que vous me permettez de formuler un commentaire

 24   relativement à cette décision que vous venez de prendre que je formule mon

 25   opposition ?

 26   Monsieur le Président, ce témoin affirme avoir été battu par des soldats

 27   serbes ou des gardes serbes au camp de Batkovic. Or, cela n'est pas vrai.

 28   C'est presque à mort qu'il a été battu par les membres du même groupe

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  1   ethnique, ses codétenus, pour les raisons qui ont ici été soulevées, cela

  2   remet fondamentalement en cause la véracité de son témoignage. C'est

  3   pourquoi je m'oppose à l'expurgation du compte rendu d'audience.

  4   Si l'on expurge chaque détail, chaque donnée qui remet en cause la véracité

  5   de l'ensemble du témoignage, à quoi bon procéder à quelque contre-

  6   interrogatoire que ce soit ?

  7   Alors qu'il s'agit ici de faits avérés et bien connus, tous les Musulmans

  8   qui ont été détenus dans ce centre de détention de rassemblement le savent.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, on va repasser à huis clos pendant

 10   quelques instants.

 11   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 12   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. SESELJ : [interprétation]

 17   Q.  Vous avez ici évoqué les aliments qui étaient donnés aux prisonniers du

 18   camp de Batkovic. Vous avez dit qu'on vous donnait des plats d'haricots

 19   avariés, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-il exact que vous receviez tous les jours la même nourriture que

 22   celle qui était donnée aux gardes serbes qui assuraient la garde ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Est-ce que lorsqu'on vous donnait ces haricots eux recevaient les mêmes

 25   ?

 26   R.  Comment le saurais-je ?

 27   Q.  Pouviez-vous voir la nourriture qui leur était distribuée ?

 28   R.  Comment aurais-je pu le voir ?

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  1   Q.  Mangeaient-ils cette nourriture ou allaient-ils manger ailleurs ?

  2   R.  Comment aurais-je pu le savoir ? J'étais enfermé à l'intérieur du

  3   hangar.

  4   Q.  Vous étiez là-bas; moi je n'y étais pas.

  5   R.  Mais j'étais à l'intérieur du hangar. Comment aurais-je pu savoir ce

  6   que les soldats serbes mangeaient ?

  7   Q.  Selon les informations dont je dispose, la nourriture qui était

  8   préparée pour vous a été la même que celle qui était préparée pour eux, et

  9   vous vous souviendrez que ce type d'haricots était le plat favori des

 10   soldats de la JNA, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, des haricots ordinaires.

 12   Q.  Cela aurait été donc anormal ?

 13   R.  Parce qu'ils les gardaient pendant plus de dix jours et ensuite ils les

 14   distribuaient aux prisonniers.

 15   Q.  Pourquoi l'auraient-ils gardé pendant plus de dix jours ?

 16   R.  Pour que cela devienne une nourriture avariée.

 17   Q.  Mais dites-vous qu'ils le faisaient exprès ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce qu'ils vous ont fait manger de la paille ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Comment avez-vous pu manger de la paille ?

 22   R.  Je parle pour moi-même. Ils m'ont fait manger de la paille.

 23   Q.  Je vous pose la question en ce qui concerne vous-même. Est-ce que vous

 24   en avez mangé ?

 25   R.  J'ai essayé, mais je n'ai pas pu. C'était très difficile.

 26   Q.  Comment auraient-ils pu vous forcer à manger de la paille alors que

 27   nous savons bien que c'est impossible ? C'est un peu étrange.

 28   R.  Cela semble étrange. En fait, c'est particulièrement triste.

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  1   Q.  Combien de temps avez-vous passé à Batkovici et à Usora, près de Doboj

  2   ? Quand avez-vous été relâché de Batkovici ?

  3   R.  Le 8 novembre 1993.

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  Est-ce qu'il y avait un autre Musulman qui était là depuis plus

  7   longtemps que vous à ce centre de rassemblement ?

  8   R.  Je ne le sais pas.

  9   Q.  D'après moi, il n'y avait absolument personne qui a été là plus

 10   longtemps que vous. Est-ce que c'est possible ?

 11   R.  Oui, c'est possible. Oui, tout est possible.

 12   Q.  D'après les connaissances que je détiens --

 13   R.  Mais je ne le crois pas.

 14   Q.  D'après les informations que je détiens, d'après les sources serbes,

 15   les autorités serbes ont essayé à plusieurs reprises de faire en sorte que

 16   vous soyez échangé avec les autorités musulmanes, mais les autorités

 17   musulmanes refusaient de vous prendre; est-ce que c'est possible ?

 18   R.  Non, ce n'est pas possible.

 19   Q.  Pourquoi ?

 20   R.  Parce que mon parti à moi voulait toujours que je sois parmi les

 21   premiers sur la liste d'échange, mais vous ne vouliez pas que je fasse

 22   l'objet d'échange.

 23   Q.  Mais comment se fait-il que d'autres prisonniers musulmans passent au

 24   maximum deux à trois mois, avec quelques exemples assez rares de ceux qui

 25   étaient restés plus longtemps, alors que vous, vous y êtes resté plus d'un

 26   an et demi ?

 27   R.  Je ne sais pas quel est le détenu qui n'est resté que deux à trois

 28   mois. Tous les détenus y étaient restés plus d'un an.

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  1   Q.  Ce n'est pas vrai qu'ils ont tous passé plus d'un an. C'étaient des

  2   détenus de Zvornik, de Vlasenica et de plusieurs autres endroits ?

  3   R.  De tous les endroits.

  4   Q.  Ce ne sont pas des villages, comme l'a dit le Procureur, mais ce sont

  5   des municipalités ?

  6   R.  Des villages, des villes également.

  7   Q.  Mais Vlasenica est un village, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, mais il y avait aussi des villes et des villages avoisinants.

  9   Q.  D'accord. Est-ce que les autorités musulmanes vous reprochaient le fait

 10   qu'à cause de votre intention de lancer une grenade à main dans le café, le

 11   conflit de Bijeljina a commencé quelques jours avant que ce soit planifié ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Est-ce que vous saviez que le conflit avait été planifié pour le 6

 14   avril ?

 15   R.  Je ne le savais pas.

 16   Q.  C'est à ce moment-là que l'on s'attendait à ce que la Bosnie-

 17   Herzégovine soit reconnue mondialement.

 18   R.  C'est ce que vous avez dit.

 19   Q.  Est-ce que vous savez qu'il y avait un ordre donné par Alija

 20   Izetbegovic pour que ce jour-là, on passe ou on parte à la conquête des

 21   casernes sur tout l'ensemble de Bosnie-Herzégovine ?

 22   R.  Je l'entends pour la première fois.

 23   Q.  Est-ce que vous saviez qu'il existait une cellule de Crise musulmane à

 24   Bijeljina et qui planifiait le tout ?

 25   R.  Non, c'est un mensonge tout ceci, c'est un tissu de mensonges. 

 26   Q.  Donc il n'y en avait pas ? Très bien. Alors, est-ce que vous savez d'où

 27   les Musulmans se procuraient des fusils automatiques et des fusils à

 28   lunette ?

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  1   R.  Vous pensez aux fusils ?

  2   Q.  Non, je parle de fusils automatiques et de fusils à lunette.

  3   R.  Je ne le sais pas.

  4   Q.  Est-ce que les Musulmans étaient armés de ces armes ?

  5   R.  Je ne crois pas que qui que ce soit avait ce type d'arme.

  6   Q.  Est-ce que vous savez où se trouve Gvozdevic ? C'est un quartier, c'est

  7   une agglomération.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que là, il y a eu un conflit entre les Musulmans lorsque

 10   certains personnes étaient parties faire la guerre contre les Serbes alors

 11   que d'autres s'opposaient à cela ?

 12   R.  Je ne le sais pas.

 13   Q.  Très bien. D'accord. Alors, si vous ne le savez pas, vous ne le savez

 14   pas. Est-ce que vous savez -- ou plutôt, est-ce qu'après votre départ de

 15   Batkovici, après avoir fait l'objet d'un échange, est-ce qu'eux les

 16   médecins, est-ce que vous avez eu des soins médicaux ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Où ça ?

 19   R.  A la garnison de Tuzla.

 20   Q.  Est-ce que vous avez des registres médicaux ? Est-ce que vous avez des

 21   dossiers médicaux ?

 22   R.  Vous voulez dire sur moi ?

 23   Q.  Est-ce que le Tribunal pénal vous a demandé de vous leur remettre vos

 24   dossiers médicaux ?

 25   R.  Personne ne me l'a demandé.

 26   Q.  Est-ce que vous aviez déclaré qu'en vérité, après votre sortie, votre

 27   échange, vous n'avez jamais été chez le médecin ?

 28   R.  Non. Vous n'avez pas bien lu. Avant la guerre, je n'avais jamais été

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  1   chez un médecin.

  2   Q.  A la page 8, troisième paragraphe à partir du haut, avant-dernière

  3   phrase -- ou plutôt, non. Dans le paragraphe, pour ce qui est de l'ensemble

  4   du paragraphe, vous décrivez à quelle -- enfin, qu'à votre habitude, vous

  5   avez été blessé. Vous aviez eu -- le bras gauche, vous a été fracturé, vous

  6   avez trois cotes qui ont été fracturées. Ensuite vous avez également une

  7   cicatrice au bras qui porte trace d'un fer à repasser, ensuite il y a

  8   quelques os cassés, vous avez des cicatrices de coupures au crâne

  9   également. Alors, vous dites que vous ne savez pas que votre crâne avait

 10   été fracturé. Vous dites, après cela, je n'ai jamais été chez un médecin.

 11   C'est ce qui est décrit dans votre déclaration alors que maintenant, vous

 12   dites que vous avez été voir un médecin à Tuzla, que vous avez fait l'objet

 13   d'un examen médical ?

 14   R.  Oui, j'avais été examiné par un médecin à ce moment-là et ensuite, plus

 15   tard, en 2004, pour le procès à Tuzla. C'est à ce moment-là que j'ai eu un

 16   examen médical.

 17   Q.  Les enquêteurs du bureau du Procureur ne vous ont jamais demandé de

 18   leurs remettre une documentation médicale ?

 19   R.  Non. Tout doit être prouvé.

 20   Q.  Non. Je sais que tout doit être prouvé s'il y a des documents, mais --

 21   R.  Oui, c'est ce que j'estime. J'estime que tout figure dans des

 22   documents.

 23   Q.  Mais non, je ne doute absolument de rien. Ici, vous êtes un

 24   représentant, vous êtes la personnification du droit international. Lorsque

 25   je pense au droit international, j'ai votre image en tête. Alors, ce n'est

 26   pas quelque chose que je -- je ne doute pas à cela. Mais je me demande :

 27   pourquoi est-ce que le Procureur ne vous a pas demandé de lui remettre de

 28   la documentation médicale, un dossier médical ? Est-ce que c'est quelque

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  1   chose que vous trouviez étrange ?

  2   R.  Non, absolument pas. Pourquoi est-ce que je trouverais cela étrange si

  3   je me sens bien, bien sûr. Tout va bien.

  4   Q.  Mais, non, il n'est pas question de vous demander comment vous vous

  5   sentez maintenant, mais quel était, lorsque vous êtes sorti en fait du

  6   centre de Rassemblement de Batkovici, quel était votre état de santé, les

  7   blessures étaient fraîches, un dossier médical aurait pu étoffer notre

  8   déclaration, si votre déclaration est véridique; Donc je n'aurais rien à

  9   contester, je n'aurais aucune objection à faire; est-ce que j'ai raison de

 10   dire cela ?

 11   R.  [aucune interprétation]

 12   Q.  Est-ce que les autorités musulmanes vous ont reproché du fait que vous

 13   aviez donné une déclaration pour la télévision serbe alors que vous vous

 14   trouviez à Batkovici ?

 15   R.  Pourquoi est-ce qu'ils me reprocheraient s'ils savaient pourquoi

 16   j'avais fait ces déclarations ?

 17   Q.  Pourquoi ?

 18   R.  Parce que j'ai été forcé, j'étais contraint de le faire.

 19   Q.  A cinq reprises, ils vous ont forcé à donner une déclaration pour la

 20   télévision de Bijeljina ? Est-ce que c'était celle-ci ?

 21   R.  Je n'ai pas vraiment compté, mais à plusieurs reprises.

 22   Q.  A la page 10, vous dites : "Environ cinq fois."

 23   R.  Oui, pour des Russes, je ne sais trop.

 24   Q.  Pourquoi est-ce qu'on vous aurait choisi, vous personnellement, pour

 25   faire ces déclarations ?

 26   R.  Je ne le sais pas.

 27   Q.  A Batkovici, il y avait des gens qui avaient beaucoup plus de prestance

 28   que vous, il y avait des représentants politiques, il y avait des

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  1   représentants, des dirigeants militaires et d'autres.

  2   R.  Vous parlez de détenus ?

  3   Q.  Oui, je parle de prisonniers.

  4   R.  Il y en avait.

  5   Q.  Il y avait des gens qui étaient plus notables que vous.

  6   R.  Je ne le sais pas. Je ne sais pas.

  7   Q.  Pourquoi est-ce qu'on vous aurait choisi vous, pourquoi est-ce qu'on

  8   vous a demandé de faire une déclaration à cinq reprises pour une télévision

  9   de Bijeljina ?

 10   R.  Probablement qu'on a demandé d'autres personnes également, ces notables

 11   que vous mentionnez.

 12   Q.  Oui, mais je n'avais pas entendu à la télévision de Bijeljina qu'on

 13   emmenait toujours des Musulmans de Batkovici pour faire des déclarations,

 14   mais pourquoi est-ce qu'on vous aurait choisi, vous personnellement, si

 15   vous étiez tout le temps recouvert d'ecchymoses, que vous aviez plein de

 16   blessures à la suite de passages à tabac ? Je trouve ça bizarre.

 17   R.  Je n'ai pas compris.

 18   Q.  Si au centre de Rassemblement de Batkovici, vous étiez sans cesse

 19   tabassé, vous avez été torturé, qu'on vous a assené des coups sans cesse,

 20   vous portiez des traces de tout ceci, de ces tortures : à la tête, sur les

 21   bras, les mains, et cetera.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Alors, est-ce que vous êtes une des personnes qui est un bon

 24   représentant ? Est-ce qu'on aime vos mots, est-ce que la propagande serbe

 25   souhaite vous montrer pour dire à quel point Batkovici était excellent, que

 26   le traitement était excellent, que c'est un merveilleux camp ?

 27   R.  C'était une caméra cachée.

 28   Q.  Donc vous parliez, vous ne saviez pas que vous étiez enregistré ?

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  1   R.  Je ne savais pas qu'ils étaient en train de filmer. Ils voulaient

  2   simplement avoir ma voix et tout ça.

  3   Q.  Mais ils vous ont emmené à la télévision de Bijeljina ?

  4   R.  C'étaient des journalistes.

  5   Q.  A Bijeljina, on vous a emmené à la télé ?

  6   R.  Oui. Oui, radio, télévision, je ne sais pas, la radio, à la télévision.

  7   Je sais qu'on me filmait.

  8   Q.  Donc il y avait des journalistes ?

  9   R.  Je ne sais pas si c'était la télé ou la radio.

 10   Q.  Alors, expliquez-moi, s'il vous plaît. Il y avait donc des journalistes

 11   qui sont venus à Batkovici ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Ils vous ont choisi, vous?

 14   R.  Des hommes avec des cravates.

 15   Q.  C'est vous qu'ils ont choisis, n'est-ce pas ? Ils vous ont emmené à

 16   Bijeljina, à la télévision.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge. J'essaie

 18   simplement de comprendre. M. Seselj parle de la première détention à

 19   Batkovic ou la deuxième fois ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, quand vous avez été à la télévision à

 21   Bijeljina, c'était la première fois ou la deuxième fois ?

 22   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 23     Alors, est-ce que vous avez été passé à tabac à ce moment-là ?      

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. La première ou la deuxième fois, Monsieur

 25   ? Parce que votre réponse n'a pas été enregistrée.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] La deuxième fois.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : La deuxième.

 28   Alors, Monsieur le Témoin, moi, je suis un Juge qui se pose des questions.

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  1   Je ne suis pas là en train de prendre pour argent comptant ce que dit le

  2   Procureur ou ce que dit la Défense. Moi, j'essaie de comprendre une logique

  3   dans ce que dit un témoin. Alors, des fois, ça peut déplaire à l'Accusation

  4   ou déplaire à la Défense mais, moi, je fais mon travail.

  5   Si vous avez été battu comme vous le dites, avec les blessures que vous

  6   nous relatez et apparemment constatées par le juge de Tuzla qui lui a bien

  7   fait son travail en faisant un examen médical, comment se fait-il alors que

  8   les autorités de ce camp vous choisissent pour aller à la télévision à

  9   Bijeljina où vous auriez pu dire devant tout le monde, Voilà ce qui m'est

 10   arrivé. Est-ce que vous avez une réponse à cette question qu'on peut se

 11   poser ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Excusez-moi, mais je suis -- il

 13   faut que je me concentre quelques instants.

 14   Pouvez-vous répéter la question ? Est-ce qu'on pourrait répéter la question

 15   ?

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Je répète lentement ma question.

 17   Vous nous avez dit que vous avez été battu au camp de Batkovic. Bon. Donc

 18   nous l'avons compris. Nous savons que vous avez été à la télévision. Alors,

 19   moi, j'essaie de comprendre comment quelqu'un qui est battu, qui peut

 20   présenter des plaies, des traces est exhibé à la télévision. C'est ça que

 21   j'essaie de comprendre.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais vraiment pas si c'était la

 23   télévision ou je ne sais pas si me filmait directement pour la télévision,

 24   mais je sais que je suis allé dire, parler, c'étaient des interrogatoires,

 25   si vous voulez.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous leur avez dit ce qui vous était arrivé, qu'on

 27   vous tapait dessus ou vous n'avez rien dit ? On peut comprendre que vous ne

 28   dites rien, parce que vous êtes prisonnier, moi, je comprends.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais à qui voulez-vous que je me plaigne

  2   puisque tout est pareil. C'est la Republika Srpska qui m'emmène parler

  3   devant la télévision serbe ou pour les journaux serbes, donc c'est leur

  4   autorité. Comment voulez-vous que je me plaigne, à qui ?

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  6   M. SESELJ : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que vous avez fait des déclarations pour une télévision

  8   étrangère ?

  9   R.  Oui, c'était la première fois, la première fois qu'on m'a emmené à

 10   Batkovici, pendant les trois premiers mois.

 11   Q.  Les trois premiers mois, d'accord. D'où venaient ces étrangers, de quel

 12   pays ?

 13   R.  Je crois que c'étaient des Russes.

 14   Q.  Est-ce que vous leur avez dit ?

 15   R.  Au village de Trnovo, ce n'est pas à Bijeljina, mais ils nous ont

 16   emmenés au village de Trnovo.

 17   Q.  Est-ce qu'ils vous ont dit que vous avez été passé à tabac à Batkovici

 18   ?

 19   R.  A qui voulez-vous que je le dise ?

 20   Q.  Aux journalistes, les journalises étrangers. Ils étaient Russes ou je

 21   ne sais trop, mais vous auriez pu leur dire. N'était-ce pas l'occasion

 22   idéale pour vous sauver, pour dire voilà on me bat ici. Ils auraient fait

 23   leur travail de façon professionnelle ?

 24   R.  Comment puis-je savoir de qui il s'agit ?

 25   Q.  Mais c'étaient des journalistes étrangers ?

 26   R.  Moi, je suis détenu. On me tape dessus et vous voulez que je leur dise

 27   qu'on me tape dessus. En plus, je suis prisonnier. Qui serait aussi

 28   courageux de le dire ?

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  1   Q.  Alors expliquez-moi quelque chose. Pendant le trois premiers mois si

  2   j'ai bien compris, vous aviez reçu le plus de coups, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Vous étiez complètement recouvert de blessure, d'ecchymoses ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Alors pourquoi vous a-t-on choisi vous, pourquoi est-ce que c'est vous

  7   qu'on a sélectionné pour parler à la télé ?

  8   R.  Je ne sais pas. Ils avaient un certain but.

  9   Q.  Pour que vous parliez que l'on ne vous passait pas à tabac alors que

 10   vous êtes recouvert d'ecchymoses ?

 11   R.  Oui, on m'a donné des vêtements comme aujourd'hui, comme maintenant.

 12   Q.  Mais vous aviez eu également des blessures à la tête ? -- On vous a

 13   donné des coups à la tête, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui. 

 15   Q.  Alors expliquez-moi pourquoi, de quelle façon est-ce qu'on vous a donné

 16   des coups avec une roche de cinq à six kilos ? Vous dites, vous avez été

 17   battu avec des chaînes, avec des barres, avec des bouts de hache et une

 18   roche de cinq à six kilos.

 19   R.  L'homme n'était pas très grand, donc il était petit. Il fallait que je

 20   m'agenouille pour qu'il me donne des coups. J'ai une cicatrice qui a huit

 21   pouces de long. C'était la grande cicatrice mais j'en ai d'autres plus

 22   petites.

 23   Q.  Donc l'homme était petit de taille. Il tient une roche de cinq à six

 24   kilos, c'est le genre de roche qu'on se sert pour faire de la choucroute ?

 25   R.  C'est une roche de la Drina.

 26   Q.  Donc cet homme tient cette roche avec les deux mains ?

 27   R.  Non, parce qu'il ne pouvait pas la tenir avec une main.

 28   Q.  Vous dites que vous agenouilliez ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Vous agenouilliez et lui, il vous donne des coups avec cette roche sur

  3   la tête ?

  4   R.  Oui, exactement, c'était ça. 

  5   Q.  Alors combien de coups un homme peut recevoir des coups d'une pierre de

  6   cette taille-là sans mourir sur le coup ?

  7   R.  Non, l'homme était un animal étrange.

  8   Q.  Vous m'appelez un animal là.

  9   R.  Mais non, vous n'avez pas compris. J'ai dit pour moi-même, j'ai dit

 10   l'homme est un animal étrange.

 11   Q.  D'accord. Alors s'il vous donne un coup une fois avec cette roche, est-

 12   ce qu'il tenait encore cette roche après le premier coup, il vous tenait

 13   encore la roche ?

 14   R.  Posez-lui la question.

 15   Q.  Encore une deuxième fois avec cette roche, un troisième coup avec cette

 16   roche ?

 17   R.  Mais je n'ai pas compté le nombre de coups que j'ai reçus.

 18   Q.  Mais alors combien de coups est-ce qu'on aurait pu vous donner ?

 19   R.  Toi, tu peux imaginer combien de fois est-ce que tu aurais pu, toi,

 20   recevoir de coups d'une roche de cinq à six kilos.

 21   Q.  Je crois que même si une tête dure j'ai peut-être la tête la plus dure

 22   à Scheveningen, mais je suis sûr mon crâne aurait éclaté après le premier

 23   coup.

 24   R.  Non, non, ce n'est pas toi qui as la tête la plus dure ici.

 25   Q.  J'ai l'impression que moi mon crâne aurait éclaté.

 26   R.  Le crâne peut éclater mais le cœur reste.

 27   Q.  Est-ce que votre crâne avait été éclaté ?

 28   R.  [imperceptible] Oui, c'est exact.

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  1   Q.  Mais si votre crâne éclate, on ne peut plus marcher, les centres au

  2   cerveau sont -- les centres responsables de la motion --

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Où allons-nous ainsi ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si vous, vous ne trouvez pas cela incroyable

  9   mais moi, je trouve incroyable que quelqu'un de trapu, et c'est de ce type

 10   de personne qu'il s'agissait, n'est-ce pas, se saisisse d'une pierre de

 11   cinq ou six kilos, ordonne au témoin de s'agenouiller et ensuite le frappe

 12   à la tête avec cette même pierre. Si cela ne vous semble pas incroyable,

 13   moi, je vais dire que pour moi, ça l'est.

 14   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Tout

 16   dépend de la force de celui qui agit ainsi, mais j'aurais un point d'ordre

 17   plus général. Est-ce que vous contestez le fait que le témoin ait été passé

 18   à tabac à Batkovic, est-ce que c'est ce que vous souhaitez dire, parce que

 19   je voudrais être absolument sûr que c'est ce à quoi vous pensez ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Harhoff, il est évident qu'il y a été

 21   battu. Ce qui pose problème c'est l'identité de ceux qui ont commis ces

 22   actes et la façon dont cela a été fait, ainsi que les détails nous

 23   indiquant les modalités exactes de ce tabassage.

 24   Afin de ne pas rentrer encore une fois dans le détail des auteurs de cela,

 25   afin de ne pas encore [imperceptible] une situation où vous allez expurger

 26   le compte rendu d'audience, il faut dire qu'il existe des méthodes de

 27   tabassage qui laissent la victime après en vie, mais apte uniquement à

 28   vivre dans un fauteuil roulant. Il y a d'autres méthodes de tabassage qui

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  1   laissent des conséquences mais qui permettent ensuite à la victime de

  2   continuer à vivre une vie à peu près normale. Là, nous voyons un témoin qui

  3   a pu rentrer par ses propres moyens dans le prétoire, qui semble avoir des

  4   mouvements assez cohérents, ce qui montre que son cerveau n'a pas été

  5   touché.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, je pense que nous

  7   sommes tous d'accord pour constater que le témoin est vivant.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai écouté avec attention ce

  9   que vous avez dit. J'ai regardé votre déclaration, si effectivement

 10   quelqu'un vous a frappé avec un caillou qui fait trois, quatre ou cinq

 11   kilos, sur la tête, n'importe quel médecin, n'importe quel infirmier dirait

 12   que ça fait --

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cinq à six, Monsieur le Président. Je suis

 14   vraiment désolé de vous interrompre mais cinq à six kilos.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Cinq à six kilos, mais même un kilo, je prends même

 16   un kilo, un kilo, avec un coup de kilo sur la tête vous pouvez avoir un

 17   traumatisme crânien. Voilà, alors est-ce que par la suite on vous a fait

 18   des radios du crâne, est-ce que vous avez eu cela ou pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, seulement des cicatrices.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 21   Monsieur Seselj, il doit vous rester moins de huit minutes, quelque chose

 22   comme ça.

 23   M. SESELJ : [interprétation] Entendu.

 24   Q.  Nous avons cité les dénommés Goga et Coso. Vous avez dit que Goga vous

 25   a donné la grenade au café Istanbul et que Coso était présent. Ensuite,

 26   vous avez dit que Coso était mort depuis longtemps, n'est-ce pas ? Comment

 27   est-il mort Coso ?

 28   R.  Vous ignorez la façon dont il est mort ?

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  1   Q.  Je vous le demande.

  2   R.  Il a été tué.

  3   Q.  Dites-moi : comment a-t-il été tué ? Comment le saurais-je si je

  4   n'étais pas présent, je vous le demande à vous.   

  5   R.  Oui, je vous ai bien entendu, mais, moi, j'étais à l'hôpital à cette

  6   époque-là. Il a été massacré.

  7   Q.  Où ?

  8   R.  Chez lui.

  9   Q.  Dans sa maison ?

 10   R.  Vers la fin, vers la fin de la chute de Bijeljina, il était en fuite et

 11   il a été tué.

 12   Q.  Avez-vous connaissance de la déclaration donnée par la sœur de Coso

 13   pour le journal "Oslobodjenje" à Sarajevo comme quoi Coso serait mort de

 14   mort naturelle chez lui ?

 15   R.  Non, je n'ai --

 16   R.  Cosa serait mort d'une mort naturelle. 

 17   Q.  C'est ça qu'a déclaré sa soeur, sa propre sœur pour un journal de

 18   Sarajevo, "Oslobodjenje."

 19   R.  C'est un mensonge. 

 20   Q.  Un mensonge ?

 21   R.  C'est un mensonge énorme.

 22   Q.  Donc sa sœur -- ta sœur a menti ?

 23   R.  Tout le monde sait que Cosa -- connaît la façon dont Cosa est mort,

 24   comme je l'ai dit.

 25   Q.  Alors ça veut dire -- la sœur de Cosa a déclaré pour le journal de

 26   Sarajevo qu'il était mort d'une mort naturelle chez lui.

 27   R.  Je m'excuse auprès des Juges de la Chambre mais je dois dire que cette

 28   personne a été véritablement massacrée. On lui a tout coupé, y compris ses

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  1   parties. A la fin c'est une femme appartenant à l'unité d'Arkan qui l'a

  2   tué.

  3   Q.  Quand l'a-t-elle tué ?

  4   R.  A ce moment-là, je ne sais pas la date exacte. C'était à l'hôpital.

  5   Q.  Une femme membre de l'Unité d'Arkan ?

  6   R.  C'est ce que j'ai entendu.

  7   Q.  Comment cela se fait-il que si les hommes d'Arkan ont quitté Bijeljina

  8   le 6 avril ?

  9   R.  Nous ne nous comprenons pas. Je parle des trois ou quatre premiers

 10   jours.

 11   Q.  Donc il a été tué pendant ces deux ou trois premiers jours par une

 12   femme ?

 13   R.  Oui. Il a été véritablement massacré, on l'a découpé en morceaux, bon

 14   il était -- c'était quelqu'un d'assez fort.

 15   Q.  Très bien.

 16   R.  Il pouvait endurer énormément de chose.

 17   Q.  Dans votre déclaration --

 18   R.  Il pouvait même endurer puisque moi j'en aurais pu.

 19   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit que les autorités serbes ou

 20   plutôt les troupes serbes, vous ne saviez exactement pas qui, avaient

 21   enlevé -- avaient emmené votre femme, votre frère, votre fille jusqu'à la

 22   caserne de la JNA et les avaient placés dans une unité de réfrigération ?

 23   R.  Ma femme, mon fils et mon frère, c'est ce que j'ai dit.

 24   Q.  Non, vous avez dit votre femme, votre frère, et la fille de votre

 25   frère. Mais de quelle unité de réfrigération et quelle sorte de

 26   réfrigération s'agissait-il dans laquelle ils les auraient placés ?

 27   R.  De quel type d'unité de réfrigération disposez-vous à la JNA ?

 28   Q.  Vous savez des réfrigérateurs dans lesquels on tenait la viande, par

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  1   exemple. Combien de temps les y ont-ils tenus ?

  2   R.  Aussi longtemps qu'ils le souhaitaient jusqu'au moment où ils leur ont

  3   déclaré où que je me cachais.

  4   Q.  Combien de temps cela faisait-il ?

  5   R.  Plusieurs heures.

  6   Q.  Ils les ont tenu dans ce réfrigérateur donc. Pourquoi étiez-vous si

  7   important au point qu'on vous relâche d'abord de l'hôpital, Arkan vous

  8   libère de l'hôpital et ensuite on vous inflige de telles souffrances --

  9   ensuite se reprend l'interprète -- qu'il soit aussi difficile de vous

 10   retrouver ?

 11   R.  Comme je l'ai dit ils m'ont laissé partir mais j'ai été assigné à

 12   résidence. Ensuite lorsque vous avez vu que j'étais en fuite, vous avez

 13   essayé de me capturer à nouveau.

 14   Q.  Qui peut-on donc se trouver en résidence surveillée pendant les

 15   conditions de guerre ?

 16   R.  C'est vous qui m'y avez placé.

 17   Q.  En résidence surveillée. C'est vous qui le dites. Connaissiez-vous la

 18   société Jugauto, savez-vous quel est ce nom ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Avez-vous jamais entendu parler d'une telle société ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Où se trouvait le camp des Bérets verts et de Ligue patriotique ?

 23   R.  Je ne sais pas.

 24   Q.  En avez-vous jamais entendu parler ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Vous avez dit que les coups de feu ont commencé juste après que vous

 27   avez été blessé et que vous êtes tombé de votre cheval ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Mais selon les informations dont je dispose -- provenant de personnes

  2   qui ont participé à ces événements, ils étaient tous membres du SRS auquel

  3   j'appartiens et qui sont des gens en qui j'ai confiance, il y a Alija

  4   Saracevic, le connaissez-vous ?

  5   R.  J'en ai entendu parler.

  6   Q.  Que représentait-il là-bas ? Que faisait-il ?

  7   R.  Il s'occupait des chevaux, il les emmenait.

  8   Q.  Où ?

  9   R.  Il avait des chevaux de course plutôt.

 10   Q.  Il n'avait pas donc un corral avec -- donc il n'avait pas un véhicule

 11   qui était tiré par des chevaux mais des chevaux de course, et il était un

 12   membre du SDR, n'est-ce pas ?

 13   R.  Je ne sais pas cela.

 14   Q.  Vous ignorez cela mais vous savez que des Musulmans du café Istanbul se

 15   sont dirigés vers la mosquée la plus proche et qu'Alija Saracevic a

 16   distribué des armes à partir de la mosquée ?

 17   R.  Je ne sais pas cela.

 18   Q.  J'ai été -- on m'a emmené de la mosquée jusqu'au quartier général du SD

 19   -- ces armes ont été prises de la mosquée jusqu'au quartier général du SDA

 20   et ont été distribuées là-bas ?

 21   R.  Je l'ignore.

 22   Q.  Savez-vous qu'il y avait des bureaux du SDA là-bas ?

 23   R.  Je l'ignore.

 24   Q.  Avez-vous connaissance que les Musulmans avaient des snipers qui

 25   étaient nichés à Zita sur le prémonitoire [phon] 5,29s ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  C'était pendant la nuit et ces snipers ont donc agi pendant la nuit.

 28   Savez-vous qui a été tué durant cette première nuit ?

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  1   R.  Non.

  2   Q.  Vous ne savez pas. C'était des civils serbes qui ont été les premiers

  3   tués par des armes musulmanes.

  4   R.  Je l'ignore.

  5   Q.  [aucune interprétation]

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   R.  [aucune interprétation]

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas venu pour l'essentiel à ce que

 15   je souhaitais c'est un contre-interrogatoire puisque je n'avais plus qu'une

 16   série de questions, je préfère ne pas -- je n'avais plus que deux ou trois

 17   questions mais je préfère ne pas entamer une nouvelle série de questions et

 18   je n'ai pas le temps.

 19   J'aurais deux questions relatives à des problèmes administratifs.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Biersay des questions

 21   supplémentaires.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Non, Monsieur le Président, pas d'autres

 23   questions. Merci.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- mes collègues, je vous remercie

 25   d'être venu dans des conditions difficiles apporter votre témoignage. Nous

 26   exprimons évidemment toute notre compassion pour les souffrances que vous

 27   avez pu subir lors de ces détentions. Nous espérons que vous pourrez donc

 28   continuer à exercer une activité malgré tout cela. Et je vous souhaite un

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  1   bon retour dans le pays dans lequel vous résidez.

  2   Je vais demander à M. l'Huissier de vous raccompagner.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  4   [Le témoin se retire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, vous avez deux

  6   questions administratives.

  7   Monsieur Seselj, que je vous indique compte tenu des décisions majoritaires

  8   de la Chambre, nous tiendrons une prochaine audience avec vous le jeudi 12

  9   mars, pour faire le point d'éventuelles questions administratives qui

 10   pourraient survenir entre aujourd'hui et le 12 mars. Voilà. Mais entre-

 11   temps il y a peut-être d'autres sujets.

 12   Je vous donne la parole. 

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce ne sera pas très long mais j'ai trois

 14   remarques pour le moment.

 15   Tout d'abord, Monsieur le Président et Monsieur Harhoff également au cours

 16   de la déposition de quelques-uns des témoins précédents vous avez exprimé

 17   votre compassion pour les témoins de l'Accusation qui manifestement ont

 18   menti, ont donné de fausses dépositions et se sont posés en tant que

 19   victimes alors qu'ils ne disposent d'aucune preuve permettant d'étayer ce

 20   statut de victimes. Et le témoin que nous avons eu aujourd'hui est de ce

 21   même type. Il a effectivement été blessé à Bijeljina mais tout un chacun

 22   peut être blessé en temps de guerre et il s'est bien trouvé au centre de

 23   rassemblement de Batkovic mais il ne dispose d'aucune preuve étayant le

 24   fait que les autorités, les forces serbes l'ait jamais battu à Batkovic, or

 25   il y a des preuves qu'il a été battu par d'autres. Je pense qu'il y a ici

 26   une forme de préjugés dans l'évaluation de tous ces témoins.

 27   Ma proposition irait plus dans le sens que vous procédiez à l'évaluation de

 28   tous ces témoignages à la fin et non pas par avance. Et peut-être que si

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  1   vous faisiez ainsi vous auriez la possibilité de tirer une ligne de partage

  2   et de voir qui était véritablement les victimes et qui ne l'étaient pas. Je

  3   pense que vous devriez également tenir compte du fait également que chaque

  4   fois que j'ai reconnu à quelqu'un le statut de victimes, je me suis

  5   toujours comporté avec beaucoup d'égards envers cette personne. Selon mon

  6   jugement cette personne n'a en aucun cas pu être une victime.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- été traduit ce que j'ai dit mais moi

  8   j'ai exprimé de la compassion pour les souffrances, mais les souffrances ça

  9   peut être diverses.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Entendu. Si cela n'entraîne pas une forme de

 11   préjugé, c'est tout ce que je voulais dire.

 12   Deuxième point, je voulais exprimer mon opposition à la demande de

 13   l'Accusation --

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, s'il vous plaît,

 15   cela n'a rien à faire avec des préjugés il s'agit simplement d'une

 16   compassion humaine toute simple envers quiconque aurait subi les

 17   traitements que ces personnes disent avoir subis. Qu'il s'agisse de Serbes

 18   ou de Musulmans qui sont responsables de ce passage à tabac, peu importe,

 19   mais je considère qu'il est tout à fait approprié de la part de cette Cour

 20   de pouvoir également faire preuve d'un visage humain et montrer une

 21   compassion envers ceux qui ont souffert et dont nous sommes ici pour

 22   débattre des intérêts. Et ceci va aussi bien pour les témoins de

 23   l'Accusation, que pour vos témoins si vos témoins avaient également fait

 24   l'objet de tels passages à tabac. Ma compassion ne va pas plus dans un sens

 25   que dans l'autre.

 26   Qu'il s'agisse de vos témoins ou ceux de l'Accusation, ou de témoins

 27   d'autres personnes ayant souffert et vécu dans de telles conditions et ceci

 28   mérite un mot de compassion de la part des Juges, et ça ne va pas plus loin

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  1   que cela.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais il faut garder à l'esprit les

  3   critères qui ont présidé à l'acte d'accusation tel qu'il a été dressé dans

  4   les critères qui sont arbitraires lorsqu'il s'agit de Serbes, de Musulmans,

  5   de Croates, d'Albanais les Juges des différentes Chambres expriment leur

  6   compassion envers des victimes ou supposés victimes, Musulmans, Croates,

  7   Albanais, c'est très rarement envers des victimes serbes. Après que nous

  8   avons eu ce témoignage de compassion ici, M. Harhoff, après l'acquittement

  9   dans l'affaire Haradinaj et les événements -- la condamnation des autorités

 10   serbes pour les crimes commis au Kosovo, ce Tribunal a véritablement perdu

 11   toute crédibilité. C'est ma position.

 12   La deuxième chose que je voudrais dire c'est mon opposition à la requête du

 13   Procureur pour que la déposition de Milan Deronjic soit versée en vertu de

 14   l'article 92 quater et ajouter à la liste 65 ter. Il est affirmé que vous

 15   avez reçu ce document le 10 septembre 2008, je n'en ai reçu une copie qu'à

 16   la pause. Ceci afin de ne pas déposer d'écriture, puisque je n'ai pas de

 17   coopération, pas de contact avec mes conseillers, je n'ai pas l'intention

 18   de déposer d'écriture. J'écrirais de façon très concise la requête en

 19   question.

 20   Miroslav Deronjic a été introduit en tant que témoin après sa mort. C'était

 21   un faux témoin et cela dans plus d'une affaire, et la Chambre a même passé

 22   outre sa participation au crime d'exécution de prisonniers à Srebrenica en

 23   1995. Il a obtenu cet arrangement au terme duquel il était condamné à dix

 24   ans de prison seulement pour avoir exécuter 65 Musulmans non armés à

 25   Glogova en 1992, bien qu'il est admis Deronjic avoir participé à la

 26   planification de l'exécution de prisonniers à Srebrenica, mais cela lui a

 27   été pardonné, et en retour il devait témoigner, livrer un faux témoignage

 28   contre d'autres personnes dans ces procès. Il est mort d'un cancer de la

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  1   moelle épinière, qui a avancé très rapidement, et c'est ce qui se produit

  2   lorsqu'on a affaire à des gens qui ont beaucoup de choses qui pèsent sur

  3   leur conscience. Deronjic était par ailleurs très bien éduqué, c'était un

  4   intellectuel et c'est lui-même qui s'est amené dans cette situation-là.

  5   Donc je m'oppose catégoriquement à l'introduction de ces éléments au terme

  6   -- en vertu de l'article 92 quater. C'est MM et Mme les Juges qui

  7   apprécieront. Je voudrais juste que cela soit versé au compte rendu

  8   d'audience. Surtout lorsqu'il s'agit de témoins qui se livrent à des

  9   marchandages afin d'avoir leur propre condamnation et leurs propres peines

 10   réduites ces témoins-là ne sont absolument pas crédibles.

 11   En l'espèce, Miroslav Deronjic a fait ma connaissance en prison. Je ne le

 12   connaissais pas d'avant. Et maintenant on veut verser son témoignage.

 13   Bratunac ne se trouve pas du tout mon acte d'accusation qui a été dressé à

 14   mon encontre, et il dépose à propos de Bratunac. Il n'y avait pas de

 15   volontaire du SRS présent là-bas.

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 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors on va passer à huis clos, et je vais expliquer

 11   à M. Seselj --

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 13   le Président.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. MUNDIS : [interprétation] Juste un point.

 17   Je pense que l'audience du 12 mars il s'agit donc d'une audience --

 18   d'une Conférence de mise en état inter partie et je voulais juste m'assurer

 19   qu'il y aura quelqu'un de l'Accusation qui sera présent. C'est ce qui se

 20   tiendra donc avec M. Seselj et il est bien entendu que nous ne serons pas

 21   présents.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est une audience comme un procès normal avec

 23   les trois Juges, le Procureur, l'accusé et lors de cette audience on

 24   abordera les questions administratives pas les questions des témoins

 25   uniquement les questions administratives.

 26   Oui, Monsieur Seselj.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis obligé de demander à Mme et MM. les

 28   Juges pourquoi il n'avertisse pas M. Mundis en lui disant qu'il ne doit pas

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  1   poser des questions absurdes. Le Règlement ne comporte absolument aucune

  2   disposition en vertu de laquelle, seul les Juges et l'accusé seraient

  3   présents lors d'une audience. Tout ce qui ne fait pas partie du procès ne

  4   peut être qu'une conférence de mise en état. Si vous filmez l'audience,

  5   alors l'accusé et l'Accusation doivent être présents --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- de faire une audience ex parte avec

  7   vous sans le Procureur, c'est possible. Bien. Alors il est quasiment 19

  8   heures. Je remercie tout le monde et nous nous retrouverons donc le 12 mars

  9   à 8 heures 30.

 10   --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le jeudi 12 mars 2009,

 11   à 8 heures 30.

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