Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 15880

  1   Le mardi 11 mai 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur l'Huissier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Bonjour, Madame, Monsieur les Juges.

  8   Il s'agit de l'affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Avant d'introduire le

 10   témoin, la Chambre va rendre plusieurs décisions orales dans l'ordre

 11   suivant :

 12   Premièrement, la Chambre demande à l'Accusation de déposer au plus tard

 13   pour le 1er juin 2010 toutes les requêtes qu'elle estime devoir prendre

 14   avant la décision 98 bis, ce qui veut donc dire, Monsieur Marcussen et

 15   Madame Biersay, que vous avez jusqu'au 1er juin pour nous déposer toutes

 16   vos requêtes, et après ça sera terminé. Et, bien entendu, lorsque ces

 17   requêtes auront été déposées, M. Seselj aura le temps nécessaire pour

 18   répliquer aux requêtes lorsque celles-ci auront été traduites dans sa

 19   langue. Ça, c'est la première décision orale.

 20   Deuxième décision orale, elle est relative à la requête du bureau du

 21   Procureur du 29 mars 2010. Alors, je vais lire lentement.

 22   Vu la requête enregistrée par le bureau du Procureur le 29 mars 2010 visant

 23   à obtenir pour sa seconde requête, Bar table, l'autorisation de dépasser la

 24   limite de 3 000 mots, et de la porter exceptionnellement à 4 353 mots. Vu

 25   la directive pratique du 16 septembre 2005 relative à la longueur des

 26   mémoires et des requêtes, attendu que la seconde requête, Bar table, vise à

 27   l'admission de 180 documents qui sont pour la plupart relatifs au discours

 28   de l'accusé et aux interviews qu'il a pu donner au cours de la période de

Page 15881

  1   l'acte d'accusation. Attendu que la Chambre considère que le nombre

  2   important de documents et la nécessité pour l'Accusation de justifier pour

  3   chacun d'entre eux de façon détaillée les motifs de sa requête justifie le

  4   dépassement de la limite de mots imposés par la directive du 16 septembre

  5   2005 [sic]. Attendu qu'il est dans l'intérêt de la justice que l'accusé

  6   bénéficie du même dépassement dans l'hypothèse où il souhaiterait déposer

  7   une réponse à la seconde requête, Bar table, par ces motifs faisant droit à

  8   la requête et ordonnant : Premièrement, que la seconde requête, Bar table

  9   de l'Accusation ne dépasse pas 4 400 mots; et deuxièmement, que la réponse

 10   de l'accusé à cette seconde requête, Bar Table, dans l'éventualité où il

 11   souhaiterait en déposer une ne dépasse pas 4 400 mots.

 12   Alors, Monsieur Seselj, je vous indique tout de suite que le Procureur nous

 13   a adressé une requête volumineuse qui fait sept volumes, et j'ai

 14   personnellement passé cinq heures à regarder l'ensemble des documents pour

 15   constater qu'il y a trois séries de documents; une première série qui

 16   concerne tous vos interviews; la deuxième série concerne toutes vos

 17   interventions à l'assemblée nationale de votre pays; et la troisième

 18   catégorie des documents divers dont des articles de presse.

 19   Les deux premières séries, vos interviews et vos interventions à

 20   l'assemblée nationale, sont des documents qui sont au cœur de l'entreprise

 21   criminelle commune et qui, par ailleurs, peuvent contenir des éléments

 22   incriminatoires concernant l'incitation au crime. Alors, il serait

 23   hautement souhaitable pour moi et mes collègues que vous répondiez à ces

 24   écritures pour nous donner votre point de vue sur chacun des documents

 25   concernant vos interviews, qui sont, j'allais dire, la pile atomique de la

 26   thèse de l'Accusation.

 27   Alors, ceci, la requête du Procureur doit vous être traduite, bien entendu,

 28   et nous avons fixé à 4 400 mots vos écritures en réponse. Bien entendu,

Page 15882

  1   vous disposez de 15 jours pour répondre, mais compte tenu du fait que la

  2   requête est importante, vous pourriez, le cas échéant, nous demander du

  3   temps supplémentaire pour répondre, comme vous pouvez ne pas répondre. Mais

  4   ça, c'est votre liberté d'appréciation.

  5   Par ailleurs, toujours dans la même lignée, je vous indique que le

  6   Procureur a fait également une requête en constat judiciaire à partir du

  7   jugement Krajisnik. Il y a plusieurs dizaines de faits dont l'Accusation

  8   demande le constat judiciaire. Là aussi, nous aurons besoin de votre

  9   position. Et notamment, je cite de mémoire, sur le point 24 de la requête

 10   du Procureur, où vous avez été mentionné directement dans le jugement

 11   Krajisnik.

 12   Sur ce, contrairement à ce que je vous avais indiqué il y a quelques

 13   semaines, ignorant tout des requêtes du Procureur qui arrivent ces derniers

 14   temps à un rythme soutenu, nous ne pourrons vraisemblablement pas avant fin

 15   août, début septembre, entamer la procédure 98 bis, compte tenu du travail

 16   à effectuer, tant en ce qui concerne la Chambre pour qu'elle rende sa

 17   décision dans ces deux requêtes à la lumière de vos écritures ou

 18   observations, et qu'il y a donc tout lieu de penser que nous pourrons

 19   entamer sereinement, ayant fait tout le travail nécessaire, le débat de

 20   l'article 98 bis fin août, début septembre, et non comme je l'avais

 21   indiqué, en juin, car j'ignorais à l'époque que l'Accusation allait nous

 22   saisir de ce type de requêtes.

 23   Alors, j'ai également une décision à rendre à huis clos.

 24   Mais vous avez levé la main. Si c'est très court, je vous donne la

 25   parole, car n'oublions pas que nous avons un témoin et notre temps

 26   aujourd'hui est très précieux, car la Chambre prendra deux heures pour lui

 27   poser des questions, le Procureur aura deux heures et, vous, vous aurez

 28   également deux heures. Alors, Monsieur Seselj, soyez bref.

Page 15883

  1   Je vous donne la parole.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord

  3   me prononcer au sujet de ce que vous venez de dire - je serai bref - et

  4   j'ai quatre points administratifs à évoquer qui vont également nous prendre

  5   peu de temps.

  6   Je vais tout de suite vous décontracter, vous et vos collègues, je ne

  7   vais pas faire comme cela vous arrangerait le mieux, parce que je ne veux

  8   pas vous donner des excuses pour les violations de mes droits en matière de

  9   procédures, parce que ceci n'existe ni dans le droit anglo-saxon ni dans le

 10   droit continental.

 11   Je ne conteste pas la possibilité que l'on verse certains documents

 12   sans la présence d'un témoin qui permettrait de verser au dossier ceci,

 13   mais que le Procureur envoie cela par la poste, dans aucun système

 14   judiciaire cela n'est possible.

 15   Ils ont pu le faire dans certaines affaires où les accusés n'ont pas

 16   bénéficié d'une protection ou d'une défense appropriée, et dans la plupart

 17   des affaires diligentées devant ce Tribunal, les accusés n'ont pas eu une

 18   défense appropriée. Nous, nous avons eu une bonne méthode. S'agissant des

 19   enregistrements vidéo, vous avez dit à l'Accusation d'apporter la totalité

 20   des enregistrements vidéo pour qu'on puisse les voir dans le prétoire, on a

 21   demandé au Procureur de nous dire quelle est la pertinence, et je suis

 22   censé me prononcer. Tous mes discours, toutes mes interviews, de cette même

 23   façon, peuvent régulièrement être versés au dossier. Donc, le Procureur

 24   montrerait les discours ou interviews un par un, il dirait pourquoi cela

 25   est pertinent, et moi, j'aurais à me prononcer sur cette pertinence tout de

 26   suite, de façon claire et brève, comme cela a été fait au niveau des

 27   enregistrements vidéo.

 28   Mais alors, avec le temps que le Procureur vous communique et que

Page 15884

  1   moi, maintenant, je dois me prononcer. Non, je vais ignorer la chose comme

  2   si elle n'existait pas, et à vous de faire comme bon vous semble.

  3   Maintenant, pour ce qui est des articles de presse, d'accord lorsqu'il

  4   s'agit de mes discours à l'assemblée, à des réunions publiques, mes

  5   interviews à la télévision, à la radio, à la presse, soit. Mais les

  6   articles de presse qui représentent l'interprétation subjective du

  7   journaliste d'un événement donné et faire verser cela au dossier comme

  8   étant un élément de preuve, sans qu'on ait entendu un témoin et sans la

  9   possibilité d'en débattre publiquement dans le prétoire, cela n'est

 10   absolument pas possible. Ça, c'est une astuce qui n'est pas appropriée et

 11   qui est servie par l'Accusation. Moi, je ne veux pas y participer. Ce sont

 12   de sales procédés et moi, je ne veux pas y procéder. D'ailleurs, le procès

 13   manque de régularité pour bien des raisons déjà, alors vous pouvez tout de

 14   suite être certains que vous allez gagner du temps pour ce qui me concerne.

 15   Je ne vais pas donc gaspiller votre temps à cet effet.

 16   Pour ce qui est de me faire savoir de façon officielle qu'il y a un

 17   constat judiciaire d'établi dans l'affaire Krajisnik, mais Madame,

 18   Messieurs les Juges, Krajisnik, lui aussi, s'était plaint de ne pas avoir

 19   eu une défense appropriée. Est-ce que vous savez ce que M. Krajisnik a vécu

 20   une fois dans le prétoire ? On a contre-interrogé un témoin, M. Krajisnik a

 21   demandé à ce qu'on le laisse poser quelques questions. Et son grand avocat

 22   s'est levé tout de suite et a dit aux Juges de la Chambre qu'il s'y

 23   opposait. Il s'opposait, donc, au fait de voir son client poser des

 24   questions. Donc, cet avocat a gardé son propre client dans un statut

 25   d'imbécile dans ce prétoire. Alors, M. Krajisnik lui a dit qu'il ne voulait

 26   plus de lui et il a demandé à ce qu'on le laisse se défendre tout seul, et

 27   on lui a quand même assigné un nouveau conseil. Donc, son procès n'était

 28   pas régulier et approprié. Il n'a pas eu une défense appropriée. Ce que les

Page 15885

  1   Juges ont constaté là-bas, ça ne me regarde pas. Moi, je ne reconnais

  2   aucune phrase énoncée dans ce jugement.

  3   Parce que dans quelques jours, on va publier un livre qui est intitulé "La

  4   Guillotine anti-serbe de La Haye", où j'ai publié tous les jugements qui

  5   sont entrés en vigueur au niveau de ce Tribunal, et j'ai énuméré une

  6   quantité énorme de violations des droits de l'homme, et j'ai un autre livre

  7   qui a été publié mais que je n'ai pas encore reçu, je vous le

  8   communiquerai, pour ce qui est de la violation des droits en matière de

  9   procédure dans l'affaire Milosevic, et je me propose de publier celles de

 10   mon affaire aussi.

 11   Alors, si vous avez la patience, j'ai quatre points à évoquer.M. LE JUGE

 12   ANTONETTI : Monsieur Seselj. Bien, la Chambre a pris note de vos

 13   observations. Les quatre points, là, vont vous prendre combien de minutes ?

 14   Parce que je vous dis, ma préoccupation, c'est le témoin, et ce sera

 15   certainement le dernier témoin avant votre phase, donc moi, je voudrais

 16   qu'on termine avec ce témoin. Est-ce qu'il faut -- combien vous avez

 17   besoin, là ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas fait le

 19   décompte en me préparant, je vous ai promis d'être très concis, et je vais

 20   faire de mon mieux. Mais je ne sais pas vous dire d'avance si j'ai besoin

 21   de cinq minutes ou de dix minutes, je ne suis pas en mesure de le faire,

 22   mais j'aurais déjà pu en finir avec un problème si vous ne m'aviez pas posé

 23   cette question. Mais je serai très bref.

 24   J'ai reçu une lettre de Soraya Laucci à l'intention de M. Ram Doraiswamy,

 25   ce Greffier de cette Chambre, où il lui est dit que les Juges de la Chambre

 26   estiment qu'on peut verser des transcriptions officielles dans le compte

 27   rendu, et que le Procureur est censé examiner la totalité des

 28   transcriptions versées au dossier dans l'affaire Seselj, et qui ont été

Page 15886

  1   versées dans le système électronique. Pour ce qui est des versions de

  2   transcriptions, elles remplaçaient tout ce qui n'est "pas officiel," pour

  3   remplacer par une version officielle. J'ai été surpris de voir que ces

  4   écrits n'ont pas été consignés comme étant des transcriptions fiables pour

  5   ce qui est des jugements ou des procès réalisés ou qui se sont produits

  6   déjà.

  7   Pour ce qui est du 98 bis, j'ai besoin de la totalité des éléments de

  8   preuve de l'Accusation et des Juges de la Chambre, qui ont été versés au

  9   dossier. Bien sûr, on me l'a communiqué en application du 65 ter il y a

 10   longtemps, mais c'est une quantité tellement énorme de documents, avec une

 11   multitude de documents qui sont complètement inutiles et qui ne servent à

 12   rien, et qui n'ont même pas été utilisés, le reste. Alors maintenant, je

 13   voudrais qu'on me range les choses par classeur en langue serbe, parce que

 14   je n'ai pas de collaborateur ici, au quotidien, qui pourrait le faire pour

 15   moi-même. Donc j'estime que quelqu'un, forcément, doit le faire pour moi.

 16   Est-ce que ce sera les services du Greffe ou le personnel du Procureur,

 17   cela est égal. Mais moi, j'en ai besoin pour ce qui est de me préparer à

 18   des fins qui sont liées au 98 bis.

 19   Deuxièmement. Au mois d'avril, j'ai été visité par des conseillers

 20   juridiques, et mon case manager, c'est-à-dire un conseiller juridique qui

 21   s'appelle Boris Alexic, et le chef de l'affaire, Marina Ragus. Le Greffe

 22   m'a, une fois de plus, empêché de recevoir M. Zoran Krasic, qui est mon

 23   conseiller juridique, et qui a dit et écrit que sa visite ne pouvait pas

 24   être privilégiée, mais qu'elle serait supervisée, et c'est la raison pour

 25   laquelle M. Krasic n'est pas venu. On ne m'a même pas encore payé les

 26   déplacements de mes conseillers juridiques. J'ai dû payer tout moi-même.

 27   Ils sont passés la dernière fois au mois de décembre, puis au mois d'avril,

 28   et qui sait maintenant quand est-ce que je vais pouvoir les faire revenir,

Page 15887

  1   parce que je n'ai pas d'argent pour les faire venir souvent. Ça, c'est le

  2   deuxième point que je voulais évoquer.

  3   J'ai reçu, en outre, le 19 avril, une demande de l'Accusation visant à

  4   faire venir, une fois de plus, un témoin. Etant donné que la documentation

  5   est confidentielle, je ne citerai rien de ces documents, mais en substance,

  6   ça se résume à ceci. Le Procureur, une fois que le témoin a terminé son

  7   témoignage, s'est réentretenu avec le témoin, le témoin leur a déposé une

  8   nouvelle déclaration au travers de quoi le Procureur a essayé de se

  9   réhabiliter soi-même, parce qu'ils ont fait des bavures dans ce prétoire,

 10   et j'ai complètement massacré leur témoin à l'occasion du contre-

 11   interrogatoire. J'ai prouvé que le Procureur se servait de méthodes

 12   inadéquates pour ce qui est des récolements de témoins et des déclarations

 13   en application du 98 ter.

 14   Maintenant, ils veulent le faire revenir, ce témoin. Je réponds, cela

 15   ne peut pas se faire, parce que si s'était fait dans l'une quelconque des

 16   affaires, cela signifierait que le Procureur pourrait re-citer à

 17   comparaître la totalité des témoins qui ont comparu jusqu'à présent, avec

 18   des déclarations toutes neuves, parce que je leur ai complètement massacré

 19   tous leurs témoins. Il n'y a pas un seul témoin qui est resté et qui est

 20   sorti d'ici avec une pertinence quelconque de ce qu'il a dit. Il n'y a pas

 21   un seul. Si vous vous en souvenez de certains, je veux bien, mais je ne

 22   m'en souviens pas du tout. Ils ont tous été sacqués. Le Procureur pourrait

 23   s'entretenir une fois de plus avec tous les témoins, recueillir de

 24   nouvelles déclarations en se servant des contre-interrogatoires déjà

 25   effectués, et réhabiliter tout ce qu'ils ont loupé ou raté dans le

 26   prétoire. Je m'y oppose à cette requête. Ça, c'est le troisièmement.

 27   Le quatrièmement, maintenant. Il y a quelques mois, vous m'avez rendu

 28   oralement une décision qui visait à me faire soumettre à une censure

Page 15888

  1   préventive de tous les livres que je voulais imprimer. Ça ne m'a pas encore

  2   été communiqué par écrit, mais il y a déjà des livres qui sont publiés,

  3   parce que j'en avais donné plusieurs auparavant à faire imprimer. Il y a un

  4   livre en quatre tomes qui est imprimé, et il s'appelle les dossiers de la

  5   police. Or, ça, c'est mon dossier de la police depuis début 1982 jusqu'à la

  6   fin de l'an 2002. Il y a 20 ans de ce que la police a recueilli à mon égard

  7   au sujet de provocateurs, d'informateurs, mise sur écoute de mes

  8   téléphones, à la maison ou ailleurs. Il y a une multitude de documents que

  9   le Procureur s'est procurés auprès du gouvernement de la Serbie. J'ai

 10   demandé au gouvernement de la Serbie de me communiquer, à moi aussi, ces

 11   documents. Le gouvernement de la Serbie m'a prévenu que je ne devais le

 12   montrer à personne, que je ne devais pas le publier, que je devais demander

 13   l'autorisation pour ce qui était de m'en servir dans le prétoire, et

 14   cetera; mais comment le gouvernement peut-il me contraindre à faire cela ?

 15   Cela n'est pas possible. J'ai publié. Le gouvernement de Serbie n'a qu'à

 16   m'arrêter un jour, me traîner en justice un jour. Ça les regarde. Ça ne

 17   m'intéresse pas. Je vais vous le remettre aujourd'hui.

 18   Tout ce qu'on a donné au Procureur, j'ai demandé à ce qu'on me donne

 19   le reste du dossier de police qui est le mien pour les années qui ne sont

 20   pas pertinentes pour cet acte d'accusation. Dans un moment de faiblesse,

 21   ils ont fini par me le donner, probablement peut-être pour se tranquilliser

 22   la conscience suite à ce transfèrement de tant de Serbes au Tribunal de La

 23   Haye, et j'ai décidé de le publier. Alors, que se passe-t-il maintenant ?

 24   Ils ne peuvent rien faire. Je suis en train d'être en prison à La Haye, je

 25   ne peux pas faire de la prison à Belgrade.

 26   Le Procureur peut être tout à fait décontracté maintenant, parce que quand

 27   il me communique un quelconque de ces documents, il n'a pas à y mettre une

 28   mention : "Contactez le gouvernement serbe avant de s'en servir dans le

Page 15889

  1   prétoire." Parce que c'est tout à fait inutile. J'ai publié le tout. C'est

  2   tout en langue serbe ici, dans la version originale.

  3   Madame et Messieurs les Juges, pour autant que je sache, jamais encore au

  4   monde il n'est arrivé que l'un quelconque des adversaires politiques d'un

  5   régime ait pu publier son dossier de police au grand complet. Je suis le

  6   premier à l'avoir fait, et j'en suis fier.

  7   Deuxièmement, c'est que quand vous vous penchiez sur ces quatre tomes,

  8   quand vous vous rendez compte de tout ce que la police secrète m'a fait,

  9   police secrète dirigée par Jovica Stanisic, vous comprendrez combien il est

 10   dénué de sens de voir le bureau du Procureur me ranger dans une entreprise

 11   criminelle commune avec Jovica Stanisic ou Frenki Simatovic, ou les autres

 12   responsables du régime Milosevic. Et quand même bien j'ai été vice-premier

 13   ministre, j'ai été mis sous écoute avec l'autorisation du président du

 14   tribunal de la Cour suprême, comme si j'étais un terroriste qui menaçait de

 15   s'emparer du pouvoir par la force, et qui est entré dans le gouvernement

 16   rien que pour guetter une occasion visant à s'emparer du pouvoir total.

 17   Alors, c'est important.

 18   C'est important aussi, parce que j'ai cru comprendre que vous étiez

 19   porté à faire en sorte que ces documents de la police et les rapports de la

 20   police, vous êtes porté à les verser au dossier comme éléments de preuve.

 21   En Serbie, ce n'est pas possible. Ce qui est consigné par la police, cela

 22   n'est pas possible de nos jours non plus. A moins d'entendre un témoin en

 23   présence d'un avocat, cela, c'est possible, lorsque l'accusé ou le suspect

 24   sont interviewés en présence de son avocat. Mais les rapports

 25   d'informateurs, les mises sur écoute, on ne peut pas s'en servir en tant

 26   qu'éléments de preuve ou dans les tribunaux. Vous, vous êtes porté, vous

 27   avez fait preuve de la chose, à verser cela au dossier. Or, quand vous vous

 28   penchez sur les terribles mensonges qui ont été casés pendant 20 ans à mon

Page 15890

  1   sujet, et quand vous vous penchez sur les méthodes dont se sont servis les

  2   gens de la police secrète en Yougoslavie, quand vous vous penchez aussi sur

  3   le fait que pendant les 20 années écoulées j'ai incessamment été à la

  4   limite de la mort et aux confins de la vie et de la mort, vous comprendrez

  5   qu'aucun rapport de police ne doit faire l'objet d'une confiance pleine et

  6   entière. Donc, je vous demanderais de demander à l'huissier de prendre ces

  7   livres, ces tomes, et d'en prendre possession vous-même, en tant que Juge

  8   de la Chambre.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je donnerai la parole à M.

 10   Marcussen qui s'est levé. De vos livres, qu'est-ce que vous voulez ? Vous

 11   voulez les donner à la Chambre ? Vous en demandez l'admission ? Quel statut

 12   vous voulez donner à ces livres ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous le dire avant que M. Marcussen ne

 14   prenne la parole pour dire ce qu'il a à dire. Je n'ai pas demandé à ce que

 15   ce soit versé au dossier. Moi, conformément à votre décision qu'on ne m'a

 16   pas encore donnée par écrit, je vous informe qu'il y a des livres qui ont

 17   été imprimés, et je vous rends possible un examen de ces livres. Vous

 18   pouvez en faire ce que vous voulez. Vous pouvez les revendre. Cela a la

 19   cote, ça peut bien se vendre. J'espère que vous n'allez quand même pas les

 20   jeter. Mais je ne veux pas donner l'ensemble au Procureur, parce qu'ils

 21   peuvent, ils ont les moyens de l'acheter à Belgrade. Ils vont peut-être

 22   encore me poursuivre là aussi pour outrage au Tribunal, mais je ne vois pas

 23   pourquoi je leur faciliterais la tâche. Ils n'ont qu'à aller à Belgrade,

 24   l'acheter et lire.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Oui, Monsieur Marcussen.

 26   M. MARCUSSEN : [interprétation] Je m'étais levé parce que l'accusé ne

 27   soulève pas la question d'administration, mais faisait la promotion de ces

 28   livres, et faisait également état de certains nouveaux éléments.

Page 15891

  1   De plus, je pense qu'il n'y a aucune raison pour que l'accusé donne ces

  2   livres à la Chambre pour inspection, étant donné que ces livres ont déjà

  3   été publiés.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre a donné une décision. Je ne l'ai pas,

  5   mais le juriste de la Chambre va me retrouver ça. Nous avons dit qu'à

  6   l'avenir, lorsque l'accusé ferait paraître un livre, ce livre devrait être

  7   transmis au Greffe afin qu'on vérifie si, dans le livre, il n'y a pas des

  8   propos qui pourraient porter atteinte à la bonne sérénité de l'audience, à

  9   la réputation du Tribunal, voire aux Juges. Apparemment ces livres ne

 10   répondent pas à ces critères. Mais moi, je vois un intérêt potentiel pour

 11   vous, mais ça, c'est votre problème.

 12   C'est que si dans ce livre vous auriez été surveillé par les

 13   policiers de M. Stanisic et Simatovic pendant des années, des années, des

 14   années, ça pourrait être intéressant au point de vue de l'entreprise

 15   criminelle, car vous êtes dans une entreprise criminelle avec ces deux

 16   personnes ainsi que d'autres. Et peut-être que les rapports de police

 17   pourraient dire, par exemple, que vous avez eu un entretien avec M.

 18   Karadzic, avec M. Milosevic. Vous avez été mis sous écoute. J'en sais rien.

 19   Malheureusement, je ne connais pas votre langue, et donc j'aurais d'énormes

 20   difficultés à voir et à comprendre ce qu'il y a dedans. Mais je vais

 21   demander à mes collègues ce qu'on décide tout de suite pour les quatre

 22   livres.

 23   Alors, qu'est-ce qu'on fait ?

 24   M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président --

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre, qui a délibéré sur la question, demande

 27   à M. l'Huissier d'aller chercher les livres, de les donner à M. le

 28   Greffier, ici présent, et, conformément à notre décision, le Greffe, avec

Page 15892

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15893

  1   ses traducteurs, verra ce qu'il y a dedans et nous ferra un rapport, le cas

  2   échéant, si le livre a un intérêt quelconque. Donc, c'est notre décision.

  3   Alors Monsieur l'Huissier, allez prendre les quatre exemplaires et vous les

  4   donnez au Greffier, ici présent.

  5   Monsieur Marcussen.

  6   M. MARCUSSEN : [interprétation] Je voudrais être sûr que nous comprenions

  7   bien la décision. Nous voulons, en fait, nous assurer qu'il n'y ait pas

  8   d'éléments qui n'auraient pas dû être communiqués; les Juges de la Chambre

  9   ne veulent pas consulter le livre comme élément de preuve. Vous voulez

 10   simplement vous assurer qu'il n'y a pas d'information confidentielle qui a

 11   été communiquée par le truchement de ce livre, n'est-ce pas ?

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 13   Deux remarques vites de ma part, et après on fait introduire le témoin.

 14   Mais je dois lire également une décision orale qui est assez longue.

 15   Concernant le fait qu'un témoin avait été après entendu par le

 16   Procureur. C'est à ma grande surprise que j'ai constaté cela. Je

 17   n'imaginais pas une seconde que le Procureur s'entretiendrait avec un

 18   témoin, donc ça été une grande surprise, et j'ose espérer que ça ne se

 19   renouvellera pas.

 20   Deuxièmement, concernant l'entrevue avec M. Krasic, nous avons

 21   appris, nous les Juges, qu'il n'y a pas eu d'entretien avec M. Krasic, car

 22   vous aviez appris qu'il devait être placé sous écoute lors de cet

 23   entretien. Et à ce moment-là, le sachant, vous avez dit : Dans ces

 24   conditions, ce n'est pas la peine qu'il vienne. Ça, nous le savions. On

 25   avait été informés par le Greffe.

 26   Le reste, les autres questions que vous avez soulevées, sont des

 27   questions d'ordre technique. Nous verrons cela entre nous.

 28   Je vais demander à M. le Greffier de passer à huis clos, parce que j'ai une

Page 15894

  1   décision importante à rendre qui est un peu longue, et après on va

  2   introduire le témoin. Monsieur le Greffier, huis clos, parce que ça

  3   concerne des témoins protégés.

  4   Non, ce n'est pas la peine de baisser le rideau. Non. Non. Oui, d'accord.

  5   Bien.

  6   [Audience à huis clos]

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)

Page 15895

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12 

 13  Pages 15895-15897 expurgées. Audience à huis clos.

 14 

 15  

 16 

 17 

 18 

 19 

 20 

 21 

 22 

 23 

 24 

 25 

 26 

 27 

 28 

Page 15898

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19   [Audience publique]

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, pouvez-vous me dire que vous ne

 21   demandez pas de mesures de protection et que vous voulez témoigner

 22   publiquement ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je confirme.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 25   Pouvez-vous nous donner votre nom, prénom et date de naissance.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Zoran Rankic. Je suis né le 1er

 27   août 1955 à Bogatic dans la République de Serbie.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre profession actuelle, Monsieur ?

Page 15899

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] En ce moment, je travaille comme chef d'équipe

  2   dans une entreprise de construction. Mais je suis de vocation de

  3   technicien.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal sur les

  5   faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie, ou bien c'est la première

  6   fois que vous témoignez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois aujourd'hui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirais la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN : ZORAN RANKIC [Assermenté]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.

 14   Alors, Monsieur, quelques éléments d'information sur la façon dont va se

 15   dérouler cette audience.

 16   Vous allez dans un premier temps répondre à des questions que les trois

 17   Juges vont vous poser. Nous avons décidé de nous répartir les deux heures

 18   en trois. Donc, chaque Juge aura normalement 40 minutes. Personnellement,

 19   je ne vais pas utiliser l'intégralité des 40 minutes vu le retard déjà

 20   pris. Après quoi, le Procureur aura deux heures. Le Procureur nous a

 21   demandé par requête de changer le tour, c'est-à-dire il aurait voulu que ça

 22   soit d'abord M. Seselj qui vous pose les questions et le Procureur après.

 23   La Chambre n'a pas accepté cela dans la mesure où nous avons procédé

 24   toujours de la même manière; questions des Juges, questions du Procureur,

 25   questions de l'accusé. En revanche, comme le Procureur il a deux heures, il

 26   peut très bien, s'il le veut, utiliser une heure et demi dans un premier

 27   temps pour ses questions, puis après laisser M. Seselj utiliser ses deux

 28   heures et reprendre la parole pendant une demi-heure après. Quoi qu'il en

Page 15900

  1   soit, le Procureur aura tout compris deux heures, pas une minute de plus,

  2   pas une minute de moins. S'il n'utilise pas ses deux heures, tant mieux,

  3   mais il a donc deux heures.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une objection.

  5   Je n'accepte pas cette méthode. C'est quelque chose de nouveau que vous

  6   venez d'introduire. Dans ce cas je ne vais pas du tout interroger le

  7   témoin, si après moi l'Accusation va disposer d'une demi-heure. Dans ce

  8   cas-là, accordez-lui quatre heures.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous renoncez c'est votre choix. Bien. Mais

 10   Monsieur Seselj, la Chambre vous donne la possibilité de reprendre la

 11   parole après les questions supplémentaires du Procureur. Donc, le Procureur

 12   peut avoir une heure et demie. Vous, vous prenez une heure et demie si vous

 13   voulez. Le Procureur prend 30 minutes, et vous, vous avez la parole en

 14   dernier. Vous reprenez vos 30 minutes. Alors, vous avez peut-être mal

 15   compris ce que nous avions décidé. C'est vous qui avez toujours la parole

 16   en dernier.

 17   Avez-vous compris cette fois ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai bien compris

 19   dès la première fois. Peut-être il y avait un problème de traduction. Mais

 20   maintenant que vous avez corrigé cela, ou peut-être c'est l'interprète qui

 21   a mieux traduit, dans ce cas-là c'est bon. Mais vis-à-vis de l'Accusation

 22   je dois avoir le dernier mot. Mais peut-être la traduction n'était pas la

 23   bonne la première fois.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 25   Alors, Monsieur, je vais commencer à vous poser des questions. Et mes

 26   questions, comme j'ai passé plusieurs heures dans les documents que j'ai

 27   concernant toutes les déclarations faites au bureau du Procureur et à la

 28   Défense de M. Seselj, ça me permet dans une seule question d'envisager

Page 15901

  1   toute la problématique.

  2   Questions de la Cour :

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous me dire dans quelles circonstances

  4   vous avez d'abord donné des déclarations au bureau du Procureur, et puis au

  5   mois d'août 2008 vous avez été voir la Défense de M. Seselj pour leur

  6   donner un témoignage ? Expliquez-moi pourquoi dans un premier temps vous

  7   étiez témoin de l'Accusation, puis dans un second temps, témoin de la

  8   Défense de M. Seselj ? Pouvez-vous nous donner des explications ?

  9   R.  Monsieur le Président, tout d'abord je dois commencer par l'an

 10   2003. C'est à ce moment-là que l'enquêteur du bureau du Procureur de La

 11   Haye a pris la première déclaration, et terminer avec l'an 2006, c'est la

 12   dernière fois que j'ai fait une déclaration auprès du bureau du Procureur

 13   du Tribunal de La Haye directement ici à La Haye.

 14   A partir de l'an 2003, des pressions de l'Accusation ont commencé,

 15   pressions sur ma famille disant qu'il fallait que je contacte le bureau du

 16   Tribunal de La Haye à Belgrade afin qu'il puisse prendre ma déclaration.

 17   J'espère que je ne parle pas trop vite.

 18   Compte tenu de cela et compte tenu du fait qu'ils exerçaient une pression

 19   sur ma famille disant qu'il fallait que je les contacte, et menaçant au cas

 20   où je ne contacterais pas de me faire venir avec l'aide des organes du

 21   ministère de l'Intérieur, afin de protéger ma famille j'ai répondu à leur

 22   appel.

 23   Ils m'ont interrogé d'abord pendant trois jours. C'était M. Paole Pastore

 24   Stocchi, l'enquêteur qui menait l'interrogatoire avec Mme Sabina Scholz.

 25   J'ai commencé à faire ma déclaration au mieux de mes souvenirs, et compte

 26   tenu du fait que beaucoup de temps s'était écoulé, j'avais oublié un

 27   certain nombre de faits.

 28   M. Paolo Pastore Stocchi était mécontent de ma déclaration. S'agissant de

Page 15902

  1   ma première déclaration, il l'a prise et il l'a déchirée en disant :

  2   Monsieur Rankic, soit vous allez fournir une déclaration en bonne et due

  3   forme, puisque nous avons des déclarations d'autres témoins qui ne

  4   coïncident pas avec la vôtre. Je suppose qu'il pensait que je mentais dans

  5   ma déclaration, ou au moins que je ne disais pas la vérité. Bien

  6   évidemment, la suite de l'entretien s'est déroulée comme cela. Monsieur

  7   Rankic, je sais que tu n'es pas tout blanc. Nous avons quelque chose te

  8   concernant, les témoins qui ont déclaré - nous avons leurs déclarations -

  9   que tu as assisté à certains événements qui se sont déroulés en Bosnie-

 10   Herzégovine. Par conséquent, sur la base de tout cela, je n'ai pu que

 11   conclure que si je ne coopérais pas avec lui, je risquais certaines

 12   conséquences. Donc, tout ceci pouvait avoir un impact sur mon avenir.

 13   A l'époque, je n'étais pas sûr du fait de savoir si le bureau du Procureur

 14   pouvait dresser un acte d'accusation à mon encontre pour des choses qui,

 15   pour être tout à fait sincère, n'avaient rien à voir avec moi. Mais

 16   personnellement, je ne me sens pas du tout coupable de quoi que ce soit. Je

 17   sais pour ce qui me concerne que je n'ai participé à aucune espèce de crime

 18   de guerre, ou que je n'ai dissimulé la perpétration de quelque crime de

 19   guerre que ce soit. Mais j'ai été bouleversé, j'ai été intimidé. A

 20   l'époque, ma situation familiale était fort mauvaise.

 21   Je suis divorcé. Enfin, le tout, s'est soldé par un divorce ultérieurement.

 22   Donc, je n'étais plus avec ma famille. Je suis resté sans travail. A ce

 23   moment-là, j'étais déjà sans travail, et j'ai commencé même à boire. La

 24   situation en matière de santé était assez mauvaise, et de nos jours encore,

 25   c'est le cas pour ce qui est de mon état de santé.

 26   Alors, j'ai commencé à faire des déclarations. Une première déclaration a

 27   été recueillie, si mes souvenirs sont bons, pendant trois jours. La dame

 28   qui interprétait a lu la déclaration que j'ai faite à partir d'un laptop.

Page 15903

  1   Et à la fin d'une troisième journée, on m'a donné tout un tas de papiers à

  2   signer. Alors, vous pouvez imaginer quelle était ma situation au niveau

  3   psychologique au bout de trois journées d'interrogatoire consécutives.

  4   Alors, moi, je n'attendais qu'une chose, c'était de signer les papiers et

  5   m'en aller, m'en aller de ce bureau du Tribunal, et aller me reposer,

  6   reposer ma cervelle de tout ça. Il était difficile de se rappeler des

  7   choses qui s'étaient produites dix ans ou 15 ans avant, et être concentré

  8   au grand maximum.

  9   La deuxième rencontre que j'ai eue avec les enquêteurs du Tribunal, ça

 10   s'est produit en début 2004. Les enquêteurs, c'était une certaine dame,

 11   Rita, qui était originaire du Népal - je ne me souviens vraiment pas de son

 12   nom de famille - et un Suédois, je crois qu'il s'appelait Thomas Athans

 13   [phon]. Et Mme Rita, cette népalaise, m'a menacé à ce moment-là, en disant

 14   que si je ne coopérais pas avec les enquêteurs, il y avait possibilité pour

 15   moi d'être livré aux instances en Bosnie, parce que prétendument ils

 16   avaient des choses contre moi, enfin des éléments de preuve contre moi pour

 17   me juger, et bien que j'aie été parfaitement conscient du fait que cela

 18   n'était pas exact, vous imaginez bien que ça ne vous est pas égal.

 19   Je sais qu'il y a des tas de Serbes qui ont été condamnés ici à des peines

 20   d'emprisonnement de longue durée, ce qui fait qu'en termes simples, je me

 21   suis trouvé contraint à donner des déclarations qui n'étaient pas exactes,

 22   mais c'était pour sauver ma peau.

 23   Et ça s'est soldé par l'année 2006 où j'ai été, une fois de plus, convoqué

 24   au bureau du Tribunal de La Haye à Belgrade, où je me suis entretenu avec

 25   un dénommé Daniel Saxon, qui était Procureur à l'époque. Et lui m'a dit, à

 26   ce moment-là, que tous mes dossiers avaient disparu à l'aéroport de

 27   Belgrade, et que j'étais en danger de mort, je risquais d'être liquidé, et

 28   que ce serait une bonne chose pour moi de venir à La Haye pour redonner

Page 15904

  1   toutes ces déclarations-là, et compléter, au passage, certaines des choses

  2   que j'avais déjà dites. Alors, je ne comprenais pas parfaitement bien qui

  3   est-ce qui me menaçait, parce que jusque-là je ne ressentais aucun péril en

  4   provenance de qui que ce soit, je n'étais menacé par personne, et encore

  5   moins par le Parti radical serbe où je compte encore, de nos jours,

  6   quelques amis. Je ne suis pas membre du Parti radical serbe, je dois vous

  7   le souligner. Mais depuis 1993, je ne suis plus membre du Parti radical

  8   serbe. Donc, en termes simples, personne ne m'a ni menacé ni dérangé.

  9   Je suis venu à La Haye sous prétexte de passer quelques jours à peine. Or,

 10   ça s'est rallongé, et ça a pris presque deux mois entiers. Entre-temps, M.

 11   Seselj qui devait voir son procès commencer, mécontent par certaines de vos

 12   décisions, avait entamé une grève de la faim, ce qui fait que le procès a

 13   été reporté pour une date indéterminée. Ils avaient probablement envisagé,

 14   puisque je me trouvais déjà à La Haye, c'était de me faire comparaître en

 15   guise de témoin numéro un de l'Accusation.

 16   Mais comme cela ne s'est pas produit, et j'ai vu que cela ne donnerait rien

 17   du tout, ils ont essayé, a posteriori, de me promettre un passage vers un

 18   pays tiers, avec une sécurisation matérielle quelconque, aux fins de me

 19   placer à l'abri, mais je n'étais pas menacé. D'abord, disons tout de suite

 20   que je n'ai peur de personne, et de rien. Et on m'a trompé, donc on m'a

 21   fait partir par supercherie de La Haye, parce que je n'avais plus de raison

 22   de rester, je ne savais pas si on allait me faire témoigner ou pas, ils ne

 23   m'ont pas envoyé vers un pays tiers comme promis. Je suis donc rentré à

 24   Belgrade, et au bout de quelques jours, bien que je n'aie pas été séjourné

 25   à mon domicile, mais ils m'ont retrouvé à l'adresse où j'ai déclaré ma

 26   résidence, mais où je ne vivais plus.

 27   Et après cela, je ne savais plus quoi faire. Ne sachant plus quoi faire, je

 28   suis allé -- je dirais que c'est moi qui ai d'abord contacté le Parti

Page 15905

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8   

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15906

  1   radical serbe. Un certain monsieur --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, voilà. Bon, vous nous avez décrit tout ce qui

  3   s'est passé avec le bureau du Procureur. Très bien. Je reviendrai sur un

  4   petit détail tout à l'heure.

  5   Alors, maintenant, expliquez-moi comment ça s'est passé avec la Défense de

  6   M. Seselj. Est-ce eux qui vous ont appelé ou est-ce vous qui les avez

  7   appelés ? Alors, pouvez-vous nous donner du détail ?

  8   R.  J'ai parfaitement bien compris votre question, et j'allais justement

  9   vous le dire.

 10   C'est moi qui ai appelé le Parti radical serbe, et c'est un certain --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous dites est important, vous témoignez sous

 12   serment, et tout ce que vous dites est important, vous le savez.

 13   Quand vous dites, c'est moi qui ai appelé le Parti radical serbe, vous

 14   savez que par des moyens techniques, on peut savoir si vous avez appelé le

 15   numéro de téléphone du Parti radical serbe à cette époque-là. Donc, tout ce

 16   que vous dites, par un Juge professionnel comme moi, doit être vérifié.

 17   Vous avez bien compris ? Alors, continuez.

 18   R.  Oui, oui, j'assume toutes mes responsabilités, et je sais que je suis

 19   venu témoigner ici sous serment. Je respecte ce Tribunal-ci, j'estime que

 20   c'est un tribunal professionnel, et c'est la raison pour laquelle je suis

 21   venu d'ailleurs, je suis venu dire la vraie vérité, et la vérité entière.

 22   J'ai contacté le Parti radical serbe, c'est un certain M. Dragan Tasic qui

 23   a répondu, et je leur ai dit que je n'en pouvais plus, et je ne voulais

 24   plus rester en contact avec le bureau du Procureur. Et j'ai souligné que si

 25   j'étais convié par le Tribunal ou convoqué par le Tribunal, je répondrais

 26   présent, mais que je ne voulais pas répondre présent à une convocation du

 27   bureau du Procureur. Il m'a demandé de rédiger une déclaration, et de la

 28   leur remettre.

Page 15907

  1   J'ai rédigé donc une déclaration, moi, en personne. Personne d'autre ne l'a

  2   fait pour moi.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous vous en souvenez ?

  4   R.  Je pense que c'était en 1997.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose la question parce que moi, j'ai une

  6   déclaration datée du 12 août 2008. Alors, avez-vous fait une déclaration --

  7   R.  Excusez-moi, excusez-moi. J'ai confondu l'année. La première

  8   fois, il y a eu une déclaration de faite en 2007, si mes souvenirs sont

  9   bons, août 2007.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la déclaration, c'est vous qui l'avez

 11   rédigée, qui l'avez tapée, ou c'est M. Dragan Tasic qui la tapait sur son

 12   ordinateur ?

 13   R.  Non, c'est moi qui ai rédigé ma déclaration, et c'est mon fils

 14   qui a tapé cela sur ordinateur, sur mon ordinateur.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, c'est donc votre fils qui l'a tapée sur

 16   l'ordinateur. Bien. Alors, qu'est-ce qui s'est passé après ?

 17   R.  C'est cela. Alors, j'ai signé -- enfin, j'ai visé cela, j'ai fait viser

 18   cela au Tribunal, et j'ai remis cela à l'équipe de Défense de M. Seselj.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, j'ai deux questions techniques à vous

 20   poser.

 21   Bon, vous nous avez expliqué comment ça s'est passé avec le bureau du

 22   Procureur et avec la Défense de M. Seselj. Alors, une première question

 23   technique, elle est relativement simple et vous allez pouvoir répondre.

 24   J'ai lu dans le jugement concernant le colonel Mrkic et le capitaine

 25   Slijvancanin, que les volontaires du Parti radical serbe étaient dans une

 26   unité appelée les Aigles blancs. Alors, j'ai été un peu étonné de lire ça,

 27   j'ai regardé s'il y avait une note de bas de page, et il n'y a pas de note

 28   de bas de page. Donc, je me demande d'où ils ont tiré le fait que les

Page 15908

  1   volontaires étaient sous l'appellation les Aigles blanc. Alors, comme vous,

  2   vous avez connu des volontaires, vous-même, vous aviez été, semble-t-il,

  3   volontaire, pouvez-vous m'expliquer si les Aigles blancs étaient l'unité

  4   des volontaires du Parti radical serbe ?

  5   R.  C'est absolument inexact. Les volontaires du Parti radical serbe à

  6   Vukovar, ils ont été casés dans l'unité appelée Leva Supoderica, qui

  7   faisait partie de la Défense territoriale de Vukovar. Et en tant que telle,

  8   elle était sous le commandement opérationnel de la Brigade de la Garde,

  9   dont faisait partie M. Slijvancanin.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, très bien. Deuxième question d'ordre technique,

 11   parce que j'ai très peu de questions, c'est mes collègues qui vous poseront

 12   tout le reste.

 13   J'ai noté dans la déclaration, que vous contestez, remise au Procureur le

 14   19 septembre 2006, au paragraphe 54 - vous ne l'avez pas mais ce n'est pas

 15   la peine de la regarder - vous parlez à un moment donné du régime de

 16   Milosevic, et vous dites que le régime de Milosevic était contre les

 17   Chetniks. Vous dites que le régime de Milosevic était procommuniste, qu'il

 18   était en compétition avec des partis nationalistes comme le Parti radical

 19   serbe, et vous dites que la coopération entre le régime Milosevic et M.

 20   Seselj se serait détériorée à cause de la JNA. Alors, avez-vous dit ça au

 21   bureau du Procureur ? Est-ce exact ? Est-ce faux ? Qu'est-ce que vous nous

 22   dites aujourd'hui ?

 23   R.  J'ai dit quelque chose de semblable. Il est vrai que le régime de

 24   Milosevic, en principe, il était contre le Mouvement chetnik, étant donné

 25   que le parti de M. Slobodan Milosevic, c'était le Parti socialiste de

 26   Serbie, qui est dérivé directement de ce qui avait été le Parti communiste

 27   de la Serbie avant. Et comme on le sait, ce sont des données historiques,

 28   jamais les communistes et le Mouvement chetnik-serbe n'ont été en bons

Page 15909

  1   termes.

  2   Je m'excuse. Il y avait eu une petite question auxiliaire que vous

  3   avez posée, mais je n'ai pas retenu. Vous pouvez la reformuler ?

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose la question pour la raison suivante.

  5   D'après le Procureur, M. Seselj fait partie d'une entreprise criminelle

  6   commune avec M. Milosevic, avec le sieur Karadzic, qui est devant ce

  7   Tribunal, avec Simatovic, et j'en passe et des meilleurs. Alors, comme

  8   vous, semble-t-il, vous connaissiez un peu le fonctionnement du Parti

  9   radical serbe - mais c'est ce qu'on verra tout à l'heure par les questions

 10   de mes collègues - j'aimerais que vous me donniez votre point de vue sur

 11   les relations que vous avez pu connaître entre M. Seselj et M. Milosevic et

 12   son régime, pour peu qu'il y aurait un régime Milosevic. Alors, quel est

 13   votre point de vue sur les relations entre Milosevic et M. Seselj ?

 14   R.  M. Milosevic et M. Seselj ont d'abord été des adversaires politiques.

 15   Pour ce qui est de l'essentiel, pourquoi nous avons envoyé des volontaires,

 16   et je crois que c'est important que de l'expliquer. En notre qualité de

 17   parti national, nous étions tenus de protéger la population serbe qui se

 18   trouvait à l'extérieur du territoire de la République de Serbie de

 19   l'époque. Il n'y a eu aucune espèce de coopération ouverte avec le régime

 20   de Slobodan Milosevic, mais il eut été illogique de s'attendre de voir,

 21   dans des circonstances de guerre et de combat, qu'il y ait des conflits

 22   armés entre le Parti radical serbe et le Parti socialiste de Serbie, à la

 23   tête duquel se trouvait le président de l'époque, M. Milosevic.

 24   Il y avait certaines priorités au niveau du Parti radical serbe, à savoir

 25   la défense de la population serbe qui résidait à l'extérieur des frontières

 26   de la Serbie. C'était l'objectif primordial. Ensuite, dans des

 27   circonstances de paix, bien sûr, on se serait battu pour le pouvoir et on

 28   aurait été les adversaires de M. Milosevic.

Page 15910

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour terminer, j'ai lu avec intérêt votre parcours

  2   politique, tel que vous l'avez décrit au bureau du Procureur, alors peut-

  3   être sous pression ou pas. J'ai cru comprendre - et si je fais une erreur,

  4   vous allez tout de suite me corriger - que vous-même, vous étiez un

  5   anticommuniste, qu'en Allemagne en 1987 à Offenbach, vous avez rejoint une

  6   organisation, Ravna Gora, puis par la suite, en Serbie, vous avez adhéré à

  7   l'association Sava, et ce n'est qu'après que vous avez intégré le Parti

  8   radical serbe. Ce que je voudrais que vous me confirmiez, avant d'être dans

  9   le Parti radical serbe, est-ce que vous aviez eu un parcours politique

 10   totalement déconnecté de M. Seselj ?

 11   R.  Je n'ai qu'un petit rectificatif à apporter d'abord. Je n'ai pas été

 12   membre du Parti radical serbe. J'ai été membre du Mouvement chetnik-serbe,

 13   et j'ai participé à la création du Mouvement chetnik-serbe aux côtés de M.

 14   Seselj, et j'ai été l'un des premiers fondateurs de ce Mouvement chetnik-

 15   serbe. Le Mouvement chetnik-serbe, ultérieurement, a procédé à une

 16   réunification de ses différentes parties, et il y a eu création du Parti

 17   radical serbe. Ça se passe en fin février 1991. Tout le reste est exact.

 18   J'ai fait partie de l'émigration chetnik, j'ai été membre de ce groupement

 19   Ravna Gora à Offenbach. Et une fois que je suis arrivé en Serbie, puisque

 20   j'ai été mis aux arrêts, j'ai même passé quelque temps de -- enfin, j'ai

 21   fait de la prison à Palinkas Kala [phon], non loin de Belgrade, et ensuite,

 22   j'ai rejoint les rangs -- oui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous corrigez peut-être une erreur qui se trouve

 24   dans votre déclaration du 19 janvier 2004. Vous avez fait, au paragraphe

 25   11, le listing du Parti radical serbe. Alors, on a président : M. Seselj;

 26   présidents adjoints : Djordjevic, Petkovic, Stefanovic, Goskovic [phon],

 27   Viletic [phon]; puis membres : Zoran Drazilovic, aka Zika, et après, il y a

 28   votre nom, Zoran Rankic, et puis après il y a Jovan --

Page 15911

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Monsieur le Président, vous avez

  2   dans le paragraphe 11 le fait qu'il s'agit du Mouvement chetnik-serbe, du

  3   Mouvement chetnik, et non pas du Parti radical serbe. C'est clairement dit,

  4   là.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, c'est donc la liste, elle concerne le

  6   Mouvement chetnik-serbe, ce qui veut dire que vous n'avez jamais été --

  7   n'avez jamais été membre du Parti radical serbe; donc, vous n'avez pas eu

  8   votre carte du Parti radical serbe ?

  9   R.  …officiellement, je n'ai jamais été membre du parti radical, c'est

 10   exact. C'est exact.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- été membre du Parti radical serbe, comment se

 12   fait-il, d'après les déclarations au bureau du Procureur, que vous étiez

 13   présent dans les bureaux du "War Staff", dirigé par Petkovic ? Comment ça

 14   se fait que vous étiez là ?

 15   R.  Je me dois de vous l'expliquer, cela.

 16   A la fin du mois de février 1991, il y a eu réunification de ce Mouvement

 17   chetnik-serbe, et une aile qui s'était séparée du Parti radical populaire -

 18   - populaire, c'est une conférence qui s'est tenue à Kragujevac, si mes

 19   souvenirs sont bons, et il y a eu création d'un Parti radical serbe. Or, il

 20   y a eu une administration patriotique centrale, dont ont fait partie les

 21   représentants du Parti radical populaire, donc cette aile dissociée, et les

 22   membres du Mouvement chetnik-serbe, dont je faisais partie moi-même. Il

 23   s'agissait d'une nouvelle administration ou direction, qui s'était mise en

 24   place au niveau du Parti radical serbe. Donc, il y a eu une représentation

 25   proportionnelle.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends mieux maintenant.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être mon objection

 28   va-t-elle vous aider.

Page 15912

  1   Lorsqu'il y a eu réunification, ceux qui s'étaient trouvés être membres du

  2   Mouvement chetnik-serbe --

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] Objection, Madame, Messieurs les Juges.

  4   M. Seselj devrait utiliser son temps pendant son contre-interrogatoire.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, oui, bien sûr. Mais M. Seselj veut

  6   aider les Juges, et moi, quand on veut m'aider, je ne refuse pas la main de

  7   celui qui veut m'aider, mais peut-être vous pouvez m'aider aussi, Madame

  8   Biersay.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] J'entends bien, Monsieur le Président, et je

 10   suis tout à fait disposée à aider les Juges de la Chambre. Mais ce que fait

 11   M. Seselj ici, il est en train de témoigner par rapport à ce qu'il juge

 12   important et à quoi devraient ressembler les choses, et il nous donne sa

 13   vision des choses par rapport aux questions posées par les Juges de la

 14   Chambre.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- intervention de M. Seselj, si je comprends bien,

 16   vous, à aucun moment, vous n'avez été membre du Parti radical serbe, mais

 17   vous me dites que votre appartenance au Mouvement chetnik-serbe a fait qu'à

 18   un moment donné, vous étiez, en même temps que M. Seselj, dans un mouvement

 19   beaucoup plus large ?

 20   R.  C'est ce que je cherchais à expliquer. Moi, je n'avais nul besoin de

 21   recevoir une nouvelle carte d'affiliation. Il y a eu réunification de ce

 22   Mouvement chetnik-serbe et de ce Parti radical populaire, pour donner lieu

 23   à la création d'un Parti radical serbe. Mais les cartes d'identité, c'était

 24   celles du Mouvement chetnik-serbe. Je n'avais nul besoin de changer ma

 25   carte d'identité -- d'affiliation, plutôt.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors, je vais maintenant laisser -- j'ai

 27   déjà pris assez de temps comme cela, et je vais laisser la parole à mes

 28   collègues, qui ont beaucoup de questions à poser. Je ne sais pas qui va

Page 15913

  1   commencer. Peut-être que la courtoisie voudrait que ce soit la Juge

  2   Lattanzi -- ou le Juge Harhoff, comme vous voulez. Bon, alors le Juge

  3   Harhoff.

  4   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro]

  5   M. LE JUGE HARHOFF : Merci, Monsieur le Président.

  6   [interprétation] Monsieur Rankic, pour reprendre ce que le Président de la

  7   Chambre vous a déjà dit, je crois qu'il serait pertinent d'ajouter quelques

  8   détails à ce que vous avez dit.

  9   Tout d'abord, Monsieur Rankic, on vous cite à la barre aujourd'hui, vous

 10   allez donc déposer aujourd'hui et demain, et c'est la Chambre de première

 11   instance qui vous a convoqué. Autrement dit, vous n'êtes un témoin ni de

 12   l'Accusation ni de l'accusé. Nous vous avons cité à la barre en tant que

 13   témoin de la Chambre parce que nous souhaitions éviter un éventuel

 14   malentendu sur la question de savoir quels intérêts vous souhaiteriez

 15   protéger en venant ici.

 16   Vous êtes ici, Monsieur, pour dire la vérité, et vous avez fait la

 17   déclaration solennelle. Et je souhaite vous rappeler que la sanction est

 18   forte lorsque quelqu'un fait un faux témoignage ou ne donne pas tous les

 19   éléments lors de sa déposition. Est-ce bien clair ?

 20   R.  Tout à fait clair.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Deuxième chose, je souhaite

 22   simplement vous informer du fait que, pour des raisons techniques, nous

 23   devons faire une pause tous les 90 minutes parce que les bandes qui

 24   permettent d'enregistrer les débats doivent être changées. Si vous voyez

 25   l'heure, vous verrez que ceci aura lieu dans quatre minutes et demi, ce qui

 26   signifie que nous allons faire une pause de 20 minutes dans quatre minutes

 27   et demi et, ensuite, nous reprendrons pendant 90 minutes, après quoi nous

 28   aurons encore une pause, et nous lèverons l'audience à 19 heures. Nous en

Page 15914

  1   aurons à ce moment-là terminé pour aujourd'hui, et nous reprendrons demain,

  2   comme le Président de la Chambre l'a indiqué.

  3   Monsieur le Président, je ne sais pas s'il serait peut-être préférable de

  4   faire la pause maintenant.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, j'ai appris que parfois, vous aviez mal au

  6   dos et que peut-être, si à un moment donné vous souffrez trop, vous nous le

  7   dites pour qu'on puisse vous permettre de vous lever ou de vous détendre un

  8   petit peu.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est bien exact.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors, profitez des 20 minutes que nous

 11   allons faire maintenant de pause pour vous reposer.

 12   Nous reprendrons dans 20 minutes.

 13   --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

 14   --- L'audience est reprise à 16 heures 06.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

 17   Monsieur Rankic, avant de commencer à vous poser des questions, je voudrais

 18   obtenir une dernière précision de votre part, à savoir que vous n'êtes pas

 19   soupçonné, ni accusé, ni -- il n'y avait d'allégations contre vous, à

 20   savoir vous êtes cité en tant que témoin et tout ce que vous direz ici ne

 21   pourra pas être utilisé contre vous, à moins, bien sûr, que vous fassiez un

 22   faux témoignage et que vous ne nous disiez pas toute la vérité. Je voulais

 23   m'assurer que vous soyez bien conscient que vous n'êtes pas un accusé, mais

 24   vous êtes un témoin et que vous devez donc dire toute la vérité en la

 25   matière.

 26   Monsieur Rankic, ce que j'aimerais savoir de votre part, c'est la manière

 27   dont vous avez vécu le processus de recrutement de volontaires ou de

 28   bénévoles au sein du Parti radical serbe en 1991 et 1992. Vous étiez membre

Page 15915

  1   des instances dirigeantes du parti, au mouvement chetnik, et vous étiez

  2   proche à des instances décisionnelles, et vous étiez au courant des

  3   procédures ou du processus visant à recruter des volontaires. Par

  4   conséquent, j'aimerais, tout en restant bref, aussi bref que possible, que

  5   vous nous expliquiez comment l'on procédait au recrutement d'un jeune homme

  6   en Bosnie, par exemple, voire en Serbie, et comment donc un jeune homme de

  7   cet origine pouvait devenir volontaire au niveau du SRS. Comment est-ce que

  8   l'on commençait sa carrière au niveau du SRS en tant que volontaire ? Est-

  9   ce que vous pourriez nous expliquer cela ?

 10   R.  Monsieur le Juge, tout d'abord, je dois clarifier un point. Je suis

 11   capable et compétent pour parler des événements jusqu'à la fin 1991, moment

 12   où j'ai démissionné de mon poste de l'adjoint du chef de l'état-major de

 13   guerre du Parti radical serbe, et par la suite je n'exerçais plus de

 14   fonctions au sein de ce parti, mais je peux vous expliquer ce qui s'est

 15   passé jusqu'à la fin 1991. A partir de la création de l'état-major de crise

 16   au printemps 1991 --

 17   M. LE JUGE HARHOFF : Oui, merci. Je suis tout à fait conscient de la

 18   période durant laquelle vous avez occupé un poste au sein du parti, mais je

 19   pense que vous êtes toujours en mesure de nous donner les informations,

 20   puisque vous nous avez fourni déjà des informations concernant 1992. Mes

 21   questions ne se limitent pas à ce que vous avez vécu en tant que membres

 22   des instances dirigeantes du parti SRS ou SCP. Mais je voudrais en fait

 23   avoir votre opinion personnelle de la situation.

 24   R.  Je suis d'accord avec vous, mais cette version concernant 1991 est une

 25   version officielle. Après, c'est un acte individuel de ma part.

 26   A partir de la création de la cellule de l'état-major de crise au printemps

 27   1991, et lorsqu'un grand nombre de réfugiés sont arrivés du territoire de

 28   la Croatie à l'époque, l'état-major de crise a eu comme première mission

Page 15916

  1   l'accueil des réfugiés, l'aide, mais lorsque je dis "aide" je ne parle pas

  2   de l'aide financière que nous n'avions pas, mais l'aide sous forme de

  3   médicaments, de l'hébergement, de la nourriture, et ainsi de suite.

  4   Suite à un certain nombre d'incidents sporadiques en Croatie, le

  5   conflit a commencé à se répandre, et l'état-major de crise du Parti radical

  6   serbe a commencé à recevoir des demandes d'aide en hommes de la part des

  7   états-majors de crise en Croatie, et nous avons considéré suite à une

  8   réunion qu'il serait opportun d'envoyer des volontaires en Croatie si

  9   effectivement nos informations confirmaient que ces volontaires y étaient

 10   réellement nécessaires.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : Merci. Pourquoi les états-majors de crise en

 12   Croatie demandaient des renforts en hommes des états-majors de crise du SRS

 13   à Belgrade ? Est-ce que vous avez publié d'une certaine manière la capacité

 14   d'organiser l'envoi de volontaires ?

 15   R.  Non, il ne s'agit pas de cela. Il s'agit du fait qu'au début de

 16   l'année 1991, la JNA de l'époque, qui était donc la seule armée légitime en

 17   Yougoslavie à l'époque, prenait une position neutre. Ils séparaient les

 18   parties au conflit plutôt que d'aider qui que ce soit dans les régions dans

 19   lesquelles les unités de la JNA étaient présentes, et là où les unités de

 20   la JNA n'étaient pas présentes le conflit ouvert avait éclaté, et nous

 21   étions un parti national. Nous étions déclarés en tant que tel. Il y avait

 22   d'autres partis politiques en Serbie, mais l'orientation n'était pas la

 23   même. Donc il était tout à fait logique qu'ils s'adressent à nous en tant

 24   que parti national, car c'était notre position, la position d'un parti

 25   national.

 26   Puis-je poursuivre ?

 27   M. LE JUGE HARHOFF : Mais pourriez-vous me dire une chose. Ces états-

 28   majors de crise qui ont demandé de l'aide, à quel niveau se trouvaient-ils

Page 15917

  1   ? Est-ce qu'il s'agissait des états-majors de crise municipaux, c'est-à-

  2   dire au sein des différentes municipalités en Croatie ou est-ce que

  3   c'étaient des cellules de Crise du SRS ? En d'autres termes, dans quel

  4   contexte organisationnel fonctionnaient ces états-majors de crise ?

  5   R.  Les états-majors de crise de la Défense territoriale du

  6   territoire de la République de Croatie à l'époque.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : Merci. Vous pouvez continuer.

  8   R.  Par conséquent, nous recevions une télécopie dans l'état-major de

  9   crise du Parti radical serbe, et à l'époque nous avions une collaboration

 10   intense avec l'Association des Serbes de Croatie, présidée à l'époque par

 11   le général retraité à l'époque, le général Pekic, nous avons demandé son

 12   avis, puisqu'il connaissait la situation en Croatie mieux que nous. Si les

 13   informations de cet homme nous confirmaient le fait qu'il y avait

 14   réellement besoin en matière d'hommes sur ce territoire, dans ce cas-là

 15   nous nous adressions aux conseils municipaux du Parti radical serbe ou du

 16   Mouvement chetnik-serbe - ce qui, à cette époque-là, était la même chose -

 17   pour qu'ils rédigent la liste des volontaires qui étaient prêts à l'époque

 18   à partir dans les régions dans lesquelles la population serbe en Croatie

 19   était menacée, pour protéger cette population. La JNA, à cette époque-là,

 20   n'était pas tellement active, et la réponse aux appels de mobilisation au

 21   sein de la JNA, à cette époque-là, était très très faible, car les partis

 22   qui n'étaient pas des partis nationaux - pour nous, il s'agissait de partis

 23   de traîtres - faisaient tout pour que la réponse à l'appel de mobilisation,

 24   celle de la JNA, soit aussi faible que possible.

 25   Si vous le souhaitez, je peux fournir une explication plus détaillée.

 26   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Nous y reviendrons peut-être un peu

 27   plus tard. Mais est-ce que je pourrais vous poser quelques questions

 28   concernant M. Pekic, général en retraite. Est-ce qu'il était également

Page 15918

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21   

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15919

  1   considéré comme étant un nationaliste ?

  2   R.  En principe, oui, même s'il était un général communiste, en général,

  3   mais par la suite, lorsque les événements ont commencé à se dérouler en

  4   Croatie, il a changé d'avis.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] D'accord. Alors, vous aviez la JNA

  6   qui n'était pas en mesure ou pas disposée à fournir une aide réelle aux

  7   nationalistes serbes, et vous aviez, d'un autre côté, ce général en

  8   retraite qui était présent en Croatie et qui était en mesure de déterminer

  9   les domaines dans lesquels un renfort d'effectifs était nécessaire. Est-ce

 10   lui qui apportait son assistance, par le truchement des états-majors de

 11   crise des TO en Croatie, et que c'est par son truchement que les demandes

 12   ont été faites au parti à Belgrade ?

 13   R.  Oui, il était le président de l'Association des Serbes de Croatie,

 14   donc, des Serbes de Croatie qui étaient en Serbie.

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Donc, vous avez contacté

 16   les TO, si je vous ai bien compris, et vous avez essayé d'évaluer de

 17   combien de renforts vous aviez besoin pour aller en Croatie; est-ce exact ?

 18   R.  C'est exact.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et si je vous ai bien compris, vous

 20   avez assuré la mobilisation de ces renforts par le biais des antennes

 21   locales du parti SRS, en Croatie, si ces antennes locales existaient. Est-

 22   ce que je vous ai bien compris ?

 23   R.  Non, il ne s'agissait pas de la Croatie, mais de la Serbie.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] D'accord. Merci pour cette précision.

 25   Par le biais des antennes du SRS en Serbie, vous êtes entré en contact avec

 26   des jeunes hommes qui étaient disposés à aller en Croatie, pour se battre

 27   du côté serbe ?

 28   R.  C'est exact.

Page 15920

  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ces jeunes renforts, à qui devaient-

  2   ils rendre des ordres ? A l'antenne locale ou à Belgrade, dans vos bureaux,

  3   de façon à être recrutés ?

  4   R.  Ils se présentaient auprès des états-majors locaux ou auprès des

  5   branches locales du Parti radical serbe et du Mouvement chetnik-serbe. Une

  6   liste était dressée, et ensuite ils venaient à Belgrade, où le comité

  7   central se trouvait et l'état-major de crise. A partir de là, ils étaient

  8   conduits à l'endroit dans la région où ils étaient nécessaires.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Nous y reviendrons dans une minute.

 10   Ma question est la suivante : mis à part ces jeunes recrues qui se

 11   présentaient directement au niveau des antennes du SRS dans les différentes

 12   municipalités, est-ce que des jeunes recrues se présentaient spontanément

 13   auprès des autorités municipales, au niveau des TO, au niveau des cellules

 14   de Crise en Serbie, de façon à se faire recruter comme volontaires ?

 15   R.  Excusez-moi, je n'ai pas très bien compris la question. Pourriez-vous

 16   la répéter ?

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, bien sûr, et je vous prie de

 18   m'excuser si la question n'était pas claire.

 19   Je vous pose la question parce que dans une de vos déclarations j'ai

 20   lu quelque part que des jeunes recrues pouvaient également s'adresser au

 21   Parti du SRS à Belgrade. C'est ce que les autorités municipales leur

 22   avaient dit. Par conséquent, ce n'est pas uniquement par les antennes du

 23   SRS que ces jeunes recrues devaient se rendre à votre bureau à Belgrade,

 24   mais c'est également par le biais des autorités municipales, ou des TO ou

 25   des cellules de Crise, peut-être. Donc, je voulais simplement obtenir des

 26   précisions de votre part. Je voulais savoir si les autorités municipales

 27   pouvaient ou avaient conseillé à ces jeunes recrues de se présenter au

 28   bureau principal du SRS à Belgrade.

Page 15921

  1   R.  Je suppose qu'il s'agissait d'une erreur. Il s'agissait des conseils

  2   municipaux du Parti radical serbe. Tous les autres qui souhaitaient se

  3   présenter passaient par les autorités militaires qui existaient auprès de

  4   chaque municipalité. Il y avait un département militaire dans chaque

  5   municipalité, et chacun pouvait les contacter pour se porter volontaire au

  6   sein de la JNA. Je pense que vous m'avez compris.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, tout à fait, et j'avais fait

  8   fausse route. C'était exclusivement par le biais des structures propres au

  9   SRS que le recrutement a eu lieu ? Les autorités municipales, par

 10   conséquent, n'ont pas prêté leur soutien en la matière; est-ce exact ?

 11   R.  C'est exact. Chaque municipalité, comme je le dis, avait un département

 12   militaire pour ceux qui voulaient se porter volontaires au sein de la JNA.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. A un moment donné, les

 14   jeunes recrues potentielles ont commencé à se présenter à Belgrade, et ils

 15   voulaient devenir volontaires. Qu'avez-vous fait à ce moment-là ?

 16   R.  A ce moment-là, une liste centrale était dressée. Bien sûr, ils

 17   devaient porter avec eux leur livret militaire, car la condition pour

 18   qu'ils puissent partir sur le terrain était d'avoir fait leur service

 19   militaire. Bien évidemment, nous faisions de notre mieux pour éviter que

 20   les alcooliques et les criminels partent, si nous pouvions vérifier leurs

 21   casiers judiciaires, mais nos possibilités étaient limitées, d'habitude.

 22   Cela dit, si un volontaire avait des problèmes psychologiques, c'était

 23   indiqué dans son livret militaire. Par la suite, ils étaient transportés en

 24   autocar à leurs destinations. C'est là qu'ils étaient repris par le

 25   quartier général de la Défense territoriale, qui avait donné des ordres

 26   pour leur envoi, et ensuite la TO était chargée de leur hébergement,

 27   nourriture et armement.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je comprends bien. Donc, tout

Page 15922

  1   d'abord, une sélection s'effectuait au sein de ces volontaires, vous

  2   regardiez leur livret militaire de façon à éviter de recruter ceux qui

  3   avaient des antécédents d'alcoolisme ou qui avaient d'autres problèmes

  4   mentaux. Est-ce qu'ensuite vous procédiez à une formation, et si oui,

  5   comment ceci était organisé et où se tenait la formation ?

  6   R.  Tout au début, avant que nous n'allions directement à la JNA, nous

  7   avions un centre d'entraînement des volontaires à Prigrevica, si on peut

  8   appeler ça un centre d'entraînement, puisqu'il s'agissait là d'une

  9   formation accélérée.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Combien de temps cette formation

 11   durait et qui étaient les instructeurs et quel était le programme de cette

 12   formation ? Qu'apprenaient-ils ?

 13   R.  Ce centre a été créé avec l'aide du général Pekic. Il a fait venir des

 14   enseignants qui se sont présentés comme membres d'une brigade d'élite, la

 15   63e Brigade de Parachutistes. Il s'agissait d'entraînements courts qui

 16   duraient 15 jours. Les personnes apprenaient à manier les armes, à

 17   reconnaître les armes, à se comporter lors de combat, donc il s'agissait

 18   d'une combinaison d'entraînement physique et tactique.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Les instructeurs qu'utilisait le

 20   général Pekic, est-ce qu'il s'agissait de militaires, de soldats ?

 21   R.  Ils se sont présentés comme membres de la 63e Brigade de Parachutistes,

 22   une brigade d'élite.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et est-ce que le général Pekic

 24   participait personnellement à la formation ?

 25   R.  Non, pas lui, mais c'est lui qui les avait envoyés. Au moins, c'est ce

 26   qu'ils m'ont dit.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Combien de volontaires bénéficiaient

 28   d'une formation en même temps, vous pouvez peut-être nous donner un ordre

Page 15923

  1   de grandeur, si vous vous souvenez ?

  2   R.  Il s'agissait de groupes d'environ 20, 30, 40 personnes.

  3   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Donc, des groupes de 20 à

  4   40 jeunes recrues étaient envoyées pour subir une formation de deux

  5   semaines avec des soldats professionnels issus de cette unité d'élite que

  6   vous avez mentionnée. C'est exact, n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc après cette formation, ils

  9   pouvaient être déployés, n'est-ce pas ?

 10   R.  C'est exact.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maintenant, j'aimerais savoir comment

 12   on décidait de leur affectation, et combien étaient envoyés à tel ou tel

 13   endroit ? Comment cette décision était prise ? Est-ce que cette décision

 14   était prise exclusivement au sein de la cellule de Crise du SRS, dont vous

 15   faisiez partie, ou est-ce que vous impliquiez d'autres personnes dans le

 16   processus décisionnel, comme par exemple M. Pekic ? Est-ce que les TO

 17   locales avaient leur mot à dire en la matière ?

 18   R.  Monsieur le Juge, comme je l'ai dit tout à l'heure, justement sur la

 19   base de cette demande de la part de la Défense territoriale locale en

 20   Croatie, c'est sur la base de cela que l'on envoyait de notre part un

 21   certain nombre de volontaires.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et qui décidait du nombre de

 23   volontaires qui étaient envoyés dans les différents endroits ?

 24   R.  Il était écrit dans leurs demandes quel était le nombre approximatif de

 25   volontaires dont ils avaient besoin.

 26   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais quant à la décision visant à

 27   sélectionner les volontaires qui étaient affectés à tel ou tel endroit,

 28   cette décision était prise au niveau de la cellule de Guerre du SRS, c'est-

Page 15924

  1   à-dire une décision qui revenait à vous et à vos collègues, n'est-ce pas ?

  2   R.  Ceci dépendait des priorités. Par conséquent, là où la situation était

  3   plus tendue, c'était considéré comme un endroit prioritaire pour l'envoi

  4   des volontaires. Là où les conflits armés étaient plus intenses

  5   qu'ailleurs, c'était là les endroits prioritaires.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je comprends bien. Je veux m'assurer

  7   de bien comprendre comment fonctionnait la sélection de chaque volontaire

  8   et que cette sélection se faisait exclusivement par vos services. Personne

  9   d'autre n'était impliqué ? Je parle, comme par exemple, des cellules de

 10   Crise du Parti radical serbe.

 11   R.  C'est exact.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Donc maintenant nous avons

 13   procédé à la sélection de jeunes recrues qui sont affectées à tel ou tel

 14   endroit en Croatie, et nous sommes en 1991. Puis vous m'avez dit qu'ils

 15   étaient acheminés par bus dans leurs différents lieux d'affectation, et

 16   qu'ils étaient remis aux TO. J'aimerais savoir comment le transport était

 17   organisé ?

 18   R.  Des autocars venaient à Prigrevica. C'est là qu'ils montaient à bord

 19   des autocars. Ils partaient en Croatie avec une liste, bien sûr. C'est là

 20   qu'ils étaient remis à la Défense territoriale, qui signait la liste pour

 21   confirmer l'accueil. Ils gardaient une copie de la liste, et moi, je

 22   ramenais l'autre copie de la liste à l'état-major de Crise.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. A qui appartenaient ces

 24   bus ? Qui payait pour les bus ou qui organisait la mise en place de ces bus

 25   ?

 26   R.  Les autocars étaient organisés par l'Association des Serbes à

 27   l'extérieur de la Croatie, donc les Serbes originaires de Croatie dont

 28   l'association se trouvait en Serbie au début. Plus tard, c'était la JNA.

Page 15925

  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc, vous dites qu'à un moment donné

  2   les bus étaient affrétés par la JNA pour transporter les volontaires du SRS

  3   sur le terrain; est-ce exact ?

  4   R.  C'est exact, après le 1er octobre 1991, et qu'il y a eu des

  5   proclamations d'un danger de guerre imminent, oui.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je souhaite préciser un détail. J'ai

  7   lu quelque part dans votre déclaration, et pour être très honnête, je ne

  8   sais pas exactement où, que M. Petkovic était en rapport étroit avec, je

  9   crois, le ministère des Relations avec les Serbes qui se trouvaient à

 10   l'extérieur de la Serbie, et qu'il a participé à l'organisation de ce

 11   transport. Est-ce que vous pouvez confirmer cela ou pas ?

 12   R.  Là, il y a une erreur qui s'est glissée, soit quelqu'un a interprété à

 13   tort et à travers ce que j'ai dit.

 14   M. Petkovic et moi, une fois on s'est rendus au ministère chargé des

 15   Relations avec les Serbes à l'extérieur de la Serbie, c'était un ministère

 16   au sein du gouvernement de la République de Serbie, où M. Petkovic a dit

 17   qu'il avait eu un entretien privé avec M. Cvijan. Alors, moi, j'ai été au

 18   ministère avec lui, j'étais assis devant le bureau, alors qu'eux s'étaient

 19   entretenus à l'intérieur pendant une dizaine de minutes. De quoi ils ont

 20   parlé, je l'ignore. Il m'avait dit qu'ils s'étaient entretenus à titre

 21   privé.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. La confidentialité de ces

 23   échangent ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si, d'une

 24   manière ou d'une autre, le ministère fournissait son aide, et prêtait main-

 25   forte au niveau du transport des volontaires dans les zones de combat.

 26   R.  Pour autant que je sache, non.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Ensuite, vous êtes arrivé à la

 28   TO locale où vous étiez censé remettre les détenus. Avez-vous voyagé en

Page 15926

  1   compagnie des volontaires ?

  2   R.  Dans la plupart des cas, oui.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. L'interprète a traduit, Monsieur

  4   Harhoff, vos propos, disant qu'il était censé remettre "ces prisonniers."

  5   Vous, vous avez parlé de volontaires, pas de "prisonniers", je suppose.

  6   L'INTERPRÈTE : L'interprète dit "les prisonniers."

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Monsieur Seselj. Je crois, en

  8   réalité, que c'est une erreur que j'ai commise moi-même. Je voulais parler

  9   "des volontaires".

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur Harhoff. Moi, je suis en train de

 11   regarder le compte rendu en anglais. Vous, vous avez bien dit la chose,

 12   vous avez dit "volontaires", vous. L'interprète a délibérément dit "les

 13   prisonniers", et cela suffit pour intervenir tout de suite et changer

 14   d'interprètes. Ce n'est pas la première fois que les interprètes traduisent

 15   à tort et à travers. Je l'avoue, vous vous êtes bien exprimé, j'ai le

 16   compte rendu sous les yeux, et vous avez tout le temps dit "volunteers"

 17   donc "volontaires."

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, je fais parfaitement

 19   confiance aux interprètes. Je suis sûr qu'il n'y a absolument pas de leur

 20   part l'intention de changer quoi que ce soit par rapport à ce qui est dit.

 21   Ce qui m'a frappé en réalité, c'est que j'ai utilisé le terme de "détenus",

 22   et je m'en suis aperçu tout de suite, et je me suis rendu compte du fait

 23   que c'était erroné, et que je voulais parler de "volontaires".

 24   M. MARCUSSEN : [interprétation] Et Monsieur le Juge, à la fin de la page

 25   45, ligne 21, le compte rendu indique "de remettre les détenus." Dans votre

 26   question à l'accusé, ne reprend pas ce qui est dans le compte rendu en

 27   anglais.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] De toute façon, poursuivons. Ceci

Page 15927

  1   n'est pas important.

  2   Ma question, Monsieur Rankic, je souhaite savoir si vous avez escorté les

  3   volontaires, et lorsque vous les avez remis aux personnes qui devaient les

  4   prendre en charge, les institutions, est-ce que vous vous en souvenez ?

  5   R.  J'ai dit, dans la plupart des cas, oui.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et lorsque vous étiez face à face à

  7   votre commandant de la TO, avec 21 volontaires derrière vous, comment les

  8   choses se passaient-elles ? Comment l'échange était-il effectué ?

  9   R.  Je remettais à cet homme la liste des volontaires, et lui, il signait

 10   qu'il en avait fait réception, et la liste était en double. Il y avait un

 11   exemplaire qu'il gardait, et l'autre exemplaire, je le ramenais au QG de

 12   crise du Parti radical serbe. Entre-temps, pendant que moi, je séjournais

 13   sur le terrain, ils étaient tenus de montrer que ces volontaires, ils les

 14   avaient hébergés, vêtus, et armés.

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc, les volontaires arrivaient en

 16   habits civils à la TO, en Croatie, et là, on leur remettait des uniformes

 17   et des armes; c'est cela ?

 18   R.  C'est exact.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Quel genre d'uniformes leur a-t-on

 20   remis; vous en souvenez-vous ?

 21   R.  Au début, c'était l'uniforme classique vert olive, qui était celui de

 22   la JNA. Par la suite, il y a eu des uniformes de camouflage qui ont fait

 23   leur apparition.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Les armes ?

 25   R.  Les armes, c'étaient les armes habituelles qui faisaient partie de

 26   l'armement de la JNA; bien sûr, c'étaient des armes d'infanterie.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et les fusils automatiques ?

 28   R.  Il y a eu des fusils M-48, et il y a eu aussi des M-56. Il y avait ce

Page 15928

  1   qu'on appelait les mégots, je crois que c'était un M-57, je ne m'en

  2   souviens pas. Et il y avait aussi le fusil automatique M-80, mais ça, c'est

  3   plus tard. Au début, on nous a donné des Spagins et des Thompson, des armes

  4   qui étaient dans les réserves de la JNA, et qu'on avait mis à la place

  5   pratiquement.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Les armes que l'on ne remettait

  7   qu'aux volontaires, était-ce les mêmes armes que celles qui étaient

  8   utilisées pendant les 15 jours d'entraînement, avant d'être déployés ? En

  9   d'autres termes, est-ce que les volontaires connaissaient bien les armes

 10   qu'on leur a données, que la TO leur remettait ?

 11   R.  Au début, oui.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Donc, vous lui avez remis la

 13   liste, à supposer que c'était un homme, lui, la liste des volontaires, et

 14   la suite, vous avez remis les volontaires aux TO, et ensuite la TO leur

 15   donnait des uniformes et des armes, et les hébergeait. Est-ce que --

 16   R.  Les vivres aussi, bien sûr.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Est-ce que vous avez jamais

 18   reçu confirmation du fait que la TO avait pris le commandement et

 19   commandait ces personnes ?

 20   R.  Du fait d'avoir apposé un cachet sur la liste visée par leurs soins, ça

 21   constituait confirmation qu'ils avaient pris en charge les volontaires. Il

 22   y avait un cachet et la signature du commandant de la TO.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et ensuite, c'est vous qui rapportiez

 24   au bureau central à Belgrade la liste dûment estampillée et signée ?

 25   R.  C'est exact.

 26   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Les volontaires étaient-ils rémunérés

 27   pour services rendus ?

 28   R.  Pour autant que je sache, au début, pas un seul volontaire n'a été payé

Page 15929

  1   pour quoi que ce soit. Une fois, lorsqu'ils ont fait partie des rangs de la

  2   JNA, ils ont eu des privilèges, comme tous ceux qui ont été mobilisés par

  3  la force, qui étaient des recrues, donc, jusqu'au 1er octobre 1991, personne

  4   n'a rien touché du tout.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Savez-vous si les volontaires

  6   devaient signer un récépissé pour les armes qu'ils recevaient, que leur

  7   donnaient les TO ?

  8   R.  D'après ce que j'en sais, les gens m'ont montré qu'ils avaient reçu des

  9   papiers montrant qu'il y a eu bordereau de signé pour les armes, je vous

 10   parle des volontaires qui étaient revenus du terrain où on les avait

 11   envoyés.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ce qui m'amène à ma question

 13   suivante, à savoir est-ce que les volontaires devaient redonner leurs armes

 14   avant de quitter l'endroit en question ?

 15   R.  Entre la Serbie et la Croatie, il y avait une police frontalière, et

 16   personne avec une arme à canon long ne pouvait passer vers la Serbie, à

 17   moins de passer son arme en contrebande.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cela s'est-il produit; est-ce

 19   que vous le savez ?

 20   R.  Probablement que si. Je ne sais pas, mais je dis que c'est probable.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Hormis les volontaires qui ont été

 22   soit tués soit blessés, certains d'entre eux sont-ils restés dans les zones

 23   de combat après avoir accompli leurs premières missions, ou est-ce qu'ils

 24   sont tous rentrés à Belgrade ?

 25   R.  Vous avez dit une fois de plus "détenus", ou alors, c'est l'interprète

 26   qui s'est trompé.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je me suis peut-être trompé une

 28   nouvelle fois. Pardonnez-moi. Nous avions un autre. Je siégeais dans un

Page 15930

  1   autre procès ce matin et nous avons beaucoup évoqué la question des détenus

  2   ce matin.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

  4   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, laissez-moi

  5   terminer. Je voulais parler des volontaires, bien sûr.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection, Monsieur Harhoff. Une fois de plus

  7   je regarde la version du texte anglais du compte rendu. Il n'y a nulle part

  8   le mot "détenus" qu'on me trouve -- que M. Marcussen me trouve maintenant

  9   ce mot. Tout à l'heure, il l'avait prétendument trouvé alors que c'était

 10   déjà parti de l'écran. Ou, je n'ai pas vu vérifier, mais il n'y a pas ce

 11   mot maintenant. Il n'y a pas le mot "détenus".

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, laissez tomber

 13   cette question. Vous pourrez évoquer cette question plus tard. Je souhaite

 14   terminer mon interrogatoire.

 15   La question que je vous posais, Monsieur Rankic, était de savoir si

 16   tous les volontaires sont rentrés à Centar, ou si certaines d'entre eux

 17   sont restés et ont poursuivi leur mission tout seul.

 18   R.  Cela dépendait des nécessités sur le terrain. Certains volontaires

 19   rejoignaient les forces de la police sur le terrain, d'autres revenaient

 20   chez eux. Cela dépendait de la situation sur le terrain.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Etes-vous resté en contact avec vos

 22   volontaires lorsqu'ils étaient aux combats sous le commandement de la TO ?

 23   R.  Oui, et j'allais même rendre visite.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Quel était l'objet de ces

 25   visites ?

 26   R.  Justement, je voulais prendre connaissance des conditions dans

 27   lesquelles se trouvaient ces volontaires, comment ils vivaient, est-ce que

 28   tout allait bien, est-ce que la discipline était bonne, est-ce qu'il y

Page 15931

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15932

  1   avait des problèmes d'une acuité certaine.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Etait-ce nécessaire de les pouponner

  3   comme cela ? Vous les aviez remis à la TO et placé sous leur commandement,

  4   je suppose qu'ils faisaient partie des forces armées sous le commandement

  5   de la TO. Donc, s'il y avait des difficultés, la TO vous ferait un rapport;

  6   sinon, ce ne serait pas nécessaire d'aller inspecter vos hommes vous-même ?

  7   R.  Quand bien même je n'aurais pas été commandant adjoint du QG de guerre,

  8   je pense que je l'aurais fait en ma qualité d'individu tout simplement.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si d'autres unités de

 10   volontaires sont également venues dans la zone de conflit en Croatie, à

 11   savoir des volontaires qui n'avaient pas été envoyées par le SRS ?

 12   R.  Oui.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Qui a envoyé ces autres volontaires ?

 14   R.  Je suis au courant du cas des volontaires d'Arkan, c'est-à-dire la

 15   Garde des volontaires serbe. Puis il y aussi le cas de Mirko Jovic, qui

 16   avait des Aigles blancs. Tout autre individu pouvait y aller sans faire

 17   partie d'une quelconque organisation.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si ces volontaires

 19   avaient été recrutés en adoptant la même procédure que celle des

 20   volontaires du SRS, à savoir qu'ils étaient recrutés en fonction des

 21   demandes émanant des TO ou de demandes faites par les TO.

 22   R.  Je ne sais vraiment pas de quelle façon ils y allaient. Je n'ai pas été

 23   mis au courant de cela.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Saviez-vous si les demandes qui vous

 25   parvenaient des TO étaient également envoyées à d'autres personnes ?

 26   R.  Je ne dispose pas de ce type d'information.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Lorsque vous nous avez dit que les TO

 28   envoyaient des demandes d'assistance sous la forme de jeunes combattants,

Page 15933

  1   vous nous avez également dit que les hommes d'Arkan étaient représentés,

  2   les Aigles blancs étaient représentés, ainsi que d'autres groupes de

  3   volontaires qui se trouvaient dans la région. Ceci me fait croire qu'il y

  4   avait un marché de volontaires. Est-ce que je vous ai bien compris ?

  5   R.  Enfin, je ne sais comment vous le formulez. Ce à quoi je vaquais,

  6   c'étaient des activités liées aux volontaires du Parti radical serbe.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Fort bien. Je vais vous poser une

  8   question encore qui a trait aux contacts que vous aviez avec les

  9   volontaires alors qu'ils effectuent leur service. Combien de temps êtes-

 10   vous resté en contact avec les volontaires du SRS; pendant un ou deux mois,

 11   ou jusqu'à la fin de la guerre ?

 12   R.  Jusqu'à la fin de l'année 1991.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] C'est à ce moment-là que vous avez

 14   démissionné.

 15   R.  C'est bien exact.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si la cellule de Crise du

 17   SRS a maintenu ses contacts avec les volontaires après votre démission ?

 18   R.  Oui, ils ont continué, mais moi je n'ai pas connaissance des détails.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] A plusieurs endroits de vos

 20   déclarations, vous évoquez Milan Lancuzanin. Vous avez indiqué qu'il

 21   s'agissant du commandant chetnik de Vukovar, et que certains volontaires du

 22   SDS avaient été placées sous son commandement. Quel poste avait Lancuzanin

 23   ? Etait-ce un officier de la JNA, est-ce qu'il travaillait pour la Défense

 24   territoriale ? Quel était son rang ?

 25   R.  M. Milan Lancuzanin était commandant de cette unité Leva Supoderica. Il

 26   faisait partie de la Défense territoriale de Vukovar. Mais ce n'était pas

 27   un officier d'active au sein de la JNA. Et vous avez dit tout à l'heure

 28   "commandant des Chetniks". Je ne serais pas d'accord avec cette façon de

Page 15934

  1   dire, parce qu'à leurs yeux nous étions tous des Chetniks.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cela revient à dire ceci : sous quel

  3   commandement était-il ? Sous le commandement de la TO ou sous le

  4   commandement de la JNA ?

  5   R.  Sous le commandement de la Défense territoriale, et la Défense

  6   territoriale faisait partie intégrante de la JNA.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Placé sous le commandement de la

  8   Brigade des Gardes; c'est cela ?

  9   R.  Dans ce secteur, le commandement opérationnel a été exercé ou confié à

 10   la Brigade de la Garde, oui.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que la Brigade des Gardes de

 12   la JNA exerçait l'autorité sur toutes les unités et pouvait donner des

 13   ordres à toutes les unités dans la zone où se déroulaient les combats ?

 14   Autrement dit, Monsieur Rankic, je souhaite savoir qui disposait du

 15   commandement militaire général à Vukovar, pour vous donner un exemple,

 16   pendant les opérations de combat ?

 17   R.  Je vais vous dire ce qui suit : la ville même de Vukovar a été

 18   subdivisée en deux secteurs; il y a eu un secteur nord et un secteur sud.

 19   Dans le secteur nord, pour autant que je le sache, le commandement

 20   opérationnel était exercé par le corps d'armée de Novi Sad, et je crois que

 21   c'est le général Bjorcevic [phon] qui était à sa tête. Le groupe

 22   opérationnel sud était commandé par la Brigade de la Garde de la JNA, sous

 23   le commandement du général Mile Mrksic.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Vous avez évoqué un

 25   peu plus tôt le fait -- je crois que vous avez dit que c'était le 1er

 26   novembre 1991, vous avez conclu une coopération officielle avec la JNA ?

 27   Je n'ai pas entendu votre réponse.

 28   R.  C'est exact.

Page 15935

  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Pourriez-vous nous décrire

  2   cette coopération, s'il vous plaît ? Comment cela s'est-il passé, et

  3   qu'est-ce que cela signifiait ?

  4   R.  Le 1er octobre 1991, sur le territoire de la Yougoslavie il y a eu

  5   proclamation d'un danger de guerre imminent. La JNA a donc pris une part

  6   active au combat contre les forces sécessionnistes. De ce fait, il n'y a

  7   plus eu une nécessité pour nous de passer par des TO locales pour envoyer

  8   des volontaires. On y est passés directement par le biais de la JNA.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je ne suis pas très sûr d'avoir bien

 10   compris. Pourquoi la proclamation d'un état de guerre imminent sous-entend

 11   que vous n'étiez plus obligés d'envoyer des volontaires aux TO ? Je suppose

 12   que les TO demandaient toujours de l'aide, n'est-ce pas ?

 13   R.  Il s'agit de ce qui suit : à partir du moment où l'on proclame un état

 14   de guerre imminent ou danger de guerre imminent, la JNA est entrée en

 15   conflit armé avec les forces sécessionnistes. Jusque-là, elle était neutre.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Même après que la JNA se soit

 17   engagée dans un conflit armé avec les forces qui souhaitaient faire

 18   sécession, je suppose que les TO et les cellules de Crise locales qui se

 19   trouvaient en Croatie faisaient toujours des demandes d'assistance en

 20   direction du SRS, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui. Mais je vous ai expliqué tout à l'heure la Défense territoriale

 22   fait partie intégrante de la JNA, donc placée directement sous les ordres

 23   de la JNA.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Après le 1er octobre 1991, qui

 25   envoyait des demandes d'assistance au SRS ?

 26   R.  Les QG des Défenses territoriales, mais sous le commandement direct,

 27   cette fois-ci, de la JNA.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] En quoi la procédure est-elle

Page 15936

  1   différente ?

  2   R.  La procédure est différente parce que nous pouvions directement nous

  3   adresser à la JNA pour avoir des armes, des uniformes, des moyens de

  4   transport et tout le reste, enfin tout ce dont on avait besoin.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Donc en somme, vous étiez

  6   toujours en contact avec les TO, à la seule différence près que les TO,

  7   maintenant, étaient placées sous le commandement de la JNA. C'est ainsi que

  8   je dois comprendre ce que vous dites ?

  9   R.  A peu près.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc d'après vous, après le 1er

 11   octobre, c'était la JNA qui faisait les demandes d'assistance en direction

 12   de la SRS pour demander que des volontaires viennent leur prêter main-forte

 13   dans les conflits armés ?

 14   R.  Oui, indirectement, oui.

 15   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et directement ?

 16   R.  Directement, c'est l'état-major de la Défense territoriale.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que de temps en temps vous

 18   mettiez des volontaires à disposition du MUP ?

 19   R.  Nous n'avons jamais envoyé des volontaires au sein du MUP. Certains de

 20   nos volontaires ont été engagés dans les MUP locaux serbes sur le

 21   territoire de la Croatie. Il faut bien qu'on soit précis. Il ne s'agit pas

 22   du MUP de la Serbie.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si en 1992, après votre

 24   démission, si le SRS a fourni des volontaires non seulement à la JNA - à ce

 25   qui deviendrait plus tard la VRS - mais également au MUP, le MUP serbe en

 26   Bosnie-Herzégovine ?

 27   R.  J'ai entendu dire que certains volontaires restaient dans le MUP serbe

 28   de la Bosnie-Herzégovine, mais vraiment, je ne suis pas qualifié pour en

Page 15937

  1   parler.

  2   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Après votre démission, nous sommes en

  3   1992 maintenant, mais encore une fois je sais que vous n'étiez plus en

  4   poste et que vous n'avez peut-être pas des informations de première main,

  5   mais est-ce que vous avez su comment l'organisation -- ou plutôt, comment

  6   on organisait la mise à disposition de volontaires à l'intention de la VRS

  7   ? Est-ce qu'il s'agissait de la même procédure que ce qui se produisait

  8   avec la JNA précédemment, à savoir les cellules de Crise ou les TO locales

  9   en Bosnie-Herzégovine demandaient de l'aide auprès de la SRS pour obtenir

 10   des volontaires ? En d'autres termes, est-ce que les procédures ont

 11   continué de la même manière jusqu'en 1992; savez-vous cela ?

 12   R.  Je suppose que oui.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si le SRS a jamais fourni

 14   des uniformes ou des armes aux volontaires ?

 15   R.  Le SRS n'avait jamais d'armes ni d'uniformes. Seule la JNA pouvait

 16   faire cela; et le MUP de la Serbie, qui avait les uniformes et les armes,

 17   mais nous n'avions pas de coopération avec le MUP.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc à votre connaissance, les

 19   volontaires n'ont jamais été envoyés dans les structures de la police,

 20   c'est-à-dire au MUP et, par conséquent, ils n'ont jamais été sous le

 21   commandement du MUP ? Est-ce que c'est ce que vous nous affirmez ici ?

 22   R.  Tant que j'étais l'adjoint du chef de l'état-major de crise, j'affirme

 23   et je maintiens toute la responsabilité de cette affirmation qu'aucun

 24   volontaire n'a été envoyé où que ce soit par le biais du MUP de la Serbie.

 25   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cependant, vous avez mentionné que

 26   dans certains cas, des volontaires étaient passés ailleurs, c'est-à-dire

 27   qu'ils s'étaient battus sous le commandement de la TO, et ensuite ils

 28   étaient portés volontaires au sein du MUP, donc ma question reste entière :

Page 15938

  1   est-ce que vous êtes resté en contact avec ces volontaires qui étaient

  2   partis de la TO et qui ont commencé à travailler au sein du MUP, ou est-ce

  3   que vous avez perdu le contact avec eux à partir de ce moment-là ?

  4   R.  A partir de ce moment-là, ils n'étaient pas placés sous notre

  5   ingérence, mais sous celle du MUP local. Ils recevaient leur salaire, donc

  6   ils appartenaient à une autre structure.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Par conséquent, votre organisation de

  8   volontaires s'était bornée à fournir des volontaires, tout d'abord, à la

  9   TO, et, après le 1er octobre 1991, à la JNA, et la coopération n'est pas

 10   allée plus loin entre la SRS et les forces armées, n'est-ce pas ?

 11   Pour le compte rendu d'audience, veuillez répondre.

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci. J'ai une dernière question à

 14   vous poser concernant une information que j'ai lue dans une de vos

 15   déclarations. Il s'agissait d'information que vous avez effectivement reçue

 16   concernant l'insubordination de certains volontaires que vous aviez

 17   envoyés. Je crois que vous avez utilisé dans votre déclaration le terme

 18   "indépendamment", c'est-à-dire que de petites unités d'anciens volontaires

 19   ont commencé à agir indépendamment. Qu'entendiez-vous par là ? Est-ce que

 20   vous vous souvenez avoir dit cela, et est-ce que vous comprenez le sens de

 21   ma question ? Qu'est-il advenu -- qu'ont-ils fait, ces volontaires dont il

 22   est question ?

 23   R.  Pourriez-vous me dire de quelle affaire il s'agit ou me donner une

 24   référence ?

 25   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je crois qu'il y a eu un incident

 26   dans la municipalité de Zvornik. Des volontaires du SRS s'étaient inscrits

 27   auprès de la TO, mais ont ensuite commencé à agir, et j'utilise votre

 28   terme, indépendamment. Et j'aimerais savoir ce que vous entendiez par là.

Page 15939

  1   R.  Veuillez, s'il vous plaît, faire une distinction entre les périodes,

  2   car Zvornik, c'était en 1992, et tout ceci, ce sont des informations de

  3   troisième main, en ce qui me concerne, et peut-être ce sont les éléments

  4   non véridiques.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. La dernière question que

  6   je souhaiterais vous poser, Monsieur Rankic, et je voudrais revenir au

  7   moment où vous avez remis vos volontaires au commandement de la TO. Savez-

  8   vous si on avait dit aux volontaires qu'ils pouvaient rester ensemble au

  9   sein d'une même unité, lorsqu'ils étaient sous le commandement de la TO,

 10   une fois que les combats ont commencé ?

 11   R.  Pour la plupart, ils agissaient en tant qu'unités, donc ensemble, étant

 12   donné qu'ils se connaissaient bien, qu'ils connaissaient leur commandant,

 13   donc il était tout à fait logique qu'ils agissent en tant qu'unité, mais

 14   bien sûr, au sein de la Défense territoriale, avec un certain nombre de

 15   tâches et de missions.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais peut-être que là, toute la

 17   pertinence du terme "indépendamment" est importante. Savez-vous s'ils

 18   étaient permis, s'ils avaient le droit d'agir indépendamment, bien sûr,

 19   toujours sous le commandement de la TO ? Mais pendant le combat, est-ce

 20   qu'ils avaient leur propre dirigeant qui était en mesure de mener des

 21   ordres indépendamment ?

 22   R.  Sur le terrain, chaque unité recevait une mission. Mais pour ce qui est

 23   du commandement sur le terrain, c'est le commandement de la Défense

 24   territoriale qui les commandait. Donc toutes les unités agissaient dans le

 25   cadre de la Défense territoriale.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons maintenant passer aux questions de la

 27   Juge Lattanzi, que je ne vais pas interrompre.

 28   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

Page 15940

  1   Monsieur le Témoin, bonsoir. J'ai besoin de tirer au clair de petites

  2   choses, préliminairement, à propos de tous ces partis. Il semble, peut-être

  3   comme en Italie, qu'il y ait des dizaines et dizaines de partis, et j'ai un

  4   peu de confusion.

  5   Le Parti radical serbe, est-ce que vous pouvez me donner l'acronyme

  6   en serbe ?

  7   R.  SRS.

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci. Après, il y a le Parti populaire radical.

  9   Est-ce que vous pouvez me donner l'acronyme serbe ? Peut-être la

 10   traduction, ce n'est pas juste, mais le problème c'est, c'est le parti dont

 11   vous étiez membre, si je ne me trompe pas. Ça s'appelait l'acronyme -- en

 12   serbe, c'est comment ?

 13   R.  Tout à l'heure, il y avait un changement d'ordre de noms. Il s'agit du

 14   Parti populaire serbe, NRS.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : Parfait. Après, il y a quelque chose qu'on nous

 16   rapporte comme SNO, et cela, je ne comprends pas ce que c'est. Vous en

 17   savez quelque chose ?

 18   R.  Il s'agit du Parti du Renouveau populaire serbe, présidé par Mirko

 19   Jovic.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : Et après, il y a le MCF, et que c'est le Mouvement

 21   chetnik-serbe, MC avec l'accent -- donc, c'est le Mouvement chetnik-serbe.

 22   C'est comment, l'acronyme en serbe, s'il vous plaît ?

 23   R.  L'acronyme en serbe pour le Mouvement chetnik-serbe est SCP.

 24   Mme LE JUGE LATTANZI : Parfait. Peut-être maintenant, je me retrouve un peu

 25   mieux, parce que j'avais un peu de confusion. Alors, vous avez parlé

 26   longuement avec le Juge Harhoff de recrutement dans le parti organisé par

 27   le Parti radical serbe, et vous êtes très informé de cette procédure, même

 28   si vous n'étiez pas membre du Parti radical serbe, parce que vous nous avez

Page 15941

  1   dit, ce soir même, que vous n'avez pas participé à la création du Parti

  2   radical serbe, et vous n'avez jamais été membre.

  3   Donc, vous êtes si bien informé, parce que -- et je voudrais que vous nous

  4   confirmiez ou démentissiez, parce que vous, comme vous avez déjà dit

  5   aujourd'hui, travailliez dans le QG, avec le Parti radical serbe, les

  6   volontaires du Parti radical serbe, même si vous étiez parti comme M.

  7   Seselj, de ce mouvement plus ample, le Mouvement chetnik-serbe, et vous

  8   avez dit : On travaillait comme unité. Vous l'avez dit ce soir. C'est, si

  9   vous voulez même la référence, c'est au procès-verbal, page 38, ligne de 5

 10   à 7.

 11   Donc, je voulais un peu savoir quelque chose en plus sur les volontaires de

 12   ce mouvement plus large, et les volontaires du Parti radical serbe. Quels

 13   étaient les rapports, est-ce que tous étaient organisés, en tout cas, de

 14   façon unitaire, même auprès des bureaux du Parti radical serbe, si les bus

 15   qu'on organisait, c'étaient les mêmes, s'il y avait vraiment cette unité à

 16   laquelle vous aviez fait référence ? Et donc, si c'est vrai, comment vous

 17   avez dit aussi, ce soir, qu'on se référait à tous ces volontaires comme les

 18   volontaires chetniks ?

 19   R.  Moi, j'ai parlé des forces qui étaient en face de nous. Ils nous

 20   nommaient, nous tous, Chetniks, alors que nous, nous savions qui était qui.

 21   Mme LE JUGE LATTANZI : Les volontaires spécifiquement organisés par le

 22   Parti radical serbe sous la présidence, sous l'autorité politique et morale

 23   de l'accusé étaient aussi vus comme -- on se référait à ces volontaires

 24   comme les volontaires chetniks, chetniks si ?

 25   R.  Oui, oui, oui. Ils nous appelaient, nous tous, Chetniks, et même la

 26   JNA, ils les appelaient Chetniks.

 27   Mme LE JUGE LATTANZI : Alors, maintenant, un autre aspect.

 28   Donc, vous avez dit à un certain moment que les volontaires, tous ces

Page 15942

  1   volontaires chetniks ont eu la possibilité de travailler, de s'organiser,

  2   et donc de travailler pour la défense du peuple serbe, comme vous l'avez

  3   dit. Avant la mobilisation, avant qu'on déclare le danger public, donc

  4   selon la loi qui prévoyait que dans certains moments après cette

  5   déclaration quelque chose arrivait, et donc, il y avait une unité, l'armée,

  6   la TO, les volontaires, et tout ça, bien. Alors, je voudrais savoir, la

  7   période, quand elle a initié -- quand il a commencé cette organisation de

  8   volontaires, avant qu'il y ait la mobilisation, en octobre 1991, et la

  9   déclaration du danger public, quand les volontaires ont commencé à être

 10   recrutés ? Parce que les volontaires individuels sont allés peut-être après

 11   la mobilisation, après que la Yougoslavie a déclaré la mobilisation, parce

 12   que vous avez fait référence aussi à des individuels -- à des volontaires

 13   qui sont allés volontairement, individuellement. C'est après la

 14   mobilisation ? Oui. Avant, de ce que j'ai compris que vous avez dit ici,

 15   aujourd'hui, il y avait déjà des volontaires qui s'étaient organisés à

 16   travers ces différents partis, ce Mouvement chetnik, et donc, je voulais

 17   savoir quand cela a commencé ?

 18   R.  A partir du 2 mai -- ou plutôt à partir de l'attaque contre Borovo

 19   Selo, lancée par les unités du MUP croate, et par la suite, les unités ont

 20   commencé à traverser le Danube -- ou plutôt, l'on a commencé à envoyer les

 21   volontaires de l'autre côté du Danube.

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : Après Borovo Selo. Alors --

 23   R.  Oui, oui.

 24   Mme LE JUGE LATTANZI : Alors, je voudrais savoir, ils ne pouvaient pas

 25   bénéficier à ce moment-là, déjà, de l'assistance ni de la TO ni de la JNA,

 26   ou ils bénéficiaient de l'assistance de la TO déjà, pour l'équipement, les

 27   armes, la logistique ? Ils ont tout de suite bénéficié de l'assistance de

 28   la TO ?

Page 15943

  1   R.  De la TO, oui, mais non pas de la JNA.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc, les armes, ils ont reçu de la TO, la TO avait

  3   des armes à disposition, ou la TO, normalement, recevait les armes

  4   seulement après une mobilisation nationale ?

  5   R.  La Défense territoriale, la TO, disposait déjà des armes, mais

  6   c'étaient des armes assez anciennes. Il faut que j'attire votre attention

  7   là-dessus, les armes obsolètes.

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : Et donc on laissait à la TO les armes aussi en temps

  9   de paix, même si les armes anciennes, pas sophistiquées, on leur laissait

 10   déjà même en temps de paix ?

 11   R.  Oui. C'était le principe qui s'appliquait en RSFY.

 12   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci. Alors, vous avez parlé aussi de la Sava. Si

 13   j'ai bien compris, vous l'avez évoquée aujourd'hui aussi avec les questions

 14   du Juge Harhoff en vous référant, ou peut-être du Juge Antonetti, à

 15   l'Association des Serbes à l'étranger. C'était la SAVA ?

 16   R.  Non, ce sont deux organisations différentes.

 17   Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi. A un certain moment, la SAVA a disparu,

 18   et il est né ce Parti du Renouveau serbe. Oui ? Vous pouvez dire.

 19   R.  C'est exact. Oui, oui, c'est exact.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : Et le Parti du Renouveau serbe, il avait cette

 21   idéologie de la défense du peuple serbe ?

 22   R.  Pour la plupart, oui.

 23   Mme LE JUGE LATTANZI : Et cette idéologie, elle était aussi quelque chose

 24   de plus -- si vous pouviez être un peu plus précis. Qu'est-ce que ça

 25   signifiait, la défense du peuple serbe ? Ça signifiait seulement une

 26   défense dans le sens strict de l'attaque des autres, ou une défense que

 27   signifiait gagner du territoire selon cette frontière dont même l'accusé

 28   nous a parlé, de la Grande-Serbie, parce que c'est important. Vous avez dit

Page 15944

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15945

  1   que les volontaires ont commencé à s'organiser autour de cette idée de la

  2   défense du peuple serbe. Alors, je voudrais bien savoir.

  3   R.  L'idée de la défense du peuple serbe est tributaire de l'année dont il

  4   est question, s'il est question de l'an 1990, de la création du Parti du

  5   Renouveau serbe, l'on parle de la tradition et culture serbe, la

  6   possibilité de maintenir l'écriture serbe, et ainsi de suite. Si l'on parle

  7   du conflit armé, c'est autre chose, donc il s'agit de la défense des Serbes

  8   qui vivaient à l'extérieur de ce qui était à l'époque la République de

  9   Serbie.

 10   Mme LE JUGE LATTANZI : Et cette défense des Serbes en dehors du territoire

 11   de la Serbie, non de la Yougoslavie, de la Serbie, signifiait aussi

 12   extension du territoire de la Serbie ?

 13   R.  Sur le territoire sur lequel nous nous rendions, pour le plupart la

 14   population majoritaire était les Serbes. Je ne sais pas ce que vous sous-

 15   entendez lorsque vous dites "l'extension du territoire".

 16   Mme LE JUGE LATTANZI : Je reviens sur cela. Vous disez il y avait la

 17   majorité serbe. Donc, vous concédez que ce territoire devait faire partie

 18   de la Grande-Serbie ?

 19   R.  Je n'utilise pas ce terme-là.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : Alors quel terme vous utiliseriez ?

 21   R.  Nous étions contre l'éclatement de la Yougoslavie.

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : Oui. Vous étiez contre l'éclatement de la

 23   Yougoslavie. Cela, je comprends bien. Je comprends aussi qu'il y a eu cette

 24   tentative de s'opposer à la sécession. Mais quand vous avez compris que la

 25   sécession était en cours, et donc cette idéologie de la Grande-Serbie s'est

 26   de plus en plus développée, c'était pour rendre la Serbie, la Grande-

 27   Serbie, avec les territoires occupés où il y avait la majorité serbe en

 28   Bosnie, en particulier ?

Page 15946

  1   R.  Excusez-moi, je ne sais pas ce que le terme "la Grande-Serbie" veut

  2   dire pour vous. La Serbie n'existe pas depuis 1945, mais 1918.

  3   Mme LE JUGE LATTANZI : La Grande-Serbie, c'était un idéal politique, mais

  4   si vous ne connaissez pas, on passe outre.

  5   R.  Excusez-moi. Je dois juste brièvement expliquer un point, si la Chambre

  6   me le permet.

  7   Voici de quoi il s'agit : la Serbie en 1918 est entrée avec un certain

  8   nombre de territoires, et les frontières de la Serbie étaient Kupa et Ilok

  9   à l'époque, et si quelqu'un considère que ça c'était la Grande-Serbie,

 10   c'est une autre question. Mais si quelqu'un procède à une sécession, il est

 11   logique qu'un Etat sorte avec le même territoire de cet Etat que le

 12   territoire avec lequel il est entré.

 13   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Un moment.

 15   Et cet objectif, quand même, de ravoir à nouveau ses limites

 16   terrestres de 1918, ses frontières, c'était un objectif à atteindre

 17   seulement par des moyens pacifiques ou par des moyens militaires ?

 18   R.  Je ne suis pas de ceux qui avaient décidé de cet objectif.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais vous connaissez que l'objectif était à

 20   rejoindre, à atteindre par la force armée et par ce qu'on appelle le

 21   nettoyage ethnique ?

 22   R.  Pour autant que je sache, l'objectif était celui de préserver la

 23   Yougoslavie; le reste, c'est les hommes politiques qui en décidaient. Moi,

 24   je n'ai pas vaqué à ce genre de chose.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux formuler mon objection à

 26   présent ? J'ai délibérément attendu que le témoin réponde.

 27   J'ai le droit de formuler des objections, même aux questions que vous

 28   posez vous-même, Madame Lattanzi. J'espère que vous le savez.

Page 15947

  1   Mme LE JUGE LATTANZI : Je ne suis pas convaincue que vous avez le droit,

  2   mais allez-y, formulez.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai délibérément attendu que le témoin finisse

  4   sa réponse pour ne pas influer, d'une façon ou d'une autre, sur sa réponse.

  5   Je proteste, Madame Lattanzi, par rapport à ce que vous avez déclaré

  6   et en disant que l'idéologie de la Grande-Serbie a évolué dans une

  7   direction qui était celle de faire en sorte que la Serbie devienne une

  8   Grande-Serbie, y compris les territoires occupés en Bosnie où les Serbes

  9   ont été majoritaires. Mais qui a alors occupé ce territoire ? Est-ce que

 10   les Serbes ont occupé eux-mêmes leur territoire ? Vous adoptez l'idéologie

 11   des ennemis des Serbes. Comment voulez-vous que les Serbes s'occupent soi-

 12   même ? Je proteste parce que c'est subjectif, c'est partial.

 13   Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai demandé une clarification au témoin.

 14   Monsieur, maintenant, je voudrais savoir quelque chose sur les rapports

 15   entre l'accusé et Milosevic, le président Milosevic.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. La question est importante, mais la pause

 17   est aussi importante.

 18   Mme LE JUGE LATTANZI : Oui.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, on va faire la pause de 20 minutes. Après,

 20   nous reprendrons aux environs de 6 heures moins dix. Puis, si ma collègue

 21   termine dans le temps imparti, Mme Biersay pourra commencer le contre-

 22   interrogatoire, disons, plus précisément, les questions de l'Accusation,

 23   parce que nous sommes dans une procédure de témoin de la Chambre.

 24   Voilà, 20 minutes de pause.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 38.

 26   --- L'audience est reprise à 17 heures 56.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 28   Madame le Juge Lattanzi.

Page 15948

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je soulever une question de procédure,

  2   très brièvement.

  3   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, vous avez

  4   attribué deux heures à la Chambre, deux heures à l'Accusation et deux

  5   heures à la Défense. Maintenant, la question qui s'impose pour moi est de

  6   savoir si les membres de la Chambre de première instance ont le droit de

  7   dépasser ce temps, car vos deux heures d'interrogatoire principal pur se

  8   sont déjà écoulées, sans compter mes objections et les interruptions de

  9   l'Accusation. Peut-être vous avez ce droit, mais dites-le-moi, s'il vous

 10   plaît; sinon, dites-le-moi aussi.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais répondre tout de suite. D'abord, sur le

 12   total, je ne pense pas qu'on ait utilisé déjà deux heures. J'ai passé

 13   beaucoup de temps à lire des décisions orales, à répondre à vos questions,

 14   et cetera, et j'ai posé très peu de questions. Le Juge Harhoff a peut-être

 15   dépassé les 40 minutes, je n'en sais rien, et ma collègue vient de

 16   commencer. Ça, c'est une première réponse.

 17   Deuxième réponse. C'est un témoin de la Chambre, les Juges prennent le

 18   temps qu'ils veulent, mais nous avons décidé de donner à l'Accusation deux

 19   heures et à vous deux heures. Si nous avions décidé de l'interroger pendant

 20   dix jours, on pouvait très bien dire le Procureur aura une heure, et la

 21   Défense une heure. C'est purement discrétionnaire. Simplement, pour que

 22   tout le monde s'y retrouve, on a dit deux heures les Juges, deux heures

 23   l'Accusation, deux heures la Défense.

 24   Etant précisé que les questions portent sur les points importants que

 25   tout le monde connaît bien maintenant; l'envoi des volontaires, la

 26   coopération Milosevic-Seselj, le cas échéant, et cetera, et cetera. Donc,

 27   voilà ma réponse. Je pense que le Juge Lattanzi, dans une demi-heure, aura

 28   terminé, en principe peut-être, puis Mme Biersay commencera, ce qui

Page 15949

  1   permettra tranquillement au Procureur d'utiliser ses deux heures, et à

  2   vous-même. Je rappelle que normalement c'est notre dernier témoin, donc

  3   maintenant les questions sont très précises et vont au cœur des problèmes.

  4   Voilà ce que je pouvais vous répondre.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : J'espère, en tout cas, que ce ne soit pas le dernier

  6   témoin, parce que peut-être il y en aura encore deux, mais on va voir.

  7   Mais en tout cas, si vous en savez quelque chose, parce que si vous

  8   n'en savez rien, vous ne répondez pas, vous le dites. Est-ce que vous

  9   connaissez les rapports entre M. Seselj et Milosevic, le président

 10   Milosevic, avant la guerre et pendant la guerre ?

 11   R.  Pour autant que je le sache, M. Seselj et M. Milosevic étaient des

 12   adversaires politiques.

 13   Mme LE JUGE LATTANZI : Et cela, tout le temps aussi pendant la guerre ?

 14   R.  Ultérieurement, les médias ont montré, mais c'est bien plus tard, en

 15   1997 donc, ils faisaient partie d'un gouvernement du salut national, si mes

 16   souvenirs sont bons. Ça s'est passé après la guerre.

 17   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais je vous ai demandé "pendant la guerre."

 18   R.  Pendant la guerre, c'étaient des adversaires politiques.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : S'ils étaient des adversaires politiques, c'est

 20   logique qu'on demandait l'assistance la JNA demandait l'assistance -

 21   comment vous avez dit, en répondant au Juge Harhoff - de volontaires aussi

 22   du Parti radical serbe ? C'est logique ? Si vous nous expliquez un peu

 23   cela. Merci.

 24   R.  Je suppose qu'ils avaient un intérêt commun, qui était celui de

 25   sauvegarder la Yougoslavie.

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : Les rapports entre M. Seselj et Arkan ?

 27   R.  D'après les informations qui sont les miennes, ils n'ont jamais été en

 28   bonnes relations. Au contraire, ils étaient, à titre privé, en relation

Page 15950

  1   hostile l'un vis-à-vis de l'autre.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais à part à titre privé, à titre public, pour

  3   ainsi dire, pour rejoindre un objectif commun. Les volontaires du Parti

  4   radical serbe coopéraient avec les volontaires d'Arkan ?

  5   R.  Nous n'avons jamais coopéré. Enfin, je ne sais pas, d'abord, ce que

  6   vous voulez dire par "coopérer". Nous n'avons jamais coopéré avec les

  7   volontaires de la Garde patriotique serbe ou les volontaires à Arkan, mais

  8   eux, ils étaient sur le terrain aussi. Bien sûr, on ne s'est jamais permis

  9   d'entrer en conflit avec eux, parce que nous étions du même côté.

 10   Mme LE JUGE LATTANZI : Peut-être j'ai mal compris ce que vous aviez dit

 11   avant. Mais à un certain moment, j'avais compris que tous ces volontaires

 12   étaient sous le contrôle d'Arkan dans une certaine zone. Mais peut-être

 13   j'ai mal compris.

 14   R.  Vous avez mal compris. Je n'ai jamais dit cela.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : Alors, je m'excuse. Cela, je dois avoir confondu

 16   avec quelque chose d'autre. Donc, ils n'ont jamais participé à des

 17   opérations ensemble ?

 18   R.  Dans le cadre de la Défense territoriale, nous avions des missions qui

 19   étaient les nôtres, notre unité avait ses propres missions. Je suppose que,

 20   eux, ils avaient leurs propres missions à eux.

 21   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc, pas de missions ensemble, mais les missions

 22   étaient données toujours par la TO aux uns et aux autres ?

 23   R.  Pendant que j'étais chef adjoint du QG de guerre, jamais nous n'avons

 24   participé à quoi que ce soit ensemble. Nous n'avons jamais été accomplir

 25   des missions opérationnelles ensemble. Comment l'expliquer ? La Défense

 26   territoriale décidait de qui allait accomplir quelle mission, mais nous

 27   nous efforcions de ne jamais nous retrouver sur le même secteur. Ils

 28   étaient peut-être à 20 kilomètres de là où nous étions, mais ça n'avait

Page 15951

  1   rien à voir avec une coopération quelconque.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Parfait. Selon vos déclarations, il y a eu des

  3   incidents provoqués aussi par des volontaires du Parti radical, des

  4   volontaires chetniks. Vous évoquez, par exemple, quelque chose qui s'est

  5   passé en 1992 à Loznica, des volontaires de Loznica qui ont été envoyés à

  6   Zvornik. Le chef de ce groupe était Zuca. Il était membre du Parti radical

  7   serbe ?

  8   R.  A partir de 1992, je ne peux pas vous répondre de façon compétente

  9   parce que je n'étais plus chef adjoint du QG de guerre. Et tout ce que j'ai

 10   appris, je l'ai appris de troisième main, si vous voulez. Mais pour ce qui

 11   est de Vojin Vuckovic, surnommé Zuca, je dirais que c'était en 1991, en

 12   effet, un volontaire à nous. Mais par la suite, j'avais appris aussi qu'il

 13   a été évincé du parti, exclu du parti.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Et vous ne savez pas à quelle date a-t-il été exclu

 15   du parti ?

 16   R.  Je ne sais pas à quelle date il a été exclu. Je sais que c'était un

 17   volontaire à nous, en Slavonie de l'est, pendant les événements de 1991.

 18   Nous sommes en train de parler de 1991.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : Est-ce que vous vous rappelez d'une visite de M.

 20   Seselj à Zvornik au printemps 1992 ?

 21   R.  Printemps 1992 ?

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi, je n'ai pas entendu la réponse.

 23   R.  Et bien, je vous ai posé une question en retour. Vous parlez bien de

 24   printemps 1992, n'est-ce pas ?

 25   Mme LE JUGE LATTANZI : Oui.

 26   R.  M. Seselj, au printemps 1992, n'est jamais venu à Zvornik. Si mes

 27   souvenirs sont bons, il était venu en 1990, c'était avant l'éclatement des

 28   conflits en Bosnie-Herzégovine.

Page 15952

  1   Mme LE JUGE LATTANZI : -- que vous vous êtes trompé quand vous avez évoqué

  2   cette visite dans une -- dans deux de vos déclarations.

  3   R.  Ce que j'ai dit dans ces déclarations, ou peut-être est-ce que -- peut-

  4   être est-ce 1992 qu'on mentionne dans la déclaration, c'est un élément qui

  5   a été fait suite à la suggestion avancée par le bureau du Procureur.

  6   Mme LE JUGE LATTANZI : Je voudrais savoir quand les volontaires chetniks

  7   parlaient des Oustachi, qu'est-ce qu'ils entendaient, ils entendaient tous

  8   les Croates, ils entendaient certains Croates, ils entendaient seulement

  9   les hommes qui pouvaient faire la guerre ? Qu'est-ce qu'ils entendaient,

 10   les Oustachi ?

 11   R.  On entendait seulement ceux qui ont fait la guerre, ceux qui portaient

 12   des armes, c'est-à-dire des hommes qui étaient aptes au combat, et qui

 13   portaient l'arme au poing.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Et le but des volontaires, c'étaient des volontaires

 15   qui se trouvaient à Vukovar, que tous ces combattants soient tués; oui ou

 16   non ?

 17   R.  L'objectif des volontaires, des volontaires serbes à Vukovar, c'était

 18   de libérer Vukovar.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : Dans deux de vos déclarations, vous évoquez quelque

 20   chose qui aurait été dit par M. Seselj : Pas un seul Oustachi ne doit

 21   quitter Vukovar vivant. Donc, là aussi, c'est une faute que vous avez faite

 22   dans vos déclarations, quelque chose que le Procureur a suggéré ou quoi ?

 23   C'est quoi ça ?

 24   R.  Je pense que cela n'a pas été transmis de façon digne de foi. Je ne me

 25   souviens tout d'abord pas que M. Seselj ait dit des choses pareilles. Nous

 26   avons convié ces gens à plusieurs reprises à se rendre. Etant donné que je

 27   suis allé à plusieurs reprises à Vukovar, je sais qu'on les a conviés à se

 28   rendre, et on sait que ceux qui ne se rendent pas, ce qui risque d'advenir

Page 15953

  1   d'eux, on le sait.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais vous avez dit que cela a été dit en présence de

  3   50 personnes, tous ces détails.

  4   R.  Ce n'est pas ce que j'ai dit.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Une autre petite chose.

  6   Les volontaires, il y avait des volontaires qui étaient organisés

  7   directement à Belgrade, et qui arrivaient de Belgrade. Il y en avait qui

  8   étaient organisés localement. Vous démentissez cela; oui ?

  9   R.  Oui, oui.

 10   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais c'était toujours des volontaires, si on parle

 11   des volontaires chetniks, des volontaires qui travaillaient ensemble selon

 12   le même but, les locaux et ceux qui arrivaient de Belgrade ?

 13   R.  Mais bien sûr. Tous les Serbes avaient, j'imagine, le même objectif. Je

 14   parle, bien sûr, de ceux qui sont des patriotes.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : Et ces volontaires chetniks, quand ils étaient

 16   organisés, les recrutés, organisés, on leur faisait des discours ?

 17   R.  Oui.

 18   Mme LE JUGE LATTANZI : Qu'est-ce qu'on leur disait ?

 19   R.  Qu'il fallait qu'ils aillent se battre de façon courageuse et digne,

 20   dans l'esprit des traditions de l'armée serbe, c'est-à-dire respecter les

 21   règles en vigueur, respecter les conventions de Genève, et se conformer aux

 22   coutumes et us de la guerre.

 23   Mme LE JUGE LATTANZI : Et ces discours, qui est-ce qui les tenait ? M.

 24   Seselj ou il y avait d'autres qui tenaient ces discours aux volontaires

 25   avant qu'ils partent ?

 26   R.  Une ou deux fois, M. Seselj a également fait cela, Ljubisa Petkovic

 27   aussi, et parfois c'était moi-même.

 28   Mme LE JUGE LATTANZI : Vous leur avez parlé des conventions de Genève, du

Page 15954

  1   respect des conventions. C'est ce que vous niez, en tout cas dans les

  2   déclarations.

  3   R.  Mais j'ai déjà dit, je ne sais pas ce qui est écrit dans la

  4   déclaration.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Est-ce que vous n'avez pas signé cette déclaration ?

  6   R.  Ces déclarations, je les ai signées, mais je n'ai jamais eu l'occasion

  7   de les lire, ni de corriger ce qui ne correspond pas à la vérité. J'ai bien

  8   insisté sur la nécessité de le faire.

  9   Mme LE JUGE LATTANZI : Quand avez-vous signé ? On vous a tenu la main pour

 10   le faire signer ? Comment on vous a forcé à signer ?

 11   R.  Dans le début de mes propos je vous ai expliqué comment on a recueilli

 12   mes déclarations. J'ai cru comprendre que vous aviez compris pourquoi

 13   j'avais signé.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Je regrette beaucoup. Je n'ai pas du tout compris.

 15   La dernière chose que je voulais vous demander, il y a eu des incidents

 16   parce qu'il y a toujours dans la guerre, vous les évoquez aussi dans les

 17   déclarations où quelques volontaires ont été impliqué dans quelque chose

 18   qui n'était pas le respect des conventions de Genève. Vous l'évoquez vous-

 19   même. Je voudrais savoir, comme réaction à cela, est-ce qu'il y a eu des

 20   réactions de la part d'une organisation, du groupe qui les avait organisés,

 21   recrutés ? Vous avez dit qu'on les choisissait, qu'on regardait qu'ils

 22   n'utilisaient pas l'alcool et tout ça. Donc il y avait une certaine

 23   sélection. Et donc après que quelqu'un a fait quelque chose, quelle a été

 24   la réaction de cette même organisation qui les avait si bien sélectionnés ?

 25   R.  Je veux dire aux Juges de cette Chambre quelque chose en guise

 26   d'explication, pour que les choses soient un peu plus claires.

 27   Sur le terrain même, le commandement opérationnel à l'égard des

 28   volontaires, c'était la tâche du QG de la Défense territoriale, voire

Page 15955

  1   l'unité militaire qui intervenait dans le secteur concerné. Nous n'avions

  2   aucune espèce de commandement opérationnel sur le terrain, et s'il arrivait

  3   - et il ne s'agissait pas seulement des volontaires du Parti radical serbe

  4   seuls, mais des volontaires en général et des Serbes du cru aussi, s'ils

  5   faisaient quelque chose, ça relevait des compétences du QG de la Défense

  6   territoriale, c'est-à-dire du commandement militaire concerné. Il y avait

  7   une police militaire. Il y avait des institutions. Il y avait une police

  8   civile sur le terrain. Le Parti radical serbe n'avait aucune espèce de

  9   commandement, n'avait exercé aucune espèce de commandement opérationnel du

 10   point de vue militaire.

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : Cela je comprends bien. Je ne me référais pas à

 12   cela. Je me référais à l'autorité morale de cette organisation qui les

 13   avait sélectionnés, et qui quand même était impliquée par leur

 14   comportement. Donc c'était son intérêt de réagir de quelque manière. Donc,

 15   je ne parle pas une réaction sur le plan d'une répression pénale. Je parle

 16   seulement d'une réaction de la part d'une organisation qui avait son

 17   intérêt, selon vous, à que ces volontaires se comportent bien sur le champ

 18   de bataille.

 19   R.  Nos seules attributions, c'est si quelqu'un faisait quelque chose à

 20   tort et à travers, c'était d'avoir des moyens de l'exclure du Parti radical

 21   serbe.

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : Et donc on l'a fait toujours après qu'on a su

 23   quelque chose qui n'était pas bien dans le comportement de quelques

 24   volontaires ?

 25   R.  Pendant que moi j'étais à l'état-major au QG du Parti radical serbe, je

 26   le faisais régulièrement.

 27   Mme LE JUGE LATTANZI : Vous dites autre chose dans les déclarations.

 28   En tout cas, merci. C'est fini.

Page 15956

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai une question de suivi qui

  2   va être très courte. Mais écoutez bien, je vous la pose parce que vous avez

  3   répondu aux questions de mes collègues de manière claire. Vous nous donnez

  4   l'impression d'être un homme cultivé ayant quelques connaissances

  5   politiques, de par votre engagement dans les années 1990. Donc je me suis

  6   dit, comme vous êtes peut-être mais je pense certainement le dernier

  7   témoin, c'est le moment ou jamais de vous poser la question suivante.

  8   Dans l'acte d'accusation il est allégué par le Procureur qu'il y a eu

  9   une forme d'épuration ethnique en Vojvodine. La Vojvodine, comme vous

 10   savez, est une province avec une particularité par rapport à la Serbie.

 11   Mais la Vojvodine fait partie de la République de Serbie. M. Seselj avait

 12   donné une interview à une agence de presse qui s'appelle "Tanjug", et c'est

 13   dans le document 1732 de l'Accusation. On lui pose une question concernant

 14   le Kosovo. M. Seselj nous a déjà longuement parlé du Kosovo, mais il dit,

 15   et j'ai le texte sous les yeux - c'est à la page 12 dans la version

 16   anglaise, ils disent que : "Le Kosovo et Metohija sont une partie

 17   intégrante de la Serbie et de la République de Yougoslavie," puisqu'au

 18   moment où il donne son interview existe encore la République de

 19   Yougoslavie, et il dit ceci. Il dit que : "Le 6 avril 1941, il y a eu une

 20   immigration de 360 000 Albanais au Kosovo, et que de son point de vue,

 21   comme l'Albanie est un Etat démocratique, il n'y a pas aucune raison pour

 22   que ces réfugiés restent encore au Kosovo." Donc, on pourrait en déduire

 23   que dans son point de vue, il pensait que ces Albanais au Kosovo devraient

 24   retourner en Albanie. C'est ce qu'il dit donc dans cette interview qui est

 25   une pièce 1732.

 26   Partant de là, en me penchant dans l'histoire de votre pays, j'ai constaté

 27   qu'il y a eu plusieurs immigrations; 990, je passe. Mais en 1690, peut-être

 28   le savez-vous, il y a eu une grande immigration car à l'époque il y a eu un

Page 15957

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 15958

  1   conflit entre l'Autriche et les Turcs, et dans le cadre de la coalition il

  2   y avait curieusement la République de Venise, qui est italienne maintenant

  3   comme tout le monde le sait. Il y avait l'Autriche, la Russie, et puis il y

  4   avait des paysans serbes sous l'appellation "Heduc" [phon], et cette

  5   coalition a perdu contre les Turcs. Et à ce moment-là, le Patriarche a

  6   organisé une immigration de Serbes pour les sauver. Les chiffres varient de

  7   40 000 à 200 000, mais c'était très important. Et beaucoup de Serbes sont

  8   partis en Vojvodine et en Slavonie, c'est-à-dire en Croatie. Donc, il y a

  9   eu un grand mouvement de Serbes qui sont partis en Croatie.

 10   En 1737, reconflit également avec le Turcs. Défaite, et à ce moment-là il y

 11   a une nouvelle immigration de Serbes qui vont aller en Croatie. Alors, je

 12   relie ces immigrations de Serbes en Croatie avec ce que disait M. Seselj

 13   avec des Albanais au Kosovo. De votre point de vue, les Serbes qui avaient

 14   immigré en Croatie devaient-ils revenir en Serbie, puisque la Serbie était

 15   un Etat démocratique, en 1991, 1992, 1993 ? Apparemment, peut-être pas,

 16   mais disons que c'était un Etat, comme pouvaient les Albanais revenir en

 17   Albanie. Qu'est-ce que vous pensez de ce que disait M. Seselj sur le

 18   Kosovo, et sa théorie, ne pouvait-on pas l'appliquer aux Serbes qui étaient

 19   partis en Croatie ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection, Monsieur le Président.

 21   En ligne 918, on dit "Kosovo-Medjugorje". Il faut entendre "Kosovo-

 22   Metohija". Ce n'est pas un hasard que de me voir intervenir au niveau de

 23   l'interprétation. Il y a trop de Croates qui interprètent. Maintenant, on

 24   vient de mettre "Medjugorje" aux côtés du "Kosovo" ? Medjugorje, c'est leur

 25   lieu saint faux, où ils ont inventé l'apparition de la Vierge Marie. Ça n'a

 26   rien à voir avec le Kosovo-Metohija. Ça n'a rien à voir avec Medjugorje.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous ne discuterons pas la Vierge Marie qui est

 28   apparue à Medjugorje, d'autant qu'aujourd'hui je crois que le Pape va à

Page 15959

  1   Fatima au Portugal.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est les interprètes qui le font, ce n'est pas

  3   moi.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, c'est Kosovo-Metohija et non pas

  5   Medjugorje. Ça, c'est évident. Je n'ai pas suivi le transcript. Parce que

  6   quand je pose une question, je regarde le témoin, puis je ne fais pas comme

  7   les Juges anglo-saxons qui ont toujours le regard sur le transcript. Moi,

  8   je préfère regarder le témoin, ou l'accusé ou le Procureur.

  9   Alors, Monsieur, pouvez-vous répondre à ma question ?

 10   R.  Madame et Messieurs les Juges, je ne suis pas un expert en matière

 11   d'histoire. M. Seselj, c'est un expert bien plus qualifié que moi-même, et

 12   ça ne se compare pas. Donc, je préfère ne pas apporter d'explications. Mais

 13   pour ce qui est de la Vojvodine, je peux quand même savoir quelque chose.

 14   J'ai lu bien des articles, j'ai suivi les médias d'une manière générale.

 15   M. Seselj n'a pas dit qu'il fallait que les Croates quittent la

 16   Vojvodine. Il a recommandé des échanges de biens avec les Serbes qui se

 17   trouvaient en Croatie. Ça, c'est ce que j'en sais.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Donc, vous pouvez répondre sur la

 19   Vojvodine, mais pas sur le reste. Je vous remercie, Monsieur.

 20   Madame Biersay, vous avez 25 minutes précieuses. Utilisez-les.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Messieurs

 22   les Juges, je vais réorganiser mon bureau, et je voudrais remettre le

 23   classeur des versions B/C/S des différentes déclarations du témoin. Je vais

 24   donc remettre cela.

 25   Et est-ce que, entre-temps, je pourrais afficher la pièce P27, s'il

 26   vous plaît.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, P27.

 28   C'est le document, Madame Biersay, qu'on a à l'écran ?

Page 15960

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] Version B/C/S page 1, paragraphe 11, et pour

  2   la version en anglais, ce serait la page 2. J'y viendrai un peu plus tard,

  3   mais je voulais que ce document s'affiche dès maintenant.

  4   Contre-interrogatoire par Mme Biersay :

  5   Q.  [interprétation] Bonsoir, Monsieur Rankic. Je m'appelle Lisa Biersay

  6   et, comme je pense vous l'avez déduit, je suis un membre du bureau du

  7   Procureur, et je vais donc vous poser des questions pour le compte de

  8   l'Accusation.

  9   Je me présente parce que nous ne nous sommes jamais rencontrés

 10   auparavant; est-ce exact ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Je vous ai remis, par le truchement de l'huissier, un classeur avec les

 13   déclarations que vous avez signées. Avant d'arriver à ces documents, je

 14   vois que vous avez également d'autres documents sur votre bureau. Est-ce

 15   que vous pourriez nous dire de quoi il s'agit ? Vous avez des documents

 16   dans des classeurs ou des chemises bleues et roses.

 17   R.  Ces documents, ce sont mes réponses aux ordonnances contraignantes et

 18   d'autres ordonnances contraignantes, des aide-mémoire, et ainsi de suite.

 19   Mais je ne les utilise pas, comme vous le voyez. Mais si la Chambre

 20   souhaite un document, je dois l'avoir sur moi.

 21   Q.  Pourrais-je vous demander de passer à l'intercalaire numéro 3 dans

 22   votre classeur, le classeur qui est devant vous.

 23   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. On n'a pas de traduction.

 25   L'INTERPRÈTE : Excusez-nous. Problème technique.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, qu'est-ce que vous nous dites ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mme Biersay a demandé au témoin quelque chose

 28   au sujet d'un aide-mémoire, mais c'est la première fois que j'entends

Page 15961

  1   parler d'un aide-mémoire. C'est la première fois que j'en entends parler.

  2   Je suis confus. Quel est l'aide-mémoire en possession du témoin ?

  3   Mme BIERSAY : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Il n'y a pas d'aide-mémoire. Mme Biersay a vu qu'il

  5   avait un dossier devant lui. Le témoin nous a dit que le dossier bleu ou

  6   rose, je ne sais pas, ce sont toutes -- je répète.

  7   Le témoin a dit qu'il avait un dossier où il y avait toutes les

  8   ordonnances et ces réponses, et il y a des documents personnels qui

  9   pouvaient être un aide-mémoire, c'est tout, mais ça, il ne l'utilise pas,

 10   il n'a pas le droit de l'utiliser. Il ne répondra qu'aux questions avec les

 11   documents de Mme Biersay.

 12   Allez-y, Madame Biersay.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai compris que Mme

 14   Biersay lui posait une question au sujet du classeur qu'elle vient de lui

 15   remettre. Je n'en vois pas d'autre. Mais peut-être quelqu'un a placé cet

 16   obstacle devant moi juste pour que je ne puisse voir cela, car à cause du

 17   pupitre, je ne vois pas ce qu'il a devant lui, et je vois seulement le

 18   classeur que Mme Biersay lui a remis.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, vous lui avez donné un classeur.

 20   Pourquoi M. Seselj n'a pas le même classeur, ce qui gagnerait du temps ?

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] M. Seselj, à l'instar des Juges de la

 22   Chambre, dispose des déclarations du témoin. Ce qu'on a donné au témoin,

 23   c'est la version en B/C/S de ce qui figurait dans le premier classeur qui a

 24   été transmis aux Juges de la Chambre et à l'accusé. Donc, j'espère que je

 25   peux maintenant poursuivre.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, veuillez poursuivre.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation]

 28   Q.  Je voudrais que vous passiez au paragraphe 14 de cette déclaration. Et

Page 15962

  1   ce qui nous intéresse plus particulièrement, c'est le paragraphe -- ou le

  2   document qui porte la date du 19 septembre 2006.

  3   Le Juge Lattanzi vous a posé des questions concernant ce que cela

  4   signifiait que de lutter au nom de la cause serbe, et vous avez fait un

  5   distinguo entre cette lutte, et ce que cela signifiait en 1990, et ce que

  6   cela signifiait en 1991. Est-ce que vous vous souvenez des questions qui

  7   ont été posées sur ce thème par le Juge Lattanzi, Monsieur Rankic ?

  8   R.  Je me souviens de cette question, mais je ne vois pas cela au

  9   paragraphe 14. Autre chose y est écrit.

 10   Q.  Oui, effectivement. Vous avez expliqué au Juge Lattanzi que la cause

 11   serbe, telle que vous la compreniez en 1990, était d'être au service de la

 12   tradition, de la culture et des écritures serbes. Est-ce que vous vous

 13   souvenez avoir dit cela, page 63 du compte rendu d'audience ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection, le témoin parlait de l'organisation

 15   SAVA, et non pas du Mouvement chetnik-serbe, lorsque Mme Lattanzi lui a

 16   posé une question concernant cette organisation, SAVA.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce que vous vous souvenez faire une distinction entre les objectifs

 19   de la cause serbe en 1990 par rapport à 1991, oui ou non, ou est-ce que

 20   vous voulez que je vous relise ce que vous avez dit ?

 21   R.  Oui. Oui, je me souviens.

 22   Q.  Et vous avez décrit l'objectif comme étant de préserver la tradition,

 23   les écritures et la culture serbes; c'est ce que vous avez dit aux Juges de

 24   la Chambre, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Maintenant, j'aimerais que nous passions au paragraphe 14 de votre

 27   déclaration de septembre 2006. Dans cette déclaration, il y a un extrait de

 28   la plateforme politique; est-ce exact ?

Page 15963

  1   R.  Excusez-moi, vous avez dit "2006", c'est bien cela ?

  2   Q.  Non, regardez simplement au niveau de l'intercalaire numéro 3, est-ce

  3   que vous êtes bien au niveau de l'intercalaire numéro 3 ?

  4   Peut-être que l'on pourrait vous donner un peu d'aide.

  5   En attendant, est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre

  6   où l'on trouve dans le programme politique du Mouvement chetnik-serbe -- il

  7   s'agit de l'intercalaire numéro 3. C'est la page 4 pour vous.

  8   Donc, il s'agit du paragraphe 14 qui commence à la page 4. Est-ce que vous

  9   voyez ce paragraphe ?

 10   R.  Oui. Oui.

 11   Mme BIERSAY : [interprétation] Et à l'attention des Juges de la Chambre, il

 12   s'agit du document qui porte la cote P27, ce qui apparaît à l'écran en ce

 13   moment.

 14   Q.  Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre où se trouvait

 15   dans le programme du Mouvement chetnik-serbe, s'il y avait une mention pour

 16   préserver la culture, l'alphabet et les traditions serbes; est-ce que vous

 17   vous souvenez de cela dans ce programme ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 19   Juges, le témoin n'a jamais dit cela au sujet du Mouvement chetnik-serbe.

 20   Je suppose que vous vous en souvenez, Madame Lattanzi.

 21   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro]

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'adresse à la Chambre de première instance,

 23   et non pas à Mme Biersay.

 24   Est-ce que vous vous en souvenez, Madame Lattanzi, que le témoin

 25   parlait du Mouvement chetnik-serbe, lorsqu'il disait cela, ou bien s'il

 26   était question du Parti du Renouveau serbe et de l'organisation SAVA,

 27   lorsqu'il le disait ? Vous n'avez pas posé la question au sujet du

 28   Mouvement chetnik-serbe. Retrouvez cela dans le compte rendu d'audience,

Page 15964

  1   s'il vous plaît.

  2   Mme BIERSAY : [interprétation] Je lui parle du Mouvement chetnik-serbe.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Je crois que ma collègue posait une question d'ordre

  4   général dans laquelle il était inclus SAVA, Mouvement chetnik-serbe, Parti

  5   radical serbe. La question était générale, et la réponse a été générale.

  6   Bon, maintenant, du général, je pense que Mme Biersay veut aller au

  7   particulier, et elle lui montre le programme du Mouvement chetnik-serbe qui

  8   figure au paragraphe 14. Voilà. Bon. C'est comme ça que je vois le

  9   problème.

 10   Alors, Madame Biersay.

 11   Mme BIERSAY : [interprétation]

 12   Q.  J'aimerais savoir si le Mouvement chetnik-serbe mettait l'accent sur la

 13   tradition, la culture, et l'alphabet du peuple serbe.

 14   R.  Je souhaite, encore une fois, répondre, et à la Chambre de première

 15   instance, et à vous, bien sûr. Tout à l'heure, lorsque je parlais, je

 16   parlais de l'an 1990, et de l'organisation SAVA, et du  Parti du Renouveau

 17   serbe. Or le Mouvement chetnik-serbe était autre chose avec son programme -

 18   -

 19   Q.  Je ne vous parle pas de la SAVA, je vous parle du Mouvement chetnik-

 20   serbe. Alors, ma question est la suivante : j'aimerais savoir si dans le

 21   programme du Mouvement chetnik-serbe, qui a été publié en 1990, j'aimerais

 22   savoir, donc, où il est mentionné que l'objectif du mouvement était de

 23   protéger la culture, l'alphabet et les traditions serbes. Peut-être que la

 24   réponse, c'est que cela ne se trouve nulle part ou peut-être que ça se

 25   trouve quelque part, et j'aimerais savoir quelle est votre réponse.

 26   R.  Ceci n'est pas écrit ici.

 27   Q.  Ce n'est pas écrit là, c'est-à-dire dans votre déclaration. Mais dans

 28   le programme, c'est-à-dire la pièce P27, est-ce qu'il y a une mention --

Page 15965

  1   c'est le document qui est à l'écran, autant que vous pourriez vous

  2   souvenir, est-ce que cela apparaît ?

  3   Je vais vous poser une autre question, toujours sur le paragraphe 14,

  4   IV en chiffres romains, le programme mentionne nommément "la question de la

  5   responsabilité pour le génocide commis et pour les destructions durant la

  6   guerre".

  7   Est-ce que vous voyez cela ?

  8   R.  Oui, oui, je vois.

  9   Q.  "… réalisé par les personnes qui ont participé en masse aux tentatives

 10   d'extermination des Serbes durant la Deuxième Guerre mondiale."

 11   Est-ce que vous voyez cela ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Donc, en 1990, avant les événements de 1991 et 1992, c'est indubitable,

 14   le programme du Mouvement chetnik-serbe a abordé la question du génocide

 15   contre les Serbes durant la Deuxième Guerre mondiale, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, cette question n'avait jamais été soulevée de manière à penser

 17   qu'il ne fallait pas résoudre cette question.

 18   Q.  Ce n'est pas une question piège. Et dans ce paragraphe, on voit

 19   également que :

 20   "L'état indépendant de Croatie, il y a eu dans cet état l'avènement

 21   d'un nouveau dirigeant oustacha…"

 22   Est-ce que vous voyez cela ?

 23   "Tout particulièrement dans les circonstances de leur établissement d'un

 24   état indépendant de Croatie et l'avènement d'un nouveau leader oustachi,

 25   ainsi qu'une protection générale de la population serbe qui est, à présent,

 26   en danger, en raison d'une nouvelle politique génocidaire."

 27   Est-ce que c'est ce qui est marqué ici ?

 28   R.  [aucune interprétation]

Page 15966

  1   Q.  Et c'est ce qui figure également dans le programme, le programme

  2   politique du Mouvement chetnik-serbe, n'est-ce pas ?

  3   R.  Probablement, si ceci est présenté de manière exacte.

  4   Q.  Donc, en 1990, l'association avec l'état de Croatie avec le nouveau

  5   dirigeant oustachi était déjà mentionnée par le Mouvement chetnik-serbe,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  C'était la peur d'un nouveau génocide.

  8   Q.  Et par conséquent, le programme politique du Mouvement chetnik-serbe

  9   était basé sur une idée de redresser les torts du passé à l'encontre du

 10   peuple serbe ?

 11   R.  Non, mais qu'il fallait lui rappeler ce qu'il avait vécu.

 12   Q.  Oui, un rappel. Mais sur ce point, dans ses discours, M. Seselj a

 13   toujours rappelé à l'auditoire les torts du passé, les exactions qui

 14   avaient été commises contre les Serbes durant la Deuxième Guerre mondiale,

 15   n'est-ce pas ?

 16   R.  Cela faisait partie de la plateforme. Je suppose que oui.

 17   Q.  Cela faisait partie du programme, et ce qui faisait également partie du

 18   programme, comme nous le voyons encore une fois dans le même paragraphe,

 19   c'est l'idée d'une expulsion des émigrants albanais et de leur descendance.

 20   Est-ce que vous voyez cela ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  La Juge Lattanzi vous a posé des questions, je crois, sur ce concept de

 23   Grande-Serbie, et vous avez répondu en disant que vous n'utilisiez pas ces

 24   termes ou ce terme; est-ce exact ?

 25   R.  Non. Je pense que la Grande-Serbie n'existe pas. L'on parle du

 26   territoire avec lequel la Serbie est entrée dans la Yougoslavie. Pour

 27   quelqu'un, c'est une Grande-Serbie; pour moi, c'est une Serbie normale.

 28   Q.  Alors, parlons de cela. Je ne parle pas du concept à proprement parler

Page 15967

  1   de la Grande-Serbie. Laissons cela de côté pour l'instant.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore une fois, Madame la Juge, Monsieur le

  3   Président, Monsieur le Juge, la réponse du témoin n'a pas été bien

  4   traduite.

  5   "…et si quelqu'un pense que ça, c'est la Grande-Serbie, c'est une autre

  6   chose."

  7   Mais une partie manque. Le témoin a dit : "Pour moi, c'est une Serbie

  8   normale, je crois," et ceci n'existe pas dans l'interprétation.

  9   Aujourd'hui, par hasard, je me suis penché sur l'interprétation et je

 10   trouve tous ces défauts. Sinon, pendant la procédure, je ne le faisais pas

 11   aussi régulièrement.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la traduction française, effectivement, j'ai

 13   entendu "Serbie normale".

 14   Bon, alors, Monsieur le Témoin, répétez --

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais pas dans l'interprétation en anglais. Ça

 16   n'existe pas.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement. Bien.

 18   Alors, Monsieur le Témoin, qu'avez-vous répondu exactement ?

 19   Aux interprètes de traduire fidèlement les propos du témoin, pour éviter ce

 20   type d'objection.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit la chose suivante : s'il y a un

 22   divorce, tout le monde sort du mariage avec ce avec quoi il est entré dans

 23   ce mariage, et pour moi, c'est une Serbie normale.

 24   Mme BIERSAY : [interprétation]

 25   Q.  Connaissez-vous ce magazine ou ce journal qui s'appelle "Velika Srbija"

 26   ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que "Velika Srbija" était un journal qui, au départ -- c'est-à-

Page 15968

  1   dire, qui existait déjà au début du Mouvement chetnik-serbe ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Et lorsque le Mouvement chetnik-serbe a évolué avec le SRS, "Velika

  4   Srbija" est devenu le journal pour le SRS, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Et dans les discours que vous avez entendus de l'accusé, est-ce qu'il

  7   utilisait le terme "Grande-Serbie" ?

  8   R.  Pour autant que je m'en souvienne, oui, et M. Seselj n'en a pas honte.

  9   Il mentionne ce terme encore aujourd'hui.

 10   Q.  Je ne vous demande pas d'aller dans un sens ou dans l'autre et de dire

 11   que quelqu'un a honte ou pas honte. Je vous demande si quelqu'un a utilisé

 12   ce terme durant de nombreux discours -- si vous l'avez entendu utiliser ce

 13   terme.

 14   R.  Oui.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question de suivi. Moi,

 16   malheureusement, je ne peux pas suivre l'activité politique dans votre pays

 17   en Serbie, mais est-ce qu'au jour d'aujourd'hui, des hommes politiques

 18   actuels parlent de la Grande-Serbie, ou personne n'évoque ce mot, ces

 19   termes ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, en ce moment, en

 21   Serbie, personne n'en parle. Nous sommes un Etat occupé.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous êtes un Etat occupé. Occupé par

 23   qui ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Les forces de l'OTAN.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay.

 26   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Je vous pose ces questions parce qu'à la page 64 du compte rendu

 28   d'audience, vous avez dit, en réponse à une question posée par les Juges de

Page 15969

  1   la Chambre, vous avez dit :

  2   "Je n'utilise pas ce terme de Grande-Serbie. Je ne l'utilise pas du tout."

  3   Est-ce que vous vous souvenez avoir dit ceci en réponse aux questions des

  4   Juges de la Chambre ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Mais même si vous dites que vous n'utilisez pas le terme de "Grande-

  7   Serbie", cela faisait partie intégrante des propos utilisés par l'accusé

  8   dans ses discours, n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est M. Seselj qui sait pourquoi il le faisait. Moi, je ne le sais

 10   pas.

 11   Pour moi, c'est normal.

 12   Q.  Je ne vous demande pas de --

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Mme Biersay insiste sur

 14   des questions notoirement connues. Moi, je n'ai jamais contesté le fait que

 15   j'avais parlé de cela, et elle place le témoin dans la position d'un

 16   expert. Il devrait expliquer mes propos et expliquer ce que je pensais.

 17   C'est absurde. C'est ridicule.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay s'aventure sur ce terrain parce que

 19   je lui aurais coupé la parole. Elle essaie, par ses questions, de mettre en

 20   évidence quelque chose que j'attends, alors attendons de voir.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation]

 22   Q.  Dans le paragraphe 15 de la déclaration que vous avez devant vous, vous

 23   avez décrit que la Grande-Serbie était un concept qui avait été inscrit

 24   comme le premier objectif du programme du Mouvement chetnik-serbe; est-ce

 25   exact ?

 26   R.  Je ne sais pas. Il faudrait que je vois le contexte d'abord.

 27   Q.  Bien, on peut regarder :

 28   "…le rétablissement d'un Etat serbe libre, indépendante et

Page 15970

  1   démocratique qui inclurait la totalité de la Serbie", donc dans votre

  2   déclaration --

  3   R.  Oui, mais il n'est écrit nulle part ici "la Grande-Serbie".

  4   Q.  Est-ce que vous voyez ceci dans le paragraphe 15 de votre déclaration ?

  5   R.  Au paragraphe 15, oui.

  6   Q.  Donc, vous avez utilisé ce terme ou ces mots précédemment dans vos

  7   déclarations, n'est-ce pas ?

  8   R.  Peut-être j'ai cité le terme de M. Seselj, car ce n'est pas un terme

  9   que j'utilise.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Est-ce que j'ai encore le temps de poser une

 11   autre question, Monsieur le Président ?

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il n'y a pas d'objection, vous avez deux minutes.

 13   Oui.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Vous avez dit aux Juges de la Chambre que vous avez entendu l'accusé

 16   parler des conventions de Genève aux volontaires du SRS. Vous avez dit ceci

 17   aux Juges de la Chambre, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  J'aimerais que l'on passe au paragraphe 35 de cette même déclaration,

 20   et j'aimerais que vous regardiez plus particulièrement les deux dernières

 21   phrases du paragraphe 35.

 22   "Je n'ai jamais entendu M. Seselj parler des conventions de Genève aux

 23   volontaires du SRS ou durant toute prise de parole en public. Autant que je

 24   me souvienne, personne au niveau de l'état-major de guerre n'a jamais donné

 25   les instructions en ce qui concerne le traitement des prisonniers de

 26   guerre."

 27   R.  Ce ne sont pas mes propos.

 28   Q.  Par conséquent, il s'agit d'un mensonge ?

Page 15971

  1   R.  Non, ce n'est pas la vérité.

  2   Q.  Et vous regardez avec moi la version de votre déclaration dans votre

  3   propre langue, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est effectivement une déclaration, mais non pas la mienne.

  5   Q.  Et vous avez signé cette déclaration, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est exact.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Témoin, quelques consignes. Vous

  8   allez revenir demain à 14 heures 15, puisque nous sommes d'après-midi, car

  9   mon collègue le Juge Harhoff siège le matin. Donc, nous nous retrouverons,

 10   nous, l'après-midi. D'ici là, vous n'avez aucun contact avec personne sauf

 11   avec les membres proches de votre famille, pas avec les journalistes et

 12   avec quiconque, pour éviter qu'on vienne me dire que quelqu'un vous a

 13   appelé, vous a menacé, et cetera. Donc ne répondez pas au téléphone sauf à

 14   votre famille. Regardez la télévision ou lisez. N'ayez aucun contact avec

 15   personne, de telle façon que quand vous allez revenir demain à 14 heures

 16   15, c'est comme si nous avons fait une pause un peu longue avec pendant

 17   cette pause aucun contact avec personne.

 18   Vous avez bien compris ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 21   Alors, je vous souhaite une bonne fin de soirée, ainsi qu'à tout le monde,

 22   et nous nous retrouvons demain après-midi.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mercredi 12 mai

 25   2010, à 14 heures 15.

 26  

 27  

 28