LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Mohamed Shahabuddeen, Président
M. le Juge Lal Chand Vohrah
M. le Juge Rafael Nieto-Navia
Mme le Juge Patricia Wald
M. le Juge Fausto Pocar

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le :
4 décembre 2000

 LE PROCUREUR

C/

BLAGOJE SIMIC
MILAN SIMIC
MIROSLAV TADIC
STEVAN TODOROVIC
SIMO ZARIC

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DÉCISION RELATIVE À L’APPEL INTERLOCUTOIRE DU PROCUREUR INTERJETÉ LE 26 OCTOBRE 2000 CONTRE LA DÉCISION DE LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE DU 18 OCTOBRE 2000

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Le Bureau du Procureur :

M. Graham Blewitt

Les Conseils de la Défense :

M. Slobodan Zecevic pour Milan Simic
MM. Igor Pantelic et Novak Lukic pour Miroslav Tadic
MM. Deyan Ranko Brashich et Nikola Kostich pour Stevan Todorovic
MM. Borislav Pisarevic et Aleksander Lazarevic pour Simo Zaric

 

LA CHAMBRE D’APPEL du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le «Tribunal international»),

VU l’«Appel interjeté par l’Accusation de la décision rendue par la Chambre de première instance le 18 octobre 2000 relative à la requête aux fins d’assistance judiciaire de la part de la SFOR et d’autres entités, ou, à défaut, demande d’autorisation d’interjeter appel de cette décision et de déposer une requête aux fins de sa suspension», déposé le 26 octobre 2000 (la «Demande en appel»),

VU la «Notification à la Chambre d’appel par laquelle la défense de Todorovic se joint à la demande du Procureur aux fins de la tenue d’une audience consacrée à la suspension de l’ordonnance de la Chambre de première instance et à la définition du champ de l’appel», déposée le 30 octobre 2000 par la Défense de Stevan Todorovic (la«Défense») et la «Requête de l’accusé Stevan Todorovic aux fins de l’appel interjeté par le Procureur ; opposition à la demande d’autorisation d’interjeter appel de l’ordonnance interlocutoire rendue le 18 octobre 2000 par la Chambre de première instance et à la requête aux fins de sa suspension ; requête aux fins d’une procédure simplifiée si l’appel était autorisé ; association de la Défense à la demande de tenue d’une audience consacrée à la suspension», déposée par la Défense le 31 octobre 2000 (les «Réponses»),

ATTENDU qu’en application de la «Directive pratique relative à la procédure de dépôt des écritures en appel devant le Tribunal international» (IT/155), le Procureur «dépose toute réplique dans les quatre jours suivant le dépôt de la réponse», et qu’aucune réplique aux réponses n’a été déposée,

VU la «Notification de la requête aux fins d’assistance judiciaire», déposée par la Défense le 24 novembre 1999 (la «Requête»),

ATTENDU que dans sa Requête, la Défense demandait à la Chambre de première instance «d’ordonner à la SFOR ou à d’autres forces militaires ou de sécurité opérant sur le territoire de BOSNIE-HERZÉGOVINE, y compris en REPUBLICA SRPSKA, de présenter les documents et les témoins [...relatifs] à l’enlèvement et à la détention de l’accusé STEVAN TODOROVIC»,

VU également les arguments écrits et oraux relatifs à la Requête et présentés ultérieurement par le Procureur et la Défense devant la Chambre de première instance III,

VU la «Décision relative à la requête aux fins d’assistance judiciaire de la part de la SFOR et d’autres entités», rendue le 18 octobre 2000 (la «Décision contestée»),

ATTENDU que la Demande en appel a également été soumise, à défaut, en application de l’article 73 B) ii) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international (le «Règlement»), et que les questions qui y sont soulevées ne sont pas examinées dans la présente décision1,

ATTENDU que dans sa Demande en appel, le Procureur soutient, entre autres, qu’en application de l’article 72 B) i) du Règlement, «les innombrables requêtes présentées par l’accusé aux fins d’une ordonnance de la Chambre de première instance portant rejet de son acte d’accusation [...et] sa libération immédiate» «constituent une remise en question de l’exercice de la compétence ratione personae du Tribunal international à l’égard de l’accusé», et que la Décision contestée «se fonde sur une interprétation erronée des circonstances qui légitimeraient la mesure d’exception consistant à priver le Tribunal international de sa compétence ratione personae. Il faut donc assimiler cette décision à une conclusion juridique préjudicielle, c'est-à-dire à une décision en matière de compétence»2,

ATTENDU que la Décision contestée n’a pas tranché la question de la légalité de l’arrestation ni celle de toute mesure de réparation éventuelle, mais a été délivrée en vue d’obtenir la divulgation de documents et de l’identité de témoins, informations que la SFOR ou d’autres forces militaires ou de sécurité opérant sur le territoire de Bosnie-Herzégovine auraient, selon la Défense, en leur possession ou sous leur contrôle, et qui étayeraient les requêtes de celle-ci portant contestation de la légalité de l’arrestation,

ATTENDU que l’article 72 B) i) du Règlement prévoit que l’appel interlocutoire n’est de droit que lorsqu’il est interjeté contre des décisions relatives aux exceptions d’incompétence,

DÉCIDE que la Requête examinée par la Chambre de première instance dans la Décision contestée n’a pas été déposée ni considérée comme une exception préjudicielle au sens de l’article 72 A) du Règlement, et que l’appel ne saurait donc être de droit en application de l’article 72 B) i) du Règlement,

DÉCIDE plus particulièrement que de toute manière, la demande présentée dans la Requête, telle qu’exposée ci-avant, ne constituait pas une exception d’incompétence au sens des articles 72 A) i) et 72 B) i) du Règlement,

PAR CES MOTIFS,

REJETTE la Demande en appel.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la Chambre d’appel
/signé/
Mohamed Shahabuddeen

Le 4 décembre 2000
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1. IT-95-9-AR73.4.
2. Demande en appel, par. 9 [note de bas de page omise].