Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 29 octobre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 34.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice?

6 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, j'ai demandé que le

7 témoin reste dehors, étant donné que la question de l'Article 92bis n'a

8 pas encore été tranchée.

9 Je crois que la Chambre a reçu des écritures de la part de M. Kay et nous

10 n'avons pas été en mesure de vous fournir tous les documents en temps

11 utile. Toutefois, nous vous avons fourni une esquisse des pièces à

12 conviction qui concernent ce témoin et, bien entendu, le déroulement de

13 son témoignage.

14 M. le Président (interprétation): Juste un moment, que l'on nous remette

15 les documents en question. Merci.

16 M. Nice (interprétation): Je regrette que cela ne vous ait pas été

17 communiqué dès hier, étant donné que nous avons fourni ces documents dans

18 le courant de la journée d'hier. Mais, peut-être serait-il encore bon de

19 se pencher dessus.

20 Toutes les questions qui sont en corrélation avec l'accusé seront traitées

21 par le témoin, moyennant présentation de documents qui vous seront fournis

22 par l'application de l'Article 92bis. Et vous allez voir quelle a été la

23 structure des organisations dont il va être question. Et, comme je l'ai

24 déjà dit la semaine passée, dans le cas où l'un des documents fournis en

25 application de l'Article 92bis demanderait des questions supplémentaires

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1 ou une présentation supplémentaire d'éléments de preuve, nous allons

2 pouvoir le faire le moment opportun et si besoin est.

3 Je crois que les écritures qui ont été fournies par les amis de la Chambre

4 ne nous apportent rien de substantiellement nouveau. Et l'on n'a pas

5 avancé de raisons complémentaires pour ce qui est des raisons pour

6 lesquelles ces éléments-là ne seraient pas fournis par écrit.

7 Dans la pratique de la Chambre de première instance, les Juges ne sont pas

8 censé lire d'avance les déclarations de témoins, mais ils peuvent lire

9 d'avance les résumés des dépositions de témoins.

10 M. Kwon (interprétation): Je voudrais présenter deux choses, Monsieur

11 Nice.

12 M. Nice (interprétation): Oui.

13 M. Kwon (interprétation): En raison des limites de temps à l'occasion de

14 notre session de la fois passée, j'ai peut-être posé une question qui

15 n'était pas très sensée. Mais voilà ma préoccupation: vous ne vous êtes

16 pas référé au 92bis s'agissant du témoin C-037 ou du témoin C-060;

17 pourquoi le faites-vous au sujet de ce témoin-ci? Quel est le critère

18 appliqué?

19 M. Nice (interprétation): Eh bien, d'abord il s'agit d'une question de

20 temps. Bien entendu, nous pouvons partager les raisons avec la Chambre et

21 avec les autres personnes présentes dans cette institution, mais

22 s'agissant de cette première série de témoins, nous les avons cités viva

23 voce afin que vous puissiez avoir une vue d'ensemble sur l'affaire

24 présentée. Et nous n'avons pas, à chaque fois, demandé à présenter tous

25 les éléments de preuve qui auraient pu être présentés en application de

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1 l'Article 92bis.

2 Je crois avoir communiqué la chose auparavant, et nous avons annoncé cette

3 approche bien à l'avance.

4 Ce que nous essayons de faire maintenant, c'est de voir comment les

5 témoignages vont se dérouler à l'avenir, et nous sommes en train d'étudier

6 la possibilité de présenter des éléments de preuve en application du 92bis

7 s'agissant des témoins qui seront cités à l'avenir.

8 Et il est très probable que vous obteniez toute une série de requêtes

9 analogues, comme cela a d'ailleurs été le cas à l'occasion de la

10 présentation des éléments de preuve pour le Kosovo.

11 Mais la priorité des priorités, c'est la question de temps. Nous avons

12 voulu être pratiques. Les choses ont quand même changé, et nous avons

13 estimé qu'il serait préférable ou désirable de se servir des dispositions

14 du 92bis là où cela est possible. Je crois que nous pouvons dire que cela

15 sera un cas différent par rapport aux autres témoins, parce que ce témoin

16 va fournir toute une librairie de documents et nous estimons que cela soit

17 présent, ce soit sous vos yeux de la façon la plus appropriée.

18 M. Kwon (interprétation): Merci. Parfaitement.

19 Est-ce que je peux passer au deuxième point que je voulais soulever?

20 Etant donné que je suis quelque peu différent des autres Juges de ce

21 Tribunal et, franchement, je ne pense pas être très familiarisé avec

22 l'histoire de la Croatie et la Krajina occidentale, aussi, est-il fort

23 utile pour moi d'entendre viva voce le témoin dans le prétoire, même

24 lorsque le Procureur pose des questions suggestives ou est en train de

25 guider le témoin.

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1 M. Nice (interprétation): Oui, je vous comprends parfaitement.

2 M. Kwon (interprétation): Je parle pour moi-même, bien entendu.

3 M. Nice (interprétation): Ce témoin va également présenter sa version, son

4 récit, sa version des événements, et il va également parler des événements

5 à la lumière du rôle qui avait été celui de l'accusé. Il va le faire sous

6 forme de narration. Il va le faire, bien entendu, sous forme de résumé, et

7 ce sera fait viva voce.

8 S'agissant de ce que vous avez dit auparavant, Mme Uertz-Retzlaff m'a

9 demandé d'attirer votre attention sur la présence d'un grand nombre de

10 documents publics qui sont accessibles dans le cas de ce témoin, et cela

11 est plus présent que pour ce qui, par exemple, des témoins C-037 ou C-060.

12 C'est la raison pour laquelle nous avons opté en faveur de cette solution.

13 M. le Président (interprétation): Eh bien, nous allons nous pencher sur la

14 question.

15 M. Nice (interprétation): Je pense que le témoin en question ne va pas

16 venir témoigner avant la fin de la semaine. Peut-être au plus tôt jeudi ou

17 vendredi.

18 Mais pendant que je suis encore debout, je voulais vous dire encore

19 quelque chose au sujet du témoin K38. Je crois qu'il y a probablement un

20 malentendu étant donné que nous ne savons ce qu'il faut qu'il se passe.

21 Est-ce que vous vous attendez à ce qu'il y ait une initiative de notre

22 part, ou est-ce que nous devons attendre une décision de la part de la

23 Chambre?

24 M. le Président (interprétation): Nous sommes en train de nous pencher sur

25 la question.

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1 M. Nice (interprétation): Merci. Je vais donner la parole à M. Groome qui

2 va interroger le témoin.

3 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, j'ai deux requêtes

4 avant de faire entrer le témoin.

5 Nous avons demandé l'application de mesures de protection. Etant donné que

6 le témoin a élu domicile dans un autre pays et a obtenu des papiers

7 d'identité sous un autre nom, aussi estime-t-il qu'il n'est point

8 nécessaire de dissimuler son identité ou de procéder à la déformation des

9 traits de son visage.

10 M. le Président (interprétation): Nous allons accorder cette modification

11 des mesures de protection.

12 M. Groome (interprétation): Autre chose, Monsieur le Président. Il y a un

13 certain nombre de documents qui n'ont pas été identifiés en application du

14 65ter: il y a plusieurs photographies qui ont été fournies par le témoin

15 au bureau du Procureur et ces documents ont été fournis à M. Milosevic au

16 mois de mai, mais ils n'ont pas été identifiés comme pièces à conviction

17 potentielles.

18 Le deuxième jeu de documents concerne les choses suivantes: il y a deux

19 papiers d'identité qui sont ceux du témoin, puis deux listes de

20 participants à une conférence internationale au sujet de laquelle le

21 témoin va témoigner, conférence à laquelle il avait été participant, et

22 une photographie de documents militaires, le tout étant transmis au bureau

23 du Procureur.

24 Ce que je voudrais suggérer en ce moment-ci, Monsieur le Président, ou

25 plutôt demander votre autorisation, à savoir montrer ces pièces à

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1 conviction au témoin et demander par la suite leur versement au dossier à

2 la fin de l'interrogatoire principal.

3 Nous allons par la suite nous pencher sur l'admissibilité de ces

4 documents.

5 M. le Président (interprétation): Eh bien, s'il arrive qu'il y ait

6 objection pour ce qui est de l'admissibilité des documents, ils pourront

7 être présentés au moment où le témoin se référera à telle ou telle autre

8 pièce à conviction, mais je ne vois pas de raison pour ce qui est de ne

9 pas les admettre.

10 M. Groome (interprétation): Merci, Monsieur le Président. L'accusation

11 cite à la barre M. Slobodan Lazarevic.

12 (Le témoin, M. Slobodan Lazarevic, est introduit dans le prétoire.)

13 M. le Président (interprétation): Demandez au témoin de faire sa

14 déclaration solennelle.

15 M. Lazarevic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

16 vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

17 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

18 (Le témoin s'assoit.)

19 M. le Président (interprétation): Procédez, Monsieur Groome.

20 (Interrogatoire principal du témoin, M. Slobodan Lazarevic, par M.

21 Groome.)

22 M. Groome (interprétation): Monsieur, veuillez nous décliner, je vous

23 prie, votre nom et prénom.

24 M. Lazarevic (interprétation): Slobodan Lazarevic.

25 Question: Où êtes-vous né?

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1 Réponse: Je suis né à Belgrade.

2 Question: Est-ce qu'à un moment donné, vous avez déménagé à Sarajevo?

3 Réponse: Oui, en 1956.

4 Question: Pendant que vous étiez à Sarajevo, avez-vous fréquenté

5 l'université là-bas?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Qu'avez-vous fait comme études?

8 Réponse: J'ai fait des études de langues.

9 Question: Quelles sont les langues que vous pensez parler de façon

10 courante?

11 Réponse: L'anglais et le français.

12 Question: Je vous demanderai de décrire à l'intention de la Chambre

13 l'organisation qui est connue sous l'abréviation KOS, K-O-S?

14 Réponse: Il s'agit d'une organisation militaire de la JNA qui se constitue

15 de deux parties: l'une traite des questions de sécurité interne et l'autre

16 de questions de sécurité externe.

17 Question: Je vais demander de parler un peu plus lentement pour les

18 interprètes.

19 Réponse: Je m'excuse.

20 Question: Quand avez-vous entendu pour la première fois parler de

21 l'organisation militaire appelée KOS?

22 Réponse: En 1968, un officier du KOS est venu me voir et m'a demandé si je

23 voulais travailler pour eux.

24 Question: Est-ce que je puis vous demander le nom de la personne qui s'est

25 approchée de vous?

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1 Réponse: Nikola Zimonja.

2 Question: Comment avez-vous fait la connaissance de Nikola Zimonja?

3 Réponse: Par le biais de mon père qui avait travaillé pour ce qui avait

4 été connu sous le nom de UDBA et qui est devenu le service de sécurité

5 d'Etat.

6 Question: Après cette rencontre initiale avec M. Zimonja, est-ce que vous

7 avez continué à le voir?

8 Réponse: Oui, tout au long de ma vie.

9 Question: Expliquez-nous vos relations avec M. Nikola Zimonja.

10 Réponse: J'avais été chargé de m'infiltrer dans d'autres organisations.

11 Par exemple, en 1968 j'ai eu pour tâche de m'infiltrer dans la structure

12 du mouvement estudiantin de Sarajevo. Par exemple, je devais placer des

13 films tournés par des touristes allemands, je devais m'infiltrer dans les

14 rangs de l'émigration serbe et de l'émigration croate en Australie, au

15 Royaume Uni.

16 Question: Considérez-vous que Nikola Zimonja avait été votre supérieur au

17 sein du KOS?

18 Réponse: Oui, en effet.

19 Question: Pouvez-vous nous donner une idée du temps que vous avez passé en

20 Australie à travailler parmi les membres de la communauté d'émigrés

21 croates?

22 Réponse: Eh bien, j'ai essayé de m'infiltrer dans cette organisation;

23 malheureusement, je n'ai pas eu beaucoup de succès, mais en tout et pour

24 tout j'ai passé 11 ans en Australie.

25 Question: Est-ce que l'on vous a demandé de revenir vers la Yougoslavie à

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1 un moment donné?

2 Réponse: Oui, en 1993, avant les Jeux olympiques de Sarajevo.

3 Question: Qui vous a demandé de revenir en Yougoslavie?

4 Réponse: Nikola Zimonja.

5 Question: Est-ce que vous avez reçu pour tâche de faire quelque chose

6 concernant les Jeux olympiques de Sarajevo, en 1995?

7 Réponse: Oui, j'ai été l'assistant personnel du chef du protocole au

8 niveau du Comité olympique international.

9 Question: Pendant que vous avez occupé ces fonctions, est-ce que vous vous

10 considériez toujours comme membre du KOS?

11 Réponse: Oui.

12 Question: En 1984, est-ce que l'on vous a confié d'autres tâches? M.

13 Zimonja vous a-t-il confié d'autres tâches?

14 Réponse: En effet, j'ai été envoyé pour travailler à Agrokomerc, dans la

15 ville de Velika Kladusa.

16 Question: Qui est-ce qui avait été chargé de cette compagnie?

17 Réponse: Monsieur Fikret Abdic.

18 M. Groome (interprétation): Je vais demander à présent qu'un classeur avec

19 14 documents vous soit présenté et qu'on lui accorde une cote à savoir...

20 Et qu'on place la première des pièces à conviction, celle qui figure sous

21 l'intercalaire 1 sur le rétroprojecteur.

22 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, ce sera la pièce à

23 conviction de l'accusation 348.

24 (L'huissier s'exécute.)

25 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je ne sais pas si c'est

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1 mon moniteur seulement. Non. Je m'excuse. Oui, ce n'est que maintenant que

2 le document est placé sur le rétroprojecteur.

3 Je vais demander à M. Lazarevic de bien vouloir nous décrire toute cette

4 série de personnes qui sont citées sur le schéma. Je voudrais qu'on place

5 donc le document sur le rétroprojecteur pendant que le témoin nous

6 fournira la description en question. Et, pour finir, je vais lui demander

7 de se servir du schéma pour expliquer quelles sont les relations entre les

8 personnes qui sont présentées sur le schéma.

9 Monsieur Lazarevic, je vais commencer par vous demander quelque chose au

10 sujet de deux personnes qui avaient quelque chose à voir avec l'armée de

11 la Krajina serbe. Et pendant ce témoignage, je vais me référer à

12 l'abréviation RSK.

13 La première personne que je voudrais que vous nous décriviez est le

14 général Mrksic.

15 Est-ce que vous le connaissiez?

16 Réponse: Oui, je le connais.

17 Question: Pouvez-vous nous décrire les fonctions de cette personne?

18 Réponse: Le général Mrksic avait été l'officier commandant du 8e Groupe

19 opérationnel de la RSK lorsque je suis arrivé en décembre 1991.

20 Question: Quand vous parlez "Groupe opérationnel, 8e Groupe opérationnel",

21 est-ce que vous entendez par là l'armée populaire yougoslave, la JNA?

22 Réponse: En effet, la JNA.

23 Question: Continuez.

24 Réponse: Je l'ai rencontré une fois de plus dans la Krajina en 1995,

25 lorsqu'il est revenu là-bas en sa qualité de d'officier commandant l'armée

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1 de la RSK.

2 Question: Est-ce que vous vous êtes entretenu avec lui concernant

3 l'hôpital de Vukovar?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Pouvez-vous, je vous prie, nous faire un résumé de votre

6 conversation?

7 Réponse: Le général Mrksic avait toujours estimé que cela avait été une

8 des grandes victoires militaires dans le conflit et il a estimé que

9 l'hôpital avait été pris par les forces croates, notamment le cinquième

10 étage. Aussi avait-il donné l'ordre de détruire les effectifs en question.

11 Question: Et vous a-t-il dit à qui il a donné cet ordre-là?

12 Réponse: Oui, il l'a fait.

13 Question: De qui s'était-il agi?

14 Réponse: Il s'agit d'un général qui était, à l'époque, commandant. Et il

15 s'agissait du général Sljivancanin.

16 Question: Vous a-t-il dit, dans les termes qu'il avait utilisés lui-même,

17 quel avait été l'ordre donné à Sljivancanin concernant l'hôpital de

18 Vukovar?

19 Réponse: Oui. Je vais le dire aussi bien en anglais qu'en serbe. Et je

20 m'excuse à l'intention de la Chambre, mais il a dit: "Abattez toutes ces

21 merdes!".

22 Une fois de plus, je m'excuse pour les termes utilisés.

23 Question: Est-ce que vous connaissez le lieutenant-colonel Mile Novakovic?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Pouvez-vous nous décrire de qui s'agit?

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1 Réponse: Novakovic était également officier de la JNA. Il a passé pas mal

2 de temps au sein de l'armée de la RSK à des positions militaires variées.

3 Question: Est-ce qu'il avait été partie intégrante de cette délégation

4 militaire serbe à plusieurs conférences de paix?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Je vais vous poser des questions au sujet de ce 21e Corps.

7 Pouvez-vous nous dire s'il s'agissait là d'une composante de l'armée de la

8 RSK?

9 Réponse: Le 21e Corps a été créé après le retrait de la JNA de la Croatie.

10 Il avait été chargé d'une région, de la région de Kordun, et cela avait

11 été appelé du nom de "Corps de Kordun".

12 Question: Est-ce que vous êtes au courant d'un 39e Corps?

13 Réponse: Oui. Ce 39e Corps est plus connu comme le Corps de la Banja, à

14 savoir comme le Corps chargé du flanc est.

15 Question: Et le 15e Corps?

16 Réponse: Le 15e Corps est plus connu comme étant le Corps de la Lika; il

17 occupait le flanc ouest du 21e Corps.

18 Question: Et est-il vrai de dire que le 21e Corps, le 39e Corps et le 15e

19 Corps avaient été parties intégrantes de l'armée de la RSK?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Au cours de la période de temps au sujet de laquelle vous êtes

22 en train de témoigner, pouvez-vous nous dire si le 21e Corps avait eu

23 trois centres de commandement différents?

24 Réponse: Oui, il y avait des centres de commandement différents. D'abord,

25 il y avait un centre à Topusko, au-dessus de l'hôtel qui se trouvait sur

Page 12321

1 les hauteurs de la base des Nations Unies; puis ils ont déménagé vers

2 Petrova Gora, puis à proximité de Vojnic. Et cela avait été le dernier des

3 sites occupés par ce corps d'armée.

4 Question: Pouvez-vous nous dire à peu près quand est-ce que le

5 commandement a été transféré vers Petrova Gora?

6 Réponse: En début 1993.

7 Question: Pouvez-vous nous dire quand est-ce que ce commandement a été

8 transféré vers Vojnic?

9 Réponse: Vers la même année, un peu plus tard, lorsque le MUP serbe a

10 déménagé vers Petrova Gora.

11 Question: Est-ce qu'à un moment donné, les membres du KOS, de ce service

12 de renseignement de la JNA a eu pour mission de travailler au sein du 21e

13 Corps de l'armée de la RSK?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Pouvez-vous nous dire quand vous avez reçu cette tâche?

16 Réponse: En février 1992.

17 Question: Et pendant le temps que vous avez passé au sein de l'armée de la

18 RSK, avez-vous été transféré vers quelque autre centre de commandement,

19 comme cela a été le cas pour le déménagement du QG?

20 Réponse: Non. Moi, j'avais occupé des bureaux à proximité de la base de

21 l'ONU.

22 Question: Où est-ce que cela se trouvait?

23 Réponse: A proximité de Topusko et cela avait pour objectif de faciliter

24 mes contacts avec les officiers de liaison des Nations Unies.

25 Question: Pouvez-vous nous expliquer qui était le colonel Bulat?

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1 Réponse: Le colonel Bulat avait été le commandant du 21e Corps, à savoir

2 le Corps de Kordun.

3 (Les interprètes demandent de ralentir.)

4 Et il avait également été mon officier de commandement.

5 Question: Avez-vous été en contact avec lui?

6 Réponse: Oui, tous les jours.

7 Question: Savez-vous nous dire s'il avait eu des contacts avec le grand

8 état-major de l'armée yougoslave pendant qu'il était à la tête du 21e

9 Corps, à savoir du Corps de Kordun?

10 Réponse: Il avait des contacts quotidiens, tous les matins, après les

11 briefings avec ses officiers; il présentait également des rapports

12 directement à l'état-major à Belgrade.

13 Question: Est-ce que vous savez nous donner les noms des personnes avec

14 qui il s'était entretenu à Belgrade?

15 Réponse: Le général Perisic.

16 Question: S'agissait-il de Momcilo Perisic?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 Question: S'agissant de vos activités auprès du colonel Bulat, au sein du

19 21e Corps, pouvez-vous nous décrire quelles avaient été ses attributions

20 pour ce qui est des décisions qui devaient être prises dans sa zone de

21 responsabilité, à savoir le secteur de Kordun?

22 Réponse: Tout ce qui avait quelque chose à voir avec des questions

23 d'importance locale: le déplacement des troupes dans une partie de la

24 région de Kordun. Dans cette région de Kordun, il avait la possibilité de

25 prendre des décisions à titre individuel; il n'avait pas à présenter de

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1 rapport à Belgrade. Pour ce qui est, par contre, de ce qui se passait dans

2 un secteur plus large, il devait consulter Belgrade et présenter des

3 rapports à ce sujet.

4 Question: Pouvez-vous dire à l'intention de la Chambre quels avaient été

5 des exemples concrets de situation où le colonel Bulat était censé

6 consulter le général Perisic avant d'entreprendre quelque action que ce

7 soit au sein de la Krajina serbe?

8 Réponse: Par exemple, si l'on envisageait de lancer une attaque pour ce

9 qui est du 5e Corps, qui était plus connu par notion de corps qui avait

10 occupé la poche de Bihac et s'agissant de la coopération avec les autres

11 corps sur le territoire de la Republika Srpska Krajina, il s'agissait là

12 de directives qui devaient provenir du QG de Belgrade.

13 Question: Quand vous parlez du 5e Corps, est-ce que vous parlez du 5e

14 Corps de l'armée de la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui, c'est exact.

16 M. Groome (interprétation): Partant des contacts que vous avez eus et de

17 l'activité que vous avez déployée au sein du 21e Corps, pouvez-vous nous

18 faire une description ou nous donner des détails concernant le fait que le

19 colonel Bulat se soit entretenu avec Belgrade ou d'abord avec son quartier

20 général à Knin?

21 M. Lazarevic (interprétation): Eh bien, cela dépendait de la situation.

22 S'il était nécessaire d'établir une coordination entre plusieurs corps, on

23 s'adressait d'abord à Belgrade puis à Knin; quand il s'agissait de

24 questions de caractère local, on s'adressait d'abord à Knin.

25 M. le Président (interprétation): Nous recevons le français sur le canal

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1 anglais.

2 Est-ce que la sténotypiste française m'entend? Oui.

3 M. Groome (interprétation): J'aimerais maintenant vous interroger au sujet

4 d'une composante du 21e Corps d'armée. Est-ce que vous connaissez l'unité

5 antiterroriste de ce corps d'armée?

6 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

7 Question: Pourriez-vous décrire à l'intention de la Chambre les fonctions

8 de cette unité?

9 Réponse: Cette unité, qui comptait 40 à 45 jeunes gens qui, en général,

10 avaient un lourd passé criminel, était censée mener à bien les sales

11 boulots -"poljavi poslovi"- au sein du 21e Corps d'armée. Et j'ajouterais

12 que, dans chaque corps d'armée, on trouvait une unité de ce genre.

13 Question: Dans d'autres corps d'armée, y avait-il des unités similaires?

14 Réponse: Elles portaient peut-être un nom différent, mais les raisons de

15 leur création étaient les mêmes.

16 Question: Vous avez décrit les membres de cette unité comme ayant un lourd

17 passé criminel. Je vous demande si les membres de ces unités étaient

18 officiellement des soldats engagés dans les rangs de la RSK?

19 Réponse: Oui, ils faisaient partie des structures régulières de l'armée.

20 Question: Vous avez utilisé l'expression "sales boulots": est-ce que vous

21 pourriez décrire à l'intention des Juges de cette Chambre ce que vous

22 entendez par là?

23 Réponse: Eh bien, toutes les tâches que quelqu'un de bien éduqué, de

24 normal refuserait d'accomplir étaient affectées à cette unité, connue sous

25 le nom d'unité antiterroriste. Pour l'essentiel, c'étaient des gens

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1 habitués à terroriser les gens, à créer des troubles et, entre autres, à

2 tuer des Croates, des Musulmans ou mêmes des Serbes.

3 Question: Qui commandait cette unité?

4 Réponse: Un jeune homme dont le surnom était "Paraga" et dont le vrai nom

5 était Sinisa Martic. Je crois qu'il ne fait plus partie des vivants

6 aujourd'hui.

7 Question: Pourriez-vous nous dire qui était le commandant Pero Ajdinovic?

8 Réponse: C'était également un membre de cette unité antiterroriste, mais

9 il s'occupait de sécurité interne et c'est lui qui a créé le groupe au

10 départ, avant la création du 21e Corps d'armée dans la région.

11 Question: Pourriez-vous nous dire qui est le colonel Mlado Karan?

12 Réponse: Mlado Karan est également un membre des forces de sécurité

13 interne, qui a succédé au colonel Ajdinovic lorsqu'il est retourné à

14 Belgrade et qu'il a repris le commandement de l'unité antiterroriste.

15 Question: Lorsque vous parlez de ces deux hommes comme étant membres du

16 KOS, parlez-vous du KOS de la RSK ou bien du KOS dont vous faisiez partie

17 au sein de l'armée populaire yougoslave?

18 Réponse: Je parle de la même chose, mais j'aimerais dire de la façon la

19 plus claire qui soit qu'il y avait deux filières au sein du KOS, une

20 filière qui s'occupait de la sécurité intérieure du pays et l'autre qui

21 s'occupait de la sécurité extérieure du pays dont je faisais partie.

22 Question: Ces deux hommes appartenaient à laquelle de ces deux branches du

23 KOS?

24 Réponse: Au service de sécurité intérieure.

25 Question: J'aimerais maintenant appeler votre attention sur la mort d'un

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1 homme répondant au nom de Dmitar Obradovic.

2 Connaissez-vous les circonstances dans lesquelles cet homme a trouvé la

3 mort?

4 Réponse: Oui. Monsieur Obradovic était maire de Vrgin Most.

5 Question: Pourriez-vous nous parler de la circonstance dans laquelle il

6 est mort? Pourriez-vous expliquer aux Juges de cette Chambre qui était cet

7 homme et quel rôle il a joué dans les événements de Krajina, au cours de

8 l'été 1992?

9 Réponse: J'ai eu le grand plaisir de rencontrer M. Dmitar Obradovic à

10 plusieurs reprises, notamment dans le cadre des réunions de l'ECMM.

11 C'était un homme très intelligent qui possédait un grand nombre de

12 documents prouvant tout ce qu'il disait au cours des réunions. Son idée

13 était que la cohabitation, la vie commune entre les Croates et les Serbes

14 était possible en Krajina aussi longtemps que les Serbes acceptaient un

15 gouvernement croate.

16 Question: Quelle était son origine ethnique?

17 Réponse: C'était un Serbe.

18 Question: S'opposait-il à la création de l'ARSK, de l'armée de Krajina?

19 Réponse: Dans un certain sens, oui.

20 Question: Etait-il favorable à une réconciliation avec les Croates selon

21 des voies pacifiques?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Qu'est-il arrivé au commandant Obradovic?

24 Réponse: Le commandant Obradovic a été tué dans une embuscade.

25 Question: Ce qui s'est passé confirme-t-il l'étendue de la zone de

Page 12327

1 responsabilité du 21e Corps d'armée?

2 Réponse: Oui. En fait, à 20 mètres à peine du quartier général, cet

3 événement s'est produit.

4 Question: Une enquête a-t-elle été menée au sujet des circonstances

5 entourant sa mort?

6 Réponse: Oui, il y a eu trois instances qui ont mené des enquêtes. Le 21e

7 Corps d'armée, la police internationale des Nations Unies et la police

8 locale.

9 Question: Compte tenu du poste que vous aviez au sein du 21e Corps, aviez-

10 vous des contacts ou avez-vous participé à cette enquête menée au sujet

11 des circonstances entourant sa mort?

12 Réponse: Oui, mais plutôt en tant qu'observateur ou pour donner un coup de

13 main s'il y avait des malentendus dus à des problèmes de langues, par

14 exemple. En tout cas, j'étais présent au début de l'enquête.

15 Question: L'enquête menée par le 21e Corps d'armée est arrivée à quelles

16 conclusions s'agissant des circonstances dans lesquelles M. le maire

17 Obradovic avait été tué?

18 Réponse: Les déclarations officielles ont consisté à dire que des

19 terroristes croates avaient pénétré sur le territoire longeant la rivière,

20 en passant la frontière pour arriver aux abords de Topusko et c'est ainsi

21 que le maire Obradovic est mort.

22 Question: Vous avez dit que c'était une déclaration officielle. Y avait-il

23 d'autres conclusions faites par les enquêteurs du 21e Corps d'armée au

24 sujet de sa mort?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Quelles ont été ses conclusions?

2 Réponse: Que cet acte était un acte commis par un groupe antiterroriste.

3 Question: Est-ce que, à un certain moment, vous avez entendu des membres

4 de l'unité antiterroriste discuter du décès d'Obradovic?

5 Réponse: En fait, oui. Ils m'ont dit à plusieurs reprises que ce qui avait

6 été fait était un acte de grand patriotisme.

7 Question: Au moment où Obradovic a été tué, pouvez-vous nous dire quelles

8 étaient ses fonctions au sein du 21e Corps d'armée et ses responsabilités

9 en quelques mots? Quelles étaient vos fonctions au sein du 21e Corps

10 d'armée et vos responsabilités en quelques mots?

11 Réponse: J'avais le grade de lieutenant-colonel, j'étais officier de

12 liaison entre le 21e Corps et toute organisation internationale sur le

13 terrain, qu'il s'agisse des Nations Unies, de la Croix-Rouge ou de l'ECMM

14 ou de quelque autre organisation. J'avais même la charge des contacts avec

15 les journalistes s'ils venaient me voir pour m'annoncer leur arrivée.

16 Question: En rapport avec cette mort, avez-vous été chargé d'informer les

17 Nations Unies des conclusions officielles selon lesquelles Obradovic avait

18 été tué par des terroristes croates?

19 Réponse: Oui. En fait, j'ai reçu une lettre de protestation que je devais

20 apporter au quartier général des Nations Unies pour la remettre

21 officiellement entre les mains du général Musa. Il était commandant de la

22 région Centre-nord, qui couvrait la zone relevant des responsabilités du

23 21e et du 35e Corps d'armée.

24 Question: A l'époque, avez-vous remis cette lettre de protestation et

25 saviez-vous que son contenu était faux?

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1 Réponse: Je le savais.

2 Question: Je souhaite appeler votre attention sur l'action de la police au

3 sein de la police au sein de la République serbe de Krajina. Pouvez-vous

4 nous dire ce que vous savez au sujet de la structure de la police de cette

5 République de Krajina, à l'époque où vous y étiez?

6 Réponse: Du point de vue de sa structure, elle correspondait à celle des

7 forces de police de nombreux pays, à savoir qu'il existait un ministère de

8 l'Intérieur avec un certain nombre de départements. Il y avait une

9 sécurité de l'Etat responsable devant la sécurité de l'Etat de Belgrade.

10 Il y avait des commissariats de police dont la zone de responsabilité

11 correspondait à peu près au secteur de responsabilité des Nations Unies.

12 Question: Chacun de ces secteurs avait-il à sa tête un adjoint?

13 Réponse: Il y avait des adjoints qui étaient responsables directement

14 devant le ministère de l'Intérieur, le ministre de l'Intérieur, Milan

15 Martic à l'époque, et aussi des chefs des commissariats de police qui

16 étaient responsables devant cet adjoint, lui-même répondant devant le

17 ministère de l'Intérieur.

18 Question: Pouvez-vous nous décrire les tâches et responsabilités de ces

19 adjoints qui dirigeaient les activités policières dans toutes ces régions?

20 Réponse: Excusez-moi, je ne comprends pas bien votre question.

21 Question: Combien y avait-il d'adjoints dans chaque zone de

22 responsabilité?

23 Réponse: A ma connaissance, je connais l'existence de quatre adjoints pour

24 la zone Sud, la zone Nord, la zone Est, la zone Ouest.

25 Question: Et chacun de ces secteurs avait combien d'adjoints?

Page 12330

1 Réponse: Il y avait un adjoint responsable devant le ministre de

2 l'Intérieur, M. Martic, mais il y avait également un certain nombre de

3 postes de police qui étaient dirigés par un chef de la police, un chef de

4 poste.

5 Question: Cet adjoint chargé des secteurs était-il la personne responsable

6 de l'action des policiers en uniforme?

7 Réponse: Oui, mais également des policiers en civil.

8 Question: Pendant le temps que vous avez passé en Krajina, vous êtes-vous

9 formé une opinion quant à l'identité de ceux qui payaient la police dans

10 la République serbe de Krajina?

11 Réponse: Les policiers étaient payés par les mêmes que ceux qui payaient

12 l'armée.

13 Question: Comment le savez-vous?

14 Réponse: A plusieurs reprises, je me suis trouvé à l'endroit où ce que

15 j'appellerais un "porteur d'argent" arrivait de Belgrade. A ce moment-là

16 commençait la distribution d'argent, c'est-à-dire qu'il appelait la

17 personne par son nom, cette personne venait voir le trésorier qui

18 remettait l'argent en question et il distribuait ainsi l'argent à tous les

19 membres de l'unité.

20 Question: Est-ce que ce trésorier était également responsable de remettre

21 de l'argent aux unités de la police et aux unités de la RSK?

22 Réponse: A ma connaissance, oui.

23 Question: A un certain moment, le trésorier a-t-il été volé par quelqu'un?

24 Réponse: Oui, en effet. Le soir du 6 août 1995, alors que les forces

25 serbes se retiraient de Krajina, le trésorier a prétendu que, dans le

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1 convoi où il se trouvait, on lui avait volé la solde de tout le monde,

2 c'est-à-dire des soldats et des policiers.

3 Question: Après avoir prétendu qu'il avait été volé, des policiers ont-ils

4 été payés à ce moment-là?

5 Réponse: Non, personne n'a été payé.

6 Question: Pourriez-vous nous dire, en quelques mots, qui était Milan

7 Martic?

8 Réponse: Milan Martic est quelqu'un qui a fait un succès assez

9 spectaculaire en très peu de temps. Car au départ, il était commandant

10 d'un petit poste de police dans un coin perdu de la région de Knin, un

11 poste où il n'y avait que quatre hommes à peu près, et, tout d'un coup, il

12 est devenu Président de la République autonome serbe de Krajina.

13 Question: En tant que Président de la RSK et de chef de poste de police,

14 il avait déjà deux postes importants, mais en avait-il d'autres?

15 Réponse: Oui, il était ministre de l'Intérieur avant de devenir Président

16 de la République.

17 Question: J'aimerais que vous décriviez à l'intention des Juges les

18 relations, s'il y en avait, entre la police et l'armée de la République

19 autonome serbe de Krajina?

20 Réponse: Vous pouvez répéter votre question?

21 Question: J'aimerais que vous décriviez à l'intention des Juges, si vous

22 le pouvez, les rapports entre l'armée et la police de la République serbe

23 autonome de Krajina.

24 Réponse: Lorsque je parle des débuts, je parle de 1992. Un peu plus tard,

25 la présence des forces spéciales de Serbie a fait en sorte que le pouvoir

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1 est passé entre les mains de la police.

2 Question: Connaissez-vous les conséquences du plan Vance sur l'armée de la

3 République serbe de Krajina?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Quelles étaient les exigences du plan Vance à l'égard de

6 l'armée?

7 Réponse: Ce plan exigeait la démilitarisation et la démobilisation des

8 unités en Krajina. Etant cosignataires du plan, nous avons changé la

9 couleur de nos équipements qui, au départ, étaient vert olive et qui, du

10 jour au lendemain, est devenue le bleu de la police. Je dirais que cela

11 s'est fait en une dizaine d'heures. Nous avons repeint tous les véhicules

12 militaires en bleu, qui était la couleur de la police.

13 Question: Le plan Vance restreignait-il les effectifs de police au sein de

14 la République serbe de Krajina?

15 Réponse: Non, pas à ma connaissance.

16 Question: Pendant cette période de mutation, avez-vous reçu une carte

17 d'identité qui vous décrivait comme membre de la police de la République

18 de Krajina?

19 Réponse: Oui, on m'a donné une carte d'identité. Et, au départ, on m'a

20 demandé d'enlever mon uniforme pour porter, pendant le temps nécessaire,

21 des vêtements civils.

22 Question: Au moment où vous avez reçu une carte d'identité de la police de

23 la RSK, faisiez-vous toujours partie du KOS de la JNA?

24 Réponse: Absolument. Pour moi, rien n'avait changé à part la couleur de

25 l'uniforme.

Page 12333

1 Question: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais qu'on

2 remette au témoin la pièce à conviction de l'accusation 348, intercalaire

3 2. C'est une photographie dont je demande qu'elle soit placée sur le

4 rétroprojecteur.

5 (Intervention de l'huissier.)

6 Monsieur Lazarevic, reconnaissez-vous les personnes…, la photographie que

7 l'on voit sur le rétroprojecteur?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Et les personnes qui y sont représentées?

10 Réponse: Oui, bien sûr.

11 Question: Je demande l'aide de l'huissier.

12 Monsieur Lazarevic, en allant de gauche à droite, je vais vous demander

13 d'identifier les personnes que l'on voit sur cette photographie.

14 Réponse: La personne sur laquelle je place le pointeur maintenant, c'est

15 moi. A côté de moi, le général Satish Nambiar, qui était commandant en

16 chef des Nations Unies pour toute cette région placée sous la

17 responsabilité des Nations Unies. Et puis, il y a un autre colonel ici qui

18 est Polonais; mais je ne me souviens pas de son nom. Et au coin,

19 malheureusement il n'apparaît pas très clairement, en tout cas sur mon

20 écran, on voit le général Novakovic. Et ce qui est intéressant, s'agissant

21 de cette transition de l'armée à la police, vous voyez un brassard sur

22 lequel est écrit "Milicija" en cyrillique.

23 Question: Je vais maintenant vous demander de prendre un marqueur et de

24 dessiner un cercle autour de ce brassard sur lequel vous dites qu'est

25 inscrit le mot "Milicija", qui veut dire "Police".

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1 (Le témoin s'exécute.)

2 Vous avez utilisé le mot "Milicija". Pourriez-vous nous dire la traduction

3 de ce mot?

4 Réponse: Ce mot signifie "Police".

5 Question: On voit des mots écrits à la main sur cette photographie. Est-ce

6 bien vous qui les avez écrits?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Merci.

9 Je demande maintenant que la pièce à conviction de l'accusation 348,

10 intercalaire 3, soit placée sur le rétroprojecteur.

11 (Intervention de l'huissier.)

12 Monsieur Lazarevic, reconnaissez-vous ce que montre cette pièce à

13 conviction 348, intercalaire 3, de l'accusation?

14 Réponse: Oui, c'est ma carte d'identité de la police.

15 Question: Vous a-t-elle été remise alors que vous faisiez partie de

16 l'armée yougoslave?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 Question: On peut retirer ce document du rétroprojecteur.

19 (Intervention de l'huissier.)

20 Monsieur Lazarevic, j'aimerais maintenant que vous décriviez à l'intention

21 des Juges de cette Chambre la structure de commandement de tous ces

22 militaires qui, désormais, portent l'uniforme de la police.

23 Réponse: Je ne vous suis pas bien.

24 Question: Ces anciens militaires sont-ils tombés sous le commandement de

25 la police à partir de ce moment-là? En d'autres termes, est-ce qu'ils

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1 prenaient leurs ordres des commandants locaux de la police ou bien

2 avaient-ils une structure de commandement, une filière de commandement,

3 une hiérarchie différente de celle de la police?

4 M. Lazarevic (interprétation): Ils n'ont jamais fait partie de la police

5 en tant que telle parce que les grades et les commandements relevaient du

6 militaire. Ils ont simplement changé leurs uniformes du jour au lendemain,

7 mais la hiérarchie, la chaîne de commandement est demeurée la même:

8 c'était une chaîne de commandement militaire.

9 M. Groome (interprétation): Avez-vous connaissance d'un incident survenu

10 aux environs du mois de mars 1992 au cours duquel un grand nombre de ces

11 hommes ont été rappelés à Belgrade pour une mission particulière?

12 Réponse: En mars 1992, c'est le début du retrait de la JNA qui retourne en

13 Bosnie et, ensuite, en Serbie. A vrai dire, un certain nombre d'officier

14 sont restés, qui étaient des officiers de la JNA. Et puis, le QG de

15 Belgrade a passé en revue les dossiers de tous les officiers de la JNA; et

16 si le lieu de naissance d'un officier était la Krajina ou la RSK, ces

17 officiers étaient renvoyés en Krajina pour une période de six mois; après

18 quoi, ils avaient le choix soit de revenir à Belgrade soit de continuer

19 sur le terrain.

20 Question: Outre ce que vous venez de décrire, un événement particulier

21 s'est-il produit, au cours duquel on a fait appel à des volontaires en

22 leur demandant d'aller à Belgrade pour une mission particulière?

23 Réponse: Oui, mais c'était la police qui était concernée. Pas la JNA.

24 Question: Eh bien, décrivez ce qui s'est passé. D'abord, de quelle force

25 de police allez-vous parler?

Page 12336

1 Réponse: De la police régulière, de la RSK.

2 Question: Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé?

3 Réponse: Un ordre est arrivé de Belgrade. Ordre ou requête, selon le terme

4 qu'on préfère. Il était demandé à tous les secteurs d'envoyer une centaine

5 de policiers en uniforme à Belgrade. Et Belgrade avait envoyé à cet effet

6 des uniformes flambants neufs qui étaient absolument les mêmes que ceux

7 des policiers de Serbie. Ces hommes ont été donc emmenés à Belgrade en

8 autobus et ont eu pour tâche de s'occuper des manifestants qui

9 manifestaient dans les rues de Belgrade.

10 Question: Cette manifestation était-elle une manifestation anti-Milosevic?

11 Réponse: Oui.

12 M. Groome (interprétation): Combien de policiers de la République serbe de

13 Krajina, à peu près, ont reçu ces uniformes de la République serbe, de la

14 police de la République serbe, et sont allés à Belgrade à bord de ces

15 autobus?

16 M. Lazarevic (interprétation): Je sais que le secteur du 21e Corps de

17 Kordun a fourni une centaine d'hommes pour cette tâche particulière et je

18 dirais qu'au total, il y a eu entre 400 et 500 hommes envoyés à Belgrade

19 pour cette mission, d'après mes souvenirs.

20 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous demander au témoin à quel

21 moment tout cela s'est passé?

22 M. Groome (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

23 Monsieur Lazarevic, pouvez-vous nous dire à peu près à quel moment, si

24 vous le savez, tout cela s'est passé?

25 M. Lazarevic (interprétation): Je ne sais pas si la Chambre sait combien

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1 de manifestations il y a eu à Belgrade dans les rues pendant toute cette

2 période, mais celle dont je parle s'est déroulée à la fin 1992.

3 Question: Savez-vous comment ces 500 hommes, ou plutôt 400 à 500 hommes

4 ont été choisis pour aller à Belgrade? Quel a été le processus de

5 sélection?

6 Réponse: Plus on était grand, mieux c'était.

7 Question: Etiez-vous présent lors de ce processus de sélection, quand

8 quelque chose a été dit à ces hommes?

9 Réponse: Eh bien, pas mal de plaisanteries ont été faites parce que

10 vraiment ils choisissaient les hommes les plus grands, en tout cas au-

11 dessus de 1 mètre 85. Ils devaient donc s'occuper de ces manifestants et

12 on plaisantait au sujet du fait qu'ils allaient les tabasser pour leur

13 faire passer l'envie d'être communistes.

14 Question: La police de la République serbe, est-ce qu'elle avait également

15 une DB ou une unité chargée de la sécurité?

16 Réponse: Oui. A la tête de la DB de la RSK se trouvait Milos Pajic.

17 Question: Vous dites qu'il était responsable de cette unité: cela signifie

18 qu'il était le chef de la DB de la RSK?

19 Réponse: Sur le papier, oui.

20 Question: Vous fondant sur votre expérience, pensez-vous en fait que c'est

21 quelqu'un d'autre qui était responsable de la DB de la RSK?

22 Réponse: Absolument.

23 Question: Qui est cette personne?

24 Réponse: Monsieur Tosa Pajic qui, par la suite, en 1995, devenait ministre

25 de l'Intérieur de la RSK.

Page 12338

1 Question: Pouvez-vous décrire les rapports que vous aviez éventuellement

2 avec Tosa Pajic?

3 Réponse: Moi, je trouvais que M. Pajic était très agréable, très éduqué et

4 très diplomate; cela a toujours été ma conviction. J'ai eu à traiter avec

5 lui au quotidien pendant mon séjour en Krajina, pour la simple raison

6 qu'il était également officier de liaison avec les Nations Unies, mais lui

7 avait des rapports avec mes homologues de la police.

8 Question: Au cours de vos contacts avec M. Pajic, vous a-t-il dit quels

9 rapports il avait, s'il en avait, avec les services de sécurité de la

10 République de Serbie, c'est-à-dire Belgrade?

11 Réponse: A plusieurs reprises, il m'a dit qu'il travaillait pour Jovica

12 Stanisic qui était chef de la sécurité de l'Etat en Serbie.

13 Question: Vous a-t-il dit à quelle fréquence il avait des contacts avec

14 Jovica Stanisic?

15 Réponse: Pratiquement, au quotidien. Toutes les nombreuses fois où je me

16 suis trouvé dans son bureau, il a eu des conversations téléphoniques avec

17 M. Stanisic.

18 Question: Avait-il un surnom ou, en tout cas, un autre nom qu'il utilisait

19 pour parler de Jovica Stanisic?

20 Réponse: Oui, il le considérait comme son papa et, en général, quand il

21 parlait de lui, il disait: "mon père".

22 Question: Durant vos conversations avec Tosa Pajic, celui-ci a-t-il

23 également utilisé un terme particulier pour parler de M. Slobodan

24 Milosevic?

25 Réponse: Oui, en effet.

Page 12339

1 Question: Quel était ce terme?

2 Réponse: "Le chef".

3 Réponse: Pendant les contacts que vous avez eus avec M. Pajic, vous a-t-il

4 décrit la nature de ses rapports à lui avec la DB?

5 Question: Eh bien, ce que j'ai cru comprendre, c'est que M. Pajic était

6 salarié de la DB de Serbie, à temps plein; parce que lorsque nous sommes

7 retournés à Belgrade en août 1995, il a tout simplement repris son bureau

8 au sein de la DB à Belgrade.

9 Question: J'aimerais qu'on remette au témoin la pièce à conviction 348,

10 intercalaire 4, et que l'on place ce document sur le rétroprojecteur.

11 (Intervention de l'huissier.)

12 Monsieur Lazarevic, reconnaissez-vous ce que l'on voit sur cette

13 photographie?

14 M. Lazarevic (interprétation): Oui, c'est l'hôtel de Topusko. Et il y a

15 trois personnes que l'on voit sur cette photographie. Je vais vous dire de

16 qui il s'agit. A gauche, M. Toso Pajic lorsqu'il était chef de la police

17 de Vojnic, donc c'était au début de 1992; je dirais aux alentours de mai

18 ou juin 1992. Et puis, un officier danois; je me souviens qu'il était

19 Danois parce qu'il était responsable de la force de police internationale,

20 mais je ne me souviens pas de son nom. Et puis, il y a moi, officier de

21 liaison du 21e Corps d'armée.

22 Question: Et c'est votre écriture que l'on voit sur cette pièce à

23 conviction?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Merci. On peut retirer la pièce du rétroprojecteur.

Page 12340

1 Monsieur le Témoin, connaissez-vous une personne répondant au nom de ce

2 Djuro Skaljac?

3 Réponse: Oui, je le connais bien.

4 Question: Pouvez-vous nous dire de qui il s'agit?

5 Réponse: C'était un second de la police de Vojnic, le second de la police

6 de Vojnic. Il était adjoint de M. Toso Pajic. Et plus tard, M. Skaljac

7 donc l'a nommé au poste d'officier de liaison avec la police de Belgrade.

8 Question: Je vous demande maintenant ce qu'il en est d'un responsable

9 politique de la République serbe de Krajina, à savoir M. Goran Hadzic?

10 Pouvez-vous nous parler de lui en quelques mots?

11 Réponse: Monsieur Hadzic a été élu Président de la RSK. J'ai participé à

12 plusieurs réunions avec lui; des réunions de la RSK qui se sont tenues à

13 l'intérieur de la République, également à l'extérieur, donc des réunions

14 internationales également.

15 Question: Monsieur Hadzic vous a-t-il jamais parlé de la nature de ses

16 relations avec M. Slobodan Milosevic?

17 Réponse: Eh bien, je pense que je pourrais décrire aux Juges de cette

18 Chambre un incident qui s'est produit et qui donnera sans doute une bonne

19 idée de la réalité des faits.

20 Pendant l'une de ces réunions en Norvège que nous avions avec la partie

21 croate, au niveau des Nations Unies bien sûr, nous avons eu une pause.

22 Nous étions dans un bureau différent de celui des autres délégations. Et

23 M. Hadzic était assis à une table où il faisait des patiences. Quelqu'un a

24 frappé à la porte. Un ambassadeur croate aux Etats-Unis est entré, ainsi

25 que l'ambassadeur canadien dont je ne me souviens pas du nom. Et

Page 12341

1 l'ambassadeur s'est adressé à M. Hadzic et au Président. J'ai traduit en

2 lui disant: "Monsieur le Président". Mais il n'a pas levé la tête de ses

3 cartes et il m'a dit: "Je ne suis pas Président, je suis simplement un

4 messager". Et je crois qu'à ce moment particulier, M. Hadzic s'est rendu

5 compte qu'il ne faisait que transmettre des messages provenant de

6 quelqu'un d'autre à cette réunion.

7 Question: J'aimerais maintenant vous parler de deux institutions fédérales

8 de l'ex-Yougoslavie, notamment l'institution dont vous faisiez partie,

9 c'est-à-dire le KOS de l'armée populaire yougoslave. Vous vous êtes

10 dépeints vous-même, le colonel Pero Ajdinovic et un autre colonel comme

11 étant membres du KOS de la RSK, n'est-ce pas?

12 Réponse: C'est exact.

13 Question: Et le colonel Mlado Karan, comme étant tous les trois membres du

14 KOS de RSK?

15 Réponse: C'est exact.

16 Question: Pendant que vous travailliez pour le KOS, est-ce que vous

17 connaissiez le sens, la signification de l'expression "fonds secrets"?

18 Réponse: Oui. En serbe, on dit "crni fond".

19 Question: Pouvez-vous décrire quel est le sens de cette expression pour

20 vous?

21 Réponse: Cela signifie simplement que de grandes sommes d'argent sont

22 mises à disposition, alors qu'on n'a pas dû signer un document et qu'on ne

23 doit pas expliquer comment cet argent est dépensé.

24 Question: Avez-vous appris quelque chose au sujet de cette forme de

25 financement et de son origine?

Page 12342

1 Réponse: Très tôt dans les années 60 et 70, ces fonds venaient d'une

2 entreprise qui s'appelait "Genex"; cela voulait dire: "General Export

3 Import". C'était une société d'import-export que tout le monde connaissait

4 et qui, en fait, était une société dépendant de la DB à l'extérieur de la

5 Yougoslavie.

6 Question: Vous la décrivez cette société comme ayant un lien avec la DB

7 aujourd'hui. Mais, en dépit de cela, est-ce que cette société fournissait

8 des fonds importants utilisés par le KOS, l'armée populaire yougoslave?

9 Réponse: Oui, en certains lieux, en effet. Notamment lorsque des sommes

10 importantes étaient requises.

11 Question: Pouvez-vous dire aux Juges de cette Chambre sur quelle base vous

12 vous fondez pour dire ce que vous dites s'agissant de cette caisse noire

13 ou de ces fonds secrets liés au KOS?

14 Réponse: Eh bien, j'en ai bénéficié moi-même. Je n'ai jamais signé un

15 quelconque reçu pour l'argent reçu à partir de 1968 et jusqu'à 1995. Et

16 pourtant, j'ai reçu des sommes régulières.

17 Question: Au début de votre témoignage, vous avez décrit un certain nombre

18 de missions que vous avez eues à l'étranger. Est-ce que vous diriez que,

19 pendant ces périodes également, vous aviez accès à la caisse noire?

20 Réponse: Oui, il suffisait de demander l'argent nécessaire et d'aller le

21 chercher sans poser de question; cet argent vous était remis sans la

22 moindre signature.

23 Question: Sans entrer dans le détail, est-ce que vous pourriez dire aux

24 Juges quelles étaient les dépenses particulières qui justifiaient

25 l'utilisation de ces caisses noires?

Page 12343

1 Réponse: Eh bien, il s'agissait en général d'activités à l'étranger, qu'il

2 s'agisse de soudoyer quelqu'un, d'acheter des armes, d'acheter des

3 documents. Tout dépendait de la situation, en fait.

4 Question: Pourriez-vous nous dire ceci: est-ce que vous aviez aussi accès

5 à des formes plus légitimes, disons, de financement pendant vos activités

6 avec le KOS?

7 Réponse: Oui, effectivement, je faisais partie des personnes reprises dans

8 la liste des salaires payés par l'ARSK.

9 Question: S'agissant des fonds que vous receviez pour des activités

10 légitimes, quel était le processus par lequel vous receviez ces fonds?

11 Réponse: Eh bien, il y avait une certaine somme, une somme donnée,

12 assortie de l'accusé de réception, tout à fait officiel, que je devais

13 signer pour montrer que j'avais effectivement reçu ces fonds.

14 Question: Si vous faisiez une demande pour obtenir des fonds secrets

15 -prenons une situation hypothétique- pour obtenir, pour acheter certains

16 éléments d'information, est-ce qu'on attendait de vous que vous obteniez

17 ces informations par la suite?

18 Réponse: Tout à fait.

19 Question: Avez-vous eu l'occasion de discuter avec M. Zimonja de demande

20 que vous aviez qui consistait à demander une somme importante de ces fonds

21 secrets?

22 Réponse: Oui, il s'agissait d'une offre permettant d'acheter un montant

23 considérable d'armes et de moyens d'écoute téléphonique; ceci étant à

24 obtenir d'un lieutenant ukrainien.

25 Question: Et que vous a-t-il dit à propos de la possibilité d'obtenir ces

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1 fonds?

2 Réponse: Il m'a dit que la somme demandée ne poserait pas de problème en

3 tant que telle, mais que l'armée n'était pas intéressée par cela et que je

4 devais m'adresser à la DB.

5 Question: Est-ce que la DB s'est impliquée dans cet achat allégué d'armes

6 de la part d'un Ukrainien?

7 Réponse: J'ai été voir M. Toso Pajic, après avoir reçu l'autorisation du

8 colonel Zimonja, et je devais faire cette offre à ce monsieur. Un appel

9 téléphonique a été passé à M. Stanisic à Belgrade et la réponse était

10 d'attendre pendant quelques jours. C'est tout ce que j'ai entendu à ce

11 propos; je ne sais pas si ces armes ont été achetées ou pas.

12 Question: Une dernière question en ce qui concerne ces fonds secrets.

13 Lorsque vous vous trouviez à l'étranger, de quelle manière, par quelle

14 filière receviez-vous ces fonds?

15 Réponse: Le système était très simple et fonctionnait très bien. Dans

16 chaque ambassade, où qu'elle se trouve -je parle ici de l'ambassade

17 yougoslave-, il y avait toujours un club yougoslave adjacent à

18 l'ambassade, là où il y avait aussi les éléments de renseignement. Vous

19 vous présentiez à l'aide de votre passeport et vous demandiez si quelqu'un

20 avait laissé un message pour vous.

21 Je me souviens qu'à Londres, il y avait des casiers avec les lettres de

22 l'alphabet; à ma lettre L, pour Lazarevic, j'avais quelque chose et cela

23 se trouvait dans ce casier. Si je devais fournir des informations,

24 j'allais remettre ces informations sous pli scellé dans ce casier. Je

25 suppose que c'était envoyé là où c'était censé arriver. Si je demandais

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1 des fonds, je passais par la même filière. J'écrivais et je motivais ma

2 demande, j'expliquais pourquoi j'avais besoin de cette somme, je plaçais

3 ma demande dans une enveloppe et je la mettais dans le casier; deux jours

4 plus tard, je passais par là pour aller chercher l'argent.

5 Question: Pouvons-nous passer de ce sujet à un autre?

6 Je vais vous demander de nous décrire les rapports qui existaient entre la

7 JNA, l'armée de la RSK, de la République de Krajina serbe, et je vais vous

8 demander ce que vous pouvez dire aux Juges de cette Chambre s'agissant de

9 la VRS, l'armée de la Republika Srpska?

10 Réponse: L'expérience m'a montré qu'ici, on ne parle pas de trois armées

11 différentes, mais bien d'une seule et même armée. Et c'est la JNA ici.

12 Qu'on donne le nom de VRS ou de ARSK, peu importait en réalité. En effet,

13 les fournitures, les fonds venaient de la Yougoslavie ou plutôt, si vous

14 voulez de la Serbie.

15 Question: Pendant que vous avez servi dans le 21e Corps, avez-vous appris

16 ou avez-vous vu des convois qui venaient de l'armée yougoslave avec des

17 fournitures, des approvisionnements donc de l'armée yougoslave en Serbie

18 et qui arrivaient dans la zone de la Krajina?

19 Réponse: Tout à fait. Au moins une fois par mois.

20 Question: Quel était l'itinéraire emprunté par ces convois?

21 Réponse: Ils venaient de Belgrade. On passait par Zila Kucavica. C'était

22 le corridor, le couloir, le seul d'ailleurs qui reliait la Serbie à la

23 RSK. Le convoi passait par là, arrivait sur le territoire de la RSK et si,

24 par exemple, le convoi arrivait dans la zone de responsabilité du 39e

25 Corps, eh bien, un certain nombre de camions y restaient; le convoi

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1 poursuivait sa route, donnait les fournitures à tel ou tel endroit et

2 poursuivait de nouveau son chemin. Et je dirai qu'en fait, certains de ces

3 camions délivraient leur marchandise sur l'itinéraire de Bosnie.

4 Question: Que voulez-vous dire exactement?

5 Réponse: Je veux dire qu'on fournissait ces différents éléments à l'armée

6 de la Republika Srpska.

7 Question: Comment le savez-vous?

8 Réponse: Il y avait ce manifeste. Ici, je dois apporter une précision à

9 l'intention des Juges.

10 Il y avait donc ces différentes grandes artères, ces grandes voies, mais

11 tout le long de celles-ci, il y avait des postes de contrôle tenus par

12 l'armée et la police. Il y en avait un près du poste où je me trouvais,

13 qui était près des Nations Unies. Je ne voulais pas avoir trop d'ennuis

14 avec les Nations Unies. Et ce convoi avait un manifeste qui montrait qu'au

15 départ, il y avait 30 camions dans ce convoi, mais, au moment où ce convoi

16 était arrivé à ce poste de contrôle précis, il n'y en avait plus que 15.

17 On peut donc partir du principe que les 15 autres camions avaient été

18 laissés à différentes étapes de l'itinéraire.

19 Question: Il y a quelques instants, vous avez utilisé le terme de Zila

20 Kucavica, dans le cadre de votre réponse. Pourriez-vous traduire ceci?

21 Réponse: C'est l'aorte principale: si on la coupe, il n'y a plus de vie.

22 Je vous décrivais ce corridor: si on coupait cette artère, il n'y aurait

23 plus de vie en RSK.

24 Question: Vous avez donc observé ces convois pendant la période où vous

25 avez servi dans le 21e Corps. Pourriez-vous dire aux Juges, d'après vos

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1 estimations, quel était le pourcentage d'armes utilisées par ce 21e Corps,

2 qui provenaient et qui était fournies par l'armée yougoslave à l'époque?

3 Réponse: Je dirais que près de 80% des armes venaient de Yougoslavie; et

4 là, c'est un chiffre tout à fait prudent.

5 Question: Pendant le temps où vous avez servi dans ce 21e Corps, étiez-

6 vous au courant de l'existence d'opérations conjointes menées et par

7 l'armée de la Republika Srpska, la VRS, et par la ARSK, l'armée de la RSK?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Pourriez-vous décrire certaines de ces actions conjointes?

10 Réponse: En général, elles étaient menées par le 5e Corps de l'armée de

11 Bosnie. Il y avait notamment la poche de Bihac qui était encerclée par ce

12 5e Corps. Il y a eu trois de l'ARSK et deux corps de Bosnie; il y avait le

13 1er Corps et le 2e Corps de Krajina, qui venaient de la VRS, le 39e Corps,

14 le 21e Corps et le 15e Corps de l'armée de RSK.

15 Question: Vous connaissiez les procédures d'application permanentes; vous

16 connaissiez aussi la réalité de la vie dans le 21e Corps. Sur cette base,

17 pourriez-vous dire aux Juges à quel niveau ce type de coordination se

18 faisait?

19 Réponse: Cela devait être décidé par le camp d'état major de Belgrade. Ce

20 n'était pas une action simple, elle nécessitait beaucoup de coordination

21 et de préparation.

22 Question: En 1995, avez-vous assisté à une inspection à Slunj, au cours de

23 laquelle il y a eu présentation de matériel militaire de la VRS et un

24 passage en revue où il y avait, parmi les participants, le 21e Corps?

25 Réponse: Oui, j'y étais.

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1 Question: Je vais vous demander des questions à ce propos plus tard.

2 Pourriez-vous nous dire quels étaient les matériels militaires importants

3 utilisés lors de cette inspection et qui venaient, d'après vous, de la

4 VRS?

5 Réponse: Il y avait beaucoup de lance-roquettes multiples notamment, il y

6 avait en fait un convoi de la Bosnie ou de la Republika Srpska qui était

7 venu dans la RSK à cette fin précise. Le matériel avait été amené le matin

8 et il est reparti après l'inspection, après le passage en revue dans

9 l'après-midi.

10 Question: Encore quelques questions à propos des convois.

11 Dans le cadre de l'expérience que vous avez acquise, pourriez-vous nous

12 dire s'il y a eu des cas où le manifeste accompagnant ce convoi donnait

13 une description erronée du matériel contenu dans le convoi, dans les

14 camions?

15 Réponse: Par exemple, on disait que c'était un convoi humanitaire. Or ce

16 convoi ne contenait que des éléments militaires, des munitions ou des

17 fusils automatiques, des armes automatiques, ce genre de choses.

18 Question: Pendant le temps où vous vous êtes trouvé dans le 21e Corps,

19 est-ce qu'il y avait d'autres membres de l'armée yougoslave qui étaient

20 assignés à des missions temporaires?

21 Réponse: Dans le cadre de l'ARSK vous voulez dire?

22 Question: Oui.

23 Réponse: Mis à part les officiers de la JNA, il n'y avait pas d'unités

24 particulières.

25 Question: Pourriez-vous nous donner une idée approximative du nombre

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1 d'officiers de la JNA qui avait eu une mission, une assignation temporaire

2 dans l'ARSK?

3 Réponse: Je dirais que c'était à peu près 100%.

4 Question: D'après votre témoignage, dites-vous que tous les officiers de

5 l'armée de la Republika de Krajina serbe étaient des membres actifs de

6 l'armée yougoslave?

7 Réponse: Oui. Tout à fait.

8 Question: Quelle était la durée moyenne de la mission de ces officiers

9 avant qu'ils ne réintègrent les rangs de l'armée yougoslave?

10 Réponse: La durée minimale était de six mois.

11 Question: Pendant le temps que vous avez passé dans le 21e Corps, avez-

12 vous fait la connaissance de certains de ces officiers?

13 Réponse: Oui, quotidiennement.

14 Question: Serait-il exact de dire que leur lieu de résidence, en fait,

15 était à peu près toute la Yougoslavie, pas seulement la Krajina?

16 Réponse: Oui, la plupart étaient au départ cantonnés à Belgrade. Il y

17 avait des gens de Krusevac, de Dragojevac, de Nis et d'autres venant plus

18 du sud de la Serbie.

19 Question: Est-ce que ces officiers recevaient des avantages particuliers

20 du fait qu'ils étaient de service dans l'ARSK?

21 Réponse: Apparemment, oui, c'était le cas.

22 Question: Comment le savez-vous, si vous savez les avantages dont ils

23 bénéficiaient de ce fait? Et comment avez-vous eu ces informations?

24 Réponse: Je dirai tout d'abord qu'ils étaient très très bien payés par

25 rapport aux officiers de l'armée de la RSK qui étaient promus par Knin,

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1 pour ne pas parler de toutes ces personnes qui décidaient de rester plus

2 longtemps que six mois. Ils étaient certains d'avoir un appartement qui

3 leur était donné quand ils étaient de retour à Belgrade ou de retour dans

4 leur lieu de résidence.

5 Question: Peut-on montrer au témoin la pièce d'accusation 348,

6 intercalaire 5? Je vais demander que l'original, à savoir la version en

7 serbe, soit placé sur le rétroprojecteur de façon que M. Lazarevic puisse

8 voir la signature qui est apposée sur la deuxième page.

9 (Intervention de l'huissier.).

10 Question: Monsieur Lazarevic, veuillez examiner ce document.

11 Je vous demande ceci: reconnaissez-vous la signature de la personne qui a

12 signé ce document?

13 Réponse: Oui.

14 Question: D'après vous, c'est la signature de qui?

15 Réponse: Du général Mile Novakovic.

16 M. Groome (interprétation): Connaissez-vous la signature de ce colonel?

17 M. Lazarevic (interprétation): Oui, je l'ai vue assez souvent.

18 M. le Président (interprétation): Maître Tapuskovic, vous voulez

19 intervenir?

20 M. Tapuskovic (interprétation): Je voudrais mettre en garde sur une chose.

21 Ce document a été rédigé en 1994. Le procureur a eu largement le temps

22 jusqu'à présent puisqu'il parle de 1995 et d'événements qui se sont

23 déroulés en 1992. Plus tard, le procureur n'a pas poursuivi l'examen de

24 documents ayant trait à l'Acte d'accusation pour la Croatie après 1991.

25 Nous avons examiné des documents ayant trait à des événements postérieurs

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1 à 1992 dont celui-ci qui a été rédigé en 1994.

2 M. le Président (interprétation): Oui, oui. Poursuivez, Monsieur Groome.

3 M. Groome (interprétation): Avez-vous lu ce document?

4 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

5 Question: Pourriez-vous, à l'intention des Juges, décrire la teneur de ce

6 document et en quoi il revêt une importance quelconque?

7 Réponse: Ceci concerne l'arrivée de nouvelles recrues pour l'armée de la

8 RSK. La plupart des jeunes, lorsqu'ils arrivent à l'âge de 19 ans,

9 puisqu'il y a toujours eu un service militaire obligatoire en Yougoslavie,

10 les jeunes hommes devenaient majeurs au moment où ils devaient faire leur

11 service et ce document porte sur l'origine de ces nouvelles recrues et

12 leur destination.

13 A Belgrade, on voulait les garder dans la région pour deux raisons.

14 Première raison, il fallait des gens en service, il fallait les avoir sur

15 le terrain, prêts à intervenir. Au lieu d'avoir un service militaire de 18

16 mois, le service militaire ne durerait que 9 mois parce que, comme cela,

17 on aurait un rendement double, si vous voulez.

18 Question: Est-il exact de dire que ce document entérine le fait qu'une

19 personne se voie bénéficier des services prestés en RSK, et ceci vaut pour

20 toute la Yougoslavie?

21 Réponse: Non, c'était toujours vrai en temps de guerre. Le temps presté en

22 temps de guerre vaut double, si vous voulez, au moment de la retraite;

23 donc la prestation est multipliée par deux. Cela intervient pour votre

24 service national.

25 Question: Merci. Posons quelques questions maintenant, à propos des

Page 12352

1 services de sécurité d'Etat en République de Serbie.

2 Vous avez déjà parlé de M. Stanisic. Est-ce qu'à un moment donné, vous

3 avez appris que M. Stanisic était présent en RSK au moment où vous vous y

4 étiez?

5 Réponse: Oui, je crois avoir eu l'occasion de rencontrer ce monsieur, de

6 façon officieuse, à deux ou trois reprises à Knin.

7 Question: Mais saviez-vous que ce monsieur était présent au moment d'un

8 contentieux entre M. Martic et M. Babic?

9 Réponse: Effectivement, je crois que M. Stanisic est venu de Belgrade pour

10 assister à cette réunion, et il transmettait un message de M. Milosevic à

11 l'intention de M. Babic.

12 Question: Comment le savez-vous?

13 Réponse: Parce qu'il y a eu une discussion générale avec ces gens qui

14 participaient à la réunion.

15 Question: Il y a ce temps où vous, vous vous trouviez en Krajina et où

16 vous avez rencontré officieusement M. Stanisic. Vous avez décrit cette

17 réunion pour nous.

18 Mais est-ce que vous êtes au courant de la présence de M. Stanisic pour

19 d'autres réunions en Krajina, d'après les conversations que vous avez eues

20 avec d'autres officiers?

21 Réponse: Oui. Par exemple, Tosa Pajic était un de ses officiers; il m'a

22 dit que "Papa" était arrivé hier ou qu'il allait venir la semaine

23 suivante, ce genre de choses. Mais, puisque je ne faisais pas partie des

24 forces de police, je n'ai jamais assisté à ces réunions. Mais je suis

25 assez sûr que M. Stanisic venait fréquemment en Krajina.

Page 12353

1 Question: Pourriez-vous dire à la Chambre, de façon approximative, quand

2 M. Stanisic était présent en Krajina pour la première fois et quand il l'a

3 été pour la dernière fois?

4 Réponse: J'aurais peine à le dire. Je sais qu'au début, ces réunions ou

5 ces visites étaient plus fréquentes. C'était dû davantage qu'à autre chose

6 à des problèmes d'organisation. Plus tard, je crois que le bras droit,

7 l'adjoint de M. Stanisic était pratiquement tous les jours présent en RSK.

8 Question: Vous dites "au début". C'est quand?

9 Réponse: Je dirais début 1990, pendant toute l'année 1991 également.

10 Question: Est-ce qu'à un moment donné, M. Tosa Pajic vous a montré un

11 document émanant de M. Stanisic, document qui concernait la coopération

12 avec M. Fikret Abdic?

13 Réponse: Oui, pour des raisons que j'ignore, à un moment donné, il y a eu

14 une réconciliation entre Belgrade et Fikret Abdic. Monsieur… En fait, une

15 lettre est arrivée de Belgrade, pas seulement par le biais de Stanisic ou

16 de Tosa Pajic, mais par la filière militaire, pour parler de la nécessité

17 d'établir une bonne coopération avec les forces de Abdic qui étaient

18 contiguës à la zone de responsabilité du 21e Corps.

19 Question: Etiez-vous personnellement opposé à cette coopération?

20 Réponse: Oui. Je n'étais pas le seul, il y avait plusieurs officiers qui

21 étaient opposés à cette coopération.

22 Question: Soyons clairs, M. Fikret Abdic, c'est un Bosnien, un Musulman de

23 Bosnie qui, à un moment donné, a passé une alliance avec des membres de la

24 Krajina serbe, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Franki Stamatovic, le connaissez-vous?

2 Réponse: Oui, je l'ai rencontré à plusieurs reprises.

3 Question: Pourriez-vous, à l'intention des Juges, dire qui il est?

4 Réponse: Monsieur Stamatovic était, lui aussi, pour des raisons que

5 j'ignore… quelquefois s'appelait Simatovic, Stamatovic. Moi, je le

6 connaissais en tant que Stamatovic. En tout cas, c'est la même personne,

7 de toute façon.

8 En fait, cet homme avait notre ancien QG de Petrova Gora, et c'est au

9 moment où il a constitué son propre QG avec des forces spéciales de la

10 police de Serbie.

11 Question: Quelles sont les connaissances que vous avez personnellement à

12 propos de ces forces spéciales?

13 Réponse: Ces forces ont été déployées dans notre zone avant

14 l'établissement d'un nouveau QG près de Velika Kladusa, du côté de la

15 Bosnie, et elles s'appelaient "P-A-U-K", "Pauk", "Araignée".

16 Question: Ces forces spéciales arboraient-elles un emblème particulier qui

17 les distinguaient des autres?

18 Réponse: Oui, c'était un insigne tout à fait différent, différent de celui

19 des forces régulières: c'était une épée tournée vers le bas avec en

20 dessous le drapeau serbe.

21 M. Groome (interprétation): Peut-on montrer une pièce au témoin? Il s'agit

22 d'une photographie de cet insigne.

23 Je demanderai qu'une nouvelle cote soit octroyée avec l'intercalaire n°1,

24 car je m'attends à ce que d'autres pièces soient introduites de la même

25 façon; elles pourraient relever de la même cote.

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1 (Intervention de l'huissier.)

2 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 349.

3 M. Groome (interprétation): Veuillez examiner le document sur le

4 rétroprojecteur et qui porte la cote P349, intercalaire 1. Reconnaissez-

5 vous ce qui figure sur cette photo?

6 M. Lazarevic (interprétation): Oui, c'est un écusson d'uniforme des forces

7 spéciales de la police de Serbie déployées en RSK.

8 Question: Et est-ce que les membres de cette unité des forces spéciales

9 étaient détachés auprès de Frenki Stamatovic? Et est-ce que ses membres

10 portaient cet écusson?

11 Réponse: Oui.

12 Question: J'en ai terminé. Merci, Monsieur l'Huissier.

13 Connaissez-vous une personne du nom de colonel Bozovic?

14 Réponse: Oui. J'ai eu le malheur de rencontrer cet homme une seule fois,

15 mais je l'ai souvent entrevu.

16 Question: Pourriez-vous nous dire qui était cet homme et à quelle unité il

17 appartenait?

18 Réponse: Il faisait partie de l'unité du MUP de Serbie. Il était colonel,

19 c'était son grade. Un homme très colérique, particulièrement intéressant.

20 Je l'ai rencontré à plusieurs reprises au quartier général du 21e Corps.

21 Je l'ai rencontré une seule fois personnellement, mais ça ne s'est pas

22 bien terminé, cette entrevue.

23 Question: Pourriez-vous nous dire, de façon approximative, quand vous avez

24 vu cet homme régulièrement au 21e Corps?

25 Réponse: Je dirai: à partir de 1993 jusqu'en 1995.

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1 Question: Et quand vous avez vu cet homme, est-ce qu'il arborait cet

2 insigne que vous venez d'indiquer dans la pièce P349, intercalaire 1?

3 Réponse: Oui, et il arborait aussi le grade de colonel, à la poche.

4 Question: Avez-vous des connaissances en ce qui concerne M. "Arkan"?

5 Savez-vous d'abord qui était "Arkan"?

6 Réponse: Oui, c'était M. Raznatovic, Zeljko Raznatovic. Je le connais.

7 Question: L'avez-vous rencontré? Et, si c'était le cas, dans quelles

8 circonstances cette rencontre a-t-elle eu lieu?

9 Réponse: C'était en 1993. Il était à une réunion dans un hôtel de Topusko.

10 On essayait de trouver une solution au problème de la guerre par la

11 signature de différents accords. On essayait de voir comment on pouvait

12 améliorer les conditions de vie dans la zone. Cette réunion a donc eu lieu

13 à l'hôtel de Topusko. Monsieur Raznatovic est arrivé avec deux ou trois de

14 ses gardes du corps et il a créé une atmosphère tout à fait déplaisante,

15 puisqu'il a attaqué les officiers en disant: "Plutôt que de planter des

16 arbres, il faut aller combattre, Messieurs!" Et quand on regardait le

17 visage des gens, on se rendait compte que ces hommes avaient peur de lui.

18 Question: Savez-vous s'il y avait des rapports, des liens entre "Arkan" et

19 les services de sécurité d'Etat de la République de Serbie, du MUP?

20 Réponse: Oui. En fait, il y avait –que je sache- plusieurs mandats d'arrêt

21 décernés dans toute l'Europe contre "Arkan". Et jamais, à la demande

22 d'Interpol, il n'a été poursuivi en Yougoslavie. Ce qui veut dire qu'il

23 était très bien protégé en Yougoslavie.

24 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, le moment se prête

25 peut-être bien à une pause?

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1 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons suspendre l'audience.

2 Monsieur Lazarevic, au cours de cette pause, et de toute autre pause

3 susceptible d'intervenir pendant votre déposition, vous n'êtes censé

4 parler à personne de votre déposition tant qu'elle n'est pas terminée. Et

5 ceci concerne également les représentants du Bureau du Procureur.

6 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

7 M. le Président (interprétation): Veuillez être de retour à l'audience à

8 11 heures 30.

9 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

10 (L'audience, suspendue à 11 heures 01, est reprise à 11 heures 31.)

11 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome, vous pouvez

12 poursuivre.

13 M. Groome (interprétation): Monsieur Lazarevic, nous avions terminé la

14 séance de ce début de matinée par les connaissances que vous aviez à

15 propos de "Arkan".

16 Pourriez-vous nous dire si le groupe d'"Arkan", les Tigres d'"Arkan",

17 avait des rapports avec l'armée de la République de la Krajina serbe?

18 M. Lazarevic (interprétation): Les forces d'"Arkan" étaient déployées avec

19 les membres du 21e Corps et du MUP de Serbie.

20 Question: Je vais vous demander ce qu'il en est de ce groupe appelé

21 "Araignée" dans quelques instants. Mais pourriez-vous dire aux Juges ce

22 que signifiait ce P-A-U-K, "Pauk"?

23 Réponse: "Pauk" a été établi du côté de la Bosnie, que le 21e Corps ne

24 reconnaissait pas comme étant une partie de ses effectifs, ce qui

25 permettait aux membres du 21e Corps d'aller combattre contre le 5e Corps

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1 de Bosnie sur territoire bosnien.

2 Question: Pourriez-vous nous dire quelles étaient les unités qui étaient

3 combinées pour établir ce quartier général "Pauk"?

4 Réponse: Il y avait les membres du 21e Corps, les officiers et les

5 combattants, il y avait les membres des forces de Abdic, les membres des

6 tigres de "Arkan" et les membres des forces spéciales de la police du

7 groupe de Serbie.

8 Question: Au cours des observations que vous avez faites s'agissant de ce

9 qui se passait dans ce groupe "Pauk", est-ce que vous avez vu les Tigres

10 d'"Arkan" coopérant avec les membres du 21e Corps?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Parlons d'un incident survenu dans un bar.

13 Vous êtes-vous trouvé dans un bar au moment où est intervenu un incident

14 impliquant certains des Tigres d'"Arkan"?

15 Réponse: Nous parlons d'un bar des Nations Unies, réservé aux membres des

16 Nations Unies. Il y avait l'officier de service du quartier général des

17 Nations Unies qui est venu chez moi dans la nuit, vers 1 heure ou 2

18 heures, disant qu'il y avait des problèmes avec des Tigres d'"Arkan", des

19 soldats serbes, plus exactement. Je pensais que c'était un problème avec

20 des membres de l'armée de RSK; or, dans ce bar où je me suis rendu, j'ai

21 trouvé des membres d'"Arkan" qui avaient bu quelque chose, qui avaient

22 pris des cigarettes et refusaient de payer.

23 Question: Comment saviez-vous que c'étaient des membres des unités

24 d'"Arkan"?

25 Réponse: Du fait des uniformes qu'ils portaient.

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1 Question: Après être arrivé à ce bar des Nations Unies, qu'avez-vous fait?

2 Réponse: La seule chose que je pouvais faire, puisque je ne pouvais pas

3 intervenir, j'ai téléphoné à mon quartier général et j'ai demandé à parler

4 au colonel Bulat.

5 Question: Avant de parler au colonel Bulat, avez-vous essayé de résoudre

6 la situation en parlant directement aux Tigres d'"Arkan"?

7 Réponse: Ce n'est pas le genre d'homme à qui on peut parler.

8 Question: Avez-vous été en mesure de contacter le colonel Bulat?

9 Réponse: Oui. Dix minutes se sont écoulées, puis j'ai pu lui parler; je

10 lui ai parlé du problème que j'avais ou plutôt du problème qu'avaient les

11 Nations Unies. Il a dit que je devais rester à proximité et que quelqu'un

12 allait arriver sur les lieux pour essayer de trouver une solution.

13 Question: Veuillez penser aux interprètes et ralentir votre débit.

14 Réponse: Excusez-moi.

15 Question: Vous avez parlé au colonel Bulat de ce problème. Par la suite,

16 est-ce qu'il s'est passé quelque chose?

17 Réponse: Trente minutes à peu près après avoir terminé ma conversation

18 avec le colonel Bulat, une jeep est arrivée et il y avait le colonel

19 Pejovic, un colonel d'"Arkan", qui est arrivé avec trois ou quatre membres

20 de la police militaire, je pense. J'ai expliqué ce qui s'était passé

21 rapidement et je suis entré dans le bar. Il y avait cet homme qui est

22 entré avec ces quatre soldats qui avaient créé le problème; en fait, il a

23 frappé chacun de ces hommes. L'un a été frappé si brutalement qu'il est

24 tombé à genoux et ces autres membres de la police militaire l'ont emmené,

25 et, cet homme, je ne l'ai plus jamais revu.

Page 12360

1 M. Groome (interprétation): D'après ce que vous avez pu observer

2 s'agissant de cet incident, avez-vous conclu que le colonel Bulat avait

3 contacté le colonel Pejovic?

4 M. Lazarevic (interprétation): Oui, j'ai compris en fait qu'il avait été

5 en contact avec le quartier général de "Pauk".

6 M. Robinson (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Témoin. Que voulez-

7 vous dire, Monsieur Groom: vouliez-vous savoir s'il y avait eu un contact

8 avant que cet homme vienne au bar?

9 M. Groome (interprétation): Non, Monsieur le Juge. Je vais essayer peut-

10 être de tirer cette question au clair.

11 La question que je vous posais, Monsieur Lazarevic, était celle-ci: savez-

12 vous de quelle façon le colonel Bulat a pu obtenir du colonel Pejovic et

13 de quelques autres membres des forces d'"Arkan" qu'ils viennent au bar?

14 M. Lazarevic (interprétation): Il y avait une ligne téléphonique directe.

15 Question: Et là, "Pauk", c'était le commandement conjoint, n'est-ce pas,

16 que vous avez décrit comme étant celui qui incluait les hommes d'"Arkan"?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Est-ce que, à un moment donné, vous vous êtes trouvé en présence

19 du ministre de la défense de la RSK, M. Dusan Rakic, à l'occasion d'une

20 réunion qu'avait M. Rakic avec "Arkan"?

21 Réponse: Oui, j'étais l'escorte personnelle du ministre de la Défense de

22 l'époque, l'amiral Rakic.

23 Question: Pourriez-vous nous dire où cette réunion a eu lieu?

24 Réponse: A Erdut.

25 Question: Qui d'autre était présent à cette réunion?

Page 12361

1 Réponse: Je persiste à croire que cette réunion a eu lieu par hasard

2 puisque nous étions en train de nous déplacer dans le secteur est avec le

3 commandant de secteur, mais nous avons traversé Dalj, nous avons dépassé

4 la station-service et je pense qu'il y avait un endroit où on pouvait

5 manger à la station-service. Je pense que le ministre a demandé à arrêter

6 la voiture parce qu'il avait vu qu'"Arkan" s'y trouvait et un certain

7 "Badza".

8 Question: Quelle était votre fonction en tant qu'escorte personnelle?

9 Réponse: J'étais censé traduire, interpréter pour le ministre de la

10 Défense lors de ses réunions avec le commandant du secteur Est des Nations

11 Unies.

12 M. Robinson (interprétation): Merci.

13 M. Groome (interprétation): Vous parlez d'un certain "Badza". Vous avez

14 parlé de "Arkan" à l'occasion de cette réunion. Et vous avez également

15 parlé du ministre Rakic. Y avait-il d'autres personnes?

16 M. Lazarevic (interprétation): Il y avait plusieurs hommes "Arkan",

17 manifestement, qui se trouvaient dans ce restaurant.

18 Question: Vous parlez de ce "Badza", connaissez-vous son nom réel?

19 Réponse: Je pense que c'était un officier de police de haut rang de

20 Serbie. C'était peut-être quelqu'un comme Stojikovic ou Stojkovic, je ne

21 sais pas exactement.

22 Question: Avant que vous ne poursuiviez votre déposition, je vais demander

23 que vous réexaminiez la pièce se trouvant sur le rétroprojecteur. Il

24 s'agit de la pièce P348, intercalaire 1. Veuillez-vous servir du pointeur.

25 Et je vais vous demander maintenant de parler des rapports existants entre

Page 12362

1 les diverses personnes dont vous avez parlé dans votre déposition.

2 Mais, auparavant, je vais vous poser une question à propos de cette pièce.

3 Est-ce que cette pièce repose sur un croquis que vous avez fait, un

4 diagramme que vous avez établi montrant les rapports existants entre les

5 personnes figurant sur ce diagramme?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Commençons par la case verte à droite, là où on voit JNA/VJ.

8 Pourriez-vous nous dire quels sont les différents rapports qui existaient?

9 Réponse: On voit comme rubrique de la case verte "JNA", puis "VJ" parce

10 que la dénomination a changé par la suite. On voit d'abord Perisic, le

11 général Momcilo Perisic. Puis, vous avez deux filières: une à gauche,

12 c'est la sécurité interne ou intérieure du KOS. Là, vous avez le colonel

13 Petar Surla et le colonel Mlado Karan. De l'autre côté, vous avez la

14 sécurité extérieure du KOS et vous avez le colonel Nicola Zimonja.

15 Nous descendons, nous voyons le QG de Knin, le général Celeketic, et le

16 général Mile Mrksic en rapport direct avec le 21e Corps dont le commandant

17 est le colonel Bulat. Puis, vous avez par la suite le C-001.

18 Question: Vous parlez du lien avec le général ou colonel Bulat. Et qu'est-

19 ce que cette ligne indique?

20 Réponse: Si vous suivez la filière vers la gauche, ça va vers le grand QG,

21 vers la droite ça va vers la sécurité intérieure. Et puis de la sécurité

22 intérieure, ça repart sur le QG.

23 Question: C-001, pour que tout soit clair, est-ce que c'est le nom de code

24 utilisé pour vous désigner dans le cadre de votre déposition?

25 Réponse: Oui.

Page 12363

1 Question: Donc, lorsque l'on voit C-001, il s'agit de vous?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Sous la rubrique C-001, on voit trois noms avec cette accolade.

4 Pourriez-vous nous dire le lien qu'il y a à partir de cette accolade?

5 Réponse: C'était le lien de cette unité antiterroriste qui avait à sa tête

6 Pero Ajdinovic. Et en dessous, vous avez deux autres noms: l'un d'entre

7 eux est devenu mon ami personnel. Et puis, vous avez cette ligne qui monte

8 directement vers la sécurité intérieure du KOS.

9 Question: Il y a dans cette case pour le 21e Corps, elle est tout à fait

10 intégrée dans la case indiquant JNA/VJ. Qu'est-ce que ça indique?

11 Réponse: Eh bien, ça indique que ça fait partie du même tout.

12 Question: Passons maintenant aux cases bleues qui se trouvent sur la

13 gauche. Là, on voit "CDB Serbie". Pourriez-vous nous parler des liens

14 organiques existant dans cette partie du diagramme?

15 Réponse: Eh bien, le chef de la SDB à l'époque, c'était Jovica Stanisic,

16 son assistant ou ses assistants directs c'étaient Frenki puis Simatovic ou

17 Stamatovic, suivis par le colonel Ulemek de "la Legija" et le colonel

18 Bozovic. Et puis, dans ce cercle, on voit aussi Tosa Pajic, chef de la

19 police et officier de liaison de la police de RSK. Et puis, il y a donc un

20 lien direct le reliant avec M. Stanisic.

21 Puis vous avez le MUP de la RSK. Vous avez le ministre de l'Intérieur.

22 Puis, vous avez aussi pour la sécurité Milos Pajic. Et tous ces hommes

23 sont en liaison directe avec Jovica Stanisic.

24 Question: Au centre du diagramme, on voit une case jaune avec, à

25 l'intérieur, les mots: ""Pauk", QG Bosnie". Pourriez-vous nous décrire

Page 12364

1 quels sont les liens entre cette case et les autres parties du diagramme?

2 Réponse: On voit aussi dans cette case qu'il y a un lien direct avec le

3 21e Corps ainsi qu'avec les forces d'"Arkan" qui se trouvent à gauche avec

4 le colonel Pejovic et le capitaine Sarac, et puis en lien direct avec

5 Stanisic, Franki Simatovic. Le chef du QG "Pauk", c'était Mile Novakovic,

6 les forces de Fikret Abdic, subordonnées au 21e Corps sous les ordres de

7 Novakovic.

8 On voit qu'il y a des liens très bien établis dans tout cela.

9 Question: Merci. Nous en avons terminé de cette pièce-ci.

10 (Intervention de l'huissier.)

11 Monsieur Lazarevic, pendant le temps que vous avez passé au 21e Corps,

12 avez-vous pris connaissance d'une politique concernant la population

13 croate dans la zone de responsabilité du 21e Corps?

14 Réponse: En fait, à mon arrivée dans la zone de responsabilité du 21e

15 Corps, à savoir en décembre 1991, la plupart des Croates ne se trouvaient

16 plus dans la région. Il y avait encore quelques poches isolées, certains

17 villages où il y avait des habitants croates; c'étaient surtout des

18 personnes âgées, des personnes malades.

19 J'ai parlé à d'autres membres du Corps. Et puis, j'avais une certaine

20 connaissance personnelle de ce qui se passait, et j'ai compris que la

21 politique consistait à faire sortir le plus grand nombre de Croates

22 possibles de ce territoire.

23 Question: Est-ce qu'il y avait une divergence de vue entre certains

24 éléments serbes, s'agissant de la meilleure façon d'appliquer cette

25 politique?

Page 12365

1 Réponse: J'ai eu des réunions avec Zimonja et le colonel Ajdinovic. Et

2 c'était présenté comme étant un problème.

3 Il y avait deux démarches possibles pour le régler. Une démarche était

4 plus violente que l'autre, c'était celle que suggérait Ajdinovic: il

5 fallait les éliminer tous, en terminer de ces personnes, terminer la

6 tâche. Alors que le colonel Zimonja avait une démarche, une approche peut-

7 être plus diplomatique: il voulait que toute la zone soit laissée sous la

8 protection de la JNA.

9 Question: Et pensez-vous qu'il y avait donc cette divergence de vue à

10 l'intérieur de la division du KOS de l'armée de la Yougoslavie?

11 Réponse: Oui, deux filières différentes.

12 Question: S'agissant de cette politique prônée par Ajdinovic, consistant à

13 tuer des Croates, est-ce qu'il pensait aux soldats croates ou plutôt à la

14 population civile croate?

15 M. Groome (interprétation): Quand il disait "croate", pour moi ça voulait

16 dire tout ce qui était croate; que ce soit des militaires ou des civils.

17 N'oubliez pas qu'il n'y avait pas en fait au sein de la RSK et de son

18 armée aucun Croate; il n'y avait que des civils. Donc s'il parlait des

19 Croates, il voulait sans doute dire "des civils".

20 M. Robinson (interprétation): Le témoin peut-il expliquer ce qu'il a dit

21 s'agissant de deux filières différentes défendues par les deux colonels de

22 la JNA?

23 M. Groome (interprétation): Pourriez-vous nous rappeler, Monsieur le

24 Témoin, ce qu'il en est de ces deux différents éléments du KOS, nous faire

25 cette description une fois de plus?

Page 12366

1 M. Lazarevic (interprétation): Le colonel Ajdinovic représentait la

2 sécurité intérieure, s'occupait de ces questions de sécurité intérieure

3 dans le pays. Alors que le colonel Zimonja s'occupait des éléments

4 extérieurs, ce qui est à l'extérieur du pays.

5 Question: Pouvez-vous nous donner un exemple d'une tâche classique confiée

6 à la branche extérieure d'une tâche déléguée à la sécurité intérieure,

7 pour mieux comprendre?

8 Réponse: La partie intérieure, c'est la partie "Renseignement" du KOS; et

9 elle, elle s'occupait des menaces potentielles dirigées contre la

10 Yougoslavie à l'extérieur de la Yougoslavie, que ce soit en Grande-

11 Bretagne, au Canada, en Australie ou ailleurs dans le monde. Quant à

12 Ajdinovic, lui s'occupait de la sécurité intérieure, donc cela veut dire

13 tout ce qui était danger pour la Yougoslavie à l'intérieur des frontières

14 de la Yougoslavie.

15 Question: Au début de la déposition, vous avez parlé de ce que vous aviez

16 fait en Australie notamment ou en Grande-Bretagne. Est-ce que les hommes

17 de la section de Ajdinovic se voyaient affectés à ce type de tâches?

18 Réponse: Pas du tout.

19 Question: Vous avez eu des discussions s'agissant de ce qu'il fallait

20 faire à l'égard de la population croate. Est-ce que, lors de ces

21 discussions, il y avait présence de représentants de la sécurité d'Etat,

22 notamment de Tosa Pajic?

23 Réponse: C'était considéré comme étant un problème général pour le secteur

24 dans lequel nous étions. Il y avait donc présence de membres de la police

25 et présence de la DB. En l'occurrence, Tosa Pajic, notamment, et M. Djuro

Page 12367

1 Skaljac.

2 Question: Pourriez-vous dire quelle était l'attitude de ces personnes à

3 propos de la population croate restante?

4 Réponse: Eh bien, c'étaient des gens de la zone et ils étaient vraiment

5 contre l'utilisation de ceci parce qu'ils s'imaginaient ce qui allait se

6 passer plus tard s'ils étaient de nouveau voisins; ils ne voulaient pas

7 qu'un grand préjudice soit causé à ces personnes.

8 Question: Est-ce que d'après cette politique certains Croates seraient

9 autorisés à rester dans la zone?

10 Réponse: En général, il y avait trois raisons à la présence de ces

11 personnes. S'agissant du 21e Corps, il y avait l'aspect relations

12 publiques; ce que j'entends par là, c'est ceci: s'il y avait des

13 organisations extérieures, internationales, ECMM ou la Croix-Rouge

14 internationale, si ces entités internationales voulaient une preuve du

15 fait que des Croates vivaient encore dans la zone, n'avaient pas tous été

16 tués, il était important qu'il y ait encore présence de Croates dans la

17 région. Ça, c'est une raison.

18 La deuxième raison: c'était en fait un rapport avec la sécurité

19 intérieure. Si les choses étaient trop calmes, eh bien, la sécurité

20 intérieure veillait à causer des problèmes. Par exemple, il y aurait

21 violation de cessez-le feu, d'accord de cessez-le-feu.

22 Troisième raison -et non des moindres-: il fallait trouver suffisamment de

23 civils pouvant faire l'objet d'échanges contre des civils serbes.

24 Question: Je vais revenir sur la deuxième raison que vous avez invoquée.

25 Vous avez dit que la présence de ces personnes était essentielle, de façon

Page 12368

1 à ce que ça dégénère et entraîne violation d'un accord de cessez-le-feu.

2 Pourriez-vous être plus explicite?

3 Réponse: Moi, j'ai assisté à 27 réunions avec le côté militaire croate,

4 dans un endroit qui se trouve entre Karlovac et Vojnic; là, nous avions

5 signé un accord de cessez-le-feu, mais la plupart de ces accords étaient

6 violés avant même que l'encre ne sèche sur le document d'accord. Et si

7 l'on voulait établir un pourcentage, je dirai que c'était un rapport de 4

8 à 1; s'il y avait quatre violations par les Serbes, il y en avait une par

9 les Croates.

10 La rivière Kupa est une frontière naturelle; il est difficile de pénétrer

11 dans la région. Ce qui veut dire que, s'il y avait des villageois qui

12 vivaient dans la région, ils étaient souvent en difficulté. Il y avait

13 notamment un couple de personnes âgées qui avait été assassinées sous le

14 prétexte qu'ils faisaient des signaux aux forces croates de l'autre côté

15 de la rivière, en utilisant une petite chandelle placée à la fenêtre.

16 Question: Est-ce que vous avez dû vous rendre sur les lieux?

17 Réponse: Oui, parce qu'il y avait une plainte déposée auprès de l'ECMM et

18 je suis allé avec quelques représentants de l'ECMM. C'était la première

19 fois que j'allais dans cet endroit. Nous avons vu quelle était la position

20 de cette fenêtre. Nous avons vu où éventuellement se serait trouvé cet

21 observateur croate de l'autre côté et nous avons compris qu'il aurait été

22 impossible que quiconque, à deux kilomètres de distance, voie cette petite

23 chandelle allumée.

24 Question: Est-ce qu'à un moment donné, vous avez appris qui était

25 responsable de l'assassinat de ce couple de personnes âgées?

Page 12369

1 Réponse: Oui, il s'agissait de M. Jovica Vojnovic. Et quand je dis

2 "Monsieur", je suis poli.

3 Question: Il était versé dans quelle unité?

4 Réponse: Il était versé dans cette unité antiterroriste dirigée par le

5 colonel Ajdinovic.

6 Question: Et comment avez-vous appris que c'était cet homme qui était

7 l'auteur de ce crime?

8 Réponse: Nous nous sommes liés d'amitié, si je puis dire, après un certain

9 instant, parce que M. Vojnovic avait une femme qui était de la région de

10 Karlovac, et il voulait obtenir un échange afin qu'elle puisse le

11 rejoindre dans la RSK. J'ai finalement réussi à le faire et cet homme a

12 toujours eu le sentiment qu'en fait, il me devait quelque chose; il m'a

13 toujours présenté à ses amis comme étant quelqu'un d'important,

14 susceptible de les aider aussi s'ils avaient des problèmes avec leur

15 famille. C'est de cette façon-ci que je me suis lié d'amitié avec lui et

16 que j'ai pris connaissance de ces divers récits. Et ce sont des choses qui

17 étaient relatées personnellement par certains membres de cette unité

18 antiterroriste.

19 Question: Et au cas où ceci n'aurait pas été répercuté de façon claire

20 dans le compte rendu d'audience, quelle était l'appartenance ethnique de

21 ce couple de personnes âgées?

22 Réponse: C'étaient des Croates.

23 Question: Est-ce que cet homme vous a dit ce qui s'était passé?

24 Réponse: Il a affirmé avoir été celui qui les avait jetés dans ce puits.

25 M. Groome (interprétation): Je vais bientôt vous poser quelques questions

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1 concernant plusieurs événements, mais auparavant, je vais demander qu'on

2 place une carte sur le rétroprojecteur. C'est la page 20 de la carte ou de

3 l'atlas qu'ont les Juges.

4 Je vais demander le versement de cette pièce selon les modalités établies

5 la semaine dernière par la Chambre. Ce sera la pièce P336.SL, ce sont les

6 initiales du témoin. Et je pense que cette carte aidera les Juges au

7 moment où le témoin va parler de certains événements.

8 M. le Président (interprétation): Je ne sais pas si je vous ai suivi.

9 Comment allons-nous traiter cette carte? Parce que c'est une partie de

10 l'atlas que nous avons.

11 M. Groome (interprétation): C'est une photo de la page 20 de cet atlas.

12 M. le Président (interprétation): Et comment va-t-elle être versée au

13 dossier?

14 M. Groome (interprétation): Elle va porter la cote 336; c'est la cote de

15 l'atlas avec, ajoutés, ".SL", ce qui montrera que c'est ce témoin qui a

16 annoté la carte.

17 M. le Président (interprétation): Est-ce la meilleure façon? Je ne suis

18 pas sûr. Il serait peut-être plus simple de donner une cote pour ces

19 différents ajouts à la pièce 336. Je ne sais pas si nous avons déjà eu ce

20 problème?

21 M. Groome (interprétation): Pas au niveau des cartes. Mais nous avons agi

22 de la sorte, je pense, pour des photographies; j'ai dit à ce moment-là que

23 j'allais demander à divers témoins d'annoter la même carte ou la même

24 photographie plus exactement. Ce sont les modalités que nous avions

25 arrêtées.

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1 M. le Président (interprétation): Fort bien. Fort bien, c'est ce que nous

2 allons faire.

3 M. Groome (interprétation): Je vais vous demander, Monsieur Lazarevic,

4 d'examiner cette copie qui est la page 20 de la pièce P336.

5 D'abord, indiquez-nous où se trouve le quartier général initial du 21e

6 Corps Topusko?

7 M. Lazarevic (interprétation): Voyez ici, ce petit point indique Topusko.

8 Question: Où se trouve le bureau de l'officier de liaison du 21e Corps?

9 Réponse: Près de l'hôtel à Topusko, au sommet de la colline.

10 Question: Indiquez-nous où se trouve Vojnic, troisième et dernier

11 quartier général du 21e Corps?

12 Réponse: Ici, précisément.

13 Question: Et vous avez annoté vous-même ces endroits?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Veuillez nous montrer où se trouve le quartier général du MUP de

16 Serbie?

17 Réponse: A Petrova Gora, à savoir ici. Il y avait aussi le quartier

18 général "Pauk" à l'intérieur de la Bosnie ici. C'était, si vous voulez,

19 comme un commandement séparé entre ces deux points.

20 Question: Plus tard, je vais vous demander ce qu'il en est de cette revue

21 ou de cette inspection le jour de la Saint Vidovdan, au mois de juin, et

22 je vais vous demander où cela s'était fait?

23 Réponse: A Slunj, ici.

24 Question: Et vous avez apporté une mention manuscrite vous-même?

25 Réponse: Oui.

Page 12372

1 Question: Vous avez parlé de la rivière Kupa: est-ce qu'on la voit sur

2 cette carte?

3 Réponse: Non, malheureusement. En fait, le parcours devrait être celui-ci;

4 je vous l'indique avec le pointeur.

5 Question: C'est quelle ligne?

6 Réponse: Comme je vous l'ai dit, c'était une espèce de frontière naturelle

7 entre la Croatie et la RSK. La rive de l'autre côté de la rivière Kupa

8 était complètement minée, il y avait beaucoup de mines. Vous aviez

9 plusieurs de ces villages -ils ne sont pas indiqués sur cette carte, mais

10 ça va jusqu'à Sjenicak Lasinjski-, il y a plusieurs autres petits villages

11 entre ces deux points.

12 Question: Vous avez indiqué divers emplacements sur la pièce P336.SL, mais

13 quels sont ces emplacements qui se trouvent en Croatie?

14 Réponse: Pourriez-vous répéter la question?

15 Question: Vous avez indiqué plusieurs endroits. Pourriez-vous nous dire

16 lesquels parmi ceux-ci se trouvent effectivement en Croatie?

17 Réponse: Tous, à l'exception de "Pauk".

18 Question: Et "Pauk", cela se trouve où?

19 Réponse: Ici.

20 Question: Merci. J'en ai terminé de cette pièce.

21 (Intervention de l'huissier.).

22 Monsieur Lazarevic, nous allons parler maintenant d'un premier événement

23 qui s'est produit en 1990. Il concerne un barrage établi avec des troncs

24 d'arbres. Etiez-vous présent?

25 Réponse: Oui, plutôt par curiosité que pour d'autres raisons.

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1 Question: Pourriez-vous nous dire à quel endroit approximativement ce

2 barrage est érigé?

3 Réponse: Sur l'une des routes qui menaient dans la région de Knin. C'était

4 en 1990. J'ai pris la voiture et je suis allé là-bas avec ma femme, comme

5 je l'ai déjà dit, parce que je voulais voir de mes yeux ce qui se passait.

6 Question: Je suis arrivé à un endroit où des arbres barraient la route; il

7 fallait donc circuler en zigzag et on ne pouvait plus poursuivre en ligne

8 droite. Il y avait des gens à côté de ce barrage, ils n'étaient pas en

9 uniforme, mais ils étaient armés, ils avaient des armes automatiques. Des

10 deux côtés de la route, il y avait des voitures et des camions garés. J'ai

11 vu que certains avaient des plaques d'immatriculation de Belgrade ainsi

12 que, pour certains camions, des plaques d'immatriculation de la JNA. Etant

13 Serbe, je me suis arrêté et j'ai parlé aux gens qui étaient là et je me

14 suis rendu compte sans la moindre ambiguïté que c'étaient des gens qui

15 venaient de Belgrade par leur accent et par le fait qu'ils ne

16 connaissaient pas bien la région.

17 Question: Ce barrage que vous avez vu, où vous vous êtes arrêté, vous a-t-

18 il semblé faire partie de cet événement plus global qui est survenu

19 spontanément et que l'on a coutume d'appeler la "révolution des troncs

20 d'arbres"?

21 Réponse: C'est ce qu'il m'a semblé, mais était-ce spontané et à quel

22 point, je n'en sais rien.

23 Question: Avez-vous parlé à certains des hommes qui contrôlaient ce

24 barrage?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Leur avez-vous parlé de l'endroit d'où ils venaient?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Pouvez-vous nous donner une idée du nombre de personnes à ce

4 barrage où vous vous êtes arrêté, qui étaient de la région, et du nombre

5 qui venaient de l'extérieur?

6 Réponse: Je dirai, sans trop de risques de me tromper, qu'il y avait 75 à

7 80% de ces hommes qui venaient de Belgrade ou d'ailleurs.

8 Question: Après vous être arrêté à ce barrage, avez-vous eu une

9 conversation avec le colonel Zimonja au sujet de celui-ci?

10 Réponse: Oui, et il a pris tout cela à la légère en riant et en disant que

11 la plupart des hommes qui contrôlaient ce barrage étaient de Belgrade

12 effectivement, qu'ils avaient été engagés, et que, selon le colonel

13 Zimonja, ils étaient payés 100 DM par jour pour contrôler le barrage.

14 Question: Pendant cette période, en 1990, avez-vous créé une entreprise

15 qui a recruté des interprètes serbes?

16 Réponse: Oui. J'ai créé une entreprise, mais j'en étais le seul employé.

17 Je n'avais pas d'autres interprètes dans cette entreprise.

18 Question: Pouvez-vous dire à la Chambre quelles sont les conditions dans

19 lesquelles vous avez créé cette entreprise?

20 Réponse: Oui, mais c'est assez compliqué et cela a impliqué également la

21 participation de M. Abdic.

22 Question: D'où avez-vous reçu le financement pour créer cette entreprise?

23 Réponse: Une partie est venue des caisses noires du colonel Zimonja.

24 Question: Quelle était le nom de cette entreprise?

25 Réponse: "Yuintra", société d'interprétation et de traduction yougoslave.

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1 Question: A cette époque, pourriez-vous nous donner une idée du but que

2 vous poursuiviez en créant cette entreprise? Après, nous pourrions vous

3 poser des questions plus précises le cas échéant.

4 Réponse: Le colonel Zimonja estimait avoir de bonnes raisons de penser

5 qu'il fallait rester dans la région après sa chute. Donc on avait besoin

6 de moi, c'était la seule raison. Je veux dire que Agrokomerc était le seul

7 employeur de la région, donc restait la nécessité de créer une entreprise

8 pour avoir une raison de rester. Créer une entreprise a été la meilleure

9 solution et la plus simple.

10 Question: Mais vouliez-vous rester dans la région pour continuer à

11 travailler au KOS?

12 Réponse: Absolument.

13 Question: J'aimerais appeler votre attention maintenant sur le début de

14 l'été 1991 et vous demander si, pendant cette période, le colonel Zimonja

15 vous a demandé de participer à une réunion à Vojnic?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Pouvez-vous commencer par nous dire qui participait à cette

18 réunion?

19 Réponse: Un message est arrivé, porté par un civil, qui me disait d'aller

20 à Vojnic. Vojnic se trouvait uniquement à 15 ou 17 kilomètres de Velika

21 Kladusa, où je résidais à l'époque. Lorsque je suis arrivé à Vojnic, la

22 réunion se tenait dans le commissariat de police, dans le bureau de Toso

23 Pajic. Les autres personnes dont je me souviens clairement et qui étaient

24 présentes était Djuro Skaljac, le colonel Ajdinovic, le colonel Zimonja et

25 sans doute deux ou trois policiers dont je ne me souviens pas des noms.

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1 Question: Les policiers dont vous ne vous rappelez pas les noms étaient-

2 ils des policiers de police de la région ou d'ailleurs?

3 Réponse: Ce n'étaient pas des policiers de la région.

4 Question: Pouvez-vous nous dire s'ils venaient d'autres localités de

5 Krajina ou d'autres régions de Yougoslavie?

6 Réponse: En fait, ils n'ont jamais participé à la discussion, ils n'ont

7 jamais pris la parole; ils se sont contentés d'être là à observer les

8 participants.

9 Question: Pourriez-vous nous dire, de façon générale, quel a été le thème

10 abordé au cours de cette réunion?

11 Réponse: Eh bien, je devais décrire la situation générale dans la région

12 de Kladusa, parce que la JNA envisageait d'attaquer une ville appelée

13 Cetingrad, qui se trouve juste à la frontière croate, à deux ou trois

14 kilomètre à peine; la frontière entre la Bosnie et la Croatie du côté

15 croate.

16 Question: Ce qui se passait à Cetingrad à l'époque, c'était un conflit

17 armé?

18 Réponse: Non, pas à l'époque. Mais il y avait une présence importante

19 d'émigrés croates de Suède, qui organisaient le HDZ, la scène politique;

20 il y avait aussi des paramilitaires selon les rapports des renseignements

21 obtenus par le colonel Zimonja.

22 Question: Des propositions différentes ont-elles été faites s'agissant de

23 l'attaque de Cetingrad lors de cette réunion?

24 Réponse: Oui, il y a eu deux propositions, qui ont toutes les deux émané

25 du quartier général de Belgrade, en vue d'obtenir une décision définitive:

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1 l'une venait du colonel Ajdinovic, qui consistait à encercler la ville et

2 ensuite à recourir à l'artillerie, donc saturer la ville de bombardements

3 et poursuivre. C'était donc une solution.

4 L'autre est venue du colonel Zimonja; lui s'intéressait davantage à

5 l'aspect renseignement qui avait été obtenu: il souhaitait laisser un

6 corridor ouvert entre Cetingrad et Velika Kladusa pour que les gens

7 puissent quitter la région avant ou pendant l'attaque d'artillerie.

8 Question: Avant cette discussion au sujet de Cetingrad, des incidents se

9 sont-ils produits, dont vous auriez eu connaissance, impliquant des

10 paramilitaires qui sont intervenus avant l'encerclement de la ville de

11 Cetingrad?

12 Réponse: Non, pas avant l'attaque de la JNA.

13 Question: A quel moment la JNA a-t-elle attaqué Cetingrad?

14 Réponse: Finalement, l'attaque a eu lieu; c'était en octobre, j'étais à

15 Kladusa avec d'autres habitants de la ville et je voyais les lumières dans

16 le ciel qui provenaient des obus d'artillerie. Très peu de temps après,

17 l'attaque a commencé et un flux de réfugiés est arrivé dans la ville

18 bosniaque de Velika Kladusa, en provenance de Croatie, de Cetingrad.

19 Question: Vous est-il apparu clairement, compte tenu de la nature de

20 l'attaque, quelle était l'alternative qui avait été choisie? Je veux

21 parler de ces deux propositions d'attaque faites antérieurement.

22 Réponse: Il était assez clair que la proposition du colonel Zimonja avait

23 été acceptée, parce qu'un corridor restait ouvert pour permettre aux gens

24 de quitter la ville.

25 Question: Vous fondant sur l'expérience que vous avez du 21e Corps d'armée

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1 et des procédures opérationnelles de façon générale, à quel niveau la

2 décision a-t-elle dû être prise pour que cette proposition soit mise en

3 oeuvre?

4 Réponse: Elle a dû être prise au niveau du QG général de Belgrade. Il

5 convient de ne pas perdre de vue qu'à l'époque, c'était encore la JNA qui

6 représentait l'armée officielle sur le terrain.

7 Question: J'appelle votre attention sur décembre 1991 et vous demander si

8 vous avez été affecté à une tâche particulière concernant deux frères

9 répondant au nom de Brajdic?

10 Réponse: Oui, comme je l'ai dit, j'ai participé à pas mal de réunions à

11 Vojnic dans cette période; les réunions étaient très fréquentes en fait.

12 Lors de cette réunion, étant donné que le flux de réfugiés croates à

13 Velika Kladusa devenait préoccupant, il a été proposé que les

14 personnalités du côté musulman et du côté croate soient éliminées et, si

15 possible, au cours d'une seule et même attaque.

16 Question: Avez-vous été affecté à la tâche consistant à éliminer ces

17 personnes?

18 Réponse: La tâche m'a été confiée parce que je connaissais la région,

19 j'étais dans la région et deux officiers, dont l'un était capitaine et

20 l'autre lieutenant, étaient concernés.

21 Question: Qui vous a donné cette tâche?

22 Réponse: Le colonel Ajdinovic.

23 Question: En quoi consistait-elle exactement, votre tâche?

24 Réponse: Eh bien, il y a un petit hôtel restaurant à Kladusa, qui

25 s'appelle "King" et tout devait se passer le soir de Noël, donc le 25

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1 décembre, le jour où toutes ces personnes seraient présentes pour fêter

2 Noël en attendant la messe de minuit, je suppose. Nous devions donc nous

3 approcher du restaurant à partir de trois points de départ différents,

4 garer notre voiture dans le voisinage et nous approcher du restaurant pour

5 y ouvrir le feu à l'aide d'armes automatiques et tuer toutes les personnes

6 à l'intérieur.

7 Question: Avez-vous exécuté cette tâche?

8 Réponse: Non.

9 Question: Pourquoi?

10 Réponse: Quatre ou cinq jours avant l'attaque, ces deux officiers sont

11 venus à Velika Kladusa portant l'uniforme de la JNA; j'étais à un bar avec

12 un certain nombre de Musulmans bien connus dans la région. Ils se sont

13 approchés de moi. Ils étaient ivres. Et ils m'ont dit que j'étais "grand

14 Serbe" et que tout le monde devait me respecter. Donc tout cela m'a mis

15 assez mal à l'aise et j'ai décidé par la suite, après y avoir réfléchi, de

16 ne pas poursuivre. Mais je ne les ai pas non plus pris trop au sérieux.

17 Question: A ce moment particulier, vous portiez toujours l'uniforme de

18 l'armée populaire yougoslave, n'est-ce pas?

19 Réponse: Non, ce n'est pas exact. J'étais civil à l'époque.

20 Question: Un moment est-il venu où, sur instruction de Zimonja, vous avez

21 rejoint les rangs de l'armée de la République serbe de Krajina?

22 Réponse: Oui. Le 22 décembre.

23 Question: De quelle année?

24 Réponse: 1991.

25 Question: Pendant la période où vous avez été membre de l'armée de la RSK,

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1 avez-vous reçu un salaire?

2 Réponse: Au sein de la RSK, oui, je touchais un salaire. Mais il y avait

3 aussi des fonds complémentaires.

4 Question: Pouvez-vous nous dire quelles étaient les sources des fonds que

5 vous avez reçus pendant votre présence au sein de l'armée de la RSK?

6 Réponse: Eh bien, il y avait la solde normale que touchait tous les

7 membres de l'armée de la RSK et du 21e Corps d'armée; ça c'était le

8 trésorier qui payait ces soldes. Et puis, je recevais également des fonds

9 supplémentaires provenant du colonel Zimonja; et, pour leur obtention, je

10 ne devais rien signer, comme je l'ai déjà dit, comme j'aurais dû le faire

11 si cela s'était passé dans un entretien avec un officier régulier. Donc,

12 je ne signais rien.

13 Question: Au début de 1992, avez-vous eu une conversation avec le colonel

14 Zimonja concernant le fait que la JNA allait se retirer de Croatie pour se

15 transférer en Bosnie?

16 Réponse: Eh bien, c'est un fait de notoriété publique, je pense, que tout

17 cela s'est passé avant l'arrivée des forces des Nations Unies sur le

18 terrain. La conversation générale que nous avions à l'époque consistait à

19 parler de l'organisation de la population: savoir qui allait rester, qui

20 n'allait pas accompagner la JNA. Personnellement, j'ai réfléchi aussi à ce

21 que je devais faire, à ce que l'on attendait de moi.

22 Question: La discussion a-t-elle porté sur ce que l'on attendait de vous?

23 Réponse: Oui. En fait, la tâche qui m'a été confiée consistait à me rendre

24 auprès du Groupe opérationnel, le 8e Groupe opérationnel de la JNA, dirigé

25 par le général Mrksic pour lui faire rapport en tant qu'officier de

Page 12381

1 liaison de l'ECMM?

2 Question: L'avez-vous fait?

3 Réponse: Oui.

4 Question: A peu près combien de fois avez-vous parlé en tant qu'interprète

5 pour M. Mrksic?

6 Réponse: Je dirai: entre février-mars-avril, une vingtaine ou une

7 trentaine de fois probablement.

8 Question: Poursuivons. Donc, sur 1992, un moment est-il arrivé où vous

9 avez reçu instruction du colonel Zimonja d'essayer de recruter des hommes

10 des Nations Unies ou de l'ECMM à des fins de renseignements?

11 Réponse: Ça, c'était la routine quotidienne.

12 Question: Pouvez-vous nous dire comment vous avez compris la nature de

13 votre mission?

14 Réponse: Eh bien, j'étais censé établir une relation, ce qu'il m'était

15 facile de faire, pour obtenir les informations nécessaires, informations

16 militaires par le biais du QG des Nations Unies. Donc il fallait

17 s'adresser aux hommes des Nations Unies, n'importe qui en fait qui avait

18 un rang supérieur à celui de sergent, ou un quelconque observateur

19 militaire pouvait faire l'affaire; et parfois même des commandants de

20 Bataillon. Mais, en fait, je pense que n'importe qui pouvait faire

21 l'affaire.

22 Question: Pouvez-vous dire, en quelques mots, par quel moyen vous avez

23 entrepris de recruter quelqu'un pour les Nations Unies ou l'ECMM?

24 Réponse: Eh bien, il faudrait que je passe pas mal de temps à vous décrire

25 cela. Cela ne s'est pas passé en un jour.

Page 12382

1 Il a fallu que je passe deux ou trois semaines à me rapprocher d'eux, à

2 faire connaissance, dans la mesure du possible à devenir ami avec eux, à

3 leur rendre service quel que soit le service demandé, à accepter tout ce

4 dont ils avaient besoin, que ce soit une escorte ou quelque autre besoin

5 lié à la sécurité. Donc ils ont fini par estimer que je faisais partie de

6 l'équipe. Je les aidais vraiment beaucoup.

7 Et, dans le même temps, j'essayais de déterminer les points faibles chez

8 chacun d'entre eux pour pouvoir éventuellement l'utiliser à l'avenir à des

9 fins de chantage ou pour les exploiter d'une façon ou d'une autre.

10 Je dois dire aux Juges de cette Chambre que certaines de ces personnes ont

11 accepté sans difficulté de travailler avec les Serbes; et certains pour

12 des causes idéologiques: ils croyaient en la cause serbe; certains d'entre

13 eux pour l'argent et d'autres pour d'autres raisons. Je ne dirai pas que

14 tout le monde peut être acheté, mais certains peuvent l'être.

15 Question: Avez-vous reçu aussi instruction du colonel Zimonja de rendre

16 compte et de surveiller les activités des observateurs de l'ECMM?

17 Réponse: Ah oui! Ça, c'était une tâche quotidienne. Au début, les

18 observateurs de l'ECMM n'étaient pas autorisés à passer la nuit sur le

19 territoire de la RSK; ils devaient, avec escorte, rentrer le soir en

20 Croatie pour revenir le lendemain. Et plus tard, on leur a donné

21 l'autorisation de passer la nuit dans n'importe quel hôtel de la région.

22 Donc, à partir de ce moment-là, je passais pratiquement 24 heures sur 24

23 avec eux.

24 Question: Dans quel but est-ce que vous surveilliez le personnel de

25 l'ECMM?

Page 12383

1 Réponse: Contrôler les déplacements de l'ECMM, cela signifiait qu'ils

2 pensaient pratiquement pouvoir circuler librement, alors qu'en fait, ce

3 n'était pas le cas puisqu'ils étaient escortés par des militaires ou des

4 policiers.

5 J'étais avec eux. Je regardais où ils s'arrêtaient, à qui ils parlaient

6 quand ils s'arrêtaient, avec qui ils parlaient au téléphone portable dans

7 les véhicules dans lesquels ils se trouvaient. Donc, de façon générale, ma

8 tâche consistait à surveiller tout ce qu'ils faisaient et à en rendre

9 compte au quotidien.

10 Question: Est-ce que vous décririez la tâche qui était la vôtre à l'époque

11 comme une tâche de facilitateur ou d'obstacle à leur mission?

12 Réponse: Je dirais que j'étais une épée à double tranchant. Je facilitais

13 leurs déplacements pour savoir avec qui ils avaient des contacts et, dans

14 le même temps, je créais tous les obstacles possible pour les empêcher de

15 voir tout ce qu'ils voulaient voir. Donc ma tâche avait deux aspects: une

16 tâche qui consistait à faciliter leur travail et l'autre le rendre plus

17 difficile.

18 Question: Pourriez-vous nous dire, en quelques mots, comment vous faisiez

19 obstacle au travail des observateurs de l'ECMM?

20 Réponse: Eh bien, supposons que, un soir, ils me disent qu'ils avaient

21 besoin le lendemain matin d'aller à tel endroit -cela, c'était la

22 routine-, pendant la nuit, si nous ne souhaitions pas qu'ils aillent là où

23 ils voulaient aller, nous suscitions un incident et, le matin, nous

24 allions les voir et nous disions: "Ecoutez, le cessez-le-feu a été violé

25 pendant la nuit; donc, pour des raisons militaires, il est impossible

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1 d'aller à cet endroit en ce moment", des choses de ce genre.

2 Question: L'incident suscité dont vous venez de parler, qui le suscitait,

3 qui exécutait la tâche?

4 Réponse: C'était l'unité antiterroriste qui était responsable et chargée

5 de toutes les perturbations, de créer tous les troubles nécessaires.

6 Question: A un certain moment, avez-vous eu une conversation avec le

7 colonel Bulat au sujet de cette obstruction du travail des observateurs de

8 l'ECMM?

9 Réponse: Oui, il a été dit très clairement, de façon très précise qu'ils

10 ne devaient pas être autorisés à mener à bien leurs missions, quelle que

11 soit la nature de cette mission.

12 Question: Vous a-t-il fait savoir qui avait donné instruction pour que ces

13 obstructions aient lieu?

14 Réponse: En fait, ces questions d'obstruction étaient davantage du domaine

15 de Tosa Pajic que celui du colonel Bulat, car cela avait un rapport plus

16 direct avec la sécurité de l'Etat qu'avec l'armée. Toutes nos unités

17 étaient déployées à partir de la route; donc l'ECMM qui empruntait la

18 route ne pouvait pas voir grand-chose du côté croate, mais, pour des

19 raisons de sécurité, la DB était très intéressée à savoir avec qui les

20 observateurs de l'ECMM parlait ou avait des rencontres. Donc, des deux

21 côtés, je veux dire du côté de la DB et du côté de l'armée, on

22 s'intéressait à leur liberté ou à la réduction de leur liberté de

23 circulation qui était garantie à l'ECMM et à laquelle nous faisions

24 obstacle.

25 Question: Tosa Pajic vous a-t-il dit sur l'ordre de qui il faisait

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1 obstruction de cette façon?

2 Réponse: De Jovica Stanisic.

3 Question: J'aimerais maintenant demander que la pièce à conviction de

4 l'accusation 348, intercalaire 6, soit placée sur le rétroprojecteur.

5 Monsieur Lazarevic, je vous demande de regarder cette photo et de nous

6 dire si vous reconnaissez d'abord les personnes qui sont représentées sur

7 cette photographie?

8 Réponse: L'homme que l'on voit de profil, je ne me souviens pas de son

9 identité, je ne le vois pas très bien. Celui qui est à côté de lui est

10 Tarbuk, c'était le commandant du 39e Corps d'armée. A côté de lui, c'est

11 le général Musa Bamayi du Nigeria; il a un béret bleu, il était des

12 Nations Unies.

13 A côté de lui, on voit le colonel Cedo Radovanovic du 21e Corps d'armée; à

14 côté de lui, Tosa Pajic et vous voyez l'emblème de la police sur son

15 uniforme. Et ensuite, c'est moi qui joue le rôle d'officier de liaison.

16 C'est l'une des réunions qui s'est tenue dans le bâtiment des Nations

17 Unies.

18 Question: Les mots écrits sur ce document sont-ils bien de votre main?

19 Réponse: Oui.

20 Question: J'en ai terminé avec cette pièce à conviction.

21 En 1992 également, avez-vous été chargé de recruter des interprètes

22 utilisables par les organisations internationales présentes en Krajina?

23 Réponse: Il était tout à fait clair qu'à partir du moment où les Nations

24 Unies arrivaient dans la région, la population locale se verrait offrir

25 pas mal d'emplois comme interprètes, responsables du ménage, plongeurs,

Page 12386

1 etc. Et il était intéressant pour nous de surveiller ce que faisaient les

2 Nations Unies du point de vue des renseignements.

3 Question: De qui avez-vous reçu instruction d'agir de la sorte?

4 Réponse: C'était une opération conjointe des services de sécurité de

5 l'Etat et de la partie renseignement de l'armée.

6 Question: Pouvez-vous nous donner les noms des personnes qui vous ont

7 communiqué ces instructions?

8 Réponse: Le colonel Nikola Zimonja et M. Toso Pajic.

9 Question: Pouvez-vous nous dire comment vous avez rempli cette mission?

10 Réponse: Une lettre officielle a été envoyée au quartier général des

11 Nations Unies à Topusko, qui ouvrait donc un certain nombre de postes et

12 qui nous a paru intéressante. Ils voulaient disposer d'un certain nombre

13 de policiers pour faire échec aux éléments criminels éventuellement

14 infiltrés dans les rangs des Nations Unies. Donc ils voulaient que nous

15 vérifiions le curriculum de leurs hommes. Ce que nous souhaitions savoir,

16 c'était quelle était la nature exacte du travail qu'ils attendaient de

17 nous et c'est la raison pour laquelle nous les avons contactés.

18 Question: Les Nations Unies ont-elles fourni des noms?

19 Réponse: Avec réticence, oui.

20 Question: Que s'est-il passé une fois que vous avez communiqué ces noms?

21 Réponse: Après une brève rencontre avec moi, nous avons donc parlé des

22 idées patriotiques de ces hommes, de ce qu'ils faisaient dans l'intérêt de

23 leur pays, de la nécessité de recueillir des informations au sujet des

24 déplacements militaires des Croates parce que ce n'était un secret pour

25 personne que les observateurs militaires, qui circulaient le long de la

Page 12387

1 frontière ou de la zone démilitarisée, étaient là pour observer les

2 déplacements de l'autre côté. Rentrant de Topusko, ils envoyaient un

3 rapport et, si nos hommes pouvaient recevoir ce rapport, c'était tant

4 mieux.

5 Question: Certains de ces hommes ont-ils pris des rapports des Nations

6 Unies pour vous les remettre?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Si l'un ou l'autre des interprètes que vous avez contactés

9 refusait de coopérer de cette façon, que se passait-il?

10 Réponse: Il était discrédité et n'avait plus le droit de travailler pour

11 les Nations Unies.

12 Question: Pouvez-vous dire à la Chambre au sujet de combien de ces

13 interprètes vous avez des renseignements de première main?

14 Réponse: Dans le secteur du 21e Corps d'armée?

15 Question: Oui.

16 Réponse: 35 à 40 au moins.

17 Question: Est-ce qu'il s'agissait de tous les interprètes que vous aviez

18 contactés?

19 Réponse: Dans le 21e Corps d'armée, il n'y avait pas d'autres interprètes,

20 ils devaient passer par moi.

21 Question: Sur ces 35 ou 40 interprètes, combien travaillaient pour vous à

22 recueillir des renseignements?

23 Réponse: Tous.

24 Question: Que faisiez-vous avec ces renseignements et ces documents que

25 vous receviez de ces interprètes?

Page 12388

1 Réponse: D'abord, je dirai, en quelques mots, quelle était la tâche des

2 interprètes.

3 Ils devaient participer aux réunions entre les responsables politiques

4 locaux, par exemple la Croix-Rouge, les Nations Unies; ces interprètes

5 participaient à ces réunions parce que je ne pouvais pas personnellement

6 être présent partout. J'allais les voir, je prenais les rapports et

7 renseignements qu'ils me donnaient, nous discutions de la réunion à

8 laquelle ils avaient participé, des décisions qui avaient été prises s'il

9 y en avait eu et, ensuite, je résumais tous ces rapports dans un seul

10 grand rapport envoyé au quartier général. J'en faisais plusieurs copies

11 dont l'une allait à Zimonja et l'autre à Pajic, et la troisième…

12 (L'interprète n'a pas entendu le nom).

13 Question: Donc une copie de votre rapport était envoyée au KOS de

14 Belgrade, c'est bien cela?

15 Réponse: C'est exact.

16 Question: L'une des copies était envoyée à Toso Pajic dont vous avez dit

17 qu'il travaillait pour la DB de Serbie?

18 Réponse: Oui.

19 Question: La troisième copie allait au colonel Bulat responsable du 21e

20 Corps d'armée: c'est exact?

21 Réponse: Dans sa zone de responsabilité puisque c'était sa zone.

22 Question: J'aimerais maintenant que nous parlions de 1993: est-ce que vous

23 avez eu la possibilité de participer à des entretiens internationaux

24 destinés à rechercher un accord de paix en Krajina?

25 Réponse: Oui. J'ai personnellement participé à quatre de ces réunions.

Page 12389

1 Question: Avant de participer à ces conférences internationales, étiez-

2 vous membre actif du KOS?

3 Réponse: Oui, j'étais membre actif de l'armée, donc je faisais partie du

4 commandement.

5 Question: Avant de partir pour ces conférences, est-ce qu'on vous

6 délivrait des documents d'identité faux?

7 Réponse: Oui, j'ai reçu trois passeports. Dans tous les trois, ou plutôt

8 dans deux d'entre eux, il était stipulé que je n'étais pas né à Belgrade

9 mais à Knin. Et le troisième indiquait mon lieu de naissance, ma date de

10 naissance réels.

11 Question: J'aimerais qu'on remette au témoin la pièce 348, intercalaire 7.

12 (Intervention de l'huissier.)

13 Monsieur Lazarevic, avant qu'on ne place cette pièce sur le

14 rétroprojecteur, je vous demanderai de passer en revue rapidement, de

15 feuilleter les quelques pages du document.

16 Réponse: Souhaitez-vous que je parle de ces documents au fur et à mesure

17 que je les regarde?

18 Question: J'aimerais que vous choisissiez les pages où est indiqué votre

19 lieu de naissance. Et on placera ces pages sur le rétroprojecteur ensuite.

20 C'est la page que nous allons placer sur le rétroprojecteur.

21 Je vous demanderai également de vous servir du pointeur et de nous montrer

22 où est inscrit votre lieu de naissance.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 Réponse: Le 26 février 1947, Knin.

25 Question: Est-ce que c'est une information erronée s'agissant de votre

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1 lieu de naissance?

2 Réponse: Oui. Ceci est passeport qui, lui, a été délivré le 21 juin 1993;

3 vous le voyez au bas de page que je suis en train de montrer. Et la

4 finalité de la délivrance de ce passeport avait été de me permettre

5 d'assister à cette conférence. Et l'on a indiqué cette chose pour que

6 personne ne demande pourquoi quelqu'un de Belgrade ferait-il partie de la

7 réunion relative à la Krajina. Donc on a indiqué sur le passeport que

8 j'étais né à Knin.

9 Question: Qui vous a délivré ce passeport?

10 Réponse: Les deux de ce… Enfin, ces deux passeports, celui-ci et l'autre,

11 si je puis vous le montrer: là, c'est un passeport de service, l'autre

12 était un passeport diplomatique et le troisième était un passeport civil.

13 Question: Ce document est également une pièce à conviction de

14 l'accusation, à savoir P348, intercalaire 7.

15 Réponse: Les deux passeports m'ont été délivrés à Belgrade.

16 Question: Qui vous a remis, physiquement parlant, les passeports entre les

17 mains?

18 Réponse: Le secrétaire du Président Hadzic de l'époque.

19 Question: Je vous demanderai maintenant de bien vouloir montrer au témoin

20 la pièce à conviction 348, intercalaire 8, et de placer la chose sur le

21 rétroprojecteur.

22 (Intervention de l'huissier.)

23 Est-ce que vous reconnaissez les personnes qui figurent sur cette photo?

24 Réponse: Oui, certaines d'entre elles… Ou plutôt, je les reconnais toutes,

25 mais je me souviens de certains des noms.

Page 12391

1 Question: Et les inscriptions manuscrites, c'est votre écriture?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Je vous prie d'aller de la gauche vers la droite et de nous dire

4 qui sont les personnes qui figurent sur cette photo?

5 Réponse: Le premier chauve, c'est moi. A côté, c'est Dusan Rakic qui avait

6 été ministre de la Défense de la RSK, à l'époque. Le monsieur qui se

7 trouve un peu en arrière, je sais seulement qu'il avait quelque chose à

8 voir avec les services de sécurité du Président Hadzic. Puis, la

9 secrétaire du Président Hadzic, c'est la personne qui m'a remis le

10 passeport et l'argent. Et en tout état de cause, c'est une photo qui est

11 prise en Norvège à l'occasion de l'une de ces soi-disant réunions secrètes

12 entre les Serbes, Croates et les représentants des Nations Unies. Et le

13 troisième, le dernier, je ne sais pas; mais je ne pense pas que ce soit là

14 une personne importante.

15 Question: Fort bien. Je crois qu'on peut enlever ce document.

16 Monsieur Lazarevic, avant de parler de ces conférences spécifiques

17 auxquelles vous avez pris part, je voudrais que vous nous donniez une

18 description générale de la procédure à suivre qui avait précédé ces

19 conférences. Est-ce que vous pouvez, en effet, décrire à l'intention de la

20 Chambre comment vous en étiez venu à apprendre que vous alliez assister à

21 ces conférences?

22 Réponse: Eh bien, je voudrais commencer en disant que les requêtes

23 relatives aux conférences passaient d'habitude par l'ONU.

24 La partie croate présentait une requête à l'intention de l'ONU, à Zagreb,

25 au quartier général de l'ONU à Zagreb. puis on informait le commandement

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1 dans le secteur où je me trouvais, si cela avait quelque chose à faire

2 avec le 21e Corps. Il en allait de même pour ce qui est du 39e Corps.

3 Maintenant, pour ce qui est du niveau du gouvernement, c'était Knin qui

4 était informé concernant les requêtes présentées par la partie croate pour

5 ce qui est de la tenue d'une réunion ou de leur volonté de tenir une

6 réunion.

7 Nous procédions ensuite de la façon suivante: nous organisions une

8 délégation militaire et civile. Nous demandions que l'on nous fournisse

9 d'avance un ordre du jour pour que l'on sache d'avance de quoi il allait

10 être question à l'occasion de ces réunions. D'habitude, nous avions avancé

11 comme prétexte la nécessité de procéder à des préparatifs pour ces

12 réunions; aussi nous fallait-il savoir ce qu'il allait y avoir à l'ordre

13 du jour.

14 Question: Donc cette requête, avec l'ordre du jour, était adressée à qui?

15 Réponse: Aux Nations Unies.

16 Question: Et est-ce que les Nations Unies vous fournissaient cet ordre du

17 jour?

18 Réponse: Non. Cela n'avait rien d'étonnant de demander l'ordre du jour à

19 l'avance.

20 Question: Veuillez continuer, je vous prie, avec votre descriptif.

21 Réponse: Une fois que nous avions résolu tous ces détails mineurs, on

22 s'attendait de notre part à ce que 48 heures au moins avant notre départ,

23 où que ce soit, nous allions à Belgrade. Nous étions d'habitude logés à

24 l'hôtel Mladost, qui se trouve dans un secteur central de Belgrade, et

25 l'on avait toujours estimé que c'était un foyer loin du foyer pour ceux

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1 qui venaient de la RSK. Je n'ai jamais vu personne payer une note d'hôtel

2 en présentant une pièce d'identité de la RSK.

3 Donc, il y avait une série de réunions. Le chef de la délégation allait

4 voir M. Milosevic pour des instructions. Le chef de la délégation

5 militaire allait au quartier général militaire pour des instructions. Nous

6 avions donc un ordre du jour préétabli; avant que les gens n'aillent

7 quelque part, on leur donnait des conseils et des instructions pour ce

8 qu'il fallait faire. Et on faisait savoir à tout un chacun à quoi on

9 s'attendait de sa part.

10 J'avais personnellement des réunions avec le colonel Zimonja qui

11 m'assignait des tâches particulières, qu'il s'agisse par exemple de

12 réunion en Autriche, en Suisse, en Norvège ou ailleurs.

13 Question: Après que les membres de ces délégations avaient obtenu, reçu

14 des briefings, est-ce qu'il y avait une réunion conjointe à l'hôtel

15 Mladost?

16 Réponse: Oui, en effet, dans la salle des conférences.

17 Question: Et qui était présent à ces réunions?

18 Réponse: Tous les membres de la délégation.

19 Question: De quoi était-il question à ces réunions-là?

20 Réponse: Eh bien, de tout ce qui leur avait été communiqué comme

21 informations, soit au cabinet de M. Milosevic ou à l'état-major général de

22 l'armée.

23 Question: Est-ce qu'il y avait un président qui présidait à ces réunions?

24 Réponse: Eh bien, c'était le chef de la délégation qui était chef de la

25 délégation, à l'époque.

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1 Question: Est-ce qu'il y avait des procès-verbaux de ces réunions?

2 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

3 M. Groome (interprétation): Permettez-moi d'abord de vous poser la

4 question suivante: quel type de PV tenait-on à jour? Est-ce que quelqu'un

5 prenait des notes sur ce qui se passait? Est-ce que quelqu'un était en

6 train d'écrire?

7 Réponse: Juste des notes brèves sur ce qui avait été discuté. Ensuite, on

8 envoyait cela à Knin. Mais d'abord, on demandait s'il y avait un consensus

9 général sur ce qui avait été noté.

10 Question: Et ces PV ont-ils été envoyés ailleurs, à votre connaissance?

11 Réponse: Je ne sais pas.

12 Question: S'agissant des délégations auxquelles vous avez pris part,

13 pouvez-vous nous dire dans combien de délégation vous avez pris part et à

14 combien de conférences vous avez assisté?

15 Question: A quatre: deux à Genève, une en Autriche et une en Norvège.

16 Question: Est-ce qu'il y a eu un modèle d'instructions générales pour ce

17 qui est de la participation à ces quatre conférences de la paix?

18 Réponse: Oui, cela avait été plus ou moins la même chose et l'idée

19 générale était de ne pas être d'accord sur quoi que ce soit. C'était très

20 simple à suivre.

21 Question: Après les réunions à l'hôtel Mladost, comment les membres de la

22 délégation se rendaient-ils à destination: ensemble ou séparément?

23 Réponse: Non, nous voyagions ensemble par vol des Nations Unies. Ce sont

24 les Nations Unies qui organisaient un vol à notre intention.

25 Question: Est-ce que la délégation restait toujours ensemble à ces

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1 différents lieux de tenue de conférence?

2 Réponse: Oui, tout le temps.

3 Question: Pendant la tenue des conférences, est-ce que les membres de la

4 délégation étaient sollicités pour des contacts réguliers avec Belgrade?

5 Réponse: Seulement s'il y avait des problèmes.

6 Question: En traits généraux, pouvez-vous nous décrire la façon dont ces

7 contacts étaient établis?

8 Réponse: Eh bien, à chacune de ces réunions, qu'elle se tienne à Vienne ou

9 en Suisse, nous avions une chambre à part pour les pauses et, à chaque

10 fois, pendant les réunions, nous pouvions demander une pause à tout

11 moment. Lorsque le côté croate faisait une proposition, nous disions que

12 nous ne voulions pas répondre tout de suite, nous nous retirions dans

13 notre pièce pour nous entretenir pendant un certain temps, puis nous

14 revenions vers la salle de conférence.

15 Et pendant l'usage de cette pièce à part, nous établissions un contact

16 avec Belgrade et il nous fallait des garanties pour ce qui est des lignes

17 téléphoniques, à savoir qu'il n'y avait pas de mise à l'écoute de ces

18 lignes. Nous avions des contacts avec Belgrade, nous présentions la

19 requête qui nous était présentée et, dans certains cas, on nous disait

20 juste de refuser tout simplement. Quand il n'y avait pas d'excuse, alors

21 on nous disait: "Signez, mais présentez des clauses qui vous ménageraient

22 une confirmation ultérieure par l'assemblée générale, une fois que vous

23 seriez revenus à la RSK.

24 Question: Et pendant les pauses, étiez-vous présent dans la pièce?

25 Réponse: Oui, j'étais dans la pièce comme tous les autres membres de la

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1 délégation.

2 Question: Est-ce que vous avez pu écouter ces conversations téléphoniques?

3 Réponse: Oui, j'étais à deux ou trois mètres de la table où avaient lieu

4 ces conversations.

5 (Les interprètes demandent de ralentir.)

6 (Excuses réciproques du témoin et de M. Groome)

7 Question: Donc, pendant ces quatre conférences, vous aviez des contacts

8 réguliers avec Belgrade?

9 Réponse: Pour ce qui est du cabinet de Milosevic, oui.

10 Question: Mais est-ce que l'on avait régulièrement des contacts avec les

11 gens de Belgrade?

12 Réponse: Oui, au niveau du cabinet de M. Milosevic.

13 Question: Veuillez nous préciser qui a contacté qui et de quelle façon?

14 Réponse: A l'époque, le Président Karadzic avait assisté à ces réunions

15 et, si j'ai bien compris, s'était entretenu avec M. Lilic et avec d'autres

16 personnes que je ne connaissais pas et qui faisaient partie du cabinet de

17 M. Milosevic.

18 Donc tout ce qui avait trait à la sécurité de l'Etat était dirigé vers

19 Jovica Stanisic, alors que les questions militaires étaient adressées à

20 l'intention du général Perisic.

21 Tout dépendait de la situation concrète; je n'affirme pas qu'à chacune de

22 ces conférences on contactait ces personnes-là, mais, lorsque les

23 questions étaient de nature militaire, on faisait appel au général Perisic

24 ou alors, si c'était un problème d'une autre nature, on contactait M.

25 Stanisic. Mais, pour la plupart des cas, c'étaient des problèmes

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1 politiques; là, on discutait avec le cabinet lui-même.

2 Question: Pouvez-vous nous décrire le type de problèmes qui survenaient

3 lorsque vous contactez M. Stanisic et quel était le type de discussions

4 que vous aviez avec lui?

5 Réponse: Eh bien, la partie croate proposait, par exemple, de mettre en

6 place un village modèle pour ce qui est de la coexistence des Serbes et

7 Croates dans le même village, sous les auspices de l'ONU, pour montrer au

8 monde entier qu'ils pouvaient bien rester, vivre ensemble comme

9 auparavant.

10 Question: Vous avez mentionné M. Lilic et vous avez dit que c'était une

11 personne que vous aviez contactée. Avait-il été, à l'époque, Président de

12 la République fédérale de Yougoslavie? Entend-on par là Zoran Lilic?

13 Réponse: Oui. On l'appelait "le facteur".

14 Question: Vous parliez de M. Lilic en disant que c'était le facteur?

15 Réponse: Oui, c'est ce que disait M. Hadzic et M. Toso Pajic.

16 Question: Pourquoi M. Lilic était-il appelé "le facteur"?

17 Réponse: Parce qu'il passait les messages à M. Milosevic.

18 Question: Est-ce que vous, et vous-même, croyiez qu'il prenait des

19 décisions lui-même s'agissant de la situation survenue à la conférence de

20 paix?

21 Réponse: Je ne pense pas que M. Lilic ait fait quelque décision, ait

22 adopté quelque décision que ce soit de toute sa vie.

23 Question: Maintenant, si un accord devait être communiqué à l'intention

24 des Nations Unies ou d'une autre partie, y avait-il des réserves formulées

25 concernant l'accord, des réserves émanant de la partie serbe?

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1 Réponse: Il était tout à fait clair, au début de toute réunion, qu'aucune

2 décision ne serait entérinée à la fin de la réunion. Et même s'il y en a

3 eu, nous n'étions pas censés partir avec.

4 M. Groome (interprétation): Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce

5 qu'était cette politique d'éviter la prise de toute responsabilité ou

6 d'aboutir à quelque accord que ce soit?

7 M. Lazarevic (interprétation): Eh bien, vous savez, les officiers, c'est

8 juste des hommes. Après la réunion, ou pendant la réunion, ou pendant la

9 pause, ils s'entretenaient entre eux et il était clair que Belgrade

10 n'avait pas du tout l'intention de résoudre les questions en suspens entre

11 la RSK et la Croatie. Et ç'avait été une opinion publique pour ce qui se

12 passait en Yougoslavie: il y avait des troubles politiques et économiques.

13 Et ainsi de suite.

14 Tant que les gens en Croatie se battaient pour leur survie, les yeux de

15 l'opinion publique seraient dirigés vers la RSK. Donc il fallait maintenir

16 le problème autant que possible là-bas. Donc tout le monde, l'attention se

17 tournerait vers ce problème-là.

18 Question: Y avait-il une politique pour ce qui est des tentatives de

19 coopération en dépit des hésitations pour ce qui est de prendre des

20 engagements quelconques?

21 Réponse: Oh oui! Nous étions très amicaux les uns à l'égard des autres à

22 ces réunions, nous avions toujours semblé être d'accord, mais, une fois

23 quitté la réunion, il apparaissait avec évidence que nous n'étions

24 d'accord sur aucun point et qu'il était nécessaire d'avoir une autre

25 réunion, une autre et ainsi de suite.

Page 12399

1 Question: Je voudrais que l'on montre maintenant au témoin la pièce à

2 conviction de l'accusation 348, intercalaire 10. Je ne suis pas l'ordre de

3 présentation, je m'excuse.

4 Penchez-vous sur la page en question avant qu'elle ne soit placée sur le

5 rétroprojecteur.

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit sur cette feuille, Monsieur

8 Lazarevic?

9 Réponse: Oui, c'est une liste des membres de la délégation de ceux qui ont

10 pris part à la réunion qui a eu lieu le 16 juin 1993 au Palais des Nations

11 à Genève. Et c'est la liste des participants à cette réunion.

12 Question: Est-ce que vous figurez sur la liste des participants?

13 Réponse: Oui, tout au fond de la page, vous voyez: "M. Slobodan Lazarevic,

14 interprète".

15 Je tiens aussi à vous signaler qu'il y a une autre page de ce document; je

16 ne sais pas si vous en disposez.

17 Il y avait une liste des membres de la délégation civile.

18 Il y avait donc la composante militaire, vous le voyez en haut de la page.

19 Vous voyez le commandant Wahlgren, quelqu'un de très bien. Puis vous voyez

20 à la tête de cette délégation croate le général Stipetic, puis les chefs

21 des différents secteurs. Dans la délégation serbe, vous avez le colonel

22 Milos Krnjeta et Nikola Krosnjar. Monsieur Milos Krnjeta était chargé de

23 la sécurité intérieure et Nikola Krosnjar avait une responsabilité

24 analogue. Vous voyez au fond de la page mon nom.

25 Question: Pour que les choses soient tout à fait claires: donc les deux

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1 Novakovic, ce n'est pas la même personne?

2 Réponse: Non, l'un est colonel, l'autre est général.

3 Question: Donc le colonel Novakovic, le colonel Krnjeta et vous-même avez

4 fait partie d'une même branche du KOS?

5 Réponse: Oui, c'est exact.

6 Question: Donc vous dites que le colonel Krosnjar avait travaillé pour un

7 centre d'information. De quelle armée?

8 Réponse: Officiellement, RSK.

9 Question: Savez-vous nous dire, partant de vos propres sources, qu'il

10 avait été membre d'une autre organisation et pas seulement de l'ARSK?

11 Réponse: Je crois que c'était la première et la dernière fois que je l'ai

12 rencontré, je ne sais pas vous dire avec exactitude.

13 Mais je connais très bien le colonel Kosta Novakovic chef de la délégation

14 et Krnjeta.

15 Question: Je vais demander maintenant à ce que la même pièce à conviction

16 intercalaire 11 soit placée sur le rétroprojecteur.

17 (Intervention de l'huissier.)

18 Monsieur Lazarevic, je vous prie de vous pencher sur cette pièce à

19 conviction et de nous dires si vous êtes en mesure de reconnaître le

20 document.

21 Réponse: C'est également une liste des membres de la délégation; je vois

22 des noms que je reconnais.

23 Question: Quelle est la date?

24 Réponse: Il s'agit du 20 juillet 1993.

25 A mon avis, il s'agissait d'une première ou peut-être d'une deuxième

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1 réunion à Genève, non, c'était la deuxième réunion à Genève. C'est une

2 réunion qui n'a duré que fort peu de temps, juste une après-midi.

3 Question: Est-ce que vous pouvez nous donner lecture des noms de la

4 délégation serbe et nous dire à quelle unité ils ont appartenu?

5 Réponse: Je commence par le début.

6 Le colonel Kosta Novakovic était chef de la délégation et il avait été

7 membre du KOS, à savoir chargé de la sécurité intérieure. Le colonel Milos

8 Krnjeta avait fait figure d'assistant et il était membre des services de

9 renseignement; je crois qu'il était chargé de la sécurité extérieure. Puis

10 le colonel Nikola Krosnjar qui était officier de liaison. Puis Cedo

11 Radovanovic qui était chef du corps.

12 Question: S'agissant du colonel Krosnjar, savez-vous nous dire quelle

13 était son appartenance, connaissez-vous un peu sa biographie?

14 Réponse: Tout ce que je sais, c'est qu'il était originaire de Knin. Je

15 n'ai aucune idée de ce qu'il faisait à Knin.

16 Question: Fort bien. Veuillez continuer.

17 Réponse: Cedo Radovanovic du QG du Corps de Kordun, 21e Corps d'armée, qui

18 était un membre ordinaire de la JNA; il n'était pas membre du KOS. Il y

19 avait aussi des officiers qui n'avaient pas fait partie du KOS.

20 Question: A cette époque-là, en 1993, avait-il été membre de l'armée de la

21 République de Krajina serbe?

22 Réponse: Tous ces membres de la délégation étaient soit partie de l'armée

23 de la RSK soit officiers de la JNA ou plutôt de la VG, de l'armée de

24 Yougoslavie.

25 M. Groome (interprétation): Continuez la liste.

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1 M. Lazarevic (interprétation): Puis il y avait là un juriste, Sinisa

2 Cakic; je ne sais pas au juste de qui il s'agit, c'était quelqu'un des

3 services juridiques. Puis un certain M. Petkovic; je crois qu'il avait été

4 chargé de l'énergétique. Il était ministre de l'Energie au sein de la RSK.

5 Et, en fin de compte, Slobodan Lazarevic, moi-même, interprète et officier

6 de liaison pour ce qui est du secteur Nord.

7 M. Robinson (interprétation): Est-ce qu'on fait état de vous en disant

8 professeur?

9 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

10 M. Robinson (interprétation): Et cela est-il? Etes-vous professeur?

11 M. Lazarevic (interprétation): Non, ce n'est pas exact. Peut-être

12 quelqu'un a-t-il pensé que cela ferait mieux sur le papier.

13 M. Groome (interprétation): Avez-vous participé en une quelconque façon à

14 l'élaboration de ce document?

15 M. Lazarevic (interprétation): De ce document-ci?

16 Question: Oui.

17 Réponse: Non.

18 Question: Maintenant, nous allons passer à la pièce 348, intercalaire 9.

19 Je voudrais que l'on place la pièce en question sur le rétroprojecteur et

20 que l'on montre une copie au témoin.

21 (Intervention de l'huissier.)

22 Monsieur Lazarevic, je vais vous demander de nous faire quelques

23 commentaires concernant chacune de ces conférences auxquelles vous avez

24 pris part.

25 Quand la première de ces conférences a-t-elle eu lieu, de celles

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1 auxquelles vous avez assisté?

2 Réponse: Le 16 juin 1993 à Genève.

3 Question: Et êtes-vous, je vous prie, en mesure de nous décrire les

4 préparatifs qui ont eu lieu avant la conférence? Et si cela concorde avec

5 vos commentaires précédents, dites que cela concorde avec ce que vous avez

6 dit précédemment, pour ne pas répéter.

7 Réponse: D'une manière générale, 48 heures à l'avance, nous partions

8 chercher des instructions, puis nous allions en réunion. Vous reveniez et

9 on revenait sans rien résoudre. Voilà brièvement la façon dont cela se

10 passait.

11 Question: Quels étaient les sujets traités à ces conférences?

12 Réponse: Je crois que la première réunion avait été très brève. Et je

13 crois que nous sommes restés à Genève seulement trois heures. Puis, nous

14 avons discuté d'accord de cessez-le-feu. Et il avait été question de zones

15 démilitarisées.

16 M. Robinson (interprétation): Qui est-ce qui vous donnait ces

17 instructions?

18 M. Lazarevic (interprétation): Eh bien, pour ce qui est du secteur

19 militaire, c'était le chef de la délégation qui allait au quartier général

20 pour en discuter.

21 M. Groome (interprétation): S'agissant de la deuxième colonne dans ce

22 tableau, il y a des noms de personnes. Est-ce que ce sont là des personnes

23 dont vous vous souvenez que c'étaient des personnes présentes à cette

24 conférence à Genève, le 16 juin 1993?

25 M. Lazarevic (interprétation): Je crois que cela doit être correct. Goran

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1 Hadzic, les ministres… Oui, c'est cela.

2 Question: Pendant ces négociations-là, y a-t-il eu des entretiens ou une

3 ligne téléphonique régulière avec Belgrade, et ce, aux fins d'obtention

4 d'instructions et communication de l'information à leur intention?

5 Réponse: Oui, certainement.

6 Question: Une fois rentré de ces conférences, y a-t-il eu des activités

7 postérieures à ces conférences?

8 Réponse: Une fois arrivé à l'aéroport de Surcin, Goran Hadzic a tenu une

9 conférence de presse. Tous les membres de la délégation sont rentrés

10 directement à l'hôtel pour un briefing. Nous communiquions ce qui avait

11 été dit à la réunion. J'avais une réunion avec le colonel Zimonja et je

12 l'informais de ce qui s'était passé.

13 Question: Qui avait été chargé de la présentation de rapports de la part

14 des membres individuels de la délégation?

15 Réponse: Cela dépendait de la délégation. S'il s'agissait d'une délégation

16 civile, c'était quelqu'un du cabinet de M. Milosevic. Si c'était un

17 segment, c'était le grand état-major. Et s'il s'agissait de la sécurité

18 d'Etat, il s'agissait d'aller faire un rapport à la DB.

19 Question: Quand est-ce que la suivante de ces conférences a eu lieu, à

20 laquelle vous avez pris part?

21 Réponse: Aussitôt après, en juillet 1993. Le 16 juillet 1993.

22 Question: Donc, en sus de ce que vous avez déjà décrit, y a-t-il eu

23 quelque chose de particulier s'agissant de ces préparatifs?

24 Réponse: Non, le modus operandi était plus ou moins le même.

25 Question: Et quels étaient les sujets débattus à cette conférence-là?

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1 Réponse: Une fois de plus, il s'agissait de questions générales relatives

2 à la violation des cessez-le-feu: comment éviter que cela n'arrive à

3 nouveau, comment établir un écart plus grand entre les forces en présence,

4 la mise en place des zones démilitarisées, et ainsi de suite.

5 Mais nous étions dans une situation plutôt étrange. L'armée croate avait

6 demandé que le 21e Corps retire ses pièces d'artillerie à 25 kilomètres à

7 l'intérieur de la zone démilitarisée, et cela n'avait pas été possible

8 parce qu'à 15 kilomètres derrière nous, il y avait la Bosnie. Et notre

9 secteur était très étroit: il ne faisait que 16 ou 17 kilomètres. Si on

10 nous demandait de retirer nos forces vers 25 kilomètres en arrière, nous

11 arrivions… nous nous déplacerions vers un autre pays. Cela nous

12 fournissait une belle raison de refuser. Mais, physiquement, de toute

13 façon, cela était impossible.

14 M. Groome (interprétation): S'agissant du tableau suivant, est-ce que cela

15 traduit fidèlement la composition de ces délégations?

16 M. Lazarevic (interprétation): Oui, en effet. Eh bien, chacune de ces

17 délégations… à chacune des conférences suivantes, la délégation se faisait

18 de plus en plus nombreuse.

19 M. Robinson (interprétation): Qui est-ce qui prenait en charge les frais

20 de la délégation?

21 M. Lazarevic (interprétation): Je crois que c'était Belgrade. Enfin, nous

22 recevions à Belgrade de l'argent en dollars.

23 M. Groome (interprétation): Pour l'argent que vous receviez à Belgrade,

24 est-ce que vous deviez signer des reçus?

25 M. Lazarevic (interprétation): Non.

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1 Question: Pendant le déroulement de cette conférence, y a-t-il eu

2 communication entre la délégation et Belgrade de façon analogue à celle

3 que vous avez décrite?

4 Réponse: Oui, rien n'a changé. La procédure était toujours la même: 24

5 heures avant la conférence, nous arrivions là-bas, nous avions des

6 briefings, on déterminait la façon dont il fallait que nous nous

7 comportions, nous allions là-bas, nous revenions et fin de l'histoire.

8 Question: Après la conférence, quelles étaient les activités qui ont eu

9 lieu?

10 Réponse: Une fois de plus, M. Hadzic avait tenu une conférence de presse.

11 Nous allions directement à l'hôtel, nous attendions un débriefing. Et le

12 jour d'après, une fois que cela était terminé, chacun revenait vers la

13 RSK.

14 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je ne sais pas si le

15 moment serait opportun pour la pause?

16 M. Robinson (interprétation): Avant la pause, revenons à une partie

17 antérieure de votre déposition, au cours de laquelle vous avez dit que

18 deux autres personnes et vous, vous aviez reçu des instructions revenant à

19 dire qu'il fallait qu'on se débarrasse de Croates et de Musulmans, et que

20 vous aviez l'intention de le faire au moment où ces personnes étaient

21 assises dans un bar, n'est-ce pas?

22 M. Lazarevic (interprétation): Oui, la veille du 25.

23 M. Robinson (interprétation): Au soir du 25, vous ne l'avez pas fait,

24 parce que vous avez perdu confiance en vos deux collègues parce que, pour

25 certaines raisons, vous n'aviez pas confiance du fait qu'ils étaient

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1 notamment en état d'ébriété?

2 M. Lazarevic (interprétation): C'est aussi parce que je n'ai jamais tué

3 personne. C'est la raison pour laquelle j'essayais de me sortir de cette

4 mission. Même à ce jour, je ne sais pas si les instructions qui m'avaient

5 été données étaient sérieuses ou pas, mais moi, je ne me sentais pas en

6 confiance pour les exécuter.

7 M. Robinson (interprétation): Mais je pense que vous avez répondu à ma

8 question suivante.

9 Vous parlez d'une perte de confiance. A l'exception de cette perte de

10 confiance, est-ce que vous auriez mené cette attaque?

11 M. Lazarevic (interprétation): Non, je ne voulais pas le faire. J'aurais

12 trouvé une raison pour ne pas exécuter cette mission qui m'avait été

13 confiée.

14 M. Robinson (interprétation): Je vous remercie.

15 M. le Président (interprétation): Nous reprendrons l'audience à 14 heures

16 30.

17 (L'audience, suspendue à 13 heures 04, est reprise à 14 heures 30.)

18 M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, il nous faudra terminer

19 à 4 heures moins 20. En effet, l'un d'entre nous a une audience après la

20 présente audience.

21 Je ne me plains pas du tout de la vitesse, mais je pense que plus on

22 avancerait dans la déposition de ce témoin, mieux ce serait.

23 M. Groome (interprétation): Je ferai de mon mieux, Monsieur le Président.

24 Monsieur Lazarevic, nous en étions restés au moment où vous parliez de la

25 réunion à Genève, de la conférence plus exactement du 16 juin 1993.

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1 Parlons maintenant de la conférence suivante à laquelle vous avez assisté.

2 Pouvez-vous nous dire à quel moment elle s'est tenue et où?

3 M. Lazarevic (interprétation): Elle s'est tenue du 20 au 22 juillet 1993 à

4 Vienne.

5 Question: Où précisément? Excusez-moi, vous avez déjà répondu à la

6 question.

7 S'agissant des préparatifs en vue de cette réunion ou conférence, est-ce

8 qu'ils étaient similaires aux précédents?

9 Réponse: Parfaitement identiques aux deux premières conférences.

10 Question: Quels étaient les sujets qui allaient être évoqués à l'occasion

11 de cette conférence?

12 Réponse: En général, les mêmes sujets qu'auparavant: la zone

13 démilitarisée, DMZ, des personnes déplacées, la possibilité de travailler

14 à cette idée d'un village modèle.

15 Question: Est-ce que Goran Hadzic a assisté à la conférence?

16 Réponse: Oui.

17 Question: S'agissant des communications avec Belgrade, est-ce qu'elles

18 étaient maintenues pendant cette conférence?

19 Réponse: Oui.

20 Question: Et après la conférence, pouvez-vous nous dire s'il y a eu des

21 activités?

22 Réponse: Eh bien, on nous a ramenés à Belgrade par avion et il y a eu un

23 débriefing pour chacun d'entre nous à l'arrivée.

24 Question: Parlons maintenant de la conférence suivante. Quand et où s'est-

25 elle tenue?

Page 12409

1 Réponse: Le 12 septembre 1993, Norvège; je ne sais plus exactement

2 l'endroit. Cela devait être une réunion très secrète. Même si, après la

3 fin de la réunion, il y avait près de 250 journalistes qui nous

4 attendaient; donc finalement, elle n'était pas si secrète que ça, cette

5 conférence.

6 Question: S'agissant des préparatifs en vue de cette conférence-ci qui

7 s'est tenue en Norvège, est-ce que vous avez assisté à une conférence

8 préalable?

9 Réponse: Oui, à Belgrade, hôtel Mladost.

10 Question: Avez-vous assisté à des briefings avec Zimonja avant la

11 conférence de Norvège?

12 Réponse: Oui, mais on m'avait donné une tâche précise à l'occasion de

13 cette dernière conférence à laquelle j'ai assisté.

14 Question: Et quelle était cette mission précise?

15 Réponse: Un membre de notre délégation était considéré comme un risque en

16 matière de sécurité; il s'agissait de l'amiral Dusan Rakic. J'avais pour

17 mission de le suivre de très près pendant toute la conférence, pendant

18 toute la journée, pour savoir qui il rencontrait, en dehors de la partie

19 officielle de la réunion, quelles réunions il avait avec le côté croate.

20 Question: Et pourquoi considérait-on que s'était un risque en matière de

21 sécurité?

22 Réponse: A l'époque sa femme et ses deux fils vivaient toujours à Zagreb

23 et ses deux fils étaient en âge de faire leurs services dans l'armée.

24 Question: S'agissant des préparatifs, avez-vous appris que, dans le cadre

25 des préparatifs en vue de la conférence de Norvège, avez-vous appris donc

Page 12410

1 que Rakic et Hadzic avaient rencontré Milosevic avant le départ de la

2 délégation?

3 Réponse: C'est ce que j'ai cru comprendre après avoir discuté avec eux.

4 Question: Pourriez-vous expliquer ce que ces deux hommes vous ont dit qui

5 vous aurait poussé à croire qu'ils avaient une réunion avec Milosevic?

6 Réponse: Ils ont dit qu'ils avaient eu une réunion avec le chef, qu'il

7 leur avait dit ceci et cela. Il s'agissait d'ordres précis qui revenaient

8 à dire qu'il ne fallait rien conclure, pas aboutir à des résultats, quels

9 qu'ils soient, pendant la réunion.

10 Question: Et de quel sujet a-t-on parlé à cette conférence-là?

11 Réponse: Je me souviens que le sujet principal, c'était une espèce

12 d'autonomie pour la RSK au sein de la Croatie.

13 Question: Examinons la quatrième colonne de la pièce.

14 Est-ce que les noms qu'on y voit sont les noms des personnes qui, selon

15 vos souvenirs, étaient présentes à cette conférence?

16 Réponse: Effectivement.

17 Question: Au cours des préparatifs, en vue de la conférence de Norvège,

18 est-ce qu'on a fait référence au fait que c'était un voyage en vue de

19 faire des emplettes?

20 Réponse: Eh bien, c'était une blague puisque, en fait, il y avait une

21 augmentation du nombre de délégués, mais rien n'avait vraiment changé. On

22 était censés avoir des fonds pour faire des emplettes. Je pense que, le

23 dimanche, c'est ce jour-là que s'était tenue la conférence et, dans ce

24 petit village norvégien, on devait contacter le maire pour qu'on puisse

25 aller faire des achats.

Page 12411

1 Question: Au cours de cette conférence de Norvège, est-ce qu'il y a eu une

2 communication régulière avec Belgrade?

3 Réponse: Pendant toute la journée.

4 Question: Vous souvenez-vous du nom de la personne contactée à Belgrade

5 pendant toute la journée?

6 Réponse: Je pense que Goran Hadzic avait contacté le cabinet de M.

7 Milosevic. Est-ce que c'était pour rencontrer Milosevic ou pour lui

8 parler? Je ne sais pas, mais il a parlé au cabinet de M. Milosevic.

9 Question: Poursuivez.

10 Réponse: Il y avait aussi les militaires de la délégation qui avaient

11 parlé à un général de Belgrade s'agissant des questions militaires.

12 Question: Et qui a été contacté, d'après vous, au quartier général

13 militaire?

14 Réponse: Je pense que c'était le général Misic.

15 Question: Savez-vous si, cette fois-là, Jovica Stanicic a été contacté?

16 Réponse: Je crois que oui.

17 Question: Et sur quoi vous basez-vous pour avoir cette conviction?

18 Réponse: Parce que j'étais dans la pièce où l'on a passé ces coups de fil.

19 Question: A votre retour de Norvège, est-ce qu'il y a eu un débriefing

20 pour vous, comme cela avait été le cas auparavant?

21 Réponse: Oui. Et celui-ci a été un peu plus long que les trois premiers.

22 Question: Quelle fut la durée approximative?

23 Réponse: Deux jours.

24 Question: Est-ce que d'autres membres de la délégation ont subi un

25 débriefing aussi?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Au cours des négociations en Norvège, est-ce qu'à un moment

3 donné, Krnjeta a fait une déclaration envers la délégation, s'agissant de

4 ce village modèle interethnique?

5 Réponse: A un moment donné, le colonel Krnjeta a suggéré qu'il nous

6 faudrait accepter la proposition consistant à créer ce village modèle. Et,

7 à un moment donné, Krnjeta a engagé une unité antiterroriste et a peut-

8 être tué quelques Serbes et Croates de cette façon. Personne ne

9 reviendrait dans ce village modèle; ce serait une façon de mettre un terme

10 à cette idée.

11 Question: Vous avez parlé de la psychose de peur. Est-ce que c'est un

12 terme utilisé par Krnjeta quand il s'est adressé à la délégation?

13 Réponse: Je crois que j'ai cité ce terme quand j'ai parlé de psychose de

14 peur.

15 Question: Donc, d'après vous, tout engagement pris envers ce village avait

16 pour prémisse que cette psychose de peur pourrait être créée dans la

17 région, une fois la délégation de retour à Belgrade, et, de cette façon,

18 on mettrait en fait terme à cette idée du village modèle?

19 Réponse: Oui, c'était l'idée.

20 Question: Est-ce que, parallèlement, il y a eu des conversations en même

21 temps qu'il y avait cette communication régulière avec Belgrade?

22 Réponse: Oui.

23 Question: S'agissant de ces négociations-ci, est-ce que M. Goran Hadzic a

24 désigné un conseiller?

25 Réponse: Oui, je pense qu'il portait le même nom que M. Milosevic; c'était

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1 aussi un Milosevic.

2 Question: Quel était son prénom?

3 Réponse: Savo ou Miso, je ne sais pas exactement, mais je dirai peut-être

4 Miso Milosevic.

5 Question: Est-ce que c'était la première fois que cette autre personne

6 répondant au nom de Milosevic assistait en même temps que vous à une

7 conférence?

8 Réponse: Non, cette même personne avait déjà été à deux réunions à Genève

9 et c'était lui qui était censé être l'hôte.

10 Question: Avez-vous des éléments d'information concernant cette personne,

11 d'où il vient, pour quel organe il travaille?

12 Réponse: Non, mais il y avait une rumeur circulant dans la délégation

13 selon laquelle c'était un frère de M. Milosevic, mais son aspect ne

14 ressemblait pas du tout à celui de M. Milosevic, il n'avait pas du tout de

15 ressemblance.

16 Question: Pendant les négociations en Norvège, est-ce qu'à un moment

17 donné, cette autre personne répondant au nom de Milosevic aurait fait une

18 référence ou un commentaire s'agissant d'une conversation téléphonique

19 qu'il aurait eue avec le Milosevic qui se trouve ici dans le prétoire?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Pouvez-vous nous dire ce qu'il aurait dit?

22 Réponse: "Il fallait garder une chose à l'esprit, c'est qu'il ne fallait

23 pas trouver de solution à l'issue de cette conférence, qu'il fallait

24 rentrer sans résultat."

25 Question: Et quels sont les termes utilisés qui vous ont poussé à croire

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1 qu'il faisait référence à M. Slobodan Milosevic ici présent?

2 Réponse: Après ce temps, chaque fois que l'on a fait référence à M.

3 Slobodan Milosevic, on l'appelait le chef, le boss. Mais dans la

4 délégation, parmi les proches, on l'appelait le boss, le chef.

5 Question: Le conseiller Milosevic a-t-il utilisé ces termes lorsqu'il a

6 relaté le type d'instructions qu'il avait reçues?

7 Réponse: En fait, il a utilisé un diminutif du prénom à savoir Slobo.

8 Question: Une fois de retour en Norvège, vous êtes-vous rendu compte qu'il

9 y avait des activités ou auriez-vous observé des activités qui étaient,

10 d'après vous, une tentative destinée à saper certains des progrès obtenus

11 pendant les négociations de paix?

12 Réponse: Je peux vous parler uniquement de la zone de responsabilité du

13 21e Corps, il y a eu une succession rapide d'événements qui étaient censés

14 instiller la peur parmi la population, tout en enrayant toute possibilité

15 d'avoir d'autres pourparlers avec le côté croate.

16 Question: Je vais vous demander de décrire certains de ces événements et

17 je vous demande de ralentir le débit à l'intention des interprètes.

18 Réponse: D'accord. Je me souviens notamment du fait qu'on avait miné la

19 voie ferrée. Ce devait être le premier déplacement du train après le début

20 du conflit. Il y a eu déraillement, il y a eu des blessés, des personnes

21 tuées et on a blâmé les terroristes croates.

22 Question: Pourriez-vous être plus précis s'agissant de l'endroit et de la

23 date approximative de cet événement?

24 Réponse: C'était en hiver, je m'en souviens, c'était entre Vojnic et

25 Glina: c'est la voie ferrée qui avant relayait Karlovac et je suppose

Page 12415

1 Petrova Gora. Je ne connais pas bien la région, mais c'était la voie

2 ferrée qui existait avant le conflit et qui a cessé d'être utilisée après

3 le début du conflit dans la région. Cela devait être le premier trajet

4 utilisé, le premier trajet de ce train; c'était le premier et le dernier.

5 Question: Qui est responsable du minage de la voie ferrée?

6 Réponse: Par la suite, j'ai appris ce qu'il en était, mais à l'époque, on

7 m'a appelé pour aller voir le colonel Bulat à son quartier général et on

8 m'a donné une lettre de griefs officielle que je devais emmener au

9 commandant du secteur Nord.

10 Question: Vous dites que, par la suite, vous avez appris qui était

11 responsable. Pourriez-vous tout d'abord nous dire dans quelles

12 circonstances vous avez appris le nom de la personne responsable de

13 l'incident?

14 Réponse: J'ai simplement fait des déductions. La distance par rapport au

15 côté croate, pour ce qui est de l'endroit où les mines avaient été

16 placées, la rapidité de pénétration des Croates, la rapidité de

17 déploiement dans la région pour essayer de desservir tous les endroits ou

18 l'endroit où la mine avait été posée, tout ceci n'a pas donné de

19 résultats. C'était l'hiver, il n'y avait aucune empreinte dans la neige:

20 ceci montrait que rien n'était venu de ce côté là. Par conséquent, cela

21 devait venir de l'intérieur.

22 Question: Etes-vous au courant de l'existence d'un autre incident vers

23 cette période-là?

24 Réponse: Il devait y avoir un match de football amical entre les Nations

25 Unies et la population locale de Glina et quelqu'un avait miné tout le

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1 terrain de football avec des mines anti-infanterie qui ne sont pas censé

2 tuer, mais amputer, mutiler; ces mines ont été découvertes juste avant le

3 début du match. Evidemment, le match a été annulé.

4 Question: Avez-vous appris qui avait posé ces mines antipersonnel sur le

5 terrain de football?

6 Réponse: Je suis parvenu à la même conclusion et ceci a été corroboré, par

7 la suite, par les personnes qui avaient effectivement été les auteurs de

8 ce minage.

9 Question: Qui étaient ces personnes?

10 Réponse: C'était un groupe antiterroriste du Corps de Banja s'agissant de

11 cet incident-ci.

12 Question: Dans quelles circonstances avez-vous appris que c'était ce

13 groupe antiterroriste du Corps de Banja?

14 Réponse: Il y avait deux groupes: un groupe qui était affecté à notre 21e

15 Corps et un autre groupe qui était pour le corps de Banja; c'étaient des

16 amis avant la guerre, ils avaient eu la même formation. Je suppose que

17 l'âge moyen, c'était 21, 22 ans. Ils avaient un lieu de réunion, un point

18 de rencontre qui était un bar à mi-chemin entre Banja et Kordun. Ils se

19 rencontraient pratiquement chaque jour pour échanger des informations.

20 Question: Et vous, avez-vous eu une conversation avec l'un quelconque des

21 membres de l'unité?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Que vous a-t-on dit qui était de nature à faire penser que

24 c'étaient eux qui avaient posé ces mines sur ce terrain de football?

25 Réponse: Ils ont dit qu'on leur avait dit ou que c'était un ordre qu'ils

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1 avaient reçu, mais l'idée, c'était qu'il fallait que personne ne soit

2 blessé, que ceci devait être découvert à temps, mais on leur avait demandé

3 de le faire pendant la nuit. Ce qu'ils ont fait, c'est prendre ces mines

4 qui sont rondes, ils les avaient placées dans un panier et puis ils les

5 avaient simplement réparties sur le terrain.

6 Question: Est-ce que vous avez déposé une plainte s'agissant de cet

7 incident à ce retour?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Quelle est la nature de la plainte?

10 Réponse: Nous avons affirmé que la pénétration, de ce qu'on appelait à

11 l'époque des éléments oustachis, s'était faite à l'intérieur de notre

12 territoire, que c'étaient eux qui avaient posé ces mines, et les

13 observateurs des Nations Unies qui étaient déployés dans la frontière

14 n'avaient rien vu.

15 Question: Est-ce qu'il y a eu un autre incident concernant un château

16 d'eau?

17 Réponse: Oui. Plusieurs mines ont été posées sur ce château d'eau. Un des

18 villageois avait emmené son bétail paître à proximité et, en fait, un

19 homme a été tué.

20 Question: Quelle était son appartenance ethnique?

21 Réponse: C'était un Serbe.

22 Question: Avez-vous appris qui avait posé les mines autour du château

23 d'eau?

24 Réponse: Cette fois-là, c'était notre propre unité antiterroriste du 21e

25 Corps.

Page 12418

1 Question: Comment l'avez-vous appris?

2 Réponse: En discutant avec le chef de cette petite unité avec "Paraga".

3 Question: Cette fois-là, vous a-t-on dit qu'il fallait déposer une plainte

4 auprès des Nations Unies?

5 Réponse: Oui. Avant même d'apprendre de découvrir qui avait été l'auteur,

6 on m'avait appelé au QG, le colonel Bulat m'avait remis une lettre de

7 plainte et je devais aller directement au complexe des Nations Unies pour

8 remettre cette lettre au second. Mais ça commençait à devenir une

9 plaisanterie entre le commandant du secteur et moi-même parce que personne

10 ne croyait que ce serait aussi facile d'avoir accès à ces endroits.

11 Question: Et est-ce qu'il y avait une plainte officielle, cette plainte

12 que vous étiez censé remettre aux Nations Unies?

13 Réponse: Oui. Officiellement, on accusait le côté croate.

14 Question: Vous étiez présent dans la région au moment de ces événements.

15 Est-ce que ces événements ont effectivement permis de rappeler la

16 possibilité qui était d'instiller une psychose de peur?

17 Réponse: Oui. Parce que, pendant toutes ces réunions, la situation était

18 tout à fait détendue dans la RSK. Bien sûr qu'il y avait plusieurs

19 réunions; il y avait des choses qui se passaient là. On avait démobilisé

20 plusieurs soldats; on les avait renvoyés chez eux pour qu'ils travaillent

21 à la ferme ou faire ce qu'ils avaient à faire. Mais après chacun de ces

22 incidents, on remobilisait tout le monde, ce qui veut dire qu'il fallait

23 chercher les personnes qui se trouvaient notamment dans les forêts, les

24 remettre en uniforme et les remettre en service.

25 Question: Parlons d'une période ultérieure.

Page 12419

1 Est-ce qu'on vous a demandé de participer à un plan consistant à expulser

2 75 Croates âgés des villages de la région?

3 Réponse: Oui, j'y ai participé personnellement.

4 Question: Pourriez-vous tout d'abord décrire le type de planification

5 nécessaire pour ce type d'opération?

6 Réponse: Quelqu'un a eu une bonne idée: celle de savoir comment se

7 débarrasser de ce qui restait de la population croate dans la région. Il

8 fallait pour ce faire contacter la Croix-Rouge internationale des Nations

9 Unies pour leur demander de l'aide, pour les transférer à l'hôpital de

10 Karlovac, parce que dans la région il n'y avait pas suffisamment

11 d'infrastructures pour leur donner les soins médicaux nécessaires. Donc

12 l'idée a été émise, présentée aux Nations Unies, comme si c'était l'idée

13 de monter un convoi humanitaire.

14 Question: Et combien de personnes ont-elles participé à ce plan, le nombre

15 des personnes censées être déplacées à Karlovac.

16 Réponse: Il y avait les gens du 21e Corps, la police, la Croix-Rouge

17 internationale, les observateurs militaires, les Nations Unies. Beaucoup

18 de personnes ont donc participé à la mise en oeuvre de l'idée.

19 Question: Et serait-il exact de dire que ces villageois croates étaient

20 des personnes âgées?

21 Réponse: Oui, je pense qu'il n'y avait personne qui avait moins de 70 ans.

22 Question: D'après votre expérience et les procédures permanentes

23 appliquées, qu'est-ce qu'il fallait faire pour mettre au point et

24 appliquer un plan de ce type?

25 Réponse: Puisqu'il y avait participation de ces entités internationales,

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1 il fallait que le feu vert soit donné par Belgrade.

2 Question: Est-ce que ce plan a vu le jour?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Pourriez-vous dire dans quelle mesure vous avez participé à

5 l'exécution de ce plan?

6 Réponse: Moi, j'avais pour mission de prendre contact avec tous ces

7 organes internationaux pour leur donner les détails du plan, ainsi que

8 leur communiquer les attentes qu'on avait à leur égard. Mais le cadre

9 général, c'était l'idée d'un convoi humanitaire qui allait partir de la

10 RSK, qui allait transporter des ressortissants croates pour les emmener en

11 Croatie afin d'y recevoir des soins de santé. Ce que nous n'avons pas dit

12 à l'époque, l'idée c'était que ces gens ne reviennent pas.

13 Question: Est-ce qu'il y a eu réunion de planification pour discuter des

14 détails de l'opération?

15 Réponse: Moi, en fait, je suis arrivé à la fin de la planification, à la

16 fin des préparatifs, au moment où les structures internationales devaient

17 être informées; c'est à ce moment-là qu'on m'a utilisé comme officier de

18 liaison avec M. Toso Pajic.

19 Question: Est-ce que vous avez eu une conversation avec M. Toso Pajic,

20 s'agissant de cet événement?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Est-ce qu'il vous a dit si M. Jovica Stanisic avait participé ou

23 pas à la planification?

24 Réponse: Il m'a dit en guise d'information que "papa", comme on

25 l'appelait, était informé de ce qui se passait. Bon, il n'a pas dit

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1 expressément: "Oui, je lui ai parlé hier ou aujourd'hui". Mais lorsqu'il

2 discutait, il donnait l'impression qu'il avait déjà discuté, au préalable,

3 de ces questions.

4 Question: Est-ce que vous avez parlé avec le général Bulat s'agissant de

5 l'opération?

6 Réponse: Oui, parce que c'était lui qui me donnait des instructions à ce

7 propos.

8 Question: Est-ce qu'il vous a indiqué s'il avait eu des contacts avec le

9 général Perisic à propos de cette question?

10 Réponse: Oui. De nouveau, à tous les niveaux de l'opération, les gens de

11 Belgrade étaient informés; depuis les civils jusqu'aux militaires, jusqu'à

12 la sécurité d'Etat.

13 Question: Une dernière chose à ce propos: est-ce que cette opération a été

14 exécutée de façon satisfaisante pour les personnes qui l'avait planifiée?

15 Réponse: Oui. De part et d'autre, les Nations Unies étaient impressionnées

16 parce qu'elles avaient eu l'impression d'avoir aidé à une tâche

17 humanitaire. De mon côté, du côté des miens, ils étaient contents parce

18 qu'en fait, 75 civils étaient ainsi éliminés, qui n'avaient aucune

19 utilité. Donc tout le monde était content, sauf les Croates concernés.

20 Question: Est-ce qu'on a, en fait, utilisé le même type de plans, à la

21 même époque, dans d'autres endroits?

22 Réponse: Je ne suis pas au courant.

23 Question: Essayez de nous décrire de façon plus détaillée cette

24 institution qu'on appelait "Pauk", "Araignée". Quand avez-vous appris

25 l'existence de ce commandement conjoint?

Page 12422

1 Réponse: Fin 1993. Il y avait afflux d'hommes en tenue, en uniforme, que

2 je ne connaissais pas. Ils parlaient notre langue, mais il était clair

3 qu'ils n'étaient pas de la région et il était aussi clair que ce n'était

4 pas un groupe paramilitaire parce qu'on leur avait donné un sauf-conduit;

5 ils avaient libre passage. Et puis aussi, ils avaient reçu notre vieux QG

6 de Petrova Gora.

7 Question: Qui était le commandant de ce commandement "Pauk"?

8 Réponse: Le général Milan Novakovic.

9 Question: Vous avez dit précédemment que le 21e Corps était impliqué,

10 ainsi que des forces spéciales de la police du MUP, les Tigres d'"Arkan"

11 ainsi que les forces de Fikret Abdic?

12 Réponse: Oui, c'est exact.

13 Question: Y a-t-il eu d'autres unités, à d'autres moments, dont vous

14 auriez été au courant, qui auraient participé ou qui étaient impliquées

15 dans ce commandement "Pauk"?

16 Réponse:Oui, il y avait les unités du 39e Corps, certaines, certaines du

17 15e, certaines du 1er Corps et d'autres unités du Corps de la Krajina en

18 Republika Srpska. Cela se passait généralement lorsqu'il y avait une

19 attaque coordonnée sur le 5e Corps.

20 Question: Donc, il y avait le 21e Corps, le 5e Corps de la RSK?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Et le 1er et le 2e Corps de Krajina sont des corps de la VRS,

23 armée de la Republika Srpska?

24 Réponse: C'est exact.

25 Question: Vous étiez officier de liaison. En cette qualité, est-ce qu'on

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1 vous a jamais demandé de répondre à des questions concernant ce

2 commandement "Pauk"? Est-ce que vous avez reçu des instructions sur la

3 façon dont il faudrait répondre, si l'on vous donnait des questions de ce

4 genre?

5 Réponse: Oui, le commandant de secteur, le général Hesselberg, qui était à

6 ce moment-là commandant du secteur Nord, m'a souvent appelé. On m'appelait

7 à son bureau et, quand je suis arrivé, il m'a lancé de l'autre côté de la

8 table un petit livret de service qui traitait des pièces d'artillerie.

9 J'ai regardé ce livret militaire et j'ai vu que cela concernait

10 l'artillerie, l'arsenal d'armes de la JNA. Le général Hesselberg a affirmé

11 que ceci lui avait été remis par des membres du 5e Corps; c'était une

12 pièce d'artillerie qu'ils avaient enlevée aux forces d'Abdic, pendant un

13 combat qui s'était déroulé récemment. Moi, j'ai dit que c'était sans doute

14 une pièce d'artillerie qui avait été laissée par la JNA et, quand il m'a

15 demandé d'ouvrir ce petit livret, malheureusement, il y avait le cachet du

16 corps Nis, qui est à environ 12 ou 1.500 kilomètres de distance. Cette

17 pièce d'artillerie était une pièce de service qui avait été utilisée un

18 mois auparavant dans la zone du 5e Corps.

19 Question: Ce corps de Nis était basé dans la ville de Nis, en Serbie?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Pourriez-vous nous dire à quel moment le général Hesselberg vous

22 a montré ce livret de service?

23 Réponse: Fin 1993.

24 Question: Officiellement, vous nous avez dit qu'il y avait en fait le

25 livret montrant la maintenance et qui montrait qu'il y avait eu

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1 maintenance un mois avant la capture de cette pièce.

2 Cela s'est passé combien de temps avant le retrait officiel de la JNA de

3 la région?

4 Réponse: Plus de deux ans.

5 Question: Je vais demander qu'on montre au témoin la pièce de l'accusation

6 348, intercalaire 12.

7 (Intervention de l'huissier.)

8 Je demande qu'on place la version originale en serbe sur le

9 rétroprojecteur.

10 Monsieur Lazarevic, vous avez longuement parlé du colonel Bulat. Dans

11 l'exercice de vos fonctions, est-ce que vous avez appris à reconnaître sa

12 signature?

13 Réponse: Oui, j'ai vu beaucoup d'ordres qu'il avait signés.

14 Question: Avez-vous eu l'occasion d'examiner soigneusement ce document qui

15 porte la cote P348, intercalaire 12?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Reconnaissez-vous la signature apposée au bas de ce document?

18 Réponse: Oui, c'est la signature du colonel Bulat, mais c'est au moment où

19 il était chef de l'état-major de "Pauk", pas pendant qu'il commandait le

20 21e Corps.

21 Question: Pourriez-vous, à l'intention des Juges, dire en quoi ce document

22 est important et pourriez-vous résumer sa teneur?

23 Réponse: Eh bien, en quelques mots, il y a eu plusieurs copies de ce

24 document qui devaient être envoyées au 21e Corps, au 39e Corps, au Groupe

25 tactique 2, Groupe tactique 3, au commandement "Pauk", à un groupe

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1 d'artillerie du 21e Corps, ainsi qu'au commandement de Bosnie Occidentale,

2 qui étaient en fait des forces de Novakovic.

3 L'ordre lui-même, c'était de fournir des informations à propos du matériel

4 et des munitions de tous ces commandements.

5 Question: Examinons le premier paragraphe après le point 6.

6 Est-ce qu'on y fait référence à des unités du MUP dans ce document?

7 Réponse: Oui. Dernier paragraphe -je le lis-: "Pendant l'inventaire, il y

8 aurait aussi les unités du ministère de l'Intérieur, MUP, ainsi que les

9 unités de la Republika Srpska. En d'autres termes, le côté serbe dans le

10 conflit en Bosnie."

11 Question: Merci. Je n'ai plus besoin de cette pièce.

12 Dans le cadre de vos fonctions, avez-vous eu l'occasion d'aller rendre

13 visite au commandement du "Pauk"?

14 Réponse: Oui, j'avais une carte d'accès permanente qui m'avait été donnée

15 par le colonel Bulat. C'était la seule façon qu'il y avait d'aller au

16 commandement du "Pauk".

17 Question: A quoi servaient vos visites?

18 Réponse: La première était en rapport avec une demande d'un général belge,

19 Pieters, qui était cantonné à Zagreb.

20 Je ne sais pas quelles étaient ses fonctions mais, en fait, il avait

21 insisté pour avoir cette réunion. Comme j'étais l'officier de liaison,

22 j'étais censé informer. Je suis allé voir le colonel Bulat: "Pourquoi ne

23 peut-il pas aller lui-même et puis, vous pouvez le ramener?"

24 Question: Pouvez-vous donner plus de détails concernant la composition des

25 forces se trouvant à "Pauk"? Pourriez-vous nous donner une estimation du

Page 12426

1 nombre des effectifs des soldats du 21e Corps, qui devaient travailler au

2 commandement conjoint "Pauk"?

3 Réponse: Je pense que les membres du 21e Corps étaient de l'ordre de 400

4 membres. Les unités du MUP, ça devait faire 200 hommes. Et les "hommes

5 d'Arkan" à peu près 100. Et je ne sais pas combien il y avait d'hommes

6 d'Abdic.

7 Question: Vous parlez du MUP. Vous avez dit: "A peu près 200 hommes"?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Est-ce que c'était le MUP de la RSK ou le MUP de Serbie?

10 Réponse: C'était en fait les forces spéciales de police de la Serbie même,

11 avec à leur tête le colonel Bozovic; le colonel Ulemek appelé aussi

12 "Legija" -apparemment, c'était un ancien légionnaire-, ainsi que Frenki

13 Stamatovic qui était le commandant à Petrova Gora, alors que les autres

14 l'étaient de l'autre côté de la frontière en Bosnie.

15 Question: S'agissant des membres du 21e Corps, est-ce qu'ils portaient des

16 signes d'identification, des insignes montrant qu'ils appartenaient au 21e

17 Corps pendant qu'ils étaient de service au QG de "Pauk"?

18 Réponse: On leur avait demandé de les enlever.

19 Question: Pourquoi?

20 Réponse: Parce qu'on ne voulait pas que la communauté internationale sache

21 qu'il y avait des membres du 21e Corps qui étaient impliqués dans un

22 conflit contre Musulmans de l'autre côté de la frontière.

23 Question: Est-ce qu'il y avait une politique qui vous dictait ce qu'il

24 fallait faire au cas où un membre du 21e Corps aurait été capturé ou tué

25 au cours des opérations menées sous l'égide de "Pauk"?

Page 12427

1 Réponse: L'ordre était simple: si l'on était appelé par le QG des Nations

2 Unies et s'il y avait un prisonnier appartenant au 21e Corps, je devais

3 nier ce fait; et les instructions que j'avais reçues consistaient à dire

4 que c'était soit un déserteur soit un volontaire qui avait franchi la

5 frontière pour rejoindre les forces de Fikret Abdic.

6 Question: Pourriez-vous à notre intention nous dire quel était le rapport

7 de commandement entre les hommes de Fikret Abdic et les membres serbes du

8 "Pauk"? Est-ce qu'il y avait un groupe qui commandait l'autre?

9 Réponse: Je pense que les forces de Fikret Abdic se trouvaient en fait

10 sous le commandement du groupe du MUP de Serbie.

11 Question: Vous avez eu connaissance d'un certain nombre d'aspects du

12 "Pauk". Dans ce cadre, avez-vous jamais vu Novakovic donner des ordres à

13 l'une quelconque des unités des forces spéciales?

14 Réponse: Non.

15 Question: Et qu'en est-il des "Tigres d'Arkan"?

16 Réponse: Là encore, même réponse: non. Je crois qu'il n'aurait pas pu leur

17 donner d'ordre même s'il l'avait voulu.

18 Question: S'agissant du MUP de Serbie et des "Tigres d'Arkan", portaient-

19 ils des insignes particuliers qui permettaient de les identifier en tant

20 que membres de ces deux groupes?

21 Réponse: Les informations dont je disposais à cet égard étaient très

22 claires. S'ils devaient participer à des combats, tous les insignes

23 reconnaissables étaient enlevés. Mais ils portaient leurs insignes à

24 l'épaule, c'est-à-dire l'épée avec le drapeau serbe, s'ils n'étaient pas

25 au combat, parce que parfois on les voyait lorsqu'ils venaient

Page 12428

1 s'approvisionner.

2 Question: J'aimerais maintenant que l'on montre au témoin une pièce qui a

3 déjà été enregistrée pour identification, à savoir la pièce à conviction

4 de l'accusation 347, intercalaire 5. Et on voit les numéros 02094552 et

5 53, donc en haut des pages de ce document, de cet extrait du document au

6 sujet duquel je vais vous interroger.

7 (Intervention de l'huissier.)

8 J'aimerais qu'on montre la copie originale en serbe au témoin.

9 Monsieur Lazarevic, je vous demanderai de regarder ce document et de nous

10 dire si vous reconnaissez ce document?

11 Réponse: On dirait un journal au jour le jour.

12 Question: J'aimerais maintenant vous interroger au sujet d'un certain

13 nombre de rubriques que l'on trouve dans ce document, notamment ce qui est

14 inscrit au niveau de la notation "15 heures 10".

15 Réponse: 15 heures 10?

16 Question: Oui.

17 Vous pourrez sans doute travailler avec la version anglaise si nous avons

18 commis une erreur et oublié dans ce document la version serbe.

19 Donc au niveau de "15 heures 10", est-il fait référence à votre groupe, le

20 21e Corps d'armée?

21 Réponse: Oui. "Ordonnez au commandant du 21e Détachement d'artillerie

22 d'ouvrir le feu".

23 Question: J'appelle votre attention maintenant sur ce qui est écrit au

24 niveau de "15 heures 40". Est-il fait référence à Bozovic?

25 Réponse: Oui. Il est dit très clairement que Bozovic doit tirer sur un

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1 certain nombre de secteurs qui se trouvent tous du côté bosniaque.

2 Question: Serait-il considéré comme normal ou habituel pour un membre du

3 MUP, donc pour un département de police, de donner des ordres de tir et

4 d'ordonner le tir à de l'artillerie donc à une unité militaire?

5 Réponse: Pas, à moins qu'une autorisation ait été reçue de Belgrade.

6 Question: Y a-t-il quelque chose dans ce document qui indique que Bozovic

7 a été interrogé au sujet de son pouvoir de donner des ordres de tir?

8 Réponse: Rien que je puisse voir.

9 Question: J'aimerais appeler votre attention maintenant sur ce qui est

10 inscrit au niveau de "17 heures 30". Et je vous demande si cette référence

11 à "Legija", que l'on voit ici, est bien une référence à la personne dont

12 vous avez déjà parlé dans votre témoignage aujourd'hui?

13 Réponse: Oui, il est dit très clairement dans ce document que "Legija"

14 était commandant donc d'un Bataillon, et on trouve également une analyse

15 des opérations de combat menées par ce bataillon ce jour-là.

16 Question: Il était censé travailler avec qui ou, en tous cas, sous la

17 direction de qui?

18 Réponse: Il est question ici d'une réunion conjointe, donc il est normal

19 de penser que cette réunion conjointe a rassemblé tous les commandants

20 présents.

21 Question: Il y a également une référence dans cette rubrique aux renforts

22 qu'il convient d'apporter à "Legija"?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Serait-il considéré normal, pour une unité militaire, d'obtenir

25 des renforts d'une unité policière venant d'un autre pays?

Page 12430

1 Réponse: Dans des conditions normales, ce serait absolument impossible,

2 mais nous ne vivions pas dans des conditions normales à l'époque.

3 Question: J'aimerais maintenant attirer votre attention sur deux autres

4 notes, l'une qui correspond à 19 heures 15: est-il question ici d'une

5 liste de fournitures à remettre à Bozovic?

6 Réponse: La liste est longue, mais je vois des mortiers, deux mortiers de

7 60 millimètres ainsi que des mortiers de 80 millimètres qui sont

8 mentionnés comme ayant été donnés à Bozovic et qui viennent du 21e Corps

9 d'armée.

10 Question: Y a-t-il un autre Bozovic dont vous auriez entendu parler en

11 dehors de celui au sujet duquel vous avez témoigné ici et qui faisait

12 partie des forces spéciales du MUP serbe?

13 Réponse: Non, c'est un nom assez peu courant dans la région.

14 Question: Dernière rubrique. Je vous demanderai de commenter ce qui est

15 écrit au niveau de 21 heures 45: est-il fait mention d'une unité spéciale

16 du MUP?

17 Réponse: Moi, je vois une mention au 39e Corps d'armée si nous regardons

18 bien la même page.

19 Question: Je vous parle du dernier paragraphe de cette rubrique.

20 Réponse: Ah oui! "16 heures 15: Unité spéciale du MUP". Oui, "Ministère de

21 l'Intérieur", en effet.

22 Question: J'en ai terminé avec ce document. J'aimerais maintenant que l'on

23 remette au témoin la pièce à conviction de l'accusation 348, intercalaire

24 13.

25 (Intervention de l'huissier.)

Page 12431

1 Je vous demande de jeter un coup d'śil à ce document et de nous dire si

2 vous reconnaissez ce dont il s'agit?

3 Réponse: Oui, c'est un registre de visiteurs. Je l'ai sans doute signé

4 moi-même à quelques reprises.

5 Question: C'était un document relatif à des personnes qui visitaient quoi?

6 Réponse: Qui visitaient le commandement de "Pauk".

7 Question: Reconnaissez-vous certains noms sur cette liste?

8 Réponse: Fikret Abdic est sans doute le nom le plus connu de cette liste.

9 Question: J'aimerais que vous lisiez rapidement les deux pages que je vous

10 ai fait remettre et que vous me disiez si vous voyez le nom de M. Abdic

11 sur cette liste à plus d'une reprise?

12 Réponse: Oui, on le voit au niveau du 18 mai 1995 qui est un jeudi; Fikret

13 Abdic une deuxième fois. En fait, je connais pas mal de gens dont les noms

14 figurent ici, car ils sont tous de Velika Kladusa.

15 Question: Ces personnes étaient-elles membres du commandement de "Pauk",

16 selon vous?

17 Réponse: Pour certaines d'entre elles, oui, mais pas toutes, ce sont des

18 visiteurs qui viennent visiter le commandement de "Pauk".

19 En haut et à droite du document, on voit qui est la personne que cette

20 personne venait voir. Donc les noms qui figurent à droite sont les noms de

21 membres du commandement et les noms de gauche correspondent aux noms des

22 visiteurs.

23 Question: Merci. J'en ai terminé avec cette pièce.

24 J'aimerais maintenant vous demander de décrire plus en détail le quartier

25 général du MUP serbe qui faisait partie du commandement global de "Pauk"?

Page 12432

1 Réponse: Il y avait des installations à Petrova Gora. C'étaient

2 d'anciennes installations militaires de la JNA où l'on trouvait des

3 installations très modernes sur le plan technologique, des téléphones très

4 modernes notamment. C'était un bâtiment qui avait deux étages au-dessus du

5 sol et sept étages en dessous du sol.

6 Question: Y avait-il un autre quartier général du MUP serbe qui faisait

7 partie du commandement du "Pauk", en dehors de Petrova Gora?

8 Réponse: Oui, c'étaient des installations qui se trouvaient à "Pauk" en

9 Bosnie, un autre centre de commandement.

10 Question: A quelle distance de la frontière croato-bosniaque se trouvait

11 ce deuxième centre de commandement?

12 Réponse: Les installations de Petrova Gora sont à cinq à six kilomètres

13 sans doute de la frontière et le commandement de "Pauk" doit se trouver à

14 800 mètres à peu près à l'intérieur par rapport à la frontière.

15 Question: A l'époque où vous étiez à Petrova Gora, pouvez-vous nous dire

16 quelles sont les personnes armées, les troupes que vous avez vues qui

17 gardaient ces installations ou qui les utilisaient?

18 Réponse: On ne pouvait aller à Petrova Gora que si l'on avait reçu une

19 invitation pour visiter le commandement de "Pauk". En tout cas, c'était

20 ainsi à partir du moment où le MUP de Serbie a repris ces installations.

21 Donc, une fois, j'y suis allé et je n'y suis allé qu'une seule fois, et

22 j'y ai vu des membres du MUP de Serbie et des "Tigres d'Arkan".

23 Question: Je vais vous demander les noms de ces personnes en vous

24 demandant si vous les avez vues à Petrova Gora. D'abord quelqu'un qui

25 s'appelle Pejovic?

Page 12433

1 Réponse: Un "Tigre" d'"Arkan", oui.

2 Question: Le capitaine Sarac?

3 Réponse: Le n°2 par rapport au colonel Pejovic.

4 Question: Vous avez déjà parlé du colonel Pejovic dans votre déposition;

5 l'avez-vous vu à quelque moment que ce soit dans cet endroit?

6 Réponse: Pas à Petrova Gora, mais je l'ai vu à Velika Kladusa une fois.

7 Question: Pourriez-vous nous dire si vous savez quel type d'armes le

8 commandement du "Pauk" avait à sa disposition?

9 Réponse: Il disposait d'armes beaucoup plus variées que celles dont nous

10 disposions. Elles étaient livrées par la JNA. La plupart de ces armes

11 étaient des Heckler ou d'autres armes, des Heckler et Koch qu'il était

12 très difficile de se procurer, car elles venaient de l'extérieur de la

13 Yougoslavie. Ces armes ne sont pas fabriquées en Yougoslavie. Au 21e Corps

14 d'armée, nous avions uniquement des armes produites dans le pays, mais

15 apparemment le MUP de Serbie avait un armement bien supérieur au nôtre.

16 Question: Le "Pauk" possédait-il des chars ou des véhicules blindés?

17 Réponse: Non, pas à ma connaissance.

18 Question: Savez-vous quels étaient les entrepôts du "Pauk"?

19 Réponse: Ils s'adressaient à la RSK pour leurs approvisionnements.

20 Question: Quelle est la relation avec votre bureau?

21 Réponse: Ils ne venaient pas dans mon bureau, mais cet entrepôt se

22 trouvait en face de chez moi, de l'autre côté de la route.

23 Question: Voyiez-vous quelquefois des unités aller et venir pour

24 s'approvisionner dans cet entrepôt?

25 Réponse: Très régulièrement, très tôt le matin, entre 8 et 9 heures du

Page 12434

1 matin, les véhicules se garaient et, pendant la nuit, les camions

2 livraient leurs approvisionnements et, le matin, ils venaient se fournir

3 en matériel.

4 Question: Ces camions qui approvisionnaient l'entrepôt, pouvez-vous nous

5 dire si vous saviez qui était le propriétaire de ces véhicules, au cas où

6 vous le sauriez?

7 Réponse: C'étaient des camions militaires qui portaient des numéros

8 d'immatriculation de la VJ.

9 Question: Pouvez-vous nous parler des unités que vous avez vues venir à

10 l'entrepôt pour s'y approvisionner?

11 Réponse: Je n'ai vu que des unités d'"Arkan" qui venaient s'approvisionner

12 à cet endroit.

13 Question: Est-ce qu'ils prenaient au passage quelqu'un d'autre?

14 Réponse: Je ne sais pas, mais ils s'approvisionnaient en quantité

15 supérieure à ce qui était nécessaire à leur effectif.

16 Question: J'aimerais maintenant appeler votre attention sur la scène de

17 Vidovdan, c'est à dire le 28 juin 1995, et je vous demanderais si vous

18 étiez présent lors de la célébration de cette fête?

19 Réponse: La question s'adresse à moi?

20 Question: Oui.

21 Réponse: Je suis désolé, je n'avais pas compris. Oui, j'étais présent,

22 c'était une parade très importante.

23 Question: Et pour ceux d'entre nous qui ne connaissons pas bien le

24 calendrier orthodoxe, pourriez-vous brièvement nous dire quelle est la

25 signification de Vidovdan?

Page 12435

1 Réponse: Eh bien, pour être honnête, je ne suis pas très religieux moi-

2 même, mais je crois que cela a quelque chose avoir avec la bataille de

3 Saint-Guy.

4 Question: Serait-il permis de dire que c'est l'une des fêtes les plus

5 importantes sur le calendrier orthodoxe?

6 Réponse: C'est une date très important pour eux; en effet.

7 Question: Pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé le jour de cette

8 fête, en quelques mots?

9 Réponse: Eh bien, puisque la télévision a diffusé cela en direct, je peux

10 vous dire qu'une parade a été organisée, destinée à montrer aux Croates et

11 aux Bosniens l'équipement en armement y compris les roquettes, et montrer

12 que tout cela ne se trouvait qu'à quelques kilomètres à vol d'oiseau des

13 deux parties concernées, donc montrer qu'il existait une menace importante

14 y compris pour Zagreb. Tout cela avait été planifié, et c'était une

15 impression de force et de puissance qui en ressortait.

16 Question: Une fois arrivée ici en Hollande, avez-vous eu la possibilité de

17 regarder une vidéo qui montrait la fête à laquelle vous avez participé?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Pouvez-vous nous dire à peu près combien de temps a duré cette

20 fête?

21 Réponse: Je crois qu'elle a duré quatre ou cinq heures.

22 Question: J'aimerais maintenant que l'on remette au témoin une pièce

23 précédemment enregistrée par l'accusation, pièce 347, intercalaire 7.

24 C'est une cassette vidéo.

25 J'aimerais que vous regardiez la table des matières de cette cassette.

Page 12436

1 Réponse: Oui, je l'ai annotée de ma main et je l'ai donc déjà vue.

2 Question: Quelle est la date qu'on lit sur cette cassette?

3 Réponse: 21 octobre 2002.

4 Question: Est-ce la date à laquelle vous avez vu les images de cette

5 vidéo?

6 Réponse: C'est la date à laquelle j'ai effectivement visionné la cassette.

7 Question: Avez-vous inscrit C-001 ainsi que la date sur une étiquette

8 apposée sur cette cassette au moment où elle a été sortie du magnétoscope?

9 Réponse: Oui, au bas de l'étiquette.

10 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, un éclaircissement:

11 l'accusation va demander le versement au dossier de toute la cassette,

12 mais elle n'estime pas nécessaire que les Juges la visionnent en ce

13 moment. Le témoin a visionné la cassette; il a identifié les images comme

14 correspondant à ce qui s'est passé ce jour-là; et les images durent deux

15 heures. Donc nous demandons le versement au dossier de la cassette, et je

16 demanderais qu'un extrait soit diffusé ici.

17 M. le Président (interprétation): Bien, nous admettons la cassette. La

18 Greffière va donner une cote à ce document.

19 Mme Anoya (interprétation): La cassette vidéo intégrale correspond à

20 l'intercalaire 7. Et l'extrait qui a déjà été enregistré aux fins

21 d'identification et admis le 22 octobre sera l'intercalaire 7A, donc un

22 extrait de la vidéo.

23 Question: Intercalaire 7A, cet extrait a été calé sur la vidéo, et je

24 demanderais qu'on la diffuse en vous priant de bien vouloir commenter les

25 images au fur et à mesure que vous les regardez, à l'attention des Juges.

Page 12437

1 (Diffusion de la cassette vidéo.)

2 Réponse: Vous voyez l'inspection des troupes ici. Le Président de la

3 République serbe de Krajina, M. Milan Martic inspecte ses troupes, à

4 l'époque.

5 Ici, on voit les Bérets rouges qui sont censés être une unité spéciale. Et

6 sur cette image, j'aimerais qu'on fasse un arrêt sur image.

7 Question: Je vous montrerai des clichés tirés de la vidéo mais, pour

8 l'instant, j'aimerais qu'on la diffuse en continue.

9 Réponse: Très bien.

10 Donc il retourne sur l'estrade et la procession va commencer. On voit le

11 général Mrksic derrière lui. Il s'apprête à saluer toutes les personnes

12 présentes, je parle du Président Martic. Et nous voyons maintenant la

13 parade militaire.

14 Question: Pourriez-vous nous dire…

15 Réponse: Ici, vous voyez le capitaine Dragan sur cette image, qui est l'un

16 des dirigeants paramilitaires au début des événements dès 1990, qui

17 ensuite est retourné à Belgrade. Et c'est la première fois que je le vois

18 ici sur cette image depuis 1991.

19 Question: J'aimerais que vous parliez des plaques d'immatriculation.

20 Réponse: Nous venons de voir la lettre G qui signifie que c'est un

21 armement qui appartient aux 21e Corps d'armée.

22 Question: Que voyons-nous ici?

23 Réponse: Un lance-roquettes multiple. Je vois le G, mais pas le numéro.

24 Toujours des armements qui nous appartiennent. Vous voyez ici les systèmes

25 de roquettes qui viennent de Republika Srpska, donc de l'armée de la

Page 12438

1 Republika Srpska. Et pourtant vous ne voyez pas de plaques

2 d'immatriculation sur ces véhicules, car elles ont été supprimées avant la

3 procession.

4 Ici, un lance-roquettes très obsolète qui raterait sa cible à 500 mètres;

5 c'est ce qui le rend d'ailleurs plus dangereux.

6 Des journalistes aussi qui filment la parade. Je crois qu'il est bon de

7 dire, de signaler que tous ces armements ont ensuite été déchargés des

8 véhicules et renvoyés en Republika Srpska par la suite. Et puis nous

9 n'avions pas de forces aériennes non plus.

10 Question: Pourquoi les plaques d'immatriculation ont-elles été enlevées

11 des véhicules de la Republika Srpska?

12 Réponse: Ici, on voit un podium. A gauche du Président Martic, les

13 étrangers membres des Nations Unies et de l'ECMM, et il est probable que

14 ces personnes aient filmé la parade pour l'analyser par la suite et

15 qu'elles aient pu voir les numéros d'immatriculation qui permettent de

16 prouver l'origine. Car s'il n'y a pas de numéro d'immatriculation, on ne

17 peut pas localiser le véhicule. Donc c'est cela la raison.

18 Ici, vous voyez le général Milan Novakovic, c'est assez intéressant, qui

19 présente le général Martic au commandement du "Pauk". Ici, les deux

20 premières personnes sont le colonel Ulemek, dit "Legija", et ensuite les

21 hommes que l'on voit ici sont tous des Bosniens, donc des membres des

22 forces de Fikret Abdic. C'est une partie du commandement qui est présentée

23 au Président Martic. Et bien sûr, maintenant, on revoit le général Mrksic.

24 Question: Je vais vous montrer maintenant quelques clichés tirés de cet

25 extrait vidéo que nous venons de visionner de façon à vous permettre

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1 d'être plus précis dans votre identification des personnes présentes.

2 Je vous prierai de regarder la photographie qui vous est remise maintenant

3 et dont je demande qu'elle soit enregistrée comme pièce à conviction de

4 l'accusation 347 intercalaire 7.1. C'est la cote qui a été affectée à

5 cette photographie l'autre jour, lorsqu'elle a été montrée au témoin C-

6 020. Mais nous ajoutons maintenant "SL" pour indiquer que ce témoin a

7 permis son versement au dossier en tant que pièce à conviction.

8 Réponse: Sur cette photographie, le dos tourné, nous voyons le Président

9 Martic, et puis le général Mrksic à sa gauche, qui tourne également le

10 dos, le colonel Bozovic… D'abord, Ulemek, ensuite le colonel Bozovic.

11 Ulemek étant "Legija", c'était son surnom. Donc vous avez Martic, Ulemek,

12 Bozovic, Mrksic.

13 Question: Et c'est de votre main que vous avez indiqué le nom de ces

14 personnes?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Je demande qu'on montre au témoin la pièce à conviction de

17 l'accusation 347, intercalaire 7.3.SL.

18 Est-ce bien votre écriture que l'on voie sur cette photographie?

19 Réponse: Oui, Monsieur.

20 Question: Pouvez-vous nous dire qui on voit sur cette photographie?

21 Réponse: Au milieu de la photographie, de face, le Président Martic.

22 Derrière lui, le général Mile Mrksic. Derrière lui, on ne voit que le

23 visage du colonel Milan Novakovic. Et puis… Ah, non! Excusez-moi, le

24 colonel Kosta Novakovic, mais à ce moment-là, il dirigeait le centre

25 d'information militaire de Knin. C'est Kosta Novakovic.

Page 12440

1 Question: Je demande que l'on remette au témoin la pièce à conviction de

2 l'accusation 347, intercalaire 7.4.SL.

3 Est-ce votre écriture que l'on voit sur cette photographie?

4 Réponse: Oui, Monsieur.

5 Question: Pourriez-vous nous dire, je vous prie, qui l'on voit sur cette

6 photographie?

7 Réponse: Le Président Mile Martic, le général Mile Novakovic, et en haut

8 de la photographie, Djuro Skaljac, qui était sous les ordres de Tosa Pajic

9 directement, donc le numéro 2 du commandement de "Pauk" et qui, plus tard,

10 est devenu officier de liaison à "Pauk". En fait, on voit son badge

11 d'identification qui sort de sa chemise ici, sur le devant. C'était un

12 document lié au commandement du "Pauk".

13 Et le dos tourné, on voit le général Mile Mrksic.

14 Question: Je demande que l'on remette au témoin la pièce à conviction de

15 l'accusation 347, intercalaire 7.5.SL.

16 Pouvez-vous nous dire qui l'on voit sur cette photographie?

17 Réponse: Le capitaine Dragan.

18 Question: Merci. Nous en avons terminé avec les photographies.

19 A un certain moment, avez-vous été nommé pour siéger au sein d'une

20 commission de trois membres destinée à s'occuper des échanges de cadavres?

21 Réponse: En fait, j'étais membre de cette commission depuis le début 1992,

22 mais elle est devenue réellement effective en tant que commission au

23 niveau de la RSK plus tard et elle a été dirigée par un certain Savo

24 Strbac.

25 Question: A un certain moment, avez-vous été appelé à participer à un

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1 échange de cadavres de soldats du Corps de Banja qui avaient été tués dans

2 la poche de Bihac et dont les cadavres étaient restés là-bas?

3 Réponse: Oui, Monsieur.

4 Question: Combien d'hommes ont été tués qui appartenaient à ce Corps de

5 Banja dans la poche de Bihac?

6 Réponse: Cent ont été proposés pour l'échange.

7 Question: Pouvez-vous nous aider à déterminer l'époque? Quand cela s'est-

8 il passé?

9 Réponse: C'était sans doute en 1994. Il faisait froid, donc je dirai début

10 1994.

11 Question: Pouvez-vous nous dire ce que vous avez fait pour faciliter

12 l'échange ou plutôt la récupération de ces cadavres?

13 Réponse: J'ai d'abord été à l'origine d'une rencontre avec des membres du

14 5e Corps d'armée, la même commission de l'autre côté de façon à ce que

15 nous puissions mettre en oeuvre cet échange assez rapidement parce que les

16 familles voulaient récupérer les corps de leurs parents: fils, maris ou

17 autres. Mais le problème, c'est que nous n'avions pas un nombre aussi

18 important de cadavres à échanger que le 5e Corps d'armée. Donc c'est moi

19 qui ai été chargé de rassembler des cadavres, indépendamment du secteur

20 d'où ils venaient pour les ramener dans le secteur du 29e Corps d'armée

21 afin qu'ils puissent être échangés contre cette centaine de cadavres du

22 39e Corps d'armée.

23 Question: Pouvez-vous nous dire comment il se fait que c'est vous qui avez

24 été chargé de cette tâche?

25 Réponse: Eh bien, j'ai pratiquement frappé à la porte pour qu'on me donne

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1 cette mission. Je suis allé au 21e Corps d'armée, à mon commandement; j'ai

2 demandé conseil, j'ai demandé ce qu'il fallait que je fasse, et on m'a dit

3 d'aller voir Toso Pajic parce qu'il y avait des cadavres à enterrer. Je

4 suis allé voir Toso Pajic et il m'a renvoyé à Djuro Skaljac, son second,

5 et nous avons trouvé deux prisonniers, je crois; c'étaient deux Croates

6 qui m'ont emmené dans un endroit désert près de la rivière et montré

7 l'endroit où il y avait des ressortissants croates qui ont commencé à

8 creuser. Ils ont creusé et trouvé quatre cadavres.

9 Le problème, c'est que j'étais avec eux, mais les cadavres étaient en

10 décomposition avancée, donc il n'y avait rien qui prouvait que leur mort

11 était récente. Et ils étaient sans doute morts depuis pas mal de mois. Et

12 puis, ce qui nous préoccupait un peu aussi, c'est que les cadavres avaient

13 les mains entravées à l'avant du corps, ce qui permettait de penser qu'ils

14 n'avaient pas été tués au combat, mais qu'ils avaient été exécutés.

15 Mais, puisque nous avions besoin de cadavres, j'ai tout de même ramassé

16 ces quatre cadavres que nous avons mis dans des sacs.

17 Question: Avez-vous obtenu 90 autres cadavres sortis d'un certain nombre

18 de fosses dans les environs?

19 Réponse: Oui, Monsieur. Mais là, il s'agissait de fosses qui étaient liées

20 à des combats menés par les membres du 5e Corps d'armée et qui avaient

21 donc été tués en opération.

22 Question: Ces cadavres supplémentaires, 90 en tout, avez-vous dû les

23 identifier pour obtenir six corps supplémentaires pour l'échange?

24 Réponse: L'accord général entre le 5e Corps d'armée et le 39e Corps

25 d'armée était que l'échange se ferait en nombre égal des deux côtés. Donc,

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1 plus nous avions de cadavres à offrir, plus nous pourrions en récupérer;

2 c'était ce genre de choses. Et il en manquait encore six.

3 Question: Avez-vous, à un certain moment, reçu instruction de parler à un

4 des "Tigres d'Arkan" au sujet de la façon de vous procurer six cadavres

5 supplémentaires?

6 Réponse: Oui, on m'a dit d'aller voir le colonel Karan Mlado qui était

7 officier de la sécurité intérieure pour le 21e Corps d'armée et qui avait

8 en général des informations quant aux endroits où les gens étaient

9 maintenus en détention ou les endroits où ils auraient pu être tués ou des

10 choses de ce genre. Donc il m'a envoyé au commandement du "Pauk" pour que

11 je parle au colonel Bozovic et au colonel Pejovic; l'un était du MUP de

12 Serbie alors que Pejovic était un "Tigre d'Arkan" et ils m'ont apporté

13 leur aide.

14 Question: Que s'est-il passé lorsque vous avez parlé à Pejovic?

15 Réponse: J'ai d'abord parlé à Bozovic qui m'a dit: "Si tu as besoin de

16 cadavres, tu n'as qu'à apporter les tiens". La rencontre a duré très peu

17 de temps. Il ne m'a pas beaucoup aidé, bien que j'ai insisté, et je suis

18 allé voir un autre commandant adjoint -si on peut l'appeler ainsi-, le

19 colonel Pejovic, qui m'a envoyé à son second, le capitaine Sarac, qui m'a

20 dit très calmement qu'il n'avait pas de cadavre, mais qu'il y avait six

21 personnes vivantes dont je pouvais me servir si j'en avais vraiment

22 besoin.

23 Question: Qu'avez-vous fait?

24 Réponse: La commission est repartie; nous devions revenir le lendemain

25 matin.

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1 Question: Etes-vous retourné voir le colonel Sarac le lendemain matin?

2 Réponse: Nous sommes retournés au commandement du "Pauk" et on nous a dit

3 qu'il y avait des corps disponibles, comme l'avait ordonné le capitaine

4 Sarac. Nous sommes allés à l'endroit indiqué: il y avait six cadavres

5 alignés qui apparemment avaient été tués récemment.

6 Question: Lorsque vous dites "récemment tués", vous est-il apparu qu'ils

7 avaient été tués dans l'intervalle de vos deux visites au commandement du

8 "Pauk"?

9 Réponse: Je dirais qu'ils avaient été tués une heure avant, lorsque nous

10 sommes revenus le lendemain.

11 Question: Que s'est-il passé alors?

12 Réponse: Encore une fois, ces cadavres étaient trop frais, comparés aux

13 conditions de l'échange. Donc j'ai demandé conseil au commandement; on m'a

14 dit de prendre ces cadavres, de les emmener à Vojnic, de les mettre dans

15 un réfrigérateur et de les conduire au lieu de l'échange la nuit de ce

16 jour-là.

17 Question: Avez-vous fait cela?

18 M. Lazarevic (interprétation): Oui, mais j'ai pris les cinq premiers, j'en

19 avais 99. Donc nous sommes allés à l'endroit où la rencontre devait avoir

20 lieu avec le 5e Corps d'armée. Il y avait là des camions de grande taille,

21 nous avons aligné les cadavres le long de la route, 99 pour nous de notre

22 côté. Ils en ont pris un, ils l'ont mis à bord du camion et ils en ont

23 laissé 99 sur la route. Donc nous avons échangé 99 cadavres contre 99.

24 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je vais maintenant

25 passer à un sujet complètement différent, et je pensais à l'heure.

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1 M. le Président (interprétation): Oui, vous avez raison. Combien de temps

2 vous faudra-t-il encore, à votre avis?

3 M. Groome (interprétation): 40 minutes à peu près, je suppose, Monsieur le

4 Président.

5 M. le Président (interprétation): Merci. Nous allons suspendre.

6 Monsieur Lazarevic, je vous demanderai de revenir ici demain matin à 9

7 heures pour la suite de votre déposition.

8 M. Lazarevic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

10 (L'audience est levée à 15 heures 32.)

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