Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 21 septembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 9 heures 13.

  4    [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Oui, bonjour.

  8   Monsieur le Juge, affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 10   En ce 21 septembre 2010, je salue en premier les éminents représentants du

 11   bureau de l'Accusation. Je salue M. Seselj, je salue également tout le

 12   personnel qui nous assiste, et j'associe également dans mes salutations les

 13   assistants qui assistent à leur première audience.

 14   Nous avons plusieurs points à l'ordre du jour de cette audience

 15   administrative. Tout d'abord, je veux dire deux décisions orales. L'une

 16   doit être lue à huis clos, et je demande à M. le Greffier de passer à huis

 17   clos pendant quelques instants.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 19   le Président.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 10   [Audience publique]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Décision sur la requête orale de l'Accusation en

 12   admission des déclarations préalables de Zoran Rankic.

 13   Saisie de la requête orale de l'Accusation présentée lors de l'audience du

 14   12 mai 2010 visant à l'admission de trois déclarations préalables du témoin

 15   de la Chambre Zoran Rankic, anciennement

 16   VS-017 : à savoir, une première déclaration en date du 13 juin et 18 et 19

 17   septembre 2006, portant le numéro 65 ter 7540; une seconde déclaration en

 18   date du 17 et 18 octobre 2006, portant le numéro 65 ter 7541; et une

 19   troisième déclaration en date du 1er au 10 novembre 2006, portant le numéro

 20   65 ter 7542.

 21   Vu l'article 89(C) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal en

 22   vertu duquel la Chambre peut recevoir tout élément de preuve pertinent

 23   qu'elle estime avoir valeur probante; attendu que ces déclarations ont fait

 24   l'objet d'un examen pendant le contre-interrogatoire du témoin par

 25   l'Accusation en vue de mettre en évidence les contradictions entre ces

 26   déclarations écrites et la déposition du témoin devant la Chambre; attendu

 27   que l'accusé ne s'est pas exprimé sur l'admissibilité de ces déclarations

 28   écrites spécifiques, attendu que la Chambre estime que les déclarations

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  1   préalables dont l'admission est demandée sont pertinentes pour évaluer la

  2   crédibilité du témoin, car elle se rapporte aux faits allégués dans l'acte

  3   d'accusation; attendu que ces déclarations ont été recueillies avec

  4   l'assistance de l'interprète dûment qualifié et agréé par le greffe du

  5   Tribunal, attendu que le Témoin Zoran Rankic a signé ses déclarations en

  6   B/C/S et a attesté de leur contenu; attendu que la Chambre estime, par

  7   conséquent, que ces déclarations présentent des indices suffisants de

  8   fiabilité et de valeur probante prima facie; attendu que la Chambre

  9   rappelle qu'elle considère qu'une distinction fondamentale existe entre

 10   l'admissibilité d'éléments de preuve et le poids qui leur sera accordé dans

 11   la détermination de la culpabilité de l'accusé, au stade actuel de la

 12   procédure, la Chambre ne fait aucune évaluation définitive de la

 13   pertinence, de la fiabilité et de la valeur probante des éléments de preuve

 14   concernés. Cette détermination n'aura lieu qu'à la fin du procès et à la

 15   lumière de l'ensemble des éléments de preuve introduits par les parties

 16   aussi bien à charge qu'à décharge.

 17   Par ces motifs, en application de l'article 89 (C) du Règlement, ordonne le

 18   versement au dossier des documents 65 ter 7540, 7541, et 7542, ordonne que

 19   le greffe assigne un numéro de pièce à conviction à chacun de ces

 20   documents.

 21   Alors, Monsieur Seselj, je vais, dans un premier temps, évoquer trois

 22   sujets, ensuite je vous donnerai la parole. Et le Procureur aura la parole,

 23   étant précisé que nous devrons terminer impérativement l'audience à midi,

 24   parce que l'accusé a une obligation en début d'après-midi.

 25   Monsieur Seselj, nous ne nous sommes pas vus depuis quasiment deux mois,

 26   parce que d'une part il y avait les vacations judiciaires, et d'autre part,

 27   j'ai eu énormément de difficulté à avoir une date d'audience en septembre,

 28   du fait que les salles d'audience étaient encombrées par d'autres procès et

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  1   du fait que mes deux collègues sont pris également dans deux autres procès.

  2   Ce qui, à mon niveau, me pose une série de problèmes. Et c'est une raison

  3   pour laquelle le Juge Harhoff n'est pas présent aujourd'hui, étant pris par

  4   l'autre affaire. Mais néanmoins, compte tenu du fait qu'il fallait qu'on se

  5   voie, le Juge Harhoff nous a donné son consentement à ce qu'on tienne

  6   l'audience en son absence.

  7   Pendant les vacances, Monsieur Seselj, j'ai chaque jour demandé si la

  8   requête dite du carnet Mladic vous avait été traduite. A la fin du mois

  9   d'août, quand je suis revenu, il m'a été dit que la requête n'avait

 10   toujours pas été traduite. Prenant mon courage à deux mains, j'ai alors

 11   saisi le greffier en personne pour lui demander des explications. Il m'a

 12   répondu en me disant que compte tenu des effectifs présents au service de

 13   traduction, compte tenu des vacances, et compte tenu des priorités

 14   accordées à l'affaire Karadzic et à l'affaire Tolimir, il a été décidé de

 15   traduire ces écritures qu'après les écritures Karadzic et Tolimir. C'est

 16   dans ces conditions que vous avez eu récemment dans votre langue les

 17   écritures traduites.

 18   Le même problème va se poser prochainement. Car également, suite à la

 19   requête Bar Table, c'est-à-dire la requête visant à l'admission de

 20   documents, le Procureur a fait de nouvelles écritures à la suite de la

 21   demande de la Chambre, et ces écritures doivent également vous être

 22   traduites. Bien. Tout ça pour vous dire que nous sommes très dépendants du

 23   service de traduction, ce qui peut expliquer certains retards.

 24   L'autre sujet est un sujet crucial qui concerne votre état de santé. Comme

 25   vous le savez, Monsieur Seselj, la Chambre a ordonné une expertise en

 26   demandant à plusieurs spécialistes de vous examiner, notamment un

 27   cardiologue.

 28   Il y a quelques jours, j'ai reçu un courrier alarmant d'un de vos proches

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  1   dont je ne vous dirai pas le nom, car je ne sais pas s'il a envoyé ce

  2   courrier avec votre consentement ou sans votre consentement. Mais votre

  3   proche s'alarmait de la situation concernant votre état de santé. Et il a

  4   joint à son courrier un document médical qu'il a été recueillir auprès d'un

  5   éminent cardiologue serbe, qu'il a joint à sa lettre. Dès que j'ai eu

  6   connaissance de ce courrier, j'ai fait une réponse à votre proche pour lui

  7   dire, un, que j'avais pris l'essence de son courrier et que j'ai adressé

  8   immédiatement le document médical à l'expert qui a été désigné par la

  9   Chambre.

 10   En lisant la presse serbe, je me suis rendu compte que votre état de

 11   santé a également été évoqué lors d'un récent meeting tenu au centre Sava

 12   de Belgrade, réunissant 4 000 personnes, dont plusieurs parlementaires

 13   russes en provenance de la Duma. Et au cours de cette réunion, votre état

 14   de santé a été évoqué, certains ayant fait un lien avec ce qui était arrivé

 15   à M. Milosevic.

 16   A titre personnel, je ne veux pas me retrouver dans cette situation.

 17   Donc je ferai tout pour vous maintenir en bonne santé. J'attends avec

 18   impatience le retour de l'expertise diligentée en matière médicale. Et en

 19   matière de procédure pénale, fut-elle procédure internationale, les

 20   problèmes sont toujours les mêmes.

 21   Il y a une série de questions qui se posent, la première est la

 22   suivante : est-ce que l'état de santé du détenu est compatible avec la

 23   détention ? L'expert doit répondre à cette question. Car si l'état de santé

 24   n'est pas compatible, on se trouve dans une situation où se pose la

 25   question de l'interruption du procès dans l'attente du rétablissement du

 26   malade. C'est donc une décision très importante qui doit être prise selon

 27   ce que dira l'expert.

 28   A titre personnel, il y aura plusieurs possibilités. La première

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  1   consistera à éventuellement nommer un nouveau collège d'experts réunissant

  2   des spécialistes mondiaux incontestables, et je ne serais pas du tout

  3   opposé à ce que ce collège soit constitué d'un expert russe, d'un expert

  4   français et d'un expert serbe qui pourraient répondre à la question

  5   fondamentale : l'état de santé est-il ou non compatible avec une détention

  6   ?

  7   La deuxième question subséquente est celle-ci : si l'état de santé

  8   est compatible avec la détention, est-ce que son état de santé nécessite

  9   des soins et lesquels, voire une intervention

 10   Chirurgicale; et si oui, quelle intervention chirurgicale ? En fonction

 11   évidemment des réponses, la question pourrait se poser de savoir où

 12   pourrait avoir lieu cette intervention.

 13   A partir de ces questions qui sont fondamentales, un juge raisonnable

 14   peut rendre des décisions assurant à la fois l'intérêt de la justice, qui

 15   passe par la continuation des procès, et la sauvegarde maximale du détenu

 16   au point de vue médical.

 17   Pour me résumer, dès que nous aurons le rapport de l'expert, la

 18   Chambre prendra toutes les mesures nécessaires répondant à la situation

 19   médicale.

 20   Le troisième sujet concerne l'indigence. La Chambre va rendre

 21   prochainement une décision sur cette question. Nous sommes en train de la

 22   finaliser, et elle devrait être enregistrée dans les prochains jours. Je

 23   fais le vœu, et mes collègues certainement le même vœu que moi, nous

 24   espérons que grâce à cette décision le greffier puisse trouver les remèdes

 25   à la situation actuelle.

 26   Je vais terminer également par un autre sujet qui me tient à cœur,

 27   qui est la question de la procédure pour outrage en cours suite à la

 28   plainte que vous avez adressée à l'encontre du bureau du Procureur.

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  1   Comme vous le savez, la Chambre a décidé de nommer un ami de la Cour

  2   pour gérer votre plainte. A ce jour, nous n'avons pas eu encore la

  3   désignation de cet ami de la Cour. Le greffe semble rencontrer d'énormes

  4   difficultés à trouver la personne idoine remplissant un certain nombre de

  5   critères, avec un critère que le greffe doit prendre en compte, à savoir

  6   que cet ami de la Cour ne peut être en aucun état de la nationalité

  7   italienne, française ou danoise. Donc le greffier est à la recherche de

  8   l'oiseau rare, et j'espère qu'il trouvera quelqu'un.

  9   Sur ce sujet, je tiens à indiquer de manière publique, pour qu'il n'y

 10   ait pas de méprise, qu'à titre personnel j'ai été amené, il y a quelques

 11   temps, à la suite du livre de Mme Carla Del Ponte dans lequel elle me

 12   citait nommément, et prenant en compte le fait qu'une interprète avait fait

 13   une certaine déclaration, j'ai estimé que je devais, au titre de l'article

 14   15(A), me récuser. J'ai donc adressé ma lettre de récusation au Président

 15   du Tribunal. Le Président du Tribunal n'a pas donné suite à ma lettre

 16   estimant, selon son analyse juridique, qu'avant d'être saisie, la présente

 17   Chambre devait modifier la décision antérieure prise par la Chambre III

 18   sous sa présidence. Vu cette position, la Chambre actuelle a donc pris une

 19   décision modifiant la décision antérieure de la Chambre III, confiant à cet

 20   ami de la Cour la charge d'instruire votre requête initiale.

 21   Il est clair pour moi - et je le dis pour enlever toute ambiguïté - que

 22   lorsque l'ami de la Cour aura terminé son travail, que dans l'hypothèse où

 23   il conclurait à une situation où il y a nécessité de dresser un acte

 24   d'accusation, automatiquement, je me récuserai à nouveau au titre de

 25   l'article 15(A). En revanche, si l'ami de la Cour concluait au fait qu'il

 26   n'y avait pas d'éléments permettant de dresser un acte d'accusation, à ce

 27   moment-là, la question ne se posera pas.

 28   Pour me résumer, nous attendons donc que le greffier désigne l'ami de la

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  1   Cour, que celui-ci fasse son travail, qui, de mon point de vue, sur le plan

  2   technique, risque de prendre beaucoup de temps, et quand nous aurons le

  3   rapport de l'ami de la Cour, il sera temps d'en tirer les conséquences.

  4   Voilà donc les différents points que je voulais, à titre personnel,

  5   évoquer. Je vais maintenant donner la parole à ma collègue qui peut aussi

  6   faire valoir son point de vue.

  7   Mme LE JUGE LATTANZI : Non, je ne ferai pas valoir mon point de vue, à part

  8   seulement sur le fait que certaines choses qui ont été dites étaient

  9   confidentielles, et donc je ne partage pas la responsabilité pour cela.

 10   Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, vous avez donc entendu

 12   les deux lectures des décisions. Vous avez également entendu ce que j'ai

 13   dit sur plusieurs sujets. Qu'avez-vous, en ce qui vous concerne, à nous

 14   dire ?

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, de mon côté, j'ai

 16   préparé une dizaine de questions que je voulais aborder aujourd'hui, compte

 17   tenu du fait qu'il s'est écoulé presque deux mois et demi depuis notre

 18   dernière entrevue. Mais je vais d'abord me pencher sur les questions que

 19   vous avez abordées vous-même, et certaines de ces questions coïncident avec

 20   ce que j'avais préparé à l'avance. Donc on gagnera du temps.

 21   En avançant les explications pour ce qui est de la décision prise par la

 22   Chambre pour ce qui est de verser au dossier les déclarations du témoin

 23   Zoran Rankic, vous avez dit dans votre exposé de motifs que je ne m'y étais

 24   pas opposé. Cependant, je tiens à vous rappeler que je me suis opposé à

 25   plusieurs reprises, de façon générale, dans ce prétoire, à ce que quelque

 26   déclaration préalable que ce soit vienne à être versé au dossier. Cette

 27   pratique n'est connue ni par le droit anglo-saxon ni par le droit

 28   continental. En Angleterre, et en Amérique, et en France, et en Italie,

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  1   cela ne peut se faire, à savoir qu'une déclaration recueillie par le

  2   procureur ou recueillie par la police soit versée au dossier en tant

  3   qu'élément de preuve.

  4   Il y a un principe de témoignage viva voce, un principe de procédure

  5   verbale et directe, et j'estime que cette décision de la Chambre se trouve

  6   être contraire au droit, mais ce n'est pas la seule à l'être. Je suis

  7   stupéfait par la réponse apportée par le greffier pour ce qui est du fait

  8   d'avoir insisté afin que me soient traduites et communiquées les requêtes

  9   de l'Accusation et les parties pertinentes du prétendu journal de Ratko

 10   Mladic, et la réponse consistant à dire que la priorité était accordée aux

 11   affaires Karadzic et Tolimir.

 12   Avec tout le respect qui est dû au rôle historique du Dr Radovan

 13   Karadzic et du général Zdravko Tolimir, j'estime que c'est une violation

 14   brutale de certains principes de droit élémentaire parce que ma détention

 15   provisoire dure depuis huit ans. La détention de M. Tolimir dure depuis

 16   trois ans et la détention de M. Karadzic, un peu plus de deux ans. Dans

 17   toutes les variantes possibles, la priorité aurait dû être attribuée au

 18   procès qui est diligenté contre moi et pas à un autre procès, quel qu'il

 19   soit. Je suis en train de battre des records du point de vue de ma

 20   détention, pour ce qui est d'un temps ininterrompu de détention. Alors,

 21   suite à huit années de détention sans qu'il y ait de jugement de rendu et

 22   sans qu'il y ait eu achèvement de la présentation des éléments à charge par

 23   l'Accusation, si cela ne constitue pas une sonnette d'alarme pour les

 24   instances du Tribunal, que ce soit les instances judiciaires ou

 25   administratives, alors point n'est utile de se poser la question,

 26   d'apporter quelque commentaire que ce soit.

 27   Donc il y a un intérêt politique en jeu, qui veut que Karadzic et

 28   Tolimir soient condamnés au plus vite, et c'est la raison pour laquelle on

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  1   accorde la priorité à la traduction, aux préparatifs, et on les épuise au

  2   quotidien par le procès qui est diligenté. Et ici, il s'est avéré, en

  3   l'occurrence, qu'il n'est point possible d'apporter un jugement de

  4   condamnation qui soit tant soit peu raisonnable, et on fait traîner la

  5   procédure.

  6   Alors, pour ce qui est des carnets Mladic, je me suis préparé en

  7   particulier pour ce point-là, parce que j'estime que c'est un élément

  8   crucial dont il convient de débattre aujourd'hui.

  9   Et il est trois problèmes principaux qui se posent tout de suite.

 10   D'abord, je n'ai pas reçu les carnets complets par les soins de

 11   l'Accusation, mais seulement des parties qu'on estime pertinentes pour

 12   l'affaire qui nous intéresse. Alors, premièrement, je vous ai déjà fait

 13   savoir que --

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen, pouvez-vous nous dire si le

 15   bureau du Procureur a envoyé les 3 500 pages du carnet Mladic à M. Seselj ?

 16   M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame la Juge, ce

 17   thème a été abordé lors de notre dernière audience administrative. Et à

 18   l'époque, nous avons expliqué que la totalité des carnets étaient

 19   disponibles sur le système EDS et, par conséquent, l'accusé peut les

 20   obtenir. Ceci est mentionné dans ce que nous avons soumis.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, vous vous souvenez

 22   probablement d'une décision que vous avez rendue en tant que Juge de mise

 23   en état, qui a été confirmée par la Chambre dès qu'elle a été créée, et qui

 24   disait que le Procureur était tenu de me communiquer la totalité des

 25   documents à charge et à décharge, en version papier et en langue serbe.

 26   Donc rien d'autre ne se trouve être rendu accessible à ma personne. Ce

 27   qu'on m'a communiqué, c'est une centaine de pages, à peine des prétendus

 28   carnets de Mladic. Mais j'aimerais en parler aussi, parce que le Procureur

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  1   ne procurera probablement jamais les 3 600 pages ni les transcriptions des

  2   enregistrements des différentes interviews et conversations qui ont été

  3   saisies aussi.

  4   D'abord, dans l'opinion publique, on met en doute ouvertement

  5   l'authenticité de ces carnets. Moi, je vous ai apporté ici un exemplaire de

  6   --

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen.

  8   M. MARCUSSEN : [interprétation] Pour que l'on traite la question de la

  9   transcription des enregistrements, tous les documents ont été transcrits et

 10   les documents ont été mis à disposition par le truchement de l'EDS, donc

 11   tout ceci est disponible.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai demandé au greffier de cette Chambre,

 14   avant l'audience d'aujourd'hui, de vous photocopier six pages de texte d'un

 15   hebdomadaire très en vue en Croatie qui s'appelle "Globus." C'est le numéro

 16   1 017 daté du 4 juin 2010. Sur la page de garde, vous pouvez voir le

 17   célèbre général serbe, Ratko Mladic, et il est dit : "Globus enquête, les

 18   carnets de Mladic où une grande supercherie." Les hommes politiques et les

 19   graphologues de Croatie, de Bosnie-Herzégovine, et de Serbie aussi mettent

 20   en doute l'authenticité, comme le disent les Croates, que ces écritures de

 21   ce sanguinaire, parce qu'ils l'appellent ainsi, parce que les seuls Serbes

 22   bons pour les Croates ce sont les Serbes morts ou ceux qui ne font que

 23   ramper comme des vers de terre. Mais l'article abonde en arguments pour ce

 24   qui est des raisons pour lesquelles --

 25   Mme LE JUGE LATTANZI : Un moment, s'il vous plaît.

 26   Vous avez tout le droit de contester l'authenticité des carnets Mladic,

 27   mais, s'il vous plaît, par d'autres documents, d'autres moyens, pendant

 28   qu'on fera l'audience on s'occupera de ces carnets, et pendant votre

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  1   contre-interrogatoire, si ce sera le cas, ou par écrit pour vous opposer à

  2   la requête qu'on va vous traduire, mais pas maintenant sur la base de

  3   journaux qui sont -- en tout cas ont été donnés au Juge Président, aussi à

  4   moi, mais j'ai refusé parce que je ne lis pas le serbe, c'est en serbe.

  5   Donc vous parlez de choses dont on doit croire à vos mots. Donc je

  6   regrette, mais je ne pense pas qu'on puisse perdre du temps pour cela

  7   aujourd'hui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, je ne partage pas --

  9   Attendez, Monsieur Seselj. Je ne partage pas le point de vue de ma

 10   collègue, parce que la Chambre doit se prononcer sur les dix carnets

 11   Mladic, doit-elle les admettre ou les rejeter. Il y a une question

 12   fondamentale, qui est l'authenticité des dix documents. Et sur ce point,

 13   même si moi, je ne connais pas le B/C/S, à partir de documents que vous

 14   nous mettez sous les yeux, je vois que quelqu'un, certainement un expert

 15   graphologue, a analysé l'écriture du carnet et l'a comparée à des

 16   documents. Donc moi qui ai l'habitude des faux et usage de faux, je suis

 17   attentif à ce que je vois sous les yeux. Donc comme nous sommes trois, mais

 18   que nous ne sommes plus que deux et que la voix du Président est

 19   prépondérante lorsqu'on est deux, je vous demande de continuer.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai encore quelque chose à ajouter quand même : que

 21   ces documents ne font pas partie du dossier, donc on ne peut pas regarder

 22   ces documents sans les admettre dans le dossier quand ils seront traduits

 23   si on décidera de les admettre.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors continuez votre démonstration technique.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je veux vous faire savoir c'est qu'il

 26   n'y a aucune raison d'admettre la demande formulée par le Procureur pour ce

 27   qui est du versement au dossier de ces carnets et pour présenter des

 28   témoins improvisés, alors je ne vais pas attendre, Madame Lattanzi, que

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  1   vous décidiez de le verser au dossier, entendre les témoins, ensuite le

  2   contester. Je ne vais pas contester l'opinion --

  3   Mme LE JUGE LATTANZI : -- pas compris. Peut-être qu'on ne m'a pas traduit,

  4   mais je ne crois pas, parce que les traducteurs ils font très bien leur

  5   travail. Peut-être vous ne voulez pas entendre. J'ai dit que vous avez tout

  6   le droit de contester l'authenticité, et quand vous arrivera la requête

  7   traduite, vous nous donnerez oralement ou par écrit tous vos arguments, et

  8   aussi avec des documents qu'on puisse lire, contrôler, lire en anglais, en

  9   français, dans une des deux langues du Tribunal, mais pas en B/C/S. Pour

 10   nous, malheureusement, on ne peut pas. Donc je disais cela, vous avez tout

 11   le droit. Qu'est-ce que vous pensez, que je pense et je prétends que vous

 12   n'ayez pas le droit ? Vous avez pleinement le droit.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame Lattanzi, j'ai déjà obtenu tout ce que

 14   le Procureur avait envisagé de me faire remettre, et j'ai cru comprendre à

 15   partir des écritures de l'Accusation qu'ils n'ont plus rien à me

 16   communiquer, et je suis en train de me prononcer verbalement, et je ne veux

 17   plus vous écriture. J'en ai marre d'écrire pour rien. Je veux me prononcer

 18   verbalement, et j'espère que vous allez avoir la patience de m'entendre. Si

 19   ce n'est pas le cas, on peut se séparer, puis un point c'est tout.

 20   Mme LE JUGE LATTANZI : -- mais je dois aussi avoir les éléments à l'appui

 21   de votre prétention qu'on n'admette pas, de votre demande qu'on n'admette

 22   pas ces documents. Vous devez nous donner les éléments, et ça c'est pas les

 23   éléments dont on pourra tenir compte. Je regrette, on ne peut pas.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, que voulez-vous que je fasse, que je

 25   m'arrête maintenant ?

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : La parole, c'est le Président qui vous la donne.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, moi, ce qui m'intéresse c'est sur

 28   le plan technique, êtes-vous en mesure de nous apporter des éléments nous

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  1   permettant de conclure que les carnets n'émanent pas de la main de M.

  2   Mladic ? Voilà, c'est ça qui m'intéresse. Alors je suis d'autant plus

  3   intéressé --

  4   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Que je suis d'autant plus intéressé que

  6   j'ai appris que le fils de M. Mladic a participé à la réunion que votre

  7   parti politique avait organisée à Belgrade. Alors, vous avez peut-être des

  8   éléments d'information de première main permettant de dire que ce carnet ne

  9   vient pas du papa.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je ne veux pas m'aventurer à en parler.

 11   Moi, je veux vous faire savoir le fait que de façon très sérieuse il y a

 12   des contestations liées à l'authenticité de ces carnets dans l'opinion

 13   publique. Et j'en ai fini avec cela. Donc c'est contesté.

 14   Ce que je n'ai pas terminé c'est ce qui suit : le Procureur demande dans

 15   cette documentation à ce que l'on entende deux témoins à l'improviste.

 16   C'est un ex-collaborateur à Mladic qui, pratiquement, n'a pas été mis en

 17   accusation, il est le seul à ne pas avoir été mis en accusation pour ce qui

 18   est de l'état-major, parce que pratiquement tout son état-major ici est à

 19   La Haye, lui non. Il a déjà témoigné, il a peut-être témoigné

 20   clandestinement ou de façon protégée, et je ne vais pas donner son nom.

 21   Alors, le Procureur veut le faire venir ici pour qu'il reconnaisse ici

 22   l'écriture à Mladic en sa qualité d'expert, parce qu'il aurait été assis à

 23   côté de Mladic pendant qu'il écrivait. On ne peut pas le faire, cela. Mis à

 24   part le fait que c'est quelqu'un que j'ai rencontré deux ou trois fois dans

 25   ma vie, et à chaque fois il était ivre. Alors cet homme ne peut pas

 26   témoigner de l'authenticité des carnets de Mladic. Il peut dire que Mladic

 27   à toute réunion a pris des notes, ça oui. Mais moi, je ne veux pas rentrer

 28   dans le fait de savoir si c'est authentique comme carnet ou pas, pour le

Page 16386

  1   moment. Mais ce que je conteste c'est que le Procureur puisse faire venir

  2   quelqu'un qui aurait été présent à des réunions afin que celui-ci témoigne

  3   et dise reconnaître l'écriture de Mladic. Qui peut reconnaître l'écriture

  4   de Mladic, si ce n'est pas un expert graphologue, qui dira ça c'est un

  5   échantillon authentique de l'écriture à Mladic, ce n'est pas contesté du

  6   tout, et ça ce sont les prétendus carnets, et partant de là je tire telle

  7   conclusion. Donc ce serait là un témoignage qui pourrait être admissible et

  8   non pas un collaborateur ivre de Mladic qui dirait : Oui, c'est certain.

  9   Alors, il pourrait même dire : Oui, sur mon honneur, c'est cela. Mais c'est

 10   ridicule, voyons.

 11   Alors, à quel tribunal peut-on faire cela, ou alors une employée du

 12   greffier ou du bureau du Procureur qui démontrerait, parce que je crois

 13   qu'on pourrait dire son nom, mais il vaut mieux ne pas le mentionner pour

 14   ne pas que vous expurgiez le compte rendu. Alors, elle aurait, depuis

 15   Belgrade, proposé à venir témoigner. Or, je pense que ce n'est pas sérieux,

 16   vous ne pouvez pas accepter cela. Moi, je suis en train de débattre de la

 17   chose sur le point de procédure, aujourd'hui, et j'essaie de vous expliquer

 18   pourquoi il convient de rejeter les requêtes présentées par l'Accusation.

 19   Mais si vous n'acceptez pas ce que je suis en train de dire, et que vous

 20   acceptez la demande faite et formulée par l'Accusation, il se peut que je

 21   ne participe même pas aux débats, aux audiences.

 22   Alors, ici, le Procureur est en train d'avancer plusieurs fragments

 23   issus de ces prétendus carnets à Mladic qui devraient être versés au

 24   dossier dans cette affaire. Et elle dit :

 25   "Une session élargie de la présidence de la RSFY, datée du 1er

 26   février, Ranko Kostic aurait pris la parole pour parler de la protection à

 27   long terme de la population serbe. Et le Procureur dit jusque-là, la ligne

 28   du front s'étire tout le long des territoires ethniques serbes. Et le

Page 16387

  1   Procureur dit que cela confirme qu'il y a modification des objectifs de la

  2   JNA, et que la direction militaire et civile avait parlé des objectifs des

  3   Serbes dans un Etat. Mais c'est complètement imbécile. Il n'y a pas d'autre

  4   terme pour qualifier la chose.

  5   Deuxièmement, la réunion avec Krajisnik, Adzic, et un groupe de

  6   généraux originaires de la Bosnie-Herzégovine, où Karadzic expliquerait les

  7   objectifs stratégiques qui seraient les leurs, et il dirait qu'elles

  8   avaient défini les lignes de démarcation de Bosnie-Herzégovine, suivant les

  9   lignes ethniques, un Etat pour tous les Serbes, une création d'une armée

 10   unifiée pour les Serbes, et cetera. Il s'agit du 6 mai 1992. Mais en quoi

 11   cela me concerne-t-il ? Quel rapport cela a-t-il avec l'espèce, le fait

 12   qu'ils se soient rencontrés quelque part et qu'ils aient discuté, et le

 13   fait que Mladic, éventuellement, ait consigné des notes lors de cette

 14   réunion ? Ensuite, réunion entre Karadzic, Krajisnik et Vucirevic [phon],

 15   lors de laquelle Krajisnik énumère des objectifs stratégiques. Il en est

 16   question aussi, qu'en ai-je à faire ?

 17   Alors, là où je suis cité, c'est lorsqu'on parle de la réunion du

 18   commandement de la 2e Région militaire. C'était le général Kukanjac qui

 19   présidait cette réunion qui s'est tenue le 9 mai 1992, soi-disant. Et lors

 20   de cette réunion, le Procureur affirme qu'un participant aurait reconnu que

 21   le général Momcilo Perisic était en train de détruire Mostar, alors qu'en

 22   réalité, c'est le général Kukanjac qui s'exprime, et soi-disant, Mladic

 23   consigne des notes. Mais Mladic consignerait : Je ne comprends pas comment

 24   Perisic serait en train de détruire Mostar et pour quelle raison. Donc il

 25   exprime ses doutes, comment se fait-il que Perisic soit en train de

 26   détruire Mostar ? Et qui aurait affirmé cela et comment aurait-on appris

 27   cela ? Alors, vous savez, grâce à une autre affaire, que le général

 28   Perisic, à chaque fois qu'il prenait pour cible Mostar, utilisait une

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  1   liaison téléphonique ou une liaison radio pour informer la partie adverse

  2   que tel ou tel objectif serait pris pour cible. Par ailleurs, le général

  3   Perisic n'a même pas été mis en accusation à La Haye pour ces faits-là. Or,

  4   le bureau du Procureur se fonde sur ce que dit le général Kukanjac, donc je

  5   vais m'abstenir d'ajouter la moindre qualification puisqu'il est décédé il

  6   y a trois ans. Mais le Procureur tire la conclusion suivante, à savoir que

  7   quelqu'un aurait reconnu la destruction par Perisic de Mostar. Or ce qu'il

  8   dit là, c'est je ne comprends pas comment il est possible que Perisic soit

  9   en train de détruire Mostar, quelqu'un dit cela, mais comment fait-il, et

 10   ce n'est pas ce qu'il a fait. Il est certain qu'il a pris pour cible

 11   certaines installations, qu'il a détruites, mais il n'a pas dévasté Mostar.

 12   Donc le bureau du Procureur ment.

 13   Et il ajoute encore la chose suivante : on cite le fait que des hommes de

 14   Seselj auraient participé à l'attaque lancée contre Mostar. Voilà ce qui

 15   figure dans les documents que j'ai reçus, qu'on m'a communiqués. Alors,

 16   est-ce que le Procureur peut peut-être m'aider pour m'indiquer où cela

 17   figure. Je n'ai retrouvé ça nulle part, dans aucune page. J'ai de nouveau

 18   examiné, à deux ou trois reprises dans ma cellule le jeu complet de

 19   documents, je ne retrouve cela nulle part. Or nous savons qu'en l'espèce,

 20   il a été répété à plusieurs reprises qu'une unité de volontaires du Parti

 21   radical serbe représentant à peu près l'effectif d'une compagnie, sous le

 22   commandement de Denis Baret, a été à Mostar sous le commandement de

 23   Perisic. C'était une unité d'infanterie qui ne pouvait donc rien détruire,

 24   car elle ne disposait pas de pièces d'artillerie, et d'ailleurs aucun acte

 25   d'accusation n'a été dressé à ce sujet. Et ces événements ne figurent pas

 26   non plus dans l'acte d'accusation dressé contre moi, parce que l'Accusation

 27   a retenu contre moi des événements dans la vallée de Mostar après le

 28   retrait de la JNA, après le départ du général Perisic, et vous avez vu ce

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  1   qu'il en a été de ces chefs d'accusation.

  2   Passons à la suite, point numéro 5, rapport matinal du commandant pour

  3   Nevesinje. On voit que les dirigeants serbes locaux maintenaient des

  4   contacts et assuraient une coordination avec la direction de la Republika

  5   Srpska en Bosnie-Herzégovine. On trouve Vukan Bratic [phon], le président

  6   de la municipalité de Nevesinje, le général Perisic, et d'autres noms. Donc

  7   ça correspond au 11 mai 1992. Mais en quoi ceci peut-il être versé ? C'est

  8   la période du 11 mai, lorsque Perisic est encore au commandement. Il se

  9   retire ensuite le 19 mai. Mais quelle importance cela a-t-il ? Il est

 10   normal que les organes civils et les organes militaires coopèrent entre

 11   eux. Il y a toute une série de questions pour lesquelles ceci est

 12   indispensable. Mais on demande le versement sans le moindre fondement.

 13   Sixième point, la date du 6 juin 1992, consultation concernant la situation

 14   politique et militaire en Bosnie-Herzégovine. On parle ici de la pertinence

 15   de cette note, parce que des consultations se seraient tenues entre les

 16   dirigeants municipaux et les autorités militaires sur le territoire de la

 17   Romanija. On parle du nettoyage de certaines localités, Bratunac,

 18   Srebrenica, Vogosca, et cetera. Mais dans toute une série d'affaires qui se

 19   sont déroulées ici, il s'est avéré que le nettoyage du terrain, cela

 20   signifiait le fait de mettre à l'écart les membres des unités armées

 21   ennemies, et jamais on n'a utilisé dans la terminologie militaire le terme

 22   de nettoyage dans le sens d'un nettoyage ethnique. Le "nettoyage ethnique"

 23   est une formulation de nature politique qui n'est apparue que plus tard, et

 24   qui a été introduite par ceux qui critiquaient la situation telle qu'elle

 25   se présentait sur le terrain. Donc pourquoi ceci devrait-il être versé au

 26   dossier ? Alors, un imbécile a déclaré là-bas qu'à Bratunac, dans la

 27   municipalité de Bratunac, il n'y avait plus de Musulmans et que la ville

 28   était complètement libérée. En quoi cela me concerne-t-il ? Quel rapport

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  1   Bratunac a-t-il avec l'acte d'accusation dressé contre moi ? Et cet

  2   imbécile de Bratunac, qui aurait déclaré ça à une réunion, quel rapport

  3   cela a-t-il ? Qui sait de qui il pouvait s'agir ? Peut-être était-ce

  4   Deronjic. Qui sait ? Ça n'a pas le moindre rapport encore une fois.

  5   Le point numéro 7 maintenant. Le 30 juin 1992, soi-disant, le général Ratko

  6   Mladic aurait consigné des notes lors d'une réunion tenue avec les

  7   représentants de la municipalité de Zvornik. Le Procureur dit, allègue que

  8   ceci viendrait étayer la mise en œuvre d'une entreprise criminelle commune

  9   en Bosnie orientale. Il ressortirait de ces notes que les autorités locales

 10   serbes auraient participé à cela, on énumère : le président du SDS, le

 11   président de la municipalité, la Défense territoriale, le MUP de Serbie,

 12   Pavlovic, les unités militaires, les hommes d'Arkan, les hommes de Seselj,

 13   et cetera. Mais je ne vois pas où il est possible de retrouver quoi que ce

 14   soit des éléments avancés par l'Accusation.

 15   Lors de cette réunion, il est survenu qu'un fonctionnaire municipal de

 16   Zvornik, et non pas un fonctionnaire du MUP de Serbie, qui s'appelait Marko

 17   Pavlovic - en fait, il s'agit de Branko Popovic ou l'inverse, parfois je

 18   perds un peu le fil de tous ces détails - a, en fait, fait des louanges des

 19   hommes de Seselj et d'Arkan pour ce qui était de leur participation au

 20   combat visant à la libération de Zvornik. Alors, qu'y a-t-il ici de

 21   controversé, pour ce qui est de la participation des hommes de Seselj à ces

 22   opérations ? Ils ont participé à cela, et tout le monde leur en a su gré.

 23   Vous avez entendu le colonel Dacic, le commandant de brigade, qui a

 24   félicité les volontaires du Parti radical serbe comme des hommes

 25   disciplinés et compétents. Le lieutenant-colonel Stupar a été à leurs côtés

 26   lorsqu'ils ont libéré des positions-clés en ville. Il n'y a là rien de

 27   controversé. Alors, qu'est-ce que cela a à voir avec une entreprise

 28   criminelle commune ? Quant à tout le reste qui pourrait être considéré

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  1   comme étant des éléments compromettants concerne des événements ultérieurs

  2   survenus aux mois de mai, juin ou juillet. Quel rapport ai-je avec le

  3   moindre de ces événements ? Est-ce que quelqu'un a chassé les Musulmans de

  4   Kozluk ou bien sont-ils partis de leur propre chef ou sous certaines

  5   pressions ou pour d'autres

  6   raisons ? Je ne sais pas, mais ça n'a pas le moindre rapport avec moi. Les

  7   volontaires du Parti radical serbe étaient partis de là-bas depuis

  8   longtemps déjà.

  9   Quant aux unités paramilitaires qui sont évoquées, et elles ont elles aussi

 10   été stigmatisées lors de cette réunion, chacun des participants à cette

 11   réunion parle des unités paramilitaires. Le Procureur dit - voyez la page 4

 12   - je cite : "On parle surtout de Zuco, celui qui était à la tête de l'unité

 13   paramilitaire des Guêpes jaunes." Et effectivement, on le cite. Mais

 14   ensuite, le Procureur ajoute, je cite : "Zuco, que le Parti radical serbe

 15   avait dépêché à Zvornik en provenance de Belgrade." Et jamais au moment de

 16   la réunion ou pendant cette dernière on ne cite cela, et jamais personne

 17   n'établit lors de cette réunion le moindre lien entre l'unité de Zuco et le

 18   Parti radical serbe. Il s'agit d'une falsification pure et simple qui est

 19   le fait du bureau du Procureur.

 20   Point numéro 8. Le 8 novembre 1992, soi-disant, le général Mladic aurait

 21   tenu une réunion avec les commandants de corps d'armées, et le Procureur

 22   dit que cela serait pertinent pour ce qui est du déploiement des

 23   volontaires du Mouvement chetnik-serbe et que cela viendrait confirmer le

 24   rapport d'un témoin expert, du Témoin Theunens. Mais où parle-t-on de

 25   volontaires du Mouvement chetnik-serbe et du Parti radical serbe ? Je ne

 26   vois aucun de leurs noms mentionné sur aucune des pages correspondant au

 27   compte rendu de cette réunion. Personne lors de cette réunion n'a parlé

 28   d'eux.

Page 16392

  1   Alors, voyons si le Procureur peut confirmer quoi que ce soit à cet

  2   égard.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous sommes au point 8. Il en reste cinq. Il

  4   vaudrait peut-être mieux que vous, si vous voulez répliquer, de le faire

  5   après que de couper ses propos. Qu'est-ce que vous vouliez dire ?

  6   M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame le Juge,

  7   j'allais dire que ceci devient une procédure assez bizarre, parce que

  8   l'accusé semble me poser des questions à moi pendant qu'il parle. Je peux

  9   répondre plus tard, je le ferai volontiers, mais je pense que la réponse

 10   sera générale, donc ce n'est pas nécessaire de revenir sur les cinq

 11   derniers points, mais je peux fort bien attendre.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Seselj.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous en sommes maintenant au

 14   point 9.

 15   Le 28 mai 1993, réunion avec la direction de la RSFY de la Yougoslavie et

 16   de la Serbie-et-Monténégro, le Procureur dit qu'il ressortirait de ses

 17   notes que la Serbie et la RSFY auraient continué à soutenir les Serbes de

 18   Bosnie-Herzégovine, et après que la JNA s'est retirée officiellement de la

 19   Bosnie-Herzégovine. Mais il n'y a rien d'anormal ici. Qu'est-ce que le

 20   bureau du Procureur a découvert de nouveau ou d'exceptionnel, ici ? Tous

 21   les Serbes aujourd'hui sont fiers, en dehors d'une poignée de traîtres, du

 22   fait que la Serbie leur soit venue en aide. Et il est affirmé ici qu'il y

 23   aurait des différends qui seraient apparus entre Seselj et d'autres

 24   dirigeants politiques. Mais qu'est-ce qu'on peut, en fait, vérifier de

 25   cela, qu'est-ce qui est visible dans ces notes ? Rien, en fait. On se

 26   contente de citer l'un des participants à cette réunion en répétant les

 27   propos qu'il aurait tenus selon lesquels un Anglais, un Britannique, serait

 28   parvenu à la conclusion que l'objectif du plan Vance-Owen serait, en fait,

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  1   d'empêcher la création d'une Grande-Serbie, rien de plus que ça. Et donc

  2   quelqu'un cite ces propos, et le bureau du Procureur transforme cela en une

  3   thèse selon laquelle quelqu'un aurait indiqué de façon indubitable que la

  4   direction serbe travaillait à la réalisation des objectifs de cette

  5   entreprise criminelle commune alléguée, alors que personne n'a déclaré

  6   ceci. Dobrica Cosic, qui préside cette réunion, en page 178, dit la chose

  7   suivante, je cite, que : "Le plan Vance-Owen représente la stratégie de

  8   l'Occident, et que la conférence de Londres a deux objectifs :

  9   premièrement, empêcher la création d'une Grande-Serbie et l'unification du

 10   peuple serbe; deuxièmement, empêcher la création d'un Etat musulman." C'est

 11   l'estimation faite par Dobrica Cosic pour ce qui est des objectifs des

 12   ennemis occidentaux, mais personne ne parle de la création d'une Grande-

 13   Serbie comme étant un objectif serbe. Il s'agit encore une fois d'une

 14   falsification grossière de la part de l'Accusation, qui ne saurait rester

 15   non sanctionnée. A la fin, Dobrica Cosic dit, et Mladic soi-disant

 16   consigne, je cite : "Seselj peut nous causer des problèmes. Je ne veux pas

 17   suggérer qu'il va conquérir la Serbie." Alors, peut-être que Dobrica Cosic

 18   a effectivement dit que je représentais un problème pour eux, mais qu'est-

 19   ce qu'on peut conclure d'autre de cette déclaration ? La date est celle du

 20   28 mai 1993.

 21   Le Parti radical serbe s'oppose alors énergiquement au plan Vance-Owen et à

 22   toute acceptation de ce dernier, alors s'il est exact que Cosic ait déclaré

 23   ceci, il est probable que j'aie représenté un problème pour eux. Mais Cosic

 24   nuance son propos. Il dit qu'il ne pense pas que je vais, arme au poing,

 25   prendre le contrôle de la Serbie. Mais on peut voir que la police secrète

 26   là-bas m'attribuait toutes sortes de choses, on peut le voir dans le

 27   dossier de police qui me concerne et qui a été publié, mais je ne pense pas

 28   avoir jamais eu l'intention de provoquer le moindre bain de sang en Serbie.

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  1   Et voilà ce qu'avance donc le Procureur à mon encontre.

  2   Ensuite, on a la réunion avec le président Milosevic en date du 8 juillet

  3   1993. Le bureau du Procureur dit, je cite, que : "La note suivante prouve

  4   que les autorités de l'Etat serbe fournissaient un soutien continu aux

  5   autorités serbes de Bosnie-Herzégovine, y compris au MUP." Mais jusqu'au

  6   moment où la République de Serbie a décrété un blocus à l'encontre de la

  7   Bosnie-Herzégovine, elle a apporté son soutien et son aide. Et pourquoi ne

  8   l'aurait-elle pas fait ? Parce que tout l'Occident et la Croatie

  9   apportaient la leur, et nous, nous aurions dû rester les bras croisés et ne

 10   pas venir en aide à nos frères en Bosnie. Qu'est-ce que le Procureur arrive

 11   à prouver en avançant ceci ? Rien d'autre que son propre dilettantisme.

 12   Alors mon médecin m'a interdit de boire de l'eau, malheureusement, donc je

 13   vais devoir ralentir un petit peu.

 14   Point numéro 11. 24 septembre 1993, réunion avec le président Milosevic. Le

 15   Procureur avance que cette note témoignerait d'une rupture des relations

 16   entre Milosevic et Seselj au second semestre 1993. Milosevic qualifierait

 17   Seselj de traître. Mais qu'est-ce qui est ici pertinent au regard de l'acte

 18   d'accusation ? Vous vous rappelez, je n'en doute pas, de la façon dont, à

 19   l'époque, je qualifiais publiquement Milosevic. Lors de ces réunions à huis

 20   clos -et je ne l'apprends qu'a posteriori - la façon dont il s'exprimait à

 21   mon sujet, tenait de tels propos, alors que je ne lui laissais pas le

 22   moindre doute à l'époque, parce que toutes les attaques auxquelles je

 23   pouvais me livrer contre lui, je le faisais publiquement. Donc qu'est-ce

 24   que cela vient étayer du point de vue du Procureur ? La thèse de Milosevic

 25   du 24 septembre 1993 selon laquelle je serais un traître. C'était au moment

 26   où, de façon tout à fait publique, à l'assemblée fédérale, j'ai avancé des

 27   éléments de contexte concernant la tentative de putsch opérée contre les

 28   autorités légitimes des Serbes à Banja Luka. Ensuite, on a assisté à ce

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  1   conflit entre le Parti radical serbe et le Parti socialiste de Serbie qui

  2   s'est prolongé pendant des années. Qu'est-ce qui est pertinent ici ?

  3   Absolument rien.

  4   Point 12. 21 décembre 1993, réunion avec le colonel Gusic concernant la

  5   situation dans la vallée de la Neretva. Quel rapport ceci a-t-il avec moi ?

  6   Qui cite-t-on à ce moment ? Ceci sort du cadre temporel de l'entreprise

  7   criminelle commune alléguée à laquelle j'aurais soi-disant participé. Le

  8   bureau du Procureur a posé la limite temporelle au mois de septembre 1993

  9   avec ce conflit particulièrement intense entre le Parti socialiste de

 10   Serbie et le Parti radical serbe que certains ont voulu présenter comme un

 11   conflit de personnes en Milosevic et moi-même. Alors, qu'est-ce qu'on

 12   arrive à étayer ainsi ? Absolument rien.

 13   13 octobre 1994, ce qui n'a absolument aucun rapport avec moi.

 14   Une réunion avec Nedeljko Bubalo, notes détaillées concernant la situation

 15   en République de Serbie, par endroits on parle de Milosevic et de l'Etat de

 16   Serbie-et-Monténégro. Le bureau du Procureur dit dans cette note, on cite

 17   nommément qu'au deuxième semestre 1993, Bolivar Stanisic, [inaudible], et

 18   le chef de l'administration du MUP serbe ainsi que Milan Spago devaient

 19   assurer l'approvisionnement en armes. Il s'agit d'une preuve claire, parce

 20   que Petkovic était encore mêlé à l'approvisionnement en armes par

 21   l'intermédiaire du MUP de la République de Serbie en 1993. Il est ici

 22   montré que des contacts étaient maintenus entre le Parti radical serbe et

 23   le Mouvement chetnik-serbe et le MUP de Serbie. Seselj devait être informé

 24   de ces contacts et de ces accords.

 25   Mais ici, il n'y a pas la moindre trace du fait que Ljubisa Petkovic ait

 26   participé à un approvisionnement en armes; un approvisionnement, peut-être,

 27   mais un approvisionnement en armes, rien ne le montre. Et Ljubisa Petkovic

 28   a été exclu de façon tout à fait éclatante du Parti radical serbe fin 1993,

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  1   ensuite il s'est lancé dans un certain nombre d'activités, et c'est

  2   possible, mais des activités avec lesquelles le parti n'avait pas le

  3   moindre lien. Si je me rappelle bien, il a été exclu vers fin octobre, nous

  4   sommes entrés ouvertement en conflit avec Milosevic au mois de septembre

  5   1993. Et ici, qu'est-ce que nous avons à l'appui de ce qu'avance

  6   l'Accusation ? Rien.

  7   Voilà, j'ai énuméré ces 13 points de la façon dont le Procureur estime

  8   avoir réussi à trouver des éléments à charge dans les soi-disant carnets de

  9   Mladic. Alors, Madame le Juge, Monsieur le Président, est-ce qu'il ne vous

 10   semble pas que le bureau du Procureur sous-estime quelque peu votre

 11   professionnalisme et votre intelligence en procédant ainsi, ainsi que votre

 12   capacité à mener ce procès à son terme ? Il s'agit ici d'un abus pur et

 13   simple de la procédure. Plutôt que de voir le Procureur et moi-même prendre

 14   des positions en application de l'article 98 bis dès le mois de juillet

 15   afin que vous puissiez prendre une décision, on persiste à perdre du temps.

 16   En l'espèce, on arrivera bientôt à la fin de la huitième année de ma

 17   détention provisoire. Et je vous repose la question que vous avez une fois

 18   rejetée ou peut-être même deux fois, cette thèse qui était la mienne : est-

 19   ce qu'ici, nous assistons au déploiement d'une véritable doctrine de l'abus

 20   de procédure ? Est-ce que nous avons ici une preuve que c'est cette

 21   doctrine que nous voyons se dérouler sous nos yeux ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je vous ai laissé développer les 13

 23   points, mais je vous indique --

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste encore un détail.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors allez-y, puis je vais reprendre la parole.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici nous avons un exemplaire d'un autre

 27   hebdomadaire quotidien en vue, le journal, "Nacional." C'est le numéro 759

 28   du mois de juillet 2010. C'est un supplément. Donc j'ai remis cela à tout

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  1   un chacun. J'ai demandé au greffier de bien vouloir photocopier l'éditorial

  2   de Srecko Jurdana qui, semblerait-il, a eu la possibilité de prendre

  3   connaissance un peu plus en détail du contenu des soi-disant carnets de

  4   Mladic, et cela me sert de preuve m'indiquant que le Procureur ne m'a

  5   absolument pas communiqué quoi que ce soit de ce qui figure dans les

  6   carnets de Mladic qui pourrait être à décharge. Ici, il est question de

  7   rencontrer Jahorina entre les représentants et présidents serbes et

  8   croates, il est question du fait que les Croates auraient ouvertement

  9   demandé un accord concernant un échange de population, à savoir que les

 10   Croates de Vojvodine déménagent en Croatie et que les Serbes de Croatie

 11   déménagent en Vojvodine, et cetera, et tout ceci se serait passé

 12   probablement vers 1993. Or, vous savez quel est le nombre des éléments de

 13   preuve que j'ai présentés indiquant que l'Eglise catholique a participé

 14   directement à cet échange et bien que les autorités croates travaillaient à

 15   cela et que jamais le moindre individu ou la moindre famille croate n'ont

 16   été chassés de Serbie, mais qu'il a toujours été question d'échanges de

 17   propriétés, et nous voyons ici que c'était la politique officielle de la

 18   Croatie que d'aller en ce sens. Or, cette partie des soi-disant carnets de

 19   Mladic, le Procureur ne souhaite pas me les communiquer, et grâce aux

 20   journaux que certains généraux croates veulent bien me fournir ici, je suis

 21   en mesure de suivre également ce qui se dit dans la presse croate,

 22   malheureusement pour le bureau du Procureur, je peux suivre ce qui s'y dit.

 23   Voilà, j'en ai fini pour ce qui est des soi-disant carnets de Mladic. Je

 24   réponds à la requête de l'Accusation en demandant à la Chambre de première

 25   instance de ne pas faire droit à la requête de l'Accusation, parce qu'il

 26   n'y a absolument aucun fondement à ce que ces extraits des soi-disant

 27   carnets de Mladic soient versés au dossier, tout comme il n'y a pas non

 28   plus de fondement à ce que des témoins soient cités à comparaître à

Page 16398

  1   l'improviste, des témoins qui ne savent même pas ce sur quoi ils vont

  2   déposer.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Aujourd'hui, nous sommes le 21 septembre 2010. Selon

  4   la Règle de procédure concernant les carnets Mladic, vous aviez jusqu'au 16

  5   septembre 2010 pour faire valoir vos observations. Nous n'avons rien eu par

  6   écrit.

  7   Alors, vous êtes intervenu tout à l'heure, et je vous ai laissé la parole

  8   alors que ma collègue était plutôt d'un avis à vous couper le micro. J'ai

  9   pris en compte le fait que ça faisait deux mois et demi qu'on ne s'est pas

 10   vu, que vous aviez peut-être des raisons à nous expliquer pourquoi vous

 11   intervenez cinq jours trop tard alors que c'était le 16, date ultime où

 12   vous deviez envoyer vos écritures, et vous ne m'avez rien dit. Alors

 13   comment expliquez-vous que vous avez tardé de cinq jours ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Président, j'ai des

 15   difficultés avec l'écriture en général.

 16   Deuxièmement, c'est vous qui avez soulevé cette question des carnets de

 17   Mladic, et j'ai tiré profit de cela. Peut-être ai-je un peu exagéré.

 18   Troisièmement, la Chambre de première instance a toujours la possibilité de

 19   proroger le délai qui court, vous avez la possibilité de le faire, vous

 20   pouvez également ne pas le faire. C'est entre vos mains. Mais j'ai fait

 21   état de tout ce que j'avais à dire concernant les soi-disant carnets de

 22   Mladic, et la décision vous appartient entièrement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, alors, Monsieur Marcussen, est-ce que vous

 24   voulez répliquer sur les 13 éléments ?

 25   M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vais le faire, Monsieur le Président,

 26   mais j'essayerai de présenter des observations plus générales. Je pense que

 27   je suis en mesure de le faire.

 28   Je voulais simplement relever que l'accusé a commencé à 9 heures 42 et

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  1   qu'il a terminé à 10 heures 25, ce qui veut dire qu'il a consacré plus

  2   d'une demi-heure à la présentation d'arguments à l'audience alors qu'il

  3   aurait dû, à notre avis, les soumettre par écrit et qu'il n'aurait pas

  4   ainsi abusé du temps consacré à cette audience administrative.

  5   Qu'a-t-il dit, au fond, aujourd'hui ? Il a fait un amalgame entre

  6   l'explication fournie par l'Accusation pour montrer en quoi les documents

  7   sont pertinents, amalgame entre cette explication et le contenu des

  8   extraits dont on a demandé le versement, donc il a l'annexe à la requête en

  9   indiquant qu'on ne mentionne pas des documents à verser. C'est vrai en

 10   partie, mais ce qu'il ne comprend pas c'est que nous avons expliqué la

 11   pertinence en plaçant aussi ces documents dans leur contexte.

 12   Et plusieurs fois, il a témoigné à propos d'événements de l'époque.

 13   Il n'est pas autorisé à le faire. Puis il dit des choses qu'on saurait

 14   d'autres affaires. C'est sans aucune pertinence au regard de la requête.

 15   De façon plus générale, l'accusé ne semble pas tenir compte du fait

 16   qu'on a demandé le versement de ces documents, parce qu'ils sont pertinents

 17   eu égard à l'entreprise criminelle commune alléguée dans l'acte

 18   d'accusation, nous l'avons décrit clairement dans la requête. Alors il

 19   qualifie nos arguments d'idiots ou imbéciles, des choses de ce genre, donc

 20   soit il a mal compris ou il devrait plutôt présenter ses arguments par

 21   écrit plutôt que de lancer de telles insultes à l'audience.

 22   Il a parlé du contenu des éléments versés au dossier, mais il les

 23   déforme souvent. Regardez, par exemple, le point 7, Madame le Juge et

 24   Monsieur le Président, s'agissant de l'extrait concernant Zvornik. Il a dit

 25   que c'était sans intérêt, qu'il y avait des choses qu'il contestait, mais

 26   au fond, ce qu'il n'a pas évoqué c'est la note mentionnant ce qu'a dit

 27   Branko Grujic à la réunion, ce qui est le sujet de l'extrait. C'est très

 28   important pour prouver une entreprise criminelle commune en l'espèce et

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  1   aussi pour les faits incriminés; plus précisément Divic et Kozluk et

  2   l'expulsion des non-Serbes qui étaient restés dans la zone après la prise

  3   de ces lieux. Et Grujic dit : Nous avons réussi à mettre en œuvre la

  4   décision de la présidence de coloniser Divic et Kozluk. C'est Karadzic qui

  5   dit qu'il faut expulser les non-Serbes et installer des Serbes dans ces

  6   régions. Alors si ce n'est pas pertinent, Monsieur le Président, je ne sais

  7   plus ce qui est pertinent en l'espèce.

  8   C'est ainsi que je terminerai ma réponse assez brève aux longues

  9   explications fournies par l'accusé.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais être très bref. Je sais que l'heure est

 11   venue de prendre la pause, mais je ne vais pas prendre plus d'une minute.

 12   Mais en quoi cela me regarde-t-il ce qui s'est passé après ? D'abord,

 13   Branko Grujic, il est vivant. Vous pouvez l'entendre, et non pas de façon

 14   superficielle lire une interprétation erronée de ce qu'il a dit. D'abord,

 15   Branko Grujic se plaint ici tout le temps contre Zuco Crni et le capitaine

 16   Dragon, il ne mentionne nulle part le Parti radical serbe et les

 17   volontaires du Parti radical serbe. Et les problèmes pour ce qui est de

 18   Divic, Kozluk et des autres localités ça a commencé fin mai en cours du

 19   mois de juin et juillet, avant qu'il n'y ait intervention de l'unité

 20   spéciale du MUP de la Republika Srpska. Les problèmes sont survenus un mois

 21   après le retrait des volontaires du Parti radical serbe de Zvornik. Les

 22   volontaires se sont retirés le 26 avec les unités de la JNA alors que les

 23   problèmes sont survenus fin mai, à partir du 26 mai ou une date autre. Mais

 24   c'est cela la substance. Le Procureur ne sait pas ce qu'il a écrit.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons -- je pensais que c'était terminé.

 26   Oui, Monsieur Marcussen.

 27   M. MARCUSSEN : [interprétation] Je me sens forcé, après ce qui vient d'être

 28   dit par l'accusé, de rappeler que même s'il avait raison - et il n'a pas

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  1   raison en disant que les volontaires n'ont pas participé à ces événements -

  2   mais même si c'était vrai, ça demeure un élément de preuve pertinent eu

  3   égard à l'entreprise criminelle commune. Je le répète pour que l'accusé

  4   sache très bien quelle est la thèse que nous défendons.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons donc faire la pause de 20 minutes. Nous

  6   reprendrons aux environs de 11 heures moins 10, puis nous irons à midi, il

  7   faudra arrêter à midi pile.

  8   Alors dans 20 minutes.

  9   --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

 10   --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 12   Monsieur Seselj, vous avez la parole, car je crois qu'il reste encore

 13   quelques sujets à évoquer.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crains fort que je ne vais pas avoir le

 15   temps d'englober la totalité des sujets qu'il nous reste.

 16   Ici vous avez abordé le sujet de mon état de santé. Vous vous souviendrez

 17   probablement du fait qu'il y a deux ans et demi j'ai eu des problèmes de

 18   foie. Mon pouls est assez accéléré à présent, je vais donc ralentir mon

 19   débit. Il y a eu dix, voire 15 analyses de sang qui ont montré que cinq

 20   enzymes au niveau du foie se trouvaient être perturbés, les résultats

 21   sortaient des limites du normal. Et j'avais abordé le sujet à plusieurs

 22   reprises. Il n'y a pas eu d'intervention médicale. Certains médecins ont

 23   essayé d'expliquer cela par le fait que j'étais obèse. Mais je ne suis pas

 24   obèse. Et si mon cholestérol est toujours normal et mes triglycérides ont

 25   toujours été dans le cadre de la normalité, je n'ai pas eu de diabète, et

 26   cetera. Donc j'ai compris quelle pouvait être la cause de cet

 27   empoisonnement graduel. J'ai commencé à manger des vivres en conserves et

 28   des denrées sèches, et le foie s'est amélioré. Ça fait un an que je n'ai

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  1   plus aucune difficulté avec le foie. Je ne peux pas être plus concret pour

  2   ce qui est des sources. Je n'ai pas de preuve, les doutes sont dans mon

  3   cerveau, et j'ai réagi, j'ai commencé à manger des vivres en conserves, et

  4   bien que ce soit considéré comme étant très peu sain, les boîtes de

  5   conserve, bien, moi, ça m'a aidé à améliorer la situation au niveau du

  6   foie.

  7   Mais à peine cela a-t-il pris fin que j'ai commencé à avoir des problèmes

  8   avec le cœur, ça fait un an et quelques, tachycardie et arythmie, et ça n'a

  9   fait que croître. Au fur et à mesure, ça a commencé à générer des problèmes

 10   accrus. Les médecins ont modifié les médicaments qu'on m'administrait. J'ai

 11   pris régulièrement ce qu'ils m'avaient préconisé. Et jamais dans mon sang

 12   ils n'ont trouvé de traces d'un produit chimique qu'ils n'auraient pas

 13   prescrit eux-mêmes, mais la situation n'a fait que se détériorer.

 14   Vous avez reçu récemment un faux rapport d'un médecin auxiliaire de la

 15   prison qui ne m'a même pas examiné. Il a présenté la situation de façon

 16   tout à fait fausse.

 17   On en est arrivé vendredi passé à me soumettre à des électrochocs dans

 18   l'hôpital de Bronovo, électrochocs au niveau du cœur, sous narcose. J'ai eu

 19   cinq traitements à l'électrochoc. Ça n'a pas marché, exception faite du

 20   fait que je sois devenu une personnalité choquante. On dit que j'étais déjà

 21   une personnalité choquante, et d'autres disent que je ne le suis devenu que

 22   récemment. Mais ça c'est un aspect que je confie au bureau du Procureur

 23   pour ce qui est d'une clarification. Il va falloir qu'on le refasse demain,

 24   après-demain, je ne sais trop. Mais il y a des indices qui disent qu'on

 25   s'apprête à le faire.

 26   On envisage pour ce qui me concerne la première quinzaine du mois d'octobre

 27   pour ce qui est d'une ablation, l'intervention chirurgicale appelée

 28   ablation. Donc on va passer par l'artère de la jambe pour faire passer

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  1   jusqu'au cœur un laser pour essayer de brûler des nerfs au niveau du cœur.

  2   Ils disent qu'on va peut-être incinérer le centre de l'amour dans le cœur,

  3   et il ne restera que la haine vis-à-vis du Tribunal, de l'OTAN, de l'Union

  4   européenne et, bien entendu, à l'égard de la totalité des traîtres serbes.

  5   Mais on verra bien ce qu'il en sera et je ne sais pas si on connaîtra

  6   l'aboutissement.

  7   Mais qu'y a-t-il ici d'indicatif en particulier ? Par le biais de mon

  8   conseiller juridique, Boris Aleksic, j'ai essayé d'entrer en contact avec

  9   le Dr Zdravko Mijajlovic, qui, l'an passé, a rédigé un rapport d'expert sur

 10   60 pages, l'an passé. Vous l'avez déjà d'ailleurs reçu, ce rapport, et j'ai

 11   été assez satisfait de son travail, parce que c'est quelqu'un de sérieux

 12   qui a abordé la chose de façon sérieuse, et il a présenté la situation

 13   telle qu'elle l'est. Alors, cette fois-ci, le Dr Mihajlovic n'a pas pu

 14   donner son opinion parce que ça lui a été interdit par son commandant, un

 15   certain Miodrag Jevtic, qui se trouverait être un général à la tête de

 16   l'Académie médicale militaire de Belgrade, momentanément, lui, il lui

 17   aurait interdit de donner son opinion. Il a dit que le Tribunal de La Haye

 18   doit d'abord lui envoyer la documentation à lui en sa qualité de directeur

 19   de ce centre. Et j'ai, en passant, appris que ce Miodrag Jevtic était

 20   membre d'une association américaine des chirurgiens en temps de guerre.

 21   Je vois déjà la toile de fond, donc j'interdis à ce que tout document soit

 22   envoyé vers l'académie médicale militaire pour ce qui est de mon état de

 23   santé ou d'engager qui que ce soit en provenance de cette académie médicale

 24   militaire à mon sujet.

 25   Ce qui constitue le plus gros des problèmes à mes yeux, c'est ce que

 26   vous avez dit vous-même, Monsieur le Président, c'est que la question qui

 27   se pose, c'est une interruption du procès. Alors, je m'y oppose de façon

 28   absolue. D'abord, la durée de ce procès a dépassé la mesure du raisonnable

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  1   il y a longtemps déjà. Une détention provisoire de cinq ans a déjà

  2   outrepassé toutes les mesures du raisonnable. Le procès dure trois ans, et

  3   le bureau du Procureur n'a pas encore terminé avec la présentation de ses

  4   éléments à charge. Et si on se penche sur le tout de façon rationnelle, on

  5   aurait pu tout faire en un an et demi. Dans ce procès, il y a constamment

  6   eu des facteurs de ralentissement. On a fait durer les choses pour telle ou

  7   telle autre raison, mais toutes les raisons étaient dénuées de sens. Aucune

  8   des raisons avancées n'a justifié une interruption du procès, et en termes

  9   simples, c'est devenu insoutenable.

 10   Alors, s'agissant de ce procès, il faut bien qu'on en sorte d'une

 11   façon ou d'une autre. Les patrons du Tribunal de La Haye, les Américains et

 12   les Anglais, le savent, la CIA aussi, et le MI-6 aussi. Nous, Serbes, nous

 13   appelons cela la "mi sest", parce que "mi" ça veut dire "nous." Alors,

 14   comment en sortir ? Tout le monde a compris, l'opinion publique juridique

 15   du monde a compris qu'il n'y a aucun élément pour ce qui est de prononcer

 16   une peine en condamnation. Alors, si on ne peut rendre une condamnation, il

 17   faut faire traîner les choses encore un peu et attendre que l'accusé meure,

 18   et éventuellement l'aider et lui donner un coup de pouce. De quelle façon,

 19   je ne sais. Je suis en train de me poser la question, et mes amis et moi ne

 20   pouvons connaître le fond de la façon dont on procède.

 21   L'année passée, on m'a soumis à des examens sur des instruments

 22   bizarres où, de façon artificielle, on a accéléré mon pouls. Après cela,

 23   mon état de santé s'est détérioré. C'est ce que j'ai pu remarquer, pour ma

 24   part. Alors, la tachycardie et l'arythmie ça peut occasionner soit un

 25   infarctus, soit une [inaudible] cérébrale. Qu'est-ce que ça va donner, je

 26   ne sais.

 27   Mais je suis contre l'interruption du procès quelle qu'en soit la

 28   raison. Je voudrais qu'une chose soit consignée au compte rendu de façon

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  1   officielle. Si je meurs, j'interdis toute autopsie. Personne n'a le droit

  2   de le faire pour quelque raison que ce soit.

  3   Alors, j'ai très soif, mais on m'a interdit l'eau, parce que

  4   prétendument il ne faut pas qu'on en prenne avant les électrochocs. Il ne

  5   faut ni manger ni boire quelques heures avant. Alors, c'est ce qui se

  6   rapporte à mon état de santé.

  7   Pour ce qui est maintenant de l'indigence, du paiement des coûts,

  8   vous avez abordé cette question, Monsieur le Président --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- terminer avec votre état de santé. Vous

 10   venez de nous donner une information que la Chambre ignorait totalement, à

 11   savoir que vous allez prochainement subir une intervention chirurgicale ici

 12   même. Attendons donc de manière confiante les résultats de cette

 13   intervention.

 14   La Chambre, comme je l'ai indiqué, attend aussi le rapport de

 15   l'expert, qui a dû intégrer les données nouvelles, à savoir les

 16   électrochocs que l'on vous faits pour réguler les battements du cœur, puis

 17   cette intervention. Je présume qu'il nous rendra un rapport complet. Mais

 18   si la Chambre a des doutes, elle a toujours, comme je l'ai dit tout à

 19   l'heure, la possibilité de demander à un panel d'experts d'autres

 20   expertises, car nous ferons tout pour que vous soyez soigné de la façon la

 21   mieux appropriée à votre état.

 22   Maintenant, vous voulez aborder la --

 23   Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai une question.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 25   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, je voulais seulement savoir si vous

 26   avez donné votre consentement écrit pour les électrochocs et l'intervention

 27   que vous allez avoir en octobre.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vendredi, on m'a emmené parce que c'était

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  1   urgent, m'a-t-on dit. Je ne me suis pas opposé à cela. Et le fait de ne pas

  2   avoir donné une approbation écrite, ça ne veut pas dire que cela s'est fait

  3   contre ma volonté. Je ne savais pas auparavant comment la chose se passait.

  4   C'est comme dans les films, quand vous réanimez quelqu'un. Mais tout se

  5   fait sous narcose, ce qui fait que je n'ai rien senti du tout, mais ça n'a

  6   pas porté de fruits après cinq électrochocs, et je pense que c'est un

  7   maximum autorisé.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, sujet suivant.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le sujet suivant que vous avez entamé c'est

 10   l'indigence ou les frais du procès.

 11   J'ai reçu un courrier du greffier adjoint. Et bien qu'une décision ait été

 12   rendue de façon solennelle, rejetant mes demandes de paiement des frais

 13   occasionnés, j'ai reçu un nouveau courrier disant qu'ils allaient

 14   réexaminer la question, mais le greffier adjoint, Ken Roberts, me demande à

 15   moi de me prononcer, et il dit : J'apprécierais votre opinion sur le degré

 16   de complicité qu'il faudrait attribuer à l'affaire dans la phase préalable

 17   partant des critères énumérés ci-dessous. Et il y a six critères. Vous

 18   savez que toutes les affaires ont été réparties en trois catégories, de par

 19   leur complexité. La plus complexe, c'est la troisième catégorie, et c'est

 20   là qu'on paie le plus les conseils de la Défense. Et une Défense en

 21   troisième catégorie, c'est payé deux fois plus que, par exemple, la

 22   catégorie numéro 1. Et ce courrier aussi prouve le comble d'insolence.

 23   Parce qu'il y a plusieurs années déjà que le greffe a jugé que mon procès

 24   faisait partie de la catégorie 3, et vous avez pu vous rendre compte de sa

 25   complexité indépendamment du fait de réussir pour ma part ou pas. On m'a

 26   reproché des délits qui n'existaient pas à l'époque où cela a été commis,

 27   par exemple, le délit au pénal du discours de la haine. Donc il y a une

 28   catégorisation de mise en place. D'autre part, ils ont mis une troisième

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  1   catégorie pour payer le premier des avocats en stand-by, Aleksandar

  2   Lazarevic; puis Van Den Spoel, le deuxième des conseils; puis l'avocat

  3   qu'on m'a imposé, David Hooper et sa petite amie, O'Shea. Donc ils ont tous

  4   été payés en catégorie 3. Et maintenant, le greffier adjoint me demande

  5   quelle est mon opinion pour ce qui est de la catégorie qu'il faudrait

  6   m'attribuer. Qu'ai-je fait ? Rien. Je ne veux pas répondre à des questions

  7   aussi stupides. Et dernièrement, je réponds de moins en moins au courrier

  8   d'une teneur similaire, d'où qu'il vienne.

  9   Mais je dois dire une fois de plus une chose : on doit me communiquer des

 10   renseignements, quel est le montant versé à tous ces conseils pour ma part,

 11   pendant la période où ils ont été engagés. Sans cela, je ne veux pas

 12   discuter du paiement éventuel de ma Défense. Deuxièmement, il faut qu'on

 13   nous communique la totalité des renseignements pour ce qui est du coût payé

 14   par le Tribunal de La Haye à la Défense, dans chacune des affaires, depuis

 15   le début des activités de ce Tribunal. Et ici, à la va-vite, ils ont bâclé

 16   la chose pour ce qui est de M. Karadzic et M. Tolimir, alors ils leur

 17   paient quelque chose de misérable, à la petite cuillère. Non, ça ne passera

 18   pas chez moi.

 19   Et troisièmement, il faut qu'on paie rétroactivement la totalité depuis la

 20   première journée de mon arrivée au Tribunal, et pas à partir d'aujourd'hui,

 21   pour la Défense. Lorsque les Juges de la Chambre ont décidé de payer ma

 22   Défense, en 2007, le greffier a compris qu'il fallait, à partir de ce

 23   moment-là, commencer à payer. Et on a demandé à l'un de mes conseillers

 24   juridiques quel était son numéro de compte. Moi, j'ai mis un terme à cette

 25   démarche de façon immédiate. Il faut qu'on définisse un budget de la

 26   Défense. Il faut que ce budget soit comparé avec le budget du Procureur

 27   pour voir combien le Procureur a engagé d'individus dans mon procès,

 28   combien dans cette affaire il y a eu de frais d'engagés. Ensuite, partant

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  1   de ces comparaisons, tirer des conclusions. Bien sûr, étant donné que je me

  2   défends moi-même, alors il faudra, bien sûr, déduire le montant pour le

  3   conseil principal, mais le reste du montant doit être versé aux membres de

  4   l'équipe de ma Défense. S'il y a 40 000 euros de payés d'une Défense de

  5   troisième catégorie pendant la durée du procès, alors pour ce qui est du

  6   salaire éventuel d'un avocat, il faut compter 20 000, étant donné que je

  7   suis mon avocat, il ne faut pas ces 20 000, mais les 20 000 restants, j'en

  8   ai besoin pour mes conseils afin qu'ils soient payés. Et chacun d'entre eux

  9   a des preuves disant qu'ils ont été engagés dans cette étendue-là. Il y a

 10   des écritures, il y a des déclarations préliminaires de faites, des

 11   déclarations tout court, il y a des données pour ce qui est de ce qui m'a

 12   été servi comme renseignements pour mes contre-interrogatoires. Donc tout

 13   ceci est étayé par un travail concret. Il n'y a pas possibilité de payer

 14   quelqu'un alors qu'il n'a rien fait. Pour ce qui est maintenant des 50 %

 15   qui sont dus au fait que je me sois défendu moi-même, mais les 50 %

 16   restants doivent être attribués à ma Défense, ou il n'y aura pas de

 17   présentation d'éléments à décharge par les soins de la Défense.

 18   Ensuite, j'ai préparé quelques autres questions que je voudrais parcourir

 19   rapidement pour vous dire que je me prononce à leur sujet.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder les autres questions concernant la

 21   Défense, bon, comme vous le savez, la Chambre va rendre une décision, mais

 22   de manière incidente, comme je lis tous vos écrits afin que rien ne

 23   m'échappe, comme vous vous en doutez, j'ai eu la surprise de constater sur

 24   des écritures concernant une procédure de récusation que je n'évoque pas,

 25   mais j'ai vu que dans la liste de votre équipe, vous aviez rayé Mme Raguz.

 26   Y a-t-il une raison ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, elle a cessé

 28   d'intervenir dans l'équipe de ma Défense de sa propre initiative depuis le

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  1   mois de mai. C'est de son propre gré qu'elle l'a décidé. Je ne sais pas

  2   quels ont été ses motifs. Elle ne s'est jamais adressée à moi pour m'en

  3   avancer les raisons. Depuis le mois de mai, elle n'intervient plus dans

  4   l'équipe de ma Défense. Depuis là, je n'ai plus eu de contacts du tout avec

  5   elle.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas de commis à l'affaire dans

  8   l'affaire.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous anticipez sur la question que j'allais vous

 10   poser. C'était de savoir si vous l'aviez remplacée, et vous me dites non,

 11   vous n'avez pas actuellement de "case manager."

 12   Bon, très bien. On en prend acte. Continuez.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je vais probablement la remplacer

 14   bientôt. Je vais probablement nommer une commis à l'affaire ou un commis à

 15   l'affaire dans l'affaire d'outrage, par exemple, Nemanja Sarovic, pour être

 16   mon conseiller, et dans l'affaire au principal. Mais j'ai des problèmes

 17   avec le greffier, là aussi, parce que quand j'ai dit que mon conseiller et

 18   mon commis à l'affaire dans l'affaire d'outrage, j'ai demandé à ce qu'il me

 19   rende visite, le greffier a interdit un contact privilégié avec Nemanja

 20   Sarovic et Dejan Mirovic [phon], qui est un maître ès droit, a refusé de

 21   façon démonstrative de venir lui aussi. Et à ce moment-là, je n'ai pu

 22   rencontrer qu'un conseiller juridique, M. Boris Aleksic. Et là donc il y a

 23   un problème en suspens pour ce qui est du conseiller juridique. Zoran

 24   Krasic est le chef de l'équipe aidant à ma Défense, parce que vous avez

 25   rendu une décision disant qu'il ne pouvait pas participer aux sessions où

 26   il y a débat à huis clos partiel, et ça, je ne veux pas être d'accord, je

 27   ne serai jamais d'accord. Zoran Krasic doit être mis sur un pied d'égalité

 28   pour ce qui est des conseillers juridiques, et il doit être entre des

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  1   égaux, et ils doivent pouvoir bénéficier de la possibilité d'avoir des

  2   contacts privilégiés avec moi. Du reste, il est au courant de tout ce qu'il

  3   y a de confidentiel dans ce procès. Il n'y a rien de confidentiel qui ne

  4   lui aurait pas déjà été communiqué. Très probablement, vais-je donc prendre

  5   les conseillers juridiques dans l'une et l'autre des affaires, ce qui fait

  6   qu'au principal, les conseillers juridiques seront Zoran Krasic, Boris

  7   Aleksic et Dejan Mirovic, et le commis à l'affaire sera Nemanja Sarovic

  8   probablement. Je vous en tiendrai au courant dans les journées qui

  9   viennent, j'attends de terminer mes consultations avec les intéressés.

 10   Voulez-vous que je poursuive avec les autres questions ?

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais me prononcer pour ce qui est de la

 13   requête qui a été qualifiée de confidentielle, datée du 20 juillet, par

 14   laquelle le Procureur demande à ce qu'on élargisse sa requête antérieure

 15   pour ce qui est de la liste des témoins. Je ne vais pas mentionner la

 16   teneur de la requête, je ne veux pas mentionner de noms du tout, mais je

 17   dirais ici que le Procureur réclame ici qu'on entende des employés du

 18   bureau du Procureur, et il demande aux Juges de la Chambre des

 19   éclaircissements pour ce qui est des positions issues d'une décision rendue

 20   précédemment.

 21   Alors, moi, je m'oppose à cette requête, parce que j'estime qu'il n'y a

 22   aucune raison de voir le Procureur présenter désormais devant les Juges de

 23   la Chambre des employés de ce bureau du Procureur pour confirmer la

 24   véracité ou la prétendue véracité des déclarations de témoins qui ont

 25   contesté ce que le bureau du Procureur avait avancé comme étant venu de sa

 26   part. Le bureau peut le faire dans une procédure d'outrage au Tribunal, si

 27   procédure d'outrage il y a, parce que je pense qu'il devrait y en avoir

 28   une, étant donné qu'il y a tant d'éléments de preuve qui sont accumulés.

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  1   Il y a une autre des écritures du 11 août, mais qui m'a été communiquée le

  2   18, qui demande à ce qu'on accepte les déclarations de Milan Babic en

  3   application du 92 quater. Alors, moi, je répète, une fois de plus, que je

  4   m'y oppose parce que Milan Babic s'est suicidé, parce que de la part du

  5   bureau du Procureur de ce Tribunal, il a été amené dans une situation sans

  6   issue, et non pas parce que son témoignage et ses propos véridiques ou non

  7   aient découlé de ce que le bureau du Procureur avait prouvé. Il a un jour

  8   terminé son témoignage, il était censé revenir le lendemain pour continuer,

  9   et dans la nuit entre les deux journées, il s'est pendu. Et nous avons des

 10   déclarations de son épouse disant que la famille avait été maltraitée suite

 11   à des promesses qui disaient qu'on les mettrait à l'étranger, qu'ils

 12   seraient sécurisés, et cetera, et cetera.

 13   Ici, le 8 septembre -- donc je me prononce dans les délais impartis, on m'a

 14   communiqué un document de l'Accusation du 26 mars 2010. Alors ici, le

 15   bureau du Procureur explique quelles sont les raisons d'audition à huis

 16   clos. Et là, il y a de la rhétorique dénuée de sens, c'est du vide. Quand

 17   vous vous penchez sur les éléments de preuve, vous verrez que dans bon

 18   nombre de cas, il y a des articles de presse qui ont été pondus à des

 19   occasions différentes, il y a des extraits de livres à moi, d'interviews

 20   que j'ai accordées, et ainsi de suite. Alors, bien qu'on ait fait la chose

 21   dans certaines affaires, je ne pense pas que ces documents puissent être

 22   versés de la sorte au dossier. On ne peut pas piétiner le principe de la

 23   présentation verbale des éléments de preuve. Tout élément de preuve versé

 24   au dossier doit, dans le prétoire même, être entendu, il faut que

 25   l'intitulé soit présenté ici. Le bureau du Procureur demande la chose, je

 26   m'y oppose ou je suis d'accord, pour tout document. Même s'il y a un

 27   million de documents, il faut qu'un million de fois on en donne lecture, on

 28   donne la lecture de l'intitulé du document, mais de la sorte, non, on ne

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  1   peut pas le faire. On peut le faire dans des affaires dans le civil, anglo-

  2   saxon ou continental, peu importe, mais dans une procédure pénale, nulle

  3   part dans un monde civilisé, on ne peut procéder au versement de documents

  4   au dossier de la sorte, et encore moins parce que la quantité est énorme.

  5   L'Accusation a objecté à l'acceptation des décisions des juridictions

  6   nationales, mais je m'oppose à ceci, parce que la Chambre a la possibilité

  7   de consulter les décisions d'autres tribunaux, et ce n'est pas seulement le

  8   cas devant ce Tribunal d'ailleurs, et il est toujours possible d'y

  9   objecter.

 10   L'Accusation a demandé qu'on interroge ses propres employés, qu'on enquête.

 11   Puisque c'est encore une fois confidentiel, je ne vais pas donner lecture

 12   du titre de ce document qui m'a été communiqué le 8 juillet, et évidemment,

 13   je m'y oppose; le document confidentiel du 28 juin à présent, où on demande

 14   que le témoin 026 fasse l'objet de versements a posteriori d'un certain

 15   nombre de documents, je m'oppose également à cela. Madame le Juge, Monsieur

 16   le Président, vous êtes certainement au courant que j'ai communiqué au

 17   Président du Tribunal une nouvelle plainte au pénal comprenant une

 18   déclaration du Témoin 026 que je vous ai également communiquée, déclaration

 19   qui a été traduite en anglais. Qu'est-ce que cela permet de voir ?

 20   Premièrement, le Témoin 026 se trouve véritablement dans un état de santé

 21   assez mauvais, mais pas suffisamment mauvais pour l'empêcher de déposer. Il

 22   aurait pu déposer. Le problème, c'est qu'on a essayé de procéder à une

 23   intervention qui l'a empêché. Il y a quelques jours, il a subi une nouvelle

 24   intervention, nous avons pris contact avec lui. Et très récemment donc la

 25   Chambre a renoncé à le citer à comparaître, mais nous avons reçu une

 26   nouvelle déclaration de sa part que nous avons incluse dans le cadre de

 27   cette demande d'ouverture d'une procédure pour outrage que nous avons

 28   communiquée à tous. Donc il était à notre disposition, et il nous a

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  1   informés qu'il avait même demandé par écrit à être entendu.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, une question, s'il vous plaît.

  3   Donc vous êtes en contact avec ce témoin, et donc vous pensez qu'il est

  4   maintenant, après cette autre intervention, il est quand même à même de

  5   témoigner ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est la position qu'il a prise. Je n'ai

  7   pas été personnellement en contact avec lui, ce sont mes conseillers

  8   juridiques qui ont longuement discuté avec lui.

  9   Et d'ailleurs, ses nouvelles déclarations résultent également de ces

 10   entretiens. Il insiste même pour déposer. Il indique avoir donné de fausses

 11   déclarations dans une autre affaire antérieure. Il cite tous les cas de

 12   fausses dépositions dont il s'agit. Je ne vais pas citer le nom de

 13   l'affaire, parce que le Procureur va bondir. Vous savez de quoi il s'agit.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Je vous remercie.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous abordez le cas de VS-026, et

 16   je vous en remercie. C'est effectivement un cas pendant actuellement. Pour

 17   mémoire, je rappelle que la Chambre a décidé d'en faire un témoin de la

 18   Chambre.

 19   Deuxièmement, il s'est avéré qu'il y avait donc des problèmes d'ordres

 20   médicaux. La Chambre a commis un expert qui a conclu de manière catégorique

 21   que son état de santé ne lui permettait pas de témoigner.

 22   Ultérieurement, nous avons eu effectivement, comme vous venez de le dire,

 23   un courrier de sa part disant qu'il voulait témoigner. A-t-il par miracle

 24   recouvré une santé flamboyante, peut-être. Les médecins font des miracles.

 25   Mais on n'a pas fourni par un document quelconque un nouveau certificat

 26   disant qu'il était apte à témoigner.

 27   Mais en plus, vous venez de rajouter un autre élément, à savoir qu'il

 28   a eu une intervention récente, ce que j'ignorais. Alors, moi, j'attends de

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  1   voir les documents médicaux, mais que ça soit clair, il n'est pas question

  2   pour moi, une seconde, de faire courir un risque quelconque à un témoin, un

  3   risque de santé majeur. Si un expert me dit : il ne peut pas, pour moi, il

  4   ne peut pas.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, hier, le médecin

  6   de la prison, Dr Falke, est venu me voir et a insisté pour qu'aujourd'hui

  7   je ne vienne pas dans le prétoire. Il est venu me voir après les heures de

  8   travail au Tribunal hier, et moi, malgré son conseil, je suis venu. Donc

  9   les médecins peuvent faire preuve davantage de prudence que les

 10   circonstances ne l'exigent, mais ce témoin aurait pu déposer par

 11   vidéoconférence. Nous avons eu des cas dans lesquels des témoins ont été

 12   entendus par vidéoconférence, qui ont déclaré avoir une phobie de vol par

 13   avion, alors qu'on savait pertinemment qu'ils avaient fait des voyages

 14   intercontinentaux. Donc ici, nous avions un témoin qui aurait pu déposer

 15   par vidéoconférence, et j'aurais accepté, bien que précédemment je me sois

 16   toujours opposé aux dépositions par vidéoconférence parce que j'estimais

 17   qu'il s'agissait d'un abus. Mais dans les circonstances telles que celle-

 18   là, où on doit s'adapter de cette façon-là, j'aurais accepté. Il aurait pu

 19   avoir un médecin assis à ses côtés qui aurait été à même d'interrompre sa

 20   déposition à tout moment si son état venait à se détériorer.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Deux choses.

 22   Premièrement, vous nous dites qu'hier le médecin de la prison vous a dit

 23   qu'il ne fallait pas venir. Je constate -, et je tiens que ça soit au

 24   transcript - première nouvelle. Le médecin aurait très bien pu nous envoyer

 25   un mail en nous disant : Attention. Rien, rien du tout. Je suis un peu

 26   étonné.

 27   Ceci étant dit, concernant la vidéoconférence, nous avions soumis la

 28   question à l'expert à l'époque, il était en possession de tous les

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  1   éléments. On lui a donné tous les éléments d'information, et la conclusion

  2   était catégorique. Alors, sauf miracle --

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, j'ignore qui est cet expert. Mais le

  4   médecin hier m'a suggéré de ne pas venir, estimant que d'être dans le

  5   prétoire me causait trop de stress, et je lui ai expliqué pendant une

  6   dizaine ou quinzaine de minutes que je me sentais très bien dans le

  7   prétoire. Il est vrai que parfois Mme Lattanzi hausse quelque peu le ton en

  8   s'adressant à moi, mais personne ne crée de stress dont je souffrirais. Le

  9   stress est dû à certaines conditions de détention, à la longue durée de

 10   cette même détention, qui sait quels sont tous les facteurs en jeu. S'il

 11   n'y a pas de causes organiques à la détérioration de mon système

 12   cardiovasculaire, comme pourrait l'être la présence de triglycérides, de

 13   cholestérol, ou d'un taux de sucre important, on procède à d'autres

 14   recherches. On utilise peut-être des électrochocs, mais en tout cas, je

 15   n'ai pas fait l'objet d'un diagnostic précis. Je ne renoncerais pour rien

 16   au monde à ma place dans ce prétoire. Véritablement, cela n'est pas la

 17   cause d'un stress important pour moi. Peut-être parfois je vous donne

 18   l'impression d'être très énervé, mais je vous prie de bien vouloir croire

 19   que ce n'est pas le stress qui est à l'origine de cela. Parfois je dois

 20   prendre une position un peu plus ferme pour défendre mes droits, ou je dois

 21   peut-être parfois m'opposer au comportement inadmissible de certains

 22   avocats qui accompagnent ici leurs clients et qui ont un comportement

 23   inadmissible. Mais ce n'est pas le prétoire qui est à l'origine de cela.

 24   Quelles sont les causes possibles, je l'ignore, il faudrait le déterminer.

 25   Mais ce n'est certainement pas le prétoire, et c'est la raison pour

 26   laquelle j'ai insisté pour venir aujourd'hui. Le Dr Falke a cédé face à mes

 27   arguments. Vous pouvez vérifier auprès de lui, j'imagine qu'il vous

 28   confirmera ce que je viens de dire.

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  1   Alors, juste encore deux ou trois choses que je souhaite pouvoir présenter.

  2   Il n'en reste pas beaucoup. En fait, il y a encore une seule question que

  3   je souhaite soulever.

  4   Madame le Juge, Monsieur le Président, le 14 septembre, j'ai reçu une

  5   lettre de la part de M. Marcussen, qui représente le bureau du Procureur.

  6   Il dit me communiquer les déclarations de cinq témoins conformément à la

  7   décision du 4 juillet 2006 de la Chambre concernant les modes de

  8   communication. Alors puisque votre nom, me dit le Procureur, est cité dans

  9   cette déclaration, et que la Chambre a décidé, dans sa décision portant sur

 10   la deuxième requête de l'Accusation, donc décision du 27 août 2010

 11   concernant la non-communication des noms et autres informations

 12   susceptibles d'identifier certains témoins, a autorisé le bureau du

 13   Procureur à communiquer des versions  expurgées des éléments

 14   d'identification personnelle. Mais je souhaite vous présenter ici à quel

 15   degré ceci a été expurgé, pour vous poser la question de savoir ce que je

 16   peux faire. Quelle utilité puis-je avoir d'un document qui a été expurgé à

 17   ce point ? Qui peut avoir la moindre utilité d'un tel document ? Voyez par

 18   vous-même. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de rendre ceci à

 19   l'Accusation ici, dans ce prétoire. Si parmi les huissiers quelqu'un peut

 20   avoir l'amabilité de prendre cette liasse et de la remettre à M. Marcussen

 21   pour que lui-même s'en serve, parce que moi, je ne m'en servirai pas.

 22   Je pense avoir présenté tout ce que j'avais préparé pour aujourd'hui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 24   Monsieur Marcussen, est-ce que l'Accusation a également, comme l'accusé,

 25   des points à faire valoir ? Je vous laisse la parole.

 26   M. MARCUSSEN : [interprétation] Simplement quelques questions, Monsieur le

 27   Président.

 28   Je commencerai peut-être par le dernier point évoqué par l'accusé. Les

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  1   déclarations ont été communiquées sous forme expurgée sur ordonnance de la

  2   Chambre. Si l'accusé n'en veut pas, peut-être peut-il me les restituer,

  3   avec l'aide de l'huissier, de cette façon le document ne traînera pas dans

  4   le prétoire. Je pense que l'accusé ne veut pas de ces déclarations, parce

  5   qu'elles sont tout à fait sans intérêt pour cette affaire. Il y a bien son

  6   nom qui est mentionné, mais c'est tout. Donc je viens de les recevoir,

  7   c'est très bien.

  8   S'agissant du Témoin VS-26, l'accusé va bientôt recevoir la traduction

  9   d'une requête, mais il semblerait qu'il y a un accord entre les deux

 10   parties quant à savoir ce qu'on peut faire de ce témoin. Je voulais

 11   simplement le dire à l'accusé. Il va peut-être vouloir voir s'il y a un

 12   accord, il pourra répondre par écrit pour avoir sous peu une décision de

 13   votre part.

 14   Et une dernière chose, c'était simplement une précision que je cherchais,

 15   c'est quelque chose qui a été dit à la page 8 du compte rendu

 16   d'aujourd'hui, en début d'audience. J'aurais voulu une précision pour

 17   savoir quelle serait la procédure que vous, Monsieur le Président, vous

 18   penseriez nécessaire pour vous disqualifier, pour vous récuser. Peut-être

 19   que le compte rendu n'est pas clair, mais nous ne comprenons pas tout à

 20   fait. Est-ce que cette question se pose en l'espèce, ici, dans ce procès,

 21   ou bien par rapport à la procédure d'outrage éventuelle qu'il y aura.

 22   Merci.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois intervenir, Monsieur le Président,

 24   avant que vous ne répondiez, de la même façon que le Procureur me coupe

 25   souvent.

 26   Moi, j'ai tout de suite compris. Vous annoncez une éventuelle récusation de

 27   vous-même dans l'affaire en outrage à l'encontre du Procureur et des

 28   enquêteurs du bureau du Procureur, si jamais on en vient à déterminer

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  1   qu'une telle affaire doit être diligentée. Donc j'ai immédiatement compris

  2   alors que le Procureur, lui, n'a pas compris, ce qui vous permet d'avoir

  3   une idée immédiate de la différence de niveaux intellectuels qui creuse un

  4   fossé infranchissable entre nous.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, vous ne devez pas dire cela. Quand

  6   même, il y a aussi un problème peut-être de traduction parce que c'est deux

  7   langues différentes, mais en tout cas, vous ne pouvez pas faire ces

  8   appréciations ici.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Marcussen, j'étais clair. Si je

 10   m'étais récusé pour l'affaire, je n'aurais pas le plaisir d'être ici

 11   aujourd'hui et de vous voir, car je ne serais plus dans l'affaire quelle

 12   que soit la position du Président du Tribunal [inaudible]. Un Juge qui se

 13   récuse n'a aucune marge de manœuvre. En revanche, comme je l'ai indiqué,

 14   c'est au transcript et M. Seselj l'a bien compris, lui, je me suis récusé

 15   de la procédure pour outrage à la Cour en expliquant les raisons. J'ai

 16   indiqué que j'attendais le rapport de l'ami de la Cour, dans le cas où il y

 17   aurait des éléments permettant l'édiction d'un acte d'accusation. A ce

 18   moment-là, j'adresserai mon courrier au Président pour me récuser de la

 19   procédure pour outrage.

 20   Mais soyons clairs, Monsieur Marcussen. Comme l'a dit l'accusé, il y a un

 21   mauvais génie qui plane, qui retarde sans arrêt cette affaire. On en voit

 22   les conséquences; une détention provisoire de près de huit ans, un état de

 23   santé de l'accusé qui se dégrade au fil du temps. Il peut arriver à un

 24   moment donné que je décide de ne plus participer à ce type de procédure,

 25   car comme le fait le Statut, j'ai l'obligation morale, et vous aussi, vous

 26   avez l'obligation morale. Il faut que le procès soit rapide. C'est ce que

 27   nous dit le Statut. C'est une règle, c'est une contrainte. Il n'y a aucune

 28   raison de retarder le cours de la justice. Mais si un mauvais génie plane

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  1   en retardant le cours, un juge conscient doit se poser la question. Donc

  2   pour le moment, je garde le cap, j'attends sereinement le rapport de cet

  3   ami de la Cour, encore faut-il qu'il soit désigné. Ça fait plusieurs mois

  4   que nous attendons, et nous n'avons toujours rien. Ça peut paraître

  5   incroyable à l'extérieur, mais voilà la situation. Bien sûr, il est

  6   difficile de trouver un ami de la Cour qui a un profil de compétence

  7   d'enquête, de droit international, d'accusation, de droits de la défense,

  8   bien sûr, mais parmi les dizaines de milliers, voire centaines de milliers

  9   de juristes dans le monde, il y en a peut-être un. J'avais à un moment

 10   donné, je peux vous le dire, pensé à un juge qui n'a pas de travail

 11   actuellement, le Juge Garzon. Pourquoi pas ? Car cet ami de la Cour, en

 12   plus, ou d'autre, doit être totalement disponible. Il ne s'agit pas de

 13   faire une enquête à la petite semaine là. Il faut une disponibilité totale.

 14   Ce qui fait que peut-être certains qui ont pu être démarchés ont pu dire :

 15   Non, moi, je ne peux pas, parce que j'ai un autre travail. Donc vous voyez,

 16   c'est très complexe. Mais parmi les milliers de juristes éminents qui

 17   existent dans le monde, on peut peut-être en trouver un.

 18   Pour tout vous dire, Monsieur Marcussen, au début, quand il y a eu cette

 19   plainte, ce que je voulais faire moi-même, c'était de faire moi-même

 20   l'instruction de la plainte. La Chambre III l'a décidé autrement, je me

 21   suis conformé à la décision de la Chambre III. Mais je pense que si j'avais

 22   fait les investigations qui s'imposaient, il y a longtemps que ça aurait

 23   été terminé. Voilà ce que je voulais dire. Donc pour me résumer, il n'y a

 24   pas d'ambiguïté.

 25   La procédure d'outrage en cours et la récusation ne concernent que la

 26   procédure à l'outrage, comme d'ailleurs, je m'étais récusé pour toutes les

 27   autres procédures d'outrage déposées par l'Accusation à l'égard de

 28   l'accusé, et j'avais expliqué pourquoi. Voilà, j'espère que vous avez bien

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  1   compris.

  2   M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que je peux obtenir une précision,

  3   si vous me le permettez.

  4   Je crois que compte tenu de ce qui a été dit, je voudrais demander

  5   aux Juges de la Chambre s'ils pensent que l'Accusation a retardé le cours

  6   de ce procès dans cette affaire.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas dit cela. Je dis simplement que M.

  8   Seselj est ici depuis plusieurs années. Voilà. Chacun en tirera les

  9   conclusions qu'il voudra.

 10   Avez-vous d'autres sujets, Monsieur Marcussen ?

 11   M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il est quasiment midi, et il faut

 13   que vous partiez, je le sais. Il est très difficile de vous dire quand on

 14   va se revoir. La Chambre doit prendre plusieurs décisions, notamment le

 15   carnet Mladic, comme vous le savez, la décision concernant la requête dite

 16   Bar Table en admission d'éléments de preuve. Il faudra qu'elle tranche

 17   également la question de VS-026. Mais il se peut que tout ceci ait été

 18   rendu [inaudible], mais encore quelques espoirs d'avoir une audience 98

 19   bis. Je ne me désespère pas.

 20   J'attends également avec sérénité que chacun prenne conscience des

 21   problèmes qui se posent au fil du temps et qui ne peuvent que s'accroître.

 22   Par ailleurs, la Chambre, pour débloquer la situation de rendre cette

 23   décision concernant le financement de votre Défense - et je crois que là il

 24   y a quelques avancées positives [inaudible] la lettre que vous a envoyée le

 25   greffier Cette lettre, il faudra l'examiner à l'aune de la décision que

 26   nous allons rendre. Donc la situation est grave, mais pas désespérée. Il y

 27   a une possibilité que dans quelque temps on entame les audiences 98 bis. Et

 28   pour cela, la Chambre fait le maximum, et vous pouvez en être convaincu.

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  1   Donc vous serez informé de la prochaine audience, en fonction des décisions

  2   à rendre. Bien entendu, au nom de mes collègues, je vous souhaite un prompt

  3   rétablissement.

  4   L'audience est levée.

  5   --- L'audience administrative est levée à 11 heures 48.

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