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1 Le mardi 8 mars 2011
2 [Audience de la Règle 98 bis]
3 [Audience publique]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 32.
5 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Bonjour, Madame, Messieurs les
9 Juges.
10 Affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj. Merci,
11 Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
13 En ce mardi, 8 mars 2011, je salue toutes les personnes présentes, et
14 particulièrement les membres du bureau du Procureur, M. Marcussen, Mme
15 Biersay, ainsi que leur assistante. Je salue également M. Seselj ainsi que
16 toutes les personnes qui nous assistent.
17 Aujourd'hui, nous allons entendre M. le Procureur, qui va donc nous faire
18 part de son point de vue concernant la procédure de l'article 98 bis après
19 l'intervention de M. Seselj hier.
20 Monsieur Marcussen, je vous donne la parole.
21 [Soumissions de l'Accusation]
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Madame et Messieurs les Juges.
23 Madame et Messieurs les Juges, la Chambre de première instance devrait
24 rejeter la requête présentée par l'accusé en vertu de l'article 98 bis du
25 Règlement.
26 Une audience consacrée à cet article est supposée être à propos d'éléments
27 de preuve versés au dossier s'agissant de savoir s'il y a des éléments qui,
28 suivant le critère le plus exigeant, permettraient d'entraîner une
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1 condamnation, et il y a des éléments de preuve qui permettraient à la
2 Chambre de conclure à une condamnation. Ces éléments montrent que l'accusé
3 et d'autres dirigeants serbes, alors que la Croatie et la Bosnie-
4 Herzégovine se mettaient en route vers l'indépendance, ont mis leurs
5 différences de côté et ont fédéré leurs ressources pour se découper ce que
6 l'accusé appelle une Grande-Serbie à partir de grosses portions de la
7 Croatie, de la Bosnie-Herzégovine aussi, et ont chassé des non-Serbes de
8 ces régions, par exemple comme à Hrtkovci. Des éléments de preuve montrent
9 que l'accusé a apporté une contribution significative et matérielle à cette
10 campagne massive de nettoyage ethnique, des éléments qui montrent que les
11 forces serbes envoyées par l'accusé et d'autres membres de l'entreprise
12 criminelle commune retenue dans l'acte d'accusation et contrôlées par eux
13 ont commis, de façon généralisée et systématique, des atrocités en Croatie
14 et Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'en Serbie. D'autres éléments montrent que
15 l'accusé lui-même a commis certains de ces crimes.
16 Hier, l'accusé a tenu un long discours au cours duquel il a décidé de
17 parler de toutes sortes de choses, mais pas des éléments du dossier. Par
18 exemple, il a décidé de parler du livre de Mme Del Ponte, ce qui ne fait
19 pas partie du dossier. Il a parlé de documents qu'il a reçus de Vaske alors
20 que ces éléments ne sont pas dans le dossier. En effet, la Chambre de
21 première instance a expressément décidé de ne pas les admettre, et ceci, le
22 20 janvier 2008.
23 L'accusé a cherché à vous donner l'impression qu'à moins que la
24 preuve ne soit apportée du fait que ses volontaires à lui avaient commis
25 des crimes retenus dans l'acte d'accusation, vous ne pouviez pas conclure
26 au fait qu'il y avait des éléments dans ce dossier qui permettaient d'en
27 porter condamnation. Il l'a fait alors qu'il savait parfaitement bien qu'il
28 était en tort.
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1 Lorsqu'il y a des éléments de preuve qui montrent qu'il y a un groupe
2 de personnes qui ont participé à un plan, un dessein commun, un objectif
3 commun visant à commettre des crimes qui sont de la compétence du Tribunal,
4 chacun d'entre eux peut être déclaré responsable de tous les crimes commis
5 dans la poursuite de ce plan, de ce dessein, de cet objectif commun, et ces
6 personnes peuvent être tenues responsables en raison des conséquences
7 prévisibles qu'avait la réalisation de ce plan, de ce dessein, de cet
8 objectif commun. Et la Chambre d'appel Brdjanin l'a dit clairement, de
9 telles personnes sont déclarées responsables des crimes utilisés -- sont
10 responsables par d'autres personnes qui ont été utilisées par les membres
11 de l'entreprise criminelle commune pour réaliser ce plan, cet objectif
12 commun.
13 Rappelez-vous, Madame et Messieurs les Juges, arrêt Brdjanin, affaire
14 IT-00-39-A, en date du 17 mars 2009, paragraphes 413 et 430.
15 Ceci étant dit, et contrairement à ce qu'affirmait hier l'accusé, il
16 y a bien des éléments dans le dossier sur lesquels vous pouvez vous appuyer
17 pour conclure que des volontaires du Parti radical serbe ont participé à
18 des crimes odieux, dont des crimes retenus dans l'acte d'accusation.
19 Quelques exemples : Milan Lancuzanin, surnommé Kameni, a participé à
20 l'assassinat de centaines d'hommes croates à Grabovo, près de Vukovar, le
21 20 novembre 1991; Miroslav Vukovic, alias Cele, a supervisé et participé
22 aux assassinats et aux passages à tabac odieux de non-Serbes à la ferme
23 Ekonomija à Zvornik; Branislav Gavrilovic, alias Brne, qui était présenté
24 comme étant un "vojvoda" chetnik par ses hommes, a frappé violemment, a
25 assassiné des prisonniers de guerre, et il disait que c'était Seselj qui
26 dictait tout à Sarajevo. Il n'y avait que Seselj, Dieu et la loi. Je vous
27 rappelle ce qu'ont dit le Témoin VS-16, le Témoin VS-1013 [comme
28 interprété] ainsi que Koblar.
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1 Mais l'accusé a décidé hier de vous tenir un long discours. Quoi
2 qu'il en soit, il a abordé au cours de cette longue péroraison certains des
3 éléments-clés. Il a affirmé qu'il avait l'intention, effectivement, de
4 créer une Grande-Serbie qui allait englober les Serbes catholiques et les
5 Serbes musulmans, mais que malheureusement, la guerre avait empêché ce
6 processus de guérison qu'il souhaitait.
7 Et je ne sais pas, est-ce que -- oui, le système marche. Très bien.
8 Regardons cette vidéo versée au dossier qui est devenue la pièce P355. Nous
9 allons ainsi voir de quelle façon l'accusé a contribué à ce processus de
10 guérison, de fédération. C'est un discours qu'il tient lors des funérailles
11 d'un volontaire du SRS tombé en août 1991.
12 [Diffusion de la cassette vidéo]
13 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
14 "L'ennemi va subir la punition du peuple serbe. Nous n'allons plus
15 pardonner comme nous l'avons fait après la Première et la Deuxième Guerre
16 mondiale. Le temps est venu pour nous de régler nos comptes aussi. Le temps
17 est venu de venger toutes les victimes serbes et d'unir toutes les terres
18 serbes."
19 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Hier, l'accusé a essayé d'excuser ses actes
21 et agissements en excipant du fait que des crimes avaient été commis par
22 d'autres dans le conflit; par exemple, à la page 16 647 du compte rendu
23 d'audience. Mais cet argument, qu'on connaît aussi sous la qualification de
24 "tu quoque", il a été rejeté notamment par l'arrêt Martic par ce Tribunal.
25 L'affaire Martic était l'affaire IT-13/1-A, 5 mai 2009, paragraphe 111.
26 Et dans la mesure où il invoque une légitime défense, on ne saurait
27 utiliser ou invoquer la légitime défense pour justifier le fait de prendre
28 pour cible une population civile. C'est dit aussi dans l'arrêt Martic au
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1 paragraphe 268.
2 Je vous le disais il y a quelques instants, nous allons respectueusement
3 vous présenter certains des éléments du dossier qui pourraient vous faire
4 aboutir à une décision de condamnation.
5 Ici, on parle de la responsabilité de l'accusé en raison de crimes commis
6 contre des non-Serbes en Croatie, en Bosnie-Herzégovine, et en Serbie, tout
7 simplement parce qu'ils n'étaient pas du bon côté, pas du bon groupe
8 ethnique. Les non-Serbes ont été pris pour victimes parce qu'il se faisait
9 qu'ils vivaient sur des terres dont l'accusé pensait qu'elles devaient
10 appartenir à des Serbes; parce que l'accusé pensait et a encouragé d'autres
11 à penser qu'ils auraient dû payer par le sang les torts, les erreurs
12 commises par des générations précédentes. Ils ont été pris pour victimes
13 parce que l'accusé a recruté des forces de combat qu'il a déployées en leur
14 disant : Chassez les Oustachi, nettoyez la Bosnie. Mais il n'était bien sûr
15 pas tout seul dans cette entreprise.
16 Alors que l'ex-Yougoslavie se désintégrait, d'autres dirigeants
17 militaires et politiques ont reconnu cette lucarne, cette opportunité
18 historique qui se présentait d'obtenir par la force un Etat dominé par les
19 Serbes qui soit élargi et unitaire. C'est ainsi que l'accusé, qui
20 jusqu'alors avait été considéré par les autorités comme un extrémiste
21 dangereux, tout d'un coup, avait un verni, comme ça, de légitimité. Il a
22 agi par la suite avec d'autres dirigeants militaires et politiques pour
23 parvenir à ces objectifs qu'il avait en commun avec eux par des moyens
24 violents et criminels. Pour parvenir à ces objectifs communs, les membres
25 de l'entreprise criminelle commune et leurs subordonnés ont commis tous les
26 crimes retenus dans l'acte d'accusation.
27 Permettez-moi d'esquisser la structure de notre argumentaire aujourd'hui et
28 vous parler des éléments sur lesquels vous allez vous appuyer.
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1 Tout d'abord, nous parlerons du critère juridique appliqué en vertu de la
2 procédure 98 bis.
3 Et puis, nous allons présenter des éléments qui montrent tout d'abord
4 que la Chambre peut conclure à l'existence d'un plan, objectif commun dont
5 faisait partie l'accusé afin de créer une Grande-Serbie homogène sur le
6 plan ethnique, et que ceci faisait partie intégrante d'un plan commun qui
7 était de persécutions, d'expulsions, de transferts forcés, d'assassinats,
8 de torture, de traitements inhumains, de violence sexuelle et de viols, de
9 pillages, de destructions de lieux de culte et d'autres bâtiments
10 religieux, et d'autres mesures discriminatoires qui étaient toutes dirigées
11 contre des non-Serbes, comme ceci est retenu dans le paragraphe 8 de l'acte
12 d'accusation.
13 Troisièmement, nous allons vous montrer comment l'accusé a apporté une
14 contribution significative à ce plan commun : premièrement, en utilisant
15 son pouvoir et sa popularité pour promouvoir l'idée de cette Grande-Serbie
16 qu'il fallait obtenir par la force; deuxièmement, en levant des forces de
17 volontaires qu'il allait déployer pour participer à cette campagne de
18 persécution dirigée sur la population afin de parvenir à cette Grande-
19 Serbie, ces forces armées ont commis de multiples crimes, ce faisant; et en
20 commettant un acte de persécution par des discours d'incitation à la haine
21 qui ont créé un climat de peur et de haine qui a entraîné les expulsions et
22 des traitements inhumains en raison de transferts forcés. Et puis, nous
23 allons vous montrer qu'une Chambre peut considérer que les éléments et la
24 preuve ont été apportés de ces crimes retenus aux chefs 1, 4, 8, 9, 10, 11,
25 12, 13, 14, de l'acte d'accusation.
26 Nous ne sommes pas censés revenir sur chacun des incidents retenus
27 dans l'acte d'accusation, mais nous montrerons qu'il y a des éléments de
28 preuve concernant les faits incriminés. L'Accusation vous montrera qu'il
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1 existe dans le dossier des éléments de preuve en portant condamnation et
2 que la requête présentée par l'accusé en vue d'acquittement et de rejet de
3 l'acte d'accusation devrait elle-même être rejetée.
4 Permettez-moi d'aborder maintenant le premier volet de fond, c'est Mme
5 Biersay qui vous présentera le second volet, qui vous parlera de la
6 contribution de l'accusé à l'entreprise criminelle commune, ainsi que des
7 crimes et des faits incriminés retenus dans l'acte d'accusation. En
8 conclusion, je me permettrai de faire un résumé de notre argumentaire, et
9 je répondrai volontiers à toutes questions que vous pourriez avoir.
10 Au cours de cette présentation, nous allons vous montrer plusieurs pièces,
11 des extraits de pièces. En outre, il y aura quelques éléments illustratifs
12 partant des éléments du dossier. Si ces pièces illustratives pouvaient être
13 versées au dossier, elles vous permettraient effectivement de mieux
14 examiner les éléments du dossier. Je me permettrais de vous proposer de
15 verser au dossier une version en "hard copy", mais aussi un CD. Ceci n'est
16 bien sûr que pour mieux me guider dans la présentation.
17 Lorsqu'on parle de numéros de page, de telle ou telle page, ces
18 numéros de page sont les pages qui sont dans le système du prétoire
19 électronique en anglais.
20 L'Accusation va mettre en exergue certains des éléments du dossier que vous
21 pouvez utiliser pour déclarer l'accusé coupable de chacun des chefs retenus
22 dans l'acte d'accusation --
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.
24 J'ai véritablement eu la meilleure des intentions du monde --
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Hier, je vous ai mis en garde. Je vous ai dit que
26 pendant que vous avez exposé votre point de vue, le Procureur n'était pas
27 intervenu. S'il était intervenu, je lui aurais fait la même remarque que je
28 vous fais. Dans cette procédure, il n'y a pas d'objections. On écoute ce
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1 que dit l'un, et ensuite on --
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président --
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, qu'est-ce que vous voulez dire ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous voulez que je quitte ce
5 prétoire ? Parce que lorsque le premier document en langue anglaise sera
6 montré par M. Marcussen ici, et il semble qu'il n'y ait pas d'équivalent en
7 serbe, et si c'est ça l'intention, je peux m'en aller tout de suite. Il ne
8 peut pas nous montrer rien qu'en anglais un document; il doit nous le
9 montrer en serbe aussi. Moi je ne peux pas imaginer, partant de l'apparence
10 d'un document, de quoi il s'agit.
11 J'avais la meilleure des intentions possibles de ne pas interrompre
12 du tout M. Marcussen, mais c'est intenable.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Marcussen, la remarque est
14 faite que s'il y a un texte en anglais, il n'a pas la traduction. Alors,
15 moi je sais pas ce que vous aviez l'intention de faire. Mais s'il y a un
16 texte en anglais, l'interprète peut traduire puisque, de toute façon, il y
17 aura une traduction.
18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président, et je
19 pense que la plupart des choses que nous allons montrer, ce seront des
20 extraits vidéo ou des cartes, donc je ne pense pas que ça posera problème.
21 Mais effectivement, s'il y a un élément écrit, je vous promets, il sera
22 traduit.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
24 Alors, comme je vois que tout le monde est animé des meilleures
25 intentions, on va continuer.
26 Monsieur Marcussen, poursuivez.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] L'Accusation va mettre en exergue certains
28 des éléments qui permettraient à une Chambre de prononcer l'accusé coupable
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1 de chacun des chefs dans l'acte d'accusation. Vu le temps qui m'est
2 imparti, nous ne pouvons pas examiner chacun des éléments apportés à
3 l'appui de tous les incidents retenus et à l'égard de tous les modes de
4 responsabilité, mais l'article 98 bis ne l'exige pas, pas plus que la
5 jurisprudence.
6 Parce que selon l'article 98 bis, la Chambre doit seulement
7 déterminer si l'Accusation a présenté suffisamment d'éléments de preuve à
8 l'appui de chacun des chefs d'accusation, ou plutôt, de chacun des éléments
9 constituant chacun des chefs. Par conséquent, à ce stade-ci, la Chambre
10 peut introduire un jugement d'acquittement par rapport à un chef tout
11 entier.
12 De plus, même si l'accusé est reconnu coupable, d'après nous, en vertu de
13 divers modes de responsabilité, il suffit que la Chambre conclue qu'il y a
14 des éléments qui soutiennent un mode de responsabilité. Si ceci est le cas,
15 la Chambre pourra et va devoir rejeter la requête d'acquittement. Regardez,
16 par exemple, l'affaire Mrksic, affaire IT-95-13/1-T, décision orale de la
17 Chambre. C'était une décision orale du 28 juin 2006, pages du compte rendu
18 d'audience 11 311 et 11 312 dans le procès Mrksic. Il y a aussi l'affaire
19 Prlic et consorts, affaire IT-04-74-T, audience du 20 février 2008, aux
20 pages du compte rendu d'audience 27 206, 27 207 et 27 237.
21 L'Accusation ne va donc pas aborder la question de la valeur probante des
22 éléments de façon détaillée. Et, de façon générale, elle ne va pas vous
23 présenter la question des éléments de preuve à l'appui d'autres éléments
24 dans son argumentaire aujourd'hui.
25 Mais abordons la question essentielle en l'espèce.
26 Je vous le disais, la Chambre pourra conclure à l'existence d'un
27 plan, d'un projet, d'un objectif commun de création d'une Grande-Serbie par
28 le déplacement forcé de non-Serbes, mais aussi par des actes de meurtre, de
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1 traitement cruel, de torture, de détention, de destruction de biens et
2 d'autres actes de persécution. Ces crimes étaient nécessaires, c'était un
3 moyen nécessaire de réaliser l'objectif commun qui était de déloger par la
4 force les non-Serbes de grandes parties de la Croatie, de la Bosnie-
5 Herzégovine, et de plus petites parties de la Serbie. Les membres de
6 l'entreprise criminelle commune ont eu recours à une violence brutale et
7 impitoyable et ont profité de cet environnement de coercition qu'ils
8 avaient eux-mêmes encouragé.
9 Hier, l'accusé, par exemple, à la page du compte rendu d'audience 16 628 et
10 16 629, a nié qu'il y ait eu des actes d'expulsion, de transfert forcé. Il
11 a affirmé, au contraire, que c'étaient des échanges de population
12 volontaires et qu'il y avait eu, pour des raisons économiques, par exemple,
13 des fluctuations démographiques. Mais c'était, en droit comme en fait,
14 incorrect.
15 Remarquez ce que disait la Chambre d'appel Krajisnik, affaire IT-00-
16 39-A, 17 mars 2009, paragraphe 319. Que disait la Chambre Krajisnik. Je la
17 cite :
18 "L'appellation de 'forcé', lorsqu'elle est utilisée pour se rapporter
19 aux crimes d'expulsion, ne doit pas être limitée à la force physique, elle
20 inclut aussi la menace de la force, la coercition telle qu'elle découle de
21 la peur de la violence, de la contrainte, de la détention, de l'oppression
22 ou répression physique, ou d'un abus de pouvoir à l'encontre de cette
23 personne, à l'encontre d'autrui ou en tirant partie d'un environnement
24 caractérisé par la coercition."
25 Ici en l'espèce, les éléments du dossier montrent que l'accusé et les
26 autres membres de l'entreprise criminelle commune se sont servis de la
27 force physique, mais aussi de tous les autres types de mesures forcées qui
28 existent et qu'a décrites la Chambre d'appel pour expulser des non-Serbes.
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1 Nous allons vous montrer de façon plus détaillée des éléments du dossier
2 qui le prouvent.
3 L'existence de l'entreprise criminelle commune, l'intention de
4 commettre les crimes retenus dans l'acte d'accusation, vous en avez la
5 preuve dans ces éléments suivants, sur lesquels nous allons revenir de
6 façon plus détaillée : tout d'abord, le fait que c'est de façon incessante
7 que l'accusé a voulu réaliser l'aspiration chetnik à avoir une Grande-
8 Serbie homogène; deuxièmement, les efforts coordonnés des membres de
9 l'entreprise criminelle commune pour opérer une séparation technique des
10 zones revendiquées comme étant serbes par les Serbes par la création de
11 structures gouvernementales et politiques uniquement serbes, et ceci,
12 soutenu par des forces armées coordonnées; troisièmement, par la séparation
13 ethnique coordonnée des non-Serbes, ce qui est démontré par la
14 systématicité des crimes commis contre ces non-Serbes de la part des
15 structures et des forces armées serbes à partir du milieu du mois d'août
16 1991.
17 Premier point.
18 Alors que la Yougoslavie se désintégrait, l'accusé est arrivé au
19 premier plan de la scène politique parce qu'il surfait sur cette vague de
20 l'idéologie politique et des traditions militaires chetniks extrémistes.
21 Cette notoriété de chef, de dirigeant chetnik, il l'a cimentée en 1989, le
22 jour où on fêtait le 600e anniversaire de la bataille de Kosovo Polje. A ce
23 moment-là, il a été nommé par un criminel de guerre de la Deuxième Guerre
24 mondiale, il a été nommé au rang suprême des Chetniks, à celui de
25 "vojvoda". Pièce P150.
26 Au cours de la période couverte par l'acte d'accusation, l'accusé
27 était le dirigeant tant du Mouvement chetnik-serbe, ce qu'on appellera le
28 SCP, que du Parti radical serbe, que nous appellerons SRS. C'étaient deux
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1 composantes d'une même entité. Vous aviez d'un côté l'aile politique,
2 c'était le SRS; et l'aile militaire, c'était le SCP.
3 L'accusé, lui, a fait sienne l'idéologie chetnik, la renaissance de
4 ses structures, de ses symboles militaires, et cette harangue incessante
5 contre les non-Serbes, tout ceci démontre son intention de parvenir à une
6 Grande-Serbie par la violence et par les crimes.
7 L'accusé s'est profilé comme étant le porte-étendard des Chetniks.
8 Lors de réunions publiques, il n'a cessé de faire référence à l'histoire
9 chetnik. Il essayait de propager l'idéologie et les objectifs chetniks, et
10 surtout, l'idée de la Grande-Serbie. Il organise des fidèles dans des
11 organisations chetniks, qui a déployé des dizaines de milliers de
12 volontaires dans les zones de conflit pendant la période couverte par
13 l'acte d'accusation. Les actes, les déclarations, l'intention de l'accusé,
14 il faut les voir à la lumière de l'idéologie et de la tradition chetnik
15 qu'il a si étroitement épousées.
16 Le 18 février 1991, juste avant la création du SRS, qui a englobé le SCP,
17 le Comité central patriotique du SCP a émis une proclamation au peuple
18 serbe, et elle a dit ceci :
19 "…pour faire revivre les traditions héroïques des guérilleros, des
20 combattants de la liberté serbe, et dans la poursuite et la pérennisation
21 des volontés de nos prédécesseurs glorieux, le général Draze Mihajlovic,
22 Dragisa Vasic, et Stevan Moljevic, et après avoir déroulé le drapeau
23 chetnik sur toutes les terres serbes."
24 Pièce P3, page 37.
25 Mais quelles étaient donc ces traditions, quels étaient donc ces
26 efforts et velléités ?
27 Yves Tomic est venu vous le dire. Quand on dit "chetnik", ça fait
28 référence à "un mode particulier d'action militaire ou armée". Les
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1 organisations chetniks, historiquement, ont été des organisations
2 militaires, et certaines d'entre elles ont effectivement développé des
3 plateformes politiques. La pièce P164, page 38, vous le montre.
4 Pour Moljevic, mentionné dans la proclamation et qui était un des grands
5 idéologues du mouvement chetnik, l'objectif essentiel du Mouvement chetnik
6 c'est la création d'une Grande-Serbie, et voilà comment il la voit :
7 "C'est une Serbie homogène qui englobe toutes les régions ethniques
8 habitées par les Serbes, même celles où les Serbes ne constituent pas une
9 majorité ethnique."
10 Je peux vous donner la référence plus tard, parce qu'il y a d'autres
11 extraits.
12 Pour parvenir à une Serbie homogène, il faut, je cite :
13 "…un plan de nettoyage ou de déplacement de la population rurale en vue de
14 réaliser l'homogénéité de la communauté serbe dans l'Etat."
15 Par conséquent, c'est un euphémisme qu'utilise le Mouvement chetnik, ils
16 demandent des échanges de population, mais en réalité, c'est équivalent à
17 un nettoyage ethnique. Et c'est à cela que se réduisent les traditions et
18 volontés héroïques : c'est un combat en vue du contrôle territorial pour
19 parvenir à une Grande-Serbie, à l'expulsion et la destruction des non-
20 Serbes dans les terres convoitées pour parvenir à une hégémonie serbe. Les
21 citations venaient de la pièce P141, page 2, et il y a le rapport de M.
22 Tomic, qui est la pièce P164, la page 44.
23 Dans sa campagne de propagande, l'accusé n'a cessé de, si j'ose dire,
24 "lioniser" les forces armées chetniks dont les dirigeants, pendant la
25 Deuxième Guerre mondiale, étaient devenus célèbres pour leur brutalité
26 extrême. Car, pour les Chetniks de la Deuxième Guerre mondiale, "nettoyer
27 un territoire libéré", ça voulait dire qu'on rasait des villages entiers
28 "afin que pas une seule maison ne reste debout", et aussi de façon à ce que
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1 la population non-serbe soit tout à fait décimée, "quel que soit le sexe et
2 quel que soit l'âge de la population." Le patrimoine, l'héritage des
3 Chetniks de la brutalité des crimes systématiques et généralisés est
4 tellement profondément ancré que les chefs chetniks, par exemple Momcilo
5 Djujic, qui était le parrain chetnik de Seselj, ont été énumérés par les
6 autorités yougoslaves, ont été répertoriés parmi les criminels de guerre.
7 Pièce P164, pages 48, 49, 53 à 57.
8 Par conséquent, en résumé, c'étaient ici les objectifs, les méthodes,
9 les symboles fièrement repris par l'accusé et qu'il fait siens lorsqu'il se
10 couvre de la cape du "vojvoda". C'est ce qu'il a continué à faire en
11 février 1991, alors qu'il avait créé ce Mouvement chetnik-serbe en août
12 1990. En février 1991, il forme le SRS et englobe le SCP comme étant le
13 bras militaire du mouvement. C'est donc la toile de fond qu'il recherche
14 alors qu'il lance de nombreux appels à la création d'une Grande-Serbie.
15 Ceci explique pourquoi cette invocation, cette incantation, litanie
16 presque, de l'accusé lorsqu'il rappelle les fautes commises contre les
17 Serbes, et les menaces de revanche ont un tel impact sur ses fidèles et sur
18 ceux qu'il cible comme étant ses ennemis, et c'est ce qu'il a fait lors de
19 ce discours lors des funérailles de ce volontaire en août 1991. Ceci
20 explique aussi pourquoi la direction qu'il a prise du SRS et l'aile
21 militaire, et puis du SCP, s'est diffusée et a fait des petits dans toute
22 l'ex-Yougoslavie et est devenue synonyme de la brutalité des Chetniks de la
23 Deuxième Guerre mondiale. C'est la raison pour laquelle il s'est proclamé
24 commandant de ce qu'il appelait des "unités opérationnelles chetniks".
25 C'est la pièce C10, paragraphe 5, pièce de la Chambre. Ceci explique aussi
26 pourquoi les volontaires du SRS et du SCP se sont largement déployés sur
27 toutes les zones revendiquées pour faire une Grande-Serbie, et pourquoi les
28 volontaires, tels que Kameni, Cele et Brne, ont commis les crimes qu'ils
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1 ont commis. Si vous prenez ceci dans sa globalité, l'intention de l'accusé
2 n'aurait pas été plus claire; il voulait créer une Grande-Serbie par
3 nettoyage ethnique, notamment par la commission des crimes retenus dans
4 l'acte d'accusation.
5 Alors, je vais parler de la deuxième branche de l'entreprise criminelle
6 commune.
7 L'accusé n'était pas le seul dirigeant serbe à poursuivre cette
8 Grande-Serbie. Indépendamment des termes employés, le caractère non dit de
9 l'objectif, d'autres partageaient l'objectif incarné par le terme de
10 "Grande-Serbie", la création d'un territoire homogène unifié marqué par la
11 cohésion pour les Serbes par des crimes commis contre des non-Serbes. Le
12 nationalisme a remplacé l'ancien slogan de fraternité et d'unité de la
13 République fédérale socialiste de Yougoslavie alors que celle-ci se
14 désintégrait. Et lorsque la Croatie et la Bosnie-Herzégovine ont franchi
15 cette voie vers l'indépendance, les dirigeants serbes ont opté pour la
16 séparation ethnique des Serbes au sein de ces républiques pour éviter deux
17 pays qui engloberaient ce qui serait un territoire serbe et pour empêcher
18 que ceci ne réduise les minorités serbes.
19 En 1991, pour la première fois au cours de sa carrière politique,
20 l'accusé a incité à la haine ethnique en déclarant qu'il y avait injustice
21 historique, et qu'il souhaitait unifier le peuple serbe en une seule et
22 même terre à tout prix, et ceci a coïncidé avec ce que d'aucuns, plus
23 puissants et personnes ayant plus de ressources, que souhaitaient également
24 d'autres dirigeants politiques et militaires. Donc, les dirigeants
25 militaires et politiques serbes ont mis de côté leurs différences de façon
26 à mettre en commun leurs ressources pour s'emparer d'eux et nettoyer des
27 terres qui, d'après eux, leur appartenaient et appartenaient aux Serbes.
28 Pour réaliser leurs objectifs communs, les membres de l'entreprise
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1 criminelle commune ont créé des structures administratives et politiques
2 uniquement serbes soutenues par les forces serbes. Ils ont déployé des
3 structures et des forces armées pour prendre cette Grande-Serbie.
4 Les éléments que nous allons maintenant aborder sont divisés en
5 quatre parties. Ces éléments montrent qu'à partir de la deuxième moitié du
6 mois d'août 1990, les Serbes de la République de Croatie, dirigés, entre
7 autres, par Milan Babic, un autre membre de l'entreprise criminelle
8 commune, ont mis en place des autorités qui étaient uniquement serbes; une
9 police uniquement serbe et une TO uniquement serbe, des unités de la
10 Défense territoriale. Ils l'ont fait avec une aide considérable de
11 Milosevic et d'autres membres de l'entreprise criminelle commune,
12 essentiellement à Belgrade.
13 2. Dans la République de Serbie, dès le début de l'année 1991,
14 Milosevic a tendu la main à d'autres dirigeants serbes, y compris l'accusé,
15 pour unir leurs forces et défendre les intérêts serbes. Des volontaires ont
16 été rassemblés, une nouvelle élite, une unité d'opération spéciale du
17 ministère de l'Intérieur serbe, du MUP serbe, a été créée. Et en juillet
18 1991, la JNA agissait ou fonctionnait en réalité comme une armée serbe.
19 3. Nous allons maintenant aborder la République de Bosnie-
20 Herzégovine. Les éléments que nous allons montrer font valoir que les
21 dirigeants serbes en Bosnie-Herzégovine, avec l'assistance considérable de
22 Milosevic, de l'accusé et d'autres dirigeants serbes, ont créé des
23 autorités uniquement serbes, une police uniquement serbe, une TO uniquement
24 serbe, à la manière dont ils avaient agi en Croatie.
25 Et pour finir, les éléments de preuve vont montrer que les autorités
26 et les forces qui avaient été établies, coordonnées et déployées par les
27 dirigeants serbes, et prétendument membres de l'entreprise criminelle
28 commune, ont commis des atrocités en masse dans le cadre de leurs efforts
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1 pour prendre des parties de la Grande-Serbie de la Croatie et de la Bosnie-
2 Herzégovine.
3 Je vais tout d'abord parler de la Croatie.
4 D'après le membre de l'entreprise criminelle commune Milan Babic, le
5 Parti démocratique serbe, SDS en Croatie, a cautionné un redécoupage des
6 frontières municipales et régionales pour illustrer la composition
7 ethnique, et ils affirment que ces régions avaient le droit à l'autonomie
8 en vertu d'une composition ethnique spéciale. Les extraits de la déposition
9 de Babic ont été versés au dossier, pièce P1137, et le programme du SDS en
10 Croatie se trouve à la pièce à conviction P169.
11 Les dirigeants serbes ont entrepris, comme je l'ai dit, de mettre en
12 place des autorités administratives et politiques uniquement serbes, aux
13 fins d'une séparation ethnique, et forcé la domination serbe sur des
14 territoires ciblés. Les zones contrôlées par les Serbes ont finalement et
15 progressivement été unies et consolidées. En définitive, ils ont déclaré
16 vouloir rejoindre la République de Serbie et appliquer les lois serbes. Les
17 Juges de la Chambre trouveront ces éléments dans les pièces à conviction
18 P895, P896, P898, P903, et la déposition du Témoin VS-004.
19 Comme le montre la pièce à conviction P1137, dès le mois d'août 1990,
20 les Serbes sous la direction de Milan Babic -- pardonnez-moi, sous la
21 direction de Milan Martic, ont commencé à s'armer avec des armes provenant
22 de dépôts de police. Des membres de la JCE, comme Jovica Stanisic et Franko
23 Simatovic, ainsi que d'autres membres du ministère de l'Intérieur de la
24 République de Serbie, ont prêté main-forte pour créer une police serbe en
25 Croatie et pour les former. Les éléments de preuve montrent également que
26 la police serbe a été surveillée et contrôlée par Milosevic. Ceci se trouve
27 dans la déposition de Babic, que j'ai déjà évoquée, à la pièce P1029 sous
28 pli scellé, la pièce 1144 sous pli scellé, et les discours de l'accusé sont
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1 à la pièce P66 et la pièce P1039.
2 Dans les régions prétendument serbes en Croatie, les unités de la
3 Défense territoriale uniquement serbes ont progressivement été créées, et
4 en particulier à partir du mois de janvier 1991. Je ne vais pas évoquer
5 ceci dans le détail. Vous trouverez ceci dans le rapport de M. Theunens, la
6 pièce P261, qui vous explique ceci. Madame, Messieurs les Juges, vous
7 pourriez regarder les pages 205, 211, et 212.
8 Babic a témoigné pour dire que des actes de provocation avaient été
9 orchestrés. Ils comprenaient des actes aux fins d'engager la police croate,
10 d'attaquer des magasins, différents kiosques à journaux, et différentes
11 installations appartenant à des entreprises croates et albanaises. Ces
12 actes ont été effectués par des groupes serbes armés, que Babic associait
13 au MUP serbe. Il a également décrit la manière dont les médias serbes, et
14 notamment les médias de Belgrade, contrôlés par Milosevic, dépeignaient de
15 plus en plus les Croates comme des Oustacha génocidaires, et il prônait la
16 séparation ethnique. L'accusé n'a manqué aucune occasion pour tenter
17 d'enflammer la situation en invoquant le spectre de génocide contre les
18 Serbes en Croatie et a proposé d'envoyer des volontaires chetniks pour leur
19 prêter main-forte. Pièce P1266, par exemple, qui est un message aux Serbes
20 de la Krajina de Knin héroïque que l'accusé a signé le 27 février 1991 en
21 qualité de président du SRS nouvellement créé, et en qualité du président
22 de l'Administration centrale de la patrie du SCP, du Mouvement chetnik-
23 serbe. Je vais lire ce message :
24 "Chers frères et sœurs serbes, aujourd'hui vous allez prendre une
25 décision historique dont dépend l'avenir de notre peuple et de notre
26 patrie. Tous les Serbes sont avec vous. Vous avez beaucoup souffert au
27 front pour voir restaurés l'honneur national serbe et la dignité serbe,
28 pour la victoire de la liberté de la démocratie sur les forces du mal et
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1 des ténèbres qui nous menacent de génocide. La Krajina serbe représente la
2 fierté serbe, et tous les Serbes la préserveront et la défendront jusqu'au
3 dernier jour. Nous sommes prêts à vous venir en aide à tout moment. Votre
4 destin est également notre destin, notre destin à partir de notre Serbie
5 aujourd'hui rétrécie. Chers frères et sœurs serbes, nous vous félicitons
6 pour votre liberté et indépendance, et nous souhaitons beaucoup de succès
7 au Conseil national serbe ainsi qu'à son président fort sage, le Dr Milan
8 Babic, avec le travail qu'il fait pour l'Etat, et le dévouement dont ils
9 font preuve."
10 Madame, Messieurs les Juges, je souhaite vous indiquer que le rapport de M.
11 Reynaud Theunens est la pièce P258. Je crois qu'il y a deux versions; une
12 version qui est caviardée et une version qui est publique. Maintenant, vous
13 avez les deux références.
14 Il n'est pas contesté qu'il existe énormément d'éléments de preuve au
15 dossier que l'accusé, peu de temps après le message que je viens de vous
16 lire, a envoyé des volontaires chetniks du SRS et du SCP dans différentes
17 régions de Croatie. A partir de cet échantillon d'éléments de preuve au
18 dossier, les Juges de la Chambre pourraient conclure que des efforts
19 coordonnés ont été organisés entre différents membres de l'entreprise
20 criminelle commune aux fins de créer des structures politiques,
21 administratives et armées serbes dans les régions de Croatie que l'accusé
22 avait identifiées comme étant la Grande-Serbie.
23 Je vais maintenant parler des événements qui se sont déroulés dans la
24 République de Serbie, essentiellement, et je vais parler des dirigeants
25 serbes en Serbie. Ceci nous montre tout d'abord qu'à la mi-mars 1991,
26 Milosevic avait demandé à ce qu'une force combattante soit créée aux fins
27 de protéger les intérêts serbes, et a demandé aux hommes politiques serbes
28 de mettre leurs différences de côté pour s'unir dans la défense des
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1 intérêts serbes. L'accusé, ainsi que d'autres hommes politiques, ont
2 répondu à cet appel et ont mis à disposition leurs volontaires pour qu'ils
3 intègrent ces forces combattantes. Le MUP serbe a créé une nouvelle unité
4 d'opération spéciale qui a été déployée pendant les deux guerres, et ce, de
5 façon importante en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, et Milosevic a
6 progressivement pris le contrôle de la JNA.
7 Milosevic était arrivé au pouvoir grâce à un programme serbe et
8 nationaliste et s'était déclaré le protecteur et le patron des Serbes à
9 l'extérieur de la République de Serbie et, bien sûr, à l'intérieur de la
10 Serbie. A la mi-mars 1991, dans le sillage d'une tentative avortée par les
11 membres serbes de la RSFY et de leur présidence de déclarer un état
12 d'urgence, Milosevic a clairement indiqué qu'il allait employer les forces
13 armées de la République de Serbie pour défendre les intérêts serbes
14 ailleurs qu'en Yougoslavie. A la pièce P1005, il a annoncé, je cite :
15 "J'ai donné l'ordre de la mobilisation des réservistes des forces de
16 sécurité du MUP de la République de Serbie et la création urgente de forces
17 de police supplémentaires dans la République de Serbie. J'ai demandé au
18 gouvernement de la République de Serbie de faire les préparatifs
19 nécessaires en vue de créer ces forces complémentaires qui garantiraient la
20 protection des intérêts de la République de Serbie et du peuple serbe, et
21 donc, de fournir les effectifs nécessaires."
22 Milosevic a ensuite demandé aux hommes politiques membres de
23 l'opposition, tels que l'accusé, de venir le rejoindre. Et je cite encore
24 une fois :
25 "J'enjoins tous les partis politiques de faire preuve d'une coopération
26 pleine et entière dans cette situation difficile, et dans l'intérêt de la
27 Serbie, de mettre de côté les différences et les différends qui existent
28 entre eux."
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1 C'est cet appel aux armes qui explique pourquoi le gouvernement de la
2 République de Serbie avait, quatre jours avant cela, enregistré
3 officiellement le parti SRS de l'accusé avec son antenne militaire, le SCP.
4 Il est important de constater que le SCP n'avait pas pu être enregistré, on
5 l'avait refusé parce qu'on avait estimé que c'était un parti trop extrême.
6 Comme l'indique la pièce P901, les autorités serbes, à ce moment-là, ont
7 enregistré le SRS et sa composante SCP, à la même époque où Milosevic a
8 lancé cet appel aux armes.
9 Ceci n'est pas une simple coïncidence, que cet appel de Milosevic
10 pour que des forces complémentaires soient créées coïncide avec l'accusé et
11 le fait que son parti politique ait été enregistré, le SRS et le SCP.
12 L'accusé, comme ceci pourra être discuté plus tard lorsqu'on parlera de sa
13 contribution à l'entreprise criminelle commune, a déployé une force
14 combattante chetnik très importante et très motivée pour défendre les
15 intérêts serbes.
16 Le climat de l'époque se retrouve dans une déclaration de l'accusé le
17 23 février 1991, à l'époque où le SRS a été créé. Il a dit que son parti et
18 son pays se préparaient à un bain de sang si cela s'avérait nécessaire; à
19 la pièce P1255, page 9.
20 Comme cela est décrit dans les pièces à conviction P258 et P183,
21 d'autres organisations paramilitaires ont également été engagées dans
22 l'entreprise criminelle commune. Ceci comprenait les Tigres d'Arkan,
23 commandés par le membre de l'entreprise criminelle commune Zeljko
24 Raznatovic, qui avait des liens avec le MUP serbe, et d'autres groupes qui
25 avaient des appartenances politiques avec les partis tels que les Aigles
26 blancs et le Srpska Garda.
27 Les forces de police complémentaires faisant l'objet d'un ordre de
28 Milosevic ont vite vu le jour, comme cela peut se voir dans la pièce P131.
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1 Je vous demande de vous reporter, Madame, Messieurs les Juges, aux pages 5
2 à 7 [comme interprété] de cette pièce à conviction. C'est une vidéo qui se
3 passe de commentaires. Nous n'aurons malheureusement pas le temps de voir
4 cette vidéo aujourd'hui. Celle-ci nous montre que le 4 mai 1991, moins de
5 deux mois après la déclaration publique de Milosevic, le MUP de Serbie,
6 sous la direction de Jovica Stanisic et Franko Simatovic, ont créé une
7 unité d'opération spéciale plus connue sous le nom de JSO, ou les Bérets
8 rouges. Lors du sixième anniversaire de l'unité, Simatovic, en présence de
9 Milosevic, Stanisic et un nombre important de dirigeants serbes, ont décrit
10 la mission de cette unité. Comme l'admet Simatovic, c'était la protection,
11 et je cite :
12 "…de la sécurité nationale dans les circonstances où la sécurité du
13 peuple serbe était mise en danger sur l'ensemble de la région ethnique."
14 A cette fin, des milliers d'hommes et des tonnes d'équipement ont été
15 déployés sur l'ensemble du territoire de Croatie et de Bosnie-Herzégovine.
16 Une escouade d'hélicoptères a été créée en Bosnie-Herzégovine, et l'unité
17 spéciale a utilisé un réseau d'aérodromes, et confère des détails donnés
18 par Simatovic, pages 5 à 7.
19 Vers le 20 mars 1991, environ à la même date, Milan Babic et Milan Martic
20 se sont rendus à Belgrade pour demander de l'aide. Là, tel que cela est
21 décrit à la pièce P1138, pages 115 à 116, ils ont rencontré Milosevic, un
22 membre de l'entreprise criminelle commune, Bogdanovic, et Stanisic, du MUP
23 serbe. Milosevic a assuré à Babic qu'il avait déjà acheté 20 000 pièces
24 d'armes à son intention, et Stanisic a confirmé que 500 de ces armes
25 avaient déjà été envoyées à Banija.
26 L'assistance considérable fournie par le régime de Milosevic aux
27 régions prétendument serbes en Croatie est étayée de surcroît par un
28 rapport daté du 1er novembre 1991 fourni par le ministre serbe de la Défense
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1 sur l'assistance aux districts en Croatie, que vous trouverez au dossier à
2 la pièce P932. Cette demande -- ou ce rapport montre qu'à partir du
3 deuxième semestre de 1991, la République de Serbie a intensifié son
4 assistance au plan pratique sous la forme de mise à disposition d'armes,
5 d'équipement de transmission et d'autres approvisionnements à destination
6 de la Croatie. Ce rapport révèle également que la République de Serbie
7 finançait les soldes, salaires et contributions à la retraite d'environ
8 quelque 50 000 Serbes membres de la TO sur l'ensemble du territoire de la
9 SAO, de la Slavonie orientale, du district serbe de Slavonie et du Srem
10 occidental et du Baranja.
11 Les forces républicaines n'étaient pas les seules à participer à ce
12 dessein commun. D'après le général Kadijevic, un des plus haut gradés de la
13 JNA, pendant le printemps et l'été de l'année 1991, la JNA est devenue une
14 armée serbe. A la pièce P196, il a dit ceci, je cite :
15 "La JNA avait complètement réalisé ses objectifs. Elle protégeait la nation
16 serbe en Croatie, elle avait préparé et permis les préparatifs militaires
17 et politiques pour ce qui allait arriver."
18 Pages 68 et 69.
19 A partir du mois de mai 1991, Milosevic, Borislav Jovic, alors président de
20 la présidence fédérale, et le général Kadijevic avaient des réunions
21 fréquentes concernant le rôle de la JNA et de sa protection des Serbes, tel
22 que décrit à la pièce P198, page 6. A la date du 5 juillet 1991, le général
23 Kadijevic avait accepté leurs ordres "sans aucune discussion".
24 Ainsi, au mois de juillet 1991, les membres-clés de l'entreprise criminelle
25 commune tels qu'allégués dans l'acte d'accusation, y compris l'accusé,
26 Milosevic, Babic, Stanisic et Simatovic, Arkan, avaient créé des structures
27 politiques et administratives uniquement serbes soutenues par les forces de
28 police serbes et les unités de la Défense territoriale de Croatie. De
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1 surcroît, l'accusé et Arkan avaient répondu aux appels à l'unité de
2 Milosevic parmi les dirigeants serbes et avaient mis à disposition des
3 forces combattantes qui devaient être envoyées en Croatie. Plus
4 particulièrement, une unité particulière d'opérations spéciales du MUP
5 serbe, et Milosevic avait pris le contrôle de l'ensemble de la JNA. Comme
6 nous le constaterons, ces forces ont été déployées de façon coordonnée à
7 partir du mois de juillet 1991, avec des conséquences tout à fait
8 désastreuses.
9 Comme nous pouvons le constater à la pièce P258, page 33, pendant l'été
10 1991, la JNA avait dû faire face à des difficultés croissantes dues à un
11 manque d'effectifs. Il était donc important que les volontaires viennent
12 renforcer leurs rangs. En conséquence, les membres de l'entreprise
13 criminelle commune étaient disposés à fournir un appui logistique-clé aux
14 volontaires de l'accusé, y compris la mise à disposition d'armes, de
15 matériel et d'entraînement militaire. Les Juges de la Chambre peuvent se
16 reporter à la pièce P857, paragraphes 38 à 41, sous pli scellé; P1074,
17 paragraphes 84 à 86, 89, 90, 96, 97; pièce à conviction P1076, pages 26 et
18 27; pièce de la Chambre C12, paragraphe 24; pièce à conviction P1058,
19 paragraphe 89 [comme interprété], sous pli scellé; et le propre récit de
20 l'accusé à la pièce P30.
21 Ces éléments de preuve montrent qu'après avoir été recrutés par le
22 SRS et le SCP, les volontaires ont souvent été envoyés pour rejoindre la
23 JNA ou le MUP serbe, à leurs centres d'entraînement pour y être formés et
24 équipés. Par exemple, la caserne de la JNA à Novi Sad a accueilli les
25 volontaires du SRS et du SCP et leur a donné des uniformes et des armes
26 personnelles avant de leur donner une semaine de formation. D'autres
27 volontaires du SRS et du SCP recrutés par le cabinet de guerre du SRS à
28 Belgrade ont été envoyés en Slavonie occidentale et à la caserne de la JNA
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1 à Belgrade pour y recevoir de l'équipement. Pour ce qui est du déploiement
2 à Vukovar, les volontaires du SRS et du SCP ont reçu une formation au
3 centre de Lipovaca, juste à l'extérieur de Sid en Serbie, organisée par le
4 MUP serbe. Les volontaires du SRS et du SCP ont reçu leurs armes des TO
5 locales là où ils étaient déployés. Arkan a fourni un appui logistique
6 complémentaire aux volontaires du SRS et du SCP depuis sa base à Erdut, en
7 Slovénie [comme interprété] orientale, qui fonctionnait sous les auspices
8 des services de Sûreté de l'Etat, la DB. L'accusé s'est rendu lui-même à
9 Erdut lorsqu'il y déposait un groupe de volontaires avec Goran Hadzic, un
10 autre membre de l'entreprise criminelle commune. Cette visite est décrite
11 dans la pièce à conviction P528.
12 Comme je l'ai indiqué à l'instant, à partir du mois de juillet 1991,
13 le 5 juillet 1991, Kadijevic a accepté ces consignes, ces ordres
14 directement de Milosevic et de Jovic sans aucune discussion. Les
15 instructions qu'il acceptait si volontiers consistaient à concentrer les
16 actions de la JNA le long de lignes stratégiques en Croatie et Bosnie-
17 Herzégovine, telles qu'indiquées dans la pièce à conviction P243. C'est une
18 carte annotée par l'expert militaire Reynaud Theunens pendant sa
19 déposition. Les lignes tracées sur cette carte par les lettres A, B et C
20 sont les lignes le long desquelles Kadijevic a reçu l'ordre de concentrer
21 la JNA. Les lignes en pointillés, Madame, Messieurs les Juges, vous les
22 reconnaîtrez certainement, il s'agit des zones prétendument serbes en
23 Croatie, donc la Krajina, la Slavonie orientale, la Baranja et le Srem
24 occidental. La ligne C longe la Neretva en Bosnie, qui est une région qui
25 revêt une très grande importance stratégique.
26 Madame, Messieurs les Juges, je vais vous demander de vous reporter à
27 la pièce P245 également, qui montre les régions dans lesquelles la JNA
28 menait ses opérations peu de temps après, à savoir au mois de septembre
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1 1991. Donc ceci montre comment les instructions ont été données par
2 Milosevic et Jovic à Kadijevic et comment ceci a été mis en œuvre. Les
3 zones en orange sur cette carte montrent les endroits où la JNA était
4 active. Encore une fois, on peut constater qu'il s'agit de ce qui semble
5 être les territoires prétendument serbes en Croatie.
6 Kadijevic confirme que les opérations ont été menées à bien en
7 coopération avec les forces serbes locales en Croatie. Il explique que ces
8 opérations ont été effectuées "en coopération étroite avec les insurgés
9 serbes" et que "la future armée de la Krajina serbe a, en fait, été mise
10 sur pied lors des combats et équipée d'armes et de matériel par la JNA", ce
11 qui fait l'objet de la page 77 de la pièce P196.
12 Personne ne sera véritablement surpris d'apprendre que le 26 septembre
13 1991, tel que cela est indiqué à la page 22 de la pièce P1257, le ministre
14 de la Défense nationale de la République de Serbie, Tomislav Simovic,
15 pouvait dire à l'assemblée nationale de la République de Serbie que, et je
16 cite :
17 "Les mesures prises à l'heure actuelle par la JNA sont, de l'avis du
18 gouvernement, prises pour protéger la Serbie, l'intérêt de la Serbie et de
19 la cause serbe."
20 Le 1er octobre 1991, trois autres événements considérables ont consolidé le
21 pouvoir serbe, et ils sont extrêmement importants. Il faut les comprendre
22 pour comprendre l'entreprise criminelle commune. Premièrement, le bloc
23 serbe ou ce qui restait de la présidence fédérale, a commencé à exercer le
24 pouvoir de la présidence fédérale. Deuxièmement, tel que cela est indiqué à
25 la page 130 de la pièce P261, le commandement Suprême des forces armées,
26 dirigé par Kadijevic, a émis un ultimatum extrêmement sévère à l'intention
27 des autorités politiques et militaires croates. Et troisièmement, comme
28 nous pouvons le voir à titre d'illustration dans la pièce P210, sous pli
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1 scellé, l'accusé a renommé, en quelque sorte, la cellule de Crise du
2 SRS/SCP et l'a appelée le cabinet de guerre. Et je pense, en fait, qu'il a
3 fait une remarque à ce sujet indiquant que cette décision avait été prise
4 au vu de la situation politique. Trois jours plus tard, la présidence
5 Croupion a déclaré un état de menace imminente de guerre, et de ce fait,
6 conformément à la législation en vigueur à l'époque, cette présidence
7 Croupion est devenue de ce fait le commandement Suprême de la JNA.
8 Le général Kadijevic a émis un bulletin qui indique de façon très,
9 très claire qu'il ne reconnaît plus l'autorité du premier ministre fédéral,
10 Ante Markovic, ou du président officiel de la présidence, à savoir Stjepan
11 Mesic. En d'autres termes, Kadijevic acceptait à ce moment-là publiquement
12 l'autorité de la présidence Croupion. La JNA était maintenant fermement --
13 appartenait, en fait, ou était placée entre les mains de la présidence
14 serbe, qui était essentiellement basée à Belgrade et dirigée par Milosevic.
15 Les pièces P246 et P261, la page 130, nous permettent de comprendre
16 l'évolution de cette situation.
17 Les éléments de preuve présentés jusqu'à maintenant démontrent que
18 l'accusé, ainsi que Milosevic, Babic, Stanisic, Simatovic, Arkan et
19 d'autres membres importants de l'entreprise criminelle commune, ont établi,
20 déployé et contrôlé des forces de combat considérables qui ont été
21 déployées en Croatie à partir du mois de juillet 1991. Et nous reviendrons
22 ultérieurement sur l'impact absolument catastrophique que cela a eu pour
23 les non-Serbes qui résidaient dans ces zones. Mais avant de parler de cela,
24 nous allons maintenant nous intéresser à la Bosnie-Herzégovine afin de
25 parler des événements dont des éléments de preuve ont été apportés et qui
26 se sont déroulés en même temps que les forces serbes qui étaient préparées
27 et déployées en Croatie.
28 Ces éléments de preuve vont montrer comment la méthode qui avait été
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1 utilisée en Croatie pour établir une séparation ethnique a également été
2 reprise par les dirigeants serbes en Bosnie-Herzégovine. Dans un premier
3 temps, des structures politiques et administratives parallèles ont été
4 mises sur pied, puis des forces de police serbes locales et des forces de
5 la Défense territoriale ont également été créées. Tout comme en Croatie,
6 Milosevic et les autres dirigeants serbes à Belgrade ont apporté un soutien
7 considérable. Et comme en Croatie, les membres de l'entreprise criminelle
8 commune ont pris des mesures pour former des structures politiques et
9 administratives serbes locales qui ont fini par fusionner en des unités
10 beaucoup plus importantes, ce qui a finalement culminé avec la déclaration
11 de la République serbe de Bosnie-Herzégovine le 9 janvier 1992 qui, par la
12 suite, fut appelée la Republika Srpska. Les éléments de preuve étayant ce
13 que j'avance se retrouvent dans les pièces P931, P941 et 945, ainsi que
14 dans les faits admis par la décision de la Chambre de première instance le
15 23 juillet 2010.
16 Tout comme en Croatie, des unités de la police composées uniquement
17 de Serbes ainsi que des unités de la Défense territoriale ont été établies,
18 tel que l'a présenté lors de sa déposition le Témoin VS-1112.
19 Dès le 8 avril 1991, le téléphone de Karadzic avait été mis sur
20 écoute parce qu'il était soupçonné d'œuvrer en faveur d'organisations
21 paramilitaires et d'être pour l'armement illicite des Serbes. Cela figure à
22 la page 9 122 du compte rendu d'audience.
23 Au mois de juillet 1991, Radovan Karadzic et Momcilo Krajisnik
24 avaient discuté l'organisation d'une réunion avec des membres serbes du MUP
25 en Bosnie-Herzégovine, ce qui a été indiqué par une conversation
26 interceptée faisant l'objet de la pièce P913.
27 En octobre 1991, l'assemblée, qui était mixte du point de vue
28 ethnique, l'assemblée de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine
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1 s'est demandée s'il fallait déclarer l'indépendance. Radovan Karadzic a mis
2 en garde les Musulmans et les Croates que s'ils souhaitaient obtenir
3 l'indépendance, cela les conduirait "vers l'enfer" tout comme en Croatie.
4 Il a même menacé en disant, et je cite : "Ne pensez pas que vous allez
5 ainsi conduire la Bosnie-Herzégovine vers l'enfer et que cela ne va pas
6 signifier l'extinction de la population musulmane, parce que la population
7 musulmane ne sera pas à même de se défendre toute seule si l'on en vient à
8 la guerre." Page 3 de la pièce P1004.
9 Lorsque l'assemblée de Bosnie-Herzégovine a finalement voté pour la
10 souveraineté, les dirigeants serbes de Bosnie, notamment Radovan Karadzic,
11 Momcilo Krajisnik et Biljana Plavsic, ont proclamé une assemblée serbe, tel
12 que cela est indiqué par la pièce P931.
13 Dans la pièce P871 du 19 décembre 1991, les dirigeants du SDS ont
14 distribué aux conseils municipaux du SDS un plan absolument radical pour la
15 mise en œuvre de la séparation ethnique de la Bosnie-Herzégovine au cas où
16 la république venait à déclarer son indépendance. Il s'agit, en fait, des
17 variantes A et B et de leurs consignes, qui sont autant de mesures qui
18 doivent être prises par les Serbes pour saisir le pouvoir, tel que cela a
19 été expliqué par le Témoin Deronjic, paragraphe 45 de la pièce P877. Il
20 s'agissait de consignes extrêmement détaillées qu'il fallait mettre en
21 œuvre en deux phases, à la fois dans les municipalités où les Serbes
22 étaient majoritaires - il s'agit de la variante A - et dans les
23 municipalités où les Serbes étaient minoritaires - il s'agit de la variante
24 B. Lors de la première phase, les consignes consistaient à donner l'ordre
25 de former des cellules de Crise composées exclusivement de Serbes ainsi que
26 des assemblées municipales. Il y avait également des consignes pour créer
27 des forces du MUP, des forces de la police et des forces de la Défense
28 territoriale composées seulement de Serbes, absolument monoethniques. Lors
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1 de la deuxième phase, les cellules de Crise devaient assumer le contrôle
2 physique dans divers lieux stratégiques et devenir ainsi les autorités
3 municipales publiques affirmant le contrôle serbe dans les municipalités.
4 Et tout comme en Croatie, il faut savoir que cette évolution de la
5 situation -- qu'à cette situation s'est absolument rallié le régime de
6 Milosevic ainsi que d'autres membres de l'entreprise criminelle commune à
7 Belgrade. Des communications interceptées entre Milosevic et Karadzic, dont
8 je ne vais pas vous présenter les détails, montrent l'étendue de cette
9 coopération. Ces conversations interceptées font l'objet des pièces
10 suivantes : P498, P504, P506, P509, P510 et P511.
11 Toujours comme en Croatie, l'entraînement, la formation et les
12 activités d'armement illustrent une fois de plus à quel point il y avait
13 une organisation importante et une coordination entre les forces serbes
14 contrôlées par les différents membres de l'entreprise criminelle commune.
15 Par exemple, en Bosnie-Herzégovine, le MUP serbe a formé et fourni des
16 volontaires, à la fois des volontaires du SRS/SCP et des volontaires serbes
17 locaux, tel que nous le voyons dans les exemples suivants : les services de
18 la Sûreté d'Etat serbe, les Bérets rouges, ont créé des camps
19 d'entraînement dans des lieux tels que Banja Luka, Trebinje, Brcko et
20 Bijeljina pour l'entraînement d'unités de la police spéciale de la
21 Republika Srpska et de la République de Krajina serbe, tel que cela est
22 décrit à la page 6 de la pièce P131. Les hommes d'Arkan et les volontaires
23 du SRS/SCP, leur présence a été établie à Brcko, et un témoin a vu des
24 Bérets rouges former et entraîner des volontaires serbes locaux dans la
25 caserne de la JNA, tel que cela peut être trouvé à la première page de la
26 pièce P980 et lors de la déposition de VS-1033, page 15 783 du compte rendu
27 d'audience.
28 Pour l'attaque contre Bosanski Samac en Bosnie, des volontaires, et
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1 notamment des volontaires du SRS/SCP, ont été formés, transportés et armés
2 par les Bérets rouges, ce qui fait l'objet des pièces suivantes : P131,
3 page 6; P988; P986; et pages du compte rendu d'audience 15 667 et 15 671
4 pour le Témoin VS-1058.
5 Pour ce qui est des zones où les crimes ont été commis, nous avons la
6 déposition de VS-32, VS-36, et VS-37. Ces dépositions indiquent, en ce qui
7 concerne Zvornik, comment, par exemple, le MUP serbe et la JNA ont apporté
8 leur soutien à la cellule de Crise serbe à Zvornik, et ce, pour mettre en
9 œuvre l'entreprise criminelle commune. La JNA a armé des Serbes à Zvornik
10 et l'officier de la JNA, Dragan Obrenovic, a participé à des réunions de la
11 cellule de Crise. Les Serbes locaux ont également reçu des armes du MUP de
12 Serbie qui étaient distribuées par le truchement de la cellule de Crise.
13 Parmi les personnes qui ont fourni ces armes, nous trouvons, par exemple,
14 le membre de l'entreprise criminelle commune Bogdanovic. J'aimerais
15 maintenant faire référence à une pièce qu'il ne faudra pas diffuser pour le
16 public parce qu'elle est versée sous pli scellé. Il s'agit de la pièce
17 P1039.
18 Je pense que nous avons un petit problème technique. Voilà.
19 Donc, il s'agit en fait d'un schéma qui nous permet de comprendre comment
20 le lien part de Zvornik jusqu'à Belgrade. J'aimerais également indiquer que
21 la personne qui s'appelle Kostic, qui semble avoir une fonction importante
22 au sein de l'armée, se trouve à côté de "Tepavcevic" sur la gauche du
23 schéma, et Bogdanovic doit se trouver là où nous avons "ministre de
24 l'Intérieur", donc au milieu en haut. Nous le voyons, par exemple, dans la
25 déposition du Témoin VS-37.
26 Outre à Zvornik, le rôle de la JNA, qui a armé et formé, peut être
27 établi --
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois intervenir ici à nouveau.
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1 Peut-être que c'est à dessein qu'on me présente le mauvais document,
2 parce que je ne vois nulle part le nom de "Bogdanovic" ici. Peut-être que
3 c'est à dessein que l'on affiche dans mon écran le mauvais document.
4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non. Non, non, ce que j'ai dit, c'est qu'au
5 vu des éléments de preuve qui ont été présentés, le nom de Bogdanovic
6 devrait se trouver en haut de l'écran.
7 Je vois que l'accusé s'esclaffe, donc je suppose qu'il a compris ce
8 que je voulais dire.
9 J'étais en train de vous dire qu'il y a d'autres éléments de preuve
10 qui ont montré qu'il y avait eu armement et formation en Bosnie-
11 Herzégovine; je pense par exemple à Bosanski Samac, pour lequel nous avons
12 la pièce P1026 versée sous pli scellé. Vous avez le Grand-Sarajevo. La
13 Chambre de première instance pourra reprendre la déposition du Témoin VS-
14 1055. A Nevesinje, le Témoin Kujan fait état d'armement dans la pièce P524,
15 page 3. Pour Bijeljina, nous avons les éléments de preuve de Gusalic, page
16 14 299 du compte rendu d'audience et les autres pages également, qui
17 décrivent comment la formation a été organisée. Pour Brcko et Potocari, je
18 vous demande de vous reporter à la déposition du Témoin VS-1033, page du
19 compte rendu d'audience 15 783, ainsi que paragraphe 10 de la pièce P1055.
20 A quoi servaient toutes ces préparations ? Nous avons une conversation
21 interceptée pour M. Karadzic, février 1992, et cela illustre mon propos.
22 Pièce P503. Car voilà ce qu'il dit, et je cite :
23 "Nous devons viser pour cette solution qui émane qui est la Grande-Serbie,
24 et si cela ne peut pas être, alors ce sera une Yougoslavie fédérale. Il n'y
25 a pas d'autres concessions."
26 Nous avons donc pu apprécier comment, au moment où il y a eu prise de
27 pouvoir serbe en Bosnie-Herzégovine, les structures politiques,
28 administratives, et armées, avaient été établies pour façonner la Grande-
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1 Serbie.
2 Il faut également mentionner une autre formation armée, à savoir
3 l'armée de la Republika Srpska, la VRS, qui a été créée après que la guerre
4 ait éclaté en Bosnie-Herzégovine. Elle a été officiellement déclarée le 12
5 mai 1992. Et nous voyons, une fois de plus, comment une force armée serbe
6 est créée avec le soutien des dirigeants serbes à Belgrade. Deux faits
7 permettent de comprendre ces moyens de preuve, deux faits qui ont été
8 acceptés par la Chambre de première instance par sa décision de constat
9 judiciaire en 2007. Il s'agit des faits suivants : 186, 190, et 191. Ils
10 nous permettent de comprendre deux choses : premièrement, lorsque la JNA
11 s'est retirée de la Bosnie-Herzégovine, elle y a laissé des officiers, des
12 soldats et des quantités assez considérables de matériel, qui ont formé la
13 base de la structure pour la VRS; deuxièmement, les officiers et les sous-
14 officiers de la VRS ont continué à recevoir leur solde de la République
15 fédérale de Yougoslavie et de recevoir leur retraite par la suite.
16 Le même jour, à savoir le jour où la VRS a été officiellement créée,
17 six objectifs stratégiques ont été annoncés par les dirigeants serbes de
18 Bosnie. Nous les trouvons dans la pièce P870. Je suis sûr que la Chambre de
19 première instance se souviendra que Reynaud Theunens avait indiqué que ces
20 objectifs avaient effectivement été adoptés en mai, mais l'offensive avait
21 commencé un mois plus tôt et les objectifs étaient ainsi devenus officiels.
22 Il s'agit de sa déposition du 21 janvier 2008.
23 La pièce qui vous est montrée maintenant est la pièce P1006, qui vous
24 permet de comprendre quels étaient ces six objectifs stratégiques. Je vais
25 me contenter de mentionner le premier, à savoir :
26 "L'établissement de frontières qui vont séparer le peuple serbe des
27 deux autres communautés."
28 Vous verrez qu'il y a cinq autres objectifs qui sont autant
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1 d'objectifs géographiques qu'ils se proposent d'obtenir.
2 Le rapport d'aptitude au combat de la VRS pour l'année 1992 a été
3 approuvé par Ratko Mladic, et ne laissait planer absolument aucune
4 ambiguïté à propos des objectifs stratégiques et de leur but, à savoir, et
5 je cite :
6 "La libération de territoires qui nous appartiennent et qui nous
7 appartiennent du fait d'une justification historique."
8 Page 159 de la pièce P992.
9 Vous aurez compris, de la présentation des moyens à charge à propos
10 des crimes commis à Zvornik, le Grand Sarajevo, Mostar et Nevesinje, que
11 les crimes ont été exécutés en coopération étroite
12 par les forces dont nous avons parlé un peu plus tôt, à savoir les
13 volontaires du SRS et du SCP, les membres de la JNA, et par la suite les
14 membres de la VRS, les hommes d'Arkan, les membres des unités du MUP et des
15 unités de la Défense territoriale serbe, et les forces du ministère de
16 l'Intérieur de la République de Serbie.
17 Avant la pause, je pense que je pourrai peut-être vous présenter un extrait
18 vidéo très rapide d'une vidéo qui a été versée au dossier. Il s'agit de la
19 pièce P644. Elle commence au point horaire suivant 1:05:24.
20 [Diffusion de la cassette vidéo]
21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
22 "En mai 1992, Milosevic, à titre définitif, s'empare du contrôle absolu
23 vis-à-vis de l'armée populaire yougoslave.C'est à ce moment-là que la
24 nouvelle constitution fédérale de Yougoslavie a été adoptée. Il est devenu,
25 en fait, l'homme qui prenait toutes les décisions. L'opération de Zvornik a
26 été planifiée à Belgrade. Les forces serbes de Bosnie y ont participé et
27 elles étaient les plus nombreuses. Toutefois, les unités spéciales et les
28 unités qui voulaient combattre venaient de notre camp. Il s'agissait des
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1 unités de la police, de ce qu'on appelait les Bérets rouges. Il s'agissait
2 d'unités spéciales des services de la Sûreté de l'Etat serbe, il s'agissait
3 des volontaires du Parti radical serbe, des volontaires d'Arkan, et il y
4 avait également une petite unité de volontaires placée sous le contrôle de
5 la police. L'armée n'a pas beaucoup participé à cette opération. Elle a
6 surtout fourni l'appui en artillerie lorsque cela a été nécessaire. Il a
7 fallu longtemps pour préparer et planifier l'opération, donc nous n'étions
8 pas nerveux, et personne ne disait : Allez, il faut faire cela en toute
9 urgence. Tout a été parfaitement organisé et exécuté jusqu'à la fin des
10 hostilités. Par la suite, lorsque le pillage a commencé, personne ne
11 pouvait plus rien contrôler.
12 C'étaient les principaux représentants de la Sûreté de l'Etat qui y ont
13 pensé, notamment Franko Simatovic, Frenki. Il faisait partie des personnes
14 les plus importantes. Il y avait d'autres personnes, mais je ne me souviens
15 plus de leurs noms. Nos volontaires se sont rassemblés, et Loznica était le
16 centre à partir duquel ils sont partis vers Zvornik. 'Vojvoda' Cvetinovic
17 était leur chef et il prenait ses ordres directement du commandant des
18 unités spéciales."
19 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pense que le moment est peut-être venu
21 de faire la pause, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Vingt minutes de pause.
23 --- L'audience est suspendue à 16 heures 02.
24 --- L'audience est reprise à 16 heures 24.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience étant reprise, Monsieur Marcussen,
26 vous avez la parole.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Madame, Messieurs les Juges, je vous ai expliqué comment plusieurs
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1 dirigeants serbes, notamment l'accusé, ont établi un certain nombre de
2 structures politiques et administratives, sans oublier les forces armées,
3 et comment elles ont été déployées en Croatie. J'aimerais maintenant en
4 venir au dernier volet de mon intervention, et je vais vous présenter des
5 éléments de preuve à propos des effets absolument catastrophiques que le
6 déploiement de ces forces a eus en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.
7 Alors, il faut savoir que ces forces ne se sont pas seulement lancées
8 dans des opérations militaires contre les forces ennemies; il y a également
9 eu de placées sous leur contrôle des zones qui ont fait l'objet de
10 nettoyage ethnique. J'aimerais maintenant faire référence à deux éléments
11 de preuve qui montrent que l'ampleur de ces crimes était si considérable
12 qu'ils ont acquis une certaine notoriété à l'extérieur de la Serbie, de la
13 Croatie et de la Bosnie-Herzégovine, et la JNA elle-même a présenté des
14 rapports à propos de ces crimes. Et j'aimerais faire référence aux pièces
15 P183 et P259.
16 Il faut savoir, Monsieur le Président, qu'en Croatie, l'effet sur la
17 population non-serbe a été absolument catastrophique. Au début de l'année
18 1992, plus de 220 000 non-Serbes avaient été chassés par la contrainte,
19 expulsés de Croatie. La carte que vous voyez maintenant a été compilée par
20 l'Accusation sur la base de la page 77 du document P632. Il --
21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Marcussen.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui.
23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Il est question de "DP". Qu'est-ce
24 que cela signifie ? "Décédé", "déporté" ?
25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non. Il s'agit des "personnes déplacées".
26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Donc il ne s'agit pas d'une pièce qui a été
28 versée au dossier. C'est l'une des pièces qui ont été préparées pour cette
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1 audience d'aujourd'hui et dont nous allons demander le versement au dossier
2 après l'audience, si vous nous y autorisez.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça c'est absolument inadmissible. J'ai été
4 stupéfait de voir le Procureur montrer quelque chose que je ne me souviens
5 pas avoir vu du tout. Mais il vient de nous dire lui-même que ce n'est pas
6 un document versé au dossier. Mais il ne peut pas, aujourd'hui, nous
7 présenter des documents nouveaux que je n'ai jamais vus et demander que ces
8 documents soient versés au dossier. C'est absolument inacceptable. Ils ont
9 fini leur présentation des éléments à charge. Et lorsque j'aurai fini mes
10 éléments à décharge, si vous me permettez de reconvoquer certains témoins
11 et présenter d'autres éléments de preuve, il pourra le faire, mais
12 maintenant, quand on est en train de se prononcer en application du 98 bis,
13 apporter de nouveaux documents et demander versement au dossier de ceci,
14 c'est de l'insolence au sommet, au comble.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends. Je vais discuter avec mes collègues si
16 on autorise le Procureur ou pas.
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Marcussen, la Chambre, à la majorité
19 - le Juge Harhoff n'étant pas de notre avis - estime que vous n'avez pas la
20 possibilité d'évoquer ce document car ce document n'a pas été discuté
21 pendant la phase de la présentation de vos éléments de preuve. C'est à ce
22 moment-là que vous auriez dû introduire ce document, pas au moment où, dans
23 votre plaidoirie, vous venez préciser les éléments à charge. Les éléments à
24 charge, ce sont ceux qui sont déjà admis. Ce document, moi aussi, je le
25 découvre pour la première fois. Donc, majoritairement, nous avons décidé
26 que vous ne pouvez pas évoquer ce document.
27 En revanche, si M. Seselj, dans le cas de ses éléments à décharge,
28 évoque les problèmes -- le problème de personnes déplacées, vous pourriez,
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1 lors du contre-interrogatoire de ses témoins, introduire ce document. Mais
2 là, dans cette phase, c'est pas possible. Voilà.
3 Alors, continuez sans parler de ce document.
4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Fort bien, Monsieur le Président. Le
5 document ne faisait que démontrer ce qui a déjà été versé au dossier, donc
6 bon, qu'à cela ne tienne. Comme je l'avais expliqué, je me proposais, en
7 fait, de ne prouver rien par ce document. C'était juste à titre
8 illustratif.
9 Mais toujours est-il, Monsieur le Président, que les crimes
10 généralisés et systématiques commis par les forces serbes ont été répétés
11 lorsqu'ils ont lancé leurs opérations de prise du pouvoir en Bosnie-
12 Herzégovine.
13 Il y a une pièce à conviction qui est très révélatrice et qui montre
14 la coopération entre les principaux protagonistes de l'entreprise
15 criminelle commune pour ce qui est de la commission de deux crimes
16 reprochés à l'acte d'accusation. Nous avons dans un premier temps le
17 déplacement par la contrainte de la population musulmane de Divic et de
18 Kozluk.
19 Lors d'une réunion qui a eu lieu avec le général Mladic en juin 1992
20 et avec des représentants serbes venant de différentes municipalités
21 serbes, les représentants de la municipalité de Zvornik ont indiqué qu'ils
22 avaient mis en œuvre la décision de Radovan Karadzic suivant laquelle Divic
23 et Kozluk devaient être habitées par des Serbes. Vous vous souviendrez que
24 nous avions indiqué que quelques mois avant cet événement, les forces
25 serbes avaient expulsé par la force tous les Musulmans de ces lieux.
26 Ils ont également indiqué que les formations de volontaires placées
27 sous la direction d'Arkan et de Seselj avaient obtenu de nombreux succès,
28 et cela, en fait, figure dans l'un des extraits des carnets de Mladic qui
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1 ont été retenus comme éléments de preuve par la décision prise hier. Je ne
2 pense pas qu'une cote P ait été octroyée à ce document. Je vais vous la
3 donner dans une petite minute. En fait, on me dit qu'il y a, effectivement,
4 une cote P. Il s'agit du document P1347.
5 Et je dirais une fois de plus que l'objectif criminel et l'énormité
6 des crimes exécutés pour promouvoir l'entreprise criminelle commune sont
7 illustrés par les modifications démographiques provoquées. Le document
8 P669, qui est maintenant sur vos écrans, montre la composition
9 démographique en Bosnie-Herzégovine avant la guerre.
10 Donc il s'agissait de la composition démographique en 1991.
11 Vous avez donc ces zones qui sont en vert et en rose qui sont des
12 zones serbes ou des zones majoritairement serbes. Les zones en vert
13 correspondent à des zones à majorité musulmane. Les zones bleues sont des
14 zones où l'on trouve une majorité de Croates. Et vous avez certaines zones
15 où nous avons une trame démographique beaucoup plus mélangée.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs les Juges, Madame le Juge, il s'agit
17 peut-être d'une erreur de traduction. Ici, on a dit que les parties en vert
18 et en violet, c'est des territoires avec une majorité serbe. Vous voyez
19 cela au compte rendu aussi. Ce n'est pas une erreur d'interprétation, mais
20 c'est ce qu'il a dit. Or, ce n'est pas exact. En rouge, c'est les endroits,
21 les territoires où il y a une majorité serbe.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'est exact. Je ne sais pas si une erreur
23 s'est glissée quelque part, mais quoi qu'il en soit, les zones serbes sont
24 en rouge et en rose et les zones en vert correspondent aux zones
25 musulmanes. Si j'ai commis une erreur, je remercie l'accusé d'avoir
26 rectifié cela.
27 Si nous regardons ce document P629, nous voyons la composition ethnique
28 après la guerre ainsi que les profonds changements démographiques, qui sont
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1 extrêmement importants, et nous voyons fondamentalement qu'à la suite du
2 déploiement des forces, il y a trois entités monoethniques qui ont été
3 créées du déploiement des forces de la part de plusieurs forces, mais
4 notamment également des forces serbes.
5 Alors, pour résumer, en un mot comme en cent, Madame, Messieurs les
6 Juges, nous avons présenté de nombreux moyens de preuve indiquant que
7 l'accusé a fait sienne l'idéologie chetnik et a rétabli son organisation à
8 connotation militaire, et ce, pour promouvoir cette Grande-Serbie, ainsi
9 que le nettoyage ethnique. Il y a également de nombreux éléments de preuve
10 qui indiquent que d'autres dirigeants serbes de la République socialiste de
11 Yougoslavie qui ont mis en commun leurs ressources et qui se sont ralliés à
12 l'accusé dans cette quête de cet Etat serbe homogène. A cette fin, ils ont
13 créé et utilisé des structures armées, administratives et politiques
14 serbes, qui incluent les volontaires du SRS et du SCP qui ont été établis
15 et déployés par l'accusé, les forces de la JNA qui étaient subordonnées à
16 Slobodan Milosevic, au général Kadijevic et au général Adzic. En BiH, nous
17 avons les forces de la VRS, qui faisaient partie d'une structure
18 hiérarchique placée sous le contrôle des membres de l'entreprise criminelle
19 commune, notamment Ratko Mladic et Radovan Karadzic, les membres de la
20 Défense territoriale serbe locale et les forces du MUP de la police. Nous
21 avons en Croatie ces forces qui étaient placées sous le contrôle de Milan
22 Babic et de Goran Hadzic. En Bosnie-Herzégovine, elles étaient placées sous
23 le contrôle des membres de l'entreprise criminelle commune, tels que
24 Radovan Karadzic, Biljana Plavsic et d'autres dirigeants serbes. Et nous
25 avons, en fait, lorsque la JNA s'est retirée, la VRS qui prend le contrôle
26 des forces de Défense territoriale. Nous avons également des forces du MUP
27 serbe qui ont opéré sous le contrôle de Jovica Stanisic et Franko Simatovic
28 et qui ont fini par être contrôlées par Slobodan Milosevic et qui ont fini
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1 par œuvrer en coordination avec Slobodan Milosevic. Et puis, nous avons
2 également divers groupes militaires, notamment les hommes d'Arkan, qui
3 étaient placés sous son contrôle. Et donc ces unités, comme les éléments de
4 preuve le montrent, ont très souvent opéré en étroite coopération avec le
5 ministère de l'Intérieur de la Serbie.
6 Ces forces ont été, dans un premier temps, déployées et ont chacune
7 rempli la fonction qui était la leur. Le but de ces opérations était très
8 manifeste, il s'agissait de procéder à un nettoyage ethnique qui
9 s'inscrivait dans le cadre de cette campagne généralisée et systématique
10 pour ces territoires qui étaient revendiqués comme étant des territoires
11 serbes. Et d'ailleurs, les observateurs internationaux en Bosnie-
12 Herzégovine, pour ces personnes, à l'époque, il était absolument manifeste
13 que l'objectif principal des opérations militaires en Bosnie-Herzégovine
14 était l'établissement de ces régions homogènes du point de vue ethnique et
15 que le nettoyage ethnique n'était pas la conséquence de la guerre mais son
16 objectif, tel que nous le voyons dans la pièce P982.
17 Madame, Messieurs les Juges, nous avons ces éléments de preuve, nous avons
18 les éléments de preuve relatifs à la contribution de l'accusé à la
19 préparation et à l'exécution de cette campagne, et la Chambre de première
20 instance peut conclure qu'il y a bel et bien des moyens de preuve qui ont
21 été présentés suivant lesquels il existait une entreprise criminelle
22 commune, tel qu'allégué au paragraphe 8 de l'acte d'accusation.
23 Ceci met un terme à mon intervention. Mme Biersay va maintenant
24 reprendre le flambeau pour vous présenter la suite des arguments de
25 l'Accusation.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
27 Madame Biersay, je vous salue à nouveau. Vous avez donc la parole.
28 Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
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1 Madame, Messieurs les Juges.
2 L'accusé a apporté une contribution substantielle à l'exécution de
3 l'objectif commun de l'entreprise criminelle commune qui était de déloger
4 par la force la population non-serbe de zones que les Serbes croyaient
5 leurs par l'histoire. La Chambre le sait bien, pour conclure à la
6 participation à une entreprise criminelle commune, il ne faut pas
7 nécessairement avoir commis un crime précis. La participation peut avoir
8 pris la forme de l'assistance à ou de la contribution à l'exécution du plan
9 ou de l'objectif commun.
10 Nous vous l'avons déjà dit, l'accusé a apporté sa contribution à
11 l'entreprise criminelle commune sous trois formes : il a promu l'idée selon
12 laquelle il fallait, par la force, découper de ce qui avait été la
13 Yougoslavie une Grande-Serbie; il a levé des volontaires armés et les a
14 déployés pour combattre en vue de réaliser cet objectif; et il s'est livré
15 à des actes de persécution, d'expulsion et de traitement inhumain par ses
16 discours d'incitation à la haine.
17 Et les éléments de preuves attestent de la contribution de l'accusé
18 et apportent également la preuve de sa responsabilité en vertu des autres
19 formes de responsabilité pénale. Parlons d'abord de sa contribution par sa
20 campagne de discours de persécution. Comment s'y est-il pris ? Ses actes,
21 ses mots, ses paroles et l'effet qu'ils ont eu doivent être compris et lus
22 dans le contexte de ce climat de tensions, d'hostilités interethniques qui
23 régnait dans une Yougoslavie qui s'émiettait.
24 La symbolique puissante du Mouvement chetnik faisait appel au
25 nationalisme ethnique, et lui, l'accusé, en a été un des partisans, un des
26 adeptes les plus populaires et les plus efficaces. La renaissance chetnik
27 qu'il a promue, le recours à une rhétorique de la violence furent une
28 contribution précieuse à l'entreprise criminelle commune parce qu'elle
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1 promouvait l'idée d'une terre serbe unifiée, homogène, et elle justifiait
2 aussi le recours à la force pour y arriver.
3 Pour preuve, par exemple, les pièces P1278 et P1196, où on retrouve
4 la rhétorique et les activités de l'accusé qui sont reconnues comme animées
5 par la haine, une incitation dangereuse à la haine et à la violence
6 ethnique. La pièce 1278 montre qu'il est suspendu, qu'il est rayé de la
7 qualité de membre de la société philosophique de Serbie en juin 1991. Le
8 conseil exécutif de la société dit ceci, je le cite :
9 "Le collègue Seselj, qui soutient une position de chauvinisme
10 militant, a ouvertement prôné la violence et la haine ethnique comme moyens
11 censés réaliser et servir les intérêts du peuple serbe."
12 Alors qu'il avait été averti de l'effet qu'avait sa campagne de
13 haine, l'accusé a généreusement propagé son message par les médias, par la
14 télévision, la radio, la presse écrite, notamment ses propres publications
15 : "Velika Srbija", ce qui veut dire littéralement "la Grande-Serbie", et
16 par "Zapadna Srbija", qui signifie "la Serbie occidentale". Il a aussi fait
17 appel à l'opinion publique directement en faisant des discours dans des
18 grands rassemblements publics. Il a été le fondateur et le directeur
19 général de "Velika Srbija". Sa popularité et son influence furent telles,
20 si grandes, que les auditeurs de Serbie l'ont élu homme de l'année en 1991.
21 Et il avait un auditoire considérable prêt à entendre sa campagne de
22 persécution et de haine. Ses discours furent quelquefois à ce point
23 incendiaires qu'ils remplissaient tous les critères qualifiant un acte
24 direct de crime. Il a commis la persécution par le discours de la haine
25 qu'il a prononcé à Vukovar et à Hrtkovci, et il a commis l'acte d'expulsion
26 et d'actes inhumains par des transferts forcés à Hrtkovci.
27 Certes, d'autres membres de l'entreprise criminelle commune n'ont pas
28 nécessairement utilisé le même discours, les mêmes termes, ni partagé la
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1 même idéologie chetnik que l'accusé, mais ces hommes avaient en commun une
2 chose, c'est le même objectif criminel commun. En raison de sa popularité
3 et du soutien politique et militaire sur lesquels il pouvaient compter, en
4 raison de cette intention qu'il partageait avec les autres membres de
5 l'entreprise criminelle commune, l'accusé en était un des membres, car non
6 seulement son idéologie remplie de haine semblait justifier les crimes
7 commis contre les non-Serbes, mais en plus de cela, elle faisait passer un
8 message simple, facile à comprendre par les Serbes de la rue, qui étaient
9 terrifiés par la situation qui se précisait dans leur pays et qui étaient
10 terrifiés par les discours que faisait l'accusé, et c'est autour de ce
11 message que se sont rassemblés les Serbes ordinaires. Il le savait, et il a
12 exploité ce filon.
13 L'accusé s'est servi de mots comme d'armes contre les non-Serbes dans
14 sa campagne de persécution. Vous avez la pièce P1263 qui montre qu'il a
15 utilisé sa publication "Velika Srbija" comme étant, je le cite, "une arme
16 puissante". Il y a un article dans "Velika Srbija" qu'il faut comprendre
17 comme étant une arme incessante que l'accusé utilisait sciemment.
18 Dans la pièce P1215, c'est lui-même qui l'explique, et je le cite :
19 "…les mots peuvent être des armes très dangereuses. Parfois, ils
20 pilonnent comme le fait un obusier."
21 Des témoins, comme Stoparic, sont venus décrire la façon dont le
22 Serbe lambda entendait ce cocktail détonnant de nationalisme et de peur que
23 cultivait l'accusé, émaillé d'appels à la vengeance. Vous avez les pièces
24 P350 et 355 qui n'en sont que deux exemples parmi tant d'autres appels à la
25 vengeance.
26 Ses mots faisaient retentir, faisaient évoquer une perspective agréable,
27 tentante, celle d'une Serbie plus grande, puissante. Et au début de cette
28 présentation, on vous a montré comment l'accusé avait fait revivre cette
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1 idéologie chetnik de la brutalité. Lorsque l'accusé utilise ce cri de
2 guerre chetnik de la Grande-Serbie, il promeut, en utilisant ses mots, il
3 justifie la subjugation, l'expulsion, le mauvais traitement infligés à des
4 non-Serbes. Parmi les éléments de preuve importants à cet égard, il faut
5 citer la pièce P1275, et vous avez aussi le témoignage du Témoin
6 Oberschall, page du compte rendu d'audience 1 971, notamment.
7 On trouve beaucoup de composantes dans cette campagne de persécution menée
8 par l'accusé. En premier lieu, il prône la force pour conquérir et
9 conserver ce qu'il considère être des terres serbes à l'extérieur de la
10 Serbie. Simultanément, il attaque et qualifie de traître quiconque propose
11 une solution pacifique au conflit. Un exemple : il prend la parole à
12 l'assemblée serbe et il se sert de ses discours pour déclarer que pour
13 parvenir aux objectifs territoriaux recherchés, il n'y a qu'une solution
14 militaire, et pas de solution politique en Croatie qui nous conviendrait "à
15 nous Serbes", dit-il. Pièce P1257.
16 Pour accroître la tension, l'accusé martèle ceci publiquement. Il proclame
17 que les Serbes, les Croates et les Musulmans de Bosnie ne peuvent tout
18 simplement pas coexister. Il rejette, il condamne toute idée de
19 négociations qui se baserait sur cette idée. Pour référence, Madame,
20 Messieurs les Juges, permettez-moi de vous renvoyer aux pièces P1298 et
21 P1211.
22 Autre exemple, en octobre 1991, en réponse à des projets de propositions
23 avant la Conférence diplomatique de La Haye qui permettraient que des
24 parties de la Yougoslavie deviennent indépendantes tout en conservant un
25 noyau fédéré et fédéral, l'accusé profère ces menaces. C'est la pièce P1259
26 -- et il s'adressait à d'autres dirigeants serbes lorsqu'il a dit ceci. Je
27 le cite :
28 "Je peux vous le garantir, le Parti radical serbe va exhorter le peuple à
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1 se soulever par les armes. Ne jouez pas avec vos vies et acceptez ce que je
2 vous dis."
3 La deuxième composante de cette campagne de persécution menée par l'accusé,
4 elle consiste à mobiliser une force serbe armée et à justifier la
5 commission de crimes, et pour ce faire, l'accusé propage un climat de peur,
6 ce qui fait que les Serbes eux-mêmes peuvent croire qu'ils sont menacés.
7 Vous avez le rapport du Témoin Anthony Oberschall. Il est aussi limpide que
8 sa déposition. Il s'agit là de la pièce P5. Le Témoin Oberschall vous a dit
9 que l'outil de propagande le plus efficace pour pousser une audience bien
10 ciblée à agir de façon violente, c'est sans relâche insister, accroître
11 l'anxiété, la peur, en répétant incessamment les messages de menaces.
12 L'accusé et son organisation, SRS/SCP, ont, de façon incessante,
13 évoqué la victimisation et le génocide subis par les Serbes au cours de la
14 Seconde Guerre mondiale.
15 Peut-on préparer la diffusion de la pièce P62. Il s'agit d'un extrait qui
16 montre l'accusé en mai 1991, lorsqu'il a conjuré le spectre de hordes
17 d'Oustachi qui se lançaient à l'assaut des Serbes en Croatie.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
20 "Nous, Serbes, nous sommes en danger. Les hordes fascistes croates se
21 lancent à l'assaut des femmes serbes, des enfants serbes. Les hordes
22 fascistes croates sont en train de planifier le génocide des Serbes."
23 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
24 Mme BIERSAY : [interprétation] Vous avez cette foule à laquelle il
25 s'adresse. Et que dit-il ?
26 "Les racines mêmes de la cause serbe sont en péril. Des hordes d'Oustachi
27 se lancent à l'assaut de villages serbes, de femmes serbes, d'enfants
28 serbes. Les hordes oustachi essaient de parachever le génocide de la nation
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1 serbe."
2 Hier, l'accusé s'est présenté comme étant l'élément fédérateur des peuples
3 ethniques de l'ex-Yougoslavie.
4 Lui et le SRS/SCP n'ont cessé de lancer cette menace, cet
5 avertissement, ils disaient que les non-Serbes constituaient une menace
6 physique, démographique, culturelle et même économique pour les Serbes. A
7 titre illustratif, je prends quelques échantillons parmi les éléments de
8 preuve, notamment la pièce P1280 et la pièce P1205.
9 Troisième composante de cette campagne de persécution menée par l'accusé.
10 Il s'est servi du prétexte d'injustice historique pour justifier la
11 revanche et la violence comme étant moralement légitimes et nécessaires.
12 Par exemple, à la pièce P35, voici ce qu'il dit en guise de mise en garde
13 en juin 1991, je cite :
14 "Tous ceux qui n'ont pas la conscience tranquille ont bien raison d'avoir
15 peur de nous, les Serbes. Ils ont bien raison de nous craindre. Nous, les
16 Serbes, nous avons trop oublié, trop pardonné pendant l'histoire."
17 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
18 Mme BIERSAY : [interprétation] "Nous avons dit aux Croates que si jamais
19 ils avaient recours à des activités génocidaires contre --"
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, qu'est-ce que vous voulez dire ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'exige que l'on mette immédiatement à l'écart
22 cette interprète parce qu'elle interprète exactement l'inverse de ce que
23 dit Mme Biersay. Mme Biersay a dit :
24 "Tous ceux qui n'ont pas la conscience nette devraient nous craindre,
25 nous, Serbes."
26 Et l'interprète a dit exactement l'inverse. Elle a dit :
27 "Tous ceux qui ont une conscience nette et claire doivent avoir peur
28 des Serbes."
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1 Alors que Mme Biersay a dit : "Tous ceux qui n'avaient pas la
2 conscience claire." Et ce n'est que par hasard que j'ai noté ceci.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, comme M. Seselj a une grande connaissance de
4 la langue anglaise, il s'est rendu compte d'un problème. Alors, pour éviter
5 cela, relisez la phrase.
6 Mme BIERSAY : [interprétation] Ce sera un plaisir, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et je demande aux interprètes de traduire
8 exactement. Allez-y.
9 Mme BIERSAY : [interprétation] "Tous ceux qui n'ont pas la conscience
10 tranquille devraient avoir peur de nous, les Serbes. Ils ont raison de nous
11 craindre. Nous, Serbes, nous avons trop oublié, nous avons trop pardonné au
12 cours de l'histoire. Nous avons dit aux Croates que si jamais ils se
13 remettaient à se livrer à des activités génocidaires contre le peuple
14 serbe, que non seulement nous allions nous venger pour chaque victime
15 tombée, mais que nous allions aussi régler nos comptes et les comptes des
16 victimes de la Première Guerre mondiale et de la Deuxième Guerre mondiale."
17 Ce genre de déclaration publique avait pour objet d'encourager les Serbes à
18 commettre des crimes contre les non-Serbes et de les absoudre de la
19 responsabilité juridique, de la responsabilité morale pour avoir commis de
20 tels crimes. Permettez-moi de vous renvoyer à la pièce P3. C'est l'addendum
21 au rapport Oberschall, qui donne quelques exemples de ce genre de discours
22 justificateur.
23 Dernière composante de la campagne de persécution menée par l'accusé, son
24 discours a aussi contribué à la création d'un environnement de coercition
25 dans lequel les non-Serbes se sont sentis en danger, menacés. Ainsi, en mai
26 1991, comme le montrent par exemple les pièces P1001 et P1003, l'accusé
27 s'est servi d'un langage incendiaire à propos du génocide subi dans le
28 passé par les Serbes et a invité à la vengeance en guise de représailles
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1 après ces crimes du passé. Il a dénigré et avili les Croates, Musulmans et
2 autres non-Serbes, leur a nié toute légitimité en tant que groupes
3 nationaux, tout ceci pour saper l'idée que ces gens avaient des droits
4 humains, et tout ceci pour approuver la destruction de ces peuples.
5 C'est sciemment qu'il a utilisé des stéréotypes ethniques, par
6 exemple, la pièce P1295, et ce recours intentionnel à encourager au mépris,
7 à la haine du non-Serbe, et avait pour objectif d'inciter à la violence
8 contre ceux qui n'étaient pas Serbes.
9 Je remarque qu'à la page 48 du compte rendu d'aujourd'hui, ligne 21, c'est
10 peut-être moi qui ai fait un lapsus au niveau de la cote. C'est la pièce
11 P1295 que je voulais mentionner. Merci.
12 C'est de façon systématique que l'accusé s'est servi du terme "Oustachi",
13 sans que ce soit un langage chiffré. Il l'a fait pour dénigrer, pour avilir
14 tous les Croates, pas seulement en tant que collabos nazis et fascistes de
15 la Deuxième Guerre mondiale, mais il a qualifié tous les Croates de menace
16 de mort pour les Serbes. C'est la raison pour laquelle il a sans arrêt, de
17 façon répétée, utilisé ce terme tout au long du conflit.
18 Tout comme il s'est servi de la symbolique profonde et puissante des
19 Chetniks de la Deuxième Guerre mondiale pour mobiliser les Serbes, il a
20 étiqueté tous les Croates d'Oustachi, tout ceci pour raviver le souvenir
21 des atrocités fascistes commises sur les Serbes pendant la Deuxième Guerre
22 mondiale et pour faire de tous les Croates d'aujourd'hui une menace pour
23 les Serbes. Le Témoin VS-004 vous a expliqué la signification qu'il faut
24 donner à ceci. Voici ce qu'il a dit exactement, je le cite :
25 "Le mot 'Oustachi', pour tous les Serbes, c'est la pire des choses qu'on
26 peut dire, parce que pendant toute l'histoire des Serbes, ce sont les
27 Oustachi qui ont commis les pires crimes contre les Serbes. C'est la pire
28 chose qu'il peut y avoir au monde. C'est le nom du bourreau."
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1 Il s'agit ici de la page du compte rendu d'audience 3 380 et de la page 3
2 624.
3 Même si l'on regarde le programme politique du début 1990 - je parle ici du
4 Mouvement chetnik-serbe, pièce P27 - là, on parle aussi d'un nouveau
5 dirigeant oustachi qui a vu le jour en Croatie et qui est animé d'une
6 nouvelle politique génocidaire dirigée contre les Serbes. Ceci est répété
7 dans le manifeste politique du SRS en 1991, pièce P153, page 11. L'accusé
8 récidive dans la pièce P179.
9 De plus, l'accusé incite à rouvrir la boîte de Pandore, qui est celle
10 de la responsabilité du peuple croate pour les crimes commis par les
11 Oustachi pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il le dit et il le redit. Il
12 dit : Il faut que les Croates soient punis pour les crimes qui ont été
13 commis. Prenez, par exemple, la pièce P32. C'est de façon répétée qu'il
14 parle -- lorsqu'il parle des Croates de souche et de tous ceux qui
15 représentent la Croatie d'aujourd'hui, il les qualifie d'oustachi.
16 Les Témoins Stoparic et Karlovic vous l'ont dit, les volontaires de
17 l'accusé se faisaient l'écho de ce langage, de cette terminologie. Par
18 exemple, ils insultaient les détenus croates d'être des Oustachi, en plus
19 des autres termes péjoratifs et négatifs qu'ils utilisaient.
20 "Velika Srbija", la publication mensuelle de l'accusé, a publié des
21 articles tels que la pièce P1289, lesquels critiquaient les échanges de
22 prisonniers et disaient que les prisonniers de guerre oustachi devaient
23 payer pour les crimes qu'ils avaient commis.
24 Au cours de la période qui a précédé la guerre, le discours politique
25 de l'accusé disait clairement à son auditoire que pour lui, tous les
26 Croates étaient des Oustachi. Il l'a dit lui-même expressément, par exemple
27 dans la pièce P34. Je le cite :
28 "Comment est-on supposé négocier avec les Oustachi ? Est-ce que vous avez
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1 vu aujourd'hui qu'il n'y a que des Oustachi dans la population croate ? Les
2 exceptions sont des plus rares."
3 En avril 1992, c'est la pièce P1194, l'accusé déclarait qu'il n'y avait que
4 "16 bons Croates" qui avaient le droit de rester en Serbie. Le reste, il
5 fallait les chasser de la Serbie.
6 Si on lui posait des questions, si on formulait des critiques à
7 propos de l'expulsion de non-Serbes de Serbie, l'accusé ne faisait que
8 répéter à l'envi la mythologie chetnik que l'expulsion des non-Serbes
9 n'était rien que "un échange civilisé de population". C'est ce que disait
10 l'idéologie chetnik, et c'est l'idéologie que l'accusé lui-même a
11 pérennisée.
12 Le Témoin Stojanovic, par exemple - il s'agit ici de la pièce P528 -
13 a décrit la façon dont l'accusé disait aux volontaires avant qu'ils ne
14 partent au front qu'il fallait chasser les Oustachi où qu'on les trouve.
15 Nous allons parler plus tard de l'effet dévastateur qu'a eu cette étiquette
16 d'Oustachi que l'accusé a mis sur tous les Croates. C'est devenu
17 particulièrement clair à Vukovar et à Hrtkovci. Vous le voyez dans les
18 pièces P298 et P1201. Ces zones qui avaient été croates, il a dit que
19 c'étaient des hauts lieux, des forteresses oustachi, le lieu où il y avait
20 les pires Oustachi.
21 Le Témoin Baricevic, aux pages du compte rendu d'audience 10 755-25
22 [comme interprété] à 10 756-12 [comme interprété] a dit ceci :
23 "On nous a enseigné l'histoire, et dans la façon dont on nous enseignait
24 l'histoire, les Chetniks et les Oustachi étaient des ennemis du peuple
25 yougoslave."
26 Pour ceux qui étaient à Vukovar et qui ont entendu l'accusé dire ceci : Il
27 ne faut pas qu'un seul Oustachi sorte vivant de Vukovar; pour ceux qui
28 l'ont entendu qualifier tous les Croates d'Oustachi à Hrtkovci, le message
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1 était des plus clairs. Tous les Croates étaient des ennemis et devaient
2 être tués, et le seraient s'ils continuaient de rester là où ils étaient,
3 là où ses volontaires et leurs sympathisants se trouvaient.
4 L'accusé a également avili, dénigré et menacé les Musulmans avec ses propos
5 incendiaires. Par exemple, dans la pièce P1180, lorsqu'il s'est adressé à
6 la foule en juin 1991, l'accusé a annoncé qu'il disposait de bastions
7 extrêmement puissants au nord-est de la Bosnie et a déclaré fièrement que :
8 "Le simple fait que dans certains endroits, les Croates et les Musulmans
9 n'ont pas dormi dans leurs maisons depuis des jours, évoque le fait que les
10 actions menées par le Mouvement chetnik-serbe n'est pas si insignifiant que
11 cela."
12 En d'autres termes, le Mouvement chetnik-serbe a été couronné de succès et
13 a réussi à inculquer la peur aux Croates et aux Musulmans, à tel point
14 qu'ils n'osaient pas dormir chez eux. Et de cela, il est fier, et il l'a
15 dit aux Musulmans de Bosnie. Il a dit :
16 "Tout d'abord, la Bosnie est une terre serbe et elle restera serbe. Si cela
17 ne vous plaît pas, il y a toujours l'Anatolie, vous pouvez vous y rendre.
18 Pour ce qui est de la division des républiques, c'est une division
19 dépassée, et le peuple serbe ne la reconnaîtra jamais et ne l'acceptera
20 jamais."
21 Avec une fréquence grandissante, l'accusé a continué de proférer ses
22 menaces avec un bain de sang en Bosnie. Ceci est parvenu à un point
23 culminant avant le mois d'avril 1992, lorsqu'il y a eu les prises de
24 contrôle par les Serbes en Bosnie et la mise en place des dirigeants serbes
25 de Bosnie dans les variantes A et B, tel que décrit aux Juges de la
26 Chambre. Les Juges de la Chambre disposent des pièces P01192, ainsi que de
27 la pièce P1293, la pièce P685, la pièce 1324.
28 La rhétorique enflammée de l'accusé préparait le terrain pour une
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1 violence discriminatoire contre les non-Serbes qui entouraient ces prises
2 de contrôle. A la pièce P1324, par exemple, on voit qu'il se sert d'une
3 conférence de presse à Belgrade pour menacer et intimider les Musulmans de
4 Bosnie. Les Musulmans de Bosnie ont rejeté de façon unilatérale les
5 ultimatums sur le territoire serbe. L'accusé a promis une "effusion de
6 sang". Il a promis "une guerre civile sanglante", et il a promis des
7 "rivières de sang", et que celles-ci s'ensuivraient.
8 En qualifiant ceux qui étaient partisans de l'indépendance en Bosnie
9 d'intégristes islamiques, il a employé le terme de "Chetnik", entre autres,
10 pour évoquer, entre autres, les souvenirs de meurtres en masse de Musulmans
11 par les Chetniks pendant la Deuxième Guerre mondiale.
12 Dans une autre conférence de presse du même mois, c'était au mois de
13 mars 1992, telle que décrit dans la pièce P1298, il a une nouvelle fois
14 proféré des menaces. Il a dit qu'une "effusion de sang dans de plus grandes
15 proportions" s'ensuivrait si des soi-disant intégristes musulmans
16 souhaitaient jouer avec le feu, et il a appelé la terre, que d'autres
17 membres de l'entreprise criminelle commune convoitaient, comme s'appelant
18 la Grande-Serbie.
19 Les Juges de la Chambre de première instance se souviendront des
20 références de l'accusé au bain de sang qui se fait l'écho de l'allocution
21 empreinte de menaces de Radovan Karadzic devant l'assemblée en octobre
22 1991.
23 En définitive, devant un rassemblement politique à grand renfort de
24 publicité en Serbie en mai 1992, l'accusé était accompagné de Nikola
25 Poplasen. Contrairement à ce que l'accusé a prétendu devant la Chambre
26 hier, Poplasen était en réalité le président en exercice du SRS en Bosnie
27 au mois de mai 1992. Des éléments pertinents à cet égard comprennent les
28 pièces P218, P1205 à la page 8, et le P1208 à la page 15. Lors du
Page 16754
1 rassemblement, l'accusé a résumé les conquêtes territoriales des forces
2 serbes et a insisté sur le fait qu'il fallait encore en faire davantage.
3 L'accusé a continué à promouvoir le nettoyage, le nettoyage du côté
4 bosniaque de la Drina, comme il le décrit lui-même dans la pièce P1200, et
5 je cite :
6 "La seule chose qui reste en Bosnie-Herzégovine est le nettoyage de
7 la rive gauche de la Drina et la prise de contrôle du corridor entre la
8 Krajina de Bosnie, la Semberija et la libération de la partie serbe de
9 Sarajevo. Tout le reste est déjà entre nos mains."
10 "Entre nos mains déjà."
11 Pendant les mois suivants, la mise en place de ce "nettoyage des non-
12 Serbes", les volontaires du SRS et du Mouvement chetnik-serbe ainsi que les
13 sympathisants et d'autres forces serbes qui coopéraient avec eux ont commis
14 activement des crimes brutaux dans le Grand Sarajevo, à Mostar et dans la
15 région de Nevesinje.
16 L'accusé a contribué à l'entreprise criminelle commune en mettant à
17 disposition les volontaires de son parti SRS pour que ceux-ci soient
18 intégrés aux forces de combat qui devaient mettre ceci en œuvre. Il était
19 de plus en plus conscient du pouvoir de mobilisation de la propagande de
20 persécution au sens général du terme. Il a reconnu à la pièce P1337 que :
21 "Des spectateurs passifs sont tous des combattants potentiels. Il
22 faut simplement les éclairer, leur apprendre, leur donner une éducation
23 nationaliste, éveiller leur conscience patriotique et leur inspirer l'amour
24 de la patrie. La propagande se fonde sur le fait qu'une grande majorité de
25 personnes sont naturellement disposés à croire sans discernement tout ce
26 qu'ils lisent, entendent ou voient à la télévision."
27 Dans le contexte de la tension créée par la désintégration de l'ex-
28 Yougoslavie et dans le cadre d'un conflit interethnique ouvert, cette
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1 éducation nationaliste, d'après l'Accusation, était un euphémisme destiné à
2 inciter à la haine contre les non-Serbes.
3 Le fondement violent idéologique à base de persécution du SRS et du
4 SCP, sa structure de style militaire ainsi que la position de l'accusé au
5 sein de ce parti en tant que dirigeant incontesté lui ont permis de
6 mobiliser et de contrôler un nombre incalculable de sympathisants. Ceux-ci
7 comprenaient des volontaires qui ont été envoyés pour morceler certaines
8 parties ou prendre certaines parties de la Grande-Serbie de la Croatie et
9 de la Bosnie. D'après le chef du cabinet de guerre du SRS, Ljubisa
10 Petkovic, tel que décrit à la pièce P1275, au mois de mai 1991, il y avait,
11 d'après lui, 15 000 Chetniks qui appartenaient aux rangs de l'accusé.
12 L'accusé est tout à fait conscient de l'influence qu'il exerçait, se
13 targuant du fait qu'il exerçait une très grande influence sur l'opinion
14 publique serbe, même à l'extérieur de la Serbie, et que des milliers de
15 volontaires serbes l'écoutaient. La Chambre de première instance dispose de
16 pièces pertinentes : le P1120 et le P1248.
17 Sa capacité à proposer une force de combat qui pouvait assister à la
18 mise en œuvre de l'entreprise criminelle commune fait que sa mise à
19 disposition d'hommes était considérable et substantielle. Ceci est
20 particulièrement manifeste dans le fait que l'accusé estimait qu'il était
21 habilité à promettre cette assistance pratique sur l'ensemble du territoire
22 de l'ex-Yougoslavie. En conséquence, les autres dirigeants de l'entreprise
23 criminelle commune et d'autres membres ont commencé à se tourner vers lui
24 lorsqu'il y avait un besoin en hommes. Le fait qu'il puisse à la fois faire
25 ces promesses et les tenir dément toute suggestion que l'accusé était une
26 simple personnalité politique déconnectée de toute opération ou
27 organisation militaire.
28 La campagne de persécution de l'accusé permettait de recruter et de
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1 motiver les forces combattantes afin de prendre la Grande-Serbie. Par
2 exemple, nous souhaitons maintenant montrer la pièce P38. C'est l'édition
3 de juillet 1991 de sa publication "Velika Srbija". Sur la première page, il
4 y a une carte sur laquelle est inscrit "Grande-Serbie" et prétend que des
5 gardes chetniks étaient présents, de la Macédoine jusqu'aux plages de
6 l'Adriatique.
7 En bas à gauche, vous remarquerez qu'il y a quelques propos suivis de
8 points d'exclamation, et ce qu'on peut y lire, c'est ceci :
9 "Frère serbe, n'oublie pas. Ce sont des terres des Serbes."
10 Les frontières montrées sont celles que l'accusé ainsi que le SRS et
11 le SCP destinaient à la Grande-Serbie. Je demande aux Juges de la Chambre
12 de se reporter à la pièce P1074.
13 Quelques semaines à peine avant que l'accusé n'envoie ses volontaires
14 à Borovo Selo en Croatie, où ils ont participé au meurtre d'officiers de
15 police croates, l'accusé s'est exprimé devant un auditoire très important à
16 Plitvice, en Croatie.
17 Avant que de vous montrer cela, il s'agit de la pièce P339, datée du
18 17 avril 1991. On y voit l'accusé faisant l'éloge de Milan Babic et de la
19 création de la SAO de Krajina. Ce qui est encore plus important, c'est que
20 sur cette vidéo, vous constatez la popularité de l'accusé ainsi que l'effet
21 qu'a son discours sur cette terre en Croatie, à juste titre une terre
22 serbe.
23 Et je souhaite que nous visionnions maintenant cette vidéo.
24 [Diffusion de la cassette vidéo]
25 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
26 "Journaliste : Dans une telle ambiance, le voïvode Seselj a déjà annoncé au
27 début de la réunion, il a commencé son allocution lors de ce rassemblement
28 politique.
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1 'Voja' [phon], Serbie, Serbie, Serbie, Serbie, Serbie.
2 Seselj : Ici vit le peuple serbe. Ici, c'est la terre serbe et elle
3 restera serbe pour toujours.
4 Frères serbes, sœurs serbes, vous vous trouvez devant les lignes de
5 front défendant la serbe cause et les frontières serbes. Vous êtes dans une
6 position très difficile. Vous êtes la portée même de toute la serbité.
7 Le journaliste : Ils leur ont dit qu'ils allaient les laisser tranquilles
8 et les Serbes en Croatie n'ont qu'un parti, le Parti démocratique serbe.
9 Vous avez des dirigeants sages et courageux dirigés par cet homme.
10 Ceux qui divisent la Serbie seront appelés des traîtres.
11 Il n'y a qu'Ante Markovic, ses mercenaires et ces services du
12 renseignements étrangers qui croient qu'il s'agit de problèmes importants
13 aujourd'hui, que votre défense n'est pas importante. Votre défense et votre
14 protection sont les plus importantes.
15 Plutôt que de les calmer, Seselj a envoyé un message et a rassemblé
16 les personnes.
17 Seselj : Nous vous envoyons un message à tous les nouveaux Oustachi et
18 chefs d'Etat du régime oustacha en Croatie : les dirigeants serbes ont été
19 frappés par les Oustachi en Krajina serbe. Une tête serbe est tombée au
20 Srem occidental et en Slavonie également. Nous allons les venger."
21 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
22 Mme BIERSAY : [interprétation] Encore une fois, quelques jours plus tard, à
23 Jagodnjak, en Croatie, l'accusé a évoqué le génocide des Serbes et a
24 déclaré que les Croates ne pouvaient qu'avoir des terres à l'ouest de la
25 ligne KOKV, la ligne de Karlobag-Ogulin-Karlovac-Virovitica."
26 Je souhaite maintenant vous montrer la pièce P70, qui est également une
27 vidéo, et je vais demander à ce que les Juges de la Chambre remarquent les
28 applaudissements lorsqu'il évoque le refrain notoire de la ligne KOKV.
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1 [Diffusion de la cassette vidéo]
2 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
3 "Les Croates peuvent, en ce qui nous concerne, quitter la Yougoslavie s'ils
4 le souhaitent à tout moment. Nous les laissons partir librement. Ils savent
5 qu'ils ne vont pas emporter avec eux une seule partie du territoire serbe,
6 pas une partie du territoire lorsqu'il y a des villages serbes qui ont été
7 détruits, des églises serbes détruites, des fosses communes serbes, des
8 camps serbes, les Serbes à Jasenovac. Si nous autorisons cela, nous serons
9 indignes de nos ancêtres couverts de gloire. Nous aurions honte face à nos
10 descendants. Les Croates peuvent créer ce nouvel Etat, mais seulement à
11 l'ouest de la ligne Karlobag-Ogulin-Karlovac-Virovitica. Tout ce qui est à
12 l'est de cette ligne est serbe."
13 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
14 Mme BIERSAY : [interprétation] Et il a dit aux personnes qui étaient là à
15 ce rassemblement politique que s'ils cédaient une partie du territoire qui
16 était à juste titre serbe, "nous serions indignes de nos ancêtres qui se
17 sont couverts de gloire et honteux devant nos descendants."
18 Son message de nettoyage ethnique aux fins de parvenir aux frontières
19 occidentales du KOKV est tout à fait clair aux yeux de ses volontaires, que
20 nous trouvons à la pièce P57 du 19 novembre 1991.
21 Egalement, nous pouvons constater ceci dans cette séquence vidéo. Je
22 demande aux Juges de la Chambre de regarder ce drapeau tristement célèbre
23 chetnik qui comporte un crâne ou une tête de mort.
24 [Diffusion de la cassette vidéo]
25 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
26 "Le journaliste : Les milices serbes qui posent pour une photographie. 'La
27 liberté ou la mort' est le slogan sur le drapeau. Soyez libre ou vous êtes
28 mort --"
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1 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise qu'elle ne peut pas entendre l'anglais.
2 [voix sur voix]
3 "La guerre sera terminée lorsque nous aurons nos frontières Karlobag-
4 Karlovac-Ogulin-Virovitica. Tous les endroits où vivent des Serbes doivent
5 être libres. Vous le savez. Vous devez nettoyer cela des Croates.
6 Le journaliste : Un bon nombre d'entre eux font partie de la milice et sont
7 des purs et durs, certainement pas du côté serbe --"
8 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
9 Mme BIERSAY : [interprétation] Un volontaire dit :
10 "La guerre sera terminée lorsque nous aurons nos limites Karlobag-Karlovac-
11 Ogulin-Virovitica. Tous les endroits où vivent des Serbes doivent libres.
12 Il faut nettoyer les Croates."
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs les Juges, Madame le Juge, je dois
14 intervenir, il s'agit d'un mensonge éhonté. L'homme qui donne cette
15 déclaration a dit, je cite : "Nous devons régler nos comptes avec les
16 Croates." Et Mme Biersay, ici, ment devant l'opinion publique entière en
17 disant : Nous devons nettoyer les Croates. Et j'en appelle à vous pour que
18 vous ne permettiez pas cela. Vous avez vu vous-mêmes, dans le texte et la
19 traduction qui vous ont été remis, vous avez vu les propos tenus par cet
20 homme. Moi, j'écoutais le canal serbe. Mme Biersay dit ici quelque chose
21 qui est complètement différent. C'est une chose de régler ses comptes, et
22 c'est une autre chose de les nettoyer --
23 Mme BIERSAY : [interprétation] Je vais interrompre. L'Accusation n'a eu
24 aucun droit de soulever des objections pendant la présentation de M.
25 Seselj.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- simplement, il y a un problème de
27 traduction.
28 Mme BIERSAY : [interprétation] C'est l'accusé qui dit qu'il y a un problème
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1 de traduction. Il a une heure pour régler tout problème s'il y a confusion
2 ou déformation des faits présentés par l'Accusation. Je crois qu'il
3 faudrait déduire ce temps-ci de son temps.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans mon souvenir, celui qui intervient, il me
5 semble que c'est un Américain qui vient de New York, et il explique les
6 raisons de sa présence et du combat. Donc, il y a un problème, à savoir
7 s'il dit "régler les comptes" ou "nettoyer".
8 Alors, est-ce que vous prendriez sur votre temps pour qu'on revoie la
9 vidéo, qui dure que deux minutes ?
10 Mme BIERSAY : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord pour
11 revisionner une séquence vidéo sur le fondement d'une intervention de
12 l'accusé qui n'est pas appropriée. La pièce a été versée au dossier, la
13 traduction a été lue, et ceci a été consigné au compte rendu d'audience.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président --
15 Mme BIERSAY : [interprétation] Cette question devrait être adressée pendant
16 son temps. Ceci n'est pas équilibré.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, puisqu'une interruption
18 est survenue, j'ai été contraint d'intervenir. Je suis d'accord pour que
19 l'on retire deux minutes de mon propre temps afin que l'on refasse passer
20 cet extrait vidéo pour qu'on puisse voir que j'ai raison, pour qu'on puisse
21 se convaincre que cet homme dit : Régler nos comptes avec les Croates, et
22 non pas que nous nettoyions les Croates. Voilà, deux minutes de mon temps.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous avez dit que vous acceptez qu'on retire
24 deux minutes de votre temps, quand vous aurez la parole, vous repasserez la
25 vidéo. Bien.
26 Madame Biersay, continuez.
27 Mme BIERSAY : [interprétation] Ce qu'a dit ce volontaire était que
28 l'objectif suivant -- la guerre serait terminée lorsque l'accusé -- que la
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1 ligne KOKV serait réalisée. C'est là où je voulais en venir.
2 Les propos de l'accusé ont eu un effet marqué sur les nationalistes
3 serbes qui l'ont entendu. Certains ont répondu tout de suite après l'avoir
4 entendu, tel que décrit par le Témoin Stojanovic dans la pièce P528;
5 Stoparic, à la page du compte rendu d'audience 2 240 [comme interprété] à 2
6 441; ainsi que le Témoin VS-2, à la page du compte rendu d'audience 6 526 à
7 6 527.
8 La position de l'accusé en tant que dirigeant et commandant chetnik
9 incontesté au sein du mouvement SRS/SCP, ainsi que son vernis de légitimité
10 en tant qu'homme politique, ont facilité son endoctrinement des
11 volontaires, plus particulièrement pour inculquer la peur et la haine pour
12 justifier une séparation ethnique et un déplacement par la force des non-
13 Serbes.
14 Tel que relaté dans la pièce P1074 par le chef adjoint du cabinet de guerre
15 du SRS, avant que les volontaires ne partent au front, l'accusé plantait
16 dans l'esprit des volontaires la haine pour les non-Serbes en leur disant :
17 "Soyez des héros", "tuez des Oustachi" et "battez-vous pour la Grande-
18 Serbie". Le discours haineux de l'accusé a fortement marqué les recrues du
19 SRS et du SCP décrivant clairement l'objectif pour lequel ils se battaient.
20 A la pièce P528, il est dit ce qui suit :
21 "Un des objectifs de Seselj était de nettoyer ethniquement certaines
22 parties de la Croatie qui, d'après lui, étaient une terre serbe."
23 Les volontaires du Mouvement chetnik-serbe et les sympathisants qui
24 ont commis des crimes essentiellement pour des raisons ethniques.
25 Je vais maintenant afficher à l'écran une photographie qui a été versée au
26 dossier sous le numéro P184. Ceci a été évoqué, me semble-t-il, dans la
27 déposition de VS-4.
28 En tant que commandant suprême, l'accusé a utilisé le Mouvement
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1 chetnik-serbe et le SRS pour mettre en œuvre l'objectif de l'entreprise
2 criminelle commune. Des hauts membres du cabinet de guerre du SRS ont
3 relaté que leur leader à la fois du SRS et du Mouvement chetnik-serbe,
4 l'accusé, avait pris des décisions importantes à propos de leurs politiques
5 et des opérations qui devaient être menées. Son Mouvement chetnik-serbe et
6 le SRS, ses cabinets de Guerre et ses cellules de Guerre, étaient destinés
7 à étayer, en tout cas à promouvoir son mouvement pour les Serbes à
8 l'extérieur de la Serbie. Ceci comprenait le déploiement de volontaires.
9 L'accusé a nommé le Témoin Ljubisa Petkovic à la tête du cabinet de
10 guerre et le Témoin Zoran Rankic en tant que chef adjoint. Ces déclarations
11 décrivent comment l'accusé a gardé le pouvoir à la fois sur la cellule de
12 Crise et le cabinet de guerre. Rankic, par exemple, a dit que :
13 "Il avait tout pouvoir et qu'il prenait toutes les décisions lui-
14 même."
15 L'accusé était "toujours trois étapes au-dessus des autres", et ce n'était
16 que l'accusé qui avait le pouvoir de promouvoir qui que ce soit au sein du
17 SRS/Mouvement chetnik-serbe.
18 L'accusé se gaussait de ces rôles pendant le conflit. Il a parlé de ses
19 titres militaires, qui comprenaient le terme de commandant, de commandant
20 suprême, voire même de "commandant des détachements opérationnels du
21 Mouvement chetnik-serbe de la patrie". Ceci se trouve étayé par les pièces
22 P59, P154 et P1058.
23 Il aimait insister sur le fait qu'il exerçait toujours le contrôle sur la
24 situation sur le terrain. Les volontaires du SRS et du Mouvement chetnik-
25 serbe reconnaissaient également que l'accusé était leur commandant suprême.
26 Pour d'aucuns, c'était un dieu. Le Témoin Kopic, aux pages du compte rendu
27 d'audience 5 892, 5 893 et 5 913, a parlé dans sa déposition de ce
28 phénomène.
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1 L'accusé n'a pas hésité à utiliser son autorité, en déclarant :
2 "C'est moi qui organise les interventions par notre organisation de
3 guérilla et je définis les objectifs de l'attaque et les endroits que nous
4 devons conquérir."
5 Des éléments de preuve pertinents comprennent les pièces P154 et P59, ainsi
6 que les dépositions de témoins, notamment le Témoin VS-33.
7 De surcroît, l'ordre du jour de l'accusé était extrême et nationaliste; sa
8 position, militante. Il souhaitait ne jamais céder une partie du
9 territoire. Les terres serbes lui conféraient une autorité morale sur les
10 membres de la TO et sur ses volontaires qui l'admiraient et qui
11 partageaient sa doctrine de la Grande-Serbie. Comme l'atteste le Témoin VS-
12 002 :
13 "C'était un voïvode," dit-il. "Nous n'aurions jamais refusé d'obéir à son
14 ordre."
15 Madame, Messieurs les Juges, je vais maintenant aborder un autre chapitre,
16 et c'est peut-être l'heure de la pause, alors je me retourne vers vous. Je
17 ne sais pas ce que je dois faire. Souhaitez-vous que je poursuive ou est-ce
18 un bon moment pour faire la pause ?
19 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause.
20 Juste une précision.
21 Vous avez cité une phrase :
22 "J'organise les interventions de notre organisation de guérilla," et
23 cetera.
24 Quel est le document ?
25 Mme BIERSAY : [interprétation] Il s'agit de deux pièces que j'ai citées.
26 C'est la pièce P59, plus précisément page 3 de la version anglaise.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci.
28 Nous allons faire, donc, 20 minutes de pause.
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1 Vous avez dû utiliser deux heures et 40 minutes, quelque chose comme ça.
2 Mme BIERSAY : [interprétation] Ensemble.
3 --- L'audience est suspendue à 17 heures 43.
4 --- L'audience est reprise à 18 heures 04.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
6 Madame Biersay, vous avez la parole.
7 Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 La première chose que l'on m'a demandé de faire est de me corriger. J'ai
9 donné aux Juges de la Chambre une référence inexacte lorsque j'ai dit que
10 la citation provenait de la pièce P59. Je l'avais sous les yeux, mais ceci
11 n'est pas exact. C'est la pièce P39, et non pas 59.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je vous ai posé la question, c'est bien que
13 j'avais un doute.
14 Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, je sais. Vous avez toujours raison,
15 comme vous le dites, Monsieur le Président.
16 Le Mouvement chetnik-serbe et le SRS ont non seulement coopéré avec des
17 membres de l'entreprise criminelle commune aux fins de former et d'armer
18 des volontaires, mais l'ont fait eux-mêmes. Comme nous l'avons évoqué par
19 le passé, la contribution significative des accusés à la mise à disposition
20 de volontaires a été rendue possible par le biais de l'assistance d'autres
21 membres de l'entreprise criminelle commune. Ljubisa Petkovic, qui
22 travaillait pour l'accusé en tant que chef du cabinet de guerre, a maintenu
23 des contacts avec l'état-major général de la JNA et le ministre serbe de
24 l'Intérieur afin de faciliter cette assistance. A la pièce P1234, l'accusé
25 décrit le rôle de Petkovic, qui était d'organiser les volontaires, de les
26 envoyer sur les champs de bataille, d'obtenir des armes et des uniformes et
27 de mettre à disposition le transport, et cetera.
28 A la pièce P1001, le journal de l'accusé, "Velika Srbija", a reconnu que
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1 les radicaux avaient organisé plusieurs camps dans la région de Sombor aux
2 fins d'entraîner les volontaires, y compris un camp à Prigrevica, qui était
3 dirigé par un Chetnik du nom de Duc Jovo Ostojic. Le Témoin Gusalic a
4 témoigné sur la prise de contrôle par les Serbes de Bijeljina, où les
5 hommes de Seselj et les hommes d'Arkan ont participé à la fois à
6 l'entraînement et à l'armement de la population serbe locale. A Sarajevo,
7 le voïvode, l'accusé Branislav Gavrilovic a créé des centres d'entraînement
8 par lesquels sont passés environ 1 500 volontaires du SRS et du SCP pendant
9 la guerre. Ceci est étayé par la pièce à conviction P1000.
10 L'accusé a exercé son autorité sur les endroits où ses volontaires étaient
11 déployés. Des membres-clés de l'entreprise criminelle commune, de l'armée
12 et de l'équipe dirigeante politique serbe, croate et de Bosnie-Herzégovine,
13 y compris Milosevic, ont courtisé, encouragé et demandé à l'accusé de
14 contribuer sa force de combat pour mettre en œuvre l'entreprise criminelle
15 commune. Tel que noté à la pièce P1074, par exemple, Goran Hadzic et Milan
16 Martic se sont rendus au cabinet de guerre et au bureau du SRS pour aller
17 demander des volontaires. Je demande aux Juges de la Chambre de bien
18 vouloir se reporter au paragraphe 86.
19 Une pléthore d'éléments de preuve révèle que les volontaires étaient, sur
20 l'insistance de l'accusé et des dirigeants du SRS et du SCP, déployés le
21 plus souvent en tant qu'unités et n'étaient pas simplement incorporés à des
22 formations existantes individuellement. Ils agissaient avec d'autres unités
23 et, quelquefois, étaient subordonnés en tant qu'unités distinctes placées
24 sous le commandement de la JNA et de la VRS, des TO locales, du MUP et des
25 autorités municipales. Les Juges de la Chambre disposent, par exemple, de
26 la pièce P1002 et P50 [comme interprété].
27 Comme élément de preuve, l'accusé exerçait son autorité pour déterminer où
28 ses volontaires étaient déployés, par exemple, je cite le cas de la
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1 Slavonie orientale et de Vukovar, pièce P30, pièce P55, P1277 et la
2 déclaration admise de Zoran Rankic, ainsi que celle de Ljubisa Petkovic.
3 Une aide lui avait été demandée, il a promis cette aide, et il a fourni
4 cette aide.
5 L'accusé, lui-même, décrit comment :
6 "En 1991, nous avons commencé à organiser des volontaires, et ce, de façon
7 considérable et à les envoyer vers des lignes de front qui avaient déjà été
8 établies, notamment en Slavonie orientale."
9 Et j'aimerais demander à la Chambre de première instance qu'elle se reporte
10 à la pièce P30.
11 Il a également déployé des volontaires en Krajina. Dans la pièce P31, il a
12 admis avoir réagi à la demande de Milan Babic, et ce, en lui envoyant des
13 volontaires en Krajina, volontaires qui ont participé de façon active au
14 conflit. En Slavonie occidentale, la Chambre de première instance a entendu
15 des témoins tels que le Témoin VS-04 ainsi que le Témoin VS-033, et ils ont
16 indiqué à la Chambre de première instance comment, à partir au moins du
17 mois d'octobre 1991, des volontaires avaient été recrutés par le SRS et le
18 SCP et avaient été déployés en Slavonie occidentale à la demande des
19 Défenses territoriales serbes locales. Ljubisa Petkovic a avoué comment il
20 avait lui-même personnellement affecté environ 500 volontaires à Okucani et
21 en Slavonie occidentale. Zoran Rankic a déclaré avoir accompagné quelque 1
22 000 hommes, quelque 1 000 volontaires du SRS/SCP dans la même région.
23 Donc, en Bosnie-Herzégovine, nous retrouvons les mêmes structures de
24 déploiement, où les dirigeants serbes avaient courtisé et encouragé les
25 contributions de l'accusé. Par exemple, Biljana Plavsic, un membre de la
26 présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, a admis à
27 l'assemblée des Serbes de Bosnie qu'elle avait envoyé une demande d'aide à
28 l'accusé ainsi qu'à d'autres membres de l'entreprise criminelle commune.
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1 Voilà ce qu'elle a dit :
2 "Je cherchais des personnes qui étaient disposées à lutter et à se battre
3 pour la cause serbe, à se battre pour le territoire de la Republika Srpska.
4 Ces lettres ont été envoyées à l'Union soviétique, à Seselj, à Arkan et à
5 Jovic."
6 Et cela figure à la pièce P987.
7 J'aimerais également demander à la Chambre de première instance de se
8 reporter à la pièce P1206, pièce dans laquelle l'accusé se vante du fait
9 que le Mouvement chetnik-serbe a contribué à envoyer un nombre illimité de
10 volontaires au conflit en Bosnie. J'aimerais également demander à la
11 Chambre de se reporter aux dépositions et aux éléments de preuve présentés
12 par écrit et par oral par le truchement des Témoins Rankic, Jovic et le
13 Témoin VS-037. J'aimerais également demander à la Chambre de première
14 instance de se reporter à la pièce P1233, pièce dans laquelle l'accusé
15 indique qu'il exerçait un contrôle important sur le SRS ainsi que les
16 volontaires chetniks serbes qui avaient participé à l'attaque contre
17 Zvornik.
18 Alors, pour ce qui est de l'Herzégovine orientale, cette zone où se
19 trouvent Trebinje, Mostar et Nevesinje, le président du SDS et du cabinet
20 de guerre, dont le nom était Vucurevic, et qui était d'ailleurs l'un des
21 collaborateurs les plus proches de Radovan Karadzic, et le voïvode de
22 l'accusé, Branislav Vakic, décrivent, dans la pièce P55, comment le
23 président du SDS et le commandant du cabinet de guerre a lancé un "appel
24 absolument spectaculaire et dramatique" en demandant qu'un groupe important
25 de volontaires du SRS et du SCP soit envoyé vers le front. L'accusé a réagi
26 et a répondu en envoyant immédiatement des volontaires du SRS vers Mostar
27 et Nevesinje ainsi que dans d'autres zones de la région. La Chambre de
28 première instance a entendu que ses volontaires avaient opéré avec une
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1 unité des Bérets rouges à Jezero. Il s'agit d'un document sous pli scellé.
2 Si la Chambre le souhaite, je pourrais fournir la référence précise à la
3 fin de l'audience ou à huis clos partiel.
4 L'accusé a exercé un contrôle des volontaires sur le terrain. Tout comme
5 n'importe lequel commandant ou général, l'accusé rendait fréquemment visite
6 à ses hommes sur le terrain, notamment lorsqu'il se trouvait dans les
7 municipalités recensées dans l'acte d'accusation. Par conséquent, il a
8 renforcé son autorité morale ainsi que son autorité doctrinale même après
9 que ses unités de volontaires ont été déployées sous le commandement de la
10 JNA, de la VRS ou des Défenses territoriales. Par exemple, l'accusé a
11 décrit comment il inspectait ses unités et comment il était quasiment
12 constamment présent sur le front, surtout au début du conflit. Et
13 j'aimerais demander à la Chambre de première instance de se reporter aux
14 pièces P31 et P1181.
15 Pour démontrer son importante contribution à l'entreprise criminelle
16 commune, Bijelina Plavsic, en décembre 1992, a résumé l'impact que l'accusé
17 avait car il motivait les combattants serbes et effrayait les non-Serbes.
18 Dans la pièce P1310, voilà les propos qu'elle tient :
19 "Il venait nous voir, se rendait sur le front. Sa présence était
20 extrêmement importante pour les hommes. Les soldats parlaient de ses
21 visites bien après son départ. En revanche, par ailleurs, le fait de savoir
22 qu'il avait été sur le front démoralisait particulièrement nos ennemis."
23 D'autres membres haut placés du SRS et SCP ont décrit également comment il
24 se rendait très fréquemment sur le front pour rendre visite aux volontaires
25 du SRS. J'aimerais à cet égard demander à la Chambre de première instance
26 de bien vouloir tenir compte des pièces P1074 et C10.
27 Dans la pièce 1191, l'accusé indique, lors d'un entretien de l'année
28 1992, que ses volontaires étaient en contact constant avec la direction du
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1 SRS/SCP et transmettaient des informations à partir du front. L'accusé se
2 vantait très souvent de la portée du contrôle qu'il exerçait
3 personnellement sur ses volontaires sur le terrain. Et cela s'est poursuivi
4 en Bosnie. Par exemple, l'accusé s'est rendu à Sarajevo, et lorsqu'il le
5 faisait, il inspectait les unités du SRS/SCP commandées par ses trois
6 voïvodes, Branislav Gavrilovic, Vasilije Vidovic, ainsi que Slavko Aleksic.
7 Ces visites font l'objet des pièces P1207, P1204 ainsi que P1221.
8 L'accusé avait également le pouvoir ainsi que l'influence nécessaires
9 pour intervenir personnellement, et ce, pour prêter main-forte aux voïvodes
10 sur le terrain. Tel que cela est indiqué par les conversations interceptées
11 P513 et P514, l'accusé souhaitait avoir un groupe de ses volontaires, qui
12 était commandé par Gavrilovic, et voulait, en fait, qu'il soit sauvé d'une
13 embuscade à Sarajevo en avril 1992. Alors, qu'a-t-il fait ? Il a tout
14 simplement menacé les dirigeants politiques serbes de Bosnie, notamment
15 Momcilo Mandic et même, d'ailleurs, Radovan Karadzic, qu'il retirerait tous
16 ses hommes des lignes de front et qu'il ne les déploierait plus jamais. Que
17 s'est-il passé ? Ses hommes ont été retirés, ce qui montre le pouvoir qu'il
18 avait de retirer ses volontaires de la ligne du front et de coordonner ses
19 actions avec d'autres membres de l'entreprise criminelle commune s'ils ne
20 se pliaient pas à sa volonté.
21 Puis, en dernier lieu, je dirais que l'accusé a publiquement loué les
22 voïvodes qui avaient participé aux crimes commis. Lorsque je dis
23 "finalement", j'entends par cela que j'arrive à la fin de ce volet de mon
24 intervention. Alors que la guerre faisait encore rage, l'accusé a
25 publiquement loué 18 commandants et chefs du SRS/SCP en indiquant qu'il
26 s'agissait de héros, en vantant et en louant le rôle qu'ils avaient joué
27 dans la lutte pour la Grande-Serbie et dans la lutte pour le changement de
28 la carte ethnique de l'ex-Yougoslavie. Cela fait l'objet des pièces P217,
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1 P255 et P218. Et comme l'a indiqué précédemment M. Marcussen, plusieurs
2 personnes qui faisaient partie de ce groupe, notamment Gavrilovic, Vidovic
3 et Aleksic, avaient participé directement à des crimes commis contre des
4 non-Serbes.
5 L'accusé avait envoyé des effectifs, et parce qu'il avait fait cela,
6 il utilisait ce fait comme moyen de pression auprès d'autres membres de
7 l'entreprise criminelle commune pour influencer les décisions en matière de
8 déploiement eu égard à ses volontaires. Ce qui fait l'objet de la pièce
9 C18, dans laquelle Petkovic rappelle comment, entre les mois d'août et
10 d'octobre 1991, l'accusé avait menacé les dirigeants de la JNA qu'il
11 cesserait d'envoyer des volontaires vers la Croatie à moins que des
12 dispositions ne soient prises pour que des armes et des uniformes ne soient
13 fournis aux volontaires du SRS et du SCP. Et que s'est-il passé ? Du fait
14 de son influence, les dirigeants de la JNA lui ont accordé absolument ce
15 qu'il voulait. Ils ont fourni armes et uniformes à ses volontaires.
16 J'aimerais maintenant attirer l'attention de la Chambre de première
17 instance sur une interview radio de l'année 1993, qui fait l'objet de la
18 pièce P1233. L'accusé parle de la façon dont il a contribué à l'attaque
19 contre Zvornik, et voilà ce qu'il dit :
20 "Vous devez savoir que nos volontaires ont combattu avec l'unité spéciale
21 du ministère serbe de l'Intérieur et que c'est grâce à cette action de
22 coordination que Zvornik fut libérée à temps."
23 Il s'agit, en fait, d'une partie de ce qui vous a été diffusé précédemment.
24 Dans la pièce P342 [comme interprété], il a admis avoir envoyé au
25 moins 30 000 volontaires armés au conflit en Croatie et en Bosnie. Excusez-
26 moi, il s'agit de la pièce P342. J'espère vous avoir donné la bonne cote
27 cette fois-ci.
28 Dans la pièce P1249, voilà comment il résume sa contribution à l'entreprise
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1 criminelle commune, et il le fait de façon très profonde et de façon très
2 positive. Je cite :
3 "Sans notre soutien et sans le soutien du Parti socialiste de Serbie, je ne
4 pense pas que les Serbes de la Republika Srpska et de la République de la
5 Krajina serbe auraient vu leurs succès couronnés de succès dans leur lutte
6 pour obtenir leurs propres pays, leurs propres territoires."
7 Il a envoyé ses forces de combat pour une seule raison : obtenir ce
8 qu'il a toujours appelé de ses vœux, à savoir obtenir par la force sa
9 Grande-Serbie et ainsi obtenir ou concrétiser l'objectif commun de
10 l'entreprise criminelle commune. Dans la pièce P1207, l'accusé admet de
11 façon très fière que grâce à son assistance aux autres membres de
12 l'entreprise criminelle commune à la fin de l'année 1992, les Serbes
13 avaient saisi environ 80 % du territoire de l'ex-République de Croatie et
14 environ 70 % du territoire de l'ex-Bosnie-Herzégovine.
15 Voilà tous les éléments de preuve que je voulais souligner, éléments
16 de preuve qui étayent la conclusion selon laquelle la Chambre de première
17 instance pourrait conclure que l'accusé a contribué de façon importante aux
18 crimes allégués dans l'acte d'accusation.
19 Permettez-moi maintenant d'aborder le dernier des trois volets de
20 notre présentation pour mettre en exergue certains des éléments à l'appui
21 de tous les chefs de l'acte d'accusation. La commission des crimes retenus
22 dans cet acte d'accusation est pertinente pour ce qui est de chacun des
23 modes de responsabilité retenus.
24 L'accusé, lui-même, a même commis certains de ces crimes, à Vukovar
25 comme à Hrtkovci, et tous les crimes commis ont été le fait de forces
26 d'entreprise criminelle commune. Il y a des traits similaires : leur
27 ampleur, la portée géographique, leur durée prolongée montrent une chose,
28 c'est que ce ne furent pas des crimes spontanés, ils avaient été
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1 prémédités; deuxième preuve, c'est qu'ils s'inscrivaient dans l'objectif
2 commun partagé par tous les membres de l'entreprise criminelle commune.
3 Pour chacun des faits incriminés, vous verrez qu'il y a un modèle de
4 comportement répété que vous a décrit les témoins. Voyons d'abord la
5 Croatie. C'est là qu'on voit le premier conflit d'envergure qui éclate.
6 C'était une zone qui relevait de cette ligne KOKV prônée par l'accusé,
7 cette ligne qui reliait plusieurs villes, et pour lui, c'était là que se
8 trouvait la frontière de la Grande-Serbie.
9 A la pièce P298, il dit de Vukovar, en Slavonie orientale, que c'est
10 le bastion le plus fort des Oustachi, et il dit que c'est la ligne-clé,
11 c'est la ligne Maginot [phon] qu'il faut conquérir. Et lorsqu'on a parlé de
12 la contribution de l'accusé, vous savez qu'il a fait des promesses et il
13 les a tenues, ces promesses. Il avait promis d'envoyer des volontaires SRS
14 et SCP de façon massive pour qu'ils participent au combat en Slavonie
15 orientale, et il l'a fait. Parlant de Vukovar, la Chambre a été saisie
16 d'éléments de preuve pertinents concernant les événements et les auteurs
17 des faits à Vukovar. Vous avez entendu le témoignage de Theunens, Radic,
18 Bosanac, Berghofer, parmi tant d'autres. Vous avez aussi les faits jugés
19 admis par la Chambre dans sa décision du 8 février 2010.
20 Les attaques d'artillerie de la JNA sur Vukovar avaient commencé en
21 juillet 1991. A compter du mois d'octobre, Vukovar était battue par des
22 tirs intensifs d'artillerie. C'était une offensive majeure déclenchée
23 contre une cité à majorité non-serbe, et la JNA déployait sa 1ère Brigade de
24 la Garde d'élite dans la région. Elle avait le commandement de toutes les
25 unités armées opérant dans le secteur. Il y avait parmi elles la TO serbe
26 locale, les unités de volontaires SRS/SCP, les hommes d'Arkan et des unités
27 de police. Lorsque la ville tombe le 18 novembre 1991, près de 15 000
28 personnes s'étaient déjà enfuies de Vukovar. C'étaient des scènes de
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1 destruction absolue, totale. Et après le 18 novembre, il y eut de nouveaux
2 milliers de non-Serbes qui ont été chassés. Le dossier vous le montre,
3 toutes ces personnes qui ont été chassées, eh bien, de ces personnes, il y
4 en avait 98 % qui n'étaient pas des Serbes de souche.
5 Et vous avez la pièce P1291. C'est le mensuel publié par l'accusé, et
6 il décrit Vukovar telle qu'elle était en début décembre 1991. Voici ce
7 qu'il dit : c'était "une ville qui n'existe plus".
8 Au cours des jours qui ont suivi la prise de la ville, les prisonniers de
9 guerre, les personnes hors de combat, les civils, dont des femmes, des
10 enfants et des personnes âgées, ont été rassemblés puis séparés et détenus
11 à Velepromet, qui servait de QG de la TO serbe locale. Les hommes ont été
12 battus brutalement, maltraités. Il y avait à Velepromet une pièce dont tout
13 le monde avait peur, on l'appelait "la pièce de la mort". Aucune des
14 victimes qu'on y a mises n'en est sortie vivante, et de cela, les
15 dirigeants serbes étaient au courant à l'époque. Ils étaient au courant de
16 ces exactions. Nous avons eu un des exemples les plus frappants à huis
17 clos, c'est pour cela que je me permets de vous demander de vous rapporter
18 à la page du compte rendu d'audience 7 531, lignes 7 à 9.
19 Le 20 novembre 1991, il y a des bus entiers d'hommes non-serbes, qui
20 viennent surtout de l'hôpital de Vukovar, qui sont d'abord emmenés à la
21 caserne de la JNA et puis à la ferme d'Ovcara. Les prisonniers y sont
22 brutalisés systématiquement et frappés. Berghofer dit que :
23 "Il y avait des gens qui hurlaient, il y avait des coups, des
24 hurlements, on piétinait les gens, on les frappait avec des barres de fer,
25 avec des crosses de fusils, on leur donnait des coups de pied, on prenait
26 n'importe quoi, tout ce qu'on avait sous la main, pour les frapper, et on
27 recommençait. Au milieu du hangar, il y avait de la paille et du sang."
28 Ruzica Markobasic a été tuée parce qu'on lui a tiré une balle dans le
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1 vagin. D'autres prisonniers, comme Damjan Samardzic, ont été battus à mort.
2 Plus tard, on a forcé les prisonniers à s'approcher d'une fosse à Grabovo,
3 à peu près à 1 kilomètre de la ferme d'Ovcara. On les a tués au couteau et
4 ils ont été exécutés par un peloton d'exécution. A Ovcara, on tuait
5 d'autres prisonniers. Des experts ont, plus tard, exhumé 200 corps de la
6 fosse d'Ovcara, et vous trouvez les détails à la pièce P819. Les auteurs
7 physiques de ces crimes horribles étaient le président de la municipalité,
8 Slavko Dokmanovic, les soldats de la JNA, les hommes d'Arkan et des
9 volontaires SRS/SCP.
10 L'accusé a affirmé que ses volontaires étaient partis de Vukovar
11 avant les massacres, mais les éléments du dossier établissent que les
12 volontaires du SRS/SCP étaient des participants actifs à ces crimes. Et il
13 y avait, parmi les volontaires de l'accusé, le commandant chetnik Milan
14 Lancuzanin, alias Kameni; Predrag Milosevic, Kinez; Predrag Dragovic, alias
15 Ceca; Marko Ljuboj, alias Mare; ainsi qu'un volontaire surnommé Topola. Il
16 y a eu certaines références qui sont à huis clos, et si vous le voulez,
17 Madame, Messieurs les Juges, je vous les présenterai séparément.
18 En résumé, la Chambre de première instance est en droit de conclure
19 qu'à Vukovar, les forces serbes, contrôlées par des membres de l'entreprise
20 criminelle commune, se sont livrées à des actes de persécution, meurtre,
21 torture, traitement cruel, expulsion, transfert forcé, destruction
22 arbitraire et pillage de biens publics et privés; en d'autres termes,
23 responsables de tous les chefs de l'acte d'accusation.
24 Vous vous souvenez sans nul doute de la discussion qu'il y a eue à
25 propos des six objectifs stratégiques destinés au peuple serbe, objectifs
26 qui déterminaient certains lieux géographiques, dont Zvornik, Sarajevo,
27 Mostar et Nevesinje. La prise de contrôle par la force était essentielle si
28 l'on voulait réaliser ce plan de la séparation et du nettoyage ethnique.
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1 Manifestement, pour l'accusé, la Bosnie-Herzégovine fait partie de la
2 Serbie. Il le dit dès janvier 1991, je le cite :
3 "Nous n'allons donner à personne l'occasion de séparer la Bosnie des autres
4 terres serbes."
5 C'est ce que montre la pièce P1339.
6 Nous en avons déjà parlé, l'accusé a participé à la réalisation des
7 objectifs communs à l'entreprise criminelle commune et a déployé ses
8 volontaires dans chacune des zones ciblées, convoitées. Par exemple, à
9 Zvornik, les forces serbes ont commencé, en avril 1992, à expulser par la
10 force pratiquement tous ceux qui n'étaient pas Serbes par des actes
11 brutaux. Vous avez des éléments directement pertinents pour les événements
12 et les auteurs à Zvornik, dont le témoignage de Boskovic, Kopic, Rankic,
13 VS-36, 37, 38, 1012, 1013, notamment. Il y a parmi les éléments de preuve
14 la pièce P959, ainsi que la pièce P1044, mais aussi la pièce P1045.
15 Le 9 avril 1992, une force d'infanterie conjointe soutenue par
16 l'artillerie de la JNA a attaqué la ville de Zvornik. Cette opération, elle
17 avait été planifiée et elle avait été commandée par Arkan. En plus des
18 hommes d'Arkan, il y a des policiers serbes locaux, des membres de la
19 Défense territoriale et des volontaires du SRS/SCP qui y participent. Ces
20 volontaires du SRS/SCP avaient été emmenés à Zvornik par Zoran Rankic avant
21 l'attaque sur demande de la cellule de Crise de Zvornik. Examinez, s'il
22 vous plaît, la pièce P1074 à cet égard, mais aussi le témoignage du Témoin
23 VS-1062 et du Témoin 1013.
24 Bon nombre de citoyens musulmans ont pris la fuite face aux forces
25 serbes qui avançaient. Certains sont partis après avoir entendu dire que
26 les paramilitaires venaient les tuer et après avoir été témoins des
27 premiers meurtres. Au cours de l'attaque, les volontaires du SRS/SCP sont
28 entrés dans un abri et ont placé en détention les femmes et les enfants,
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1 alors qu'on a fait sortir 12 hommes qu'on a placés contre un mur et que les
2 hommes d'Arkan ont abattus. Les femmes et les enfants ont été emmenés dans
3 un centre de rassemblement proche de là, on les a forcés à monter dans des
4 bus et ils ont été expulsés de la Bosnie. A partir de la fin mai jusqu'en
5 juin 1992, les forces serbes ont poursuivi ces modes d'attaques
6 systématiques, persécutions, expulsions, destruction, mauvais traitements,
7 assassinats, dans toutes les localités autour de la ville de Zvornik. Je
8 vous donne un exemple : le 1er juin 1992, des forces serbes, dont la JNA, la
9 TO, la police, les paramilitaires, ont fait une rafle; ils ont rassemblé
10 les civils musulmans non armés, les ont rassemblés à Klisa et Djulici, ont
11 séparé les femmes des hommes, ont placé en détention les hommes à l'école
12 technique de Karakaj, qui était surveillée par la police locale ainsi que
13 par les forces de la Défense territoriale. Entre le 1er et le 5 juin 1992,
14 il y a au moins 150 non-Serbes qui ont été assassinés à l'école technique
15 de Karakaj. Le 5 juin 1992, 500 Musulmans qui avaient survécu ont été
16 transportés à la maison de la culture de Pilica. Trois jours plus tard, la
17 police les emmenait à l'abattoir de Gero à Karakaj. Lorsqu'ils arrivent à
18 l'abattoir de Gero, les prisonniers sont forcés de descendre, on les emmène
19 à l'intérieur, on les aligne, on les exécute. Il y a au moins 180 hommes
20 qui ont perdu la vie de cette façon. Ces meurtres avaient été ordonnés par
21 des membres de la cellule de Crise de Zvornik et commis par des volontaires
22 du SRS/SCP et les hommes de Niski. On retrouve le même mode opératoire
23 contre les non-Serbes dans toute la municipalité de Zvornik. Les civils
24 sont expulsés de chez eux, sont placés en détention dans d'autres lieux de
25 détention, par exemple à la fabrique de chaussures Standard, à la ferme
26 Ekonomija, à la briqueterie Ciglana, à la maison de la culture de Celopek.
27 Ce ne sont pas des meurtres spontanés dont nous parlons.
28 Il restait un dernier groupe de Musulmans dans la zone de Zvornik,
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1 c'était à Kozluk. Le 26 juin 1992, des forces serbes se composant de
2 membres de la VRS, de la police, de la TO, des hommes d'Arkan, et une fois
3 de plus, de volontaires du SRS/SCP, ont forcé les Musulmans de Kozluk à
4 monter dans des cars et dans des camions. Les habitants de Kozluk ont été
5 contraints de signer de fausses déclarations par lesquelles ils disaient
6 qu'ils partaient de leur plein gré. Ils ont été envoyés en Serbie, et de
7 là, en Autriche et ailleurs. Il y avait 12 ou 13 non-Serbes qui ont refusé
8 de partir. Qu'est-il advenu de ces personnes ? Elles ont été tuées.
9 Après la prise de la municipalité de Zvornik par les forces serbes,
10 celles-ci se sont livrées à des actes de destruction à grande échelle, de
11 mosquées et d'autres lieux de culte. Et, par exemple, des maisons
12 abandonnées qui n'avaient pas été détruites pendant l'attaque ou après
13 l'attaque ont subi des pillages intensifs de la part des forces serbes et
14 ont été saisies par les autorités municipales serbes de Zvornik. Des
15 détenus non-serbes de la briqueterie ont été obligés de piller et
16 d'embarquer les marchandises dans des camions qui partaient pour la Serbie.
17 On peut conclure qu'il y a de la part des forces serbes, contrôlées par les
18 membres de l'entreprise criminelle commune, des actes de persécution,
19 d'assassinat, de torture, de traitement cruel, d'expulsion, de transfert
20 forcé, de destruction arbitraire et de pillage de biens publics et privés.
21 A Sarajevo, on trouve la même campagne de persécution qui se
22 poursuit, et c'est décrit par les Témoins VS-1055; VS-1111, Safet Sejdic;
23 Perica Koblar, le Témoin VS-1060; et Mujo Dzafic. Vous avez aussi les
24 pièces P1110, P993, P1045, P218, et P644. Les forces serbes ont attaqué les
25 Musulmans, les ont tués et les ont chassés pendant la prise de contrôle du
26 Grand Sarajevo.
27 La création d'institutions uniquement serbes, d'institutions
28 parallèles, les mesures discriminatoires prises contre les non-Serbes et la
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1 présence de véhicules militaires sur les collines environnantes ont créé un
2 climat de peur, de coercition pour les non-Serbes.
3 Le Témoin VS-1055 vous a dit qu'il avait vu des reportages à la
4 télévision qui montraient des cadavres dans les rues de Zvornik, qu'il
5 avait entendu à la radio une description de la façon dont les hommes
6 d'Arkan, mais aussi les hommes de Seselj, étaient entrés dans Bijeljina
7 pour purger la ville de ses Musulmans. En raison de ces reportages, en
8 raison de ce qu'il a entendu à la radio, cet homme a décidé de faire partir
9 sa famille de la municipalité d'Ilijas. Arrive la fin mai, le début du mois
10 de juin 1992, près de la moitié de la population musulmane du village de
11 Ljesevo avait pris la fuite.
12 Dans la soirée du 4 juin 1992, des forces serbes, dont des membres de
13 la Défense territoriale d'Ilijas et un groupe de volontaires du SRS/SCP,
14 menées par le "vojvoda" chetnik Vidovic, alias Vaske, ont attaqué et pris
15 Ljesevo. Le village a subi des bombardements intenses, les maisons ont été
16 pilonnées, les granges, les maisons, incendiées, et les biens appartenant à
17 des non-Serbes ont été confisqués. Vaske est entré, a pris et a volé un
18 téléviseur et a lancé une roquette dans la maison d'un particulier; c'est
19 ce que vous disait à la page 7 833 le Témoin VS-1055. Pendant l'attaque,
20 les civils non-serbes qui restaient ont été capturés et brutalisés. On a
21 maltraité un groupe qui se trouvait là, qu'on avait aligné le long d'une
22 clôture, de "balija", et on a tiré. Dix-sept personnes ont ainsi été
23 assassinées. Les villageois qui n'avaient pas été tués pendant l'attaque
24 ont été rassemblés à la gare ferroviaire. Là, on les a contraints à monter
25 dans des bus et on les a ainsi éloignés de Ljesevo.
26 Ce même genre d'attaques s'est répété dans d'autres villes et dans
27 d'autres villages dans tout le Grand Sarajevo, comme vous le disait le
28 Témoin Sejdic. Les hommes commandés par Vaske ont emmené certains des
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1 villageois qui avaient survécu à Ljesevo dans l'entrepôt d'Iskra qui
2 servait de lieu de détention dans la municipalité d'Ilijas. Là, de 130 à
3 140 personnes non-serbes, dont des femmes et des enfants, étaient en
4 détention dans des conditions innommables, inhumaines. Deux hommes qui
5 avaient ordonné ceci aux détenus disent :
6 "Lève-toi quand vient un officier de la Garde de Seselj."
7 Un détenu a été emmené, et on a plus tard exhumé son cadavre. C'est ce que
8 vous a dit le Témoin VS-1055 aux pages 7 836 et 7 837 du compte rendu
9 d'audience.
10 Vers le milieu du mois d'août, les détenus ont été transférés dans la
11 maison de Planja dans la municipalité de Vogosca, maison qui était
12 surveillée par la VRS. On envoyait régulièrement les détenus pour des
13 travaux forcés au front et là, ils étaient vraiment exposés aux pires
14 dangers et utilisés comme boucliers humains. Vaske a aussi participé à la
15 destruction de biens religieux à Ilijas, à Vogosca. Vous avez ceci aux
16 pages 321 à 384 de la pièce P1045.
17 Après les attaques menées dans le Grand Sarajevo, des mesures
18 officielles empêchant le retour des populations non-serbes qui avaient été
19 déplacées par la force ont été prises. Pièce P993, par exemple, voici ce
20 qu'elle montre :
21 Au vu de tous les éléments de preuve dont a été saisie la Chambre, une
22 Chambre de première instance est en droit de conclure qu'aussi dans le
23 Grand Sarajevo, des forces serbes contrôlées par des membres de
24 l'entreprise criminelle commune se sont livrées à des actes de persécution,
25 d'assassinat, de torture, de traitement cruel, de transfert forcé, de
26 destruction arbitraire et de pillage de biens publics et privés.
27 A Mostar, ceux qui n'étaient pas Serbes ont été systématiquement terrorisés
28 par les forces serbes qui ont eu recours à la menace, à la violence
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1 brutale, à l'assassinat, ainsi qu'au pilonnage et à l'incendie volontaire
2 des villages et des lieux de culte. Beaucoup de victimes non-serbes qui
3 avaient été placées en détention l'ont été dans des conditions terribles et
4 ont été soumises à des travaux forcés dans des conditions dangereuses.
5 C'est ce que vous ont dit les Témoins VS-1068 et VS-1067.
6 Des témoins vous ont parlé de crimes précis commis à Mostar,
7 notamment Fahrudin Bilic, Redzep Karisik, le Témoin VS-1067, le Témoin VS-
8 1068, ainsi que Riedlmayer. Vous avez également d'autres éléments de preuve
9 qui vous ont été fournis à huis clos. Parmi les documents pertinents, vous
10 avez la pièce P217 et la pièce P888.
11 Les forces serbes qui agissaient à Mostar et autour de Mostar
12 comptaient dans leurs rangs la JNA, plus tard la VRS, des Bérets rouges et
13 des volontaires du SRS/SCP menés par les "vojvoda" Oliver Baret et
14 Branislav Vakic. A cet égard, veuillez examiner la pièce P217 ainsi que les
15 autres pièces que j'ai déjà mentionnées.
16 Après une explosion à proximité de la caserne de la JNA à Mostar le 3
17 avril 1992, la JNA a commencé à tirer à l'aveuglette sur la ville et elle
18 n'a pas cessé jusqu'au 20 mai 1992. Après cela, elle a chassé les non-
19 Serbes d'un village proche, celui de Topola, pillé les maisons et incendié
20 ces maisons. Pendant l'offensive, les mosquées de Mostar et d'autour de
21 Mostar ont été particulièrement prises pour cible et détruites. Srdjan
22 Djuric, un volontaire du SRS/SCP, s'est servi d'un lance-roquettes pour
23 tirer plus précisément sur les mosquées. Le commandant du SRS/SCP, Oliver
24 Baret, a reçu les félicitations de l'accusé pour le rôle qu'il avait joué
25 dans l'attaque menée par les Serbes à Mostar.
26 On retrouve ce mode de comportement devenu familier qui se répète ici
27 et qui est le fait des forces de l'entreprise criminelle commune. Après
28 l'attaque, Zdravko Kandic, commandant de la VRS, ordonne aux troupes de
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1 rassembler tous les non-Serbes qui restent, de les chasser de chez eux, de
2 les détenir. Il y a notamment le petit vestiaire du stade de Vrapcici, et
3 c'est là que des civils non-serbes vont être maltraités et mourir de faim.
4 Il y avait parmi ces forces serbes des volontaires du SRS et du SCP qui ont
5 emmené au moins 88 des détenus s'y trouvant à la décharge d'Uborak, et là,
6 chacune de ces victimes a été tuée systématiquement et laissée dans le
7 ruisseau. A Sutina; pareil, au moins 18 hommes furent assassinés. Une
8 Chambre de première instance est en droit de conclure que les forces serbes
9 contrôlées par les membres de l'entreprise criminelle commune se sont
10 rendues coupables de ces actes repris dans l'acte d'accusation.
11 Madame et Messieurs les Juges, j'allais maintenant passer à
12 Nevesinje, mais vu l'heure, je me demande ce que vous voulez faire.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vu l'heure, et puis vu le temps qu'il vous
14 reste - il vous reste approximativement 30 minutes - alors, le mieux, c'est
15 qu'on continue demain. Vous terminerez les 30 minutes et ensuite, M. Seselj
16 aura ses 48 minutes, si je me souviens bien, et nous aurons ainsi terminé
17 la procédure 98 bis.
18 J'ai un petit regret, Madame Biersay. J'aurais bien aimé avoir un classeur
19 avec tous les documents que vous avez cités --
20 Mme BIERSAY : [interprétation] C'est faisable. Vous pouvez l'obtenir.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce que ça m'aurait permis de suivre en temps
22 réel tout ce que vous avez dit --
23 Mme BIERSAY : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. Peut-être que demain, on aura quelque chose
25 comme ça. Vous avez toute la nuit.
26 Sur ce, je vous remercie et je souhaite à tout le monde une bonne soirée.
27 --- L'audience est levée à 18 heures 57 et reprendra le mercredi 9 mars
28 2011, à 14 heures 30.