Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 15 mai 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 01.)

3 (Audience publique avec mesures de protection.)

4 (Le témoin, M. Ratomir Tanic, est dans le prétoire.)

5 (Interrogatoire principal du témoin, M. Ratomir Tanic, par M. Nice.)

6 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice?

7 M. Nice (interprétation): J'ai oublié de noter le numéro du dernier

8 paragraphe traité hier, je vous prie de m'excuser un instant.

9 M. le Président (interprétation): Pendant que M. Nice cherche ce

10 paragraphe, je vais me tourner vers le témoin et lui demander de bien

11 vouloir répondre de façon aussi succincte que possible.

12 Vous avez beaucoup de choses à dire et il est important que nous vous

13 entendions, mais le temps dont nous disposons est limité, et nous

14 procéderons plus rapidement, vous pourrez quitter ce prétoire plus vite,

15 si vous vous concentrez sur les questions qui vous sont posées et y

16 répondez précisément. Si le conseil de l'accusation souhaite vous demander

17 des précisions, il pourra toujours le faire. Je voudrais vous demander de

18 garder cela à l'esprit, s'il vous plaît.

19 M. Tanic (interprétation): Je ferai de mon mieux pour me conformer à ces

20 instructions.

21 M. Nice (interprétation): Je crois que nous en étions au paragraphe 53, si

22 je ne me trompe.

23 Monsieur le Président (interprétation): Je vais consulter mes notes. Oui,

24 M. le Juge Kwon me dit que la chaîne de commandement privée était le

25 dernier sujet abordé.

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1 M. Nice (interprétation): Oui, je vous en remercie. Paragraphe 54… J'ai

2 trouvé l'endroit où nous nous sommes arrêtés.

3 Monsieur Tanic, hier vous nous avez parlé d'une mission de recherche

4 d'enquête et des recommandations faites par cette commission d'enquête.

5 Est-ce que ces recommandations étaient suivies d'effets de la part de

6 l'accusé?

7 M. Nice (interprétation): Non.

8 Question: Est-ce qu'il a jamais dit que l'UCK était une organisation

9 terroriste?

10 Réponse: Pas dans un cadre juridique, mais en tant qu'accusation

11 politique, mais pas dans le cadre de la loi prévue par la Constitution.

12 Question: Je vais vous demander de répondre par oui ou par non. Est-ce

13 qu'il a jamais déclaré un état d'urgence au Kosovo pour lutter contre les

14 terroristes?

15 Réponse: Non, pas pour lutter contre les terroristes.

16 Question: Je vais vous demander une fois de plus de répondre par oui ou

17 par non. Suite à la mission du groupe d'enquête, est-ce que vous avez eu

18 la connaissance du fait que l'accusé ait fait reposer la responsabilité

19 des événements du Kosovo sur d'autres personnes? Répondez par oui ou non.

20 Réponse: Oui.

21 Question: Et de qui avez-vous entendu prononcer ce genre de propos?

22 Réponse: Eh bien, de la part des dirigeants des services de sécurité et de

23 la part des organismes politiques avec qui nous avions des échanges

24 réguliers d'informations au niveau du Parlement et du Gouvernement de la

25 Serbie.

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1 Question: Et, en une phrase, que disaient les dirigeants au sujet des

2 responsabilités pour ce qui était des problèmes au Kosovo?

3 Réponse: Eh bien, il est apparu à la fin que la responsabilité de tout

4 cela, c'était celle de policiers irresponsables ainsi que des services de

5 sécurité de l'armée qui essayaient de camoufler ces événements et ne

6 souhaitaient pas agir contre les terroristes. Il s'agissait de rumeurs qui

7 circulaient en Yougoslavie.

8 M. Nice (interprétation): Merci.

9 M. Kwon (interprétation): Vous nous avez dit que l'action entreprise

10 contre l'UCK ne s'était pas faite dans le cadre juridique et légal?

11 M. Tanic (interprétation): Oui.

12 M. Nice (interprétation): Pouvez-vous expliciter ce que vous entendez par

13 "cadre juridique"? Est-ce que vous voulez dire que les actions entreprises

14 au Kosovo étaient plus ou moins officieuses?

15 M. Tanic (interprétation): Eh bien, je ne peux dire qu'il s'agissait

16 d'actions officieuses mais, en tout cas, il s'agissait d'actions illégales

17 au regard de notre Constitution et des règlements juridiques, et c'est ce

18 que j'ai pu déterminer suite à des consultations.

19 Quand il y a état d'urgence, normalement, cela aurait dû être décidé par

20 l'assemblée de la Yougoslavie. C'était elle qui était chargée de prononcer

21 ce genre de situation. Et qualifier un groupe de "terroristes", c'est

22 quelque chose aussi qu'il convient de pas faire à la légère. Donc, toutes

23 ces actions n'étaient pas conformes aux dispositions constitutionnelles en

24 vigueur dans notre pays.

25 Question: Il y a un événement qui a eu lieu ultérieurement et dont vous

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1 tirez un certain nombre de conclusions au paragraphe 55. Je voudrais que

2 vous en parliez un petit peu. Est-ce que le 23 mars 1999, il y a eu une

3 séance officielle et télévisée de l'assemblée de la République de Serbie

4 au cours de laquelle M. Milutinovic a fait une observation?

5 Si c'est le cas, pouvez-vous nous parler de cette observation et, en une

6 phrase, nous expliquer pourquoi cette observation était d'importance?

7 Réponse: Oui, lors de la réunion de l'assemblée de la République de Serbie

8 qui a eu lieu le 23 mars 1999, en premier lieu il y a eu une discussion

9 totalement illégale quant à savoir si la Yougoslavie devait faire la

10 guerre à l'OTAN. Ceci n'avait, en fait, rien à voir avec les fonctions et

11 les attributions de l'Assemblée de la République de Serbie mais aurait dû

12 être discuté par l'Assemblée de la République de Yougoslavie.

13 Question: Rappelez-vous ce que vous avait dit M. le Juge May, donc nous

14 allons essayer d'appliquer les directives qu'il vous a données maintenant.

15 Je répète: le 23 mars, est-ce que M. Milutinovic a fait une observation?

16 Si c'est le cas, pouvez-vous nous parler de cette observation et ensuite,

17 en une phrase, dites-nous quelle était l'importance de cette observation?

18 Donc je veux de vous deux choses: premièrement, qu'a-t-il dit;

19 deuxièmement, quelle était l'importance de cette observation?

20 Réponse: Monsieur Milutinovic a déclaré que le problème politique avec les

21 Albanais n'existait pas, que ça n'existait pas non plus à Rambouillet, et

22 que les pouvoirs, les puissances occidentales et le groupe de contact

23 avaient proposé à la délégation serbe à Rambouillet un politique qui leur

24 convenait, mais que le seul problème était que le groupe de contact et la

25 communauté internationale souhaitaient mettre en place un accord politique

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1 avec des troupes sur le terrain au Kosovo.

2 Question: Quelle était l'importance de ce commentaire?

3 Réponse: A mon avis, son importance est la suivante: c'est qu'on disait

4 ici que le groupe de contact et les puissances occidentales voulaient

5 imposer un accord qui n'allait pas dans le sens des intérêts de la Serbie.

6 Or c'était complètement faux, puisque Milutinovic savait qu'on aurait pu

7 obtenir un accord favorable, tant à la Serbie qu'à la Yougoslavie.

8 Question: Au paragraphe 57: au cours de cette séance de l'Assemblée de

9 Serbie, est-ce que d'autres représentants du SPS ont fait des déclarations

10 favorables ou non à la guerre?

11 Réponse: Eh bien, ils se sont prononcés en faveur de la guerre, mais dans

12 un sens différent de ce qu'avait dit Milutinovic. Lui, il avait dit qu'on

13 avait offert à la Serbie un accord qui ne lui était pas favorable, et que

14 c'était la raison pour laquelle il fallait entrer en guerre contre l'OTAN.

15 Question: Ensuite, je vais passer au paragraphe 58: est-ce que Vuk

16 Draskovic a proposé une solution alternative?

17 Réponse: A ma connaissance, oui, au nom d'un groupe de personnes qui

18 avaient mis au point une solution alternative, qu'ils souhaitaient

19 présenter à l'assemblée et qui aurait dû permettre d'éviter le conflit

20 avec le Pacte de l'OTAN qui semblait suicidaire.

21 Question: Maintenant, j'aimerais que nous examinions un document qui se

22 compose de trois parties, et nous avons besoin d'un certain nombre

23 d'explications à ce sujet. Il s'agit du document TX-8.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 L'original est un fax, sur papier fax, à l'ancienne mode. On va comprendre

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1 l'importance de ce fait. Vous savez notamment qu'au début du fax on

2 utilisait du papier qui avait tendance à très vite se dégrader. De ce

3 fait, nous avons recopié ce document dès que nous en avons eu la

4 possession. Je pense que nous pouvons utiliser cette version-ci, et je

5 souhaiterais qu'on place le document en question sur le rétroprojecteur.

6 Monsieur Tanic, est-ce qu'il s'agit d'un document que vous avez déjà vu

7 précédemment, un document que vous avez déjà reçu?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Que voit-on sur le rétroprojecteur actuellement? Moi, j'avais

10 demandé à ce qu'on y place un fax. Est-ce que c'est ça?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Il est en date du 24 mars 1999. Comment avez-vous reçu ce

13 document, s'il vous plaît?

14 Réponse: Ce document, comme vous pouvez le voir, c'est un projet de

15 conclusion; il a été envoyé au groupe, un groupe de députés. Il a été

16 envoyé à l'occasion de la réunion de l'Assemblée, que nous avons évoquée

17 un peu plus tôt.

18 Question: Je vais demander à ce que l'on place la version en anglais sur

19 le rétroprojecteur. Ensuite, nous reviendrons à l'original ultérieurement.

20 Passons en revue ces conclusions.

21 On voit au n°1 que: lors d'une session du 23 mars 1999, l'Assemblée

22 nationale avait accepté les positions et le travail de la délégation de la

23 République de Serbie à Rambouillet.

24 Deuxièmement: que l'Assemblée nationale affirme que la délégation de

25 l'Etat de Serbie avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour entrer

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1 en dialogue avec la délégation du Mouvement séparatiste des Albanais du

2 Kosovo et de Metohija à Rambouillet, à Paris, etc.

3 Troisièmement: l'Assemblée nationale note à regret que les médiateurs, à

4 Rambouillet, ne sont pas parvenus à persuader la délégation du Mouvement

5 séparatiste de s'asseoir à la table de l'autre délégation.

6 Quatrièmement: nous avons ici une partie qui est illisible, et ensuite, on

7 peut lire: "Ceci pourra être mis sur le compte de délégation de Serbie qui

8 a insisté pour avoir des discussions directes et pour trouver un accord".

9 Cinquièmement -je résume ici les paragraphes pour gagner du temps-:

10 l'Assemblée nationale en appelle aux représentants du groupe de contact,

11 afin de trouver une solution pour persuader la délégation du Mouvement

12 séparatiste albanais de s'asseoir à la même table de négociation.

13 Sixièmement: si la délégation du Mouvement séparatiste albanais ne

14 souhaite pas engager de pourparlers et trouver un accord… Ensuite, la

15 délégation serbe est prête, etc., etc.,

16 Septièmement: dès qu'un accord politique sera trouvé, la Serbie et la

17 République fédérale sont prêtes à conclure un accord.

18 Ensuite, paragraphe n°8: l'assemblée nationale exige que soit mis un terme

19 à toutes les menaces d'agression prononcées par le Pacte de l'OTAN.

20 Neuvièmement: l'assemblée nationale exprime sa détermination à trouver un

21 accord pacifique, et ceci rapidement.

22 Nous allons maintenant nous pencher avec un peu plus d'attention sur le

23 paragraphe 7. Je cite-: "Dès qu'on aura trouvé un accord politique, la

24 délégation d'Etat de la Serbie et de la République fédérale de Yougoslavie

25 est prête à conclure un accord avec la communauté internationale en

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1 application dudit accord politique avec un mandat précis et limité émanant

2 du Conseil de sécurité des Nations Unies".

3 Si l'on examine le fax, c'est-à-dire l'original de ce document, je

4 souhaiterais poser la question suivante: on constate qu'il y a quelque

5 chose d'écrit à la main; est-ce qu'on vous a dit qui avait écrit ceci?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Qui vous a dit qui avait écrit ceci à la main sur ce document?

8 Réponse: C'est Dusan Mihaljovic et Vuk Draskovic qui m'ont communiqué

9 cette information.

10 Question: Et ils vous ont dit que c'était l'écriture de qui que l'on voit

11 ici?

12 Réponse: D'après eux, il s'agit de l'écriture de M. Slobodan Milosevic.

13 Question: Est-ce que vous aviez déjà vu précédemment son écriture?

14 Répondez par oui ou par non.

15 Réponse: Oui, à deux ou trois occasions.

16 M. Nice (interprétation): Revenons maintenant à la version en anglais pour

17 voir quelle a été la modification ainsi apportée.

18 A la fin du paragraphe 7 on peut voir que ce qui a été inscrit à la main,

19 c'était la chose suivante: "En respectant la souveraineté de la Serbie et

20 de la République fédérale de Yougoslavie".

21 Je souhaiterais que l'on donne une cote à ce document.

22 Mme Anoya (interprétation): Il s'agira de la pièce à conviction de

23 l'accusation 149.

24 M. Kwon (interprétation): Monsieur Nice, est-ce que le témoin a répondu à

25 votre question quand vous lui avez demandé comment il avait reçu ce

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1 document? Il a dit que ce document avait été envoyé aux députés; est-ce

2 qu'il a dit quelque chose d'autre?

3 M. Nice (interprétation): C'est la seule chose qu'il ait dite; cela ne

4 suffit pas. Je vais lui reposer la question. Je m'excuse de ne pas y avoir

5 pensé plus tôt.

6 Monsieur le Témoin, vous avez entendu la question de M. le Juge Kwon. Ce

7 document a été envoyé aux députés. Comment se fait-il que vous ayez vu ce

8 document vous-même? Comment se fait-il que vous vous soyez entretenu avec

9 Vuk Draskovic?

10 M. Tanic (interprétation): J'ai trouvé ce document dans mes archives

11 personnelles; c'est également le président du groupe de députés qui me l'a

12 donné. J'ai remarqué des différences entre ce qui avait été conclu et ce

13 qui avait été discuté; je voulais donc voir le document pour voir le

14 document qui avait été communiqué; c'est ainsi que j'ai pu me procurer le

15 document, c'est-à-dire ce projet de conclusion.

16 M. Nice (interprétation): Et comment se fait-il que vous en soyez venu à

17 vous entretenir avec M. Draskovic au sujet de ce document?

18 M. Tanic (interprétation): Je n'en ai pas parlé seulement avec lui mais

19 avec beaucoup d'autres personnes. Tout simplement pour la raison suivante:

20 j'avais participé avec ceux qui ont participé au document, document qui

21 aurait dû être suffisant pour éviter cette guerre suicidaire et inutile,

22 avec le Pacte de l'OTAN. Et j'ai reçu des informations selon lesquelles M.

23 Milosevic, sur le principe, était d'accord, sachant que rien ne devait

24 être fait à l'encontre de la souveraineté de la Serbie et de la

25 Yougoslavie. Cependant, lors de la réunion de l'Assemblée de Serbie, j'ai

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1 vu que la discussion allait dans un sens complètement différent qui menait

2 tout droit à une guerre inutile avec l'OTAN et je pense c'est cette

3 divergence qui est apparue en deux jours, cette divergence énorme qui a

4 causé…

5 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, je vous rappelle ce

6 que je vous ai dit au début: je vous demande, s'il vous plaît, de vous

7 concentrer sur les questions qui vous sont posées.

8 M. Nice (interprétation): Afin que nous comprenions bien la situation,

9 Monsieur Tanic, ces conclusions, ce projet de conclusion, en dehors de

10 l'ajout manuscrit, est-ce qu'elles avaient été acceptées? Est-ce qu'il

11 s'agissait d'un plan qui avait été établi?

12 M. Tanic (interprétation): D'après mes informations, oui, entre M.

13 Draskovic et M. Milosevic.

14 Question: Et corrigez-moi si je me trompe, mais ce que vous dites, c'est

15 que ce plan, même avec la modification manuscrite, ne correspond pas aux

16 débats que vous avez pu suivre lors de la réunion de l'Assemblée au cours

17 de laquelle sont intervenus Milutinovic et d'autres?

18 Réponse: Oui, parce qu'il y a des différences cruciales qui sont apparues.

19 Question: Je crois que… Mais non, je vais plutôt passer à la page suivante

20 et au paragraphe 65.

21 A votre connaissance, Monsieur Tanic -ici je reviens un petit peu en

22 arrière, aux années 1996 et 1997-, quels étaient les effectifs de l'UCK, à

23 peu près?

24 Réponse: D'après les évaluations des services de renseignement, elle

25 comptait environ 2.000 personnes qui étaient armées de manière

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1 insuffisante, et il s'agissait essentiellement de jeunes hommes qui

2 habitaient dans des villages.

3 Question: Et quant aux dirigeants de l'organisation, est-ce qu'ils étaient

4 nombreux?

5 Réponse: Eh bien, les véritables dirigeants se trouvaient pour la plupart

6 à l'étranger. En tout cas, ils n'étaient pas plus que cinq ou dix. Ils se

7 trouvaient en Suisse, en Allemagne, en Croatie et parfois en Albanie.

8 Question: Vous nous avez dit hier que certains pays avaient déjà indiqué

9 qu'ils allaient aider la Serbie si elle était décidée à contrôler l'UCK.

10 Est-ce exact?

11 Réponse: Oui, dans le cadre des conditions prévalant pour une solution

12 politique au Kosovo.

13 Question: Et le Président Rugova a-t-il dit quoi que ce soit de ses

14 intentions vis-à-vis de l'UCK ou d'autres groupes radicaux? Que

15 souhaitait-il faire? Qu'était-il prêt à faire s'agissant de ces

16 organisations?

17 Réponse: Disons que, globalement, ils menaient une politique de résistance

18 non violente et ils étaient prêts à marginaliser l'UCK sur le plan

19 politique, si l'on trouvait une solution politique au Kosovo.

20 Question: Paragraphes 67 à 72; je vais en traiter en une phrase, je pense.

21 S'agissant de l'éventualité d'une intervention de troupes étrangères sur

22 le sol de la Serbie, existait-il, à votre connaissance, des obstacles

23 constitutionnels à une telle éventualité?

24 Réponse: Non.

25 Question: Paragraphe 74. A la fin des années 90, avant aussi, mais à la

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1 fin des années 90, est-ce qu'il est arrivé que des Albanais du Kosovo

2 soient tués, dans le cadre de ce conflit qui se développait?

3 Réponse: Oui, oui. Dès le début de l'année 1998.

4 Question: Est-ce que, dans les cercles politiques où vous évoluiez, on

5 parlait de ces décès?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Et est-ce que cette question a été portée à l'attention de

8 l'accusé? Répondez par oui ou par non.

9 Réponse: Je suis désolé. Là, dans mon casque, j'entends le français.

10 J'entends le français dans mes écouteurs.

11 (Intervention de l'huissier.)

12 Question: Est-ce qu'on a parlé de cette question à l'accusé?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Répondez par oui ou par non à la question suivante, s'il vous

15 plaît. Savez-vous quelle a été sa réaction à ces nouvelles qu'on lui

16 apportait au sujet des décès de ces Albanais du Kosovo?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Est-ce que vous l'avez appris suite à des contacts directs avec

19 l'accusé, ou est-ce que vous avez appris cela de sources autres? Ou bien

20 est-ce que c'est de ces deux sources que vous avez appris cela?

21 Réponse: Des deux. Mais en premier lieu, d'autres sources.

22 Question: Donc vous l'avez également appris de l'accusé lui-même?

23 Réponse: Oui, lors de la rencontre que j'ai évoquée hier.

24 M. Nice (interprétation): Qu'a-t-il dit au sujet de la mort des Albanais

25 du Kosovo?

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1 M. Tanic (interprétation): Il a dit que le peuple albanais soutenait

2 collectivement les terroristes albanais et que, dans ces conditions, la

3 mort de civils allait malheureusement être une conséquence d'un conflit.

4 M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice, je vous suis reconnaissant

5 des efforts que vous faites pour que nous soyons aussi succincts que

6 possible, mais, pour moi, je n'ai pas très bien compris comment ces

7 Albanais du Kosovo dont nous parlons ont trouvé la mort?

8 M. Nice (interprétation): Monsieur Tanic, les décès dont nous parlons,

9 comment se produisaient-ils?

10 M. Tanic (interprétation): Eh bien, ils se produisaient de la manière

11 suivante. Mais là, il va falloir que je sois un petit peu plus long dans

12 mes explications. J'ai du mal à trouver l'équilibre entre une bonne

13 explication et, en même temps, une certaine concision. Il faudrait qu'on

14 me dise comment je dois procéder.

15 M. Robinson (interprétation): La raison pour laquelle je vous demande

16 cela, c'est que je m'intéresse aux phases initiales du conflit, à la

17 manière dont il a évolué. J'estime donc qu'il est nécessaire que l'on nous

18 dise exactement comment ces Albanais du Kosovo ont trouvé la mort. Et vous

19 pouvez répondre à cette question aussi succinctement que possible.

20 M. Tanic (interprétation): Eh bien, ces gens ont trouvé la mort dans le

21 cadre des activités régulières de nos forces de police contre les

22 terroristes albanais. Cependant, il faut savoir que ces activités avaient

23 lieu de la manière que j'ai expliqué précédemment, avec ces chaînes de

24 commandement semi-personnelles, sans cadre constitutionnel ou légal, avec

25 l'emploi de la logistique de la police et de la logistique des services de

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1 sécurité.

2 Si bien que des terroristes ont été tués, mais aussi des civils ont été

3 tués. Par exemple, à Donji Prekaz, un village; il y a eu un incident de ce

4 type, en mars 1998. Si vous vous le souhaitez, je peux vous donner des

5 explications plus amples à ce sujet.

6 M. Robinson (interprétation): Ceci s'est donc déroulé en 1997? Ou en

7 quelle année?

8 M. Tanic (interprétation): En 1998, au début de 1998.

9 M. Kwon (interprétation): J'aimerais, s'il vous plaît, que vous nous

10 parliez concrètement des conversations que vous avez eues avec M.

11 Milosevic, à l'époque: ce que vous avez dit et ce que M. Milosevic a

12 répondu.

13 M. Tanic (interprétation): Hier, j'ai dit qu'il ne s'agissait pas

14 véritablement d'une conversation au sens où on l'entend habituellement; il

15 s'agissait plutôt de remarques qui ont été échangées rapidement. Monsieur

16 Milosevic a dit que les Albanais disposaient du soutien massif de la

17 population et qu'il s'agissait en fait là d'un cas de terrorisme massif.

18 Il ne s'agissait pas d'une conversation en tant que telle. Je l'ai

19 expliqué hier. Moi, je n'étais pas à même de discuter de ce genre de

20 choses avec M. Milosevic. Je n'avais pas le grade requis.

21 M. Nice (interprétation): Par rapport à ce que vous saviez, est-ce que

22 d'autres fonctionnaires de haut rang, à l'époque, y compris Perisic, est-

23 ce qu'ils prenaient une position en ce qui concerne la mort d'Albanais du

24 Kosovo ou une position qui était compatible avec l'attitude de l'accusé,

25 ou, comme vous l'avez décrit, toute différente qu'elle était, cette

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1 position?

2 M. Tanic (interprétation): Oui, je suis conscient de cela, je connais la

3 question beaucoup mieux parce que j'ai pu en discuter avec les personnes

4 en question, de façon plus longue: leurs positions étaient, la plupart du

5 temps, contraires à la position de l'accusé. Elles étaient opposées à

6 l'utilisation non sélective de la force.

7 Question: Plus récemment -et je pense au cours de la préparation du livre

8 dont vous avez parlé-, vous avez eu des entretiens avec différentes

9 personnes, y compris avec Perisic, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Pendant ces entretiens, est-ce qu'on vous a montré une lettre,

12 que vous allez pouvoir regarder, datée du 23 juillet 1998, émanant de

13 Perisic et adressée à l'accusé?

14 (Intervention de l'huissier.)

15 Est-ce que c'est bien la lettre qui vous avez été montrée par M. Perisic?

16 Réponse: Oui.

17 Question: L'original, ou la version en BCS, pourrait être placée sur le

18 rétroprojecteur, d'abord pour ce qui est de la première page; comme ça,

19 vous pouvez voir ce dont il s'agit. Puis le feuillet suivant.

20 Vous avez cette date du 23 juillet 1998 et c'est adressé au Président. Et

21 si vous regardez la dernière page, on peut voir comment elle se présente.

22 Il y a la signature de M. Perisic?

23 Réponse: Oui.

24 M. Nice (interprétation): Pourrait-on maintenant mettre la version

25 anglaise sur le rétroprojecteur, en commençant par la première page?

Page 4938

1 M. le Président (interprétation): Avant de faire cela, il faut savoir d'où

2 vient cette pièce.

3 M. Nice (interprétation): Oui.

4 Premièrement, est-ce que vous reconnaissez ceci comme étant la lettre qui

5 vous a été montrée?

6 M. Tanic (interprétation): Oui. Il s'agit de la lettre du chef d'état-

7 major général adressée à M. Milosevic en sa qualité de Président de la

8 Yougoslavie.

9 M. Nice (interprétation): En fait, cette version est, je crois, tirée d'un

10 livre parce que cette lettre a été publiée, n'est-ce pas?

11 M. Tanic (interprétation): Oui, oui. C'est bien clair. C'est tout à fait

12 identique à l'original de la lettre que j'ai vue, que j'ai lue, étudiée,

13 examinée et discutée avec plusieurs personnes.

14 M. le Président (interprétation): Oui, cela vient d'un livre: le livre du

15 témoin?

16 M. Nice (interprétation): Oui, cela vient d'un autre livre. Je crois que

17 c'est sur la première page pour ce qui est de l'original. Il y a les noms

18 des auteurs en haut et la date de publication en bas.

19 M. le Président (interprétation): Très bien.

20 M. Nice (interprétation): Je ne sais pas si nous avons l'ensemble du livre

21 ici. Si le Tribunal souhaite que…?

22 M. le Président (interprétation): Non, je veux simplement savoir si cela

23 doit être versé au dossier.

24 M. Nice (interprétation): Oui, j'espère que la méthode qui consiste à

25 résumer ces textes convient de façon satisfaisante. La traduction en

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1 anglais de ce livre, c'est "Le feu et l'inondation".

2 "Monsieur le Président, ayant analysé votre attitude, j'ai besoin de

3 communiquer d'urgence certains faits à votre connaissance. J'espère que

4 vous avez eu l'occasion de vous assurer de la conscience…, de la haute

5 conscience des militaires, etc.".

6 Paragraphe 3: "Nous ne serions pas corrects et sincères dans ces

7 circonstances très graves si, en tant que professionnels qui ont protégé

8 la VJ et la SRJ dans des conditions qui vous sont connues, nous ne

9 faisions pas remarquer les faits suivants: une tendance constante à

10 utiliser l'armée yougoslave en dehors des institutions du système, la

11 séparation d'unités de la VJ, de l'armée yougoslave, la tentative pour que

12 les personnes non habilitées puissent commander des unités de ce genre, le

13 fait de court-circuiter des niveaux de commandement dans des conversations

14 officielles avec des membres de la VJ et de mener des politiques du

15 personnel sur une base illicite et sans les critères voulus, des dépenses

16 financières en dehors de ce qui est prévu par la loi", et ainsi de suite.

17 Puis, un certain nombre d'exemples typiques sont donnés: "Premièrement, la

18 tendance du système d'utiliser l'armée en dehors des institutions du

19 système". Elle dit que cette situation Kosovo-Metohija aurait pu être

20 surmontée si un état d'urgence avait été déclaré lorsque des propositions

21 écrites avaient été adressées, lesquelles n'avaient pas été acceptées.

22 Et à la page B, il y a une demande au gouvernement pour s'assurer qu'il y

23 ait une proclamation légale sur l'une des questions suivantes: la

24 proclamation d'un état d'urgence.

25 Et elle poursuit: "Utiliser l'armée yougoslave dans ces conditions est

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1 intenable. Les véritables objectifs ne sont pas réalisés. Nous sommes

2 accusés d'être utilisés de telle manière; l'utilisation de l'armée de

3 cette façon a été remarquée par les observateurs et peut provoquer des

4 représailles de la communauté internationale et de l'OTAN. La solution

5 proposée serait d'utiliser de façon licite l'armée. La position est claire

6 pour nous et nous devons avoir une base politique et légale claire à ce

7 sujet.

8 Deuxièmement: séparation des unités. Vous avez décidé de séparer la

9 Brigade des gardes de la VJ; une telle décision n'est pas licite. Cette

10 décision devrait être annulée".

11 Ensuite point 3: "Tentative par des personnes non habilitées à commander

12 des unités de la VJ:

13 a) L'inspiration constante de membres du MUP d'avoir des unités

14 subordonnées à elle, conduit à des malentendus si ces unités ne reçoivent

15 pas les données nécessaires.

16 b) Tentative par des membres civils, des personnels civils, du personnel

17 de commander le Corps, la responsabilité du commandant du Corps pour

18 évaluer la situation, les plans d'opérations de l'armée et du MUP en

19 coopération avec des membres civils du personnel et du MUP, et rendre

20 compte à Sainovic et Minic."

21 Et ça poursuit ainsi: "En pratique, le commandant du Corps de Pristina

22 planifie ce qu'il reçoit comme ordre, ce qui est à la demande de Sainovic,

23 Minic et du MUP. Puisque c'est son vœu, comme notre vœu à tous, de

24 réaliser les plans si d'autres ne peuvent pas le faire ou ne vont pas le

25 faire, il le fait avec des unités du Corps de Pristina, ce qui conduit à

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1 une utilisation illégale, non systématique et inadéquate des unités de la

2 VJ, violant ainsi le système en dehors du système d'unités hiérarchique de

3 commandement. Il devrait y avoir un poste de commandement à Pristina qui

4 serait établi.

5 Quatrièmement: court-circuiter des niveaux de commandement dans des

6 conversations officielles avec des membres de l'armée -toutefois, parfois,

7 vous faites cela sans savoir que le chef de l'état-major général,

8 contrairement aux règles de commandement militaire et de subordination-

9 donne lieu à des violations qui rompent l'unité de l'armée. Une

10 proposition est faite pour le respect de ces principes de subordination

11 militaire d'unités de commandement.

12 Cinquièmement: conduire une politique du personnel sur une base illicite

13 et sans critères voulus: les généraux et les colonels sont souvent promus

14 dans la VSO -et en dehors de la VSO- sur une base illicite, sans décret ni

15 critère, ce qui a des effets négatifs extrêmement graves par rapport à

16 l'armée."

17 Monsieur Tanic, VSO, pouvez-vous nous dire ce que c'est que VSO?

18 Réponse: C'est le Conseil suprême de Défense.

19 Question: Parce que ce n'est pas sur notre liste. Je vous remercie.

20 Et on poursuit en disant: "Il est nécessaire de respecter les lois, les

21 décrets, les critères de promotion" et, à la page suivante pour l'anglais:

22 "Chaque institution dépend des éléments principaux du système et expose ce

23 que doit être un général, les propositions pour s'abstenir de faire des

24 promotions lorsque cela n'est pas conforme à la loi."

25 (Le Président se consulte avec le Juge Kwon.)

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1 "Sixièmement: dépenses financières illicites. Vous m'avez donné l'ordre de

2 rendre des immeubles et des meubles pour les besoins du MUP. Sur la base

3 de la loi SRJ sur les biens, vous n'avez pas le droit de me donner ces

4 ordres et je n'ai pas le droit d'appliquer ces ordres en ce qui concerne

5 des paiements matériels en dehors de la VJ. Solutions proposées:…"

6 Et ensuite, il y a un certain nombre de paragraphes de conclusion qui

7 expriment "l'inquiétude que, si ces problèmes ne sont pas réglés, sans

8 cela, cette institution unique et hautement fonctionnelle yougoslave va se

9 transformer en une masse amorphe et désunie du point de vue fonctionnel".

10 Donc, quelques commentaires. Le reste, on pourra le lire.

11 J'aurais souhaité des commentaires sur ce que nous venons de regarder.

12 Pouvez-vous nous aider? Nous avons vu une référence faite à la Brigade des

13 gardes. Auriez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet? Qu'est-ce que

14 cela veut dire, qu'est-ce que cela représente?

15 Réponse: La Brigade des gardes était censée être sous le commandement

16 personnel de M. Milosevic pour appliquer des ordres que l'armée n'aurait

17 pas appliqués parce que ça aurait impliqué l'utilisation illicite de la

18 force.

19 (Les interprètes demandent si le témoin pourrait parler un peu plus

20 lentement.)

21 M. Nice (interprétation): Je suis bombardé d'instructions sur la façon

22 dont vous devriez… S'il vous plaît, allez plus lentement. Bombardement de

23 ma part; je ne décris personne d'autre.

24 Y a-t-il d'autres éléments en ce qui concerne la référence à des civils

25 qui donneraient des instructions? Pouvez-vous nous éclairer là-dessus: du

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1 personnel civil qui donnerait des instructions?

2 M. Tanic (interprétation): Eh bien, ceci a trait à cette chaîne de

3 commandement privée ou occulte des envoyés de M. Slobodan Milosevic qui

4 étaient engagés, l'armée ne pouvant recevoir d'ordres du personnel civil.

5 Ceci pour ce qui serait fait au Kosovo.

6 M. Kwon (interprétation): La pièce à conviction en serbe, vous dites que

7 c'est l'original. Est-ce bien, cet exemplaire, une photocopie de la lettre

8 originale ou est-ce qu'elle a été réimprimée?

9 M. Tanic (interprétation): Non, c'est une photocopie de l'original, de la

10 lettre originale, mais peut-être recadrée pour l'impression parce que

11 c'était sur un format A4 qui est le format officiel pour les

12 communications de ce genre, le format A4.

13 M. Kwon (interprétation): Se fait-il que M. Perisic aurait gardé cette

14 lettre après l'avoir adressée à M. Milosevic?

15 M. Tanic (interprétation): Bien sûr qu'il a gardé des copies; c'est un

16 document officiel, cela fait partie des archives. On peut le voir avec

17 l'en-tête, il y a également le timbre "confidentiel", et également les

18 voies officielles par lesquelles elle a été transmise. Le chef d'état-

19 major général a le droit de garder une copie de documents officiels de ce

20 genre.

21 M. Kwon (interprétation): Est-ce qu'il était chef état-major de l'armée

22 par la suite, après avoir envoyé cette lettre à l'accusé?

23 M. Tanic (interprétation): Oui. Pendant trois mois et demi à quatre mois,

24 je crois.

25 M. Nice (interprétation): Nous allons arriver à la question de la fin des

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1 fonctions de Perisic par la suite. Mais je crois que ce que l'on

2 souhaiterait savoir, ce que les Juges souhaiteraient savoir de façon plus

3 détaillée, c'est: est-ce qu'il vous a montré son propre exemplaire de

4 cette lettre qu'il avait gardée ou est-ce que Perisic vous a montré un

5 exemplaire qui avait été conservé et déjà utilisé pour la publication dans

6 le livre de quelqu'un d'autre?

7 M. Tanic (interprétation): Non, pas à l'époque; cette copie n'était

8 imprimée dans aucun livre. Il m'a montré son propre exemplaire, sa copie à

9 lui, deux ou trois ans avant qu'elle soit publiée dans un livre.

10 M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice, pour revenir sur le premier

11 exemple typique qui est donné, le chef du personnel dit que la situation

12 du Kosovo et Metohija aurait pu être surmontée si on avait déclaré l'état

13 d'urgence, comme il l'avait d'ailleurs recommandé.

14 Le témoin n'est pas juriste, mais serait-il capable de nous dire

15 brièvement comment la déclaration d'état d'urgence aurait fait une

16 différence? A-t-il connaissance des pouvoirs qui auraient été mis à la

17 disposition de M. Milosevic dans un état d'urgence proclamé, et qui aurait

18 joué un rôle essentiel dans cette situation? S'il ne sait pas, il n'a pas

19 besoin de répondre.

20 M. Nice (interprétation): Est-ce que vous pouvez répondre à la question

21 posée par le Juge Robinson, Monsieur le Témoin?

22 M. Tanic (interprétation): Je pense que je peux faire une réponse utile,

23 mais c'est à la Chambre qu'il appartient de voir si j'en suis capable.

24 D'après notre Constitution, M. Milosevic n'aurait pas eu plus ou moins de

25 pouvoir si un état d'urgence avait été déclaré de façon régulière par

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1 l'Assemblée de Yougoslavie.

2 Le problème est ailleurs: si un état d'urgence avait été proclamé par

3 l'Assemblée yougoslave, il aurait fallu que ce soit précédé par un débat

4 national important sur la question de savoir s'il y avait vraiment

5 terrorisme dans une partie du pays à un degré tel que cela nécessitait

6 l'utilisation de l'armée ou de la police. Ou si ce n'était pas le cas, à

7 ce moment-là on aurait eu une discussion la question savoir si le problème

8 de terrorisme au Kosovo était tellement important ou si c'était seulement

9 fabriqué, grandi exagérément. D'autre part, la déclaration d'un état

10 d'urgence obligeait le président de la République, dans ce cas-là M.

11 Milosevic, de prendre d'autres mesures politiques et ceci aurait empêché

12 le côté volontariste et non sélectif de l'emploi de la force.

13 Voilà comment je vois les choses et c'est la meilleure réponse que je peux

14 vous donner pour vous assister.

15 Question: Il y a quelques autres questions qui découlent du document que

16 nous venons d'examiner. Le matériel VJ de l'armée qui allait au MUP…

17 Répondez simplement par oui ou par non à cette question, s'il vous plaît.

18 Savez-vous quelle était la participation, s'il y en a eu une, de l'accusé

19 pour savoir si du matériel de l'armée devait aller au MUP? Répondez par

20 oui ou par non, s'il vous plaît.

21 Réponse: Oui.

22 Question: Vous avez appris cela de l'accusé lui-même ou par des documents

23 que vous auriez vus vous-même, par une personne quelconque?

24 Réponse: Non, pas de l'accusé personnellement. Je n'ai pas appris cela

25 directement, j'ai appris cela en parlant au chef du SDB, à des hommes

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1 politiques et par le fait que j'ai vu certains documents.

2 Question: Dans ces conditions, pouvez-vous nous dire: d'après ces sources,

3 vous avez compris qu'il y avait une participation de l'accusé dans le fait

4 de confier du matériel de l'armée au MUP?

5 Réponse: Pour autant que j'ai compris, la participation de l'accusé M.

6 Milosevic était essentielle.

7 M. Nice (interprétation): Bien. On reviendra peut-être sur certains de ces

8 points lorsqu'ils deviendront pertinents dans d'autres passages.

9 M. le Président (interprétation): Le numéro de la pièce?

10 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce à conviction 150.

11 M. Milosevic (interprétation): S'agit-il de ce livre-ci? Est-ce que ce

12 livre est en train de devenir une pièce à conviction versée au dossier?

13 M. le Président (interprétation): C'est la lettre qui est vraiment une

14 pièce. Si vous voulez que ce soit le livre, laissez l'accusé voir le

15 livre.

16 M. Milosevic (interprétation): Je demande si c'est le livre qui est une

17 pièce versée au dossier. Parce que je vois qu'il s'agit d'un livre qui

18 s'appelle "Feu et inondation", publié à Belgrade.

19 M. le Président (interprétation): On va vous tendre ce livre, vous pourrez

20 le regarder et vous pourrez nous dire ce que vous voulez à ce sujet.

21 M. Nice (interprétation): Je vérifie pour voir si on peut le trouver ici.

22 Je vais essayer de me le procurer pendant la suspension de l'audience,

23 essayer de trouver la source du livre et se procurer un exemplaire le plus

24 rapidement possible.

25 M. le Président (interprétation): Bien.

Page 4947

1 M. Nice (interprétation): Le paragraphe 77, au milieu… Excusez-moi, le 78,

2 pour ce qui est justement des dépositions à faire.

3 S'il vous plaît, répondez par oui ou par non à ma question: avez-vous eu

4 un entretien avec quelqu'un qui a traité des ordres donnés en 1998 à des

5 commandants locaux au Kosovo? Avez-vous parlé de ce sujet? Oui ou non,

6 s'il vous plaît?

7 M. Tanic (interprétation): Oui.

8 Question: Avec qui avez-vous eu cette conversation, et où?

9 Réponse: Les chefs de la sécurité d'Etat et le Président de mon parti. Il

10 y a eu toute une série de conversations à ce sujet, avec mes collègues

11 politiques.

12 Question: Et ces entretiens que vous avez eus, ils étaient contemporains

13 des événements, en même temps que les événements ou après, lorsque vous

14 avez préparé votre livre?

15 Réponse: C'était contemporain, c'était au même moment. Par la suite, j'ai

16 seulement pu faire des comparaisons.

17 Question: De quoi s'agissait-il ce fait de donner des ordres aux

18 commandants locaux?

19 Réponse: J'ai reçu des renseignements de diverses sources, tout à fait

20 identiques, qu'en pratique la soi-disant commission d'Etat pour le Kosovo,

21 qui consistait en sept ou huit personnes pour s'occuper ce qui se passait

22 au Kosovo, qui était un organe para-politique et qui allait au-delà des

23 autorités légales de la Yougoslavie, ceci voulait dire qu'en fait ils

24 transmettaient directement, faisaient directement appliquer les ordres

25 personnels de M. Milosevic concernant l'utilisation illégale de la force

Page 4948

1 et l'utilisation non sélective de la force, par des moyens qui ne

2 correspondaient pas aux buts voulus pour une utilisation de la force.

3 Question: Bien. Je pense que nous viendrons directement à cette question

4 de cette commission d'Etat au paragraphe 83, sur la page du résumé.

5 Quand cet organe a-t-il été créé? Qui, à votre connaissance, en étaient

6 les membres?

7 Réponse: Pour autant que je sache, cela a été formé à un stade très

8 précoce, pendant le premier tiers de 1998. Les membres de cette commission

9 -qui n'a rien à voir avec mon opinion d'ailleurs de cette connaissance

10 publique…

11 Question: Je vous interromps pour vous inviter à ne pas nous donner votre

12 opinion; c'est uniquement pour les Juges. Je vous demande de nous dire ce

13 que vous avez appris à l'époque comme étant les faits.

14 Une commission a été constituée très tôt, et elle comprenait qui?

15 Réponse: Sainovic, Minic, Andjelkovic, Matkovic, c'étaient les civils. Et

16 puis, il y avait les militaires: les généraux Pavkovic et autres noms,

17 probablement que c'étaient les autres membres. Mais les premiers, j'en

18 suis sûr. Le premier nom était Matkovic.

19 Question: Et son prénom?

20 Réponse: Je crois que c'était Dusan.

21 Question: Très bien, j'avais mal entendu.

22 Pouvez-vous à présent nous dire quelques mots d'un sujet auquel il a été

23 fait référence de temps en temps, quelque chose qui s'appelle "Fer à

24 cheval"? Là encore, je ne vous demande pas votre opinion, mais simplement

25 des faits. A-t-il existé un plan désigné par le nom de "plan Fer à

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1 cheval"?

2 Réponse: Ce n'était pas le nom officiel de ce plan, c'était le nom

3 familier d'un plan tout à fait différent.

4 Question: Très bien. Mais nous aimerions comprendre ce nom familier, cette

5 dénomination familière. Pouvez-vous nous dire à quel moment cette

6 dénomination a-t-elle été utilisée pour la première fois?

7 Réponse: Je sais en quoi consiste ce plan, mais à quel moment cette

8 dénomination a été utilisée pour la première fois, je ne le sais pas

9 vraiment. D'autant plus qu'il s'agissait d'une dénomination familière qui

10 n'était pas le nom officiel de ce plan.

11 Question: Mais de quoi était-il question?

12 Réponse: Il s'agissait des méthodes d'entraînement anciennes de la JNA, un

13 plan de formation utilisé donc par la JNA ancienne. C'était un plan

14 destiné à mettre en pratique les entraînements habituels dans les armées

15 occidentales, en cas d'agression sur la Yougoslavie à partir du sud-est de

16 l'Europe. Si la population albanaise prenait partie pour l'agresseur

17 étranger, ce plan devait être appliqué. L'armée yougoslave donc

18 n'appliquerait ce plan que si ces deux conditions étaient réunies.

19 Il s'agissait de tenir sept positions défensives et de s'efforcer de

20 neutraliser les forteresses albanaises. Ce plan a été stocké dans les

21 archives et n'aurait dû être réactivé que si toutes les autres conditions

22 étaient réunies, en particulier pour le Kosovo.

23 Question: Les sept positions défensives dont vous venez de parler,

24 pourriez-vous les énumérer? Notamment, si vous aviez une carte

25 géographique sous les yeux, pourriez-vous utiliser le pointeur pour nous

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1 indiquer leur emplacement?

2 Réponse: Quand nous avons discuté, j'ai utilisé des notes écrites où ces

3 positions étaient inscrites, mais ici, je n'ai pas le droit d'utiliser de

4 notes, donc je préférais ne pas m'exprimer sur ce point par crainte de

5 commettre une erreur. Il s'agit de sept positions défensives qui

6 constituent, lorsqu'elles sont reliées les unes aux autres, un demi-

7 cercle. Cela figure dans ma déclaration écrite.

8 M. Nice (interprétation): Nous voyons celles qui ont été énumérées au haut

9 de la page 15, paragraphe 75, de votre déclaration.

10 Mais si les Juges de cette Chambre souhaitaient voir l'emplacement de ces

11 positions sur une carte géographique, nous pourrions utiliser la première

12 carte de l'atlas du Kosovo.

13 M. le Président (interprétation): Les Juges, effectivement, estimeraient

14 que ce serait utile.

15 M. Nice (interprétation): Eh bien, je demande dans ce cas que l'on remette

16 au témoin cette carte géographique et qu'on en place un exemplaire sur le

17 rétroprojecteur.

18 (Intervention de l'huissier.)

19 Je vous demanderai d'utiliser le pointeur, Monsieur Tanic, si vous voulez

20 bien, pour indiquer l'emplacement de ces positions.

21 D'abord, il y a le mont Deravica, n'est-ce pas?

22 M. Tanic (interprétation): Excusez-moi, mais je demande l'accord des

23 Juges. Je ne suis pas un expert militaire et je ne souhaiterais pas

24 indiquer sur cette carte l'emplacement de ce genre de choses; d'autres

25 peuvent le faire mieux que moi.

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1 Question: Très bien, très bien. J'abandonne. Nous avons la liste des noms

2 de ces positions données par le témoin et nous pourrons faire appel à un

3 autre témoin pour en indiquer l'emplacement sur la carte.

4 Monsieur Tanic, savez-vous si, à l'époque du conflit, une expression de

5 l'intention d'agir en rapport avec ce "plan Fer à cheval" a été exprimée

6 d'une façon ou d'une autre?

7 Réponse: Eh bien, les choses sont très simples: l'objectif principal et

8 l'intention n'existaient pas, il n'y avait pas d'agression étrangère et la

9 population albanaise n'a pas pris parti pour l'agresseur étranger.

10 Question: Monsieur Tanic, je vous interromps un instant. Je vous en prie,

11 répondez par oui ou non: à l'époque, y a-t-il eu expression d'une

12 intention d'agir d'une façon quelconque en rapport avec ce plan, oui ou

13 non?

14 Réponse: Oui.

15 Question: A-t-il, de façon générale, été admis que ce plan était opportun

16 à l'époque, ou quelqu'un a-t-il résisté, s'est-il opposé à son

17 application?

18 Réponse: Pour autant que je le sache, la direction de l'armée et la

19 direction des services de sécurité de l'Etat.

20 Question: Ont-elles accepté ou rejeté l'application de ce plan?

21 Réponse: Non, elles ne souhaitaient absolument pas utiliser ce plan, car

22 il n'y avait pas d'agression étrangère ni de soulèvement albanais. Ou

23 plutôt la population albanaise ne s'est pas mise du côté de l'agresseur

24 étranger, car il n'y avait pas d'agresseur étranger.

25 Question: Qui vous a appris ce que ces structures ont rejeté l'application

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1 de ce plan?

2 Réponse: Je l'ai appris de la direction militaire. Je demanderai tout de

3 même de ne pas avoir à prononcer certains noms pour ne pas nuire à ces

4 personnes, car nombre de ces personnes subissent aujourd'hui des

5 pressions.

6 M. Nice (interprétation): Très bien, très bien. Passons au paragraphe 88.

7 M. Milosevic (interprétation): Objection!

8 M. le Président (interprétation): Oui, quelle est votre objection?

9 M. Milosevic (interprétation): Le témoin doit répondre aux questions qui

10 lui sont posées. Quel sens y a-t-il à lui permettre de dire quelque chose

11 d'aussi absurde que ce qu'il a dit pour ensuite l'autoriser à ne pas citer

12 les sources, à ne pas dire qui lui a dit cela?

13 M. le Président (interprétation): C'est un argument que vous pourrez

14 présenter en temps utile. Vous pourrez reposer cette question au cours du

15 contre-interrogatoire et nous déciderons ce qu'il convient d'en faire.

16 Dans l'intervalle, le témoin peut poursuivre comme il l'a fait jusqu'à

17 présent.

18 M. Nice (interprétation): Paragraphe 88. Nous en revenons à un sujet qui a

19 fait l'objet d'une question de M. le Juge Kwon, il y a quelques instants.

20 Y a-t-il eu des mutations au sein des niveaux supérieurs, à l'automne

21 1998? Pouvez-vous en donner la liste, je vous prie?

22 M. Tanic (interprétation): Oui. Suite à l'accord conclu entre M. Milosevic

23 et M. Holbrooke sur une solution pacifique et politique pour le Kosovo,

24 très peu de temps plus tard, les dirigeants des services de sécurité de

25 l'Etat de Serbie ainsi que les dirigeants de l'état-major ont été

Page 4953

1 modifiés: M. Stanisic et tous les cadres qui travaillaient sous ses

2 ordres, ainsi que M. Perisic et ceux qui travaillaient sous ses ordres.

3 Question: Ils ont été remplacés par qui? Pouvez-vous nous donner les noms

4 de ceux qui les ont remplacés? Perisic a été remplacé par qui? Paragraphe

5 90.

6 Réponse: Par le général Ojdanic.

7 Question: Quel était son grade avant d'être nommé à ce poste? Quelle était

8 son appartenance politique, s'il en avait une?

9 Réponse: Je vous prie de m'excuser mais, en ce qui concerne le grade, je

10 ne comprends pas la question. Et en ce qui concerne son appartenance

11 politique, si je ne m'abuse, il était proche du parti JUL. Quant à la

12 question que vous posez au sujet du grade, je ne suis pas en mesure de

13 répondre, tout simplement.

14 Question: Qui a remplacé Stanisic?

15 Réponse: Monsieur Radomir Markovic. Nous l'appelons Rade Markovic mais son

16 prénom officiel est Radomir.

17 Question: Quelles avaient été les appartenances politiques antérieures de

18 M. Markovic, s'il en avait eu?

19 Réponse: Il avait des rapports personnels très proches avec M. Milosevic

20 et sa famille. Mais il n'avait jamais travaillé dans le domaine de la

21 sécurité de l'Etat; il avait plutôt travaillé dans le domaine de la

22 police, donc dans le domaine que nous, nous avons l'habitude de désigner

23 sous le nom de sécurité publique.

24 Question: Et M. Dimitrijevic a été remplacé par qui? Le savez-vous?

25 Réponse: Je n'en suis pas très sûr du nom de celui qui l'a remplacé. Je

Page 4954

1 n'aimerais pas fournir une réponse erronée.

2 Question: Très bien, très bien.

3 Paragraphe 91. En 1998, quelque chose s'est-il passé en rapport avec ce

4 que vous avez appelé des matériels ou des éléments économiques au Kosovo?

5 Réponse: Si je vous comprends bien, vous parlez de ce que nous appelons

6 les "revenus matériels". Et, par cette expression, nous faisons référence

7 aux biens mobiliers et immobiliers. C'est bien de cela que vous parlez?

8 Question: Oui.

9 Réponse: S'il s'agit donc des revenus matériels, oui, il y a eu des

10 modifications.

11 Question: De quoi parlez-vous et de quel moment parlez-vous? S'agit-il de

12 cela par rapport à l'intervention de l'OTAN?

13 Réponse: Je crains qu'il n'y ait un malentendu entre nous, mais je vais

14 m'exprimer de façon à voir s'il y a effectivement malentendu.

15 Si nous parlons des revenus, des ressources matérielles, eh bien, je veux

16 parler de l'arrivée de véhicules de combat qui faisaient partie de

17 l'artillerie, de l'artillerie légère des chars, et d'autres éléments

18 matériels. En fait, tout ce que l'armée peut utiliser contre des civils

19 parce que, s'agissant des Albanais, c'étaient des citoyens de Yougoslavie.

20 Je pense c'est ce que vous avez dans l'esprit: donc des ressources pour

21 mener des combats. Si vous faites référence à des éléments matériels ou à

22 des ressources matérielles d'une autre nature, nous pourrions peut-être

23 régler ce malentendu.

24 Question: Y a-t-il aussi eu l'arrivée de réserves de carburant?

25 Réponse: Oui, j'ai supposé que c'était compris dans ma réponse.

Page 4955

1 Effectivement, depuis plusieurs mois avant le conflit avec le Pacte de

2 l'OTAN, du carburant, des réserves stratégiques de carburant ont été

3 transportées dans des réservoirs de plus petite taille, à partir de toute

4 la Serbie. C'étaient des réservoirs qui appartenaient aux organisme

5 militaires et économiques. Donc des réservoirs de carburant stratégiques

6 ont été transférés d'un endroit à l'autre, plusieurs mois avant le début

7 et durant la conférence de Rambouillet, ou plutôt durant les contacts

8 entre Milosevic et Holbrooke, qui ensuite ont donné lieu de la conférence

9 de Rambouillet.

10 Question: Merci.

11 Paragraphe 94: vous avez eu une conversation, mais j'aimerais que nous en

12 parlions de façon très précise et que nous abordions les questions qui ont

13 été traitées dans cette conversation avec le plus grand soin.

14 Vladimir Stambuk, rappelez-nous ses fonctions à l'époque.

15 Réponse: Il était vice-Président du Gouvernement de Serbie; l'un des vice-

16 Présidents, en fait.

17 Question: Avez-vous, oui ou non, eu une conversation avec lui en 1998, je

18 crois, au sujet du problème avec les Albanais du Kosovo? Oui ou non?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Où et, pour autant que vous puissiez le préciser, quand a eu

21 lieu cette conversation?

22 Réponse: La conversation a eu lieu entre l'ambassadeur britannique, M.

23 Donnelly, et l'ambassadeur allemand, M. Gruber, M. Stambuk et moi-même.

24 Elle s'est déroulée dans les locaux de l'ambassade allemande, je crois,

25 deux semaines avant l'accord conclu entre Milosevic et Holbrooke. Peut-

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1 être dix jours avant. En tout cas, très peu de temps avant la conclusion

2 de cet accord.

3 Question: Très bien. Quel a été le sujet de cette conversation, de façon

4 générale?

5 Réponse: Cette conversation a eu pour objet le fait de savoir comment

6 éviter l'intervention aérienne sur la Yougoslavie car, à l'époque, on

7 sentait bien qu'il était déjà fortement question qu'une telle intervention

8 aérienne ait lieu. Nous discutions alors pour savoir s'il était possible

9 de conclure un accord avec Holbrooke et si Holbrooke était en mesure

10 d'empêcher une telle intervention, pour être tout à fait précis.

11 Question: En d'autres termes, je pense que des observations précises vous

12 ont été faites par M. Holbrooke au cours de cette conversation?

13 Réponse: Oui, M. Holbrooke a prononcé une observation que j'avais déjà

14 entendue de la bouche d'autres personnes. Il l'a citée à titre d'exemple:

15 il a donné l'exemple qui avait déjà été formulé par deux ambassadeurs de

16 pays du Pacte de l'OTAN, en disant qu'en fait "l'OTAN n'avait rien, à

17 l'époque, contre un bombardement de la Yougoslavie". Bien sûr, tout à fait

18 normalement, j'ai réagi à cela.

19 Question: Il a ensuite donné des détails: a-t-il dit ce qui allait se

20 passer s'il y avait une opération de bombardement de petite envergure qui

21 était lancée?

22 Réponse: Il ne l'a pas expliqué devant les ambassadeurs britannique et

23 allemand, parce que je lui ai demandé de nous écarter du groupe, lui et

24 moi, et d'en parler seul à seul. Ensuite, nous avons parlé de cela, je lui

25 ai demandé comment les choses se passeraient, qui était le fonctionnaire

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1 qui disait que les officiels de Belgrade n'avaient rien contre, car dire

2 qu'ils n'avaient rien contre, cela voulait dire en d'autres termes qu'ils

3 invitaient, qu'ils appelaient une telle intervention.

4 Question: Très bien. Je ne vous demande pas de détails trop nombreux, mais

5 de nous dire simplement ce qui a été dit. Il vous a donc fait ces

6 observations et vous lui avez répondu. Y a-t-il eu d'autres observations

7 qu'il vous a faites?

8 Réponse: Il m'a répondu que je n'avais pas bien compris certaines choses,

9 mais que le président de mon parti, M. Mihajlovic, avait en fait signalé

10 qu'un bombardement de petite envergure contre Belgrade serait en fait un

11 très bon alibi pour justifier la persécution des Albanais et l'opposition

12 des Serbes aux Albanais. Parce qu'en temps de guerre, personne ne peut

13 poser de questions. Il m'a alors conseillé de transmettre au président de

14 mon parti un message dans lequel il était dit que "revenir à la coalition

15 serait une bonne chose et que tenter de s'opposer aux tentatives de

16 construction artificielle des conditions d'une guerre ou d'un conflit

17 serait une bonne chose également". C'est ce qu'il a conseillé.

18 Question: Vous avez utilisé l'expression "continuer et poursuivre la

19 persécution des Albanais". Manifestement, cela fait déjà longtemps et je

20 suppose que vous ne vous rappelez pas mot à mot ce que vous avez dit ou ce

21 qui vous a été dit au sujet des Albanais et de la persécution qui

22 sévissait contre eux?

23 Réponse: Eh bien, il parlait de "terminer le nettoyage ethnique, d'avoir

24 un prétexte pour achever ce nettoyage ethnique des Albanais et les

25 expulser du territoire de Yougoslavie". J'ai entendu ces mots comme

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1 signifiant cela; d'autres personnes également. Ils figurent dans d'autres

2 documents, indépendamment d'ailleurs des points de vue et opinions

3 exprimés par les uns et les autres.

4 Question: Vous parlez, en rapport avec le dernier sujet que nous venons de

5 traiter, mais également d'un sujet évoqué précédemment, de l'admissibilité

6 de cela pour d'autres pays également.

7 Réponse: Oui, s'agissant de cela, d'autres pays également.

8 Question: Je vais répéter ma question. Vous dites, en rapport avec le

9 dernier sujet abordé mais également en rapport avec un sujet abordé

10 précédemment, c'est-à-dire l'admissibilité d'un bombardement à petite

11 échelle, que des tiers avaient dit la même chose que ce que M. Stambuk

12 disait ce jour-là.

13 Pouvez-vous nous donner le nom de ces autres personnes qui ont parlé

14 ainsi, soit lors d'une réunion à l'ambassade soit autre part?

15 Réponse: Eh bien, de nombreuses personnes l'ont dit, à commencer par M.

16 Milovan Bojic et d'autres, c'est-à-dire des représentants du SDS, des

17 dirigeants, M. Milutinovic lui-même d'ailleurs. Je ne peux pas énumérer le

18 nom de toutes ces personnes, elles étaient nombreuses. Tout le monde

19 parlait de cela, parlait d'un bombardement à petite échelle comme ne

20 posant aucun problème. Bien sûr, pas dans des déclarations publiques, mais

21 dans des conversations privées, et en d'autres occasions également.

22 Question: Paragraphe 96, il y a un homme qui s'appelle Bogdan Tomas. Qui

23 était-il en 1998 et quelles étaient ses fonctions?

24 Réponse: J'aimerais renouveler la question que j'ai déjà posée

25 précédemment, j'aimerais garder cette question et la réponse que j'y

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1 apporterai pour un moment de cette audience où je pourrai m'exprimer à

2 huis clos, car je ne souhaite placer personne en situation dangereuse.

3 Toutes ces personnes subissent suffisamment d'aléas et de risques, pour

4 que je n'ajoute pas des risques supplémentaires.

5 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, je laisserai donc cette

6 question de côté et y reviendrai à la fin, lorsque nous aborderons en une

7 seule fois toutes les questions à traiter à huis clos privé. Je pense que

8 la même chose s'appliquera à l'Article 77.

9 Monsieur le Témoin, il est possible que vous en ayez parlé hier, mais

10 j'aimerais ajouter quelques détails, si vous n'y voyez pas d'inconvénient,

11 aujourd'hui.

12 Avez-vous appris quoi que ce soit au sujet de l'attitude de l'accusé vis-

13 à-vis des informations concernant l'UCK, de façon générale, et au sujet de

14 son attitude concernant la reddition à l'institution, où nous nous

15 trouvons, de toute personne ayant commis des crimes contre les Serbes? Oui

16 ou non? Avez-vous appris quoi que ce soit au sujet de son attitude sur ces

17 points?

18 Réponse: Oui.

19 Question: D'où vous sont venus ces renseignements au sujet de son

20 attitude? Qui vous en a parlé?

21 Réponse: Des tiers.

22 Question: Pouvez-vous nous donner l'éventail des personnes, et de leurs

23 fonctions, qui se sont exprimées sur l'attitude de l'accusé à ce sujet?

24 Réponse: La direction de la sécurité, les structures différentes de la

25 sécurité d'Etat, la direction de l'armée, les structures politiques. Et je

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1 peux parler également de cela à huis clos partiel, il n'y aura pas de

2 problème.

3 M. Nice (interprétation): Quelle était l'attitude de l'accusé quand il a

4 appris que l'UCK était prête à remettre ses hommes à l'institution où nous

5 nous trouvons?

6 (Les Juges se consultent sur le siège.)

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, c'est un témoignage

8 important, j'aimerais que vous y reveniez plus tard. Nous, nous

9 examinerons la nécessité d'un huis clos partiel ou complet un peu plus

10 tard.

11 M. Nice (interprétation): Eh bien, dans ce cas, je parlerai séparément de

12 toute la page 18. Nous pouvons donc passer directement à la page 18 de la

13 déposition du témoin. Il y a un élément très important en page 18, mais

14 j'y reviendrai plus tard; pas à huis clos mais néanmoins plus tard.

15 Je vous renvoie à présent au paragraphe 101 de la déposition.

16 Monsieur le Témoin, avez-vous appris que des opérations ont été conduites

17 contre l'UCK en 1998? Et notamment, avez-vous appris quoi que ce soit au

18 sujet de l'implication de la famille Jashari, oui ou non?

19 M. Tanic (interprétation): Oui.

20 Question: Y a-t-il eu un modèle, selon les renseignements dont vous

21 disposiez, un modèle, un schéma, une structure particulière pour cette

22 opération, notamment du point de vue de la dimension de l'action initiale

23 qui devait être lancée contre l'UCK?

24 Réponse: Oui. Il existe des schémas appliqués que l'on trouve dans la loi,

25 bien sûr, mais également dans divers règlements utilisés par les forces

Page 4961

1 armées, par la direction de l'armée.

2 Question: Et le schéma que vous avez pu reconnaître, quel était-il?

3 Réponse: Ce schéma consistait d'abord dans le fait qu'on autorisait, qu'on

4 admettait un nombre limité de victimes serbes afin de faire monter la

5 tension, et ensuite qu'on lançait une opération massive et non sélective

6 contre la population albanaise. Opération beaucoup plus importante que

7 cela n'eût été nécessaire pour éliminer les rebelles, mais qui était

8 destinée à détruire des vies et des bâtiments civils.

9 Ce schéma donc ne concernait pas uniquement la famille Jashari; il a été

10 mis en oeuvre à Decani également, avec certaines variantes. Mais, en

11 général, il s'agissait d'emploi massif de la force et d'emploi non

12 sélectif de la force, ce qui était contraire au règlement de la police et

13 de l'armée, et contraire à la loi de façon générale.

14 Question: Nous reviendrons sur ce schéma. Nous reviendrons également sur

15 les deux endroits que vous avez identifiés il y a quelques instants. Mais,

16 pour le moment, je vous demande, sur la base de ce que vous saviez des

17 services de sécurité avec lesquels vous étiez en contact, quelle était,

18 selon vous, la façon opportune de traiter du problème des terroristes dans

19 une communauté civile? Paragraphe 105.

20 Réponse: Eh bien, cela n'a rien à voir avec mon opinion. C'est une

21 procédure qui est prescrite et qui s'appelle une "procédure de combat". Ce

22 n'est pas une procédure autre qu'une procédure de combat, et c'est une

23 procédure légale. Cette procédure de combat a été prévue par la loi; elle

24 figure dans les règlements officiels de l'armée et de la police s'agissant

25 du déploiement des différents services et des efforts à accomplir pour

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1 séparer les civils des terroristes, notamment dans des circonstances où

2 l'on sait que de nombreux terroristes recourent à l'utilisation des civils

3 en tant que bouclier humain ou ce genre de choses. Il y a des techniques,

4 des moyens, des logistiques qui sont tous liés à des opérations de combat

5 et qui permettent un bon équipement de nos unités. Après, tout ce qui doit

6 être fait, c'est tenter de les arrêter quel qu'en soit le prix et non les

7 tuer.

8 Et les arrestations peuvent se faire de diverses façons. Vous avez des

9 moyens de combat destinés à effectuer des arrestations, à mettre des gens

10 en prison. Mais, en tout état de cause, le recours massif à la force par

11 rapport à des civils serait...

12 Question: Je pense que c'est suffisant. Et maintenant, j'en arrive à la

13 dernière question, paragraphe 106.

14 Où se trouvaient les unités équipées du matériel nécessaire et de

15 l'équipement nécessaire pour traiter avec des terroristes en bonne et due

16 forme, à l'époque dont nous parlons?

17 Réponse: Ils n'étaient pas équipés de ces matériels, ils n'avaient que des

18 cadres nécessaires et ce sont précisément les raisons des critiques

19 exprimées par Stanisic et Perisic.

20 Question: Il y a peut-être un malentendu entre nous sur ce point.

21 Réponse: Ils ont été critiqués pour cela.

22 Question: Ces unités, à l'époque, disposaient-elles par exemple de gaz

23 lacrymogènes ou d'équipements de ce genre que l'on peut utiliser contre

24 des terroristes de façon contrôlée, maîtrisée, tel que l'avez expliqué, il

25 y a quelques paragraphes?

Page 4963

1 Réponse: Oui, en effet. Dans les entrepôts, ces équipements existaient,

2 mais ils n'ont pas été utilisés; c'est de là que vient le malentendu entre

3 nous. Ils ne les ont pas utilisés sur le terrain. Ils avaient tout

4 l'équipement nécessaire, la logistique, mais seulement sur le papier.

5 Question: Merci. Vous avez donné deux exemples: les familles Jashari et

6 Decani. En ce qui concerne les détails de ce qui est survenu lors de ces

7 deux incidents, car je crois qu'il s'agit de deux incidents, quelle était

8 votre source d'information de façon générale?

9 Réponse: Eh bien, encore une fois, la direction des services de sécurité

10 de l'Etat et l'armée, mais j'aimerais en parler à huis clos partiel:

11 certaines personnes risquent, là encore, d'être mises en danger.

12 Question: Passons sur vos sources, donc. Mais d'après vous, qui était

13 responsable de ces missions, à l'époque?

14 Réponse: Nous avons discuté d'abord longuement du problème. Ils ne m'ont

15 pas dit cela tout de suite, nous avons eu une discussion durable au sujet

16 de ce genre de problème.

17 Question: Vous ne m'avez peut-être pas écouté ou peut-être est-ce ma

18 faute, peut-être ai-je mal formulé ma question. Qui, à la direction, était

19 chargé de ces missions qui ont eu le caractère que vous avez décrit,

20 paragraphe 102 de votre déposition?

21 Réponse: Eh bien, en ce qui concerne les aspects pratiques, c'étaient les

22 civils, le personnel civil; cela figure d'ailleurs dans la lettre du

23 général Perisic. C'étaient eux qui transmettaient les ordres de M.

24 Milosevic et de ses plus proches collaborateurs, et pas les institutions,

25 en tant que commandants locaux, selon les informations dont je dispose.

Page 4964

1 Question: Pouvez-vous nous donner le nom des civils qui ont été

2 responsables de ces missions particulières?

3 Réponse: Le nom le plus souvent mentionné est celui de M. Nikola Sainovic.

4 Question: Y en a-t-il d'autres?

5 Réponse: Monsieur Vlajko Stojkovic également. Mais cet homme est mort, je

6 n'aimerais pas nuire à sa réputation.

7 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, je ne sais pas si c'est

8 le bon moment pour la pause?

9 M. le Président (interprétation): Oui. Nous sommes très reconnaissants de

10 l'aide que vous nous apportez, Monsieur le Témoin.

11 Peut-être pourriez-vous, pendant la suspension d'audience, de même que les

12 amici curiae, réfléchir au contenu de cette déposition et vous demander,

13 en réfléchissant aux sources, si certains éléments doivent être versés au

14 dossier ou pas? Je parle de ceux qui seront abordés à huis clos partiel.

15 Peut-être pourriez-vous y réfléchir?

16 (L'accusé, M. Slobodan Milosevic, demande la parole.)

17 Nous suspendons pour le moment, Monsieur Milosevic.

18 Nous suspendons l'audience pendant 20 minutes.

19 (L'audience, suspendue à 10 heures 33, est reprise à 10 heures 50.)

20 (L'audience est reprise à 10 heures 57.)

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Tanic, j'aurais dû vous

22 expliquer la chose suivante: il est possible, en effet, que vous n'aviez

23 pas suivi les discussions relatives à la procédure. Quant à savoir s'il

24 convient ou non de donner des noms, eh bien, le Conseil vous donnera des

25 instructions à ce sujet et la Chambre devra peut-être, en temps utile,

Page 4965

1 statuer à ce sujet mais, en tous cas, on va vous dire ce qu'il convient

2 que vous fassiez.

3 M. Tanic (interprétation): C'est que je n'avais pas compris cela, c'est

4 pourquoi je vous ai demandé de me donner des instructions.

5 M. Nice (interprétation): Je ne sais pas si vous souhaitez que j'évoque la

6 possibilité de passer ou non à huis clos partiel, ou bien souhaitez vous

7 que j'en termine mon interrogatoire avant de parler de cela?

8 M. le Président (interprétation): Oui, continuons.

9 M. Nice (interprétation): Je dispose ici d'un exemplaire du livre, c'est

10 celui du témoin. Nous ne l'avons pas encore pour l'instant, peut-être

11 pourrait-on le remettre à l'accusé pour qu'il puisse l'observer?

12 M. le Président (interprétation): Oui.

13 M. Nice (interprétation): J'ai indiqué dans le livre, j'ai placé des post-

14 it à l'endroit où se trouvent les deux lettres que nous souhaitons verser

15 au dossier. On pourrait y réfléchir ultérieurement.

16 Paragraphe 107. Non. Ça aussi, il faudra s'interroger ultérieurement quant

17 à l'utilité de l'évoquer ou pas. Passons tout de suite au paragraphe 108,

18 aux événements qui ont eu lieu pendant les bombardements.

19 Pendant les bombardements de l'OTAN, avez-vous rencontré l'accusé en

20 personne?

21 M. Tanic (interprétation): Il y a eu des contacts avec l'accusé par le

22 biais des canaux officiels.

23 Question: Est-ce que vous avez eu une rencontre avec lui? Est-ce que vous

24 l'avez vu personnellement ou lors de réceptions ou lors de manifestations

25 de ce style en avril 1999?

Page 4966

1 Réponse: Aucune réunion qui puisse prouver quoi que ce soit, l'accusé nie

2 tout, je ne peux pas le prouver, mais je peux prouver tout le reste. Je

3 vais donc vous dire que j'ai eu avec lui des communications indirectes par

4 le biais de la voix officielle. Il s'agissait de communications entre le

5 Gouvernement de Serbie et de Yougoslavie.

6 Question: Monsieur Tanic, je vais répéter ma question, parce que ceci est

7 très important pour la Chambre: je voudrais savoir si vous avez eu des

8 conversations avec l'accusé au mois d'avril 1999?

9 Réponse: Au cours du printemps 1999, oui. Très rapidement. Une rencontre

10 très succincte.

11 Question: Et où cela?

12 Réponse: Je le répète, ceci est très difficile à prouver aujourd'hui, et

13 je souhaiterais vous demander, si possible, que l'on évoque cette question

14 en même temps que les autres questions dont nous souhaitons parler

15 séparément et qui ont trait aux noms et aux informations de ce style.

16 Question: Fort bien. Paragraphe 110: Pendant les bombardements de l'OTAN

17 -et veuillez, s'il vous plaît, répondre par oui ou par non- avez-vous eu

18 des informations au sujet de ce qui s'est passé pendant les bombardements?

19 Je pense, par exemple, au déploiement des forces armées, aux positions de

20 défense antiaérienne etc. Est-ce que vous avez eu des informations à

21 sujet?

22 Réponse: Oui, oui, oui, tout à fait. Oui, des informations personnelles.

23 Question: Quelle semblait être la principale stratégie vis-à-vis de

24 l'OTAN, d'après ce que vous avez pu comprendre?

25 Réponse: D'après ce que j'ai compris, d'après ce que j'ai appris, la

Page 4967

1 principale stratégie consistait à gagner du temps, à faire traîner les

2 choses et à faire traîner cette guerre avec l'OTAN le plus possible,

3 contre les intérêts de notre pays et les pertes de vie civile. Les

4 destructions civiles constitueraient une sorte de victoire morale vis-à-

5 vis de l'OTAN, et cette stratégie, elle a été explicitée, elle a été

6 exprimée tout à fait clairement et ça on peut le prouver exactement.

7 Question: Je pense que le paragraphe 113 rentre dans la même catégorie que

8 certains des passages évoqués précédemment. Mais si nous passons à la page

9 suivante, nous pouvons en arriver à la question qui est la suivante.

10 Est-ce que vous avez eu des contacts avec le ministre des Affaires

11 étrangères russe, à l'époque?

12 Réponse: Non. Je m'excuse mais cela doit être une erreur. Jamais dans ce

13 que j'ai dit, je n'ai parlé de la possibilité pour moi d'avoir ce type de

14 contacts.

15 Question: Je vous prie de m'excuser, c'est une erreur de ma part. Passons

16 à autre chose. Paragraphe 115: qu'est-il advenu des bâtiments civils au

17 cours du conflit?

18 Réponse: Eh bien, on les a employés dans un but militaire et ceci, sans

19 autorisation.

20 Un exemple: s'agissant du commandement de la ville de Belgrade, il se

21 trouvait en deux endroits. J'ai vu ceci de mes yeux, je peux vous donner

22 les deux sites, ceci ne pose aucune difficulté: l'école élémentaire de

23 Sveti Sava rue Marsala Tolbuhina, ainsi que le grand magasin dans la même

24 rue; vous avez donc une école primaire et un grand magasin. Or, le

25 commandement de la ville de Belgrade a été réinstallé à ces deux endroits.

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1 Les officiers qui s'occupaient du commandement de la ville de Belgrade

2 portaient souvent des vêtements civils. Et pendant un certain temps, des

3 chars ont été déployés autour de l'église de Sveti Sava, c'est-à-dire

4 Saint-Sava. Les gens, ensuite, ont commencé à se plaindre donc on a

5 éloigné les chars de cet endroit. Mais pour ce qui est du quartier général

6 de la défense militaire de Belgrade, moi j'ai vu de mes yeux où ils se

7 sont installés.

8 Question: Paragraphe 117. La RTS, la radiotélévision serbe: est-ce que

9 vous avez eu des informations à son sujet?

10 Réponse: Oui. J'ai eu des informations au sujet du bombardement au sujet

11 de la RTS, deux jours avant et deux jours après. J'ai transmis cette

12 information par la voie officielle au commandement ou à la défense, ou

13 plutôt à M. Milosevic qui, à ce moment-là, assumait le commandement

14 suprême; il devait donc être informé. Or, le bâtiment en question n'a pas

15 été évacué, on y a laissé à dessein des civils afin qu'ils y trouvent la

16 mort et je sais que plusieurs sources d'information ont communiqué ces

17 éléments relatifs à la RTS.

18 Question: Le SDB disposait-il d'informations au sujet de cibles futures,

19 des informations autres que celles que vous aviez obtenues ailleurs? Est-

20 ce que le SDB avait d'autres sources d'information?

21 Réponse: Oui, il y avait d'autres sources d'information, deux ou trois

22 autres sources d'information qui étaient de qualité. Sans aucune activité

23 d'espionnage; je ne parle pas de cela.

24 Question: Est-ce que ces informations ont constamment été communiquées à

25 l'accusé, ou bien est-ce qu'il y a eu modification dans la transmission

Page 4969

1 des informations, à votre connaissance?

2 Réponse: Il fallait absolument qu'il obtienne cette information et d'après

3 son comportement, on voyait qu'il avait obtenu ces informations. Parfois,

4 il évacuait la population et parfois il ne le faisait pas, suivant ce qui

5 lui convenait. Et ceci vaut non seulement pour la population mais aussi

6 pour les biens, pour les marchandises, pour les propriétés.

7 Question: Est-ce que le SDB a continué à lui fournir ces informations tout

8 au long de la guerre?

9 Réponse: Oui, tout à fait.

10 M. Nice (interprétation): En quoi consistait votre rôle à ce moment-là et

11 sur la base de quelle… l'autorité de qui?

12 M. Tanic (interprétation): Eh bien, en fonction des décisions ou des

13 opinions. S'il vous plaît, veuillez tenir compte de ces deux expressions:

14 l'opinion ou les décisions de la défense unifiée de la ville de Belgrade

15 et le SDB.

16 Je me suis rendu à l'étranger deux fois pendant la guerre. Je ne peux pas

17 dire que j'ai été envoyé dans le cadre d'une mission officielle à

18 l'étranger, mais l'explication qu'on m'a donnée c'était qu'il fallait que

19 je fasse de mon mieux, en fonction des gens que je connaissais, pour

20 enquêter -et j'insiste sur le mot "enquêter"- sur la possibilité de

21 terminer le conflit avec l'OTAN aussi rapidement que possible.

22 M. le Président (interprétation): Les déclarations du témoin m'inquiètent

23 un petit peu, notamment en ce qui concerne les sources. On peut se

24 demander l'intérêt que présente ce type d'élément d'information pour la

25 Chambre, ce type de déposition.

Page 4970

1 M. Nice (interprétation): Bien entendu, ceci il conviendra d'en décider

2 lorsque nous examinerons les questions qui ont été réservées pour la fin.

3 Il vient de nous expliquer ce qu'il faisait. Moi, maintenant, je voudrais

4 savoir qui lui avait fixé sa mission et ensuite, nous en arriverons à un

5 élément de preuve tout à fait concret. Mais pour l'instant, nous parlons

6 de choses un petit peu différentes.

7 M. le Président (interprétation): Oui mais je voudrais vous demander, s'il

8 vous plaît, pour l'instant, de parler de choses bien concrètes. Et

9 ensuite, pour le reste, nous aurons à décider.

10 M. Nice (interprétation): Monsieur Tanic, vous nous avez dit ce que vous

11 faisiez: vous étiez à l'étranger dans le cadre d'une mission officielle

12 pour enquêter sur la possibilité de mettre un terme au conflit. Mais sur

13 la base de quelle autorité?

14 M. Tanic (interprétation): L'état-major unifié de la défense de la ville

15 de Belgrade et les services de sécurité d'Etat. Il était impossible de

16 quitter Belgrade pendant la guerre dans le cadre d'un voyage privé.

17 Question: Et vous avez effectivement pu quitter Belgrade pour mener à bien

18 la mission que vous nous avez explicitée, n'est-ce pas?

19 Réponse: Oui, oui. Mais on m'a accompagné au début de mon…, jusqu'à la

20 frontière et on est venu me récupérer à la frontière avec la Hongrie;

21 c'est là que j'ai quitté le pays. Et d'ailleurs, des notes ont été prises,

22 consignées dans les documents officiels puisqu'il s'agissait d'une

23 procédure officielle.

24 Question: Suite à ces missions, ou plutôt à cette mission, est-ce que vous

25 avez obtenu des propositions que vous avez essayé de défendre, ensuite de

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1 transmettre?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Une proposition ou plusieurs?

4 Réponse: Une proposition, une proposition qui était sur le devant de la

5 scène à ce moment-là. Il y a eu des variations, mais il s'agissait

6 essentiellement d'une seule proposition.

7 Question: Cette proposition, quand est-elle apparue pour la première fois?

8 Réponse: A ma connaissance, à la mi-avril 1999 au plus tard, pour autant

9 que je m'en souvienne.

10 Question: Il y a une lettre dont nous disposons et qui a été envoyée par

11 M. Lilic à l'accusé. Est-ce que cette lettre a un rapport avec cet accord?

12 Ou est-ce qu'elle en découle?

13 Réponse: Je n'avais pas compris que cette question m'était adressée à moi.

14 Question: Oui, c'est une question qui vous est adressée. Il y a une lettre

15 qui a été envoyée en mai 1999 par M. Lilic. Je voudrais savoir si cette

16 lettre confirme ce que vous dites au sujet d'une offre d'accord, l'offre

17 avec laquelle vous êtes revenu de l'étranger?

18 Réponse: Oui, oui, effectivement. Elle confirme cet accord, l'esprit ainsi

19 que des aspects très concrets et très nombreux de cette proposition.

20 Question: Cette lettre se trouve en annexe du livre que nous avons

21 communiqué à l'accusé il y a quelques instants. Est-ce que vous aviez vu

22 cette lettre avant de la trouver dans ce livre?

23 Réponse: Non, et je n'ai pas non plus vu la lettre dans le livre. J'ai

24 appris l'existence de cette lettre dans un entretien accordé par M. Lilic

25 à un hebdomadaire appelé "Vrema", environ trois mois plus tard. Et j'ai vu

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1 qu'il y avait une grande concordance dans cette lettre.

2 Question: Je parlerai de cette lettre plus tard, avec un autre témoin.

3 Monsieur le Témoin, en quelques termes et le plus succinctement possible,

4 pouvez-vous nous parler des éléments de l'accord que vous avez contribué à

5 proposer?

6 Réponse: Non, ce n'est pas moi qui l'ai mis en place, cet accord. Je

7 n'avais pas l'autorité pour le faire.

8 Les éléments de cet accord étaient les suivants: il devait y avoir un

9 cessez-le-feu unilatéral de toutes les activités de combat de l'armée de

10 la Yougoslavie et des unités spéciales du MUP, pendant une période de 24

11 heures, à l'exception des obligations d'assurer la défense de ces troupes.

12 Ensuite, il y avait la suspension des activités de l'OTAN pendant une

13 période de 24 heures. Et puis il y avait un cessez-le-feu unilatéral plus

14 long, observé par l'armée yougoslave et les unités de combat du MUP, sauf

15 quand il s'agissait d'opérations d'autodéfense, ainsi qu'une suspension

16 plus longue des bombardements de l'OTAN. Dans l'intervalle, on allait

17 mettre en place très rapidement un dialogue politique avec les Albanais du

18 Kosovo, et en particulier avec M. Rugova, pour essayer de trouver une

19 solution politique au problème du Kosovo.

20 Le Corps de Pristina devait rester au Kosovo et des troupes de maintien de

21 la paix devaient entrer au Kosovo et elles devaient coopérer avec le Corps

22 de Pristina. Ensuite, suite à un cessez-le-feu de longue durée et après la

23 conclusion d'un accord de paix, la communauté économique devait aider à la

24 reconstruction du Kosovo, et des troupes de maintien de la paix devaient

25 entrer sous la bannière des Nations Unies. Les responsables officiels de

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1 Belgrade auraient leur mot à dire dans la composition des troupes de

2 maintien de la paix de l'ONU, c'est-à-dire qu'il n'y aurait pas trop de

3 représentants des pays de l'OTAN. Ceci permettant à la Yougoslavie de

4 sauver la face.

5 Voici, en quelques mots, le contenu de cette proposition d'accord de paix,

6 mais ce n'était pas le seul. Donc ce genre de proposition était

7 communiquée au Président Milosevic.

8 Question: Merci. Est-ce qu'il y a une proposition de cessez-le-feu le jour

9 de la Pâque catholique? Est-ce que ceci avait une relation quelconque avec

10 des soldats américains?

11 Réponse: Oui. C'était une des variations du fameux plan.

12 Question: Est-ce que Mihajlovic, le chef de votre parti, et vous-même en

13 avez parlé? Est-ce que, suite à cela, vous avez passé un coup de

14 téléphone? Répondez par oui ou par non.

15 Réponse: Oui.

16 Question: Et à qui avez-vous téléphoné?

17 Réponse: D'abord, nous avons adressé une proposition par écrit à M.

18 Milutinovic; ensuite, le président de mon parti a parlé avec M.

19 Milutinovic au téléphone; ceci avait trait à la réponse à la lettre.

20 Question: Avez-vous été en mesure d'entendre les deux intervenants ou un

21 des intervenants de cette conversation téléphonique?

22 Réponse: Les deux. Ce n'était pas secret: le haut-parleur du téléphone

23 avait été enclenché.

24 Question: Et que Mihajlovic a-t-il dit à Milutinovic? Et que lui a répondu

25 Milutinovic?

Page 4974

1 Réponse: Eh bien, tout d'abord, M. Milosevic a fait clairement savoir

2 qu'il accepterait un cessez-le-feu à l'occasion de la Pâque catholique.

3 Nous n'étions pas les seuls à le faire; M. Sedano (phon.), le secrétaire

4 du Vatican, le savait également.

5 Question: Je vous demande, s'il vous plaît, de vous concentrer sur mes

6 questions et de répondre précisément à mes questions.

7 Réponse: Bien.

8 Question: La conversation téléphonique, s'il vous plaît, quelle en a été

9 la teneur?

10 Réponse: Eh bien, c'est très simple. Nous lui avons demandé pourquoi il

11 n'y avait pas de cessez-le-feu à l'occasion de la Pâque catholique, alors

12 que ceci avait été promis, puisque la Pâque catholique était déjà passée.

13 Et puis, il y avait également la question de la libération des trois

14 soldats américains.

15 Question: Et quelle a été la réponse?

16 Réponse: Eh bien, M. Milutinovic a répondu qu'il y aurait effectivement un

17 cessez-le-feu, mais un peu plus tard; parce qu'il a dit que nous -et par

18 ce "nous", il entendait Belgrade- nous n'avions pas encore fini notre

19 travail là-bas. Il parlait du Kosovo. Et il a dit que le cessez-le-feu

20 aurait lieu à la Pâque orthodoxe.

21 Question: C'est-à-dire dans combien de temps plus tard?

22 Réponse: Il n'a pas été précis, M. Milutinovic. Il a dit: "Une fois qu'on

23 aura terminé le travail là-bas, au Kosovo; une fois qu'on aura terminé, on

24 verra".

25 Question: Merci. Je crois qu'à un moment donné, vous avez parlé avec le

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1 président de l'Assemblée, M. Tomic, au sujet des négociations de paix dont

2 vous aviez connaissance.

3 Répondez par oui ou par non: est-ce que M. Tomic avait connaissance de la

4 tenue de ces négociations? Est-ce qu'on lui en avait fait part?

5 Réponse: Oui. Mais il y avait également Vuk Draskovic qui était le vice-

6 Premier ministre. Peut-être y a-t-il eu une erreur technique parce qu'en

7 fait, il y a eu beaucoup plus de communication avec M. Draskovic qui était

8 vice-Premier ministre du gouvernement yougoslave à l'époque mais

9 effectivement, j'ai eu des contacts avec M. Tomic aussi.

10 Question: Paragraphe 131. Non, il faudra revenir plus tard au paragraphe

11 131.

12 Paragraphe 137. Je souhaiterais aborder un certain nombre de points de

13 détail avec vous, Monsieur le Témoin.

14 La police de la République de Serbie avait-elle une caractéristique

15 précise? Est-ce qu'il y avait des éléments d'identification particuliers,

16 propres à cette police?

17 Réponse: Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, répéter votre question

18 et être plus précis? Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris.

19 Question: La police de la République de Serbie, je voudrais savoir quel

20 était son niveau d'intégration avec les autres institutions chargées du

21 maintien de l'ordre: est-ce qu'elle en était plutôt proche ou plutôt

22 éloignée?

23 Réponse: S'agissant des services de sécurité publique, ils étaient

24 intégrés, mais cela ne valait pas pour les unités spécialisées qui

25 n'étaient pas intégrées.

Page 4976

1 Mais excusez-moi, je ne suis pas vraiment sûr d'avoir compris votre

2 question, si bien que je ne suis pas vraiment en mesure de répondre.

3 Question: Je ne vais pas m'appesantir sur ce sujet, je vais passer à autre

4 chose.

5 S'agissant maintenant du contrôle exercé sur le MUP… Non. Non, en fait,

6 nous en avons déjà parlé: c'est le paragraphe 138.

7 Maintenant, paragraphe 148. Reprenons ce thème des unités spéciales. Avez-

8 vous vu ces unités spéciales, vous-même, pendant la période qui nous

9 intéresse?

10 Réponse: Oui. Les unités spéciales et la police, on les désignait comme la

11 JSO.

12 Question: Avez-vous appris par qui elles étaient dirigées ou contrôlées?

13 Répondez par oui ou par non, s'il vous plaît.

14 Réponse: Oui, oui.

15 Question: En particulier, par qui elles étaient contrôlées ou dirigées

16 lorsqu'elles étaient en opération au Kosovo?

17 Réponse: Monsieur Milosevic utilisant sa chaîne de commandement privé à

18 travers Sainovic et Rade et Vlajko Stojilkovic.

19 Question: Paragraphe 149. Vous avez eu une conversation, je crois, avec

20 Perisic au sujet de ces unités, oui ou non?

21 Réponse: Pourriez-vous être, une fois de plus, plus précis lorsque vous

22 dites "des unités spéciales"? Parce qu'il y en avait à la fois dans

23 l'armée et dans les forces de police. Il serait difficile de discuter

24 d'une unité de police spéciale avec Perisic, par exemple.

25 Question: J'y reviendrai. C'est mon erreur, je pense.

Page 4977

1 Avez-vous eu avec Perisic des entretiens -dites oui ou non- concernant le

2 matériel militaire qui devrait être passé des militaires à la police?

3 Réponse: Oui, tout à fait.

4 Question: Est-ce que c'était à l'époque ou plus tard, lorsque vous

5 réunissiez des sources pour votre livre?

6 Réponse: C'est à l'époque où je préparais les documents pour mon livre et

7 où je comparais mes connaissances par rapport à ce que j'avais su à

8 l'époque avec M. Perisic et ce dont il se souvenait.

9 Question: Oui ou non, Perisic vous a-t-il dit quelque chose de l'attitude

10 de Milosevic sur ce point?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Paragraphe 149, dernière ligne. Que vous a-t-il dit de

13 l'attitude de Milosevic?

14 Réponse: Comme il l'avait écrit dans sa lettre: que M. Milosevic

15 continuait à lui demander que du matériel militaire soit remis à des

16 unités du MUP et que ce matériel militaire serait utilisé au combat, pour

17 des opérations de combat. Et M. Perisic, pour différentes raisons, de

18 nombreuses raisons qu'il exposait dans la lettre, dont l'une qu'il m'a

19 expliquée qui était le déploiement contre la population civile, il n'y

20 avait pas de règles permettant ce déploiement contre les habitants. Je me

21 réfère ici à du matériel militaire lourd, du matériel lourd.

22 Question: Y a-t-il des références ou des indications sur la façon dont ce

23 personnel était vêtu?

24 Réponse: Il était question de chars, de véhicules de combat, d'infanterie,

25 de lance-grenades de 128 millimètres et davantage. Comme on l'a dit, M.

Page 4978

1 Perisic avait dit que c'était tout à fait impossible et M. Milosevic avait

2 répondu à cela en disant que "ce ne serait pas utilisé par l'armée mais

3 par la police. Donc, il n'y avait aucun danger que l'armée soit blâmée

4 pour cela".

5 Question: Les commandants locaux, d'après ce que vous savez, ce que vous

6 avez compris, étaient-ils en mesure d'arrêter les membres d'une unité

7 spéciale pour des actes illicites?

8 Réponse: Bien sûr, les membres des forces de réserve aussi; ils l'ont fait

9 aussi.

10 Question: Au cours de la guerre, d'une façon générale, qu'est-ce que vous

11 avez observé en ce qui concernait les comptes rendus des médias locaux,

12 des journaux, etc.?

13 Réponse: J'ai remarqué toute une série d'informations inexactes qui

14 étaient publiées, qui attisaient les flammes de la guerre et qui

15 masquaient les résultats réels des opérations de combat. Et ceci s'est

16 poursuivi tout au cours de 1998 et de 1999. Je parle des médias officiels.

17 Question: Quelles sortes de distorsions y avait-il?

18 Réponse: Quant au nombre de terroristes, par exemple: il était exagéré, il

19 était amplifié; les solutions pacifiques étaient minimisées; nos victimes,

20 les nombres étaient indiqués comme bien plus petits et l'ensemble des

21 opérations était en quelque sorte masqué. C'est ce type de distorsion

22 d'information de la situation actuelle en réalité.

23 Question: Le dernier paragraphe: "Des charniers ont été trouvés". Est-ce

24 que vous avez eu des entretiens au sujet des fosses communes en Serbie?

25 Réponse: Pour commencer, au cours de l'été 1999, alors que je préparais

Page 4979

1 mon ouvrage, lorsque nous avons cherché parmi les victimes serbes et

2 albanaises, pour savoir où elles étaient…

3 Question: Je vous ai demandé qui?

4 Réponse: Excusez-moi, mais je suis un peu dans le vague.

5 Est-ce que je pourrais répondre à cette question en séance à huis clos ou

6 à huis clos partiel? Je ne veux pas ne pas répondre, mais je voudrais

7 savoir si l'on va avoir ceci à huis clos ou non?

8 Question: Si c'est un nom que vous pouvez donner publiquement, donnez-le

9 publiquement. Si vous pouvez le donner publiquement!

10 Réponse: Bien, très bien. Je ne veux pas compromettre ces gens parce qu'il

11 y a eu des enquêtes officielles : Zoran Mijatovic, Dusan Mihaljovic,

12 ministre de l'Intérieur de Serbie.

13 Question: Qu'est-ce que Mijatovic a dit au sujet de ces fosses communes

14 qui ont été trouvées?

15 Réponse: Qu'il y a eu une enquête officielle conduite par le MUP, qui

16 indiquait exactement quels étaient les auteurs, l'endroit, les sites eux-

17 mêmes, mais pour une raison quelconque, cette enquête a été arrêtée. Sinon

18 moi-même, lorsque j'étais enlevé, j'ai été exposé à la torture à cause de

19 cette question des fosses communes.

20 Question: Je souhaiterais savoir un peu plus de ce que vous avez entendu

21 dire au sujet des fosses communes. Mijatovic, on en a parlé.

22 Est-ce qu'il y a un lien établi entre ces fosses communes et d'autres

23 conclusions ou comptes rendus à sujet?

24 Réponse: Pas seulement Mijatovic, mais M. Mihajlovic aussi, le ministre

25 des Affaires intérieures: ils m'ont dit le résultat des enquêtes tout

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1 simplement, aussi loin que cette enquête avait été menée.

2 Pourriez-vous maintenant préciser ce que vous voulez dire par un lien?

3 Question: Est-ce qu'un véhicule avait été trouvé près du Danube qui aurait

4 établi un lien entre l'un et l'autre?

5 Réponse: Oui, un véhicule avait été trouvé dans le Danube à un endroit qui

6 s'appelait "Svaketuteknja". C'était un véhicule que M. Keta avait pris aux

7 douanes et avait dit aux unités de sécurité publique "pour transporter les

8 corps", juste avant l'intervention de l'OTAN au Kosovo.

9 Question: Qu'est-ce que Mijatovic vous a dit à ce sujet, en ce qui

10 concerne les circonstances? Qu'est-ce qu'il vous a dit à ce sujet en ce

11 qui concerne toutes ces circonstances?

12 Réponse: Eh bien, tout simplement… En fait, il ne m'a pas dit son opinion,

13 mais les résultats des enquêtes: qu'il y avait un lien clair entre M.

14 Milosevic et l'ordre en quelque sorte de cacher ces fosses communes et que

15 l'origine de ces cadavres, malheureusement, était dans les unités de

16 Sreten Lukic et non pas des unités de sécurité de Serbie. C'est pour ça

17 qu'une opération pour masquer l'ensemble avait été lancée, bien que nos

18 organes officiels en eussent été bien conscients.

19 Question: Est-ce que c'était les seules fosses communes dont vous aviez

20 entendu parler?

21 Réponse: Non, j'ai discuté seulement de l'une d'entre elles, je n'avais

22 pas l'énergie psychologique pour pouvoir continuer à ce sujet.

23 Question: Est-ce que Sreten Lukic était à l'époque le chef du MUP au

24 Kosovo? Exact?

25 Réponse: Oui.

Page 4981

1 Question: Revenons maintenant à traiter des circonstances dans lesquelles

2 vous êtes parti, vous avez quitté la Yougoslavie: que vous est-il arrivé?

3 Réponse: Après que j'ai commencé à préparer mon livre et à réunir des

4 sources pour ce livre, concernant le Kosovo et les crimes liés au Kosovo,

5 peu après cela et après ma conversation, après qu'on avait intercepté mes

6 conversations téléphoniques et qu'on avait appris que je préparais un

7 livre qui exposerait ce que je dis aujourd'hui, j'ai tout simplement été

8 enlevé dans la rue et, deux heures après, ma femme aussi, au début

9 d'octobre 1999.

10 Question: Combien de temps avez-vous été détenus tous les deux?

11 Réponse: Nous avons été tous les deux enlevés, drogués et emmenés dans

12 deux prisons différentes où nous avons passé chacun deux jours, ma femme

13 et moi-même en l'occurrence.

14 Question: Que vous est-il arrivé en prison? Je ne veux pas vous gêner,

15 mais sans détail.

16 Réponse: Non. Et pour gagner du temps aussi, eh bien, c'était de la

17 torture, de la variété, du type de l'Amérique latine comportant des

18 injections, des coups, des suffocations. Et en réunissant ces sources pour

19 mon livre -je ne peux pas les présenter toutes maintenant-, mais il y a eu

20 une tentative pour essayer qu'il y avait un complot –qui, en fait,

21 n'existait pas-, complot international contre M. Milosevic.

22 Question: Et vous avez été questionné à ce sujet?

23 Réponse: Si vous appelez cela être questionné, si le fait d'être drogué,

24 d'être battu, d'avoir un sac sur la tête ou d'être considéré comme ça?

25 Voilà comment j'étais interrogé.

Page 4982

1 Question: Quel était le sujet de ces questions, de cet interrogatoire?

2 Page 18 du résumé, excusez-moi.

3 Réponse: Eh bien, c'était essayer de savoir pourquoi je faisais des

4 recherches sur ces questions, sur les fosses communes, sur les tombes

5 serbes, si j'avais des contacts avec les SDB, si je voulais vraiment

6 écrire ce livre et pourquoi? Et des questions privées de ce genre.

7 Deuxièmement, nous avons discuté des enquêtes. C'étaient les raisons pour

8 lesquelles j'étais torturé. Ils voulaient que je reconnaisse qu'il y avait

9 un complot, une conspiration contre M. Milosevic, contre sa sécurité,

10 qu'il y avait un complot des Britanniques et que j'avais des contacts avec

11 des services de renseignement. Puis ils m'ont torturé, ils ont torturé ma

12 femme; ils voulaient que nous disions que nous faisions de l'espionnage.

13 Nous avons réussi à survivre à ces tortures, j'ai été drogué; ma femme n'a

14 pas été droguée, elle a seulement été battue.

15 Et le stade suivant de l'enquête a quelque peu pris un tour différent: ces

16 individus ensuite ont dit qu'ils étaient ceux qui voulaient renverser

17 Milosevic eux-mêmes et que, en fait, tout ceci était simplement une

18 épreuve qu'on me faisait subir pour voir comment je pourrais survivre. Ils

19 voulaient que je les mette en rapport avec les personnes des services de

20 renseignement britanniques afin qu'une coopération puisse s'établir afin

21 de renverser M. Milosevic.

22 Question: Vous avez été relâché… Combien de temps êtes-vous resté après

23 avoir été relâché en Serbie à l'époque?

24 Réponse: J'ai été relâché deux heures avant la tentative d'enlèvement de

25 Vuk Draskovic et je suis resté encore pendant un mois.

Page 4983

1 Question: Et ensuite, vous avez pu quitter le pays?

2 Réponse: Oui, légalement, parce que j'ai vu qu'on se préparait à

3 m'assassiner.

4 M. Nice (interprétation): Je crois que je vais m'arrêter un instant ici,

5 et peut-être pourrait-on traiter de l'autre question. Peut-être pourrait-

6 on traiter de cela en séance à huis clos partiel?

7 M. le Président (interprétation): Je pense que cette question devrait être

8 traitée si possible en public, parce que c'est une question de principe,

9 sans mentionner de nom. Si vous voulez vous référer à cette déclaration,

10 peut-être que ce serait la méthode qui convient.

11 M. Nice (interprétation): D'après mes notes, ceci deviendrait pertinent

12 par rapport à la page 2, paragraphe 3. Je ne suis pas sûr de cela, mais

13 j'ai une annotation, au bas du paragraphe 3, à ce sujet qui a peut-être

14 trait à ce genre. Puis le reste des documents a été obtenu aujourd'hui, et

15 j'ai des annotations commençant à la page 17, paragraphes 96, 97, 98. Puis

16 à la page 20, paragraphe 108.

17 M. Kwon (interprétation): Le paragraphe 87 à la page 15 n'est-il pas

18 pertinent?

19 M. Nice (interprétation): Je n'ai pas relevé celui-là à l'époque.

20 M. Kwon (interprétation): Est-ce que vous pourriez vérifier par la suite?

21 M. Nice (interprétation): Certainement, Monsieur le Juge, il me semble que

22 lorsque nous arrivons à la page 17… Non, pardon! à la page 20. La question

23 se pose à peu près dans les mêmes termes au paragraphe 113, mais c'est

24 assez différent par rapport au paragraphe 108.

25 Le Juge Kwon avait parfaitement raison pour le paragraphe qu'il a cité: le

Page 4984

1 paragraphe 87, page 15.

2 Alors, le paragraphe 113 est le problème habituel. Le paragraphe 108, je

3 crois, est un paragraphe différent parce qu'il ne dépend pas des craintes,

4 de l'anxiété, du bien-être d'autres personnes. C'est une question sur

5 laquelle le témoin pourra peut-être donner des explications

6 complémentaires et des raisons pour lesquelles il ne veut pas déposer en

7 public à ce sujet. Peut-être sera-t-il bon que je lui demande à nouveau à

8 ce sujet?

9 M. le Président (interprétation): Oui.

10 M. Nice (interprétation): … afin qu'il puisse lui-même comprendre la

11 différence?

12 Témoin, s'il vous plaît, la Chambre est en train d'examiner des éléments

13 de preuve qui ont trait à ce qui vous a été dit par d'autres personnes.

14 Vous vouliez protéger leurs noms de façon à ce qu'ils ne soient pas

15 exposés à des risques.

16 Avant que la Chambre ne délibère sur cette question et entende des

17 arguments à ce sujet, il y a un autre passage qui a trait à une

18 conversation ou à une rencontre que vous avez eue avec l'accusé en avril

19 1999.

20 Quelle est votre raison pour que vous puissiez nous dire que vous préférez

21 déposer à huis clos partiel, vu ce que vous avez dit par ailleurs de

22 l'accusé en audience publique et sachant que vous-même, vous êtes protégé

23 par le fait que vos traits ne sont pas visibles dans ce procès et qu'à

24 l'avenir, votre sécurité sera protégée? Quelles sont donc vos raisons en

25 ce qui concerne les éléments de preuve relatifs à avril 1999?

Page 4985

1 M. Tanic (interprétation): C'est mon rapport général avec le Tribunal.

2 Monsieur Milosevic rejette tout ce que j'ai dit, en commençant tout

3 simplement par mon existence dans ces affaires. Donc je veux bien donner

4 au Tribunal les déclarations qui me permettent de les confirmer par deux

5 ou trois sources indépendantes, ce qui permet…

6 M. Nice (interprétation): Monsieur le Témoin, je peux vous arrêter ici. Ce

7 sont le Tribunal et les juristes qui examinent la question de savoir si

8 les éléments de preuve sont suffisants ou non, et les questions de droit,

9 ce n'est pas pour vous.

10 Donc la question est très simple: si vous ne voulez pas déposer là-dessus,

11 dites simplement vous ne voulez déposer là-dessus. Est-ce que vous êtes

12 prêt à déposer à ce sujet?

13 M. Tanic (interprétation): Ce n'est pas parce qu'il y a une communication

14 officielle avec Milosevic à l'époque qui soit suffisante pour une

15 déclaration publique, pour une déposition publique; ça ne change rien dans

16 cette communication. Il a fait les mêmes choses que dans les

17 communications privées, ce que je ne peux pas prouver non plus. Donc je

18 n'ai pas diminué ces informations…

19 M. Nice (interprétation): Est-ce que vous êtes prêt à nous dire ce qui a

20 été dit à cette réunion en avril 1999, s'il vous plaît?

21 M. Tanic (interprétation): Je suis prêt à dire ce qui a été dit dans des

22 communications officielles avec M. Milosevic et c'est le même,

23 fondamentalement, que les autres.

24 M. le Président (interprétation): Cela ne sert à rien de continuer à

25 jouter de cette façon; cette escrime suffit.

Page 4986

1 M. Nice (interprétation): Je crois que ça suffit pour ce paragraphe-ci. Le

2 paragraphe 113 entre dans cette même catégorie. Ensuite, le paragraphe

3 131. Je crois que c'est tout ce que j'ai à signaler.

4 Le Tribunal est en mesure d'avoir un huis clos au titre de l'Article 75,

5 sous réserve des dispositions de l'Article 79 du Règlement. Et l'Article

6 79 est assez strict en ce qui concerne les audiences à huis clos sur des

7 questions d'ordre public ou de bonnes mœurs, ou assurer la sécurité et la

8 protection d'une victime ou d'un témoin pour éviter la divulgation de son

9 identité conformément à l'Article 75 ci-dessus, ou en considération de

10 l'intérêt de la justice. C'est peut-être la considération de l'intérêt de

11 la justice que la Chambre doit avoir à l'esprit, plus particulièrement en

12 ce qui concerne cette question.

13 Mais quand on revient à l'Article 75 du Règlement -je n'ai pas une version

14 à jour des amendements-, mais je lis: "Une Chambre peut ordonner des

15 mesures appropriées pour empêcher la divulgation au public ou aux médias

16 de l'identité de personnes qui sont liées au témoin…" C'est le texte de

17 l'Article 75.

18 Et sans donner la liste de ces critères, "identification" par rapport au

19 ii) et au iii) de l'Article 79: "protéger", "protection des témoins".

20 (Le Procureur donne lecture de ces dispositions.)

21 Donc du point de vue purement technique, l'Article 79 ne donne pas de

22 critères supplémentaires à l'Article 75 et la catégorie de personnes qui

23 sont identifiées dans le 75B)i), les personnes qui ont un lien ou qui sont

24 associées avec la victime ou les témoins, prima facie, ne répondraient

25 peut-être pas à ces circonstances. Mais si cela devait être approprié

Page 4987

1 d'incorporer ce raisonnement plus large en vue d'un huis clos; cela

2 pourrait être le cas.

3 En tout cas, "l'intérêt de la justice" doit être pris en considération

4 comme possibilité pour la Chambre. La protection de l'intérêt de la

5 justice permettrait de faire en sorte que ce témoin obtienne ce qu'il

6 demande, c'est-à-dire de pouvoir déposer sur certains détails en ne

7 révélant pas au public les noms des personnes auprès desquelles il a

8 obtenu des renseignements.

9 Les noms sont bien entendu connus de l'accusé; cela pourrait être fourni à

10 l'accusé pour l'aider à préparer sa défense ainsi qu'aux amici. Et dans

11 ces circonstances, il n'y a aucune injustice à l'égard de l'accusé. Il est

12 certainement au courant; il pourra… Au cours du contre-interrogatoire, il

13 faudra peut-être qu'il y ait des moments de huis clos, à ce moment là,

14 mais il est tout à fait en mesure de présenter ses arguments et il n'en

15 subira aucun préjudice.

16 Les préoccupations du témoin traduisent bien sûr le fait qu'il y a

17 d'autres personnes qui ne sont pas de son avis et qui pourraient être

18 préoccupées par le fait que des moyens illégaux seraient utilisés pour

19 mettre en échec cette procédure et pourraient poser un vrai danger pour

20 ses sources d'information.

21 Le Tribunal est au courant des préoccupations que nous avons en ce qui

22 concerne la diffusion de l'information, mais, dans le passé, ces

23 préoccupations ont été portées à votre attention et rien n'a été révélé.

24 Avec l'aide de l'accusé, les Règles du Règlement du Tribunal seront

25 respectées; il y aura donc une perspective raisonnable.

Page 4988

1 L'accusé lui-même a dit que sa parole suffit; il n'a pas besoin d'être

2 tenu par le Règlement du Tribunal si le témoin voit qu'il y a une

3 véritable distinction entre ce qui est dit ici et pourrait être dit ici,

4 en huis clos partiel, pour que le procès soit équitable et ce qui, à son

5 avis, pourrait être dit en public, mais avec un risque pour les personnes

6 en question.

7 D'après ce que je comprends, il y a eu des occurrences, dans le passé, de

8 huis clos d'après lesquels des preuves sélectives auraient été présentées,

9 notamment dans l'affaire Tadic.

10 M. le Président (interprétation): Il n'y a pas de difficulté: des

11 dépositions peuvent être faites à huis clos partiel.

12 M. Nice (interprétation): Je disais aussi: pour la protection des

13 personnes autres que les témoins. Dans ce type de problèmes, bien que nous

14 fassions tout ce que nous pouvons pour assurer que tout sera dit en public

15 dans ce procès, ce type de preuve -qui est potentiellement utile ou

16 précieuse pour la Chambre- pourrait exposer certaines personnes à des

17 risques. Il y a bien entendu une différence, différence que l'accusé a

18 lui-même présentée, entre le fait de donner des noms de personnes

19 lorsqu'il s'agit de coauteurs de crime ou de personnes qui sont

20 étroitement associées au gouvernement de l'époque; il y a une différence

21 entre ces personnes et les fonctionnaires qui n'entrent pas dans ces

22 catégories et qui peuvent, pour eux-mêmes, ne pas avoir été associés avec

23 les délits dont il est question ici. Cela pourrait être donc extrêmement

24 dangereux pour eux que le témoin donne des renseignements à ce sujet.

25 Nous voudrions vous inviter à dire qu'il convient tout à fait que, pour

Page 4989

1 ces cas relativement limités, il puisse y avoir huis clos partiel, y

2 compris pour le contre-interrogatoire. C'est à la Chambre évidemment de

3 décider quel poids accorder à ces dépositions si elle estime que leur

4 valeur est diminuée par le fait qu'elles aient été données en séance

5 privée.

6 M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice, diriez-vous que le Règlement

7 a été essentiellement destiné pour la protection… Ne pensez-vous pas que

8 le Règlement a été destiné à la protection des victimes et des témoins, et

9 que, dans la mesure où la protection d'autres personnes est en cause, il y

10 aura un seuil plus élevé, un critère plus élevé pour que cette protection

11 soit accordée?

12 M. Nice (interprétation): Je ne suis pas sûr d'être d'accord avec la

13 deuxième proposition, bien que je pense que la première proposition est

14 certainement juste, parce que le Règlement, lorsqu'il a été rédigé, avait

15 probablement plus particulièrement à l'esprit les victimes et les témoins.

16 Mais je me permets d'exprimer respectueusement des doutes sur le point de

17 savoir si un tribunal peut exiger un critère plus élevé de sécurité par

18 rapport aux dangers ou un seuil moins élevé s'il s'agit d'une déposition

19 d'une personne qui pourrait être en risque.

20 M. Robinson (interprétation): L'une des raisons pour avoir un critère plus

21 sévère serait la possibilité d'avoir des dépositions fiables pour la

22 Chambre. Ce type de preuves serait certainement plus facile à obtenir par

23 rapport à une victime et à un témoin que par rapport à d'autres personnes.

24 Donc la question qui se pose est de savoir comment la Chambre peut se

25 satisfaire de la nécessité de la protection d'une personne qui n'est ni

Page 4990

1 victime ni témoin. C'est une question de preuve pour satisfaire la Chambre

2 et il semble qu'il est beaucoup plus facile d'obtenir ces éléments de

3 preuve par rapport à des victimes ou des témoins.

4 M. Nice (interprétation): C'est une proposition différente. Je crois que

5 le seuil ou le critère d'élément de preuve est différent. C'est la nature

6 même des éléments de preuve qui sont fournis ici qui est en cause et qui

7 montre le danger qui existe pour ceux qui pourraient donner ces éléments

8 de preuve, vu le type de personnes qui ont encore une position importante

9 dans le pays.

10 Nous savons qu'il y a eu récemment des meurtres dans ce pays, des

11 personnes ont disparu dans ce pays. Nous le savons: il y a eu des

12 personnes qui ont été abattues, pour une raison ou pour une autre. C'est

13 ce qui se passe dans ce pays.

14 Si l'on pouvait regarder un ou deux des passages en question? Par exemple,

15 la page 17 est un bon exemple. Sans entrer dans les détails de quelles

16 sont les sources ni les sujets, en ce qui concerne les renseignements

17 fournis à ce témoin, au paragraphe 96, et puis plus particulièrement le 97

18 aussi, on peut voir des lieux auxquels il est fait allusion, qui sont

19 mentionnés. Si vous passez ensuite au paragraphe 107, à la page 19, et

20 enfin à la page 22, au paragraphe 131, on peut imaginer facilement comment

21 ceux qui ont fourni des renseignements sur ces questions pourraient courir

22 des risques considérables, par l'intervention d'autres personnes. Mais ce

23 qui serait dit à huis clos ou à huis clos partiel permettrait au témoin de

24 s'exprimer et à l'accusé d'avoir un procès équitable.

25 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Kay?

Page 4991

1 M. Kay (interprétation): Monsieur le Président, c'est un problème sur

2 lequel il convient d'examiner le Règlement avant tout.

3 Nous avons entendu l'observation de M. le Juge Robinson, qui a parlé de

4 l'Article 75 qui, apparemment, d'après notre interprétation, est une

5 disposition plus directement liée à la protection des victimes et des

6 témoins.

7 Si l'on examine maintenant l'article 75B)i), il est encore une fois

8 question de victimes ou de témoins ou de personnes liées ou associées à

9 des victimes ou à des témoins, qui traitent d'une situation plus

10 personnelle d'un témoin, c'est-à-dire de la protection des personnes qui

11 lui sont proches à ce témoin. Nous aimerions dire que cette disposition a

12 été conçue pour que, lorsqu'un témoin vient d'un endroit où se trouve

13 encore sa famille ou ses collaborateurs ou des gens qui ont un rapport

14 avec lui et qui pourraient être affectés par sa déposition, cet Article

15 s'applique.

16 Ce n'est pas le cas en l'espèce, avec le témoin qui est ici, qui ne relève

17 pas de l'Article 75 dans son application générale. Nous disons que c'est

18 davantage l'Article 79 que le Procureur a évoqué ici, qui traite de la

19 protection et de la défense des intérêts de la justice.

20 Le problème qui se pose donc, c'est celui d'un accusé qui a droit à ce

21 qu'une déposition soit faite en public, de façon à ce que le témoin puisse

22 répondre effectivement de ses dires. S'appuyer sur des sources qui ne sont

23 pas identifiées en public créerait un inconvénient pour l'accusé, même si

24 les noms peuvent être cités à huis clos et que, du moins dans ce cas, les

25 collaborateurs de l'accusé pourront vérifier ces identités lors de la

Page 4992

1 préparation de sa défense par l'accusé.

2 Ceci peut également aider l'accusé au cas où cela serait rendu public,

3 parce que d'autres collaborateurs, qui ont un rapport avec ces événements

4 et les informations de l'époque, peuvent se pencher plus en détail sur ce

5 qui a été dit et peuvent proposer à l'accusé un certain nombre

6 d'informations au sujet du témoin, si l'accusé n'est pas d'accord avec ce

7 que le témoin a dit.

8 L'égalité des armes est un principe qui, dans une grande mesure, exige

9 autant que cela est possible qu'une défense soit faite en public et donc

10 puisse être analysée par des personnes extérieures, examinée de près

11 également, et que des témoins puissent répondre de ce qu'ils ont dit en

12 public. La difficulté que pose une audition à huis clos, c'est que dans ce

13 cas-là l'égalité des armes risque être affectée et que cela a un rapport

14 avec l'équité du procès.

15 M. le Président (interprétation): Merci.

16 Un instant, Monsieur Tanic, vous souhaitez ajouter quelque chose? Nous

17 sommes ici en pleine discussion juridique mais si vous souhaitez ajouter

18 quelque chose, vous pouvez le faire dans le cadre de votre déposition.

19 M. Tanic (interprétation): Oui, oui, je comprends bien que je ne suis pas

20 un expert juridique et donc je ne souhaite pas m'ingérer dans une

21 discussion juridique, mais je parle de ma déposition.

22 Je crois que toute cette question est en train de créer des difficultés

23 inutiles. Par conséquent, je suis prêt à dire en public ce que je

24 souhaitais dire, il y a quelques instants, à huis clos partiel. Je ne

25 souhaite pas rendre plus difficile le travail de la Chambre de première

Page 4993

1 instance ou du Bureau du Procureur, donc je suis prêt à m'exprimer en

2 public.

3 M. le Président (interprétation): Merci.

4 M. Nice (interprétation): Merci. C'est très utile. Je reviendrai donc sur

5 un certain nombre de paragraphes de la déposition du témoin.

6 J'aurai besoin cependant de 30 secondes d'audience à huis clos partiel

7 pour communiquer quelque chose à l'accusé. Cela n'a rien à voir avec la

8 déposition du témoin, mais cela a quelque chose à voir avec la

9 personnalité du témoin. Est-ce que je peux le faire maintenant, puisque le

10 témoignage a été interrompu?

11 M. le Président (interprétation): Oui.

12 Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

13 (Huis clos partiel à 12 heures 06.)

14 (expurgé)

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16 (expurgé)

17 (Audience publique avec mesure de protection à 12 heures 08.)

18 M. Nice (interprétation): Très bien. Je vais maintenant, aussi rapidement

19 que je peux, revenir sur certains sujets dont vous n'avez parlé que

20 partiellement précédemment.

21 Donc rapidement, je vous prie; paragraphe 87, page 15 de votre déposition.

22 Vous parliez du plan "Fer à cheval" et je crois que vous avez parlé de

23 "certains pouvoirs en haut lieu" lieu –je crois que ce sont les mots que

24 vous avez utilisés- qui se sont opposés à ce plan. Qui étaient ces

25 pouvoirs en haut lieu qui se sont opposés, qui ont rejeté l'application de

Page 4995

1 ce plan?

2 M. Tanic (interprétation): Jovica Stanisic, chef des services de sécurité

3 d'Etat de Belgrade; son adjoint, chef des services de sécurité adjoint de

4 Belgrade, Zoran Mijatovic; le général Momcilo Perisic qui était chef de

5 l'état-major; le général Aleksandar Dimitrijevic, chef du département de

6 sécurité militaire, et c'est le service qui est connu comme le KOS de

7 façon générale, services de sécurité de l'armée.

8 Question: Merci.

9 Réponse: Excusez-moi, mais il y a encore d'autres personnes qui se sont

10 opposées à l'application de ce plan.

11 Question: Très bien, poursuivez.

12 Réponse: Un responsable de haut rang qui accompagnait les responsables de

13 la sécurité militaire et les responsables de la sécurité de l'Etat en cas

14 d'opération; il faut que je me souvienne des noms. Il y avait aussi les

15 dirigeants de ce qu'on appelait le "groupe des réformistes" sur la scène

16 politique yougoslave, M. Zoran Lilic, Dusan Mihaljovic, Nebojsa Covic, des

17 réformistes bien connus. Voilà les gens les plus importants dans ce groupe

18 des réformistes. J'ai peut-être oublié des noms mais je ne voudrais pas

19 abuser. Leur opposition était systématique et toujours motivée.

20 M. Nice (interprétation): Merci.

21 M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice, s'il vous plaît. J'aimerais

22 demander au témoin s'il peut répondre à cette question.

23 Sur quoi se fondait votre opposition au plan "Fer à cheval", en quelques

24 mots, je vous prie?

25 Et j'ajouterai ce qui suit: je crois me rappeler que dans votre déposition

Page 4996

1 vous avez dit que, fondamentalement, ce plan consistait en cas d'attaque

2 de la part d'un agresseur et au cas où les Albanais soutenaient cet

3 agresseur, autorisait donc une action particulière, donc ce plan reposait

4 sur des hypothèses précises.

5 Alors, nous situant dans ce contexte hypothétique, pouvez-vous m'aider en

6 me disant quels étaient les fondements de votre opposition à ce plan?

7 M. Tanic (interprétation): Je n'ai pas de problème à répondre mais

8 j'apporterai une nuance. Ce plan "Fer à cheval" n'existait pas

9 officiellement sous cette dénomination, je l'ai dit clairement; il

10 s'agissait ici d'un abus, d'une dénomination qui caractérisait des formes

11 d'entraînement utilisées par l'ancienne JNA. Ce n'était pas une

12 dénomination officielle.

13 Bien. Maintenant, je répondrai à votre question: d'abord, la raison de

14 notre opposition résidait dans le fait qu'il n'y avait pas d'agression

15 extérieure et donc, il n'y avait pas non plus de population albanaise qui

16 s'était mise du côté de l'agresseur étranger. Par ces deux faits, il n'y

17 avait aucune raison de parler ou de mettre en œuvre le plan en "Fer à

18 cheval". Par ailleurs, pour l'armée et la police, leur objection venait du

19 fait que le problème du Kosovo pouvait se régler de façon politique grâce

20 à l'utilisation sélective de la force; et ceci, c'était quelque chose que

21 chacun savait depuis deux ou trois ans, y compris moi-même, y compris un

22 certain nombre de gens dont j'ai donné les noms qui se sont opposés à ce

23 plan, qu'ils aient été à un niveau très élevé ou à un niveau inférieur, y

24 compris à un niveau inférieur au mien.

25 M. Robinson (interprétation): Merci. Vous pouvez poursuivre, Monsieur

Page 4997

1 Nice.

2 M. Nice (interprétation): Merci. Page 17, paragraphe 96 de votre

3 déposition.

4 Monsieur le Témoin, vous avez commencé à nous dire ce que vous saviez en

5 détail des forces de l'UCK. Comment a-t-il été possible de connaître les

6 objectifs de l'UCK? Qui vous en a parlé en 1999 à Belgrade?

7 M. Tanic (interprétation): La plus grande partie de mes connaissances,

8 lorsque je parle des niveaux supérieurs des services de sécurité de

9 l'Etat, provient d'échanges de vues effectuées dans un cadre de travail

10 avec M. Zoran Mijatovic, chef des services de sécurité de la ville de

11 Belgrade et de son adjoint Jovica Stanisic, ainsi que de mes conversations

12 de travail avec d'autres responsables. Je pense que les noms que j'ai déjà

13 donnés sont suffisamment parlants; ils sont bien connus dans les médias

14 également. Et il a été dit qu'à cette époque, le nombre des terroristes

15 était environ de 2.000.

16 D'ailleurs, excusez-moi, Monsieur Nice, de quelle période parlez-vous? De

17 1998 ou de la période antérieure à 1998?

18 Question: Lorsque vous êtes parti à Belgrade pour un congé en 1998, avez-

19 vous eu des conversations avec quelqu'un au sujet des effectifs de l'UCK,

20 notamment à Djakovica?

21 Réponse: Excusez-moi. 1998… Dans ce cas, je dois me corriger: à ce moment-

22 là, les effectifs de l'UCK étaient bien supérieurs à 2.000. Moi, je

23 pensais à la période 1996/1997, excusez-moi.

24 1998, donc, c'est de cette période que j'ai parlé avec les responsables de

25 SDB -j'ai déjà donné un nom- ainsi qu'avec un homme qui menait les

Page 4998

1 opérations du SDB à Djakovica.

2 Question: Son nom?

3 Réponse: Son nom est Bogdan Tomas.

4 Question: Qu'a-t-il pu vous dire des effectifs de l'UCK et de ce que les

5 services de sécurité savaient des lieux de résidence des membres de l'UCK,

6 etc.?

7 Réponse: Je dois insister pour que la question soit un peu plus précise

8 car il y a de grandes différences entre l'UCK de 1997 et l'UCK de 1998. Et

9 au cours de ces deux années, les personnes dont j'ai parlé ont rempli les

10 fonctions qui étaient les leurs, donc je voudrais que la question soit

11 précisée de façon à ce que M. Milosevic ne puisse pas faire mauvaise

12 utilisation de mes réponses par la suite. J'ai déjà dit qu'en 1998, les

13 effectifs de l'UCK avaient été accrus mais ils l'ont été à plusieurs

14 reprises.

15 Question: Nous aimerions savoir ce que M. Tomas vous a dit au sujet de ce

16 qu'il savait des effectifs de l'UCK à Djakovica.

17 Réponse: Nous avons d'abord discuté de l'exemple de Decani, le centre de

18 Decani, l'action des chars de l'armée yougoslave aux alentours de Pâques

19 1998 puisqu'il était question à ce moment-là d'anéantir les nids de

20 mitrailleuses. Des unités spéciales de la SDB connaissaient bien

21 l'emplacement de ces nids de mitrailleuses et ils pouvaient les anéantir

22 sans intervention de l'armée. Mais au lieu de cela, c'est l'armée qui est

23 arrivée et qui a procédé à des destructions non sélectives d'une partie de

24 Decani peuplée d'Albanais du Kosovo, ce qui a intensifié les tensions

25 ethniques alors que les lieux où étaient concentrés les terroristes n'ont

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1 pas été détruits.

2 Et puis, il y a eu des tirs de tireurs embusqués, et les services de

3 sécurité se sont plaints de cette action en disant qu'elle n'avait pas été

4 efficace. Et, en réponse, on leur a dit qu'elle avait été ordonnée d'en

5 haut et que le pilonnage de Decani devait durer plusieurs jours. Je ne

6 sais pas quel était l'officier militaire responsable de cette opération.

7 Quant à…

8 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, l'heure de la pause

9 habituelle est passée. Avez-vous encore besoin de quelques minutes? De

10 combien de minutes pensez-vous?

11 M. Nice (interprétation): J'ai besoin de cinq ou dix minutes, je pense.

12 Pas plus.

13 M. le Président (interprétation): Bien. Poursuivez dans ce cas.

14 M. Nice (interprétation): Donc aucun des tireurs embusqués n'a été tué

15 mais en général, de façon générale, que vous a dit M. Tomas, s'il vous a

16 dit quelque chose au sujet de ce qu'il savait des forces de l'UCK à

17 Djakovica?

18 M. Tanic (interprétation): Il est possible qu'un tireur embusqué ait été

19 tué, mais avant tout, M. Mijatovic, qui était la personne responsable, m'a

20 dit que M. Milosevic n'autorisait pas les services de sécurité de l'Etat à

21 agir contre les dirigeants de l'UCK qui étaient à l'étranger, qu'il

22 n'autorisait pas la surveillance électronique à la frontière et qu'il

23 empêchait toute mesure efficace -comme il l'a dit- contre le terrorisme

24 albanais, y compris contre le trafic de drogue, qu'il refusait

25 pratiquement tout ce qui pouvait être fait, et y compris des matériels qui

Page 5000

1 lui étaient offerts à crédit pour la surveillance de la frontière. Donc

2 qu'il s'exprimait contre le terrorisme en parole, mais que, dans la

3 pratique, il empêchait toute action visant le terrorisme de façon efficace

4 parce que "les terroristes n'étaient pas des paysans tout de même!

5 C'étaient des terroristes. Et ils avaient des dirigeants".

6 Question: Paragraphe 107: il y a un lien avec la question précédente.

7 Avez-vous appris quoi que ce soit au sujet de ce qui s'est passé à

8 Likosane et à Prekaz? Si oui, de la bouche de qui?

9 Réponse: Oui, comme je l'ai dit: dans le village de Likosane, une

10 patrouille a été tuée, en tout cas, une patrouille de police.

11 Question: Je vous interromps. Je vous interromps. Vous avez entendu parler

12 de cela de la bouche de qui?

13 Réponse: De Bogdan Tomas et de Mijatovic. Et quand j'utilise le terme

14 "service", ce sont ces deux hommes auxquels je pense.

15 Question: Que vous ont-ils dit au sujet de ce qui s'était passé à Likosane

16 et à Prekaz?

17 Réponse: Ils m'ont parlé des résultats d'une enquête interne menée par le

18 MUP qui montrait que la situation était hautement suspecte, que les unités

19 de la police, des unités de la police serbe avaient été envoyées dans le

20 village de Likosane pour lutter contre une forteresse, un fortin

21 terroriste, sans disposer des équipements nécessaires, sans disposer des

22 véhicules, de la logistique, des renseignements nécessaires, etc., etc. et

23 que donc on avait l'impression qu'on les avait envoyées à la mort.

24 Après cela, les forces de police, dans leur recherche des auteurs de

25 meurtre, des tueurs, des terroristes albanais du Kosovo, ont tué un

Page 5001

1 certain nombre de personnes. Les frères Jashari ont érigé des barrages

2 devant leur maison à Donji Prekaz; ils étaient avec les autres membres de

3 leur famille. Notre police savait, connaissait les tactiques très

4 anciennes des terroristes albanais et musulmans qui consistent à prendre

5 des êtres humains pour s'en servir comme bouclier humain, pour se

6 protéger, et à prendre y compris des membres de famille ou des amis, etc.

7 Donc c'est quelque chose de très moche, de très vil, mais il n'y a pas

8 d'autre moyen que de les tuer dans ce cas.

9 Et notre police est intervenue. La force a été utilisée massivement contre

10 les Jashari qui ont été tués en grand nombre, y compris femmes, enfants,

11 et ceci a donné lieu à des inquiétudes dans les milieux politiques, au

12 sein de l'armée, de la police et des services de sécurité parce que nous

13 savions que cela allait créer des ressentiments importants parmi les

14 Albanais et créer des risques de représailles.

15 M. Nice (interprétation): Merci. Pouvons-nous en venir maintenant au

16 paragraphe 98?

17 M. le Président (interprétation): Quand vous aurez fini, nous suspendrons

18 l'audience.

19 M. Nice (interprétation): Y a-t-il eu un Albanais identifié qui s'appelait

20 Agim Ceku?

21 M. Tanic (interprétation): Oui, les Albanais ont été identifiés, plusieurs

22 d'entre eux d'ailleurs. Mais quand j'ai souhaité obtenir des

23 renseignements sur ce point, j'en ai été empêché par des gens qui étaient

24 loyaux à Milosevic.

25 Question: Avez-vous découvert oui ou non quelle était l'attitude de

Page 5002

1 l'accusé vis-à-vis de la recherche de ces personnes afin de les remettre à

2 l'institution où nous nous trouvons, le Tribunal pénal international? Oui

3 ou non, avez-vous appris cela?

4 Réponse: Oui, je l'ai appris. Et de la façon la plus claire qui soit.

5 Question: De la bouche de qui?

6 Réponse: D'abord, des bouches des dirigeants des services de sécurité de

7 l'Etat. Et l'un des exemples que je peux donner, c'est les tortures

8 auxquelles j'ai été soumis parce que l'une des accusations qui a été

9 portée contre moi a été que j'allais livrer certaines personnes, certains

10 terroristes albanais au Tribunal de La Haye, et que j'enquêtais à cette

11 fin. Donc j'ai été frappé pendant deux heures en raison de ce seul motif.

12 M. Nice (interprétation): J'ai peut-être encore quelques questions, mais

13 il n'y en aura pas beaucoup.

14 M. le Président (interprétation): Je suspends l'audience pendant 20

15 minutes.

16 (L'audience, suspendue à 12 heures 24, est reprise à 12 heures 45.)

17 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice.

18 M. Nice (interprétation): Paragraphe 113, page 20. Veuillez, s'il vous

19 plaît, répondre par oui ou par non aux questions suivantes.

20 Avez-vous appris quoi que ce soit au sujet des ordres donnés afin

21 d'envoyer des troupes dans la région de Djakovica au mois de juin 1989 ou

22 à peu près à cette période? Répondez par oui ou par non.

23 M. Tanic (interprétation): Oui, mais avant juin 1999.

24 Question: De qui avez-vous reçu les informations que vous avez reçues à ce

25 sujet?

Page 5003

1 Réponse: Nous parlons de Pâques 1998 et c'était Bogdan Tomas, peut-être

2 qu'il y a eu une erreur dans la transcription des propos.

3 Question: Non, mais il se trouve que j'essaie de passer en revue tous les

4 points que nous avions laissés de côté, et j'étais en train de parler de

5 juin 1999. Au cours des bombardements de l'OTAN –il y a peut-être eu une

6 erreur, en effet, au niveau de la transcription de nos propos, c'est vrai-

7 mais je voudrais savoir si, en 1999, vous avez eu connaissance d'un ordre

8 qui a été donné pour envoyer des troupes dans la région de Djakovica?

9 Veuillez, s'il vous plait, répondre par oui ou par non.

10 Réponse: Oui, mais avant juin, c'est là que se trouve l'erreur. En juin,

11 tout était pratiquement terminé. Je vous prie de m'excuser.

12 Question: Et de qui avez-vous reçu cette information?

13 Réponse: D'un officier, Tomas Bogdan, d'un officier des services de

14 sécurité qui était là alors que les bombes tombaient et qui a vu ce qui se

15 passait, qui a vu ce qui arrivait aux hommes qui étaient envoyés pour

16 mourir sous les bombes qui tombaient.

17 Question: Qu'a-t-il été en mesure de vous dire?

18 Réponse: Tout simplement, il m'a dit que quand les bombes tombaient, on

19 avait l'impression que la terre avait pris feu, qu'elle bouillonnait. Pour

20 vous dire l'intensité des bombardements: tout brûlait. Et là, sans que ce

21 soit nécessaire après la fin des bombardements, les soldats ont été

22 envoyés pour prendre le contrôle des terrains qui étaient bombardés. Puis

23 les avions de l'OTAN sont venus et, de nouveau, des soldats ont perdu leur

24 vie. Et on connaissait déjà à ce moment-là l'Accord Chernomyrdin-Atisari.

25 Question: Répondez par oui ou par non. Est-ce que vous avez appris ce que

Page 5004

1 ces soldats étaient censés faire en allant à Djakovica? Connaissez-vous

2 leur objectif, répondez par oui ou par non?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Est-ce que c'est toujours M. Tomas qui vous l'a dit, ou

5 quelqu'un d'autre?

6 Réponse: Oui, et puis j'ai eu également d'autres sources après cela.

7 Question: Quel était l'objectif de l'envoi de ces troupes sur place? Que

8 vous en a-t-on dit?

9 Réponse: L'objectif était d'expulser les terroristes albanais des zones où

10 ils auraient pu revenir après le bombardement de l'OTAN, s'il y avait de

11 nouveau un bombardement, de nouveau des victimes serbes, de nouveau des

12 expulsions, etc.

13 Question: Oui ou non, est-ce que M. Tomas -s'il vous plaît, répondez par

14 oui ou non- a-t-il été en mesure de vous dire qui avait donné pour

15 instruction aux troupes de se rendre à cet endroit et de procéder à ces

16 opérations?

17 Réponse: Non. Non, il n'a pas pu le me le dire, je l'ai appris par une

18 autre source.

19 Question: Sans nous faire part de la conclusion, comment l'avez vous

20 appris, de quelle manière?

21 Réponse: Dans des discussions avec le général Perisic ultérieurement, au

22 moment où je préparais un livre. Et je parlais de la nécessité de

23 l'utilité de faire appel à une armée dans de telles circonstances, de

24 déployer des troupes dans de telles circonstances.

25 Question: Et d'après ce que vous a dit cette source, qui avait donné pour

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1 ordre à ses troupes de se rendre à Djakovica dans cet objectif.

2 Réponse: Une fois encore, c'était cette chaîne de commandement privée. Je

3 ne peux pas le confirmer directement, mais en tous cas, c'était la chaîne

4 qui descendait de Milosevic, et sans que ceci soit conforme aux

5 institutions, et qui descendait à Pavkovic, cette chaîne de commandement

6 donc de Milosevic à Pavkovic.

7 Question: Merci. Paragraphe 131, page 22. Est-ce que vous avez appris

8 d'une source quelle qu'elle soit -et répondez, s'il vous plaît, par oui ou

9 par non- qui avait ordonné l'opération de Racak? Répondez par oui ou non,

10 avez-vous appris qui en avait donné l'ordre?

11 Réponse: Oui, oui, oui.

12 Question: Qui vous en a informé?

13 Réponse: Des sources étrangères.

14 Question: Pouvez-vous nous donner le nom de ces sources?

15 Réponse: Non. Je peux vous donner les sources publiques.

16 M. Nice (interprétation): Vous parlez de sources publiques, de quoi

17 s'agit-il?

18 M. Tanic (interprétation): Ce qui est paru dans la presse, enfin dans un

19 seul journal.

20 M. le Président (interprétation): Ce genre d'éléments de preuve n'est pas

21 admissible, Monsieur Nice.

22 M. Nice (interprétation): Je ne vais pas aller plus loin à ce sujet. J'en

23 ai donc terminé des passages que nous avions mis de côté. Il me reste

24 encore un certain nombre de questions et une pièce à conviction qui

25 restent d'hier.

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1 D'abord, les questions. Un point de détail: quand on examine cet accord

2 potentiel dont vous nous avez parlé, est-ce que la Yougoslavie elle-même

3 avait participé à l'envoi de forces de maintien de la paix des Nations

4 Unies précédemment, à votre connaissance?

5 M. Tanic (interprétation): Oui, à des opérations de maintien de la paix.

6 Question: Et en fait, est-ce que vous avez une opinion quelconque au sujet

7 des Kosovars ou des Albanais ou de leur culture? Est-ce qu'ils vous

8 tiennent à cœur? Quelle est votre position?

9 Réponse: Mon opinion personnelle ou politique?

10 Question: Non, votre opinion personnelle.

11 Réponse: Elle est très négative.

12 Question: Pourquoi?

13 Réponse: Parce qu'ils présentent un problème pour ce qui est des intérêts

14 de l'Etat et de la nation serbe. Pas de la manière dont certains

15 l'entendent mais, en tous cas, ils présentent un problème. Surtout,

16 maintenant.

17 M. Nice (interprétation): J'en ai fini des questions mais, si vous le

18 permettez, je souhaiterais évoquer les journaux. J'ai commencé déjà à

19 fournir des extraits d'articles hier, vous vous souviendrez.

20 M. le Président (interprétation): Est-ce que ceci découle toujours du

21 dernier témoin?

22 M. Nice (interprétation): Vous vous souviendrez que le problème auquel

23 nous étions confrontés était le suivant: il y avait un article de journal

24 qui avait apparemment été expurgé pour y biffer le nom du témoin. Donc,

25 nous avions un original qui est expurgé et des copies expurgées. J'hésite

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1 beaucoup à demander au CLSS de retraduire à nouveau cet article.

2 Je souhaiterais donc demander à la Chambre la possibilité de verser

3 l'original de cette pièce où avons souligné tous les endroits où il y

4 avait eu expurgations. Il s'agit de la pièce 147 et je pense que même les

5 personnes qui ne savent pas lire le cyrillique pourront voir clairement

6 que c'est le nom du témoin qui a été expurgé. Tout cela est donc très

7 logique et permettra de comprendre la traduction en anglais.

8 (Intervention de l'huissier.)

9 On voit que c'est le nom de Radomir Tanic qui est expurgé à plusieurs

10 reprises parfois, le titre de ses fonctions. Et puis, nous avons deux

11 autres articles de presse semblables; je les ai présentés sous forme de

12 liasse. On trouve d'abord la version anglaise, ensuite l'original où nous

13 avons souligné les passages expurgés. Même chose pour l'autre article.

14 Je me demande si tout cela pourrait entrer au dossier sous la cote 147.

15 Nous aurions ainsi deux volets supplémentaires à cette pièce 147 et, avec

16 la Chambre, je me demande si nous pourrions avoir la possibilité de ne pas

17 demander une traduction supplémentaire des articles où l'on avait

18 simplement expurgé les noms; ceci nous permettra d'économiser aussi bien

19 du temps que de l'argent.

20 M. le Président (interprétation): Il serait peut-être utile que nous ayons

21 des pièces 147.1, 147.2, 147.3 afin d'éviter toute confusion?

22 M. Kwon (interprétation): Monsieur Nice, pouvez-vous nous dire, s'il vous

23 plaît, si M. Tanic a parlé du paragraphe 108 à la page 20, si l'on a parlé

24 de manière exhaustive après qu'il a décidé de finalement tout nous dire en

25 audience publique?

Page 5008

1 M. Nice (interprétation): Je vais lui poser la question.

2 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

3 l'article en date du 18 septembre 1996 portera la cote 147.2; l'article

4 daté du de 31 juillet 1997 portera la cote 147.3.

5 M. Nice (interprétation): Dernière question. Monsieur Tanic, suite à la

6 question posée par M. le Juge Kwon, vous avez manifesté le désir de

7 témoigner entièrement en audience publique et je voudrais, dans ce

8 contexte, savoir si vous pouvez ou si vous êtes prêt à parler de ce qui

9 s'est passé lors de la réunion d'avril 1999 avec l'accusé. Répondez par

10 oui ou par non, sans explication.

11 M. Tanic (interprétation): Oui, mais il faudrait qu'une correction soit

12 apportée à la description qui n'est pas tout à fait correcte –c'est sans

13 doute ma faute, d'ailleurs- lorsque j'ai décrit de quoi il était question.

14 Question: Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé et quand?

15 Réponse: Eh bien, au cours des mois d'avril et de mai, il y a eu quatre ou

16 cinq réunions… Il me faut un peu de temps pour répondre, mais je vais

17 essayer d'être aussi concis que possible. Donc au cours des mois d'avril

18 et de mai, il y a eu cinq ou six réunions à Belgrade au club de Novo

19 Demokracija avec l'ambassadeur italien. Il y avait M. Vuk Draskovic, le

20 vice-Premier ministre du gouvernement. Il y avait le Président de mon

21 parti, M. Dusan Mihaljovic.

22 Question: Ceci est sans doute d'un grand intérêt mais moi, ce qui

23 m'intéresse au plus haut point, c'est de savoir ce que l'accusé vous a dit

24 lorsque vous l'avez vu en personne. Je voudrais simplement que vous nous

25 parliez de cela afin d'avancer au plus vite.

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1 Réponse: Eh bien, justement, c'est pour cela que j'en parle. Comme nous ne

2 nous sommes pas rencontrés en tête-à-tête, en face à face, puisqu'il y a

3 eu une conversation téléphonique: cela s'est passé par conférence

4 téléphonique. Je ne pensais pas en parler mais, en tout cas, il y a eu une

5 conversation téléphonique entre nous, mais pas de rencontre en chair et en

6 os.

7 Et ce qui a été dit à ce moment-là, c'est qu'il n'y aurait pas de cessez-

8 le-feu, mais que la Serbie et la Yougoslavie avaient besoin de victimes

9 civiles supplémentaires. Ceci a été dit quand on a insisté pour que le

10 conflit se termine aussi rapidement que possible. Mais je ne souhaite pas

11 dire quoi que ce soit de plus à ce sujet parce qu'il y a d'autres éléments

12 qui prouvent la véracité de cette accusation contre M. Milosevic.

13 M. Nice (interprétation): Mais qui a dit ça et qui était de l'autre côté

14 du téléphone?

15 M. Tanic (interprétation): Eh bien, j'ai entendu sur le haut-parleur du

16 téléphone le dialogue qui a eu lieu entre MM. Milosevic et Draskovic. Il

17 s'agissait d'une réception, mais de notre réception.

18 Permettez-moi de vous parler du contexte, si vous le souhaitez, parce que

19 c'est très important.

20 M. le Président (interprétation): Non. Monsieur Tanic, nous avons essayé

21 de comprendre exactement ce qui a été dit. Ce qui est important ici, c'est

22 la conversation. Est-ce que je vois et bien compris? Il y a eu une

23 conversation téléphonique entre M. Draskovic et M. Milosevic, est-ce bien

24 exact?

25 M. Tanic (interprétation): Oui. Par le biais du haut-parleur du téléphone.

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1 M. le Président (interprétation): Et vous, vous écoutiez ce qui sortait du

2 haut-parleur et vous avez entendu ce que vous avez rapporté?

3 M. Tanic (interprétation): Oui, parce que ceci a eu lieu dans les bureaux

4 de notre parti.

5 M. le Président (interprétation): Vous parlez de réception: c'était peut-

6 être une erreur dans la traduction. Est-ce que ceci a une pertinence

7 quelconque pour ce qui est de cette conversation?

8 M. Tanic (interprétation): Il s'agissait d'une petite réception que nous

9 avions organisée en présence de l'ambassadeur italien et nous avons mis à

10 profit cette occasion pour… En tout cas, c'était une petite réception.

11 J'en ai parlé brièvement précédemment et l'erreur vient de moi; je

12 n'allais pas en parler de cette manière, je voulais aborder la question

13 d'une autre manière. Donc maintenant, ceci est plus clair.

14 Mais en tout cas, la teneur de la conversation reste inchangée.

15 M. le Président (interprétation): Merci bien.

16 M. Nice (interprétation): J'en ai terminé des questions que je souhaitais

17 poser, à ce stade des débats, au témoin.

18 Je vous serais très reconnaissant si, avant la fin de l'audience

19 d'aujourd'hui, on pouvait avoir une idée du temps dont aura besoin

20 l'accusé pour contre-interroger ce témoin, parce que ceci aura une

21 influence sur l'ordre de comparution des témoins la semaine prochaine,

22 chose qui est très difficile à gérer. Et, compte tenu du temps dont aura

23 besoin l'accusé, il faudra peut-être réorganiser la comparution des

24 témoins; il faudrait que je puisse vous le dire demain ou après-demain.

25 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, de combien de temps

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1 aurez-vous besoin pour contre-interroger le témoin?

2 M. Milosevic (interprétation): En tout cas, beaucoup de temps, plus que M.

3 Nice n'en a eu besoin, étant donné que ce témoin nous a fourni une énorme

4 liasse de documents.

5 M. le Président (interprétation): Inutile d'entrer dans les détails pour

6 l'instant. Nous sommes en train de réfléchir au temps nécessaire.

7 M. Nice (interprétation): Mais en fait, cette indication me suffit.

8 M. le Président (interprétation): En tout cas, demain. Demain, la journée

9 de demain

10 M. Milosevic (interprétation): Mais si je n'ai que la journée de demain,

11 ce serait moins que le temps dont a disposé M. Nice!

12 M. Robinson (interprétation): Monsieur Milosevic, vous allez entamer votre

13 contre-interrogatoire du témoin. Il a dit beaucoup de choses lors de sa

14 déposition, beaucoup de choses qui se rapportent à vous-même. Il s'agit

15 donc d'éléments de preuve que l'on peut considérer comme importants pour

16 la Chambre de première instance.

17 Afin d'utiliser au mieux la possibilité qui vous est donnée de contre-

18 interroger le témoin, je souhaiterais vous enjoindre de cibler au mieux

19 votre contre-interrogatoire en vous concentrant sur les questions

20 pertinentes et de résister à la tentation d'ergoter ou même de vous lancer

21 dans des joutes oratoires avec le témoin. Le contre-interrogatoire ne doit

22 pas être utilisé pour marquer des points face à un adversaire. Je pense

23 utile de vous le rappeler au début du contre-interrogatoire de ce témoin,

24 dont les dires sont très importants et la déposition est importante, aussi

25 bien en ce qui vous concerne que pour la Chambre.

Page 5012

1 M. Milosevic (interprétation): S'agissant du temps, je constate

2 qu'aujourd'hui, il me reste moins de 40 minutes, ce qui signifie que

3 demain j'aurai besoin de toute la journée de demain ainsi que toute la

4 journée de lundi pour contre-interroger le témoin.

5 M. le Président (interprétation): Ceci n'est absolument pas le cas.

6 Indéniablement, nous vous accorderons la journée de demain, mais je viens

7 de noter que le Procureur a eu besoin de quatre heures et demie pour

8 interroger le témoin. Si l'on vous accorde toute la journée de demain,

9 vous aurez bénéficié de la même période de temps. Nous verrons où nous en

10 sommes, comment nous avançons et nous verrons la nature des questions

11 posées avant de décider s'il convient que le contre-interrogatoire se

12 poursuive au-delà de la journée de demain.

13 Encore une chose, Monsieur Nice, un point technique: est-ce que le témoin

14 sera à même d'être présent ici la semaine prochaine?

15 M. Nice (interprétation): Sans problème. Moi, il se trouve que je ne serai

16 pas là mardi, mais on me remplacera sans problème.

17 M. le Président (interprétation): Bien.

18 M. Milosevic (interprétation): Ceci signifie donc que je dispose du

19 premier jour de la semaine prochaine. C'est bien ce que vous avez dit?

20 M. le Président (interprétation): Non. Justement, c'est tout à fait le

21 contraire de ce que j'ai dit. J'ai dit que vous avez toute la journée de

22 demain. Ensuite, nous déterminerons si vous avez du temps mardi, suivant

23 votre évolution, l'évolution de votre contre-interrogatoire.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais est-ce que l'on tient compte du fait

25 que M. Nice a débuté hier à 11 heures 40? Et ensuite, il a disposé de deux

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1 heures hier.

2 M. le Président (interprétation): Oui, j'en ai bien pris note. Mais ce

3 n'est pas le cas. Il a eu une heure et demie. Mais inutile de se lancer

4 dans des débats stériles au sujet du temps.

5 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Ratomir Tanic, par l'accusé M.

6 Milosevic.)

7 M. Milosevic (interprétation): Bien. Passons au contre-interrogatoire.

8 Mais je voudrais dire une chose: le simple fait que le premier Serbe à

9 déposer ici soit un faux témoin confirme mes affirmations selon

10 lesquelles…

11 M. le Président (interprétation): Voici un commentaire de votre part. Si

12 vous avez des questions, posez-les. Mais là, vous êtes en train de perdre

13 votre temps.

14 M. Milosevic (interprétation): Vous affirmez que vous êtes un de mes

15 associés?

16 M. Tanic (interprétation): Je vous en prie, je n'ai jamais dit que j'étais

17 un associé ni un de vos amis, mais c'est les circonstances qui ont fait

18 les choses. Il serait faux de ma part de dire que j'étais un de vos amis

19 ou un de vos associés, mais le fait que j'ai été un conseiller du

20 président d'un des partis de votre coalition, ce qui fait que j'ai eu des

21 contacts réguliers, des contacts de travail réguliers dans le cadre de

22 l'application de votre politique; et j'ai eu des contacts parfois avec

23 vous. Vous avez vu que j'ai énuméré les circonstances très limitées qui

24 nous ont vu rencontrer.

25 M. le Président (interprétation): Bien, bien, bien. Nous y viendrons et

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1 nous éclaircirons ce point.

2 M. Tanic (interprétation): Donc, j'ai été, en fait, très prudent et

3 modeste dans ma façon de présenter ces choses-là.

4 M. Milosevic (interprétation): Bien. Vous dites que vous étiez à un

5 associé parce que je vous ai donné des instructions quant à votre travail,

6 ou bien que j'ai suivi, que j'ai participé au travail que vous avez

7 accompli.

8 M. Tanic (interprétation): On me demande d'attendre l'interprétation.

9 J'ai dit qu'à plusieurs reprises, dans le cadre du travail que

10 j'accomplissais, d'abord pour mon parti, en tant que membre de la

11 coalition du gouvernement… Ceci a été confirmé à plusieurs reprises

12 indirectement ou directement par vous-même. Je n'ai jamais affirmé que

13 j'ai été associé constamment à vos activités ni que j'ai été votre ami.

14 J'ai présenté les choses de façon tout à fait prudente et j'ai présenté

15 notre association de travail de façon extrêmement prudente. Mais

16 j'appartenais à un parti qui était un parti de coalition.

17 Question: Moi, ça ne m'intéresse de parler de cette coalition. Vous

18 affirmez que vous avez eu des contacts directs avec moi?

19 Réponse: Oui. Mais j'attends l'interprétation.

20 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais vous comprenez le serbe,

21 j'imagine?

22 M. Tanic (interprétation): Oui, je comprends. Mais pour la Chambre de

23 première instance…

24 M. le Président (interprétation): Il faut que vous vous souveniez que tous

25 vos propos doivent être traduits. Veuillez donc faire, s'il vous plaît,

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1 une pause.

2 M. Milosevic (interprétation): Merci.

3 M. Nice (interprétation): Excusez-moi, j'ai une question, mais je

4 n'entends pas l'interprétation; donc je ne sais pas combien de temps je

5 dois attendre, si je peux répondre tout de suite. Ça, ça me cause une

6 petite difficulté.

7 M. Milosevic (interprétation): Vous affirmez que vous apparteniez au parti

8 Nova Demokracija, le parti qui s'appelle Nouvelle Démocratie, oui ou non?

9 M. Tanic (interprétation): Oui.

10 Question: Est-ce que vous occupiez un poste, une fonction quelconque au

11 sein de ce parti?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Pouvez-vous me dire, mais le plus succinctement possible,

14 pourquoi vous pensez que moi-même, en plus de 700.000 autres membres de

15 mon parti, le Parti socialiste, et 150.000 membres de la gauche, ainsi que

16 d'autres personnes de qualité, pourquoi est-ce que moi j'aurais eu besoin

17 de vous choisir, vous, pour vous affecter une mission, quelle qu'elle

18 soit?

19 Réponse: Je n'ai jamais affirmé que vous, vous m'aviez donné une mission

20 quelconque. Ce que j'ai dit, c'est que vous avez autorisé des missions

21 qui, ensuite, m'ont été confiées et que j'ai réalisées. Je pense par

22 exemple aux missions qui m'ont été confiées par le président de mon parti.

23 Question: Donc c'est le président de votre parti qui vous a donné des

24 missions. Alors, est-ce que vous m'avez jamais rencontré moi,

25 personnellement?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Vous avez dit hier, en réponse à une des questions posées par M.

3 Nice, que vous m'aviez rencontré fréquemment. Est-ce exact?

4 Réponse: Non, ce n'est pas exact parce que j'ai donné la liste des

5 rencontres que j'ai eues avec vous en réponse à une question de M. Nice.

6 Question: Oui, j'en ai pris note. Il vous a demandé si je vous ai

7 rencontré fréquemment; vous avez répondu oui. Il vous a demandé si l'on

8 s'était rencontré plus d'une fois et vous avez répondu oui. Ensuite, il

9 vous a demandé combien de fois et vous avez répondu: "Six ou sept fois."

10 Est-ce que c'est vrai ou pas? Répondez par oui ou par non.

11 Réponse: Oui, c'est exact. A mon avis, ça, ce n'était pas des rencontres

12 fréquentes. Si M. Nice estime que c'étaient des rencontres fréquentes, eh

13 bien, peu importe.

14 Question: Vous avez dit cinq à sept fois?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Il vous a demandé: "Où?". Vous avez dit: "Deux ou trois fois

17 lors de réceptions de la délégation du Parti de la Nouvelle démocratie, et

18 deux ou trois fois lors d'autres réceptions au parti de la JUL", n'est-ce

19 pas?

20 Réponse: Non, j'ai été beaucoup plus précis.

21 Question: Bien. On pourra vous remettre la transcription de vos propos et

22 c'est ce qui figure au compte rendu d'audience.

23 Réponse: Eh bien, à ce moment-là, je crois que vous vous êtes trompé en

24 prenant des notes, parce que je sais très bien ce que je vous ai dit.

25 M. Milosevic (interprétation): Bien.

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1 M. le Président (interprétation): Il a dit, d'après les notes que j'ai

2 prises, que le nombre de rencontres s'élevait à cinq ou sept, et, toujours

3 dans le cadre de réunions de travail ou de réceptions, deux ou trois fois

4 lors des congrès annuels, des réunions annuelles entre les partis, lors

5 des réceptions de la JUL ou lors de réceptions données à l'occasion de

6 jours fériés.

7 M. Milosevic (interprétation): Ceci nous donne donc cinq ou sept

8 rencontres. C'est cela?

9 M. Tanic (interprétation): Oui, c'est exact, comme vient de le répéter M.

10 le Juge May.

11 Question: Autant que je puisse interpréter la chose, vous ne m'avez pas

12 jamais rencontré moi personnellement, vous n'avez jamais eu de rencontre

13 personnelle avec moi?

14 Réponse: Vous voulez dire en tête-à-tête, vous et moi seulement?

15 Question: Non, lors d'une réunion quelle qu'elle soit?

16 Réponse: J'attends l'interprétation. Eh bien, à chacune de ces occasions,

17 nous nous sommes rencontrés, mais jamais en tête-à-tête. Il y avait

18 toujours d'autres personnes qui étaient présentes, il y avait toujours un

19 groupe.

20 Question: Comme vous nous parlez de réceptions au Parti de la Nouvelle

21 démocratie, il y avait toujours des représentants des médias, de la

22 télévision ou de la presse écrite; il y avait des cameramen lors de ce

23 type de réceptions?

24 Réponse: Monsieur Milosevic, je n'ai jamais parlé de réceptions de la

25 Nouvelle démocratie.

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1 Question: Vous avez parlé de réunions ou de réceptions qui me faisaient

2 rencontrer régulièrement, moi, qui me faisait rencontrer le Parti Nova

3 Demokracija?

4 Réponse: Oui, Monsieur Milosevic, mais il ne s'agissait pas de réceptions

5 données par Nova Demokracija; il s'agissait de réunions qui étaient

6 organisées entre Nova Demokracija et vous-même, dans le bâtiment de la

7 Présidence de Serbie. Il y avait des photographes. Ceci a été

8 photographié: je peux vous les amener demain, ces photographies, si vous

9 le voulez.

10 Question: Justement, c'est ce que j'ai dit. Comment dire? Lorsque les

11 membres du Parti de la Nova Demokracija arrivaient, ils étaient en

12 délégation nombreuse, oui ou non?

13 Réponse: J'attends l'interprétation.

14 Question: Je vous en prie, répondez!

15 Réponse: Parfois oui, parfois non. En tout cas, c'était toujours dans le

16 cadre de la visite d'une délégation, il y avait toujours une délégation.

17 Et qui dit délégation, dit beaucoup de monde.

18 Question: Bon. Cessons de perdre du temps.

19 Réponse: Nous avons perdu du temps, Monsieur Milosevic.

20 Question: Est-ce que vous savez que, lors des réceptions de la JUL, c'est-

21 à-dire de la Gauche Yougoslave Unifiée ou d'autres réceptions d'Etat, il y

22 a toujours énormément de monde: des gens qui appartenaient à la communauté

23 religieuse, à la communauté diplomatique, des notables, etc. Est-ce que

24 vous le savez?

25 Réponse: Bien évidemment.

Page 5019

1 Question: Ces réceptions, auxquelles participaient plus de 1.000 personnes

2 en général, peuvent-elles être considérées comme des rencontres avec moi?

3 Réponse: J'ai décrit très précisément les circonstances dans lesquelles

4 ont eu lieu de brèves rencontres de travail avec vous, Monsieur Milosevic,

5 lors de ces réceptions. Car lors de ces réceptions, comme tout homme

6 d'Etat, vous vous efforciez d'avoir quelques conversations de travail avec

7 certaines personnes; c'étaient des conversations de travail brèves. J'ai

8 parlé de rencontres et pas de réunions; j'ai été très précis et je n'ai

9 jamais parlé de ces rencontres comme des rendez-vous pris dans le cadre de

10 ces réceptions; j'ai parlé de rencontres de travail qui se sont déroulées

11 afin d'échanger des opinions.

12 Je demande que l'on vérifie le compte rendu d'audience pour voir à quel

13 point j'ai été précis.

14 M. Milosevic (interprétation): Vous avez dit vous-même que ces réceptions

15 étaient assez rares et moi, j'y allais très rarement. J'y assistais très

16 rarement. Je ne m'occupais pas de contact de travail au moment de ces

17 réceptions. Donc, si je ne le faisais pas, vous ne pouviez pas avoir de

18 rencontres de travail dans ce cadre. Comment receviez-vous des invitations

19 à ces réceptions, dans le cadre de la Nouvelle Démocratie, puisque vous

20 dites que vous n'étiez pas membre de direction mais simplement conseiller

21 du président?

22 M. Tanic (interprétation): Excusez-moi, mais là, il y a trois questions en

23 une seule, si j'ai bien compris. Ou au moins…

24 M. le Président (interprétation): Non, non. Contentez-vous de répondre à

25 la dernière question: comment étiez-vous invité à ces réceptions?

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1 M. Tanic (interprétation): J'étais invité par écrit dans le cadre du quota

2 réservé à la Nouvelle Démocratie, je n'ai jamais dit que je n'étais pas un

3 permanent de la Nouvelle Démocratie: j'étais en tout cas conseiller et

4 j'avais également d'autres tâches et je recevais des invitations

5 régulières, qui sont enregistrées par écrit.

6 M. Milosevic (interprétation): Donc dans le cadre du quota réservé à la

7 Nouvelle Démocratie?

8 M. Tanic (interprétation): Monsieur Milosevic, il n'est pas question de

9 quota ici.

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Tanic, vous pouvez être tenté

11 de vous quereller avec l'accusé, mais vous devez résister à ces

12 tentations. Souvenez-vous que vous êtes devant un Tribunal; répondez aux

13 questions et ne personnalisez pas le problème.

14 Monsieur Milosevic, pour ce qui vous concerne, je vous demande de ralentir

15 votre débit lorsque vous posez vos questions.

16 M. Milosevic (interprétation): Ma question suivante est très courte.

17 Monsieur le Témoin, vous êtes-vous présenté mensongèrement ici? Je ne

18 pense pas à votre nom et prénom, mais au rôle que vous remplissiez, au

19 rôle qui était le vôtre. L'avez-vous présenté de façon mensongère: oui ou

20 non?

21 M. Tanic (interprétation): Non.

22 Question: Permettez-moi de vous donner lecture. Après quoi, je vous

23 demanderai de répondre à une de mes questions.

24 Voilà ce que le Parti de la Nouvelle Démocratie, donc votre parti, a

25 annoncé hier suite au début de votre déposition. Donc Nouvelle Démocratie,

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1 votre parti, dont le président est le ministre de l'Intérieur actuel,

2 comme vous l'avez dit, donc un de mes opposants en tout état de cause.

3 Voilà ce qui est écrit: "Réponse: Ratomir Tanic témoigne au sujet de sa

4 tentative de créer une histoire à laquelle la Nouvelle Démocratie, comme

5 il l'a présentée…, pas plus qu'il n'avait le rôle qu'il souhaite se

6 donner. Selon nos informations, Tanic ne pouvait en aucun cas être le

7 partenaire de Milosevic dans l'élaboration d'un plan destiné à restaurer

8 l'autonomie du Kosovo".

9 M. le Président (interprétation): Nous allons interrompre ici. De toute

10 façon, nous allons vous interrompre parce que, Monsieur Milosevic, je vous

11 demande ce que vous êtes en train de lire.

12 M. Milosevic (interprétation): Le journal d'aujourd'hui; je vous le

13 remettrai.

14 M. le Président (interprétation): Quel journal?

15 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais simplement terminer le journal

16 de Belgrade d'aujourd'hui que j'ai reçu.

17 M. le Président (interprétation): Non, non! A moins que vous n'ayez une

18 question précise, il ne s'agit que de commentaires provenant d'une tierce

19 personne.

20 M. Milosevic (interprétation): Je vous en prie! Ceci n'est pas un

21 commentaire, ceci est une publication officielle du parti auquel le témoin

22 appartient et je souhaite l'interroger en rapport avec cette annonce

23 officielle de son parti. Je vais poursuivre la lecture, cette annonce est

24 très courte.

25 Je cite: "L'imagination peut tout faire et la nécessité encore plus. Nous

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1 avons de la compréhension pour l'affaire Tanic, a déclaré hier Nova

2 Demokracija".

3 M. le Président (interprétation): Je ne vous autoriserai pas à poursuivre;

4 ceci n'est qu'un commentaire de journaliste ou simplement une déclaration.

5 Posez votre question. Vous avez un témoin devant vous, vous ne devez pas

6 lire ce genre de journal.

7 M. Milosevic (interprétation): Je dois le lire pour vous. C'est une

8 déclaration qui émane de son parti; c'est un extrait de la presse, ce ne

9 sont pas des interprétations de journalistes.

10 (Les Juges se consultent sur le siège.)

11 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, qui est l'auteur de

12 cet article?

13 M. Milosevic (interprétation): Ce n'est pas un article, c'est une

14 déclaration du parti du témoin. C'est le parti du témoin qui a donné cela

15 comme annonce officielle; c'est la raison pour laquelle je l'interroge.

16 M. le Président (interprétation): Non, non, non, un instant. Quel est le

17 journaliste qui a rendu compte de cette déclaration?

18 M. Milosevic (interprétation): Sur la photocopie qui m'a été envoyée par

19 fax, je ne vois pas la signature du journaliste, mais il s'agit d'un

20 journal paru aujourd'hui à Belgrade. Les journaux sont des documents

21 publics, vous pouvez vérifier.

22 M. le Président (interprétation): Très bien, très bien. Pas de problème.

23 Je voulais simplement comprendre la situation. Ce que nous n'allons pas

24 autoriser, ce sont des abus liés à cette lecture, mais vous pouvez poser

25 des questions au témoin qui ont un rapport avec sa crédibilité.

Page 5023

1 Des commentaires comme "imagination, etc." ne nous aident aucunement. Nous

2 n'autoriserons pas de question sur ce point. Mais y a-t-il dans ce texte

3 quelque chose de concret que vous voudriez soumettre au témoin, par

4 exemple le fait que sa présentation des fonctions exercées par lui est

5 inexacte? Si tel est le cas, vous pouvez l'interroger à ce sujet. Mais

6 donner lecture de toutes sortes de commentaires au sujet de la déposition

7 de ce témoin ou de qui que ce soit d'autre ne nous aide aucunement.

8 Pouvez-vous trouver une question concrète à poser sur la base de ce texte?

9 M. Milosevic (interprétation): Je pose la question sur la base d'une

10 phrase très courte qui figure dans la déclaration officielle de son parti,

11 qui se lit comme suit -je cite-: "C'est la raison pour laquelle nous ne

12 connaissons pas les raisons de sa décision de témoigner au sujet de

13 quelque chose dont nous ignorons qu'il y a participé".

14 Existe-t-il quelque chose de plus concret -je cite-: "auquel nous ignorons

15 qu'il ait participé"? Donc, ils ne savent pas…, son parti ne sait pas

16 qu'il y a participé.

17 M. le Président (interprétation): Très bien. Ça, c'est une question.

18 Monsieur Tanic, ce qui est dit ici, c'est que votre parti n'était pas au

19 courant du fait que vous alliez témoigner?

20 M. Milosevic (interprétation): Non, non, non!

21 M. le Président (interprétation): Et votre parti dit que vous témoignez au

22 sujet de quelque chose dont il ignore que vous y avez participé. La

23 signification de cela n'est pas très claire, mais nous vous autorisons à

24 répondre à la question.

25 M. Tanic (interprétation): Eh bien, je répondrai très simplement à cette

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1 question.

2 Un parti qui compte 35 à 40.000 membres, effectivement, ne peut pas savoir

3 ce que font les dirigeants au plus haut niveau, qui sont très peu

4 nombreux. Premier point.

5 Deuxième point: ce que j'ai dit ici constitue jusqu'au jour d'aujourd'hui

6 des éléments qui étaient restés secrets, qui n'étaient pas connus du

7 public de Serbie. Et ceci pour une raison très simple, c'est que M.

8 Milosevic cachait tout cela au peuple serbe. Donc il est vrai que les

9 membres de mon parti ignorent beaucoup de choses que j'ai dites ici, mais

10 c'est la raison pour laquelle M. Dusan Mihaljovic, ministre de

11 l'Intérieur, connaît exactement les raisons pour lesquelles cela fait deux

12 ans et demi que je ne vis pas dans mon pays.

13 Je n'ai jamais dit que je représentais le Parti de la Nouvelle Démocratie;

14 j'ai dit avec la plus grande exactitude que je ne représentais que moi-

15 même. J'ai dit que je parlais ici à titre de personne privée, après avoir

16 subi des tortures et avoir été menacé de meurtre. Et il est vrai que mon

17 parti ne peut pas savoir ce que je fais ou ce que je suis; il peut même

18 s'imaginer que je suis mort.

19 M. Milosevic (interprétation): Ma question ne portait pas sur ce que votre

20 parti pense de ce que vous êtes ou de ce que vous faites aujourd'hui, mais

21 sur vos affirmations.

22 Votre parti affirme que vous parlez de quelque chose dont votre parti

23 ignore que vous y avez participé. Or, vous avez dit dans votre déposition

24 que vous y aviez participé avec leur accord. Qu'est-ce qui est vrai?

25 M. Tanic (interprétation): Je n'ai jamais dit que j'avais participé à cela

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1 avec l'accord du parti Nouvelle Démocratie, mais avec l'accord du chef de

2 cabinet, M. Mihaljovic.

3 M. le Président (interprétation): Je vous demande à tous deux de ralentir

4 pour le compte rendu d'audience.

5 Le témoin, je crois, a répondu à la question de savoir si le parti savait

6 ou ne savait pas. Avez-vous une autre question?

7 M. Milosevic (interprétation): J'aimerais demander au témoin quelle est sa

8 réaction au fait que certaines des personnes, dont il a cité les noms hier

9 en rapport avec des conversations qu'il aurait eues avec ces personnes,

10 ont envoyé ce matin des lettres pour démentir tout cela. J'ai une lettre

11 de Ratko Markovic dans laquelle il affirme n'avoir jamais eu la moindre

12 conversation avec lui avant son départ à Rambouillet.

13 M. le Président (interprétation): Vous pouvez citer à la barre M. Markovic

14 en tant que témoin pour qu'il le nie.

15 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Mais j'ai une autre lettre.

16 M. Nice (interprétation): Est-ce que je peux répondre?

17 M. le Président (interprétation): Un instant. Oui, vous pouvez répondre au

18 sujet de M. Markovic, mais rapidement.

19 M. Milosevic (interprétation): Je n'ai même pas posé la question!

20 M. Tanic (interprétation): Ce que j'ai fait peut être démontré et prouvé

21 par des preuves indépendantes qui viennent de trois sources différentes au

22 moins; M. Milosevic peut m'interroger sur ces sources mais, bien entendu,

23 ces personnes vont démentir ce que j'ai dit et raconter qu'elles ne m'ont

24 jamais rencontré, car elles ont peur de la même chose que ce que j'ai

25 vécu, à savoir qu'elles ont peur d'être tuées; il y a toujours des

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1 meurtres secrets en Yougoslavie aujourd'hui. Mais par ailleurs, je peux

2 démontrer et prouver cela sur la base de trois sources différentes.

3 M. Milosevic (interprétation): Etes-vous en train de m'accuser de

4 tentative de meurtre?

5 M. le Président (interprétation): Non, non, ne répondez pas à cette

6 question.

7 M. Milosevic (interprétation): Puisque vous ne m'autorisez pas à faire

8 état de ces autres lettres, je vais poursuivre, mais je vous prie d'éviter

9 d'interrompre de façon à ne pas me faire perdre le temps qui m'est

10 imparti.

11 Monsieur le Témoin, quelle est votre profession?

12 M. Tanic (interprétation): Pour l'instant, je suis responsable politique

13 en immigration. Par le passé, j'ai été homme d'affaires.

14 Question: Quelles sont les études que vous avez terminées? Quels sont les

15 diplômes que vous avez obtenus? Quelle est votre formation?

16 Réponse: J'ai terminé mes études secondaires. Je ne suis pas illettré. Je

17 n'aimerais pas répondre à ces questions, car j'ai été torturé par vos

18 hommes.

19 Question: Je vous en prie, je ne sais pas qui vous a torturé. Vous avez

20 vous-même dit que c'étaient des gens qui étaient contre moi.

21 Je viens de vous poser une question tout à fait légitime, car je tiens à

22 vérifier votre crédibilité: quelle est votre profession? Cela n'a rien de

23 secret.

24 Réponse: J'ai étudié la philosophie et l'économie, Monsieur Milosevic.

25 M. Milosevic (interprétation): Mais avez-vous obtenu un diplôme?

Page 5027

1 M. Tanic (interprétation): Ceci n'est vraiment pas un sujet à discuter

2 devant ce Tribunal. Je ne crois pas que j'ai nécessité de répondre à des

3 questions privées.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Tanic, y a-t-il une raison pour

5 laquelle vous ne pouvez pas répondre à cette question?

6 M. Tanic (interprétation): Je ne souhaite pas le faire, car je ne suis pas

7 ici un témoin expert; je n'ai pas à voir vérifier le niveau de mon

8 enseignement, de mon éducation.

9 M. le Président (interprétation): Non, non, non, ces questions sont tout à

10 fait fondamentales. Il me semble qu'il n'y a aucun préjudice que vous

11 pourriez subir à répondre à ces questions. Je ne vois pas ce qui pourrait

12 vous nuire en disant si vous avez obtenu ou pas un diplôme.

13 M. Tanic (interprétation): Bien sûr, je pourrais en subir des conséquences

14 négatives. Pourquoi est-ce que je répondrais à des questions privées? La

15 prochaine question consistera à me demander quelle est la couleur des

16 chaussettes que je porte? Je n'ai pas demandé à M. Milosevic si lui-même…

17 M. le Président (interprétation): Non. Monsieur Tanic, vous répondrez aux

18 questions opportunes. Cette question était parfaitement opportune, il n'y

19 a aucune raison pour laquelle la Chambre estimerait que vous ne devez pas

20 répondre à cette question, mais si vous décidez de ne pas y répondre, il

21 en sera pris bonne note.

22 M. Tanic (interprétation): Très bien. J'ai étudié l'économie et la

23 philosophie. Et à la question de savoir quand j'ai obtenu un diplôme et

24 quel diplôme j'ai obtenu, je ne souhaite pas répondre. C'est mon droit.

25 (Les Juges se consultent sur le siège.)

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1 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic?

2 M. Milosevic (interprétation): Etes-vous donc un étudiant en philosophie

3 et en économie qui n'a pas terminé ses études?

4 M. Tanic (interprétation): C'est sous-entendu dans la réponse que j'ai

5 faite précédemment; c'est la raison pour laquelle j'ai dit que je ne

6 voulais pas répondre et, bien sûr, je ne souhaite pas non plus répondre à

7 autres questions liées à mes études de philosophie et d'économie.

8 Question: Donc votre formation, c'est une formation secondaire, n'est-ce

9 pas?

10 Réponse: Non, je n'ai pas de formation secondaire.

11 Question: Quelles sont les études secondaires que vous avez terminées?

12 Réponse: J'ai terminé des études secondaires économiques; je n'ai pas

13 terminé des études secondaires de lycée.

14 Question: Donc vous avez une formation secondaire économique?

15 Réponse: Non, il faudrait un expert pour évaluer ma formation. Vous n'êtes

16 pas un expert en la matière et, tout simplement, je ne souhaite pas

17 répondre à ce type de questions qui n'ont aucun rapport avec le procès.

18 Question: Elles ont un rapport avec le procès, car je vérifie votre

19 crédibilité, crédibilité que vos réponses, bien entendu, affectent.

20 Où avez-vous été employé, où perceviez-vous votre salaire dans la période

21 où vous affirmez que vous accomplissiez les tâches que vous avez affirmé

22 accomplir? Où étiez-vous employé, à cette époque?

23 Réponse: Je percevais mon salaire et j'étais employé dans une entreprise

24 qui m'appartenait.

25 Question: Où ça?

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1 Réponse: Dans mon entreprise. Oui, oui, j'avais trois entreprises qui

2 m'appartenaient.

3 Question: Dans votre travail actuel, vous incombe-t-il également de

4 présenter des explications, d'initier par rapport à cette fausse

5 accusation et à ce faux Acte d'accusation qui a été dressé contre moi?

6 Réponse: Non, je ne suis lié en aucun cas par rapport à ce procès ou par

7 rapport à ces explications d'initiés ou autres. Je n'ai aucune autre

8 obligation politique par rapport à quoi que ce soit qui soit faux ou vrai.

9 Et je ne sache pas qu'il s'agisse d'un faux Acte d'accusation, comme vous

10 venez de le définir.

11 Question: Comprenez-vous qu'il est très facile de voir à quel point

12 certaines parties de l'Acte d'accusation coïncident avec le pamphlet que

13 vous avez écrit et qui comporte 30 pages, dont vous avez parlé dans votre

14 déclaration? Vous rendez-vous compte de cela?

15 Réponse: S'il y a coïncidence, c'est probablement une coïncidence. Je n'ai

16 pas écrit cet Acte d'accusation et je doute d'ailleurs que je sois

17 qualifié pour le faire. Nous avons discuté de cela il y a quelques

18 instants donc: très évidemment, je n'ai pas fait d'études de loi.

19 M. Milosevic (interprétation): Savez-vous que c'est un fait de notoriété

20 publique que l'Acte d'accusation a été établi en coopération avec les

21 services britanniques pour lesquels vous avez travaillé?

22 M. le Président (interprétation): Totalement non pertinent. Il

23 n'appartient pas au témoin de répondre à cette question.

24 M. Milosevic (interprétation): Question suivante: est-ce que ce fait-ci

25 est pertinent, le fait que M. Nice a évoqué, à savoir que lorsque les

Page 5030

1 déclarations de ce témoin ont été faites, elles ont été faites en présence

2 de deux membres des services secrets britanniques? Est-ce que c'est un

3 fait pertinent?

4 M. Tanic (interprétation): Est-ce que c'est à moi que vous posez cette

5 question ou aux Juges?

6 M. Milosevic (interprétation): J'interroge les Juges de la Chambre.

7 M. le Président (interprétation): C'est une question à laquelle le témoin

8 peut répondre, en effet. Oui, Monsieur Milosevic?

9 M. Milosevic (interprétation): Mais si vous n'avez pas collaboré à la

10 rédaction de l'Acte d'accusation, pourquoi est-ce qu'on ne vous aurait pas

11 donné une nouvelle identité, on ne vous aurait pas donné un logement dans

12 un pays étranger, on n'aurait pas dépensé des sommes énormes pour assurer

13 votre protection, si vous étiez venu ici simplement pour témoigner au

14 sujet de questions politiques générales?

15 M. Tanic (interprétation): Je ne témoigne pas ici au sujet de questions

16 politiques générales, mais au sujet de secrets très précis que votre

17 gouvernement cachait. Et il a été confirmé que j'avais été victime de ces

18 tortures en tout cas, et peut-être même d'une tentative de meurtre, de

19 même que mon épouse. C'est la raison pour laquelle des représentants des

20 services britanniques étaient présents en tant que responsables de ma

21 sécurité et pas pour me dire ce que je devais dire, car ils ignoraient

22 également un grand nombre des choses que vous avez faites. Alors comment

23 auraient-ils pu me dire ce que je devais faire?

24 Question: Combien y avait-il de représentants des services britanniques

25 lorsque vous avez fait votre déclaration?

Page 5031

1 Réponse: D'abord, je ne sais pas du tout s'il s'agit de représentants des

2 services des renseignements ou des services de sécurité britanniques. Vous

3 savez, il y a une énorme différence entre les deux. Un homme seulement

4 était présent tout le temps, et très brièvement, pour assurer ma sécurité.

5 D'ailleurs, personne d'entre eux n'était présent tout le temps lors de ma

6 déclaration.

7 M. Milosevic (interprétation): Vous pourrez nous donner vos commentaires

8 et vos idées au sujet de votre déclaration plus tard, cela ne m'intéresse

9 pas, mais contentez-vous de répondre à mes questions.

10 A la rédaction de l'Acte d'accusation, ont participé les mêmes

11 représentants serbes qui, au cours des dernières années, ont été les

12 auteurs médiatiques de la guerre contre la Serbie. Est-ce que vous êtes au

13 moins au courant de cela?

14 M. le Président (interprétation): La rédaction de l'Acte d'accusation n'a

15 rien à voir avec le témoin; cela relève de l'accusation. Donc il n'y a

16 aucune raison de lui poser des questions à ce sujet. Avez-vous une autre

17 question à poser au témoin?

18 M. Milosevic (interprétation): Il me semble que, dans votre déclaration

19 écrite ainsi que dans votre déposition orale, vous avez confirmé d'une

20 certaine façon que vous rentriez dans les rangs de ceux qui sont les

21 auteurs de l'Acte d'accusation. Oui ou non? Simplement oui ou non.

22 M. le Président (interprétation): Non, ce n'est pas une question destinée

23 au témoin.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais est-il clair à vos yeux que vous

25 comparaissez ici dans le rôle de ce qu'on appelle "un initié", alors que

Page 5032

1 vous ne l'étiez pas, un initié?

2 M. le Président (interprétation): C'est un commentaire également.

3 M. Milosevic (interprétation): Comprenez-vous que ceci peut être vérifié

4 par tout citoyen de la République de Serbie qui aurait la possibilité de

5 lire ce que vous avez écrit et d'entendre ce que vous avez dit?

6 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous perdez votre

7 temps et le temps du Tribunal avec ces commentaires. Il vous reste deux

8 minutes, vous pouvez poser encore une question.

9 M. Milosevic (interprétation): J'aimerais aborder ce qui a été dit au

10 sujet du nettoyage ethnique mais, puisque M. le Président me dit que je

11 n'ai que deux minutes à ma disposition, ce serait totalement insensé de me

12 lancer sur ce sujet. Je me contenterai donc de poser une question

13 intermédiaire très courte.

14 Monsieur le Témoin, pourquoi avez-vous demandé à bénéficier du statut de

15 témoin protégé ou de témoin secret?

16 M. Tanic (interprétation): Je n'ai pas demandé et je n'ai pas obtenu le

17 statut de témoin secret; je suis venu ici en déclarant mon nom et mon

18 prénom, Monsieur Milosevic.

19 M. Milosevic (interprétation): Je vous en prie….

20 M. Tanic (interprétation): Mais comment est-ce que je pourrais être un

21 témoin secret puisque j'ai donné mon nom et mon prénom?

22 M. le Président (interprétation): N'interrompez pas…. Non! Un instant, un

23 instant! Trop d'interruptions ici.

24 Vous avez encore une question?

25 M. Milosevic (interprétation): Je reformule ma question: êtes-vous au

Page 5033

1 courant du fait que jusqu'avant-hier, jusqu'à la fin de la journée de

2 travail d'avant-hier, vous étiez présenté par cette institution illégale,

3 comme un témoin secret, K3?

4 M. Tanic (interprétation): Monsieur Milosevic, ça, je ne le savais pas et

5 je ne l'ai pas demandé. Puisque je témoigne ici en donnant mon nom et mon

6 prénom, il est difficile de supposer que j'ai demandé à bénéficier du

7 statut de témoin secret, auquel cas je bénéficierais sans doute d'autres

8 privilèges. J'ai donné mon nom et mon prénom que vous pouvez salir comme

9 vous le voulez!

10 M. Milosevic (interprétation): Très bien.

11 (Coupure du micro.)

12 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant suspendre.

13 (Les Juges se consultent sur le siège.)

14 Monsieur Milosevic, si vous souhaitez disposer de la déclaration écrite de

15 ce témoin à quelque moment que ce soit, vous pourrez le faire savoir aux

16 Juges de cette Chambre et vous en disposerez, donc vous pourrez en prendre

17 connaissance. Si à un moment ou à un autre, vous souhaitez que nous

18 disposions de la déclaration préalable de ce témoin, réfléchissez-y.

19 Nous suspendons l'audience jusqu'à 9 heures demain matin.

20 (Le témoin, M. Ratomir Tanic, est reconduit hors du prétoire.)

21 (L'audience est levée à 13 heures 47.)

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