Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Jeudi 14 février 2002.)

2 (Déclaration liminaire de l'accusé, M. Slobodan Milosevic.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures.)

4 (Audience publique.)

5 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

6 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

7 M. le Président (interprétation): Le micro devrait être allumé. Il est

8 allumé maintenant, c'est bon.

9 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous m'entendez?

10 J'avais dit que j'espérais que… et que je m'imaginais qu'en fonction du

11 Règlement que vous m'avez expliqué vous ne m'interrompriez plus.

12 Je voudrais commencer avec un enregistrement vidéo et je poursuivrai par

13 la suite.

14 Je demanderai maintenant à la cabine technique de nous faire passer la

15 vidéo.

16 M. le Président (interprétation): Que ce soit fait!

17 (Début de la diffusion vidéo.)

18 (Interprétation de la vidéo.)

19 "Les gens en Yougoslavie souffrent encore des conséquences de la guerre;

20 la poussière et les irradiés et les bombes qui n'ont pas explosé se

21 trouvent encore au Kosovo. On sait bien que la guerre n'a pas résolu les

22 problèmes au Kosovo mais qu'il les a accentuées."

23 (Interruption de la diffusion vidéo.)

24 M. le Président (interprétation): Pourrait-on entendre l'interprétation de

25 ceci? Je demande aux interprètes de nous apporter leur aide.

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1 Bien. Nous commençons à nouveau la diffusion.

2 (Reprise de la diffusion vidéo.)

3 "Pour des raisons soi-disant humanitaires, les gens souffrent encore des

4 conséquences de la guerre. Cette poussière d'uranium et les bombes non

5 explosées au Kosovo menacent encore la population. Les conséquences des

6 attaques aériennes ne peuvent être encore englobées dans leur ensemble. La

7 guerre au Kosovo n'a rien résolu mais a accentué les problèmes. Les

8 nettoyages de la part des Serbes ont créé une ambiance… (Inaudible.)

9 Avec la propagande de guerre de l'OTAN, on a dit qu'il y a eu massacre à

10 Racak. Tous les doutes qui persistent encore font l'objet du rapport

11 suivant. Ce village au Kosovo est bien connu: Racak, connu dans le monde

12 entier. C'est ici que l'on aurait perpétré un massacre terrible, massacre

13 qui a occasionné une attaque de l'aviation de l'OTAN. Une mission de

14 vérification de l'OSCE est arrivée ici avec plusieurs équipes de

15 télévision. On a retrouvé 44 corps. Et Walker a dit qu'il s'agissait d'un

16 massacre et non pas de victime de la guerre. Les cadavres portaient des

17 blessures sur leur visage. Nous avons besoin de quelques instants pour

18 retrouver nos esprits.

19 Mais qu'est-il arrivé vraiment à Racak? Ici, à l'université de Pristina,

20 le médecin-légiste finlandais a examiné les cadavres, et ses recherches ne

21 disent pas qu'il s'est agi d'un massacre; et elle a parlé pour la première

22 fois de la chose pour le compte de la télévision: "Je suis consciente du

23 fait que cette scène avait été montée dans son ensemble car cela est

24 effectivement possible, nos premières recherches l'ont bien indiqué. En

25 outre, les examens de médecine légiste que nous avons effectués en

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1 novembre 1999 ont donné des résultats, et nous avons communiqué ces

2 résultats directement au Tribunal international de La Haye."

3 L'ambassadeur Walker est arrivé à Racak un samedi; et il avait décidé lui-

4 même de qualifier cet événement de "massacre". J'ai systématiquement évité

5 de me servir de ce terme. Il est un doute pour ce qui est du massacre

6 survenu. Des données nous disent qu'il y avait des membres de l'UCK, Racak

7 avait été une place forte à l'époque pour l'UCK. Bon nombre d'informations

8 nous indiquent qu'il y avait eu, sans aucun doute, beaucoup de conflits

9 entre les effectifs serbes et les forces de l'UCK. En sus, on m'a dit, et

10 j'ai lu certaines informations à ce sujet, que ce jour-là on avait tué des

11 membres de l'UCK à cet endroit-là.

12 Qu'est-il arrivé à Racak? Les vidéos du 15 janvier 1999 nous montrent des

13 policiers serbes qui avaient inspecté les maisons et perquisitionné. Ce

14 n'est que par la suite que l'on découvrira ici 44 corps. Est-ce que ce

15 massacre, soit-disant "massacre", avait été la conséquence des conflits

16 armés entre les forces serbes et les forces de l'UCK?

17 Voilà ce qu'en dit un membre de l'UCK: "Nous avons vu les Serbes arriver.

18 Nous avons pris des positions et avons ouvert le feu. Nous savions qu'à

19 chacune de ces attaques de notre part, ils allaient se venger sur les

20 civils".

21 Racak, conséquence d'une provocation de l'UCK, avait été qualifiée comme

22 telle par le ministère des Affaires étrangères à Washington qui avait

23 supposé que c'est bien de cela qu'il s'était agi. L'UCK avait compté sur

24 le fait que la perte de civils allait être présentée dans le monde comme

25 des victimes pour donner prétexte à une intervention de l'extérieur.

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1 Le ministre de la Défense allemand a également repris les termes de

2 l'ambassadeur Walker, parce que dans ce rapport secret du ministère

3 allemand de la Défense sur le Kosovo, il est dit: "Les Albanais ont

4 probablement été tués lors de l'attaque des policiers serbes, le 15

5 janvier 1999, visant à régler les comptes aux membres de l'UCK".

6 Walker a reconnu, en date du 22 janvier 1999, à Pristina que lors de la

7 visite à Racak il n'avait pas connu toutes les circonstances de

8 l'événement. Et aux Etats-Unis d'Amérique, Racak avait été également

9 l'événement le plus important, et les dires de Walker ont été décisifs.

10 C'est ce qui a conforté les opinions en Europe, y compris l'OSCE, pour ce

11 qui était de la prise de certaines mesures, et c'est l'engrenage des

12 événements qui a conduit aux bombardements.

13 Pour ce qui est de Racak, il semblerait que nous ne saurons jamais la

14 vérité mais les morts ont été utilisés, mis à profit pour justifier les

15 attaques de l'OTAN. Et les gens de l'OSCE ont également visité les lieux

16 avec M. Walker, et peu de temps après on avait affirmé qu'il s'était agi

17 d'un massacre perpétré par les Serbes mais, à ce moment-là, plus personne

18 ne pouvait apporter de jugement. Cette opinion a été reprise par l'OSCE,

19 les Nations Unies et par tous les gouvernements du monde.

20 Un jour plus tard, l'OTAN a tenu une réunion exceptionnelle qui a été tout

21 à fait inusuelle, inhabituelle. Par un comportement de ce genre, c'est

22 Walker qui a allumé la mèche qui a conduit à la guerre. Une guerre qui a

23 constitué une violation du droit international, une guerre qui a coûté la

24 vie de beaucoup de gens et une guerre pour laquelle la responsabilité doit

25 être assumée par les hommes politiques occidentaux.

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1 (Interruption de la diffusion vidéo.)

2 M. Milosevic (interprétation): La diffusion, il y en a encore.

3 (Reprise de la diffusion vidéo.)

4 (Reprise de l'interprétation de la vidéo.)

5 "Chers concitoyens, l'OTAN a commencé ce soir ses frappes aériennes contre

6 des objectifs militaires en Yougoslavie. L'alliance de l'OTAN va éviter

7 ainsi la violation des droits de l'homme et une catastrophe humanitaire au

8 Kosovo. Le Président yougoslave Milosevic mène une guerre sans merci sur

9 ces lieux-là.

10 Nous ne menons pas une guerre mais nous sommes conviés à trouver une

11 solution pacifique. Une solution pacifique qui peut comprendre des moyens

12 militaires."

13 Ce film montre comment la population a été induite dans l'erreur depuis

14 les premières journées de la guerre au Kosovo. On voit comment les faits

15 ont été manipulés, comment on a manipulé, comment on a menti. Ce film

16 montre pourquoi des bombes sont tombées sur Belgrade. Cela a commencé par

17 un mensonge.

18 L'OTAN a affirmé avoir jeté des bombes pour protéger des vies d'Albanais

19 du Kosovo. Mais quand les premières bombes sont tombées, on a vu des

20 images de ce genre. Les Serbes apeurés fuyaient leur cave et les abris

21 souterrains, le peu d'abris qu'il y avait en ville.

22 Et nous entendrons maintenant le speaker de la Radio serbe: "Un grand

23 nombre d'avions se rapproche de Belgrade. Nous prions les citoyens

24 d'éteindre leurs lumières. Attention! Un grand groupe d'avions ennemis

25 s'approche de Belgrade. Citoyens, restez dans vos abris. Attendez des

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1 instructions, les instructions à venir."

2 On pouvait voir la peur dans les yeux des enfants serbes avant que les

3 choses ne commencent. Ce sont des images de la télévision yougoslave, mais

4 cela était trop réaliste pour pouvoir servir de propagande serbe. La peur

5 de la guerre est une peur que l'on ne partage pas avec autrui. C'est

6 l'image de la guerre.

7 Le porte-parole de l'OTAN savait déjà quelle était la puissance de l'image

8 diffusée. L'essentiel, c'est que l'ennemi n'ait pas le monopole sur les

9 images et il faut mettre au premier plan la tactique de l'OTAN et non pas

10 la propagande de Milosevic. Nous conduisons une guerre aérienne parfaite.

11 Bon nombre de journalistes ont parlé de l'image diffusée par Milosevic.

12 Mais qui croire? Les images diffusées ou les paroles que l'on pouvait

13 entendre?

14 La prochaine fois que la CNN ou la BBC montreront des images de réfugiés

15 bombardés, nous pourrons dire que nous y croyons et que nous nous

16 excusons. Mais nous voyons des fosses communes, des gens qui ont été tués

17 intentionnellement et placés dans ces fosses communes.

18 Mais l'OTAN ne disposait pas d'image de fosses communes. On nous montrait

19 seulement des réfugiés albanais du Kosovo. Sur leurs visages et sur les

20 visages des Serbes dans leurs abris, on voyait la peur et la souffrance.

21 Mais que nous disent donc ces images? Est-ce que cela aide l'OTAN? Est-ce

22 que cela donne l'impression d'être un appel à des puissances étrangères,

23 disant "Venez à notre secours"? Est-ce que les souffrances humaines ne

24 constituent pas une obligation et une opportunité pour une intervention

25 militaire? Les souffrances humaines des Albanais du Kosovo, est-ce ce que

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1 c'est là la priorité ou une obligation?

2 Le ministre allemand de la Défense, Rudolph Scharping, explique, en 1999,

3 pourquoi il a envoyé au Kosovo des soldats allemands: "Nous

4 n'entreprendrions jamais des mesures militaires s'il n'y avait pas eu de

5 catastrophe humanitaire avec 250.000 réfugiés au Kosovo. Et avec plus de

6 400.000 personnes déplacées et le nombre de morts que nous ignorons

7 encore. Nous ignorons encore quel est le nombre de morts."

8 L'OSCE était censée le savoir. Les seuls observateurs rapportaient

9 régulièrement des événements. Leur bilan pour le mois de mars 1999 parlait

10 de 39 morts sur tout le territoire du Kosovo. Est-ce que c'est là la

11 catastrophe humanitaire qui nous menaçait?

12 Le diplomate américain et le représentant de l'OSCE se trouvant là-bas au

13 Kosovo nous disaient: "Les fondements, pour ce qui est de la légitimité de

14 la participation allemande, avaient été la soi-disant catastrophe

15 humanitaire." Cette catastrophe humanitaire, en tant que catégorie de

16 droit international justifiant l'intervention militaire au Kosovo,

17 existait avant le début de la guerre. Avant le début des frappes aériennes

18 de l'OTAN, il n'y avait pas eu de catastrophes humanitaires; il est

19 certain qu'il y avait des problèmes humanitaires, qu'il y avait eu

20 beaucoup de réfugiés. Mais voilà comment les choses se présentaient: les

21 gens quittaient leurs villages lorsque les Serbes avaient déployé des

22 actions contre l'UCK; puis, ils revenaient chez eux. Le fait est que tout

23 le monde savait qu'il y aurait une catastrophe humanitaire lorsque l'OTAN

24 commencerait ses bombardements. On en avait débattu au sein de l'OTAN, de

25 l'OSCE et parmi la population.

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1 La violence au Kosovo: aucun rapport de l'OSCE ne mentionne la catastrophe

2 humanitaire qui était imminente. Les observateurs de l'OSCE avaient

3 observé des insurgés de la soi-disant armée de la Libération du Kosovo

4 contre les unités de l'armée régulière de la Yougoslavie. Les villageois

5 fuyaient à l'approche de tels conflits. Par la suite, ils regagnaient

6 leurs maisons qui souvent, entre-temps, avaient été détruites.

7 L'OTAN à Bruxelles avait connaissance des rapports de la mission de

8 l'OSCE, qui coïncidaient avec ses propres rapports. Mais ces rapports

9 n'avaient pas été publiés, à aucune des nombreuses conférences de presse

10 tenues à l'époque. Au contraire, à l'occasion de cette Session

11 exceptionnelle de l'OTAN, en date du 14 mars 1999, on a jugé que l'on ne

12 pouvait pas dire que les violences étaient suscitées par les interventions

13 des forces serbes et les forces serbes avaient réagi avec violence. Mais

14 les chefs de l'OTAN se préparaient, d'ores et déjà, à attaquer la

15 Yougoslavie.

16 En même temps, au ministère allemand de la Défense, il n'avait pas été

17 question d'une catastrophe humanitaire imminente. Dans la documentation du

18 ministère allemand de la Défense, on disait tout à fait autre chose par

19 rapport à ce que disait Rudolph Scharping. Nous citons un rapport secret

20 du ministère de la Défense allemand: "Au cours des quelques jours écoulés,

21 il n'y a pas eu de conflit important entre les forces yougoslaves et

22 serbes, et l'UCK. Les forces de sécurité serbes ont limité leurs actions

23 dernièrement à l'accomplissement de missions de routine, à la recherche

24 d'entrepôts d'armes et au contrôle des routes nationales principales."

25 Mais, en dépit de cela, les préparatifs au siège de l'OTAN avaient

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1 poursuivi leur cours. Lorsque les premières bombes sont tombées, le

2 soutien des pays de l'OTAN a diminué et la situation avait menacé de se

3 renverser. Les chefs politiques avaient pris un rôle décisif. Les

4 représentants démocratiquement élus savaient quelles sont les informations

5 qu'il importait de transmettre aux opinions publiques de leurs pays

6 respectifs.

7 Rudolph Scharping a fait un travail excellent. Il n'avait pas été facile,

8 notamment pour l'Allemagne, pays pour lequel la défense pouvait être la

9 seule intervention militaire envisageable, de venir prendre part

10 militairement à une intervention à l'extérieur. La chose n'avait pas été

11 simple pour elle.

12 Et non seulement le ministre Scharping, mais M. Schreider et M. Fischer

13 avaient constitué d'excellents exemples de chefs politiques qui ne

14 prenaient pas en considération l'opinion politique. Je me félicite de ce

15 que les Allemands aient compris cela.

16 Et parlant des événements et des dommages collatéraux, nonobstant toute

17 chose, ils sont restés sur la même ligne. Si nous avions perdu l'appui de

18 l'Allemagne, nous aurions perdu l'appui de toute l'Alliance. La lutte pour

19 l'opinion publique s'est faite plus brutale; il ne suffisait plus de

20 diffuser des images de propagande à usage politique.

21 Pristina avait fait l'objet d'une propagande politique particulière. Au

22 centre de l'attention, s'est retrouvé le stade de Pristina. On voit, sur

23 le stade, les tribunes endommagées, mais on voit aussi que le gazon est

24 soigneusement entretenu. A l'époque, avant cette année-là, les Serbes y

25 avaient tenu un camp de concentration pour les Allemands.

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1 Et c'est avec cette assertion-là que Rudolph Scharping s'est adressé à son

2 opinion publique en 1999: "Ce qu'il importe maintenant, c'est de savoir ce

3 qui se passe au Kosovo. Parce que j'apprends qu'il y a un camp de

4 concentration à Pristina. Et j'apprends que l'on rassemble là des

5 Albanais, qu'on tue les instituteurs en présence de leurs élèves. Et

6 beaucoup de gens inscrivent une lettre S sur leur porte pour ne pas être

7 chassé de là. Donc aucun homme civilisé ne saurait fermer les yeux devant

8 cela."

9 La lettre S pour se protéger des Serbes n'existait plus, sur aucune porte,

10 à Pristina. Pas même dans les catacombes sous le stade de le Pristina.

11 Ici, on pouvait peut-être retrouver quelques ballons perdus, peut-être

12 quelques enfants s'étaient abrités là pour fumer une cigarette en

13 cachette.

14 Mais Rudolph Scharping, même après la guerre, dans son journal de guerre,

15 avait écrit au sujet de nombreux prisonniers qui avaient été détenus. Et

16 davantage encore, le ministre des Affaires étrangères allemand avait-il

17 comparé ces agissements avec ceux des Allemands du temps des nazis. Et

18 Scharping et Fischer ont maintenu leur position.

19 J'ai dit qu'il y avait des indices disant que des gens étaient détenus au

20 stade. On a interné des personnes dans les passages souterrains de ce

21 stade. Nous avons essayé de tirer les choses au clair et nous avons des

22 déclarations de témoins.

23 Si quelqu'un était censé en savoir quelque chose, c'était Shaban Kelmendi,

24 un homme politique albanais du Kosovo. Sa maison se trouve juste à côté du

25 stade. "Comme vous pouvez le voir d'ici, nous pouvons englober du regard,

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1 embrasser du regard le stade tout entier. A aucun moment, je n'ai vu de

2 prisonniers, de détenus. Le stade avait servi d'héliport seulement."

3 Et au cours de son récit, on voit justement un hélicoptère s'approcher.

4 "Voyez-vous, ici, on atterrit seulement avec des hélicoptères. Ces

5 hélicoptères atterrissaient ici et je pouvais voir des soldats monter ou

6 descendre. Le stade de football de Pristina, pour ce qui est du camp de

7 concentration, comme décrit par Rudolph Scharping, avait été une

8 propagande militaire. En tout état de cause, une invention pure et simple.

9 Ici, je dois vraiment me maîtriser, car comparer Auschwitz avec la

10 situation au Kosovo est une assertion incroyable.

11 En ma qualité d'Allemand, j'ai honte d'entendre des ministres allemands

12 proférer de tels propos. Un Allemand ordinaire serait tout de suite envoyé

13 au tribunal s'il dénigrait de la sorte quiconque. Lorsqu'un ministre

14 allemand parle des camps de concentration au Kosovo, cela se trouve sur

15 une même ligne d'événements, parce que cela correspond à une situation

16 historique déterminée, une situation du règne nazi en Allemagne. Et je

17 crois qu'il est absolument scandaleux que des Allemands se soient servis

18 de telles comparaisons.

19 Ce n'est pas le seul mensonge de guerre qui est parti vers le monde pour

20 s'assurer un appui de l'opinion publique. Pendant la guerre, bon nombre

21 d'endroits sont restés intacts. Deux ans plus tard, les gens reviennent

22 vaquer à leurs occupations, mais cela a toujours une signification

23 importante pour la guerre qui s'est conduite au Kosovo.

24 Le récit commence sur les terres des Sefket Berisha, histoire qui va

25 devenir une information de premier ordre pour ce qui est des médias

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1 occidentaux.

2 "Le 29 janvier 1999, deux mois avant le début des frappes aériennes de

3 l'OTAN, des voisins avaient entendu des coups de feu provenant de la

4 maison de Berisha. Qu'était-il arrivé? Ce jour-là, le 29 janvier, il s'est

5 passé ce qui suit; c'était un vendredi. A 5 heures du matin, quand cela a

6 commencé dans la maison de mon voisin Berisha, on a pu entendre des

7 rafales d'armes automatiques. Cela a duré trois ou quatre heures. Nous

8 n'étions pas réveillés et avons entendu tout cela. Trois ou quatre heures

9 après, les coups de feu se sont tus. Vers 10 heures, un groupe de

10 policiers s'était approché de nous; mon père et moi les avons vus.

11 Lorsqu'ils se sont approchés de nous, à 50 ou 60 mètres, il ne m'est rien

12 resté d'autre à faire que de m'enfuir; j'ai fui dans une autre direction.

13 Ce minibus déchiqueté rappelle justement ce jour-là."

14 Mais que s'est-il passé très exactement à Rogovo? "Massacre perpétré par

15 les Serbes contre des civils innocents", a dit Scharping. Un peu plus

16 tard, le 27 mars, le ministre de la Défense a présenté ses preuves à lui.

17 Ce que je vous montre maintenant, il faut avoir vraiment avoir des nerfs

18 pour l'avaler. Mais voilà ce qui illustre toute la brutalité avec laquelle

19 tout avait commencé. Lorsque vous regarderez ces photographies, il vous

20 sera facile de voir de quoi il s'agit en fait.

21 Voyez les uniformes que portent les unités spéciales de police serbes.

22 Cela montre clairement que des forces spéciales serbes et les militaires

23 serbes y ont pris part, suivis plus tard par de simples et communs

24 criminels. Il s'agit vraiment d'images terrifiantes. Et je dois faire de

25 mon mieux pour emprunter un ton calme, pour ne pas exploser moi-même.

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1 Voilà la raison pour laquelle nous faisons la guerre.

2 Il s'agit de titres, évidemment, affichés par la presse dans le monde

3 entier. Mais des experts, eux, savaient bien qu'il ne s'agissait pas d'un

4 massacre, certes pas d'un massacre contre des civils; les rapports des

5 services en témoignent. Il s'agit de quelque chose à l'adresse de civils

6 seulement. Plus tard, il a été dit que 24 Albanais ont été tués de même

7 qu'un policier serbe; il s'est agi d'un conflit, d'un accrochage, pas de

8 massacre contre des civils comme le ministre de la Défense le prétendait.

9 Voici les prises de vues faites par une chaîne de télévision occidentale

10 et qui témoignent de près de ce qui s'était passé. Il s'agissait

11 d'Albanais, prétendument des civils; or, ces morts portent des bottes et

12 ils ont des emblèmes sur leurs uniformes, de l'UCK. Pourtant, ceci a-t-il

13 été arrangé ou pipé par les Serbes avant que des journalistes occidentaux

14 arrivent?

15 "-A quoi vous en tenez-vous pour présenter de telles informations?

16 -Réponse: Evidemment au rapport de l'OSCE.

17 -Question: Avez-vous été correct pour présenter tout cela comme cela

18 s'était présenté?

19 -Réponse: Oui, les rapports sont tout à fait exacts."

20 Un premier rapporteur de l'OSCE sur place, c'est cet homme-là que vous

21 pouvez voir; il s'agit d'un policier allemand Hemming Henschoe. En tout

22 cas, ce que le ministre de la Défense a dit dans sa toute première

23 déclaration et que nous avons pu voir à Dojcevele, ne coïncide pas à ce

24 que je lui avais montré, moi, lorsque j'ai du faire rapport. Son rapport

25 officiel sur les événements de Rogovo ne dit rien sur des massacres

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1 prétendus contre des civils.

2 Nous avons pu voir un minibus de couleur rouge déchiqueté avec 14 corps à

3 son bord; 3 corps étaient en dehors du minibus. Dans un garage, on pouvait

4 encore retrouver 5 corps de combattants de l'UCK en uniforme. 300 mètres

5 plus loin, nous avons retrouvé 4 corps encore. Or, les corps qui vous ont

6 été montrés par le ministre de la Défense, nous les avons rassemblés en un

7 lieu, les policiers serbes, moi-même et mes deux autres collègues russes.

8 Voilà l'origine de ces images sur la prétendue exécution, telle que l'a

9 présenté le ministre Scharping; ce qui n'a rien à voir avec la réalité des

10 choses. Il a été tout à fait clair qu'il ne s'agissait pas de massacres

11 perpétrés contre la population civile car, à en juger d'après les rapports

12 de l'OSCE, même les commandants de l'UCK ont dit que certains de leurs

13 combattants sont tombés pour la cause albanaise. Or, le ministre allemand

14 a fait que ceci ait pu être un massacre.

15 New York, en avril 1999. Pendant que Scharping, lui, relatait le massacre

16 qui n'existait pas et qu'il parlait d'un camp de concentration inexistant,

17 les préparatifs pour la guerre battaient leur plein. En Amérique, on

18 devait préparer les esprits et l'atmosphère à cela. Evidemment, tout cela

19 était difficile parce que l'OTAN était contre ce qui peut être pensé dans

20 les Nations Unies. Un tel mandat, mandat de faire la guerre, n'existait

21 pas; il n'a jamais été autorisé par l'ONU. Des services de sécurité

22 avaient beaucoup à faire. Des chefs de gouvernement et d'Etat se

23 succédaient. Des débats menés à huis clos devenaient de plus en plus

24 aigus.

25 En avril 1999, à l'ONU, on discutait de la guerre. En même temps, les

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1 avions de l'OTAN se préparaient déjà à attaquer, et cela multiplié par

2 6.000 appareils, sans être mandaté par l'ONU. On connaît bien la politique

3 des Etats-Unis d'Amérique et on connaît bien l'attitude de ce pays à

4 l'égard de l'ONU. Déjà en 1993, le Président Clinton, dans un rapport

5 secret, a déjà fait valoir la politique de son pays à l'égard de l'ONU. Il

6 a dit: "Si cela est évidemment nécessaire, on peut toujours marcher sans

7 eux, partout où cela sera nécessaire et possible. Surtout, lorsqu'il ne

8 faut pas prendre décision au nom de l'ONU."

9 L'intervention au Kosovo sans être mandatée par l'ONU est une violation

10 flagrante du droit international. Le ministre allemand de la Défense y a

11 pris part. Mais pourquoi? Conseiller politique important de

12 l'administration américaine, Perry avait accès à des plans secrets du

13 Gouvernement américain. Certains des membres du ministre des Affaires

14 étrangères disent que le Kosovo n'est qu'un début des guerres que l'OTAN

15 mènera prochainement, ultérieurement, dans des pays lointains.

16 Quant à Washington, il ne s'apprêtait évidemment pas à présenter sa

17 position de proue dans ce sens-là; celle-ci n'a jamais été contestée. Nous

18 sommes devenus témoins du fait qu'il a fallu chercher un prétexte, à

19 savoir qu'il a fallu trouver une guerre défensive.

20 C'est dans ces locaux que siège le conseil de l'OTAN. L'OTAN doit-il

21 devenir un policier global à nouveau. Pour ce qui est des Etats-Unis

22 d'Amérique, c'est peut-être une attitude tout à fait simple, mais chose

23 difficile à expliquer à l'opinion publique américaine d'autant plus que la

24 guerre au Kosovo est devenue objet de critiques de plus en plus acerbes.

25 Notamment, lorsque les avions manquaient des cibles militaires pour

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1 atteindre des colonnes de réfugiés. Des officiers, quant à eux, appellent

2 cela comme étant des "dommages collatéraux". Evidemment, tout ceci est à

3 interpréter de la sorte partout dans l'OTAN, notamment en Allemagne.

4 Début avril 1999, au siège de l'OTAN, on essayait de limiter les dégâts

5 collatéraux. Après l'attaque sur une colonne de réfugiés près de

6 Djakovica, un premier incident de la guerre, l'opinion publique se voyait

7 diminuée de 25%, prête à autoriser tout cela, et à justifier.

8 Milosevic a dû faire une erreur lorsqu'il s'est mis à expulser la

9 population albanaise au Kosovo et en Macédoine. Sur les frontières, on

10 pouvait voir les gens et comprendre leur souffrance. Voilà ce qui était le

11 bien-fondé de l'action de l'OTAN.

12 Voilà les images qui permettent de corroborer les propos du porte-parole

13 Jaimie Shea. Il s'agit de réfugiés albanais à la frontière yougoslavo-

14 albanaise. Tous les soirs dans chaque télé-journal, on pouvait voir de

15 telles images: partout de la souffrance et des scènes de personnes

16 expulsées.

17 Mais ceci évidemment ne suffisait pas à l'opinion publique allemande. Il a

18 fallu dire encore que, depuis longtemps, les Serbes se préparaient au

19 nettoyage ethnique du Kosovo. Des meurtres et l'expulsion au Kosovo ont

20 été, cette fois-ci, baptisés comme étant un plan, une opération "Fer à

21 cheval". Le plan, l'opération "Fer à cheval" a permis de voir ce qui

22 s'était passé en fait en 1998. Certaines parties de ce plan démontrent

23 clairement comment la police serbe s'était préparée à expulser la

24 population.

25 Ces rapports démontrent que de telles opérations systématiques ont été

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1 planifiées depuis octobre 1998 pour être perpétrées en janvier 1999. Ceci

2 devrait être la présentation de ce plan d'opération. Des unités serbes,

3 sous forme d'un fer à cheval, encerclent des Albanais pour les expulser du

4 Kosovo. Nous sommes en janvier 1999; par conséquent, avant le

5 bombardement. Les Serbes se mettaient à faire des plans d'expulsion des

6 Albanais; à preuve, cette photographie présentée en Allemagne.

7 Mais voilà ce qui invite au doute: on parle ici d'avril 1999, par

8 conséquent après le début des bombardements. Donc ce qui s'était passé

9 dans le village de Rogovo n'est aucune preuve de l'existence du plan "Fer

10 à cheval".

11 Voilà comment se présente Randobrova aujourd'hui. Peu de choses rappellent

12 l'existence d'une guerre, on est en train de tout retaper, de renouveler.

13 Les matériaux de construction, cette fois-ci, pour couvrir les toits de

14 ces maisons, ont été des dons des organismes allemands.

15 Mais ce village a-t-il été vraiment attaqué par des Serbes pour être

16 incendié? La population civile a-t-elle vraiment été expulsée de cette

17 localité? Si oui, ceci devrait démontrer l'existence d'un tel plan. Les

18 citadins ont quitté leur village le 25 mars, après le début des raids

19 aériens de l'OTAN.

20 Le soir, il nous a été ordonné par l'UCK d'évacuer la population. Le 26

21 mars, ici, dans ce village, il n'y avait plus personne. Nous avons emmené

22 tous les citadins vers le village de Mamusa. Après quoi, nous avons été

23 pilonnés par les Serbes. Nous avons tous été des combattants de l'UCK.

24 Nous avons dû nous défendre, mais c'était impossible; nous étions

25 impuissants face aux canons et aux chars.

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1 Nous étions 85 combattants, mais il y en avait d'autres à côté de nous. En

2 tout, nous étions 120 combattants. Ceci a peu de chose en commun avec le

3 plan d'expulsion et de déportation de la population civile.

4 "-Question: Le ministre Scharping a-t-il diffusé des mensonges dans ses

5 rapports? Comment vous êtes-vous informé pour savoir ce qui s'était passé

6 dans ce village?

7 -Réponse: Il s'agit de résultats de rapports aériens. Il n'est pas

8 difficile de se procurer de telles photos lorsque le temps n'est pas

9 nuageux.

10 Ensuite, il y a des rapports et des dépositions de témoins. Il y a pas mal

11 de ceux qui ont été évacués qui sont apparus comme réfugiés."

12 Puis, nous devrons parler des rapports des rapporteurs et observateurs de

13 l'OSCE. Dans sa brochure, le feu Scharping ne parle seulement que du

14 village de Randobrova comme étant une preuve de l'existence de ce plan,

15 mais cette photographie a été faite plus tard, en avril 1999, quand les

16 attaques avaient bel et bien commencé.

17 Là-bas, derrière, se trouve ce village, que cite dans sa brochure le

18 ministre allemand de la Défense. Le village ne s'appelle pas Sankovici

19 mais Pregrstisca. Encore aujourd'hui, on y voit et on y retrouve des

20 traces de la guerre. De nombreuses maisons ont été incendiées jusqu'à leur

21 fondation. Il faudra beaucoup de temps à une centaine de citadins pour

22 tout remettre sur pied et rénover leur maison et leur village.

23 "Merci" nous disent, en allemand, ces enfants-là. Ici, partout, des

24 matériaux de construction ont été des dons des organismes humanitaires

25 allemands.

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1 "Dans le village de Pregrstisca, de façon sournoise, les Serbes se

2 préparaient à détruire, une fois pour toutes, les foyers de ces enfants."

3 (Fin de citation.)

4 D'abord, on vient dans les combles de la maison pour allumer un cierge et

5 c'est dans les sous-sols qu'on ouvre les jerricans de gaz. Il ne s'agit

6 pas seulement d'attaques séparées, mais il s'agit d'une partie du plan

7 intégral surnommé "Fer à cheval". Il s'agit d'une destruction planifiée

8 avant et pendant les attaques de l'OTAN.

9 Mais après Pregrstisca, les gens se souviennent d'autres choses aussi.

10 Tout cela s'était déjà passé en juin 1998. Il y avait beaucoup de gens ici

11 qui étaient membres de la JNA et qui s'approchaient du village depuis le

12 village voisin. Mais nous les avons repoussés, les gens de l'armée. Après

13 quoi, nous les avons attaqués, nous avons ouvert le feu au moyen de nos

14 pièces d'artillerie lourde. Et cela a duré comme ça quatre semaines.

15 Pratiquement, il n'y avait pas un seul endroit en pierre, de terre où un

16 obus ne serait tombé.

17 Voilà comment cela s'est passé, pour parler de l'ensemble de cette région-

18 là. C'est en juin 1998 que les destructions ont eu lieu. Mais, d'après

19 Scharping, Milosevic n'a élaboré ce plan, plan "Fer à cheval" que plus

20 tard, en décembre 1998.

21 Que s'est-il passé avec ces cierges dans les combles des maisons et du gaz

22 qui a été ouvert dans les sous-sols des maisons dont Scharping parlait?

23 Non, pour parler des maisons de notre village, elles n'ont pas été

24 incendiées de cette façon-là. Ceci a été une œuvre tout à fait sporadique

25 et différente. C'est par suite de pilonnages que des maisons ont été

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1 incendiées. Certes, on ne pouvait pas parler de cierges ni de gaz.

2 Une fois de plus, nous ne voyons pas de preuve à l'appui du soi-disant

3 plan "Fer à cheval", mais tout cela devait être falsifié et inventé de

4 toutes pièces par le ministère de la Défense. Dire que les Serbes

5 entreraient dans des villages pour ouvrir des jerricans de gaz, pour

6 allumer une chandelle dans les combles des maisons: cette méthode est

7 inexistante. De quoi parle-t-on? Vraiment, techniquement parlant, ceci ne

8 pourrait pas fonctionner. Mais chimiquement parlant, également

9 scientifique, ceci ne pourrait pas fonctionner. Vous avez dû évidemment

10 tenir toutes ces informations, notamment oculaires, lesquelles sont

11 erronées et certes pas vérifiées. Alors, pour ma part, je vous suggère de

12 procéder à un test avec des bonbonnes de gaz.

13 Ainsi, le ministre a pu se rendre compte du fait qu'il est difficile

14 d'élucider de tels mensonges. Des images d'autres villages surviendront

15 plus tard, mais sans texte incriminé.

16 Cette fois-ci nous sommes en mai 1999. Il s'agit déjà d'un second mois de

17 guerre. De plus en plus de pilotes américains se préparent à attaquer.

18 Depuis longtemps, on savait qu'il n'y avait pas que des cibles militaires

19 à être touchées; des civils ont été touchés également. Or, on a appris que

20 l'ONU utilisait des bombes à uranium.

21 Malgré le fait qu'à Belgrade, il y a un régime impopulaire, en Allemagne,

22 on se met à douter de plus en plus du bien-fondé de l'opération. Et la

23 pression contre Rudolph Scharping devient de plus en plus importante. En

24 dépit de ces assertions témoignant de l'existence d'un plan "Fer à

25 cheval", évidemment des traces tristes demeurent pour témoigner d'autres

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1 choses.

2 Deux ans après la guerre: une fois de plus, nous nous adressons à Rudolph

3 Scharping pour lui demander ce qui s'était passé avec ce plan "Fer à

4 cheval". Nous avons obtenu des informations de nos services de

5 renseignements depuis le mois d'avril 1999, et cela par le biais du

6 ministre des Affaires étrangères. J'ai essayé de faire en sorte que ces

7 informations soient comparées, collationnées par l'interception des

8 services de liaison serbes et des unités militaires et paramilitaires

9 serbes. Une fois que ceci a été fait, nous les avons utilisées, de telles

10 informations.

11 Je me suis rendu au ministère de la Défense au mois de novembre et il m'a

12 été dit qu'aucun plan "Fer à cheval" n'existait; que seule existait la

13 présentation des événements au Kosovo, lesquels événements ont déjà eu

14 lieu. Evénements que nous avons pu vérifier sur la base de différents

15 rapports de l'OSCE.

16 Il n'y avait pas de plan "Fer à cheval", ainsi préconisent des experts du

17 ministère de la défense. Les Albanais réfugiés du Kosovo, victimes de

18 l'attaque des Serbes mais pas en tant que victimes du plan "fer à cheval".

19 Ce n'était qu'une invention pure et simple du ministère allemand de la

20 Défense, fruit d'une propagande de guerre, comme si on parlait de Pristina

21 ou d'un massacre des civils dans des villages. Mais pour parler de

22 souffrances, il faut parler également des séquelles des raids de l'OTAN.

23 Depuis longtemps, on parlait de tout cela. Des agents de l'OSCE en

24 parlaient, des officiers également, mais le Gouvernement allemand voulait,

25 lui, avoir le soutien de l'opinion publique. Demeure inconnu toujours ce

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1 qu'il adviendra de ces gens-là, par exemple.

2 Par le passé, souvent on reprochait au commandement allemand toutes les

3 fois où celui-ci s'était tu, alors qu'il devrait parler. Or, moi, dans

4 cette situation donnée, j'avais quelque chose à dire. Et sont restées

5 intactes, de telles manipulations et de telles oeuvres de propagande.

6 Pourtant, mensonges et propagandes, en temps de guerre, s'avèrent beaucoup

7 plus puissants; il s'agit d'armes qui sont capables de tuer la vérité.

8 (Fin de la diffusion vidéo.)

9 M. Milosevic (interprétation): Ceci n'est, je dirai, qu'un atome, moins

10 qu'un atome de vérité en plein océan de mensonges, en pleine production de

11 propagande et en plein abus par les médias en tant que moyen de guerre

12 utilisé cette fois-ci à l'encontre de mon pays. Nous avons entendu parler

13 un général allemand, et c'est à dessein que nous avons fait notre choix

14 pour présenter une émission de chaîne de télévision allemande, anglaise

15 mais pas serbe. Nous ne connaissons pas ces gens-là. Vous avez entendu

16 dire un général qui, lui, a honte, en tant qu'allemand qu'il est, devant

17 les gestes de son Gouvernement.

18 Or, étant donné que vous êtes capable de lire tout mon courrier, j'en

19 reçois pas mal et ceci n'est pas sans vous casser la tête, vous avez pu y

20 trouver également des lettres signées par des officiers allemands qui ont

21 honte de leur Gouvernement. Vous avez trouvé des lettres signées par des

22 officiers anglais qui, eux aussi, sont honteux devant le fait qu'ils ont

23 un tel Gouvernement des courriers signés par des vétérans, en français,

24 qui ont font autant.

25 Et en Occident, où règne -je dirai- vraiment une nuit médiatique lorsque

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1 la Yougoslavie est en question car tous les réseaux du monde, pour

2 évidemment accomplir cette mission, ont dû être une des armes de la

3 guerre, c'est-à-dire pour occulter le public. Mais parmi tous ces gens-là,

4 gens des médias, il y a des gens qui préfèrent la vérité à tout confort

5 qui aurait pu leur être offert par leurs chefs et des administrations.

6 Je suis certain, pour ma part, que l'opinion publique finira par triompher

7 pour confirmer que les voies de la vérité se feront de plus en plus

8 élevées et importante et que la honte reviendra à ceux qui ont menti sur

9 la Yougoslavie et qui, par la guerre des médias qui étaient la leur, ont

10 fait notamment à ce que des gens meurent, à ce qu'il y ait tant de

11 dévastation.

12 Mais passons maintenant à ce que je me proposais de dire dans cette toute

13 première occasion qui m'a été offerte après une période de sept mois.

14 Au cours de ces deux jours, tous ceux qui, du côté de l'accusation, ont

15 pris la parole et que nous avons pu entendre, ont pu dire une même phrase.

16 Eux, ils sont ici pour juger un individuel. Il est fort délicat de faire

17 associer tout cela à des affaires de peuple, etc. Ce sont des individus

18 que l'on juge ici, pas du peuple. Tous les trois de l'accusation l'ont dit

19 ainsi mais, par leurs actes, en fait, ils ne font qu'accuser le peuple

20 tout entier.

21 A commencer par l'intelligentsia serbe. Celle-ci a été inculpée et, avec à

22 sa tête, l'Académie serbe des Sciences et des Arts; nous avons même

23 entendu des citations tirées du mémorandum de l'Académie des Sciences et

24 des Arts qui, d'après l'accusation, servait de base idéologique du crime

25 perpétré contre le peuple albanais. Il s'agit en effet du mémorandum dans

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1 lequel les académiciens serbes, en toute honnêteté, ont fait valoir et

2 présenté la situation qui existe telle quelle depuis plus de seize ans.

3 Ils l'ont fait avec un sentiment de responsabilité.

4 Mais le fait qu'ils accusent ainsi l'intelligentsia serbe et l'Académie

5 serbe n'est qu'une chose, parce qu'on trouve aussi une accusation de

6 Vidovdan et la bataille de Kosovo Polje.

7 Le malheureux Procureur a dit qu'en fait, nous ne savions même pas

8 pourquoi deux millions de personnes s'étaient rassemblées sur le site de

9 Kosovo Polje pour fêter le 600e Anniversaire d'une défaite. Mais il ne

10 sait pas que cette bataille, pour les Serbes, était également une bataille

11 pour l'Europe. Il accuse Kosovo Polje mais ne le sait pas et, allant au-

12 delà de cela, l'intelligentsia serbe et l'Académie des Arts et des

13 Sciences, Kosovo Polje, Vidovdan. Ensuite, il s'attaque à toutes sortes

14 d'autres institutions: les gouvernements, le parlement, les différents

15 organismes politiques les médias, etc., etc.

16 Les citoyens sont également mis en accusation, notamment ceux qui sont

17 allés voter aux élections pluripartites. C'est le seul point sur lequel

18 j'admets que ma conduite a bel et bien été le reflet de l'expression du

19 peuple. Mais le Procureur accuse la population de m'avoir soutenu. Donc le

20 comportement, l'expression de la population est mise en accusation

21 également.

22 Le Procureur de ce Tribunal accuse l'armée et la police, les volontaires

23 de la Défense territoriale. Il se réfère à tous ces éléments sous un

24 vocable collectif de "forces serbes". C'est exactement ce que fait le

25 Procureur. Il a donc accusé la Serbie et les Serbes de m'avoir soutenu en

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1 Serbie, ainsi que les Serbes qui me soutenaient à l'extérieur de la

2 Serbie, ainsi que tous ceux qui me soutiennent encore aujourd'hui en

3 Serbie. Il accuse le peuple, il accuse la nation.

4 Nous avons entendu tout cela, ces deux derniers jours, alors que le

5 Procureur affirme ensuite ne mettre en accusation qu'un individu. Quand il

6 parle d'individu, il suppose sans doute que je suis un surhomme puisqu'il

7 affirme que je détenais une espèce d'autorité en dehors de mon pays, une

8 espèce de pouvoir magique, venant de Dieu sans doute.

9 Et le Procureur s'occupe toujours de mon état émotionnel, de mon

10 affectivité. Il se demande ce que je pensais, ce que je voulais obtenir,

11 quelles étaient mes intentions.

12 Les Américains traversent toute la planète pour aller combattre le

13 terrorisme en Afghanistan, l'Afghanistan étant à l'autre extrémité du

14 globe par rapport aux Etats Unis. Et tout ceci est considéré comme logique

15 et normal. Alors que, dans le cas qui nous intéresse, il s'agit d'une

16 lutte contre le terrorisme chez soi, au cœur même de sa maison. Et cette

17 lutte est considérée comme un crime. Cela signifie que, même chez nous, à

18 la maison, nous n'avons pas le droit de réagir au terrorisme. Et je

19 montrerai le lien qui existe entre les deux choses.

20 Dans cet Acte d'accusation mensonger, le Procureur est allé encore plus

21 loin que ce qu'aurait pu faire l'imagination la plus débridée. Le

22 Procureur affirme même -et nous l'avons entendu ces deux derniers jours-

23 que c'est délibérément que j'ai provoqué la guerre contre la Yougoslavie,

24 les frappes de l'OTAN et les souffrances de millions d'habitants,

25 simplement pour me servir de cette occasion afin de détruire les Albanais.

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1 Je me demande vraiment si le Procureur n'aurait pas plus imaginer une

2 explication plus intelligente.

3 Il dit également que je ne m'intéressais à aucune frontière, mais

4 simplement à celle qui sépare les Serbes des non-Serbes. Alors que la

5 Serbie et la Yougoslavie, pendant toutes ces années de crise en

6 Yougoslavie, a été le seul le pays de l'ex-Yougoslavie où il n'existait

7 aucune discrimination nationaliste, le seul pays qui a conservé sa

8 structure nationale, qui est resté absolument identique à ce qu'il était

9 il y a douze ans, au moment du début de la crise.

10 La réalité yougoslave dément cette terrible invention, cette terrible

11 position du Procureur. Donc nous allons ici entendre ces nébuleuses

12 réflexions en fermant les yeux sur la réalité de la Yougoslavie, qui n'est

13 pas la réalité d'un seul instant, mais la réalité de plus de dix ans; qui,

14 par sa parfaite exactitude, impossible à ignorer, dément ces insanités.

15 Je serais censé avoir mené personnellement et politiquement une politique

16 de génocide en dehors de la Serbie, mais cette politique de génocide

17 n'existe pas en Serbie, seule région pour laquelle nous sommes

18 responsables, puisqu'en tant que Président de la Serbie, je suis

19 responsable de la Serbie. Le Procureur souhaite m'imputer une

20 responsabilité pour tout ce que d'autres ont fait par eux-mêmes, pour tous

21 les crimes commis par certains.

22 Depuis deux jours, nous avons entendu les affirmations du Procureur selon

23 lesquelles notre défense, la défense que, moi, je qualifie de "défense

24 héroïque" par rapport à l'agression commise par le Pacte de l'OTAN, le

25 Procureur affirme donc que cette défense n'a été qu'un prétexte pour

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1 justifier le fait que nous pouvions en tirer profit afin d'agresser les

2 Albanais du Kosovo. Eh bien, vous êtes en train ici d'insulter un peuple

3 tout entier.

4 En réalité, il y a un fait connu de tous, connu du monde entier, à savoir

5 que les bombardements du Kosovo, 24 heures sur 24, nuit et jour, tous les

6 jours pendant 78 jours. Pendant 24 heures, les bombes ne cessaient de

7 tomber; ce fait, le Procureur souhaite le couvrir par l'audition de

8 témoins qui vont venir ici, pour dire qu'ils ont fui face aux forces

9 serbes, tels que vous les appelez, à savoir l'armée et la police. Ce fait

10 est un fait que tous les habitants de la planète connaissent. C'est un

11 fait connu de tous, et il pourrait être nié par certains témoins qui vont

12 dire: "Nous avons fui face aux forces serbes hors du Kosovo".

13 Or, vous avez vu à l'instant des images venues de l'occident qui démentent

14 cela. Vous avez entendu un général de l'ouest, de l'occident. Et il y en

15 aura d'autres qui vont venir, il y a de nombreux militaires et généraux

16 qui souhaitent venir ici pour vous dire à vous et à vos supérieurs ce qui

17 est la vérité et ce qui est un mensonge, ce qui est une construction de

18 toutes pièces.

19 Or, ce qui a été dit ici par le Procureur est une construction de toutes

20 pièces.

21 Cette fuite des Albanais du Kosovo, vous en parlez comme étant une

22 déportation; or, cette fuite correspond aux bombardements. Si vous lisez

23 l'Acte d'accusation, vous verrez que les date qui sont citées, se situent

24 toutes dans la période des bombardements, des frappes aériennes; et ceci

25 est encore une autre preuve indiquant que nous sommes face à une

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1 manipulation des faits et à une tentative de faire porter la

2 responsabilité des crimes aux victimes.

3 L'OTAN a y compris bombardé et tué en masse des Albanais qui revenaient

4 dans leurs villages. Les Albanais qui n'avaient pas obéi à l'UCK leur

5 demandant de fuir, puisque l'UCK tuait en grand nombre pour forcer les

6 Albanais à fuir. En effet, c'était le concept d'Albright qui disait: "Nous

7 protégeons les Albanais". Donc il fallait que les Albanais fuient du

8 Kosovo pour que soit prouvée la thèse selon laquelle nous les Serbes, nous

9 les faisions partir. Il y a eu des invitations qui ont invité les Albanais

10 à fuir du Kosovo, des slogans qui étaient proférés en albanais à partir

11 des avions. Et l'UCK lançait le même genre de slogan: si les habitants

12 résistaient, ils étaient tués par l'UCK. Et pourtant, les Albanais ensuite

13 revenaient dans leurs villages et n'ont pas tous fui le Kosovo. Ils

14 voulaient revenir mais ils ont fui un peu partout, en Republika Srpska

15 notamment.

16 Et, selon l'Acte d'accusation, il serait sans doute possible de créer

17 encore une autre invention, à savoir que peut-être la Republika Srpska les

18 a fait partir, les a chassés de chez elle pour les renvoyer au Kosovo.

19 Toutes sortes d'imaginations peuvent être à l'oeuvre pour créer des

20 inventions de ce genre dans le cadre de ce sale travail.

21 Je me demande vraiment s'il existerait un tribunal qui, confronté à la

22 réalité de frappes aériennes durant 78 jours, avec des bombardements, nuit

23 et jour, 24 heures sur 24… Je me demande s'il pourrait exister un tribunal

24 qui, dans ces conditions, appellerait à la barre des témoins pour leur

25 demander de dire qu'ils ont été obligés de partir de chez eux parce que

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1 les forces serbes les auraient contraints à partir.

2 Je tiens à dire ici que ce mensonge terrible et inacceptable est

3 entièrement de la responsabilité de ce Tribunal et il serait peut-être

4 préférable que cette farce arrive à son point culminant face au monde

5 entier avec quelques autres inventions.

6 Je l'ai dit: c'est un mensonge, c'est également une insulte à

7 l'intelligence de chacun sur toute la surface du globe.

8 Nous avons entendu hier une composition mentale de ce genre qui a été

9 formulée de la façon suivante: là où il y a déportation, il y a meurtre.

10 La vérité, c'est que lorsqu'il y a conflit avec des terroristes, avec des

11 bandes terroristes, il y a également bombardements. Le plus souvent,

12 lorsqu'il y a un conflit sur un territoire, il y a aussi des

13 bombardements. Il n'était pas rare que les terroristes, lorsqu'ils

14 agissaient pendant la guerre, reçoivent le soutien de leurs alliés qui

15 étaient engagés dans la guerre contre la Yougoslavie. Soutien aérien. Donc

16 la vérité, c'est qu'il y a eu un conflit, qu'il y a eu des bombardements

17 et que, dans de nombreux cas, la population a fui en raison de ces

18 bombardements.

19 Nous avons entendu l'interprétation du Procureur ces deux derniers jours,

20 selon laquelle ce conflit avec ces bandes terroristes n'existaient pas

21 mais que les résultats du conflit armé, à savoir la fuite des habitants

22 par peur des frappes aériennes, eh bien, cette fuite des habitants a été

23 comparée, a été baptisée "déportation".

24 Je le répète: la population du Kosovo a été chassée par l'UCK parce que

25 c'est l'UCK qui a ordonné aux habitants de partir. C'est elle qui les a

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1 fait partir, c'est elle qui les a tués. Ça, c'est le premier point.

2 Deuxième point: l'OTAN et ses frappes aériennes, c'est la vérité au sujet

3 de la cause des déplacements de population et des déportations. Et je

4 tiens à dire ici quelque chose que chacun connaît en Serbie: selon la

5 tradition serbe, la tradition militaire serbe, un prisonnier de guerre ou

6 une personne sans arme est un être sacré; quiconque viole ce principe

7 sacré doit rendre des comptes. Cependant, ce n'est pas ce qu'a fait

8 l'armée ou la police. Je ne nie pas le fait que certains groupes isolés

9 aient pu le faire, mais il n'est pas exact que l'armée et la police aient

10 été responsables de cela. La réalité c'est que chacun défendait son pays.

11 Quant à des groupes isolés qui sont capables de commettre des crimes, il y

12 en a partout dans le monde, et partout ils sont traduits en justice.

13 Mais il n'est pas permis d'imputer des crimes aussi odieux à une armée, à

14 une police, à un peuple, aux dirigeants de ce peuple, etc. D'ailleurs, les

15 membres de la police et de l'armée sont ceux qui savent le mieux combien

16 de terroristes ils n'ont pas réussi à capturer, précisément parce que ces

17 terroristes se mélangeaient à la population. Il leur arrivait quelquefois

18 de les voir à une centaine de mètres à peine, de bien les reconnaître au

19 milieu des habitants parce qu'en général ils ne portaient que leurs sous-

20 vêtements, s'étant débarrassés de leurs uniformes. Et la plupart de ces

21 hommes ont réussi à s'échapper parce qu'un ordre très strict était venu du

22 commandement et des quartiers-généraux, stipulant qu'il était interdit de

23 mettre en danger la population civile, de risquer de blesser ou de tuer un

24 civil dans le cadre des tentatives d'arrestation.

25 Les Américains qui se déplaçaient au Kosovo le savent très bien; nous

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1 avons discuté de cela avec eux. Les terroristes le savaient également bien

2 sûr; ils savaient que la police et l'armée avaient interdiction stricte

3 d'ouvrir le feu dès lors qu'ils se trouvaient au milieu de la population,

4 donc pour eux la solution était facile, il leur suffisait d'enlever le

5 haut de leur uniforme, de pénétrer au milieu de la foule et s'échapper.

6 Nous en avons parlé très souvent, nous en avons discuté très souvent

7 disposition mais l'ordre en question est demeuré valable.

8 Donc la police et l'armée avait pour devoir tout à fait clair de lutter et

9 d'anéantir l'UCK et les terroristes qui avaient pris les armes mais, en

10 même temps, elle a le devoir très strict de protéger la population civile.

11 Et les ordres, les commandements émanant des quartiers généraux de la

12 police et de l'armée le confirment.

13 D'ailleurs, cette déportation imaginaire aurait-elle pu être organisée,

14 d'autant plus qu'elle est censée avoir été massive, en l'absence d'un

15 ordre? Or, aucune idée, aucune action n'existe, sous quelque forme que ce

16 soit, qui puisse prouver qu'il y avait eu un ordre. Même si vous parveniez

17 à faire venir un témoin.

18 Hier, à la télévision, on a vu des témoins dont vous avez montré les

19 photographies ici, qui disent qu'ils n'ont aucune intention de venir

20 confirmer de telles choses, car il s'agit de mensonges. Hier, ils ont

21 parlé. Chaque fois qu'il y avait une pause dans nos débats, les

22 journalistes les appelaient et disaient: "Vous venez d'être vus aux

23 écrans, sur les écrans dans le prétoire, et il est dit que vous avez

24 l'intention de témoigner". Leurs réponses, bien entendu, étaient: "Non,

25 aucunement. Je n'ai aucune intention d'aller témoigner".

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1 Alors, présentez-moi ces témoins qui auraient l'intention de témoigner.

2 Moi, personnellement, je n'interdis à personne de venir témoigner.

3 Quiconque viendra ici pour dire la vérité ne saurait dire quoi que ce soit

4 qui serait inexact, pour autant que ce soit lié réellement à ma politique,

5 à mon travail, à mon gouvernement, vous pouvez en amener que vous voudrez.

6 Un nombre incroyable de choses ont été dites ici, comme s'il s'agissait de

7 preuves. J'entends hier que trois généraux ont été décorés, mais où le

8 problème? Quel problème y a-t-il à décorer des généraux? Plusieurs

9 milliers d'hommes ont été décorés pour bravoure. Nous sommes le seul pays

10 qui a descendu un soi-disant avion furtif américain; on les dit furtifs.

11 Holbrooke expliquait, il montrait de la main que 2 milliards de dollars

12 avaient été dépensés pour construire cet avion. Et quand le commandant de

13 la base me parlait, il m'a expliqué que si l'on disait qu'il coûtait 40

14 millions de dollars, c'était un mensonge, car il coûtait au moins 250

15 milliards de dollars et qu'on voulait réduire la somme, réduire le prix.

16 Alors, l'homme qui a descendu cet avion furtif destiné à semer la mort

17 parmi les enfants en Voïvodine, cet homme mérite sans doute d'être décoré;

18 il mérite d'être décoré cinquante fois. Et toute personne, tout homme qui

19 a descendu un avion a été décoré. Tout homme qui a tiré sur un missile de

20 croisière a été décoré. Je ne vous dirai pas combien de milliers, combien

21 de dizaines de milliers de vols il y a eu au cours de ces frappes.

22 Le général Short était à la base de Florence; il dirigeait les opérations.

23 Un de ses pilotes a été blessé dans le ciel yougoslave. Une cassette vidéo

24 a été filmée, des propos de cet homme; elle sera montrée dans ce procès.

25 Beaucoup d'autres choses seront montrées pour tirer la vérité au clair.

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1 D'ailleurs, en dehors des soldats qui ont été décorés pour bravoure, il y

2 a également des milliers de citoyens en Yougoslavie qui ont été décorés

3 pour les efforts déployés par eux au cours de la guerre. En effet,

4 beaucoup de citoyens, beaucoup d'habitants ont fait un effort surhumain

5 pour obtenir la reconstruction du pays et se battre contre les mensonges

6 qui étaient diffusés.

7 J'ai entendu hier le Procureur qui riait du fait que la Serbie n'avait pas

8 été en guerre avec la Croatie ou la Bosnie. Mesdames et Messieurs, la

9 Serbie n'a pas été en guerre avec la Croatie ou la Bosnie. Pourquoi

10 souhaitez-vous rendre la Serbie et les Serbes responsables d'une guerre en

11 Croatie en en Bosnie-Herzégovine?

12 Et aujourd'hui, dans votre Acte d'accusation, vous passez d'un événement à

13 l'autre, d'un événement en Croatie à un événement en Bosnie. Bien entendu,

14 il ne s'agit que des événements les plus importants qui sont mentionnés.

15 La seule chose que nous savions à l'époque, c'était que là-bas, il y avait

16 des combats et que nous espérions qu'ils cesseraient le plus rapidement

17 possible.

18 Pourquoi a-t-on parlé ici hier du corridor de Brcko, en le présentant

19 comme une espèce d'opération criminelle? Cela fait partie de l'accusation

20 retenue contre moi, alors que ce corridor de Brcko a été discuté entre

21 Owen et Stoltenberg au moins cinquante fois. Entre Owen, Stoltenberg,

22 d'une part, les représentants des Musulmans de Bosnie -Karadzic, Boban,

23 Mladic- et tout cela en ma présence. Il y a eu au moins cinquante réunions

24 pour en discuter, car ce corridor est très important.

25 Si vous prenez une carte géographique, vous le constaterez facilement.

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1 Toute la Krajina bosniaque communique grâce à ce corridor avec l'Est et

2 toute la région de Banja Luka également. C'était un corridor tout à fait

3 vital, de tout temps. Je ne vois pas quel est le sens qui lui est attaché

4 dans les propos tout à fait regrettables du Procureur.

5 La Bosnie-Herzégovine tout entière était en fait une petite Yougoslavie.

6 La Yougoslavie, la grande, était composée de plusieurs peuples qui se

7 développaient et vivaient dans une très bonne coexistence. De la même

8 façon, la Bosnie-Herzégovine se composait de plusieurs groupes d'habitants

9 serbes, croates et musulmans.

10 Vos chefs, Madame, ont détruit la Yougoslavie. Ils ont également détruit

11 la mini Yougoslavie et, aujourd'hui, ils combattent en fait les trois

12 peuples de Bosnie-Herzégovine. Ils veulent leur faire payer l'addition

13 alors que c'est eux qui les ont poussés dans cette guerre odieuse afin

14 d'échapper à la véritable responsabilité.

15 Pourquoi ont-ils, après tout, contraint la Bosnie à quitter la

16 Yougoslavie, si ce n'était pas pour obtenir un conflit armé? Quand,

17 finalement, ils ont séparé la Bosnie de la Yougoslavie, quand les trois

18 parties ont accepté le plan Cutilheiro, qui organisait la Bosnie, pourquoi

19 ont-ils dit à Izetbegovic qu'il devrait apposer sa signature sur ce

20 document? Peut-être que l'ambassadeur Warren Zimmerman a, par la suite,

21 pensé qu'il avait fait une erreur en lui conseillant cela.

22 Mais en tout cas, c'est une attaque contre un cortège de mariage qui

23 traversait Sarajevo, un cortège de mariage serbe. C'est par cet événement

24 que la guerre a commencé: par une attaque contre les Serbes. Les Serbes

25 n'ont jamais commencé quelque guerre que ce soit, quelque conflit que ce

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1 soit.

2 La même chose pour la Croatie: dans un village non loin de Plitvice, des

3 gens ont été assassinés.

4 Sur toutes ces questions, il existe des faits qui les confirment. Le

5 village en question s'appelait Borovo Selo. Et il est insensé de faire

6 porter les accusations sur ceux qui ne les méritent pas.

7 Aujourd'hui, on parle de trois peuples en Bosnie. Mais pourquoi avez-vous

8 accepté que le référendum au sujet d'une soi-disant indépendance de la

9 Bosnie se déroule en l'absence de participation d'un des trois peuples, à

10 savoir la Serbie, s'il y a bien trois peuples et si, encore aujourd'hui,

11 le principe fondamental consiste à dire que rien ne peut se passer si les

12 trois peuples ne sont pas d'accord?

13 C'est donc seulement pour l'indépendance et la sécession de la Bosnie

14 qu'il était possible de se passer de l'agrément d'un de ces trois peuples,

15 précisément le peuple qui détenait la plus grande superficie de territoire

16 et qui avait le plus grand nombre d'habitants, le plus grand nombre de

17 membres? Ça, ce sont des faits historiques.

18 Des historiens, des académiciens vont venir ici, y compris des membres de

19 l'Académie serbe des Sciences et des Arts, s'ils osent le faire. S'ils

20 osent le faire compte tenu de ce qui a été dit ici, puisque, apparemment,

21 ils sont présentés comme des idéologues du nationalisme serbe.

22 Hier, le Procureur est allé jusqu'à suggérer que le nettoyage ethnique en

23 Bosnie a été récompensé et que le territoire de la Republika Srpska a été

24 limité. Mais je me demande finalement quel est votre objectif, réellement,

25 dans ce Tribunal? Parce que le Kosovo n'a pas de frontière avec la Serbie;

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1 le Kosovo est la Serbie. La Haye n'a pas de frontière entre la ville et

2 les Pays-Bas.

3 Il y a, si vous ne les connaissez pas, un grand nombre de choses qu'il

4 faut que vous compreniez. Posez des questions à ceux qui le savent et vous

5 comprendrez.

6 Dans toute armée, en tout cas, dans toute armée que je connaisse, il

7 existe le principe de l'unité de la prise de décision; aucun maillon de la

8 chaîne ne peut être évité lors de la prise de décision dans la chaîne

9 hiérarchique. Il ne doit pas et il ne peut pas y avoir d'anarchie. Et

10 toute omission d'un de ces maillons de la chaîne, toute omission ou

11 déviation de cette hiérarchie représente au sein d'une armée un crime qui

12 est sanctionné et puni. Donc, si une armée comme celle que vous avez

13 décrite pouvait exister quelque part, ce serait le signe d'un désordre

14 absolument extraordinaire. Je ne sais pas qui, dans son propre pays,

15 accepterait qu'un tel désordre, ou en tout cas un tel manque

16 d'organisation règne.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, l'heure est arrivée

18 pour les interprètes d'avoir une pause.

19 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.) Oui, c'est avec plaisir que

20 je prendrai un café.

21 M. le Président (interprétation): Nous reprendrons nos travaux dans vingt

22 minutes.

23 M. Milosevic (interprétation): D'accord.

24 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 50.)

25 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous allons prendre

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1 notre pause suivante à 12 heures 15.

2 M. Milosevic (interprétation): Pendant la pause, j'ai été informé d'un

3 fait, à savoir qu'il y a encore un petit bout d'enregistrement vidéo qui,

4 par un concours de circonstance, n'a pas été diffusé. Je voudrais qu'on en

5 finisse avec cela, puis, je me proposerais d'enchaîner avec mon exposé.

6 M. le Président (interprétation): Bien.

7 (Début de la diffusion vidéo.)

8 (Interprétation de la vidéo.)

9 Quand les forces serbes se sont retirées dans l'après-midi, on a dit qu'il

10 y avait 15 membres de l'UCK de tués dans l'action, les observateurs

11 internationaux sont entrés dans le village et n'ont rien remarqué de

12 particulier. Ce n'est que le lendemain matin qu'on s'est rendu compte dans

13 quelle mesure les Serbes avaient habilement fait les choses. Nous avions

14 monté une colline. Au bout de quelque 10 à 15 minutes de marche nous avons

15 trouvé des cadavres. En montant par la suite, je ne sais combien de

16 cadavres nous avons trouvés jusqu'au moment où nous avons trouvé tout un

17 amas de cadavres.

18 Au moment où Walker est arrivé, l'UCK avait repris le contrôle sur Racak.

19 "-M. Walker: Je pense qu'il nous faudra quelques minutes pour déterminer

20 ce que je voudrais dire et je vais tenir une conférence de presse

21 aujourd'hui à Pristina dans l'après-midi. Les faits confirmés par la

22 mission de vérification nous disent qu'il y a des éléments de preuve pour

23 ce qui est des détentions, des exécutions sommaires et des exécutions de

24 civils non armés Albanais à Racak par la police et l'armée de

25 Yougoslavie."

Page 262

1 En d'autres termes, il a accusé l'armée et la police serbe. Walker était

2 censé être un observateur indépendant.

3 "-Question: Est-ce qu'il était à ce moment-là en train de demander des

4 instructions de la part des américains?

5 -M. Walker: Je n'ai jamais appelé ma capitale, je n'ai dit que ce que j'ai

6 vu, à savoir un massacre.

7 -M. Holbrooke: M. Walker m'a appelé de Racak.

8 -Question: Vous avez dit, Monsieur Walker, que vous n'aviez appelé

9 personne.

10 -M. Clark: J'ai été appelé par Walker et il m'a dit qu'il avait vu des

11 cadavres.

12 Ce qu'il a dit aux Etats-Unis a donné le feu vert pour amorcer la guerre

13 au Kosovo et c'est à Racak que les Serbes ont joué le jeu au profit de

14 l'UCK. Je vais dire qu'il y aura toujours un dilemme pour savoir si c'est

15 l'UCK qui a lancé des combats dans des régions habitées par des civils

16 parce qu'ils savaient que les Serbes allaient répondre. Et

17 personnellement, je ne pense pas que cela ait été le cas. Il s'agissait

18 clairement d'une guerre.

19 Pour ce qui est de Racak, il fallait certainement prendre des mesures. Il

20 apparaît clairement que c'était un événement qui nous avait galvanisé. Le

21 Président avait dit qu'il fallait aller de l'avant et qu'il fallait faire

22 savoir que les Etats-Unis allaient faire partie de force multinationale,

23 mais Mme Albright savait que ces images de Racak ne dureraient pas trop

24 longtemps et qu'il fallait avoir des alliés européens à bord.

25 (Fin de la diffusion vidéo.)

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1 M. Milosevic (interprétation): Est-ce terminé? Est-ce que l'équipe

2 technique a terminé avec la diffusion?

3 Je me propose donc de continuer là où je m'étais arrêté, pour ce qui est

4 des commentaires que j'avais fait au sujet des constructions qu'il nous a

5 été donné d'entendre.

6 Vous avez parlé de plan de terre brûlée; je ne sais pas d'où cela

7 provient, probablement du Vietnam. Ce plan de terre brûlée, c'est comme le

8 plan de "Fer à cheval", au sujet duquel tout un chacun sait qu'il s'agit

9 là d'une invention pure et simple et qui, quand on a soi-disant parlé

10 d'une présentation en original, il y avait un intitulé qui disait

11 "Potkova" qui est un mot croate pour dire "Fer à cheval". Les Serbes

12 n'utiliseraient jamais le terme de "Potkova" mais dirait plutôt

13 "Potkovica".

14 Je ne sais pas du tout du reste ce que signifie l'explication entendue ici

15 au service des assertions de l'accusation affirmant que les Serbes au

16 Kosovo disposaient d'armes. Tout un chacun sait que tout le monde au

17 Kosovo avait des armes. Il est un nombre infini d'exemples documentés

18 disant que les terroristes albanais faisaient irruption dans les maisons

19 d'Albanais, donc de leurs propres compatriotes pour leur confisquer des

20 armes. Beaucoup d'exemples documentés l'illustrent.

21 Et vraiment lorsque j'ai écouté ce que l'on a dit ici, je crois que toute

22 personne censée peut se demander comment il est possible d'exiger une

23 responsabilité pénale, j'entends pénale, je ne parle pas de responsabilité

24 politique, morale ou d'une autre nature, qui dans ce cas-ci ne pourrait

25 être initiée ou lancée non plus, mais on exige une responsabilité pénale

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1 pour une sécession forcée de la Yougoslavie, une sécession sous la

2 contrainte qui m'est imputée.

3 Il n'est pas contesté que la Croatie ait fait sécession et l'on ne

4 conteste pas non plus que cette sécession ait été une sécession par la

5 force. Et comment se pouvait-il que moi, en ma qualité de Président de

6 Serbie, je puisse faire cesser des conflits que les paramilitaires croates

7 avaient avec l'armée populaire yougoslave, qu'elle voulait chasser des

8 bases militaires que ces forces armées yougoslaves avaient occupé pendant

9 plus de 50 ans et où il n'y avait pas de Serbes venus d'ailleurs? Tout

10 cela était la RSFY, tout cela était partie intégrante d'un territoire qui

11 était conjoint, qui était celui de la République fédérative socialiste de

12 Yougoslavie.

13 On cherche et on voit ici que vous n'avez aucune idée, aucune connaissance

14 au sujet de ce qu'étaient les ministères de la Défense au niveau des

15 Républiques. Ils n'avaient aucune ingérence au niveau de l'armée. Leur

16 travail principal avait consisté à tenir à jour des listes de conscrits,

17 donc d'exercer les fonctions qui étaient des fonctions administratives ou

18 des compétences administratives au service de la défense.

19 Vous êtes en train de citer des opinions politiques du général Simovic,

20 mais vous ne parlez pas des attributions et de ses activités. Mais toute

21 personne a le droit d'avoir une réflexion politique et de parler de choses

22 dont elle estimerait devoir parler.

23 Qu'est-ce que c'est que ces déménagements de population internes au

24 Kosovo? Quel peut être le motif de ces déplacements de personnes? Quelle

25 est l'explication qui est apportée quand il y a des conflits, quand il y a

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1 des bandes de terroristes qui font irruption dans des villages, lorsqu'ils

2 tuent des citoyens?

3 Et vous allez voir, dans l'exposé qui va suivre, combien d'Albanais ont

4 été tués avant la guerre; ils étaient deux fois et demie plus nombreux que

5 ceux tués par les Serbes. Mais il est normal que les gens fuient vers leur

6 famille, vers des endroits où il y a des centres d'accueil organisés par

7 des autorités en place. Et même maintenant je n'arrive pas à comprendre

8 quel pourrait être l'objectif de ces déplacements de personnes à

9 l'intérieur du territoire, à moins qu'il ne s'agisse d'une interprétation

10 malicieuse qui voudrait interpréter que l'on fuie des territoires que l'on

11 estime peu sûrs pour ses propres familles et ses propres enfants.

12 Mais peut-on dire que quelqu'un a forcé quelqu'un à déménager, à fuir le

13 territoire de son pays? Ce serait le pire des crimes. Et qui serait

14 d'ailleurs en mesure de le faire?

15 Ensuite, je me demande quelle pourrait être la signification de la

16 tentative de prouver qu'il y a eu mauvaise intention à l'égard des

17 Albanais au moment d'une agression de l'OTAN, à part concentration des

18 troupes au sud du territoire. Car tout enfant savait que ce territoire-là

19 était l'avant-garde de notre défense, parce que l'on s'attendait à une

20 intervention terrestre de l'OTAN en provenance de la Macédoine.

21 Et où, selon l'avis de l'accusation, étions-nous censés placer nos propres

22 effectifs si les forces ennemies étaient en Albanie et en Macédoine? Est-

23 ce que nous étions censés les placer au niveau de la frontière hongroise

24 ou macédonienne et albanaise? Soit dit en passant, qu'ils nous arrivaient

25 que pendant 24 heures des bombardiers B52 viennent bombarder les positions

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1 au niveau de la frontière et que l'offensive soit lancée par la suite,

2 mais par des Albanais qui avaient essayé de pénétrer le territoire. Chose

3 qu'ils n'ont jamais réussi à faire, grâce à la ferme défense de nos

4 effectifs.

5 Comment expliquer cela comme étant une intention mauvaise à l'égard des

6 Albanais que de placer des troupes à la frontière menacée par l'extérieur?

7 Et ce n'était pas une intervention fictive, mais une attaque réelle qui

8 avait cours à ce moment-là et dont était au courant le monde entier.

9 Je dirais en particulier que sont complètement dénuées de sens et mal

10 intentionnées les assertions qui avaient fait état de notre option, de

11 notre détermination en faveur d'une solution militaire. Mais cela est

12 démenti par notre effort pour aboutir à un accord politique. La teneur de

13 cet accord politique qui avait été proposé par le Gouvernement de Serbie

14 et la direction de Serbie a été publiée. Et le seul point d'achoppement,

15 lors de nos entretiens avec la délégation américaine, c'était le fait

16 qu'ils voulaient se présenter comme étant partenaires dans ces

17 négociations. Exception faite des entretiens que j'ai eus avec Rugova, ils

18 avaient été contre ces contacts-là, parce qu'ils voulaient contrôler

19 toutes choses.

20 Et la seule pierre d'achoppement avait été le fait que nous ayons exigé

21 nous-mêmes que cette solution politique se fonde sur une égalité en droit

22 des citoyens et sur un pied d'égalité des communautés ethniques parce

23 qu'au Kosovo, comme on l'a en partie mentionné dans ce que nous avons eu

24 l'occasion d'entendre, il y avait des Albanais, des Serbes, des Turcs, des

25 Musulmans et des Goranis et des Romis et des Egyptiens. Sept communautés

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1 nationales.

2 Et aux fins de réaliser une solution de ce type, nous avons eu une

3 approche tout à fait normale, tout à fait concrète visant à faire réaliser

4 cela de manière à faire avoir deux chambres à l'assemblée du Kosovo. Une

5 chambre des populations, où on serait représenté un vote par personne, par

6 membres d'une ethnie, et une autre chambre qui serait celle des

7 communautés nationales ou chacune des communautés nationales, à savoir les

8 Serbes et les Monténégrins qui avaient été considérés comme une communauté

9 ethnique, où il y aurait les Albanais, les Turcs, les Musulmans, les

10 Romis, les Goranis et les Egyptiens, seraient représentés sur des bases

11 paritaires pour avoir là quelques-uns de leurs représentants élus.

12 Regardez ce qui se passe aux Etats-Unis, Rhode Island qui est plus petit

13 que Belgrade a deux sénateurs, tout comme l'Etat du Texas qui est plus

14 grand que la moitié de l'Europe. Et il est logique que dans une structure

15 complexe les choses soient solutionnées de cette façon. C'était la seule

16 pierre d'achoppement, et cela ne devait pas être accepté parce que le plan

17 disait qu'il ne fallait rien accepter pour trouver prétexte à

18 l'envahissement de la Yougoslavie. Et, face à l'opinion publique mondiale,

19 on édifie actuellement au Kosovo une communauté monoethnique et un Kosovo

20 ethniquement pur.

21 C'est ce que je traiterai comme idée néonazie que l'on a suivie pour

22 briser la Yougoslavie, la démanteler et pour refaire une carte des Balkans

23 nouvelle et une grande Albanie derrière tout cela. Et dans le contexte de

24 tout ce que nous avons entendu de la part du bureau du Procureur, je

25 dirais qu'il n'a pas par hasard mentionné Nuremberg. Nuremberg n'a pas été

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1 mentionné à titre symbolique. Ils n'en ont pas eu assez que de commettre

2 un crime sur la Yougoslavie et se venger sur le rôle joué par la

3 Yougoslavie dans leur défaite dans deux guerres mondiales, ils veulent

4 faire maintenant de nous qui sommes victimes de leurs crimes, nous

5 proclamer coupables et, avec l'assistance symbolique de ce Tribunal, me

6 faire comparaître devant Nuremberg pour inverser les rôles. Les crimes,

7 les meurtres commis en Yougoslavie, et cette crucifixion que l'on fait, me

8 concernant ici, vient prouver entre autres faits, avec les actions

9 déployées, ce que je viens de dire.

10 Mais l'opinion publique mondiale ne saurait passer outre tout cela, en

11 dépit des efforts déployés de toute sorte par le Bureau du Procureur, par

12 les médias. Et l'opinion publique yougoslave quant à elle -et elle n'est

13 pas la seule- connaît d'ores et déjà la vérité vraie.

14 La question qui se pose c'est, quand on écoute pendant deux journées, les

15 deux journées écoulées: ce que vous cherchez à prouver par ces différentes

16 photographies, ces photographies du Conseil suprême de la défense dont

17 j'avais été Président et où avaient pris part les personnes qui étaient

18 habilitées à le faire, vous auriez pu montrer mes photographies avec

19 Rugova ou avec Christopher ou Kofi Annan, je ne comprends pas ce que cette

20 production de photographies vient prouver.

21 Que voulez-vous prouver par ces photographies, où l'on voit la police

22 rétablir l'ordre aux manifestations et ce, quelque centaines de fois moins

23 brutalement que l'on peut le voir à vos télévisions à vous, pour le

24 rétablissement de l'ordre par vos policiers à vous, lorsque il y a des

25 manifestations ou quand la paix et l'ordre public sont menacés ou quand la

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1 vie des gens est mise en péril?

2 Que prouvez-vous par une photographie d'un enterrement où l'on ne peut pas

3 reconnaître, où l'on voit derrière moi un millier de personnes? Qu'est-ce

4 que cela prouve? Que voulez-vous prouver par ces types de photographies

5 que vous êtes en train de présenter ici à la Chambre? Que prouvez-vous par

6 vos assertions disant que je ne vous avais pas livré certaines personnes

7 que vous suspectiez avoir commis des crimes? Ce n'est là, nulle sorte de

8 secrets.

9 Je ne vous livrerai jamais qui que ce soit parce que j'estime que ce

10 Tribunal est illégal. Je l'ai même dit à Mme Albright quand elle m'avait

11 demandé d'extrader des personnes. Je lui ai dit: "Envoyez à nos autorités

12 les éléments de preuve que vous avez et vous n'avez aucune préoccupation à

13 vous faire pour ce qui est de voir la jurisprudence yougoslave passer

14 outre quelque crime que ce soit."

15 Est-ce que quelqu'un est conscient du fait que nous, en Yougoslavie, en

16 1992, avions déjà jugé des citoyens à nous pour des crimes de guerre

17 perpétrés, des citoyens qui avaient tués des Musulmans, qui avaient abattu

18 des Musulmans? En 1992, alors que nous ne savions pas du tout que ce

19 Tribunal allait être créé. Et cela n'importait nullement car chaque pays

20 civilisé dans son code pénal à une catégorie qui est le "crime de guerre".

21 Et, en 1992, nous avions déjà jugé des gens pour crime de guerre.

22 Et encore à l'époque, je disais: "Faites-nous part de ces événements de

23 preuve que vous avez et ne vous faites aucune préoccupation dans le cas où

24 quiconque aurait commis, perpétré quoi que ce soit de mal, qui aurait tué

25 des femmes, des enfants, maltraité des soldats, qui aurait tiré ou ouvert

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1 le feu en direction d'une fourgonnette ou ambulance de la Croix-Rouge".

2 Et, comme je vous le prouverais, l'OTAN a ouvert le feu sur une ambulance

3 qui était roumaine, et je leur ai dit: "Montrez-nous cela et, vous allez

4 voir, nous les jugerons".

5 Mais nous n'avons livré personne, nous n'avions extradé personne. Je

6 n'extraderai personne. Et ceux qui l'ont fait, qui le font actuellement,

7 sont en train de violer la constitution et de commettre des délits pénaux.

8 S'ils le font, c'est parce que nous avons un régime fantoche qui est censé

9 obéir aux ordres de l'extérieur et qui ne bénéficie pas du soutien du

10 peuple.

11 Je voudrais savoir aussi ce que vous entendez par "l'existence de

12 volontaires serbes qui sont allés traverser la Drina pour aller se battre

13 là-bas"? Pour ce qui est de leur comportement, c'est l'autorité sur le

14 territoire duquel ils se trouvent qui en répond. Que voulez-vous qu'on

15 dise au sujet de l'existence de volontaires serbes qui sont allés aider

16 leurs frères serbes de l'autre côté? Mais vous n'êtes pas intéressés du

17 tout par le fait de savoir combien de Moudjahidine il est arrivé en Bosnie

18 ou au Kosovo qui ont été capturés avec des sabres qui servaient à découper

19 les têtes, à décapiter les gens, et qui, sur demande de qui on sait, ont

20 fini par être relâchés. Et lorsque ceux qui venaient d'Arabie Saoudite

21 pour décapiter des gens, il était normal qu'ils fassent 2.000 kilomètres

22 et viennent en Bosnie pour aider Alija Izetbegovic. Mais si ce sont des

23 Serbes qui vont aider des Serbes, alors là, c'est une chose qui doit faire

24 l'objet d'une attention particulière de la part du Bureau du Procureur.

25 Que dire de la phrase prononcée à Gazimestan qui faisait partie d'une

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1 allocution que je qualifierais de "très bonne". Je dirai même excellente.

2 Et où il n'y a rien à reprocher. Vous avez cité un tout petit bout de

3 phrase où j'ai dit que "bon nombre de batailles étaient encore devant

4 nous, mais qui n'étaient certes pas des batailles armées, et que ces

5 batailles n'étaient pas exclues du tout". Mais ce sont des phrases de

6 nature générale, que tout un chacun pourrait utiliser de nos jours parce

7 que la paix n'est pas une catégorie sûre et stable.

8 Et du reste, pourquoi existe-t-il des armées dans chaque Etat, si cela

9 était le cas? Mais de façon très maligne, l'on saute tout le reste, l'on

10 omet tout le reste. Et j'ai reçu par fax ce discours et je m'efforcerai de

11 retrouver la citation que vous avez prise pour montrer ce que vous avez

12 arraché du contexte en place.

13 Dans ce discours, il est dit -je cite-: "Des relations d'égal à égal entre

14 les populations yougoslaves sont indispensables pour la survie de la

15 Yougoslavie, pour son dépassement de la crise et pour sa prospérité socio-

16 économique. La Yougoslavie ne se dissocie pas par cela par l'ambiance

17 contemporaine du monde actuel. Ce monde est caractérisé par la tolérance,

18 par la coopération et par l'égalité en droit. Le développement

19 scientifique, culturel, économique et autres rend les peuples

20 interdépendants et de plus en plus égaux en droit. S'agissant de la

21 civilisation vers laquelle évolue l'humanité…"

22 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, dans le cas où vous

23 êtes en train de lire, je vous demande de ralentir.

24 M. Milosevic (interprétation): Je comprends parfaitement que les

25 interprètes ne puissent pas suivre une lecture si rapide.

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1 "Dans cette civilisation vers laquelle évolue l'humanité, ne peuvent

2 s'aventurer que des gens, des personnes qui sont sur un pied d'égalité. Et

3 si nous ne pouvons pas nous aventurer d'un pas analogue vers une

4 civilisation de ce genre et occuper les premiers rangs, il est certain que

5 nous ne saurions occuper les derniers rangs non plus. Aussi, nulle part

6 sur quelque pouce de notre patrie à nous, il n'est point de parole qui

7 soit aussi pleine de sens quand on parle de l'entente, de la solidarité et

8 de la coopération entre les hommes. Autant cela est vrai au niveau du

9 champ du Kosovo qui est le symbole de discorde et de la traîtrise.

10 Dans la mémoire de la population serbe, cette discorde avait été

11 déterminante pour la défaite dans la bataille et pour le destin qui a

12 obscurci la vie du peuple, le mauvais sort qui a frappé ce peuple. Et il

13 demeure toutefois certain que cette discorde a été vécue par le peuple

14 comme étant son malheur le plus grand. Et c'est la raison pour laquelle le

15 peuple a pour obligation d'éliminer cette discorde pour se protéger des

16 défaites, des échecs et de la stagnation.

17 Le peuple de la Serbie cette année-ci est devenu conscient de la nécessité

18 de sa concorde qui est un préalable pour ce qui est de sa vie

19 contemporaine et de son développement à l'avenir.

20 Je suis convaincu que cette conscience de la concorde, nécessité de

21 concorde et nécessité d'unité, permettra à la Serbie non seulement de

22 fonctionner en sa qualité d'Etat, mais de fonctionner en sa qualité d'Etat

23 fructueux. Aussi, suis-je d'avis que cela a du sens que de le dire

24 précisément ici, au Kosovo. Là où la discorde a tragiquement mis en péril

25 la Serbie et où l'entente, la concorde remise en place est susceptible de

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1 lui restituer la dignité et la conscience, cette conscience-là de la

2 nécessité des rapports entre les nations est un préalable sine qua non

3 pour la Yougoslavie car son destin se trouve dans les mains de toutes les

4 nations qui la constituent.

5 Six siècles plus tard, nous nous retrouvons encore aujourd'hui dans un

6 combat, face à des combats."

7 C'est ce que vous citez.

8 "Mais ce ne sont pas des combats armés quoique ce type de combats encore,

9 ne soient pas exclus."

10 Je dis là une phrase d'ordre général, vous ne l'avez pas citée. Mais je

11 continue.

12 "Quels que soient ces combats, ces combats ne sauraient être gagnés sans

13 courage, sans esprit de sacrifice, sans ces propriétés qui, à l'époque,

14 dans les temps d'antan, avaient été présentes au Kosovo.

15 Notre principal combat de nos jours a trait à l'aboutissement à une

16 prospérité sociale, économique, politique, culturelle, donc qui se ramène

17 ou se réduit à un rapprochement par rapport à une civilisation dans

18 laquelle les populations vivront au XXIe siècle. Pour ce type de combat,

19 nous avons besoin d'héroïsme, mais d'un héroïsme différent, d'un courage

20 qui est nécessaire pour aboutir à tout succès, à toute chose qui ne

21 saurait être modifiée au fil des siècles." (Fin de citation.)

22 Je ne vais pas citer tout le discours parce que j'en ai cité suffisamment

23 pour dire à quel mauvais escient il a été extrait une partie, un fragment.

24 Parce que j'avais, moi, parlé de la prospérité socio-économique,

25 culturelle et autre, et vous avez vu comment mes dires ont été inversés.

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1 Je dirai encore -et je continue à citer-: "En Serbie, il n'y a jamais eu

2 seulement et rien que des Serbes. De nos jours, plus encore qu'avant, il y

3 a des citoyens qui appartiennent à d'autres nations, à d'autres minorités

4 nationales. Cela n'est pas un handicap pour la Serbie. Je suis sincèrement

5 convaincu qu'il s'agit là pour elle d'un avantage. Et c'est dans ce sens-

6 là qu'évolue la composition nationale de tous les pays, notamment les pays

7 développés du monde contemporain. De plus en plus, et avec de plus en plus

8 de succès, on voit les citoyens de nationalités différentes, de

9 confessions différentes et de races différentes vivre ensemble.

10 Le socialisme, en sa qualité de socialité progressiste et équitable

11 notamment, ne devrait pas permettre que les gens soient divisés en

12 fonction de leur appartenance religieuse ou nationale. Les seules

13 différences qui sont admises dans le socialisme sont les différences que

14 l'on fait entre homme honnête et homme malhonnête.

15 Aussi, tout un chacun vivant en Serbie de son propre travail, de façon

16 honnête, respectueux des autres gens, des autres peuples, sont chez eux,

17 se trouvent chez eux dans cette République. La Yougoslavie est une

18 communauté plurinationale et elle ne saurait subsister que dans des

19 conditions d'égalité en droit totales, de toutes les nations qui y

20 résident.

21 La crise qui a frappé la Yougoslavie a conduit à des divisions nationales,

22 sociales, culturelles, religieuses et autres moins importantes. Parmi

23 toutes ces divergences et ces divisions, les divisions nationales sont les

24 plus importantes parce qu'en les éliminant, on atténuera forcément les

25 autres divisions d'importance moindre."

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1 Et ainsi de suite et ainsi de suite.

2 Donc au Kosovo, à cette grande fête serbe qui est celle de Vidovdan,

3 s'agissant d'événements décrits en tant qu'éruption du nationalisme serbe,

4 ceci est la version authentique. Et si vous êtes d'avis contraire, prenez

5 les journaux du 29 juin 1989 et lisez le texte de ce même discours. De nos

6 jours encore, je n'y apporterai aucune modification, je n'y changerai pas

7 un seul mot. J'ai estimé à l'époque que moi, en tant que Président de la

8 Serbie, j'étais censé dire cela aux Serbes, là où ils étaient en majorité,

9 que la légalité en droit était la clef qui permettait d'ouvrir toutes les

10 portes. Et vous voyez dans quel degré d'esprit malicieux on a arraché un

11 fragment de phrase qui est un lieu commun.

12 Je ne me propose plus d'ailleurs de vous donner lecture de ce discours,

13 c'est-à-dire d'abuser de votre temps précieux, si ce discours n'a pas été

14 abusé par eux et de façon si mal intentionnée.

15 Mais permettez-moi de poursuivre là où je m'étais arrêté, pour poser une

16 série de questions à l'adresse de l'opinion publique, mais pas au

17 Procureur. Parce que ce degré auquel le Procureur se trouve mal

18 intentionné est si évident que plus personne n'y voit de dilemme.

19 Que peut-on dire par là quand on dit que le Parti socialiste de Serbie a

20 nommé tel ou tel ministre? Je ne connais pas de pays où le parti qui

21 aurait gagné des élections libres ne se trouve pas compétent pour nommer

22 des ministres. Je ne sais pas, dans vos pays respectifs, par qui les

23 ministres ont été nommés, sauf évidemment par ceux qui ont gagné les

24 élections, pour avoir ces responsables.

25 Ce qui n'a pas toujours été le cas en Yougoslavie: nous avons même été

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1 prêts à nommer à des fonctions importantes, ministérielles entre autres,

2 des gens qui n'appartenaient pas à des partis. Et nous avons également

3 connu des situations où il y avait des gens qui étaient hors partis et des

4 partis respectifs en présence.

5 Que voulez-vous prouver en parlant de leur statut matériel, financier et

6 autre? Je ne sais pas comment cela se présente dans d'autres pays; peut-

7 être que leurs sources de revenus sont autres que leur salaire. Chez nous,

8 les seules ressources des ministres sont leurs salaires. Or, parmi ces

9 ministres, ceux qui seraient prêts à abuser de leur fonction pour

10 détourner des fonds, ils ont toujours dû en répondre, surtout lorsqu'ils

11 sont écroués. D'ailleurs, nous avons peut-être été le seul pays connu, au

12 cours de ces dix dernières années, à écrouer deux de ses ministres qui ont

13 effectué un détournement de je ne sais plus quel montant de deutschemarks.

14 Bien entendu, non seulement ces gens ont été destitués, mais ils ont été

15 jugés et condamnés à des peines de prison. Il s'agissait de plus de

16 700.000 deutschemarks.

17 Donc un parti qui a gagné aux élections est, bien entendu, censé nommer

18 ses ministres et son gouvernement. Et que veut dire, cette fois-ci, que de

19 parler du re-baptême du parti socialiste? On parle ici du Parti socialiste

20 serbe? Nous, nous n'avons jamais été le Parti socialiste serbe, mais le

21 Parti socialiste de Serbie. Qui dit Parti socialiste de Serbie dit

22 évidemment que les Serbes sont en majorité. Mais, en Yougoslavie, il n'est

23 pas d'ethnie qui ne soit pas représentée au sein du Parti socialiste:

24 Hongrois, Ruthènes, Goranis, Albanais, Romanichels, Egyptiens sont tous

25 là; les Musulmans avec.

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1 Alors, pensez-vous que les membres de toutes ces différentes communautés

2 ethniques, qui se trouvent en Serbie, se verraient obligés de s'affilier à

3 des partis prêts à procéder à des discriminations quelconques? D'ailleurs,

4 c'est insensé de vouloir prouver quoi que ce soit dans ce sens-là. La

5 réalité yougoslave prouve, au cours de ces douze années écoulées, qu'il

6 n'y a pas eu de changement dans ce sens-là.

7 Voilà ce qui me permet d'ailleurs de dire que toutes les insinuations

8 faites à mon égard et à cet égard sont nulles et inexistantes.

9 Je ne me propose pas non plus de parler au sujet de telle ou telle affaire

10 insensée, comme quoi le statut du Kosovo a été dissous, l'assemblée a été

11 dissoute par le Parlement serbe. Eh bien, que dirai-je de tout cela? De

12 quel acte criminel s'agirait-il? C'était tout à fait normal quand on a

13 enfreint la constitution. Pourquoi parlez-vous de chefs de médias qui

14 seraient tous, et par règle, chefs du parti socialiste? Il y a tant de

15 directeurs de médias et d'autres sociétés qui n'étaient pas membres du

16 parti socialiste. Ils seraient prêts à vous écrire là-dessus, si vous y

17 tenez bien entendu. Il y a eu tant de directeurs de médias du côté de

18 l'opposition, du côté du gouvernement, etc., qui n'ont pas été membres du

19 parti socialiste. Le fait même qu'une démocratie existe dans le pays, eh

20 bien, se lit par le fait même qu'il y a tant et tant de médias

21 d'opposition et lesquels médias fonctionnent tous.

22 Que voulez-vous prouver en disant que nous avons eu un ministère chargé

23 des relations avec les Serbes hors Serbie? Il y a plus de deux millions de

24 Serbes parsemés depuis l'Australie en Amérique latine, Etats-Unis

25 d'Amérique, jusqu'au Canada et évidemment dans tous les pays d'Europe. Y

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1 compris celui-ci où nous sommes, c'est-à-dire aux Pays-Bas.

2 De tels liens doivent être évidemment sauvegardés et de tels ministères

3 devraient exister quand il s'agit de relations à établir avec nos gens

4 dans la diaspora. Tous les ans, nous avons des réunions, des gens qui

5 viennent de notre diaspora d'Australie, des Indes, d'Amérique du Sud, etc.

6 Que voulez-vous prouver par là en disant que nous avons établi un

7 ministère chargé d'entretenir des relations avec des Serbes hors Serbie?

8 D'où cette impertinence, avec laquelle vous voulez citer une de mes

9 prétendues déclarations que c'en est fait de la Yougoslavie, alors que les

10 oiseaux sur les branches savent que j'ai tout fait de mon mieux et de tout

11 mon coeur pour sauvegarder la Yougoslavie et que c'est dans la continuité

12 de cette Yougoslavie que nous avons, encore une fois, formé cette

13 République fédérale encore une fois de Yougoslavie.

14 Pensez-vous qu'il n'y a pas eu de voix élevées en Serbie, et assez fortes,

15 selon lesquelles la Serbie devrait sortir et se séparer de la Yougoslavie?

16 Notamment, à en juger d'après ceux qui ont été de violents anticommunistes

17 et qui avaient élevé leurs voix et qui disaient que la Yougoslavie était

18 évidemment une prison des peuples, une construction tout à fait

19 fallacieuse et qu'il a fallu la démanteler. C'est à l'adresse de ceux-là

20 que je disais que la Yougoslavie est un pays de tous ceux qui doivent

21 vivre sur un pied d'égalité, et que c'est un pays dans l'intérêt du peuple

22 serbe, au profit duquel pays et peuple vous semblez vous engager sans

23 savoir ce que vous faites.

24 Les Serbes n'ont pas d'autres intérêts que de vivre dans le cadre d'un

25 seul Etat et cela évidemment dans différentes Républiques. Et vous en avez

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1 abusé, la presse notamment, en disant que c'était un programme, plan de la

2 Grande Serbie, mais j'ai dit que c'est ainsi que dans le cadre d'un seul

3 Etat que se trouveraient à cohabiter Croates, Macédoniens, Albanais, etc.

4 Mais savez-vous qu'en Serbie il y a plus de Musulmans qu'en Bosnie et

5 qu'il serait le moins dans leur intérêt, intérêt des Musulmans, ce serait

6 vraiment leur malheur de se voir séparés? Car évidemment, le fait est

7 qu'il y a plus de Musulmans en Serbie qu'en Bosnie. Ne serait-il pas dans

8 leur intérêt également de vivre dans le cadre d'un seul Etat, pourquoi

9 pas, au niveau de deux Républiques?

10 Je ne sais pas d'où vient cette invention suivant laquelle à Karadjordjevo

11 j'aurais parlé avec Tudjman au sujet du partage de la Bosnie. Oui je me

12 suis entretenu avec Tudjman, on s'est rencontré, il était venu à

13 Karadjordjevo, c'était à la frontière même. Dix ou 15 jours plus tard, je

14 me suis rendu chez lui, lui rendre visite en retour, encore non loin de la

15 frontière des deux pays, dans un bâtiment similaire à celui de

16 Karadjordjevo. Et nous avons d'ailleurs informé l'opinion publique de ce

17 qui a été dit entre l'un et l'autre. Nous avons dit qu'il a fallu

18 promouvoir nos rapports. Je ne dis pas qu'il n'y ait pas eu d'idée

19 concernant un certain partage de la Bosnie, mais cette idée n'est pas à

20 moi.

21 Je dis toujours, et je le redis: on ne peut jamais aboutir à une solution

22 qui serait au détriment des intérêts des peuples qui cohabitent en Bosnie,

23 c'est un programme qui est le mien et qui a été lancé à Dayton; et c'est

24 grâce à un tel programme que Dayton a pu être couronné de succès. Si vous

25 voulez vraiment être impartiaux, vous pouvez faire un effort pour

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1 retrouver tout cela dans les journaux.

2 Le problème de la Bosnie ne peut être réglé que suivant la formule capable

3 de protéger les intérêts de tous les trois peuples co-habitants. C'est la

4 clé et la formule pour laquelle j'avais opté; la seule formule suivant

5 laquelle on peut bâtir le futur des trois pays de Bosnie-Herzégovine. Il

6 n'y a pas d'autre formule, d'autre solution. Toutes les autres formules

7 sont vouées à l'insuccès.

8 Comment pouvez-vous parler de cette soi-disant "politique de nettoyage

9 ethnique" lancée depuis Belgrade, alors que tout un chacun sait en Serbie

10 que ce terme-là ne sert à rien d'autre que de désigner un crime. En

11 Serbie, personne n'ignore que le terme de "nettoyage ethnique" est désigné

12 pour désigner un crime. Je ne veux pas revenir en arrière pour parler des

13 réalités serbes et yougoslaves.

14 Je ne sais pas ce que vous avez vraiment voulu prouver quand vous dites

15 que je me suis rendu à Sarajevo. Je me suis rendu au siège du SDS. Et puis

16 quoi, même si je m'y suis rendu, cette réunion que j'ai eue à Sarajevo à

17 laquelle assistaient les Présidents de toutes les Républiques yougoslaves

18 et qui ont eu pour hôte Alija Izetbegovic, tous les Présidents y étaient:

19 Izetbegovic, Tudjman, Gligorov, Kucan, tous y étaient à cette réunion.

20 Moi, j'ai pris la parole au nom de la Serbie pour adopter le plan auquel

21 était abouti Izetbegovic et Gligorov; lequel plan me semble tout de même

22 préconiser un Etat, évidemment un peu… plutôt a des liens d'Etat lâches,

23 pas trop tendus. Mais j'avais posé la question à Izetbegovic et il y a un

24 enregistrement qui en témoigne. Je lui ai posé la question comme quoi:

25 "Izetbegovic, dites-moi: est-ce que vous croyez que ceci devrait être un

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1 Etat?". Il a dit: "Oui, ceci devrait être un Etat et ne vous efforcez pas

2 trop pour m'expliquer". J'ai expliqué tout, il a dit: "J'ai accepté ce

3 plan".

4 J'ai voulu simplement rappeler tout cela à cette réunion du SDS. J'ai vu

5 des gens importants du parti; j'ai vu entre autres des membres de

6 l'Académie des Sciences pour leur en parler.

7 Que voulez-vous prouver en disant que je leur ai rendu visite? Je leur ai

8 rendu visite plus de 100 fois, pas une seule fois. Que voulez-vous dire?

9 Que c'est une entreprise criminelle? Hier, vous avez dit ici qu'on

10 entrevoit l'image qui est la mienne dans tout cela. Je vois que c'est le

11 néonazisme qui est entrevu dans tout cela.

12 Il s'agit de crimes perpétrés contre les Serbes en Bosnie, en Croatie et

13 ailleurs qui planent au-dessus de tout cela. S'il s'agit de l'image à moi,

14 il ne s'agit que d'une image de résistance qui est la mienne et qui plane

15 sur tout cela, image de résistance au néonazisme. Lorsque je parle des

16 relations internationales, quand je parle des efforts qui ont été les

17 miens en faveur de la démocratie, de la liberté et cela, je dirais,

18 partout où je me rendais dans le monde. Et notamment quand je parlais de

19 la justice.

20 Que voulez-vous prouver en parlant de la Serbie et lorsque vous parlez des

21 bombardements de Sarajevo? Dans la Bosnie même, moyennant votre appareil

22 gigantesque et qui vous coûte cher, vous pouvez trouver des traces dans

23 les journaux et ailleurs, où vous allez voir à combien de reprises des

24 responsables serbes, pendant que j'ai été Président de la Serbie, ont tout

25 fait pour dénoncer les bombardements de Sarajevo. Au temps notamment où

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1 Dobrica Cosic, Président de la République fédérale de Yougoslavie depuis

2 1992; lui aussi il peut en témoigner, grand écrivain serbe, membre de

3 l'Académie entre autres. C'est à son adresse et à mon adresse à moi que

4 tous ces responsables lorsque nous étions à Dobanoci s'étaient adressé

5 pour dire que, sur votre demande, jamais aucune localité ne sera

6 bombardée.

7 Comment voulez-vous qu'on puisse avoir un contrôle dans un autre Etat?

8 Quand j'ai entendu parler de l'existence de camp, je me suis renseigné et

9 il m'a été dit: "Il n'y a pas de camp, il n'y a que des prisons réservées

10 à des prisonniers de guerre qui y sont détenus pour un court laps de

11 temps, pour être échangés ensuite, tous contre tous, selon ce principe-

12 là."

13 Encore aujourd'hui, je peux rencontrer tous ces gens qui ont été employés

14 dans ces camps de prisonniers et ils disent tous que nous avons occulté

15 dans ce sens-là. Peut-être qu'il y a des gens qui l'ont été également et

16 qui ont été des responsables de la Republika Srpska, parce que vraiment il

17 m'est difficile de croire que des gens pourraient tromper ou occulter de

18 cette façon-là qui que ce soit. Je ne vois pas non plus ce qu'on veut

19 prouver en inventant des organigrammes de tels ou tels organismes, pour

20 lesquels vous-même vous croyez qu'ils ne sont pas authentiques, mais que

21 vous présumez qu'il y avait tel ou tel schéma ou organigramme de pouvoir.

22 Tout ceci est bien inscrit dans la constitution de tout Etat. On sait très

23 bien quelles sont les compétences des Présidents, du Premier ministre, des

24 ministères. Pourquoi voulez-vous que quelqu'un serait prêt maintenant à

25 concocter d'autres organigrammes pour miner son propre Etat? Car c'est

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1 fidèle à notre système à nous que nous avons adopté une telle

2 constitution. Si nous avions voulu faire autrement, la constitution aurait

3 été différente.

4 Que voulez-vous dire quand vous préconisez que des services étaient en

5 coopération? Tous les services sont en coopération. La moitié des choses

6 qui ont été inventées ici, et de toutes pièces, sont oeuvre de la

7 coopération de différents services de renseignements. Quand vous parlez

8 d'hélicoptère, de Grbavica, eh bien ces hélicoptères-là ont servi pour

9 transporter des malades ou blessés vers l'Académie de médecine militaire

10 de Belgrade. Je crois qu'ici, on en fait autant.

11 Mais je ne veux vraiment pas gaspiller trop de temps pour me lancer dans

12 des commentaires sur l'expression d'une impuissance, je dirai, car ce que

13 nous avons pu écouter pendant deux journées entières ne prouve autre chose

14 que vous ne détenez rien, du point de vue fait, et que vous devez inventer

15 quelque chose qui, de prime abord, semble être mensonge en Yougoslavie et

16 ça finira par être compris par le monde entier comme étant un mensonge.

17 Et ce que nous avons pu voir ici sur les écrans du moniteur et qui vient

18 des sources occidentales d'information, eh bien, au sujet de tout cela, je

19 suis certain qu'il y aura en occident de plus en plus de gens qui ne se

20 plieront pas à ces exigences-là et qui ne voudraient pas perdre leur

21 honneur quand ils se veulent esclaves de toute campagne de média.

22 Par conséquent, cette façon-là de juger est un crime perpétré contre un

23 Etat souverain, contre le peuple serbe, contre moi-même que vous voulez

24 juger en ma qualité de chef d'Etat quand je me suis mis à défendre cet

25 Etat, à défendre ce peuple en question contre le terrorisme, à le protéger

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1 contre la machine de guerre des plus puissantes qui ait jamais existé,

2 laquelle se trouve associée au terrorisme.

3 Il s'agit aussi de parler du crime perpétré contre la vérité. Et comble de

4 cynisme, c'est également un crime contre la justice. Il s'agit d'ailleurs

5 d'une compétition où on voit la justice et l'injustice. Le monde entier

6 sait qu'il s'agit d'un procès politique et que ceci n'a rien à voir avec

7 le droit. Non. Cela parce que ce Tribunal, je le considère comme tout à

8 fait illégitime, lequel fait, évidemment, vous avez refusé.

9 Permettez-moi, Monsieur May, de faire une digression là-dessus.

10 Hier, vous avez voulu me répondre pour m'interrompre ensuite, pour dire

11 que vous avez décidé comme quoi je n'ai pas fait appel et que ceci était

12 pour vous chose faite. Ceci, je ne me préparais pas à le faire, non

13 seulement pour des raisons juridiques mais morales également. Vous savez

14 que le principe de l'habeas corpus ne peut pas avoir lieu sans qu'il y ait

15 un débat judiciaire et un interrogatoire. En sont garants d'ailleurs,

16 l'article 9 de la Charte universelle des Droits de l'homme, l'article 9 du

17 Pacte international des droits fondamentaux des citoyens, l'article 5 du

18 Pacte de protection des droits de l'homme et l'article 6 de la Convention

19 américaine des droits de l'homme. Il s'agit lorsqu'on procède ici de

20 violer non seulement la liberté physique d'un particulier, mais il s'agit

21 d'enfreindre les droits de l'homme fondamentaux.

22 Il est de mon devoir de le souligner; car il était de votre devoir

23 d'engager ici des débats judiciaires pour qu'on puisse entendre les

24 enquêteurs de votre Tribunal qui ont pris part à tout cela, qui est un

25 délit pénal. Entre autres, il y a évidemment lieu de signaler le nom du

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1 directeur de la prison de Belgrade qui a participé à un délit pénal. Vous

2 avez dû interroger tous ces gens-là pour ensuite décider si ces documents

3 servent un corps juridique suivant lequel le Tribunal procède.

4 Alors, vous allez voir qu'il s'agit évidemment d'une infraction grave au

5 droit même. Donc ceci n'a rien à voir avec le droit et avec la justice,

6 non pas seulement parce que le Tribunal est illégitime et parce qu'il se

7 trouve doté depuis de sources telles venant d'Arabie Saoudite, lesquelles

8 sources alimentent le terrorisme international, mais aussi à cause du fait

9 que le Tribunal a accepté des accusations fallacieuses pour faire ensuite

10 sens dessus que maintenant c'est la victime qui se trouve objet d'une

11 représaille et que c'est la victime qui n'est pas en mesure de prouver son

12 innocence.

13 Nous voici donc remontés dans les temps de l'Inquisition. Par conséquent,

14 ce Tribunal, lorsqu'il traite des forces qui ont évidemment perpétré un

15 crime contre mon Etat, mon peuple et mon pays, devrait être considéré

16 comme des forces qui ont été à l'origine de la guerre. Pour parler ensuite

17 de catégories telles de témoins secrets, etc. fait que ce procès est monté

18 de toutes pièces, et on voit que c'est la force qui triomphe sur la force

19 de la justice et du droit. Il n'y a donc aucun élément d'un jugement

20 équitable, aucun élément de l'égalité des armes des parties en présence.

21 Regardez comment se présentent les choses. Un énorme appareil d'un côté,

22 une structure médiatique énorme, toujours rangée de ce côté-ci, mille et

23 un services, toujours de ce côté-ci. Tout est à votre disposition. Or, de

24 mon côté à moi, je n'ai que la cabine téléphonique publique -je dirai-

25 dans la prison où je suis. C'est tout ce dont je dispose pour m'affronter

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1 ici à, cette fois-ci, des calomnies des plus graves à l'adresse de mon

2 Etat, de mon peuple et de tous les autres dont les noms ont été mentionnés

3 ici.

4 Lorsque nous étions ici devant cette Chambre d'appel, présidée par M.

5 Jorda, j'ai dit clairement: "Laissez-moi en liberté. Tout le monde sait

6 que je ne fuirai pas cette bataille qui doit être livrée pour permettre à

7 la vérité de triompher. Je serais prêt à sacrifier évidemment toute ma

8 famille et mon peuple qui croient au principe de la justice et de la

9 vérité. Vous savez très bien que je ne fuirai pas. Permettez-moi d'être

10 libre. Mettez-moi en liberté pour qu'à partir de la liberté je puisse

11 m'affronter à tout cela".

12 Vous voulez maintenant qu'on se mette à une compétition de nage de 100

13 mètres, encore que mes pieds et bras sont ligotés, et vous voulez que ce

14 soit vraiment un procès équitable. Tout cela pour que la victime de

15 l'agression soit un coupable, tout simplement pour rendre légitime le

16 crime de ceux qui vous ont réunis ici, de vos commanditaires.

17 Mais je vais vous dire une chose: on ne peut pas justifier le crime

18 perpétré par ces derniers. Or, le recel de crime est peut-être l'un des

19 moyens les plus graves, auquel font souvent recours des criminels. L'OTAN

20 et les crimes de l'OTAN ne seront jamais légalisés dans mon pays.

21 Le pouvoir pro-OTAN en Serbie aura beau faire à s'occuper de cette tâche

22 que ce régime est en train d'accomplir où la Serbie ne sera autre

23 qu'humiliée, diminuée. Mais ce pouvoir ne parle pas au nom du peuple. Et

24 le peuple entier sait très bien que tel n'est pas le cas, et que le régime

25 ne parle donc pas au nom du peuple.

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1 Le premier crime, et le plus important, désigne d'abord l'agression. Il

2 s'agit de l'agression contre la paix. Il s'agit de crime de "génocide",

3 crime contre l'humanité et violation du droit de la guerre, etc.

4 Depuis le mois de mars en 1999, lorsque l'OTAN a attaqué la Yougoslavie,

5 et cela dure encore dans tous les pays membres de l'OTAN, dans tous les

6 pays de l'Union européenne et dans d'autres pays membres de l'OTAN, une

7 vaste campagne anti-serbe et anti-yougoslave a été organisée. Le tout pour

8 camoufler et dissimuler les vastes crimes qui ont été perpétrés contre la

9 population civile.

10 Est-ce que je vais trop vite pour nos interprètes? J'entends toujours

11 l'écho de l'une des cabines qui n'est pas loin de moi. Par conséquent,

12 j'essaierai de m'y conformer.

13 M. le Président (interprétation): Ils vous suivent mais ayez à l'esprit

14 également qu'ils vous suivent et qu'ils doivent vous suivre.

15 M. Milosevic (interprétation): Voilà pourquoi font défaut, dans la majeure

16 partie de ces pays que j'ai mentionnés, les informations des crimes

17 perpétrés en Yougoslavie. Pour parler de l'intensité de ces crimes, pour

18 parler de la force militaire employée, eh bien, l'agression perpétrée

19 contre la Yougoslavie connaît des dimensions les plus importantes depuis

20 la Seconde Guerre mondiale. Une alliance composée de 19 pays les plus

21 évolués, y est à la base. Il s'agit de dire que ces pays sont 676 fois

22 économiquement et autrement plus puissants que la Yougoslavie; ne serait-

23 ce qu'à en juger d'après les données statistiques. Et pour parler de ces

24 données statistiques et concernant l'économie, ces données sont

25 accessibles.

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1 Et bien sûr, à d'autres points de vue, cette alliance, et du point de vue

2 militaire surtout, cette alliance est certainement plus puissante que la

3 Yougoslavie. Infiniment plus puissante que la Yougoslavie.

4 Mais évidemment, parmi les victimes il y avait enfants, vieillards,

5 femmes, personnes malades. Des femmes en maternité, malades graves en

6 dialyse, des victimes se trouvaient dans des colonnes de réfugiés mais

7 également parmi les journalistes qui étaient à remplir leurs tâches. Il y

8 avait des agriculteurs dans leurs prés. Ensuite, il y avait également des

9 gens qui étaient près de leurs étals au marché vert, des passagers qui se

10 trouvaient par hasard sur des ponts. Ont été détruits et démolis de vastes

11 quartiers d'habitation, des parties entières de centres villes.

12 Tout a été fait selon ce qu'on a pu lire dans une déclaration: "la Serbie

13 devrait être ramenée à l'âge de la pierre".

14 Sur le nombre total des civils tués, 30% étaient des enfants. Sur le

15 nombre total des civils grièvement blessés, 40% étaient des enfants. Et je

16 ne parle en ce moment que des civils. 120.000 femmes enceintes ont été

17 touchées par ces bombardements, ainsi que de très nombreux animaux de

18 ferme. Des écoliers qui travaillaient dans leurs classes, à l'époque,

19 1.300.000 d'entre eux ont été blessés. Des enfants, en très grand nombre,

20 ont vu leur vie complètement bouleversée par les bombardements qui

21 duraient toute la journée et même la nuit; ce qui a provoqué des

22 traumatismes psychologiques et d'autres traumatismes, et qui risquent

23 d'avoir des conséquences jusqu'à la fin de leur vie. Plus de la moitié de

24 ceux qui sont morts à Kosmet étaient des habitants de nationalité

25 albanaise, c'est-à-dire précisément ceux au nom de qui soi-disant

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1 l'agression a été mise en œuvre, agression que les auteurs de celles-ci

2 baptisent "intervention humanitaire". Et très bientôt, vous verrez à quoi

3 ressemble une telle intervention.

4 Donc l'article 2, de la Charte des Nations Unies, a été violé de la façon

5 la plus flagrante qui soit sans accord, sans avoir obtenu l'accord du

6 Conseil de sécurité. Je pense que là-dessus, au moins, il n'y a pas de

7 contestation que cette agression a été violente et brutale et qu'elle l'a

8 été sans l'accord du Conseil de sécurité.

9 Les Droits de la Guerre, les Conventions de Genève de 1939 ont été violés

10 ainsi que le Protocole additionnel 2 de 1997. Le Pacte des droits

11 civiques, le Pacte des droits culturels de 1966 ainsi que de nombreuses

12 autres conventions internationales ont été violées également.

13 Outre ces conventions internationales, l'OTAN a violé les dispositions de

14 son propre statut, selon lequel l'OTAN est une organisation de défense

15 régionale qui ne peut intervenir que sur le territoire de ses Etats

16 membres. L'agression contre la Yougoslavie constitue une infraction à la

17 loi et aux dispositions officielles de la plupart des Etats membres de

18 l'OTAN. En effet, ce type d'agression militaire est interdit par tous ses

19 règlements.

20 Le Gouvernement de la République fédérale yougoslave a soumis une plainte

21 à la Cour internationale de justice en rapport avec l'agression de l'OTAN

22 en exigeant que ce…, en demandant que ce Tribunal détermine que l'OTAN a

23 commencé une agression militaire contre un pays tiers. Que la non-

24 ingérence dans les affaires intérieures d'un pays tiers a été violée par

25 cette intervention contre le droit d'un gouvernement de s'opposer à

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1 l'approvisionnement en armes et en équipement de terroristes agissant sur

2 son territoire. Que la mort violente de nombreuses femmes et enfants a

3 constitué une violation de nombreux pactes et conventions internationales

4 protégeant leurs droits. Car vous verrez que ce sont les civils qui ont

5 été la première cible de l'OTAN. On le voit quand on analyse la nature des

6 victimes notamment.

7 Au Kosovo, au cours de toutes ces campagnes de bombardement, l'OTAN n'a

8 réussi à détruire que sept chars. En revanche, elle a détruit un très

9 grand nombre d'hôpitaux, bien plus nombreux que les chars; elle a détruit

10 beaucoup plus d'écoles que de chars, elle a détruit beaucoup plus de

11 centres de santé et d'écoles maternelles que de chars.

12 Et toutes sortes d'autres obligations ont été niées, comme le fait qu'il

13 soit interdit d'utiliser des armes à fragmentation. Celui qui a été vu à

14 la télévision, M. Shea, le grand menteur qui aurait dû être félicité et

15 avoir été décoré cette année-là, comme ayant le record du mensonge, il a

16 dit que cette arme était interdite, la bombe à fragmentation, et qu'elle

17 n'avait pas été utilisée. C'est seulement plus tard qu'il a été prouvé

18 qu'elle l'avait été.

19 Le fait que le bombardement des raffineries de pétrole et des usines

20 chimiques est interdit par la loi, constitue une des dispositions en

21 vigueur dans la plupart des pays dans le monde. La destruction, en effet,

22 par voie militaire, de telles usines peut causer des dégâts très graves

23 pour les civils et la population locale.

24 La destruction d'institutions culturelles et éducatives est une violation

25 à l'exercice du droit à la vie, du droit au travail, du droit à

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1 l'information, du droit d'accéder aux soins médicaux, ainsi que de

2 nombreux autres droits fondamentaux de l'homme.

3 La destruction de ponts traversant des rivières ou des fleuves

4 internationaux est évoquée dans une disposition d'une convention

5 internationale sur la navigation.

6 Tous ces actes constituent des crimes et des violations d'obligations

7 existantes, notamment la violation de l'interdiction d'imposer à un groupe

8 d'un pays des conditions de vie qui entraînent une atteinte à l'intégrité

9 physique, une atteinte partielle ou complète à l'intégrité physique des

10 habitants de ces pays.

11 C'est l'Alliance de l'OTAN qui est responsable des dommages, ainsi que les

12 Etats membres qui ont participé à l'agression contre la Yougoslavie; et

13 d'autres Etats qui, de temps en temps, ont apporté leur aide à l'OTAN.

14 Outre les Etats, sont responsables également des individus, à commencer

15 par ceux qui prennent les décisions, c'est-à-dire les chefs d'Etat et de

16 gouvernement, les ministres de la Défense, le secrétaire général de

17 l'OTAN, les commandants militaires et d'autres. Et la liste va jusqu'aux

18 exécutants anonymes.

19 On m'a dit que j'avais la possibilité de montrer des photographies; donc

20 j'aimerais maintenant que certaines de ces photographies soient montrées.

21 Je vais vous apporter quelques mots d'explication à ce sujet. Le 14 avril

22 1999…

23 M. le Président (interprétation): Monsieur l'Huissier, veuillez commencer

24 la distribution de ces photographies.

25 M. Milosevic (interprétation): Je vous demande de faire distribuer cette

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1 série de photographies dans l'ordre prévu par moi. Elles sont toutes en

2 rapport avec les événements dont je vais parler maintenant.

3 Donc le 14 avril 1999, de 13 heures 30 à 15 heures 30, à Djakovica, sur la

4 route qui va de Djakovica …

5 M. le Président (interprétation): Un instant, je vous prie.

6 (Distribution des photographies par l'huissier.)

7 Vous pouvez poursuivre. Gligorov Kucan Dobanovci

8 M. Milosevic (interprétation): Donc sur la route de Djakovica à Prizren,

9 tout près du village de Madanaj Ime, une colonne de réfugiés albanais a

10 été bombardée à trois reprises, des Albanais qui étaient en grande

11 majorité des femmes, des vieillards et des enfants qui retournaient chez

12 eux dans des véhicules - des tracteurs et des remorques.

13 Qu'en est-il de la photographie? On ne la voit plus à l'écran. J'aimerais

14 que vous voyiez ces photographies. Moi, je vois la photographie maintenant

15 sur mon écran; nous pouvons donc poursuivre.

16 M. le Président (interprétation): Je n'ai pas la photographie sur mon

17 écran à moi.

18 (Intervention technique.)

19 La photographie est à nouveau sur les écrans. Nous avons l'image à l'écran

20 maintenant.

21 M. Milosevic (interprétation): Passons à la photographie suivante,

22 Monsieur l'Huissier.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 Les gens que vous voyez là sont tous des paysans. Une femme et son enfant

25 tués dans le village de Madanaj.

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1 Photographie suivante. Ces gens-là ne voyageaient pas en autobus, mais en

2 tracteur, en voiture à cheval. On pouvait voir très clairement qu'il

3 s'agissait de civils et de paysans.

4 Photographie suivante. Cadavres calcinés.

5 N'oubliez pas, je vous prie, que les photographies sont recto verso. Mais

6 vous pouvez poursuivre. Passons à la photographie suivante, Monsieur

7 l'Huissier. Continuez.

8 Photos suivantes? Vous pouvez poursuivre.

9 Photographie suivante. Une fillette.

10 Photographie suivante. Une vieille femme.

11 Photographie suivante. Suivante. Suivante.

12 Vous en faut-il encore? Allez-y!

13 Photographie suivante. Suivante. Suivante. Des corps calcinés.

14 Suivante. Suivante. Suivante.

15 Donc voilà ce qui s'est passé le 14 avril; cela s'est passé entre 13

16 heures 30 et 15 heures 30. Il n'y avait aucun doute: il faisait tout à

17 fait clair. C'est délibérément que l'OTAN a visé ces personnes. Mais je

18 vais vous dire pourquoi ces personnes ont été prises pour cibles. Elles

19 l'ont été parce qu'elles rentraient dans leur village, c'est-à-dire

20 qu'elles agissaient au contraire de la conception de l'agresseur qui

21 souhaitait, de façon mensongère, diffuser l'idée que les Albanais fuyaient

22 devant l'armée et la police serbes. Donc tous les Albanais étaient

23 autorisés à partir, mais aucun n'avait le droit de revenir chez lui.

24 Durant l'agression, des tracts ont également été lancés par les avions

25 qui, en langue albanaise, invitaient les habitants à fuir. Et l'UCK,

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1 organisation terroriste, à continuer, à agir. Elle a y compris tué les

2 chefs de famille désobéissants, qui ne lui obéissaient pas en refusant

3 d'abandonner leur domicile.

4 C'est donc là, une fois une fois de plus, la preuve de la collusion qui

5 existait entre les forces de l'OTAN et cette organisation terroriste qui

6 était devenue nécessaire pour obtenir la déstabilisation de la

7 Yougoslavie.

8 Le 25 mars, à 5 heures, Rozaj a été bombardé.

9 Le 26… Je ne serai pas en mesure de vous donner un grand nombre

10 d'exemples, car pour cela, il me faudrait une dizaine de jours et je

11 risquerais bien sûr de me fatiguer à l'excès. Donc je me contenterai de

12 vous fournir quelques exemples.

13 Le 26 mars, bombardement du village de Grlic, dans la municipalité de

14 Danilograd.

15 Le 2 avril, le village de Orahovac, au Kosovo Metohija: un grand nombre de

16 blessés, un grand nombre de tués; grand nombre également de blessés

17 graves. Je vais d'ailleurs, s'agissant de ce village de Nogovac, non loin

18 de Orahovac, qui a été bombardé ce jour-là, je vais vous montrer ceci: le

19 22 avril, le village de Smokovo, bombardé à 1 heure 45. Un grand nombre de

20 blessés et de morts. Près de Kursumlija.

21 Voilà, je donne à M. l'Huissier un certain nombre de photographies qui

22 vous permettront de voir les résultats des bombardements dont je viens de

23 parler.

24 Le 4 avril, Cacak.

25 Le 5 avril, Vranje. Vous avez les photographies ici; il faut les montrer

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1 recto verso.

2 M. le Président (interprétation): Il faudra interrompre, Monsieur

3 Milosevic.

4 M. Milosevic (interprétation): Bien, si cela doit prendre trop de temps,

5 je peux encore vous donner une autre photographie. Enfin, bon, terminons

6 avec ceci d'abord.

7 M. le Président (interprétation): Montrez donc ces photographies une par

8 une.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 M. Milosevic (interprétation): Je suppose que, sur vos écrans, les images

11 sont plus claires. Vous voyez ces corps sans vie qui sont, pour la

12 plupart, ceux de paysannes. Grand nombre de corps entassés les uns sur les

13 autres. Cette paysanne ici a le corps complètement calciné; les bombes ont

14 dû la brûler vive.

15 Ici, vous voyez un lotissement. Donc, de façon générale, ils bombardaient

16 des villages. Vous voyez les dates: 25, 26, 24 mars, début avril. Dès ce

17 moment-là, l'OTAN visait des villages et des maisons d'habitation. C'était

18 devenu la cible prioritaire pour les décideurs de l'OTAN. Là encore,

19 l'image d'une femme, une vieille femme.

20 M. le Président (interprétation): Nous allons suspendre vingt minutes à

21 présent.

22 (L'audience, suspendue à 12 heures 15, est reprise à 12 heures 36.)

23 M. le Président (interprétation): Nous allons continuer jusqu'à 13 heures

24 45 et nous lèverons la séance pour aujourd'hui.

25 M. Milosevic (interprétation): Le 5 avril 1999, à 21 heures 40, on a

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1 bombardé Aleksinac, petite ville au centre de la Serbie, une ville de

2 mineurs. Et tout un chacun en Serbie sait qu'il y a des mines à Aleksinac,

3 il s'agit de mines de charbon, ce sont des mines de fond. Le travail de

4 mineur est le travail le plus pénible. Cette ville ne dispose pas

5 d'installation militaire, elle n'a aucune importance stratégique et sa

6 destruction à elle ne peut être comparée qu'aux bombardements des villes

7 effectués par les nazis pendant la Deuxième Guerre mondiale.

8 Donc sans aucune raison, sans objectif aucun, si ce n'est celui d'abattre

9 le plus possible de civils, notamment des citoyens, des gens pauvres,

10 lorsque Chirac est venu à Belgrade, j'ai ouï-dire à la télévision qu'il

11 avait dit qu'il avait sauvé les ponts de Belgrade. Il est vrai qu'il ne

12 les a pas tous sauvés, les plus grands de ces ponts ont été bombardés et

13 détruits, mais il avait apposé un veto. Ce qui prouve que les chefs d'Etat

14 décidaient des objectifs, des cibles à viser. Et lorsqu'il viendra ici, et

15 comme vous le savez j'ai le droit de citer des témoins à comparaître, je

16 devrais lui poser la question forcément de savoir pourquoi il n'avait pas

17 apposé son veto pour ce qui est de la destruction de cette petite ville de

18 mineurs et notamment pour ce qui est de la mort de tant de gens, de

19 civils, de femmes et d'enfants. Quelle cible militaire cela avait-il pu

20 être si ce n'est l'objectif de commettre un crime, si crime peut

21 constituer objectif en soi, une fin en soi.

22 Je voudrais que l'on vous montre des photos d'Aleksinac, je voudrais que

23 vous voyez de quoi à l'air le centre ville et de quoi avait l'air ces gens

24 tués à Aleksinac. Il s'agit pratiquement du centre ville tout entier et

25 au-delà de cette circonférence, de ce périmètre.

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1 (Intervention de l'huissier qui place la photographie sur le

2 rétroprojecteur.)

3 On voit là un cadavre enseveli sur la photographie de tout à l'heure, on

4 voit des maisons détruites. Comme vous pouvez le voir, ce sont des maisons

5 d'habitation, des maisons familiales. Ici l'on voit les textes qui nous

6 disent où les cadavres de ces personnes-ci ont été retrouvés.

7 M. le Président (interprétation): Est-ce tout?

8 M. Milosevic (interprétation): Le 6 avril, on a bombardé Dubinje dans la

9 partie la moins développée de la Serbie, dans la région de Sjenica. La

10 région de Sjenica est une région essentiellement peuplée de Musulmans. Le

11 6 avril, on a bombardé Podgorica aussi. Le 7 avril, on a bombardé

12 Pristina. On a complètement détruit le bâtiment des PTT au centre de

13 Pristina. Et beaucoup de gens ont trouvé la mort, beaucoup de gens ont été

14 ensevelis sous les décombres et il s'agissait de Serbes et d'Albanais et

15 de Goranis et des Turcs, mais la majorité était quand même des Albanais.

16 Pour ne pas faire d'interruption, je vais remettre à l'huissier un jeu de

17 sept photographies, avec dessus bon nombre d'installations. Je vais

18 demander aussi au monsieur qui présentera les photographies, de nous

19 montrer les légendes se trouvant sous les photos pour que je puisse faire

20 des commentaires.

21 Le 8 avril, on a bombardé Suprija, une autre petite ville au centre de la

22 Serbie, cela a commencé à 0 heure 42 minutes jusqu'à minuit 50. Comme vous

23 pouvez le constater, ces petites villes ont été bombardées surtout la nuit

24 quand les gens dormaient chez eux pour qu'on soit sûr qu'on les tuerait.

25 Comme à Aleksinac et à Suprija aussi, il n'y avait pratiquement aucun abri

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1 antiaérien et, si tant est qu'il y en a eu, il y en a eu si peu qu'ils ne

2 pouvaient pas héberger ne serait-ce qu'un pour-cent de la population en

3 place.

4 Vous ne manquerez pas de voir également les photos des bâtiments détruits

5 à Suprija. On a bombardé le 9 avril Osjecenica dans la municipalité de

6 Mionica. Mionica se trouve et la région en général est une région agricole

7 d'élevage.

8 Le 9 avril, on a bombardé Pricevici, dans la municipalité de Valjevo, le

9 hameau de Boskovici.

10 Du 10 au 11 avril, dans la nuit, il y a eu trois vagues de bombardement

11 pour ce qui est de la municipalité de Kursumlija et le village de Merdare

12 en apathie surtout, c'est là que l'on a jeté des bombes destructives et

13 des bombes à fragmentation.

14 Cette liste du reste sera remise à l'opinion publique tout aussi bien qu'à

15 vous-mêmes ici. Et il en va de même pour bon nombre d'événements que je

16 citerai.

17 Le 11 avril, à 4 heures du matin, on a bombardé le village de Smaila. Il

18 s'agit de la municipalité de Rekovac. Puis le 11, le village de Turekovac

19 dans la municipalité de Leskovac.

20 Le paysan serbe est le paysan le plus résistant qu'il y ait. Et seuls des

21 nazis avaient pu concevoir de tels bombardements de villages.

22 J'ai ici des rapports, j'en ai beaucoup d'ailleurs. Il y a quelqu'un qui

23 dit: "J'ai perdu la conscience, je ne sais pas ce qui m'est arrivé

24 ensuite, mais je sais seulement que je me trouve maintenant à Belgrade

25 pour soins, à l'Académie médicale militaire. Neraz Ceraku, qui est

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1 albanais, qui a été apporté jusqu'à Belgrade en provenance de Pristina

2 bombardée vers l'établissement médical d'élite, le meilleur que la

3 Yougoslavie ait. On a entendu dire ici que c'était nous qui avions

4 organisé des expulsions d'Albanais, que nous avions provoqué la guerre à

5 seule fin d'anéantir, de détruire tout ce qui était albanais.

6 Le 14 avril, le village de Pavlovac, dans la municipalité de Vranje. Vous

7 allez voir des cadavres devant des maisons villageoises. En entre autres,

8 vous verrez le cadavre de Milica Stojanovic, une fillette de 12 ans.

9 Le 16 avril, on a bombardé Subotica.

10 Le 17 avril, on a bombardé Batajnica. C'est une localité à proximité de

11 Belgrade. Vous allez voir le cadavre de la petite Milica Rakic, qui est

12 née en 1996.

13 Le 17 avril encore, donc le même jour, on a ciblé -c'est pratiquement

14 Belgrade, la banlieue de Belgrade- une cité ouvrière dans la banlieue de

15 Belgrade qui s'appelle Rakovica.

16 Et nous vous ferons part d'une liste des victimes. Vous allez voir des

17 rues à Mileseva; vous allez voir des cadavres dans les rues de Mileseva.

18 Vous allez voir, le 20 avril, le village de la municipalité de Novi Pazar,

19 une région sous-développée de la Serbie.

20 Le 21 avril. Vous allez voir un camp de réfugiés à Meja, dans la

21 municipalité de Djakovica et vous allez juger de ce qu'il en est des

22 assertions aux termes desquels on aurait peuplé les régions quittées par

23 les Albanais avec des Serbes.

24 Donc vous verrez que tous ces faits-là démentiront les assertions mal

25 intentionnées, toutes ces insinuations que nous avons entendues ici. Parce

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1 que la Yougoslavie a accueilli un million de réfugiés et qu'il y en a eu

2 le moins possible au Kosovo. Si l'on en jugeait d'après cela, on m'aurait

3 peut-être accusé d'avoir voulu changer, modifier la carte démographique de

4 Belgrade. La plupart de ces réfugiés se sont dirigés vers Belgrade;

5 personne ne les a obligés à se diriger où que ce soit. Ils se dirigeaient

6 là où ils avaient l'opportunité de se rendre. Et 80% d'entre eux, voire

7 90% d'entre eux ont été hébergés chez l'habitant, dans des familles qui

8 les ont accueillis. Et Sadako Ogata m'avait dit une fois qu'elle n'allait

9 jamais nulle part ailleurs, vu de tels soins à l'intention des réfugiés.

10 Et je peux dire ici, à vous, chose que vous pouvez retrouver, si vous

11 voulez vous donner la peine de vous pencher sur ces faits-là, à savoir que

12 plus de 50.000 réfugiés musulmans, pendant la guerre en Bosnie, ont été

13 recensés; ils étaient venus s'abriter, chercher refuge en Serbie. Que

14 diriez-vous donc de ces réfugiés venus d'un pays que l'on dit que nous

15 avions agressé? 50.000 d'entre eux sont venus se réfugier chez

16 l'agresseur: mais qu'est-ce que cela signifie? Qu'est-ce que cela peut

17 signifier que d'entendre des assertions de ce type? Mais le papier est en

18 mesure de supporter toutes sortes de choses et peut supporter des

19 aberrations de ce genre aussi.

20 Vous allez voir des photos de corps, de cadavres, de bâtiments détruits,

21 de personnes qui ont été tuées et je n'ai même pas parcouru le premier des

22 mois.

23 Et comme méfait particulier, quoique le terme de "méfait" n'est pas assez

24 fort, je citerai le bombardement des établissements de santé, les

25 établissements de santé à Zajecar, l'établissement pharmaceutique de

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1 Ladjevci, le centre médical de Kraljevo, le centre médical de Leskovac,

2 l'hôpital général, le centre hospitalier de Pristina, le centre

3 hospitalier de Rakovica, cette banlieue ouvrière de Belgrade. Ensuite, la

4 communauté locale du "13 Mai", qui fait partie du combinat agricole de

5 Zemun. Ensuite, le centre médical de Sime Milosevic, à Belgrade. Puis, le

6 centre médical de Sremcica, à Belgrade. Puis à Zeleznik, à Belgrade. Puis

7 Gnjilani, puis Leskovac, centre d'établissement de Djakovica, hôpital de

8 Djakovica.

9 (Les interprètes demandent de ralentir l'énumération.)

10 L'établissement médical de Raska. Le centre médical de l'industrie de Nis,

11 puis le centre médical de Cacak, village de Leskovac. Puis, le centre

12 médical de Cacak, l'établissement médical de Lucani. Puis l'infirmerie de

13 l'industrie du tabac à Nis. Puis le centre médical de Jastrebac.

14 L'institut Cigota à Cajetina, en pleine montagne, qui soigne les maladies

15 de la glande thyroïde. Le centre de Prokuplje, de Cuprija, la maison de

16 santé de Cuprija. Le centre médical de l'usine "21 Mai" de Belgrade. Le

17 centre médical de Kursumlija. L'institut chargé de soigner les maladies et

18 les interventions chirurgicales à Banjica. Puis le médical général de

19 Valjevo. Et ainsi de suite.

20 En sus, il a été bombardé des établissements scolaires. Je vais soumettre

21 à l'opinion publique toute une liste. Mais, pour gagner du temps, je ne me

22 proposerai pas d'en donner lecture ici parce qu'il s'agit ici d'une liste

23 des établissements scolaires qui ont été endommagés ou détruits lors de

24 l'agression du Pacte de l'OTAN, seulement au cours du premier mois de

25 l'intervention. Et à chaque page, on retrouve des dizaines d'écoles.

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1 La liste, s'agissant des trente premiers jours, comporte, en tout et pour

2 tout, 34 pages. Donc sur 34 pages, nous avons une liste des écoles

3 endommagées ou détruites pendant l'agression de l'OTAN. A Belgrade, il

4 s'agissait essentiellement d'écoles primaires. Dans la municipalité de

5 Cukarica, Rakovica, Vozdovac, municipalité de Zemun, municipalité de

6 Savski Venac, municipalité de Zvezdara, municipalité de Palilula,

7 municipalité de Novi Beograd, municipalité d'Obrenovac, de Sopot. Puis, à

8 Bor, dans la région de Jablanica; puis à Leskovac, puis à Nis, dans la

9 région de Nis d'une manière générale. Et ce, allant des écoles primaires

10 jusqu'aux facultés, jusqu'aux écoles techniques de génie civil, de

11 mécanique technique, d'installation, d'hébergement des élèves, des

12 étudiants, puis des cantines estudiantines. Mais, en majeure partie, il

13 s'est agi d'écoles primaires.

14 Par conséquent, sur 34 pages, nous voyons des écoles. Je ne vais pas non

15 plus donner lecture de cette liste des monuments culturels bombardés. Mes

16 collaborateurs vous feront parvenir cela également. Ils feront parvenir

17 cela également à l'opinion publique. Cette liste-là comporte 18 pages. Et,

18 tout à fait par hasard, on voit en page 18, le monument historique de la

19 Ligue de Prizren qui se trouve au Kosovo.

20 Mais avant d'enchaîner, je voudrais demander qu'on montre les

21 photographies de ces bombardements, essentiellement des bombardements de

22 villages et de villes: Dubinje, Podgorica, Pristina, Podgorica, Mionica,

23 Pricevici, Vranje et ainsi de suite dont je vous ai parlé tout à l'heure.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 Ici, on voit certains bâtiments du centre ville de Pristina. Tout à

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1 l'heure, je l'ai raté. Il s'agit d'ailleurs du bâtiment de l'Assurance,

2 "Assurance-maladie et Retraite" de Pristina. Ici, il s'agit de grandes

3 surfaces, grands magasins Grmija de Pristina. Au début, vous avez pu voir

4 les bureaux PTT: le bâtiment central a été entièrement démoli. Et dans les

5 parages de celui-ci, il y a des blocs d'habitation entièrement démolis

6 également, tout autour donc du bureau principal des PTT.

7 Voilà comment on a dû déblayer les décombres pour retrouver les restes de

8 la famille albanaise des Gashi qui ont trouvé la mort, cinq membres de

9 cette famille ayant été évacués, leurs cadavres, le 5 avril 1999.

10 Sur cette photographie, nous voyons le cadavre de Radovan Aleksic de la

11 rue Zanaska. Vous pouvez poursuivre.

12 Sur cette photographie également, des cadavres, des photos de cadavres de

13 Pristina. Je ne vois pas très bien comment se lit la légende en dessous

14 des photos.

15 Voici comment se présentent les maisons démolies de Cuprija. Comme je l'ai

16 dit tout à l'heure, il s'agit d'une petite ville de la Serbie centrale.

17 Une fois de plus, il s'agit de maisons familiales.

18 Ici encore, une photographie qui illustre les bâtiments détruits de

19 Cuprija. Nous y sommes toujours dans la ville de Cuprija. Voici comment se

20 présentent les maisons villageoises de la municipalité de Valjevo.

21 Photo suivante. Allez-y.

22 Ici, vous pouvez voir les photographies des maisons démolies du village

23 Merdare, municipalité de Kursumlija. Pour être concret, cinq personnes y

24 ont trouvé la mort; entre autres, un bébé d'un an.

25 Voilà comment se présentent toutes ces photographies qui font partie de

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1 cette documentation qui a été élaborée à cette époque-là, tous ces

2 documents recueillis à cette époque-là. Plus tard, sur d'autres photos,

3 vous verrez le même village. Cette fois-ci, il s'agit du village de

4 Turekovac, municipalité de Leskovac. Vous pouvez voir sur cette

5 photographie des parties d'engins non explosées. Nous sommes au village de

6 Pavlovac, municipalité de Vranje, et le cadavre de Milo Drajkovic, qui lui

7 a été tué par une bombe à fragmentation.

8 Sur cette photographie, une maison touchée également. Voilà les traces des

9 bombes à fragmentation lancées par des gens qui, prétendument, ne visaient

10 pas des cibles civiles; la raison pour laquelle, certainement, il y a eu

11 prohibition de tels engins. Je crois qu'ici, nous pouvons nous passer de

12 commentaires.

13 Sur cette photographie, vous pouvez voir qu'une fillette a été tuée. Cette

14 fois-ci, il s'agit de cette fillette nommée Milica, âgée de 12 ans. Voilà

15 le cratère, le trou produit par l'obus.

16 Nous sommes à Subotica maintenant. Photographie prise en date du 16 avril.

17 Cette photo présente la maison de Mihalj Radfali de Subotica; également

18 une bâtisse, maison familiale d'habitation. Voici la photographie de la

19 maison dans laquelle a été tuée la petite fillette, Milica Rakic. Vous

20 pouvez aller de l'avant. Voilà la photo de cette fillette notamment. Une

21 autre maison démolie et qui faisait partie de ce même complexe de maisons

22 d'habitation.

23 Allez de l'avant toujours. Vous-mêmes, vous pouvez remarquer qu'il s'agit

24 évidemment de simples maisons, bâtisses sans étage. Et tous ces cadavres

25 autour.

Page 305

1 Nous sommes maintenant dans le village de Dolovi, municipalité de Novi

2 Pazar, en date du 20 avril. Il s'agit de maisons de villageois plutôt

3 pauvres; il s'agit d'une région sous-développée, économiquement parlant.

4 Cette fois-ci, nous sommes dans un centre de regroupement de réfugiés,

5 désignés comme étant Maja à Djakovica, ce dont j'ai parlé tout à l'heure

6 en précisant la date du 21 avril.

7 Encore une fois, évidemment des parties de ce camp pour réfugiés. Voici,

8 cette fois-ci, la photographie de quelques cadavres de réfugiés. En

9 général, il s'agit de corps de femmes.

10 Je voulais attirer votre attention sur le fait qu'il s'agissait là d'un

11 bombardement féroce et sauvage des ponts et des voies de communication.

12 Déjà en date du 25 mars, l'aéroport de Golubovci a été touché. Le 1er

13 avril a été bombardé le pont de Varadin, il s'agit d'un pont qui se trouve

14 en plein coeur de la ville de Novi Sad, enjambant le Danube. Et c'est

15 ainsi que la destruction de ce pont a pratiquement coupé l'alimentation en

16 eau de l'ensemble de la ville qui se trouve de l'autre côté de la rive. La

17 rivière du Danube a été fermée à toute navigation. Cela s'est passé à 04

18 heures 55 jusqu'à 05. Le même jour, le pont de Beska a été bombardé, il

19 s'agit d'une voie de communication importante qui relie Belgrade à Novi

20 Sad.

21 Le 3 avril, le pont dit "de la liberté" de Novi Sad a été bombardé. En

22 date du 3 avril, fut bombardé le pont "le 25 Mai", qui relie la localité

23 de Backa Balenka qui se trouve en République fédérale de Yougoslavie à

24 Ilok, ville qui se trouve en Croatie. Ensuite, nous sommes près du pont du

25 village Jezgrovici. Ensuite, une autre photographie du pont de Biljanovac.

Page 306

1 Ensuite, le pont des chemins de fer de Novi Sad a été touché également.

2 Ensuite, le pont de Brvenik sur Ibar. Le pont de Bogojevo a été touché

3 également. Un autre pont dans le village de Lozno. De même que les voies

4 ferrées évidemment importantes de Kraljevo à Lapovo, en date du 6 avril, à

5 4 heures du matin.

6 Il s'agit de parler de la nuit du 11 au 12 avril, l'aéroport de Pristina

7 était touché; de même que la gare routière de Pristina.

8 Je crois que vous pouvez très facilement et rapidement nous faire voir

9 toutes ces photographies, car elles témoignent d'une destruction

10 systématique de toutes les voies de communication d'intérêt vital pour la

11 population civile. Elle aussi comme cible étant sous la protection des

12 prohibitions, interdictions qui découlent d'ailleurs des Conventions de

13 Genève.

14 (Intervention de l'huissier.)

15 Allez-y. Faites défiler rapidement ces photographies.

16 Il s'agit du pont de Varadin au beau milieu de Novi Sad. Il me semble que

17 les ponts de Novi Sad ont constitué une cible à part parce que c'est comme

18 ça en les détruisant, qu'on parvenait à paralyser entièrement la vie de la

19 ville.

20 (Intervention de l'huissier.)

21 Voilà le pont détruit de la liberté de Novi Sad, c'est-à-dire le pont

22 enjambant le Danube entre les localités de Novi Sad et de Sremska.

23 Nous sommes à la photographie qui illustre le pont du 25 mai sur le Danube

24 près de Backa Palanka et Ilok. Il s'agit maintenant du pont près du

25 village de Jezgrovici. Vous pouvez y aller plus rapidement pour nous

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1 présenter tous ces ponts. Le pont du village de Biljanovac qui enjambe la

2 rivière de Ibar.

3 Allez-y. Photo suivante: ce que vous voyez, c'est le pont de chemin de fer

4 de Novi Sad. Nous sommes au bord de la rivière Ibar dans le village de

5 Brvenik près de Kraljevo.

6 C'est le pont routier qui engendre la rivière du Danube près de son bord,

7 notamment près de Bogojevo. Nous sommes près du pont maintenant du village

8 de Lozno dans les environs de Kraljevo, voici comment se présente son

9 aspect pour voir le tablier du pont. En voici une photo qui illustre l'une

10 de ces maisons démolies qui se trouvait non loin du pont touché.

11 Voilà une autre photo illustrant le pont ferroviaire de Bogojevo qui

12 engendre le Danube. Ensuite, nous sommes sur les rails mêmes des voies

13 ferrées de Bogutovac. Nous sommes toujours sur les voies ferrées qui

14 relient Lapovo à Kraljevo. D'ailleurs, il s'agit de toutes ces mêmes

15 photos que nous avons pu voir lorsque nous avons voulu illustrer la

16 Seconde Guerre mondiale quand nous étions encore en classe et quand on

17 nous enseignait l'histoire de la Seconde Guerre mondiale.

18 Nous sommes maintenant près de l'aéroport de Pristina, il s'agit de la

19 gare routière de Pristina cette fois-ci. Photo suivante: une autre photo

20 de la gare routière. Ce crime est de cette nature également qui ne demande

21 aucun commentaire.

22 Le 12 avril, à 11 heures 40, au moyen de missile de croisière, fut démoli

23 un pont entre Leskovac et Vranje à une distance de 12 kilomètres de

24 Leskovac. Le pont ferroviaire a également été touché près de la localité

25 de Grdelica. Et sur le pont se trouvait à ce moment même une rame de train

Page 308

1 qui assurait le transport de Grdelica à Ristovac. Il s'agit de dire qu'un

2 train omnibus pour voyageur a été démoli et qu'il se trouvait sur les

3 rails selon son programme habituel et en plein jour à 11 heures du matin.

4 Je crois qu'une liste entière vous sera procurée à vous et à l'intention

5 de l'opinion publique, de sorte que tout cela soit bien montré. Pour

6 certaines de ces photos, on n'arrive pas à saisir le fait que des gens

7 puissent être objet de telle calcination. Mais, enfin, à vous d'en juger.

8 Voici les photos, Monsieur l'huissier.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 Voici ce pont bombardé dont j'ai parlé tout à l'heure et avec un train

11 dessus. Voici les parties de la rame des wagons démolis. Les cadavres

12 calcinés.

13 Sur cette photographie, on a dénombré neuf voyageurs qui ont trouvé la

14 mort. Une fois de plus, la photographie de ce train pour voyageurs. Ici,

15 de toute évidence, les cadavres de ceux qui étaient projetés du train, à

16 moitié calcinés. On dit, dans la légende ici, qu'il s'agit de cadavres de

17 femmes. On peut les reconnaître.

18 Peut-être le seul de ces cadavres facile à reconnaître sur la

19 photographie. Voici comment se présente le corps de Petar Mladenovic, né

20 en 1952. A cette époque-là, c'était encore le cadavre non identifié de

21 l'une des victimes.

22 Une fois de plus, une vue de ce cadavre calciné. Et puis, on doit dire que

23 la seule culpabilité qu'on peut reprocher à ces gens-là, c'est d'avoir

24 pris ce train, ce jour-là, mais probablement qu'ils sont coupables aussi

25 d'être citoyens de Serbie. En plus, sur d'autres photographies, on

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1 n'arrive pas à croire à quel point un corps peut être calciné.

2 En date du 12 avril, le pont dit "de l'Effendi", près de Ponosevac, a été

3 bombardé.

4 En date du 13 avril, le pont de Biljanovac fut bombardé.

5 Le 14 avril, c'était le tour du pont ferroviaire près de l'arc de Lim.

6 Du 14 au 15, le pont de Pepeljevac a été bombardé.

7 Le 15 avril, le pont du village de Jasika, enjambant la Morava, a été

8 bombardé. Et je me passe de tout commentaire pour ne pas vous donner des

9 interprétations de ce qui a été dit pour faire économie de temps.

10 Le 15 avril, nous sommes toujours sur un autre pont, enjambant cette fois

11 le Danube, près de Kovin, non loin de Smederevo. Sans dire que tous les

12 établissements et installations non loin du pont ont été détruits. J'ai

13 d'autres photos qui illustrent tous ces ponts dont je viens de parler et

14 que je ne propose pas de vous faire voir en ce moment-ci, car aujourd'hui,

15 je crois que j'ai peu de temps à ma disposition.

16 Le 22 avril, les bureaux des PTT de Uzice furent bombardés. Uzice est

17 l'une des villes les plus importantes de Serbie.

18 En date du 23 avril, a été bombardé le pont Sava qui, lui, se trouve entre

19 Surcin et Ostruznica, enjambant la Sava, notamment. Les cibles

20 particulièrement visées ont été toutes les tours émettrices de radio et

21 télévision. Je ne veux évidemment pas vous donner lecture de cette liste

22 de toutes ces installations, mais disons que, le 21 avril, a été bombardé

23 un centre commercial d'affaires de Usce, près de Belgrade, et où se

24 trouvent plusieurs sociétés économiques et, commerciales, le siège du

25 Parti social de Serbie et, entre autres, plusieurs stations de radio et de

Page 310

1 télévision ont été touchées.

2 Nous possédons également des photos des canons de SOS, de chaînes de

3 télévision, de différentes télévisions, à savoir Pink Kosava, par exemple,

4 cette dernière ayant ma fille à sa tête. Nous avons entendu une conférence

5 de presse au cours de laquelle il a été dit que cette chaîne de télévision

6 où travaillait ma fille a été détruite parce qu'étant un des centres de

7 propagande de Milosevic. Or, la vérité, qui n'est pas ignorée par la

8 Yougoslavie toute entière, c'est qu'il s'agit d'une chaîne de télévision

9 consacrée uniquement à la musique et que jamais, ou presque jamais, cette

10 chaîne de télévision ne diffusait d'émissions documentaires ni

11 d'informations. Mais, en général, c'est une chaîne de télévision réservée

12 à la musique et à des films, pour la plupart, de production américaine.

13 La seule chose du domaine de l'information, journal télévisé, qui

14 existait, c'était l'information concernant la météo. Voilà ce qui

15 représente le centre de la propagande de Milosevic et, comme telle, cette

16 chaîne de télévision a été visée et touchée.

17 Deux jours après le bombardement du centre Usce, l'OTAN a frappé le siège

18 de la Radiotélévision de Serbie. Et ce jour-là, tous les journalistes,

19 tous les cameramen, tous les techniciens qui s'y trouvaient ont été

20 touchés. Il s'est agi d'un crime non seulement parce qu'il a frappé des

21 journalistes qui travaillaient, mais il les a frappés sur leur lieu de

22 travail, c'est-à-dire dans le bâtiment de la radiotélévision avec tous

23 leurs compagnons. Nous donnerons la liste des victimes.

24 Mais ici, aujourd'hui, je voudrais mentionner un fait supplémentaire. Le

25 gouvernement favorable à l'OTAN de Belgrade a arrêté Dragoslav Milanovic,

Page 311

1 directeur général de la Radiotélévision de Serbie parce que, dit-on, il

2 n'a pas pris la peine de défendre ses employés d'une façon suffisante. Et

3 donc ce serait sa faute si ces personnes ont été tuées.

4 Je crois que l'opinion publique toute entière constate qu'entre cette

5 explication relative à l'arrestation de Milanovic et la logique utilisée

6 par le Procureur ici, depuis deux jours, un lien existe. L'OTAN a bombardé

7 la Radiotélévision de Serbie; il a détruit, tué des gens et ensuite, c'est

8 le directeur de cette télévision qui est arrêté, parce que ces gens sont

9 morts; ce serait lui qui serait coupable de la mort de ces personnes.

10 J'aimerais maintenant que l'on montre ces photographies du bâtiment de la

11 Radiotélévision serbe, bien qu'au milieu des décombres, on ne voie que des

12 orteils et des doigts. Mais j'aimerais que chacun ici voie ces

13 photographies puisqu'il s'agit encore une fois d'un crime grave, d'un des

14 plus graves. Je vous en prie.

15 (Intervention de l'huissier.)

16 Passez toutes ces photographies en revue; je n'ai pas l'intention de les

17 commenter, car j'en ai déjà dit quelques mots. Vous ne verrez pas grand-

18 chose, en dehors de quelques doigts qui pointent ou de quelques parties de

19 corps humains.

20 Ce bâtiment, le bâtiment de la Radiotélévision de Serbie se trouvait en

21 plein centre de la ville de Belgrade. Et c'est loin d'être un bâtiment

22 secondaire; c'est vraiment le bâtiment n°1. C'est là que se trouvait le

23 premier émetteur de télévision. Voyez, par exemple, sur cette

24 photographie: on voyait une main et une toute petite partie d'un corps qui

25 ressortent des décombres.

Page 312

1 Autre photographie, je vous prie. Autre photographie. Des restes, des

2 restes humains des victimes.

3 Les entreprises ont constitué des cibles privilégiées selon cette volonté

4 de ramener la Serbie à l'âge de pierre. L'usine de construction d'avions à

5 Pancevo a été bombardée le 24 mars 1999; puis le 27, puis le 29 mars.

6 L'usine de Mladost et l'usine de Kosmet, au Kosovo Metohija, bombardées le

7 26 mars, les deux usines. L'usine de la liberté de Cacak, bombardée le 28

8 mars, à 4 heures 43 du matin, et le 30 mars, à 4 heures 10 du matin:

9 l'entreprise de machines à laver et autres machines, comme lave-linge,

10 cuisinières électriques, etc.

11 Le 4 avril, le 6 avril, ce sont les deux dates des bombardements. L'usine

12 de la liberté est la plus grande entreprise de Cacak et un très grand

13 nombre d'habitants de la ville y travaillent. L'usine Toplana à Novi

14 Beograd a été bombardée le 4 avril. C'est l'entreprise qui chauffe toute

15 la ville de Belgrade.

16 Le 5 avril: bombardement de l'usine de tabac de Nis.

17 Le 6 avril: l'entreprise Miloje Blagojevic.

18 Le 9 avril, à 1 heure 20 -la précédente se trouvait à Nis-: bombardement

19 des locaux du "Drapeau rouge" de Kragujevac. C'est une entreprise

20 d'automobiles, construction d'automobiles. Et 30.000 familles vivaient de

21 leur travail dans cette usine.

22 Je ne donnerai pas la liste complète de toutes les entreprises qui ont été

23 endommagées, mais, aux alentours de cette usine, 64 autres installations

24 ont été touchées; d'ailleurs, il est difficile de parler d'usine, c'est en

25 fait un complexe industriel.

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1 A Urosevac, le 12 avril: bombardement d'une plantation. Le village de

2 Rznic, dans la municipalité de Decani, a été bombardé le 12 avril.

3 Le 13 avril: toute une série de commerces de Pristina frappés.

4 Le 14 avril: le complexe industriel de Krusik, à Valjevo, est touché. Là

5 encore, c'est la plus grande entreprise de Valjevo dans laquelle travaille

6 un nombre très important d'habitants de Valjevo. L'entreprise de

7 fabrication textile, d'accumulateurs, d'armatures métalliques et toutes

8 sortes d'autres entreprises de cette très grande société, qui avait de

9 très bons résultats sur le plan économique, ont été détruites.

10 Le 15 avril, de 5 heures du matin à 5 heures 15, les usines du 14 octobre

11 de Krusevac sont détruites.

12 Le 15 avril, à 1 heure 30 du matin, sont bombardées à Belgrade, dans la

13 municipalité de Rakovica -je vous ai parlé déjà de cette localité de

14 Rakovica où sont concentrées de nombreuses industrie belgradoises, et

15 notamment des industries de fabrication métallurgique-: l'industrie de la

16 boulangerie de Belgrade s'y trouve également, production de pain,

17 l'entreprise Rekord qui fabrique des pneus, une entreprise de fabrication

18 de tracteurs, l'"Entreprise du 21 Mai", qui fabrique des moteurs

19 d'automobile, l'entreprise Minel qui fabrique des équipements

20 énergétiques, le monastère de Rakovica, la Poste, l'école pour conducteur

21 de machines, deux écoles primaires, une école maternelle pour les enfants

22 des ouvriers, l'école maternelle de Zvorcic et de Hajdi, l'école

23 Koturovic, l'Hôtel du 1er Mai et le centre médical.

24 Le lac de Gradsko à Kragujevac, tout près de la gare routière et de la

25 gare de chemin de fer, a été bombardé le 15 avril, là où il y a beaucoup

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1 de personnes rassemblées.

2 Un grand nombre de bâtiments civils ont été détruits le 15 avril, dans le

3 centre d'une autre ville. Le 14 avril, l'entreprise Prva Iskra à Baric est

4 frappée. Etc.

5 S'agissant des entreprises, en fait, je vous demanderai de montrer ces

6 photographies l'une après l'autre, car on voit l'étendue tragique des

7 destructions. On voit dans l'usine de construction d'avions, y compris des

8 avions terminés qui sont détruits dans cette entreprise dont le nom est

9 Utva et, ailleurs, dans une usine où travaillaient 30.000 personnes, on ne

10 voit plus rien: l'usine est rasée totalement, il n'en reste rien. Donc

11 c'est une entreprise tout entière qui est liquidée dans les faits.

12 Et pendant que M. l'huissier prépare les photos, j'ajouterai ce qui suit.

13 Pendant plusieurs mois après ces bombardements, nous avons réussi à faire

14 fonctionner l'économie, ainsi qu'à permettre la circulation de tous les

15 véhicules malgré l'absence des ponts. Et tous ceux qui avaient perdu un

16 toit sur leur tête ont reçu un nouveau logement dans un grand complexe

17 immobilier construit récemment.

18 Vous pouvez aller assez vite sur ces photos.

19 Ici, c'est l'entreprise "Liberté" de Cacak, détruite par le bombardement.

20 Ici, l'entreprise de chauffage de Novi Belgrade. On voit les restes de

21 corps de travailleurs qui y travaillaient. Le réservoir contenant le

22 carburant a été incendié à Belgrade, en pleine ville.

23 Autre photographie: des entrepôts détruits dans l'usine de tabac de Nis.

24 Autre photographie: l'aspect de cette usine de Nis.

25 Suivante: des usines de Lucani, dont j'ai parlé tout à l'heure.

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1 Suivante: l'usine d'automobiles de Kragujevac.

2 Suivante: c'est une chaîne, vous voyez, une chaîne de l'usine. On voit

3 encore des restes de voitures qui sont accrochés à la chaîne. Plus loin,

4 l'usine de plastique de Pristina. L'usine de Lake également; plus de 100

5 millions de DM avaient été investis dans cette usine à elle seule.

6 Photo suivante: l'usine Magistrala de Pristina.

7 Ici, l'usine de fabrication de machines de l'industrie textile à Valjevo.

8 Photo suivante: toujours la même usine de Krusik de Valjevo. Une halle de

9 transport détruite. Ici, la cantine destinée aux travailleurs dans cette

10 usine Krusik de Valjevo, détruite elle aussi.

11 Autre photo -je vois mal-: c'est l'usine de construction d'accumulateurs à

12 Krusik-Valjevo.

13 Autre photographie: "Prva Iskra" (Baric).

14 Autre photo: c'est le point d'impact des bombes qui a été pris en photo.

15 Autre photographie: à l'intérieur de cette usine d'armature métallique,

16 vous voyez les destructions.

17 Autre photographie: l'entrepôt, la halle de l'usine de fabrication des

18 accumulateurs.

19 C'est la dernière photo. Très bien, merci.

20 Une liste au sujet des bombardements frappant des usines, des raffineries

21 de pétrole et de dérivés de pétrole existent. Je n'en donnerai pas lecture

22 intégrale. Tout a été détruit, mais les dommages écologiques sont sans

23 doute encore plus importants; en fait, incomparablement plus importants

24 que les dommages directs sur le carburant, bien que cette perte ait été

25 importante également.

Page 316

1 A Pancevo, bombardement le 4 avril. Ici, des cadavres d'ouvriers; je vous

2 les montre.

3 A Smederevo, le 4 avril; à Pristina, le 5 avril; à Novi Sad, le 5 avril; à

4 Mala Krmsa, le 6 avril; à Devet Jugovica, sur le mont Ksomet, le 6 avril;

5 à Conoplja, le 7 avril et puis encore le 8 avril.

6 Il s'est agi de bombardements systématiques approfondis. Les cratères des

7 bombes étaient très importants. Je passe.

8 A Novi Sad, le 7 avril. De nouveau à Bogutovac, le 8 avril, quatre jours

9 après le premier bombardement. De nouveau à Smederevo, le 9 avril; Novi

10 Sad, le 12 avril. De nouveau à Conoplja le 12 avril. A Pancevo, la

11 raffinerie est frappée une nouvelle fois; à Smederevo, également nouveau

12 bombardement. Les avions revenaient à plusieurs reprises pour approfondir

13 la tâche, pour terminer le travail, jusqu'au bout.

14 Il existe une liste également des centres de loisirs, des centres

15 récréatifs et hôtels, depuis Cikota à Zlatibor jusqu'à toutes sortes

16 d'autres installations, toutes installations où des personnes ont trouvé

17 la mort. Et il existe des photographies montrant les diverses parties du

18 corps détachées du tronc.

19 A Kopaonik, un hôtel, un complexe hôtelier a totalement brûlé. On voit le

20 reste des bâtiments. Tout cela été fait avec des bombes à fragmentation y

21 compris; on en voit bien la conséquence sur ces photographies.

22 Tout ce que je viens de dire, a été accompli au cours du premier mois. Ce

23 qui est caractéristique, c'est que le pilonnage aveugle de bâtiments

24 civils a été la règle. C'est cela la caractéristique principale: plus les

25 civils souffraient, mieux c'était. Plus de victimes humaines il y avait,

Page 317

1 plus de morts il y avait, mieux c'était.

2 J'appelle votre attention sur le fait que des bombes ont été utilisées qui

3 carbonisaient des corps humains à une certaine distance de leur lieu

4 d'impact. Des bâtiments entiers ont été détruits et de nombreuses

5 personnes calcinées de cette façon. Des bombes ont été jetées sur des

6 champs et des prés qui, parfois, n'ont pas explosé dans l'attente qu'un

7 enfant les ramasse et saute avec elles, sans doute. Il est donc tout à

8 fait manifeste que l'objectif de l'agresseur consistait à frapper les

9 civils. Un exemple: le pont du canyon de Grdelicka, qui était un lieu très

10 visité.

11 Et le 30 mai, vous le verrez un peu plus tard, ils ont donc bombardé un

12 pont qui était visité beaucoup ce jour-là, parce que c'était un jour de

13 congé religieux. Et lorsqu'un peu plus tard, les équipes de secouristes

14 sont arrivées pour apporter leur aide aux personnes touchées, les avions

15 sont repassés en une deuxième vague pour être sûrs de faire le nombre

16 maximum de victimes.

17 Chacun des cas que je viens de citer, a donné lieu à un énorme nombre de

18 victimes. L'objectif étant manifestement de terroriser et de briser toute

19 la nation yougoslave. L'objectif, en fait, était le peuple tout entier.

20 Pour le moment, je n'ai pas dit un mot des soldats et combattants tués.

21 Même si, pour ce qui nous concerne, nous les considérons également comme

22 étant des victimes de l'agression, car le pays était en paix; et la guerre

23 est alors le crime majeur, en temps de paix. Ces soldats défendaient leur

24 pays. Il était interdit qu'ils soient pris pour cibles prétendument

25 légitimes d'une agression venant de l'extérieur. C'est une agression qui

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1 est prétendument légitime, qui a été soutenue par l'OTAN sans une

2 quelconque intervention du Conseil de sécurité des Nations Unies, et sans

3 même consultation des Etats membres du Pacte de l'OTAN.

4 Des dirigeants politiques d'un certain nombre de partis politiques

5 italiens m'ont parlé; je les ai tous reçus pendant la guerre, de gauche et

6 de droite. "Nous ne sommes pas un pays indépendant", m'ont-ils dit,

7 "personne ne nous a demandé s'il fallait partir en guerre contre le pays

8 voisin."

9 L'agression a montré que le Pacte de l'OTAN n'était pas un Conseil mais un

10 pacte dépendant de l'administration américaine, qui peut s'en servir

11 chaque fois qu'elle le décide et selon les modalités dictées par elle.

12 Tous ces crimes sont impardonnables, car ils ont été pensés et planifiés

13 plusieurs mois à l'avance; les objectifs ont été choisis plusieurs mois à

14 l'avance et, après la lecture du texte du soi-disant Accord de

15 Rambouillet, qui impliquait l'occupation de tout le territoire de la

16 République fédérale yougoslave, on constate que liberté a été donnée à

17 toute la propagande anti-serbe et anti-yougoslave pour se servir des

18 réseaux de télécommunication mondiaux, afin de créer un fondement à cette

19 agression. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, il est tout à fait

20 clair que la raison réelle de l'agression de l'OTAN résidait dans le

21 besoin de s'élargir qu'avait l'OTAN, par l'admission de nouveaux membres;

22 c'est-à-dire qu'il fallait un précédent pour pouvoir recourir à la force,

23 contrairement au souhait des Nations Unies et sans aucun agrément de la

24 part du Conseil de sécurité. Il s'agissait donc d'un objectif

25 géostratégique tout à fait clair. Et personne, je suppose, ne peut

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1 l'ignorer aujourd'hui.

2 Je poursuivrai…

3 M. le Président (interprétation): Il est 13 heures 45. L'heure est donc

4 arrivée de suspendre l'audience.

5 Nous suspendons jusqu'à demain matin, 9 heures 30, heure à laquelle vous

6 pourrez poursuivre.

7 L'audience est levée.

8 (L'audience est levée à 13 heures 43.)

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