Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-9-R77

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3

4

5 LE PROCUREUR

6 C/

7 BLAGOJE SIMIC

8 MILAN SIMIC

9 MIROSLAV TADIC alias MIRO BRKO

10 STEVAN TODOROVIC alias STIV alias STEVO alias MONSTRUM

11 SIMO ZARIC alias SOLAJA

12

13 Jeudi 2 décembre 1999

14

15 L'audience est ouverte à 14 heures 35.

16

17 M. le Président (interprétation). - Je demande à Madame la

18 Greffière d'annoncer l'affaire.

19 Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour, monsieur le Président,

20 messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-95-9-R-77.

21 M. le Président (interprétation). - Je tiens à dire d'emblée que

22 nous allons tous faire les efforts nécessaires pour tenter d'achever nos

23 débats aujourd'hui et je demande aux deux parties de tenir compte de cette

24 instruction.

25 M. Haynes (interprétation). - Monsieur le Président, j'appelle à

 

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1 la barre Igor Pantelic.

2 (Monsieur Pantelic est introduit dans le prétoire.)

3 M. le Président (interprétation). - Monsieur le Témoin, vous

4 pouvez prononcer la déclaration solennelle.

5 M. Pantelic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

6 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 M. le Président (interprétation). - Monsieur Pantelic, vous

8 pouvez vous asseoir.

9 M. Pantelic (interprétation). - Merci monsieur le Président.

10 M. Haynes (interprétation). - Vous vous appelez Igor Pantelic,

11 n'est-ce pas ?

12 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

13 M. Haynes (interprétation). - Monsieur Pantelic, j'aimerais que

14 nous allions immédiatement au coeur des débats. Hier, vous étiez dans le

15 prétoire lorsqu'il a été question au cours de la déposition d'un témoin

16 d'un enregistrement d'une conversation téléphonique.

17 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

18 M. Haynes (interprétation). - Etiez-vous l'un des interlocuteurs

19 au cours de cette conversation téléphonique ?

20 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

21 M. Haynes (interprétation). - Vous rappelez-vous cette

22 conversation ?

23 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

24 M. Haynes (interprétation). - Où vous trouviez-vous au moment de

25 cette conversation ?

 

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1 M. Pantelic (interprétation). - Dans une rue de Belgrade.

2 M. Haynes (interprétation). - Donc il s'ensuit logiquement que

3 vous utilisiez un téléphone portable.

4 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

5 M. Haynes (interprétation). - Durant cette conversation, votre

6 interlocuteur au téléphone vous a parlé d'un programme ?

7 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

8 M. Haynes (interprétation). - Avez-vous compris de quoi il vous

9 parlait ?

10 M. Pantelic (interprétation). - Non.

11 M. Haynes (interprétation). - Quelle a été votre attitude

12 générale par rapport à cette conversation téléphonique ?

13 M. Pantelic (interprétation). - Eh bien, c'est une question

14 d'interprétation je suppose, car la langue utilisée était une langue

15 argotique et le mot programme dans l'argot que nous utilisons signifie en

16 général "qu'est-ce qui est prévu pour ce soir ?", s'agissant donc d'un

17 moment de la journée, d'une réunion d'amis par exemple.

18 Dans le cas précis qui nous intéresse, j'ai probablement compris

19 ce terme comme signifiant qu'il se rapportait à une audience en justice ou

20 à un programme de protection de témoin, quelque chose comme cela.

21 M. Haynes (interprétation). - Merci.

22 M. le Président (interprétation). - Monsieur Ryneveld ?

23 M. Ryneveld (interprétation). - Ce micro ne fonctionne pas, je

24 vais en essayer un autre.

25 Monsieur Pantelic, si comme vous le dîtes vous n'aviez aucune

 

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1 idée de ce à quoi se rapportait ce terme "programme", pourquoi avez-vous

2 dit qu'il allait se dérouler au mois de novembre ? Quel genre de programme

3 pouvait avoir lieu au mois de novembre ?

4 M. Pantelic (interprétation). - Eh bien, monsieur Rynevel, je

5 vais vous expliquer. Le terme "programme" utilisé dans notre langue et

6 plus précisément dans la langue argotique que nous utilisons souvent dans

7 la vie quotidienne, ce terme donc signifie quelque chose de bien précis

8 lorsque nous parlons d'amis. Je viens de l'expliquer.

9 Mais dans le cas précis qui nous intéresse, j'ai compris le

10 terme programme comme se référant à un événement particulier, à une

11 procédure par exemple où, comme je l'ai dit tout à l'heure, à un programme

12 de protection des témoins.

13 En effet, je me souviens que nous avons parlé de ce type de

14 programme très souvent entre nous. Je parle des collègues qui travaillent

15 sur la présente affaire. Et, voyez vous, pour organiser une défense de

16 qualité dans la présente affaire, il ne suffit pas de faire venir des

17 témoins serbes dans ce prétoire. Notre stratégie reposait sur l'idée que

18 nous aurions besoin de témoins appartenant à d'autres nationalités. Or

19 ceci est assez délicat car la plupart du temps les témoins potentiels

20 demandent d'abord quel genre de protection leur sera assurée, comment se

21 déroulera le voyage à La Haye et ils posent de très nombreuses questions.

22 Donc très probablement, j'ai compris que ce terme était utilisé comme se

23 rapportant à ce genre de questions.

24 M. Ryneveld (interprétation). - Donc vous avez discuté de ce

25 sujet avec M. Avramovic ?

 

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1 M. Pantelic (interprétation). - Pas seulement avec M. Avramovic,

2 mais nous discutons toujours entre collègues. Je discute très souvent avec

3 M. Braschich, avec M. Pisarevic et avec les autres avocats. Ce sont des

4 éléments dont nous parlons très souvent dans nos rapports lorsque nous

5 parlons des témoins. C'est tout à fait normal.

6 M. Ryneveld (interprétation). - Mais monsieur, vous n'avez pas

7 dit : "Je ne comprends pas de quel programme vous parlez", quand la

8 question a été posée au téléphone. "Quand est-ce que ce programme

9 commence, Bani ?", vous avez répondu : "Je pense que ce sera à la fin de

10 l'année".

11 M. Pantelic (interprétation). - Moi j'ai compris qu'il

12 s'agissait d'un processus particulier, mais je ne savais pas quel était le

13 rapport que mon interlocuteur avait à l'esprit quant à sa relation avec

14 mon collègue ou avec des tiers d'ailleurs.

15 Si vous jetez brièvement un coup d'oeil à la deuxième page de ce

16 compte rendu de conversation téléphonique, vous constaterez qu'il y a eu

17 une pause qui a été ménagée. Donc pour moi, il était assez étonnant

18 d'ailleurs de répondre sur-le-champ dans ces conditions.

19 Mais rappelez vous, monsieur Ryneveld, que je me trouvais à

20 Belgrade, nous étions dans les premières heures de la soirée, c'est-à-dire

21 à quelques minutes d'une alerte aérienne, puisqu'à ce moment-là des

22 bombardements avaient lieu sur Belgrade et moi j'étais censé franchir des

23 ponts pour me rendre dans une autre partie de la ville.

24 A la fin du mois d'avril, le 29 à mon retour de La Haye où

25 devait se dérouler une conférence de mise en état, la date de début du

 

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1 procès a été fixée au 22 juin. A ce moment-là, un très gros travail a

2 commencé pour nous, un très gros travail d'organisation sans même parler

3 des voyages qui, eux aussi, étaient très complexes.

4 Dans les conditions que je viens de décrire, à Belgrade, la vie

5 était très difficile, il n'y avait pas d'électricité, en tout cas elle

6 était coupée très souvent dans la journée. Donc il est très probable que

7 je n'étais peut-être pas aussi concentré que j'aurais pu l'être. A la

8 lecture de la transcription de cette conversation téléphonique, vous

9 constaterez que très souvent le mot "inintelligible" a été utilisé parce

10 que nous parlions sur un téléphone portable dans la rue.

11 M. Ryneveld (interprétation). - Mais les termes "Bani" et "Daki"

12 dans la deuxième partie de la transcription sont accompagnés parfois de la

13 mention "inintelligible". Cela ne concerne pas le début de la conversation

14 lorsque vous parliez à votre interlocuteur.

15 M. Pantelic (interprétation). - Revoyez la transcription, vous

16 trouverez ce terme assez souvent.

17 M. Ryneveld (interprétation). - Ecoutez monsieur, je n'ai pas vu

18 le mot "inintelligible" attribué à votre partie de la conversation, mais

19 enfin peut-être...

20 M. Pantelic (interprétation). - Vous ne devriez pas être aussi

21 ironique, mon cher.

22 M. Ryneveld (interprétation). - Je vois effectivement le terme

23 "inintelligible" utilisé une fois dans la transcription, en référence à

24 votre partie de la conversation.

25 M. Pantelic (interprétation). - Bon, écoutez, ce n'est peut-être

 

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1 pas capital.

2 M. Ryneveld (interprétation). - J'ai encore une ou deux

3 questions à vous poser néanmoins.

4 M. Pantelic (interprétation). - Bien sûr.

5 M. Ryneveld (interprétation). - Si je comprends bien votre

6 position, vous étiez occupé, vous aviez des choses à faire, vous utilisiez

7 un téléphone portable, vous étiez à Belgrade et le client de quelqu'un

8 d'autre vous appelle.

9 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

10 M. Ryneveld (interprétation). - Vous ne comprenez pas bien de

11 quoi il veut vous parler. Mais à ce moment-là, pourquoi est-ce que vous

12 lui donnez des assurances en lui disant qu'il n'y a rien d'urgent encore ?

13 M. Pantelic (interprétation). - Ce que j'ai compris, c'est que

14 nous ne parlions pas d'une affaire immédiate. Je ne sais pas en quelle

15 qualité mon interlocuteur agissait, quelles étaient ses relations exactes

16 avec mon collègue. Je n'étais pas au courant. Moi, je parlais

17 d'informations générales. Il ne s'agit d'ailleurs pas uniquement de la

18 personne dont nous parlons, mais de toutes les personnes qui nous

19 appellent au cabinet parce que nous avons très souvent des appels

20 téléphoniques.

21 Il arrive que l'un de nos témoins appelle mon collègue,

22 Maître Pisarevic, par exemple. C'est tout à fait normal. C'est une façon

23 tout à fait normale de procéder avec quelqu'un qui va être témoin ou qui

24 peut nous apporter une information.

25 Donc, dans ces circonstances, nous nous efforçons toujours

 

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1 d'être très polis, très compréhensifs et d'éviter ce que j'appellerai le

2 raccourci de la conversation.

3 M. Ryneveld (interprétation). - Mais alors, monsieur, si ce que

4 vous dites est exact, si vous ne saviez pas vraiment de quoi il

5 s'agissait, pourquoi étiez-vous prêt à donner un conseil à quelqu'un qui

6 était le client d'un de vos collègues sur une question que vous n'aviez

7 pas très bien comprise et qui n'était pas urgente ? Pourquoi ce conseil ?

8 M. Pantelic (interprétation). - Eh bien, la raison est très

9 simple. J'ai pensé que quelqu'un s'intéressait peut-être à une évolution

10 particulière de l'affaire ou que cette personne pouvait comparaître en

11 tant que témoin ou comparaître à un autre titre d'ailleurs. Donc pour moi

12 ils s'agissait d'information générale et sans rapport uniquement avec

13 cette personne mais avec d'autres personnes également. Ce que je dis est

14 un commentaire général et c'est ce que j'aurais dit à peu près à n'importe

15 qui, c'est-à-dire vers la fin de l'année nous serons prêts à commencer la

16 défense dans la présente affaire. C'était un commentaire général et c'est

17 ce que je dis et répète à tous les témoins parce qu'ils sont intéressés.

18 Madame Ingerheis, par exemple, est en contact permanent avec

19 tous vos témoins du côté de l'accusation. Elle organise les voyages, elle

20 a toute sorte de démarches à accomplir. Donc il y a bien sûr l'accusation,

21 il y a la défense, les témoins de l'accusation sont favorables à

22 l'accusation, mais à part le fait que ce sont des témoins de l'accusation,

23 le processus est assez similaire.

24 M. Ryneveld (interprétation). - Donc vous ne pensiez pas que

25 Daki aurait besoin de témoigner avant la fin de l'année ?

 

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1 M. Pantelic (interprétation). - En fait, je ne connaissais pas

2 du tout sa situation.

3 M. Ryneveld (interprétation). - Et pourtant vous lui avez donné

4 un conseil ?

5 M. Pantelic (interprétation). - De façon générale, parce que je

6 ne savais pas s'il n'allait pas lui-même fournir cette information à un

7 tiers. Vous savez, je ne comprends pas que nous soyons si strict sur toute

8 cette question.

9 M. Ryneveld (interprétation). - Merci.

10 M. le Président (interprétation). - Avant les questions

11 supplémentaires de la défense, monsieur Pantelic, j'ai moi-même une

12 question à vous poser. La question que Daki a posé et "à quel moment va

13 commencer le programme avec Bani ?" Vous dites que vous pensiez qu'il

14 s'agissait d'un programme de protection de témoins. Y avait-il un

15 programme de protection de témoins destiné à Bani puisque Bani est

16 M. Avramovic ?

17 M. Pantelic (interprétation). - Monsieur le Président, au cours

18 pratiquement des deux dernières années de cette affaire, de ce procès, mes

19 collègues et moi-même avons travaillé en permanence sur cette affaire et

20 un grand nombre de témoins nous posaient la question de savoir comment ils

21 pouvaient être protégés. Ils nous disaient : nous n'avons pas la

22 nationalité serbe, comment est-ce que nous pouvons aller à La Haye pour

23 déposer en toute sécurité et, dans tous nos rapports avec ces témoins

24 potentiels, nous nous efforcions de leur expliquer toutes les mesures de

25 protection mises au point par l'unité de protection des victimes et des

 

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1 témoins, de façon générale bien sûr nous ne pouvons pas rentrer dans tous

2 les détails.

3 Donc nous avions bien sûr des témoins serbes que nous avions

4 l'intention de citer qui, eux, ont besoin de se voir octroyer un sauf-

5 conduit parce que, eux aussi ont parfois quelques réserves compte tenu de

6 leur situation. Je ne dirai pas qu'ils ont des craintes, mais enfin, ils

7 viennent de Samac, ils sont souvent liées aux autorités locales de Samac,

8 donc c'est pourquoi, très souvent, il faut que nous leur parlions, que

9 nous les persuadions et que nous leur fournissions des informations

10 convainquantes.

11 Donc très franchement, je n'ai peut-être pas réussi à respecter

12 cette légère différence qu'il convenait de respecter à ce moment-là. Peut-

13 être que je me suis imaginé que mon interlocuteur demandait des

14 informations générales. Parce qu'il est tout de même difficile de leur

15 détailler les choses en leur disant qu'il s'agit d'une unité de protection

16 des témoins. Il est plus facile de parler de programme de protection.

17 M. le Président (interprétation). - Qui en général est mis au

18 point par le Tribunal.

19 M. Pantelic (interprétation). - Oui, par le Tribunal.

20 M. le Président (interprétation). - Merci.

21 M. Bennouna. - Monsieur Pantelic, juste une précision. Vous avez

22 répondu à Me Haynes tout à l'heure, qui vous posez la question en disant

23 que vous avez été appelé sur un portable.

24 M. Pantelic (interprétation). - Oui.

25 M. Bennouna. - Est-ce que vous pouvez dire au Tribunal comment

 

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1 se fait-il que le témoin Agnes avait le numéro de votre portable ?

2 M. Pantelic (interprétation). - Oui, monsieur le Juge. Votre

3 question est très simple. En fait, il nous arrive très souvent de recevoir

4 des fax du Greffe à notre numéro de téléphone, des fax destinés à mon

5 collègue Me Pisarevic et à bien d'autres collègues qui travaillent en

6 Republika Srpska et à Belgrade. Donc, cela c'est tout à fait normal.

7 S'agissant maintenant de ce numéro de téléphone particulier, il

8 est très courant également pour des collègues qui travaillent sur la même

9 affaire, comme c'était notre cas, de donner un grand nombre de numéros de

10 téléphone de tous les collègues intéressés au cas où la personne qui veut

11 appeler a des difficultés à établir le contact parce qu'on ne sait jamais.

12 Il peut arriver qu'une information très importante nous soit destinée où

13 soit destinée à l'un de nos collègues et que ce collègue soit absent à ce

14 moment-là, donc un autre collègue va recevoir cette information et la

15 transmettre aux collègues intéressés. Cela fait des années que je

16 travaille de cette façon y compris avec mon collègue Me Pisarevic.

17 Si j'ai quelque chose à faire dans la région de Bosanski Samac,

18 je vais donner à la personne qui appelle ce numéro de façon à ce que cette

19 personne puisse laisser un message au cabinet.

20 M. Bennouna. - Vous donnez le numéro du portable à des témoins

21 potentiels ?

22 M. Pantelic (interprétation). - De façon générale, oui. Mais ce

23 n'est pas moi qui ai donné ce numéro de téléphone, donc il serait peut-

24 être bon que vous interrogiez la personne intéressée. Ce n'est pas moi qui

25 ait donné le numéro.

 

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1 M. le Président (interprétation). - Ce n'est pas vous qui avez

2 donné ce numéro ?

3 M. Pantelic (interprétation). - Non. Non non. Moi je n'ai même

4 pas rencontré cette personne, je n'ai pas même pas rencontré M. Agnes, je

5 n'ai eu aucun contact avec lui.

6 M. le Président (interprétation). - Merci.

7 Maître Haynes ?

8 M. Haynes (interprétation). - Je n'ai pas de questions

9 supplémentaires, monsieur le Président.

10 M. le Président (interprétation). - Monsieur Pantelic, nous en

11 sommes arrivés aux termes de votre déposition. Vous pouvez vous retirer.

12 M. Pantelic (interprétation). - Merci monsieur le Président.

13 Est-ce que je dois sortir de la salle ou est-ce que je peux

14 prendre ma robe ?

15 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez poursuivre dans

16 le prétoire.

17 (Monsieur Pantelic regagne son siège dans le prétoire.)

18

19

20 M. le Président (interprétation). - Maître Haynes ?

21 M. Haynes (interprétation). - J'appelle à la barre Milan Simic.

22 (Monsieur Simic prend place au banc des témoins.)

23 M. Pisarevic (interprétation). - Monsieur le Président, j'aurais

24 un mot à vous dire.

25 M. le Président (interprétation). - Oui.

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1 M. Zecevic (interprétation). - Dans le cadre de la déposition de

2 mon client, Milan Simic, j'aimerais proposer que le contre-interrogatoire

3 se limite au champ de l'interrogatoire principal, c'est-à-dire plus

4 précisément à la question dont nous venons de parler sans s'étendre aux

5 autres questions liées à l'application de l'article 77 du Règlement.

6 M. le Président (interprétation). - Très bien merci. Ce sera le

7 cas. C'est d'ailleurs la décision qui a été rendue par la Chambre. Donc le

8 champ de l'interrogatoire sera limitée, dans ces conditions si ces limites

9 sont dépassées une objection peut être proposée, les Juges l'examinerons.

10 M. Zecevic (interprétation). - Merci monsieur le Président.

11 M. Simic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

12 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

13 M. Haynes (interprétation). - Vous vous appelez bien

14 Milan Simic ?

15 M. Simic (interprétation). - Oui.

16 M. Haynes (interprétation). - Quelle est votre date de

17 naissance ?

18 M. Simic (interprétation). - 9 août 1960.

19 M. Haynes (interprétation). - Je crois savoir que vous vous êtes

20 marié en 1993, n'est-ce pas ?

21 M. Simic (interprétation). - Oui.

22 M. Haynes (interprétation). - Pourriez-vous nous donner la date

23 de votre mariage ?

24 M. Simic (interprétation). - Le 1er février 1993. Oui, je me suis

25 marié le 1er février 1993.

 

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1 M. Haynes (interprétation). - Nous voyons que vous êtes dans une

2 chaise roulante. Les événements qui vous ont contraint à la chaise

3 roulante se sont déroulés à quel moment ?

4 M. Simic (interprétation). - Le 13 février 1993, c'est-à-dire

5 13 jours après mon mariage.

6 M. Haynes (interprétation). - Je crois savoir que vous êtes

7 diplômé en économie, n'est-ce pas ?

8 M. Simic (interprétation). - Oui, j'ai terminé des études

9 d'économie.

10 M. Haynes (interprétation). - Avez-vous jamais été accusé ou

11 condamné pour un délit criminel ?

12 M. Simic (interprétation). - Non, jamais, ni mis en accusation

13 ni condamné.

14 M. Haynes (interprétation). - Il y a à présent une question que

15 j'aimerais vous poser uniquement au sujet des événements qui se sont

16 déroulés à Bosanski Samac en 1992. En 1992, vous êtes-vous jamais rendu

17 dans les locaux de l'école élémentaire ?

18 M. Simic (interprétation). - Oui, en 1992 je me suis rendu une

19 fois dans les locaux de l'école élémentaire et je l'ai dit en mars 1998 au

20 représentant du Bureau du Procureur. En outre, des témoins du Procureur,

21 qui ont été entendus par la suite par l'accusation, ont confirmé ce fait.

22 M. Haynes (interprétation). - De façon à ce que tout soit clair,

23 vous parlez d'une audition à laquelle a assisté également Mme Paterson ?

24 M. Simic (interprétation). - Oui.

25 M. Haynes (interprétation). - Vous étiez au Tribunal dans le

 

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1 prétoire le jour ou le témoin que l'on appelle Agnes a déposé ?

2 M. Simic (interprétation). - Oui.

3 M. Haynes (interprétation). – Aviez-vous jamais vu cet homme

4 avant dans votre vie ?

5 M. Simic (interprétation). - Non, je ne l'avais jamais vu avant.

6 M. Haynes (interprétation). – Merci, Monsieur Simic.

7 M. le Président (interprétation). - Sera-ce Mme Paterson ou

8 M. Ryneveld ?

9 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur le Président, si je

10 dois partir de l'idée que je dois me limiter à ces deux questions, mon

11 contre-interrogatoire sera très bref, mais ai-je une marge de manoeuvre

12 pour aller un peu au-delà de ces deux questions ?

13 (Les Juges délibèrent sur le siège.)

14 M. le Président (interprétation). - Vous ne serez pas limitée

15 d'une façon aussi stricte. Vous êtes autorisée par la Chambre à traiter

16 des sujets qui font l'objet de votre document écrit, mais comme la Chambre

17 en a décidé, vous ne serez pas autorisé à aller au-delà des questions qui

18 ont déjà été abordées dans ce prétoire.

19 Mme Paterson (interprétation). - Très bien, Monsieur le

20 Président, je n'ai pas l'intention d'agir ainsi.

21 Monsieur Simic, nous nous sommes déjà rencontrés, n'est-ce pas ?

22 M. Simic (interprétation). - Oui.

23 Mme Paterson (interprétation). - Comme vous venez de le dire,

24 nous étions ensemble le 2 mars 1998, jour où vous avez fourni une

25 déclaration au Tribunal, n'est-ce pas ?

 

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1 M. Simic (interprétation). - Oui, au début du mois de mars. Je

2 ne me rappelle pas le jour exact.

3 Mme Paterson (interprétation). - Et dans cette déclaration,

4 comme vous l'avez déjà dit, vous admettiez avoir été présent dans les

5 locaux de l'école primaire un jour en 1992, n'est-ce pas ?

6 M. Simic (interprétation). - Oui, j'ai dit que j'avais été

7 présent dans l'école primaire. Je ne l'ai pas admis, je l'ai dit en

8 relatant un événement qui avait en rapport avec l'école primaire à ce

9 moment-là.

10 Mme Paterson (interprétation). - Au cours de cette même

11 conversation, je vous ai demandé si quelqu'un que vous connaissiez comme

12 étant votre Kum, et vous m'avez expliqué que kum signifiait témoin de

13 mariage, vous avez donc parlé de cette personne...

14 M. Simic (interprétation). - Non, vous ne m'avez pas posé la

15 question. Je vous ai dit que cet homme était mon chauffeur et qu'il m'a

16 amené jusqu'à l'école primaire pour ensuite m'en ramener. Donc le témoin à

17 mon mariage, mon parrain également, a été mon chauffeur ce jour-là.

18 Mme Paterson (interprétation). - Très bien. Quel est le nom de

19 cette personne ?

20 M. Simic (interprétation). - Il s'appelle Stevo Markovic.

21 Mme Paterson (interprétation). - Le 23 juin 1999, une

22 déclaration de votre avocat a été soumise au Tribunal et, dans cette

23 déclaration, vous niez complètement avoir rencontré la personne connue

24 sous le nom d'Agnes, n'est-ce pas ?

25 M. Simic (interprétation). - Oui, c'est exact.

 

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1 Mme Paterson (interprétation). - Et vous n'avez jamais eu une

2 conversation téléphonique avec M. Agnes, c'est bien cela ?

3 M. Simic (interprétation). - Vous avez raison, c'est exact.

4 Mme Paterson (interprétation). - Donc vous étiez ici, vous avez

5 entendu la déposition de M. Agnes, vous l'avez entendu dire à plusieurs

6 reprises qu'il vous avait rencontré, qu'il avait parlé avec vous au

7 téléphone et tout cela est faux, inexact ? C'est bien ce que vous nous

8 dites dans votre déposition aujourd'hui ?

9 M. Simic (interprétation). - Oui, vous avez entièrement raison.

10 Tout cela est faux.

11 Mme Paterson (interprétation). - Mais vous aviez entendu parler

12 de cette personne, de M. Agnes, avant de venir au Tribunal dans le cadre

13 de cette audience, n'est-ce pas ?

14 M. Simic (interprétation). - J'ai entendu parler d'un très grand

15 nombre de gens, de personnes, avec lesquels mes conseils de la défense ont

16 établi des contacts.

17 Mme Paterson (interprétation). - Je suppose que vous avez des

18 entretiens réguliers avec votre conseil de la défense, M. Avramovic, pour

19 préparer votre défense dans ce procès, n'est-ce pas ?

20 M. Haynes (interprétation). - J'aimerais demander à Mme Paterson

21 de faire preuve de la plus grande attention dans cette partie de ses

22 questions car elle aborde le problème du secret qui lie l'avocat et son

23 client.

24 M. le Président (interprétation). - Madame Paterson ?

25 Mme Paterson (interprétation). – Oui, Monsieur le Président, je

 

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1 demandai simplement s'il y avait eu des conversations. Je n'ai aucune

2 intention d'entrer dans la substance de ces conversations ou de demander

3 au témoin ce que M. Agnes lui a dit au cours de ces conversations.

4 M. le Président (interprétation). - Très bien, limitez-vous à

5 cela.

6 Mme Paterson (interprétation). - Avez-vous jamais eu une

7 conversation avec M. Avramovic ? Avez-vous discuté avec lui du fait que M.

8 Agnes s'était porté volontaire pour témoigner en votre faveur ?

9 M. Haynes (interprétation). - Non, cela va trop long loin !

10 M. Hunt (interprétation). - Est-ce que vous affirmez que le

11 secret de la relation avocat/client est lésé ici ?

12 M. Haynes (interprétation). - A moins que le témoin y renonce.

13 M. Hunt (interprétation). - Oui.

14 M. Haynes (interprétation). - Mais je suis au courant que le

15 témoin n'est pas prêt à refuser, à renoncer à ce privilège du secret.

16 M. Hunt (interprétation). - Ne pensez-vous pas que des

17 instructions auraient pu être obtenues s'agissant des implications d'un

18 tel refus de la part du témoin ?

19 M. Haynes (interprétation). - Peut-être la question pourrait-

20 elle lui être posée effectivement.

21 Mme Paterson (interprétation). - Puis-je poser la question au

22 témoin, monsieur le Président, ou souhaitez-vous la poser vous-même ?

23 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez la poser.

24 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, vous avez le

25 droit de refuser de répondre à la question, mais souhaitez-vous y répondre

 

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1 ou pas ? La décision vous appartient ?

2 M. Simic (interprétation). - Je souhaite répondre effectivement

3 à la question.

4 Mme Paterson (interprétation). - Très bien. Et bien répondez-y !

5 M. Simic (interprétation). - Pourriez-vous me la répéter, je

6 vous prie ?

7 Mme Paterson (interprétation). - Oui. Y a-t-il eu un moment

8 quelconque au cours de vos conversations avec M. Avramovic où vous avez

9 parlé de la préparation de votre procès et où mention aurait été faite de

10 l'existence de cette personne connue sous le nom de M. Agnes, cet homme

11 qui s'est proposé pour témoigner en votre faveur ?

12 M. Simic (interprétation). - Monsieur Avramovic ne m'a pas dit

13 ce genre de chose bien que j'ai discuté de cela avec lui, mais lorsque

14 M. Agnes est apparu comme au nombre des nombreuses personnes que mon

15 avocat avait contactées, mon avocat à ce moment-là était M. Vukovic. Donc

16 j'ai reçu les premières informations au sujet de M. Agnes de la bouche de

17 M. Vukovic et non pas de celle de M. Avramovic.

18 Mme Paterson (interprétation). - Très bien, mais la question que

19 je vous pose consiste à savoir si vous saviez que M. Agnes existait. Vous

20 saviez qu'il y avait un homme qui s'était proposé de témoigner en votre

21 faveur, n'est-ce pas ?

22 M. Simic (interprétation). - Non.

23 Mme Paterson (interprétation). - Que saviez-vous de M. Agnes ?

24 M. Simic (interprétation). - Sur la base de ce que M. Vukovic

25 m'a dit, je savais qu'il avait contacté un homme que nous avons appelé

 

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1 M. Agnes ici. Il m'a transmis les impressions qu'ils s'étaient faites au

2 sujet de cet homme très brièvement parce que, bien sûr, nous n'avons pas

3 uniquement discuté de cette personne. Cette conversation a eu lieu après

4 mon retour et il m'a dit ce qui s'était passé pendant mon absence.

5 S'agissant de M. Agnes, il m'a donné ses impressions quant à cet

6 individu. Il m'a dit qu’il avait l'impression que c'était quelqu'un

7 d'assez peu fiable et qu'il n'avait pas encore décidé s'il allait

8 l'utiliser ou pas dans le cadre de la défense.

9 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, connaissez vous

10 une femme dénommée Jasna Marusevic ?

11 M. Simic (interprétation). - Oui.

12 Mme Paterson (interprétation). - Cette jeune femme a témoigné

13 ici cette semaine, n'est-ce pas ?

14 M. Simic (interprétation). - Oui, bien sûr.

15 Mme Paterson (interprétation). - Mademoiselle Marusevic est une

16 de vos amies personnelles, n'est-ce pas ?

17 M. Simic (interprétation). - Oui.

18 Mme Paterson (interprétation). - Elle a essayé de vous aider

19 dans la préparation de votre défense dans la présente affaire, n'est-ce

20 pas ?

21 M. Simic (interprétation). - Oui, d'une certaine façon. Elle n'a

22 pas essayé d'aider la défense directement parce qu'elle ne peut pas le

23 faire, elle n'est pas compétente pour cela mais, un jour, elle m'a dit

24 qu'elle avait eu un contact avec un de ses amis à elle dont elle pensait

25 qu'il pourrait être utile dans le cadre de ma défense. Je lui ai donné, à

 

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1 ce moment-là, le numéro de téléphone de mon avocat, M. Vukovic. Je lui ai

2 dit qu'elle pouvait entrer en contact avec lui pour lui faire savoir ce

3 fait et que lui déciderait de ce qu'il convenait de faire par la suite.

4 Mme Paterson (interprétation). - Est-ce que Jasna vous a jamais

5 dit qu'elle était amie de M. Agnes, qu'elle le connaissait déjà avant le

6 début de la guerre ?

7 M. Simic (interprétation). - Elle m’a dit qu'elle avait un ami

8 au sujet duquel elle pensait qu'il pouvait donner des informations

9 pertinentes à mon avocat, qu'elle était amie avec lui, qu'elle le

10 connaissait d'avant la guerre.

11 Mme Paterson (interprétation). - Et avez-vous eu des

12 conversations plus détaillées avec elle au sujet de M. Agnes, au sujet du

13 fait qu'il s'était proposé pour témoigner en votre faveur ?

14 M. Simic (interprétation). - Non, je n'ai pas discuté avec elle

15 en détail. Je n'ai pas discuté des affaires concernant ma défense avec

16 elle.

17 Mme Paterson (interprétation). - Mais, Monsieur Simic, est-ce

18 que vous n'avez pas trouvé cela un peu étrange qu'un homme dont vous nous

19 dites que vous ne l'aviez jamais vu, que vous ne le connaissiez pas, que

20 cet homme se présente pour témoigner en votre faveur dans une procédure

21 aussi grave que celle que nous connaissons, ici, à La Haye ? Est-ce que

22 cela ne vous a pas surpris d'une manière ou d'une autre ?

23 M. Simic (interprétation). - Tout d'abord, en ce qui concerne ma

24 conversation avec Jasna, à l'époque, elle m'avait juste dit qu'il était

25 prêt à parler avec mon avocat pour lui donner éventuellement des

 

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1 informations pertinentes. Je ne sais pas s'il était question d'un

2 témoignage.

3 Et je ne suis pas étonné, deuxièmement, que quelqu'un souhaite

4 venir devant ce Tribunal pour dire la vérité. On n'a pas à témoigner en ma

5 faveur ou bien à charge ou décharge. Les gens viennent pour dire la

6 vérité. Je me demande comment ce Tribunal pourrait fonctionner si les gens

7 ne se présentaient pas pour raconter ce qu'ils ont vu, témoigner des

8 faits, dire la vérité. Je pense que les autres témoins viennent aussi pour

9 les mêmes motifs.

10 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, jusqu'à fin mai

11 ou juin 1999, vous bénéficiiez d’une remise en liberté provisoire et vous

12 habitiez à Bosanski Samac, n'est-ce pas ?

13 M. Simic (interprétation). - Oui.

14 Mme Paterson (interprétation). - Donc contrairement aux

15 co-accusés dans cette affaire, qui sont ici en détention à La Haye, vous

16 étiez à Bosanski Samac où vous étiez en mesure de vous déplacer librement,

17 de recontrer des gens, d'aller au café, de parler avec les gens, n'est-ce

18 pas ?

19 M. Simic (interprétation). - Oui.

20 Mme Paterson (interprétation). - Et l'un des cafés que vous

21 fréquentiez, c'est le café Lotos, où Jasna est serveuse, n'est-ce pas ?

22 M. Simic (interprétation). - Non.

23 Mme Paterson (interprétation). - Vous ne fréquentez pas le café

24 Lotos, jamais ?

25 M. Simic (interprétation). - Non, pas souvent. Vous m'avez

 

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1 demandé si j'y allais souvent. Moi, je dis non. Je n’y suis pas tout le

2 temps. Je ne vais pas souvent dans le café Lotos. J'y vais de temps en

3 temps.

4 Mme Paterson (interprétation). - Vous avez entendu aussi bien

5 M. Agnes que Jasna nous dire qu'à plusieurs reprises, M. Agnes est allé à

6 Bosanski Samac en 1998 et en 1999. Vous en souvenez-vous ?

7 M. Simic (interprétation). - Oui.

8 Mme Paterson (interprétation). - Est-il exact de dire que la

9 plupart des habitants de Bosanski Samac savent qui vous êtes du fait que,

10 malheureusement, vous êtes dans un fauteuil roulant ? N'est-ce pas exact ?

11 M. Simic (interprétation). - Oui, la plupart des personnes me

12 connaissent pour deux faits malheureux : le premier fait, c'est que je

13 suis consigné à la chaise roulante. Le deuxième fait, c'est que j'ai été

14 mis en accusation par votre Tribunal.

15 Mme Paterson (interprétation). - Donc, monsieur Simic, vous nous

16 dites que jamais en 1998 et en 1999, au cours de tous les séjours que

17 M. Agnes a fait à Bosanski Samac, vous êtes en train de nous dire que vous

18 ne vous êtes jamais rencontrés, ni dans la rue ni au café ? Vous ne vous

19 êtes jamais vus ? Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de nous

20 dire ?

21 M. Simic (interprétation). - Oui, j'affirme que je ne l'ai

22 jamais vu, c'est-à-dire que je ne me suis pas rendu compte que c'était

23 lui. Mais c'est vrai que je rencontre beaucoup de personnes dans la rue.

24 Peut-être que je vous ai rencontré quelque part dans la rue avant la

25 guerre, mais je ne m'en souviens pas. Moi, je n'exclu pas la possibilité

 

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1 de l'avoir rencontrée dans la rue, mais je ne m'en étais pas rendu compte.

2 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, vous avez

3 assisté à toutes les dépositions, vous avez entendu celle de M. Agnes

4 notamment, n'est-ce pas ?

5 M. Simic (interprétation). - Oui, et j'ai aussi lu toutes ses

6 déclarations.

7 Mme Paterson (interprétation). - Si vous avez lu ses

8 déclarations, si vous l’avez entendu déposer, vous savez qu'il nous a

9 décrit un certain nombre de rencontres qu'il prétend avoir eues avec vous.

10 M. Simic (interprétation). - Non, moi, je sais que dans la

11 première des déclarations, il a dit qu’il ne m’a jamais vu, qu’il a

12 entendu parler de moi. La deuxième fois, il dit qu'il m'a entendu au

13 téléphone et, la dernière fois, il dit qu'il m'a vu plusieurs fois. Moi,

14 je me suis dit qu'à la fin, on deviendrait de grands amis et qu'il allait

15 dire qu'on s'était vu tous les jours. Il a parlé de beaucoup de choses

16 dans ses déclarations. Au sujet de quelles déclarations vous voulez que je

17 fasse des commentaires ?

18 Mme Paterson (interprétation). - Je vais revenir sur ce point

19 dans quelques instants. Mais dans le passé, vous avez eu plusieurs emplois

20 différents, n'est-ce pas, monsieur Simic ?

21 M. Simic (interprétation). - Oui. En réalité, j'ai toujours fait

22 le même travail, mais dans différentes entreprises.

23 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, avez-vous

24 jamais été employé par une société qui s'appelle Nova Forma ?

25 M. Simic (interprétation). - Cela dépend. Mon entreprise, qui

 

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1 s'appelle Osijet, était partenaire, sous-traitait avec cette entreprise

2 Nova Forma. Moi, j'ai imprimé du matériel pour eux. En réalité, ils

3 achetaient nos produits. Nous avions une relation de partenaires

4 d'affaires.

5 Mme Paterson (interprétation). - Donc une fois de plus, nous

6 nous trouvons face à une pure coïncidence quand M. Agnes nous dit qu'il

7 vous a rencontré une fois à Nova Forma ?

8 M. Simic (interprétation). - Monsieur Agnes ne sait même pas où

9 se trouve le bureau de Nova Forma d'après ce que j'ai cru comprendre. Bien

10 sûr que ce n'est pas vrai, comme tout ce qu'il a dit ne correspond pas à

11 la vérité. Moi, je ne suis jamais allé à Nova Forma avec M. Agnes. Je n'y

12 suis allé qu'une seule fois, c'était à l’occasion d'une fête. Ils avaient

13 fêté une année d'existence et j'étais un des invités pour cette cérémonie.

14 Sinon, pour moi, il m’est très compliqué d'aller à Nova Forma puisqu'on ne

15 peut pas y aller directement depuis la ville. Il faut rentrer depuis la

16 rue principale. Il y a un endroit, pour y aller, c'est assez compliqué

17 pour moi.

18 Mme Paterson (interprétation). - Donc, monsieur Simic, sur tous

19 les endroits qu'auraient pu soit agir M. Agnes pour nous dire qu'il vous

20 avait rencontré à cet endroit, à Bosanski Samac, nous nous trouvons donc

21 face à une coïncidence absolument extraordinaire : le fait justement qu'il

22 ait choisi de nous dire qu'il vous avait rencontré à Nova Forma où il se

23 trouve que vous avez travaillé. C'est ce que vous affirmez ?

24 M. Simic (interprétation). - Eh bien j'affirme que j’entretiens

25 des relations d’affaires avec toutes les entreprises de Samac. Il n’y a

 

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1 pas d'entreprise, à Samac, qui n'entretiennent pas de relations d'affaires

2 avec mon imprimerie. On a des clients plus ou moins importants mais, moi,

3 mon fonds de commerce se trouve à Samac. Donc si vous enquêtez au sujet de

4 n'importe quelle entreprise à Samac, vous allez finir par voir que nous

5 avons des relations d'affaire. Tout cela dépend de sa source

6 d'informations en ce qui concerne M. Agnes. Peut-être qu'il se fonde sur

7 les ouï-dire, les rumeurs ?

8 Moi aussi, il y a une autre relation que j'ai eue avec

9 Nova Forma. Moi, j'ai été membre du comité executif de l'entreprise

10 Buducnost au moment où M. Marjan Micic, qui faisait partie de cette

11 société, la société d'Etat, on lui avait donné les locaux qui sont devenus

12 des locaux de Nova Forma.

13 Donc moi j'ai été dans le comité executif de cette autre société

14 et Marjan Micic, c'est un ami à moi, que je connais depuis la guerre, et

15 nous avons travaillé ensemble avant la guerre dans la même entreprise.

16 Lui, il était directeur financier et moi, j'étais directeur technique.

17 Maintenant, c'est lui le propriétaire de Nova Forma. Tout le monde sait

18 qui est le propriétaire de Nova Forma. C’est enregistré dans un Tribunal,

19 le Tribunal de commerce, et cela se sait. Ce n'est pas vraiment important

20 de savoir ce que M. Agnes dit.

21 Il faut que, pour vous, ce soit écrit formellement, quelque

22 part, dans un registre.

23 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, vous avez

24 entendu qu'il a été dit, lors des dépositions, que M. Agnes n'est pas

25 originaire de Bosanski Samac, mais de Bihac en Bosnie. Avez-vous eu

 

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1 connaissance de cette déposition ?

2 M. Simic (interprétation). – Oui.

3 Mme Paterson (interprétation). – Et vous avez également entendu

4 les informations selon lesquelles, le 17 avril, M. Agnes a été arrêté,

5 puis détenu dans un camp jusqu'en décembre, moment où il a rejoint les

6 rangs de l'armée des VRS, jusqu'en octobre, moment auquel il est allé en

7 Serbie. Vous avez entendu les dépositions qui vont dans ce sens, n'est-ce

8 pas ?

9 M. Simic (interprétation). - Oui, je les ai entendues, mais je

10 ne me souviens plus de toutes les dates dont vous venez de parler.

11 Mme Paterson (interprétation). - Donc vous êtes en train de nous

12 dire que M. Agnes qui n'était même pas de Bosanski Samac et qu'il n'y a

13 même pas séjourné longtemps, a fait beaucoup d'efforts pour étudier ce qui

14 se passait à Bosanski Samac, savoir à qui appartenait la compagnie Nova

15 Forma, etc., pour trouver le meilleur endroit où prétendre vous avoir

16 rencontré ?

17 M. Simic (interprétation). - Pour autant que je sache, lors de

18 sa déposition, il n'a pas vraiment parlé de cela. A aucun moment il n'a

19 parlé du propriétaire de Nova Forma. Peut-être que vous pensez le

20 contraire, mais il n'a jamais parlé de cela. Et je ne sais pas d'où il

21 tient ces informations et je ne peux pas vous le dire, mais en tout cas ce

22 sont des informations erronées et cela ne m'intéresse pas d'ailleurs, et

23 je pense que vous vous pouvez aussi vous en convaincre très facilement.

24 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, est-ce que dans

25 le cadre de votre entreprise d'imprimerie, ou d'une autre entreprise avec

 

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1 laquelle vous avez travaillée, est-ce qu’il vous est arrivé d'avoir un

2 bureau dans un immeuble qui s'appelle Spomen Dom ?

3 M. Simic (interprétation). - Oui.

4 Mme Paterson (interprétation). - Et vous avez également entendu

5 M. Agnes nous dire qu'il vous avait rencontré au moins à une reprise dans

6 cet immeuble ?

7 M. Simic (interprétation). - Quand ? Quand nous nous sommes

8 rencontrés à Spomen Dom ?

9 Mme Paterson (interprétation). - Je ne sais pas si je dispose de

10 cette information précise, mais vous souvenez-vous que M. Agnes nous à dit

11 vous avoir rencontré au moins une fois dans cet immeuble appelait Spomen

12 Dom ?

13 M. Simic (interprétation). - Oui, je me souviens qu'il l'a dit,

14 mais le problème, c'est Simic. C'est que mon bureau à l'époque n'était pas

15 à Spomen Dom. Lui, il dit que nous nous sommes rencontrés à Spomen Dom,

16 mais le fait est qu'à ce moment-là, moi, je n'avais pas mon bureau à

17 Spomen Dom. Il ne m'a jamais rencontré, je ne l'ai jamais vu où que ce

18 soit et surtout pas à Spomen Dom.

19 Si vous pouvez le vérifier, essayez de le vérifier.

20 Mme Paterson (interprétation). - Avez-vous un parent, je ne sais

21 pas si c'est un parent éloigné ou proche, qui s'appelle Simiom Simic ?

22 M. Simic (interprétation). – Oui. Simeom Simic, c'est un cousin

23 proche. C'est mon cousin, l'enfant de mon oncle.

24 Mme Paterson (interprétation). - Est-ce que, lui aussi, il a un

25 bureau à l'immeuble Spomen Dom ?

 

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1 M. Simic (interprétation). - Il est directeur de l'entreprise

2 d'Etat qui s'appelle Duga et qui se trouve à Spomen Dom. Donc il est le

3 directeur de l'entreprise qui se trouve à Spomen Dom.

4 Mme Paterson (interprétation). - Donc apparemment, nous nous

5 trouvons une fois de plus devant une coïncidence remarquable.

6 Monsieur Agnes nous dit qu'il vous a rencontré dans l'immeuble Spomen Dom

7 où il se trouve que vous, vous aviez un bureau, et où il se trouve

8 également qu'un de vos cousins a toujours un bureau aujourd'hui.

9 M. Simic (interprétation). - Je ne vois pas quel rapport avec

10 mon cousin. Il travaille là-bas depuis un moment, et moi aussi j'avais un

11 bureau là-bas puisque je suis retourné depuis à Spomen Dom.

12 Vous m'avez dit que je suis connu à Samac à cause d'un accident.

13 Moi, j'ai dit non à cause de deux faits malheureux. Et puisque je suis

14 connu, ce n'est pas difficile d'apprendre où je me trouve puisque moi je

15 travaille pour beaucoup de compagnies.

16 Mais voyez, le problème pour M. Agnes, c'est que mon imprimerie

17 a déménagé plusieurs fois, à plusieurs reprises entre Buducnost et Spomen

18 Dom, donc entre deux locaux différents et, lui, il ne peut pas se rappeler

19 exactement de la date où nous étions par exemple à Spomen Dom, alors que

20 moi je m'en souviens très bien. Je me souviens très bien de ces dates. Et

21 M. Agnes a mélangé les dates, il ne s'en souvient plus. Et au moment où je

22 travaillais à Buducnost, lui dit que je travaillais à Spomen Dom, donc

23 vice-versa.

24 M. le Président (interprétation). - Monsieur Simic, vous êtes en

25 train de rendre la vie un petit peu difficile aux interprètes. Je vous

 

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1 demanderai de ralentir un petit peu, s'il vous plaît.

2 M. Simic (interprétation). - Je m'excuse, Monsieur le Président,

3 je vais m'y efforcer. Voilà, j'ai répondu à votre question.

4 Mme Paterson (interprétation). - Donc, vous venez de nous dire

5 que vous avez, au jour d'aujourd'hui, de nouveau un bureau ou des bureaux

6 dans cet immeuble Spomen Dom ?

7 M. Simic (interprétation). - Oui.

8 Mme Paterson (interprétation). - Et à quel moment avez-vous de

9 nouveau loué des bureaux dans cet immeuble Spomen Dom ?

10 M. Simic (interprétation). - Vers la fin du mois de mars ou

11 début avril de cette année.

12 Mme Paterson (interprétation). - Donc fin avril, début mars...

13 Ou plutôt fin mars début avril, c'est ce que vous nous avez dit ?

14 M. Simic (interprétation). - Moi, j'ai dit vers la fin du mois

15 de mars ou bien au début du mois d'avril. C'est ce qu'il me semble. Mais

16 il faudrait que je vérifie dans le document que j'ai à la maison puisque

17 j'ai les contrats de location et je pense que ceci se fondant sur ces

18 contrats peut être déterminée avec précision.

19 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur Simic, M. Agnes s'est

20 manifesté auprès du Tribunal indirectement au début 1999. Donc vous nous

21 dites que vous avez de nouveau loué des bureaux dans l'immeuble Spomen Dom

22 avant que M. Agnes ne quitte Bosanski Samac et ne se présente au Tribunal

23 pour y faire les allégations que nous connaissons ?

24 M. Simic (interprétation). - J'ai dit à quel moment je suis

25 revenu à Spomen Dom, et cela n'a rien à voir avec M. Agnes. Je ne vois pas

 

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1 quel rapport cela a avec M. Agnes. Moi je me souviens de la date où nous

2 avons déménagé de Buducnost à Spomen Dom.

3 Mme Paterson (interprétation). - Je sais que vous nous avez dit

4 qu'en août 1998 vous êtes allé au Monténégro où vous avez suivi un

5 programme de rééducation.

6 M. Simic (interprétation). - Oui.

7 Mme Paterson (interprétation). - Et je crois qu'en septembre,

8 vous étiez ici même à La Haye où vous avez passé quelques jours dans le

9 cadre d'une autre procédure, n'est-ce pas ?

10 M. Simic (interprétation). - Oui.

11 Mme Paterson (interprétation). - Mais donc pour ce qui est des

12 mois d'octobre, novembre et décembre 1998, est-ce que pendant ces mois-là

13 vous étiez à Bosanski Samac ?

14 M. Simic (interprétation). - Oui, bien sûr.

15 Mme Paterson (interprétation). - Et en 1999, est-ce qu'en

16 janvier, février et mars, vous étiez à Bosanski Samac ?

17 M. Simic (interprétation). - Bien sûr. Où pourrais-je être

18 d'autre ?

19 Mme Paterson (interprétation). - Je sais que vous niez avoir

20 jamais rencontré M. Agnes, mais en fait vous étiez à Bosanski Samac

21 pendant cette période de six mois où il affirme vous avoir rencontré à

22 plusieurs reprises. N'est-ce pas exact ?

23 M. Simic (interprétation). - C'est exact que j'ai été à Bosanski

24 Samac puisque j'ai respecté l'ordonance de ce Tribunal et je n'ai pas

25 quitté Bosanski Samac, respectant l'ordre de ce Tribunal, l'ordonnance de

 

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1 ce Tribunal.

2 Mme Paterson (interprétation). - Un moment s'il vous plaît. Je

3 n'ai plus d'autres questions, Monsieur le Président.

4 M. le Président (interprétation). - Maître Haynes, souhaitez-

5 vous poser des questions supplémentaires au témoin ?

6 M. Haynes (interprétation). - Non.

7 M. le Président (interprétation). - Monsieur Simic, vous en avez

8 fini de votre déposition. Vous pouvez disposer.

9 M. Simic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président,

10 Monsieur le Juge.

11 (M. Simic regagne le banc des accusés.)

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14 M. le Président (interprétation). - Maître Haynes, où en sommes-

15 nous ?

16 M. Haynes (interprétation). - Je souhaite maintenant verser au

17 dossier un classeur de documents. Je dispose d'un exemplaire pour chacun

18 des Juges.

19 M. le Président (interprétation). - Et pour l'accusation

20 également ?

21 M. Haynes (interprétation). - Ces documents ont été mis à

22 disposition de l'accusation il y a déjà quelques jours.

23 (Les documents sont remis aux Juges.)

24 Si vous me permettez, je vais vous expliquer de quoi il s'agit

25 rapidement.

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1 Dans la première partie de ce dossier, vous trouverez la

2 totalité des éléments de preuve documentaires déposés par la défense au

3 cours de cette procédure. Vous trouverez un sommaire à la deuxième page

4 qui donne une description des documents et donne la pagination des

5 documents, aussi bien dans la version serbe que dans la version anglaise.

6 On trouve également, dans la deuxième colonne, la date à laquelle ces

7 documents ont été déposés.

8 La deuxième partie de ce dossier porte le titre : "Faits

9 reconnus ou admis". Je me suis entretenu avec M. Ryneveld à ce sujet et

10 l'accusation est en train d'étudier sa position à ce sujet. La plupart de

11 ces faits ont été communiqués à l'ensemble des parties il y a déjà trois

12 mois. On leur a demandé d'y répondre, et seul M. Brashich y a répondu,

13 mais la position de l'accusation est la suivante. Si j'ai bien compris,

14 ils ne sont pas prêts à accepter tous ces faits, à l'exception des quatre

15 premiers, mais ils admettent que les documents qui se trouvent dans la

16 première partie viennent à l'appui de ces faits.

17 Je pense donc qu'il vaudrait mieux intituler ce document :

18 « Etat des faits », plutôt que : « Faits admis".

19 Mme Paterson (interprétation). - Oui, cela correspond à la

20 situation. En ce qui concerne la deuxième partie du document qui

21 s'intitule : « Faits admis" ou "reconnus", nous n'avons aucune difficulté,

22 mais en ce qui concerne la section 2 et les points 5 à 7, nous n’avons

23 aucune manière d'aller vérifier et de les reconnaître. Mais nous ne nous

24 opposons pas à ce que cela soit versé au dossier et que les Juges

25 accordent à chacun de ces documents le poids qu'il convient de leur

 

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1 accorder.

2 M. le Président (interprétation). - Donc si j'ai bien compris,

3 vous souhaitez changer le titre et dire : « Présentation des faits" plutôt

4 que "Faits admis".

5 M. Haynes (interprétation). - Oui. D'ailleurs, je vous serais

6 reconnaissaient de me dire quelle doit être la pratique qui doit être

7 adoptée pour ce document.

8 M. le Président (interprétation). - Ce n'est pas nécessaire.

9 Vous demandez en effet le versement au dossier.

10 M. Haynes (interprétation). - Merci. Ce qui nous amène à la

11 troisième partie du dossier.

12 M. Hunt (interprétation). - Je vous interromps. Mais on ne

13 trouve pas, ici, l'entretien qu'a eu M. Simic dans lequel il dit qu'il a,

14 en effet, été à l'école élémentaire. Je croyais que vous alliez traiter de

15 la question.

16 M. Haynes (interprétation). - Je suis en train d'y travailler.

17 J'ai essayé hier soir de trouver une copie de la transcription de cet

18 entretien. Je l'ai obtenu de la part du conseil de la défense dans

19 l'affaire principale, mais il y a beaucoup d'annotations sur cet

20 exemplaire.

21 M. Hunt (interprétation). - Mais j'imagine qu'il est possible de

22 trouver un exemplaire qui ne porte pas d'annotations.

23 M. Haynes (interprétation). - Je vais m'efforcer de le faire le

24 plus rapidement possible.

25 Mme Paterson (interprétation). - Si vous nous donnez un petit

 

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1 peu de temps pendant la pause, je serai en mesure d'imprimer un exemplaire

2 de ce document à partir de mon ordinateur.

3 M. le Président (interprétation). - Merci.

4 M. Zecevic (interprétation). - Moi, j'avais compris que ce

5 document devait être expurgé, sauf pour les passages dans lesquels il

6 reconnaît avoir été à l'école primaire.

7 M. le Président (interprétation). - En effet.

8 M. Haynes (interprétation). - C'est ce que j'ai l'intention de

9 faire.

10 Mme Paterson (interprétation). - L'entretien s'est passé de la

11 façon suivante : M. Simic a pu nous dire ce qu'il avait à nous dire sans

12 être interrompu. Ce document comporte quatre pages de transcription. Je

13 crois que c'est au début de la troisième page de cette partie de sa

14 déclaration qu'il nous dit : "Nous sommes allés à l'école primaire et nous

15 y sommes restés entre 11 heures et midi ".

16 Est-ce que cela vous suffit ou est-ce qu'il faut que je vous

17 communique les quatre pages de la déclaration ?

18 M. Hunt (interprétation). - Je pense qu'il convient de vous

19 entretenir à ce sujet avec M. Haynes. Mais nous ne souhaitons pas avoir

20 autres choses que ce qui explique le contexte dans lequel ceci a été

21 communiqué.

22 Mme Paterson (interprétation). - J'en discuterai avec Me Haynes

23 pendant la pause.

24 M. Haynes (interprétation). - Ceci nous amène à la quatrième

25 partie de ce dossier et la question bien difficile des affidavits. Au

 

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1 terme de l'ancien article du Règlement, je pense que les éléments de

2 preuve apportés par Spasoje Pisarevic sont recevables par ce Tribunal. Il

3 s'agit d'une déclaration signée, qui est recevable. Dans le cadre de la

4 législation serbe, c’est considéré comme une déclaration.

5 D'autre part, cela est reconnu par la convention de La Haye de

6 1933, donc je n'ai pas besoin d'insister sur le fait que, dans le système

7 juridique yougoslave, il n'y a pas d’affidavits comme nous les connaissons

8 dans les systèmes de Common law, mais il y a un système de déclaration. Je

9 vois que Mme Paterson se lève ?

10 Mme Paterson (interprétation). - Pour accélérer les choses, hier

11 nous avons dit très clairement que nous n'avions absolument aucune

12 objection à ce que ce document soit versé au dossier. Nous sommes tout à

13 fait prêts à ce que cela soit fait pour qu'il soit soumis à l'examen des

14 Juges.

15 M. Haynes (interprétation). - Oui, mais en dépit des concessions

16 qui ont été faites hier, ce qui me préoccupait, c'est que par le passé, la

17 Chambre avait dit que ce document n'avait pas la forme appropriée. Si

18 maintenant, c'est le cas, à ce moment-là, je demande le versement au

19 dossier de ce document avec tous les autres documents.

20 M. Hunt (interprétation). - La concession n'a pas trait à la

21 forme du document, mais au fait que vous ayez le droit ou non de demander

22 le versement au dossier.

23 M. Haynes (interprétation). - Oui, mais moi je souhaite vraiment

24 que ce document soit considéré comme un document recevable, et non pas

25 comme un document quelconque. Donc voici l'ensemble des éléments de preuve

 

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1 que la défense souhaite présenter dans cette procédure.

2 M. le Président (interprétation). - Madame Paterson ?

3 Mme Paterson (interprétation). - J'ai une question à poser. Nous

4 aussi, nous disposons d'un dossier qui ressemble à celui de Me Haynes et

5 qui contient toutes les déclarations de M. Agnes et qui, je crois, ont été

6 versées au dossier en tant qu'éléments de preuve de la défense. Je

7 voudrais savoir si cela, ces éléments sont versés au dossier, s'ils sont

8 recevables ?

9 M. le Président (interprétation). - Oui, nous avons pris une

10 décision à ce sujet, n'est-ce pas, madame la Greffière ?

11 Mme Ameerali (interprétation). - Toutes les déclarations du

12 témoin Agnes à l'accusation ont été versées au dossier et figureront sur

13 la liste.

14 M. le Président (interprétation). - Maître Haynes ?

15 M. Haynes (interprétation). - Il y a une question d'importance

16 qui est celle du transcript modifié de la conversation téléphonique qui

17 devient maintenant la pièce à conviction 1-A. Toutes les autres copies, je

18 pense, doivent être éliminées du dossier.

19 M. le Président (interprétation). - Cela fera donc partie des

20 éléments de preuve. Ce sera une pièce à conviction, mais cela ne change

21 rien aux autres éléments soumis auparavant, dont le versement a été

22 demandé avant.

23 M. Haynes (interprétation). - Eh bien, cela m'ennuie un petit

24 peu parce que je n'ai pas lu le rapport du service de traduction qui a

25 pourtant son importance. En effet, le fait important, c'est que la ligne

 

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1 la plus cruciale de la transcription de cette conversation téléphonique

2 entre M. Agnes et M. Avramovic, nous dit-on aujourd'hui est

3 inintelligible.

4 M. le Président (interprétation). - Oui, mais nous admettrons ce

5 document.

6 M. Haynes (interprétation). - Oui, mais cela signifie, Monsieur

7 le Président, que le document 1-A original était un document erroné, une

8 traduction fausse.

9 M. le Président (interprétation). - C'est à nous qu'il incombe

10 d'en décider.

11 M. Haynes (interprétation). - Nous en avons débattu longuement

12 hier.

13 M. Hunt (interprétation). - C'est pourquoi ce document doit être

14 versé au dossier, car la vérité ou l'absence de vérité que nous

15 attacherons à ce document est une décision qui nous appartient à nous, les

16 Juges de cette Chambre. Mais soyez assurés que si les spécialistes de la

17 traduction nous disent qu'ils ne peuvent pas se prononcer entre une

18 traduction et l'autre, nous ne tiendrons pas compte de ce document. Nous

19 tiendrons compte de ce que nous dirons les responsables du service de

20 traduction. Cela semble du bon sens simple. Mais exclure une pièce à

21 conviction sur cette base n'est pas l'objet du débat.

22 M. Haynes (interprétation). - Et bien cela dépend tout de même,

23 puisqu'il a fallu demander une nouvelle traduction, nous aimerions que

24 vous nous apportiez une réponse définitive.

25 M. Hunt (interprétation). - Nous ne sommes pas un jury, donc

 

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1 permettez nous d'en décider en tant que Juges.

2 M. Haynes (interprétation). - Certainement.

3 Je demande que ce document soit enregistré sous la cote 1-C,

4 sous réserve d'une décision définitive au sujet du passage particulier de

5 la transcription.

6 M. Brashich (interprétation). - Monsieur le Président, puisque

7 nous parlons des éléments de preuve, je me demandais si je pouvais me

8 permettre, sans nuire exagérément à la suite de ces débats, de vous

9 demander l'autorisation de quitter le prétoire maintenant, car je dois

10 être au Tribunal demain à New York et je crois que M. Pantelic est dans la

11 même situation assez désagréable que moi, donc nous demandons cette

12 autorisation aux Juges de cette Chambre.

13 M. le Président (interprétation). - Maître Brashich, oui, vous

14 pouvez vous retirer et je vous rappelle tout de même que, bien entendu,

15 vous serez informé de la suite de nos débats ici car l'affaire à laquelle

16 vous allez participer à New York demain n'a rien à voir avec la nôtre.

17 M. Brashich (interprétation). - Je vous rappelle que j'ai

18 également parlé au nom de M. Pantelic de façon à ne pas faire double

19 emploi.

20 M. le Président (interprétation). - Monsieur Pantelic aussi,

21 vous pouvez partir.

22 M. le Président (interprétation). - En fait tous les conseils de

23 la défense qui souhaitent quitter le prétoire peuvent le faire

24 actuellement, sauf ceux qui ont un rapport étroit avec le reste de nos

25 débats.

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1 (Monsieur Braschich et M. Pantelic quittent le prétoire.)

2 M. le Président (interprétation). - Madame Paterson ?

3 Mme Paterson (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Je

4 voulais simplement informer les Juges de cette Chambre, étant entendu que

5 j'ai pris note de votre demande quant à la possibilité de terminer ce

6 soir.

7 Je tiens à vous dire qu'après examen à plusieurs reprises de la

8 durée possible de mes conclusions, je pense que mes réquisitions dureront

9 à peu près une heure et je tâcherai de me limiter à cette durée.

10 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez également

11 soumettre vos réquisitions par écrit.

12 Mme Paterson (interprétation). - Oui, Monsieur le Président,

13 mais pour l'instant je n'ai par écrit qu'un plan, donc je ne pensais pas

14 déposer un document écrit.

15 Si vous voulez bien m'accorder quelques instants de patience, je

16 vais m'efforcer de m'en tenir aux limites de temps que je viens

17 d'indiquer.

18 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez poursuivre,

19 Madame Paterson.

20 Mme Paterson (interprétation). - Monsieur le Président,

21 Messieurs les Juges, la question qui se pose à vous consiste à déterminer

22 si M. Avramovic et M. Simic ont menacé, intimidé, lésé, corrompu ou fait

23 pression d'une autre façon sur un témoin potentiel, plus précisément

24 l'homme dénommé M. Agnes, devant ce Tribunal ?

25 Par sa nature même, ce crime a été commis à huis clos, donc la

 

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1 plus grande partie de nos débats ici se concentrera sur un élément, à

2 savoir la crédibilité des trois témoins les plus importants dans cette

3 affaire : M. Avramovic, M. Simic et M. Agnes.

4 En vous prononçant sur ce point, il est tout à fait capital que

5 vous accordiez l'attention nécessaire à la crédibilité de ces témoins et

6 notamment aux motivations qui les ont poussés à se présenter devant vous

7 pour témoigner.

8 Si quelqu'un arrivait dans ces débats en plein milieu de notre

9 procédure, cette personne pourrait penser que les choses sont très

10 complexes car il est question de très nombreuses rencontres, de très

11 nombreux rendez-vous, de dates différentes, de très nombreuses personnes,

12 mais vous, messieurs les Juges, vous avez entendu l'intégralité des débats

13 et vous savez que cette procédure n'est pas très complexe.

14 En effet, elle se résume à une chose : la parole de M. Agnes

15 contre la parole de M. Avramovic et la parole de M. Simic.

16 Oui, effectivement, d'autres témoins ont été cités, mais les

17 témoins dont je viens de parler sont les trois témoins les plus importants

18 dans la présente affaire, et l'un des moyens pour évaluer leur

19 crédibilité, je suis sûr d'ailleurs que vous allez mettre ce moyen en

20 application, est celui dont je vais parler à présent.

21 Mais je souligne d'emblée que dans la présente affaire, la

22 motivation des témoins pour venir s'exprimer ici et dire ce qu'ils ont dit

23 est extrêmement importante. Il importe que nous nous posions la question

24 de savoir ce que M. Agnes avait à perdre ou à gagner en venant ici relater

25 les faits qu'il a relatés.

 

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1 Par ailleurs, quelles étaient les motivations de M. Avramovic

2 pour nous donner la version qu'il nous a donnée et finalement quelles

3 étaient les motivations de M. Simic pour déposer comme il l'a fait ?

4 Finalement, la dernière question sur laquelle les Juges de cette

5 Chambre vont avoir à se prononcer consiste à se demander si M. Agnes s'est

6 porté volontaire pour témoigner en faveur de M. Milan Simic ou s'il y a

7 été contraint, ou en tout cas si quelqu'un s'est efforcé de le contraindre

8 à témoigner ainsi en faveur de M. Simic.

9 Commençons, si vous le voulez bien, par M. Agnes.

10 Vous l'avez vu, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous

11 l'avez entendu déposer pendant plusieurs jours. Vous êtes au courant du

12 fait qu'il s'est trouvé à La Haye en tant que témoin protégé depuis le

13 mois de mai et qu'il a fallu attendre novembre pour qu'il témoigne, donc

14 8 mois à peu près se sont écoulés avant sa déposition. Vous l'avez entendu

15 vous dire qu'il a laissé sa famille derrière lui en Serbie et qu'il a pris

16 lui-même la décision de quitter la Serbie pour se présenter au Tribunal en

17 s'adressant à la Sfor à Brcko.

18 Vous l'avez entendu dire qu'il avait peur de venir à La Haye,

19 qu'il était très préoccupé par rapport à sa sécurité personnelle et celle

20 de sa famille, ce qui a été corroboré par un autre enquêteur de

21 l'accusation, M. Tore Soldal, qui nous a dit que M. Agnes, ce jour-là,

22 s'était adressé à la Sfor et qu'à son avis M. Agnes était très inquiet.

23 Monsieur Agnes vous a dit qu'en dépit de ses craintes, la seule

24 chose qu'il a demandé au Tribunal, c'était de lui accorder des garanties

25 de sécurité. Il n'a pas demandé un emploi, il n'a pas demandé de l'argent.

 

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1 Il n'a même pas demandé y compris à ce moment-là d'être réinstallé dans un

2 autre pays.

3 Et finalement, lorsque des mesures de protection lui ont été

4 accordées, il a été convenu qu'il serait réinstallé dans un pays étranger,

5 mais en tout cas la seule chose qu'il a demandé, la seule chose qu'on lui

6 a promise au départ ce sont des mesures de sécurité. La seule chose qu'il

7 voulait, c'était pouvoir s'exprimer en sécurité et garantir la sécurité de

8 sa famille.

9 Quelles étaient ses motivations ? Ses motivations, c'était

10 retrouver le contrôle de sa vie. Nous savons désormais pourquoi il s'est

11 proposé en tant que témoin.

12 Examinons la teneur de son récit, de sa déposition.

13 J'admets que M. Agnes n'était pas un témoin idéal. Il y a eu des

14 moments où il était très difficile, frustré, fâché. Mais d'autres moments

15 où il a été un témoin très crédible. Vous l'avez vu devant vous ici, vous

16 avez pu constater ses émotions. Ses émotions, il ne les a pas gardées pour

17 lui. Il était tout tout à fait possible de savoir quand il était fâché,

18 quand il était frustré, quand il était scandalisé par certaines des

19 allégations de la défense.

20 Depuis le début, il a en fait y compris reconnus un certain

21 nombre de choses le concernant qui n'étaient pas très positives. Monsieur

22 Soldal vous a dit que dès sa première audition par le Bureau du Procureur,

23 M. Agnes a parlé au Bureau du Procureur de cet événement malheureux où le

24 fusil de M. Agnes a été déchargé et a blessé une jeune fille. Il a admis,

25 en tant que Musulman, avoir rejoint les rangs de l'armée de la Republika

 

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1 Srpska dans laquelle il a servi pendant plusieurs mois.

2 Il a admis auprès de M. Soldal qu'il a utilisé plusieurs noms,

3 alors qu'il était en Serbie. Et lorsqu'il a été confronté à l'infâme sac

4 de voyage bleu, il a admis qu'il lui appartenait, il n'a fait aucun effort

5 pour le cacher. Il a admis également avoir laissé certaines choses

6 secrètes, ne pas avoir tout dit dans ses déclarations, sur certains points

7 il a donné des détails, sur d'autres il été très évasif.

8 Mais, là encore, il a expliqué pourquoi. Il a parlé de sa

9 crainte. Il a dit qu'il souhaitait d'abord s'assurer que les mesures de

10 protection et de sécurité lui seraient accordées par le Tribunal et,

11 lorsqu'il a eu ces garanties, il a commencé à donner des détails de plus

12 en plus nombreux et de plus en plus importants, y compris sur ses

13 rencontres avec Milan Simic.

14 Donc, messieurs les Juges, à la lecture et à l'examen de ses

15 déclarations, vous verrez qu'il s'inquiétait pour sa protection, mais

16 également pour celle de sa famille et de ses amis.

17 Il a même essayé de protéger Jasna et son père. Vous savez que

18 Jasna est venue ici témoigner pour la défense. Eh bien, M. Agnes a tout de

19 même essayé de garder son nom en dehors des débats, le plus possible.

20 Vous vous rappellerez qu'au cours du contre-interrogatoire,

21 M. Haynes a remis en cause un grand nombre des choses affirmées par

22 M. Agnes en tentant de montrer que ce que M. Agnes a fait était mal et

23 qu'il était prêt à faire n'importe quoi pour se protéger quand il avait

24 peur.

25 Mais si l'on regarde les choses dans le détail, on se rend

 

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1 compte que ce qu'il a fait aurait été fait pratiquement par n'importe qui.

2 Maître Haynes affirme que pour M. Agnes, c'était terrible d'avoir quitté

3 la Serbie. Or il a quitté la Serbie, entre autre chose, pour éviter d'être

4 mobilisé dans les rangs de l'armée de la République fédérale de

5 Yougoslavie au moment des combats au Kosovo. Bien entendu, des centaines,

6 sinon des milliers de jeunes gens, ont quitté pour ne pas être mobilisés

7 et ne pas combattre au Kosovo.

8 Monsieur Agnes a fait son temps dans l'armée, il a fait son

9 temps dans un camp de détention en Bosnie et il n'éprouvait aucun désir de

10 se trouver dans les rangs de quelque armée que ce soit, à quelque moment

11 que ce soit à l'avenir.

12 Oui, en effet M. Agnes a changé de nom. L'a-t-il fait légalement

13 ou pas ? Où est la différence ? Il l'a fait pour des raisons très

14 concrètes. C'était un Musulman qui habitait en Serbie et, comme son oncle

15 l'a déclaré, il était plus facile pour lui dans le quotidien d'adopter un

16 nom serbe, donc c'était une solution tout à fait appropriée et concrète

17 dans de telles circonstances.

18 Maître Haynes a également fait référence au fait qu'à partir du

19 moment où il est rentré dans les rangs de l'armée de la Republika Srpska,

20 il a tout fait pour en sortir. Bien sûr, il voulait en sortir ! Il n'avait

21 pas envie d'y rentrer au départ. La seule raison pour laquelle il y est

22 rentré, c'est pour éviter des travaux plus difficiles, c'est-à-dire des

23 travaux forcés. Et bien sûr, il a profité de toutes les occasions qui

24 pouvaient lui être données pour en sortir.

25 Monsieur Agnes, lui, a parlé d'un certain nombre de choses qui

 

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1 peuvent être très contestables. Une question se pose au sujet de la

2 déposition qu'il a faite au sujet de son oncle. Est-ce que son oncle a,

3 oui ou non, versé de l'argent pour le faire sortir de la VRS ?

4 Monsieur Agnes a dit, dans sa déposition, que son oncle avait

5 effectivement donné de l'argent à quelqu'un dont il pensait qu'il pouvait

6 le faire sortir de l'armée. Et quand il est venu témoigner, ici,

7 oralement, alors qu'il l'avait dit dans sa déclaration écrite, il a eu des

8 difficultés à le reconnaître. Mais il a eu ces difficultés parce que cela

9 a été présenté par la défense comme une forme de corruption. Son oncle

10 avait agi ainsi parce qu'il s'inquiétait du bien-être de M. Agnes et

11 M. Agnes n'avait pas envie d'entendre cela qualifié comme étant une forme

12 de corruption puisque c'est quelque chose que son oncle faisait en sa

13 faveur. Mais il souhaitait effectivement quitter l'armée et il a admis que

14 son oncle avait tout fait pour l’aider.

15 Maître Haynes a également fait allusion au fait que M. Agnes

16 était peut-être un criminel recherché et qu'il avait fui des poursuites

17 chez lui en se présentant ici.

18 Mais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si cela était

19 vrai, la Republika Srpska aurait sans doute fait savoir qu'un mandat

20 existait, un mandat d'arrêt contre M. Agnes. Or à ma connaissance, jusqu'à

21 présent, la Republika Srpska ne l'a pas fait.

22 Maintenant, ce livret militaire dont nous avons beaucoup

23 parlé... Il n'est pas nécessaire d'y revenir dans le détail. Monsieur le

24 Président, Messieurs les Juges, vous vous rappellerez le détail des

25 dépositions faites à ce sujet. Monsieur Agnes a nié avec véhémence que ce

 

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1 livret militaire lui appartenait et, manifestement, ce document a été

2 falsifié ou, en tout cas, modifié. Nous pensons que c'est la déposition de

3 M. Agnes qu'il convient de croire sur ce point, à savoir que ce n'est pas

4 un document qui lui appartenait et que ce n'est pas un faux document qu'il

5 aurait utilisé de son propre chef.

6 Et pensez à ce que la défense essaie de faire dans ses

7 arguments, cela n'a pas de sens. La défense essaie de transformer le sac

8 de voyage bleu infâme en une question centrale. Ce sac aurait été laissé

9 dans la maison de Jasna. Selon elle et selon M. Agnes, il aurait été

10 laissé chez des amis à Brcko. Mais comme nous l'avons dit, il convient de

11 prendre quelques instants pour réfléchir aux conditions dans lesquelles

12 tout cela s'est passé.

13 Monsieur Agnes a déclaré qu'il prévoyait de partir. Selon lui,

14 il était sous pression pour témoigner. Il ne souhaitait rien d'autre que

15 de se débarrasser des problèmes et il est inutile d'ajouter qu'il ne

16 souhaitait pas que tout le monde soit au courant de ses plans, de ses

17 plans de départ. Il ne souhaitait pas que M. Simic ou M. Avramovic les

18 connaissent.

19 Alors, dans des conditions de ce genre, qu'est-ce que vous

20 feriez ? Vous laisseriez votre sac auprès de Jasna ou auprès de vos amis ?

21 Moi, je pense que vous le laisseriez auprès de vos amis. Et je ne conteste

22 pas le fait qu'il a essayé de partir. Mais de toute façon, s'il a laissé

23 son sac, est-ce que vous pensez que, dans ces conditions, il aurait laissé

24 sa carte d'identité à l'intérieur ? Cette carte d'identité, il pouvait

25 l'enterrer sous un arbre, la jeter dans la rivière. Cela n'a aucun sens de

 

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1 laisser aussi bien le sac que le livret militaire chez Jasna.

2 Mais il vous a fourni des explications. Il vous a dit avoir

3 laissé ce sac chez des amis à Brcko et s'être adressé à la Sfor. Et il

4 pensait que s'il arrivait auprès de la Sfor avec son sac et tous ses

5 objets personnels, il pourrait avoir l'air suspect. Il ne savait pas, il

6 l'a dit dans sa déposition, si la Sfor n'allait pas l'arrêter, s'ils

7 allaient croire ce qu'il avait à dire au sujet du Tribunal. Il pensait que

8 si la Sfor n'acceptait pas ses dires, s'il était renvoyé chez lui, eh bien

9 au moins, il pourrait retrouver son sac chez ses amis. S'il avait laissé

10 son sac chez Jasna, se serait-il adressé à la Sfor, risquant de ne pas

11 être accepté par la Sfor, pour ensuite devoir retourner chez Jasna, lui

12 expliquer d'où il venait et paraître encore plus suspect ?

13 Moi, je dis que tout ce qui a été affirmé par la défense n'a

14 aucun sens et que ce sont les propos de M. Agnes qu'il convient de croire

15 au sujet de ce sac de voyage bleu.

16 M. le Président (interprétation). - Madame Paterson, il faut que

17 nous ménagions une pause à 16 heures. Donc tenez en compte.

18 Mme Paterson (interprétation). - J'aimerais arriver à la fin de

19 ce sujet.

20 M. Hunt (interprétation). - Mais n'allez pas trop vite car les

21 interprètes se plaignent de votre rapidité d'élocution.

22 Mme Paterson (interprétation). - Je prie les interprètes de

23 m'excuser. Je sais que c'est un de mes problèmes mais je viens de New York

24 et, à New York, nous parlons vite.

25 M. Hunt (interprétation). - Vous parlez vraiment très vite.

 

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1 Mme Paterson (interprétation). - Si vous réfléchissez à

2 l'histoire qui nous a été racontée par M. Agnes et, en fait, il ne s'agit

3 pas d'une histoire mais de la vérité, pourrait-on penser... Eh bien dans

4 mon pays, on dit que l'enfer ou le diable se trouve dans les détails.

5 Chacun sait bien que si l'on veut raconter un mensonge, il est toujours

6 plus simple de raconter quelque chose de simple et de bref.

7 Ce que je dis, c'est que ce sont précisément les détails qui

8 permettent de corroborer le récit M. Agnes. Si M. Agnes avait monté une

9 histoire de toute pièce, si rien de ce qu'il nous a dit n'était vrai,

10 pourquoi aurait-il raconté autant de détails ? Pourquoi ne se serait-il

11 pas contenté de parler d'une seule rencontre où il aurait subi des

12 pressions ? Il lui aurait suffi de dire : « Il y a eu une rencontre où on

13 m'a proposé de l'argent, un appartement et un emploi ». Pourquoi a-t-il

14 dit qu'il y avait eu plusieurs rencontres, dans des lieux différents, en

15 présence de très nombreuses personnes différentes ? Pourquoi a-t-il pris

16 le mal de nous dire qu'une telle rencontre avait eu lieu à l'entreprise

17 Nova Forma, une autre à Spomen Dom, si ce n'était pas vrai ?

18 En nous donnant tant de détails, il s'est simplement mis dans la

19 situation où on allait le contraindre de répéter, de répéter, et de

20 répéter sa déposition. Et je dis que, si l'on compare ses propos devant le

21 Tribunal, au contenu de ses déclarations écrites, il y a cohérence.

22 Rappelez-vous certains des détails qu'il a fournis.

23 Sur chacune des réunions dont il a parlé, il y avait quelque

24 chose de particulier qu'il avait à dire, qui s'était inscrit dans sa

25 mémoire : le moment de la réunion, le lieu de la réunion, les personnes

 

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1 présentes et, quelquefois, y compris les documents qui lui ont été

2 montrés. Rappelez-vous, lorsque nous avons parlé de sa dernière rencontre

3 à Bosanski Sama où est apparu cet homme, Spasoje Pisarevic, rappelez-vous

4 que nous avons parlé de cette liste de noms proposée par M. Pisarevic

5 quand il a demandé à M. Agnes de lui dire tout ce qu'il savait au sujet de

6 ces noms. Monsieur Agnes a répondu : "Je ne peux rien dire car je ne les

7 connais pas, je ne connais que leurs surnoms". A ce moment-là,

8 M. Pisarevic a proposé des explications. Puis, on est ramené dans le

9 bureau de M. Pisarevic.

10 Alors comment est-ce que M. Agnes aurait pu créer tous ces

11 détails de toute pièce, à moins qu'une telle rencontre n'ait réellement eu

12 lieu, à moins qu'il ne se soit réellement rendu dans tous ces lieux.

13 Et que penser des allégations au sujet de la préparation des

14 témoins, de ce qu'a dit M. Agnes à ce sujet ? Cela est confirmé par la

15 bande audio, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Cette bande audio

16 nous apporte de très nombreux détails, à savoir qu'il a été dit à M. Agnes

17 par M. Avramovic qu'il lui faudrait au mois de mai se rendre à Bosanski

18 Samac où il participerait à un programme de préparation des témoins et à

19 des répétitions.

20 Et comme vous le savez, Monsieur le Président, Messieurs les

21 Juges, nous avons entendu cet enregistrement. Monsieur Pantelic a été

22 interrogé à ce sujet, vous avez entendu ce qu'il nous a dit sur ce point.

23 Je vous laisse la possibilité, bien sûr, de déterminer si vous pensez que

24 ce que M. Pantelic a dit est vrai ou pas.

25 En tout cas, à mon avis, les explications de M. Pantelic sont

 

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1 beaucoup plus compliquées et difficiles à croire que celles de M. Agnes.

2 Et tous les détails sont corroborés dans le récit de M. Agnes. Et puis, en

3 outre, M. Agnes n'a rien exagéré dans sa déposition.

4 S'agissant de la question très importante que vous avez posée,

5 Monsieur Bennouna, si je ne m'abuse, vous avez demandé à M. Agnes si

6 M. Avramovic lui avait jamais proféré des menaces directes, s'il l'avait

7 jamais menacé de faire du mal à M. Agnes ou à sa famille, et la réponse de

8 M. Agnes a été : "Non, non, non". Alors imaginez combien il lui aurait été

9 facile de répondre oui à cette question, de dire :

10 "Oui, oui, il m'a menacé directement", mais il n'a pas choisi

11 d'agir ainsi. Il a dit : "Les menaces n'étaient pas directes, n'étaient

12 pas des menaces très importantes. Elles étaient beaucoup plus subtiles,

13 elles se faisaient par voie de coups de téléphone et par l’intermédiaire

14 de personnes qui venaient chez moi et qui me menaçaient de coups de feu.

15 Ce n'étaient pas des menaces directes. M. Avramovic ne m'a pas dit en

16 plein visage : 'Je te menace de ceci ou de cela'.".

17 Il n'a donc pas exagéré ce qu’il nous a dit dans sa déposition.

18 Nous affirmons, du côté de l'accusation, Monsieur le Président, Messieurs

19 les Juges, que M. Agnes a tenu sa promesse. Il est venu ici, il a promis

20 de dire la vérité, il a attendu huit mois pour témoigner, il l'a fait dans

21 des conditions de solitude importantes, il a attendu. Ce n'était pas

22 facile pour lui. Il a témoigné jour après jour. Il a été soumis à des

23 contre-interrogatoires très pénibles. Vous avez pu constater ses émotions

24 qu'il ne cachait pas, et j'affirme, Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges, que tout cela doit être retenu pour porter un jugement positif sur

 

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1 sa crédibilité. Comme je l’ai dit, il a joué son rôle et il a rempli sa

2 promesse.

3 Maintenant, j'en arrive en un autre sujet.

4 M. le Président (interprétation). - Nous allons lever l'audience

5 pendant 20 minutes.

6

7 Suspendue à 16 heures 02, l'audience est reprise à 16 heures 25.

8

9 M. le Président (interprétation). - Madame Paterson, on m'a

10 demandé de vous prier de bien vouloir parler un peu plus lentement

11 indépendamment du lieu dont vous êtes originaire.

12 Mme Paterson (interprétation). - Merci, Monsieur le Président,

13 je ferai de mon mieux.

14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais que nous

15 parlions maintenant de la déposition de M. Neskovic.

16 Comme vous le savez, cette déposition a été brève, mais elle a

17 été significative pour un certain nombre de raisons. En effet, M. Neskovic

18 a confirmé un certain nombre de choses, a corroboré un certain nombre des

19 propos de M. Agnes. Il a confirmé qu'effectivement, il y avait eu une

20 rencontre dans la maison de M. Agnes en septembre, à Sremska Mitrovica.

21 Monsieur Neskovic a admis ne pas avoir été présent lorsque M. Avramovic a

22 parlé à M. Agnes, donc il n'est pas en mesure de nous dire quelle était la

23 teneur de cette conversation. Et M. Neskovic a dit que lorsqu'il a pénétré

24 dans la salle à manger pour voir combien de temps la conversation allait

25 se produire, il les a vus brièvement parler des événements survenus à

 

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1 Bosanski Samac en 1992. Tout cela confirme ce que nous a dit également

2 M. Agnes.

3 Mais je crois que ce qui est un peu ennuyeux dans la déposition

4 de M. Neskovic, c'est que, tout comme M. Vukovic, il souhaite nous faire

5 croire qu'il ne s'intéressait pas non plus à M. Agnes.

6 Monsieur Neskovic a déclaré que la veille de cette rencontre, il

7 avait été retenu pour travailler sur la défense de M. Todorovic.

8 Monsieur Neskovic était ministre de la Justice adjoint de la Republika

9 Srpska, il connaissait la mise en accusation de M. Todorovic et savait que

10 parmi les charges retenues contre M. Todorovic se trouvaient des

11 allégations liées au camp de Bosanski Samac.

12 Or ici, nous sommes en présence de quelqu'un qui a été détenu

13 dans l'un de ces camps et qui, selon la défense, était prêt à coopérer

14 avec la défense. Or M. Neskovic souhaite nous faire croire qu'il ne

15 s'intéressait absolument pas à M. Agnes et qu'il ne s'intéressait pas aux

16 questions qu'il aurait pu poser au sujet de son client. Donc je dis,

17 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, qu'il y a là une séquence

18 d'événements assez difficiles à croire.

19 Mais discutons encore une fois de la déposition de M. Vukovic à

20 présent. Elle a été brève également, mais elle a permis de confirmer et de

21 corroborer certains des éléments contenus dans la déposition de M. Agnes.

22 Vous vous rappellerez qu'il a confirmé deux rencontres qu'il a eues avec

23 M. Agnes, même s'il a été incapable de dire exactement quand ces réunions

24 se sont déroulées et où.

25 Monsieur Vukovic a confirmé qu'il y avait eu au moins une

 

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1 rencontre dans le café Jet set, à Bosanski Samac. Ce qui est très

2 important dans la déclaration de M. Vukovic, c'est la description qu’il a

3 faite de la façon dont il a organisé la défense de M. Simic.

4 M. Vukovic insiste pour dire que M. Agnes, là encore, n'a aucun

5 intérêt en tant que témoin. Si l'on veut bien croire la version fournie

6 par la défense, nous sommes en présence d'un homme qui est prêt à

7 témoigner pour la défense. Monsieur Agnes est prêt à dire, n'est-ce pas,

8 pour commencer qu'il n'a jamais vu Milan Simic dans l’école primaire et,

9 au moins, si M. Simic était bien dans l’école primaire, M. Agnes est prêt

10 à dire qu'il n'a jamais vu M. Simic faire du mal à qui que ce soit.

11 Mais M. Vukovic souhaite nous faire croire que ce témoin n'a

12 absolument pas la moindre importance pour lui et qu'il a immédiatement

13 estimé que ce témoin n'était pas un témoin crédible. Suite à quoi,

14 M. Vukovic dit avoir jeté toutes les notes qu'il a faites au sujet de

15 cette conversation avec M. Agnes. Ce qui est très pratique, semble-t-il,

16 pour le Tribunal, c’est qu’il a décidé également, nous dit-il, de ne pas

17 facturer sa prestation.

18 J'affirme, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que cette

19 séquence d'événements est très difficile à croire et qu'elle permet de

20 remettre en cause la totalité, l'intégralité de la déposition de

21 M. Vukovic.

22 Passons, si vous le voulez bien, à un témoin de l'accusation,

23 Mirsad Sahanic. Vous vous rappellerez que Mirsad Sahanic est un ami de

24 M. Agnes, c'est un policier affecté à Bosanski Samac en avril 1992.

25 Malheureusement pour M. Sahanic, il se trouvait à Bosanski Samac

 

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1 le jour où la ville a été attaquée, le jour où la guerre a commencé. Il a

2 été arrêté et a été maintenu en détention dans un camp pendant quelque

3 temps. Vous avez appris que M. Sahanic était un homme marié, qu'il avait

4 une famille, qu'il avait un travail, qu'il s'occupait de sa vie, qu'il

5 s'occupait de ses affaires et, tout d'un coup, en 1998, il commence à

6 recevoir des appels téléphoniques de Jasna Marusevic et de M. Agnes.

7 Aucun des trois témoins dont j'ai parlé ne remet en cause

8 l'existence de conversations téléphoniques entre Jasna et Mirsad et entre

9 Mirsad et M. Sahanic. La défense essaie de nous faire croire qu'aucune

10 rencontre n'a eu lieu. Quels que soient les événements qui sont survenus

11 pendant ces rencontres, en tout cas la défense ne peut pas remettre en

12 cause l'existence de conversations téléphoniques entre Jasna et Mirsad et

13 entre M. Agnes et Mirsad.

14 Et vous vous rappellerez, Messieurs les Juges, que la déposition

15 de Mirsad correspond assez bien à celle de M. Agnes et même assez bien à

16 celle de Jasna. Il y a quelques divergences avec les premières

17 déclarations de Jasna. Monsieur Sahanic a expliqué en effet que c'est sa

18 mère qui lui avait expliqué que Jasna s’était donné beaucoup de mal pour

19 se rendre à Tuzla et trouver le numéro de téléphone de Mirsad Sahanic.

20 Elle est allée voir sa mère et elle est allée aussi à la police. Elle a

21 fait des efforts absolument extraordinaires pour retrouver le numéro de

22 téléphone de Mirsad et savoir où il était.

23 Les plus grandes contradictions entre le récit de Jasna et celui

24 de Mirsad concernent les événements qui se sont passés le soir de

25 l'arrestation. Jasna aimerait que les Juges croient que Mirsad s'est

 

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1 précipité dans sa maison pour lui demander de s'abriter. Mais Mirsad et

2 M. Agnes, tous les deux, disent que cet événement ne s’est pas produit,

3 qu'ils étaient à l'hôtel, qu'ils ont été réveillés au milieu de la nuit au

4 moment où la guerre a commencé.

5 Que vous dit Mirsad au sujet de ses premières inquiétudes, de

6 ses premières préoccupations ? Il vous dit qu'il s'est préoccupé de sa

7 sécurité parce que des coups de feu étaient tirés contre le bâtiment.

8 L'hôtel était dans un lieu exposé et il a pensé qu'il serait bon d'aller

9 de l'autre côté, dans une autre partie du bâtiment pour s'y abriter.

10 Et puis, Mirsad vous a dit, à un autre moment dans sa

11 déposition, qu'il a pensé aussi que ce qui serait la meilleure solution

12 serait peut-être d'essayer de franchir la rivière pour se rendre en

13 Croatie, mais Mirsad n'a jamais pensé un instant, d'après ce qu'il vous a

14 dit, à assurer la sécurité de Jasna en se précipitant chez elle et en lui

15 disant de s'abriter, Jasna étant son ancienne petite amie.

16 Alors je souligne que Mirsad et Jasna ont peut-être bien eu

17 cette relation qu'ils ont admise tous les deux, mais regardons les choses

18 comme elles sont, s'ils l'ont eue, ils l'ont eue pendant six semaines

19 avant le début de la guerre. Bien sûr, il est possible d'avoir une

20 relation très importante pendant une période aussi courte, mais c'était

21 une relation de six semaines. Ensuite, la guerre a éclaté, ils ne se sont

22 jamais revus et, pour autant que je le sache, ils ne se sont pas encore

23 revus aujourd'hui.

24 Si nous examinons maintenant la déposition de M. Sahanic, il

25 s'occupe de sa vie, il s'occupe de ses affaires en Allemagne. Il n'a pas

 

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1 demandé à être mêlé à cette affaire, il n'a pas demandé à avoir quoi que

2 ce soit à faire dans ce procès. Il dit qu'il a reçu quelques coups de

3 téléphone et sa déposition est entièrement crédible. Comment pouvons-nous

4 savoir que sa déposition est crédible ? Eh bien, pour une raison

5 importante, à savoir que Me Haynes ne lui a posé aucune question en

6 contre-interrogatoire, donc ses propos n'ont pas été contestés.

7 Finalement, il importe de constater qu'il n'y avait aucune motivation pour

8 que Mirsad Sahanic souhaite venir ici et vienne dire autre chose que la

9 vérité.

10 Passons maintenant à la déposition de Jasna Marusevic. L'une des

11 premières choses que Jasna a reconnues, c'est qu'il y avait un rapport

12 très étroit entre elle-même et Milan Simic et son employeur, M. Jankovic.

13 Elle a expliqué que l'épouse de Milan Simic et l'épouse de M. Jankovic

14 étaient soeurs. Donc nous avons ici Jasna qui admet être une amie de

15 Milan Simic, Milan Simic admet qu'ils sont amis. Jasna travaille au café

16 Lotos, dont le propriétaire est un ami à elle et un parent par mariage de

17 M. Simic. Alors est-ce simplement une coïncidence si Jasna est plus que

18 prête à s'impliquer pour aider M. Simic dans sa défense ? Elle est

19 d'accord pour obtenir le numéro de téléphone de son avocat. Elle dit, elle

20 promet qu'elle appellera l'avocat si elle trouve des gens qui peuvent lui

21 être d'une quelconque utilité. Et effectivement elle trouve un témoin :

22 M. Agnes et son très bon ami, Mirsad Sahanic.

23 Mademoiselle Marusevic a reconnu avoir des rapports étroits avec

24 M. Simic et d'autres personnes à Bosanski Samac qui font partie des

25 autorités locales, donc il est tout à fait facile de comprendre quelle

 

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1 pouvait être motivée en faveur d'un ami et en faveur de son employeur.

2 Mais si nous écoutons plus attentivement sa déposition, nous constatons

3 qu'elle permet de corroborer un grand nombre des propos de Mirsad Sahanic.

4 Il est possible que dans les déclarations écrites qu'elle a soumises au

5 Tribunal, elle ait omis les détails de son voyage à Tuzla, et moi je dis

6 que ce n'est pas par hasard.

7 Mais, en outre, elle ne propose aucune explication crédible

8 quant aux efforts qu'elle a accomplis pour contacter Mirsad après d'aussi

9 nombreuses années. Bien sûr, ils ont eu une relation brève, mais pour

10 autant que nous le sachions, cette relation n'était pas forcément très

11 importante ou très sérieuse. Mais c'est elle-même, en personne, qui a

12 admis ne l'avoir jamais revu après le milieu de cet été-là. Il était

13 encore en détention. Elle s'est beaucoup occupée de cet homme. Elle ne

14 savait pourtant même pas quelle a été la date de sa remise en liberté. Il

15 a été remis en liberté en novembre et elle pensait qu'il avait été libéré

16 en juillet ou en août. Entre 1992 et 1998, elle ne fait aucun effort pour

17 rentrer en contact avec lui, elle ne sait pas s'il est vivant ou mort

18 même. Et par hasard, juste au moment où M. Simic commence à s'organiser

19 dans le cadre de son procès, elle se rappelle Mirsad et décide de faire un

20 effort pour contacter -qu'en est-il de ses raisons personnelles ?- cet

21 ancien petit ami qu'elle cherche à retrouver pour parler en faveur de

22 M. Simic, parler à M. Avramovic !

23 Je ne souhaite pas, pour ma part, minimiser la situation de

24 Mlle Marusevic. Elle a vécu à Bosanski Samac en 1992, date à laquelle la

25 situation était difficile pour tous : les Croates, les Musulmans, tout le

 

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1 monde a souffert à ce moment-là. Mais la réalité, c'est que Mlle Marusevic

2 a admis avoir eu un traitement spécial, un traitement qui n'a pas été

3 accordé à d'autres personnes. Dans la même situation qu'elle, d'autres

4 Croates ont été contraints de partir, ont été transférés dans le village

5 de Lacevica, d'autres Croates ont été obligés de faire des travaux forcés,

6 des travaux pénibles dans la ville, alors qu'elle, on lui a donné un

7 emploi très agréable : servir le café à la municipalité. Par hasard,

8 c'était le même bâtiment que celui où Milan Simic et Blagoje Simic avaient

9 leurs bureaux.

10 Tout cela prouve qu'il existait un rapport particulier entre

11 elle et ces hommes, qu'elle avait une raison particulière d'aider

12 Milan Simic, de venir ici témoigner en sa faveur et de contredire certains

13 des propos tenus par M. Agnes dans sa déposition à lui.

14 Et bien entendu, Jasna nous a aussi parlé de ce fameux sac bleu.

15 Elle nous a dit l'avoir trouvé dans son armoire. Mais apparemment pendant

16 des semaines elle n'a même pas eu l'idée que M. Agnes était parti et

17 n'allait pas revenir. Elle n'a pas pensé une seconde que ce sac bleu avait

18 la moindre importance puisque c'est seulement au mois de septembre qu'elle

19 parle de ce sac à M. Avramovic.

20 Même si tout cela était vrai, Monsieur le Président, Messieurs

21 les Juges, le fait que son sac se soit trouvé dans son appartement et

22 qu'elle ne soit pas la seule à avoir accès à ce sac permet de jeter le

23 doute sur sa déposition. Et je vous invite à manifester quelques soupçons

24 par rapport à cette partie de sa déposition.

25 Je vais garder ce que j'ai à dire au sujet de M. Avramovic pour

 

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1 la fin de mes réquisitions.

2 Donc parlons quelques instants de M. Simic. Vous l'avez entendu

3 ici aujourd'hui. Sa déposition a été relativement courte. Il a dit n'avoir

4 jamais rencontré M. Agnes, n'avoir jamais parlé avec M. Agnes au

5 téléphone, n'avoir en fait jamais eu de contacts avec cet homme avant la

6 déposition dans ce prétoire.

7 Mais la réalité, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

8 c'est qu'il est tout à fait surprenant, si vous voyez la version de la

9 défense, de voir M. Agnes se proposer pour témoigner en faveur de

10 Milan Simic alors que Milan Simic n'a pas exprimé le moindre intérêt par

11 rapport à une possibilité de rencontrer M. Agnes et de parler avec lui. Il

12 n'a même pas eu envie de le rencontrer, de lui serrer la main, de lui dire

13 "Merci de venir me défendre". Je vous dis, moi, que c'est difficile à

14 croire.

15 Monsieur Simic était à Bosanski Samac pendant cette période et

16 M. Agnes également de temps en temps. En dépit de ce qu'a dit M. Simic,

17 j'affirme qu'il a passé pas mal de temps dans le café Lotos et que très

18 probablement ils ont dû se rencontrer, ne serait-ce que de façon

19 informelle, puisqu'il est fort probable qu'il ait été assis à des tables

20 du même café, là où Jasna travaillait comme serveuse. Monsieur Agnes dit

21 qu'il a fréquenté ce café, Jasna y était serveuse. Monsieur Simic affirme

22 s'y être trouvé également. Il est difficile de croire qu'ils ne s'y soient

23 jamais rencontrés.

24 Et c'est une coïncidence également de voir que M. Agnes a été

25 capable de nous fournir des détails quant au fait que M. Simic avait des

 

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1 rapports aussi bien avec l'entreprise Nova Forma qu'avec le bureau de

2 Spomen Dom, alors que M. Simic voudrait que vous croyiez que M. Agnes a

3 déployé des efforts incroyables pour le rechercher et établir une relation

4 avec lui, une relation d'affaires liée à l'entreprise Nova Forma.

5 J'affirme, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que tout

6 cela est ridicule. Monsieur Agnes n'était sans doute pas capable de faire

7 tout ce qu'il souhaitait faire. Je dis que M. Agnes était en mesure de

8 circuler en ville, qu'il avait des informations, qu'il recueillait des

9 informations, qu'il rassemblait des éléments et que ce que la défense

10 essaie de vous faire croire est incroyable, impossible à croire.

11 Je vous rappelle encore une fois le lien qui unit Jasna et qui a

12 été admis par elle, le lien qui l'unit à M. Simic et à M. Jankovic. C'est

13 tout de même une relation importante entre la femme de M. Simic et la

14 femme de M. Jankovic. Ils étaient tous très amis, donc nous avons toutes

15 les raisons de croire ce que nous dit M. Agnes à ce sujet.

16 Finalement, je voudrais parler de la déposition de M. Avramovic.

17 Rappelez-vous, Messieurs les Juges, il nous a fait une déclaration. Au

18 cours de sa déposition d'aujourd'hui, il a répondu à une question qui lui

19 était posée au sujet de la rumeur et M. Avramovic a dit à ce sujet :

20 "Lorsque je dépeins une situation, vous pouvez me croire lorsque je vous

21 dis que je peux dépeindre cette situation en me fondant également sur la

22 rumeur et sur des bruits". Cela vous donne une idée très précise de la

23 façon dont M. Avramovic travaille et de la façon dont il organise une

24 défense.

25 J'affirme également devant vous, Messieurs les Juges,

 

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1 aujourd'hui, qu'il importe peut-être de jeter un coup d'oeil plus précis à

2 la déposition de M. Avramovic car il n'est pas n'importe qui. C'est un

3 avocat compétent. Bien sûr, ses propos et ceux de M. Agnes doivent être

4 évalués de façon égale, mais j'ajoute que les propos de M. Avramovic

5 doivent être évalués en tenant compte de sa situation professionnelle.

6 Eh bien, examinons son travail professionnel et la façon dont il

7 a représenté son client, M. Simic. Il dit avoir pris des notes selon

8 lesquelles se trouvaient compris les noms d'un certain nombre de témoins

9 potentiels importants capables de témoigner en faveur de son client. Mais

10 il nous dit avoir déchiré ces notes et les avoir jetées. Et en les jetant,

11 il a jeté aussi les noms de trois, quatre, ou cinq témoins supplémentaires

12 qu'il aurait pu citer pour parler en faveur de son client.

13 Pourquoi nous dit-il avoir décidé de jeter ces notes ? Eh bien,

14 il nous dit que c'est parce qu'il a décidé que M. Agnes n'était pas

15 crédible. Il minimise donc l'importance de témoins potentiels et

16 d'éléments de preuve potentiels alors que son client est accusé du crime

17 le plus grave qui puisse être, à savoir le crime de guerre.

18 Et si vous examinez tous les documents dont il a été question,

19 les factures notamment, je pense que vous trouverez des contradictions

20 entre les moments où M. Agnes affirme avoir eu des rencontres, des

21 réunions et les moment où M. Avramovic affirme avoir eu des réunions.

22 Examinons ce que M. Avramovic a fait, lui aussi, au sujet de cet

23 infâme sac bleu. Monsieur Avramovic n'est pas un avocat tout jeune, c'est

24 un avocat compétent, expérimenté. Il vous a même dit avoir travaillé

25 pendant un moment au ministère de l'Intérieur de la République fédérale de

 

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1 la Yougoslavie. Le ministère de l'Intérieur, c'est la police. Il a donc

2 travaillé pour la police, et pourtant il manifeste le plus grand mépris

3 pour l'importance de la filière de conservation d'un élément de preuve

4 potentiel.

5 Si ce sac bleu est aussi important qu'il veut vous le faire

6 croire, il y aurait eu de nombreux moyens de le conserver. Si nous croyons

7 que ce sac a été découvert à Bosanski Samac, la situation était difficile

8 en plein centre de la Republika Srpska, mais il aurait peut-être pu aller

9 à la police locale les informer de l'importance de ce sac, leur dire

10 quelle avait été la filière de conservation de ce sac. Il aurait pu se

11 rendre à l'IPTF qui était responsable de la garde de M. Simic à Bosanski

12 Samac, il aurait pu leur demander de s'occuper du sac.

13 Mais qu'a-t-il fait de ce sac ? Il l'a pris avec lui et il l'a

14 emporté dans son bureau à Belgrade. L'a-t-il apporté au mois de septembre

15 au Tribunal dès qu'il a découvert que ce sac existait ? Non, le Tribunal

16 n'a entendu parler de ce sac la première fois qu'en novembre. Et qu'a fait

17 le sac pendant tout ce temps ? Qu'est il arrivé à ce sac ? Il était sous

18 la garde de M. Avramovic, apparemment chez lui ou dans son bureau à

19 Belgrade. Et y compris au moment où ce sac arrive au Tribunal, est-ce que

20 M. Avramovic le donne à la garde du Tribunal ? Non, il le remporte dans sa

21 chambre d'hôtel.

22 Nous affirmons qu'en raison de cette absence complète de

23 précision dans la filière de conservation du sac, tout ce qui a été dit au

24 sujet de ce sac bleu est plus que suspect. C'est ce que dit l'accusation.

25 J'ai déjà parlé du fait que M. Vukovic a décidé que M. Agnes

 

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1 était un témoin sans valeur, y compris en tenant compte du fait que

2 M. Agnes a été enfermé dans l'école primaire et n'a pas vu M. Simic lever

3 la main sur qui que ce soit. Et apparemment M. Avramovic a porté le même

4 jugement sur M. Agnes.

5 Mais examinons le témoignage incroyable de M. Avramovic selon

6 lequel M. Agnes aurait dit à M. Avramovic pouvoir établir un contact avec

7 trois ou quatre témoins. Qu'a dit M. Avramovic à ce moment-là ? Selon

8 M. Avramovic, il lui aurait dit : "Eh bien, c'est très bien si cela ne

9 vous ennuie pas, si cela ne vous pose pas de problème, faites-le et dites-

10 moi quel sera le résultat de vos démarches". Est-ce réaliste ? Il défend

11 un homme accusé de crimes de guerre. On lui fait cadeau de trois ou quatre

12 témoins potentiels. Ce qu'il aurait dû faire, c'est dire immédiatement :

13 "Donnez-moi les noms de ces témoins potentiels, dites-moi ce que je peux

14 faire pour les retrouver, dites-moi ce que je peux faire pour vous aider à

15 les retrouver". Eh bien non, il dit : "Ecoutez, si tout va bien, si tout

16 cela ne pose pas de problème, faites-le moi savoir".

17 Monsieur Avramovic prétend aussi connaître plusieurs personnes à

18 Bosanski Samac qui pourraient discréditer M. Agnes, des gens qui auraient

19 été détenus avec lui dans l'école primaire ou qui le connaissaient pendant

20 son séjour à Bosanski Samac, et pourtant aucune de ces personnes n'a été

21 citée ici en tant que témoin, aucun affidavit provenant de ces personnes

22 n'a été soumis à la Chambre.

23 Et puis je vous invite également, Messieurs les Juges, à

24 considérer deux autres parties de la déposition de M. Avramovic qui

25 dénigrent M. Agnes. Chaque fois qu'il avait la possibilité de le faire, il

 

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1 a expliqué très longuement que M. Agnes était impossible à croire, que

2 c'était un très mauvais témoin et il a dit pourquoi.

3 Mais le problème que cela pose, c'est que s'il a estimé que

4 M. Agnes était un si mauvais témoin, on se demande pourquoi il a continué

5 à avoir des contacts avec lui. S'il a trouvé que M. Agnes était un très

6 mauvais témoin, pourquoi a-t-il continué à le voir et à lui parler ?

7 Pourquoi ne lui a-t-il pas dit directement : "Vous êtes un mauvais

8 témoin". Non, il n'a pas fait cela. Il prétend l'avoir vu le 8 septembre

9 et le 28 septembre.

10 Il parle d'une rencontre à l'hôtel Mimosa et il parle au moins

11 d'une autre rencontre à Bosanski Samac, qui a été mentionnée par

12 M. Avramovic.

13 Alors pourquoi est-ce qu'il a toutes ces rencontres avec un

14 homme dont il estime que c'est un témoin absolument impossible ?

15 J’affirme, du côté de l’accusation, que les Juges devraient remettre en

16 cause considérablement la crédibilité du témoignage de M. Avramovic.

17 Puis, nous revenons à présent sur les détails dont j'ai déjà

18 parlé précédemment. Essayons de regarder les détails de la déposition de

19 M. Avramovic car, en effet, il y a un détail que M. Avramovic a été

20 incapable d'expliquer : le détail concernant ce programme de préparation.

21 Rappelez-vous, Messieurs les Juges, tout cela était sur un enregistrement

22 audio, donc je vous propose de prendre le temps et d'écouter attentivement

23 et tranquillement l'intégralité de cette conversation.

24 Vous avez entendu les explications compliquées de M. Pantelic

25 qui a dit qu'il était tendu à cause des bombardements de Belgrade, qu'il

 

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1 n'a pas tout compris de ce que cet homme lui a dit. Mais, moi, ce que

2 j’affirme, c'est que si vous écoutez attentivement cette bande audio, vous

3 verrez que tout cela n'apparaît pas dans la voix des deux interlocuteurs.

4 Mais contentons-nous, pour le moment, de la déposition

5 d’Avramovic où il est question de ce programme de protection des témoins.

6 Que dit-il ? La question qui lui est posée est la suivante : "De quel

7 programme s'agit-il, à ce moment-là, Monsieur, si ce n'est pas un

8 programme de répétition dont M. Agnes a parlé ?" Et la réponse de

9 M. Avramovic est la suivante : "Il est très difficile de répondre à cette

10 question avec une certitude absolue sur la base de ce que je viens

11 d'entendre".

12 Cette réponse est très parlante, Messieurs les Juges. Il est

13 incapable de proposer une explication parce qu’il n'y en a pas ! La

14 version de M. Agnes relative à ce programme de préparation des témoins est

15 la vérité.

16 Et finalement, parlons des motivations de M. Avramovic,

17 motivations qui l'on poussé à témoigner comme il l’a fait. N'oublions pas

18 la situation dans laquelle se trouve M. Avramovic. Nous avons parlé de la

19 situation de M. Agnes. Eh bien, consacrons quelques instants à examiner la

20 situation de M. Avramovic.

21 Il défend un homme accusé d'un des crimes les plus graves qui

22 soient. Son client a déjà reconnu devant l'accusation s'être trouvé sur

23 les lieux du crime. Il y a un nombre limité de témoins qu'il est capable

24 de trouver en faveur de son client. Des deux côtés, il a été admis qu'il y

25 avait une cinquantaine de personnes détenues dans l’école.

 

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1 Monsieur Avramovic sait que l'accusation -puisque nous avons communiqué

2 les déclarations des témoins- a prévu de citer à la barre un certain

3 nombre des personnes détenues dans les locaux de l’école.

4 Monsieur Avramovic peut sans doute, à juste titre, estimer que nous allons

5 en citer d'autres.

6 Il y a de très nombreux témoins qu'il peut contacter. Or, il

7 reconnaît lui-même que la plupart de ces témoins ne résident pas à

8 Bosanski Samac. Monsieur Avramovic a plaidé avec beaucoup d'efforts pour

9 nous dire combien il était difficile pour lui de travailler : il lui

10 fallait opérer dans la Republika Srpska, à Bosanski Samac, la guerre

11 faisait rage. Tout cela est vrai, et cela fait partie des raisons pour

12 lesquelles sa situation était particulièrement difficile. Il lui fallait

13 bien partir du principe qu'un certain nombre des témoins détenus dans

14 l’école primaire allaient refuser de témoigner en faveur de Milan Simic,

15 même si Milan Simic ne leur avait fait aucun mal personnellement. Ces

16 témoins savaient qui était Milan Simic. Ils savaient que c'était une

17 personne qui avait du pouvoir et qu'il avait sans doute quelque chose à

18 voir avec leur détention.

19 Monsieur Sahanic a expliqué ne pas souhaiter retourner à

20 Bosanski Samac pour témoigner pour Milan Simic. Pourquoi aurait-il voulu

21 le faire, puisque Milan Simic a sans doute participé à son maintien en

22 détention ?

23 Donc l'accusation affirme, Messieurs les Juges, que

24 M. Avramovic, en réalité, avait les plus grandes peines à trouver ne

25 serait-ce qu'un seul témoin prêt à témoigner en faveur de son client.

 

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1 Et ensuite, il découvre par l'intermédiaire de Jasna, M. Agnes

2 et, par l'intermédiaire de M. Agnes, Mirsad Sahanic. Ce sont deux témoins,

3 mais eux aussi vont avoir des réticences à témoigner en faveur de

4 Milan Simic puisqu'ils ont été détenus dans ce camp.

5 Le seul avantage qu'il avait à sa disposition, c'est que

6 M. Agnes était dans une situation de vulnérabilité. Il savait que M. Agnes

7 avait rejoint les rangs de l'armée de la Republika Srpska, il connaissait

8 l'existence de l'incident au cours duquel M. Agnes avait tiré sur cette

9 jeune femme. Il savait que M. Agnes vivait en Republika Srpska sous un

10 faux nom. Tout cela, ce sont des éléments dont il pouvait tirer profit.

11 L'accusation, par conséquent, Messieurs les Juges, affirme que parce que

12 M. Avramovic avait les plus grandes difficultés pour trouver des témoins,

13 il a parlé à M. Agnes, il l'a menacé, il l'a intimidé, il l'a fait venir à

14 Bosanski Samac. Lui-même et M. Simic lui ont offert, proposé de l'argent,

15 un appartement et un emploi, exactement comme M. Agnes vous l’a dit.

16 En conclusion, Messieurs les Juges, je crois qu'il faut se

17 souvenir de ce que M. Agnes n'a eu de cesse de me dire dans les

18 conversations que j'ai eues avec lui au cours de la préparation de cette

19 affaire. Alors que nous essayions de déterminer le nombre de réunions

20 qu'il y avait eu, quand elles avaient eu lieu, M. Agnes a insisté sans

21 cesse pour dire qu'il y avait seulement trois réunions qui étaient

22 importantes.

23 M. Hunt (interprétation). - Est-ce que ceci a été versé au

24 dossier ?

25 Mme Paterson (interprétation). - Non.

 

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1 M. Hunt (interprétation). - Impossible d'apporter des

2 commentaires, s'il n'y a pas de pièces déposées au dossier.

3 Mme Paterson (interprétation). - Je voudrais vous soumettre

4 l’idée suivante : trois réunions sont importantes, que je vous le dise ou

5 que ce soit quelqu'un d'autre qui vous le dise. Il y a eu la réunion à

6 Bosanski Samac, au cours de laquelle M. Agnes dit avoir rencontré pour la

7 première fois M. Simic, au cours de laquelle on lui a offert l'argent,

8 l'appartement, l'emploi. Puis la réunion dans la maison de son oncle où il

9 dit que M. Avramovic est revenu recueillir une déposition détaillée avec

10 enregistrement audio. Et puis, il y a eu la réunion où il a reçu le numéro

11 de téléphone de Mirsad. On lui a dit qu’il fallait le contacter.

12 Eh bien, tous les éléments importants découlent de ces trois

13 réunions cruciales sur lesquelles il faut vous concentrer. Je l’ai dit,

14 M. Agnes est loin d'être un témoin parfait. Il a fait preuve de

15 difficultés, mais il est revenu, il vous a raconté son histoire. Vous

16 pourrez le constater vous-mêmes, vous pourrez comparer le comportement

17 affiché par les deux témoins. Rappelez-vous l'aspect qu'avait M. Agnes au

18 moment de sa déposition -il a montré ses émotions, parfois il était calme,

19 quelquefois bouleversé, parfois encore en colère ou parfois en proie à

20 l'indignation- et comparez ceci avec la déposition de M. Avramovic. Vous

21 êtes des professionnels du métier, Messieurs les Juges, vous connaissez la

22 gravité des crimes reprochés à M. Avramovic : faux témoignage, pots-de-

23 vin. Comment réagiriez vous ? Est-ce que vous ne seriez pas indignés face

24 aux charges retenues contre vous ?

25 Monsieur Agnes a pu expliquer son histoire sans aucune

 

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1 contradiction, par rapport avec les déclarations qu'il avait fournies. Il

2 a pu fournir une explication logique et légitime à la plupart des

3 événements, et sa déposition a été corroborée par certains éléments de

4 preuve irréfutables : ces enregistrements audio qui confirment que

5 M. Avramovic et M. Pantelic connaissaient M. Agnes, avaient eu beaucoup de

6 discussions approfondies avec lui. Comparez sa déposition avec celle de

7 M. Avramovic et avec celle de M. Simic. Il vous faudra conclure que

8 M. Agnes est un témoin digne de foi.

9 Nous estimons avoir apporté la preuve des charges retenues

10 contre M. Simic et M. Avramovic. Monsieur Agnes a dit avoir fait l'objet

11 de menaces, lui et sa famille, qu'il était harcelé, intimidé.

12 Monsieur Agnes vous a fait valoir que ces intimidations et ces menaces se

13 sont poursuivies tout au long de sa déposition. Un jour, il n'a pas voulu

14 déposer parce que ces menaces continuaient d'être proférées à l'encontre

15 de sa personne et de sa famille.

16 Monsieur Agnes a été encouragé, surtout par M. Avramovic et

17 M. Simic, à faire un faux témoignage devant cette Chambre.

18 Monsieur Avramovic et M. Simic ont offert de l'argent, un emploi, un

19 appartement à M. Agnes, ou du moins étaient présents au moment où de

20 telles offres ont été formulées. Monsieur Agnes a été encouragé à

21 contacter un autre témoin aux mêmes fins, afin que cet autre témoin fasse

22 lui aussi un faux témoignage. Monsieur Avramovic et M. Simic ont tous deux

23 été impliqués dans ce genre de comportement et l'ont toléré et l'ont même

24 encouragé. Monsieur Avramovic et M. Simic ont menacé, ont intimidé, ont

25 essayé d'offrir des pots-de-vin, ont essayé de s'immiscer dans la vie de

 

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1 M. Agnes qui était un témoin potentiel.

2 Je vous demande de déclarer M. Avramovic et M. Simic coupables

3 des charges retenues contre eux.

4 M. le Président (interprétation). - Maître Haynes, vous avez la

5 parole.

6 M. Haynes (interprétation). - Je vais m'efforcer de réaliser

7 plusieurs choses dans le cadre de ma plaidoirie finale. Je m'efforcerai de

8 faire preuve de concision et de ne pas trop répéter les choses, de parler

9 lentement, dans l'intérêt des interprètes et de la cabine française et de

10 la cabine BCS. Rappelez-vous qu'il n'y a que six mois qui se sont écoulés

11 entre mai et septembre et que nous avons commencé les premières audiences

12 consacrées à cette affaire en septembre.

13 Mais j'essaierai de rester fidèle aux éléments de preuve

14 entendus et de ne pas moi-même déposer.

15 Un de mes clients, en l'occurrence Milan Simic, fait l'objet

16 d'un acte d'accusation qui va le mener à un procès. Cet acte d'accusation

17 a été rédigé, a été confirmé, et il a été interrogé. Sous le principe de

18 la précaution, on l'a mis en garde pour ce qui est de ses droits. L'acte

19 d'accusation a été modifié et les éléments à l'appui de ce nouvel acte

20 d'accusation ont été signifiés. La Chambre, en temps utile, devra

21 déterminer si les éléments de preuve entendus sont de nature à corroborer

22 les charges qui ont été retenues contre lui.

23 Nous n'avons pas ici affaire à une affaire qui fait l'objet d'un

24 acte d'accusation. Cette Chambre de première instance a tenté de retenir

25 une procédure, procédure qui ressemble assez à celle qu'on a lorsqu'il y a

 

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1 un procès à la suite d'un acte d'accusation. Ceci porte sur des éléments

2 de preuve écrits. Des charges ont été formulées, énoncées. C'est bien

3 comme cela qu'on les a qualifiées tout au long de cette procédure. Ces

4 charges sont particulières quant aux détails qui les qualifient, portant

5 également sur le temps et quant au fond des allégations formulées et pour

6 lesquelles mon client est ici présent.

7 Mon client est ici présent pour répondre uniquement de ces

8 allégations-là. Mes clients ne sont pas venus ici pour répondre

9 d'allégations concernant Mirsad Sahanic.

10 Mais au cours de cette réquisition tout à fait extraordinaire

11 que nous venons d'entendre, j'ai été surpris du fait qu'on n'a fait aucune

12 référence aux charges retenues contre mes clients et aux charges qui leur

13 étaient notifiées avant le début de la procédure et qui vont faire l'objet

14 de votre jugement, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

15 J'aimerais me pencher désormais sur ces accusations parce que je

16 pense que, quelle que soit l'interprétation qu'on donne aux éléments de

17 preuve entendus, il en reste peu qui peuvent constituer la base d'un

18 jugement de culpabilité concernant mes clients.

19 S'agissant de Milan Simic, il est accusé tout d'abord, entre

20 juillet et septembre 1998, de s'être immiscé de façon illégale et

21 arbitraire dans l'administration de la justice du Tribunal pénal

22 international en formulant des menaces par téléphone envers un témoin

23 potentiel qu'on a décrit comme étant Agnes. Il est accusé également de

24 s'être trouvé dans une voiture noire qui avait été amenée à la maison de

25 M. Agnes. Il est aussi accusé -et ceci est provoqué par le fait qu'il y a

 

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1 eu modification du Règlement en décembre 1998- au paragraphe 3, d'avoir

2 offert un pot-de-vin, d'avoir voulu suborner un témoin potentiel décrit

3 dans la requête déposée comme étant M. Agnes, l'intention étant de forcer

4 M. Agnes à faire un faux témoignage.

5 Je le dis d'emblée, pas un seul mot n'a été prononcé qui

6 apporterait la preuve nécessaire pour déterminer la culpabilité de

7 Milan Simic au regard de ces charges.

8 Les éléments de preuve sont limpides. Nous parlons de fin

9 octobre, de début novembre 1998. Il n'y a eu que cette réunion-là et,

10 après, il n'y a eu plus qu'une réunion en février. Les détails de cette

11 réunion sont repris à la page 91 à 96 du compte rendu d'audience [version

12 anglaise] et vous ne verrez aucun mot qui soit de nature à corroborer les

13 charges portées contre Milan Simic après la modification du Règlement de

14 décembre 1998.

15 Je vous dirai qu'il faut l’acquitter vu l'absence totale

16 d'éléments de preuve.

17 Maintenant, parlons de M. Avramovic. J’ai laissé de côté pour

18 l’instant les allégations antérieures à la modification du Règlement de

19 décembre 1998, mais je vais me repencher sur le paragraphe B. Je parle ici

20 des allégations auxquelles il fait face. Une fois de plus, je rappelle à

21 la Chambre de première instance que M. Agnes nous a dit sous serment qu'il

22 y avait eu une réunion seulement après novembre 1998.

23 Quelles sont les charges ? Entre janvier et mai 1999, il aurait

24 offert un pot-de-vin, il aurait voulu suborner un témoin potentiel décrit

25 dans la requête comme étant M. Agnes, afin que ce dernier fasse un faux

 

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1 témoignage, en disant à M. Agnes, en janvier, qu’on allait le former à

2 bien réciter le faux témoignage au cours du mois de mai, cinq jours par

3 semaine et, B, qu'on lui fournirait de l'argent et un appartement après

4 qu'il eût déposé devant ce Tribunal.

5 Aucune preuve n'a été apportée à l'appui d'une telle allégation.

6 Nous sommes toujours au B. Il aurait dit à M. Agnes, en février, qu'il

7 devait dire que Milan Simic n'était pas à l'école, comme l’affirme

8 l'accusation. Il n'y a pas un mot qui ait été prononcé à l'appui de cette

9 allégation.

10 C : du fait de montrer, au mois de mars, à M. Agnes une liste

11 avec quelque 160 noms et de lui dire que la répétition du mois de mai

12 impliquerait également d'examiner cette liste et de marquer erronément les

13 noms des personnes s'étant trouvées à l'école.

14 Effectivement, les éléments de preuve entendus ne parlent pas

15 d'une réunion en février ni ne donnent les détails concernant ce que

16 disait M. Agnes après novembre 1998. Pas une preuve à l'appui des

17 allégations formulées !

18 D : on avait dit à M. Agnes qu'on lui trouverait un emploi après

19 qu'il eût déposé ici devant vous. Aucun mot à ce propos lors de la réunion

20 d'avril, ni après novembre 1998.

21 E : il aurait dit à M. Agnes au mois de mai -ceci est en rapport

22 avec le transcript de la conversation téléphonique- qu'on veillerait à

23 déterminer la somme à payer à Agnes.

24 Je vous fais valoir que les éléments de preuve entendus ne

25 suffisent pas pour le condamner de cette allégation, et je ne dirai pas

 

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1 qu'ici, c'est une affaire vaste, que l'on va tracer de façon tout à fait

2 schématique. Ici, des charges très précises sont retenues. S'agissant des

3 événements qui se sont produits après novembre 1998, la deuxième

4 accusation retenue contre mes deux clients, je dis que quelles que soient

5 les déterminations factuelles établies, aucun élément ne vient soutenir

6 ces allégations.

7 Qu'est-ce qu'il nous reste ?

8 Eh bien, il ne nous reste plus que les allégations antérieures à

9 décembre 1998. Et elle revient à dire ceci. Par rapport à M. Simic, il est

10 accusé d'avoir participé à des harcèlements téléphoniques et d'avoir rendu

11 une visite tardive à la maison de M. Agnes à Sremska Mitrovica. Pour ce

12 qui est de M. Avramovic, il est accusé de choses un peu plus conséquentes,

13 d'avoir exécuté les deux actes ci-dessus nommés et aussi d'avoir persuadé

14 M. Agnes de déposer lors de la réunion du 28 septembre.

15 Maître Patersen a raison de dire que la condamnation ou

16 l'acquittement de mes clients, au regard de ces charges, sont fonction

17 d'un seul témoin, de M. Agnes. Je vous ferai valoir cinq éléments à

18 l'encontre de M. Agnes.

19 Je dirai, tout d'abord, qu'il vous a menti à plusieurs reprises,

20 alors qu'il était sous serment, parfois sans raison, si ce n'est qu'il

21 mentait un peu par réflexe.

22 A d'autres occasions, on voit qu'il y a un objectif, un dessein

23 particulier qui le pousse à être malhonnête.

24 Je dirai, en second lieu, qu'il a proféré de nombreux mensonges

25 à l'encontre de nombreuses personnes, en particulier par rapport à

 

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1 M. Soldal.

2 Je dirai, en troisième lieux, qu'on ne peut pas lui accorder la

3 moindre foi sur les éléments importants puisqu'il a intérêt à mentir.

4 Je dirai, en quatrième lieu, que vu ce cadre général et

5 généralisé de malhonnêteté, il y a des questions de principe qu'il faut

6 trancher, mais qui sont à ce point truffé d'anomalies et de contradictions

7 qu'on ne peut leur accorder aucun poids.

8 En cinquième lieu, qu'il a été contredit sur tous les points de

9 fond non seulement par la déposition de personnes de bonne moralité et des

10 témoins fiables, mais aussi par des preuves documentaires provenant de

11 sources indépendantes.

12 Je sais qu'il m'est arrivé, par le passé, d'exagérer un peu, de

13 trop accentuer la dose. Je ne vais pas énumérer les 17 mensonges qu'il a

14 proférés sous serment, M. Agnes, je vais me contenter d'en retenir quatre

15 ou cinq qui, selon moi, attestent de sa malhonnêteté fondamentale et de

16 ses vils motifs.

17 Excusez-moi, Monsieur le Président et Messieurs les Juges, de

18 commencer par la partie relative à l'armée.

19 J'espère qu'au moment de vos délibérations, vous examinerez ces

20 différents points. Le Bureau du Procureur avait le loisir de faire cela au

21 cours de ces trois derniers mois et le Bureau du Procureur a décidé de ne

22 pas demander la traduction de ceci.

23 Voyons l'âge de ce livret militaire, l'état dans lequel il se

24 trouve. Voyez l'âge qui se marque à chacune des pages écornées de ce

25 livret. Voyez comment le plastique transparent, cette pellicule a commencé

 

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1 à se salir, à se souiller. Voyez la reliure. Vous pourrez constater, vous-

2 mêmes, si c'est là un document que quelqu'un n'a pas porté depuis 17 ans

3 dans sa poche, alors qu'on a suggéré que ce document avait été

4 confectionné cette année.

5 Voyez où l'essentiel des éléments de preuve vous disent qu'il a

6 été trouvé. Il a été trouvé dans un sac. Monsieur Agnes a reconnu que

7 c'était le sien, parmi d'autres objets dont M. Agnes a reconnu que

8 c'étaient les siens.

9 Voyez les détails. Qui aurait pu les fournir ?

10 Eh bien, il y a le groupe sanguin. Il y a aussi les détails

11 concernant le service militaire en ex-Yougoslavie ; le nom de ses parents

12 factice, même sa date de naissance. Examinez aussi les modifications, les

13 altérations apportées à ces détails. On a changé le nom. On a changé le

14 nom des parents. La date et le lieu de naissance ont été changés. Tout

15 ceci afin que soit corroboré sa fausse identité serbe.

16 Ceci ne sert à personne d'autre. C'est seulement lui qui aurait

17 intérêt à ce que la date de début de service militaire soit modifiée, que

18 le nom de ses parents soit modifié, parce que ce document lui appartient,

19 on y trouve sa photo à lui.

20 Mais si vous doutez encore que ce soit bien son document, un

21 document qui lui appartient, je vous demanderai d'examiner deux éléments

22 vraiment infimes de preuve qui se passent de commentaires. Vous avez un

23 nom écrit au bic, à l'arrière, au verso de son passeport, de sa carte

24 d'identité et, effectivement, il y a aussi une allusion à Dragan

25 Stefanovic et Alxcovac, à l'endroit où il a servi.

 

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1 A la page 280 du compte rendu d'audience en anglais, je lui ai

2 demandé de regarder le verso de ce livret. Le témoin a souri. Ma question

3 a été alors de dire : "Mais, vous souriez. Reconnaissez-vous ce nom". Il a

4 répondu : "Peut-être, cela dépend de la question que vous allez me poser."

5 Je vous fais valoir que c'était un sourire qui équivalait à

6 reconnaissance, à identification, non pas du nom parce que précédemment, à

7 la page 262 du compte rendu, vous verrez que je lui demandais de façon

8 précise s'il connaissait un certain "Dragan Stefanovic". Il m'a répondu :

9 "Non, je ne connais pas de Stefanovic. Je connais beaucoup de Dragana."

10 Ce qui veut dire qu'il n'a pas reconnu le nom qui figurait. Je

11 vous fais valoir qu'il a reconnu l'écriture. Je n'irai pas jusqu'à dire

12 que c'était la sienne. Toutefois, nous savons tous que nous écrivons tous

13 des choses dans nos journaux, dans nos chéquiers, que ce soit lui qui l'ai

14 écrit ou que ce soit Dragana ou même une autre personne amie qui voulait

15 qu'il se souvienne de son nom. Mais il a souri parce qu'il se rendait

16 compte que nous avions établi, au-delà de tout doute raisonnable, que

17 c'était bien un document qui lui appartenait.

18 Or, ce document a tellement peu d'importance dans le contexte

19 des éléments de preuve entendus dans cette affaire, il ne représente rien.

20 S'il m'avait dit, lorsque je lui ai d'abord posé la question : "Oui, mais

21 bien sûr, c'est mon livret militaire", et qu'est-ce que cela faisait à

22 l'affaire ? S'il m'avait dit : "Bien sûr, que c'est mon nom, mais cela a

23 été remplacé par mon ancien nom (expurgé)", cela aurait été tout.

24 Toutefois, ce n'est pas ce qu'il fait. Il a décidé, il a choisi

25 de mentir à ce propos, ce qui donne à ce document une valeur toute

 

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1 particulière.

2 Pour moi, c'est la preuve éclatante qu'il s'agit là d'un témoin

3 qui a pour première réaction de mentir et, pour deuxième réaction, de

4 réfléchir à ce qu'il vient de dire.

5 Mais je pense qu'on peut aller beaucoup plus loin.

6 En effet, souvenez-vous de ce que Me Paterson semble avoir

7 adopté, sans avoir pour autant mené d'enquête sur la question, mais ce

8 témoin, M. Agnes, a vraiment lancé des allégations vraiment

9 extraordinaires, qui sont vraiment extravagantes. Effectivement, je le

10 prends personnellement aussi parce que j'aurais participé à la contrefaçon

11 de ce document. Ce témoin ne se contente pas de mentir à sa première

12 réaction. Il est aussi tout à fait prêt à lancer des accusations éhontées

13 à l'encontre de n'importe qui.

14 Mais je pense que le mensonge le plus vil qu'il a proféré à

15 l'encontre de ce document, c'est de nier sa propre photographie, sa propre

16 image. Pouvez-vous concevoir un réflexe plus infantile ? On vous montre

17 votre propre photo. Jasta Marusevic n'a eu aucune peine à l'identifier, à

18 le reconnaître.

19 On vous montre votre propre photo et vous dites : "Non, ce n'est

20 pas moi." C'est là un vil menteur à qui nous avons affaire.

21 Mais si ceci nous donne une idée de ses réflexes, il faut se

22 dire aussi que certains de ses mensonges ont des desseins particuliers,

23 des desseins un peu cousus de fils blancs, mais des desseins quand même.

24 Je voudrais que vous repensiez à ce qu'il disait à propos du

25 moment où éclate la guerre en 1992. Ceci n'est pas du tout contesté.

 

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1 Effectivement, c'est le premier type d'éléments de preuve consistant qu'il

2 a fourni. C'était le premier mensonge qu'il a dit. Puis, il a parlé aussi

3 de M. Soldal, autre mensonge.

4 Monsieur Mirsad Sahanic vous a dit que c'était aussi un mensonge

5 puisque cet homme vivait à Samac, avant le début de la guerre. Il ne se

6 contentait pas d'y passer la nuit, dans un hôtel ou dans une voiture, il

7 vivait à Samac. Il a fini par reconnaître qu'il mentait au moment du

8 contre-interrogatoire, même s'il a parlé de malentendu.

9 Ce qui est bizarre, c'est qu'ayant reconnu avoir dit un

10 mensonge, il a réaffirmé ce mensonge plus tard, toujours dans le cadre du

11 contre-interrogatoire.

12 Qu'est-ce que ceci nous montre ? Il essaie d'attirer la

13 sympathie sur sa personne. Il veut donner l'apparence d'être la victime.

14 Et, soyons franchement honnête ici, personnellement, je suis sûr que nous

15 aurons beaucoup de sympathie pour les événements qui se sont produits en

16 avril 1992, pour ce qui lui est arrivé. Mais ceci ne suffit pas à

17 M. Agnes ; il faut qu'on le considère comme étant un spectateur innocent,

18 alors qu'il n'est même pas capable de dire la vérité s'agissant

19 d'événements incontestés et incontestables.

20 Vous allez peut-être aussi penser que les événements de

21 Pelogacevo, en 1993, au moment où une gamine de 15 ans a été abattue par

22 balle et où son oncle a assuré sa remise en liberté, je dirais que, là

23 aussi, il essaie de se donner une image d'angélisme.

24 Je suis sûr que Me Paterson me pardonnera de faire valoir que le

25 Juge Bennouna et moi-même avons levé tout doute sur les questions que nous

 

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1 posions. Il savait bien ce que signifiait "subornation", "faux

2 témoignage". Il a décidé de dire une chose à M. Tore Soldal et d'en dire

3 une autre, au moment de sa déposition devant vous, Messieurs les Juges.

4 Troisième mensonge important que je voulais que vous reteniez,

5 c'est celui qui concerne Mirsad Sahanic. Je pense que sa déposition n'a

6 pas été contestée, au regard des charges sur lesquelles vous devrez

7 trancher et ceci est tout à fait dénué d'importance. Toutefois, c'est un

8 élément important si l'on veut vraiment jauger la crédibilité de M. Agnes.

9 Disons le carrément, il est inconcevable que vous preniez une

10 autre décision que celle-ci. Monsieur Agnes a obtenu le numéro de

11 téléphone de Mirsad Sahanic, de Jasna Marusevic. C'était inévitable.

12 Pourquoi se serait-elle rendue à Tuzla pour voir sa mère, pour trouver sa

13 mère et sa famille, si elle avait pu demander à quelqu'un d'autre de le

14 faire ?

15 Et je suis sûr que votre conclusion inévitable sera celle-ci.

16 Jasna lui a donné ce numéro de téléphone, fin octobre ou début novembre

17 1998.

18 Sahanic, dans sa déposition, parle de deux conversations

19 téléphoniques faites par M. Agnes : l'une s'étant déroulée au milieu de la

20 nuit, alors qu'il était saoul ; l'autre vers la fin de la soirée,

21 conversation au cours de laquelle Jasna est également intervenue.

22 Il parle légalement dans sa déposition de quatre coups de fils

23 supplémentaires faits par Jasna au cours de l'année 1999.

24 Qu'en dit M. Agnes ? En effet, ici, il ne peut y avoir aucune

25 erreur. Ce que M. Agnes nous dit, il le dit dans sa cinquième déclaration

 

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1 préalable. C'est M. Avramovic qui lui aurait donné ce numéro de téléphone

2 au mois de septembre.

3 Et lorsqu'il est venu déposer devant vous, Messieurs les Juges,

4 il a dit que Milan Simic lui avait donné ce numéro de téléphone au mois

5 d'août.

6 Ce mensonge est tout à fait parlant. Il nous dit deux choses au

7 moins. D'abord, que M. Agnes sait quelle cible prendre quand il veut

8 mentir. Il est inutile de vous parler de Jasna Marusevic, parce que pour

9 ce genre d'histoire, on ne reçoit pas, en prime, la possibilité d'être

10 réinstallé dans un autre pays. Non, il sait qu'il doit dire que tout ce

11 qui a été fait contre lui était le fait des accusés.

12 Mais voyez le reste de sa déposition. A un moment, il dit : "Des

13 centaines et des centaines d'appels téléphoniques auraient été adressés à

14 M. Mirsad Sahanic dès septembre 1998". Plus tard, il parle d'énièmes coups

15 de téléphone passés à M. Sahanic.

16 Vous constatez là que c'est un homme qui exagère de façon

17 naturelle, ce qui veut dire que ceci enlève toute crédibilité à sa

18 déposition.

19 Il y a un point corollaire important pourtant. Si la déposition

20 de Mirsad Sahanic, et si effectivement M. Agnes ne lui a téléphoné que

21 deux fois, une fois au milieu de la nuit, la seconde fois en fin de

22 soirée, alors que Jasna était présente, cela veut dire que Milan Simic,

23 depuis son bureau ou depuis le bureau de Milan Simic, aucun coup de fils

24 ne peut avoir été adressé à Mirsad Sahanic.

25 Je vais revenir au cinquième et dernier mensonge que je voulais

 

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1 vous mettre en exergue. Il concerne le sac. C'est un mensonge d'omission

2 et qui vous dit beaucoup sur les motifs qui animaient M. Agnes.

3 Effectivement, il a été trouvé dans l'appartement de Jasna. Il ne

4 servirait à rien que je sois ici à vous faire de telles affirmations si ce

5 n'était pas la vérité. Depuis qu'il a franchi la frontière, le témoin a

6 essayé de prendre ses distances par rapport à Jasna Marusevic. Il lui a

7 fallu cinq déclarations préalables avant qu'il ne la mentionne et il est

8 tout à fait significatif qu'il fait pour la première fois mention de

9 Jasna, après la présentation par M. Avramovic, présentation détaillée, de

10 ces éléments à décharge.

11 Je pense que, quoi que dise M. Agnes, il était au courant des

12 éléments qu'allait défendre notre défense.

13 Je vous disais qu'il voulait prendre ses distances par rapport à

14 Jasna. Pourquoi ? Parce qu'il savait pertinemment que, comme elle l'avait

15 déjà fait avec M. Avramovic, elle pouvait en fait démêler l'écheveau de

16 ses récits depuis le début jusqu'à la fin. Vous trouverez peut-être

17 significatif qu'au cours de sa déposition, il ait nié avoir le moindre

18 contact avec elle après février 1999 et puis, il a dû revenir sur ses

19 dires par la suite.

20 Il est aussi significatif qu'il nie l'avoir rencontrée avant de

21 rencontrer l'un quelconque des avocats.

22 Examinons un instant pourtant Jasna Marusevic. C'est une femme

23 jeune, simple, catholique, d'origine modeste. Elle vit simplement avec

24 350 Marks par mois. Ce n'est pas une femme qui a du pouvoir à Bosanski

25 Samac, ce n'est pas quelqu'un qui est venu déposer devant vous pensant que

 

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1 si elle ne disait pas ce qu'il fallait dire, elle serait dans le pétrin.

2 Elle n'était pas terrifiée. Je pense qu'elle ne peut pas être tout ce que

3 vous fait croire qu'elle est l'accusation.

4 Je dirai que c'était un témoin honnête, un témoin fiable, digne

5 de fois. Puisque vous pouvez comparer ce qu'elle a dit par rapport à des

6 facteurs indépendants et ses dires se sont avérés.

7 Elle vous a dit où se trouvait M. Agnes au moment où a éclaté la

8 guerre ; fait confirmé par M. Mirsad Sahanic et, un peu plus tard par

9 M. Agnes. Elle vous a dit avoir vu Mirsad et Agnes en détention. C'est

10 exact.

11 Elle vous a dit avoir vu Agnes en 1993, en uniforme de l'armée

12 de la Republika Srpska. C'est exact.

13 Toutefois, et c'est là vraiment le point essentiel de sa

14 déposition à Jasna, et puisqu'on m'a critiqué pour ne pas avoir contre-

15 interroger M. Mirsad Sahanic, eh bien je vous répliquerai qu'ici, il n'y a

16 eu aucune contestation à la déposition de Jasna Marusevic. C'est elle qui

17 a présenté à Drago Vukovic. C'est exact. Il faut que ce soit exact. Cela

18 ne peut pas être inexact.

19 Réfléchissez un instant. Effectivement, quand on appelle un

20 témoin Agnes, on est un peu perdu. En effet, on oublie qu'en juillet 1993,

21 c'était un homme qui avait un nom, ce n'était pas son nom de naissance, ce

22 n'était pas un nom reconnaissable par toutes les personnes qui le

23 connaissaient, lui, en 1992.

24 En 1992, il était connu sous un nom, le nom d'un homme qui était

25 mort. Cet homme avait trouvé la mort ; son identité avait été détruite.

 

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1 (expurgée), serbe, habitait à Sremska Mitrovica avec des parents que

2 personne ne connaissait. Il n'était pas inscrit sur les listes des

3 réfugiés. Il n'était pas connu au ministère de l'Intérieur comme étant

4 résidant à l'adresse qu'il avait donnée. Il était impossible de retrouver

5 la trace du moindre de ses parents.

6 Les avocats de la défense n'auraient pas pu retrouver sa trace.

7 Il fallait que ce soit lui qui trouve la trace des avocats. C'est là

8 l'essentiel de la déposition de Jasna, puisque c'est elle qui a présenté

9 M. Agnes a Drago Vukovic.

10 Et ici vous commencez à reconnaître qu'il faut forcément en

11 arriver à cette conclusion. Le récit qu'il a donné des événements commence

12 à se décanter.

13 En effet, si c'est exact, vous devrez accorder tous le poids

14 qu'il faut au récit donné par Drago Vukovic lorsqu'il vous a dit qu'il

15 avait été introduit, présenté à M. Agnes par Jasna. Agnes nous a dit, a

16 voulu nous faire croire que ses avocats sont tombés par hasard sur sa

17 maison au mois de juillet ou août 1998.

18 Ceci est tout à fait incroyable. Il est impossible d'accorder la

19 moindre foi à ceci. La vérité, c'est que Jasna les a présentés et elle

20 était tout à fait prête, enthousiaste même, à ce qu’il y ait ce dialogue

21 pour voir s'il pouvait être d'une quelconque utilité.

22 Je voudrais d'abord parler des motifs qui le poussent à mentir.

23 Je le dis, et c'est visible à l'oeil nu pour chacun ici dans ce Tribunal,

24 ce n'est pas une histoire qui se caractérise par l'altruisme. Au

25 contraire, c'est une histoire assez sombre, marquée par l'égoïsme.

 

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1 Il s'agit d'un homme qui, avant de rencontrer M. Soldal, était

2 dépourvu de famille véritable. Il dit, il affirme être un Musulman de

3 Bihac. Il faut bien croire ses dires. C'était un Musulman de Bihac,

4 disait-il, qui n'était pas bienvenu à Bihac. Il nous a dit ne pas pouvoir

5 vivre en Republika Srpska puisqu'on le recherchait pour meurtre. Il ne

6 pouvait plus vivre en Serbie puisqu'il vivait sur sous une fausse

7 identité. La vie était tout à fait misérable pour lui et il risquait

8 d'être appelé sous les drapeaux. Et nous savons qu'avant qu'Agnes n’essaie

9 de rencontrer un avocat, des plans avaient été préparés par ses soins afin

10 de trouver un autre endroit où il puisse vivre.

11 Il vous a dit qu'il était allé à Belgrade vers le milieu de

12 l'année 1998 pour voir la Commission internationale de la Croix-Rouge. Il

13 a dit qu'il voulait obtenir ce document, comme nous l'avons découvert.

14 C'était pour voir s'il pourrait ainsi, grâce à ce document, vivre dans un

15 autre pays. Et nous savons qu'il va réussir à atteindre cet objectif par

16 le biais de ce Tribunal, quelle que soit l'issue de cette affaire. Je ne

17 sais pas où il ira vivre, mais nous savons à peu près où il veut aller

18 parce qu'il nous l'a dit lui-même, vous vous en souviendrez certainement.

19 Il a parlé, au cours de sa déposition, qu'il avait fait une demande auprès

20 du consulat ou de l'ambassade d'Australie, du Canada et des Etats-Unis.

21 Ah, il n'en demande pas tant finalement ! Aucun de ces trois

22 pays ne m'accepterait personnellement, mais M. Agnes, lui, est venu ici et

23 sait ce qu’il veut. Il veut aller là-bas. Et si vous avez quelque doute

24 que ce soit à ce sujet, et je vous prie par avance d'excuser ma

25 formulation, il suffit de se rappeler de l'obscène petite mise en scène

 

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1 qu'il nous a servie lorsqu'il a refusé d'entrer dans le prétoire jusqu'à

2 ce qu'on lui accorde ce qu'il demandait.

3 Et moi, j'affirme que quelqu'un qui n'a pas de pays, qui n'a pas

4 de famille, qui n'a pas d'emploi, qui n'a pas d'avenir, pour quelqu'un de

5 ce genre, avoir la citoyenneté d'un de ces trois pays, c'est l'équivalent

6 pour nous de gagner le gros lot à la loterie. Et voilà un homme, donc, à

7 qui on avait garanti qu'il allait gagner à la loterie et qui voulait que

8 l'on lui donne l'argent avant même qu'il ait acheté le billet de loterie !

9 Alors avec des témoins comme M. Agnes, on se trouve toujours

10 placé devant une difficulté. C'est que ce qu'il raconte contient

11 nécessairement des éléments de vérité. C’est obligatoire. Imaginez à quel

12 point cela aurait été ridicule s'il était venu proférer ces allégations

13 contre M. Avramovic et s'il ne l'avait jamais rencontré. Il faut bien

14 qu'il y ait quelque chose de vrai dans ce qu'il raconte. La difficulté

15 pour les Juges ici, c'est donc de faire le tri entre ce qui s'est

16 effectivement passé et ce qui est mensonge, exagérations et qui est

17 complètement indigne de foi.

18 Donc je vous serais reconnaissant de considérer la position de

19 la défense. Ceci, je pense, vous permettra de définir quels sont les

20 détails qu'il convient de prendre en considération dans ce qu'il nous a

21 raconté.

22 Nous estimons qu'ayant rencontré Jasna Marusevic en juillet, il

23 a rencontré par le biais de Jasna, il a rencontré Darko Vukovic en août.

24 Monsieur Vukovic l’a rencontré, mais comme il s'apprêtait à passer le

25 flambeau à M. Avramovic, à ce moment-là, il l’a présenté à M. Avramovic le

 

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1 22 septembre, puis ils se sont rencontrés ensuite ultérieurement le 28 où

2 un certain nombre de détails ont été discutés. On en a pris note et on lui

3 a montré des listes.

4 Et nous, nous avançons que la rencontre suivante a eu lieu en

5 novembre, au café Mimosa, et qu'ensuite, il n'y a eu qu'une seule

6 rencontre, cette année, à Bosanski Samac, où Spasoje Pisarevic lui-même

7 était présent.

8 Bien. Voici l'essentiel de ce qu'il a à nous dire. C'est la

9 base, la fondation. Puisque cela s'est produit en effet, c'est

10 indiscutable.

11 Maintenant, il faut que vous vous demandiez si ce qu'il nous a

12 dit lors de sa déposition n’est finalement pas autre chose que la chose

13 suivante : il s’est servi des détails des rencontres qui ont effectivement

14 eu lieu et il les a multipliés, il les a mélangés pour atteindre

15 l'objectif qu'il recherchait. Je vais vous donner un exemple.

16 Nous ne contestons pas le fait que le 28 septembre, M. Avramovic

17 a montré effectivement à M. Agnes un certain nombre de listes.

18 Monsieur Agnes, lui, nous dit que ceci s'est produit à toutes sortes de

19 moments au cours de l'année. Par exemple, dans sa déposition, il nous a

20 dit que cela s'était passé au café Mimosa en novembre. Mais dans sa

21 première déclaration préalable, il nous dit que cela s'est produit en

22 février. Ultérieurement, il nous dit que cela s'est passé chez son oncle.

23 Et dans sa quatrième déclaration préalable, il nous dit que cela s'est

24 passé en avril avec Milan Simic. Dans sa cinquième déclaration préalable,

25 il nous dit que cela s'est produit à la mi-novembre, après que lui et

 

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1 Jasna ont appelé Mirsad Sahanic.

2 Donc l'événement a bien eu lieu. Mais nous, ce que nous

3 avançons, c'est que cet événement a eu lieu uniquement le 28 septembre.

4 Vous pensez que c'est peut-être le cas ou allez-vous croire un témoin qui,

5 tout au long de ses déclarations préalables et au cours de sa déposition,

6 nous donne cinq versions quant au moment où cet événement a effectivement

7 eu lieu et nous dit que cet événement a eu lieu avec différentes personnes

8 à chacune de ses versions ?

9 On lui a donné le numéro de téléphone de l'avocat, et cela a

10 effectivement eu lieu. Pourtant, lorsqu'il témoigne à ce sujet, lorsqu'il

11 fait des déclarations préalables à ce sujet, eh bien, c'est la confusion

12 la plus totale qui règne. Il nous dit que le numéro de téléphone lui a été

13 donné par M. Avramovic en septembre. Alors, penchons-nous sur ce qu'il

14 nous dit dans sa première déclaration préalable où il nous dit que le

15 numéro de téléphone lui a été donné par les avocats chez son oncle.

16 Penchons-nous sur la cinquième déclaration préalable où il nous dit que

17 c'est Drago Vukovic qui lui a donné le numéro de téléphone.

18 Parlons maintenant de l'offre d'argent qu'on lui a faite.

19 Et nous, bien entendu, nous disons que cela n'a jamais eu lieu.

20 Or, M. Agnes dit, dans son témoignage, qu'on lui a offert 10 000 Marks et

21 que c'est M. Simic qui lui a fait cette offre la première fois qu'ils se

22 sont rencontrés en août.

23 Examinons maintenant sa déclaration préalable alors qu'il nous

24 dit que c'est M. Avramovic et Simic qui lui ont fait cette offre en

25 janvier et, pensons à cette cinquième déclaration préalable, lorsqu'il

 

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1 nous dit que l'argent lui a été offert par M. Simic. Apparemment, d'après

2 mes notes, bizarrement, cela se serait produit chez son oncle.

3 Voici donc la façon dont il nous présente les choses. Il modifie

4 les événements tels qu'il nous les présente et il essaie de nous les

5 présenter là où cela l'arrange le mieux. Ce sont là les déclarations de

6 quelqu'un qui a pour réflexe de mentir et qui réfléchit ensuite, après

7 avoir menti.

8 Moi, j'affirme que finalement, les décisions que vous avez à

9 prendre sont finalement assez réduites. Il faut que vous tranchiez sur la

10 question suivante au sujet de savoir si les tirs, le harcèlement

11 téléphonique ont effectivement eu lieu. Parce que moi, j'avance que cela

12 n'a jamais eu lieu. Il s'agit là d'allégations extrêmement simples, qui

13 sont très faciles à proférer, mais qui ne sont corroborées par aucun

14 élément de preuve qui vous a été présenté.

15 Soyons très clairs à ce sujet, je critique ici l'accusation :

16 son oncle et sa tante étaient là, on pouvait les appeler à témoigner et

17 personne n'a voulu le faire ! On les mentionne, son oncle et sa tante,

18 dans toutes les versions au moment où Milan Simic était à Egelo, en

19 rééducation, ou au moment où il était à La Haye. Il dispose en fait d'un

20 alibi.

21 Prenons en compte également son état physique. Etant donné les

22 allégations qui sont proférées contre lui, à savoir qu'il s'est rendu près

23 d'une maison en voiture, qu'il a tiré des coups de feu près de cette

24 maison, il est clair que cela n'a pas eu lieu.

25 Ces allégations sont, d'autre part, contredites par les rapports

 

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1 de la police locale qui nous disent qu'au cours de la période en question,

2 la seule fois où on les a appelés pour intervenir dans ce village, c'était

3 pour une bagarre. Vous vous souviendrez qu'il nous a dit que la police a

4 été appelée à plusieurs reprises.

5 Mais ce qui est vraiment décisif ici, c'est sa propre

6 déposition, parce que nous sommes censés l'excuser ; excuser le fait qu'il

7 ait du mal à se retrouver dans les dates, même si, à mon avis, il lui

8 suffisait d'examiner ce qui s'était produit au cours des 8 ou 9 derniers

9 mois et d'essayer de faire une espèce de chronologie. Mais on nous demande

10 de lui pardonner pour cette confusion. Mais là, c'est une des occasions où

11 justement on peut trouver la date réelle.

12 Nous savons que M. Avramovic et M. Neskovic sont venus le

13 28 septembre, parce que Stevan Todovoric a été arrêté la veille. Nous

14 savons que le 14 septembre, nous le savons d'après le document du CICR

15 qu'on lui a remis en Bosnie.

16 Il vous faudra donc examiner ces éléments de preuve avec

17 attention et j'avance qu'une fois que cela sera fait, vous en arriverez à

18 la conclusion suivante. Il nous a dit que la visite des avocats avant le

19 28 septembre a eu lieu deux semaines auparavant. Cette visite a été

20 précédée, à peu près... C'est trois jours avant cette visite plutôt que

21 les tirs ont cessé autour de sa maison la nuit. Donc on peut dire que cela

22 s'est passé vers le 10 septembre.

23 Mais vous vous souviendrez qu'il nous a dit qu'il a été chercher

24 ce document délivré par la Croix Rouge, il a dû aller en Bosnie, rester

25 chez une de ses tantes. Donc il a dû attendre une dizaine de jours pour

 

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1 obtenir ce document du CICR.

2 On voit que ce qu'il nous raconte au sujet des événements de

3 Sremsko Mitrovica nous montre qu'il était impossible qu'il ait pu assister

4 à ces événements puisqu'il n'était même pas là.

5 Je vais maintenant passer à la rencontre du 28 septembre et je

6 dirai une seule chose à ce sujet. Nous avons cité à la barre des témoins,

7 des témoins dignes de foi. Ce sont des témoins qui ont une moralité

8 irréprochable et cela vaut pour chacun d'entre eux. Il s'agit d'hommes

9 d'âge moyen qui ont une bonne profession, profession libérale. Ce qu'ils

10 nous disent, eux, c'est que ces événements n'ont pas eu lieu.

11 Si on examine les éléments de preuve relatifs au 28 septembre,

12 je vous implore de garder à l'esprit que les allégations du départ

13 impliquaient Me Neskovic, l'avocat de Doboj. Il est nommé et personne ne

14 lui a fait la courtoisie de lui dire que cela le concernait. On lui a

15 permis de déposer et je voudrais que vous réfléchissiez un petit peu à cet

16 homme et à sa situation. Essayez de le comparer à M. Agnes.

17 Je voudrais vous demander si vous préférez la déposition de

18 M. Agnes à celle d'un homme d'âge mûr, qui a été président d'une haute

19 juridiction ? Cet homme vous ressemble beaucoup. Est-ce que vous

20 n'attachez donc pas de crédibilité à ce qu'il dit ? Est-ce que vous n'avez

21 pas tendance à croire Drago Vukovic que l'on n'a pas interrogé au sujet

22 d'une réunion qui, soi-disant, n'aurait pas eu lieu, si l'on doit croire

23 Agnes ?

24 J'affirme que si l'on regarde les choses dans leur globalité, si

25 l'on regarde sa première déclaration préalable, M. Agnes nous a présenté

 

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1 les réunions telles que la défense estime qu'elles ont eu lieu. Il ne nous

2 parle pas d'une réunion avec Milan Simic, mais avec chaque nouvelle

3 déclaration préalable, il en rajoute. Ses allégations deviennent de plus

4 en plus extravagantes.

5 Il est inutile que je vous rappelle que la réunion du

6 28 septembre figure dans sa première déclaration, dans la deuxième, etc.

7 Donc, en bref, il est impossible de le croire.

8 Maintenant, je voudrais aborder deux ou trois éléments. Il va

9 vous falloir déterminer s'il existe des preuves permettant de dire qu'il a

10 effectivement rencontré Milan Simic.

11 Moi, là, j'insiste sur le fait que loin d'être cohérent, il nous

12 dit "non" dans sa première déclaration préalable et il nous dit la même

13 chose dans sa deuxième et dans sa troisième déclaration préalables, mais

14 dans sa quatrième déclaration, il nous dit qu'il l'a rencontré une fois en

15 avril et dans sa cinquième déclaration préalable, il nous dit l'avoir

16 rencontré trois fois et lorsqu'il a déposé, il l'a rencontré à plusieurs

17 reprises. Vous vous souvenez de la façon dont il a protesté véhémentement

18 lorsqu'il nous a parlé d'octobre et de novembre, des mois dont il ne nous

19 a pas parlé lors de sa première déclaration, du moins il n'a pas dit qu'il

20 y avait eu des réunions lors de ces mois. Lors de sa déposition, il a dit

21 qu'il y avait eu cinq, dix, vingt réunions par mois, cinquante coups de

22 téléphone par mois.

23 Mais moi, j'affirme qu'il n'est pas un témoin que l'on puisse

24 croire du point de vue du droit ou du point de vue des faits. J'insiste

25 sur ce fait.

 

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1 Cet homme, on ne peut absolument pas le croire. Il faut

2 s'intéresser en ceci à l'article 77 du règlement de procédure et de

3 preuve. Cet homme, à aucun moment, n'a été un témoin potentiel. Si vous

4 n'en êtes pas convaincus, si vous n'êtes pas convaincus du fait qu'il

5 était témoin potentiel, à ce moment-là, vous ne pouvez condamner qui que

6 ce soit d'outrage au Tribunal.

7 S'il était un témoin potentiel, à ce moment-là la conclusion

8 logique, c'est que quiconque a vu quoi que ce soit ou en relation avec

9 quelqu'un susceptible d'être jugé par ce Tribunal est un témoin potentiel.

10 Moi, j'affirme que ce n'est pas le cas. Le règlement, tel qu'il se

11 présentait avant décembre 1998, ne comprenait pas cette phrase et il

12 s'agissait de personnes qui déposaient ou qui s'apprêtaient à déposer.

13 Moi j'estime qu'ici, on parle dans ce nouvel article de

14 personnes susceptibles de déposer dans un procès qui n'a pas commencé. Si

15 on entend par « témoin potentiel" toute personne capable de fournir des

16 éléments de preuve au sujet d'une affaire dont a à trancher ce Tribunal, à

17 ce moment-là, on se trouve dans une situation tout à fait incohérente.

18 Imaginons que deux hommes se trouvent dans un bar quelque part

19 dans le monde, et si l'un d'entre eux sait ce qui s’est produit au Kosovo

20 et dit à l'autre : "Tu sais, je crois que je vais allé me présenter au

21 Tribunal pour témoigner à ce sujet", et si son ami lui rétorque : «Tu ne

22 peux pas le faire, tu n'a pas le droit de faire cela », il lui donne un

23 coup de poing dans la figure. A ce moment-là, on pourrait en déduire que

24 cet homme pourrait être amené, ici, devant Tribunal et qu'on pourrait

25 l'accuser d'outrage au Tribunal.

 

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1 Alors que va-t-il se produire quand les avocats de la défense

2 cherchent des témoins qui ne souhaitent pas témoigner parce que leur

3 famille, les personnes avec qui elles vivent exercent des pressions sur

4 elles pour qu'elles ne viennent pas témoigner ?

5 Est-ce que nous devons présenter des requêtes ex-parte en tant

6 qu'avocats de la défense pour que soient délivrés des mandats d'arrêt pour

7 la moitié de la population d'un village de Bosnie ? Bien évidemment que

8 non !

9 Moi, j'affirme que la seule interprétation possible de

10 l'article 77, ce que l’on entend par « témoin potentiel », c'est quelqu'un

11 dont on envisage, dont les parties ont l'intention d'entendre la

12 déposition au Tribunal. Donc, ce sont les témoins dont les noms figurent

13 dans les documents de l'accusation. Et moi, j'affirme qu'en ce qui

14 concerne cet homme, ce n'était pas un témoin potentiel. Jamais, on n'a

15 envisagé de lui demander de témoigner ici.

16 Il faut penser à ce que nous ont dit MM. Vukovic et Avramovic.

17 Et étant donné ce que vous avez entendu, étant donné ce que ces hommes

18 savaient au sujet de M. Agnes, quel avocat digne de ce nom aurait même

19 envisagé d'appeler M. Agnes à comparaître ? C'est un marginal, c'est

20 quelqu'un dont les déclarations allaient à l'encontre des instructions de

21 M. Avramovic, ou de son client plutôt. C'est quelqu'un de dangereux et

22 quelqu'un dont le témoignage risquait de léser son client.

23 Vous remarquerez, d'autre part, qu'il nous a dit lui-même dans

24 sa déposition... Il n'y a eu aucun contact entre lui et M. Avramovic entre

25 octobre et février et, après il n'y a eu aucun contact non plus. Est-ce

 

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1 que cela ne nous donne pas des indications sur son importance dans la

2 préparation de l'affaire ?

3 D'autre part, je vous inviterai à étudier les facturations de la

4 défense. Vous verrez que les avocats sont allés voir cet homme le 22 et le

5 28 septembre, mais ne l'ont pas revu plus tard. Ceci montre bien qu'il

6 n'était pas envisagé comme un témoin potentiel, puisque ce sont les deux

7 seules fois où les avocats de la défense l'ont vu.

8 M. Hunt (interprétation). - Avant de passer à votre

9 "péroraison", si je puis l'appeler ainsi, ici, des documents ont été

10 déposés. Il y a eu le dépôt par Me Morison et puis par vous-même,

11 documents qui soulevaient des questions juridiques importantes sur la

12 procédure suivie, sur les faits ultra vires de l'article 77. Est-ce que

13 vous allez vous fonder sur ces éléments ?

14 M. Haynes (interprétation). - Eh bien, c'est par eux que j'ai

15 commencé. J'ai commencé par reconnaître que la Chambre de première

16 instance avait adopté une procédure donnée et, selon moi, cette procédure

17 force la Chambre à juger ces hommes au regard des charges et allégations

18 précises retenues contre eux.

19 M. Hunt (interprétation). - Ce qui veut dire que vous ne vous

20 fondez pas sur ces suggestions formulées dans le document ?

21 M. Haynes (interprétation). - Non. Effectivement, voici ma

22 péroraison. Elle se résume à deux phrases.

23 Estimez que l'affaire, qui a été prouvée au-delà de tout doute

24 raisonnable, se réfère acte d'infidélité par rapport aux éléments de

25 preuve entendus et par rapport aux critères d'établissement de la preuve.

 

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1 Monsieur Agnes n'a jamais été un témoin potentiel, ce qui veut dire qu'il

2 n'est jamais tombé sous le coup de l'application de l'article 77.

3 M. le Président (interprétation). - Maître Paterson ?

4 Mme Paterson (interprétation). - Très rapidement, nous faisons

5 vivement objection à un commentaire formulé par Me Haynes. Il a, au fond,

6 accusé des membres du Bureau du Procureur d'être eux-mêmes coupables

7 d'outrage.

8 Le 17 septembre 1999, cette Chambre a rendu une ordonnance qui

9 disait, notamment : « L'accusation a pour ordre de ne communiquer aucune

10 déclaration préalable de témoin, ni leur contenu, à d'autres personnes que

11 les représentants du Bureau du Procureur jusqu'à nouvel ordre, et dans la

12 mesure nécessaire pour permettre une enquête sur ces allégations

13 d'outrage ».

14 Maître Haynes a dit qu'au moins un des membres du Bureau du

15 Procureur aurait informé M. Agnes de la teneur d'au moins une déclaration

16 préalable ou de renseignements qui nous avaient été donnés dans le cadre

17 de cette affaire. Je voudrais le dire sans aucune équivoque, aux fins du

18 compte rendu, que rien de la sorte ne s'est produit et que ces

19 allégations, vu les circonstances, étaient tout à fait hors de propos.

20 Enfin, M. Haynes nous a demandé de tirer des extraits de la

21 déclaration faite par M. Simic au Bureau du Procureur en mars 1998. Nous

22 l'avons fait à la demande de M. Haynes. Je vais peut-être lui demander

23 d'étudier le document pour savoir s'il le satisfait.

24 (Mme Paterson remet le document à Me Haynes.)

25 (Le document est remis aux Juges.)

 

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1 M. Haynes (interprétation). - Je crois que la meilleure chose à

2 faire, ce serait de soumettre ce document en dernier ordre dans le

3 classeur que je vous ai soumis. Est-ce bien le D8 ?

4 M. le Président (interprétation). - Quelle serait la cote

5 attribuée à ce document ?

6 Problème de technologie !

7 Mme Ameerali (interprétation). - Effectivement, ce serait le

8 document D 13.

9 M. Haynes (interprétation). - J'étais loin du compte en parlant

10 de D 8 !

11 M. le Président (interprétation). - Voulez-vous intervenir en

12 duplique ? Je ne vous invite pas à le faire.

13 M. Haynes (interprétation). - Non, monsieur.

14 M. le Président (interprétation). - La Chambre va délibérer et

15 vous fera part plus tard de sa décision. La procédure est suspendue.

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17 L'audience est levée 17 heures 57.

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