Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 3028

1 (Lundi 15 avril 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 16.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice.

6 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, j'ai demandé à ce qu'on

7 demande au témoin d'attendre quelques instants, car je suis ici avec Mme

8 la Procureure ce matin. Il ne s'agit pas de revenir ici sur une question

9 qui a déjà été traitée, mais nous avons besoin d'informations

10 supplémentaires au sujet de la décision qui a été rendue le 10 avril au

11 sujet du temps disponible pour l'accusation afin de présenter ses moyens à

12 charge. La décision se trouve au compte rendu d'audience page 2779 et je

13 crois que le compte rendu officiel commence à la page 2782.

14 La préoccupation du Procureur découle du devoir qui est le sien de

15 présenter sa thèse et nous comprenons bien que cette décision n'a pas été

16 rendue de manière écrite. C'est sur la base de la décision orale que nous

17 allons travailler et nous comprenons donc que la Chambre envisage encore

18 des manières dont les éléments de preuve pourraient être présentés.

19 Mais il est dit ici qu'il y a des difficultés rencontrées par un accusé

20 qui se défend tout seul par rapport à un accusé qui ne le fait pas. Et,

21 étant donné qu'il appartient au Procureur de prouver sa thèse, nous nous

22 inquiétons de la signification du mot "should" en anglais, du mot

23 "devrait", lorsque vous avez dit que le Procureur devrait avoir un an à

24 partir de maintenant pour présenter la présentation de ses moyens. Vous

25 comprendrez, Monsieur le Président, que nous avons besoin de savoir où

Page 3029

1 nous en sommes.

2 Je dois dire -comme ça a été le cas depuis le début dans cette affaire-

3 que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour être aussi concis

4 que possible et pour que la présentation des moyens à charge se termine

5 aussi rapidement que possible. On le voit dans les requêtes que j'ai déjà

6 présentées précédemment. Mais c'est le terme "should", "devrait", qui nous

7 pose quelque difficulté. Si cela vous était possible?

8 M. le Président (interprétation): Eh bien, si les choses ne sont pas

9 claires, je vais vous les dire très clairement.

10 Il s'agit d'une ordonnance à caractère obligatoire. Bien entendu, tout

11 ceci sous réserve d'événements inattendus. En cas, par exemple, de

12 maladie, en cas de circonstances imprévisibles, il est possible que cette

13 ordonnance doive réexaminée au vu de telles circonstances imprévues.

14 Mais l'intention de la Chambre a été de rendre une ordonnance. Il ne

15 s'agit pas là d'une invitation ou d'une exhortation à l'intention du

16 Procureur.

17 M. Nice (interprétation): Je vous remercie. Je vais consulter Mme la

18 Procureure. Merci beaucoup.

19 Nous pouvons faire revenir le témoin sous réserve de la chose suivante: un

20 document supplémentaire nous a été communiqué pendant le week-end ou

21 plutôt nous l'avons retrouvé dans la poursuite, dans la recherche continue

22 que nous faisons des documents dans nos bases de données; il s'agit d'un

23 document qui tombe peut-être sous le coup de l'Article 68. Je crois que ce

24 document a déjà été communiqué à l'accusé mais, étant donné qu'il n'a pas

25 de conseil de la défense, étant donné qu'il a peut-être une grande

Page 3030

1 quantité de documents entre les mains, nous voulons nous assurer que

2 l'accusé dispose bien de ce document.

3 M. le Président (interprétation): Si vous le permettez, je vais traiter

4 d'autres questions d'ordre administratif qui ont trait au calendrier.

5 Vendredi, nous siégerons nous siégerons de 9 heures à 12 heures 45. Lundi

6 prochain, l'un des Juges de la Chambre a un rendez-vous chez le médecin

7 l'après-midi, si bien que nous siégerons de 9 heures à 15 heures.

8 (Les Juges se concertent sur le siège.).

9 S'il vous plaît, faites entrer le témoin.

10 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais d'abord émettre un commentaire:

11 il est absolument absurde de suggérer que 14 mois ne soit pas une durée

12 suffisante pour la présentation de ce qu'il est convenu d'appeler les

13 moyens de preuve de l'accusation. Ce qui montre bien la nature de ces

14 moyens sur le plan juridique.

15 (Le témoin, M. Karol J. Drewienkiewicz, est introduit dans le prétoire.)

16 Deuxièmement, vous auriez, semble-t-il, discuté la semaine dernière de mes

17 difficultés de coopération avec mes associés et de la difficulté qui est

18 la mienne de recueillir des éléments. Eh bien, je peux vous dire que,

19 jusqu'au jour d'aujourd'hui, je n'ai pas été en mesure de travailler avec

20 mes associés ou de travailler sur des documents émanant d'eux. Et le fait

21 que cela ait été rendu impossible vient de ce que vous n'avez rendu aucune

22 décision à cet égard; par conséquent, je n'ai eu la possibilité de les

23 informer ni au sujet de documents reçus par moi, ni au sujet de quelque

24 information recueillie par moi. Donc je ne comprends pas que cela soit

25 resté possible étant donné ce qui a été dit hier.

Page 3031

1 J'ai encore une observation à faire. Les documents qui me sont remis

2 continuent à m'être remis en anglais alors que, comme vous le savez, il

3 existe une obligation de me les remettre en serbe.

4 M. le Président (interprétation): Je vais répondre à ces questions.

5 En premier lieu, il s'agit du temps disponible pour l'accusation pour

6 présenter ses moyens. Ça ne vous concerne pas, c'est à la Chambre d'en

7 décider.

8 Deuxième chose: On vous a expliqué pourquoi vous ne devriez pas

9 communiquer à vos associés; cette explication c'est la bonne, une décision

10 n'a pas encore été rendue mais elle le sera, et vous en serez informé.

11 Troisièmement, nous allons examiner ce qu'il en est au sujet de la

12 communication des documents à votre endroit.

13 Monsieur Nice, pouvez-vous peut-être nous apporter un éclaircissement à ce

14 sujet?

15 M. Nice (interprétation): Je ne vois pas très bien à quelle catégorie de

16 documents il fait référence en nous disant que ces documents ne lui sont

17 communiqués qu'en anglais. Si on me donne des informations plus précises,

18 je pourrais répondre précisément. Bien entendu, par concession et

19 simplement pour l'aider, puisqu'il refuse de regarder les documents, nous

20 continuons à lui communiquer les déclarations des témoins à venir peu

21 avant leur venue dans le prétoire.

22 Nous répondons aux obligations qui sont les nôtres en vertu de l'Article

23 68, et dans les langues du Tribunal. Je pense que le moment viendra où la

24 Chambre souhaitera peut-être revenir sur une décision rendue précédemment

25 au sujet des langues comprises par l'accusé, bien que je comprenne qu'une

Page 3032

1 décision a été rendue précédemment, en disant que les documents devaient

2 être lui communiqués en BCS ou en serbe. Certes, mais à l'époque on ne

3 savait pas quel était son niveau d'anglais. Or, il apparaît clairement

4 maintenant qu'il parle couramment anglais, il a travaillé longtemps aux

5 Etats-Unis; il est sans doute compréhensible qu'il préfère parler dans sa

6 propre langue. Mais étant donné le caractère très lourd de la traduction,

7 étant donné les ressources les moyens financiers qui sont mis en œuvre

8 pour lui communiquer des documents deux fois plus souvent que ne l'exige

9 le Règlement, puisqu'il refuse d'examiner ces documents, eh bien, il est

10 possible qu'ultérieurement la Chambre revienne sur une décision qui a été

11 prise sur la base du fait qu'il ne comprenait pas l'anglais.

12 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice, certes mais le

13 témoin est dans le prétoire et il convient de poursuivre sa déposition.

14 Monsieur Milosevic, c'est à vous. Le contre interrogatoire se poursuit.

15 M. Milosevic (interprétation): Une nouvelle contre-vérité vient d'être

16 dite: je n'ai pas travaillé aux Etats-Unis, c'est inexact.

17 Deuxièmement, même si je comprenais ce qu'il est écrit dans les documents,

18 cela ne signifie pas que mes associés qui doivent obtenir ces documents de

19 façon à recueillir des informations à mon intention comprennent également

20 l'anglais, et je ne peux pas en dehors de tout ce que j'ai à faire avec

21 eux leur servir de traducteur.

22 D'ailleurs, je ne vois pas comment l'obligation de traduire en serbe

23 n'existerait pas. Il y a un amicus curiae qui doit également obtenir ces

24 documents en serbe, donc je considère que ce qui vient d'être entendu,

25 cette polémique quant au fait de savoir si ces documents doivent m'être

Page 3033

1 communiqués en anglais ou pas est du plus mauvais goût; je parle des

2 déclarations de témoins.

3 Et j'ai cru comprendre, n'est-ce pas, que maintenant je pouvais poursuivre

4 le contre-interrogatoire?

5 M. le Président (interprétation): Oui.

6 (Contre-interrogatoire du Témoin, M. Karol John Drewienkiewicz, par

7 l'accusé M. Slobodan Milosevic.)

8 M. Milosevic (interprétation): Nous allons reprendre à l'endroit où nous

9 nous sommes interrompus la dernière fois. J'ai déjà posé un certain nombre

10 de questions qui s'appuyaient sur des déclarations, et sur la base du

11 travail des membres de la mission de vérification dont vous étiez le chef

12 opérationnel comme nous l'avons constaté. Je me suis fondé également sur

13 les déclarations faites par un certain nombre de chefs terroristes du

14 Kosovo-Metohija; ce qui a montré que cette mission a servi à sauver ceux

15 qui menaient des actions terroristes au Kosovo-Metohija. Et sur la base de

16 ce que j'ai cité, nous avons vu que cette mission a servi à ranimer

17 l'armée.

18 M. le Président (interprétation): A quoi tout cela sert-il? Quelle est la

19 question? Un instant. Un instant...

20 Sur la base des déclarations faites par des chefs terroristes, cette

21 mission a servi à un objectif qui a consisté à sauver ceux qui agissaient

22 de façon terroriste; est-ce ce que vous êtes en train de dire, Monsieur

23 Milosevic? Est-ce le but que vous avez compris comme étant celui de la

24 mission?

25 M. Milosevic (interprétation): Oui, je dis que l'objectif de cette mission

Page 3034

1 a sans aucun doute consisté à préparer les conditions préalables pour la

2 guerre contre la Yougoslavie et à servir de prétexte à celle-ci. C'est le

3 premier point que j'affirme. Quant au deuxième point...

4 M. le Président (interprétation): Vous êtes ici pour poser des questions,

5 pas pour formuler des affirmations. Or, apparemment, vous venez de

6 formuler deux observations, et vous n'avez pas posé de question au Témoin.

7 Laissez-moi un moment. Un moment, je vous prie, Monsieur Milosevic. Il

8 n'est pas équitable pour le Témoin que vous lui assignez ces affirmations,

9 il devrait avoir la possibilité de répondre.

10 Général, pouvez-vous nous aider sur le point suivant: il a été suggéré

11 premièrement que l'objectif de la mission, comme vous venez de l'entendre

12 s'agissant de l'action des terroristes, consistait à sauver cette action,

13 et deuxièmement à préparer un prétexte pour la guerre contre la

14 Yougoslavie. Je ne sais pas si vous pouvez traiter de ces deux questions?

15 M. Drewienkiewicz (interprétation): Oui. La mission avait pour objet de se

16 rendre sur le terrain pour vérifier les conditions d'application de

17 l'accord conclu entre l'OSCE et la République fédérale de Yougoslavie. Et

18 le texte de cet accord est l'un des documents auxquels je me suis référé,

19 il y a déjà quelque temps. Nous avions le sentiment que nous étions sur

20 place pour veiller à ce qu'aucune guerre n'ait lieu. Vous vous rappellerez

21 que, durant le mois de septembre, la durée du mois d'octobre 1998, la

22 situation était effectivement tendue dans la région et que nombre

23 d'activités se déroulaient qui semblaient présager le pire.

24 L'OTAN a émis des ordres qui ont été rendus publics et qui ont indiqué que

25 des préparatifs étaient en cours. Pendant ce temps, l'accord a été conclu

Page 3035

1 entre l'OSCE et la République fédérale de Yougoslavie, qui avait pour but

2 de désamorcer ces tensions et de tenter un retour à une situation normale

3 ou, en tout cas, plus normale. C'est de cette façon que nous concevions

4 notre rôle et nous nous sommes efforcés de traiter sur un pied d'égalité

5 toutes les personnes avec lesquelles nous avions des contacts.

6 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous connaissance de la déclaration de

7 Haradinaj? Nous nous sommes arrêtés sur ce point, car je démontre la thèse

8 qui vient à l'instant d'être interprétée à sa façon par M. Nice, à savoir

9 qu'afin d'agir contre les Serbes, afin de convaincre l'opinion de façon

10 générale de la nécessité d'agir contre les Serbes, il fallait encercler

11 Kievë et d'autres endroits comme Prilep, Decani, etc.

12 Donc il s'agit ici de Kievë, Decani, Prilep qui sont des localités bien

13 connues où ils ont provoqué des heurts d'une sauvagerie incroyable et des

14 conflits d'une sauvagerie incroyable. Et ces lieux sont connus parce que

15 l'armée yougoslave et les forces de sécurité yougoslaves sont mises en

16 accusation précisément en rapport avec ces lieux.

17 Alors la question que je pose est la suivante: est-il exact que leur rôle

18 a consisté à accroître au maximum l'effusion de sang, à intensifier le

19 conflit de façon à ce qu'ensuite, ceci puisse être présenté comme

20 ressortant de la responsabilité des forces de sécurité yougoslave?

21 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non.

22 Question: Bien. Je vous ai rappelé la déclaration de cet homme selon

23 laquelle l'arrivée de la Mission de vérification au Kosovo a permis de

24 redonner vie à l'UCK. Il a même affirmé que cet accord a sauvé l'UCK. Il a

25 dit également que cet accord avait largement contribué à redonner vie à

Page 3036

1 l'armée. Ce sont les mots qu'il a utilisés. Ceci est-il exact ou pas?

2 Réponse: C'est un avis qui n'est pas le mien. Et aujourd'hui est le

3 premier jour, ou plutôt vendredi dernier est le premier jour où j'ai

4 entendu parler de cet accord. C'est vendredi dernier qu'il a été mentionné

5 pour la première fois.

6 M. Milosevic (interprétation): Ceci a été publié dans un ouvrage

7 d'interviews, comme bien d'autres déclarations de personnes qui, après

8 l'occupation du Kosovo, ont considéré qu'il leur était loisible de dire

9 tout ce qui pouvait leur être utile. Mais est-il inexact…

10 M. Nice (interprétation): Là encore, ce n'est pas une question. Ce n'est

11 pas une question!

12 M. Milosevic (interprétation): Est-il inexact…

13 M. le Président (interprétation): Un instant, il y a une objection.

14 M. Nice (interprétation): Nous ne pouvons plus nous permettre de passer du

15 temps à entendre des déclarations de la bouche de cet accusé qui consacre

16 pas mal de temps à des déclarations.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, l'objection est prise en

18 compte.

19 Monsieur Milosevic, vous venez d'entendre l'objection. Le Procureur est

20 habilité à élever de telles objections. Vous pourrez faire des discours en

21 temps utile, mais le Témoin est ici pour répondre à des questions.

22 M. Milosevic (interprétation): Tout ce que je viens de dire constitue

23 exclusivement des questions, même si cela déplaît au Procureur. Quand il

24 est question du temps, nous avons entendu la partie adverse…

25 M. le Président (interprétation): Ceci n'est pas un commentaire

Page 3037

1 acceptable. Ce serait plus simple si vous vous contentiez de poser des

2 questions. Et une façon de déterminer s'il s'agit oui ou non d'une

3 question, c'est que le propos énoncé soit bref. Nous avancerons plus vite.

4 M. Milosevic (interprétation): J'espère que ce sera également le cas des

5 réponses.

6 M. le Président (interprétation): Général, je vous demanderai

7 effectivement de tenir compte de cela également.

8 M. Milosevic (interprétation): En me fondant sur votre dernière réponse

9 -je parle de la déclaration de cet homme au sujet des entretiens qui ont

10 eu lieu avec des observateurs militaires de plusieurs armées, dit-il,

11 notamment de l'armée anglaise, française, canadienne et américaine-, ces

12 entretiens allaient-ils dans le sens de l'explication que je viens de

13 fournir, oui ou non?

14 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non. Il s'agissait de rencontres

15 régulières entre des personnes qui s'étaient vues affecter pour tâche

16 d'établir la liaison avec les insurgés, c'est-à-dire avec l'UCK, car nous

17 avions besoin de moments de communication réguliers avec l'UCK de façon à

18 ce qu'en cas d'incident, nous établissions rapidement la liaison avec eux

19 pour déterminer exactement ce qui s'était passé et désamorcer l'incident

20 le plus rapidement possible.

21 Question: Mais, dans ce cas, comment peut-on expliquer ce qu'il dit à la

22 fin de son explication au sujet des entretiens en question. Il dit -je

23 cite-: "Des préparatifs de l'OTAN étaient en cours pour préparer les

24 frappes aériennes à venir". (Fin de citation.)

25 Il s'agit donc du contenu, de la teneur de ces entretiens.

Page 3038

1 Comment pouvons-nous, dans ces conditions, expliquer l'emploi de ces

2 termes?

3 Réponse: Je ne crois pas que l'officier de liaison nommé par moi soit allé

4 rencontrer l'UCK pour discuter des préparatifs de l'OTAN s'agissant d'une

5 campagne de raids aériens. Je ne le crois tout simplement pas.

6 Question: Mais croyez-vous, s'agissant des modalités de coopération entre

7 l'UCK et l'OTAN pendant les bombardements, il affirme durant cette période

8 du point de vue militaire que "le Kosovo était un lieu de travail commun à

9 l'OTAN et à l'UCK. J'ai utilisé et j'ai profité des frappes de l'OTAN.

10 Quant à l'OTAN, elle a profité des actions menées contre les forces

11 serbes, etc.".

12 Réponse: Pendant les frappe aériennes, je me trouvais en Macédoine et pas

13 au Kosovo. J'ai quitté la Macédoine le 24 avril et ne suis pas retourné au

14 Kosovo pendant le reste de la campagne de frappe aérienne, donc je n'étais

15 pas au Kosovo pendant les frappes aériennes.

16 Question: Très bien, mais, lorsque vous avez communiqué avec des gens

17 comme Haradinaj, Thaci et d'autres, saviez-vous qu'ils étaient mis en

18 accusation? J'ai ici sous les yeux, par exemple, une décision prouvant que

19 Haradinaj a été accusé de 75 crimes, pillages, vols et autres actions

20 menées contre des policiers serbes et des Albanais, etc. Saviez-vous

21 quelle était l'identité exacte des gens avec lesquels vous coopériez ?

22 Réponse: Nous savions qu'il s'agissait d'une organisation

23 insurrectionnelle et nous savions que des assassinats de policiers avaient

24 lieu, mais à aucun moment, pendant le temps que nous avons passé au

25 Kosovo, nous n'avons approuvé les meurtres de policiers.

Page 3039

1 Question: Considérez-vous qu'il s'agissait d'une organisation terroriste

2 ou d'une organisation insurrectionnelle?

3 Réponse: Je crois qu'"insurrectionnelle" est le mot plus adapté car c'est

4 un mot moins affectif.

5 Question: Et vous considérez que le mot "terroriste" est un mot affectif?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Votre remarque vaut-elle pour tous les terroristes du monde ou

8 seulement pour les terroristes du Kosovo?

9 Réponse: Les seuls que j'ai rencontrés, face à face, sont ceux qui

10 agissaient au Kosovo. C'est donc sur cette base que je m'appuie pour dire

11 ce que je dis.

12 Question: En rapport avec ce point, j'aimerais que nous revenions sur ce

13 que vous définissez comme "les objectifs de la mission". Connaissez-vous

14 l'article du "Sunday Times", du 12 mars 2000, dans lequel on lit -je

15 cite-: "Les diplomates européens, qui travaillaient à cette époque-là pour

16 l'OSCE, affirment qu'il s'agit d'une organisation toute soumise à la

17 politique américaine qui a rendu les frappes aériennes inévitables". (Fin

18 de citation.)

19 Réponse: Nous avions le sentiment d'être sur place pour veiller à ce que

20 la situation n'empire pas, de façon à ce que des frappes aériennes, par

21 exemple, n'aient pas à survenir. Mais nous n'avions pas le sentiment

22 d'être le jouet ou d'être soumis à la politique américaine, comme vous

23 venez de le dire. Non, pas du tout.

24 Question: Avez-vous connaissance d'un article de "l'Humanité", un journal

25 français, du 18 novembre 1999, dans lequel on lit que Willy Wimer, vice-

Page 3040

1 Président de l'assemblée de l'OSCE, un Allemand donc, a accusé les Etats-

2 Unis de miner la mission de l'OSCE avec l'aide de la Grande-Bretagne? Je

3 vous donne la citation exacte -je cite-: Tous les membres de l'OSCE

4 savaient que l'OTAN, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ne souhaitaient

5 pas le succès de la mission. J'ai entendu de nombreux témoignages de

6 personnes affirmant que des instructeurs américains entraînaient les

7 combattants albanais. Ils leur expliquaient qu'il était sain sur le plan

8 stratégique de tuer des policiers serbes afin d'entraîner, de provoquer la

9 répression à grande échelle contre la communauté albanaise". (Fin de

10 citation.)

11 Voilà les mots qui sont utilisés, ils sont vérifiables.

12 "J'ai rencontré deux collègues sur le terrain qui étaient engagés dans une

13 opération de photographies. J'ai pensé que leur mission s'était achevée et

14 qu'ils avaient recueilli suffisamment de données depuis le début du

15 bombardement pour agir."

16 Est-ce vrai ou pas?

17 Réponse: Non, vraiment pas.

18 M. Milosevic (interprétation): Quant à la phrase suivante -je cite-: "Tout

19 le monde savait que l'OTAN, et notamment les Etats-Unis et la Grande

20 Bretagne, ne souhaitait pas le succès de notre mission". (Fin de

21 citation.)

22 Cette phrase est-elle exacte ou pas?

23 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, absolument pas.

24 M. le Président (interprétation): S'agissant de la mission, pouvez-vous

25 nous apporter quelques éclaircissements? Ces rapports apparemment ont été

Page 3041

1 fournis à des journalistes et semblent émaner de membres de la mission, à

2 moins que ce ne soit pas le cas, mais des idées de ce genre ont-elle été

3 exprimées à l'époque?

4 M. Drewienkiewicz (interprétation): L'OSCE est un organisme très vaste, et

5 nous nous trouvions sur place avec des représentants qui nous ont été

6 envoyés par un certain nombre d'Etats, chacun d'entre eux ayant son propre

7 avis, ses propres idées, effectivement. Et, la liberté d'expression

8 n'était pas vigoureusement réfrénée. Donc, au sein de la mission, on

9 trouvait une grande diversité d'opinions quant au potentiel pour la

10 mission de se poursuivre et de parvenir au succès. Certaines personnes,

11 étaient plus optimistes que d'autres et certaines plus déterminées que

12 d'autres à ce que la mission aboutisse.

13 M. le Président (interprétation): Merci.

14 M. Milosevic (interprétation): En mars 2000, le "Sunday Times" affirme que

15 "des représentants des services de renseignement ont reconnu avoir aidé et

16 équipé l'UCK avant les bombardements de la Yougoslavie par l'OTAN. Cet

17 aveu a entraîné l'amertume chez certains diplomates européens qui ont

18 déclaré que cela avait freiné les efforts déployés pour un accord

19 politique entre les Serbes et les Albanais". (Fin de citation.)

20 Etes-vous au courant de cela?

21 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je n'ai jamais rencontré ces agents

22 américains qui auraient entraîné des représentants de l'UCK. J'ai entendu

23 en revanche un certain nombre de rumeurs, ici ou là, quant au fait que des

24 individus isolés, s'étant écarté de leur chemin, se soient trouvés au sein

25 de l'UCK, alors qu'ils n'étaient pas issus de la région. Ils ne m'ont pas

Page 3042

1 été décrits comme Américains, je ne les ai jamais rencontrés, mais des

2 rumeurs persistantes avaient lieu quant au fait que deux ou trois

3 personnes -des soldats de fortune- se soient trouvées avec l'UCK. Mais,

4 comme je l'ai dit, je ne les ai jamais vues.

5 Question: Et vous considérez que des agents de la CIA n'ont pas participé

6 à votre mission?

7 Réponse: Aucun de nos représentants n'a été identifié comme tels.

8 M. Milosevic (interprétation): Selon votre presse britannique, Walker a

9 admis que la CIA avait certainement participé à un certain nombre de

10 préparatifs ayant débouché sur des frappes aériennes. Est-ce exact ou pas?

11 M. Drewienkiewicz (interprétation): Il faut que vous parliez à Walker pour

12 le savoir.

13 M. le Président (interprétation): Oui. Est-ce que M. Walker est un témoin?

14 Rappelez-moi.

15 M. Nice (interprétation): Ce n'est pas un point dont je peux traiter au

16 pied levé.

17 M. le Président (interprétation): Très bien. Veuillez poursuivre.

18 M. Milosevic (interprétation): Est-il exact que des représentants de la

19 CIA ont établi des contacts avec l'UCK, alors qu'ils supervisaient les

20 cessez-le-feu au Kosovo en 1998 et 1999, et qu'ils ont, pendant cette

21 période, fourni des manuels de combat américains à l'armée serbe et à la

22 police serbe? Ceci est-il exact? C'est écrit dans le "Sunday Times". Est-

23 ce exact ou pas?

24 M. Drewienkiewicz (interprétation): Encore une fois, je ne suis pas au

25 courant. Je dois dire que je ne crois pas toujours ce qui est écrit dans

Page 3043

1 le "Sunday Times".

2 Question: Et ce qu'on lit un peu plus loin, à savoir que, "lorsque l'OSCE

3 s'est retirée du Kosovo -je cite- une semaine avant les frappes aériennes

4 de l'année dernière, un grand nombre de téléphones satellites et

5 d'équipements destinés à localiser des lieux au niveau de la planète ont

6 été fournis secrètement à l'UCK pour permettre aux commandants de la

7 guérilla de maintenir le contact avec l'OTAN et l'UCK à Washington. Et

8 l'UCK disposait de téléphones portables, ainsi que le général Clark".

9 Ceci est-il exact ou pas?

10 Réponse: L'UCK avait certainement accès à des téléphones cellules

11 cellulaires, par satellite. Nous ne leur avons pas laissé ces téléphones

12 en partant: ils les avaient déjà. Et lorsque nous avons évacué la région

13 pour nous rendre en Macédoine, nous avons reçu des informations par ce

14 biais de ces téléphones -que nous n'avions pas laissés derrière nous à

15 leur intention, mais dont ils disposaient- selon lesquelles des violations

16 des droits de l'homme étaient en cours.

17 Question: Qui vous a fourni cette information? L'UCK?

18 Réponse: Dans certains cas, oui.

19 Question: Le "Sunday Times" déclare également que l'UCK a admis avoir des

20 contacts depuis longtemps avec les Américains et les services de

21 renseignement britanniques, y compris dans le but de déstabiliser des

22 villages où la population était majoritairement albanaise et qu'en 1996,

23 dans le nord de l'Albanie, une rencontre avait eu lieu avec des

24 Britanniques, des Américains, des Suisses, tous agents des services de

25 renseignement.

Page 3044

1 Ceci est-il exact ou pas? Je vous parle, pour l'essentiel, de liens entre

2 les services américains et les services de renseignement européens.

3 Diriez-vous que ceci était exact ou inexact?

4 Réponse: J'étais en Allemagne et à Sarajevo en 1996. Je n'étais pas dans

5 le nord de l'Albanie; donc j'ignore tout de ceci; c'est très simple. En

6 vérité, je ne savais même pas que la Suisse avait des agents de service

7 secret.

8 Question: Adim Ceku, commandant de l'UCK, a établi des contacts avec les

9 Américains dans le cadre de son travail au sein de l'armée croate, qui a

10 été modernisée avec l'aide de cette organisation, s'agissant des

11 ressources militaires professionnelles. Je parle de la société MPI, que

12 vous connaissez, qui servait à améliorer la situation, à moderniser des

13 armées sur le plan de leur équipement. Cette société a passé quelque temps

14 également au Kosovo; elle était présente ainsi que d'autres pour aider au

15 programme de formation et d'équipement de l'armée bosniaque.

16 Etes-vous au courant que ces deux entreprises, en tout cas, étaient

17 présentes au Kosovo et connaissez-vous ces sociétés?

18 Réponse: Je connais ces deux entreprises. Duncan était la société qui a

19 permis aux Américains de recruter les gens envoyés par les Américains à la

20 mission de vérification du Kosovo. En effet, les Américains avaient

21 quelques difficultés internes compte tenu de leur impossibilité à détacher

22 des militaires, des soldats en service pour les envoyer au sein de la

23 mission de vérification. Donc ils ont recruté un certain nombre de

24 personnes par le biais de Duncan.

25 Quant à l'autre société, MPI, pour autant que je le sache, c'est une

Page 3045

1 société qui était présente en Bosnie dans le cadre d'un programme bien

2 défini. Et certaines des personnes qui avaient travaillé pour la MPRI, La

3 MPRI qui avait engagé pas mal de monde, donc ces personnes ont cessé au

4 bout d'un certain temps de travailler en Bosnie, et se sont portées

5 candidates auprès de Dincor pour travailler au Kosovo dans un poste

6 différent. Certaines de ces personnes ont été recrutées. Je crois que

7 c'est par souci de rapidité que des Américains, qui avaient quelques

8 connaissances de la région et qui dans certains cas parlaient la langue,

9 étaient disponibles très rapidement, ont été de cette façon engagés par

10 Dincor. Ces personnes travaillaient pour Dincor lorsqu'ils étaient avec

11 nous, mais je ne suis pas au courant de la présence de la MPRI en tant que

12 tel au Kosovo.

13 Question: Ce qui signifie que ces deux sociétés qui travaillaient en

14 Bosnie ont déménagé au Kosovo pour faire le même travail au Kosovo que

15 celui qu'elles avaient fait en Bosnie, c'est cela que vous êtes en train

16 de dire?

17 Réponse: Non, ce n'est pas ce que je suis en train de dire. Je suis en

18 train de dire que la MPRI a engagé des personnes en Bosnie pour effectuer

19 un certain travail, et que ce travail s'est achevé dans le courant de

20 l'année que 1998.

21 Certaines de ces personnes ont été ensuite reprise par Dincor pour faire

22 un travail différent au sein de la Mission de vérification du Kosovo. Ces

23 personnes, pour la MPRI en Bosnie, enseignaient les techniques militaires,

24 et au Kosovo ces personnes, par le biais de Dincor, faisaient un travail

25 de vérification dans le cadre de notre mission, comme c'était notre cas à

Page 3046

1 tous. Il n'y avait aucun traînement à moment-là, aucune formation.

2 Question: Et vous êtes catégorique?

3 Réponse: Oui. A ma connaissance, c'est ainsi que cela se présentait, c'est

4 ce dont je me souviens.

5 Question: Le 18 novembre 1999, le quotidien français "L'Humanité" écrit

6 que le vice-président de l'assemblée parlementaire de l'OSCE, Willy Wimer

7 avait accusé les Etats-Unis de saper l'accord de la mission du Kosovo avec

8 la Grande Bretagne. Et on peut lire ici que, de toutes les manières

9 possibles, ils ont saboté le plan de paix que l'OSCE avait mis en place

10 patiemment, qu'ils ont soutenu les membres de l'UCK au lieu de soutenir

11 les modérés de Rugova, et la partie yougoslave a soutenu le plan de paix

12 depuis octobre mais que l'UCK avait systématiquement violé ce plan de

13 paix, et qu'il était évident que ce plan de paix déplaisait à certains et

14 ne correspondait à pas à leurs intérêts, est-ce exact.

15 Réponse: Non, pas à ma connaissance. Lorsque l'accord a été signé en

16 octobre 1998, on avait l'intention de voir naître un accord semblable

17 entre l'OSCE et les Albanais du Kosovo. L'ambassadeur Chris Hill et un

18 autre diplomate américain ont fait tous les efforts possibles pour obtenir

19 un tel accord. Ces efforts se sont poursuivis jusqu'au mois de décembre

20 1998, mais finalement on est arrivés à la conclusion qu'il ne serait pas

21 possible de conclure un tel accord. Nous souhaitions ardemment qu'un tel

22 accord soit conclu, et de nombreux contacts ont été pris avec Rugova afin

23 qu'il prenne un rôle plus actif au Kosovo à l'époque, mais il était assez

24 réticent à le faire.

25 Question: Le même journal parle du témoignage d'un vérificateur qui dit

Page 3047

1 que beaucoup de gens lui ont affirmé que des instructeurs américains

2 formaient les combattants albanais, et ces gens avaient expliqué à ce

3 vérificateur qu'il était juste, il était censé du point de vue stratégique

4 de tuer des policiers serbes afin d'entraîner une répression massive de la

5 communauté albanaise. Est-ce que vous êtes au courant de cela?

6 Réponse: Non. Non, nous étions fermement et totalement opposés à ce que

7 l'UCK tue des policiers. Nous leur avons dit très clairement que ce

8 n'était pas là une bonne solution pour obtenir un soutien, et que le fait

9 de tuer un policier ou des policiers d'un Etat sur le territoire de cet

10 Etat, c'est quelque chose qui est inacceptable; et nous l'avons dit à de

11 très nombreuses reprises.

12 Question: Ils affirment également que l'UCK a forcé les Kosovars à se

13 joindre au convoi de réfugiés afin d'obtenir une réaction aussi rapide que

14 possible de l'Occident; et les organes de sécurité de l'OSCE sur place ont

15 établi des rapports sur la base de ce qui avait été observé sur place. Ces

16 rapports ensuite ont été détruits, ils ont pris note de l'attitude de

17 chacun envers l'UCK. Est-ce que vous êtes au courant de cela?

18 Réponse: Un certain nombre d'études ont été faites par différentes parties

19 de notre mission. Je ne suis pas au courant de toutes ces études; en tout

20 cas ce dont vous me parlez, je n'en ai pas connaissance.

21 Question: Etes-vous au courant de la chose suivante: "Deutsch Welle", le 6

22 décembre 2000, a diffusé l'interview d'un universitaire de Zurich qui

23 parlait du rôle des services de renseignements de la CIA. Et on savait

24 pertinemment qu'il y avait eu des négociations l'année précédente en

25 Suisse, l'UCK a été formée par cette organisation américaine pendant la

Page 3048

1 guerre. Il y avait des liens donc avec les services de renseignements,

2 ceci c'est le Dr Albert Stahl du Centre d'études stratégiques de

3 l'université de Zurich qui l'a déclaré sur la Deutsch Welle. Etes-vous au

4 courant de cela? Moi je ne parle pas de la déclaration précise de ce

5 monsieur, mais de ce qu'il dit, de la teneur de cette déclaration. Est-ce

6 que c'est vrai ou pas?

7 Réponse: Moi, je n'ai pas connaissance d'activités de la CIA. Je n'ai pas

8 connaissance que la CIA ait formé l'UCK, non.

9 M. Milosevic (interprétation): Bien que le journal allemand ait déclaré

10 que les agents de la CIA, avant l'attaque contre l'ex-Yougoslavie, ait

11 aidé l'UCK...

12 M. le Président (interprétation): Inutile de poursuivre dans ce sens,

13 Monsieur Milosevic, puisque le Témoin a déjà dit qu'il n'était pas au

14 courant. Veuillez, s'il vous plaît, passer à un autre sujet.

15 M. Milosevic (interprétation): Mais là on en arrive à ce qui est essentiel

16 dans notre affaire.

17 M. le Président (interprétation): Peut-être. Mais en ce qui concerne ce

18 Témoin, il nous dit qu'il n'en sait rien, qu'il ne peut pas vous apporter

19 d'autres informations. Si vous-même vous avez des témoins, des preuves à

20 présenter, vous pourrez le faire.

21 M. Milosevic (interprétation): Avez vous entendu parler de Heinz Lokweih?

22 Il s'agit d'un général de brigade de la Bundeswehr à la retraite qui,

23 jusqu'en l'an 2000, appartenait à la délégation allemande auprès de

24 l'OSCE, à Vienne. Il a également participé aux négociations relatives à la

25 limitation des armements à Dayton, ou après Dayton, et il a également

Page 3049

1 publié un ouvrage; il a également publié un autre livre qui s'intitulait

2 "Une guerre que l'on aurait pu parler".

3 En avez-vous entendu parler?

4 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, mais il y a beaucoup de généraux

5 de brigade de l'armée allemande à la retraite.

6 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais il a publié un livre; c'est pour

7 cela que j'imaginais que vous en auriez entendu parler. Donc, en tout cas,

8 il affirme que l'UCK bénéficiait du soutien inconditionnel de l'Ouest.

9 M. Nice (interprétation): Permettez-moi d'intervenir, s'il vous plaît.

10 M. le Président (interprétation): Allez-y.

11 M. Nice (interprétation): Ceci découle des questions que l'on va commencer

12 à entendre et ceci découle de tous les documents qui sont présentés ce

13 matin.

14 L'accusé se base, pour ses questions, sur des extraits de document au lieu

15 de nous donner la totalité du document. C'est toujours la même chose.

16 C'est vrai que cela fait gagner du temps, mais la façon de présenter les

17 documents, c'est en donnant le document dans son intégralité pour voir

18 dans quel contexte il se situe, puisqu'on a déjà vu que l'accusé pose des

19 questions hors contexte.

20 Par exemple, ici, il demande au Témoin s'il connaît l'auteur d'un ouvrage.

21 Le Témoin répond "non". Donc je ne vois pas très bien pourquoi on continue

22 de poser des questions au Témoin au sujet d'un document, d'un livre qu'il

23 ne connaît pas, que nous ne pouvons pas voir, etc. Cela ne mène à rien.

24 M. le Président (interprétation): Cela dépend de ce qu'il y a dans ce

25 livre. Il est possible que le Témoin puisse répondre, il est possible que

Page 3050

1 le Témoin ne puisse pas répondre, mais on ne peut pas le savoir à

2 l'avance. Dans le cadre du contre-interrogatoire, ce ne sont pas les

3 questions qui comptent, ce sont les réponses.

4 Il est possible que le Témoin soit en mesure de répondre sur certains

5 points, peut-être que non, mais il est possible que oui.

6 En l'espèce, il faut savoir que l'accusé assure lui-même sa propre

7 défense, si bien que les règles qui s'appliquent à un avocat professionnel

8 doivent être légèrement adaptées, il faut lui laisser une certaine marge

9 de manœuvre. Mais, en tout cas, il convient que les sources des documents

10 mentionnés soient communiquées pour que nous puissions les vérifier.

11 M. Nice (interprétation): Oui et il vaudrait mieux encore qu'on nous

12 communique tout de suite la source de ces pièces.

13 M. le Président (interprétation): Oui.

14 Que souhaitez-vous demander au sujet de ce livre? Peut-être d'ailleurs

15 pourriez-vous nous indiquer la page dont il est question, Monsieur

16 Milosevic?

17 M. Milosevic (interprétation): En premier lieu, je veux que vous

18 interdisiez que l'on me prive du temps qui m'est imparti. Il ne s'agit pas

19 d'un livre ici, il s'agit de différents points de vue.

20 Ensuite, ceux qui ne croient pas à ce qui est écrit dans ce livre peuvent

21 le vérifier, et ceux que cela gêne pourront estimer que c'est ma position

22 à moi et que je vérifie cela en posant des questions au Témoin.

23 Peu importe. Moi, je vous demande s'il est vrai que l'UCK bénéficiait du

24 soutien inconditionnel de l'Occident?

25 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, ce n'est pas vrai. Nous ne sommes

Page 3051

1 pas allés sur place pour soutenir l'UCK; nous y sommes allés pour empêcher

2 qu'une situation grave n'empire encore; nous sommes allés sur place pour

3 la situation s'améliore et qu'au bout du compte, on puisse organiser des

4 élections.

5 Question: Quand l'OTAN a participé au conflit, en prenant clairement

6 position contre les Serbes, en faisant usage de ses capacités contre les

7 Serbes, en les menaçant, et si l'on dit qu'ils ont fait que l'UCK leur

8 principal allié militaire pour atteindre leur objectifs, est-ce que c'est

9 vrai ou ce n'est pas vrai?

10 Réponse: Ce n'est pas ce que l'OTAN faisait, mais j'ai du mal à vous

11 parler au nom de l'OTAN parce qu'à l'époque, je ne servais pas au sein des

12 rangs de l'OTAN.

13 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous remarqué que le 24 mars 1999, le

14 Président des Etats-Unis, lorsqu'il s'est adressé au peuple américain, a

15 établi comme priorité non pas la catastrophe humanitaire mais l'OTAN, la

16 fiabilité de l'OTAN.

17 M. le Président (interprétation): Voilà une question à laquelle le Témoin

18 ne saurait répondre.

19 M. Milosevic (interprétation): Mais cela, c'est un fait notoirement connu.

20 Je lui demande simplement s'il en a pris note.

21 M. le Président (interprétation): Vous pourrez donner vous-même des

22 éléments de preuve à ce sujet en temps utile.

23 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais ceci a été déclaré en public par

24 Clinton; il est facile de verser cela au dossier.

25 Savez-vous également que les mêmes propos ont été tenus par Clark sur CBS,

Page 3052

1 lors des informations, en mai 2001, le 15 mai 2001. Il a notamment

2 déclaré: "Ce que nous n'avons jamais vraiment compris, c'est que ce

3 conflit n'était pas un conflit qui était un conflit uniquement du Kosovo.

4 Ce n'était pas un conflit non plus qui traitait du nettoyage ethnique. Il

5 s'agissait d'une bataille dont dépendait l'avenir de l'OTAN, la

6 crédibilité des Etats-Unis en tant que force sur laquelle il convenait de

7 compter sur la scène internationale".

8 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous êtes en train de

9 demander au Témoin s'il peut jeter une lumière quelconque sur ces

10 déclarations?

11 M. Milosevic (interprétation): Non. Moi, je lui demande si cette opinion

12 ainsi présentée ne révèle pas le contexte dans lequel a eu lieu

13 l'agression contre la Yougoslavie et les véritables raisons qui ont dicté

14 cette agression; et le fait que sa mission allait dans le même sens. Voilà

15 sa mission.

16 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, moi, je pense qu'on s'est rendus

17 sur place pour prévenir qu'une catastrophe n'ait lieu. C'est l'opinion que

18 j'avais à l'époque et c'est toujours l'opinion que j'ai aujourd'hui.

19 Question: Mais, étant donné qu'un certain nombre de vérificateurs,

20 manifestement, ne partageaient pas votre point de vue, est-ce que ce que

21 les vérificateurs italiens ont dit est exact?

22 Ceci a été publié dans la revue géostratégique intitulée "Limas"; on peut

23 y lire que les Américains ont saboté la mission de l'OSCE. Ici, il s'agit

24 donc d'un extrait d'une revue géostratégique italienne, "Limas", et on

25 peut y lire la chose suivante -je cite-: "A mon avis, cette mission avait

Page 3053

1 deux objectifs: l'un était d'infiltrer des hommes sur le théâtre des

2 opérations et ils avaient une mission de renseignement. Il s'agissait

3 également d'activités dans le cadre des forces spéciales. Ils avaient

4 également un travail préparatoire à accomplir pour une guerre qui avait

5 déjà été décidée".

6 Je m'interromps pour que l'on puisse traduire.

7 Je reprends: "L'autre mission, c'était de donner l'impression que tout

8 était fait, tout avait été tenté et donc de justifier et d'obtenir le

9 consentement de l'opinion publique pour l'agression que nous avons

10 perpétrée".

11 Est-ce que c'est exact?

12 Réponse: Mais je dirai que nous avons fait tout ce qui était en notre

13 pouvoir. Nous n'étions pas là pour infiltrer des gens afin qu'ils mènent à

14 bien des missions de renseignement ou afin de faciliter les activités des

15 forces spéciales. Non, nous étions là pour remplir la mission qui était la

16 nôtre en fonction de l'accord. Nous étions là pour faire notre travail

17 aussi bien que possible, même si ce n'était pas parfait. Et ceci sans

18 bénéficier de la coopération de beaucoup des acteurs présents sur le

19 terrain.

20 Question: Les Italiens déclarent dans ce même document -je cite-: "Nous

21 avons critiqué Walker et son chef opérationnel Drewienkiewicz, pour avoir

22 coopéré avec les autorités serbes".

23 Je voudrais savoir si c'est vrai. Est-ce qu'il y a un certain nombre de

24 membres de la mission qui vous ont critiqués ou est-ce qu'ils vous ont

25 critiqués entre eux, sans savoir que vous le sachiez?

Page 3054

1 Réponse: Je me souviens qu'il arrivait que tout le monde ne soit pas

2 d'accord sur la manière de procéder. A ce moment-là, le chef de la mission

3 prenait une décision et tout le monde s'y pliait. Mais il ne s'agissait

4 pas là d'obtenir l'accord de tous, il s'agissait de prévenir que des

5 événements inacceptables ne se produisent. Et si certains n'étaient pas

6 très contents par ce que l'on disait, bon, on a entendu toutes les

7 opinions, mais le chef de mission a dit: "Bon, on a va choisir telle ou

8 telle solution". Là, c'est possible effectivement que certains n'aient pas

9 été très contents, mais ce n'était pas là, ce n'était pas là notre

10 objectif que tout le monde soit content.

11 Question: Mais ils disent également qu'on vous critiquait, -je cite (le

12 début de la phrase manque)-: "Il s'agissait de contrôler les flux

13 d'informations et surtout d'utiliser la mission pour établir des contacts

14 avec les rebelles de l'UCK et les former pour qu'ils puissent permettre à

15 l'OTAN de toucher ces cibles dans les bombardements qui allaient suivre".

16 Est-ce que ceci est exact ou non? En tout cas, c'est ce que certains des

17 membres de votre mission ont déclaré.

18 Réponse: Indéniablement, une partie de notre mission consistait à prendre

19 contact avec l'UCK pour que, en cas d'incident, on puisse s'entretenir

20 avec les représentants des deux parties, pour découvrir qui était en tort

21 et pour s'efforcer de calmer la situation. Et cela, on ne peut le faire,

22 on ne pouvait le faire que si l'on avait des contacts aussi bien avec

23 l'UCK qu'avec les forces militaires serbes. C'est ce que nous avons fait.

24 Nous avons eu des contacts avec l'UCK, non pas pour assurer une formation

25 à l'UCK, pas du tout. Et il est arrivé que, lors des discussions des

Page 3055

1 événements avec des représentants de haut niveau serbes, j'ai essayé de

2 leur assurer une petite formation en essayant de leur expliquer la

3 différence qu'il y a entre "mesure de", ou "réplique proportionnée ou

4 disproportionnée". Mais je dois dire que je n'ai pas eu beaucoup de

5 succès, ce faisant.

6 Question: Et dans ce contexte, ils ont affirmé que certains membres de la

7 commission ont assuré une formation à l'UCK afin qu'ils puissent guider

8 les bombardements de l'OTAN pour toucher certaines cibles. Les

9 vérificateurs italiens ont dit: "Le 24 mars, les bombardements ont

10 commencé. Les forces de sécurité serbes ont essayé de trouver tous ceux

11 qui étaient soupçonnés de travailler pour l'UCK. Ces opérations étaient au

12 cœur de ce qui a été décrit par l'OTAN comme étant du "nettoyage

13 ethnique"."

14 M. le Président (interprétation): Quelle est votre question?

15 M. Milosevic (interprétation): Ma question, c'est de savoir si c'est vrai,

16 mais je n'ai pas fini.

17 "Les membres de l'UCK ont dit qu'il y avait peu de violence et que l'UCK

18 ne cessait de se livrer à des actes de provocation".

19 Est-ce que c'est exact?

20 M. Drewienkiewicz (interprétation): Le 24 mars, nous étions en Macédoine

21 et les seuls contacts que nous avions, qui pouvaient nous informer sur les

22 événements au Kosovo, c'étaient des gens qui avaient quitté le Kosovo

23 après nous. Nous les avons rencontrés; ils nous ont dit ce qui se

24 produisait et, comme je l'ai dit, nous avons eu des contacts par téléphone

25 satellitaire, en premier lieu avec l'UCK. Et ils nous ont donné des

Page 3056

1 informations sur ce qui s'est passé et sur notamment d'autres violations

2 des droits de l'homme.

3 M. Milosevic (interprétation): Mais est-ce que les déclarations des

4 vérificateurs italiens sont exactes quand ils disent: "Ceci a été une

5 occasion pour Walker et le département d'Etat américain pour dénoncer les

6 Serbes en les accusant d'avoir mis un terme à la trêve. Mais les Européens

7 voyaient les choses différemment. Les rebelles albanais, encouragés par

8 les Américains, ne cessaient de provoquer des attaques serbes afin de

9 justifier l'intervention de l'OTAN de leur côté"?

10 M. le Président (interprétation): Mais le Témoin a déjà répondu. Il a déjà

11 donné ses commentaires sur ce point de vue; donc il n'est pas vraiment

12 utile de continuer à parler de cela.

13 M. Milosevic (interprétation): Nous allons y venir ultérieurement.

14 Mais étant donné que ceci se trouve dans le même document, je pense qu'il

15 serait utile que vous nous donniez votre opinion sur une autre déclaration

16 faite par les vérificateurs italiens. Ils nous parlent de quelque chose

17 qu'on va évoquer plus tard -je cite-: "En janvier, Walker a réglé ses

18 comptes avec ces principaux critiques en mettant les médias internationaux

19 de son côté. Je parle de la signification politique du fameux massacre de

20 Racak. Le 15 janvier, la police serbe avait mené à bien une mission qui

21 avait été annoncée à l'avance, accompagnée d'observateurs et d'équipes de

22 télévision, contre les tueurs de l'UCK dont on pensait qu'ils s'étaient

23 retranchés dans le village de Racak. Quand les Serbes sont entrés dans le

24 village pour procéder à son ratissage, les tireurs de l'UCK se sont

25 réfugiés sur les hauteurs environnantes et ont ouvert le feu sur les

Page 3057

1 policiers, comme le montrent les images des équipes de télévision. Mais

2 les forces serbes les ont contournés et ont arrêté un grand nombre, ou ont

3 coincé un grand nombre de membres de l'UCK. Après le retrait des forces

4 serbes, cet après-midi-là l'UCK a repris le contrôle du village, et c'est

5 l'UCK qui a conduit Walker dans le village le lendemain pour lui montrer

6 les victimes de ce qui était décrit comme le massacre serbe. Il est

7 possible, comme l'affirme les autorités serbes et comme beaucoup le

8 pensent, que les victimes ont été tuées lors de la fusillade qui a été

9 signalée par la police et qui ensuite ont été alignées pour faire croire à

10 l'existence d'une exécution massive ou d'un massacre, en tout cas, le

11 caractère extrêmement émotionnel.

12 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le Témoin est ici

13 pour répondre à des questions et pas pour répondre à la lecture d'extraits

14 d'articles ou autres. Pour répondre, il faut lui poser des questions

15 précises.

16 D'abord, on parle ici de l'exécution par la police serbe d'une opération

17 qui était annoncée à l'avance. Etes-vous au courant de cela?

18 M. Drewienkiewicz (interprétation): Oui, il est indéniable que dans cette

19 zone on avait annoncé une opération contre les personnes qui s'étaient

20 rendues coupables de quelque chose. "Nous allons trouver ces gens et nous

21 allons nous occuper d'eux", et c'est le général Loncar qui me l'a dit lors

22 de la réunion au cours de laquelle il a reçu un coup de téléphone lui

23 annonçant que trois policiers avaient été tués. Je lui ai dit que j'étais

24 désolé d'apprendre la mort de ces trois hommes mais, en tout cas, ça a été

25 annoncé à l'avance. Mais ce qui n'a pas été annoncé, c'était le niveau de

Page 3058

1 cette opération parce que ce genre d'information nous était rarement

2 communiqué.

3 M. le Président (interprétation): Et est-ce que ces tirs ont opposé les

4 membres de l'UCK et les forces serbes?

5 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je crois qu'il y avait des membres de

6 l'UCK à la périphérie du village, lorsque l'attaque contre Racak a

7 commencé.

8 M. le Président (interprétation): Est-ce que c'est l'UCK qui a mené Walker

9 dans le village à votre connaissance?

10 M. Drewienkiewicz (interprétation): L'UCK était présente dans le village

11 lorsque nous sommes arrivés le samedi matin avec Walker.

12 M. le Président (interprétation): Autant que vous avez pu le voir, est-ce

13 que ce sont eux qui l'ont conduit, qui l'ont mené dans le village?

14 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non. Eux, ils étaient dans le village;

15 et nous, nous sommes entrés dans le village, nous avons été tout à fait en

16 mesure d'arriver dans le village et d'y entrer par nos propres moyens.

17 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, la suite de ce

18 passage de ces déclarations?

19 M. Milosevic (interprétation): Mais pensez-vous, vu tout ce que je vous ai

20 dit, vu tout ce que j'ai lu, que l'on pourrait à juste titre dire, et

21 c'est exactement ce dont parlent les vérificateurs italiens, est-ce qu'on

22 pourrait dire que le comportement de Walker c'était un semblant de

23 neutralité de la part de l'OSCE, et donc que ce comportement a sonné le

24 glas de toute prétention de neutralité de la part de votre mission?

25 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, ce n'est pas la façon dont nous

Page 3059

1 avons interprété les choses. Nous avons pensé que l'opération de Racak

2 était un exemple flagrant d'utilisation disproportionnée de la force. Et

3 nous avons cru très sincèrement que ces corps que nous avons trouvés dans

4 ces tranchées sur la colline, c'était la manière dont ces corps avaient

5 été laissés quand ils avaient été tués. Nous n'avons trouvé aucun élément

6 nous indiquant que ces corps avaient été déplacés, entassés les uns sur

7 les autres. Nous n'avons trouvé aucun élément qui pouvait nous indiquer

8 que c'était le cas.

9 Question: Nous reviendrons sur Racak un petit peu plus tard. Ce qui

10 m'intéresse, c'est votre point de vue, votre point de vue sur -comment

11 dire?- une déclaration assez brève émanant de cette mission qui, d'après

12 les vérificateurs italiens, était telle: "Il s'agit d'une mission

13 internationale, mais parmi toutes les missions internationales qui ont été

14 mises sur pied, il serait difficile de trouver une mission plus marquée

15 par le désordre et l'ambiguïté tragique". (Fin de citation.)

16 Est-ce que vous êtes d'accord avec cette déclaration?

17 Réponse: Nous étions effectivement membres d'une mission très ambitieuse.

18 Aucune disposition n'avait été prise avant que l'autorisation ait été

19 donnée à la mission de se rendre sur le terrain, donc il était difficile

20 au début de mettre les choses sur pied. Donc oui, notre travail au départ

21 a été marqué par un grand désordre; j'ai essayé de remettre les choses en

22 place et j'ai été à même de le faire grâce à l'aide de subordonnés

23 extrêmement compétents.

24 Question: Quand avez-vous commencé à rencontrer les commandants et les

25 responsables des groupes terroristes de l'UCK?

Page 3060

1 Réponse: La première fois que je me suis rendu sur une position tenue par

2 l'UCK, c'était lors de l'après-midi du 25 décembre 1998.

3 Question: Après cette date, est-ce que vous avez eu des réunions

4 fréquentes? Je vais poser la question différemment: à quelle fréquence les

5 rencontriez-vous?

6 Réponse: Nous ne nous rencontrions pas fréquemment, j'utilisais des

7 officiers de liaison pour entrer en contact avec eux dès lors que c'était

8 possible. J'ai dû me rendre sur des positions tenues par l'UCK entre six

9 et huit fois pendant toute la durée de la mission.

10 Question: Donc vous vous y êtes rendu à huit reprises pendant toute la

11 durée de votre mission: vous ne vous êtes pas entretenu avec des membres

12 de l'UCK plus de huit fois?

13 Réponse: Ce sont des occasions au cours desquelles j'ai pu m'entretenir

14 avec eux directement. Il y a eu des contacts pris par le biais d'officiers

15 de liaison beaucoup plus fréquemment: nous essayions de savoir ce à quoi

16 ils se préparaient, ce qu'ils envisageaient de faire. Je n'ai pas eu de

17 contacts directs très fréquents avec eux, mais j'avais beaucoup de

18 contacts avec eux par le truchement de mes officiers de liaison; ces

19 officiers qui avaient été désignés comme étant des personnes qui devaient,

20 de façon permanente, être en contact avec l'UCK. C'étaient ces personnes

21 qui étaient le mieux à même d'établir de réels rapports de travail avec

22 l'UCK.

23 Question: Et Walker, est-ce qu'il avait des rencontres quotidiennes avec

24 ces personnes?

25 Réponse: Non.

Page 3061

1 Question: Quelle était la fréquence de ces prises de contact avec l'UCK?

2 Réponse: Je pense qu'il les rencontrait moins fréquemment que moi. Si nous

3 partons de l'hypothèse que j'ai rencontré l'UCK six à huit fois, je dirais

4 que Walker a dû rencontrer l'UCK à quatre et six fois.

5 Question: Nous ne parlons pas de Racak. Ou est-ce que nous incluons Racak

6 dans le nombre de ces rencontres?

7 Réponse: Je ne pensais pas à Racak, je ne l'ai pas inclus, mais nous

8 pouvons inclure les rencontres de Racak.

9 Question: Et de quoi discutiez-vous lorsque vous les rencontriez?

10 Réponse: Eh bien, nous avions toujours un objectif précis à l'esprit

11 lorsque nous allions les voir, par exemple, ramener les huit soldats de la

12 VJ; nous avions toujours pour objectif de débattre de la question la plus

13 problématique du moment, nous n'entamions pas de grands débats

14 philosophiques.

15 Question: Ce qui veut dire que vous vous rencontriez lorsque des

16 situations de crise surgissaient pour pouvoir en discuter, par exemple, le

17 fait que des prisonniers aient été faits, le fait qu'il y ait eu des

18 arrestations de soldats. Mais lorsqu'il n'y avait pas de telles situations

19 de crise, de quoi discutiez-vous lorsque vous vous rencontriez?

20 Réponse: A partir de la fin du mois de décembre, nous nous sommes dit que

21 nous étions dans une situation de crise permanente: dès lors qu'un

22 incident était réglé, un autre survenait. Nous n'avons réussi à récupérer

23 les huit soldats serbes du sommet de la colline de Stari Trg que le

24 mercredi, par exemple, et Racak s'est produit le vendredi; il n'y avait

25 pas beaucoup de répit entre les différents incidents, pas beaucoup de

Page 3062

1 répit qui nous permettait de réfléchir à qu'il était en train d'advenir de

2 nous.

3 Question: Donc, en termes pratiques, cela veut dire que vous ne discutiez

4 que de points très sensibles lorsque vous vous rencontriez les membres de

5 l'UCK, n'est-ce pas?

6 Réponse: Eh bien, pour ce qui me concerne, je ne me rendais sur une

7 position de l'UCK que lorsqu'il était absolument nécessaire pour moi de le

8 faire et lorsque j'en ressentais la nécessité. Moi, je n'allais pas là-bas

9 pour prendre un café ou pour discuter autour d'une table.

10 Question: Est-ce que vous n'avez pas reçu des rapports portant sur des

11 incidents qui se seraient produits? Enfin, je ne parle pas de vous

12 personnellement mais de la mission dans son ensemble. Lorsque des

13 incidents se produisaient, est-ce que vous receviez des rapports émanant

14 de Serbes ou de résidents non albanais.

15 Réponse: Oui, dans une certaine mesure, nous recevions des éléments

16 d'information qui provenaient de tous ceux qui étaient prêts à nous

17 transmettre des informations. Nous rassemblions ces éléments

18 d'information, nous essayions d'établir la source de ces informations et

19 nous essayions d'établir ce qui avait pu affectivement se produire dans

20 les faits.

21 Question: Mais moi je parle des plaintes qui ont été déposés, des rapports

22 qui ont été faits à propos d'enlèvements, de violations des droits de

23 l'homme, rapports faits quant à des incidents violents impliquant l'UCK.

24 Est-ce que vous n'avez pas reçu des rapports, des plaintes émanant de la

25 population serbe et non serbe?

Page 3063

1 Réponse: Effectivement.

2 Question: Que trouvait-on au cœur de ces rapports, au cœur de ces

3 plaintes?

4 Réponse: Cela dépendait un petit peu des cas mais, généralement, ces

5 rapports portaient sur des infractions du cessez-le-feu, des violations du

6 cessez-le-feu, sur des allégations de comportement abusif, mais dans les

7 deux camps. Nous essayions de nous informer sur ce qui avait pu

8 effectivement se produire et, s'il était possible d'en venir à un certain

9 nombre de conclusions quant aux responsables de ces violations, nous

10 établissions cela. Mais ce n'était pas toujours possible.

11 Question: Est-ce que les familles de personnes qui avaient été enlevées ou

12 tuées se sont plaintes auprès de vous?

13 Réponse: Oui, des deux côtés.

14 Question: Comment cela "des deux côtés"? La police n'a enlevé personne,

15 c'est l'UCK qui enlevait, qui se livrait à ce type d'actes. Est-ce que

16 vous avez fait quoi que ce soit pour que les personnes qui avaient été

17 enlevées soient retrouvées? Est-ce que vous avez fait d'autres tentatives

18 visant à délivrer des personnes? Et je ne parle pas de ces huit soldats

19 que vous avez déjà mentionnés.

20 Réponse: Oui, nous avons réussi à récupérer un certain nombre de personnes

21 et, lorsque ces neuf membres de l'UCK qui avaient été, jusqu'à ce jour,

22 détenus après leur capture lors d'une embuscade qui s'était produite au

23 niveau de la frontière, donc ce même jour, nous avons également retrouvé

24 cinq Serbes qui avaient été enlevés; nous avons pu retrouver ces personnes

25 et les rendre à leur famille. Cela, c'est un incident qui me revient

Page 3064

1 aujourd'hui à l'esprit.

2 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Drewienkiewicz, est-ce que vous

3 faites une distinction entre des civils enlevés et des terroristes pris à

4 la frontière, des terroristes armés qui essayaient illégalement de

5 traverser la frontière? Et je parle ici de ceux qui ont été arrêtés par

6 les forces légitimes d'un Etat qui surveille ses frontières et qui en

7 assure le contrôle. Est-ce que vous faites une distinction entre ces deux

8 types d'enlèvement? Vous semblez établir une équivalence.

9 M. Drewienkiewicz (interprétation): Moi, je dis qu'on a ramené ces cinq

10 Serbes. Bien sûr qu'il y a une distinction entre les deux catégories de

11 personnes que vous évoquez et, à l'époque, nous avons établi

12 qu'effectivement, l'embuscade sur la frontière était en fait une tentative

13 légitime faite par les forces d'un Etat de défendre leurs frontières,

14 parce qu'il y a eu effectivement une infraction assez grave.

15 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous allons

16 suspendre et nous nous retrouverons après la pause.

17 M. Milosevic (interprétation): Quelle est la durée de la pause?

18 M. le Président (interprétation): Un quart d'heure.

19 (L'audience, suspendue à 10 heures 35, est reprise à 10 heures 55.)

20 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, je crois vous avoir

21 expliqué la semaine dernière que nous avons pris des dispositions pour que

22 le Témoin soit disponible aujourd'hui. Mais il ne peut pas rester beaucoup

23 plus longtemps.

24 M. le Président (interprétation): Je crois que vous pouvez reprendre. Tout

25 ce que vous avez dit n'a pas été saisi.

Page 3065

1 M. Nice (interprétation): Je vous ai dit la semaine dernière que le Témoin

2 pouvait rester ici aujourd'hui, mais je ne crois pas qu'il puisse passer

3 plus de temps avec nous.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vous encourage

5 donc à mettre un terme à votre contre-interrogatoire dès aujourd'hui.

6 M. Milosevic (interprétation): Nous travaillons jusqu'à quelle heure?

7 M. le Président (interprétation): Nous travaillons jusqu'à 13 heures 45,

8 c'est-à-dire 2 heures moins le quart, et nous prendrons une autre pause

9 dans le courant de la matinée.

10 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, nous ne disposons pas de beaucoup

11 de temps, c'est très court.

12 M. le Président (interprétation): Oui, il a pris plus de six heures, vous

13 parlez de M. Nice, mais nous allons voir comment nous avançons et nous

14 ferons un petit bilan de la situation à la fin de la journée.

15 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous saviez que, depuis

16 l'arrivée de la mission, le taux de criminalité avait beaucoup augmenté?

17 Je parle de crimes perpétrés par les membres de l'organisation de l'UCK.

18 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, pas vraiment. Vous comparez ce

19 taux de criminalité à celui qui prévalait quand? Quels sont vos éléments

20 de comparaison?

21 Question: Eh bien, je compare cela à la situation qui prévalait avant

22 l'arrivée de votre mission sur le terrain. Parce que le niveau de

23 criminalité était presque au niveau zéro avant l'arrivée de la mission.

24 Les crimes qu'ils commettaient. Et d'ailleurs les statistiques montrent

25 bien quelle a été l'augmentation qui s'est produite, augmentation très

Page 3066

1 soudaine, et cette augmentation commence à partir du moment où la zone

2 passe sous la protection de la mission.

3 Est-ce que vous savez cela?

4 Réponse: Je ne suis pas tout à fait en accord avec vous. Nous demandions

5 constamment à être tenus informés de ces faits que vous évoqués. Jamais

6 nous n'avons disposé de ces éléments d'informations à partir desquels nous

7 aurions pu agir.

8 Question: Mais est-ce qu'il y a eu augmentation de la criminalité? Est-ce

9 qu'il n'est pas légitime que les forces de sécurité aient réagi en

10 conséquence? Est-ce qu'il n'est pas vrai que la mission, par la suite, a

11 accusé les forces de sécurité en s'appuyant sur certains clichés, à savoir

12 qu'ils faisaient recours à la force de façon excessive? Est-ce qu'il n'y

13 avait pas là une espèce de plan qui avait été établi pour que les choses

14 se fassent de la sorte?

15 Réponse: Non, ce n'est pas notre perception des choses. A notre arrivée,

16 l'UCK a déclaré qu'elle respecterait un cessez-le-feu. Comme je l'ai déjà

17 évoqué, nous souhaitions passer un accord ferme avec le camp albanais,

18 mais cela n'a pas pu se faire. En revanche, il y a eu déclaration d'un

19 cessez-le-feu et, dans un premier temps, ce cessez-le-feu a été respecté

20 dans une certaine mesure. Cela étant dit, il y a eu des cas isolés

21 d'incidents impliquant l'UCK. Ces incidents, nous les avons déplorés, mais

22 nous comprenions qu'une organisation insurrectionnelle ne pouvait pas

23 faire preuve d'un total niveau de discipline et ne pouvait certainement

24 pas transmettre les ordres à ses membres si rapidement qu'un gouvernement

25 pourrait le faire. Le gouvernement disposait de forces de sécurité

Page 3067

1 organisées, forces de sécurité qui reposent sur des chaînes de

2 commandement précisément établies. Il n'y a pas de code de ce type, de

3 code de fonctionnement de ce type pour des insurgés.

4 Question: A combien de reprises vous êtres vous rendu à Dragobil?

5 Réponse: Peut-être une fois.

6 Question: Avez-vous rencontré les chefs de l'UCK en cette occasion?

7 Réponse: Oui, je me suis rendu sur place pour essayer de voir de quelle

8 façon nous allions pouvoir assurer leur transport vers Rambouillet. Nous

9 devions les faire monter sur un avion qui les transporterait à Rambouillet

10 où ils devaient faire partie de la délégation des Albanais du Kosovo.

11 Question: Est-ce que cela signifie que Dragobil était le centre où se

12 rassemblaient les chefs principaux?

13 Réponse: Ils se rassemblaient en différents endroits. C'est le lieu où

14 j'ai dû me rendre, moi, pour les rencontrer.

15 Question: Est-ce que vous aviez vos propres locaux sur place, si je peux

16 le dire ainsi? Ou est-ce que vous aviez un bureau permanent sur place?

17 Réponse: Nous avions sur place un officier de liaison; il s'y tenait de

18 façon permanente, il était en contact quasi permanent avec l'UCK.

19 Question: Et qu'en est-il de la KDOM? Est-ce qu'elle avait également un

20 bureau sur place?

21 Réponse: Vous faites référence, je pense, à la KDOM des Etats-Unis qui est

22 celle qui était toujours à Dragobil? Je sais qu'ils étaient là de temps à

23 autre, je ne sais pas s'ils avaient un poste permanent en cet endroit.

24 Question: Mais vous, vous aviez un bureau permanent, vous aviez une

25 représentation permanente?

Page 3068

1 Réponse: C'était quasi permanent. L'officier de liaison venait de temps en

2 temps me voir ou voir d'autres personnes pour nous tenir informer de

3 certaines choses, mais il nous semblait qu'il était important qu'il y ait

4 l'un des nôtres présent sur place de façon quasi permanente, afin que

5 l'UCK puisse s'entretenir avec cette personne dès lors qu'ils le jugeaient

6 nécessaire.

7 Question: Et ces représentants de votre mission se trouvaient sur place

8 pour protéger les chefs de l'organisation terroriste, c'est pour cela que

9 vos représentants étaient à Dragobil?

10 Réponse: Non, je crois que les chefs étaient tout à fait capables

11 d'assurer leur propre protection. Nous, nous étions sans arme, nous étions

12 dans des véhicules assez standards, et nous n'étions en aucun cas une

13 force de protection.

14 Question: Est-ce que Walker était à Dragobil?

15 Réponse: Il ne s'y trouvait pas quand je m'y suis rendu, mais je sais

16 qu'il s'y est rendu au moins en une occasion.

17 Question: Et est-ce que vous pourriez nous donner les noms des personnes

18 que vous avez rencontrées à l'époque? Pourriez-vous par ailleurs nous

19 donner les noms des personnes qu'il a rencontrées?

20 Réponse: J'aurais besoin pour vous répondre de consulter mes notes

21 personnelles. Les personnes que j'avais rencontrées, étaient les personnes

22 qui, à l'époque, étaient les trois dirigeants de l'UCK.

23 Question: Quel est le nom de ces personnes?

24 Réponse: Je répète qu'il faudrait que je puisse consulter mes notes

25 personnelles, je ne peux pas, comme ça, à froid vous donner ces noms.

Page 3069

1 Question: Vous n'avez pas vos notes personnelles sur vous?

2 Réponse: Malheureusement, non.

3 Question: A qui avez-vous fait part de vos impressions après votre visite

4 à Dragobil?

5 Réponse: Eh bien, je me suis sans doute entretenu avec Walker et Keller,

6 qui était le responsable de la mission. Et puis, la préoccupation

7 principale, c'était de faire en sorte que les personnes qui devaient

8 prendre part aux négociations de Rambouillet puissent s'y rendre.

9 Question: Chacun sait bien quelles étaient les personnes présentes à

10 Rambouillet. Est-ce que ce sont avec ces mêmes personnes que vous vous

11 êtes entretenu à Dragobilje?

12 Réponse: Ces personnes faisaient partie de la délégation qui s'est rendue

13 à Rambouillet, effectivement.

14 Question: Avez-vous eu des contacts avec les familles des Serbes qui

15 avaient été enlevés?

16 Réponse: Pas personnellement, non.

17 Question: Lorsque vous vous êtes entretenu avec les chefs d'organisations

18 terroristes à Dragobilje, est-ce que vous avez fait quoi que ce soit pour

19 qu'ils vous remettent les citoyens qu'ils avaient enlevés?

20 Réponse: Je me suis rendu à Dragobilje, juste après que les cinq Serbes

21 ont été rendus à leurs familles. Lorsque je suis allé à Drabogilje,

22 c'était déjà le mois de février et les cinq Serbes âgés ont été rendus à

23 leurs familles fin janvier.

24 Question: Et qu'en est-il des représentants de la mission dont vous avez

25 dit qu'ils étaient entrés en contact avec les familles des Serbes qui

Page 3070

1 avaient été enlevés? Est-ce que ces représentants ont assumé leurs

2 responsabilités vis-à-vis de ces familles? Est-ce qu'ils ont fait quelque

3 promesse que ce soit devant les membres de ces familles?

4 Réponse: Il y avait, de temps à autre, des réunions entre les membres de

5 la KVM et les familles des Serbes qui avaient été enlevés, ou alors entre

6 ces représentants et les familles des civils albanais qui avaient été

7 enlevées. Ces réunions se tenaient de façon régulière; ce n'est pas moi

8 qui m'en occupais, ça dépendait d'autres membres de la mission, mais je

9 savais que ces réunions avaient cours. Et nous souhaitions, bien sûr, que,

10 des deux côtés, les personnes qui avaient été enlevées soient rendues à

11 leurs familles; c'était une de nos préoccupations principales.

12 Question: Est-ce que vous avez eu de bons résultats? Je ne parle pas des

13 cinq personnes dont nous avons déjà parlé.

14 Réponse: Je crois que nous avons pu intervenir dans le cadre d'un autre

15 enlèvement, mais je ne peux pas vous en dire plus, parce que je n'ai pas

16 pris part moi-même à ce qui a été fait.

17 Question: Est-ce qu'ils vous ont dit que Dragobilje et Glodjani étaient

18 les centres de détention les plus importants pour les Serbes enlevés et

19 pour les Albanais enlevés ?

20 Réponse: Non.

21 Question: Savez-vous que les civils qui étaient enlevés étaient emmenés

22 dans le village de Glodjani, là où l'UCK avait son quartier général?

23 Réponse: Non.

24 Question: Est-ce que vous savez que ces personnes ont été torturées, puis

25 tuées, puis jetées dans le canal qui approvisionne le lac de Radonic en

Page 3071

1 eau?

2 Réponse: Non.

3 M. Milosevic (interprétation): Savez-vous que nous disposons de

4 photographies très détaillées, de rapports très détaillés sur ces crimes ?

5 M. le Président (interprétation): Ne répondez pas à cette question.

6 M. Milosevic (interprétation): Très bien.

7 Est-il exact, qu'aucun plan n'avait été conçu pour expulser les Albanais

8 du Kosovo et de Metohija?

9 M. Drewienkiewicz (interprétation): A l'époque où je me trouvais au sein

10 de la Mission de vérification du Kosovo et jusqu'à ce que nous quittions

11 les lieux avec les autres membres de la mission, le 20 mars, je n'ai pas

12 eu connaissance d'un plan qui aurait été conçu pour expulser les Albanais

13 du Kosovo et de Metohija.

14 Question: Est-ce que cela veut dire que vous n'avez rien vu, rien entendu

15 qui aurait pu vous conduire à penser qu'un tel plan avait été conçu ?

16 Réponse: Je n'ai pas vu de plan de ce type. Personne ne m'a parlé de

17 l'existence d'un tel plan.

18 Le comportement de certains membres de vos forces de sécurité n'était pas

19 toujours compatible avec le souhait que certaines personnes manifestaient

20 de rester là où elles se trouvaient.

21 Question: Saviez-vous que les forces de sécurité n'ont jamais agi contre

22 les terroristes, dès lors que ceux-ci se trouvaient mêlés à des groupes de

23 civils?

24 Réponse: Non, ce n'est pas l'impression que j'ai eue. Mon impression était

25 celle-ci: vos forces de sécurité étaient tout à fait prêtes à s'attaquer à

Page 3072

1 des groupes où se trouvaient des membres de l'UCK et des membres de la

2 population civile.

3 Question: Mais les représentants américains eux-mêmes, pendant 1998,

4 étaient pleinement conscients du fait qu'aucune opération n'était lancée

5 dans les zones où se trouvaient des civils, que jamais le risque de

6 blesser des civils n'a été pris? Est-ce que vous savez qu'aucune action

7 visant des civils n'a été menée? Répondez par un oui ou par un non.

8 Réponse: Non.

9 Question: Est-il exact que des représentants serbes, qui participaient à

10 votre réunion du 4 décembre 1998, ont critiqué le mode de fonctionnement

11 de la mission, ont critiqué le fait que la mission de vérification n'avait

12 pas encore commencé. N'ont-ils pas demandé que ce processus commence

13 immédiatement?

14 Réponse: C'est exact et nous aurions pu commencer à travailler beaucoup

15 plus rapidement si les vôtres avaient fait preuve de plus de coopération.

16 Question: Vous pensez donc que, s'il y a eu absence de coopération, c'est

17 parce que les autorités yougoslaves l'empêchaient?

18 Réponse: On peut dire les choses ainsi.

19 Question: Est-il exact de dire qu'en cette occasion, les représentants de

20 la Serbie et de la Yougoslavie, ou plutôt les représentants des autorités

21 ont demandé que les infractions de cessez-le-feu, dont s'était rendu

22 coupable l'UCK, soient l'un des points à l'ordre du jour?

23 Réponse: Je pense que cela a été effectivement l'un des points dont nous

24 avons débattu.

25 Question: Est-il exact que vous aviez déclaré que vous ne souhaitiez pas

Page 3073

1 débattre de ce sujet lors de cette réunion?

2 Réponse: Je n'en ai pas le souvenir. Nous n'avons pas consacré cette

3 réunion à l'étude de cette question.

4 Question: Eh bien, je vais vous rafraîchir la mémoire. Vous parlez de cela

5 à la page 14, paragraphe 3, de votre déclaration. En ces occasions, est-ce

6 que l'on a évoqué les zones qui étaient les plus préoccupantes?

7 Réponse: Les zones qui étaient la source de nos préoccupations étaient

8 celles-ci. D'abord, nous n'arrivions pas à mettre sur pied la mission de

9 façon suffisamment rapide. Les procédures bureaucratiques qui étaient

10 utilisées visaient à entraver la capacité de la mission à commencer à

11 travailler au Kosovo. L'objectif principal de cette réunion que vous

12 évoquez, pour autant que je m'en souvienne, c'était de demander qu'il y

13 ait accélération de la procédure bureaucratique afin que nous puissions

14 louer des bâtiments, obtenir des visas plus rapidement que ce n'était le

15 cas.

16 Question: Avez-vous obtenu plus rapidement ces visas?

17 Réponse: Cela n'est jamais allé particulièrement vite, non. Nous avons

18 posé précisément la question pour savoir si ce groupe de l'instance

19 chargée de délivrer les visas puisse être situé à Pristina, de façon à ce

20 que les passeports n'aient pas à voyager de Pristina à Belgrade pour

21 revenir ensuite, mais ceci n'a jamais été fait. Donc les passeports ont dû

22 continuer à être envoyés à Belgrade pour ensuite revenir; il fallait

23 plusieurs jours pour obtenir un visa.

24 Question: Combien cela fait-il "plusieurs jours"?

25 Réponse: Cela dépendait. Mais ce n'était jamais rapide.

Page 3074

1 Question: Oui, mais combien de jours?

2 Réponse: Je me souviens que lorsque j'ai demandé à obtenir un visa à

3 utilisation multiple, au lieu d'un visa à utilisation unique, il a fallu

4 six jours ouvrés pour que mon passeport parte à Belgrade et revienne avec

5 les tampons nécessaires. Mais c'est le seul souvenir que j'en ai.

6 Question: Mais pendant tout ce temps-là, vous étiez au Kosovo; cela ne

7 fait pas de doute?

8 Réponse: C'est exact, mais lorsque des vérificateurs étaient appelés à

9 intégrer la mission et qu'ils se rendaient à l'ambassade yougoslave dans

10 le pays où ils vivaient, il leur fallait en moyenne deux semaines pour

11 obtenir un visa de l'ambassade yougoslave dans leur pays. Donc leur

12 intégration à leur mission, leur arrivée sur place étaient freinées. Et

13 cela valait pour le Kosovo. Mais s'ils devaient se rendre en Macédoine,

14 par exemple, pour rencontrer les vérificateurs qui étaient attendus à

15 l'aéroport de Skopje, cela n'était pas possible si l'on ne disposait que

16 d'un visa unique. Donc cela compliquait tout le processus et la vie de la

17 mission; cela nous rendait moins efficaces.

18 Question: Mais aviez-vous en tête l'idée qu'à Vienne -c'est-à-dire la

19 ville où se trouve le siège de l'OSCE- des possibilités ont été ouvertes

20 pour que les membres de votre mission obtiennent des visas plus

21 rapidement?

22 Réponse: Pas précisément. De toute façon, les membres de la mission ne

23 venaient pas tous de Vienne; ils venaient en général directement de leur

24 pays d'origine, ils arrivaient à Skopje et ensuite, de Skopje, ils

25 allaient au Kosovo. Il n'y avait pour eux aucune raison de passer par

Page 3075

1 Vienne.

2 Question: Mais vous aviez tout de même 1.300 membres de la mission qui

3 disposaient d'un visa. Et je suppose que la différence pour les 2.000, la

4 différence entre ce chiffre et le chiffre de 2000 n'était pas due à des

5 difficultés liées à l'obtention des visas?

6 Réponse: En mars, effectivement, les effectifs de la mission ont atteint

7 1.379 représentants et, entre Noël et mars, la mission a recruté à peu

8 près une centaine de personnes par semaine; nous espérions atteindre le

9 chiffre de 2.000 au mois d'avril.

10 Question: Pourquoi une augmentation aussi lente?

11 Réponse: Elle était rapide d'après les critères applicables à des missions

12 de ce genre qui, en général, recrutent une personne à la fois.

13 Il a fallu autant de temps pour la mission des Nations Unies du Kosovo

14 pour atteindre les mêmes effectifs lorsque cette mission est arrivée au

15 mois de juin. Il lui a fallu à peu près le même temps pour atteindre un

16 effectif de 1.300 personnes. C'est une réalité de la vie lorsqu'on fait

17 appel à des gens individuellement, il faut que des négociations se

18 déroulent avec 1.300 personnes, il faut étudier leur curriculum vitae

19 avant de les recruter. Il ne s'agit pas d'unités constituées qui attendent

20 de partir, comme ce serait le cas pour une unité militaire par exemple

21 avec tout son équipement.

22 Question: S'il a fallu le même temps pour la constitution de la mission

23 des Nations Unies après le 10 juin, le même temps que celui dont vous avez

24 eu besoin pour créer votre mission de vérification, et que ceux dont je

25 viens de parler n'avaient pas besoin de visa pour arriver au Kosovo, cela

Page 3076

1 signifie, n'est-ce pas, que le problème des visas n'avait aucun effet, ni

2 ralentisseur ni accélérateur?

3 Réponse: Non, ce n'est pas exact.

4 Question: Mais comment se fait-il qu'il ait fallu aux Nations Unies le

5 même temps qu'à vous, puisque eux n'avaient pas le problème des visas que

6 vous venez d'indiquer comme étant un des problèmes qui s'est posé à vous?

7 Réponse: Je n'ai pas indiqué que j'aurais eu ces problèmes, je les ai eus

8 effectivement. Je crois qu'il vous faudrait comparer la liste des

9 effectifs de la mission des Nations Unies avec la nôtre. La mission des

10 Nations Unies s'est constituée à la même vitesse que la nôtre, cela ne

11 fait aucun doute, mais eux avaient besoin de très nombreux policiers, et

12 obtenir des policiers c'est encore plus difficile que d'obtenir les gens

13 que nous recherchions pour ce qui nous concerne. Nous n'avions pas besoin

14 d'aussi nombreux policiers mais, encore une fois, je répète que toutes ces

15 personnes n'attendaient pas ensemble le moment du départ.

16 Question: Mais lors de vos rencontres avec des représentants yougoslaves,

17 ceux ci vous ont-ils indiqué qu'entre Vienne et Nis, l'UCK tirait, et qu'à

18 Malisevo la population avait quitté la ville en raison des actions de

19 l'UCK qui s'exerçaient sans retenue? Ceci vous a-t-il été indiqué de façon

20 précise?

21 Réponse: Si je me souviens bien, la route qui mène de Pec à Nis s'étend

22 sur à peu près 150 miles, donc j'aurais besoin de davantage de précisions

23 pour répondre à votre question. Quant à ce qui se passait à Malisevo, nous

24 en avons certainement discuté, car Malisevo était un point très sensible à

25 l'époque.

Page 3077

1 Question: Est-il exact que lors de la réunion entre les représentants du

2 gouvernement de la Yougoslavie et vous et Walker le 9 décembre, il a été

3 demandé que la KVM cesse de soutenir l'UCK, et qu'il a été demandé que la

4 communauté internationale cesse d'apporter un appui financier à l'UCK à

5 partir de banques occidentales?

6 Réponse: Oui, je me souviens que ces allégations ont été formulées et que

7 Walker les a niées avec la plus grande fermeté.

8 Question: Pensez-vous qu'il s'est opposé à cela, à juste titre, alors que

9 l'on sait que des moyens financiers destinés à aider l'UCK partaient de

10 banques occidentales à destination de l'UCK? Etes-vous au courant de cela?

11 Réponse: Je ne suis pas au courant des sources de financement de l'UCK,

12 non.

13 Question: Est-il exact que l'armée yougoslave a demandé à la KVM de

14 procéder à une inspection au moment d'une violation du cessez-le-feu, le

15 14 décembre à l'est de Prizren, à la frontière, et qu'à l'occasion de cet

16 incident un certain nombre de terroristes ont trouvé la mort?

17 Réponse: Oui, mais c'était à l'ouest de Prizren.

18 Question: Vous a-t-il été confirmé par vos patrouilles à ce moment-là que

19 des combats avaient eu lieu et que des équipements très nombreux avaient

20 été découverts?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Est-il exact qu'une colonne importante de l'UCK était en cause?

23 Réponse: Oui, nous pensons que ces effectifs étaient à peu près de 145

24 hommes.

25 Question: Est-il exact que la KVM a obtenu l'autorisation pour rendre

Page 3078

1 visite aux prisonniers de l'UCK, suite à cet incident?

2 Réponse: Beaucoup plus tard, oui. Au moment où les neuf prisonniers ont

3 été faits prisonniers, on était -comme vous venez de le dire- à la mi-

4 décembre, et selon mon souvenir, c'est à la fin de la première semaine ou

5 au début de la deuxième semaine de janvier que nous avons eu accès à ces

6 prisonniers à Nis. Et ceci a eu lieu dans le contexte des négociations

7 destinées à obtenir la libération de vos huit soldats prisonniers à Stari

8 Trg.

9 Question: Est-il exact que ces prisonniers, suite la visite de Ciaglinski,

10 votre représentant à la prison de Nis où ils étaient enfermés, leur ont

11 dit que c'était une colonne de l'UCK qui était destinée à apporter des

12 renforts, et que c'est à ce moment-là que le chiffre de 145 personnes a

13 été mentionné?

14 Réponse: Oui, vous pourrez lui poser la question lorsqu'il comparaîtra,

15 mais c'est sans aucun doute ce dont il m'a rendu compte, effectivement.

16 Question: Est-il exact qu'ils ont à ce moment-là annoncé que c'est contre

17 leur gré qu'ils avaient été mobilisés dans les rangs de l'UCK, et qu'ils

18 sont partis, qu'ils ont suivi un entraînement en Albanie à ce moment-là?

19 Réponse: Oui, c'est ce que j'ai compris.

20 Question: Est-il exact que tous ces hommes lors du conflit du 14 décembre

21 étaient armés?

22 Réponse: Je ne peux pas me prononcer sur ce point, mais la plupart d'entre

23 eux semblent avoir été armés, en effet.

24 Question: Est-il exact que les terroristes ont tué, le 14 décembre, des

25 jeunes gens serbes dans le café "Panda" de Pec?

Page 3079

1 Réponse: Il y a eu meurtre dans le café "Panda" de Pec et certains jeunes

2 gens serbes ont été tués. Quant à nous, nous n'avons jamais réussi à

3 déterminer avec précision à qui il fallait attribuer ces meurtres. Il n'y

4 avait de preuve ni dans un sens ni dans l'autre.

5 Question: Etes-vous au courant du fait que les terroristes qui étaient les

6 auteurs de cette attaque se sont enfuis vers le quartier de la ville qui

7 s'appelle Kapshnica, qui concrètement était le champ de bataille de l'UCK

8 dans cette ville?

9 Réponse: Je n'ai jamais entendu dire cela jusqu'à aujourd'hui et je n'ai

10 jamais eu connaissance d'une poursuite de la police qui aurait pu

11 permettre de tirer ce type de conclusion.

12 M. Milosevic (interprétation): D'après leurs déclarations, toutes les

13 traces menaient vers ce quartier. Avez-vous été informé de cela?

14 M. le Président (interprétation): Le Témoin vient de dire qu'il n'était

15 pas au courant.

16 M. Milosevic (interprétation): Lorsque la partie adverse vous a interrogé,

17 il a été question du meurtre de quatre jeunes gens, alors que ce sont six

18 jeunes gens qui ont été tués comme vous le savez: Ivan Obradovic, un

19 écolier, un lycéen, Vuleza Glozdenovic, lycéen également, Zoran Stankovic,

20 lycéen, Dragan Trifkovic, lycéen, Svetislav Ristic, lycéen, Ivan Radovic,

21 étudiant. Et Bogdan Radovic, le père d'Ivan Radevic a été enlevé. Quant

22 aux terroristes de l'UCK, ils ont passé à tabac sa mère et sa grand-mère.

23 M. le Président (interprétation): Un instant. Je vous demanderai de ne

24 parler que d'une chose à la fois.

25 Général, pouvez-vous nous aider au sujet de cet incident?

Page 3080

1 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je ne me souviens pas avec précision

2 de combien de personnes ont été tuées lors de l'attaque dans le bar

3 "Panda". Je crois savoir que certains sont morts sur-le-champ et d'autres

4 plus tard. Le chiffre se situe -de cela, je me souviens certainement-

5 entre quatre et six. Il s'est agi d'un incident très regrettable. Nous

6 n'avons pas réussi à parvenir à des conclusions précises quant aux motifs

7 de cette attaque et personne n'a jamais revendiqué la responsabilité de

8 cet incident.

9 Question: Mais le simple fait de constater où les auteurs de cet incident

10 se sont enfuis et le fait que le père d'un des jeunes gens assassinés a

11 été enlevé -je vous ai donné le nom de tous ces jeunes gens-, cet homme

12 d'ailleurs avait auparavant été président de l'assemblée municipale de

13 Pec, ces faits sont-ils suffisants pour vous montrer combien il est

14 absurde et monstrueux de laisser entendre que cet acte aurait pu être

15 imputé à qui que ce soit d'autre qu'à l'UCK?

16 Réponse: Non, parce que des incidents se sont produits ailleurs dans la

17 région des Balkans, qui ont fait l'objet de nombreux documents, des

18 incidents qui avaient l'air d'être une chose et qui, en fait, se sont

19 avérés être le contraire; c'est la raison pour laquelle nous n'avons

20 jamais décidé de culpabiliser qui que ce soit en détail dans le cadre de

21 l'incident dont nous sommes en train de parler.

22 Question: Savez-vous de qui c'était la spécialité de créer des victimes

23 dans son camp afin d'accuser le camp adverse, aussi bien en Bosnie qu'au

24 Kosovo?

25 Réponse: Non, mais je me souviens d'attaques à la grenade contre des biens

Page 3081

1 albanais et des biens serbes durant la guerre, pendant la période que j'ai

2 passée au Kosovo. Donc aucun des deux camps n'avait le monopole de ce

3 genre d'événements, je le crains fort.

4 M. Milosevic (interprétation): Mais savez-vous que c'était leur pratique,

5 si l'on pense au prétendu pilonnage des civils qui faisaient la queue pour

6 acheter du pain à Sarajevo et au prétendu pilonnage...

7 M. le Président (interprétation): Non, non, non. Ceci sort du champ de la

8 déposition de ce Témoin.

9 M. Milosevic (interprétation): Bien. Est-il exact que, le 15 décembre,

10 lors de la rencontre entre la KVM et le gouvernement, des représentants du

11 gouvernement ont porté des accusations en affirmant que c'était aux Etats-

12 Unis que l'UCK obtenait des armements spécialisés puisqu'on a trouvé sur

13 des représentants de l'UCK un certain nombre d'armes de ce genre?

14 M. Drewienkiewicz (interprétation): Oui, je me souviens que cette

15 allégation a été faite, et je me souviens encore une fois qu'elle a été

16 réfutée vigoureusement par M. l'ambassadeur Walker.

17 Question: Savez-vous que l'Albanais Floren Krasniqi, un urbaniste de New

18 York, l'un des principaux financiers de l'UCK, a décrit quelles étaient

19 les armes qui étaient venus des Etats-Unis, grâce au fait que des sociétés

20 de chasseurs albanais importaient des armes de ce type à partir des Etats-

21 Unis? Savez-vous donc qu'il y a eu confirmation de ce que Walker a réfuté?

22 Réponse: Non, mais j'ai pu constater que la plupart des armes étaient des

23 kalachnikovs.

24 Question: Ici, on ne parle pas de kalachnikovs, mais d'armements spéciaux

25 provenant des Etats-Unis. Vous n'avez aucune connaissance à ce sujet par

Page 3082

1 conséquent?

2 Réponse: Non, je ne suis pas au courant. Non.

3 Question: Est-il exact que, lors de la rencontre avec les représentants du

4 MUP, vous avez proposé que les effectifs soient réduits et que le MUP n'a

5 pas pu accepter cela, car il s'inquiétait de la sécurité de ses membres?

6 Ceci vous est-il apparu comme logique ou pas?

7 Réponse: Ceci était en rapport avec la caserne de la police de Malisevo,

8 dans laquelle nous étions convaincus que se trouvait la raison pour

9 laquelle les habitants craignaient de retourner à Malisevo, compte tenu de

10 la présence policière très nombreuse. Et nous avons établi une présence

11 permanente de la KVM à Malisevo. Après quoi, je suis allé voir le chef de

12 la police pour lui proposer de réduire la présence policière dans la

13 ville, car nous considérions que c'était une menace. Il ne s'agissait pas

14 d'un commissariat normal: cela ressemblait davantage à un fort assiégé

15 avec des blindés devant la porte.

16 Question: Etes-vous au courant de cette question liée à une

17 caractéristique de l'UCK, à savoir qu'elle avait pour habitude de tuer les

18 siens afin d'accuser la partie adverse par la suite? Etes-vous au courant

19 du fait qu'un témoin de l'accusation, par exemple -donc ce n'est pas

20 quelqu'un que j'ai cité, mais quelqu'un qui a été cité par le Procureur-

21 dit que "là où il n'y avait pas d'attaque policière, l'UCK organisait des

22 attaques organisées par elle contre des villages en paix"? Etes-vous au

23 courant de cette pratique?

24 Réponse: Non, pas avec précision, car si tel avait été le cas, nous

25 aurions protesté publiquement. Lorsqu'on trouve un corps sans vie et

Page 3083

1 dénudé, sur le côté de la route, à 8 heures du matin, il est très

2 difficile de savoir qui a tué cet homme ou cette femme.

3 M. Milosevic (interprétation): Je parle d'un témoin protégé de

4 l'accusation qui affirme que l'UCK organisait des attaques contre des

5 villages en paix et que les organisateurs...

6 M. le Président (interprétation): Le Témoin a répondu à cette question: il

7 a dit ce qu'il avait à dire dans le cadre de sa déposition à ce sujet dans

8 la mesure de ses moyens. Veuillez passer à un autre sujet.

9 M. Milosevic (interprétation): Le sujet est le fait que Hashim/Aqim Tahci,

10 Sulejman Selimi, Rexhep Selimi et un autre homme ont organisé toute une

11 série d'assassinats d'Albanais.

12 M. le Président (interprétation): C'est ce que vous dites, c'est ce que

13 vous dites. Le Témoin a répondu.

14 M. Milosevic (interprétation): J'interroge le Témoin non pas en rapport

15 avec ce que je dis, mais avec ce que je lis dans la déclaration préalable

16 de ce témoin protégé qui, parce qu'il était Albanais, a été protégé...

17 M. le Président (interprétation): Cela n'a pas d'importance.

18 Monsieur Milosevic, le contre-interrogatoire a pour but de poser des

19 questions au témoin et pas de se quereller. Vous l'avez interrogé au sujet

20 de cette pratique dont vous alléguez l'existence; il vous a dit ce qu'il

21 avait à dire ce sujet. Il n'y a aucune raison de poursuivre sur ce sujet.

22 M. Milosevic (interprétation): Mais la question que je pose consiste à

23 savoir s'il est logique que le chef de la mission de vérification soit

24 interrogé pour déterminer s'il savait ou ne savait rien de tous ces

25 incidents causés par Selim Thaci, etc. Donc ma question a un lien direct

Page 3084

1 avec ce qui constituait le devoir de ce Témoin, devoir consistant à

2 vérifier pour ensuite rendre public. Et je m'appuie sur la déclaration

3 préalable de votre témoin, d'un témoin de l'accusation, donc pas sur des

4 observations ou des commentaires provenant de moi. Je pose cette question

5 au Témoin en rapport avec la raison de sa présence au Kosovo.

6 M. le Président (interprétation): Vous l'avez interrogé au sujet de cette

7 pratique que vous avez décrite. Y a-t-il autres choses sur quoi vous

8 souhaiteriez interroger le Témoin?

9 M. Milosevic (interprétation): Je ne comprends pas votre question. Bien

10 sûr, j'ai d'autres questions à lui poser sur toutes sortes de sujets, mais

11 il me semble toutefois que ceci est une caractéristique très importante,

12 car il est question de très nombreux crimes qui ont été commis à

13 l'encontre d'Albanais, là où il était de l'intérêt des Albanais…

14 M. le Président (interprétation): La question est la suivante: êtes-vous

15 au courant d'attaques menées par l'UCK contre des Albanais, si j'ai bien

16 compris, Monsieur le Témoin?

17 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, pas en tant que telles. Il y a eu

18 une série d'assassinats qui se sont poursuivis pendant tout le mois de

19 janvier et le début du mois de février, quatre par semaine à peu près.

20 Nous n'avons pas pu déterminer qui étaient les auteurs de ces assassinats.

21 La police serbe n'a pas pu le faire non plus, alors qu'elle était présente

22 en grand nombre et qu'elle avait des moyens de police scientifiques bien

23 meilleurs que les nôtres.

24 M. le Président (interprétation): Pour que tout soit clair, s'agissait-il

25 d'assassinats d'Albanais?

Page 3085

1 M. Drewienkiewicz (interprétation): Assassinats d'Albanais et de Serbes.

2 Les deux groupes étaient impliqués.

3 M. Milosevic (interprétation): Je comprends la nécessité de toujours

4 établir une espèce d'équilibre entre les forces terroristes et les forces

5 légales, mais je vous demande si vous êtes au courant de l'incident au

6 cours duquel ce groupe dirigé par Hashim Thaci, dont je viens de parler, a

7 passé à tabac Luza Buhala (phonétique) qui travaillait comme policier à

8 Pristina. Sa maison a été incendiée. Après quoi, Thaci lui a sculpté sur

9 la poitrine un certain nombre de symboles. C'est ce témoin de

10 l'accusation, cet Albanais protégé qui l'a dit dans sa déposition. Etiez-

11 vous au courant de cela?

12 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non.

13 M. Milosevic (interprétation): Etes-vous au courant du fait que ce Salim

14 Thaci qui sculpte des symboles sur la poitrine des Albanais a rencontré

15 -et ceci est prouvé par des photographies- Madeleine Allbright, Clark,

16 Blair et d'autres?

17 M. le Président (interprétation): Ceci est un commentaire général, le

18 Témoin ne peut pas répondre.

19 M. Milosevic (interprétation): Mais le Témoin peut-il répondre à la

20 question de savoir ce qu'il en est sur le plan de la morale: Clark,

21 Allbright, Blair et d'autres photographiés avec cet homme?

22 M. le Président (interprétation): Non, il n'appartient pas au Témoin de

23 répondre à cette question.

24 M. Milosevic (interprétation): Bien, je vais sauter un certain nombre de

25 questions puisque, visiblement, je vais encore subir la contrainte du

Page 3086

1 temps.

2 Est-il exact que lorsqu'il y avait échange de soldats, les soldats

3 restitués présentaient des signes physiques de sévices?

4 M. Drewienkiewicz (interprétation): Oui, oui, absolument; ils avaient été

5 passés à tabac.

6 Question: Est-il exact que des citoyens en révolte ont érigé des barrages

7 un peu partout au Kosovo pour protester contre le fait que l'Etat ne

8 prenait pas des mesures plus fermes contre les terroristes, alors que des

9 incidents de ce genre se produisaient.

10 Réponse: Il est exact que des barrages ont été érigés, qui avaient à mon

11 avis plutôt l'allure de barrages tenus par des paramilitaires puisque ces

12 hommes portaient des armes à canon long en public et des masques sur le

13 visage. J'étais tout à fait surpris de constater que la police n'a rien

14 fait contre cela.

15 Question: Le fait de savoir de quoi ils avaient l'air à vos yeux est une

16 chose, mais considérez-vous qu'il s'agissait de civils ou pas?

17 Réponse: Ils portaient en général des vestes de cuir, de couleur noire, et

18 ils auraient aussi bien pu être des civils que des membres des forces de

19 sécurité en permission.

20 Question: Une petite digression, si vous me la permettez. Etes-vous au

21 courant de l'ordre selon lequel toute unité présente sur le territoire du

22 Kosovo avait pour devoir de désarmer et d'arrêter immédiatement toute

23 unité paramilitaire agissant dans sa zone de responsabilité?

24 Réponse: Non, je n'étais pas au courant. Et en tout cas, ce n'est pas ce

25 qui s'est passé ce jour-là qui, je crois, était le 2 janvier.

Page 3087

1 Question: Je ne sais pas quel jour ceci a eu lieu, mais je vous demande si

2 vous êtes au courant de l'existence d'un ordre de ce type et du fait que

3 cet ordre a été respecté?

4 Réponse: Je ne connaissais pas l'existence de cet ordre, et il n'a

5 certainement pas été respecté. En tout cas, il n'a pas donné lieu à

6 actions lorsque j'ai rencontré personnellement ces paramilitaires.

7 Question: Vous insistez, par conséquent, sur le fait qu'il ne s'agissait

8 pas de citoyens mais de formations paramilitaires?

9 Réponse: Ces hommes, à mes yeux, avaient l'aspect de paramilitaires; ils

10 agissaient en groupe et donnaient des ordres aux civils qui observaient

11 les choses en tant que spectateurs.

12 Question: Est-il exact que le 15 janvier, sur le territoire de Decani, un

13 représentant de la mission de vérification a été blessé?

14 Réponse: Deux membres de la mission ont été blessés.

15 Question: Je parle bien de membres de la mission?

16 Réponse: Deux membres, oui.

17 Question: Est-il exact que ce jour-là deux véhicules du MUP précédaient un

18 des véhicules de la KVM et que l'UCK a ouvert le feu et a blessé deux

19 représentants de la communauté internationale ainsi qu'un habitant de la

20 région?

21 Réponse: Il est exact que les véhicules de la KVM étaient de façon

22 générale dans les mêmes zones que les véhicules du MUP. Dans mon souvenir,

23 les véhicules de la KVM précédaient les véhicules du MUP, et il est tout à

24 fait exact que nous avons découvert par la suite que c'était l'UCK qui

25 avait ouvert le feu.

Page 3088

1 Question: Mais le fait qu'il était manifeste que l'on tirait sur une

2 colonne constituée y compris de véhicules du MUP ne vous a pas suffi

3 d'emblée pour constater que c'est l'UCK qui était responsable?

4 Réponse: Non, je craignais fort qu'il s'agisse d'une provocation et que ce

5 soit la police serbe qui éventuellement ait ouvert le feu.

6 Question: Donc vous êtes parti du principe que c'était la police serbe qui

7 avait ouvert le feu sur une colonne où se trouvaient des membres de la

8 police serbe?

9 Réponse: Oui, parce que les deux types de véhicules étaient séparés. Ils

10 étaient séparés de 50 à 100 mètres à peu près.

11 Question: Cela signifie donc que seule une reconnaissance directe par

12 l'UCK lui-même pourrait vous faire changer d'avis? A savoir que ce n'était

13 pas la police serbe qui était coupable, mais que c'était la police serbe

14 qui était la victime innocente et qu'on a accusé injustement?

15 Réponse: Suite à cet incident, j'ai parlé avec ceux qui avaient essuyé ces

16 tirs dont Richard Ciaglinski, j'ai parlé avec le plus de monde possible

17 présent sur les lieux lors de cet incident et c'est sur cette base que je

18 me suis forgé ma propre opinion.

19 Question: Si bien qu'au bout du compte, c'est seulement après une

20 revendication directe de la part de l'UCK que tous les doutes qui pesaient

21 sur la police serbe se sont dissipés?

22 Réponse: Eh bien, je me souviens avoir parlé à toutes les personnes ayant

23 pris part à cet incident. Et lorsque j'ai passé en revue toutes les

24 informations nécessaires -quand j'ai eu terminé, il était 2 heures du

25 matin-, j'en ai conclu que je ne savais pas qui était responsable, mais

Page 3089

1 que ce dont je disposais semblait indiquer qu'il s'agissait là d'une

2 provocation du MUP.

3 Dans le même temps, nous avons demandé à ceux d'entre nous qui avaient des

4 contacts avec l'UCK, d'aller rencontrer le commandant de l'UCK et de lui

5 demander sa version des événements. Le lendemain, ceux d'entre nous qui

6 travaillaient avec l'UCK m'ont fait savoir que l'UCK avait reconnu que

7 c'étaient les siens qui étaient responsables de cet acte. Nous leur avons

8 recommandé de le reconnaître publiquement; ils ont refusé, mais ensuite,

9 nous avons, dans un communiqué de presse, déclaré que ces événements

10 étaient le fait de l'UCK et qu'il avait reconnu sa responsabilité. Voici

11 comment les événements ont évolué.

12 Question: Mais les événements tels qu'ils se sont déroulés, est-ce qu'ils

13 ne vous ont pas amené à conclure ou amené d'autres à conclure que les

14 critères que vous avez utilisés pour vous faire votre opinion, c'était que

15 vous pensiez systématiquement que c'étaient les Serbes qui étaient

16 responsables, quels que soient les événements?

17 Réponse: Non, non. C'était l'opinion que je m'étais forgée au moment où

18 les tirs ont eu lieu et puis aussi à cause de ce qui s'était passé en

19 début de journée, lorsqu'il y avait eu beaucoup de discussions entre mes

20 vérificateurs et les policiers ou la police serbe, qui ne voulaient pas

21 que nous les accompagnions. En fait, il s'agissait d'un changement de

22 garnison et nous, nous souhaitions les accompagner pour nous assurer qu'il

23 y avait là un changement de personnel, une relève et pas un apport de

24 renfort. Mais je me suis basé sur les conversations qui ont eu lieu et qui

25 m'ont été communiquées; vu les circonstances des tirs, j'en ai conclu à ce

Page 3090

1 moment-là que la conclusion la plus probable, c'était que les Serbes

2 avaient ouvert le feu sur mes vérificateurs. C'est ce que j'ai pensé à ce

3 moment-là.

4 Question: Bien. Nous comprenons bien pourquoi vous êtes arrivé à cette

5 conclusion et pourquoi, ensuite, vous avez changé d'idée.

6 Est-il vrai que le 15 janvier, vous avez envoyé votre associé, votre

7 adjoint Maisonneuve dans la municipalité de Stimlje?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Est-il est également exact que, le 15 janvier, les habitants de

10 Racak où il se serait rendu, lui ont donc dit qu'il y avait un certain

11 nombre de personnes, pas très nombreuses, qui avaient été tuées et

12 arrêtées et qu'il y avait eu plusieurs blessés?

13 Réponse: C'est ce que lui ont dit les gens qu'il avait rencontrés ce

14 vendredi soir, au moment où la nuit tombait. La situation était très

15 compliquée à ce moment-là et, pour lui, il lui a semblé que la priorité

16 était d'évacuer les blessés. C'est ce qu'il a fait. D'autre part, on avait

17 reçu des informations non confirmées selon lesquelles un certain nombre

18 d'hommes avaient été emmenés par la police. Mais ces informations

19 n'avaient pas été confirmées à ce moment-là.

20 Question: Oui, mais là, il a discuté avec les habitants de Racak et il

21 vous a transmis ces informations?

22 Réponse: Oui, mais il faut bien savoir que tous ces gens avaient passé

23 l'après-midi chez eux, dans leurs maisons, alors que les tirs étaient très

24 nourris; les gens n'avaient pas été en mesure de se rencontrer dans la rue

25 pour découvrir ce qui s'était passé. Donc toutes ces personnes relataient

Page 3091

1 les événements de leur propre point de vue, qui était très limité, par

2 force.

3 Question: Et avez-vous fait une sélection dans ces déclarations en

4 choisissant ce dont on pourrait accuser les Serbes et ce dont on ne

5 pouvait pas les accuser, parce que, d'après Maisonneuve, aucun élément ne

6 permettait d'accuser les forces serbes pour ce qui s'était produit.

7 Réponse: Je ne me rappelle pas avoir entendu Maisonneuve dire quoi que ce

8 soit dans ce sens, mais tous les rapports établis à ce moment-là ont été

9 communiqués en tant qu'éléments de preuve officiels; et ils sont

10 disponibles.

11 Question: Nous savons bien quelle est la nature de ces rapports.

12 Est-il exact que, le lendemain, à Racak, donc le 16, vous êtes allé sur

13 place avec Walker et que, sur place, vous avez trouvé des représentants de

14 l'UCK?

15 Réponse: C'est exact.

16 Question: Est-il également exact que des membres de l'UCK ont refusé de

17 vous laisser quitter Racak avant d'avoir rencontré Walker?

18 Réponse: C'est exact.

19 Question: Est-il est également exact que Walker vous a surpris lorsqu'il a

20 condamné le gouvernement de la RSFY et qu'il l'a accusé d'être responsable

21 de ce qui s'était passé à Racak?

22 Réponse: A l'époque, j'ai été surpris de l'entendre parler d'un massacre

23 en décrivant cet événement, mais quoi qu'il en soit, je suis d'accord avec

24 ce qu'il a déclaré.

25 Question: Si vous êtes d'accord, comment se fait-il que vous ayez été

Page 3092

1 surpris?

2 Réponse: Parce qu'on se trouvait en pleine conférence de presse et puis,

3 on n'avait pas discuté de la question précédemment. Et si je me souviens

4 bien, il a fait cette déclaration en réponse à une question.

5 Question: Savez-vous que Hashim Thaci, dans une interview à la BBC, le 24

6 mars 2000, a déclaré la chose suivante -je cite-: "Une unité de l'UCK

7 était opérationnelle à Racak et de nombreux membres de l'UCK ont

8 courageusement trouvé la mort en luttant contre les forces yougoslaves".

9 (Fin de citation.)?

10 Réponse: Je n'ai aucun doute quant à la présence très probable de l'UCK à

11 Racak, mais je n'ai considéré que ceci constituait une justification pour

12 raser l'endroit au moyen de tirs d'artillerie.

13 Question: Est-ce que Racak a été rasée? Est-ce que c'est ce que vous avez

14 vu lorsque vous êtes arrivé sur place, à Racak?

15 Réponse: Beaucoup de maisons avaient été effectivement très gravement

16 endommagées.

17 Question: Mais pouvez-vous véritablement utiliser le terme de "raser", si

18 c'est ce que s'est produit?

19 Réponse: Il est indéniable que Racak a fait l'objet d'attaques au moyen

20 d'armes d'artillerie de très gros calibre, de manière totalement

21 injustifiée, dans le cas d'une opération dirigée contre des insurgés.

22 Question: Oui, mais il existe des preuves montrant qu'il n'est pas exact

23 que l'on ait fait appel à des tirs d'artillerie, c'est faux?

24 Réponse: Ça, je n'en ai pas connaissance.

25 Question: Nous y reviendrons.

Page 3093

1 Savez-vous que sur Internet, on trouve une déclaration faite par Madeleine

2 Allbright à la BBC, elle dit la chose suivante: "des préparatifs étaient

3 nécessaires pour ce qui s'était passé à Racak, et que l'on a attisé le

4 brasier afin de faire pression sur les alliés européens pour qu'ils

5 acceptent l'intervention militaire"?

6 Réponse: Ça, il faudrait lui poser la question à elle.

7 Question: Moi, ce que je vous demande, c'est si vous êtes au fait de cette

8 déclaration ou d'une déclaration allant dans ce sens?

9 Réponse: Non, pas dans ces termes, et ayant entendu cette déclaration, je

10 ne suis pas forcement d'accord avec son contenu.

11 M. Milosevic (interprétation): Cependant cet aveu tardif de la part d'une

12 ministre américaine nous rappelle une déclaration faite par...

13 M. le Président (interprétation): Là, il ne s'agit pas d'une question, il

14 s'agit d'un commentaire de votre part.

15 M. Milosevic (interprétation): Dans ces conditions, permettez-moi de poser

16 une véritable question. Avez-vous connaissance d'une déclaration faite par

17 le vice-président de l'assemblée parlementaire de l'OSCE, l'Allemand

18 Wimer, qui est un des rares dignitaires européens à ne pas penser que ce

19 massacre destiné à la télévision était...

20 M. le Président (interprétation): J'ai fort l'impression que vous êtes en

21 train encore une fois de faire un commentaire. Quelle est votre question?

22 M. Milosevic (interprétation): Ma question est la suivante: êtes-vous au

23 courant d'une décision faite par le vice-président de l'assemblée

24 parlementaire de l'OSCE qui dit la chose suivante -je cite-: "Nous

25 rejetons les manipulations faites au moyen des images de la télévision qui

Page 3094

1 ont pour objectif de provoquer une intervention de l'OTAN au Kosovo. Et

2 quand on voit certaines images ou certaines photographies, on a

3 l'impression qu'il s'agit d'ordres envoyés à nos soldats"?

4 M. le Président (interprétation): On vous demande de ralentir quand vous

5 donnez lecture de certains documents.

6 Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes au courant de cette déclaration?

7 M. Drewienkiewicz (interprétation): Moi, je ne connais pas ce diplomate.

8 Je sais en tout cas qu'il n'était pas avec moi sur cette colline. Je sais

9 ce que j'ai vu, et il ne s'agissait pas de manipulations par les médias,

10 il s'agissait d'hommes qui étaient morts et qui avaient été abattus de

11 sang-froid, c'est mon opinion.

12 M. Milosevic (interprétation): Et êtes-vous au courant de l'affirmation

13 selon laquelle ces gens étaient transportés à cet endroit, parce que

14 lorsque vous êtes arrivés, Walker et vous, dans le village, il était déjà

15 sous le contrôle de l'UCK? Vous êtes arrivés 16 heures après leur entrée

16 dans le village, et ils ont donc bénéficié de tout ce laps de temps pour

17 pratiquer cette mise en scène?

18 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je sais qu'il y a eu un laps de temps

19 pendant lequel nous n'étions pas là, c'est-à-dire pendant la nuit

20 essentiellement. Je ne crois pas que l'UCK ait procédé à une manipulation

21 quelconque sur les lieux afin que vos forces soient accusées de ces actes.

22 Moi, je crois que ce que nous avons vu, c'est ce qui c'est effectivement

23 produit.

24 Question: Savez-vous qu'à Racak les membres de ce que l'on appelait la

25 "Adim Zelek et Soli", donc la 121e Brigade, ils étaient présents? C'était

Page 3095

1 dans la maison de Mehmeti que se trouvait le commandement d'une des zones

2 opérationnelles locales, le saviez-vous? Saviez vous que cela se trouvait

3 exactement à Racak?

4 Réponse: Non.

5 Question: Et saviez-vous que jusqu'au 15 janvier les membres de l'UCK

6 avaient tué Sinica Mihajlovic, Nazmija Aluri, Svetislav Pesic, Sasa

7 Jankovic, Ranko Dordjevic ainsi que d'autres civils, Miftar Veseli et

8 Enver Gashi. Les premiers que j'ai cités étant des policiers. Et

9 précédemment, en novembre, saviez-vous qu'ils avaient mis le feu à la

10 maison de Xhemail Batiqi à Racak? Et qu'ultérieurement, juste avant

11 l'intervention, ils avaient tué un policier Svetislav Pesic lors d'une

12 embuscade plusieurs jours avant l'intervention des terroristes à Racak?

13 Etes-vous au courant de ces prétextes, de tout ce qui a précédé, de tout

14 ce qui est arrivé avant?

15 Réponse: Je sais qu'il y a eu effectivement des actes de violence

16 précédemment, et je sais que c'était le devoir de vos forces de police

17 d'enquêter sur ces crimes, d'arrêter les personnes concernées, de les

18 traduire en justice et de les envoyer en prison, si ces personnes étaient

19 reconnues coupables. Or ce n'est pas ce qui s'est produit.

20 Question: Mais vous savez pourquoi il n'a pas été possible de mener une

21 enquête à ce moment-là?

22 Réponse: Je n'ai eu connaissance d'aucune tentative de mettre en marche

23 une enquête policière digne de ce nom avant le 15 janvier.

24 Question: Et savez-vous que le juge d'instruction Danica Marinkovic, juge

25 d'instruction à Pristina, a essayé plusieurs fois de se rendre à Racak,

Page 3096

1 mais elle n'a pas été en mesure de le faire à cause des combats; elle a dû

2 attendre trois jours avant de procéder à cette enquête et qu'il y avait

3 encore des tirs à ce moment-là?

4 Réponse: Je l'ai rencontrée le dimanche, je lui ai offert de l'escorter

5 moi-même jusqu'au village, mais elle a refusé mon offre.

6 Question: Saviez-vous que la totalité du village était encerclée par des

7 systèmes de tranchées, de bunkers, tout autour du village et que, vers

8 Jeserske Planine, vers la montagne qui se trouvait là, savez-vous qu'à cet

9 endroit, il y avait une autre ligne de tranchées?

10 Réponse: Je sais qu'il existait une tranchée assez longue, qui faisait

11 environ 15 à 18 mètres ou un peu plus. C'est ce que j'ai dû traverser

12 quand je suis monté en haut de la colline, vers le ravin. Mais c'est la

13 seule tranchée que j'ai vue à cet endroit.

14 Question: Mais est-ce que vous avez parcouru la totalité du village et les

15 environs pour constater le nombre de bunkers ou de tranchées qu'on y

16 trouvait? Ou bien est-ce que vous avez simplement pris note de la tranchée

17 que vous avez dû franchir?

18 Réponse: Je ne suis pas allé à la recherche d'autres tranchées.

19 Question: Il y a quelques instants, nous avons établi -pas très

20 clairement, mais nous avons établi cependant- que vous aviez été informé

21 de cette action de la police à l'avance, à savoir que la mission de

22 vérification avait été informée de cette action de la police à l'avance et

23 que les vôtres étaient présents le 15 janvier à Racak?

24 Réponse: Non. Non, je ne pense pas que nous ayons été véritablement

25 informés. Quand les policiers ont été tués, une semaine avant, le général

Page 3097

1 Loncar m'a dit: "Nous allons prendre des mesures suite à ce fait", mais il

2 était très rare qu'on nous annonce une opération à tel moment ou à tel

3 endroit, avec tel objectif. C'est ce que nous aurions souhaité recevoir,

4 ce type d'informations, afin de pouvoir être sur place et de nous assurer

5 qu'aucune exaction n'avait lieu. Mais il était très rare que cela se

6 produise et, en tout cas, cela n'a pas été le cas à Racak.

7 Question: Oui mais, il y a quelques instants, vous avez l'avez confirmé en

8 donnant un nom, un prénom, en disant que Maisonneuve se trouvait à Racak,

9 le 15 janvier.

10 Réponse: Oui, il y était, je l'ai envoyé sur place vers 2 heures 30 de

11 l'après-midi, depuis Pec.

12 Question: Pourquoi?

13 Réponse: Parce que nous avions reçu des informations, selon lesquelles il

14 y avait des tirs dirigés vers le village et vers d'autres villages, des

15 tirs ouverts par des armes de gros calibre, les armes de vos forces. En

16 conséquence, il s'est rendu sur place. C'était d'ailleurs un endroit qui

17 ne faisait pas vraiment partie de sa zone opérationnelle, mais j'étais

18 très préoccupé, je vous voulais que quelqu'un d'expérience se rende sur

19 place.

20 Question: Oui, mais il était sans doute accompagné d'autres vérificateurs

21 lorsqu'il s'est rendu à Racak, le 15?

22 Réponse: Oui, et ils lui ont fait rapport de la situation et ce rapport

23 fait partie du rapport qui a été communiqué à la Chambre.

24 Question: Mais justement, c'est ce que je veux dire: c'est que les

25 vérificateurs qui étaient là le 15 janvier n'ont rien vu de ce que vous et

Page 3098

1 Walker avez vu quand, plus tard, après un intervalle de temps, vous vous

2 êtes rendus sur place et vous avez vu les corps qui avaient été amenés

3 dans cette ravine par l'UCK?

4 Réponse: Maisonneuve est arrivé à la nuit tombante, il est resté dans le

5 village. Personne ne lui a dit, ne lui a suggéré d'aller voir en haut de

6 la colline; il n'avait aucune idée de ce qui s'était passé. Il savait

7 qu'il y avait eu des échanges de tirs très nourris pendant la journée et

8 je ne m'attendais pas à ce qu'il aille se promener aux alentours du

9 village pour découvrir ce qui s'était produit à environ 300 mètres du

10 village. Quelle direction aurait-il pu prendre?

11 M. Milosevic (interprétation): Mais vous dites vous-même qu'il y a eu des

12 tirs extrêmement nourris à Racak et vous nous dites que les forces de

13 sécurité étaient venues, s'étaient rendues coupables d'un massacre contre

14 la population civile. Alors, qu'en est-il véritablement: est-ce qu'il

15 s'agit d'échanges de tirs ou s'agit-il d'un massacre de civils?

16 M. le Président (interprétation): Je pense que nous avons dit tout ce

17 qu'il y avait à dire ce sujet. Le Témoin ne peut pas nous en dire plus et

18 je ne pense pas que son opinion nous serait d'une quelconque utilité. Il y

19 aura d'autres témoins qui déposeront à ce sujet.

20 M. Milosevic (interprétation): Savez-vous qu'en plus de vos propres

21 enquêteurs qui sont allés à Racak le 15, une équipe de télévision de

22 l'Associated Press était également là?

23 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, pas vraiment. En tout cas, ils ne

24 se sont pas présentés à nous.

25 Question: Oui, mais, dans les médias, ils ont transmis ce qu'ils avaient

Page 3099

1 vu?

2 Réponse: Eh bien, dans ces conditions, cela doit être disponible.

3 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, oui, évidemment. Saviez-vous qu'il

4 n'y avait pas de civils dans le village et que, déjà au cours de l'été,

5 les villageois avaient quitté Racak en raison des opérations en cours dans

6 la zone, à quelques exceptions près peut-être?

7 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je crois que l'un des rapports qui a

8 été communiqué à la Chambre, la semaine dernière, reprend des informations

9 sur le nombre d'habitants de Racak. On a stipulé que certains d'entre eux

10 avaient besoin de nourriture, de vivres. Donc nous savions effectivement

11 que certains habitants de Racak étaient partis, mais il y en avait encore

12 sur place. On était en hiver et des témoins oculaires ont déclaré qu'ils

13 avaient vu de la fumée sortir uniquement d'une seule cheminée, la cheminée

14 de la maison où se trouvait le quartier général de l'UCK. C'est là qu'on a

15 trouvé des équipements.

16 M. le Président (interprétation): Le Témoin ne saurait répondre à cette

17 question.

18 M. Milosevic (interprétation): Fort bien.

19 Des témoins oculaires déclarent qu'il y avait des tirs dans tous les sens

20 et que se sont arrêtés vers 16 heures. Est-ce que ça correspond avec vos

21 propres conclusions?

22 Réponse: Non, mes conclusions c'est que les tirs sur Racak se sont arrêtés

23 avant, et les habitants de Racak ont été très surpris de voir arriver le

24 MUP dans le village.

25 M. Milosevic (interprétation): J'ai ici certains témoins de Racak -ce ne

Page 3100

1 sont pas mes témoins, ce sont des témoins de cette fausse accusation. Par

2 exemple, Nesret Shabani nous dit que, le 15 janvier, à Racak il y avait

3 une véritable guerre qui faisait rage.

4 M. le Président (interprétation): Vous pourrez en parler avec d'autres

5 témoins. Le Témoin que nous avons aujourd'hui dans le prétoire est arrivé

6 le lendemain. Vous pouvez lui demander, lui poser des questions au sujet

7 de ce qu'il sait, mais je ne pense pas qu'on ira très loin si vous lui

8 posez des questions au sujet d'éléments qu'il ne connaît pas et où il ne

9 peut pas répondre.

10 M. Milosevic (interprétation): Mais nous n'avons pas ici un Témoin,

11 Monsieur May, qui parle uniquement de ce qu'il a vu. C'est le responsable

12 exécutif de la mission de vérification et on peut partir du principe qu'il

13 savait où qu'il avait des raisons de savoir les faits qui ont été utilisés

14 d'une certaine manière dans la guerre contre la Yougoslavie. J'ai donc

15 raison de lui poser des questions au sujet de ce qu'ont dit un certain

16 nombre de témoins parce qu'il était responsable de rassembler ces faits

17 auprès de ces témoins; et la question que je souhaiterais lui poser, c'est

18 pourquoi il ne l'a pas fait puisqu'il était chargé de la mission de

19 vérification.

20 M. le Président (interprétation): Effectivement, ça c'est une question que

21 vous pouvez lui poser.

22 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, c'est pour ça que je la lui pose.

23 M. le Président (interprétation): Laissez-le répondre.

24 M. Drewienkiewicz (interprétation): Nous avons établi un rapport, au soir

25 du 15, qui regroupait toutes les informations dont nous disposions et qui

Page 3101

1 émanaient d'un certain nombre de sources différentes. Il y avait les

2 informations données par les témoins oculaires qui avaient été recueillies

3 par mes vérificateurs, et puis mes vérificateurs avaient également

4 directement posé des questions aux habitants du village. Mais, comme vous

5 avez pu le constater, les faits ne sont pas apparus dans toute leur clarté

6 tout de suite, et c'est plus tard que nous avons obtenu une idée plus

7 claire de la situation. C'est souvent le cas d'ailleurs.

8 Mais au départ, tout était assez confus: il faisait nuit et tous les

9 habitants du village qui étaient encore là, étaient terrifiés et ils

10 étaient perdus; il y avait des blessés et la situation manquait de clarté.

11 Nous avons fait face à la situation telle que nous l'avons trouvée. Nous

12 avons établi le rapport au mieux. Pendant la nuit, nous avons obtenu des

13 informations, des rapports supplémentaires, nous sommes retournés sur

14 place et, à ce moment-là, nous avons vu ce que nous n'avions pas vu

15 l'après-midi précédente. Personne n'a essayé de falsifier les

16 informations. Et tous ces rapports sont ceux qui ont été établis au moment

17 des faits.

18 M. Milosevic (interprétation): Vu l'information sélective des

19 informations, aussi bien dans ce cas que dans d'autres...

20 M. le Président (interprétation): Mais là, c'est un commentaire que vous

21 souhaitez faire? Si?

22 M. Milosevic (interprétation): Non, ce n'est pas un commentaire. Je vous

23 fais une demande.

24 Vu l'autorité dont vous disposez, je pense que vous devriez stipuler que

25 les services américains, les services britanniques, les services français

Page 3102

1 et tous les autres services communiquent les informations dont ils

2 disposent au sujet de cet incident et au sujet d'autres incidents, et qui

3 ont été manipulés afin d'accuser les Serbes des crimes qui ont été commis

4 par la partie adverse. Et si vous n'avez pas l'autorité de rendre une

5 telle ordonnance, à ce moment-là, vous n'êtes pas apte à mener ces débats.

6 M. le Président (interprétation): Ceci n'a rien à voir avec la question de

7 la communication des pièces. Si vous avez une requête à faire, nous

8 l'étudierons avec le soin qui convient. Mais cela n'a rien à voir avec le

9 témoin qui est ici aujourd'hui.

10 Nous ajournons pour 15 minutes.

11 (L'audience, suspendue à 12 heures 16, est reprise à 12 heures 34.)

12 M. le Président (interprétation): Vous pouvez poursuivre.

13 M. Milosevic (interprétation): Une petite digression: j'ai procédé à

14 quelques vérifications pendant la pause à propos de crimes perpétrés au

15 café "Panda" au cours duquel quelques hommes ont été tués. Vous avez

16 déclaré que vous ne pouviez pas établir qui avaient été les auteurs de ce

17 crime. A la page 7 de la chronologie d'événements, au paragraphe 44, vous

18 parlez de ce crime perpétré dans le café "Panda", et vous dites -je cite-:

19 "Attaque de l'UCK contre le café "Panda" de Pec". (Fin de citation.)

20 Alors, est-ce que c'est exact ou est-ce que ce n'est pas exact?

21 M. Drewienkiewicz (interprétation): Il faudrait que je puisse me

22 rafraîchir un peu la mémoire.

23 M. le Président (interprétation): Ce document se trouve sous quel

24 intercalaire, puisque nous faisons référence à la chronologie d'événements

25 qui nous a été remise? De quoi parlons-nous exactement?

Page 3103

1 M. Milosevic (interprétation): C'est ce document qu'on appelle

2 "chronologie". Enfin, vous pourriez vérifier cela plus tard, moi je

3 voudrais essayer de gagner un peu de temps pour le moment. Vous avez

4 déclaré -je cite-: "Attaque de l'UCK sur le café "Panda" de Pec". (Fin de

5 citation.) C'est sous le paragraphe 44 dans ce que vous avez appelé

6 "chronologie".

7 Maintenant, nous allons revenir aux événements de Racak. Hier, alors que

8 vous parliez d'un autre événement au cours duquel des membres de l'UCK ont

9 été tués, vous avez indiqué que vous aviez remarqué une grande flaque de

10 sang. Comment se fait-il que vous n'ayez pas remarqué de sang à Racak, à

11 l'endroit où vous dites qu'il y a eu une exécution? Comment se fait-il que

12 vous n'ayez pas remarqué de flaques de sang à Racak, alors qu'à Racak il y

13 avait beaucoup plus de personnes concernées que ce n'est le cas dans

14 l'incident que vous avez évoqué hier?

15 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je crois que vous parlez de la

16 description que j'ai faite du massacre de Rogovo, au cours duquel un

17 certain nombre de personnes tuées ont été découvertes à bord d'une

18 camionnette. Je décrivais de quelle façon le sang s'écoulait de la

19 camionnette sur le sol de la cour de ferme où elle se trouvait, et j'ai

20 parlé de la boue et du sang qui se mélangeaient et que l'on pouvait voir

21 sur le sol.

22 A Racak, le sol n'était pas si boueux. C'était un sol plus sableux, si je

23 ne m'abuse, sablonneux, et il n'était donc pas possible que le sang

24 s'écoule et constitue des flaques, mais il y avait très clairement du sang

25 sur chaque corps que j'ai pu voir à Racak. Cela étant dit, ces corps

Page 3104

1 n'étaient pas entassés à un même endroit, ils n'étaient pas entassés sur

2 une surface non-poreuse comme c'était le cas à Rogovo où effectivement le

3 sang s'écoulait de la camionnette sur le sol. Je crois que c'est sur cela

4 que vous vouliez que je m'exprime?

5 Question: Oui, d'ailleurs, vous n'avez pas du tout évoqué cet élément

6 d'information dans le cadre de cet incident. S'il y a eu un incident où se

7 trouvaient les douilles, si c'était effectivement un massacre, une

8 exécution, où se trouvaient les douilles?

9 Réponse: J'ai essayé de trouver ces douilles; j'ai regardé dans un

10 périmètre de cinq mètres autour de la tranchée, mais je n'ai pas trouvé de

11 douilles. Je n'ai pas essayé d'aller plus loin parce qu'il y avait des

12 buissons, des ronces aux alentours, et il m'aurait fallu beaucoup de temps

13 pour pouvoir faire une inspection des lieux, une inspection complète. Il

14 aurait fallu que j'aille jusqu'à 30 ou 40 mètres de là, qui est à la

15 distance depuis laquelle on a pu tirer sur ces personnes pour les abattre.

16 Question: Revenons sur les déclarations qui ont été faites à propos de

17 Radak. Un des témoins de l'accusation a déclaré qu'il y avait une

18 véritable guerre à Racak, ce jour-là, et que l'UCK se trouvait dans les

19 lieux ce jour-là. Il s'agit de M. Shabani, un témoin de Racak. M. Nesret

20 Shabani. Et puis il y a également un autre témoin de l'accusation, Drita

21 Emini; cet autre témoin déclare que les villageois locaux avaient aidé

22 l'UCK à creuser des tranchées deux ou trois mois avant que le massacre

23 soit perpétré.

24 M. le Président (interprétation): Le Témoin a déjà évoqué les éléments

25 d'informations dont il dispose à propos de cet incident. Tout ce que vous

Page 3105

1 dites pour l'instant est de l'ordre du commentaire, il ne constitue en

2 rien une question. Pour ce qui est de l'intercalaire qui permet de

3 retrouver la chronologie, je voudrais préciser qu'il s'agit de

4 l'intercalaire n°63, et je voudrais par ailleurs préciser que c'est au

5 paragraphe 44 que l'on trouve les déclarations que l'accusé a soumis à

6 l'attention du Témoin. Nous poursuivons.

7 M. Milosevic (interprétation): Cette femme, ce témoin dont je parlais à

8 l'instant, a déclaré que des tranchées avaient été creusées plus d'un mois

9 avant ce massacre que vous alléguez. Et pourtant, hier, vous avez déclaré

10 qu'il s'agissait de tranchées qui avaient été récemment creusées, et ceci

11 vous ne l'avez pas repris.

12 M. le Président (interprétation): C'est un point totalement nouveau. La

13 question n'est pas de savoir quand elles ont été creusées, nous ne savons

14 même pas de quoi il s'agit.

15 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, je crois que ces

16 tranchées avaient récemment été creusées; il y aura d'autres éléments de

17 preuve qui auront un rapport avec les tranchées et qui nous permettrons de

18 revenir sur cette question lorsque nous nous pencherons sur Racak. Il y

19 aura tout un classeur de documents portant sur ce lieu.

20 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je pense que les tranchées que j'ai

21 vues avaient été récemment creusées parce qu'il n'y avait pas d'herbe qui

22 poussait dans la tranchée, et ça aurait été le cas si effectivement ces

23 tranchées avaient été creusées longtemps auparavant.

24 M. Milosevic (interprétation): Très bien.

25 Je vous ai demandé comment il se faisait que vous ne saviez pas que des

Page 3106

1 témoins avaient déclaré que trois mois auparavant ils avaient creusé des

2 tranchées, qu'ils avaient fini de creuser ces tranchées au moins un mois

3 auparavant, et je me demande d'ailleurs comment il aurait pu y avoir de

4 l'herbe dans les tranchées vu que c'était le 15 février. L'herbe ne pousse

5 pas pendant l'hiver, elle ne pousse pas entre le 15 décembre et le 15

6 février.

7 M. le Président (interprétation): Où voulez-vous en venir? Où voulez-vous

8 en venir et quel est l'intérêt de cela pour le Témoin?

9 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais dire qu'il y a une différence

10 très importante entre ce que le Témoin affirme jusqu'à présent et ce

11 qu'ont pu dire les habitants de Racak, les villageois.

12 M. le Président (interprétation): Si cela est vrai, vous pourrez le

13 commenter en temps utile.

14 M. Milosevic (interprétation): Il y a également Xhemail Beqiri, témoin de

15 Racak, qui confirme que, le 15 janvier, à Racak, il y avait des

16 vérificateurs de l'OSCE. Je parle également ici d'un témoin de

17 l'accusation.

18 M. le Président (interprétation): Alors, lorsque ce témoin viendra devant

19 la Chambre, vous lui poserez la question. Nous allons également entendre

20 des personnes de l'OSCE, n'est-ce pas? Nous allons entendre ces témoins

21 nous dire ce qu'ils ont pu observer. Monsieur Maisonneuve, n'est-ce pas,

22 va venir?

23 M. Nice (interprétation): Oui.

24 M. le Président (interprétation): Dans ce cas, Monsieur Milosevic, vous

25 pourrez lui poser la question.

Page 3107

1 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous avez connaissance de ces

2 déclarations faites par des personnes de Racak? Non, nous vous n'êtes pas

3 au courant de cela?

4 (Signe négatif de la tête du témoin.)

5 Est-ce que vous savez qu'un témoin a déclaré que des vérificateurs de

6 l'OSCE se trouvaient près de la rivière de Berisha, à Racak?

7 M. Drewienkiewicz (interprétation): Les rapports qui ont été soumis à

8 l'intention de la Chambre établissent les faits tels que nous avons pu les

9 établir, à Pristina, cette nuit-là. Comme je l'ai indiqué, au fil du

10 recueil des informations, nous avons modifié notre perception de ce qui

11 avait pu se passer.

12 Question: Des témoins oculaires déclarent que, vers 16 heures, les tirs

13 s'étaient interrompus. Des policiers se trouvaient toujours dans les

14 tranchées dont ils s'étaient assurés le contrôle. Peu de temps après, les

15 observateurs de l'OSCE sont arrivés accompagnés d'équipes de télévision.

16 Est-ce que vous avez connaissance de tout cela?

17 Réponse: Je n'ai pas connaissance de tout cela, mais je dois faire une

18 observation. Cela se produisait au cours de la même après-midi que celle

19 où nous avions dû récupérer deux victimes. Ce que nous avons fait, c'est

20 envoyer un message à toutes les stations, déclarant qu'il fallait surtout

21 rester en retrait. Personne n'essayait de se précipiter sur les lieux pour

22 s'y trouver avant la police. C'est un moment où nous avons décidé d'être

23 un petit peu en retrait pour des raisons, je crois, totalement

24 compréhensibles et totalement justifiées.

25 Question: Des témoins déclarent qu'il y avait des combats qui se

Page 3108

1 déroulaient sur une ligne de front longue de deux ou trois kilomètres, et

2 des témoins déclarent également que des terroristes ont été tués en de

3 nombreux endroits. Est-ce que vous avez reçu, de vos représentants à

4 Racak, des rapports sur ces faits-là?

5 Réponse: Je me rappelle d'un rapport indiquant qu'il y avait des tirs

6 échangés dans des villages qui se trouvaient sur cette ligne de front de

7 deux ou trois kilomètres. Je n'avais pas connaissance du fait que des

8 membres de l'UCK avaient été tués; si cela avait effectivement été le cas,

9 cela aurait été mentionné dans les rapports.

10 Question: D'après le rapport de l'organisation Human Rights Watch, d'après

11 le rapport des journalistes qui trouvaient avec Walker, le 16 janvier, il

12 apparaît que nombre des corps avaient été mutilés, leurs ongles avaient

13 été arrachés, etc. Est-ce que vous êtes au courant de ce que disaient ces

14 rapports? Est-ce que vous saviez, par ailleurs, que ce que disaient ces

15 rapports était faux?

16 Réponse: Je sais que l'un des corps avait été décapité. Jamais nous

17 n'avons su qui avait perpétré cet acte et nous n'avons jamais pu établir

18 un lien entre cet incident et les forces de sécurité serbes. Jamais, nous

19 n'avons attribué cet incident aux forces des autorités serbes.

20 Question: Par la suite, il a été établi, par des experts médico-légaux,

21 que toutes les personnes avaient été tuées par des armes à feu et que les

22 blessures qui avaient été infligées aux corps par ailleurs étaient le fait

23 d'animaux. Est-ce que vous avez eu connaissance de cela?

24 Réponse: J'ai été informé de cela, mais je pense que la personne qui a été

25 décapitée, a été décapitée à l'aide d'une hache.

Page 3109

1 M. Milosevic (interprétation): Cela n'a pas été démontré par l'une

2 quelconque des conclusions tirées par les experts en médecine légale. Ce

3 que dit le groupe Human Rights Watch, le savez-vous? Ce groupe dit que

4 l'armée et la police avaient attaqué les civils sans distinction, avaient

5 brûlé les maisons et indique que des ordres avaient été donnés qui

6 visaient à tuer tous les habitants de plus de 15 ans.

7 Est-ce que vous pensez que ces déclarations ont été faites dans un but

8 particulier, pour qu'il y ait une attention particulière qui soit donnée à

9 ces crimes?

10 M. le Président (interprétation): Il ne convient pas que le Témoin réponde

11 à cette question.

12 M. Milosevic (interprétation): Christophe Châteleau, un journaliste du

13 "Monde", dans le récit qu'il fait de la scène, indique qu'après le départ

14 de l'agence Associated Press et après le départ de la police, les membres

15 de la mission de l'OSCE sont arrivés à bord de trois véhicules; ils ont

16 d'abord trouvé un premier cadavre, puis quelques personnes blessées.

17 Est-ce que vous avez connaissance de ce qui a été dit par ce journaliste?

18 Il s'agit de vos observateurs?

19 M. Drewienkiewicz (interprétation): On a l'impression que l'on parle ici

20 des premiers observateurs qui sont arrivés sur place et, effectivement,

21 cela correspond à ce que nous avons pu établir dans le cadre de nos

22 rapports qui ont été rédigés le soir, à Pristina.

23 Question: Certes, mais est-ce que vous ne voyez pas l'incohérence qui

24 existe entre ce qui a été dit par votre mission -à savoir qu'il y avait ce

25 conflit entre l'UCK et la police- et ce qui a été dit à propos du fait que

Page 3110

1 le village a été pris vers 16 heures?

2 Que dites-vous de ce laps de temps qui s'écoule entre 16 heures et le

3 moment où vous arrivez sur place avec Walker? Est-ce qu'il n'y a rien qui

4 vous frappe?

5 Réponse: Nous sommes arrivés sur place dès que nous avions pris conscience

6 du fait que quelque chose de très grave s'était produit. Cela, c'était

7 samedi matin. Et j'ai clairement déclaré, dans le cadre de ma déposition,

8 que dans le cadre de ma déposition que nous n'étions pas montés sur la

9 colline le vendredi soir.

10 Question: Des déclarations ont été faites auprès de la presse canadienne,

11 déclarations selon lesquelles à 16 heures, à Racak, la police était sur

12 place que l'opération avait été menée dans des conditions difficiles mais

13 qu'elle avait été efficace et tout à fait nette.

14 Réponse: Ce qui a été dit, a été dit par quelqu'un qui avait sa propre

15 opinion de la chose.

16 M. Milosevic (interprétation): Par ailleurs, un caméraman appartenant à

17 l'agence Associated Press a fait une déclaration à la presse, déclarant

18 qu'il s'agissait d'une opération absolument limpide. Il dispose de

19 séquences filmées qui ont été diffusées...

20 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, si vous disposez de

21 ces séquences filmées, vous pouvez demander à ce que nous les regardions,

22 mais il ne sert à rien de continuer à poser ainsi des questions à ce

23 Témoin.

24 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous savez que le "Monde", le

25 quotidien français, a déclaré qu'il n'y avait presque pas de population

Page 3111

1 civile à Racak, parce que la population civile avait fui l'année

2 précédente et, à quelques exceptions près, que la population n'était pas

3 revenue?

4 M. le Président (interprétation): Le Témoin s'est déjà prononcé sur ce

5 qu'il savait à propos de cela. Peu importe ce que dit le "Monde", le

6 Témoin vient déposer ici en son nom propre.

7 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Moi je parle d'un journaliste

8 qui se trouvait sur les lieux et qui était donc un témoin oculaire, et il

9 a dit lui-même qu'il n'avait pas réussi à percer le mystère de ce qui

10 s'était produit, il n'a pas réussi à établir ce qui s'était passé avec

11 Walker, avec ce massacre dont on dit qu'il a été perpétré. Est-ce que vous

12 savez que des témoins oculaires ont déclaré que les vrais combats

13 s'étaient déroulés dans la forêt parce que les membres de l'UCK s'étaient

14 retirés dans la forêt qui entoure le village?

15 M. Drewienkiewicz (interprétation): Non, je n'avais pas connaissance de

16 cela, mais je ne suis pas bien certain que cela soit pertinent.

17 M. Milosevic (interprétation): Mais certaines questions sont tout à fait

18 pertinentes. Je parle des questions qui ont été posées publiquement par

19 les journalistes dans les médias. Une de ces questions est celle-ci, elle

20 est intéressante. Comment est-ce que les policiers ont pu rassembler

21 autant d'hommes et ont pu les emmener paisiblement vers un lieu

22 d'exécution alors qu'ils étaient la cible de tirs, puisqu'on leur tirait

23 dessus depuis les collines environnantes, et puisque les tirs se sont

24 poursuivis le lendemain et le surlendemain?

25 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le Témoin n'a pas à

Page 3112

1 se prononcer sur tout cela. Le Témoin a dit qu'il s'était rendu sur place,

2 c'est ça qui est au cœur de sa déposition. Il a déclaré également qu'il

3 avait des cadavres, vous n'avez pas remis en question ce qu'il a pu dire à

4 ce titre.

5 M. Milosevic (interprétation): Moi, je conteste la teneur de la

6 déposition, c'est ce que je fais précisément en ce moment. Je lui demande

7 comment telle ou telle chose était possible, et je lui demande s'il est

8 logique que quelqu'un puisse rassembler des citoyens alors qu'il est

9 soumis à une pluie de tirs.

10 M. le Président (interprétation): Je vous demande de passer à autre chose.

11 M. Milosevic (interprétation): Et qu'en est-il de cette tranchée qui se

12 trouvait à proximité du village, que les villageois n'ont pas remarquée?

13 Les observateurs de l'OSCE sont entrés dans le village, ils se sont

14 entretenus avec les villageois, est-ce qu'ils ont essayé de trouver les

15 blessés?

16 M. Drewienkiewicz (interprétation): Ceci s'est passé à 200 ou 300 mètres

17 de la maison la plus proche, la nuit tombait et personne n'a dit quoi que

18 ce soit qui les laisse supposer qu'il fallait se rendre là-haut pour voir

19 ce que l'on pourrait y trouver. Nous n'avions pas pour habitude de nous

20 écarter des chemins pour nous aventurer dans le noir, ce n'était pas

21 vraiment notre habitude à ce stade de notre travail. Comme je l'ai dit

22 tout à l'heure, nous venions d'aller récupérer deux de nos hommes qui

23 avaient été blessés, nous n'allions pas partir hors des chemins à la nuit

24 tombée pour trouver quelque chose, alors que personne ne nous avait dit

25 que nous pouvions trouver quoi que ce soit, cela aurait été complètement

Page 3113

1 absurde d'agir de la sorte.

2 Question: A partir de ce moment-là, rien n'a été trouvé, vous n'avez

3 trouvé quelque chose que le lendemain. Mais est-ce que l'on peut contester

4 qu'entre le moment où la police s'est retirée et le moment où vous êtes

5 arrivé, 15 ou 16 heures se sont écoulées? 15 ou 16 heures de temps pendant

6 dans lequel le village était sous le contrôle de l'UCK, alors que vous

7 vous étiez avec Walker?

8 Réponse: Effectivement, il y a eu un laps de temps qui s'est écoulé. Moi,

9 j'ai déclaré ce que j'avais pu voir, j'ai dit quand j'avais eu pu faire

10 ces observations, et je vous ai dit ce qu'avait été mon impression de ce

11 qui s'était passé.

12 M. Milosevic (interprétation): Le "Figaro", trois jours plus tard, a

13 publié un article; article dans le cadre duquel le journaliste se demande

14 pourquoi Walker se dépêche d'accuser les forces de sécurité…

15 M. le Président (interprétation): Peu importe ce que dit le "Figaro" ou

16 qui que ce soit d'autre, le Témoin ne peut pas se prononcer sur ce genre

17 de déclarations. Vous avez entendu le Témoin s'exprimer sur ce qu'il avait

18 pu voir, sur ce qu'il avait pu observer, sur ce qu'il avait pu conclure de

19 ce qu'il avait observé.

20 Vous pouvez poser des questions sur cela, mais demander au Témoin de se

21 prononcer sur des déclarations de journalistes, cela ne saurait continuer.

22 Si vous voulez citer ces journalistes à comparaître, faites-le, mais pour

23 le moment nous perdons du temps.

24 M. Nice (interprétation): Est-ce que je peux intervenir très rapidement?

25 Maître Wladimiroff me dit que les amis de la Cour ont des questions qu'ils

Page 3114

1 souhaiteraient poser. Mais je rappelle qu'il y a des questions de

2 procédure très importantes que nous devons aborder pour préparer la venue

3 du témoin qui viendra demain. Monsieur Ryneveld voudrait soulever ces

4 questions avant la fin de la session d'aujourd'hui. Il est important

5 d'avoir tout cela à l'esprit parce qu'il faut notamment que l'accusé

6 dispose de certains éléments d'information pour la comparution de demain.

7 M. le Président (interprétation): Oui.

8 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Me Wladimiroff,

9 l'amicus curiae Me Wladimiroff procédera au contre-interrogatoire si le

10 temps le permet. Mais pour ce qui me concerne, il y a une question et une

11 seule que j'aimerais poser, je crois qu'il est justifié que je la pose.

12 Je veux parler de l'Article 90, qui autorise si j'ai bien compris, la

13 Chambre à faire ce qui relève de sa compétence et de son autorité pour

14 éviter tout gaspillage de temps. Cependant, je considère que la procédure

15 d'aujourd'hui, où il a été déclaré à l'avance que ce Témoin n'était

16 disponible devant ce Tribunal qu'aujourd'hui, nous met dans une

17 situation...

18 M. le Président (interprétation): Maître Tapuskovic, nous ne perdons pas

19 cela de vue et je demanderai au Témoin s'il peut revenir, c'est à cela que

20 vous pensez?

21 M. Tapuskovic (interprétation): Non.

22 M. le Président (interprétation): Mais vous êtes en train d'occuper notre

23 temps. Que voulez-vous savoir?

24 M. Tapuskovic (interprétation): Je ne comprends pas. J'essaie de ne pas

25 prendre trop de temps, ce que je veux dire, c'est que je sais bien que

Page 3115

1 vous allez rendre une décision sur ce point. La décision vous appartient,

2 mais si le Procureur dit à l'avance que quelqu'un n'est à la disposition

3 de la Chambre qu'aujourd'hui, le problème est posé d'une façon plus

4 sérieuse. C'est tout ce que je voulais dire, c'est bien sûr à vous qu'il

5 appartient de déterminer quand le contre-interrogatoire du témoin cessera,

6 se terminera. Je suis tout à fait d'accord avec cela. Je dis simplement

7 que le fait d'annoncer à l'avance que le témoin ne sera pas disponible

8 demain nous pose un problème.

9 M. le Président (interprétation): Oui, oui, et nous demanderons au témoin

10 de revenir lorsque le moment sera approprié.

11 M. Milosevic (interprétation): Je pense qu'il est de très mauvais goût de

12 limiter le temps du contre-interrogatoire d'un témoin qui a été le chef de

13 toute la mission, qui a apporté plus d'une centaine de pages de documents

14 et qui a consacré plus d'un jour et demi à l'interrogatoire principal. Il

15 témoigne de certains événements qui ont été la cause principale de

16 l'agression.

17 M. le Président (interprétation): Nous sommes d'accord: c'est un témoin

18 important, il a déposé longuement et, en temps utile, nous lui

19 demanderons, s'il le peut, à un moment qui lui convient, de revenir devant

20 cette Chambre.

21 Maintenant, poursuivons.

22 M. Milosevic (interprétation): Je pense qu'il serait plus logique de

23 poursuivre l'interrogatoire jusqu'à la fin des questions, sans lui

24 demander de revenir.

25 Ma question est la suivante: compte tenu de la période assez longue qui

Page 3116

1 s'est écoulée entre le départ de la police et l'arrivée de la mission de

2 vérification, pendant ce temps, l'UCK avait tout le contrôle sur le

3 village. Je demande donc…

4 M. le Président (interprétation): Nous avons déjà parlé de cela. Vous avez

5 avancé vos arguments; le témoin a répondu au mieux de ses capacités, à

6 savoir qu'il a parlé de ce qu'il sait. Il me semble que vous êtes en train

7 de revenir sur des questions qu'il appartiendra de résoudre à la fin de ce

8 procès et que vous ne pouvez pas obtenir davantage d'aide de la part du

9 témoin par vos remarques. Il ne s'agit que d'une discussion qui ressemble

10 à une querelle.

11 M. Milosevic (interprétation): Je demande au témoin si, à son avis, l'UCK

12 aurait pu rassembler ces corps dans l'intervalle de temps en question,

13 pour les transporter jusqu'à l'endroit où ils ont tous été trouvés

14 ensemble.

15 M. le Président (interprétation): La seule question consiste à demander au

16 témoin ce qu'il a vu. Donc cela correspond-il à ce que vous avez vu?

17 M. Drewienkiewicz (interprétation): Cela ne correspond pas à ce que j'ai

18 vu et ce n'est pas l'impression que j'ai acquise par la suite.

19 M. Milosevic (interprétation): Vous avez déclaré que les vérificateurs se

20 trouvaient à Racak le 15 mai; avant, vous avez également déclaré qu'ils

21 n'avaient pas officiellement été appelés. Cela étant dit, les membres

22 britanniques de la mission de vérification, d'après ce qu'ils ont dit au

23 "Guardian" -le "Guardian fait état de sa déclaration et le membre de la

24 mission en question est Neal Stretchen (phonétique)-, il a déclaré qu'il

25 avait été officiellement appelé à se rendre à Racak avant l'opération.

Page 3117

1 C'est la première fois que l'on reconnaît publiquement que la mission de

2 vérification avait reçu des informations préalables portant sur

3 l'opération de Racak.

4 Alors, est-ce que c'est exact ou pas?

5 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je n'ai jamais eu connaissance de

6 cette déclaration.

7 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous connaissance des conclusions

8 tirées par le "Frankfurter Runschau", le 21 janvier, qui lance un

9 avertissement; il dit -je cite-: "Rien n'aurait pu être plus préjudiciable

10 que…"

11 M. le Président (interprétation): Peu importe. Peu importe ce que pense

12 tel ou tel quotidien.

13 M. Milosevic (interprétation): Alors, comment est-il possible que, le

14 lendemain donc, immédiatement après l'arrivée des équipes qui souhaitaient

15 mener une enquête sur le terrain, comment est-il possible que des

16 villageois désarmés lancent une attaque? Comment est-ce possible?

17 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je crois que vous faites référence à

18 Mme la juge Marinkovic, qui s'est rendue au village dans la journée de

19 dimanche. A ce moment-là, effectivement, l'UCK était présent dans le

20 village. Nous nous étions entretenus avec les membres de l'UCK et, d'après

21 ce que je me souviens, ils ont déclaré qu'ils permettraient à la juge de

22 pénétrer dans le village; ils ont déclaré qu'il n'y aurait pas d'acte de

23 violence si elle venait seule et si nous l'escortions. Les membres de

24 l'UCK ont déclaré que si une escorte importante de policiers pénétrait

25 dans le village, ils ouvriraient le feu sur l'escorte. La juge a choisi

Page 3118

1 d'entrer dans le village accompagnée d'une importante escorte de police et

2 on lui a tiré dessus.

3 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous pensez qu'il y a eu des

4 abus? On dit ici que je fais constamment référence à la presse, mais, tout

5 de même, il y a eu tout de sorte d'abus dans le cadre de la presse par

6 rapport à ce qui a été dit sur Racak?

7 M. le Président (interprétation): Il ne revient pas au Témoin de se

8 prononcer sur ces questions. Ces questions n'ont aucune pertinence du

9 point de vue de ce qui a été dit par le Témoin.

10 M. Milosevic (interprétation): Très bien.

11 Dites-moi alors ce que vous croyez: pourquoi pensez-vous que la Finlande a

12 d'abord donné priorité aux experts en médecine légale yougoslaves?

13 Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas eu contestation des conclusions qui ont

14 été rendues par ces experts? Je parle de la Finlandaise Helena Ranta, qui

15 était la responsable de l'équipe finlandaise.

16 M. Drewienkiewicz (interprétation): Il faudrait que vous posiez cette

17 question à cette femme dont vous citez le nom.

18 M. Milosevic (interprétation): Mais tout cela a un rapport avec ce qui

19 s'est passé: pourquoi est-ce que Mme Ranta a déclaré qu'il fallait qu'elle

20 se tourne vers les responsables du ministère des Affaires étrangères avant

21 de pouvoir faire état de ses conclusions professionnelles? Qu'est-ce que

22 le ministère a à voir avec une expertise médico-légale?

23 M. le Président (interprétation): C'est une question rhétorique à laquelle

24 le Témoin ne peut pas répondre.

25 M. Milosevic (interprétation): Vous avez pu voir la photographie où l'on

Page 3119

1 voit Walker accompagné de tout un groupe de personnes. On voit également

2 l'entassement de corps, on voit notamment cet homme qui porte un chapeau

3 blanc.

4 Comment est-ce que quelqu'un peut être atteint à la tête sans que son

5 chapeau ne bouge? On dirait que c'est une coquille d'œuf placée sur son

6 crâne, alors que, normalement, lorsqu'on est atteint par une balle, on

7 perd ses chaussures.

8 Est-ce que vous ne pensez pas qu'il y a eu là un montage, que toute la

9 scène a été montée afin de montrer certaines choses aux médias? Est-ce que

10 vous ne pensez pas que les cadavres ont été alignés d'une certaine façon

11 au bénéfice des médias?

12 M. Drewienkiewicz (interprétation): C'est une pensée qui m'a traversé

13 l'esprit au moment lorsque je montais les flancs de la colline mais,

14 lorsque j'ai pu voir les corps et la façon dont ils étaient entassés, j'ai

15 pensé qu'ils n'avaient pas été déplacés, qu'ils avaient été tués et qu'ils

16 étaient restés là où ils étaient tombés. C'est l'opinion que je me suis

17 forgée tout au long de ma visite au sommet de la colline et dans la

18 tranchée; et cette opinion est la même aujourd'hui: si j'étais un

19 terroriste, je ne me déplacerais pas avec un calot blanc sur la tête.

20 Question: Mais c'est justement ce que je dis: c'est que cet homme ne se

21 déplaçait pas avec un calot blanc sur sa tête. Moi, je dis que quelqu'un

22 l'a placé sur sa tête. Après, les experts médicaux ont établi que, suite à

23 un tel tir, les yeux sortent de la tête de la personne touchée. On ne peut

24 pas avoir envisagé qu'après été atteint de la sorte, une personne garde

25 son chapeau sur la tête; il n'est certainement pas né avec ce chapeau sur

Page 3120

1 sa tête.

2 Réponse: Moi, j'ai eu l'impression, à la fin de ma visite sur les lieux,

3 que ces personnes étaient tombées là où elles avaient été abattues. Je

4 n'ai jamais pensé que qui que ce soit avait essayé de déplacer ces corps.

5 Question: Vous avez observé ces corps en un certain endroit. Ensuite, ces

6 corps ont été emmenés et déposés dans la mosquée locale, et cela été fait

7 avant que l'enquête n'arrive à son terme. Est-ce que cela ne révèle pas

8 ici la façon dont on a essayé de manipuler les éléments de preuve? Est-ce

9 que cela ne vous laisse pas penser qu'effectivement, il y a eu tentative

10 de manipulation?

11 Réponse: Non. Nous étions responsables de tout ce qui a été fait sur la

12 colline. Mais nous nous sommes assurés que tout ce que nous voyions était

13 filmé: nous avons filmé l'emplacement des corps, nous avons filmé les

14 blessures. Nous voulions nous assurer du recueil du plus d'éléments de

15 preuve possible, nous voulions engranger toutes sortes d'éléments de

16 preuve. Nous n'avions pas à disposition une équipe de médecins légistes;

17 nous ne pouvions pas faire appel à des légistes pour qu'ils viennent

18 immédiatement faire des enquêtes sur les lieux.

19 Question: Est-ce que vous avez connaissance de la déclaration de Thaci qui

20 est une déclaration complémentaire de celle que j'ai évoquée tout à

21 l'heure? Il a déclaré que nombre de membres de l'UCK étaient morts à Racak

22 et que Racak était, en fait, un tournant pour l'Occident qui est devenu

23 convaincu de la nécessité d'intervenir militairement?

24 Réponse: Non, je n'ai jamais entendu cette déclaration avant aujourd'hui.

25 M. Milosevic (interprétation): Pour corroborer cela, nous disposons de la

Page 3121

1 déclaration d'un autre combattant de l'UCK auprès de la télévision

2 allemande. Il a déclaré que lui-même et ses compagnons ont attaqué la

3 police de façon intentionnelle afin de provoquer un conflit.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, cela ne sert à rien

5 de poser ce genre de questions au Témoin. Si vous voulez avancer ce genre

6 d'éléments de preuve, il faudra le faire en temps utile devant la Chambre,

7 mais vous ne pouvez le faire par le biais de ce Témoin.

8 M. Milosevic (interprétation): Et comment pouvez-vous expliquer ce qui a

9 été dit par Mme Marinkovic, la juge d'instruction de Pristina, qui est une

10 des personnes les mieux informées de ce qui s'est passé à Racak?

11 Madame Marinkovic a déclaré -je cite-: "D'emblée, j'ai trouvé assez

12 étrange le comportement des collaborateurs de Walker. Le général

13 Drewienkiewicz a essayé de nous empêcher de nous rendre sur les lieux du

14 crime". Est-ce exact ou non?

15 Réponse: Non, j'ai dit que j'étais tout prêt à l'accompagner sur les lieux

16 du crime. J'ai simplement dit que je ne souhaitais pas qu'il y ait plus de

17 combats, qu'il y ait plus de blessés.

18 Question: Et est-ce que vous savez que, dans le rapport, dans le procès-

19 verbal, il est indiqué qu'une mitrailleuse d'un calibre de 12,5

20 millimètres a été trouvée avec des revolvers 7,62 -il y en avait 63-, il y

21 avait des grenades à main de production chinoise, il y a eu 12 mines

22 trouvées, un lance-roquettes à main, trois radios portatives, des

23 uniformes avec des insignes? Est-ce que vous savez que tous ces éléments

24 ont été trouvés? Est-ce que vous savez que le rapport en fait état?

25 Réponse: Non. Et à l'époque, nous avons demandé à ce qu'une enquête

Page 3122

1 conjointe soit menée et nous avons demandé à ce que ce genre

2 d'informations justement soit mis à notre disposition. Ce qui n'a jamais

3 été fait.

4 Question: Est-ce que vous reconnaissez que la Chambre d'instruction a mené

5 une enquête? Et est-ce que vous admettez que le rapport qui a été établi

6 par le tribunal de district est un rapport pertinent qui porte sur les

7 événements qui se sont produits?

8 Réponse: Ce rapport a simplement établi que les armes trouvées pouvaient

9 être reliées aux corps qui avaient été trouvés. Ça, c'est tout à fait

10 coutumier dans le cas d'une enquête médico-légale.

11 Question: Mais c'est précisément ce qu'ils ont établi: que les armes se

12 trouvaient à l'endroit même où étaient les corps, est-ce que cela est

13 contesté?

14 Réponse: Oui, absolument. J'ai dit, à l'époque: "s'il y a des armes, eh

15 bien, nous voulons les voir et nous voulons également disposer des

16 éléments de preuve qui permettent d'établir un lien entre ces armes et les

17 personnes décédées". Nous avons demandé ces éléments de preuve, ils ne

18 nous ont jamais été remis.

19 M. Milosevic (interprétation): Mais le lien entre les armes et les

20 cadavres n'est-il pas suffisant quand on voit que le rapport des légistes

21 établit que des coups de feu ont été tirés contre ces personnes? C'est ce

22 qu'ont établi les légistes dès qu'ils ont enlevé leurs gants de

23 caoutchouc.

24 M. Drewienkiewicz (interprétation): Cet élément de preuve n'a jamais été

25 mis à notre disposition, Monsieur le Président.

Page 3123

1 M. Nice (interprétation): Ce document a été remis à l'accusé ce matin,

2 donc il est disponible. Et, en anglais et en Serbe, on y lit ce qui suit

3 -je cite-: "Lorsque nous sommes arrivés dans le village de Racak, selon le

4 rapport du juge, j'ai été informé par des représentants de la police que,

5 au cours du ratissage du terrain, des membres du MUP et du ministère de

6 l'intérieur de Serbie ont trouvé des armes ainsi que des parties

7 d'uniformes militaires. Par la suite, un peu plus loin dans le texte, on

8 voit que le site a été photographié. Donc c'est un exemple de la façon

9 dont les documents sont remis au témoin, et c'est cela qui conduit au

10 commentaire fait par lui.

11 Je dis cela rapidement pour ne pas perdre de temps. Je demanderai que ce

12 document soit placé sur le rétroprojecteur.

13 M. le Président (interprétation): Que ce soit fait.

14 M. Milosevic (interprétation): Je ne souhaite pas abuser de votre temps

15 parce que le Procureur a utilisé davantage de temps que moi, et j'ai

16 encore pas mal de questions à poser au Témoin.

17 M. le Président (interprétation): Il nous dit que les choses devraient

18 être claires pour que l'équité soit respectée. Et il est équitable que le

19 Témoin voit ce document qui est placé sur le rétroprojecteur. Merci.

20 M. Milosevic (interprétation): Mais qu'est-ce qui figure sur le

21 rétroprojecteur?

22 D'après la déclaration que je vois actuellement que j'ai sous les yeux, il

23 s'agit d'une liste d'armement et il n'y a rien ici qui permet d'établir un

24 lien entre les personnes dont les corps ont été découverts et ces armes.

25 Ces armes auraient pu se trouver dans la cave de n'importe quel

Page 3124

1 commissariat de police, n'importe où sur le territoire du Kosovo. Tout

2 poste de police dispose d'un grand nombre d'armes, donc je ne crois pas

3 que ceci permette d'établir un lien précis entre les personnes qui ont été

4 tuées et les armes; et si tel devait être le cas, il ne s'agirait en tout

5 cas pas d'une infraction grave que de posséder une arme.

6 Ce que vous venez de mettre sur le rétroprojecteur, c'est une partie du

7 rapport du juge d'instruction dont j'ai donné lecture tout à l'heure,

8 exactement le même passage.

9 Considérez-vous que lorsque, à partir des hauteurs environnantes, les

10 membres de l'UCK tirent sur une unité de la police, lorsque cette unité de

11 police se retire, vous pensez qu'elle doit laisser derrière elle des

12 carabines, des grenades, des fusils mitrailleurs, des fusils automatiques

13 et toute sorte d'autres armements? Ou bien faut-il que ces armes soient

14 ramassées avant le départ, de façon à ne pas être mises à la disposition

15 de ceux qui viendront par la suite?

16 M. Drewienkiewicz (interprétation): Tout cela dépend des circonstances. Le

17 fait allégué, c'est que ces armes sont associées aux personnes qui ont été

18 tuées. Or, ce que j'ai sous les yeux ne me semble pas pouvoir prouver

19 cette affirmation; pas plus d'ailleurs que toutes les constatations qui

20 ont été faites à l'époque.

21 M. Milosevic (interprétation): Mais ceci ne fait que confirmer que les

22 membres de la mission de vérification et les terroristes de l'UCK étaient

23 parfaitement synchronisés, ce dont je ne doute aucunement.

24 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ceci n'est pas une

25 question en bonne et due forme, à moins que vous ne suggériez que ce

Page 3125

1 témoin synchronisait ses rapports d'une façon ou d'une autre. Si vous

2 souhaitez que le rapport du juge d'instruction soit examiné par la

3 Chambre, il va vous falloir en demander le versement au dossier.

4 M. Milosevic (interprétation): Le fait que vous l'ayez laissé partir sans

5 escorte de la police n'indique t-il pas, puisque vous avez dit que les

6 villageois étaient en colère et qu'ils étaient éventuellement armés et

7 qu'ils auraient pu tirer sur la police dès qu'ils la voyaient, n'est-il

8 pas exact que le juge d'instruction vous a demandé comment il se faisait

9 que les villageois étaient armés; et au lieu de lui répondre, vous l'avez

10 menacée en lui disant qu'elle serait tenue responsable si un nouveau bain

11 de sang se produisait et que vous la traduiriez en justice devant le

12 Tribunal de La Haye? Est-ce bien la teneur de la conversation que vous

13 avez eue avec cette femme, ce juge d'instruction?

14 M. Drewienkiewicz (interprétation): Oui, c'est bien la teneur de la

15 conversation que j'ai eue avec elle; je lui ai dit que je la tiendrai

16 responsable de tout bain de sang ultérieur s'il avait lieu. Je lui ai dit

17 qu'elle devrait répondre personnellement de ses responsabilités si un

18 nouveau bain de sang se produisait. Je le lui ai dit très clairement à ce

19 moment-là.

20 Question: Savez-vous que lorsqu'une enquête est menée à bien, pour autant

21 que je m'en souvienne: sur la base des rapports que j'ai pu lire, il y

22 avait des tranchées tout autour du village et sur les collines

23 environnantes, des pics et des haches ont été découvertes et dans les

24 tranchées de très nombreuses douilles d'armes de 7,62 millimètres,

25 produites en Chine, et puis au sommet de la colline on a trouvé un bunker

Page 3126

1 recouvert de bois ainsi qu'un fourneau dans le bunker et un nid de

2 mitrailleuse à côté du bunker, qui était protégé par des sacs de sable et

3 où se trouvait une mitrailleuse et un grand nombre de douilles de 12,7

4 millimètres? Avez-vous connaissance de ce fait qui est évoqué dans le

5 rapport?

6 Réponse: Non, pas du tout. Je n'ai pas vu ce bunker. Il ne se trouvait

7 certainement pas dans la région dans laquelle j'ai circulé

8 personnellement, qui ne couvrait pas plus de 30 ou 40 mètres carrés. Je

9 n'ai pas traversé ou circulé sur toute la colline.

10 Question: Le fait que vous n'ayez pas circulé sur toute la colline ne

11 signifie pas que tout ce que je viens de dire et qui figure dans le

12 rapport n'existe pas, oui ou non? C'est votre affirmation que: le juge

13 d'instruction a inventé tout ce qu'elle a mis dans son rapport?

14 Réponse: Elle a rendu compte, j'en suis sûr, de ce qu'elle devait dire

15 mais je ne sais pas dans quelle mesure il existe effectivement un lien

16 entre les armes et les personnes dont les corps sans vie ont été

17 découverts sur place, selon les allégations qui viennent d'être faites à

18 l'instant. Je cherche toujours ce lien. N'importe qui peut descendre dans

19 la cave d'un commissariat de police et y trouver toute une série

20 d'armements, et puis ensuite gravir une colline et dire: "Voilà, nous

21 avons tué ces personnes parce que ce sont des terroristes, et voilà leurs

22 armes". C'est une suggestion très plausible dans un tel rapport.

23 Question: Dans le rapport, il est également stipulé que dans la cour d'une

24 maison, on a trouvé un lanceur de mines portables, ainsi que des sacs de

25 munitions, des rapports d'activités militaires et des balles, ainsi que

Page 3127

1 des munitions fabriquées en Chine et des cigarettes américaines, etc.,

2 etc., comme s'il s'agissait d'un quartier général local. Savez-vous cela?

3 Réponse: Non, je n'étais pas au courant.

4 Question: Saviez-vous, aviez-vous connaissance de la déclaration selon

5 laquelle, apparemment, il s'agit de victimes de guerre, d'opérations de

6 guerre -des experts en ont parlé- et que toutes les blessures ont été

7 provoquées par les becs d'un certain nombre d'oiseaux sur les tissus mous

8 des cadavres? Etes-vous au courant de cela?

9 Réponse: Je ne suis pas au courant de l'intégralité du rapport des

10 médecins-légistes, du rapport d'autopsie. Je sais qu'un rapport d'autopsie

11 a été établi, mais je n'ai jamais eu sous les yeux l'intégralité de ce

12 rapport.

13 Question: Comment se fait-il qu'en trois ans, vous n'ayez pas vu ce

14 rapport dans son intégralité?

15 Réponse: Il a été remis à Walker et c'est dans ces conditions que l'équipe

16 des légistes souhaitait travailler, en ne remettant ce rapport qu'à

17 Walker.

18 Question: Considérez-vous que ceci confirme l'affirmation qui est la

19 mienne, à savoir que Walker a utilisé cet événement pour justifier

20 l'agression?

21 Réponse: Non, absolument pas.

22 M. Milosevic (interprétation): Pourquoi, dans ces conditions, un rapport

23 de médecin-légiste ne devrait être remis au seul Walker?

24 M. le Président (interprétation): Non, non. Ce n'est pas au Témoin qu'il

25 appartient de répondre à ce genre de questions.

Page 3128

1 M. Milosevic (interprétation): Je crois qu'il appartient à l'opinion

2 publique de répondre à un grand nombre de ces questions.

3 M. le Président (interprétation): Non. S'il y a pertinence, la pertinence

4 de ces questions relève de cette Chambre de première instance.

5 M. Milosevic (interprétation): Les experts qui escortaient le juge

6 d'instruction décrivent des actions intenses de la part de l'UCK à leur

7 rencontre et disent être à peine parvenus à ramasser et à emporter les

8 cadavres qu'ils ont, en présence de vos observateurs ainsi que du

9 secrétaire de l'ambassade de Finlande, etc., transportés jusqu'à

10 l'institut. Je suppose que tout cela n'est pas contesté?

11 M. Drewienkiewicz (interprétation): Qu'êtes-vous en train de dire

12 exactement, je vous prie?

13 Question: Que les cadavres ont été ramassés, qu'ils ont été ramassés alors

14 que l'UCK tirait de façon à rendre impossible le transfert des corps

15 jusqu'à l'institut, que, pendant tout le temps de ce transport et le temps

16 de l'autopsie, vos représentants étaient présents. Ceci est-il exact ou

17 pas?

18 Réponse: Selon mon souvenir, les cadavres ont été ramenés des flancs de la

19 colline dans les dernières heures de l'après-midi du samedi et, ensuite,

20 je crois que c'est le lundi que la police est retournée dans le village en

21 grand nombre pour enlever les cadavres de la mosquée où ceux-ci avaient

22 été déposés le samedi. Et je crois que la présence de la police à Racak,

23 lors de l'enlèvement des cadavres, a dû être très importante. Je n'étais

24 pas là moi-même, le lundi.

25 M. Milosevic (interprétation): Le professeur Slavisa Dobricanin, un des

Page 3129

1 experts chargés de l'autopsie, affirme qu'il a constaté que, dans les 40

2 cas, ces personnes ont trouvé la mort en raison de balles tirées à

3 distance contre elles, hormis pour une personne où il dit avoir trouvé des

4 preuves semblant indiquer que les tirs provenaient d'une distance

5 inférieure, c'est-à-dire de 60 à 70 centimètres, à partir d'une tranchée.

6 Etes-vous au courant de cela? Etes-vous au courant du fait que tous les

7 médecins-légistes, y compris le Dr Dunjic, qui a témoigné ici et dont la

8 déclaration écrite existe, tous ces légistes affirment que, sur le plan de

9 l'expertise médico-légale, il n'y avait aucune différence entre leurs

10 constatations et les constatations faites par les légistes finlandais et

11 de Biélorussie, selon lesquelles toutes les autopsies ont été faites

12 ensemble et en présence des experts?

13 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous répondre à cette question?

14 M. Drewienkiewicz (interprétation): Dans mon souvenir, je crois avoir lu

15 dans un rapport qu'un des corps présentait une présence de poudre semblant

16 prouver que les tirs avaient été tirés à bout portant pratiquement. Mais

17 cette présence de poudre n'existait pas sur les autres cadavres; ça, je

18 m'en souviens.

19 Je me souviens également que Walker a dit, s'agissant du rapport des

20 légistes finlandais, qu'il n'y avait rien dans ce rapport qui contredisait

21 son point de vue à lui, selon lequel il s'agissait d'un massacre.

22 M. Milosevic (interprétation): Pensez-vous que des légistes, auteurs d'un

23 rapport, peuvent affirmer d'une part que toutes les personnes tuées sont

24 mortes au cours d'un combat et qu'en même temps, en dépit de ce fait,

25 Walker peut affirmer qu'il n'y a rien dans ce rapport?

Page 3130

1 M. le Président (interprétation): Non, non, non. Ce n'est pas une question

2 à poser à ce Témoin; il a déjà témoigné sur ce point. Il est possible que

3 ces questions soient à trancher par les Juges de cette Chambre de première

4 instance après la présentation de tous les moyens de preuve. Je vous

5 demanderai de passer à autre chose.

6 M. Milosevic (interprétation): J'ai sous les yeux un exemplaire du rapport

7 du juge d'instruction dans lequel je lis -je cite-: "Sur les collines

8 environnantes, on a trouvé des tranchées et toute une série d'éléments, de

9 parties d'équipement que j'ai déjà énumérés tout à l'heure, qu'il y avait

10 donc des bunkers protégés par des sacs de sable, etc."

11 Et quant à vous, vous dites que vous n'avez pas vu cela, car vous n'avez

12 pas circulé sur plus de 30 mètres. Mais les membres de votre mission de

13 vérification sont-ils allés voir ces bunkers dans les environs de Racak?

14 Ont-ils confirmé que tout ce que la juge d'instruction Danica Marinkovic

15 avait dit. Ont-ils confirmé que c'était exact ou l'ont-ils infirmé?

16 M. Drewienkiewicz (interprétation): Pour autant que je m'en souvienne, son

17 rapport ne nous a jamais été communiqué. Quant à moi, il est certain que

18 je n'étais pas au courant de la présence d'autres bunkers sur la colline à

19 une certaine distance de ce ravin. Je n'ai été informé de cela que lorsque

20 j'ai vu pour la première fois une carte, il y a quelques semaines.

21 M. Nice (interprétation): L'enquêteur chargé de cette affaire, ou en tout

22 cas de cette partie de l'affaire, a établi une carte de grande dimension.

23 Vous l'avez déjà vue, je crois, et elle démontre la présence d'autres

24 bunkers.

25 M. Milosevic (interprétation): Etes-vous au courant du fait que, sur la

Page 3131

1 base du rapport établi par les légistes auprès des tribunaux et la juge

2 d'instruction, une note a été adressée au Tribunal d'instance de Pristina

3 dans laquelle il est stipulé qu'il n'y a pas le moindre doute que le décès

4 de l'une quelconque des personnes tuées au cours de ce conflit ait pu être

5 dû à un crime, mais que tous ces décès se sont produits suite à une

6 résistance contre une attaque de la part des terroristes, qu'il est

7 convenu d'appeler l'UCK, et que tout cela s'est fait dans le respect de la

8 loi établie par le ministère de l'Intérieur?

9 M. Drewienkiewicz (interprétation): Je suis désolé, mais cette enquête n'a

10 pas été menée conjointement. Il nous a été demandé de participer à

11 l'enquête et, si nous avions participé, nous aurions pu exprimer un point

12 de vue sur le rapport de Mme la Juge Marinkovic. Mais sur la base de ce

13 que j'ai vu sur place, l'enquête a été très rapide et n'a pas observé, n'a

14 pas respecté les procédures habituelles, pour autant que j'aie pu le

15 constater.

16 Question: S'agissant de la procédure la plus adaptée ou la procédure qu'il

17 aurait fallu mener à bien, elle a été rendue impossible par l'UCK. En

18 effet, les constatations n'ont pu être faites sur place que trois jours

19 plus tard. Vous ne remettez pas cela en cause, je suppose: selon la

20 procédure, il aurait fallu constater les faits immédiatement sur place?

21 Réponse: Il était possible de le faire immédiatement, il était possible de

22 le faire le samedi.

23 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais qui a empêché la juge

24 d'instruction de faire ces constatations? La juge d'instruction a essayé

25 de faire ces constatations, comme chacun le sait, et elle a été chassée

Page 3132

1 par des coups de feu; ensuite, les constatations ont été faites trois

2 jours plus tard. Qui est responsable de ce retard?

3 M. le Président (interprétation): Le Témoin a déjà témoigné ce sur ce

4 point.

5 Général, je ne crois pas que nous irons beaucoup plus loin aujourd'hui.

6 Monsieur Milosevic, nous allons mettre un terme à cet interrogatoire

7 aujourd'hui. Il est tout à fait clair que le temps mis à la disposition de

8 la défense pour le contre-interrogatoire doit être à peu près égal à celui

9 utilisé par le Procureur au cours de l'interrogatoire principal.

10 Donc, Général, il va nous falloir vous prier de revenir. Pouvez-vous

11 trouver un moment qui vous conviendra pour revenir?

12 M. Drewienkiewicz (interprétation): J'en discuterai à l'extérieur de cette

13 salle avec vos représentants, Monsieur.

14 M. le Président (interprétation): Nous n'aimons pas beaucoup ce terme de

15 "vos représentants", mais vous pouvez en discuter avec le Procureur de ce

16 point très, très spécifique; nous le disons de la façon la plus claire:

17 vous ne pouvez pas discuter avec lui d'autres questions. Nous vous en

18 remercions.

19 Nous entendrons plus tard la suite du contre-interrogatoire.

20 Monsieur Milosevic, ce Témoin est important. Il est tout à fait normal que

21 vous disposiez d'un temps absolument égal à celui du Procureur; vous

22 pourrez donc disposer encore de deux heures d'après nous. Vous n'êtes pas

23 tenu d'utiliser tout ce temps pour le contre-interrogatoire, mais lorsque

24 le Témoin reviendra, vous pourrez disposer de ces deux heures. Ce qui vous

25 donnera, en fait, plus que l'heure et demie dont a disposé le Procureur.

Page 3133

1 M. Milosevic (interprétation): Je pense que ceci est erroné, inéquitable

2 et que ce n'est pas dans l'intérêt de la justice et de la vérité, car on

3 ne peut pas comparer le temps utilisé par le Procureur, alors que le

4 Témoin avait des questions qu'il pouvait lire et les réponses étaient lues

5 également pendant tout l'interrogatoire principal. Et les choses ne se

6 sont pas passées comme vous l'aviez envisagé au départ, c'est-à-dire que

7 le Témoin a utilisé des notes personnelles pour se rafraîchir la mémoire.

8 Nous avons accepté cela, donc les questions et les réponses ont été lues.

9 Le Témoin a apporté avec lui un grand nombre de documents; nous avons

10 essayé d'établir un équilibre entre les deux. Je pense qu'il serait

11 équitable qu'il n'y ait pas de restriction au contre-interrogatoire de ce

12 témoin. Si vous examinez les choses d'un peu plus près, vous constaterez

13 que vous me limitez dans le temps.

14 M. le Président (interprétation): Nous ne sommes pas d'accord, nous devons

15 établir ce qui est équitable à long terme dans la présente affaire. Il

16 nous faut également tenir compte de l'équilibre entre l'interrogatoire

17 principal et le contre-interrogatoire afin que le procès se déroule tout

18 de même assez rapidement. Vous aurez notre décision s'agissant du témoin.

19 Vous l'avez entendu, vous disposerez donc de deux heures supplémentaires

20 et nous entendrons les amici; puis, il y aura questions supplémentaires de

21 la part du Procureur par la suite.

22 Général, c'est tout pour aujourd'hui. Nous pensons, nous espérons que vous

23 pourrez trouver un moment pour revenir.

24 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, M. Ryneveld a quelque

25 sujet à évoquer.

Page 3134

1 M. le Président (interprétation): J'aimerais d'abord que le Témoin se

2 retire.

3 (Le témoin, M. Karol John Drewienkiewicz, est reconduit hors du

4 prétoire.)

5 (Questions relatives à la procédure.)

6 M. Nice (interprétation): Nous avons un autre témoin qui est un témoin

7 protégé et qui n'arrivera que demain soir. Donc il ne sera sans doute pas

8 disponible dès les premières heures de l'audience de mercredi, puisqu'il

9 faut tout de même que nous revoyions un certain nombre de points avec lui.

10 Si mercredi matin, si le lendemain du mercredi, le témoignage est terminé,

11 nous pourrons aborder la première série des témoins 92bis et j'aimerais

12 que l'accusé soit prêt à cette situation.

13 M. le Président (interprétation): Très bien.

14 M. Milosevic (interprétation): Pourrions-nous savoir qui est le témoin qui

15 sera entendu demain?

16 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, l'accusé est habilité à

17 avoir le nom de ce témoin. Quel est-il?

18 M. Nice (interprétation): Monsieur Ciaglinski, Monsieur le Président.

19 Monsieur Ryneveld va vous en dire quelques mots à l'instant.

20 M. le Président (interprétation): Donc vous citerez un témoin protégé?

21 M. Nice (interprétation): Oui.

22 M. le Président (interprétation): Dont le nom figure sur la liste?

23 M. Nice (interprétation): Exact.

24 M. le Président (interprétation): Ou bien le premier des témoins 92bis?

25 M. Nice (interprétation): C'est exact.

Page 3135

1 M. le Président (interprétation): Pour que les choses soient tout à fait

2 claires, c'est seulement le premier de cette dernière catégorie que vous

3 allez entendre?

4 M. Nice (interprétation): Cela dépendra de la durée du contre-

5 interrogatoire. Le premier ou les deux premiers, selon les circonstances

6 et le temps.

7 M. le Président (interprétation): Très bien. Donc nous commencerons avec

8 le témoin de demain et nous verrons ce qu'il en est par la suite.

9 Oui, Monsieur Ryneveld?

10 M. Ryneveld (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

11 très brièvement: le but de mon intervention consiste à demander

12 l'autorisation de communiquer une déclaration préalable de témoin qui

13 avait été expurgée précédemment.

14 En effet, le 11 décembre 2001, le Procureur a soumis une requête à la

15 Chambre de première instance, eu égard à la déclaration préalable du

16 témoin Ciaglinski, dans le but de protéger l'identité de quelqu'un dont le

17 nom est mentionné dans cette déclaration.

18 Le 4 janvier 2002, la Chambre de première instance a ordonné l'expurgation

19 de ce nom dans la déclaration et une déclaration avec expurgation du nom a

20 été communiquée aux amici et à l'accusé.

21 Lors de la révision de sa déposition avec le témoin Ciaglinski, hier, nous

22 avons discuté de cette partie expurgée du texte et nous nous sommes rendu

23 compte qu'il y avait une autre information importante, un autre élément de

24 preuve important qui est résumé dans un document qui a été distribué à

25 l'accusé, aux amici et aux Juges de cette Chambre. C'est un document d'une

Page 3136

1 page qui comporte quatre paragraphes et qui est en fait notre résumé de

2 l'élément de preuve complet.

3 Alors, la difficulté provient du fait que ce renseignement est en rapport

4 avec le paragraphe dont l'expurgation a été demandée et acceptée. En

5 d'autres termes, les paragraphes expurgés, même s'ils ne contiennent pas

6 ce renseignement, créent un contexte qui permettrait de divulguer ce

7 renseignement. C'est en application de l'Article 70 que la demande a été

8 faite par le témoin d'obtenir une expurgation. Le témoin, M. Ciaglinski, a

9 autorisé l'accusation à communiquer sa déclaration, mais je ne peux pas

10 signifier cette déclaration ou, en tout cas, la déclaration non expurgée,

11 puisque le contexte constituerait en fait une infraction à votre

12 ordonnance.

13 Donc voilà le contexte de ma requête. Je ne voudrais pas agir sans votre

14 permission en communiquant la déclaration complète.

15 M. le Président (interprétation): Vous aurez l'autorisation de la Chambre

16 de première instance de communiquer la déclaration complète.

17 M. Ryneveld (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

18 M. le Président (interprétation): Très bien. Suspension jusqu'à 9 heures

19 demain matin.

20 (L'audience est levée à 13 heures 44.)

21

22

23

24

25