Affaire n° :    IT-99-37-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Patrick Robinson
M. le Juge Mohamed Fassi Fihri

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
8 novembre 2001

LE PROCUREUR

c/

SLOBODAN MILOSEVIC

_____________________________________________________________________

DÉCISION RELATIVE AUX EXCEPTIONS PRÉJUDICIELLES

_____________________________________________________________________

Le Bureau du Procureur :

Mme Carla Del Ponte
M. Daniel Saxon
M. Dirk Ryneveld
Mme Julia Baly
Mme Cristina Romano
M. Daryl A. Mundis
M. Milbert Shin

L’Accusé :

Slobodan Milosevic

Les Amici Curiae :

M. Steven Kay
M. Branislav Tapuskovic
M. Michaïl Wladimiroff

 

I. INTRODUCTION

1. La présente Chambre de première instance du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le «Tribunal international») est saisie de deux requêtes déposées par l’Accusé les 9 et 30 août  2001 (les «Requêtes») 1. Le Bureau du Procureur (l’«Accusation») a déposé ses réponses les 16 août et 13 septembre 2001 2. Le 19 octobre 2001, les amici curiae nommés à la demande de la Chambre de première instance ont déposé un mémoire traitant des questions soulevées par l’Accusé dans ses Requêtes 3, auquel l’Accusation a répondu le 26 octobre 2001 4. La Chambre a entendu les parties et les amici curiae le 29 octobre 2001.

2. Le 30 octobre 2001, la Chambre de première instance a oralement rejeté les Requêtes , et indiqué que sa décision écrite serait rendue ultérieurement. La Chambre de première instance expose à présent par écrit les motifs de sa décision.

3. La présente Décision traite de tous les arguments, tant écrits qu’oraux, soulevés par l’Accusé, l’Accusation et les amici curiae. Bien que le Tribunal international se soit déjà prononcé sur certains de ces arguments, la Chambre les a tous étudiés très soigneusement. En effet, tout organe judiciaire est tenue d’examiner de très près toute exception tirée de l’illégalité de sa création. La Chambre note que les amici font valoir que l’Accusé assurant sa propre défense, il convient de lui accorder «le bénéfice d’arguments qu’il ne soulève pas explicitement, mais qui découlent de ses objections et arguments» 5. Cette argumentation est manifestement fondée. Cependant, lorsqu’elle doit déterminer si une requête donnée constitue une exception préjudicielle aux termes de l’article  72 du Règlement de procédure et de preuve (le «Règlement»), la Chambre est liée par les dispositions dudit Règlement et par la jurisprudence du Tribunal concernant leur interprétation 6.

II. EXAMEN

1. La question de la valeur obligatoire de précédent des décisions de la Chambre d’appel

4. En dépit du fait que la Chambre d’appel, dans son Arrêt Aleksovski 7, a conclu que ses décisions s’imposaient aux Chambres de première instance, les amici soutiennent que «la jurisprudence de la Chambre d’appel n’a pas, en soi, valeur obligatoire de précédent, mais que la Chambre de première instance peut s’en inspirer». Cependant, bien que cette affirmation soit manifestement incorrecte 8, la Chambre estime qu’il convient d’examiner à fond, en motivant ses propres conclusions, les questions soulevées sur lesquelles la Chambre d’appel s’est déjà prononcée dans l’Arrêt Tadic relatif à la compétence 9.

2. Création illégale du Tribunal international

a) Licéité

5. L’Accusé soutient que le Tribunal international est une institution illégale au motif que le Conseil de sécurité n’était pas habilité à le créer. Les amici ont souscrit à cette thèse, et ont en outre demandé que l’argumentaire de l’Accusé concernant la licéité du Tribunal soit élargi pour inclure les arguments exposés aux paragraphes 27, 32, 41, 43, 44 et 55 de l’Arrêt Tadic relatif à la compétence . La Chambre accède à cette demande. La contestation de la licéité du Tribunal repose sur le fait que le Conseil de sécurité n’est pas habilité par le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, à créer un tribunal pénal international.

6. La disposition applicable en la matière est l’article 41 de la Charte, qui permet au Conseil de sécurité d’adopter des mesures n’impliquant pas l’emploi de la force armée pour s’acquitter de l’obligation que lui impose l’article 39, de maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales. L’article 41 énumère certaines mesures que le Conseil de sécurité peut adopter. Cette liste n’est manifestement pas limitative et le Conseil de sécurité peut adopter toute autre mesure, pour autant qu’elle permette de maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales .

7. De l’avis de la Chambre, la création d’un Tribunal habilité à poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire en ex-Yougoslavie, et tenu de respecter pleinement les droits de l’accusé, constitue avant tout, dans le contexte de l’époque et le conflit qui ravageait alors le pays , une mesure destinée à rétablir la paix et la sécurité internationales. En effet , le Conseil de sécurité, dans sa résolution 827 portant création du Tribunal, a insisté sur le rôle que ce dernier pourrait jouer dans la restauration de la paix et la réconciliation en ex-Yougoslavie 10. Dans son Arrêt Tadic relatif à la compétence, la Chambre d’appel est parvenue à la même conclusion, et elle a jugé que «la création du Tribunal international relève indéniablement des pouvoirs du Conseil de sécurité en vertu de l’article  41» 11. Par conséquent, la Chambre rejette ce moyen.

8. L’Accusé soutient que la création d’une juridiction ad hoc pour un seul pays «porte atteinte à la justice et au droit», qu’une telle juridiction «enfreint tous les principes les plus élémentaires du droit», et qu’un «tribunal international créé, voire prédéterminé, pour poursuivre une seule nation à raison d'actes qui y auraient été commis et, en particulier, si ce n'est exclusivement, un groupe donné , est incapable d'équité» 12.

9. Des organismes de défense des droits de l’homme se sont, à plusieurs reprises , prononcés sur la légitimité de tribunaux ad hoc 13. Il ressort de leurs décisions que les organes judiciaires ad hoc ne sont nullement, par nature, illégitimes, et que l’important est qu’ils aient été créés par la loi, en ce sens que, comme il est noté dans l’Arrêt Tadic relatif à la compétence, ils doivent offrir «véritablement à l’accusé les garanties intégrales d’un procès équitable prévues à l’article 14 du Pacte international sur les droits civils et politiques» (le «Pacte») 14.

10. Le Tribunal remplit cette condition puisque son Statut, et en particulier l’article  21 de celui-ci, reconnaît des droits comparables à ceux garantis par le Pacte.

11. Par conséquent, ce moyen est rejeté.

b) Indépendance

12. Les amici ont développé, au paragraphe 10 de leur Mémoire, l’argument de l’illégalité du Tribunal du fait de son manque d’indépendance. Ils affirment que l’Accusé invoque cet argument en raison de «l’apparent manque d’indépendance du Procureur lorsqu’il a décidé de délivrer un acte d’accusation contre l’Accusé en premier lieu» 15. L’Accusation soutient que les amici n’ont pas établi le manque d’indépendance du Procureur. Elle ajoute qu’en l’engageant à agir ainsi, le Conseil de sécurité ne met pas davantage en cause son indépendance que les ONG et autres groupes qui, à intervalles réguliers , l’exhortent à ouvrir une information sur des crimes qui relèvent de la compétence du Tribunal international. L’Accusation soutient en effet que le terme «engager» ne signifie pas donner des «instructions» 16.

13. L’article 16 2) du Statut dispose :

Le Procureur, qui est un organe distinct au sein du Tribunal international, agit en toute indépendance. Il ne sollicite ni ne reçoit d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autre source.

14. Manifestement, s’il l’on pouvait établir que le Procureur n’a pas agi en toute indépendance, il y aurait violation de cet article. Ce serait en particulier le cas s’il avait fait preuve de mauvaise foi en mettant en accusation une personne .

15. En l’espèce, ni l’Accusé, ni les amici n’ont présenté l’ombre d’une preuve pour étayer la thèse de la mauvaise foi ou de l’abus de pouvoir dont le Procureur se serait rendu coupable en établissant un acte d’accusation à l’encontre de l’Accusé . Il ne fait aucun doute que l’indépendance du Procureur n’est pas mise en cause par le fait que le Conseil de sécurité l’a engagé «à commencer à rassembler des informations concernant les actes de violence au Kosovo qui pourraient être de la compétence du Tribunal» 17 et que l’Accusé  a été mis en accusation suite aux enquêtes ainsi menées. Il en va de même lorsqu’un gouvernement dans un système interne fixe la politique à suivre en matière de poursuites . À ce propos, l’article 18 1) du Statut impose au Procureur :

[d’ouvrir] une information d’office ou sur la foi des renseignements obtenus de toutes sources, notamment des gouvernements, des organes de l’Organisation des Nations Unies, des organisations intergouvernementales et non gouvernementales. Il évalue les renseignements reçus ou obtenus et se prononce sur l’opportunité ou non d’engager les poursuites.

Son indépendance n’est pas compromise par le fait qu’il ouvre une information sur la base de renseignements provenant d’une source particulière, comme le Conseil de sécurité. Il en irait différemment s’il évaluait lesdites informations et décidait de la mise en accusation d’un individu donné en se fondant sur les instructions d’un gouvernement, d’une institution ou d’une personne. Rien ne donne à penser que le Procureur a agi sur les instructions d’un gouvernement, d’un organe ou d’une personne, en décidant d’incriminer l’Accusé. Par conséquent, ce moyen est rejeté .

16. À ce propos, les amici ont également fait valoir que pour éviter que «l’on puisse reprocher (au Tribunal( de statuer sur sa propre licéité», ce dernier devrait demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur la question de sa compétence. Sur ce point, l’Accusation répond que le Tribunal n’est pas habilité à demander un avis consultatif à la Cour. Elle ajoute que dans son Arrêt Tadic relatif à la compétence, la Chambre d’appel a conclu que le Tribunal était compétent pour statuer sur sa propre compétence 18.

17. La Chambre rejette l’argument des amici, et ce faisant, elle affirme qu’il n’est pas nécessaire de s’interroger sur la compétence qu’a le Tribunal de statuer sur sa propre compétence dans la mesure où la Chambre d’appel a déclaré dans l’Arrêt Tadic relatif à la compétence que le pouvoir qu’a un organe judiciaire de statuer sur sa propre compétence est un «élément constitutif nécessaire dans l’exercice de la fonction judiciaire» 19. Par conséquent, la Chambre estime que cet argument n’est pas fondé.

3. Procès équitable et respect des droits de l’homme

a) Allégation de partialité

18. Les amici soutiennent qu’en déclarant le TPIY incapable de le juger de manière équitable, ou de garantir ses droits fondamentaux, l’Accusé «fait valoir implicitement la partialité» 20. En tout état de cause, l’Accusé a lui-même déclaré à propos du Tribunal que «(l('esprit même de cette entreprise procède de la persécution. Rares sont les juges amenés à siéger dans un tribunal créé dans de telles circonstances qui se sentiront libres d'acquitter un prévenu, sauf peut-être ceux d'importance secondaire ou ceux qui sont manifestement innocents, ou encore pour feindre un semblant d'objectivité» 21.

19. La Chambre interprète cet argument comme une mise en cause de l’impartialité du Tribunal, et par là même, de la Chambre. Même s’il n’entre pas dans le cadre de l’article 72 du Règlement, la Chambre doit examiner l’argument selon lequel l’Accusé ne serait pas jugé équitablement parce que l’un de ses membres est de parti pris . Dans l’Arrêt Furundzija, la Chambre d’appel a conclu, à propos du parti pris invoqué par l’appelant à titre de moyen d’appel, que ce dernier :

aurait pu soulever la question devant la Chambre de première instance préalablement au procès ou au cours de celui-ci. Sur cette base, la Chambre d’appel pourrait conclure que l’Appelant a renoncé à son droit de soulever la question au stade actuel de la procédure et elle pourrait rejeter ce motif d’appel 22.

20. L’Accusé n’étaye pas davantage son allégation de partialité 23.

21. Dans l’affaire Furundzija, la Chambre d’appel a conclu que la partialité d’un juge pouvait être établie de trois manières. Tout d’abord, par la preuve d’une partialité réelle. Ensuite, si le Juge a un intérêt, matériel ou autre, dans l’affaire . Enfin, si un observateur raisonnable et bien informé peut légitimement redouter un parti pris 24.

22. Seul le troisième critère est pertinent dans les circonstances de l’espèce. Ni l’Accusé, ni les amici n’ont avancé qu’un observateur raisonnable et bien informé pourrait légitimement redouter un parti pris de la part de la Chambre. Ce moyen est donc rejeté.

b) Violation alléguée du droit de l’Accusé à la vie privée et de sa liberté d’expression

23. Les amici soutiennent que l’interdiction de toute communication entre l’Accusé et les médias constitue une violation de son droit à la vie privée et de sa liberté d’expression. Ils ajoutent qu’une telle interdiction, non motivée, peut aisément être interprétée comme l’expression du manque d’indépendance du Tribunal international 25. Selon l’Accusation , les arguments de l’Accusé sur ce point ne touchent pas, par nature, à la compétence , mais aux règles de détention 26 concernant les questions de communication 27.

24. Cet argument n’entre pas dans le champ d’application de l’article 72 du Règlement , même interprété de la manière la plus large. Il ne s’agit pas d’une exception préjudicielle. Cependant, même s’il n’en était pas ainsi, de telles restrictions apportées à la liberté d’expression d’un accusé détenu entreraient tout à fait dans la catégorie des limitations permises par le Pacte, limitations qui doivent être prévues par la loi et nécessaires à la sauvegarde de l’intérêt général, et notamment de l'ordre public 28. La Convention européenne des Droits de l’Homme prévoit des restrictions similaires à la liberté d’expression. Elle dispose que l’exercice de cette liberté peut être soumis «à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi» et nécessaires à l’intérêt général, et notamment à la défense de l’ordre et la prévention du crime 29. En outre, il convient de noter qu’aux termes du principe 19 de l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement :

Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit de recevoir des visites, en particulier de membres de sa famille, et de correspondre, en particulier avec eux, et elle doit disposer de possibilités adéquates de communiquer avec le monde extérieur, sous réserve des conditions et restrictions raisonnables que peuvent spécifier la loi ou les règlements pris conformément à la loi 30.

25. Par conséquent, ce moyen est rejeté.

4. L’allégation selon laquelle l’Accusé échappe à la juridiction du Tribunal du fait de son statut d’ancien Président de la République fédérale de Yougoslavie (la «RFY») et de son transfert illégal par le gouvernement de la République de Serbie , en violation du droit interne

a) Incompétence du fait de son statut d’ancien Président

26. La Chambre note que l’Accusé n’a pas explicitement soulevé cet argument. Dans l’extrait cité par les amici, il est dit que «le Tribunal n’est pas compétent pour juger le Président Milosevic» 31. La Chambre examinera toutefois cet argument, puisqu’il a été invoqué par les amici. L’Accusation a répondu que l’article 7 2) du Statut reprend les règles du droit international coutumier, et note en particulier que le Tribunal international pour le Rwanda a condamné Jean Kambanda, ancien Premier Ministre du Rwanda, pour son rôle dans le génocide de 1994 32.

27. L’article 7 2) du Statut dispose que

[l]a qualité officielle d’un accusé, soit comme chef d’État ou de gouvernement, soit comme haut fonctionnaire, ne l’exonère pas de sa responsabilité pénale et n’est pas un motif de diminution de la peine.

Les amici indiquent que l’Accusé refuse en fait d’admettre la validité de cet article.

28. Il n’y a absolument aucune raison de contester la validité de l’article 7 2)  du Statut, qui reprend une règle de droit international coutumier.

29. Cet article trouve son origine dans l’évolution de la doctrine de la responsabilité pénale individuelle après la Deuxième Guerre mondiale, lorsqu’elle a été consacrée par l’article 7 de la Charte de Nuremberg 33 et par l’article 6 du Statut du Tribunal de Tokyo 34. La valeur coutumière de l’article est encore confirmée par son incorporation dans un grand nombre d’autres instruments, ainsi que dans la jurisprudence.

30. L’on peut mentionner les instruments suivants : l’article IV de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide 35  ; le principe III des Principes de Nuremberg 36  ; l’article 6 du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda 37  ; l’article 6 2) du Statut de la Cour spéciale pour la Sierra Leone 38  ; l’article 27 du Statut de la Cour pénale internationale (la «CPI»), adopté à Rome (1998) 39 et l’article 7 du Projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité (1996) 40.

31. Il convient de signaler tout particulièrement le Statut de la CPI qui, s’il n’est pas encore entré en vigueur, a déjà été signé par 139 États et a obtenu 43  des 60 ratifications nécessaires à son entrée en vigueur. Cet instrument multilatéral revêt la plus grande importance et a fait, même à ce stade, plus ou moins l’unanimité . La Chambre accorde également une importance particulière au Projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, élaboré par la Commission du Droit international en 1996. Elle cite ces deux instruments modernes comme preuve du caractère coutumier de la règle selon laquelle un chef d’État ne peut pas mettre en avant sa position officielle pour ne pas répondre des crimes relevant de la compétence du Tribunal.

32. En outre, la jurisprudence vient confirmer cette règle. Il a été déclaré dans le Jugement de Nuremberg :

Le principe du Droit international, qui dans certaines circonstances, protège les représentants d’un État, ne peut pas s’appliquer aux actes condamnés comme criminels par le Droit international. Les auteurs de ces actes ne peuvent invoquer leur qualité officielle pour se soustraire à la procédure normale ou se mettre à l’abri du châtiment [...] un idée fondamentale du Statut est que les obligations internationales qui s’imposent aux individus priment leur devoir d’obéissance envers l’État dont ils sont ressortissants . Celui qui a violé les lois de la guerre ne peut, pour se justifier, alléguer le mandat qu’il a reçu de l’État, du moment que l’État, en donnant ce mandat, a outrepassé les pouvoirs que lui reconnaît le Droit international 41.

33. Plus récemment, dans l’affaire Pinochet, la Chambre des Lords a conclu que le sénateur Pinochet ne bénéficiait d’aucune immunité pour les tortures et la complicité de torture dont il se serait rendu coupable dans l’exercice de ses fonctions de chef d’État. Lord Millet a notamment déclaré :

À l’avenir, si l’objectif est de protéger comme il convient les droits fondamentaux de la personne, il faut que ceux qui commettent des atrocités contre des populations civiles s’attendent à en répondre. Dans ce contexte, le rang élevé de l’accusé ne saurait constituer un moyen de défense 42.

34. Par conséquent, ce moyen est rejeté.

b) Incompétence du fait de son transfèrement illégal

35. Les amici ont utilement développé ce moyen au paragraphe 15 de leur Mémoire . L’argument est que l’Accusé a été illégalement transféré au Tribunal pour les raisons suivantes :

a) Le Tribunal a envoyé les mandats d’arrêt aux autorités de la RFY, et non pas au gouvernement de la République de Serbie. C’est toutefois ce dernier qui a livré l’Accusé au Tribunal alors qu’il n’en avait pas le pouvoir.

b) Le gouvernement serbe n’a aucune obligation internationale de coopérer avec le Tribunal.

c) L’article 18 de la Constitution fédérale ne prévoit pas l’extradition ou la remise de ressortissants yougoslaves à un organe international.

d) Dans les circonstances exposées aux points a), b) et c) ci-dessus, le transfèrement de l’Accusé constitue un abus de procédure, en ce que les procédures de la RFY n’ont pas été respectées et que l’Accusé a été illégalement livré au Tribunal.

36. À ce propos, l’Accusation soutient qu’il est un principe juridique établi : les États ne peuvent invoquer leur législation nationale pour éluder leurs obligations internationales. À cet égard, l’Accusation note que la RFY était tenue, en droit international, aux termes des articles 9 1) et 29 du Statut, de déférer l’Accusé devant le Tribunal 43.

37. L’article 9 4) du Pacte dispose :

Quiconque se trouve privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale .

38. Cette disposition n’est pas reprise dans le Statut du Tribunal. Cependant, dans la mesure où elle consacre l’un des droits fondamentaux de l’accusé en droit international coutumier, elle est applicable et a été appliquée par le Tribunal.

39. La Chambre d’appel du TPIR saisie de l’affaire Barayagwisa 44 a souligné l’importance du droit qu’a l’Accusé d’invoquer cette disposition, qui a pour nom habeas corpus dans certains systèmes de la common law .

40. L’un des corollaires fondamentaux du droit qu’a un accusé de contester la légalité de sa détention est que son recours doit être examiné dans les plus brefs délais . C’est pourquoi la Chambre assimilera cette demande à un recours pour illégalité de la détention. La Chambre peut procéder de la sorte puisque le recours a été formé par l’Accusé et qu’elle a entendu les arguments de toutes les parties ainsi que des amici en la matière.

41. À l’audience, le Procureur a soutenu que la RFY «n’avait pas de pouvoir d’exécution , c’est-à-dire que tous les transfèrements, toutes les décisions prises par la police ou toute mesure contraignante sont mis en oeuvre par la République de Serbie [...] qui procède aux transferts et aux arrestations, comme dans le cas des autres accusés venant de Belgrade» 45.

42. L’article 58 du Règlement dispose :

Les obligations énoncées à l’article 29 du Statut prévalent sur tous les obstacles juridiques que la législation nationale ou les traités d’extradition auxquels l’État intéressé est partie pourraient opposer à la remise ou au transfert de l’accusé ou d’un témoin au Tribunal.

43. La question est de savoir si cet article est applicable dans la mesure où l’obligation énoncée à l’article 29 du Statut pesait sur la RFY, et non pas sur la République de Serbie.

44. Les mandats d’arrêt délivrés par le TPIY les 24 mai 1999 et 22 janvier 2001 ont été adressées aux autorités de la RFY, et non pas au gouvernement de la République de Serbie. Le second de ces mandats a été signifié au Ministre fédéral de la Justice en personne, à Belgrade le 6 avril 2001. Le 3 mai, le Président du Tribunal de district de Belgrade a annoncé que l’acte d’accusation du 22 mai 1999 et la Décision relative à l’examen dudit acte, datée du 24 mai 1999, avaient été signifiés à l’Accusé. Le  21 mai 2001, le Ministre de la Justice a confirmé au Greffier du Tribunal que l’acte d’accusation avait bien été signifié à l’Accusé. Ce dernier se trouvait alors en détention pour infraction à la loi pénale de la République de Serbie, infraction sans rapport avec les chefs d’accusation retenus à son encontre par le Tribunal international. Les autorités serbes ont livré l’Accusé au Tribunal, le 28 juin 2001 , avant que la RFY, alors saisie de l’affaire, ne prenne toute autre mesure.

45. L’article 58 du Règlement a pour objet de garantir que les procédures internes prévues pour l’arrestation et le transfèrement d’un accusé par un État qui a reçu une demande en ce sens, ne servent pas de prétexte à la non-exécution d’une telle demande. L’on ne saurait trop insister sur l’importance que revêt l’exécution des demandes adressées en vertu de l’article 29 du Statut. Le Secrétaire général, dans son Rapport, a mis l’accent sur l’importance de cette obligation juridique, en déclarant que «le fait que le Tribunal international soit créé par voie de décision adoptée au titre du Chapitre VII signifie que tous les États ont l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à cette décision» ; il a ajouté que «le mandat d’amener ou ordonnance de transfert sous la garde du Tribunal émanant d’une Chambre de première instance seront considérés comme donnant effet à une mesure coercitive relevant du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies» 46.

46. Cela étant, l’article 58 doit être interprété en tenant pleinement compte de sa finalité. Par conséquent, la Chambre conclut que même si le transfèrement a été effectué par le gouvernement de la République de Serbie, et non par les autorités de la RFY auxquelles la demande avait été adressée, l’article 58 du Règlement s’applique et l’Accusé a donc été transféré conformément aux dispositions du Statut.

47. L’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités est également pertinent. Il se lit comme suit :

Une Partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant de la non-exécution d'un traité [...].

Le Statut du Tribunal s’interprète comme un traité. Il impose à la RFY de faire droit à une demande d’arrestation et de transfèrement d’un Accusé ; la RFY ne peut donc pas se prévaloir de son droit interne, et en particulier la répartition des pouvoirs entre l’État fédéral et les États fédérés pour se dérober à ses obligations . En l’espèce, c’est l’Accusé, et non pas la RFY, qui invoque le système constitutionnel yougoslave ; or, si cette dernière ne peut s’en prévaloir, c’est vrai, a fortiori , de l’Accusé. Par conséquent, ce moyen est rejeté.

48. Les amici ont explicitement invoqué «la théorie de l’abus de procédure », déjà examinée par la Chambre d’appel saisie de l’affaire Barayagwisa. Il est deux points à noter concernant la théorie telle qu’elle a été développée dans la jurisprudence de certains systèmes juridiques et du Tribunal international . Premièrement, un abus de procédure n’entraîne pas l’incompétence du Tribunal, mais la question qui se pose est de savoir si le Tribunal devrait user de son pouvoir discrétionnaire pour refuser de juger l’Accusé. Deuxièmement, le Tribunal usera de son pouvoir discrétionnaire pour refuser de juger l’Accusé s’il a été porté gravement atteinte à ses droits.

49. Sur ce premier point, il ressort clairement de l’affaire R. v. Horseferry Road Magistrates Court, Ex parte Bennett que :

[U]n tribunal peut, à sa discrétion, ordonner qu’il soit sursis à des poursuites pénales au motif que celles-ci seraient constitutives d’abus de sa propre procédure , notamment soit 1) à cause de l’impossibilité (généralement du fait de retard qui interviendrait) de garantir un procès équitable à l’accusé, soit 2) parce que le fait de juger l’accusé dans le cadre d’une affaire particulière ferait offense à son idée de la justice et des exigences de la procédure 47.

50. À propos du second point, au paragraphe 74 de l’Arrêt Barayagwisa, la Chambre d’appel a souligné que le pouvoir de rejeter un chef d’accusation s’exerce «lorsqu’au vu des violations graves et flagrantes dont les droits de l’accusé font l’objet, l’exercice d’une telle compétence pourrait s’avérer préjudiciable à l’intégrité du Tribunal».

51. À la lumière de cette jurisprudence, la Chambre conclut que les circonstances de l’arrestation et du transfert de l’Accusé (par le gouvernement de la République de Serbie, auquel aucune demande n’avait été adressée, mais qui fait partie intégrante de la RFY, qui avait, quant à elle, reçu notification du mandat d’arrêt) ne sont pas telles que les droits de l’Accusé s’en sont trouvés gravement bafoués. Il convient de noter que dans l’affaire Barayagwisa, la Chambre d’appel avait conclu à un abus de procédure, au motif que l’Accusé avait été détenu onze mois sans être informé des accusations portées contre lui 48. Par conséquent, la théorie de l’abus de procédure ne s’applique pas, et ce moyen est rejeté.

5. Compétence territoriale

52. Les amici curiae soutiennent que la limitation de la compétence ratione loci du Tribunal est discriminatoire. Ils reprennent des arguments antérieurement avancés concernant la nature ad hoc du Tribunal et les poursuites sélectives . Ces questions ont déjà été examinées aux paragraphes 9, 10, 13, 14 et 15 (supra ). Par conséquent, ce moyen est rejeté.

53. Par conséquent, toutes les demandes sont refusées.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre
Richard May

Fait le 8 novembre 2001
La Haye
(Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1 - L’accusé a initialement déposé une Requête auprès du Greffe, datée du 9 août 2001. Voir Le Procureur c/ Slobodan Milosevic, affaire n° IT-99-37-PT, Exception préjudicielle aux fins de protection, 9 août 2001 (l’«Exception préjudicielle»). À la demande de l’accusé, seuls les arguments exposés au paragraphe 8 de l’Exception préjudicielle ont été examinés. Ensuite, le 30 août 2001, l’accusé a déposé un document sans intitulé, exposant ses arguments portant, pour la plupart, sur l’illégalité du Tribunal (la «Requête de Milosevic»).
2 - Le Procureur c/ Slobodan Milosevic, affaire n° IT-99-37-PT, Réponse de l'Accusation à l'«Exception préjudicielle aux fins de protection» déposée le 9 août 2001, 16 août 2001 (la «Réponse de l’Accusation à l’Exception préjudicielle») ; Réponse de l’Accusation au Mémoire relatif à l’illégalité du TPIY déposé le 31 août 2001 par l’accusé Slobodan Milosevic, 13 septembre 2001 (la «Réponse de l’Accusation à la Requête de Milosevic»).
3 - Le Procureur c/ Slobodan Milosevic, affaire n° IT-99-37-PT, Mémoire des amici curiae relatif à la compétence, 19 octobre 2001 (le «Mémoire des amici»).
4 - Le Procureur c/ Slobodan Milosevic, affaire n° IT-99-37-PT, Réponse de l’Accusation au Mémoire des amici curiae relatif à la compétence, déposé le 19 octobre 2001, 26 octobre 2001 (la «Réponse de l’Accusation au Mémoire des amici»).
5 - Mémoire des amici, par. 6.
6 - À cet égard, la Chambre a tenu compte des arguments de l’Accusation, qui soutient que si un accusé qui décide d’assurer lui-même sa défense peut bénéficier d’une grande latitude dans son argumentation invoquée aux termes de l’article 72 du Règlement, les questions sur lesquelles il peut se fonder pour plaider l’incompétence en vertu dudit article doivent respecter certaines limites. Voir Réponse de l’Accusation aux amici, par. 3.
7 - Le Procureur c/ Aleksovski, affaire n° IT-95-14/1-A, Arrêt, 24 mars 2000 (l’«Arrêt Aleksovski»).
8 - À ce titre, la Chambre a noté les arguments de l’Accusation figurant au paragraphe 6 de sa Réponse au Mémoire des amici ; celle-ci rappelle la conclusion de la Chambre d’appel saisie de l’affaire Aleksovski, à savoir «qu’une interprétation correcte du Statut exige que la ratio decidendi de ses décisions s’impose aux Chambres de première instance».
9 - Le Procureur c/ Dusko Tadic, affaire n° IT-94-1-AR72, Arrêt relatif à l’appel de la Défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 2 octobre 1995 (l’«Arrêt Tadic relatif à la compétence»).
10 - UN Doc. S/RES/827 (1993). Dans sa résolution, le Conseil de sécurité constate que la situation en ex-Yougoslavie «continue de constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales» et se déclare convaincu que «dans les circonstances particulières qui prévalent dans l’ex-Yougoslavie, la création d’un tribunal international, en tant que mesure spéciale prise par lui, et l’engagement de poursuites contre les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire international [...] contribueraient à la restauration et au maintien de la paix».
11 - Arrêt Tadic relatif à la compétence, par. 36.
12 - Requête de Milosevic, p. 4 et 5.
13 - Voir par exemple, par. 4 des Commentaires généraux du Comité des Droits de l’Homme sur l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, selon lequel : «S'il est vrai que le Pacte n'interdit pas la constitution de tribunaux de ce genre, les conditions qu'il énonce n'en indiquent pas moins clairement que le jugement de civils par ces tribunaux devrait être très exceptionnel et se dérouler dans des conditions qui respectent véritablement toutes les garanties stipulées à l'article 14», H.R. Comm., 43e session, supp. n° 40, par. 4, UN Doc A/43/40 (1988) ; Cariboni c/ Uruguay H.R. Comm. 159/83, 39e session, supp. n° 40, UN Doc A/39/40) ; Inter-Am C.H.R, Rapport annuel 1972, OEA/Ser. P, AG/doc. 305/73 rev. 1, 14 mars 1973, p. 1 ; Inter-Am C.H.R., Rapport annuel 1973, OEA/Ser. P, AG/doc. 409/174, 5 mars 1974, p. 2 à 4) (citation reprise de l’Arrêt Tadic relatif à la compétence, par. 45).
14 - Arrêt Tadic relatif à la compétence, par. 45.
15 - Mémoire des amici, par. 10.
16 - Réponse de l’Accusation au Mémoire des amici, par. 9.
17 - Résolution du Conseil de sécurité 1160, S/RES/1160 (1998), par. 17.
18 - Réponse de l’Accusation au Mémoire des amici, par. 21 et 22.
19 - Arrêt Tadic relatif à la compétence, par. 18.
20 - Mémoire des amici, p. 7 et 8.
21 - Requête de Milosevic, p. 7.
22 - Le Procureur c/ Furundzija, affaire n° IT-95-17/1-A, Arrêt, 21 juillet 2000 (l’«Arrêt Furundzija»), par. 174.
23 - Voir supra, par. 18.
24 - Arrêt Furundzija, par. 189.
25 - Mémoire des amici, par. 11.
26 - Règlement portant régime de détention des personnes en attente de jugement ou d’appel devant le Tribunal ou détenues sur l’ordre du Tribunal, IT/38/Rev. 8.
27 - Réponse de l’Accusation, par. 10.
28 - Voir article 19 3) du Pacte.
29 - Article 10 2) de la Convention européenne des Droits de l’Homme.
30 - Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement, adopté par la Résolution 43/173 de l’Assemblée générale, datée du 9 décembre 1988 [Non souligné dans l’original].
31 - Exception préjudicielle, point 5.
32 - Réponse de l’Accusation, par. 12 et 13.
33 - Agreement for the Prosecution and Punishment of the Major War Criminals of the European Axis, 82 UNTS 279.
34 - Statut du Tribunal militaire international pour l’Extrême Orient, in vol. 2 du Records of the International Military Tribunal for the Far East (R. John Pritchard ed.).
35 - Paris, 9 décembre 1948, UNTS, vol. 78, 277.
36 - Principes du droit international consacrés par le statut du Tribunal de Nuremberg et dans le jugement de ce Tribunal, UNGAOR, 5e session, suppl. n° 12, UN Doc. A/1316 (1950).
37 - Résolution du Conseil de sécurité 955 portant création du Tribunal international pour le Rwanda, UN Doc. S/RES/955 (1994).
38 - UN Doc. S/2000/915, 4 octobre 2000.
39 - UN Doc. A/CONF. 183/9, 17 juillet 1998.
40 - Commission du droit international, texte adopté lors de la 48e session, 1996, Annuaire de la Commission du Droit international, 1996, Vol. II (2), doc. A/51/10 (le «Rapport de la Commission du Droit international»).
41 - Procès des grands criminels de guerre devant les tribunaux militaires de Nuremberg, en vertu de la Loi du Conseil de contrôle n° 10 ; Voir Rapport de la Commission du Droit international, commentaire 3) de l’article 7.
42 - Décision de la Chambre des Lords du 24 mars 1999, R. v. Bow Street Metropolitan Stipendary Magistrate and others, ex parte Pinochet Ugarte (2001) 1 AC 147, (1999) 2 All ER 97 (1997) 2 WLR 827, (1999) 1 LRC 588 et 589 [Traduction non officielle].
43 - Réponse de l’Accusation au Mémoire des amici, par. 15 et 16.
44 - Jean-Bosco Barayagwisa c/ Le Procureur, affaire n° IT-97-19-AR72, Décision, 3 novembre 1999 (la «Décision Barayagwisa»). La Chambre d’appel a infirmé une décision dans cette affaire pour des motifs qui n’affectent en aucun cas la validité de la décision de la Chambre quant à l’importance du droit de l’accusé à l’habeas corpus.
45 - Audience, 29 octobre 2001, Compte rendu d’audience, p. 62 et 63 [Traduction non officielle].
46 - Rapport du Secrétaire général établi conformément au paragraphe 2 de la Résolution 808 du Conseil de sécurité (1993), UN Doc. S/25704, par. 125 et 126.
47 - Décision de la Chambre des Lords du 24 juin 1993 (1994) 1 AC 42 : (1993) 3 All ER 138 ; (1993) 3 WLR 90, cité dans l’Arrêt Barayagwisa, par. 75 [Non souligné dans l’original] [Traduction non officielle].
48 - Arrêt Barayagwisa, par. 86.