Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Jeudi 3 octobre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 3.)

3 (Audience publique.)

4 (Le témoin, M. Stjepan Mesic, est déjà dans le prétoire.)

5 M. le Président (interprétation): Le programme pour aujourd'hui se

6 présentera comme suit.

7 Le témoin sera interrogé jusqu'à 10 heures 20, comme nous l'avions déjà

8 ordonné. Après quoi, nous allons faire une pause jusqu'à 10 heures 50. A

9 10 heures 50 approximativement, nous allons traiter de la matière touchant

10 à M. Wladimiroff. Après quoi, nous allons faire venir ici le témoin

11 précédent qui a été interrogé pour le contre-interroger jusqu'à midi 20.

12 Après quoi, nous allons faire une pause pour déjeuner jusqu'à 13 heures

13 50; pour siéger ensuite en audience jusqu'à 3 heures 20 et pour faire une

14 pause de 10 minutes. Et pour reprendre les débats à 15 heures 30 jusqu'à

15 16 heures 30.

16 Demain, nous allons siéger pendant quatre heures, de 9 heures à 13 heures,

17 en faisant évidemment les pauses comme prévues d'ordinaire. Pour finir,

18 jusqu'à 1 heure, le contre-interrogatoire et l'interrogatoire d'ailleurs

19 du témoin précédent.

20 Comme nous venons de le dire, c'est pendant une heure encore que nous

21 allons poursuivre le contre-interrogatoire du témoin ici présent.

22 Monsieur Milosevic, c'est à vous.

23 Oui, Monsieur Milosevic.

24 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Stjepan Mesic, par l'accusé M.

25 Milosevic.)

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1 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, pendant ces deux journées,

2 vous avez beaucoup parlé de la Grande Serbie.

3 Savez-vous que la Grande Serbie est une invention, une création de

4 l'empire austro-hongrois d'il y a un siècle et demi, et tout cela

5 uniquement en tant qu'instrument de propagande anti-serbe. Or la Grande

6 Serbie n'a jamais constitué le programme d'aucun gouvernement serbe,

7 depuis que la Serbie a été établie jusqu'à ce jour. Est-ce que vous avez

8 eu connaissance de ce fait?

9 M. Mesic (interprétation): Historiquement parlant, j'en sais long, mais

10 ici, nous sommes pour traiter d'un autre cas. Si on n'a pas parlé de la

11 Grande Serbie, alors là, si on ne peut pas parler de la Grande Serbie,

12 pourquoi la division de la garde sous le commandement direct de Blagoje

13 Hadzic a-t-elle attaqué la ville de Vukovar? Pourquoi la 52e Brigade des

14 blindés de Kraljevo est-elle allée sur Vukovar? Pourquoi la 211e Brigade

15 de blindés de Nis est-elle allée Vukovar? Pourquoi la 2e et la 3e Brigades

16 de la garde ont-elles marché sur Vukovar?

17 Comme nous le savons, les commandants étaient Sljivancanin, Mrksic et

18 Radic. Pourquoi les Aigles blancs ont-ils marché sur Vukovar? Pourquoi

19 l'Unité "Dusan Silni", sous le commandement d'Arkan, etc.?

20 M. le Président (interprétation): Monsieur Mesic, je dois vous

21 interrompre. Est-ce que j'ai pu comprendre de ce que vous venez de dire

22 que c'est une conclusion que vous faites à en juger des événements qui ont

23 eu lieu?

24 M. Mesic (interprétation): Il s'agit de plans exécutés en vue de la

25 création de la Grande Serbie. Il y avait des unités spéciales du ministère

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1 de l'Intérieur de la Serbie. Il y avait là aussi, sur le terrain, les

2 unités de la Défense territoriale de la Serbie; le tout étant, en fin de

3 compte, sous le commandement de M. Milosevic, accusé ici.

4 Le plan de la Grande Serbie consistait donc à créer un territoire allant

5 depuis Vukovar de l'avant. Je ne veux pas m'occuper de ce qui pouvait

6 être, avait pu être la propagande de l'empire austro-hongrois.

7 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, comme vous n'êtes pas sans

8 le savoir, moi j'ai été Président de la Serbie. Hier, lorsque M. May

9 voulait me poser des questions sur Vukovar, je vous ai dit que je n'en

10 savais rien, j'étais Président de la Serbie. C'est vous, Monsieur Mesic

11 -et est-ce que je m'abuse de le dire ainsi-, qui, d'après la décision

12 prise par vous, avez entrepris des attaques contre l'armée yougoslave

13 populaire sur tous les points et dans tous les secteurs où celle-ci était

14 présente? C'est vous qui étiez responsable des conflits et accrochages qui

15 ont eu lieu avec les effectifs de la JNA qui, elle, se trouvait sur le

16 territoire de la Yougoslavie. C'est vous qui avez provoqué des

17 destructions et des tueries.

18 Est-ce que vrai de dire ainsi, Monsieur Mesic, ou pas?

19 Réponse: L'accusé vient de sortir ici des conclusions qui devraient

20 pouvoir faire honte à David Copperfield; lui, il aurait à lui en envier.

21 L'armée yougoslave était justement là pour armer ceux qui se sont mis à

22 attaquer l'Etat et l'autorité de la Croatie. La Croatie s'était mise à se

23 défendre car l'armée yougoslave, sous le contrôle et le commandement de

24 l'accusé, a envahi et attaqué le territoire croate. Personne n'a attaqué

25 les garnisons, il n'y avait qu'un blocus des garnisons.

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1 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, une seconde, s'il

2 vous plaît. Je crois que la référence faite à David Copperfield devait,

3 probablement, être une erreur. On voulait peut-être faire une référence à

4 Micawber?

5 Je ne sais pas si je suis dans mon droit ou pas, mais en tout cas pouvons-

6 nous faire preuve de davantage de consistance et de cohérence dans ces

7 discussions? Peut-être parle-t-on trop en termes généraux. Pourrait-on

8 peut-être être utile à cette Chambre de première instance.

9 Monsieur Mesic, on parle du plan portant création de la Grande Serbie.

10 Avez-vous entendu l'accusé ou un quelconque membre de la présidence de la

11 Serbie parler de ce plan-là?

12 M. Mesic (interprétation): C'est exact. On n'a pas parlé de la création de

13 la Grande Serbie. Une telle conclusion n'existe pas -enfin, pour autant

14 que je le sache- mais, à l'œuvre, se trouvait l'opération portant création

15 de la Grande Serbie, en Croatie et en Bosnie-Herzégovine. C'est de cette

16 œuvre-là qu'il s'agit, de cette opération-là qu'il s'agit. C'est ce que je

17 veux démontrer pour parler de l'action de la Défense territoriale, de

18 l'armée yougoslave, et des organisations paramilitaires illégales;

19 lesquelles unités et formations se trouvaient mobilisées dans des centres

20 serbes, en Serbie, pour être formées et entraînées en Serbie. Après la

21 chute de Vukovar, évidemment, toutes ces femmes, enfants et autres, qui

22 n'ont pas été tués à Ovcara, ont dû regagner les camps en Serbie jusqu'à

23 Nis.

24 M. Milosevic (interprétation): Cela n'est pas exact, Monsieur Mesic, mais

25 pour ne plus parler de cette Grande Serbie, vous dites vous-même que

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1 personne n'en a parlé.

2 Hier, vous disiez que vous saviez bien vous situer dans le temps. Par

3 conséquent, je voudrais savoir ceci: la réaction des Serbes a eu lieu en

4 août 1990. Vous avez parlé de cette "révolution des troncs d'arbre" et

5 vous avez dit que les conflits ont été provoqués par ce plan-là, pour

6 lequel vous dites que personne évidemment ne s'y référait, et que ce plan

7 consistait en la destruction de la Yougoslavie.

8 Or ma question est la suivante: l'autorité dans laquelle vous étiez vous

9 -parce que vous avez été le premier Président du Gouvernement croate après

10 la victoire aux élections du HDZ, lequel Gouvernement a décrété une

11 terreur contre la population serbe-, eh bien, l'a-t-on fait avant août

12 1990?

13 M. Mesic (interprétation): En Croatie, il n'y avait aucune terreur. Je

14 vous l'ai dit: il y avait des messages inacceptables, cela est vrai.

15 Question: Mais de quels messages parlons-nous, je vous en prie? Permettez-

16 moi de fraîchir votre mémoire. Ecoutez, cette vague anti-serbe

17 nationaliste qui déferlait à cette époque-là n'a pas été sans rappeler

18 1941 et 1988. Le 12 mars, dans une lettre au Président de la Croatie, le

19 général Milan Zezelj, général à la retraite, a démissionné parce qu'il y a

20 eu ce regain du mouvement oustachi du fait que la présidence de la Croatie

21 a permis de voir une partie de la population serbe chicanée et où les

22 Serbes se sont fait juger et maltraiter pour tout acte. Et vous dites

23 qu'en mars, les Serbes s'étaient révoltés en faisant des barrages routiers

24 au moyen de troncs d'arbre pour qu'ils ne se fassent pas tuer par votre

25 police. Il s'agit vraiment d'un lieu d'exécution en 1941, le 27 mars

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1 notamment, à Jasenovac. Depuis 1941 et dans les années qui ont suivi. Vous

2 n'êtes pas sans savoir comment les choses se sont présentées à Jasenovac

3 où 700.000 hommes se sont fait tuer, parmi lesquels des Serbes, des Roms,

4 des Juifs, etc.

5 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je crois que nous

6 avons épuisé ce thème-là. Nous en avons parlé à plusieurs reprises hier et

7 aujourd'hui. Sachez que le temps qui vous est imparti est limité.

8 M. Milosevic (interprétation): Je vais faire de mon mieux pour tirer un

9 profit tout à fait rationnel du temps qui m'est imparti.

10 Par conséquent, au printemps...

11 M. le Président (interprétation): Non, non, non, si vous ne posez pas de

12 question raisonnable, nous allons mettre fin à cela.

13 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je voulais savoir pourquoi

14 les anciens détenus du camp de Jasenovac ont envoyé des messages: nous

15 venons de sortir d'un enfer et nous ne voulons pas que ce même enfer soit

16 connu par nos enfants et nos arrières-petits-fils. Nous sommes indignés de

17 voir que l'Etat indépendant croate se prolonge pour être le message

18 historique du peuple croate.

19 M. le Président (interprétation): Le témoin ne peut pas répondre à la

20 question que vous venez de lui poser. Vous devrez citer vos propres

21 témoins à la barre pour ce faire.

22 Quelle est votre question suivante?

23 M. Milosevic (interprétation): Ma question suivante est de voir si vous,

24 dans votre programme du HDZ, avez fait intégrer, notamment, tout cela: à

25 savoir les circonstances historiques dans lesquelles le peuple croate

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1 devait créer son propre Etat. Lorsque vous avez organisé le programme

2 contre les Serbes, le 17 juin 1989, voilà le programme de votre parti HDZ.

3 Le 17 juin 1988. Et ce programme présente exactement les objectifs

4 auxquels je viens de faire référence.

5 Or les Serbes se sont-ils insurgés avant cela pour que vous le fassiez

6 ainsi ou par la suite? Comment ce qui a été fait a posteriori puisse être

7 une cause de ce qui devait le précéder?

8 M. le Président (interprétation): Il y avait là plusieurs questions.

9 Une première allégation, c'est que vous avez entamé la création d'un

10 programme. Je crois, Monsieur Mesic, que vous avez déjà parlé de cela

11 mais, étant donné que tout vient d'être formulé de la façon que nous

12 venons de l'entendre, vous devriez pouvoir y répondre.

13 M. Mesic (interprétation): J'ai répondu à cette question, mais je peux le

14 répéter.

15 Le peuple croate a eu droit à son autodétermination et à son autonomie et

16 indépendance, tout comme l'ont ce droit, des Finlandais ou des Serbes. Eh

17 bien, ils se sont servis de leur droit à l'autodétermination. La

18 Yougoslavie ne possédait plus de facteur d'intégration.

19 Jusqu'à la séparation, jusqu'à la "désassociation", la Croatie voulait

20 emprunter un chemin à l'amiable, pacifique; voilà pourquoi il a été offert

21 par la Croatie ce modèle confédéral. C'est ce que j'ai dit.

22 Secundo, j'ai dit que dans sa base, dans l'essence, la Croatie avait

23 hérité déjà d'un passé antifasciste créé lors de la Seconde Guerre

24 mondiale. Et la Croatie d'aujourd'hui, pour parler des bases antifascistes

25 de l'année 1981, n'était ni indépendante ni autonome. La Croatie était une

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1 création des "quislings". Il y avait des crimes perpétrés; il y en avait

2 qui ont répondu de ces crimes. Et faire maintenant en sorte que des

3 associations faites depuis l'Etat indépendant croate à la Croatie

4 d'aujourd'hui, ne peut être autre chose qu'une oeuvre de propagande. Or,

5 la Croatie d'aujourd'hui, démocratique, Etat de droit, n'a rien à voir,

6 n'a aucun rapport avec l'Etat indépendant croate.

7 Je l'ai dit et je le répète une fois de plus: il y avait des messages qui

8 étaient mal faits et qui n'ont pas été sans être onéreux, mais tout devait

9 être réglé au sein des institutions, et non pas au-delà et à l'écart;

10 surtout lorsque nous voyons des gens quitter le Parlement pour régler des

11 problèmes.

12 Que voulaient-ils, ces gens-là, en sortant du Parlement? Eh bien, ils

13 voulaient ce que veut l'accusé d'aujourd'hui, Milosevic, ils voulaient

14 faire en sorte que des parties du territoire de la Croatie soient

15 écartées, détachées. Et ce ne sont pas ces gens-là qui se sont insurgés.

16 Se sont insurgés ceux qui ont voulu faire la frontière allant de

17 Virovitica, Karlovac et Karlobag. Comme disent les Latins: "Pour la énième

18 et centième fois, disons toujours la même chose".

19 M. Milosevic (interprétation): Je ne veux pas évidemment m'immiscer dans

20 les affaires intérieures qui sont les vôtres et celles de votre Parlement.

21 Mais vous, vous en voulez maintenant à des parlementaires serbes d'avoir

22 quitté le Parlement comme quoi ils n'ont pas voulu régler des problèmes.

23 Alors, vous ne vous en voulez pas autant à vous et aux vôtres d'avoir

24 quitté l'instance suprême de la Yougoslavie lorsqu'il a fallu régler des

25 problèmes. Et c'est vous qui avez fait en sorte que la présidence

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1 devienne, comme on l'appelle, "croupion" parce que vous vous en êtes

2 sorti, vous vous en êtes retiré. Toutes vos histoires portant sur la

3 Grande Serbie n'étaient autre chose qu'un canevas, un prétexte de votre

4 plan. C'était une tentative de décapiter...

5 M. Nice (interprétation): …

6 M. le Président (interprétation): Allez-y.

7 M. Nice (interprétation): Je suis désolé de me voir obligé d'interrompre.

8 Mais peut-on entendre le témoin répondre à cette question?

9 M. le Président (interprétation): Laquelle, s'il vous plaît?

10 M. Nice (interprétation): Lorsqu'on suggère au témoin d'avoir quitté la

11 Yougoslavie. Il en a été accusé.

12 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il a déjà répondu à

13 plusieurs reprises. Il pourrait le faire. La suggestion faite par l'accusé

14 parlant de Serbes, c'est que vous-même vous avez quitté le Parlement, mais

15 vous avez quitté la présidence. Est-ce que vous pouvez répondre à cette

16 question?

17 M. Mesic (interprétation): Bien entendu. Volontiers. Je suis fort aise

18 d'entendre cette question.

19 La Croatie, elle, a promulgué et proclamé son indépendance, de concert

20 avec la communauté internationale. La Croatie fait atermoyer la mise en

21 oeuvre de ces décisions, croyant que dans un laps de temps, dans un espace

22 de trois mois, on pourrait aboutir à une solution politique. C'est-à-dire

23 aboutir à un modèle qui nous aurait permis de passer depuis la Fédération,

24 qui était en dysfonctionnement, à quelque chose d'autre: quelque chose

25 d'autre que nous avons appelé comme étant "un modèle confédéral". Si cela

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1 ne fonctionne pas, alors là, chacun fait son chemin, mais en tant qu'Etat

2 indépendant. C'est ce que nous avons déjà entendu.

3 Voilà la raison pour laquelle je me suis mis à réitérer tout cela. Car si,

4 une fois ces trois mois écoulés où nous n'avons plus de présidence, où la

5 Croatie est indépendante, je n'avais plus grand-chose à chercher au sein

6 de la présidence -ce n'est pas de mon propre chef que je suis venu à la

7 présidence de la Yougoslavie, c'est suite à une décision prise par le

8 Parlement croate que je m'y trouvais- et évidemment, si la présidence n'y

9 est pas, je n'avais qu'une tâche à remplir: revenir au Parlement et dire

10 ce qui s'était passé à Belgrade. Et voilà ce qui s'était passé. Je ne sais

11 pas par quel moyen j'ai pu renverser et démanteler cette Yougoslavie.

12 M. le Président (interprétation): Une seconde.

13 M. Milosevic (interprétation): Les licenciements massifs des gens qui

14 étaient employés dans la police, dans la santé et dans les mass media,

15 tout cela a eu lieu avant la réaction de ces derniers.

16 M. le Président (interprétation): Le témoin a déjà répondu à des questions

17 sur ce sujet et je vous demanderai, si vous voulez poursuivre votre

18 contre-interrogatoire, de poser des questions nouvelles au témoin.

19 M. Milosevic (interprétation): C'est sur d'autres choses que je lui pose

20 des questions. Parce que si l'on essaie de se replacer dans le temps, on

21 voit que la réaction des Serbes en Croatie était une réaction provoquée

22 par le pogrom dont ils ont fait l'objet.

23 M. le Président (interprétation): Non, non, nous avons déjà parlé de cela,

24 Monsieur Milosevic. Vous pouvez poser des questions au témoin au sujet de

25 ce qu'il a dit, mais vous ne pouvez pas répéter et répéter et répéter sans

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1 cesse les mêmes choses. Ceci n'a aucun sens. Il vous reste dix minutes.

2 M. Milosevic (interprétation): Vous rappelez-vous la déclaration de Lord

3 Carrington qui a dit: "Nous n'étions pas loin de la solution au problème

4 de la Krajina et de la Slavonie, alors que l'Allemagne a reconnu la

5 Croatie dans les frontières qui sont les siennes et a pratiquement fait

6 échec au processus de paix. Car la Croatie n'avait plus aucun intérêt à

7 des négociations de paix, parce que reconnue prématurément".

8 Est-ce que vous vous rappelez cette déclaration? Est-ce que vous croyez

9 que, lui aussi, il était dans son droit de dire ainsi?

10 M. Mesic (interprétation): Ce n'était pas l'Allemagne qui était la toute

11 première à reconnaître la Croatie. La Croatie s'est fait reconnaître par

12 l'Islande. Or, l'Allemagne et l'Islande et tous les autres pays qui ont

13 reconnu la Croatie et la Slovénie, et par la suite la Bosnie-Herzégovine,

14 n'ont fait autre chose que de reconnaître une réalité. Car la Serbie,

15 elle, n'acceptait pas les accords auxquels on était parvenu. La Serbie

16 optait pour la modification, le remaniement des frontières des

17 Républiques.

18 Si on parle de licenciement par exemple -permettez-moi de répéter une fois

19 de plus-, faudrait-il pour autant dévaster et raser Vukovar, faudrait-il

20 pour cela voir des divisions entières venir pour s'en occuper?

21 M. le Président (interprétation): Très, très bien. Allez-y.

22 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, essayons de tirer cela au clair.

23 Il y avait des accrochages avec l'armée de la JNA, pas avec la Serbie. Et

24 ces accrochages et conflits dans le territoire de la Yougoslavie ont été

25 provoqués par la violence dont vous avez fait preuve, vous.

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1 Or, je voulais savoir: les Serbes ont-ils accepté le plan Vance, les zones

2 protégées nord, sud, est, ouest; était-ce exact, Monsieur? Et puis, était-

3 ce vers la fin 1991, début 1992? Est-ce exact, Monsieur Mesic?

4 M. Mesic (interprétation): Oui, cela est exact, le plan Vance-Owen

5 existait.

6 M. Milosevic (interprétation): Ce n'était pas le plan Vance-Owen. Le plan

7 Vance, zones UMPA.

8 Réponse: Oui, cela est exact. La Croatie a respecté les zones UMPA,

9 celles-ci ont été protégées.

10 Vous dites que ces zones ont été respectées, alors que c'est dans le cadre

11 des zones de l'ONU que vous avez effectué toutes ces attaques. Voilà le

12 livre sur le plateau de Miljevac, le livre sur le pont de Maslenica. Tout

13 à l'heure, on parlait de l'année 1992 et cette fois-ci de l'année 1993.

14 Voici un livre sur l'exode de 1995, le livre sur des personnes portées

15 disparues, le livre sur la Slavonie occidentale en 1995. Toutes les

16 attaques ont été perpétrées dans le cadre des zones de protection placées

17 sous le contrôle de l'ONU.

18 Comment expliquez-vous tout cela, Monsieur Mesic?

19 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant. Les interprètes

20 nous prient de vous rappeler la nécessité de ralentir votre débit. Cette

21 remarque s'adresse aussi bien à l'accusé qu'au témoin.

22 Et maintenant, Monsieur Mesic, vous venez d'entendre un certain nombre

23 d'allégation au sujet des zones protégées par les Nations Unies. Peut-être

24 pouvez-vous répondre?

25 M. Mesic (interprétation): Il n'y avait que des ripostes à des attaques.

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1 La Croatie se devait de rétablir le trafic sur ses voies de communication,

2 se devait de rétablir la vie économique et la vie tout court. Or la

3 Croatie a été attaquée sur tous les axes, sur toutes les voies de

4 communication. Et qui parle de Maslenica -on le sait, il s'agit d'un

5 secteur surplombant la route départementale qui longeait la mer

6 Adriatique- et, une fois Maslenica tombée, la Croatie a été coupée.

7 M. Milosevic (interprétation): Pour ma part, je soutiens que les Serbes

8 d'abord avaient accepté le plan Vance, la démilitarisation et accepté que

9 tout soit placé sous le contrôle de l'ONU, et que tout soit placé dans le

10 cadre sous forme de zones protégées. Il s'agit de faits historiques.

11 Est-ce que vous le réfutez, Monsieur Mesic? Est-ce que vous dites le

12 contraire, que ceci n'est pas exact?

13 M. Mesic (interprétation): Bien sûr, je réfute, bien sûr.

14 M. Milosevic (interprétation): Très bien, très bien.

15 M. le Président (interprétation): Laissez terminer le témoin. Il apporte

16 des explications.

17 M. Milosevic (interprétation): Je vous en prie, Monsieur Mesic.

18 M. le Président (interprétation): Laissez-le finir.

19 M. Milosevic (interprétation): Il a entendu, Monsieur May.

20 M. le Président (interprétation): Monsieur Mesic, avez-vous quelque chose

21 à ajouter au sujet des zones protégées?

22 M. Mesic (interprétation): Oui, effectivement, il est exact que la

23 démilitarisation n'a pas eu lieu.

24 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, nous n'allons pas parler,

25 je n'ai pas le temps d'ailleurs de montrer tous ces ouvrages, tous ces

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1 livres et de parler de toutes ces horreurs. Nous n'allons donc pas parler

2 du fait de savoir si vous avez respecté les zones qui étaient placées sous

3 la protection des Nations Unies ou pas, car il est tout à fait manifeste

4 que nous les avons respectées et il est tout à fait manifeste que vous ne

5 les avez pas respectées. Et nous devons…

6 M. le Président (interprétation): Posez une question. Vous n'êtes pas en

7 train de témoigner.

8 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, vous êtes arrivé au sein de

9 la présidence pour un mandat de trois mois, le 1er juillet, donc jusqu'au

10 1er octobre. Vous avez tenu un certain nombre de réunions, la première

11 notamment de la présidence où il a été question de mettre un terme aux

12 hostilités et de discuter d'une solution pacifique pour la crise

13 yougoslave. Je n'ai pas participé à cette réunion ni d'ailleurs à pas mal

14 d'autres, car vous aviez l'habitude d'inviter les Présidents des

15 Républiques, mais je n'ai pas toujours été invité.

16 Est-ce que le membre de la présidence de la RSFY, comme vous l'avez dit,

17 qui représentait le bloc pro-serbe, comme vous l'appeliez, était opposé à

18 l'arrêt des hostilités et à la recherche d'une solution pacifique à la

19 crise, lors de ces 15 séances que vous avez convoquées?

20 Est-ce qu'un seul des représentants du bloc serbe -comme vous l'appelez-

21 était opposé à cela?

22 M. Mesic (interprétation): Même une commission a été constituée pour

23 mettre un terme aux hostilités. Elle a été dirigée par Branko Kostic,

24 membre de la présidence. En fait, il était vice-Président de la

25 présidence. Cette commission était destinée en fait à attiser l'incendie,

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1 et c'est exactement ce qui s'est passé. Elle a obtenu le soutien du bloc

2 serbe qui était dirigé par Borislav Jovic. Lui, par ailleurs, avait des

3 communications directes avec l'accusé.

4 Question: Etes-vous en train de dire que ces hommes s'opposaient à une

5 solution pacifique, qu'ils ne la souhaitaient pas?

6 Réponse: Exact. C'est exactement ce que je dis.

7 Question: Le compte rendu que vous avez apporté ici démontre que, le 1er

8 octobre, six membres de la présidence étaient présents. C'est simplement

9 pour corriger ce que vous avez dit hier. Quant à la décision de

10 démilitarisation de toutes les formations armées sur le territoire de la

11 RSFY, sauf la JNA et la police régulière, et ce, devant se faire avant le

12 18 juillet 1991 à minuit, ce texte est signé par vous personnellement,

13 Monsieur Mesic; vous avez signé cette décision sur le désarmement de tout

14 le monde, de toutes les formations, sauf la JNA et la police régulière

15 agissant en temps de paix. Et entre-temps, vous avez armé vos propres

16 membres du "Zenga", de la garde nationale, ainsi que d'autres

17 paramilitaires qui se sont mis à piller, à assassiner un peu partout en

18 Croatie. Et il y a aussi…

19 M. le Président (interprétation): Vous devez permettre au témoin de

20 répondre.

21 M. Milosevic (interprétation): Oui.

22 M. Mesic (interprétation): Monsieur Milosevic parle de façon inaudible

23 parce que son micro est éteint.

24 M. le Président (interprétation): Non, non. Monsieur Milosevic, vous devez

25 autoriser le témoin à parler; vous parlez vous-même depuis déjà pas mal de

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1 temps.

2 Monsieur Mesic, quelles sont les suggestions derrière le fait de dire que

3 vous avez désarmé toutes les formations sauf les membres de la garde

4 patriotique?

5 M. Mesic (interprétation): L'accusé sait parfaitement bien qu'il

6 s'agissait de formations paramilitaires illégales et qu'elles ont été

7 désarmées. Je suis d'accord avec cette décision. Quant à la garde

8 patriotique, ce n'est pas une organisation paramilitaire illégale, mais

9 une institution créée par le ministère de l'Intérieur, mais qui portait

10 les armes et c'est une institution légale, pas illégale.

11 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, au point 1 de cette

12 décision que vous avez signée, nous lisons ce qui suit: "Démobiliser et

13 désarmer toutes les formations armées présentes sur le territoire de la

14 RSFY, à l'exception de la JNA et de la police régulière agissant en temps

15 de paix, et ce, avant le 18 juillet 1991, minuit".

16 Donc il n'est pas question de légal ou d'illégal. Il est question de

17 toutes les formations armées, sauf l'armée et la police. Vous avez signé

18 cette décision et aujourd'hui, cependant, vous affirmez, puisqu'il y a

19 contestation,...

20 (Le micro de M. Milosevic s'éteint.)

21 M. le Président (interprétation): Vous devez arriver à une question,

22 Monsieur Milosevic.

23 M. Milosevic (interprétation): Vous connaissiez, Monsieur Mesic, les

24 crimes qui avaient été commis à partir de la déclaration de Stjepan

25 Hercog, qui, le 29 janvier 1992, commence à publier votre Novilist. Il est

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1 question d'enquêtes menées sur le fait que des citoyens serbes honnêtes et

2 tranquilles ont été victimes de liquidation. Là, il est donc question de

3 tentative de liquider les Serbes en 1991.

4 L'article poursuit en disant: "… des Serbes qu'on n'a plus jamais revus".

5 Et des messages sont envoyés à vous, à Tudjman et à d'autres. C'est ce qui

6 est dit dans cet article. Vous saviez tout cela, Monsieur Mesic, n'est-ce

7 pas? Vous étiez au courant?

8 M. Mesic (interprétation): Moi, je n'ai pas reçu un document de ce genre

9 et, après avoir été élu à la fonction que j'ai commencé à occuper, j'ai

10 découvert ce genre de documents.

11 La Croatie, à l'époque, ne fonctionnait pas comme un Etat en bonne et due

12 forme. Aujourd'hui, la Croatie fonctionne comme un Etat en bonne et due

13 forme, et Etat respectueux du droit. Des enquêtes se mènent aujourd'hui en

14 Croatie. Si ce que M. Stjepan Hercog a dit à l'époque s'avère exact, les

15 coupables seront condamnés. Aujourd'hui, la Croatie est un véritable Etat.

16 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Mesic, je ne vous interroge pas au

17 sujet de la situation actuelle. Vous ne cessez de dire, lorsqu'il est

18 question de la période où vous étiez responsable des crimes commis contre

19 les Serbes que –je ne sais trop quoi-, que c'est le Parlement qui était

20 responsable, vous ne saviez rien, vous étiez en dehors de tout cela.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ceci va vraiment

22 beaucoup trop loin. Cela dépasse toutes les bornes. Vous avez encore le

23 temps de poser deux questions, si vous le souhaitez, mais ces questions

24 doivent être nouvelles.

25 M. Milosevic (interprétation): J'ai posé la question! Je demandais à M.

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1 Mesic s'il était lui-même l'homme invisible, puisqu'il semble ne pas avoir

2 été présent à l'endroit où ces crimes se commettaient ou bien s'il se

3 considère responsable, avec d'autres, des crimes commis contre les Serbes.

4 M. le Président (interprétation): Il a déjà répondu à plusieurs reprises à

5 cette question.

6 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Si vous m'accordez encore deux

7 questions, je vais poser les questions suivantes.

8 Est-il exact que cette même JNA, que vous commandiez collectivement étant

9 membres du commandement suprême collectif de la JNA, est-il exact qu'au

10 cours de tous ces événements, elle a exprimé son opposition à 14

11 propositions de cessez-le-feu, alors que les opérations étaient menées par

12 la partie croate? Est-ce que ceci n'est pas la preuve que la direction

13 militaire du pays que vous contestez, ce commandement suprême -qui a été

14 créé en 1987, et pas après cette date, contrairement à ce que vous dites-,

15 donc est-ce que cela ne montre pas exactement quelle était l'attitude de

16 la présidence et des militaires à l'époque, à savoir que la direction

17 militaire du pays cherchait une solution pacifique à tous les problèmes,

18 et que chacune de ces situations a été proposée, et l'armée a été

19 contrainte d'accepter ce que vous proposiez?

20 M. Mesic (interprétation): Nous n'établissons pas ici des faits par la

21 négative, mais uniquement par la positive. Nous parlons ici du fait que le

22 commandement suprême ne peut entrer en fonction, ne peut devenir

23 opérationnel...

24 M. le Président (interprétation): Pardon. J'ai perdu l'interprétation. Je

25 n'entends plus les interprètes. Ah, d'accord! Maintenant, nous pouvons

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1 poursuivre.

2 M. Mesic (interprétation): L'état-major du commandement suprême ne peut

3 devenir opérationnel qu'en cas de guerre ou en cas de menace de guerre

4 imminente. La décision à ce sujet est prise par la présidence de la

5 Yougoslavie; et une décision de cette nature n'a jamais été prise à

6 l'époque.

7 S'agissant des propositions de cessez-le-feu, il y en a eu -pour autant

8 que je le sache- effectivement 14 fois. Je ne vais pas m'intéresser au

9 fait de savoir qui était l'auteur de ces demandes de cessez-le-feu, mais

10 elles existaient. Et l'armée a cependant mené la tâche qui lui avait été

11 assignée. Et des organisations paramilitaires commençaient, dans ces cas-

12 là, par prendre le contrôle de certains territoires en expulsant à 100% la

13 population non-serbe. Après quoi, l'armée s'assurait le commandement de

14 ces zones.

15 M. Milosevic (interprétation): Donc, il ne me reste plus qu'une seule

16 question.

17 Ce secteur dont vous parlez, les zones protégées par les Nations Unies ont

18 été créées dans ce secteur par la suite… Et je vois que vous avez appris

19 par coeur et très bien les fausses accusations que vous êtes censé

20 prononcer ici, et que vous le faites à la perfection.

21 Ma question est la suivante: aujourd'hui que vous travaillez pour ce

22 Tribunal illégal, est-ce que vous pensez véritablement que vous

23 parviendrez à échapper à votre responsabilité pénale par rapport à vos

24 crimes?

25 M. le Président (interprétation): Ce n'est pas une question acceptable. Le

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1 témoin est un témoin devant ce Tribunal; il ne travaille pas pour le

2 Tribunal, comme vous le savez parfaitement bien.

3 Monsieur Tapuskovic, vous avez la parole.

4 (Questions de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, M. Stjepan

5 Mesic.)

6 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

7 J'ai eu, sur la base des documents disponibles, véritablement beaucoup de

8 difficulté à me prononcer pour décider quelles seraient les bases de mon

9 intervention en tant qu'amicus. J'ai finalement choisi deux pages sur la

10 totalité des documents disponibles. Je vais demander le versement de ces

11 deux documents au dossier.

12 Il s'agit de la déclaration de M. Mesic en mars 1998, déclaration faite

13 devant les enquêteurs du Tribunal de La Haye. Je ne peux pas m'occuper de

14 la déclaration beaucoup plus longue qui a été faite dans le procès

15 Dokmanovic, elle comporte plus de 20 pages.

16 Mais, sur la base de ce document d'une seule page, je vais vous demander,

17 Monsieur Mesic, et il est question des événements de Karadjordjevo, de la

18 réunion de Karadjordjevo, ce qu'il en est exactement.

19 Vous dites que vous aviez prévu de vous réunir vous-même, Tudjman,

20 Milosevic et Jovic. Vous avez dit cela à Tudjman. Et Tudjman a été seul à

21 se rendre à la réunion de Karadjordjevo, n'est-ce pas?

22 M. Mesic (interprétation): Oui.

23 Question: Est-il exact que, s'agissant du destin de la Croatie, vous

24 consultiez toujours le Président de la République mais vous gardiez

25 toujours votre propre opinion?

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1 Réponse: Au sein de la présidence, je représentais les intérêts de la

2 République de Croatie et je faisais connaître mon point de vue personnel.

3 Question: Merci. Hier, vous avez dit que toute votre famille avait fait

4 partie des partisans. Vous avez dit cela lorsque vous avez été interrogé

5 dans l'affaire Dokmanovic en tant que témoin.

6 Vous avez dit, à un certain moment, ce qui suit -je cite-: "Mon père, ses

7 cinq frères et toute ma famille, y compris moi-même, nous étions tous avec

8 les partisans". (Fin de citation.)

9 Et je le sais, je sais aussi que 11 membres de votre famille ont trouvé la

10 mort à ce moment-là. Je ne vais pas vous interroger au sujet des

11 événements qui ont précédé cela, qui ont précédé la création des camps

12 durant la Deuxième Guerre mondiale.

13 Mais, compte tenu du fait que toute votre famille était dans les rangs des

14 partisans, je vous pose la question suivante: est-il exact que pendant la

15 Deuxième Guerre mondiale, ce sont les Serbes qui ont eu le plus de

16 victimes parmi tous les peuples qui résidaient dans ces régions? Ceci est-

17 il exact, oui ou non?

18 Réponse: Le nombre le plus important de victimes se trouve parmi les

19 Juifs, les Roms et certainement parmi les Serbes.

20 Question: Mais proportionnellement?

21 Réponse: Je ne vais me lancer dans des spéculations numériques.

22 Question: Merci, merci. Est-il exact qu'Hitler n'a bombardé que Belgrade,

23 les villes serbes et ce, sans frapper des cibles militaires mais pour

24 l'essentiel des cibles civiles, et qu'il y a eu parmi la population civile

25 un très grand nombre de victimes?

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1 Réponse: Oui, la Wehrmacht a bombardé les villes serbes.

2 Question: Merci. Est-il exact que c'est seulement en Serbie que si l'on

3 tuait un Allemand, la réplique était la mort de cent Serbes? Ceci est-il

4 exact, oui ou non? Ceci a-t-il été le cas à Kragujevac, à Kraljevo et dans

5 d'autres villes serbes?

6 Réponse: Oui, c'est exact. Mais je dois simplement ajouter que le général

7 Hadzic m'a dit: "Si on tue un Serbe, 2.000 Croates paieront pour ces

8 morts".

9 Question: Oui, oui, j'ai entendu cela. Je sais.

10 Hier, vous avez parlé de l'assassinat de Ferdinand, l'assassinat d'un

11 homme est toujours une tragédie; je ne pense pas qu'il était bon

12 d'assassiner Ferdinand. Mais ce que je vous demande, c'est la chose

13 suivante: savez-vous que 60% des hommes serbes sont morts pendant la

14 Première Guerre mondiale? Je parle des hommes aptes à combattre. Et si ce

15 n'est pas 60%, c'est peut-être un pourcentage tout à fait proche. Mais,

16 enfin, est-ce exact, oui ou non?

17 M. le Président (interprétation): Votre rôle, Monsieur Tapuskovic,

18 consiste à aider la Chambre de première instance sans essayer de marquer

19 des points pour une partie ou pour une autre. Alors, si vos questions ont

20 la moindre pertinence, je vous propose de les poser. Mais je ne vois pas

21 vraiment en quoi cela peut aider la Chambre de parler de la Deuxième

22 Guerre mondiale et sûrement encore moins de la Première Guerre mondiale.

23 La première chose que l'accusé a dite, c'est que les Serbes se trouvaient

24 dans un climat de crainte, de peur, et que ceci était partiellement le

25 résultat de ce qui s'était passé 50 ans auparavant.

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1 M. Tapuskovic (interprétation): Oui, oui, exactement.

2 M. le Président (interprétation): Mais il y a tout de même une limite aux

3 éléments de preuve que nous pouvons recevoir sur ce sujet. Et il y a une

4 limite au-delà de laquelle le contre-interrogatoire du témoin n'a plus

5 d'intérêt pour la Chambre. Donc je vous demande de ne pas perdre cela de

6 vue.

7 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, c'est exactement

8 mon intention. Exactement. Mon intention est de faire la clarté sur ce que

9 vous venez de dire précisément. J'aurais encore une question à ce sujet à

10 poser au témoin.

11 Monsieur Mesic, dans l'histoire des territoires yougoslaves dont vous avez

12 parlé hier, et vous avez parlé hier de "Yougoslavie invalide", est-ce que

13 pendant ces 40 ans qui se sont écoulés entre 1950 et 1999, cette période

14 n'a pas été la période la plus tranquille, la plus pacifique, au cours de

15 laquelle pas une victime n'a été enregistrée, pas une victime civile? Ceci

16 n'a-t-il pas été la période la plus pacifique dans l'histoire de toute la

17 région?

18 M. Mesic (interprétation): Je suis d'accord avec vous sur ce point: cette

19 période a été la plus pacifique dans la région. Il n'y a pas eu de guerre.

20 Les Serbes et les Croates ne se sont absolument pas fait la guerre pendant

21 cette période jusqu'à des dates plus récentes. Mais les événements récents

22 se sont produits par volonté de modifier les frontières des Républiques,

23 puis de la Yougoslavie.

24 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges, je dois revenir sur certaines questions qui sont vraiment

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1 pertinentes pour la Chambre de première instance et qui sont les

2 suivantes: au cours de la Première Guerre mondiale, un grand nombre de

3 régiments étaient originaires de Croatie. Un de ces régiments est arrivé

4 jusqu'à Lipljani.

5 M. le Président (interprétation): Je ne vois pas en quoi ceci peut être

6 pertinent pour la Chambre de première instance et encore moins comment

7 cela peut avoir la moindre pertinence et le moindre lien avec le contre-

8 interrogatoire de ce témoin.

9 Le témoin a répondu à des questions relatives à de très nombreuses pièces

10 à conviction et, si vous voulez l'interroger sur ces éléments de preuve

11 pour aider la Chambre de première instance, faites-le, bien entendu. Mais

12 revenir aussi loin dans l'histoire en ce moment précis ne nous apporte

13 guère d'assistance.

14 M. Tapuskovic (interprétation): C'est précisément en raison de ces

15 assassinats que le peuple serbe avait peur du moindre conflit, de la

16 moindre guerre. C'est la raison pour laquelle je posais mes questions,

17 mais je vais arrêter.

18 Monsieur le Témoin, hier, vous nous avez dit qu'il y avait trois éléments

19 d'intégration pour la Yougoslavie: Tito, son autorité, son intégrité,

20 ensuite, la Ligue des communistes et, enfin, l'armée populaire yougoslave.

21 C'est bien ce que vous avez dit?

22 M. Mesic (interprétation): J'ai dit que ces éléments étaient les facteurs

23 d'intégration principaux. Bien sûr, il y avait aussi des intérêts

24 économiques, etc. Il y avait des éléments liés à l'histoire, etc. Mais ces

25 trois facteurs étaient les facteurs d'intégration principaux, sans

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1 lesquels la Yougoslavie ne pouvait plus demeurer unie.

2 Question: C'est exactement ce que je vous demande: est-ce que l'amour, la

3 culture, la langue, les liens de famille, les liens d'amitié, est-ce que

4 tout cela n'était pas des éléments qui unissaient les gens sur ce

5 territoire, est-ce qu'il n'y avait pas d'autres éléments d'unification que

6 simplement le tourisme, comme vous semblez le dire?

7 Réponse: L'amicus curiae a pour devoir d'aider la Chambre.

8 Question: Oui, et je le ferai toujours. Je remplirai toujours mon devoir

9 sur ce point.

10 Réponse: Mais l'amicus curiae doit aussi respecter la vérité des propos

11 tenus dans ce prétoire. Je n'ai jamais dit que le tourisme était un

12 facteur d'intégration. J'ai parlé de ces trois éléments comme étant les

13 principaux facteurs d'intégration; je n'ai pas dit qu'ils étaient les

14 seuls, il y en avait d'autres, mais ces trois facteurs étaient les plus

15 importants et, en leur absence, la Yougoslavie ne pouvait plus exister.

16 C'est la Serbie qui a contraint la Slovénie à quitter les frontières de la

17 Yougoslavie, c'est la Serbie qui a créé un blocus contre la Slovénie, qui

18 a interdit à la Slovénie de s'approvisionner en biens provenant de Serbie

19 et d'autres Républiques. Et tout ceci sous instruction de M. Milosevic,

20 l'accusé ici. Alors, qui est-ce qui voulait démembrer le pays?

21 Question: Néanmoins, le premier facteur d'intégration existait parce que,

22 bien sûr, Josip Broz Tito est mort, il est mort de mort naturelle et la

23 Ligue des communistes ne s'est désintégrée que plus tard.

24 Vous avez hier, dans la déclaration faite précédemment, au paragraphe 4,

25 vous avez dit que M. Milosevic avait démoli la Ligue communiste de

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1 Yougoslavie. Alors, vous pensez que la Ligue des communistes aurait dû

2 continuer à exister? Je vous le demande parce que hier, vous avez reproché

3 à Slobodan Milosevic d'avoir démoli et détruit ce parti.

4 Réponse: C'est votre interprétation, ce n'est pas ce que j'ai dit.

5 Question: Ah, mais...

6 Réponse: Non, un instant. Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit

7 simplement que ce facteur d'intégration avait disparu et, en fait,

8 finalement, je suis y compris allé en prison, j'ai même été incarcéré

9 parce que j'étais opposé au système monopartite, unipartite. Donc ne me

10 mettez pas dans la bouche des mots que je n'ai pas dits.

11 Question: Non, je lis simplement ce qui est écrit dans votre déclaration

12 écrite dans laquelle vous dites -je cite-: "Milosevic a effectivement

13 détruit la Ligue des communistes yougoslaves". (Fin de citation.)

14 C'est mot pour mot ce qui est écrit dans votre déclaration préalable,

15 faite devant le Tribunal en 1998.

16 Réponse: Je dois encore répéter ce que j'ai déjà dit. Il y avait trois

17 facteurs d'intégration et, parmi eux, la Ligue des communistes qui était

18 un parti multinational. Donc, de cette façon, tout le monde était

19 représenté au sein de la Ligue des communistes et, un jour, la Ligue des

20 communistes a disparu. Je ne dis pas que la Ligue des communistes était

21 une bonne chose; elle ne pouvait pas l'être parce que, de toute façon,

22 elle était le seul parti existant; moi, je me battais pour un système

23 multipartite. Alors ne me mettez pas dans la bouche des mots signifiant

24 que je regrettais la disparition de la Ligue des communistes. J'ai

25 simplement dit qu'en disparaissant, c'était un facteur d'intégration qui

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1 disparaissait.

2 Question: Merci. Hier, vous avez dit également: "Il fallait détruire la

3 JNA". Alors, qui aurait dû détruire la JNA, qui a détruit la JNA, l'armée

4 populaire yougoslave?

5 Réponse: L'accusé, par sa vision des choses. Parce qu'il pensait qu'un

6 Etat devait être créé, englobant les Serbes vivant sur d'autres

7 territoires. L'armée est restée sans sponsor; elle cherchait de l'argent,

8 elle avait besoin de financiers importants, et la JNA a pensé que M.

9 Milosevic pouvait être son sponsor sur le plan financier et que, par

10 ailleurs, l'armée pourrait disposer et travailler sur un territoire plus

11 important. C'est la raison pour laquelle la JNA a rempli les tâches qui

12 lui étaient assignées par l'accusé.

13 Question: Mais l'armée n'a pas été attaquée en Slovénie le 27 juin 1991,

14 lorsque des barricades ont été érigées aux abords de la frontière? L'armée

15 souhaitait exercer son contrôle sur les frontières, mais ce jour là, 40

16 soldats innocents ont été tués et ils ne portaient pas d'armes.

17 Est-ce que c'est exact ou pas? Est-ce que ce n'est pas l'armée qui a été

18 attaqué en Slovénie, lorsque les barricades ont été érigées par la Défense

19 territoriale, un peu partout dans la République de Slovénie?

20 Réponse: En Slovénie, l'armée n'a pas été attaquée; c'est l'armée

21 populaire yougoslave qui attaquait en Slovénie, qui attaquait les

22 institutions de la République slovène.

23 Question: Mais est-ce qu'il y a eu un blocus des casernes à ce moment-là?

24 Est-ce qu'il n'a pas été décidé que les soldats devaient rester enfermés

25 dans leur caserne sur l'ordre de Seks et qu'ils ne devaient recevoir ni

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1 eau ni nourriture?

2 Réponse: J'ai déjà répondu à cette question. Le blocus était nécessaire;

3 le blocus des casernes de l'armée populaire yougoslave devait être mené à

4 bien pour empêcher que soient armés ceux qui ont renversé l'institution de

5 l'Etat croate.

6 Question: Je ne vais pas revenir à la déclaration de M. Spegelj quant au

7 fait qu'il aurait fallu commencer à assassiner les officiers de l'armée

8 yougoslave. Mais vous parlez tout le temps d'une partie de la Serbie, vous

9 parlez tout le temps de cet axe Karlobag-Virovitica, etc., la frontière à

10 ce niveau-là?

11 Réponse: Oui, oui, oui. Vous voulez dire Karlovac?

12 M. Tapuskovic (interprétation): Oui, je voulais dire Karlovac. Nous savons

13 ce que vous voulez dire.

14 "Nous, le Parti croate des droits, le 17 juin 1991, proclamons la région

15 de Lipljani, et nous demandons que les frontières orientales suivent l'axe

16 Subotica et d'autres villes..."

17 M. le Président (interprétation): On vous demande de ralentir et de

18 répéter la fin de votre dernière question.

19 M. Tapuskovic (interprétation): "… que les frontières devaient suivre

20 l'axe Subotica, Zemun, Drina, Sandzak, Boka, Kotorska".

21 M. Mesic (interprétation): Je ne connais pas ce slogan mais, même si ceci

22 avait été décidé, le gouvernement… Je ne connais pas cette charte, mais

23 même si elle avait été adoptée, le Gouvernement croate, le pouvoir en

24 Croatie n'était pas aux mains du Parti croate des droits.

25 En ce qui concerne le général Spegelj, puisqu'il a été évoqué ici, il n'a

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1 jamais parlé du fait que qui que ce soit aurait dû être tué. Ce qu'il a

2 dit, c'est que –et cela peut être prouvé lors des images de cassettes

3 vidéo- lorsqu'une guerre civile existe, on ne peut plus savoir qui est

4 coupable et qui ne l'est pas, il y a simplement des gens qui se tirent

5 dessus des deux côtés; et c'est la raison pour laquelle j'ai dit qu'il va

6 fallait éviter à tout prix une guerre civile.

7 M. Tapuskovic (interprétation): Merci. Vous dites qu'en raison de tout

8 cela, dans la région, vous mettiez sur un pied d'égalité la population

9 serbe et la population croate et qu'il n'y avait pas de raison de craindre

10 un conflit ou la perte de vie humaine.

11 Mais je vous pose la question suivante, et j'en aurais fini: s'il n'y

12 avait pas de crainte, s'il n'y avait pas de crainte justifiée, j'ai bien

13 compris que la Croatie avait le droit de rester… d'unir, d'unifier,

14 d'intégrer son territoire –ça, c'est tout à fait normal d'envoyer des

15 hommes en uniforme intégrer le territoire, je l'admets tout à fait- mais à

16 la fin, à la fin de cette période, qu'est-ce qui s'est passé réellement en

17 Krajina? Est-ce qu'il n'est pas exact que les maisons des Serbes ont été

18 incendiées, que des civils ont été tués, et que toute la population,

19 300.000 personnes environ –et peut-être le chiffre est-il encore

20 supérieur- ont été bombardées par des avions dans ce secteur, et je ne

21 rentrerai pas dans le détail avant d'être expulsées? Comment est-ce que

22 tout cela a pu se produire s'il n'y avait pas, derrière tout cela, le but

23 de gagner de nouveaux territoires? Est-ce que cela ne signifie pas que la

24 crainte était justifiée et que les Serbes ont eu un destin qui

25 correspondait exactement à celui qu'ils craignaient?

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1 Réponse: Lorsque "la révolution des troncs d'arbres" a commencé, il n'y

2 avait pas la moindre raison d'avoir peur. Il n'y avait pas de base

3 sérieuse justifiant la peur ou l'angoisse. Tout aurait pu se régler dans

4 les institutions croates, c'est ce qui aurait dû être fait. Il aurait

5 fallu éviter la guerre en Croatie.

6 Mais l'armement de certains qui impliquait la mise en place d'un plan

7 destiné à étendre les frontières de la Serbie –je ne vais parler de Grande

8 Serbie maintenant- mais, enfin, il s'agissait d'étendre les frontières de

9 la Serbie parce que la Serbie est une zone très restreinte, personne ne

10 pouvait prendre cela tranquillement. Donc l'explication correspond bien à

11 la volonté des Serbes. Et lorsque des gens sont armés, cela signifie qu'il

12 y a un plan qui va être mis en oeuvre, une opération qui est en train de

13 se dérouler, lorsqu'on voit des gens quitter l'armée. Or, il y a eu

14 désertion massive de l'armée.

15 Question: Monsieur Mesic, j'admets tout cela, mais je vous demande

16 pourquoi les victimes étaient nécessaires? Est-ce qu'il n'était pas

17 nécessaire de tuer des civils, d'expulser des gens de la région où ils

18 vivaient? Je vous demande si tout cela était nécessaire?

19 Réponse: J'ai déjà répondu à cette question. J'ai dit pourquoi les Serbes

20 étaient nécessaires en Croatie. Slobodan Milosevic avait besoin de

21 repeupler le Kosovo après en avoir expulsé les Albanais. Mais les crimes

22 commis contre les civils, j'ai dit que j'étais contre tous les crimes.

23 Tout ceci fera l'objet d'enquêtes, la police s'intéressera à la chose.

24 Et les radicaux de Croatie, je les blâme autant que les radicaux de

25 l'autre partie; les radicaux serbes, les radicaux croates sont unis, pour

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1 ce qui me concerne, dans ma critique, dans mes reproches. Vous avez pu

2 constater quelles étaient mes opinions à ce sujet.

3 Question: Merci beaucoup. Il y a d'autres sujets que j'aurais voulu

4 discuter avec vous, mais le temps va nous manquer. Des questions

5 constitutionnelles notamment, j'aurai voulu les aborder.

6 Je ne pourrais pas entrer dans les détails mais je vous pose la question

7 suivante. Nous avons compris qu'un certain nombre des idées que vous

8 défendez reposent sur la Constitution adoptée en 1974 que vous défendiez.

9 Or, cette Constitution créait une Yougoslavie confédérale; c'est ce que

10 vous avez dit dans votre déclaration. Et lorsque vous avez agi en tant que

11 témoin dans l'affaire Dokmanovic, au compte rendu d'audience, page 1629 de

12 ce compte rendu d'audience, vous dites que "le modèle confédéral a été

13 introduit dans le système yougoslave par cette Constitution". Est-ce exact

14 ou pas?

15 Réponse: Le fonctionnement de la fédération correspondait dans la pratique

16 à un modèle confédéral. Il ne portait pas ce nom mais, dans la mesure où

17 le Président et le vice-Président sont remplacés à leur poste de façon

18 automatique, dans la mesure où pour régler les questions les plus

19 importantes on recherche le consensus, ceci correspond très certainement à

20 un des aspects du modèle confédéral.

21 Question: Hier, vous avez dit que vous aviez décidé d'aller dans le sens

22 de l'autonomie et des événements qui se sont produits avec l'armée parce

23 que la Yougoslavie n'était plus une fédération. Or, d'après ce que vous

24 pensiez, comme vous l'avez dit également ici, la Yougoslavie était déjà

25 une confédération -je dis bien une confédération- depuis 1974. Comment

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1 expliquez-vous la différence entre les deux?

2 Réponse: La Yougoslavie n'était pas totalement une confédération. Elle

3 montrait certains aspects du modèle confédéral dans son mécanisme, dans sa

4 façon de fonctionner. C'est la raison pour laquelle la Croatie a proposé

5 que le modèle confédéral soit appliqué, mais à 100%, jusqu'à ses dernières

6 conséquences. Le modèle qui fonctionnait à l'époque n'était pas

7 satisfaisant: il ne satisfaisait ni la Serbie ni aucune des autres

8 Républiques, ça c'est exact. Mais pour ce qui nous concerne, nous, nous

9 demandions la mise en place d'un système confédéral, et la Serbie a

10 proposé de continuer ce qu'elle faisait au Kosovo, ce qu'elle faisait en

11 Vojvodine; et ça nous ne pouvions pas l'accepter.

12 Question: Merci. Est-il exact, puisque vous avez sûrement suivi cela de

13 très près, qu'après le Printemps de Croatie des initiatives ont été prises

14 pour que les choses changent? Est-ce bien exact?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Est-ce qu'en 1991 déjà, il y a eu des discussions, des débats

17 très animés sur ce point, et que le livre que je vous montre ici a été

18 interdit à Belgrade "Les Annales de la faculté de droit de Belgrade"? Est-

19 ce que cet ouvrage n'a pas été interdit parce que des experts, en fait,

20 les principaux experts de l'époque, en Yougoslavie ont estimé qu'en

21 diffusant les idées contenues dans cet ouvrage on se dirigeait vers le

22 démantèlement de la Yougoslavie? Ceci en 1971.

23 Réponse: Je ne sais pas quels étaient les livres interdits à Belgrade.

24 Question: Je vous interroge uniquement au sujet de celui-ci.

25 Réponse: Mais je dois dire, si l'on parle du droit, que la source de la

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1 souveraineté en République fédérale yougoslave relevait des Républiques.

2 Le Dr Jovan Stefanovic, un professeur d'université très compétent,

3 estimait -et il avait raison d'estimer- que c'était les Républiques qui

4 détenaient la source même de l'autorité et que dans leur action les

5 Républiques transféraient une partie de leur autorité, de leur

6 souveraineté sur la fédération.

7 Et le Dr Jovan Stefanovic a également dit, s'agissant de citoyenneté, donc

8 de citoyenneté de ceux qui habitaient dans les Républiques, que par la

9 logique même, si une République faisait partie de la fédération, on

10 estimait qu'un citoyen de cette République était également citoyen de la

11 fédération yougoslave.

12 Question: Vous dites que vous ne savez rien de l'ouvrage que je suis en

13 train de montrer, mais puisque vous-même, et à très juste titre, avez

14 exprimé vos opinions -et d'ailleurs vous avez été emprisonné pour cela, et

15 vous ne voulez pas parler des changements constitutionnels qui ont conduit

16 au démantèlement de la Yougoslavie, je vous demande si le Pr Djuric,

17 professeur d'université, un autre professeur très connu, et son assistant

18 Cavoski, n'ont pas émis les idées qui allaient dans le sens du

19 démantèlement de la Yougoslavie?

20 Réponse: Je sais très bien tout cela puisque, en Croatie, des gens ont

21 également été sanctionnés et punis pour leurs opinions. Mais je suis très

22 opposé à ce qu'on punisse les gens pour le fait d'avoir exprimé leurs

23 opinions.

24 En Serbie, il y a également des gens qui maintenaient certaines positions

25 et qui ont été sanctionnés pour cela. Je ne suis pas d'accord avec leurs

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1 opinions, mais ce n'est pas une raison pour les emprisonner. A l'époque,

2 c'était un crime de maintenir et de défendre certaines opinions.

3 Malheureusement, le pays était une dictature et les choses correspondaient

4 à une dictature.

5 Question: Nous n'avons pas le temps de discuter de cela. Je devrais en

6 parler avec des experts du droit constitutionnel, mais je vous pose la

7 question suivante: la Constitution de 1974 prévoit-elle le droit de veto?

8 Réponse: Je ne peux pas répondre à cette question.

9 Question: Est-ce que les régions, les régions autonomes avaient le droit

10 de prendre des décisions indépendantes? Et est-ce qu'une décision au

11 niveau de la fédération pouvait être bloquée par l'opposition d'une région

12 autonome?

13 Réponse: De ce point de vue, les régions autonomes pouvaient effectivement

14 bloquer certaines décisions si elles n'étaient pas d'accord.

15 Question: Donc les régions autonomes pouvaient, quelles que soient les

16 décisions émanant de Belgrade, les arrêter, en arrêter l'application au

17 niveau de la Fédération?

18 Réponse: Je ne crois pas que cela s'appliquait à toutes les décisions,

19 mais uniquement aux décisions relatives à des questions tout à fait

20 capitales. Et puis, les Républiques, elles aussi, si elles n'étaient pas

21 d'accord avec certaines mesures, pouvaient empêcher leur mise en oeuvre au

22 niveau de la fédération, leur adoption au niveau de la Fédération.

23 Question: Est-il exact également qu'au niveau des Républiques, pas une loi

24 ne pouvait être votée? Prenons une république de 10 millions d'habitants,

25 peuplée par 10 millions d'habitants, et une région autonome qui lui est

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1 attachée, dans laquelle habitent 2 millions d'habitants; est-ce que la

2 région autonome peut bloquer le vote d'une loi au niveau de la république?

3 Réponse: Oui, c'était une disposition constitutionnelle.

4 Question: Si c'est le cas dans la république, si ce que je viens de dire

5 était valable dans les Républiques, comment se fait-il que la Fédération

6 ne pouvait pas faire quoi que ce soit toute seule, car pratiquement toutes

7 les institutions fédérales étaient bloquées, rien ne fonctionnait plus au

8 niveau de la fédération à l'époque, précisément en raison de ce qui était

9 imposé à la Serbie?

10 Alors, répondez à la question que je vous pose: est-ce qu'il y a eu des

11 tentatives faites en Croatie pour que des minorités nationales ou des

12 peuples constitutifs obtiennent le même genre de droit que ceux qui

13 existaient ailleurs?

14 Réponse: La Croatie n'avait pas de région autonome. La Serbie avait deux

15 régions autonomes: le Kosovo et la Vojvodine. Mais, constitutionnellement,

16 il était prévu que les régions autonomes étaient également des éléments

17 constitutifs de la Fédération à côté de la Serbie. Donc au niveau des

18 institutions fédérales, les régions autonomes étaient à égalité avec les

19 Républiques, et leurs représentants étaient à égalité avec les

20 représentants des Républiques.

21 Question: Monsieur Mesic, il ne reste plus beaucoup de temps; j'ai encore

22 une question à vous poser. Lorsque vous avez commencé à vous diriger vers

23 l'indépendance après que l'Allemagne a déjà réalisé sa réunification,

24 après l'adoption de la Charte d'Helsinki, comment est-ce que vous avez pu

25 vous prononcer en faveur de l'indépendance? Comment est-ce que vous avez

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1 pu prendre cette décision, alors que le monde entier, lui, allait plutôt

2 dans le sens de l'intégration, de l'unification? Comment est-ce que vous,

3 vous avez décidé de défendre la fragmentation, le démantèlement d'un tout

4 petit pays de la planète en plusieurs parties?

5 Réponse: Comme la Fédération ne pouvait plus continuer, il était tout à

6 fait logique de souhaiter s'en dissocier. Il n'y avait pas d'autre

7 solution. Il y a d'ailleurs pas mal de petits pays en Europe qui ont une

8 taille même inférieure aux républiques yougoslaves et qui sont souverains

9 et indépendants.

10 Mais la solution pour toutes les anciennes républiques yougoslaves, qui

11 sont aujourd'hui des Etats, était de s'intégrer à une Europe unie. Il n'y

12 avait aucun problème à ce qu'en l'absence de toute guerre, les pays

13 deviennent indépendants en Europe. Aujourd'hui, tous les pays qui

14 constituent l'Europe vivent de façon indépendante, quel que soit le côté

15 de la frontière où habitent les habitants. Pour un Français, cela n'a

16 aucune importance de savoir si un Français habite d'un côté de la

17 frontière ou de l'autre. Et nous voulions que cela n'ait aucune importance

18 que l'Albanais habite d'un côté ou de l'autre de la frontière, que le

19 Croate habite d'un côté ou de l'autre de la frontière, que le Serbe habite

20 d'un côté ou de l'autre de la frontière, parce que les règles qui

21 s'appliquent à l'ensemble des pays européens sont votées par un mécanisme

22 européen, et donc l'égalité existe entre tous les habitants.

23 Il n'y avait pas besoin d'utiliser les chars pour imposer une solution ou

24 une autre. Ceci a été la plus grande erreur faite par ceux qui voulaient

25 modifier le tracé des frontières des Républiques; et c'est l'accusé qui

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1 voulait agir de cette façon.

2 Question: Bien. D'accord. Mais est-ce que l'Allemagne, qui était réunifiée

3 à l'époque, n'a pas été le premier pays à vous reconnaître?

4 Réponse: J'ai déjà répondu hier en disant que c'était l'Islande qui nous

5 avait reconnus en premier.

6 M. Tapuskovic (interprétation): Merci. Je n'ai plus de question.

7 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Stjepan Mesic, par

8 M. Nice.)

9 M. Nice (interprétation): La citation exacte de la déclaration de mars

10 1998 faite par le témoin et dont M. Tapuskovic a donné lecture en partie,

11 est la suivante -je cite-: "En 1989, au 14e Congrès, Milosevic a

12 effectivement détruit la Ligue des communistes yougoslaves. Ceci a créé un

13 vide au niveau fédéral puisque le parti ne fonctionnait qu'au niveau des

14 Républiques." (Fin de citation.)

15 Est-ce que c'est exact? Est-ce que c'était bien votre point de vue à

16 l'époque, Monsieur Mesic?

17 M. Mesic (interprétation): C'est exact. Je ne défendais pas la politique

18 menée par la Ligue des communistes, mais je disais simplement qu'elle a

19 été détruite.

20 Question: Et par sa destruction au niveau fédéral, le parti n'a-t-il

21 continué à fonctionner qu'au niveau des Républiques?

22 Réponse: C'est exact. La Ligue des communistes est restée au niveau de la

23 République en Croatie, elle s'est transformée en un parti social

24 démocratique. Elle a accepté le système multipartite, et a effectué une

25 politique de démocratie sociale, tel que c'est normal en Europe.

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1 Question: Compte tenu du temps limité qui nous reste, toute question à

2 laquelle vous pourriez répondre par oui ou par non nous ferait gagner du

3 temps.

4 Diverses allégations ont été faites contre vous. Pourriez-vous nous en

5 dire un petit peu plus en ce qui vous concerne? Avez-vous jamais été

6 membre du parti communiste vous-même? Que pouvons-nous savoir?

7 Réponse: Oui, je l'étais.

8 Question: Jusqu'à quand?

9 Réponse: Jusqu'à 1971, lorsque j'ai participé au "Printemps croate",

10 lorsqu'on a demandé, on a exigé la démocratie et que les comptes soient

11 clairs au niveau fédéral.

12 Question: On vous a posé des questions sur la période de la paix, pendant

13 les quelque 20 années en question. Cette période de paix, avec ou sans

14 droit civil, en Europe, est-ce que vous jugeriez qu'il s'agit d'une

15 période d'une période de paix, oui ou non?

16 Réponse: C'était une période sans guerre, mais ça n'était pas une période

17 de paix parce que les lois étaient appliquées de façon sélective et ceci

18 ne devrait pas être le cas dans une démocratie.

19 Question: Pendant la période où vous étiez juriste qualifié, vous ne

20 pouviez pas trouver de travail et vous ne pouviez pas voyager parce que

21 vous n'aviez pas de passeport. Est-ce que le fait d'être privé de

22 passeport était quelque chose qui vous manquait particulièrement comme

23 outil, à l'époque, dans cet Etat?

24 Réponse: Des centaines de milliers de personnes se sont vues refuser un

25 passeport et j'ai été l'une de ces personnes. J'ai présenté ma candidature

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1 à 150 postes et, bien que j'eusse passé l'examen pour devenir magistrat,

2 pour devenir juge ou avocat, je n'ai pas pu obtenir de travail.

3 Question: Et, dans ce contexte de cette préoccupation pour la démocratie,

4 est-ce que vous avez tenu ces positions tout au long des débuts du HDZ en

5 tant que parti, en quittant ce parti, lorsque vous avez désapprouvé ses

6 actions en Bosnie?

7 Réponse: J'étais convaincu que la Yougoslavie ne pourrait pas survivre.

8 Mais j'avais peur également de ces réunions immenses, ces masses de

9 millions de personnes qui se réunissaient pour dire qu'ils règleraient les

10 comptes avec la Croatie. Je cherchais ceux qui pourraient résister à ces

11 attaques, qui pourraient se dresser contre ces attaques et je pensais que

12 c'était le HDZ qui pourrait relever ce défi historique. Quand j'ai vu

13 toutefois qu'une partie de cette politique s'écartait de ce que je

14 souhaitais, alors, je l'ai abandonné.

15 Question: Si on s'arrête un instant du point de vue chronologique, je

16 traite d'un certain nombre de questions chronologiquement: qui furent les

17 premières victimes de Plitvice et de Pakrac? Est-ce que ce furent les

18 Croates ou les Serbes?

19 Réponse: Il n'y a pas eu de victimes à Pakrac, ni blessés ni tués. Mais

20 l'armée yougoslave est venue sur place pour s'emparer du territoire afin

21 de réaliser des objectifs d'une plus Grande Serbie. La première victime à

22 Plitvice était un Croate, Josip Jovic.

23 Question: Pendant que vous avez occupé la présidence, en tant que

24 Président, ce que vous avez cherché à obtenir, est-ce que vous travailliez

25 consciencieusement pour réaliser les résultats par le truchement de la

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1 présidence?

2 Réponse: C'est exact. Je considérais que mon arrivée à la présidence était

3 une occasion qui m'était fournie de trouver une issue pacifique et

4 politique pour sortir de la crise, parce que la Yougoslavie était entrée

5 en crise avant mon arrivée à la présidence. Le travail de la présidence

6 était bloqué, la Fédération, les institutions fédérales ne fonctionnaient

7 plus. Tout ceci se passait déjà avant que je ne sois nommé à ce poste.

8 Question: Et vos tentatives pour tenir des réunions loin de Belgrade -est-

9 ce que c'était trop dangereux pour vous de voyager?-, est-ce que vos

10 tentatives d'avoir des réunions, de grouper des réunions, si cela avait

11 été possible de faire des arrangements pour ces réunions?

12 Réponse: Ce n'est pas simplement qu'il était dangereux pour moi

13 d'atteindre Belgrade, on m'a empêché d'aller à Belgrade parce que

14 l'aéroport à Zagreb avait été fermé et les routes étaient barrées. Je

15 voulais réunir des gens à Brioni. Et la réponse qui m'a été faite était

16 qu'il ne pouvait y avoir d'accord à ce sujet et que c'était la solution

17 militaire qui devait être utilisée.

18 Question: En avançant dans le temps, s'agissant toujours de vos fonctions

19 générales, nous vous avons demandé si vous auriez pu…

20 Il s'agit d'un passage du compte rendu qui est protégé, donc je traiterai

21 de cela lorsque vous aurez fini votre déposition. Pourriez-vous nous aider

22 sur deux questions concernant ce point, en répondant par oui ou par non?

23 Vous savez de quelle déposition protégée il s'agit.

24 Est-ce que le défendeur à ce procès était un Serbe, oui ou non?

25 Réponse: Oui, c'est exact.

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1 M. Nice (interprétation): Etait-il un Serbe, le défendeur dans l'autre...

2 La Chambre sait ce dont il s'agit. Est-ce que l'accusé était un Serbe?

3 M. Mesic (interprétation): Oui.

4 M. le Président (interprétation): Je crois que vous savez. Bon, il faudra

5 qu'on regarde à nouveau le Règlement parce que le témoin est en train de

6 déposer ici.

7 M. Nice (interprétation): Oui, je vais traiter de cela selon la procédure.

8 La question, je crois, est d'évidence.

9 Venons à Bobetko. Au cours de la toute dernière semaine, lorsqu'il a été

10 su que vous viendriez ici pour déposer, y a-t-il eu une réaction, une

11 réaction importante en Croatie qui était contraire au fait de livrer

12 Bobetko à ce Tribunal?

13 M. Mesic (interprétation): Oui, c'est exact.

14 Question: Avez-vous, dès le premier moment lorsque la question a été

15 soulevée en Croatie, je pense la dernière semaine ou la semaine juste

16 avant, su que la question était résolue que les accusés croates devraient

17 être livrés ici pour subir un procès?

18 Réponse: J'ai considéré que la Croatie avait une loi constitutionnelle

19 concernant la coopération avec le Tribunal et qu'elle devrait fonctionner

20 à tout moment. Le Gouvernement croate a aussi le droit d'utiliser les

21 moyens juridiques à sa disposition lorsqu'il le juge nécessaire.

22 Question: Certaines questions de détail qui découlent de ces questions:

23 vous avez parlé de la visite des ministres serbes au territoire de la

24 Croatie. Est-ce que vous vous souvenez de ce passage? Et pourriez-vous

25 nous donner le nom du ministre serbe? Et à quel endroit le ministre s'est

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1 rendu, si vous pouvez vous en souvenir?

2 Réponse: Je ne parviens pas à me rappeler ni de son prénom ni de son nom

3 de famille, mais je sais qu'il s'est rendu en visite dans le secteur qui

4 entrait dans la frontière de Karlobag-Virovitica, sans que les autorités

5 croates en aient connaissance et qu'il était ministre dans le Gouvernement

6 de la Serbie. Il était accompagné par Vojislav Seselj, dont les unités

7 militaires étaient également dans le même secteur.

8 Question: Lorsqu'il y a eu un vote concernant le retrait de l'armée de la

9 Croatie, est-ce que vous étiez le seul à voter contre cette proposition?

10 Réponse: Je dois corriger ce que vous venez de dire: le vote portait sur

11 le retrait de l'armée de la Slovénie.

12 Question: Est-ce que vous avez été le seul à voter contre?

13 Réponse: C'est exact. Parce que j'étais d'avis que ceci faisait partie du

14 scénario de l'accusé. Il voulait que la Slovénie puisse s'en aller parce

15 qu'il n'y avait pas de population serbe qui se trouvait là; donc il ne

16 pouvait pas attaquer une partie du territoire slovène? C'est la raison

17 pour laquelle la JNA s'est retirée de la Slovénie, et il n'est pas entré

18 dans une nouvelle guerre avec la Défense territoriale de la Slovénie qui

19 remportait beaucoup de succès.

20 Question: Il est dit qu'à l'époque vous étiez très enthousiaste pour la

21 fragmentation de la Yougoslavie. Si vous aviez voté différemment, auriez-

22 vous montré davantage d'enthousiasme pour ce démantèlement, pensez-vous,

23 croyez-vous?

24 Réponse: Lorsque j'ai voté, j'avais à l'esprit que c'était la mise en

25 oeuvre d'un scénario. Mais, comme je l'ai dit, dans l'armée yougoslave qui

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1 était devenue serbe, les retraits de Croatie, de Bosnie et de Macédoine,

2 alors j'ai dit que si elle se retirait, à ce moment-là je voterai pour son

3 retrait de Croatie, de Bosnie et de Macédoine.

4 Question: Juste une question de détail. La Chambre veut avoir compris les

5 choses de façon différente. En tant que Président de la présidence, vous

6 expliquez qu'il n'y avait qu'un personnel très limité qui était à votre

7 disposition. Est-ce exact?

8 Réponse: Oui. J'avais seulement quelques fonctionnaires qui m'aidaient: un

9 conseiller, un chef de cabinet, deux secrétaires.

10 Question: Bon. Pour finir, vous avez appelé l'attention ce matin et

11 récemment sur l'existence possible auprès des Serbes de craintes qui se

12 seraient accumulées du fait d'événements tragiques précédents, que vous

13 avez vous-même profité des craintes serbes dans votre approche politique,

14 Monsieur Mesic?

15 Réponse: Non, à aucun moment, pas à un seul moment cela n'a été ma

16 politique d'essayer de faire peur à qui que ce soit à cause de leur

17 nationalité ou de l'origine ethnique. J'ai toujours préconisé et je

18 continue de préconiser aujourd'hui les droits des citoyens, les droits

19 civils, la protection des minorités et leurs droits contre toute

20 discrimination de groupes vulnérables, y compris les minorités.

21 M. Nice (interprétation): Et est-ce que vous avez toujours tenté de

22 réaliser cela en Croatie, cette discrimination positive par rapport à des

23 groupes vulnérables?

24 M. Mesic (interprétation): Oui, c'est exact. C'est la raison pour laquelle

25 j'ai appuyé la loi sur les minorités nationales qui étaient adoptées

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1 conformément à des critères européens. Je voulais que la Croatie soit

2 encore plus avancée et donne encore plus d'espace à des minorités

3 nationales.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Mesic, ceci termine votre

5 déposition. Je vous remercie d'être venu jusqu'au Tribunal pour faire

6 cette déposition et pour avoir été disponible pendant une journée

7 supplémentaire.

8 La Chambre de première instance va lever l'audience pendant une demi-

9 heure.

10 M. Nice (interprétation): Juste avant qu'on ne laisse la séance, est-ce

11 que nous pourrions dire clairement notre position en ce qui concerne notre

12 compte rendu? Si on peut le faire avant de l'oublier.

13 M. le Président (interprétation): Bien.

14 M. Nice (interprétation): La position est que… Le témoin n'a pas besoin de

15 rester pour cela. Peut-être qu'il est pressé.

16 M. le Président (interprétation): Le témoin souhaiterait partir.

17 (Le témoin, M. Stjepan Mesic, est reconduit hors du prétoire.)

18 (Questions relatives à la procédure.)

19 M. Nice (interprétation): Le compte rendu demeure l'objet de mesures de

20 protection pour une autre Chambre. Et, effectivement, lorsque ceci a été

21 évoqué par la Chambre d'appel, cela demeure sous une protection, sous des

22 mesures de protection.

23 L'accusation, de façon cohérente par rapport à son obligation de

24 communication, a été préoccupée à l'idée que l'accusé trouverait les

25 occasions qu'il pourrait de critiquer ces procédures. Et il faut savoir

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1 publiquement que tout a été fait pour que la documentation lui soit mise à

2 sa disposition, l'accusation prenant les initiatives qu'elle doit prendre.

3 Donc, nous avons pris les mesures nécessaires qui lui permettront de lire

4 ce compte rendu, et ceci lui a été fourni en application d'un ordre du

5 Juge Président d'une Chambre d'appel sur la base de non-communication par

6 la suite et, effectivement, sur la base des conséquences qui auraient

7 découlé de la violation d'une ordonnance.

8 Par conséquent, ceci n'aurait jamais dû avoir lieu, selon l'ordonnance

9 ceci n'aurait jamais dû être mentionné publiquement dans cette Chambre.

10 Maintenant, dans le cas où je n'ai aucun désir d'interrompre les choses à

11 un moment où les choses sont reprises par l'accusé, en tout état de cause,

12 ceci fait seulement partie du compte rendu. Vous pourriez voir quelle est

13 la façon de résoudre cette question.

14 M. le Président (interprétation): Pourquoi ne regardons-nous pas

15 l'ensemble du compte rendu pour voir s'il y a une pertinence quelconque?

16 M. Nice (interprétation): Si vous le voulez. Nous pourrions voir si

17 l'accusé ou quelqu'un en son nom devrait présenter une nouvelle demande à

18 la Chambre d'appel à ce sujet.

19 M. le Président (interprétation): Nous tournons en rond. Je croyais que le

20 Règlement avait été amendé de façon plus pratique.

21 M. Milosevic (interprétation): S'agissant de ce compte rendu d'audience,

22 je voudrais corriger une erreur factuelle qui a sans doute été commise

23 intentionnellement par M. Nice.

24 Monsieur Nice a demandé à M. Mesic si l'accusé était bien un Serbe. Le

25 témoin a confirmé qu'il s'agissait effectivement d'un Serbe. Or, l'accusé,

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1 s'agissant du passage du compte rendu d'audience dont j'ai donné lecture,

2 dans l'affaire relative à laquelle ce passage est lié, l'accusé était un

3 Croate. J'ai aussi utilisé des passages du compte rendu Dokmanovic qui

4 était un Serbe, mais là il s'agissait d'un Croate.

5 M. le Président (interprétation): Oui mais la question de M. Nice avait

6 pour but d'obtenir la réponse que vous venez de faire. Il ne l'a pas

7 obtenue, mais c'était son objectif tout à fait clairement.

8 Bien, nous allons revenir à ce transcript en temps utile. Nous verrons

9 s'il n'est pas possible de le rendre publique d'une façon ou d'une autre,

10 donc nous le reverrons plus tard.

11 Suspension maintenant pour une demi-heure.

12 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 11 heures 3.)

13 M. le Président (interprétation): Oui, une demande a été faite pour que

14 l'accusé puisse se consulter avec ses associés aujourd'hui, ici, après que

15 la Chambre aura fini de siéger, au bout d'une heure, une heure et demie.

16 Nous allons donner des instructions au Greffe pour qu'on puisse faciliter

17 les choses.

18 J'en viens maintenant à la question dont on a dit qu'on allait traiter

19 maintenant et qui a trait à l'amicus curiae M. Wladimiroff.

20 Monsieur Milosevic, vous aviez présenté des conclusions sur ce sujet

21 lorsque je vous ai arrêté la semaine dernière. Y a-t-il quelque chose que

22 vous souhaitiez ajouter à ce que vous aviez dit à ce moment-là?

23 M. Milosevic (interprétation): Comme vous le savez, j'ai posé une question

24 en rapport avec le fait que l'amicus curiae, donc l'ami du Tribunal, votre

25 ami et pas le mien, a fait une déclaration que je considère impropre et

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1 dans laquelle je vois une entrave au cours normal de ce qui se déroule

2 ici. Mais je considère que ceci montre, et plus précisément confirme que

3 ce tribunal illégal ne se situe pas sur le terrain du droit, mais sur le

4 terrain de la politique et des médias.

5 En fait, le témoin que nous venons d'entendre a exposé ses positions

6 politiques, pour l'essentiel, et il n'a pas établi des faits. Ceci est une

7 preuve supplémentaire du fait qu'ici, nous sommes en présence d'une

8 opération politique et médiatique, et pas d'une opération légale.

9 S'agissant des individus concernés dans cette pièce, je considère que ce

10 qui s'est passé est tout à fait impropre et qu'une campagne médiatique a

11 bénéficié de l'appui d'une personne présente ici, alors que vous, vous

12 parlez de cette opération comme d'un procès. Je considère que la façon

13 dont M. Wladimiroff a agi le déconsidère complètement, y compris en tant

14 qu'ami du Tribunal, en tant que votre ami et le rend incompétent pour

15 accomplir sa tâche.

16 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, je ne demanderais pas

17 normalement à l'accusation de s'exprimer, mais s'il y a quelque chose que

18 vous voulez dire, vous pouvez le faire.

19 M. Nice (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Non, le compte

20 rendu d'audience est venu à mon attention récemment: il y a des passages

21 qui nous préoccupent, mais je suis sûr que ces passages ont déjà été lus

22 par la Chambre. J'ai présenté mes arguments la dernière fois et j'ai dit

23 quels étaient les dangers impliqués dans le fait de s'adresser à la

24 presse. Nous ne le faisons pas; c'est une politique que nous respectons

25 rigoureusement depuis le début du procès et je pense qu'il est extrêmement

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1 regrettable.

2 M. le Président (interprétation): Très bien, Monsieur Nice. Vous n'avez

3 peut-être pas parlé à la presse, mais je suppose que d'autres l'ont fait?

4 M. Nice (interprétation): Non, aucun membre de l'équipe du Procureur qui

5 travaille dans ce procès.

6 M. le Président (interprétation): Non, aucun membre de votre équipe, j'en

7 suis sûr, mais d'autres l'ont fait; vous l'avez peut-être constaté?

8 M. Nice (interprétation): Oui, je suppose que, bien sûr, il y a un élément

9 lié à la presse dans toute cette affaire, mais en ce qui concerne l'équipe

10 du Procureur dans ce procès...

11 M. le Président (interprétation): Très bien. Des commentaires ont été

12 faits au moment du procès, selon lesquels il conviendrait que vous

13 vérifiiez si de telles choses se sont produites.

14 M. Nice (interprétation): Je ne l'ai pas vérifié moi-même. En fait, je ne

15 lis pas la presse, mais comme je l'ai indiqué récemment, pour autant que

16 je l'aie compris, la presse est souvent mal informée. Voilà le problème.

17 C'est la seule observation fondamentale que je ferai. Malheureusement,

18 tout contact avec la presse est impropre dans des procès de ce genre. Je

19 vérifie simplement avec Mme Uertz-Retzlaff et M. Groome; je n'en ai pas

20 discuté avec eux. Non, je n'ai pas d'autre à dire.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Wladimiroff, nous avons votre

22 note qui nous a été transmise au sujet de cet article publié dans un

23 journal bulgare et, en partie, reproduit dans la presse néerlandaise.

24 Peut-être aimeriez-vous commencer par là?

25 M. Wladimiroff (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je

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1 commencerai d'abord par la presse bulgare en traitant de la partie de

2 cette publication bulgare que M. Milosevic a mentionné. Je peux dire

3 fermement: ce n'étaient pas exactement les mots que j'ai prononcés.

4 La publication résultait d'une visite à Salzbourg au mois d'août.

5 J'enseignais à des étudiants pendant l'été le droit international pénal,

6 organisé par l'université de Salzbourg. L'un des étudiants, qui était

7 actif pour le Comité de défense juridique du programme bulgare, a demandé

8 une interview qu'il a prise au magnétophone à l'époque. En répondant à des

9 questions générales en ce qui concernait ma pratique en tant qu'avocat

10 dans l'affaire Tadic et des questions de procès équitables dans

11 l'ensemble, la question de l'étudiant a passé au procès de Milosevic.

12 Dans ma réponse à cette question "Y a-t-il une chance que Milosevic puisse

13 être acquitté?", j'ai indiqué que "Le Procureur avait choisi une vaste

14 cible contre l'accusé: le Kosovo, la Croatie et la Bosnie. En utilisant un

15 fusil -comme vous l'avez vu dans la transcription, vous avez vu tout ce

16 qui a été dit à ce sujet-, en utilisant un fusil, il essayait de montrer

17 que certains des petits plombs pourraient arriver en tirant très large

18 pour toucher la cible, pour essayer de démontrer ses thèses."

19 J'ai dit également "qu'il y avait une possibilité que l'accusé soit accusé

20 de tous les chefs d'accusation pesant sur lui, qu'il soit acquitté de

21 toutes les charges d'accusation."

22 Par la suite, cet étudiant, qui n'est pas un journaliste, m'a dit qu'il

23 avait publié cet article dans un journal en Bulgarie et qu'une phrase

24 avait été utilisée qui n'avait pas été utilisée par moi, à savoir "En

25 théorie oui, mais en pratique non". Hier, il m'a envoyé un courrier

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1 électronique avec une transcription du passage pertinent de

2 l'enregistrement et m'a aussi confirmé ce que je disais au sujet de

3 l'interview. Ce qui confirme mes souvenirs. Vous avez ces documents qui

4 ont été remis.

5 Permettez-moi de dire que je regrette ce qui s'est passé, mais, comme vous

6 l'avez peut-être remarqué, ce qui a été publié ici n'était pas en fait ce

7 que j'avais dit. Vous avez lu ce que j'avais effectivement dit.

8 Je vais maintenant passer à la question précédente: le "Courant".

9 J"en ai traité pendant l'audience du 11 et je vous ai écrit une lettre le

10 12 pour expliquer comment les choses s'étaient passées. Comme je l'ai

11 écrit dans cette lettre, je n'ai rien à ajouter par rapport à ce que

12 j'avais dit en audience ici. A mon avis, la teneur de l'article ne reflète

13 pas l'esprit de la conversation que j'avais eue avec ce journaliste et de

14 ce qui est dit; les citations sont une déformation de ce que j'ai dit,

15 même si la situation est légèrement différente.

16 Après l'audience, j'ai contacté le journaliste et il a exprimé un regret:

17 que l'article ne m'avait pas été envoyé pour que je puisse l'approuver

18 d'abord. Il a défendu son point de vue, la façon dont il a avait compris

19 notre interview, mais a reconnu que sa version était une interprétation de

20 notre entretien. Il ne s'agissait pas de citations exactes.

21 J'ai été en désaccord avec son interprétation, mais ceci laisse la

22 question telle qu'elle. Dans les deux cas de figure, je me rends compte

23 que je n'aurais pas dû donner d'interview, comme je vous l'ai écrit. Et

24 j'accepte le fait qu'en donnant cette interview, par conséquent, je suis

25 responsable de l'interview, bien que je n'ai pas été cité correctement et,

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1 dans un autre cas, pas cité du tout et, dans un autre cas, cité de façon

2 inexacte.

3 Je voudrais dire que je regrette les critiques adressées sur les questions

4 qui sont passées en dehors de ce prétoire. Depuis le moment où j'ai été

5 nommé amicus curiae, en septembre de l'an dernier, j'ai essayé d'aider la

6 Chambre dans ce procès, dans l'intérêt de la justice, et je crois que

7 l'accusé a bénéficié de cette assistance.

8 Et je peux dire à la Chambre que s'il y a là une leçon à apprendre, je

9 l'ai apprise: je ne peux pas parler à la presse, même pas sur des

10 questions, directement ou indirectement, qui ont trait… Et il vaut mieux

11 que je reste silencieux, que je garde le silence et que je m'occupe

12 uniquement de ma tâche. Il ne faut pas que j'en parle, même sur des

13 questions relatives à Milosevic.

14 M. le Président (interprétation): C'est l'accusé qui a dit que c'était

15 inapproprié de poursuivre, de continuer à faire ainsi. C'est à nous qu'il

16 appartient de voir ce qu'il en est. Mais comment répondez-vous à la

17 suggestion qu'il a faite qu'il était inapproprié que vous continuiez?

18 M. Wladimiroff (interprétation): Je comprends ces remarques sur ces

19 questions, mais, comme je l'ai déjà dit, ces incidents ont trait à des

20 questions qu'on a dit que j'aurais dites en dehors de la salle d'audience.

21 Ma position est qu'en salle d'audience, j'ai fonctionné conformément aux

22 critères exigés pour un amicus curiae et je crois que je peux continuer

23 d'œuvrer comme amicus curiae si je m'en tiens aux critères exigés et, pour

24 éviter toute répétition de ce qui s'est passé en dehors du Tribunal, je

25 viens d'indiquer que je ne parlerai plus à la presse. Et je pense qu'il

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1 est possible pour moi de continuer.

2 M. Robinson (interprétation): Pourriez-vous, Monsieur Wladimiroff,

3 reconsidérer cette réponse dans le cadre du fait que l'un de vos rôles est

4 de présenter des conclusions et des objections. Et il est possible à

5 l'accusé d'y répondre, sans soulever la question à la lumière de ce qui

6 s'est passé, que des questions confidentielles peuvent être évoquées ou

7 non.

8 M. Wladimiroff (interprétation): Je voudrais dire, Monsieur le Juge, que

9 c'est une question qu'il échoit à la Cour de trancher. Les amici curiae

10 tendent d'assister la Cour, ils ont une relation avec la Cour, ils ne sont

11 rattachés à aucune des parties et n'ont pas de relation avec l'une ou

12 l'autre des parties. Nous ne recevons d'instruction d'aucune partie, donc

13 ce n'est pas une question de relations de confiance avec l'une ou l'autre

14 des parties.

15 Nous avons une relation avec la Chambre et, là encore, je regrette, comme

16 je l'ai dit, ce qui s'est passé en dehors du Tribunal, bien que je n'aie

17 pas été cité ou que j'aie été cité de façon déformée. Mais puisqu'on a

18 rendu compte de ce que j'ai dit, mais en l'occurrence chose que je n'ai

19 pas dite, j'ai le sentiment que... Je vais essayer de dire cela très

20 soigneusement: j'ai l'impression qu'un incident est arrivé, mais est

21 arrivé qui peut avoir déçu le Tribunal. Et je le prie de m'en excuser,

22 mais je crois que ce que j'ai fait ici, au Tribunal, devrait me permettre

23 de continuer, parce que ce qui compte, c'est ce que je fais devant vous en

24 salle d'audience.

25 M. Kwon (interprétation): Monsieur Wladimiroff, vous avez soulevé la

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1 question que vous-même, en tant qu'amicus curiae, avez un rapport avec la

2 Chambre. Telle est la question essentielle, je crois. Mais les autres

3 personnes, les gens de l'extérieur, qui ne comprennent pas bien ce qu'est

4 un amicus curiae et quel est son rôle, pourraient penser qu'ils ont des

5 contacts réguliers avec les Juges, ce qui n'est pas du tout vrai. Donc ce

6 que vous dites pourrait être déduit par réflexion par d'autres personnes

7 et ils pourraient penser que ceci comprend ce que pensent certains Juges,

8 ou quelque chose de ce genre.

9 Pourriez-vous me dire ce que vous pensez de ce qui est vrai dans ce compte

10 rendu? Vous comparez… enfin, vous décrivez le procès comme une sorte de

11 partie de chasse. Et, à la fin du compte rendu, vous mentionnez le fait

12 qu'il y a une possibilité que certaines balles pourraient atteindre leur

13 cible. Pourriez-vous, s'il vous plaît, clarifier cela et nous dire ce que

14 vous vouliez dire par là?

15 M. Wladimiroff (interprétation): Je vais essayer de le faire, Monsieur le

16 Juge.

17 M. Kwon (interprétation): Oui, je vous remercie.

18 M. Wladimiroff (interprétation): Je voudrais d'abord traiter de la

19 première question que vous avez évoquée. Peut-être que l'un des problèmes

20 que j'ai créés pour moi-même est d'expliquer au monde extérieur ce que

21 fait un amicus curiae. La leçon à retenir, comme je l'ai dit, est peut-

22 être qu'il ne faut pas faire cela parce qu'en tentant d'expliquer ce

23 qu'est un amicus curiae et ce qu'il fait, à un moment donné, on vient à

24 parler du procès et on est à ce moment-là vulnérable à des questions si

25 l'on n'y répond pas. Et c'est ce qui s'est passé.

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1 Maintenant, pour répondre à votre deuxième question, d'après la façon dont

2 je vois les choses, en tout cas, je n'avais pas l'intention de comparer le

3 procès avec une partie de chasse; bien entendu, non. Mais j'ai utilisé un

4 exemple qui, je crois, n'était peut-être pas le meilleur exemple que j'ai

5 utilisé de ma vie, mais l'exemple avait pour but de montrer de façon très

6 compréhensible ce qu'on aurait pu dire que l'accusation faisait avec tant

7 de charges, tant de chefs d'accusation; comme un exemple d'un fusil de

8 chasse qui tirerait tous ses plombs de façon large. Je pense que ceci

9 expliquerait ce qui se passait. Cela ne voulait pas dire qu'au cours de ce

10 procès, on agissait de la sorte. Ce n'était pas en ce qui concernait le

11 procès lui-même, mais c'était une comparaison par rapport à ce que faisait

12 l'accusation. Peut-être n'aurais-je pas dû le faire. Peut-être n'aurais-je

13 pas dû le faire.

14 M. Kwon (interprétation): Je vous remercie. Et je me souviens d'avoir déjà

15 évoqué cela précédemment, alors que nous traitions de questions de résumés

16 de déposition de témoin avec M. Nice. Je me souviens que j'ai dit que ce

17 qui était important est que nous fassions ce qu'il convient pour avoir un

18 procès équitable. Mais ce qui est également important, c'est qu'il faut

19 qu'autrui se rende compte de ce que nous faisons et que ce que nous

20 faisons est juste, et que le procès est équitable.

21 Mais que diriez-vous à ce sujet? Que le public et les médias ne vous

22 considèrent plus comme étant impartial à la suite de ce que vous avez dit

23 aux médias? Quelle est votre observation, quel est votre commentaire par

24 rapport à ce que vous avez dit aux médias?

25 M. Wladimiroff (interprétation): J'essayais de dissocier, Monsieur le

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1 Juge, ce que je suis censé avoir dit et ce que j'ai véritablement dit. Il

2 est extrêmement difficile de répondre à des choses qu'on n'a pas dites. En

3 l'occurrence, c'est impossible. Je peux seulement répondre par rapport aux

4 paroles que j'ai prononcées.

5 Et je voudrais redire que ce que j'ai dit ne met pas en danger le

6 caractère équitable du procès, à mon avis. Ce que j'ai dit n'était peut-

7 être pas en termes très choisis ou les meilleurs exemples qu'on aurait pu

8 utiliser. Il est malheureux peut-être de traiter de cette question du

9 tout, mais je n'ai pas vraiment dit quoi que ce soit qui puisse mettre en

10 danger le procès ou qui puisse être inéquitables vis-à-vis de l'accusé. Et

11 d'après ce sentiment, que j'ai notamment été cité à tort, de façon

12 déformée, j'ai le sentiment que je peux continuer à faire correctement mon

13 travail, comme je l'ai dit, en salle d'audience et que cette erreur ne

14 sera pas faite, pour ce qui est de présenter les choses peut-être de façon

15 peut-être pas très élégante, donc j'ai le sentiment que je pourrais

16 continuer.

17 Je ne devrais pas dire ceci, mais aussi pour être très franc avec la

18 Chambre, après tout, je suis un Hollandais, j'essaie de parler anglais de

19 mon mieux, et c'est suffisant pour faire ma tâche. Mais, parfois, cela

20 peut me gêner et je pense que là, c'est une des occasions où j'ai été

21 gêné. Peut-être que lorsqu'on est un locuteur de naissance, on peut

22 utiliser de meilleurs exemples ou formuler les choses de façon différente

23 pour qu'il n'y ait aucun malentendu. Mais là encore, ce n'est pas une

24 excuse, c'est seulement une explication.

25 M. Robinson (interprétation): Par exemple, Monsieur Wladimiroff, dans la

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1 citation citée par le Juge Kwon, vous avez dit que "vous pouviez perdre un

2 certain nombre d'objectifs, que certains plombs pourraient manquer leur

3 objectif, mais certains l'atteindront quand même."

4 C'est un langage vraiment très malheureux. Il aurait peut-être été plus

5 heureux de dire que "certains, peut-être, atteindraient leur cible".

6 M. Wladimiroff (interprétation): Je comprends ce que vous dites, Monsieur

7 le Juge et, effectivement, en voyant les choses avec un recul, je

8 souhaiterais avoir utilisé un langage plus approprié, plus élégant, mais

9 vous aurez peut-être remarqué que c'est du vocabulaire parlé. Ce sont de

10 longues phrases. Et, là encore, pas en tant qu'accusé, pas comme un

11 accusé, là encore, il s'agit d'une langue qui n'est pas parlée par un

12 locuteur natif.

13 M. Robinson (interprétation): Comme vous le savez très bien, pour ce qui

14 est d'apprécier des questions, par exemple, de parti pris et de

15 partialité, vous aurez très rarement des éléments de preuve d'un parti

16 pris direct. Donc le critère véritable est de savoir comment la chose

17 paraît à un homme raisonnable. L'apparence est plus importante et c'est

18 une indication plus importante que la réalité. Ainsi, ce que le Juge Kwon

19 a dit est extrêmement important et la façon dont on peut apprécier cela,

20 c'est la façon dont les choses paraissent à une personne raisonnable.

21 M. Wladimiroff (interprétation): Je comprends, Monsieur le Juge. Je

22 comprends aussi que c'est là une question qui relève d'une appréciation

23 très prudente et, effectivement, de voir ce qui a été dit; cela doit être

24 fait non pas sur la base de ce qui a été publié. Je m'en rends compte. Je

25 me rends compte aussi que non seulement la justice doit être faite, mais

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1 il faut voir également que la justice doit sembler juste.

2 Peut-être doit-on penser que le critère pour donner l'impression que la

3 justice est bien appliquée, on peut considérer qu'il s'agit d'un critère

4 objectif, dans le sens qu'il ne faudrait peut-être pas le comprendre dans

5 le sens que d'autres personnes pourraient décider de favoriser cela, de

6 promouvoir la justice.

7 Ce que je dis, c'est que, si les médias en tirent davantage que ce qui s'y

8 trouve, c'est à vous d'apprécier cela. Je ne dis pas qu'ils en tirent

9 davantage de ce qui a été dit, mais, dans mon esprit, il y a toujours

10 l'idée qu'il serait mauvais de parvenir à un point où ce seraient d'autres

11 qui décideraient ce que vous devez penser en écrivant à ce sujet.

12 Je n'arrive pas à m'exprimer très clairement, mais je pense que vous

13 comprenez ce que j'essaie de dire.

14 M. le Président (interprétation): Je pense que vous avez raison: le

15 critère est de savoir si ce que vous avez fait a eu un effet sur le

16 caractère équitable du procès.

17 M. Wladimiroff (interprétation): Oui.

18 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'il y a eu un préjudice

19 quelconque causé au caractère équitable du procès? C'est la première

20 question et la réponse est évidemment non. Ici, il y a une Chambre de

21 première instance composée de juges indépendants et de métier, et aucune

22 personne ne pourrait dire qu'il y a eu le moindre préjudice quant à

23 l'équité du procès.

24 Une des questions suivantes qui se pose est de savoir: est-ce qu'il y a eu

25 un préjudice causé à la façon dont le procès et l'équité du procès

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1 pourraient être considérés? Parlant pour moi-même, je dirai qu'aucune

2 personne raisonnable ne pourrait imaginer que des commentaires qui vous

3 ont été attribués pourraient être, en quoi que ce soit, attribués aux

4 membres de la Chambre de première instance. A l'évidence, non.

5 Donc la question qui se pose est de savoir s'il est possible pour vous de

6 continuer de remplir votre rôle et d'agir de façon indépendante, mais en

7 tant qu'amicus curiae, comme ami de la Chambre, puisque vous avez admis,

8 comme c'est bien le cas, que vous avez eu le tort de parler de la façon

9 dont vous avez parlé? Est-ce que vous avez l'impression que votre

10 indépendance a été compromise et votre capacité à continuer a été

11 compromise par ce qui s'est passé?

12 Et plus important, est-ce que vous pensez que la façon équitable de la

13 perception de ce procès a été compromise par le fait que vous continuiez?

14 Très simplement, la Chambre de première instance a ordonné qu'il y ait un

15 amicus et que ceci devrait continuer.

16 M. Wladimiroff (interprétation): Je vais essayer de répondre à cela,

17 Monsieur le Président.

18 Je pense que l'équité du procès n'est pas affectée. Je pense que la

19 perception du caractère équitable du procès, malheureusement, a fait

20 l'objet de discussions, et mon espoir est que ce débat d'aujourd'hui a

21 éclairci les choses, et qu'il ne devrait pas y avoir de perception de

22 manque d'équité, s'il devait y avoir une perception quelle qu'elle soit.

23 Si j'ai raison, si j'apprécie bien la situation, correctement, je dirai

24 que je peux poursuivre, je peux continuer.

25 M. Kwon (interprétation): Oui, ce qu'évoque le Juge Président est tout à

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1 fait approprié et tout à fait juste. Nous ne sommes pas affectés du tout

2 par ce que vous avez dit ou par ce que les médias ont exprimé.

3 Ma dernière préoccupation, c'est que le rôle de l'amicus curiae est

4 d'aider la Chambre et aussi d'assister en partie l'accusé qui n'est pas

5 représenté par un conseil. Mais si l'accusé est tellement opposé à la

6 présence d'un amicus curiae, je me préoccupe de la question de savoir si

7 vous, en tant qu'amicus curiae, pouvez continuer à remplir ce rôle dans ce

8 procès, si vous pouvez le faire avec la vigueur qui s'impose.

9 M. Wladimiroff (interprétation): Permettez-moi de dire ceci: je crois que

10 la position et de l'accusé, c'est qu'il ne reconnaît pas le Tribunal et

11 que, par conséquent, il ne reconnaît personne qui soit désigné par le

12 Tribunal. Donc dès le début, j'ai été conscient du fait que je suis une

13 persona non grata, du point de vue juridique, parce que je suis nommé par

14 la Chambre. Ceci, en soi, n'est pas un obstacle à ce que je puisse remplir

15 mon rôle de mon mieux, et c'est ce que je fais.

16 Vous aurez peut-être remarqué que les amici se concentrent sur les aspects

17 juridiques de ce procès et nous sommes très réticents pour ce qui est

18 d'intervenir dans des contre-interrogatoires; et là, je parle pour moi-

19 même, c'est particulièrement vrai.

20 Dans toute question juridique, dans tout procès, je me rends compte que,

21 lorsqu'on étudie les questions juridiques évoquées par l'accusation ou par

22 la Chambre, je m'engage dans un débat juridique ou de nature juridique qui

23 peut déplaire à l'accusé, parce que ceci est une façon de respecter les

24 règles. Et ce que je comprends, c'est qu'il n'accepte pas cela parce qu'il

25 ne reconnaît pas le Tribunal.

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1 Donc je connais bien le principe selon lequel un accusé n'apprécie pas que

2 quelqu'un soit nommé par le Tribunal et qu'il n'apprécie pas ce qu'il

3 fait. Et ceci ne changera pas.

4 M. Robinson (interprétation): Monsieur Wladimiroff, permettez-moi

5 d'éclaircir un point. La question n'est pas de juger de l'équité du procès

6 du point de vue de l'un ou l'autre des Juges qui sont assis ici; ça, je le

7 rejette complètement.

8 La question, me semble-t-il, est plus spécifique. Il s'agit de parler de

9 la perception que vous avez de votre propre équité en tant qu'amicus, de

10 savoir ce que vous pensez de la façon dont vous travaillez. Pouvez-vous

11 travailler équitablement et impartialement dans le rôle qui est le vôtre?

12 Pouvez-vous présenter des arguments, des objections devant l'accusé?

13 Pouvez vous soumettre des éléments au sujet de ce qui s'est passé?

14 Donc on ne parle pas ici de l'équité du procès dans l'abstrait ou en

15 rapport avec les Juges. La question qui se pose c'est: est-ce que vous

16 pouvez être perçu comme impartial et équitable, compte tenu du fait que

17 vous avez fait des commentaires au sujet des éléments de preuve, pas

18 nécessairement de la façon dont la transcription de l'article bulgare le

19 dit, mais d'une façon ou d'une autre, en tout état de cause, et que ceci a

20 pu être considéré comme étant des commentaires contraires à l'accusé?

21 C'est la perception qui peut exister et la question est donc de savoir

22 comment vous percevez votre équité et votre possibilité d'impartialité

23 dans le rôle qui vous a été assigné.

24 M. Wladimiroff (interprétation): Oui, Monsieur le Juge.

25 M. Robinson (interprétation): Parce que si vous ne pouvez pas être

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1 impartial et équitable dans les éléments que vous présenterez à l'accusé

2 ou dans les objections que vous élèverez aux conceptions de l'accusé,

3 alors, je ne vois pas comment vous pouvez accomplir le travail qui est le

4 vôtre ici et remplir votre rôle. Je crois que c'est sur ce point que vous

5 devriez vous concentrer. Mais je ne crois pas que nous devrions y passer

6 beaucoup de temps. Pour ce qui me concerne, je peux très bien me contenter

7 sur ce que vous avez dit jusqu'à présent en répondant aux questions posées

8 par moi.

9 M. Wladimiroff (interprétation): Je pourrais peut-être ajouter que je suis

10 un esprit indépendant, et je n'aime pas du tout lorsque des gens me

11 considèrent comme n'étant pas un esprit indépendant. Je ne recule pas par

12 rapport au travail qu'on me propose. J'aime faire ce que je suis en train

13 de faire parce que je crois que c'est dans l'intérêt de la justice et

14 c'est mon seul souci. Je ne m'inquiète pas d'une éventualité de changement

15 par la suite. Je ne crois pas que je modifierai mon attitude. Je

16 continuerai, à l'avenir, à aider la Chambre, comme je me je me suis

17 efforcé de le faire depuis toujours. Rien de ce point de vue-là ne

18 changera.

19 M. le Président (interprétation): Je dois dire, pour ce qui me concerne,

20 que je considère que le fait de savoir si l'équité du procès a été

21 affectée, je considère cela comme un point de la plus haute importance. Et

22 je crois que c'est cela qu'il convient de vérifier.

23 S'agissant de l'équité des propos qui sont les vôtres, je crois qu'elle

24 n'est pas contestée, mais il est permis de dire que la Chambre de première

25 instance a été, bien sûr, aidée par les amici curiae dans son travail à de

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1 nombreuses reprises, et je suis tout à fait sûr que certains de ces

2 éléments d'aide à la Chambre provenaient de vous. Oui.

3 Maintenant, je vous demande un instant.

4 (Les Juges se concertent sur le siège.)

5 M. le Président (interprétation): La Chambre se prononcera sur la

6 question.

7 Monsieur Nice, vous avez la parole.

8 On me rappelle qu'il faudra quelques minutes pour préparer la salle à

9 l'audition du témoin suivant.

10 M. Nice (interprétation): Vous vous rappellerez, Monsieur le Président,

11 que le témoin que nous allons entendre maintenant bénéficie de certaines

12 mesures de protection?

13 M. le Président (interprétation): Suspension pendant quelques minutes.

14 (L'audience, suspendue à 11 heures 37, est reprise à 11 heures 52.)

15 (Audience publique avec mesures de protection.)

16 (Le témoin C-037 est déjà dans le prétoire.)

17 M. le Président (interprétation): Puisque nous avons eu une pause, nous

18 poursuivrons nos travaux jusqu'à 13 heures et non l'heure que j'avais

19 indiquée ce matin.

20 Et puis, deuxième remarque administrative: compte tenu des dispositions

21 acoustiques prises en rapport avec la protection de la voix du témoin et

22 le microphone supplémentaire installé devant lui, il importe au plus au

23 point que les autres personnes présentes dans la salle débranchent leur

24 micro lorsque le témoin parle.

25 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

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1 (Contre-interrogatoire du Témoin C-037 par l'accusé, M. Milosevic.)

2 M. Milosevic (interprétation): Vous avez fait une déclaration devant ce

3 Tribunal, pour autant que je puisse le constater, le 1er mai 2002, donc

4 cette année, et vous témoignez d'événements qui se sont déroulés il y a 11

5 ou 12 ans, n'est-ce pas?

6 Témoin C-037 (interprétation): Oui.

7 M. le Président (interprétation): Micro, s'il vous plaît.

8 M. Milosevic (interprétation): Ce si grand nombre d'années n'est-il peut-

9 être pas trop important pour que vous puissiez vous rappelez très

10 précisément de tous les détails des événements? Je veux parler de ces 11

11 ou 12 années écoulées depuis.

12 Témoin C-037 (interprétation): C'est effectivement une période de longue

13 durée. Je me suis efforcé de me souvenir de tout ce dont je pensais que je

14 pouvais me souvenir et de tous les événements qui se sont déroulés.

15 Question: Très bien. C'était exactement le but de ma question. Ce que vous

16 dites ici, vous en êtes absolument convaincu, n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui, je suis convaincu que les choses se sont passées ainsi.

18 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

19 M. le Président (interprétation): Micro, s'il vous plaît.

20 M. Milosevic (interprétation): Mon micro est branché, Monsieur May.

21 M. le Président (interprétation): Allez-y.

22 M. Milosevic (interprétation): Avec votre famille?

23 Témoin C-037 (interprétation): Avec une partie de ma famille. Et nous ne

24 sommes pas tous partis ensemble, nous ne vivons pas tous à Pakrac, en

25 Croatie.

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1 Question: Avez-vous un emploi actuellement?

2 Réponse: Oui.

3 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous des difficultés particulières

4 dans votre existence personnelle, dans la façon dont elle se déroule?

5 Témoin C-037 (interprétation): Eh bien, tout n'est pas simple.

6 M. Kwon (interprétation): Nous n'avons pas au compte rendu d'audience en

7 anglais la question qui a précédé la question suivante: "avec votre

8 famille?"; il y avait une question avant cela qui n'a pas été enregistrée

9 au compte rendu d'audience. Quelle était cette question, Monsieur

10 Milosevic?

11 M. Milosevic (interprétation): Vous vivez normalement avec votre famille?

12 Je lui demandais s'il habitait à Pakrac, comme tout le monde, avec sa

13 famille.

14 Il y a une question qui m'intéresse, Monsieur le Témoin. Je ne sais pas si

15 ce que je vais dire est exact ou pas, mais vous me répondrez. Est-il exact

16 qu'en novembre 1991, en tant que premier accusé dans un procès intenté par

17 le Gouvernement de Croatie contre vous,...

18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, puis-je

19 interrompre?

20 M. le Président (interprétation): Huis clos.

21 (Huis clos partiel à 11 heures 51.)

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21 (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures.)

22 M. Milosevic (interprétation): Quand avez-vous créé le Parti démocratique

23 serbe de Slavonie occidentale?

24 Témoin C-037 (interprétation): Vers la fin du mois de mai, à moins que ce

25 ne soit en juin 1990.

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1 Question: En juin. Qui était à l'initiative de la création de ce parti?

2 Réponse: Nous étions un certain nombre de personnes. J'étais l'une de ces

3 personnes.

4 Question: Avez-vous créé ce parti en tant que parti indépendant et l'avez-

5 vous fait indépendamment de tout le monde? Ou bien est-ce que, au

6 préalable, avant de créer ce parti en Slavonie occidentale, vous avez eu

7 des relations avec les sections de Knin, par exemple? Enfin, comment les

8 choses se sont-elles passées? Les représentants du parti de Knin ont fait

9 une proposition d'abord, ou est-ce que cette proposition a été faite par

10 vous d'abord? Pourriez-vous nous parler de cela?

11 Réponse: Les gens de Knin ont enregistré leur parti les premiers et les

12 premières élections démocratiques se sont tenues. Après quoi, ils ont

13 obtenu plusieurs sièges au Parlement, au Sabor croate, et c'est seulement

14 donc après ces élections que nous avons créé notre parti en Slavonie

15 occidentale.

16 Question: Donc vous avez créé votre parti en tant qu'élément, en tant que

17 composante du SDS, qui s'était déjà créé en tant que parti distinct et

18 déjà enregistré en tant que tel, n'est-ce pas?

19 Réponse: Non, nous appartenions au parti de Knin, au SDS de Knin.

20 Question: Très bien. Dites-moi maintenant la chose suivante: est-ce que

21 quelqu'un, en dehors des membres du SDS de Knin et du SDS de Slavonie

22 occidentale, est-ce qu'il y a eu donc quelqu'un en dehors de vous qui

23 adhérait à ce parti? Quelqu'un de Serbie par exemple ou de Belgrade. Est-

24 ce que des gens extérieurs de la région appartenaient à votre parti?

25 Réponse: Non.

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1 Question: Eh bien, dites-moi, comment vous est venu l'idée de créer un

2 parti en Slavonie occidentale?

3 Réponse: Parce que la guerre faisait déjà rage dans la région de Krajina,

4 ainsi qu'en Slavonie orientale, et nous voulions faire en sorte que la

5 Slavonie occidentale puisse éviter d'entrer dans la guerre. Nous voulions

6 participer à des négociations. C'est la raison pour laquelle nous avons

7 décidé de créer une branche du SDS en Slavonie occidentale.

8 Question: Mais pourquoi est-ce que vous avez, dans ces conditions, créé la

9 région autonome serbe de Slavonie occidentale? Si j'ai bien compris ce que

10 vous dites, vous dites avoir voulu négocier avec Zagreb pour régler les

11 problèmes. Pourquoi est-ce que vous avez eu besoin, dans ces conditions,

12 de créer une région autonome? Est-ce que vous n'auriez pas pu négocier...

13 (Interruption du micro de M. Milosevic.)

14 Réponse: Eh bien, parce que la Slavonie, la Baranja, le Srem occidental

15 existaient déjà, et donc certains pourraient penser que nous faisions

16 partie de cette région avec le nom qu'avait cette région. Et donc pour ne

17 pas être confondu avec eux, nous avons créé notre propre région.

18 Question: De ce que vous dites, il ressort que vous avez créé une région

19 autonome serbe de Slavonie occidentale dans le but de vous distinguer de

20 ce qui était en Slavonie orientale? C'est bien cela que vous nous dites?

21 Réponse: Pour ne pas relever de la Slavonie orientale, Baranja, Srem

22 occidental. Et pour être indépendants, afin de pouvoir exprimer nos

23 propres points de vue et de prendre nos propres positions.

24 Question: Oui, c'est ce que j'ai compris: de façon à ne pas être confondus

25 avec ceux qui faisaient partie de cette autre région. C'est bien cela?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Je vous ai interrogé, il y a quelques instants, au sujet de la

3 création du SDS. Maintenant, je vous demande s'il y a eu des Serbes de

4 Belgrade qui ont participé à la création de la région autonome de Slavonie

5 occidentale?

6 Réponse: Vous pensez à la Slavonie occidentale, c'est bien cela?

7 Question: Oui, bien sûr.

8 Réponse: Pour la Slavonie occidentale, il n'y en a pas eu. Mais pour les

9 autres régions, je ne sais pas.

10 Question: Très bien. Eh bien, penchons-nous maintenant sur les aspects

11 financiers.

12 Est-ce que quelqu'un a fourni des fonds au SDS de Slavonie occidentale,

13 quelqu'un par exemple qui était à Belgrade, en Serbie? Est-ce que

14 quelqu'un depuis là-bas vous a financé de quelque façon que ce soit?

15 Réponse: Non.

16 Question: Est-ce que vous aviez des accords quelconques avec Belgrade et

17 la Serbie dans le cadre de vos activités?

18 Réponse: Non.

19 Question: Eh bien, dites-moi, y compris en rapport avec ce référendum que

20 vous avez organisé pour que les gens puissent se prononcer au sujet de

21 l'autonomie des Serbes de Croatie, dans le cadre de ce référendum, vous

22 n'avez pas eu non plus, vous n'avez pas bénéficié de la participation de

23 quiconque à Belgrade, n'est-ce pas?

24 Réponse: Non.

25 Question: Votre "non" signifie qu'il n'y a pas eu de participation de

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1 Belgrade, c'est bien ça?

2 Réponse: En effet, il n'y en a pas eu.

3 Question: En page 9 de votre déclaration, vous dites que vous êtes arrivé

4 à Belgrade, au gouvernement serbe, et que vous avez parlé avec Budimir

5 Kostic, qui était alors vice-premier ministre du gouvernement. Est-ce que

6 vous y êtes allé sur votre initiative?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Est-ce que vous vouliez le rencontrer parce que c'était

9 également un Serbe de Croatie, donc il venait de la même région que vous,

10 et que vous considériez que vous pouviez lui rendre visite et parler avec

11 lui en raison de cela?

12 Réponse: Je ne sais plus de quel jour, de quelle date vous parlez.

13 Question: De ce qui figure en page 9 de votre déclaration: on y lit que

14 vous êtes allé à Belgrade.

15 Réponse: La première raison pour laquelle je suis allé le voir, c'est

16 parce qu'il était professeur. Je souhaitais qu'il nous aide au sujet des

17 observations qui étaient les nôtres par rapport à la Constitution de la

18 Croatie.

19 Question: Eh bien, je vous remercie, parce que c'était effectivement de

20 cela que je voulais vous parler. Vous êtes allé plus rapidement au sujet

21 qui m'intéresse. Vous y êtes allé parce que c'était quelqu'un qui venait

22 de la même région que vous, pour lui demander son aide au sujet de

23 questions juridiques, car il était professeur à la Faculté de droit de

24 Belgrade, n'est-ce pas?

25 Réponse: Cela a été notre premier contact, au moment de notre premier

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1 contact, mais ce premier contact n'a pas eu lieu à Belgrade, il a eu lieu

2 en Slavonie occidentale.

3 Lorsque je suis allé le voir à Belgrade, c'était mon deuxième contact avec

4 lui; cela s'est passé le 21 août 1991. Ce jour-là, je suis allé le voir,

5 accompagné d'un de mes collègues, et je souhaitais lui soumettre les

6 problèmes, car la guerre avait déjà éclaté. Et il nous a reçus ce jour-là.

7 Question: Donc c'est à votre instigation que vous êtes allés lui parler,

8 n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Vous a-t-il encouragés d'une façon ou d'une autre à vous opposer

11 au Gouvernement croate, à l'Etat croate? A-t-il eu la moindre influence,

12 de ce point de vue, sur vous dans un sens ou dans l'autre, dans le sens de

13 l'opposition ou dans le sens contraire?

14 Réponse: Eh bien, entre les deux entretiens que nous avons eus, entre nos

15 deux rencontres, lorsque nous avons négocié avec M. Tudjman, cela m'a été

16 reproché par téléphone. Mais ce jour-là, lors de la conversation que nous

17 avons eue avec lui, il ne nous a jamais incités à aller vers la guerre;

18 ça, je ne l'ai pas entendu dire.

19 Question: Très bien, passons à autre chose. La Défense territoriale de la

20 SAO de Slavonie: est-il exact de dire que la Serbie n'avait aucun rapport

21 avec la Défense territoriale de Slavonie?

22 Réponse: Je n'ai aucun élément qui me permette de penser que la Défense

23 territoriale était engagée dans ce sens, car je n'ai pas la moindre idée

24 de la façon dont est structurée la Défense territoriale. Et ceux qui ont

25 engagé la Défense territoriale, dans un sens ou dans l'autre, je n'en sais

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1 rien, car ils ne m'en ont pas parlé et je n'avais pas de connaissance à ce

2 sujet. Donc je ne sais pas si la Défense territoriale a joué le moindre

3 rôle dirigé par la Serbie.

4 Question: Bien. Donc vous ne connaissiez rien de l'éventuelle

5 participation de la Serbie dans les actes de la Défense territoriale de

6 Slavonie occidentale, n'est-ce pas?

7 Réponse: C'est exact, je n'en sais rien.

8 Question: Une certaine tension existait. Il y avait des affrontements, des

9 accrochages, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Quels sont les motifs qui ont provoqué ces tensions?

12 Réponse: Le problème des postes de police, parce que le ministère avait

13 une trentaine de policiers, je crois, sous ses ordres -enfin je ne connais

14 pas le nombre exact-, une trentaine, une quarantaine, je ne sais pas

15 exactement, mais en tout cas, il a été décidé de restructurer ces

16 policiers et de modifier le rapport entre les policiers appartenant à tel

17 ou tel groupe ethnique, de façon à éviter qu'une majorité serbe existe

18 parmi ces policiers, donc restructuration proportionnelle. Les policiers

19 devaient obtenir de nouveaux insignes, de nouveaux emblèmes sur leur

20 couvre-chef et, pour autant que je m'en souvienne, les critiques et les

21 objections venant du chef de la police, du secrétaire -comme on

22 l'appelait, je crois, à moins qu'il ne se soit appelé autrement- en tout

23 cas, les remarques ont concerné le fait que des armes avaient été retirées

24 des postes de police et que les soldats qui avaient emporté ces armes les

25 avaient emportées chez eux. Et que donc cela pouvait présenter un danger.

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1 Le chef de la police a demandé au chef de la municipalité de lui fournir

2 l'autorisation écrite de désarmer ces policiers et de faire appel aux

3 policiers réservistes pour maintenir le droit et l'ordre dans la

4 municipalité de Pakrac. Une fois qu'il a dit cela, le ministère s'est

5 engagé dans l'affaire -je veux parler du ministère de l'Intérieur. Un ou

6 deux jours plus tard, je ne me rappelle pas exactement ce qui s'est passé,

7 mais un incident a éclaté entre les policiers qui allaient au poste de

8 police à Pakrac et ceux qui dépendaient encore du ministère de

9 l'Intérieur. Il y a eu des coups de feu sporadiques entre les réservistes

10 et les policiers relevant du ministère et après, pour parler négociations,

11 le ministère fédéral s'est impliqué et il a repris le contrôle du poste de

12 police. Les insignes précédents ont été utilisés à nouveau et le poste de

13 police s'est trouvé réintégré à la municipalité. Voilà, en bref, ce qui

14 s'est passé.

15 Question: Très bien. Quand l'armée est-elle intervenue?

16 Réponse: Elle est intervenue quelques heures après l'incident.

17 M. Milosevic (interprétation): Qu'est-ce que l'armée a fait? Quel était

18 son rôle? Quel a été le comportement de l'armée?

19 Témoin C-037 (interprétation): L'armée est arrivée. Je ne sais pas qui a

20 contacté l'armée par rapport à ce problème de la police en ville, mais les

21 réservistes de la police ont été désarmés après l'incident et leurs armes

22 ont été remises au MUP de Croatie.

23 M. Kwon (interprétation): Excusez-moi, excusez-moi, mais apparemment nous

24 avons des difficultés techniques. Ce témoin est un témoin protégé et sa

25 voix est déformée. Donc il faut, Monsieur Milosevic, qu'il y ait une pause

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1 entre vous et le témoin et il faut parler plus lentement que d'habitude.

2 En effet, il arrive assez souvent que vous posiez une question, mais

3 qu'une partie de votre question ne soit pas entendue, parce que votre

4 micro n'est pas encore branché au moment où vous parlez. Et au compte

5 rendu d'audience en anglais, on ne trouve pas l'intégralité de votre

6 question.

7 Alors, quelle était la question posée par vous au sujet de l'armée, avant

8 le moment où il est mentionné que l'armée est intervenue plusieurs heures

9 après l'incident?

10 M. Milosevic (interprétation): Le témoin s'est vu poser une question qui

11 était la suivante: "Qu'a fait l'armée?". Rt le témoin a dit qu'on avait

12 demandé aux soldats de rendre leurs armes et que ces armes ont été

13 retournées au ministère.

14 M. Kwon (interprétation): Mais quelle était la question précédente, si

15 vous vous en souvenez?

16 M. Milosevic (interprétation): Je ne vois pas de quelle question vous

17 parlez. La question portait sur l'incident, sur la nature de l'incident

18 et, ensuite, j'ai demandé qu'il décrive l'incident. Je lui ai demandé ce

19 qu'a fait l'armée, quel rôle exact elle a joué; et il a expliqué qu'en

20 fait, l'armée avait insisté pour que les armes soient reprises aux

21 réservistes de la police et qu'elles soient remises au ministère de

22 l'Intérieur de Croatie.

23 Monsieur le Témoin, Monsieur C-037, cela signifie, n'est-ce pas, que dans

24 une telle situation -je veux parler de celle que vous venez de décrire-,

25 l'armée est venue aider le ministère de l'Intérieur de Croatie et les

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1 organes relevant de lui, n'est-ce pas?

2 Témoin C-037 (interprétation): Oui, c'est exact.

3 Question: Est-il exact que la tâche de l'armée consistait en fait à

4 empêcher les conflits sur le territoire, comme vous l'avez dit dans votre

5 déposition? Je ne parle pas de l'ensemble des territoires d'ailleurs

6 lorsque je vous pose cette question, mais uniquement de celui dont nous

7 discutons ici. C'est exact ou pas?

8 Réponse: Le 2 mars, l'armée est venue empêcher un conflit, effectivement.

9 Question: L'armée a essayé de séparer deux parties qui s'affrontaient?

10 Réponse: Le conflit a cessé avec l'intervention de l'armée.

11 Question: Donc, tout s'était calmé, la situation était revenue au calme et

12 l'armée a apporté son aide au ministère de l'Intérieur de Croatie? C'est

13 bien cela qui s'est passé?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Y a-t-il eu des tentatives, d'un côté ou de l'autre, pour

16 attaquer des villages et inciter certains à la violence, à cette époque-là

17 ou immédiatement après? En tout cas pendant cette même année?

18 Réponse: Non.

19 Question: Donc la situation était tranquille?

20 Réponse: Oui. Pas cette année-là, parce que la guerre a éclaté par la

21 suite, mais dans cette période de quelques jours.

22 Question: Compte tenu du fait que, dans votre déposition, vous dites que

23 la JNA a empêché les affrontements dans ces endroits où des tensions

24 étaient apparues et des attaques avaient eu lieu, c'est bien exact, n'est-

25 ce pas, l'armée a empêché les attaques sur des villages croates?

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1 Réponse: Lorsque les tensions ont commencé à croître: vous voulez dire

2 après le 2 mars?

3 Question: Je ne sais pas exactement ce qu'il en était de vous à ce moment-

4 là, mais puisque vous êtes ici en personne, j'aimerais discuter avec vous

5 et faire la clarté sur le comportement de l'armée populaire yougoslave, de

6 la JNA.

7 Réponse: Eh bien, elle était…

8 Question: Je m'en tiens à votre déclaration écrite. Vous dites, en page

9 11, paragraphe 5, à peu près que "l'armée a empêché toute attaque sur un

10 village croate", si je ne m'abuse?

11 Réponse: Cela, ça s'est passé là-haut, dans les environs de Pakrac. Là,

12 l'armée a agi pour empêcher l'attaque de villages serbes, mais à Donji

13 Caglic, qui était un village mixte peuplé de Serbe et de Croates, un

14 accrochage a eu lieu entre les Serbes et les Croates.

15 Question: Et l'armée est allée séparer les belligérants?

16 Réponse: Non, cela ne s'est pas passé à cet endroit-là. Cela ne s'est pas

17 passé ainsi parce que certains habitants ont été tués, des habitants

18 croates, et d'autres sont partis.

19 Question: Dites-moi, est-il exact que l'armée a respecté l'accord de

20 cessez-le-feu?

21 Réponse: Je ne peux pas répondre à cette question, car je ne sais pas qui

22 était responsable de l'instauration du cessez-le-feu. Et je ne sais pas

23 non plus qui a enfreint, qui a violé l'accord de cessez-le-feu. Parce que

24 des cessez-le-feu, il y en avait sans arrêt. Il y avait sans arrêt

25 quelqu'un qui violait l'accord de cessez-le-feu, mais comme il n'y avait

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1 pas de soldats de la JNA là où je me trouvais, je ne puis pas vous dire

2 avec certitude qui a été responsable de la violation de l'accord de

3 cessez-le-feu. Je ne sais pas.

4 Question: Ce que je vous demande, c'est si l'armée a respecté les

5 décisions, les accords de cessez-le-feu.

6 Réponse: Je ne peux pas vous répondre à cette question, car je ne me

7 trouvais pas physiquement au même endroit que l'armée.

8 Question: Vous dites dans votre déclaration, si je comprends bien, que la

9 tâche de la JNA consistait à empêcher l'extension du conflit, à empêcher

10 l'entrée de policiers croates dans les villages serbes et à empêcher

11 également des attaques de villages croates et vous dites que la JNA a

12 respecté les accords de cessez-le-feu. C'est ce que je lis en tout cas en

13 page 11, paragraphe 3, de votre déclaration écrite.

14 Réponse: Je m'en tiens à ce que j'ai dit dans ma déclaration préalable.

15 Question: Je souhaitais simplement l'établir. Mais, dites-moi, je vous

16 prie…

17 (Interruption du micro de M. Milosevic, qui est de ce fait inaudible.)

18 Réponse: Eh bien, oui.

19 Question: Vous dites que, "dans la plupart des cas, lorsque les combats

20 éclataient, les Serbes comme les Croates abandonnaient leurs habitations

21 pour prendre la fuite. La différence réside dans le fait que, après la fin

22 des combats, les Croates pour la plupart sont retournés chez eux et ont

23 récupéré leurs maisons, alors que la majorité des Serbes ne sont pas

24 revenus".

25 Réponse: Lorsque je dis cela, je pense à la Slavonie occidentale et au

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1 secteur précis qui était proche des lieux de combat, parce que ce secteur

2 où les combats se déroulaient changeait d'importance, de superficie avec

3 le temps. Et la population de Grubisno Polje est concernée par mon propos.

4 Les Croates qui vivaient non loin de Grubisno Polje sont revenus par la

5 suite. La même chose à Slatina, Grubica et à Orahovica, par exemple, alors

6 que les Serbes ne sont pas revenus. Et les Croates sont également revenus

7 dans le secteur de Pakrac.

8 Question: Vous avez lu l'Acte d'accusation contre moi, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Dites-moi ce qui suit: est-il vrai que vous-même,

11 personnellement, vous n'êtes au courant, vous n'avez pas la moindre

12 information au sujet de l'un quelconque des crimes retenus contre moi dans

13 l'Acte d'accusation? Est-ce exact ou pas? Et je ne veux pas revenir sur

14 certains éléments que nous avons évoqués à huis clos.

15 Réponse: Pourriez-vous être plus clair? Je ne vous suis pas tout à fait.

16 Question: Vous avez dit que vous aviez lu l'Acte d'accusation. Nous avons

17 parlé des positions, des fonctions qui étaient les vôtres à l'époque; tout

18 à l'heure, nous l'avons fait à huis clos partiel. Je vous demande, suite à

19 tout cela, s'il est vrai de dire que, personnellement, vous n'avez aucune

20 connaissance, pas le moindre élément de connaissance au sujet de l'un

21 quelconque des crimes qui me sont reprochés dans l'Acte d'accusation?

22 Réponse: S'agissant des crimes, je n'ai aucune connaissance quant au fait

23 que vous en auriez commis.

24 Question: Donc vous n'avez aucune connaissance à ce sujet?

25 Réponse: Non.

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1 Question: Vous avez déclaré, il y a un instant, que vous ne saviez pas qui

2 avait créé la Défense territoriale de Slavonie, c'est bien cela?

3 Réponse: C'est exact.

4 Question: Et pourtant vous occupiez le poste que vous occupiez. Donc, en

5 dépit du poste occupé par vous, vous n'en savez rien. Si vous ne savez pas

6 qui a créé la Défense territoriale en Slavonie occidentale, pouvez-vous

7 nous dire si elle se composait de villageois des hameaux et des villages

8 des environs?

9 Réponse: Oui. Elle comptait dans ses rangs la population locale. Mais si

10 nous parlons de la structure de la Défense territoriale, cette structure

11 relevait des employés des secrétariats municipaux. Et je ne sais pas qui a

12 donné les ordres pour qu'elles s'établissent d'une façon ou d'une autre.

13 Question: Très bien. Donc ça, vous ne le savez pas. Mais vous dites savoir

14 que la Défense territoriale était composée des habitants de la région.

15 Donc, si je vous comprends bien, vous ne savez pas qui donnait ces ordres

16 à la Défense territoriale, vous ne savez pas qui la structurait comme elle

17 était structurée et vous ne savez pas qui a proposé que l'on crée une

18 Défense territoriale en Slavonie occidentale?

19 Réponse: J'ai dit que je ne le savais pas, je l'ai déjà dit.

20 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que cela signifie qu'ils ont

21 organisé la Défense territoriale sur leur propre initiative?

22 Témoin C-037 (interprétation): C'est possible, mais je n'en sais rien.

23 M. Kwon (interprétation): Un instant, je vous prie, avant que le texte qui

24 m'intéresse ne disparaisse de l'écran.

25 A la question posée par M. Milosevic, Monsieur le Témoin, quant au fait

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1 que vous n'aviez pas la moindre connaissance sur l'un quelconque des

2 crimes reprochés à M. Milosevic dans l'Acte d'accusation -vous savez,

3 quand M. Milosevic vous a demandé si vous aviez lu l'Acte d'accusation, et

4 ensuite il vous a demandé si vous aviez des informations au sujet de l'un

5 ou l'autre des crimes qui lui sont reprochés-, donc vous répondez à cette

6 question: "S'agissant des crimes, je n'ai pas la moindre connaissance

7 quant à un quelconque crime commis par vous".

8 Mais vous êtes au courant des crimes qui sont reprochées à l'accusé dans

9 l'Acte d'accusation, donc vous savez que… je vous demande si vous savez

10 éventuellement si ces crimes auraient pu être commis par des Serbes en

11 Croatie, par d'autres que l'accusé, mais par des Serbes en Croatie? Est-ce

12 que vous êtes au courant d'un quelconque incident mentionné dans l'Acte

13 d'accusation?

14 Témoin C-037 (interprétation): J'ai parlé de ces crimes. J'ai donné mon

15 témoignage au sujet de certains d'entre eux; ils ont eu lieu dans le

16 secteur de la Slavonie occidentale. Et j'ai parlé de crimes commis dans

17 diverses localités.

18 M. Kwon (interprétation): A votre connaissance, donc, ces crimes sont bien

19 contenus dans l'Acte d'accusation?

20 Témoin C-037 (interprétation): Oui

21 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, c'est dans ce but que je vous pose

22 la question: est-ce que, selon ce que vous savez, selon les connaissances

23 que vous avez, la Serbie et son Gouvernement –et j'étais le Président de

24 ce gouvernement-, est-ce que vous savez si la Serbie et son Gouvernement

25 avaient le moindre rapport avec ce que vous avez lu dans l'Acte

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1 d'accusation?

2 Témoin C-037 (interprétation): Je ne sais pas si vous avez un rapport

3 personnel avec les crimes ou si la Serbie a un rapport direct avec ces

4 crimes. J'ai simplement parlé des crimes qui ont été commis à cet endroit.

5 C'était cela ma réponse.

6 Question: Donc, vous ne savez pas si j'ai moi-même quoi que ce soit à voir

7 avec ces crimes ou si la Serbie a quelque chose à voir avec eux?

8 Réponse: Je ne sais pas, non.

9 M. Milosevic (interprétation): (Inaudible en raison du micro éteint.)

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous faisons appel à

11 vous pour que vous ne perdiez pas de vue les dispositions particulières

12 qu'il convient de respecter, compte tenu des mesures techniques prises

13 pour assurer l'audition de ce témoin.

14 Les interprètes n'ont pas entendu la question que vous venez de poser, car

15 votre micro ne fonctionnait pas. Donc je vous demande de ménager une pause

16 avant de poser la question suivante et d'éteindre votre micro à la fin de

17 vos questions.

18 M. Milosevic (interprétation): Je ménage des pauses très importantes et,

19 apparemment, elles ne suffisent pas. Alors, est-ce que je peux agir moi-

20 même sur les boutons qui se trouvent là devant moi?

21 (Inaudible.)

22 (en anglais): Ah! Ben, il est de nouveau éteint! Ah! Ça y est, il se

23 rallume.

24 (en serbe): Je vais essayer de veiller à ce que ma question soit terminée

25 avant que le témoin puisse commencer sa réponse. Bien, avançons.

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1 Monsieur le Témoin, est-il exact que vous ne savez rien quant à la façon

2 dont la Défense territoriale était armée?

3 Témoin C-037 (interprétation): Non.

4 Question: Vous ne savez rien à ce sujet?

5 Réponse: Non, je ne sais rien.

6 Question: Vous ne savez rien non plus au sujet de la façon dont la Défense

7 territoriale était équipée?

8 Réponse: Non.

9 Question: Vous n'avez pas non plus la moindre information quant à la façon

10 dont la défense était financée?

11 Réponse: Non.

12 Question: Est-il exact que tous les commandants de la Défense territoriale

13 étaient des habitants des environs, des gens qui habitaient dans la

14 région, tout comme les membres la Défense territoriale?

15 Réponse: Au début, oui et, par la suite, quelques officiers de la JNA sont

16 arrivés.

17 Question: Ces officiers de la JNA sont venus d'où?

18 Réponse: De Banja Luka. Et Jovo Trbojevic également est arrivé de Novi

19 Sad, mais il était originaire de Slavonie occidentale; c'est là qu'il est

20 né.

21 Question: Donc ce sont des gens originaires de la région qui sont venus?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Personne n'est venu de Serbie pour vous commander là-bas? Les

24 gens qui commandaient étaient exclusivement des gens de la population

25 locale, qui avaient une certaine connaissance militaire, une certaine

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1 instruction militaire.

2 Réponse: Dans le secteur de Okucani, les gens qui sont venus étaient de

3 Yougoslavie, de Serbie, de Bosnie. C'est une unité qui est arrivée dans la

4 région de Bjelovar.

5 Question: Très bien, une unité de la JNA à Bjelovar. Mais Bjelovar, c'est

6 la ville croate la plus proche, n'est-ce pas, où il y avait une caserne?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Et il y en a qui sont venus également de Croatie, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Très bien.

11 Réponse: Plus tard, trois unités sont arrivées de Vojvodine, de Zrenjanin.

12 Question: Vous parlez des unités régulières de la JNA?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Qui existaient à l'époque où la République fédérale de

15 Yougoslavie existait encore?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Très bien. Dites-moi à présent, dans les fonctions qui étaient

18 les vôtres, vous n'avez aucun élément, aucune information qui prouverait

19 que la Défense territoriale de Slavonie occidentale a reçu une aide

20 quelconque du ministère de la Défense de Serbie?

21 Réponse: Non, en effet, je n'en ai pas.

22 Question: Ce sont des conclusions que je tire de la lecture de votre

23 déclaration, mais je vous demande simplement de les confirmer. Et vous

24 vous êtes rendu auprès du ministère de la Défense de Serbie, n'est-ce pas?

25 Réponse: J'y suis allé en 1992; je pense que c'était au début de 1992. Je

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1 suis allé au ministère chargé des Serbes vivant en dehors de la Serbie et,

2 ensuite, j'ai été invité à me rendre au ministère de la Défense pour dire

3 ce qui se passait en Slavonie occidentale.

4 Question: Vous êtes donc allé au ministère. On vous a interrogé là-bas

5 parce que le ministère souhaitait obtenir des informations quant à ce qui

6 se passait en Slavonie occidentale, n'est-ce pas?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Avez-vous parlé de crimes quelconques ou de choses de ce genre

9 se produisant là-bas?

10 Réponse: Je pense que je ne l'ai pas fait.

11 Question: Au sujet des relations qu'il devait y avoir entre la Défense

12 territoriale et la JNA, vous n'en saviez rien, n'est-ce pas?

13 Réponse: Rien.

14 Question: Si je vous suis bien, vous n'avez pas eu de connaissance quant à

15 l'armement de la Défense territoriale de la Krajina?

16 Réponse: Non.

17 Question: Etant donné la fonction qui était la vôtre, pas tout à fait à

18 cette période-là mais disons pendant les années précédentes, pour parler

19 d'une période de un ou deux ans qui précédaient cette période, dites-nous

20 où se trouvaient stockés, stationnés les armements de la Défense

21 territoriale? Etait-ce dans votre ville? Dans le territoire de votre

22 municipalité?

23 Parce que la Défense territoriale devait être organisée un peu partout

24 suivant le même principe. Je ne sais pas comment c'était fait en Croatie?

25 Je suppose que les armes étaient là où votre Défense territoriale avait

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1 été organisée. Est-ce que vous avez eu connaissance de cela?

2 Réponse: Pour autant que je m'en souvienne, la Défense territoriale a été

3 organisée en Croatie, tout comme dans le restant du territoire de la

4 Yougoslavie et elle a été dotée de ces armes. Plus tard, je ne sais pas

5 par quel moyen, on avait pris ces armes au nom du secrétariat à la Défense

6 nationale. Où, dans quelle localité et comment? Je ne sais pas.

7 Question: Si je vous ai bien compris, dans la majeure partie de ces

8 localités, la JNA n'était pas présente en Slavonie occidentale?

9 Témoin C-037 (interprétation): Si, peut-être pour couvrir un tiers du

10 territoire.

11 M. Milosevic (interprétation): Dites-moi, au sujet de ce que vous avez dit

12 dans le cadre de l'interrogatoire principal dont vous avez fait l'objet,

13 au sujet de la présidence de la RSFY, au sujet de ces réunions portant sur

14 le plan Vance-Owen, la réunion étant tenue quand? Vous avez dit, le 21

15 janvier…

16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

17 Juges, je crois qu'on avait discuté de cette question à huis clos partiel.

18 M. le Président (interprétation): Oui, très bien, passons à huis clos

19 partiel.

20 (Huis clos partiel à 12 heures 33.)

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5 (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 48.)

6 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que j'ai bien compris que les

7 contacts entre les responsables de la Slavonie occidentale et les Serbes

8 de Bosnie n'étaient que des rapports d'ordre personnel?

9 Témoin C-037 (interprétation): Oui, si je me souviens bien, il n'y a pas

10 eu d'autre contact sauf cela, à moins qu'il n'y en ait eu d'autres plus

11 tard.

12 Question: Vous n'avez pas de connaissance concernant les relations ou les

13 implications de la République de Serbie dans de tels contacts?

14 Réponse: Non.

15 Question: Vous n'en avez pas donc. Mais étant donné votre fonction, si

16 vous n'avez pas de connaissances relatives à de tels événements, tels

17 qu'on les décrit, si vous ne détenez aucune information pour savoir qu'un

18 ordre aurait pu être donné par quiconque, portant sur l'expulsion de

19 Croates d'une telle ou telle localité, si vous n'avez pas de connaissances

20 portant sur la participation de Belgrade dans la création et

21 l'organisation de la Défense territoriale, dans l'organisation du

22 référendum, dans ce qui a été fait lorsque telles ou telles municipalités

23 se sont trouvées confrontées entre elles, pourquoi donc, à la page 12, à

24 l'avant-dernier paragraphe de votre déposition, vous dites: "Il n'est pas

25 de raisons pour lesquelles je devrais croire que les 10 crimes aient été

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1 perpétrés."

2 Or, maintenant que nous avons parcouru tout cela, le texte de votre

3 déposition, vous dites que vous ne disposez pas de connaissances, mais

4 qu'il n'y aurait pas, pour vous, de raisons pour lesquelles vous devriez

5 croire, etc. Comment expliquez-vous cela?

6 Réponse: Je n'ai pas de raisons pour lesquelles je devrais croire que des

7 crimes n'aient pas été commis. Eh bien, nous savons très bien que des

8 crimes ont été perpétrés en Dalmatie, dans le sud du pays, en Slavonie

9 occidentale. J'en savais long et j'en ai parlé. Pour parler de Ilok, par

10 exemple, nous savons très bien qu'il y a eu un exode croate.

11 Question: Je vous en prie, qu'on se comprenne bien. Je ne parle pas de vos

12 règlements de compte entre vous, dans tel ou tel village; je parle de

13 crimes qui ont été, en quelque sorte, attribués à des intentions de la

14 Serbie, à des intentions portant organisation de la population civile

15 d'une autre nationalité qu'eux, etc.; c'est de cela que je parle. Mais là

16 où vous vous êtes meurtris entre vous, lorsque vous en êtes venus aux

17 mains, etc., je n'en parle pas.

18 Je voulais savoir s'il y a une relation quelconque, quelque chose qui

19 serait mis en corrélation lorsqu'on parle de la Serbie et de Belgrade et

20 du reste du territoire. Si vous en êtes venus aux mains, je n'en parle

21 pas.

22 Réponse: Je vais reprendre ma réponse. Il n'y a pas de raisons pour

23 lesquelles je devrais croire qu'il n'y a pas eu de crimes, car il y en a

24 eu, mais je n'ai pas pu lire, comme vous le dites, que la Serbie a été

25 impliquée dans des crimes ou a été liée ou mêlée à des crimes.

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1 Question: Mais, même lorsqu'il s'agit de ces crimes-là, est-ce que c'est

2 exact de dire que vous n'avez pas d'information vous-même concernant un

3 quelconque crime de la série?

4 Réponse: J'ai dit que je parlais d'avoir entendu parler de crimes.

5 Question: C'est ce que je voulais constater. Vous n'avez pas vous-même,

6 personnellement, de connaissances concernant ces crimes?

7 Réponse: Dans ma toute première déposition, j'ai parlé de crimes perpétrés

8 en Slavonie occidentale dont j'ai entendu parler. Etant donné que je

9 n'étais pas in situ, j'ai pu parler des crimes pour lesquels j'ai entendu

10 dire qu'ils s'étaient perpétrés et par qui ils l'ont été.

11 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, au début de l'interrogatoire

12 principal, l'une des questions qui vous a été posée était de savoir si

13 vous étiez chez moi, à une réunion, n'est-ce pas?

14 M. le Président (interprétation): Sommes-nous toujours en huis clos

15 partiel, à ce moment-là, lorsque la question a été posée?

16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, Messieurs

17 les Juges. La question a été posée à huis clos partiel. Par conséquent, il

18 s'agit de M. Jovic et de M. Milosevic.

19 M. le Président (interprétation): Passons à huis clos partiel.

20 (Huis clos partiel à 12 heures 53.)

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10 (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 59.)

11 M. le Président (interprétation): Nous suspendons l'audience jusqu'à 2

12 heures 30.

13 Mais avant cela, puis-je vous demander pendant combien de temps comptez-

14 vous contre-interroger ce témoin, Monsieur Milosevic?

15 M. Milosevic (interprétation): Je n'en ai pas d'idée tout à fait précise,

16 mais je tâcherai de bénéficier du même temps, en durée, qui a été imparti

17 à l'accusation.

18 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

19 M. Nice (interprétation): Certainement. Nous avons un autre témoin.

20 Pourrais-je dire quelque chose au sujet des témoins? Notre intention est

21 d'avoir suffisamment de témoins ici pour avoir un flot continu de

22 dépositions, chaque fois que ce sera possible. Et nous en avons un pour

23 demain. Il se peut qu'il y ait quelque chose que je souhaite dire en ce

24 qui concerne la révision de l'ordre dans lequel les témoins doivent être

25 entendus avant la suspension.

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1 M. le Président (interprétation): Nous devons finir à 13 heures pour des

2 raisons techniques.

3 L'accusé disait plus tôt qu'il n'avait pas les documents pour le témoin

4 suivant. Il est possible qu'il les ait reçus, mais peut-être pourriez-vous

5 lui fournir de nouveaux exemplaires afin qu'il puisse les examiner pendant

6 le week-end?

7 M. Nice (interprétation): Pourrais-je faire une autre remarque pendant 30

8 secondes?

9 L'accusé se plaint de la quantité de temps qui a été prévu dans l'emploi

10 du temps. L'emploi du temps d'origine, sur la question de savoir combien

11 de temps il serait pris pour les témoins, était une estimation, une

12 estimation la plus optimiste. Nous interrogerons les témoins plus

13 rapidement lorsque nous pourrons le faire. Il semble que nous serons en

14 mesure, que nous aurons la possibilité de gagner du temps et d'améliorer

15 l'emploi du temps par rapport à celui que nous avions à l'origine, en

16 prenant un peu moins de temps que ce qui a été prévu à l'origine.

17 M. le Président (interprétation): Très bien.

18 Témoin C-037, pourriez-vous, s'il vous plaît, être de retour à 14 heures

19 30?

20 L'audience est levée.

21 (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 33.)

22 (Le témoin C-037 est déjà dans le prétoire.)

23 M. Nice (interprétation): Avant que l'accusé ne commence à poser des

24 questions, Monsieur le Président, une question administrative parce que je

25 vais quitter la Chambre dans quelques minutes. Les deux témoins suivants

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1 sont Matovina et Samardzic.

2 Je vais quand même continuer parce que cela ne concerne pas directement le

3 témoin.

4 Donc, les documents qui lui sont présentés, s'il y a un témoin au conseil

5 demain, je crois que cela doit être Matovina parce que je ne crois pas que

6 Samardzic sera en mesure de commencer. Et si nous ne commençons pas le

7 témoin suivant avant lundi prochain, nous demanderons peut-être à la

8 Chambre d'entendre Samardzic d'abord et Matovina en second.

9 Je ne pense pas qu'il y aura un inconvénient pour l'accusé et j'espère que

10 ce sera acceptable pour la Chambre. Les noms sont Matovina et Samardzic.

11 M. le Président (interprétation): Bien. Il semble peu probable que nous

12 ayons un autre témoin demain, mais je vous remercie de cela.

13 Maintenant, j'aimerais dire que nous avons reçu la version anglaise de la

14 pièce D40 qui a été versée au dossier ce matin.

15 Oui, Monsieur Milosevic.

16 M. Milosevic (interprétation): Bien.

17 Monsieur C-037, poursuivons. Essayons de constater ce que vous ignorez

18 encore. Vous ne savez rien non plus des contacts que Babic a eus avec le

19 ministère de la Défense nationale Serbie et le ministre Simovic.

20 Témoin C-037 (interprétation): Non.

21 Question: Vous ne saviez pas non plus des choses sur le soutien qu'aurait

22 offert Belgrade à Babic et à Martic?

23 Réponse: Je n'ai pas de preuve concernant ce soutien dont ils auraient pu

24 bénéficier, mais disons que dans les médias ils ont eu pas mal de chance

25 de prendre la parole pour intervenir dans ce sens-là.

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1 Question: Tout de même, vous dites que les services de sécurité de l'Etat

2 se sont servi des Serbes de Croatie pour exercer une influence sur les

3 événements en Croatie. Il s'agit de votre hypothèse tout à fait libre.

4 Est-ce vrai de dire que vous n'avez jamais pris part aux travaux, à des

5 réunions de cette société, surtout pas de concert avec des gens des

6 services de sécurité?

7 Réponse: Je me rendais à l'association, j'adhérais à l'association des

8 Serbes de Croatie.

9 Question: Alors, sur la base de quoi vous pouvez dire qu'ils auraient pu

10 être manipulés par les services de la DB?

11 Réponse: Je ne sais pas comment, dans quelles circonstances, j'ai pu

12 apprendre que certains membres de cette association auraient pu avoir des

13 contacts avec, mais je ne dispose pas de détails.

14 Question: Vous dites que les membres de cette association des Serbes de

15 Croatie ont eu des contacts de ce genre-là?

16 Réponse: Oui, il s'agit de généraux, peut-être le général Kokot ou

17 quelqu'un d'autre.

18 Question: Vous vous référez là à des généraux retraités qui habitent

19 Belgrade, etc.

20 Réponse: Oui.

21 Question: Par conséquent, vous n'avez pas de connaissance directe de

22 contact quelconque que l'Association des Serbes de Croatie pourrait avoir

23 avec les services de sécurité de l'Etat?

24 Réponse: Non, je n'ai pas de connaissance directe.

25 Question: D'une autre manière, disons que pour ce qui est de cette ligne,

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1 soi-disant ligne militaire dont on parlait tant ici, vous n'en saviez rien

2 non plus.

3 Réponse: Non, mais je voudrais savoir à quoi vous vous référez quand vous

4 parlez de "ligne militaire".

5 Question: Il s'agissait d'une espèce de communications établie à des fins

6 militaires par Krajina avec Belgrade, c'est-à-dire une communication dans

7 laquelle se seraient trouvées des structures militaires avec la Krajina.

8 Vous n'en savez rien?

9 Réponse: Pendant que j'étais au gouvernement, je sais que le ministre

10 Spanovic se rendait au siège de la JNA.

11 Question: A Belgrade?

12 Réponse: Oui.

13 Question: D'accord, mais vous ne savez rien, vous-même, personnellement de

14 ces relations-là?

15 Réponse: Non.

16 Question: Vous ne savez pas non plus de détails concernant les relations

17 entre le ministère de l'Intérieur de la Serbie et la police de Krajina?

18 Réponse: Non, je n'en sais pas grand-chose, enfin pour être franc et

19 direct.

20 Question: Par conséquent, en tant que responsable, fonctionnaire, pour ne

21 pas dire quelle était votre fonction, vous n'avez jamais vu de Bérets

22 rouges en Slavonie occidentale?

23 Réponse: Non.

24 Question: Vous ne les avez pas vus? Bien.

25 Puisque vous parlez de police de la Slavonie occidentale, n'est-il pas

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1 vrai que Belgrade n'a rien à voir avec la création et la formation de

2 cette police?

3 Réponse: Pour autant que je sache, non.

4 Question: Vous n'avez pas de connaissance non plus concernant des contacts

5 de la police de la Slavonie occidentale aurait pu avoir avec le ministère

6 de l'Intérieur de la Serbie?

7 Réponse: Cela ne m'est pas connu.

8 Question: Donc vous n'avez pas de connaissance non plus concernant la

9 présence d'un quelconque membre du SUP de Belgrade dans le territoire de

10 la Slavonie occidentale?

11 Réponse: Non. Il y avait Jovo Vezmar qui, lui, travaillait au MUP. Il

12 était venu pour retourner.

13 Question: Vezmar Jovo, d'où était-il?

14 Réponse: De Pakrac.

15 Question: Ah?

16 Réponse: Il était venu donc de Pancevo pour être commandant de la TO de

17 Pakrac, pour retourner à Pancevo une fois de plus.

18 Question: Vous voulez dire qu'il était allé se faire employer en Serbie

19 après la chute de la Slavonie occidentale?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Savez-vous combien de gens étaient partis pour la Serbie et pour

22 la Republika Srpska, une fois que des Serbes ont été expulsés de la

23 Croatie après août 1995?

24 Réponse: Environ 350.000 hommes en tout.

25 Question: Vous pouvez supposer qu'une partie de ces 350.000 hommes, il y

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1 en a eu qui ont pu trouver un emploi, des fonctions, dont les

2 qualifications étaient requises.

3 Réponse: Je suppose que oui.

4 Question: Par conséquent, celui qui a été policier, il a pu être embauché

5 par la police? Vous supposez ainsi?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Très bien. Vous, en qualité qui était la vôtre, vous ne saviez

8 pas d'où les fonds provenaient, vous ne saviez pas non plus si la Serbie

9 s'était mise à financer la SAO en Slavonie occidentale? Est-ce exact?

10 Réponse: Pour autant que je sache, je ne détiens pas d'informations

11 suivant lesquelles je dirai qu'elle aurait été financée.

12 Question: Bien. Mais est-ce exact de dire que les membres de la police de

13 Slavonie occidentale étaient notamment les gens originaires du pays et

14 qui, d'ordinaire, étaient employés par le MUP de Croatie?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Vous faites mention de vos contacts avec des généraux: avec le

17 général Uzelac en premier lieu. A cette époque-là, vous n'avez pas pu

18 parler avec lui d'armes, d'armement ni de questions militaires d'une

19 manière générale, n'est-ce pas?

20 Réponse: A cette époque-là, on avait eu des entretiens à Bucje. Il s'était

21 rendu là pour inspecter les lieux, voir comment se présenter la situation

22 et il disait qu'il allait voir comment il fallait procéder pour que les

23 gens restent sur place. On ne parlait pas d'armes ni de quelque chose

24 d'autres.

25 Question: Par conséquent, il s'attendait à ce que tout soit en sécurité

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1 pour ne pas que des gens fuient les lieux?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Le document donné en annexe intitulé comme "Réunion du comité

4 régional du SDS du 8 mai 1991" nous permet de voir qu'il y avait là une

5 attitude exprimée par la majeure partie des Serbes qui habitaient cette

6 région, n'est-ce pas?

7 Réponse: Je ne sais pas à quel document vous vous référez.

8 Question: Je crois qu'il s'agit de documents donnés en annexe à votre

9 déclaration.

10 Réponse: Vous vous référez peut-être aux documents concernant le

11 référendum?

12 Question: Je ne saurais être précis, parce que la partie adverse est

13 infatigable de nous les communiquer et de les livrer.

14 Réponse: Vous vous référez à la réunion du 8 mai 1991, c'est-à-dire où

15 l'attitude prise c'est qu'à majorité les Serbes devaient se présenter à un

16 référendum pour voter en faveur de leur survie et dans le cadre de la

17 Yougoslavie.

18 Question: Bien. Puisqu'il en est ainsi, je n'ai guère besoin de chercher,

19 de fouiller ici pour parcourir le texte.

20 Est-ce vrai de dire qu'à la seconde page de ce document, au point 2, nous

21 lisons… Une seconde! C'est ce qui a été constaté par vous à cette époque-

22 là là-bas. A cette réunion, essayons de voir s'il y a eu quelqu'un de

23 Serbie. Et y a-t-il eu quelqu'un qui serait venu de la Serbie pour vous

24 donner des directives ou instructions quelconques?

25 Réponse: Non, il n'y avait personne et il n'y a eu transfert d'aucune

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1 instruction.

2 Question: Sous le point 2, on parle de votre nom pour dire que, voilà "la

3 Slovénie et la Croatie n'étaient que les pions entre les mains du "grand-

4 père", du "grand-papa". On sait que la Bosnie et le Sandzak devaient

5 devenir un Etat musulman dans les Balkans.

6 Le 15 mai 1991, fallait-il -entre parenthèses- (voir la défection de

7 50.000 Albanais d'Albanie pour engager la guerre.) C'est dans cela que

8 Izetbegovic joue un rôle important."

9 Voilà de quoi on a parlé là-bas. C'est ce que vous avez dit vous?

10 Réponse: Non, non, non, j'ai dit qu'il n'a pas été parole de cela.

11 Question: Ah bon! Donc cette conclusion telle quelle, vous ne l'avez pas

12 mise en annexe ici?

13 Réponse: Non, c'est le conseil de l'accusation qui l'a fait. Et ce procès-

14 verbal -d'ailleurs pour le traiter comme tel- n'est pas un procès-verbal

15 tenu à cette réunion-là.

16 Question: Je vous en prie, vous devez avoir en vue le fait que ce procès-

17 verbal que l'on veut présenter ici comme étant un élément de preuve ne

18 peut en aucune manière être lié à ce témoin, et l'on ne saurait se servir

19 de ce témoin pour verser au dossier ce document-là.

20 Evidemment, si vous voulez réagir autrement, ça, c'est votre affaire, mais

21 tout de même, essayons de pas procéder de la façon qui me semble de toute

22 façon et de toute évidence parfaitement inappropriée.

23 Vous dites qu'en août, lorsque le MUP de la Croatie s'était rendu à

24 Okucani, que des unités venues là-bas étaient de Bjelovar. Est-ce exact

25 que ces unités étaient venues pour empêcher l'escalade de conflits?

Page 10846

1 Réponse: Oui. D'abord, une partie des soldats ont été désarmés par le MUP

2 croate. Après quoi, l'armée a repris ses hommes à elle et je crois que

3 c'est le Corps d'armée de Banja Luka qui était intervenu via Gradiska,

4 parce que la Slavonie occidentale a été coupée pendant plus d'un mois, et

5 il n'y a pas eu de contact avec la Bosnie. Et c'est ainsi que les unités

6 de la JNA de Bjelovar qui se trouvaient stationnées à Okucani pouvaient

7 entrer en contact avec le Corps d'armée de Banja Luka.

8 Question: Bien. Donc, nous venons de constater que l'armée était là pour

9 libérer les soldats capturés par le MUP de Croatie, soldats qui ont été

10 capturés par le MUP de Croatie, désarmés par ce dernier en vue d'empêcher

11 la poursuite des conflits, n'est-ce pas?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Mais l'armée yougoslave se trouvait-elle à cette époque-là dans

14 le territoire de la Yougoslavie et la Croatie faisait-elle partie du

15 territoire de la Yougoslavie?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Vous avez pu lire la liste des camps tels qu'ils se présentent

18 dans l'Acte d'accusation, mais vous ne disposez pas d'informations, vous,

19 personnellement, quant à l'existence de ces camps. Et d'après ce que vous

20 avez dit, d'après vos propos, j'ai pu comprendre que vous n'avez

21 qu'entendu parler de cela à la télévision croate, n'est-ce pas?

22 Réponse: Pour les autres camps, j'ai entendu parler de leur existence en

23 regardant la télévision, mais pour les parties occidentales des pays, j'ai

24 pu apprendre également de la part des résidents de ce pays.

25 Question: Dites-moi de quels camps il s'agissait? En fait, je suppose que

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1 vous n'êtes pas sans savoir que les dirigeants de la République serbes de

2 Krajina disaient: "A Belgrade qu'il n'y a jamais eu de camps."

3 Je ne sais pas si vous l'avez dit vous aussi. S'agissait-il de camps, de

4 prisons? De quoi il s'agissait? Et ce dont vous auriez pu avoir une

5 connaissance vous-même?

6 Réponse: Je ne saurais distinguer entre prison et camp. Je ne sais pas

7 comment se présente la signification de l'un et de l'autre. Mais ce qu'il

8 y avait à Bucje, c'était plutôt une maison privée qui servait de détention

9 des gens. J'ai entendu dire que d'aucuns ont été passés à tabac, d'autres

10 ont été tués et il y en a qui ont pu se faire échanger. Ce que j'ai pu

11 entendre parler de Ovcara, eh bien, j'ai entendu dire que des gens y ont

12 été emmenés, et il y en a qui ont été tués. Il y avait un hangar, une

13 espèce de hangar là-bas. Ce que j'ai entendu parler de Knin, eh bien, je

14 dirai qu'il s'agissait d'une prison. Etait-ce dans l'enceinte de casernes

15 ou d'autres installations, je ne sais pas.

16 Question: Mais qui se trouvait détenu dans cette prison de Knin?

17 Réponse: Je ne sais pas.

18 Question: Bien, mais s'agit-il de dire que des criminels y étaient détenus

19 ou des civils simples et pacifiques, étaient-ils détenus ceux-là aussi?

20 Réponse: Pendant que j'étais là, il y avait des criminels qui étaient des

21 Serbes. Pour ce qui est des autres, j'ai entendu dire qu'ils étaient des

22 civils, mais je n'ai pu les voir, moi.

23 Question: Je suppose que ces détenus criminels serbes étaient des civils?

24 Réponse: Oui, mais il y avait des soldats également parmi eux.

25 Question: Bon. Est-ce que vous vous rendiez souvent à Knin?

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1 Réponse: Oui. Enfin, pas souvent, mais une fois tous les 14 jours, pour y

2 rester un ou deux jours.

3 M. Milosevic (interprétation): Mais si vous vous y rendiez une fois pour

4 deux jours, un jour ou deux jours, toutes les quinzaines, vous devez avoir

5 une idée? Je devrais vérifier quelque chose. Je crois que Milan Martic

6 m'en a parlé et je crois qu'il m'a dit la vérité en disant qu'à Knin...

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous ne pouvez pas

8 témoigner actuellement au sujet de ce que M. Milan Martic vous a dit. Soit

9 vous citez Milan Martic à la barre, soit vous présentez des éléments de

10 preuve au moment où ce sera votre tour. Mais je vous prie de poser des

11 questions au témoin.

12 M. Milosevic (interprétation): Je vais formuler ma question. Voyez-vous,

13 Monsieur May, lorsque la partie adverse interroge le témoin, elle se met à

14 poser des questions au sujet des localités dans lesquelles ce témoin ne

15 s'est jamais rendu pour lui demander ce dont il a entendu parler là-bas.

16 Or, je lui demande au sujet de Knin dans quelle ville il se rendait, je

17 voulais savoir si, s'y rendant, il a pu voir qu'il y avait une bonne

18 partie de Croates qui y résidaient, et s'il est exact de dire -ce dont on

19 m'avait assuré- qu'il n'y a pas eu de discrimination, qu'il n'y a pas du

20 mauvais traitement et que la loi était observée.

21 M. le Président (interprétation): Vous pouvez lui poser cette question.

22 Oui, vous pouvez pose cette question.

23 M. Milosevic (interprétation): Est-ce exact?

24 M. le Président (interprétation): Demandez-lui d'abord s'il y avait des

25 Croates à Knin qui vivaient une vie tout à fait normale. C'est exact ou

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1 pas, Monsieur le Témoin?

2 Témoin C-037 (interprétation): Il y avait des Croates qui menaient une vie

3 tout à fait normale à Knin.

4 M. Milosevic (interprétation): Donc il y avait des Croates qui vivaient

5 normalement à Knin?

6 Témoin C-037 (interprétation): Oui.

7 Question: Sans être objet d'une violence quelconque ou de mauvais

8 traitements, etc.?

9 Réponse: Je ne saurais vous le dire pour tous, tous ces gens-là qui y

10 résidaient, mais pour certains, je sais qu'il n'y en avait pas, mais pour

11 d'autres, peut-être qu'il y avait des problèmes.

12 M. Milosevic (interprétation): Bien, mais essayons de tirer au clair tout

13 cela pour ne pas qu'on se mette à parler d'un certain nettoyage ethnique,

14 etc., parce que ce sont des éléments avancés par l'autre partie. Encore

15 que tout semble être inversé ici, il me semble.

16 Bon, vous dites, quant à vous, qu'il n'y aurait pas de raison de croire

17 -parce que vous avez dit avoir entendu parler de certains camps uniquement

18 en regardant la télévision- que ceci devait être vrai pour parler de ces

19 camps.

20 Page 13 de votre déclaration, paragraphe 1, étant donné la fonction qui

21 était la vôtre, vous a-t-il été permis de prendre connaissance des camps

22 pour Serbes en Croatie, et notamment pendant ce temps-là où vous étiez en

23 Slavonie occidentale? Par exemple en Slavonie occidentale à Pakrac, à

24 Slavonska Pozega, etc., il y avait des camps, j'ai sous mes yeux ici toute

25 une liste de ces camps.

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1 M. le Président (interprétation): Permettez au témoin de répondre,

2 notamment s'agissant de Pakrac, le lieu où le témoin habitait.

3 Témoin C-037 (interprétation): Oui, j'ai entendu dire qu'il y avait une

4 prison à Pakrac, à Pozega, à Pakracka Poljana.

5 M. Milosevic (interprétation): Bien. Je n'arrive pas à me débrouiller dans

6 cette liste, mais voilà.

7 Pour Slavonska Pozega, on parle de cinq camps. La caserne de Slavonska

8 Pozega était un lieu de détention de Serbes. Ensuite, salle omnisports de

9 Pozega. Ensuite, Slavonska Pozega, centre de détention pour femmes. Et

10 poste de police. Et la prison du district de Slavonska Pozega. Voilà où se

11 trouvaient tous ces camps-là.

12 Est-ce que vous avez eu connaissance de cela?

13 Témoin C-037 (interprétation): J'ai entendu parler de cela.

14 M. le Président (interprétation): Etait-ce une prison dans laquelle on

15 détenait des Serbes ou était-ce une prison destinée aux Croates?

16 Témoin C-037 (interprétation): C'étaient des prisons destinées aux Serbes.

17 M. le Président (interprétation): Et de quelle période parlons-nous?

18 Pendant quelle période cette prison a-t-elle été une prison dans laquelle

19 des Serbes étaient détenus?

20 Témoin C-037 (interprétation): Elle concernait les Croates mais les Serbes

21 aussi. Et il s'agissait de la période au cours de l'année 1991. Mais pour

22 parler de la prison de Pozega, elle existe encore aujourd'hui.

23 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais ce à quoi je me référais tout à

24 l'heure, la salle omnisports, ces différentes prisons, de toute façon, ne

25 servent pas toujours de prison, je le suppose, au moins, encore

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1 aujourd'hui.

2 Témoin C-037 (interprétation): Non.

3 M. Milosevic (interprétation): Etant donné que nous sommes en train de

4 parler de Pakrac, sur ma liste ici j'ai les camps pour Serbes différents.

5 Vous me direz lesquels de ces camps vous sont connus et lesquels vous sont

6 inconnus. Peut-être que vous avez eu connaissance de tous.

7 Par exemple, Pakrac-Lipik, la prison de Pakrac, ensuite les sous-sols du

8 grand magasin de Pakrac, ensuite Pakrac Gavrinica, le village de Seovica,

9 un camp au beau milieu de la Maison de la culture, Pakrac, village de

10 Seovica, le camp de détention dans la forêt, Pakrac Marino Selo, il

11 s'agissait des sous-sols d'une exploitation de pisciculture. Ensuite,

12 Pakrac Marino Selo…

13 M. le Président (interprétation): Permettez au témoin de répondre à votre

14 question. Il n'est pas en mesure d'avoir une aussi bonne mémoire.

15 Témoin C-037 (interprétation): J'ai entendu parler de camps au poste de

16 police et dans les sous-sols des grands magasins. Si vous parlez de

17 Seovica et du reste, tout cela se trouvait sous contrôle des Serbes en

18 1991. Peut-être parle-t-on de tout cela pour traiter de la période d'après

19 l'opération éclair, mais ce n'était plus réservé à des Serbes. Pour ce qui

20 est de Pakrac Poljana, exploitation de pisciculture, etc., peut-être qu'il

21 y en avait un ou deux.

22 M. Milosevic (interprétation): Ces trois camps à Pakrac n'en constituaient

23 un seul, n'est-ce pas? Ceux où étaient enfermés les Serbes?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et en dehors de ces trois camps, il y avait d'autres camps où

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1 étaient enfermés des Serbes dans le secteur de Pakrac? Vous êtes au

2 courant de cela?

3 Réponse: Ce que j'ai dit, c'est que, dans les sous-sols du grand magasin,

4 au poste de police et également dans un endroit à Lipik, il y avait des

5 prisons, mais je ne sais rien de très précis à ce sujet.

6 Question: Donc vous connaissez ces trois camps et un autre, mais je vous

7 demande si vous savez quoi que ce soit au sujet de Pakrac Marino Selo, le

8 bâtiment administratif.

9 Réponse: C'était un camp.

10 Question: Dites-moi, savez-vous quoi que ce soit au sujet de Pakracka

11 Poljana? Un camp relevant d'une entreprise. C'était une entreprise qui

12 fabriquait des stylos-billes et des interrupteurs électriques.

13 Réponse: Tout ceci peut être considéré comme un seul et unique camp.

14 Question: Très bien. Et le bâtiment de la pisciculture, ainsi que le

15 centre des pompiers, la brigade des pompiers?

16 Réponse: C'était également une seule et même prison.

17 Question: Y avait-il d'autres lieux?

18 Réponse: Tout cela ne constitue qu'un seul camp.

19 Question: Combien de Serbes étaient détenus dans ces camps?

20 Réponse: Je ne sais quel était leur nombre, on a parlé de plus d'une

21 centaine. Certains ont parlé de 2 à 300 personnes, mais je n'ai jamais

22 obtenu de chiffre exact.

23 Question: Vous parlez d'une centaine, de 200 ou de 300 personnes, mais

24 parlez-vous de l'ensemble des camps dont vous avez confirmé l'existence à

25 Pakrac et dans la région de Pakrac, ou parlez-vous d'un seul de ces camps?

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1 Réponse: Ce que j'ai dit concernait Pakracka Poljana. Quant au sous-sol du

2 grand magasin de Pakrac, je ne sais pas quel était le nombre de détenus à

3 cet endroit.

4 Question: Donc vous ne savez pas combien de personnes s'y trouvaient, mais

5 vous savez que c'était un camp?

6 Réponse: Parce que les gens ont toujours peur de parler de cela, les gens

7 qui étaient là, en tout cas ceux avec lesquels j'ai eu des contacts.

8 Question: Très bien. Mais vous êtes maintenant en contact avec ces

9 personnes. Nous avons entendu M. Mesic dire que la Croatie était

10 aujourd'hui un Etat en bonne et due forme, un Etat de droit. Comment

11 expliquez-vous le fait que ces personnes aient peur de parler de ceux qui

12 se trouvaient dans les camps? Est-ce que cela signifie qu'elles ne sont

13 pas sûres d'être en sécurité, y compris aujourd'hui, qu'elles ont toujours

14 peur de parler?

15 Réponse: Les gens qui étaient dans les camps ont peur de parler de cela

16 parce qu'ils ont peur de ceux qui les détenaient dans ces camps, qui

17 risqueraient de leur faire du mal, y compris aujourd'hui. La peur existe

18 toujours.

19 Question: Pouvez-vous nous parler de ce que vous avez appris au sujet du

20 traitement réservé à toutes ces personnes détenues dans ces camps? Comment

21 étaient-elles traitées?

22 Réponse: J'ai entendu dire quels étaient l'objet de sévices, qu'on les

23 frappait avec des câbles, qu'on utilisait également l'électricité pour les

24 torturer, qu'on les forçait à se couper les oreilles les uns les autres et

25 même certains à manger les oreilles en question, et que certains ont été

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1 tués là. C'était à Pakracka Poljana.

2 Quant à Pakrac, j'ai entendu dire que les détenus étaient attachés à des

3 radiateurs et frappés.

4 Question: Combien d'entre eux ont-ils survécu? Combien de personnes ont

5 survécu? Combien de personne ont été tuées dans ces camps?

6 Réponse: Je ne peux vraiment pas vous donner de chiffre, car je ne connais

7 pas le chiffre exact des personnes tuées. Le décompte est encore en cours

8 et le nombre des personnes portées disparues augmente tous les jours.

9 Chaque fois que quelqu'un revient, il fait état de personnes que l'on

10 recherche et qui sont, pour l'instant, portées disparues.

11 Quant aux personnes qui ont survécu, je ne sais pas non plus, car la

12 situation n'est pas encore stabilisée et il est impossible de connaître un

13 chiffre exact pour le moment. Il est possible de parler de pourcentage,

14 mais je ne préfère pas ne pas utiliser de pourcentage puisqu'on parle ici

15 d'êtres humains et les exhumations sont encore en cours.

16 Question: Vous avez eu la possibilité de parler à certaines de ces

17 victimes dont les oreilles ont été coupées ou qui ont été forcées de

18 manger l'oreille d'autrui ou qui ont subi des tortures à l'électricité,

19 des passages à tabac?

20 Réponse: J'ai parlé à un homme à qui on a tiré dans le ventre, il m'a

21 parlé longuement de cela. Et j'ai parlé avec un autre homme qui enterrait

22 des corps. Mais ils ont toujours peur de venir témoigner en public au

23 sujet de tout cela.

24 M. Milosevic (interprétation): Cet autre homme dont vous venez de parler

25 enterrait les personnes qui n'avaient pas survécu. C'est bien cela?

Page 10855

1 Témoin C-037 (interprétation): Oui.

2 M. le Président (interprétation): Aidez-nous sur ce point, Monsieur le

3 Témoin. Ces incidents survenus dans les camps ou les prisons se situent

4 dans quelle période?

5 Témoin C-037 (interprétation): Cela se passait entre le mois d'août 1991

6 et le début de l'année 1992.

7 M. le Président (interprétation): Quelle était la situation à Pakrac à ce

8 moment-là? Parce que vous avez décrit des prises de contrôle par les

9 Serbes à plusieurs reprises, ce genre de chose. Que se passait-il à ce

10 moment-là?

11 Témoin C-037 (interprétation): A partir du 19 août, les Serbes ne

12 faisaient que passer dans la ville de Pakrac, s'agissant des endroits

13 qu'ils tenaient sous leur contrôle. La ville, à un certain moment, n'a

14 appartenu à personne, et par la suite, elle a en permanence sous le

15 contrôle croate. Donc la prison dont a parlé M. Milosevic se trouvait du

16 côté de la gare de Pakrac. Les Serbes ne pouvaient stationner qu'aux

17 abords de la ville. La ville a été lourdement bombardée, pilonnée;

18 personne ne pouvait donc y habiter, il y avait simplement le poste de

19 police et les sous-sols du grand magasin et dans les rues, le secteur tenu

20 par les Serbes de l'autre côté. La vie n'a recommencé qu'à partir de mars

21 1992 avec le retour de certaines personnes, si l'on peut parler ainsi;

22 c'étaient des Croates pour la majorité d'entre eux et très peu de Serbes

23 jusqu'en 1995. Et en 1995, après l'opération "Eclair" quelques Serbes sont

24 revenus vivre dans leurs appartements, mais sans avoir l'autorisation

25 officielle de le faire, leurs appartements avaient été confisqués et

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1 certains détruits. Et ensuite, les bâtiments ont été réparés pour

2 certains, des travaux étaient en cours, et les Serbes peuvent aujourd'hui

3 retourner dans leur domicile après en avoir fait la demande.

4 M. Milosevic (interprétation): Soyons tout à fait clairs à ce sujet. Vous

5 avez des communications directes. Vous avez entendu parler de ces camps où

6 étaient enfermés les Serbes dans la région de Pakrac et de Serbes torturés

7 en 1991, alors que la Croatie se trouvait toujours dans les frontières de

8 la RSFY, c'est-à-dire avant la reconnaissance internationale de la Croatie

9 à un moment où l'armée était en territoire croate et que la Croatie

10 faisait partie de la Yougoslavie. Donc il s'agissait de l'armée unifiée de

11 la Yougoslavie encore à l'époque, et tout cela s'est passé à ce moment-là,

12 n'est-ce pas?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Pouvez-vous nous donner des détails plus précis au sujet de

15 l'identité des Serbes qui ont été torturés, à qui on a coupé les oreilles,

16 qui ont été contraints de manger les oreilles depuis, qui ont été passés à

17 tabac, ou qui ont subi les tortures à l'électricité? Qui étaient ces

18 Serbes? Etait-ce des gens qui avaient commis un crime ou pas?

19 Réponse: C'étaient des gens originaires de la région. Certains habitaient

20 dans la région de Pakracka Poljana, et d'autres ont été amenés à Pokracka

21 Poljana en provenance de Zagreb et d'autres régions de Croatie ou du

22 village de Kip par exemple. Un groupe d'habitants de Kip a été amené à

23 Pokracka Poljana également. Ce n'étaient pas des gens qui avaient commis

24 des crimes ou qui avaient fait quoi que ce soit à l'encontre de l'Etat.

25 Question: A en juger par ce que vous dites, nous vous entendons dire

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1 qu'ils ont été torturés, massacrés, tués, malmenés et on est en droit de

2 penser que c'était simplement parce qu'ils étaient serbes, n'est-ce pas?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Vous venez de dire à l'instant qu'un groupe de personnes est

5 revenu, mais que, même pour certains dont les maisons n'ont pas été

6 détruites, elles ne vivent toujours pas dans leur appartement. Pourquoi?

7 Réponse: Eh bien, à partir du début de la guerre, tous les Serbes qui

8 avaient fui leur domicile et qui n'ont pas habité dans leurs appartements

9 pendant la guerre ont perdu le droit de revenir dans leurs appartements.

10 Je veux parler ici de ce qu'on appelait à une certaine époque le "droit de

11 résidence" et la loi encore en vigueur aujourd'hui stipule que ces Serbes

12 n'ont pas droit à un appartement.

13 Il est possible qu'on revienne sur cette loi. Je ne sais pas quand cela se

14 fera, mais le travail est en cours pour ce droit à la résidence soit rendu

15 à ces Serbes. Mais les Serbes en question ont perdu le droit d'habiter

16 dans les appartements où ils habitaient avant, ce qui leur pose un

17 problème d'existence.

18 Question: Mais cette loi, selon laquelle les Serbes n'ont pas le droit de

19 revenir vivre dans l'appartement qu'ils ont abandonné à l'époque, en

20 raison de tout ce que vous venez de décrire… Parce que c'est bien en

21 raison de cela, n'est-ce pas, en raison de ce que vous venez de décrire

22 qu'il leur arrivait?

23 Réponse: Je ne sais plus exactement si cela s'est passé en 1992 ou en

24 1995, si cette loi date de 1992 ou de 1995, parce que j'ai été réintégré

25 dans mes droits en 1995. Donc je ne sais pas exactement si la loi date de

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1 1992 ou de 1995.

2 M. Milosevic (interprétation): Donc aujourd'hui, en Croatie, où l'Etat de

3 droit prévaut, cette loi est toujours en vigueur et les Serbes ne peuvent

4 pas retourner dans leurs appartements?

5 Témoin C-037 (interprétation): Non, ils ne peuvent pas le faire. Certains

6 sont revenus et ont reçu des appartements abandonnés par d'autres. Les

7 réfugiés de Slavonie, de Bosnie, lorsqu'ils ont obtenu la citoyenneté

8 croate, ont emménagé dans des appartements parce que des Croates qui

9 n'avaient pas d'appartement avant avaient racheté les leurs.

10 M. Kwon (interprétation): Monsieur Milosevic, les interprètes vous

11 demandent de faire attention, car ils n'ont pu entendre une partie de

12 votre question. Pourriez-vous ralentir et ménager une pause entre les

13 questions et les réponses?

14 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur Kwon. Je pensais que

15 j'en tenais compte, mais je vais effectivement ménager une pause.

16 Monsieur le Témoin, vous venez de nous décrire ce qui se passait à Pakrac.

17 Pouvez-vous, pour que je n'aie pas à refaire la lecture de ce document

18 -vous en avez entendu la lecture et vous avez dit que ce qui était contenu

19 dans le document était juste-… ces camps de Slavonska Pozega -je parle des

20 camps où étaient détenus des Serbes, bien sûr-, avez-vous des informations

21 au sujet des Serbes détenus dans ces camps et de la façon dont ils étaient

22 traités?

23 Réponse: Je n'ai pas d'information au sujet du nombre de personnes

24 détenues.

25 Ce que j'ai entendu dire, c'est qu'ils ont également été passés à tabac et

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1 torturés dans ce deuxième camp. Sinon, de toute façon, dans les endroits

2 où étaient détenues des personnes capturées dans la région de Pakrac, on

3 disait aussi que, lorsque les camps étaient tenus par les Serbes, les

4 Croates étaient passés à tabac et que, de l'autre côté, lorsqu'il

5 s'agissait de Serbes enfermés, c'étaient les Serbes qui étaient passés à

6 tabac.

7 Je ne sais pas quels étaient les contacts existant à l'époque entre les

8 uns et les autres, mais, en général, cela devenait de notoriété publique

9 lorsque quelqu'un était arrêté, et cela ne faisait qu'accroître la tension

10 et la méfiance des uns vis-à-vis des autres. Donc j'ai décrit cela comme

11 une conception, car vous avez parlé à plusieurs reprises de Pakrac et la

12 situation était la même dans les environs de Pakrac.

13 Mais, en tout cas, à Poljana, je sais aussi que les gens étaient

14 lourdement battus. Et je sais qu'il y avait des échanges assez fréquents

15 entre les Croates et les Serbes; c'est-à-dire que les Croates échangeaient

16 des Serbes contre des prisonniers à eux, et que les Serbes échangeaient

17 des Croates contre des prisonniers à eux. Donc chacun essayait par voie

18 d'échange de récupérer ses prisonniers.

19 Question: Je vous en prie, j'ai lu une partie du texte tout à l'heure,

20 j'ai lu la liste des prisons où étaient enfermés des Serbes. Combien de

21 prisons tenues par des Serbes y avait-il dans lesquelles étaient enfermés

22 des Croates? Le savez-vous?

23 Réponse: J'ai énuméré un certain nombre d'endroits en Slavonie

24 occidentale, Bucje, Vocin, Okucani, notamment pour lesquels je dispose

25 d'information, ainsi qu'à Mijokovicevo. Pour le reste, il y avait des

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1 tueries, des massacres, des affrontements, des accrochages.

2 Question: Donc vous êtes au courant de l'existence de ces quatre prisons,

3 n'est-ce pas?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Combien de Croates étaient détenus dans ces quatre prisons sous

6 la garde des Serbes?

7 Réponse: Je ne sais pas quel est le chiffre exact, j'aurais beaucoup de

8 mal à le dire, notamment pour le quartier de Stari Grad. Mais, à Bucje,

9 vraiment, je ne pourrais même pas faire une estimation. Nous parlons ici

10 d'êtres humains, il ne faut pas se tromper.

11 Question: Est-il exact qu'en 1991, au mois d'octobre, vous avez passé un

12 certain temps à Bucje? Vous y êtes resté une trentaine de jours, n'est-ce

13 pas?

14 Réponse: Oui. Enfin, pas exactement à Bucje, pas seulement à Bucje, mais à

15 Bucje également. Mais pas seulement. J'ai vécu également dans les

16 environs.

17 Question: Donc c'est bien l'endroit où se trouvait la prison?

18 Réponse: Oui, dans le village.

19 Question: Très bien. Donc vous avez passé une trentaine de jours à cet

20 endroit, vous avez vu la prison. Il s'agit d'une prison qui était tenue

21 par les Croates, n'est-ce pas? Je suppose, compte tenu compte des

22 fonctions exercées par vous, que vous avez dû être informé de ce qui se

23 passait dans cette prison? Combien de détenus y avait-il dans cette

24 prison? Qui étaient ces détenus et quel était le traitement qu'ils

25 subissaient?

Page 10861

1 Réponse: Puisque vous reparlez des fonctions qui étaient les miennes,

2 j'aimerais encore une fois vous informer –au cas où vous l'auriez oublié-

3 que je n'avais aucune compétence là-bas, car le pouvoir était entre les

4 mains des militaires, de la Défense territoriale. Et je n'avais ni la

5 possibilité ni le droit de me mêler de choses qui, d'ailleurs, ne

6 m'intéressaient pas particulièrement. Donc je ne sais pas combien il y

7 avait de détenus dans cette prison. Je sais cependant que, pour la

8 majorité d'entre eux, c'étaient des civils qui avaient été ramassés sur la

9 ligne de démarcation et il y avait peut-être également un nombre

10 relativement limité de gens qui avaient été faits prisonniers au combat

11 pendant la guerre.

12 Parmi ces prisonniers de guerre, il y avait également des Serbes. J'ai

13 entendu dire que la plupart d'entre eux étaient passés à tabac, frappés et

14 même que certains étaient tués. Mais je n'ai aucune information précise à

15 ce sujet, parce que ce secteur était sous le contrôle de la Défense

16 territoriale qui a été stationnée à cet endroit pendant toute la guerre et

17 qui m'était très opposée. Donc, je n'avais pas le droit de me mêler de

18 tout cela.

19 Question: Bien. Mais il est très improbable que vous ayez été réellement

20 dans l'impossibilité d'obtenir quelque information que ce soit, parce que

21 dans la région, en général, tout le monde sait tout sur tout le monde;

22 vous pouviez savoir y compris ce que chacun se préparait pour déjeuner.

23 Et puisque vous étiez dans le secteur de la prison, vous pouviez savoir ce

24 qui se passait dans la prison. Combien de personnes étaient enfermées dans

25 cette prison?

Page 10862

1 Réponse: Je ne peux pas vous donner de chiffre, je ne le connais pas.

2 Question: Mais vous avez sans doute vu le bâtiment? Etes-vous entré dans

3 le bâtiment?

4 Réponse: Non.

5 Question: Avez-vous vu le bâtiment?

6 Réponse: Je ne me suis pas approché, donc je ne sais pas.

7 Question: Vous ne savez même pas à quoi ressemblait ce bâtiment?

8 Réponse: Non.

9 Question: En êtes-vous sûr?

10 Réponse: Certain.

11 Question: Quel était le nombre maximum de personnes qui auraient pu se

12 trouver enfermer dans cette prison?

13 Réponse: Peut-être une centaine.

14 Question: Combien d'entre eux étaient des Serbes et combien des Croates?

15 Réponse: Peut-être 10 Serbes, le reste étant des Croates.

16 Question: Combien de soldats, combien de civils?

17 Réponse: Je ne sais pas.

18 Question: Très bien, ne continuons pas dans ce sens.

19 Page 4 de votre déclaration, dernier paragraphe, vous parlez des

20 évènements de Pakrac et vous expliquez que la municipalité de Pakrac avait

21 décidé de demeurer dans les frontières de la Yougoslavie si la Croatie

22 décidait de quitter la Yougoslavie.

23 Est-ce que c'est la municipalité qui a décidé de prendre cette décision

24 par elle-même ou est-ce que vous avez exercé une influence sur elle?

25 Réponse: C'était une décision prise non par les autorités de la

Page 10863

1 municipalité, mais par la population, par les habitants qui avaient

2 organisé une délégation auprès de la municipalité.

3 Question: Est-ce que quelqu'un a pensé que vous auriez pris cette

4 décision?

5 Réponse: C'était après la séparation, après que la Croatie se soit séparée

6 de la Yougoslavie. Donc, lorsque les Serbes ont voté en disant qu'eux

7 voulaient rester dans les frontières yougoslaves, c'était en fait une

8 espèce de geste politique destiné à ce que les gens sachent qui voulaient

9 rester en Yougoslavie.

10 Question: Cependant, pour autant que je l'aie compris, ceci ne s'est pas

11 passé dans le cadre du référendum que vous aviez organisé auparavant,

12 c'est bien cela? Est-ce que c'était avant ou après le référendum?

13 Réponse: Le premier référendum concernait l'autonomie culturelle en 1990,

14 tenu aux environs du 21/22 février 1991. Le deuxième référendum portait

15 sur la question de savoir qui voulait rester dans les frontières

16 yougoslaves et il a eu lieu le 12 mai 1991.

17 Donc il y a eu… Ce dont nous parlons en ce moment s'est passé entre les

18 deux référendums.

19 Question: Bien. Mais dites-moi, quel était l'objet de ce référendum sur

20 l'autonomie culturelle?

21 Réponse: Je ne pourrais pas vous donner les détails aujourd'hui, cela fait

22 longtemps que la chose s'est passée. Mais il s'agissait de l'autonomie

23 culturelle et politique des Serbes en Croatie. Je crois que le but était

24 de défendre l'identité des Serbes résidant en Croatie. Je ne sais pas

25 exactement quels étaient les détails cependant?

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1 Question: Mais est-ce que cela impliquait que l'on parlait d'éducation en

2 langue serbe, avec emploi de l'alphabet cyrillique, du fonctionnement de

3 la société culturelle serbe, "Prosvjeta"?

4 Donc, était-il question d'égalité de droit du point de vue de la défense

5 de l'identité nationale des Serbes, du point de vue de la satisfaction de

6 leurs besoins culturels et également dans le domaine de l'éducation, de la

7 culture, etc.? Est-ce qu'il est permis de s'exprimer ainsi?

8 Réponse: Je pense qu'il est permis de s'exprimer ainsi effectivement, en

9 disant qu'il s'agissait de défendre l'identité culturelle serbe sans

10 parler de tous les éléments que vous venez d'énumérer.

11 Question: Que savez-vous par exemple des licenciements de Serbes dans la

12 police, dans les médias, dans la santé, dans les services publics, etc.,

13 durant l'année 1990, des Serbes qui travaillaient en Croatie? Donc à une

14 époque où il n'y avait aucun affrontement, aucun accrochage. Pouvez-vous

15 me donner davantage de détails à ce sujet?

16 Réponse: Oui, l'époque à laquelle les licenciements ont commencé,

17 notamment dans les rangs de la police, se situe bien à ce moment-là.

18 Question: Excusez-moi de vous interrompre.

19 Monsieur Kwon, Je ne voudrais pas accélérer mon débat, mais j'ajouterai ce

20 qui suit: lorsque vous dites "au début, notamment dans les rangs de la

21 police", qu'entendez-vous "par début"? Quand ce début s'est-il situé?

22 Réponse: Eh bien, je ne pourrais pas vous donner la date exacte, mais je

23 pense que cela a commencé à la fin 1990, au moment où les Serbes ont été

24 licenciés de la police et des services publics, quand les Serbes ont dû

25 partir parce qu'on considérait que ceci était nécessaire pour respecter la

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1 proportionnalité ethnique, notamment dans les rangs de la police et des

2 services publics à la municipalité où le HDZ avait obtenu la majorité aux

3 élections. Plus tard en 1991, il y a eu d'autres licenciements, un nombre

4 encore accru d'ailleurs.

5 Question: Avez-vous une idée quant au nombre de personnes qui ont été

6 visées dans ce que vous appelez "le début", avant donc que le conflit

7 n'éclate? Combien de Serbes ont été licenciés dans la police, les services

8 publics, les médias et, en général, combien de Serbes ont perdu leur

9 emploi?

10 Réponse: Je ne peux vous donner de chiffre, je n'ai même pas d'estimation

11 d'ailleurs, car tout cela s'est passé peu à peu et a créé de graves

12 tensions. Et je ne peux même pas faire une évaluation, je n'oserais pas me

13 hasarder à vous donner un chiffre.

14 Question: Bien, mais avez-vous quelque connaissance que ce soit quant aux

15 secteurs dans lesquels les Serbes ont été licenciés, à part la police, les

16 services de santé et les services publics? Les Serbes ont-ils perdu leur

17 emploi dans des entreprises autres que celles-ci, entreprises commerciales

18 par exemple?

19 Réponse: Ceci s'est passé plus tard. J'ai entendu dire qu'en 1991,

20 notamment à Zagreb et dans les grandes villes, les Serbes ont en grand

21 nombre perdu leur emploi.

22 Question: Simplement parce qu'ils étaient serbes et pour aucune autre

23 raison?

24 Réponse: Oui, c'est ce que j'ai entendu dire de la bouche des personnes

25 qui ont été licenciées.

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1 Question: Ce sont les personnes licenciées qui vous l'ont dit?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Dites-moi, êtes-vous au courant du fait que tous les directeurs

4 notamment, en tout cas tous les cadres dans le secteur économique qui

5 avaient la nationalité serbe et vivaient en Croatie ont été licenciés dès

6 le début? Enfin, peut-être pas tous, certains ont peut-être conservé leur

7 emploi mais, en tout cas, que le nombre des cadres serbes dans ces

8 entreprises a diminué? Avez-vous entendu parler de cela?

9 Réponse: Oui, j'ai également entendu parler de cela, j'ai entendu dire que

10 cela a effectivement eu lieu.

11 Question: Mais tout ce qui s'est passé, compte tenu des chiffres très

12 importants, de l'ampleur du phénomène, puisqu'il s'agissait de la police,

13 des services publics, des entreprises commerciales, de la santé, etc., des

14 médias, est-ce que cela peut être défini comme une forme de discrimination

15 généralisée à l'égard des Serbes en Croatie?

16 Réponse: Oui, cela commençait à prendre des proportions de discrimination

17 généralisée à l'égard des Serbes qui avaient peur désormais de perdre leur

18 emploi, mais cela s'est passé surtout dans les endroits où les Serbes

19 étaient en minorité. C'est-à-dire par exemple, Zagreb, Sisak, Pozega dans

20 la direction de Bjelovar également, et dans d'autres endroits du même

21 genre.

22 Question: Donc dans les endroits où les Serbes étaient manifestement en

23 minorité, ces mesures ont été les plus graves, n'est-ce pas?

24 Réponse: Oui. Là où le HDZ avait emporté une majorité considérable.

25 Question: Bien. Autrement dit, dans les endroits où le HDZ l'avait emporté

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1 le programme consistait à licencier et à expulser, à chasser les Serbes.

2 C'est cela ou pas?

3 Réponse: Je ne sais pas si c'était un programme, mais en tout cas c'est

4 ainsi que les choses se sont passées.

5 Question: Quand avez-vous entendu parler pour la première fois de gens qui

6 avaient été arrêtés ou capturés de façon illégale et dont on perdait la

7 trace, qui pour certains disparaissaient ou étaient tués, et ce depuis

8 Zagreb jusqu'à Vukovar, dans des lieux très différents? Quand est-ce que

9 vous avez entendu parler de cela pour la première fois?

10 Réponse: J'en ai entendu parler pour la première fois à la mi-1991.

11 Question: Ce matin, j'ai cité un rapport au sujet duquel Mesic a confirmé

12 qu'il ne l'avait vu qu'au moment où il a pris ses fonctions de Président.

13 Or c'est un rapport qui date de 1991 et qui vient de Hercog, un conseiller

14 de Tudjman, dans lequel il est question d'arrestation, de capture illégale

15 de Serbes -je peux utiliser un mot croate, je n'ai pas besoin de vous le

16 traduire- suite à quoi on perd toute trace de ces personnes, on ne sait

17 pas si ces personnes sont vivantes ou mortes etc. Est-ce que vous êtes au

18 courant de cela?

19 Réponse: Non, je n'avais pas connaissance de ce rapport.

20 M. Milosevic (interprétation): Ce rapport, après que le nouveau

21 gouvernement a été mis en place en Croatie, a-t-il été rendu public?

22 M. le Président (interprétation): Il dit qu'il n'a aucune connaissance de

23 l'existence de ce rapport. Essayons d'avancer.

24 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May.

25 Dites-moi, je vous prie, une fois que les fameuses barricades ont été

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1 érigées, est-il exact que vous avez vérifié que le gouvernement à Zagreb

2 et le gouvernement à Belgrade n'avaient aucun rapport avec tout cela et

3 n'en savaient absolument rien avant de voir les images diffusées par les

4 médias? N'avez donc aucune idée de ce genre de résistance?

5 Témoin C-037 (interprétation): Je ne vois pas ce que vous voulez dire

6 quand vous me demandez si nous avons vérifié.

7 Question: Avez-vous établi qu'il était exact que le Gouvernement de

8 Belgrade n'avait rien à voir avec tout cela et n'en avait même pas la

9 moindre connaissance? Je veux parler y compris de la déclaration faite par

10 vous, de votre déclaration préalable. Mais répondez-moi, parce que vous

11 savez bien ce que vous avez dit.

12 Réponse: Pour autant que je le sache, ceci a été l'oeuvre de la population

13 locale à sa propre initiative.

14 Question: Des barricades ont été érigées pendant la nuit par la police de

15 Pakrac, pendant la nuit, mais la JNA a demandé que ces barricades soient

16 enlevées. Il a été tiré profit de tout cela. Et le 2 mars 1991 le MUP a

17 pénétré dans la ville, a échangé des coups de feu avec les policiers de

18 Pakrac. Autrement dit, ils se sont tirés les uns sur les autres. Ils ont

19 désarmé un certain nombre d'hommes et, dans l'intervalle, la JNA est

20 arrivée, les négociations ont commencé entre la JNA et le MUP de Croatie.

21 Deux jours plus tard, le processus de désarmement a démarré et les deux

22 autres membres de la police de Pakrac se sont vus enlever leurs armes qui

23 ont été restituées à la police. Ensuite, vous poursuivez en disant que

24 quatre assistants de Petar Gracanin, le ministre fédéral de l'Intérieur

25 sont arrivés à Pakrac. Je me souviens que l'un d'eux a dit que la Croatie

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1 était un Etat légal et que les policiers de Pakrac devaient rendre leurs

2 armes, car dans le cas contraire, ils seraient arrêtés par la police

3 fédérale et remis entre les mains du MUP de Croatie. Les Serbes de Pakrac

4 ont constaté que la situation s'était calmée et ont été déçus. C'est bien

5 cela?

6 Réponse: Oui.

7 M. Milosevic (interprétation): Comment les barricades sont-elles apparues?

8 Pouvez-vous nous le dire.

9 Témoin C-037 (interprétation): Je pense que je l'ai dit à huis clos

10 partiel. J'ai expliqué cela à huis clos partiel donc j'aimerai à nouveau

11 un huis clos partiel.

12 M. le Président (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie.

13 (Huis clos partiel à 15 heures 30.)

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16 [audience publique]

17 M. Milosevic (interprétation): Mais je pensais que cela faisait longtemps

18 que nous étions en séance publique, car il n'y avait que quelques

19 questions qui nécessitaient le huis clos partiel. Je ne peux pas revenir

20 sur toutes les questions que j'ai posées. Mais, de toute façon, je pense

21 que l'on met trop l'accent sur ces huis clos partiels, car le Témoin C-037

22 ne court aucun danger d'être reconnu, puisque tout le monde sait de qui il

23 s'agit.

24 Est-ce vrai que ce damier rouge-blanc ou blanc-rouge se trouvait aussi sur

25 les portails de l'un des camps de la mort, tel Jasenovac?

Page 10872

1 Témoin C-037 (interprétation): Oui.

2 Question: Considérez-vous que seules les personnes âgées, comme vous

3 dites, celles qui appartenaient à des générations déjà âgées, avaient des

4 raisons d'être troublées de voir tout cela? Avaient-ils des raisons, ces

5 gens-là, d'être inquiets, préoccupés, sinon effrayés étant donné ce qu'ils

6 risquaient de courir?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Et ce dont nous parlions tout à l'heure -parlant de camps,

9 parlant de licenciements, parlant de passages à tabac et de tueries-, est-

10 ce que tout cela pouvait être considéré comme un bon motif et bien fondé

11 de leurs peurs et inquiétudes?

12 Réponse: Oui, en quelque sorte, parce que ce n'était que les tout premiers

13 débuts d'une époque où des gens se faisaient intimider aussi.

14 Question: Est-ce vrai de dire que, justement, la région de la Slavonie

15 occidentale garde encore des cicatrices jamais guéries qui datent de la

16 Seconde Guerre mondiale et que, d'une façon tout à fait justifiée, ces

17 gens-là doivent être sensibles à de tels événements?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Y a-t-il eu une famille de Serbes dans cette région-là qui

20 n'aurait pas eu de victimes au cours de la Seconde Guerre mondiale?

21 Voilà, je vais m'arrêter maintenant pour vous poser une seconde question

22 sous forme d'une autre phrase.

23 Réponse: Je ne sais pas. Peut-être, mais ç'aurait pu être difficile.

24 Question: Et y a-t-il, en Slavonie occidentale, une famille de Serbes –

25 bien entendu, exception faite de ces familles qui ont dû fuir avant que le

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1 conflit ne se déclenche- qui n'aurait pas perdu un des leurs, pour parler

2 de ces familles-là, au cours de ces différentes attaques sur les Serbes et

3 sur les maisons des Serbes?

4 Réponse: Je m'excuse. Pouvez-vous reposer cette question? Je n'ai pas

5 très, très bien capté.

6 Question: Dans cette région-là –nous parlons de la Slavonie occidentale-,

7 peut-on dire qu'il y a une famille ou des familles qui n'auraient pas

8 perdu quelqu'un des leurs au cours de 1991-1995, pendant les attaques sur

9 la Slavonie occidentale? Exception faite –disais-je- de ceux qui,

10 préalablement, avaient fui la région pour partir pour la Serbie, etc.

11 Réponse: Oui, il y en a bien entendu, il y en a parmi ces familles serbes

12 qui étaient dans l'armée croate pour combattre avec celle-là, de concert

13 avec l'armée croate. Oui, de telles familles existaient.

14 Question: Mais sont-elles nombreuses?

15 Réponse: Non.

16 M. Milosevic (interprétation): Au sujet de ces événements, si j'ai bien

17 compris, page 5, cinquième fragment, vous signalez ici sous forme d'un

18 reproche...

19 M. Kwon (interprétation): Monsieur Milosevic, je note que vous êtes en

20 train de citer une déclaration écrite du témoin à plusieurs reprises, un

21 certain nombre de fois. Est-ce que c'est votre intention de

22 continuellement citer sa déclaration? Est-ce que vous voudriez que nous en

23 ayons une? Nous n'en avons pas pour le moment.

24 M. Milosevic (interprétation): Il s'agit de sa déclaration dont le résumé

25 m'a été communiqué.

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1 M. le Président (interprétation): (Inaudible.)

2 C'est votre erreur. Rappelez-vous que nous sommes les Juges. C'est

3 l'accusation qui vous a envoyé ces documents, nous ne les avons pas.

4 Alors le Juge vous a demandé: est-ce que vous voulez que nous ayons ces

5 exemplaires ou pas?

6 M. Milosevic (interprétation): Oui, certes, je souhaite faire cela. Mais

7 pour autant que je m'en souvienne, jusqu'à maintenant, vous avez toujours

8 disposé de ces différents documents, que ce soit des résumés de

9 déclarations, etc., pour parcourir le texte, pour vous référer à tel ou

10 tel fragment, etc. Pourquoi devrais-je commettre une faute?

11 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas cette déclaration, on

12 vous l'a dit précédemment. Nous vous l'avons déjà dit: nous n'avons pas

13 les déclarations des témoins, à moins qu'elles n'aient été communiquées en

14 vertu du Règlement, ce qui, vous le savez, permet l'admissibilité des

15 déclarations écrites.

16 Nous avons celle-là, mais les autres déclarations, nous ne les avons pas.

17 Laissez-nous avoir un exemplaire de celle-là et nous verrons si l'on peut

18 les verser; on leur donnera une cote.

19 (La Greffière s'entretient avec le Président.)

20 Je crois qu'il y a six déclarations. Quelle est celle sur laquelle vous

21 vous êtes fondé, Monsieur Milosevic? Nous l'avons maintenant.

22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Peut-être que M. Milosevic se réfère

23 au résumé après récolement. C'est quelque chose que vous avez devant vous,

24 là.

25 M. le Président (interprétation): Nous avons le résumé après récolement,

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1 c'est exact.

2 M. Milosevic (interprétation): J'ai sous mes yeux la déclaration faite par

3 le témoin en date du 19 mars… Non, le 1er, les 2, 3 et 4 mai 2002. Voilà.

4 (Intervention de l'huissière.)

5 M. le Président (interprétation): Oui, ceci est un résumé. Ça, nous

6 l'avons. Je vous remercie. Oui, nous l'avons, celui-là.

7 M. Milosevic (interprétation): Bien. Puis-je poursuivre?

8 M. le Président (interprétation): Oui.

9 M. Milosevic (interprétation): Bien.

10 Monsieur C-037, vous reprochez le fait que les médias ont rapporté sur ce

11 qui s'était passé, ce dont nous avons parlé, tantôt en audience publique,

12 tantôt à huis clos partiel, vous leur reprochez d'avoir présenté cela

13 comme étant un événement dramatique. Telle est votre façon de voir la

14 chose.

15 Mais les événements de Pakrac ne représentent-ils pas un événement

16 dramatique?

17 Témoin C-037 (interprétation): Oui, mais au sujet de ces événements-là, il

18 a été dit dans des rapports et communiqués qu'il y a eu des tués. On a

19 même affiché les noms des tués. Ce qui n'était pas le cas. Voilà la raison

20 pour laquelle j'ai dit que les choses ont été présentées autrement.

21 Question: Et comment se fait-il qu'on ait pu parler de tués alors qu'il

22 n'y en a pas eu? Est-ce que vous avez pu en savoir quelque chose? Qui a pu

23 être l'auteur de ce rapport? Quelqu'un de Pakrac ou est-ce une simple

24 invention de quelqu'un qui travaille pour les médias?

25 Réponse: Si je m'en souviens bien, il y avait un journaliste qui était

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1 venu pour faire un reportage sur les événements de Pakrac.

2 Question: Par conséquent, il y avait quelqu'un qui était venu là pour

3 faire un reportage. Il avait observé tous ces échanges de feu, ces

4 conflits, accrochages, et il l'a rapporté ensuite?

5 Réponse: Je ne sais pas ce qu'il a fait pour observer, ce qu'il a pu

6 observer.

7 Question: Bien. Mais vous dites que les Serbes n'avaient pas de raison de

8 fuir parce qu'ils n'étaient pas menacés du côté croate et de la part des

9 Croates?

10 Réponse: A quelle période vous référez-vous?

11 Question: Je vais vous le dire tout de suite.

12 Vous dites: "En fait, il n'y avait pas de raison de quitter le territoire

13 parce qu'il n'y avait pas de menaces perpétrées par la partie croate. En

14 novembre 1991…" Donc nous parlons de la fin de l'année 1991… Oui, oui,

15 vous dites qu'"il n'y avait pas de raison pour que les Serbes partent de

16 là-bas parce qu'ils n'étaient pas menacés par la partie croate". C'est la

17 citation que j'ai retirée de votre déclaration.

18 Ensuite, vous parlez d'amendement. Vous avez dit avoir pu voir comment les

19 gens avaient été manipulés en Slavonie occidentale. Par exemple, le SDS

20 -il s'agit de votre partie à vous-, lorsqu'il voulait étudier les

21 amendements à la Constitution croate, les gens ne voulaient pas écouter.

22 Ils voulaient se faire distribuer des armes parce qu'ils avaient entendu

23 des rumeurs suivant lesquelles les Croates s'étaient fait armer. Mais ces

24 rumeurs étaient-elles bien fondées ou pas? Y a-t-il une part de vérité là-

25 dedans ou pas, pour dire que les Croates étaient armés?

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1 Réponse: Dans votre premier commentaire et dans la seconde partie de votre

2 question, vous confondez deux événements.

3 Votre premier commentaire concernait la fin de l'année 1991, alors qu'il

4 s'agissait d'abord de parler du début de 1991.

5 Lorsque nous parlons de la fin de 1991, pour parler de la conduite des

6 gens de Daruvar, Pakracka Poljana, etc., il n'y avait pas vraiment une

7 importante concentration de l'armée croate, il n'y avait pas vraiment une

8 pression si importante.

9 La preuve en est que ce n'est que quelques jours plus tard seulement

10 qu'ils pouvaient entrer dans les villages serbes pour les incendier.

11 Question: A quel moment?

12 Réponse: Eh bien, à Daruvar, le retrait a eu lieu le 15 novembre. Or eux,

13 ils sont entrés cinq jours plus tard, le 20 ou le 21, je ne sais plus.

14 Donc, dans ce village, il n'y a pas eu de combat. Tout simplement, les

15 gens fuyaient ce village, de peur tout simplement, parce qu'on parlait

16 d'importantes concentrations des forces armées croates qui affluaient. Les

17 gens perdaient tout sens de sécurité. Il n'y avait pas suffisamment de

18 membres de la JNA auxquels ils s'attendaient et, comme ils étaient tout

19 seuls pendant des jours et des jours, ils ont lâché ce front-là. Et puis,

20 les forces croates sont venues. Etaient-ce des Domobrani, étaient-ce les

21 forces de la garde nationale ou l'armée croate? Je ne sais pas. En tout

22 cas, ils sont entrés, ces gens-là ont pénétré dans les villages.

23 Question: Et que s'est-il passé avec ces villages?

24 Réponse: Pendant des jours et des jours, ces villages se sont fait

25 incendier, piller et les maisons qui étaient construites en dur, on les a

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1 fait sauter en l'air.

2 Question: Qu'est-ce qu'on a fait?

3 Réponse: On les a fait sauter en l'air parce que c'étaient des

4 constructions solides. Et c'est ainsi que tout cela s'est passé lorsque ce

5 contrôle de la force croate s'est établi.

6 Pour la seconde question…

7 Question: Justement, voilà le pourquoi de ma seconde question. Il n'y

8 avait pas, vous dites, de raison pour que des gens soient troublés et

9 fuient, alors que vous dites maintenant vous-même que ces gens-là devaient

10 fuir devant les forces croates parce que ces dernières étaient venues là

11 pour tout raser, incendier ou faire sauter en l'air.

12 Est-ce que tout cela n'est pas un démenti de ce que vous dites, vous,

13 lorsque vous dites que ces gens-là n'avaient pas de raison d'être

14 intimidés ni d'avoir peur?

15 Réponse: Oui, en quelque sorte, pour parler de ces villages-là, où il y

16 avait moins de force. Ces forces-là, en entrant, ne pouvaient pas

17 incendier tout et raser tout. Si, par exemple, il y avait un homme ou

18 deux, évidemment ils ne peuvent pas faire tout cela. Plus tard, lorsque

19 les forces se sont fait plus importantes, lorsque les forces armées ont eu

20 du temps pour se concentrer davantage, il pouvait y avoir non seulement

21 des soldats, mais des civils également. Alors là, les dégâts étaient plus

22 importants. Voilà pourquoi je dis qu'il n'y avait pas de raisons pour

23 lesquelles il avait fallu quitter ce territoire. Je voulais dire que les

24 officiers chefs, les commandants, n'étaient pas de taille à répondre à

25 cette exigence ou peut-être ils ont été manipulés également.

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1 Question: Vous dites qu'ils ont manipulé les gens en leur disant qu'il

2 fallait suivre au lieu de rester là-bas et combattre. C'est ce que vous

3 dites?

4 Réponse: Je crois qu'ils devaient rester là-bas et préserver leur village

5 au lieu de le quitter. Mais c'est mon opinion à moi.

6 Pour le second volet de votre question, lorsqu'on a pu voir diffuser le

7 film sur Spegelj et les armements, les gens ont été fort effrayés parce

8 que les gens n'ont pu faire autre chose que de constater que les Croates

9 se faisaient armer, et il n'y avait plus de sécurité.

10 Lorsque nous avons dû nous occuper des amendements à la Constitution et

11 lorsque que nous étions à Okucani, lorsque M. Kosutic s'est rendu chez

12 nous, il était notre invité pour nous aider là-bas, là on ne pouvait plus

13 parler d'amendement à la Constitution. Les gens n'y étaient plus

14 intéressés. Les gens ne faisaient autre chose que de demander des armes en

15 disant: "Si j'ai un fusil, je me sens davantage en sécurité"; voilà un

16 phénomène qui se faisait courant chez des gens, à savoir les gens étaient

17 en proie à la peur. Et puis, des pressions ont été exercées sur tous ces

18 gens qui étaient des responsables politiques. Eh bien, ceux qui ne

19 suivaient pas de telles instructions, qui ne se conformaient pas à de

20 telles pressions ont été considérés comme des gens peu sérieux et

21 traîtres.

22 Plus tard, en juin 1991, lorsque je me suis rendu près de Borovo Selo -je

23 ne sais pas en quel mois, peut-être au mois de mai- et lorsque j'étais de

24 retour, j'ai pu voir en parcourant les villages croates d'Osijek vers

25 Pozega, j'ai pu voir le soir, par exemple, la nuit tombée, sortir des gens

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1 dans la rue avec un fusil à la main, je sais que les Croates étaient

2 armés. Comment, suivant quel principe et suivant quelles lignes? Je ne

3 peux pas le savoir.

4 Etait-ce uniquement des Croates? Je ne le savais pas non plus. J'ai pu

5 voir que des gens portaient des armes, par la même occasion les Serbes se

6 faisaient armer. Il y en avait qui achetaient des armes au début. Je ne

7 sais par qui ils étaient approvisionnés en armes. Il y en a eu beaucoup

8 qui s'achetaient leurs armes. C'était un phénomène courant.

9 Question: Bien. Mais quelle serait votre connaissance relative à la

10 création du soi-disant rassemblement de la garde nationale?

11 Réponse: Je crois que c'était en 1991, en été, je ne saurais être plus

12 précis.

13 Question: Et de qui était composé ce rassemblement de la garde nationale?

14 Réponse: Je crois que c'étaient des volontaires mais aussi des effectifs

15 de police également. Je sais que cela a été créé sous cet intitulé-là,

16 "Rassemblement de la garde nationale", mais je ne sais pas où le

17 rassemblement a pu puiser toutes ces recrues.

18 M. Milosevic (interprétation): Bien. Vous venez de nous faire une

19 description d'un vaste tableau depuis les camps en parlant de tortures

20 jusqu'au village où il y a eu des incendies et tous les autres événements.

21 Or, j'ai une question d'ordre plus général à poser. Après que vous soyez

22 venu témoigner ici, pendant le premier jour de votre témoignage, nos

23 journaux ont rapporté que le témoin C-037 a accusé Milosevic d'avoir été

24 l'auteur des frontières planifiées, Karlobag, Karlovac et Virovitica.

25 Alors, comme je ne pouvais pas vraiment voir comment cela cadrait avec ce

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1 que j'ai entendu ici, à moins de ne parler de la carte...

2 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ceci ne semble pas

3 être une question très correcte. Ce que vous pouvez faire, c'est demander

4 au témoin quels sont les éléments de preuve dont il dispose et non pas la

5 façon dont un journal en a rendu compte. Alors, quelle était la question

6 sous sa forme correcte?

7 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, j'ai posé cette question au

8 témoin parce que je ne l'ai pas remarquée comme étant cela. Est-ce que

9 c'est lui qui m'a accusé de cette frontière?

10 M. le Président (interprétation): Peu importe, ce qu'il a dit, c'est ce

11 qu'il a dit. Ce n'est pas au témoin de commenter cela. Vous pouvez le

12 faire en temps utile et nous pourrons en tirer des conclusions. Ce n'est

13 pas à lui d'en faire des commentaires maintenant.

14 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur May?

15 M. le Président (interprétation): Non, ne discutez pas, et passez

16 simplement au point suivant. Vous pouvez lui poser des questions qui sont

17 pertinentes par rapport aux éléments de preuve, mais lui poser des

18 questions sur des articles de journaux, on ne peut pas vous permettre de

19 lui demander de commenter ses propres... Dites-nous quelle est la question

20 que vous voulez poser. Peut-être que nous pourrons la formuler pour vous?

21 M. Milosevic (interprétation): Voilà, je vais vous dire où je veux en

22 venir. Si vous me le permettez.

23 Je suppose que je suis censé avoir le droit de poser des questions au

24 sujet de quelques éléments de preuve qui ont été montrés au témoin en vue

25 de commentaires. Si on a montré au témoin un élément de preuve, et si...

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1 M. le Président (interprétation): Bien sûr que vous avez le droit de le

2 faire, mais à ce moment-là, présentez la pièce au témoin, et vous pouvez à

3 ce moment-là lui poser une question, une question permise. Quelle est la

4 pièce à propos de laquelle vous voulez lui poser une question? Vous ne

5 savez pas quelle est cette pièce? Eh bien, on va la trouver.

6 M. Milosevic (interprétation): Bien, il y avait d'abord une carte de la

7 Croatie sur laquelle nous avons pu voir une ligne en flexion qui...

8 M. le Président (interprétation): C'est très bien. Retrouvons donc cette

9 pièce. Il semble que ce soit à l'onglet 3, pièce 326.

10 (Intervention de l'huissier.)

11 M. Milosevic (interprétation): Oui, il s'agit bien de cette carte-là, je

12 vous prie de la placer sur le rétroprojecteur.

13 Je peux voir tout cela à distance, d'où je suis. Le témoin verra mieux

14 parce que lui n'est qu'à une distance de 50 centimètres du moniteur.

15 Voyez-vous comment se présente cette carte, Monsieur C-037?

16 Témoin C-037 (interprétation): Oui, je la vois.

17 Question: Cette carte vous a été présentée ici. Or, je demande quel

18 rapport tout ceci peut avoir avec une quelconque attitude prise par

19 Belgrade? Pouvez-vous me répondre à cette question?

20 Réponse: Cela a toujours été attribué comme devant être la réalisation du

21 slogan de Seselj, Karlovac, Karlobag, Virovitica.

22 M. Milosevic (interprétation): Laissez de côté Seselj! Vous savez, des

23 politiciens disent ceci ou cela à des temps différents.

24 Avez-vous jamais entendu dire un quelconque représentant des autorités

25 -vous devez savoir que Seselj était de position-, or avez-vous entendu un

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1 quelconque représentant des pouvoirs, des autorités, à commencer par moi,

2 en Serbie, ou avez-vous entendu dire un membre du gouvernement, un

3 ministre, ou quelqu'un d'autre en Yougoslavie, un général, qui aurait pu

4 parler de cela comme étant un plan tel qu'on vous le présente sur cette

5 carte-là?

6 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre! C'est un

7 point important. Ce n'est pas la peine de poursuivre.

8 Témoin C-037 (interprétation): Non. Je n'ai jamais entendu dire cela par

9 un employé, un officier de l'Etat, du Gouvernement de Yougoslavie, et j'ai

10 dit quelles étaient les raisons pour lesquelles ceci a été considéré comme

11 étant un tracé d'une certaine frontière.

12 M. le Président (interprétation): Pouvons-nous considérer, Témoin C-037,

13 que vous n'avez jamais entendu personne au gouvernement parler de cette

14 ligne?

15 Témoin C-037 (interprétation): Non.

16 M. le Président (interprétation): D'après mes souvenirs, vous dites que

17 vous avez vu quelqu'un, est-ce que je me trompe? Rappelez-nous, si vous le

18 voulez bien, quel était votre élément de preuve qui -vous dites- relie

19 cette ligne au gouvernement serbe?

20 Témoin C-037 (interprétation): Peut-être, mais lorsqu'on fait une

21 association d'idée à la phrase selon laquelle tous les Serbes devaient

22 vivre dans un même Etat.

23 M. le Président (interprétation): Oui, mais comment ceci se relie-t-il à

24 cette ligne?

25 Témoin C-037 (interprétation): Je crois avoir pu relier cela à M.

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1 Milosevic, c'est-à-dire que les Serbes devaient vivre dans un Etat.

2 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, laissez-moi finir. Ceci

3 n'explique pas tout à fait pourquoi cette ligne particulière que l'on voit

4 sur la carte: quelle est sa signification? Pouvez-vous nous expliquer sa

5 signification? Et là, vous dites que c'est lié à la Grande Serbie, mais

6 pourriez-vous nous expliquer cela, nous aider un peu? Peut-être que vous

7 ne le pouvez pas.

8 Témoin C-037 (interprétation): Ici, ce que je suis en train de montrer

9 représente la Krajina; ici, la Slavonie occidentale. Seselj se rendait en

10 Krajina, en Slavonie occidentale, et parlait du tracé de cette frontière-

11 là présentée sous forme de cette ligne-là.

12 M. le Président (interprétation): C'est ce qu'il dit, c'est cela que

13 Seselj dit…

14 M. Milosevic (interprétation): Et quand était-ce?

15 Témoin C-037 (interprétation): Seselj le disait en 1991.

16 Question: Bon, mais à cette époque-là, a-t-il adhéré à un parti?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Etait-il membre du Parlement, député?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Etes-vous sûr?

21 Réponse: Oui, je suis certain, il était du Parti radical serbe.

22 Question: Etait-il dans le parti d'opposition?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Opposition à qui?

25 Réponse: A vous.

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1 Question: Mais comment se fait-il, même s'il en parlait, que vous y

2 fassiez une association quelconque pour relier tout cela à une attitude

3 qui aurait pu être la mienne ou celle d'un membre du Gouvernement de

4 Serbie, lorsqu'il s'agit de quelqu'un qui appartient à l'opposition -qu'il

5 a dit-?

6 Réponse: J'ai dit, quant à moi, que j'ai relié ça à son nom, à lui.

7 M. Milosevic (interprétation): Bon, je ne sais pas s'il l'a dit ainsi,

8 lui, mais, d'après vous, lors de votre déposition, ceci s'est trouvé relié

9 à moi et à mon encontre. Comme vous pouvez le constater vous-même, cet

10 élément de preuve...

11 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il n'est pas

12 nécessaire de troubler qui que ce soit avec des articles de journaux, les

13 Juges apprécieront.

14 M. Milosevic (interprétation): Deuxièmement, saviez-vous que cette phrase

15 "Abuser de tant de gens ici qui se prononcent comme tous les Serbes dans

16 un Etat…", il n'y a pas "ce seront" ou "seraient", etc., mais c'était

17 plutôt une question de dire que la Yougoslavie avait l'intérêt de voir les

18 intérêts des Serbes sauvegardés, et ce n'est qu'en Yougoslavie que tous

19 les Serbes pouvaient sauvegarder leurs intérêts. Peu importe s'ils

20 résidaient dans différentes Républiques.

21 Est-ce que vous en savez quelque chose? Comment est-on parvenu à déformer

22 cette citation, que ceci ne pouvait concerner que la Yougoslavie; à cette

23 époque-là la République socialiste fédérative de Yougoslavie?

24 Réponse: Ce n'est pas moi qui ai apporté des corrections à la citation. Ce

25 n'est pas moi qui l'ai déformée, croyez-moi. J'ai voulu dire tout

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1 simplement que je savais que les Serbes souhaitaient demeurer, vivre dans

2 le cadre d'un seul Etat, de la Yougoslavie. Mais j'ai relié ce slogan,

3 cette phrase à cet homme-là. Et quant à ces inversions "lorsque vivront ou

4 seront", je ne pourrai pas en parler davantage.

5 M. Milosevic (interprétation): Mais, c'est vous qui interprétez la chose

6 de cette façon-là! Tous les Serbes vivaient dans un Etat pendant que la

7 Yougoslavie existait, tous les Croates vivaient dans un Etat pendant que

8 la Yougoslavie existait. Encore aujourd'hui, les problèmes des Croates de

9 Bosnie sont beaucoup plus importants qu'ils ne le pensent, car ils ne

10 peuvent plus évidemment faire éduquer leurs enfants à Sarajevo, mais ils

11 doivent les envoyer à Zagreb ou à Split. Autant puis-je dire pour les

12 Musulmans qui résidaient dans le cadre d'un seul Etat. Voilà la raison

13 pour laquelle je disais que la Yougoslavie était bonne pour tous les

14 peuples yougoslaves.

15 M. le Président (interprétation): Quelle est la question, Monsieur

16 Milosevic? Quelle est la question? Quelle est la question?

17 M. Milosevic (interprétation): Ma question était notamment une tentative

18 d'apporter un éclaircissement. Vous venez de prononcer cette phrase qui

19 est tout à fait exacte et qui est tout à fait humaine et tout à fait

20 raisonnable. Vous avez même dit que ceci devait être lié à ces propos et

21 ce discours de Kosovo Polje. Le discours de Kosovo Polje, dites-vous, est

22 un discours fort bon, alors que c'est le contraire ce qu'on dit ici.

23 Qui c'est qui vous a inculqué tout cela?

24 M. le Président (interprétation): Le témoin a répondu à cela. Non,

25 Monsieur Milosevic, vous ne pouvez continuer à tenir ces discours.

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1 M. Milosevic (interprétation): Et comment! J'ai encore trois heures à ma

2 disposition demain, Monsieur May.

3 M. le Président (interprétation): Avez-vous d'autres questions pour le

4 témoin?

5 M. Milosevic (interprétation): Oui, je vais de l'avant.

6 Bien. Donc, malgré le fait que les Serbes n'ont pas été objets de menaces

7 militaires depuis la Croatie alors que, comme vous dites, vous, leurs

8 villages étant incendiés, ils ont fini par fuir les lieux. Si je comprends

9 bien, d'après vous, ils devaient y rester, faire la guerre et ils auraient

10 eu des chances de sauvegarder et de préserver leurs maisons? Peut-être

11 auraient-ils pu être accusés, eux aussi, d'avoir perpétré une agression

12 contre leurs propres maisons?

13 Témoin C-037 (interprétation): Puis-je dire un mot?

14 M. le Président (interprétation): Oui, vous êtes censé faire une

15 déposition, même si ça ne semble pas être le cas.

16 Témoin C-037 (interprétation): Monsieur Milosevic, encore aujourd'hui, je

17 pense qu'il n'y avait pas de raisons pour lesquelles ces gens-là devaient

18 quitter les lieux, parce qu'il y a pas mal d'arguments à l'appui de ce que

19 je dis.

20 Là où les Serbes se trouvaient en Croatie, dans leurs villages, dans

21 lesquels villages il n'y avait pas de conflit, les villages sont restés

22 intacts. Par conséquent, si les Serbes n'avaient pas quitté les lieux, à

23 ce moment-là -comme ils n'ont pas quitté les lieux dans le sud de Pakrac-,

24 eh bien, tout aurait pu rester intact.

25 Je ne justifie pas les représailles qui ont eu lieu contre les gens, mais

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1 ce n'est pas seulement la concentration des forces armées qui les a

2 expulsés, mais il n'y avait pas de bonne volonté également auprès des

3 Serbes pour rester. Et l'on ne peut pas vivre uniquement de la volonté

4 d'autrui, on doit pouvoir vivre de sa propre volonté, volonté de

5 sauvegarder ce qui t'appartient.

6 Et lorsque je dis que ces gens-là devaient rester là-bas, ce n'était pas

7 que je voulais dire qu'ils devaient commettre des crimes, faire quoi que

8 ce soit de ce genre, mais il fallait se défendre. Et je crois que la

9 Croatie, dans de telles circonstances, n'aurait pas pu pénétrer dans ces

10 régions de la Krajina. Et ce qui s'est passé par la suite, c'est une

11 histoire à part.

12 M. Milosevic (interprétation): Bon, à vous écouter comme ça, puis-je vous

13 demander si les Serbes en Croatie ont fait autre chose que de se défendre

14 en tant que résidents des territoires où ils avaient vécu des siècles

15 durant? Est-ce qu'ils sont allés ailleurs pour envahir d'autres

16 territoires ou est-ce qu'ils défendaient leur territoire?

17 Témoin C-037 (interprétation): Près de Drnis, ils sont allés pour envahir

18 des maisons qui n'appartenaient pas vraiment à des Serbes. Il y avait des

19 cas pareils à Kordun, à Banija également. Le problème, c'est que là où les

20 Serbes étaient au pouvoir, les Serbes ne devaient surtout pas incendier

21 les villages croates et ils ne devaient surtout pas expulser des civils

22 croates, surtout pas les tuer.

23 Je ne dis pas qu'il y a eu une bonne confiance et une bonne entente entre

24 eux, mais, vous savez, à Donji Caglic par exemple, lorsque l'armée était

25 venue et lorsqu'il y avait eu 10 ou 15 extrémistes, on aurait pu faire

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1 autre chose que de faire la guerre; parce que livrer un combat pour

2 sauvegarder ses propres biens, évidemment, ceci peut justifier. Mais faire

3 du mal à autrui rien que pour se sauvegarder soi-même, ceci n'est pas bon

4 non plus. Et j'ai des raisons pour penser ainsi, parce que moi-même, je

5 suis né en Croatie.

6 Mes parents, eux aussi. Mes parents ont connu la Deuxième Guerre mondiale.

7 Tous les membres de leur famille ont été tués au cours de la guerre.

8 Enfants qu'ils étaient, mes parents étaient détenus dans le camp oustachi.

9 Mais c'est dans ce camp oustachi que mes parents ont été sauvés par des

10 Croates.

11 Voilà, nous avons de ces exemples dans notre histoire commune où nous nous

12 sommes entre-égorgés, mais il y a eu des épisodes où nous nous sommes

13 sauvés les uns les autres. C'est ce que je dis en ce moment-ci.

14 Pour ma part, je pense –et tel est mon point de vue- que nous, Serbes,

15 avons dû faire davantage et mieux pour qu'il n'y ait pas de tels

16 événements. Il s'agit de mon attitude à moi. Ceci ne peut pas, évidemment,

17 apporter de changements. Mais je me souviens de ce que mon père me disait.

18 Il me disait: "Ecoute! Les Oustachis ont tué tous les membres de ma

19 famille, mais ce sont les Croates qui m'ont sauvé du camp des Oustachis".

20 Et il avait 12 ans à cette époque-là.

21 Par exemple aussi, à cette époque-là, les Serbes regagnaient le rang des

22 partisans tout comme des Croates. Je crois que c'est un exemple

23 illustratif qui aurait pu nous servir d'exemple, cette fois-ci, pour que

24 l'on ne s'entrégorge pas.

25 Voilà comment se présente le cours de ma réflexion.

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1 Question: Je crois que le cours de vos réflexions est bon, juste. Et je

2 crois que personne ne devrait avoir le droit de tuer quelqu'un parce qu'il

3 a été exposé à un danger; à moins que ce ne soit évidemment une action à

4 son corps défendant. Mais, pour ce qui est de ces excès, vous parlez de

5 villages près de Drnis…

6 Réponse: Près de Benkovac aussi.

7 Question: Oui, Benkovac. Mais vous n'avez toujours pas répondu à ma

8 question, à savoir: avec toutes les exceptions que personne ne devrait

9 pouvoir justifier… il ne faut pas les justifier et l'on ne devrait jamais

10 accepter de justification de tels exemples d'exactions.

11 Alors, pourrais-je dire que, pendant ces années de crise, c'est exact de

12 dire qu'en règle générale les Serbes n'ont fait que défendre le seuil de

13 leur propre maison et les territoires dans lesquels ils résidaient? Avec,

14 évidemment, l'existence de tous ces excès que personne ne saurait

15 justifier. Mais, généralement parlant, est-ce exact de dire que les Serbes

16 étaient là pour défendre leur village, le seuil de leur propre maison,

17 chacun d'eux, etc.? Est-ce exact?

18 Réponse: En général, oui.

19 Question: Bon. Essayons de tirer au clair tout cela. Pour ce qui est des

20 crimes, évidemment les crimes ne sont justifiés par personne.

21 Le Parlement croate adopte en 1990 l'amendement n°68 portant abolition de

22 l'alphabet cyrillique, n'est-ce pas?

23 Quelle fut la réaction en Slavonie occidentale par la suite, étant donné

24 cet événement? Est-ce que vous pensez, pour parler de cette atmosphère due

25 à la peur, qu'il y a eu une évolution en escalade ou, dirai-je, ceci

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1 n'aurait pas dû être considéré comme étant des changements et événements

2 dramatiques, mais à la longue et considéré dans une optique plutôt

3 prolongée, ceci pourrait être dramatique? Dites-nous quelque chose là-

4 dessus.

5 Réponse: Oui, en effet, ceci a eu un impact négatif et il a été ressenti

6 par les Serbes ainsi, d'autant plus que les Serbes était un peuple

7 constitutif et en cohabitation avec les Croates, l'emploi de l'alphabet

8 cyrillique étant à égalité. Les Serbes se sont considérés en cela comme

9 discriminés. Ils voulaient que leur alphabet soit à égalité. Ils ont vécu

10 pendant de longues années dans une telle situation. Voilà la raison pour

11 laquelle ils ont été troublés.

12 M. Milosevic (interprétation): (Inaudible.)

13 M. le Président (interprétation): Encore. La question n'a pas été

14 entendue. Ceci doit être la dernière question.

15 M. Milosevic (interprétation): Les événements qui se sont déroulés par la

16 suite, après ce premier signal d'alarme, ont-ils été la source d'une

17 nouvelle atmosphère de peur en escalade où les gens se sentaient menacés,

18 situation dans laquelle, vous avez dit vous-même, les gens n'ont pu réagir

19 que de façon spontanée?

20 Témoin C-037 (interprétation): Oui, surtout lorsque les Serbes ont vite

21 fini par comprendre qu'ils avaient perdu leur qualité d'élément

22 constitutif, lorsqu'ils ont compris qu'ils devenaient une minorité. Qui

23 dit minorité dit hommes et femmes de moindre valeur. Alors, on disait le

24 contraire, que des Serbes auraient pu être privilégiés, occupant telle ou

25 telle fonction, etc.

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1 Voilà comment les Serbes ont considéré cela, vraiment comme une attaque.

2 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant suspendre, parce

3 que nous allons manquer de bobines.

4 M. Kwon (interprétation): Un point simplement: je dois présenter des

5 excuses pour mon erreur, à l'assistante de Mme la Greffière. Je me rends

6 compte que ce n'était pas "résumé de récolement" que l'accusé citait et la

7 déclaration écrite est datée des 1er, 2, 3 et 4 mai. Donc nous avons un

8 meilleur document.

9 M. le Président (interprétation): L'audience est levée jusqu'à demain

10 matin, 9 heures du matin.

11 (L'audience est levée à 16 heures 16.)

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