Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 23 octobre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 16.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Nous ne pourrons pas poursuivre

6 l'audition du témoin en ce moment même. Par conséquent, il semble

7 approprié d'aborder quelques questions qui sont, de toute façon, en

8 suspens. Il y a quelques arguments de nature juridique à présenter en

9 rapport avec le témoin C-036.

10 Nous sommes saisis d'une requête en application de l'Article 92 bis. Il

11 s'agirait d'aborder certaines parties de sa déposition en vertu de cet

12 article du Règlement, aussi par rapport à la production de documents.

13 L'Ami de la Chambre a déposé des écritures. Nous allons l'entendre à

14 l'audience et nous allons entendre aussi ce qu'a à dire l'accusé et ce que

15 l'accusation veut présenter comme arguments.

16 Maître Kay, merci d'avoir déposé ce document. A l'exception, me semble-t-

17 il, du fait que les déclarations sont recevables au motif certain que ces

18 déclarations ont trait à des contextes politiques ou militaires, mais vous

19 demandez si ce moyen de preuve devrait être reçu. Et c'est une question de

20 pouvoir discrétionnaire à appliquer.

21 M. Kay (interprétation): Au paragraphe 13 de nos écritures, nous énonçons

22 divers points qui, à notre avis, devaient être pris en compte par la

23 Chambre de première instance. Ils ont trait à l'admission sous cette forme

24 de ce moyen de preuve. Nous avons, de toute façon, l'élément supérieur et

25 général de l'avis au public, vu la nature tout à fait pertinente de ce

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1 moyen de preuve et de cette audition, puisqu'il s'agit de questions

2 centrales au plan politique dans ce procès. On verra.

3 M. le Président (interprétation): Des exemples de cela ou un exemple tout

4 du moins: pouvez-vous nous en donner un? Vous dites que c'est un élément

5 central, mais pourriez-vous nous donner un exemple?

6 M. Kay (interprétation): Si vous prenez la partie de la pièce qui fait

7 état notamment de la création de la région autonome serbe de Krajina, à

8 cet endroit, vous allez trouver toute une série de pièces.

9 M. le Président (interprétation): C'est quelle page?

10 M. Kay (interprétation): Page 6.

11 M. le Président (interprétation): De la déclaration ?

12 M. Kay (interprétation): Oui, aux fins du 92bis. Vous le savez, après

13 avoir lu le mémoire préalable au procès et l'Acte d'accusation, la

14 participation de l'accusé à ces questions relève de la thèse soutenue par

15 l'accusation contre lui.

16 Qu'avons-nous ici? C'est une foison de pièces. Il y en a en tout 75, qui

17 présentent de façon détaillée toute l'évolution de ces affaires dès le

18 début, depuis la première pièce jusqu'à la fin.

19 Le témoin lui-même fait un commentaire dans le cadre de cette déclaration

20 qu'il fournit à propos de certaines facettes de cette création.

21 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous aider sur ce point?

22 Je vois le document. Nous allons bien sûr revenir sur ce document dans un

23 instant. Nous sommes conscients du nombre de documents. Nous en tiendrons

24 compte. Cependant, à quel genre de commentaires pensiez-vous? Commentaires

25 faits par les témoins, dites-vous?

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1 M. Kay (interprétation): Prenons la partie de sa déclaration où il fait

2 référence à Radovan Karadzic, pages 1 et 2. Ce sont peut-être là des

3 questions sur lesquelles l'accusé va vouloir poser des questions à propos

4 de la création de ces parties.

5 M. le Président (interprétation): Bien sûr, libre à lui de poser des

6 questions; cela va de soi.

7 M. Kay (interprétation): Certes, mais ça sera difficile pour lui, parce

8 que, si ces documents apparaissent simplement dans le prétoire, alors

9 qu'il n'y aurait pas eu au préalable d'explication fournie à leur

10 encontre, dans de telles circonstances, comment voulez-vous, Messieurs les

11 Juges, vous saisir de ces moyens de preuve? Il y a un vide au fond.

12 Nous avons, certes, une déclaration de la part de ce témoin qui fait à peu

13 près 10 pages. Mais il y a deux classeurs de pièces qui présentent de

14 façon détaillée la création de ces différents conseils et des régions en

15 tant que telles, les municipalités, sans pour autant fournir la moindre

16 explication quant au contexte.

17 Nous le voyons à la lecture du mémoire préalable au procès et de l'Acte

18 d'accusation. La politique qui était en filigrane de toute cette évolution

19 fait partie de la thèse soutenue par l'accusation, contre l'accusé.

20 M. Robinson (interprétation): Veuillez étoffer cet argument, parce qu'il

21 m'intéresse vivement: c'est le caractère central de ces moyens de preuve

22 pour venir à l'appui de la thèse de l'accusation.

23 Est-ce que vous dites que c'est central dans la mesure où la création de

24 ces entités montre qu'il y a eu établissement d'une entreprise criminelle

25 conjointe, avec participation de l'accusé dans celle-ci?

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1 M. Kay (interprétation): Tout à fait. Des noms sont mentionnés et, en

2 particulier, un nom est mentionné qui est en rapport direct avec le

3 présent témoin. Et c'est ce nom qui est intéressant. Je n'en dirai pas

4 plus en audience publique. Manifestement, là, il y a un élément de

5 participation qui est central. L'accusé, lui-même, va vouloir interroger

6 le témoin sur ces questions centrales. Or c'est une question et une

7 entreprise tout à fait ardues si l'on n'a comme seul moyen que la

8 production par ce témoin de ces deux classeurs, avec une déclaration qui

9 contient, dans une certaine mesure, un commentaire.

10 Mais, la Chambre elle-même, n'a pas reçu la moindre explication. Il est

11 donc difficile de relever ou d'appréhender ces éléments à partir de la

12 déclaration. Tout ceci est dans le vide.

13 M. le Président (interprétation): Mais dans un procès de ce type, avec

14 autant de documents, nous ne pouvons pas être tenus uniquement par les

15 pratiques de systèmes nationaux, manifestement, ou il est probable que,

16 dans un système national, on recevrait ces éléments de preuve viva voce.

17 Or, ici, nous nous faisons face à toute une montagne de documents et il

18 faut bien résoudre ce problème. Ceci, bien sûr, ne doit pas porter

19 préjudice à l'équité du procès. Ça, c'est essentiel.

20 Ce qui est dit ici, c'est qu'il est possible de lire ces documents, de

21 lire cette déclaration préalable et il est possible de procéder à un

22 contre-interrogatoire. Par conséquent, sans l'ombre d'un doute, est-il

23 dit, il n'y a aucun préjudice au principe de l'équité. Au contraire, il y

24 a des avantages puisque ce sera plus rapide.

25 On ne peut pas demander au témoin de produire 75 documents; c'est vraiment

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1 un processus très long et je ne sais pas si on gagnerait quoi que ce soit

2 à ce que le témoin nous les présente, nous les produise plutôt que ce ne

3 soit par le biais d'une déclaration. Evidemment, moi, je préfère qu'un

4 témoin produise chacun des documents qu'il a l'intention de produire, mais

5 il faut voir quelles sont les manières plus constructives, plus positives

6 de travailler pour aller plus vite, pour autant que ceci n'entame pas

7 l'équité du procès.

8 M. Kay (interprétation): Mais le principe de l'intérêt du public, de

9 l'opinion publique, est essentiel -et j'insiste là-dessus- puisque, ici,

10 on parle de la politique qui régit le développement de ces Régions

11 autonomes, de ces municipalités et de tout ce que ceci a signifié. Et je

12 crois que ceci a vraiment été un leitmotiv depuis le début du procès.

13 M. Robinson (interprétation): On pourrait dire cependant que ce n'est pas

14 quelque chose d'historique puisque ceci, comme vous l'avez dit, est

15 quelque chose de central. Ça fait partie de la res gestae. Moi, je ne vois

16 pas que c'est là quelque chose d'historique. C'est à ce point proche des

17 événements, au moment où ils se sont produits, qu'on ne peut pas qualifier

18 ceci d'historique.

19 M. le Président (interprétation): Oui, je serais d'accord. C'est

20 politique, ça c'est certain, et ça, c'est un des termes mentionnés dans le

21 Règlement de procédure et de preuve même si, s'agissant de cette facette-

22 ci du procès, c'est peut-être plus central que ce qu'on admet d'habitude.

23 Cependant, revenons, si vous le voulez bien, à ce que je disais à propos

24 des documents.

25 Pourquoi avons-nous besoin d'un témoin qui va parcourir toute une liste de

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1 documents, documents que nous, nous pouvons lire? La Chambre peut fort

2 bien se saisir de ces documents.

3 Prenons, si vous le voulez bien, la page 3.

4 (Les interprètes précisent qu'ils n'ont pas les textes.)

5 M. Kay (interprétation): Du document ou de la déclaration?

6 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, la déclaration. Mais vous

7 avez les documents, n'est-ce pas?

8 M. Kay (interprétation): Oui.

9 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas, nous, les documents,

10 donc vous êtes peut-être mieux loti que nous. Mais moi, je me contente de

11 voir la page 3. Ou est-ce qu'il serait préférable de voir la page 6, celle

12 que vous avez déjà évoquée?

13 M. Kay (interprétation): Oui.

14 M. le Président (interprétation): Ce que je vois, c'est qu'on commence par

15 une notification du Président de la présidence.

16 Document suivant: c'est un statut ou règlement intérieur de la SAO de

17 Krajina, une décision de mise en application de ce statut.

18 Autant de documents de ce genre qui, à mon avis, se passent de

19 commentaires. S'il y a des questions d'interprétation qui se posent, on

20 peut fort bien les poser dans le cadre du contre-interrogatoire. Mais il

21 se peut que vous ayez des arguments en sens inverse?

22 M. Kay (interprétation): La participation du témoin à l'élaboration de ce

23 document est apparente, et ceci, dans beaucoup de documents. Je ne vais

24 pas être plus explicite pour le moment.

25 Les modalités de production et de création de ces documents au moment de

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1 la création de cette région politique, ces modalités vont peut-être

2 s'avérer d'une grande signification dans ce procès, surtout quand on pense

3 à savoir qui a commis quoi et s'agissant des pouvoirs dont devaient être

4 dotées ces entités.

5 Mais je comprends bien que ce n'est pas là quelque chose, comme le disait

6 le Juge Robinson, d'historique. Manifestement, cependant, ce sont des

7 éléments politiques. C'est le contexte, un contexte qui a un rapport

8 étroit avec la politique et avec le déploiement, l'expression du pouvoir

9 politique dans cette région, mais dans d'autres également.

10 Le mémoire préalable au procès, les déclarations liminaires du Procureur

11 et l'Acte d'accusation montrent clairement que l'accusé est tenu

12 responsable parce que, soi-disant, il aurait tiré toutes les ficelles.

13 Des documents de ce type qui mentionnent de façon détaillée le contexte

14 politique de cette région, la structure dans laquelle la participation de

15 l'accusé est apparente, eh bien, ceci doit faire l'objet d'explications

16 plus claires de la part de l'accusation.

17 M. Robinson (interprétation): J'aurais tendance à être d'accord avec vous.

18 Je vous ai dit que ce n'était pas historique, mais je voulais poursuivre

19 en disant ceci: je pense que le terme "politique" qu'on trouve dans le

20 Règlement n'est pas à sa place, parce que les questions politiques sont

21 tout à fait différentes des questions historiques, au sens du passage du

22 temps, au sens temporel.

23 Quelquefois, des questions d'ordre historique peuvent avoir le caractère

24 que vous leur avez attribué et je pense que ceci porterait… ou serait

25 bénéfique à tout le monde. Il serait utile d'avoir ces éléments de preuves

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1 présentés dans le cadre d'un interrogatoire principal.

2 Il se peut… Et le témoin n'aura peut-être pas besoin de se voir guider par

3 des questions portant sur l'entièreté des documents, sur la totalité de

4 ceci; peut-être que ça pourrait se faire pour certains documents alors que

5 les autres pourraient être versés au dossier.

6 M. Kay (interprétation): L'accusation a déjà présenté sa thèse dans la

7 requête qu'elle a déposée. Elle décrit l'évolution politique de zones

8 serbes de la Croatie à partir de 1990 jusqu'au début de 1992. Dans ce

9 contexte, la déposition de ce témoin, si elle se fait en application de

10 l'Article 92bis, va produire cette tranche de documents politiques, cet

11 ensemble de documents politiques. Mais, pour ce faire, il faut que

12 l'accusation présente une thèse. Sous quelle forme? Eh bien, en produisant

13 un témoin qui dira comment elle a vu la chose.

14 M. le Président (interprétation): Mais je m'interroge. Est-ce que nous

15 n'attribuons pas trop d'importance à un moyen de preuve présenté

16 oralement? Dans quelle mesure ceci permettra-t-il d'avoir une déclaration

17 qui soit meilleure? Qu'est-ce qu'il y a comme avantage à avoir l'oralité

18 des débats et d'une déposition pour une question telle que celle-ci?

19 Je comprends bien ce qu'il en est, disons, lorsqu'on a des événements, des

20 conversations. A ce moment-là, c'est important d'avoir un témoin présent à

21 l'audience. Mais ici, on se contente de parler de l'évolution et de la

22 participation de certaines institutions; et je pense que les documents le

23 disent peut-être mieux qu'un témoignage oral.

24 M. Kay (interprétation): Ce récit peut se faire, bien sûr, par le biais

25 des documents. Mais ce qui est en jeu ici, c'est la présentation et le

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1 soutien d'une thèse, le fait que des allégations sont formulées, si ceci

2 est versé au dossier. Or, jusqu'à présent, aucune thèse n'a été formulée

3 de façon explicite à l'encontre de l'accusé. Comment dès lors va-t-il y

4 répondre? Nous avons eu des déclarations liminaires, des déclarations de

5 témoin. Ce témoin-ci est essentiel et central pour la production de ces

6 éléments qui vont de 1990 à 1992.

7 M. le Président (interprétation): Mais que dirait-il dans le débat, dans

8 les débats? Je comprends au niveau du contre-interrogatoire; mais s'il

9 arrivait ici en interrogatoire principal, qu'est-ce que ça ajouterait à la

10 déclaration écrite qu'il a faite? Qu'est-ce que vous anticipez?

11 M. Kay (interprétation): Ce n'est pas mon témoin.

12 M. le Président (interprétation): Oui, mais on dit: voilà, vous parlez de

13 présentation de thèse; et ceci revient à l'accusation pas au témoin. Ce

14 que je vous demande -et c'est une question réthorique-, je vous demande

15 dans quelle mesure le fait d'avoir le témoin à l'audience serait supérieur

16 ou plus important à ce qui est couché dans les documents? A ce moment-là,

17 bien sûr, il reviendrait aux Juges de trancher sur ce point.

18 M. Kay (interprétation): La thèse que l'accusation présente, elle le fait

19 par le biais des dépositions du témoin. Pour le moment, nous avons reçu

20 ces thèses dans le cadre du mémoire préalable au procès, dans la

21 déclaration liminaire, dans l'acte d'accusation. Mais cette thèse, elle

22 doit être corroborée par des preuves pour pouvoir avoir un poids

23 quelconque.

24 Des assertions étaient formulées contre l'accusé. Et maintenant, on

25 essaie, de façon des plus sommaire, de corroborer tout ceci par dix pages

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1 de déclarations et par deux classeurs de documents qui comprennent des

2 documents très circonstanciés, politiques, historiques notamment. Là, vous

3 avez quelque chose, un défi que ne peut pas relever l'accusé.

4 M. le Président (interprétation): Je suppose que ce n'est pas une question

5 qui se pose. Ici, nous parlons de documents; le témoin doit venir déposer

6 à l'audience afin que les Juges puissent déterminer s'il dit la vérité à

7 propos de ces documents et s'il parvient à apporter une preuve. Mais, ici,

8 ce n'est pas le cas.

9 Alors, ce que vous dites c'est ceci: c'est que l'accusation devrait

10 parcourir les documents, nous montrer la signification qu'il faut

11 attribuer à ce document plutôt que de se contenter de verser un document

12 et de dire aux Juges: "Voilà, examinez le document à tel ou tel

13 paragraphe".

14 M. Kay (interprétation): Tout à fait. Tout à fait, pour le moment. C'est

15 tout à fait dénué d'intérêt, sans aucun sens. Et, à notre avis, ceci

16 n'aide pas la Chambre de première instance, surtout au regard des

17 questions qui lui sont posées.

18 (Les Juges se consultent sur le siège.)

19 M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Kay. A moins que vous

20 n'ayez quelque chose à ajouter.

21 Oui, Monsieur Milosevic, vous voulez intervenir?

22 M. Milosevic (interprétation): Vous savez que je suis catégoriquement

23 contre l'application de l'Article 92bis qui, au fait, ayant en vue la

24 pratique qui est la vôtre au cours des mois qui viennent de s'écouler,

25 s'est réduit à la possibilité ou l'impossibilité qui sont les miennes de

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1 contre-interroger les témoins. Cela, pratiquement dit, veut dire qu'on

2 vient ici pour déverser une énorme quantité de documents d'allégations et

3 d'assertions pour ensuite rendre impossible l'interrogation du témoin.

4 Dans ce cas précis, nous voyons que le témoin n'a guère plus besoin de

5 témoigner; il s'agit de faire venir le témoin avec des documents.

6 Alors, on se demande quelle serait la fin de contre-interroger le témoin.

7 Etant donné la fonction qui est la sienne, le témoin n'est plus seulement

8 un facteur ou un archiviste qui se serait occupé de tel ou tel document,

9 et lesquels documents que les instances et organes de la Republika Srpska

10 avaient produits depuis la création des toutes premières instances de la

11 Région autonome serbe jusqu'à la Republika Srpska.

12 Ce que M. Kay vient de dire je considère que c'est fort opportun et

13 approprié.

14 Je voulais également relever la question clé qui me semble apparaître ici:

15 l'impossibilité qui est la mienne de contre-interroger le témoin. C'est ce

16 que vous devez à voir en vue.

17 Je ne les ai pas encore vus, ces documents, mais si vous avez 70

18 documents, vous devez me permettre de poser des questions au témoin sur

19 chacun des documents pour lui poser des questions au sujet des

20 corrélations dans lesquelles ces documents se trouvent ou pour lui

21 demander à quel degré, d'après lui, dans tous les événements, se seraient

22 trouvées impliquées les instances, le Gouvernement de la Serbie, moi-même,

23 etc.

24 Car il n'est certainement pas possible de voir la Serbie installée sur un

25 tiers du territoire dans lequel se trouve vivre le peuple serbe. Ce n'est

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1 pas que la République serbe les ait installés là-bas en 1990; ces gens-là

2 y sont pour vivre et résider pour des siècles durant. Nos efforts visaient

3 à leur permettre d'y subsister, survivre et non pas à les voir privés,

4 déchus de leurs droits.

5 Je crois que c'est un exemple typique de témoin qui me semble tout à fait

6 inapproprié pour être contre-interrogé à la lumière et au titre de

7 l'Article 92bis. Evidemment, s'il est là pour présenter sa déclaration, il

8 faudrait pour autant me permettre de le contre-interroger; pour le faire,

9 je devrais prendre connaissance en détail de tout ce qu'il aura à dire.

10 Je crois qu'il faudra rejeter cette requête suivant laquelle le témoin

11 devrait être interrogé ou contre-interrogé sous cette forme abrégée, mais

12 il faudrait pouvoir interroger et contre-interroger le témoin au sujet et

13 sous tous les aspects de ses dépositions et témoignages.

14 (Les Juges se consultent sur le siège.)

15 M. le Président (interprétation): Oui, nous voyons l'heure qui passe. Je

16 pense que maintenant, nous pouvons revenir au témoin. Ce que nous allons

17 faire à huis clos partiel.

18 Mais auparavant, permettez-moi d'ajouter ceci: Monsieur Nice, nous allons

19 reporter la présentation de vos arguments jusqu'à la fin de la matinée.

20 Et nous allons maintenant passer à huis clos partiel.

21 (Audience à huis clos partiel à 9 heures 45.)

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5 (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 52.)

6 Mme Anoya (interprétation): Nous sommes maintenant en audience publique.

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, si vous avez besoin de

8 contacter le témoin à propos de ces questions pendant une éventuelle

9 pause, libre à vous de le faire, bien sûr.

10 Monsieur Milosevic, le temps est venu pour vous de procéder au contre-

11 interrogatoire. Vous aurez deux heures et demie pour ce faire.

12 Veuillez garder à l'esprit que, s'il y a des questions susceptibles de

13 révéler l'identité du témoin, sous une forme ou une autre, il faut que

14 vous les posiez à huis clos ou plutôt à huis clos partiel, surtout

15 s'agissant de questions abordées par le témoin hier à huis clos partiel;

16 elles seront bien sûr abordées, vos questions, à huis clos partiel aussi.

17 Oui, vous avez la parole.

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9 M. le Président (interprétation): Mais c'est précisément ce qui est ici en

10 cause; vous le savez pertinemment, tout ceci a été dit à huis clos

11 partiel. Nous n'allons pas entendre le reste de votre objection, elle est

12 inutile.

13 La Chambre, se fondant sur la nécessité de protéger le témoin, décide de

14 ce qui doit se faire à huis clos partiel. En ce qui vous concerne,

15 l'équité du procès signifie aussi que vous devez être en mesure de

16 procéder à un contre-interrogatoire. Il n'y a aucun préjudice si vous le

17 devez faire à huis clos partiel plutôt qu'en audience publique. Je suppose

18 que le préjudice dont vous pourriez faire état, c'est qu'il ne vous est

19 pas possible de comparaître en public, mais ce n'est pas véritablement un

20 préjudice.

21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, à réitérées reprises, je vous

22 ai dit que le seul motif pour lequel je saisis la possibilité qui m'a été

23 donnée de contre-interroger le témoin, c'était le motif qui consistait à

24 faire entendre en public ce qui était la vérité.

25 M. le Président (interprétation): Ecoutez, Monsieur Milosevic, il y a une

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1 chose que vous ne comprenez pas. La Chambre, c'est elle qui juge dans ce

2 procès, ce n'est pas le public qui juge. Et, dans la mesure du possible,

3 toutes les séances doivent bien sûr se faire en audience publique. Ça va

4 de soi. C'est un des piliers; un pilier: c'est le pilier fondamental de

5 tout système judiciaire et donc aussi de celui-ci.

6 Mais au regard de ceci, comprenez qu'il y a des problèmes en matière de

7 sécurité pour les témoins et, quelquefois, ceci prime sur la nécessité

8 d'avoir une audience publique sur l'oralité des débats. Ce que je dis,

9 c'est que ceci n'entame pas l'équité du procès; parce que le procès se

10 poursuit; vous pouvez contre-interroger le témoin même si ceci se fait à

11 huis clos partiel. Donc ceci n'a aucune incidence sur l'équité du procès.

12 Vous ne devez pas vous préoccuper savoir si les audiences se font

13 publiquement ou à huis clos partiel. Ce que vous devez faire, c'est vous

14 concentrer sur votre contre-interrogatoire, qu'il se fasse à huis clos

15 partiel ou pas.

16 On vous a dit que les questions abordées doivent être abordées aujourd'hui

17 par vous à huis clos partiel aussi, ne l'oubliez pas. Nous perdons du

18 temps sur ces questions, et ça c'est déjà fait plusieurs fois. De toute

19 façon, ce temps sera repris sur le temps consacré au contre-

20 interrogatoire.

21 M. Nice (interprétation): Une chose. L'observation de l'accusé sera bien

22 sûr expurgée parce qu'il semblait vouloir révélé quelque chose qu'il avait

23 dit à huis clos partiel. Est-ce qu'il n'est pas utile de dire au nombre

24 limité de personnes qui ont entendu ceci, de dire à ces personnes que la

25 publication de ce qui n'a pas été entendu par l'opinion publique serait en

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1 fait un outrage et qu'il faut voir ce qu'il en est de leur responsabilité?

2 M. le Président (interprétation): Oui. Les personnes présentes dans la

3 galerie du public ont entendu cet avertissement, avertissement qui est

4 relayé par la Chambre de première instance.

5 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

6 (Contre-interrogatoire du Témoin C-020 par l'accusé M. Milosevic.)

7 M. Milosevic (interprétation): Etant donné que cette question touchant à

8 l'identification du témoin a été traitée d'une façon aussi vague, je dirai

9 que je ne suis plus sûr dans quelle mesure une quelconque question que je

10 serais capable de lui poser ne serait pas susceptible de le révéler, étant

11 donné ce qu'il a dit, lui, en déposant ici. Mais pour essayer au moins de

12 le faire, je voudrais faire ce contre-interrogatoire du témoin en audience

13 publique, mais pas en audience secrète. Les procès secrets, je dois le

14 dire, c'est quelque chose qui tient d'un passé qui ne saurait être

15 évidemment un titre de gloire de qui que ce soit. Or toute cette

16 spéculation ou opération que vous considérez comme étant le procès,

17 d'après vous, pourrait être traitée comme appartenant à ce passé.

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25 Témoin C-020 (interprétation): Oui, c'est exact.

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1 M. le Président (interprétation): Est-ce que ceci a été évoqué en audience

2 publique?

3 (Le Procureur, M. Nice, fait un geste négatif.)

4 Pour ce témoin, je pense qu'il faudra passer à huis clos partiel. Du

5 moins, je précise ce que je voulais dire: pour ces questions, il faudra

6 passer à huis clos partiel.

7 (Huis clos partiel à 10 heures.)

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10 (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 35.)

11 M. le Président (interprétation): Nous avons commencé avec un léger retard

12 ce matin. Donc, nous proposons que la pause se tienne à 11 heures moins 5,

13 qu'elle dure 25 minutes, et qu'ensuite, nous reprenions nos débats de 11

14 heures 20 jusqu'à 13 heures.

15 Oui, Monsieur Milosevic, vous pouvez poursuivre.

16 M. Milosevic (interprétation): Nous sommes en audience publique en ce

17 moment?

18 M. le Président (interprétation): Oui.

19 M. Milosevic (interprétation): Vous dites que vous êtes allé vous battre

20 dans les environs de Ozren. Dites-moi pour quelle raison avez-vous pris

21 cette décision?

22 Témoin C-020 (interprétation): La première raison, c'est que je ne me

23 sentais pas en sécurité. Je pensais qu'il pourrait y avoir des problèmes

24 en raison du fait que j'avais quitté ce groupe. Et aussi la deuxième

25 raison, c'est parce que je suis d'origine d'Ozren.

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1 Question: Donc je crois comprendre que votre principale motivation,

2 c'était de chercher à vous protéger contre un danger, une menace, venant

3 du groupe que vous veniez d'abandonner?

4 Réponse: A 80%.

5 Question: Bien, à 80%. Mais y avait-il un autre motif, en dehors de votre

6 désir de sauver votre peau, par rapport au danger que pouvait créer le

7 groupe que vous veniez de quitter?

8 Réponse: Oui, parce que moi, je suis originaire à peu près de la région où

9 j'avais l'intention d'aller en tant que volontaire, et il y avait très peu

10 de volontaires qui y allaient. J'ai sans doute été le premier.

11 Question: Très bien. Vous avez dit, vous avez mentionné les noms de

12 certaines personnes responsables des actes commis à Lovas?

13 Réponse: C'était une réponse à une question qui m'était posée au sujet du

14 fait de savoir si j'avais entendu des rumeurs.

15 Question: Il est vrai qu'aucune des personnes en question n'était membre

16 de la JNA ou du ministère de l'Intérieur de Serbie, n'est-ce pas?

17 Réponse: En effet, toutes ces personnes étaient des habitants de la

18 région, en tout cas pour celles dont j'ai donné les noms.

19 Question: Très bien. Vous dites qu'après les combats de Vukovar, la JNA a

20 enfermé un grand nombre de Croates dans des centres de regroupement de

21 Serbie, parce qu'elle souhaitait les évacuer de cette région craignant que

22 des membres de la Défense territoriale locale, dans les villages situés

23 autour de Vukovar, veuillent s'en prendre à ces personnes, les tuer. C'est

24 bien cela?

25 Réponse: Je n'ai pas dit exactement cela.

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1 Question: Eh bien, je vous en prie, dites-moi quelle était la situation?

2 Répondez à la question que je vous pose! Est-il vrai que les soldats de la

3 JNA ont sauvé des civils croates de risques éventuels et a également sauvé

4 des prisonniers croates du danger auquel ils auraient pu être exposés de

5 la part des habitants de la région?

6 Réponse: Oui, ça aussi, mais dans ma déclaration écrite, il est fait état

7 de l'interception d'un autobus et d'autres autobus qui ont pris une route

8 différente, une déviation.

9 Question: Donc l'incident dont vous parlez était, en fait, une tentative

10 de reprendre des prisonniers à l'armée; c'est bien cela?

11 Réponse: Oui, dans ce cas précis, oui.

12 Question: Mais êtes-vous au courant du fait que l'armée a y compris

13 modifié son itinéraire afin d'éviter de traverser des régions où un danger

14 pourrait exister pour les prisonniers en question où ils auraient risqué

15 d'être kidnappés?

16 Réponse: Oui, ils ont emprunté un autre itinéraire.

17 Question: A votre avis, est-ce que l'armée a fait cela pour sauver la vie

18 de ces personnes?

19 Réponse: Je crois, oui. En effet.

20 Question: Y a-t-il eu plusieurs situations de ce genre dans lesquelles les

21 populations locales ont bloqué la route pour empêcher l'armée d'emmener

22 les prisonniers et essayer de reprendre ces prisonniers à l'armée? Est-ce

23 que cela ne s'est passé qu'une seule fois ou y a-t-il eu plusieurs

24 incidents du même genre?

25 Réponse: J'ai entendu parler de quelques autres cas, mais je ne peux pas

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1 le confirmer avec certitude. En tout cas, je suis au courant avec

2 certitude d'un cas de ce genre.

3 Question: Est-il vrai qu'en rapport avec les événements de Lovas, les

4 officiers de la JNA sont intervenus auprès du Gouvernement de la Slavonie,

5 de Baranja et du Srem occidental en protestant?

6 Réponse: S'agissant de Lovas, j'ai entendu des rumeurs; j'ai entendu

7 parler d'opposition, mais opposant qui à qui? Je ne pourrais pas le dire

8 aujourd'hui avec précision.

9 Question: Bien. Je crois que c'est en public que vous avez dit qu'en 1993,

10 vous êtes devenu volontaire dans les rangs de la garde des volontaires

11 serbes de Zeljko Raznatovic, dit "Arkan", et que vous êtes parti pour la

12 Krajina?

13 Réponse: C'est exact.

14 Question: C'était après la chute de Maslenica, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Donc, concrètement, c'était après l'incursion des forces croates

17 dans les zones protégées par les Nations Unies, n'est-ce pas?

18 Réponse: Je ne sais pas si c'était une zone protégée, mais, en tout cas,

19 les Croates ont repris Maslenica et certains villages dans les environs

20 de…, sur le mont Velebit. Et il y a eu, à ce moment-là, mobilisation dans

21 toute notre région, c'est-à-dire dans la République serbe de Krajina et

22 les environs de Knin en particulier.

23 Question: Cette garde des volontaires serbes dont vous faisiez partie,

24 lorsqu'elle est arrivée sur le territoire de la République serbe de

25 Krajina, a été mise sous le commandement de l'armée de la Republika

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1 Srpska, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui, nous dépendions de l'armée de la Republika Srpska et c'est

3 elle qui nous donnait nos ordres.

4 Question: Estimez-vous que, du point de vue de la discipline militaire, du

5 point de vue de la façon dont les ordres étaient exécutés, estimez-vous

6 que ce que vous faisiez vous-même à l'époque -c'est-à-dire piller, tuer et

7 tous actes commis par vous-, estimez-vous qu'on peut les qualifier d'actes

8 criminels?

9 Réponse: Depuis le moment où je suis devenu membre de la garde des

10 volontaires serbes, je dirais que le comportement de l'armée a été le plus

11 discipliné et le plus responsable qui soit, sur un théâtre d'opérations

12 militaires.

13 Question: Eh bien, c'est précisément le renseignement que j'ai obtenu moi

14 aussi; donc je souhaitais simplement vérifier auprès de vous.

15 A votre avis, puisque vous avez participé à tous ces actes, est-ce qu'un

16 quelconque crime aurait été commis par cette armée contre la population

17 civile ou est-ce qu'un acte du même genre aurait pu être commis?

18 Réponse: Pendant toute la durée des opérations, nous n'avons eu aucun

19 contact avec des civils croates; nous n'étions en contact qu'avec les

20 nôtres parce qu'il y avait des combats sur la toute la ligne de front;

21 donc uniquement dans des zones qui n'étaient pas habitées.

22 Question: Très bien. C'est Islam Grcki, Kasic, Smokvic, donc des villages

23 majoritairement serbes ainsi que des villages mixtes où il y avait

24 davantage de Serbes que de Croates puisque, au cours de l'agression de

25 l'armée croate en 1993, ce sont ces villages qui ont souffert le plus.

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1 Vous êtes arrivés dans cette région pour protéger toutes ces personnes,

2 n'est-ce pas, et empêcher une quelconque attaque, une quelconque escalade

3 des attaques contre les villages serbes. C'est bien cela?

4 Réponse: Oui, nous avons créé une ligne et lancé une contre-attaque pour

5 reprendre le contrôle des territoires qui avaient été perdus par nous.

6 Question: Savez-vous que certains soldats des Nations Unies ont été tués

7 par les forces croates, à cette époque-là?

8 Réponse: Personnellement, je ne suis pas au courant de cela.

9 Question: Donc vous vous êtes trouvé sur le théâtre des combats de Knin,

10 c'est-à-dire de la Krajina, indépendant de la Republika Srpska, depuis le

11 mois de janvier jusqu'au mois de mars 1993. C'est bien cela?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Est-il exact que cette unité composée de volontaires –donc je

14 veux parler de vous-, sur le théâtre des opérations de Knin, n'avait aucun

15 rapport avec la JNA ou avec la République de Serbie? Lorsque je dis "un

16 quelconque rapport", je veux dire une relation de quelque nature qu'elle

17 soit.

18 Réponse: En dehors du fait qu'il y avait pas mal de gens qui venaient de

19 la République de Serbie, nous n'avions rien à voir avec la Serbie. Quand

20 je dis "nous", je veux parler de nos hommes.

21 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

22 M. le Président (interprétation): Nous recevons une note de la régie

23 technique qui nous informe qu'il faut maintenant changer de cassette

24 vidéo. Donc nous allons faire la pause maintenant.

25 Une demi-heure.

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1 (L'audience, suspendue à 10 heures 45, est reprise à 11 heures 15.)

2 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

3 M. Milosevic (interprétation): Nous sommes maintenant au mois de mars

4 1993. C'est à ce moment-là que vous êtes rentré, parce que vous aviez été

5 blessé; et puis votre unité, elle est restée là où elle était deux mois de

6 plus?

7 Témoin C-020 (interprétation): Non, ce n'est pas exact. J'ai été blessé,

8 mais j'avais une vieille blessure. J'avais une blessure au pied et, vu

9 qu'il faisait très froid dans la montagne Velebit, j'ai commencé à avoir

10 une hémorragie.

11 Question: Et puis vous dites que les "Super Tigres", une unité a été

12 constituée. On vous a posé une question, on vous a demandé si elle était

13 passé à l'action, cette unité? Vous avez répondu que ce jour-là, depuis ce

14 jour-là plus exactement, il n'y avait pas d'action militaire.

15 Réponse: Il n'y avait pas d'action militaire.

16 Question: Est-ce qu'il y avait d'autres types d'actions?

17 Réponse: Nous devions assurer la sécurité de certaines personnes

18 importantes, d'hommes politiques, de personnalités de partis politiques de

19 la Krajina.

20 Question: Et puis, on vous a demandé le type de casquette qu'ils

21 portaient. Vous avez dit qu'ils portaient des casquettes noires. Puis on

22 vous a demandé de préciser s'ils portaient quelquefois un béret rouge, ce

23 sur quoi, vous avez répondu que l'Unité des Bérets rouges avait des

24 soldats qui portaient des bérets rouges, mais que cette unité ne se

25 trouvait pas dans la région.

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1 Réponse: A ce moment-là, elle ne s'y trouvait pas.

2 Question: Puis vous dites qu'il y a eu un démantèlement de l'unité:

3 certains ont assuré une sécurité personnelle, d'autres sont rentrés chez

4 eux. Entre d'autres termes, l'unité a été démantelée?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Si j'ai bien compris, vous avez fourni certains certificats

7 attestant de votre participation à des combats. Je crois comprendre que

8 vous aviez deux certificats, les deux émanant de la République de Srpska

9 Krajina; est-ce exact?

10 Réponse: Il y en a un qui est de la République de Srpska Krajina et

11 l'autre émane de la Republika Srpska.

12 Question: Dans vos déclarations préalables, vous dites qu'en 1994, au

13 milieu de l'année 1994, vous avez reçu l'ordre de vous présenter. Et puis

14 vous avez corrigé: vous dites que ce n'était pas un ordre, mais que

15 c'était une convocation, que c'était un simple appel à convocation pour

16 rejoindre l'unité, n'est-ce pas?

17 Réponse: Ce n'était pas un ordre que je devais exécuter. Il me revenait à

18 moi de décider si je voulais le faire ou pas.

19 Question: Donc c'était un type d'unité de volontaires qui était

20 constituée?

21 Réponse: Ce n'est pas une unité de volontaires qui était formée. C'était

22 notre propre unité qui avait été démantelée et qui était remobilisée.

23 Question: Oui, mais à partir de la libre volonté des personnes qui

24 voulaient la rejoindre, cette unité?

25 Réponse: Oui, c'est certain. Tout le monde n'a pas répondu: ce n'était pas

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1 un ordre.

2 Question: Et il ne fait pas l'ombre d'un doute que c'étaient des

3 volontaires, n'est-ce pas?

4 Cependant, vous dites qu'avec cette unité, vous vous êtes rendu dans la

5 Province autonome de Slavonie occidentale, à Velika Kladusa plus

6 exactement?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Et que vous avez rempli certaines missions, n'est-ce pas?

9 Page 17 de votre déclaration préalable, vous dites que les Serbes de la

10 Serbie même ne pouvaient pas lutter et combattre sur les terrains de

11 bataille en Bosnie. Est-ce exact?

12 Réponse: Ce n'était pas qu'ils n'étaient pas autorisés à le faire, mais

13 les unités régulières n'auraient pas dû être présentes sur le terrain où

14 nous nous trouvions. Mais ceci ne s'appliquait pas à la population serbe;

15 parmi les Serbes qui voulaient être des volontaires, ils pouvaient le

16 faire.

17 Question: Je ne parle pas des volontaires. Je parle de la Serbie qui

18 compte 10 millions et demi d'habitants. Je dis simplement qu'il n'y avait

19 pas d'unités provenant de la Serbie. Du moins officiellement.

20 Réponse: Non, elles n'étaient pas autorisées à se trouver à cet endroit.

21 Question: Il n'est donc pas contesté qu'il s'agissait bien là de

22 volontaires? Et, pour autant que j'aie pu en juger, il n'est pas non plus

23 contesté que cette unité ait eu des engagements dans la Province autonome

24 de Bosnie occidentale, non pas pour combattre mais pour donner des

25 instructions aux combattants se trouvant là, pour les aider dans leur

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1 formation, et non pas pour participer de façon directe à quelque activité

2 militaire que ce soit. Est-ce bien cela?

3 Réponse: La mission consistant à fournir une instruction, elle est arrivée

4 plus tard. Au départ, nous avons participé à des opérations.

5 Question: Certes, mais hier, vous avez dit hier qu'ils n'ont pas respecté

6 les ordres visant à ne pas les engager dans des opérations, parce qu'ils

7 avaient pour seule tâche d'assister et d'instruire, de former. Est-ce bien

8 cela?

9 Réponse: Plus tard, nous avons appris que nous n'aurions pas dû participer

10 à des opérations, à des actions directes, que nous aurions dû intervenir

11 uniquement de façon indirecte.

12 Question: Dans votre déclaration préalable, il est dit que vous y êtes

13 resté, à cet endroit, jusqu'à la libération de Velika Kladusa. Mais hier,

14 vous avez corrigé cela: vous avez dit que vous étiez parti plus tôt parce

15 que vous étiez blessé?

16 Réponse: Oui, j'ai été blessé le 21 novembre.

17 Question: Fort bien. Pendant votre présence sur le terrain, avez-vous

18 appris quoi que ce soit, ou saviez-vous quoi que ce soit à propos de la

19 situation qui prévalait à Velika Kladusa et à propos du fait que la

20 population de la Province autonome de Bosnie occidentale, population

21 musulmane, s'opposait à l'aile que je qualifierais d'"extrémiste" de

22 l'armée d'Izetbegovic? Je parle ici de l'aile musulmane.

23 Réponse: Oui. Avant cela, il y avait la Région autonome de Bosnie

24 occidentale, il y avait aussi le 5e Corps qui a été expulsé par l'armée

25 d'Izetbegovic, et puis nous avons eu une deuxième phase avec nos

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1 instructions; nous avons rétabli le contrôle de la région.

2 Question: Vous avez passé quelques mois dans la région. Est-ce que vous

3 avez ainsi appris les horreurs commises par des membres du 5e Corps de

4 Atif Dudakovic contre la population musulmane de cette Province autonome

5 de Bosnie occidentale, contre les combattants de Fikret Abdic?

6 Réponse: Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est que tous les combattants de

7 Bosnie occidentale ont d'abord été capturés par le Corps, ont subi des

8 tortures, des mauvais traitements, divers sévices, et que bon nombre

9 d'entre eux ont été tués.

10 Question: Les habitants de Bosnie occidentale étaient-ils bien disposés

11 envers vous, étaient-ils amicaux envers vous? Donnaient-ils l'impression

12 d'être des modérés en faveur d'une coexistence pacifique, en faveur d'une

13 plus grande stabilité du développement de l'économie, en faveur de la

14 signature d'un accord de paix, ce genre de choses? Est-ce que vous avez

15 appris ce genre de choses pendant votre présence là-bas?

16 Réponse: Moi, je peux vous donner mon avis personnel et le voici: ceux qui

17 se sont bien comportés, qui étaient amicaux, eh bien, je peux vous dire

18 que je n'ai pas rencontré ce genre de personnes, même sur le terrain de

19 bataille, même parmi les miens; je veux parler des Serbes qui étaient avec

20 moi.

21 M. Milosevic (interprétation): A huis clos partiel… Alors, je ne sais pas,

22 Monsieur May, s'il nous faut revenir maintenant à huis clos partiel pour

23 que je repose ma question?

24 M. le Président (interprétation): Oui.

25 M. Milosevic (interprétation): Mais je suis l'ordre dans lequel

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1 l'interrogatoire principal s'est fait.

2 M. le Président (interprétation): Ceci a été abordé à huis clos partiel;

3 il faut donc repasser à huis clos partiel pour votre question.

4 (Audience à huis clos partiel à 11 heures 24.)

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1 (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 28.)

2 Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en public.

3 M. Nice (interprétation): On vous a posé quelques questions, au cours de

4 votre déposition, au sujet de votre voyage à Belgrade, et ensuite votre

5 voyage en Croatie, en passant par la Bosnie pour aller vous battre.

6 L'accusé a laissé entendre que les Serbes de la République de Serbie

7 n'avaient rien à voir avec ces combats. J'aimerais donner lecture de deux

8 passages de votre déclaration préalable qui traitent de cette question:

9 l'un se trouve en page 17, l'autre en page 18. Et je demanderai vos

10 commentaires ensuite.

11 En page 17, nous lisons ce qui suit, dans votre déclaration -je cite-:

12 "Nous avons franchi un pont dans les environs de Bijeljina. Je savais

13 qu'il y avait embargo, et qu'aucun équipement et aucun effectif provenant

14 de la République de Serbie n'était autorisé à pénétrer sur le territoire

15 de Bosnie-Herzégovine. Cependant, alors que nous attendions avant de

16 passer, j'ai entendu des rumeurs selon lesquelles nous attendions des

17 membres russes des Nations Unies qui devaient commencer à travailler sur

18 le pont et qui demanderaient de l'argent pour nous laisser passer". (Fin

19 de citation.)

20 Et puis, ensuite, vous parlez du détail de votre passage du pont.

21 Et en page 18, vous dites ce qui suit: ""Frenki" a ordonné aux Bérets

22 rouges de ne pas participer aux opérations de combat à l'avenir parce que

23 nous avions subi des pertes humaines et qu'il serait difficile de les

24 justifier dans des rapports, car des Serbes provenant de Serbie n'étaient

25 pas censé avoir participé aux combats sur le théâtre des opérations de

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1 Bosnie". (Fin de citation.)

2 Ces deux passages figurent-ils dans votre déclaration écrite et sont-ils

3 exacts?

4 Réponse: Dans votre première citation, vous avez parlé d'argent qui serait

5 demandé par les Russes. Et vous avez utilisé le mot "soudoyer".

6 Je ne sais pas si, pour ma part, j'ai utilisé le mot "soudoyer". Je pense

7 que j'ai dit qu'il serait nécessaire de conclure un accord avec les Russes

8 pour pouvoir franchir le pont. Et dans le deuxième passage que vous avez

9 cité, il y a eu des problèmes en raison de la mort du colonel Kole et d'un

10 autre colonel, donc il était difficile de justifier la perte de ces deux

11 hommes, le colonel Kole et le colonel Mita, dans des rapports parce que

12 l'un d'eux était un responsable de haut rang de la police spéciale

13 d'Erdut; et sa photographie a été publiée dans l'annonce de décès parue

14 dans les journaux. C'était un policier de haut rang. Et en raison de ces

15 pertes, de ces décès, nous n'avions plus le droit de participer à des

16 actions militaires.

17 Question: On vous a posé des questions au sujet de votre participation ou

18 non dans les rangs de la JNA ou du MUP, mais je vous demanderai de donner

19 un détail supplémentaire aux Juges: étiez-vous payé lorsque vous

20 patrouilliez dans le secteur?

21 Réponse: A Kladusa, oui.

22 Question: Oui. Et cet argent que vous receviez vous était versé en dehors

23 de vos indemnités journalières, n'est-ce pas?

24 Réponse: Nous recevions une partie de notre solde à Kladusa, et une

25 deuxième partie, une deuxième moitié, lorsque nous retournions au QG à

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1 Belgrade.

2 Question: Savez-vous personnellement quelle était l'origine des fonds qui

3 vous étaient versés? Ou bien ne le savez-vous pas?

4 Réponse: Il n'existe aucun document traitant de cette question, hormis une

5 feuille de papier qu'on nous demandait de signer afin de confirmer que

6 nous avions reçu l'argent qui nous était remis. Mais, encore une fois, des

7 rumeurs circulaient selon lesquelles une partie de nos soldes venaient du

8 MUP de Serbie et une deuxième partie d'"Arkan" lui-même.

9 Question: Et le paiement de cet argent se faisait en quel endroit

10 exactement?

11 Réponse: Je l'ai déjà dit. Nous étions payés en partie à Kladusa et le

12 reste lorsque nous retournions au quartier général d'"Arkan".

13 Question: Merci. Et dernière question au sujet des Bérets verts, enfin

14 quelques détails.

15 "Frenki", est-ce que vous nous avez donné le nom complet de "Frenki"? Le

16 connaissez-vous?

17 Réponse: Non.

18 Question: Les "Bérets rouges" que vous avez vus, savez-vous d'où ils

19 venaient? Avaient-ils un lieu d'origine?

20 Réponse: Je ne peux pas dire exactement en quels endroits ils étaient

21 stationnés en permanence, mais, en tout cas, la direction des "Bérets

22 rouges" était liée à la forêt de Lipovac, de Lipovacka Suma. C'était donc

23 censé être leur point de départ dans la région de Tara, par là-bas. Je ne

24 sais pas s'ils avaient leur caserne là-bas, mais, en tout cas, il y avait

25 là-bas une caserne et certains officiers y sont allés.

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1 Question: Savez-vous si certains des membres des "Bérets rouges" avaient

2 été ou étaient membres d'un autre groupe ou, en tout cas, étaient

3 originaires d'un autre groupe éventuellement?

4 Réponse: Selon les rumeurs, les "Bérets rouges" étaient membres des

5 services de sécurité de l'Etat de Serbie.

6 M. Nice (interprétation): Ce sera tout. Merci, Monsieur le Président.

7 M. le Président (interprétation): Témoin C-020, nous sommes arrivés au

8 terme de votre déposition. Je vous remercie d'être venu au Tribunal pénal

9 international pour témoigner. Vous pouvez maintenant vous retirer.

10 (Le témoin C-020 est reconduit hors du prétoire.)

11 (Audience publique.)

12 (Questions relatives à la procédure.)

13 M. Nice (interprétation): J'aimerais que nous revenions sur notre

14 discussion de ce matin, si c'est possible.

15 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons traiter de cela. Il

16 nous reste quelques minutes jusqu'à 13 heures, donc nous pourrions

17 commencer maintenant.

18 M. Nice (interprétation): Très bien. La discussion relative à

19 l'application de l'Article 92bis n'est pas seulement importante pour ce

20 témoin, mais également pour la façon dont nous allons précéder de façon

21 générale à l'avenir.

22 Nous sommes en train de revoir les dépositions des témoins qui seront

23 entendus dans les semaines à venir pour voir quelle est la partie, quelle

24 proportion de ces dépositions pourrait être intégrée à l'application de

25 l'Article 92bis, sinon, d'ailleurs, l'intégralité de ces dépositions.

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1 Au départ, nous ne procédions pas à ce travail de révision et je le

2 regrette.

3 Je dois dire que, s'agissant de ce témoin dont je parle, compte tenu de

4 l'intérêt d'une déposition en public, une version de la déclaration de ce

5 témoin...

6 M. le Président (interprétation): Attendons que les stores soient relevés.

7 M. Nice (interprétation): Je crois que je peux poursuivre?

8 (Signe affirmatif de la tête de M. le Président.)

9 Une version publiée de la déclaration préalable du témoin a été déposée le

10 16 octobre. Quelquefois, la presse a fait savoir qu'elle avait des

11 difficultés à être informée à temps, mais c'est une remarque qui n'a pas

12 lieu d'être puisque ce document a été déposé le 16 octobre.

13 Les documents qui accompagnent cette déclaration ne sont pas encore

14 disponibles pour le public. Il est peut-être difficile, sur le plan

15 administratif, d'organiser la mise à disposition à l'avance de ce genre de

16 documents, mais, si ce problème est considéré comme un problème important,

17 je pense qu'il pourra être réglé, s'agissant donc de l'accès pour le

18 public à tous ces documents. S'agissant de ces documents, ils ont été

19 communiqués aux associés de l'accusé le 17 octobre, alors que l'accusé

20 prétend que cela n'a pas été fait.

21 Bien sûr, ces documents constituent une masse volumineuse de papiers à

22 lire et c'est la raison pour laquelle nous le faisons pendant les jours et

23 les heures où nous ne siégeons pas. Voilà ce que je voulais dire au titre

24 des observations que j'avais à faire.

25 Et puis, il me semble qu'il y a un certain malentendu qu'il faudrait

Page 12298

1 traiter.

2 Ce témoin est un témoin qui sera très important, en tout état de cause. Sa

3 déposition au cours de l'interrogatoire principal, même si la partie que

4 je vous montre ici relèvera de l'Article 92bis, prendra plusieurs jours,

5 peut-être trois jours.

6 L'accusé et les amici ont reçu des transcriptions et des cassettes; les

7 transcriptions composent une masse de papier comptant plus d'un millier de

8 pages. Les amici ont reçu tout cela le 20 septembre et l'accusé, le 2

9 octobre.

10 Durant sa déposition qui sera très fournie, il est inévitable que le

11 témoin aborde un certain nombre de questions qui sont traitées de façon

12 simple et neutre dans la partie du document relevant de l'Article 92bis.

13 Je ne dis pas que l'Article 92bis s'applique à des choses simples, mais,

14 en tout cas, les commentaires fournis par ce témoin au cours de sa

15 déposition en interrogatoire principal devraient être, pour certains,

16 couverts dans ce qui relève de l'Article 92bis.

17 Donc nous aimerions raccourcir, autant que faire se peut, le nombre de

18 jours consacrés à ce témoignage et, si l'on organise la séquence de la

19 déposition, la chose devrait être possible.

20 Disposer d'une espèce de bibliothèque des documents à laquelle on peut se

21 référer à chaque fois que cela est nécessaire, peut être une solution. Il

22 est donc possible de procéder de deux façons différentes. Soit un certain

23 nombre de jours seront consacrés à la lecture de ces documents très

24 volumineux, avant le début de la déposition, soit un certain délai sera

25 accordé entre l'interrogatoire principal et le contre-interrogatoire.

Page 12299

1 M. le Président (interprétation): Apparemment, deux questions sont posées

2 ici, dont l'une semble très importante par rapport à l'application du

3 Règlement, et l'autre est peut-être importante pour le procès, mais pas

4 nécessairement pour l'application du Règlement.

5 L'amicus qui a parlé, a évoqué deux questions. Il a d'abord dit que ces

6 documents portent sur une question centrale pour présentation de la thèse

7 de l'accusation, donc cette question étant la création de la Région

8 autonome serbe de la Krajina. Et puis, en deuxième lieu, il a dit, si j'ai

9 bien compris, que vous devriez présenter votre thèse par le biais des

10 documents. Autrement dit, si j'ai bien compris, il semble vous inviter à

11 nous dire, quels sont les documents importants, quels sont ceux qui le

12 sont moins, plutôt que simplement nous inviter à les lire.

13 M. Nice (interprétation): Je suis sûr que, s'agissant de la deuxième

14 observation, les éléments les plus importants de la documentation seront

15 indiqués dans le cadre de l'exposé des événements historiques par le

16 témoin. Mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire que le témoin passe en

17 revue l'un après l'autre, tous les documents en indiquant quels sont les

18 plus importants.

19 M. Robinson (interprétation): Je ne crois pas qu'il ait été dit qu'il

20 devrait lire l'intégralité des documents. Mais, pour respecter la notion

21 d'équité, il importe de prendre en compte de la façon la plus importante

22 qu'il soit. Il me semble que cette question est une question centrale pour

23 la présentation de votre thèse, certes, et à mon avis, elle ne relève pas

24 exclusivement de l'Article 92bis A) et 1)B), puisqu'il y est question, en

25 particulier, du contexte pertinent sur le plan historique. Il s'agit d'une

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1 question centrale pour l'affaire. Il serait difficile d'utiliser le mot de

2 "contexte". Mais, par ailleurs, il faut assurer l'équité à l'égard d'un

3 accusé qui n'a pas de conseil. Donc, il est tout à fait indispensable que

4 l'accusé puisse bien connaître la qualité des éléments de preuve de

5 l'accusation. Il est important que l'accusé puisse savoir si le témoin a

6 été guidé dans ses réponses au représentant du Bureau du Procureur, et

7 quels sont les points importants qui ont été mis en exergue par

8 l'accusation dans ses entretiens avec le témoin. Je crois que ceci

9 améliorerait l'équité du procès, s'agissant du respect des droits de

10 l'accusé. Je ne crois pas que pour ce faire, il soit nécessaire de relire

11 la totalité des documents, mais je pense que deux ou trois détails

12 pourraient être donnés sur les points que je viens d'évoquer.

13 M. Nice (interprétation): Je n'ai guère de doute quant au fait que

14 quelques passages seront lus par le témoin, mais, s'agissant de la

15 méthodologie à suivre, je pense que nous aurons besoin d'un temps assez

16 considérable pour lire de façon convenable l'ensemble des documents. Le

17 témoin a l'intention de s'exprimer de façon neutre et objective, grâce à

18 l'application de l'Article 92bis.

19 J'aimerais revenir maintenant sur la question que vous avez posez,

20 Monsieur le Juge, quant à la nature de la déclaration préalable. Nous

21 savons, grâce à l'application déjà bien connue de l'Article 92bis, dans

22 d'autres circonstances, que certaines parties de la déposition d'un témoin

23 peuvent être résumées par l'avocat, avant le début de l'examen du document

24 et que le témoignage du témoin en personne ne porte, dans ces conditions,

25 que sur certaines parties jugées très importantes du texte, du document

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1 concerné.

2 Cela peut concerner un paragraphe ou d'autres extraits du document qui

3 sont donc signalés à l'accusé. Mais si les extraits peuvent être lus à

4 l'avance par les Juges, le document étant mis à la disposition des Juges à

5 l'avance, puisque j'ai parlé -comme je le rappelle- uniquement des

6 documents déjà ouverts au public, et donc, si le témoin peut être entendu

7 en interrogatoire principal uniquement sur certaines parties du document,

8 parce que nous voyons bien qu'il n'est absolument pas nécessaire de se

9 livrer à une lecture soumise de l'intégralité, de la déclaration

10 préalable. Mais, en tout cas, si certaines parties du document uniquement

11 pouvaient être abordées par le témoin dans le prétoire avant le début du

12 contre-interrogatoire, je pense que ce serait une bonne chose.

13 Et revenons maintenant sur la première remarque de l'amicus. Si je l'ai

14 bien comprise, il a évoqué les éléments qui justifient d'appliquer

15 l'Article 92bis. Mais la liste de ces facteurs n'est pas exhaustive et

16 l'amicus a laissé entendre que le document dont nous parlons, ne relève

17 pas de l'Article 92bis. Que le document soit historique ou politique,

18 qu'il traite d'un contexte ou pas, à notre avis, avec le respect que nous

19 devons à la Chambre, nous disons que, sur le fond, il serait bon de lui

20 appliquer l'Article 92bis.

21 Parce que, qu'est-ce que fait ce document? Il ne fait que revenir sur des

22 éléments qui confirmés et disponibles pour le public; c'est-à-dire qu'il

23 reprend la relation publique, si je puis me permettre d'utiliser ce terme,

24 d'un certain nombre d'événements historiques survenus dans une séquence

25 particulière.

Page 12302

1 M. le Président (interprétation): Mais l'amicus a également dit que cet

2 élément était tout à fait central dans la présentation de votre thèse et

3 qu'à cet égard l'article ne pourrait pas s'appliquer.

4 M. Nice (interprétation): Il faut voir à quel moment ces entités ont été

5 établies.

6 M. le Président (interprétation): Mais ceci concerne aussi d'autres

7 événements qui se sont produits par la suite.

8 M. Nice (interprétation): Donc ce n'est pas le simple établissement de

9 cette entité qui était une entreprise ou un acte criminel, ou qui est

10 repris dans l'Acte d'accusation. C'est plutôt ce que les gens ont fait une

11 fois que ces événements se sont produits et une fois que ces entités ont

12 été établies. Bien sûr, ce sont des questions de définitions et de

13 gradation qui s'imposent ici, mais nous disons respectueusement que nous

14 n'acceptons pas du tout l'idée sur laquelle ce sont des éléments qui

15 seraient centraux pour l'Acte d'accusation ou pour les charges retenues

16 contre l'accusé. Ce sont là les raisons pour lesquelles, à notre avis, ces

17 documents doivent ou devraient être examinés, de façon à ce qu'ils

18 prennent le moins de temps possible. D'autant que, si la Chambre, par la

19 suite, pense que de façon générale ou s'agissant de tel ou tel paragraphe,

20 il était préférable d'avoir les réponses du témoin ici à l'audience, avant

21 ou après le contre-interrogatoire, qu'il n'y aurait aucun préjudice.

22 L'accusé peut contre-interroger, il aura disposé de plus de temps qu'il

23 nous était possible de lui donné pour examiner les documents. L'amicus est

24 là aussi. Ses associés peuvent les examiner aussi. Il n'y a aucun

25 préjudice.

Page 12303

1 Bien sûr, il y a une limitation au niveau du temps imparti, mais,

2 récemment, la Chambre a appliqué une politique aux termes de laquelle le

3 temps réservé au contre-interrogatoire est à l'avenant du temps pris pour

4 l'interrogatoire principal. Mais, en fait, le temps consacré au contre-

5 interrogatoire doit être en fonction du temps dont a besoin l'accusé pour

6 réfuter les arguments qui sont présentés contre lui. Donc ce serait là

7 priver l'accusé de..., je suis sûr que la Chambre ne va priver l'accusé de

8 cette possibilité de présenter tous ses arguments.

9 Et puis, il y a aussi la possibilité de présenter ses arguments en avance.

10 Et vous ne seriez pas surpris, Messieurs les Juges, d'apprendre que nous

11 exhortons la Chambre à repenser à la remarque que faisait le Juge May qui

12 nous semblait tout à fait juste. C'est un simple argument: il disait que,

13 dans un procès de ce type, il fallait essayer de faire preuve de

14 créativité, d'innovation, d'efficacité et que le témoignage oral ne doit

15 pas nécessairement primer sur le témoignage écrit dans des questions de ce

16 genre.

17 Bien sûr, un témoignage oral est important lorsque est en jeu une question

18 de crédibilité. Or, ici, en l'occurrence, pour ne pas dire tous les

19 documents, la quasi-totalité, sont ouverts au public; par conséquent, la

20 question de la fiabilité ne se posera sans doute pas, alors que, de toute

21 façon, le témoin ferait des commentaires lorsqu'il sera à la barre. Et

22 tous ces documents étant de notoriété publique.

23 Voilà. Je ne sais pas si ceci vous a aidés. Je ne sais pas s'il faut

24 grever le temps de la Chambre de détails trop considérables, mais je pense

25 que, si nous agissons de la sorte, il n'y aura aucun préjudice et, si vous

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1 estimez que là il y a traitement inadéquat de tel ou tel paragraphe, on

2 peut toujours revenir dessus.

3 M. Kwon (interprétation): Donc la seule préoccupation de l'accusation,

4 c'est de gagner du temps, de faire une économie de temps?

5 M. Nice (interprétation): Non, Monsieur le Juge. Si une des préoccupations

6 principales de l'accusation était de gagner du temps, je suppose que vous

7 ne nous critiqueriez pas, parce que je crois comprendre que la Chambre

8 tient ceci très vivement à l'esprit. Donc, effectivement, dans la liste de

9 nos priorités, le temps est important.

10 Mais, de surcroît, nous estimons que, dans un procès de cette taille, de

11 cette complexité, pour ce qui est de la gestion générale du procès, il est

12 important de choisir la bonne méthode qui permet de présenter les moyens

13 de preuve. Le 92bis, notamment par l'intermédiaire de ce témoin, fournit

14 une telle méthode. Nous avons un Tribunal moderne. Il n'y a pas de jury.

15 Nous avons des Juges compétents, qui sont tout à fait lettrés et

16 compétents. Ici, je ne veux pas du tout être insultant, mais vous avez des

17 juges qui sont compétents et ils peuvent aborder beaucoup de documents. Et

18 je ne pense pas qu'il soit utile d'utiliser des méthodes ancrées dans une

19 ère obsolète et qui ne s'appliquent plus dans un tribunal moderne. Je

20 pense que, dans notre période contemporaine, c'est la façon la plus

21 efficace d'aborder ce problème.

22 M. Kwon (interprétation): Avant la suspension de l'audience, parlons du

23 temps.

24 Vous le savez, la Chambre de première instance permet à l'accusé, accorde

25 à l'accusé le même temps que celui qui a été consacré par l'accusation à

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1 la présentation des éléments dans le cadre de l'interrogatoire principal.

2 Par conséquent, s'il y avait une partie de la déposition d'un témoin qui

3 se faisait en application du 92bis, l'accusé aurait peut-être moins de

4 temps qu'il n'en aurait eu si le témoin avait fait toute sa déposition à

5 l'audience.

6 Je m'interroge: est-ce que l'accusation a pensé à ceci? Est-ce que ce

7 n'était pas cela que l'accusation avait en tête lorsqu'elle a demandé ce

8 type de modalités?

9 M. Nice (interprétation): Pas du tout. Et nous reviendrons sur la question

10 dans un autre contexte sans doute. Le fait que l'accusé n'ait pas de

11 conseil et vu l'attitude de l'accusé envers la Chambre, une égalité de

12 temps finalement, c'est une règle pratique et approximative qui s'applique

13 lorsqu'il n'y a pas de raison d'accorder un temps qui soit trop long.

14 Bien sûr, lorsqu'il y a présentation des moyens par le biais du 92bis, les

15 circonstances ont changé et d'autres éléments sont à prendre en compte.

16 Bien sûr, il faut voir le temps dont a besoin l'accusé, qu'il doit avoir

17 pour présenter ses moyens.

18 M. le Président (interprétation): Je ne pense pas qu'on considère ceci

19 comme étant une difficulté. On pourrait accorder davantage de temps pour

20 le contre-interrogatoire si nous estimions nécessaire d'appliquer le

21 92bis, si cette déclaration était considérée comme recevable en

22 application de cet Article. Mais je pense qu'effectivement, il faut se

23 libérer de certaines pratiques tout à fait démodées qui exigent que tous

24 les éléments de preuve soient présentés de façon orale.

25 Il reste encore une minute. Je crois que M. Kay tient beaucoup à

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1 intervenir.

2 M. Kwon (interprétation): Vous voulez consacrer deux journées à

3 l'interrogatoire principal?

4 M. Nice (interprétation): Non, trois journées en l'état. Mais avec le

5 92bis, peut-être deux… non, avec trois jours, en l'état, pour le moment.

6 Et si on avait ces éléments de preuve, il faudrait encore deux, ce qui

7 donne cinq jours en tout.

8 M. Kwon (interprétation): Merci.

9 M. Kay (interprétation): Je vois, vu la présentation de l'accusation,

10 qu'il y a beaucoup de documents qu'ils ne feront qu'effleurer et qui

11 nécessiteront beaucoup moins de temps au niveau de l'examen.

12 M. le Président (interprétation): Par exemple, le Statut: pourquoi avons-

13 nous besoin d'un témoignage comprenant le Statut? Il suffit de le

14 produire.

15 M. Kay (interprétation): Le Statut et la Constitution, si j'ai bien

16 compris, vont être des éléments, de toute façon, évoqués par le témoin

17 lors de sa comparution. Donc, si on retire ces documents de cette partie-

18 ci, je ne vois pas ce que ça va donner. L'accusation l'a dit clairement:

19 le témoin va faire référence à ces documents.

20 M. le Président (interprétation): Mais y a-t-il la moindre raison -parce

21 que nous voulons aboutir à un bon compromis, un compromis raisonnable-

22 pourquoi on ne peut pas poser de questions qui guident le témoin? Est-ce

23 que vous pourriez nous donner une raison, quand je dis "guider le témoin

24 par des questions"?

25 M. Kay (interprétation): Nous avons des règles assez souples à ce propos.

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1 Un très grand nombre de ces documents pourrait être traité de cette façon-

2 là, je l'ai déjà dit. Mais il y a d'autres documents qui sont tout au fait

3 particulier au regard de l'Acte d'accusation.

4 Paragraphe 6 de l'Acte d'accusation, nous voyons comment la thèse de

5 l'accusation est présentée dans ce paragraphe.

6 (Les Juges consultent les documents.)

7 "Transfert forcé des Croates et autres populations non serbes pour faire

8 partie d'un nouvel Etat dominé par les Serbes par la commission de crimes,

9 en contravention des Articles 3 et 5.

10 Il y a notamment dans ces régions les régions mentionnées ou auxquelles

11 font référence les autorités serbes."

12 M. le Président (interprétation): Il serait utile que vous définissiez

13 quel est le document qui pourrait revêtir une certaine importance à cet

14 égard. Et puisque nous n'avons pas d'audience ni demain ni après-demain,

15 vous pourrez le faire et nous rendrons notre décision mardi matin.

16 M. Kay (interprétation): Oui.

17 M. le Président (interprétation): Oui, c'est important parce que ceci est

18 en réponse à un argument général. Si vous pouvez nous dire: "Voilà, pour

19 tel ou tel document, il faut que le témoin soit présent à l'audience"; à

20 ce moment-là, c'est bien. Mais pour le moment, moi, je ne suis pas tout à

21 fait d'accord avec ces arguments généralisés selon lesquels il faudrait

22 que le témoignage se fasse oralement. Mais il se peut que, pour tel ou tel

23 document, ce soit nécessaire. Et si c'est le cas, nous examinerons la

24 question.

25 M. Kay (interprétation): Oui.

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1 M. Robinson (interprétation): Surtout si vous pouvez établir un lien entre

2 ce document et une partie de l'Acte d'accusation, comme vous venez de le

3 faire.

4 M. le Président (interprétation): Fort bien.

5 Nous allons lever l'audience. Elle reprendra mardi matin.

6 (L'audience est levée à 13 heures.)

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