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1 Le mardi 20 mars 2012
2 [Plaidoiries]
3 [Audience publique]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.
5 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Madame, et Messieurs les Juges.
9 Affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj. Merci.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce mardi, je salue toutes les personnes présentes, les représentants du
12 bureau du Procureur, et M. Seselj. Nous sommes donc au stade des
13 plaidoiries de l'accusé.
14 Monsieur Seselj, il vous reste exactement trois heures 40 minutes. C'est ce
15 que j'ai indiqué la dernière fois. Si, aujourd'hui nous ne perdons pas de
16 temps, y compris les périodes de repos, nous pourrions terminer aujourd'hui
17 les plaidoiries à la condition que le Procureur n'ait pas une réplique.
18 Mais pour le moment, en ce qui me concerne, je ne vois pas en quoi il
19 pourrait y avoir réplique dans la mesure où tout ce que nous a dit M.
20 Seselj jusqu'à présent nous le savions de par ses écritures. Voilà donc
21 comment se présente la situation, Monsieur Seselj, nous pourrions terminer
22 aujourd'hui. Je vous laisse la parole pour vos trois heures 40 minutes.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr, Monsieur
24 Antonetti, que tout ce que je viens de dire jusqu'à présent était chose
25 connue de vous, jusqu'à présent, donc. Alors, le bureau du Procureur, lui,
26 il est resté bouche bée, et c'est la raison pour laquelle il n'y aura pas
27 de réplique, parce que voulez-vous qu'il réplique à tout ce que j'ai déjà
28 dit ? Rien du tout.
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1 Alors, je crois que maintenant, il serait bon de parler plus en détail des
2 circonstances politiques qui ont influé sur l'affaire. Nous avons déjà vu
3 qu'il y avait des témoignages documentés pour ce qui est des demandes de
4 dresser un acte d'accusation à mon encontre, de faire en sorte que je sois
5 empêché de gagner aux élections serbes, et cetera. Carla del Ponte, pour
6 deux individus, a bien dit qu'ils avaient demandé à ce qu'un acte
7 d'accusation soit dressé contre moi. Le principal, bien entendu, c'est
8 Zoran Djindjic. Mais il y avait en Serbie plusieurs autres leaders DOS
9 ottomans, tels que Goran Svilanovic, Nebojsa Covic, Miroljub Labus, et
10 autres, à avoir été de ceux-là. Alors, il y a eu un acte d'accusation de
11 dressé, on ne l'a pas étayé de façon adéquate, tout un tas de papiers
12 accompagnait l'acte d'accusation, et je crois que cela n'a pu suffire qu'au
13 Juge O'Gon Kwon pour étayer l'acte d'accusation parce qu'à personne d'autre
14 de normal cela n'aurait suffi. Mais le bureau du Procureur, après que
15 l'acte d'accusation ait été rédigé, a commencé, seulement à ce moment-là, à
16 diligenter ses enquêtes. Alors, on peut le voir à partir des dates des
17 déclarations de témoins que le bureau du Procureur a cités à comparaître
18 ici. Il y a eu plusieurs témoins qui avaient déjà témoigné dans l'affaire
19 Milosevic. Alors, on a profité de leurs déclarations, on les a rappelés
20 pour qu'ils en fassent de nouvelles. La grande majorité des témoins n'a
21 fait que, une fois l'acte d'accusation dressé, que de déposer à ce moment-
22 là ou de faire des déclarations. Donc, ce n'est pas l'acte d'accusation
23 dressé par le bureau du Procureur qui s'est basé sur des déclarations de
24 témoins, mais l'acte d'accusation, une fois rédigé, a servi de panneau
25 d'indication pour la façon dont il fallait façonner les déclarations des
26 témoins et comment y conformer les autres éléments de preuve. Donc, tout
27 entretien avec des témoins éventuels ou potentiels était ciblé, parce qu'on
28 avait un texte d'acte d'accusation et on cherchait de quoi l'étayer.
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1 Certains ont réussi davantage que d'autres. D'autres se sont empêtrés dans
2 leurs mensonges de façon spectaculaire; et d'autres, encore, ont été
3 capables de bien emballer les choses pour placer cela sous tel paragraphe
4 ou tel autre paragraphe de l'acte d'accusation.
5 Alors, c'est la raison pour laquelle ce procès a été un procès, au fait,
6 sur un sujet déterminé d'avance. On a d'abord fixé un devoir, une mission,
7 la mission évoquée par Maurice Gourdault-Montagne en 2006, et ça, c'était
8 déjà établi en début de l'an 2000 parce qu'on avait vu qu'après le 5
9 octobre, avec l'arrivée de cette équipe de traîtres, c'est-à-dire les DOS
10 ottomans qui sont venus au pouvoir avec l'aide des services de
11 renseignements occidentaux et avec un énorme montant d'argent venu de
12 l'Occident, avec tout autre appui logistique aussi, ça n'avait pas réussi à
13 anéantir le Parti radical serbe. Et je me suis trouvé à La Haye, comme on
14 le sait, et il n'a pas été question de commencer le procès tout de suite ou
15 très rapidement, parce que Carla del Ponte l'avait promis déjà en février
16 2003 à Belgrade, cela. Mais j'ai été mis sur attente. On a eu Conférence de
17 mise en état sur Conférence de mise en état tous les quatre mois. Là, on a
18 fait les choses proprement, et rien du tout. Ils avaient espéré qu'à un
19 moment donné ils allaient réussir à me briser et à m'obliger à accepter un
20 conseil de la Défense tel que choisi par eux, par le Tribunal, le Greffier
21 et le bureau du Procureur.
22 Mais dès la première année, on a commencé contre moi à déployer une espèce
23 de guerre psychologique et mentale. Et en 2003, le 11 décembre, David
24 Tolbert, le greffier adjoint, promulgue une décision où, a-t-il machine de
25 la chose, le greffier adjoint, dans sa décision, c'est un texte à caractère
26 administratif, entendons-nous bien, fait référence à la Résolution 827 du
27 mois de mars 1993 où le Conseil de sécurité a créé ce Tribunal
28 international pour poursuivre des personnes qui se sont rendu coupables de
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1 violations graves au droit humanitaire international pour qu'il y ait
2 rétablissement de la paix. Alors, ça semble être la mission du greffier
3 adjoint, du Greffe. Mais le Greffe, ça n'a rien à voir avec le
4 rétablissement de la paix et le maintien de la paix. Puis, on fait
5 référence au Statut et aux Règlements de mise en détention, qui ne parle
6 pas du tout de ces questions-là. On fait référence aussi à la nécessité de
7 procéder à la protection des droits individuels des détenus. Alors, on
8 viole mes droits et on fait référence au respect de mes droits. Il est
9 question aussi du Conseil de sécurité qui avait manifesté sa préoccupation
10 - nous parlons de 1993 - en raison des rapports relatifs aux crimes de
11 guerre, au nettoyage ethnique, à la conquête de territoires, et les
12 arguments qui ont été avancés pour la création de ce Tribunal
13 international. Et il est dit ensuite : Etant donné que contre M. Vojislav
14 Seselj, auprès de ce Tribunal international, il y a un procès de diligenté
15 pour des accusations relatives à des délits commis pendant qu'il était à la
16 tête du parti en Yougoslavie, et étant donné qu'il est candidat aux
17 élections parlementaires fixées pour le 28 décembre 2003 en Serbie, étant
18 donné aussi le fait que le directeur de l'Unité de détention des Nations
19 Unies avait été informé du fait que l'accusé avait fait des déclarations
20 auprès des médias en se servant des locaux de l'Unité de détention et que
21 ses déclarations avaient été publiées par les médias, et soit dit en
22 passant, que s'est-il passé ? Je me suis entretenu avec des personnes.
23 J'avais contacté par téléphone des amis, des connaissances à moi. Et
24 certains d'entre eux m'avaient raconté quelque chose au sujet de ce qu'ils
25 avaient raconté aux médias partant de ce que nous avions échangé comme
26 propos. Et on se réfère à l'article 73(B) de la mise en détention pour ce
27 qui est de l'exercice de la justice, on prévoit que le Greffe peut refuser
28 toute demande de visite au détenu s'il y a raison de croire que cette
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1 visite viserait à se procurer des informations susceptibles d'être publiées
2 par les moyens d'information, par les médias, et conformément au principe
3 appliqué, il découlerait que la communication entre l'accusé et d'autres
4 individus se trouverait être passible d'une interdiction si la conséquence
5 pouvait être la publication de déclarations du détenu dans les médias, et
6 notamment si la conséquence de telles déclarations visent à miner le mandat
7 de ce Tribunal pour ce qui est donc du rétablissement et du maintien de la
8 paix en mesure ex-Yougoslavie.
9 Alors, le greffier adjoint ne mentionne pas du tout le fait de quelles
10 déclarations il s'agit. J'avais reçu plusieurs visites familiales, j'avais
11 reçu dans visites d'amis venus du parti, et les membres de ma famille et
12 les autres visiteurs, une fois revenus à Belgrade, sont interrogés par les
13 témoins pour savoir comment j'allais au niveau santé. On disait que
14 j'allais bien. On leur demandait comment je me débrouillais dans l'Unité de
15 détention, que faisais-je ? Or, je dis oui, on leur disait que je me
16 débrouillais bien, et que je lisais beaucoup. Alors que voulez-vous qu'ils
17 disent d'autre ? Rien d'autre, justement. Et le Greffier ne mentionne pas
18 du tout quel est l'élément qui a posé problème. Alors moi, j'ai contacté
19 d'ici deux ou trois journalistes, des amis à moi. Je me suis entretenu avec
20 eux, parfois je les appelle aussi. J'appelle Vladan Dinic, par exemple, le
21 rédacteur en chef du journal ou de la revue "Svedok", en traduction,
22 "témoin". J'en contacte d'autres, mais pourquoi voulez-vous que je ne les
23 contacte pas, j'attire leur attention sur des éléments, mais je n'ai pas
24 accordé d'interview, je n'ai pas fait de déclaration pour les médias, et le
25 Greffier adjoint ne dit pas cela, d'ailleurs. Et étant donné que j'ai
26 suscité beaucoup d'attention au niveau des moyens d'information en général,
27 étant donné aussi qu'un rapport à ce sujet disant qu'un accusé suspecté
28 d'avoir commis des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre, tel
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1 que cela est le cas pour l'accusé, il se trouve être en situation d'aider
2 la campagne qui bat son plein pour les élections parlementaires en Serbie.
3 Et c'est là que le bât blesse, parce que j'aidais la campagne qui avait
4 cours en Serbie. Mais je l'aide de nos jours encore, de nos jours encore je
5 suis à la tête de la liste du Parti radical serbe, pour les élections
6 parlementaires. De nos jours encore, je suis le candidat numéro un sur
7 cette liste. Comment pouvez-vous m'interdire cela ? En aucune façon. Le
8 consul serbe est venu, j'ai signé tous les imprimés qu'il fallait. Je ne
9 suis pas une personne condamnée. Et tant que le jugement ne sera pas
10 applicable, on ne peut me déposséder de quelque droit que ce soit,
11 exception faite du droit à la liberté de me déplacer. Ici, je suis interné
12 parce qu'on avait pensé que je pourrai fuir, influer sur les témoins,
13 entreprendre ou commettre d'autres délits, et cetera. Mais aucun autre
14 droit à moi ne serait être limité. Est-ce que le Greffe ou le Greffier
15 considérerait qu'au contraire il peut procéder à ce genre de limitation.
16 Il dit aussi que l'utilisation des locaux de l'unité de détention c'est
17 d'assurer le bien-être des mis en accusation, et non pas pour entraver les
18 efforts du Tribunal pour ce qui est du rétablissement de la paix et de la
19 sécurité en ex-Yougoslavie. Et le fait qu'un détenu à l'unité de détention
20 puisse communiquer en se servant des locaux de l'Unité de détention pour
21 participer à une campagne battant son plein pour ce qui est des élections
22 parlementaires en Serbie, cela est susceptible d'entraver les activités du
23 Tribunal pénal international dans l'exercice de son mandat. Alors moi, je
24 convie les gens du Greffe à vous remettre ce document daté du 11 décembre
25 2003, pour que vous puissiez en prendre connaissance en langue anglaise, si
26 tant est que cela vous intéresse.
27 Etant donné dit-on aussi que pour ce qui est du rétablissement de
28 l'équilibre entre le droit de l'accusé à communiquer et à recevoir des
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1 visites et le droit du Tribunal pénal international pour ce qui est de
2 l'exercice efficace de son mandat et de ses fonctions, il convient de
3 prendre en considération le fait que les circonstances concrètes dans
4 lesquelles se trouve ce détenu nécessitent la mise en œuvre de mesures
5 indispensables aux fins d'éviter des rapports négatifs de la part des
6 médias du fait de l'absence de limitations aux droits de l'accusé à
7 communiquer et à recevoir des visites.
8 Mais qu'y a-t-il de négatif ou d'influençable de ma part au niveau des
9 médias ? Ce qui risque de nuire pour ce qui est du Tribunal c'est tout ce
10 qui est utile au Parti radical serbe. Parce que c'est surtout préjudiciable
11 pour vous si le Parti radical serbe connaît de bons résultats. Votre
12 objectif à vous est de l'anéantir et non pas le laisser gagner aux
13 élections. Et partant de tout ceci, le Greffier d'adjoint, David Tolbert,
14 décide qu'il conviendrait d'interdire toute communication téléphonique
15 entre l'accusé et les autres individus, exception faite de sa famille au
16 sens restreint du terme, un conseiller juridique auquel il aurait, et les
17 représentants diplomatiques et consulaires. Et on demande à ce que soit mis
18 sur écoute les entretiens avec les autres, exception faite des conseillers
19 juridiques et toute personne devrait se voir interdire la visite à
20 effectuer au détenu ou à l'accusé, exception faite de sa famille et des
21 conseillers juridiques. Il s'agit de surveiller toutes les visites
22 approuvées, telles qu'autorisées par le directeur de l'Unité de détention,
23 ou la personnalité officielle concernée. Alors cela ne se rapporte pas,
24 semble-t-il, aux communications faites par écrit.
25 Alors ça, c'est une première des décisions prises dans ce sens. Vous allez
26 entendre les autres décisions. Alors tout ça, pour moi ce sont des élément
27 de preuve irréfutables qui montrent que je suis, je fais l'objet de
28 persécution politique, et que tout le procès est motivé par la politique.
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1 Je me trouve à avoir à la fête de Noël catholique, le 25 janvier, dans
2 l'après-midi, ça pouvait être dimanche si mes souvenirs sont bons --
3 L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'il a bien dit 25 janvier.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- non c'était un vendredi, j'ai appelé la
5 centrale téléphonique du Parti radical serbe, et je me suis entretenu là-
6 bas avec des responsables du parti. Il y avait le haut-parleur de branché,
7 il y avait eu plusieurs journalistes de présents. J'ai prononcé quelques
8 phrases seulement au sujet des élections qui allaient avoir lieu. Je n'ai
9 donc pas donné de noms de témoins protégés, je n'ai mentionné aucun nom
10 d'ailleurs, ni aucun document sous pli scellé. Je n'ai même pas évoqué les
11 Juges du Tribunal de La Haye, ni les Procureurs du Tribunal de La Haye. Il
12 s'agit d'un vendredi dans l'après-midi. Alors il se passe un samedi et un
13 dimanche. Pendant ce samedi et dimanche, très probablement ceux qui
14 réécoutent les conversations téléphoniques mises sur écoute, pour rédiger
15 des comptes rendus, ont présenté leur rapport. Et au matin, avant 8 heures,
16 je reçois sur un bout de papier en une phrase le fait -- enfin une
17 information disant que jusqu'à nouvel ordre on m'interdisait toute
18 utilisation du téléphone. Puis pendant la journée du 29 décembre, il
19 m'arrive une décision de la part de Hans Holthuis, Greffier en son état,
20 qui dit : Compte tenu du fait que le Greffier vise à empêcher les détenus
21 d'abuser, de profiter de libre communication à des fins politiques et en
22 particulier du fait des élections en Serbie, puisque ça serait susceptible
23 d'influer de façon négative sur la mission du Tribunal pour ce qui est du
24 rétablissement de la paix en ex-Yougoslavie. Alors moi, je dois dire
25 d'abord qu'il n'a pas du tout été question ici d'une communication
26 privilégiée. Je me suis servi d'une cabine téléphonique publique, parce que
27 si c'était une communication privilégiée, je n'aurais pas pu être mis sur
28 écoute. Je n'avais pas encore eu de conseiller juridique, il n'était pas
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1 enregistré, j'avais deux avocats professionnels, mais on n'a pas voulu les
2 mettre sur la liste, on voulait mettre des personnes, m'imposer des
3 personnes pour que ce soit des personnes choisies par eux, qu'ils me
4 défendent.
5 Alors étant donné qu'il y avait des élections parlementaires en Serbie qui
6 s'étaient tenues à la date du 28 décembre 2003, et étant donné que M.
7 Vojislav Seselj avait été l'un des candidats à ces élections, étant donné
8 que le directeur de l'Unité de détention des Nations Unies avait appris que
9 l'accusé, à la date du 25 décembre 2003, à la veille des élections en
10 question, a profité de sa possibilité de communiquer à partir de l'Unité de
11 détention pour faire des déclarations à l'intention de la presse, et étant
12 donné que ses déclarations ont par la suite été diffusées en long et large,
13 étant donné que l'accusé a de façon flagrante enfreint les décisions le
14 concernant, il est donc décidé que pendant cette période d'interdiction
15 jusqu'au 10 janvier, il soit interdit toute communication téléphonique de
16 l'accusé avec d'autres individus, exception faite de son conseiller
17 juridique, on le dit à chaque fois, s'il l'a - or, on sait pertinemment
18 bien que je n'en ai pas - et les représentants consulaires et diplomatiques
19 qui, en l'occurrence, ne peuvent pas du tout m'aider.
20 Alors c'est la décision qui est datée du 29 décembre, et vous voyez
21 quel est l'exposé des motifs. Il n'y a aucune raison classique, aucun motif
22 classique d'énoncé. Et on parle des élections ou du soutien aux élections à
23 ce Parti radical serbe qui mine le mandat de ce Tribunal pour la
24 préservation de la paix dans les Balkans. Ensuite, le 5 janvier -- ou
25 plutôt, c'était le 29 décembre. Le 8 janvier, le Greffier adjoint, David
26 Tolbert, promulgue une nouvelle décision. Etant donné tout ce qu'il avait
27 énoncé précédemment et ayant constaté les dispositions du Statut, des
28 résolutions, et cetera, et cetera, il dit :
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1 "Compte tenu du fait que les résultats aux élections parlementaires
2 en Serbie qui se sont tenues le 28 décembre 2003 montrent que le parti
3 politique à la tête duquel l'accusé se trouve a remporté 82 mandats sur un
4 total de 250 sièges au Parlement national de la Serbie, étant donné aussi
5 le fait que les activités dans une période postélectorale mèneront
6 probablement à la possibilité que ce parti politique et les adeptes de
7 l'accusé viennent à demander à ce qu'ils s'engagent plus en avant dans les
8 activités politiques postélectorales pour ce qui est des élections
9 parlementaires qui se sont passées le 28 décembre 2003, étant donné aussi
10 le fait qu'une grande attention de la part des médias à l'égard des
11 rapports qui disent le détenu est, sans difficulté aucune, en mesure
12 d'aider les activités de son parti pour les élections parlementaires, et
13 étant donné sa possibilité d'intervenir dans les activités postélectorales,
14 ceci risque de contribuer à miner la possibilité de ce Tribunal pour ce qui
15 est du rétablissement et de la sauvegarde de la paix en Yougoslavie."
16 Donc, en aidant à la campagne, moi je mets en péril le rétablissement
17 et la sauvegarde de la paix en ex-Yougoslavie. Et du fait de mes activités
18 postélectorales, c'est-à-dire consultation pour ce qui est de la
19 composition du gouvernement ou participation éventuelle du Parti radical
20 serbe au gouvernement, cela risque aussi de menacer la paix. Tout ça, ce
21 sont des formulations émanant de David Tolbert. Il décide que pendant la
22 période de 30 jours supplémentaires, l'on interdise, si le directeur du
23 quartier pénitentiaire n'en aura pas décidé autrement, d'interdire toute
24 communication de l'accusé avec les personnes tierces. Et là encore, à titre
25 d'exception, il cite les conseillers juridiques s'il en a, et je n'en avais
26 pas officiellement parce qu'ils n'ont pas été enregistrés, et avec des
27 représentants diplomatiques consulaires. Donc toute communication m'était
28 interdite à ce moment-là. Je n'ai pas pu recevoir de visite de la part de
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1 mes proches, de ma famille. Certes, deux fois par semaine, cela m'a été
2 offert en la présence du directeur du quartier pénitentiaire. Il m'a
3 proposé de prendre contact avec mes proches par téléphone depuis son
4 bureau, et je l'ai refusé.
5 Le 6 février, de nouveau, le Greffier adjoint promulgue une nouvelle
6 décision. Il cite tout ce qu'il a l'habitude de citer, la résolution du
7 Conseil de sécurité, le Statut du Tribunal et les objectifs proclamés du
8 Tribunal international. Il rappelle les décisions précédentes lorsqu'on a
9 apprécié les facteurs susceptibles d'entraver le Tribunal international de
10 l'exercice de sa motion, que le rôle des médias allait être très important,
11 le rapport sur le fait qu'il s'agit de quelqu'un qui est accusé de génocide
12 - de génocide, je souligne - et crimes contre l'humanité et crimes de
13 guerre, ce qui est le cas de l'accusé, et que l'accusé est en position
14 d'apporter un soutien actif à la campagne électorale en Serbie.
15 Et là, ils ajoutent cette accusation pour génocide. Il a fallu que je
16 me penche sur l'original du document en anglais, et là il n'y avait pas de
17 génocide. Donc c'est celui qui a traduit le document qui a ajouté le
18 génocide. Quelqu'un qui m'aime au point que tout ce qu'on m'imputait, à
19 savoir les crimes de guerre et crimes contre l'humanité, ne lui suffisait
20 pas, il a fallu qu'il complète par le génocide. En fait, je signale cela en
21 passant pour attirer votre attention sur la qualité de vos services de
22 traduction, à l'époque comme aujourd'hui.
23 Alors, David Tolbert répète : Compte tenu du fait qu'aux élections
24 parlementaires qui se sont tenues le 28 décembre 2003 en Serbie, le parti
25 que dirige l'accusé a remporté 82 sur les 250 sièges du Parlement de
26 Serbie, et compte tenu du fait que les activités pendant la période
27 postélectorale, probablement, feront en sorte que le parti politique et les
28 adeptes de l'accusé sollicitent sa participation sur la scène politique,
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1 donc on reprend tout ce qui a déjà été dit dans les décisions précédentes.
2 Et on ajoute : Compte tenu en particulier du fait que l'accusé
3 continue de faire preuve de dépit là-dessus et que cela suscite une
4 inquiétude, il proclame désormais une nouvelle interdiction, interdiction
5 de toute communication entre moi-même et tout autre individu. Cela se passe
6 donc le 6 février 2004.
7 Alors, tout cela, je l'ai publié dans mon livre : "Théodore Meron,
8 diplomate israélien génocidaire."
9 Prenons la décision du 9 mars 2004, signée là encore par David
10 Tolbert. Il reprend tout ce que l'on a vu dans la décision précédente et il
11 dit là encore que j'ai tendance à défier l'interlocuteur sur la question de
12 cette décision-là, la décision portant sur l'interdiction de communication,
13 et donc il décide de renouveler pour une période de 30 jours
14 supplémentaires cette interdiction de communication.
15 Le 8 avril se situe une nouvelle décision où on reprend toutes ces
16 choses sans fondement et détestables dites dans la décision précédente, et
17 l'on renouvelle l'interdiction pour 30 jours supplémentaires. Puis, le 7
18 mai, une nouvelle décision, signée cette fois-ci de nouveau par David
19 Tolbert. On y retrouve la répétition fidèle de tout ce qui a déjà été dit
20 et le renouvellement de même de l'ensemble des interdictions.
21 Puis, une décision intervient le 9 juin. Là encore, toutes les
22 formules sont reprises, et on proroge donc cette interdiction. Ce n'est que
23 le 30 juin 2004 que cette décision sera annulée.
24 Telles sont les preuves manifestes, les nouvelles preuves. Je ne vous
25 ai jamais illustré cela de manière aussi claire dans ce prétoire même si, à
26 plusieurs reprises, j'ai mentionné ces décisions. Donc il s'agit d'un
27 Tribunal qui est à caractère politique, très caractérisé. Ce sont des
28 mobiles politiques qui président à ces activités, et je vous ai illustré
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1 cela en vous citant mon cas très concret.
2 Donc tout cela correspond à ce que l'on trouve dans le livre de Carla
3 del Ponte sur la nature politique de ce Tribunal et sur le fait que l'on a
4 commandité mon arrestation et l'acte d'accusation contre moi. Tout cela
5 correspond à ce que Florence Hartmann écrit dans son livre lorsqu'elle
6 parle de l'ingérence des renseignements occidentaux aux activités du
7 Tribunal -- en fait, sur l'instrumentalisation du Tribunal de La Haye de la
8 part des services de renseignements occidentaux. Et en parallèle, on lance
9 une campagne de lynchage contre le Parti radical serbe, une action de très
10 grande envergure. On cherche à recruter certains parmi ses membres de tout
11 premier plan. Et quelles sont les informations qui m'atteignent ? La
12 première du genre que j'ai reçue, c'était qu'en 2004, Aleksandar Vucic a
13 rencontré un agent du renseignement très connu, un Américain, Morton
14 Abramowitz. Et vous savez qui a révélé ça ? James Lyon, qui était à
15 l'époque le président du Groupe de crise international, soi-disant une ONG
16 qui déploie des activités d'espionnage très clairement. Tomislav Nikolic
17 fait l'objet d'attaque en 2005. Natasa Kandic fait une déclaration
18 publique. Elle affirme que Tomislav Nikolic, en tant que volontaire du
19 Parti radical serbe, en 1991, en Slavonie orientale, Ernestinovo ou
20 Lastovo, eh bien, qu'il y aurait tué des femmes âgées. Tomislav Nikolic est
21 très secoué par cela. Si cela s'était passé, j'aurais été au courant de
22 cela. Nous étions des amis très proches. Il m'en aurait parlé. Mais il a eu
23 peur des répercussions. Il s'est dit qu'à partir du moment où on l'accuse
24 de manière aussi publique, il sera très difficile de se défendre. Ici,
25 devant ce Tribunal de La Haye, il y a eu beaucoup d'innocents qui ont été
26 condamnés parce qu'ils n'ont pas su se défendre face à ces accusations
27 mensongères. Donc il a été tellement pris de panique qu'il s'est mis à
28 faire toutes sortes de déclarations publiquement. J'ai dû intervenir depuis
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1 La Haye. J'ai dû agir auprès de lui, même directement, pour le calmer, pour
2 qu'il retrouve sa condition normale.
3 Puis, un deuxième coup a été lancé. Slobodan Miljkovic, Lugar, il est
4 venu avec un groupe de volontaires entraînés, dont Srecko Radovanovic. Ils
5 sont venus à bord d'hélicoptère de la JNA dans le secteur de Samac. Il a
6 rejoint le 17e Groupe tactique, et par la suite il s'est trouvé accusé
7 d'avoir commis des crimes sur le site de Crkvina, et il est revenu par la
8 suite en Serbie. A son retour de Samac en 1992, apparemment il est devenu
9 membre du Parti radical serbe, et alors il se met d'accord avec les
10 autorités locales de Samac pour repartir au champ de bataille, mais cette
11 fois-ci pour être rémunéré à faire cela. Et donc, il va venir pour mener à
12 bien un certain nombre de missions concrètes avec un groupe de volontaires.
13 Tomislav Nikolic, à Kragujevac, organise une cérémonie de départ pour ces
14 volontaires, mais le QG n'est absolument pas au courant. Ljubisa Petkovic
15 n'a jamais été informé du départ de ce groupe au front. Et je vous ai déjà
16 dit que dès 2003, Slobodan Miljkovic a été exclu du parti lorsqu'il a giflé
17 le président du comité municipal, Jovan Savic. Donc nous avons là deux
18 éléments qui ont été utilisés pour lancer cette attaque contre Tomislav
19 Nikolic, et psychologiquement, il a été ébranlé suite à cela. Il ne pouvait
20 pas savoir ce que Miljkovic allait faire à Samac. Et d'ailleurs, il n'avait
21 absolument aucun lien avec -- enfin, on n'a jamais pu prouver qu'il y a eu
22 des vieilles femmes qui ont été tuées à Lastovo ou Ernestinovo, et encore
23 moins qu'il ait été impliqué à cela. Parce que s'il y avait eu des preuves
24 à l'appui, elles se seraient trouvées également dans mon acte d'accusation.
25 Donc il est ébranlé sur le plan psychologique, et là il se trouve
26 accusé par les diplomates occidentaux de Belgrade, des représentants du
27 TPIY, et il prend contact avec Carla del Ponte. Au moins une fois il l'a
28 rencontrée à Strasbourg, et ce, au moment de la session parlementaire du
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1 Conseil de l'Europe. J'ai des témoins oculaires pour prouver cela. Et il
2 s'est agi d'une rencontre si cordiale devant les députés que les députés
3 ont pu en déduire qu'ils se connaissaient déjà bien. Puis, Tomislav
4 Nikolic, apparemment, rencontre à Budapest David Tolbert, qui était
5 Greffier adjoint dans un premier temps, et puis qui, très rapidement, est
6 devenu Procureur adjoint. Alors, comment est-ce que cela est possible ?
7 Devant le TPIY, cela semble être possible, alors.
8 Tomislav Nikolic le voit à Budapest de nouveau, c'est à une session
9 du Conseil de l'Europe ou un des organes de cette organisation. J'en ai
10 entendu parler. En fait, à partir du moment où je lui ai posé la question,
11 il m'a dit : Oui, oui, oui, il s'intéresse à cette affaire et se demande
12 comment cela se peut qu'un acte d'accusation ne soit dressé contre moi
13 devant le TPIY. Dragan Todorovic était présent pendant cet entretien. Il
14 s'est un petit peu emmêlé, mais il m'a confirmé cette rencontre.
15 Heureusement, on voit apparaître un homme de très grand courage, Julian
16 Assange. On l'appelle Julian dans les pays anglo-saxons, Julian Assange. Il
17 a une page Web, et par WikiLeaks il révèle énormément de documents de la
18 correspondance diplomatique américaine. Il y a quelques jours, j'ai publié
19 un livre de plus de 1 000 pages, il s'intitule : "WikiLeaks m'informe."
20 Dans ce livre, je publie toutes les dépêches diplomatiques qui ont été
21 rendu publiques jusqu'à présent où mon nom est mentionné, où celui du Parti
22 radical serbe est mentionné, où ces traîtres, Tomislav Nikolic et
23 Aleksandar Vucic, sont mentionné, et un choix de dépêches où est mentionné
24 le Tribunal de La Haye. Mille et quelques pages, donc il a fallu que
25 j'élimine quelques dépêches qui mentionnent le TPIY. Je n'ai mentionné que
26 celles qui compromettent le plus ce Tribunal. Donc on peut y voir que l'ex-
27 directeur du quartier pénitentiaire, Timothy McFadden, au profit des
28 Américains, a dû espionner Slobodan Milosevic. C'est par écrit qu'il
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1 fournissait des informations sur ses relations avec son épouse, des
2 informations qui relèvent des écoutes effectuées dans la salle des visites,
3 des appréciations de la personnalité et de la moralité de Slobodan
4 Milosevic, et cetera.
5 Il y a là toute une multitude de preuves nous permettant de voir que
6 le Tribunal de La Haye n'est qu'un instrument que brandissent les services
7 de renseignements occidentaux. Et heureusement, on voit alors apparaître
8 cette dépêche de l'ambassade des Etats-Unis à Paris qui me rend un service
9 inqualifiable grâce à l'activité de Maurice Gourdault-Montagne. Donc je
10 dispose désormais d'une preuve-clé de ce qui se situe en coulisses de mon
11 procès. Si cela avait été un véritable Tribunal, si vous étiez de
12 véritables Juges, Mesdames, Monsieur, dès l'apparition de cette décision,
13 vous auriez immédiatement pris la décision de mettre fin à ce procès parce
14 qu'il n'a aucune intégrité. Après la dépêche de l'ambassade américaine de
15 France avec la déclaration de Maurice Gourdault-Montagne, plus aucune
16 intégrité n'est préservée à ce procès. C'est terminé. Tout est terminé. Le
17 procès est terminé, sauf que vous l'ignorez toujours. Ce procès constitue
18 mon triomphe. J'ai réussi à démontrer que tout cela n'est qu'un jeu
19 politique, rien d'autre. Et vous vous êtes prêtés au jeu, tant pis, tant
20 pis pour vous.
21 Ces documents de WikiLeaks nous permettent de trouver une multitude
22 d'autres informations, de données sur comment Nikolic et Vucic ont été
23 recrutés, quelles sont les attentes de leurs patrons occidentaux si jamais
24 ils arrivaient au pouvoir ou s'ils arrivaient à participer au pouvoir. Tout
25 ce qu'ils sont prêts à faire, et des choses bien pires que Boris Tadic, les
26 démocrates, ils n'ont plus aucun scrupule moral. Et là, celui qui prend
27 part directement, c'est Arnaud Danjean, l'agent d'espionnage français. Il
28 établit un lien entre eux et Stane Subotic, Zabac. Stane Subotic les
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1 finance grâce à des sommes très importantes. Le gouvernement américain
2 également en passant par des soi-disant ONG, par différentes fondations,
3 Danjean lui-même y prend part. Il semblerait qu'une partie de ces
4 ressources vienne de Kadhafi également et ont été attribuées à Nikolic et
5 Vucic. Et une partie très importante de cet argent est allé à Sarkozy, bien
6 entendu. Tout ça ce sont des caisses noires, des fonds clandestins. Mais au
7 moment de la chute de Kadhafi, on a reçu des informations dans le public
8 disant que c'était une pratique très largement développée. Et d'après les
9 déclarations de leurs patrons, ils ont fait circuler il y a deux ans que
10 j'aurais commandité le meurtre de Nikolic. Et vous savez pourquoi, pourquoi
11 ils ont fait circuler cela ? Tous les médias de Serbie ont publié ça,
12 disant que j'aurais commandité ce meurtre, cet assassinat de Nikolic en
13 tant qu'un des arrêtés du clan Zemun, il a dit cela, et il a fallu à ce
14 moment-là que le Tribunal décide qu'on allait mettre fin à toutes mes
15 communications avec l'extérieur, et mon épouse s'est vu accuser d'avoir
16 transmis cet ordre à un certain Simovic, donc pour que cet assassinat soit
17 fait.
18 Et voire même Tomislav Nikolic "s'est rappelé" que précédemment c'est
19 en passant par Aleksandar Vucic que j'aurais commandité l'assassinat de
20 quelqu'un. Mais cette fois-ci le Tribunal n'a pas réagi. Et longtemps, je
21 me suis demandé pourquoi ce manque de réaction. Et la conclusion à laquelle
22 je suis arrivé est la suivante : C'était à partir du moment où on avait
23 déjà bel et bien lancé cette attaque contre mon cœur et cette autre action
24 était superflue, puisque attaquer mon cœur était bien plus efficace. Les
25 mesures disciplinaires suscitent toujours mon dépit, ma réaction, et je m'y
26 oppose, et finalement les résultats escomptés ne sont pas là. Mais à partir
27 du moment où mon cœur est abîmé, je ne peux plus respirer et, bien sûr, je
28 suis toujours défiant, je combats toujours, mais j'ai du mal à retrouver
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1 mon souffle. Voilà, c'est ça. Physiquement, on arrivera plus facilement à
2 m'arrêter qu'en s'en prenant à mon mental. Parce que sur le plan mental, je
3 suis encore inébranlable face à l'ensemble de ce Tribunal et toutes les
4 forces obscures qui le dirigent.
5 En coulisse politiquement, il est intéressant de constater que toutes les
6 puissances occidentales ont pris part à ce complot : les Etats-Unis
7 d'Amérique, la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne. Leurs services de
8 renseignements ont contribué grandement. Ils ont essayé de briser le Parti
9 radical serbe, ils ont essayé de protéger Tomislav Nikolic et Alexandre
10 Vucic. Aussi, Tomislav Nikolic est traité par quelqu'un qui ne pourrait pas
11 être utilisé longtemps, quelqu'un de jetable, quelqu'un qui a acheté son
12 diplôme universitaire. Et en Serbie d'ailleurs, nous avons plusieurs
13 agences chargées de combattre la corruption, enfin formellement. Vous
14 pensez quelqu'un soit intervenu pour élucider les conditions dans
15 lesquelles ils ont obtenu ce master en sciences économiques, sans passer ni
16 réussir ne serait-ce qu'un seul examen ? Non, même le régime qui est encore
17 en place ne veut le faire. Cela leur convient que ce parti ne soit pas trop
18 fort, qu'il soit au Parlement, et qu'il se soit un bouche-trou dans telle
19 ou telle circonstance lorsqu'ils ont besoin de compter sur la majorité
20 parlementaire. C'est ça le rôle qu'ils sont appelés à jouer. Tomislav
21 Nikolic fera tout ce que Arnaud Danjean lui demande de faire ou un autre
22 agent d'espionnage occidental dont j'ignore l'existence, car je ne suis au
23 courant de l'existence que de ceux qui ont été révélés, dévoilés. Pour les
24 autres, je ne les connais pas, je les ignore, et je ne mentionnerais jamais
25 un nom si je n'ai pas si je n'ai pas de preuve à l'appui. Et j'ai des
26 preuves très valables à l'appui de ce que vient de dire. Qui saurait nier
27 l'authenticité de la dépêche de l'ambassade américaine de Paris envoyée à
28 Washington ? Qui pourrait contester le rôle joué par Arnaud Danjean dans
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1 l'ensemble de ces basses besognes ? Qui pourrait contester le rôle joué par
2 l'un quelconque de ces participants, de Maurice Gourdault-Montagne, par
3 exemple. Personne ne pourrait contester. Donc il s'agit là de quelque chose
4 que l'on ne saurait accueillir que par le silence.
5 Alors permettez-moi d'aborder maintenant un autre sujet que je n'ai
6 pas exploré de manière tout à fait exhaustive dans la première partie de ma
7 plaidoirie. Le Procureur déploie des efforts très considérables pour
8 démontrer que mon soi-disant discours de haine peut constituer un crime de
9 persécution. Et il compte là-dessus sur l'appui des membres de la Chambre
10 de première instance, en particulier la majorité des Juges de la Chambre de
11 première instance. Et le Procureur cite à l'appui le procès Nahimana et
12 consorts, et les Juges d'ailleurs citent eux aussi cette affaire-là. C'est
13 la pratique du TPIR. Et là, il y a eu une affaire pour génocide, pour un
14 génocide établi de façon irréfutable, et d'après la convention pour la
15 prévention du génocide, même si le génocide n'a pas eu lieu, on doit punir
16 pour l'invitation directe et publique au génocide. Mais ça, c'est pour ce
17 qui est du génocide. Par contre l'arrêt en appel contre Nahimana et
18 consorts, les mêmes actes qui ont été qualifiés de génocide ont de surcroît
19 été qualifiés de persécution, d'assassinat et je ne sais quoi encore. J'ai
20 lu tout ceci en détail.
21 Voyons quelle est la jurisprudence du TPIY à ce sujet. Je vous
22 rappelle l'affaire contre Kordic et Cerkez. Le Tribunal de La Haye a dressé
23 un acte d'accusation contre eux le 30 septembre 1998. Et dans cet acte
24 d'accusation au chef 1, il est question de persécution en tant que crime
25 contre l'humanité. Les persécutions fournissent une définition beaucoup
26 plus générale de tous les crimes contre l'humanité, c'est une notion sui
27 generis, mais en tant que notion spécifique, la persécution peut également
28 constituer un crime contre l'humanité.
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1 Au paragraphe numéro 37 de l'acte d'accusation dressé contre eux, au point
2 (c), il est indiqué qu'une campagne de persécution à grande échelle ou
3 généralisée a été conçue et mise en œuvre, exécutée selon les modalités
4 suivantes, et cetera, donc toute une série de modalités, (c) par
5 l'encouragement, l'incitation, ainsi que par la propagation de la haine et
6 de la défiance sur des bases ethniques, politiques, religieuses, et autres,
7 par le moyen de la propagande de discours et autres. Donc il s'agit d'un
8 acte d'accusation, tous azimuts, et c'est comme s'il avait déjà été préparé
9 pour moi.
10 Cependant, le 26 février 2001, la Chambre de première instance, qui était
11 composée des Juges Richard May, Mohamed Bennouna, et Patrick Robinson, a
12 rendu son jugement, et au paragraphe 209 de ce dernier, il est question de
13 l'encouragement et de la propagation de la haine sur des bases politiques
14 et autres, comme suit : La Chambre de première instance relève que l'acte
15 d'accusation dressé contre Dario Kordic est le premier acte d'accusation
16 dans l'histoire du Tribunal international dans lequel cet acte ait été
17 retenu à charge en tant que crime contre l'humanité. On veut probablement
18 dire pour lequel cet acte est retenu à charge comme acte comme crime contre
19 l'humanité. La Chambre de première instance estime que ces actes, tels
20 qu'ils sont évoqués dans l'acte d'accusation, ne constituent pas en eux-
21 mêmes un crime contre l'humanité. Il ne figure nulle part ailleurs dans le
22 Statut du Tribunal en tant que crime contre l'humanité. Ce qui est le plus
23 important, c'est qu'il n'atteint pas le même degré de gravité que les
24 autres infractions figurant à l'article 5 du Statut.
25 Ensuite il est indiqué : "L'incrimination," on pense à l'article 5, "n'est
26 pas devenue une pratique courante en droit international coutumier. Par
27 conséquent, condamner l'accusé pour le crime de persécution représenterait
28 une violation du principe de légalité." Il s'agissait là de l'un des
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1 fonctionnaires le plus haut placé de la Communauté croate d'Herceg-Bosna,
2 qui était là traduit en justice.
3 Alors, ensuite au paragraphe 271, il est indiqué, je cite :
4 "La Chambre de première instance admet que l'appel direct et public
5 au génocide représente un crime en application de l'article 43(C) du
6 Statut. Mais les actes retenus à charge contre les accusés en l'espèce se
7 situent largement en dessous des critères correspondant à cet acte."
8 Alors, moi, je ne remets certainement pas en question que l'appel
9 public et direct à commettre le génocide représente donc un crime contre
10 l'humanité en application de la convention de prévention du génocide. Mais
11 on ne peut pas traiter cela de la même façon que l'incitation au génocide.
12 C'est là la substance et c'est ce qui résout toute la question. Alors, dans
13 une autre remarque il est indiqué, paragraphe 272 :
14 "La poursuite au pénal pour discours n'atteignant pas ou ne
15 remplissant pas les critères correspondant à l'incitation a reçu peu d'écho
16 dans la pratique internationale. Dans l'affaire Streicher, il a été
17 constaté que ce dernier avait incité le peuple allemand à la persécution.
18 Cependant, les actes qu'il a commis, à savoir la publication d'une revue
19 antisémite, représentaient une incitation au meurtre, à la persécution.
20 Conformément à ce qui a été constaté par le TPIR dans le jugement contre
21 Nahimana et consorts, il a donc été estimé que l'accusé était coupable
22 d'incitation directe et publique à commettre le génocide.
23 "En application du Statut du Tribunal militaire international et
24 conformément à la loi 10 du Conseil de contrôle ainsi qu'au Statut du TPIY
25 et du TPIR, conformément également au Statut de la CPI, seule l'incitation
26 directe et publique à commettre le génocide est incriminée de façon
27 explicite en tant que discours."
28 Donc cette partie d'ailleurs du jugement a été confirmée en appel. Et
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1 l'Accusation en espèce n'a même pas essayé de le contester.
2 Alors ailleurs il est indiqué qu'en droit conventionnel, les positions au
3 sujet de l'opposition qu'on peut y faire, il n'est pas nécessaire de
4 considérer de tel discours comme des crimes. Dans la convention portant sur
5 l'initiation de toutes les formes de discrimination, où il est indiqué que
6 les parties doivent incriminer, déclarer comme crime et punissable en tant
7 que tel toute propagande fondée sur une idée de supériorité raciale et
8 susceptible d'inciter à la discrimination raciale et à la haine." Donc dans
9 le droit international coutumier, on met de côté la discrimination raciale
10 et la haine raciale. C'est également l'approche qu'a retenue la Chambre de
11 Lords au Royaume-Uni. Seule cette forme de haine fait l'objet d'une
12 incrimination et peut-être sanctionnée, et non pas les échanges si vifs,
13 fussent-ils, entre des adversaires politiques, des groupes religieux ou
14 autres, entre lesquels il n'y a pas de différence raciale. Il n'a pas de
15 différence racial ou ethnique entre les Serbes, les Croates, les Musulmans,
16 les Albanais, les Macédoniens. Il n'y a absolument aucune différence sur le
17 plan racial entre eux.
18 L'article 20 du Pacte international sur les droits civils qui concerne
19 l'interdiction de la propagande de guerre dispose que, toute propagande de
20 guerre doit être interdite par la loi, que le fait de prôner la haine
21 raciale, religieuse, ou sur une base ethnique ou politique, susceptible
22 d'entraîner des conflits doit faire l'objet d'une interdiction par la loi.
23 C'est ce qui figure dans le pacte international. Et pourtant on y dit
24 également : Bien que dans son libellé initial, l'article 20 portant sur
25 l'incitation à la haine raciale soit telle qu'elle est dans sa formulation
26 finale, il est seulement indiqué que de tels actes doivent être interdits
27 par la loi. Mais il n'est pas indiqué qu'ils doivent l'être dans le droit
28 pénal. Donc de quelle loi s'agit-il ? Peut-être s'agit-il d'infraction
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1 d'une loi qui ferait de tels actes des délits. Peut-être les contrevenants
2 s'exposeraient-ils à une peine de prison pouvant aller jusqu'à 60 jours.
3 Donc en Serbie, par exemple, les tribunaux compétents pour de tels délits
4 sont des organes de l'administration et non pas du système judiciaire en
5 tant que tel. Ils peuvent prononcer une peine allant jusqu'à 60 jours
6 d'emprisonnement.
7 Alors, l'ouvrage de Manfred Novak fournit un fondement à ceci. "Le Pacte
8 international sur les droits civils", de 1964. Il est également ajouté ici
9 qu'un grand nombre d'Etats a ajouté des commentaires et interprétations
10 portant sur cette disposition. Par conséquent, nous avons ici affaire à
11 quelque chose qui est encore loin d'être incontestable et absolument
12 consensuel en droit international, et si tel est bien le cas, cela ne
13 saurait être applicable dans cette enceinte.
14 Ensuite, il est indiqué que : Une grande variété d'approches
15 juridiques, d'interdictions, et de protections en matière de propagation ou
16 d'incitation à la haine, à la défiance ou aux divergences, que ce soit sur
17 une base politique, ethnique, ou religieuse, au moyen de la propagande, de
18 discours, ou par d'autres moyens, montrent qu'il n'existe pas de consensus
19 sur le plan international concernant l'incrimination de cet acte en droit
20 international coutumier. En tant que Chambre de première instance, vous
21 vous êtes référée aux lois de l'ex-Yougoslavie, mais dans le code pénal
22 actuel de la Serbie même, on trouve sans doute toujours la même disposition
23 interdisant la propagation de la haine sur une base raciale, religieuse, ou
24 autre. Alors, la peine encourue a été réduite, passant de 10 à 5 ans. Il
25 s'agit là de la législation nationale serbe, et cela n'a pas été confirmé
26 en droit international coutumier pour que vous puissiez l'appliquer ici.
27 Vous ne pouvez pas me poursuivre ici pour trouble à la circulation sur les
28 routes de Serbie parce que j'aurais peut-être conduit en état d'ébriété -
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1 ce qui n'est pas le cas puisque je ne bois pas, mais je vous donne
2 simplement cet exemple.
3 L'Allemagne et le Canada se situent des deux côtés opposés de ce
4 spectre large, bien que dans de nombreux autres Etats, y compris en ex-
5 Yougoslavie et aux Etats-Unis, on trouve des formes de régulation
6 s'appliquant aux discours de propagation de la haine. Dans la loi de 1996
7 de la République Sud-africaine, les discours de propagation de la haine sur
8 l'une de ces bases et représentant une tentative de porter préjudices sont
9 exclus. Dans le code criminel du Canada, article 319, on interdit les
10 discours qui sont susceptibles d'inciter à la haine contre ceux qui
11 appartiennent à d'autres races, nationalités, ou pratiquent une autre
12 religion. Dans le code pénal français, il est indiqué que ceux qui
13 provoquent la discrimination, la haine ou la violence dirigée contre une
14 personne ou un groupe de personnes en raison de l'origine, ou
15 l'appartenance, ou la non-appartenance de ces dernières à un groupe
16 ethnique ou religieux, encourt une peine de prison d'un an et ainsi qu'une
17 amende.
18 Et vous savez pertinemment bien mieux que moi, Monsieur Antonetti,
19 que ceci figure au code pénal français, et que l'on ne saurait considérer
20 cela comme un crime contre l'humanité. On y cite également ce fameux
21 article 133 du code pénal de la RSFY interdisant les actes susceptibles de
22 porter préjudice à la fraternité et à l'unité entre les peuples.
23 Alors, d'après le code pénal allemand, ceux qui incitent à la haine
24 et à la violence, ou encore à des actes arbitraires dirigés contre certains
25 groupes de population, ou encore procèdent à des vexations ou perturbent la
26 population correspondante et troublent l'ordre public, doivent être
27 sanctionnés. Les Etats-Unis représentent malgré tout une exception, compte
28 tenu des garanties qui sont données et qui protègent le discours. Le
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1 discours de haine est protégé par la constitution des Etats-Unis, à
2 condition qu'il n'atteigne pas le niveau de l'incitation, ce qui est un
3 seuil vraiment très élevé, placé très haut dans la jurisprudence
4 américaine. Et j'essaie de vous expliquer que ce critère de l'incitation
5 n'est satisfait, n'est rempli qu'à partir du moment où l'incitation en
6 question a contribué de façon significative à l'exécution du crime, et non
7 pas lorsqu'il s'agit de suppositions. J'aurais tenu un discours à Belgrade
8 ou à Pirot et de l'autre côté de la Drina, là-bas, quelqu'un tue ou viole,
9 et on trouve différentes versions, on dit parfois qu'il aurait tué ou violé
10 avant mon discours, ou après mon discours, on n'apporte aucune preuve de la
11 façon dont mon discours aurait pu avoir la moindre influence sur ces actes,
12 mais moi, je suis responsable de ce que quelqu'un là-bas a commis un crime.
13 Ce sont des inepties.
14 Alors, est-ce qu'avec le jugement que vous rendrez, vous allez aller à
15 l'encontre de celui rendu dans l'affaire Kordic et Cerkez ? Peut-être que
16 la Chambre de première instance dans l'affaire contre Kordic et Cerkez a
17 pris cette position de principe concernant l'incrimination du discours de
18 haine parce qu'elle disposait d'un grand nombre d'autres arguments sur
19 lesquels étayer son jugement. Par conséquent, elle n'avait peut-être pas
20 besoin d'en appeler en plus au discours de haine. Mais dans mon procès,
21 vous ne disposez de rien. La participation à la guerre n'est pas un crime.
22 La contribution à l'effort de guerre, ce n'est pas une infraction au pénal
23 non plus. Les Serbes n'étaient pas des agresseurs dans cette guerre. En
24 partant de mes discours, pouvez-vous retrouver le moindre fragment qui
25 pourrait constituer une contribution significative à la commission ne
26 serait-ce que d'un seul crime ? L'Accusation n'a pas mené sérieusement son
27 enquête; nous l'avons déjà vu. Son enquête a été, d'ailleurs, assez
28 tardive. D'abord, l'acte d'accusation a été dressé, et ce n'est qu'ensuite
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1 qu'une enquête a été menée. L'acte d'accusation, ensuite, a été amendé,
2 certaines portions ont dû en être retirées.
3 Mais le Procureur n'avait pas vraiment envie de visionner les
4 enregistrements de mes discours publics. Parce que si le Procureur avait
5 vraiment fait diligence et avait été un peu plus sérieux, il aurait mis la
6 main sur les preuves indiquant que lors de plus d'une centaine de meetings,
7 j'ai cité un poème, qui est l'un de mes poèmes préférés, vieux de plus de
8 200 ans. Et lorsque je cite ce poème, je suscite l'enthousiasme du public
9 parce qu'il s'agit d'un texte particulièrement combatif.
10 Et je vais vous en lire quelques vers, parce qu'il s'agit d'un texte que
11 lorsque je le connaissais encore par cœur, je citais très volontiers.
12 Malheureusement, ici je ne suis plus vraiment en mesure de me fier à ma
13 seule mémoire, par conséquent, il est préférable que j'en donne lecture. On
14 m'avertit de lire plus lentement. Je vais le faire.
15 "Allons, enfants de la patrie. Le jour de gloire est arrivé. Un drapeau
16 sanglant a été dressé contre nous. Entendez-vous le martèlement de l'armée
17 qui arrive ? Il s'agit de l'armée ennemie, l'armée qui égorgera femmes et
18 enfants. Citoyens, formez bataillons et avancez, et que le sang impur" -
19 donc, le sang des ennemis - "remplisse les rigoles que nous laisserons
20 derrière nous. Tout pour la patrie, par amour pour la patrie. Mène-nous et
21 renforce nos muscles vengeurs. Liberté, chère liberté, lutte aux côtés de
22 tes défenseurs. Que la victoire réponde à tes courageux appels sous les
23 drapeaux. Qu'au moment de leur mort, tes ennemis" - il s'agit donc ici de
24 l'ennemi, de l'adversaire - "que tes ennemis voient le triomphe qui est le
25 tien et la gloire qui est la nôtre. Et lorsque nos pères ne seront plus
26 nous retrouverons leur cendre, les traces de leur fierté, nous serons moins
27 jaloux de leur avoir survécu que de partager leur fardeau. Aux armes,
28 Citoyens. Formons des bataillons. Avancez, avancez. Et que le sang impur
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1 remplisse les traces que nous laisserons.
2 Que veulent ces hordes d'esclaves ?" Il s'agit des ennemis.
3 "Ces hordes de traîtres trompés par leurs gouvernements. Pour qui
4 sont ces chaînes préparées d'avance, ces chaînes horribles." Et il s'agit
5 ici des chaînes préparées pour les Serbes, de ceux qui étaient alors
6 l'entité fédérale croate ou l'entité fédérale de Bosnie-Herzégovine, si les
7 Serbes ne s'étaient évidemment pas dressés, élevés contre ça.
8 Or, Monsieur Antonetti vous aurez évidemment reconnu tout de suite
9 ces vers. Il s'agit de l'hymne national français, "La Marseillaise". Il
10 s'agit d'un chant que je connaissais par cœur dans son intégralité. Je ne
11 l'ai pas cité intégralement mais je le citais, je le récitais fréquemment.
12 Alors pourquoi le Procureur a-t-il omis de dire que je citais ce chant dans
13 mes discours ? Qu'est-ce qu'il l'en n'a empêché ? C'est ainsi que l'on
14 s'exprime, que l'on parle lorsqu'on est en état de guerre, on ne va quand
15 même pas faire les louanges de l'ennemi. Imaginez un instant ce que vous,
16 Français, disiez au sujet des Allemands en 1939 lorsque ces derniers vous
17 ont attaqués, ou vous Danois, je ne sais plus quelle année ils vous ont
18 attaqués, ou vous Italiens, lorsque les Allemands ont occupé la moitié
19 d'Italie ? On ne peut pas s'exprimer de façon positive au sujet de
20 l'ennemi. Alors, puisqu'on fait des plaisanteries sur mon compte depuis
21 qu'on a appris qu'un pacemaker, un stimulateur cardiaque m'a été implanté,
22 après on a compris que c'était autre chose, que ce n'était pas un
23 pacemaker, eh bien certains ont commencé à m'appeler "peacemaker", celui
24 qui fait la paix. Alors est-ce que vous me jugez ici pour n'avoir pas été
25 quelqu'un de pacifique ? C'est pour cela que vous me jugez ? Est-ce que
26 vous me jugez parce que je suis une personnalité agressive ? Mais c'est mon
27 droit plein et entier d'être agressif. S'il y a quoi que ce soit de
28 punissable pour ce qui est de mon agressivité, c'est punissable devant mon
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1 tribunal local à Belgrade, non pas devant un tribunal international.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il est l'heure, il faut qu'on fasse
3 la pause. Nous allons faire 30 minutes de pause, et nous reprendrons à 4
4 heures.
5 --- L'audience est suspendue à 15 heures 31.
6 --- L'audience est reprise à 16 heures 01.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans la suite, je vais vaquer une fois de plus
9 à des aperçus concrets pour ce qui est des thèses avancées par l'Accusation
10 et qui sont tout à fait dénuées de pertinence et qui ne sauraient être
11 défendues. Le bureau du Procureur, de façon tout à fait incompréhensible,
12 essaie de présenter le fait que la défense des Serbes à l'Occident et
13 l'assistance portée à ces Serbes constitueraient une entreprise criminelle
14 commune.
15 Alors faillait-il défendre les Serbes sur le territoire de l'unité fédérale
16 croate, alors que Tudjman, dès 1990, par la modification de la
17 constitution, a en dépit de leur volonté à eux les a dépossédés de leur
18 droit le plus élémentaire, le plus fondamental, c'est-à-dire le droit à la
19 constituvité [phon].
20 Alors que pouvait-on espérer ou escompter à ce moment-là ? Peut-être ce que
21 le Juge Moloto a dit dans le procès à Milan Martic. Pourquoi vous, les
22 Serbes, puisque vous avez vu que les Croates ne vous aimaient pas là-bas,
23 pourquoi n'avez-vous pas plié bagages et pourquoi n'avez-vous pas quitté la
24 Croatie ? Il a dit quelque chose d'à peu près similaire. Mais c'est facile
25 pour le Juge Moloto. Dans ces régions, là-bas, tous vos biens, vous les
26 chargez sur un âne, sur une mule et vous voyagez où vous voulez. Or, les
27 Serbes sur le territoire de l'ex-Croatie, de l'ex-unité fédérale croate,
28 ils y résidaient depuis plus 400 ans. Et ils n'étaient pas arrivés là en
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1 expulsant des Croates. C'est par la volonté de la cour viennoise, c'est-à-
2 dire des autorités autrichiennes, qu'ils étaient venus sur le territoire
3 qui préalablement avait été saccagé et pillé par les Turcs. Et les Turcs
4 avaient fui ces territoires pour aller un peu partout en Europe. Et il y en
5 a même de nos jours encore en Slovaquie. Le président de la Slovaquie
6 actuelle, Ivan Gasparovic, c'est un Croate d'origine. Ils résident en
7 grands groupes, énormes groupes un peu en dessous de Vienne. C'est les
8 Croates de Gradiste [phon]. Puis il y en a à Hongrie, il y a beaucoup de
9 noms croates qui sont des noms hongrois alors que ces Hongrois ne parlent
10 pas un mot de croate. Et en Italie, vous avez eu jusqu'à il n'y a pas
11 longtemps des villages qui étaient habités presque uniquement par des
12 Croates qui avaient, eux, fui les Turcs. Et on a convié les Serbes là-bas
13 pour défendre l'Empire autrichien. Ils ont protégé ce qu'il restait de
14 Croates. Ils ont protégé le reste de l'Europe contre les avancées turques.
15 Et lorsque le péril turc est passé, on a entamé un processus de
16 développement de cette Empire austro-hongrois après la bataille à Patu
17 [phon], et là, l'Autriche a perdu la possibilité d'être à la tête de
18 l'unification de l'Allemagne, ils ont dû céder cela à l'Empire turc, et les
19 Hongrois ont profité de cette faiblesse et ont demandé à ce que la
20 monarchie se subdivise en deux. Puis il y a eu un marché de conclu avec les
21 Croates aussi, car on a donné à la Croatie, la Slavonie tout entière. Le
22 parlement croate qui était un établissement de noblesse croate pendant des
23 siècles, c'était le parlement de la Dalmatie, de la Croatie et de la
24 Slavonie. La Dalmatie et la Slavonie, c'étaient des régions strictement
25 dissociées de la Croatie. Les Dalmates n'étaient pas des Croates. C'est un
26 peu roman, qui est très proche des Italiens. Ce ne sont pas des Slaves.
27 Mais par la volonté du pape de Rome et avec le soutien de ce dernier,
28 lorsque Byzance a perdu sa primauté au niveau de la partie nord de la mer
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1 Adriatique, ils ont été annexés à la Croatie pour faire partie d'une
2 province à part du temps du règne du roi Tomislav. La Slavonie, quant à
3 elle, a été annexée a posteriori, mais ça n'a pas modifié la structure
4 ethnique de la population en Slavonie. Les gens de la Slavonie, c'est ce
5 que sont les Slovènes. Slavonie et Slovénie, c'est la même chose.
6 Et là, les Serbes sont venus habiter sur des territoires complètement
7 dévastés et vides d'habitants pour défendre l'Autriche. On a créé cette
8 Krajina militaire, qui est le synonyme de frontière militaire, comme région
9 administrative qui était directement gérée par Vienne. Alors, une fois que
10 le péril turc est passé en 1881, il y a eu un accord de la population serbe
11 aussi pour supprimer cette frontière militaire et de faire en sorte que
12 cette Krajina militaire fasse partie de la Croatie et de la Slavonie, parce
13 que la Dalmatie, elle, elle était encore dirigée ou gérée par Vienne, et la
14 Slavonie était gérée par la Hongrie. Donc on a dit qu'i fallait annexer
15 ceci à la Slavonie à condition que les Serbes deviennent ou restent un
16 peuple constitutif sur pied d'égalité avec les Croates. Et les Communistes
17 ont entériné la chose en créant cette unité fédérale croate vers la fin de
18 la Deuxième Guerre mondiale. Et ce droit proclamé du côté des Serbes n'a
19 jamais été remis en question par personne, bien que les hommes politiques
20 croates les plus éminents avaient fait des efforts en ce sens du temps du
21 communisme, puis est venu Franjo Tudjman pour biffer tout ceci d'un coup de
22 plume.
23 Alors, que pouvaient faire les Serbes d'autre si ce n'est de se soulever,
24 de s'insurger pour s'y opposer ? Et ils avaient gardé des souvenirs vivaces
25 de ce qui s'était passé pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les Serbes,
26 pendant la Deuxième Guerre mondiale, ont subi un génocide de la part de
27 différentes puissances fascistes, en commençant par l'Allemagne et par
28 l'Etat Quisling croate. Les Serbes sont venus -- enfin, sont arrivés dans
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1 une situation où l'Italie fasciste est venue les aider contre les crimes
2 croates de la Deuxième Guerre mondiale. Les Italiens ont dû réoccuper
3 toutes leurs zones d'intérêt dans le cadre de cet Etat indépendant croate
4 pour faire stopper les crimes. Et hier, je vois à la télévision croate, on
5 s'attaque au mouvement chetnik de Drazen Mihailovic en le qualifiant de
6 fasciste. On dit qu'il avait coopéré avec l'Italie fasciste. Oui, mais
7 l'Italie fasciste n'avait pas effectué un génocide à l'égard des Serbes. Le
8 génocide a été commis par la Croatie fasciste et par l'Allemagne fasciste,
9 et l'Italie n'a pas effectué de génocide, ni à l'égard des Juifs, ni à
10 l'égard des Serbes, et c'est là la différence. Entre deux maux, on choisit
11 le moindre. Alors, c'est un mal que de voir l'Italie avoir occupé une
12 partie de notre pays, mais il n'y a pas eu de génocide, or, la Croatie
13 était un Etat génocidaire.
14 Et moi, je suis mis en accusation parce que je l'avais dit au peuple serbe.
15 Je n'ai fait que présenter des faits et des vérités. Des centaines et des
16 centaines de tomes, de livres, ont été rédigés sur ce sujet. Il y a des
17 milliers et des milliers innombrables de documents qui ont été préservés à
18 cet effet, et maintenant on doit prétendre et faire semblant que tout ceci
19 ne s'est jamais produit ? Dès que Tudjman est arrivé au pouvoir, il a
20 ravivé nos souvenirs de cette Croatie fasciste. D'ailleurs, il a fait
21 l'effort de raviver les choses, parce qu'il a coopéré avec l'émigration
22 oustachi de par le programme qu'il a promulgué, de par ses dépositions
23 qu'il avait adoptées à l'égard de ce peuple. Et alors, vous vouliez que
24 nous n'allions pas porter secours à ces Serbes en péril ? L'entreprise
25 criminelle, c'était la dépossession des Serbes de leur droit de peuple
26 constitutif, de leur droit constitutionnel. Il en va de même pour ce qui
27 est du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Les Musulmans, avec l'aide des
28 Croates, ont contesté le droit aux Serbes d'être ou de demeurer un peuple
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1 constitutif.
2 A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les Communistes avaient hésité :
3 faire en sorte que la Bosnie-Herzégovine soit annexée à la Serbie, ou en
4 faire un Etat constitutif de fédération, à part. Et puis, on en a fait un
5 Etat constitutif à part. Et puis, on a proclamé le fait que c'était une
6 unité fédérale où il y avait des peuples constitutifs sur pied d'égalité, à
7 savoir les Serbes, les Croates et les Musulmans. Les Musulmans n'étaient
8 pas qualifiés de nation, à vrai dire. Ils pouvaient opter pour ce qui est
9 de se prononcer sur le plan ethnique en faveur du fait de se dire Croates
10 ou Croates jusqu'en 1991 -- jusqu'en 1981, mais ils ont constitué un groupe
11 ethnique à part. Et tous les Musulmans de Bosnie-Herzégovine se trouvent
12 être d'origine serbe, des Serbes qui du temps de l'occupation ottomane sont
13 passés à l'Islam, se sont convertis a l'Islam. La plupart d'entre eux
14 avaient accepté l'Islam par intérêt, au début, parce que ça permettait
15 d'avoir une position privilégiée dans cet Empire ottoman. Mais leurs
16 enfants et leurs petits-enfants, du moins pour ce qui est de la classe au
17 pouvoir, de l'aristocratie, ils allaient se former à Constantinople, en
18 Egypte, à Bagdad, et on leur enseignait le turc, l'arabe, le persan. Ils
19 pouvaient lire les livres saints musulmans, et grand nombre d'entre eux
20 avaient commencé à aimer l'Islam, du fait de la raison ou de l'approche à
21 ses valeurs. Au début, personne n'avait bien compris cette nouvelle
22 religion, mais une partie de ces gens avait accepté cette nouvelle religion
23 pour préserver leurs terres, leurs biens, pour avoir des positions ou des
24 situations privilégiées.
25 Et après avoir appris ces langues orientales, on a compris quelles étaient
26 les valeurs de cette nouvelle religion, les acquis, et il y a un amour à
27 l'égard de cette religion qui s'installe. La population tout ordinaire a
28 appris aussi des choses au sujet de la religion, bien que la totalité des
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1 choses en turc ou en arabe étaient incompréhensible, mais du fait de se
2 faire paraphraser les choses, ils avaient commencé à comprendre un peu.
3 Alors maintenant, ces Musulmans du groupe ethnique national serbe qui
4 étaient passés à l'Islam, qui s'étaient convertis à l'Islam, ça avait été
5 des soldats de l'Empire ottoman. Ils ont participé pratiquement à la
6 totalité des conquêtes turques ultérieures. Ils sont allés se battre contre
7 Vienne. Ils se sont battus sur des champs de bataille en Afrique, en Asie.
8 Dieu seul sait où ils sont allés se battre. Et ils ont été respectés parce
9 que c'était de bons combattants. Et ça leur a fourni un pouvoir économique
10 et une influence de poids, mais ils étaient quand même minoritaires par
11 rapport aux Serbes orthodoxes, et en particulier par rapport aux
12 Catholiques, jusqu'à la grande défaite des Turcs aux portes de Vienne en
13 1690. Alors, les Turcs doivent quitter la Slavonie, la Lika, les autres
14 territoires, pour aller où ? En Serbie de nos jours, en Macédoine, et en
15 Bosnie-Herzégovine.
16 Eugène de Savoy, le grand chef militaire autrichien, est entré avec un
17 grand régiment militaire en Bosnie-Herzégovine. Il a mis la Bosnie-
18 Herzégovine à feu et à sang. Il est entré à Sarajevo, il a incendié la
19 totalité des mosquées. Il a détruit la totalité des fortifications. Et
20 quand le commandant Nikolomini, lorsque l'armée -- est mort, lorsque
21 l'armée autrichienne a dû se retirer, Eugène de Savoy s'est retiré lui
22 aussi de la Bosnie-Herzégovine. Savez-vous ce qu'il a fait ? Il a pris
23 pratiquement la population catholique totale de la Bosnie-Herzégovine pour
24 la déménager vers des territoires de la Slavonie qui avaient été vidée de
25 sa population auparavant et il restait en Bosnie-Herzégovine à ce moment-là
26 moins de 10 000 catholiques. Et il y a bon nombre de Serbes orthodoxes qui
27 avaient quitté cette Bosnie-Herzégovine pour peupler la Slovénie, qui
28 pendant des siècles avait été une province turque, lorsque les Turques ont
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1 été chassés, ça s'est vidé de cette population-là, et ça a été peuplé de
2 catholiques et orthodoxes venus de la Bosnie.
3 En Croatie, il s'est passé quelque chose de similaire, je vous l'ai déjà
4 raconté. Les Croates à l'origine, ils ont leur langue croate, du point de
5 vue linguistique, ça s'appelle le chtokavien. Ça diffère du stokavien,
6 c'est-à-dire du serbe et du kajkavien, qui est une langue slovène. La
7 linguistique dit au sujet de la langue macédonienne que c'est un dialecte
8 vieux stokavien. Il y a le nouveau stokavien et l'ancien stokavien. Le
9 nouveau stokavien se subdivise en ékavien et iékavien et ikavien, mais tout
10 ça c'est serbe.
11 M. Marcussen peut rire autant qu'il le veut, mais ignorer ceci est une
12 chose risible. Pourquoi est-il venu participer à ce procès ? Parce que ce
13 procès, on ne peut pas le diligenter de façon facile, aisée, comme cela a
14 été le cas contre le groupe des responsables politiques, militaires et
15 policiers de Serbie ou aux Serbes qui ont été mis en accusation pour les
16 prétendus crimes commis au Kosovo. Là-bas, il a réussi à créer un conflit
17 entre les différents accusés pour conduire à leur bien le procès jusqu'au
18 jugement. Ici, ça ne se passera pas facilement. Ici, il a à faire face à
19 quelqu'un qui se trouve être absolument supérieur à lui, et qui a le droit
20 d'être arrogant parce que supérieur à lui. Je ne peux pas résister à cette
21 arrogance qui découle de ma grande supériorité vis-à-vis de lui.
22 Les Croates ont été pratiquement anéantis en tant que peuple, ils ont été
23 disséminés dans toute l'Europe, et leur noblesse a été transférée par
24 l'Autriche vers la Slovénie, vers le Zagorije [phon] de la Croatie de nos
25 jours. Et au fil des siècles, ces nobles Croates ont obligé leurs paysans
26 qui parlaient le kajkavien à se prononcer comme étant Croates. Du temps du
27 mouvement illyrien, Ljudevit Gaj, qui était à la tête de ce mouvement
28 illyrien, il commence à imprimer son journal appelé "Danica" en langue
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1 kajkavienne, et ensuite en langue stokavienne. Josip Juharic Trojmayer
2 [phon], évêque de Djakovica, vient présenter une thèse qui dit que les
3 Serbes et les Croates, c'est un même peuple, et qu'il n'y a que la religion
4 qui les diffère les uns des autres. Parce que les Serbes étaient orthodoxes
5 et les Croates catholiques. Et il essaie de faire en sorte que tous les
6 Serbes catholiques soient présentés comme étant des Croates, mais ça n'a
7 pas réussi. Ça n'a pas pu être fait ni en Dalmatie, et encore moins en
8 Slavonie. S'agissant des gens de la Slavonie, il n'y avait pas une
9 conscience nationale serbe bien développée, exception faite de quelques
10 personnes instruites là-bas, telles que Autun Matija Veljkovic [phon], par
11 exemple. Mais ils avaient une autre conscience, une conscience d'identité
12 slavonienne, et leur responsable, leur chef politique était Mato Topalovic.
13 Il a publié plusieurs textes qui s'opposent à ces tentatives de faire en
14 sorte que les Slavoniens soient déclarés comme étant des Croates. Cette
15 lutte a duré dans une première phase jusqu'en 1850, et dans une deuxième
16 phase jusqu'en 1900.
17 En 1850, suite à l'initiative des intellectuels croates, parmi lesquels il
18 y avait par exemple le Mazuranic, il y a création ou aboutissement à un
19 accord de Vienne, où la partie serbe était représentée par Vuk Karadzic et
20 Djuro Danicic. Et suite à ce qui était convenu, les Serbes et les Croates
21 ont commencé à parler une même langue littéraire, une langue serbe, tout en
22 l'appelant serbo-croate ou croato-serbe. Alors, l'encre n'a pas encore
23 séché sur le texte de l'accord que les Croates ont commencé
24 systématiquement, commencé à déformer la langue pour la faire se
25 différencier du serbe.
26 Mais en 1900, à l'occasion du premier congrès catholique, qui s'est tenu à
27 Zagreb, on a proclamé le fait que la totalité de ceux qui parlaient
28 stokavien étaient, enfin qui parlaient, qui étaient de religion catholique,
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1 c'étaient des Croates. Et c'est là que commence le fléau qui va se
2 répercuter sur la perpétration de terribles crimes pendant la Première
3 Guerre mondiale, où les Croates endoctrinés par l'Eglise catholique romaine
4 et leurs évêques ont commis les pires des crimes sur le territoire de la
5 Serbie, notamment dans la Macva [phon], dans la région de Loznica et autres
6 régions. Et pendant la Deuxième Guerre mondiale, les pires des criminels,
7 c'étaient des Serbes catholiques endoctrinés, qui se sont retournés contre
8 leurs frères orthodoxes. Parce que en détruisant l'orthodoxie, on
9 détruisait précisément ceux qui leur rappelait leurs origines.
10 Et nous autres, sans prendre en considération la totalité de ces faits
11 historiques, nous ne pouvons pas juger de la situation présente, ou porter
12 de jugement sur la situation présente. Le passé des générations mortes,
13 pèse sur les âmes et les esprits des générations vivantes. Nous ne pouvons
14 pas nous comporter comme si l'histoire de la civilisation commençait avec
15 nous. Nous devons nous souvenir de ce que nos grands-pères, nos pères et
16 autres, avaient gardé en mémoire, eux qui avaient subi et vécu tout ceci.
17 Et dès qu'il y a eu renouvellement de ces traditions oustachi en Croatie,
18 sous la direction de Franjo Tudjman, nous avons alarmé, mis en alerte
19 l'opinion publique serbe, dès qu'il y a eu éveil des tendances
20 panislamiques en Bosnie-Herzégovine, nous avons mis en garde l'opinion
21 publique serbe.
22 A compter de 1981 déjà, j'ai mis en garde contre cette tendance
23 panislamique qui se manifestait en Bosnie-Herzégovine. En 1986, on m'a
24 interdit un livre, "Chasse aux répliques", et j'ai indiqué la chose, enfin
25 tout ceci de façon argumentée. Et le problème ce n'était pas Izetbegovic et
26 ses acolytes, c'était le régime en Bosnie-Herzégovine qui, du temps des
27 Communistes encore, avait suscité ces idées, encouragé ces idées
28 panislamiques pour essayer de faire en sorte que la Bosnie-Herzégovine se
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1 fasse essentiellement un état, ou devienne essentiellement un état
2 musulman. Alors, j'ai déjà répondu devant la justice pour tout ce qui fait
3 l'objet de ce procès-ci, pour ce qui est des demandes de rétablissement de
4 cette Fédération yougoslave, pour la suppression de ces nations
5 artificielles. J'ai été jugé en 1984 à Sarajevo, et vous êtes en train de
6 me juger une deuxième fois pour la même chose. Mais vous pouvez me juger
7 cent fois, la vérité vous ne l'étoufferez pas. La vérité est plus puissante
8 que nous tous. A la différence de vous-même, moi, je suis convaincu de la
9 véracité de ce que je dis, et cela fait que je suis d'autant plus détendu,
10 mais c'est vous qui êtes dans des problèmes, dans des difficultés. Parce
11 que vous êtes en train de faire un grand écart entre votre conscience et
12 les pressions de ces sombres ou de ces ténébreuses puissances qui vous ont
13 commandité des choses. A vous de voir comment vous allez accomplir votre
14 mission.
15 Le Procureur dit que du fait de la création de ces provinces autonomes
16 serbes ou de ces régions autonomes serbes sur le territoire de la Croatie
17 et de l'unité fédérale bosno-herzégovienne, il y a eu un premier pas de
18 fait pour ce qui est de la création d'un état pan-serbe. Mais ce n'est pas
19 vrai non plus. La création des régions autonomes serbes a fait que les
20 Serbes ont essayé d'empêcher la sécession de la Croatie et de la Bosnie-
21 Herzégovine pour obliger les Croates et les Musulmans à négocier. Il y
22 avait une thèse de sous-tendue : Si vous restez en Yougoslavie, nous
23 resterons en Bosnie-Herzégovine et en Croatie. Si vous faites sécession
24 vis-à-vis de la Yougoslavie, nous ne voulons pas le faire, nous voulons
25 rester en Yougoslavie. C'était ça la politique serbe. Et dans la Région
26 autonome serbe de la Krajina, qui englobait la Dalmatie, la Lika, la Banja
27 et Kordun, et dans la Slavonie occidentale, dans cette Région autonome
28 serbe de la Slavonie de l'est, de la Baranja et du Srem occidental, c'était
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1 la politique fondamentale de toutes ces régions autonomes serbes qui
2 avaient été créées sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et pourquoi
3 ne pas les créer ? Les Serbes, quand ils ont créé ces régions autonomes
4 serbes, n'ont expulsé personne. Ils n'ont jamais persécuté personne. Ils
5 n'ont pas évoqué un Etat pan-serbe. Ils n'ont fait que souligner une chose
6 : Nous voulons rester en Yougoslavie. La Yougoslavie a été créée en 1918,
7 et nous voulons la faire subsister, rien d'autre. Qui était le facteur
8 perturbateur dans les Balkans ? Ceux qui avaient cherché à briser la
9 Yougoslavie, et non pas ceux qui avaient essayé, cherché à la préserver.
10 J'ai été l'un des intellectuels serbes, peu nombreux, qui avaient compris
11 quelle était l'immensité de l'erreur serbe pour ce qui était contenu dans
12 le document relatif à la création de la Yougoslavie. Si en 1918, nous
13 n'avions pas accepté la Yougoslavie, la Serbie aurait englobé la Slavonie
14 entière, la Bosnie-Herzégovine entière, la côte adriatique jusqu'à ce mont
15 de Planka qui se trouve dans les environs de Split. Ce serait la Serbie. Ça
16 ne se serait pas appelé la Grande-Serbie. Ça aurait été tout simplement la
17 "Serbie" tout court. Nos antécédents, les prédécesseurs politiques, et
18 notamment le régent Aleksandar Karadjordjevic, voulaient une unification
19 des Slaves du sud, et ça a porté atteinte et porté préjudice aux intérêts
20 nationaux serbes. Ils ne savaient pas avec qui ils s'unissaient, parce
21 qu'ils voulaient procéder à l'unification des Serbes, des Croates, et des
22 Musulmans. On n'avait pas, nous, à nous préoccuper des Croates et des
23 Slovènes. Ils n'avaient qu'à s'occuper d'eux-mêmes, négocier avec les
24 Allemands, les Italiens, les Hongrois, pour savoir ce qui appartiendrait à
25 qui et ce qui reviendrait à quoi. Malheureusement, ça n'a pas été fait de
26 la sorte. Le Procureur me reproche d'avoir énuméré tout ce qui appartient
27 aux Serbes. Nous l'avons dans le premier programme du Mouvement chetnik-
28 serbe, dans le premier programme du Parti radical serbe, dans la
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1 déclaration également, et c'est toujours notre orientation encore
2 aujourd'hui. Toute la Serbie d'aujourd'hui est incontestablement serbe,
3 avec le Kosovo et la Vojvodine. Vous voulez nous enlever le Kosovo et la
4 Metohija, mais vous n'y arriverez pas. Vous n'y arriverez absolument pas.
5 Même si un bain de sang devait se reproduire un jour, si la génération
6 d'aujourd'hui n'y parvient pas, nos fils et nos petits-fils y parviendront.
7 La Macédoine, quant à elle, elle a été reconnue sur le plan international
8 en tant que partie du territoire serbe après la première guerre balkanique.
9 D'après l'accord de Bucarest, cela est incontestable. Après la Deuxième
10 Guerre mondiale, d'après le traité de Versailles, personne n'a remis en
11 question le fait que la Macédoine était serbe. Les Serbes eux-mêmes ont
12 contribué à ce que, d'une certaine façon, la Macédoine soit confirmée sur
13 le plan ethnique, parce qu'ils nous sont très proches. Il n'y a pas de
14 peuple qui nous soit plus proche, à nous Serbes, que les Macédoniens. Les
15 Serbes leur ont permis de se doter d'une entité fédérale, et puis au moment
16 où les Macédoniens ont voulu opérer une sécession, du côté des Serbes,
17 personne n'a voulu avoir recours à la violence pour s'y opposer. Moi,
18 certes, j'ai élevé la voix, mais nous n'avons rien fait pour l'empêcher.
19 Nous nous sommes dit : Bon, très bien, ils vont trouver une certaine
20 indépendance, ils vont pouvoir vivre leurs aspirations et, puis après, ils
21 vont revenir au sein d'un Etat commun. Et puis, les Américains se sont
22 ingérés. A Krivolak [phon], ils ont décidé de se doter d'une base
23 militaire. A Krivolak, la base de Krivolak. Ils ont donné aux Albanais la
24 possibilité de se révolter. Voilà, de nouveau, nous avons de nouvelles
25 tensions dans les relations entre les Macédoniens et les Albanais, et
26 probablement, il va y avoir scission de la Macédoine. Si la Macédoine était
27 restée dans un Etat commun avec la Serbie, personne n'aurait pu contester
28 son intégralité territoriale.
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1 Et n'oublions pas que la Macédoine d'aujourd'hui n'est que le territoire
2 libéré pendant les guerres balkaniques et la Première Guerre mondiale par
3 l'armée serbe. Seuls ceux qui résident sur ce territoire libéré par l'armée
4 serbe ont le droit de se dire Macédoniens. Ce qui a été conclu par les
5 Bulgares, depuis longtemps, fait la Bulgarie. Ce qui a été conquis ou
6 libéré par la Grèce, depuis longtemps, appartient à la Grèce. Et personne
7 ne remet cela sur le tapis, donc l'existence des Macédoniens là-bas. Or, le
8 Procureur me reproche dans son réquisitoire le fait d'avoir dit en 1990,
9 lors d'une très grande fête serbe qui est fêtée par les Macédoniens,
10 lorsque je me suis rendu au monastère Prohor Pcinjski, d'avoir pris la
11 parole sur les murailles du monastère serbe pour détruire les plaques
12 commémoratives communistes à l'étoile de cinq branches macédoniennes, où
13 soi-disant des Communistes auraient tenu une réunion à cet endroit pour se
14 mettre d'accord de se soulever et créer la Macédoine communiste. Et c'était
15 le jour de la Saint-Elie. Mais comment est-ce qu'on peut accepter qu'un
16 monastère serbe arbore des symboles sataniques ? En 1990, c'était à 5
17 heures du matin que j'ai détruit ces symboles. Et maintenant, on procède à
18 des auditions de témoins, cela ne peut constituer un délit que s'il y a eu
19 atteinte à l'ordre public. Alors, les prêtres du monastère disent : Non,
20 cela ne nous a pas perturbés, effectivement, nous avons entendu des coups
21 de marteau et cela nous a plu, a plu à notre oreille. Les gens qui se sont
22 rassemblés, qui étaient là, venus de Serbie, de Macédoine, à 5 heures du
23 matin, parce que c'est une très grande fête, la Saint-Elie, et ils disent :
24 Non, non, ça ne nous a absolument pas dérangés. Nous avons bien apprécié
25 l'arrivée de Vojislav Seselj et le moment où il a enlevé ces plaques. Et il
26 a bien fallu qu'ils m'acquittent.
27 Or, le Procureur cherche à démontrer, à travers cela, que je suis quelqu'un
28 de mal, de mauvais. La Macédoine ne figure pas dans mon acte d'accusation.
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1 Le Monténégro a depuis toujours été serbe. Même à l'époque où il était
2 indépendant, le Monténégro, de par sa constitution, se disait Etat serbe.
3 Sur le territoire du Monténégro actuel et au nord de l'Albanie, on a créé,
4 d'ailleurs, le premier Etat serbe. Cela date du roi Caslav, du roi Stjepan
5 Vojislav, roi Mihailo [phon] Bodin, roi Vladimir, jusqu'à la fin du Xe
6 siècle. Et alors, je nie l'existence de la nation monténégrine ? Mais bien
7 entendu. Tout homme d'honneur, d'intégrité doit nier l'existence de la
8 nation monténégrine. Cela constitue une attaque à la nation serbe.
9 Alors, la question de la Bosnie, c'est quelque chose que nous avons
10 déjà examiné. La Bosnie, au Moyen Age, quasiment sans interruption, faisait
11 partie de la Serbie. Ce qui ne l'a pas été, ce n'est qu'une toute petite
12 zone de Bosnie centrale, Sarajevo, peut-être, Kiseljak, Fojnica, tout au
13 plus jusqu'à Zavidovici. Au nord de ces zones-là, Usora et Soli, eh bien,
14 c'était le roi Dragutin qui régnait. Les monastères serbes en témoignent.
15 L'Herzégovine de la Saint-Sava. Le premier Herceg serbe, l'Herceg Stijepan,
16 se dit du Saint-Sava, et ils se proclament Herceg, autrement dit Vojvode,
17 Herceg en allemand ça veut dire Vojvode. Donc le monastère serbe de
18 Mileseva, c'est en Serbie aujourd'hui. Dubrovnik, parlons-en, il a été tout
19 d'abord une ville romane, et tous les environs étaient serbes. Et comme la
20 population n'arrêtait pas d'arriver, ethniquement il y a eu un changement,
21 une slavisation de la population romane. Donc les anciens, les autochtones
22 deviennent la noblesse, et puis la majorité des citoyens sont des Serbes.
23 Et Dubrovnik était une cité catholique. Ce sont les Serbes catholiques qui
24 y résidaient. Tous les grands intellectuels Raguzin [phon] sont
25 catholiques, dont Ivan Gundulic, dont Rudjer Boskovic. D'ailleurs, il a les
26 mêmes origines que moi. Son père Nikola est arrivé du même village que mon
27 père Nikola d'Orahov Do. Seulement cela se passe 200 ans plus tôt, il est
28 arrivé à Dubrovnik, il a épousé une Italienne. Entre ce Serbe et cette
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1 femme italienne ce mariage a donné Rudjer Boskovic.
2 Maintenant les Croates se l'approprient. Parlons de la
3 Dalmatie. Au moment de l'arrivée des Serbes et des Croates, la Dalmatie ne
4 comprend que la zone des cités dalmates entre Zadar et Split. Omis était
5 serbe, la frontière entre la Serbie et la Croatie se situe sur la rivière
6 Cetina. Et la Croatie, elle est à l'arrière, c'est l'arrière-pays des
7 villes dalmates. Dans toutes ces villes dalmates la population est romane.
8 Et elle s'y maintient pendant très longtemps, jusqu'à y compris après la
9 Seconde Guerre mondiale lorsque les Communistes ont chassé environ 300 000
10 Italiens de la côte adriatique. La Lika, oui, elle est croate, voire même
11 Avare [phon]. Car la Lika, la Korbava [phon] et la Gacko à l'époque de la
12 Croatie médiévale bénéficie d'une certaine autonomie avec le Ban à leur
13 tête. Donc un Ban qui est le numéro deux de l'Etat. Le Kordun a été croate
14 à un moment donné dans le passé, et le mont Petrovac qui s'appelait Gvozd
15 dans le passé. La Banija elle aussi était croate à un moment donné, mais
16 les Croates n'y sont plus. Les Turcs les ont tués ou réduits en esclavage,
17 chassés que lorsque les Serbes sont venus s'y installer, ces zones étaient
18 désertes et ils sont venus à l'invitation du Tzar autrichien. Alors à qui
19 appartiennent ces terres désormais ?
20 La Slavonie, elle n'était pas serbe mais elle n'était pas croate non
21 plus. Elle était slovène. La Slavonie et la Slovénie, c'est une seule et
22 même chose. Cela faisait partie intégrante de la grande Moravie, la
23 Tchéquie, la Slovaquie, et toute la plaine pannonienne en faisait partie
24 lorsque les Hongrois sont arrivés au centre de la plaine pannonienne, ils
25 ont repoussé les Tchèques et les Slovaques vers le nord et ils ont repoussé
26 les Slovènes vers le sud. Les toponymes l'attestent, la Slovénie, la
27 Slavonie, la Slovaquie, mais c'est identique, à l'origine c'est identique.
28 Maintenant, alors les Slavoniens kajkakaviens, ils ont été repoussés
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1 de Slavonie jusqu'à la ligne occupée par les Turcs, donc jusqu'à la
2 Slavonie occidentale aujourd'hui. Et les Turcs, ils ont installé là la
3 population musulmane surtout, et pas mal de Serbes orthodoxes, pour servir
4 à la frontière. Alors qu'est-ce que je m'approprie ? Mais rien du tout. Ce
5 sont des terres serbes et j'ai des preuves à l'appui de cette affirmation.
6 Alors, je n'ai pas le droit de dire que ce sont les terres serbes ?
7 Est-ce qu'il faut que j'hésite à le dire publiquement ? Mais pourquoi ?
8 Pour quelle raisons ? Parce que vous risquez de m'accuser, de me condamner
9 à cause de cela. Mais peu m'importe. D'ailleurs je vous ai dit cela dès le
10 premier jour. Votre jugement ne m'intéresse nullement. Ce procès je m'en
11 suis servi de tribune politique pour régler le compte au TPIY et aux forces
12 obscures dans ce Tribunal et l'instrument, et j'ai engorgé des résultats
13 très satisfaisants là-dedans. Je ne pense pas que qui que ce soit d'autre
14 aurait pu le faire avec plus de succès, et je pense que vous-même vous n'y
15 parviendrez pas. Vous en avez été témoin.
16 Le Procureur affirme qu'au début de la guerre, les Serbes ont essayé
17 d'occuper des points qui avaient une importance stratégique. Mais à quoi
18 bon s'en étonner ? A chaque fois qu'il y a une guerre les parties adverses
19 essaient de s'emparer des positions stratégiquement importantes. Pour nous,
20 nous autres Serbes, ce qui avait une importance stratégique c'était toute
21 la Krajina, et en particulier la Bosnie-Herzégovine. Quel est le point
22 stratégique pour nous, le corridor enter la Krajina et la Semberija. Il
23 fallait bien qu'on ouvre le passage par ce corridor, ou bien, les Serbes de
24 la Krajina et les Serbes de la République serbe de la Krajina seraient
25 condamnés à l'anéantissement. Et nous avons percé ce corridor. Et ceux qui
26 ont pris part, c'étaient des volontaires du Parti radical serbe, et j'en
27 suis fier. Et pendant toute cette opération où on a opéré cette percée, on
28 a percé ce corridor, il n'y a rien que vous ayez pu trouver qui constitue
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1 un acte répréhensible.
2 Nous avons remporté un succès. Nous avons ouvert ce corridor. Et
3 maintenant les puissances occidentales viendraient nous l'enlever par la
4 commission d'arbitrage pour Brcko, donc les activités de cette commission
5 portant sur Brcko, par une interprétation mensongère des accords de Dayton,
6 qui laisse le soin à l'arbitrage d'établir la frontière ethnique au niveau
7 de Brcko. Or, l'arbitrage où ont pris part les puissances occidentales, il
8 y avait un représentant des puissances occidentales, il y avait un
9 Musulman, et un Serbe. Eh bien, ils ont eu plus de voix que le Serbe. Et en
10 fait ils ont décidé que Brcko devait constituer une entité à part au lieu
11 d'y tracer la frontière ethnique. Pour essayer de casser, de briser la
12 Republika Srpska en deux un jour grâce à Brcko.
13 Et puis la rivière Drina, cela vous étonne que ça a été d'une
14 importance stratégique, très importante, très grande aux yeux des Serbes.
15 Mais, bien sûr que cela a été le cas.
16 La Drina traverse le cœur des terres serbes, du pays serbe, elle est
17 très importante. Il a fallu empêcher que les centrales électriques ne
18 soient explosées sur la Drina, et puis le barrage des [inaudible] près de
19 Zvornik, il a fallu empêcher que ce barrage ne soit détruit, et les
20 Musulmans s'apprêtaient à le faire sauter. Un objectif stratégique d'avoir
21 un accès à la mer Adriatique, mais cet objection stratégique, il existe
22 pour les Serbes depuis toujours. En 1915, la Grande-Bretagne a garanti à la
23 Serbie l'accès à la mer Adriatique. Ça, c'est un premier point. En 1916, le
24 Pacte de Londres prévoit cela. Et puis en 1918, le président américain
25 Wilson soumet une déclaration une déclaration de 14 points au congrès
26 américain. Le point 11 de cette déclaration se lit comme suit :
27 "Les territoires occupés de Serbie-et-Monténégro doivent être renouvelés.
28 Donc, ce qui a été occupé par l'Autriche-Hongrie et l'Allemagne, et la
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1 Serbie doit se voir garantir l'accès à la mer sans entrave."
2 Ça a été garanti en 1918 par le président américain Wilson. Or, on
3 nous prive maintenant de cet accès en toute sécurité et libre à la mer.
4 Jamais nous n'y renoncerons, et il faudra qu'on s'en empare de nouveau.
5 Comment ? Je ne peux pas savoir par avance comment, mais nous ne pouvons
6 pas renoncer à cet objectif. A partir du moment où l'occasion se sera
7 présentée, lorsque les puissances occidentales d'aujourd'hui se seront
8 effondrées, il suffit de voir cette crise qui secoue l'euro et le déficit
9 budgétaire de certains pays membres de l'UE, cela remet l'ensemble en
10 question. Soit l'UE investira des centaines de milliards pour sauver la
11 Grèce, ou bien tout s'effondrera. Donc, c'est un cercle vicieux, et
12 j'espère que l'UE se sera effondrée très rapidement et très certainement
13 avant d'avoir réussi à forcer la Serbie à en devenir membre. Et puis,
14 l'Amérique elle aussi doit périr, parce que l'Amérique, c'est grâce à la
15 planche à billets qu'elle se maintient. La seule branche industrielle qui
16 fonctionne encore aux Etats-Unis, c'est la planche à billets. A partir du
17 moment où le reste du monde aura cessé d'accepter le dollar américain en
18 tant que devise qui constitue l'équivalent de la valeur marchande de tous
19 les biens, l'Amérique se sera effondrée. Il n'y a plus rien d'autre pour la
20 sauver.
21 L'empire tout entier repose sur la domination du dollar. Par
22 conséquent, l'accès à la mer Adriatique, cet objectif ne sera jamais
23 abandonné, vous avez beau me condamner à 100 ans de prison si vous voulez.
24 Vous me reprochez aussi d'apporter mon soutien au Parti démocratique
25 serbe. C'est exact. C'était en 1990, lorsque le Parti démocrate serbe a été
26 constitué dans l'ancienne entité fédérale croate, et lorsque le Parti
27 démocratique serbe a été constitué en Bosnie-Herzégovine, nous, membres du
28 Mouvement chetnik-serbe, en 1991, du Parti radical serbe, nous avons
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1 considéré qu'il ne fallait pas qu'on y constitue notre propre parti, mais
2 que tous les Serbes devaient se trouver réunis autour du Parti démocratique
3 serbe. Telle a été la position que nous avons adoptée en 1990 et au début
4 de l'année 1991. Mais comme le Parti démocratique serbe s'est décomposé sur
5 le territoire de l'ex-entité fédérale croate, lorsque la Krajina s'est
6 séparée du reste du parti, et comme nous n'étions pas satisfaits de
7 certains aspects de la politique menée par le Parti démocratique serbe de
8 Bosnie-Herzégovine, eh bien, nous avons pris la décision d'y créer notre
9 propre organisation politique.
10 En Bosnie-Herzégovine, au départ, il n'y avait que trois antennes. A
11 Banja Luka, avec Nikodin Cavic, un avocat, à sa tête, à Bijeljina --
12 L'INTERPRÈTE : Interruption au niveau de la réception.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] En 1992, nous n'avions que cela. Nous n'avions
14 aucune autre structure de notre parti ailleurs en Bosnie-Herzégovine. Et en
15 mai 1992, Nikola Poplasen est venu me voir. Il enseignait à la même faculté
16 des sciences politiques où j'avais été professeur dans le passé. On se
17 connaissait de Sarajevo. C'était un intellectuel de tout premier plan. A
18 l'époque, peut-être un peu plus rouge, mais il a été guéri désormais de
19 cette maladie, et j'en suis le premier coupable. Donc, il semblait le mieux
20 placé pour se charger donc de l'initiative de la création du Parti radical
21 serbe de la Republika Srpska.
22 Et Rade Leskovac, un cas analogue, nous lui avons confié la mission de
23 créer le Parti radical serbe de la République serbe de Krajina. Nous avions
24 une antenne là-bas à Knin. Tode Lazic était à la tête de cette antenne. Et
25 en 1991, nous avions un noyau déjà constitué du -- plutôt du Mouvement
26 chetnik-serbe que du Parti radical serbe, en Slavonie orientale. Rien
27 d'autre. Puis, des partis politiques dignes de ce nom ont commencé à se
28 constituer, et ils étaient liés aux activités du Parti radical serbe en
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1 Serbie, c'est-à-dire en RFY, tout en bénéficiant d'une certaine autonomie,
2 ils étaient enregistrés en Republika Srpska ou en République serbe de
3 Krajina en tant que partis autonomes.
4 Donc, le soutien que nous avons fourni au Parti démocratique serbe n'a pas
5 duré longtemps. Et c'est en 1996, parce que nous ne voulions pas présenter
6 nos propres candidatures à la présidence de la République et au Parlement
7 pour ne pas diviser les voies serbes, nous avons participé uniquement aux
8 élections parlementaires. Nous avons remporté 10 %, et hélas, nous avons
9 accordé notre soutien à Biljana Plavsic, ce qui, très rapidement, s'est
10 révélé être une grosse erreur de Karadzic et de ses collaborateurs, et
11 notre erreur, parce que nous lui avons accordé notre soutien là-dessus,
12 puisqu'on sait qui est Biljana Plavsic.
13 La Serbie, d'après le Procureur, a aidé par tous les moyens, et le
14 Procureur fait toute la liste de ces aides. Mais on était tenu par
15 l'honneur d'aider les frères occidentaux. L'Amérique a apporté son soutien
16 aux Contras du Nicaragua, ceux qui se sont opposés au régime sandiniste et
17 qui ont commis des crimes atroces. Le Nicaragua a porté plainte contre les
18 Etats-Unis d'Amérique devant la Cour internationale de justice, et cette
19 plainte a été rejetée. Certes, l'Amérique aurait aidé, dit-on, mais non pas
20 à commettre des crimes, mais à s'emparer du pouvoir au Nicaragua. C'était à
21 peu près ça le motif. Et je pense que c'était dans l'affaire contre Dusko
22 Tadic, ici, au moment où la Défense a cité ce jugement de la Cour
23 internationale de justice, la Chambre du TPIY a considéré que ce précédent
24 ne saurait pas être appliqué ici, et la Serbie devrait donc répondre
25 d'avoir apporté son aide à ses frères en Occident ? L'Amérique a aidé des
26 bandits, des criminels, alors que nous, nous aidions nos propres frères.
27 Les Etats-Unis ne sont pas responsables de cela alors que nous, nous
28 serions coupables d'avoir apporté notre aide à nos propres frères qui
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1 avaient déjà goûté à la lame du couteau oustachi pendant la Seconde Guerre
2 mondiale et qui devaient de nouveau revivre cela, alors que toutes sortes
3 de mauvais traitements étaient déjà infligés aux Serbes, qu'on les
4 licenciait, et cetera ?
5 Juste avant la guerre à Sarajevo, ils étaient tués, les invités de ce
6 mariage serbe devant la plus vieille église de Sarajevo, le père du marié a
7 été tué, et la police ne réagit pas. Et bientôt, le meurtrier de cet homme
8 devient l'un des commandants principaux des Musulmans à Sarajevo. Il n'a
9 été liquidé que lors d'un règlement de comptes ultérieur entre criminels,
10 après la guerre.
11 L'Accusation se réfère également au rôle de la JNA. Au début, elle a
12 essayé de préserver l'intégralité de la Yougoslavie avant de revoir à la
13 baisse ses objectifs pour se contenter de protéger les Serbes, ce que
14 Veljko Kadijevic, le général, a écrit tout à fait ouvertement dans son
15 ouvrage. Mais que pouvait-elle faire d'autre ? Nous condamnions la
16 direction de la JNA pour s'être mêlée du moindre conflit, parce qu'ils
17 envoyaient des jeunes hommes sans la moindre arme faire face à des gardes
18 forestiers slovènes, à des associations de chasseurs, et autres gardes
19 slovènes, à toutes sortes de criminels en arme.
20 Et quand je parle de jeunes hommes sans arme, qu'est-ce que cela
21 signifie ? Ils avaient des armes mais ils n'avaient pas de munitions. Et
22 ils étaient comme des pigeons d'argile, posés comme cible devant les
23 Slovènes. Et pas à un moment vous n'avez eu l'idée d'accuser qui que ce
24 soit de ces crimes-là. Dans la résolution du Conseil de sécurité, pourtant
25 le mandat du TPIY englobait également le territoire de la Slovénie. Alors
26 pourquoi avez-vous évité cela ? Il aurait fallu quand même qu'au moins une
27 personne, un Slovène soit accusé de ce massacre. Mais, bien sûr, vous
28 n'avez pas vu cela parce que votre cible ce sont les Serbes, et personne
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1 d'autre.
2 Encore une chose. Quand on parle des frontières et des menaces qui pèsent
3 sur elles, n'importe quelle armée procéderait à l'armement des populations
4 frontalières. Il n'y a pas une armée au monde qui ne le ferait pas pour se
5 défendre, pour mieux s'organiser. Alors quel est le problème lorsque la JNA
6 a fourni des armes à la population serbe ? Je vous ai expliqué comment nous
7 avons procédé de façon illégale au début, pour rentrer dans des entrepôts
8 militaires et en faire sortir des armes. Ensuite, la JNA a fourni des armes
9 plus sophistiquées. Ce n'est pas qu'après que les Serbes ont reçu des
10 Kalachnikov. C'est peut-être après le 1er août 1991. Jusqu'à ce moment-là,
11 nous nous contentions des fusils automatiques Thompson, des Schpagins
12 automatiques russes, des fusils M-48, toutes les armes qui étaient beaucoup
13 plus anciennes et qui étaient prévues, enfin qui avaient été retirées de
14 l'inventaire pour être détruites. D'ailleurs, c'est ainsi qu'on les a fait
15 figurer dans la documentation, comme ayant été détruites.
16 Alors, si la tâche de la JNA était de sauvegarder l'intégrité territoriale
17 de la Yougoslavie, et si cette tâche s'est avérée impossible, alors il
18 fallait sauver ce qu'il était possible de sauver. C'est de cela que je
19 parle lorsque je dis que la JNA a revu à la baisse ses objectifs. On ne
20 pouvait pas garder la Slovénie dans le giron de la Yougoslavie, eh bien,
21 tant pis, on laissait tomber la Slovénie et on sauvegardait ce qui était
22 possible de sauvegarder. La JNA était effroyablement en retard pour ce qui
23 était de se retirer de certains non-serbes. Par exemple, Varazdin, le
24 général Trifunovic là-bas a remis entre les mains des Croates l'ensemble du
25 Corps de Varazdin, avec 120 chars parmi les plus sophistiqués et autres
26 véhicules blindés. Au lieu de faire exploser tous ces moyens ou alors au
27 lieu d'opérer une percée avec ces équipements, parce qu'il s'agissait d'une
28 puissance de feu considérable, il aurait pu dire ou bien vous me laisserez
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1 passer ou bien la ville de Varazdin sera rayée de la carte. Et au lieu de
2 le fusiller en place centrale de Belgrade, il a été condamné à une peine
3 légère, et il a été complètement gracié par le régime actuel de Belgrade,
4 le régime traître et pro-occidental. Voilà ce qui s'est passé.
5 La JNA était en retard. Elle était incapable. Alors vous, vous louez cette
6 brigade dans votre réquisitoire, cette Brigade des Gardes, vous dites que
7 c'était une brigade d'élite, que ces hommes étaient les mieux formés. Mais
8 c'est ridicule. Ces soldats n'étaient formés à rien du tout, en dehors du
9 fait de monter la garde en environnement urbain et de participer à des
10 honneurs à l'occasion de visite des chefs d'état étrangers. S'il n'y avait
11 pas eu les volontaires et s'il n'y avait pas eu les membres de la Défense
12 territoriale, aujourd'hui encore cette Brigade motorisée serait dans la
13 boue là où elle était. Et justement parce qu'ils n'avaient pas de soldats
14 correctement formés. C'est la raison pour laquelle ils utilisaient des
15 armes lourdes, même lorsque cela n'avait aucune pertinence.
16 Malheureusement, c'est ainsi que fonctionnait la JNA. Elle a dû passer par
17 une sélection interne, les officiers compétents ont surnagé, ceux qui
18 étaient incompétents se sont retirés en quelque sorte d'eux-mêmes, sont
19 partis. Lorsque la JNA a été transformée en VJ, la situation s'est
20 améliorée. Et dès 1992, au moment de l'agression de l'OTAN, nous avions une
21 armée sérieuse, une bonne armée a telle point bonne que l'OTAN n'aurait
22 jamais osé intervenir avec des forces terrestres. Malheureusement, le
23 gouvernement a donné son aval à cette demi-capitulation, et à l'entrée sur
24 le territoire du Kosovo-Metohija. Et le SRS, le Parti radical serbe a été
25 le seul à s'être opposé avec conséquence et systématiquement à ceci, y
26 compris au sein du Parlement, parce que nous n'étions pas prêts à nous
27 battre contre les forces terrestres de l'OTAN, pour ensuite voir comment
28 les choses se présentaient. Jamais ils n'auraient osé nous attaquer parce
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1 que nous étions prêts à nous battre contre les forces de l'OTAN.
2 Alors l'Accusation dit que j'étais un propagandiste fanatique, que j'ai
3 mené une campagne de haine et que j'incitais à la persécution dans une
4 véritable campagne. Mais tout ceci est inepte. Je n'étais pas un
5 propagandiste fanatique. Ma propagande était tout à fait réaliste et fondée
6 sur des faits. L'Accusation continue de s'appuyer sur son soi-disant expert
7 Oberschall, et n'a de cesse d'essayer de démontrer qu'il y aurait eu une
8 campagne de propagation du mensonge, qu'il s'agissait de propagande
9 mensongère. Alors peut-être que chez vous en Occident, toute propagande est
10 mensongère; chez nous, non. Parce que en Serbie, la propagande la plus
11 efficace, c'est toujours celle fondée sur la vérité. Et c'est une telle
12 propagande que poursuit le SRS dès sa fondation. Nous avons eu de cesse que
13 de dire la vérité au peuple serbe, toute la vérité, rien que la vérité. Et
14 c'est là le secret de notre succès et de notre vitalité. C'est le secret de
15 la confiance considérable que le peuple serbe nous accorde. Même ceux qui
16 ne votent pas pour nous, nous respectent, en raison de nos principes, de
17 notre cohérence et de la façon dont nous sommes demeurés fidèles à nos
18 objectifs. Il n'y a pas eu de campagne de persécution parce qu'il n'y a pas
19 eu de persécution qui aurait pu être le résultat d'une telle campagne.
20 Il n'y a pas eu de persécution en Serbie, nous l'avons vu sur l'exemple de
21 Hrtkovci, aucun habitant de Hrtkovci n'a été expulsé de Serbie ni n'a fait
22 l'objet de transfert forcé. Savez-vous ce que c'est le transfert forcé ?
23 C'est la même chose que ce que les Américains ont fait avec les Japonais,
24 en les expulsant de force. Des états situés dans le Pacifique pour les
25 maintenir dans des camps de détention ou jusqu'à la fin de la guerre.
26 Savez-vous ce que c'est l'expulsion ? Vous le voyez sur l'exemple des
27 expulsions des Allemands, qui ont donc été expulsés de Pologne, de
28 Tchéquie; c'est ça l'expulsion. Lorsque vous avez quand même -- un des
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1 critères c'est est-ce que vous avez le temps d'emporter une petite quantité
2 de vos biens ou non, et non pas lorsque vous avez l'occasion de voyager
3 trois ou quatre fois en Croatie pour essayer de vous décider de choisir la
4 maison que vous allez peut-être accepter de prendre. Ça, ce n'est pas de
5 l'expulsion. D'autant plus qu'en Croatie même, on prônait ceci, Tudjman
6 était pour Dobrica, Cosic était également pour des échanges de populations
7 civilisées. Moi, je n'étais le partisan de rien d'autre, par l'échange de
8 biens et un échange de populations civilisées. Même lorsque je faisais des
9 promesses dans le cadre de notre programme, je ne disais pas : Vous allez
10 être expulsés. Je disais on va vous donner les adresses d'appartements des
11 maisons serbes et vous ferez un échange. Ceci ne peut pas être considéré
12 comme un crime de persécution. Alors peut-être s'agit-il de quelque chose
13 de désagréable sur le plan des faits, mais ce n'est pas un crime, ce n'est
14 pas un crime de persécution. Ce n'est certainement pas une expulsion.
15 Alors, il y a eu modification de la composition ethnique sur ce territoire,
16 c'est exact, mais comment ces changements dans la composition ethnique de
17 la population sur ces territoires ont-ils commencé ? Cela a commencé avec
18 la fuite des Serbes de Croatie dès que Franjo Tudjman a remporté les
19 élections en 1990, et ce processus s'est déroulé sans discontinuer. Il a
20 ses prolongements aujourd'hui encore, parce qu'il n'y a toujours pas de
21 retour des Serbes sur les terres qui étaient les leurs. Seuls quelques
22 vieillards reviennent, que ce soit pour vendre leurs biens pour ensuite
23 revenir en Serbie, ou pour finir par mourir de nostalgie sur place. Mais
24 personne d'autre ne fait ce voyage de retour, parce que les garanties
25 nécessaires n'existent pas, et il n'y a pas de restitution des appartements
26 des Serbes. Et tout ce qui est arrivé aux Serbes sur le territoire de la
27 Croatie, rien de tout cela n'a été traité par vous alors que vous vous
28 concentrez, en fait, sur les conséquences d'un événement au lieu d'aller
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1 chercher ses causes, les conséquences d'actes inhumains sans regarder
2 quelles en sont les causes.
3 Alors, la structure ethnique de la population a également connu des
4 modifications sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, mais comment cela
5 est-il intervenu ? D'abord, il y a eu un exode serbe, surtout de la
6 population serbe de Sarajevo, puis ensuite des autres villes, de Tuzla, de
7 Zenica, de Zavidovici, de Maglaj, de Mostar. Ensuite, c'est en masse que
8 les réfugiés et les personnes expulsées, les personnes déplacées serbes ont
9 afflué sur des parties du territoire de la Republika Srpska où vivaient
10 jusqu'alors des Musulmans. Alors, bien entendu, c'était une pression
11 considérable, mais une pression objective, et non pas quelque chose qui
12 avait été prémédité ou conçu à l'avance, planifié. Très souvent, il y a eu
13 échanges de populations spontanés parce que chaque oiseau allait rejoindre
14 les siens, pour ainsi dire, parce que les gens se sentaient plus en
15 sécurité parmi les leurs. Lorsque des dizaines de milliers de Serbes
16 arrivaient à Zvornik en provenance de Tuzla et des localités environnantes,
17 que pensez-vous qu'il soit possible de faire dans une telle situation ? Qui
18 peut empêcher cela ? Et à aucun moment il n'y a eu mise en accusation du
19 moindre Musulman pour expulsion de Serbes. Alors, Delic a été mis en
20 accusation pour les crimes commis à Celebici. Alors, vous avez pris un
21 certain nombre d'individus qui étaient plutôt en bas de l'échelle pour
22 donner une apparence d'équité. Vous avez jugé le général Seferovic [phon]
23 et vous l'avez acquitté. Vous avez également traduit en justice
24 Hadzihasanovic et Kubura, que vous avez condamnés à des peines symboliques.
25 D'abord, M. Antonetti, si je m'en souviens bien, a déterminé une peine de
26 trois ans, puis ensuite la Chambre d'appel a réduit ceci à deux ans et
27 demi. Ensuite, un autre a été condamné à deux ans en première instance,
28 puis acquitté en appel. Rasim Delic a été condamné à trois ans. Mme
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1 Lattanzi faisait partie des Juges qui l'ont jugé. Et on s'attendait à ce
2 qu'en appel, il soit acquitté. Malheureusement, il est décédé avant l'arrêt
3 en appel. Et c'est Naser Oric qui avait donc été condamné à deux ans avant
4 d'être acquitté. Voilà le résultat de votre travail concernant les
5 Musulmans de Bosnie.
6 Quant aux Serbes, ils écopent de peines lourdes, de peines de prison à vie.
7 Or, les Serbes ne sont pas coupables de ce que les Musulmans ont été les
8 premiers à constituer des unités paramilitaires sur le territoire de
9 Bosnie-Herzégovine dès 1990, avec les Bérets verts, et la formation armée
10 de la Ligue patriotique également. Puis ensuite, ils ont fait venir des
11 Moudjahidines en provenance d'Etats du monde arabe pour commettre des
12 crimes sur l'ensemble du territoire se trouvant sous leur contrôle. Qui
13 avez-vous mis en accusation pour les casernes de Sarajevo, pour Pofalici et
14 pour tous les autres massacres de Serbes ? A Sarajevo, c'est à l'intérieur
15 de la ville que passait la ligne de front. Les Serbes tiraient sur les
16 Musulmans et les Musulmans tiraient sur les Serbes, que ce soit au moyen de
17 tireurs d'élite ou d'artillerie, et seuls les Serbes en seraient coupables.
18 Et les Musulmans, eux, non, ils se défendaient, ils se défendaient contre
19 les barbares serbes. Qui peut croire cela ? Il faut être totalement
20 ignorant de ce qui s'est passé. Au moyen de ces jugements, de ces jugements
21 truqués que rend le Tribunal de La Haye, vous essayez de falsifier
22 l'histoire. Vous pensez, vous vous imaginez que l'histoire sera écrite en
23 fonction des jugements que vous rendez, mais non. Ce sont vos jugements qui
24 seront étudiés par les historiens, et ce sont vos jugements qui
25 compromettront cette tentative et compromettront plus encore cette
26 tentative d'internationalisation de la justice qui est déjà compromise.
27 Dès le premier jour, j'ai déjà indiqué que l'Accusation faisait
28 référence à des discours que j'avais prononcés en dehors du cadre temporel
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1 visé par l'acte d'accusation, avant août 1991 et après septembre 1993. Elle
2 se réfère également à mon ouvrage "L'idéologie du nationalisme serbe", qui
3 a été publié en 2002. Est-ce que l'Accusation erre dans l'obscurité ? Parce
4 qu'elle ne sait toujours pas, même aujourd'hui, comment faire pour en venir
5 à bout de moi. Au début, alors, l'Accusation a rassemblé une équipe de
6 juristes extrêmement sûrs d'eux qui, en fait, sont tout simplement
7 incapables de faire face à l'ampleur de la tâche, qui se contentent de
8 faire de grandes déclarations et d'énoncer de grandes théories, mais qui
9 n'ont fait qu'essuyer échec sur échec.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je ne vais pas, moi, faire de
11 grandes déclarations. Je vais simplement vous dire qu'il est l'heure de
12 faire la pause. Nous reprendrons à 6 heures moins le quart. Et d'après le
13 décompte, il vous reste 1 heure 10, donc en théorie, à 7 heures moins cinq,
14 vous aurez terminé votre plaidoirie. Voilà comment se présente la
15 situation.
16 Trente minutes de pause.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais essayer de finir aujourd'hui, si c'est
18 possible.
19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 16.
20 --- L'audience est reprise à 17 heures 46.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
22 L'INTERPRÈTE : Micro pour M. Seselj, s'il vous plaît.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le bureau du Procureur dans son mémoire en
24 clôture et dans son réquisitoire a notamment insisté sur la prétendue
25 fiabilité des déclarations recueillies par leurs soins au niveau des
26 témoins. Mais ces déclarations sont tout à fait peu fiable, parce que c'est
27 le bureau du Procureur qui les a rédigées lui-même, et ça n'a pas été
28 rédigé par le bureau du Procureur pendant les investigations, pendant les
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1 enquêtes pour savoir s'il y avait des éléments permettant de dresser un
2 acte d'accusation, ça a été fait une fois que l'acte d'accusation a déjà
3 été rédigé. Or, ça fait une double raison pour ce qui est de considérer que
4 c'est peu fiable, d'abord, parce que rédigé par le bureau du Procureur et,
5 deuxièmement, parce que ça a été adapté à l'acte d'accusation déjà rédigé,
6 sans répéter la totalité des arguments qui disqualifient bon nombre de
7 catégories de témoins qui ont été cités à comparaître par le bureau du
8 Procureur.
9 Le bureau du Procureur me reproche le fait de qualifier Tudjman de nouveau
10 chef oustachi. Le fait que j'ai évoqué la question du génocide commis à
11 l'égard des Serbes précédemment et chose de ce genre. Mais Tudjman c'était
12 le nouveau "poglavnik", le nouveau leader, mais pour ne pas qu'il y ait un
13 trait, un signe d'égalité total, au lieu de "poglavnik" on l'a appelé
14 "Vrhovnik". C'est un mot nouvellement créé qui n'existait pas auparavant
15 dans la langue serbe, Vrhovnik, mais tout le reste coïncidait, les
16 uniformes, les symboles, les insignes. Alors moi, mes propos ont servi
17 d'obusier, mais chaque homme politique qui tient à soi fait chose pareille.
18 Mais mon ami, Jean-Marie Le Pen, par ses propos, avait tiré comme avec un
19 obusier, et pendant des décennies durant il est resté sur la scène
20 politique française, et il a été détesté par la totalité des globalistes,
21 de ceux qui sont favorables au globalisme en Europe occidentale. Les hommes
22 politiques qui tirent de la sorte, comme avec un canon, qui martèlent de la
23 sorte, qu'est-ce que ceci signifie en d'autres termes ? Eh bien, cibler le
24 centre même du problème avec une puissance destructrice pour anéantir les
25 positions de l'ennemi, vaincre dans les duels avec les adversaires,
26 prouver, démontrer l'irréprochabilité de son propre programme politique,
27 prouver sa supériorité en matière de connaissance, de connaissance
28 politique, habileté politique, enfin tout ça, ça signifie marteler comme
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1 avec un canon. Mais moi, ça fait neuf ans que dans ce prétoire je canonne
2 au niveau de ce prétoire. Vous n'êtes même pas conscients à quel point vous
3 êtes des assonés. Je crois que les Juges de la Chambre sont conscients du
4 fait qu'ils sont exposés à de graves tirs. J'ai fait cela, et c'est la
5 raison pour laquelle vous êtes anéantis. Le Tribunal de La Haye, cet acte
6 d'accusation mensonger dressé à mon encontre, et les Juges de la Chambre
7 qui se trouvent à faire le grand égard en ce que la conscience leur dicte
8 et leur connaissance juridique leur dicte, et ce que les patrons de ce
9 Tribunal de La Haye leur demandent, à vous de nager comme vous pouvez et de
10 vous en dépatouiller comme bon vous semble. Moi ce ne m'intéresse pas.
11 A un endroit déterminé, le bureau du Procureur affirme que dans un
12 discours, j'aurais dit qu'en cas de partage, les Musulmans auraient droit à
13 18 % du territoire de la Bosnie-Herzégovine, mais ça, c'est un fait. Parce
14 qu'en vertu de ce que disent les cadastres, les Serbes étaient
15 propriétaires de 74 % des propriétés terriennes. Parce que du temps de
16 l'occupation ottoman déjà, la population orthodoxe serbe vivait dans les
17 campagnes, et les Musulmans étaient concentrés dans les villes. Ils
18 équipaient les fortifications, ils étaient des artisans, des commerçants,
19 ce genre de chose. Et ils n'avaient pas de propriétés terriennes. Lorsqu'on
20 a supprimé la féodalité, ils ont été dépossédés de tout cela, et le royaume
21 de Yougoslavie a fait en sorte que les baillis ottomans se voient compenser
22 la valeur des terres qui étaient les leurs du fait de la suppression de ce
23 système féodal, ou le paysan travaille sur sa terre, où c'est le système de
24 servage et le serf a l'obligation de rétrocéder une partie des revenus des
25 terres parce qu'on a dit que la terre n'appartient pas à celui qui la
26 travaille mais à celui qui exerce le pouvoir. Mais là il n'y a aucune
27 erreur possible. Les Musulmans étaient propriétaires de 18 % des terres en
28 vertu des cadastres; 74 % étaient donc propriétaires des Serbes, et le
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1 reste était en propriété des Croates. On me reproche plus tard, un peu plus
2 loin, que j'avais dit que Vukovar c'était une place forte oustachi, mais
3 c'est la vérité.
4 Vukovar était la place forte la plus fortifiée des Oustachi, en application
5 ou en vertu des renseignements croates, 1 600 volontaires venus de toutes
6 les parties de la Croatie, sont allés à Vukovar pour s'opposer aux forces
7 de la JNA. Donc d'un coté, nous avions eu des gens qui étaient fortement
8 motivés du côté croate, et qui avaient épousé l'idéologie oustachi, et
9 d'autre part nous avions une JNA à demi pourrie. Mais Vukovar c'est une
10 ville serbe. Ça a toujours été une ville serbe, bien que le dernier
11 recensement avant la guerre, à la veille de la guerre, montrait qu'ils
12 étaient à moins de 50 %, les Serbes. Mais il faut ajouter à cela ceux qui
13 s'étaient prononcés comme étant des Yougoslaves, et c'étaient
14 essentiellement des Serbes qui l'avaient fait, cela. Et il y avait d'autres
15 qui sous bien des pressions durant les décennies antérieures ont dû quitter
16 Vukovar.
17 Le Procureur, pour m'offenser, j'imagine, affirme que j'étais un prétendu
18 militaire, que je portais un uniforme et un gilet pare-balles. Je n'ai
19 jamais porté de gilet pare-balles de ma vie, jamais. Parce que de cette
20 façon-là, j'exerçais une influence morale sur les combattants. Je
21 critiquais les officiers qui portaient des gilets pare-balles alors que
22 leurs soldats, la totalité des soldats n'en avaient pas. Un tel officier ne
23 peut pas exercer une autorité à l'égard de ses soldats. Je n'ai jamais
24 porté de gilet. Si, j'ai porté un uniforme, l'uniforme je l'ai porté à
25 compter du 1er octobre lorsqu'on a déclaré un état de danger de guerre
26 imminent, jusqu'au retrait de la JNA de la Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire
27 jusqu'à la création de la République fédérale de Yougoslavie. Et j'ai été
28 un soldat de ma patrie, et j'ai considéré que j'étais un soldat de ma
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1 patrie, et de nos jours encore, je suis un soldat de ma patrie, bien que je
2 ne porte un uniforme. Je lutte contre ce fléau du Tribunal de La Haye, le
3 pire des ennemis des Serbes, qui a pu être créé comme institution. Donc de
4 nos jours encore je suis un soldat de ma patrie.
5 Mais après la création de cette République fédérale de Yougoslavie, je n'ai
6 plus porté l'uniforme. J'ai inspecté les fronts en tant que civil, ça ne
7 signifie pas que je n'ai pas porté d'arme. J'ai toujours eu un pistolet à
8 ma ceinture.
9 Le Procureur insiste sur cette prise du pouvoir par les Serbes dans les
10 municipalités de la Bosnie-Herzégovine, et dans les différentes parties de
11 l'ex-Croatie, c'est-à-dire la Croatie en tant qu'unité fédérale. Les Serbes
12 ont pris le pouvoir en effet dans toutes les municipalités où ils ont pu le
13 faire, mais la même chose a été faite par les Croates et par les Musulmans.
14 A chaque fois que les Musulmans sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine
15 ont pu prendre le pouvoir quelque part, ils l'ont fait.
16 Et je crois avoir fait une erreur, et je me suis rappelé par la
17 suite, le général musulman, ce n'était pas Seferovic, mais c'était Sefer
18 Halilovic. Il me semble que j'ai fait une erreur à ce niveau-là, mais peu
19 importe, celui qui a été libéré.
20 Qu'ont fait les Musulmans à Zvornik ? Ils ont pris le pouvoir. Ils
21 ont créé, dès 1991, une unité des Bérets verts dans les entrepôts de la
22 police et de la TO. Ils ont pris des armes pour armer les criminels du cru.
23 C'est d'abord les Musulmans qui ont pris Zvornik, et ensuite les Serbes ont
24 libéré Zvornik. Alors, c'était partout soit les Serbes qui l'emporteraient,
25 soit les Musulmans. Mais vous, ce qui m'intéresse, c'est seulement là où
26 les Serbes l'ont emporté. Là où les Musulmans l'ont emporté, vous trouvez
27 ça naturel, parce que vous estimez que l'armée dite ABiH, c'est une armée
28 régulière de la Bosnie-Herzégovine, alors que l'armée de la Republika
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1 Srpska, c'est considéré par vous comme étant une formation paramilitaire,
2 et dans tous les procès qui ont été conduits ici, ça a été fait de la
3 sorte. L'ABiH se présentait de façon fausse. C'était une armée uniquement
4 musulmane, avec ça et là un Croate dans les rangs. Mais les Croates, eux,
5 avaient leur propre armée à eux, l'armée de l'Herceg-Bosna, le HVO, ils
6 l'appelaient ainsi, Conseil croate de la défense.
7 Donc, aucune armée n'avait été une armée de la Bosnie-Herzégovine,
8 bien que les Musulmans se soient présentés de façon tout à fait fausse de
9 la sorte. Chaque nation en Bosnie-Herzégovine avait sa propre armée. Leurs
10 officiers étaient sortis des mêmes écoles, c'est-à-dire des académies
11 militaires yougoslaves. Et Sefer Halilovic, et Hadzihasanovic, et Kubura,
12 ils ont fait les mêmes académies militaires que Ratko Mladic ou d'autres
13 officiers serbes. Il n'y a que les criminels qu'Izetbegovic avaient
14 utilisés au début de la guerre pour les mobiliser à Sarajevo, à commencer
15 par Juka Prazina et autres, ceux-là n'avaient pas fait d'académie militaire
16 du tout, mais Izetbegovic lui-même, au bout d'un an ou deux, a dû s'en
17 débarrasser. Il a fait éliminer certaines personnes, d'autres ont fui,
18 comme Juka Prazina. Il a rejoint les rangs des Croates à Mostar, et puis de
19 là il est parti en Europe occidental, et je crois qu'il a été abattu sur
20 une autoroute belge. Je crois que l'AID, le service de renseignements
21 musulman, l'avait rattrapé. Il en savait trop et il était trop dangereux,
22 de ce fait. Mais ledit Juka Prazina, au début de la guerre, avait été
23 présent lors des sessions de la présidence de Bosnie-Herzégovine, de cette
24 présidence Croupion.
25 On dit "présidence Croupion". Mais pourquoi quand il s'agit de la
26 présidence de la Bosnie-Herzégovine, vous ne dites pas présidence Croupion
27 ou tronquée ? Parce que cette présidence, elle avait été abandonnée par ces
28 membres serbes, c'est-à-dire Nikola Koljevic et Biljana Plavsic. Pourquoi
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1 ne l'avez-vous pas qualifiée de la sorte ? Est-ce là l'approche de principe
2 qui est la vôtre ?
3 Vous avez dit que les hommes à Seselj étaient mal famés. Alors, où avaient-
4 ils une si mauvaise réputation ? Dans la propagande croate et musulmane ?
5 Et fama volat, parce que les rumeurs, on les fait courir, on dit : ils sont
6 comme ceci, ils sont comme cela, mais attendez. D'abord, moi, j'ai d'abord
7 été détesté par l'opinion publique communiste parce que j'ai été le plus
8 éminent des dissidents anticommunistes à l'époque. Il n'y avait que moi, à
9 l'époque communiste, à avoir dit de façon tout à fait ouverte que j'avais
10 été un anticommuniste. Ceux qui étaient anticommunistes hésitaient à le
11 faire et à le dire en public. Ils voulaient remédier aux carences du
12 socialisme, faire telle chose, telle chose. Mais moi, j'ai ouvertement dit
13 de prime abord que j'étais anticommuniste. Les médias étaient tous
14 contrôlés par les communistes, et on a diffusé à l'intention du public une
15 image négative me concernant. A l'époque encore, quand j'ai créé le
16 Mouvement chetnik-serbe, il n'y avait pas que les médias musulmans et
17 croates, entendez-moi bien, il y avait aussi les médias serbes qui le
18 disaient. Donc, c'était un antagonisme qui s'était créé. Les Chetniks
19 avaient été présentés comme étant des égorgeurs ou je ne sais quoi, alors
20 que les Chetniks avaient été une force antifasciste pendant la Deuxième
21 Guerre mondiale. Ce n'étaient pas eux, les extrémistes. C'étaient les
22 Communistes qui étaient des extrémistes. Et lorsque la guerre a éclaté,
23 donc, ces rumeurs ont couru plus encore. Mais il n'y a pas eu un seul cas
24 de figure où les Croates, où les Musulmans, auraient mis en accusation l'un
25 quelconque des volontaires du Parti radical serbe, c'est-à-dire un homme à
26 Seselj, pour l'accuser ou pour lui reprocher un crime de guerre. Il n'y a
27 pas eu un seul cas de figure. Il y a eu des volontaires qui ont été
28 capturés -- enfin, des nôtres qui ont été capturés par les Croates,
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1 essentiellement lorsqu'ils étaient blessés, et ils ont tous été échangés.
2 Il n'y en a pas un seul à avoir été jugé.
3 Il en va de même pour ce qui est des Musulmans. Pas un seul site religieux
4 n'a été détruit par des volontaires du Parti radical serbe. On dit qu'un
5 homme de Vranje aurait détruit, plastiqué l'église catholique romaine.
6 D'abord, on n'a pas prouvé que cet homme venu de Vranje était membre du
7 Parti radical serbe. Et pourquoi cette église de Nevesinje, catholique, n'a
8 pas figuré à l'acte d'accusation ? Elle ne s'y trouve pas. Si vous aviez
9 considéré que les choses étaient si vraies que cela, ça aurait été mis à
10 l'acte d'accusation. Nous n'avons jamais détruit aucun édifice religieux,
11 ni endommagé, jamais. Et là où il y a eu destruction des édifices
12 religieux, ça s'est fait lorsque les combats étaient terminés. Qui l'a fait
13 ? Eh bien, à d'autres instances à enquêter. Pas vous seulement, il y a des
14 instances serbes qui doivent enquêter, mais du côté croate et musulman, il
15 faut enquêter aussi.
16 Alors oui, le bureau du Procureur se montre être peu conséquent dans
17 certains procès. Dans l'affaire Mrksic et autres, on n'a pas prouvé
18 l'existence d'une entreprise criminelle commune, et chez moi, il y aurait
19 eu une entreprise criminelle commune au sujet de ce qui s'était passé à
20 Vukovar. Alors, le commandant de la Brigade de la Garde motorisée et ses
21 officiers les plus hauts gradés n'ont pas fait partie de l'entreprise
22 criminelle commune, et moi, oui. Lorsque Vukovar a été libérée, moi je me
23 suis trouvé à Knin. Et j'ai été à Benkovac. Vous avez même des vidéos
24 tournées à Benkovac datant de cette période.
25 Ensuite, dans le jugement rendu à l'intention de Mrksic, on a rejeté le
26 chef d'accusation relatif au délit au pénal qui figure à l'article 5 du
27 Statut, crime contre l'humanité. Là-bas, on a accepté le fait qu'il
28 s'agissait d'un crime de violation des coutumes et us de la guerre en
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1 application de l'article 3. Or, chez moi, il s'agit d'un crime contre
2 l'humanité. Mrksic et autres ont été condamnés du fait de l'exécution de
3 prisonniers de guerre, et moi, on veut me condamner pour des civils qui
4 auraient été exécutés à Ovcara. Mais qui a été fusillé à Ovcara ? Mais on a
5 prouvé que plus de 80 % des prisonniers de guerre avaient été exécutés,
6 sans y inclure les étrangers qui n'ont jamais été mentionnés. Le fait est
7 qu'on a prouvé que le service du renseignement militaire de la JNA, au côté
8 de Vesna Bosanac, avait fait des listes pour savoir qui devait être
9 exécuté. On avait dit 200, et puis il fallait prendre les voyous de la
10 ville. Alors, "fukara", chez nous, ça veut dire les bons à rien. C'est un
11 mot turc qui est resté dans la langue. Ça veut dire une espèce de
12 prolétariat [inaudible] prolétariat. C'est des gens qui sont sans travail,
13 des pauvres, des gens qui sont -- de petits criminels qui sont portés sur
14 le larcin, et c'est ainsi que le choix où le tri a été fait. Et Vesna
15 Bosanac a aidé à établir la liste pour que soit exécuté 200 Croates, mais
16 que de l'avis des Croates, ce serait le moindre des maux qu'il puisse y
17 avoir pour les Croates dans leur ensemble. Il n'y a pas un seul dignitaire
18 avoir été exécuté. Personne ayant occupé des fonctions de commandement n'a
19 été exécuté. Le crime a donc été organisé. Et vous savez fort bien qui est-
20 ce qui a fomenté la perpétration de ce crime.
21 On répète sans cesse des mensonges au terme de quoi Vuskovic, Zuca, aurait
22 été un commandant du Parti radical serbe à Zvornik. On a eu des éléments de
23 preuve innombrables ici venant de déclarations de chef de la police
24 musulmane disant que Zuca, avec son frère, Dusan Vukovic, Repic, Miroslav
25 Bogdanovic, et Mirolad Ulemek, surnommé Legija, étaient venus en voiture à
26 Zvornik avant le début des conflits, et les Musulmans les ont arrêtés à un
27 barrage routier et ils les ont tabassés. Et ensuite, l'un de ces chefs de
28 la police musulmane, Fadil Mujic, les a libérés pour qu'en échange les
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1 Serbes le laissent partir de Zvornik en passant par la Serbie. Et on
2 prouve, on essaie de prouver maintenant que Rankic les auraient emmenés là-
3 bas. Mais Rankic n'y est pas allé à Zvornik, il vous l'a dit dans son
4 témoignage. Et il y a des preuves écrites montrant que Rankic avait
5 démissionné de l'état-major de guerre en 1991, en décembre déjà, lorsqu'il
6 y a eu une espèce de commerce, lorsque vous avez promis telle chose. Vous
7 avez pu recueillir toutes sortes de déclarations. Si vous aviez tenu les
8 promesses faites au départ à ces faux témoins vous auriez peut-être eu un
9 bon procès, un procès réussi. Peut-être aurais-je eu beaucoup plus de mal à
10 démasquer ces faux témoignages. Mais vous avez menti à vos propres témoins,
11 et vous en payez les frais. Le pire des criminels, lorsqu'on cherche à se
12 mettre d'accord avec lui, il faut tenir sa promesse, ayant tout en ballot.
13 Or, vous, vous avez voulu être plus criminel que les criminels les plus
14 notoires, et vous en payez les frais.
15 Vous avez menti de même en disant que les Arkanovci ont été les premiers à
16 rentrer dans cet entrepôt d'armes à Zvornik et que les Seseljevci sont
17 venus par la suite, et que les Arkan ont fait sortir les hommes et les
18 Seseljevci, les femmes et les enfants. Or, les déclarations des témoins
19 témoignent du contraire. Seuls les hommes d'Arkan sont entrés dans
20 l'entrepôt. Ils ont fait sortir tout le monde, ils ont séparé les hommes
21 qu'ils ont emmenés pour les exécuter, et ils ont fait partir les femmes et
22 les enfants. Et les membres du Parti radical serbe ont accueilli ces civils
23 musulmans à la sortie de Zvornik, ont essayé de leur apporter de l'aide, à
24 leur donner à manger aux femmes et aux enfants. Pourquoi est-ce que vous
25 mentez en disant que les Seseljevci sont entrés dans l'entrepôt ? Est-ce
26 que vous trouvez cela dans les documents ? Quelles déclarations avez-vous à
27 l'appui ? Et ça, vous avez menti à ce sujet dans votre réquisitoire. Vous
28 n'avez même pas tenté de le faire pendant le procès.
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1 Comment est-ce qu'on vous a rassemblé des gens sans aucune valeur pour
2 mentir ici ? Vous citez le journal, les carnets de Mladic. A un endroit
3 dans ses notes, Mladic dit que Marko Pavlovic ou quelqu'un d'autre de
4 Zvornik lui aurait dit lors d'une réunion à Pale que les Seseljevci et les
5 Arkanovci avaient fait leur preuve lors des combats de Zvornik. Mais
6 qu'est-ce que cela signifie au juste ? Premièrement, Mladic à ce moment-là
7 ne se trouvait pas en Bosnie-Herzégovine au moment de ces combats. Il
8 n'était pas commandant du tout. L'armée de la Republika Srpska n'existait
9 pas à ce moment-là. Il y avait la JNA, et nos volontaires ont été rattachés
10 aux unités de la JNA. En fait, nos volontaires ont été commandés par le
11 commandant des réservistes de la police, Vojislav Jekic. Vous trouverez
12 dans un des entretiens que j'ai donnés, qui a été diffusé à la Radio
13 Loznica, c'est là que j'en parle, et le document vient de vous. Il a été
14 versé au dossier par vous. Ce document date de 1993 ou de 1994. Peu
15 importe. C'était bien avant que l'on ne dresse l'acte d'accusation. Certes,
16 il y a eu un groupe d'une centaine de volontaires du Parti radical serbe.
17 Ils ont été rattachés aux réservistes de la police, et le commandant de ces
18 réservistes était Vojislav Jekic. Et plus tard, lorsqu'on est allé
19 conquérir Kula Grad, toutes les forces serbes ont été commandées par
20 l'actuel colonel Stupar, à l'époque lieutenant-colonel. C'est ça la vérité.
21 Et le dossier, les transcriptions, les comptes rendus d'audience du procès
22 en témoignent.
23 A plusieurs reprises, vous faites référence au fait que le Témoin
24 1062 réfute la déclaration qu'elle a donnée aux autorités musulmanes en
25 2003. Messieurs, mais vous devez vous souvenir du fait que j'ai démasqué
26 ces mensonges ici. Ce n'était pas très beau à voir. Son mari et ses deux
27 fils ont été tués, et j'ai été vraiment aimable à son égard. Je ne voulais
28 pas la blesser. Je l'ai interrogée que sur des points essentiels. J'ai été
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1 vraiment plein d'égard à son sujet. Et elle n'était pas prête à affronter
2 mon contre-interrogatoire. Elle n'était pas prête à répondre à cette
3 question. Or, elle avait été préparée par les autorités musulmanes. Elle a
4 dit, mais ce n'est pas ma signature. Si, c'était bel et bien sa signature,
5 et vous le savez. Et ce document je l'ai eu par vous. Vous étiez tenu de le
6 faire.
7 Vous dites qu'à partir du moment où la ville de Zvornik a été prise,
8 les volontaires sont devenus membres -- partie de la police et la Défense
9 territoriale. Mais cela n'est pas exact, vous n'avez pas de preuve dans le
10 dossier. Les volontaires du Parti radical serbe se sont retirés, repliés.
11 Quelques individus sont restés. J'en connais un qui est resté sur place.
12 Mais qu'est-ce que cela a à voir par la suite avec les activités du Parti
13 radical serbe ? Il est resté de son propre gré à titre individuel. Il a
14 trouvé un boulot dans la police. Il y a eu parmi nos membres ceux de
15 Zvornik, de Mali Zvornik qui ont trouvé du travail à Zvornik. Certains du
16 groupe de Bobic, ils sont devenus membres de cette unité de nos volontaires
17 de Loznica, commandée par Cvetinovic, Dragan Cvetinovic. Il a été proclamé
18 voïvode chetnik, son surnom était Stene. Alors, que peut-on y faire si
19 quelqu'un était parmi nos volontaires et après il a été enrôlé ailleurs ?
20 Mais les listes de versement de salaires que vous m'avez données, que vous
21 avez confisquées sur place, nous montrent qu'à partir de 26 avril il n'y a
22 plus de volontaire du Parti radical serbe à Zvornik et que personne ne
23 considère ces hommes comme étant des volontaires du Parti radical serbe.
24 Après vous avez menti en disant que j'ai déplacé Zuca à Skelani et ses
25 Guêpes jaunes, alors que Zuca ne s'est jamais trouvé à Skelani.
26 Alors qu'est-ce qui m'a poussé à insister sur la prétendue erreur de
27 l'interprète sur le chant que l'on a entendu ici. On l'a entendu à
28 plusieurs reprises pendant le procès, et une fois pendant ma déposition
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1 dans l'affaire contre Slobodan Milosevic. On voit un groupe de soldats qui
2 marchent, et au milieu de ce groupe il y a un homme qui porte le drapeau
3 chetnik et le couvre-chef en fourrure chetnik. Ils portent les uniformes
4 vert-olive. Ce sont soit des réservistes ou appartiennent à la Brigade de
5 la Garde, Dieu sait quelle est l'unité à laquelle ils appartiennent, est-ce
6 que c'est le secteur sud ou le secteur nord ? Donc il y a une mise en scène
7 évidente, là. Donc ceux qui chantent : Slobo, envoie-nous de la salade, il
8 va y avoir de la viande, on égorgera du Croate. Et votre prétendu
9 interprète, comment interprète-t-il ? De manière complètement différente.
10 Il dit : Oh, les Croates, on va vous égorger, on va en égorger la moitié et
11 l'autre moitié, on la jettera aux chiens. Mais ce sont deux chants
12 complètement différents. Alors, pourquoi est-ce que j'ai mis cela en
13 exergue ? Pourquoi est-ce que j'ai voulu qu'on opère bien une distinction
14 là ? Premièrement, ces soldats qui chantent : "Ô Slobo, envoie-nous la
15 salade", mais il est totalement exclu qu'ils soient des volontaires du
16 Parti radical serbe. On le voit d'après leurs uniformes. Parce que nos
17 uniformes, ils se faisaient fournir en uniformes de camouflage complètement
18 neufs des entrepôts de la JNA. Or là, ce sont des uniformes anciens.
19 Et deuxièmement, jamais les volontaires du Parti radical serbe
20 n'auraient-ils chanté un chant qui est positif à l'égard de Slobodan
21 Milosevic ? Non. Ils auraient dit : "Ô Seselj, envoie-nous la salade", ou
22 "Ô Voïvode", s'ils l'avaient chanté. Peut-être qu'ils ont chanté pire que
23 ces chants-là, mais vous ne l'avez pas établi. Comment est-ce qu'on
24 pourrait établir maintenant tout ce qu'on a chanté de part et d'autre ?
25 Regardez ce que les Croates chantent aujourd'hui. Leur Thompson, le numéro
26 un de la chanson nationaliste croate, voyez ce qu'il chante aujourd'hui.
27 Les volontaires serbes membres du Parti radical serbe portent encore le
28 souvenir récent des arrestations qu'a fait contre moi Slobodan Milosevic.
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1 Par trois fois, j'ai été condamné. Je me suis présenté candidat à la
2 présidence de la République alors que j'étais encore en prison, les prisons
3 de Milosevic, et je ne me suis présenté qu'une fois à la télévision, et ce
4 qui est encore plus important, nos volontaires ont raillé Milosevic, toutes
5 sortes de chansons pour le tourner en dérision, "Rankovic s'est levé de sa
6 tombe, maintenant il s'appelle Sloba Milosevic", et puis, "au cœur de
7 Belgrade, Sloba est pendu", et puis, "ce sont les Chetniks qui défendent ta
8 patrie aujourd'hui, Sloba, où sont tes résistants, tes partisans ?"
9 Je respecte Slobodan Milosevic pour tout ce qu'il a fait ici en se
10 défendant, en se défendant soi-même et le peuple serbe devant ce Tribunal
11 de La Haye illégal. Je respecte sa mort de martyr. Nous sommes devenus des
12 amis sincères ici alors que nous n'avons jamais été liés par des liens
13 d'amitié de par le passé. Donc, je vous expose ici un certain nombre de
14 faits, et je ne porte pas atteinte à l'image de Milosevic. Ces faits nous
15 montrent tout simplement à quel point votre acte d'accusation, avec tous
16 les éléments à l'appui, se fonde sur des mensonges. Mais vous ne pouvez pas
17 nier les faits. Les volontaires du Parti radical serbe, comment voulez-vous
18 qu'ils chantent des louanges à Slobodan Milosevic ? Les volontaires du
19 Parti radical serbe, ils ne peuvent pas arborer l'étoile rouge sur leurs
20 uniformes. Mais c'est inconcevable.
21 Slavko Aleksic vous pose problème. Vous auriez pu identifier ne serait-ce
22 qu'un crime qu'on aurait pu lui mettre sur le dos. Il a déclaré quelque
23 part, et vous le citez, que le 21 avril 1992, il est arrivé au cimetière
24 juif et qu'il a nettoyé Grbavica. Mais est-ce que cela veut dire qu'il a
25 nettoyé, nettoyé de force musulmanes ? C'est une expression militaire.
26 Lorsqu'on s'empare d'un territoire, il faut procéder à un nettoyage du
27 terrain pour que les éventuelles poches de résistance soient éliminées. Les
28 Musulmans n'ont jamais été chassés de Grbavica. A plusieurs reprises, je me
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1 suis rendu à Grbavica, à Grbavica 2, près du centre commercial. Je m'y suis
2 trouvé une fois lorsqu'un grand nombre de civils, dont la plupart étaient
3 des Musulmans, étaient en train d'attendre pour se faire livrer du pain,
4 parce que l'armée de la Republika Srpska garantissait à chacune des
5 familles, au quotidien, une ration de pain, et donc, ils étaient tous
6 ensemble à faire la queue, les Musulmans et les Serbes. Je suis resté
7 quasiment une heure là-bas, sur place, et j'ai échangé quelques mots avec
8 ceux que je connaissais d'avant la guerre, avec qui j'étais en bonne
9 relation. Il y a eu des crimes, c'est vrai, qui ont été commis dans le
10 quartier de Grbavica, mais ces crimes ont été commis par des criminels. Et
11 si parmi ces criminels il y en avait qui avaient des liens avec les
12 instances du pouvoir, les plus hauts placés, alors ça, il faut le
13 démontrer. Mais ils n'étaient pas ces criminels-là. Aucun d'entre eux n'a
14 été en contact avec Slavko Aleksic.
15 Vous attaquez également le fait que les Serbes étaient armés, armés par la
16 Serbie et par la JNA. Mais qui a armé les Croates et les Musulmans ?
17 Comment ça se fait que vous n'ayez pas mis en accusation un homme politique
18 allemand, parce qu'il y a eu des quantités fabuleuses d'armes qui ont été
19 fournies aux Croates depuis les entrepôts de l'Allemagne de l'Est, ces
20 armes de fabrication russe, c'est-à-dire soviétique ? Et vous n'avez pas
21 mis en accusation un homme politique hongrois parce qu'ils ont fourni des
22 armes aux Croates ? Vous avez fait référence à ce meeting que j'ai organisé
23 à Plitvice, au lac de Plitvice. Nous y sommes allés en tant que civils, et
24 la JNA a essayé de nous empêcher d'y accéder. Il y a eu beaucoup de
25 barrages routiers prévus par la JNA, et je les ai contournés. Et ils
26 étaient armés de mitrailleuses lourdes déployées sur des blindés avec leurs
27 canons qui reflétaient les rayons du soleil de printemps. Et devant Milan
28 Martic, j'ai été félicité, et Milan Martic m'a fait cadeau d'une
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1 Kalachnikov, et c'est ce que Milan Martic m'a offert, des Kalachnikovs avec
2 des munitions ont été fournies dans des sacs de farine aux Croates. Et j'ai
3 reçu une nouvelle Kalachnikov de fabrication hongroise avec tous les
4 symboles dessus.
5 C'est en voiture avec Stefanovic que je suis revenu à Belgrade. J'étais au
6 volant d'une Toyota Corolla, et lui, il était assis à côté de moi, et on a
7 fait une erreur près de Doboj. On a tourné vers Tuzla, et donc, ça nous a
8 amenés à passer par la ville de Tuzla. Et on ne pouvait pas tout le temps
9 être arrêté par la police musulmane, et on s'est dit qu'on allait tirer si
10 on venait à être arrêtés, on allait tirer pour vendre cher notre peau. Ce
11 n'était pas encore la guerre en Bosnie-Herzégovine. On savait très bien à
12 quoi s'attendre si on nous arrêtait. Finalement, on ne nous a pas arrêtés.
13 On est passés par Tuzla, vers Bijeljina, et puis après, on était déjà en
14 sécurité. Donc, avec ce fusil automatique que je gardais sous le siège,
15 sous mon siège, à mes pieds. Donc, qui a armé les Serbes ? Mais qui a armé
16 les Croates et les Musulmans ? Pourquoi est-ce que vous adoptez cette
17 approche unilatérale ? Qui a été le premier à s'armer ? Ça aussi, il
18 faudrait le savoir.
19 Vous avez insisté sur l'exemple Hrtkovci. D'après vous, ce serait une
20 localité d'où on a expulsé les Croates. Mais on a déjà pu voir que pas un
21 seul Croate n'a quitté Hrtkovci sans avoir procédé à l'échange de biens au
22 préalable. Mais il y a eu des expulsions de Croates de Serbie. Quand les
23 forces de l'OTAN sont entrées au Kosovo-Metohija, les Croates ont été
24 expulsés de Janjevo. Les Croates qui ont trouvé insupportable de vivre sous
25 le joug albanais, ils ont abandonné l'ensemble de leurs biens et ils ont
26 pris la fuite pour se rendre en Croatie sans demander leur change. Et puis,
27 les Croates les ont installés dans des logements et des maisons serbes
28 abandonnés. Tout le village de Mijokovicevo [phon], en Slavonie
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1 occidentale, compte aujourd'hui ces Croates de Janjevo qui ont pris la
2 fuite parce qu'ils ne voulaient pas vivre sous le pouvoir albanais. Ça,
3 c'est un exemple d'expulsion. Pourquoi n'avez-vous pas mis des gens en
4 accusation à cause de cela ?
5 Le Procureur ajoute des circonstances aggravantes, et là nous arrivons sur
6 un terrain commun. Je suis parfaitement d'accord avec le Procureur là-
7 dessus, il n'y a aucune circonstance atténuante en l'espèce. Il n'y a que
8 des circonstances aggravantes. Mon comportement dans le quartier
9 pénitentiaire et devant la Chambre de première instance, ça, c'est la
10 première circonstance aggravante que cite le bureau du Procureur; je suis
11 entièrement d'accord avec le bureau du Procureur. Je méprise ce Tribunal.
12 Je méprise l'administration du quartier pénitentiaire. Et je saisis toute
13 occasion pour mettre au défit le Procureur, la Chambre, et le Tribunal,
14 ainsi que l'administration pénitentiaire. Et il n'y en a rien de secret.
15 Vous voyez que je suis très coopératif maintenant. Je suis
16 entièrement d'accord avec vous.
17 Puis, parmi les circonstances aggravantes, vous dites que je me suis
18 servi de ce procès pour en faire une tribune politique. Cela aussi est
19 exact. Puisque avant tout, il s'agit d'un Tribunal politique. Alors comment
20 voulez-vous que je m'oppose à ce Tribunal et à ce Procureur, si ce n'est
21 par un discours qui serait plus intelligent que le vôtre. Je ne vais pas
22 marteler, je ne vais pas m'emparer d'un obusier parce que dans le cadre
23 d'un conflit d'idée, vous n'avez aucune chance de l'emporter. Dans le cas
24 d'un conflit d'arguments judiciaires, de principes juridiques, vous ne
25 pouvez pas l'emporter face à moi. Donc il ne vous reste plus que le recours
26 à la force. Vous, Madame, Messieurs les Juges, vous, Madame, Monsieur le
27 Procureur, servez-vous de cette force, de cette violence jusqu'au bout,
28 n'ayez aucune hésitation là-dessus, je vous mets au défi.
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1 Vous dites que j'ai exposé le programme de la suprématie nationale
2 serbe; oui, c'est vrai, c'est exact. Vous dites que cela constitue une
3 circonstance aggravante. Je ne m'y oppose pas. Je ne dis pas le contraire.
4 Nous sommes, nous les Serbes, avons eu une suprématie nationale. Mais quel
5 autre peuple aurait pu endurer ce que les Serbes ont enduré ? Quel autre
6 peuple aurait pu résister à toutes ces forces obscures auxquelles oppose
7 une résistance le petit peuple serbe. La suprématie nationale serbe, je la
8 démontre ici aussi dans cette salle d'audience de La Haye. Je suis un
9 nationaliste serbe de premier plan, et je vous déplume ici, vos plumes
10 s'envolent au ciel. Vous n'arrivez pas à ma cheville. J'ai réussi à
11 anéantir tout ce à quoi je me suis pris. Personne ne peut rien contre moi.
12 Je fais voler en éclat le Tribunal de La Haye. Je publie les noms des
13 témoins protégés sur mon site internet. Je vous mets au défi, pourquoi ne
14 pas m'intenter des procès pour outrage. Je ne compte même pas ces procès.
15 Vous ne pouvez rien contre moi, parce que sur le plan moral, sur le plan
16 intellectuel, je domine. Vous n'y pourrez que me tuer, il n'y a aucun autre
17 remède contre moi, et à partir de ce moment-là, ma tombe luttera contre
18 vous. Vous ne comprenez même pas ce que je suis en train de dire, mais vous
19 comprendrez.
20 C'est comme cette mise en scène des Américains, lorsqu'ils ont voulu
21 faire croire qu'ils avaient largué le corps d'Osama bin Laden au-dessus de
22 l'océan Pacifique, qu'on ne sache pas où se trouve sa tombe, pour que son
23 corps ne soit pas emmené aux Etats-Unis. Or, moi, après ma mort, vous ne
24 pourrez pas larguer mon corps quelque part au-dessus de la mer, vous devrez
25 me remettre à la Serbie et ma tombe continuera de lutter contre vous. La
26 lutte continue.
27 Comme circonstance aggravante également, vous dites que j'aurais entravé le
28 bon fonctionnement de ce Tribunal. Mais ce Tribunal n'a jamais connu quoi
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1 que ce soit qu'on pourrait qualifier de bon fonctionnement ou de cours
2 normal de la justice, dans aucun procès, et pas certainement dans celui-ci
3 où ma détention dure plus de neuf ans. Et vous, Chambre de première
4 instance, vous vous référez à la jurisprudence de TPIR. Mais en Afrique
5 c'est la déclaration africaine des droits de l'homme qui s'applique, alors
6 qu'en Europe, c'est la convention européenne des droits de l'homme qui
7 s'applique. Voyons s'il existe où que ce soit en Europe un précédent d'une
8 détention provisoire aussi longue.
9 Ensuite, vous m'avez empêché de présenter des moyens à décharge. Vous
10 m'avez pris du droit découlant de l'article 21 du Statut, et vous m'avez
11 maltraité de toutes les façons possibles et imaginables, c'est impossible
12 d'en faire la liste intégrale depuis le premier jour de ma venue ici. Il
13 n'était pas nécessaire pour vous de remettre en question cette circonstance
14 atténuante qui découlerait de ma reddition au Tribunal de La Haye, parce
15 que je ne me suis jamais livré, le 24 février je suis venu à La Haye pour
16 des raisons totalement différentes. J'avais promis au peuple serbe lors de
17 plusieurs meetings de mettre en place un projet conjointement avec la reine
18 des Pays-Bas. C'était la raison de mon voyage à La Haye, je n'avais pas
19 absolument pas l'intention de me livrer. Lorsque l'avion a atterri à
20 l'aéroport de la capitale des Pays-Bas, à Amsterdam, un cordon a été mis en
21 place à partir de la sortie de l'appareil, et tout d'un coup l'équipage a
22 déclaré que la police aéroportuaire insistait pour que je sois le premier à
23 descendre. Alors je pensais que c'était un honneur que l'on me faisait
24 officiellement, et que j'allais entendre les accents de l'hymne national ou
25 de quelque chose de cet ordre se passerait. Or, je suis sorti de l'avion et
26 vers le début déjà de la passerelle qui avait été mise en place, plusieurs
27 policiers néerlandais m'attendaient. L'un d'eux a tout de suite pris mon
28 manteau, c'était l'hiver, il m'a pris mon manteau pour le fouiller, et
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1 ensuite il y avait également cet homoncule qui faisait un mètre, je ne sais
2 pas combien, qui a commencé à me lire mon mandat d'arrestation. Et alors
3 moi, j'ai ouvert une porte qui permettait de rejoindre le tarmac et je suis
4 sorti en courant, et j'ai vu un nombre incroyable de policiers qui
5 m'attendaient là, et j'ai été emmené à partir de là, à Scheveningen, ils
6 m'ont emporté. Donc là il n'y a pas la moindre circonstance atténuante.
7 Or ici, j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour vous faire voler en
8 éclat, et c'est ce que j'ai continué de faire aujourd'hui, en recourant
9 peut-être à toutes mes forces physiques, mais croyez-moi, en y trouvant un
10 plaisir extrême, dans le même temps.
11 Alors, l'Accusation demande une peine de 28 ans d'emprisonnement. Bien
12 entendu, il n'existe pas le moindre fondement juridique à un jugement
13 portant condamnation quel qu'il soit, mais de fondement juridique, vous
14 n'en avez guère besoin. Voyons quelle serait la peine la plus appropriée.
15 Si vous prononcez une peine de 28 ans d'emprisonnement, je n'ai pas la
16 moindre chance de purger ma peine jusqu'au bout, jusqu'à son terme. Mais
17 compte tenu de l'énergie qui est la mienne en tant qu'adversaire des Etats-
18 Unis et de l'hégémonie mondiale des Etats-Unis, compte tenu de mon statut
19 d'ennemi irréconciliable tant de l'OTAN que de l'Union européenne, et
20 compte tenu de ma haine inextinguible du Tribunal de La Haye et de tous les
21 Juges de La Haye, ainsi que des Procureurs de La Haye, eh bien, la seule
22 peine appropriée serait une peine de prison à vie. Et pour vous, c'est
23 d'ailleurs la seule chance de me voir purger ma peine jusqu'à son terme,
24 parce que quelle que soit la peine que vous prononciez, s'il ne s'agit pas
25 d'une peine de prison à vie, il n'y a aucune chance que je la purge jusqu'à
26 son terme. Ce serait donc la solution la plus élégante.
27 Alors, bien entendu, vous devrez trouver une forme ou une autre de
28 justification, mais cela ne vous coûte pas grand-chose. Dans d'autres
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1 jugements rendus devant ce Tribunal, on a trouvé des justifications pleines
2 d'inepties, de fausses déclarations et de faux éléments de preuve à chaque
3 fois qu'il s'est agi de Serbes mis en accusation devant ce Tribunal. Donc,
4 ça ne pose absolument aucun problème de faire de même dans mon cas. Vous
5 avez des services entiers qui sont chargés de le faire. Alors, parfois, il
6 est difficile de distinguer ce qui est rédigé par différentes personnes. Il
7 y a des variantes un peu surprenantes. Parfois, j'ai pu lire dans les
8 jugements rendus contre les Serbes condamnés pour ce qui s'est passé au
9 Kosovo-Metohija pendant le bombardement de l'OTAN. Alors, c'est rédigé sur
10 plusieurs tomes. Dans un premier tome, on avance une première
11 argumentation, et dans un second tome, les arguments sont totalement
12 différents parce que ceci a été rédigé par des auteurs différents, et ceux
13 qui ont rédigé ceci ne se sont même pas aperçu du problème principal, ou
14 alors, peut-être qu'ils ne l'ont même pas compris. Donc, cela ne vous
15 posera absolument aucun problème. Et dans ce dilemme auquel vous êtes
16 confrontés entre d'un côté la possibilité de suivre votre conscience et de
17 vous déterminer en tant que professionnels, et d'autre part, la possibilité
18 de prononcer une lourde peine contre moi et le fait d'obéir à vos maîtres,
19 eh bien, je crois que pour vous, l'approche la plus lucrative serait
20 certainement d'écouter vos maîtres. En tout cas, moi j'interdis que l'on
21 procède à la moindre autopsie sur mon corps si je dois mourir dans un
22 avenir proche. Une autopsie ne peut être pratiquée qu'à Belgrade, et ce, à
23 condition que ma famille le demande. Il est hors de question également
24 qu'il soit procédé à l'académie de médecine militaire. Je dois le
25 souligner, au cas où.
26 Encore une chose que je dois faire, au moins pour la forme, et ceci pour
27 accentuer encore votre calvaire. A la fin de cette plaidoirie qu'est la
28 mienne, j'exige que l'on mette fin à ma détention, parce qu'il n'y a plus
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1 aucune raison de la maintenir. Quelles peuvent être les raisons de
2 maintenir quelqu'un en détention, qui n'existent pas en l'espèce ? Il n'y a
3 pas de risque de me voir m'enfuir, parce que pourquoi fuirais-je et où
4 m'enfuirais-je ? Il n'y a pas de danger, non plus, de me voir exercer la
5 moindre influence sur les témoins, parce que tous les témoins de
6 l'Accusation ont été déjà entendus depuis longtemps. Et il n'y a pas non
7 plus le moindre risque de me voir répéter et commettre à nouveau des
8 infractions, des crimes pour lesquels on me juge ici. Pourquoi ? Parce que
9 la situation de guerre n'est plus en place dans les Balkans, et vous, vous
10 n'avez compétence que pour les crimes commis pendant la guerre civile, et
11 pour rien d'autre. Alors, je n'attends pas de vous que vous rendiez une
12 décision faisant droit à ma requête. Je sais que vous allez la rejeter,
13 mais je vous place dans une position dans laquelle vous allez être
14 contraints de prendre une décision et de rejeter ma requête. C'est la
15 substance de ce que je suis en train d'exposer.
16 Je suis particulièrement satisfait de ce procès, bien que vous ayez foulé
17 au pied nombre de mes droits, et bien que vous m'ayez empêché de présenter
18 des éléments à décharge dans le procès qui est le mien. J'ai apporté la
19 preuve que le Tribunal de La Haye était illégal, qu'il était antiserbe,
20 qu'il recourait à des mensonges et aux pires des manipulations possibles.
21 J'ai démontré également qu'il n'apportait aucune contribution à la justice,
22 mais au contraire, qu'il contribuait à l'illégalité, qu'il était une arme
23 entre les mains du totalitarisme, en tant que nouvel ordre mondial, nouvel
24 ordre mondial, un totalitarisme bien pire encore que le nazisme d'Hitler.
25 Et sur cette base, je quitte ce prétoire pour rejoindre directement un
26 champ de gloire, et le SRS, le Parti radical serbe, ce qui l'attend, c'est
27 le succès aux élections à venir. Pour moi, ce Parti radical serbe est plus
28 important que ma vie même. Vous n'avez pas réussi à le briser, bien que
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1 vous ayez essayé de le faire par tous les moyens possibles. Et Maurice
2 Gourdault-Montagne ne pourra qu'en être déçu, ainsi que tous ses amis et
3 collaborateurs des services de renseignements occidentaux. En fait, vous
4 n'êtes parvenus à rien du tout, mais vous m'êtes venus en aide de façon
5 tout à fait considérable, moi qui étais un homme ordinaire avant, pour
6 devenir quelqu'un de tout à fait célèbre dans le domaine du droit pénal
7 international et dans le cadre de tout manuel portant sur le droit pénal
8 international. C'est ainsi que j'en termine avec ma plaidoirie, et je pense
9 que j'ai même été un peu plus court que prévu, dix minutes de moins.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement.
11 Est-ce que par extraordinaire, l'Accusation, en application du Règlement,
12 voudrait répliquer ?
13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, comme
14 l'accusé l'a dit lui-même aujourd'hui, il s'est servi de ce procès comme
15 tribune politique. Et il a poursuivi, il a répété ses affirmations de
16 propagande pour justifier, et il ne cesse de se faire le chantre de la
17 rétribution contre les innocents. Il n'arrête pas de dire qu'il y a eu un
18 complot. Il dit qu'il n'a pas reçu un procès équitable. Il a attaqué
19 l'Accusation, les Juges, le Tribunal, et il a fait moult affirmations sans
20 aucun fondement dans le dossier de l'instance. Et rien de ceci n'aura un
21 effet sur les charges retenues contre lui. Il n'y a donc aucun fait ni
22 aucun élément de droit pour lesquels il faudrait intervenir sous forme de
23 réplique.
24 Nous vous demandons de le déclarer coupable et d'apposer à l'accusé une
25 peine qui corresponde à la gravité des faits commis contre nombre
26 personnes. Il a demandé une mise en liberté provisoire. Il n'a apporté
27 aucun élément qui le justifierait. Il est tout à fait hors de propos de
28 faire ce genre de demande. Voilà, c'est tout ce que nous avons à dire.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Président.
2 Monsieur Seselj, comme l'accusé a toujours le dernier mot, est-ce que vous
3 voulez rajouter quelque chose ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'attendais la fin de l'interprétation.
5 Je dois quand même ajouter une chose à la fin. Au cours de ce procès, j'ai
6 été très fortement handicapé, et je ne peux que le regretter. En fait, je
7 m'attendais à affronter des juristes éminents, des Procureurs capables, des
8 personnes intelligentes dans cette salle d'audience. Je pensais que
9 j'aurais à participer à un duel sur un pied d'égalité. Malheureusement, ici
10 dans cette salle d'audience, j'ai eu contrepartie, j'ai eu face à moi des
11 gens peu éduqués, des juristes de très mauvaise qualité, et des personnes
12 absolument dépourvues de tout sens moral. Et c'est cela le handicap que
13 j'ai ressenti constamment. Pour moi, cela a quelque peu entaché la valeur
14 de ce procès qui aurait été bien plus convaincant et bien plus beau si nous
15 avions pu mener un débat sur un pied d'égalité. Eux, dix ou 20 qu'ils
16 étaient, et je passe tous les collaborateurs qui ont travaillé au sein du
17 bureau du Procureur sur cette espèce, ne m'arrivaient même pas à la
18 cheville, et je faisais comme si je les remarquais même pas dans la salle
19 d'audience. J'ai fait voler en éclats tous leurs faux témoignages, tous les
20 faux éléments de preuve, et ils persistent à affirmer que je suis coupable
21 de ces crimes, que je suis coupable de ceci et de cela. Ce n'est qu'un
22 amoncellement d'inepties. Et c'est triste de voir à quel point la justice
23 internationale est tombée bas, mais je suis content de constater que cette
24 première tentative de mettre en place une justice internationale après les
25 procès de Nuremberg a connu un échec aussi cuisant. Et que c'est dans mon
26 procès à moi que cette tentative a été le plus compromise.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : En application du Règlement et de l'article 87, je
28 déclare les débats clos. Et la Chambre va se retirer pour délibérer, et
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1 lorsque nous aurons délibéré --
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez, je n'ai pas d'interprétation. Pas un
3 seul mot.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je répète. Je répète.
5 Je disais qu'en application de l'article 87 du Règlement, je déclare les
6 débats clos. La Chambre va se retirer pour délibérer et lorsque nous aurons
7 délibéré, nous rendrons une ordonnance portant calendrier pour la lecture
8 du jugement.
9 Je vous remercie.
10 --- L'audience est levée à 18 heures 50.
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